Digitized by the Internet Archive
in 2007 with funding from
Microsoft Corporation
http://www.archive.org/details/dictionnairelang00hombuoît
Ps ta FC
: SE AT" es ns
A Es LP |
EE = 6 { CONTENANT s
ÿ. n
4 CUT ; * détinitions radicaux et étymologies des mots; les idiotismes,
4 ldictons, maximes et proverbes, leurs origines et celles des coutumes, usages et institutions;
! les noms propres de personnes et de lieux; +.
< _ origines, étymologies et significations; les termes d'agriculture, de métiers, d'arts, de professions,
| e d'industries ; la flore et la faune méridionales; etc., etc. +
(4 Leu
x PAR
F Maxim D'HOMBRES
ANCIEN PRÉSIDENT DU TRIBUNAL CIVIL D'ALAIS, MEMBRE DE L'ACADÉMIR DE NIMES,
Pba-4 : ANCIEN PRÉSIDENT DE LA SOCIÈTÉ SCIENTIFIQUE ET TATTÉRAIRE D'ALAIS,
1
"
4
L à 1 ET
GRATIEN CHARVET
MEMBRE DE L'ACADÉMIE DE NIMES, DE LA SOCIËTÉ ARCHÉOLOGIQUE DE MONTPELLIER
ET DE LA SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE ET LITTÉRAIRE D'ALAIS,
CORRESPONDANT DU MINISTÈRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE POUR LES TRAVAUX HISTORIQUES,
OFFICIER D'ACADÉMIE.
. ALAIS
hé et Lithographie A, BRUGUEIROLLE, Grand'rue, 93,
1884
s!
DICTIONNAIRE
LANGUEDOCIEN-FRANÇAIS
LANGUEDOCIEN-FRANCÇAIS
CONTENANT
les définitions, radicaux et étymologies des mots; les idiotismes,
dictons, maximes et proverbes, leurs origines et celles des coutumes, usages et institutions;
les noms propres de personnes et de lieux,
origines, étymologies et significations; les termes d'agriculture, de métiers, d'arts, de professions,
d'industries ; la flore et la faune méridionales; etc., etc.
PAR
Maxim D'HOMBRES
ANCIEN PRÉSIDENT DU TRIBUNAL CIVIL D'ALAIS, MEMBRE DE L'ACADÉMIE DE NIMES,
ANCIEN PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE ET LITTÉRAIRE D'ALAIS,
DICTIONNAIRE
|
|
|
ET
GRATIEN CHARVET
MEMBRE DE L'ACADÉMIE DE NIMES, DE LA SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE DE MONTPELLIER
ET DE LA SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE ET LITTÉRAIRE D'ALAIS,
CORRESPONDANT DU MINISTÈRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE POUR LES TRAVAUX HISTORIQUES,
OFFICIER D'ACADÉMIE.
4
15087
Fr |
” A
ALAIS
Imprimerie et Lithographie A. BRUGUEIROLLE, Grand’rue, 93.
1884
d ES or pe ab SET onrals ve
pes Re 24b saf0d do 2ünigixo vrusl 2
È re 6f Je anaucatag sb &1quig prnet
Log c5 hé haraitäie sb iiinatignb asmios el!
310. Jos sasfanothirônr shoes! de otolk sf ::
AAX
Li
TVA Aura
ARISTON #1: AU Lo Te à TATAIOE À A CANMIN NE ATMTANA À
ETATAT MATATERS DE AGNTENOE VON AL SE ‘s*
ARUNRROTANT LUAVART EI AUOT AUS LAON x ao AÉTEENA vo TRE
BAIE e MALO
MAXIMIN D'HOMBRES
Deu agradal e al pobol util.
Agréable à Dieu et utile au peuple.
Vieizce CHARTE D’ALAIS.
On l’a dit bien souvent et avec juste raison : certaines familles semblent être prédestinées au goût des
recherches studieuses; elles possèdent ce don naturellement et se le transmettent de génération en géné-
ration comme un/précieux héritage. Cette observation ne s’est jamais manifestée avec plus d’évidence qu’à
l'égard de Maximin d'Hombres.
François-Louis-Maximin d’'Hombres naquit, le 14 août 1810, à Alais, d’une ancienne et honorable
famille des Cévennes: Il était le fils de François-Régis d'Hombres dont les vertus charitables sont restées
légendaires, et de Marie-Antoinette-Eulalie Desroche, de Génolhac.
Petitineveu des deux célèbres Boissier de Sauvages, par’ sa grand'mère Marie-Augustine Boissier de
La Croix de Sauvages, et neveu du baron d'Hombres-Firmas, il voulut se rendre digne de ses devanciers
et suivre comme eux, avec honneur, la voie que leurs travaux lui avaient ouverte,
Doué d'une intelligence peu commune et d’une pénétration non moins remarquable, Maximin fit avec
succès ses études classiques à Forcalquier d’abord, à Aïx ‘ensuite, chez les Jésuites. Il les poursuivit plus
tard au collège de sa ville natale, et alla les compléter à Paris par celles du Droit.
Ses débuts à Alais, comme avocat, lui valurent les éloges les plus mérités, et firent présager pour Jui un
brillant avenir. Il prit, pendant trente-cinq ans, une part active à tous les grands débats judiciaires qui se
produisirent devant le tribunal de cette ville. A partir de 1840, il fit toujours partie des Conseils de l’ordre;
et, à neuf reprises différentes, il en fut élu bâtonnier. « Cœur noble, âme généreuse, esprit cultivé, » a dit
sur sa tombe un de ses anciens confrères, « Maximin d'Hombres était un de ces hommes dont le talent et la
probité s'imposent et honorent les corps auxquels ils appartiennent (1). »
‘Caractère aimable et enjoué, esprit incisif et éminemment gaulois, Maximin avait l’aimable défaut des
hommes très spirituels, qui n’ont jamais l'air de se prendre tout-à-fait au sérieux, lors même qu'ils se
livrent à des occupations fort sérieuses; contrairement aux esprits bornés ou superficiels, qui se gardent
bien de douter d ‘eux-mêmes, et font consister leur principal mérite à s'occuper, avec une gravité affectée,
de choses parfäitement insignifiantes.
Un membre de la société d’Alais a décrit avec finesse « cette figure originale et sympathique, pré-
sentant un singulier mélange de dougeur et de malice, de bonhomie et de causticité... Ce charmant
éauseur, prompt à la réplique, habile à lancer le trait, à la verve familière, aiguisée, rt far 4 ironique,
mais jamais blessanté (2). » ht
” Une bienveillance constante, une bonté i Doféreble, formait, ‘en effet, le fond du caractère de Maximin
ACT CET LL CPI M Lg 0 TTOS
(1) Discours de M. Émile Pin, bâtonnier de l'Ordre des avocats, : ,,, #
(2) V. Aupmax. — Compte-rendu des travaux de la Société scientifique et littéraire d'Alais, pendant l’année 1873.
LL
d'Hombres. Ses qualités charmantes, son abord facile et plein d’aménité, lui ettiraient l'estime et l'afec-
tion universelles. Quant à ses amis, ils ont pu apprécier combien Lun dentre eux (4) l’a justement défini
en signalant chez lui cette éénacité du cœur qui rendait ses'affections idissolübles. à
Pourrions-nous oublier, en parlant des précieuses qualités de notre ami, celles qui étaient peut-être
les moins apparentes, mais en même temps les plus réelles : ces vertus bienfaisantes, ces habitudes de
charité, héréditaires dans sa famille, dont pourraient rendre témoignage tant de misères secourues, tant
d'infortunes soulagées en silence, sans faste et sans ostentation ? PR
Aussi, lorsqu’à la fin de sa carrière d'avocat, parcourue avec autant d'honneur que de distinction,
Maximin d'Hombres fut appelé à la Présidence du Tribunal (d’Alais, tous ses concitoyens, sans acception
d'opinions, applaudirent avec enthousiame à une nomination si bien justifiée.
*
+
Maximin d'Hombres avait épousé, le 26 novembre 1844, M'° Victorine Farjon, de Montpellier, dont
l'inaltérable affection l'a, jusqu'à ses derniers moments, entouré des soins les plus délicats et les: plus
dévoués, :
Durant de longues années, Maximin d'Hombres à fait partie du Conseil municipal d'Alais, où l’avaient
appelé la confiance et l'affection de ses concitoyens; et il a rempli, pendant un certain temps, les fonctions
d’adjoint à la mairie,
Il était membre de l'Académie du Gard, de la Société des études pour les langues romanes et de
la Société scientifique et littéraire d’Alais, dont il a occupé la présidence pendant l’année 1872:
Maximin d'Hombres avait eu quatre frères, morts avant lui, et une sœur qui lui survit : 4° Hippolyte,
ancien élève de l’École polytechnique, mort en Afrique, capitaine du génie; — 2° Léonce; mort religieux
trappiste; — 3° Ernest, mort garde-général des Eaux-et-Forêts; — 4° Paulin, mort enseigne de vaisseau
devant Saint-Jean-d'Ulloa; — 5° Pauline, religieuse de la Visitation à Tarascon, seule survivante.
Ayec Maximin s’est éteinte la descendance mâle de la branche cadette de la famille d'Hombres.
*
LE]
Doué d’une aptitude exceptionnelle pour toutes sortes de travaux, mais principalement porté vers
les études littéraires, historiques et archéologiques, Maximin savait faire marcher de front ces diverses
études avec celles de sa profession. Les premières avaient même d'autant plus de charme et d’attrait pour
lui, qu’elles fournissaient à son esprit une agréable diversion aux fatigues du barreau, et lui servaient
en quelque sorte de délassément.
Le but constant qu’il poursuivit toute sa vie fut de mettre en lumière les principaux faits historiques
qui se rattachent au passé de sa ville natale pour laquelle il professait, comme tous ses devanciers, une
prédilection intime et profonde, un culte ardent et passionné : Soi totus amor (2).
A part ses incontestables qualités littéraires, ce qui mérite surtout d’être signalé dans Maximin
d'Hombres, c’est l'esprit de suite et l'opiniâtreté dans le travail qui, chez l'historien et l’érudit, sont toujours
des qualités fécondes.
« On est en général tenté de plaindre les savants qui consacrent leur vie à composer de gros livres et
les curieux qui passent leur temps à les lire, dit M. Gaston Boissier. Peut-être les uns et les autres sont-ils
beaucoup moins malheureux qu'on ne le suppose. S'il faut un certain courage pour se jeter résolument dans
ces études pénibles et infinies, il est rare, quand les premières difficultés sont vaincues, qu’on n’éprouve pas
(4) Éloge de Maximin d’Hombres, par M. d'Espinassous,
(2) Épigraphe inscrite par Maximin d’Hombres en tête de son Étude sur Alais.
pour elles un grand attrait : elles ont ce privilège qu'elles donnent beaucoup plus qu’ellés ne promettent.
Les érudits, qui se sont fait un domaine restreint et fermé, le fouillent avec passion dans tous les sens, et
finissent toujours par y découvrir quelque coin de terre inconnu où ils sont les premiers à poser le pied,
Ce plaisir est un des plus vifs qu’on puisse éprouver, et il n’est pas commun (1). »
*
LE]
Maximin d'Hombres a laissé trois excellentes Études ou notices réunies dans le volume des Recherches
historiques sur Alais, publié en 1860, en collaboration avec MM. Marette, Duclaux-Monteil et César Fabre.
La première de ces notices est un précis historique sur la Seigneurie d’Alais, C’est, sans contredit,
le travail le plus complet qui ait jamais été publié sur cette matière.
La seconde contient une étude archéologique et historique sur l’ancienne église de Saint-Jean-Baptiste
d’Alais, convertie plus tard en cathédrale,
La troisième traite des anciens noms des rues et places de la ville avec l'indication de leur étymologie.
On doit, en outre, à Maximin d'Hombres, de nombreux articles publiés dans l'Écho d’Alais, journal
dont l'existence a duré onze années, de 1841 à 1852, et dont il fut l’un des principaux fondateurs,
On a aussi de lui une notice biographique placée en tête de la deuxième édition de Las Castagnados,
recueil de poésies languedociennes du marquis de Lafare-Alais, à qui l’unissait une vieille et étroite amitié;
et trois ou quatre plaquettes, sans nom d'auteur, qui n’ont jamais été mises en vente : il n’en a été tiré
qu’un nombre très restreint d'exemplaires (2).
Mais les travaux les plus remarquables dus à ses longues et patientes recherches et à sa profonde
-érudition, sont : 1° Une étude de longue haleine, sous forme de discours, intitulée : ALAIS, ses origines,
sa langue, ses chartes, sa commune et son consulat; 2° Le nouveau DICTIONNAIRE LANGUEDOCIEN-FRANÇAIS,
resté inachevé.
*
LE)
Dans son étude sur Alais, l'auteur éxpose d'abord l’ensemble de son œuvre.
Il a pris à tâche de faire ressortir le synchronisme qui existe entre les origines de l’organisation
municipale de la ville d’Alais et celles de la formation de son langage. Il établit l'étymologie du nom
d’Alais qui tient par ses racines à la langue celtique; il montre la contrée successivement occupée par les
Ibères, les Ligures, les Celtes, les Romains, les Franks, les Visigoths, les Sarrasins, et assimilant à son
idiome des éléments divers empruntés au langage de sés envahisseurs, 11 signale l'introduction de la forme
latine, dans la langue indigène, comme la conséquence évidente de l'occupation romaine et de l'établisse-
ment du christianisme dans la Gaule méridiohale; et, après l’apaisement des grandes secousses produites
par les invasions, il montre ce même langage national, ainsi modifié, s’assujétissant à des règles, se fixant
progressivement, et, sous le nom de Zangue romane, s'imposant à l’Europe occidentale.
Abordant ensuite la période féodale, l’auteur fait apparaître, en 1093, le premier seigneur connu
d’Alais, Raymond Pelet, qui prend part à la première croisade, de concert avee Raymond-Décan d'Uzès et
Guillaume de Sabran, sous les ordres de Raymond IV de Saint-Gilles, Il fait voir aussi les papes Gélase IT,
en 1118, et Alexandre III, en 1162, recevant à Alais l'hospitalité des Pelet; il décrit la vie seigneuriale,
les aventures des troubadours de la contrée; il dépeint enfin, au seuil du XIII: siècle, la ville d’Alais entrant
(1) G. BoissiEr. — Les provinces orientales de l'empire romain.
(2) Les Chartes d'Alais du XIIIe siècle, traduites du roman et du latin en rimes françaises, 40 pages in-8°; — Rapport au
Contoll meeineh d'Algisanr. Le déntnisatien don ruanet piepte de 4-9 ; + Coup-d'œil sur l'alignement et les syndicats du
Gardon, 80 pages in-8°.
1
«en possession d'elle-même et de la vie publique; » le peuple alaisien établissant ses droits; affirmant son
existence civile et son organisation communale.
Parvenu à cette partie de son Étude, l'auteur passe en reyue les principaux articles de la cherie
de 1200, octroyée par les seigneurs aux habitants d'Alais, et si étrangement défigurée dans son texte et
dans sa date par MM. Beugnot (1) et Laferrière (2). Rétablissant les textes d’après les documents originaux
déposés aux archives municipales, il présente une vue d’ensemble de l’organisation communale d’Alais, en
faisant ressortir le profond sentiment religieux qui domine dans les institutions de la société naissante.
*
* +
Le nouveau Dictionnaire languedocien-français fut le but constant vers lequel convergèrent lès études
de Maximin d'Hombres, et la meilleure partie de l'existence de notre cher et regretté confrère à + con-
sacrée à cette œuvre éapitale, qu'une mort prématurée ne lui a pas pérmi d'achever.
En publiant son Dictionnaire languedocien-français, l'abbé de Sauvages s'était donné pour mission
principale d'enseigner à parler correctement le français à ceux de ses compatriotes qui, accoutumés dès
l'enfance à formuler leur pensée en languedocien, n’en donnaient, én se servant du français, qu'une tra-
duction vicieuse hérissée de gasconismes. Ï1 se proposait, én outre, d'expliquer les mots du vieux langage
dont fourmillent les anciens documents écrits de l’époque féodale.
Cette préoccupation constante a empêché lé savant abbé d'atteindre le résultat qu'on était en droit
d'espérer de lui. Elle lui a fait Souvent négliger où omettre les mots les plus usuels et le mieux émployés
pour s'attacher de préférence aux termes purement techniques. Aïnsi restreint dans sa spécialité, on peut
dire quelle plan de l'ouvrage manqué d'unité et demeure incomplet, au grand préjudice du dialecte alaisien.
Le dangér qu'avait voulu conjurér l'abbé de Sauvages n’existe d'ailleurs plus de nos jours: Ce n’est
pas, en effet, l'altération dé la langué française par le languedocien qui est à craindre à l'heure présente :
l'influence contraire est bien plus à redouter, et nous assistons, chaque jour, à l'envahissement progressif
de notre belle et vieille langue d'Oc, qui tend à se pervertir et à se corrompre, en se francisant.
C'est pour combler les nombreuses lacunes du dictionnaire de.l'abbé de Sauvages que. l’auteur des
Castagnados eut le premier la pensée, il y a déjà. plus. de trente ans, de rendre sa physionomie vraie au
dialecte alaisien, cet ami d'enfance qu'il savait manier avec tant de grâce et d'esprit. Il associa à cette œuvre
considérable deux amis intimes, MM. J-M. Marette et Maximin d'Hombres, animés comme Jui du feu sacré;
et, avec leur collaboration, il jeta les fondements de l’œuvre future, en commençant. par recueillir a
onmenclature de tous les mots qui devaient entrer dans le nouveau Dictionnaire languedocien-français,
nomenclature écrite en entier.de la main du marquis de La Fare, et destinée de servir de guide aux trois
collaborateurs. Cette classification devait être considérée comme un arrêt définitif, qu'il fallait religieu-
sement respecter.
Mais la mort vint successivement enrayer .ou suspendre l’accomplissement de l’œuvre commencée,
M. le marquis de Lafare-Alais succomba le premier en 1846; M. Marette le suivit vingt ans plus tard, en 1866.
L'honneur et le fardeau de l'entreprise devinrent alors l'héritage exclusif du dernier des survivants;,
qui, à. son tour, devait disparaître ayant d’avoir pu mettre la, dernière main à ce monument patriotique:
x rt
** p2
À dater de sa nomination comme président du Tribunal civil d'Alaïs, l'existence de Maximin d'Hombres
né devait plus être qu'une longue agonie précédant une crise suprême.
» (1) Documents inédits:sur l'histoire de France. Les Ociu; ou registres des arrêts rendus par la Cour du roi, publiés par
M: Beugnot, membre de l’Institut. T. II, 2” partie, 1312-1318. Appendice:; Anciennes coutumes d'Alais, pp. 1458-1501.
(2) Larennière. Hisloire du Droit français, T. V, Coutumes de France, sect. IT; Anciennes Coulumes d'Alais, Paris 185820
L
Notre ami succomba, le 27 décembre 1873, à la cruelle maladie dont il était atteint depuis plusieurs
mois. Il mourut en chrétien convaincu et résigné, digne couronnement d'une aussi belle existence.
M. E. de Roux-Larcy a résumé en trois mots, sur sa tombe, la noble devise de Maximin : « Dévoue-
ment, abnégation, fidélité. »
« Sa foi religieuse, a-t-il ajouté, sa mort la proclame... — Sa foi politique fut de celles qui com-
mandent le respect à leurs adversaires, et qu'aucune épreuve ne fait jamais défaillir (4). »
« Né dans le sein de l'Église romaine, élevé dans la foi et l'amour de ses dogmes, dans le respect de ses
décisions, dans la soumission à sa discipline, a dit excellemment de lui M. d'Espinassous, rien de ce qui,
dans nos temps troublés, a fait hésiter tant d'âmes, n’a eu la force de le faire dévier un seul moment de son
devoir filial..……. Dieu, roi, patrie, cité, famille, amis, tant que ce noble cœur a battu, il a tout aimé avec
obstination..…. — Catholique et légitimiste par sentiment, il devait nécessairement en être le type le plus
pur, et il ne pouvait que vivre et mourir dans les bras de l'Église et en révant du trône (2). »
A ce splendide hommage aussi mérité que noblement exprimé, il nous suffira d'ajouter que la mort de
Maximin d'Hombres fut une perte irréparable pour sa famille et ses nombreux amis, et un deuil public pour
cette excellente population alaisienne, qui voyait s’éteindre en lui une de ses figures les plus originales et
les plus aimées, un des derniers chroniqueurs de ses mœurs populaires, un des derniers représentants de
ses antiques traditions.
LA
LE.
Après la mort de notre ami, Madame d’Hombres voulut bien nous confier le soin de terminer l'œuvre
inachevée de son mari : honneur insigne et périlleux, qui nous revenait moins qu'à tout autre et que nous
nous sommes efforcé de justifiér, sans espérer d'y avoir réussi aussi complètement que nous l’aurions désiré.
Maximin d'Hombres avait, en mourant, laissé le Dictionnaire languedocien rédigé et imprimé jusqu’à
la lettre M, inclusivement. Il restait donc à définir, sans autres jalons que la liste incomplète laissée par
M. le marquis de La Fare-Alais, tous les mots correspondant aux douze dernières lettres de l'alphabet.
L'orthographe introduite par M. de La Fare, dans ses poésies, est des plus défectueuses et se trouve en
complète opposition avec les origines et les traditions de la langue d'Oc. Maximin d'Hombres l'avait néan-
moins adoptée, par déférénce pour le souvenir de son ami, et, bien que nos préférences soient en faveur
de l'orthographe rationnelle, reconstituée par la renaissance provençale, nous avons dû, à notre tour, nous
plier aux mêmes exigences, pour conserver, à l'œuvre à moitié accomplie de nos prédécesseurs, sa physio-
nomie propre et sa complète unité.
Dix ans ont été consacrés à cette tâche laborieuse, dont l'accomplissement nous a été facilitée surtout
par MM. Émile de Firmas-Périès et César Fabrè, deux alaisiens de vieille-roche, pour qui le dialecte Cévenol
n’a point de secrets. Nous devons aussi de nombreux renseignements aux trois poètes d'Alais, successeurs
de La Fare, MM. Paul Félix, André Leyris et Albert Arnavieille ; et, d'autre part, M. Émile Reboul, a bien
voulu prêter à MM. Alfred Veirun, Auguste Brugueirolle et Clodomir Castagnier, imprimeurs du Diction-
naire, le concours de son remarquable talent de correcteur.
Nous nous estimons heureux de pouvoir consacrer ici, à ces bienveillants collaborateurs, les meilleurs
témoignages de notre sincère reconnaissance.
Alais, 27 décembre 1883.
x G. CHARVET.
{+
(1) Discours prononcé par M. E. de Roux-Larey sur la tombe de M. Maximin d'Hombres.
(2) Éloge de M. Maximin d'Hombres, par M. d’Espinassous.
EXPLICATION DES ABRÉVIATIONS
—ss—————
A ouai. 12 .,2100% ... Aclif. Inn. 2,08 tattle ... Indicatif.
AR LAN don ip 1 ÉONPAÉ INTERJ 4. RE Interjection.
VCD ET RER TEEN Adjectif. IRDÉG, 4 La See Irrégulier.
OT PRE A Adverbe où Adverbialement. ÉTAL SR 5 803 ses TETE Italien.
PR ee ce s soie Allemand. LANGE ec ner Languedocien.
PA ON à Anglais. BAT.574 74 FE INDIE Latin.
FU AN APR ET CUT DE Article. Liu. aie leo à ..… Limousin.
Au Eliane nor des Au figuré. LE, né esnreeP a Linnée, naturaliste.
AUGM ei. be er de Augmentatif. LOC. PRVB,.....:..0:. Locution proverbiale.
RL PRO 4 ce ce sert Au propre. M. m. ou MASsC........ Masculin.
DA LT nr oroecms Basse latinité. Ji et ÉTAT A Même signification.
OP MR Er Canton. NS PR: 1-0 Nom propre.
RE Tree sde ebe Catalan. PAR EXT....... .. .... Par exlension.
EU PE DO Re Celte ou Celtique. PAR EX. .....+ «ss... Par exemple.
aval um PR ul Cévenol. PART, PASS, 4,443 0. . Participe passé.
CoMmer do.5ebbs chritel < Commune. Ps. ou PÉIOR........ «+ Péjoratif.
COR EE LS Conjonction. Pons Lie mes es Personne.
COR io Contraction. PHR. F OU FAITE...,... Phrase faite
Rd ee Re on Corruption où Corrompu. PEUR era ve as Pluriel.
En aue a des Datif. FOR a nr des Portugais.
Dénons shift 24 0x1 Démonstratif. Ropsiui, site A. «.. Populaire.
DéRucish su der ati .... Dérivation où Dérivé, Pos 4454 lon. Possessif.
DL uit LS MATS Dialecte. Pepe... ssse..s. Préposition.
ECO NERO Dictionnaire. Pas ri tee Mes Présent.
11" RP PAR .... Diminutif. PRIS ne Aie En ae Prétérit.
Là 0 MR PAL TELA .... Diphihongue. PHONE tee Pronom.
Empuit os, <tir uiix Emprunt où Emprunté. PHON1 LG tee L 107. Provençal.
TRES Os 7 Espagnol. PEMBrsr ee dass +.:. Proverbe.
12e 1 2 BP A EN ... Etymologie. RÉDur...,....:..,..... Réduplicatif.
LR AT OS EN E Exclamation. RU Ci AE 2e Réfléchi.
LT RUE EE PTS PA Exemple. ||: ARR ANE PIEDS ..... Relatif.
lg EAP L AT AEE À Féminin. NES ST sers mn ..... Singulier.
Kaai .lU ae ".... Famille ou Familier. SuBs. ou 8..... Link Substantif.
BST ob édite Fiquré. SM ab ss... Synonyme.
Fr....., DCCETETE ELITE Français. RAR Pts cie Traduit.
PR TE Ge Fréquentatif. RIRE. ed cs to Qule Triphthongue.
RAS DE ad ae ae s alu à Gascon. L'ÉNCENC R e .. Voyez ce mot.
Le PO RTE EU Génitif. A ER ere ie ohne dr Verbe.
RS OP LOT . Grec. V.1......,,.::,41.,.1 Vieux langage.
AMP DANS do Impératif. NO xs MR En sa ee Voyez.
— Indique le changement d'acceptions ou de sens d’un mot; mais plus souvent les citations et remarques. ;
= Signifie égale. Ex. Ac = ec, ac égale ec ; angue — anègue, = anenche : angue égale anègue, égale anenche ; etc.
DICTIONNAIRE
LANGUEDOCIEN-FRANÇAIS
BOISSIER p£ SAUVAGES ! DE LA FARE-ALAIS! Deux
noms radieux et sympathiques, que nous sommes heureux
. d'inscrire en tête des colonnes de ce livre, et qui feront sa
meilleure fortune.
Au premier nous rattachent des liens de famille; au
second est due l’idée première de notre nouveau Diction-
naire languedocien.
L'abbé de Sauvaces, parmi les célébrités que notre pays
a vues naître, on l’a dit avec raison, est la plus complète-
ment alaisienne : aucune n'a le cachet du crù comme la
sienne. Géologue, physicien, naturaliste, agronome, litté-
rateur ou lexicographe, soit qu'il consacre ses études à
l'agriculture, soit qu'il dirige ses recherches vers la linguis-
tique, tous les travaux d'une vie bien remplie et toujours
appliquée, les connaissances variées qu'il possède à un
degré distingué, supérieur même en quelques branches, son
expérience et son rare savoir semblent n'avoir quelque prix
à ses yeux qu'autant qu’il peut les faire tourner à la pros-
périté et à l'illustration de son pays natal.
Entre tous ses ouvrages, le seul dont nous ayons à
parler ici, le mieux connu peut-être, ne pouvait manquer
de porter l'empreinte de cette pensée de bien public. Dès le
titre même de son dictionnaire, et dans sa préface, le but
du modeste savant prend plaisir à s’avouer hautement. Il
se donne pour mission principale d'enseigner à parler cor-
rectement le français à ceux de ses compatriotes qui, accou-
tumés dès l'enfance à formuler leur pensée en languedocien,
n'en donnent, en se servant du français, qu'une traduction
vicieuse et toute hérissée de gasconismes. Il se propose en-
suite d'expliquer les mots du vieux langage dont fourmil-
lent les titres et actes établissant d’anciens droits ou leur
exemption. Une pareille conception a pu paraitre étrange,
originale : il n’y faut voir que le sentiment exagéré peut-
être mais touchant, d’un noble patriotisme, qui sacrifie au
désir d’être utile même le soin de sa renommée littéraire et
scientifique. Cette préoccupation toutefois a empêché une
œuvre excellente d'atteindre la portée que l’auteur pouvait
se promettre. Elle lui fait mettre de côté les mots les plus
usuels, pour ne s'attacher qu'à des techniques; tous les
termes, et souvent les mieux employés, ne se trouvent pas
chez lui, et il les néglige pour en poursuivre d’autres,
hors de son domaine, s'il y peut saisir l’occasion d’un
redressement et matière à sa leçon de français. Restreint
ainsi dans une spécialité, et en même temps entrainé vers
des dialectes étrangers, son plan est incomplet et manque
d'unité, au grand détriment de notre dialecte. Quelle valeur,
en effet, était destiné à avoir, pour l'avenir littéraire de
notre pays, un travail de cette importance, exécuté par un
homme comme l’abbé de SauvaGes, si, au lieu de se renfer-
mer dans un traité de purisme français, il nous eût donné
un vrai lexique languedocien, embrassant la langue dans sa
plénitude, ne sanctionnant que ce qu'il savait être de pur
sang cévenol, mais légalisant tout notre avoir légitime! Sa
réserve trop timide est d'autant plus regrettable, que per-
sonne encore n'avait, avec tant de profondeur, de sagacité
et d'érudition, pénétré dans le génie de notre idiome, ne
s'était plus impressionné de ses beautés, de sa limpidité, de
la sève de ses tours, de ses images, de ses figures, de ses
idiotismes. Malgré ces lacunes, SAUVAGES restera comme la
gloire la plus populaire de nos contrées, et il méritera tou- :
jours d’être considéré comme le plus savant et le plus spi-
rituel des iniliateurs du languedocien.
Son recueil sera le meilleur à consulter et le plus en-
rieux quand on voudra remonter aux sources; mais sa
donnée trop exclusive devait nous interdire de le prendre
en tout pour modèle. Le danger qu'il a voulu combattre
n'existe plus d'ailleurs an mème degré. Ce n'est pas l'alté-
ration de la langue française par le languedocien qui est à
redouter : l'influence inverse est bien autrement à craindre,
et le péril sérieux est au contraire de voir notre belle et
8
vieille langue d'Oc se pervertir et se corrompre en se fran-
cisant. Notre génération qui s’en va et celles qui viennent,
sont vouées au français : elles ne parlent et ne pensent plus
qu'en français. Est-ce à dire cependant que, de notre passé,
dont il ne reste plus qu'une ombre, rien ne soit à regretter?
Faudra-t-il surtout que le fier et doux parler de nos pères
et de nos mères-grands, pour avoir encore quelque charme
et une valeur, ne se façonne qu'aux belles manières
françaises et aux modes nouvelles, déserte son archaïsme,
énerve sa virile individualité, se renonce tout entier à
lui-même?
Quand la nationalité méridionale s’est fondue dans la
grande nationalité française, notre terre classique des liber-
tés communales, des franchises municipales, a-t-elle perdu
par la conquête et par la centralisation son esprit d’indé-
pendance et ses généreuses aspirations, qu’elle ne prouve
encore par moments qu'il en survit un souvenir? N'en
serait-il pas de même pour la langue d'Oc, qui a régné en
souveraine des Alpes à l'Océan, des Pyrénées à la Loire?
Quinze millions d'habitants, dans vingt départements, l'em-
ploient comme moyen de communication habituel, comme
l'agent le mieux compris dans leurs transactions, dans leurs
besoins journaliers. Elle est partout, et son génie vivifie en-
core nos provinces ; il semble les resserrer entre elles par une
plus étroite solidarité. Elle est divisée en une nombreuse
variété de dialectes, le Cévenol, le Provençal, le Limousin,
l’Auvergnat, le Gascon, le Béarnais; mais elle les rapproche
et les fusionne tous dans son principe unitaire, sous le même
symbole commun et fédératif. L’ostracisme français n’est
point parvenu à paralyser chez elle la fibre spiritualiste et
poétique : elle vient de faire ses preuves éclatantes. On
l'exclut des écoles, de l’enseignement classique et des aca-
démies : elle se venge de la proscription en forçant son
vainqueur à applaudir, à envier les merveilleuses inspira-
tions de sa muse toujours fidèle. Vaincue par les armes
perfectionnées du français, on voudrait la reléguer à la
campagne, à la ferme, parmi les paysans et les laboureurs;
elle s’en échappe pour prendre ses entrées dans les salons
du grand monde et sur les théâtres des premières villes.
Modeste Cendrillon, on la croit réduite aux plus vulgaires
usages de la vie commune, condamnée au rôle de servante,
après avoir été dépouillée de sa part d’héritage par sa su-
perbe sœur d’outre-Loire; mais elle est restée grande dame
et noble fille du peuple, et elle ne veut pas que son blason
mi-parti soit infecté de la barre ignominieuse de bâtardise.
Elle était littéraire, élégante et polie avant que le français
n'eût secoué son enveloppe tudesque et inculte. Elle n’a
point abdiqué, et se souvient; elle se refuse à recevoir l’au-
mône du français, ce qui pour elle serait consentir à des-
cendre à l'humiliante condition de patois, et dégénérer de
fangue savante et de haute extraction en un jargon grossier
et barbare. Les royautés tombées, comme les démocraties
asservies, ont leurs majestés et leurs fiertés, qui comman-
dent encore le respect, et quelquefois de ces retours de sève
et leurs jours de révolte, qui les relèvent des proscriptions
et des dédains!
Ce n’est pas qu'il y ait à armer en guerre pour reconqué-
rir à la langue d'Oc sa couronne de souveraine déchue, et
pour la restaurer dans son rang politique et international
d'autrefois. Ses destinées sont changées, elle n’aspire pas si
haut; mais elle n’est pas tombée si bas qu’elle se laisse dé-
figurer, travestir et outrager sans protestation. Au moins
aura-t-elle bien le droit de vouloir rester en possession
d'elle-même et de son génie, et qu'il lui soit permis, tant
soit-elle bafouée et trahie, mème par les siens et ses plus
proches, d'espérer que son culte vit encore dans quelque
noble cœur, et que le feu sacré trouvera un coin de foyer
qui l’abrite et le conserve.
Cependant on a pu croire que l’heure de la réhabilitation
était près de sonner pour elle, à voir le mouvement litté-
raire qui se produit en sa faveur à notre époque, si peu
portée vers la littérature. C'est au moment où la langue
d'Oc est proclamée, de par les pédants, morte sous la férule
du français, et dûment ensevelie, que, de tout le Midi, dans
son vieil idiome national, s'élève la plus éloquente des pro-
testations, s'exprimant avec une fraicheur de poésie, une
jeunesse de verve, une inspiration, une originalité, à rassu-
rer contre de fatidiques et niaises prédictions, à consoler
des écœurements du positivisme matérialiste. Et c'est à ce
moment-là mème que les meilleurs esprits, en France et en
Allemagne, — historiens, savants, philologues, curieux et
érudits, doctes et lettrés, — attirés vers les études de la
linguistique, se prennent à interroger nos anciens dialectes
pour y découvrir le secret de leur formation, de leur ori-
gine, des lois du langage, la trace des vieilles mœurs, des
usages, des institutions du pays, que souvent un mot a tra-
duits et conserve dans son étymologie.
La renaissance des lettres méridionales a déjà pour elle
la plus grande puissance du jour, le fait accompli. Elle
s’est affirmée par des œuvres brillantes et vigoureuses; et
aussitôt, sous le charme et l’étonnement, l'attention publi-
que s’est fixée sur ces patois, comme on disait, auxquels
on n'avait pas soupçonné tant d’harmonieuses ressources.
Grâces en soient rendues à la muse de la langue d'Oc! Dès
qu'on a pu voir l'éclat et la richesse de son écrin, on a
voulu sonder les profondeurs de la mine qui recélait ces
fines pierreries : les travaux de recherche et les fouilles ont
été entrepris avec ardeur. Cette poésie, que l’on pouvait
avouer et qui se faisait applaudir, a commencé-par faire
aimer sa langue et le vocabulaire qui en apprenait les déli-
catesses, le tour et l'expression. L'histoire d’un peuple n'est
autre que l’histoire de sa langue; et à son tour, la science
est venue explorer les sources, les formes, les flexions, les
transformations du vieux langage néo-latin, roman, langue-
docien ; demander aux dictionnaires du peuple ce que le
peuple pensait et comment il parlait sa pensée, comme il
la parle encore et la parlera longtemps, et étudier sur le vif
son génie, ses coutumes et ses traditions.
La poésie refleurissait au berceau des premiers trouba-
dours; et par un merveilleux entrainement de patriotisme,
tous les dialectes, aussi nombreux et aussi mélodieux que
dans l'ancienne Grèce, se réveillaient pour publier leur
charte particulière, le code local de leurs variétés. Les tra-
vaux des grammairiens et des linguistes, les glossaires, les
lexiques, les vocabulaires se sont multipliés pour attester
la vitalité rajeunie de l’idiome languedocien. Des académies,
des sociétés, des congrès, des jeux floraux ont encouragé
cet élan de l'esprit provincial, et tout le Midi a répondu à
des voix aimées et connues, qui l’appelaient dans sa langue
populaire à une vie nouvelle.
Certes, tout cela ne va pas faire renaître les temps des
Raymond de Toulouse et des Béranger de Provence, avec
les cours d'amour, avec les fleurs et les joies de la gaie
- science. Nous n’allons pas revenir à l'époque pour laquelle
écrivait SAUVAGES, où, par tout notre pays, dans les plus
grandes maisons comme sous les toits les plus humbles, le
patois, c'est-à-dire le langage de la patrie, conservait seul
l'antique droit d'asile, où seul il était admis dans les rela-
tions privées et domestiques, dans les causeries intimes du
“salon du riche et de l'âtre du pauvre, où la famille patriar-
cale ne s’entendait, ne s'entretenait, ne s’aimait qu'en pur
languedocien. Non; mais tout cela, ce réveil intellectuel de
nos provinces, ce retour de faveur, cet empressement du
monde savant à remettre en honneur l'idiome méridional
donnent la preuve que le flambeau, rallumé par des mains
habiles, n'a rien perdu de son éclat, etqu'il y a mieux que
des cendres mortes à remuer au foyer de la langue d'Oc.
N'est-ce pas déjà quelque chose de bien remarquable qu'une
langue, proscrite et dédaignée, qui revendique d'autorité sa
place au soleil, qui s'impose par des chefs-d'œuvre et se
classe de prime-saut au rang qui lui a autrefois appartenu
et qui lui revient encore? N'est-ce pas faire acte de force,
sous Je régime le plus centralisateur qu’on ait jamais inventé,
d'avoir su persévérer dans son indépendance, et si bien
garder intactes l'originalité et la pureté de son type natif?
Et quand elle s’est présentée ainsi, de quels artifices at-elle
usé pour se faire reconnaitre? Quelles habiletés a-t-elle
employées pour être adoptée et recherchée? Son histoire
était là qui disait son passé, ses traditions, ses instincts.
Le charme desa parole, de sa mélodie, de ses rythmes a
sufli : elle n’a pas exercé d'autre séduction.
Cependant, depuis le commencement de ce siècle, le sys-
tème des prohibitions ne lui a pas épargné ses rigueurs.
Que de défenses par édits et par arrêts, par lois et décrets,
de se produire! Et en mème temps, comme sur son domaine
les introductions de la concurrence officielle étaient léga-
lisées! Au nom du progrès et de l'unité, sous prétexte de
belle diction, aucune trahison, aucune rupture, aucun
abandon ne lui ont été ménagés. Elle à été écartée de l'in-
struction. primaire de l'enfance; les hautes classes de la
société n'ont plus consenti à la traiter que comme une langue
de luxe, pouvant s’adonner avec quelque succès à la litté-
9
rature et y réussissant assez bien, et elles l'ont bannie de
leur conversation la plus familière. Mais, sous le coup de ces
injustes réprobations, auprès des masses populaires, loin des
villes et des écoles, elle a trouvé un refuge. L'attachement
opiniâtre du peuple pour le langage dans lequel il à appris
à penser, qu'il s'est donné comme l'instrument le plus
facile, le plus commode, le plus actif de ses relations, de ses
nécessités d’habitudes et de mœurs, lui a fait un rempart
inexpugnable. Là est pour elle la vraie patrie; elle est là
en pleine possession d'elle-même. Vivant par les populations
attachées au sol, elle a suivi leur développement; mobile
comme tout ce qui vit et marche, quand elles avançaient;
s'impressionnant avec elles des influences climatériques,
quand leur organisme les portait naturellement à modi-
fier certains sons, à préférer certaines articulations mieux
appropriées à leurs facultés; se prètant à formuler les
idées et les connaissances d'une civilisation plus riche,
dans la mesure des besoins et des intérêts qu'elle était
appelée à servir, dans le cercle qu'elle embrassait, selon les
lois et la nature de son organisation, dont le peuple a si
bien le secret et l'instinct. C'est assurément pour s'être
tenue dans ce milieu, dont on ne l’arrachera pas de long-
temps, où les innovations ont moins de prise et le respect
de la langue maternelle plus de puissance, qu’elle doit de
n'avoir presque rien perdu de son caractère primitif,
du naturel qui distingue son individualité, qui la classe
comme une langue à part, vivant de sa vie propre,
Aussi, plus qu'un autre, l'idiome languedocien est-il en
droit de se montrer jaloux et fier de rester et de paraitre
lui-même. 1 ne redoute rien tant que l'alliage et la contre-
façon : il réprouve avec horreur tout ce qui ressemble à un
pastiche ou à un calque; il est dans sa nature d’avoir des
susceptibilités d'hermine, des délicatesses de sensitive, et
des raffinements de pruderie, qui auraient dû déconcerter
les audaces d'attouchements profanes. A ce point que, pour
vivre dans le mouvement intellectuel et social, quand il est
forcé d'emprunter un mot au français, son voisin et son
rival, il a hâte de protester eontre ce servage, et se croit
obligé de défigurer l'intrus par quelque métathèse hardie
qui sauve jusqu'à l'apparence de l'imitation. Ainsi encore,
il sent bien que le langage moderne de la politique, des
sciences et des arts, de la philosophie, lui échappe; mais,
dans la sphère où l'a retenu sa défaite, il n’en avait nul
besoin; il repousse l'importation étrangère ou il la dénature
par des procédés à lui propres, et peut-être aussi par la
crainte d'introduire dans son domaine la plus étrange des
battologies, s’il lui fallait, à l'exemple du français, deman-
der des techniques à l'Angleterre pour la politique, le com-
merce ou l'industrie, à l'Italie pour la musique et la pein-
ture, à la Grèce et à l'Allemagne pour la philosophie.
Le contact continuelet forcé du français n'autorise avec lui
ni assimilation, ni promiscuité. Le génie de la langue d'Ocest
en opposition avec le génie de la langue d'Onl. La sonorité de
l'accentuation méridionale, l'euphonie et la cadence de ses
2
10
désinences et de ses formes, ses tours elliptiques et sa con-
struction ne se plieront jamais au dialecte sourd du Nord, à
sa précision exacte et compassée. Il ne sortirait de la fusion
qu'une logomachie sans nom, qui ne serait ni du langue-
docien ni du français, mais du vrai patois cette fois, inin-
telligible aux habitants du pays eux-mêmes, et faite pour
déconcerter les étrangers et les plus savants philologues.
Malheureusement ces incompatibilités entre les deux lan-
gues n'ont pas été toujours bien comprises. Pour quelques
affinités que le latin avait à l’origine apportées dans l’une
et dans l’autre, on n’a pas assez tenu compte de leurs diffé-
rences physiologiques, de tout ce que peut-être le climat,
leur position géographique, leurs tendances avaient mis
d’inconciliable, d’antipathique dans leur nature, dans leur
caractère, dans leur mécanisme, dans leur expression.
C'étaient deux fleuves, ayant une source commune, qui
longtemps avaient suivi une marche parallèle, fécondant
le pays dans leur cours; mais que depuis des pentes oppo-
sées ont entrainés en sens contraire, et dont les eaux ne
peuvent plus se mêler sans se troubler et se corrompre.
C'est ce qu'il fallait surtout remarquer : c'était à main-
tenir la séparation qu'il importait de s'attacher.
Aujourd'hui la langue française, qui ne cesse de se pro-
diguer, de se répandre, de se perfectionner, attire tout à
elle : seule, elle a la parole; seule, elle est de bon ton et
de bonne compagnie; tout se fait, s'enseigne, se régente,
se discute, se traite en français : sa prééminence est incon-
testable. La langue d'Oc, à ses côtés, depuis qu’elle a perdu
sa nationalité, n’est plus qu'un parler de vaincus. Comme
elle n’a pu se mouvoir que dans un cercle restreint, sa
puissance de développement s’est mesurée à des intérêts et
à des besoins bornés. Émule souvent heureuse du français,
dans la poésie, plus abondante et plus musicale que lui, on
l'a bien vue toucher sans efforts aux conceptions élevées de
la pensée et de l'esprit; mais rejetée de la vie publique
active, du monde des affaires, de la politique et des sciences
humaines, mise en quelque sorte au ban de la civilisation
moderne : toute expansion lui devenait impossible. Elle est
restée, avec ses allures familières, vulgaires, un peu rusti-
ques, la langue du peuple, de la famille, des campagnes.
Elle à vécu néanmoins et elle vit encore de son propre
fonds, par la seule énergie de sa constitution.
Mais tous rapports philologiques ont cessé entre les
deux idiomes. Leur co-existence sur le même territoire ne
saurait fonder ni alliance, ni association. La transfusion de
J'un dans l’autre ne serait en effet que l’anéantissement du
plus faible, sans profit pour le plus fort.
Sans doute il peut arriver un jour, si éloigné qu'on le
prévoie, où le vainqueur parviendra à étouffer le paria, à
force de l'étreindre. 11 le supplantera dans son modeste
empire, mais son pouvoir ne va pas jusqu’à le rayer de la
famille des langues. Que le languedocien soit supprimé et
démonétisé, c'est le lot des proscrits; mais rien ne fera
qu'il n’ait eu cours légal, qu'il ne soit encore une des
gloires de la mère-patrie, qu’il ne revendique justement son
individualité distincte, et qu’il ne se refuse à être converti en
un des patois du français. C’est au moins contre cette
décomposition violente qu'il proteste, s’il est condamné à
mourir. Amis et ennemis s'acharnent à le transformer en
un argot qui le rendra bientôt tout à fait méconnaissable.
Certains puristes, et quelques-uns très-érudits vraiment,
ne sont-ils pas allés jusqu'à professer que le vocabulaire
languedocien n'avait rien de mieux à faire que de mettre
au pillage les dictionnaires français? Ces stériles et humi-
liants larcins, s'ils étaient érigés en système et innocentés,
ces monstrueux amalgames, s'ils s’accomplissaient, c'en
serait fait de la langue d'Oc, et de sa dignité, et de son génie.
Les empiriques, en infiltrant dans les veines de la pauvre
malade un sang étranger, n’obtiendraient que ce déplorable
résultat de compromettre davantage son existence. A l’arrèt
de mort qu'on n'ajoute donc pas un arrêt de flétrissure.
La réaction intelligente de l'esprit des provinces, dans le
Midi, n’a pas été saluée partout avec tant de sympathie
encourageante pour avorter en plein succès. La langue d'Oc,
qui a repris sa place dans la littérature de la France, fait
désormais partie de ses richesses, et sa conservation inté-
resse la gloire nationale. Mais que lui faut-il encore pour
vaincre les préjugés, pour avoir raison de tous les partis-
pris? Elle n’y parviendrait pas mieux si elle consentait à
reprendre les formules archaïques du roman des trouba-
dours, avec lesquelles on ne s’entendrait plus, que si elle
était contrainte à recourir à ces faux ajustements d’em-
prunt, qui l’enlaidissent et la défigurent. Mais tous les suf-
frages lui feront accueil quand elle se montrera dans sa
pureté première, dans sa simplicité vraie et naturelle. Elle
ne doit être jugée que sur son type natal, sur un tableau
correct, complet, entier d’elle-mème, telle que le progrès
l'a faite, modifiée, appropriée, avec les accroissements que
son génie lui a apportés et que l'usage consacre. Au prix
d’une épuration sévère, elle méritera de se relever de son
abaissement, et d'attirer les études sérieuses et la faveur
publique.
Sans rien répudier de son passé qui a jeté un vif éclat
dans la littérature, ne peut-elle avoir quelque orgueil de sa
renaissance, qui n’est pas moins brillante? Ce qui était
autrefois de son essence, ne le porte-t-elle pas encore
aujourd’hui en elle? Toutes les langues arrivent nécessai-
rement à se transfigurer avec les mœurs, l'esprit public et
les tendances des populations qu’elles représentent. Et de
cela que l’idiome méridional ne s’est pas figé dans l’immo-
bilité, qu’il a éprouvé des transformations, serait-il juste:
de conclure qu'il doit être déclaré atteint et convaincu de
mort civile? Ce ne sont point les acquisitions nouvelles,
quand il les a marquées au titre légal, qui peuvent dimi-
nuer son crédit; mais bien cette fausse monnaie, frappée
au coin d’une fantaisie ignorante, qui le déconsidère : et
c’est là que le remède doit être appliqué.
D'autre part, la langue d'Oc est morcelée en une infinité
de dialectes; mais s’en est-elle pour cela affaiblie dans son
principe? Tous ces rameaux se relient par mille radicules
à la souche-mère; les nuances d’intonation et de vocalisa-
tion viennent confondre leurs accords dans l'harmonie
originelle, dans une gamme commune. S'il n’est pas permis
d'espérer, à cause de l'étendue du territoire et de la diver-
sité des dialectes, de les rassembler tous dans une compo-
sition unique, qui dénonce les altérations dont ils ont
chacun plus ou moins subi l'atteinte, et qui les ramène’au
thème vrai, ce résultat ne peut-il être obtenu dans une
monographie, qui se rattache à tous par des aperçus géné-
raux, par la fraternité d'origine et de famille? Notre dia-
lecte cévenol, par sa position concentrique entre la plaine
et la montagne, plus abrité que les autres contre les impor-
tations exotiques, ne s'est-il pas montré aussi plus fidèle au
vieux culte, n'a-t-il pas mieux conservé les saines traditions ?
Ne devrait-il pas être préféré pour ce travail d'épuration ?
Ce sont ces études qui préoceupaient l’auteur des Casta-
gnados, auxquelles il conviait un groupe d'intimes, animés
comme lui du feu sacré. Il rèvait de rendre à son dialecte
bas-languedocien , cet ami d'enfance tant aimé, sa physio-
. nomie vraie. Dans cette pensée fut commencée la nomencla-
ture du nouveau Dictionnaire languedocien : elle nous est
parvenue écrite en entier de la main de M. le marquis DE
LA FARE-ALAIS.
A cet éminent esprit, si versé dans la connaissance de
l'idiome maternel, si familier avec le génie du gai-savoir,
il appartenait, et lui seul avait autorité et compétence pour
cela, de dresser le nobiliaire complet de notre langue, où
ne devaient être inscrits, comme sur le livre d’or de Venise,
que les patriciens de bon aloi, de pure origine ou d’allian-
ces légitimes. Poète, il avait rendu à cette langue populaire
sa grâce et son élégance, sa clarté et son énergie, son carac-
tère joyeux et goguenard, ses allures franches et agrestes ;
il l'avait élevée même jusqu'à l'idéal qu'on lui croyait
inaccessible, jusqu’au sentiment et au pathétique pour les-
quels on l’accusait de manquer d'expression ou de soufle.
Grammairien , il voulait lui garder son purisme natif et son
originalité technique; la sauver du servilisme de l'imitation et
des pollutions de l'invasion étrangère; délivrer son domaine
des excroissances sauvages que le terroir natal n'avait pas
produites et se refusait à féconder; conserver aux fleurs de
-ses champs leur fraicheur et leur parfum, sans proscrire
toutefois celles que sa culture ou son génie avaient natura-
lisées et dont il avait fait des conquêtes. Le maître seul eût
pu mener à bien ce labeur délicat : malheureusement il ne
lui a pas été donné de l’accomplir; mais il en a déposé la
pensée dans la nomenclature.
Cette classification, telle qu’il nous l'a laissée, accompa-
-gnée de quelques notes trop rares et pieusement recueillies,
qu'il sera facile de reconnaitre, forme un tout complet.
Notre système d'orthographe et les règles de notre syntaxe
s'y trouvent en germe : toutes les acquisitions nouvelles du
Cévenol sont légalisées, les néologismes irréguliers condam-
11
nés; le maitre a prononcé. Pour nous, ces listes de mots
sont les tables de la loi : elles fixent notre dialecte, elles
sont notre langue vraie, actuelle, vivante. C'est l'arrêt au-
quel il n'y a rien à ajouter ni à retrancher : le jugement
dernier qui sépare le bon grain de l'ivraie.
I y a plus de vingt-cinq ans du jour où fut écrite la pre-
mière ligne du Vocabulaire et où nous recevions, avec un
ami, hélas! perdu aussi pour nous, la confidence du plan
d’une entreprise trop tôt interrompue. Alors, dans une col-
laboration fraternelle, à laquelle manquait son chef naturel,
le travail aurait pu être suivi; d'autres préoccupations
arrêtèrent nos études, sans jamais cependant nous les
faire perdre entièrement de vue. Enfin, quand au dernier
survivant est revenu ce legs de l'amitié, pour en accepter
l'honneur et les périls il a moins consulté ses forces que
son patriotisme. L'œuvre avait été inspirée par un senti-
ment qui devait la faire continuer : elle pouvait être utile,
ses difficultés ne devaient pas empêcher d'en tenter les
risques et les écueils. Mais aujourd'hui que la tâche est à
peu près remplie, que nous avons parcouru jusqu’au bout la
voie tracée par les jalons indicateurs, nous jetons un regard
en arrière, et nous doutons. La bonne volonté ne nous
at-elle pas égaré? L'esprit du maître ne souffle plus; ne
nous a-t-il pas abandonné dans ce long trajet? Et nous en
sommes à nous demander, en le regrettant peut-être, s’il
n'eùt pas été préférable que l'esquisse fût restée simplement
au trait qui seul lui donnait tant de vie et d'animation;
s’il n’eût pas mieux valu que la toile eût été laissée vide
dans son cadre d'or. Puisse au moins la gangue abrupte
ne pas trop déparer le diamant que nous avons voulu
mettre en lumière!
Tout d’abord nous devions dire comment était né le
nouveau Dictionnaire languedocien ; maintenant, que son
ordonnance, sa marche et son développement eussent dû
être moins imparfaits, plus conformes aux us et coutumes
et aux règles académiques, nous l'avouons. Il y aurait trop
mauvaise grâce à ne pas le reconnaître et trop de présomp-
tion à ne pas s'en exeuser. Il va de soi que notre pré-
tention n’a pas été de faire un livre savant, pas plus que
destiné à apprendre la langue à ceux qui la savent; mais il
importait de conserver l’acte de son état civil, nous l'avons
fidèlement enregistré. Nous avons mis toute sorte d'appli-
cation et de désir à bien faire, pour rendre utiles et inté-
ressantes nosrecherches, pour maintenirlessaines traditions;
s'il ne nous a pas été donné de faire mieux, à nous seul
la faute. Mais que ne nous pardonnera-t-on pas et ne nous
laissera-t-on point passer à la faveur des deux noms si
populaires et sisympathiques qui nous couvrent? Ce double
patronage de Sauvages et de La Farr-ALAIs, nous l'invo-
quons à chaque page. A plus d'un titre nous avions le droit
de nous en réclamer : ici le devoir qui nous tenait le plus
au cœur était de porter l'hommage du souvenir et de la
reconnaissance à ces deux mémoires vénérées et chères.
7.
À
A, s. m. Première lettre de l'alphabet. Cette lettre n'étant
jamais muette et n'ayant qu'une seule et mème prononcia-
tion, il n’y a pas lieu de lui donner un accent quelconque,
ni au commencement, ni à la fin, ni dans l'intérieur d’un
mot. Cependant A prend l'accent circonflexe dans la diph-
thongue : mdou, pdou, doubé, etc.
À, prépos. el signe du datif à. — Anan à la vilo ; douna dé
pan à un pâoure. Ici Va n’est pas considéré comme lettre,
comme substantif; il est préposition. Pour ledistinguer ainsi,
ét ne pas le confondre avec le mot suivant, nous lui donnons
l'accent grave, qui du reste ne modifie en rien sa pronon-
ciation.
À, 3me pers. ind. prés. du verbe Avédre, il ou elle a.
À, désinence, qui est représentée dans quelques noms
propres d'homme et dans beaucoup de noms de lieu, en
fr. par ae, et en lat. par acus, acum.
Dans aucun mot notre dialecte n’admet ni ne prononce
le C final ; le français, au contraire, le fait fortement sentir;
en cela, et sur la terminaison dont nous traitons, celui-ci se
rapproche davantage de l’ancienne forme. Nos aïeux, les
Celtes, avaient en effet ce suffixe ac, ak, qui se confondait
avec son équivalent ec, ek, conservés encore dans l’armori-
cain, le cambrique et autres; et ils appuyaient sans doute
sur la finale.
On connait le rôle des préfixes et des suffixes, deux
sources qui fécondent et enrichissent les langues. Ceux-là
précèdent le mot, font les composés et marquent un rap-
port de convenance, de lieu, de distance, de temps, de
différence, etc.; ceux-ci suivent le mot, forment les dérivés
et impriment à la racine un sens particulier de qualité, de
mode, d'action, de substance, d'appropriation, de ressem-
blance, de réunion, de collectivité et autres. Le suffixe ae,
d'origine gauloise, servait à adjectiver le radical auquel il
s'attachait, en lui apportant une idée de descendance, de
propriété ou de collectivité, quand il s’ajoutait à un nom
propre.
En arrivant dans les Gaules, Rome leur imposa sa langue
et son génie; mais le vieux tronc celtique ne fut pas déra-
ciné et ses rameaux verdissaient dans le langage usuel.au
milieu des pousses latines. Les dénominations locales toutes
faites ne pouvaient s’effacer : elles furent latinisées le plus
souvent par la simple addition de lasyllabe romaine carac-
téristique us, a, um, selon qu'il s'agissait d'un mansus où
pagus, d'une villa ou mansio, d'un castrum ou predium.
Pour les établissements nouveaux à créer et à nommer, le
contact persévérant des deux idiomes amena des modifica-
tions de procédés et de formes. Le latin introduisit son
génitif en &, signe de relation identique au suflixe ac; et
ABA
de là très-probablement les désinences en acius où acium,
et par transposition iacus, iacum, et peut-être les flexions
en assius, assium, atius, atium. C'était déjà l’altération,
mais aussi le renouvellement; et pendant les sept ou huit
siècles que dura la décadence du régime romain, qui allait
s’altérant dans la basse latinité, se faisait en mème temps
le travail de formation de la langue d'Oc, prète à jeter
tant d'éclat avec ses troubadours. Il est facile de compren-
dre, dans cette période, les transformations par lesquelles
durent passer les désignations appellatives, sans parler des
influences ethniques, qui agissent avec tant de puissance sur
les organes vocaux et sur l'accent.
Les résultats se traduisent en variantes multipliées.
Tandis que, dans le Nord, le suffixe ae se convertit en é,
ey, ay, i, y, il fléchit, dans le Midi, en a simple, en ec, ex;
vers le Centre, en eu, eux; un peu partout, en as et at; et
toujours le latin immobile et uniforme a persisté dans ses
finales acus et acum, iacus et iacum. Dans cette variété de
produits issus de l’union des formes latines avec les dési-
nencesgauloises, tantôt latinisées, tantôt seulement traduites
de la langue vulgaire et primitive, la combinaison de la
mouillure sur lé apparait dans beaucoup de noms; elle
amène encore comme équivalent le suffixe an; en etautres,
et, il faut le reconnaitre aussi, le g celtique mouillant ln,
qui donne, pour ac et acum ou iacum, dans le Nord, igné,
igni, igny, ignies, qui ne sont pas moins pittoresques que
nos agnac, agnas, anègues, aniques, agnargues, arque et
orgue, méridionaux, qui ont les mêmes éléments primitifs
et remontent à la même source. En commençant, il fallait
tenir note de ces transformations. — Voy. les articles An,
Argue, et les exemples sous les noms de lieu Aimargue,
Massiargue, Candia, Sdouvagna, Séouvagnargue, etc., ete.
Abadiè, s. f. Abbaye; monastère d'hommes ou de fem-
mes, gouverné par un abbé ou une abbesse.
Dér. du latin Abbatia.
Abandoü, s. m. Abandon. — Il ne se prend guère
qu’adverbialement. Laïsso tout à l'abandoù, il néglige toutes
ses affaires.
Abandouna, v. Abandonner. — Ce mot d'origine toute
française est peu employé dans son sens propre, mais-il
devient tout-à-fait technique au participe passé fém. uno
abandounado, une femme décriée et que tout le monde fuit.
Nous remarquerons, en commençant et une fois pour
toutes, que le plus grand nombre de verbes actifs, dans
notre idiome ainsi que dans le bas-breton , se terminent en
A à l'infinitif et au part. pass. masc. Tous ces participes
font ado au féminin.
Abäoucha (s'), v. Tomber sur la face, sur le nez.
ns. à dé
o
ABÉ
Le radical semble pris de bueca, bass. latin., bouche.
Abâousa, v. Retourner un vase sens dessus dessous.
Abâousa (s'), ». Se coucher à plat ventre.
Abâousoù (d'), ou d'Abâousoüs, adv. A plat ventre,
face à terre.
Abarbassi, ido, adj. Barbu, qui laisse croître sa barbe
outre mesure.
Dér. de Barbo.
Abartassi (s'), v. Se couvrir de buissons; dégénérer en
buisson. Se dit d'un arbre qui a été brouté ou ‘trop fré-
quemment ravalé dans sa jeunesse.
Dér. de Bartas, buisson.
Les verbes dont l'infinitif est en 1, ont la mème termi-
naison au part. pass. masc.; ils font au fém. ido : règle
générale.
Abasani (s’), v. Se flétrir, se rider; devenir vieux, usé,
mi-pourri. Se dit quelquefois des personnes, mais plus sou-
vent du boïs de service qui a été pénétré par l'humidité et
la gelée, et qui perd par là son poids et sa dureté.
Abastardi (s'), v. S'abâtardir, se rabougrir, dégénérer.
Se dit surtout des plantes et des céréales qui dégénérent
faute d'assolement et de renouvellement des semences.
Abataïa, v. Altaquer, poursuivre quelqu'un avec des
projectiles quelconques; jouer de la fronde, jouer à la
bataille, lancer des pierres avec la fronde; abattre des fruits
à coups de pierre ou de gaule.
Abè, s. m., dim. Abéqué. Abbé. Ce mot n'est plus qu'une
désignation générique de tout ecclésiastique, n'importe son
rang et ses fonctions, jusqu'à celles d'évèque inclusivement.
Dér. du lat. Abbas.
- Abé, s. m. Sapin, Abies vulgaris, Linn. Grand arbre de
la famille des Conifères. — Voy. Sapin.
Dér. du lat. Abies.
A-bé-cé-dé, s. m. A-b-c, abécédaire, alphabet.
Abéïano, s. f. Mélisse, citronnelle, Melissa officinalis,
Linn, Plante à odeur de citron. Ses feuilles prises en infu-
sion sont un léger stomachique. C’est le thé des paysans.
— Voy. Limounéto.
Etym. de abéio, parce que les fleurs de cette plante, la
mélisse, attirent les abeilles, dont le nom grec est pkiosx,
formé lui-mème de u£k, lat. mel.
Abéïè, s. m. Grand troupeau de moutons composé de
plusieurs troupeaux de différents propriétaires, et que l’on
réunit sous la garde d’un maitre-berger nommé baïle, pour
les conduire en été sur les hautes montagnes. — Voy. Avé.
Ge mot est évidemment une dégénérescence d'éouéiè, qui
_ a la mème signification dans le dialecte gascon ou plutôt
bordelais. Ce dernier est dérivé d'douëlio, brebis, formé du
Ex Jatin ovis, comme ovile, bergerie, étable à brebis. C'est la
même origine que le français ouaïlle ou ovaille.
Abéio, s. f. Abeille, mouche à miel. Apismellifica, Linn.
— Mèrdo d'abéio, miel. Carga coumo uno abéio, chargé
commerune abeille; ne se dit que de quelqu'un chargé de
© butin ou d'objets utiles à soi-même.
ABÉ 13
Abél ou Apiè, s.m. Rucher d'abeilles; lieu où sont pla-
cées les ruches à miel; l'ensemble de toutes les ruches.
— Voy. Apiè.
Abéna ou Avéna, v. Finir, user, élimer. Se dit d'un
habit, du linge, d'un meuble; au fig. d'une personne usée
de vieillesse ou de travail. — C'est encore un technique:
particulier pour les filatures de soie. Chaque jour, à la fin
de la journée, on ramasse les derniers cocons à moitié filés
qui restent dans la bassine, pour les réunir le lendemain à
des cocons neufs ; mais le samedi il y aurait inconvénient
à les laisser croupir ainsi tout le dimanche dans leur humi-
dité. Pour y obvier, on travaille un peu plus longtemps le-
samedi, pour achever de filer ce qui reste de soie aux der-
niers cocons : c’est ce travail sur les cocons ainsi usés, et
sans en adjoindre de neufs, qu'on appelle Abéna. —
Voy. Avéna.
Abénaduros, s. f. pl. Reste de cocons mi-dévidés dont
il est parlé à l’article précédent. La soie qui en provient à
moins de force et de nerf, car ce sont les filaments inté-
rieurs et le dernier travail du ver arrivé à sa fin. Aussi
n'est-il pas prudent de dévider cette soie sur la flotte déjà
commencée; elle paraitrait à l'extérieur et donnerait à
l'œil mauvaise opinion de sa consistance. Pour y remédier
on prend une roue nouvelle et l’on entreprend une autre
flotte; alors la soie provenue des abénaduros se trouve en
dedans et passe ainsi inaperçue.
Abèou (xl'), adv. En danger, sur le de d'un précipice,
sous le coup d’un accident. — Aqud's bièn à l'abèou, cela
est fort exposé, bien en danger.
Dér. peut-être du lat. Läbes, chute, ruine; mais alors il
aurait dû être écrit Labèou; peut-être du lat. Abyssus,
abime, précipice.
Abéoura, v. Abreuver; mener à l’abreuvoir, faire boire
les bestiaux; combuger un vaisseau en bois, des futailles.
— La tèro és prou abéourado, la terre est assez humectée,
abreuvée.
Dér. de Béoure, boire.
Abéouradoù, s. =. Abreuvoir; auge à cochon ; auget de
cage. On dit proverbialement : Vaï tout soul à l'abéouradoù,
‘il n’est pas nécessaire de le mener boire, il sait boire tout
seul, en parlant d'un ivrogne. — Cassa à l'abéouradoù,
tendre des filets le long d’un ruisseau où vont boire les
oiseaux.
Abéouraje, s. m. Breuvage. — Il se dit de la pâtée
qu'on sert aux cochons; du breuvage mèlé de son et de
farine qu'on donne aux chevaux et aux vaches ; particuliè-
rement des breuvages médicaux qu'on fait avaler aux
animaux domestiques de toute sorte.
Abéoure, s. m. Toute sorte de boisson étendue d’eau,
mais dont le vin est la base, soit piquette, soit vin trempé;
abondance.
Abérlénquiè ou Amélan, s. m. Amelanchier, Cratægus
amelanchier, Linn. Arbrisseau de la fam. des Rosacées. Son
fruit se nomme Abérlénquo. — Voy. Amélan.
14 ABL
Le nom propre Abérlén tire de là son origine et sa signi-
fication.
Abérouni, v. Priver un mouton ou un agneau, lui
apprendre à manger dans la main, à suivre son maitre, à
obéir à sa voix. Il est dér. de Béroù, agneau privé, Robin-
mouton, le favori du berger.
Abérouni (s'), v. Se vermouler, se garnir de vers. Se
dit d'un fruit qui commence à être vermoulu, souvent à
force de maturité.
Dér. de Béroù, le ver blanc du fruit.
Abéssi, v. Émousser, tourner le morfil d’un instrument
tranchant. — La daïo s'abéssis quan arapo uno téoupinièiro,
la faux émousse son morfil en coupant la terre d'une tau-
pinière.
Abésti, v. Hébêter, abètir. — Lou trop manja rèn
abésti, trop manger abètit.
Un abésti ne signifie point un homme hébèté, mais un
homme grossier, brutal, sans mesure, sans convenance.
Dér. de Béstio, bète.
Abima, v. Friper, salir, perdre, gâter ; déchirer la peau.
— As abima ta vèsto das diménches, tu as fripé, sali ton habit
des dimanches. M'abimè, il me roua de coups. Mé sou
abima én loumban, je me suis moulu, tout déchiré en
tombant.
Dér. du français Abîmer, quoiqu'il n’ait aucun rapport
de signification avec lui. Celui-ci n’a jamais qu’un sens
figuré et elliptique; le premier n’est jamais qu’au positif et
au physique.
Abitaïa, v. Ravitailler, fournir des provisions de bouche.
Dér. de Bitaïo, victuaille.
Ablada, v. Emblaver une terre. — Aquélo tèro s'ablado
énd'un séstiè, cette lerre reçoit un setier de semence.
Dér. de Bla, blé.
Ablanqui, v. Rendre blanc, rendre propre, laver; passer
un blanc.
Ablasi, ido, adj. Usé, devenu souple par usure, avachi.
On le dit surtout du linge qui, pour avoir trop servi, pour
avoir été trop souvent blanchi, a perdu son apprêt, sa
crudité.
Dér. de Blaso, bavure des cocons. Cette substance, émi-
nemment souple et molasse, sert ici de terme de comparai-
son. C'est à tort, pensons-nous, que Sauvages veut donner
à cet adjectif une origine celtique, lorsque la déduction ci-
dessus est si simple et si naturelle. Quant au subs. blaso
lai-mème, il ne saurait être celtique; car à coup sûr les
Celtes ne connaissaient ni les vers à soie, ni la nomencla-
ture qui s'y rattache. D'ailleurs Sauvages ne cite pas le
radical qui pourrait à toute force, par une analogie quel-
conque, avoir fourni le mot à notre langue. Mais sans
remonter si haut, et ce sera encore une assez ancienne
descendance, Blaso ne viendrait-il pas du grec 61&, qui
signifie mou, lâche, paresseux? Sa parenté étymologique
avec Ablasi mous paraît au moins aussi certaine. —
Voy. Blasi.
ABR
Ablasiduro, s. f. État du linge ablasi.
Ablasiga, ». Meurtrir; accabler de lassitude; briser les
os. Au part. pass. seul employé : harassé, moulu de fatigue,
courbaturé. Activément il est inusité.
Mèmie dérivation qu’Ablasi, dont il n’est que la repro-
duction dans un sens figuré:
Ablasigaduro, s. f. Lassitude dans tous les membres,
courbature.
Ablouta, v. Joindre plusieurs sommes ensemble.
Dér. de Bto, bloc.
Abouchardi, ido, adj. Barbouillé, sali, au visage surtout.
Dér. de Bouchar.
Abouminable, blo, adj. Abominable.
Trad. du français.
Abouna, v. Abonner.
Trad. du français.
Abounamén, s. m»m. Abonnement.
Trad. du français.
Abounda, ». Rassasier, et non point abonder. Ce mot
est évidemment dérivé du français, quoique l’acception en
ait été restreinte. C'est seulement de l’analogie : ce qui
abonde par trop est rassasiant. — Mé soui abounda dé à
dire, je me suis lassé de lui dire.
Etym. du lat. ab, et de undo, regorger, déborder.
Aboundivou, adj. de tout genre. Rassasiant, qui gonfle
l'estomac, comme les mets trop gras. — Voy. Abounda:
Abouréla, vw. Traiter une chose comme le bourreau
traite un patient, c.-à.-d. la torturer, la briser, la déformer,
l’abimer.
Abourgna, ». Éborgner, rendre borfne, crever un œil,
ou lui faire grand mal; éborgner l’œilleton d’une greffe.
Dér. de Borgne, borgne.
Abouri, v. Détruire. — Abourè uno hisado, détruire
une nichée. Abour? un cam, défricher un chemin. Uno
vigno abourido, une vigne abandonnée et en friche. Aquélo
modo s’'abouris, cet usage se perd. Uno fénno abourido, une
femme fanée, ridée, qui a perdu ses formes et sa fraicheur.
Ce verbe paraît formé de Boure, bourgeon, bouton, et
de l’a privatif. On ravale un arbre et une plante en lui
enlevant ses boutons à mesure qu’ils paraissent. Les autres
acceptions ne sont qu’une extension de celle-là, primitive-
ment tirée de l’agriculture.
Abouscassi (s’), v. Dégénérer, s’abâtardir; au fig. se
ratatiner, se négliger dans sa tenue et dans son allure.
Dér. de Bouscas, bâtard, sauvageon.
Abraqua, v. Braquer un canon, une lunette, même les
yeux.
Trad. du français. L’a d’abraqua est purement explétif.
Abrasa, v. Braser du fer ou du cuivre; mettre de la
braise sur un potager, dans un réchaud, dans les sabots.
Cette chaussure, ainsi échauffée quelques secondes, con-
serve longtemps sa chaleur, quoiqu'on aille dans la boue
ou la neige. Cet usage est fort suivi chez les Cévenols.
Dér. de Braso, braise.
—
Cri des revendeurs de rue, lorsqu'il ne leur reste que peu
de marchandise. A l'acabado! Cri de victoire des fileuses
de soie à la fin de la saison de la filature. Ce cri multiple
et poussé de toute la force des poumons se fait entendre
pendant les trois derniers jours de la campagne. Il est
_ accompagné d’une chanson de circonstance fort ancienne,
| ACA
Abrasaïre ou Estabrasa, s. m. Chaudronnier ambulant,
qui va souder, raccommoder le vieux cuivre à domicile, en
s'annonçant par ce cri : Pétroulérou-éstabrasa! Cassérolo
éstama! Cette phrase est sans doute un mélange corrompu
du languedocien et de l'italien calabrais; car la plupart de
ces industriels étaient dans l'origine des Napolitains et
avaient le costume et le chapeau conique des lazzaroni.
Abrasqua, v. Ebrancher; rompre les branches d’un
arbre en les tirant du bas. — Zous fruchès s'abrasquoù,
les arbres rompent sous le poids de leurs fruits.
Dér. de Branquo, branche.
Abrasque, quo, ou Abrasquou, adj. m. f., de tout
genre. Cassant, fragile, qui s'ébranche facilement. Le chà-
taignier principalement casse au moindre effort de l’homme
ou du vent.
Abri, s.m. Abri. Ne se dit que d’une exposition à l'abri
du vent ou des gelées, et non au figuré.
Dér. du lat. Apricus.
dit : Mar douroùs, abriou plèjoùs, rèndou lou péisan our-
guioùs, mars venteux, avril pluvieux, rendent le paysan
_orgueilleux. Aou més d’abriou t'aldoujeiras pas d'un fiou,
dou més dé maï fai cé qué lé plaï, amaï éncaro noun saï,
au mois d'avril tu ne t'allégeras pas d’un fil, au mois de
mai fais ce qui te plait, et je ne sais trop encore. Bon
conseil hygiénique, que les variations de température dans
ces deux mois justifient souvent. — Péïssoù d'abriou,
poisson d'avril, attrape.
Etym. du lat. Aprilis.
Abriva, v: Faire manger un poisson d'avril, attraper.
Abrouqui (s’), v. Se rabougrir, végéter maigrement, se
dessécher. Se dit d'un arbre brouté ou trop souvent ravalé,
qui pousse faiblement. — Voy. s'Abartassi.
Dér. de Broquo, büche, branche sèche.
Abrouta (s’), v. Avorter. Se dit en parlant des animaux.
Du lat. Abortus, part. pass. d’Aboriri, mème significat.
Abusa, v. Abuser de... Traduit du français. Ce mot ne
s'emploie jamais vis-à-vis d'un régime direct; ainsi on ne
dit pas : Abusa qudouquàs, pour tromper, duper quelqu'un ;
mais abusas dé iéou, Vous abusez de moi.
Açal interj. Oh çà! Or çà! — Açà véguén, cà, voyons.
Açà vénès? oh çà! venez-vous ?
Acaba, v. Achever, finir; se ruiner. — Es acaba, il est
achevé; sa santé est usée; il ne peut plus vivre longtemps;
ou bien : c’est un homme ruiné. Aquél co l'acabè, ce fut
r
Je dernier coup qui l'acheva. Acaba qué siègue, sitôt fini,
pas plus tôt terminé, une fois ceci achevé.
Acabado, s. f. Fin, terme. — A l’acabado! à mon reste!
Abriou, s. m. Avril, 4m mois de l’année. Le proverbe”
ACA 15
et à chaque refrain il recommence à se produire par un
crescendo progressif.
Acabaïre, ro, adj. Prodigue, dissipateur; un mange-
tout.
Dér. de Acaba.
Acabassi (s’), v. Se biser, se flétrir par l’âge et le tra-
vail. 11 ne se dit que des personnes, et surlout des femmes
à qui quelques années de mariage, des couches fréquentes
et un allaitement trop prolongé ont enlevé leur fraicheur,
leur agrément et le goùt de la toilette.
Dér. de Cabas, cabas. On appelle cabas, au fig., une
femme malpropre et mal fagotée.
Acagnarda, v. Abriler une plante, l'exposer au soleil,
à l'abri de la bise. — S'acagnarda, prendre le soleil dans un
angle de mur, comme font les vieillards et les mendiants,
qui n'ont pas d'autre feu que celui du ciel. Au fig. s'aca-
gnarder, s'acoquiner, s’accoutumer à vivre dans la fai-
néantise.
Dér. de Cagnar, abri exposé au soleil.
Acalouna, v. Échauffer, réchauffer. — Aquéste tén
s'acalouno pas gaïre, ce temps ne se radoucit guère.
Dér. de Caloù, chaleur.
Acamina, v. Mettre sur la voie; mettre une affaire en
train ; mettre en fuite, chasser. S’acamina, v. r. Se mettre
en route, se diriger vers, s’avancer.
Dér. de Cami, chemin.
Acampa, v. Ramasser, cueillir; prendre, gagner ; au fig.
économiser, entasser. — Abcéder, aboutir, en parlant d’un
apostume qui travaille, qui se forme, qui suppure. —
Acampa dé forços, reprendre des forces après une maladie.
Acampa d'apéti, gagner de l’appétit. Acampa dé sén, pren-
dre de la raison. — Moun dé acampo, mon doigt apostume,
il a un mal d'aventure.
Dér. de Camp, vieux mot : champ.
Acampaduro, s. f. Mal d'aventure, apostume.
Acampaïire, ro, adj. Ramasseur; au fig. économe, thé-
sauriseur. Le proverbe dit : À bon acampaïre bon éscam-
païre, à père avare enfant prodigue.
Acampaje, s. m. Action de ramasser, de cueillir; cueil-
lette.
Açan ou Acën, s. m. Accent, accentuation.
La première forme Agçan est admise par l'usage : elle se
justifie par son étym. du lai. ad cantus, que rappelle sa
consonnance. La seconde Acén a reçu ses lettres de natu-
ralisation de Sauvages, et dérive aussi du lat. accinere,
chanter, qui a donné accentus. Les deux mots sont régu-
liers et également employés. — Voy. Acén.
Acanala, v. Diriger l'eau par un canal ou un bief. Une
rivière, un cours d’eau quelconque sont acanalas, soit
quand on les canalise, soit même lorsqu'ils se sont tracés
un lit profond et droit.
Dér. du mot suivant. .
Acanâou, s. f. Chéneau de toiture; toute sorte de con-
duit d’eau en bois, en fer ou en poterie, pourvu que ce soit
16 ACA :
à ciel ouvert; lorsqu'ils sont ou en forme de tube, ou sou-
terrains, on les nomme Bournèou, bourneau. — Faïre
l'acandou, loc. prvb. pour dire : s'entendre comme lar-
rons en foire, tricher au jeu en s’entendant frauduleuse-
ment avec l’un de ses adversaires pour duper son partner ;
signifie encore : ménager la chèvre et le chou; nager entre
deux eaux; crier tour à tour vive le roi, vive la ligue;
promettre à celui-là ce qu'on a promis à celui-ci, et
tromper au moins l’un des deux; car c’est le rôle de celui
qui trompe tout le monde, et à qui, par conséquent, per-
sonne ne peut se fier. L’'Acandou, le chéneau, comme
nous venons de le définir, est le conduit, primitivement en
bois et ensuite en fer-blanc, placé horizontalement au bord
des toits pour en recevoir l’eau, qui, par de plus petits
tuyaux appelés gouttières ou gargouilles, tombait de là sur
le pavé, avant que les règlements de la police urbaine
eussent prescrit des descentes appliquées contre les murs
des maisons pour amener l'eau jusqu'au niveau du sol.
C'est par ces gouttières assez multipliées que le chénean
versait sa provision sur tous les passants, également et
sans faire de jaloux. Dispensateur généreux d’une chose
qui ne lui coûtait rien et ne valait pas davantage, est-il
devenu le type de notre homme qui fait l’Acandou, ou
comme l’Acandou, en prodiguant ses promesses, ses pro-
testations, marchandise de même valeur, qui n’est aussi
que de l’eau claire? — Tout cela n’est pas certain, peut-
être même n’est pas très-probable; mais, à coup sûr, ce
n’est pas impossible.
Acances, s.m. pl. Espace qui reste sans être labouré dans
un champ, aux deux extrémités de la ligne des sillons, où
tourne la charrue. A la fin du labour, on reprend toutes ces
lisières par une nouvelle direction perpendiculaire à la ligne
des sillons : c’est la dernière opération que subit un champ.
Par extension, on donne au fig. ce même nom à la termi-
naison d’une foule de choses. — Sèn as acances déou carémo,
nous sommes à la fin du carème. Souï as acances dé moun
vi, je suis au fond de mon tonneau.
Serait-il dérivé du lat. ad calces, aux pieds, au fond?
Acantouna, v. Tirer quelqu'un à l'écart, l’acculer dans
un coin; écoinsonner un mur, y placer un écoinson, la
pierre angulaire d'encoignure. — S'acantouna, se réfugier
dans un coin, se blottir au coin du feu.
Dér. de Cantoù, coin.
Acâou, s. m. Chaux; pierre calcaire cuite ou calcinée
dans un four à chaux. En chimie, protoxide de calcium. —
On la distingue en Acdou grasso, chaux grasse, et Acdou
maïgro, chaux maigre. La première est la chaux pure,
sans argile, acide carbonique et chaux ; elle foisonne par
l'immersion dans l’eau. Le mortier à chaux grasse se
lessive et se détruit dans l'eau. La seconde est la chaux
argileuse ou siliceuse, qui foisonne peu ou pas. Celle
qu'on appelle chaux hydraulique, qui est une variété de la
chaux maigre, contenant de 8 à 20 pour °/, d'argile, fait
prise dans l’eau : le mortier fait avec cette chaux prend
ACE
de la consistance lorsqu'il est immergé. Les chaux maigres
de 0 à 6 pour °/, d'argile, sont non hydrauliques; de 6 ou
8 à 20 pour °/, d'argile, elles sont hydrauliques; de 20 à
26 pour °/ elles forment à elles seules, sans besoin de
sable, le mortier hydraulique connu sous le nom de ciment
romain. : |
La chaux de la Blaquière, aux environs d'Alais, est
renommée. Celles des Tavernes, de Vézenobres et de Ners
ont aussi des qualités remarquables. — Déstrémpa d'acdou,
éteindre et détremper de la chaux. Pasta d’acdou, corroyer
de la chaux, la mêler avec du sable, à l’aide du rabot,
pasto-mourtiè. ;
Dér. du lat. Calx, Caleis. Notre dialecte a ajouté un a
initial, purement explétif et euphonique. C’est ce qui fait
sans doute que dans ce pays, bien des personnes, en par-
lant français, ou qui s’en piquent du moins, disent couram-
ment au plur. les achaux, comme elles font pour Les acôtés,
les côtés. Aucuns vont même jusqu'à les apilastres, les
-achéneaux, les amuriers, les pilastres, les chéneaux, les
müriers, etc.
Acapara, v. Accaparer, monopoliser.
Trad. du français.
Acaparur, urdo, adj: m. et f. Accapareur.
Trad. du français.
Acarcavéli, ido, adj. m. et f. Cassé, ratatiné, branlant
de vieillesse ou de maigreur. Il se dit principalement du
bois desséché et d’un meuble branlant dans ses jointures.
Dér. de Carcavèl, qu'on dit en certaines localités pour
Cascavèl, par terme de comparaison avec le brandillement
bruyant de cet instrument. — Voy. Cascavèl.
Acarnassi, v. Habituer à manger de la chair, rendre
carnassier.
Dér. de Car, chair. |
Acata, v. Couvrir; joncher. Au fig. Acata, part. pass.,
caché, dissimulé, sournois.
Acatage, s. m. Toute sorte de couvertures de lit.
Acén ou Açan, s. m. Accent : accent tonique, flexion
de la voix sur certaine syllabe des mots; prononciation,
accentuation. Se dit aussi pour accent grammatical, signe
graphique qui affecte certaines voyelles.
Notre langue n’a qu’un substantif pour exprimer Mes
deux acceptions très-différentes du mot Acér, dont lune
désigne la prononciation elle-même, et l’autre un signe
accidentel et variable destiné à modifier le son d'une
voyelle. Elle n’a pas accordé droit de cité à ces qualifi-
catifs, inventés par les grammairiens, d’accent rationnel,
oratoire, logique, pathétique et autres. Mais, pour faire de
tout cela comme le bourgeois-gentilhomme de la prose,
sans le savoir, elle ne se reconnait pas moins si redevable
à l'accent tonique et à l’accent grammatical, que nous ne
pouvons nous dispenser de leur ouvrir un crédit particulier
proportionné à leur importance.
Ce qu’on doit entendre par accent tonique, notre défini-
tion, peut-être trop concise, a essayé de l'exprimer en un
ACE
mot. Qu'on nous permette d'emprunter à la préface des
Castagnados un commentaire qui la complète.
: La Fare-Alais dit de la langue d'Oc « qu'elle est une
musique comme l'italien, plus que lui peut-être; c’est du
. moins une mélopée. Ses syllabes sont des notes, ses
phrases des motifs harmoniques; son accentuation, si
variée, est une véritable gamme, et ses diphthongues, ses
triphthongues, si fréquentes, si multiples, forment des
syncopes chromatisées d’une mélodieuse expression. Si
cette langue a le larynx limpide et métallique, elle a
aussi, et par-dessus tout, l'oreille chatouilleuse; et sa
susceptibilité à cet égard rappelle ce sybarite que le pli
d'une rose empêchait de dormir. »
On ne saurait mieux dire. C'est bien la, en effet, l'origi-
nalité et le caractère dominant de notre langue d'Oc, que
cette prosodie musicale des mots et des syllabes, qui ne
l'abandonne jamais, qu'elle garde en parlant les autres
langues, et qui est dans sa nature. Et cela n’est autre
chose que son accent propre et l'accent tonique, que ce
culte de la modulatioh, qui lui est inspiré par l'éclat de
ses voyelles, qui lui fait éviter le redoublement des con-
sonnes et condamner, même dans la plus humble prose, le
choc de deux sons pareils; que ce sentiment natif de
l'euphonie, d'où lui viennent ses délicatesses exquises
de construction et de vocalisation. L'accent tonique, ainsi
compris, est de toutes les langues; mais il est, au plus haut
degré, l'essence, l’Ame et le génie particulier des idiomes
méridionaux. Pour eux, qui chantent d'instinct, qui
relèvent plutôt du solfége que de la grammaire, l'har-
monie est la loi souveraine. La langue d'Oc, comme l'ita-
lien et l'espagnol, ses sœurs du même lit, en reconnaissent
si bien la puissance, que la prononciation est devenue la
raison logique de leur orthographe. 11 le fallait bien. Le
sens d’un mot dépend souvent, — on va le voir par des
exemples, — de la manière dont il est accentué : dès lors,
écrire comme on prononce et comme on entend, et par
voie de conséquence, ne prononcer que comme on écrit et
que ce qui est écrit, c'est-à-dire conformer l’écriture à la
parole, est une nécessité de nos dialectes; car l'unique
moyen de leur conserver la clarté, ta grâce, l'intelligence,
* consiste à rapprocher l'orthographe de la pensée, à lier la
forme des mots avec leur signification. Dès lors, toutes les
lettres devant ètre articulées avec le son qu’elles expri-
ment, il n’est besoin de représenter à l'œil que ce qui doit
être entendu par l'oreille. |
Les Grecs et les Latins avaient la quantité, qui mesurait
la durée des sons : les langues modernes ont l'accent
tonique, c’est-à-dire l'élévation ou la flexion de la voix
sur chaque mot, presque sur chaque syllabe. À Rome,
_ rapporte Cicéron, le peuple se montrait très-sensible à
l'observation de la mesure. « Tout le théâtre, dit-il, se
soulève et.pousse des cris, si une syllabe est trop brève
ou trop longue, bien que la foule ne connaisse ni pieds
ni rhythme, et qu'elle ne sache point ce qui blesse son
.
ACE 17
oreille, ni pourquoi ni en quoi elle est offensée : Theatra
tota exclamant, si fuit una syllaba brevior aut longior, nec
verd multitudo pedes novit nec ullos numeros tenet, nec
illud quod offendit aut cur aut in quo offendat intelligit. »
La langue d'Oc a hérité de sa mère latine d'une sensibilité
pour le moins aussi vive. Dans sa vocalisation, qu'une
ronde soit substituée à une noire, elle se sent froissée;
qu'une note qui doit être éclatante soit convertie en un.
son sourd, qu'une voyelle forte s'échappe comme une
muette, elle s'irrite de la transposition; elle est blessée de
la cadence fausse; pour elle le sens se déplace, se dérobe,
se dénature aussitôt. Il n'y a pas ici cependant non plus
d'autre juge que l'oreille. Judicium ipsa natura in auribus
nostris collocavit, dit toujours Cicéron; mais l'accent va
de soi, sans théorie et sans grammaire; il est dans l’air et
dans la voix; notre parler est ainsi fait. 11 faut l'accepter
tel quel, se soumettre à ‘ses exigences, ou renoncer à se
faire comprendre. C'est de cette accentuation que nous
essayons de donner une idée et de poser les principes.
I n'existe pas de langue qui n'ait son système propre,
individuel d’intonations, de, consonnances, dépendant de la
combinaison, du rapprochement et de la sonorité de ses .
voyelles. Pour notre langue d'Oc, rien n'est plus essentiel
que de connaitre la clef de sa notation.
Le premier point, et le plus délicat, est de préciser l’in-
flexion, de déterminer le degré d'élévation ou d’abaisse-
ment de la voix, qui constitue l'accent tonique. Dans une
phrase écrite, tous les mots sont séparés par un intervalle;
il en doit être de même dans la phrase parlée. Chaque mot
a sa syllabe tonique, et n'en a qu’une, la syllabe finale,
sur laquelle, par une sorte d’insistance, il se fait un temps
d’arrêt imperceptible, cependant appréciable, une modu-
lation. distincte, qui peut être classée dans l'échelle des
sons, insensible presque, mais qui, en appuyant, est mise
en sâillie. Une seule condition est imposée à cette dernière
syllabe, c’est qu’elle soit de force à supporter l'accent, ce
qui n'arrive jamais avec une muette, une féminine, une
faible, sur laquelle la voix ne s'arrête point. C'est pour-
quoi la tenue ne se fait qué sur la finale des mots, quand
cette syllabe est masculine, à consonnance pleine et grave;
ou sur la pénultième, quand le mot se termine par une
féminine, faible ou muette.
Cette règle est le fondement de la prononciation du lan-
guedocien : son corollaire se trouve dans la justesse exacte
du son attaché à chaque syllabe, représenté par une
voyelle. Notre idiome, pour s'écrire avec le mème alphabet
que le français, qui fut l'alphabet latin, ne donne pas
cependant à toutes les lettres le son qu'elles avaient en
latin, non plus que celui qu'elles ont en français. A chacun
son lot. La langue d'Oc a des sons qui lui appartiennent
en propre, des alliances de lettres qu'elle affectionne, des
cadences qu’elle recherche; elle ne veut pas en être dépos-
sédée, et elle ne se livre qu'à ceux qui lui sont fidèles; à
eux seuls elle consent à révéler sa grâce, sa douceur, sa
3
18 ACE
souplesse, son énergie, ses beautés entières, La variété de.
ses intonations, la. sonorité de. ses, voyelles, rendent. sa.pros.
nonciation vivement, acçentuée;, et surtout, elle, diffère,
essentiellement, du français, qui cultive les, consonnances,
œmuettes et sourdes, et qui arrive à, de, grands effets, par des:
tout, contraires, Aussi, sur ce chapitre de l'accent,
pas d'aceord à établir; point, de rapprochement entre deux;
pôles. opposés. Quand les. puristes. d'Ontre Loire, auront,
traité dédaigneusement. de gascons. nos, dialectes méridio-
naux, et que ceux-ci auront répliqué par l’épithète corresr
pondante de, franchiman., la séparation des. deux, langues,
n'en restera que plus: accusée, et,ilen sera. mieux; prouvé.
encore qu'une transposition de, l’une à, l’autre est; impos-
sible. La part faite à chacune, elles garderont chacune leur
mérite, et leur accent, et leur caractère, et leur génie: et
leurs chefs-d'œuvre n’y perdront rien, Mais essayer de
réduire le languedocien, à, la. vocalisation française, de le
prononcer à la française, ne serait que l’assourdir, l'énerver,
le défigarer, et. arriver à la cacophonie la plus ridicule. et
la, plus inintelligible, L'emploi, d’un alphabet. commun, les
babitudes d’épellation inçulquées par l'enseignement, sco-
laire peuvent être des. causes, fréquentes d'erreur et d’hési-
‘tation à la lecture ou à l'écriture; les plus familiarisés avec
nos idiomes n’y échapperont pas toujours. Un Dictionnaire
languedoeien ne peut donc trop insister sur ce, chapitre
si essentiel de l’accentuation, qui fait. comprendre son
orthographe et facilite l'étude de.sa grammaire. C’est, pour
cela que nous, résumons, mème.en nous.exposant à quel-
ques répétitions, nos remarques, générales sun la, valeur
spécifique des voyelles et sur la prononciation:
L'accent tonique; avons-nous dit, est. une simple flexion
de la voix; il n’a qu'une place dans chaque mot, la der-
nière syllabe, si elle est masculine; l’avant-dernière, si le
mot est terminé par une féminine. C'est, une pure-nuance
euphonique, une modulation musicale, indépendante de
tout signe qui l'exprime, mais qui se fait toujours sentir,
Ce qu’on appelle l'accent grammatical est au, contraire un
signe apparent, visible, posé, sur une voyelle el destiné
seulement à en, modifier le son. Comme il se- borne: à indi-
quer la qualité particulière d’un son, il.se place partout où
il rencontre la. voyelle à accentuer, et, peut par suite. se
trouver indifféremment au commencement, au milieu. ou. à
la fin d'un mot; mais à cette dernière position, il rend
tonique la voyelle qu'il touche, en.piquant-sa, consonnance;
ILest de trois sortes : aigu, grave et circonflexe, comme en
français: Ce dernier ne.se, place. que sur les voyelles a, à, 0,
quand elles composent des diph: ou des triph., pour-mar-
quer seulement la voix dominante.
Le languedocien a, cinq voyelles simples, a,.e; à, 0, us et
une, voyelle. composée, ou, qui regrette. toujours d'être
obligée d'employer deux lettres, pour un son unique et
simple. Cette indication suffit, à notre sujet, sans entrer.
dans les subdivisions.et distincetions.de classes.
Toutes, les, letires et, les! voyelles, se. prononcent et
ACE:
: sonnent. à. la, méthode, ancienne. de l'alphabet où suivant:
l'accent graphique: qu’elles: portent. : c'est pourquoi, dans
l'intérieur d’un mot, polysyllabique, il ne peut exister de
syllabe muette, ressemblant à, le. muet français. modernes:
À la fin des: mots seulement se- trouvent les: syllabes:
muettes;. et là, règle. générale, toute. voyelle finale, à Fexs
ception.del’& et de l’u, est-faible, sourde, féminine, si-eller
n'est pas.accentuée, ou si elle est.suivie d'unes.formant: le
pluriel; ce qui signifie que la. voix. doit. appuyer: sur læ&
syllabe précédente, la pénultième,. que nous ‘accentuonso
exprès ici. Ex. : râbe, pl. râbes ; image, pl. imàgesz rèbles.
pl. rébles; diménche, pl: diménches; chàri, pli. chèrisiss
sèti, pl. sètis; bècho, pl. bèchos; ésodlo, pl. éscdlos: oùs=.
quou, pl, câsquous; flèscou, pl. flâscous basségow, pk. bas-
ségous:
Dans notre dialecte, les voyelles. finalessa-et.w.ne sont, :
jamais. muettes : elles peuvent donc. supporter l'économie:
de l'accent grammatical, sans en être appauvries; ni fémi,
nisées, Cependant, par cela que leur position les:rend tonis.
ques, le repos: de: la: voix, qui se. fait alors sur-elles, semlile,
les élevér d'un. quart de ton, Cette nuance méritait. d'être
notée; elle est sensible, même dans les polysyllabes com--
posés de lettres similaires, comme: acaba;, davala; etc., dont:
le dernier a est un peu plus;éclatant que les premiers. La;
prosodie latine du, Gradus ad. Parnassum, classerait ces)
mots parmi les anapestes, deux brèves-.et une longue; des
mème qu'elle aurait fait des iambes de mama oude chur
chu, une brève et une longue.
Dans plusieurs localités de l'Hérault et au midi d’Alais;.
sans dépasser cependant le canton de Vézénobres, l'a final
est muet dans les terminaisons caractéristiques du-féminin.
des substantifs et adjectifs, comme rosa, musæ, bona,
nova, etc. On le prononce comme un: a adouci, d’un: son:
intermédiaire. entre. l’e.et lo. Cette variété dialectique est:
une réminiscence très-rapprochée: du latin. Nous ne pou
vons l’adopter ici; car pour la mêmedésinencenousentèn-
dons o, nous prononçons o,.nous avons, düécrire partout: o.
naturel; et nous ne pensons pas que l'étymologie, em:
souffre.
L'e languedocien. a trois sons! distincts: Surmonté. des
l'accent aigu, ik se prononce. comme: l'é. fermé françaiss
dans été, bonté ; avec l'accent; grave, comme l’e ouvert dans:
accès, succès; privé.-de tout: accent,, il ne se présente.qu'à!
la fin d’un mot, et alors: il est muet, naturel, nom point à:
la manière de le muet français, mais comme:l'e finabitalien:
de rose, dare; ù
La prononciation de l'i ne varie: que dusfort au faible,
du, sonore au doux, du, long aw bref; mais- une certaines
acuité se, fait toujours plus ow moins: sentir: La voyelles
est sonore, naturelle entre deux consonnes: dindo; nouns
dina,, dificinle, avec, une légère. insistance quand elle-est :
tonique à la pénultième ; cependant.nous ne: lui, accordonse
pas l'accent : c'est: affaire. de quantité. Nous le: lui résers
vons, au contraire, pour’ les cas où il, pourrait: y: avoir:
ACE
æonfusion , à la ‘fin des-mots "par exemple, comme touph,
sou), éndévént, diméni + à il 18e détache Elair et nt.
L'accent grave-indique alors que le son se renforée ; tandis
que! li final non accentué glisse et murmure faiblement, la
Noix appuyant'sur mére de fab Ex. : chàri, db,
0H, témiéribri, ‘pur gätori.
Nous employons Msctuteiteofiexs pour la diphthongue
fou, et il marque -l'insistänee ‘de h voix:se prolongeant :
caliou, arpiou, réligiou.
Le tréma sur li estun Signe’ particulier de notre accen-
tuation orthographique. Sa fonction est des plus impor-
tantés. Quand il suit une consonne ét précéde urie voyelle,
le tréma sur l'5 a pour but de le faire sentir plus longue-
ment, et d'en faire une syllabe séparée de la voyelle subsé-
quente, comme dans fo, bio, müo, en deux sylläbes. Alors
qu'il est placé après une voyellé, êt suivi d’une consonne,
ou à Ja fin d’un mot, T'à trématé est doux et faible; le plus
souvent il forme la diphthongue. Ex. : véire, foire, sou,
rèi, galoï, pantaï. Entre deux voyelles, il rémplace à peu
près en certains cas 7 mouillés français, sans communiquer
à celle qui le suit la flexion labiale, mais seulement en la
‘mouillant; et toujours il empêche la cohésion avec la
voyelle précédente, ainsi dans païo, daïo, joïo, bluïo, puño;
de telle sorte qu'il devient le siége d'une séparation de
syllabes, ou ce qui revient au mème, qu'il s'oppose à la
formation d’une diphthongue ou d’une triphthongue, que,
sans Jui, le rapprochément des voyelles amènerait, comme
dans les mots presque exclusivement composés de voyelles,
vidouïè, aïé, cuidtré, rouïdoume. Pour scander ces mots et
parvenir à la prononciation juste, le concours de l'& tréma,
qui est séparatif entre voyelles ou diphthongues dans le
mot, est un des signes les plus essentiels à bien observer.
Nous reviendrons sur son rôle très-important.
L'o et l'ou, voyelles, sont soumises aux mêmes règles.
Le défaut d’accent, quand elles sont finales, indique
qu’elles doivent s'échapper sans articulation, qu’elles
jouent dans le mot à peu près le mème rôle que l’e muet
français, caractérisant le féminin des substantifs, et que le
point d'appui de la voix se fait sur la pénultième. Ex. :
fango, manado, bèlo, cénténo, babino, carosso, cagnoto,
figuro, davalou, révènou, basségou, manipou, donou, tutou.
Surmontés de l'accent grave, à et où sonnent clairement :
eselà, cachd, grélè, vértigo; lavadoù, agasso, loubatoù;
méchoùs, vérinoùs. |
Répétons encore que ow entre deux consonnes ou près
d'une voyelle, avec ou sañs accent, ne compte jaimais que
pour une wvoyelle, comme :s'il n'y avait qu'une seule
lettre.
-“AW'agencement et à la liaison desses voyelles, la langue
d'Oc semble avoir mis avec complaisance tous les raffine-
ments de son génie mélodique. Parmi es’langues de l'Eu-
rope, elleest seule à posséder dans Sa vocalisation ces
trilles brillants-qui ne produisent qu'un accord unique,
comme trois cordes de harpe touchées à ‘la fois, vibrant
ACE EL)
dans la même tadonce. Le français se conténite de réttiir
deux :sôns; le languedoeien ‘rassemble ‘dans tünie sylläbé
deux, trois et jusqu'à quatre sons distincts. Ses diphthôn-
guesse multiplient à profusion et:se présentent unics 6%
séparées, ‘au commencement, dans l'iitérieur où à la ‘fin
des mots. Ses triphthongues si ériginales stiveñit la mère
marche el:sont presque aussi fréquentés : les tétraphithôn-
gues ‘apparaissent dans les vocables les plus usuéls. Cepén-
dant l'orthographe, l'accentuation et la prononciation ‘d8s
voyelles ne changent point parce qu'elles ‘se “rencontrent
doubles, triples où quadruplès/ à former, dans un ‘môt, trié
seule-syllabe composée d'autant de sons en une souleéris-
sion de voix. Si «compliquée que puisse être la vomibi-
naison, le premier et le plus essentiel de Jenrs caractères
est de ne faire jamais qu’un temps, un pied, dirait-on en
versification : la pluralité dans l'unité.
Làcest la pierre de touche de cette ‘sorte de syllabes.
C'est ‘pourquoi nous ‘nous refusons à ranger parmi les
diphthongues les formes ua, 6, ui, uo sollicitées par les
consonnes get 4, comme abrasqua, cargué, blanqué, quin-
cha, quicha, aqud : ici l’u ne parait que comme explétif ;
c'est un parasite dont l'emploi rénd le g dur : il n'y a
pas dualité de consonnance; après ces deux léttres, lu
ne se fait pas entendre : précédé de toute autre il doit
sonner : apuïa ; euté, etc, où bien, én diphthongue,
éstiià, juël, ‘éte.
Par ‘ces exemples on a pu voir qu'une voyélle suivie
d'une autre voyelle ne fait pas nécessairement alliarice
avec elle. En dehors des éléments dont nous allons donner
le tableau, nous ne connaissons pas d'assemblages de lettrés
qui puissent en réalité former des diphthongues ou des
tiphthongues. Mais la langue d'Oc aime trop à rapprocher
ses voyelles, à les multiplier, à nuancer de tons divers des
combinaisons identiques ; sa vocalisation seule donne sou-
vent à sës mots un caractère et un sens trop différents,
pour n'avoir pas une notation qui réponde à ce besoin, qüi
représente exactement son euphonie, ses accords, le rhythme
de ses gammes syllabiques.
Le français se préoccupe moins d'éviter une confusion
qui le rend si difficile à bien prononcer : ‘sa prose et sa
poésie ont des ‘différences de quantité inéxplicables dans
lés terminaisons en ion, teur, ieuæ, par ex, qui reviennent
sans cesse et qui font tantôt des monosyllabes diphthongues,
tantôt doivent se scander en deux témps : de ce nombre,
avec ‘une infinité d'autres mots, fier, adj. d'un seul jet,
et fier, verbe, dissyllabe. Cependant rien n'avertit de-ces
changements. Notre orthographe au contraire a voulu-les
indiquer au moyen de li tréma, qui disjoint les syllabes,
comme fo, fille, et jiè, feu, mio, amie, mi, muid, pio,
pillage, piè, dindon, ete.
. Un signe spécial était indispensable; car le languedocién
n’a pas le droit de prendre les licences du français. Ina
ni grammaire, ni académie pour commenter ét justifier ses
anomalies. Il n’admet ‘pas de lettres ‘inutiles, mon arti-
20 ACE
culées, se prononçant autrement qu'elles ne sont riotées ;
il professe en principe que sa prononciation est toujours
vraie, réglée sur la valeur propre des voyelles ; ce qui
ne l'empêche pas d'accumuler volontiers les accords
sonores, de mêler ses diphthongues et ses triphthongues
dans le même mot. Dès lors il lui est imposé plus
strictement qu'au français d'avoir un système d’ortho-
graphe qui mette en pleine lumière la différence d’accen-
tuation de toutes les lettres et de lettres identiques, et
la séparation des membres d'un même mot où se trouvent
surtout des voyelles avec des diphthongues. Par la plus
fngénieuse disposition, qui dénote la perfection du senti-
ment mélodique de la langue d'Oc, les complications les
plus ardues deviennent simples et faciles avec les accents
grammaticaux et les à tréma.
L'accent modifie le son : il l'affaiblit ou le renforce ;
mais il ne transforme pas la voyelle. Le tréma réservé à
lé ne lui fait rien perdre de sa qualité naturelle; mais il
V'isole en quelque sorte quand il est placé entre deux
voyelles, comme pa-io, ma-io, pu-io, et il mouille celle qui
la suit, comme fait à peu près & en français.
Par son interposition il signale, dans l’intérieur d’un mot,
la séparation de deux diphthongues, et adoucit un choc
trop rude ; et il est remarquable que li se trouve au com-
mencement de toutes les triphthongues : ce qui nous
semble l'indice de la délicatesse d’acoustique de notre
langue, et la preuve d’un sentiment harmonique très-
étudié. Ainsi, quand l'i ne fait que se lier aux autres
voyelles dans la triphthongue il garde sa forme naturelle,
midou, monosyllabe, sidoume, deux syllabes; mais
alors qu'il suit une voyelle ou une diphthongue, ou
qu'il termine uné diphthongue ou triphthongue, il prend
le tréma : rou-idumé, cadiëiro, risou-iiro, vidou-iè,
viè-ié, offrent des exemples des positions les plus difi-
ciles et démontrent le fonctionnement de l’i simple et
de li tréma dans l’agglutination et dans la division des
syllabes.
Notre dialecte possède trois diphthongues qu'on peut
appeler féminines, et qui pour cela sont dénuées de tout
accent. Cette variété a son importance dans la versification.
Leur prononciation d’ailleurs se conforme aux règles qui
précèdent : le tréma, quand il est nécessaire, ne change
rien à leur nature.
Exemples : en ie, véndie, rèndie, moïe, ouïe; en io,
glorio, bèstio, joïo, fuïo ; en iou, énténdiou, maïou, tuïou,
moiou, ouiou.
La finale diphthonguée de ces mots s'écoule comme une
muette, et comme elle n’est comptée que pour une syllabe
qui est féminine, l’insistance de la voix s'établit par l'accent
tonique sur la pénultième. Ces différences de sons se
trouveront indiquées à leur place. Voy. lettre I et Iou,
diph.
Pour bien comprendre l'effet que produisent les accents,
il n'y a qu’à comparer à l'oreille les sons muets, purement
ACE
alphabétiques, avec ceux donnés par les mêmes diphthongues
accentuées. Dans la diphthongue masculine, et dans toutes
les triphthongues, se trouve toujours une voyelle domi-
nante, celle qui est le pivot de l'intonation sur laquelle se
fait la tenue; les coagulées se font entendre, mais coulent
rapidement : dans les diphthongues féminines, la voix, en
réunissant le double son, égalise les voyelles sans appuyer
plus sur la première que sur la seconde. *
DIPHTHONGUES.
aï.— Maï, plus........... Esclaïre, éclair.
âou. — Nàèou, auge........ Lâouso, dalle.
àX:— RL, loi 528 ... Pèïiro, pierre.
éï.— Créï, croissance...... Véire, verre.
èou.— Lèou, poumon. ..... Cisèou, ciseaux.
éou.— Béou, à boit........ Téoule, tuile.
ia. — Diable, diable... ... Aparia, accoupler .
ie. — Véndie, que je vende. Moïe, que je mouille.
iè. — Miè, moitié,........ Ariè, arrière.
tie ANG el cas ut Bèstiéto, petite bêle.
io. — Glorio, gloire....... Bèstio, bête.
id. — Fid, feu..... Re A Cañù, chenèét.
iou. — Maïou, mail...... . Entendiou, qu’ils entendent.
iou. — Diou, Dieu........ Miougrano, grenade.
iu. — Béstiu, bestial....... Méssius, messieurs.
de) COL Len eee Galoï, gai. :
oua. — Coua, couvé....... Couacho, calandre.
ouè. — Vouè, holà........ Espouèr, espoir.
oué. — Foué, fouet. ....... Couéto, queue.
ouï. — Bouï, buis......... Douïre, jarre.
dou. — Dôou, deuil....... Cévénôou, cévenol.
uè. — Gnuë, nuit......... Juël, ivraie.
ui. — Frui, fruit......... Estui, étui.
TRIPHTHONGUES.
iaï. — Biaï, adresse....... Répapiaïre, radoteur.
ijou. — Siâou, coi..,...,. Viâouloun, violon.
SOL 1 SOL, SD à de 5050 Cadiëïro, chaise.
iéou. — léou, 7e, moi...... Liéourèio, livrée.
iôou. — Midou, mulet. ..... Favidou, haricot.
iuè. — Hiuè, Auit.,........ Endiuël, andouille.
TÉTRAPHTHONGUES.
iuèï., — Hiuèï, aujourd'hui. Cadiuèïsso, cosse.
uièi. — Cuièisso, cuisse... Cuièïssaou, molaire.
Ce tableau doit faire comprendre la raison de notre ortho-
graphe; et répétons ce que nous avons dit ailleurs : « On
ne saurait assez recommander l'observation minutieuse de
l'accent; elle est d'une importance radicale. Toute l’intel-
ligence de l'idiome est là; et sans elle, on nage à pleine
eau dans l’amphibologie. »
‘ACE
Une liste à peu près complète de mots parfaitement
homographes, .présentera un curieux intérêt à ce point
de vue, et complètera ces explications.
Nous avons négligé les homonymies dans les différents
temps des verbes, qui seraient trop nombreuses, comme
réndie, il rendait, et qué réndie, que je rende, etc., etc.,
et quelques autres mots dans lesquels l’accent est iden-
tique sur la finale, mais qu'influence Vi tréma ou l'i
naturel, soit pour les diviser en deux temps, soit pour en
faire des monosyllabes, comme pie, pilier, etpiè, pied, Puech,
cuïè, cuiller, et cuiè, cuit, bie, je serre, et bé, billet.
Il sera ainsi facile de se rendre compte de ce que peut
l'accent graphique, et comment une simple inflexion sur
une voyelle fait varier le sens et la signification d’un mot. .
É FERMÉ ET E NATUREL.
Boufé, soufflet............ Boule, je souffle.
Boumbé, bout-d'homme. . Boumbe, je cogne.
Bouré, brun..:,,..:...... Boure, bourgeon .
Bourgés, bourgeois ........ Bourges, {u creuses.
Bouté ;sbrin.. 245... Boute, je mets.
Bravé, gentil. ............ Brave, robuste.
Cargué, ‘étui. .......:..., Cargue, je charge.
Césé, n. pr. dim. François. Cése, pois-chiche.
Chaïné, chat sauvage... Chaïne, chéne.
Coublé, solive.........,.., Couble, couple.
Coulé, petite colline. .... ... Coule, je décuve.
Courdouné, ganse....:.... Courdoune, je cordonne.
Dévé, devoir. ............ Déve, je dois.
Déstré, pressoir à vin...... Dèstre, perche (mesure).
Estré, étroit... OAI Estre, être.
Fuéi-mMunée. : 3e. 5, Fure, je fouille.
Gourgué, petite mare....... Gourgue, je trempe.
Grané, petit grain. ........ Grane, je grène.
Lipé, gourmand... ..,...... Lipe, je lèche.
Manqué, manchot....,..... Manque, je manque.
Mèrlé, créneau. ........... Mèrle, merle.
Miné, minon............. Mine, je mine.
Mouïssé, épervier.. ........ Mouïsse, écourté.
Paré, paroi. .... ELA Pare, je pare.
Péné, petit pied........... Péne, je peine.
Piqué, pianos. lise... Pique, je frappe.
Poudé, serpette....:......: Poude, je taille.
Pougné, poing............ Pougne, je pique
Quiché, targette . su... Quiche, je presse
Quinqué, quinquet........ Quinque, je souffle
Rèssé, scie à main......., Rèsse, je scie
Sabé, science... ....... .... Sabe, je tanne
Sâousé, n. pr., Sauzet..... Sâouse, saule.
Séré, petite colline... ...... Sère, montagne.
Siblé, sifflet. ............. Sible, je siffle.
Tapé, petit bouchon ‘ Tape, je bouche.
TOR, SN 55 à .... Téte, je tète.
ACE 21
Tourné, rouet1977, 2. Tourne, je reviens. J
Trâouqué, petit trou .. Trâouque, je perce,
Tristé, soupente....,...,.. Triste, triste,
Uïé, œillet....., MNT Tee Uïe, je sers ce tonneau.
Ë FERMÉ ET Ë OUVERT, GRAVE.
Aprés, appris.....,.,:,., Après, après
Arésto, arréle.....,,...,,.: Arèsto, halte là !
Espésso, épaisse. .,........ Espèço, espèce
Espéro, ‘attente, affût...... Espèro, attends.
Lachén, pourceau.,........ Lachèn, nous lachämes.
Jasén, nouvelle accouchée... Jasèn, nous gisons.
Vakén,: actif 0592 01 Vaïèn, is valaient
Péro; poire..." x 4 Péro, père
F6; foin; fois Fè, fait
EE Cr NC LE, Sè, sept.
Sa 'sainf.. ENG Te Sèn, nous sommes
NOR, ON NS Vèn, à vient
Ë GRAVE ET E NATUREL
Cadë, cadet... 7m, Cade, genévrier
Counséiè, conseiller... ... .. Counséïe, je conseille
Entré, il entra.7222..,10. 31 Entre, entre.
Gäouchè, gaucher... ..,..... Gâouche, gauche.
Lachè, il ldcha, laitier... Lache, mal serré.
Mouïè, épouse............ Mouïe, je mouille.
Récatè, il serra.........., Récate, provision.
Révéïè, aubade........... Révéie, je réveille.
Roudiè, charron.......... Roudie, je regarde.
Vigè, n. pr., Viger........ Vije, osier.
Î GRAVE ET I NATUREL OU TRÉMA.
Conrl;coourif, one Ur, Couri, n. pr., Courry.
Fasti (faïre), faire horreur .. Fasti, aversion.
Garlÿ-guérir. su lt, Gari, rat.
Pass pays:as ds: 0 Péis, poissons.
Sai, panne de porc........ Saï, ici dedans.
Trai, trahir. sise... Traï, il jette,
Véri, poison, venin. ....... Véri, porc.
O NATUREL ET Ÿ GRAVE
Aouséro, Lozère........... Aousérd, Lozérien.
Haba Basse ones 540 Bab, chrysalide.
Be: ballerir ess ctuin Bald, ballot
Handd dise de Bardd, bardot
Bigo, bigue escale Bigo, hoyau
0. ONN ITR LL ILE Bi, tricot
Bousso, bourse. ........... Boussd, gousset .
Cacho, cachette. ....... ... Cachô, cachot,
Cagno, dégoût, paresse. .... Cagnù, niais
L: ACE
Capo, manteau... Capô, attrapé.
Casso, chasse. ..1:..,:.... Cassd, ladre.
€Cato, chatte... sas. sas, Cat, catin.
Enquo, canelle... .…....... Encù, chez.
Faro, mine, visage......... Farû, élégant.
Fino, rusée.......…..s...:. Find, finaud.
Fio, fille. .... à A ie EE SE . Fiù, feu.
Galo, gale.... .. Sen rire . Galù, galop.
Gigo, cuisse de bœuf....... Gigù, gigot.
Grélo, gréle..:. …....: .... Grélè, grelot.
Léngado, coup de langue... Léngadd, Languedoc.
Mancho, manche. ......... Manchù, manchot.
Mio, amies sorte cet Mid, muid.
Palo, pelle... .…. ..... Palô, lourdaud.
Pato, patte... us. st Patô, brique.
Pégo, pot. 2. es a Pégô, savetier.
Péro, poire. ....:4.. ee +... Pérù, mouton.
Pilo, pile, tas...... TRE Pil, pilote.
Pio, pillage. ....... CNRS Pi, dindon.
Rabo;: ran6..2..h0i4s Rabô, rabot.
Ribo, rive, bord.....,..., Ribô, n.-pr., Ribot.
FPS OM 7 SRE AOL LE Sal, malpropre.
Ciro, cites ibinnes à if Sird, sirop.
Tantos, s. plur., tantes..... Tantôs, tantôt.
Trapo, trappe............ Trapô, trapu.
Triquo, trique...,.,...... Tricd, gilet de laine.
OU MUET ET OÙ GRAVE.
Ajustou, ils ajoutent. ...:.. Ajustoù, ajoutage.
Apialou, ils élaient..,..... Apialoù, étai.
Biou, is billent........... Bioù, trique.
Boutou, is placent. ....... Boutoù, bouton.
Caladou, is pavent..…...... Caladoù, pavé.
Calou, ils lâchent.......... Caloù, chaleur.
Cantou, is chantent... .,... Cantoù, coin.
Câoussou, is chaussent. .. .. Câoussoù, chausson.
Coulou, ils coulent...,,.... Couloù, couleur.
Escalou, ils grimpent...... Escaloù, échelon.
Espèrou, is attendent... ... Espéroù, éperon.
Espirou, ils suintent. ...... Espiroù, soupirail.
Furou, éls furètent., ....... Furoù, fureur.
Gardou, is gardent. ....... Gardoù, Gardon.
Jètou, is vomissent. ,..…., ,. Jètoù, jeton.
Lardou, is lardent........ Lardoù, Zardon.
Liquou, ils dèchent.…......., Liquoù, liqueur.
Mascarou, ils noircissent.... Mascaroù, barbouillé.
Paslou, ils pétrissent. ...... Pastoù, tas de mortier.
Passèrou, is passèrent... , Passéroù, moineau.
Pétassou, ils raccommodent . Pétassoù, petite pièce.
Piquou, is frappent. ....., Piquoù, pie.
Plounjou, ils plongent. . ; . :. Plounjoù, plongeon.
Prisou, ils prisent...,..... Prisoù, prison.
Révéïiou, ils réveillent. ...,. Révéïoù, réveillon.
‘ACI
Sablon, is mettent du säble. Sabloù, sablon.
| Säbou, its tannent. …, ..... Saboù, s4v0n.
Sénglou, is sanglent....... Séngloù, petitercorde.
Séntou, ils sentent. ........ Séntoù, odeur.
| Sèrmou, ls trempent d'eau. Sérmoû, sermon.
Susou, ils suent........... Susot, sueur.
Téchou, is dégoûtent. . Téchoù, petite goutte.
Tourtiou, is tordent....... Tourtioù, craquélin.
Trissou, is broient........ Trissoù, ‘pilon.
Valou, ils œwalent.......... Valoù, valeur.
Véïrou, Îs tournent... ... Vèïroù, menu poisson. 2
Virou, is tournent. ...... . Viroù, tvrille.
La différence à l'oreille, qui, en définitive, détermine de
sens de tous ces mots correspondants à un mot semblable,
est produite par les accents. Dans ceux où la finale est
accentuée, elle est tonique; c'est sur elle que la voix s'arrête
et pèse : au contraire, pour ceux qui n’ont pas d'acéent'à
la fin, la tonique est la pénultième et la tenue se fait sur
elle. Par exemple, le dernier mot de cette longue Histe,
virou, ils tournent, est composé d'une longue et d’une
brève; l'inverse a lieu pour viroë, vrille, qui est. formé
d’une brève et d’une longue, et aïnsi des autres. La mesure,
la quantité, réglées par les accents : toute notre langue
musicale est là.
Acérti, v. Certifier, assurer, rendre.certain, ‘affirmer.
Dér. du lat. Certus. Ê
Acéta, prép. Excepté. Il est visiblementicorrompu du
français, mais fort de mise.
Achas ! interj. Voyez donc! Voyeztun peu!
Dér. d’Agacha, voir devant soi. C'est'la contraction de
ce verbe à la ?2me pers. plur. de l'impér. Agachas. =
Voy. Agacha.
Achata ou Achéta, ». Acheter.
Trad. du français.
Achétur, urdo, adj. Achéteur, euse.
Trad. du français.
Aciè, s. m. Acier.
Trad. du français.
Acièira, v. Aciérer, chausser d'acier la pointe d’un outil.
Acimérla, ado, adj. Perché, juché haut.
Dér. de Cimo, hauteur, extrémité.
Aciou, s. f. Action. Il ne se prend qu’en mauvaise part.
— Quinto aciou m'as fa! quel tour tu m'as joué!
Trad. du français.
Acipa, v. Prendre par surprise, saisir, surprendre.
— Nous acipè, et za! dédin, il nous surprit,ret crac! sous
clé.
Dér. du lat. Accipere, recevoir.
Acipa (s’), v. Se heurter, broncher, se-rencontrer tête à
tête, chopper. — Nous acipèn, nous nous rencontrâmes nez’
à nez. :
Étym. du celt. Assoupa, dit Honnorat.
|
|
|
ACO
Acivada, v. Donner de l'avoine. Aw fig: et par ironie,
régaler d'une volée de coups, rosser.
Dér, de Civado, avoine..
Aclapa on Réssègre, v. Couvrir de menue pierraille;
recouvrir les:sillons d’une terre emblavée, soit à la pioche,
soit à la: herse, et. briser les mottes pour mieux enterrer la
semence-ou le fumier.
Dér. de: Olu ou Clap, pierraille.
Aclapassa, vw, Entasser des pierres en monceau ; amon-
celer
Dér: de: Clapas, tas.de. pierres.
Aclata, v. Baisser, courber; accabler sous le poids;
Dér. de: Cla, las, amas, monceau.,
Acok, s. »m. Mur de-soutènement en pierre sèche.
Açor, s. des deux genres, ou Acordi, s: toujours
m:. Accord, réconciliation, ‘bonne intelligence. — Estre:
d'acordi, tre. cœur à cœur, — Acor est masculin ow
féminin à peu près ad libitum. On dit : L'acor és facho,
et‘dé bon acor.
. Dér. du lat. Cor, cœur.
Acoto , s. f: Une cale qu'on met sous le pied d’une table
chancelante, sous la roue d'une charrette. pour l'empêcher
de marcher.
Dér. du lat. Cos, cotis.
Acouassa (s'), v. Se, coucher comme les poules qui
veulent couver. Au fig. se pelotonner, se tapir, s’accroupir,
se mettre. dans toute sorte de posture qui rappelle une
poule couveuse.
Dér. de Coua ou Couga, couver.
Acoubla, v. Accoupler, joindre par couple; joindre des
bœufs ou des chevaux pour le labour. — Aquélo miolo
acoublariè bièn. la miou, cette mule s'appareillerait bien
avec la mienne.
Acoucara (s’), v. S'encanailler, fréquenter la mauvaise
compagnie, s'engueuser.
Dér. de Coucarou.
Acoucha (s’), v. Accoucher.
Frad. du français.
Acouchado , s. f. Accouchée. On dit Jasén en langue-
Acouchurdo où Acouchuso, s. f. Aecoucheuse, sage-
femme. En lang. Lévandièiro, — V. ©. m.
Trad. du français.
Acougassa, v. &. Faire. tomber ; congé sur le der-
rière.
Acougassa (s’), v. r. Le mème que s'Acouassa, s'acerou-
pir. — V. c. m.
Dér. de Couga, couver. M. sign. (go ouai
Acougouncha (s’), v. S'accroupir. C'est un explétif du
verbe précédent et il a la même racine. La posture qu'il
désigne -est encore plus grotesque : c'est celle des magots
de la Ghine que le XVIHS siècle nous à légués avec ses
vieilles cheminées,
|
ACO 2%
Acoulado, s. f. Accolade, embrassement les bras autour
!
du cou.
Étym. du lat. ad collum.
Acouloubri, ido, adj. Effarouché, irrté, envenimé
comme: une couleuvre. Au fig. éveillé, déluré ; se dit d'une
fille garçonnière. et hardie.
Dér. de Coulobre:
Acoumada, v. Raccommoder, radouber; assaisonner
Au fig. concilier, convenir.
Dér, de Coumode..
Acoumadamén, s: m. Accommodement, accord, trans-
action, le mezzo termine d'un différend.
Acouménça, v. Commencer. Au fig. chercher noise,
être le premier à attaquer. — Ce mot, auquel on n'a fait
qu'ajouter l& explétif, a une origine commune avec le
‘ français, commencer, et l'italien cominciare. Cette origine
se-prend dans le latin Cum, initiare.
Acouménçamén ou Couménçamén, s: m. Commence-
ment. Le premier se dit plus particulièrement du com-
mencement d'un livre, d’une histoire.
Acouménçanço, s: f. Commencement d'une histoire,
d’un conte, d’une leçon, d'un livre.
Acoumouda, v. Accommoder, arranger, apprèter.
Acoumouda (s'). S'accommoder, se contenter de. —
Qué s’acoumode, qu'il s'arrange.
Acoumoula, v. Remplir par dessus les: bords, faire
grasse mesure; accumuler, combler.
Dér. de Coumoul.
Acoumpagna, v. Accompagner, aller de compagnie. —
Lou bon Diow vous acoumpagne, et sé plôou qué vous bagne,
Diew vous accompagne, et s’il pleut soyez trempé.
Étym. du lat. Comes, compagnon.
Acouquina (s’), v. S'acoquiner, prendre des habitudes
dé fainéantise et de débauche; s’accoutumer en un lieu, en
certaine compagnie. Il est toujours pris en mauvaise part.
Dér. de Couqui.
Acourcha, v. Raccourcir, rapetisser.
Acourcha (s’), v. Prendre le chemin le plus court.
Dér. de Courcho.
Acourcoussouni (s’), v. Se ratatiner, se ms MT: à
de vieillesse ou de rachitisme.
Dér. de Courcoussoù, charançon. Cet animal est plié en
courbe dans l’alvéole où il se blottit; de là la comparaison
du vieillard qui a à peu.près la même posture.
Acourda, v. Réconcilier, accorder ensemble.
Dér. d’Acordi.
Acoussa(s'}, v. Se diriger vers, au pas de course; s'em-
presser de courir; poursuivre. ;
Dér. de Cousso.
Acousséia, v. Conseiller, donner un conseil. — Voy.
Cousséïa.
Dér: de Coussél.
Acousta, v. Accoster, aborder.
Trad. du français.
24 ADE
Acoustuma, v. Accoutumer, habituer.
Trad. du français.
Acoustumado (à l’)}, «dv. Selon la coutume, l'habitude;
à l'accoutumée.
Acouta, v. Caler, mettre une cale sous le pied d'un banc,
‘d'une table pour l'empêcher de brandiller, sous une roue
de voiture pour l'empêcher de rouler seule ; étayer, mettre
un étai. Au fig. arrêter.
Dér. d’Acoto.
Acouti, ido, adj. Tassé, épais, compacte.—Se dit très-
bien du pain trop peu manipulé ou trop levé, qui est
massif et compacte.
Acoutra, v. Accoutrer, parer, habiller d’une manière
ridicule et surchargée d’ornements. — Ce mot, contempo-
rain du français Accoutrer, a une mème origine latine :
ad, augment., et culturam, culture, soin du corps, parure.
Ce serait donc un superlatif de toilette; ce qui la rend
ridicule et grotesque.
Acoutra (s'), vw. S'enivrer, se griser. Cette dernière
acception n’est que l’extension de la première signification
active; ne dit-on pas, en fr. familier : se pomponner, pour
se griser ?
Acoutramén, s. m»m. Accoutrement, costume bizarre.
Acrû, s. m. Accroc, déchirure occasionnée par un corps
crochu.
Dér. de Cro.
Acrochi, s. m. Embarras, difficulté, pierre d'achoppement.
Dér. de Cro.
Acrouchouni, ido, adj. Courbé, ratatiné de vieillesse.
Acrouchouni (s’), v. S'accroupir, se blottir dans un
coin; se mettre en peloton; se ratatiner, se ramasser tout
le corps. — Voy. s' Amouchouna.
Dér. de Crouchoù, quignon de pain, auquel un vieillard,
ainsi fait, ressemble par sa masse informe, par sa couleur
bise et la rugosité de sa peau.
Acrouqua, ». Accrocher, suspendre à un croc.
Dér. de Cro.
Acrousti, ido, adj. Se dit du pain qui a beaucoup de
croûte, et des plaies et pustules, où il se forme des
croûles, des gales, des escares.
Dér. de Crousto.
Acul, s. m. Accueil. — Mot tout français, que notre
languedocien s’est approprié et qu'il emploie très-bien.
Acusa, vw. Accuser. — Contemporain du français, et
dér. comme lui du lat. Accusare.
Ade, n. p. Agde, ville (Hérault) : Aya0h, Agatha.
Adéli, ido, adj. Déjoint, baillant comme un tonneau
dont les douves sont déjointes par la sécheresse. Au fig.
sec, amaigri, exténué.
Étym, du lat. Deligare.
Adéré, adv. De suite, pied à pied; un à un; sans rien
laisser en arrière. — On disait en vieux français dans le
même sens : à la rangette.
Dér. de l'esp. Arreo, mème signification.
ADR
Adijà, adv. Déjà.
Dér. de la bas. latin. Dejam. J
Adiou! Adioussias ! interj. Adieu. — Le preinier ne
s'adresse qu'entre égaux, ou de supérieur à inférieur. Le
second, plus respectueux, s'adresse aux supérieurs ; où ‘aux:
égaux, à qui l'on veut montrer des égards. C’est une phrase
faite : À Diou-sias! soyez à Dieu! Le mot Adiou est la:
‘syncope de la mème phrase, et par cela même ilest plus
cavalier. Il n’en est pas de ces deux mots comme du fran-
çais Adieu, que l’on n’emploie qu’en prenant congé d’une
personne, jamais en l’abordant. En languedocien, ons'en
sert avant, pendant et après la rencontre, indistinctement.
Adouar , n. p. Édouard. — Depuis qu'on à raffiné sur !
le choix des noms propres, et que le peuple a abandonné
les prénoms de Jean, Jacques, Pierre, etc., ila bien fallu
que son idiome adoptât les noms nouveaux-venus et.quiil
les appropriàt à son génie, Depuis lors, Adouar et son:
diminutif Douaré sont devenus familiers et très- cie
dans la langue.
Adouba, v. Accommoder, apprêter, assaisonner; tanner;
raccommoder, radouber; émonder; bistourner; renouer un
membre; relier des tonneaux ; rosser, échiner. — Adouba
la soupo, assaisonner le pot au feu. Adouba dé sowiès,.
raccommoder des souliers. Adouba dé boutos, relier des
tonneaux. Adouba dé pèls, apprèter, tanner des cuirs. L'an
pas mâou adouba, on l'a bien ajusté. Té vôou adouba, je
vais te battre, te rosser.
Toutes ces acceptions procèdent du mème primitif, et.
représentent directement ou par extension la même pensée.
Le verbe est dérivé de Ado, terme ancien, hors d'usage,
qui signifiait : lessive de tanneur, qui a formé Adobare; de
la bas. latin., pour ajuster, armer, préparer, dont la racine
Adob serait celtique. Adouber est du vieux français, qui
s'est conservé comme technique au jeu des échecs et du
tric-trac, quand il s’agit d’une pièce ou d’une dame dérangée
à remettre en place; mais radouber, radoubeur, sont restés. »
L'ancien Dauber où Dober appartient aussi à la mêmeori-
gine et rentre dans le même sens.
Adoubaïre, s. m. Tanneur; mégissier; tonnelier; save-
tier; renoueur ; châtreur.
Adoubaje, s. m. Raccommodage; apprèt; manière d'ap-
prêter ; réduction d’un membre luxé. 1
Adoubun, s. ”. Assaisonnement, qu'il soit huile, beurre,
lard ou saindoux.
Adoun, adv., Alors, pour lors; en ce temps-là.
Dér. du lat. ad tunc.
Adoura, v. Adorer.
Trad. du français.
Adraïa, v. Fouler, battre un Fe. le rendre Sable
Adraïa (s’), v. Se mettre en route, s’acheminer. Au fig.
se mettre en train, se dégourdir les jambes.
Dér. de Draïo.
Adraqua (s’), v. Sécher à demi ; se ressuyer. — On po pas
séména qué noun la tèro siègue adraquado, on ne peut pas
AFA
semer avant que la terre soit ressuyée de la pluie. Linge adra-
qua, linge essoré; froumaÿe adraqua, fromage à moitié sec.
Adré, écho, adj. Adroit, habile.
Dér. du lat. Dexter ou ad rectum.
Adré, s. m. Exposition sud d’une montagne, opposée
à l'avès, exposition nord.
Mème dérivé que le précédent, ad rectum, c'est-à-dire
vers le bon côté. Avès est dér. de Adversus, contre, con-
traire, opposé.
Adréchamén, adv. Adroïitement, avec dextérité, avec
adresse.
Même dér.
Adréssa, v. Adresser, envoyer à quelqu'un. — S’adréssa
à qudouquus, s'adresser à quelqu'un, lui demander des
renseignements.
Dér. de la bass. lat. Addirectiare, envoyer directement
à quelqu'un, dont l'esp. a fait Enderezar, et l'ital. Addi-
rizzare.
Adrèsso, s. f. Adresse, habileté.
Dér. de Adré.
Adrèsso, s. f. Adresse, suscription d’une lettre-missive.
Dér. de Adréssa.
Adrissa, v. Dresser, placer debout; rendre droit; faire
tenir droit; relever.
Adrissa (s’), v. Se cabrer; se redresser. — Adrissa-vous,
levez-vous. Sé tiras tro la brido, vaï s'adrissa, si vous
tirez trop la bride, il va se cabrer.
> Dér. de a explétif, et Dré, droit.
Adu, ucho, part. pass. de Adure.
* Adure, v. Amener, conduire, apporter.
Dér. du lat. Adducere.
Adusa ou Adésa, v. Atteindre à une chose élevée,
hors de la portée ordinaire. — Ly pode pas adusa, je ne
puis y atteindre. Y adusara pas, il n’y parviendra pas.
C’est la position du renard de la fable, sous les raisins.
Dér du lat. Adire, Adeo.
Afacha, v. Dépouiller les châtaignes rôties de leur coque
à demi brülée, les éplucher. — Cette opération se fait d'ordi-
nairé en les agitant dans un paillon ou panneton, appelé en
languedocien Païassoù, où on les recouvre d’un torchon.
Afachado, s. f. Châtaigne rôtie au moyen d'une poële
percillée.
Sauvages, qui est parfois admirable dans ses étymologies,
s'amuse sans doute dans celle qu’il donne à ce mot. Il le
fait dériver de l'ital. Afaciato, effronté, sans pudeur.
« D'autant, dit-il, que les châtaignes qu'on fait rôtir ou
griller, pètent dans les meilleures compagnies. »
Cette plaisanterie accuse du reste la difficulté d'extraire
cette racine. Dans ses notes, La Fare-Alais pensait que ce
mot tenait probablement à quelque circonstance, à quelque
anecdote locale, qui n'étaient pas venues jusqu'à nous, et
qui sont spéciales aux Cévennes d’Alais; car, dans le reste
des Cévennes, on dit Brasucado, dér. de Braso, et c’est
plus naturel.
AFA 25
Sauf le respect dû à nos maîtres, la racine ne se trouve-
rait-elle pas simplement dans Afait, Affach, pris du roman
Afaiter, préparer, séparer, raccommoder, dér. du lat. Afec-
tare; d'où l'esp. Afeytar, orner, parer, ce qui a donné
Affaitamen, Affachador, Affachamén, et dans notre vieux
langage Afachomén, une tuerie; et dans le dialecte gascon
Affaych, préparation; dans le bas-limousin Afachadoù,
atelier où l'on foule les chapeaux, et Afachadis, criblures
que l’on enlève en vannant le blé? Certaines ressemblances
sont souvent de grandes présomptions de parenté.
Afaïra, ado, adj. Qui a beaucoup d'affaires; quiest en affai-
re; surtout celui qui a de mauvaises affaires, qui ades dettes.
Afaïre, s. m. Péj. Afaiïras, dim. Afaïroù. Affaires;
particulièrement procès. — Aquéles afaïrasses m'émpachow
dé dourmà, ces diables de procès m'ôtent le sommeil.
Aqud's un doutre afaïre, je ne l'entends pas ainsi. Un
home d'afaïres, intendant, homme d'affaires; un avocat,
un avoué. Aqud's pa’n afaïre, ce n'est qu'une bagatelle.
Din l'afaire d'un an, dans un an, dans l’espace d'un an.
Aïci d'afaïres, voici bien des difficultés.
Afaïroù, s. #. dim. Un petit outil, un petit ingrédient;
un objet dont on ne trouve pas de suite le nom propre.
Mème origine que le mot français.
Afama, v. Affamer, causer la faim. — En termes
d'agriculture on dit s’afama, en parlant des racines des
arbres arrachés depuis longtemps, exposées à l'air, et qui
ont de la peine à reprendre, quand elles sont mises en
terre. C'est ce qui arrive souvent aux müriers de pépinière
qu'on transporte d'un marché à l’autre et qui restent sans
vendre pendant longtemps. Le meilleur moyen de connaitre
si ces arbres sont trop anciennement arrachés, c'est de
trancher un bout de racine. S'il sort par l’incision une
sève glutineuse de couleur de lait, on est assuré que les
arbres pousseront. Du reste le mürier est une plante très-
vivace, et il est rare qu'il ne pousse pas même après un
long éventement de ses racines. Le châtaignier et les frui-
tiers sont bien plus délicats.
Dér. du lat. Fames.
Afara, ado, adj. Efflaré, qui a la figure farouche et
décomposée par la surprise, la peur ou la colère.
Dér. du lat. Fera.
Afasqua, v. Dégoüter, rassasier jusqu'au dégoût, ce
qui est le propre des mets trop gras.
Dér. sans doute du lat. Fastidium.
Afasquoüs, ouso, adj. Rassasiant jusqu'au dégoût.
Du lat. Fastidire, Fastidiosus.
Afatiga, v. Lasser, fatiguer ; empressé ; embarrassé. — Es
afatiga coumo un pdoure home qué coulo sa trémpo, empêtré
comme un homme pauvre qui coule sa piquette : il y va
de cul et de tête, comme une corneille qui abat des noix.
Dér. de Fatigo.
Afatouni, ido, adj. Mou, lâche, usé, avachi, comme le
linge qui a perdu son apprêt par l'usage.
Dér. de Fato.
96 AFO
Afatrassi, ido, adj. Péjoratif du mot précédent : c’est
un degré de plus. Il est dérivé de Fatras, péjor. lui-mème
de Fato. Mais Afatrass se dit, en outre, des personnes qui
ont perdu leurs forces, et particulièrement des jambes qui
flageolent de faiblesse maladive.
Aféciou, s. f. Zèle, ardeur, application; vif intérèt qu'on
apporte à un ouvrage. — Y ana d'aféciou, travailler de
tout cœur. — Il n’a rien de commun avec l'affection en
français
Dér. du lat. Aficere, exciter, émouvoir.
Afénadoù, s. m. n. pr. Petite hôtellerie de route
où l’on ne fournit que du foin. — Ce mot a vieilli et
n’est connu que par le nom d’une maison, où d’un quartier
par extension, sur la route de Nimes à Moulins, près de
Portes.
Dér. de Fé, foin.
Afénadoù, s. m. Trappe par laquelle on jette le foin du
grenier dans l'écurie.
Afénaira, v. Faner le foin, le tourner, l’apprêter au
soleil, le mettre en meule; faire tout le travail qu'exige
cette récolte quand elle est fauchée.
Dér. de Fé, foin, et Énaïra, donner de l'air.
Afénaïraïre, aïro, adj. Faneur, faneuse.
Afénaje, s. m. Nourriture en fourrage donnée au bétail,
soit dans une écurie, soit dans un herbage, sans peser le
foin; sorte de pension. — Métre soun chival à l'afénaje,
mettre son cheval en pension, fourrage à discrétion.
Afénassa, v. Ensemencer un champ en pré, y semer de
la fénasse, de la graine de foin; vendre du foin en botte.
Dér. de Fé, foin.
Aféta (s’), v. S'affecter, prendre un air affecté.
Trad. du français.
Afiança, v. Se promettre en mariage, passer des pactes
de mariage. — Ce verbe est actif en languedocien. —
Afiancè uno tèlo, il s'engagea avec une telle.
Dér. du lat. Fidentia, confiance, foi.
Aficha, v. Afficher.
Trad. du français. Dér. de Afigere, attacher à.
Aficho, s. f. Affiche, placard.
Trad. du français.
Afincha (s’), v. S'appliquer à... avec zèle ; mettre tonte
son attention, toute son intelligence à quelque chose; y
appliquer sa finesse et sa vue.
Dér. de Fi, adj., fin, rusé, attentif.
Afina, v. Ruser, cajoler dans l'intention de duper ; affi-
ner, polir, rendre plus fin un objet, faire la pointe.
Dér. de Fi, adj.
Aflaqui (s’), v. S'affaiblir, se relâcher, s'amollir; devenir
faible, mou, flasque.
Dér. de Fla.
Afoula (s’), v. S’afloler, s’engouer, se passionner.
Dér. de Fol.
Afourti, v. Assurer, affirmer opiniätrément.
Dér. de For.
AGA
Afourtuna, ado, adj. Qui a de la fortune; bien partagé
des biens de la fortune ; favorisé du sort.
Dér. du lat. Fortuna.
Afourtuna, v. Ce verbe n’est employé que dans cette
phrase interj. Diou m'afourtune! Diou vous afourtune!
Que Dieu m'assiste! Que Dieu vous soit en aide! Cette
expression n’est communément qu'explétive, sans que la
circonstance soit assez importante pour nécessiter une pieuse
éjaculation. On le dit lorsqu'un enfant pleure ou qu'il fait
du tapage, qu'une chose dérange ou importune; lorsqu'on
veut souhaiter bon voyage à un ami ou mème à un indif-
férent.
Dér. du lat. Fortuna.
Afraïra (s'), v. S'associer; proprement se faire des dona-
tions réciproques entre mari et femme, entre parents ou
amis.
Dér. de Fraïre.
Afréjouli (s’), v. Se refroidir, tourner au froid. — Low
tên s'és bièn afréjouli, le temps est devenu bien froid. Soui
tout afréjouli, je suis tout transi de froid. Lous vièls soun
afréjoulis, les vieillards sont frileux.
Dér. de Fré.
Afrésqua, ado, adj. Empressé, alléché, la gueule enfa-
rinée. — Il a son origine dans le mot frés, frais. V. c. m.
Afrésqua (s’), v. S'apprôter vivement; se hâter.
Afri, ido ou iquo, adj. Avide, empressé, affriandé ; ardent,
âpre à la curée. — Es afrè dou traval, il est affectionné à
l'ouvrage.
Dér. du lat. Apricus, ardent.
Afriquèn, èno, adj. Africain, d'Afrique.
Afriquo , s. f. Afrique, partie du monde. — Depuis la
conquête d'Alger, l'Afrique est devenue populaire et réveille
d’autres intérêts que ceux de sa géographie.
Dér.du lat. Apricus, chaud, ardent ; ou selon Roquefort,
de l'arabe Aphrah, séparer.
Afroun, s. m. Injure, outrage, affront.
Dér. de l’ital. Afronto, ou du lat. ad frontem. L’affront
est une injure en présbnce de celui qui la subit : ad fron-
tem ejus. «©
Afrounta, v. Affronter, rencontrer de front; mais sur-
tout injurier, donner un démenti.
Afrountur, s. m. Affronteur, insolent, trompeur.
Afroüs, ouso, adj. Affreux , horrible, épouvantable.
Dér. du grec vpx, frayeur.
Agaboun, s. m. — Voy. Agdou.
Agacha, v. Regarder devant soi; regarder avec attention,
considérer, admirer. — Agachas! Voyez donc! V. Achas.
Dér. du grec 4y&w, admirer, regarder avec surprise,
être frappé d'étonnement.
Agaci, s. m. Cor, durillon, calus; excroissance dure et
douloureuse qui vient aux pieds.
Agafa , v. Prendre à la volée; saisir avec la main ou
avec un chapeau, un tablier, ce que l'on jette de loin;
attrapper.
ei
Dr
AGI
Étym. du vieux mot lang. Gaf, qui signifie Croc, dont
lé fr. a tiré et conservé gaffe, gaffer.
Agalanciè, s. m. Eglantier, rosier sauvage; Rosa rubi-
ginosa, Linn. — Sa fleur se nomme Eglantine. Son fruit,
qu'on appelle gratte-cul, sert à faire les conserves de cynor-
rhodon, dont il se fait un commerce d'exportation consi-
dérable dans la petite ville de Meyrucis (Lozère).
Nodier dit que le savant Périon fait venir ce mot du
grec #yhavros, arbre ou fleur épineuse.
Agalavardi, ». Affriander, accoutumer à la friandise. —
Au participe passé, Agalavardi, se dit surtout du bétail
mal gardé et qui a trop accoutumé d'aller brouter dans
les blés ou les vignes.
Dér. de Galavar.
Agalis (én), adv. En biaïs, en biseau, en talus, endiagonale.
… Dér. de aval, par le changement du v en g, qui est fréquent.
Agalousses, s. m. plur. — Voy. Agdousses.
Agani, ido, adj. Retrait, mal-venu, mal nourri, par
vice d’origine. Au fig., chétif, exténué, rachitique.
Dér. de l’ital. ingannare, tromper, frustrer. Son étym.
remonterait-elle au sanscrit aghan, exténué?
Aganlo, s. f. Noix de galle. Elle est fournie par le chène
des teinturiers.
Étym. du lat. Galla.
Aganta, v. Prendre, saisir, empoigner.— On dit égale-
ment : té véou aganta, je vais t'agripper; sé l’agante, si je
te prends, et aganto aqud, attrape ceci; agantè un tapas,
il reçut un soufflet ; ce qui est prendre.
Dér. de Gan, de l’allem. wand, ou du lat. vagina, gaine.
Agâousses, s. m. plur. où Agalousses. Ononix ou
arrête-bœuf épineux ; Ononis spinosa, Linn., planteligneuse
A famille des Légumineuses, commune dans les blés.
L'étym. du mot, selon les uns, se trouve dans le celt.
äga, bois ; selon d’autres, dans l'arabe, et aussi, par cor-
ruption, dans le lat. aculeata, aculeosa.
Agaracha, v. Donner une œuvre aux champs laissés en
jachère ; laisser reposer une terre.
Dér. de Gara, guéret.
Agas, s. m. Erable, arbre; Acer, Linn.
Ce mot paraît d’origine ligurienne.
Agasso, s. f. Pie; en v. fr. agasse; Corvus pica, Linn.,
oiseau de l'ordre des Passereaux, commun dans nos
climats et connu par son caquet. — Au fig., se dit d'une
personne au babil étourdissant.
Du bas-br. Agac, dit Sauvages.
Agassoü, s. m. dim. Le petit de la pie. — Tramblo
coumo lou quiou d'un agassoù, il tremble comme la feuille.
Agérbassi (s’), ou Agérbi (s’), v. Se gazonner, devenir
herbeux, se couvrir de graminées; se taller.
Dér. de Girbo.
Aginouïa (s'), v. S'agenouiller , se mettre à genoux.
Aginouia, v. Terme de vigneron: couder, coucher un
sarment dans la fosse pour le provigner.
Dér. de Ginoul.
AGN 7
Aglan, s. m. Gland, fruit du chène, — Voudridi èstre
un aglan, qu'un por mé mangèsse, je voudrais être un gland
et être mangé par un porc : c'est une expression d'an-
goisse quand on se trouve dans une situation malheureuse
et sans issue; mais le plus souvent le peuple, qui est tou-
jours hyperbolique, l'emploie pour une simple contrariété.
Dér. du lat. Glans, glandis.
Aglana, ». Ramasser des glands, faire la glandée; don-
ner, distribuer du gland aux pourceaux.
Agnano, s. f. n. pr. de lieu. Aniane, petite ville, chef-
lieu de canton de l'Hérault. — Une célèbre abbaye d'hom:
mes de l'ordre de Saint-Benoît y fut fondée du temps de
Charlemagne. Les bâtiments qui restent encore ont été
transformés en maison de correction.
Un vieux dicton languedocien dit : Inoucèn d'Agnano.
Quelle est son origine? Lé français dit bien dans le même
sens : Niais de Sologne, qui ne se trompe qu’à son profit.
Les habitants de la Sologne passent pour avoir d'autant
plus d'intelligence qu’ils en font paraitre moins, et ils
mettent dans les affaires qu’ils traitent une habileté secrète
qui les fait toujours tourner à leur avantage. On a dû
trouver dans nos contrées que, tout en contrefaisant le
simple, l'habitant d'Aniane était aussi extrêmement adroît
et alerte sur ce qui regarde ses intérêts ; de là le dicton, :
naturalisé bien avant qu'il y eût des détenus à Aniané,
qu'on ne peut pas traiter d'inoucén, mème en commettant
un jeu de mots à la française ; car il s'applique à tout individu
de l’acabit du niais dont il est question, en sous-entendant
la dernière partie de la phrase qui complète le sens.
Agnèl, s. m. Augm. Agnèlas, dim. Agnèlé où Agnèloù.
Agneau, petit agneau. — Les moutons changent de nom
en changeant d’âge; ils sont d’abord agnèl depuis leur
naissance jusqu'au retour de l’amountagnaÿé, à la fin d'août;
alors ils deviennent bédigas. L'an d’après, à la mème époque,
ils sont doublén, ensuite tèrnén, et ainsi de suite. — Agnèl dé
la, agneau de lait, qui n’a été nourri que de lait. Agnèl dé
can, agneau qui a mangé aux champs. Es un agnäl, il est
doux comme un agneau. Quinte agnèlas! Quel grand
agneau, quel bon diable! Aqud's la sournéto dé l'agnël blan,
c’est toujours la même répétition. Ce proverbe tient à un
usage des conteurs de sornettes. Lorsqu'ils sont ennuyés des
demandes qu'on leur adresse pour en conter une nouvelle,
ils disent : Véou vous dire la sournéto dé l'agnèl blan. — Ah!
voui, diga-la, s'écrie l'assemblée; et le conteur : Sé voulès
qué vous la digue, vous la diraï. — Voui! voui / diga-la,
insiste-t-on de plus belle. Mais le conteur se renferme
dans son éternel : Sé voulès qué vous la digue, vous la diraï,
jusqu'à ce que, fatigué de cette vaine répétition, le cercle
| d’auditeurs passe enfin condamnation. On dit en français,
pour la mème chose : c'est la chanson du ricochet.
Agnèl, agnèlé, agnèloù sont des termes de cajolerie
| enfantine, de tendresse mignarde.
| Dér. du lat. Agnus, dim. Agnellus, qui vient lui-mème
du grec éyvés, pur, chaste.
LE
28 AGN
Agnèla, v. Agneler, mettre bas, en parlant des brebis.
Agnèlado, s. f. Le croit d'un troupeau, sa portée
d’agneaux dans l’année.
Agnèlo, s. f. Agneau femelle. —Se dit particulièrement
d’une brebis qui commence à porter avant d'être à l'état
de bédigasso. Cet animal souffre de cette précocité; il
ne peut se développer, vit dans un état rachitique, si tou-
tefois il ne meurt pas en mettant bas. Les éducateurs ont
plusieurs procédés pour prévenir cette nubilité trop hâtive.
Agnèlo, s.f. Nielle des blés; Agrostema githago, Linn.,
plante de là famille des Caryophyllées. Son grain mêlé au
blé rend le pain noir et amer.
Dér. du lat. Nigellus, noirâtre.
Agno, désinence, en fr. Agne.
Par ordre alphabétique, Agno est le premier d’une série
de suffixes, qui se sont formés sur toutes les voyelles en
ègno, égno, igno, ogno, ougno, ugno, qui tous présentent
des particularités curieuses dans l’histoire de la formation
de la langue. Ces finales entrent en composition de noms
‘communs, substantifs ou adjectifs, et d’un certain nombre
de noms propres d'hommes et de lieux, avec un caractère
spécial. Elles ont été d’ailleurs soumises à tant d’altéra-
tions diverses, qu'il n’est pas sans intérêt de faire ici
connaissance avec elles, en leur consacrant un mème
article.
Dans toutes les langues, les noms se forment en quelque
sorte par des procédés systématiques. L'élément rudimen-
taire reste à peu près invariable, et c'est au moyen des
suffixes qu’il se modifie suivant les acceptions auxquelles
il est destiné à s'appliquer. Chaque pays, par une disposi-
tion particulière, obéissant aux influences de son orga-
nisme vocal, adopte de préférence la formule qui convient
le mieux à ses facultés d'articulation et de vocalisation ;
et dans ses vocables appellatifs surtout, parce qu'ils sont
sujets à se répéter plus souvent et doivent être plus fixes,
il rapproche les lettres et les combinaisons les plus faciles
pour lui à prononcer.
Ainsi, étant donné un radical, il est nécessaire de Jui
imprimer une certaine forme stable et commode pour en
étendre le sens ; il faut ajouter une désinence caractéris-
tique pour lui faire signifier que l’objet désigné par lui doit
s'unir à un autre objet ou qu'il n'en est qu'une partie,
qu'il en dérive, qu'il en provient ou qu'il doit s'incorporer
à lui, pour préciser sa descendance, le qualifier plus expres-
sément, et pour déterminer ses dimensions, son étendue,
ses propriétés. C'est l'adjectif tiré du substantif; le quali-
ficatif joint au significatif; le diminutif ou l’augmentatif
venant modifier le simple, ce qu'on nomme la dérivation:
c’est le fonctionnement des suffixes.
Cette loi est universelle: partout mèmes procédés pres-
que mécaniques, en ce sens que, les mots représentant les
idées, l'accessoire suit le principal, la désinence supplétive
étend la signification du radical. Ce qui fait la variété des
idiomes à base commune comme le celtique et le latin,
AGN
d'où sont issues nos langues modernes, n’est en définitive
que la différence de prononciation. Les rapports sont sou-
vent cachés, inappréciables à l'analyse, mais ils existent.
Ils se sont dénaturés par des raisons inconnues, mais des
points de contact vérifiés laissent voir leur rapprochement.
Chaque groupe de population a, en effet, des tendances de
langage qui lui sont propres, des habitudes qui le portent
à rechercher certains sons et à en éviter d’autres ; les dia-
lectes naissent de ces convenances toutes locales, et de
cette manière se lie et se décompose l’ensemble général,
sans perdre ses affinités, mais en les laissant s’oblitérer et
en les écartant plus ou moins de la source commune. C’est
pourquoi, dans ces recherches qui remontent quelquefois à
des origines lointaines, il y a à tenir compte de l’état des
idiomes voisins et de la philologie comparée. C'est faire
une tentative dans cette voie que d'essayer, sur les mots
de notre langue, de surprendre le secret de leur formation
originelle; de savoir par quel instinct naturel ou quel tra-
vail prémédité, la pensée et son expression s’est plue à
revêtir certaines formes plutôt que d’autres, et de démèler
sous l'empire de quelles propensions et de quelles antipa-
thies particulières quelques-unes de ces expressions sont
arrivées jusqu'à nous, etontété adoptées. Pour cela, l'étude
des désinences est d'une importance considérable; car ce
sont ces syllabes, insignifiantes en apparence, qui donnent
à une langue son type individuel, son cachet et son carac-
tère. Du petit au grand, le dialecte a sa valeur; si modeste
que soit sa part, il a droit de se présenter au concours.
De la langue la plus anciennement parlée dans les
Gaules, le celtique, nous n'avons que des notions impar-
faites, réduites à quelques centaines d'expressions éparses
dans les écrivains latins ou grecs, et à quelques lambeaux
d'inscriptions lapidaires; il n’a été recueilli aucun monu-
ment écrit d’une sérieuse portée. Rien n’est resté dans l'air
de son accentuation. Cependant, avec les mots qui nous
ont été conservés, avec les appellations géographiques, et
les noms d'hommes, que la stabilité naturelle de leur signi-
fication et de leur structure a protégés davantage, si l'on
n'est point parvenu à composer un vocabulaire complet, il
a été possible de discerner sûrement ce qui appartient dans
nos langues modernes à l’idiome primitif, et de lui attribuer
telles formes, telles locutions, telles racines qui, ne se
retrouvant pas ailleurs, n’ont pu lui servir de modèle et
remontent nécessairement à cette source. CelL élément pri-
mordial .mérite d'être relevé avec prudence, sans doute,
mais avec un soin minutieux.
Les colonies grecques, établies sur le littoral méditerra-
‘néen, eurent des rapports de commerce et d'échange avec
les populations voisines ; mais bien que florissantes et d’une
civilisation plus avancée, elles ne se mélèrent jamais avec
le corps gaulois au point d'exercer une influence, qui n’eut
pas le temps d’ailleurs d'être bien profonde. Les mots grecs
que nous avons retenus nous ont élé apportés presque tous
par l'intermédiaire des Romains.
;
AGN
Le latin doit être considéré comme le vrai générateur de
- nos idiomes. Il avait pénétré dans la Gaule et dans la Nar-
bonaise, avant l'arrivée de César. Après la conquête, il s’y
naturalisa avec une absorbante énergie, et tout concourut
à favoriser sa prédominance et à en prolonger la durée :
les lois, l'administration, la civilisation, la religion, mème
l'esprit national. Le christianisme vint encore seconder son
influence. Les invasions germaniques des Francs et des
Visigoths, loin de comprimer cet essor, accrurent sa popu-
larité : les barbares l'adoptèrent, et leur conversion à la
religion chrélienne, leur orthodoxie ne contribua pas peu
à le maintenir, bien qu'ils eussent versé un élément nou-
veau dans le langage par leur prononciation. Mais il faut
dire que ces altérations furent plus sensibles au nord qu'au
midi de la France; et nous n'en avons que plus tard res-
senti les effets par le français d’Outre-Loire.
Mais la langue importée par les vainqueurs de la Gaule
et par les colons à la suite n'était pas le latin classique et
cicéronien : c'était le langage déformé de Rome, familier
aux soldats et au bas peuple, hérissé de barbarismes. La
latinité gauloise se forma d'abord sur ce modèle; et encore
la nouvelle langue, pour se répandre dans le pays con-
quis mais toujours indompté, dut-elle se soumettre à une
foule d’altérations néologiques, se plier à des exigences
‘ dont la masse de la nation puisait le principe dans son
indépendance. Car, tout en acceptant un langage qu'ils
n'avaient pas appris dans leur enfance, les indigènes ne
renoncèrent pas à leurs habitudes de prononciation, et
firent violence au latin pour l’approprier aux formes natu-
relles de leur pensée.
oignages les plus certains attestent que le vieux
gaulois, en pleine possession de son territoire au VII et
au Ville siècle, se maintint longtemps encore; même au
XIIIe siècle, son extinction n'était pas complète. Mais déjà
tous ces ferments de celte, de latin , de tudesque avaient
commencé à se fusionner. Puis, quand ce pêle-mèle se
réorganisa sous le soufile d’un esprit différent, après de
longues élaborations, une langue véritable était créée.
Elle fut d'abord qualifiée de rustique, comme si elle
n'eùt été qu'une dégénérescence d’idiomes corrompus ;
mais une dénomination plus juste, qui est un souvenir, ne
tarda pas à prévaloir : elle est appelée Romgn ; et c’est le
roman qui a donné naissance à la langue d'Oil et à la
langue d'Oc, ces deux filles si glorieusement régénérées.
— Voy. Léngadd, Patouès, Rouman.
L'œuvre de recomposition fut lente : elle suivit les phases
de la grandeur romaine, qui mit du temps à mourir. Dans
le principe, elle était inconsciente, irréfléchie, ignorant sa
voie, mais entrevoyant un but; elle s’inspirait et se gui-
dait par un vague souvenir, qui n'avait jamais péri et qui
ramenait peu à peu le peuple, lui qui fait la langue, vers
des inflexions qui lui avaient été familières. En acceptant
le latin, il l'avait soumis, par une sorte d’instinct méca-
niqre, aux aptitudes les plus conformes à son organisme
AGN 29
vocal ; en le transformant, il ne cherchait qu'à porter dans
la prononciation les prédilections ou les antipathies qui
étaient dans sa nature.
Un respect traditionnel entourait les racines, qui sont
l'âme des mots : les modifications s’accomplirent donc plus
volontiers sur les désinences. Elles s'adressèrent surtout à
celles qui avaient le cachet romain, d'abord parce qu'elles
étaient moins dans les prédispositions organiques de la
voix, puis parce que ces finales, sans signification par elles-
mêmes, n'affectaient qu'accessoirement la substance du
mot, que le changement ne voulait pas atteindre. Le génie
national reprenait les coneessions arrachées par les vain-
queurs : c'était l’affranchissement qui s'annonçait. Ce
retour à l’ancien esprit gaulois offrirait des coïncidences
qui vont plus loin que les formes du langage.
Mais les signes de cette réaction se manifestent clairement.
Le premier besoin est la rapidité de la parole répondant à
la promptitude de la conception : et la contraction des mots,
la simplification des modes et des cas marquent des écarts
d'indépendance qui protestent contre l'ampleur et la régu-
larité latines. L'accentuation se reprend à des cadences et à
des agencements de syllabes qu'une bouche et une oreille
romaines n'avaient pas inventés : et il s'ensuivit la nécessité
de combiner autrement la forme d’une foule de mots. On
le voit : si les fondements latins restaient encore solides,
un édifice plus jeune s'élevait sur eux.
Les éléments de cette révolution du langage se trouvent
dans le changement de formes, dans les modifications des
désinences, qui obligent l'appareil phonétique à prendre
d’autres flexions plus en harmonie avec ses tendances et
ses habitudes natives. C’est ce qu'il faut constater par des
applications et des exemples. Qu'on en juge à l'œuvre.
Chez nos ancêtres gaulois la forme du sufixe était AC =
EC; nous l'avons déjà signalé. — Voy. À, suff. Son accen-
tuation, forte sans doute, à cause de la lettre finale, devait
cependant être adoucie ou assourdie par un son guttural,
ressemblant à celui du X grec, qui lui servait d'expres-
sion dans l'écriture: et ce qui le prouve, ce sont les
variantes dialectales, conservées dans la néo-celtique en
ach = iac = aue = och —=ech; nuances ménagées pour
estomper des tons trop durs. Les permutations opérées plus
tard en S doux, en J ou G doux, comme équisonnants,
seraient aussi un indice de quelque valeur.
Ces désinences étaient employées à adjectiver les mots,
à former des termes ethniques, patronymiques, géogra-
phiques, à marquer la possession, la filiation, l'apparte-
nance, la collectivité. En voici quelques exemples : Bron,
tristesse, bronach, triste; bod, touffe, bodec, touflu ; karad,
amitié, karadee, aimable; suil, œil, suilech, qui a des yeux;
stan salut, steinech, salutaire; plum ou plwm, plume,
plumauc où plumawe, emplumé, dial. cornique ou cambrique.
En gaélique : Albanach, Écossais; Erionnach, Irlandais ;
Sacsanach, Anglais ; en bas-breton : derv, tann, chène,
dervek, tannec, lieu planté de chènes, abondant en chênes ;
30 AGN
ounn, frène, ounnek, frènaie, etc., etc. — Voy. Zeuss,
Gram. celt.; Le Gonidec, Dict. bret.
Mais, arrive la domination étrangère, et les mots cel-
tiques n’entrent plus dans le langage usuel qu'à la condi-
tion de revêtir la forme romaine. Le latin avait sa termi-
naison caractéristique générale en us, a, um; partout où
un terme gaulois se rapprochait d’un des siens par le sens
ou la consonnance, dans les noms propres qu'il ne tenait
point par politique à défigurer, dans les dénominations
locales qu’il importait de ne pas débaptiser, il s'appropriait
le mot et se contentait d’adjoindre sa formule propre à la
désinence vaincue. Mais à part sa finale en acus, aca, acum,
la plus proche, qui a été la plus durable et qui donne en-
core à bien des noms propres, dans la moyenne latinité,
une physionomie gauloise, il avait aussi ses suflixes en
anus, a, um}; aneus, a, UM; anius, assius, EnNUS, inus,
onus ; de la même catégorie, et exerçant de pareilles fonc-
tions adjectives, possessives ou collectives. Les Gallo-
Romains adoptèrent ces désinences dictées par le vain-
queur, et ils les vulgarisèrent en les étendant en anicus,
enicus, inicus, onicus, a, um, employées généralement au
plur. fém. : anicæ, enicæ, inicæ, onicæ. Suivons la gradation
sur les noms d'hommes et de lieux. On trouve dans César :
Divitiacus, Dumnacus, Valetiacus ; dans Tacite : Galgacus,
Caractacus; Sidoïne-Apollinaire cite Avitacum, prædium
Aviti, Prusianus ; Grégoire de Tours, Brennacum ; l'Iiné-
raire d'Antonin, Juliacum, Tiberiacum, Solimariacum ; les
chartes, Flaviacum, Aureliacum, Pompeiacum, Pauliacum;
et en même temps, à cette dernière période, on rencontre
Martiniacum et Martinhanicæ, Colonia et Colonice,
Condacum et Condusonicæ, Salvanumet Salvanicæ, Alsonum
et Aisonicæ, Veranum et Verananice, et ainsi d’une foule
d’autres. De sorte que la progression pourrait être celle-ci :
Brenn, primitif celtique, donne directement Brennus ; puis
Brennac, Brennacus, celto-latin, fils ou descendant du
Brenn ; et dans les noms communs, devenus noms de lieu,
collectifs, cass, cass-ac, cass-ec, forme celtique; cassacus,
cassanus, casnus, forme latine ; Cassanicæ, forme gallo-
romaine, etc., etc. Les transformations se firent sur ce
modèle; inutile d’en détailler l’interminable nomenclature.
Tel était le produit du mélange du gaulois et du latin,
parlés simultanément, à côté l’un de l’autre sur le même
sol. Les désinences ac = ec affaiblies en ach, auc, ech,
furent donc soumises à la prononciation romaine, qui don-
nait toujours le son dur au C, semblable au K rude,
même sur les voyelles douces e, à, et qui articulait forte-
ment le N, dont il ignorait le son mouillé. Les Gallo-
Romains avaient surenchéri en redoublant les deux sons
de ces consonnes dans anicæ, enicæ, inicæ, onice.
C’est contre la dureté êt la sécheresse de ces intonations
que devait protester la langue romane en France, comme
le firent tous les idiomes dans les pays où les Celtes avaient
séjourné, une fois que la puissance romaine eut cessé de
peser sur le langage.
AGN
Aussi, ac — ec, la forme première, représentée par
acus, ecus, icus, ocus, um, perd-elle d'abord sa finale
latine; puis le e s'amoindrit et coule; il permute avec le
ch ou le j et g doux ; il disparait même entièrement de nos
appellatifs, où il ne se fait jamais sentir. A part quelques
exceptions, qui localisent une dénomination, il se trans-
forme de vingt manières différentes, selon les influences
auxquelles il obéit. Tandis que la géographie ancienne
garde ses acum ou anum immuables, à tous les points de
l’horizon, les terminaisons nominales se sont changées en
a, as, àt, 6, ei, ie, ter, ière, tes, y, eux, ieux, etc. Il faut
encore comparer, pour ces métamorphoses du ac =,
dans la signification adjectivée, nominative, colleclive ou
diminutive, les variantes qui paraissent autant formées sur .
le suffixe celtique que sur le correspondant latin ou sa
latinisation, comme édo, t, iètro, et leurs dérivations où
leurs analogies sur les différentes voyelles, et les affinités
êt les permutations de lettres. — Voy. lettres C, G, et Édo,
1è, etc.
Dans les finales anus, anum ; enus, inus, onus; aneus,
enius, inius, onius, au masc. et au neutre, d'importation
latine plus marquée peut-être ou du moins plus éloi-
gnée des suffixes celtiques, le roman, pour les traduire,
supprime également la caractéristique latine; il garde an,
en, in, on, avec ou sans à antécédent, et souvent même il
efface le n dans les noms communs, au moins de notre dia-
lecte, comme bo, cous?, mati, etc.; et dans ceux où la consonne
persiste, elle prend, dans le Midi surtout, une expression si
fortement nasalisée qu’elle devient un caractère typique de
notre idiome. — Voy. An, suff.
Les désinences féminines ana, ena, ina, ona, una, et
surtout ania, enia, inia, onia, unia; anea, inea, onea,
unea, se reproduisent plus particulièrement dans le vieux
languedocien et dans le moderne par nos finales agno, égno,
ègno, igno, ogno, ugno, qu'emploie le français sous diffé-
rentes formes transmises par le roman, en agne, aigne,
eigne, oïgne, ogne. — Voy. aux mots : Cassagno, Gamégno,
Gascougno, elc., etc.
Et encore sur tous ces suffixes, à peu près indifférem-
ment, tant sur ceux où le c est la consonne dominante que
sur ceux où ln se rencontre, il intervient fréquemment
une autre combinaison très-répétée en aÿe, éje, êje, ije, oje,
uje, le J remplaçant le G doux, —et en acho, ècho, écho,
éncho, icho, ocho, qui dérivent du même principe et qui
vont reparaître sous un autre aspect.
Les Gallo-Romains avaient, disons-nous, représenté les
désinences principalement en icus, a, um, en les latinisant
plus durement, par anicæ, enicæ, inicæ, onicæ, où se rap-
prochaient les deux consonnances fortes de l'N et du C.
C'était une transformation qui voulait peut-être rappeler
le suffixe primitif des aïeux et le mettre en contact avec
ceux des vainqueurs ; mais cette finale de la moyenne lati-
nité, à dur redoublement, devint particulièrement antipa-
thique au roman et aux autres langues néo-latines qui se
AGN
recomposaient. La malheureuse terminaison en nicus, nica,
nicum, quelque voyelle qui lui serve de véhicule, a le don
d'horripiler tous les idiomes en voie de rénovation, et
cause les écarts de prononciation les plus étranges.
En France, le roman en fait anègues, enèques, inègues,
onèques, et aniches, anénches, anges, enges, inges, onge.
Lelanguedocien emploie là-dessus sa voyelle féminine propre
0, mais la forme en est conservée. Dans l'espagnol et l'ita-
lien, comme dans la langue d'Oc, se retrouvent des procé-
dés identiques; et il est remarquable qu'en Espagne, à
propos de l'altération apportée plus tard par le languedo-
cien sur ces désinences anègues, onègues, etc., venant de
anicæ, enicæ, onicæ, se montre une articulation conforme
à nos argues, erqgues, orgues. — Voy. Argue, Canounje, où
des exemples sont cités.
Cette variété anègues, enègues, etc., ne débarrasse pas la
désinence d’une certaine rudesse, qu’amortit à la vérité la
présence de l’e ou l'a atone ou muet, sur lequel elle tombe
en languedocien comme en français; mais nous présumons
que la flexion forte du g n'est ici que le résultat d’une
exigence orthographique, quand il précède les voyelles a,
o, u, dans nos dialectes. L'exactitude de cette induction
nous est démontrée par ce qui existe de pareil en français,
et aussi dans la prononciation du languedocien des Hautes-
. Cévennes. Ainsi, pour traduire le lat. veniat, nos monta-
gnards disent : qué végno, et dans la plaine on prononce :
qué vèngue. Le premier est plus pur; mais cette diffé-
rence a peut-être amené une autre combinaison : celle
du g suivant ln au lieu de la précéder, La mouillure est
moins sensible : cependant ng n’est qu’un équivalent. C'est
une gaportton du germain par les Francs ou les Visi-
gotb$, qui n'avaient aucune facilité à articuler notre gn, et
qui l'ont démontré en changeant presque toujours nos dési-
nences agne, aigne, eigne, igne, ogne, EN ange, inge, onge,
dans les dénominations. Quoi qu'il en soit, la formule ré-
pond exactement, par la suppression de la voyelle e inter-
médiaire, à celle des romanes anègues, enègues, onèques,
et ne sort pas d’une autre provenance. Dans le roman et
au nord, où l’influence germanique se fait plus sentir, on
trouve, comme formes analogues dans la langue du moyen
âge: dunge, dogner et duner, doner et dogner ; aviegne,
avegne, avienent ; espreigne, preigne ; et venge, lenge, donge;
et viengne, tiengne, dongne, qui sont aujourd’hui : donner,
advenir, prendre, venir, tenir; sans compter encore d’au-
tres variantes qui ne laissent pas d’être frappantes et fort
congruentes à notre sujet.
Dans cette généalogie de désinences, ce qui est essentiel
à retenir, c'est l'introduction dans l’accentuation d'élé-
ments tout-à-fait nouveaux et inconnus au latin. Le G
guttural et souvent doux se substitue au C toujours dur
du latin; le CH chuintant, qui est celtique, aspire aussi à
reprendre ses droits; enfin, dans les suffixes qui font le
sujet de notre article et dans beaucoup de leurs variantes,
sur toutes les voyelles s'articule le GN mouillé, une des |
AGN 31
flexions de la plus incontestable origine gauloise. Et cé
n'est pas un phénomène des moins remarquables que la
reproduction de ces mouillures gutturales et nasales dans
tous les idiomes celto-latins au moment où ils se renouvel-
lent. Elles s'étendent mème à 4 mouillé, que le fr. et l'esp.
adoptent, bataille, batalla, etc., que l'ital. représente par gli,
figlia, bataglia, et notre dialecte par l’i tréma, féo, bataïo.
En résumé, quand on suit à la trace ces transformations,
et qu'on étudie leur dégénérescence graduelle dans ses prin-
cipes et dans ses causés, il est difficile de ne pas recon-
naitre, à voir leur identité d'emploi et de destination au-
près du radical, que tous ces suflixes de mème famille sont
égaux entre eux, et que, depuis les primitifs AC = EC en
passant par le latin, ils peuvent ètre ramenés, par une
équation logique et rigoureuse, jusqu'à la forme usitée
dans nos idiomes modernes, si originale qu'en paraisse
l'expression au premier aspect. La singularité de physio-
nomie qu'affectent parfois certaines désinences n’est pas,
au reste, sans avantages : elle signale et met dans un relief
plus frappant le menibre sut lequel il faut d'abord opérer
pour arriver par la dissection jusqu’à l'os, c'est-à-dire au
radical. Dans la recherche des étymologies, il est bon
d'avoir affaire à un mot ainsi surchargé, dont on peut du
premier coup-d'œil dégager l'appendice à tournure connué
d'avance. Mais la parité significative ou l’équipollence des
terminaisons de même catégorie a une portée bien plus
étendue : car si elle permet d'établir entre les mots et les
noms, des analogies qui les font équivalents les uns aux
autres, malgré la différence de leurs formes, quand ils pro-
cèdent d’une racine unique, elle empèche encore et le plus
souvent de confondre, avec un mot qui parait dérivé d'une
langue de formation, comme le latin par exemple, une
simple désinence, qui lui ressemble par sa physionomie,
mais qui n'est en définitive que le produit d’une combi-
naison régulière ou d’une altération successive. Ceci soit
dit en passant pour notre finale Argue, à laquelle nous
renvoyons. Mais que de ceci surtout ressorté clairement
la loi d’affinité, de concordance, d'égalité de valeur dans
les désinences supplétives, ce résultat obtenu sera fécônd ;
et nous tenions à en consolider les bases. Les citations
sous chaque mot feront mieux comprendre son impor-
tance majeure. — Voy. Argue, suf]., Canounje, Cassagno,
Sdouvagnargue, etc.
Notre but ici, au moyen de ces observations générales,
était encore de démontrer qu’au moins une partie de
l'ancienne prononciation s'était conservée dans les Gaules,
et qu'au moment de la rénovation de la langue qui devint
notre idiome roman, tout imprégné de celte et de latin,
qui ne faisait encore que se parler et se préparait à s'écrire
en dévenant la langue d'Oc, cette tradition était assez
intense, assez enracinée pour constituer un de ses attributs.
essentiels, comme il arriva pour le français, l'italien et.
l'espagnol. La prononciation obligea l'alphabet à se com-
biner autrement, avec la mème énergie que la contraction
32 AGR
qui resserrait les mots : ce furent les premières tendances
de l'esprit nouveau. Cependant, le plus souvent, l'expression
significative, dépendance respectée du radical, se maintint,
et l'accent tonique persista, comme en latin, sur la der-
nière syllabe forte ou sur la pénultième. L’intonation, ce
sentiment mélodique représenté par la mesure et la quan-
tité, garda même dans la langue d'Oc de ces réminiscences
qui en ont perpétué l’euphonie presque matérielle en longues
et en brèves, dont nos dialectes ne se sont jamais séparés.
Sans doute, il est difficile de bien apprécier la nature de
ces diverses modifications à la distance où nous sommes de
ce mouvement intellectuel et euphonique de notre langue,
quand les changements peuvent être le résultat de circon-
stances fortuites ou de particularités d’origine, de sol, de
climat, ou de tant d’influences ignorées ; mais nous essaie-
rons de les distinguer et de les débrouiller avec patience,
et à l'aide de tout ce que nous pourrons recueillir de
lumières et d'enseignements.
Nos indications, si insuffisantes qu’elles soient, ne servi-
raient-elles qu'à faire entrevoir la communauté d’extrac-
tion de la langue d’Oïl et de la langue d'Oc, leur contem-
poranéité de formation et de progrès, à montrer que celle-ci,
déchue politiquement, mais aussi littéraire que jamais,
n'est pas un des patois corrompus du français ; ces études,
que de plus habiles compléteront, n’arriveraient-elles qu’à
jeter une lueur bien faible sur nos origines et notre his-
toire, qu’à sauver leur aridité technique par quelque uti-
lité et un peu d'intérêt et de nouveauté, que nous persiste-
rions encore à les suivre, et nous ne croirions pas notre
labeur perdu.
Agnuè, adv. Cette nuit, ce soir. — En vieux français,
on disait : anuit.
Dér. du lat. ad noctem.
Agnuècha (s’), w. S'anuiter, se mettre en chemin la
nuit, voyager de nuit. — Nous agnuèchan, la nuit se fait,
la nuit nous gagne. En v. fr. s’anuister.
Dér. de Gnuë.
Agôou, s. m. plur. Agôousses. Le petit chène-vert épi-
neux; Quercus coccifera, Linn. Plante ligneuse sur laquelle
on cueille le kermès animal ou vermillon. à
Agourini (s’), v. S'acoquiner; prendre des habitudes de
paresse et d'ivrognerie; fréquenter mauvaise compagnie.
Dér. de Gourin.
Agoustén, quo, adj. Du mois d'août, d’arrière-saison.
Dér. du lat. Augustus, qui lui-même a formé août, qui
n’en est qu’une contraction.
Agrada, v. Plaire, convenir, être au gré; agréer, ap-
prouver. — Aquéles éfans s'agradou, fôow lous marida,
ces enfants s'aiment, il faut les marier. Sa fagoun m'agrado,
ses manières me conviennent. S'aqud vous agrado, si vous
approuvez cela.
Dér. de Gra, gré.
Agradèlo, s. f. Épine-vinette; Berberis vulgaris, Linn.
Arbrisseau épineux dont on forme des haies vives. Son
AGR
fruit en grappes est aigrelet et rafraichissant. Agradèlo est
évidemment la corruption d’Aigradèlo, qui n’est qu'un dimi-
nutif d'aïgre; c'est comme si l'on disait : l’Aigrelette.
Agrâoutouni (s'), v. Se recroqueviller, se ratatiner,
comme des cretons ou graisillons, connus en languedocien
sous le nom de grdoutoù. à
Agrava, v. Couvrir un champ de sable, de gravier, par
inondation.— Gardoù agravo lous pras, le Gardon couvre
les prés de gravier.
Dér. de Gravo.
Agrévou, s. m. Houx, arbre toujours vert, à fleurs mo-
nopétales en rosette, hérissées de piquants, à baies rouges,
et dont la seconde écorce sert à faire la glu. De ses bran-
ches flexibles on fait des baguettes, qu’on appelle pour cela
des houssines.— Ilex aquifolium, Linn., de la famille des
Frangulacées ; assez commun dans nos bois. ,
Étym. du grec äypla, qui est le nom du mème arbris-
seau, dér. de &yptos, sauvage, farouche, à cause des épi-
nes longues et fortes de ses feuilles.
Agriable, blo, adj. Agréable.
Trad. du franc.
Agrimouïiè, s. m. Groseiller à maquereau, arbuste épi-
neux, dont les fruits sont assez gros, mais moins doux que
ceux du groseiller sauvage ordinaire; Ribes grossularia, Linn.
Son nom lui vient sans doute du goût aïgre de ses fruits.
Agrimouio, s. f. Groseille à maquereau, fruit de l'ar-
brisseau précédent.
Agrioto, s. f. Griotte; variété de ce qu'on appelle à
Paris la cerise, à laquelle notre griotte ressemble beau-
coup, au goût près. La cerise est fort douce et la griotte
est fort aigre. — Aqud's vraï coumo manjan d'agrüotos, cela
est vrai comme il neige des boudins. Badinan ou manjan
d’agriotos ? Mot à mot : plaisantons-nous où mangeons-
nous des griottes? Est-ce pour rire ou tout de bon? Tel
est le sens. Dans notre dicton, les griottes se trouvent mê-
lées par la raison que leur goût âpre et acide fait faire à
celui qui les mange une grimace, qui ressemble au rire,
une sorte de rire aigre-doux, sardonique, laissant le choix
entre le rire ou la grimace.
Agroumandi, v. Affriander, apâter, affrioler. Le même
que Agalavardi. — V. c. m. j
Dér. de Grouman.
Agroumia (s’), ou Agroumouli (s’), v. Se blottir; s'ac-
croupir; se mettre en peloton ; se tapir dans un coin; se
ramasser comme pour rentrer en soi-même. :
Dér. du lat. grumus, grumeau, qui a donné aussi gru-
mèl, du primitif grum, grain, d’où grumo, etc.
Agroutiè, s. m. Griottier, arbre qui porte la griolte.
— Voy. Grioto.
Agruméli, v. Pelotonner, former des caillots, mettre
en grumeaux. — Se dit des choses, jamais des personnes,
pour lesquelles on se sert de Agroumouli.
Dér. de Grumel.
Agrunas, s. m. Prunellier ou prunier sauvage ; Prunus
AGU
spinosa, Linn., arbrisseau de la famille des Rosacées. Son
fruit est d'une acidité et d'une Apreté remarquables. —
On dit également : Agrugnèet Agrunëiè. — Voy. Bouïssoù.
Étym. de &yprs, sauvage, champêtre; le celt. avait
aigr, aigre.
Agrunèlo, s. f. Prunelle, fruit de l'agrunas, dont on
fait de l'eau-de-vie.
Mème étym.
Agu, part. pass. du v. Avédre, avoir ; eu, possédé.
Aguè, 3° pers. sing. du prét. du v. Avédre. Il ou elle eut.
Aguè (à l'},, adv. Aux aguets, à la piste.
Dér, du grec äyéw, considérer attentivement.
-Aguïado, s. f: Aiguillée de fil; aiguillon du laboureur :
le bout pointu sert à piquer les bœufs, l'autre extrémité
est armée d'une petite pelle, qui sert à racler la terre du
soc et qui s'appelle Bourboussado.
Dér. d’Aguïo.
Aguialas, s. m. Aquilon, vent du nord-est. Il souflle
pour Alais des Alpes piémontaises. — Il y a sans doute
bien doin du latin Aguilo au langued: Aguialas, cepen-
dant onne peut méconnnaitre entre les deux mots un air
de famille. Le q du premier se change souvent en g par
euphonie : c'est ici le cas. Quant à la terminaison, elle
exprime évidemment un péjoratif caractéristique, car on
‘ne parle de ce vent qu'avec aversion. Le grec alyrahôs,
rivage, bord de la mer, vent de terre, a peut-être aussi
contribué à sa formation.
Aguïè, s. m. Porte-aiguille; pelotte, sorte de coussinet
ou de bourrelet destiné à piquer les épingles etles aiguilles,
recouvert et barriolé de morceaux de drap ou de velours.
Autrefffles femmes de noblesse ou de bourgeoisie en fai-
saient un ajustement de toilette qu’elles portaient suspendu
à leur ceinture à côté de l'aumônière ou du claviè. (V.c. m.)
Aujourd’hui des breloques remplacent ces deux symboles du
travail et de la charité : la pelotte a aussi perdu sa place.
Le mot lui-mème commence à être hors d'usage : affaire de
mode, trait de mœurs, signe du temps.
Odde, de Triors, dans ses Joyeuses Recherches de la langue
tolosaine, de 1578, décrit comme suit ce petit bijou :
« Aguillier est à dire vn petit peloton de drap que les fem-
mes coustumierement tiennent pendu en leur ceinture, en-
semble auec leur bource, auquel elles mettent et fichent
leurs espingles, et doit estre tousiours beau, ioly, et s’il
est possible neuf et la bource semblablement, autrement
cela n'a point de nez, principalement quand de ieunes
femmes le portent, car il n'est guivre beau et seant à vne
ieune femme de prendre.vn vieil Aguillier, non plus qu'il
est beau de chausser quelque vieille sabatte, groulle, ou
escarpin dans quelque belle pantoufle, tonte neufue, ou
mettre quelque vieil petas et piece de drap vsée sur de belles
chausses toutes neufues. Et pour preuue de cela, ie mettray
icy en auant ce nouueau et assez vsité prouerbe en ceste
ville. de Tolose disant ainsin : À bourgo nauuo non cal
aguillier vieil ; et hæc sint dicla nemine nominando. »
AIA +
Aguio, s. f. Aiguille à coudre, à tricoter; aiguille de
montre; pièce de fer pour planter les vignes ou les saules...
— Méntis pas dé la pouncho d'uno aguño, il ne ment pas
d'un iota. ds
Dér. de Acus, às, aiguille.
Aguincha ou Guincha, v. Viser, prendre pour point de
mire.
Dér. de Guinche ou guènche, louche, parce qu'en visant
ainsi, on ferme un œil pour mieux régulariser la ligne
visuelle, et on a l'air de loucher. Peut-être encore ce verbe
tire-t-il son origine de l'esp. guinar, regarder du coin de l'œil,
eta-t-il la même communauté de sens avec le franç. guigner.
Agusa, v. Aiïguiser, rendre aigu; pointu, tranchant.
Étym. du lat. Acuo; acus, acutus.
Agusadouïro, s. f. Pierre à aiguiser. — Voy. Chafre.
Ah! interj. Ah!
Ah! bé! interj. Ah! pour le coup !
Ai, 4re pers. sing. ind. prés. du v. Avédre; j'ai.
Ai, interj. Aïe, cri de souffrance, de plainte, de sur-
prise. — Aï/ dé ma dén! Ah! la dent! Aï/ mé fas mdou!
Aïe ! tu me fais mal. Aï/ gai sès ? Ah! vous voila?
Ai, diphthongue, c'est-à-dire réunion de deux voyelles
produisant un double son par une seulemémission de. voix,
L'articulation de cette syllabe, dans la langued'Oc, se fait
en appuyant sur la première voyelle, tandis que la seconde
reste faible: la voix dominante ici porte sur l'a, elle s'adou-
cit et s'efface presque sur l’i final.
En vertu du principe que toutes les lettres se prononcent
et se font sentir, nous aurions pu éviter de marquer l'#
d’un signe particulier. L'italien et le grec n'en emploient
pas : ils écrivent simplement farai, vedrai; 6kaçés, fuat,
xl, et tous les infinitifs passifs; et leur diphthongue aiala
même consonnance que la nôtre. Cependant le tréma, nous
a paru nécessaire, d'abord pour marquer une différence
dans la prononciation de l'i entre ses variétés d’inflexion
(F. la lettre 7); puis, pour sauver une exception que nous
étions forcé d'admettre. Voici le cas : le français a la diph-
thongue simple, sorte de voyelle, formée des deux lettresai,
qu'il prononce tantôt comme é fermé, j'aimai, tantôt comme
è grave, j'aimais; or dans notre dialecte se rencontrent
certains mots d'origine toute française, mais impatronisés et
consacrés depuis longtemps parmi nous, quoique en assez
petit nombre, notamment, pour les citer presque tous :
air, Alais, hais, conjonc. Pour ceux-là nous demandons,
en faveur des lecteurs habitués à lire à la française, de leur
conserver leur physionomie orthographique à la française.
Certes, ils ne perdraient rien à être écrits comme ils se
prononcent: èr, Alès, mè; cependant le moindre trouble
à la lecture résulterait-il de cette configuration puriste, et
il reviendrait :souvent, ce serait assez pour justifier une
exception si peu exigeante d'ailleurs. L'emploi du tréma
sur l'i après a devient ainsi tout à fait logique, et la règle.
se trouve mieux confirmée, en rendant sensible la distinction,
et en maintenant invariablement le son diphthongué sur aï.
5
% MG.
Aïado, s. f. Sauce à l'ail, aillade; coulis du paysan, fait
avec de l'ail, du persil:et du poivre. En Provence, cette
sauce s'appelle atoli, parce qu'il y entre aussi de l'huile.
Dér. de Aïé.
Aïçaï, adv. Çà, deçà, de ce côlé, mais un peu. plus loin.
— Tira-vous aigaï, passez de çà, de.ce. côté.
Dér. du lat. Hàc.
Aïçalin, adv, Ici-bas, ci-dedans,
.r Comp, de Aïcè etialin.
Aïçamoun, adv. Cà-haut.
Comp. de Aïci.et amoun.
Aïçamoundâou, adv. Cà-haut, mais plus haut encore
que là place oécupée par l'interlocuteur.
Comp. de Aici et amoundäou.
Aïçaval, adv. Cà-bas. l'est presque synon, de Aïçalin.
Comp. de Aïe? et aval.
Aïci, ado. Ici, dans cet endroit. — D'aïci-'n-lai, doré-
navant. D'aïci-’n-foro, en sortant d'ici, de ce pas, doréna-
vant:
Dér. du lat: Hic.
Aiçd, pron. démonst. Ceci.— Qué séra tout aïgù ? qu’'ar-
rivera-t-il? que sera-ce que tout ceci? Ai pdou qu'aïçà :vi-
rara mdou, j'ai peur que ceci tournera mal.
Dér. du lat: Hoc.
Aïçgô-Aïlô, phr. faite. Ceci-cela, des si et des mais.
Aïé, s. m. Ail, plante de la famille des Liliacées, AUium
sativum, Linn.— Son oignon se divise en plusieurs gousses
nommées beségno. L'assemblage de ces caïeux forme une
tète qu'on nomme boussélo.
Etym. du lat. Alium.
Aïècha (s'), v. S'aliter, garder le lit:
Dér. de: Je.
‘ Aïèiro, s. f. ou Aïguïèiro, s. f. Evier, conduit, égoùt
des eaux de cuisine.
Dér. du lat. Aquarium. — Aïdiro n'est que la contrac-
tion euphonique de aïguiiro.
Aigadino, s. f. Ondée, pluie subite d'orage peu vio-
lente; une faible inondation, ou plutôt l’inondation d’un
petit torrent, d'un ravin.
*Dér. de Aigo.
Aïgagnäou, s. m”. Rosée, serein, vapeur exhalée de
lhumus terrestre et condensée par le contact de l’air froid
desla nuit: Malgré la démonstration physique, on dit :
tombo d'cigagnäou, comme si la rosée tombait d'en haut,
Le languedocien, passe encore; mais le français, qui doit
être: etiqui est: eneflet plus docte, dit à: merveille : tomber
dela rosée, le serein tombe; et personne ne s’en émeut.
Dér. de Aïgo et de gnuëè, eau de nuit.
Aïgaïè, s. m. n.pr. de lieu. Aigaliers, Aquilerium, com-
mune du canton d'Uzès. — Voy. Aigoùs, et:1èïro, suffi
“Aïgaje; s. m. Ce mot a le mème sens que aïgagndou,
mais ilést plus générique; il désigne seulement: l'humidité:
desiprés, du: terrain, de la feuille de müriers; trempés :de-
rosée;
AIG.
Aïgarado, s. f. De l'eau rougie, du vin trempé: outre.
mesure et:qui n'a conservé qu'une teinte rosée; dé-la rin-
çure, de l'abondance. C’est. aussi une ondée d'eau de: vais-
selle.
Aïgardén, s. m. Eau-de-vie, alcool, liqueur plus ow
moins, spiritueuse. et incolore.
Formé de Aïgo et du lat. ardens, brûlant. En esp., agua
ardiente; en ital. anc. acqua ardente.
Aigardéntiè, s. m. Marchand, débitant, distillateur
d'eau-de-vie; particulièrement les marchands. ambulants
d’eau-de-vie, qui la débitent par contrebande. dans lescwil-
lages et hameaux, loin des agents de la régie.
Aïgasso, s. f., péjor. d’Aïgo. Eau sale, de mauvais-goût,
et même de l’eau pure, eu égard au mépris que lui témoi-
gnent les ivrognes.
Aïglo, s. f. Aigle, oiseau de proie, de. l'ordre: des Ra-
paces; Falco fulvus, Linn. Aquila fusca. Le. français fait
une distinction de genre lorsqu'il s'agit de l'oiseau, animal,
quiest masculin, ou-de l'emblème, insigne, qui: est alors,
féminin ; le languedocien n'admet pas cette: différences
seulement, lorsqu'il parle de l'aigle romaine ou napoléo-
nienne, il francise tout à fait et prononce èglo. L'un. et.
l'autre mot sont d’origine française.
Aïgo, s. m., dim. Aïguéto; péj. Aïgasso. Eau. — Füou
pas dire d'aquél' aigo noun béouraï, il ne faut pas dire:
fontaine, je ne boirai pas de ton eau, pour: iline faut jurers
de rien. Véou pas l’aïgo qué béou, il ne vaut: pas: l'eau
qu'il boit; c’est, un homme de peu de valeur: Aÿ pantaïsa
d'aïgos trébous, j'ai fait un mauvais rêve. Pér avédre dé:
bono ago, féou ana. à la bono fon, pour avoir, de bonne:
eau, il faut.aller à la bonne source ; qui veut bon conseil,
s'adresse à bon conseiller. Kaïre las aïgos, se dit: des eaux:
qu'une femme prête à accoucher. rend aussitôt: que: le: pla
centa s'entr'ouvre pour laisser passage à l'enfant. Escampa.
d'aïgo, verser de l'eau, uriner, pisser: Las aïgos li vènou.
as. ièls, les larmes lui viennent aux yeux. Aïgo quélcourei
fai pas mdou âou moure; en franc. du XVe siècle, on
disait dans le même sens: Esve (eau) qui: court neporte
point d’ordures (Prov. Gall, ms. cité par Le Roux de
Lincy). Aquêl vièl a éncaro bono.aïigo, ce Vieïllardest.en-
core vert, il.a bonne mine. Douna l'aïgo, ondoyer, un.
enfant. L'an batéja émbé d'aïgo dé: mérlusso, ilLest: mal
baptisé, c'est un pauvre chrétien.
Aïgo-boulido, s. f. Eau bouillie, potage à l’eau, au sel
à l'ailet à l'huile.
Aïgo-déou-méinage, s. f. Eau de vaisselle, lavure.
Aigo-courén, eau courante, rivière ou ruisseau. — L'adj,
reste, au masculin, comme dans le mot: suivant, seulement
pour, l'euphonie.
Aïgo-for, s. f. Eau forte. — On donne cette qualifiçationà.
l'acide nitrique ou sulfurique, à cause de:sa force dissolvante.
Aïgo dé sardos, saumure desardines. Lasaumure s'exprime:
aussi par Aïgo-sdou, composé de.aïgo et de sdou, avec sup-
pression.de: l’article, comme dans les deux mots suivants
AIG
— JAïgo-nafo, éau de fleurs d’oraiger, éau de naffe. Du lat.
“Aïÿo-roso, éau-rose, de fleurs de rosier.
Aïgo-signado, ‘eau bénite. Signado, marquée du signe de
‘la croix.
Étym. du lat. Aqua; du rad. célt. Aa, ae, ag, eau.
_“Aïgo-Morto, s. f. n. pr. Aigues-Mortés, ville, arrondis-
‘sement de Nimes.
Ce nom est composé avec l'adjectif qualificatif et le
“réprésentant languédocién du célt. aa, ag, aqua, eau, trans-
formé par le roman eve, ave, ve, euve, et ses nombreuses
variantes. Il est entré de même dans Aïgo-Vivo, Aigues-
Vives (Gard), et autres.
Aïgo-pouncho, s. f. Bourgé-épine, espèce de nerprun ;
Ramñus catharticus, Linn. Arbrisseau de la famille des
Frangulacées, dont la feuille, l'écorce et surtout les baies
sont purgatives. — Avec le suc épaissi des baies de ner-
prun êt un peu d’alun, on prépare la couleur verte connue
‘sous le nom de vert de vessie.
"Aïgoùs, ouso, adj. Aqueux, de la nature de l’eau, qui
mtiënt de l'eau, abondant en eau.
Dér. du lat. Aquosus, formé du rad. celt. Aa, ac, ag,
ayg, eau.
I n’est pas peut-être de railical qui soit entré dans la com-
position de plus de mots, avec plus de variantes. Nous ne fai-
sons pas ici un dictionnaire géographique, pour le relever dans
tous les noms de lieu qu'il a formés ; mais nous le signalons
dans quelques localités les plus rapprochées, pour constater
certaines analogies étymologiques à l'appui de ce que nous
disons des noms propres locaux. Ainsi Aïgouso, Saint-Lau-
rent-youze (Gard), et Aïguéso, Aiguèze (Gard), Aïgaië,
Aquilérium, Aigaliérs (Gard), identiques entre eux, le seront
encore avec Agusargues, Agusanicæ, Agusargues (Hérault),
avec Aguzan, commune de Conqueirac (Gard) ; avec Aguessac
(Aveyron), Aguillan (Drôme), comme avec Eyguières, Aqua-
ria, et Eygalières, Aquaria (Bouches-du-Rhône); et de même
âvéc Guzargues (Hérault), et Guzan (Hérault), par apocope de
Va initial. Tous ces noms sont dérivés de la même source,
ét la différence de leurs désinences n'ôte rien à leur com-
munauté d'origine et de signification. — Voy. Argue.
Aïgo-vès, s. m. Eau-versant, lés eaux-versantes d'une
montagne, terme de cadastre: l'arôte, l'angle supérieur du
prisme de la montagne ou de la colline.
Dér. de Aïgo et de ves, en bass.-lat. Aqui-vergium.
Aïgre, s. m. Coin de fer, outil quelconque faisant levier,
quelquefois mêmeune pierre plus dure que les autres, qu'on
pour point d'appui au pied-de-biche d'un levier, quand
on véut soulever une masse, où débiter un banc de pierre,
où faire une pesée. C'est ce qu'on nomme en français :
wœrgueil. — Ce mot, qui n'est guère usité que chez les carriers
et les chauffourniers, a donné naissance à un verbe fort
employé, aïgréja, et dont l’acception en” est classique
et multipliée dans ses applications. :
Dér: ‘de Aïgre, à étym. lat. aéér, abris.
AIM #
Aigre, gro, adj. Aigre, acide, piquant au goût; au fig:,
piquant, fâcheux, mordant.
Aïgréja, ». Aigrir, sentir l'aigre, tourner à l'aigre. —
Voy. Aïgre, adj.
Aïgréja, v. Au prop. secouer fortement, cuittrétesien
leviér, faire une pesée, Au fig, mettre en mouvement,
mettre en route, décider, S'aïgréja, commencer à se remuer,
se secouer, s'aviver, se mettre en train. Un enfant s'aïgréjo
quand il se réveille, qu'il se démène et qu'il commencée à
pleurer.
Dér. de Aïgre, s. m.
Aïgréto, s. f. Oseille; Rumex acetosa, Rumex scutatus,
Lion. Plante champêtre et potagère à saveur trésacide.
Dér. de Aïgre, adj.
Aïgri (s’), v. S'aigrir, devenir aigre, passer à l'aigre.
Aïguéja, v. Laver souvent; arroser, mouiller, baigner;
passer du linge à l'eau simple.
Dér. de Aïgo.
Aïguièiro, s. f. Evier. — Voy. Aïeïro.
Aïlaï, adv. De ce côté-la, de l'autre côté. — Lassas
aqud aïlax, laissez donc cela ; brisez-là ; n'en parlez plus.
— Voy. D'aïlai, En-lax.
Formé du lat. Ad et illà, ou illàc.
Aïlamoun, adv. Là-haut, au-dessus, amont.
Formé du lat. Zlà, et ad montem, vers la montagne, du
côté d’en haut.
Aïlamoundâou, adv. Bien plus haut. C'est un angmen-
tatif d’Aïlamoun, en y nd ddou, haut, qui est un
réduplicatif de amoun.
Aïlaval, adv. Là-bas, aval.
Formé du lat. 71là et de ad vallem, vers la vallée, vers
le bas.
Aïma, v. Aimer, prendre plaisir à, se plaire à, désirer:
Dér. du lat. Amare.
Aïmable, blo, adj. Dim. Aïmabloù, aïmabléto; péjor.
Aimablas, so. Aimable. — Le péj. armablas ne se dil que
par contre-vérité. — Sès aïmablas / vous êtes gentil! repro-
che-t-on à quelqu'un qui fait ou dit quelque chose de
désagréable, de mauvais goût.
Aïmargue, s. m. n. pr. de lieu. Aimargues, qui s'écri-
vait aussi Aymargues, commune et petite ville dans le can-
ton de Vauvert (Gard).
Le nom d'Aimargue, parmi ceux qui portent la même
finale, se prête moins qu'aucun autre à la combinaison fan-
taisiste qui voulait que toutes ces dénominations désignassent
des maisons de campagne ayant appartenu dans l'origine attk
plus noblès familles patriciennes de Rome, ou tout aû moins
à leurs riches affranchis établis autour de la métropole de
Nimes. Dans la composition du mot, il n'entre ni lé nom
d'homme Æmilius, ni même le latin ager, domaine.
Pour s'en convaincre, il suffit de dégager d'abord là
désinence adjectivé argue, sur le sens et l'origine dé 14-
quelle nous nous éxpliquons. — Toy. Argue. Réstè
corps du mot ; et remarquons qu'il a subi bien dés träñisfor-
36 AIN
_ mations, et que sa forme la plus récente n’a pas pu d'évi-
dence autoriser sa plus ancienne dérivation.
Or, le premier titre latin qui mentionne cette localité,
est de l’an 813; elle y est appelée Armasanica in litlora-
ria. En 961, et dans les actes publics depuis cette époque,
on écrit tantôt Armasianici, Armatianicæ, tantôt Armada-
.micæ, Armazanicæ, qui se fixent enfin en Armasanicæ.
Dans le même temps, comme pour tous les noms à finale
identique, la langue vulgaire disait Armasanègues, qui se
trouve dans les vieilles chartes, et plus tard Emargues,
Marques, Aimargues.
En latin, comme en roman, on le voit, le radical est le
mème; et il s’est conservé en languedocien. Armas ou
Ermas, qui signifie, dans notre vieil idiome, marais, ter-
rain marécageux, vague, inculte, s'approprie très-bien à la
situation d’Aimargues, encore in littoraria au IXe siècle,
et à plus forle raison quand l'appellation dut lui être ap-
pliquée. Armasanica où Armasanèques supposent le pri-
mitif Armas-ac où Armas-ec, ayant passé par Armas-ana
où Armas-aca, latin, et n’ont pas d’autre sens que, champ,
domaine, propriété, villa de l'Armas. Ce qui est modeste,
et moins flatteur peut-être que la descendance romaine ou
gallo-romaine de Æmilius, mais plus certain et plus naturel.
— Voy. Agno, suff.
Il est vrai que, dans la forme nouvelle, la substitution,
sur la première syllabe, de la lettre à à la consonne r est
étrange; mais le fait n’est pas isolé, on le dirait mème sys-
tématique dans la composition de noms de ce genre dans
notre pays. En effet, pour le Gard seulement, on trouve
Goudargues, représenté par le lat. Gordanicus et Gorda-
nicæ; Boussargues, par Brossanicæ; Bassargues, par Bar-
sanicæ; Goussargues, par Gorsanicæ ; Massargues, par
Marsanice.
Malgré les variétés de désinences qui se sont attachées
à la racine, il convient de rapprocher les analogies qu'in-
diquent et que justifient les changements eux-mêmes du
nom d’'Aimargue que nous venons de signaler. Ainsi nous
trouverons les mèmes mots dans : Arman (Basses-Pyré-
nées); Armeau (Isère); Armens (Gironde); Armous et
peut-être Armagnac (Gers); Herm (Landes et Basses-P yré-
nées); L'Herm (Gironde); L'Herm (Ariége, Haute-Garonne,
Lot); Hermaux (Lozère) ; Armes (Isère); Armissan, Armel-
lan (Aude); Armilhac (Lot-et-Garonne). Que ces dénomi-
nations ethniques viennent denotre armas, langued., ou du
gr. Épnuos, qui a fait le lat. eremus, leur identité est incon-
testable, et justifie notre système de formation des noms.
Aïna, ado, s. et adj. Ainé, ée, le premier né des en-
fants; par ext. personne plus âgée qu'une autre, — Dans
les familles villageoises, il est d'usage de distinguer le fils
ainé en l'appelant l'aïna, le puiné cadè, et les autres, de
leurs prénoms.— Faïre un aïna, faire à son fils aîné tous
les avantages que permet la loi. Sès moun aïna dé quatre
ans, Nous êtes plus âgé que moi de quatre ans.
Dér. du lat. antè natus, né avant.
AIS
Air ou Êr, s. m. Air, fluide qui entoure le globe ter-
restre ; vent, vent-coulis; mine, manière, physionomie,
façon, allure; chant. — Anas préne l'air; allez prendre
l'air. Faï d'air, un pdou d'air, il fait de l'air, il fait un
peu de vent. À prés un air, un co d'air, il a pris froid, il
a une fluxion, une transpiration arrêtée. Prén un air, il
prend des airs de fierté. À un air dé sé ficha dé ièou, il
semble vouloir se moquer de moi. Dono d'air à soun pèro,
il a un air de ressemblance avec son père, c’est tout le
portrait de son père. N'a pas l'air, il ne parait pas. Canta-
nous un air, chantez une chanson.
En l'air, adv. En l'air, en haut.
Dér. du lat. Aër.
Aïradé, s. m. Airelle ou myrtille, Vaccinium myrtillus,
Linn.; petit arbuste de la fam. des Bruyères ou Ericacées.
— Il croit sur les hautes montagnes, et ses fruits sont assez
agréables au goût.
Dér. du gr. AE, ay6s, de chèvre, plante de chèvre.
Airé ou Ëré, s. m. dim. de Air. Petit air ; air, mine,
tournure. — Un airécharman qué noun saï, un petit air,
une tournure charmante et gentille comme on ne peut
mieux. Ë
Airéto, s. f. Petite enclume de faucheur pour rabattre
la faux, pour étirer son morfil.
Airiè, s. m. Chef d’une aire à battre le blé; celui qui en
dirige les opérations.
Dér. de Airo.
Airo, s. f. Dim. Airéto. Aire, plate-forme pour battre le
blé ; plate-forme pour les tuiliers, les potiers.
Dérivé du lat. Area. ;
Aïrôou, s. m”. Dim. Aïroulé. Aire, la quantité de
gerbes qu'on foule à la fois sur l'aire; jonchée de diffé-
rentes choses répandues sur la terre. — Ramassa la pas-
turo à bèles aïrôous, ramasser du fourrage trop clair-semé
par jonchées de quelques pouces d'épaisseur.
Dér. de Aïro.
Aïsa, do, adj. Aisé; mais il n’emprunte à cet adj. franc.
que cette seule acception relative à l’aisance de fortune.
Appliqué aux personnes, il signifie : douillet, délicat, qui
aime ses aises, qui plaint sa peine. Dans ce sens, il se
rapproche de Couwmode. V. ©. m.— Aqud po sé dire un
home aïsa, voilà un homme qu’on peut dire jouir d’une
honnête aisance.
Dér. de Aïse.
Aïsanço, s. f. Commodité, faculté, convenance. Par
opposition au mot précédent, aisango n’est jamais employé
pour aisance de fortune. — Aqud's une bèlo aïsango, cela
est fort commode, cela évite de la peine, des corvées.
L'aïisançgo d'un oustâou, la bonne distribution, les facultés
d'une maison, un arrangement commode où chaque chose
est à portée. |
Dér. de Aïse.
Aïse, s. m. Dim. Aïsé, augm. iron. Aïsas. Aise, con-
tentement, commodité, repos heureux, satisfaction, sans-
CT ES CS
: Préne sous aïses, se prélasser, se dorlotter :
AIS
gène. — Soui én aïse dé vous véire, je suis charmé, bien
aise de vous voir. Aquél home és à soun aïse, cet homme
jouit d'une honnête aisance. Faraï aqud à moun aïse, je
: ferai cela à loisir, sans trop me presser. Marcha à soun
aïse, marcher à pas lents, au pas de promenade. Y-ana
, aller doucement, avec précaution, sans se presser.
] c'est le far-
niente des Italiens. Vaï à toun aïsas, moun home, ne te
: gène pas, mon garçon.
Étym. du gr. Alsæ, convenance, bienséance, d'où aotos,
heureux, favorable.
. Aïses, s. m. pl. Êtres d’une maison, d'une contrée. —
Sa lous aïses, sé pérdra pas, il connait la maison, le pays,
il ne s’égarera pas. Un chasseur doit connaitre lous aïses,
les allures, les mœurs, les remises du gibier.
Aïsi, ido, adj. Commode, facile; bien à la main. —
Aquél oustdou és bièn aïsi, cette maison est fort commode.
Aquélo piolo és bièn aïsido, cette cognée est bien à la
main. Sa fénno és pas gaïre aïsido, sa femme est d'humeur
revèche et peu facile à vivre.
Dér. d'Aïse.
Aiïsino, s. f. Nom générique que l'on donne à tout
ustensile, ou meuble, ou vase, qui sert à contenir soit un
liquide, soit un solide. Ainsi, un panier, un plat, un seau,
‘un tonneau, sont tout autant d’aïsinos.
Dér. de Aïsi.
Aïssado, s. f. Dim. Aiïssadéto. Marre, houe, outil de
jardinier. — Dans les Hautes-Cévennes et dans le Vivarais,
cet outil a un manche assez court, sa lame est triangulaire
et légèrement recourhée en-dedans; c'est la même forme
que la maille ou maigle de Bourgogne et la chèvre de Lor-
raine. À Alais et dans les environs, le manche en est long,
la lame large en carré-long et tranchant au bout; sa sur-
face est plate; elle décrit un angle de 45 degrés avec son
manche, qui s’y joint par un anneau ou œil et non par
une douille comme la pelle. L'aïssado ou trénquo jardi-
gnéro est plus large de lame; l'angle de la lame et du
manche est plus aigu que dans le précédent outil. Celui-ci
sert particulièrement aux jardiniers pour faire les semis ou
‘plantations à raies dans un terrain meuble, et à creuser les
canaux d'irrigation.
. L'Aïssadéto est une serfouette, petit outil à lame pointue
du bout, à l’usage des jardiniers et fleuristes, pour gratter
Ja terre autour des plantes jeunes et délicates.
Dér. du lat. Ascia.
Aïssadoù, s. m. dim. Le même que le précédent Aïssadéto.
_ Aïsséja, v. Se plaindre, geindre, soupirer.
+ Formé de l’interj. Aï/ — Ces sortes de formation des
verbes fréquentatifs sont un des caractères particuliers de
Ja langue d'Oc. Les augm., les dim., les péjor. appartien-
nent à un même ordre d'idées. Il est peu de mots dont on
_ne puisse faire un verbe, et peu de he ne puissent
mg 2 4 A
cit ou renforce même le sens primitif.
t, adou-
AJU 37
Aïsséjaire, ro, adÿ. Douillet, qui aime à se plaindre,
qui ne cesse de gémir ; malade imaginaire.
Aïsséto, s. m. Aissette ou aisseau, petite hache de ton-
nelier et de sabotier, dont le manche, d'environ six pouces
de long, porte un fer qui a d'un côté un large tranchant
recourbé, et de l’autre une panne, un marteau, et quelque-
fois une douille simple.
Étym. du lat. Ascia, hache.
Aisséto, s. f. Plainte faible; soupir continu d’un enfant
qui souffre, propre particulièrement à la fièvre. — Aquél
éfan méno uno aïsséto qué dévigno pas rés dé bo, ce pauvre
enfant a une manière de se plaindre qui n’est pas de bon
augure.
Même rac. que Aisséja.
Aïtabé, Tabé, Aïtambé, També, adv. Aussi, aussi
bien, à cause de cela.
Formés de Tan ou aïtan, autant, et de bé, bien.
Aïtan, adv. et s. m. Autant, tant. — Un doutre aïlan,
une autre fois autant.
Aïuèncha (s'), v. S’éloigner, s'écarter d'un lieu, d'une
personne.
Dér. de Juèn.
Aja, ado, adj. Agé, qui est avancé en âge.
Trad. du franç.
A-ja! interj. Cri de commandement d'un charretier pour
faire obliquer son attelage à gauche.
Ajassa, v. Coucher par terre, ou sur un lit. — Bla
ajassa, blé versé.
Ajassa (s’), v. Se coucher, s'étendre. — En parlant des
vers à soie, il signifie: entrer en mue, se coucher sur la
litière (jas). — Lous magnas couménçou dé s'ajassa ; s'ajas-
sou à las quatre, les vers commencent à entrer en mue ; ils
sont à la quatrième maladie.
Dér. de Jas.
Aje, s. m. Age. — Il semble une simple traduction
du franç. C'est un de ces mots qui, manquant à la
langue, ont dù être empruntés à leur voisin. En bon
languedocien, on l’évite autant que possible. — On dit
très-bien cependant : Un home d'aje, un vicillard. Es
éncaro d'un bon aje, il n'est pas encore trop âgé.
Sé fai adija din l'aje, il commence à être d’un âge assez
avancé.
Ajouqua, v. Jucher, percher, accrocher en haut.
Ajouqua (s’), v. S'accroupir, s’assoupir, s'endormir sur
sa chaise; en parlant des perdrix, se raser, quand elles
aperçoivent l'oiseau de proie.
Etym. du lat. Jugum, perche, juchoir, ou de Jacere.
Ajougne, v. Atteindre, attraper, joindre quelqu'un qui
marchait devant.
Dér. du lat. Adjungere.
Ajuda, v. Aider, secourir, venir en aide. — Les villa-
geois, lorsqu'ils invitent à diner un ami, ne manquent
jamais de lui annoncer le mets principal du repas. Ainsi
on lui dit: Véndras m'ajuda à manja uno éspanléto, tu
38 ALA
viendras prendre ta part d’une éclanche. Diow m'ajude,
Dieu me soit en aide.
Dér. du lat. Adjuvare.
Ajudo, s. f. Aide, secours, assistance, protection ; celui
qui aide dans un travail. — As uno bono ajudo émbé ta
fénno, tu as un bon associé avec ta femme. Siès dé pdouro
ajudo, tu es d’un faible secours. Un pou d'ajudo faï
gran bé, Prvb, un peu d'aide fait grand bien. On dit alter-
nativement : Bon dré a besoun où n'a pas besoun d'ajudo,
le bon droit a où n'a pas besoin d'aide. Le premier sens
est rassurant; il ne faut pas toujours se fier au second.
Dér. de Adjuvare.
Ajusta, v. Ajouter, joindre, ajuster, additionner, mettre
quelque chose de plus; viser pour atteindre un but en
tirant. — Les premières acceptions dérivent de adjungere,
joindre ensemble ; la dernière est formée du lat. ad-justum,
juste, droit.
Ajustoù, s. m. Petite pièce de bois ou d'étofle, ajoutée
par assemblage ou par couture à une autre trop courte ou
trop étroite.
Dér. du lat. Adjungere.
Al, artie. masc. sing. dat. Au, roman-languedocien ; inu-
sité aujourd'hui dans notre dialecte, mais encore employé
dans la région montagneuse des Cévennes, et mème dans
une partie de l'Hérault. Il est formé par la contraction de
à lou, qui a donné dou. — Voy. Aou.
At est aussi l’article arabe qui s'est incorporé à quelques
mots lang. et fr., tels que alambi, etc.
Aladèr, s. m. Alaterne sauvage; Rhamnus alaternus,
Linn. Arbrisseau de la famille des Frangulacées, toujours
vert, qui croît sur nos collines et surtout parmi les bruyères,
auxquelles il se trouve mêlé quand on s’en sert pour ramer
les vers à soie; sa feuille ressemble à celle de l'olivier.
Son nom lat. alaternus est probablement une altération de
alternus, parce que les feuilles de l’aladèr, alaterne, sont
alternées sur leurs branches.
Alafan, s.m.Eléphant; Elephas maæimus, Linn. Mam-
mifère onguiculé de la fam. des Pachydermes. — Alafan
est une pure corruption du français ou plutôt un purisme
languedocien, dont le génie tend à s'éloigner du type fran-
çais, alors qu'il est obligé de Jui faire un emprunt.
Étym. du lat. Elephantus, dér. du grec Ekégas.
Alais ou Alès, s. m.n. pr., Alais, ville. — Ce nom a
exercé bien des fois les investigations des étymologistes. On
a prétendu l'expliquer par les armoiries de la ville, puis par
sa configuration et même par son orientation. L'écusson
porte, en effet, un demi-vol d'argent sur champ de gueules;
mais avant l'époque incertaine où cette aile lui fut donnée,
avant que la science du blason eût été mise en honneur, la
ville et son nom existaient, et n'est-il pas naturel de penser
que le nom fit naître l'idée de prendre une aile comme armes
parlantes, au lieu d'imaginer que les armoiries inspirèrent
le nom? Il parait tout aussi difficile d'admettre les autres
systèmes. La rose des vents n'était pas inventée avec ses
ALA
indications d'£st et d'Ouest, quand le baptènié sé fit. D'an-
leurs la forme Alest dérivait de Afestum; tradüétion latiñe
à l'usage des tabellions, du nom roman Alés; de beaucoup
plus ancien. Enfin, comme la ville ne s'était pds imipro-
visée d’un seul jet dans un moule tout tracé, cominént
_ cette figure d’aile aurait-elle été assëz nettement déssinée
dès sa première plume, alors qu'il fallat la nommer, pour
déterminer l'allusion ? Le mot de l'énigme n'est pas dans
ces découvertes, plus ingénieuses que: vraies: Une autre
solution du problème se présente.
C'est au mot lui-même qu'il faut s'adresser pour tfotvér
sa racine. Or, l'histoire fait remonter le nom d’A/esi& aux.
âges les plus reculés. Elle raconte que, tréize siècles énvi-
ron avant l’ère chrétienne, les Celtes, sous le rom de Volcés
Arécomiques, qui occupaient le littoral méditerranéen de
ka Gaule, eurent à lutter contre une invasion de raviga-
teurs phéniciens, descendus sur leurs rivages. La colonie de
Tyr venait explorer ces contrées inconnues ét y apporter
sa civilisation et le commerce. Son but était d'exploiter lés
mines de nos Cévennes, où l’oret l'argent se rencontraient
alors presque à fleur de terre, et de faire l'échange de ses
produits. Elle établit deux stations commerciales, à proxi-
mité l’une de l’autre, pour se prêter un mutuel secours. Ba
première, plus voisine de la mer, s’appela Namauwr, de
Nama, en celtique, fontaine, où de Neimheish, gaëliqué,
qui se prononce Némése, d'où on a fait Nemäusus, Nismes
et Nimes. La seconde, plus haüt, au centre de l'exploita-
tion et du trafic, fut nommée Alesia.
L'attribution est certaine pour Nimes; les plus gravés
historiens ne la mettent pas non plus en doute pour Alais.
S'il en était autrement, il serait au moins singulier de
trouver, après tant de siècles, les deux noms s'appliquant
aux deux localités désignées par les anciens géographes
grecs, dans les mêmes conditions topographiques, avec la
même raison appellative, et une pareille communauté" d’ori-
gine et d'existence.
Au reste, cette Alesia primitive, malgré l'opinion de
M. de Mandajors aujourd'hui abandonnée, n’a rien de’com-
mun avec l'Alesia' de Vercingétorix, que la ressemblance
de son nom, tiré du même radical et exprimant une posi-
tion semblable. L'invasion d'Hercule dans les Gaules,
ses conquêtes et ses voyages ne sont que le symbole de la
marche et des progrès de l'antique civilisation phénicienne,
et ce n’est que par une flatterie imaginée sous Augusté,
pour honorer la mémoire de César, vainqueur d'Alesia,
que la fondation de la grande cité gauloise fut ratächée
aux aventures du demi-dieu mythologique: Mais la confu-
sion n’est pas possible; car les commerçants de Tyrn'au-
raient pu pénétrer si avant dans les terres, ni s’éloignér
des Cévennes, où leur exploitation de or les avait attirés
et les retenait.
Campement fixe, station commerciale où ville, it importé
peu; rien n'est resté que les deux nôms. Voilà pour tés
inductions historiques. :
ALA
- Comme dernière épreuve, le nom a besoin d'être soumis
à l'analyse dans sa composition. Il tient au celtique, puisque
la langue du paysoù il était employé pouvait seule servir à
la dénomination; et dans cet idiome il doit être significatif.
Constatons d’abord la forme la plus ancienne : c’est
celle qui, dans les noms propres et de lieux, rend le mieux
compte de leur formation, qui les suit et s'attache à eux
avec le plus de persévérance. Pour Alais, le mot est écrit
dans les vieilles chartes Alès ou Allès. Alesia ou Alexia est
composé selon le génie du grec; mais la désinence explé-
tive ia laisse facilement apparaitre le radical primitif.
Les deux syllabes du mot appartiennent au celtique.
Al ou all, cité par Virgile et expliqué par Ausonne (44
Celtarum), signifie : hauteur, élévation, sommet, montagne.
IL est reproduit par le latin a/tus, correspondant à eæcelsus ;
et dans toutes les langues dérivées, il emporte également
l'idée de hauteur. Es ou ès final est aussi d'origine gau-
loise. Il est fréquent dans les noms du Midi, où on le
retrouve pour désigner une portion de territoire, une région.
IL imprime à la racine af, en s’y joignant, comme une
idée, de provenance, de dérivation. Dans ce sens, le mot
entier ne pourrait que signifier : pays élevé, contrée haute,
vers la montagne. C’est là, en effet, la désignation la plus
caractéristique, celle qui exprimait le mieux la position,
qui s'appliquait exactement à un certain territoire, Quand la
ville, plus tard, vint à se bâtir, il était naturel de la dési-
gner par le nom appliqué au pays sur lequel eHe s'emplaçait.
Ses commencements furent si faibles, qu'ils ne méritaient
pas d'abord dénomination spéciale de ville. Mais tout
concorde. et se réunit pour rendre ces faits et leurs circon-
stances vraisemblables ; iln’en faut pas davantage pour que
notre étymologie soit juste.
Après les diverses altérations que nous venons d’indi-
quer, le nom était revenu à sa forme primordiale ; il s'écri-
vait Alès où Ales, en français, au commencement du
XVIIS siècle. Alors, pour éviter la confusion avec une autre
ville du Midi, son orthographe définitive fut fixée en Afais.
Nous la maintenons ainsi ; mais sans vouloir pour cela
que:sa prononciation languedocienne soit altérée, pas plus
qu’ellene devrait l'être en français. Les habitants du Nord
nous chicanent un peu sur ce point. Ils prononcent Alais
conime Calais, palais, ete., et s'étayant de l’analogie, ils
trouvent ridicule qu'en Languedoc nous fassions sentir, en
parlant, le s final: Serait-ce vraiment, un gasconisme que
l'on aurait le droit de nous reprocher, et une contravention
au beau langage, dont tout le Midi se rendrait coupable?
Mais si les puristes ont raison de blâmer cette manière de
faire sentir ici la consonne finale sifflante, pourquoi ae
tent-ils lorsqu'il s'agit de Reims, de Sens, d'Air, qui, à
coup sûr, ne-se prononcent pas COMME reins, sans, fai,
ais? Pour. “vivre et. parler de bonne intelligence, ne vau-
drait-il pas mieux se montrer. RER est inu-
tile d'aborder une discussion sur les noms:
lieux, mais il nous semble qu'on ferait. résoudte
et de:
ALA 39
la question en faveur de la prononciation locale, qui doit
être généralement adoptée : car c'est la seule manière de
s'entendre partout, et même de parler correctement.
Alanda ou Alandra, v. Ouvrir une porte, une fenêtre à
deux battants. — De mème qu'on dit : Alanda la porto,
ouvrir tout à fait la porte, on dit aussi : Alanda lou troupil,
lâcher le troupeau, le faire sortir de la bergerie grande
ouverte; Alanda lou fid, faire brüler le feu, et Alanda
sa mérchandiso, étaler sa marchandise. Dans toutes ces
acceptions, il se trouve un certain contact, une sorte de
rapprochement qui peut servir à expliquer la racine du
mot. Ne viendrait-il pas de ad latum, au large?
Alanda {s’} v. S'étendre par terre, tomber de son long.
Alangui, ido, adj. Triste, PORN E abattu, affaibli
par le chagrin ou la maladie.
Dér. de Langui, venant du lat. Languere.
Aläougèiri, v. Décharger, alléger, rendre plus léger. —
S'aldougäirà, se dévêtir, prendre des habits plus légers. Le
proverbe dit :
Aou més d'abriou
T'aläougèires pas d’un fiou ;
Aou més dé mai
Fai cé qué té plai,
Amaï éncaro noun sai :
Au mois d'avril, ne te dévèêtis pas d'un fil; au mois de.mai,
fais ce qu'il te plaira, et je ne sais encore si c’est prudent.
Dér. de Zdougè.
Alâouso, s. f. Alose; Clupea alosa, Linn. Sorte de
poisson de mer qui.remonte le Rhône par grandes bandes
pour aller déposer son frai. Sa chair est fort bonne après
qu'il a vécu quelque temps dans l'eau douce, tandis que,
pris dans la mer, elle est sèche et de mauvais goût.
Alapas, s. m. Bouillon-blanc ; Verbaseum tapsus, Linn.
Plante cotonneuse, à fleur blanche ou rose, agreste, adou-
cissante, vulnéraire, détersive. — Voy. Bouïoun-blan.
Alapédo, s. f. Asphodèle; Asphodelus, Linn. — L'ala-
pédo. à fleurs blanches est fort commune dans nos bois. De
la pulpe de sa racine, on fait une espèce de pain assez
mangeable. Cette qualité était sans doute connue des
anciens : car les, Romains avaient fait de l'asphodèle une
plante des tombeaux ; ils la plantaient autour des: mo-
numents funèbres, pour donner aux morts ou à leurs mänes
le moyen de se substanter: — Voy. Pouraquo.
Alarga, v. Elargir, faire sortir un troupeau de la ber-
gerie. — S'alarga, s'étendre; devenir libéral. — Quan-t-un:
vilèn s'alargo, tout y vaï, il n'est rien de tel qu'un vilain
qui se met en train.
Dér. de Large.
Alari (Sént-), n: pr. Saint-Hilaire, nom commun. à plu-
Du lat: Hilaris.
Alarja, v. Elargir, rendre plus large, un vêtement, un
champ, un meuble, um canal, une fenêtre, un trou.
Dés. de Large.
40 ALÉ
Alarmo, s. f. Tocsin. — Ce mot n'a pas d'autre acception.
Il est formé de à l'armo, aux armes, cri pour courir aux
armes à l'approche de l'ennemi. En ital. on dit : Al'arme.
Alata, v. Elargir un troupeau, lui donner la clé des
champs. — Le mème que Alarga.
Dér. du lat. ad lata, sous-ent. deducere.
Alcovro, s. f. Alcôve. — Corr. du fr., m. sign.
Étym. : al koba ou el-kauf, en arabe, cabinet où l'on
dort, tente. En esp. A/coba et alcova.
Alédro ou Anédo ou Coutèlo (V. c. m.), s. f. Narcisse
blanc des prés. Narcissus poeticus, Linn.
Dér. du lat. A/bedo, blancheur.
Alègre, s. m. n. pr. Allègre, commune du canton de
Saint-Ambroix, arrondissement d’Alais, et nom pr. de
plusieurs autres villages. Il est aussi quelquefois nom pr.
d'homme. En lat. on le trouve écrit dans les anciens titres,
Alegrium et Alergium.
Ce nom est assez répandu; mais sa désinence n’est pas
commune, car on ne la rencontre, dans notre langue, que
dans pécègre, persica, et sègre, sequi, avec ses deux composés
coussègre et pérsègre. Cette circonstance, etsurtout la variante
latine, semblent être l'indice d'une altération ou d'une trans-
position de lettres dans la terminaison. En ce cas, un primitif
en èrge se laisserait soupçonner, et, par la prononciation du
g dur, on arriverait à èrgue, finale adjective identique à
argue. Les exemples de ces inversions ne scnt pas rares.
De là, le corps du mot ne présentant d'ailleurs qu'une
variété d'orthographe bien connue et insignifiante, l'ana-°
logie serait directe entre Alègre, Alèrgue, et Aleyre, et
Aléirargues, qui ne sont eux-mêmes qu'une forme de
Alairac (Aude); Aleyrac (Drôme, Hérault, Haute-Loire);
Aléira, Alleyrac (Gard); Alleyras (Haute-Loire) ; Allerand
(Marne) ; Allaires (Morbihan); Alayrac (Aveyron, Tarn) ;
Alairas (Ardèche); Alleyrat (Corrèze, Creuse); Allières
(Sarthe) ; qui auraient produit, par apocope de l'a initial,
Layrac (Haute-Garonne et Lot-et-Garonne) ; Leyrat (Creuse) ;
Lirac (Gard) ; Leran (Ariége) ; Leren (Basses-P yrénées); Laires
(Pas-de-Calais) ; Lairargues (Hérault). Tous ces mots ont, en
effet, pour racine le a! gallicum, de Virgile, al Celtarum d'Au-
sonne, pour indiquer l'altitude, l'élévation, les montagnes.
La conformité du nom de notre Alès, Allez, Alais, semble
encore le ranger dans la même famille étymologique.
Alémagno, n.pr. Allemagne. — On donne le sobriquet
d'Alémagno à un Allemand, ou même à quelqu'un qui a
voyagé et séjourné en Allemagne.
Aléman, ando, adj. Allemand. — Las Alémandos est
devenu le nom d’un quartier où se trouvait une ancienne
taverne; c’est aujourd'hui une tuilerie à un kilomètre
d'Alais, sur l’ancienne route de Saint-Ambroix. Il doit y
avoir un siècle à peu près, deux femmes, des Alsaciennes
peut-être, vinrent là établir une buvette qui attirait les
chalands. Elles se firent peindre sur la façade de la maison
par un barbouilleur de l'endroit; cette image, à demi effa-
cée, se distingue encore : de là le nom, qui s’est conservé.
ALI
Alénga, ado, adj. Grand parleur, beau diseur; qui a
Ja langue bien pendue, bien affilée ; qui a réponse à tout.
Dér. de Léngo.
Alèrto, adj. seulement fém. Alerte, éveillée,
gourdie.
Trad. du fr.
Alésti, v. Préparer, apprôter; disposer; mettre en état.
Dér. de Lèste.
Aléva (s'), v. Se lever. — Ne se dit que du tmpe quand
il tourne au beau, qu'il se lève.
Algarado, s. f. Algarade; mercuriale, réprimande; re-
proches bruyants et publics.
Étym. de l'arabe et de l'esp. Algarada, qui signifie :
course sur l'ennemi brusque et imprévue.
Aliboufiè, s. m. Aliboufier ou alibousier, storax, styrax;
Styraæ officinalis, Linn. Arbre de la fam. des Ébénacées.
Il découle de cet arbre, dans les pays chauds, un suc bal-
samique connu sous le nom de storax, que l’on conserve
ordinairement dans des roseaux, calamus ; de là le nom
de calamite appliqué à cette résine.
Son étym. serait-elle prise de Até, haleine et de boufa,
souffler, à cause de son odeur d’encens ?
Aligna, v. Aligner, ranger sur une même ligne droite.
—S'aligna, se battre en duel.
Dér. du lat. À pour ad, et linea.
Alimâou! interj. Péj. Alimdoudas! Animal! butor!
grosse bête! — Il n’est employé qu'interjectivement et
presque jamais comme subst.
Corrupt. du fr. Animal.
Alimase, s. m. Limace, limaçon sans coquille, mol-
lusque rampant, visqueux. — Marcho coumo un alimase,
il marche à pas de tortue.
Dér. du lat. Limax, venu lui-même du grec Actu;
Xzpov, pré humide. Û
Alin, adv. Là-bas. — C'est à tort, selon nous, que Sau-
vages le traduit par là-dedans. C'est sans doute la termi-
naison, qu'il a prise pour la”préposilion latine àn, qui a
causé son erreur. Il est bien certain que alin veut dire là-
bas, bien bas, plus bas encore que aval; jamais il n’a
signifié : là-dedans. Jl est formé du lat. Ad et imum, au
fond.
Aliroü, s. m. Aileron, extrémité de l'aile à laquelle
tiennent les grandes plumes.— Le mot est formé de même
que le fr., mais non pas d’après lui : car ici le languedo-
cien est au moins son contemporain.
Dér. de Ao.
Alisa, w. Polir, lisser ; ratisser; .enduire un mur à la
truelle. Au fig., flatter, cajoler, flagorner quelqu'un pour
en faire une dupe. — T'alise, Bdoussiètro.! dit-on prover-
bialement quand on voit faire des compliments à perte de
vue. Bdoussièiro, qui estun nom propre, la femme de Bois-
sier, est mis génériquement; peut-être le dicton faisait-il
allusion à une anecdote réelle,
Dér. de Lis, uni, poli.
vive, dé-
ALU
Alisaîire, ro, adj. Flatteur, cajoleur, embaucheur.
Dér. du précédent.
.Alisaje, s. m. Enduit d'un mur au mortier fin.
Alisiè, s. m. — Voy. Ariguiè.
Alisqua (s'), v. Se farder, s'ajusler, s'adoniser ; se pour-
lécher comme font les chats.
Dér. de Liqua.
Alo, s. f. Dim. Aléto; péj. Alasso. Aile. — Se dit par
analogie de choses très-diverses : Alos d’un capil, bords
d'un chapeau, dont la forme et l'envergure autrefois, dans
les chapeaux à la française, justifiaient l'acception. Alo dé
rasin, grapillon, brin qui s'en détache, figurant par à peu
près une aile. — Yoy. Sounglé.
Dér. du lat. 4/a.
Alongui, s. m. Retard ; délais, lenteurs affectées. — Dé
qu'anas cérqua tan d'alonguis? qu’avez-vous besoin de tant
chercher des retards ?
Dér. de Long.
Alor, adv. Alors, en ce temps-là. — Alor ! dans ce cas-
à; oh! s’il en est ainsi. Pér alor, pour lors.
Dér. de l'ital. Alora.
Alouèto, s. f. Alouette ordinaire, alouette des champs ;
Alauda arvensis, Temm. Oiseau de l’ordre des Passereaux.
.— Syn. Léouséto. Lou Coutéloù, la Couquïado, la Calan-
dro sont des variétés de l’Alouette. — V. c. m.
Dér. du lat. Alauda et de son dim. Alaudetta, qui a la
mème sign.
Alounga, #®#Allonger, prolonger; retarder, différer ;
rendre plus long.—Aqu faï pas qu'alounga lou poutaje, lou
pastis, cela ne fait qu’entrainer des retards. — A/ounga lou
pastis, allonger la courroie, perdre du temps volontairement.
Alounga (s’), v. Prendre le chemin le plus long; tomber,
s'étendre de son long.
Dér. de Long.
Aloungaïre, s. m. Mauvais payeur ; qui prolonge le
terme du paiement ; conteur, discoureur verbeux qui n’en
finit pas.
Dér. de Long.
Aluïasses , s. m. plur. Compliments intéressés ; belles
paroles; détours de paroles, ambages.—Féou pas ana cérqua
tant d'aluïasses, il ne faut pas tant de circonlocutions.
Contr. de AUeluia.
Aluma, v. Allumer, enflammer, mettre le feu. — Il
parait spécial aux deux locutions suivantes : A/uma la
clédo, commencer à faire du feu au séchoir à châtaignes ;
et Aluma lou four d'acdou, garnir le four à chaux. Ce
qui prouverait sa légitimité languedocienne. Mais on ne
dirait pas bien : A/uma lou lun, lou fid, pour lesquels il
faut préférer Atuba ou Aluqua. — V. c. m.
Formé du lat. Ad lumen.
Aluméto, Brouquéto, Luquéto, s. f. Allumette, petit
brin de bois soufré par le bout. Au fig., chercheur de noises,
boute-feu. — Voy. Brouquéto, Luquéto.
Dér. de Aluma. #
AMA LA
Aluqua, v. Allumer le feu ou la lampe. — Voy. Aluma.
On le dit quelquefois pour appeler de loin une personne,
lui crier : Hola! Hô! la héler. On ne voit pas trop le rap-
port entre ces deux significations.
Aluqua (s')}, v. S'animer, s'échauffer, en parlant avec
feu.
Dér. du lat. Allucere, ou du gr. vxvebw, parf. keksyveuxa,
éclairer. <
Alura, ado, aïj. Fin, rusé; éventé, étourdi ; luron. —
Tèsto alurado, tête à l'évent. — Voy. Lura.
Dér. de Luro.
Ama, aro, ou Amare, a/j. Amer, qui à de l'amertume.
— Qué béou ama, po pas éscupi dous, prvb., qui boit
amer, ne peut pas cracher doux.
Dér. du lat. Amarus, qui lui-même vient de mar, mer;
l'eau de mer étant le type de l'amertume.
Amadoü, s. m. Amadou.
Emprunté au fr.
Amadura, v. Mürir, rendre mûr ; devenir mür, aboutir,
apostumer, en parlant d'un abcès; s'apprèter, s user. —
Lou sourél amaduro la frucho, lous blas, le soleil fait
mürir les fruits ou les blés. Aquél roudaïre amaluro,
cet abcès va aboutir. Aïçd s'amaluro, ceci s'apprête, dit-on
quand on commence à être à bout de patience et près
d'éclater. Mas braïos s'amadurou, mes pantalons s'usent.
Dér. du lat, Maturare.
. Amadurun ou Madurun, s. m. Maturité, état de ce qui
est mûr. — Aquélo péro tombo d'amalurun, cette poire
pourrit d'excès de maturité. Aquéles magnas sé foundow
d'amadurun, y a lon-tén que déourièou rèstre émbrugas,
ces vers à soie dépérissent de maturité, on devrait les avoir
ramés depuis longtemps.
Formé de Mau, venant du lat. Maturare ou maturus.
Amaga, v. Choyer, réchauffer, abriter; cacher; couvrir.
— Amaga un éfan, envelopper un enfant, le dorloter, le
serrer dans ses bras ou sur le sein de sa mère. Lou fiù és
amaga, le feu est couvert.
Amaga (s'), v. Se tapir, se blottir dans une cachette;
se pelotonner dans un coin ; s'envelopper pour se défendre
du froid. — Voy. S'amata.
Dér. du lat. Magale, magalia, mot punique, cabane,
huttes. Le radical est probablement magus, maga, magi-
cien, sorcier, fée ; parce que dans l'antique superstition, ces
êtres fantastiques habitaient les cavernes et les grottes.
Amaiï, adv. Encore; aussi; de plus; davantage ; avec;
même, quand même. — Amaï-maï, bien plus, encore
davantage. Amaï-maï gn'aguèsse, quand même il y en
aurait davantage, y eneùt-il plus encore. Amaï qué, pourvu
4 que, quoique. Vivo l'amour, amaï qué dine, vive l'amour,
pourvu que je dine, dit le proverbe. Amaï fasen, aussi
faisons-nous. Amaï à vous/ à vous aussi : c'est une
réponse aux civilités ordinaires entre gens qui se rencon-
trent ou s'abordent. Bonsouèr à touto la coumpagno, Bon-
soir à la compagnie, dit le premier interlocuteur; Amaï à
$
po] AMA
vous, Jui répond-où, à vots aussi, nous voüs disons de
tnôte. Amdï tus ? Toi assi; tu quoque! Amaï véridra päs,
ét mêrné il ne viendra pas, vous verrez qu'il ne viendra
. Amaï la cassibraïo, là Canaille avec. Homes, fénnos
ét lous droles amaï, hommes, femmes et les enfants avec,
et même les enfants. |
Dér. de Mai, plus.
Amaïgri (s'), v. Maigrir, se dessécher, dépérir.
Dér. de Maïgre.
Amaïra, v. Aù prop. réunir ün enfant ou le petit d'un
animal à sa mère. C’est le contraire de Désmaïra. — V.c. M.
Au fig. réunir, associer, rassembler. Se dit d’une gerbe,
d'un fagot, de toute espèce de tiges, qu'on assemble régu-
Hièrement en plaçant tous leurs gros bouts du mème côté
pour les lier plus facilement.
Dér. de Maire.
Amaïsa, v. Apaiser, adoucir, Calmer.— Amaïsa un é[an,
endormir un enfant, l’apaiser, le consoler, l'empêcher de
érièr ou de pleurer. Amaïsa la fan, apaiser le prémier
aïguillon de la faim, la calmer. Amaïsa-vous, Calmez-Vous,
radoucissez-vous. Lou tén s’amaïso, le temps devient calme.
L'douro s'és amaïsàdo, le vent s’est calmé.
Dér. de l’ital. Amimausare, adoucir, apprivoiser.
Amaläouti, ido, adj. Qui est bien malade, bien exté-
nué, bien affaibli.
Dér. de Maläou.
Amalu, s. ”». Hanche, et proprement la tête supérieure
du fémur.
* Dér. de l'aräbe Amalue, l'os-säcrüm ; c'est par éxt. qu'ôn
applique à la hanche.
Amäluga, v. Au prop. déhancher, déboiter le fémur.
Au fig. froisser, meurtrir, éreinter.
Dér. sans doute d’Amalu, mais le lat. 44 malum pour-
rait bien ne pas y être étranger.
Amana, v. Rassembler ; amonceler; amener en tn mêmé
ts; cueillir à pleines mains; serrer, empoignér. — Es pa’
qui éncaro bièn amana, il n’est pas là encore bien en main,
bien exercé. Ta fio s’és pas éncaro amanado, ta fille n’est
pas encore rentrée à la maison.
Dér. du lat. Ad manum, soit que Manus se traduise par
main, soit par foule, peloton, botte.
” ‘Amare, T0, adj. Amer. — Voy. Ama.
La formation du lat. est encore plus sensible dans Am&ré,
qui vient de ad et mare.
Amaréja, v. Etre un peu amer, avoir un léger goût
d'amertume. — C'est un fréquentatif formé d'Amare.
La plupart des substantifs et même des ‘adjectifs sont
suscéplibles, en languedocien, d'être ainsi transformés en
verbes. Les verbes eux-mêèmés, en prenant la désinence éja,
$e dédoublent présqué tous, et deviennent fréquentatifs on
‘éiinratifs.
"Sauvages dit dans $es proverbes: Qué pluïdéjo, maldou-
téjo et tout cé qué manÿo_ aniaréjo, le plaideur est comme
k san tout ce qu'il mange a de l'arnertüme.
AMA
Amarëlo, s. f. on Amaroù, Tlilaspi, Tberis Où Thläspi
amara, Linn. Plante de la fam. des Crüciféres re Nr
qui croit dans les blés, et dont la graine, lorsqu'elle sy
mêle, communique de l'areftume au pain qui et provient.
— Voy. Amaroù.
Dér. de Ama, amer.
Amarignè, s. m. Souche ou pied de l’osier franc et
jaune, dont on coupe les jets chaque année qui servent de
liens pour les tréilles et vignes; Salix amerina, Lin.
Dér. d'Amiarino.
Amarinén, énquo, adj. Flexible, pliant comme l'ésier.
— Se dit des diverses espèces de bois de service qui ont
la nervure longue, flexible et non cassante.
Dér. d'Amarino.
Amarino, s. f. Osier; c’est le nom géiéritqué! — Uno
dmarino, un jet ou un seion d'osiér, coûpé pour servir dé
ligature.
Dér. du lat. Salix amerina, qui lui-même vient de Ame-
ria, ville de l’'Ombrie, en Halie. C'était dans l’origine le
Saule d’Ameria, comme l’on dit : le peuplier de la Caro-
line, le peuplier d'Italie.
Amaroû, s. f. Amertume, saveür amère.
Dér. de Amare.
Amaroû, s. m. où Amarèlo, Thlaspi, Tlaspi dmara,
Linn. Plante qui eroit dans les blés, et produit üne petite
graine qui, mêlée ensuite à la farine, donne au pain üne
amertume prononcée. — Voy. Amarèlo.
Dér. de Amare.
Amarougnè, s. m. Marrohnier d'hide, marronnier des
jardins, arbre magnifique de grandeur, de port, de féuil-
lage et de fleurs.
Amarouno, s. f. Marron d'Inde, fruit dû marronnier
d'Inde. — Ce fruit, qui est d’une amertume extrême, n'a
rien de commun avec le marron, qui est Si sucré ét si
savoureux, que par sa couleur ét sa formation dans un
hérisson; le dernier se nomme exclusivement : Déouphi-
nénquo. — V. c. m.
Ici se présente une difficulté d' trymoigie que le lecteur
jugera lui-même.
Amarouno vient-il d'Amarougnè, l'arbre qui produit ce
fruit, où bien vierit-il de cette amertume, amaroù, qui forme
son principal caractère et qui fait qu'aucune espèce d'ani-
fal ne peut s'en nourrir ? Cette dernière Solution semble
si naturelle qu'on serait tenté de l'adopter; cependant fl
devient difficile d'expliquer que l'amarougnèet l'étoee
son fruit, aient deux origines différentes.
D'autré part encore, comment admettre que l'amarougnè
et le marronnier d'Inde, le même arbre très-certainement,
avec leur physionomie si fraternelle de noms, ne pro-
viennent pas d’une racine commune? Or, le marronnier
d'Inde n’est qu'une variété du marronmier ordinaire, du
chätaïgnier à marrons ; et le mot marron, frère et contem-
porain de l'ital. marronñe, vient comme lui du grec dù
moyen âge pappôv.
AMB
Mais, comme il est impossible que le grec, l'italien.et le
français, à la fois, soient venus puiser leur étymologie
dans le languedocien amarouno, qui lui-même ne représente
pas du tout le marron doux dont ces diverses langues ont
voulu parler; il faut en conclure qu'amarougnè dérive du
fr. marronnier, qui doit ce nom à son fruit, marron, et
que, ce. dernier le tient de l'italien et du grec. Amarougnè,
à son tour, a créé le mot amarouno, qui, du reste, va à
merveille à sa nature et n'enlève pas l'amertume, au con-
traire, pour n'en pas être issu : le mot signifie innocem-
ment la chose.
_Amarouno so dit aussi : grrr amaro. — V. c. m.
…Amassa, v. Ramasser, cueillir , faire un amas; mettre
ensemble; réunir beaucoup de monde; entasser, thésau-
riser ; aboutir, abcéder,. apostumer. — Voy. Acampa.
= Amassa d'hèrbos, ramasser des herbes. Amassa la fièio,
cueillir de la feuille de müriers. Amassa foço argén, deve-
nir très-riche, amasser une grande fortune. Moun dé amasso,
mon doigt apostume; le mal que j'ai au doigt aboutit.
, Le lang. amassa, le fr. amasser, lit. ammassare, dériv.
ons du lat. massa, masse, amas, ou plutôt du gr. ua,
j'amasse.
Amassa (s’), ». S'attrouper, se rassembler. — S'amas-
. sara proù, dit-on d'un absent, il se rendra bien, il reviendra
au gite. S'amassè un fun dé mounde, il se fil un grand
rassemblement.
Amassaire, ro, adj. Entasseur, thésauriseur, quand il
est rmployé sgèe Lorsqu'il est question de vers à soie, il
: les gens qui cueillent.la feuille de müriers, quoi-
qu'on n'y ajoute pas le mot fièio.
Amassaje, s. m. Action de ramasser, de cueillir; frais,
coût. de la cüeillette. — Voy. Acampaje.
- Amata (s'} ».. Se tapir, se.blottir, s “aplatir ; s’humilier
de crainte ou de respect. — L'aï amata, je l'ai confondu,
je l'ai maté, aplati. S’amatou dé pôou, ils se cachent de
peur, ils.se tapissent de frayeur. — Voy. S'amaga.
Dér. de Mato.
- Amati, ido, adj. Dru, épais. Se. dit d'un pré. bien
gazonné, bien tallé, et aussi du pain massif et gras-cuit.
anPe-deshtar
(s'), ». Selever matin;_se mettre de bone
2 d'ours = on en voyage.
Ambre, s. m. Amble, alnre du cheval. entre le pas et
le trot.
Gorr. du Fami dér. enr pi Ambulare.
_ Ambre (Léva l'}, v. Être fin et rusé au dernier degré,
mème de la délicatesse. — C'est une phrase faite,
contractive d'une plus longue. On sait que l'ambre, quand
iLest échauffé par la friction, soulève et attire même d’as-
sez loin une
paille. Le peuple, quicroit voir là un signe
proyerbialement : És fà coumo l'ambre,
tre Le patois Lan l'ae.rairs Ang 1e |
de sa finesse, dit.
phrase, et pour exprimer la finesse poussée, à l'extrème, |
AME #
quand le fr. se çontentait de : fin comme l'ambre, le lan-
guedocien a exagéré et a voulu dire; plus fin que l'ambre,
une finesse qui léverait l'ambre lui-même. On comprend
que, jouant sur le mot, il s'agit ici de finesse morale,.et
c'est de celui qui la possède à un très-haut degré quon dits
Lèvo l'ambre.
Dér. de Ambra, bass.-lat. ; ambre, en catal.
arabe.
Ambrièi (Sént), s. m. n. pr., Saint-Ambroix, ville,
commune et canton de l'arrondissement, d’Alais. — Foy.
Bidou.
Dér. de Sanctus Ambrosius.
Améchi, ido, adj. Qui a les cheveux plats et embrouillés;
mal peigné.— Sauvages, qui écrivait à une époque où la
coiffure était relevée, retapée, bouclée, crépée et poudrée,
concevait la négligence des cheveux améchis par leur apla-
tissement sur le front, d'où ils retombaient en mèches.sales
et irrégulières. La coiffure actuelle a dû amener une entente
différente du mot améchi, qui n’est au fond que le désordre
dans les cheveux.
Dér. du fr. Méche. Il ne peut venir du subs. mécho, qui
ne signifie que la morve du nez.
Amélan, s. m. ou Abérlénquiè, Amelanchier, Cratægus
amelanchier, Linn. Arbrisseau de la fam. des, Rosacées,
dont le fruit est une petite baie, nommée abérlénquo, âpre
au goût. — Foy. Abérlénquiè.
Dér du gr. una, pomme, et &yyetv, étranger; pomme
qui serre la gorge.
Amèn, s. m. Fin d’une chose; ainsi soit-il. — Dire
amèn à toutos cdousos; consentir à tout, ce qu’on. propose,
accepter toute condition, approuver le bien et le mal, Jus-
qu'amën, jusqu’à la fin des fins, sans fin, jusqu'à l'éter-
nité ; de jusqu'à amän.
Reproduit du mot hébreu : Amen, fiat, ainsi soit, ainsi
soit-il, qui termine toutes les oraisons latines.de l'Eglise.
Améndo, s. f. Amende, punition pécuniaire. au profit
du fisc, qui n’a rien de commun avec les dommages et
intérêts dus à la partie civile. —
Dér. du lat. Emendare.
Améndri, v. Abaisser, diminuer le prix. — N'a pas du
tout le sens du fr. amoindrir, et ne s'emploie guère que
pour exprimer un abaissement de prix d'une marchandise.
— An améndri lou pan, le prix du pain est diminué.
Dér. de Méndre.
Aménla, s. m. Sorte de marbre commun dans le Gard ;
brèche, sorte d’amygdaloïde; poudingue composé de plu-
sieurs cailloux cimentés ensemble par un gluten aussi dur
que la pierre.
Dér. d’Aménlo, parce que ces différents cailloux reeese-
blent aux amandes qui sont noyées dans le, ciment: du
nougat.
Aménliè, s. m. Amandier; Amygdalus communis, Lipn.
Arbre de la famille des Rosacées. à
En esp. Améndro, du Jai. Amygdalus }dugreS dpuyisa.
; anbar, en
£ AMI
Aménlo, s. f. Amande, fruit de l’amandier.
Même dér. que le préc.
Aménloù, s. m. dim. d'Aménlo. Petite amande. C'est
proprement la pulpe de l’amande, le fruit dans la coque.
ll est également applicable à l’amande de tous les fruits à
noyau. — Lorsque quelqu'un, après avoir fait de grosses
pertes au jeu ou dans le commerce, réalise un menu gain,
on lui dit ironiquement: Éngraisso-té, pérlé, aqui un
aménloù, engraisse-toi, avare, voilà une amande. Peut-être
le mot pérlé, qui est devenu une qualification usuelle de
l'avare, prend-il son origine dans ce dicton. Peut-être
vient-i' aussi d’un idiome quelconque, où, dans un temps
donné, pérlé signifiait à la fois cochon et avare. Le fait est
que dans la formule de ce proverbe, il semble que c'est
d’un porc qu'il est question, comme le mot éngraïsso-té
l'indique.
Aménuda, v. Couper à plus petits morceaux ; amincir ;
émincer, amenuiser ; retailler, recasser. — Voy. Aprima.
Dér. de Ménu.
Amériquèn, èno, adj. Américain ; qui concerne l'Amé-
rique.
Trad. du fr.
Amériquo, s. f. Amérique, partie du monde. — On dit
d'un homme trop fin, trop rusé en affaires, trop âpre à la
curée, trop peu délicat : À pas bésoun d'ana én Amériquo
pér faïre fourtuno, il n’a pas besoin d’aller en Amérique
pour faire fortune.
Amérita, v. Mériter, être ou se rendre digne de. —
Aquù à amérito, il a bien mérité son sort ou sa punition,
cela lui va bien. Aqud t'amérito, tu as bien gagné ce qui
l'arrive.
Dér. du lat. Mereri, meritus sum.
Amérites, s. m. plur. Mérite, ce qui rend digne d’estime
et de considération.
Dér. de Amérita.
Améstio, s. f. Amnistie, pardon, exemption de peine.
Corr. du fr.
Ami, igo, s. et adj. Dim. Amigué, amigoù, amigouné,
amiguélo, amigouno, amigounéto. Ami, amie; petit ami,
cher petit ami. — Moussè moun ami, est une phrase
explétive qu'on ne peut traduire par : monsieur mon ami,
qui n’a aucun sens en fr. ; elle revient à celle-ci : ah ! certes;
ab ! oui vraiment ; ah! je vous en réponds !
Dér. du lat. Amicus.
Amiada, w. Caresser; flatter; pateliner, amadouer. —
Voy. Lavagna.
Dér. de Ami.
Amiga (s'), v. Se lier d'amitié avec quelqu'un; se faire
un ami.
Dér. de Ami.
Amigué, éto, s. et adj. dim. — Voy. Ami, de même
que pour les autres dim. et doub. dim.
Aminça, v. Amincir, rendre plus mince; émincer, cou-
per par tranches minces; menuiser.
AMO
Aminça (s’), v. Devenir mince; maigrir.
Dér. du lat. Minuere.
Amistanço, s. f. Amitié, attachement ; affection; rap-
ports d'amitié ou d'amour. Au plur., Amistangos signifie :
caresses, amitiés, Cajoleries.
Dér. de Ami.
Amistoüs, ouso, adj. Dim. Amistousé, éto. Amical,
caressant; doux; qui témoigne de J'affabilité. — Es pas
gaïre amistoùs, il est d'humeur revèche, brutale.
Dér. de Ami.
Amitiè, s. f., ou mieux : Amitiès, au pl. Amour, affec-
tion, attachement, tendresse. — Ne se dit que de l’atta-
chement entre personnes de sexe différent. C'est cette
affection douce, raisonnable et matrimoniale qu’éprouvent
les gens simples du peuple, après une assez longue fréquen-
tation. Il est fort singulier qu’en languedocien Amitiè
signifie amour, et que Amour signifie amitié.
Dér. de Ami.
Amo, s. f. Ame; esprit; cœur; conscience. — Rèndre
l’amo, mourir, expirer, rendre l'âme. Par une alliance de
mots assez bizarre, on dit : Un sacre-moun-amo, pour :
un tapageur, hardi, audacieux, effronté. — Y-a pas amo,
pas âme qui vive.
Dér. du lat. Anima.
Amouchouna, v. Mettre en tas, réunir des objets épars
en monceaux ; froisser, friper; mettreen bouchon du papier,
du linge, etc.
S'amouchouna. Se blottir dans un coin; se ratatiner;
se pelotonner ; se courber comme fait un vieillard. — Woy.
S'acrouchouni.
Dér. de Mouchoù.
Amoula, v. Aiguiser, émoudre, avec une meule tour-
nante et non avec la pierre à aiguiser; rendre tranchant
ou pointu sur la meule.
Dér. de Molo.
Amoula, v. Agir lentement, lambiner; lanterner.
Dér. de Mol.
Amoulaïre, ro, s. et adj. Remouleur, émouleur ; lambin,
lent, qui va, parle ou agit lentement.
Amoulè, s. m. Remouleur, gagne-petit. — Ce mot est
plus technique que Amoulaïre. Celui-ci se dit de toute per-
sonne qui aiguise ; Amoule est le nom particulier de lapro-
fession.
Dér. de Amoula.
Amoulouna, v. Amonceler, mettre en tas, en meule;
entasser ; rassembler, réunir en masse. —Ce mot entraine
l'idée d’une plus grande dimension que Amouchouna ;
comme sa racine mouloù est plus grande que mouchoù,
qui n’est qu’un pelit tas, un bouchon.
S'amoulouna. S'amonceler, en parlant de la foule,
s'entasser ; et aussi se rabougrir, se recroqueviller, se mettre
en peloton, en parlant d'une seule personne.
Amoun, adv. Là-haut; au ciel; vers le nord.
Dér. du lat. AG montem.
AMO
Amoundâou, adv. Là-haut; au ciel. Augmentatif et
réduplicatif de Amoun, comme si l'on disait : là-haut au
haut.
Amounéda, ado, adj. Riche en espèces ; fam., en gros
sous ; pécunieux.
Dér. de Mounédo.
Amounina (s'), v. Devenir effronté. — Se dit d’une fille
trop délurée, trop hardie, trop garçgonnière pour son âge.
Dér. de Mounino.
Amountagna, v. Envoyer ou conduire un troupeau dans
les hautes montagnes pendant la canicule. — On fait une
différence dans les foires entre le bétail qui a passé l'été
dans les montagnes, et celui qui est resté dans le pays.
Celui-ci a la laine plus mate, moins de vigueur, et les brebis
sont moins précoces à mettre bas que celles qui sont
amountagnados.
Amountagnaje, s. m. Action ou habitude d'envoyer
les troupeaux dans les montagnes; frais de pâturage des
pacages; et aussi frais que l’on paie au maitre berger ou
baïle qui garde plusieurs troupeaux sous sa responsabilité.
Amour, s. m. En poésie, ce mot répond bien au fr.
Amour dans ses diverses acceptions; mais dans le style
ordinaire, il exprime : Affection, attachement, tendresse,
-pris d’une manière générale ; on ne l’emploie jamais avec
la signification française de Amour. On dit d’un homme,
d'un valet, d'un chien : És sans amour, il n’a nul atta-
chement, il ne s'attache à rien; il ne consulte que son
intérêt, son bien-être, son égoïsme. La poésie a ses privi-
léges et ses ces : elle à fait d'amour une passion, un
sentiment, tandis que dans le langage commun, amour ne
s'entend que des attentions, des soins affectueux, de ces
préférences souvent personnelles et de cet empressement
sympathique, mais plutôt naturel que passionné.
Pér amour dé, prép. À cause de; en considération de.
— Pér amour dé vous, à votre considération. Pér amour
d'aquà, en considération de cela. On supprime quelquefois
le mot pér : Amour dé rire, amour dé parla, comme on
dit en fr. histoire de rire, histoire de parler.
Amoura, v. Emousser ; faire perdre la pointe ou le tran-
Chant à un outil, à un clou, à tout objet pointu ou tran-
chant.
Dér. de Mouru.
Amoura, v. Rapprocher, joindre ; mettre nez-à-nez, l’un
contre l’autre. — Aquélo pèiro amouro pas prou, cette
pierre ne joint pas suffisamment.
Dér. de Moure.
Amoura (s'), v. Boire à même ; donner du nez à terre;
tomber sur la face; se heurter du nez en se rencontrant
avec quelqu'un inopinément; ou contre une porte, un
arbre ou un mur. — S'amoura dou flasquou, boire au
goulot de la bouteille ; dou féra, en trempant la bouche
dans le seau; dou vala, au ruisseau, en se couchant à
plat ventre.
Dér. de Mourse.
AMO 45
Amouracha (s'), v. S'amouracher de. S'engager en une
folle passion. Tout comme en fr., ce terme ne s'emploie
qu'en mauvaise part. Il exprime une inclination de haut
en bas, à l'encoutre d'une personne inférieure, soit en con-
dition, soit en considération personnelle.
Formé entièrement du fr.
Amourèléto, s. f. Morelle; Solanum nigrum, Linn.
Plante de la famille des Solanées, commune le long des
murs ou sur le bord des chemins. La même que le Pisso-
can. — V.c. m.
Etym. du gr. duavpôs, sombre, nourâtre.
Amouriè, s. m. Mürier; Morus, Linn. Cet arbre, qu
joue un rôle principal dans les préoccupations du pays,
offre deux espèces et un très-grand nombre de variétés.
Le mürier noir, Morus nigra, Linn,, qui se plante dans
les terrains les plus arides, est impropre à l'éducation des
vers à soie, à cause de la dureté et de la grossièreté de sa
feuille, dont les fibres et les nervures sont trop ligneuses
à sa maturité. Il produit la müre noire employée à faire
les conserves et les sirops de müres. Les Cévennes avaient
autrefois beaucoup de müriers noirs qui ont dù céder la
place au mürier blanc, Morus alba, devenu si populaire et si
vénéré de nos jours. Cependant le culte, ou la culture du mù-
rier, est suivi avec moins de ferveur et est menacé d’aban-
don, lant la persistance des maladies des vers soie, l'insuccès
des éducations ont jeté de découragement dans les pays séri-
cicoles. Il n'y a pas vingt ans, mème dans les montagnes,
le moindre coin de terre, une anfractuosité de rocher étaient
utilisés, et un mürier était planté, cultivé, élevé, et pros-
pérait dans la plus petite place ; aujourd'hui on a des pré-
férences pour la vigne, et l'agriculture de nos contrées
cévenoles semble tendre à se modifier profondément.
Amouro, s. f. Müre, fruit du mürier et de la ronce. —
Celle du mürier blanc est blanche, douceâtre, fastidieuse ;
les porcs en sont friands ; mais elle est rare, parce qu’on
la fait tomber avant sa maturité en cueillant la feuille.
Elle ne mürit que sur quelques arbres qui restent sans être
dépouillés. — L'amouro d'arounze, la müre de la grande
ronce; l'amouro dé bartas, la mûre de buisson : elle vient
presque par grappes, noire et douce; l'amouro dé dame,
la mûre de la ronce rampante, qui croit dans les champs :
elle est aigrelette et agréable au goût.
Étym. du lat. Morum, mùre, dér. du gr. éuaupés, sombre,
noir.
Amouroüs, ouso, adj. Mollet, souple, moelleux ; doux ;
aimable. En lang. l'acception de : Amoureux, qui a de
l'amour, ne vient que par imitation du fr. — Amouroùs
coumo un bartas, par contre-vérité, doux comme un fagot
d’épines.
Amourousi, v. Rendre souple, ramollir; assouplir ;
adoucir. — Dé pan amourousi, du pain ramolli par l’hu-
midité.
Dér. de Amouroùs.
Amourti, v. Amortir; calmer; éteindre; enlever la
46 a
vivacité, l'ardeur, la violence; :rendre ;plus faible. —
Amourti un co, affaiblir, amortir la portée d'un coup. La
balo s'amourtiguè sus soun mantèl, la balle ne put tra.
verser son manteau, elle fit balle-morte, Amourti.soun co,
appesantir un coup de hache ou de houe sans tirer à soi la
terre ou l'éclat de bois.
Dér. de Mort.
Amourtièira, v. Garnir de mortier, fixer avec.du mor-
tier. — Bièn amourtidira, amourtidira à pérpâou uno.bas-
tisso, employer suffisamment de mortier, noyer .convena-
blement les moellons dans le mortier, de manière à ne pas
laisser des vides dans les joints.
Dér. de Mourtie.
Amoussa, ». Eteindre, calmer; maler; réduire au
silence, faire taire. — Amoussa lou fid, lou lun, éteindre
le feu, la lampe, Fasiè bé désoun, crano, mais l'aguère lèow
amoussa, il faisait le crâne, mais j'eus bientôt rabattu son
caquet.
Dér. de l'it. Amorsare,
Amoustéli (s'), ». Maigrir; devenir fluet; prendre un
yisage pointu comme une belette.
Dér. de Moustèlo.
Amoutéli, ido, adj. Grumelé; formé en grumeaux, en
caillots.
Dér. de Moutél.
Amouti, ido, adj, Gazonné; devenu herbeux; tallé. —
Se dit d'un pré qui est assez foulé, tassé, pour pouvoir être
arrosé. :
Dér. de Mouto.
Amusa, v. Amuser, divertir; oceuper. en jouant; faire
prendre le change; tenir le bec dans l'eau ; P “distraire quel-
qu'un pour l'empêcher de yoir, clair à ce qui se passe,
Dér. de l’allem, Musen, être pisif. té
Amusamén, s. M. Amusement ; à ce qui amuse ; passe.
temps; action de tympaniser quelqu’ un. — Fou pas
prêne aqud én amusamén, il ne faut pas le prendre en
plaisanterie.
Amusan, anto, adj. Amusant, divertissant ;
asser le temps.
Amuséto, s. [. Jouet; bagatelle. — Saïque mé prênes pér
tour amuséto? Lu Veux sans doute faire de moi ton ont
‘An, suffixe qui provient du lat. anus, anum, |. ;,
Notre langue doit beaucoup, au latin : elle Jui: a pris, “
Mots et presque toutes les désinences qui s'ajoutent aux
radicaux pour constituer des mots. Mais le celtique, qui
fut son élément natif, lui a laissé aussi certaines, de ses
formes, de ses intonations, de ses constructions, Nous, aurons
plus d'une occasion de signaler cette fusion des deux langues,
leür existence parallèle, et de suivre à cès‘lueurs la marc}
qui.les à fait arriver à notre languedocien «moderne ; surtout
dans, les. sulixes, Les syll abes : accessoires ui s'atiachent
à un radical pour en étendre et en modifier RE
les noms propres de lieu, toujours ; si gui feat ur
inaltégables qu'aucun autre mot. —, Foy, Agno,. à
qui fait
AN
Pour adjectiver un substantif, pour marquer le rapport
d'une personne ou d'une chose à l'objet auquel elle appar-
tient ou dont elle dérive ou fait partie, les Gaulois se ser-
yaient de la terminaison ac ou ec ajoutée au mot; les lan-
gues néo-celtiques, le bas-breton et l'armoricain ont
conservé cette forme. Rome victorieuse, en imposant sa
langue à nos contrées méridionales, les premières soumises,
et à toute la Gaule, n'abolit pas cependant l’idiome national,
Elle avait surtout à respecter les appellations locales, sous
peine de ne pouvoir plus ni s'entendre ni se, reconnaitre;
mais, par droit de Na elle leur imprima le cachet
propre de son génie. Sa formule générale était dans les
finales us et um avec la même portée que ac et ec; mais
elle avait plus particulièrement anus et anum,. d’une iden:
tité. très-rapprochée. Ainsi commença à se latiniser Je gau;
lois. Dans la catégorie que nous étudions, un nom ou un
mot se rencontrait-il en mème temps dans.les. deux idiomes,
de : signification et de structure pareilles, la terminaison
caractéristique latine était jointe. à sa, finale locale, Par.
sorte de pléonasme de suffixes; était-il purement celtique,
àradical barbare, sans correspondant latin, on le traduisait,
ou bien le vainqueur se lapppris par l'addition Dies suf-
ms communs et. des
noms propres persistérent tant. que £ le contact. et la
promiscuité des deux langues. C'est pour cela que l'emploi
de J'une ou de l’autre de ces formes ne détermine ni l'âge
ni la date d'un mot, non plus que: d'une dénomination
locale. Mais _par Jà aussi, se comprennent, assez, bien les
variantes qui, s ‘attaquent à la, finaleçen laissant partout i inYaz
riable le corps mème des mots. On, trouve, dans, le. Midi,
la désinence ac, abrégée pour nous, en a simplé, ai illeur
changée en at, qui représente, le celt, ac. ou ec, en. diet
elyaçum, à;cÔlé d' une. localité à finale. en an, “altération
anus, et anum, analogue, aux précédentes, Ici .egr, <ette
dernière finale est souyent, reproduite, par an cæ, dérivar
tion. directe ; el là ‘langue xulgaire, au moyen- 14 tradui-
sait en anègques,, dont, notre. nepploss. a fini par. fair
argue. Dans,le nord de, L ‘Gaule, Je e, Jatins ayait. aussi ses
finales, constantes en.acum et anum ; mais le Foman et. le
français leur ont subatitné des finales en é, y, es, etc. On
en conclut avec raison que tous ces suñixes, sont, de même
valeur .et,6gaux, entre, eux, You. l'art. Agno,., ekpour
les gxemples,, les mots, Marina, Mer artianargues, -Sdows
vagna, el autres. Lits Due E4j doi COCA
Le sufixe an = anus, anum, — ac, œ, = FF 4Cus, acum,
marque, une, idée, de collectivité, de; Proyenancg,. Se
priété, Lou, fédan, lou fian, i lou *frterdar mi
des substantifs, collectifs, pour, dire; Jes brebis, ‘les, fl
ie fermes, les, bag sites A as général,
orme expression du, sens de p ‘toutes les.varianteg
s reproduisenf dans, bougoup,de noms, de lieu, + Foy,
Martignargue, Massiargue, Péouia, Sdouvagna,, etc
Lédignan, Poumpignan, et autres. ui où 230
LÉbé à ne dé
tds RÉ A NÉ ds D ss sh. 2 2 à 5
ANC* .
“Ant, 5. 'm. Añ, année. — L'an dé daï-laï, l'anhée avaht-
dernière ; il ÿ a deux ans. Añtan, l'an dernier. — V. c. m.
Dévañ añtan , il ÿ à deux ans. Hiubi faï un an, aujoûr-
d'hdi il ÿ a tin añ. Couméngo sous ans pér éaléndos, 1
inpte ses années À partir de la Noël. L'an dâou bissés,
l'äfinée bissextilé. — Voy. Bissès.
Dér. du lat. Añnus.
An, 3e pérs. plur. hdie. prés. du verbe Aoédre; ils où
ont.
Ana, v. Aller; marchérz ävarñcer ; se mouvoir; se trans-
porter d’un lieu dans un autre; changer de place du point
où l'on est à ün autre; S'éténdre aù loin; être contenu,
renfermé ; entrer. — Vôou à la mésso, je vais à la messe.
Vas à Par, tu vas à Paris. Vaï vite, il marche vité. Añôn
plan, allons lentement. Añas-y, allez-y. Anèrou dou maté,
ils allèfént à la camipägné. Y-dian ana, nous ÿ allons à
l'instant, nous nous y rendons sur l'heure. Faï pas qu'ana
et véni, il ne fait qu'allér ét Venir. Vaï d'aïci dou fin fouh,
il s'étend d'ici aù fond. Vaï bas, il plonge profondément.
Toüt aquô anara pas dinc aquél sa, tout cela n'entrera pas
dans Ce sac, né peut être contenu dans ce sac. Aquélo rodo
vaï pas, vai mâou, Ce rouage ne marche pas, manœuvre
mal.
S'ér-aha. S'éh allé ; partir; disparaître; quitter im lieu ;
et quélquéfois Simplement aller. — La taquo s'és én-anado,
la taclie a disparu. La couloù s'én-vaï, la couleür s'effacé,
se ternit. On dit d'an malade: S'én-vai tant qué po, il
dépérit à vüe-d'œil, il marché à grands pas Vérs la fosse.
Lou la s'én-vaï én aïgo, le lait tourne en petit-lait. On dit
d'ün doméstiqué à gages : s'én-baï, il quitte sès inäïtres ou
il est renvoyé. Lou fid s'én-vai, le feu s'éteint faute d’ali-
rent. Aquél éfan couméngo à s'én-aha soulé, Cét enfant
corniheñce à aller, à iarchér seul. Tout soun bon-sén s'és
én-ana, tout sé bôn Sens ést parti. Coumo n'én-dan lous
afaïres? comment vont les affaires? Coumo n'én-vai? quelle
tournure cela prend-il ?
‘Dér. de l'ital. Andare.
Ana, s. m. Mañière d'êtré, de vivre; état de santé. —
Aqüd's Souñ ana, c'est Sa manière d'être où de faire. Mé
démandè moun ana, il mé demanda des nouvelles de ma
sänté: — "On dit aussi subst. faï l'ana et lou véni, il fait
l'aller et le retour ; lou vaï et lou vèn, le va-et-vient.
, # [. Anchois; Clupea encrasichotus, Linn.
Petit poisson dé mêt, Sans écaille, que l’on sale pour mian-
ger ci. 11 no faût pas éonfondre l'anchoïo avec la sardo,
qi n'a rien de commun avec la première que la siumure.
2 A lous idls bourdas d'añchoïo, il a les Ses rouges,
chassieux et éraillés. Pa VO RTE , pressés
comme
barengs.
2Étym. du celt. Jia:
Ancièn, èno, adj. Vieux, vieillard ; FRS ancien.
— Moun ancièn, mon père ou mon atél! *Es un ancièn,
— c'éét um Vicittird.
“ÆEmpranté du fr.
AND 47
Anciènéta, s. [. Mode ancienne, et non ancienneté ou
antiquité.
Formé dé Ancièn.
Ancro, s. f. Encre, liqueur noire pour écrire. — Mé fai
shsa l'ancro, il me donne une peine horrible.
Dér. de l'ital. Inchiostro.
Ancro, s. f. Ancre de navire, instrument de fer, à bran-
ches aiguës, qu'on jette au fond de l'eau pour arrêter les
vaisseaux.
Dér. du lat. Anchora.
Andrè, n. pr. m.; au fém. Andrèio. Dim. m. Andrèné,
Andrèssé; dim. f. Andrèélo, Andrènéto. — I est à
rémarquer que le fém. Andreio ne se donne qu'à la femme
d'André, et non point pour prénom à une fille. On appelle
Andréïéto où Andrénéto la fille ainée d'André, lorsque
celui-Ci est un nom patronymique.
Andriou (Sént-), n. pr. de lieu. Saint-André : nom
commun à plusieurs villages.
Androuno, s. f. Cul-de-sac; plus particuliérement la
petite ruelle, ou espace vide, qu'on est obligé de laisser
entre deux maisons qui ne veulent pas de mitoyenneté, et
par où s'écoulént les eaux des toits. C'est ce qu'on appelle
eù termes de coutume : le tour ou le pied de l'échelle. On
lui donne aussi le sens de : latrines, privé, lieux d'aisance.
Dans cette acception, étym. du grec &vëpèv, lieu écarté,
petite salle réservée aux hommes, qui est traduit aujour-
d’hui dans les gares de chemin de fer par : Côté des hommes,
mêmé sign. Dans la bass. lat, Añndrona.
Andusén, énquo, adj. D'Anduze; qui habite où qui con-
cerne Anduze.
Anduso, s. f. ñ: pr. Anduze, ville du départément du
Gard. Si l'on voulait se contenter de la forme latine de
ce mot pour expliquer sa dérivation et sa forme actuelle,
rién ne serait plus simple que de rapprocher du lat. Andu-
sia, le fr. Anduze, et le lang. Anduso, et l'analogie démon-
trerait seule la parenté et la descendance en ligne directe.
Le mot, quoique venant de loin, n’a pas assez changé sur
la route pour n'être pas d'abord reconnu. Sur un pêtit
monument en marbre, conservé au musée de Nimes, se
trouve inscrit à la lête d’un groupe de plusieurs noms dé
localités gallo-romaines, le nom d’Andusia, sur l'attribu-
tion duquel à l’Anduze moderne aucune contestation ne
s'est élevée. Depuis cette époque, le nom est fidèlement
reproduit par les plus anciens cartullaires, et presque
sans altération il est arrivé jusqu’à nous. Les Romains
avaient donc un poste militaire, un campement d'une
certaine importance qu'ils appelèrent Andusia, sur l'empla-
cément de la ville actuelle, on un peu au-dessus vers le
sommet dit de Saint-Julien : d'anciennes constructions,
des médaillés ét dés antiquités trouvées sur ce point
Er à la dénomination elle-même la certitude de l'occu-
FL difficulté étyinologique n'est pas résolue. Les
vaitiqieurs de la Gaule se moñtraient surtout jaloux d'im-
48 ANË
poser aux noms de lieux des pays soumis la forme qui con-
venait au génie de leur langue : de là cette terminaison
latine qu'ils donnèrent à ce mot. Or, la localité, comme
toutes les autres inscrites sur le monument antique du
Musée, faisait partie du territoire des Volces Arécomiques,
qui avait des villes ou des bourgs assez nombreux. Par con-
séquent, elle avait aussi, comme les autres, son nom gau-
lois ou celtique, quand les Romains vinrent l'occuper et
la classer : et c'est’ dans le plus ancien idiome national que
sa racine doit se retrouver.
Heureusement ici se rencontrent des similaires qui peu-
vent mettre sur la voie, et faire déterminer sa forme pri-
mitive. Sur deux autels votifs découverts dans le Midi, et
qui portent des inscriptions, on lit : Andosso et Andose;
une autre inscription, remarquable par ses noms gaulois,
mentionne également la forme Andos. Enfin, un cippe
funéraire du Musée de Nimes rappelle encore mieux le
nom latinisé, en écrivant : Andus. Ce ne sont là, sans
doute, que des rapprochements, des termes de comparaison ;
mais ils permettent d'admettre avec la plus grande proba-
bilité que la forme celtique d’Andusia est Andos ou Andus.
Le premier radical and, haut, élevé, se retrouve avec cette
même signification dans beaucoup de langues anciennes.
La désinence os et us serait réduplicative avec le même
sens. Les deux montagnes d’Anduze, entre lesquelles coule
le Gardon, l'emplacement de la ville, nous paraissent auto-
riser parfaitement cette étymologie et lui donner une signi-
fication caractéristique. L'origine antique du nom et son
application ne peuvent pas être douteuses.
Anédo, s. f. — Voy. Alédro.
Anèl, s. m. Anneau, bague, boucle d'oreille.
Sén-Jan-das-Anèls, n. pr. Saint-Jean-de-Marvéjols, com-
mune de l'arrondissement d’Alais, canton de Barjac. On
l'appelle aussi : Saint-Jean-des-Anneaux, parce qu'autrefois
on y fabriquait quantité de bagues de crin, qui étaient un
des principaux objets de commerce à la foire qui s’y tient
le 29 août.
Dér. du lat. Anellus, dim. de annulus.
Anéla, v. Boucler ; anneler; tourner en volute. — On
dit proverbialement d’un homme qu'on ne peut décider à
terminer une affaire : À lou mdou dé la quo d'un por,
andlo toujour el jamaï noun nouso, il est comme la queue
d'un porc qui s’entortille et ne se noue jamais.
Dér. de Anël.
Anèlo, s. f. Anneau de rideau; virole de toute sorte
d'outils. — Anèlo dé pèous, boucle de cheveux.
Dér. du lat. Anellus.
Anéquéli (s’), ». S'exténuer, s’amaigrir de faim, de
froid, de manque de soins ; devenir à rien.
Dér. du lat. Nihil, ou de nec alere, nec alitus.
Anén, A°e pers. plur. impér. du v. Ana. Allons. Se prend
souvent comme interjection. — Anén à la fon, allons à la
fontaine. Anén, chu, allons! silence. Anén/ zou! pèr véire,
idiotisme : ça! voyons donc! Anén/ véndra pas, il ne viendra
ANI
pas; il faut en prendre son parti. Anén/ moun home, ou
fas bièn, c'est cela, mon garçon, tu le fais bien.
Anîèr, s. m. Enfer; lieu où les damnés éprouvent un
supplice éternel; diable, diablotin; fosse d'un pressoir à
huile, où l'on fait écouler les eaux de la cuve, après en
avoir enlevé l'huile à la surface. Ces eaux ainsi rejetées
contiennent encore de l'huile, que les employés du moulin
recueillent quand elles sont reposées; mais cette huile der-
nière est toujours plus épaisse, plus chargée et de qualité
inférieure; on l'appelle : Oli d'anfèr.
Dér. du lat. Inferi.
Anfin, av. Enfin ; à la fin, en dernier lieu.
Formé du lat. In fine.
Anfla, v. Donner, appliquer un soufllet ; souffleter.
Dér. du lat. Infligere, appliquer, frapper violemment; ou
peut-ôtre de énflare, faire enfler, grossir, parce qu'un souf-
flet très-fort fait enfler la joue.
Anîle, s. m. Soufilet sur la joue.
Angle, s. m. Angle, ouverture de deux lignes qui se
rencontrent ; coin, recoin.— Angle dé ro, couches et veines
de terre végétale qui se trouvent dans les diverses assises
d'un rocher.
Dér. du lat. Angulus. \
Anglés, s. m. Créancier fâcheux, importun. — L'origine
de ce mot vient évidemment d’un temps où, en France,
on ne connaissait pas de rencontre ou de vue plus déplai-
sante que celle d’un Anglais, maitre du territoire.
Anglés, éso, adj. Anglais, anglaise, qui est d’Angle-
terre.
Angléso, s. f. Redingote, dont la forme et la coupe ont
été importées sans doute d'Angleterre.
Anguièlén, énquo, adj. Qui tient de la forme et de la
natur» de l'anguille. — Se dit au prop. et au fig. de quel-
qu'un ou de quelque chose, long et menu, qui échappe
facilement, qui glisse en se tordant, qu'on ne peut saisir.
Dér. de Anguièlo.
Anguièlo, s. f. Anguille, Muræna anguilla, Linn. Pois-
son, de la famille des Pantoptères et de l'ordre des Holo-
branches, qui habite non-seulement la mer, mais les lacs,
les étangs, les rivières et les ruisseaux.
Dér. du gr. Éygshus, d'où le lat. anguilla, ou de
anguis.
Animäâou, äoudo, adj. Péjor. Animdoudas. Grosse bête;
grossier, brutal. — Alimdou n’est que la corruption de ce.
mot, et il ne s'emploie que par interjection. — Y. ç. m.
Dér. du lat. Animal.
Anis, s. m. Anis, Pimpinella anisum, Linn., de lafamille
des Ombellifères. Plante aromatique originaire d'Egypte,
dont la graine est une des semences chaudes. — Les
semences, plutôt que la plante elle-même, sont ainsi
nommées.
Dér. du gr. &vroov.
Anisèto, s. f., ou mieux Nisèto. Anisette, eau-de-vie
anisée. — C'est l'absinthe des gens du peuple. Étendue d'eau,
ANN
elle est extrêmement rafraichissante et désaltère beaucoup.
— Voy. Nisèto.
Dér. de Anis.
Anisses, s. m. pl. Laine ou poil d'agneau, qui sert à
faire les chapeaux de feutre les plus grossiers, qu'on nomme
chapeaux de laine.
- Dér. du lat. Agni, gén. d'agnus.
‘Anitor, s. m. Cresson des jardins, cresson alénois, nasi-
tort; Lepidium sativum, Linn. Plante de la famille des
Crucifères, potagère, qu'on met dans le bouillon et dont
on mélange la salade de laitue.
Corr. du fr: Nasitort , peut-être aussi dér. d’Anès, dont
il a un peu la saveur.
. Anje, ou mieux Anjou, s. m. Dim. Anjouné. Ange,
créature spirituelle d’un ordre supérieur à l'humanité. Petit
ange, se dit souvent des petits enfants. — Anjou boufarèl,
c'est une de ces têtes d'ange, sans corps, avec des ailes,
qu'on trouve dans les tableaux et dans l'architecture
d'église, toujours bouffies et qui semblent soufller, comme
les têtes de vent qui viennent du paganisme. On dit d’un
enfant joufllu et vermeil : Sémblo un anjou boufarèl, et
d'un joueur qui a tout perdu et se retire de la partie, nu
et dépouillé : Anara coucha émbé lous anjous.
© Dér. du lat. Angelus.
Anjèlus, s. m. Angelus, prière que les catholiques font
en l'honneur de la sainte Vierge, le matin, à midi et le
soir. Désigne aussi le point du jour et la nuit tombante ;
la sonnerie qui annonce l'heure de cette prière.
Dér. du lat. Angelus.
Anjou, s. m.— Voy. Anje.
Anjouné, s. m. — Voy. Anje.
Anjounén, énquo, adj. Angélique, qui tient de l'ange,
qui appartient ou qui est propre à l'ange.
. Dér. de Anjou.
Annadiè, dièiro, adj. Qui n’est pas pareil, qui ne pro-
duit pas également chaque année ; casuel. — L'ouliviè és
bièn annadie, l'olivier ne produit pas tous les ans, il est
soumis à bien des éventualités. — Dans le mème sens, on
dit d'un homme d'humeur inégale, qu'és journaïè, il est
journalier.
- Dér. de Annado.
Annado, s. f. Année; annuité. — Ce mot n'est pas
employé comme synonyme de an pour le comput du temps,
mais simplement pour l'ensemble des récoltes de l'année. —
Aourén uno bono annado dé bla, nous aurons cette année
une bonne récolte de blé. L'annado ddou fanfaroù, lou
péisan béquè prou; cette phrase proverbiale, empruntée à
la sagesse des anciens, signifie que lorsqu'il y a abondance
de fanfaroùs au printemps, il y aura une bonne récolte
de vin. (Foy. Fanfaroù). L'annado sé présénto bièn, il ÿ
a bonne apparence de récolte cette année.
- La bono annado, la bonne année; souhaits du premier
jour de l'an, dont le protocole est: Vous souhèle la bono
annado, acoumpagnado dé fosso d'éoutros. La plupart du
ANU 49
temps on supprime cette finale, et l'on ditsimplement : La
bono annado acoumpagnado.
Dér. du lat. Annus.
Anno, s.f. n. pr. Dim. Annéto, Nanoun, Nanéto. Anne,
Annette, n. pr. de femme.
Anounça, v. Annoncer, faire savoir; publier; pronos-
tiquer, présager. —S'anoungça bièn, se produire avec avan-
tage; s'exprimer avec facilité et élégance.
Emprunté du fr.
Anouncies, s. m. pl. Bans de mariage; publication de
mariage. — An crida sous anouncies, on a publié ses bans.
Dér. du lat. Nuntiare.
Anquado, s. f. Fessée ; claques ; coups de la main sur
le derrière. — Ficha uno anquado, donner une fessée ; fouet-
ter avec la main sur les fesses. Cette expression n'est usi-
tée qu’à l'encontre d'un enfant.
Dér. de Anquo.
Anquo, s. f. Au sing. Fesse; au plur. Las anquos sont
les hanches, partie latérale du bassin située au haut de la
cuisse.
Dér. de la bass. lat. Anca, m. sign., ou du gr. àyxy,
angle saillant.
Ansin, adv., ou Énsin, Énsindo. Ainsi, de cette ma-
nière, de cette façon; c'est pourquoi, de même. — Pér
ansin, par conséquent, partant.— Aqud's pas ansin qué
foou faïre, ce n’est pas la manière de faire cela. Ansin
siègue, ainsi soit-il. Crése qué siès un pdou ansin, je crois
que tu rèves, que tu radotes : euphémisme délicat.
Dér. du lat. In et sic.
Antan, adv. L'an dernier; autrefois, jadis, ancienne-
ment. — En vieux fr., on disait antan, comme on le voit
par ce dicton encore admis : Je m'en soucie comme des
neiges d'antan. — Davan-antan, adv. L'année avant-der-
nière. Mas amours d'antan, mes vieilles amours.
Dér. du lat. Antè annum.
Antièno, s. f. Antienne; mauvaise nouvelle, commis-
sion fàcheuse ; demande pénible. — Pourta l'antièno, faire
une commission désagréable pour celui à qui elle s'adresse;
solliciter.
Empr. au fr.
Antifo (Batre l'), v. Battre la campagne, courir les
champs. — Phr. faite, mot d’argot français.
Antignargue, s. m. n, pr. de lieu. Antignargues, ha-
meau dépendant de la commune d’Aigremont, canton de
Lédignan, arrondissement d’Alais. En lat. Antinhanicæ et
Entrinnanicæ : roman , Entrinnanègues.
Dér. du celt. Ant, and, anti, devant, en avant; avec la
désinence lat. anicæ, transformée par la langue vulgaire
en anègues et argues. — Voy. Argue. Ses analogues se
retrouvent dans Antignac (Hérault, Cantal, Haute-Garonne);
dans Antignate (Lombardo-Vénétie) ; dans Antigni ou Anti-
gny (Vienne, Vendée, Côte-d'Or), et dans Antin (Hautes-
Pyrénées).
Anuia ou Anuèja, v. Ennuyer, causer de l'ennui; fati-
7
50 AOU
uer. — Tout aqud m'anuio, tout cela m'ennuie, me
fatigue.
Anuïia (s’), v. S'ennuyer, languir d'ennui; perdre le
goût d'une chose dont on a usé longtemps.
Dér. du gr. Évvoux, tension d'esprit, application forcée.
” Anuè, adv.— Voy. Agnuë.
Anuècha(s’), v.— Voy. Agnuëcha (s!).
Aou, particule et art. sing. masc. au datif. Au. Il est
la contraction de à lou pour former le datif. Aou s'emploie
quand le subst. auquel il s'applique, commence par une
consonne. Au plur. datif, il fait as, contraction de
à lous, aux; comme le dat. sing. fém. à la, donne à
las, aux, pluriel. — Aow puple, au peuple, as puples,
aux peuples; à la fénno, à la femme, à las fénnos, aux
femmes.
La chute de l’Z du radical primitif a! a produit la con-
traction dou, dipht., qui se prononce par une seule émis-
sion de voix, et dont la première voyelle est tonique par
l'accent circonflexe. Cequi motiverait assez bien, au moins
pour l’article, la manière d'écrire que nous préférons . —
Voy. Al.
Mais cette forme, qui est également appliquée aux
voyelles e, à, o, alors qu’elles deviennent aussi diphthon-
gues par l’adjonction de la consonnance ow, a été l'objet de
vives critiques. Avant de justifier des motifs qui nous font
rester réfractaire aux réformes en vogue, qu'il nous soit
permis de présenter, in lmine litis, un exposé de quelques
principes généraux sur la matière, préliminaire indispen-
sable de toute discussion.
Notre Dictionnaire, par droit de naissance, avait son
orthographe toute faite dans la nomenclature dressée par
La FaRe-ALais. Ce catalogue, patiemment élaboré sous le
contrôle d’une critique que l'intimité rendait plus rigou-
reuse parce qu’elle était plus libre et plus familière, n'avait
pas seulement en vue de relever un à un tous les mots de
ñôtre dialecte, de juger de leurs droits à l'admission ou de
prononcer leur rejet définitif. Il avait encore fallu, pour
les enregistrer dans un ordre régulier, déterminer exacte-
ment la forme et la structure de chacun : leur classement
posait donc les bases de notre méthode orthographique. Le
savoir du maître et son goût éprouvés donnaient à ce pre-
mier travail une irrécusable sanction. Nous pouvons dire
-éépendant que cette nomenclature nous était imposée
moins par déférence pour son autorité, que par une con-
viction réfléchie de suivre, en l'adoptant, le système le
plus clair, le plus rationnel et le meilleur.
Avec une langue comme la nôtre, qui n'a ni alphabet
propre, ni règles précises, ni syntaxe bien arrêtée ; qui est
beaucoup parlée sans avoir presque de prose écrite ; qui
nè s'est produite au dehors que par une merveilleuse poésie
partout chantée; mais qui veut se faire lire et comprendre,
“ét'qui mérite d'être étudiée; un dictionnaire n'a qu'une
voie à prendre, celle qui rapproche autant que possible
Yécriture de la prononciation. Par céla que, dans notre
AOÛ
idiome essentiellement musical et euphonique, le sens d'un
mot dépend le plus souvent du son qui lui est imprimé en
parlant, il est nécessaire que la lettre écrile soit la pein-
ture de la voix entendue. Chaque terme, chaque syllabe,
figurés par les signes convenus et usuels, doivent se pré:
senter avec un relief tel qu’ils puissent d'abord être épelés
sans hésitation, puis liés régulièrement, enfin prononcés
comme l'usage demande et veut qu'ils soient articulés.
Saisir rapidement l'œil, la voix et l'oreille pour arriver par
le plus court chemin à l'intelligence, c'est le but que se
propose notre Lexique. L'orthographe phonétique est done
la seule que comporte notre idiome : voilà le principe. -
Seulement la règle est dans la mesure et ne peut se sou:
tenir que par des tempéraments. Une rigidité absolue-n’a
rien-de pratique dans les conditions de l'idiome méridional;
et l'éclectisme large et simple que les Castagnados ont for-
mulé, lui convient mieux de tous points. Certes, si nous
avions à mettre en œuvre les richesses enfouies de lan:
cienne langue d'Oc, avec ce trésor-là, et en dépit des acces-
sions nouvelles que le temps et les mœurs nous ont impo-
sées, nous n'aurions pas hésité à relever le vieux pavillon,
à proclamer une syntaxe et une orthographe spéciales, à
arborer des principes radicaux et inflexibles. Mais nous
n'en sommes pas à avoir une langue-maîtresse et, comme
on dit, sui juris; nous ne sommes plus le roman. I n'y a
pas d’illusion patriotique à se faire : notre idiome s’est
transformé; sa configuration doit se ressentir du change-
ment, s’il y a progrès. Soit que, remontant aux mêmes
origines, le français et le languedocien aient gardé l'em-
preinte de leurs éléments primitifs; soit que l’action.des
mèmes influences ait agi-sur eux d’une manière presque
identique au moment de leur seconde formation, dans leur
passage du roman au langage actuel; soit que, par Je
contact forcé, des infiltrations aient pénétré de l'un dans
l'autre ; le fait certain est que bien des-mots se retrouvent
dans les deux langues, sans qu'il soit toujours facile de
reconnaître à laquelle appartient la primauté de composi-
tion, ou si la greffe n’a pas une date contemporaine. Cette
catégorie de vocables ne saurait manquer d’engendrer cer-
taines conformités d'orthographe. Il s’en rencontre d’autres
que l'usage a mis dans la circulation, qui se sont natura-
lisés et qui ont acquis droit de cité. Si nous voulons un
Dictionnaire complet, nous devrons leur faire place,
Cet état de choses était de nature à mitiger notre rigo-
risme. SAUVAGES, il y a cent ans, avait déjà été amené à
faire des concessions. Nous avons une instinctive antipas
thie, égale au moins à la sienne, pour les travestissements
à la française de nos techniques; mais la crainte de nous
confondre avec le français nous préoccupe moins. Surtout
le désir de donner à notre langue originale une physio-
nomie plus originale encore, ne nous conduira pas à défi-
gurer certains mots, au point de dérouter l'œil le plus
exercé, ni à compliquer certaines liaisons de syllabes par
l'introduction de lettres parasites ou bizarres, pour la seule
AOU
satisfaction de ne pas créer des-ressemblances graphiques;
quand il y a au fond ne hrpeetnsieneeer
painité.
Si, avec SAUVAGES, nous reconnaissons que toutes les
lettres doivent être prononcées, encore faut-il, croyons-
nous, n'écrire que celles qui.se prononcent, qui sont suffi-
santes, de par l'alphabet, à constituer le son juste. En tout
ce-qui ne blesse pas le génie de la langue, il n’y a pas péril
à se montrer facile, et nous indiquons comme exemple la
dipht. ai. —Voy: Ai.
Mais à part cette exception, c'est toujours la prononcia-
tion vers laquelle converge notre orthographe et qui lui
{sert de guide.
+ Nous entendons les docteurs ès-grammaire s’écrier :
‘mais les étymologies que vous sacrifiez avec votre sys-
tème phonographique ! mais les homonymies qui vont
-pulluler, semer partout la confusion et nous précipiter
dans le chaos! Nous tombons dans l’abomination de la
désolation prédite par Ch. Nodier.
Ces anathèmes ne seraient,pas effrayants, ni ces griefs
très-sérieux, n'étaient le pédantisme-et le paradoxe qui les
ont parfois éloquemment enflés ; mais que les timorés se
‘ rassurent.
La part des étymologies est largement faite dans notre
‘ lexique; au-dessous de chaque vocable est, autant que
possible, placée sa dérivation. Les lettres étymologiques
‘ savantes ne disparaissent-elles pas en parlant? Pourquoi en
surcharger le mot écrit? Ne serait-ce pas le plus sûr moyen
de le rendre inintelligible à la lecture, introuvable à la
æecherche la plus obstinée, et d'en fausser l’épellation ?
* Dans les cas si fréquents d'apocope et d’aphérèze, de syn-
cope et de métathèse, de mutation, de transposition, d’ad-
dition ou de suppression de voyelles et de consonnes, quel
serait.le parti à prendre pour éviter le barbarisme en écri-
ture ou la cacophonie dans la parole? Les savants auraient
bien fait de commencer par résoudre ces difficultés.
Quant aux homonymies; avec une orthographe pure-
ment phonique, elles existent au même degré dans l'écri-
sure comme dans la prononciation, pour la vue et pour
l'onie..ÆEh bien! après? Dans le langage parlé quelle.est la
confusion possible? Dans la phrase écrite :d'où. peut naitre
V'incertitude ou l’obseurité? Avec notre méthode d’aecents
et.de tréma, il n'y a pas de mot absolument homographe.
Sur.les-mêmes lettres, la notation donne le sens; toute
amphibologie est. prévenue par l'accent. Il.n'y a, pour s'en
«onvainere, qu'à le voir fonctionner, par exemple, dans
babo.et babd, béou et bèou, coulou et couloù, sén et sèn,
- æén.et vèn, fio et fiè, sie ronié id ete., etc. — Voy.
au mot Acén.
* Lèest, en effet, le point eapital. L'accentuation est le
rai génie de la langue d'Oc. C'est par l'accent que se
module la gamme harmonique de sa vocalisation ; l'accent
‘qui marque la tonalité de ses cadences brèves ou longues,
AOU : 51
Comme disait le maitre, notre idiome « vocalise plutôt
qu'il n'articule. » Sa parole est.une musique et.une mé-
lopée : il.ne faut pas l'oublier. Mais son chant, si doux à
l'oreille, a pour se traduire aux yeux une notation : pour
son parler écrit, cette notation est l'alphabet.
La langue d'Oc n'a pas un instrument fait exprès pour
elle ; elle a partagé avec la langue d'Oil l'usage de l'an-
cien alphabet latin; les mêmes combinaisons de signes
produisent à peu-près les mêmes effets. Nous ne voyons,
pour notre part, aucun mal à ce qu'elle s'empare et se
serve d'un bien qui lui appartenait un. peu aussi; n'eùt-
elle même pas été la première à le posséder. Aujourd'hui
c'est peut-ôtre pour elle la seule condition possible .de
vivre, de se faire comprendre et étudier, .de se répandre
par le monde et d'y faire figure. Elle a donc sagement agi
d'en adopter les formes ; elle a fait mieux encore de suivre
son mouvement, de mettre à profit sa valeur et ses perfec-
tionnements. Quel regret aurait-elle de cette communauté,
si les caractères de l'alphabet français en usage peuvent
représenter tous les sons languedociens et reproduire fidé-
lement sa prononciation ? [1 sera mème facile de prouver
qu'elle y a gagné d'exprimer certaine consonnance qui lui
était particulière et qui n'existait pas.en latin. — Voy.
lettre.U.
Maintenant, à Ja question de notre article, que ces pré-
mices auront simplifiée. Comment faut-il écrire les diph-
thongues ou triphthongues dans lesquelles se rencontre la
consonnance ou? Nous ne parlons que de la première
forme sur a ; les autres e, &, o viendront en leur lieu : elles
ont toutes d'ailleurs les mêmes raisons d'être. — Voy. Eou,
diphth.
IL s'agit d’une diphthongue, ce qui signifie une syllabe
unique composée de deux sons. La voyelle a, éclatante,
sonore, n’est pas en litige; mais comment doit être repré-
sentée la seconde, voyelle sourde et aphone?
Rien ne paraît plus simple que la réponse, s'il est bien
convenu, une fois pour toutes, que les mots doivent être
figurés tels que dans l’usage.on les artiçule; que la pro-
-nonciation doit être rendue de:la manière la plus facile, Ja
plus.perceptible au plus grand nombre; qu'enfin le seul
véhicule connu et pratiqué doit être l'alphabet français. 11
n’y a.pas à vouloir se.soustraire à cette loi de la nécessité,
Ai à.s'en humilier. Ce n’est point un tribut de vassalité
payé au français, mais le partage d’un héritage commun.
‘Que l'on s’en plaigne, à la bonne heure: ce peut être un
agréable exercice d'esprit. Que l'on trouve une regrettable
imperfection à.ne pouvoir exprimer chaque son simple.par
un signe unique, et que, par exemple, dans la conjoncture,
l'abréviation grecque &# (ov) qui ferait si bien, .ne soit.pas
admise chez nous; nous nous gardons d'y contredire. Mais
nous n’en serons pas moins tenus, quel que soit notre dia-
—lecte, de nous servir de ce que nous avons et comme nous
J'avons;.et il faudra bien s'en contenter. Il semble donc
qu'il devrait suffire de savoir comment l'alphabet fran-
52 AOÛ
çais traduit en lettres le son qui se fait entendre nette-
ment, isolément, à la finale de notre diphthongue, pour
décider que la langue d'Oc doit l'écrire de mème. Or, la
voix u est représentée par un seul caractère : la vocale ou
a besoin de deux signes, mais n’en est pas moins une : et
l'une et l'autre ont leur son spécifique, particulier. Nous
entendons et nous prononçons w et ou, voyelles, sans les
confondre; écrivons donc et notons avec des signes diffé-
rents des sons distincts. L'orthographe vraie de la syllabe
sera donc dou.
La déduction est rigoureuseeet logique. Elle avait frappé
sans doute bien des auteurs et des plus recommandables,
glossateurs et poètes, qui professaient la nécessité d’écrire
commeon prononce, lorsque de notre temps on a essayé de
changer tout cela, non pas en attaquant le principe, mais
en imaginant une exception qui le renverse.
Une nouvelle école proclame que la voyelle « se pro-
nonce, en effet, toujours comme en français, hormis les
cas où elle suit immédiatement une autre voyelle; car alors
elle doit prendre le son ou; et il faut écrire au, éu, èu, iu,
du, diphthongues, et iau, iéu, ièu, idu, triphthongues, au
lieu de dou, éou, ou, iou, 6ou, et idou, iéou, tôou.
Voilà l’inéluctable Schibboleth en écriture, posé d’auto-
rité à l'entrée du cénacle, où nul ne pénètre sans sou-
mettre, au culte et à la pratique de ce symbole, son esprit,
sa foi et sa plume. C’est l’heureux commencement, le pivot
fondamental de l'unité orthographique des dialectes de la
langue d'Oc, ont décidé les puristes réformateurs.
Ce dogme, d’assez fraiche date, est soutenu à la vérité
par des hommes d’un incontestable talent, sinon par des
arguments bien solides; mais il n’est pas si absolu qu'il ne
souffre des atténuations, ni si vrai qu'il ne se contredise
souvent lui-même. On lui a fait une histoire, ce qui donne
toujours un certain crédit; il a trouvé des partisans, ce
qui ne manque jamais aux plus étranges doctrines. Ne
parlons pas des convertis du premier degré, qui longtemps
avaient écrit ces diphthongues comme ils les articulaient,
sans doute avec la conscience de bien faire et la certitude
d'être compris, et qui depuis, illuminés par un rayon d’en-
haut, se corrigenteux-mêmes, et dans leur ferveur de néo-
phytes, affrontent le douloureux martyre de ne plus pou-
voir être lus. Ne relevons pas chez les adeptes du second
degré ces scrupules qui leur font admettre l'application du
système à la voyelle a, tandis qu'ils la rejettent pour les
autres. Les résipiscences comme les divergences prouvent
ceci: que l'orthographe dou a eu et aura toujours sa raison
d’être, et qu’il n’est pas aussi sûr que la réforme par au
puisse également bien justifier de la sienne.
Nous regardons cette prétendue innovation comme une
hérésie grammaticale de la plus grosse espèce. Elle mène
tout droit à la cacophonie, ce que notre langue redoute le
plus; elle introduit foreément l'exception dans l'exception,
ce qui est un danger et un signe de décomposition pour
un idiome; elle se met en révolte ouverte avec l'usage et
AOÛ
le sens commun, et finit par ne tenir aucun compte des
lois de la liaison, du rapprochement, de la combinaison et
de la valeur des lettres.
Il est facile de poser en théorème que la Vogel u prend
le son ou, quand elle se trouve placée après une autre
voyelle; mais rien n’est moins réfléchi, ni moins véritable.
Il existe une famille nombreuse et très-intéressante de
mots dans lesquels l’euphonie caractéristique de l'u simple
ne peut pas disparaitre. Nous ne tenons pas compte de
quelques noms propres, comme Esaü, Danaüs, Emmaüs,
Antinoüs, etc. ; mais Marius, si commun en Provence:
mais Darius, Durius, Vius, etc., fréquents dans le Bas-
Languedoc, mais tant d'autres à désinence identique, qui
reviennent si souvent dans les traductions des anciens
auteurs, il n’est pas aussi commode de s'arranger avec eux
si lon veut prononcer correctement et suivre les préceptes
des novateurs. De quel droit sacrifier encore cette classe
de substantifs communs, d’adjectifs et de participes, ter-
minés en aitu, èiu, &iun, un, aiur, tur, ius,iuro, tuso, etc.,
comme douréiu, oreillard; béstiu, bestial; caïtius, chôtif ;
éscoubiun, balayures ; éscafouïun, écrasement ; aïul, aïeul;
iuèl, œil; maliuga, rompre ; méssius, messieurs; hiudt,
aujourd’hui; liuèn, loin; huièl, bourgeon, œil; s'aïuèncha,
s'éloigner ; baïuèrno, étincelle; pariuro, gageure; cadiuëisso,
cosse de pois; faïu où alaïu, bière, cercueil ; triun, éplu-
chures; triuèjo, truie ; viéiun, vieillesse, etc., ete. ? Certes,
s’il en fut, ceux-là ont un « qui suit immédiatement la
voyelle; et personne ne s’avisera jamais de faire entendre
ou en les prononçant. La conclusion est claire.
Cependant comment une erreur de ce calibre a-t-elle
pris naissance et crédit ? Simplement parce qu’on a évo-
qué le souvenir des troubadours classiques, qu'on a démon-
tré qu’ils n'avaient pas écrit autrement ces syllabes diph-
thonguées, et qu'on a voulu s’autoriser de leur exemple
constant.
L'argument, pour être le seul qui se soit encore produit
en faveur de ce système, n’est pas heureux. Son moindre
défaut est d’avoir trop oublié que les troubadours écri-
vaient avec l'alphabet latin et qu'ils prononçaient à la
mode latine. La langue romane employait les formes et
les lettres romaines. Or, le latin qui ne connaissait point
le son de l’x simple, avait cependant ce signe w qui son-
nait partout et invariablement ow, isolé, précédé ou suivi
par une voyelle ou une consonne. En italien, en espagnol,
en portugais, langues néo-latines, l’u français, qui n'existe
pas non plus, a conservé la prononciation qu'il avait chez
les Romains. Au contraire, dans la langue d'Oc, le son w
est ancien : on le fait remonter aux Gaulois. Il est dans
son génie, et il est impossible de ne pas le maintenir. Mais,
comme pour exprimer ce son w, la langue d'Oc manquait
d'un caractère spécial, ou, pour mieux dire, n'avait à sa
disposition, dans l'écriture, qu’une lettre destinée à repré-
senter deux voix différentes, force était bien à ceux qui
écrivaient de mettre un w dans les mots dont la pronon-
|
AOÛ
ciation devait faire entendre ou, comme dans ceux où la
voyelle avait le son actuel. Cet usage s’est prolongé long-
temps : il explique l'ancienne manière d'écrire des trou-
badours , mais il est loin de prouver qu’on doive la préco-
niser et la reprendre.
Aujourd'hui, en l'état des conventions et des combinai-
sons alphabétiques qui régissent la langue d'Oc, il n'est
plus permis de revenir aux vieux errements. A moins de
réformer l'alphabet adopté, et nous n'en sommes pas là, si
la langue d'Oc veut se faire lire et se faire comprendre à
la lecture, elle sera tenue d'écrire par le signe convenu la
voyelle qui devra être prononcée comme l'u français, et de
mème pour la voyelle ou, formée de la jonction de deux
signes, mais ne produisant qu'un son simple, entier, indé-
pendant ; et ce sera une règle générale, sans exception, bien
que l’une ou l'autre vocale soit précédée ou suivie d’une
voyelle ou d'une consonne. — Voy. Eou, diphth., 1, Ou,
U, voyelles. :
Que l'on consulte donc l'oreille et la prononciation, c’est
tout ce que demande notre idiome, essentiellement eupho-
nique. Sauvons son autologie, sans cesse menacée par les
envahissements du Nord ; mais soyons de notre époque, et
sous prétexte d'unité, ne faisons rien de rétroactif, la pire
des conditions. N'essayons pas de ressusciter des formes
surannées, ne latinisons pas notre orthographe, si nous
voulons prouver que notre langue d'Oc est toujours vivante
et qu’elle produit encore des chefs-d’œuvre.
Aou, s. m., au plur. Aousses. Toison de mouton ou de
brebis ; l'ensemble de la dépouille d’une bête à laine prise
isolément. — L'dou ne comprend que cette partie de la
toison qui se tient toute et ne forme qu’un corps, déduction
faite de la laine du ventre, des jambes et de la tête, qui se
coupe en détail, par flocons et se nomme: Flouquariè.
Dér. du béarn. Aoulha, brebis, du lat. Ovicula, et Ovis.
— Voy. Abéiè.
Aoubado, s. f. Aubade; concerts, musique, sérénade au
point du jour sous les fenêtres d’une jeune fille ou d'une
personne que l’on veut honorer. — Il se prend souvent,
par antiphrase, pour une insulte publique ou une scène de
moquerie ou de reproches. — Voy. Révéiè.
Dér. de Aoubo. 1
Aoubala, v. Dévider la soie, la doubler et la tordre fai-
blement, lui donner un faible apprèt, sur des bobines qui
tournent fixées à un grand métier, l'éoubalo, mis en mou-
vement par l'eau, la vapeur ou des chevaux, et qui est de
forme ovale. .
Dér. du fr. Ovale, qui est le mot technique de ce métier.
Aoubalaïre, aïro, adj. Celui ou celle qui sert un métier
de soie dit ovale.
Aoubalaje, s. m. Œuvre que donne à la soie le métier
dit ovale; moulinage de la soie destinée à la confection des
_Aoubaléstriè, ièiro, subst, et adj. Étourdi et maladroit
à la fois; jeune gars sans frein et sans mesure.
AOU 53
Ce terme de mépris est une suite du décri où étaient
tombés nos archers qu'on nommait au moyen âge, en langue
romane, doubaléstriès, arbalétriers. Comme la guerre, à
cette époque, se faisait principalement au moyen de 4a
cavalerie, les hommes d'armes, les archers, milice à pied,
étaient peu considérés, mal exercés et partant peu utiles,
ce qui devait seul étouffer chez ces soldats tout germe de
courage et tout désir de se distinguer. Leur nom et jusqu’à
celui de matras qu'on donnait à leur flèche, devinrent en
Languedoc des termes d’injures ; tandis que chez les Anglais
les archers étaient la meilleure et la plus utile de leurs
milices, témoins les batailles de Crécy et de Poitiers.
Aoubaléstriè, s. m. Arbalétrier, pièce de charpenterie
d'un comble; ferme ou assemblage qui soutient la couver-
ture, formé de deux pièces obliquement placées, qui vont
s'emmortaiser du haut avec le poinçon ou pied-droit et par
le bas avec la ferme décrivant avec elle un triangle.
Dér. d’Aoubaléstro.
Aoubaléstriè, s. m. Grand martinet, martinet à ventre
blanc Cypselus alpinus, Temm. Oiseau de l'ordre des
Passereaux et de la famille des Planirostres. Gris uniforme
sur toutes les parties supérieures, la gorge et le ventre
blancs. Son nom lui vient de ce qu’en déployant les ailes
il rappelle la forme d’une arbalète,
Aoubaléstro, s. f. Arc d'acier monté sur un füt, qu'on
tend au moyen d’une corde, servant à lancer des flèches
nommées matras.
Dér. de la bass. lat. Arbalista, formé de arcu-balista.
Aoubalo, s. f. Ovale, métier à doubler et à tordre la
soie.
Empr. au fr.
Aoubé, interj. Oui; oui vraiment. — Aoubé tant ! oh!
certes oui! Aoub'aquà ! pour cela, oui ! je vous le promets.
Aoubé saïque ! oui, sans doute.
Formé par syncope de Oui ou ha et de bé.
Aoubécho, s. f. Aubier d’un arbre, couche ligneuse
entre l'écorce et le cœur de l’arbre ; elle est plus blanche,
plus tendre et plus poreuse que ce dernier, parce qu'elle
est plus récente de formation. Les planches prises dans
l’aubier sont plus sujettes à la vermoulure. — Voy. Aou-
bénco.
Dér. du lat. Alburnum .
Aoubéi, v. Obéir; agir selon un ordre reçu; céder,
plier.
Dér. du lat. Obedire.
Aoubéissén, énto, adj. Obéissant, soumis ; maniable.
Aoubéissénço, s. f. Obéissance, soumission ; habitude
d'obéir.
Aoubénas, s. m. n. pr. Aubenas, ville du Vivarais,
dans le département de l'Ardèche. — On remarquera que,
pour tous les noms de lieu qui commencent par un a, on
ne place pas au-devant la préposition à, correspondant au
lat. ad, et l'on ne dit pas à Alais, à Aoubénas, à Avi-
gnoun, parce que cette réduplication de la mème voyelle a
54 AOÛ
quelque chose de heurté pour l'oreille languedocienne.
Mais on emploie la préposition én, répondant au lat. in, et
l'on dit: Véou én Alais, én Aoubénas, én Anduso, én
Arle: I n'en est pas de mème pour les noms de lieu com-
mençant par une autre voyelle; car on dit très-bien : à
‘Usès, à Iousé, à Uchâou, à Orléan.
Le mot languedocien Aoubénas est exactement reproduit
par son équivalent latin Albenacium où Albenassium. C'est
pour la première syllabe, le changement, très-commun
dans notre idiome, de al en dou, rendu par au en fr., ce
qui ne se fait pas non plus sans une certaine réciprocité.
Quant à la terminaison as, ce n'est pas ici un fréquentatif,
mais une variante du suffixe celtique primitif ak, vulga-
æisé dans la forme latine acum, assium. Le mot lui-même
est le gaulois alb, le même que ap, signifiant sommet,
haute montagne, et blane, couleur de neige ou couvert de
neige. Sa parenté est nombreuse; aux désinences près, on
la reconnait dans les noms identiques : Atbénas, en Pro-
vence; Aoubénas, arrondissement de Forcalquier (Basses-
Alpes) ; dans Aubeïgnan (Landes); Aoubigna (Gard), en fr.
Aubignac; qui se retrouve dans Aubignac ou Albignac,
Atbiniacum, arrondissement de Bourges; Albignac, Atbi-
niacum (Vaucluse); Aubignas, en Vivarais; Aubigné, en
Bretagne, Poitou, Maine, Anjou, Touraine; Aubigny, Albi-
niacum, dans le Berry, la Brie, la Picardie, le Bourbon-
nais, le Poitou, Touraine, Champagne, Bourgogne, Laon-
nais, Normandie, Franche-Comté, Nivernais, Artois; et
encore dans Aubeinges ou Aubinges (Berry); et enfin dans
notre Aoubignargue, Aubignargues, Albanhanicæ (Hérault).
Tous ces noms présentent dans leur radical et dans la
version latine une analogie directe, et s'appliquent à des
localités, comme Aubenas, sur des plateaux élevés ou
remarquables par les montagnes qui les entourent. —
Voy. Aoubussargue, etc.
Aoubénco,.s. f. Aubier, couche ligneuse extérieure et
ordinairement plus blanche, qui se-trouve entre le cœur
de l'arbre et le liber on couche intérieure. — Voy. Aow-
bécho.
Dér. du lat. Alburnum.
Aoubérjèiro, s. f. Pècher qui produit l'alberge ou pavie-
alberge, à chair adhérente au noyau. Cet arbre a de nom-
breuses variétés.
Dér. de Aoubèrjo.
Aoubérjino, s. f., ou Vièdase, fam. Aubergine, mélon-
gène; Solanum melongena, Linn. Plante potagère de la
famille des Solanées.
Aoubèrjo, s. f. Auberge ; hôtellerie; lien où l'on donne
à manger et où on loge pour de l'argent.
Dér. de la bass. lat. Alberga ou Albergum, logement, ou
de l'ital. Atbergare, Au reste, il est emprunté au fr. Le
mot propre d'hôtellerie, en lang., est cabaré; mais comme
cabaret, en fr., signifie une mauvaise hôtellerie, ou plutôt
encore l'échoppe du marchand de vin, débilant à bandière,
on a cru qu'en lang. aussi il fallait distinguer l'hôtel-
AOÛ
lerie bourgeoise de la taverne du peuple, en appelant la
première Aoubérjo, et la seconde Cabaré.
Aoubèrjo, s. f. Pavie, alberge ; sorte de pêche ferme,
dont la chair adhère au noyau; fruit plus connu dans le
midi de la France que dans le nord. On en distingue trois
espèces : la Pavie, qui a la chair très-blanche et qui «st
la plus savoureuse ; la Pavie jaune, et une dernière dont
la pulpe est d’un rouge très-foncé, dure et peu aqueuse.
Dér., d'après Ménage et Roquefort, du lat. Abus, parce
que l'espèce principale a la chair blanche ; selon Saumaise,
de l’art. arabe A4, le, et Beg, fruit.
Aoubéto, s. f. La petite pointe du jour; le premier
rayon lumineux qui précède l'aurore.
Dim. de Aoubo.
Aoubicoù, s. m. Sorte de figue précoce, longue et noire,
qui mürit à la Saint-Jean.
Dér. du lat. A/bicans, qui signifie blanchâtre, sans donte
parce qu’en séchant, cette figue passe du noir au blanc.
Aoubièïro, s. f. Lieu planté de trembles, peupliers
blancs, doubo. — V. c. m.
Aoubignargue, s. m. n. pr. de lieu. Aubignargues,
dans le département de l'Hérault. — Voy. pour l'étym.
Aoubénas, Aoubussargue.
Aoublida, ». Oublier, perdre le souvenir, la mémoire ;
laisser quelque chose par oubli. — Aï doublida moun
coutèl din lou pra, j'ai laissé mon couteau au pré:
Dér. du lat. Oblivisci.
Aoublidoüs, ouso, adj. Oublieux; qui a la mémoire
courte. |
Aoubligaciou, s. f. Obligation, engagement qui lie, qui
impose le devoir qui nait des services rendus; billet ou
acte par lequel on s’oblige. — I aï fosso doubligacious, il
m'a rendu bien des services, il m'a souvent obligé. Passa
uno doubligactou, passer un contrat notarié, portant obli-
gation; prêt hypothécaire.
Dér. du lat. Obligatio.
Aoublija (s’), ». S'obliger pour quelqu'un, lui servir de
caution.
Aoublisè, indécl., locution proverb.; phr. faite, pour
dire : Merci, bien obligé ; s'emploie surtout quand on.refuse.
C'est ce qui s’exprime en fr. fam. par : Merci, non.
Contr. et corr. du fr.
Aoubo, s.f. Aube, le point du jour. — La primo doubo,
la première clarté de Faurore. D'uno doubo à l'âoutro,
toute la journée, de l'aube du matin à l'aube du soir ou au
crépuscule.
Dér. du lat. Albus, alba.
Aoubo, s. f. Peuplier blanc, Populus alba, Linn,, et
aussi Peuplier-tremble, Populus tremula, Linn. Arbres
communs dans nos contrées, de la fam. des Amentacées.
Dér. du lat. Alba.
Aoubo dé mèr, s. f. Pre rc ou Algue des vitriers;
Zostera marina, Linn. Plante de la fam. des Aroïdes, abon-
dante sur les côtes de la Méditerranée; la même que la
où,
Mousso-dé-mèr, vermifuge bien connu. — Voy. Mousso-dé-
Aoubo paraît être une corr. de Aougou, employé aussi
dans notre dialecte et qui avait son étymologie dans le lat,
Ad et ligare, parce qu'elle s'attache aux pieds de ceux qui
marchent dans la mer. — Voy. Aougou.
Aoubovi, s. m. Vigne-blanche ou Viorne à larges feuilles,
Clematis alba, Linn. Plante de la fam. des Renonculacées,
éaustique et vénéneuse, espèce de Clématite, autrement
dite : Herbe aux gueux.
Dér. du lat. Alba et de vitis, ou uva.
Aoubrado, s. f. Quantité de feuilles qui se trouve sur
un seul mürier. — Aquè y-a uno bravo doubrado, ce mürier
fournira beaucoup de feuille, il est bien garni.
Dér. de Aoubre.
Aoubre, s. m. Arbre, plante ligneuse et vivace dont la
tige, épaisse et nue à la base, s'élève à une hauteur remar-
quable; le plus grand des végétaux. — On disait dans l’an-
cienne langue romane : Albre, alber.
Dér. du jat, Arbor.
Aoubre, s. m. Arbre, pièce de bois, posée horizontale-
ment ou verticalement, sur laquelle tourne toute une
machine et d'où dépend son principal mouvement.
Aoubre dâou moulà d'oli, le mouton, la presse d’un pres-
‘soir à huile, énorme pièce de bois qu’on fail peser par une
vis sur la pâte d'olives.
Aoubre dré, arbre-droit d'une charpente, d'un puits-à-
roue, etc. — Faïre l'éoubre dré, se tenir en équilibre, en
chandelle, sur la tôte, les pieds en l'air. Au fig., faire tous
ses efforts, faire l’impossible, employer tous ses moyens
pour prouver sa bonne volonté; se mettre en quatre.
Aoubre jasén, pièce de bois horizontale dans laquelle
tourne l'arbre droit d’un puits à roue.
Aoubré, s. m. dim. Petit arbre, arbrisseau.
Aoubréspi, s. m. — Voy. Aougréspi.
Aoubréssa, s. m. Havresac. C'est particulièrement ce
sac d'ordinaire en peau et à divers compartiments, dans
lequel les chasseurs et les ouvriers terrassiers à la journée
portent leurs provisions de bouche.
Formé de l'allemand Haber, avoine, et sake, sac. D'après
cette étym., cette sorte de sac aurait été dans l'origine à
J'usage-des soldats de cavalerie, pour porter la provende de
leurs chevaux en campagne, ce que l'on appelle aujour-
d'hui : musette.
-Aoubricô, s.m. Abricot, fruit de l'abricotier.
-Dér. de l'arabe Albercogq.
Abricoutiè, s. m. Abricotier, Prunus armeniaca, Linn.
Arbre de la famille des Rosacées, originaire de l'Arménie,
comme son nom latin l'indique.
ÆAoubussargue, s. m. n. pr. de lieu, Aubussargues,
commune du canton de St-Chaptes, arrondissement d'Uzès.
Son nom est en latin Albussanicæ. 1 peut absolument
avoir eu pour radical un nom d'homme, comme son ana-
logue Aoubignarque, en lat. Albinhanicæ, et la seule diffé-
AOÛ 55
rence serait alors entre les noms Alban, Albain, ou Albin,
Albanus, ou Albinus ; mais, soit nom d'homme ou nom de
lieu, l'origine est certainement dans le celtique A4 où Atp,
montagne, blanc de neige, et les procédés de formation ap-
pellative sont ici les mèmes que nous signalons aux art.
Argue et Aoubénas, etc. Ainsi se vérifient les identités de
racine, et l'équivalence des terminaisons, quand on rapproche
successivement les noms. Celui-ci se reproduit, pour en
donner un nouvel exemple, dans Albussan (Creuse), dans
Albussac, Aubusson (Creuse et Puy-de-Dôme); et dans ces
similaires, comme dans tous ceux cités sous le mot Aowbé-
nas, il s'applique à une situation sur des montagnes ou
caractérisée par le voisinage de montagnes.
Aoucupa (s’), v. S'occuper ; travailler ; mettre le temps-
à profit; ne pas rester oisif. — Aquél travaïadoù és pas
d'un gran és-avan, mais s'éoucupo toujour, cet ouvrier
n'est pas très-habile, il ne fait pas rapidement son travail,
mais il ne perd pas un moment, il est toujours à l'ouvrage.
Dér. du lat. Occupare.
Aoufénsa, adj. sans fém. Atteint d’une hernie. — Le mot
créba est le technique le plus usité, mais il est familier et
ignoble; quand on veut y mettre de la décence, on se sert
de doufénsa ou de rélassa. — V. €. m.
Dér. du lat. Offensus.
Aougou, s. m. Algue ou mousse-marine. — Voy. Aoubo-
dé-mèr
Aougréspi, s. m., ou Aoubréspi. Auhépine, épine
blanche, noble épine; Cratægus oæiacantha, Linn. Arbris-
seau épineux de la fam. des Rosacées.
Dér. du lat. Alba et spina.
Aougruno, s. f. Augure, pronostic, présage.— Ce tech-
nique, qui a vieilli, s'emploie encore parmi les vieillards
ét les bonnes femmes. — N'aï pas bono dougruno, j'en ai
mauvais augure, je n'en augure rien de bon.
Corr. du fr.
Aouja, s. m. n. pr. de lieu. Aujac, commune du
canton de Génolhac, arrondissement d'Alais.
Ce nom, en lat. Aujacum, offre un exemple intéressant
de la composition dés noms dans nos pays, qui confirmé ce
que nous disons à l'art. Argue. Inutile d’abord de remar-
quer que, selon Ja règle invariable de notre dialecte, lex
final est supprimé. Mais, auprès de ce hameau, se trouve
un écart qui est indifféremment appélé Aoujagué ou Aou-
jargué, petit Aujac. Le premier diminutif est dans la
forme ordinaire et régulière de tous les noms propres en
a, le second présente cette particularité que, par W'ad-
jonetion de la consonne r;, ilentre dans la catégorie ‘des.
appellations en argue, et se montre en complète analogie
avec le nom Aoujargue, Aujargues, commune du canton
de Sommières, arrondissement de Nimes. Ce sont bien là
les mêmes noms sous différentes finales, et ils sont rendus
par la mème forme latine; mais en même temps ils sont
identiques à Aoujan, rERReR NE fervent
et à Aujon (Haute-Marne).
56 AOÛ
Quant à l'étymologie, comme Aujargnes se disait autre-
fois Orjargues, il est probable que la mème altération
a eu lieu pour Aujac. Si done Orjargues dérive du lat.
Aurum, Aujac doit en venir aussi, avec d'autant plus de
raison qu'il est situé, comme Orjargues, sur un de ces ruis-
seaux qui roulent des paillettes d’or.
Aoujourdhiuèi, adv. ou Hiuèï, Aujourd’hui. Aoujour-
dhiuëï est plus grave que Hiuëï : celui-ci désigne plus par-
ticulièrement le jour même où l'on parle ; le premier s'étend
à toute l'époque, à tout le régime actuels.
Dér. du lat. Hodi, et formé du datif dou, et jour, hui.
Aoulivastre-bouscas, s. m”. Troëne, Ligustrum vulgare,
Linn. Arbrisseau de la fam. des Jasminées, commun le long
des haies.
Aoumédo, s. f. Ormoie, lieu planté d’ormes.
Dér. du lat. Ulmarium, ou de Oume.
Aouméléto, s. f. Omelette, œufs battus et cuits dans
la poêle. — Vous la révira coumo uno doumélélo, il vous
l'a rebiffé comme on retourne une omelette. — Faïre l'dou-
méléto, faire la fète, le repas du lundi de Pâques, dont
l'omelette forme le plat de fondation, le mets tradition-
nel. Cette coutume tient aux anciens rits de l'Eglise pri-
mitive, où les œufs mêmes étaient interdits pendant le
Carème. La jubilation pascale se traduisait par le rappel
des œufs longtemps proscrits.
Du fr. Omelette, de œufs mélés.
Aouménta, v. Augmenter; croître en valeur ou en
quantité. Se dit principalement du prix des denrées en
hausse, et aussi d’une rivière dont les eaux commencent à
se gonfler par de fortes pluies.
Trad. du fr.
Aouméntaciou, s. f. Augmentation de prix , hausse de
prix ; augmentation du nombre des mailles dans un tricot.
Aoumorno, s. f. Aumône, ce qu'on donne aux pauvres
par charité. — Démanda l'éoumorno, demander l’aumône.
Faïre l'âoumorno, faire la charité.
Dér. du gr. àkenmooévn.
Aouno, s. f. Aune, mesure ancienne de longueur. — Ce
mot est peu usité dans le style vulgaire, parce que cette
mesure, venue de Paris, n’est connue dans le Midi que
depuis peu. Comme les marchands s’en sont servis jusqu’à
l'emploi exclusif et obligé du mètre, force était au peuple
de connaitre la valeur de l’aune et de la comparer à sa
mesure vulgaire, lou pan. L'aune représente cinq pans
moins un quart. — Voy. Pan.
Trad. du fr.
Aoupila (s’), ». Se passionner maladivement pour cer-
tains aliments même insalubres ; s'adonner avec ardeur à
leur usage ; désirer se nourrir de substances terreuses comme
la cendre, la suie, le plâtre, le sel. Cette maladie, à laquelle
les jeunes filles sont particulièrement sujettes, se nomme
en fr. malaise.
Dér. du lat. Oppilare, fermer, boucher, venant du gr.
wi6w, je serre.
AOU
Aouquo, s. f. Oie domestique ou sauvage, Anas anser,
Linn. Oiseau de l'ordre des Palmipèdes. — Marcho coumo
uno douquo crébado, il marche comme une oïie crevée,
phrase proverbiale qui correspond à : il marche lourdement
et les jambes écartées. En vieux français du moyen âge,
on disait auque pour oie, témoin l’histoire fabuleuse de la
reine Pédauque, nom que l’on a donné à la reine Berthe,
mère de Charlemagne, dont on voit les statues sur quel-
ques monuments gothiques, avec des pieds d'oie, Hradnction
du nom.
Les Joyeuses Recherches de la langue tolosaine, de C1. oùde
de Triors, publiées au XVIe siècle, sont curieuses à-con-
sulter sur notre article. Elles disent : Auque (Aouquo) idem
sonat gallico sermone quod Oye, hinc illud en ceste cité,
estre coumo las auquos de Blagnac, que se leuan de may-
tis per beoure. Et dicuntur hæc à l'endroit de ceux qui
naturellement sont alterez comme vne esponge, et lesquels
escase poyne ne sont pas sourtis du lict qui crient à layguo,
à layguo, ie voulois dire au vin... Est et aliud vulgare
dictum en ceste cité de Tholose sur ce mot d’auguo, ainsin :
Non qual pas parla sinon quand l'auquo pisso; et hœc à
l'endroict de ceux qui n’ont que babil. Le diminutif d’au-
que est auqueto, hinc illud, en ceste mesme cité : à la
Sant Anneto, taston liœu à l'auqueto.
Dér. selon certains étymologistes du celt. Auca ; suivant
d’autres, du lat. Avis ; mais il y avait sans doute à la suite
quelque épithète spéciale, que la contraction subie par le
mot ne laisse pas deviner. En ital. Oca.
Aouraje, s. m. Tempête, grand vent. — Ce mot n'a
aucun rapport de signification avec le fr. orage, qui a
cependant une origine commune dans le lat. Aura, vent.
Le français a dévié du sens primitif, le languedocien y est
resté fidèle.
Aouréiïado, s. f. Action de tirer les oreilles; correction
donnée ou reçue en tirant les oreilles.
Dér. de Aouréio.
Aouréiéto, s. f., ou Bougnéto. (VW. c. m.) Beignets
sucrés, faits avec de la fleur de farine, du sucre et de la
fleur d’oranges. — C'est un dim. d'doureïo, et les beignets
susdits sont ainsi nommés, non pas à cause de leur dimen-
sion, qui dépasse de beaucoup celle de l'oreille, mais à
cause de leur forme et de leur plus ou moins de ressem-
blance avec l'oreille.
Aouréio, s. f. Oreille, organe de l'ouïe. — Es du d'âou-
réio, il a l'oreille dure. Pénja l'douréio, porter l'oreille
basse, être tout honteux. Pouda én douréio dé lèbre, tailler
la vigne ou un jeune plant de mürier à oreille de lièvre,
c'est-à-dire lorsque deux des scions que l'on conserve se
réunissent en angle aigu par leur base. C'est un défaut
pour la bonne direction à donner à l'arbre dont l'enfour-
chure devient trop serrée.
Dér. du lat. Auricula, dim. de auris.
Aouréiïo-d'ase, s. f. Grande consoude, Consoude offi-
cinale, Symphitum consolida, Linn. Plante vulnéraire de
OU CT ST AU OT —
PO
à de.
ME ST CN. NI CN (JT
AOU
la fam. des Borraginées, commune dans les prairies
humides. .
. Son nom lui vient de la forme de ses feuilles.
Aouréiu, udo, adj. Oreillard, qui a de longues oreilles.
Dér. de Aouréio.
. Aouréja, v. Donner de l'air; secouer à Par, pour faire
perdre l'humidité ; essorer, faire sécher à l'air
. Dér. du lat. Aura.
. Aourénje,s. m. ». pr. de lieu. Orange, ville du Comtat,
dans le département de Vaucluse. — On doit dire : Ana
én Aourénje, pour : aller à Orange. — Voy. Aoubénas.
. Aouriolo, s. f. Chardon étoilé ou Chausse-trappe, Cen-
taurea calcitrapa, Linn. Plante qui croit dans les champs
à blé, et commune sur le bord des chemins, dont Ja
semence est enfermée dans une espèce de hérisson très-
piquant. — Voy. Cago-trépo.
Dér. du lat. Aureolus, qui est couleur d'or, parce que sa
fleur a cette nuance.
Aouripèlo ou Aouripènlo, s. f. Erysipèle, inflamma-
tion-superficielle de la peau, avec rougeur, chaleur et une
très-légère tuméfaction.
Corr. du fr.
Aouristre, s. m. Ouragan, coup de vent subit et de peu
‘de durée.
. Dér. du lat. Aura.
Aouro, s. f. Vent, souffle; grand vent, génériquement.
Aouro d'dou, ou douro drécho, bise, vent du nord ; mistral.
Aouro folo, coup de vent impétueux. Aouwro rousso, ou Rou-
vérgasso, vent du nord-est, ou qui vient du côté du Rou-
ergue, relativement aux Cévennes : c'est un vent chaud et
malsain pour les vers à soie. — Dé l'éouro, en terme de
cadastre, à l'aspect ou du côté du nord.
Dér. du lat. Aura.
Aouroûs, ouso, adj. Venteux, qui donne du vent ; qui
est exposé au vent. — Voy. Abriou.
Dér. du lat. Aura.
Aoûs, s.. m. Août, huitième mois de l’année. —Prvb. : Sé
pléou:én aoùs, tout oli ou tout mous, s'il pleut en août,
bonne récolte d'huile ou de vin.
Dér.. du lat. Augustus.
Voici un de ces motssur lesquels se fait le mieux sentir
l'influence de l'accent dans la prononciation et par suite
dans la signification : sa contexlure le rapproche beau-
coup de la particule dou, dipht.; son accentuation l'en
écarte absolument, en en faisant une dissyllabe par le seul
déplacement de la tonique. Ces petits incidents, qui sont
- très-essentiels à observer, tiennent de trop près au méca-
nisme de notre orthographe et se présentent trop souvent
pour que nous négligions d'y insister. — Voy. Acén.
Au commencement ou dans l'intérieur d’un mot poly-
syllabique, toutes nos voyelles gardent leur son naturel,
et c'est pour cela qu'il serait inutile de les accentuer.
Cependant l'E, à cause de ses intonations différentes,
mérite une exception, et il a besoin d’un signe qui marque
AOU 57
sa consonnance grave ou aiguë, ouverte ou fermée; nous
n'avons pas cru pouvoir nous en dispenser mème dans les
monosyllabes /Voy. lettre E). Pour les autres voyelles,
quand elles forment diphthongues ou triphthongues, quelle
que soit leur place dans le mot, la dominanté est tou-
jours distinguée par l'accent circonflexe.
Mais c'est surtout à la finale des mots que se fait la
cadence, que se produit la modulation propre aux idiomes
méridionaux. C'est là, sur la dernière syllabe ou sur la
pénultième, que repose l'accent tonique, cette inflexion
qu'aucun signe n'indique le plus souvent, mais qui bien
des fois aussi est signalée par la présence de l'accent gram-
matical. Nous rappelons cette règle.
Dans notre dialecte, les voyelles À et U exceptées, toutes
les autres, y compris la composée ou, sont féminines ou
muettes quand elles se trouvent à la fin d’un mot polysyl-
labique, seules ou suivies d’un s, ou en composition d'une
À diphthongue ou triphthongue, à moins toutefois qu'elles
ne soient accentuées.
Ce principe est général et absolu. Aussi qu'arrive-til
dans la prononciation ? La tonique, qui est dans chaque
mot, et seulement à la fin, ne peut s'appuyer que sur une
syllabe pleine, forte ou masculine; la tenue est donc ame-
née sur la dernière, grave de sa nature ou marquée d’un
accent. Sur cette syllabe se module la note, se condense
l'imperceptible repos prosodique. Les syllabes précédentes,
quelle que soit d'ailleurs leur qualité ou leur nature, son-
nent de leur son naturel sans doute, mais se prononcent
plus rapidement, plus légèrement en quelque sorte, la voix
s’arrêtant sur la syllabe accentuée, sur la voyelle domi-
nante, quand il y a diphthongue émise d’un seul jet.
L'application en exemples est saisissante. Ainsi À natu-
rel, toujours éclatant, est néanmoins bref dans bardd, bar-
dot; tantès, tantôt; éscaloù, échelon ; Léngadd, Languedoc,
tandis qu'il est long et grave dans les mots homographes,
bardo, bât ; tantos, les tantes ; éscalou, ils grimpent;:lén-
gado, coup de langue, etc., etc. Toute la différenceestdans
l'accent final, qui convertit la syllabe tonique de brève.en
longue, d’une noire fait une blanche, et produit cette inver-
sion musicale et un sens nouveau. JL en est de même
pour les autres voyelles. Le secret de la prononciation
vraie et juste, comme la raison de notre orthographe, ne
tient qu'à l'observation de cette règle.
Pour en revenir maintenant à notre article, il est facile
de comprendre sur le mot Aoùs la nécessité et l'effet de
l'accent. Si la finale n'était pas accentuée, elle resterait
muette féminine, et par son contact avec la voyelle forte
a, elle serait absorbée, et deviendrait diphthongue, se
confondant avec elle. L'accent grave la dégage, et avertit
qu'elle doit servir d'appui à la voix : il décide du son et
du sens. Dans la versification, l'épreuve est bonne à faire :
lou més d'aoùs, le mois d'août, ne rime pas avec lous dé-
_ déous, les dés à coudre, pas plus que, par une raison sem-
blable, ne rimeraient lous maoùs, les carreaux de terre
8
58 AOU
cuite, avec lous mous, les maux. Pourquoi ces différences
d’assonnances dans des mots où les mêmes voyelles se
reproduisent ? Simplement parce que ici ou là la position
de l'accent a été intervertie. La tonique est fixée dans les
premiers sur oùs accentué, qui fait un mot dissyllabe de
a-oùs et ma-oùs, et dans les derniers dédéous et mdous, il
y a diphthongue, et la voix pèse sur l'a.
Au moyen de cette simplification et sans préjudice pour
l'intelligence du mot, on arrive à cet autre principe du
languedocien, de n’écrire que comme on prononce, avec les
seules lettres nécessaires, et toutes devant être articulées.
La parasite k pourrait donc être sacrifiée dans bien des
mots sans que le sens eût à en souffrir. Maoù servirait
d'exemple, et dans le même cas se trouverait trai, trahir,
dissyllabe par l'accent, qui ne se confondrait pas non plus
avec traï, il jette, monosyllabe par la diphthongue.
Ces observations se répéteraient également sur les autres
voyelles. Elles viendront à leur place, mais il est déjà
facile de les pressentir par l'épellation des mots : Sai,
panne de porc, et saï, céans ; mïoù, meilleur, et miou,
mien ; fo, feu, et fio, fille; péès, pays, et péis, poissons, et
dans la longue série des homographes que nous avons
cités, que l'absence ou la présence de l'accent sur une
des lettres de la syllabe finale modifie si profondément.
L’harmonie de notre langue se compose de ces nuances
de tons et de demi-tons, qu’il est indispensable de noter
distinctement dans l'écriture. C’est la quantité prosodique,
la mesure, que l’orthographe a charge de marquer. Nous
avons essayé de poser quelques règles, qui se complèteront
d'observations successives, principalement en traitant des
voyelles et de leur assemblage dans les diphthongues. L'in-
telligence de notre dialecte est toute dans la prononciation
juste; la notation écrite doit tendre à s’en rapprocher autant
que l'alphabet usuel, adopté, classique, peut le permettre.
Aousa, v. Oser, avoir l'audace ; s’enhardir.
Dér. du lat. Ausus, part. pass. de audere.
Aousar, s. m. Hussard ou housard, corps spécial de
cavalerie légère.
Corr. du fr.
Aousardo (à 1‘), adv. À la housarde, à la mode des
housards ; cavalièrement.
Aouséro ou Lâäouséro, s. f. Lozère, chaîne de monta-
gnes qui donnaient autrefois leur nom à toute la contrée,
et le donnent aujourd’hui à un département. Les princi-
paux sommets de la Lozère sont granitiques, mais son
extrémité orientale, qui est dans le département du Gard
etse nomme la Fête-de-Bœuf, est composée de schiste mi-
cacé, comme la plupart des montagnes secondaires qui
suivent sa direction. Il paraît que c’est de cette espèce de
pierre, qu'on appelle /douso dans le pays, que le mot Zdou-
séro aurait été formé, et l'usage actuel l'a contracté par
celui de Aouséro.
Aouséro, oto, adj. Lozerot, habitant de la Lozère où
du départ. qui porte ce nom. — On ne sait pourquoi ces
AOÛ
habitants, lorsqu'ils se répandent dans la France, sem-
blent vouloir renier ce nom de Lozerot et le remplacer par
celui de Lozérien, qui est antipathique au génie de leur
langue originaire. Si on les appelle Lozériens, à Paris, sur
parole, ils restent Lozerots pour leurs voisins du Lan-
guedoc. — Voy. Gavè.
Aousi, v. Ouiïr, entendre ; percevoir les sons ; écouter.
— Aouses? m'’entends-tu ? entends-tu? Ce temps de verbe
appartient à un dialecte au-dessus d’Alais; ar ici il ferait :
dousisses ? Il est cependant très-adopté. Ou save pas qué
pér dousi dire, je ne le sais que pour l'avoir ouï dire, je ne
l'ai pas vu. N'aï pas Gous dire aqud, je n'ai pas entendu
parler de cela. Aqud faï bon dousà dire, c'est bon à savoir.
Sévène, m'éousiras, si je viens, tu m'entendras. Dow
vous dousie ! Dieu vous écoute! J'en accepte l’augure.
Dér. du lat. Audire. ‘
Aousido, s. f. Ouïe, l’un des cinq sens ; faculté d'ouir.
—1-a léva l'âousido, il l'a étourdi du coup. Parti d'âousido,
prendre feu à la première parole; être prompt et vif; se
décider étourdiment et sans réfléchir.
Dér. du lat. Auditus.
Aousidoù, s. m. Tympan, orbite auriculaire; oreille.
Dér. de Aousi.
Aousidouiros, s. f. pl. Oreilles; organe auditif, —S'em-
ploie pour ouïe et oreille, en poésie et style trivial.
Dér. de Aousi.
Aousino et Eousino, s. f. Gland du chêne vert. — Car
d'âousino, chair ferme et de bonne qualité, telle que celle
des porcs qui se nourrissent de glands. On pousse la com-
paraison jusqu'à l'espèce humaine : quand on pince les
joues rondes et fermes d’un bel enfant, on dit : Aqud's dé
car d'âousino. — Voy. Eousino.
Dér. de Eouse.
Aoussé, s. m. Troussis; plis qu'on fait au bas de la
robe des enfants et qu’on découd pour l’allonger à mesure
qu'ils grandissent. — Voy. Héoussé.
Dér. de Hdoussa.
Aoussèl,s. m. Dim. Aoussélé, Aousséloù ; augm. et péj.
Aoussélas. Oiseau, animal vertébré et ovipare, ayant un bec,
des plumes et des ailes. — L'éoussèl dé Sén Lu, l'oiseau
de saint Luc, le bœuf, parce qu'on le représente ailé; se
dit ironiq. d’une personne lourde, pesante, qui ressemble
par sa marche el sa tournure à un bœuf.
Aoussélé est proprement un petit oiseau; dousséloù, un
oiseau de nichée; doussélas, un oiseau de proie, un gros et
vilain oiseau.
Aoussèl, s. m. Instrument pour porter le mortier; sorte
de benne en planches, ouverte d’un côté et à deux man-
ches, que l’on porte sur le cou, pour monter le mortier
aux maçons sur leur échafaudage ; on l'appelle en fr. oiseau
ou mieux augeot, quiparaît être une corruption de augéot,
petite auge.
Dér. de la bass. lat. Aucellus, dit pour avicellus, dim.
de Avis.
AOÛ
Aousséla (s'), v. S'ébouriffer, comme font les oiseaux
en colère; se hérisser. Au fig. se mettre en colère, s'irriter,
s'emporter, hausser le ton, monter sur ses grands chevaux.
Dér. de Aoussèl.
Aoussélino, s. f. La gent volatile, qui porte plumes ;
les petits pieds. Quelquefois se dit fam. et per contre-
vérité d'un gros oiseau de rapine.
Dér. de Aoussèl.
Aoussén, s.m, Absinthe, armoise-amère, Artemisia
absinthium, Linn. Plante de la fam. des Composées corym-
bifères ; elle croit dans les inontagnes des Cévennes. — La
plante n'a de commun avec la liqueur du même nom,
fabriquée aujourd'hui, que le souvenir de ce baptème pri-
mitif, où les feuilles de la tige macérées entraient pour
quelque chose, au moins pour leur parfum. Aussi le vieux
nom languedocien n'est plus connu qu'en botanique, et les
amateurs du breuvage dont nous parlons, en ont fait bra-
vement : Arsénto, et s'empoisonnent pour faire la mode,
tout en parlant mal leur langue.
Aoussuro, s. f. Hauteur, éminence, cime d’une mon-
tagne; tout endroit comparativement plus élevé qu'un
autre. — Sus l'éoussuro, sur la hauteur, au sommet.
Dér. de Ndoussa, ndou.
Aouta, s. m. Autel, table destinée aux sacrifices et par-
_ticulièrement à la célébration de la messe. — Lou gran-
t-douta, le maître-autel.
Dér. du lat. Altare.
Aoutouna, v. Automner; jeter du bois dans l’arrière-
saison; mürir en automme. —Se dit particulièrement de la
pousse que fait le mürier après avoir été dépouillé de sa
feuille et taillé au commencement de l'été. C'est au prop.
pousser en automne.
Aoutouno, s. f. Automne, troisième saison de l’année,
entre l'été et l'hiver.
Dér. du lat. Autumnus.
Aoutour, mieux : A l'éntour, adv. Autour, à l'entour,
aux environs. — Es doutour de mièjo gnuë, il est environ
minuit.
Formé de Aow, article, et de tour.
Aoutre, âoutro, pron. et adj. Autre. — D'éoutre-tén,
autrefois, jadis. Aoutre mdou noun y ague! Que tout le
mal se réduise là! Oh ! pour cela, c'est un petit malheur !
Coumo disiè l'doutre, comme disait cet autre : sorte de pré-
caution oratoire pour commencer une phrase proverbiale.
Tout un ow tout doutre, tout blanc ou tout noir, point de
“milieu. Es tout doutre, il est singulièrement changé, on ne
le reconnaîtrait pas. Un co l'un, un co l'doutre, tantôt
l'un, tantôt l’autre; alternativement, Uno doutro fés, une
autre fois; pas cette fois-ci, une autre.
Dér. du lat. Alter.
-Aoutromén ou Aoutramén, adv. Autrement, d'une
autre manière ; sans cela ; sinon. — Faras cé qué té dise,
doutromén!.… tu feras ce que je te dis, sinon! Dans le
dialogue familier, on l'emploie d’une manière explétive, et
APA 59
sans qu'on lui attache un sens positif : Aoutramén disias
qué.…., vous disiez donc. C'est une formule pour changer
de propos, pour ramener à la question.
Aoutros-fés, adv. Autrefois, jadis, au temps passé.
Aousoü, s.m. n. pr. de lieu. Auzon, hameau de la
commune d’Allègre, arrondissement d'Alais; et Alzon,
chef-lieu de canton, arrondissement du Vigan.
Les deux appellations sont les mêmes en
et se trouvent aussi mentionnées dans le dénombrement des
feux de la sénéchaussée de Beaucaire et de Nimes, en 1384,
avec la même orthographe latine, Alsonum. On sait la faci-
lité de al à se transformer en au et à s'exprimer par
dou dans la langue vulgaire : le français n’a pas eu de pré-
férence; mais la communauté d'étymologie des’ deux mots
n’en est pas altérée. Il est à remarquer que la finale ow en
lang., on en fr., provenant du suffixe lat. O ou onus, onum,
est quelquefois diminutive, mais elle marque aussi l'abon-
dance et communique à la chose représentée par le radical
une idée de dérivation, de conformité de nature ou de
ressemblance, en mème temps que de quantité (Voy. Ou,
suff.). Quant au corps même du mot, la forme au pluriel
aouz, aux, als, semble ne pas être tont à faitinsignifiante:
elle n'aurait pas été employée pour indiquer simplement
une localité placée sur une élévation et comme isolée, mais
plutôt nne localité entourée de hauteurs, dans un pays de
montagnes, où s'élèvent de nombreuses collines. C’est avec
cette signification que le sens du suffixe Jui conviendrait
en donnant plus d'énergie au radical, et que l'application
serait exacte pour les deux villages.
Apaïa, v. Garnir de paille; faire la litière aux che-
vaux ; jeter de la paille sous les animaux pour leur litière.
Dér. de Païo.
Apanli (s’), v. Pälir, devenir pâle ; se faner, s'étioler.
Dér. de Panle.
Apâouri, v. Appauvrir, rendre pauvre; rendre moins
fertile ; devenir mauvais ; épuiser. — L'éoumorno apdouris
pas, l’'aumône ne rend pas plus pauvre. Lou tén s'apdou-
ris, le temps se gâte, il se couvre.
Dér. de Pdoure.
Apâousa (s'), Se poser, prendre pied, comme fait le
gibier après une remise. — S'apdousa, dans le sens du fr.
s'opposer à..., n'est qu'une corruption, mais il se dit
quelquefois. II n'a pas la même étym.
Dér. de Pdouso.
Apâousado, s. f. Reposée, lieu où le gibier se repose pen-
dant le jour ou après une remise. — Tira à l'apdousado,
tirer à la reposée, au gite. — Voy. Pdousado.
Dér. de Pdouso.
Apâouta (s’), v. Tomber sur ses mains; se mettre sur
les mains.
Dér. de Pdouto.
Apäoutoùs (d'), ado. A quatre pattes ; sur les pieds et
les mains.
Dér. de Pdouto.
60 APÉ
Apara, v. Défendre, protéger, prendre la défense. —
S'aparo coumo un catévès, il se défend de bec et d'ongles.
S'apara dou fré, se garantir du froid. Po pas s'apara dou
proufi, il ne peut pas se défendre contre la fortune; il a un
bonheur insolent ; tout lui réussit. Apara las mouscos,
chasser les mouches.
Dér. du lat. Apparare, armer pour la défense. En ital.
Parare, en esp. Parar.
Apara, v. Tendre, présenter un récipient quelconque
pour recevoir ce qu'on y jette; attraper au vol ce qu'on
vous jette. — Aparo toun fanddou, lou pagnè, loun capèl,
fa man, tends ton tablier, le panier, ton chapeau, ta
main.
Dér. du lat. Aperire, ouvrir.
Aparamén, adv. Probablement, apparemment, sans
doute.
Empr. au fr.
Aparéià, v. Accoupler, appareiller; ranger deux à
deux.
Dér. de Parél.
Aparënço, s. f. Physionomie extérieure d'un objet, ses
apparences, ce qu'il semble être; vraisemblance, proba-
bilité. — Aquél bla a bono aparénço, ce blé en herbe pro-
met beaucoup. Y-a pas aparenço qué partigquén hiuët, il est
peu probable que nous partions aujourd’hui.
Dér. du lat. Apparere.
Aparénta, ado, adj. Apparenté, allié. — Vous sès pas
méou aparénta, vous voilà bien apparenté ; vous avez des
parents dont vous pouvez être fier.
Aparénta (s’), v. S'apparenter, former par un mariage
des liens d’affinité avec une famille.
Dér. du lat. Ap pour ad, et parens, parentis.
Aparia, v. Egaliser, rendre égal; unir, ajuster. — On
apario les vers à soie de différents Ages, en donnant aux
plus jeunes plus de chaleur et de nourriture. — Aparia las
létros, assembler les lettres quand on apprend à lire. Y-a
pas rés qu'aparie aqud, il n’y a rien de pareil à cela; tel
homme ou tel objet n’ont pas leur pareil.
Aparia (s’), v. S'apparier, s’accoupler, se réunir par
paires ; se comparer, se mesurer.
Dér. du lat. Par, d'où paré.
Apartémén, s. m. Appartement. — C'est un emprunt au
fr. pour désigner un appartement de luxe, la chambre
d'honneur ou le salon de parade ; le terme générique est
Mémbre. — V. c. m.
Aparténi, v. Appartenir, être dans la possession de
quelqu'un. — Aquù i-appartèn bé, émb'un homé dé soun
éspèço, dé faïre lou déspichoùs, il convient bien à un
homme de sa sorte de faire le dédaigneux.
Dér. du lat. Pertinere, pertinet.
Apèl, s. m. Appel; recours exercé devant une juridic-
tion supérieure. — Faire l'apèl, faire son compte.
Empr. au fr.
Apéla, v. Appeler, nommer; faire venir à soi, attirer.
APÉ
— Lous valas apèlou la barbasto, les cours d’eau attirent
la gelée blanche. Lou marin apèlo la plèjo, le vent du
midi amène la pluie. Aqud s'apèlo parla! voilà parler,
voilà qui est parler. Aquô s'apèlo un home, Noïlà un
homme de tête et de cœur. Aqud s'apèlo! dit-on souvent
comme inter). pour exprimer l'admiration : voilà Es est
bien ! voilà qui est beau!
Dér. du lat Appellare.
Apéna (s’), v. S'appliquer, apporter ses peines et ses soins.
Dér. de Péno.
Apéndris, drisso, s. et adj. Apprenti, qui fait son
apprentissage.
Corr. du fr. Apprenti.
Apéndrissage, s. m. Apprentissage.
Avec une légère variante qui vient du génie de la lan-
gue, empr. au fr.
Apéns (Lous), s. m. pl. Hameau de la commune de La
Melouze, arrondissement d'Alais. La prononciation du mot
est la mèêmeenfr. qu’en lang.
Dér. du celt. Pen, cime; sommet, pointe d’une mon-
tagne. La lettre a qui le précède n'est que l’augment ini-
tial. La situation de ce hameau explique son nom. En
allem. pinn, et pfin, haut, élevé, hauteur, sommet. En
lat. pinna, créneau de mur; pinnaculum, faîte, pinacle,
ont la mème origine du gaulois per. L'Apennin, les Apen-
nins, célèbres montagnes d'Italie, Alpes penninæ, Apen-
ninæ, sont le même mot que notre Apéns.
Apénsiouna, v. Bailler à emphytéose, ou à bail emphy-
téotique, ou à locaterie perpétuelle. C'est aliéner un im-
meuble quelconque moyennant le service d’une rente con-
stituée et perpétuelle, dont le bailleur ne peut exiger le
remboursement tant que la rente est régulièrement servie.
Dér. de Pénsiou.
Apèou, s. m. Appeau; toute sorte de sifflet avec lequel
on contrefait la voix des oiseaux pour les attirer dans
les filets ou à portée du fusil. Le même que Souné. —W.
c. m.
Dér. de Apéla.
Apérési (s’), v. Devenir paresseux, mou, lâche au tra-
vail; s'accoquiner.
Dér. de Péréso.
Apésa, v. Prendre pied; appuyer le pied; donner du
pied à quelque chose, comme à un sac, à une échelle, à
une planche, qu'on place debout et que l’on apéso pour les
rendre plus solides.
Dér. de Pe, au plur. pèses.
Apéti, s. m. Appétit, besoin on seulement désir de
manger. — Es pas l'apétà qué manquo, ce n’est pas faute
d’appétit si nous ne mangeons pas.
Dér. du lat. Appetere.
Apétoui, ido, ou Apétouni, ido, adj. Apprêté. Ne se
dit que du pain et ne se prend qu'en mauvaise part. On
ne dit pas en effet: Dé pan bièn apéloui; mais: Aquél
pan és mou apélou, Ou apélouidas, qui est le péjor.
APL
L'étym. est-elle dans Apéti, ce qui contrarierait un peu
le sens de ce mot, toujours appliqué à un pain qui ne
l'excite guère; ou bien serait-elle dans sa formation, a grec
“privatif, et une altération du mot pdte, arrangé euphoni-
quement, ce qui ne serait pas sans exemple ?
Api, s.m. Céleri, Apiuwm graveolens, Linn. Plante pota-
gère de la famille des Ombellifères. — Api bouscas, Ache,
sorte de céleri à feuilles et à côtes plus menues, qu'on
n'emploie que par brins dans un potage. Son arome est
beaucoup plus fort que celui du céleri franc.
Au commencement de ce siècle, on raconte qu’un de nos
concitoyens, obligé d'aller à Paris, se promit bien d'y faire
ample récolte de découvertes qu’il publierait au retour.
Dans ce but, à son premier diner au restaurant, il cherche
sur une longue carte un de ces mets inconnus sur les bords
du Gardon; il le trouve enfin et demande des céleris au
jus. On ne les lui fit pas attendre; mais à peine y eut-il
goûté, qu'il s'écrie : Aÿ/ sacrédi / lous céléris soun d’apis!
Le mot est resté.
Dér. du lat. Apium, formé de apis, parce que sa fleur
est recherchée par les abeilles.
Apialoü, s. m. Etai, étançon; appui; jambe de force
pour soutenir les cintres en bois d'une voûte. — L'apialoù
est un étai posé verticalement ou obliquement, quand il
soutient un pan de mur qui menace ruine ; lou pincèl est
‘ ce même étai placé horizontalement, quand il est destiné
à prévenir l'éboulement d’un mur ou d’une tranchée de
terre. — Voy. Pincël.
Dér. du lat. Pila, pilier.
Apialouna, v. Etançonner, étayer, étrésillonner ; poser
un étai.
Dér. d'Apialoù.
Apiè, s. m. Rucher; ensemble, collection des ruches
dans un même lieu. — Voy. Abél.
Dér. du lat. Apis, abeille ; aparium.
Apignéla, ado, adj. Serré comme les écailles ou comme
les amandes d’une pomme de pin.
Dér. de Pigno.
Apitança, v. Ménager le mets que l'on mange, en y
ajoutant beaucoup de pain, en sorte que le mets ne serve
que de véhicule, d'assaisonnement à celui-ci qui, selon les
règles d'une bonne hygiène et surtout de l'économie domes-
tique, doit être le principal aliment. Les enfants, qui sont
naturellement gourmands, font tout le contraire ; aussi est-ce
particuliérement pour eux que le mot apitança estemployé.
Dér. de Pitanço.
Aplacarda, v. Placarder ; mettre ou afficher un placard ;
appliquer contre un mur, y lancer un objet quelconque de
nature à y rester appliqué, à s'y coller. — Aplacarda quéou-
quàs, lancer quelqu'un contre.., lecoller au mur, l'y fixer
en le tenant par le cou ou la poitrine.
Dér. de Placar, pris pour affiche.
Aplana, v. Aplanir; niveler ; rendre uni, rendre lisse,
Dér. de l'adj. Plan, du lat. Planus, explanare.
.
APO 61
Aplanaje, s.m. Action d'aplanir, aplanissement.
Aplati, v. Aplatir, rendre plat ; lancer avec force contre
un mur, contre la terre, contre un corps dur.
Dér. de l'adj. Pla.
Apléji (s’), v. Devenir pluvieux, tourner à la pluie.
Dér. de Plèjo.
Apliqua (s’}, v. S'appliquer; porter toute son attention,
son zèle, son savoir-faire, — Il est principalement employé
pour exprimer l'application d'un écolier studieux.
Empr. au fr.
Aploun, s. m. Aplomb; ligne verticale, équilibre résul-
tant pour un corps de l'observation de cette ligne. — Aqué!
mur és pas gaïre sus soun aploun, ce mur n'est guère
d'aplomb.
L'aploun est un outil de maçon en forme de triangle
rectangle, à l'angle droit duquel est fixé un cordon qui est
terminé par une boule de plomb. Cet instrument sert à
reconnaître le nivellement des assises d'un mur ou du gise-
ment d’une pierre de taille, c'est-à-dire son parallélisme
avee l'horizon.
D'aploun, adv. D'aplomb.—Se dit pour : fortement, avec
décision, sans hésiter.
Dér. de Ploun.
Apotro (Bon), adj. m. Bon-apôtre. — Faire lou bon-
apotro, se faire meilleur qu’on n’est, affecter la probité, la
générosité. Es un bon-apotro, se dit ironiquement soit
d’un homme faux, hypocrite ; soit d’un libertin, soit d'un
homme peu obligeant ou de mauvaise foi.
Dér. du grec Amésrohos, envoyé, messager.
Apouénta, v. Pointer, ajuster vers un but. — Terme de
jeu de boules; c’est lancer sa boule modérément, terre à
terre, de manière à approcher le plus près possible du but
ou cochonnet. C'est le contraire de tira, qui signifie :
lancer sa boule avec force contre celle de l'adversaire pour
la déplacer, ou l'éloigner du but. On dit au fig. et pro-
verb.: Tiro, qué iéou apouëènte, passe devant, je te sui-
vrai. On le dit surtout des filous ou fripons, qui s'enten-
dent pour duper quelqu'un.
Dér. de Pouëèr, point, qui est l'expression reçue au jeu
de boules pour désigner le gain du coup. On dit : És iéou
qu'a lou pouèn, c'est moi qui gagne le coup. — Foy.
Pouèn.
Apoulidi, ». Enjoliver, rendre joli; embellir.
Dér. de Pouli, adj.
Apoulina, v. Dresser un jeune cheval, faire son éduca-
tion; le maquignonner. Au fig. former par la flatterie;
amadouer ; habituer ; déniaiser. — Uno /io apoulinado, une
fille délurée, bien maniérée, qui a toutes les ruses de la
coquetterie, ou bien une jeune fille bien apprivoisée, dont
l'éducation amoureuse est faite.
Dér. de Pouli, poulain.
Apouloun, s. m. Casaquin, sorte de spencer de femme,
d'une étoffe ou d’un dessin différent de la jupe. Cette mode
de nos grand’mères a duré longtemps , elle revient aujour-
62 APR
d'hui. Ilest probable que ce nom lui est venu du fr.
Apollon, en usage dans le grand monde, toujours savant
et fort en mythologie. En arrivant au peuple, il y est resté
pour représenter génériquement loute sorte de vêtements
justes à la taille et ne formant qu’un corsage sans jupe.
Cependant le renouveau de la mode a introduit de nou-
velles dénominations, et il est douteux qu'elles soient plus
heureusement trouvées : ce qui a dù faire conserver l'an-
cien nom.
Apouncha, v. Rendre pointu; donner de la pointe, for-
mer la pointe d’un outil en fer ou en bois. Au fig. Apoun-
cha d'argén, mettre l'argent au bout des doigts; payer
comptant. — Tout aqud apounchariè pa’n fus, tout cela
n’aboutit à rien. Apouncha dé joun émb'uno masso, faire
un travail de dupe, une œuvre sans objet.
Dér. de Pouncho.
Apoupouni, v. Choyer, dorloter, comme une nourrice
fait pour un enfant en le berçant sur son sein.
Dér. du gasc. Poupos, sein, mamelle; ou du fr. Poupon.
Apouridi, v. Faire pourrir, réduire en dissolution, en
décomposition. Au fig., gàter un enfant.
Dér. de Pouri.
Apourta, v. Rapporter, comme fait un chien qui rap-
porte ce que son maitre a jeté, ou laissé, ou caché même
pour éprouver son intelligence et la finesse de son odorat.
C'est là la seule acception de ce mot, qui ne reproduit
aucune de celles du verbe apporter dont il est cependant
le dérivé. à
Apoustios, s. fém. plur. Attelles, terme de chirurgie ;
minces et petites planches pour maintenir les fractures d’os.
Dér. et dim. de Pos.
Apoustoumi ou Apoustémi, v. Apostumer, venir à sup-
puration; abcéder.
Dér. du gr. ’Ambstnux, abcès.
Apouticari, ou mieux Pouticari, s. m. Pharmacien,
apothicaire. — Aqud's un conte d'apouticari, c'est un
compte d'apothicaire, un mémoire enflé à plaisir.
Dér. du gr. ’Acoÿ#xn, boutique.
Apradi, v. Gazonner, semer un champ de graine de
foin ; mettre en pré. — S'apradis dé pér él, il se garnit
lui-mème de plantes fourragères.
Dér. de Pra.
Aprène, v. Apprendre, acquérir quelque connaissance
qu'on n'avait pas; retenir, graver dans sa mémoire; être
averti, prévenu ; instruire, enseigner. Dans le sens d'ap-
prendre, il signifie : apprendre une leçon, un métier; mais
non point apprendre une nouvelle, un ouï-dire. — 45 aprés
ma ligoù, j'ai appris par cœur ma leçon. Aprénguè d’èstre
magoù, il apprit le métier de maçon. S'ou és aprés, il s’est
formé lui-même sans maître.
Aprène se dit aussi des plantes ou arbres transplantés,
qui poussent de nouvelles racines, et d’une greffe qui com-
mence à pousser ; reprendre.
Dér. du lat. Prehendere.
AQU
Aprèts, s. m. pl. Apprèt; préparatifs; préparation en
général. Il signifie aussi : apprèt, raideur d’une étoffe pro-
duite par sa préparation ou par la teinture.
Empr. au fr. En ital. Appresto.
Après, adv. et prép. Après, ensuite, — Après la mort,
lou mèje, après la mort, le médecin ; c'est de la moutarde
après diner. M'és toujour après, il m'est toujours après.
Aprés, és0, adj. et part. pass. de Apréne. Appris.
— Quand il s'emploie adjectivement, ce n’est guère qu'en
mauvaise part; alors il signifie : élevé, éduqué. —Siès bièn
méou aprés, tues bien mal élevé, mal embouché. Un
méou-aprés, un mal appris, un insolent,
Aprésta, v. Apprèter, préparer, disposer; assaisonner,
faire cuire; tenir prêt.
Dér. de l'ital. Appretare.
Aprima, v. Amincir, rendre mince; amenuiser; émin-
cer (Voy. Aménuda). — S'aprima, maigrir, s’user.
Dér. de Prim.
Aprivada, v. Apprivoiser, priver; rendre plus doux,
plus traitable un animal ou une personne d'humeur sau-
vage et farouche.
Dér. du lat. Privatus.
Aproucha (s’), v. S'approcher de quelqu'un ou de quel-
que chose. : L
S'aproucha est employé particulièrement pour : s'appro-
cher des sacrements, communier. — À Pasquofôous'aprou-
cha, faïre soun dévé, il faut faire ses Pâques.
Empr. au fr.
Aprouchan, adv. Approchant; environ; à peu près.
Formé de Aproucha.
Aproufita, v. Profiter ; économiser ; ne pas laisser per-
dre. — Aproufita sas fardos, user ses hardes jusqu'à la
corde. Aproufitè cént éscus davan soun mariage, il ramassa
cent écus avant son mariage. Aproufito bièn dou coulèje, il
profite bien des leçons qu’il reçoit au collège.
Dér. de Proufi.
Aproumés, éss0, part. pass. de Aproumétre. Voué, pro-
mis.
Aproumétre, v. Promettre, donner l'assurance; s’en-
gager ; vouer; engager sa foi; passer des pactes de ma-
riage. — T'aproumêle qué m'ou pagaras, je te réponds que
tu me la paieras. — Vous aprouméle qu'és pas vraï, je vous
assure que ce n'est pas vrai. Aÿ aproumés moun éfan dou
blan, j'ai voué mon enfant au blanc : c'est-à-dire j'ai fait
vœu de l’habiller tout en blanc en l'honneur ‘de la "saïnte
Vierge. Mé soui aproumés, je me suis voué, j'ai fait vœu à
Notre-Dame.
Dér. du lat. Promittere.
Apuia, v. Appuyer; étayer; soutenir; protéger.
Dér. de la bass. lat. Appodiare.
Apuïage, s. m. Droit d'appui, de mitoyenneté. — Té
faraï paga l'apuiage, je te ferai payer la mitoyenneté.
Aquél, élo, pron. dém. Ce, cet, cette, celui, celle. —
Aquêél d'aqui, celui-là. Es pas aquél qué déouriè rèstre, il
AQU
n'est pas tel qu'il devrait ètre. Oh / aquélo saï èro pa’ncaro
éstado, oh! voilà un propos que nous n'avions pas entendu !
en voilà bien d’une autre ! Soui pas aquél qué mé crésès, je
ne suis pas l'homme que vous croyez.
En ital. Quello ; en esp. Aqueste, aquello.
Aquéste, ésto, pron. dém. Ce, cet, cette, celui-ci,
celle-ci. — D'aquéstes ans, il y a quelques années. D'a-
quéste tén, par ce temps-ci.
En ital. Quésto; en esp. Aqueste.
Aqui, adv. Là, dans cet endroit ; près du lieu où l'on
est. — Pér-aqui, de ce côté-là, par là. Vèn dé passa pér
aqui, il vient de passer de ce côté. Coumo vaï voste pèro?
© — Pér-aqui, Comment se porte votre père? — Coussi,
coussi, par ci, par là. D'aqui-aqui, d'un moment à l’autre,
de là là. S'én souvèn pas d'aqui-aqui, il ne s'en souvient
pas d'ici là. D'aqui et d'aïlè, de çà et de là, à droite et à
gauche. Aÿli n’est pas de notre Dictionnaire : c'est un de
ces mille mots inventés pour l'euphonie. Le languedocien
aime surtout à procéder par consonnance ou rime dans la
plupart de ses dictons. Aquél d'aqui, celui-là. Aqud d'aqui,
cela mème. Es aquù d'aqui, c'est bien cela. Aqui-dré, vis-
à-vis d'ici, en droite ligne. Mais cette expression est le
plus souvent explétive. Les gens de la campagne, surtout
à l’est d’Alais, ce qu'on nomme les Gounèls, s'en servent
sans aucune espèce d’à-propos, sans besoin. Sès ana à la
fèiro hièr? — Aqui-dré y anère bé, Avez-vous été hier à
_ la foire ? — Ma foi oui, j'y fus. Ce n’est réellement qu'un
moyen d’allonger la phrase, de se donner le temps de
répondre catégoriquement.
En ital. Qui ; en esp. Aqui.
Aquioula, v. Acculer ; pousser et serrer dans un coin
ou contre un mur; empècher de reculer; faire pencher
une voiture, une charrette sur son arrière; faire tomber
sur le derrière.
Dér. de Quiou.
Aquis, s. m. Acquit, quittance. — Un bé dé bon aquis,
dé michant aquis, une fortune bien où mal acquise.
Empr. au fr. Dér. du lat. Acquirere.
Aquissa, v. Haler des chiens pour les faire battre ; exci-
ter deux ennemis, deux rivaux l’un contre l'autre. — Le
mème que Atissa. — V. c. m.
En celto-breton, Atizar, m. sign. Le mot est-il formé par
onomatopée de quis-quis, cri d'excitation, ou bien le verbe
a-t-il inspiré l'onomatopée ?
Aquita, v. Acquitter, solder, payer intégralement. —
Qudou s'aquito faï cabdou, qui paie ses dettes s'enrichit.
Empr. du fr.
Aquô, pron. dém. Ça, cela, cette pou — Coumo
k , comme cela, ainsi. Aqud d'aqui, cela, cela mêèm».
Aqud-bo, mot-à-mot : cela bon, signifie une liqueur quel-
conque moelleuse et sucrée, où toute autre friandise.
Un pichd vêire d'aqud-bo, un petit verre du meilleur. Un
d'aqud, une chose, une affaire dont on ne se rappelle pas
le nom. Emb'aqud où End'aqud, avec cela, pourtant, cepen-
ARA 63
dant. D'aquo, de cela, de cette chose. À fosso d'aqub, il a
beaucoup de biais, d'esprit, de subtilité, d'adresse. À d'aqud,
il a du quibus. Féou d'aquà, il faut de l'argent. Agud's,
contraction de aquè és, c'est. Aquô's aquà, c'est cela, c'est
bien cela. Aqud'ro, contraction de aquè èro, C'était. Aqud
vañ aqui, c'esL la conséquence naturelle de cela. Aqud tombo
bièn, cela arrive bien, à propos, à point nommé. Aqud vaï
bièn, cela va bien. Qu'és aquè? qu'est-ce que c'est ? Aquo's
aquè, c'est cela. Aquo's p'aqud, ce n'est pas cela. As vis
aquè? as-tu vu cela? Véiras aqud, tu verras, tu me la
paieras. Aquô sé dis, cela se dit; on en parle.
Aqud se prend quelquefois comme prépos. pour éncà,
chez. — Anan aqud dé moun péro, nous allons chez mon
père. — Voy. Encè.
Dér. du lat. Quod.
Ar, s. m. Arcade, arceau, construction en courbure de
voûte. — Au plur. Lous ars, les arceaux, les arcades. Le ;
marché à Alais était entouré de portiques ou arcades. L'éta-
lage des légumes et autres marchandises, dans le temps
des foires et des marchés, se fait souto lous ars. L'ar
dé Vius, l'Arc-des-Vieux, carrefour à Alais, formé en
voûte à la rencontre des rues Valaurie, Bouquerie et Ray-
mond Pellet : il vient de disparaître. Vius nous parait être
ici un nom propre : l’art. dé au sing. l'indique. On aurait
dit das vièls si l'on avait dû traduire par l’Arceau des
vieillards. À moins qu'il ne s'agisse d’une corruption fran-
cisée. — Voy. Vius.
Dér. du lat. Arcus.
Ara, v. Donner des arrhes, s'assurer d'une vente, d'un
achat moyennant des arrhes ; arrher.—Se dit généralement
pour retenir d'avance un objet chez un marchand. C'est
une promesse d'acheter une chose qui n’est pas encore livrée.
Dér. de Aro, arrhes.
Araïre, s. m. Araire, charrue à deux bêtes, et même à
une seule, sans roue et sans coutre. — Cette fois c'est bien
évidemment le fr. qui a emprunté au languedocien le mot
araire, qui figure assez nouvellement dans la nomencla-
ture technique de l’agronomie.
Dér. du lat. Arare.
Aran, s. m. Fil d'archal : fil de fer ou de laiton. — En
esp. on l'appelle : Hilo de arambre. — Voy. Fiou dé
richar.
Dér. du lat. Aramen, airain, cuivre.
Arapa, v. Prendre, saisir avec la main ; empoigner, accro-
cher. — Arapo! attrape! Arapa-lou, empoignez-le. Sé
t'arape, si je te pince. T'araparaï/ je t'y prendrai.
S'arapa, se coller, s'accrocher. — La pégo s'arapo à las
mans, la poix s'attache aux mains. Aquél chival s'arapo
bièn, ce cheval tire à plein collier. Aquél home couméngo
dé s’arapa, cet homme commence à bien faire ses affaires,
à prendre dans son commerce. On le dit aussi d'un con.
valescent qui revient en santé après une longue ou dange-
reuse maladie.
Dér. du lat. Arripere.
64 ARC
Arapo-man, s. m. Grateron, galiet grateron; Galium
aparine, Linn. Plante de la famille des Rubiacées, ram-
pante, rude au toucher et qui s'accroche aux mains quand
on la saisit. De là lui vient son nom.— Voy. Réboulo et
Réjistèl.
Arapo-pèou, s. m. Bardane, Aretium lappa, Linn.
Plante de la fam. des Composées Cynarocéphales, floscu-
leuse, et dont la semence est renfermée dans un hérisson
dont les piquants sont terminés en crochets; ce qui fait
que, lorsqu'on les mêle dans des cheveux un peu longs,
on ne peut plus les débrouiller et l'on ne s'en débarrasse
gu'en coupant; son nom dérive de cet effet.
— Arasa, v. Terme de maçon, couronner un mur, égaliser
sa dernière assise, la niveler.
=: Dér. de Ras.
Arboùs, s. m. Arbousier, Arbutus unedo, Linn. Arbris-
seau de la fam. des Ericacées, toujours vert, qui porte à la
fois des fleurs et des fruits. Ces derniers sont d’une belle
couleur aurore foncée, mais fades, d’une saveur plate.
Dér. du lat. Arbutus, m. sign.
Arboussé, s. m. Lieu planté d’arbousiers.
Arbousso, s. f. Arbouse, fruit de l’arbousier. — Ce mot
et les deux précédents ont fourni un assez grand nombre
de noms propres et de lieux, comme : Arbous, Darboux,
Larbous, Arbousse, Arbousset, Darboussier, etc.
Arboutan, s. m. Pied de biche, bras de fer qui sert à
fermer l’un des vanteaux d’une porte cochère. Il n’a aucun
rapport de signification avec l'arc-boutant fr., dont il est
pourtant dérivé probablement.
Arcanje, s.m. Archange, ange d'un ordre supérieur dans
la hiérarchie céleste.
Empr. au fr.
Arcèli, s. m. Lavignon, Venus decussata, Linn. Coquil-
lage marin, bivalve, bon à manger, du genre des Cames.
Dér. du lat. Arcella, petit coffre.
Archavésque, s. m. Archevèque, prélat métropolitain
qui à des évèques pour suffragants.
Dér. du lat. Archiepiscopus, formé du grec Apy#, pri-
mauté, et émioxoroc.
Archè,s.m. Cavalier de l’ancienne maréchaussée; archer,
soldat armé d’un arc et de fléches.
Dér. de la bass. lat. Archerius.
Arché, s. m. Archet, baguette aux extrémités de laquelle
sont attachés en saillie des crins qu’on tend à volonté et
qu'on passe sur les cordes d’un violon ou d’une basse pour
en tirer des sons ; instrument pour faire tourner un foret:
sorte de piége fait avec deux branches pliées en arc et
rattachées par un fil double, pour prendre les petits oiseaux ;
en terme de moissonneur, étui de la faucille, qui en a par
conséquent la forme recourbée.
Dér. de Ar, dim. 6
Archiban, s. m. Banc à dossier, banc d'honneur, chez
ls bons paysans des Cévennes, placé au coin de leurs im-
menses cheminées : c'est le siége des chefs de la maison et
ARD
des étrangers de distinction. L'archiban est aussi un long
coffre en forme de banc, fixé auprès de la table à man-
ger, Sauv. — Le mot et la chose sont des demeurants
de l’ancien régime : ils représentent ces mœurs patriar-
cales, qui conservaient avec respect les traditions de la
famille et de l'hospitalité, l'amour du père assis au foyer.
domestique ou à la table frugale, à la place d'honneur. Le
progrès ne trouve plus là que des ais vermoulus qui ne
sont bons qu'à jeter au feu.
Dér. du grec Apyf, primauté, puissance, et Ban.
Archimpo ou Archipô, s. m. Etuvée, viande hachée,
hachis.
Dér. du gr. Apyés, premier, principal, grand, et du
lang. Po.
Arcialoùs ou Arcièloüs, s. m”. Bolet, cèpe, potiron,
champignon gris, très-bon à manger; bolet comestible,
Boletus edulis ou esculentus, on bovinus, Pers. Linn.,
Roques.— Cet excellent champignon se reconnaît aisément
à son chapeau plus ou moins large, un peu ondulé sur les,
bords, d'une couleur fauve, quelquefois d’un rouge de
brique, brunâtre, couleur noisette. Sa substance intérieure
est ferme, d'un beau blanc qui ne s’altère pas à l'air, à la
cassure. Le pédicule est épais, tubéreux, renflé à la base,
court ou élevé. Il est essentiel de ne pas le confondre avec
le pissago, qui lui ressemble beaucoup et qui est très-véné-
neux et malfaisant. C’est cette espèce de champignon, très-
abondante dans les Cévennes, qu'on fait sécher et qui est
livrée au commerce. Au nord d’Alais, on le nomme Céloùs;
ce n’est qu'une contraction de"notre vocable. — Voy. Cé-
loùs ; Pissagd.
Dér. de l’it. Araceli, m. sign.
Arcisoùs ou Artisoüs, s. m. pl. Ver, mite ou ciron du
fromage, Acarus siro, Linn. Insecte du genre des Aptères
et de la fam. des Parasites. On le nomme également Marano.
— Voy. Artisoùs et Marano.
Le second de ces noms, dont le premier n’est qu'une
variante, est évidemment parent du fr. Artison, qui est
aussi un petit insecte rongeur.
Arculo, s. m. Un homme fort, robuste, un Hercule.
Empr. au fr.
Ardécho, s. f. Ardèche, département dont le chef-lieu
est Privas; rivière qui y prend sa source et lui donne son
nom, affluent du Rhône.
Dér. du lat. Arduesca.
Ardioù, s. m. Ardillon, dard ou pointe d'une boucle: —
— Sara un ardioù, serrer sa ceinture d’un point, ‘se ser-
rer le ventre, au prop. et au fig.
Ce mot est au moins contemporain du fr. ; il est dér. dn
celt. Dart, pointe, ou du grec ’Apèx, L'ital. a Artiglio,
orteil, ergot, serre.
Ardoù, s. f. Grande chaleur, chaleur brülante, parti-
culièrement celle qui est produite par la fermentation ; viva-
cité avec laquelle on se porte à quelque chose.
Dér. du lat. Ardor.
ARE
- Aré, s. m. Bélier, le mäle non châtré de la brebis.
* Dér. du lat. Aries.
Arèdre, v. Lasser, fatiguer, harasser; rendre; mettre
sur les dents. — Se dit surtout de la fatigue procurée par
üne marche forcée.
Dér. du lat. Reducere.
Arédu, udo, part. pass. de Arèdre. Rendu, lassé, ha-
rassé. .
Arégacha, v. Regarder; fixer attentivement en arrière.
—Se dit aussi gtnériquement pour : regarder, considérer
de toute manière.
Formé du lat. Retrd, arrière, et du gr. A\yzw, admirer.
Arémouli, ido, ou Arémoulu, udo, adj. Avide, âpre à
la curée; qui n'a pas de pudeur dans ses vues intéressées ;
affronteur ; insatiable. — Voy. Rémoulu.
Arémoulije, s.m. Avidité du bien, désir insatiable d'en
acquérir, mèlé de jalousie; effronterie intéressée.
Aréna, v. Tenir en bride; raccourcir les rênes. — Aréna,
ado, part. pass. Au fig. Réngorgé, qui relève la tête, qui
se rengorge.
Dér. du lat. Retinaculum, ou de l'ital. Redina, rène.
Arénadoù, s. m. Terme de bâtier ou de hourrelier, Arè-
noir; bouton où baguette fixés au-devant du bât ou d’une
-barde ou bardelle, pour y accrocher les rênes du bridon où
la longe du licou.
Dér. de Arena.
Arénda ou Arénta, v. Prendre et bailler à ferme,
prendre et donner à loyer; affirmer, louer.
Dér. de Réndo.
Aréndamén ou Aréntamén, s. m. Bail à ferme ou à
loyer ; le prix de ce bail.— Mé féou ana paga moun arén-
damén, il me faut aller payer mon loyer.
Dér. de Réndo.
Arénja, v. Arranger, disposer, mettre en ordre; accom-
moder, ajuster, ranger ; raccommoder, concilier, accorder,
faire transiger ; arranger une affaire. — Arénja sous afai-
res, mettre ordre à ses affaires. Arénja soun pèou, peigner,
lisser ses cheveux. Aquô m'arénjo bièn, cela me va, cela
m'arrauge à merveille ; s'accorde avec mes intentions ou
mes intérèts. Lou juge lous arénje, le juge les réconcilia,
les fit transiger. Féou arénja aquél proucès, il faut arran-
ger cette affaire,
S'arénja, se parer, s'ajuster, s'endimancher ; se ranger ;
s'arranger, prendre des arrangements, se mettre à son aise.
— Suïqué t'arénjaras un pdou, sans doute tu t'habilleras
convenablement. Lou tén s’arénjo, le temps devient serein,
ou bien, il se radoucit. Aquél home s'arénjo démpièi qu'és
… marida, cet homme est devenu plus rangé, moins dissipé,
moins prodigue, depuis son mariage. Sé voulès, m'arénja-
rai d'aquelo piègo, si vous voulez, je me chargerai de ce
champ, je m'en arrangerai, je vous l'achèterai. Aquélo drolo
s'arénjo bièn, cette jeune fille s'ajuste bien. Arénja-vous,
sans façoun, mettez-vous à votre aise, sans cérémonie. Aügo
s'arénjura, tout ceci s'arrangera, se raccommodera. Bouto /
ARÈÉ 65
bouto ! t'arénjaraï, val va ! je t'arrangerai d'importance,
je te châtierai de la bonne manière.
Dér. de l'allem. Ring, rang, d'où est venu rén.
Arénjamén, s. m. Arrangement, transaction ; ordre
dans la tenue d'une maison ; esprit de conduite dans ses
affaires.— Un michan arénjamen véou maï qu'un bon prou-
cès, mauvais arrangement vaut mieux que bon procès.
Aréscle, s. m. Cercle en bois refendu, dont on reliait
les anciennes mesures de capacité, telles que les minots,
quartes et boisseaux ; dans les mesures du nouveau sys-
tème, ce cercle est en fer. L'Aréscle est encore le cerceau
d'un tamis, d’un crible, des tours à filer la laine et le
coton, des caisses de tambour, etc.—Piquo tant sus l'aréscle
coumo sus lou tambour, il parle ab hoc et ab hac, sans me-
surer la portée de ses paroles ; par comparaison avec un
tambour maladroit qui frapperait lantôt sur le bois, tantôt
sur la peau de sacaisse. — Aréscle dé moult, archures d'un
moulin à farine ; elles sont recouvertes par les converseaux
et forment ensemble le tambour : terme de meunier.
Dér. du lat. Arculum. En roman arescle, cercle mince,
éclisse, éclat de bois.
Arésouna, v. Demander raison; discuter; interroger ;
faire rendre compte.
Dér, de Résoù.
Arésta, v. Arrêter, retenir, empêcher d'aller ou de dire ;
faire cesser, réprimer; attacher; déterminer ; régler ; saisir
par autorité de justice ; engager pour servir ; décider, con-
venir de faire. — L'aréstère lèou, je le retins, je l’arrêtai
bien vite; je le réprimai. Arésta lou san, étancher le sang.
Arèsto aquélo bocho, calle cette boule. Avèn arésta lou jour,
nous avons fixé le jour. L'an arésta, on l’a mis en prison,
on l’a écroué. Aï arésta un méssaje, j'ai retenu un domes-
tique, je l'ai arrhé. Avèn arésta dé faïre uno pérménado,
nous avons décidé d'aller à la promenade. Aquél chi arèslo
bièn, ce chien a bon nez, arrête. ferme le gibier.
Arésta, ado, part. pass. et adj. Sage, réservé, retenu,
posé, quand il s’agit des personnes ; arrêté, fixé, conclu,
en parlant d’une chose, d’une affaire, d’un marché. — Un
Jjouine home arésta, uno fio aréstado, un jeune homme
sage, posé, une fille vertueuse, réservée.
Dér. du lat. Restare.
Aréstamén, s. m. Arrêt, arrestation; saisie d’une per-
sonne ou des biens. — Faguèrou un aréstamén dé soun bé,
on fit contre lui une saisie immobilière. — On se sert du
mot banimén, quand il s’agit d'une saisie-arrèt ou mobilière.
Aréstiè, s. m. Arôtier, pièce de bois qui, dans un toit,
part de l'extrémité du faite et va en descendant reposer
sur l'angle du bâtiment, divisant les eaux à droite et à
gauche dans les toitures à deux égoûts.
Dér. de Arésto.
Arésto, s. f. Arète de poisson, os long et pointu qui
tient lieu de côtes dans les poissons; crête d'un toit; angle
saillant d’un prisme, d'un mur, d’une voûte.
Dér. du lat. Arista, barbe de blé.
66 ARG
Aréstoù, s. m., ou Cabô. Chabot, meunier, chevane;
Cyprinus dobula, Linn. Poisson de rivière, qui a la tète
large et plate, la gueule fort ouverte et sans dents. Sa
chair, peu estimée, est toute parsemée d'arètes, ce qui lui
a valu son nom lang. — Voy. Cab.
Argèlo, s. f. Argile; terre grasse; terre de poterie. —
Pasta d'argèlo, pétrir de l'argile.
Dér. du lat. Argilla.
Argéloùs, ouso, adj. Argileux, qui tient de l'argile.
Dér. de Argèlo.
Argën, s. m. Argent, métal; monnaie en général. —
Mino d'argën, cuiè d'argén, mine d'argent, cuiller d'ar-
gent. Plago d'argin és pas mourtèlo, plaie d'argent n'est
pas mortelle. Gagno vèr l'argén, se dit d'un animal domes-
tique quelconque, qui est encore d'age à augmenter de
valeur en grandissant, où d'une bète qui a été malade et
qui se rétablit chaque jour : dans ce dernier sens, on l'ap-
plique même aux personnes. Gagnan vèr l'argen, disons-
nous à un malade pour lui donner de l'espoir ou du cou-
rage. Aquo's d'argôn dé moun gagna, c'est de l'argent de
mon pécule, gagné par mon travail ou mon industrie, et
non advenu par héritage. Au fig. AquÔ's d'argén de soun
gagna, se dit aussi d'un malheur arrivé à quelqu'un par
sa faute; c’est un malheur qu'il a été chercher Jui-mème.
L'argén és roun, fôou bé qué rounle, la monnaie est ronde,
pour qu'elle circule ; l'argent est fait pour rouler, pour
courir d'une main à l'autre. D'argén blan, en monnaie
d'argent, en pièces d'argent. Pagan argén countan, nous
payons en espèces sonnantes. Ana bon jo, bon argen, agir
loyalement, franchement, sans ménagement.
Dér. du lat. Argentum.
Argénta, v. Argenter; passer une couche d'argent ;
donner une couleur argentée.
Argènta, ado, part. puss. du v. préc. et adj. Le mème
que Argéntoüs. (W. ©. m.) — Sèn pas bièn argéntas pér
lou moumén, nous ne sommes pas riches, pas chargés d'ar-
gent pour le moment. |
Argéntariè, s. f. Argenterie, vaisselle ou autres meu-
bles et ustensiles d'argent. — C'est le nom d'une rue à
Montpellier, l'Argenterie, où était autrefois l'Hôtel des
monnaies.
Argéntoüs, ouso, adj. Pécunieux, riche en espèces;
qui a beaucoup d'argent; qui produit de l'argent. Ne se
prend guère que négativement.
Argén-viou, s. m. Vif-argent, mercure. La propriété de
cette substance métallique, blanche et fluide, d'être conti-
nuellement en mouvement à la moindre agitation, l'a fait
prendre pour emblème des personnes vives et remuantes.
— Sémblo qu'a d'argëén-viou din sas mans, ses mains s'agi-
tent comme si elles étaient du vif-argent.
Argnè, s. m., ou Vèrdé. Marlin-pècheur, oiseau. — On
l'appelle Argnè parce qu'on avait cru longtemps qu'en le
mettant desséché dans une garde-robe, son odeur en chas-
sait les teignes, arnos ; mais, loin de préserver son voisi-
ARG
nage, on à vu, dans les cabinets d'histoire naturelle, l'ar-
gnè dre parmi les oiseaux empaillés un des premiers atteint
par ces insectes.
Voy. Verde. ee
Argue, en fr. Argues, terminaison d'un grand nombre
de nos de lieux dans le Bas-Languedoc, départ. du Gard
et de l'Hérault.
La finale Argue a été longtemps considérée comme repré:
sentant le lat. ager, champ, domaine. Cette ingènieuss
interprélation, mise en crédit par le savant historien Més
nard, était combattue par les Bénédictins de l'Histoirg
générale du Languedoc; elle fut adoptée à titre de conjec-
ture par Sauvages ; aujourd'hui, battue en brèche au sein
mème de l'Académie du Gard, elle parait abandonnée par
la plupart des étymologistes.
Argue, dans la langue vulgaire, le languedocien, est, en
effet, de dernière formation ; elle n'apparait qu'au XIVe siè-,
cle, où elle devint particulière au territoire qui avait été
autrefois le pays des Volces Arécomiques: Au moyen âge,
les noms ainsi formés avaient pour finale anègues, ani
gues où aniches ; dans le principe &’était le radical celtique
ek ou son analogue contemporain 4k, qui s'attachait aux
mêmes noms pour leur donner la signification de pro-
priété, un sens, une idée de provenance.
Quand, avec la conquête, le latin s'imposa à la Gaule,
il ne changea pas les appellations locales existantes ; seule-
ment il leur imprima le cachet de son génie et de s4
langue, et il ajouta ses finales caractéristiques en us, a,
um, selon qu'exigeait l'accord avec mansus, villa, cas-
trum où prædium. Pour les établisssements nouveaux qui
se créèrent dans la suite, les mèmes procédés de dénomi-
nation furent employés. De là les terminaisons en acus;
aca, acum; puis les variantes enanius, aneus, atius, assius,
a, um, etc., désinences correspondantes adjectives.
Les Gallo-Romains, nos ancêtres, adoptèrent donc soit
pour l'euphonie, soit pour se rapprocher de la forme latine,
les finales celtiques latinisées ou purement romaines. Enfin,
lorsque du mélange se forma la langue romane rustique,
plus tard quand se fit la division en langue d’Oil et en Jan
gue d'Oc, comme le latin se conserva toujours à titre de:
langue officielle des actes publics, les altérations se multi-
pliérent, par une sorte de marche parallèle. Les influences
ethniques, qui ont lant de puissance sur l'intonation, agi-
rent à leur tour pour modifier les terminaisons. Ainsi,
tandis que le latin disail acus, aca, acum, le roman répon-
daitpar ac, as, at, par préférence au midi et au centre dela
France, et par e, y, ey, ieux, etc, dans le Nord: Les ten:
dances à la contraction, à l'adoucissement de la prononcia-
tion se manileslèrent; et alors que le basilatin écrivait
acus, anus, a, um, le roman supprimait la terminaison et
il avait an, en, ane, enne, et ainsi de suite sur les autres
voyelles. k
Peu à peu, par le même sentiment, la consonnance tou=
jours dure du e se transforma en ch chuintant, et l'on arrivæ.
ARG
aux désinences mèlées en ache, auche, ènche, inche. L'or-
thographe ne resta pas désintéressée dans la question: le
latin remplaçait souvent li par j. Or quand les Gallo-
Romains, de anius, anêus, onius, «, um, eurent fait
anicus, inieus, onicus, a, um, el anicæ, au plur.,
V'inversion par anjcus, anjus, allait de soi dans l'écriture :
la chute du ec dur s'ensuivit et l'on eut anjus, enjus, a,
“um, et les autres, qui par la suppression de la finale carac-
téristique produisirent derleur coté anje, enje, inje. L'on
“compreud encore que la substitution du g doux au j soit
arrivée tout naturellement, comme celle du e doux ou du
ch au c latin sonnant k devant toute voyelle. Ces combi-
naisons amènent également le gx mouillé et aussi la méta-
thèse ng. — Voy. les articles Agno, Canounge, Cassagno,
et autres.
De là sont issues les (inales en cgna, igna, agnac, ignac,
ailleurs rgné, igney, ignies, igny, etc., qui se prononcent
en nasalisant et en mouillant. Et ce phénomène, dans notre
pays, avait passé d'abord par angues, onigues, aniches,
inègues, oniches, etc., du moyen àge roman, désinences
exprimées en lat. anicæ, enicæ, onicæ, et qui sont enfin
devenues argue, ergue, orgue, dans bien des appellations
‘de nos jours.
Mais ilest facile de saisir, à travers ces permutations
de lettres, les altérations qui se sont produites de la forme
romane primitive aux formes définitives de notre dialecte.
Toutes ces variétés de finales, depuis ac = ec — acus,
anus, anius, jusqu'à an, anche, ènche, anje, ange, agne,
etles autres, comme anicæ — anègues = argues, etc. ont
donc une source commune et sont équipollentes; et
ce.qui le prouve, c'est que le latin, langue plus fixe,
plus fidèle au radical premier, les exprime, quelle que
soit leur diversité, au midi et au nord, par sa formule à
près uniforme acum où anum; et que, dans les noms
de lieux, d'un bout de la France à l'autre, des corps de
mots identiques, portant suivant les pays des terminai-
sons différentes, en langue vulgaire, se retrouvent dans
le latin des chartes, des diplômes, des anciens titres,
avec la même finale invariable. Pourquoi ces différences
sur des mots similaires, souvent mème à des distances
très-rapprochées ?
+ Sic voluère patres, sic voluit usus.
Question de latitude; loi de permutation ; recherche
d'énergique euphonie; toutes ces causes ont pu amener
une combinaison qui a donné lieu à de si singulières inter-
prétations.
Pourquoi encore, pour nos contrées, près de nous, au
milieu de ces syllabes fluides de la terminaison latine, s'est
introduite la consonne rude r de notre argue? Comment l'i
doux a-til disparu? Il n'y a pas peut-être d'autre raison,
. &t.il faut bien s'en contenter, que celle qui, du latin pasti-
naca à fait notre pasténargo; de dominicus, domèrgue; de
dies dominica, dimèrgue (v. lang.), et diménche actuel ;
qui a converti le Pagus rutenicus en Rouergue ; canonicus,
ARI 67
chanoine, en canounge; villa canonica en La Canourgue
(Lozère), el le mème, nom d'une place à Montpellier; comme
monica, religieuse, s'est transformé en mourgo, les Mour-
ques, nom d'une de nos rues, et les dim. mourguéto et
mounjéto. (V. c. m.) Ce qui est remarquable néanmoins,
c'est que la même forme se rencontre dans l'espagnol
ét dans l'italien, langues néo-latines de même origine que
la nôtre. — Voy. Canounge.
IL nous parait donc évident que la finale argue n'est
qu'une désinence purement explétive, adjective, qui ém-
porte de soi un sens de provenance, une idée de propriété,
à peu près comme ager, mais qui n’en est pas un dérivé ni
une traduction. Ce qu’il fallait démontrer.
Ari, interj. Haie! commandement qu'on adresse aux
ânes, chevaux ou mules pour les faire avancer. — On dit
d'un paresseux, d'un ouvrier nonchalant : Féow toujour &
dire : ari, il faut toujours lui dire : allons done!
Rabelais s'en est servi dans ce sens : Ari, bourriquet /
En ital. on dit aussi : arri; en esp. port. arre. Les
Anglais ont, avec la mème signification, le verbe to harri.
Harre est un mot arabe d'origine ; il signifie proprement :
warche, avance. En celt, ari désigne un âne. Tous ces
mots et le nôtre dériveraient-ils du celtique ? Le latin aurait-
il contribué de moitié à sa composition, en combinant et
élidant aro, maintenant, avec i, impératif, va, marche? En
étymologie, il ne faut jurer de rien.
Ariala, v. Canaliser, conduire les eaux d'arrosage par
de petits canaux.— La ribièiro s'és touto arialado d'un
cousta, la rivière s'est creusée un lit étroit sur l'un de ses
bords,
Dér. de Rial,
Arias, s. m. n. pr. de lieu. Arias, nom de ruisseau dans
plusieurs communes du Gard.
Dér. sans doute, comme le mot préc., de Rial, avec l'a
explétif ; peut-être aussi le mot riassos n'est-il pas étranger
à sa formation. — Voy. Riassos. Toutes ces idées se rap-
prochent et se tiennent.
Ariba, v. Donner à manger aux animaux ; jeter de la
feuille aux vers à soie ; appäter un enfant, un vieillard, un
infirme, qui ne peuvent faire usage de leurs mains. —
Ariba, sans régime, s'applique, par excellence, aux vers à
soie : À quinlo houro ariban? à quelle heure donnons-
nous la feuille, le repas de feuille aux vers à soie ? Ariba
lou réinar, appter le renard, faire une trainée d'appât
qui le conduise dans le piége. Fou ana ariba sas gnèïros,
il faut aller donner à manger aux puces, c.-à-d. fam. se
coucher. Axibo sans fiäio, répond quelqu'un à qui l'on
demande une chose impossible ou très-difficile à faire :
donne à manger à tes vers sans le moindre brin de feuille.
Aribado, s. f. Repas, ration qu'on donne aux animaux,
particulièrement aux vers à soie. — Quant dounas d'ari-
bados? combien de fois par jour donnez-vous à manger aux
vers ? Lus manquo pas qu'uno aribado pérlous ajassa, ilne
manque à ces vers qu'un léger repas pour les faire dormir,
687 ”” ARL
Aribaïre, aîro, adj. Ouvrier qui donne à manger aux
vers à soie.
Ariè, interj. En arrière! commandement pour faire
reculer un cheval.
Formé du lat. Retro ; en esp. Arriédro. .
Ariès (és), adv. En arrière, en reculant, derrière. —
Porto soun capèl és ariès, il porte son chapeau en arrière.
Vaï és ariès, il marche en arrière ; il porte, il incline der-
rière.
Dér. du lat. Ad retrà.
Ariguiè ou Aliguiè, par corr. Alisiè, s. m. Alisier,
Cratægus aria, Linn. Arbre de la fam. des Rosacées, com-
mun dans les bois. Son fruit se nomme Alise en fr.
Ariuèje, s, m. Salsepareille du Languedoc, d'Europe,
Smilax aspera, Linn. Plante de la fam. des Asparagées,
sarmenteuse, à baies rouges, rampante el épineuse. — On
dit proverbialement : Rama coumo un ariuèje, de ce qui
est touffu, épais, mème d'un mensonge.
Dér. du gr. Apk, lime, râpe, cette plante étant toute
hérissée de pointes.
Ariva, v. Arriver; aborder, parvenir dans un lieu où
l'on voulait aller ; advenir ; survenir. — Faï pas qué d'a-
riva, il vient d'arriver, il arrive à peine. S'aqud m'’arivo
tourna, si l’on m'y prend encore. Sé t’arivavo, si tu t'ayi-
sais de cela, s'il t'arrivait. T'arivara malur, il t'en advien-
dra malheur. Y-és ariva, il y est parvenu, au prop. et
au fig.
Ce verbe, en languedocien comme en français, a été tech-
niquement approprié, dans le principe, à l'arrivée d’un
voyage sur eau. Son étymologie de rive ou de ribo, quand
on prononçait ariba au lieu de ariva, le démontre assez.
Les deux dérivations se confondent dans le lat. Ripa, ad
ripam.
Arivado, s. f. Arrivée; venue de quelqu'un ou de quel-
que chose en un lieu.
Dér. du lat. Ad et ripa.
Arjalas, s. f. Genêt épineux. Spartium scorpius, Linn,.
Arbuste de la fam. des Légumineuses, à fleurs jaunes ;
ajonc.
Sauvages prétend que ce mot est d'origine arabe; ne
viendrait-il pas plutôt du grec Apyakéos, difficile, fAcheux,
incommode, qui est pour beaucoup dans le lat. argutus ;
à cause des longues épines de cet arbrisseau ?
Arjalassièiro, s. f. Lieu couvert d'ajoncs, de genêts
épineux.
Dér. de Arjalas.
Arjéirolo, s. f. Azerole, fruit de l’azerolier, arjérouie.
Arjérouiè, s. m. Azerolier, Mespilus, Linn. Arbre de
la fam. des Néfliers, dont le fruit ressemble à une petite
pomme et a des noyaux comme la sorbe.
Arle, s.m. Arles, ville de Provence ; sous-préfecture du
départ. des Bouches-du-Rhône. — On dit : én Arle, à Arles,
et non à Arle. — Voy. Aoubénas.
Dér. du lat. Arelas.
ARM
Arlén, énquo, adj. Arlésien, ienne; d'Arles; qui est
d'Arles.
Dér. du lat. Arelas.
Arlénde, s.m., n. pr. de lieu. Arlende, hameau dépen-
dant de la commune d'Allègre, canton ds Saint-Ambroixs
arrondissement d’Alais. Dans le voisinage, se trouve une
belle source du mème nom : La fon d’Arlénde.
Ce mot est écrit dans le dénombrement de la sénéchaus-
sée de Nimes, Arlempde. Sa dernière partie formée de Zinde,
clair, transparent, traduit le lat. limpidus. Sa première
syllabe est-elle l’article armoricain ar, la, que l’on trouve
dans bien des noms commençant ainsi : Ar-leux (Nord),
très-rapproché de notre mot; Ar-cenay (Côte-d'Or); Ar-
dennes (Aveyron), et autres ? Serait-elle préposition repré-
sentée le plus souvent par le lat. ad, vers, ou la particule
celt. intensive, jointe à l'adjectif pour lui donner plus de
force et mieux exprimer la beauté et la limpidité des eaux
de la fontaine d'Arlénde? — Voy. Zeuss, Gramm. celt:
On pourra choisir.
Arléquin, s. ”m. Arlequin, homme léger, peu sûr; bouf-
fon, farceur.
Ce nom est le surnom d'un bouffon de théâtre qui vint
d'Italie à Paris sous le règne de Henri II. Comme il allaït
souvent chez MM. de Harlay qu'il amusait beaucoup, ‘ses
compagnons le nommèrent Harluiquino, petit Harlay ‘ét
ce nom est demeuré à tous ses successeurs dans l'emploi.
I a fini par passer dans l’usage comme adjectif.
Arléquinado, s. f. Arlequinade; tour d'arlequin; bouf-
fonnerie ; lazzi; niche.
Arma, v. Armer, donner des armes; mettre sous les
armes; disposer une machine, un fusil à tirer, à faire
feu. :
Dér. du lat. Armare.
Armado, s. f. Armée; troupes en corps sous la con-
duite d'un chef; grande foule, grand nombre. — Y siañ
uno armado, nous y étions en foule, en grande multi-
tude.
Armagna, s. m. Almanach, calendrier.
Altér. de Almanach.
Armas, s. m., augm. de Erme, grand tènement de térré
en friche, de lande. Autrefois il avait la signification de
marais, terrain marécageux, et les anciennes chartes latines
le rendaient par Palus, paludis. Sauvages lui donne pour
synonyme Garigo, qui a le sens de marais. — Yoy. Erme,
Aimarque.
Armasi, s. m., ou Cabiné. Armoire, placard, buffet;
meuble où l'on tient du linge et des hardes, et où le
paysan serre ce qu'il a de précieux.
Ce mot vient, comme armoire, son correspondant fran-
çais, de ce qu'on y renfermait autrefois les armes, les
armures, et dans les châteaux les titres et les armoiries:
— Cérquo la gnuè pér lous armasis, il cherche midi
à quatorze heures, il cherche des faux-fuyants.
Armitaje, s. m. Ermitage, habitation d’un ermite; aû
ARO
fig. lieu solitaire, maison isolée; nom d'une montagne qui
domine Alais, où était un ancien ermitage.
Dér. du lat. Eremita.
Armito, s. m. Ermite, solitaire qui s'est isolé du monde
pour servir Dieu. — Démpièi qué l'armilo és mort, arivo
toujour quicon, dit-on chaque fois qu’il arrive un malheur
où un évènement étrange, comme si l'ermite était une
«espèce de Providence qui éloignait les malheurs d’un pays.
An fouita l'armito, aqud i-amérilo, chantent les enfants
autour d'un camarade qui a été puni par ses parents, ou
qui a été justement houspillé par un compagnon plus fort
que lui.
Dér. du lat. Eremita. M
Armo, s. f. Arme; tout ce qui sert à armer, soit pour
l'attaque, soit pour la défense. — N'y douriè pér n'én
préné las armos, il y en aurait pour prendre les armes,
- pour s'insurger, au prop. et au fig. Pourta l'armo, las
‘ armos, porter les armes.
Emp. du fr. dér. du lat. Arma.
Armol, s. m., ou Armôou. Bonne-Dame ou Arroche
des jardins, Atripleæ hortensis, Linn. Plante potagère et
sauvage; quand on la cultive dans les jardins, elle devient
haute et ligneuse, et on la nomme alors épinard d'Es-
pagne.
Dér. de l'esp. Armuellas, m. sign.
Armuriè, s. m. Armurier, arquebusier; qui fait des
armes.
Emp. au fr.
Arna, ado, adj. Rongé, percé par les teignes, piqué des
vers; vermoulu.
Dér. de Arno.
Arnaduro, s. f. Mangeure de vers ou de teignes; le trou
percé par elles.
Dér. de Arno.
Arnavès, s. m. Argalon, paliure, nerprun, Rhamnus
paliurus, Linn. Arbrisseau qui ressemble au jujubier et
qui est bien plus piquant, de la fam. des Frangulacées. Un
.Savant botaniste suédois, qui avait voyagé en Palestine,
dit qu'il n’y a, dans tous les environs de Jérusalem, que
cette espèce de paliurus qui ait pu servir à faire la cou-
ronne d’épines de N.-S.-J.-C.
Astruc affirme que ce mot nous vient de l'arabe.
Arno, s. f. Teigne, en lat. Tinea, petit iusecte, véritable
chenille qui se change en phalène, de l'ordre des Lépidop-
tères, trop connu par les dégâts qu’il fait sur les étoffes, les
pelleteries et le papier. Sa phalène est ce petit papillon,
d'un blanc un peu gris mais argenté, qu'on voit voler
l'été dans les appartements où l'éclat de la lumière l’attire.
Au fig., importun, parasite, solliciteur dont on ne peut
se débarrasser.
Sauvages prélend que ce mot vient du celtique.
Aro, s. f. Are, mesure de superficie contenant 400 mé-
tres carrés.
Emp. du fr. dér. du lat. Area, surface.
ARP 69
Aro, adv. A présent, à cette heure, maintenant, en ce
moment. — Tout'aro, tout à l'heure, bientôt, dans un
moment. Ah! pér-aro! Ah! pour le coup! Gna prou pèr
aro, c'est assez pour l'instant. Un pdou aro, un pdou pit,
un peu après l'autre ; par moments. Aro mémélo, tout à
cet instant, il n'y a qu’un bien petit moment.
Dér. du lat. Hora, ad horam, ou de hac hord. En ital.
Ora, en esp. ahora, en cat. ara.
Aros, s. f. pl. Arrhes d'un marché, gage de son accom-
plissement. — Douna d'aros, donner des arrhes.
Dér. du gr. &25a6tv, m. sign., formé de l'hébreu arab,
promettre, donner des assurances, ou de l'arabe araba,
nouer, affermir, serrer; d'où le lat. arrha, m. 8.
Arougan, anto, adj. Fier, insolent, arrogant.
Dér. du lat. Arrogans.
Arouganço, s. f. Orgueil, fierté, arrogance, insolence,
morgue.
Mème dér.
Arouina, v. Ruiner, causer la ruine; démolir; user
par le temps; détruire la fortune, causer la perte des biens
de quelqu'un.
Dér. du lat. Ruina. ;
Aroundi, v. Arrondir ; élargir; rendre rond. S’aroundi,
engraisser, se remplumer. Au fig., étendre son héritage,
joindre à son domaine une terre qui convient.
Dér. de Roun.
Arounze, s. m. Ronce, Rubex cæsius, Linn. Arbrisseau
épineux et parasite, qui produit les müres ; de la fam. des
Rosacées.
Dér. du lat. Ranca.
Arouqua (s’}, ».,ou S'arouqui. S'endormir ; tomber darts
un profond sommeil, où l'on semble changé en pierre.
Dér. de Ro.
Arouqui (s’). Se pétrifier, devenir de la pierre; durcir.
Au fig., s'endormir profondément.
Dér. de Ro, rocher.
Arousa, v. Arroser, répandre de l’eau ; -humecter.
Dér. du lat. Ros, eau, goutte, rosée.
Arousado, s. f. Petite averse de pluie; pluie douce et
de courte durée.
Arousage, s. m. Action d'arroser; droit d'arrosage.
Arousouèr, s. m. Arrosoir; grande cruche en fer-blanc
pour arroser les plantes et les fleurs.
Emp. du fr.
Arpaïargue, s. m, n. pr. Éiees commune du
canton d’Uzès. Son annexe est Aoureia, Aureillac ou
Aurillac. Deux petits villages, situés, celui-ci sur une
haute montagne , celui-là sur la pente d'un coteau.
Le nom du dernier pourrait lui venir de Aouro, vent, à
cause de sa situation ; mais son voisinage avec Arpaïargue,
et même sa traduction française laissent croire que aurum,
lat., a contribué à la dénomination des deux localités,
situées près d’un ruisseau aurifère : Aurum legere, chercher,
recueillir de l'or,
70 ARP
Le nom d'Arpaïargue, qui n’exprime pas bien entendu
par sa finale urgue le domaine de quelque sénateur romain,
est rendu dans le latin des chartes par Arpalhanice, et il
dérive certainemeut aussi. de aurum et de palhare, bass.
lat., chercher de l'or dans le sable des rivières ; d'où le fr.
Orpailleur. Ses analogues sont Orpillières (Gard) et Arpail-
hac (Aveyron).
Arpan, s. m. A proprement parler, signifie : longueur de
l'ouverture de la main. — Au jeu d'£quip? (V. ©. m.), qui
se joue avec des gobilles, on mesure ainsi la distance entre
les boules; l'on dit alors : Faï tous arpans, fais ta mesure.
Mais comme la tricherie se mêle toujours à ces jeux d'en-
fants, le mesureur allonge tellement les doigts en glissant
sur Ja terre, qu'il abrége singulièrement la distance. On
appelait ce procédé : Arpans de la naciou, et l'on voulait
parler d'une mesure frauduleuse. Le jeu en question avait
sans doute pris naissance en ce temps-là. La nation était
prise alors pour le gouvernement; on était sous la répu-
blique, la première bien entendu, et les enfants se permet-
taient cette sorte d'épigramme politique, en commémora-
tion de la bangueroute du tiers-consolidé. Les bonnes
vérités sont le privilége de cet âge.
Arpan, en ce sens, pourrait avoir quelque parenté avec
arpo; cependant nous peusous qu'il n'est que l'extension
du mot suivant.
Arpan, s. m. Mesure de superficie qui répond au fr.
arpent, el qui dérive comme lui du lat. Arripendium,
mesurage des champs. Mais en Languedoc, il ne répond pas
aux dimensions de l’arpent de Paris, qui valait autrefois
51 ares 07 centiares.
. L'arpent de Montpellier, qui était l'unité légale pour les
justiciables de la Cour des Aides de cette ville, était de
deux sortes. L’arpent ou deztre, pour mesurer les bâtiments,
était une corde qui tirait neuf pans, soit 2 mêt. 25 cent.,
sans avoir égard à la fraction imperceptible qui résulte de
la comparaison du mètre à la toise ou à la canne. Le dextre
ou arpent, pour mesurer les champs, était de 48 pans, soit
& m. 50, en mesure linéaire. L'arpent, carré représente
donc une superficie de 20 mètres : il faut 25 arpents pour
une quartulado, 400 pour une séstièirado, 400 pour une
sdoumadudo (V. c. m.), et dans le système décimal, il en
faut 5 pour un are, 500 pour un hectare,
Le dextreou l'arpent contient donc 0 ares 20 centiares.
LOISIR RAT. | 25
La quarte. : « 5 »
BE CRT. Di. A0 »
ÉORODMER LE 0 let te ua »
La salmée, . " . : . 80 »
Telle était la mesure à Aug à Saint-Christol et dans
quelques autres communes voisines, l'arpent n'avait que
B paus.
Arpanta, v. Arpenter, mesurer la contenance des terres ;
faire de lougs pas, marcher vite et à grands te:
Dér. de Arpan.
ARQ
Arpantaïre, s. m., ou Arpentur. Géomètre arpenteur.
— Voy. Espèr.
Arpantage, s. m. Arpentage, art de mesurer la super-
ficie des terres ; rapport ou plutôt résultat d'une se: Ed
d'arpenteur.
Dér. de Arpan.
Arpantéja, ». Parcourir à grands pas ; courir çà et ls
et par ext., jouer des jambes. —Se dit surtout d'un enfant
au berceau qui, couché sur le dos, joue des jambes «et se
démène quand il est libre. Ce mot se confond avec Arpa-
téja.
Dér. de bi
Arpatéja, v. Gambiller, jouer des jambes. — 11 est le
mème que Arpantéja. La seule différence parait être dans
l'étym. Celui-ci est dér. de Arpo.
Arpéto, s. f., dim. de Arpo. Croc de batelier; mais plus
particulièrement ces petites griffes en vrilles, avec lesquelles
plusieurs plantes parasites grimpantes s’attachent, aux
wurs ou à l'arbre, leur tuteur, comme le lierre, la vigne-
vierge, ete. On le dit aussi des pattes de la plupartodes
insectes.
Arpi, v. Accrocher avec les mains ou les griffes ; rapi-
ner ; empoigner, saisir,
S'arpi, se prendre aux cheveux, s'égratigner récipro-
quement avec les ongles et les griffes.
Dér. de Arpo, formé lui-même du lat. arripio.
Arpian, ando, adj. Pillard, rapineur, qui a les mains
crochues, comme on le reproche, improprement sans doute,
aux Normands; esçogriffe, escroc.
Dér. de Arpo.
Arpiou, s. m. Dim. Arpioulé. Ongle long et crochu ;
un doigt d’une serre, d'une griffe, pris séparément. Au
plur. par ext., main, doigts. mL
C'est un dim. dér. de Arpo.
Arpo, s. f. Main; griffe; serre; patte. — On dit: À
bono arpo, où Es uno bono arpo, d'une femme qui &.la
main habile pour ramasser une récolte, telle que les chà-
taignes, ou pour cueillir la feuille de mürier. Jouga dé
l'arpo, jouer de la griffe; rapiner, mème égratigner. Trémpa
l'arpo, mettre le pied, entrer dans l’eau ; au fig. mettre la
main à la pâte; entreprendre. Y-an bouta l’arpo déssus, on
s’en est saisi, on a mis Ja main sur lui.
Dér. du gr. Apos, crc, crochet, grappin.
Arquado, s. f: Arche d'un pont; voüte courbée en
arc.
Dér. du lat. Arcus, arc.
Arqué, s. m. Arc-en-ciel, météore en arc formé par la
réfraction de la lumière solaire dans les nuages, composé
de plusieurs bandes de couleurs, rouge, orange, jaune,
vert, bleu, indigo et violet.—C'est le dim. de Ar. (F. ©. m.)
Arqué dé voulan, Archet ou étui de faucille. M
Dér. du lat. Arcus.
Arquièiro, s. f. Soupirail, lucarne, jour de souffrance ;
ouverture longue et très-étroite pour que la tète n’y puisse
ASA
passer, qui éclaire une cave, une étable, un grenier, un
bâtiment non habité ; barbacane, chantepleure; ouvertures
de mème dimension, qu'on pratique dans les murs de sou-
tènement et de terrasse, pour faire écouler les eaux de
luie.
: Ce mot vient de son ancienne application aux meur-
trières par où tiraient les archers, qu'on nommail arquiès.
Arséniso, s. f. Aruoise, herbe de Saint-Jean, Artemisia
vulgaris, Linn. Plante de Ja fam. des Corymbifères, stoma-
chique, vermifuge, emmenagogue, antiseptique.
Dér. du gr. ’Apreu:slx, nom de la Diane des Latins,
patronne des vierges, qu'on appliquait par allusion à une
plante dont on faisait usage en médecine pour provoquer
les menstrues chez les jeunes filles.
Artéia (s'), v. Se heurter les doigts de pied contre quel-
que chose; broncher, se blesser le pied par un choc. —
Aï poou qué mé séraï artéia, j'ai peur d'avoir fait une
- sottise, un pas de clerc.
Dér. de Arte.
Artéiado, s. f. Heurt, blessure aux orteils : ce qui
n'arrive guère qu'aux gens qui vont pieds nus.
Ce mot n'a pas d'équivalent en français, dans nos dic-
tionnaires, parce que ni l'Acadéinie ni les Parisiens ne vont
nu-pieds; mais dans la Picardie, par exemple, où les pau-
vres gens font comme les nôtres, on dit très-bien s'orteil-
ler et orteillade: En tous cas, dans l'acception figurée, il
est encore à regretter, et il pourrait bien ne pas manquer
d'emploi. Il signifieen effet: maladresse, mal-habileté, entre-
prise ou action dans laquelle on se laisse imprudemment
pincer.
Dér. de Artél.
” Artél, s: m. Orteil, doigt du pied. — Zéva l'artél, se
sauver, décamper, détaler; lever le pied. Trémpa l'artél,
se mettre à l'eau, guéer à pied.
Dér., comme son synonyme ital. Artiglio, du lat. Arti-
culus, jointure.
Artichâou, s. m. Artichaut, Cynara scolimus, Linn.
Plante indigène de l'Andalousie, de la fam. des Cynaro-
“céphales, cultivée partout à cause de l'aliment que fournit
‘son réceptacle et les écailles de son calice. On en connait
plusieurs variétés. — Voy. Carchofle.
- Dér. du celt. Artichauden; art, pointe, et chaulæ, chou;
par où Chou épineux. D'autres le tirent de l'arabe Khar
chioff, artichaut. Le grec et le latin ont été mis aussi à
contribution. Nous n'avons pas de préférence,
Artisoùs, s. m. pl. — Voy. Arcisoùs.
As, art. pl. m, au datif. Aux. Au fém. on dit À las. —
As homes, as éfans, aux hommes, aux enfants ; à Las fén-
nos, à las fios, aux femmes, aux filles.
As, 2° pers. sing. ind. prés. du verbe Avédre, tu as. —
As fan, tu as faim. As dé poumos, tu as des pornmes.
Asaïga, v. Arroser; mouiller, baigner. — Ce terme
exprime spécialement le mode d'arrosage particulier aux
Cévennes, soit qu'on puise l'eau dans un cours d'eau bor-
ASE 71
dant la propriété, soit dans un petit bassin où on la
ramasse et qu'on appelle tompo. On la puiseet on la répand
aù loin au moyen d'une pelle creuse en bois sur les plan-
ches d'un jardin, à peu pres comme les bateliers vident
leur bateau avec une écope. — Asaïgu lou vi, tremper le
vin. Asaïga à régo, arroser par irrigation en faisant couler
l'eau successivement dans chaque raie d’une planche de
potager. C'est le mode qu'on suit quand on arrose au moyen
d'un puits-à-roue ou d'un chapelet.
Dér. de Aïyo et de la part. explétive a, qui marque l'ac-
tion; la lettre s n'est là que pour l'euphonie, pour éviter
le choc des deux a, par un hiatus réprouvé mème en
prose.
Asaïgadouiro, s. f. Pelle creuse en hois pour arroser,
dont il est question à l'article précédent. Lorsqu'on n'em-
ploie à cet usage qu'une moitié de courge sèche, emman-
/Chée d'un long bâton, ce qui est le plus commun, on peut
toujours nommer cet outil asaigadouiro ; mais il est plus
technique de l’appelèr couasso. .
Asaïgaje, s. m. Arrosage, arrosement; droit d'irrigation ;
action d'arroser.
Ascla, v. Fendre, mettre en éclats, dans le sens de
fèler.
Ascla, ado, a1j. et part. pass. Fendu, fèlé ; au fig.
écervelé, cerveau fèlé, tête folle.
Asclo, s. f. Fente, fèlure, crevasse ; intervalle entre une
porte ou une fenètre et leur chambranle, — Rire coumo
uno asclo, rire à gorge déployés. — Voy. Fénlasclo.
Les trois mots ci-dessus de mème formation dérivent,
selon Sauvages et Astruc, du celt. Ascl, escl, radicaux.
Le grec a Kkäow, fente, rupture.
Ase, s. m. Dim. Asené, péj. Asénas. Ane, baudet;
Equus asinus, Linu. Mamrmifère de la fam. des Solipèdes.
Au fig. sot, ignorant, imbécile, butor. —Faïre lou répas
de l'ase, manger sans boire. L'ase té quie, peste de toi!
L'ase mé quie, foin de moi! Mouririè pu lèou l'ase d'un
pdoure home, il mourrait plutôt l'âne du pauvre : c'est une
espèce de murmure contre le sort qui semble frapper plus
fort sur le pauvre que sur le riche; mais cette expression,
qui est devenue trés-proverbiale, n'a rien d'irrévérencieux
ni d'irréligieux. Cela se dit quand l'enfant d'une nom-
breuse famille est dangereusement malade ; ou bien lors-
qu'on voitéchapper de maladie un égoïste, un-homume isolé,
dont la perte ne serait préjudiciable à personne. On sup-
pose par là que rien n'est plus utile au pauvre que son
âne, qui est son gagne-pain. Michan coumo un ase négre,
méchant comme un âne noir. Cela provient de cetie race
d'ànes, très-grands et très-méchants, qui vient de la Cata-
logne, où ils sont tous d'un gris presque noir. Pati coumo
un ase dé las gipièiros, souffrir comme un âne de plâtrière.
Le pltre gris, qu'on n'exploilait autrefois pour les envi-
rons d’Alais que dans la commune de Générargues, était
transporté à dos d'âne dans des sacs qu'on leur posait à nu
sur le dos. Un gamin, à califourchon sur la groupe, les
12 ASE
guidait sans bride avec un gros bâton, et les faisait galo-
per, malgré cette double charge: ils allaient ainsi par
cavalcade de dix à douze. Ce service était fort dur, attendu
surtout que les pauvres baudets étaient mal nourris et
réduits souvent à brouter l'herbe sèche des chemins. Ce
genre de transport, qui avait son cachet local, a disparu
aujourd’hui que les routes et les chemins vicinaux permet-
tent une voie plus facile; mais le dicton proverbial est
resté. Y-a maï d'un ase à lu fièiro qué sé sémblou, prvb.,
il y a plus d'un âne à la foire qui s'appelle Martin. L'ase
dé mila és toujour mâou émbasta, prvb., l'âne de la com-
munauté est ioujours le plus mal bâté : tout bien en com-
mun ou en indivis est toujours mal administré. L'ase fiche !
est une sorle d'interjection explétive, fort en usage, et qui
n'est que la modification plus décente d’une locution fort
employée, quoique ‘de beaucoup moins honnête : L'ase
fiche lou dariè ! le diable emporte celui qui sera le dernier
à la course. Aquél ase és bièn maldou qué porto déssus un
bèl émplastre, voilà un âne bien malade, qui porte sur le
dos un grand emplâtre, c'est-à-dire un homme inutile : ce
devait être un des propos de ceux de la fable du Meunier,
son fils et l'âne. Mouqué coumo un ase, penaud comme un
baudet. Aguélo ribo n'és pas pir aquél ase, dicton prvb.,
mot à mot : ce verdage n’est pas pour un pareil âne. Au
fig. : ce n'est pas pour lui que le four chauffe; ce morceau
est trop délicat pourlui; il lui passera sous le nez. Dans ce
seps.se trouvent une foule d'applications. Ù
La temelle de l'âne, ânesse, est appelée Sdoumo. — Y.
c, M. é
Aséné, non, est le dim. Asénas, péjor., signifie au pr. et
au fig., gros âne. — Voy. Bourou, Lourisquo, Pécata.
Ase, au jeu de cartes, as. Ase dé piquo, dé tréflo où dé
trounfle, dé caïre, dé cur, as de pique, de trèfle, de car-
reau, de cœur. — Voy. Bourou.
Ase, très-petit poisson de rivière, chabot des rivières,
Cottus gobio, Linn., qui a l'encolure de la baudroie, la tête
large et plate, plus grosse que tout le reste du corps. Il est
insipide à manger et contient souvent du gravier dans l’es-
tomac. 1} se lient presque toujours au fond de l'eau, sous
les pierres. Quand on l'irrite, il renfle sa large tète, ce qui
le rend encore plus laid.
Ase-bouïen, 8. m. Le tètard, la nymphe de la grenouille,
qu'on rençoutre dans les eaux croupissantes, où un rayon
de soJeil suffit pour les faire éclore. Eu naissant ilest noir ;
en grossissant il devient gris. Sa tête et son corps forment
une espèce de boule terminée par une queue plate en
forme d’aviron et dont le plan est vertical. Les pattes sor-
tent de cette boule, la queue se détache, et le tétard aqua-
tique devient grenouille amphibie. Au fig. Ase-bouién
signifie : butor renforcé, âne, imbécile, sot fieffé; un degré
de plus dans la sottise ou Ja bêtise que l'ane ordinaire, 1
est très-employé.
Le non latin du têtard, Gyrinus, est facile à comprendre :
il vient de gyrare, arrondir, puisque c’est une vraie boule.
ASS
Son nom fr. qui signifie grosse tête, a sa raison puisqu'il
ne semble être qu'une tête; mais notre ase-bouïén, dont
l'épithète surtout ne dit rien, ne s'explique guère. Dans
nos environs, on appelle le têtard tésto d'ase, ce qui est un
peu moins incompréhensible. ..
Ase dé charpanto, chevron de charpente, composé de sa
ferme, du pied-droit et des arbalétriers.
Ase dé réssaïre, banc à trois pieds sur lequel les scieurs
de long élèvent et placent horizontalement leur bigue; le
pied de derrière n’est que le prolongement du banc lui-
mème , qui vient s'appuyer à terrre et le long duquel on
roule la bigue pour la hisser, quand elle est trop lourde
pour être soulevée sur les épaules.
Toutes ces dernières acceptions dérivent de quelque
point de comparaison ou de similitude avec l'âne, animal,
dont le nom dérive lui-même du lat. Asinus.
Asénën, énquo, adj. D'âne; qui tient de l’âne; qui
vient de l'âne. c dent
Asénga, v., ou Enzina. Arranger ; rajuster; agencer ;
raccommoder ; apprêter. S'asénga, s'arranger, se mettre à
l'aise et s'ajuster. — Voy. Enzina. M
Dér. de Aïsi.
Asérba, v., ou Ashérba. Donner le vert aux chevaux ;
conduire les troupeaux dans les prairies. Gi
Dér. de Hèrbo.
Aspre, 0, adj. Apre, désagréable au goût.
Dér. du lat. Asper, et au moins contemporain du fr.
Assadoula, v. Rassasier, gorger; assouvir la faim.
Dér. de Sadoul.
Assaja, v., ou Ensaja. Essayer ; tenter ; tâcher de faire;
faire l'essai; essayer un habit, une robe, un chapeau, pour
voir s'ils vont bien. ,
Dér. de l’ital. Assagiare, m. sign. f
Assalé, s. m. Place garnie de pierres plates ou de che-*
neaux en bois, où l'on donne le sel aux moutons.
Dér. de Sdou et de Sala. 3
Assaléja, v. Donner le sel au bétail.
Dér. de Sdou, formé du lat. Sal.
Assana, vw. Cicatriser, guérir une plaie, une blessure.
Dér. de San, sain.
Assâou, s. m. Emotion pénible; nouvelle alarmante;
reproche mortifiant ; importunité fatigante. — Nous dounè
un fièr assdou, il nous alarma vivement.
Emp. du fr. Assaut.
Assäouvagi, v. Rendre sauvage, farouche. — Dé batre
lou béstidou l'assdouvagis, on rend les animaux farouches
en les battant.
_S’assdouvagà, v. S'effaroucher; prendre un air, une
humeur sauvage; contracter des manières agrestes.
Dér. de Sdouvaje.
Assassin, s. m. Assassinat, et non assassin. — Aqud's-
un assassin, C'est un vrai assassinat, dit-on, quand on est
assailli par une troupe de mendiants, une foule de créan-.
ciers ou simplement d'importuns.
EE
ASS
Dér. de Haschichin, qui était le nom des sujets du
Vieux de la Montagne, autrement dit Prince des Haschi-
chins, ou Assassins. Comme ses sujets, fanatisés par lui,
assassinaient tous ceux qui déplaisaient au maître, leur
nom est devenu générique pour désigner les assassins.
Assassinna, v. Assassiner, tuer par guet-apens, par tra-
hison, de dessein prémédité. Au fig. importuner à l'excès,
solliciter; exiger son dù tout de suite, comme si l’on met-
tait le pistolet sur la gorge. — Les deux n se font sentir.
Assassinur, s. m. Assassin, meurtrier.
Assata, v. Affaisser; battre; fouler, tasser. — Assata la
bugado, encuver le linge de la lessive, l'abreuver pour
l'entasser. Assata un co dé poun, asséner un coup de poing.
La croto s'és assatado, la voûte a fait son effort, les murs
ont pris leur assiette. Assata un souflé, appliquer un soufflet.
Dér. du lat. Assidere.
Assécarli (s'), v. Se dessécher, devenir sec. — Se dit
‘ principalement d'un arbre qui meurt peu à peu par les
branches.
Dér. de Séqua,
Asségura, v. Rendre sùr, consolider; caler; assurer,
certifier, affirmer.
Dér. de Ségu.
Asséguranço, s. f. Süreté, assurance ; caution, nantis-
sement, hypothèque ; fermeté, hardiesse.
Assémäâou, s. m., ou Sémâou. Cornue; comporte ;
benne ; vaisseau de bois composé de douves reliées par des
cercles, avec deux chevilles horizontalement placées, par
lesquelles deux personnes le transportent à l’aide de deux
bâtons appelés pour cela sémaïès, qu'on passe en dessous
des chevilles. Ce vaisseau sert principalement à transporter
la vendange.
Dér. probablement de Séma, mot d’un autre dialecte
que le nôtre, qui signifie : tirer le moùt d’une cuve trop
pleine, dér. lui-même de l'ital. Scemare, diminuer. —
Voy. Sémdou.
Assémbla, v. Assembler; rassembler; mettre ensemble,
joindre, unir, réunir, rapprocher; convoquer. — Diou lous
faï, amaï lous assémblo, Dieu les fait et les assemble, dit-
on souvent ironiquement d'un ménage plus ou moins bien
assorti, d'une coterie dont les membres sont ignorants et
Emp. du fr. Assembler.
Assémblado, s. f. Assemblée; plus spécialement, la
tenue des offices divins dans la religion réformée, soit
dans un temple, soit au désert. »
Emp. du fr.
Assès, adv. Assez, autant qu'il en faut. — C'est pure-
ment un terme de civilité populaire. N'aï bièn assès, dit-on
à table quand le maître de la maison vous offre d’un nou-
veau plat. Dans ce cas-là on ne dit jamais : N'aï bé prou.
Assès ne se place qu'à la fin de la phrase. On ne dit pas:
Aï assès manja, mais bien : Aï prou manja.
Emp. au fr., comme la plupart des termes de civilité.
ASS 73
Assési, ido, adj. Rassis. — Ne se dit guère que du pain,
par opposition à pain frais ou mollet.
Dér. du lat. Assidere.
Asséta, v. Asseoir, mettre sur un siége ; faire tomber
quelqu'un par force sur son derrière; poser sur une base
solide.
S'asséta, v. S'asseoir, se mettre dans un siége ; s'établir
d'une manière solide, prendre son faix, en parlant d'un
mur, d'une voûte, d'une pierre de taille.
Dér. du lat. Assidere.
Assétous (d'}, adv. Assis, sur son séant ; par opposition
à debout. — Ero d'assétoùs sus soun id, il était au lit, assis
sur son séant.
Assiétado, s. f., ou Siétado. Assiettée ; contenu d'une
assiette, plein une assiette, — Uno assiétado dé soupo, est -
une assiette de soupe, non seulement pleine, mais comblée
et presque en pyramide, — Voy. Siétado.
Dér. de Assièto.
Assièto, s. f., ou Sièto. Assiette, vaisselle plate dans
laquelle on met ce que l’on mange à table. — Assièto bécudo,
écuelle à bec. Paro ta sièto, présente ton assiette.
Dér. du lat. Assidere ou assisia, de à sedendo, parce
qu'autrefois l'assièto indiquait la place de chaque convive
à table.
Assigna, s. m. Assignat, papier-monnaie. — Ce terme est
malheureusement devenu familier à tous les idiomes de la
France, et y est resté en triste souvenir. — Prin coumo
un assigna, mince comme un papier d'assignat. Afatrassi
coumo un assigna, MOu, sans apprêt, sans consistance,
comme les feuilles d’assignats. Mème avant que ceux-ci
fussent décrédités par la banqueroute et l'échelle de dépré-
ciation, ils étaient méprisés par le peuple pour leur légé-
reté, leur peu de consistance, et la nullité de leur valeur
spécifique, en regard des espèces sonnantes, fussent-elles
du billon le plus lourd.
Assista, v. Faire l’aumôûne ; aider, secourir. — Diou
vous assiste, Dieu vous vienne en aide! Pode pas vous
assista, je ne puis rien vous donner, dit-on à un men-
diant.
Dér. du lat. Assistere.
Assoucia (s’), v. S'associer, se mettre en communauté
d'intérêts; former une association.
Dér. du lat. Associare.
Assoulida, v. Consolider, rendre solide, sûr; donner
des garanties, des hypothèques, des nantissements ; aflir-
mer.
Dér. de Soulide.
Assouma, v. Assommer ; tuer ou terrasser en frappant
sur la tête avec quelque chose de lourd, comme un bäton,
une pierre, une massue.
Dér. du lat. Summum, sommet.
Assourda, v. Assourdir, rendre sourd à force de crier
ou de faire du bruit; ennuyer, fatiguer de propos.
Dér. de Sour,
10
74 ATA
Assourti, v. Aller au-devant ou à la rencontre de quel-
qu'un.
Formé de Sourtà et de la prép. lat. ad, sortir vers.
Assourti, v. Assortir, mettre ensemble des objets qui se
ressemblent, qui se conviennent, qui concordent.
Dér. du lat. Sors.
Assupa, v. Rencontrer nez à nez, se heurter contre
quelqu'un, en le rencontrant à l'improviste, sans l'avoir
aperçu d'avance.
Dér. de Su, tète, crâne.
Assuqua, v. Assommer, frapper fort sur la tête.
S'assuqua, v. Tomber sur la tête, donner de la tête
contre un corps dur. — Es tout assuqua, il est tout
hébété.
Dér. de Su, crâne, et a privatif.
Astre, s.m. Astre; soleil, étoile, corps céleste, — Moun
astre, dans le langage des nourrices à leur poupon, dans
celui des amoureux à leur belle, est l'expression de leur
tendresse charmée et éblouie. IL s'emploie aussi dans le
même sens à peu près que planéto, ou étoile, en fr., pour
parler de l'influence du sort, de la destinée soumise aux
astres ou en dépendant. Les anciens et les modernes ont
conservé dans leur langue la tradition de cette influence
des astres ; on en a fait une science qui a eu sa vogue.
Pér co d’astre, par hasard, par bonheur. Lou diable vire
l'astre ! Peste soit! sorte d’imprécation qui nous vient de
loin, assure Sauvages. C'est le Deus omen avertat! des
Romains. Sémblo qué siès din lous astres, on dirait que tu
es dans les astres, reproche-t-on à une personne distraite et
préoccupée.
Etym, du gr, ’Aotpov, de ’Actie, étoile, d'où lelat, astra.
Asurpa, v. Usurper. — Ne se dit qu'en parlant des pro-
priétés territoriales, qu’on rogne peu à peu en éloignant
la ligne divisoire.
Emp. du fr.
Atala, vw. Atteler; attacher des bêtes de trait, chevaux
ou mules, à une voiture ou à une charrue. — Es dé mi-
chan atala, c'est un homme intraitable, revèche au joug
ou qui n'entend pas la raison.
S'atala, v. S'appliquer, employer toutes ses forces, toute
son attention; faire son possible; se mettre au travail. —
S'atalèrou à bataïa, ils se mirent en train à babiller.
Dér. du lat. Telum, flèche, timon.
Atalaje, s. m. Attelage; l'ensemble des bètes de trait
qui traînent une même charrette,
Atalus (én), adv. Obliquement ; en talus; en biseau.
Dér. du lat. Talus, talon, cou-de-pied.
Atalussa, v. Couper un terrain en talus ; former en talus
la berge d'un fossé; donner du pied à un mur, à une
chaussée, à une butte.
Atâoula, v. Attabler; mettre les gens à table pour
manger, boire ou jouer. — S'atéoula, se mettre à table,
Dér. de Téoulo.
Atapa, v. Prendre, saisir, joindre ; fermer, boucher,
ATÉ
couvrir, cacher, voiler. — M. de Bonafous a dit dans une
charmante chanson :
Sé vos pas qué siègue tan amouroùs
Et dé ta bouquéto et dé tous ièioùs,
Atapo-loùs, ma mio, atapo-loùs. ,
Ce mot, dans le premier sens, est une variante de atrapa,
et dans le second, de tapa. — Voy. Atrapa et Tapa.
Ataqua, ado, adj. Atteint d’une maladie; qui a un vice
dans une partie du corps; qui souffre d’une infirmité. —
Ataqua dé l'asme, asthmatique. Ataqua dé la péïitrino,
atteint de pulmonie.
Dér. de Taquo. x
Ataquo, s. f. Attaque, atteinte d’une maladie; crise.
Au fig. folie, acte de déraison, — Es mor d'uno ataquo,
il est mort d’apoplexie. Sas ataquos lou prénou, le voilà
retombé dans sa folie.
Emp. au fr.
Atarda, v. Retarder ; atlarder, mettre en retard.
S'atarda, s'attarder, se retirer tard, se mettre tard en
route.
Dér. de Tar.
Atari, vw. Tarir, mettre à sec. S’atar), tarir, devenir sec;
perdre son eau. — Soun moulè s'ataris pas jamaï, il ne
met jamais l’écluse à ses paroles.
Dér. du lat. Arire, par métaplasme de Arere, être. à
sec. |
Atébési (s’), v. Tiédir, devenir tiède, — La progression
de ce mot est en raison inverse de son correspondant
français. Une chose s'atiédit quand elle a été plus chaude
avant et qu'elle passe graduellement à une température
moins élevée. C'est le contraire avec le mot languedocien
S'atébési, qui exprime que la chose, de froide qu’elle était,
devient tiède.
Dér. de Tébés.
Atènciou, s. f. Ce mot ne s'emploie que précédé du
verbe faïre : faire attention, prendre garde; ou bien seu
comme interj. : Attention! Aténciou / Garde à vous !
Emp. au fr.
Aténdre, v. Atteindre, frapper de loin, toucher; attendre,
être dans l’attente, l’expectative; être attentif à un ouvrage,
y mettre tout son temps, sans perdre une minute.
S'aténdre, croire, se fier, avoir confiance, se rapporter.
— L'aténdéquè à la tèsto d'un co dé pèiro, il l'atteignit
à la tête d’un coup de pierre. L'aténdou coumo lou Méssio,
ils l’attendent comme le Messie. Aténdès-nous un pdou,
attendez un peu que nous arrivions. S'aténdiè énd'aquél
traval touto la gnuë, il s'appliquait à cet ouvrage toute la
nuit. Sé vous aténdès d’él, sérés mdou fisa; si Vous vous
fiez à cet homme, vous serez peu sûr de votre affaire.
Dér. du lat. Attendere.
Aténén, ènto, adj. Contigu, limitrophe, tenant. —
Aquél bé és tout d'un aténén, dans ce domaine toutes les
terres se touchent, sont conliguës, attenantes.
Dér. du lat. Ad, et tenere,
TT
ATR
Aténténa, v. Atermoyer, prolonger les termes; ren-
voyer d'un jour à l'autre; tenir le bec dans l’eau. —
Aténténa uno fio, bercer une jeune personne d'une pro-
messe de mariage, dont on retarde toujours l'exécution.
Formé de la réduplication de Tén, comme si l'on disait
dé tên à tén, d'un temps à l'autre.
Aténténaire, aïro, adj. Atermoyeur, mauvais payeur ;
enjoleur, trompeur de filles.
Atéssa, v. Allaiter; donner à téter ; donner le sein à un
enfant.
Dér. du gr. T#, nourrice, par métaplasme du + én «,
ou en suivant la prononciation adoucie du 0 qui est üne
véritable sifflante. En celt. Tétar signifie léter.
Atéssado, s. f. Repas ou réfection d’un enfant qui tête.
— Douna uno atéssado, donner à téter, faire téter. À agu
dos atéssados, il a tété deux fois.
Dér. de Téta.
Atétouni, ido, adj. Affriandé à la mamelle, qui veut
| toujours téter; enfant difficile à têter,
Dér. de Téta.
Atifa (s'), v. S'attifer, s'ajuster, se pomponner, se parer
de tous ses atours.
Dér. du gr. Xtigsu, orner , ou de Tügos, soin de se parer.
Atifès, s. m. pl. Affiquets, pompons; fanfreluches de
toilette; atours, ajustements de femme.
Emp. au vieux fr. Attifets.
Atira, v. Attirer; allécher; affriander , appâter. —
Aquel vin atiro soun buvur, ce vin excite à boire. Aquélo
marchando és bièn atiranto, cette marchande est bien pré-
venante; elle attire les chalands par ses prévenances,
Formé de Ad, vers, et tira.
Atissa, v. — Voy. Aquissa.
Ato, s: f. Acte, contrat notarié ; exploit d’huissier. —
Li faraï douna uno ato, je lui ferai signifier un exploit.
Dér. du lat. Actum.
Atous,s. m., ou Trounfle. Atout, terme de jeu de cartes;
couleur de la retourne, ou celle dans laquelle on joue; triom-
phe. — Batre atoùs, faire atout, 4 pas sdoupégu jouga, aviè
bièn lous atousses én man, il n'a pas su mener sa barque, il
avait toutes les chances de succès; il a perdu avec beau jeu.
Ce mot signifiait dans l'origine la couleur supérieure à
tout, qui prend toutes les autres, qui gagne tout.
Atrapa, v. Attraper; tromper, duper, faire une niche;
trouver, trouver par hasard, rencontrer. — T'atraparas bé,
tu finiras bien par L’attraper. Vos qué lous atrapén? veux-tu
que nous leur fassions une niche ? Coumo atrapas aquél vi?
comment trouvez-vous ce vin ? Piou-piou, cé qu'atrape és
miou, bon, ce que je trouve m'appartient, disent les enfants
en s'emparant de quelque bonne trouvaille.
Dér. du vieux lat. Trappa.
Atrapaire, aïro, adj. Trompeur, faiseur de dupes.
Atrapo, s. f. Attrape ; niche; tricherie ou fourberie inno-
cente et par pure plaisanterie. — Le poisson d'avril est une
atrapo.
AVA 75
Atrouba, v. ou Trouba. Trouver, rencontrer ; sur-
prendre. —Aquést'an Caléndo s'atrobo un dilus, cette année,
la Noël arrive un lundi.
Dér. de l'all. Trefen, toucher, atteindre, selon Le Du-
chat ; par métaphore, trouver ; d'où l'ital. Trovars.
Atroupa (s'), v. S'attrouper, se rassembler par troupe, se
réunir tumultueuserent.
Dér. de Troupo.
Atroupéla, v. Réunir en troupeau, par bandes qui mar-
chent dans un certain ordre, processionnellement, comme
le troupeau qui suit la trace de Robin-mouton.
Dér. de Troupil.
Atuba, v. Allumer le feu, la lampe, une chandelle ; et
non éclairer.
Dér. du lat. Tubus, tube, tuyau, parce qu'originaire-
ment on soufilait le feu avec un tube en fer, comme on le
fait encore dans quelques-unes de nos montagnes.
Atubal, s. m, Menu-bois, allumettes, copeaux, brou-
tilles ; tout ce qui est propre à s’'enflammer rapidement et
qui peut aider à allumer le gros bois d’un feu.
Dér. de Atuba,
Atupi, v. Réduire au silence, rendre muet; éteindre ;
calmer ; étoufler, couvrir; au prop. et au fig. — Atupi low
fo, ce n’est pas éteindre ni étouffer le feu; mais bien le
recouvrir de cendres chaudes ou de charbon mouillé, ce
qui le conserve sans le laisser flamber.
Dér, du gr. “Arvros, bègue, muet, sans bruit; ou formé
de a privatif et Tèsw, allumer, enflammer.
Aval, adv. Là-bas, en bas : pour les Cévennes, tout ce
qui est au midi et à l'est d'Alais. Le territoire de Nimes,
de Montpellier et la Provence sont comparativement en
bas, aval; en parlant d’une de ces localités, on dit : Avat
vèr Sén-Gile, vèr Béoucaïre. — Aval-aval, là-bas bien
bas.
Formé du lat. Ad vallem, vers la vallée, par opposition
à amoun, ad montem, vers la montagne.
Avali (s), v. Se perdre, disparaître sans laisser de
traces, à la manière des esprits; se dissiper comme un
songe ; s'évanouir.
Dér. de Aval et du lat. ire, parce qu'on suppose que les
esprits viennent des bas lieux, et qu'ils y retournent
quand ils disparaissent.
Avança, v. Devancer, prendre les devants sur quelqu'un,
le dépasser, soit en marches, soit en études, en savoir;
faire des avances, avancer de l'argent.
S'avança, avancer, s'avancer; aller au-devant, prendre
les devants; approcher du but, du terme. — Aqué! éfan
és bièn avança, cet enfant est fort avancé dans ses études.
Dé qué vous avanço aqud? à quoi cela vous sert-il, quel
avantage en retirez-vous ? Aro qu'avès fa lou fol, sès pus
| avangça, à présent que vous avez fait toutes ces folies, êtes-
vous mieux loti? Es tan d'avança, c’est autant de fait.
Dér. du lat. 46, de, par, et antè, avant; ou bien ad
ventum, vers le vent.
76 AVA
Avanço, s. f. Avance, ce qui déborde, ce qui dépasse ;
espace de chemin que l'on a devant quelqu'un. — Préne
l'avangço, prendre les devants. L'avango d'uno casquéto, la
visière d'une casquette.
© Avango (d’), adv. D'avance, par anticipation, avant le
temps. — Ou savian d’avango, nous le savions déjà.
Avanços, s. f. pl. Avances d'une mise de fonds pour
un fermier, pour un commerçant ou pour un artisan qui
commence à s'établir; anticipation ; ressources préparées
et prêtes. — Avédre d'avangos, avoir des avances, de l'argent
devant soi. Plaça sas avangos, placer ses fonds, ses éco-
nomies. Aquéles novis douran prés las æanços, ces jeunes
fiancés auront prélevé les prémices du contrat.
Dér. du lat. 4b et ant.
Avantaja, v. Avantager, donner, faire des avantages à un
de ses enfants par-dessus les autres, lui former un préciput.
Dér. du lat. Anto, et agere.
Avantaje, s.m. Avantage ; supériorité ; position privilé-
giée; préciput. —AquÔ'sun bèl avantaje quand on a sas avan-
gos, c'est déjà un grand avantage d’avoir sa première mise de
fonds. D'aïgaval on a pas l'avantaÿe pér émpléga sas forços,
d'en bas on n’a point d'élan pour faire valoir sa force.
Emp. au fr.
Avantajoüs, ous0, adj. Avantageux, qui offre des avan-
tages; présomptueux, qui croit avoir par sa taille, sa
force, son adresse, l'avantage sur les autres.
Avantura, v. Aventurer, hasarder ; exposer à un risque,
à un danger, courir la chance.
Dér. de Avanturo.
Avanturiè, s. m. Aventurier. — On appelle ainsi le vers
à soie qui précède de plusieurs jours la masse de ses com-
pagnons et fait un cocon précoce. Dans une chambrée on
recueille à part ces avant-coureurs, pour avoir une idée
de la qualité et de la forme du gros de l’armée. Quelques
personnes croient que ces vers hâtifs ne passent que par
trois mues au lieu de quatre ; il est plus probable que ce
sont des vers premiers-nés ou qui ont plus de vigueur
pour parcourir leurs divers âges.
Dér. de Avanturo.
Avanturo, s.f. Aventure; évènement inopiné; accident.
— Aguère uno avanturo, j'eus une bonne fortune. 4 l’avan-
turo, à la gardé de Dieu, sans précaution, aux chances du
hasard. Douna la bono avanturo, dire la bonne aventure,
tirer des horoscopes.
Dér. du lat. Adventurus, futur pass., qui doit arriver.
Avanturoüs, ouso, adj. Aventureux, qui hasarde, qui
ne craint pas le danger.
Dér. de Avanturo.
Avaras, asso, s. el adj. péjor. de Avare, peu usité; gros
et sordide avare.
Dér. du lat. Avarus, avidus eris.
Avaricio, s. f. Avarice, attachement excessif aux
richesses ; lésinerie sordide.
Dér. du lat. Avaritia,
AVÉ
Avaricious, ouso, adj. Avare, pince-maille, fesse-ma-
thieu; avaricieux, qu craint la dépense, ne donne pas ou
donne mal. :
Dér de Avaricio.
Avè, s. m. Avé. Premier mot latin de l'Ave Maria, de
la Salutation angélique ; grain de chapelet sur lequel on
dit l'Avé; temps de le dire.
Avé, s. m. ou Avéiè. Troupeau de moutons, de brebis:
N à vieilli et n’est plus usité qu'au-dessus d’Alais.— Garda
l'avé, garder le troupeau.
Dér. du lat. Ovis. .
Avédre, vw. act, et auæil. Avoir, posséder; atteindre,
aveindre. — Avédre lou fiou, être dégourdi, rusé. Avédre
péou, avoir peur. Avédre la séntido, pressentir. Avédre gran
gdou dé. S'estimer heureux de...Æs pas riche, mais abièn
quicon, il n'est pas riche, mais il a quelque bi2n.. Avën con-
véngu, nous sommes convenus. Ai agu, j'ai eu. Aguèrou,ils
eurent. Aguèn, nous eümes. S'aguéssian fa coumo aqud,
si nous avions ou si nous eussions fait comme cela. Vaï/
t'douraï, vas, je t'atteindrai. Avén agu dé résoùs, nous
nous sommes querellés. Aquél broutèl és trop ndou, pode
pas l'avédre, ce rameau est trop haut, je ne puis y atteindre.
— Voy. Avéra.
Dér. du lat. Habere.
Avéjan, s. m. n. pr. de lieu. Avéjan, comm. annexe de
Saint-Jean-de-Maruéjols, canton de Barjac, arrondissement
d’Alais.
Ce nom paraît venir de Avé, av“, troupeau de brebis, du
lat. ovis, plutôt que de ave, ève, eau, en roman, qui dans
notre lang. affecte en général une autre forme. La situation,
d'ailleurs, la nature du pays favorise singuliérement notre
interprétation. Le suflixe an qualifie le radical. — Foy.
An, suf.
Avélagnè, s. m., ou Avelagnéiro, s. f. Noisetier, ave-
linier, coudrier ; Corylus avellana, Linn. Arbrisseaw jou
arbre de la fam. des Amenlacées. Le Coudrier est l'espèce
sauvage et silvestre ; le Noisetier est le coudrier cultivé.
C'est avec les scions du coudrier que l'on fait la fameuse
baguette divinatoire des prétendus inventeurs de sources
et de fontaines.
Dér. de Avélano.
Avélagnèiro, s. f. Coudraie, lieu couvert de coudriers;
bosquet de noisetiers. On la prend aussi pour le Noisetier
lui-même.
Dér. de Avélano.
Avélano, s. f. Aveline, noisette, fruit du noise-
tier. |
Dér. du lat. Avellana, m. sign., qui vient lui-même
de Avella, ville du royaume de Naples, où les coudriers
sont en abondance, et renommée encore aujourd'hui pour
la bonne qualité de ses noisettes. En cat. esp. ital. Avel-
lana.
Avén, s. m. Cavité ou conduit souterrain et naturel, qui
sert de réservoir aux eaux de la pluie ou de la neige, et
AVE
qui alimente les sources; caverne profonde et verticale
au fond de laquelle est un amas d'eau.
Dér. du celt. Awen, rivière.
Avéna, v. ou Abéna. Epargner, ménager, économiser ;
épuiser; user jusqu'au bout, jusqu'à la corde. — Avénas
la sdou, ménagez le sel. Avéna sas fardos, user ses vieux
habits, les porter quoique usés et rapiécés. Avéna lou jour,
profiter du jour jusqu'à son déclin. — Le part. pass. adj.
Avéna, ado, signifie : épuisé, usé par les débauches, ou
ruiné par les maladies. — Voy. Abéna.
Avéna; s. m. Gruau d'avoine, dont on fait une excel-
lente purée pour le potage.
‘Dér: du lat. Avena, avoine.
Avénaduros, s. f. plur.— Voy. Abénaduros.
Avénén, s. m. Ne s'emploie qu'au génitif, et dans une
sorte de phrase faite, d’un avénén. — Tout d'un avénén,
tout d'une pièce, d'une venue, sans galbe et sans forme.
© Uno cambo tout d'un avénén, une jambe sans mollet. Es
touto d'un avénén, elle n’a ni tournure, ni hanches, ni
gorge. — Le nominatif adjectivé, qui voudrait dire : ave-
nant, affable, est du pur franchimand.
Dér. de Véni.
Avéngu, udo, adj. part. pass. de Avéni. Grand et fort,
bien venu. — Aquél éfan és bièn avéngu pér soun tén, cet
enfant est bien grand, bien fort pour son âge.
Avéngudo, s. f. Crise de maladie; revers de fortune ;
accident malheureux et inopiné.
. Dér. de Avéni,
Avéni, v. Arriver à faire ; parvenir à; réussir ; suffire.
— Pode pas y avéni tout soul, je ne puis suffire seul à ce
travail. Y avéndra pas, il n'y réussira pas, il n'y par-
viendra pas. — Péraqud y-avénirén, pourtant nous en
viendrons à bout.
Dér. du lat. Advenire.
Avëno, s. f. n. pr. Avène, petite rivière torrentielle qui
prend sa source dans la montagne de Rouvergue, près de
la Grand'Combe;, et se jette dans le Gardon, au droit de
Saint-Hilaire-de-Brethmas, au-dessous d'Alais.
Dér. du celt: Awen, rivière, qui entre dans beaucoup
de noms propres de rivières ou de localités situées sur des
cours d'eau, notamment le nom lat. Avenio, Avignon.
Avesnes, chef-lieu d'arrondissement du département du
Nord, sort évidemment de cette modeste source. Son an-
cienne orthographe Avenna rappelle le mot celtique avec
sa double consonnance latinisée, avenn, et notre pronon-
ciation lang. fortement sentie dans avén, qui est le
mème mot. L'origine de Advenæ, étrangers fixés sur ce
territoire, ab advenis gentibus ibi collocatis, est une glo-
rieuse imagination ; mais notre patois, comme on dit dans
le Nord, est plus fidèle aux traditions et a bien son prix.
Les communes rurales Avesnes-le-Sec, Aveny, Avenay,
Avesnes-sur-Helpe, Avesnes-lez-Aubert, sont de petits
affluents : Avesnes-le-Sec indique un avén, une source tarie,
et non pas un sol aride où l’avoine ne pousse plus. Là se
AVÉ 77
trouve la confirmation de l'origine du nom, pour lequel il
est inutile de faire de l’érudition historique à la recherche
d’une flatteuse et imaginaire dénomination.
Avéns (Lous), s. m. pl. L'Avent, le temps qui est
placé entre la Saint-André, le 30 novembre, et la Noël,
25 décembre. C'est pour l'Eglise romaine, un temps d’expia-
tion et de pénitence pour se préparer aux joies de la Nati-
vité, comme le Carème est une préparation au triomphe
pascal. — On disait en v. fr. : les Avents.
Dér. du lat. Adventus, arrivée.
Avéousa, v. ou S'avéousa. Devenir veuf; perdre sa
moitié ; être délivré. — Diou m'én avéouse, Dieu me
délivre d'un tel ou de telle chose !
Dér, de Véouse.
Avéra, vw. Aveindre ; atteindre; tirer un objet d'un
endroit hors de portée, soit en haut, soit en bas. — Avéra
dé cérièiros, cueillir des cerises avec un croc. Avéra lou
féra, tirer un seau noyé du fond d'un puits. Qudou po y-
avéra? qui peut y atteindre ?
Dér. du lat. Advenire, ou Advehere.
Avéracioù, s. f. Advération, terme de vieux cadastre ;
dénombrement des biens-fonds, avec leur contenance, con-
fins et estimation, pour former l'assiette de la taille.
Dér. du lat. Veraæ, véridique, sincère.
Avérti, v. Avertir, donner avis; présager; instruire;
prévenir du danger; convoquer les membres d'une assem-
blée délibérante; inviter à un convoi funèbre. — Lou tou-
nèro n'avertis pas, le tonnerre ne gronde pas avant la
foudre, ;
Dér. du lat. Advertere, tourner l'attention vers.
Avértimén, s. m. Avertissement du juge de paix, invi-
tation à la conciliation ; avertissement du rôle des contri-
butions. Il serait encore applicable aux avertissements
donnés aux journaux dans notre époque. — Lous avérti-
méns i-an pas manqua, ce n'est pas faute qu'on l'eût
bien prévenu.
Avès, 2e pers. du plur. de l'ind. prés. du v. Avédre.
Vous avez.
Avès, s. m. Revers d'une montagne vers le nord ; aspect
au nord. C'est le contraire de l’Adré, aspect du midi. —
Aqud's dé bos dé l'avès, c'est du bois coupé à l'aspect nord.
Ce bois est moins bon à brûler que celui de l'adré. Ses
pores sont plus serrés, ses fibres sont plus longues et plus
entre-nouées ; il devient noir au feu et fournit peu de
braise.
Dér, de Vès, versant.
Avésqua, s. m. Evêché, palais épiscopal. — L'évèché à
joué longtemps un grand rôle à Alais, soit pendant qu'il
était réellement un palais et la résidence d'un évêque, soit
lorsqu'il est devenu presque du domaine public. Ses cours,
ses jardins étaient le rendez-vous des oisifs de café et des
jeux des écoliers. Il demeure seulement encore à l'état de
nom propre parmi nous, aujourd'hui que la sape indus-
trielle a fait disparaitre le magnifique dessin de sa double
78 AVI
façade et de sa cour d'honneur, que les jardins mutilés
ont été envahis par des constructions bourgeoises, ou divi-
sés en petits carrés, et qu'enfin l'orangerie et le côté des
fruitiers viennent d'être cédés pour une place publique
devant l'hôtel-de-ville.
Dér. du lat. Episcopatus.
Avésque, s. m. Evèque, prélat chargé de la conduite
d'un diocèse. — Un chè régardo bé ‘n avésque, amaï li lèvo
pas lou capèl, prvb. Un chien regarde bien un évèque, se
dit proverbialement quand une personne s'étonne ou se
fâche qu'on la fixe. On dit d'un pendu : Es un avésque dé
campagno, dono la bénédiciou das pèses.
Dér. du lat. Episcopus. En ital. Vescovo.
Avignoun, s. m. Avignon, ville, chef-lieu du dép. de
Vaucluse. — Pata d’Avignoun, un pata, ancienne monnaie
papale frappée à Avignon. Patachoù d'Avignoun, sobri-
quet des Avignonnais, qu’ils doivent sans doute à leur
monnaie dite pata. Granéto d'Avignoun, graine de ner-
prun, Rhamnus infectorius, Linn., qui croit dans nos
environs. Elle sert aux teinturiers de petit teint pour le
jaune et de stil de grain pour la peinture. — Foy. Gra-
néto, Aoubénas.
Dér. du lat. Avenio, qui a sa racine dans le celt, Awen,
venant de aa, aqua, eau, qui à donné en roman ave, ève,
ive, et autres, en lang. avén, aïgo, etc. — Voy. Avéno:
Avirôou, interj. Commandement de voiturier pour faire
tourner à droite. La conversion ou le pas oblique qu'exige
ce commandement, décrit un angle plus ouvert que celui
qu’on obtient par le commandement à ruou ou à rudou,
mais toujours du même côté. L'angle du premier se rap-
proche du quart de cercle ou de l'angle droit, c'est tout un
changement de direction; l'angle du second n'est guère
qu’une déviation à droite pour couper l'ornière, éviter un
mauvais pas, où pour partager la route avec une voiture
qui croise la première.
C’est un vocable composé arbitrairement, qui varie sui-
vant les localités, mais qui est fixe et d’une antique ori-
gine dans chacune d'elles. — Faïre tira aviréou , faire
changer de direction à droite.
Avis, s, m. Vis, cylindre cannelé en spirale, destiné à
rentrer dans un écrou cannelé de même. En fr. le mot est
féminin, une vis ; il est masculin en languedocien.
Emp: au fr, avec l’a explétif, qui est dans le génie de
la langue quand elle est obligée d'emprunter à sa rivale.
Avis, s. m. Sentiment, opinion. — M'én dounarés un
avis, vous.m'en direz votre sentiment, votre opinion, M'és
avis, il me semble.
Emp. au fr.
Avisa (s’), v. S'aviser, s'apercevoir: tenter, oser, s’en:
hardir— M'avise qué pldou, je m'aperçois qu'il pleut. Low
cièl toumbariè qué s'ènavisariè pas, le ciel viendrait à
tomber qu'il n’y prendrait pas garde, qu’il ne s'en avise-
rait pas. S'avis? pas de me dire : voulur/ n'osa-t-il pas
me dire : voleur! Sé t'avises dé parla, si tu as la hardiesse
le
AVO
de parler. Sans s'én avisa, sans s'en apercevoir, sans y
faire attention. :
Avisa, ado, part. pass. et adj. Avisé, prudent, circon-
spect ; éveillé.
Dér. de Avis,
Avisamén, s. m. Prudence, prévoyance, perspicacité,
intelligence; circonspection. — Aquél drole vous a d'avi-
samén qué noun saï, Ce garçon à une intelligence, une
prudence extraordinaire. À
Dér. de Avisa.
Aviva, v. Raviver, évertuer, réveiller; vivifier.
Aviva, ado, part. pass. et adj. Vif; sémillant, éveillé;
guilleret. — Lou tén s'és aviva, le temps s’est mis au vif.
Lou tén s'avivo, le temps se refroïidit. Aviva coumo un
péissoë sus lou rastouble, éveillé comme un poisson dans
le sac. Aviva coumo un passéroù, éveillé comme un moi-
neau.
Dér. de Viou, du lat. vivus.
Avoua, v. Avouer, confesser; reconnaitre qu'une chose
est, en faire l’aveu. |
Emp. au fr. Aveu.
Avoua, s. m. Avoué, procureur. — Cette profession à
trop de rapport avec le peuple, pour qu'il ne se soit pas
hâté de la suivre dans la transmigration de son nom.
Avoua est aussi bon languedocien que Proucuroù.
Avouca, s. m., dim. Avoucadé. Avocat. — Es un
avouca, c’est un Gros-Jean, un important, un pédant, qui:
fait l’entendu, l’érudit en affaires, et en toute science.
Avouca das ases, un pauvre avocat. Aquél avouca és chèr,
dounariè pa’n bon counsél pèr sièi frans, prvb. Cet avo-
cat est cher; il ne donnerait pas un bon conseil pour six
francs, — sous-entendu : parce que cela lui est impos-
sible.
Pourquoi nos paysans appellent-ils leur âne l’avouca?.,
Que dans un atelier d'imprimerie, le pressier s'appelle an
ours et le compositeur un singe, cela se conçoit pour qui
les a vus manœuvrér et se démener. Que certaines per-
sonnes soient des chameaux, c'est encore mieux, nül n'y
peut contredire. Il n’en est pas de même ‘de l'assimilation
qui fait l'objet de cet article. Mais il est parfaitement inu-
tile d’en prouver la criante fausseté; il ne s'agit que d'en
chercher l'origine.
Un plaideur malheureux, irrité contre son avocat à qui il
attribuait, comme on fait toujours, la perte de son procès,
dit que c'était un âne : — l'äne avait tout à fait mauvaise .
réputation à celte époqué. — Rentré chez lui, il continua
à exhaler sa colère, et réciproquement il appela son âne
avocat, C'était du pur algèbre qu'il faisait sans s'en
douter, comme Monsieur Jourdain de la prose. Af étant
égal à A2, A2 devait Ôtre égal à Af; l'équation restait la
même quoique les termes changeassent de place. La colère.
de notre plaideur dura bien au-delà des vingt-quatre heures!
légales, et toutes les fois qu'il allait aux champs avec son
compagnon, il ne manquait pas de dire : Ari, l'avouca / Lan
AVO
plaisanterie se répandit et finit par être acceptée, par l'âne
d'abord, cela va sans dire, et puis par ceux même qui
eussent pu en être blessés et qui ne firent qu'en rire.
Voici une autre explication, qui est celle des savants.
Un avocat, du vieux temps où l’on faisait force latin au
barreau, avait pris la spécialité de plaider les alibi. Il en
trouvait partout et faisait un tel usage de ce moyen dans
tous les cas, qu'il lança un jour le génitif pluriel fort
hasardé aliborum. On ne l'appela plus que Maître Alibo-
rum, qui devint Aliboron. Or, cet avocat était, dit-on,
un âne. De telle sorte que de ces trois noms ou de ces trois
mots on finit par faire une confusion qui dure encore.
Après cela il y à une explication plus simple et que je
crois la bonne, car il ne faut pas abuser de l'anecdote.
Un paysan qui fait l’entendu en affaires, le beau parleur,
aimant fort à avoir raison, le Gros-Jean enfin, ses voisins
l'appellent un avouca. L'âne a bien quelque chose de ces
“allures. À certain entêtemeent, que peut-être on apprécie
mal quelquefois, il doit se croire aussi une façon de doc-
teur qui en sait plus que tout le monde, car il est diffi-
cile de Jui faire faire autre chose que ce qu'il a conçu ; et
dans les fréquentes discussions qu’à ce propos ils ont
ensemble, l'ânier de dire : Ah! tu fais l'entendu, tu veux
faire ta tête, tu raisonnes, tu fais l'avocat; nous allons
voir: Ari, l'avouca ! — Ce n'est pas autrement qu'il a
AZO 79
pris ses grades et reçu son titre. — Voy. Franchiman.
Dér. du lat. Advocatus.
Avugla, v. Aveugler, rendre aveugle ; éblouir, au prop.
et au fig. — L'douro avuglo, le vent vous remplit de
poussière à aveugler. Cérquo soun capèl, el és aquè qué
l'avuglo, il cherche son chapeau, et son chapeau est là qui
lui crève les yeux. Lous éliousses avuglou, les éclairs
éblouissent.
Dér. de Avugle.
Avugle, avuglo, adj. Aveugle. — Véou maï èstre nèci
qu'avugle, mieux vaut être sot qu'aveugle, répond-on prvb.
à quelqu'un qui vous traite d'imbécile. Cette phrase, dont
le sens est singulièrement elliptique, signifie que n'étant
pas aveugle mais simplement un sot, on a la satisfaction de
voir plus sot que soi et l'espérance d'en guérir. Bada coumo
un avugle, crier comme ün aveugle, parce que l'aveugle
mendiant a une façon lamentable et criarde de déplorer son
infirmité. L'Avuglo dé Castèl-Cuïd, est le titre d’une des
plus jolies pièces du poète Jasmin.
Dér. de la bass. lat. Aboculus, privé d'yeux.
Azouèn, s. m. Adjoint à la mairie. — Toute la nomen-
clature des fonctions constituées sous un régime constitu-
tionnel est devenue familière au peuple, qui en accommode
au génie de sa langue toutes les dénominations.
B
B
B, seconde lettre de l'alphabet et première des con-
sonnes.
Il entre dans le plan de ce Dictionnaire, on a pu s’en
apercevoir, de réunir à la nomenclature purement lexico-
graphique de notre langue où du moins de notre dialecte
les observations grammaticales relatives à la contexture
des mots, qui est leur orthographe, ou à leur étymologie,
qui est leur histoire. Nous faisons en même temps de la
grammaire, suivant toute l'acception du mot, et du glos-
saire, en inscrivant sous leur numéro d'ordre les termes et
les locutions en activité de service ou d'usage, et en ras-
semblant autour d'eux les significations, les définitions, les
exemples, les citations, les remarques qui présentent quel-
que intérêt de curiosité ou un éclaircissement instructif.
En cela nous suivons notre programme; mais encore est-il
bon d'expliquer pourquoi nous nous le sommes imposé,
Avec la conviction que nous avions affaire à une langue
véritable, il convenait de traiter notre idiome méridional
comme une langue, Né le même jour et dans le même ber-
ceau que le français, il est resté plus longtemps fidèle à sa
nature et à ses origines : il l'a emporté sur lui en culture
B
et en harmonie; mais après avoir lutté, il a été vaincu et
il est proscrit. Pour lui le mouvement de progrès s’est
arrêté; la force seule de sa constitution le soutient, mais
la déchéance qui le frappe ne l'a pas converti en un des
patois du français, et les principes vitaux de sa forma-
tion n’ont point péri. C'est à retrouver ces éléments, à en
réveiller l'énergie et la puissance qu'il travaille et qu'il
mérite d’être aidé, Et c'est précisément pour cela aussi
qu'un vocabulaire languedocien, mème quand il se ren-
ferme dans un dialecte particulier, ne saurait se contenter
de relever le catalogue complet des mots de bon et vrai
crà, ou des naturalisés, de traduire leur sens, de signaler
leurs altérations, de les ramener à leurs sources. Il nous
a semblé qu'il devait encore étudier leur formation et leur
composition, pénétrer dans leur génie, chercher la raison
de leur structure, de l'agencement de leurs lettres et de
leurs syllabes, de leurs combinaisons et de leurs change-
ments, noter leur accent et leur prononciation, tout ce qui
fait le caractère, le cachet, l'individualité, la physionomie
animée d'une langue.
C'est un champ nouveau à explorer : un filon que
80 B
la langue d'Oc a peutêtre trop négligé, tandis que le
français et les autres langues possèdent des travaux lrès-
remarquables : est-ce un motif pour le délaisser? Notre
Dictionnaire n'a pas voulu rester dans le cadre d'une
simple classification de mots, moins dans l'espérance de
combler une lacune, que dans la pensée de recueillir ce
qui intéressait la langue. Ces notions grammaticales, ces
observations sur la composition des termes qu'il enregistre
et sur la syntaxe, auraient peut-être gagné à être rassem-
blées et à se condenser dans un traité spécial entièrement
didactique, qui manque à la langue d'Oc, au lieu de se
répandre à petites doses séparées sur une infinité d’arti-
cles; mais une fois la forme du Lexique adoptée, il était
difficile de procéder autrement, D'ailleurs, malgré leur
dissémination, un enchainement coordonne et relie dans
une idée d'ensemble tous ces matériaux; puis, à vrai dire,
le travail s'est mesuré de lui-même à nos forces : vouloir
élever un monument eût été une bien grosse entreprise, et
pour nos moyens d’une exécution impossible. Un livre à
consulter, au courant de la fantaisie ou de la distraction
a surtout besoin de variété : il se sauve par l’éparpillement
et peut atteindre son but sans fatigue : nous ne cherchons
que cela. Dans une œuvre toute originale, ce sera, si
l'on veut, notre originalité, Humble débiteur, dès notre
enfance, envers notre langue, nous payons notre dette à
cette créancière amie en monnaie de billon, ramassée sou
par sou, au lieu de solder en fins billets de banque, réservés
aux riches de la finance, dont nous ne sommes pas. Qu’im-
porte après tout, si la monnaie est courante et de bon aloi
et que le compte arrive juste? à
Sans aller plus avant, nous tenions à expliquer, sinon à
justifier notre méthode et l'ordonnance de ce vocabulaire.
Sans doute notre travail n’est pas simplifié par là, non
plus qu'abrégé et plus facile; mais cette digression et celles
qui pourront suivre ne seront pas inutiles, si pour un plus
grand labeur elles nous valent aussi plus d’indulgence.
A propos de la première consonne de l'alphabet, il est
donc naturel de s'informer avec quelle valeur et par
quelles modifications les consonnes, ces éléments consti-
tutifs des mots, sont entrées dans leur composition.
La question serait fort abstraite et trop compliquée s’il
fallait la tenir à la hauteur des spéculations théoriques
touchant l'origine, la formation et la physiologie du lan-
gage ; elle se tempère heureusement en abordant à l'his-
toire, en s'appuyant sur des faits rapprochés, plus tan-
gibles et déjà vérifiés. Nous n’aurons qu’à relever les prin-
cipaux : les notions générales paraissent sufire.
La gamme des sons que peut émettre la voix humaine
n'a qu'un petit nombre de notes : ce sont les voyelles,
qui se meuvent dans une échelle fixe, en passant du grave
au doux, du long au bref, du simple au composé. Les
consonnes sont plus nombreuses , leurs combinaisons
plus multipliées : elles servent de lien aux voyelles,
elles sont leur point d'appui. L'alliance de ces deux
B
éléments forme les syllabes et les mots, et toutes les
langues ont les mêmes procédés nécessaires. Tout cela,
voyelles et consonnes, se divise et se subdivise en nuances
de tons et demi-tons, se distingue en classes et en familles,
s'étiquette en genres et en catégories de gutturales, pala-
tales, dentales, labiales, sibilantes, liquides, aspirées, fortes
ou faibles. Dans la revue qui s'ouvre chacune doit venir
à son tour par ordre alphabétique; et nous nous attache-
rons à signaler leur caractère individuel, leur office et
surtout leurs permutations, sans autre tableau systématique.
Ce qui fait en somme une langue et la différence des
langues et des dialectes n’est que la tonalité ou l'accent
que prennent les voyelles, et la combinaison des con-
sonnes avec elles, comme agents et instruments de la
parole. Et ce qui rend un idiome commun à un peuple
est l'effet de la prédisposition naturelle ou instinctivement
convenue de l'organisme vocal d’un groupe vivant dans
des rapports fréquents, sous le mème ciel et sur le mème
sol ; ce sont les propensions particulières à chaque population
à rechercher ou à répéler certains sons, à préférer les
uns ou à réprouver les autres, suivant les facilités ou
les complications d’une articulation, qui la rendent plus
ou moins propre à être exprimée, entendue et comprise, et
qui lui font adopter de préférence telles ou telles intonations.
Cette loi est générale ; tous les langages qui se sont parlés
dans un pays quelconque, dans une zone déterminée, ont
leur raison dans ces sympathies ou ces répulsions orga-
niques: leurs altérations, leurs changements, leur déve-
loppement même n'ont pas d'autre mobile.
Nous n’avons pas une langue primitive ; notre idiome est
un dérivé de seconde ou de troisième formation. Par con-
séquent pour peu que l’on tienne à s'expliquer son expan-
sion, sa vivace persistance et sa régénération actuelle, il
est impossible de ne pas consulter ses origines, sa généa-
logie, sa filiation, son histoire, c’est-à-dire de ne pas
rechercher les lois et les procédés de la langue qui lui a
servi de type, dont il s’est imprégné et qu'il remplace sur
son ancien territoire. Là est l’essentiel.
Nous l'avons dit déjà : le midi de la Gaule fut le pre-
mier latinisé. En tenant compte de l'élément celtique qui
se mêla au latin populaire, apporté par les vétérans et les
colons ; en faisant la part des influences germaniques et
orientales, dues aux Visigoths ou aux Sarrazins; toujours
est-il que ce qui nous est parvenu de la langue des plus
anciens habitants, comme ce qui est resté de celle des
envahisseurs, ne nous a été acquis que par le latin, et à
la condition de revêtir la forme et les flexions romaines.
Au moment où, après une longue période d’inculture et
presque de barbarie, la langue voulut se relever et que se
forma le roman rustique, en même temps que l'italien et
l'espagnol, c’est encore le latin plus ou moins corrompu
et oblitéré, qui leur fournit son vocabulaire et sa syn-
taxe, les lettres de son alphabet et le mécanisme de l'ac-
centuation.
Mais il est bien évident que, pour se former et s'orga-
niser, la langue romane ne fut pas coulée d'un seul jet
dans ce moule un peu fèlé du latin vulgaire, et ne sortit
pas non plus comme un bloc d’une élaboration savante du
moyen âge. Le peuple s'en mèla presque seul. La fusion de
tous les éléments qu'on y distingue se fit peu à peu, de sou-
venir et d’instinct. A mesure que s'éteignit la domination
qui imposait ses formes, lapopulation, pluslivrée àelle-mème
fit prévaloir ses goûts et ses commodités dans la pronon-
ciation, et assouplit davantage le parler à ses aptitudes et
à ses préférences. Et qu'alors certaines tendances tradi-
tionnelles aient fait retour, que certaines propensions de
vocalisation, sous l'action directe du climat ou par l'in-
fluence des habitudes, se soient manifestées; il n'est pas
permis de le mettre en doute. En Espagne et en Italie, la
langue nouvelle qui se créait aussi, n'opéra pas d'une
autre manière : les mêmes conditions climatériques eurent
. ici une influence à peu près pareille ; et c'est pour cela
que tant d'aflinités se. montrent encore entre la langue
d'Oc et l'espagnol et l'italien.
Partout, dans notre Midi, la vivacité proverbiale des
Gaulois se donna carrière. Il semble que la formule radi-
cale, qui représentait suffisamment l’idée, étant trouvée et
conservée, le premier besoin, le plus pressant était de
l'exprimer promptement, avec la rapidité que le peuple
tenait de sa nature. Aussi, la contraction, la syncope,
l'abréviation se produisent à chaque mot. Les langues
romanes les érigent en système ; preuve que la simpli-
fication répondait à une nécessité de l'esprit nouveau. Le
latin populaire n'y avait pas échappé : c'était comme un
exemple à suivre; souvent même l’idiome nouveau exagéra
le modèle.
Comment les désinences supportèrent la première épreuve,
nous l'avons fait voir à l'article Agno, suffixe; mais en
même temps le corps des polysyllabes ne pouvait manquer
d’être atteint. Pour eux la restriction s'opère au moyen de
J'accent tonique : nous allons indiquer ce procédé.
On sait que tous les mots, sans exception, ont une syl-
labe dominante sur laquelle la voix s'appesantit. Le latin,
langue de quantité par excellence, à cause des dactyles qui
terminaient beaucoup de ses mots, et pour donner un point
d'appui suffisant à son accent sur une syllabe longue, avait
la faculté d'accentuer toniquement même l’anté-pénultième ;
dans asinus, bibere, vivere, ete., la voix pesait sur la pre-
mière syllabe, elle glissait sur les autres. Le roman lan-
guedocien et ses dialectes n'étendent jamais l'accent jus-
qu'à l'anté-pénultième ; ils repoussent le dactyle de la fin
des mots, et c'est pourquoi la syllabe médiane brève se
trouve nécessairement supprimée où absorbée dans une
seule voix diphthonguée et longue. Ex. : Asinus fait ase,
bibere, béoure, vivere, vioure, comme populus donnait
pobol au roman et à notre dialecte puple ou pople, baju-
lus baïle, baculus bastoù, spiritus éspri, etc., etc.
. La conséquence devrait être d'amener les permutations
B 81
de lettres, qui mettaient la prononciation plus en rapport
avec l'organisme vocal du peuple destiné à s'en servir;
car ces syncopes pouvaient placer en contact des combinai-
sons de syllabes dont les consonnes en se heurtant se
repoussaient euphoniquement. Et c'était le moins dès lors
que chaque population cherchât à approprier les mots à ses
facullés innées, à ses propensions et à ses facilités de les
articuler. Mais comme en définitive le roman languedo-
cien ne se débarrassait pas absolument de son empreinte
latine, et comme il ne voulait pas s'affranchir des lois
générales d’aflinités euphoniques qu'il recueillait par suc-
cession et trouvait toutes faites ; et qu'enfin les combinai-
sons anciennes avaient leur logique et ne s'étaient pas
établies au hasard et par pur caprice; les changements
qui ne blessaient pas le sens et n'étaient pas une gène trop
grande, se soumirent aux règles consacrées.
Ainsi les permutations du latin à notre languedocien
actuel, en passant par le roman, ont été inspirées, de
proche en proche et à lous les degrés, par le besoin d'ob-
tenir une prononciation plus prompte et plus facile, et par
cela de diminuer l'effort et de mieux approprier la lettre
aux habitudes ou aux propensions de l'organe.
De là est venu d’abord l'adoucissement dans la pronon-
ciation et l'introduction des finales muettes, plus généra-
lisée dans le français que dans notre idiome méridional.
Les consonnances dures se sont affaiblies; le e et le g
romains, toujours rudes devant toutes voyelles, se sont
changés en s eten g doux, en ch ou en j. Quand deux
lettres similaires se rencontraient rapprochées dans deux
syllabes voisines, il paraissait souvent plus commode d’en
transformer une par son équivalente, que d'admettre une
répétition. C'était un sentiment mélodique, autrement
perçu et autrement noté; mais les rapports chromatiques,
si délicats à observer, se maintenaient sans avoir toutefois
rien de constant et d’uniforme. La fixité leur est venue,
quand chaque dialecte, prenant son vrai caractère, s'est
consolidé dans une région et qu’il y persévère, comme
pour démontrer qu'il répondait dans le principe, et qu'il
répond encore à quelque nécessité. réelle ou harmonique,
naturelle à la population qui l'a adoptée.
Dans cet ordre d'idées, quelques exemples” pris au
hasard, qui seront mieux expliqués par la suite, mais qui
donnent déjà la clé de bien des étymologies et qui décou-
lent des observations précédentes. Nous ne faisons qu'in-
diquer : d'abord les désinences en argue, passant de la
bass. lat. anicæ au roman anègues, se métamorphosant en
anche, ange, enche, agne et leurs analogues ; manica, latin,
devient notreWieux mot margue et manche actuel, domi-
nicus, dominica, donne doumèrgue et diménche ; les finales
en ola, olæ, olum se convertissent de diverses manières,
Balneolæ, balneolum, balniolum, deviennent pour nous
Bagnôou, Banious et Vagnas, en fr. Bagnols, Baigneux,
Bagnères, etc., comme linteolum fait lénçéou, linceul,
filiolus, fiéou, filleul ; lusciniola, roussignüou, rossignol, etc.
#
82 BAB
Et encore, pour la permutation qui nous occupe, on
trouve piper, pébre, poivre; rapa, rabo, rave ; ripa, ribo,
rive; capra, cabro, chèvre ; lepus, lèbre, lièvre, et ainsi de
suite d'une foule d'autres ; la labiale B, selon l’esprit de
chacun des trois idiomes, se transformant de trois façons,
tantôt douce, tantôt forte, tantôt aspirée.
Tant il y a que, dans l'application, on est arrivé à obtenir
certaines lois de permutation. C’est ce qui a permis de les
classer par groupes naturels. Il se rencontre sans doute des
exceptions; mais rien ne parait en définitive livré au
hasard ni au caprice dans les variantes les plus étranges
en apparence. La règle peut se formuler, et il en résulte
qu’une consonne de même nature, soit forte ou faible, soit
aspirée, peut bien être appelée à remplacer une consonne
appartenant à la mème famille, mais que rarement elle
dément sa race et elle ne se substitue jamais à une con-
sonne d'un groupe opposé. Ainsi B pourra être indifférem-
ment, sans trouble harmonique, converti en une consonne
de son ordre, P, F, ou V, et à l'inverse ces dernières pour-
ront être permutées en B; mais il n’adviendra pas que les
unes ou les autres passent facilement dans l’ordre des den-
tales ou des gutturales.
B et V appartiennent au même groupe des labiales sim-
plés ; leur permutation est fréquente et légalisée par les
règles. Suivant les diverses nuances de l’idiome languedo-
cien, elles usurpent volontiers l’une sur le domaine de
l'autre. Dans le dialecte gascon, B a l'avantage; dans le
Bas-Languedoc, c'est V ; dans nos Cévennes, c’est un juste
milieu. Il ÿ a encore parmi nous une foule de mots dans
lesquels on emploie B et V à peu près ad libitum, comme
sabe, save; abéna, avéna; atrouba, atrouva ; boumi,
voumi, etc. Cela tient à ce qu'Alais, placé sur la ligne
divisoire du dialecte lozérien et raïot, et de celui de Nimes
et du pays gounel (V. ©. m.), est comme un terrain
neutre, qui peut emprunter aux deux rivaux avec une
égale légalité.
Sans insister sur des observations qui reviendront
d'ailleurs à chaque lettre, on voit toutes les ressources que
la philologie peut tirer de ces principes, quand il s’agit soit
de recomposer un mot étymologiquement, en dégageant le
radical, soit alors qu’il faut chercher sa descendance et la
raison de sa forme actuelle,
B, lettre isolée, se prononce à l’ancienne méthode fran-
çaise, comme si elle était suivie d’un é fermé, Bé. A ce
ütre, ici et dans l’article suivant, elle devrait figurer à un
autre rang ; mais comme elle n’est considérée que dans sa
valeur ordinale et non point sous le rapport, de la pronon-
ciation, nous la maintenons à cette place. Il en sera de
même pour les autres consonnes.
Estre marqua dou B, être marqué au B. Un pro-
verbe a dit:
Bègou, borni, boussu, bouïtous,
Quatre B qué soun fachoùs.
B-a-ba, s. m. Commencement de la seconde leçon du
BAB
syllabaire, et par conséquent une des plus faciles. — Æs
éncaro dou b-a-ba, il en est encore aux premiers éléments.
Aquÿ's lou b-a-ba, c'est la chose la plus simple du monde.
Ba, syllabe qui, isolée, ne présente aucun sens, et qui
n'entre dans ce dicton populaire : tant fa, tant ba! que
pour signifier : tant de gagné, tant de mangé. — Cela
dérive probablement de bas, jeter à bas.
Baba, v. Baver, comme font les enfants au maillot, les
vieillards en caducité et mème quelquefois les idiots. Cest
sans doute ce qui a donné naissance au dicton : és nèci qué
babo, il est imbécile au point de baver. — Ddou plési qué
n'aviè babavo, il en bavait de plaisir, a dit le poète abbé
Favre, dans son fameux sermon dé moussu Sistre, pour
peindre la béate jouissance de Simon à l'écouter. Zi faguère
baba lou rouje, je lui fis rendre le sang par la bouche; je
lui cassai la gueule. :
Un fousél baba, est un cocon que la nymphe, récem-
ment transformée en papillon, a commencé à-percer pour
obtenir sa délivrance. L'animal, pour cette opération, com-
mence par répandre sa bave sur les parois intérieures de
l’un des pôles du cocon, afin de les ramollir et de dissoudre
le ciment visqueux qui colle les fils de soie l'un à l’autre;
par ce procédé, il parvient à les décoller, à les séparer et
à les écarter, en les ramassant en bourrelet sur l’orifice,
mais sans jamais les couper, car, à l'état de papillon, il
n’a ni dent, ni sécateur quelconque; enfin il agrandit assez
l'ouverture pour y passer tout le corps. Or le fousél baba
n'est pas celui qui est complétement ouvert et qu'on
nomme parpaïouna, mais bien celui dont les tégaments
intérieurs ont été humectés de bave, babo, et relevés en
bouchons, sans ouverture extérieure. Cette espèce de
cocons ne fournit pas de soie, parce que le brin de soie à
été embrouillé, noué, renoué, et qu’il ne peut se dévider
à la bassine ; il n’a plus d'autre valeur et d'autre utilité
que le cocon de graine ordinaire, dé babo, gâté par la
bave. |
Dér. du lat. barb. Babus, enfant.
Babaïre, aïro, adj. Qui bave; enfant plein de bave;
baveux.
Dér. de Baba.
Babâou, s. m. Sorte d’être fantastique dont on ne déter-
mine pas le nom, ni la forme, ni l'usage; c'est un objet
indécis de crainte pour les enfants. — Garo lou babdou!
Gare la bête noire ! — Babdou est aussi le type de ce qui
est noir, de l'obscurité ; on dit : nègre coumo babdou, éscu
coumo babdou. Faïre pinchoù-babdou, montrer et cacher
alternativement la tête : jeu qu'on fait à un petit enfant
pour l'amuser. — Dans le langage enfantin, on appelle
encore babdou un pou de tête, qu'on présente comme une
bête dangereuse et méchante pour engager les enfants à se
laisser peigner. On leur fait à l'appui le conte suivant ?
Sé vos pas té laïssa pénchina, lous babâous trénaran tous
pèous, né faran uno cordo, et té rabalaran én Gardoù,
tu ne veux pas te laisser peigner, les poux tresseront tes
: BAB
cheveux, ils en feront une corde, avec laquelle ils te trai-
neront à la rivière.
Ce mot parait dér, de l’ital. florentin Zdou, dont il n'est
qu'un réduplicatif et qui a la mème signification, Un auteur
italien, qui a voulu faire l'érudit et l'original, prétend que
ce mot bdou est l'abrégé ou la finale du nom d’Annibal,
qui fut longtemps un signe d'effroi à Rome, et dont les
femmes romaines usaient pour menacer leurs enfants.
* Babarël,s. m. Bavette d'enfant; pièce d'estomac, linge ou
toile en tafletas ciré, destiné à recevoir la!bave des enfants.
— Sauvages dit aussi que Babarèl est une pièce ajoutée
au haut d’un tablier, dont les femmes font un ajustement et
se couvrent la poitrine, dans un âge où l’on ne bave plus.
. Dér. de Baba.
. Babaria, v. Baver ; rendre de l'écume par la bouche,
comme font les chevaux qui ont trop d'ardeur ou les épi-
_leptiques.
Fréquentatif de Baba.
Babario, s. f. Bave, salive qui découle de la bouche;
écume de la bouche; liqueur visqueuse que répandent les
limaçons.
Dér. de Babo.
Babarogno, s. f. Être fantastique; la bête noire, dont
on fait peur aux enfants, en les effrayant autant par un
nom aussi laid que par la forme hideuse qu’on suppose au
fantôme.
Ce mot ne serait-il pas un peu parent d'étymologie avec
celui de Babardoudo, que cite Sauvages, et qui signifie un
domino; habit de masque; grande robe dont on affublait
les pleureurs, à Montpellier, dans les convois funèbres ?
— Voy. Baragogno.
Babaroto, s. f. Blatte, en lat. Blata, insecte ortho-
ptère, très-vite, lucifuge, brun-noir, plat et large, à deux
longues antennes, qui habite autour des cheminées et des
fours. Sa préférence pour la farine et le pain lui a fait
donner un second nom languedocien, celui de Panatièiro.
Il est assez difficile de se débarrasser de cette blatte domes-
tique, là où elle a établi son domicile.
Nous sommes fort tenté de faire dériver son nom de
Babäou, parce que c'est une bête noire et qu'elle inspire
quelque dégoùt.
Babèou, n. pr. de femme, dim. de Zsabèou, Elisabeth.
— Voy. Béloun.
Babia, v. Babiller ; jacasser, bavarder.
Dér., comme le fr., d'après certains auteurs, de l'hébreu
Babel, confusion ; d’après les autres, du gr. Ba£ä£ew, bal-
butier. On a voulu y voir aussi une onomatopée, imitant
les premiers sons inarticulés que fait entendre un enfant.
Je le crois plutôt dér., comme Baba, dulat. Babus, enfant,
parler comme les enfants, pour ne rien dire.
Babiaïre, aïro, adj. ou Babiur. Babillard; qui aime à
5 ; qui parle beaucoup, à tort et à travers. — Voy.
BAB 83
Babil, s. m. Babil, Joquacité; caquel, cagnetage. —
Manquo pas dé babil, il n’est pas en peine de parler,
A fosso babil, il babille beaucoup. À pas qué dé babil, il n'a
que du caquet.
Mème étym. que Babia.
Babinar, ardo, adj. Qui a de grosses lèvres; lippu.
Dér. de Babino.
Babino, s. m. Lèvre; babine d'animal. Té né pos
fréta las babinos, tu peux t'en frotter la moustache. S'ér
liquo adéja las babinos, il s'en lèche les lèvres d'avance ;
l'eau lui en vient à la bouche,
Dér. du lat. Labina, dim. de Zabia, lèvres; peut-être
aussi de babo, dont les:babinos sont le siége.
Babiur, urdo, adj. — Voy. Babiaire.
Babo, s. f. Bave, salive qui découle de la bouche ;
écume de certains animaux ; liqueur visqueuse du lima-
çon. — Es téndre coumo dé babo, dit-on d'un légume où
d'un fruit très-tendre. On ne sait quel rapport il peut y
avoir entre un fruit tendre et la bave, qui n’a aucune con-
sistance et n’est qu’un liquide gluant. Le languedocien est
plein, dans ses dictons, de ces comparaisons excentriques
dont les deux membres sont sans rapport. L'usage de
celui-ci est fort ancien et fort journalier. Aquélo éstofo és
pas qué dé babo, cetle étoffe n'a point de consistance.
Dér. de Baba.
Babo, s. m. Nymphe ou chrysalide du ver à soie : c’est
l'état moyen de cet insecte entre celui de ver et de papillon.
Il se métamorphose en chrysalide environ trois jours après
avoir commencé à filer son cocon, qu'il termine en se con-
vertissant en babè, de forme ovoïde, à mesure qu'il se
dépouille de sa soie: et après le treizième jour de cet état,
il devient papillon.
Les chrysalides sont un excellent engrais, soit qu’on les
répande dans leur entier, soit réduites en poudrette. Cet
engrais actif et chaud accélère prodigieusement la pousse
et la végétation. On dit que les Madécasses en font un plat
très-friand, au rapport de Lamothe Le Vayer. Pareil usage
se retrouve en Chine, où les mandarins ont trouvé et livré
une recette particulière pour cet apprêt. La députation chi-
noise venue à la dernière exposition universelle, avait,
sans doute, oublié le secret de cette préparation, ou bien
elle a tenu à ne pas le révéler; car le rapport de la com-
mission ne mentionne pas qu'elle ait été primée pour le
moindre échantillon culinaire en ce genre. Si cependant le
fait rapporté par les voyageurs est vrai, il est fort pro-
bable que les chrysalides qui font les délices des gour-
mands du Céleste-Empire ou de Madagascar, sont d'une
pature différente des nôtres, dont on connait l'odeur détes-
table, et qui ne doivent pas avoir un goût meilleur à quel-
que sauce qu'on les accommode. — Un poulé dou babà,
un poulet nourri et engraissé de chrysalides, qui lui. don-
nent une chair jaune, molasse et une saveur nauséabonde.
Dér. du lat. Bombyæ, par un métaplasme un. peu forcé.
Baboutièiro, s. f. Femme qui achète les chrysalides
84 BAD
dans les filatures, soit pour élever des porcs, soit pour les
faire sécher et les revendre pour engrais.
Dér. de Babô.
Bacanal, s. m. Bacchanal, grand bruit, tapage infernal ;
rixe bruyante,
Dér., comme le fr., du lat. Bacchanalia, bacchanales,
fètes de Bacchus; mais le bacanal n’entraine pas conrme
les bacchanales l’idée d’orgie, ni de plaisir sensuel.
Bacara, s. ". Bacarat, terme du jeu de macao. C’est le
plus mauvais point à ce jeu, un point ruineux. Par ana-
logie, on dit : faïre bacara, manger tout son bien, se
ruiner complétement, jusqu'au jeûne forcé inclusivement.
Quand on a tout mangé ou perdu; on se trouve dans la
mème situation que lorsqu'on fait bacarat au macao.
Emp. au fr.
Bachas, s. m. Bourbier; gâchis; cloaque, soit qu'il pro-
vienne de boue liquide, d'eaux sales ou d'eaux pluviales;
mare à canards ; mare à fumier ; flaque d’eau ; cuvette ou
bassin de fontaine domestique; maie ou réservoir d’un
pressoir à vendange. — Crébo-bachas d'Anduso, vieux
sobriquet des Andusains, sans doute à cause des fontaines
dont leur ville est abondamment fournie.
Dér. de l'allem. Bach, rivière, ruisseau, ou de Ha bass.
lat. bacca, baccha, bacchia, baccharium, identiques de
sign. à bachas.
Bachassoù (Céndrouséto), s. f. Cendrillon. — Foy.
Céndrouséto.
Bacho, s. f. Bache, grande couverture de grosse toile ou
de cuir, dont on recouvre les charrettes chargées pour
préserver les colis de la pluie; sorte de manne en cuir
qui occupe l'impériale des chaises de poste et sert de
malle aux voyageurs.
Bada, v. Ouvrir la bouche ; avoir la bouche béante ;
être ouvert; par ext., crier à tue-tète; appeler; héler en
donnant toute extension à sa voix ; bayer, être ravi d’ad-
miration. — Bada dou loup, crier au loup. Bado tant qu'a
dé gorjo, il crie de toute la largeur de sa bouche, il crie à
pleine gueule. — Doummaï lous dousséloùs soun jouïnes,
doummaï badou, plus les oisillons sont jeunes, plus ils
ouvrent le bec. C'est une expression proverbiale, qu'on
applique par comparaison à une nichée d'oiseaux qui
ouvrent le bec et crient à la fois quand ils voient arriver
la pâtée que leur apporte leur mère. Mous souïès badou dé
pértout, mes souliers font mille grimaces. Aqud faï bada
: dé véire, on est, en voyant cela, ravi d’admiration. Dé qué
bades ? tè, véloù’qui! De quoi te plains-ta ? pourquoi cries-
tu? tiens, le voilà! Bada la dragëio, avoir la bouche béante;
bayer aux corneilles. Cette expression prvb. est empruntée
à un jeu de carnaval. Un masque, déguisé en Cassandre,
est monté sur un âne, la face vers la queue. 11 tient à la
main une baguette au bout de laquelle est attaché un fil,
portant une dragée qui se balance sur la tête d’une foule
d'enfants qui suivent, la bouche ouverte pour happer la
dragée, car il leur est défendu de se servir de leurs mains.
BAD
Le Cassandre frappe sur la baguette avec une seconde, qui
imprime à la dragée un sautillement continuel et rend .
très-difficile la tâche des happeurs. A les voir se démener,
se bousculer, et bada, est le plaisir du masque et l'amuse-
ment des spectateurs.
Dér. de la bass. lat. ou de l'ital. BaïZare, béer, bayer.
Bayer est donc l’acception naturelle et originaire de bada ;
crier west venu que par analogie, parce qu'on crie em
ouvrant la bouche grande, comme quand on baye.
Badadis, s. m., ou Badadisso, s. f. Criaillerie; réu-
nion de plusieurs voix qui crient.
Dér. de Bada, crier.
Badado, s. f. Grand cri prolongé; mercuriale à haute
voix et colérique ; huée de mépris ou de risée. — Faïre la
badado, huer quelqu’n, le poursuivre de huées ; lui faire
une honte publique, crier haro.
Dér. de Bada, crier.
Badafièiro, s, . Terre remplie de lavande; par ext.
broussaille, bruyère.
Dér. de Badafo.
Badaño, s. f.,ou Espi. Lavande, spic, aspic, Lavandula
spica, plante de la fam. des Labiées, aromatique; nard
commun. C'est de cette plante qu'on tire par la distilla-
tion l’eau de lavande et l'huile d’aspic. La badafo est pro-
prement la plante elle-même considérée comme combus-
tible. On la brüle en effet dans les magnaneries pour puri-
fier l'air; on l’emploie aussi en guise de bruyère pour
ramer les vers à soie; mais comme elle est basse et courte,
on ne peut la fixer d’une table à l’autre comme la bruyère,
et on la réserve pour la table la plus haute qui n’a point
de dessus, en la piquant dans des liteaux percés de trous,
ou dans des fagots de sarment. Les vers à soie se plaisent
à filer dans la badafo, dont ils paraissent aimer l'odeur
forte et agréable. La fleur de la badafo et sa semence sont
placées au haut des nombreux épis qu’elle pousse annuel-
lement. Quand ces épis sont secs, on les vend par bottes
pour allumer le feu, ou pour faire chauffer le linge de
corps, auquel ils communiquent une bonne odeur. Dans cet
état, on l'appelle Espi. — V. c. m.
Il est difficile de donner une étymologie à ce mot ; la
plupart des termes empruntés à l’histoire naturelle sont
dans le mème cas. Chaque dialecte a ses techniques, et
ils sont souvent, comme les noms propres, produits par
un cas fortuit, quelquefois anecdotique. Le Jat. Balsamum
serait bien hasardé et aurait passé par trop d’altérations.
Le roman a badace, pour nommer aussi une plante qui
croit dans les lieux arides, comme la lavande.
Badaïa, v., fréquent. de Bada. Bâäiller, ouvrir invo-
lontairement la bouche, en respirant et expirant avec
force; au fig., s’entr'ouvrir; se crevasser; rendré le der-
nier soupir. — Lous castagnès couménçou dé badaïa, les
châtaignes commencent à ouvrir leurs hérissons; les chà-
taignes sont prêtes à tomber. Badaïa vdou pas ménti, #é
noun véou manja, véou dourmi, prvb., le bâäillement
7
BAG
ânnonce la faim ou le sommeil. Es pas mort, mais badaïo,
il n'est pas mort, mais il est aux abois.
Dér. de Bada.
Badaire, aïro, adj. Qui crie, qui appelle; criard. —
Siès pas qu'un badaïre, tu ne fais que crier.
Der. de Bada.
Badal, s. m,, dim. Badaïoù. Bâillement: action de
bâiller. — Faïre sous badals, où faïre lou dariè badal,
rendre le dernier soupir.
Dér. de Badaïa.
Badäou, äoudo, adj. Badaud, niais, nigaud, qui s’ar-
rête à tout, qui admire tout.
+ Dér. del’itäl. Badare, ou de la bass. lat. Badaldus, qui
4 la bouche ouverte, qui bäille.
Badarèl, élo, adj., péjor. Badarélas. Criard, criailleur;
qui toujours crie, toujours se fâche.
Dér. de Bada.
Badin, ino, adj. Badin, plaisant, farceur.
Dér. du gr. Hadvés, d'enfant.
Badina, v. Badiner ; folàtrer ; tromper, duper, plaisanter
quelqu'un, le mystifier; faire semblant. — M'an bièn
badina à la fièiro, on m'a bien dupé à la foire. Badine
pas, je ne plaisante pas, je le dis très-sérieusement. Vésès
pas qué badine? ne voyez-vous pas que c'est pure plaisan-
terie? $
Dér. du gr. Hatdvés. é
Badinado, s. f. Plaisanterie; tour de plaisant bon ou
mauvais ; mystification ; gaillardise.
Badinaïre, aïro, adj. Gouailleur; plaisantin; mystifi-
cateur.
Badinaje, s. m. Badinage; plaisanterie; gaillardise;
mystification, génériquement parlant. Badinado est un
acte isolé et spécial du badinaÿe. — Entén pas rés lou badi-
naje, il n'entend nullement la plaisanterie. Aqud’s pas dé
badinaje, ce n’est point un jeu, c’est très-sérieux. Aqud’s
un vilén badinaje, c'est une mauvaise plaisanterie.
Badino, s. f. Badine, canne mince et flexible; le stick,
en nouveau langage à la mode ; petit bijou que les femmes
portent suspendu au cou et qui varie suivant le pays, le
culte et la mode.
-Dér. de Badina, parce que dans l’une ou l'autre accep-
tion, l'objet semble toujours frétiller, jouer et être en
mouvement.
Badiou, adj. m. sans fém. Ouvert de tous côtés ; béant;
grand-ouvert. — L'oustdou és tout badiou, la maison est
toute grande-ouverte, soit par négligence, soit par manque
de fermeture, comme le logis du pauvre.
Dér. de Bada. : "
Bagar, s:m., n. pr. de lieu. Bagard, commune du can-
ton d'Anduze, arrondissement d’Alais.
Un titre de l'an 4071 cite cet ancien village comme
viguerie, in vicaria de Bagarnis, et l'appelle encore de
Bagarno ; en 1474, la forme au pluriel revient dans de
Bagarnis, et se conserve depuis.
BAG 85
Comme étymologie il se rencontre deux mots de la bass.
lat. qui feraient une sorte de pléonasme : baga, id est
arca, Coffre ; et arna, alveus apum, ruche d'abeilles, qui
est dans l’ital. arnia, lieu rempli de ruches d'abeilles. Cette
attribution serait appuyée et confirmée par le nom d'un
écart de cétte commune dans le voisinage , mentionné
aussi dans la charte de 4074, qui dit : in vicaria de
Bagarnis, et in villa quæ vocatur de Melnacho. Ce dernier
mot est certainement le nom primitif de Moinas actuel,
qu'il est facile de reconnaitre; mais le nom latin d’évidence
est formé de mel, miel, qui y entre tout entier. Ce rappro-
chement donne raison à la signification étymologique de
Bagar, lieu où se trouvaient de nombreuses rucheries.
Bagasso ! interj. Ah! bien oui, je t'en souhaite! Va-
t-en voir s'ils viennent ! Cela ne vaut rien.
Nous croyons que cette expression dérive du mot de l'an-
cienne langue d'Oc, Bagans, formé du lat. vagans, errant,
vagabond, nom que l’on donnait aux bergers nomades des
Landes. Sans doute, ce genre de vie excentrique, au milieu
de la civilisation, leur avait donné des mœurs barbares et
sauvages, pareilles à celles des truands et des bohémiens,
qui les mit en mauvais renom. On a fait de là notre inter-
jection, qui ressemble à l'expression du mépris.
Autrefois, en v. fr., on appelait Bagasse, une prostituée,
une coureuse. Probablement l'étymologie est la même et
s’appliquait à ces sortes de bergères nomades. En tous cas,
le mot est ancien dans notre idiome. Voici un fragment
extrait des Joyeuses recherches de la langue tolosaine, par
Odde, de Triors, 1578, qui s'en explique dans un assez
long commentaire rabelaisien ; il commence ainsi : « Ba-
gasso, seu ut nonnulli volunt, courredisso en ceste cité de
Tolose, est vn terme iniurieux entre les pauures femmes,
de fort basse, vile et infime condition, lequel nom de
Bagasso sϾpissime resoluitur per aliud nomen quod dicitur
(cantoniero); sunt et nonnulli qui dicunt (cabas), juæta vul-
gare dictum figue de Marseillie, cabas d'Auignon..… Or,
bien que le susdit prouerbe se dise et s’vsite bien souuent
comme nous voyons icy in malam parlem contre la noble
cité d'Auignon, toutes fois ie m'asseure que telle maladie
regne plus ailleurs qu’en Auignon, et que si elle a le bruict
les autres ont le faict. Que mal de pippe eut abbata le
premier inventeur de tels blasmes et ne peus croire que ce
n’aye esté quelque larron foeté et banni de la susdicte
noble cité, Et pour tout hongue qui hongue, gronde qui
gronde, tousiours viura la noble cité d’Auignon, moienant
l'ayde de Dieu, car sine ipso factum est nihil, et per ipsum
omnia facta sunt, Deo gratias..……. » :
Bagatèlo, s. f. ou Barandèlo. Danse ou plutôt galop,
fort en honneur dans les Cévennes, qui ressemble assez à
la danse des Bacchanales. Cette danse fort animée et sou-
vent gracieuse s'efface dans nos mœurs actuelles, qui ont
adopté la contredanse des villes, danse pâle et dialoguée,
qu'on ne fait plus que marcher de nos jours. Le galop
était ce qui rappelait le mieux, il y a quelques années, la
86 BAG
bagatèlo ; mais depuis qu'avec les mazurkas et les scotichs,
le progrès chorégraphique a pénétré dans les campagnes,
par la manière dont on les saute et avec laquelle on s’aban-
donne, il n'y a pas à regretter les élans et la désinvolture
de la bagatelo.
Comme vocable, Barandèlo est à la fois plus technique
et plus expressif. C’est celui qu'a employé notre charmant
poète cévenol, dans la description si vive, si joyeuse de
cette danse à la Fièiro dé Sén-Bourtoumiou.
Ce mot est sans doute par analogie empr. au fr.
Bagna, v. Mouiller par aspersion ou par immersion. —
Lou bas sé bagno, proprement, le bàt commence à tremper
dans l'eau; au fig. et prvb. : la chose commence à se
ghter, le danger approche. On suppose ici un homme pas-
sant à gué une rivière sur un mulet ; quand l'eau com-
mence à arriver à la hauteur du bât, il est à craindre que
cela n'empire, il y a danger de la noyade : prenons donc
garde, lou bas sé bagno. Ainsi dans toutes les entreprises
ou circonstances, pour avertir d'être avisé et prudent,
quand on comprend qu’on va être poussé à bout, et que la
mesure s’emplit. Bagna coumo un ra, mouillé comme un
canard. Faï la cato bagnado, il fait la chate-mite.
Dér. de Ban, bain.
Bagnaduro, s. f. Mouillure; état de ce qui est mouillé.
— Fôou pas garda la bagnaduro, il ne faut pas garder ses
habits ou sa chaussure, quand ils sont mouillés.
Dér. de Bagna.
Bagnôou, ». pr. de lieu. Bagnols-sur-Cèze, ville, chef-
lieu de canton, arrondissement d’Uzès. — On donne à ses
habitants, dans la tradition, le sobriquet de Galinéto dé
Bagnéou, mais la tradition n'a pas expliqué pourquoi. —
Il ne faut pas confondre cette ville avec celle de Bagnols-
les-Bains (Lozère), qu'on appelle Lous Banious. — VW.
&. m.
Il est curieux cependant de rapprocher les deux appel-
lations : Bagnôou, arrondissement d'Uzès, Lous Banious,
arrondissement de Mende. Ces deux mots, qui ont la mème
signification, la mème traduction, se distinguent par leur
consonnance finale. Leur radical commun vient du lat.
Balneum, qui donnait dans les vieux titres Balneolæ ou
Balneolum, pax l'addition de la désinence diminutive, pour
indiquer un petit lieu de bains. À Bagnéou, il existait en
effet autrefois, à peu de distance de la ville actuelle, au
pied d’une petite montagne appelée Lancise, une source
d'eau thermale fort en renom pour les maladies cutanées :
cette source a perdu son efficacité. Lous Banious gardent
toujours l’ancienne réputation de leurs eaux minérales qui
les ont fait dénommer, — Voy. Banious (Lous).
Sur le nom latin des deux localités, le languedocien a
fait la variante que nous remarquons, qui s'efface dans le
français Bagnols, mais qui se retrouve dans le roman
encore conservé sur des points nombreux de la France.
Ainsi, au bord du Rhône, dans la plaine, Bagnéou ; dans
les montagnes des Cévennes, {ous Banious ; comme iden-
BAH
tiques, les noms de Banyuls-des-Aspres et Banyuls-sur-
| Mer se rencontrent dans les Pyrénées-Orientales; Zagnouæ,
commune de Calvisson (Gard), dit Bagnolum villa, en 1060 ;
Les Bagnious dans la Haute-Garonne ; Bagneux, dans l'Aisne,
Allier, Cher, Indre, Isère, Maine-et-Loire, Marne, Meurthe,
Moselle, Seine, Deux-Sèvres, Somme, Vienne; Baigneux,
dans Indre-et-Loire, Sarthe, Côte-d'Or; qui avec Banios
(Hautes-Pyrénées) , Baneuil (Dordogne), Bagneaux (Loiret,
Seine-et-Marne, Yonne), Baigneaux (Eure-et-Loir, Gironde,
Loir-et-Cher), Banèche (Haute-Vienne), Baneins (Aïn),
Baneix (Haute-Vienne), tous désignés par Balneolæ, Bal-
neolum, Baniolum, Balniolum, semblent plus rapprochés
de tous Banious ; de mème que La Bagnolle (Ardennes) ,
Bagnolles (Orne), Bagnol (Côte-d'Or), Baignol (Haute-
Vienne), Bagnols (Basses-Alpes, Aude), Bagnols (Hérault,
Puy-de-Dôme, Rhône, Var), Bagnolet (Seine) , les Bagno-
lets (Allier), Baïgnolet (Eure-et-Loir), sont parfaitement
semblables ou plus voisins au moins de Bagndou. Dans la
même famille se comptent encore Bagnac (Cantal, Lot,
Haute-Vienne), Bagnars (Allier, Cantal), Bagnars (Avey-
ron), Le Bagnas (Hérault), Bagne (Ain), Bagné (Vienne),
Bagnéras, Bagnères, la Bagnère (Hautes-Pyrénées, Haute-
Garonne, Landes), Baignac (Lot-et-Garonne), Baignes
(Isère, Haute-Saône, Charente), les Baiïgners (Loiret). Près
de nous, Vagnas (Ardèche) et La Vagniérette, ruisseau dans
la commune de la Rouvière (Gard), n’ont-ils pas la même
source, par la substitution connue du V au B?
Partout le radical est à peu près immuable ; les variantes
s'exercent sur le diminutif ous, ola, olum, au sing., ou
olæ, plur. Ces différences ethniques très-remarquables s’ex-
pliquent par l'influence des situations, des climats, sur la
formation des noms.
Bago, s. f. Bague; anneau d’or ou d'argent ou d'autre
matière, orné quelquefois de quelque pierre précieuse,
que l'on porte au doigt. — Bago dé mariaje, anneau
nuptial.
Dér. du lat. Bacca, anneau.
Bagoù, s. m. Caquetage, babil, intempérance de langue;
facilité de s'exprimer, mais dans le genre trivial. — À bon
bagoù, il a la langue bien pendue. En fr. fam., dans la
langue verte, on dit aussi bagou.
Dér. du gr. Bapa, son, parole.
Baguéto, s. f. Baguette ; bâton long, délié, flexible ou
rigide ; baguette de fusil; petite bague, petit anneau;
baguette d’un nœud, ganse. — Voy. Nouscléto.
Dér. de la bass. lat. Baculela, dim. de Baculus.
Baguiè, s. m. Baguier, écrin à mettre des bagues.
Dér. de Bago.
Bahu, s. ». Bahut, grand coffre à serrer les hardes, le
plus souvent doublé en cuir et garni de clous à tête quiy
forment divers dessins. C'est un meuble du moyen-àge.
On appelle encore bahu, ces grands coffres où les paysans
serrent leur salé quand il est sec. .
Dér. de l’allem. Behuten, m. sign. ZE
” BA
Baïa, v., ou Baïla. Donner en général; donner à bail
où à emphitéose, bailler en style de pratique. — Té baïa-
raï uno douréiado, je te tirerai les oreilles. Baïa-mé un co
dé man, aidez-moi un moment, donnez-moi un coup de main.
Dér. du gr. BéAkew, lancer, jeter, envoyer.
Baïar, s. m. Bar, ou bard, sorte de civière dont le fond
n'ést pas à claire-voie, mais en planches, pour transporter
le mortier.
Dér. du lat. Bajulare, transporter un fardeau.
Baïargue, s. m., n. pr. de lieu. Baillargues, village et
commune dans le département de l'Hérault.
Au lieu de chercher péniblement dans les monuments
lapidaires ou sur les médailles romaines un nom d'homme
d'une notoriété souvent douteuse, qui corresponde à la
dénomination d'un village construit sur les prétendues
ruines d'une villa antique, pourquoi ne pas demander à la
langue parlée dans les Gaules en même temps que le latin,
et ne pas extraire des altérations et des transformations
que les mots ont subies pour arriver jusqu’à nous, une
racine qui soit également satisfaisante à la signification et
aux procédés ordinaires de composition des noms propres ?
Pour Baïargue, Baïllargues, Balhanicæ au moyen-àge, sa
dérivation ne serait-elle pas plus naturelle en la tirant du
gaulois bala, baile, village, qui est encore, avec le même
sens, en gallois, bala ; en irlandais, baile et balu ; en bas-
breton , baile; qui ont donné au fr. baillage, bailli, après
la bass. latin., qui disait balia, ballia, baillagium ? Sur ce
radical, se serait, par les procédés ordinaires, formée
l'appellation de la bass. lat. en anicæ, puis la traduction
romane arrivant enfin à notre désinence en argue. Cette
descendance est pour le moins aussi probable que celle
. tirée du nom d'un certain Ballienus que cite Cicéron dans
son oraison Pro Fonteio
Baïla, v. — Voy. Baïa.
Baïle, s. m. Baïlli ; maître-valet dans une ferme, chef
des journaliers, qui a la direction de l'ouvrage; maitre-
berger qui a la conduite d’un grand troupeau pour aller à
la montagne (VW. Abeïé). — Ddou pu toundrdou n'an fa
lou baïle, prvb., du plus ignorant on a fait un docteur.
Ce dicton a reçu et recevra, de tous temps et sous toute
sorté de régimes, de nombreuses applications. La malice
des ambitions méconnues esftsi grande, les bons choix si
difficiles, le vrai mérite si rare!
Dér. de la bass. lat. Ballium, gouvernement, adminis-
tration, tutelle.
Baïléja, v. Commander; faire les fonctions de baïte;
trancher du maitre ; faire l'important.
Baïlésso, s. f. Femme du maitre-valet dans un domaine,
qui est chargée de veiller aux soins du ménage.
- Baïssa, v. Baisser, diminuer de hauteur; baisser de
prix ; s'affaisser peu à peu, s’affaiblir.
Sé baïssa, se baisser, se courber.
Emp. au fr. i
Baïssos, s. f. pl. Branches basses d’un arbre, celles où
BAJ 87
l'on peut atteindre de terre. — Ce mot ne se dit que des
arbres à fruits quelconques et du mürier, de ceux enfin dont
il faut atteindre les branches pour faire la cueillette. — Las
baïssos toquou lou sdou, l'arbre est tellement chargé de
fruits que les basses branches trainent à terre.
Dér. de Baïssa. ,
Baïto, s. f., ou Capitèlo. Hutte, baraque, maisonnette
de vigne, qui n’est pas habitée et ne sert que pour enfer:
mer des outils, ou se mettre à l'abri d’un orage, d'une
ondée.
Dér. de l'héb. Baith, maison, logement, d'où vient peut-
être l’angl. to bait, se loger en passant.
Baïuèrno, s. f. Etincelle ; bluette qui s'échappe du
bois enflammé. — Voy. Bélugo et Sarjan.
Il est difficile de déterminer l’étymologie de ce mot;
mais il est impossible de lui refuser un rapport saisissant
de conformation avec le français baliverne, rapport qui
trahit une commune origine. Le mot est en effet le mème
dans les deux langues, sans autre variante que celle pro-
duite par une transposition de lettre due à la différence de
leur génie ; l’? tréma languedocien n’est guère que le pen-
dant des deux 4 mouillés ou de l'i, forme que garde du
reste la prononciation raïole en disant baïuèrno. Sauvages,
qui ne donne pas ce mot, conserve cette orthographe dans
tous ses analogues. Quant à la transformation de l’u en +»,
elle est si commune aux deux langues qu'elle n’a pas
besoin d'explication. Outre la ressemblance matérielle, gra-
phique et consonnante, les deux mots ont bien aussi quel-
que rapport dans leur signification. La baïuèrno comme
la baliverne, sont choses de peu d'importance, de peu
de durée, choses qui passent sans laisser de trace. Leur
différence est en ce que le premier mot tient à l'ordre
physique, le second à l'ordre moral. Maintenant, le pre-
mier a-t-il donné naissance au second ou faut-il prendre
le vice versd ? Ne peut-il se faire aussi que, dérivant d'une
source commune, ils soient nés simultanément ? Ce mystère
se perd dans la nuit... de l'étymologie.
Baïzaduro, s. f. Biseau ou baisure du pain, empreinte
que deux pains s’impriment réciproquement, lorsqu'ils se
touchent et se collent dans le four.
Dér. de Baïsa, baiser, mot ancien, usité encore dans
quelques-uns des dialectes du languedocien.
Bajana, s. m., ou Cousina. Potage aux châtaignes blan-
chies, dont toute la préparation consiste à les faire bouillir.
C'est un mets très-commun dans les Cévennes, où il fait
la principale nourriture des habitants pendant tout l'hiver.
IL est exquis avec une addition de lait.
Dér. de Bajano.
Bajanèl, èlo, adj. Nigaud, imbécile, niais. — Cette
épithète moqueuse me parait tenir à cet esprit de rivalité
qui a existé au moyen âge entre les habitants de localités
voisines. Par la même raison que les habitants des Cévennes
appelaïent Gounèls par dérision les habitants des communes
au-dessous d’Alais, ceux-ci, usant de représailles, quali-
83 BAL
fiaient les premiers de Bajanèls, parce qu'ils se nourrissaient
de bajanos; et dans leur dictionnaire ce nom est resté
synonyme de nigaud. — Voy. Gounël.
Dér. de Bajano.
Bajano, s. f. Châtaigne blanche, séchée à la fumée et à
la chaleur dans le suoir à châtaignes, clédo, et dépouillée
après cette opération de sa coque et de sa pellicule; chà-
taigne-bajane.
Dér. du lat. Baianus où Bajanus, qui est de Baïa, ville
du royaume de Naples. J1 semblerait par là que l'usage de
faire sécher ou blanchir les châtaignes a commencé dans ce
dernier pays.
Bal, s. m. Bal ; réunion convoquée pour danser ; danse.
— Douna lou bal, donner la chasse, pourchasser ; rosser,
faire danser quelqu'un, iron.
En ital. Ballo; en esp. Balle. Le gr. a BaX\w, je danse,
Bal, s. m. Bail à ferme, à loyer, à emphytéose ; contrat
public ou privé, pour donner, pendant un temps déter-
miné, moyennant un prix payable annuellement ou à des
termes convenus, la jouissance d’une chose mobilière ou
immobilière à quelqu'un.
Dér. du lat. Ballium. l
Bala, v. n. Etre en suspens, entre le mouvement et
l'immobilité. — Se dit d'une boule prête à s’arrèter, qui se
balance avant de se fixer; et encore d’un moribond à ses
derniers moments, prêt à passer, — Bato, il est entre
la vie et la mort. À bala, il est mort. Dans ce dernier
sens, familier du reste, ce mot ne serait-il pas une corrup-
tion de émbala, faire ses paquets pour partir ? Ou bien a-t-il
la mème étymologie que le suivant : balan ?
Balalin-balalan , ou Balin-balan. Onomatopée pour
exprimer un objet qui branle, qui s’agite ou qu'on agite
de droite et de gauche, comme une cloche. C'est un rédu-
plicatif de balan.— Ana balin-balan, où balalin-balalan,
aller à l'aventure, à droite et à gauche, ou les bras ballants.
Balan, s. m. Branle, volée; élan que l'on donne à un
coup que l’on veut lancer. L’élan qu'on prend soi-même
pour s'élancer se dit van. — Souna à balan, sonner les
cloches à volée. Trés cos à balan, trois volées. Dound lou
balan, donner le branle. Aquélo carétado a trop dé balan,
cœtte charrette est chargée trop haut, elle court risque de
verser. Aquél martèl a maï dè balan, ce marteau a plus de
coup, plus d'élan. Résté’qui én balan, il resta là en sus-
pens, dans l’hésitation. .
Ce mot est-il une contraction de Balangça, ou bien vient-
il du gr. Béw, lancer, envoyer? On peut choisir.
Balança (sé), v. Se balancer, se dandiner ; s’égaliser, se
valoir réciproquement l'un l'autre; jouer à l'escarpo-
lette, à la balançoire.
Dér. de Balanço.
Balançadoù, s. m. Balançoire, escarpolette; une planche
posée en travers sur une poutre, et aux deux bouts de
laquelle les enfants se balancent en faisant la bascule.
- Dér. de Bulango.
BAL
Balanço, s. f. Balance. Au sing. ne se dit que figur.
pour : attention avec laquelle on pèse les raisons pour et
contre; comparaison, parallèle équitable. Au plur. las
balangos s'emploie pour balance, instrument formé d'un
arbre, d’un fléau et de deux bassins pour peser, — Tèn
bièn la balangço, il rend justice égale à tous. Fdou faire la
balanço, il faut rendre justice à tous, il faut faire un
poids, une mesure équitables.
Dér. du lat, Bilancis, génit. de bilanx, double bassin,
Balandran, s. »m, Arbre mobile de la balandro ; plateau
d'une grande romaine ou balance pour peser des objets
d’un grand volume. — De là, par analogie, passa dou balan-
dran, berner, faire passer à la couverture; bousculer.
Formé de Balan et de l'ital. andare, aller.
Balandro, s. f., ou Poulèje, Bascule de puits de cam-
pagne ; mécanisme fort simple et fort usité pour les puits
de jardin dans les Cévennes. Il consiste : 4° en un arbre
droit fiché en terre; 2° en nn arbre mobile fixé au pre-
mier par un crochet et un anneau, en forme de vergue ; à
une extrémité de celui-ci on place un contre-poids fait
d’ordinaire d’une grosse pierre percée qui tient à l'arbre
par une cheville; à l’autre bout est attachée, par un brin
de corde assez Jàche, une barre mince qui descend ainsi
verticalement et qui est terminée par un croc soutenant le
seau. Pour puiser l’eau, on tire cette barre, qui fait jouer
facilement la vergue sur son anneau, et le seau plonge;
quand il est plein, le moindre mouvement du bras fait
jouer la bascule, et le contre-poids, agissant dans le même
sens, le seau remonte sans effort et sans fatiguer le pui-
seur, — Voy. Poulèje. :
Mème dér. que Balandran.
Balé, s. m. Auvent, petit toit de planches, en saillie, |
au-dessus de la porte d’une boutique, pour abriter l'étalaga
de la pluie et du soleil trop éblouissant; palier d'escalier
ou galerie découverte, balcon en terre-plein. — Le balé,
auvent au-dessus de la porte des magasins, a disparu, ou à
peu près, devant les règlements d'édilité; il était pitto-
resque et utile aux marchands ; mais les devantures en
avancement et surtout les étalages à la mode le remplacent
avec avantage et maintiennent à l’intérieur un peu plus
que le demi-jour favorable au choix de la marchandise,
sous prétexte d’un soleil trop éclatant, Le progrès des
lumières nous vaut ce changement.
Dér. du gr. Békkew, jeter en avant,
Baléja, v. Faire contre-poids ; être égal, équivalent ; en
équilibre. — Faïre baléja, égaliser, équilibrer, par ex. :
une charge de mulet, de manière à ce que les deux côtés
aient à peu près le même poids. Aquô baléjo à l'éntour
d'un quintdou, cela pèse environ un quintal. Aquéles dous
éfans sé baléjou, ces deux enfants sont à peu près du
même age où de mème force.
Dér. de Balo.
Baléno, s. f. Baleine, Balæna mysticetus, Linn. Poisson,
genre de Mammifères de la fam. des Cétacés ; le plus gros
EE
es. éo f
BAN
de tous les animaux connus; ses fanons ou barbes four-
nissent les baleines de parapluies, servent aux corsets de
femme, etc.
Emp. au fr.
Balisto, s. m. Bailliste ; fermier, séquestre; adjudica-
taire. — Balisto dé l'otrouë, fermier de l'octroi.
Dér. de Bal, bail.
‘Balo, s. f. Balle de plomb; ballot, balle. — Balo dé
fusil, dé pistoulé, balle de fusil, de pistolet. Balo dé cébos,
balle d'oignons ; il y a douze tresses, ou rèsses, à la balle.
Aquà faï bièn ma balo, cela me chausse à merveille, ça fait
bien mon affaire.
Dér. du gr. Békeu, jeter, lancer.
*Balô, s. m. Ballot, balle, sous une enveloppe de grosse
toile, serrée avec des cordes; demi-charge d'un mulet,
celle que l’on met d’un côté du bât. — Saïque aqud's pas
un balù dé sédo, pér lou ména tant plan? ou pésa tant fi,
faut-il tant de précautions, ou tant regarder au poids? ceci
n’est pas un ballot dé soie.
Dér. du précédent.
Baloto, s. f. Petite boule du loto, où est inscrit unnuméro.
Dim. de Balo.
Balouta, v. Balloter; au pr., lancer et relancer d'une
main à l’autre, ou d’un joueur à l'autre, comme se repasse
une balle ; au fig. mystifier quelqu'un, le renvoyer de l’un
à l’autre, du poirier au pommier.
Dér. de Balo.
Balustrado, s. f. Balustrade, garde-fou, composé de
balustres continus.
Emp. au fr.
Balustro (à tusto), adv. A l’aveuglette, à la hurlu-
berlu; brusquement, brutalement ; sans prendre aucune
précaution.
.* Formé de Tusta et du fr. balustre, parce que dans cette
situation ôn se heurte à tout.
Bambocho, s. f. Orgie, débauche. — Faïre la bam-
bocho, Où sé mêtre én bambocho, faire une partie de dé-
bauche, un gala crapuleux.
*Dér. de l'ital. Bamboccio, petit homme grotesque :
Bôcca, bouche, ne serait-il pas là pour quelque chose?
Peut-être mème le fr. bouc, dont la lascivité est connue.
Bamboucha, v. Faire des bamboches ; se livrer à la
débauche ; faire de mauvaises farces, des farces d’ivrogne.
Bambouchur, urdo, adj. Bambocheur; libertin ; enclin
à la débauche.
* Ban, s. m. Banc; siége on tréteau long, en bois ou en
pierre, sur lequel plusieurs personnes peuvent prendre
place ou plusieurs choses être déposées. Il prend en fr. dif-
férents noms, suivant les usages auxquels il sert. — Ban
dé miénuisiè, établi de menuisier. Ban dé bouchè, étal de
boucher. Ban dé iè, tréteau de lit. Ban dé la bügado,
selle ou batte de lessivense. Ban das marguiès, banc de
l'œuvre. Es vièl coumo un ban, il est vieux comme les rues.
Dér. du lat. Bancus ou de l’allem. bank.
BAN 89
Banar, do, adj. Cornu, encorné; qui a de longues
cornes ; habitant de la commune de Bannes (Ardèche).
Dér. de Bano.
Banastado, s.f. Contenance d’unebanasto; plein une man.
ne,ou banne—Faï toujour quéouquobanastado, il fait toujours
quelque ânerie, quelque école, quelque affaire de dupe. Y ana
émbé touto la banastado, dit-on de quelqu'un qui parle des gens
sans égard, sans garder aucune mesure, lâchant sur leur com-
pte les vérités les plus dures, les plus blessantes, qui, pas plus
queles véritésordinaires, nesont pas toujours bonnesà dire, ni
surtout à entendre: c'est comme si l’on disait qu’il vide tout
son sac, sans y rien garder, comme on jette là une banastado.
Dér. de Banasto.
Banastaïre, s. m. Fabricant de banastos, et de toutes
sortes d’engins faits avec des scions refendus de châtai-
gniers sauvageons, que l'abbé de Sauvages appelle Côtons.
On dit proverbialement : Banastaïre das Apéns, parce
que les habitants de ce hamezu, dépendant de la commune
de Lamelouse, arrondissement d’Alais, se livrent beaucoup
en hiver à la fabrication de ces bannes en châtaignier.
Dér. de Banasto.
Banastéja, v. fréq. Transporter habituellement à dos de
mulet ou d'âne dans des banastos.
Banasto, s. f. Banne ou manne double, panier à bât
pour transporter le fumier et autres objets, dans les pays
où les voitures ne peuvent rouler. — Sot coumo uno ba-
nasto, sot comme un panier. À éstudia souto uno banasto,
dit-on d’une personne complètement ignare, par allusion
peut-être aux chevreaux, que l’on recouvre ainsi pour les
empêcher de gambader et par là de maigrir; ou bien pour
rappeler les ânes, quisont le plus souvent chargés de banastos.
Dér. du gaulois Benna, voiture, ou de l'allem. benne,
tombereau; d’où le lat. benna, charrette entourée de claies,
sorte de corbeille.
Banastoü, s. m., ou Taréirôou. Dim. de Banasto. Ban-
neton, mannequin ou petite manne, sans anses, très-évasé
d'ouverture.
Bancèl, s. m., ou Faïsso. Terrasse ou bande de terre ;
plate-bande de jardin. Le terme bancèl est proprement usité
dans les hautes Cévennes; faïsso est plutôt des environs
d’Alais.
Dim. de Ban, banc, parce que le bancèl est droit et
long comme le banc.
Banda, ado, adj. Mort, crevé; ivre-mort, roidi. —
Banda coumo un piô, soûl comme une grive.
Emp. du fr. bander, pour roidir.
Banda (sé), v. Se soûler, s'enivrer; se gorger de vin.
Mème dér.
Bandéja, v. frég. Passer du linge savonné dans l’eau
claire, ce qui se fait en le tenant par un bout et le plon-
geant, le passant, le repassant dans l'eau, jusqu’à ce qu'il
soit bien essuyé de l'eau de savon.
Est-il dér. du lat. Pandere, étendre, développer, ou du
languedocien branda ?
90 BAN
Bandi, s. m. Dim. Bandind. Bandit , vagabond, homme
sans aveu. — Es un bandè, c'est jun mauvais drôle; et
quelquefois, seulement, un mauvais sujet, un libertin ; s'il
s'agit d’un tout jeune homme ; on dit alors : és un ban-
dinà.
Dér. de l'ital. Banditto, banni, proscrit.
Banéja, v. frég. Commencer à montrer les cornes, comme
les escargots ; par ext. jouer des cornes.
Dér. de Bano.
Banèlo, s. f. Vanneau. — Voy. Vanèou.
Bani, v. Bannir, chasser. — Y-a pas mouïèn dé banà
los ras, il est impossible de se délivrer complètement des
rats. — Il signifie aussi : faire une saisie-arrêt.
Dér. du lat. Bannum, bannissement, exil, ban.
Banimén, s.m. Saisie-arrèt ou opposition, terme de pra-
tique en procédure.
Banious (Lous), n. pr. de lieu. Bagnols-les-Bains, ville
dans la Lozère, renommée par ses éaux thermales.
Il est à remarquer que l’appellation française ne donne
pas la preuve que le baptiseur füt très-fort en languedocien.
Bagnols, traduisant lous Banious, est dér. du lat. Balneo-
lum, qui signifie : lieu de bains; pourquoi alors ce pléo-
nasme inintelligent dans le nom français, et l’accouple-
ment de deux mots de mème signification ? — Voy. Ba-
gnéou.
Bano, s. f. Dim. Banéto, péj. Banasso. Corne de la tête
de certains animaux ; antennes de certains insectes ; cornes
des escargots; coup à la tête, qui se tuméfiant devient une
bosse au front. — Uno bano dé fougasso, un morceau de
fouace, parce que la fougasso, le gâteau des paysans, est
plate et formée en compartiments et en grillage ; un de ces
fragments ressemble done assez à une corne. Fla coumo la
bano d'un bidou, contre-vérilé, mou comme la corne d’un
bœuf. Chacun soun gous, dis lou prouvèrbe, coumo l'éoutre
qué sugavo uno bano, chacun son goût, comme disait
cet autre qui suçait une corne. S’és fa uno bano, il s’est
fait une bosse au front. La bano d’un tour, l'un des quatre
volants de la roue d’un tour à filér la soie. Cagardouléto,
so las banélos, chantent les enfants dans nos Cévennes,
comme ceux de Paris disent : Colimagon borgne, montre-
moi tes cornes. Nous rimons mieux.
Las banos, au plur, comme les cornes, sont, au fig.,
l'emblème d'un mari trompé.
Dér. probablement du celte; car on ne trouve l’atia-
logue de ce mot dans aucune des langues connues.
Bano, n. pr. de lieu, Bannes, village et commune de
l'Ardèche, sur les limites du département du Gard,
Du Cange cite Bano avec la signification de terrain
communal. L'étymologie de ce nom pourrait bien être tirée
de l'affectation du territoire à des dépaissances, ou à quel-
que autre servitude communale. Ce que nous ne pouvons
vérifier.
Banquaroutiè, tièiro, adj. Banqueroutier, ière, celui
ou celle qui a fait banqueroute,
BAO
Banquarouto, s. f. Banqueroute ; faillite; insolvabilité,
feinte ou réelle d’un négociant. !
Dér. de Banquo, banque, et de routo, fém. de row,
rompu. :
Banqué, s. m. Petit banc; tréteau de lit, de. théâtre. de
bateleur, de table à manger, etc.
Dim. de Ban, banc. '
Banquiè, s. m. Banquier; celui qui fait le commerce
de l'argent; à certains jeux de cartes, celui qui taille ou
joue contre tous les autres.
Dér. de Banquo. ?
Banquo, s. f. Comptoir de marchand; grand coffre à
hauteur d'appui, qui règne tout autour du magasin, ou
dans une partie seulement et sur lequel on montre et on
étalé la marchandise. Il y a un tronc au milieu, en tiroir,
où l’on fait tomber les espèces à mesuré qu'on les reçoit,
et dont on fait la levée et l'inventaire chaque soir.
Dér. de Ban, banc.
Banu, udo, adj. Cornu; qui a où qui porte des cornes.
— Un cho banu, un sot, un homme sans intelligence,
comme un hibou.
Dér. de Bano.
Bâou, bâoujo, adj. Niais, nigaud, badaud. — Qué siès
bâou ! Que tu es bête!
Dér. du lat. Balbus, bègue.
Bâoubècho, s. f. Bobèche, partie du chandelier où se
place la chandelle.
Emp. au fr.
Bâoudrado, s. f. Bôtise, balourdise, niaiserie ; école,
Dér. de Bdou.
Bâoudroi, s. m. Baudroie, galanga, raie pècheresse,
diable de mer; espèce de lophie, Lophius piscatorius, Linn.
Poisson de l’ordre et de la fam. des Chisnopnés (respirant
par une fente), cartilagineux, à corps plat, à évent près
des nageoires, à large gueule, qui semble n'être que tèle et.
queue. La Baudroie fait un très-bon potage.
Bâoudufo, s. f., où Boudufo. Toupie, jouet d'enfants
sabot. Ce mot ne s'emploie plus qu'au fig. Es pas pu bèl
qu'uno bâoudufo, il n’est pas plus grand qu'une toupie. Té
vire cowmo uno béoudufo, je te fais tourner comme une
toupie.
Qué sé trufo,
Diou lou bufo,
Et lou faï vira coumo uno bâoudufo. (Prvb.)
Les étymologistes sont fort divisés sur la dériv. de ce
mot ; elle est tirée du celte Bodwa, mamelle, à cause de
la ressemblance ; ou bot, boud, quia fait dans la bass.
lat. botta, d'où l'ital. bodda, crapaud, à cause de la gros=
seur. — Voy. Boudufo.
Bâoujoula, v. Porter un enfant au bras, le caresser, le.
Dér. du lat. Bajulare, porter un fardeau,
Bâoume, s. m. Baume, sorte de menthe, plante aro-
matique, plus particulièrement la menthe verte et .gen-
7 —
BAR
Aille.Aufig:se ditaussi d’un confortatif, d'un réconfortant dont
‘on exagère la bonté: Aquél.vin és un bdoume sus l'éstouma.
Dér. du lat. Balsarum.
Bâoumélu, udo, adj. Creux, caverneux ; se dit parti-
culièrement d'un arbre, d'une pièce de bois.
Dér. de Bdoumo.
Bâoumo, s. f. Dim. Bdouméto, péj. Bdoumasso. Grotte,
æavité naturelle; caverne; bauge du sanglier; terrier du
“renard; garenne du lapin. Ce mot a donné naissance à une
oule de noms propres de personnes et de lieux : Labdoumo,
-Bdoumé, Bdoumèle, Bdoumassiè, qui se traduisent en fr.
par Labaume, Baume, La Baumelle, Balmelle, Balmes,
Baumier, Baumassier, etc., qui signifient pour en dériver
en ligne directe et primitive : habitation ou habitant des
cavernes, des grottes : l'origine est ancienne et se rattache,
par une infinité de quartiers, aux troglodites. La Bdoumo
dé las Fados est le titre d'une des plus .jolies pièces de
‘ motre inimitable poète des Castagnados.
‘Bâouquo, s. f. Du verdage, espèce d'herbe graminée,
foin grossier qui pousse naturellement sur les talus et
berges des fossés et dans les bois taillis; c'est probable-
ment «du foin dégénéré en poussant dans des terres sèches
et trop fortes. On ne s'en sert guère que pour litière.
Aucune bête de labour, non plus que les moutons, ne
consent à s'en nourrir.
‘Bâouri, s. m. P6j. Bdourias. Précipice ; ravin profond
et escarpé, gorge étroite et sauvage; abime ; fondrière.
Dér.-peut-être du lat. Vallis rivus, ruisseau de vallée,
soude l'ital. also, précipice, du gr. Bélew, jeter, lancer.
Bar, s. m. Dalle, pierre plate large et carrée, pour car-
reler. = Bar:dé Mus, dalle des carrières de Mus, village
oprès de Nimes, d'où se tirent les meilleures dalles pour
<arreler ‘les fours à pain, parce qu’elles :sont réfractaires et
supportent très-bien l'action du feu. Bar dé saboù, une
sable de savon. C'est sous -cette forme que le savon est
Æabriqué et livré au commerce. Cette table a d'ordinaire huit
icentimètres d'épaisseur sur cinquante centimètres en carré.
»Bara, +. Fermer, en général; barrer, boucher ; bâcher |
une porte, la fermer et l'assujettir par derrière avec une
barre. — S'én fou bara lous iels, il faut s'en fermer les
æyeux, s’en consoler, en prendre son parti. Aqud baro l'és-
touma, ice spectacle vous:serre le cœur. Bara ‘sa boutigo, |
æst tout simplement fermer son magasin; mais bara ‘bou-
tigo, c'est cesser son commerce par suite de déconfiture on |
autrement. Baropas dé tout lou jour, il ne cesse pas de par- |
der de-toute la journée. :Bara lou camà, æouper leschemin,
entraver la marche, fermerla carrière à quelqu'un. Para un
trdou, boucher un trou. Se bara déforosé bara dédin, fer- |
smér da porte sur soi du dehors, ou-par dedans, $'enfermer. |
“Dér. de :Baro.
‘Baracan, s. m. Bouracan , espèce.decamelot, étoffe qui
-ÆEmp. au:fr.
“Baradis,-isso, adj. Qui peut se fermér ; fermant; ‘des-
BAR "1
tiné à être fermé. — Pagnè baradis, panier à couvercle.
Coutèl baradis, couteau de poche, qui se ferme.
Dér. de Bara.
Baradisso, s. f. Action souvent répétée de fermer et
d'ouvrir une porte, une fenêtre, un tiroir. — Aquélo bara-
disso finira lèou ? En finira-t-on bientôt d'ouvrir et de fer-
mer cette porte?
Dér. de Bara.
Baraduro, s. {. Fermeture, en général; boucheture
d’épines ou de fagots, pour empêcher l'accès d'un champ.
Ilest peu employé au propre. Au fig. il est usuel dans ce
dicton : Pdouro baraduro ! pauvre ressource! mauvais
pronostic! cela s'annonce mal.
Dér. de Bara.
Baragna, »v. Faire une haie vive, garnir de buissons ou
d’épines l'entrée d’un champ ou la crête d’un mur de eld-
ture ; clore, faire des haies avec des buissons.
Dér. du celt. Bar, barrière ; ou de l'esp. brena, hallier,
ou du lat. vara, barre : sans doute tous proches parents.
Baragnado, s. f. Haie vive ou non; échalier; toute
sorte de clôture en haie. Sur les bords du Gardon, et de
toutes les rivières torrentielles, on fait des baragnados
pour faire déposer le limon. On y emploie des ramées de
chêne-vert, serrées et assujetties par le sable etle gravier,
ou ‘des branches d'osier et de saule. Les premières sont
plus fortes; mais celles-ci, plus épaisses, ont l'avantage
de prendre racine, de durer plus longtemps et d’être plus
résistantes; aussi sont-elles préférées. On établit aussi des
baragnados en fagots de bois mort de toute sorte, pour
arrêter et faire amonceler les feuilles de châtaigniers que
le vent entraîne. Par ce moyen elles se trouvent ramas-
sées en tas, nettes de leurs hérissons et propres à la litière
de toute sorte d'animaux. — Un trdouquo baragnado, un
braconnier, un grapilleur, un homme qui ne respecte
aucune propriété ni clôture. Au fig., un éventé, un étourdi,
un hurluberlu. — Voy. Bartas.
Baragnas, s. m”. Haie naturelle ; amas de ronces et
d'épines, qui se forme sur les anciennes murailles démo-
lies; entrelacement de ronces ; buisson.
Péjor. de Baragno.
Baragno, s. f. Echalier platôt que haie ; clôture presque
toujours provisoire, moins forte et moins épaisse que la
baragnado.
Baragogno, s..f.Le même mot et la même signif. que
-Babarogno. — V. ©. m.
Baragouina, v.Baragouiner; parler d'une manière inin-
| telligible; bredouiller.
ÆEmp. au fr, quitire, dit-on, son 6tym. du bas-bret.
Bara, pain, et guin, vin, à cause de la confusion que font
scèux qui parlent mal la langue; mais que d’autres font
wenÿir du lat. Barbaricus, barbare.
Baraïa,v. — Voy. Varaïa.
Baraïè,s. m. Boisselior; ouvrier qui fait des baraux.
Dér. de :Bardou.
92 BAR
Baraje, s. m. Barrage, digue; déversoir en travers d'un
cours d’eau pour faire une prise d'eau.
Dér. de Bara.
Baralé, s. m. Baril, barillet; bidon des journaliers aux
champs; baril à huile; capron, baie de fraisier sauvage,
qu'il ne faut pas confondre avec la fraise des bois.
Dim. de Bardou.
Barandèla, v. Danser la barandèlo ou la bagatèlo.
Barandélaïire, aïro, adj. Danseur de barandèlo. Par
ext. un étourdi, inconsidéré, léger.
Barandèlo, s. f. — Voy. Bagatèlo.
Baranqua, v. Radoter ; battre la campagne; parler ou
agir à tort et à travers; ne savoir ce qu'on dit. — L'és-
coutés pas, baranquo, ne l’écoutez pas, il radote, il ne
sait ce qu’il dit.
Dér. de Ba, partic. rédupl., et de ranqguo, de rotulare.
Baranquaje, s. m. Radotage; paroles en l'air ou sans
suite; propos extravagants.
Baranquaïre, aïro, adj. Radoteur ; qui débite des rado-
teries, ou par vieillesse, ou par bêtise. Id., Baranqur,
urdo.
Baranquéja, v. rédupl, de Baranqua.
Barâou, s. m. Baral, v. fr., barrique à vin, longue et
étroite, qui sert, comme les autres, à transporter le vin à
dos de mulet; mesure de capacité pour les vins. Cette
mesure varie d’une localité à l’autre. Le Bardou d’Alais
contenait autrefois 27 pots ou 54 pintes de Paris. Le Ba-
rdou métrique contient 60 litres. — Entén bouto pér bardou,
il entend tout de travers ce qu'on lui dit; il prend des
vessies pour des lanternes, martre pour renard. Pou-bardou,
un puits public qui se ferme la nuit, de crainte d'accident
ou de mauvais dessein. Il y avait autrefois à Alais une
quantité de ces puits qui étaient situés dans un renfonce-
ment de rue et à couvert dans l'épaisseur d'une maison.
On les fermait la nuit; mais avec le temps les fermetures
avaient disparu, et ces impasses obscurs étaient dange-
reux ; On les a fermés et remplacés par des pompes. Un de
ces puits a donné son nom à une de nos rues, qui est appe-
lée encore : rue Puits-Baral. L'opinion que son nom lui
vient de la fermeture appliquée à son puits, est fort sou-
tenable; mais, dans ce mot que le languedocien persiste à
prononcer baral, et non baräou, et qu'il n’a pas eu l’idée
d'exprimer par baradis, ne trouverait-on pas aussi bien
une qualification tirée de la situation qu’il occupait, au
moment de son baptème, à l'extrémité de la ville? Puits-
Baral signifierait alors : puits situé aux barrières d'Alais,
sur la limite de la clôture de la ville. La rue Montagnasse,
qui reprend aujourd’hui son nom, s'appelait, au moyen âge,
rue Malbourguel, mauvais petit faubourg : elle est voisine
de la rue Puits-Baral ; sa dénomination ancienne viendrait à
l'appui de notre interprétation, en indiquant que, dans ces
temps reculés, la ville ne s'étendait pas plus loin.
Bardou, en lous cas, put trouver son étym. dans la
bass. lat. barrale, barile, barillus, d'un capitulaire de Char-
BAR
lemagne, avec la sign. de tonne ou de vase propre à con-
tenir un liquide quelconque, ou dans l'esp. barral, grande
bouteille ; ou enfin, comme baral, dans le’ celt. barr, qui
signifie non-seulement barre, barrière, mais tout ce qui
sert à renfermer, à contenir.
Baraquo, s. f. Dim. Baraquéto. Baraque, chaumière ; ;
maisonnette en mauvais état; hôtellerie de roulier sur les
routes ; baraque, échoppe, auvent, construit en planches
sur les places en temps de foire. — Aquél oustéou és uno
vidio baraquo, cette maison n’est qu'une mauvaise pauvre
baraque. Las baraquos dé Coudougnan, dé Fons, la bara-
quo dé Plagnéou, la baraquo dâou Péla sont connues, et
renommées sur nos routes départementales.
Dér. de l'esp. Baracca, cahute de pècheur.
Barato, s. f. Baraterie; dol, fraude, contrebande ; alté-
ration des liquides par mélange ; contrefaçon, tromperie.
Dér. de l'esp. Baratar, brouiller, tromper.
Barba, v. Pousser des radicules, prendre racine; se dit
surtout des boutures, quand elles commencent à barba, à
jeter leur tissu de radicules.
Dér. de Barbo.
Barbacano, s. f. Ouverture, fente laissée dans un mur
de soutènement, pour faire écouler les eaux pluviales.
Dér. de l'esp. Barbacana, m. sign.
Barbajôou, s. m. Grande joubarbe, artichaut de mu-
raille, Sempervivum tectorum, Linn. Plante de la fam. des
Crassulacées, grasse, vulnéraire et émolliente.
Dér. du lat. Barba Jovis, barbe de Jupiter, comme son
correspondant fr. Ces deux mots sont la métathèse l’un de
l’autre.
Barbajôou, s. m., ou Quiou-blan. Din Borbäjuilé.
Hirondelle à croupion dlanc} hirondelle de fenêtre; Hirundo
urbica, Temm. Le dessus du corps, partie d'un noir à
reflets bleuâtres, partie d’un noir mat, le restant d'un
blanc pur; queue fourchue. Cette hirondelle est la plus
commune dans nos contrées, où elle arrive quelques jours
après l'hirondelle de cheminée. Elle aime à placer son nid
sous la corniche des maisons et des grands édifices. —Æsca-
rabia coumo un barbaÿjéou, gai comme un pinson.
Ce mot a évidemment la même étym. que son homo-
nyme précédent. Cependant il est difficile de saisir les
rapports de cette origine, à moins que la queue fourchue
du volatile ne soit une image de la barbe du maître des
dieux.
Barbasta, v. Faire ou tomber de la gelée blanche. —
À barbasta sus sa tésto, Ses cheveux grisonnent, il a pra
sur ses cheveux.
Dér. de Barbasto.
Barbasto, s. f. Gelée blanche; givre. C'est le produit
de la condensation de la rosée et de toutes les vapeurs qui
exsudent de la terre. Barbasto exprime cet effet des grands
frimas d'hiver qui fait ressembler le sol à un champ de
neige ; plouvèno et jalibre (V. c. m.), sont plus particu-
lièrement ces gelées de printemps, ces giboulées, qui font
BAR
tant de mal à la vigne et à la feuille de mürier. Les con-
crétions de la barbasto sur les plantes et les arbres ressem-
blent à une sorte de barbe blanche. C'est de là que Sau-
vages fait dériver ce nom.
Barbata, v. Bouillir à gros bouillons; particulièrement,
faire un certain bruit en hbouillant, soit comme un grand
vase qui rend un bruit sourd en bouillant fortement, soit
‘seulement comme un potage qui mitonne sur un fourneau ;
‘chez l’un et l'autre, ce bruit est produit par le dégage-
ment de l'air, qui forme des globules qui crèvent et se suc-
cèdent instantanément. C'est ce qu'exprime ce mot par
une onomatopée saisissante.
Barbéja, v. Raser, faire la barbe, au pr. et au fig. —
L'avèn barbéja, nous avons eu de son poil, nous lui avons
gagné son argent.
- Dér. de Barbo.
Barbèl, s. m. Barbeau, Cyprinus barbus, Linn. Poisson
“d'eau douce; museau pointu, mâchoire supérieure fort
avancée avec des barbillons, dos olivâtre, ventre blanc ;
il croit vite et devient fort grand; sa forme ressemble
assez à celle du brochet. Il préfère un lit couvert de cail-
loux à un fond bourbeux.
Barbèl signifie aussi : un jeune gars, un blanc-bec.
L'une et l’autre de ces acceptions sont dér. de Barbo:
dans la dernière, parce que c’est l’âge où la barbe com-
mence à pousser; dans la première, parce que ce poisson
porte deux appendices où barbillons à la mâchoire supé-
rieure.
Barbéto, s. f. Terme de nageur, qui n’est employé que
dans cette expression : Faïre la barbéto, et signifie : ap-
prendre à nager à un apprenti en le soutenant de la main
par le menton, ce qui l'empêche d’enfoncer la tête, et lui
permet d'étendre le corps sans danger dans la position
horizontale. Au fig., prèter aide et appui, soutenir.
Dér. de Barbo, parce qu'on prend le nageur par la
“barbe, ou du moins au siége de la barbe; qu’on lui tient
le menton dans la paume de la main, comme font les bar-
-biers à leur patient pour le savonner, où plutôt comme ils
faisaient, quand il y avait des barbiers, et avant l’inven-
tion du pinceau à barbe.
.« Barbiè, s. m. Barbier, qui fait la barbe, qui rase. L'his-
toire des barbiers mériterait d'être écrite et conservée. Il y.
a un siècle, ils n'étaient point autres que des chirurgiens,
avec priviléges. Aujourd'hui, ils ont perdu leur droit de
: saigner, autrement qu’en faisant la barbe, et encore! mais |.
leur titre a totalement disparu, sinon la profession. — Lou
: barbiè de Sdouxé. Sauzet estun petit village, arrond. d'Uzès.
La tradition assure qu'il ÿ avait là un barbier qui non-seu-
lement rasait gratis, mais qui payait à boire à ses pratiques
par-dessus le marché. Sa pont nee
Den ee see siege + à
* Barbio, s. m. Petit homme barbu, bamboche à longues
\ snolonschasl Le mode de nos jours rend fréquente l'appli
_cation de ce mot.— Voy. Barbocho.
BAR 93
Barbo, s. f. Dim. Barbéto, péj. Barbasso. Barbe, poil
des joues et du menton; arôte de l'épi des céréales; filets
du tuyau d'une plume; radicules, filaments d’un végétal
quelconque. — Quand papiès parlou, barbos calou, quand
les titres parlent, les docteurs se taisent. Fariè la barbo
énd'un iôou, il trouverait à tondre sur un œuf. Nous faï
la barbo én toutes, il nous passe tous, il nous rendrait
des points. Barbo dé paño, visage de bois, dicton fort usité
et d’une application plus large que son correspondant fran-
çais : il s'étend à toute sorte de désappomntement, quand
on se voit trompé dans son attente. Bouvié sans barbo, atro
sans garbo, prvb., à jeune bouvier, pauvre moisson.
Dér. du lat, Barba.
Barbocho, s. m. Dim. Barbouchéto. Petit homme barbu :
même sens que Barbiè. (V. ©. m.) Barbichon; chien-
barbet.
Dér. de Barbo, parce que le barbet a beaucoup de poil
autour du museau.
Barbouïa, v. Balbutier ; bégayer; baragouiner ;. bre-
douiller.
Dér. du lat. Balbus, bègue.
Barbouïaje, s. m. Barbouillage, en discours, en écri-
ture, en peinture, en diction ; grifonnage ; gahmafrée.
Emp. au fr.
Barbouïur, uso, adj. Barhouilleur; bredouilleur ; grif-
fonneur.
Barbouti, v. Marmolter; chuchotter; parler entre ses
dents; murmurer tout bas; faire un à-parte; dire des
messes-basses, parler dans sa barbe.
Dér. de Barbo.
Barboutimén, s. m. Chuchottement, marmottement;
murmure ; messe-basse ; bredouillement.
Barbu, udo, adj. Barbu, qui a de la barbe, beaucoup
de barbe.
Barbudo, s. f. Chicorée sauvage, barbe de capucin,
Cichorium intybus, Linn. Chicorée barbue des prés, qu'on
mange en salade quand elle commence à pousser et qu’elle
germe encore dans la terre ; plus tard elle est dure et héris-
sée de piquants. C'est à cet âge peu tendre qu'elle a reçu
son nom.
Barbudo est aussi le nom des ceps de vigne d’un an, qui
ayant poussé des radicules, qui plus faciles à la reprise et
donnent plus tôt des produits.
Dér. de Barbo.
+ Barda, s. m. Carrelage en dalles ; pavé bardé avec des
dalles.
Dér. de Bar.
Barda, v. Couvrir, barder de lard un rôti; mettre la
- barde à une bête de somme; plaquer ou lancer contre les
murs ou sur le carreau. = Barda un perdigal, barder,
couvrir un perdreau de bardes de lard. Vaï barda la miolo,
l'ase, va-t-en mettre la barde à la mule, à l'âne. Lou bardè
- dou séou, il le jeta rudement par terre.
… Dér. dans lepremier sens de Zardo, dans le second de Bar.
9% BAR
Bardo, s. f. Dim. Bardèlo, péj. Bardasso. Barde, bar-
delle, espèce de bât ou de selle piquée de bourre; tranche
mince de lard appliquée sur une volaille.
Dér. de Barda, du lat. bardianum, espèce d’armure ou
de cuirasse des soldats gaulois.
Bardo, s.f. Dim. Bardouté, péj. Bardoutas. Espèce de
mulet, né de l’ânesse et du cheval. Cet animal, très-robuste
mais de forme peu élégante, est le souffre-misère de la
bande des mulets (coublo) ; c'est lui qui porte les bagages, et
le muletier par-dessus le marché. Au fig. butor, lourdatd ;
souffre-douleur. — Lou prénou pér bardè, on en fait le
bouc émissaire, un objet de mystification ; on le charge de
tout ce qu’il y a de plus pénible. Passa pér bardd, deve-
nir le jouet, être le dindon de la farce.
Ï y a une distinction à faire entre les deux Jocutions :
passa pér bardd et préne pér bardd. Que le premier dicton
s'applique à qui porte plus-que sa part des peines et des
fatigues communes, c’est bien cela, mais c’est encore autre
chose. La charge susdite du bardot ne pouvant figuret sur
une lettre de voiture, il ne comptait pas lui-même au
nombre des mulets qui composaient la caravane. C’est dans
ve dernier sens qu'est prise la première locution, appliquée
à une personne qui, dans une dépense à faire, dans une
charge quelconque à supporter en commun, trouve moyen
de s'exonérer de son écot, de sa tâche; passe commié on
dit par-dessus le marché, et par conséquent ne compte pas
non plus.
Pour le deuxième dicton : -Bardè, au fig., signifie un
lourdaud, un imbécile, un sot et grossier personnage, dont
on se moque, dont on abuse, à qui l’on fait porter aussi
double bât, double charge; et l'individu qu'à toft ou à
raison on considère comme tel.ét que par conséquent ‘on
traite de cette manière, on le prend'pour bardot : il devient
alors chef d'emploi de doublure qu'il était, et la copie vaut
l'original.
Dér. du gr.Bæpèés, lourd, lent.
Barguigna, v. Barguigner; hésiter; balancer ; être in-
décis, embarrassé.
Dér.-de la bass. lat. Barcaniare, marchander. Ce der-
nier mot venait lui-même du lat. in barcam ire, aller:sur
une barque, parce que le mot harca était à proprement
un ‘esquif, ‘ou embarcation, sur laquelle les trafiquants
allaient et venaient, dans le-port, d'un mavire à l'antre,
pour traiter avec les patrons.
Barguignaïre, aïro, «dj. Péj. Barguignaïras, (ässo.
Barguigneur; marchandeur. — Voy. Raïsséjaïre.
Bari, s.m. En vieux languedocien, Rempart; barrière. —
La carièiro dâou Bari, la rue du Rempart, qu'on a.æu le
bon esprit-à Alais de.ne pas franciser et qui s'appelle tou-
jours la rue du Barry. Lou müioù bari.és la .pès, le meil-
leur boulevard d'une ville, c’est la paix. Suivant la fameuse
devise, ce devait être aussi eelni de l'empire; mais-depuis…
Esfouïro-bari d'Aoubénas,.c'est-le vieux surnom. que l'on
donnë aux habitants d'Aubenas. 41-est sans doute glorieux
BAR
pour eux, puisqu'il doit signifier : qui sape les remparts,
sapeur de remparts. :
Dér. de la bass. lat. Vara ou barum, barricade, enceinte,
clôture, faite avec des poutres, premiers remparts des
villes, ou plutôt des villages qui devinrent des villes et
des places de guerre sous la féodalité, dans un temps où
tout le pays était couvert de forêts. On se servit ensuite
de l'expression, un peu modifiée, barium, pour mur de
ville fait de poutres, et le nom resta quand les pierres rem-
placèrent ces remparts trop faibles. Un prvb. disait, et il
justifie la dériv. : À bari bas éscalo noun féou.
Barièiraïre, s. m. Préposé aux barrières, à l'octroi,
commis aux barrières à la perception des droits d'entrée
dans les villes.
Dér. de Barièiro.
Barièiro, s. m. Barrière. — Les villes, qui n'avaient
pas des portes, avaient des barrières, ne füt-cerque pour
empêcher la contrebande et assurer les péages. On les pla-
gait même quelquefois à des distances assez éloignées, qui
agrandissaient le rayon autour des villes ou des châteaux
féodaux ; et les noms, qui persistent encore, en conservent
le témoignage, comme les anciennes chartes d’établisse-
ment. Un décret consulaire imposa un droit de péage à
l'entrée des villes pour les chevaux et les voitures, et pour
la perception on y plaçait des barrières mobiles. Ce droit
fut converti par la loi de frimaire.an VIl en octroi muni-
cipal, et les bureaux d'octroi occupèrent le même empla-
cement que les barrières. Ce n’est même que sous le nom
de barièiro que sont connus ces bureaux et -le quartier
qu'ils occupent. Ainsi, on dit à Alais la Barièiro ddou
Mas-dé-Négre pour désigner le bureau d'octroi du Mas-de-
Nègre.
Dér. de Bara.
Baril, s..m. Dim. Barïé. Baril, petit tonneau, :barrique
à huile; barillet, petit baril. —-Un baril dé sardos, tune
barrique de sardines. Un baril d'anchoïo, un baril d'an-
chois. Un baril d'oli, un baril d'huile.
Dér. du celt. Barr, vaisseau, d’où la bass. lal.! barillus,
baril.
Barioto, s. f. Brouette, espèce de petit tombereau, à
une-roue-et deux bras, 'traîné ou poussé par une personne.
— Voy.-Brouétlo où Brouvèto.
Dér. de Ba, rédupl,-et.du lat. rota, roue, parce «que
dans le principe-elles-avaient une double roue.
Bariïoù, +.m.Barillon, engin destiné à confectionner
des trousses, de grosses bottes de foin ou -de: paille. C'est
ane sorte de filet, composé de deux barres «t -de cordes
non-eroisées : un réseau ou tramail à cet usage.
Dér.-de Baro, dont:il-est un dimin.
Bariquo, s. f. Barrique, grand baril. A1 ne se-dit -que
du baril qui sert-de çaque aux anchois etaux sardines:Qn
-se.sert de ces barillets pour les chapelets .de puits-à-roue.
— La musiquo és: din la:bariquo, disent les chantres-et an
peu sans doute les chanteurs, dont la réputation test aussi
BAR
d'être bons buveurs; mais alors ils parlent de bariquo,
dans sa grande dimension, gros tonneau servant à, conte-
nir du vin. — Au fig. eten style fam. ce mot signifie le
ventre, les intestins. — Té vou eréba la bariquo, je te
crève le ventre, En esp. on dit aussi dans le même sens
barrica, ventre.
Dér. du celt. Barr, vaisseau, ou du lat, barillus.
Barisquo-Barasquo, adv. Onomatopée exprimant l'ac-
tion de quelqu'un qui, une barre à la main, comme une
faulx, renverserait ou briserait tout ce qui est à sa portée.
Au fig. brutalement, bruyamment,
Dér. de Baro.
Barja, n. pr. de lieu. Barjac, ville et canton de l’arron-
dissement d’Alais.
Cette petite ville est mentionnée dans les anciennes
chartes avec quelques altérations dans son nom : en 1076,
de Bariado ; en 1077, de Bariae; en 4084, de Bargiaco ;
.en 4131, de Bargago; en 1132, de Barjago; en 1171, de
Barjaco ; en 1194, de Bargiaco. En fr. on écrivait Barjac
ou ;
Abstraction faite de la désinence adjective ae, acum, et
en lang. a, où le « final est supprimé (V. a, an, suff.), la
forme Ja plus ancienne du mot semblerait indiquer son
étymologie de la bass. lat. barium au plur., avec le sens
de mænia, fortification, selon Du Cange, et Barja signife-
rait alors village fortifié. Mais n'a-t-elle pas été prise peut-
être du celt. berg, éminence, hauteur, d'où est venu le
vieux mot barge, aujourd'hui berge, ou mieux peut-être de
la bass. lat. baria ou beria, locus scilicet arboribus desti-
tutus, dumetis verd vepribusque refertus? (Voy. Du Cange,
Ve Berra.) On ne trouve pas en effet dans le territoire de
grandes forêts, mais de petits bois. Le nom d’un lieu voisin,
Bérias, dans l'Ardèche, pourrait servir d'indice, au moins
par analogie de situation, de, nature de terrains et d’aspect
Il y a dans le Gard deux autres localités du mème nom,
Barja, hameaux des communes de Monteils el de Trèves,
où la topographie et le sol confirmeraient notre dernière
a, +. Maquer le chanvre, le broyer avec la maque,
— Ce mot semble une contraction du fréquentatif Baréja,
qui n’est pas dans la langue, mais qui signifierait jouer de
la.barre, passer à la barre : parce que les mâchoires de Ja
maque à chanvre ont bien pu dans l’origine n'être que de
simples barres à broyer. — Dans le dial. prov. maquer se
dit brégea, rapproché de broyer, dér. de l'allem. brechen,
rompre, briser; de cette origine germanique, le langued.
aurait bien pu conserver bar où ber pour bérja et barja,
avec le mème sens de briser et broyer.
Barja, v. Jaser ; babiller; jacasser ;. caqueter ; jahotter.
— Barja coumo la bèlo Jano, babiller comme une .com-
mère, diable té.barje! Au diable ton babil !
Dér. du celt. Bajol ou du gr. Baïw, habiller, bre-
douiller.
BAR 95
Barjadisso, s. f. Bavardage ; longue causerie; babil
ennuyeux. et insupportable,
Dér. de Barja.
Barjaïre, aïro, adj. Babillard, qui aime à causer; qui
ne cesse pas de jacasser. — Voy. Barjdou.
Barjalado, s, . Bisaille; trémois; menus grains ; menus
blés; semences de mars; mélange de paumelle et de vesce
dont on fait un pain grossier. On sème ainsi en mars, de
barjalado, les terres que le manque de temps ou les lon-
gues pluies ont empèché d’ensemencer en automne. —
Aqud's pas qué dé barjalado, c'est de la ripopée.
Dér. du lat. Farrago, toutes sortes de grains.
Barjäou, âoudo, adj. — Voy. Barjaire.
Barjios, s. f. plur. Chenevottes, débris du chanvre
broyé, maqué, avec quoi on faisait les allumettes soufrées,
avant que l'usage des allumettes chimiques, à frottement,
à phosphore, à explosion soudaine, plus dangereuses mais
plus rapides à s'enflammer, eût fait oublier les premières,
— Dansa sus las barjios, sauter de joie, être dans le ravis-
sement. Quand la culture du chanvre était une industrie
dans nos contrées; quand arrivaient les barjios, la récolte
était finie, et c'était fête et repos; on pouvait danser.
Dér. de Barja, maquer.
Barjo, s. [. Maque, brisoir, banc à maquer le chanvre;
babil, jacasserie, superfluité de paroles, — N'a pas qué dé
barjo, il n’a que du babil, il n’y a point de fond.
Barlaqua, v. Mouiller, tremper; agiter dans l’eau ;
plonger dans l’eau,
Sé barlaqua, se tremper jusqu'aux os; se vautrer dans
l'eau et dans la boue; se saucer par la pluie.
Dér. de Bar, en v. lang. boue, fange, limon, et laque,
vautrer,
Barlaquado, s. {. Mouillure, soit qu'elle vienne.en jetant
à l'eau quelqu'un ou quelque chose, ou s’y plongeant soi-
même, soit par l'effet de la pluie qu'on reçoit. — Aï éndura
uno bono barlaquado, j'ai supporté une grosse averse.
Dér. de Barlaqua.
Barnaje, s. m. Fouillis, embarras; hardes, meubles,
entassés en désordre. Au prop. effets personnels qu'on prend
en voyage.
Ce mot me parait la contraction de Barounage, qui vou-
lait. dire l’ordre des barons, équipage de baron ; ou plus
} simplement, du gaulois barnage, bagage désignant le train
d’un grand seigneur. — Voy. Baroun.
Baro, s. f. Dim. Baréto, baroù, barïoù, péjor. Barasso.
Barre ; pièce de bois ou de fer, longue et peu épaisse; tra-
verse.; perche; latte.— Baro dé caréto, enrayure de
charrette. Baro dé galigné, juchoir. — Sé préne uno baro!
si je prends un bâton! Propre coumo La baro d'un galigné,
propre comme le perchoir des poules. Métre la baro à la
porto, bâcler une porte. Nous ajudaras à pourta la baro,
tu nous aideras à porter le joug, dit-on à un nonveau marié.
Dér. du-Jat. Vara, traverse, pièce de bois mise.en tra-
vers, d’une porte. |
96 BAR
Baroù, s. m. Bâton de chaise; traverse de bois rondin,
qui sert à soutenir les tables de vers à soie et qui porte
elle-même sur les chevilles des montants. Quand ces tra-
verses sont en bois scié, on les appelle jaséno. — V. c. m.
Dér. de Baro.
Barougné, s. f. Baronnie; titre de baron ; terre baron-
niale, château baronnial. — Le quartier où s'établit aujour-
d'hui l'avenue de la nouvelle gare du chemin de fer, l’em-
placement de l'hôtel du Commerce, et tout ce pâté de mai-
sons, ainsi que la première gare, faisaient partie de ce
qu'on appelait autrefois à Alais la Barougnè, quand la
ville et son territoire étaient divisés en deux juridictions,
celle du baron et celle du comte; ce dernier avait aussi
des possessions vers le quai de la Comté, rappelant ce sou-
venir.
Baroun, s. m. ; au fém. Barouno. Dim. Barouné, péjor.
Barounas. Baron, titre de noblesse. — Le sort de ce mot
a été bien divers : lors de son premier emploi, dit Honno-
rat, il signifiait homme vil, ensuite homme en général, et
il n’est devenu un titre d'honneur que vers l’année 567.
En italien, le mot barone signifie tantôt noble, vaillant,
puissant, et tantôt brigand, voleur, vaurien. Les extrèmes
se touchent.
Dér. du v. lang. Bar ou baro, vir, homme. Les rois appe-
laient barons leurs vassaux immédiats. Ils disaient indif-
féremment : mon baron ou mon homme, pour homme
d'armes.
Barounéja, v. Se montrer baron ; se vanter de l'être ;
se donner des airs de grand seigneur.
Dér. de Baroun.
Barquado, s. f. Batelée ou barquée, plein une barque ;
le chargement d’une barque. — Empouisounariè uno bar-
quado dé crucifis, dict., il ferait faire naufrage, il porte-
rait malheur à une barque chargée de crucifix.
Dér. de Zarquo.
Barqué, s.m. Batelet; bachot; canot; esquif.
Dim. de Zarquo.
Barquéto, s. f. Petit bateau, petite barque ; barquerolle ;
barquette, espèce de pâtisserie, de, gaufre, en forme de
barque.
Dim. de Barquo.
Barquiè, barquièiro, adj. et s. De barque, qui tient à
une barque; batelier, patron d’un bac sur une rivière ; pas-
seur.
Dér. de Barquo.
Barquo, s. f. Péjor. Barquasso. Barque ; bac; tartane;
allège. — Sa barquo toquo, sa barque échoue; il est au
bout de son rouleau ; ses affaires vont mal. Ména bièn sa
barquo, bien conduire ses affaires. Coumo vaï la barquo?
comment va la santé? comment vont les affaires?
Dér. du lat. Barca. |
Bartas, s. m. Dim. Bartassoù. Hallier, buisson épais,
touffe de ronces et de broussailles ; au pr. touffe de bois
taillis non élagué. — Amouroùs coumo un bartas, par
BAS
contre-vérité, doux comme un fagot d'épines. Un sdouto-
bartas, a beaucoup de rapport avec trdouquo-baragnado
(Voy. Baragnado), et je n’y vois d'autre np 8 que
celle de l’escalade à l’effraction.
Le poète Salluste du Bartas était certainement méridional
par son nom; né dans le nord de la France, il se fût appelé
du Hallier ou du Buisson, avec ou sans séparation de
l'article; nous ne savons.
Dér. de la bass. lat. Barta, buisson, hallier, ou par l’ad-
dition d’un r, du grec Béros, buisson.
Bartassado, s. f. Fourré de bois; lieu rempli de hal-
liers, où il est difficile de pénétrer ; grande touffe de buis-
sons.
Dér. de Bartas.
Bartasséja, v. Battre les buissons et halliers, terme de
chasseur ; quêter le gibier en fouillant les buissons.
Bartassoü, s. m. Branche basse, ou plutôt rejeton de
chène vert, rabougri et ravalé, et par cette raison plus
épais, plus touffu, dont on se sert pour ramer les vers à
soie en les mêlant avec la bruyère. Avant de les employer,
on les fait sécher et on les dépouille de leurs feuilles, en
les battant contre un mur. L'éducateur cévenol, supersti-
tieux observateur des lunaisons, ne coupe les bartassoùs
que pendant la nouvelle lune, sans quoi il arriverait que
le bois en serait de suite vermoulu et se briserait en le
frappant. D’après lui, tous les arbres verts doivent être
coupés en lune nouvelle, et tous ceux qui perdent leur
feuille, après la pleine lune, sous peine des vers.
Dim. de Bartas.
Barunla, vw. Rouler; courir; rôder; vagabonder. —
— Barunlè lous éscaïés, il roula l'escalier.
Rédupl. de Runla. — V. ©. m.
Barunlaïre, aïro, adj. et s. m. Vagabond; batteur
d’estrade; coureur ; rouleau, cylindre mobile qu’on roule
sur une terre nouvellement ensemencée pour aplanir da
crête des sillons et raffermir le terrain.
Dér. de Barunla. .
Barunlo, s. f. Pente escarpée et rapide ; terrain qui va
en descendant, très-incliné. — Préne la barunlo, être
entrainé par la pente, dégringoler, au pr. et au fig.
Dér. de Ba, signe du rédupl. et du lat. rotula, petite
roue.
Barutèl, s. m. Claquet ou traquet d’un moulin ; blu-
teau, blutoir; sas. Au fig. babillard sempiternel, bavard
dont le caquet imite le bruit incessant d’un traquet de
moulin. î
Dér. du lat. Volutare.
Bas, basso, adj. Dim. Bassé, péj. Bassas. Bas, pro-
fond ; qui a peu de hauteur.
À bas, adv. A bas; doucement.
En bas, où Dé bas, adv. En bas, au fond.
L'émbas où Lou débas, s. m. Le bas; par rapport au
premier étage d’une maison; le rez-de-chaussée ; le fond.
— Lou vin és bas, le tonneau est au bas. Dé la cénturo én
nn. sé
BAS
bas, de la ceinture aux talons. Es à bas, il est tombé,
détruit, par terre.
Dér. de la bass. lat, Bassus.
Bas, s. m. Dim. Basté, péj. Bastas. Bât, espèce de selle
très-forte pour bêtes de somme, servant au transport. —
Anén plan, lou bas sé bagno, Où sé moïo, doucement, ceci
commence à se gâter (Voy. Bagna). Pourta lou bas, payer
l'acquit pour les autres ; avoir tout le souci.
Dér. du celt. Bast, d'où la bass. lat. aurait fait bastum,
bât; ou bien du gr. Bxsxés, bâton avec lequel on porte les
fardeaux, forme de Basé£ew, porter une charge.
Basacle, s. m. Terme de comparaison à tout ce qui est
large et grand.— Aquéles souïès soun dé basacles, ces sou-
liers sont démesurément larges. Il existe à Toulouse une
grande minoterie de ce nom sur la Garonne et le canal
Brienne. Est-ce ce nom qui est devenu type, ou bien
vient-il lui-mème de ses grandes dimensions ; ou enfin ces
-deux acceptions existent-elles indépendantes l'une de
l'autre? Cette dernière hypothèse parait plus raisonnable.
Le mot Basacle est ancien dans l'idiome, tandis que le
moulin du Basacle a été construit sous l'administration de
Mgr de Loménie de Brienne, archevèque de Toulouse, qui
a laissé son nom au canal sur lequel il est construit ; ce
qui ne fait remonter son établissement que vers les années
qui touchent à 4789. Son architecture ne présente pas une
date beaucoup plus ancienne, en supposant qu’il ne se fût
agi alors que d’un agrandissement. Du reste, ce mot parait
dér. du lat. Vasculum, vase, vaisseau.
Basali, s.m. Basilic, serpent ou lézard, animal fabuleux,
dont le regard, dit-on, donnait la mort, s’il voyait l'homme
avant que l'homme l'eùt vu. On croyait, et qui dirait que
bien des gens ne croient pas encore? qu’il provenait des
œufs d'un vieux coq. Dans les Castagnados, le marquis de
la Fare-Alais a chanté cette légende et a dédié cette pièce à
Jean Reboul : deux noms fraternels ! deux gloires locales !
Dér. du gr. Bacs, royal.
Basali, s. m. Basilic, Ocymum basilicum, Linn., de la
fam. des Labiées, plante annuelle, aromatique, que le popu-
laire cultive avec soin dans des pots cassés: Les jeunes
gens des ,deux sexes, quand ils sont endimanchés en été,
ne se passeraient pas d'un brin de basilic à la bouche, à la
main ou sur le sein. C’est le patchouli cévenol. On peut
l'appéler aussi l’oranger du savetier, car il n’est guère de ces
artisans qui n'en aient un pot dans leur boutique. Notez qu'on
ne dit point vase, attendu que c'est presque toujours un vieux
pot hors de service et chassé de la cuisine, qu'on emploie à
ce dernier usage. — Enguén-basalà, basilicon, onguent.
Mème étym. que le mot précédent.
Bassaqua, v. Caholer; secouer; remuer d’un côté à
l'autre ; ballotter comme un sac.
Dér. de Ba, particule rédup., et de sa, saquo.
Bassaquamén, s. m., ou Bassaquado, s. f. Secousse ;
cahot, cahotage d’une voiture.
Mème dér. que le mot préc.
BAS TT
Bassaquo, s. f. Paillasse de lit; sac à paille; large sac
dans lequel se plient les bergers dans leur cabane, et sur-
tout lorsqu'ils bivouaquent dans les pâtis des montagnes.
Mème dér. que Bassaqua.
Bassarèl, s. m.— Voy. Bassèl. m. sign.
Basségou, s. m. Timon d’une charrue, d’un araire;
brancard d’un puits à roue, auquel est attelé le cheval qui
met en mouvement son mécanisme.
Dér. du lat. Baculus, bâton.
Bassèl, s. m., ou Bassarèl. Battoir de lavandière, palette
de bois dont elles se servent pour battre le linge en lavant.
Au fig. soufflet, tape à main plate.
Dér. du lat. Baculus, dim. Bacellus.
Basséla, v. Battre le linge avec le bassèl. Au fig. frap-
per, battre comme plâtre; frapper à coups redoublés ; par
ext. tourmenter, inquiéter.
Dér. de Bassèl.
Bassélaje, s. m. Bruit de battoir de lavandière; ou
tout autre bruit ou tapage qui lui ressemble par la fré-
quence des coups.
Dér. de Bassèl.
Bassèsso, s. f. Action indigne d’un homme ou d’une
femme d'honneur ; action honteuse ; une faiblesse chez le
sexe. — À fa uno bassèsso, il a commis une lächeté.
Emp. au fr., le mot, mais non le sens.
Bassina, s. m. Au plur. Bassinasses. Cocons qui ne
peuvent achever de se dévider dans la bassine, soit qu'ils
aient été attaqués par les rats, qui auraient rompu la suite
du fil, soit parce que le papillon aurait commencé à les
bouchonner intérieurement, comme on le voit à l’article
Baba, ou bien encore que le fil serait bouchonné naturelle-
ment (Voy. Troumpéto), ou enfin que le fil soit tellement
inconsistant qu'il casse à chaque instant.
Dér. de Bassis.
Bassina, v. Bassiner, chauffer avec une bassinoire ; bas-
siner, fomenter en mouillant avec un linge imbibé ou avec
une liqueur tiède. — Sé bassina l'éstouma, se réconforter
le cœur par la boisson, se réchauffer par quelques rasades.
Dér. de Bassino.
Bassinado, s. f. Contenu d’une bassino, plein une bas-
sino. — Bojo dé plèjo à bèlos bassinados, la pluie tombe
à seaux.
Dér. de Bassino.
Bassiné, s. m. Bassinet d'un fusil, d’un pistolet ; partie
creuse d’une arme à feu qui reçoit l’amorce. — Féou cra-
cha dou bassiné, il faut payer d'avance, payer comptant :
c’est d’un petit bassin, d’une sébille à quêter qu'il s'agit
dans ce dicton, et non du bassinet d'une arme quel-
conque.
Dim. de Bassis.
Bassino, s. f. Cuiller à seau pour puiser de l'eau. Elle
est ordinairement en cuivre. Quelquefois, pour éviter le
vert-de-gris, la queue seulement est en cuivre et le bassin
en étain.
98 BAS
Depuis que le français s'est emparé de ce mot pour
exprimer le vaisseau où l’on fait bouillir les cocons dans
une filature, le languedocien l’a suivi dans cette voie ;
mais sous cette dénomination il ne désigne que la bassine
en poterie des nouvelles filatures. — Voy. Bassis.
Bassis, s. m”. Au plur. Bassisses. Bassin ; vivier ; plat
à barbe; particulièrement, bassine à filer les cocons. Le
bassès était autrefois en fonte ou en cuivre pour résister à
l'action directe du feu; dans les filatures à la vapeur ou
à la Gensoul, ils sont simplement en poterie.
Dér. du gaulois Bachinou, bassin; la bass. lat. avait
bacinus, formé de l'allem. back, signifiant lac; dim.,
bassin. »
Basso-cour, s. f. Cour, basse-cour. — Le lang. exprime
l'une et l’autre acception.
Emp. au fr. .
Bassoù, s. f. Profondeur; ce qui est bas et profond.
Dér. de Bas.
Bastar, ardo, adj. Dim. Bastardoù, ouno. Bàtard,
enfant naturel. En terme d'agriculture, sauvage, sau va-
geon.
Dans cette dernière application, on dit tantôt bastar,
tantôt Vouscas ; l'usage seul indique les différents emplois.
En général cependant l’adj. bastar s'accole aux simples et
aux plantes potagères, et bouscas aux arbres et arbustes.
On dit : api bastar, aïgréto bastardo, et castagnè bouscas ,
périè bouscas. Il ÿY a une distinction qui parait plus tech-
nique encore : on dit bastar d'un végétal qui, quoique de
la mème famille que celui qui lui sert de type, en diffère
par sa nature et sa production; tandis que Douscas est pro-
prement le sauvageon, qu'on peut assimiler au type en
l'entant.
Le dim. Bastardoù, ouno, ne se prend jamais qu'en par-
lant d’un enfant illégitime, naturel.
Dér. du gr. Basodpz, femme prostituée.
Bastardiè, ièïro, adj. Préposé des hôpitaux qui va
conduire les enfants-trouvés en nourrice.
Bastardièiros, s. f. pl. Comportes, grands paniers
d'osier doubles, où l'on dépose les enfants-trouvés pour les
transporter à dos d'âne chez leurs nourrices.
Bastardije, s. f. Bàtardise; état de celui qui est bâtard ;
signe de bâtardise.
Bastarduégno, s. f. La gent bâtarde; les enfants-trouvés
pris collectivement ; les bâtards en général.
La dérivation du mot n’a pas besoin d'être expliquée,
tant elle est naturelle. Au substantif est joint Je suffixe
uègno, qui marque la collectivité ; il est peu fréquent et
propre à notre dialecte. On le rencontre dans éfantuègno,
trassuègno, avec la même idée collective.
Baste ! adv. Plût à Dieu! A Dieu plaise! — Le fran-
çais a également le mot baste, peu usité et familier, qui
signifie : soit, passe pour cela, j'en suis satisfait. Dans le
lang., Baste! exprime un souhait. Ce n’est donc que la
différence du vœu, du désir à l'approbation : une nuance.
BAS
Les deux mots ont évidemment la mème origine. Baster,
verbe neutre, impers., anciennement en fr., ne s’est con-
servé qu’à l’impér., comme en lang. l’ancien verbe Basta.
L'un et l’autre devaient être contemporains et procédaient
d'une source commune avec l'ital. Bastare, sufire, qui
fait basta, il suflit. La racine doit donc être la même pour
tous, et elle ne peut être que dans le lat. bené stare, qui
répond à toutes les acceptions dans les trois langues.
Basté, s. m. Mantelet, sellette d’un cheval de trait, qui -
supporte le brancard ou limonnière.
Dim. de Bas, bM.
Bastéja, v. Charrier à bât, à dos de mulet ou d'âne;
transporter sur le bât ; porter le bât.
Dér. de Bas, bât.
Basti, v. Bâtir, construire en maçonnerie; établir ; battre
violemment, frapper, jeter contre le mur. — Lou roussi-
gnéou couménço dé bast}, le rossignol commence à bâtir
son nid. Bastè sus lou davan, en parlant d'un homme,
engraisser, prendre du ventre; d’une femme, être enceinte ;
avancer dans sa grossesse. Bastirièi aquél drole, quand
bado coumo aqud, je souffletterais cet enfant, quand il crie
de la sorte. Quéow m'a bastà aquél qusas? qui m'a amené
ce gueux-là?
Dér. du gr. Bxstés, bâton, parce que dans les premiers
âges on construisait les maisons avec des perches et des
barres.
Bastido, s. f. Maisonnette de campagne ; villa.
En Provence, et à Marseille surtout, ce nom a été donné
aux pavillons et aux maisons des jardins qui sont dans la
banlieue des villes. Il ne s'applique qu’à des maisons
d'agrément, et non aux fermes et aux bâtiments d’exploi-
tation.
Dér. de Basti.
Bastiè, s. m. Bourrelier; ouvrier qui fabrique des bats;
celui qui fait et vend tout l'équipage des bêtes de somme,
bâts et gros harnais.
Dér. de Bas, hât.
Bastimén, s. m. Navire, vaisseau. — Il est impropre
de s’en servir pour désigner un bâtiment sur terre, un
édifice.
Dér. de Basti.
Bastisso, s. f. Bâtiment, construction en maçonnerie ;
toute chose bâtie; action de bâtir ; frais de construction.
— Aïimo la bastisso, il a la manie de faire bâtir, la maladie
de la truelle. Aquélo acdou faï dé bono bastisso, ce mortier
fait une excellente prise. La bastisso la arouina, la manie
de bâtir l’a ruiné.
Dér. de Bast.
Bastoü, s. m. Dim. Bastouné, péj. Bastounas. Bâton ;
canne ; long morceau de bois, brut ou travaillé, que l’on
porte à la main pour se soutenir, pour parader, pour con-
duire des animaux, pour se défendre, etc. — Séras moun.
bastoù dé vidièsso, tu seras mon bâton de vieillesse; mon.
appui, mon soutien dans mes vieux ans. Tour ddou bastoù,
BAT
tour de bâton, pour dire profits casuels et illicites d’un
emploi.
Dér. du gr. Bastés.
Bastounado, s. f. Bastonnade ;
bâton.
Batacla, v. Bâcler une affaire, la terminer rondement,
promptement; finir un ouvrage rapidement, tambour-bat-
tant. — Séra lèou batacla, ce sera bientôt troussé.
Dér. du lat. Baculare, fermer avec un bâton.
Bataclan, s. m. Avoir, mobilier d’une maison; nippes
et argent ; équipage; étalage; batterie de cuisine ; attirail
de ménage. — À éseudéla tout soun bataclan, il a dissipé
tout son saint-frusquin. Empourtas tout voste bataclan,
emportez tout votre attirail, tout ce qui vous appartient.
En provençal, on dit Pataclan, c'est évidemment le
même mot. Cette homonymie ne pourrait-elle pas mettre
sur la voie de l'étym. ? Ne dériverait-il pasalors de Pato,
“chiffon, tiré du gr. Mérnux, chose vile, et de Kkéw, rompre,
briser, Kiéoua, éclat, morceau ?
Batado,'s. f. Dim. Batadéto, péj. Batadasso. Empreinte
de la patte d'un animal.
Dér. de Bato.
Bataïa, v. Bavarder ; brailler ; babiller; batailler en
paroles.
Dér. du lat. Batuere, combattre, se disputer.
Bataïaïre, aïro, adj. Péjor. Bataïairas, asso. Babillard ;
braillard; bavard qui aime la discussion.
Dér. de Bataïa.
Bataïo, s. f. Bataille; batterie, querelle entre des com-
battants. — Faïre la bataïo, jouer à la bataille, à coups de
fronde. C'est une sorte de petite guerre qui a été fort en
vogue chez les enfants et jusque chez les gars de quinze à
dix-huit ans, sous le Directoire et le Consulat. Les diffé-
rents quartiers d'une ville se formaient sous des bannières
différentes. Ce jeu avait fini par donner lieu à des études
de stratégie et de ruses de guerre fort savantes. La police
alors se montrait peu répressive aux développements de
cette science, et les enfants avaient d'autant plus de zèle
et de loisir pour cet exercice qu'on trouvait peu d'écoles
de ce temps. Pendant l'Empire, il y avait ailleurs trop
d'occasions sérieuses de batailler pour chercher des amuse-
ments dans limitation. Plus tard, la police mit bon ordre
à des jeux qui avaient voulu reprendre leurs anciennes
proportions. Sous le nouvel empire, ces divertissements
enfantins seraient moins tolérés que jamais. La paix n'est-
elle pas son principe ?
Emp. au fr.
Bataïoun, s. "”. Bataillon; grand nombre, multitude ;
* foule.
Emp. au fr.
Batanlul, s. m. Espèce de coiffe, de bonnet de femme,
dont la dentelle descend sur le front-et les Yeux: comme un
demi-voile.
Dér. du fr. Battant-l'œil, terme que la mode consacra
volée de coups de
BAT 99
dans le temps, et qui a passé avec elle. L'expression, qui +
est restée générique en languedocien, a survécu.
Batéiè, ièiro, adj. Dér. de Batèou. — Voy. Barquié.
Batéire, éiro, adj. Qui aime à battre, qui cherche
noise ; querelleur ; disputeur.
Dér. de Batre. .
Batéja, v. Baptiser, donner, conférer le baptème; donner
un sobriquet à quelqu'un ; asperger d'eau la tête de quel-
qu'un par plaisanterie ; tremper, arroser d’eau.— Batéja lou
vi, tremper le vin. Couro batéjes ? Quand feras-tu baptiser
ton enfant ? c'est-à-dire quand ta femme accouchera-t-elle ?
L'an batéja émbé d'aïgo dé mérlusso, c'est un mauvais
chrétien, un mal-baptisé. Batéja souto'n cade; quand les
protestants n'avaient point le libre exercice de leur culte,
c’est dans les champs, au désert, qu'ils accomplissaient
toutes leurs cérémonies religieuses, et que par conséquent
ils donnaient le baptême ; de là, pour indiquer un protes-
tant, le dicton : és ésta batéja souto'n cade, il à été bap-
tisé sous un genévrier. Ce dicton, par extension, tend bien
aussi à prendre la signification du précédent. 7 fariè batéja
un téoulé, il lui inspire tant de confiance, il a tant d'em-
pire sur lui, qu'il lui ferait baptiser une tuile, qu'il lui
ferait croire que les enfants se font par l'oreille, Té véou
batéja coumo sé déou, je vais t'asperger comme il faut.
Lou Batéja, cérémonie; escorte ; fète de baptème.
Dér. du gr: Béxzeuv, plonger dans l’eau.
Batéjado (La), s. f. n. pr. de lieu. La Batéjade, quar-
tier voisin du hameau de Larnac, dans la commune
d’Alais. Son nom lui vient-il de ce que, au moment de
l'introduction du christianisme dans les Gaules, ce lieu
fut témoin de la prédication de la foi nouvelle par un des pre-
miers apôtres et de la conversion des plus anciens habitants
de nos contrées? Nous ne le pensons pas. Il semble plutôt
ne dater que de l’époque de nos dissidences religieuses où
les cérémonies du culte, les assemblées et l'administration
du baptème se faisaient, comme on disait, au désert.
Batèmo, s. m. Baptème, sacrement qui efface le péché
originel et rend chrétien; le premier des sacrements. — A
pas qué lou batèmo dé trop, il a le baptème de trop : c’est
une brute. Téni én batémo, être parrain d'un enfant.
Dér. du lat. Baptisma.
Batén, s. m. Vanteau de porte, de croisée, d'armoire.
Dér. de Batre.
Bat-én-goulo (Dé), adv. Tout grand-ouvert ; ouvert à
deux battants ; béant.
Formé de Bat ou batén, vanteau, èt de Gdoule, jable,
mortaise ; c’est-à-dire battant ou vanteau à mortaise.
Batèou, s. m. Bateau, petit vaisseau qui va à rames, et
qui est particulièrement destiné à naviguer sur les rivières
ou dans les ports.
Emp. au fr. Dans la bass. lat. Batellus.
Batèsto, s. f. Batterie ; rixe ; combat à coups de poings,
de bâton ou de pierre.
Dér. de Batre.
La
100 BAT
Batioù, s. m». Pied de cochon, de mouton, spécialement ;
pince d’un cheval. Par ext. péton d’un petit enfant.
Dim. de Bato.
Batisto, n. pr. d'homme. Dim. Batistoù, souvent abré-
gés l’un en Tisto, l'autre en Tistoù. Baptiste : nom insépa-
rable de Jean, qui vient de saint Jean-Baptiste. — Tran-
quinle coumo Batisto, tranquille comme Baptiste ; on dit
de même proverbialement en français : un père tran-
quille.
Batistouèro, s. #». Constatation du baptème sur le
registre curial ; l'acte lui-même. On disait autrefois l'extrait
baptistère ou de baptème, ce qui équivalait à l'acte de
naissance d'aujourd'hui, lorsque les curés étaient ch r:és
de la tenue des actes de l’état civil. En languedocien,
malgré ce changement dans nos institutions, on nomine
encore un acte de naissance : batistouèro. — Régarde lou
batistouèro d’aquélo miolo, regarde l'âge de cette mule à ses
dents. À pérdu soun batistouèro, dit-on d’une femme qui
cache son âge.
Dér. du lat. Baptisma.
Bato, s. f. Dim. Batéto, batioù, péjor. Batasso. Pied;
corne du pied des bœufs, des brebis, des porcs, des chè-
vres ; sabot d’un cheval, d’une mule, d'un âne. — Dalica
coumo uno bato d’ase, douillet comme le sabot d’un âne;
par contre-vérité. À vira las batos, il a tourné les pieds
en l’air ; il est mort, ou il est crevé.
Bato dé bidou, espèce de grosse figue, assez fade et
aplatie.
Voy. Pato.
Dér. de Batre, par la raison que c’est avec cette partie
que les animaux battent ou foulent le sol.
Bato-quioulo, s. f. Casse-cul, selle ; contre-coup sur le
derrière, comme lorsqu'on tombe en glissant, ou qu'on
vous enlève une chaise sur laquelle vous comptiez vous
asseoir. — Douna la bato-quioulo, est un jeu d'enfants
(cet âge est sans pitié) qui consiste à prendre le patient,
ordinairement le plus faible de la bande, et en le soule-
vant par la tête et par les pieds, à lui faire, par saccades
régulières, donner du derrière contre une pierre ou sur le
sol.
Sauvages rapporte que « a selle est en Lombardie le
supplice des banquerouliers, et la pierre sur laquelle on
les fait tomber en les hissant et en les lâchant de fort
haut, au moyen d'une corde et d’une poulie, est appelée :
pierre d'ignominie. » C'est de l’histoire du moyen âge, et
peut-être du temps du roi Didier. Ces sortes de supplices
spéciaux sont aujourd'hui abolis partout.
Formé de Batre et de Quiou.
Batre, v. Battre; frapper; donner des coups; frapper
fortement. — Batre dé las dos mans, terme d'agric.,
bècher des deux côtés, de manière à rejeter la terre sur un
mème point pour niveler le terrain et combler un bas-fond.
Batre la pavano, vagabonder. Batre uno marcho, suivre
un plan de conduite, entrer dans une voie : il se prend
BÈ
d'ordinaire en mauvaise part. Chacun ba sa marcho, cha-
cun tire de son côté. Batre atoùs, jouer de l’atout. Batre
las cartos, mèler les cartes. Batre la campagno, battre la
campagne ; radoter ; chercher des faux-fuyants. Batre l'a
émbe un bastoù, battre l'eau avec un bâton, perdre son
temps. Batre d'idous, brouiller des œufs. Ména un bèl
batre, faire étalage de sa fortune ; mener grand train; faire
un commerce sur une grande échelle.
Dér. du lat. Batuere, battre.
Batu, udo, part. pass. de Batre.
et batu, les battus paient l'amende.
Batudo, s. f. Battue, terme de chasse et de louveterie;
battue, terme de filature, quantité de cocons mise en une
fois dans la bassine à filer et à battre avec le petit balai;
séance de travail sans désemparer; quantité de travail que
fait un ouvrier entre un repas et l’autre.
Dér. de Batre.
Batuma, v. Enduire; cimenter; empoisser ; goudronner.
Par ext. enduire un mur, terme de maçon. — Batuwmo,
dit-on d’un ivrogne qui s’en va battant les murailles.
Dér. du lat. Bitumen.
Baturèl, èlo, adj. Péj. Baturélas, asso. Bavard; babil-
lard; caqueteur; causeur ennuyeux.
Métathèse de Barutèl.
Bavar, ardo, adj. Dim. Bavardé, bavardoù, né. Bavar-
das. Bavard, babillard ; effronté, impertinent; sot, insolent.
Dér. de Baba.
Bavardije, s. f. Bavarderie ; impertinence ; effronterie.
Mème étym. que le précéd.
Bé, s. m. Dim. Béné, augm. Bénas. Domaine ; immeuble
rural, quelle que soitson importance ; génériquement, for-
tune, avoir, biens, possessions, richesses. — À foço bé dou
sourél, il est riche en fonds de terre. Pér tout lou bé qué
sé souréio, voudrièi pas... pour toute la fortune du monde,
je ne voudrais pas... Un bé de dous coubles, un domaine
de deux charrues.
Dér. du lat. Benè.
Bé, adv. Bien; beaucoup; considérablement. Cette
expression est prise explétivement comme en fr., pour
synonyme de : en effet, certainement, à la vérité ! Devant :
une voyelle, on y joint un » euphonique. Elle prend aussi
quelquefois la forme substantive. — Bé talamén, très-cer-
tainement! Y soui bén-ana, j'y ai bien été. — Gna bé
foço, il y en a en effet beaucoup. Dé bé s'én fdou, il s'en
faut bien, il s’en faut de beaucoup. Tout sé faï pér un bé,
rien ne se fait sans raison. Ou fasiè pér un bé, il le faisait
dans de bonnes intentions. Ou a tout fa hormi lou bé, il a
fait toutes sortes de choses excepté le bien. Fasés dé bé à
Bértran, vous ou réndra én cagan, prvb., Graissez les”
bottes d’un vilain, il dit que ça les brûle; chantez à l'âne,
il vous fera un pet, ce qui revient au vieux prvb. fr. : Oignez
vilain, il vous poindra ; qui ajoute de plus que le nôtre:
Poignez vilain, il vous oindra.
Dér. du lat. Benè.
Battu, ue. — Coucu
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
BEC
Bè, s. m. Dim. Béqué, béquoù, péj. Béquas. Bec, partie
cornée qui tient lieu de bouche aux oiseaux; nez; pointe
en forme de bec; au fig. babil, langue, caquet. — A un
pouli bè, il a un fameux nez, fam. un fameux pif. Taïo ta
piolo ? dé bè! dé bè! expr. prvb., mot à mot : ta hache
coupe-t-elle? de la pointe seulement; mais cela s'applique
à une personne qui n’a que du jargon, à un faux brave.
Un co dé bè, un coup de langue, un trait satyrique, un
sarcasme. Manquo pas dé bè, il ne manque pas de babil.
Tène lou bè din l'aïgo, payer par)de belles paroles, faire
attendre.
Dér. du gaulois Becq, ou du celto-breton bak ou beg.
Bèbo; s. f. Moue, mine ou grimace de mauvaise humeur,
de bouderie. — Faïre la bèbo, faire la moue, bouder.
Dér. de Be.
Bécar, s. m. Goujon, bouillerot, Cyprinus gobio, Linn.
C'est un petit poisson de rivière (bien qu'on cite un pècheur,
un seul, qui en prit un de 250 grammes ou demi-livre pour
ètre clair), d’un bleu noirâtre sur le dos et le ventre blan-
châtre à filets jaunes. Son nom de Bécar lui viendrait-il de ce
qu’il mord, ou bèquo, facilement à l'hameçon des pècheurs-
amateurs, dont il est la grande ressource ?
Bécaru ou Bécharu, s. ». Flamant, bécharu, phéni-
coptère, Phænicopterus ruber, Linn., oiseau de l'ordre des
Échassiers. Son nom lui vient de la grosseur de son bec.
Bécasso, s. f. Bécasse; bécasse ordinaire, Scolopax rus-
ticola, Linn., oiseau de l'ordre des Échassiers et de la fam,
des Tenuirostres. Sa chair est très-estimée; gibier d’un
fumet supérieur. Son long bec effilé lui a fait donner son
nom.
Bécasso s'applique au fig. à une personne niaise; sot,
butor. — Ch coumo uno bécasso, stupide comme une
bécasse. Tout aqud sés foundu ën mèrdo dé bécasso, tout
cela est venu à rien. :
Les deux dim. Bécassoù, s. m., Bécassino, s. f., bécas-
sine, Scolopaæ gallinago, Linn., sont des oiseaux du même
genre et de la mème famille que la bécasso, plus petits
comme, leur nom l'indique, mais de mème fumet et de
pareille délicatesse de chair.
Béchar, s. m. Dim. Béchardé. Houe fourchue, houe à
deux becs, binette, qui est l'instrument le plus usité dans
ce pays pour travailler la vigne, les müriers, et pour toute
espèce de travail à bras, là où la pierraille empèche d'em-
ployer le louchet. — Voy. Luché.
Dér. de la bass. lat. Besca ou becca, bèche.
Béchérino, s. f., ou Réïné. Roitelet, le plus petit des
oiseaux d'Europe. Il y en a de deux espèces également
communes dans nos contrées et que le languedocien con-
fond sous le même nom ; ce sont le roitelet ordinaire, Re-
gulus cristatus, et le roitelet triple-bandeau, Regulus igni-
capillus, Term. Le second ne diffère que par le dessus de
sa tête, orangé couleur de feu, du premier, dont les parties
supérieures sont olivâtres nuancées de jaune, gorge et
poitrine roussâtres, etles parties inférieures blanchâtres.
BED 101
Bèchos, s. f.plur. Lèvres ; grosses et laides lèvres. Ne
se prend qu'au péjoratif, en terme de mépris. Autrement
on dit : las bouquos.
Dér. de Bé. :
Béchu, udo, adj. Péj. Béchudas, asso. Lippu ; qui a de
grosses et vilaines lèvres ; bec-de-lièvre.
Dér. de Be.
Bécu, udo, adj. Dim. Bécudé, péj. Bécudas. Qui a un
bec, une pointe en forme de bec. Au fig. babillard ; rai-
sonneur; qui se rebèque, qui réplique à tout. — Péses
bécus, pois pointus, pois-chiches. Sièto bécudo, écuelle à
bec (Voy. Crouséludo). Es uno bécudo, elle a la langue
affilée.
Bèdaïne, s. m. Bec-d’âne, outil de menuisier, espèce de
rabot destiné à vider les mortaises.
Emp. au fr.
Bédé, s. m. Petit agneau, terme d'amitié qu'un berger
donne à un agneau favori. Lous bédés, les moutons ou les
brebis, dans le dictionnaire des petits enfants.
Onomatopée tirée du bèlement des brebis ; le gr. avait
aussi B%, et le latin Dee, pour exprimer le bèlement.
Bédigano, s. f. Sarment, liane de vigne sauvage dont
on fait des cannes.
Formé et corrompu de Védil et de cano. — V. c. m.
Bédigas, s. m. Bédigasso, 8. f. Dim. Bédigassé, péjor.
Bédigassas. Agneau d’un an, mouton de l’avant-dernière
portée. Au mois de septembre, les agneaux de l’année com-
mencent à s'appeler Bédigas, nom qu'ils conservent jus-
qu’au mois de septembre suivant, où ils deviennent Dou-
blén. À
Bédigas, au masc. et Bédigasso, au fém. se disent des
bonnes personnes, sans fiel et sans malice. Bédigas est
aussi un terme de commisération. — Es un bédigas, un
bédigassas, un bédigas sans lano, c'est un bonhomme, une
bonne pâte d'homme, une bête du bon Dieu. Pdoure bédi-
gas ! pauvre homme ! le poverazzo des Italiens.
Augment. de Bédé.
Bédigo, s. f. Brebis de l'année; brebis maigre, malingre,
éclopée. — Voy. Bédigas.
Bédin-Bédos, s. m. Jeu des osselets; osselets. — Les
enfants, pour jouer à ce jeu, se munissent d’osselets, qui
font le plus souvent l'enjeu, quand il n’est pas autrement
intéressé ; chacun des joueurs doit en avoir au moins trois.
L'adresse consiste à placer les osselets dans un trou
creusé dans la terre, à une certaine distance. Au premier
coup celui qui joue dit : Bédin ou bédà ; au second, bédès
ou bédà, et au troisième, sdauto din lou crès. L'incantation
et le jet doivent être rapides ; le gain de la partie appar-
tient, comme de raison, au plus adroit, qui fait rafle. Ce
jeu est fort ancien ; l’histoire raconte qu'Auguste, empe-
reur, s’y divertissait beaucoup.
Les osselets avec lesquels on joue, sont la rotule du
genou des moutons. Le nom du jeu ne viendrait-il pas,
pour cette raison, de Bédé, mouton, agneau?
102 BEL
Béfa, s. m. Bienfait ; bonne œuvre; bonne action.
Dér. du lat. Benefactum.
Bèfi, io, adj. Péj. Béfias, asso. — Voy. Bof.
Bégatagno, adj. des deux genres. Bègue, qui bégaie.
Péjoratif de Bègue.
Bégu, udo, part. pass. du v. Béoure. Bu, bue. — Y-a
bégu, il a donné dans le panneau.
Bégudo, s. f. Bouchon, petit cabaret de route, où l'on
s'arrête pour se rafraichir. Ce mot est devenu nom propre
pour une foule de maisons et de lieux où cette industrie
ne s'exerce plus, mais où elle existait autrefois.
Dér. de Bégu.
Bègue, bèguo, adj. Bègue, qui bégaie.
Dér. du gaul. Bec, d'où le lat. beccus.
Bégui, s. m. Dim. Zéguiné. Béguin, bonnet d’enfant de
naissance; têtière ou coiffe de toile, qu'on attache sous le
menton au moyen d’une bride; béguin en velours ou en
soie qu’on leur met un peu plus tard par-dessus la têtière.
— L'a prés dou bégui, lou quitara dou couïss, c'est un
défaut qu'il à pris au berceau et qu'il ne quittera qu’au
tombeau.
Ce mot, comme son correspondant français, dérive évi-
demment du mot Béguine, parce que sans doute les reli-
gieuses de ce nom portaient une coiffure à peu près sem-
blable dans l’origine. Elles formaient un ordre fort ancien
et qui est resté fort populaire en Belgique, où elles exer-
çaient une œuvre de miséricorde. Ce nom, d’après un
auteur anglais, vient de la première fondatrice de l’ordre,
Bégué, fille de Pépin de Landon, mère de Pépin d’Héristal
et grand'mère de Charles-Martel, qui fonda la première
maison à Gand, au VII siècle.
D'autres le font dériver d’un chanoine de Liége, nommé
Lambert dit Le Bègue, qui aurait fondé cet ordre en 4477.
A cette époque les surnoms avaient plus d'importance que
de nos jours, ils devenaient l'appellation vulgaire, et il
n’est pas élonnant que ce Le Bègue ait pu donner son
nom à un monastère dé sa fondation.
Un mot allemand pourrait aussi intervenir dans l’étym.
C’est Beginn, commencement, origine; bonnet qu'on met
aux enfants nouveau-nés.
Bèjâoune, s. m. Béjaune. Les deux acceptions du fr.
au prop. et au fig. ne sont point admises en lang. Cette
expression n’a cours que dans cette phrase ; Paga lou
bèjdoune, payer la bienvenue, la mise hors de page, la
sortie du noviciat.
Bèl, bèlo, adj., au plur. Büles, bèlos ; dim. Bélé, péjor.
Bélas. Grand; gros ; vaste. — Gardoù és bèl, la rivière a
grossi. S'és fa bèl, il a grandi. On dit aussi : És un bol
éfan, c'est un bel enfant; mais ce n’est que par euphonie,
bèl est pris là pour bèou, beau.
Dér. du lat. Bellus, beau, bien fait. Il parait que dans
les premiers Ages de notre idiome, âges éminemment guer-
riers, la beauté était inséparable d’une belle taille. Bellus
était évidemment la qualité d’un homme fort et propre à
BEL
la guerre, bellum. En fr. encore, on‘ne dira pas bel homme,
ni belle femme, d’un individu mignon et de courte sta-
ture; c'est pour ce dernier qu'a été inventé le mot :
joli.
Bèl-Bèl, locution au mase. qui n'est employée que
comme suit : Faïre lou bèl-bèl, flagorner ; accabler de pré-
venances ; flatter l’amour-propre; faire tout beau à un
chien; montrer une friandise ou un joujou à un enfant,
sans vouloir le lui laisser prendre.
Bül est pris ici pour synonyme de beau.
Bélèou, adv. Peut-être; il est possible. — Qué dis
bélèou, n'és pas ségu, dire peut-être, n'est pas affirmer,
donner ni avoir l'assurance.
Bèles (A), à bèlos, adv. Un par un; un après l’autre.
— A bèles sôous, un sou après l’autre. À bèlos fés, à plu-
sieurs reprises. A bèlos palados, par pelletées. A bèlos
avéngudos, par accès, par crises. À bèlos troupélados, par
pelotons. À bèles flos, un morceau après l’autre, par petits
morceaux. À bèles us, un par un. À bèles dous, deux à
deux, deux par deux. A bèles dès, à bèles douje, par
dizaine, par douzaine ; dix, douze à la fois. À bèlos houros,
parfois, quelquefois.
Bélétos, s. f. pl. Petites pièces de monnaie; argent
mignon. — Foudra bé qu'apounche sas bélétos, il faudra
bien qu'il délie les cordons de sa bourse.
Dér. de Bèou.
Bélicoquo, s. f., ou Piquo-poulo. Fruit du micocou-
lier, qui est une petite baie à noyau, noire quand elle est
mûre, sèche, doucetre, et qui n’a presque qu'une peau
ridée sur son noyau ; on en fait une tisane béchique.
Bélicouquiè, s. m., ou Fanabrégou, ou Piquo-pouiè.
Micocoulier, Celtis australis, Linn., arbre de la fam. des
Amentacées, qui vient très-grand et très-vieux. Son, bois,
qui a les fibres longues, fortes et flexibles, compacte et
dur, est très-estimé pour le charronnage. Dans les Céven-
nes, on le recépait comme les saules, et de ses pousses,
quand elles étaient arrivées à l’âge de trois ans, on faisait
des cercles de tonneau, qui duraient fort longtemps. Cette
industrie s’est perdue, soit par la rareté de ce bois que les
défrichements ont singulièrement éclairei, soit par l'emploi
très-répandu des cercles en fer laminé. Cet arbre est soi-
gneusement ménagé en taillis à Sauve (Gard), où lon en
fabrique des fourches à trois becs, les seules dont on se
serve dans tout le pays pour remuer et tourner les pailles
et les foins.
Béloio, s. f. Bijou, parure, affiquets de femme.
Dér. de Bèou.
Bèlos (Dé), s. f. pl. Terme de jeu. Ne se dit que dans
la phrase : Faïre dé bèlos, parier en dehors du jeu prin-
cipal, comme les paris de la galerie à l’écarté. C’est sur-
tout au jeu de dés, au passe-dix, que ce terme était em-
ployé. Ce jeu, qui était fort usité parmi les gamins, il-y a
quarante où cinquante ans, s'établissait en plein air et sur
les places. On formait une masse ou poule des mises de
COS PS RE
BEN
tous les joueurs, et celui qui amenait le plus gros point on
la plus forte rafle, gagnait la poule. Mais le joueur le plus
hardi, ou qui voulait jouer plus gros jeu, au moment où il
avait les dés en main, proposait à la galerie de parier
qu'il ne dépasserait pas tel nombre ; s’il dépassait ce nombre,
il avait perdu. C'est ce pari d'extra qu'on nommait dé bèlos.
Dér. de Bou.
Béloun, n. pr. Dim. Bélouné. C'est un dim. du nom
de femme Isabelle ou Elisabeth. — Voy. Babèou.
Bélouso, s. f. Blouse, un des six trous du billard. —
Ficha din la bélouso, blouser; duper; tromper ; mettre
dans l'embarras.
Emp. au fr.
Bélugo, s. f. Dim. Béluguüéto. Bluette, étincelle qui
s'échappe du feu. — Es tout fid, tout bélugo, il est vif
comme la poudre, il est plein de zèle et d’ardeur.
Dér. du lat, Lux, lumière, précédé de la particule
rédupl. bé.
Bélugué, éto, adj. Vif; léger ; alerte, éveillé ;
tillé ; fringant ; sémillant.
Béluguéja, v. Etinceler; pétiller ; briller ; éclater. —
Tout li béluguéjo, il est pétillant de vivacité ou d'esprit.
La fidio couménço dé béluguèja, les bourgeons des müriers
commencent à poindre et à prendre un reflet doré.
Dér. de Bélugo.
Bèmi, bèmio, adj. Péjor. Bémias. Bohème, bohémien,
émous-
. truand, qu'on appelle Gitanos en Espagne, Zingari en
Italie, Zigenner en Allemagne et Gypsi en Angleterre ; au
moyen âge, le fr. les nommait Bèmes ou Besmes ; peuplade
errante, tribu vagabonde, que chaque peuple fait sortir
d’une origine différente. Ceux que l’on voit dans notre
pays, nous arrivent des frontières de l’Espagne et du Rous-
sillon. Aussi les appelle-t-on vulgairement Catalans. Ils se
rendent par bandes à nos foires, vendant des Anes et des
mules, disant la bonne aventure, et exerçant souvent des
industries moins légales. Ils marchent ainsi en tribu com-
posée d'hommes, de femmes et d'enfants, ne logent jamais
dans les hôtelleries, mais bivouaquent sur une grève,
campent sur les bords d’un chemin ou sous l'arche d'un
pont, se nourrissant d'animaux morts où de débris de
légumes qu'ils ramassent par les rues. Ils sont très-friands
On dit adjectivement Bèmi, d'un homme de mauvaise
mine ou de mauvaise foi. — Franc coumo un bèmi, franc
comme un Bohème : cdd edge
vérité.
Sous la Ligue, on a donné le boul 46 Bho-au meur-
trier de l'amiral de Coligny, qui était de la Bohème et se
nommait Charles Dianowitz. — Voy. Bigoro (bando dé).
-Corrupt. de Bohème. — Voy. Catalan.
Bémian, ano, ou ando, adj. Bohémien. — Voy. Bèmi
Bénda, v. Bander, envelopper d'une bande ; lier avec
une bande. — Bénda uno rodo, embattre une roue.
Dér. de Béndo.
À
Bi
BEN 103
Béndaje, s. m. Bandage de herüie, exclusivement. Les
autres acceptions s’'arrangent avec Béndo, qui suit.
Béndèou, s. m. Dim. Béndèlé, péj. Béndèlas. Bandeau ;
bande pour ceindre le front ou pour couvrir les yeux;
plus spécialement bande de toile, bordée d’une petite den-
telle, dont les femmes du peuple se servaient autrefois pour
se serrer la tête et les cheveux par-dessous la coiffe, et
qu'on met encore aux enfants au maillot sous leur béguin.
Dim. de Béndo.
Béndo, s. f. Bande d'étoffe , pièce de linge, plus longue
que large, destinée à entourer quelque partie du corps, une
plaie, un membre; bande de fer pour renforcer les jantes
d'une roue; bandage de roue.
Le radical de ce mot se trouve dans beaucoup de lan-
gues : en persan, bend, lien ; en allem. anc., band, aujour-
d’hui %enden, lier, bind, lien; en lat., pandere, déplier,
étendre; dans la bass. lat. bandum, bandellus ; d'où le
roman benda.
Bénédiciou, s. f. Bénédiction, cérémonie par laquelle
on bénit ; vœux favorables; abondance, bienfaits du ciel.
— Ana à la bénédiciou, aller au salut. Pldou qu'és uno
bénédiciou, il pleut à seaux. Gn'avié qu'èro uno bénédiciou,
il y en avait à foison.
Dér. du lat. Benedictio.
Bénézé, n. pr. d'homme, fort répandu dans ce pays:
au fém. Bénézéto. C’est un dim. de Bénouë, Benoit, et
tous, en lang. et en fr., dér. du lat. Benedictus, béni.
Bénhuroüs, ouso, adj. Dim. Bénhurousé. Un bienheu-
reux, un saint-homme, un innocent ; une personne sans
malice, sans vice. — Voy. Bénura.
Dér. de Bé et Huroùs.
Béni, v. Bénir, consacrer au culle divin ; donner la
bénédiction ; louer, remercier ; faire prospérer. — Diou té
bénisque ! Dieu te bénisse ! expression qu’on adresse à celui
qui éternue. Cièrge béni, cierge bénit. Aïgo-bénito, eau-
bénite. Dé pan-béni, du pain-bénit.
Dér. du lat. Benedicere.
Bénissiadiou ! interj. Littéralement :
béni ! Merci ! Grâces à Dieu!
Dér. de Béni, siègue contracté en sia, et Diou.
Bénitiè, s. m. Bénitier, vase à l’eau-bénite, placé à
l'entrée des églises catholiques, où au chevet de lits, ou
au-dessus d’un prie-Dieu.
Dér. de Béni.
Bénobre, s. m.n. pr. de lieu, ou Vénobre. Vézenobres,
chef-lieu de canton dans l'arrondissement d’Alais.
La tradition rapporte que le vieux château de Véze-
nobres, dont il ne reste plus que quelques pans de murs,
et dans l'enceinte duquel est bâtie la plus grande partie du
haut village, fut attaqué par les Sarrazins après leur
déroute à Poitiers, due à Charles-Martel. C'était sans doute
une forte position, qu’ils convoitaient pour un de leurs
postes de défense. Ils en furent repoussés par les habitants,
qui délivrèrent par là tout le pays d’un semblable voisinage.
que Dieu soit
104 BÉN
Une autre tradition, moins glorieuse, est rapportée par
l'historien Ménard. A la fin du XIVe siècle, pendant les
troubles de la minorité de Charles VI, une troupe de
rebelles des environs de Nimes, excédés sans doute du
poids des impôts et provoqués par le désordre des guerres
civiles, avait pris les armes et commettait toutes sortes de
brigandages chez les nobles et les riches. Ces bandes étaient
désignées sous le nom de Touchis. On prétend que les
habitants de Vézenobres favorisèrent ces pillards; peut-
être ne firent-ils que leur donner asile à contre-cœur; tou-
jours est-il que le surnom de Touchà dé Bénobre leur fut
donné en souvenir de ces faits. Ce sobriquet est venu
grossir ainsi la nomenclature de surnoms, d'ordinaire
peu flatteurs, que les localités rivales et voisines se don-
naient entre elles au moyen âge.
Le nom de Bénobre est arrivé au languedocien après de
nombreuses variantes. Le latin du moyen âge l'écrit dans
un titre de 4050 Vezenobrium ; en 4052 et 4054 Vinedo-
brium ; en 4060 Vidanobre et Vinadobre dans le même
acte; en 4077 Vinezobre ; en 11400 Vedenobrium ; en 1125
et 1128 Vezenobre; en 1142 Vedenobrium ; en 1144 et
1150 Vesenobre ; en 1151 et 4162 Vedenobrium; en 1166
Vicenobrium; en 1167 Vedenobrium; en 1174 Venedo-
briwm ; en 1193 Vedenobre , en 1219 Vicenobrium et Veze-
nobrium, sans parler des variations plus récentes.
Sur ce thème l’étymologie ne se montre pas clairement.
Le savant Ménard a voulu la voir dans le mot Virinn, un
des noms de lieux du territoire des Volces Arécomiques,
inserit sur un petit piédestal antique conservé au musée
de Nimes. Ce nom aurait été abrégé à cause des dimen-
sions du monument ; mais restitué en son entier, il serait
Virinno ou Virinnum , se rapprochant beaucoup des
formes que nous citons. L'interprétation a été contestée.
Cependant qu'on nous permette une analogie, si éloignée
qu'on voudra. La ville de Bergues, arrondissement de
Dunkerque (Nord), était anciennement dénommée Gruono-
Berg, Groenberg, nom tudesque composé de groen, gruen,
vert, et berg, hauteur, éminence, et le latin le rendait par
wiridis mons. Soit à cause de cette origine, soit à cause de
la venue de saint Winoc, qui fit en ce lieu bâtir une église,
le nom dans les chartes latines se transforma en celui de
Winociberga. Le rapprochement est facile à saisir : ici la
forme tudesque domine ; pour nous, c’est la celtique qui
survit ; mais la traduction latine est de nature à faire im-
pression et a bien pu se conserver dans une inscription de
la province romaine, en adoptant le mot Virinn qui s’est
si bien altéré dans la suite.
Quoi qu'il en soit, les chartes disent Viceno, Videno,
Vidano, Veceno, et ajoutent le radical bri, rendu par le
neutre lat. brium ou bre. Bri est caractéristique de la
situation, comme suffixe ; il signifie hauteur, colline, élé-
vation. Vicæn est traduit dans Du Cange par habitatio,
domus, demeure, maison, et il ajoute : Saæonibus vicæn
esl pagus, vicus; en saxon vicæn veut dire bourg, village.
BEN
Le nom entier signifierait par conséquent demeure élevée,
bourg ou village, sur une colline : ce qui est exact pour
Bénobre.
Le glossaire de Du Cange peut fournir une autre indica-
tion. On y trouve le mot Vinoblium, — et la ressemblance
avec notre nom latin n’est pas contestable, — pour vigne,
champ planté ou propre à être planté de vignes, dont le
fr. a fait vignoble. Puis, et à l’article suivant : Vinobre,
eodem intellectu, avec le mème sens. Il y a concordance.
La dernière forme surtout a le mérite de reproduire le
mot actuel sans le décomposer : on sait en effet que les
deux lettres F et B se substituent volontiers l’une à l’autre.
L'application dans les trois modes, soit éminence verte,
verdoyante, soit village sur une hauteur, soit lieu planté
de vignes, est du reste également juste.
Encore une interprétation, qui pour être la dernière
n’est peut-être pas la bonne, mais qui prouvera au moins
que nous avons cherché, si nous n’avons pas trouvé.
Sur le monument du musée de Nimes, parmi les noms
inscrits, se trouve celui de Briginn, abrégé plus tard en
Brinno, qui est devenu le Brignon actuel. Briginn, à
l'époque la plus ancienne, était une localité, centre de
population sans doute assez important dans un certain
rayon. Une voie romaine, celle de Nemausus à Gabalum,
n’était pas éloignée de Briginn, Brinno, et venait traver-
ser le Gardon à Ners, en vue du village actuel de Véze-
nobres. Quand ce village se fonda, peut-être à l’époque
gallo-romaine, aurait-on voulu que son nom, tout latin
däns sa première partie, traduisit on exprimât sa situation
dans le voisinage de l’oppidum le plus considérable alors
de la contrée, vwicinus, vicino, de Briginn, Brinno, qui
nous est parvenu avec les abréviations et les altérations
d'usage. Cette conjecture vient de bien loin, de si loin
même, qu'on peut sans lui faire le moindre tort, préférer
les autres; mais elle n’était pas à négliger. ÿ
Bénoûù, s. m. Auge, sorte de mangeoire pour les brebis.
Elle se compose de deux planches posées de champ et réu-
nies par des chevilles d'environ un pied de longueur, ce
qui laisse entre elles un vide de même dimension, qu'on
remplit de fourrage ou de regain. Cette mangeoire, aïnsi
disposée, a pour objet d'empêcher les brebis de mettre les
pieds dedans et de fouler et de gâter leur provende.
Dér. du celt. Benn, benne.
Bénoubrén, énquo, adj., ou Vénoubrén, énquo.
Habitant de Vézenobres; qui appartient à Vézenobres.
Bènouri, s. m., ou Fourniguiè, ou Pi-col-dé-sèr.
Torcol, torcou, turcot ; torcol ordinaire, Yunæ torquilla,
Linn. Oiseau de l'ordre des Grimpeurs, de la fam. des
Cunéirostres. Cet oiseau, qui est une espèce de pie, s’ac-
croche anx troncs d'arbres et se pose sur les grosses bran-
ches; mais il préfère se tenir à terre où il cherche des
fourmilières. Sa langue est longue, rugueuse et gluante;
il l'introduit bravement dans les trous de fourmis, dans
l'interstice qui se forme entre l'arbre et l'écorce; les four-
BÉO
mis, qui y habitent, grimpent sur cette langue, croyant y
trouver pâture; alors l'oiseau-chasseur la retire et avale
ses ennemis. Le torcol est curieux à voir de près : il
retourne sa tête et son cou par des mouvements onduleux
semblables à ceux des serpents; il ouvre sa queue en
éventail, tourne ses yeux et redresse les plumes du haut
de sa tête. Il devient extrèmement gras aux premières
pluies de l'automne. Les diverses habitudes de cet oiseau
lui ont valu ses trois noms languedociens ; il est pourtant
plus habituellement dénommé par le premier. — Voy.
Fourniguiè, et Pi-col-dé-sèr.
La prononciation du nom de cet oiseau est l'indice de
son étymologie. La première syllabe est en effet fortement
sentie par l'accent grave sur lé, ce qui lui donne aussitôt
sa filiation de Bè, bec, faisant allusion à la manière ingé-
nieuse que ce volatile emploie pour se procurer une pro-
vende de son goût. Si un accent aigu se fût rencontré sur
le mot, sa signification eùt été changée et il aurait voulu
dire : bien nourri. Ce qui était moins pittoresque et se
serait appliqué à bien d’autres. Le caractère et la descrip-
tion exacte du volatile sont bien mieux représentés par la
prononciation et l'orthographe de son nom.
Bénura, ado, adj. et part. pass. Heureux, bienheureux ;
favorisé du Ciel; à qui tout réussit.
Bénura comme verbe, signifiant rendre heureux, est peu
usité, quoique le terme soit bien fait et pittoresque. Mais
dans le sens de l'adj. ou du part. pas., il est élégant et
expressif. — Ta bénurado planéto, ton heureux destin.
Diou l'a bénura, Dieu la béni, l’a rendu heureux.
Ce mot, d'après Sauvages, paraît être formé du lat. Bona
et Hora, qui a une bonne heure ou qui l’a eue. On sait en
effet que les anciens distinguaient les heures favorables et
les heures funestes : traditions qui se sont conservées dans
le vieux mot fr. heur, et qui sont passées dans ceux de bon-
heur et malheur, contraction de bonne heure et male heure.
A ce titre le lang. devrait écrire notre mot avec un h,
comme nous avons fait pour Bénhuroùs, qui a la mème
origine; mais nous supprimons ici la lettre parasite, qui
n’est qu'étymologique, et dont le retranchement ne nuit en
rien à la prononciation, par raison de nos règles d'ortho-
. graphe, et pour avoir d’ailleurs une variété de plus con-
forme à notre mot à la malouro, où elle ne parait pas
d'avantage.
Bèou, adj. m. sans fém. Beau. — Faï bèou, il fait
beau. À bèou faïre, il a beau faire.
Ce mot, dans sa formation, dans sa signification natu-
relle et dans toutes ses acceptions elliptiques, est d'origine
française ;: même emploi, mêmes acceptions.
Béoucaire, s. m.n. pr. de lieu. Beaucaire, ville renom-
mée par sa foire du 22 juillet. Aussi son nom est-il devenu,
pourun vaste rayon de pays autour de lui, une date, un point
important dans l'année. Autrefois les marchands en détail,
les artisans, les fournisseurs de toute espèce, allaient faire
_—urs achats en foire de Beaucaire, et pour cela ils avaient
BÉO
besoin de réaliser les crédits qu'ils avaient faits dans
l'année. Quoique aujourd’hui les boutiques et magasins
se fournissent ailleurs qu'à Beaucaire, l'usage d'arrêter les
comptes des fournitures à crédit et de réclamer le montant
des mémoires s'est conservé. Aussi pleut-il à cette époque
ce qu’on appelle les comptes de Beaucaire : c'est un mau-
vais quart d'heure pour les débiteurs et un temps fort
occupé pour MM. les huissiers. — Pér Béoucaïre, ou à
Béoucaïre à l'époque de la foire de Beaucaire, à la mi-
juillet.
Béoucaïre remonte aux temps les plus anciens. Le géogra-
phe Strabon l'appelle Oÿyépvov, Yyéovov et l'épvov, que les
auteurs latins Pline, Sidoine Apollinaire, les Tables théodo-
siennes traduisent par Ugernum ou Ugerno; que l'Anonymede
Ravenne écrit Ugurnum; qui devint au VIe siècle Castrum
Odjerno, et dans la bass. lat. Castrum de Ugerno, en
1020; Belcayra, en 4121 ; Bellicadrum, en 4160, 4178,
4209; Belloquadra, Bellumquadrum, Belli-quadrum, en
1226 et plus tard ; en même temps que la langue vulgaire
disait, en 4125, Belcaire; en 129%, Bauquaire; en 1302,
Bieuchayre, et en 4435, Belcayre; ce qui a donné enfin le
nom actuel.
La première partie du mot, en lang., en fr. et dans la
latinité du moyen âge, ne présente aucune difficulté. La
seconde partie cayra, quadra, quadrum ou cadrum, est une
altération ou une syncope du substantif de la bass. lat.
cité par Du Cange, quadraria, quadrataria. Cayra a fait
directement caire, comme quadra et quadrum, dérivant de
quadraria où quadrataria , en lat. lapidicina, le tout a
produit carrière, en fr. L'affinité est incontestable ; et tous
ces dérivés descendent d’un primitif commun, le vieux
mot celtique cair, pierre, qui se retrouve du reste dans
une infinité de noms locaux. Nous avons dans nos envi-
rons, en grand nombre, lous Caïrols, comme désignation
de quartiers pierreux, ou de carrières de pierres communes.
La liste serait longue des lieux ayant la mème origine d’ap-
pellation : Cayrac et Cayrol, dans l'Aveyron; Cayres
(Haute-Loire); Cayrols (Cantal); Carole (Gers); Carrole
(Hautes-Pyrénées) ; Carolles (Manche) ; Charolles (Saône-
et-Loire ; Queyrac (Gironde); Queyras (Hautes-Alpes) ;
Caralp (Ariége); Carrouge et Carouge (Orne, Seine-et-Oise,
Suisse); Cayrouse (Aveyron); Quiers (Seine-et-Marne);
Carrare, en Italie, et autres.
Sauf tout le respect dû à une opinion assez accréditée,
qui voudrait que le nom de Belliquadrum où Bellumqua-
drum eût été donné à Beaucaire à cause d'une tour carrée
qui dominait l'emplacement sur lequel la ville s’est cons-
truite, l'étymologie tirée du gaulois cair nous parait préfé-
rable et plus naturelle. D'ailleurs la même raison appella-
tive devrait se rencontrer dans les homonymes assez nom-
breux ; et l’on n’a pas remarqué des traces de la moindre
tour de forme carrée à Belcaire (Aude), arrondissement de
Limoux ; à Beaucaire (Aveyron), commune Noviale; à
Beaucaire (Charente), commune Saint-Amand-de-Nouère ;
4
105
106 BEO
à Beaucaire (Cher), commune Herry; à Beaucaire (Gers),
commune Valence, et autres encore ; non plus qu'à Bel-
caire (Dordogne); à Bellicaire, province de Gerona, et à
Bellicayre, province de Lerida (Espagne). Ce qui commence
à donner beaucoup de crédit à notre version.
Mais il y a plus : le nom grec de Béoucaïre latinisé me
semble un argument nouveau. Le lieu désigné par Strabon
existait avant lui et était connu. On a dit que sa forme
celtique devait être Wern ou Guern, qui veut dire en
gallois et en bas-breton : aune, aunaie, lieu planté d’aunes;
vèr, lang. L'application à un castrum sur un grand fleuve
est juste; mais la dérivation serait-elle moins exacte, si
Yon admettait que le celtique cair a été le parrain du Fég-
voy de Strabon, qui se trouvait sans doute précédé d’une
épithète significative, exprimant en gaulois ce que dit le
bellum de la bass. lat., Béou du languedocien, et que, dans
la variante Yyépvov, Strabon aurait traduite et exprimée?
Ainsi, la première syllabe de Ugernum où Ugerno, lat., ne
serait-elle pas la diphthongue adverbe Eb, bien, reproduite
euphoniquement par le latin w? La prononciation du y
grec et du g latin devant e est dure et se rapproche sen-
siblement de celle du celtique : ce qui ne met pas à une
grande distance cair et guer. Le gaulois a encore cairn,
appliqué aux monuments de pierre, dolmens, qui introduit
une lettre de plus dans la ressemblance graphique des mots.
Mais une permutation identique se fait remarquer sur le
nom d’un ancien oppidum purement celtique, signalé dans
le savant ouvrage de M. Germer-Durand, Diction. topogr.
La petite commune de Garn, ancien évèché d'Uzès, aux
limites du Vivarais, a conservé intacts sa forme et son
nom celtique, Cairn. Le g s'est substitué au c, inverse-
ment à ce qui est arrivé dans le roman pour Belcaire, qui
reprend sa forme primitive; mais par un procédé sem-
blable à celui employé par le latin et le grec, Ugernum,
Yyépvoy : preuve que nos déductions sont vraisemblables.
_La terminaison en o, si commune dans les appellations
celtiques, ne doit pas être négligée. On sait que nos pères
les Gallo-Romains employaient les deux langues, celtique
et romaine, et quand, au moyen âge, on voulut désigner
l'antique localité, la traduction devint précise et fidèle en
substituant à Y'yépvov, le mot Belcayra, Bellicadrum, Bel-
lumquadrum.
Tous ces noms seraient donc synonymes; mieux que
cela, ce serait le même nom, sous différentes formes, grec-
que, latine, languedocienne et française. L’antiquité qu'on
attribue à Beaucaire, les belles carrières qui touchent la
ville, et qui ont été connues dès les premiers âges, ne s’op-
posent point à cette origine de son appellation et semblent
la justifier. Le géographe Strabon a traduit autant que le
grec le permettait, sans trahir le vieux gaulois.
Béou-l'oli, s. m., ou Damo, Suito, Nichoulo. Effraie;
frésaie , chouette-effraie, Strix flammea, Linn., dé l’ordre
des Rapaces et de la fam. des Nocturnes. Cet oiseau de
proie nocturne, qui atteint jusqu'à 35 centimètres de lon-
: BÉO
gueur, a le dessus du corps jaunâtre, ondé de gris et de
brun, parsemé d’une multitude de petits points blancs ; le
dessous est d’un blanc soyeux, éclatant. Il habite les vieux
édifices, les clochers et les toits des églises. On croit vul-
gairement qu’il y entre la nuit pour boire l’huile des lam-
pes; de là son nom de Béou-l'oli. Par celui de Suito sous
lequel il est connu aussi, on a sans doute essayé de rendre:
le soufflement ou sifflement qu’il pousse pendant la nuit.
Il à la réputation d’être l'oiseau de mauvais augure par
excellence. — Voy. Damo, Suito, Nichoulo.
Béoure, v.. Boire; avaler un liquide, labsorber. —
Aquél home béou, cet homme est adonné à la boisson, à
l'ivrognerie. Mous sowiès bévou, mes souliers laissent trans-
pirer l'eau. Béoure das ièls, manger des yeux, couver du
regard. Béoure coumo un sablas, boire beaucoup, sans fin,
comme un champ de sable, qui absorbe l’eau et la pluie
en telle quantité qu’elle y tombe. Y-a pas qu'un grand
béoure qué pogue té tira d'aqui, ce n'est qu'à force de
boire de la tisane que tu peux te tirer de cette maladie.
Mais les ivrognes ou les plaisants qui veulent les imiter
dans leurs propos, tournent la chose dans le sens du vin,
et c’est le vin qu’ils conseillent, quand ils adressent cette
phrase à ceux qui se plaignent d’un malaise. Low béoure
li lèvo pas lou manja, la soif ne lui Ôte pas la faim, boire
ne l'empêche de manger. Un ase à béourië, le cas n’est pas
difficile, un âne s’en tirerait. Fénno qué noun manjo, lou‘
béoure la mantèn, à petit-manger, bien boire. Béoure pâouw
et souvén, boire peu et souvent : bonne hygiène.
On dit d’un homme qüi s’est ruiné: Ou @ pas tout
manja, n'a bé bégu dé flès, il n’a pas mangé tout son
bien, il en a bu une partie. Aquélo aïgo sé béou, cette
source se perd dans la terre ou dans le sable. Béoure lous
cos, endurer les coups sans se plaindre. Crésès aqud et
bévès d’aïgo, croyez cela et buvez de l’eau par-dessus,
phr. prvb. pour dire que vous ne croyez pas un mot de ce
que l’on raconte, ou que ce mensonge est difficile à avaler.
et qu’il faut boire pour le faire descendre dans le gosier.
C'est dans le mème sens qu'on dit d'un hâbleur : Faï-lou
béoure, fais-le boire, pour que son mensonge ne s'arrête
pas au gosier. Las tèros an prou bégu, les champs sont
suffisamment abreuvés. Faïre un béoure, faire un temps de
repos pour les journaliers, pendant lequel ils vont boire
un coup à leur gourde pour. reprendre haleine. I ne faut
pas confondre un béoure avec un répas, un repas : le repas
est un temps déterminé par les usages, où les travailleurs
mangent commodément assis; low béoure n’est qu'un
simple temps d'arrêt, pendant lequel ils cassent simple-
ment une croûte et boivent un coup. Ce temps est de
durée arbitraire, et soumis au plus ou moins de zèle de
ouvrier, ou au plus ou moins de sévérité du chef d’ate-
lier, ou baïle. Quant sé faï dé béoures d'aquésto sésoù?
combien doit-on faire de poses au travail dans cette
saison ? s
Dans cette acception, low béoure est subst. mase. IL
BÉQ
signifie encore : le boire, le liquide que l’on boit; la ration
de breuvage aux animaux, mais dans ce dernier sens on
emploie : Abéoure. — Lou béoure et lou manja, le boire et
le manger. Aqud mé lévo lou béoure et lou manja, cette
émotion, cette nouvelle m'a coupé la soif et l'appétit.
Dér. du lat. Bibere. En ital. Bevere, boire.
Béouta, s. f. Beauté, qualité de ce qui rend aimable ou
admirable, au physique et au moral. — Es pa’no béouta,
ce n’est pas une beauté.
Emp. au fr.
Béqua, v” Becqueter; mordre avec le bec; battre à
coups de bec; donner des coups de bec; manger seul, en
parlant d’un oiseau ou d’un poussin; brouter ; mordre à
lhameçon; avaler crédulement un mensonge. — Aquél
passéroù couméngço à béqua, ce petit moineau commence à
manger seul. Lou péissoù bèquo pas, le poisson ne mord
pas. Tout lou bèquo, tout le monde le dupe, le houspille;
tout le monde l’accuse; se moque de lui : on l'accable à
coups de bec. Lous faguère toutes béqua, je leur fis avaler
à tous cette bourde.
Dér. de Bè, bec.
Béquado, s. f. Dim. Béquadéto. Becquée, pâtée que les
oiseaux portent à leurs petits dans le nid; coup de bec;
raillerie ; sarcasme, insulte. — Espéra la béquado, attendre
la becquée; attendre que la manne tombe du ciel ; ne se
donner aucune peine, aucun souci, pour obtenir ce qu'on
Béquaduro, s. f. Blessure causée par un coup de bec;
accroc; déchirure ou piqüre causée par un conp de bec ou
par quelque chose de pointu.
pee de Bé, bec.
Béquaje, s. m. Herbage d'automne, qu'on fait brouter.
C’est l'herbe dernière qui pousse dans un pré, après en
avoir enlevé le foin et le regain.
Dér. de Béqua.
+ - Béquo-figo, s. m. Becfigue, oiseau du genre gohe-
mouche, Motacilla ficedula, d’après Linn.; Muscicapa luc-
tuosa, suivant Temm. Le becfigue a le dessus du corps
noir, le front et toutes les parties inférieures blanches ; la
queue et les ailes noires; celles-ci ont leur couverture blan-
che. Arrivé en France vers la fin d'avril, ilrepart dans les
premiers jours de septembre. D'après l'ornithologie mo-
derne, il se nourrit de mouches et d'autres petits insectes
ailés, qu'il enlève de dessus les feuilles et les fruits mûrs;
aussi la science l’a dénommé Gobe-mouche. Le vulgaire, en
le voyant fréquenter de préférence nos figuiers, car c'est
là qu'il fait la chasse la plus abondante, a cru qu'il se
nourrissait de leurs fruits et lui a donné le nom de Bèguo-
figo. Les latins, qui en avaient la même opinion, l’appe-
laïent Ficedula. Peut-être ce gobe-mouche, en becquetant
la figue pour y saisir sa proie vivante, se laisse-t-il aller à
goûter un peu-du fruit et mérite-t-il ainsi ses divers noms;
en tous cas, dans quelque genre ou famille qu'on le range,
BÉR 107
son nom est évidemment un emprunt du fr. au langued.
La figue est trop un fruit du Midi pour ne l'avoir pas ins-
piré ; Becfigue, double subst. fr., ne significrait rien s'il
n'était la traduction du verbe et du régime employés par
la langue d'Oc.— Gras coumo un bèquo-figo, gras comme
un becfigue. Sa chair est en effet très-délicate et très-esti-
mée. Un grand professeur en gastronomie, Brillat-Savarin,
a dit: «Parmi les petits oiseaux, le premier, par ordre
d'excellence, est sans contredit le becfigue; si cet oiseau
privilégié était de la grosseur d’un faisan, on le paierait
certainement à légal d’un arpent de terre. »
Bèquou, s. m. dimin. Baiser, en style mignard et
enfantin, comme on dit en fr. famil. Bécot.
Dér. de Péqua, becqueter.
Bérbéquin, s. m. Villebrequin, outil de menuisier, qui,
au moyen d'une mèche, sert à faire des trous en emportant
la matière qu’il traverse.
Formé probablement de Vira, tourner, et de bréquin,
nom ancien de la mèche, du lat. Veru, veruum.
Béré, s. m. Berret; espèce de bonnet d'enfant, en ve-
lours ou en soie, coupé à côtes de melon, qu'on attache
sous le menton ; bonnet plat et tricoté des paysans du
Béarn. — Voy. Béréto, .
Dér. du lat. Birrus ou birrum, nom d’une espèce de
coiffure en usage chez les anciens ; d’où la bass. lat. bar-
retum où birretum, berret, barette ; en esp. birreta; en
ital. barreta.
Bérénguèri, s. m. nom pr. d’un terroir d’Alais, près
la route d’Alais à Nimes, dit Bérénguèri, que des archéo-
logues, d’après un passage de Sidoine Apollinaire, pré-
tendent être Voroangus, habitation d’Apollinaire, voisine
de Prusianus, Brésis aujourd'hui, demeure de Tonance
Ferréol, préfet des Gaules au Ve siècle.
Béréto, s. f. Bonnet d'enfant ; calotte de prêtre; bonnet
rond et juste à la forme de la tête, tel que la calotte qu'on
voit au théâtre aux Cassandres, à Bartolo et aux rôles à
manteau de la comédie française et italienne.
Même étym. que Béré ci-dessus.
Bérgadiè, s. m. Brigadier, commandant d’une brigade,
grade de cavalerie ou de gendarmerie correspondant à celui
de capcral dans l'infanterie.
Emp. au fr.
Bérgado, s. f. Brigade, division d'un corps d'armée;
section de gendarmerie commandée par un bérgadiè. En
gén., troupe, bande armée.
Emp. au fr.
Bérgan, ando, adj., ou Brégan, ando, péjor. Bérgan-
das où Brégandas. Brigand, voleur de grand chemin ; le
plus souvent, épithète injurieuse donnée à celui qui com-
met des vexations ou d'étranges concussions. Souvent en-
core, c'est une sorte d'interjection : © Bérgan/ neutrale-
ment employée; en ce sens, le péj. Bérgandas/ est surtout
admis
Dér. du lat. Brigantes, peuples d'Hibernie qui, sous la
108 BÉR
domination romaine, ravagèrent souvent les provinces sep-
tentrionales de la Grande-Bretagne.
Bérgandaje, s.m.,ou Brégandaje. Brigandage; action
violente; volenie; concussion.
Mème étym. que le précéd.
Bérgandéija, v., ou Brégandéja. Se livrer au brigan-
dage, dans la double acception, étendue ou restreinte, mais
également peu recommandable.
Bérgè, s. m. Dim. Bérgèïré. Berger, pâtre, expression
toute française, qu'on ne peut employer qu’en poésie.
Bergéireto, s. f., ou Couacho, Bergeronnelte, hoche-
queue, lavandière, petit oiseau du genre des becs-fins ; il
vient se mêler au milieu des troupeaux de moutons, et
mange familièrement avec eux : ce qui lui a valu son
nom. Quant au mot lui-même, c’est du français tout pur
comme le précédent et le suivant, et dans le mème ordre
d'idées et d'emploi. Aussi ne devrait-on donner droit de
cilé et de classification qu'à Pastouréléto; Car le languedo-
cien n'appelle ses bergers que pastres, ainsi qu'on le voit
dans le mot de meilleur aloi de la bergeronnette, Gala-
pastre.
Voy. Couacho, Galapastre, Brando-quuio.
Bérgèiro, s. f. Dim. Bérgtiréto. Bergère. — Voy. Bérgè.
Bérigoulo, s. f. Barigoule; manière d'apprôter les arti-
chauts, qui consiste à les placer crus sur le gril, avec du
sel, du poivre et de l'huile, qu’on introduit dans les inter-
stices des feuilles. C’est un emp. au fr. Barigoule, sauce
bien plus compliquée d’ailleurs que notre bérigoulo.
Bérlénqué, s. m. Jeu d'enfants, qui ne pourrait être
traduit et exprimé en fr. que par le mot lui-même. Il con-
siste à placer quelques sous ou même des épingles, debout
derrière une petite pierre carrée et mince, posée de champ.
Les joueurs, placés à une certaine distance, lancent chacun
deux palets contre cette pierre; quand ils peuvent la
chasser assez loin pour que l'un de leurs palets soit plus
rapproché que la pierre de l'enjeu ou d’une pièce de cet
enjeu ; l'enjeu ou la partie d’enjeu leur est acquis. Comme
on le voit, le bérlénqué est le premier rudiment du jeu de
bouchon.
Dér. peut-être de Bèrlo, à cause du petit caillou qui
sert de but, ou de ceux avec lesquels on joue.
Bèrlo, s. f. Dim. Bérlé, bérléto, péj. Bérlasso. Eclat de
pierre ou de bois, souche d’arbre ébréchée ; grosse branche
morte; bord d’un vase.
Bérloquo, s. f. Breloque. Ne s'emploie que dans la
phrase : Batre la bérloquo, battre la campagne, divaguer,
déraisonner. La bérloquo, breloque, en terme de théorie
militaire, est la batterie de tambour qui annonce l'heure
des corvées.
Dér. du lat., soit Veriloquium, langage vrai, naïf; parce
que, quand on déraisonne par folie ou par ivresse, on
laisse souvent échapper des vérités qu'il eût été sage de
retenir ; soit de breviloquium, laconisme, langage coupé ;
soit de varia loqui, parler sans suite,
BÉR
Bérna, s. m., n. pr. d'homme ; au fém. Bérnado ; dim.
Bérnadé. Bernard. Nom qui a servi de racine à beaucoup
d’autres dans le pays : Bérnadèl, Mâoubérna, Bernardin,
et la syncope familière de ce dernier : Nadin. — T'a tou-
qua, Bérna? J'espère qu'on l’a touché, l'ami? Express.
prvb. qu'on adresse à celui qui vient de recevoir une
correction méritée, ou bien un quolibet piquant qu’il av it
provoqué. Bérna din la luno ; on fait croire aux enfants
que les diverses taches qu'on aperçoit dans la lune, quand
elle est pleine, et qui donnent l’apparence d’une face
humaine, ne sont autre chose que la figure d’un bücheron,
nommé Bérna, que Dieu a placé dans la lune pour le punir
d’avoir fait des fagots un jour de dimanche.
Dér. du lat. Bernardus, formé de l’allem. beer, ours, et
de hart, génie.
Bérna-pésquaire, s. m., ou Guiräou-Pésquaïre. Héron
cendré, héron ordinaire, Ardea cinerea, Linn., nom com-
mun à plusieurs variétés de héron. Oiseau de l'ordre des
Echassiers et de Ja fam. des Cultrirostres, remarquable
par la longueur de ses jambes, de son cou et de son bec;
il vit de pèche et tire de là son nom. Dans nos environs,
on l'appelle Bérna-pésquaïre, et dans d’autres localités voi-
sines aussi, Guirdou-pésquaire. Reste à savoir quel Ber-
nard et quel Guiraud, qui ont toujours été assez nombreux
dans le pays, étaient assez forts pêcheurs devant la langue,
ou assez mal bâtis, pour qu'on ait donné leur nom au dis-
gracieux oiseau-pècheur, aux si longs pieds et au si long
bec, emmanché d’un si long cou. La Fontaine, qui l'a si
bien peint, ne l’a pas dit et ne le nomme que le héron;
‘nous n’en savons certes pas plus que lui. — Voy. Guirdou-
péscaire.
Béroù, s. m. Dim. Bérouné. Terme de berger, Robin-
mouton, mouton favori; celui qui conduit le troupeau ;
petit agneau privé qui mange dans la main.
Dér. du lat. Vervez, mouton.
Béroù, s. ». Ver blanc, qui vit dans les fruits, princi-
palement dans les cerises et dans les pois.
Ce mot parait dérivé du fr. ver, dont il ne serait qu'un
dim. Dans le rom. beron ou berou, ver qu'on trouve dans
les cerises nommées guignes.
Bérouia, v. Verrouiller; fermer au verrou.
Dér. de Béroul. :
Béroul, s. m. Dim. Bérouïé, péjor. Bérouias. Verrou;
fermeture de porte; tige de fer ronde et mobile, glissant
entre des crampons, ou anneaux. En lat. Pessulus. « C’est
de ce mot, dit Sauvages, que certains auteurs font dériver
le nom de Montpellier (Monspessuli), mont ou colline du
verrou, à cause de la célébrité du verrou de l’église de
Saint-Firmin, dans cette ville. »
« Les banqueroutiers y faisaient, dit-on, cession de
biens, en présence des magistrats et du peuple assemblés
un dimanche à l'issue de la messe. Le patient, debout, nu-
pieds et nu-tête, appuyait les deux mains sur le verrou de
l'église, et, dans le moment marqué, il en détachait une
BER
qu'il portait sur son derrière en disant à ses créanciers
d’une voix haute : Pago-té d'aquà, dicton qui a passé en
proverbe, »
Il prétend encore que c'est de là qu'est venu cet autre
dicton : Moustra lou quiou, montrer le derrière, qu'on dit
de ceux qui ont manqué à leurs engagements.
L'anecdote est assez curieuse et peut être vraie; mais il
est absurde de supposer, comme ces savants auteurs qui ne
sont pas d’ailleurs cités par Sauvages, que de là vient le
nom de Monspessulanus, Montpellier, attendu que ce nom
existait certainement avant l'invention de cet usage, et sur-
tout avant qu'on y parlât le languedocien, tel qu'il est
cité dans la phrase sacramentelle : Pago-té d'aqui. — Voy.
Mounpéiè.
Empourtaras pas low béroul, tu n'emporteras pas la
crémaillère quand tu quitteras cette maison, est une expres-
sion proverb. fort usitée de nos jours. Lorsqu'un domes-
‘tique prend vivement l'intérêt de son domaine vis-à-vis
d'un maraudeur, d’un grapilleur, celui-ci l’apostrophe par
cette phrase, comme pour lui dire que sa fidélité ne lui
procurera pas une fortune.
Dér. de Baro, dim. baroul, béroul.
Bérqua, v. Ebrécher ; écorner ; entailler ; édenter.
Dér. de Bèrquo.
Bérquaduro, s. f. Brèche; écornure ; entaille; l’action
d’ébrécher. — Voy. Bèrquo.
Dér. de Bèrquo.
Bèrque, bèrquo, adj. Spécialement mouton, brebis ou
chèvre, qui a perdu ses dents.
Bérquièiro, s. f., ou Vérquiéiro, s. f. Dot d’une fille
en la mariant; constitution dotale; bien apporté par la
femme en mariage.
Dér. de la bass. lat. Vercheria.
Bèrquo, s. f. Brèche ; écornure ; entaille; coche.
Dér. de l’allem. Brechen, rompre, casser, briser.
Bèrquo-dén, adj. des deux genres. Brèche-dent, à qui
il manque une ou plusieurs dents; ne s'applique qu'aux
personnes.
Formé de Bèrquo et de dén.
Bértèlo, s. f. Sangle, courroie, pour soutenir un sac
sur le dos; bretelles pour soutenir les pantalons.
4 Emp. au fr.
Bértoul, s. m., ou Bértoulo, s. f. Dim. Bérioulé, bér-
touléto. Cueilloir, petit panier à anse, fait d'éclisses tres-
sées ; son usage principal est de servir à ramasser des chà-
taignes. — Aquèl castagnè frucho bièn, las bojo à plén
bértoul, ce châtaignier produit beaucoup, à plein panier.
Formé par corrupt. peut-être de Bridoulo, éclisse, scions
refendus; mais mieux dér. de brett, celt., en lat. lignum,
bois, planche. — Voy. Bréthmas.
Bértoulado, s. f. Contenu d'un Bértoul, plein un bér-
toul. :
Bérugo, s. f. Dim. Béruguéto, péj. Bérugasso. Verrue;
poireau, excroissance dure et indolente, qui vient ordi-
BÉS
nairement aux mains. — Un remède de bonne femme contre
les verrues consiste à les frotter journellement avec un
bouchon de bourre prise dans un bät. On n'a pas ouf dire
que cela ait guéri personne ; mais comme cela ne saurait
faire empirer le mal, il n'y a aucun-inconvénient à conti-
nuer la friction jusqu’à ce qu’elle ait usé la calosité.
Dér. du lat. Verruca, verrue.
Bésâou, s. m. Dim. Bésalé. Canal d'irrigation, biez de
moulin; prise d’eau.
Ce mot doit avoir une origine commune avec le fr. Biez.
En roman, besal, besaliere, canal, conduit des eaux, rigole
d'arrosage, mème sign.; celt. beal; bass. lat. bedale, en lat.
via aqueæ; en gr. B{n. :
Béscle, s. m. Terme de boucherie ; rate de mouton ;
fressure.
En v. fr. Bascle.
Béscui, s m. Biscuit: pâtisserie faite de la fleur de
farine, de sucre et d'œufs, cuite au four de pâtissier. —
Paprè-béscui, papier sur lequei on enfourne la pâte de
biscuit, et sur lequel il reste des traces de sa substance
quand on le détache. Les enfants achètent ce papier chez
les pâtissiers et rongent à belles dents cette friandise à
très-bon compte.
Dér. du lat. Bis et coctus, cuit deux fois.
Béségno, s. f. Gousse-d’ail; amande d'ail; un des
caïeux dont la réunion forme la tête, qu'on appelle Bous-
sèlo.
On dit, et c’est possible, que ce mot a pour étym. Véno
d'aïè, à la vérité par altér.
Béségudo, s. f. Besaigüe, instrument de charpentier,
taillant par les deux bouts. — Escld à la béségudo, sabot à
la cévenole, dont la pointe est recourbée comme les anciens
souliers à la poulaine.
Dér. du lat. Bis et acutus, à deux pointes, soit qu'il
s'applique à l'instrument des charpentiers, soit à la chaus-
sure de nos montagnards, qui portait sans doute, dans
l'origine, une seconde pointe à l'arrière, comme une sorte
d’éperon.
Bésougna, v. Travailler, s’occaper ; faire une affaire ;
faire ses affaires. — A bièn bésougna, il a bien spéculé.
Bésougno, s. f. Dim. Bésougnéto, péj. Bésougnasso.
Chose; affaire; besogne, travail, ouvrage. Dans ce dernier
sens : Laïsso mé faïro ma bésougno, laisse-moi faire ma
besogne, mon travail, mon ouvrage. Faï fosso bésougno, il
fait beaucoup d'ouvrage. Faïre bésougno, réussir dans ses
affaires, être rangé; augmenter progressivement son avoir.
Avec la première acception, Bésougno a la mème extension
que le fr. chose et le lat. negotium. Il sert à désigner une.
foule d'objets dont le technique ne vient pas immédiate-
ment à la mémoire; il veut tout dire et désigne tout. —
Moussu Bésougno, monsieur Chose, monsieur un tel.
Bésougno en dit autant, en supprimant monsieur.
Dér. de l’ital. Bisogna, affaire.
Bésoun, s. m. Besoin; manque; misère, disette, indi-
109
110 BES
gence ; nécéssité naturelle. — Aqud li faï bésoun, cela lui
est nécessaire, il ne peut s'en priver, ou s’en passer, Es bé
besoun qué… il faut bien que, il est bien nécessaire que...
Es lou bésoun qué i-ou fai faïre, c’est la misère qui le
conduit là. S'éro dé bésoun, s'il le fallait. Faïre sous bésou-
nas, Vaquer à ses nécessités naturelles.
Dér. de l’ital. Bisogno, manque, nécessité.
Béssédo, s. f. Taillis de bouleaux.
Ce mot est dér. de Bès, bouleau, qui a vieilli, mais qui
s’est conservé dans le breton bez, pris du celt. bess, mème
sign. Iln'est plus qu’un nom prop. et entre dans la com-
position de plusieurs ; la désinence édo, qualificative et col-
lective, répondant à aie fr. ou ay : La Béssédo revient à
La Boulaye ou La Boulay, ou Boulay. Cette finale édo est
caractéristique et propre au midi de la France; elle repré-
sente la terminaison lat. etum, qui a varié souvent en
eium, eyum, et a fait idwm et edum, d’où édo procède
plus directement; mais sous toutes ces formes, elle porte
en soi un sens de collectivité, qui s'attache aux mots dans
æsquels elle apparaît : Cérièirédo, Nougarédo, Pinédo,
Vérnédo, etc., lieux plantés de cerisiers, de noyers, de
pins, d’aunes, etc. Ses similaires sont en lang. ier, ières;
en fr. aie, ay, aye, ei, ey, ée, eis, eis, eix, ès, et, ex, os,
oi; mais le radical commun est dans l’ancien gaulois, au-
quel il faut toujours remonter, en fait surtout d’étymologie
des noms propres de lieux.
Bésséjo, s. f., n. pr. de lieu. Bessèges, commune
érigée nouvellement en chef-lieu de canton, arrondis-
sement d’Alais. L'importance et la prospérité des mines de
houille et des fonderies et forges établies dans cette loca-
lité lui ont donné un développement considérable.
Dans l’étymologie des noms, il y a toujours à distinguer
le radical, qui forme le corps du mot et leur signification,
de la désinence, qui n’est souvent qu’explétive. Ici éjo
semble être un suffixe marquant la collectivité, la quan-
tité ; le radical reproduit le celt. bess, vess, bouleau, et le
nom signifierait un lieu planté de bouleaux. Il pourrait
cependant aussi avoir 6té formé par la bass. lat. bessæ ;
Bésses dans le dialecte limousin et auvergnat. a le sens du
lat. pascua, pâturages, prairies. Les deux acceptions sont
applicables.
Béssina, v. Vesser ; rendre par le bas un vent muet.
Béssino, s. f. Vesse, vent muet par en bas. — Pardou-
los dé fénno, béssino d'ase, propos de femme, le vent l’em-
porte. Pér un pé, pér uno béssino réfuses pas ta vésino,
pour un petit défaut sans gravité, ne refuse pas en mariage
ta voisine. La moralité de ce proverbe est qu’il vaut mieux
épouser une femme que l'on connait bien, malgré quelques
petits défauts, qu'une étrangère qui peut en cacher de
beaucoup plus grands. Le proverbe ajoute en effet : Né
vréndras uno détras low pioch qué n'daura fach sept ou
hioch.
Béssino-dé-loù , vesse-de-loup, plante de la fam. des
Fungus, Bolets; qui se remplit d'une poudre noire, quand
BES
elle esten maturité. Sous la pression elle éclate, et sa pous-
sière se répand.
Dér. du lat. Vesica, petite vessie, globule.
Bésso, s. f. Abbesse, supérieure d'un monastère de filles
où de femmes. — Tèros où Mas dé las Bessos, métairie où
champs de l'Abbaye ou des Abbesses.
Dér. du lat. Abbas, par apocope de l’a initial.
Béssoü, béssouno, adj. Dim. Béssouné. Jumeau, elle;
en parlant soit des personnes, soit des animaux ou des
arbres, produits d’une même souche, ou bien des fruits
adhérents l’un à l’autre. |
Dér. du lat. Bis et de la part. on, contraction de homi-
nes : deux hommes, où homme double. La désinence soù,
qui est la même que soun, et qui, dans le principe, était
ainsi, puisque son féminin est encore souno, peut avoir été
empruntée à l'angl. son, fils. La longue occupation des
provinces inéridionales par les Anglais rend cette hypo-
thèse plausible. Béssoù reviendrait alors à bis-son, deux
fois fils, ou double-fils.
Béssounado , s. f. Accouchement de jumeaux ou de
jumelles ; les jumeaux eux-mêmes pris collectivement. —
Aquo faï uno bravo béssounado, c’est un joli couple. À fa
trés béssounados, elle est accouchée trois fois de ju-
meaux.
Béstialén, énquo, adj. Qui lient de la bête, bestial ;
qui aime les animaux, qui se plaît à lesélever, à les soigner.
Dér. de Béstio.
Béstiâou, s. m. Dim. Béstialé, péj. Béstialas. Bétail ;
ensemble des animaux domestiques d’une ferme; la gent
animale en général. — Lous magnans soun un brave bés-
tialé, les vers à soie sont un charmant peuple-animal!
Ariba lou béstidou, donner la ration aux animaux dela
grange, chevaux, mules, bœufs où moutons, non comprise
la volaille. Laïssas pissa lou béstidou, laissez pisser le mou-
ton ; laissez faire ; laissez couler l’eau.
Dér. de Bastio.
Béstiassado, s. f. Grosse bêtise; balourdise ; gaïllardise
grossière.
Béstiasso, s. f. Gros et vilain animal. Au fig., grosse
bête; butor; grand imbécile; grossier.
Augm. et péjor. de Béstio.
Béstiéja, v. Faire l’imbécile, le nigaud; dire ou faire
des gaillardises grossières.
Béstiéjaire, aïro, adj. Qui fait des niches grossières et
gaillardes ; qui fait des lazzis indécents.
Béstiéto, s. f., ou Béstiolo, s. f. Bestiole, petite bête;
insectes en général. Au fig., petit esprit, personne bornée,
sans intelligence et sans instruction.
Béstiouno s'emploie dans le mème sens.
Dim. de Béstio.
Bèstio, s. f. Dim. Bestiéto, béstiolo, béstiouno, péj. Bés-
tiasso. Bête, animal, en général, particulièrement une
mule où un cheval. Au fig., sot, idiot, imbécile ; ES
butor; mauvais plaisant; vicieux.
BIA
— Aï éscampa uno bèstio, il m'a crevé un cheval, une
mule. Es pu bèstio qué nèci, il est plus coquin que sot. Mé
diquè pas soulamén : bèstio, siès aqui? il ne fit nulle atten-
tion à moi ; il ne me demanda pas seulement : que fais-tu
là ? Aquo's la bèstio dâou bon Diou, c'est un pauvre inno-
cent, un crétin inoffensif.
Dér. du lat. Bestia.
Béstidou, olo, adj. Dim. Béstioulé. Nigaud ; imbécile;
ignorant; stupide.
Béstiu, udo, adj. Dim. Béstiudé, péj. Béstiudas. Bes-
tial, qui a les instincts de la bête ; brute ; abruti.
Dér. de Bèstio.
Bésuquariès, s. [. plur. Dim. Bésuquarièirétos. Vé-
tilles; niaiseries ; bagatelles.
Dér. de Bésuqué.
Bésuqué, éto, adj. Vétilleur; cogne-fétu; tatillon ;
qui fait une grosse affaire de niaiseries; qui se tue et se
tourmente de minuties, les crée et les cherche à plaisir;
qui épluche ce qu’il mange.
Dér. de Bésuquo, vieux mot hors d'usage, qui signifie
une espèce de jeu de fainéant, consistant en une chaine
dont les anneaux sont enchevêtrés de manière qu'ils sont
très-difficiles à dénouer. C'est cet instrument ou quelque
chose d’analogue qu'on vient de renouveler sous un nom
de circonstance : da question romaïne. L'allusion a été
saisie; cet exercice a amusé sans rien résoudre, bien
entendu ; mais l'inventeur y a fait sa fortune.
Dér. du Jat. Bis et uncus, double crochet.
Bésuquéja, v. Vétiller; baguenauder; s'amuser à des
riens; pignocher ou manger à petits morceaux et en éplu-
chant.
Bésuquoüs, ouso, adj. Vétilleux ; minutieux en parlant
des choses. — Un ouvraÿe bésuquoùs, un ouvrage minu-
tieux, qui exige de la patience ; travail de détail minu-
tieux.
Béto-rabo, s. f. Betterave, Beta vulgaris, Linn., plante |
potagère, partout cultivée, qui a trois variétés principales : |
blanche, rouge et jaune.
- Emp. au fr.
Bétorgo, s. f. Cerise courte-queue; gobet ; la meilleure
“espèce pour confire à l’eau-de-vie.
Bétourguib, s. m. Cerisier courte-queue.
Serait-il dér. du lat. Bis tortus, qui serait une allusion |
NRRRRE ER Aie de ie us be |
tordue?
Bia, v. Serrer la corde d’un ballot, ou la charge d'une
voiture, en la tordant avec la bille ou avec le garrot ;
biller.
Dér. du lat. Bis et de Lia, lier ; lier deux fois.
Biaï, s. m. Dim. Biaissé. Biais; adresse, habileté;
savoir-faire ; tournure; esprit; inclinaison ; manière d’être.
— Jean sans biaï où Péâou-dé-biaï, un maladroit, Préne
lou bia, prendre la bonne manière de faire quelque chose.
Aqud's soun biaï, c'est sa manière de faire ou d'être. Cha-
|
|
|
|
Î
|
|
BID 11
cun soun biaï, chacun a sa façon d'agir. Préne qudouquus
dé soun biaï, prendre quelqu'un par son faible, s'accom-
moder à son humeur. Aqud's toujour d'un biaï, c'est tou-
jours la même chose, ni mieux, ni plus mal. Douna lou
biaï à quicon, donner une bonne inclinaison à quelque
chose ; lui donner de la tournure. À bon biaï, il paraït
adroit, habile. De quinte biaï qué mé vire, de quelque côté
que je me tourne, quélque tournure que je prenne. D'un
biaï ou d'un doutre, d’une façon ou d'autre. Siès pas dé
biaï, tu n’es pas bien placé. A fosso biaïssé, il a beaucoup
de dextérité, d'adresse ; il est plein de savoir-faire. Aquô's
pas dé biaï, ce n'est pas d’aplomb; cela n’a pas de tour-
nure.
Dér. du gaulois Bihay, obliquité.
Biaissu, udo, adj. Dim. Riaïssudé. Adroït ; ingénieux +
plein de savoir-faire.
Dér. de Biaï.
Biala, ». Bèler. — Se dit des brebis, des moutons, des
chèvres, des agneaux, et par extens. de tout cri forcé. —
Fédo qué bialo pèr un moucèl, brebis qui bêle perd sa gou-
lée, c'est-à-dire qu'un bavard est toujours en arrière dans
ses affaires.
Dér. du lat. Balare, bèler, ou du gr. Brkv, brebis.
Bialaïre, aïro, adj. Qui bèle; au fig., pleurard; qué-
mandeur ; poétiq., mouton, chèvre, agneau.
Bialamén, s. m. Bélement, cri naturel des brebis, etc.
Biar, s. m. Dim. Biardé. Billard ; table sur laquelle on
joue à ce jeu.
Emp. au fr.
Biasso, s. f. Dim. Biasséto. Besace; panetière de berger ;
sac des mendiants; sac ouvert dans le milieu, ayant üne
poche de chaque côté.— À sa biasso coufido, pléno, il a du
foin dans ses bottes. Chacun prècho pér sa biasso, prvb.,
chacun prèche pour sa besace, dans son intérêt.
Dér. du lat. Bisaccium.
Biblo, s.f. Bible; livre ou recueil des Saintes Ecri-
tures.
Dér. du lat. Biblia, livre par excellence.
Bicarèou, s. m. Mercier ambulant; porte-balle.
Dér..du lat. Vicatim, de bourg en bourg, de éne en
- Village.
Bichè, s. m. Dim. Bichéiré. Petit broc; eruche à vin
qui, au lieu d’avoir un goulot, a un large bec.
Dér. du gr. Bfxos, vase ou urne à anses. En îital. dic-
chiere, verre, gobelet ; mesure à vin.
Bidé, s. m. As au jeu de dés. — À fa raflo dé bidé, il
a fait rafle d’as; il a tout gagné, tout ramassé.
Ce mot a la même étym. que le fr. Bidet; comme l'as
au jeu de cartes se nomme aussi ase en langued., âne,
bidet.
Bidoun, s. m. Bidon; barillet en hois, où les journaliers
portent leur ration de vin pour la journée, et les cantiniers
de l’eau-de-vie.
Emp. au fr.
112 BIG
Bièïos, s. f. pl. Péjor. Bièiassos. Effiloques ; effilures ;
franges d’une étoffe usée et qui s’effile.
Corrup. du mot Vièios.
Bièn, adv. Bien; beaucoup; à merveille; grandement;
heureusement ; largement. -— Ce mot est une richesse de
la langue d'Oc, qui distingue entre les deux acceptions du
fr. bien, sans confusion possible. On dit en français : je
l'aime bien, et l’'amphibologie est embarrassante. On doute
si cette petite phrase signifie : oui, je l'aime, ou si elle
exprime : je l’aime beaucoup. En lang. on dirait dans le
premier cas : L'aïme bé, je l'aime, certainement ; et dans
le second : L'aïme bièn, je l'aime extrêmement.
Dér. du lat. Zene.
Biènfasén, énto, adj. Bienfaisant ; qui prend plaisir à
faire du bien; qui fait de bonnes œuvres.
Formé de Bièn et de fasén.
Bièro, s. f. Bière, boisson spiritueuse produite par la
fermentation degraines céréales et particulièrement de l'orge.
Dér. de l’allem. Bier.
Bièro, s. f. Brancard à claire-voie dans lequel on porte
les morts au cimetière, qu’ils soient déjà renfermés dans
le cercueil ou seulement dans leur suaire. On ne doit
jamais dire la bièro, dans le sens de cercueil, bière, qui se
disent caïsso.
Dér. du celt. Baer ou baar, cercueil, ou de bar, bran-
card, caisse portative.
Bièto, s. f. Citation; billet d'avertissement à compa-
raitre devant le juge de paix; extrait du rôle des contri-
butions ou avertissement.
Dér. du fr. Billet.
Biga, v. Colloquer; se défaire; troquer; échanger;
vendre; marier. — À bièn biga sa fio, ila bien placé sa
fille ; il Jui a fait faire un bon mariage ; il l’a bien collo-
quée. Coumo quicon la bigarén, de manière ou d'autre
nous nous en débarrasserons.
Dér. du lat. Bis et jugare, ou vices, échange
muture.
Bigara, ado, adj. Bigarré; peint, nuancé, mêlé de plu-
sieurs couleurs disposées par bandes.
Dér. du lat. Bisjugare, atteler, joindre, et radius, rayon,
raie; ou bien de variegatus ou virgutus.
: invicem
Bigaraje, s. m. Bigarrure; bariolage; mélange de plu-
sieurs couleurs tranchantes.
Dér. de Bigara.
Bigarouno, s. f. Bigarreau, grosse cerise en forme de
cœur.
Formé du lat. Bis et du mot garo, lang. adjectivé.
Bigô, s. m. Hoyau à deux dents; bident; binette :
moins fort et emmanché plus court que le béchar. — V. c.
m.— C’est l'outil dont on se sert dans les hautes Cévennes
et le Vivarais pour les vignes et toutes sortes de binage.
Dér. du lat. Bicornis.
Bigô, oto, adj. Bigot; faux dévot; hypocrite.
Dér. de l’allem. Bey Gott, ou de l’angl. by god, par
BU
Dieu ! parce que les bigots sont censés répéter souvent cette
oraison jaculatoire.
Bigo, s. f., ou Bigoun. Pièce de bois courte et équarrie;
poinçon; étai. — Voy. Bigoun.
Dér. de la bass. lat. Biga.
Bigorno, s. f. Enclume à deux cornes ou à deux
pointes arrondies pour tourner le fer en rond; compagnies
du centre de la garde nationale ; ancienne milice.
Dér. du lat. Bicornis, à deux cornes.
Bigoro (Bando dé), s. f. Bande, troupe de Bohème ou
de Gitanos, qu'on appelle aussi dans le pays Catalans,
parce que leur domicile, s’ils en ont un, est dans les mon-
tagnes frontières de la Catalogne et de la France. On les a
appelés dans le temps bando dé Bigoro, parce qu'il en
venait beaucoup du Bigorre, pays limitrophe de la Cata-
logne. Par ext. on dit bando dé Bigoro comme terme inju-
rieux, pour : tas de voleurs, tas de brigands. — Voy.
Bèmi.
Bigoun, s. m., ou Bigo. Bigue; petite poutre longue et
grèle, ou courte et équarrie quand elle sert de poinçon ou
d’étai. — Voy. Bigo.
Bigournu, udo, adj. Milicien ; garde national du centre;
biset.
Dér. de Bigorno.
Bigoutariè, s. f. Bigoterie; fausse piété; fausse dévo-
tion.
Dér. de Bigo.
Bigoutéja, v. Faire le bigot; se livrer habituellement à
des actes de dévotion puérile.
Dér. de Bigo.
Bigre, bigro, adj. Dim. Bigratoù. Synonyme radouci
et dimin. de Bougre. I] n'entraine aucune idée ficheuse
ni insultante : ce n’est guère qu'une plaisanterie. Bigre
s'emploie aussi comme interj. : diable! C’est un nom qu'on
donnait autrefois aux riverains des forêts nationales ou
seigneuriales, qui étaient des espèces de gardes spéciaux,
chargés de la surveillance et de la recherche des abeilles,
pour en recueillir le miel. Un privilége de leur charge les
autorisait à couper l'arbre sur lequel l’essaim venait se
poser. De là ils furent nommés dans la bass. lat. et les
actes de notaire bigrus ou bigri, par corrup. du lat. api-
ger, apicurus, apicuri, ce qui a fait le mot actuel. On
pourrait peut-être aussi tirer cette épithète légèrement
moqueuse du nom des habitants du Bigorre, en lat. Biger-
riones, que l’on confondait avec les Bohèmes. — Voy.
Bigoro.
Bijare, aro, adj. Bizarre; bourru; d'humeur peu so-
ciable; fantasque ; capricieux.
Emp. et corrup. du fr.
Bijou, s. m. Dim. Bijouné. Bijou, parure, jolie pets
chose en général. Bijouné, joli petit enfant.
Dér. du lat. Bis et jours.
Bijoutariè, s. f. Bijouterie; toute espèce de bijoux;
magasin et profession de bijoutier.
I
BIO
Bijoutiè, s. m. Bijoutier, marchand qui vend des bijoux ;
fabricant de bijoux.
Bijoutièiro, s. f. Marchande de bijoux ; femme d’un
bijoutier ; boite vitrée où s'étalent les bijoux dans un
magasin de bijouterie.
Bingoi (Dé), adv., ou Dé guingoï. De guingois; de
travers ; de côté; en faux-équerre; bistourné. — Marcho
tout dé bingoï, il marche obliquement. Y véi dé bingoï,
il est louche. — Voy. Dé guingoï.
Dér. du gr. Tv, boiteux, estropié.
Binlo, s. f. Bile; mais particulièrement pituite. C’est ce
qu'on entend d'ordinaire quand on se plaint de la binlo ;
on veut désigner par là un épaississement des glaires sur
la poitrine, qui deviennent visqueuses, muqueuses et diffi-
ciles à expectorer.
Dér. du lat. Bilis.
Bio, s. f. Bille de billard, exclusivement.
Dér. du lat. Bulla, bulle ou boule, ou de pila, balle à
jouer, boule. Le mot n’est pas ancien en lang. avec cette
sign. et vient du fr.
Bio, s. f. Garrot; bille; bâton court et fort dont on
serre les cordes d'emballage en les tordant ; trique, tricot ;
gros bâton; court bâton des bâtonistes. — Garo, La bio !
gare, la trique, le bâton !
Dér. de Bio.
Biô, s. m. Billot; grosse canne brute; tricot; gourdin.
Augm. de Bio.
BiGou, s. m. Dim. Bioulé, péjor. et augm. Bioulas. Bœuf
domestique, Bos taurus domesticus, Linn., mammifère de
la fam. des Ruminants. Le taureau se nomme Brdou. —
Bioulé, s. m. Bouvillon, jeune bœuf ; en v. fr. bouvelet
ou beuvelet. Lou Bidou bramo, le bœuf beugle, meugle ou
mugit. — Aquél home és un bidou, cet homme est fort
comme un bœuf. Bidou dé la Palu, taureau sauvage des
marais /palus) de la Camargue, très-propre aux combats.
Fla coumo la bano d’un biéou, antiphrase, c’est-à-dire
raide comme une barre. Volo-bidou, sobriquet ancien des
habitants de Saint-Ambroix. On prétend qu'un charlatan,
au moyen âge, annonça qu'il voulait faire voler un bœuf
du ran dé Jèsu, rocher de Jésus qui domine la ville au
midi, jusqu’au ran dé Manifaciè, rocher qui se trouve de
l'autre côté du pont. Jour pris pour cette expérience, on
ne sait trop comment s'en tira l'empirique : probablement
le bœuf ne voia pas; mais les drogues et les onguents
eurent bon débit, et les malins du voisinage firent subir
aux Saint-Ambroisiens les conséquences de leur crédulité.
Ce sobriquet tient encore dans toute sa force.
Voici une autre version : les habitants de Saint-Am-
broix avaient une foire à laquelle jamais personne ne
venait. Une année, ils s’avisèrent de faire publier dans
tous les environs (les affiches-programmes n'étaient pas
connues, non plus que l'imprimerie inventée dans ce
temps), qu'on verrait à leur prochaine foire un spectacle
extraordinaire : un bœuf qui volerait, en parcourant dans
BIS 113
son vol le trajet ci-dessus indiqué. On laisse à penser si au
jour dit les curieux abondèrent dans la ville; pendant
toute la journée, les boutiques non plus que les cabarets
ne purent suffire aux chalands. ]1 va bien sans dire que le
bœuf ne vola pas non plus; mais la foire fut bonne, et
cette fois les mystifiés ne furent pas ceux de Saint-Am-
broix.
On peut choisir entre les deux origines du sobriquet : à
coup sùr, elles ne partent pas du même auteur.
Bato dé biôou. — Voy. Bato.
Léngo dé bidou, espèce de feuille de mürier, dure, gri-
sâtre et sans müres; elle est plus clair-semée que les autres
espèces ; aussi est-ce la moins productive et doit-on l’éviter
à la greffe, mais en revanche, elle est moins sujette à la
tache par les brouillards et la miélée.
Biôou, s. m. Coccinelle, Coccinella punctata, Linn., de
la fam. des Trimérés, insecte, genre de scarabées, dont les
élytres sont rouges, tigrées de sept points noirs. On le
trouve principalement dans le calice des lys. Il est connu
aussi sous le nom de Bèstio_ ddou bon Diou, ou Galinéto
dâou bon Diou.
Lorsque Bidou est un nom propre d’homme, ce qui est
fort commun dans le pays, il fait au féminin Biolo.
Dér. du lat. Bos, ou mieux du gr. Boës, même sign.
Bioù, s. m. Dim. Biouné. Bigue de bois équarrie pour
être sciée en long. — Aquél doubre fara trés bioùs, cet
arbre fournira trois longueurs de sciage.
Dér. de Bio.
Biquo, s. m. Gaillard; bon compagnon. — Un bon
biquo, un bon drille. Trasso dé biquo, mauvais garçon,
mauvais diable. Sères un biquo à faïre aqud, si tu étais
homme à faire telle chose. Ah / lou biquo! ah! le luron !
Ce mot pourrait bien dér. de Vicanus, villageois.
Bisa, ado, adj. HAlé, gercé par la bise.
Dér. de Biso.
Bisbil, s. m. Bisbille; mésintelligence; discorde; que-
relle ; rixe; dispute.
En ital. Bisbiglio.
Biscaïre, s. m. Biais ; côté; obliquité ; travers; angle.
— Dé biscaïre, de travers, en faux équerre. Coupa dé bis-
caïre, couper de biais. Cantoù dé biscaïre, encoignure en
faux équerre.
Dér. du lat. Bis et du lang. caïre.
Biscarlo, s. m. Bidet ; petit cheval de montagne, ordi-
nairement de race lozerotte.
Ce mot ne serait-il pas dans sa finale une contraction ou
une altération de cavald, petit cheval? La syllabe bis, de
la bass. lat. bisus, brun, noir, déterminerait la couleur la
plus ordinaire de ces poneys de montagnes.
Biscountour, s. m. Zig-zag; faux-fuyant ; course pleine
de contours et de détours, en décrivant divers arcs de
cercle inverses les uns des autres.
Dér. du lat. Bis et contorquere, tourner deux fois au-
tour.
15
114 BIS
Bisé, s. m. Pigeon biset; ramier; pigeon sauvage,
Columba livia, Linn. —11 se distingue par deux bandes
ñoires qu'il a sur chaque aile. Son plumage est d'un gris
de fer foncé, et lui a valu-son nom, tiré de la bass. lat.
bisus, brun.
Bisècle, s. m. Bizègle, instrument de cordonnier en
buis, ayant une sorte de mortaise aiguë à chaque bout,
qui sert à lisser la tranche des semelles et à effacer la ligne
de suture.
On ne sait trop pourquoi on donne quelquefois, chez le
peuple, le nom de Bisècle aux enfants qui ont le prénom
de Louis.
Dér. du lat. Bis acutus, aigu des deux côtés.
Bisèl ou Bisèou, s. m. Biseau, talus pratiqué à l'extré-
mité d’un outil, d’un instrument. On le dit des bords à
facettes d’une glace, de l’arète adoucie d’un bois équarri,
du dos d'un couteau, etc.
Dér. comme Biaï, du gaulois Bihay, obliquité.
Bisés, s. m. pl. Coup de bise; autans; vents froids et
fréquents.
Dér. de Biso.
Bisèto (En), adv. De biais; en biseau ; obliquement. —
Biséto est le dimin. de Bisèou, mais ne s'emploie qu'ad-
verbialement. On dit encore : éscaïè én biséto, escalier en
colimaçon. Il semblerait cependant que cette dernière
expression viendrait de avis, une vis, dim. viséto.
Biso, s. f. Bise; vent de bise; vent sec et froid qui
souffle du N.-E. au N.-0.— La biso és folo, il fait un
vent fou. Touqua dâou vén dé biso, il est un peu timbré.
Aquésto és né siès touqua déâou vên dé biso, pour le coup,
tu peux t'en frotter les moustaches.
Juste-Lipse fait venir ce mot de l’ancien teutonique, bisa,
tourbillon de vent. En tous cas, il est remarquable que la
racine de notre biso, prise du celt. bis, signifiant noir,
réponde au grec Mekavéopéas, vent noir, et au lat. aguilo,
même sign., dér. de aquilus, noirâtre.
Bisouèr, s. m». Dimin. Bisouèrné. Vent-coulis; courant
de bise à travers une porte, une fenêtre, une ouverture
quelconque.
Dér de Biso.
Bisqua, v. Bisquer ; être vexé; enrager ; s’impatienter ;
s'inquiéter; rechigner.
Dér. du lat. Vexare, vexer.
Bisquo, s. f. Colère; fàcherie. — A prés la bisquo, il a
pris la mouche. Aqud's mdou préne sa bisquo, Voilà qui
est mal prendre son temps, se facher mal à propos.
Dér. de Bisqua.
Bissès (L'an dé), s. m. L'année bissextile, celle où se
rencontre le bissexte, c’est-à-dire le jour qu'on ajoute au
mois de février tous les quatre ans. — Lou pagaraï l'an
dé bissès, je le paierai aux calendes grecques.
Un lourdaud, nommé Jean ddou Fés, qui avait pris
femmé, trouva mauvais que celle-ci accouchât au bout de
trois mois de mariage. 11 consulta sur cette affaire son
BLA
curé, qui, en homme d'esprit et de conciliation, voulut pré- -
venir les suites fâcheuses d’un évènement irrémédiable
d'ailleurs. Il compulse son Ordo, et voyant que l'année
est bissextile, après des calculs qui commencent à calmer
l'imagination du pauvre mari, il en tire enfin l’oracle où
solaleur suivant :
Jean dâou Fés
Fénno n’a prés
L'an dé bissès qué né vôou trés ;
Trés et trés fan sièi et trés fan nôou,
L'éfan és vostre pérqué Diou-z-ou vou.
Jean du Fés a pris femme dans l’année bissextile, qui
compte triple ; trois et trois font six, et trois font neuf; l’en-
fant est à vous puisque Dieu le veut ainsi.
Notre homme se retira satisfait, dit l’histoire.
Dér. du lat. Bissextus.
Bistour, s. m. — Voy. Biscountour.
Bistourtiè, s. m. Bistortier, terme de pâtissier ; cylin-
dre, rouleau, pilon de bois pour travailler la pâte, la pétrir
et la mettre en feuille sur une table.
Dér. du lat. Bis et torquere.
Bitaïo, s. f. Victuaille; provision de bouche ; spéciale-
ment, ration de vivres qu'apporte un ex aeres dans son
bissac.
Dér. du lat. Victualia, vivres.
Biva, s. m. Bivouac, garde qui est sur pied pendant la
nuit.
Emp. au fr., qui dér. de l’allem. Bey, guet, étæwacht, nuit.
Bivaqua, v. Bivaquer ou bivouaquer ; par ext. passer
la nuit en plein air, à la belle étoile.
Dér. de Biva.
Bla, s. m. Dim. Bladé. Blé, nom générique qui com-
prend toute espèce de céréales propres à la nourriture de
l'homme. Dans beaucoup d’endroits, le mot bla ne désigne
que le froment et ses variétés. — Lou bla a fa d'un "sidi,
d'un dès, le blé a sextuplé, décuplé, il a produit six ou”
dix pour un. Téro négro faï bon bla, la terre noire pro
duit de bon blé; on dit cela souvent d’une femme très-
brune, qui doit produire des enfants robustes. Manjarén
pas grand bla énsémble, nous ne vivrons pas longtemps
ensemble; il y a incompatibilité entre nous. Sa fénno té
fara manja lou bla chèr, sa femme le ruinera. Bla carga,
blé chargé de mauvaises graines. Bla dé barquo, blé étran-
ger, qui vient par eau et qui est souvent avarié. Bla dé
péis, blé indigène. Chaque pays a une prédilection pour les’
produits de son sol, ici surtout. Le fait est que le blé des
environs d’Alais est de fort bonne qualité; il se vend tou-
jours plus cher que le blé étranger. Bla dè séméngo, blé
du premier choix, réservé pour renouveler la semence.
Bla vést, grains qui n'ont pas été dépouillés de leur
balle. Un bla est ordinairement un blé en herbe. Un for
bla, un blé bien fort et bien épais. ue :
Dér. de la bass. lat. Bladum, qui vient lui-même du
vieux Saxon blad.
BLA
_Bladiè, èïro, adj. Qui concerne le blé; blatier, mar-
hand de blé, moins usité cependant en ce sens que mar-
chan dé bla. 1 est quelquefois nom prop. ; les enfants alors
se nomment : Bladièiré, Bladièiréto. — Mouli bladiè,
moulin à blé.
Dér. de la bass. lat. Bladarius où bladerius, moulin à
farine.
Blagua, v. Bavarder; hâbler ; parler inconsidérément ;
mentir.
Dér. du lat. Blaterare, caqueter, babiller.
Blaguo,.s. f. HAblerie; bavardage ; babil importun ;
menterie; blague, qui est passé en ce sens dans le fr. fam.
et pour signifier : sac à tabac. — Taïso ta blaguo, cesse
ton. babil. Nous a pas fa qué dé blaguos, il ne nous a dit
que des bourdes, des häbleries, des mensonges.
Dér. de Blagua.
Blagur, urdo, adj. Blagueur; häbleur; parleur sempi-
- ternel ; indiscret.
Mème dér. que le préc.
Blaïme, s.m. Calomnie, ou tout au moins grosse médi-
sance. — Léva un blaïme, inventer une calomnie, calom-
nier.
Dér. du gr. Blépyx, lésion, injure, dommage.
Blaïsa, v. Biaiser; agir avec nonchalance, sans entrain,
sans conviction.
Dér. du nom pr. Blèso, Blaise, synonyme de noncha-
lant.
Blaïséja, v., et Blésséja, v. Grasseyer, parler gras,
comme font les Provençaux, à l'encontre de Ja lettre r qui
s’embarrasse dans leur gosier, et qui a quelque rapport
avec le g.
Ce mot est encore plus spécialement applicable à un léger
défaut de langue, qui se produit pour certaines consonnes,
comme si on les glissait entre les dents ; ce qui fait pro-
noncer le ch comme un s, le j comme un z, et « comme si
d la précédait.
Le premier est le grassaiement et le second le zézaie-
ment, que le lang. confond dans Blaïséja ou Blésséja.
taDér. de Blé. j
- Bla-maré, $. m. Maïs; blé d'Inde on de Turquie; gros
-millet des Indes; Zea mays, Linn. Plante de la fam. ps
*Graminées, originaire de l'Amérique, d’après certains
auteurs, tandis que d’autres soutiennent qu'elle est venue
des Indes-Orientales, opinion que semblerait confirmer son
nom fr. En tous cas, la dénomination langued. Bla-maré,
indique qu’elle nous est arrivée par la mer.
Blan, s. m”. Blanc, monnaie du moyen âge qui valait
cinq deniers. — Sièï blan, deux sous et demi, où 425 mil-
lièmes. C'est là le seul cas où le mot est employé.
Son nom dérive de sa couleur, c'est-à-dire que cette
monnaie était blanchie ou étamée ; en argent, elle eût été
trop petite pour la valeur représentée.
_ Blan, quo, «dj. Dim. Blanqué, péjor. Blanquas. Blanc;
couleur de la neige ; pâle; propre. — Drapèou. blan, dra-
BLA 115
peau de la monarchie française. Pèro-blan, frère-prècheur
dominicain dont il existait un couvent à Alais. Abéoura
dou blan, mêler de la farine dans le breuvage d'un animal.
Mé faï véni lous pèous blans, il me fait blanchir les che-
veux, dit-on de quelqu'un qui nous tourmente, nous im-
portune jusqu'à l'impatience. Camiso blanquo, chemise
propre. Faïre un viaje blan, faire un voyage inutile, se
déplacer pour rien. Vénguè tout blan, il pälit tout à coup.
Dér. de l'allem. Blank, brillant, éclatant.
Blan, s. m. Cible, but où l'on tire. — Aï fa blan, j'ai
mis dans le blanc, j'ai touché le but. Tira dou blan, tirer
à la cible.
Le point où l'on vise est marqué ou tracé en blanc au
centre d’un espace noir : de là le nom.
Blan-bè, s.m. Blanc-bec, jeune homme sans expérience,
ironique et méprisant.
Formé de Blan et de bè.
Blanchi, v. Blanchir; passer au lait de chaux ; faire
prendre une couleur blanche. — Faïre blanchi, faire blan-
chir, en terme de cuisine, donner une première ébullition
à la viande, aux légumes, les passer à l'eau bouillante.
Dér. de Blan.
Blannavo, s. f. n. pr. de lieu. Blannaves, commune du
canton de Saint-Martin-de-Valgalgues, arrondissement
d’Alais.
Ce nom se divise en deux parties. La dernière ne pré-
sente aucune difficulté : nave, nove, noue, en v.fr., nava,
en esp., signifie prairie. Dans la première, pour avoir un
sens raisonnable, ban ne pouvant s’allier au sens de nave,
il faut admettre, pour l'euphonie et la signification, que
r primitif s’est transformé en Z actuel; ces deux consonnes
ont d’ailleurs des dispositions particulières à permuter
ainsi. Or ärana est rendu dans la bass. lat. par juvenca,
vacca junior, Vache jeune. Ce qui donne pour le nom entier:
prairies ou pâturages pour l'élève des vaches. Cette inter-
prétation se fonde par assimilation sur le nom d’un hameau
de cette commune de Blannaves, où la mème étymologie se
trouve très-marquée. Branoùs, Branoux, est représenté par
le lat. branus, masc. de brana, id est juvencus, junior
bos (Du Cange), dont nous avons fait en langued. avec la
mème signification brdou, jeune taureau.
Blanquäou, s. m., ou Blanquäoudo, s. f. Guigne
blanche, espèce de cerise de couleur de cire, légèrement
teintée de rose, du côté exposé au soleil. Le fruit est indif-
féremment masc. ou fém., l'arbre n'a que le masc. Cérièire
blanquéou, cerisier qui produit la guigne blanche.
Dér de Alan.
Blanquas, asso, adj. Blanchâtre, qui tire sur le blanc;
d’un blanc sale.
Péj. de Blan.
Blanqué, s. m. Cérat de Galien, pommade résolutive,
détersive et dessicative; onguent connu aussi sous Je nom
de blanc Rhasis, par corrup. blanc raisin, d’une couleur
blanchâtre.
116 BLA
Blanquéiras, s. m. Terre schisteuse et argileuse, d'une
teinte jaunâtre pâle ; terrain à maigre végétation. Pour le
mettre en produit, il faut le défoncer profondément.
Dér. de Blan, et du celt. cair, pierre, quier et autres.
Blanquéja, v. Paraître blanc; avoir de loin une teinte
blanchâtre ou lumineuse; tirer sur le blanc: devenir
blanc. — Lous sères acouménçou dé blanquéja, l'aurore
commence à blanchir le sommet des montagnes. Adéjà
blanquéjo, il devient blanc, il vieillit, en parlant d’un
homme qui commence à grisonner.
Dér. de Blan.
Blanquéto, s. f. Blanquette, espèce de fricassée, de
gibelotte d'agneau, de chevreau ou de rogatons de rôtis de
veau ou de mouton, à la sauce blanche.
Blanquélo dè Limoùs, Blanquette de Limoux, nom que
le fr. a emprunté au lang. comme le précédent. C’est un
vin clairet et mousseux, de même natnre mais plus piquant
que la clairette de Die.
Blanquinoùs, ouso, adj. Dim. Blanquinousé, péjor.
Blanquinousas. Blanchâtre; tirant sur le blanc; d'un
blanc sale. Peut-être est-il d’un degré supérieur à Blan-
quas, déjà péjor. — VF. c. m.
Blanquoü, s. f. Blancheur ; couleur blanche.
Blaquarédo, s. f. Chènaie ; taillis de chênes blancs.
Ce mot est formé de la finale caractéristique, méridio-
nale essentiellement, éZo, qui est le signe de la collecti-
vité, et qui répond à la terminaison lal. etum, et armori-
caine ek : le radical, ou mieux les deux syllabes qui pré-
cèdent, se décomposent en blak, celt. blanc, et quar qui
égale quere, celt., d'où le lat. a fait quercus, chène; et en
voulant désigner un lieu planté de chènes, une chênaie, il
s’est servi de son collectif etum, traduit dans la langue
d'Oc par édo. Ainsi s’est formé quercetum, mème ques-
noltum, exprimé en fr. par chênaie et en lang. par blaqua-
rédo, où blanche chênaie, ou taillis de chènes blancs.
La première syllabe est indicative de la qualité ; la seconde
représente le radical celtique, caractérisant le sujet, l'arbre
lui-même. Mais il n’est peut-être pas de syllabe qui ait
subi autant de transformations, qui ait été plus défigurée
que le nom du chêne, l'arbre des Druides, le vieux gau-
lois tann. On le retrouve en Armorique, et il est syno-
nyme de dero; le latin l'avait altéré en quercus, avec la
désinence propre au génie de sa langue. Il est toujours
reconnaissable et le changement graphique devait avoir été
produit par la variété de prononciation. Tann ou dero
sonnaient indifféremment comme tsann, chann, sann, ou
chero, chesro, æero, quero ; quand la voyelle finale, muette
sans doute, est tombée, on voit facilement comment ont
pu se former et le mot latin et les variantes romanes. Si
bien que, d'après les plus anciens titres, tann primitif est
exprimé par tasnus comme par casnus, d'où leur collectif
tasnetum et casnetum, ce dernier donnant quesnetum, le
mème que quercetum, plus rapproché du latin, et employés
tous deux également dans la traduction ou la reproduction
BLA
des noms communs ou de localités, tels que chénaie, écrit
autrefois chesnaie comme chesne, et Chesnei (Eure), Quesnay
(Calvados), Chenay (Sarthe), Cheney (Yonne), Chenaye
(Deux-Sèvres), Chenois (Meurthe), Chesnaye (Seine-et-Oise),
Tannois (Meuse), Chanoy (Haute-Marne), Xenois (Vosges),
Sannois (Seine-et-Oise), Thenay (Indre), Quenay (Calvados),
Casneuil (Lot-et-Garonne), identiques à Thenailles (Aisne),
Chenailles (Loiret), Thenneil (Indre-et-Loire), et Quesnay
(Nord), Lous analogues, et tous rendus par la forme inva-
riable latine, Quercetum où Quesnetum. Le lang., en em-
ployant édo, as, ièro, iètro, comme désinences, n’a fait
qu'approprier au génie propre de sa langue et de sa pro-
nonciation, ce que dans d’autres dialectes on entendait et
on prononçait avec une autre inflexion. Mais la dérivation
est évidente; elle se fait mieux sentir dans La Blaquièiro,
La Blachère (Ardèche), qui confirme la filiation — Voy.
les articles Cassagno, Édo et Iéiro, suffixes.
Blaquas, s. m. Dim. Blaquassoù. Jeune chène blanc.
Blaquassino, s. f. Jeunes pousses du chêne blanc qui
se convertissent en buisson faute d’être élaguées, ou pour
avoir été broutées à leur naissance.
Blaquièiro (La), s. f., nom pr. de lieu. La Blaquière,
hameau de la commune de Cendras, près Alais, probable-
ment dans l’origine un taillis de chènes blancs. Mème
forme et même étym. que Blaquarédo. — Voy. Blaquas.
Blaquo, s. f. Jeune ramée du chène blanc, dont les
moutons sont très-friands, et dont on fait des fagots pour
leur nourriture d'hiver.
Blasa, v. Faire de la blaso, premier travail des vers à
soie qui veulent filer leur cocon.
Dér. de Blaso.
Blasi, s. m., nom pr. d'homme. Blaise. Au fig., noncha-
lant, mou, bonhomme. — Voy. Blèso.
Dér. du gr. BAÆ, lâche, imbécile.
Blasi, v. Faner; flétrir; froisser, meurtrir. — Blasi,
part. pass., flétri; fané; meurtri. Il a formé Ablasiga qui
a la mème sign. — V. c. m.
Dér. du gr. BAG, comme le nom pr. précéd., qui n’a
avec lui que la seule différence de l'accent, placé dans le
premier sur la pénultième qui est longue et rend l'£ muet,
tandis que la syllabe est brève dans celui-ci, comme le
note du reste l'accent que prend là final et le fait sonner.
Blaso, s. f. Bave, bourre des cocons du ver à soie : ce
sont les premiers fils qui servent d'échafaudage à ce petit
édifice et qui le tiennent à la bruyère où il est suspendu. On
dépouille Je cocon de cette bave avant de le filer ; elle est.
grossière et n’est pas chargée de l'humeur visqueuse,
répandue par le ver, qui donne de la force et de la consis-
tance au fil de soie.
Dér. du gr. BX&, subst. de Bu, être mou, flasque. Le
mot blasi existait dans la langue ; il a suffi d’un rappro-
chement pour appliquer l'épithète et faire le mot, au
“moment de l'importation des vers à soie, moins ancienne
évidemment que le mot lui-même. . €
BLO
Blassa, v. Blesser. N'est pas admis avec son acception
active, et serait une injure adressé à une femme. 11 n'est
reçu que comme verbe, sé blassa, se blesser, avorter, en
parlant d’une femme enceinte qui accouche avant le terme
naturel; faire une fausse couche.
Dér.du gr. Dose, frapper, ou Baérteuv, offenser, blesser.
Blatiè, s. m., au fém. Blatièiro. Blatier ; marchand, ou
plutôt revendeur de blé. Il a beaucoup d’analogie avec
Bladië, s'il n’est toutefois le mème.
Dér. de Bla.
Blé éto, adj. Blet, blette, peu usités; mou, comme le
deviennent certains fruits en muürissant; mince, plat. —
Péro bléto, poire blelte. Bousso bléto, bourse plate. Il est
des fruits qui ne sont mangeables que lorsqu'ils ont atteint
un certain point de maturité, tels que la nèfle, la cor-
nouille, la corne. Pour les poires et les autres fruits, quand
ils arrivent à ce degré de blé, ils sont à demi pourris et
perdent tout leur prix.
Dér. du gr. BA&, lâche, mou.
Blé, adv. En grasseyant, avec blésité. — Parla blé,
grasseyer, bléser. — Voy. Blaïsséja.
Dér. du lat. Blæsus, bègue.
Blédo, s. f. Blette, bette ; poirée; Beta vulgaris, Linn.
Plante potagère de la fam. des Chénopodées. — Costos ou
coustétos dé blédo, cardes de poirée.
Dér. du lat. Blitum, ou du gr. Bhérov, m. sign. En ital.
Bieta, en esp. Bledos.
Blèmi, adj. m. sans fém. Blème, pâle.
Dér. du gr. Blépyuzx, aspect, visage.
Blèso, s. m., nom pr. d'homme. Blaise. Au fig., niais ;
nigaud. — Kaïre dé soun Blèso, faire l’innocent, le bon
apôtre, la chatte-mitte. — Voy. Blasi.
Dér. du lat. Blasius, du gr. BX&.
Bléste, s. m., ou Blésto, s. f. Tale, sorte de mica-
schiste, concrétion de mica; pierre talqueuse, commune
dans nos Cévennes, opaque, feuilletée en lames minces,
flexueuses, jaunâtres ou grises, facilement pulvérulentes ;
elle se trouve en amas ou en filons dans les différentes
roches de cristallisation ou dans les calcaires qui lui sont
subordonnés.
Le roman avait le mot Bleste, bourbier, chose sale.
Dériverait-il du lat. Bliteus, vil, pour signifier un terrain
de peu de valeur ou qui se convertit aisément en boue ?
Blétou, s. m. Dim. Blétouné. Clou rivé d’un couteau,
de ciseaux, elc., qui est accompagné d'ordinaire d’une
rosette d'argent ou de cuivre.
Corrup. de Boutoù.
Blétouna, v. Clouer la lame d’un couteau à son manche,
y mettre un clou rivé.
Blo, s. m. Total, assemblage en bloc de différentes choses
de nature et de valeur diverses.
Dér. de l'allem. Block, tronc, souche ; gros morceau de
métal brut.
Blodo, s.f. Blaude; blouse; sarrau de toile, le plus
BO
souvent bleue, que les charretiers et les cultivateurs, dans
beaucoup de départements, portent par-dessus leurs habits.
Dér. de la bass. lat. Blialdus, bliaudus, venant de
blavus.
. Bloun, mieux Blounde, do, adj. Dim. Bloundé, bloun-
din, bloundiné, bloundind, bloundinoùs; péj. Bloundas,
bloundinas. Blond, onde; d’une couleur moyenne entre le
doré et le châtain-clair. — Bloundin est souvent un sobri-
quet, que l’on donne rarement à un blond, maïs bien par
antiphrase à un noireau, à un teint presque mulâtre.
Nombreuses variétés d'étym. : les unes prises du saxon
Blond, mêlé; d'autres du lat. apluda, couleur de la graine
de millet, ou de ablunda, paille, couleur de paille; ou
bien de bladum, couleur de blé; ou encore de blandus,
agréable.
Blouqua, v. Boucler; serrer avec une boucle. — En
parlant des cheveux, le lang. dit frisa, dans le sens de
boucler ; mais bouqua serait impropre.
Blouquo, s. m. Dim. Blouquéto, augm. Blouquasso.
Boucle, anneau de métal, muni d’un ardillon, et qui sert
de fermeture à bien des objets divers. — S'emploie dans
toutes les acceptions, sauf boucle de cheveux.
Dér. du lat. Buccula, anneau du bouclier par où on
passait le bras.
Blouquo, s. m. Clou de soulier, court, à tête ronde et
plate, dont on sème la semelle par lignes régulières. 11 ne
faut point le confondre avec la tacho, petit clou, à tête
grosse et ronde, comme les clous de fauteuil, pour fixer
toute sorte de choses délicates, et qu'on appelle en fr.
broquette. Métathèse de Broquo, en esp. broca, clou.
Dér. de Blouquo, parce que cette espèce de clous sert à
relier les différentes assises de la semelle, comme si elles
étaient serrées par des boucles.
Blu, uio, adj. Dim. Bluïé, péjor. Bluïas. Bleu, bleue;
violet; de couleur bleue ; une des sept couleurs primitives
— Blu dé cièl, bleu céleste. Vénèi tout blu, prendre un
teint pourpre de colère, de frayeur-ou de froid. Estre passa
dou blu, être désappointé, désabusé de ses prétentions.
Il se prend quelquefois comme substantif; mais il se
rapproche alors de l’argot. Un blu signifie un mauvais
bidet, une rosse, un äne, et par ext. au jeu de cartes, un
as. — Au pl. m. lous blus, les bleus, désignation de parti.
Dér. de l’allem. Blauw, azur, bleu de ciel.
Bluïastre, astro, adj. Bleuâtre; violacé; tirant sur le
bleu ou le violet ; d’un bleu sale.
Bluïéja, v. Paraitre bleu; jeter de loin une teinte bleue,
azurée ou violacée.
Dér. de Blu.
Bo, bono, adj. Dim. Bouné, péj. Bounas. Bon, bonne;
qui a de la bonté; parfait ; qui a toutes les qualités dési-
rables selon sa nature ou pour sa destination, ou pour son
état ; en parlant des personnes et des choses, excellent,
fort, vigoureux, vrai, heureux, humain, franc, véritable.
— Lorsque cet adjectif précède immédiatement le sub-
117
118 BON
stantif auquel il se rapporte, il se dit : bon; un bon home,
dé bon pan. H fait de même, lorsque le mot suivant com-
mence par une voyelle dans un mème membre de phrase :
Aqud’s bon à sdoupre, c'est bon à savoir. — Faïre soun bon
jour, faire sa communion eucharistique.
Faï-bo, il fait bon : le temps est doux. Lorsque cette
expression faï-bo est suivie immédiatement d’un infinitif,
on dit bon. Faï-bon marcha, il fait bon cheminer. Faï-bon
sdoupre quicon, Il est utile d’avoir quelque instruction.
Sé faïre bo pér quéuoquus, se porter fort pour quel-
qu'un, le cautionner. Faïre bo dé cén frans, s'obliger sur
parole de cent francs ; les jouer sur parole.
Un bon home ne veut pas dire comme en fr. un bon-
homme, un peu niais; mais un homme solide au travail,
soit pour l'adresse, soit pour la force, — Aqud’s dé bon
faïre, dé bon dire, cela est aisé à faire, à dire. Esocrituro
dé bon légi, écriture très-lisible. Aquo's dé bon véire, c'est
clair, évident. Lou bo ddou jour, le bon du jour. Faï bon
èstre riche, parlez-moi d'être riche. Ou dises dé bo? Tu
parles sérieusement ? Y vaï dé bo, il ne plaisante pas. Y-a
uno bono lègo, uno bono houro, il y a encore une forte
lieue, une bonne heure. Low bon Diou, Dieu, le bon Dieu;
se dit quelquefois pour crucifix.
Dér. du lat. Bonus.
Bocho, s. f. Boule, ordinairement en buis, servant à
jouer. — Jouga à las bochos, jouer au jeu de boule. Tira
uno bocho, débuter une boule.
En ïital. Zoccia, en esp. bocha.
Bofi, iô, adj. Péj. Boufias. Bouffi ; gros joufflu; enflé ;
difforme de figure ; boursouflé.
Dér. de Boufa.
Bojo, s. f. — Voy. Saquo.
Bolo, s. f. Borne; limite ; frontière; ligne divisoire quel-
conque entre deux territoires, comme entre deux. héri-
tages, deux champs, qu’elle soit déterminée par la nature,
un cours d’eau par exemple, une chaîne de rochers, les
eaux versantes d’une montagne, ou par un canal et un
chemin public, soit par des bornes conventionnelles entre
parties. — Faïre bolo, servir de point ou de ligne de déli-
mitation.
Le plur. as bolos est d'un emploi plus fréquent.
Dér. de la bass. lat. Bola : bolas seu metas plantare,
planter des bornes, venu sans doute du gr. B&xos, motte,
tertre.
Bomi, s. m., ou Vomi. Vomissement; action ou envie
de vomir; haut-le-cœur. — Aqud faï véni lou bomi, cela
soulève le cœur.
Dér. du lat. Vomere.
Bon, bono, adj. — Voy. Bo.
Bonafoüs, ousso. Dim. Bonufoussé, éto, n. pr. d'homme,
qui répond à bonne fontaine : Bonafous, Bonefoux ou Bon-
nafoux, L'ancienne langue d'Oc disait fous pour fontaine.
Dér, du lat, Bonus, et fons.
Bonamén, adv. Bonnement; sans fie], sans malice; sans
BOR
arrière-pensée. C’est souvent un adv. explétif, sans portée:
Bonamën dé que vous dirai? Au fait, que voulez-vous que
je vous dise ?
Dér. de Bonus, bond mente.
Bonhur, s. m. Bonheur; félicité; état Dire pros-
périté; chance heureuse. — Estre dâou bonhur, être heu-
reux au jeu; avoir bonne ehance. Sé lou bonhur m'énvôou
dire, si le hasard veut me sourire. Low bonhur gn'én. vou,
le bonheur le suit, s'attache à lui. Y-a pas bonhur qué dé
canaïo, il n’y a de bonheur que pour la canaille.
Dér. du lat. Bona et hora.
Bonjour, s. m. et interj. Dim. Bonjourné. Le bonjour
et Bonjour! En langued. plus qu’en fr. on distingue le
bonjour du bonsoir ; on s’y trompe bien quelquefois, mais
rarement. On dit bonjour toute la matinée jusqu'à midi,
et bonsouèr de midi au soir. Bonjour et bonsouèr se disent
soit en accostant quelqu'un, soit en passant à côté de lui,
sans s'arrêter. On ne les dit guère pour prendre congé, ce
qui se fait par adiou, adiou-sias, où bien vôtro, auquel on
répond : amaï à vous, je vous en dis autant. — Low:bon-
jour à vosto fénno, vous présenterez mes salutations à
votre femme, et l’on réplique invariablement : Y manqua-
raï pas, dé vosto part, je n'y manquerai pas, de votre
part.
Formé de Bon et de jour.
-Bonsouèr, s. m. et interj. Dim. Bonsouèrné. Le bon-
soir, bonsoir! salutation du soir. — Voy. Bonjour. —
Aça anën, bonsouèrné. Çà, nous partons, bonsoir! Dire
bonsouèr, dire adieu ; renoncer à.
Formé de Zon et de souèr.
Bôou, s. m. Ocre; terre bolaire. On emploie l'ocre en
pain ou en motte pour marquer d'une couleur rouge ou
jaune foncé les moutons qui sont destinés à la boucherie.
Les bergers s'en servent aussi par coquetterie pour farder
leurs plus beaux moutons, concurremment avec le Nash
de-gris.
Dér. du lat. Bolus, bol, terre bolaire. ñ
Bor, s. m. Dim. Bourdé. Bord; lisière ; extrémité; rive.
— Préne sus lous bors, prendre vers les extrémités, supls
lisière. Siès bién dou bor, tu es bien sur le bord.
Dér. du lat. Ora et dugr. “Opos, par l'addition du B.
En allem. bord, m. sign.
Bordo, s. f. Dim. Bowrdéto. Fétu, brin de paille ; saleté;
atomes surnageant dans un liquide. — Tiro mé aquélo
bordo, tire-moi cette paille de l'œil, dit-on à quelqu'un
qui avance une grosse hablerie. Y-a bé dé bordos dinc aquél
afaïre, cette affaire est bien sale, bien louche.
Dér. comme le v. fr. Ord, orde, du lat. sordidus; laïd,
sale.
Borgne, gno, adj. Dim. Bourgné, péj. Bourgnas. Bor-
gne, privé d’un œil. — C’est par le frottement du fr..qu'on
a restreint le mot Borgne à ce sens. I] paraît certain qu'en
lang. il signifie proprement : aveugle, privé de lawue,
comme cela se démontre par les phrases proverbiales :
BOR
Borgne d'un il ; il est clair que borgne s'entend là pour
aveugle. Une chanson fr. dit bien aussi : 12 était borgne
des deux yeux. L'argén fai canta lous borgnes, argent
fait chanter les aveugles et non les horgnes. D'aïci à cént
ans sérén toutes borgnes, dans cent ans nous serons tous
aveugles, nous n'y verrons plus. On appelle aussi les vers
à soie lous borgnes, à cause du préjugé général qui veut
qu'ils soient privés de l'organe de la vue. Enquiè coumo
un ca borgne, ne peut s'entendre que d’un chat aveugle;
les animaux ne pouvant beaucoup s'inquiéter de la perte
d’un seul œil, qui ne fait que diminuer faiblement leur per-
ceplion visuelle. Bado coumo un borgne qu'a pérdu soun
bastoù,il crie comme un aveugle qui a perdu son bâton ;
crierait-il s'il lui restait un œil? Siès borgne qué y véses
pas, tu es donc aveugle pour n’y pas voir?
Dér. du bas-breton Born, m. sign.
Borgno, adj. fém. de Borgne. Dim. Bourgnéto ; péj.
Bourgnasso. Borgne; aveugle. Au fig. obscure. — Ma
grand-la-borgno, ma mère-l'oie ; la traduction est exacte,
mais incomplète. En fr. comme en lang., il s'agit d'une
bonne vieille grand'mère, qui charme et endort les enfants
par ses longs contes. Notre gran a la mème spécialité que
la Mère-l'Oie. Cependant il y a pour nous quelque chose
de plus ; nous n'avons pas seulement recours à notre con-
teuse, comme on fait à l’autre, pour nous amuser ou appe-
ler le sommeil. Lorsque quelqu'un nous poursuit ou fatigue
de billevesées, de promesses auxquelles on ne croit pas,
de contes à dormir debout pour tout dire, on lui jette à
la figure : ma gran-la-borgno! ou contractivement : ma
gran ! C'est une expression d'incrédulité, de dédain, de
reproche, de colère. On voit qu'il est toujours question de
contes, sans quoi l’ellipse ne s’expliquerait pas, c'est comme
si l'on disait : vous me débitez des sornettes, je n’en crois
pas un mot. En fr. on n'emploie pas ainsi le nom de la
Mére-l'Oie, c’est une lacune. Resterait maintenant à savoir
quel malheureux accident rendit borgne où pour mieux
dire aveugle, notre pauvre gran. L'infirmité lui vint sans
doute avec l’âge, et elle a toujours été si vieille ! Mais que
de plus clairvoyants décident à quelle époque de sa vie ma
gran-la-borgno perdit la vue.
» Borgno, s. f. Canal d'entrée ou d'amont, canal de fuite
où d'aval d'un moulin à eau. C'est généralement ce pas-
sage voüté et obscur, qui commence à la première vanne
de chute et se términe au canal couvert de fuite.
Dans le bas-bret. Born ; en ital. Bornio, m. sign.
Borio, s. f. Dim. Bouriéto; péj. Bouriasso. Métairie ;
ferme ; closerie ; domaine dépendant d'une seule et mème
exploitation. Comme ce mot est propre aux Hautes-
Cévennes, où la propriété est fort divisée, il ne représente
guire qu'un petit domaine. Le mot Mas, plus particulier
e vennes, et à un pays de plaines et de larges
e | éntraine l'idée d’une plus large exploitation. +
— Borio est devenu nom pr. et s'applique à tout un quar-
tier, où se trouvait sans doute et où il existe encore un
BOS 119
manoir ou une ferme principale, On le traduit en fr. par
La Borie, et quelquefois on en a fait un nom d'homme.
Dér. de la bass. lat. Boria, fonds de terre, maison de
campagne ; du lat. boaria, étables à bœufs.
Bos, s. m. Dim. Bousquè; péj. Bouscarasso. Bois, en
général, substance ligneuse dure et compacte des arbres
et des arbrisseaux ; forêt ; taillis; futaie. — Apara un bos,
défendre l'entrée d’un taillis aux troupeaux. Bo$ dé luno,
bois coupé dans la lunaison favorable ; dans le sens de ce
préjugé qui veut qu'on coupe après la pléine lune tout le
bois qui perd annuellement ses feuilles, et en nouvelle
lune celui qui les conserve toute l’année /Voy. Bartassoù).
Bos coumun, communal ou communaux, pâturages où les
habitants d’une commune ont droit de pature; dans les
Hautes-Cévennes et la Lozère, communaux sur lesquels les
habitants ont droit d'affouage, c'est-à-dire le droit de
prendre du bois pour leur chauffage, fixé par répartition
des feux. Sèn dinc tn bos ? Sommes nous dans une forêt, au
milieu des voleurs? Au fig. Porto bièn soun bos, il porte
bien son âge, il est vert pour son âge. Es dé bon bos, il
est bâti de bon bois, il durera longtemps. Faïre fid dé tout
bos, faire flèche de tout bois. Laïssas faïre lou bos, loc.
prvb., ayez patience ; laissez pisser le mouton; mot à mot
cela signifie : attendez que le bois ait travaillé tout ce
qu'il doit, qu'il ait pris le degré de sécheresse néces-
saire.
Le radical Bos, ses composés et ses dérivés, ses dimi-
nutifs ou ses péjoratifs ont donné naïssance à une famille
très-nombreuse de noms propres de personnes et de lieux.
Pour bien saisir les variantes des appellations modernes,
il faut connaitre les changements par lesquels a passé le
primitif qui se trouve dans la langue celtique Bos, bose,
dans le germanique Buse, ou dans le gothique Busche.
Suivant l'influence dominante, la bass. lat. fit : Boscus,
boscum, buscus, buschus, avec les dim. Boschetus, buske-
tus, busquetus. Le roman disait : Bos, bose, boc, boisc,
bosche, bou, busche, et les dimin. Boscal, bosquet, buchet,
bosquina, boscatge, boisson, boyssada; en esp. portug.
Bosque, bosquete; en ital. Bosco et boschetto.
De ces éléments se sont formées, disons-nous, bien des
dénominations locales; mais le fonds était si riche, dans
un pays couvert de forêts, et il prêtait si bien à une dési-
-gnation, qu'il ne faut pas s'en étonner. Les altérations de
langage s'en mêlant ensuite ét venant à modifier les mots
et lessons, à les amoindrir ou à les renforcer, il n'est pas
surprenant non plus que la véritable racine des vocables
soit souvent difficile à distinguer, ‘et puisse être confondue
dans ces broussailles. Nous essaierons de les retrouver sous
léurs formes diverses, et sous chacun des composés ou
dérivés, diminutifs et autres. — Voy. Bruèl, Bruguiè.
* Ici notons les nuances qui retracent dans notre langue
celles du primitif lui-même. Dans les noms d'homme et de
lieu, se conservent très-rapprochées : lou Bos, lou Bose, le
Bosq (Hérault) ; dèl-bos, Delbos, Dalbos, Dalbosc, Dubosc
120 BOU
ou Dubois, tous identiques et faits du mème bois; les
composés Chalbos, Chdoudobos, Chäoudoboï, Méäoubos ,
Malbos, Malbosc. — Voy. ces mots, et autres, sans oublier
ceux où la désinence particulière à notre territoire se
montre, comme dans les noms : Boussargue, qui est
identique aax premiers, et Bussargue. .
Bosso, s. f. Dim. Bousséto, Boussignolo, péJ. Boussasss.
Bosse, déviation de l'épine dorsale ou du sternum; enflure
causée par une contusion ; en général, toute excroissance
contre nature. — Rounla sa bosso, rouler sa bosse, voya-
ger de tous côtés en exerçant différentes industries inter-
lopes. Faïre ou sé ficha uno bosso, manger et boire avec
excès. Sé ficha uno bosso déou rire, rire à ventre débou-
tonné, ou mieux dans le même sens : Créba ddou rire ; ces
trois locutions sentent fortement la langue verte. Sés fa
uno bosso dou front, il s'est fait une contusion au front,
qui s’enfle.
Dér. du celt. Boss, ou du gr. Péoox, enflure.
Boto, s. f. Péj. Boutasso. Botte, chaussure de cuir qui
couvre le pied, la jambe et quelquefois le genou. — Coumo
vaï la boto ? comment va votre santé ?
Emp. au fr. En celt. Bot, pied.
Bou, s. m. Dim. Bouté. Bout; fin, extrémité, reste de
quelque chose; brin. — Fiou à dous bous, à trés bous, fil
à deux ou trois brins. Sèn pa’'ncaro dou bou, nous ne
sommes pas encore au bout, à la fin; nous n’avons pas
fini. Tout sé véira dou bou, nous verrons bien à la fin du
compte. Lou téne pér un bon bou, j'ai mes süretés avec lui;
je le tiens par un bout qu’il n’essaiera pas de rompre.
Lou bou dâou mounde, terme de charcutier, l'intestin
cœæcum, boyau fermé naturellement d’un côté, dans lequel
on ensache de la viande de porc hachée dont on fait une
sorte de mortadelle : c’est cette mortadelle qu’on appelle
bou dâou mounde.
Dér. du celt. Bod, fond, extrémité, ou du gr. Bués,
fond, profondeur.
Bou, s. m. Papillon mâle des vers à soie. Plusieurs
femelles pouvant être fécondées par un même mâle, il y a
intérêt à prendre pour le grainage plus de femelles que de
mâles ; à cette fin, lorsqu'on choisit les cocons qui doivent
servir, on donne la préférence à ceux qui sont bien formés,
qui sont les plus durs, parce qu’il est à supposer qu'ayant
plus de soie, il faut admettre que les papillons qui en
proviendront seront plus robustes; on reconnait ensuite ou
on croit reconnaître les mâles dans les cocons à forme plus
allongée, plus pointue aux extrémités, mais souvent on se
trompe à ce triage dont les données sont peu précises.
C'est du reste un mauvais procédé et une économie mal
entendue que de choisir trop peu de mäles pour le nombre
des femelles que l’on élève; car le plus souvent la mau-
vaise qualité de la graine est due à sa provenance de mâles
épuisés. Il est prudent de calculer seulement deux femelles
pour un mâle; mais l'usage contraire est malheureusement
suivi par les spéculateurs, surtout depuis l'extension que
BOU
cette industrie a prise. Quand il sera possible d'échapper à
tous les inconvénients des grainages faits au hasard, et
que chaque éducateur éclairé par l'expérience et soigneux
de ses intérôts, voudra lui-même avec intelligence surveiller :
cette opération délicate, en y mettant l'importance qui
convient, peut-être la solution du problème si intéressant
pour nos contrées aura-t-elle fait un pas de plus.
Bou, s. m. Figue-fleur, ou figue précoce, que le préjugé
donne pour mâle à la figue franche. C'est cette idée qui
lui a fait donner le nom de Bou, bouc, qui est typique du
genre mâle.
Bou, s. m. Péj. Boucas, Boucaras. Bouc, mâle de la
chèvre, Capra hireus, Linn. Mammifère de la fam. des
Ruminants. Se prend aussi pour : outre à vin faite d’une
peau de bouc, dont le poil est tourné en dedans. — Es
coufle coumo un bou, il est enflé comme une outre; ou au
fig. il a le cœur gros, de colère ou de chagrin.
Dér. du celt. Buch, d'où le bas-bret. bouch, le gallois
bwch, le saxon bock, dans la bass. lat. Puccus.
Boubâou, s. m., n. pr. de lieu. Boubaux, Saint-
Martin-de-Boubaux, hameau de la commune de Lamelouze,
arrondissement d’Alais.
Dér. de Bou, bon, dialecte lozerot, ou peut-être de bos,
en lal. buschus, bois, avec apocope, et de bdou, baux,
par substitution du v en #, lettres identiques, vaux, val,
anc. fr., vdou, lang., vallon, vallée ; d’où bon vallon ou
vallon boisé. Les noms analogues seraient : Belval, Bel-
leval, Beauvalon, ou Bonval, Bonneval , noms d'homme ;
Bonnevaux, canton de Génolhac, arrondissement d’Alais.
Boubo, ou Bouboü! interj. Dim. Boubéto, bouboù.
Terme d'enfant ou de nourrice. C’est le baragouinage de
l'enfant qui demande à boire. On sait qu’à cet âge où peu
de syllabes sont encore connues, on ne s'attache qu’à quel-
ques consonnes qui frappent davantage la mémoire, en y
joignant nne voyelle quelconque, et on en fait une rédu-
plication de la syllabe retenue pour la rendre plus, sen:
sible. L'enfant ne se rappelle pas de tout le mot Déoure,
mais le B l’a frappé comme le son de la diphthongue ou,
il en fait boubo et bouboù, de mème qu'il a créé papa,
poupo, tété, etc. Les grands enfants qui sont auprès de
lui, et qui devraient toujours le ramener à la prononcia-
tion du mot propre pour l'y façonner, au lieu de cela,
abondent dans son sens et se plient à son vocabulaire. La
nourrice ne manque jamais de lui dire : Vos boubo, vos dé
bouboù, au lieu de prononcer le mot béoure, qu'il compren-
drait évidemment, puisque c’est lui qui a formé par ana-
logie son bowbo. S'il ne le répète pas exactement, ce n’est
pas faute de l’entendre ni d'en faire l'application, mais
plutôt d'être exercé aux procédés labiaux et autres qui sont
nécessaires à la prononciation. Il est bien entendu que, par
cette raison, le dim. Bowbéto n’est jamais employé que par les
nourrices et les bonnes, jamais par leur poupon lui-même,
qui aurait aussitôt fait de dire béoure, s’il pouvait varier et
articuler plusieurs syllabes avec changement de consonnes.
BOU
Boubourado, s. f.Péj. Boubouradasso. Vapeur chaude et
étouffante qui s'exhale d’un endroit chaud et enfermé; étuve.
Onomatopée exprimant le bruit d’une eau qui bout à
gros bouillons: bou! bou ! répété.
Boucan, s. m. Boucan; bruit; vacarme: tintamarre;
bruit d’une rixe.
Ce mot, qui est importé, comme son homonyme fr., de
l'idiome des Caraïbes, signifie le mode et le lieu de la pré-
paration des viandes qu'on boucane ou qu’on fume. Il a
donné naissance au v. boucaner et au s. boucanier, appli-
qués d’abord aux Indiens qui boucanaient à la fumée des
viandes de bœufs sauvages, dont ils faisaient commerce.
Plus:tard, ce commerce d'échange innocent et primitif fut
délaissé par les sauvages, qui travaillaient plus directe-
ment et qui se firent flibustiers. De toutes les nations leur
vinrent des compagnons : c'étaient bien les plus grands
tapageurs et les plus mauvais garçons du monde. Le mot
originaire dévia de son acception primitive, et il reparut
comme synonyme de tapage tumultueux, vacarme, et
caractérisa ainsi les boucaniers, faiseurs de houcan, tapa-
geurs et querelleurs. — Voy. Bousin.
Après cela, comme l’étym. a des ressources, elle a fourni
dans le celt. Bocan, impudique, qualification encore très-
applicable à ce genre de tapageurs, et dans le gr. Buxévn,
instrument de tapage par excellence, qui les caractérise aussi.
_Boucariè, s. f., n. pr. de rue et de quartier, qui signi-
fiait dans l’origine Boucherie, inscrit aujourd'hui sous le
nom fr. de Bouquerie.
Dans les premiers temps de l'émancipation des com-
munes, les différentes corporations des arts et métiers adop-
taient des rues et des quartiers particuliers, soit par ordre
de leurs syndics, soit que l'autorité consulaire voulüt
détruire tout privilége de quartier en obligeant tous les
exploitants d’une même industrie à s'établir dans une
même rue. — Voy. Fabrariè, Fruchariè, Péiroularie,
Sabatariè, Téissariè, etc.
Bouquariè, dérivant de bou, bouc, bocaria, dans la bass.
lat., désigne le lieu où l’on tuait les boucs et où l'on en
préparait la chair, où l'on tenait -boutique pour la vendre.
- Or il semble extraordinaire que la viande des boucs et des
chèvres füt le principal objet du commerce des boucheries;
cependant le doute est difficile quand on se rend compte
des mots boucher et boucherie, et quand on trouve dans la
charte d’Alais de l'année 1200, écrite en langue vulgaire,
ce curieux passage :
Et nomnadamenz disem que en carreiras publigas o em
plassas li boquier o li altre maselier lo sanc delz bocz non
jeton ni escampon, ni las butladas o attras causas pudenz,
ni aucizon Los bocz emplassas ; e aïizo vedam a totz homes.
« Nons défendons expressément aux bouchers de jeter ni
répandre le sang des boucs dans les rues publiques ou sur
les places, non plus que les intestins ou autre chose fétide,
qu'ils ne puissent non plus égorger les boucs sur les places;
et ceci nous le défendons à tout le monde. »
BOU
Il paraîtrait cependant qu’au moyen âge il existait deux
sortes de bouchers, les uns dits 3oquiers, les autresmaseliers,
du lat. macellarius. Sauvages nous dit que ce dernier nom
appartient à un autre dialecte. Néanmoins dans la charte
de 4200 nous voyons les deux noms en usage à Alais, en
rapprochant l’article que nous venons de citer de celui-ci:
Establen que tuit li masellier una vegada en lan juron
sobrelz quatre evangelis de Deu quezel masel defra la vila
dalest lur etient en alcuna guisa carn de moria ni poirida
o daltra guisa mortalz non vendran ; cant verre vendran
0 aret o troia digon o al comprador, iasia aisso que non li o
demant ; de feda si hom non li a demanda non son tengut
de dire nomnadamenz. Creissem que las carnz non sion ten-
gudas en aigo, en aici que las vendant poiridas per bonas ;
e sien contra aizo fasion li seinnor metan lur pena.
« Nous ordonnons que tous les bouchers, une fois par an,
jurent sur les quatre Evangiles de Dieu, que dans la bou-
cherie ou dans la ville ils ne vendront sciemment aucunes
viandes passées, ni pourries, ni provenant de bêtes mortes
de maladie. Quand ils vendront verrat, bélier ou truie, ils
devront en prévenir les acheteurs, même sans qu'on leur
demande; s’il s’agit de brebis, ils ne seront tenus de le
dire qu’en tant qu'ils en seront requis expressément. Nous
ajoutons qu’ils ne tiendront point les viandes dans l’eau
afin de vendre ainsi pour bonnes celles qui seraient pour- |
ries, et s'ils se mettent en contravention ils seront punis
par leurs seigneurs. »
Il existait donc des états distincts et par le genre de
leur commerce, et par le quartier de leur réunion en con-
frérie, puisqu'à Alais il y avait une rue appelée Boucarid,
et une autre nommée Mazèl-vièl. Il faudrait en conclure
que les boquiers, bouchers, ne vendaient que de la chair de
bouc, chèvre et chevreau, qui était sans doute plus estimée
que de nos jours, et les maseliers toute autre espèce de
viande, comme mouton et porc.
On pourrait tirer une autre induction du rapprochement
de nos deux citations. On y voit qu’il est défendu aux
bouchers d’égorger les boucs dans les rues et places et d'y
jeter le sang ; mais on ne retrouve pas la mème prohibi-
tion faite aux maseliers pour les béliers, verrats ou truies.
D'où on pourrait penser, à notre avis, que les boquiers
égorgeaient toutes sortes de bêtes comprises dans l’expres-
sion générique boues, et que les maseliers n'étaient que des
espèces de revendeurs de viande de basse qualité, qu'ils
auraient achetée des particuliers ou des gens de la cam-
pagne. Ce qui confirme cette idée, c’est leur serment de ne
pas vendre, à leur escient, de la viande de bêtes mortes ;
il est évident que, s'ils avaient égorgé eux-mêmes, ils
n'auraient pu être dans le doute si leur viande appartenait
ou non à une bête morte. Une seconde considération, qui
corrobore cette idée, est puisée dans l’étym. de maselier :
macellarius signifie moins boucher que marchand de
viande ; en outre macellum signifie halle, étalage de den-
rées, étal de boucher; enfin macellus est le dim. de macer,
16
12
122 BOU
maigre. De lout cela on pourrait conclure que le maselier
n'était que le revendeur, l'étalagiste de viandes maigres,
de moindre qualité, et destinées à la classe la plus pauvre ;
les boquiers, bouchers, étaient au contraire à peu prés ce
qu'ils sont de nos jours.
Boucaru, udo, adj. Péj. Boucarudas. Lippu ; qui a de
grosses lèvres. Ce mot, qui n’est plus dans le dialecte, est
resté nom pr. d'homme.
Boucha, v. Tirer une boule, débuter une boule ; terme
du jeu de boules. On lance de loin pour cet effet une boule
contre celle qu'on veut débuter, éloigner du but; si elles
sont d’un poids égal et qu'on tire juste, la boule lancée
perd tout mouvement et le communique à l’autre, qui part
au loin, tandis que la première occupe exactement la place
qu'elle a usurpée, par droit d'adresse : c'est ce qu'on
appelle : téra’n plago, qui s'emploie aussi au fig. — Voy.
Tira.
Boucha ne se dit au sens de boucher (tapa) qu'au part.
pass. et figurat. : és boucha, il'est bouché, il a l’intéllect
fort obtus.
Dér. de Bocho.
Bouchar, ardo, adj.
Dim. Bouchardé, péj. Bouchar-
das. Sale; malpropre; ‘barbouillé au visage; mouton |
marqué de noir ou de brun sur le museau ; un bœuf où
un mulet, portant au museau une couleur noire ou diffé-
rente de celle du corps, reçoivent aussi cette dénomina-
tion.
Dér. de Boucho, ou de bouquo.
.Bouchardije, s. f. Saleté; malpropreté ; crasse sur la
figure.
Bouchariè, s. f. Boucherie; abattoir public; ‘boutique
où Ton vend de la viande. — Voy. Boucariè.
Bouchè, s. m., au fém. Bouchèiro, dim. PAPE
Boucher. — Voy. Boucariè.
Bouchin-Cabro, s. m. Barbe-bouc, salsifis des prés, à
fleur jaune, Trapopogon pratense, Linn., de la fam. des
Composées chicoracées. Les gamins ‘sont très-friands au
printemps de cette plante dont ils sucent chaque jointure
au nœud de sa tige, qui a un goût douçâtre.
Dér. du lat. Barbula-hirci, d'où bouchin-barbo, ét la
Corrup. bouéhin-cabro. En ital. Barba-di-becco; en ‘esp.
Barba-de-cabron.
Bouchi-tè | interj. Cri ou plutôt commandement adressé
à la chèvre. I équivant à Halte-là !'et s'emploie lorsque cet
animal se dresse contre un arbre pour le brouter, ou quand
il prend quelque direction dangereuse. Comme cet appel
est toujours accompagné d'un coup de pierre, l'animal ne
se trompe guère sur sa signification.
Dér. de Boucho.
Boucho, s. f. Dim. Bouchéto; péj. Bouchasso. Chèvre.
(Voy. Cabro.) Boucho est le fém. de Bouc, et l’ancien nom
de la chèvre en langue d’Oc.
Boucouiran, s. m., nom pr. de lieu. Boucoiran, com-
mune du canton de Lédignan, arrondissement d’Alais, sur ?
BOU
la route de Nimes à Alais, et sur le chemin de fer qui
traverse sous un tunnel le rocher que domine son vieux
château.
Sauvages le fait dériver de deux mots gr., Boëe, bœuf et
Koïpos, porc. On pourrait trouver une autre racine qui
paraîtrait s’accommoder davantage aux allures du pays.
Rarement on a emprunté chez les Grecs pour formuler le
nom des bourgs qui se fondaient dans les Gaules, excepté
peut-ètre pour quelques-uns qui pourraient remonter à la
colonisation phocéenne. Il est plus naturel de supposer
qu'on a pris dans l’idiome vulgaire, surtout alors que les
racines s’en présentent si aisément dans deux mots de l'an-
cien comme du nouveau languedocien : bou ou boue, qui
signifie bouc, et ouire, outre de bouc. La désinence an,
qui est la traduction littérale du lat. anus, anuwm, dérivée
du suffixe celt., signe de la descendance, de la propriété,
de la provenance, indique le sens et la signification à don-
ner au mot qui lui est attaché; ici Bouc-owir-an veut dire:
lieu des outres de bouc, où l’on fabrique des outres de
bouc. — Voy. l'article Argue, et An, suff.
Sauvages a commis une erreur en écrivant à la française
le prétendu Céiros venant du gr. Le mot porc se dit bien
côiros; mais en gr. l’orthographe veut qu'on metle Xofpas
par un X.et non Kotpos, par un K: différence qui détermine
le sens. Dans le mot Boucouïran, d’ailleurs, pas la moindre
trace du ch, qui aurait été conservé, si la version de notre
savant lexicographe eût été admissible.
Boudéfla, v. S’enfler; se gonfler, se-boursoufiler. —
Aqud faï -boudéfla las bouquos, cela fait enfler les lèvres.
Las: figos boudéflou, les figues commencent à tourner «en
maturité; elles se gonflent.
Boudéfle, éflo, adj. Péjor. Boudéflas, asso. Enflé ;
gonflé ; bouffi; boursoufflé; gros. Au prop. et au fig.
Boudifla, v. S’enfler; former des vessies, des cloches,
des ampoules; enlever. — Moun dé boudiflo, mon doigt
s’enfle; il me vient au doigt une ampoule, une cloche:
Boudiflo, s. f. Dim. Boudifléto, péjor. Boudiflasso.
Vessie urinaire; vessie de-porc, qu’on conserve gonflée de
vent pour l'appliquer comme dessiccatif; cloche; ampoule;
élevures sur la peau; bulles formées par de grosses gouttes
de pluie en tombant dans l’eau.
Dér. comme les précédents, du celt. Bot, crapaud, bass.
lat. botta, en ital. bodda ; et du lat. inflare, flare in, souf-
fler dans.
Boudignièiro, s. f. Boudinière ; charcutière qui va
dans les maisons particulières faire l’assaisonnement des
viandes salées de porc, qu’il est d'usage d'égorger pour la
provision de l’année.
Dér. de Boudin.
Boudin, s. #. Boudin, boyau rempli d’un mélange de
sang de porc, d'herbes et de graisse. — Nous pourtan pas
dé boudin, nous n’en sommes pas aux civilités ensemble;
nous sommes ‘brouillés; il y a des motifs d’inimitiéentte
“nous. Cette loc. prvb.est fondée sur’l'usage local-qui: veut
l
:
BOU
que lorsqu’en égorge un porc, ce qui a lieu dans chaque
maison de paysan et presque dans toutes les familles bour-
geoïses, on envoie un plat de boudin à ses parents, à ses
amis et à tous ceux auxquels on veut témoigner affection
ou reconnaissance. Agud’s cla coumo dé boudin, c'est clair
comme la bouteille à l'encre; tout cela est fort obscur.
Dér. de la bass. lat. Botulus ou botellus.
Bou-Diou! interj. Bon-Dieu! exelam. de surprise,
d’étonnement, qu’on place à tout propos, et qui survient un
peu partout, au commencement, au milieu où à la fin
d'une phrase. — Bou-Diou ! qu'és bèl, Bon Dieu ! qu'il est
grand. Dé qué voulés faïre, Bou-Dtou! Que voulez-vous
faire, grand Dieu !
Altération de Bo, bon ; euphoniquement traduit en bou.
Boudoli, s. #. Petit homme; bout d'homme; nabot ;
enfant gros et court, replet et joufllu.
Dér. de Bou, bout, et oli, huile, comme terme de com-
. paraison à une outre à huile, qui a les mêmes dimensions
et une sorte de ressemblance de conformation.
Boudoufle, s. m. Péj. Boudouflas. Gros-bouffi; gros
joufflu ou pansu ; bouffe-la-balle, dans l’argot populaire.
Ce mot est synonyme de Boudèfle, proche parent de bou-
doli, descendant plus ou moins direct de boudiflo pour
l'étym.
Boudougna, v. S'élever; s'enfler; grossir. La différence
avec Zoudifla, est que l’enflure exprimée par ce dernier
est censée remplie d’eau on d'air; dans celui-ci l’enflureest
produite par une contusion, d'où résulte une bosse, une
bigne, en v. fr.
Dér. de Boudougno.
Boudougno, s. f. Dim. Boudougnéto, péjor. Boudou-
gnasso. Bosse, enflure, bigne, produites par un coup, par
une contusion ou par l’engorgement d’une glande ; loupe,
tumeur, excroissance charnue.—Il vient de pareilles tumeurs
à certains arbres, au chène et au châtaignier principale-
ment,
Paraît un augm. de Bougno. — V. ©. m.
Dér. du gr, Bovvés, élévation.
Boudousquo, s. f. Epiderme de certains légumes; écale,
-écorce, coque de certains fruits; pellicule qui reste sou-
vent adhérente dans les rugosités de la ehâtaigne sèche ou
blanchie; efflorescence du vin en bouteille ; dépôt de lie
au fond d’un vase ; éclaboussure de boue. — Manquo pas
se. din tout aqud, toute cette affaire est bien
Dér. peut-être du gr. Bépéogos, bourbe.
Boudroun, s. m. Terme de magon. Bigue de bois qui sert à
soutenir.les planches d’un échafaudage, soit lorsqu'elle est
posée transversalement aux poutres principales, soit Jors-
qu'elle s'enfonce dans l'épaisseur des murs, ce qui arrive
lorsqu'on est parvenu à une élévation telle qu'on ne peut
plus échafander ni sur des poutres, maîtresses, ni sur des
f Formé de -Bou-dé-roun.
BOU 123
Boudufo, s. f. Toupie, sabot, bourdat; jouet d'enfant.
— Voy. Béoudufo. ,
Bouésaje, s. m. Charpente d’un couvert; boiserie,
ouvrage de menuiserie ; boisage, tout le bois dont on s'est
servi pour boiser ; parquetage.
Dér. de Bos.
Boufa, v. Soufller; être essoufilé ; sifiler; refnser avec
dédain ; manger avec avidité, avec excès; dévorer. —
Boufa coumo un lètrou, souffler comme un lézard, soufller
de fatigue; le lézard, quand il est aux abois, rend une
espèce de son comme le vent d'un soufflet, Laïssas un pdou
boufa à la mountado, donnez le temps de soufller à la
montée. Mé boufè d'uno lègo, il repoussa au loin mes pro-
positions. Un pdoure diable tout lou boufo, un pauvre
hère est mal accueilli partout. L'douro boufo, le vent
souffle. Aguë lèou boufa tout soun féaure, il eut bientôt
dévoré sa fortune. Boufes pas, ne souffle pas; chut!
silence !
Onomatopée du bruit qu’on fait en soufilant; en allem.
on dit puffen, gonfler les joues pour soufller. L'étym. pent
s'appliquer à un homme qui est essoufflé, ou qui se gorge
la bouche en mangeant avidement.
Boufaire, s. m. Goinfre; gros mangeur; vorace; au
fig. prodigue, mangeur.
Dér. de Boufa. é
Boufar (Gran), s. »”. Bouffard, maître-soufileur dans
une verrerie, celui qui souflle les grands vaisseaux, tels
que dames-jeannes, alambics, matras.
Dér. de Boufa.
Boufarèl (Anjou-), s. m. Ange bouffi, gros bouffi, par
comparaison aux têtes d’anges isolées qui sont toujours
jonfflues, et aux figures du vent, que les peintres repré-
sentent comme les têtes d’anges et que le peuple confond
avec elles. — Sémblo un anjou-boufarèl, il ressemble à un
ange bouffi.
Dér. de Boufa.
Boufé, s. m. Dim. Boufétoù. Enfant joufllu et nabot;
gros. petit joufflu ; fort ressemblant au boudoli.
Dér. de:Boufa.
Boufèlo, s. m.; au fém. Boufèlésso. Dim. Bouféloù.
Gros-enflé; gros bouffe-la-balle, surnom familier que l'on
donne aux hommes d'un embonpoint excessif. Le dimin.
ne s'applique pas à un homme moins gros que le premier,
mais d'ordinaire au: fils de celui qui est surnommé Boufèla,
quelle que soit d’ailleurs sa eonstitution; de même pour
le-fém. Boufèlésso. Cet usage de faire participer les femmes
et les enfants aux sobriquets de leur mariet de leur père
est très-fréquent chez le peuple, surtout chez celui des
communes rurales.
Dér. de Boufa ou de boudifla.
Boufés, s. m. plur. Dim. Boufétés ; péjor. Boufétasses.
Soufflet. à feu, instrument pour souffler.
Dér..de Boufa.
Boufiga, v. Se boursoufller ; se couvrir d’ampoules ;
124 BOU
s'élever en pustules, en vessies, avec inflammation, telles
que les produisent les piqüres d’abeilles, de moucherons, et
le frottement des orties, ou les brûlures.
Dér. de Boufa.
Boufigo, s. f. Dim. Boufiguéto, péjor. Boufigasso. Vessie ;
cloche ; ampoule ; pustule; échauboulure ; boursouflure.
Dér. de Boufa, boufiga.
Boufo, s. f. Balle du blé; gousse ou pellicules des
légumes.
Dér. de Boufa.
Boufo, adj. fém., inusité au masc. Boufe. Creuse ; ver-
moulue; stérile, appliqué à une femme. — Nose boufo, noix
vide, qui chante creux, parce que l’amande est desséchée.
Fénno boufo, femme stérile.
Dér. de Boufa.
Boufo-fiô, s. m. Petit bonhomme ; enfant chétif et petit,
toujours au coin du feu; gratte-cendre : le pendant au
masc. de Cendrillon.
Boufo-la-balo, s. m. Bouffe-la-balle. Il a beaucoup de
rapport avec Boufèlo ; seulement celui-ci exprime plus
particulièrement l'embonpoint de la figure, de grosses joues
et une petite bouche; celui-là est instantané d'application
et ne sert jamais de sobriquet. Le fr. d’argot pop. et fam.
dit bouffe-la-balle, qu'il paraît avoir emprunté au lang. ;
car que signifie en fr. le mot bouffe ? tandis que boufo,
3me pers. indic. prés. du v. Boufa, indique quelqu'un qui
soufile et qui, pour ce faire, enfle ses joues.
Boufoun, s. m. Bouffon; plaisantin; gaudrioleur ; facé-
tieux ; farceur; goguenard. — Boufoun coumo un céndriè,
loc. prvb., mot à mot : bouffon, plaisant, farceur comme
un cendrier. Voilà un de ces dictons capable de déjouer les
plus subtiles et les plus sagaces explications. Est-ce une
antiphrase? c’est probable, car on ne dit cela que de quel-
qu’un passablement refrogné, nullement rieur ou qui plai-
sante à la façon des fossoyeurs d'Hamlet. Mais le cendrier
est-il l'emblème de la tristesse, l’image de la morosité ?
peut-être; surtout lorsqu'on se le représente avec ses débris
de charbon noirci et sa couleur grise, sans étincelles, sans
flamme. Puis n'est-ce pas de cendres qu'on se couvrait
dans les jours de-deuil ; et le premier mercredi du Carème,
le Memento homo, avec ses cendres, ne vient-il pas rappeler
les pensées graves et solennelles de notre néant ? La locu-
tion peut avoir été créée par toutes ces comparaisons. Le
contraste serait parfait. Le fr. a dans le même sens : gai
comme les portes d’une prison. Les deux phrases, en lang.
et en fr., veulent dire : aussi peu gai que possible, ce qui
approche beaucoup de triste, et le dépasse souvent quand
il s’y mêle tant soit peu d’ironie. Donc contre-verité.
Boufoun, comme son correspondant fr.et l'ital. bufo,
vient du nom des anciens bouffons de cour, dont le premier
emploi a été celui de grimacier ; la principale de leurs gri-
maces consistait à s’enfler les joues et à rouler les yeux,
ce qui donne au mot la même dérivation qu’au verbe
doufa.
BOU
Boufouna, v. Bouffonner; dire ou faire des plaisante-
ries; mais particulièrement railler, amuser les autres aux
dépens de quelqu'un ; goguenarder.
Dér. de Boufoun. :
Boufounado, s. f. Bouffonnerie; plaisanterie presqu
toujours mauvaise ; farce qui excite à rire.
Dér. de Boufoun.
Boufounaïre, aïro, adj. Péj. Boufounaïras. Railleur ;
mystificateur ; mauvais plaisant.
Bougéroun, ouno, adj. Matois; luron, petit coquin.
Dimin. et lénitif d’une expression plus énergique; comme
qui dirait en fr. d’argot mitigé : un bigre. C’est là un de
ces mille mezz0-termine que le lang. emploie volontiers pour
faire accorder ce qu'il doit à l'énergie d’une qualification
avec son respect pour la pudicité du langage. Dans bougé-
roun, du reste, l’adoucissement n’est pas seulement dans
le terme, il est aussi dans la pensée : il n’y a rien d’insul-
tant dans cette épithète, et la signification que nous lui
donnons est exacte. Les Italiens disent aussi en langage
trivial bugiarone, évidemment un dim. de bugiardo, men-
teur. Il est d'autant plus probable que notre bougéroun est
emprunté à l’ital. que nous le croyons vulgarisé chez nous
depuis seulement que les chaudronniers napolitains, les
tabrasaïres (V. c. m.), nous ont apporté leur bugiarone. Il
a été au surplus très-bien accueilli comme lénitif du gros
mot que nous n'écrivons pas ici, et qui a bien quelques
autres variantes, toutes en dimin. classés et usuels.
Bougnas, s. m». Vieux tronc d'arbre noueux, tels que
ceux qui sont charriés et délaissés par les inondations. Au
fig. grosse et vilaine tête.
Augm. et péjor. de Bougno.
Bougné, s. m. Débris noueux d’un arbre; petite
souche.
Dimin. de Bougno.
Bougnéto, s. f. Beignet, sorte de pâtisserie cuite à la
poêle avec de l'huile ; tache produite par un corps gras:
Dér. de la mème source que l’ital. Bugna, tumeur,
enflure, parce que les beignets sont une pâte boursouf-
flée. |
Bougno, s. f. Dim. Bougnéto, péj. Bougnasso. Souche
d'arbre, particulièrement la partie noueuse du tronc où
sont attachées les racines; bigne; bosse; enflure ; glande;
contusion ; meurtrissure. — Voy. Boudougno.
Dér. de l’ital. Bugna, bosse.
Bouï, s. m. Buis, Buœus semper virens, Linn., arbris-
seau de la fam. des Euphorbiacées, commun dans nos
montagnes. Cet arbuste, qui fournit un très-bon engrais,
est fort en vénération dans le pays. On prétend qu'il fume
un champ pour trois années, suivant ses divers degrés de
putréfaction : il fume la première année avec ses feuilles,
la seconde avec l'écorce, la troisième avec le bois. s…
Dér. du lat. Buxus, du gr. Ié£os, buis.—Voy. Bouissiètro.
Bouïargue, s. m.,n. pr. de lieu. Bouillargues, commune
dans le canton et l'arrondissement de Nimes. IL est fait
BOU
‘mention de ce village dans de vieilles chartes sous le nom
de Bollanicæ et Bolhanicæ, villa de Bolhanicis.
Nous aurions à répôter, à propos de l'étymologie de ce
nom, ce que nous avons dit dans l'art. Baïargue. (V. c. m.)
Tous ces villages ou hameaux, si nombreux dans le Gard
et dans l'Hérault, ne nous semblent pas avoir eù nécessai-
rement pour parrains des Romains d’origine auxquels on
attribue leur fondation, sans autre preuve qu’une ressem-
- blance de noms et sur une fausse interprétation de la finale
argue. Parce qu'un Romain inconnu se sera appelé Bolanus,
qu'un certain Vettius Bolanus aura été consul avec Cal-
purnius Piso, en l'an HE de l'ère chrétienne ; que même
Cicéron aura eu un ami de ce nom, et qu'il parle dans une
lettre à Quintus, son frère, d’un domaine près de Rome
qu'il nomme Bouillanus, ce n'est pas une raison pour
‘admettre que Bouïargue, Bouillargues, Bolhanicæ, tire sa
* dénomination de cet illustre personnage, non plus que de
quelqu'un de ses clients ou descendants établi dans les
environs de la colonie nimoise. Il est moins superbe, mais
certainement plus sùr, de prendre l’origine du nom dans
le lat. bovilia, étables à bœufs, de bos, bovis, qui a donné
à notre dialecte bidou, bœuf, bouïè, bouvier; au prov.
bubou ; au roman bouières, bouvières, bovières, terres lais-
sées en jachère pour servir de pâturage aux bœufs. Ainsi
on trouverait à ranger dans la même famille, comme l’a
- faitle latin, qui se connaissait en traduction, en les dési-
gnant par le nom analogue Bovilhacum où Boviliacum, les
identiques correspondants à Bouïargue, Bolhanicæ : Bouil-
lac (Aveyron, Dordogne, Gironde, Tarn-et-Garonne) ; Bouil-
las (Gers, Lot-et-Garonne); La Bouille (Seine-Inférieure) ;
Bouillé (Maine-et-Loire) ; Bouilly (Aube) ; Bouvine (Nord) ;
* Bovelles (Somme); Boves (Somme); Bova, en Calabre;
même Bovaca, dans la Colombie ; car la racine, la même
pour tous, est tirée du nom de l'animal le plus utile à
l'agriculture. A 7 es ce nom est parfaitement en
situation.
. Bouïda, v. Vider; faire écouler d’un lieu, d’un vaisseau,
- d'un sac ce qui le remplit ; enlever ; dter; éloigner.
Dér. du lat. Viduare.
Bouïde, bouïdo, «dj. Vide; qui ne contient rien; qui
n'est rempli que d'air.
Dér. du lat. Viduus où viduatus.
Bouïén, énto, part. prés. du v. Boul. Bouillant, qui
bout ; au fig. qui a beaucoup de vivacité, d’ardeur ; colé-
rique ; prompt ; violent. — Aigo bouïénto, de l'eau bouil-
lante. Ase-bouïén. (Voy. Ase.) Sés re sp vous ôtes
trop vif, trop pétulant. :
Dér. de Bouli.
Bouïno, s. f. La gent bovine, l'esphce bovine ; viande
de bœuf ou de vache. — Léngo-bouïno. — V, €. m.
Dér. du lat. Bovis, génitif de bos.
Bouio-baïsso, s. f. Matelote à la provençale; espèce de
ragoüt ou de potage que l'on fait avec du poisson bouilli,
assaisonné à l'ail.
BOU 125
Les étymologistes provençaux, les plus compétents pour
un mot qui leur appartient, lui donnent une dérivation
du sens mème des mots dont il est formé : il bout, baisse ;
c'est-à-dire : descends la marmite, le potage bout. Et
servez chaud !
Bouïoù, s. m. Peson d'une balance; boulon, contre-
poids mobile d’une romaine.
Dér. du lat. Bulla.
Bouïoun, s. m. Bouillon; décoction de viandes ou
d'herbes ; consommé. — Un bon bouïoun, aqud remonto,
un bon consommé, rien de mieux pour restaurer.
Dér. de la bass. lat. Ebullium, fait du lat. bullire, parce
que c’est par l’ébullition qu'il se prépare.
Bouïoun-blan, s. m. — Voy. Alapas.
Bouira, v. Bourrer, charger de coups; frapper quel-
qu'un à coups redoublés, comme Von fait sur le corps
soufflé d’un bœuf pour en détacher la peau.
Dér. du gr. Boës, bœuf.
Bouiril, s. m. Ventre ; bedaine ; grosse panse; panse de
bœuf.
Mème étym. que Bouira.
Bouïssèl, s. m. Boisseau, mesure de capacité qui con-
tient le quart de la carte, le huitième de l’émine, le soixante-
quatrième de la salmée, d’après nos anciennes mesures ;
en mesure métrique, il contient 3 litres 125. Il est aussi
mesure de superficie et vaut 4 are 25 centiares.
Dér. de la bass. lat. Bussellus.
Bouïssièiro, s. f. Terrain couvert de buis ; taillis de
buis.
Ce mot est un nouvel exemple de l'analogie qui existe
entre les désinences celtiques et les finales latines et plus
tard romanes, ou en langue vulgaire qui les traduisait. Le
primitif final était certainement ac ou ec, marque de la
collectivité, que le lat. a rendu par efum, et que le lang.
exprime par ièÿro : beuzac, beuxek, buæiacum, forme celtique;
buxetum, forme latine ; bouïssièiro, forme languedocienne,
signifient également lieu couvert de buis, comme le fr.
bussaie, bussières, Buxières, n. pr., et Bussières (Seine-et-
Marne), Bussiares (Aisne), Boussières (Nord), Bouxières
(Meurthe). (Voy. l'art. Argues, An, Ieïro, etc., suff.) Ces
affinités sont les plus directes ; mais la prononciation de
l'u en ou, l'altération de la voyelle double elle-même ou et
celle de la voyelle o de bos, boïs, les traductions employées
dans la bass. lat. passées dans le roman et enfin dans le
languedocien, rendent souvent très-mal aisée l'application
pour distinguer s'il s’agit d’un lieu couvert de bois ou seu-
lement couvert de buis. Il faut toujours citer, d’après Sau-
‘| vages, les n. pr. Boissier, La Boissière, Monthoissier, etc.,
comme dérivés de bouï, buis, qui a formé le masc. bouïssiè
et le fém. bouïssièiro. I est certain que dans notre dialecte
la prononciation mène droit à cette étymologie. Il faut en
dire autant de La Bouwissièiro, La Boissière, communes de
Bez et Esparon, et communes de Malons et Elze, de Bouïs-
sièiros, Boissières, commune du canton de Sommières,
126 BOU
arrondissement de Nimes, et sans doute du nom de Bowïssé,
Boisset, Buæetum, commune du canton d'Anduze, et
hameau de la commune de Saint-Sébastien. En composition,
Bèlbuis, de la commune de Rochegude, sera également à
citer. On est ainsi conduit à trouver comme similaires :
Boissières (Sarthe), et peut-être La Boisselière (Sarthe), et
Boissi (Seine et-Oise) ; et même le nom prop. Boissy, avec
la désinence familière aux dialectes du Nord, et chez nous
Boissin, représenté par Bowissé; à moins toutefois qu'ils
n’aient été inspirés par le mot suiv. bouïssoù, qui est une
sorte de péjor. venant encore de bouï, et qui a donné
comme noms de lieu et d'homme : Boisson, Bouïssoù, Bois-
sonade, Bouïssounado, le Buisson, Boyssonum (Gevaudan).
— Voy. Bos.
Bouiïssou, s. m. Dim. Bouïssouné, péj. Bouïssounas.
Buisson, en général; toute touffe d’arbustes épineux et
piquants, particulièrement le prunier sauvage ou prunelier.
— Voy. Agrunas.
Dér. de Bou.
Bouja, v. Verser, répandre ; à proprement parler, verser
d’un sac ou dans un sac.
Bouja, se vider, rendre tout ce que l’on a dans le corps,
se dit iron. d’une fille qui est accouchée depuis peu. —
Vèn dé lou bouja, elle vient d'accoucher. En parlant d’une
pluie torrentielle : N'én bojo à plés féras, il en tombe à
seaux.
Dér. de Bojo.
Boul, s. m. Bouillon; ébullition; action de bouillir ;
mouvement des bulles soulevées ; bruit d’un liquide qui bout.
— Prén lou boul, il commence à bouillir. Dinc un boul
aquù séra quiè, dans un, seul bouillon ce sera cuit. Fo ||
pas qu'un boul, c’est l'affaire d’un bouillon.
Dér. du lat. Bulla.
Boulado, s. f. Jet d’une boule au jeu de boules. — 4%
éncaro uno boulado , il me reste encore une boule à jouer.
Dér. de Boulo.
Boulanjariè, s. f. Boulangerie; profession, atelier, bou-
tique de boulanger.
Dér. de Boulanÿe.
Boulanjè, s. »m. Boulanjèiro, s. f. Boulanger, houlan-
gère; qui fait et vend le pain.
Dér. du lat. Polentarius, de polenta, farine de froment.
Boular, s. m. Péj. Boulardas. Grosse boule ; gobille, plus
grosse que les autres. — Un boular d'équipé, une grosse
gobille pour jouer à ce jeu d’enfant que La Fare décrit
dans ce charmant Hab) dé Sagatides Castagnados. — Voy.
Boulo.
Augm. de Boulo.
Bouldrado, s. f. Crevasse ; action de crever, de se cre-
vasser, de s’entr'ouvrir, de répandre par là son contenu.
Au fig. tour de maladresse, sotte équipée. Dans ce dernier
sens ce mot paraïtrait n'être qu’une altération de bdou-
drado.
Dér. de Bouldro.
BOU
Bouldro, s. f. Boue; vase ; dépôt de limon d’alluvion;
lie, crasse, fèces que dépose un liquide; effondrilles d'un
bouillon, d’une infusion ; bourbe. Bouldro et surtout son
péjor. Bouldras, entraînent l’idée d'un plus grand épaissis-
sement dans ces matières et d’un amas plus considérable
que la Zoudro. — V. c. m.
Dér. du gr. B6p60ç0s, bourbe.
Boulé, $. m. Dim. Boulété, péj. Boulétas. Bolet; cham-
pignon; agaric; fungus; cryptogame en chapiteau. On
peut diviser en deux classes les champignons comestibles
dont on fait usage dans ce pays, savoir : les laminés et les
poreux. et fistuleux. Dansla première se rangent : {ou dorgue
(boulé rouge), l'é èl, lou capélan, lou souquarèl, lou
vinoùs ; dans la seconde, l'arcialoùs, la léngo-bouino, la
sabatèlo et la galinolo. X1 est rare que chacune de ces
espèces n'ait pas un analogue dans la classe des champi-
gnons malfaisants. Les plus communs sont le pissago,
variété de l'arcialoùs, et le féou-dorgue qui ressemble
beaucoup à celui-ci. — V. €. m.
Les principaux diagnostiques des champignons vénéneux
se reconnaissent : 4° lorsque la cassure qu'on fait au cha
piteau devient en quelques secondes d’une couleur violagée
et livide; 2° lorsqu'en les rompant il en suinte une humeur
laiteuse; 3° lorsqu'ils ne portent pas vers le milieu de eur
tige une sorte de collet ou de couronne, qui n’est autre
. chose que la membrane liant le chapiteau au pédonenle,
avant que celni-là ne fùt développé; 4° lorsque l’épiderme
du chapiteau ne se détache pas nettement en ruban, en.le
pinçant du bord au centre; 5° lorsque la coupole est par-
semée de petits flocons de matière laiteuse et spongieuse:
Dér. du lat. Boletus.
Boulé, s. m. Boulet; boule de fer dont on charge les
canons.
Dér. du lat. Bulla. Dim. de Boulo.
Bouléga, v. Bouger; remuer; se remuer; changer-de
place ; tant à l'actif qu'au passif. — Vole pas jamaï \bou-
légæ d'aïci s'és pas vrai, je veux ne jamais bouger. descette
place si je mens. Bouléques pas, ne bouge ni ne remue.
Bouléga lou véspiè, remuer le guêpier; réveiller le chien
qui dort.
Dér. de l’allem. Wogen, voguer, ou du lat. bulla, but-
lam agere, pousser, agiter une boule.
Boulégadis, s. m”. Remue-ménage ; démangeaison de
remuer ; frétillement.
Dér. de Bouléga.
Boulégado, s. f. Foule; troupes tas ; fourmilière.
Dér. de Bouléga.
Boulégaïre, aïro, adj. Dim. Boulégaïré, péjor. Baulé-
gaïras. Remuant; frétillant; qui s'agite, qui remue:tou-
jours; mauvais coucheur.
Dér. de Bouléga.
Boulégamén, s.m.Remuement; mouvement perpétuel ;
frétillement. 444
Dér, de Bouléga.
BOU
Bouléja, v. Confiner; être limitrophe ; être contigu ; se
toucher, en parlant des propriétés. — Nous bouléjan, nos
champs, nos propriétés se touchent.
Dér. de Bolo.
Boulétièiro, s. f. Terre à champignons; proprement,
champignonnière, c’est-à-dire un endroit particulier où les
champignons viennent de préférence. Une fois que cet
endroit est connu, on est à peu près sûr d'y en trouver plu-
sienrs années de suite, jusqu'à ce que le sol soit épuisé. Cela
ne s'applique guère qu'aux dorgues, aux arcialoùs, aux
capélans,; les autres espèces viennent au hasard, ou bien
au-pied des souches de certains arbres.
Dér. de Boule.
Bouli, +. Bouillir; s'élever en bulles et à bouillons par
l'effet, dela chaleur ou de la fermentation ; fermenter ou
cuyer, en parlant du vin,— Aquél vin a prou bouli, ce vin
a assez, cuvé. Moun sang mé boul, la colère me fait monter
le sang :au cerveau, j'en ai la fièvre. — Faïre bouli l'émi-
ndou, verser de très-haut et avec force le blé dans la
mesure, (le manière qu'il n'ait pas le temps de s’y tasser,
et qu'il forme par conséquent une plus grande quantité de
vide.C'est ce qu'on reproche aux revendeurs de blé qui
veulent faire maigre mesure.
Dér. du‘ lat. Bullire, qui vient de bulla, bulle, bouil-
lon.
Bouli, s. m. Bouilli; viande bouillie ou cuite dans l’eau.
— Mätre lou bouli, mettre le pot-au-feu. Es pas bo ni pér
bouli ni pér rousti, il n'est bon àien; il n’est bon ni à
pendre ni à dépendre.
Dér. du Jat. Bullire.
Boulidoù, s. m. Tourbillon dans l'eau ; bas-fond qui se
forme dans. une rivière par le tournoiement des eaux causé
par la rencontre de deux courants, ou d’un rocher qui
l'oblige,à.changer de direction, ou encore par des ouvrages
d'art-qui-ont le même effet. C'est également toute espèce
de xaisseau supplémentaire dans lequel on fait cuver la
vendange, quand la grande cuve est insuffisante ; celle-ci
ne prend jamais le nom de boulidoù, qui est un dimin.
Dér. de Boul.
Boulnado, s. f. Dim. Bowlnadéto, péjor. Boulnadasso.
Proprement, panse ; la poche gastrique où se rencontrent
les aliments à moitié digérés ; en général les intestins et Je
bas-ventre.
Dér. du lat. Bolutus, boyau, intestin.
Boulo, s.f. Dim. Bouléto, augm. Boular, boulasso. Boule ;
bille; gobille;-tout. corps rond ; au fig. la tête. — Boulo
d'équipè, sobille d’un jeu d'enfant qui se nomme équipe.
(Vay. Boular.) À pérdu la boulo, il a perdu la tête. Tira’no
boulo, terme du jeu. de boule, viser à déloger une boule, la
débuter, en lançant fortement la sienne contre elle. — Foy-
Bocho.
Dér. du lat. Bulla.
Bouloun, s. m. Dim. Boulouné. Boulon, cheville en: fer
BOU 127
passe une clavette ou une mèche taraudée qui est vissée
par un écrou.
Boulzes, s. m. plur. Soufllet de forge ; mais particuliè-
rement soufllet double des chaudronniers ambulants, qui
consiste en une poche terminée par un tuyau, et qu'on
élève et comprime successivement de chaque main. Ce
genre de forge s'établit en plein vent, sur la première place
venue, en creusant une petite fosse de trois ou quatre pouces
de profondeur, où viennent aboutir les tuyaux des toulxes,
et par-dessus on place une très-petite quantité de charbon
de bois.
Boulze, s. m. sing., est encore un nom pr. très-répandu
dans le pays, dont le fém. est Boulzésso et le dim.
Boulzé. Il est rendu en fr. par Boulze.
Boum! interj. Onomatopée qui exprime le bruit sourd
produit par la chute d’un corps pesant. — Voy. Chinnanano.
Dér. du lat. Bombus.
Boumba, v. Battre; frapper un coup sourd; heurter
avec force. — Boumbo-quiou, casse-cul; coup sourd qu'on
se donne en tombant sur le derrière.
Dér. du lat. Bombus.
Boumbanço, s. f. Bombance; gala; grande et bonne
chère ; festin pompeux.
Dér. de la bass. lat. Pompantia.
Boumbarda, v. Bombarder; jeter, lancer des bombes;
canonner; par ext. tirer des coups de fusil, mème lancer
des coups de pierre.
Dér. de Boumbo.
Boumbé, éto, adj. Petit homme court, ramassé, gras-
souillet, rondelet, nabot tout rond de graisse. — Voy.
Boumboti, Coufloti.
Dér. de Boumbo, arrondi comme une bombe.
Boumbe, s.m”. Augm. Boumbas. Bruit sourd ; celui que
fait un corps lourd en tombant.
Dér. du lat. Bombus.
Boumbi, v. Rendre un son sourd en tombant ; au fig.
mourir; crever. — Né boumbigué, il en creva.
Dér. du lat. Bombus.
Boumbo, s. {. Bombe, gros boulet de fer creux qu'on
remplit de poudre pour le faire éclater. — Tira las boum-
bos, tirer des boîtes en signe de réjouissance et faute de .
canon. Boumbo, grosse femme, courte et replète.
Dér.-du lat. Bombus.
Boumboti, s. m.— Voy. Boumbé, m. sign.
. Boumbourido, s. f. Bourdonnement ; ne s'emploie qu'au
fig» caprice ; boutade ; transport. — Foy. Grdoule.
Boumbourina, v. Bourdonner, comme font les taons, les
abeilles, les hannetons; au fig. murmurer; marmotter ;
grogner ; bougonner ; corner, aux oreilles.
Dér..du lat. Zombus, bourdonnement.
Boumbourinéja, v. frég. de. Boumbourina.
Boumi, v., où Voumi, Vomir; jeter par la bouche ce
|; qui était dans. l'estomac.
quia unettête d'un: côté, et de l'autre une ouverture où l'on |
Dér. du lat. Vomere.
128 BOU
Bounas, asso, adj. Bonhomme, trop bon, sans malice,
avec une légère teinte de stupidité.
Aug. de Bo.
Boundoù, s. ». Bonde ; bondon; trou rond d’un ton-
neau par où on le remplit; bouchon, tampon qui ferme ce
trou. — Voudrièi qué ma gorjo sérviguèsse dé boundo®, je
voudrais que mon gosier servit d’entonnoir: souhait d’ivro-
gne. Métre lou boundoù, bondonner.
Dér. du gr. Béetv, boucher.
Bouné, s. m. Dim. Bounété; péj. Bounétas. Bonnet
d'homme, génériquement, ou bonnet de femme, par em-
prunt au fr. Le bonnet de coton, qui est la coiffure habi-
tuelle de travail pour les cultivateurs et la plupart des
artisans, se nomme particulièrement bounéto, ainsi que les
bonnets de laine rouge ou brune des auvergnats ou loze-
rots. — Le n. pr. Bouné, en fr. Bonnet, est assez porté.
Bouné signifie encore : bonnet carré, bonnet que portent
les gens d'église. — Un curé des hautes Cévennes, qui fai-
sait ses prônes en patois, dit un jour en chaire : Il y a une
personne dans ma paroisse qui scandalise tout le monde
par sa conduite plus que légère ; voulez-vous que je vous
la nomme, que je la désigne? Je vais lui jeter mon bonnet
carré. Le geste : yant suivi la parole, l’histoire ajoute que
toutes les femmes simultanément baïissèrent la tête, chacune
ayant bien quelque petite chose à se reprocher. Ah / fouriè
bé dé bounés, Ah! qu’il faudrait de bonnets carrés, reprit
le malin curé, en voyant ce mouvement.
Un co dé bouné, une salutation, un coup de chapeau.
On l'arapariè à cos dé bouné, on le prendrait avec un cha-
peau. — On croit vulgairement qu'un bonnet crasseux
d'homme calme les affections histériques d’une femme,
quand on lui en frotte le haut de la poitrine ou qu'on le
place à nu sur son sein.
On n'est pas d'accord sur l’étym. : les uns la tirent du
celt. Boned, bonnet ; d’autres de l'angl. bonnet ; quelques-
uns enfin du nom d’une espèce de drap dont on faisait
anciennement les bonnets.
Bounétado, s. f. Coup de bonnet; salutation, révérence ;
salut du bonnet.
Dér. de Bouné.
Bounéto, s. f. Dim. Bounététo, péj. Bounétasso. — Voy.
Bouné,.
Bounta, s. f. Bonté, qualité de quelqu'un ou de quelque
chose qui est bon ; obligeance.
Dér. du lat. Bonitas .
Bounto, s. f. Ce mot ne s'emploie qu'en se joignant
avec cabro, ou en la désignant directement et quand il est
déjà question d'une chèvre dans la phrase : Uno bounto.
— Cabro-bounto, chèvre franche, sans cornes.
Dans d’autres dialectes, au lieu de bounto, on dit mouto
pour la mème qualification. L'étym. donnée alors est prise
du lat. Mutila cornubus, à qui on a coupé les cornes, où
du gr. Méukos, qui n'a pas de cornes. Nous n’avons pas
moulo : il n’y a rien à dire. Bounto serait-il une altération ?
BOU
Ces deux mots ne paraissent pas se prêter à une commu-
nauté d’origine. Mais pourquoi le nôtre ne viendrait-il pas”
aussi du gr. Bouvés, mamelle ? Ù
Il peut sembler extraordinaire, au premier abord, que
ce mot grec, qui a une acception générique, soit employé
pour désigner adjectivement une espèce particulière de:
chèvre, Pour que la déduction fût logique, il faudrait sans
doute que le radical étymologique indiquât l'absence de: :
cornes. Cependant si on veut remarquer la manière dont
les langues se sont formées, il ne serait peut-être pas diffi-
cile, dans l'espèce, de se rendre compte de la possibilitéet
de la justesse d'une pareille racine. Les divers dialectes.
méridionaux ont puisé alternativement dans la langue des
colons phocéens et dans celle des colons romains. Dans le
mot que nous étudions, une moitié est empruntée au lat.
capra, cabro; l’autre moitié vient du gr. Bouvée, qui a fait
Bounto, c'est-à-dire l'animal aux mamelles. Ces deux
idiomes s'étant confondus dans le roman lang., il en est
résulté deux mots divers pour rendre l'idée de la chèvre.
Dès lors on a bien pu profiter de cette richesse pour dési-
gner par l’un des deux une espèce particulière. Or la chèvre
sans cornes parait le type de l'espèce ; la chèvre encornée
est l'exception, puisque, en fr., on désigne la première
espèce par le nom de chèvre franche, au témoignage de
Sauvages, la chèvre-type. On l’a appelée dès lors cabro-
bounto, comme on dirait chèvre-chèvre, et cabro-banardo;
la chèvre à cornes.
Bouqua, »., ou Boulqua. Verser les blés ou les foins ;
les coucher, ce qui est d'ordinaire l'effet d’une grosse
averse, lorsque les blés et les foins étant fort épais et fort
orgueilleux, les tiges en sont tendres et faciles à s’age-
nouiller. Ce même effet est produit quand une personne ou
un animal les foule en les traversant ou en s’y vautrant.
— S'aquél bla sé bouquo, y-doura dé paño, si ce blé vient
à être versé, la paille sera abondante cetle année: Cela”
veut dire que ce blé en herbe est bien maigre, et s’il vient”
à être assez fort, assez dru pour ètre versé, c'est une
preuve que tous les autres, qui sont de plus belle venue, -
réussiront merveilleusement. Locution ironique pour expri-
mer un champ de blé étiolé et clair-semé. :
Dér. du lat. Volvere, rouler.
Bouqua, v. Terme de magnanerie, couvrir, féconder la
femelle du papillon du ver à soie.
Dér. de Bou, papillon mâle.
Bouqué, s. m. Dim. Bouquété, bouquétoù. Bouquet,
réunion de fleurs liées ensemble; mais il se dit plus com-
munément d'une fleur isolée. — Ah / qué de bouqués! Ah!
que de fleurs ! dira-t-on en entrant dans un parterre. Bou-
qué de péiros, pierre d'attente. Bouqué dé pèous, une
mèche de cheveux, un toupet, un flocon de cheveux.
Dér. de la bass. lat. Boscetum.
Bouqué, s. m., n. pr. de lieu. Bouquet, commune. ét.
canton de Saint-Ambroix, arrondissement d’Alais. C'est.
le nom d'une montagne vers le nord-est d’Alais, Sère dé 1
BOU
Bouqué, au sommet de laquelle, dit le guidon, on a érigé
récemment une statue colossale de la sainte Vierge. L'alti-
tude de la montagne, au guidon, est de 631 mètres.
Ce nom est d'évidence un dimin. de Bos (V. €. m.), tra-
duit de la bass. lat. Bosquetum, boscetum, boschetum. H à
pour analogues Bousché, Bouschet, communes de Ponteils
et de Brésis ; lou Bousqué, le Bousquet, hameau de la com-
mune de Saint-Romans-de-Codière; lous Bousqués, les Bou-
quets, commune de Soudorgues, et les noms de personne
Bouchet, Bousquet, Bosquet, communs dans nos pays. Sa
signif. indique la présence de petits bois, ou clair-semés,
ou de médiocre hauteur.
Bouquéto, s. f. Petite bouche, bouche mignonne. —
Faïre bouquéto, faire la petite bouche; ne manger ou ne
parler que du bout des lèvres ; faire le dédaigneux, au fig.
Dim. de Bouquo.
. Bouquo, s. f. Dim. Bouquéto, péj. Bouquasso. Bouche,
partie inférieure de la tête par où on parle et on mange ;
ouverture. — La bouquo dé l'éstouma, le creux de l'esto-
mac. (Voy. Paléto.) La bouquo d'un four, la gueule d'un
four. Bouquo-fino, un gourmand, ou un beau parleur.
. Bouqguo s'emploie rarement au positif pour bouche, qui
se dit Gorjo. — V. ©. m.
Las bouquos, les lèvres.
Dér. du lat. Bucca.
Boura, v. Casser des pierres ou des rochers avec une
masse de carrier qu'on appelle bouro. Au fig. Bourrer ;
frapper rudement ; maltraiter ; travailler avec assiduité el
employer toute sa force. — Fôou boura aquél ro, il faut
casser ce rocher à coups de masse.. Nous bourarén, nous
lutterons ensemble. Zou ! bouras, allons, ferme, forcez,
poussez.
Dér. de Bouro, masse de fer.
. Boura; v. Bourrer; au prop. garnir ou remplir de bourre;
presser la charge d’un fusil.
Sé boura, se bourrer de vivres ; se gorger d'aliments ;
prendre double fourrure contre le froid; se rembourrer, au fig.
+ Dér. de Bouro, bourre.
. Boura, v. Bourgeonner, se dit principalement de la
vigne quand elle commence à pousser ses bourgeons.
Dér. de Boure, bourgeon.
_Bourado, s. f. Effort; épaulée: reprise d'un travail,
d'un ouvrage. — Y véou faire uno bourado, je vais don-
ner encore un coup de main à cet ouvrage. Y-avèn fa uno
bravo bourado, nous avons donné un bon coup de collier.
Dér. de Bouro, masse de fer. |
Bouraïè, s. m. Bourrelier, celui qui fait les colliers de
labour et harnais de roulage, parce qu'il emploie beaucoup
de bourre pour rembourrer.
Bourajo, s. f. Bourrache, Borrago offcinalis, Linn.
Plante de la fam. des Borraginées, diaphonétique et bé-
chique.
« Dér. du lat. Borrago, altér. da, œrsgtl Salons Apalte,
mot qui dans La Lithuanie sgnifait coria.
BOU 129
Bouras, s. m. Péj. Bourassas. Lie, boue, que dépose
l'huile soit dans les fosses du pressoir, soit au fond des jarres.
Dér. du gr. Bépéopos, boue, bourbier.
Bouras, s. m. Péj. Bourassas. Etofle de laine grossière;
bure ; grosse toile d'étoupe dont on fait les sacs et draps de
la campagne, bourén.
Dér. de Bouro, bourre.
Bourasso, s. f. Dim. Bowrasséto. Lange en laine gros-
sière, espèce de bure dont on enveloppe les enfants, au
maillot par-dessus le lange de toile, drapé ou drapël, etau-
dessous du lange de parade, — Estre à la bourasso, ètre au
maillot.
Dér. de Bouras.
Bourbouïado, s. f. Hachis d'herbes, ragoüt, fricassée,
macédoine composée de légumes, d'herbes et de viande
hachée, d'œufs brouillés, apprètés comme les épinards ; plat
assez commun et qui n'est pas du goût de tout le monde.
— Vèou manja aquélo bourbouïado, dit, surtout un jour
maigre, quelqu'un qui n'a qu’un très-mince ordinaire.
Dér. du gr. Bépécpos, bourbier.
Bourbounés, s. m. Au plur.f Bourbounéses. Bourbon-
nais, province de France; habitant du Bourbonnais, qui
lui appartient. On désigne ainsi une espèce de porcs tout
blancs qui viennent du Bourbonnais.
Bourboussado, s. f. Curoir de l’aiguillon; petit fer
plat en forme de pelle, au bout du manche de l'aiguillon à
bœufs, pour détacher la terre, les herbes, les ronces qui
s'engagent dans le soc de la charrue en labourant. — Voy.
Curéto.
Dér. du gr. Bépéopos, boue, fange.
Bourdaléso, s. f. Débris fangeux de menu bois et de
végétaux de toute espèce, que les inondations déposent
dans les oseraies et qui marquent le plus haut point qu'a
atteint le niveau des eaux. — Voy. Bourdinchè.
Ce mot parait directement issu de bordo; la place où
sont déposés ces débris sur les bords des rivières, la trace
qu'ils laissent comme bordure, pourraient avoir auss;
influencé sur sa dénomination.
Bourdas, s. m. Péj. Bourdassas. Au plur. Bowrdasses.
Rustre ; gros lourdaud. Epithète injurieuse donnée aux
montagnards de la Lozère, parce qu'ils voyagent avec un
gros bâton nommé bourdo. De là ce nom; mais ne vien-
drait-il pas du lat. Burdo ou burdus, mulet engendré par
un àne?
Bourdé, s. f. Sabot, espèce de toupie qu'on fait tourner
en la frappant avec un fouet. Ce mot n’est plus usité que
par comparaison : Escarabia coumo un bourdé, vif comme
une toupie.
Bourdèou, n. pr. de lieu. Bordeaux, ville, ancienne
capitale de la Guyenne, maintenant chef-lieu du départe-
ment de la Gironde.
Dér. du lat. Burdigala. Isidore de Séville dit que ce nom
lui vient de ses premiers habitants, qu'il appelle Burgos
Gallos.
17
130 BOU
Bourdérèou, s. m. Bordereau; facture des différentes
livraisons d’une marchandise ou d’une denrée vendues.
Emp. au fr.
Bourdifaïo, s. f. Fétus et brins de quoi que ce soït-qui
surnagent dans un liquide ou qui vont au fond; brous-
sailles; rejetons ravalés qui croissent au pied d'un arbre.
— Y-a bé dé bourdifaïos, c'est une affaire sale ou em-
brouillée.
Dér. de Bordo.
Bourdifèl, s. m. Péj. Boudifélas. Amas embrouillé de
fils entrenoués, de racines enchevêtrées.
Dér. de Bordo.
Bourdinchè, s. m. Péj. Bourdinchèiras. Débris fangeux,
détritus de bois, de racines, mêlés de limon, déposé dans
une cruede rivière sur les rives où dans les oseraies. —
— Voy. Bourdaléso.
Dér. de Bordo.
Bourdo, s. f. Péj. Bourdas, bourdasso. Bas-bout noueux
d’une souche; long bâton renflé à une extrémité, qui se
termine par une sorte de boule, bougno. — Pè-dé-bourdo,
pied-bot.
En v. fr. bourde, bâton ; d’où bourdon, bâton de pèle-
rin.
Bourdo, s. f. Bourde; menterie; fausse nouvelle. —
Débita dé bourdos, débiter des mensonges.
Dér. de la bass. lat. Burda, mensonge.
Bourdouïra, v. Ravauder; farfouiller ; mettre sens des-
sus dessous ; fouiller; retourner en tous sens. — Dé qué
bourdouïres pér aqui? que vas-tu ravauder là ?
Formé de Bordo, balayures, débris, et de vira, ou de
bordo, v. m., maison des champs, et vira, tourner la
maison.
. Boure, s. m. Dim. Bourioù. Bourgeon qui commence à
pousser ; plus particulièrement œil de la vigne. — Pouda
à boure et bourioù, taïller la vigne en ne laissant au scion
restant que deux bourgeons ou deux yeux. — Voy. Bou-
rioù.
Dér. de Bouro, bourre, parce que le bourgeon, quand il
commence à gonfler, est couvert, entouré d’une sorte de
duvet cotonneux.
Bouré, éto, adj. Brun, couleur de la bourre de bœuf
où de vache. — Vi-bouré, vin blanc rosé, clairet et dou-
ceâtre.
Dér. de Bouro, bourre.
Bourèio, s. f. Bourrée, bourrée d'Auvergne ; rigaudon ;
danse qui s’est effacée déjà devant le galop et la contre-
danse, détrônés eux-mêmes par la polka et la mazurka. —
Voy. Bourigal. À
Bourèl; $. m., au fém. Bourèlo. Péj. Bourélas. Bour-
reau; exécuteur des hautes-œuvres; au fig. cruel, inhü-
main, féroce. — Pago dé bourèl, paiement d'avance. Avédre
un fron dé bourèl, être déhonté comme un valet de bour-
reau. Lou bourèl l'a manqua, c'est-à-dire il s’est échappé
de la corde qu'il a méritée.
BOU
On n’a qu'à choisir entre les diverses étym. proposées.
Ce mot, dit-on, vient du celt. borrev ; Caseneuve le tire du
| gr. Bopés, qüi dévore: Gui-Patin, du lat. burrus, roux,
parceque les rousseaux sont ordinairement violents; le
P. Labbe, du v. fr. boucheriau, petit boucher ; Ménage, du
lat. buccarus, boucher, passant par buccarellus, burellus,
bourel; Eusèbe de Salverte et Roquefort, du bourguignon
buro, lance; Villaret, du nom d'un clerc, possesseur en:
1260 du fief de Bellem-Combe, à la charge de pendre les
voleurs du canton. En langue romane et en ital. on dit
boya, en bas-breton bourreo. J'incline pour ce dernier.
Bourén, s. m. Dim. Bourénqué, péj. Bourénquas. Drap
de grosse toile qui sert à porter du foin, de la paille, etc.
— Voy. Bouras.
Dér. de Bouwro.
Bourétaïre, s. m. Au fém. Bourétairo. Cardeur, car-
deuse de fleuret et de bourre de soie. Ils cardent les côtes
et ce qu'on appelle lous éstrasses de cocons de filature. Ils
en tirent dans les premières barbes ce qu’on appelle la fan-
taisie, et du reste le fleuret, qu'on nome bouréto,
Bouréto, s. f. Fleuret ou bourre de soie, provenant des
débris grossiers des cocons. C’est une étoffe qui fait un
très-long usage, et dont les femmes de la campagne étaient
exclusivement vètues, il y a quelques années, excepté dans
les grands froids. Aujourd’hui les jeunes filles ont des ten-
dances marquées à s’émanciper de la servitude de cette
mode antique. L’étoffe était très-solide à la chaîne, mais de
mauvais teint et peu élégante d’ailleurs.
Dér. de Bouro, bourre.
Bourgadiè, ièiro, s. et adj. Habitant d’un bourg, d'une
bourgade ou gros village; plus généralement, habitant d'un:
faubourg de ville; qui appartient au faubourg d’une ville.
Dér. du lat. Burgus.
Bourgado, s f. Dim. Bourgadéto. Bourg, bourgade,
petit bourg ; faubourg.
Dér. du lat. Burgus.
Bourgal, alo, adj. Franc, loyal, La franchise et la
loyauté étaient censées les vertus particulières aux bourgeois
affranchis, par comparaison aux serfs de la glèbe, dont les
compliments et les offres de service étaient entachés d'une
arrière-pensée de servilisme.
Ce mot dérive évidemment de- bourg, qui a fait bour-
geois ; l'idée qu'il exprime est l’honneur de la bour-
geoisie.
Bourgalamén, adv. Loyalement; franchement ; carré-
ment ; sans arrière-pensée; avec indépendance. Il répon-
dait autrefois à bourgeoisement, qui, dans l’acception fran-
çaise, comme subst. et comme adv., a bien dégénéré de
notre temps, où bourgeois est devenu une expression de
mépris et synonyme de homme vulgaire, sans esprit, sans
délicatesse et sans goût.
Bourgés, s. m. Au fém. Bourgéso ; au pl. m. Bourgéses.
Bourgeois; habitant d'une ville, qui vit sans travailler; le
peuple entend par là les riches. Il signifie encore : patron,
BOU
chef d'atelier, dans le langage des ouvriers; maitre et-hôte-
lier, dans celui des domestiques ou des voyageurs.
“Dér. du lat. Purgus, bourg.
Bourgnoù, s. m. Ruche à miel; tronc Fo «#23
caisse oupanier dans lequel.on met les abeilles.
Dér. de Borgne, obscur.
Bourgougno, s. f. La Bourgogne, ancienne province de
France. — Pégo dé Bourgougno, importun qui s'attache à
vous avec obstination et dont on-peut se débarrasser plus
difficilement que de la poix de Bourgogne, qui est la meil-
leure et la plus adhérente.
Dér. du lat. Burgundius.
-“Bourguignoun, s.m. Porc, cochon. C'est là un des
nombreux déguisements que l’urbanité languedocienne im-
pose-àcet animal immonde pour.le produire là où il doit
du-respect. Môme alors n'est-il désigné qu'en accompagnant
son:surnom de précautions oratoires, comme : parlan-t-én
. réspè, pardoulos-pudou pas. Elle fait de même, quand elle
parle du fumier, d'un‘âne, etc. Cet usage se perd cepen-
dant,-soitpar le contact du fr..qui se moque de ces locu-
tions, soit par l'extension des idées d'égalité. — Voy.
Lachén, Vésti-dé-sédo.
Uest-probable que les premières races de nos pores nous
sont venues de la Bourgogne, ce qui leur a donné ce nom.
Bourigal, s. m.Dim. Bourigaïé. Rigolon, bourrée, sorte
de danse.
Dimin. de Bourdio. — V..c. m.
‘Bouril, s. m". Dim. Bourïoù. Bouchon; duvet; -coton ;
éraillures de fil qui dépassent sur la trame d'une étoffe,
qui la déprécient et qu’il faut éplucher ; bouchon ou caillot
qui se forme à un fil en le filant. — Tiro aquél bouril éndé
tas\déns;tire-toi d'embarras si tu peux; dénoue cette diffi-
culté.
Dim. de-Bouro.
Bourioù, s. m. Petit bouchon de fil; petit bourgeon ;
contre-bourgeon qui pousse à côté du principal ; le plus
bas œil d'un sarment de vigne. — Voy. Boure.
«Dim. de -Bouril et de boure.
Bourioùs, ouso, adj. Dim. Bouriousé; péj. Bouriousas.
Cotonneux ; bouchonné ; plein de duvets et.de bouchons.
“Dér. de Boure.
-#Bourisquado, s. f. Dim. -Bourisquadéto, péj. Bourisca-
dasso. Anerie, faute grossière, ignorance crasse.
« Dér. de Bourisquo.
Bourisquo, s. f. Dim. Bowrisquoù, Bourisquéto, éj.
Bourisquasso. Bourrique, ânesse,, ou même âne générique-
ment. Au masc. Bourisquou, avec la diphthongue finale
muette, ce qui le distingue de son dim. Ts où elle
pe — Voy. Bourou.
- Bourisquou, baudet, âne ; bourrique ;-ausfig. nes
Vial; ignare; bourrique, qui a aussi les deux accep-
RE EMA cet longs il ms :Bourisquoù.
Dér. du gr. Hégétyos;rroux.
= Bourisquoü, s. m. Anon, Loniets petit âne. "La
BOU 131
nuance entre les diminutifs, bourisqué, m., bourisquéto, f.,
et bourisquoù, est seulement que celui-ci est un petit âne
qui commence à porter le bât, les autres des Anons qui
têtent-encore leur mère.
Bourja, v. Fouiller profondément la terre avec la trén-
quo, lou béchar ou lou coutriè, — V.ie. m.
Augm. de, Bouléga.
Bourjoù, s.m. Tisonnier; fourgon pour atiser le feu;
tout-bâton de bois ou de fer, propre à fouiller, à remuer.
Altér. pour Fourjoù, dér. du lat. Furca.
Bourjouna, v., et Bourjounéja, frég. Fourgonner;
remuer ; fouiller dans un trou avec les mains, un fer ou un
bâton. — Bourjouna lou fid, fourgonner le feu, le remuer
avec les pincettes; tisonner. Bourjouna las sèrvos, fouiller
les remises du poisson avec une perche pour le faire sortir.
Déqu'anus bourjouna aqui? qu'allez-vous farfouiller là?
Formé de Bourjoù.
Bourjounaïre, aïro, adj. Remuant, qui s'agite, qui -
fouille partout et sans cesse.
Dér. de Bourjoù.
Bourlis, s. m. Trouble ;
agitée.
Dér. de l'ital. Burlana, tourbillon.
Bournal, s. m». Cendrier d'un four.
Ilest dit pour Fournal, altér. fréquente de F en 8.
Bournèl, s. m., ou Bournèou. Dim. Bournélé, péy.
Bournélas. Conduit d’eau souterrain ou extérieur, en
plomb, en zinc, en fonte ou en poterie; tuyau de poële.
Dér. du celt. Born, fontaine.
Bourniquèl, èlo, adj. Dim. Bourniquélé, péj. Bourni-
quélas. Myope; qui a la vue basse, faible, mauvaise vue;
qui cligne les yeux ; louche.
Dim. de Borgne.
Bouro, s. f. Masse de fer montée sur un manche long et
flexible pour briser les rochers; masse de mineur ou de
carrier. pour rompre les pierres.
Bouro, s. f. Péj. Bourasso. Bourre ; poil des animaux ; :
duvet qui recouvre certains fruits et certains végétaux ;
bourre d'un fusil, bouchon fait de bourre ou de papier
pour presser la charge. — Bouro dé sédo, bourre de soie.
Quan-t-on faï mérca énd'él féou toujour y laissa dé bouro,
on ne-peut traiter une affaire avec lui sans y laisser du
sièn. Æmib'él féou toujour y laïssa péou ou bouro, on ne
peut se tirer de-ses mains les braies nettes. Féou qué la
bouro né sdoute, il.ne faut pas s'y épargner quand vous
devriez y laisser-de la peau. Tira pèous et bouro, tirer d'une
affaire, d’une spéculation, tout ce qu'il est possible de Jui
faire rendre. Y-a dé bouro, cela s'entend sans qu'on soit
obligé de compléter le dicton qui est : Y-a dé houro à batre.
Pour le rendre, on trouvé la phrase toute faite : il y a-du
fil à retordre. En -vérité, -si l'on voulait positivement et
sans'velléité même d'antiphrase qui n'y est-certainement
pas, si l'on voulait, par une image, par une comparaison,
exprimer une très-grande difficulté à vainere, on pourrait
confusion; tumulte; foule
132 BOU
sans peine trouver plus juste et plus vrai. En effet, rien
n’est au contraire plus facile que de tordre, même de
retordre du fil et de battre de la bourre comme de la laine.
Le français a donc bien décidément déraillé, quoique les
chemins de fer ne fussent pas inventés à cette époque ;
mais qu'il s'arrange. Quant au languedocien, qui nous tient
en ce moment davantage au cœur, il n’y aurait pas moyen
non plus de sauver sa locution en la prenant comme on la
ditet surtout comme on l'entend communément. I en serait
tout autrement si, au lieu de battre, il y avait comme dans
le français et plus à propos que chez lui tordre ou filer;
car le poil si court de la bourre se prèterait difficilement à
cette opération. I n’est pas impossible que notre dicton soit
parti de là pour arriver où il est, par une oblitération quel-
conque. Mais il est plus probable encore qu'il ait été fait dans
un autre ordre d'idées, et qu'il ne dise pas ce que l’on croit.
Bouro signifie aussi la masse de fer, au bout d’un long
-manche, dont se sert le mineur ou le carrier pour rompre
les blocs de rocher et les réduire en moellons. Frapper de
cette masse est à coup sûr un travail des plus pénibles.
N'est-ce pas cela qui a donné naissance au dicton ? Notons
d’abord que batre est pris de mème pour frapper. On dit :
batre lous piqués, frapper les pieux pour les enfoncer avec
le moutoù, le bélier ou la sonnette, qui les bat comme la
masse bat la pierre. Notre locution a dü ètre primitivement
avec une inversion : Y-a dé la bouro à batre pour y-a à
batre dé la bouro, autrement dit : éndé la bouro, ainsi
qu'on dit en français : jouer de la prunelle, des couteaux,
pour avec la prunelle, avec les couteaux. Cela équivalait à :
il y à à frapper de la masse, ce sera aussi rude que de frapper
avec la masse. Dans cet ablatif, l’article la a disparu, parce
qu'il n'était pas indispensable ni même nécessaire à la clarté
de la phrase, qu’il allongeait inutilement, ce dont la langue
a horreur. Dans nos proverbes si nombreux, des irrégula-
rités, des ellipses bien autres abondent. Cette suppression de
partie de l’article, créant un calembour, a donné ouverture
à cette double interprétation par les deux sens qui se présen-
taient; mais dans le choix à faire il faut se garder de toute
préoccupation du français. A chacun sa responsabilité, à
chacun selon ses œuvres : parce que dans cette circonstance,
le fr. a mal dit, ce n'est pas une raison pour que le lang.
en ait fait autant; lorsque surtout il est si facile de voir
qu'il a autrement et mieux dit, qu’il a dit ce qu'il fallait.
Dér. du lat. Burra, bourre, fait de burrus, roux, cou-
leur de la bourre, ou du gr. Isgéés, roux, rougeître.
Bouro, s. f. Jeu de cartes, espèce de bête-ombrée ou de
mouche, — Estre à la bouro, faire la bôte à ce jeu-là, faire
la remise.
Bourou, s. "=. Ane, baudet, bourrique; as, au jeu de
cartes. — Voy. Bourisquo.
Bourtoulaïgo, s. f., ou Pourtoulaïgo: Pourpier, Por-
tulaca oleracea, Linn., de la fam. des Portulacées, plante
potagère et grasse.
Dér. du lat. Portulaca.
BOU
Bourtoumiou, s. m. Barthélemy, prénom d'homme, qu
est devenu nom de famille fort commun. Il fait au fém.
Bourtoumigo, et au dim. Bourtoumigué. — Sén-Bowrtou-
miou , la Saint-Barthélemy, jour de la foire principale
d’Alais, qui commence le 24 août et dure huit jours. C'est
une date fort intéressante pour tout le pays, parce qu'elle
sert de terme aux baux à loyer et à ferme, à la location des
domestiques des champs, et à la plupart des transactions
et des échéances de rentes foncières. Quouro qué vèngue
Sén-Bourtoumiou y-doura dous ans, il y aura deux ans,
vienne la Saint-Barthélemy : formule générale de comput
de date pour les paysans, qui prennent ainsi pour point
de départ, tantôt une fête, tantôt une récolte, tantôt l'époque
d’un travail qui se fait à temps fixe : quouro qué vèngou
las prunos, lous Avéns, lous cabusses, vienne la saison des
prunes, l’Avent, l'époque des provins. Finès sous ans pér
Sén-Bourtoumiou, il compte ses années à partir de la Saint-
Barthélemy ; il est né aux environs du 24 août. La Fare,
dans ses Castagnados, a fait de la Fièiro dé Sén-Bourtou-
miou, un tableau du genre des plus gais et des mieux
réussis.
Dér. du lat. Bartholomeus.
Bouru, udo, adj. Dim. Bourudé, péjor. Bourudas, asso.
Velu; couvert de poils ou de bourre. Au fig. bourru,
inquiet avec grossièreté. Au jeu de la bouro, celui qui a
fait une mauvaise affaire, une spéculation ruineuse. —
M'a fa bouru, il m'a mis dedans. Estre bouru émbé lou rèï,
perdre avec beau jeu; en effet, au jeu de la bouro, quand
on ne fait pas de levée on est bouru, et il est par trop fort
de n’en pas faire, quand on aen main le roi, qui est la plus
forte carte.
Bousa, v. Fienter; mais il ne se dit que du gros bétail
domestique, dont les excréments se nominent bouso.
Bousado, s. f. Augm. Bousas. Fientée; tas de bouse
que les bœufs ou les vaches ont rendue en une seule fois.
Dér. de Bouso.
Bousanqué, éto, adj. Homme ou femme de très-petite
taille ; bamboche ; nabot. Il est devenu n. pr. — Voy. Bou-
sérlé.
Dim. de Bousas.
Bousas, s. m. Péj. Bousassas. Fientée énorme. Au fig.
homme ou enfant de taille basse et large, à la fibre lâche
et molle.
Augm. de Bouso et de bousado.
Bouscarasso, s. f. Bois fort épais et mal entretenu, où
les ronces et les plantes sauvages abondent ; fourré sau-
vage. }
Péj. de Bouscas.
Bouscardiè, s. ”m. Bücheron, qui coupe et qui dépèce
les arbres sur face ; qui habite les bois.
Dér. de Bos. ‘
Bouscardièiro, s. f. Bücher; hangar au bois ; lieu où
l’on serre le bois de chauffage. — Voy. Piolo. +
Dér. de Bos. EL
BOU
* Bouscarido, s. /. Dim. Bouscaridéto. Fauvette ; bec-fin
à tête noire, Sylvia atricapilla, Temm., de la fam. des
Passereaux. Ce charmant oiseau, le seul qui puisse riva-
liser avec le rossignol par son chant, qui dure plus long-
temps s'il est un peu moins parfait, est fort commun à
son double passage d'automne et de printemps ; il en reste
aussi beaucoup en hiver dans le pays. IL vit d'insectes et
de larves, ainsi que des baies du sureau et du grosciller, et
fait son nid dans les buissons d'aubépine et d’églantier. II
a le dessus de la tête d’un noir profond, le corps cendré,
légèrement nuancé d'olivatre à la queue et aux ailes, le
ventre et la gorge inclinaht au blanchtre. Le nom de
Bouscarido, qui vient évidemment de 6os, habitant, ama-
teur des bois, s'applique bien particulièrement à cette fau-
vette, mais il se donne également aux autres espèces de ce
genre, qui sont nombreuses. C'est que le languedocien n’est
point une langue de savant; il se contente de tracer à
grands traits et abandonne les détails. Ce n’est point par
pénurie, car il donne souvent plusieurs noms au même
individu, mais il est frappé surtout de la différence des
genres et néglige ou dédaigne les nuances, insignifiantes
souvent, qui distinguent lès variétés. Nous le verrons ainsi
confondre sous le nom de tartano et de mouïcé la plupart
des oiseaux de proie, de sèr, de Zusèr ou lètrou, de ratopé-
nado, de grapdou, toutes les espèces de ces animaux, qui
sont très-nombreuses et qui ont chacune un nom ou une
épithète différents dans la science. On pourrait citer bien
d’autres exemples de ce genre qui se retrouveront.
Bouscarido, et par abrév. Bouscar, est un sobriquet que
l'on donne à quelqu'un de frèle, maigre et fluet.
Bouscarido (Grosso), s. f. Sitelle où Torchepot, Sitta
Europea, Linn. Cet oiseau, qui a les plus grands rapports
avec les pies, vit sédentaire chez nous. Il a les parties supé-
rieures du corps d’un-cendré bleuâtre, la gorge blanche, les
flancs et les cuisses d'un roux marron. — Voy. Raté.
Bouscarlo, s. f. Fauvette ; variante de Bouscarido, qui
a la même racine et s'äpplique aussi aux mêmes variétés
de fauvettes. — Voy. Bouscarido.
Bouscas, s. m. Gros bois ; grande forêt ; forèt solitaire ;
bois qui brüle difficilement; mauvais bois. — Voy. Bous-
“ane. a et péj. de Bos.
Bouscas, casso, s. el adj. Sauvage ; sauvageon ; branche
non greffée; bâtard; faux. — Léva lou bouscas, enlever les
pousses de sauvageon d'un arbre. Pèro bouscas, père nour-
ricier. Fraïre bouscas, frère utérin où consanguin. Cousis
bouscas, cousin bâtard, parent fort éloigné. Las litanïos
bouscassos, des chants obscènes, grivois ; la mère Gaudi-
chon. Fron bouscas, front très-étroit, où les cheveux sont
très-bas plantés.
_ Péjor. de Bos.
* Bouscassino, s. /. Généralité des Drag
de sauvageon qui sortent tout le long de la tige
«fau arbre greffé à la tête, qui forment souvent comme des
BOU 133
buissons, et qu'il faut se hâter d'enlever pour ne pas affa-
mer le bourgeon de la greffe.
Dér. de Bouscas.
Bousérlé, s. m. Enfant tout petit de taille, menu,
mignon. Il est, comme bousqnqué, un dim. de bousas, mais
il n’entraine pas, comme lui, une idée de ridicule; il ne
s'attache qu'aux enfants, tandis que tousanqué s'attache à
des individus de tout âge. — Voy. Bousanqué.
Bousiga, v. Fouiller, remuer, soulever la terre avec le
grouin, à la manière des pourceaux et des sangliers. Par
exl. gâter un ouvrage, bousiller, le gâcher, le faire à demi
et sans régularité ; rabâcher ; ressasser. — Bousiga lou tété,
est ce que fait un enfant à la mamelle, quand il donne des
coups de tête au sein de sa mère pour faire venir le trait
ou le jet de lait.
Dér. de Bouso et du lat. agere, remuer, agiter, parce
que tout le monde sait que c'est surlout dans la fiente que
les porcs aiment à fouiller.
Bousigado, s. f. Trace laissée dans un champ par le
fouillement des pourceaux; barbouillage, mal-façon.
Dér. de Bousiga.
Bousigadoù, s. m. Fouillis ; endroit hanté par les porcs
et surtout labouré par leurs œuvres; groin ; gros nez qui
ferait croire que le propriétaire pourrait s'en servir à bou-
siga, iron.
Bousigaïre, s. m. Mauvais ouvrier; .celui qui gâte un
travail. Au fig. rabâcheur.
Dér. de Bousiga.
Bousigaje, s. m. Bousillage; ouvrage, travail mal fait ;
œuvre donnée à un champ, peu profonde, inégale, toute de
trous et de bosses, comme si elle était faite par le groin
d'un porc.
Dér. de Bousiga.
Bousin, s. m. Tapage; tintamarre; train; rumeur. —
Voy. Boucan. Par ext. mauvais lieu, lieu de débauche.
Emp. au fr. mais le lat. Buccinare semble ne pas être
étranger à sa formation.
Bouso, s. f. Fiente, crottin des bœufs, vaches, ânes,
chevaux et mulets. — Ramassaïre dé bouso, le dernier
degré sur l'échelle sociale, ou plus académiquement sur la
roue de la fortune; ce métier, consistant à ramasser du
crottin sur les routes, est sale et donne de petits bénéfices;
aussi n'est-il exercé que par les enfants, les vieilles femmes
et les hommes hors d’état de travailler. Deux jeunes enfants
se rencontrent ; le plus grand dit à l'autre : Dé qué fas?
— Ramasse dé bousos, ct tus ? — Oh! iéou, sou à las bro-
ques. Et le plus petit d'envier son camarade qui avait fait
son avancement; car, quittant son premier métier, il était
passé ramasseur de buchettes. — Fara bé la bouso pér la
gorjo, expression fort sale, mais très-énergique, pour dire
qu'une personne, vivement contrariée, irritée, va finir par-
exhaler sa colère, vomir sa bile et son venin.
Dér. du gr. Bovotastx, venu de Boÿs, bœuf.
Boussa, v. Former une bosse, s'élever en protubérance ;
134 BOU
se dit surtout des plantes tubereuleuses ou bulbeuses,
comme les pommes de terre, lesraves, les aulx, etc. lors-
qu'elles commencent à développer leurs tubercules ou leurs
caïeux.
Dér. de Bosso. .
Boussado, s. f. Dim. Boussadéto. Contenu d’une bourse ;
plein une bourse; magot d’un avare ; pécule d’une femme,
qui se dit mieux fatéto.
Dér. de Bousso.
Boussar, ardo, adj. Péj. Boussardas. Vilain bossu;
mauvais bossu; se prend toujours en mauvaise part.
Péjor. de Boussu.
Boussargue, s. m. n. pr. de lieu. Boussargues, village,
dans la viguerie de Bagnols, Brossanicæ, dans le dénom-
brement de la sénéchaussée de Nimes.
V. pour l’étym. l’article Bos.
Boussèlo, s. f. Dim. Boussèléto; péjor. Boussélasso.
Oignon de fleurs; tête d'ail, qui est composée d’un assem-
blage de plusieurs caïeux ou gousses, béségnos.
Dim. de Bosso.
Boussi, s. m. Dim. Boussiné. Morceau; bribe; petit Las.
— Voy. Flo, Tèfle, Tro.
Dim. de Bosso.
Boussignolo, s. f. Dim. Poussignouléto. Petite bosse;
bosse au front; excroissance; protubérance; bosse de cha-
meau; tuméfaction quelconque.
Dim. de Bosso.
Boussignoula, ». Enfler ; se former en bosse; tuméfier.
— Soun fron boussignoulè tout dé suito, l'œdème se forma
tout de suite sur son front.
Bousso, s. f. Dim. Bousséto, péj. Boussasso. Bourse;
petit sac de peau, de fil, ou de soie, où l’on met de l'argent.
par ext. l'argent que l’on a, dont on peut disposer. —"%Æs
élo qué gardo la bousso, c’est la femme qui tient les.cor-
dons de la bourse. À bono bousso, c'est un richard. Véou
maï amis én cour qu'argén én bousso, exp. :prvb:, la
faveur en justice vaut mieux que l'argent. Tant qué vou-
ras ami, mais qué la bousso noun toques, prvb. ami.jus-
qu’à la bourse.
Dér. du gr. Bipsx, ou Bupoke, peau, cuir, parce que les
premières bourses en étaient faites.
Boussd, s. m. Gousset, petite poche placée près de la
ceinture dela culotte, où autrefois on tenait l'argent pour
porter avec soi.
Curo-boussd, Vide-gousset, est le nom d’un village sur la
route de Nimes à Beaucaire, qui autrefois n’était qu'une
taverne de route. Ce nom lui fut-il donné parce qu’on y
faisait bonne chère et qu’on y buvait du bon, ce qui allé-
chait les voyageurs à y vider leur gousset, ou bien cette
taverne avait-elle mauvais renom, et supposait-on que le
gousset s’y vidait un peu contre le gré de ceux qui étaient
forcés de s’y arrêter ? La première version est.plus-chari-
table, la seconde est mieux dans les mœurs du temps -où
le surnom a été donné. — Par ext. on appelle .curo-boussd
BOU
tons les objets de dépense habituelle et les ‘enfants -qui
font des appels fréquents à la bourse de leur père ou qui
leur coûtent beaucoup pour leur éducation. — Gratas un
pdouvoste boussd, mettez la main à votre gousset, dit à son
père un fils qui demande de l'argent.
Dér. de Bousso.
Boussu, udo, adj. Dim. Poussudé, péj. Boussulas.
Bossu, qui a une bosse; montueux; inégal; contrefait, —
Faoï nous vêtre sé siès boussu, tourne sur tes talons et va-
t-en. S'ou wos pas créire, véndras boussu, si tune Veux
pas le croire, tu deviendras bossu, c’est-à-dire Dieu te
punira. Dé jouïne médéc}, céméntèri boussu, le jeune méde-
cin peuple le cimetière.
Dér. de Bosso.
Boussuduègno, s. f. La gent bossue ; la race des bossus ;
express. collective, avec le suffixe #ègno : à conférer à
Bastarduègno, Éfantuègno, etc. —-V. ©. m.
Dér. de Bosso.
Bouta, v. Mettre, poser, placer.
Ce terme est très-élastique; ses diverses acceptions
s'étendent à beaucoup d'actes. Quelques exemples aideront
à en bien comprendre les sens divers. — Boutas qu'ague
pas rés di, faites comme si je n'avais rien dit. £ous cabnès
boutou dé banos, les cornes commencent à pousser aux
chevreaux. Las fédos boutou dé pièi, les brebis commencent
à avoir les mamelles gonflées, preuve qu'elles mettront bas
bientôt. Aquél éfan bouto dé déns, les dents commencentà
percer à cet enfant. Bouta davan, faire marcher quelqu'un,
un troupeau devant soi. Boutas-y la man, meutez la main
à cette affaire. Bouta coire, mettre le pot au feu, ou-en
terme de boulangerie, enfourner le ‘pain. "Bouta fiù,reom-
mencer une chose que d’autres feront après; attacher de
grelot. Boula lou lévan, mettre le levain, pour faire lepains
au fig. semer des ferments de discorde.
Dér. de la bass. lat. Butare. |
Boutado, s. f. Ecluse, réservoir d'un moulin; lepre-
mier lait qui vient aux mamelles après l'accouchement,"
Dér. du gr. Bu06<, fond, profondeur.
-Boutar, s. »m. Gros tonneau ; tonne; foudre,
Augm. de Bouto.
Boutas! interj. Sorte de locution explétive, qui n'a
rien de commun avec le v. bouta. Quand elle est prise inter-
jectivement, elle répond suivant les cas à : Allez donc!
Allons donc ! Mon Dieu, non! Je vous en prie! Allez!
Attendez, attendez! Bon ! — Boutas / fasè-m'aquél plèsi,
ah! rendez-moi ce service, je vous en supplie. Ah/vboutas!
mon Dieu, non, vous n'y pensez pas !-Est-ce possible? Bou-
tas, boutas ! és pas tan nèci, allez, allez, il n’est pas si sot
qu'il en a l'air. Boutas! laïssa-lou dire, ne Vous tourmentez
pas, laissez-le dire. Boutas! n'agués pas poou, allez, .ne
craignez rien. Ah / bouta-vous, ah ! laissez-donc! Vousm'y
pensez pas! Ce sont des balivernes. — Ce dernier exemple
présente un idiotisme qu'il faut remarquer. L'interj.aspris
ici tout à fait, pour ainsi-parler, la forme verbale, :c'est-à-
BOU
dire que boutas est considéré comme un temps du verbe
bouta. Il entre alors dans une règle générale et invariable
qui veut que, lorsqu'un verbe à la 2me personne plur. de
l'impératif est suivi immédiatement du pronom pour régime,
on supprime ls final : Aima-vous, régarda-mé, réscoundè-
lou. Ainsi bouta-vous, laissez donc. Dans ce cas, comme
dans les précédents, ikreste une observation : boutas est la
forme respectueuse et plurielle; au sing., avec la mème
acception, on emploie : Bouto! bouto! va! va! Bah! pas
possible! Bon, bon ! que dis-tu là? Bowto/ vèngues pas,
va, je t'en prie, ne viens pas. Bouto! té troumpes, bien vrai,
tu testrompes. Boulo! save cé qué tènes, Va, Va, je sais ce
que tw vaux. Bouto! qu'ou faras bé, j'en suis sûr, tu le
feras.
Bouté, s. m., ou Siblé. Tuyau de greffe, pour enter en
flûte ; virole d’écorce prise à un scion franc, qui a un ou
deux œilletons et qu'on insère dans un scion écorcé de
sauvageon. Il faut faire attention que cette virole soit juste
à la place qu’elle doit occuper : trop large, elle perdrait la
sève et laisserait l'air circuler entre elle et le sujet ; trop
étroite, elle se fendrait avant d’arriver à sa place.
Dim. de Bou, bout.
Boutéia, ado, adj. Qui a de gros mollets. — Bién bou-
téia, qui à de forts mollets, bien pris, bien tournés.
Dér. de Boutél.
Boutéiè, s. m. Plant, semis de courges, de toute espèce
de cucurbitacées. — Voy. Cougourliè.
Dér de Boutéio, courge.
Boutéio, s. f. Dim. Boutéréto ; augm. et péj. Boutéiasso.
Bouteille ; vase de verre ou d’autre matière, à long col et
àlarge ventre, propre à contenir les liquides ; quantité de
liquide contenu dans la bouteille. —Sour coumo uno bou-
téio, sourd comme un pot. Béowre boutéio, boire chopine.
La bo téio l'a més aqui, le vin l’a tué.
Dér. de B uwto, dont boutéio est un dimin.
Boutéio, s. f: Courge de toute espèce, la famille appelée
cucurbitacée; potiron. — Boutéio-énvinadouiro, espèce de
courge, étranglée par le milieu, renflée par les extrémités,
dont on fait les gourdes à vin. (Voy. Gourdo.) Les autres
espèces sont : la cougourlo, lou pastès, lou courné, la
couasso. Ù
Dér., comme le précéd., de Bouto, parce que la courge
sert aussi de vaisseau à vin. .
Boutéiou, s. m. Graine ou pépin de courges et des
cucurbilacées en général.
Dér. et dim. de Boutéio. *
.Boutél, s. m. Dim. Boutéié, boutéioù, péj. Boutéias.
Mollet, gras de la jambe. — À miè boutél, à mi-jambe.
Long d’esquino, prin dé boutél, rasclo m'aquél, mot à mot :
long d'échine, fluet de mollets, n’est pas redoutable, atta-
que-le; longue taille et jambes grèles annoncent la faiblèsse
de la constitution, qui rendent propre à recevoir une raclée.
Faïre lous boutéls énd'un éfan, fèter à table le baptème d’un
enfant. L # À,
BOU 135
* Ce mot paraît avoir la mème étym. que le fr. bo tte, fais-
ceau d'herbes, parce que le mollet est un faisceau de mus-
cles et tendons.
Boutigna, v., ou mieux Réboutigna, Bouder; rechi-
gner ; répondre avec aigreur; revenir sans cesse sur un
grief passé; se montrer capricieux, mutin, chagrin.
Boutignaïre, aïro, adj. Péjor. Boutignaïras. Mieux
Réboutignaïre. Boudeur; rechigné; capricieux ; mutin;
chagrin.
Boutigo, s. f. Dim. Boutiquéto ; péj. Boutigasso. Bou-
tique.
Ce mot, en fr., s'étendait autrefois aux industries et
aux professions les plus libérales, de l'échoppe du savetier
aux brillants magasins de nouveautés et à l'étude ou plutôt
au cabinet du notaire ; il ne s'élève pas plus haut aujour-
d’hui que la boutique du regrattier. Le lang., qui ne veut
pas être en reste, a suivi la progression de la mode; mais
il lui a fallu emprunter au fr. les appellations plus pom-
peuses pour lesquelles il n’a pas été consulté, attendu
qu'elles lui sont arrivées toutes formulées de Paris. Aussi
est-il obligé de se faire patois, quand il entre chez le bot-
tier à la mode, pour appeler sa boutique un atéiè, Cepen-
dant il a conservé l’ancien vocable, sinon dans toutes ses
applications, au moins avec certaines acceptions caracté-
ristiques dont il use encore.
— Faïre boutigo, tenir une boutique, tenir un tout petit
commerce de détail. Faï bièn boutigo, il est achalandé ; il
est gracieux et prévenant pour les chalands. Bara boutigo,
fermer boutique ; faire banqueroute ; au fig. se taire. Léva
boutigo, commencer un commerce; au fig. se battre, se
quereller; susciter une rixe.
Dér. du gr. Axoüxn.
Boutiguiè, s. m. Au fém. Boutiguièiro. Boutiquier, bou-
tiquière ; celui ou celle qui tient boutique; petit marchand
en détail. '
Dér. de Boutigo.
Bouto, s.f. Dim. Boutéto ; augm. Boutar, péj. Boutasso.
Tonneau; fût; futaille. Lorsque le tonneau de ce pays est
pris pour mesure de capacité, il contient 360 litres, ou six
barraux. — Béoure à la barbo dé la bouto, boire à même
le tonneau, en plaçant la bouche à la canelle. Bouto-trém-
pidiro, tonneau à piquette, trempo, que l'on tient à part
pour cet objet, parce que le vin pourrait en être détérioré.
Bouto-carétièiro, petit tonneau qu'on place debout et
défoncésur une charrette pour charrier la vendange.
Dér. de la bass. lat. Buta; en allem. butte, barrique,
cuvier,
Bouto! interj. 2me pers. sing. impér. de Bouta. Terme
de menace, qui s'emploie dans toutes les acceptions, quand
on tutoie l'interlocuteur. — Voy. Boutas.
Boutoù, s. m. Dim. Boutouné; péj. Foutounas. Bouton
d'habit ; de fleur ; bubon, élevure sur la peau ; bourgeon
d'arbre; moyeu de voiture, de charrette ; testicule d'animal.
+ Dér. de la bass. lat. Botonus, bouton, que Roquefort
136 BRA
fait venir de bouta, mettre; botonus signifie également
bout, extrémité, ce qui le rend applicable à toutes les
acceptions.
Boutougnèiro, s. f. Dim. Boutougnèiréto, péj. Boutou-
gnéïrasso. Boutonnière, petite entaille faite à un habille-
ment quelconque pour y passer un bouton. Au fig. estafi-
lade à la peau, blessure.
Dér. de Boutoù.
Boutouna, ». Boutonner, attacher, fixer avec des bou-
tons. Boutonner, bourgeonner, pousser des boutons, en
parlant des plantes à fleurs, des arbres.
Boutouna, part. pass. Bourgeonné, couvert de bubons;
au fig. boutonné, discret, caché, dissimulé,
Sé boutouna, se boutonner; être discret , dissimuler.
Dér. de Boutoù.
Bouvé, s. m. Bouvreuil, pivoine ou pivète. Pyrrhula
vulgaris, Temm Ce joli oiseau a le dessus du corps d’un
noir lustré de violet et le dessous d’un beau rouge minium,
excepté le bas-ventre et les couvertures inférieures de Ja
queue qui sont blancs. Il se nourrit de baies, de bourgeons
des Arbres et de graines. Il s’apprivoise facilement, retient
les airs qu’on lui siffle et apprend à parler.
Bouvé, s. m. Bouvet, terme de menuiserie, rabot destiné
à faire des languettes et des rainures.
Bouviè, s. m. Bouvier, celui qui conduit les bœufs;
valet de charrue. La planète Vénus, lorsqu'elle paraît
avant l'aurore, est désignée sous le nom de Bouvië.
Ce mot a servi à former le n. pr. Bouïè, en fr. Boyer.
Dér. du lat. Bos, bovis, bœuf.
Bracana, adj. Dim. Bracanadé, bracanadoù, péj. Bra-
canadas. Bariolé ; moucheté, tigré; tacheté; tavelé; mar-
qué de bandes, de taches, de zig-zags, en couleurs tran-
chantes sur le fond.
Dér. de l’ancien lang. Brac, tache de boue.
Bracougnè, s. m. Braconnier, chasseur par contrebande;
celui qui chasse furtivement.
Dérive-t-il du gaulois Brac, boue, bourbier, parce que
les braconniers s'exposent à traverser des flaques d’eau, à
séjourner dans des mares, ou du lat. bracca, chausses, sorte
de vêtement de la Gaule dites Braccata? Il est fort possible
que les premiers braconniers aient été des soldats licenciés,
comme on en voit tant dans le moyen âge, qui étaient
obligés de chercher des moyens d'existence dans le pillage
et le braconnage.
Braîfa, vw. Bäfrer; manger goulument; goinfrer. — À
tout brafa, il a dévoré tout son patrimoine.
En bas-bret. Dibriff, m. signif.
Brafado, s. f. Dim. Brafadéto, péj. Brafadasso. Bâfre;
repas abondant; coup de dent solide.
Dér. de Brafa.
Brafaire, aïro, adj. Dim. Brafaïré, péj. Brafaïras.
Bâfreur; goinfre; gros mangeur.
Dér. de Brafa.
Brafo, s. f. Bäfrerie; goinfrerie ; la gueule. — La brafo
BRA
li fariè faïre fosso cdousos, il n’est rien qu'il ne fit pour
un bon repas.
En bas-br. Dibriff, manger.
Bragassargue, s. m.n. pr. de lieu. Bragassargues, com-
mune dans le canton de Quissac, arrondissement du
Vigan. ‘ \
Ce village est connu dans les titges sous le nom lat.
Bracassanicæ. Dans la première syllabe, par un accident
très-fréquent, il y a eu mutation des consonnes : L est
devenu r. La substitution étant.certaine, on obtient blacas
pour radical tiré de blac, celt., jeune chène, et fort bien
employé dans notre langued. avec l'orthographe Blaquas.
(V. c. m. et Blaquarédo.) Quant à la finale lat. explétive
anicæ, représentée par argue, nous renvoyons aussi à nos
explications. L'analogie amène immédiatement les noms
similaires répandus dans nos environs : Blaquéiras, La
Blaquièiro, hameaux de la commune de Cendras, de Pom-
miers, de Peyroles, de Savignargues, et autres, et Blacoùs,
dans la commune de Cardet. LÉ
Braïa, v. Culotter; mettre une culotte ou un pantalon.
— Sé braïa, mettre sa culotte, le pantalon aujourd’hui. La
gradation est sensible ; le lang. est resté gaulois avec les
brayes ; la traduction fr. est obligée de se servir du mot
qui ne s'applique plus à l’objet désigné, et pour se faire
comprendre, d'adopter le mot nouveau qui n’est pas encore
devenu un verbe. — Es braïa bièn juste, au fig. il a tout
juste ce qu'il lui faut pour vivre. Sé braïo bé ndou, il a
bien de la morgue pour sa condition. Un amouriè bièn
braïa, un mürier bien fourni en feuille dans l’intérieur de
ses grosses branches. Un por bièn braïa, un porc dont les
jambons sont bien fournis en gräisse. Un braïo-l'ase, un
nonchalant, un niguedouille; ou bien un homme qui veut
se mêler d’un ouvrage de femme, ou de ce qui n’est pas
dans ses attributions. |
Dér. de Braïo. ,
Braïa, v. Brailler; babiller sans mesure; criailler ;
chanter. gu
Dér. de la bass. lat. Bragulare, criailler, faire du bruit.
Braïar, ardo, adj. Dim. Braïardé, braïardoù; péj.
Braïardas. Braillard, qui parle haut, sans cesse, hors de
propos ; brailleur ; tâtillon; qui se mêle de ce qui ne le
regarde pas ; qui fait l'important. — Dé qué sé mélo aquél
braïar? que veut donc ce braillard? que vient-il ici four-
rer son nez?
Dér. de Braïa, brailler.
Braïardije, s. m. Importance, manie de se mêler des
affaires des autres.
Dér. de Braïar.
Braïasso, s. m. Qui est mal culotté ; qui laisse tomber
sa culotte en marchant ; par ext. qui a les jambes courtes
et le derrière bas. Péjor. de braïar, importun, curieux,
tâtillon.
Dér. de Braïo. \éwipva
Braïéto, s. f. Primevère des prés à fleur jaune, Primula
BRA
officinalis, Linn. Plante de la fam. des Primulacées. Oreille
d'ours, primevère des jardins à fleur rouge; variété.
Dér. de Braïo, et dim. probablement parce que sa fleur,
en forme de calice, est recouverte, à moitié de sa longueur,
par une enveloppe verte, ressemblant à un canon de
culotte.
Braïo, s. f. Dim. Braïéto, péj. Braïasso. Culotte, pan-
talon ; brayes, braie ; chausses.— Douna las braïos, culotter
un enfant pour la première fois. Un cago-braïo, terme de
mépris, un chie-en-lit, un lâche, un poltron. S'én tira las
braïos nétos, s'en tirer les braies nettes, se tirer adroite-
ment et sans pertes d’une mauvaise affaire. Quito pas mas
- braïos, il m'est toujours après, c’est un importun dont je
ne peux me débarrasser.
Dér. du celt. Brag, d'où le lat. Braca, bracca, braccæ.
Brama, v. Braire, comme les ânes; crier, brailler ; pleu-
rer comme font les enfants; pleurer en général. — Lou
diable té brame! peste soit du pleurard! Cette locution
‘revient souvent sans que le diable serve de nominatif au
verbe; on dit de même : lou diable té rigue! peste du
rieur! Lou diable té démore! peste soit du Jlambin qui
n'est jamais prêt! Un bramo-fan, un prèche-misère, un
crie-famine, qui crie famine sur un tas de blé. Laïsso lou
brama as ases, laisse le braire pour les ânes, dit-on de quel-
qu'un qui pleure sans sujet. Bramo coumo un bidou, il ne
crie pas, il beugle. Quan douras prou brama, quand tu
auras assez pleuré. À brama soun sadoul, aro sé pâouso,
il a pleuré tout son soûl, maintenant il se repose.
Dér. du gr. Bpéueuv, frémir, braire, gronder. En bas-bret.
Bram, en ital. Bramare.
Bramadis, s. m., ou Bramadisso, s. f. Pleurs continus;
criaillerie soutenue d’un enfant; manie de pleurer; naturel
d’un enfant pleurard; braiement prolongé de plusieurs
ânes, soit à la fois, soit par dialogues.
Dér. de Brama.
Bramado, s. f. Dim. Bramadéto, péj. Bramadasso.
Durée du braiement d’un âne ou des pleurs d’un enfant ;
interruption jusqu'au temps d'arrêt qui les sépare d’une
reprise.
Dér. de Brama.
Bramadoù, s. m. Gosier, au fig.; l'instrument par
lequel un enfant pleure.
Dér. de Brama.
Bramaïre, aïro, adj. Dim. Bramaïré ; péj. Bramaïras.
Pleurard ; braillard ; brailleur; qui pleure ou crie conti-
nuellement.
Dér. de Brama.
Bramovaquo, s. f. Gratiole, Gratiola ofjicinalis, Linn.
Plante dé la fam. des Personnées, médicinale, employée
souvent par les indigents comme émétiqne et purgative.
Brancu, udo, adj. Dim. Brancudé; péj. Brancudas.
Branchu; qui a beaucoup de branches; qui se termine en
* forme de fourche. — Voy. Branquaru.
Dér. de Branquo.
BRA 137
Branda, v. a. et n. Branler, ébranler; agiter en divers
sens; remuer fortement; secouer; pousser decà et delà;
branler; être peu solide, branlant; chanceler; balancer, —
Aquél iôou brando, cet œuf cloque, il a du vide. Branda
las cambos, battre le pavé, faire le fainéant. Tout cé qué
brando tombo pas, tout ce qui menace ruine ne tombe pas.
Branda las campanos, sonner les cloches; au pr. et au fig.
Branda-nicouldou, être faiseur de bas au métier. Brando-
pinto, ivrogne, amateur de la dive bouteille. C’est le surnom
qu’on donnait aux habitants du Collet-de-Dèze. Branda un
doubre, secouer un arbre. Branda dou manche, branler au
manche. Aï uno dén qué brando coumo uno sounaïo, j'ai
une dent qui branle comme une sonnette. À toujour
qudouque fère qué li brando, il a toujours un fer qui loche,
au fig. il a toujours des entraves ou quelque affaire qui
cloche. Téoulo qué brando, table qui chancelle.
En ital. Brandire, brandir.
Brandi, v. Secouer avec force; branler: ébranler rude-
ment. — Vou lou brandiguèrou coumo sé déou, on vous le
secoua, on le pelota comme il faut.
En esp. Brandir.
Brandido, s. f. Secousse ; saccade; branle; remuement.
Au fig. reproche, mercuriale; semonce.
Dér. de Brandi.
Brandimar, ardo, adj. Péj. Brandimardas. Grand
vaurien; fainéant; grand flandrin.
Ce mot vient évidemment de Brandimart, l’un des per-
sonnages de l’Arioste. Un grand nombre de ces person-
nages sont passés proverbialement dans le fr. et le lang.,
comme rodomont, sacripant, etc. Mais si Rodomont a con-
servé son caractère en s’adjectivant, il n’en a pas été de
mème pour Sacripant et Brandimant, car dans le poème
italien leur caractère est à peu près l'opposé de celui que
leur donnent le fr. et le lang.
Brandin, ino, adj. Brandinas, asso. Fainéant; batteur
de pavé; flandrin; dégingandé.
Dér. de Branda.
Brandin-Brandan, adv. Sorte d’onomatopée de mouve-
ment ; bras ballants, balançant de droite et de gauche,
comme un pendule ; démarche dégingandée.
Rédupl. de Branda.
Brandinéja, v. Faïnéanter ; battre le pavé; gueuser.
Dér. et fréq. de Brandi.
Brando-quuio, s. f. Bergeronnette, — Voy. Bérgëiréto,
Couacho, Galapastre.
Brandouïa, v. Brandiller; branler ; secouer vivement.
Sé brandouia, se balancer, se dandiner.
Dér. et fréq. de Branda.
Brandussa, v. Secouer rudement; branler ; brandiller.
Sé brandussa, se dandiner en marchant; suivre des épaules
le mouvement des jambes. — Brandussavo sa tèsto, il
branlait la tête.
Dér. et fréq. de Branda.
Branle, s. m. Branle; danse; ronde. — Anan faïre lou
48
138 BRA
branle, nous allons danser la ronde. Low branle dé Pala-
dan, lou pu nèci és lou pu gran, chanson qui accompagne
une ronde d'enfants, au dernier mot de laquelle chacun,
pour ne pas être pris ou donner un gage, se pelotonne et
se fait petit ; le plus grand est le sot qui paie.
Branoüs, s. "”., n. pr. de lieu. Branoux, hameau de la
commune de Blannaves. — Voy. Blannavo.
Branquado, s. f. Dim. Branguadéto. Branche chargée
de fruits ou de feuilles de müriers, qui s'éloigne assez du
tronc pour qu'on ne puisse les cueillir sur l'arbre sans
échelle; rameau hors de portée couvert de fruits; grain de
folie.
Dér.'de Branquo.
Branquaje, s. m. Branchage ; ensemble des rameaux et
branches d’un arbre; bois-menu produit des branches.
Dér. de Branquo.
Branquar, s. m”. Brancard, espèce de litière pour trans-
porter un malade, sorte de civière pour porter des far-
deaux, des pierres; les bras d’une charrette entre lesquels
on attelle le cheval.
Dér. du lat. Brachium.
Branquaru, udo, adj. Branchu, qui a beaucoup de
branches. — Voy. Brancu.
Dér. de Branquo.
Branquas, s. m., ou Branquasso, s. f. Grosse branche ;
longue et grosse branche considérée comme une arme.
Augment. de Branguo.
Branquo, s. f. Dim. Branquéto, péj. Branquasso. —
Branche d'arbre; branche de rivière ; brin ; division ; por-
tion; racine ou germe d’un mal ou d’un défaut.
Dér. du celt. Brane, d’où le lat. brachium, et la bass.
lat. branca, branche.
Brâou, s. m. Dim. Bréoudé, Brâoudoù, péj. Bréoudas.
Taureau, bœuf entier. — Brama coumo un bräou, beugler.
Aquè’s un brdou; for coumo un brâou, il est fort comme
un taureau.
Dér. du bas-bret. Braw, qui a fait aussi l’adj. brave, et
le fr. brave. En lat. bravium, et en gr. Bpaéetoy voulaient
dire : prix des jeux, prix de la bravoure et de la force.
Fortis aussi signifiait brave et fort : les deux qualités
suprèmes. Le taureau était chez tous ces peuples le type
adopté de la vaillance et de la force.
Braqua, v., mieux Abraqua. Braquer, tourner wers ;
fixer un but. — 1 braquè sous dous ièls déssus, il braqua
ses yeux sur lui. — Voy. Abraqua.
Emp. du fr.
Bras, s. m. Dim. Brassé, brassoù ; augm. Brassas. Au
plur. Brasses ; dim. plur. Brassés et Brassoùs. Bras, membre
du corps humain qui tient à l'épaule; ce qui en a la forme,
la figure, l'usage; au fig. action, force, puissance. — À pas
qué sous brasses, il n’a que ses bras pour le nourrir. Sèn
prou brasses aïci, il y a bien assez de bras ici. Brasses
d'uno caréto, brancard d’une charrette, timons. En bras dé
camiso, en manches de chemise. Lou bras dé Diou, la!
BRA
puissance, le bras, la main de Dieu. À lou bras long, il a
les bras longs ; il peut beaucoup.
Dér. du lat. Brachiwm.
Brasa, v. — Voy. Abrasa.
Brasas, s. m. Au plur. Brasasses. Grand brasier ; gros
tas de braise; foyer bien garni de braise et qui ne flambe
plus.
Augm. de Braso.
Brasièiro, s. f. Dim. Brasièiréto. Brasier, récipient à
braise, en fer ou en terre, pour chauffer un appartement.
Dér. de Braso.
Braso, <. f. Braise, charbon allumé ou portion de bois
brûlé qui ne donne plus de flamme.
Dér. du bas-bret. Bras, braise, du gr. Bpéçw ou Bpécow,
bouillir; en allem. Brasen, brûler. Esp. Brasa, ital.
Bragia.
Brassado, s. f. Dim. Brassadéto, péj. Brassadasso.
Brassée, ce que peuvent enceindre les bras étendus en
cercle; embrassement ; embrassade ; accolade; mème sim-
plement baiser. — À brassado, à pleins bras. —Uno bras-
sado dé bos, une brassée de bois; uno brassado dé gavèls,
dé païo, une brassée de sarments, de paille. Faï uno bras-
sado, un baiser, s’il te plait. Arapa à brassado, prendre à
foi de corps.
Dér. de Bras.
Brasséja, v. Gesticuler, remuer les bras avec vivacité
en parlant; travailler des bras.
Dér. de Bras.
Brasséjaïre, aïro, adj. Gesticulateur; travailleur à
bras.
Brassiè, s. m. Journalier, cultivateur qui travaille la
terre seulement à bras, et non avec un instrument ara-
toire ou le secours des animaux de labour.
Dér. de Bras.
Brassièiro, s. f. Lisière pour soutenir les enfants qui
commencent à marcher, — Efan à la brassièiro, enfant à
la lisière.
Dér. de Bras.
Brasucado, s. f. Dim. Brasucadéto. Grillade de chà-
taignes sous la braise. — Dans une partie des Hantes-
Cévennes, ce mot est pris pour la châtaigne elle-même,
quand elle est rôtie. — Voy. Afachado.
Dér. de Braso.
Bravamén, adv. Beaucoup; à foison ; ni trop, ni trop
peu; raisonnablement ; médiocrement. — Bravamén, Sui-
vant l’intonation, a tous ces sens divers : preuve nouvelle
que le ton fait la chanson.
Brave, avo, adj. Augm. Bravas. Se dit généralement
de beaucoup de qualités du corps ou de l’esprti. Selon les
cas, il signifie : honnète, intelligent, leste, adroit, robuste,
bien portant, sage, de bonne mine. Il se :dit aussi des
choses inanimées pour : bon, avantageux, beau. —:Un
brave home, un honnôte homme. Uno bravo fénno, une
honnête femme. Uno bravo fio, fille sage, de mérite. Sès
BRÈ
brave coumo un s6ou, vous vous portez comme le Pont-
Neuf. Sérias bé brave sé..., vous seriez bien aimable si.
Sès brave? vous allez bien? Uno bravo tèro, un champ
assez considérable. Un brave oustdou, une maison confor-
table. Sé sén pas riches, séquén braves, si nous ne sommes
pas riches, soyons honnêtes.
Brave n'a jamais l’acception de brave en fr. Cependant,
fauted’un mot qui réponde à bravoure dans le sens de
courage ou d'exploit guerrier, on dit par exception et en
ajoutant un nom pour qualifier et justifier cette extension :
Brave coumo César, brave comme César. Mais l'exception
confirme la règle, et elle est rare.
Dér. du bas-bret: Braw, ou du lat. Bravium. — Voy.
Bréou.
Bravé, éto, adj. Dim. Bravoù, bravouné, bravounéto.
Joli; gentil; mignon. C’est là un exemple frappant de la
dégénérescence des mots, quand ils passent par différentes
filières et après un long laps de temps. Celui-ci a la même
origine que le précédent, et voilà leur radical brdou, tau- |
reau, qui finit par différentes cascades à l’adj. bravouné,
gentillet, qui semble la qualité la plus antipathique, avec
lui.
Bravén, s. m. Nature particulière de terrain assez fer-
tile et bon surtout pour la vigne, mais difficile à labourer
en bonne saison ; car il est très-dur avec la sécheresse et
argileux par la pluie. Ilest composé d’un mélange de limon
et:de schiste.
Bravouro, s. f. Honnèteté ; probité. Ne signifie jamais
bravoure ou courage.
Dér. de Brave.
Brégadiè, s: m. — Voy. Bérgadiè.
Brégado, s. f. — Voy. Bérgado.
Brégan, s. m. — Voy. Bérgan.
Brégandaje, s. m. — Voy. Bérgandaje.
Brégandéja, v. — Voy. Bérgandéja.
Brégo, s: f. Noise; chicane; querelle d'Allemand. —
Cérqua brégo, chercher noise.
Dér. dugallois Breg, rupture. En esp. Brega; en ital.
Briga, dispute.
Brégoùs, ouso, adj. Dim. Brégousé; péj. Brégousat.
Querelleur ; hargneux ; tracassier. — Chi brégoùs. a las
douréïos vérménousos; chien hargneux à les oreilles déchi-
rées:: le dicton se comprend de reste et ne s'applique pas
seulement aux animaux.
Dér: de Brégo.
Brén, s. »m. Son, partie la plus grossière du blé moulu.
— Déstré dou brén et larje à la-farino, économe de bouts
de chandelle; il ménage la paille et prodigue le grain.
Dér. du bas-bret. Brenn, même sign. Il a formé le fr:
bran, excrément, bran de son, qui est le son véritable di
bréneau. Tous ces mots n'ont aucune espèce d’analogues ni
endat. nien gr, ni dans les langues modernes qui ont
puisé à-cette source. La racine celtique est forcée:
Brénoûs, ouso, adj. Qui contient trop de son, en par-
BRÈ ” 139
lant du pain ; défaut de toute autre préparation culinaire
qui n’est pas liée, ou qui est graveleuse.
Dér. de Brén.
Brès, s. m. Dim. Brèssé,. Au plur. Brèsses. Berceau
d'osier; barcelonnette d'enfant. Au fig. jeune âge; commen-
cement, lieu où une chose a commencé. — Ou a prés dou
brès, c'est un défaut qu’il a pris au berceau. Gna’n plén
brès, loc. prvb., il remplit son berceau, en parlant d'un
gros enfant, quelquefois même d’un adulte. On dit d'une
femme qui désire ardemment des enfants : Ah boutas! lou
fariëe én tout lou brès, ah! mon Dieu ! elle consentirait à
accoucher d'un enfant tout botté, tont éperonné. La grano
dé brés, les petits enfants.
Dér. du lat. Versus, part. pass. de versare. Cependant
quelques-uns le tirent du gr. BpKeuv, dormir, ou de Bpésoztv,
agiter.
Brés (Sén-), s. m., n. pr. Saint-Brès, commune dans
le canton de Saint=Ambroix (Gard). Brés est la traduction
du nom pr. Brice, Saint-Brice, disciple de saint Martin de
Tours, vers le milieu du Ve siècle ; du lat. Brictius.
Bréscan, s. m., ou Brisquo, ou Briscan. Brisque, bris-
can, nom qu'on donne aux as et aux dix du jeu de mariage
ou de biscambille.
Brési, s. m., n. pr. de lieu. Brésis, quartier du terri-
toire d’Alais, au midi et sud-ouest de la montagne de Saint-
Germain-de-Montaigu, et que l'abbé Teissier, notre compa-
triote, ainsi que d’autres après lui, soutiennent avoir été
Prusianus, l'habitation de Tonance Ferréol, préfet des Gau-
les:au Ve siècle, décrite par Sidoine-Apollinaire.
Brési serait une altération du nom lat. Prusianus:
Brésil, s. m. Brin; fétu; résidu en poussière; petite
parcelle; débris de charbon qui restent au fond d'un sac.
Dér. de Briso.
Brésquo, s. f. Rayon de miel; gauffre ou gâteau de
cire; cire avec ses alvéoles pleines, telle qu’elle est ou
qu'elle sort de la ruche: — Bâtonnet; jeu du bâtonnet ;
jeu d'enfant.
Dér. du bas-bret. Brec, cassant. En allem. Brechen,
rompré, briser.
Bréssa, v. Bercer, donner le branle à un berceau;
balancer un enfant dans son berceau pour l'endormir. —
Sé bréssa, se dandiner, se balancer lourdement en mar-
chant; comme font les bergers et les gens chaussés de gros
sabots.
Dér. par métathèse, du lat: Versare, agiter.
Brèsso, s. f: Lit en planches d'un valet d'écurie dans
l'écurie mème; cabane: de-berger portative pour coucher
dehors, couverte le plus souvent en paille.
Augm. de Brès;
Bréssolo, s.f. Dim, Bréssouléto. Lit d'enfant. à bar-
reaux ;. table à rebords, avec des pieds en bateau, sur
laquelle-on pose le berceau d’un enfant, pour l'élever au
niveau du lit-de la nourrice et lui imprimer au besoin
le-balancement qui le berce et l'endort.
140 BRÉ
Bréthmas, s. ”., n. pr. de lieu. Brethmas, écart de la
commune de Saint-Hilaire, à laquelle il donne son nom,
Sént-Alari-dé-Bréthmas, canton et arrondissement d’Alais.
D'antiques ruines découvertes dans ce quartier, des restes
de tuiles et de poteries gallo-romaines, sans doute, font
remonter assez loin son origine et son nom.
Ce village est mentionné dans une ancienne charte qui
mérite d'être rapportée. — Hist. gén. de Lang., t. Ier, pr.
p. 35. — C'est une donation faite vers l’an 810 à l’abbaye
d’Aniane. Trademus res quæ sunt in terrilorio nemausensi
suburbio castro andusianensi, sive infra ipsum pagum, villa
cui vocabulum est Berthomates..……, hoc est cum mansis,
campis, curtis et horlis, cum exeis et regressis, cum ecclesia
Sancti Hilarii constructa, necnon aliis ecclesiis quæ infra
terminum de ipsa villa fundata fuerint, cum oblatis et
mansionibus ad Berlomates aspicientibus.
Le nom porté dans cet acte avec une légère variante se
trouve au dénombrement de la sénéchaussée, en 1384,
S. Ylarius de Bretomanso.
Il n’y a rien à dire de la dernière portion du mot Mates,
identique à Mazes et Mages, traduit par le latin mansus
et abrégé selon les règles par le lang. et le fr. en mas. Sa
forme au pluriel parait moins l'indice d’une agglomération
que la réunion ou la proximité d’un certain nombre de
mansi dans sa dépendance. La première partie jouit d’une
possession d'état fort respectablé, et Bertho, Breto pour
signifier breton ; par où on arrive à Mas du Breton.
En contestant cette facile interprétation, je ne voudrais
pas me faire une méchante affaire avec ce Breton breton-
nant, qui, à une époque assez reculée, nous aurait laissé le
nom de son pays, plutôt que son nom propre, ce qui est
étrange d’abord. Mais l'existence mème de cet étranger
transplanté aux bords du Gardon ne me semble pas encore
suffisamment attestée par une simple dénomination, à
laquelle on peut assigner dans notre langue vulgaire une
origine et une raison plus naturelles. En effet, si Bertho-
males, Bretomansus, Bréthmas a eu pour parrain un Breton
quelconque, le droit d’invoquer pareille descendance au
même titre appartient à une petite place de la ville d’Alais,
appelée en fr. Berthole aujourd’hui, en lang. Brétolo, et
dans une proclamation de l’an 4388, — Mss. de l’Hôtel-de-
Ville, — trivium de Berthola. C'est la même racine et le
même mot. Or cette place, au moyen âge, à proximité du
Marché, était le lieu spécial où se cantonnaient et s'éta-
laient les denrées apportées des Cévennes avec la bréto, la
hotte montagnarde, ou dans le bértoul, brétoul, panier fait
de minces lames de bois; peut-être aussi y avait-il là une
industrie de fabrication de brétos et de bértouls. Elle en a
retenu le souvenir. Les deux noms, en tous cas, qui ont
contribué à faire celui de Brétholo, Bérthole, dérivent du
gaulois brett, en lat. lignum, bois, planche, éclisse, ser-
vant à faire brétos et bértouls. Mais les analogies nous
viennent encore en aide. Le nom propre Breteuil n’est pas
plus breton d'origine que notre Bréthmas et que notre
BRI
Brétolo, son correspondant direct, avec la différence du
dim. roman euil au dim. lang. ol ou olo. Et l’on sait que
le nom de cette ancienne famille était autrefois Tonnelier, |
changé depuis en Breteuil, son équivalent synonyme, plus
noble et plus sonore peut-être mais sorti de la même souche,
exprimant la même idée, fait du mème bois, brett. Pareil-
lement pour Bretche, vieux mot fr. signifiant fortifications
de bois, dans Du Cange Bretechiæ, castella lignea. Dans
tout cela pas la moindre trace d’un Breton.
La dérivation pour Bréthmas nous paraît donc fort pro-
bable, en y faisant entrer brett, soit que le mansus pri-
mitif fût construit en planches, soit qu'il ait été établi
dans un pays couvert de bois; les deux hypothèses peuvent
être également soutenues.
Brévé, s. m. Brevet, privilége ; acte portant concession
d’une grâce, d’un don, d’une autorisation.
Emp. au fr.
Brévéta, ado, adj. et part. pass. Breveté; qui est
pourvu, muni d’un brevet.
Emp. au fr.
Bria, v. Briller; reluire ; jeter une lumière étincelante ;
avoir de l'éclat.
Emp. au fr.
Brian, anto, adj. Brillant, qui a de l'éclat; qui reluit.
Emp. au fr.
Brida, v., mieux Embrida. Brider, mettre la bride ;
lier, arrêter, attacher. — M'an bièn brida et séngla, on
m'a joliment lié et garrotté, dit-on proverbialement, quand
on vient de passer un acte qui vous lie fortement. Sén bri-
das, nous sommes arrêtés, liés. Sauvages traduit : nous
jeünons. Très-juste : la loi est la bride. Brida l’ase pér la
quuño, prvb., prendre une affaire à contre-pied; agir à
contre-sens.
Les étym. paraissent nombreuses : d’abord le celt. bride,
puis le vieux saxon bridel, bridl, mème mot et même signi-
fication, le gr. éolien Bevrée, pour évte, tirer, parce que la
bride sert à tirer. En ital. briglia; en esp. brida, bride.
Bridèl, s. m. Dim. Bridélé ; péj. Bridélas. Bridon; filet
à mors brisé, sans branches ni bossettes.
Dér. de Brida.
Brido, s. f. Dim. Bridéto, péj. Bridasso. Bride; partie
du harnais d’un cheval qui sert à le conduire; petite bande
de toile ou d’étoffe, attachée au béguin d’un enfant, aux
bonnets et aux chapeaux de femme, destinée à passer sous
le menton, pour retenir ces coiffures. — Trépa émbé la
brido, ou émbé lou cabéstre, jouer avec sa queue à la
manière des jeunes chats ; se dit des gens très-jeunes qui
ne prennent nul souci et se font un jeu de tout. — Voy.
Cabéstre.
Dér. de Brida.
Brido-mousquo, s. m. Cogne-fétu; tatillon; qui fait de
grands embarras de petite chose; homme fluet, frèle, débile.
Bridoulo, s. f. Dim. Bridouléto. Bois de jeunes scions
refendu en lames fort minces, que l’on tresse pour faire les
BRI
païarons, bértoulos et campanèjes. (V. c. m.) Les jeunes
pousses de châtaignier sauvageon sont considérées comme
les plus favorables ; à cet effet, on les aménage en taillis et
on les coupe tous les trois ans.
Dér. de Brido.
Brignoü, s. m. Brignole; prune de mirabelle, la plus
petite de toutes les espèces. Elle est d'un assez beau jaune
quand elle est müre.
Comme son nom, et surtout son représentant fr. l'in-
dique, ce fruit vient de Brignoles, en Provence, où il est
cultivé avec succès, et où l'on fait des conserves de prunes
très-renommées.
Brignoun, s. m. n. pr. de lieu. Brignon, commune du
canton de Vézénobres, arrondissement d’Alais. La tradi-
tion donne à ce village une origine fort ancienne.
Le nom de Brignoun sous la forme Briginn, est un de
cœux qui sont inscrits sur un petit monument du musée
.de Nimes, portant les noms de onze localités du territoire
des anciens Volces Arécomiques. I1 occupe le second rang
dans le deuxième groupe, qui paraît avoir pour chef-lieu
Ucetia, Uzès. L'attribution de Briginn à Brignoun, Bri-
gnon, n’esi pas douteuse. Dans l'inscription le mot est évi-
demment abrégé de la dernière syllabe à cause des dimen-
sions du piédestal; il devrait se terminer en o, Briginno,
simple nom de localité avec la finale celtique si commune,
ou en ones, au plur., si on veut l'appliquer à une peuplade,
. Briginnones. La traduction latine du moyen âge donne
raison à cette désinence. La basse latinité des Cartulaires
disait, en effet, en 4207, Brinnonum, en 1273 Brinno, en
4381 et 1384 Brinhonum, en 4435 Brinhon, dont le lan-
guedocien a fait Brignoun et le fr. Brignon. Ici se remarque
la transformation du g entre deux voyelles, dont la pro-
nonciation était mouillée, ce que le latin rendait en plaçant
un À ou un i après n, et que nous avons repris par notre
gn qui produit le même effet; les exemples sont nom-
breux.
Dans le voisinage on a découvert des restes d’antiquités
romaines ou gallo-romaines ; un monticule où l’on prétend
que l’ancien village était établi, porte le nom de Sère dé
. Brièno, colline de Brienne, et un ruisseau est aussi appelé
Brdouno, Braune; ce sont autant de dérivations du celtique
Briginn. |
Quant à l'étymologie du mot, on trouve en gallois Bri-
gynn, cime, sommet, extrémité, bout, où l'on reconnait la
racine bri, brin, bren, colline, élévation, hauteur, qui a
donné avec le même sens dans diverses langues ber, bir,
berg, bern, birn. La situation de Brignoun justifie cette
dénomination, et son ancienneté d'origine est également
établie : village sur une élévation.
Brin, s. m. Brin de fil ; fil de la soie sans être doublé et
tel qu'il se dévide sur la roue à filer; brins de chanvre
dont est composée une corde, ou un fil redoublé et tordu.
— Floundo à quatre brins, fronde à quatre bouts.
Ce mot parait dérivé de Prin dont il est la métathèse.
BRI 141
Il ne faut pas perdre de vue que le mot prin vient évi-
demment du lat.-primus. Le fil dont on fait les étoffes est
doublé, triplé, quadruplé; lorsqu'il est simple, il se dit
brin, ce qui revient à premier ; ce sont bien là dès-lors ces
premiers filaments qui restent dans la main de celui qui
sérance, les brins premiers, par excellence.
Bringo, s. f. Dim. Bringuéto, péj. Bringasso. Bringue ;
rosse; cheval maigre; femme maigre, déhanchée, mal
bâtie. — Métre én bringo, mettre en pièces, en désarroi.
Emp. au fr.
Briou, s. m. Dim. Brivé, brioulé. Certain temps; petit
intervalle de temps. — Y-a un bon briou, il y a longtemps.
N'avès pér un pouli briou, Vous en avez encote pour long-
temps. Espérarés un briou, vous attendrez un peu. Y-a’n
brive, il n’y a qu'un petit instant.
Dér. du lat. Zrevi, bientôt.
Briqué, s. m. Dim. Briquétoù. Briquet à feu, outil
d'acier pour tirer du feu d’un caillou ; sabre-briquet court
à l'usage de l'infanterie; jeune gars, blanc-bec; homme
sans valeur et sans consistance; petit homme, au physique
et au moral; petit et mauvais cheval, criquet. — Batre
dâou briqué, au fig. être cagneux, avoir les genoux qui se
heurtent en marchant.
Emp. au fr.
Briquo, s. f. Dim. Briquéto ; péj. Briquasso. Brique,
terre argileuse pétrie, montée et cuite, qu’on emploie dans
les constructions. — Briguo énvérnissado, brique vernissée.
Briquo canéludo, brique à crochet, qui sert à faire des
voûtes.
Dér. de la bass. lat. Brica.
Brisa, v. Briser; casser; rompre, mettre en pièces;
réduire en poudre.
Dér. de la bass. lat. Brisare, presser.
Brisal, s. m. Dim. Brisaïé. Menus débris de pierres;
petits fragments, réduits en poussière, de tout corps dur
très-divisé.
Dér. de Briso.
Briso, s. f. Dim. Briséto, s. f. Brisouné, s. m. Miette ;
brin ; parcelle ; morceau détaché d’un plus grand; miette
de pain. — Douna-mé n'é'no briso, donnez-m'en un petit
morceau. Né rèsto pa’no briso, il n’en reste pas un fétu, il
n’en reste rien. N'avédre dé las brisos, en avoir des écla-
boussures. Aou foun ddou sa s'atrobou las brisos, prvb.,
au fond du vase la lie; au dénouement les angoisses. Las
brisos né sdoutavou dou capèl, on mangeait de si grand
appétit, on cassait si vivement la croûte, que les éclats,
les miettes en volaient au loin.
Las brisos, châtaignes sèches qui ont été brisées en les
battant pour les dépouiller. Cette espèce de châtaignes a
un peu moins de valeur au marché que les autres, parc
qu'elle se met en marmelade en cuisant ; mais elle est aussi
bonne, préférable même, si on veut la moudre en farine
pour l’abreuvage des porcs, parce que généralement ce sont
les châtaignes de meilleure qualité et les plus sèches qui se
142 BRO
brisent le plus; celles qui sont avariées, moisies où ver-
moulues contenant une humidité qui les préserve de se
concasser.
Dér. de Brisa.
Briso-baro, s. m. Ecervelé; indompté; tranche-mon-
tagne ; qui se met au-dessus des lois.
Comp. de Briso, brisa, et baro.
Brisqué! interj. intraduisible, qu’on adresse à quelqu'un
qui commet une incongruité en parole ou en action sales.
Ce mot paraît la contraction et un sous-entendu de :
brusquez la politesse.
Brivado, s. f. Dim. Brivadéto. Séance, durée d’un tra-
vail entre ses diverses interruptions; séjour. — Y-avèn fa
uno bono brivado, nous avons fait une bonne séance de
travail. — 11 a aussi toute la portée de Brtou; on dit bien
et également : Y-a un bon briou et uno bravo brivado,
pour : il y a un long espace de temps.
Dér. de Briou.
Brocho, s. f. Dim. Brouchéto, mieux : Haste. Broche
de cuisine; espèce de longue aiguille.
Dér. de Broguo, parce que les premières broches étaient
un pieu de bois, une büche. Sauvages prétend qu'il y a
des bâtons d’un certain bois dont les fibres sont de leur
nature tellement torses que la chaleur les fait détordre, et
que les viandes qu'on y embrochait autrefois, tournaient
d’elles-mèmes. Probablement ce n'étaient que des moineaux
ou tout au plus des grives, avec lesquels on pouvait se
permettre cette économie de tourneur ou de tourne-
broche.
Brodo, s. f. Paresse ; fainéantise ; mollesse; indolence ;
produites par l'ennui ou par une certaine disposition d'es-
prit ou de corps semblable au spleen anglais. Ce n'est pas
une paresse habituelle, mais accidentelle, un entrainement
irrésistible et momentané au far-niente, qui donne du
dégoût pour le travail et par conséquent de l’inapti-
tude.
Les ouvriers de Paris appellent cette disposition : avoir
la:flême, ce qui veut dire : avoir la brodo, être plus en
train de flâner que de travailler. — La brodo mé gagno,
l'ennui, le dégoût me gagnent; je ne ‘suis bon à rien. Aquél
tén faï véni la brodo, ce temps lourd donne des vapeurs,
de la lassitude dans les membres, de la’ mélancolie dans
l'esprit. Mé dones la brodo, tu m’ennuies.
Dér. du gr: Bpaôbs, lent, Bpédos, lenteur.
Broquo, s. f. Dim. Brouquéto;, péj. Brouquasso. Bûche:
bâton brut; scion d'arbre sec. — Lou touquarièi pas énd'uno
broquo, je ne le toucherais pas avec des pincettes. Porto uno
broquo, lou fid s'amousso, apporte une büche, le feu va
s'étemdre: S'arrape uno broquo! si je prends un bâton,
gare!
Dér. de la bass: lat: Broca, branche d'arbre, échalas,
broussaille:
Broquo-quiou (A), adv: Tout de travers; à la diable.
— Travdia à broquo-quiou, gMter l'ouvrage, en se hâtant
BRO
trop et ne faisant nulle attention : va comme je te pousse.
Aqu s’apèlo juja à broguo-quiou, voilà qui s'appelle jugé
à la diable, dit un plaideur qui perd son procès, dans les
vingt-quatre heures bien entendu, et quelquefois, avec plus
de raison, après ce délai de tolérance.
Dér. d’un jeu d’écolier qui porte cenomet qu'on nomre
en fr. broche-en-cul.
Brou, s. m. Dim. Brouté. Jeune pousse des arbres; brin
détaché d’une plante; trochet de fleurs ou de fruits; bour-
geon. — Un brou dé sdouvio, dé vidouiè, dé basali, une
branche de sauge, de giroflée; un brin de basilic.
Dér. du celt. Brout ou Brot, brin, d’où la bass. lat.
Brogilum, Bruillum, Brolium, petit bois, broussailles; ou
du gr. Bxw, bourgeonner.
Brou, s. m. Terme de boucherie, pièce du poitrail d’un
mouton, qui répond au grumeau du bœuf; haut côté de la
poitrine.
Dér. du v. m. Brutz, sein, poitrine.
Broucanta, v. Brocanter; acheter, revendre ou troquer;
vendre par échange; vendre du bric-à-brac, des marchan-
dises d'occasion.
Dér. du lat. Recantare, se dédire, parce que ce genre de
revendeurs avaient autrefois vingt-quatre heures pour se
dédire, et rompre leurs marchés.
Broucantur, urdo, adj. Brocanteur; celui qui sans être
marchand, a la manie de brocanter, d'échanger, de troquer
ce qui lui appartient, comme chevaux, voitures, meubles.
Dér. de Broucanta.
Brouchado, s. f. Dim. Brouchadéto. Brochée; hâtelettes;
enfilade de petits-pieds à la broche.
Dér. de Brocho.
Brouda, v. Broder.
Emp. au fr.
Broudariè, s. f. Broderie.
Emp. au fr.
Brouduso, s. f. Brodeuse.
Emp: au fr.
Brouéto, s. f., ou Brouvéto. Brouette. — Voy. Barioto.
Brouïa, v. Brouiller, semer la discorde; mettre le dé-
sordre. — Sé browia, se brouiller avec quelqu'un; d'ami
devenir ennemi:
Dér. de l'ital. Progliare, imbroglio.
Brouiadisso, s. f. Brouillerie, mésintelligence.
Dér. de Brouïa.
Brouiar, s: mi. Dim. Brouiardé ; péj. Brouiardas. Brouil-
lard ; nuage. — Lou brouïar a mouqua las vignos, la gibou:
lée'a fait périr les bourgeons de la vigne.
Brouiar, en style d’écolier, est le brouillon, cahier où
écrit qui n’est pas mis au nêt: — Papiètbroïard, papier’
gris, qui boit.
Dér. du lat. Pruina, ou de la bass. lat: Brolhardus, m. sig:
Brouiarda, ardado, adj. Couvert de brume, chargé de’
brouillards:
Dér. de Brouïar .
BRO
Brouio, s. f. Brouille; mésintelligence légère; petite
brouillerie. Le mème que Brouïadisso, mais avec une
nuance un peu plus foncée.
Dér. de Brouïa.
Broun-broun, s. m. el adv. Hurlu-berlu; étourdi;
étourdiment, en renversant tout. Onomatopée. Viendrait-il
du gr. Beovr/, tonnerre?
Broundas, s. m. Dim. Broundassoù ; péj. Broundassas.
Rameau de chène-vert avec toutes ses feuilles, dont on se
sert, en guise de balai, pour amonceler les feuilles mortes
et les hérissons de châtaigniers; brandes, bourrée.
Dér. et augm. de Broundo.
Broundio, s. f. Ramilles, émondilles, broutilles; débris
de menu bois qui reste après qu’on a dépécé des arbres, ou
ébranché.
Dim. de Broundo.
Broundioù, s. m. Brindille, petit morceau, petit éclat de
bois.
‘Dim. de Broundio.
Broundo, s. f.Bourrée; brandes ; fagots de menu chène-
vert ou de broussailles, dont se servent les boulangers, les
potiers de terre et autres pour chauffer leur four.
Dér. du lat. Frons, Frondis, ramée, feuillage, qui, par
apocope et changement de f en b, avait fait dans la bass.
lat. Bronda, menues branches.
Brounqua, v. ou Bruqua. Broncher, faire un faux pas
en heurtant du pied contre quelque chose. — Qué bruquo
el noun tombo avanço camà, prvb. qui bronche sans tomber
accélère ses pas; c’est-à-dire on apprend en faillant.
Dér. de l'ital. Bronciare, broncher, et Bronco, tronc,
souche, heurter contre une souche.
Brounquado, s. f. ou Bruquado. Bronchade; action de
broncher; faux pas d'un cheval.
Dér.de Broungua.
Brouncaire, aïro, adj. ou Bruquaïre, aïro. Qui
bronche; qui est sujet à broncher; cheval qui n’a pas les
jambes solides.
Dér. de Brounqua.
Brounza, v. Bronzer ; donner au fer une couleur bleuâtre
pour le préserver de la rouille, ce qui se fait à un feu très-
vif. Au fig., cuirasser contre les douleurs de l'âme et du
<orps; aguerrir, rendre insensible à la souffrance; devenir
dur comme le bronze.
Brounza, part. pass. Bronzé, couleur de bronze; teinten
noir. — Souïès brounzas, souliers de peau teinte en noir,
présentant le velouté de la peau, à l'extérieur.
Dér., disent aucuns, du celt. Bronez, m. sig.
Brounzi, v. Se rôtir outre mesure, se dessécher au feu ;
noircir comme bronze; bronzir par le froid, qui produit le
même effet.
Dér. de mème que Brounxa.
‘Broumi, v. Sifller, bruire, en passant comme font les
balles, les boulets, une pierre lancée avec une fronde. Au
fig., murmurer, grogner, marmotter, gronder. — Las balos
BRO, 143
brounzissièou, les balles nous sifflaient aux oreilles. Dé qué
brounzisses din toun cantoù? qu'as-tu à murmurer, à gro-
gner dans ton coin ? — Voy. Brounzina.
Dér. du gr. Beuy#, hurlement.
Brounzidou, s. »". ou Rouflo. Loup, instrument de jeu
pour les écoliers, fait d’une petite planche fort mince atta-
chée au bout d’un cordon. Ils le font tourner très-vivement
au-dessus de leur tête, et produisent par ses vibrations dans
l'air un frémissement sourd, un brounzimén, qui imite le
hurlement du loup.
Dér. de Brounzi.
Brounzimén, s. m. Bruissement ; sifflement d'un projec-
tile ; frémissement de l'air produit par le frôlement d'un
corps quelconque; frôlement d’une robe, d’une étoffe.
Dér. de Brounzi.
Brounzina, v. — Voy. Brounzi, sifiler, bruire.
Brounzinaïire, aïiro, adj .Péj. Brounzinaïras. Grondeur;
grommeleux ; qui marmotte, qui aime à gronder; qui mar-
ronne.
Dér. de Broun:zi.
Brouqua, v. Planter des oseraies, des saulsaies. L’osier,
le saule, le peuplier se plantent par simples boutures dans
les graviers les plus secs, et ils y réussissent toujours pour
peu qu’ils trouvent de l'humidité à la profondeur où l’on
enfonce leur extrémité inférieure. I1 faut, en général, les
planter après que la sève s'est retirée; cependant lorsqu'on
les plante dans l'eau ou dans des terrains marécageux, ils
prennent en toute saison, même en juillet et août.
Comme ces plantations se font très en grand dans le pays,
au bord des rivières, soit pour en défendre les bords, soit
pour bonifier les graviers inertes en arrêtant les depôts
d’alluvion, on prend très-peu de soin pour ce travail de
brouquaje. On a des scions de toute grosseur, on les coupe
à la longueur d’un mètre, et l'on amincit en pointe leur
gros bout; ensuite on.fait un trou dans-les graviers avec
un instrumènt de fer pointu, appelé Aguïo, et l'on y place
trois ou quatre scions à la fois, en se contentant d'écraser,
d’ébouler le sable avec le pied pour remplir le vide du trou.
Il est rare qu'aucun de ces plants reste sans pousser.
Brouqua s'applique à toutes les espèces de boutures,
comme celles de la vigne, du figuier, etc.
Il se dit aussi, pour repiquer des plantes que l’on a
semées d’abord sur couches et qu’on repique à distance dans
les jardins potagers, comme l'oignon, la betterave, la poi-
rée, la laitue, la chicorée, le céleri, etc.
Dér. de Broguo, dans la première acception, à cause des
scions qu'on emploie et qui se nomment Broguo; dans la
seconde, à cause de la bûche qui sert de plantoir dans cette
-opération.
Brouquaje, s. m. Action de planter des oseraies; la
:saison de ce travail, et surtout la masse des bois qu'on y
emploie. — Agud's dé brave brouquaje, éstén bièn, c'est du
bois très-favorable à planter en oseraies, il foisonne beaucoup.
+Dér.de Zrouqua.
144 BRO
Brouquéto, s. /. Allumette.
Toutes les allumettes se faisaient avec des brins de che-
nevotte coupés à quatorze ou quinze centimètres de lon-
gueur, soufrés simplement aux deux bouts et mis en paquets.
De là leur nom de Brouguétos, dim. de Broguo, parce que
ce n'était en effet que de minces büchettes. Il est bien
entendu qu'aujourd'hui on ne peut plus par cette raison
appeler Brouquétos, les allumettes en cire de Roche et
autres. Aussi le lang. a-t-il été forcé d'adopter l’AZuméto.
Les gamins qui vendent les allumettes à la Congrève, ont
même fait disparaître à peu près entièrement les marchans
dé brouquétos, qudou né vôou, dont le cri est remplacé dans
nos rues par celui d'alumétos à la Congrè, dous cén pér un
sou. C’est du bien bon marché, mais c’est du bien mau-
vais lang. — Voy. Aluméto, Luquéto.
Brouquiado, s. f. Dim. Brouquïadéto. Fagot ou brassée
de broutilles ou de bûchettes; ramassis qu’on en fait dans
un bois ou au fond d’un bûcher. Au fig., feu de paille, de
peu de durée.
Dér. de Broquo.
Brouquiè, s. m. Boisselier; artisan qui fabrique des
futailles de bas-bord, telles que seaux, baquets, cornues,
cuves à lessive, barillets, etc. Les mêmes font les patins à
semelle de bois pour les femmes.
Dér. de Broquo, bois refendu.
Brousén, s. #”., n. pr. de lieu. Brouzen, quartier du
territoire d’Alais, en amont sur la rive droite du Gardon,
où quelques étymologistes placent le Prusianus du préfet
des Gaules, Tonance Ferréol. — Voy. Brési et Berén-
guèri.
Broussa, v. Tourner, caillebotter, grumeler ; faire tourner
le lait, une crème, une sauce ; c’est-à-dire que la partie
butireuse ou onctueuse se sépare de la partie séreuse et se
grumelle par caillots. — Moun la sés broussa, mon lait a
tourné. À broussa sa crèmo, elle a laissé tourner la crème.
Brousso-sâouço, s. m. Gâte-sauce, mauvais cuisinier
qui manque ses sauces.
Dér. de Brousso, parce que le lait tourné forme de petits
caillots assez semblables à la graine de bruyère.
Brousso, s. f. Touffe de bruyère de la petite espèce, basse
et rampante.
Dér. du bas bret. Proust, buisson, broussaille. Dans la
bass. lat. Bruscia.
Brousso-pèou (A), adv. A contre-poil; en sens contraire
du poil; à rebours; de travers; au pr. et au fig. — Voy.
Cronto-pèou.
Broustio, s. f. Petite boite de sapin, à lames minces,
refendues.
En bas bret. Broustet, branche aisée à refendre. Dans la
bass. lat. Brustia.
Broutél, s. m».Dim. Broutélé. Trochet ou glane de fruits ;
jet d'arbre qui porte une certaine quantité de fruits ramassés
en bouquet.
Dim. de Brou; en celt. Brout ou Brot, traduit dans la
BRU
bass. lat. par Brogilus, Bruillus, Brolius, qui signifie comme
dimin. petit bois, broussailles qu'on fait brouter.
Broutélado, s. f. Quantité de fruits qui se trouve réunie
dans un seul trochet ou sur une même branche.
Dér. de Broutél.
Bru, s. m. Bruit, son ou mélange de sons, tapage,
vacarme; bruissement; rumeur; nouvelle qui circule;
dicton ; renommée; renom. — N'és pas bru qué d'acd, on
ne parle que de cela. Né coure un bru, on en murmure bien
quelque chose dans le public. Faï fosso bru, il fait beaucoup
de tapage. Crén pas bru, il ne se laisse pas intimider. Un
home sans bru, un homme paisible, qui ne fait pas parler de
lui. S'én-és douna lou bru, la nouvelle, le bruit en a couru.
Dér. du bas bret. Brud, Brut, bruit, rumeur, ou du gr.
Bovéwv, rugissement, murmure.
Bru, adj. masce. — Pan-bru, pain-bis. N'a pas d'autre
application.
Dér. du lat. Brutus, grossier; il pourrait être aussi une
altération ou une contraction de Brun.
Bruël, s. m. et n. pr., ou Bruëil. En v. lang. petit bois;
un fourré; jeune taillis.
I y à dans l'Aveyron un village et commune de Saint-
Jean-du-Bruel, qui a pris cette épithète de sa position dans
les bois.
En v. fr. on disait : breuil, brouil et brel, auquel le mot
lang. répond très-exactement; et dans la bass. lat. on avait
dit : broilus, broilum, brolium ; brogilus, brogilum, bruillus.
Cette diversité de désinences, attachées à un radical inva-
riablement le mème, donne clairement le sens dans lequel
il faut les entendre dans les différents idiomes. La termi-
naison lang. é! est diminutive, comme le sont en fr. ses
correspondantes directes en el, el, euil, uil, qui traduisent
ou que traduit le lat. oilus, olium, ogilus, uillus. Par con-
séquent comme règle générale, tous les mots-racines, affectés
d’une de ces finales égales entre elles, auront une signification
diminutive. De plus les désinences en ol, ols, 6ou, jol, jols,
j6ou, du languedocien, rendues par oilus, olius, ogilus latin,
seront identiques à è/ et également diminutives, comme dans
le fr. eul, euil, el, oil et eau, eaux, ège, elles, eiles, ailles,
eilles, oilles, parfaitement équivalentes. De sorte que Bruël,
en étymologie, sera le même que Brueilet, du Breuil, Brue-
joul, Brucjols, Bruèges, Broglio, Brouelles, Bruailles,
Brueiles, Brouxelles, Breaux; et que de la même source
dériveront, à part les noms communs, les noms propres
Bruyère, La Bruyère, Bruguiè, lang. Bruguëirole, Brugas.
Le gaulois Bru, où Brou, Brout, bois, branche, brin, est
atténué par sa désinence qui prend toute sorte d’inflexions;
mais l'élément primitif reste immuable et toujours recon-
naissable.
Brugas, s. m. Lande couverte de bruyères.
Péj. de Bruguiè.
Bruguèirolo, s. f., n. pr. d'homme et de lieu. Bruguei-
rolle. Petit champ couvert de bruyères. — Voy. Bruël.
Dim. de Bruguie. ”
|
|
BRU
Bruguiè, s. m. Taillis de bruyères à balais que l'on met
en coupe réglée. — N. pr. d'homme : Bruguier. Avec la
désinence féminine, iéiro, il est encore n. pr. de lieu, et
très-commun.
Ainsi que nous l'avons déjà remarqué, les anciens radi-
caux signifiant bois ou forêt ont dù nécessairement donner
naissance à de nombreuses dénominations dans nos pays
couverts de forêts, de landes de bruyères, de hautes et
basses futaies : de là aussi les diminutifs ou les péjoratifs
caractéristiques d’une situation ou de l'état des lieux et des
propriétaires. Aussi le primitif celtique brug, adouci en bru
ou brus, bruyères, broussailles, que nos ancêtres gaulois
prononçaient peut-être broug, et dans lequel certainement,
en latin, l’u sonnait ou, s'est-il reproduit dans nos appella-
tions locales et dans les noms d'homme avec des variétés
nombreuses, tantôt en conservant sa consonnance simple,
tantôt en adoptant l’euphonie latine.
A propos du mot qui nous occupe, la plus ancienne forme
connue du radical est tirée d’une inscription gravée sur un
petit piédestal conservé au Musée de Nimes, malheureuse-
ment tronqué, mais où se lisent encore onze noms de loca-
lités des Volces Arécomiques. À la seconde ligne de ce
monument est porté le nom de Brugetia. Nous n'avons pas
à chercher ici la certitude d'attribution entre les diverses
localités qui auraient, chacune, des raisons égales à la
réclamer : les savants ne sont pas d'accord sur la vraie
position indiquée. Cependant le mot nous reste, et la
divergence des opinions ne fait ressortir qu'une chose :
c'est que le nom Brugetia est aussi bien représenté par
Bruget, hameau de la commune de Cornillon, que par La
Bruguière, canton de Lussan, arrondissement d'Uzès, ou
par La Bruyère près d’Anduze, ou par Bruyés de la com-
mune d'Aigaliers; comme il pourrait l'être par Brugèdes,
commune de Sénéchas, par Bruèje, commune de Saint-
Privat-des-Vieux, par Bruguier, commune de Monoblet et
Méjeannes-lés-Alais, et par tous les autres noms de La
Bruguière répandus dans le département du Gard. Ce qui
amène à reconnaitre que toutes ces appellations ont une
commune racine, el que, si elles se distinguent par leurs
suffixes en ef, yès, ède, té, iètro, elles n'en représentent pas
moins des localités où les bruyères étaient abondantes, ce
qui donne la signification ; et ces nuances prouvent que ces
désinences sont égales entre elles et équivalentes, ce qui
donne raison à ce que nous disons des suffixes et de la
composition des noms.
Mais il y a plus : la différence de prononciation dans le
radical multiplie les analogies. Zru étant identique à Brou,
il s'ensuit que les noms de Brouxén près d’Alais, Brouxet,
commune, Broussoùs, près de Portes, dans notre arrondis-
sement, Broussan, commune de Bellegarde (Gard), devront
être ramenés à la mème signification désignant des lieux
anciennement remplis de broussailles, couverts de bruyères.
La variété ethnique des terminaisons n’empêcherà pas de
les reconnaitre et de les rapprocher; elle ne servira qu'à
BRU 145
démontrer la fécondité de la langue qui se prète harmo-
nieusement à ces modulations diverses, à prouver la
richesse de notre idiome et sa souplesse à diversifier la
forme sans altérer ni compromettre le sens des mots.
Dér, de Brus.
Brula, »v. Brûler; consumer par le feu; être en état de
combustion; brouir, se dit des effets produits par le froid
sur les fleurs et sur les premiers bourgeons des arbres. —
Fato-brulo, jeu d'enfant qui consiste à cacher un objet de
petite dimension et à le faire chercher par un patient. A
mesure qu'il se rapproche de l’objet, or lui crie : fato-brulo!
et quand il s’en éloigne : brulo pas; par ce moyen on le
conduit petit à petit à l’objet lui-même. Par suite, le mot
Brula, dans le langage ordinaire, est devenu synonyme de
se rapprocher, être prêt à deviner. — Brules bièn, tu es
sur la voie, tu te rapproches singulièrement du but.
Brula, s. m. et part. pass. — Es un brula, c'est une
tête brülée.
Dér. du lat. Perustulare.
Bruladuro, s. f. Brûlure; action du feu; sa trace, sa
marque.
Dér. de Brula.
Brulaïre, s. m. Potlon à brüler le café; brûloir; instru-
ment ou ustensile servant à cette torréfaction.
Dér. de Brula.
Brun, bruno, adj. Dim. Bruné, éto; péj. Brunas, asso.
Brun, brune; noirâtre; d'une teinte foncée, sombre; obs-
cur; bis. — Mouli brun, moulin destiné à fabriquer le
pain bis, parce que les meules en étant plus serrées donnent
un degré de plus de trituration à la farine, ce qui rend
impossible sa séparation d’avec le son au tamis. — Il est
aussi n. pr. d'homme, Brun : d’où son dim. Brunél.
Dér. de l’allem. Braun, en ital. et en esp. Bruno.
Bruqua, v. — Voy. Brounqua.
Bruquaïre, aïiro, adj. — Voy. Brounquaïre, aïro.
Brus, s. m. Dim. Brussé. Au plur. Brusses. Bruyère à
balais, Erica scoparia, Linn. Arbuste de la fam. des Eri-
cacées. C’est celle qu'on emploie pour ramer les vers à soie,
et dont on fait des balais, éscoubos dé brus. — Ana as
brusses, aller à la provision de bruyère pour les vers à
soie. Capoula dé brusses, couper les brins de bruyère de la
longueur nécessaire pour les échalasser entre les rangs des
tables. Plégarias lou proufi dinc uno fièio débrus ; la feuille
de bruyère étant sans largeur aucune, que pourrait-on plier
avec? Aussi cette phrase équivaut à celle-ci : le bénéfice est
venu à rien.
Dér. du celt. bas-bret. Bruc; Bruscus en lat., dans la
bass. lat. Bruscia et Brueria, broussailles.
Brutäou, talo, adj. Péj. Brutalas. Brutal; grossier;
féroce ; emporté; sans égard, sans politesse, sans ménage-
ment.
Dér. du lat. Brutus.
Bu, s. m. Dim. Buqué; péi. Buquas. Chicot d'arbre;
ergot de branche; bout mort et desséché d’un scion d'arbre
19
146 BUQ
qui a été taillé et qui n’a repoussé qu'à quelques pouces
au-dessous de la taille; éclat de bois, écharde ou picot qui
est entré dans la chair. — M'és éntra un bu din l'ounglo,
il m'est entré une écharde entre l’ongle et la chair.
Dér. de la bass. lat. Buca, tronc, tige.
Bu, s. m. But; intention; point où l’on vise, fin qu'on
se propose. — Y-anavo énd'un bon bu, il se présentait pour
le bon motif, en vue du mariage.
Dér. de la bass. lat. Butum.
Bubo, s. f. Bubon; pustule qui se forme sur la tête des
enfants mal soignés; boutons qui s'élèvent aux lèvres ;
échauboulure. — Rénouvéla las bubos, au fig. renouveler
de tristes souvenirs, une ancienne douleur.
Dér. du gr. Bovéwv, tumeur.
Bufadèl, s. m. Mets du pays composé de raves et de
châtaignes bouillies ; celles-ci à demi-cuites, qu'on nomme
calossos. — Bufadèl est l'expression gounèlo et alaïsienne ;
les Cévénols, chez lesquels ce metsest surtout en honneur,
le nomment Picourèlo.
Dér. de Bufa, ou Boufa, qui veut dire souffler ou man-
ger, deux acceptions également applicables à un mets qu'il
faut manger chaud, et souffler.
Bugada, v. Faire la lessive; blanchir au moyen de la
lessive; faire boire à grands verres de l’eau ou de la tisane.
Etym. nombreuses et variées : du celt. Bugad, lessive et
abreuver, d’où le bas-bret. Bugat, m. s.; dulat. Zuca, trou,
parce que la lessive s'écoule par un trou; du gr. Bovyéèz,
cuve, grand bassin ; du lat. Buo où Imbuere, imbiber.
Bugadièiro, s. f. P6j. Bugadièirasso. Lessiveuse; lavan-
dière ; blanchisseuse; buandière. — Un froun dé bugadiètro,
une effronterie de harangèré. Le prvb. dit : Las soubros
dâou flascou dé las bugadièiros garissou las fèbres; c'est
comme si l’on disait : le vin pur guérit les fièvres, car ce
qui reste au fond de la gourde d’une lessiveuse est assuré-
ment du vin pur, ou bien peut-être : la fièvre est un mal
sans remède, qu’on guérirait cependant avec les restes d’une
gourde de lessiveuse, mais impossible de s'en procurer
jamais une goutte de surabondance. Quinto bugadièiro!
quel bavard ! des deux genres.
Dér. de Bugada.
Bugado, s. f. Lessive; quantité de linge encuvé, lessivé,
blanchi. — Métre la bugado, mettre à cuver le linge dans
la lessive. Faïre bugado, faire la lessive. Esténdre la bugado,
étendre le linge lessivé pour le faire sécher. Au fig. Bugado,
perte considérable au jeu, une lessive, dans ce sens. Dé
léssiou sus la bugado, ajouter une dette à une autre, une
maladresse, une sottise sur une autre, faute sur faute.
Mème dér. de Bugada.
Buqua (sé), v. Se blesser, se faire une déchirure à la
peau en se piquant à un éclat, bu, à un chicot de bois.
Dér. de Bu.
Buquado, s. f. Dim. Buguadéto. Déchirure à la peau;
accroc à un habit, à une robe; procurés par un chicot de bois.
Dér. de Bu.
BUT
Burataïre, s. m. Au fém. Buratairo. Tisserand de
burate. Aujourd’hui cette étoffe de laine, plus fine que le
cadis, ne se fabrique plus; on appelle Burataïres les tisse
rands de fleuret ou bouréto.
Ce mot vient peut-être du portug. Burato, gaze, parce
que la burato était beaucoup plus claire que le cadis.
Bure, s. m. Beurre; crème du lait épaissie en l’agitant.
— Un bure, un pain de beurre. Aqud's un bure, ce fruit
est fondant comme du beurre. Faïre soun bure, faire ses
orges, ses choux gras; bénéficier dans une spéculation ;
expression qui entraine toujours l’idée d’un gain illicite ou
peu délicat. À foundu soun bure, il a dissipé tout son bien.
M'én coustè moun bure, il m'en a coûté fort cher.
Dér. du gr. Botépov, formé de Boÿ, vache, et de Tupés,
fromage; d'où le lat. Butyrum, beurre.
Burèl, èlo, adj. Dim. Burélé; péj. Burélas. Brun ; lirant
sur le brun. — Cadis-burèl, cadis fait de la laine de moutons
noirs, sans teinture, avec la couleur naturelle; on dit aussi
couloù dé la bèstio, de la couleur de la bête qui l’a produit.
Dér. du lat. Burrus. 4
Burèou, s. m. Bureau, table destinée au travail des
affaires; pupitre, secrétaire; lieu où l’on expédie les affaires.
— Lou burèou dâou vi, le bureau du receveur des contri-
butions indirectes. Escriou dinc un burèou, il est employé
dans un bureau administratif. ‘
Empr. du fr.
Burina, ». Buriner, graver au burin; avoir une belle
plume, une écriture élégante; bien peindre.
On le dit dér. du celt. Burin, ou de l’allem. Boren, creuser.
Bus, s. m. Dim. Busqué. Buse, lame de baleine, de fer
ou de bois, qui sert à tenir en état un corps de jupe. On
disait autrefois busquièiro; mais ce nom, comme l’objet
qu'il représente, n'était connu que de l’aristocratie. Aujour-
d’hui que l'usage du Busc est devenu populaire dans toutes
lès classes, on a emprunté le nom au fr. qui fournissait la
chose.
Busqua, v. Echancrer une jupe, un corsage, pour dessi-
ner le galbe de la taille. — Sé busca, Se cambrer; creuser
les reins et développer la poitrine en marchant.
Dér. de Bus.
Busquaïa, v. Ramasser du menu bois, des broutilles ;
couper des branches d’un arbre.
Dér. de Busquaïo.
Busquaïo, s. f. Büche à brüler; broutilles; menu-bois
refendu ; éclat de bois.
Busquaïo est évidemment pour bousquaïio, bosquaïo, dér.
de Bos.
Buta, vw. Pousser; heurter; serrer contre; soutenir ;
affermir; germer. — Buta lou tén, pousser le temps avec
l'épaule. A pas bésoun qué lou butou, il n’a pas besoin
d'être poussé, d’être excité. La Jan lou buto, la misère
pousse. Butas la porto, poussez la porte. Butas fèrr
heurtez Wivement. Mé butarés un pâou, Vous me soutien-
drez un peu. Butés pas! ne poussez pas! Aguél doubre b
bièn, cet arbre pousse avec vigneur. Lou bla a buta, le blé
a commencé à germer. Fou qué quâouquus lou bute, fariè
pas aqub, il faut que quelqu'un l’excite, il ne ferait pas cela
de lui-même.
Dér. de la bass. lat. Butare.
Butado, s. f. Dim. Butadéto; péj. Butadasso. Secousse ;
heurt; poussée; coup d'épaule. — A bèlos butados, par
secousses: par épaulées. M'a fougu douna uno bono butado,
il a fallu donner un bon coup de collier pour terminer cette
affaire, pour mener cet ouvrage à bonne fin.
Dér. de Buta.
Butaroü, s. m. Chasse roue. — Mème sign. que buto-
rodo, dont il n’est qu’une syncope et peut-être une corrup-
tion. — Voy. Buto-rodo.
C 147
Butavan, s. m. Boutoir, outil de maréchal, espèce de
pelle tranchante pour parer le sabot d'un cheval avant d'y
placer le fer.
Formé de Buta, pousser, et Avan, en avant.
Butin, s. m. Butin ; provisions de bouche et autres. fl
ne se prend guère qu'en mauvaise part — Manguo pas
butin, il y a franche-lippée.
Empr. au fr.
Buto-rodo, s. m. Borne, en pierre, en fer ou en fonte,
en forme de cône tronqué, placée soit au coin d’une maison,
à la porte d’une remise, à l'entrée d'un pont, pour empè-
cher que l'essieu des roues d’une voiture ou charrette
n'écorne les murs; soit à l’entour d'une place, pour inter-
dire la circulation des voitures.
C
C
C, troisième lettre de l'alphabet; elle a la même pronon-
ciation qu'en fr. et subit les mêmes modifications, c’est-à-
dire qu'elle a la prononciation du K devant les voyelles a-
o-u, et celle de l’s double devant e et à.
Le C est la deuxième des consonnes ; il appartient à l’ordre
des Palatales, parent de la famille des Gutturales. Les gram-
mairiens le classent ainsi en expliquant la manière dont se
fait son émission, forte ou faible, par l'organe buccal : très-
bien; nous n’insistons pas autrement. Son histoire est plus
curieuse et présente plus d'intérêt : nous lui devons une
mention. — Les Romains, qui avaient adopté l'alphabet
des Grecs, l'appelèrent d'abord Gamma et le figuraient par
le signe : ce qui cependant n'empècha pas d'employer la
forme arrondie en croissant, C, d'où lui vint le nom de
Luna, surtout quand il prenait le son adouci. Tout cela
est formel, et il est bon de citer à ce titre, Varron disant :
« Antiquis enim C quod nunc G; » et Festus Avienus :
«€ # G frequenter ponebant Antiqui, » et dans un autre
e: « Quæ nune C appellatur, ab Antiquis G vocaba-
sur. » Cest ce qu'écrivait aussi Ausone dans ce vers,
De literis :
Prævaluit postquam ganmaæ vice functa prius C.
Cependant l'opinion contraire était soutenue par d’impor-
tantes autorités : en latin, Tacite, Pline et Juvémal en par-
lent, et appuient le nom lunaire: en grec, Suidas et Plutar-
que penchent aussi pour la forme du cappa au lieu du
gamma. Mais on sait par Isidore de Séville, De originibus,
que le K prévalut et fut introduit définitivement par un
maître d'école, nommé Sallustius.
Puérilités, dira-t-on. Nullement. La conclusion à tirer
est que, si la forme a eu quelque influence, au point de
faire confondre uné lettre avec l'autre, il y a certainement
.
C
rapprochement d’articulation quand la lettre et le son se
produisent, ce qui tient à leur nature et au procédé
d'émission ; mais ceci explique encore que le C latin tenait
de son origine grecque la force et la dureté devant toutes
les voyelles, comme le T ou G grec, et que, par suite aussi,
leur permutation est naturelle et facile, C'est ce qu'a trans-
mis le latin aux langues romanes, et celles-ci au languedo-
cien. Par où on ne sera plus étonné, dans la recherche des
étymologies, des substitutions fréquentes des deux signes,
et par exemple, des changements de cavea, lat., en gabio,
lang., cage, fr.; cicada en cigalo ; crassus en gras; crotalum
en grélù; acus, acucula en aguño; ecclesia en glèïso; ficus
en figo; vicarius en viguiè; ete., etc. Et encore, par des
variantes caractéristiques plus remarquables : le lat. canis,
du gr. Küwv, Kuvés, qui donne au fr. chien, à notre dial.
chi pour chin, au toulousain, gous et cos; de plus, le lat.
catus, en gr. Karl, donne au fr. chat; à notre dial. ca; au
prov. gat; au cat. gat; à l'esp. et au port. gato; à l'ital.
gatto.
Mais dans la formation du roman, la permutation ne
s'arrêta pas là : la réaction continuant amena d’abord
l'adoucissement de l’intonation sur les voyelles e et à, par
lequel le C dur, romain ou grec, se convertit en deux SS;
puis, pour les voyelles éclatantes et fortes, a, 0, u, les
mêmes tendances firent introduire la combinaison primitive
et celtique sans aucun doute du C avec H, flexion chuin-
tante inconnue au latin. Ce CH est gaulois pur-sang, il ne
vient pas d'importation germanique. Les peuples tudesques
né le prononcent qu'avec une articulation fortement guttu-
rale aspirée, et leur langue en général ne montre aucune
aptitude pour les mouillures adoucies du roman. Nos dia-
lectes au contraire, et le français lui-même, l'ont repris à
148 C
sa source; et en particulier, notre dialecte cévénol, comme
preuve d’origine ancienne, lui qui a mieux conservé les
traditions du langage, l’emploie partout et invariablement
et dit cha pour ca, chéou pour cdou, et mème où nous
disons fdou : châou ana sé jaïre; chabro, pour cabro; etc.
Nous signalons ici un des phénomènes de l'élaboration
de l’idiome, comme nous l’avons fait à la lettre B. En pas-
sant du celtique au latin, du latin au roman, en dérivant
ensuite vers le languedocien et ses dialectes, la langue ne
s’annule pas plus qu’elle ne se crée, elle se modifie suivant
les latitudes et suivant les dispositions propres aux groupes
de chaque zone. C'est pourquoi les permutations n’ont pas
de règles absolues, invariables, savantes, en vertu desquel-
les tous les mots se seraient transformés et qu'on devrait
nécessairement retrouver dans leur composition nouvelle.
A part le radical à peu près immuable, toutes ces lois de
transformation et de permutation varient à l'infini dans
l'intérieur d’un idiome, et à plus forte raison dans un dia-
lecte comme le nôtre, qui se distingue par un caractère
si particulier : nous en saisissons seulement les principaux
accidents. Ce qui est à bien constater, c’est que, à toutes
les époques où le langage s’est modifié, il a obéi partout à
des tendances spéciales, et que, sans se dépouiller d’une
manière complète de ses formes, ila cherché en tout temps
et partout à ressaisir ses propriétés primordiales; et que
toujours, cédant ou à la puissance de l'habitude ou à des
influences organiques et climatériques, appropriées au pays
où il était reçu, il suivait dans ses innovations un certain
plan uniforme, sans secours de la science ni souci de la
grammaire, mais sous l'inspiration d’aptitudes innées et de
facilités de prononciation, dont le peuple, peu instruit
d’ailleurs, restait le souverain juge. Aussi nous contentons-
nous de prendre notre dialecte sur le fait, et laissons-nous
de côté les classifications scientifiques.
Le languedocien n’admet pas le C final, non plus que le
C devant une consonne autre que les fluides Z et R. Lors-
qu'il emprunte au gr. au lat. ou au fr., qui tous admettent
cette rencontre, il supprime net le C et le considère comme
non avenu. C'est une délicatesse d’acoustique qui lui est
commune avec l'ital. Une seule exception a été faite pour
la propos. din, dans, précédant une voyelle; on dit : dine
un an, dans un an.
Dans une langue dont l'orthographe n’a rien de précis,
rien d'arrêté, qui n'a jamais eu de grammaire et qui ne
pouvait en avoir à cause de ses variations d’une localité à
l'autre, qui n’a eu que des lexiques partiels et à principes
divergents, chaque écrivain, chaque glossateur surtout doi-
vent se créer des principes, des règles et une orthographe à
leur usage, faute de type à imiter, de loi unanimement
acceptée et reconnue ou d'académie autorisée qui impose
ses décisions. Au milieu de ces incertitudes, un principe
semble bien surnager, celui de l'orthographe auriculaire ;
et cependant, son application absolue a présenté des diffi-
cultés si nombreuses que tous les essais ont échoué. Sauva-
CA
ges, qui a été plus loin qu'aucun autre peut-être dans cette
voie, s’y est fourvoyé lui-mème, et plus d’une fois. L'ori-
gine de certains mots, leur étymologie l'ont entrainé; et
c’est ainsi qu'il nous donne jusqu’à trois signes différents
pour rendre la prononciation du C, en se servant tour à
tour du C, du Æ et du Q.
Certes, en suivant la règle de l'orthographe auriculaire,
le Cet l’S auraient suffi à exprimer les diverses prononcia-
tions combinées que nous offrent les lettres €, Æ, Q, S, et
nous y aurions gagné l'économie de deux signes ; mais nous
l'avons dit, nous faisons de l’éclectisme; et il est prudent,
avec une certaine mesure, de respecter, dans chaque mot,
sa physionomie étymologique. Nous avions d’ailleurs des
traditions qui obligent, et mieux encore les notes et les
formules de l’éminent poète des Castagnados, qui, dans tout
ce travail, sont notre guide, notre loi et notre inspiration.
Nous conserverons donc chacune de ces consonnes, en don-
nant toutefois congé définitif au Æ intermédiaire, qui nous
paraît tout à fait anomal au languedocien et que le fr.
lui-mème n’adopte que dans quelques emprunts exotiques.
On s'étonnera peut-être d’après cela de rencontrer quel-
quefois le Qu, là où le C aurait été parfaitement suffisant,
où mème il aurait eu plus de convenance étymologique :
nous l'avons employé ainsi parce que notre premier besoin,
en cette affaire, a été de faire concorder orthographiquement
chaque mot avec ses composés, avec ses dimin. et ses péj.,
chaque verbe avec les divers membres de sa conjugaison.
Si, par exemple, nous avions écrit broco, — saco, — touca,
il aurait fallu écrire brouciè pour brouquiè; sacéto pour
saquélo; toucère pour touquère; l'on comprend bien que
cette orthographe n’était pas abordable.
Ca, s. m. Dim. Caté, catoù, catouné; augm. Catas ; péj.
Cataras. Chat, felis catus, Linn. Mammifère de la fam. des
Carnivores. — Le chat sauvage, la véritable souche de
notre chat domestique, existe dans nos cantons montagneux
et boisés; gris plus ou moins brun, avec des ondes plus
foncées sur le dos et transversales sur les flancs; dedans
des cuisses un peu jaunâtre; les lèvres et la plante des
pieds noires, la queue annelée terminée en noir. — Voy.
Chaïné. — Lou ca midoulo, le chat miaule. Es saje coumo
lou ca âou froumaÿe, il est sage, tranquille comme un chat
qui tient sa provende, c’est-à-dire jusqu'à ce qu’elle soit
achevée. Sdouta coumo un ca maïgre, sauter comme un
chat maigre, comme un cabri. Lou més das cas, le mois de
février, temps des amours des chats. Au fig. Faïre lou ca,
faire la chatte-mitte, patte de velours ; baisser le ton; baisser
pavillon; ramper devant plus fort ou plus puissant que soi.
Empourta lou ca, vider un loyer sans prévenir le maitre,
décamper à la sourdine; partir sans prendre congé, sans
faire ses adieux. Achéta un ca dinc un sa, acheter chat en
poche; faire marché sans voir la marchandise. Soun coumo
lou ca et lou ra, ils vivent ensemble comme chien et chat;
ils vivent très-mal d'accord. Y-a pa’n ca, il n'y a per-
sonne, personne! Fariè d'ièls énd'un ca, exp. prvb., il
CAB
est si adroit qu’il ferait des yeux à un chat. Manjo ca qué
roumiaras, loc. prvb. pouvant se traduire par : tel qui rit
vendredi, dimanche pleurera.
Dér. de la bass. lat. Catus, mème sig. Quant à l’étym.
de celui-ci, on est loin d’être d'accord : le gr. Kaxks, furet;
l'hébreu Chatoul, peuvent y avoir contribué; le lat. y a
pris part : Catare, ou Cattare, voir clair; Catum ab eo quod
catat, id est videt ; Catos id est acutos; et encore, Si origo
ejus adferri possit, à caveo dici maæximè probatur, pense
Vossius. On n’a que le choix.
Cabala, v. Cabaler; intriguer pour quelqu'un ou pour
soi; comploter; se liguer avec quelqu'un.
Emp. au fr.
Cabalo, s. f. Cabale, complot, coalition d'ouvriers.
Emp. au fr.
Cabanèl, s. m., n. pr. Au fém. Cabanèlo; dim. Caba-
nèlé, Cabanéloù. Cabanel.
. Dér. de Cabano, chaumière, ou du béarn. Caban, formé
de Cab, tète, en v. lang., manteau des pâtres béarnais et
navarrois, pourvu d’un capuchon.
Cabanis, s. m., n. pr. d'homme. Au fém. Cabanisso;
dim. Cabanissé. Cabanis.
Dér. de Cabano.
Cabano, s. f. Dim. Cabanéto ; péj. Cabanasso. Cabane ;
chaumière, hutte. — Cabano dé pastre, hutte de berger.
Il est aussi n. pr. d'homme, Cabane. Au fém. Cabanésso ;
dim. Cabané.
Dér. de la bass. lat. Capanna; du gr. Kamävn, tugurium.
Cabâou, s. m. Bétail gros et menu qui fait partie d’une
ferme d'exploitation rurale, et que le code civil désigne
sous le nom d'immeubles par destination. Par ext. ce mot
s'applique à fortune, avoir, héritage, possession, trésor. —
Y-a un for cabdou dinc aquél mas, il y a un bétail consi-
dérable dans ce domaine. Aqud’s tout moun cabdou, c'est
tout mon avoir. Las fénnos soun un michan cabàou, les
sont une mauvaise engeance dans une maison. Qué
s'aquito, faï cabdou, prvb., qui paie ses dettes s'enrichit.
On emploie aussi famil. le dim. Cabalé, pour dire toute
sorte de famille d'insectes et de petits animaux, comme
les rats, les fourmis, les sauterelles, etc.
Dér. du lat. Caballus, mauvais cheval, rosse.
Cabaré, s. m. Cabaret; logis; hôtellerie ; auberge ; lieu
où l’on donne à boire et à manger. — Faïre cabaré, tenir
une auberge; vendre du vin en détail.
Les étymologistes français, qui ne peuvent se décider à
devoir quelque chose au languedocien, tandis qu'ils vont
fouiller dans les patois les plus sauvages des Gaulois et des
Germains, font dériver cabaret du gr. Karmketov, mème
sig. Le mot nous paraît, à nous, d'origine purement lan-
guedocienne. En fr. il était peu connu au moyen âge; il n’a
guère commencé à paraître qu'au temps de la Ligue, et il
était synonyme alors de taverne : c'était les rendez-vous de
l'aristocratie comme les cafés de nos jours, à la seule diffé-
. rence qu'au lieu de liqueurs et de café, on y buvait du vin.
CAB 149
Le lang. Cabaré semble bien plus ancien, car son acception
est plus large : il signifiait autrefois logis, hôtellerie, et il
n’a pris que plus tard la synonymie de taverneet bouchon.
Le nom du château de Cabaret, dans le département de
l'Aude, fameux dans les fastes de la guerre des Albigeois,
était une corruption de Cab - aré, caput arietis, tête de
bélier. N’est-il pas probable que le nom commun de Cabaré
a la même origine? peut-être parce qu'une tête de bélier
était l'enseigne commune des logis à l’époque et dans la
localité où ce nom a pris son origine. Il est bien évident
dès-lors que le fr. nous aurait fait cet emprunt, comme en
mille autres circonstances, sans qu'il veuille en convenir.
Cabarétéja, v. fréq. Hanter les cabarets, les tavernes.
Dér. de Cabaré.
Cabarétéjaire, adj. m. Pilier de taverne; habitué des
cabarets.
Cabarétiè, ièiro, s. Cabaretier, cabaretière; aubergiste;
hôtellier.
Cabas, s. m. Dim. Cabassé; péj. Cabassas. Cabas; panier
de sparterie, dont se servent les cuisinières pour aller à la
provision d’herbes, de légumes, et mème à la boucherie.
Au fig. une femme sale, mal fagotée, très-négligée dans sa
tenue; un torchon. — Voy. Acabassi.
D’après les étym. fr. le gr. Ké6os, ancienne mesure de
froment, aurait donné naissance au mot cabas. Nous le
croyons plutôt tout méridional et formé du lat. Caput, qui
avait fourni à l'esp. Cabessa, comme au lang., pour dire
tête, sans doute parce que cette sorte de panier se portait
autrefois sur la tête. La quantité de mots lang. qui ont la
syllabe cab pour racine, et qui sont tous relatifs à la tête,
apporte une nouvelle probabilité à cette origine.
Cabasso, s. f. dim. Cabasséto; péj. Cabassasso. Tronc
d'arbre étêté, qu'il soit mort ou vivant; maitresse branche
de la tête d’un arbre. Lorsque les müriers ou les châtai-
gniers sont étiolés et menacent de périr par les branches,
on rase celles-ci tout près du tronc : s'il arrive que les
racines soient encore saines, l’arbre reprend toute sa vigueur
et pousse de nouvelles branches, qui atteignent vite leur
première dimension.
Dér. de Cab, pour tête, Cabasso augm. En esp. Cabessa ;
en ital. Capo, tête.
Cabassu, s. m. n. pr. d'homme. Au fém. Cabassudo;
dim. Cabassudé. En fr. Cabassut ou Chabassut. Il est très-
répandu, indifféremment avec les deux intonations à la
première syllabe. Qu'il dérive de Cabésso ou de Cabasso, le
mot adjectivé a voulu dire en principe forte têle ou grosse
tête, au moral ou au physique, avec Cab pour racine.
Cabassudo, s. f. Jacée des prés, Centaurea jacea, ou
Centaurea nigra, Linn. Plante de la fam. des Synanthérées,
commune dans les prairies. — Voy. Carouje.
Cabés, s. m. Chevet d’un lit; côté du lit où l'on met la
tête; oreiller ; traversin.
Dér. de Cab, tête.
Cabésso, s. f. Péjor. Cabéssasso. Tête ; au fig. savoir,
150 CAB
jugement, esprit, bon sens. — Uno forto cabésso, une bonne
tête; une tête bien meublée et à jugement sûr.
Dér. de Cab, tête. En esp. Cabessa, Cabeza; en port.
Cabeca; en b. bret. Cab. Le lat. Caput n’est pas étranger
à tous ces mots, non plus que le gr. Kepak, si on voulait
bien.
Cabéstre, s. m. Licou ou licol; lien que l’on met à la
tête des hôtes de somme pour les attacher au moyen d’une
longe. — Trépa émbé lou cabéstre, où émbé la brido, se dit
des jeunes gens,. qui s'amusent de tout, sans nul souci,
fringants et dissipés, qui ont la bride sur le cou. — Voy.
Brido.
Dér. du lat. Capistrum, formé de caput stringo, capitis
stringium. En bas-bret. Kabestr.
Cabi, v. Serrer un objet, le ranger, le mettre à l'abri des
voleurs ou des curieux, le cacher. — Cabè uno fio, marier
une fille, la colloquer. Coussi quicon la cabirén, de manière
ou d’autre nous l’établirons bien.
Dér. du lat. Cavum ou Cavus, cavité, cachette, enfonce-
ment.
Cabiïè, s. m. Ruban de fil dit Chevillère, dans toutes les
localités de France, quoique non enregistré par l’Académie.
Sauvages le fait dér. de Capilli, les cheveux, parce que,
dit-il, les femmes, peu avant lui, se servaient de ce ruban
pour tresser leurs cheveux ; il aurait pu ajouter que, de son
temps, il servait à tous les hommes du peuple pour rouler
leurs cheveux en queue. Aujourd’hui, comme cordon, il
entre dans beaucoup d'ouvrages de couture.
Cabiné, s. m. Dim. Cabinété; péj. Cabinétas. Armoire ;
bahut; garde-robe; jamais cabinet. C’est le meuble essen-
tiel pour tout nouveau ménage : une fille des plus pauvres
ne consent guère à se marier, quand elle ne peut pas se
donner un cabiné; elle attend, s’il le faut, avec une rési-
gnation méritoire, jusqu’à ce que son pécule arrive au pair
de cette dépense.
Ce mot vient évidemment du précéd. Cabi : cependant
il est singulier que le lat. barbare se soit rencontré avec
lui dans son emploi relatif au mariage. Dans la bass. lat.
Cabimentum veut dire établissement.
Cabô, s. m. Chabot, meunier, chevane, poisson de
rivière à grosse tête; ce qui lui vaut sans doule son nom.
— Voy. Aréstoù.
Cabosso, s. f. Dim. Caboussélo; péj. Caboussasso. Clou
de fer de cheval à grosse tête carrée; clou de même forme,
mais de plus grande dimension, avec lequel on fixait les
bandes de fer sur les jantes de charrette, et où ils étaient
autrefois en si grand nombre que la roue portait sur les
clous et non sur la bande. Aujourd’hui qu'on ne ferre plus
les roues à bande, mais en cercle, on n’emploie que des
boulons à tête plate. — Voy. Clavèl dé caréto.
On appelle aussi Cabosso, certains gros clous dont les mon-
tagnards garnissent leurs sabots et souvent leurs souliers.
Dér. de Cabésso.
Cabra, s. m. Troupeau de chèvres, génériquement ; mais
CAB
il n’est employé qu'en parlant des chèvres qu'on envoie au
bouc pour les faire saillir. C'est là une branche d'industrie
agricole, qui consiste pour toute mise de fonds dans l'achat
d’un bouc. On amène là toutes les’ chèvres du canton, et
elles y restent jusqu'à un mois ou deux. En attendant, le
propriétaire du bouc profite d’un restant de lait que les .
chèvres ont conservé, se fait payer la nourriture, et quand
le lail tarit, il a grand soin de renvoyer les chèvres à leur
maître. Téni cabra, c’est garder un bouc pour cet usage.
Cabra, v. Dresser une échelle, une planche, une poutre
contre un mur, dans la position d'une chèvre qui se dresse
contre un arbre.
Sé cabra, se cabrer; se dresser, se révolter contre; s’em-
porter, se brouiller avec quelqu'un. — Sé soun cabras, ils
sont en opposition.
Dér. de Cabro.
Cabri, s. m. Dim. Cabridé, Cabridoù. Chevreau, cabri,
petit de la chèvre, Hædus; petit côté d’une échelle double,
qui, dans certains pays, n’est composé que d’une barre
ronde. — Séouta coumo un cabri, sauter comme un cabri.
Uno tèsto dé cabri, au fig. un étourdi, un écervelé. Quan
la cabro vaï pér hor, sé lou cabrè séouto n’a pas tor, prvb.,
quand la chèvre va dans le jardin, si le chevreau y saute,
il n’a pas tort ; pour signifier que les parents doivent seuls
rester responsables des mauvais exemples qu’ils donnent à
leurs enfants.
Dér. de Cabro.
Cabrida, v. Chevroter, mettre bas des chevreaux; faire
le chevreau. Se dit encore d’une échelle double, qui, étant
dressée, s'ouvre entièrement, parce que la partie qui sert
de support vient à glisser en arrière; par ext. et de là,
cabrida, signifie dégringoler, tomber.
Dér. de Cabri. ,
Cabridado, s. f. Portée d’une chèvre, quantité de che-
vreaux qu’elle met bas. Par ext. dégringolade, chûte de
haut.
Dér. de Cabri
Cabridan, s. m. Frelon, guèpe frelon, Vespa crabro,
Linn. Insecte du genre de la guêpe. — Voy. Grdoule.
Cabriè, s. m. Au fém. Cabriéiro, Chevrier; celui ou
celle qui garde les chèvres. Est devenu n. pr. d'homme et
fait en fr. dans le Midi, Chabrier, et dans le Nord, Che-
vrier.
Dér. de Cabro.
Cabro, s. f. Dim. Cabréto; péj. Cabrasso. Chèvre,
femelle du bouc. — Cabro-bounto. Voy. Bounto €
Boucho. Mé farias vén) cabro, Vous me rendriez fou,
vous me feriez perdre patience. La cabro dé moussu Sagnè
sé batéguè touto la gnuè émbé lou loup, mais dou jour lou
loup la manjè, phrase proverbiale qui exprime de longs
et vains efforts pour se défendre, surtout au jeu; on syÿn
cope souvent ét l'on dit : Faï coumo la cabro dé moussu
Sagnè, et cela signifie : il finira par être enfoncé; il va tout
perdre. :
CAB
Il s'agit, comme on le voit, de toute défense longue,
obstinée, désespérée, mais inutile, contre plus fort, plus
habile ou plus beureux que soi. Un joueur qui perd la
partie après l'avoir disputée pied à pied; un malade qui
meurt après avoir longtemps et péniblement résisté au
mal; un négociant, un particulier qui voit s'accomplir sa
déconfiture après l'avoir retardée autant que possible en
faisant flèche de tout bois; nos éducations de vers à soie
| depuis vingt ans, commençant bien pour finir par un
i désastre; tout cela fait como la cabro dé moussu Sagnè.
D'où vient qu'une chèvre est devenue le parangon de tous
ces braves malheureux ?
… C'est, cé qu'explique suffisamment le complément du
| dicton, qu'on scinde parce qu'il serait trop long et que
tout le monde le sait assez pour pouvoir l'abréger. J'ai
| mème vu les gens en pareille occasion. se permettre une
ellipse bien autre en disant seulerhent : {a cabro! Mais
c'était un peu des argotiers. L'entier dicton est comme
dessus : Faïre coumo la cabro dé moussu Sagnè, qué sé
batégquè touto la gnuè émbé lou loup et lou matà lou loup la
manjé, faire comme la chèvre de monsieur Sagnier, qui se
battit toute la nuit avec le loup et le matin le loup la
Mangea. — Cette fin était prévue, mais celle des Spartiates
} aux Thermopyles l'était aussi; et la chèvre ne méritait
pas moins de passer à la postérité et d’y entrainer son
maître, qui sans elle serait fort peu connu, et avec elle
risque mème de ne survivre que dans le proverbe.
* Dér. du lat. Capra.
Cabro, s. f. Echelle double; chevalet des scieurs de
long, qui soutient le baudet ou ase.
ro, s. f. Mante, mante religieuse. — Voy. Prègo-
Diou.
Cabro, s. f. Papillon femelle du ver à soie; morpion,
vermine qui s'attache aux endroits couverts de poils.
Cabros, au pl., les deux poutres principales qui soutien-
nent l'apparei d'une sonnette à piloter, où moutoù; la
troisième, qui est garnie d’échelons pour grimper à la
poulie, se nomme éscalo.
Cabréto, s. . Chevrette, meuble de l'âtre d'une cuisine,
gt 2 ET les pots dans les cendres.
. du lat. Capra..
jou, s. m. Chevreuil ; chamois ; isard; toute espèce
de ëvre sauvage ; Capreolus, Linn. Quadrupède de gr
des Cerfs; brun ou roux, à cinq andouillers au plus. —
n. pr. Chabréou, en fr. Chabrol, NE AD à
fr. encore Chebreuit et Chevreau. La seule différence est
dans la désinence, suffixe diminutif en lang. exprimé par
dou, traduit par of, rendu par le fr. ewil. — Voy. Oou
ce A conférer avec Bagndou, Cassagnolo, Plagnôou,
© Dér. de Cabro.
* Cabroü, s. m. Dim. Cabrouné. PT pièce de char-
Lo te pied droit et de deux arbalétriers.
ut
CAC 151
Cabus, s. m. Action de plonger dans l’eau, ou de tomber
de haut la tête la première; de faire un plongeon.
Dér. du lat. Caput, parce que la tète porte la première.
Cabus, s. m. Au pl. Cabusses. Provin, branche de vigne
que l'on couche dans la terre pour qu'elle prenne racine et
remplace un cep qui manque. — Ddou tn das cabusses,
dans le dernier quartier de la lune de mars.
Cabus, adj. m. Cdou ou Cdoulé cabus, Chou blanc,
chou cabus ou chou pommé.
Dér. du lat. Caput, parce que cette espèce de chou forme
une grosse tète ronde.
Cabussa, v. Plonger dans l'eau ; faire le plongeon; tom-
ber de haut la tête la première. Il est quelquefois actif : —
Cabussa quéouquus, plonger pour sauver quelqu'un qui se
noie. Cabussa un sôou, aller chercher un sou au fond de
l'eau, en plongeant : exercice qu'on s'amuse à faire exécu-
ter aux enfants en jetant un sou dans l’eau.
Dér. du lat. Caput, tête; en esp. Cabessa.
Cabussa, v. Provigner la vigne; marcotter toute espèce
de plantes ou d’arbustes. Au fig. inhumer, enterrer quel-
qu'un.
Cabussaïre, aïro, adj. Plongeur; qui a coutume de
plonger.
Dér. de Cabus.
Cabussâou, s. m”., ou Cassdou, où Sacol. — Voy. Cas-
sou.
Cabussé, s. m. Rale d'eau, Rallus aquaticus, Linn. Ce
nom est aussi donné à la poule d'eau marouette, gallinula
porzana, dont les habitudes tiennent beaucoup de celles
du Rale, — Voy. Rasclé.
Cabussèl, s. m. Dim. Cabussélé; péj. Cabussélas. Cou-
vercle; ce qui sert à couvrir. — Lou cabussèl dé la tèsto,
le crâne, l'os supérieur de la boite du cerveau.
Dér. du lat. Caput; en esp. Cabessa.
Cabusséla, v. Mettre un couvercle; couvrir un plat, un
pot, une huche, de son couvercle.
Cabussèlo, s. f. Couvercle d'un pot au feu, uniquement.
— Chaquo toupè trobo sa cabussèlo, chaque cheville a son
trou ; chaque fille trouve un mari.
Las cabussèlos, au pl. les cymbales, parce que cet ins-
trument a effectivement la forme d’un couvercle à pot.
Mème étym. que les préc.
Cacaï, s. m. Caca; selle d’un enfant; ordure, saleté ;
terme de nourrice qui, pour détourner un enfant de tou-
cher à quelque chose, lui dit : Cacaï! C'est par suite de la
mème idée qu’on met une décoction amère au bout du sein
de la nourrice quand on veut sevrer son nourrisson, et
quand il y porte la bouche, il se retire en s'écriant : Cacaï/
— Aquèd's dé cacaï, c’est sale.
Dér. du gr. Kéxxn, excrément.
Cacalaca! interj. et s. m. Coquerico, chant du coq;
onomatopée. Gosier, au fig; par ext. cou, Col, — Li coupè
soun cacalaca, il lui coupa le cou.
” Cacalaca, s. m. où Pantoufléto, s. f. Digitale pourprée,
152 CAC
mufle de veau, Antirrhinum majus, Linn. Plante de la
fam. des Personnées, qui croit sur les vieilles murailles, à
fleurs irrégulières et pourprées, auxquelles il ne manque
que d’être plus rares et exotiques pour être recherchées.
Cacalaca, en terme de coiffure, toute espèce de nœud de
rubans, de pouf, posé sur le haut d’une coiffure de femme, *
en guise de la crête d’un coq : d’où le nom.
Cacalas, s. m. Au pl. Cacalasses. Eclat de rire. — Faguè
un bèl cacalas, il partit d’un grand éclat de rire.
Ce terme vient-il du gr. Keyyahdo, rire à gorge déployée;
ou bien n'est-il qu’un rappel du cacalaca du coq, avec
lequel l'éclat de rire a un rapport d’onomatopée ?
Cacalassa, v. ou mieux S'éscacalassa. Eclater de rire ;
tire à gorge déployée, bruyamment, rire aux éclats.
Dér. de Cacalas.
Cacha, v. Serrer; presser; meurtrir; casser, briser en
serrant fortement, avec les dents, ou en frappant; mâcher,
broyer avec les dents. — Cacha dé noses, casser des noix.
Moun éscld mé cachavo, mon sabot me blessait le pied. Un
ase dé soun tén cachariè pas la païo; c’est ce que l’on dit
de quelqu'un qui veut se faire ou que l’on croit plus jeune
qu'il n’est, et qui a cependant largement atteint ou dépassé
l'âge où un âne, faute de dents, ne pourrait plus broyer ou
mâcher la paille.
Sé cacha lous dés, se meurtrir les doigts; au fig. être
dupe de son propre stratagème.
Dé froumaje cacha, du fromage qui adépassé le degré de
fermentation qui lui convient, vieux, fort et rance.
Dér. du lat. Quassare, briser.
Cachaduro, s. f. Meurtrissure ; pinçon ; blessure produite
par une forte pression. — Aou débasta sé vésou las cacha-
duros, exp. prvb., quand on enlève le bât à un âne, on
aperçoit ses blessures ; au fig., c’est à fin de compte qu'on
juge de son mal.
Dér. de Cacha.
Caché, s. m Cachet; sceau; pain à cacheter.
Dér. de Cacha.
Cachéta, v. Cacheter; appliquer un cachet; fermer avec
un pain à cacheter.
Dér. de Cacha.
Cacho, s. f. Cachette; cache; lieu secret où l’on cache
quelque chose.
Emp. au fr.
Cachô, s. m. Dim. Cachouté; péj. Cachoutas. Cachot ;
prison basse et obscure.
Emp. au fr.
Cacho-foué, s. m. Chambrière de charrette ; gros bâton
suspendu par une douille mobile au tablier d’une charrette,
qui sert à soutenir les bras en équilibre lorsqu'elle est
dételée, et à soulager le limonier lorsqu'elle est attelée
chargée, mais au repos.
Comp. de Cacha et de Foué, fouet.
Cachomoure, s. m. Coup de poing sur la mâchoire, sur
le nez.
CAD
Comp. de Cacha, meurtrir, êt Moure, visage.
Cadabre, s. m. Péj. Cadabras. Cadavre, corps mort ;
plus particulièrement en parlant du corps humain ; au fig.
homme maigre et décharné, ou seulement livide.
Dér. du lat. Cadaver, qui serait la syncope de caro data
vermibus, à ce qu'on assure et qui est vraisemblable et
ingénieux.
Cadacu, n. pr. de lieu. Cadacu, petit hameau dans la
commune de Laval, arrondissement d’Alais.
Dér. du lat. Caput et Acutum, chef pointu.
Cadaï, s. m. — Voy. Calaï.
Cadansa, v. Balancer; remuer en équilibre; pencher;
branler. — La téoulo cadanso, la table n’est pas solide;
elle branle sur ses pieds.
Dér. du lat. Cadere, tomber, et de Danso.
Cadäoula, v. Fermer au loquet; fermer une porte avec
le loquet.
Cadäouléja, v. Loqueter; agiter, faire aller le loquet
d’une porte pour ouvrir, ou pour indiquer qu’on se dispose
à entrer.
Cadäoulo, s. f. Dim. Caddouléto; péj. Caddoulasso.
Loquet; cadole; languette de fer, avec son appareil en
bascule qui la soulève, et le crochet-gache qui la retient,
pour fermer une porte. En terme de charcuterie, verge du
porc, y compris son fourreau et la longue membrane qui le
lie à l'abdomen. — Es toujour én l'air coumo uno cadäoulo,
au fig., il est sémillant, actif, agité; il ne saurait rester en
place. Fino cadäoulo, loc. prvb., fin matois, rusé et actif.
Le fr. s'est emparé de ce mot dont il a fait Cadole, qui
a la même acception, mais qui ne s'emploie que comme
technique de serrurerie.
Dér. du lat. Cadere, tomber.
Cadarâou, s. m., n. pr. d'un torrent qui borde à l'ouest
la ville de Nimes : Cadarau.
Dans le dialecte nimois, ce mot est synonyme de voirie,
gémonies. Cela tient peut-être à ce que le lit de ce torrent,
sur lequel est aussi situé l’abattoir public, servait à cet
usage; et que cette destination était ancienne. Mais ne
pourrait-on pas prétendre avec autant de fondement que
c'est de cette circonstance même que le torrent tire son nom?
Il n’est pas hors de probabilité que l'expression, soit qu’elle
s'applique génériquement à tout emplacement de voirie,
soit à l'emplacement particulier de ce torrent, ne dérive du
lat. Cadaver, cadavre; si l’on se rappelle surtout que des
fourches patibulaires, véritables gémonies, dont on voit
encore quelques piliers sur la route de Sauve, dominaient
le cours de ce ruisseau. Cependant Sauvages, en consultant
sans doute quelque dialecte voisin, applique ce nom de
Cadardou aux ruisseaux d'écoulement des rues, et lui
donne pour origine le verbe grec Karàgéw, couler de haut
en bas. D’autres veulent le faire venir du catalan cataranco,
torrent. Le mot n'appartient pas à notre langue; et nous
y voyons plutôt une redondance réduplicative de notre
Cardou, qui a la mème signification. — Voy. Cardou.
en
LA
r
CAD
Cadastre, s. m. Cadastre; anciennement registre de
capitation; plus tard terrier des propriétés imposées à la
taille; aujourd’hui registre public où sont marquées l’éten-
due et la valeur des terres.
Dér. de la bass. lat. Capitastrium. Godefroi dit : In
Gallia, aliquibus in locis, à capilibus vel capitatione cap-
dastra, vel cataïtre, vocatur capitationis scilicel registrum,
in quibus singulorum nomina a@notata erant.
Cade, s. m. Grand genévrier à baies rouges, Juniperus
oæycedrus, Linn. Arbrisseau de la fam. des Conifères. C'est
la grande espèce dont la racine fournit l'huile empyreuma-
tique de Cade, qui est d'un usage très-fréquent en agricul-
“ture pour Je traitement des animaux, el principalement
contre la gale des moutons. La tige de cet arbuste fournit
par incision la résine appelée Sandaraque, base des plus
beaux vernis. — Es davala ddou cade, il a dégringolé; il
est en déconfiture; ou ikest mort.
- Cade-mourvis, s. m. — Voy. Mourvis.
Cade-sabà, s. m. — Voy. Sabino.
On regarde ce mot comme dér. du celt.
Cadè, s. m. Dim. Cadété; péj. Cadétas. Cadet. Surnom
qu'on donnait beaucoup dans le peuple au fils puiné d’une
famille, au second enfant mâle, n'importe le nombre des
frères subséquents. Ce nom était tellement incarné à l’indi-
vidu qui en était affecté dans son enfance, qu'il ne le per-
dait pas même par la mort de son frère aîné, quoiqu'il
devint par là le chef de la maison. Lorsqu'on voulait y
ajouter le nom de famille, on faisait précéder celui-ci de la
partic. dé; on disait donc : cadè dé Martà et non cadè-
Marti. Il en est de même encore assez généralement pour
les prénoms; on dit plutôt : Jean dé Brunèl que Jean
Brunèl. Dans les races vraiment populaires et autochtones,
il n’est pas rare qu'on ajoute au prénom et au surnom de
Cadè la désignation de la mère, surtout lorsque cette mère
est plus connue que le père, ou lorsqu'elle est veuve. On
dira plus volontiers par ext. cadè dé Martino, Jand dé
Brunèlo, que cadè dé Martà où Jand dé Brunèl. Cette
tournure prend un caractère plus original et plus local
encore, si l’on féminise pour la mère le surnom du père.
Un homme était surnommé Zon Diou, son fils était connu
sous le nom de cadè dé Bon Dioulo. Ce nom de Cadè est
resté dans le génie de la langue, mais l'usage se perd de le
donner aux enfants. — Un bon cadè, un hon drille. Lous
cadès dé las Matèlos, qué lous dous fan cént ans ; loc prvb.,
de beaux jouvenceaux ! la paire fait un siêcle ! dicton qui
a été importé de Montpellier : les Matèles est un village au
bord de l'étang de Mauguio.
Cadè, qui se disait autrefois Capdë, est un dim. de Caput,
chef, petit chef, second chef de la famille.
_ Cadèl, s. m. Dim. Cadélé, Cadéloù; péj. Cadélas. Au
fém. Cadèlo. Jeune chien, petit de la chienne; par ext.
jeune homme sur les confins de la puberté. — Un cadélas,
un jeune gars, robuste et un peu niais.
Dér. du lat. Catellus.
2
A Y —
CAD 153
Cadèl, s. m. Chaton ou folles fleurs des arbres que les
botanistes distinguent sous le titre et rangent dans la fam.
des Amentacées, comme le chêne, le noyer, le châtaignier,
le coudrier, le peuplier, l'orme, le saule, etc.
Cadéla, v. Chienner, mettre bas, en parlant d’une
chienne; pousser des chatons, en parlant de certains
arbres.
Cadélado, s. f. Portée ou ventrée d'une chienne; laitée,
en fr., se dit également d’une chienne de chasse.
Dér. de Cadël.
Cadénas, s. m. Cadenas; serrure mobile et portative,
qu'on adapte par un anneau à un autre anneau fixe, com-
me fermeture. — Lou cadénas dou col, les vertèbres du
cou; les clavicules qui joignent les deux épaules en fermant
l'orifice supérieur de la poitrine.
Dér. du lat. Catena, chaine.
Cadénéto, s. f. Cadenette, longue tresse de cheveux.
C'était la coiffure des incroyables du Directoire, qui se
nommaient aussi Muscadins. Cette mode était renouvelée
d'autrefois, et remontait, dit-on, à Henri Albert, seigneur
de Cadenet, maréchal de France, qui lui aurait donné son
nom. Il est bien aussi probable que ce nom lui vient de ce
qu'elle consistait à relever les cheveux en tresse plate, en
chaine, qu’on fixait au haut de la tête avec un peigne.
Cadéno, s. f. Chaine, suite d'anneaux ou chainons
entrelacés. — Cadéno dé coulas, mancelle, chaîne qui tient
au collier d’un cheval de charrette. Fré coumo la cadéno
d'un pous, froid comme une chaine de puits.
Cadéno est le nom d’une rue du vieil Alais. Est-ce un
souvenir du moyen-àge, pour rappeler les précautionsd'une
bourgeoisie toujours jalouse de ses libertés et priviléges à
l'encontre de ses seigneurs, qui faisait placer des chaînes à
l'entrée de ses rues contre les incursions des gens du chà-
teau dominant la ville sur ce point, ou contre les attaques
extérieures? Ou bien, cette rue en pente était-elle si difi-
cile, qu’autrefois il avait été nécessaire d'établir une chaine
dans toute sa longueur pour servir de main-coulante aux
passants? Le nom se retrouve dans les plus anciens titres
des archives municipales : les attaches des chaines se dis-
tinguaient encore aux deux extrémités et indiquaient leur
position en travers de la rue; la première origine nous
paraît donc préférable. Le lat. Catena est en tous cas le
radical du mot.
Cadièïraïre, aïro, s. Fabricant, tourneur, faiseur de
chaises; rempailleur de chaises.
Dér. de Cadiëiro.
Cadièïro, s. f. Dim. Cadièiréto ; péj. Cadiëirasso. Chaise,
siége à dossier où l'on s'asseoit ; chaire à prècher. — Empaïa
uno cadièiro, rempailler une chaise. L'an tracho dé la
cadiëiro én bas, on a publié en chaire les bans de son
mariage.
Dér. du lat. Cathedra, qui a les deux mêmes signif.
Cadis, s. m. Cadis; étoffe de laine grossière, espèce de
gros drap gris ou brun, sans teinture, qu'on fabrique dans
2
154 CAG
les campagnes, surtout dans la Lozère. — Faïre un cadis|,
faire faire une pièce de cadis dans la maison, ce qui pro-
cure une meilleure qualité que de l'acheter en foire ou chez
les marchands.
Dér. sans doute de la ville de Cadix, d’où cette étoffe
doit avoir été importée dans l'origine.
Cadissaïre, aïro, s. Tisseur de cadis; marchand ou
fabricant de cette étoffe.
Dér. de Cadis.
Cadissariè, s. f. Hardes et habits de cadis de toute une
maison, qu'on lave à la fin de l'hiver et qu'on suspend dans
la cave pour les préserver des vers.
Dér. de Cadis.
Cadiuèïsso, s. f. ou Gadôousso, ou Dôousso. Cosse de
pois, de fèves, de haricots et autres légumes qu'on écosse;
au fig. forte tape, causant contusion et douleur. — Voy.
Déousso.
Cadra, v. Cadrer; convenir; s’ajuster, s'assortir avec.
— Aquè cadro bièn, cela vient juste à point.
Dér. du lat. Quadrum, carré.
Cadran, s. #. Cadran, surface sur laquelle sont marquées
les heures. Au fig. homme ou femme effronté, aux allures
hardies, qui s'affiche avec affectation et mauvais goût.
Dér. dans sa première acception du lat. Quadratum ; dans
la seconde, par comparaison peut-être avec le cadran, qui
étale et marque les heures.
Cadre, s. m. Cadre, bordure de bois en baguettes dont
on entoure une glace, un tableau, une gravure; chambranle
d’une porte.
Dér. du lat. Quadrum, carré.
Cafè, s. m. Café; nom commun à la graine du cafier, à
l'infusion qu'on en fait, et au lieu où on le vend préparé.
— Faire cafè, tenir un café; être cafetier, limonadier. Au
fig. préne soun cafè, jouir silencieusement et paisiblement
d’un spectacle qui amuse. Cette phrase se prend d'ordinaire
en mauvaise part, c’est-à-dire qu'on jouit malicieusement
d'une mystification que l’on fait subir à quelqu'un, ou
d’une querelle à laquelle on ne prend part que pour juger
des coups et en rire.
Dér. comme le fr. de l'arabe Gahouhah.
Cafétiè, ièïro, s. Cafetier ; limonadier ; le maître ou la
maitresse d’un café.
Dér. de Cafe.
Cafétièiro, s. m. Dim. Cafétièiréto. Cafetière; vase à
faire le café, ou toute autre infusion.
Dér. de Cafè.
Cafiô, s. m. Chenet; landier; ustensile de cheminée qui
soutient le bois dans le foyer.
En bas-bret. Kafuner, chenet; en ital. Capi fuocco.
Cafour, s. ”m. Enfourchure d’un arbre; le point où les
grosses branches se séparent du tronc; carrefour; embran-
chement de plusieurs rues qui forment une sorte de petite
place.
Dér. du lat. Quadrum el Forum, place carrée.
CAG
Caga, v. Chier; aller à la selle; s’ébouler, en parlant
d'un mur, d’une tranchée, ou d’une bobine, d’une fusée,
d'une toupie, dont le fil ou la corde est enroulée trop
lâche.
Notre Dictionnaire s'est fait un devoir d'enregistrer tous
les mots et de chercher l'explication de toutes les locutions
populaires. 11 suffit de le rappeler. « En mouchant une
expression mal propre, on s'expose à lui arracher le nez —
c'est-à-dire le caractère, l'originalité, » a dit un glossateur
de beaucoup d'esprit : il n’y a donc pas à faire les délicats
avec une langue qui professe hautement et avec raison que
pardoulos pudou pas. Un empereur d'assez bonne maison
disait la mème chose de l'argent; nous pouvons bien le
dire de la monnaie courante du peuple. Nous toucherons
donc au passage deux dictons fort usités, et sans aucun
scrupule.
Caga dâou pichù quiou : inutile de donner le mot à mot;
mais l’argot de la langue verte nous fournit un correspon-
dant : chier de petites carottes; mème signification. C’est
mener petit train, vivre de peu, se serrer le ventre; cette
dernière expression, plus académique, nous mène tout droit
à la nôtre, comme on va le voir. Quand on est obligé
d'économiser jusque sur son manger, l'estomac n'a pas
beaucoup à faire. Dans cet atelier de fabrication, comme
dans les autres, la matière première faisant défaut, les pro-
duits diminuent nécessairement; et l'importation manquant,
l'exportation doit être peu de chose : d'où il suit qu'une
petite voie suffit pour l’opérer. L'effet est dit pour la
cause dans notre locution, qui, par une bizarrerie à
noter, indique beaucoup moins le fait d'économiser sur sa
cuisine, avec les conséquences de l'espèce, que celui de se
restreindre, par nécessité aussi, et de faire petitement toute
autre chose, quoique les mêmes conséquences n’y soient plus.
Caga méléto. Le melet est un poisson de mer assez long
mais surtout très-mince. C'est cette conformation qui à
donné lieu à notre dicton qui signifie : avoir grand peur:
On sait qu’un des effets de la peur est de resserrer singu-
lièrement chez l’homme certain conduit sécréteur; bien
d’autres dictons dans toutes les langues viennent, avec la
science, témoigner de ce fait. Or, il doit résulter de cet
élat que les produits ne peuvent être que fort minces,
comme la mélélo, par exemple, et c’est encore dire la cause
que de dire l'effet.
Dér. du lat. Cacare.
Cagado, s. f. Cacade; excréments. Au fig. éboulis;
imprudence, entreprise manquée; ânerie, pas de clerc. —
As fa aquà uno bèlo cagado, tu as fait là une lourde sottise,
une énorme imprudence. Dé cagados dé mousquos, chiüres
de mouches.
Dér. de Caga.
Cagarâoulé, s. m. Très-petit pot à bouillir; le plus petit
pot, dans lequel on fait chauffer le bouillon d’un malade,
la soupe d’un enfant.
Dér. du lat. Cacabulus, dim. de Cacalus, pot au feu.
CAG
Cagaräoulo, s. f. Dim. Cagardouléto. Escargot, limaçon
à coquille; hélice aspergé, Heliæ aspersa, Linn. Mollusque
Gastéropode. En fr. moyen-âge, on disait Caguerole, qui
signifiait à la fois un escargot et une espèce de marmite
à trois pieds et à longue queue. Cette dernière acception
semble annoncer sa dérivation du lat. Cacabus, pot au feu;
et l’escargot y aurait participé par analogie de forme. Le
limaçon, quand on l'irrite ou qu’on l'approche du feu, rend
une écume comme le pot au feu. — Lou tambour dé las
cagardoulos, le tonnerre. Aïço és la casso dé las cagardoulos,
tan dé vis tan dé prés; dicton pour exprimer un succès
complet en quoi que ce soit, comme au jeu, par exemple,
quand on gagne toutes les parties. Ordinairement on ne dit
que le premier membre de la phrase, le second restant
facilement sous-entendu. Il est inutile, pour expliquer ce
dicton, de dire que lorsqu'on va à la recherche des escar-
gots, ce qui se fait après une pluie de printemps ou un
. orage, on en prend tout autant qu'on en trouve; ce gibier,
dont on est généralement friand dans le pays, étant peu
propre à dépister ou à fair le chasseur.
Cagarèl, Picarèl ou Suscle, s. m. Mendole, Sparus
Mana, Linn. Petit poisson de la Méditerranée, de l’ordre
des Holobranches; bon quand on le mange frais, mais qui,
ainsi que l'indique son nom lat., peut imiter l'anchois,
Mana, et qui en effet se conserve dans la saumure; c’est
le goût piquant qu'il en tire qui l’a fait appeler Picarèl.
— Voy. ©. m.
Cagarèlo, s. f. Mercuriale, foirelle; Mercurialis annua,
Linn. Plante de la fam. des Euphorbiacées, purgative et
laxative : elle est un poison pour plusieurs animaux et
entr'autres pour les lapins.
Son caractère éminemment émollient lui a valu son nom.
Cagarocho, s. f. Dim. Cagarouchéto. Très-petite mai-
son, cahutte étroite, taudis, où l'on est logé à pli de corps.
Au fig. bamboche, très-petit homme, nabot, avorton.
Il peut, dans les deux sens, pr. et fig., dériver par com-
paraison de la posture accroupie exprimée par le verbe.
Cagasso, s. f. A-bé-c6, alphabet, croix de par Dieu. —
-Voy. Crous.
Cagnar, s. m. Dim. Cagnardé. Cagnard, abri exposé au
soleil; c'est le foyer d'hiver des pauvres gens, des vieil-
- lards.et des fainéants ; la cheminée du roi Réné à Aix.
Dér. du lat. Canis, chien, ou de l’ital. Cagna, chienne,
parce que les chiens aiment à se coucher au soleil.
Cagnarda, ». Exposer au soleil et à l'abri du vent.
Dér.de Cagnar.
Cagno (Faïre la), v. Faire la mine, la grimace; dédai-
gner; refuser d'un air dédaigneux.
Dér. du lat. Canis, c'est-à-dire faire une mine de chien.
Cagnè, oto, adj. Dim. Cagnouté, éto ; péj. Cognoutas,
asso. Sot, imbécile; poltron.
Dans l’ancien lang. Cagnd signifiait chien : on dit encore
un: foutrassdou dé cagnè, un gros diable de chien.
Dér. du lat. Canis; en ital. Cagnolino, petit chien.
CAI 155
Cagnoto, s. {. Dim. Cagnoutéto ; péj. Cagnoutasso. Cor-
nette de femme en indienne, sans dentelle ni avance, qui
emboîite la tête et les oreilles. C'est la coiffure exclusive
des femmes du peuple et de la campagne dans leur négligé
de travail. Les étrangers conspuent cette coiffure, qui n'est
pourtant pas sans grâce, et qui ressemble beaucoup au
bonnet phrygien. Tout dépend du plus ou moins de coquet-
terie dans la manière de l'arranger.
Ce mot paraît encore dér. du lat. Canis, parce que, dans
le principe, cette coiffure descendait sur le cou en oreilles
de chien.
Cagnouta, v. Mettre la Cagnoto à quelqu'un; coiffer une
femme de sa Cagnoto. y
Dér. de Cagnoto.
Cago-chi, s. m. Bon-Henri, épinard sauvage, Chenopo-
dium bonus-henricus folio triangulo, Linn. Plante de la
fam. des Chénopodées; commune dans les lieux gras.
Son nom lang. lui vient de ce que les chiens aiment à
déposer sur elle leurs excréments.
Cago-prin, s. m. Pince-maille, fesse-Mathieu; ladre
d’une avarice sordide; vilain; taquin. — Sauvages donne
à ce mot pour équivalents : cago-dignès, cago-du, cago-séc,
cago-maños : c’est la même idée, que nous avons expliquée
dans le verbe servant à la formation de tous ces subst. —
Voy. Prin, Dignè, Maïo, etc.
Cago-trépo, s. f. Chausse-trappe ou chardon étoilé,
Centaurea calcitrapa, Linn. Plante de la fam. des Compo-
sées Cynarocéphales, qui vient le long des chemins. La
même que l'douriolo. — Voy. c. m.
Çaï, adv. de lieu. Ici, céans. Il a la même portée que
Aïci, avec cette différence que ce dernier suit d'ordinaire
le verbe auquel il sert de régime , tandis que le premier le
précède. — Çaï séra lèou, ou séra lèou aïci, il sera bientôt
ici. Ça sèn, nous y voilà. Diou çaï siè! que Dieu soit
céans! exp. prvb., quand on entre dans une maison.
Çaï a quelque chose de plus technique, de plus syncopé
et partant de plus poétique que Aüci.
Dér. du lat. Ho, par ici.
Caïa, v. Cailler; coaguler; figer. — Lou carboù dé la
Gran’ Coumbo és lou mioù, parça qué caïo lou maï, la
houille de la Grand'Combe est de la meilleure qualité,
parce qu’elle se caille, elle fait prise, c'est-à-dire que le
soufre et le bitume qu'elle contient se mettent en fusion et
en vitrification à l’action du feu; ce qui cimente les mottes
entr'elles.
Dér. du lat. Coagulare; en ilal. Quagliare.
Caïado, s. f. Caïllé; du lait caillé.
Dér. de Caïa.
Caïäou, s. m. Dim. Caïalé; péj. Caïalas. Caillou; galet;
pierre de pleine main et de la dimension dont on se sert
pour la fronde ou pour le jet à la main. — L'abataïavo à
cos dé caïdous, il le poursuivait à grands coups de pierre.
S'arape un caïdou, si je prends une pierre.
Dér. du lat. Calculus, on Cautes.
156 CAI
Caïas, s. m. Caillot de sang, grumeau de sang caillé.
Dér. de Caïa.
Caïé, éto, adj. Bigarré; pie; de deux couleurs. Ce mot
ne se dit guère que des bœufs dont la robe est de deux
couleurs. Pour les porcs, on dit Gardl, dans le mème sens.
Ra-caïé, s. m. Lérot, espèce de loir ou de gros rat,
tacheté de gris et de blanc, qui niche sur les arbres. —
Voy. Ra.
Caïé signifie aussi mollet, à moitié sec, en parlant de
certains fourrages et de quelques céréales, comme la luzerne,
le sainfoin, le seigle et l’avoine, qu’il faut couper et entas-
ser, avant une parfaite dessication, pour éviter que la
feuille des premiers et le grain des seconds ne se détachent
en les remuant et ne se perdent.
Caïèjro, s. f. Ventricule ou estomac des agneaux, veaux
et chevreaux, que l'on conserve par une préparation, pour
cailler le lait. La première opération digestive de ces ani-
maux étant de cailler le lait, le viscère qui sert à cette
opération, est saturé de certains acides, qui produisent le
même effet après la mort de l'animal et la dessication du
viscère. — Voy. Cal.
Dér. de Caïa.
Caïn, ino, adj. Tatillon; importum; inquiétant; qui se
plait à tourmenter; incommode.
Dér. du nom de Caïn, race de Caïn.
Caïna, v. Tourmenter; inquiéter; importuner ; piquer à
coups d’épingles.
Mème dér. que l’adj. préc.
Caïo, s. f. Caille, Perdix coturniæ, Temm. Oiseau de la
fam. des Alectrides. Les cailles arrivent dans notre pays
vers le commencement d'avril. On les appelle alors cailles
vertes, parce que la campagne est déjà couverte de verdure ;
elles sont peu grasses à cette époque, qui est celle de leurs
amours. Vers le mois d'août et de septembre, elles font un
second passage; on les chasse dans les luzernes et dans les
vignes, et comme elles sont fort grasses, elles sont faciles à
tirer; leur chair alors est un manger délicieux.
Rèi dé caïo, s. m. Râle de genèt, Rallus crex, Linn.
Oiseau de la mème famille que la caille, un peu plus gros;
il vit solitaire, ce qui lui a valu sans doute d’être traité de
majesté.
En ital, Quaglia.
Caïo, s. Jeu d'enfants qui ressemble à celui de cligne-
musette, mais dont il est le contre-pied : car celui qui est
caché doit prendre celui qui le cherche avant qu'il ait
touché le but, tandis qu'ici celui qui se cache fait ses efforts
pour ne pas être découvert d’abord, et une fois éventé par
le chercheur qui l'annonce en criant : caïo pér un tèl, tâche
de toucher le but avant d'être saisi sous peine d’interver-
sion des rôles.
Caïradé, s. m. Gesse domestique; pois carré, Lathyrus
sativus, Linn. Plante de la fam. des Légumineuses, cultivée
soit comme fourrage, soit pour en cueillir la graine.
Dim. dér. du lat. Quadrum, carré.
CAI
Caïre, s. m. Dim. Caïroù. Côté; carré; coin; angle;
côté d’un angle. Au fig. endroit; canton; quartier. — Cara
dé tout caïre, carré dans tous les sens. Cérqua détout caïre,
chercher de tous côtés. Y-a un brave caïre dé trufos, il y
a un beau carré de pommes de terre. Es réscoundu din
quéouque caïre, il est caché dans quelque coin. Rèsto pas
én d'aqguéste caïre, il n’habite pas dans ce quartier.
Dér. du lat. Quadrum.
Caire, s. m. Carreau, une des couleurs du jeu de cartes.
— Joguo caïre, quâou n'a pas né po pas traïre, c'est un.de
ces mille dictons que les joueurs inventent pour entretenir
la conversation, quand le jeu absorbe toutes leurs pensées
au point de ne pouvoir causer de sujets étrangers à ce qui
les préoccupe exclusivement. Le besoin de rimer est parti-
culier au génie du dicton, surtout en languedocien. Copo
caïre et jogo caïre, il triche; au fig. il plaide le faux et le
vrai; il fausse sa parole.
Ficha’n care pour ficha én caïre ou ficha un caïre. Cela
veut dire : fatiguer, ennuyer, scier le dos, et aussi contra-
rier, vexer, ficher malheur, ce dernier verbe mis par amen-
dement, bien entendu, comme dans notre languedocien.
Maintenant, d'après ce que nous venons de dire, Caïre a
plusieurs significations, selon l'occurrence : coin, sens, côté
et carreau du jeu de cartes. Il n’est pas absoluïnent impos-
sible que la locution vienne d’une partie de cartes dans
laquelle un joueur aurait été obstinément poursuivi et battu
par la couleur carreau ; cependant il y a une autre explica-
tion assez simple, assez naïve, si ce n’est davantage, pour
être la bonne. Lorsqu'un enfant n’est pas sage, on l'envoie
en pénitence dans un coin de la chambre où il doit rester
jusqu’à l’expiration de sa peine, debout, sans bouger, et
tourné vers le mur; il est clair que cela doit l’ennuyer, le
vexer, lui ficher malheur, si vous voulez. Ces souvenirs
d'enfance restent en grandissant et, quoique plus sage alors,
si l'on éprouve quelque contrariété, quelque ennui, quelque
vexation, on a pu les assimiler à ceux du jeune temps,
quand on vous flanquait dans un coin pour punition, etles
appeler du même nom en salant tant soit peu l'expression.
Mais il ne faut rien garder sur la conscience. Cette der-
nière explication, qui me revenait assez, je dois convenir
qu’elle ne peut être acceptée que sous bénéfice d'inventaire.
Le dicton est exclusivement languedocien et de vieille date.
Ceux qui font les dictons étaient, en matière d'éducation,
pour l’ancienne méthode de M. Cinglant, et je crois mème
qu'ils le sont toujours. Comment auraient-ils fait celui-ci
sur une nouvelle pénalité qui n’a été édictée que depuis et
seulement dans le code des salons? C’est assez difficile à
arranger, et il faudra sans doute revenir à notre partie de
cartes au risque de la perdre encore. |
Dér. du lat. Quadrum.
Caïre (dé), adv. De travers, obliquement; de côté; en
diagonale. — Ana dé caïre, marcher de côté; au fig. être
gèné dans ses affaires; ne pas aller franchement. Coupa dé
caïre, couper de biais.
.
CAL
Dér. du lat. Quadrum; ou du gr. Xslp, la main.
Caïssa, v. Terme d'agric. Equarrir une fosse, une fosse
d'arbre, tailler ses berges perpendiculairement, les ragréer;
taller, pousser plusieurs rejetons de la racine. Au fig. sé
caïssa, se remplumer;®rajuster ses affaires; s'arrondir ;
prendre de l'embonpoint. — Lou bla caïsso, le blé talle,
lorsque sa fane s'épaissit et forme plusieurs plantes avant
que sa tige s'élève. Un home, un chival bièn caïssas, un
homme ou un cheval ragotés. S'és bièn caïssa, il a bien fait
ses orges; il a remonté ses affaires; se dit aussi d’un jeune
homme dont les membres se sont renforcés, qui a pris du
corps. Aguélo fénno s'és bièn caïssado, cette femme s’est
bien meublée, bien nippée; ou elle a pris de la carrure.
Dér. de Caïsso.
Caïssâou, s. m. Dim. Caïssalé; péj. Caïssalas. Dent
molaire ou mâchelière. — M'a déraba dous caïssdous, il
m'a extirpé deux grosses dents. Dérabo aquél caïssdou, au
” fig., tire toi de cet embarras; tire toi cette grosse épine du
pied; trouve une solution à cette affaire difficile.
En lang. romane Caïs, mâchoire, dent.
Caïsso, s. f. Dim. Caïsséto ; péj. Caïssasso. Caisse de bois
propre à renfermer toute sorte d'objets; coffre; bière, cer-
cueil. — Caïsso dé cabus, fosse à provigner. — Voy. Cros.
Dér. du lat. Capsa, coffre.
Caïssoù, s. m. Caisson de charrette; petite armoire placée
sous le brancard et fermant à clé, où les rouliers renferment
leur argent et ce qu'ils ont de plus précieux.
Dim. dér. du lat. Capsa.
Caïtiviè, s. f. Chétiveté; misère; infortune; pauvreté ;
mésaise; saleté, crasse, squalidité qui suivent la misère ;
maigreur, mauvaise santé provenant d'une nourriture mau-
vaise où Lrop peu abondante. — Es mor dé caïtivié, il est
mort de pénurie, de misère. Tira soun véntre dé caïtiviè,
manger goulument, avec avidité, comme quelqu'un qui a
longtemps jeûné, et qui est à bonne table pour se refaire.
Y vaï pas dé caïtivië, il n’y va pas de main morte.
Dér. du lat. Captivus, captif, esclave; en ital. Cattivo,
malheureux, chétif.
Caïtivoüs, ouso, adj. Chétif, malingre ; cacochyme; qui
végète languissamment.
Cajoula, v. Cajoler; courtiser; tenir à quelqu'un des
propos flatteurs, agréables, séduisants.
Emp. au fr.
Cal, s. m. Présure; matière acide qui sert à faire cailler
le lait. La substance que l'on emploie le plus souvent,
provient de la macération de la caïètro, caillette, ou estomac
des chevreaux, qu'on fait tremper longtemps dans l'alcool.
Une cuillerée à café de cette liqueur, ainsi pénétrée des
acides de la caïèro, suffit pour faire coaguler trois litres de
lait. — Voy. Caïdiro.
Cal se dit au prop. de cette sorte de matière gélatineuse,
ressemblant à du caillé, qui forme le noyau de certains fruits
au commencement de leur maturité, l’intérieur des grains
CAL 157
à enveloppe dure, et se prend pour jointure, calus, nœud
des os fracturés; au fig. il exprime la verdeur, la sève, le
défaut de maturité, dans le sens de jeunesse. — Lou bla és
én cal, le blé commence à former son grain; le moment où
le grain n’est encore qu'une pâte blanche, laiteuse, comme
le caillé. Nose én eal, noix, lorsque son amande n'est
encore qu’une gelée. Aquè's pas qué dé cal, cela n'a point
de consistance encore. Préne cal, en parlant d'un os cassé
qui commence à se souder par la coagulation de la substance
gélatineuse qui lubréfie ses pores : former calus. Aqwélo
Jjouïnèsso és éncaro din soun cal, cette jeunesse n'est pas
formée, fam., si on lui pressait le nez, il en sortirait du
lait.
Dér. de Caïa.
Cala, v. Céder; baisser pavillon; lâcher ; se taire; mettre
les pouces.
Dér. du gr. Xakéw, céder, faiblir.
Calada, v.Paver; carreler; couvrir, revêtir de pavés, de
carreaux ; joncher. — La tèro èro touto caladado dé poumos,
le sol était couvert de pommes. Low cièl és calada d'éstèlos,
le ciel est semé d'étoiles. Féou avédre lou gousiè calada pér
béoure aqud, cette liqueur est-si forte, qu'il faut avoir le
gosier pavé, le palais bronzé, pour la boire.
Dér. de Calado.
Caladaïre, s. m. Paveur, celui qui pave. Au fém. Cala-
daïro.
Calado, s. f. Pavé des rues; chemin pavé; l’ensemble,
l’espace pavé, recouvert de pavés.
Dér. du celt. Kaled, dur; en bas-bret. Kaled, ou Kalet.
Caladoù, s. m. Pavé; pierre équarrie qu’on appelle pavé
d’échantillon. Par ext. pavé des rues, des cours, des corri-
dors intérieurs. — À couja sus lou caladoù, il a couché par
terre.
Mème dér. que Calado.
Calaï, s. m., ou Cadaï. Sorte de colle claire dont la
farine est la base. Les tisserands en oignent les fils de leur
chaine, pour leur donner plus de fermeté, les empècher de
s'érailler ou de se détordre, ce qui leur procure une sorte
d’apprèt ou de raideur.
Dér. du lat. Catena, où Cadeno, chaine, dans Cadaï, ou
de Cal, pour calus, callosité, dans Calaï.
Calaman, s. m., ou Caraman. Arètier, faitage d'une
toiture; pièce de bois qui s'étend d’une ferme à l’autre et
qui supporte les chevrons ou traverses, sur toute la longueur
du toit.
Dér. du gr. Kakéun, chaume, parce que dans l'origine
les maisons étaient couvertes en chaume ; ou de K2ov, bois.
Calamandriè, s. m. Germandrée ou Chênette, Tencrium
chamædrys, Linn. Plante de la fam. des Labiées, qui croît
de préférence sur les côteaux.
Calandra, v. Calandrer ; passer une étoffe à la calandre.
Dér. de Calandro.
Calandriè, s. m. Calendrier, almanach, livre ou table
qui contient la suite de tous les jours de l’année.
158 CAL
Dér. du lat. Calendarium, parce qu'on écrivait autrefois
en gros caractères en tête de chaque mois le mot Calendeæ,
calendes, premier jour du mois, nouvelle lune.
Calandro, s. f. Calandre, presse où machine cylindrique,
qui sert à lisser, à donner du lustre, du moiré à une étoffe.
Nodier fait dér. ce mot du gr. Kaïéovrss, rouleau, et
Roquefort de Kÿkuwèpos, cylindre.
Calandro, s. f. Grande alouette, non huppée; calandre,
Alauda calandra, Temm. Oiseau de l’ordre des Passereaux
et de la fam. des Subulirostres. C'est l'espèce qui supporte
ie mieux la captivité; elle vit longtemps, chante agréable-
ment d'une voix éclatante et répète les airs qu'on lui
apprend.
Dér. du gr. Kéhavôox, alouette.
Caléndâou, s. m. Büche de Noël; grosse bûche qu'on
met au feu pendant la veillée de la messe de minuit, à la
Noël. Les gens de la campagne lui attribuent une foule de
qualités superstitieuses. En Provence, on l'appelle Cacho-
fuèc.
Caléndäou est le titre du second poème provençal de
Frédéric Mistral : une nouvelle et magnifique épopée après
la charmante épopée de Miréïo. Le récit des amours et des
aventures du jeune et beau Caléndäou, le héros du poème,
sert de cadre aux tableaux de mœurs, aux descriptions des
vieux usages, des fêtes, des gloires de l’ancienne Pro-
vence.
Dér. de Caléndos.
Caléndos, s. f. pl. Fête de Noël; jour de la fête de Noël.
— Pér caléndos, à Noël, à fin décembre. Caléndos jalados,
Pasquos mouwiados, éspigos carados, prvb., de la gelée à
Noël, de la pluie à Pâques, promettent une riche moisson.
Dér. du lat. Calendæ, les Calendes : terme de comput
pour la division du mois chez les Romains. Les Calendes
étaient le premier jour de chaque mois; les jours qui pré-
cédaient se comptaient en ordre rétrograde. Ainsi le
34 décembre était le second jour des calendes ou avant les
calendes de janvier, secundo calendas, sous-entendu antè ;
le 30 décembre tertio calendas, le 29 quarto calendas, et
ainsi de suite en remontant jusqu’au 43e jour où commen-
çaient les ides, que l’on comptait aussi en rétrogradant
jusqu'au 5me jour, qui était le jour des Nones. La fête de
Noël se trouvait donc à peu près au milieu de cette série
des Calendes, et comme cette fête occupait plusieurs jours,
on appelait tous ces. jours-là les Calendes de janvier; et la
fête de Noël étant une des plus grandes solennités de l’année,
on l’a appelée Calendos par excellence.
Le mot lui-même en lat. Calende, vient du gr. Kat,
appeler, parce que le jour des Calendes, à Rome, on convo-
quait le peuple pour lui annoncer le nombre des jours du
mois, la nouvelle lune et quel jour tomberaient les Nones.
Calibo, s. m. Caiïllebotte, masse de lait caillé; du lait en
grumeaux qu'on obtient du petit-lait en le faisant bouillir.
On en fabrique plusieurs mets, entr'autres l’éscarassoù, qui
est une sorte de rhubarbe, et la réquiècho, recuite, sorte de
CAL
crème qu'on prépare avec du sucre et de la fleur d'orange,
et qui a quelque rapport avec la crème à la Chantilly.
Dér. de Cal, venu du lat. Coagulare.
Calibre, s. m”. Calibre, diamètre intérieur d'un tube,
comme fusil, canon, conduit de fontaine, tuyau, etc. Au
fig. constitution physique, valeur individuelle, — Quinte
calibre! quel calibre! dit-on en voyant un individu forte-
ment constitué, surtout une femme aux formes puissantes
et developpées.
Dér., dit un auteur, de l'arabe Calib, moule.
Calice, s. m. Calice, vase où l'on fait la consécration de
la messe. Il s'applique seulement dans cette acception. —
Propre coumo un calice, très-propre, très-net, comme un
calice.
Dér. du lat. Caliæ, coupe, tasse.
Calicô, s. m. Calicot, tissu ou toile de coton, moins fine
que la percale.
Emp. au fr.
Caligna, v. Courtiser ; flatter; coqueler, faire l’aimable
auprès des fefhmes; faire sa cour, faire l'amour; mugueter;
convoiter. — Caligna à cos dé poun, faire l'amour à coups
de poing.
Ce mot parait être une corruption de Galina, qui n’est
pas dans la langue, mais qui, en l’admettant, signifierait
faire le coq. Les mots fr. galant, galanterie, de Gal, ont
la même étymologie, de mème que coqueter, coquetterie,
coquet, dérivant de coq.
Calignaïre, s. m. Dim. Calignaïroù. Le galant, l'amou-
reux d’une fille, celui qui lui fait la cour.
Mème étym.
Calimas, s. m. Au pl. Calimasses. Chaleur forte et
humide; air chaud, lourd, étouffant; vapeur chaude.
Dér. du lat. Calidus, chaud.
Calin, ino, adj. Dim. Caliné, éto. Calin; flatteur; qui
fait le doucereux, qui s’insinue hypocritement dans les
bonnes grâces; patelin.
Dér. du lat. Callidus, rusé. s
Caliou, s. »m. De la cendre chaude, de la braise qui se
conserve sous les cendres; au fig. feu, verve, inspiration.
Dér. du lat. Calidus, chaud.
Calo, s. f. Abri proprement dit. — Ne s'emploie guère
qu’adverbialement au dat. à la calo, à l'abri du froid et du
vent. -
Dér. de Caloù.
Calds, s. m. Au pl. Calosses. Dim. Caloussé; péj.
Caloussas. Trognon de chou; grosse tige d’une plante légu-
mineuse. — Calès dé brus, chicot de bruyère que l'on
coupe quand on rame les vers à soie. Catès dé fidio, la tige
de nouvelle pousse des müriers, qui est verte et tendre,
mais que les vers ne mangent pas. An pas laïssa qué lous
calosses, ces vers ont bien mangé, ils n’ont laissé que le
bois de la feuille. |
On dit au fig. un calès dé fénno, une femme très-grasse.
Dér. du lat. Cawlis, tige, ou du gr. Käov, bois.
CAM
Calossos, adj. f. pl. N'a d'emploi que dans Bajanos
calossos, châtaignes sèches, qu'on ne fait cuire qu'à demi et
qu'on mange d'ordinaire avec de la salade.
Dér. du lat. Callosus, calleux, durci.
Caloto, s. f. Calotte, petit bonnet hémisphérique qui
couvre le sommet de la tête ; calotte de prêtre; taloche, tape
du plat de la main sur la tête. — Dans ce dernier sens :
Jjouga à la caloto, jouer en prenant une taloche pour enjeu;
on comprend que c’est le gagnant qui paie et le perdant qui
it.
eubsis est aussi une réunion d'habitués, qui font cercle
et causent assis en public, ou debout, sur une place, devant
un café, etc.
Un auteur fait dér. ce mot du celt. Calota : nous n'avons
pas le moyen de le vérifier: D'autres du lat. Callus,
couverture de tête, que nous ne trouvons pas, mais qui
viendrait du gr. Kaÿoætw, couvrir, voiler : à la bonne
heure !
Caloù, s. f. Dim. Calounéto; péj. Calounasso. Chaleur;
au fig. ardeur, feu, véhémence, activité. — Estre én caloù,
entrer dans la saison des amours, en parlant des animaux.
Dér. du lat. Calor, chaleur.
Calourado, s. f. Echauffaison; bouffée de chaleur. Au
fig. concupiscence, passion de l'âme.
Dér. de Caloù.
Calourén, énquo, adj.
caractère chaud et bouillant.
Caloussu, udo, adj. Dim. Caloussudé et Caloussudà ;
péj. Caloussudas. Robuste; bien membré; ragot, gros et
court; qui a de gros membres.
Dér. de Calès.
Calouta, v. Donner du plat de la main une tape sur la
tête; souflleter. — Té vas faïré calouta, tu vas recevoir une
taloche. .
Dér. de Caloto.
Calu, udo, adj. Dim. Caludé; péj. Caludas. Myope, qui
a la vue basse; presque aveugle. Par ext. se dit des moutons
où brebis atteints du vertige ou Lournis, sorte de maladie
qui leur rend la tête lourde et les fait tourner sur eux-
mêmes jusqu’à ce qu'ils tombent. Elle est occasionnée par
des vers qu'une mouche dépose dans leurs naseaux et qui,
pénétrant jusque dans les sinus frontaux, y font de grands
ravages.
Dér. du lat. Caligo, obscurcissement, venu du gr.
Kakiorw, couvrir, voiler.
Camar, ardo, adj. Dim. Camardé et Camardoù; péj.
Camardas. Camard; camus, qui a le nez plat, gros et
écrasé. Dans le peuple, on donne volontiers le surnom de
Camar par antiphrase aux gens porteurs d'un gros nez. —
Dé souiès camars, des souliers à pointe large et carrée.
Lou camar, substant. se prend pour le nez.
Son étym. est-elle dans le gr. Kapdpz, voûte, arcade, qui
a donné le lat. Camurus, tourné, courbé en dedans, parce
que les nez camards ou camus sont courbés en dedans? Ou
Chaleureux, échauffé; d'un
CAM 159
bien serait-elle tirée de Camelus, chameau, qui à le nez
très-aplati, mais qui porte aussi une bosse et a l'épine
dorsale fortement en arcade eten voûte? Les unes ont sans
doute formé les autres : tout se tient.
Camba, ado, adj. Dim. Cambadé ; péj. Cambadas. Jambé;
qui a la jambe bien faite ou de longues jambes, suivant le
qualificatif qui précède, ou mème seulement l'inflexion et
le ton. — Camba coumo un gal, qui a des jambes de coq.
Dér. de Cambo.
Cambado, s. f. Dim. Cambadéto; péj. Cambadasso.
Enjambée; gambade. — Foudra bé né dansa uno cambado,
il faudra bien essayer de cette danse, y danser une enjam-
bée.
Uno cambado, en termes d’agric. l'enjambée de terrain
que fait un ouvrier avec la houe, c’est-à-dire la largeur
qu'il peut atteindre autour de lui sans changer de place ses
jambes, qu'il est obligé d’enfouir dans la terre.
Dér. de Cambo.
Cambaïa (sé), v. Mettre ses jarretières.
Dér. de Cambo et de ïa, lier.
Cambaïè, s. f. Dim. Cambaiëiréto. Jarretière.
Mème étym.
Cambajou, s. =". Jambon, cuisse de porc salé. — Tirarén
d'aqui coumo d'un cambajoù, ce sera là notre plat de
résistance, qui doit servir pour plusieurs jours. Tiro d'iéou
coumo d'un cambajoù, il me prend pour banquier, il tire
sur moi comme si son crédit ne devait jamais s'épuiser.
Ce mot a toute l'apparence d’un dim. de Cambo, de
mème que son correspondant fr. jambon, dim. de jambe :
nous ne savons pourquoi, car c'est la cuisse et fort grosse
encore qu’il désigne. Sauvages fait la même remarque, et
cite plusieurs mots fr. ayant leurs analogues en lang.
qui offrent la même anomalie, comme : caisse, caisson,
caïsso, caïssoù ; salle, salon, salo, saloun ; saucisse, saucis-
son ; sdoucisso, sdoucissd, etc.
Cambaloto, s. f. Dim. Cambaloutéto ; péj. Cambaloutasso.
Culbute; cabriole; saut périlleux. — Faïre la cambaloto,
faire la culbute, tomber cul par dessus tête. Faïre dé
cambalotos, faire des cabrioles.
Quoique ce mot semble avoir pour racine le mot Cambo,
il est probable qu'il dér. de l’ital. Tombolata, qui a la
mème signif.; seulement le lang. en l'empruntant l’a trans-
formé de manière à lui donner une physionomie plus locale
par la métathèse de Cambo. Il est certain qu'en prenant ce
dernier pour racine du mot Cambaloto, on ne sait trop que
faire de la désinence aloto, qui ne présente aucun sens ni
aucune analogie.
Cambalouta, v. Faire la culbute; faire des cabrioles;
tomber la tête en bas. !
Cambalu, udo, adj. Qui a de longues jambes; c'est la
tournure du héron voyageant sur ses longs pieds.
Dér. de Cambo.
Cambarô, s. m. Douleur vive au poignet à laquelle sont
sujets certains artisans par le fréquent exercice de cette
160 CAM
partie du bras, ou plutôt par la reprise d’un travail de
main ou de bras dont on avait perdu l'habitude. Les
faucheurs y sont très-sujets au commencement de la saison,
parce qu'ils étaient déshabitués depuis plusieurs mois d’un
travail qui intéresse presque exclusivement les nerfs et
ligatures des poignets. On prétend, sans doute par préjugé,
qu'un bracelet ou cordon d’écarlate est le remède de cette
incommodité.
Dér. de l’ital. Gamba rolta, qui a la même signif. Pro-
bablement on a appliqué au bras un terme qui avait été
trouvé dans le principe pour une douleur de mème nature
à la jambe.
Cambéto, s. f. Petite jambe; mancheron d’un araire,
qui est surmonté et terminé par le manche où manipou.—
Faïre la cambéto, donner un croc-en-jambe.
Dé sdouto-cambéto, loc. adverb., à cloche-pied.
Dim. de Cambo.
Cambi, s. m»., ou Candou. Abonnement avec un maré-
chal pour ferrer les chevaux d’une ferme, et réparer les
outils aratoires. — Féra à cambi, ferrer par abonnement.
Dans le principe Cambi signifiait échange; c’est par un
excès d'extension de sens qu'il en est venu à ne plus signi-
fier qu'abonnement.
Dér. du lat. Cambium, échange.
Cambo, s. f. Dim. Cambéto; péj. Cambasso. Jambe,
partie du corps du genou jusqu’au pied ; tronc d'arbre, tige
de plante. — Douna las cambos à un éfan, donner la
liberté aux jambes d’un enfant, c’est-à-dire lui ôter le
maillot et le vêtir d’une robe pour la première fois. Cambo
dé pastièiro, surnom qu’on applique à un cagneux, à cause
de la ressemblance de conformation de ses jambes avec
celles d'un banc de maie-à-pétrir qui ont la même dériva-
tion. Cambo falèto, jambe à moitié paralysée, qu'on traine
ou qu’on jette en avant; celui qui est affligé de cette infir-
mité. Sémblo qu'un chi mé pisso à la cambo, phrase faite,
pour exprimer le mépris ou le peu de cas qu’on fait de
vaines paroles, ou d’une sotte fanfaronnade.
Dér. de la bass. lat. Camba, même sig., ou du gr. Kay,
courbure, jointure. En ital. Gamba.
Camboï, s. m. Cambouis, vieux oing d’une roue de
charrette, ou d'une machine, devenu noir par suite du
frottement et par le mélange des parties métalliques.
Dér. du celt., dit Honnorat. Je lui crois plutôt une
parenté naturelle avec Cambajoù , à cause de la graisse de
porc qui en est la base. — Voy. Cambajoù.
Cambovira, v. Faire la culbute; culbuter, renverser,
mettre sens dessus dessous. Au fig. trépasser.
Formé de Cambo et de Vira.
Cambra, ado, adj. Cambré; arqué; courbé; voûté,
Dér. du gr. Kapépa, voûte.
Cambrado, s. f. Dim. Cambradéto ; péj. Cambradasso.
Chambrée, en terme de magnanerie, la quantité de vers ou
de cocons compris dans une magnanerie. — Faire uno
cambrado, élever des vers à soie; ména la cambrado, diri-
CAM
ger leur éducation. Manqua sa cambrado, ne pas réussir
sa chambrée.
Dér. de Cambro.
Cambrioù, s. m. Dim. Cambriouné. Petite chambre;
chambrette ; cabinet.
Dim. de Cambro.
Cambro, s. f. Dim. Cambréto, cambriou ; péj. Cambrasso.
Chambre; plus particulièrement, appartement où l'on
couche. — Mounta uno cambro, meubler une chambre
pour des nouveaux mariés.
La eambro, la chambre des députés. Acception nouvelle
prise du fr. et introduite dans le langage politique.
Dér. du lat. Camera, même sign., ou du gr. Kaydpæ,
vote.
Cambroul, s. m. Échauboulure, éruption de boutons,
efflorescence de l'épiderme, maladie commune aux enfants.
Caméld, s. m. Camelot, grosse étoffe de laine, originaire
du Levant, où elle était tissée de poils de chameau ; ce qui
lui a valu son nom.
Dér. du gr. Kaurmlorf, peau de chameau.
Camèou, s. m. Chameau, Camelus bactrianus, Linn.
Mammifère de la fam. des Ruminants; il porte deux bosses
sur le dos. Au fig. un grand nigaud, badaud; une grande
femme mal charpentée et sans grâce. — Les armoiries de
Béziers sont un chameau. Des malins lui ont affecté pour
devise : Sèn foço, nous sommes fort nombreux.
Faïre lou camèou, se courber, se voûter; faire le dos de
chameau.
Dér. du lat. Camelus, ou du gr. Kéurmhos, même
sign.
Cami, s. m. Dim. Caminé. Chemin, route, voie, sentier.
— Cam méssadiè, chemin qui conduit à la messe, à
l'église. Cam das éndéoutas, chemin des débiteurs : chemin
de traverse, mauvais chemin, plus long que la voie directe.
Tout cami méno én vilo, prvb., tout chemin conduit à Rome.
Es à la fin dé soun cami, il est à la fin de sa course.
Plusieurs étymologies ont été proposées : d’abord, du
cell, Cam, marche; ou d’un mot égyptien Cham ou Chem,
signifiant incendie, feu; parce que les premières voies
auraient été frayées par le feu; ou de l’ancien gothique
Uamen, Quiman, ou du teuton Komen, avec le sens de
chemin; ou de l'allemand Kommen, aller et venir; enfin,
selon Ménage, de Caminare, tiré de Campinare, dimin. de
Campare, formé du gr. Kay#, jambe. En ital. Cammino;
en esp. Camino; en portug. Caminho; en cat. Cam. La
vraie source parait être dans la première indication «on
trouve en effet Caman en kymri, Cewm en gaël, Kamen en
armoricain : Kam y signifie Pas, comme le Kymri Camre;
dont l'anglais a fait to come, venir.
Camina, v. Cheminer, faire route, marcher, aller, faire
son chemin. — Camino, tron dé l'air! as pôou qué la tèro
té manque? fais ton chemin, morbleu! tu as peur que la
terre te manque? C’est une phrase faite qu'on accuse les
provençaux d'adresser aux personnes qui leur demandent
CAM
leur route. Ce ne peut être qu'une calomnie motivée par
leur brusquerie native : si elle a quelque chose de vrai, ce
défaut s’efface chaque jour par les progrès de la civilisation.
Faï bon camina lou mati, il fait bon marcher le matin.
Camino, camino! marche, marche : sorte d’interjection,
pour faire avancer, ou pour chasser quelqu'un.
Dér. de Cami.
Caminaïre, s. m. Cantonnier, ouvrier employé à l’entre-
tien où à la réparation des chemins; marcheur.
Dér. de Cami.
Caminarèl, èlo, adj. Voyageur, qui fait beaucoup de
Chemin; marcheur, qui marche beaucoup, longtemps.
Dér. de Cami.
Caminolo, s. f., ou Caréiroù. Petit sentier; chemin de
travèrse; chemin rural.
Dim. de Cami.
Camisar, ardo, adj. Qui est en chemise; qui va en
chemise.
Lous Camisards, les Camisards, bandes armées de calvi-
nistes cévenols dans la guerre religieuse du commencement
du XVIlmwe siècle. Ce nom leur fut donné de ce qu'ils por-
taient sur leurs habits une chemise, camiso, ou_un sarrau
- où blouse de toile blanche.
Camiso, s. f. Dim. Camiséto. Chemise, vêtement de
linge avec corps et manches, qui se porte sur la peau. —
En cor dé camiso, sans autre vêtement que la chemise et le
pantalon, ou la jupe. En mancho dé camiso, sans habit, de
manière à montrer les manches de la chemise. La car és pu
prèchi qué la camiso, où és pu près la car qué la camiso, la
chair est plus près du corps que la chemise : cette phrase
est employée pour exprimer qu'on porte plus d'intérêt à
soi-même ou à sa famille qu'aux étrangers.
Dér. de la bass. lat. Camisia. -
Cammas, s. m. Hameat, manoir principal d’un domaine.
Dér. de Cap, chef, tête, et de Mas, métairie.
Camouflé, s. m. Camouflet, insulte, affront; mystifica-
tion. Dans l’origine, cette sorte d'affront consistait à souffler,
au nez de quelqu'un qui dormait, de la fumée avec une
paille, un chalumeau ou un cornet de papier allumé.
Dér. du lat. Calamus et Flatus, chalumeau et souffle,
Calamo flatus.
Campagnar, ardo, adj. cit. qui habite la
campagne. On dit mieux Péisan.
Campagnè, s. m. Sonneur de cloches, celui qui est
chargé de sonner les cloches.
Dér. de Campano.
Campagno, s. f. Campagne, grande étendue de pays;
lieux en dehors de la ville où sont les champs, cultivés où
non cultivés; expédition militaire et sa durée. — Ana én
campagno, faire un voyage.
Dér. du lat. Campus, champ.
Campanéja, v. frég. Sonner les eloches; brimbaler les
cloches; sonner à coups redoublés.
Dér. de Campano.
CAN 161
Campanéjado, s. f. Contenu d’un clayon; plein un
clayon.
Dér. de Campanèje.
Campanèje, s. f. ou Lévadoü. Clayon, sorte de panier
plat, plus long que large, avec un étroit rebord, formé et
tressé d'éclisses en bois refendu. On l'emploie à faire sécher
les fruits au soleil, pour transporter le linge sec du lavoir,
et pour élever les vers à soie dans le premier âge.
Campanéto, s. f., ou Couréjolo. Liseron ou volubilis,
Convolvulus arvensis, Linn. Plante de la fam. des Convol-
vulacées ; sa fleur blanche ressemble à une clochette, d'où
Jui vient son nom. — Voy. Couréjolo.
Campano, s. f. Dim. Campanéto. Cloche; clochette,
sonnette. — Bé dé campans, se disait autrefois d'une pro-
priété cléricale.
Dér. du lat. Campana, nom pris de la contrée d'Italie
où les premières cloches furent connues, et dont saint Pau-
lin, évèque de Nole, en Campanie, fut le premier à intro-
duire l'usage dans les églises, en 400.
Campéja, v. Poursuivre, courir après quelqu'un; chas-
ser, dissiper. — La fan lou campéjo, la faim, la misère le
talonne. — L'aï campéja tout lou jour, je l'ai poursuivi
toute la journée. — Lou son té campéjo, le sommeil t'ac-
cable, te poursuit.
Dér. du lat. Campus et Agere.
Campèstre, s. m. Terrain inculte, sauvage; propriété de
peu de valeur et de mauvaise culture; pays montueux.
Dér. du lat. Campestris, champètre.
Camus, uso, adj. Camus, camard, qui a le nez court et
aplati. Se dit mieux Camar. { V. c. m.)—Qu'a un pan dé nas
n'és pas camus, prvb., qui par une inversion du physique
au moral, du propre au figuré, s'applique ironiquement
à quelqu'un qui, recevant une juste mystification, échouant
dans une entreprise, n’en ayant qu'un pied-de-nez, voudrait
encore se faire passer pour habile ou pour avoir réussi. —
Voy. Camar, mème étym.
Can, s. f. Plaine sur une haute montagne. — Avec Ja
même signif. et sans toutefois que cette différence puisse
être expliquée, si ce n’est par un usage local, on dit pour
certaines désignations /a chan, en faisant sentir le ch, pour
la can, synon. Ainsi la chan ddou Tor, plaine sur la mon-
tagne du Taur (Ardèche), et Za can dé l'Éspitalé, plaine
d'une montagne de la Lozère, n. pr. de lieu, ayant appar-
tenu aux chevaliers hospitaliers de St-Jean de Jérusalem,
qui possédaient plusieurs commanderies dans nos pays.
Il n’est pas douteux que ce monosyllabe Can pourrait
être une altération orthographique dérivant soit du latin
campus, soit de cantus, selon qu'il serait orné à sa der-
nière lettre de la consonne indicative p ou t; mais il est à
remarquer que le mot n'est reçu, dans notre dialecte, qu’au
féminin, dans l’acception qui précède, avec la flexion du
C dur, qu'il a retenue du latin; il n'existe pas au masculin
isolé, avec aucune des flexions du C. Seulement il entre
volontiers en composition dans les deux sens de champ ou
162 CAN
de chant, et alors, bien qu’il préfère le chuintement du Ch,
il admet aussi l’intonation latine, au moins dans le parler
gounèl; car le raïdou n'emploie partout que le ch. Le fr.
conserve au contraire, pour les deux emplois, l'adoucisse-
ment chuintant. — Voy. Chamboù, Canta, etc., etc.
L'observation est importante au point de vue de notre
purisme lexicographique, qui ne doit donner droit de cité
qu'aux mots véritablement reconnus pur-sang, el proscrire
le mélange franchiman et fantaisiste, qui ne nous appartient
pas. Notre nomenclature a ses rigueurs ; c’est le respect de
la langue qui les a inspirées et dictées. La langue avait ses
raisons pour choisir ou adopter telles ou telles formes plutôt
que d’autres, et nous nous inclinons toujours devant elle;
ce que le sentiment général et l'usage ont consacré, nous
parait avoir plus de cachet, plus de droit à être maintenu
que les prétendus perfectionnements de notre vieil et bon
idiome cévenol mis en vogue par les novateurs. — Voy.
Franchiman.
Dér. du lat. Campus.
Cana, ». Mesurer à la canne; mesurer en général. Ce
terme s'emploie principalement au jeu de boules, pour
mesurer la distance des boules des joueurs au but.
Dér. de Cano.
Canabas, s. m. Canevas, grosse toile, toile de chanvre.
Dér. du lat. Cannabis, chanvre.
Canabassariè, s. f. Toilerie, toute sorte de marchandise
de toile, ou de tissu de chanvre.
La Canabassariè était le nom d’une rue à Alais, dans les
environs du Marché, le quartier des Canabassiers, qui
représentaient dans les corporations du moyen-âge les
commerces de chanvrier, de filassier et de toilier; là sans
doute se faisait l’étalage de ces marchandises.
Canabassiè, s. m. Tisserand, ou marchand de grosse
toile; marchand chanvrier-filassier.
Dér. de Canabas.
Canabièïro, s. f. Chènevière, champ où croit, où est
semé le chanvre.
Le nom de la fameuse rue de Marseille, la Canebière, tire
de là son origine.
Dér. du lat. Cannabis, chanvre, ou du gr. Kévaoc,
canne, roseau.
Canaboü, s. m.
chanvre.
Mème étym.
Canaïo, s. f. Canaille, nom collectif pour désigner tous
les gens sans aveu, sans honneur, ni probité, ni délicatesse;
souvent aussi, en l’adoucissant, pour troupe d’enfants
brayants, tapageurs.
Dér. du lat. Canis, c’est-à-dire race de chiens; ou plus
probablement du lat. Canalicolæ, espèce de lazaroni de
Rome qui se tenaient sur les bords d’un des canaux de
cette ville.
Canäou, s. m., ou mieux Acanâou. Cheneau, conduit
des eaux d’un toit de maison: tronc d'arbre creusé pour
Chènevis, semence ou graine de
CAN
conduire des eaux d'irrigation. Ce mot dans notre dialecte
ne correspond nullement au mot fr. Canal, bien que tous
deux aient la mème étym. dans le lat. Canalis; mais quand
on parle, par ext., du canal du Languedoc ou de tout autre,
on francise le mot et l’on dit : ou canal dâou Léngadd,
lou canal das pras dé Sén-Jan, ou à Alais simplement, lou
Canal; et l'on s'entend. — Voy. Acandou.
Canar, s. m. Canard, Anas, Linn. Oiseau domestique ou
sauvage, de l’ordre des Palmipèdes, dont les espêces et les
variétés sont nombreuses. — Tira as canars, Ôtre très-peu
vêtu par un temps froid, grelotter de froid. Cette locution
provient sans doute de la chasse aux canards, qui se fait à
l'affût et dans la saison la plus rigoureuse de l’année : quand
on est peu vêtu en hiver on grelotte, comme lorsqu'on est
à l'affût des canards.
Canar, s. #. Chien caniche, barbet.
Dans la première acception, ilest possible que Canar soit
une onomatopée tirée du cri de cet oiseau, Can, Can,
comme quelques-uns l’ont voulu. Il se peut aussi que son
nom vienne du lat. Anas, qui semble cependant un peu
bien éloigné; mais, dans. le second sens, la dériv. du lat.
Canis, chien, est très-indiquée.
Canarda, v. Canarder, tirer au fusil un animal ou un
homme ; le tirer comme un canard.
Dér. de Canar.
Canari, s. m. Serin des Canaries, Fringilla canaria,
oiseau de l'ordre des Passereaux, remarquable par son beau
plumage jaune, par sa facilité à apprendre des airs, très-
susceptible d’attachement et d'éducation.
Canastèl, s. m., ou Canastèlo, s. f. Dim. Canastèlé,
Canastèléto, Canastèloù. Corbeille, panier d’osier ou d’é-
clisses, de forme ronde ou oblongue, moins profond que
large ordinairement; corbillon, petite corbeille, suivant les
dimensions que suivent les dim.
Dér. du lat. Canistrum, ou du gr. Kévaotoov, Vase en
forme de corbeille, fait de Kévns, corbeille.
Cancagnè, èiro, adj. Cancanier; médisant; faiseur de
cancans.
Cancan, s. m. Cancan, commérage; vacarme, tapage.—
Faïre gran cancan, faire grand bruit, grand étalage.
Dér. du lat. Quamquèm, quoique, parce que, formule de
début de bien des discours quand on parlait latin à l’école:
Candéiè, s. m. Dim. Candéièiré. Chandelier, flambeau,
ustensile destiné à supporter les chandelles, bougies, etc:;
fabricant de chandelles, qui fait ou vend des chandelles
Dér. de Candèlo.
Candéïèiro, s. m. Fabrique de chandelles.
Candèl, s. m. Peloton de fil, de soie.
Corruption de Cap dèl, dim. de Cap, petite tête.
Candéla, v. Dévider. mettre en peloton.
Dér. de Candël.
Candèléto, s. f., ou Aoubre-dré. Arbre droit, arbre
fourché. — Faïre la candèléto, faire l'arbre droit ou l'arbre
fourché : jeu d'enfant qui consiste à se tenir en équilibre
Te —
CAN
sur la tête, les pieds en l'air, droit comme une chandelle,
dont Candèléto est le dimin. En espag. on dit de même
Hazer la candelilla. -
Candèlo, s. f. Dim. Candèléto. Chandelle, petit cylindre
de suif dont une mèche de fil de coton occupe le centre
d'an bout à l’autre; stalactite qu'on trouve dans les caver-
nes et les souterrains en forme de cierges, ou celles formées
par la glace suspendues l'hiver au bord des endroits par où
l'eau coule.
Dér. du lat. Candela, formé de Candeo, être blanc de feu.
Candélouso (Nosto-Damo-la), s. f. Chandeleur, fête de
la Purification de la Sainte-Vierge, qui est célébrée le
2 février. Ce nom lui vient de la bénédiction des cierges
qui a lieu ce jour-là. — Quan la Candélouso lusèrno,
cranto jours après hivèrno, prvb., quand le soleil brille le
jour de la Chandeleur, l'hiver dure encore quarante jours.
On prétend que l'ours rentre dans sa tanière s’il fait beau
ce jour-là. Le prvb. lat. dit aussi :
Si sol claruerilt Marid Purificante,
Majus friqus erit poste quam antè.
Candi, s. f. Chanvre, Cannabis sativa, Linn. Plante de
. Ja famille des Urticées, que l'on cultive partout pour en
retirer la filasse connue sous le même nom. Il se faisait
autrefois un assez grand commerce de chanvre dans notre
pays, cette industrie a beaucoup perdu de son importance.
- Aï déma candi! l'aïgo l'émméno! locution prvb., qui
n'a pu passer dans le langage et devenir le type d’une
exclamation de détresse, qu’à cause du prix qui s’attachait
à la culture et à la récolte du chanvre. La phrase doit avoir
une origine anecdotique. Un individu avait mis du chanvre
à rouir dans un ruisseau; un orage grossit le ruisseau,
l'eau entraina le chanvre, et notre homme, voyant son bien
se perdre, de pousser piteusement cette exclamation. Quel-
qu'un l’entendit, la répéta en racontant la scène, elle devint
le cri de désappointement, d'alarme, de déploration pour
toute autre chose que pour du chanvre emporté : trope,
figure, dicton pittoresque et populaire, qui a mainte appli-
cation. Quand une position critique se complique et s'ag-
grave, que les choses se gâtent, s'en vont à vau-l'eau; que
la débâcle arrive, commence; que miséricorde se perd;
qu'un danger menace, qu’une catastrophe est imminente;
que tout annonce une ruine inévitable : c’est ce que signifie
et le cas de crier : Aï dé ma candi! l'aïgo l’'émméno!
Dér. du lat. Cannabis, reproduisant le gr. Kévvaéx,
chanvre.
Candia, s. m., n. pr. de lieu et de personne. Candiac,
sur la rive gauche du Vistre, ancien château et seigneurie
dans le diocèse de Nimes, village du Gard, cité dans le
dénombrement de la sénéchaussée de 4394 sous le nom de
Candiacum.
Candiargue, s. m., n. pr. de lieu. Candillargues, com-
mune et canton de l'Hérault, à dix-sept kilomètres de
Montpellier, situé sur la rive septentrionale de l'étang de
CAN 163
Maguelonne. Dans un acte de donation de 960, il en est
parlé : dono villam indominicatam quam vocant Candiani-
cas. En 985, son nom est un peu différent; un titre porte :
in suburbio castri substantionensis, in terminio de villa
Candianicus, etc., et in terminis de Montepestellario. Depuis,
la forme Candianicæ a été seule employée; elle est devenue
par les procédés ordinaires Candiargue, Candillargues. —
Voy. Argue.
Ce n'est pas tout à fait à cause de l'importance, du reste
fort médiocre, des deux localités dont les noms précèdent,
que leur étymologie mérite d'être particulièrement étudiée;
mais bien à cause des variétés intéressantes qui se sont
attachées à cette famille nombreuse d'appellations locales,
et qui font ressortir ce que nous disons de la formation et
de la composition des noms propres.
D'abord l'élément constitutif du mot, ce qui fait sa
signification, le radical, pour Candia et Candiargue, est
évidemment le même que celui de Cande, de Candé, de
Candat, de Candan, de Candaillac. Cande, qui parait être
l'expression la plus simple, est le nom de la ville de Tou-
raine où mourut saint Martin, le grand apôtre des Gaules :
la latinité du moyen-âge l'appelle Condate, Condate Turo-
num, Condatensis vicus. Expilly, Diction. géog., cite en
France trente-un hameaux, villages ou villes du nom de
Condé, trois Condes, onze Condat, et ils sont rendus en :
latin, sans exception, par Condate, ou par les variantes
Condatum, Condœum, Condetum, Condata, qui ne sont que
des accords de genre.
Ainsi, devant la traduction, point de différence entre
Cande et Conde; ils sont égaux : la même identité existe
au fond. En effet, Kant, en armoricain, signifie : coin,
angle; en gallois, Kand, Kind, Kend, Cond, confluent,
rencontre de deux rivières, embouchure traçant un angle ;
de même que le mot celt. Kon, .Cuneus, lat., veut dire :
coin, encoignure, angle. Du premier nous avons fait Cantèl,
Cantoù, peut-être Cantal, et leurs composés; du second
Cougna, Cougné, mème Couga et autres; { V.c. m.), par le
changement ordinaire en lang. de on en ou, o en w, ou
peut-être en « lat. prononcé ou, de cuneus. Nous verrons
comment tous ces noms à base identique répondent à la
même idée. Voilà pour la première syllabe, la plus certaine
affinité établie.
Une fois la racine étymologique dégagée, le reste est
affaire de terminaisons. On sait que le gaulois était riche
en suffixes : pour faire des noms d'hommes ou de lieux,
pour adjectiver un substantif qui désignait l'objet, et
marquer la propriété, la provenance, la possession, l’état,
la qualité, les attributs, la configuration de la chose, il
employait des formules précises, qu'il redoublait même
quelquefois pour l’euphonie, ou pour leur donner plus de
force; et il les variait avec une merveilleuse fécondité, La
langue latine vint ensuite exercer son génie pour s’appro-
prier les dénominations existantes. À son tour le roman les
modifia, et enfin le languedocien moderne s’est emparé de
D
164 CAN
toutes ces altérations, en conservant tantôt leur tournure
primitive, en la remaniant tantôt à sa manière.
Essayons, pour arriver aux deux mots qui nous occu-
pent, de remonter cette longue échelle de variantes. Nous
avons parlé des suffixes a, ac, argue, au; dans l'espèce il
en apparait de nouveaux sur la plus ancienne forme,
Cande, Conde, Condate. Par les exemples on arrive aux
plus claires démonstrations. La grammaire celtique de
Zeuss en fournit de nombreux : dia, deus, dia-de, divinus;
doin, homo, doin-de, humanus ; dal, forum, dal-de, foren-
sis; Deo, Vita, beo-de, vivus; bi, pix, bi-de, piceus; nem,
cœlum, nem-de, cœleslis; dam, cervus, dam-de, cervinus;
trab, traba, trab-da, trabeatus; rig, rex, rig-da, regius ;
fag, fagus, fag-de, faginus; — cis, fiscus, census, cis-te,
censorius; mis, mensis, mise, menstruus; ros, TOSa, ros-
te, rosarium ; brot, momentum, ambrot-te, momentaneum ;
gut, VOX, gut-te, vocalis; — briv, pons, briv-ate, pontilis ;
dun, castrum, arx, dun-ate, castrensis; #aes, Campus,
mMai-ate, campestris ; nant, vallis, nant-uate, vallestris; etc.,
etc. Par où, il résulte que de = da = te — ate, finales
adjectives, sont identiques.
De plus, si l’on veut remarquer que de et di sont deux
syllabes fort sujettes à se confondre, ou, comme dit Zeuss,
qui alternent souvent ensemble; — nous les avons en effet
retrouvées dans le gallois ; — si l’on tient compte de l’intro-
duction du génitif en à, imposé par le latin au celtique,
dans les dénominations locales, et des procédés au moyen
desquels la désinence gauloise ak, ek, était conservée à la
condition de s’adjoindre la finale caractéristique latine en
us, a, um; il sera facile de constater une parenté très-
rapprochée entre Cande, Candate, et notre Candia, Can-
di-ac-um, Candiac. L’assimilation avec Candiargue, Can-
dianicus, Candianicæ, Candillargues, ne sera pas moins
évidente. .
Cependant les termes de l'équation que nous venons de
poser sur les désinences adjectives se sont multipliés. La
finale gauloise primitive ac = ec — de = te = ate, s'est
modifiée, combinée tantôt avec elle-même, tantôt avec les
suffixes latins; par suite d’influences agissant sur les orga-
nes de la voix et de la prononciation, selon les climats;
suivant le mélange et le contact de divers idiomes, elle a
pris les formes les plus bizarres, elle admet les variantes les
plus disparates en apparence. Si bien qu’elle se trouve
aujourd'hui représentée par a, as, at, argue, e, ey, ergue,
orgue, ex, ies, eu, ieu, y, et une infinité d’autres suffixes
simples, sans compter ceux produits par redoublement, par
l'adjonction du latin ou du tudesque. Ici la raison de ces
variétés est sensible.
Le radical Kant — Kon s'étant adjectivé pour faire un
nom de lieu, pour désigner une propriété d’après sa posi-
on, a donné Kan-de — Kon-de — Kon-ak — Kon-ek, et
les autres, latinisés en Condate, Condatum, Condetum, tra-
duits par Cuneatus, angulaire, pour signifier un lieu, un
terrain, une maison, Mansio, Villa, Predium, Castrum,
CAN
situés dans un angle, formant un angle, au confluent de
deux rivières, dessiné par la jonction, la rencontre de deux
cours d’eau, le plus souvent, ou encore et par extension,
dans un angle terrestre formé par des vallées ou par tout
autre accident de terrain remarquable. On comprend pour-
quoi le radical Kant, Kon, se trouve dans tant de noms de
lieux et est devenu si commun en France : aussi toutes les
localités que les anciens titres désignent par le mot Condate,
sont-elles toutes posées au confluent de deux rivières.
Expilly le remarque à propos de Condé et Condat, en disant
« que ces noms sont synonymes et signifient la mème chose
que confluent ou jonction de rivière.» Evidemment, Candia
sur le Vistre, et Candiargue sur l'étang de Maguelonne, et
formant angle, n’ont pas d'autre raison dénominative : ils
la prennent dans leur situation, comme leurs analogues :
Candes, Condate, Condata, Touraine, Indre-et-Loire;
Candé, Condetum, Loir-et-Cher, Maine-et-Loire, Charente-
Inférieure, Vienne; Candilly, Oise; Condac, Condate ad
Carantonum, Charente; Condac, Vienne; Condal, Saône-et-
Loire; Condat, Condato, Condatum, Cundatum, Cundadum,
Lot, Corrèze, Lot-et-Garonne, Puy-de-Dôme, Haute-Vienne,
Cantal, Dordogne; Candas, Aveyron; 27 Condé, Condate,
Condatum, Condœum, Condetum, Condatus, Condete, Cone-
dacus, Conadacus, Condeïum, par toute la France; Condes,
Tarn, Jura, Haute-Marne; Condesaygues, Lot-et-Garonne ;
Coñdel, Calvados, Tarn; Condette, Pas-de-Calais; Condillag,
Drôme; Condeau, Orne; Condrieu, Conderate, Condriacum,
Rhône.
Ces analogies pourraient se multiplier ; adjoignons-y
seulement trois appellations qui nous touchent : Coundamino,
terre autrefois seigneuriale, désignation très-répandue don-
née à la terre principale d’un domaine, comme on dirait :
le coin du seigneur, du maître. L'élément Conde, Conda,
lui donne cette signification, qui est complétée par l’abré-
viation euphonique de Domini, au gén.; le mot est ensuite
devenu le nom pr. d'homme La Condamine. — Voy. Coun-
damino.
IL faut encore remarquer deux noms de hameaux dans
le Gard, Canduzorgue, dans la commune de Saint-Roman-
de-Codière, et Conduzorgue, Condusonice, commune de
Montdidier, qui peuvent être conférés à Condansargue,
Condansanicæ, dans le territoire du Caylar. Les variantes
sur le radical ne font que confirmer ce que nous avons
établi sur l'identité de Cande et Conde : mème configuration
dans les mots, mème signification; la voyelle w, qui parait
au milieu du nom, nous l'avons également trouvée danses
traductions de Condé et Condat, dans la bass. lat.
Le même thème primitif, dans sa pureté, suivant que
l'influence gauloise ou romaine a agi sur la dénomination,
se montre encore dans Lou Cun, Le Cun, hameau de la
commune de Pommiers, Cuneus latin, et dans Coundou,
Connaux, commune de Bagnols, où l'élément celtique Kon-
ak, est plus apparent.
Les termes de comparaison augmenteraient si l'on voulait
CAN
suivre la racine dans ses transformations : Condate, ancien
nom de ville dans la Gaule entre Nevirum et Brivodurum,
est aujourd’hui Cosne, Nièvre; Condate, vers le confluent de
l'Ille dans la Dordogne, se nomme Condat, près Libourne,
Gironde; Cognac, dans la Charente, dans la Haute-
Vienne ; tous sont appelés au moyen-àge Condate. On voit
d’un coup-d'œil la nouvelle série d’appellations locales qu'a
fait naître le premier radical : Cognan, Cognat, Cogne,
Cogners, Cognes, Cognières, Cognin, Cogny, Coin, le Coin,
Coinces, Coinches, Coincy, Coing, Coigne, Coigneux, Coi-
gnières, Coigny, etc. Concordance de racine, variété ethni-
que des terminaisons, qui se rencontrent dans bien des noms
communs et des noms propres, en lang. et en fr. de même
origine, dont le sens se rattache par là à une idée de coin,
d'angle, d'encoignure, de confluent.
Mais si ces déductions sont vraies, de tous ces rappro-
chements il faudra conclure au moins, sans trop de témé-
rité, que les noms ainsi formés à désinence en argue, ou
orgue, ne représentent nullement des noms historiques
complétés par le lat. ager, mais des localités que leur situa-
tion, leur emplacement seul a fait dénommer.
Candou, s. m. — Voy. Cambi.
Cané, s. m., n. pr. de lieu, Canet.
Ce mot est plutôt un nom collectif qu’un dim. Il vient
de la bass. lat. Cannetum, cannaie, comme le suivant, lieu
abondant en roseaux et: même en joncs, la canne des ter-
rains bas et humides, riassos.
Canéiè, s. m. Lieu planté de roseaux, qu'on coupe tous
les ans : cannaie.
Dér. du lat. Canna, roseau, dont le rad. celt. est Can,
même sign., auquel s'ajoute le suffixe de collectivité 2,
similaire à tètro, édo, et autres, répondant au fr. aie, ay, ei,
eiæ, etc.; dans le bas lat. Cannetum.
Canéla, v. Canneler ; en parlant du blé, se former en
tuyau, monter en tige.
Dér. du lat. Canna, roseau.
Canèlo, s. f. Roseau, plante aquatique. Se dit aussi du
tuyau de bois où même de cuivre qu’on ajuste à un ton-
neau, à une cuve, pour en tirer la liqueur, la faire écouler :
robinet, cannelle. Mais on dit mieux en bon lang. Enquo,
dans ce dernier sens. — V. c. m.
Dér. du lat. Canna, roseau.
Canélu, udo, adj. Cannelé; creux intérieurement; qui
forme le tube.
Dér. du lat. Canna. ‘
-Canfigoüs ou Canfiégoùs, s. #., n. pr. de lieu, dans la
commune de Soustelle, arrondissement d'Alais. — Sauvages,
prenant la seconde version, qui est cependant peu usitée,
donne à ce mot la sign. de terre brülée; champ où le feua
passé et a tout embrasé : il le décompose sans doute en
Can pour Camp, et Fiégoùs pour Fuéëgoùs, de Fuec, ancien
mot, feu. On pourrait peut-être aussi le faire venir de
Campus fici, champ du figuier, lieu planté de figuiers, qui
d’ailleurs se rapproche davantage de la première appella-
CAN 165
tion ; mais l'autorité d'un maitre tel que Sauvages, qui
possédait si bien la connaissance de la langue et le senti-
ment des étymologies, mérite la plus grande considération.
Cangard, s. m. Blé de Crimée; par extension tout blé
étranger qui arrive par mer et dont le peuple fait peu de
cas.
Ce mot est la corruption de Tangarok ou Taganrok, ville
de la Crimée.
Canio, s. f. Chenille. — Ce mot ne s'emploie que pour
désigner ces sortes de chenilles microscopiques qui arrivent
en masse et détruisent certains végétaux et la feuillaison
des arbres, et qui meurent sans transformation, au bout de
quelques jours : ce sont à proprement parler des vers à
pattes. Par là on les distingue de l'Érugo, qui est la che-
nille ordinaire et qui passe par les mêmes métamorphoses
que le ver à soie. Il est une sorte de Canïo qui s'attaque à
la luzerne et en dissèque chaque feuille sans en altérer les
fibres les plus tenues, de manière à la réduire en dentelle.
Ces chenilles s’abattent en telle quantité qu'en une matinée
un champ de luzerne est quelquefois entièrement dévoré.
Après trois jours de vie, cet insecte se dirige en colonne
serrée vers le cours d'eau le plus voisin, qu'il devine avec
un instinct merveilleux, et où il termine sa courte et mal-
faisante existence en se noyant; il en périt aussi beaucoup
en chemin, et leurs cadavres forment une trace noire dont
on distingue à peine les individus.
Traduit du fr. Chenille.
Canisso, s. f. Petite et même espèce de roseaux de
marais; le clayon lui-mème, fait de ces roseaux, qui sert
de plancher aux tables de vers à soie. Ces claies en treillis
sont préférables à des planches pour cet usage, parce qu'elles
laissent mieux pénétrer et circuler l'air dans leurs inters-
tices, et qu'ainsi la litière mieux aérée est préservée de
toute fermentation. Lorsque les vers sont jeunes et qu'ils
pourraient passer à travers le clayon, on le tapisse d’un
papier gris qui est connu sous le nom de papier-magna.
Le fr. nous a emprunté ce mot; mais comme chaque
langue a sa pelite vanité, il a fait comme le lang., il a défi-
guré son emprunt, qu'il nomme Cunis. Quand je dis le fr.,
je ne dis pas celui de l'Académie et des savants, mais bien
celui de l’école séricicole, qui recherche et fabrique au
besoin tous les techniques à son usage.
Dér. du lat. Canna, dont il est un dim.
Canisso, s. m. Petit homme chevelu et crèpu. C'est un
surnom fort répandu.
Corr. du fr. Caniche.
Cano, s. f. Canne, bâton; jonc, pour s'appuyer en mar-
chant.
Dér. du lat. Canna, roseau.
Cano, s. f. Cane, femelle du canard, Anas, Linn.
Cano, s. f. Canne, mesure de longueur. Elle varie beau-
coup suivant les pays. La canne d’Alais est de huit pans,
elle vaut 1m 989; la canne carrée vaut 3" 956 mil.
carrés.
166 CAN
Mesure de capacité pour le vin : l'ancienne canne était
de 18 litres, la nouvelle en vaut 20.
Mesure de capacité pour l'huile : l’ancienne canne valait
9 litres 52, la nouvelle vaut un décalitre.
Cano est souvent pris génériquement pour mesure de
toute espèce. — Es pas dé cano, c’est indubitable, c'est une
assertion qui n'a pas besoin de preuve ; une dimension qui
peut se passer d’une mesure exacte.
Encore une de ces locutions dont le système métrique est
en grand train d’oblitérer l'origine. La cano était une
mesure de contenance, pour l'huile surtout, à très-peu près
le décalitre actuel; mais du mème nom, nous venons de le
voir, il y avait aussi une mesure de longueur, qui équiva-
lait à la toise; et l’on disait Cana comme toiser et aujour-
d'hui métrer. C'est de cette dernière mesure seulement qu'il
est ici question. Notre locution s’usitait surtout au jeu de
boules ou à d’autres jeux analogues que les enfants avaient
en grand nombre : lors donc qu'il s'agissait de décider si la
boule, la gobille ou le palet du joueur étaient plus près du
but que celui d’un autre, on disait en examinant des yeux
d’abord : Es dé cano, ou bien : Es pas dé cano, Selon que
le cas était ou paraissait douteux ou non. Es pas dé cano
signifiait par conséquent : il n’y a pas à mesurer, il n’est
pas besoin de mesurer pour décider ce qui se voit, qu'il y
en a de reste. Et cela se dit toujours de ce qui est évident,
hors de discussion, incontestable; et par extension ou
exagération, de tout individu, de toute chose dont les qua-
lités ou les défauts atteignent largement ou dépassent mème
la mesure, sans que toutefois ni Cano, ni mêtre aient rien
à mesurer en tout ceci.
Cano, s. f. Chancissure blanche, espèce de moisissure
qui surnage en paillettes blanches sur le vin mal bouché,
ou lorsque la bouteille a été mal égouttée au lavage. C’est
ce qui sort le premier d’une bouteille et le dernier d’un
tonneau. On dit au fig. és à las canos, il est à sec, il est à
son dernier sou.
Dér. du lat. Canus, blanc.
Canobas, s. m. Mauve sauvage, alcée.
Canoû, s. m. Dim. Canouné. Canon, longue pièce
d'artillerie, canon de fusil, de pistolet.
Dér. du lat Canna.
Canoû, s. m. Tuyau; tube; conduit ; plumes en tuyau
d’un jeune oiseau : ce sont les grosses plumes des ailes qui
poussent les premières, tandis que celles du corps ne sont
encore qu’un duvet. Ce mot s'applique en général à beau-
coup de choses en forme de tuyau : Lou canoù dé la chimi-
nèïo, le tuyau de la cheminée; Lou canoù d’uno fon, le
tuyau, le robinet d’une fontaine, d’uno bouto, la canelle
d’un tonneau; un canoù dé ploumo, un tuyau de plume.
Dér. du lat. Canna.
Canouna, v. n. Monter en tuyau, comme toutes les céréa-
les, les oignons et autres plantes bulbeuses; être en forme
de tuyau. Dans le sens actif, canonner, battre à coups de
canon; il est reçu, mais par imitation du fr.
CAN
Canounado, s. f. Canonnade, décharge de coups de
canon; conduite d'une fontaine soit en bois, en fonte ou en
poterie, lorsqu'elle est dirigée sous terre : quand elle est à
ciel découvert, on emploie le mot Acandou.
Dér. du lat. Canna.
Canouné, s. m., ou Manouné. Terme de triperie :
boyaux d'agneau, de chevreau, de mouton et même de
veau, qu'on lie par petites bottes, et dont on est friand
surtout à Alais, où l'on dit mieux Manouné. — V. c. m.
Dim. de Canoù.
Canounge, s. m. Chanoïine, celui qui possède un canoni-
cat. — Il est devenu n. pr. d'homme, rendu par Canonge.
Dér. du lat. Canonicus. .
Canourgo (La), s. f.,n.pr. de lieu. La Canourgue, ville
et canton du département de la Lozère, mentionnée dans les
titres les plus anciens sous le nom de villa de Canonica. A
Montpellier, une place est aussi appelée La Canourgue, à
cause de son origine canoniale, voisinage ou dépendance
d’une propriété canoniale.
Les deux mots Canounge, Canonicus, et la Canourgo,
Canonica, dérivent évidemment de la même source : leur
radical commun se trouve dans le gr. Kavv, règle, ordre,
que le lat. a simplement adopté dans le même sens Canon,
onis, et qu'il a adjectivé en Canonicus, a, um, régulier,
chanoine régulier. Dans le principe, il est probable que
cette unité d’origine en avait fait deux menechmes; depuis,
ils se sont un peu déformés; mais, malgré la différence de
physionomie, l'air de famille persiste et les rapproche.
Seulement, le premier, subst. masc., a gardé les contours
émoussés, le ton sourd, qui sont peut-être plus fréquents
dans le Nord ; tandis que le second, nom propre féminin,
a revêtu cette forme rude, accusée, particulière à notre
Midi. Mais, la parenté une fois établie, ces ressemblances et
ces variétés, les altérations mêmes des deux mots, que nous
prenons pour lypes, présentent un assez curieux sujet
d'étude sur ces fameuses finales languedociennes en argues,
ergues et orgues, dont on s’est tant occupé.
L'importation grecque ou latine de Canonicus date de
l'époque où, dans les Gaules, l’ancienne langue nationale
était encore comprise et parlée, au moment où commençait
à se former, du mélange avec le latin, l'idiome rustique
vulgaire. Des besoins nouveaux, une civilisation plus avan-
cée, surtout la nécessité de se reconnaître avec les dénomi-
nations locales débaptisées ou en voie de se modifier au
goût des conquérants, des traditions indestructibles et des
influences impérieuses avaient fait subir au langage des
changements considérables; mais une langue ne procède
pas au hasard, bien qu’il soit difficile d’avoir toujours rai-
son de ses variations, et, dans la conjoncture, les analogies
ne manquaient pas : elles sont même si frappantes qu'on
dirait une loi régulière, systématique, uniforme, dont on
va saisir les applications.
Le mot arrive tout fait, tout d’une pièce, purement
latin. Quand le roman, qui se créait, le rencontre et qu'il
CAN
veut s’en emparer, il n'a garde de toucher au radical; mais
sa finale en icus n'allait pas à ses aptitudes vocales : à
d'autres semblables, à des noms de lieux ainsi terminés; il
avait fait subir une altération conforme à son génie, et il
appliqua à Canonicus sa méthode habituelle de transforma-
tion. La voyelle la plus souple devait d'abord être atteinte :
l'i disparait de la désinence, ou il se change en e plus ou
moins ouvert, qui le rappelle; la palatale C est remplacée
par sa correspondante G, la consonne celtique de prédilec-
tion, sur laquelle nous revenons souvent; enfin la termi-
naison devient muette et s'éteint. L'intrusion de R, qui se
substitue à M, est particulière au Midi. On ne peut expli-
quer sa présence que par le désir instinctif du peuple, ce
maitre souverain de sa langue, de donner à certains mots,
à des noms propres de lieux, plus de consistance, plus
d'énergie, et de faire peut-être un accord mieux lié avec le
son guttural fortement accentué qui la suit presque tou-
jours; ce que l'organisme méridional ne dédaigne pas,
quand celui du Nord y semble moins porté.
Ces procédés de recomposition se révèlent clairement
dans: les diverses évolutions du mot Canonicus. Notre
langue romane en a fait Canonge, Canonègue et Canorgue.
. Un exemple de chaque forme : la chanson de geste de
Gérard de Roussillon dit : Ni monge, ni canonge, ni cape-
lan. Dans un titre de 1174 on trouve : La claustra des
canonègues ; dans Pierre Rogiers, troubadour du XII: siècle :
Peire Rotgier si fo d'Alvernhe, canorgues de Clermon. L'abbé
de Sauvages cite Canonèjhe { Canonège), comme appartenant
au.vieux langage. Enfin le languedocien moderne dit
Canounge. Le subst. féminin suit la mème marche : Cano-
nica est représenté par Canorgua, Canorguia. Dans Pierre
Rogiers : Laïsset la canorgua et fes se joglars ; dans Pierre
Cardinal : Son païre lo mes per canorgue en la canorguia
del Pueï. Nous arrivons naturellement à La Canourguo; et
pas n’est besoin de faire remarquer que dans notre dialecte
où égale o roman.
La preuve maintenant qu'il s’agit ici d'une loi générale,
au moins en ce qui concerne la substitution du G gaulois
au C latin dans ces désinences ; c'est que les idiomes celo-
latins l'adoptent de même. Canonicus a donné en cat.
Canongo, en esp. Canonigo et Canongia, en port. Cano-
nego. L'anglais lui-mèmé à Canongate, faubourg d'Edim-
bourg, qui accuse pareille filiation; l'italien seul Canonico
s’est conservé absolument latin.
Mais la règle s'applique encore aux noms propres et aux
noms communs, dans lesquels la présence du même suffixe
latin a dù amener une pareille combinaison dans le roman
et dans le languedocien. Sans citer Monachus, qui faisait
en roman Monge, Mongne, Monègue, Morgne, Moyne; en
cat. Monjo, en esp. et en port. Monje; prenons le subst.
fém. Monica, religieuse. Le roman avait Monja, Monga,
Morga, Moyna; en cat., esp., port. Monja; comme pour
monastère on disait Mongia et Morgia; et notre languedo- |
cien Moungeo (Mounjo), el Mourgo : la carïèiro dé las
CAN
Mourgos, la rue des Mourgues à Alais; et les diminutifs
Mounjéto, Mourguéto, petite religieuse, et Mounjétos, nom
des haricots à enveloppe blanche ou noire, féveroles sèches.
11 faut voir comme le roman, au nord et au midi, en fr.
et en lang., s'exerce sur ces syllabes icus, ica, toutes les
fois qu’il les rencontre : Carrica, de la bass. lat., donne
Carguo, charge; Granica, Granÿjo, grange; Lanica, lange ;
Serica, sarjo, serge; Fabrica, Forjo, forge; Pautrica,
Fango, fange; Manica, Marque, Manche, manche; Porti-
cus, Porge, porche; Medicus, Mèje, médecin.
Les noms de lieyx suivent la mème voie. Pour ne citer
d’abord que les plus rapprochés par la consonnance finale
avec notre type, dans le Gard, Colorgues, commune de
Saint-Chaptes, était, dans un dénombrement de 1394, Colo-
nicæ; comme un lieu détruit de la commune de Langlade,
Colonges ou Colongres, commune de Verfeuil. Coloures,
commune de Marguerittes, s'appelait en lat. Colonicæ,
Colonices; Coulorgues, commune de Bagnols, Colonice ;
Colonges, dans la Côte-d'Or, Cologne sur le Rhin, Cotonire.
Santonicus est devenu Saintonge. Conduzorgues, commune
de Montdardier (Gard), vient de Conduzonicæ; Montuzor-
gues, de Montusonicæ; Solofgues, de Savaronicæ ; Soudor-
gues, de Sardonicæ et Sordonicæ, etc.
Ces rapprochements indiquent une marche constante vers
le mème effet à produire. Les termes de comparaison sont
abondants pour démontrer que cette désinence latine, nicus,
nica, nicæ, au sing. ou au pl., au masc. ou au fém., se
reproduit dans notre langue vulgaire, et même dans le fr.,
par les combinaisons nge, nègue, nège, rqua, rquia, rgue,
rguo, qui toutes sont équivalentes, égales entr'elles.
Mais ce n'est pas seulement alors que le mot porte o =
ou comme voyelle dominante à l'antè-pénultième, onicus,
167
. onicæ, que la permutation a lieu; les voyelles a, e, à, dans
les mêmes conditions ont le même privilége. Armasanice a
donné Armasanègues, Aimargue, Aimargues; Caxanicus,
Caxanicæ, Cairanègues, Caïssargue, Caissargucs; Domes-
sanicæ, Domessanègues, Domessanengues, Domensan, Dou-
méssarque, Domessargues ; Rutenicus, Rodinigus, Rouergue.
Enfin notre mot Diménche, dimanche, en lat. dies Domi-
nica, et le nom propre Dominique, du masc. Dominicus,
offrent une autre preuve à l'appui. Le roman traduisait
Diemence, Diemenche, Dimoinge, Dimenge, Dimenche; dans
les coutumes d’Alest, on lit Dimentge. Le verbe était,
d’après Sauvages, Endimérga où Endiménga ; aujourd'hui
Endiméncha. De son côté, le nom propre a passé de Domi-
nicus en Doumèrjhe, Doumènjhe, Doumènghe ; il est Dou-
mèrgue, en fr. Domergue; en esp. Domingo. Ce sont
toujours et partout des formes identiques; mais les derniers
exemples donnent plus d'extension au procédé et introdui-
sent de nouvelles désinences pour représenter le même
suffixe : ce qui ne laisse pas que de jeter le plus grand jour
sur la composition des mots et des noms propres.
D'où vient cependant cette constance à repousser une
telle finale, cette espèce de parti-pris des langues néo-latines
168 CAN
de n'admettre que des combinaisons qui s’éloignent tant
en apparence de la construction ancienne? D'abord, si grand
que soit l'écart entre les formes actuelles et la forme primi-
tive des mots que nous relevons, il faut remarquer que, dans
la plupart des cas, les désinences seules sont atteintes. Dans
nos idiomes néo-latins l'inconvénient n'est pas grave : car
l'influence de la terminaison est à peu près nulle sur là
signification des mots. Tout se réduit donc le plus souvent
à une question d’euphonie, et dépend de la manière dont tel
ou tel son est rendu ou perçu, suivant certaines préférences
de flexion naturelles à chaque peuple, selon une disposition
particulière des organes ou la différence des tempéraments.
On sait en effet quelle action exercent sur le langage les
habitudes, les influences locales et climatériques. C’est que,
il faut le bien dire, dans toutes les langues, dans tous les
pays, dans tous les temps, le peuple a une propension innée,
irrésistible à la contraction : il y est poussé et entretenu
par son dédain de Ja correction classique, par une négli-
gence naturelle de prononciation, par l'ignorance des flexions
qu'il abandonne volontiers aux savants et aux rhéteurs ;
mais à tout prix la syncope et l’ellipse doivent s'adapter à
ses instincts et à sa diction. On comprendra dès lors com-
bien les licences du latin vulgaire, usuel, tel qu'il fut
transporté dans les colonies par les soldats de Rome, en se
mêlant aux idiomes gaulois, rencontrèrent de facilité à
faire accepter leurs incorrections, et comment la nouvelle
langue, en train de se former, éprouva peu de gène, peu de
résistance à fondre ses propres éléments dans le moule
accrédité, à se façonner sur le modèle sans trop grandes
concessions, sans perdre son caractère et son génie.
Mais nous ne faisons qu'indiquer en passant ce mouve-
ment de transformation et de recomposition, et il n'est pas
de notre sujet de remonter aux causes. Il suffit d’en cons- -
tater l'activité et l'énergie, et de saisir quelques-uns de ses
effets isolément, pour avoir une idée du travail général et de
l'esprit de notre langue.
Maintenant, en présence des altérations, des divergences,
des variétés de prononciation et de structure, par lesquelles
ont passé quelques mots, que nous étudions, avant de par-
venir à leur forme actuelle, nous nous demandons S'ils
n’ont pas obéi à une loi générale de compositions diverses ;
et il nous semble impossible de ne pas reconnaître que
toutes ces disparités sont plus superficielles que réelles ,
qu'elles se confondent et se balancent; qu’au fond le nom-
bre des mots et surtout celui des noms propres, quoique
très-varié, est beaucoup plus réduit qu’on ne pense. Il res-
sort de là avec évidence que chaque pays, presque chaque
localité adopte de préférence une formule, qui ne lui est
peut-être venue que par une disposition propre, particulière,
de son organisme vocal à prononcer plus ou moins facile-
ment telle ou telle articulation, tel ou tel rapprochement
de lettres; et les exemples nous paraissent ici saisissants.
Ainsi, à propos de Canonicus, Canounge, Canonica, la
Canourguo, nous voyons les finales orgue et èrgue corres-
CAN
pondre exactement à onge, ènge, èngue, énche, one, par
onèqgue, onège, onènche, reliées par contraction à own, on,
en, et au fém. ono, ouno : pourquoi la désinence argtes, qui
a été anègues, aniches, oniches, n'aurait-elle pas aussi
quelque affinité avec an, anges, anche? Pourquoi énges,
ignes, ignies, igné, igni, igny, n'auraient-ils pas une atta-
che par in, ine, inies, ein, eine, èje, ije; et'ne seraient-ils
pas affiliés à cette communauté dénominative, qui, pour
englober tant d’appellations locales en France, part d’une
source unique? Pourquoi tous ces suffixes ne reconnai-
traient ils pas pour auteur le celtique ac — ee, qui s'est
transformé au contact du latin, tantôt faisant fonction
d’adjectif, tantôt servant à donner certaines attributions
ethniques et patronymiques? Ces conclusions nous semblent
solidement établies.
Mais alors que devient le système laborieux qui voulait
trouver une signification, dans la désinence explétive argue,
des noms propres de lieux de nos contrées, en en faisant la
traduction du lat. Ager?
Nous nous en sommes expliqué ailleurs : cech est un
nouvel argument. — Voy. Argue.
._ Cansoù, s. f. Dim. Cansounéto. Chanson; pièce de vers
par couplets, que l’on peut chanter. Au fig. sornettes,
contes frivoles. — Agud's la cansoù de l'agnèl blan ; c'est
toujours la même chanson; c’est un thème qui ne finit an
Dér. du lat. Cantio, même sign.
Canta, v. Chanter, former un chant par une suite de sons,
d'accords. Au fig. célébrer, louer; sonner, résonner. —
Canta clari, rendre un son clair comme un vase vide. Il se
dit aussi pour : rendre un son fèlé Cantarén pas mésso,
loc. prvb. pour dire : nous ne serons pas longtemps
d'accord, nous ne nous entendons pas. C’est sans doute une
allusion aux chants du lutrin. Té foura canta pu nâvu,
dit-on à quelqu'un qui marchande avec la prétention
d'obtenir à bas prix ou à des conditions très-modérées une
chose quelconque, une marchandise, qu'on estime davantage
qu'il n’est offert : il te faudra chanter une autre gamme,
un ton plus haut.
Dér. du lat. Cantare.
Cantaïre, aïro, adj. P6j. Cantaïras, asso. Chanteur; qui
fait profession de chanteur. — En terme de magnanerie, on
appelle un cantaïre, un cocon faible, qui cède à la pression
du doigt et rend un son quand la coque reprend sa première
position.
Dér. du lat. Cantare.
Cantarèl, arèlo, «dj. Chanteur sempiternel et ennuyeux;
qui aime à chanter, ou qui a des dispositions à chanter.
Cantarèlo, s. f. Chanterelle ; sorte de bouteille en verre,
dont le fond très-mince est percé d'une petite ouverture. On
chante contre ce fond pour amuser les enfants, et le souffle,
qui fait vibrer fortement les parois, augmente très-singulié-
rement le volume de la voix en lui donnant une qualité
métallique et frémissante.
Dér. du lat. Cantare.
CAN
Cantèl, s. m. Chanteau ; premier morceau taillé en coin
sur un grand pain; pointes supplémentaires d’un manteau,
d'une robe, d'une chemise de femme; pièce du milieu d’un
fond de tonneau, qui est terminée des deux côtés par un
segment de cercle.
Dé cantèl ou pér cantèl, posé de champ. On le dit d’un
corps plat, d'une brique, d'une pierre de taille, posés sur
leur tranche, c'est-à-dire sur leur face la plus étroite,
comme les livres dans une bibliothèque.
Dér. de la bass. lat. Cantellum, dim. de Cantum, coin.
Canto-pérdris, s. m. Garou ou Saint-bois, Daphne lau-
reola, Linn. Arbrisseau de la fam. des Thymélées ; à feuille
étroite, commun dans les landes arides.
Par extension, on appelle Canto-pérdris, un terrain sec
et infertile, une propriété de peu de valeur, serait-elle
ornée d’une chétive masure, parce que c’est là que l’arbuste
de ce nom croit de préférence.
Les botanistes assurent que les: fruits du garou, rouges
à leur maturité, sont avidement recherchés par les oiseaux,
surtout par la perdrix : de là sans doute le nom lang.
. Canto-plouro, s. f. Chante-pleure. Ce mot, qui est imité
du fr. chante-pleure, ne représente pas le même objet.
.Celui-ci est proprement un grand entonnoir pour remplir
les futailles, ou bien un tuyau de fuite pour les eaux plu-
viales pratiqué dans l'épaisseur d’un mur.
La Canto-plouroest un outil de moulin à huile. Ce qu'on
appelle l'Enfer dans ces moulins est un récipient où l’on
rejette les eaux qui ont servi à échauder la pâte d'olives,
après qu'on a écrèmé l'huile sur leur surface. Cet enfer est
composé de trois cuves superposées l’une à l'autre et qui
déversent successivement l’une dans l’autre. Quand Ja plus
haute est pleine, elle verserait par le haut et entrainerait
l'huile qui surnage dans la seconde et de là dans la troi-
sième, résultat qu'il faut éviter, puisque cette huile doit
rester autant que possible dans la cuve supérieure, et tout
au plus dans la seconde. Pour y parvenir, on place dans
chacune de ces deux premières cuves un tuyau de fer blanc
plus ou moins recourbé, qui fonctionne comme un siphon
et vide les cuvées par le bas. Par ce moyen l'huile baisse
avec l'eau, mais surnage toujours jusqu’à complète vidange
de l’eau. C'est ce tuyau qu'on nomme Canto-plouro.
Cantoù, s.m. Dim. Cantouné. Coin; carrefour; quartier
d'une ville; quignon de pain; coin du feu; recoin d’un
appartement; angle d’un mur; canton, division territoriale.
En terme de maçon, pierre angulaireà faces perpendicu-
laires l’une à l’autre, dont on forme les angles saillants d'un
mur. — Résta à soun cantoù, garder le logis, demeurer
dans son coin; ne pas se mêler des-affaires des autres. Vira
lou cantoù d'un air, prendre la ritournelle, saisir les
reprises d’un chant. Vira lous cantoùs, tourner les diffi-
cultés. À un brave cantoù, il possède un bon coin de terre,
il a un petit domaine bien productif. Aèsto dou cantoù dé la
Téissarië, il demeure au coin de la rue Tisserie.
Le mot ést riche en interprétations étymologiques : nous
CAO 169
en avons dit quelque chose indirectement à l'art. Candia,
Candiargue. Les uns le tirent de l’allem. Kant, bord,
extrémité, marge, angle, coin. D'autres le font dériver du
gothique Cant, même signif.; ou du gr. Xavè6ç, le coin de
l'œil, l'angle, le coin.
Cantounado, s. f. Hameau; amas de maisons formant
une ile dans une commune rurale. Ce mot est dit par
opposition aux maisons isolées, dont se composent en
grande partie la plupart des communes des Cévennes.
Dér. de Cantoù.
Cantourléja, v. frég. Fredonner, marmotter une chanson
entre les dents; gringotter un air.
Dér. du lat. Cantilare.
Canturlo (Vira-), ». Perdre la tête; battre la campagne.
Se dit plutôt de la perte de la raison par maladie ou acci-
dent, que d'une folie passagère par ivresse.
Dér. du lat. Cantilare.
Câou ou Câoulé, s. m. Chou, Prassica oleracea, Linn.
Plante potagère, alimentaire, de la fam. des Crucifères. —
Le proverbe dit :
Entre Sén-Pière et Sén-Pâou,
Planto lou pore et lou céou.
— Y-a céous et cdous, distinguons, il y a choux et choux.
Une anecdote est attachée à ce dicton, et en explique l'ori-
gine présumée. Un pauvre diable se confessait à son curé
d'avoir volé des choux: celui-ci lui fit une légère répri-
mande et voulait passer outre. Le pénitent ajouta alors :
Mais ces choux-là étaient à vous. — Ah! reprit le curé,
y-a cdous et câous, c'est bien une autre affaire. Et la
semonce ainsi que la pénitence furent doublées.
Sganarelle, dans le Médecin malgré lui, dit dans la même
acception : il y a fagots et fagots.
L'étymologie prise du lat. Caulis, tige, semblait toute
naturelle; mais on a dit contre elle que le chou Cdou,
Câoulé, était précisément une des plantes les moins remar-
quables par la tige; et ceux qui n'étaient pas satisfaits du
dér. lat. ont trouvé dans le celtique le mot Chaulx, Cawl
ou Caul, qui signifie légume, et qui leur a paru de beau-
coup préférable. Leur raison s'appuie de ce que de Cawl,
les Italiens ont fait Cavolo, les Espagnols Col, les Allemands
Koel, les Belges Koole. Cal est de notre vieux langage, mais
il est encère usité dans les Cévennes; la plaine emploie
Cdou et Cdoulé plus adouci. — Voy. Cdoulé.
Câou, Câoudo, adj. Chaud, chaude: qui a, qui procure,
qui fait éprouver la sensation de la chaleur. Se prend quel-
quefois adverbialement : Sé tène cdou, se tenir chaudement.
Béoure cdou, boire chaud.
Dér. du lat. Calidus, mème sign.
Il faut observer que dans le dialecte des basses Cévennes, ,
on change fréquemment la lettre Z en la voyelle composée
ou; cela tient au goût particulier de cette population pour
les polyphthongues, qui sont en général plus euphoniques.
A mesure qu'on s'éloigne vers le levant du Languedoc, les
170 CAO
consonnes se multiplient de proche en proche, les poly-
phthongues s’effacent, les syllabes deviennent plus labiales
ôu plus gutturales, ét par là se rapprochent davantage du
français. Le génie originaire semble mieux conservé dans
le premier mode, car il n’a pu l'emprunter à aucune autre
langue ; aucune ne faisant une telle dépense de voyelles, et
n'étant aussi avare de consonnes.
Nous avons donné des exemples de cet harmonieux agen-
cement de voyelles au mot Acén. Les diphthongues et les
triphthongues se rencontrent, se mêlent, se croisent dans
le mème mot, sans se heurter, sans choc discordant, grâce
à leurs ingénieuses compositions , faites pour ménager tou-
jours l'oreille. Ce mécanisme appartient tout entier à notre
langue, et donne la preuve de sa souplesse ét d'une sensi-
bilité musicale très-développée.
Câouciou, s. f. Caution; celui qui répond ou s’oblige
pour un autre. — Pdoure, câouciou et malaïroùs noun sou
sujes à l'énvéjoùs, prvb., être pauvre, caution et malheu-
reux ne sont pas sujets d'envie.
Dér. du lat. Cautio, formé du verbe Cavere, part. Cau-
tus.
Câouciouna, v. Cautionner; se porter garant; s’obliger,
se rendre caution pour quelqu'un.
Câoudéja, v. fréq. Couler la léssive à chaud, en y jetant
fréquemment de l’eau bouillante, qu’on laisse écouler par
la bonde de la cuve. On verse de l'eau bouillante ou du
moins très-chaude pour dégager plus facilement les alcalis
contenus dans la cendre et les unir au corps gras du linge
sale, ce qui les change en véritable savon. Ces corps gras
eux-mêmes ont besoin de cette chaleur pour se fondre, se
détacher du linge et s'unir aux alcalis ou sels lixiviels. La
lessive, Bugado, est purement une opération chimique d’un
ordre relevé. Les ménagères ne s'en doutent guère.
Dér. de Cdou.
Câoudéjado, s. f. Action de réchauffer une lessive en y
jetant une nouvelle ondée d’eau lixivielle chaude. — Zi
fôou éncaro trés céoudéjados, il faut donner encore trois
réchauds à cette lessive, c’est-à-dire renouveler trois fois le
mème manège.
Gâoudéto, s. f. Châtaigne bouillie, qu’on sert sous un
linge pour lui conserver sa chaleur; de là elle tire son nom.
— Voy. Této.
Câoudo, s. f. Battue; reprise de travail; chaude, en
terme de forgeron. Il s'emploie surtout pour les ouvrages de
forgeron, et pour les travaux de pilotage, soit au maillet,
soit à la sonnette, où les ouvriers doivent mettre de
l'ensemble dans le battage du fer ou des pilotis, et s’arrôter
ensemble à un signal donné. La céoudo est l'intervalle de
travail continu entre deux repos.
Dér. de Cdou.
Câoufa, v. Chauffer, échauffer; exposer à la chaleur du
feu. — Lou sourél câoufo, le soleil est ardent. Aïgo cdoufo,
l'affaire devient chaude.
Dér. du lat. Calefacere, mème sign.
CAO
Câoufaje, s. m. Action de se chauffer; quantité de bois
ou de houille qu'il faut à une famille ou à un individu.
Câouféja, vo. frég. Réchaufler; chauffer à plusieurs
reprises, comme on le fait pour une personne ou un animal
malade, par l'application de linges chauds, ou au moyen
d'une bassinoire.
Câou-flori, s. ». Chou-fleur ; Brassica oleracea botrytis,
Linn. Variété de chou commun, selon quelques botanistes;
espèce distincte, d'après les autres.
Côoulé, s. m. Dim. Céoulichoù. Chou. C’est un dim. de
Câou, mais plus usité que lui pour exprimer le genre dans
sa généralité. — Voy. Cdou.
Cdoulé-cabus, s. m. Chou cabus ou pommé, Brassioa
oleracea capitata, Linn.
Câoulé à l'oli, s. m. Brocoli, variété du chou-fleur.
Câoulé-bru, Câoulé-vèr, chou vert, Brassica oleracea
viridis, Linn. Espèce qui ne pomme jamais. Elle a un grand
nombre de variétés. — Voy. Cdou.
Câouléja, v. frég. Effeuiller un chou sur sa tige, sans
l'arracher, afin qu'il puisse pousser de nouvelles feuilles.
On n’enlève que les feuilles les plus vieilles et extérieures,
sans toucher au cœur. On dit Cdouléja, par extension, de
toutes les plantes légumineuses auxquelles on fait subir la
même opération, comme la blette, la betterave, etc.
Câoulichou, s. m. Dim. de Céoulé. Petit chou, et rnieux
un cœur de chou, et les jeunes pousses du chou-vert ou du
chou-brocoli.
Câoulichoù, s. m., est aussi le nom du Carmillet, compa-
gnon-blanc, Lychnis Sylvestris alba simple, Linn. Plante
de la fam. des Cariophyllées, dont on mange les jeunes
pousses. La même que Této-lèbre. — Voy. ©. m.
Câoupisa ou Câoussiga, v. Fouler aux pieds; mettre le
pied sur le pied de quelqu'un, ou sur quelque chose. —
M'avès câoupisa, Vous m'avez marché sur le pied.
Dér. du lat. Calx, talon, chaussure, pied, ou de Calcare,
fouler, uni à Pes, pied. En ital. Piggiure et Calpestare ; en
esp. Pizzar, fouler aux pieds.
Câoupre, v. Conténir; tenir; être contenu dans. — Zi
pode pas coupre, je n’y puis tenir plus longtemps, ma
patience est à bout. Aqud poura pas jamaï câoupre din ma
tèsto, cela n'entréra jamais dans ma tête. Po pas céoupre
din sa pèl, ilne peut plus tenir dans sa peau, il est trop gros.
Dér. du v. pass. lat. Capi, capior, être contenu.
Câouqua, ». Fouler le blé avec des chevaux; quand on
lé bat avec le fléau, on dit Escoudre. Au fig. fouler aux
pieds, presser fortement sous les pieds. — La païo né voou
pas lou câouqua, prvb., le jeu n’en vaut pas la chandelle.
Dér. du lat. Calcare, fouler aux pieds.
Câouquado, s. f. Airée; reprise de foulage ; quantité de
gerbes qu’on foule en une reprise.
Las câouquados, s. f. pl. La saison où l’on foule le blé.
Câouquasou, s. f. Action de fouler le grain; foulage ;
saison de ce travail.
Dér. de Cdouqua.
CAO
Câouquièiro, s. f. Tannerie; atelier où l'on tanne;
maison garnie de galeries couvertes pour faire sécher les
peaux tannées.
Le nom d'une ancienne rue d’Alais, désignée ainsi dans
les vieux titres, a été francisé en rue des Calquières,
Dér. d'Acdou, parce que c'est principalement avec une
lessive de chaux qu'on apprôte les cuirs et qu'on en fait
tomber le poil.
Câouquio, s. f. Coquille, partie dure qui recouvre ou
renferme le corps des mollusques testacés; trompe, voûte
en saillie, propre à soutenir un angle de mur, le coin d’une
maison.
Dér. du lat. Concha, même sign.
Câouse, s. m. Chose; mot que l'on applique à une per-
sonne, à un objet dont on ne se rappelle pas le nom, ou
qu'on veut éviter de nommer. — Moussu edouse, monsieur.
chose; monsieur un tel.
Câouso, s. f. Chose, ce qui est, ce qui existe; toute
chose inanimée; cause, motif. — Né sièï cdouso, j'en suis
cause. On dit mieux : Né soui l'én-cdouso, qui n’est qu'une
altération de la première forme plus régulière, mais moins
usitée. — Sé siès bono cdouso parlo, sé qué dé noù, Diou té
rétire, si tu es bonne chose parle, sinon que Dieu te fasse
disparaitre : phrase de conjuration quand on croit voir ou
entendre quelque chose de surnaturel, un revenant, un
esprit familier, etc.
Dér. du Jat. Causa.
Câoussa, v. Chausser; mettre une chaussure, des bas ou
des souliers; buter, chausser un arbre, ramasser de la terre
au pied. En terme de forgeron ou de taillandier, rechanger
an outil, une boue, un soc, etc., en y appliquant, lorsqu'il
est usé, de nouveau fer pour l'élargir, l’allonger et l'acérer
une seconde fois. — Sé cdoussa d'un pè'n doutre, se chaus-
ser à rebours, mettre par exemple le pied droit dans le
soulier ou le sabot du pied gauche.
Dér. du lat. Calæ, chaussure.
- Câousse, s. m. Causse, haute montagne ou chaine de
hautes montagnes terminées en haut par une vaste plaine.
Les parements extérieurs des Causses sont fort escarpés
et présentent dans leur tranche l'épaisseur des diverses
assises dont ils sont composés et qui sont en général de
nature calcaire. C'est. ce qui les distingue dans le pays de
ce qu'on appelle la montagne, terrain de seconde formation,
composé de schiste et de mica la plupart du temps. La
haute chaine de la Lozère est de la première nature; les
chaînes inférieures et parallèles à cette chaine sont de la
seconde espèce, surtout dans les versants méridionaux.
Cette série de Causses règne en are de cercle dans le
centre du département de la Lozère et se poursuit dans la
chaîne de l'Aveyron. Ce sont les Cansses de ce dernier
département qui fournissent ces excellents-fromages de lait
de brebis qui, en passant par la fermentation des célèbres
gaves de Roquefort, acquièrent nne renommée européenne.
Les meilleures qualités sont produites dans l'arrondissement
Cao 171
de Saint-Affrique, et surtout dans le canton qu'on appelle
le Camarès.
Ce nom de Céousse peut fort bien dériver de la
calcaire des rochers dont ils sont composés; Sauvages
tire du lat. Cautes, rochers.
Câoussésouù, s. f. Action de rechanger un outil; quan-
tité de fer qu'on y ajoute; point de jonction du vieux fer
au nouveau.
Dér. de Céoussa.
Câoussétariè, s. f. Bonneterie; chaussetterie; fabrique
ou magasin de bas et de bonnets.
y a à Alais une rue de ce nom, qui est bien la plus
petite de toutes celles que le métier ou l'industrie qu'on y
exerçait eût dénommées; car elle n’a pas plus de vingt
mètres de long sur trois de large. Cela indiquerait-il que,
dans le vieux temps, on allait beaucoup plus les jambes
nues et que le bonnet de coton était moins en vogue?
Câoussido, s. f. Chardon épineux ou hémorroïdal, Ser-
ratula arvensis, Linn. Civium arvense, plante de la fam.
des Composées Cynarocéphales, très-commune dans les
champs.
Dér. de Céoussiga.
Câoussiè, s. m. Chaussure de quelque espèce qu’elle
soit. Ce mot ne s'emploie guère que lorsqu'il s'agit de la
dépense que fait un individu pour sa chaussure.
Câoussiga, v. — Voy. Cdoupisa.
Câoussignè, s. m. Chaufournier; faiseur, fabricant de
chaux.
Dér. de Acdou.
Câoussina, v. Passer le blé de semence à l'eau ou à la
fleur de chaux, le chauler, pour détruire le germe du char-
bon ou de la nielle, qui est une sorte de carie on de fungus.
Aujourd'hui on emploie plus souvent la soude et l’eau de
vitriol pour cette opération, sans cesser pour cela de dire
Câsussina et chauler.
Dér. de Acdou.
Câoussinar, s. m. Habitant des Causses; mouton de
petite espèce qu’on nourrit dans les Causses, et principale-
ment dans les Causses de l’Aigoual.
Dér. de Cdousse.
Câoussos, s. f pl. Chausses, haut de chausses, vêtement
de la ceinture aux genoux, propr. culotte. Les deux mots
et les deux modes ont vieilli. Le pantalon, /as Braïos (YF. €.
m.), règne seul. Cependant Cdoussos s'est conservé dans une
locution qui revient souvent : Coumo y farén las câoussos?
C'est la question que l'on se pose devant un problème à
résoudre, en présence d'un embarras qui se dressé inopiné-
ment, dévant un coup de partie difficile à jouer, dans an
écart au jeu de piquet, dans une situation dont on ne voït
pas le moyen de sortir; quand en se grattant le front on se
demande : comment nous y prendrons-nous? Quel biais
emploierons-nous? Comment sortir de ce pas? Comment
nous.tirer de là? Ou autrement : Eh bé/ aro, coumo y farén
das céoussos ?
172 CAP
Ce dicton confirmerait ce que j'ai entendu dire mainte fois,
que les pantalons sont très-difficiles à faire, plus difficiles
que toute autre partie de l'habillement ; car autrement com-
ment serait-on plus en peine pour faire chausses et haut de
chausses que pour un gilet ou un paletot, et enfin pour une
règle de trois, une mortèse ou une paire de souliers? J'aime-
rais bien aussi de savoir, pour vous le dire, à quel tailleur
on doit le dicton.
Câoussoù, s. m. Chausson; chaussure de toile, de tricot,
de flanelle, de lisières, qu'on met aux pieds.
Dér. de Céoussa.
Câouto-à-Câouto (Dé), adv. En lapinois; à pas de loup;
en marchant avec précaution, en catimini. — Y vai dé
cdouto-à-céouto, il y va tout doucement, sur la pointe du
pied. ?
Dér. du lat. Cautus, avisé, prévoyant, rusé.
Capable, blo, adj. Capable; qui est en état de..... Ne
s'applique que, par une extension franchimande et réprou-
vée, à celui qui a de la capacité, de l'intelligence. — Siès
pas capable, tu n'as pas la force, le courage, l'audace de.
Es capable dé tout... hors lou bé, il est capable de tout
hormis du bien.
Dér. du lat. Capax.
Capéïè, s. m. Chapelier; celui qui vend ou fabrique des
chapeaux.
Dér. de Capèl.
Capéiroù, s. m. Sorte de filet de pèche à double manche,
en forme d’entonnoir. Il est beaucoup plus grand que le
Vignoù, dont le manche est en forme de fourche.
Dér. du lat. Capere, prendre.
Capèl, s. m. Chapeau; coiffure extérieure des hommes
et des femmes.
Dér. de la bass. lat. Capellum , même sign., qui vient
lui-même de Caput, tête, qu'avait retenu notre vieux lang.
Cap, resté dans beaucoup de composés.
Capélado, s. f. Salut du chapeau ; coup de chapeau. —
Li dévèn la capélado, nous lui devons le salut. Emb'uno
capélado C'én véiras, tu t'en tireras avec un coup de cha-
peau.
Capélan, s.m. Prêtre; celui qui a reçu les ordres sacrés ;
abbé, ecclésiastique. — On appelait autrefois Capellani les
cleres qui gardaient la chape de saint Martin, à Tours,
relique que nos anciens rois faisaient porter devant eux à
la guerre. On appliqua ce nom au petit édifice où était
renfermée cette relique, qu’on nomma Capèlo, chapelle. Ce
dernier nom passa par extension à toutes les autres cha-
pelles, et celui de chapelain et Capélan à ceux qui les
desservaient. Le lat. Cappa, chape, désignation de la relique
et du vêtement que portent les prêtres dans les cérémonies,
n'est pas étranger non plus à l'appellation.
— Mounta dâou cousta das capélans, monter à cheval
du côté droit.
Capélan, s. m. On appelle ainsi les vers à soie morts sur
la bruyère avant d'avoir filé leur cocon, et qui restent sus-
CAP
pendus aux branches. Ce nom leur vient sans doute de ce
qu'ils deviennent tout noirs.
Capélan, s. m. Sorte de champignon très-commun dans
le pays et qui nait dans les oseraies et les prairies humides.
Il est fait en pain de sucre comme les morilles, maïs il est
beaucoup plus grand. Il est laminé et noir en dessous quand
il est un peu fait; le dessus est d’un blanc cendré. C'est ce
mélange de noir et de blanc qui lui a valu sans doute son nom.
Capélan, s.m. Capelan ou officier, Gadus minutus, Linn.
Poisson de mer de la fam. des Jugulaires et de l'ordre des
Holobranches. Sa chair est peu estimée.
Capélan, s. m. Carthame ou safran bâtard, Carthamus
tinctorius, Linn. Plante tinctoriale, de la fam. des Iridées.
Sa semence est connue sous le nom de graine de perroquet.
Capélané, s.-m., est le dim. très-bien reçu dans toutes les
acceptions précédentes.
Capéléto, s. f. Nombril de Vénus, Cotyledon umbilicus,
Linn. Plante grasse, de la fam. des Crassulacées, qui pousse
dans les vieux murs humides. Elle a la forme d’un cham-
pignon, dont la concavité serait en dessus; au centre exté-
rieur de sa circonférence se trouve un renfoncement qui
ressemble à un nombril humain. Elle est connue aussi sous
le nom de Coucarèlo. — Voy. c. m.
Son nom est dù probablement à sa ressemblance assez
éloignée avec un chapeau, Capèl.
Capélino, s. f. Têtière; petite coiffe des enfants nouveau-
nés; espèce de capote de femme, en étoffe, dont l’usage’est
récent dans nos campagnes pour préserver contre le soleil.
Dér. de Capèl.
Capèlo, s. m. Dim. Capèléto. Chapelle; petite église,
petit oratoire consacré à Dieu. — Aïço és pas la capèlo das
hégandous, dit un joueur de cartes en voyant beaucoup de
figures dans son jeu : on sait qu'il QE a point d'images
dans les temples protestants.
Le mot venu du lat. Capella, mème sign., se rattache à
ce que nous avons dit de l'étym. de Capélan.
Capélu, udo, adj. Huppé, ée; qui a une huppe sur law
tête. Il se dit des poules ou de certains oiseaux, qui ont sur
la tête une touffe de plumes, comme l’alouette huppée‘et la
huppe ou pupul.
Capéssulo, s. f. Capsule, amorce au nitrate d'argent,
fulminate, pour les fusils à piston. — Ce mot d'invention
nouvelle est une simple corruption du français. on
Capéto, s. f. Dim. de Capo. Manteau de femme; man-
telet de femme ou d'enfant.
Capigna, v. Chercher querelle; quereller; taquiner, Cela
répond principalement aux picoteries et petites querelles
des enfants entr'eux, qui ne vont pas plus loin que de se
prendre aux cheveux ou à la tête.
Dér. du lat. Caput, d'où Cap, et Pigna, peigner.
. Capignaïre, aïro, adj. Enfant taquin; qui cherche que-
rellé, noise. S'applique aussi aux grandes personnes.
Capignoùs, ouso, adÿ- Hargneux, querelleur d'habitude;
pointilleux.
CAP
Capitani, s. m. Capitaine, chef d'une compagnie de soldats.
Dér. de la bass. lat. Capitanus, et autant fr. que lang.
Capitâäou, s. m. Capital, somme principale, principal
d'une dette; peine capitale. — L'an jugea dou capitéou, on
l’a condamné à mort.
Capitèlo, s. f. Hutte, maisonnette de vigne, non habitée, .
où l'on renferme les outils, et où l'on peut se mettre à l'abri
d'un orage.
Dér. du lat. Caput, chef; ou bien parce que ce petit
édifice terminé en cône a la forme d'un chapeau, ou parce
que la Capitèlo est en quelque sorte le chef-lieu de la vigne.
Peut-être aussi faut-il chercher sa dériv. dans l'ital. Capi-
tello, chapiteau, parce que la Capitèlo n’est souvent et n'était
surtout autrefois qu'un appentis, un petit toit, une sorte de
chapiteau sous lequel on mettait à l'abri la cuve vinaire.
De nos jours, malgré la cour d'assises et le luxe des garde-
vignes, il ne serait pas prudent de laisser la vendange ainsi
à portée des passants et des vagabonds.
- Capitolo, s. m. Capitole; hôtel-de-ville de Toulouse. Ce
nom n'est point une imitation de celui du Capitole de Rome.
I vient du lat. Capitulum, chapitre, assemblée. 1 fut donné
au chapitre des consuls de Toulouse par une lettre de la
reine Blanche qui portait en titre : Dilectis de Capitulo.
Capitoul, s. m. Capitoul, nom que portaient les consuls
de Toulouse, et qu'ils prirent au commencement du
XIVme siècle. Cette dignité conférait de droit la noblesse
à ses titulaires avant 1789.
Capitula, v. Calculer, spéculer. Ce mot qui d'évidence
est un emprunt au fr. s'éloigne complètement de lui par sa
signification, — Aqud's biën capitula, c'est bien calculé,
combiné.
Capo, s. f. Cape, espèce de manteau de drap grossier, que
portent les paysans et surtout les bergers pour se parer de la
pluie. Les bergers, qui conduisent les troupeaux dans la mon-
tagne en été, couchent sur la terre nue pliés dans leur cape.
Dér. de la bass. lat. Cappa, chape.
Capô, s. m. Chapeau de femme en paille ou en étoffe ;
capote de femme.
Dér. du lat. Caput.
Capô, oto, adj. Honteux, confus, qui a un pied de nez;
interdit, attrapé.
Ce mot dérive du fr. Capot, terme de jeu de piquet. Celui
qui est capot à ce jeu est honteux et désemparé : on a fait
sur lui toutes les levées, il est pris, en lat. Captus, capere :
ou bien, il a perdu du commencement, à capite, jusqu’à la
fin du coup. Le point de départ est un peu éloigné; et nous
ne sommes pas d’ailleurs chargé d'expliquer les étym, fran-
çaises.
- Capoü, s.m. Chapon; jeune coq coupé ou châtré; croûte
de pain frottée d'ail, dont on assaisonne la salade dans ce
pays et qu'on nomme aussi en fr. chapon. Il ÿ a là sans
doute une ironie : la croûte à l'ail dans la salade est la
poule au pot du pauvre.
Dér. du lat. Capo, eunuque.
CAP 173
Capouchin, s. m. Capucin, religieux de l’ordre de Saint-
François, portant ordinairement une longue robe brune et
un capuchon. — Le mot est une corruption du fr.
Grano dé capouchin, Cévadille, Veratrum sabadilla,
plante de la fam. des Colchicacées, originaire du Sénégal.
On prétend que sa graine fait mourir les poux. Ce préjugé
remonte sans doute à la même source que ces mauvaises
plaisanteries sur la barbe et la saleté des capucins, que l'on
disait se servir de la semence de cévadille pour se débar-
rasser de la vermine qui nichait sous leur menton.
Capoula, v. Hacher menu, couper à morceaux ; découper
avec des ciseaux. :
Dér. de la bass. lat. Capulare, couper, trancher, déca-
piter.
Capoulado, s. f. Hachis; abattis; massacre.
Capoulaïre, aïro, adj. Qui bache, qui coupe à mor-
ceaux.
Capoun, ouno, adj. Capon; lâche, poltron; traître, de
mauvaise foi, vaurien; gueux. Terme injurieux.
Selon Roquefort, ce mot viendrait du fr. Capot, qui fait
son adversaire capot, qui lui prend tout; selon le P. Puget,
il serait tiré de Capo, chapon, parce que, dit-il, les capons
d'ordinaire sont gras comme des chapons.
Capouna, v. Chaponner, châtrer un jeune coq; caponner,
lâcher pied, montrer de la lächeté.
Capounadoü, adj. m. seulement. En âge d'être cha-
ponné; poulet assez fort pour subir cette opération.
Capounaïiro, s. f. Femme qui chaponne les poulets.
Capounariè, s. f. Polissonnerie; action méprisable ;
lâcheté; trait de capon.
Capounéja, v. frég. Vagabonder, polissonner; faire le
galopin.
Capound, oto, s. m. f. Petit vaurien; jeune effronté ;
petite libertine.
Capourâou, s. m. Caporal, chef de la plus petite subdi-
vision d'une compagnie d'infanterie.
Dér. de l'ital. Caporale, dim. de Capa, chef.
Caprice, s. m. Caprice ; boutade d’un enfant qui pleure
et crie pour une folle idée qu’on contrarie; entètement ;
engouement amoureux.
Dér. du lat. Capra, chèvre, dont le caractère est capri-
cieux et volontaire.
Capricioùs, ouso, adj. Capricieux ; qui a des caprices ;
qui est sujet aux caprices.
Capriciousé, éto, adj. Dim. du précédent. Petit capri-
cieux. Se prend quelquefois comme expression de câlinerie,
de gentillesse : mais suivant le ton la chanson.
Capriço, s. f. Fantaisie, caprice; désir déraisonnable ;
goût particulier et capricieux.
* Capucho, s. f. Capuce, capuchon; chaperon d'une cape
ou d’un manteau de berger.
* Dér. du lat. Caput, tête.
Capusa, v. Charpenter, menuiser; couper du bois en
menus morceaux, soit avec la hache, soit avec un couteau
174 CAR
ou tout autre instrument tranchant; mais non point avec
le rabot ou la varlope. Au fig. inquiéter, tourmenter à coups
d'épingles; faire endèver.
Dér. de la bass. lat. Capulare, couper, trancher.
Capusadoü, s. m. Espèce de banc sur lequel on amenuise
le bois.
Capusaïre, s. m. Equarisseur, charpentier, bûcheron ;
ouvrier qui menuise le bois sans autre outil que la hache,
la plane, le ciseau et les tarières. C’est ainsi que l’on fabri-
que les échelles, civières, rateliers et la plupart des outils
aratoires.
Capusaje, s. m. Action de menuiser le bois, de l’équar-
rir, de dégauchir une pièce.
Capusios, s. f. pl. Copeaux, petits morceaux, gros ou
menus, que l'instrument du Capusaïre détache d’une pièce
de bois.
-Caqué, s. m. Caquet ; bavardage ; intempérance de langue.
Onomatopée du caquetage des poules.
Caquéta, v. Caqueter; bavarder; jacasser.
Car, s. f. Péj. Carnasso; dim. Carnéto. Chair, viande.
— Car dé cavio, chair d'un animal dont on a Ôté la tête,
la peau, les viscères intérieurs et les pieds, et réduit à la
seule viande qui a cours à la boucherie. Véndre car décavïo;
quand on vend au poids un animal de boucherie, on ne le
pèse que quand il est réduit à l'état ci-dessus; tout ce qu'on
a enlevé ainsi passe sur le marché au profit de l'acheteur :
on appelle cela Car dé cavïo, parce que l'animal dans cet
état, à l’abattoir, est suspendu à l’étal particulier du bou-
cher par une cheville, et pesé. Estre car dé cavio, au fig.,
être réduit au strict nécessaire, être sans le sou. Es pu près
la car qué la camiso; ma peau est plus proche que ma
chemise ; je tiens plus à ma peau qu’à son vêtement : pro-
verbe d'égoïste, dira-t-on, mais qui peut si bien se justifier
dans ses diverses applications!
Dér. du lat. Caro, chair.
Car, conjonce. Car.
Dér. du gr. Yép, ou du lat. Quare, c'est pourquoi.
Cara, s. m. Oreiller, coussin carré pour soutenir la tête
quand on est couché. Il tire son nom de sa forme.
Cara, ado, adj. Carré; qui à la figure, la forme carrée.
Au fig. large d’épaules. — Cara coumo un chafre, mot à
mot : carré comme la pierre à aiguiser des faucheurs. —
Voy. Chafre. Cette comparaison répond à l'acception figurée ;
elle signifie : bien râblu, vigoureux; mais quel est le rap-
port avec la pierre qui donne le tranchant à une faulx? Je
ne sais. Sauvages traduit par : panader comme un coq. Je
ne l'explique pas mieux. La phrase est très-nsitée : il
suffit.
Cara, v. Donner le bras à quelqu'un ; lui prendre le bras.
Sé cara, se carrer, faire le gros dos, se pavaner, se prélasser,
faire l’homme d'importance; se mettre à l'aise, s'accom-
moder. — Cara uno poulido fio, marcher en donnant le
bras à une jolie fille. Aguélo pièpo mé carariè bé, -ce champ
arrondirait bien mon domaine.
CAR
Carabacho, s. f. Cravache, fouet court d’une seule pièce,
pour les chevaux de selle. 3
Corr. du fr.
Carabagnado, s. f., ou Caramagnado. Quantité prodi-
gieuse; une batelée.
Serait-ce une corrupt. du vieux fr. Carabinade, décharge
générale de carabines?
Carabata, v. Mettre la cravate à quelqu'un. Sé carabata,
se cravater; mettre, arranger sa cravate à son cou,
Carabato, s. f. Cravate; linge qu'on met et noue autour
du cou.
Corr. du fr.
Carabignè, s. m. Carabinier à cheval; grenadier de
l'infanterie légère.
Emp. au fr.
Carabinéja, vw. frég. Transporter quelque chose, on
promener quelqu'un d’un lieu à un autre et à plusieurs
reprises; porter d'ici et de là, çà et là.
Dér. peut-être du genre de guerre que font les çarabiniers
ou tirailleurs, qui vont de çà et de là, sans ordre de bataille;
et mieux peut-être du lat. Currus, char, qui a fait charrier,
et de Binus, double, double charriage.
Carabino, s. f. Carabine, petite arquebuse qu'on portait
à cheval.
En ital. on dit Carabina, mot altéré de Canabina, canne
double, soit parce que le canon de cette arme était double,
soit parce que le canon de fer est accompagné d'une canne
ou d’une monture en bois,
Caral, s. »m. Machefer; scories qui se détachent du fer
ou de la gueuse quand on les forge; balle coupée en quatre
ou plomb carré, dont on se sert pour la chasse au loup et
aux bêtes fauves, dont la peau très-dure est quelquéfois
impénétrable aux balles rondes.
Caral, s. m., se dit aussi pour l'ornière, la trace que
laissent les voitures sur la terre. — La Fare l'a poétiquement
appliqué à la voie ferrée, lou caral dé fère, pour les œails
qui forment la voie.
Caramèl, s. m. Longue trompette faite d'écorce d'arbre
roulée en rubans, ou d’un tuyau d’oignon, dont les enfants
s'amusent. Par extension, flageolet, chalumeau.
Dér. du lat. Calamus, chalumeau.
Carâou, s. m. Ruisseau des rues; ornière de charrette,
de voiture; espace contenu entre les ornières. — 4oupa
cardou, traverser quelqu'un dans ses projets.
Caral et Cardou ne sont, dans cette acception, queule
même mot : al correspond à dou. — Foy. Aou.
Dér. du lat. Carrus, Char.
Caravira, v. Défigurer, décomposer les traits; troubler,
étourdir ; bouleverser l'esprit et les sens ; causer unepénible
émotion. — Es tout carawira, il.est tout interdit. Agud d'a
caravira, cette nouvelle l’a troublé, bouleversé. Caravira
l'oustéou, mettre la maison sens dessus dessous.
Dér. du gr. Képa, tête, figure, et de Wira, tourner : faire
volte-face.
CAR
‘Caravirado, s. f. Subite et pénible émotion ; bouleverse-
merit dans les traits et dans l'esprit.
Carboü, s. m. Charbon de bois; houille; braise éteinte.
Dér. du lat. Carbo, mème sign.
Carbougnè, s. m. Charbonnier ; fabricant de charbon de
bois; mineur de houille. — Sa carbougnè, sac à charbon.
D'un sa carbougnè po pas sourti farino blanquo, prvb.,
d'un sac à charbon on ne sort pas de la farine blanche : on
ne tire d’un sac que ce qui y est contenu. Les applications
du dicton sont nombreuses.
Carbougnèiro, s. f. Mine de charbon ; houillère; grande
fosse creusée en terre où l’on fait brüler le bois pour le
convertir en charbon.
Le plus ancien titre qui mentionne les mines de houille
de notre pays, et qui prouve que leur exploitation, si infé-
fieure à ce qu’elle est aujourd'hui, comptait cependant
pour une certaine valeur, remonte à l'année 4345. Dans la
vente faite par Humbert, dauphin de Viennois, à Guillaume
Roger, vicomte de Beaufort, de tous les droits qu'il possé-
dait comme seigneur d'Alest et dépendances, l'estimation
ést donnée de chaque propriété, et après l’article concer-
nant la forêt d’Abylon, dans la baronie de Portes-Bertrand,
. il est ajouté : Hem, carboneria lapidum, que est in dicta
foresta, cujus emolumentum ex ipsa proveniens valere apre-
ciätum est, pro redditu annuo, quatuor libras Turon. ren -
duales. — Et l'article suivant pour les minerais de Palme-
salade : Item, menerie ferri site in tenamento de Palma-
Salada, cum explecha nemorum foreste de Portis et de Escha-
leriis, apreciata valere, pro redditu annuo, sexies viginti
libras Turon. renduales. Enfin, pour ne pas négliger le
droit régalien sur les mines ni les renseignements sur leur
périmètre de concession, cette autre clause : Ztem, census
seu servilutes quas idem dominus Dalphinus habet et perci-
Pit, dictusque dominus rex habere et percipere consuevit, pro
éxplecha carboneriarum lapidum mandamenti castri de
Porlis, ab hominibus de Portis, de Cambono-Rigaudo et quo-
rumdam aliorum locorum, valentes seu ascendentes in et ad
reddilum annuum quindecim solidos Turon.
IL est curieux, au moins en étymologie et en industrie,
de savoir quel chemin ont fait les mots et les choses depuis
six cents ans environ.
Carbounado, s. f. Étuvée de mouton ou de veau. C'est
d'ordinaire une rouelle prise dans la cuisse de l'animal et
qu’on pique de gros dés de lard. C'était jadis le plat mignon
du dimanche chez la petite bourgeoisie, qui s’en régalait en
famille ou avec ses amis et voisins. Aujourd’hui le luxe
répandu dans toutes les classes l’a fait reléguer dans le
service le plus journalier et le plus usuel.
Dér. de Carboù, parce que c’est avec un feu doux de
charbon de bois qu’on apprôtait ce mets autrefois.
Carbouncle, s. m. Charbon, maladie inflammatoire des
hommes et des animaux, et presque toujours mortelle si on
n'y apporte un prompt remède. Le plus efficace est la cau-
térisation. Autrefois les paysans superstitieux n’osaiént
CAR 175
appeler cette maladie par son nom, parce qu'ils croyaient
que ce nom portait malheur et donnait la maladie elle-mème
à celui qui le prononçait. On l'appelait la michanto, la
mauvaise. C'est par suite d'un pareil ordre d'idées qu'on
nomme les vers à soie muscardins, aquélo michanto méno,
et la grêle, lou michan tén.
Dér. du lat. Carbuneulus, petit ulcère enflammé, bubon
de peste.
Carbounèl, s. m. Blé niellé, charbonné, touché par un
brouillard appelé la nielle, qui le rouille et le noircit. —
Voy. Câoussina.
Carbounio, s. f. Braise éteinte; poussier, débris de
charbon; cendre de houille, mêlée de charbon non consumé.
Dér. de Carboù.
Carcan, s.m. Carcan, pilori; peine infamante; collier de
fer fixé à un poteau et avec lequel on attachait par le cou
les malfaiteurs qui y avaient été condamnés.
Dér. du gr. Kaprtvos, cancre, écrevisse de mer, parce que
les branches du collier, appelé carcan, ressemblent aux
pinces de cet animal.
Carchofle, s. m. Artichaut, cardonnette, cardon bon à
ger. — Voy. Artichdou.
Carchofle d'ase, chardon aux ânes, cardon sauvage,
Cynara cardunculus sylvestris, Linn.
Carcul, s. ”». Calcul, supputation.
Corr. du fr. '
Carcula, v. Calculer, supputer, compter.
Carculaïre, aïro, adj. Calculateur, celui qui aime à
supputer, qui est près de ses intérêts, qui compte minutieu-
sement ses intérèts.
Carda, v. Carder; peigner la laine avec la carde. Au fig.
s'emploie avec le mot faire, faire, et comme verbe n. : Aqud
mé faï carda, pour dire : cela me fait trépigner de dépit,
de colère, à peu près comme si on me peignait avec la
carde. — Voy. Cardo.
Cardaïre, aïro, s. m. f. Cardeur de laine, d’étoupe, de
fleuret de soie, etc.
Cardé, s. m. n. pr. de lieu. Cardet, canton de Lédi-
gnan (Gard).
La désinence en é, éto, en fr. et, ette, formée par le suf-
fixe lat. etwm, indique la collectivité, plutôt qu’elle n'est
un dim. Nous citerons de nombreux exemples (F. E,
désin.) et ses variantes : Cardé, Cardet, lieu où se trou-
vent beaucoup de chardons, lat. carduus, ou bien où
s'exerce l’industrie des cardeurs. — Voy. Cardo.
Cardèlo, s. f. Laiteron, Sonchus, Linn. Plante de la
fam. des Chicoracées, laiteuse, bonne aux lapins; chicorée
jaune.
Cardéto, s. f. Séneçon, Senecio vulgaris, Linn., plante
de la fam. des Composées Corymbiféres, commune, à fleurs
à aigrettes blanches, qui a quelque ressemblance avec celles
de La cardo, d'où lui vient son nom dim.
Cardinal, s. m. Cardinal, ua des soixante-et-dix prélats
du Sacré-Collége. — Rouje coumo un cardinal, rouge comme
176 CAR
un coq, parce que les cardinaux sont vêtus de rouge en
habit de cérémonie.
Cardo, s. f. Cardon, cardonnette. Cynara cardunculus,
Linn., plante de la fam. des Cyranocéphales, cultivée dans
les jardins, ressemblant à l'artichaut, dont les côtes sont
tendres et estimées dans l’art culinaire. On assure que
cette plante a été introduite en France, en 1536, par Rabe-
lais, curé de Meudon.
Dér. du lat. Carduus, chardon, dont {a cardo est une
spécialité cultivée.
Cardo, s. f. Carde à carder, espèce de peigne à l'usage
des cardeurs, dont la forme varie suivant les matières à
carder. — Sapa coumo uno cardo, se dit des semailles qui
naissent drues et épaisses comme les pointes d’une carde.
Dér. du lat. Carduus, chardon, dont une espèce, à tête
hérissée de pointes, est employée pour carder.
Cardounio, s. f. Chardonneret, Gros-bec chardonneret,
Fringilla carduelis, Temm., oiseau de la fam. des Cunéi-
rostres et de l'ordre des Passereaux. « Le chardonneret,
dit Crespon dans son Ornithologie du Gard, est un de nos
plus beaux oiseaux d'Europe; à l'éclat de la parure il joint
d'excellentes qualités : il se plie facilement à l’esclavage,
devient familier, reconnait la voix de ses maitres, et comme
il veut de l'occupation dans son étroite demeure, on peut
lui apprendre divers petits exercices très-amusants. Je ne
parlerai pas de son chant que tout le monde connait et
que chacun aime à entendre; j'ajouterai qu’il ne manque
vraiment à cet oiseau que d'être plus rare pour en faire
désirer vivement la possession. » — Le proverbe dit : Pés-
caïre dé ligno, cassaïre dé cardounïo, noun achélèrou jamaï
ni tèro, ni vigno, pêcheur à la ligne, chasseur au filet ne
firent jamais fortune.
Dér. du lat. Carduelis, m. sign., qui, à son tour, vient
de carduus, chardon, dont cet oiseau recherche la graine;
de ce rapport, qui ressemble à celui qui existe entre le
loup et l'agneau, est venu le nom de la cardounïo.
Cardousses, s. m. plur. Épine jaune, Scolyme d’Es-
pagne, Scholymus, Linn., plante de la fam. des Composées
Cynarocéphales, qui pousse aux bords des champs.
Caré, s. m. Charroi; voiture; frais de voiture. — Quan
mé coustara lou caré? combien me coûtera la voiture ? quel
sera le prix du charroi?
Dér. du lat. Currus, char.
Caréïado, s. f. ou Säoupignano, s. f. Jusquiame ou Hane-
bane, Hyoscyamus niger, Linn., plante de la fam. des
Solanées. La jusquiame, comme la cigüe, selon comme on
l'administre, peut être un excellent remède on un violent
poison. Elle est un narcotique puissant.
Caréiè, s. m. Sorte de cadre en avant d’un tour à filer
la soie, où sont encadrées plusieurs bobines tournantes des-
tinées à tordre le fil de soie avant qu'il se dévide sur la roue.
Caréïirôou, s. m. Dim. Caréiroulé. Viol; petit sentier
pour les piétons et tracé seulement par l'usage.
Dim. de Curiètro.
CAR
Caréja, v. Charrier, voiturer, transporter. — Las four-
nigos couménçou dé caréja, les fourmis commencent à
emmagasiner. L'aïgo caréjo, la rivière est bourbeuse, elle
charrie du limon.
Dér. de Caré.
Caréjadis, disso, adj. Qui a été souvent transporté;
qu'on a souvent changé de place, comme le vin de Bor-
deaux, retour des Indes, qui gagne au transport. — Oki
caréjadis, huile étrangère, par opposition à l'huile du pays.
Soui pas caréjadis, dit un podagre, je ne suis guère
allant.
Caréjaïre, aïro, adj. Qui charrie, qui dépose; qui
entasse. ;
Caréjaje, s. m. Action de charrier, de transporter, de
voiturer, de changer une chose de place.
Caréjè, s. m. Sédiment, dépôt d’une liqueur; bourbe
déposée après avoir soutiré; par ext., le tonneau même.
Carél, s. m. Carrelet, sorte de filet à poisson; il est
carré et soutenu aux quatre coins par deux bâtons en
croix, dont le milieu est fixé à une longue perche.
L'acception donnée à ce mot par l'abbé de Sauvages de :
petite lèchefrite dans laquelle on fait cuire de la saucisse,
s’est perdue depuis que les cuisinières parlent français. Il
en est de même de celle par laquelle il affirme aussi qu'on
désignait ces carrés de gros papier servant à placer les
vers à soie sortant d’éclore. Depuis l'invention des méthodes
perfectionnées, ce technique a disparu; on ne fait pas
mieux que du temps de notre savant sériciculteur cévenol,
au contraire; mais le progrès parle français, et en atten-
dant, notre industrie des vers à soie en souffrance et en.
danger de mort, désespère ceux qui cherchent les remèdes
et ceux qui ont encore confiance.
Carémo, s. f. Carème; espace de quarante jours de
pénitence, dans l’église catholiqne, pour se préparer à la
fète de Pâques. — Faïre carémo, observer le jeûne; faire
maigre Chère. Sèn à la fi dé la carémo, nous sommes à la
fin du carème. Y-aï précha sèt ans pér uno Carémo, j'y ai
été sept ans prècher le carème
Dér. du lat. Quadragesimus, quarantaine.
Carèou, s. m. Carreau, gros fer à repasser des tailleurs.
Fran-Carèou, jeu d'enfant, qui consiste à lancer en l'air
une pièce de monnaie qui retombe sur le carreau; celui
dont la pièce est le plus au centre du carreau, et la plus
éloignée des joints, a gagné.
Caréssa, v. Caresser, faire des caresses; traiter avec
des démonstrations de tendresse, d’attachement, d'amour;
faire l'amour.
Dér. du gr. Kafféw, m. sign.
Caréssan, anto, adj. Caressant, qui aime à caresser;
mielleux, doucereux.
Carésso, s. f. Caresse, baiser; geste qui approche de
la trop grande familiarité, à demi indécent.
Dér. du lat. Carus, cher.
Caréstiè, s. f. Cherté, disette, misère. — Jamaï lou
dite lle dé
CAR
michan tén noun éngéndro caréstiè, la grèle n'engendre pas
la disette ni la cherté, parce que,stout en ruinant la con-
trée qu'elle frappe, ce ne sont que quelques individus qui
en souffrent, sans faire augmenter en général le prix des
denrées.
Dér. du lat. Carere, manquer, souffrir de disette.
Caréstioùs, ouso, adj. Pauvre, misérable; chétif ; qui
manque du nécessaire ; maigre, rabougri.
Carétado, s. f. Charge d'une charrette: charretée ; la
quantité qu'une charrette porte ou peut contenir.
Dér. du lat. Carrus, char.
Carétéja, v. frég. Voiturer d'habitude; exercer la pro-
fession de roulier, sans suivre une route habituelle.
Carétéjaire, s. m. Roulier ; qui voiture toute sorte de
marchandises et de denrées, sans service régulier.
Carétiè, s. m. Charretier ; celui qui conduit une char-
rette ; roulier.
Caréto, s. f. Dim. Carétouno. Charrette, voiture à deux
roues destinée à porter de lourds et gros fardeaux. — La
caréto méno lous bidous, la charrette conduit les bœufs,
loc. prvb., qui s'emploie lorsqu'un chef de famille se laisse
gouverner par toute sa maison.
Dér. du lat. Carrus, char.
Carétoun, s. m. Petite charrette; camion; charriot ;
haquet.
Carga, v. Charger, mettre une charge, un fardeau sur. ;
prendre, se vêtir; attaquer l'ennemi, donner la charge ;
déposer contre, rendre un témoignage accablant; mettre
de la poudre et du plomb dans une arme à feu. — Zou/
cargo la miolo, allons ! charge la mule. Cargo mé un pdou,
porte-moi un peu. Carga lou déou, prendre le deuil. Carga
l'éstiou, prendre des habits d'été. Lou tén sé cargo, le temps
se couvre. Carga sus lou davan, prendre du ventre; être
enceinte. Carga la mounino, s'enivrer, se griser. Té véou
carga, je vais fondre sur toi. Lou cargo à fâou, il dépose
. faussement contre lui. Carga soun fusil, charger son fusil.
Carga tro, tro carga, surcharger.
Dér. de la bass. lat. Caricare, charger un char.
_ Cargadou, s. m. Chargeoir ; toute espèce d’engin pour
aider quelqu'un à charger un fardeau; spécialement, gros
billot de bois qu'on pose debout et sur lequel les manœuvres
des maçons posent et garnissent leur planche à mortier,
pour la charger sur leur tête sans aide et sans avoir besoin
de la soulever de terre.
Cargadouïros, s. f. plur. Corde à charger un mulet
lorsqu'il porte à bât. Elle est faite exprès et très-peu tordue
pour pouvoir supporter une plus grande torsion quand on
la garrotte, qu'on la serre avec le garrot, bio.
Cargaïre, aïro, adj. Chargeur; celui qui charge-ou qui
aide à charger.
Cargamén, s. m. Chargement; charge d'une voiture ou
d'un mulet; quantité qu'on transporte en un voyage soit
en voiture, soit à dos de mulet; chargement, reconnais-
sance d’un dépôt. :
CAR 177
Cargassèlo, s. f. Manière de porter quelqu'un sur les
épaules, en le mettant à califourchon sur son cou. — Faïre
cargassèlo, faire la courte échelle à quelqu'un, le hisser
sur ses épaules pour l'aider à atteindre à un point plus
élevé ; lui servir d'échelle.
Dér. de Cargo et de Sèlo, parce que celui qui grimpe
ainsi est placé comme sur une selle.
Cargastièiros, s. f. plur. Cadre de bois fixé à un bât et
garni de cordes, sur lequel on transporte à dos de mulet
les gerbes à l'aire. Ce procédé est peu usité de nos jours, à
cause du progrès de la grande et petite voirie qui permet
aux voitures d'aller dans presque tous les champs. On ne
le rencontre guère que dans les pays de montagnes.
Cargo, s. f. Dim. Carguéto. Charge, fardeau, faix ; obli-
gation onéreuse, permanente; impôt; ce qu'on met pour
charger une arme à feu. — Pourta à cargo, porter à dos
de mulet.
Cargos, s. [. plur., en lerme de vigneron, une viette,
un sarment qu’on taille plus long que les autres et qu'on
fixe en arc au tronc de la souche, pour obtenir une plus
grande quantité de raisins; mais l'excédant que produit
cette branche à fruit forcée, n’amène le plus souvent d'autre
résultat que de fatiguer le cep et une prompte mortalité, si
l'expérience se renouvelle longtemps. On emploie cepen-
dant le procédé pour une vigne vieille qu'on a le projet
d’arracher au bout de quelques années. Il est toutefois des
espèces de cépages qui ne se trouvent pas mal de ce trai-
tement et qui même, sans lui, ne produiraient que médio-
crement; le raisin dit de la Madeleine est de ce nombre.
Cargo-péio, s. m. Bruine, petite pluie. — Tombo dé
cargo-péio, il bruine, il fait une pluie fine et menue, qui
pénètre et alourdit les vêtements.
Le mot est composé de Carga, charger, et de Péro,
habits; en général, mauvais habillons portés par les pauvres
ou gens sans asile, qui sont plus exposés à la pluie. —
Voy. Péio. :
Cargué, s. m. Étui à mettre les épingles et les aiguilles
à coudre.
Cariaje, s. m. Charriage ; action de charrier ; salaire du
voiturier. Au fig. train de maison; train de grand seigneur.
Dér. du lat. Carrus, char.
Carièiro, s. f. Péjor. Carièirasso. Dim. Cariëiréto. Rue;
grande, longue ou vilaine rue; petite rue, ruelle. — Es à
la cariiro, il est réduit à la mendicité. Dès éscus sé trobou
pas à la cariètro, dix écus ne se trouvent pas sous le sabot
d'un cheval. ANèci à coure cariéiro, fou à courir les rues.
Escampa-mé aqud à la carièïro, jetez-moi cela à la porte,
à la rue.
Dér. du lat. Carrus, char; dans la bass. lat. carreria ;
en esp. carera; en port. carreira; en ital. carriera.
Cariolo, s. f. Cariole; en agricult. petite charrette;
espèce de petite voiture assez légère, montée sur essieu, à
deux roues, couverte de toile et garnie de bancs; fourgon ;
patache.
23
178 ‘CRT -
Carioun, s. m. Carillon; tapage; brouhalia ; battement
des cloches à coups précipités et dans une sorte de me-
sure.
Caritadoüs, ouso, adj. Charitable, aumônier ; qui aime
à faire la charité, à distribuer dés aumôûnes.
Dér. du lat. Caritas, charité.
Carmantran, s. ”. Carème-prenant; jours-gras, der-
nière semaine du carnaval.
Corr. du fr. Carème-entrant.
On appelle Carmantran le mannequin qui représente le
carnaval dans les mascarades du mardi-gras, sous la figure
de Silène. Par ext. on donne ce nom à une femme débraillée,
sale et un peu déhontée.
Carmantréto, s. f. Dim. de Carmantran. Quelques
personnes donnent ce nom à la semaine de la Sexagésime,
l’avant-dernière du carnaval; les autres au dimanche des
Brandons, la Quadragésime, le premier dimanche du
Carème.
Carnabiôou, s. m., ou Cornobiôou, s. m. Vesce sau-
vage des prés et des blés, à fleur jaune, Vicia lutea, Linn.,
plante de la fam. des Légumineuses.
Dér. de Car et de Bidou, viande à bœuf, parce que ces
plantes les engraissent.
Carnaduro, s. f. Carnation ; teint du visage; ton de la
chair.
Dér. de Car, chair.
Carnaje, s. m. Carnage ; abattis d'hommes ou d’ani-
maux ; ensemble des chairs d’un animal de boucherie.
Dér. de Car, chair.
Carnassiè, sièiro, adj. Carnassier ; carivore ; en par-
lant des hommes, qui aime la viande, qui s’en nourrit de
préférence.
Carnassièiro, s. f. Carnassière ; garde à manger ; caisse
garnie de canevas que l’on suspend dans un lieu frais pour
conserver la viande et la préserver des mouches ; gibe-
cière, sac de chasse.
Dér. de Car, chair.
Carnavaïas, s. m. Péjor. de Carnaval. Femme laide,
sale, débraillée, mauvaise langue, déhontée; mal embouchée.
Carnaval, s. m. Carnaval ; temps consacré aux amuse-
ments, divertissements, danses et bals. Le peuple fait partir
le carnaval de la fête des Rois, mais seulement jusqu'au
mardi-gras. Le carnaval n’est mème à proprement parler que
le mardi-gras, lorsqu'on se sert du mot pour désigner une
date : Lou jour dé carnaval signifie le mardi-gras. Car-
naval est aussi une épithète injuriéuse comme Carman-
tran el Carnavaïas. — V. ç. m.
Dér. de Car, chair, et Aval, en bas, c’est-à-dire que
c’est l'époque où le règne de la viande va finir. Cette éty-
mologie semblerait prouver qu'en effet le carnaval dans
son origine ne comprenail que les derniers jours ; car si on
l'eùt fait remonter à l'Épiphanie, il était absurde de dire
que la viande est à bas, puisqu’au contraire c’est le temps
de l’année où l'on en fait la plus grande consommation.
CAR
D'autres étymologistes tirent ce mot de la phrase latine :
Caro, vale! Adieu la viande; ce qui pour le sens revient
absolument à l'idée ci-dessus.
Rien n’établit quel est l'idiome, du fr. où du lang., qui
eut l'initiative de la formation de ce mot. La première éty-
mologie semblerait l’accorder au lang., la deuxième au fr.
Cela cependant ne préjuge rien ; car la section carn, prise
du lat., convient aussi bien à l’un qu'à l’autre: le mot
aval est aujourd'hui plus lang. que fr., mais il était fr.
jadis ; il est encore comme technique un terme de ponts-
et-chaussées. Quant à vale provenant du lat., il a appar-
tenu au premier occupant, quelle que soit celle des dèux
langues qui a puisé à cette source, et aucune ne s'en est
fait faute.
Carnifès, s. m. au pl. Carnifèsses. Chagrin cuisant; ver
rongeur; malaise, inquiétude; remords; souci. — Aÿ un
carnifès qué mé charquo, j'ai quelque chose qui me ronge,
qui me tourmente.
Dér. du lat. Carnifex, bourreau.
Carnio, s. f. Viande ; viandaille ; expression de mépris
ou de satiété, à propos d’un repas qui est trop fourni en
viandes.
Carnivas, s. m. Carnosité ; excroissance charnuë. Se
dit surtout des mamelles de femme et des animaux, dont
les glandes laiteuses sont peu spongieuses et alvéoliques et
ne rendent que peu de lait.
Péjor. de Car.
Carnu, udo, adj. Charnu ; fourni en chair ou en pulpe,
comme un fruit. Au fig. épais, volumineux.
Caro, s. f. Carre ; carrure de la taille, des épaules ; mine,
air du visage. — Aqud’'s uno bèlo caro, voïlà une bëlle
carrure, une bonne mine! Uno bono caro, une heureuse
physionomie, un bon air, prévenant et affable. Bon pañ,
bon vi el bono caro d’oste, bon pain, bon vin et bonne
figure d'hôte.
De ces deux acceptions diverses, la première dér. de
Cara, carré, et la seconde du lat. cara, masque.
Carogno, s. et adj. f. Dim. Carougnéto; péjor. Carou-
gnasso. Charogne; carogne, dans Molière. Pris adjectiv.
comme injure à une personne : femme de mauvaise vie,
de mauvaise foi; hypocrite.
Péjor. de Car.
Carosso, s. m. Dim. Caroussélo, s. m. Carrosse. Se dit
génériquement de toute voiture de luxe, à quatre roues et
suspendue. Le lang. éminemment populaire a dédaigné
toutes les appellations spéciales que la mode aristocratique
attribue à chaque espèce de voiture.
Dér. du lat. Carrus, Char.
Carougnado, s. f. Charogne ; de la chair de bête morte
à la voirie. Par ext. toute sorte de viande de mauvaise
qualité, ou trop coriace ; même une bête vivante quand
elle est extrèmement maigre. g
Dér. et péjor. de Car.
Carouje, s. m. — Voy. Cabassudo.
CAS
Caroussado, s. f. Carrossée; les personnes contenues
dans un carrosse.
Caroussiè, s. m. Carrossier ; qui fait et vend des car-
rosses et voitures.
Carpan, s.m. Bonnet ou toquet d'enfant; coiffure de
luxe, à côtes de melon, dont les arêtes étaient souvent bor-
dées d'un cordonnet d’or ou d'argent, ou de clinquant. Ce
bonnet était d'ordinaire en velours. La mode en est passée
chez les gens riches; le peuple la conserve encore pour les
plus jeunes enfants.
Diverses étymologies se présentent, toutes également
savantes. D'abord on le ferait dér. du lat. Carpere, parce
que le carpan prend, embrasse toute la tête; puis de l’hé-
breu Carpas, fin lin, dont on faisait ce toquet; enfin du
gr. Kapxe, bonnet grec des ilotes de l’Archipel.
Carpan est pris aussi dans le sens de soufllet, tape sur
la joue ; coups.
Dans cette dernière acception, l'étym. pourrait être prise
du gr. Kapxéc, carpe, poignet, d’où le lat. Carpus et carpere.
Carpéloüs, ouso, adj. Chassieux ; qui a les yeux pleins
de chassie. — Voy. Ciroùs.
Cartable, s. m. Portefeuille propre à contenir des
papiers, fort en usage aujourd’hui parmi les jeunes écoliers.
© Dér. du lat. Cartobolus.
Cartazèno, s. f. Liqueur alcoolique composée avec de
l'esprit et du moût qui tient lieu de sucre. C’est une liqueur
grossière dont le peuple use seul dans les cafés borgnes et
sur l’établi des marchandes d’anisette.
Corr. de Carthagène, ville d'Espagne, d'où sans doute
cette liqueur a été primitivement importée.
Carto, s. f. Carte à jouer ; carte de géographie; géogra-
phie. — Tira ou faïre las cartos à qudouquus, faire les
cartes, tirer l’horoscope de quelqu'un par le jeu des tarots.
Aï pas qué.de cartos. blanquos, ou dé cartos noblos, je n'ai
dans mon jeu que des cartes blanches, c’est-à-dire point de
figures, ou des cartes nobles, c’est-à-dire des figures seule-
ment. .Counouï la carto, il est expert en géographie. Au
fig. pèrdre la carto, perdre la tête ; être troublé; se brouiller;
s'égarer.
Dér. du lat. Charta, papier.
-Cartatoucho, s. f. Cartouche, petit cylindre creux, de
papier roulé, renfermant la charge ordinaire d’un fusil.
Ce mot est une corruption du fr. ou plutôt un raffine-
ment pour s'éloigner de lui. On l'étend jusqu'au nom
propre du célèbre voleur, Cartouche, qui est très-popu-
laire, et qui sert souvent de terme de comparaison.
- Cartoü, s. m. Carton; carte. — Aïmo bièn lou cartoù,
dit-on d’une personne qui est passionnée pour les jeux de
cartes.
1 Dér. du lat. Charta.
.Caruro, s. f. Carrure; taille carrée ; PERTE
embonpoint.
Dér. de Caro.
«Gas, s. m. Cas; événement, aventure ; conjoncture ; fait;
cas
action; estime. — Pér cas d'asar, par hasard, par aven-
ture. Es pa'qui lou cas, au fait; ce n'est pas l'embarras.
En cas qué vèngue, si par événement il venait; au cas
qu'il vienne. N'én faï fosso dé cas, il l'a en grande
estime. En cas dé cas, en cas que, dans le cas où ; idiotisme
avec une forme adverbiale.
Dér. du lat. Casus; par apocope cas.
Casâou, s. m. Dim. Casalé. Péjor. Casalas. Masure ;
petite maison à moitié ruinée ; ruines d’une habitation quel-
conque ; cahute.
I est lui-même péjor. du lat. Casa, chaumière.
Les noms propres Casal, Casalis, Chazel, Chazelle, sont
dérivés de Casdou, casal, en suivant les différentes pronon-
ciations des divers dialectes. L'abbaye de la Chaise-Dieu,
dans le Velay, qui, dans le langage du pays se dit Za Chaso-
Diou, vient de la même origine et répond au lat. Casa Dei,
La rue des Cazaux, lous Casdous, du vieil Alais, nom
encore conservé, était autrefois Casalia in suburbio, les
chétives et pauvres maisons du faubourg, à l'extrémité
sansdoute de la ville, quand elle prit naissance sous la Roque.
La série de noms propres formés par cette nouvelle con-
sonnance, se modifiant encore suivant les fantaisies ortho-
graphiques, est nombreuse, et laisse apparaître sa constitu-
tion primitive : Chazaux, Casaux, Cazot, Chazot, Chasa-
lette, ont une commune dérivation avec les précédents.
Casaquin, s. m. Casaquin, espèce de vêtement, de
spencer de femme, d’une éloffe et d’une couleur différentes
de la jupe, que les dames portaient au XVIIIe siècle, et que
les paysannes ont conservé longtemps au XIX°*. Cette mode
a disparu même chez ces dernières qui portent la robe d’une
seule pièce. Mais on ne peut encore jurer qu’il n’y aura pas
de retour aux anciennes formes.
Dim. de Casaquo.
Casaquo, s. f. Casaque; espèce de large veste dont on
couvre les autres habits pour les préserver et se préserver
soi-même de la pluie et du froid : terme générique de toute
espèce de surtout. — Vira casaquo, tourner casaque, chan-
ger de parti politique, ordinairement pour prendre celui
du plus fort.
Au rapport de Ménage, ce mot ne serait qu’une corr.
de Cosaque, peuple de qui nous viendrait cet habillement.
Cascaïa, v. Glousser comme les poules; gazouiller;
jacasser; jaboter; clapoter comme l'eau d'un ruisseau ;
sonner creux comme les noix sèches.
Ce mot est une onomatopée du cri de la caille et forme
comme lui une mesure semblable au dactyle latin composé
d’une longue et de deux brèves.
Cascaïaïre, aïro, adj. Qui glousse; qui gazouille ; jacas-
seur.
Cascaïaje, s. m. Gazouillement; babil; jacasserie.
Cascaïéja, v. frég. de Cascaïa.
cavèl, s,. m. Hochet d'enfant garni de grelots et d'un
SLA d'ivoire ou de cristal que les enfants à la mamelle
sucent et mâchent quand leurs gencives se gonflent et que
179
180 CAS
leurs dents commencent à pousser; quand ils sont un peu
plus grands, ils continuent à se plaire à ce carillon du
cascavël ; mais alors le bout est garni d’un sifflet. Quelque-
fois ce hochet est composé d’une espèce de petit tambour,
garni de parchemin, emmanché d’un petit bâton et rempli
de pois secs qui font un roulement monotone en l'agi-
tant.
Sa dérivation paraît être de Cascaïa, dans le sens du
bruit des noix sèches qu’on remue et dont l’harmonie res-
semble assez à celle du cascavèl; mais Ménage prétend qu'il
a été pris du lat. Scabellum, scabillum, espèce d'instru-
ment qui avait de grands rapports avec les castagnettes.
D’autres le tirent du gr. Kapzxlpw, résonner. La bass. lat.
disait Cascaviellum. En esp. Cascal.
Casèrnos, s. f. plur. Caserne; bâtiment pour loger les
troupes en garnison.
Ce mot ne se prend qu’au plur. en lang.
Dér. du lat. Casa, logis.
Casqué, s. m. Casquette d’enfant ; bonnet à visière.
Dim. de Casquou.
Casquéto, s. f. Casquette, coiffure pour tous les âges,
avec ou sans visière.
Dim. dér. de Casquou.
Casquou, s. m». Casque, armure défensive qui couvre la
tète. — De La Fare a dit, dans la Bdoumo dé las Fados,
d’un croisé tué en combattant en Palestine :
Laïssè soun casquou et lou dédin
Entre las mans d’un Sarazin.
Dér. du lat. Cassis, mème sign.
Cassa, v. Chasser; aller à la chasse, poursuivre le
gibier ; prendre, attraper, gagner un mal ; au jeu, détourner,
interrompre un Coup. — Bon chi casso dé ragço, bon chien
chasse de race. Cassa un réoumas, gagner un rhume. Faï
pas qué mé cassa, il ne fait qu'arrèter, que détourner mon
coup, m'empècher de jouer.
Le radical de Cassa est fort controversé. On le prend
dans le lat. Casses, rèts, filets de chasse, dont se servaient
les anciens. On le fait venir de Casnar, mot gaulois pour
désigner celui qui pourchasse, qui poursuit quelque chose.
On cite aussi un mot celtique, lequel aurait fourni Caciare,
chasser, aux capitulaires des rois carlovingiens. Ménage
pense qu'il vient du lat. Captare, et Ch. Nodier, du vieux
fr. Sacher, formé du lat. Sagittare, lancer une sagète, une
flèche. Les probabilités me paraissent en faveur de Casses.
Cassagno, n. p. de lieu et de personne. Augm. Cassa-
gnas. Dim. Cassagnéto, Cassagnolo. Cassagne, Cassagnas,
Cassagnette, Cassagnoles.
Ce mot est un de ceux que leur radical et leur finale
recommandent spécialement à un Dictionnaire étymolo-
gique raisonné. Il est des plus propres à mettre sur la trace
de la formation et de l'emploi des suffixes dans notre dia-
lecte, et par là ce que nous avons à en dire se rattache aux
observations générales présentées à l’art. Agno, désinence.
CAS
(V. ©. m.) Ainsi chaque portion de notre travail essaie de
se relier à une pensée d'ensemble, sans la moindre pré-
tention à faire un traité didactique et complet, et surtout
sans autre engagement que la variété, sans autre méthode
que de ne pas abandonner le fil conducteur tout en le repre-
nant à nos heures.
Nous le rappellerons donc : les désinences, ces syllabes
jointes au radical pour lui donner plus d'extension signi-
ficative, forment une des parties les plus originales de la
physionomie de notre langue. Elles lui viennent du latin,
qui n'avait fait cependant qu'accommoder à son génie des
finales antérieures. Leur emploi ne pouvait pas varier et
les modifications dans leur structure, amenées par des
causes diverses, dénonçant une articulation plus ancienne,
n’ont pas empêché de reconnaître leur parenté à l'air de
famille, de s'assurer de la régularité de leur succession
généalogique et d'établir leur égalité de valeur à la manière
dont elles affectent les radicaux. Ici se présente un nouvel
exemple de cette équipollence dans la diversité des formes,
sur laquelle nous avons tant insisté. Nous aurons de plus
à remarquer les tendances que nous signalions à l’adoucis-
sement des inflexions, qui s'introduisit dans la langue
romane à mesure qu’elle se dégageait de la gravité romaine
quelquefois un peu rude. Notre mot, soumis à la question,
ne résistera pas à rendre bon témoignage de ces phéno-
mènes.
Cassagno est formé du radical celtique Cass et du suffixe
collectif agno : il signifie Chénaie. Le chène, cet arbre
typique du culte des Druides, si commun dans les forêts
dont notre sol était couvert, a dù laisser son nom à une
infinité de lieux et de personnes, et il est naturel que ces
dénominations se retrouvent sous des formes nombreuses,
en tenant compte des modifications que la langue et ses
dialectes ont subies à toutes les époques. Cass, racine,
. voulait dire chène. Le roman l’avait conservé : le lexique
de Raynouard le confirme par cette citation : Casser (r
muet) es arbre glandier. Dans la Guienne, on dit encore :
Casso; mais notre dialecte n’a pas retenu le primitif ancien ;
seuls, ses dérivés augm. ou dim. ont persisté,. dans la
composition de noms propres.
Sur ce radical bien déterminé, les formules adjectives ne
pouvaient manquer de se répandre. Or nous savons que le
signe celtique de la collectivité, le plus en usage, était
AC—EC ; il est donc probable que pour désigner une ré-
union de chênes, un lieu abondant en chênes où quelque
provenance du chène, une propriété remarquable par ses
chènes, ou mème le possesseur de ce domaine, la première
forme d'appellation dut être cass-ac où cass-ec. Le latin
trouva d’abord commode d'ajouter sa propre désinence la
plus simple en us, a, um, qui ne changeaïit pas la signifi-
cation; mais il avait aussi ses finales particulières, et plus
la Gaule se latinisait, plus aussi l'introduction des formes
romaines se multiplia; par où survinrent les terminaisons
en anus, enus, aneus, anius, alus, elus, a, um, qui s’al-
CAS
longèrent ensuite en anicus, enicus, et en anicæ, enicæ,
onicæ, etc. de la mème catégorie, ainsi que nous l'avons
indiqué.
Il s'agit de retrouver ces métamorphoses successives
dans les dénominations adoptées à l'époque où le latin était
parlé dans les Gaules, et de suivre leur dégénérescence
dans la basse-latinité jusqu'à la formation de la langue
romane rustique et de notre languedocien. Rien ne prou-
vera mieux que toutes ces terminaisons s'appliquent à un
mème radical, sont égales entr'elles et qu'elles ont voulu
les unes et les autres lui imprimer une signification équi-
valente. Si elles se reproduisent exactement dans les vieux
cartulaires, titres ou instruments, dans les anciennes
nomenclatures géographiques, à côté des appellations en
roman ét dans la langue vulgaire, données comme une tra-
duction et leur représentation fidèle, et si on les voit ainsi
se perpétuer dans notre idiome moderne par une généalogie
non interrompue, attachées toujours à la tige radicale, il
en résultera de plus fort cette certitude que le sens adjectif,
collectif, possessif ou patronymique ne s’est pas altéré à la
suite de transformations purement euphoniques de suffixes
dont l’équivalence substantielle est certaine.
IL faut remarquer cependant que les différences d’in-
flexion, auxquelles les finales ont été soumises, devaient
avec une certaine intensité beaucoup moindre, atteindre
les radicaux eux-mêmes. Aussi n'y ont-ils pas non plus
échappé dans l'élaboration nouvelle. Le C qui commence
le mot Cass, se prononçait toujours durement en latin,
même devant les voyelles e eti; la première innovation fut
de lui donner le son chuintant du CH, quand il précédait
une voyelle quelconque. Nous en avons cité de nombreux
exemples, parmi lesquels notre mot aurait pu entrer. En
s'adoucissant, le C fait souvent aussi infléchir l'a qui le
suit et le change en e, surtout en fr. : furca, fourche ;
arca, arche; musca, mouche; peccare, pécher ; vacca,
vache, etc. De Cass il a fait sans difficulté Ches, qui d’abord
avait élé Cais, aujourd’hui Ché pour Ches. Une fois sur cette
pente les permutations se multiplient : le son S s'applique
au C dur latin ; dans quelques dialectes, le C—S devient
égal au P, et par réciprocité, surtout en fr., le T se trans-
forme en S. De son côté le CH est attiré dans le même
orbite, et, variant du C=S à T=S, il prend ce dernier
son de la dentale ou se complique de doubles lettres, comme
SCH, SH, TSH, DS. Mais ce changement du T est plus
rare dans notre dialecte. Il devait cependant se rencontrer
dans le celtique, et si, dans des mots que nous allons citer,
cette assimilation se produit, c'est plutôt à la base radi-
cale du mot qu'à la permutation qu'elle doit être attribuée :
ex. Tannetum et ses dérivés comparés avec Casnetum et
‘autres.
Tous ces principes, ces changements dans la prononcia-
tion du radical, ces altérations dans les désinences, l’occa-
sion se présente de les prendre de nouveau sur le fait. 11
faut voir comme ils se vérifient et s'appliquent.
CAS 181
Du Cange semble avoir tracé en quelques lignes cette
histoire des transformations, quand, au mot Casnus, em-
ployé au moyen-âge, il donne ces variantes ethniques :
« Casni sunt quercus ; nostris Chesnes, Picardis Quesnes,
Occitanis Casses et Cassenate. » L'assimilation entre les
deux derniers mots est certaine. Cassenat, d'après Sau-
vages, n'est autre que Cessenat, taillis de chènes, devenu
n. pr., comme Cassano, noix de chène, est la reproduction
du lat. Cassana, par adjonction au radical Cass du suffixe
de provenance ana. De tout cela on peut faire presque
sortir cette équation : Cass = cais = ches = ques = chas
= cess. Maintenant sur les variantes, les suffixes apporte-
ront leur contingent de variétés et viendront se former
suivant les dialectes, les mots analogues et équivalents,
dont nous allons voir les séries.
D'abord, le radical Cass, traduit par Casnus, chène, n'in-
dique qu'une individualité. Il fournit comme analogues les
noms propres de lieux et d'hommes : Casse, Chas, Caisne,
Le Kain, Duchône, Duquesne; Chassac (Gard); Chasse
(Basses-Alpes et Jura) ; Chasse (Sarthe); Chasne (Ile-et-
Vilaine), et plus de trente bourgs ou villages où le mot
chêne entre seul en composition ou comme qualificatif sin-
gulier.
Quand il s'agit de pluralité, de collectivité, de prove-
nance, de propriété, le latin fait sien le radical et y adapte
la richesse de ses suflixes; à côté du subst. casnus, on
trouve les adj. cassaneus, nius, a, um ; Cassetum, casnetum,
formés sur le modèle de quercus, quercenus, quernetum,
quescetum.
Pour sa part, la langue vulgaire, qui se forme, se sou-
vient aussi du radical, et voulant écarter le latin dégénéré,
elle écourte le mot de sa finale trop romaine ; puis chaque
clan, chaque ville plie radical et suffixes à ses aptitudes de
prononciation, et alors les variations dialectales croissent à
l'infini sur le même mot, sans que pour cela sa significa-
tion ait changé et que le sens ait été détourné.
Voilà comment s'expliquent les affinités et les différences
dans la formation des noms, les influences de l'organisme
et l'action des climats sur leur prononciation. Suivant les
zones diverses, telle forme est répandue ou se montre rare-
ment, au Midi comme dans le Nord. Nous l'avons déjà
rémarqué à propos de la finale caractéristique argues ; nous
y reviendrons sur bien d'autres.
Comme il apparait, notre mot Cassagno, chargé de sa
terminaison caractéristique languedocienne, appartient à
tous les titres, par son origine et par sa configuration, à la
nombreuse famille dont nous parlons : sa parenté n’est pas
douteuse. L'analogie et sa signification le placent au mème
rang et en font le même mot que les noms d'hommes : La
Chassagne, La Chesnay, Duchesnois, etc., et ceux de loca-
lité : Chanac (Corrèze, Lozère); Chanas (Isère) ; Chanay
(Ain, Vendée); Channay (Côte-d'Or, Indre-et-Loire) ; Cha-
nät (Puy-de-Dôme); Chanet (Cantal, Isère); Le Chanet
(Jura); Le Chaney (Ain); Chanois (Vosges); Chesnei (Eure);
182 CAS
Chasnay (Nièvre); Chenay (Marne): Chenois (Meurthe);
Sannois (Seine-et-Oise); Xenois (Vosges); Quesnay (Cal-
vados); Quesnoy (Nord) ; Quennois” (Belgique), etc., dont
l'identité ne résulte pas seulement de la conformation, mais
surtout de leur représentation presque invariable en Jatin
par quercetum, quesnelum, Où casnetum.
La nomenclature pourrait s'étendre encore et l'on trou-
verait à y ajouter dans notre voisinage, avec une évidente
concordance, Sénéchas, canton de Génolhac, appelé en
4211 villa de Chaneschas; en 1620, Channeschas; et d’au-
tres appellations où le .C est remplacé par un T, moins
pour l’euphonie, avons-nous dit, que pour répondre à un
synonyme celtique de chêne; car l’arbre druidique s’appe-
lait aussi Thann, tann, dont le lat. fit Tasnus, et toutes les
variations, très-rapproché de Casnus, au point de, se con-
fondre. De là naitraient les homonymies de Thenay (Indre) ;
Tannois (Meuse); Tagnac, commune de Chamborigaud
(Gard); et Tanargues, montagne de l'Ardèche, avec la.dési-
nence qui nous est familière. Les concordances atteignent
les dérivés augm. et dim., et la formule ethnique spéciale
à chaque pays n'empêche pas de les reconnaitre. Cassagnolo
aura par conséquent pour identiques Casseneuil ou . Cas-
neuil (Lot-et-Garonne); Theneuil (Indre-et-Loire); The-
neuille (Allier) ; Seneuille (Haute-Loire), comme . Chenaïlles
(Loiret), est identique à Thenailles (Aisne), par le moyen
de procédés pareils.
Toutes ces dénominations, qu’elles s’appliquent aux per-
sonnes ou aux localités, auront donc pour principe et pour
base la même racine, remonteront à une source commune.
Pour tenir ainsi à l’idiome celtique, sont-elles contempo-
raines de la première occupation de notre territoire par les
Celtes? Je ne le mettrais pas en doute pour certaines d’en-
tr'elles qui sont des désignations générales ou géographiques
de contrées, de montagnes, de régions ; quant aux noms
propres d'hommes, qu’elles soient suffisantes à établir une
généalogie, la déduction est peut-être possible, la descen-
dance probable, mais je n'ai pas charge de vérifier, non
plus que de certifier autrement leur lignée. En tous cas, il
est certain que l’origine radicale de notre mot et deses ana-
logues se trouve dans l’idiome parlé en Gaule avant la
conquête romaine, et que le chêne, «arbre, était nommé
cass et tann ; qu'une terminaison collective, formée sur le
modèle latin, variable d’un pays. à l’autre, communiqua à
ce radical primitif un sens de pluralité, de provenance, de
propriété, le transforma en adjectif, et qu'il aété ainsi trans-
mis à notre dialecte actuel, avec une signification assez
positive pour pouvoir affirmer que les noms qui en sont
affectés tiennent au chène par quelque branche ou.par leur
racine. Ce qui autorisera, si l’on veut, les villes, villages
ou individus, désignés par quelqu'une des. variantes. qui
précèdent, à prendre pour armes parlantes un chêne de sino-
ple, fûté de sable, avec:iglands d'or.semés sur l’éeu, avec
“garantie-que leur nom se-prête à cette fantaisié héraldique.
Cassaïre, aïro, adj. Chasseur, chasseresse ; celui qui
cas
chasse habituellement ou qui aime à chasser. — Cassaire
dé cardounios, péscaïre à la ligno, noun crompè ni tèro, ni
vigno, prvb., chasseur de chardonnerets, pêcheur à la
ligne, n’achelèrent jamais ni terre, ni vigne : trop petits
profits des deux côtés. |
Dér. de Cassa.
Cassana, v. Attacher, coudre, ajuster la ceinture d’une
jupe, d’uné culotte, d’une robe, d'un tablier.
Cassano, s. f. Ceinture de culotte; coulisse d'une jupe ;
cordon de ceinture.
Cassäou, s. m.Sac à demi-plein de paille dont se servent
les manœuvres, les gens de la campagne pour porter les
fardeaux. Ils-mettent sur la tête le fond qui est vide en
guise de capuchon, le haut, qui est plein et fermé par un
cordon, forme sur leurs épaules un coussinet sur lequel
repose le fardeau. — On né pourtariè bé tan sans cassdou,
on pourrait bien en porter autant sans coussin, dit-on
prvb. d’une faible somme ou d'une mince fortune.
On disait autrefois Cabussdou, et le mot est encore usité
dans quelques localités voisines. IL dérivait probablement
de Cabésso, tête. Cassäou, qui n’est qu'une contraction,
est seul admis de nos jours.
Il est impossible ici de ne pas remarquer l’analogie,, au
moins dans la forme, qui existe entre le mot p: tet
celui-ci; ne se rapprocheraient-ils pas aussi par le Sens ?
Cassano, qui est pris pour ceinture, a signifié encore capu-
chon, cape, chaperon, et Michel, dans l’'Embarras de la
foire de Beaucaire, dialecte nimois, l’emploie avec cette
orthographe pour Céoussano, écrit ailleurs Coussano. Ne
pourrait-on pas voir,là des altérations dont la base primi-
tive et commune aurait été cap, cab, cabésso, col, et dont
le sens aurait été détourné ensuite pour exprimer aujour-
d’hui et d’une part la ceinture d’une jupe, d’une robe, et
d'autre part cette espèce de sac, serré aussi par un, cordon,
qui est le coussinet placé sur la tête et descendant sur le
cou et les épaules? —Voy. Sacol.
Cassarèlo, s. f., ou Vèsto cassarèlo. Espèce de frac à
basques très-courtes qui fait encore l'habit des dimanches
des raïols-proprement dits. Il est ordinairement de cadis et
doublé de serge écarlate. La coupe du Veston de nos petits-
crevés à la mode ressemble beaucoup à celle de, la. Cassa-
rèlo. Cet, habit était probablement, autrefois une veste.de
chasse, et, il a.tiré son nom de cette idée. On supprime
-ordinairement dans la conversation le mot vèsto,. et on.dit
-simplement uno cassarèlo.
: Casséirolo, s.. f. Dim. Casséirouléto., Casserole, ,usten-
sile de cuisine.en forme de bassin, en terre le plus souvent,
«muni d’une, queue ou manche.
Dim. du lat. Capsa.
Cassérd, s. m. Étameur de casseroles dont le,cri
-est : Cassérol'éstama.. Un. Casséro est aussi un chapeau
-pointu, parceque. ces industriels, surtout ceux, qui vien-
«nent de la Calabre, portent, des chapeaux. très-pointus. de
forme.
CAS
Cassibraïo, s. f. Canaille; racaille; race de bohème ; et
marmaille, en parlant des petits enfants.
Son étym. est-elle tirée de Briaïo, canaille, troupe, trou-
peau, péut-être formé ou altéré de Brébial, par contract.,
ancien motsignifiant troupeau de brebis, venu de Berg, qui
à fourni Vérvez ; où bien de Braïa, brailler, crier, auquel
on' aurait ajouté le rad. Cass, de casses, filets, qui a donné
cassd, casso, et lés composés ?
Cassino, s. f. Cassiné; mauvaise hôtellerie ; cabaret sale
ét à mauvais renom; maison mal famée.
Dim. du lat. Casa, chaumière, loge. En ital. Casino, qui
ést devenu français et très-employé.
Cassio, s. f. Produit de la chasse; le gibier, gros ou
menu, tué dans une seule chasse. Il est pris le plus sou-
vent én mauvaise part, en parlant d’une mauvaise chasse
qui n'a produit que dés petits-pieds.
Dér. dé Casso.
Cassiou, s. f. Chatouillement; action de chatouiller ;
sensation produite par le chatouillement. — Faïre la cas-
siou, Chatouiller, causer une contraction nerveuse en Cha-
toüillant une personne au genou, à la plante des pieds ou
à la taille. Crén pas gaïre la cassiou, il ne craint guëré le
chatouillement, dit le prvb., en parlant d'un mari qui ne
‘s'émeut pas des galanteries de sa moitié.
Il semble que Cassiou n'est que la corruption de Catiou,
ou l'application de la règle française, qui chañge en € ou
en double SS, la lettre T, quand elle est suivie d'un à ou
d’une autre voyelle. Le mot Catiou lui-môme parait dérivé
de Ca, parce que cette espèce dé chatouillement ressemble
aux carésses des petits chats. Peut-être est-ce aussi la cor-
ruption de Gratiou, également usité et tiré de Grata. De
Gratiou la dégénérescence s'établirait par gatiou, catiou,
cassiou. D'autres cependant veulent voir son origine dans le
lat. Catulire, qui avait produit le vieux mot français Catiller.
— Voy. Catiou et Gratiou.
Casso, s. f. Chasse, action de chasser ; partie dé chasse,
poursuité du gibier.
Dér. du lat. Casses, filets.
Casso, s. f. Fois, une fois; tour, ronde, au jeu. —
Auésto casso, cètte fois-ci. Séroi la casso, tenir tête au
jeu jusqu'au bout de la partie. Pas qu’aquésto casso, rien
que cette ronde, que cette partie; ce fob au wisth.
Ce mot dans l'usage revient parfaitement à l'ital. Volta,
à l'esp. Vegada, que la langue romane avait aussi.
Dér. peut-être du lat. Casus, sort, incident.
Cassô, cassoto, adj. Ladre, porc atteint de ladrerie au
dernier degré, qui tombe en pièces, en dissolution.
Dér. du lat. Cassus, vain, inutile, bon à rien.
Cassô, s. m. Sorte de cuiller faite d'un baril d’anchois
emmanché d’un bâton, pour arroser d'eau bouillante la
pâte d'olives dans le pressoir d'an moulin à huile.
Dér. du lat. Capsa, cassette, cassolette. -
Casso-gnèiro, s. m. Surnom qu'on doarie-& Fiféériet
tous ses accessoires, parce qu'ils chassent les puces.
CAS 183
Cassolo, s. f. Grande terrine à deux anses; soupe,
potage, cuit au four dans la terrine de ce nom, compost
de riz ou de gruau, assaisonné de petit salé ou d’andouille
appelée missoù. C'est un mets fort en honneur chez le
peuple, qui en fait le régal de son souper du dimanche,
depuis un temps immémorial. Sauvages y rapporte cer-
taines locutions proverbiales telles que {éva dé cassolo, ère
dégoté au jeu. N'és pas dé cassolo, il n'est pas de la
fête, de la partie. Ces expressions doivent avoir vieilli, car
on ne les rétrouve pas de nos jours. Tout au contraire, és
dé cassolo, signifie : il est dégoté au jeu, il est déçu de ses
espérances ; l'an més dé cassolo, on l'a renvoyé, on a
repoussé sa demande en mariage. Il n'est pas impossible
que ces dernières acceptions ne soient la corruption des
premières, employées par des personnes qui ne se sont pas
rendu compte de leur origine: le fait est que l'usage a fait
loi. Il ne serait pas impossible non plus que cette formule soit
un mauvais jeu de mots amené par des rapports de physio-
nomieentre le mot cassoloet le verbe cassa, Chasser, renvoyer.
Cassolo est aussi l'auget d’un moulin placé au-dessous
de la trémie et qui, mis en mouvement par le cliquet, verse
peu à peu le grain dans la meule.
Dér. du lat. Capsula, petit coffre.
Cassôoudo, s. f. Prèle des prés, Equisetum, Linn.
Queue de cheval, plante de la fam. des Prèles, rude au
toucher, dont on fait des pelotes pour écurer la vaisselle
de cuisine. Cette plante vient en abondance et naturelle-
ment dans les prés fraichement renouvelés, ce qui nuit à
la qualité du foin. Les chevaux en sont friands, mais elle
leur agace les dents et les lime singulièrement à cause de
sa rudesse, qui produit l'effet de la pierre ponce. Cette
herbe ne résiste pas à l’action de la faulx : elle périt dès la
seconde année.
Cassoulado, s. f. Contenu d’une terrine, d'une soupière ;
plein une terrine appelée cassolo.
Cassouléto, s. f. Julienne, Cheiranthus maritimus, Linn.,
ou Hesperis matronalis, plante de la fam. des Crucifères,
siliqueuse, cultivée comme plante d'ornement.
Castagna, v. Ramasser les châtaignes qui tombent d'elles-
mêmes à leur maturité, en faisant éclater le pe met qui
les renferme.
Castagnados, s. f. plur. Action ou saison de ramasser
les châtaignes. Cette récolte, comme toutes celles qui ont
quelque importance, sert de date dans les divisions de
l'année, aux paysans des Cévennes. — Pér castagnados,
eñviron le mois d'octobre. C'est un temps de longues veil-
lées où l’on emploie les ramasseuses à filer de la laine ou
des débris de filature de soie. Ces ramasseuses sont des
: jeunes filles, et comme elles sont souvent très-nombreuses,
ces soirées attirent les jeunes gens des environs qui s'y
rendent quelquefois de très-loin. C'est là que se débitent
ces jolis contes et ces légendes superstitieuses qui tien-
nent une si grande place-dans l'imagination des gens de la
- campagne et surtout des montagnards.
184 CAS
Las Castagnados est aussi le titre de ces charmantes
poésies Janguedociennes de La Fare-Alais. Le théâtre était
bien choisi au gré de l’auteur : c'était celui qui allait le
mieux à Ja taille de son dialecte jovial, causeur, conteur
et narquois par goût et par nature, en mème temps que
mélodieux, élégant et noble, quand le sujet grandit et que
la pensée s'élève. Ce livre restera comme le plus pur mo-
dèle de notre langue.
Castagnaïro, s. f. Ramasseuse de châtaignes. Il n'y à
que les femmes et surtout les filles qui se livrent à ce tra-
vail trop minutieux pour les hommes, et pour lequel ils
seraient moins propres peut-être.
Castagnè, s. m. Dim. Castagnéiroù. Châtaignier, Fagus
castanea, Linn. Arbre de la fam. des Amentacées. Cet
arbre, en état de sauvageon, Bouscas, grandit plus vite et
devient plus fort; mais son fruit, assez gros du reste, est
de mauvaise qualité et fade; il est d’ailleurs peu abon-
dant. Ses variétés d'espèces sont nombreuses : nous les
indiquons sous leurs noms spéciaux.
Lou castagnè amarés, où simplement amarés, au plur.
amaréses, est le marronnier d'Inde. Cette épithète lui vient
du lat. Amarus, à cause de l’amertume extrême de son
fruit.
Le nom de l'arbre qui est la richesse de nos pays de
montagnes devait naturellement fournir beaucoup de noms
propres d'hommes et de lieux. Ils sont communs en effet
dans nos contrées, et présentent des variétés d'orthographe
suivant leur provenance de terroir ou de dialecte; ainsi :
Castanier, Chaslanier, Castagnier, Chastaigner, Chastei-
gnier, etc.
Castagno, s. f. Châtaigne, fruit du châtaignier. — C'est
la providence de quelques localités en France, telles que
le Périgord, le Limousin et les Cévennes, comme le fruit
de Parmentier l’est pour tous les pays pauvres et pour l’Ir-
lande en particulier. On mangela châtaigne bouillie d’abord,
quand elle est très-fraiche; elle senomme Této, parce qu'on
mord dessus et qu’on la suce comme un enfant qui tête;
on appelle cette manière de la manger, Téta, lèter. Quand
elle commence à se dessécher un peu, on enlève la pre-
mière écorce en lui laissant la pellicule intérieure, on l’ap-
pelle alors Ploumado, pelée. Quand on la fait griller dans
une poèle percillée, elle se nomme Afachado. Enfin, lors-
qu'on la fait sécher à la fumée, qu’on la dépouille après de
toutes ses enveloppes, on la mange bouillie et on la nomme
Bajano. — V. 6. m.
Dér. du lat. Castanea, que l’on dit venir du nom grec
Kavréoa, ville de Thessalie, dont le territoire produisait
beaucoup de châtaignes. Certains auteurs ont prétendu que
le mot latin avait 6té formé de Casta et Nata, née chaste,
allusion au hérisson très-piquant qui protège la châ-
taigne.
Castané, s. m. Châtaigneraie, lieu complanté de châtai-
gniers. Il est devenu aussi n. pr. Castanet, en fr.
Castèl, s. m. Dim. Castélé, castélou. Augm. Castélas.
CAT
Château, maison de plaisance d'un seigneur; forteresse ;
fort.
Dér. du lat. Castellum, m. sign.
Castélas, s. m. Péjor. de Castèl. Château ruiné; ruines
d'un vieux château.
Castélé, s. m. Dim. Châtelet, petit château : jeu d’en-
fant mentionné par Erasme dans ses Colloques latins et
qui consiste à disposer leurs noix, trois châtaignes, trois
noyaux d’abricot en triangle, avec un quatrième super-
posé, c’est le châtelet. Le joueur cherche à abattre le petit
édifice avec un projectile de même nature, et à distance il
les lance jusqu’à ce qu’il y parvienne. Au plus adroit appar-
tiennent les débris du fortin.
Castélé, s. m. Se dit encore de ces petits coffres, ressem-
blant à une maisonnette en planches, à compartiments éta-
gés et percés de trous, dans lesquels on mettait à éclore la
graine de vers-à-soie ; la chaleur était produite et ménagée
à l’entour par une lampe à esprit de vin où même par la
température un peu plus élevée de l'appartement.
Castéléja, v. frég. Fréquenter les châteaux; aller d'un
château ou d’une maison de campagne à l’autre, ce qu'on
appelait autrefois cousiner. Par ext. faire le parasite;
vivre d'aventures, de franches lippées.
Dér. de Castel. ;
Castéléjaïre, aïro, adj. Parasite ; tondeur de nappe.
Castia, v. Châtier ; corriger, punir ; reprendre.
Dér. du lat. Castigare, m. sign.
Castio-fol, s. m. Porte-respect; martin-bâton.
Castro, s. m. Retranchement, petit parc fait dans l’in-
térieur d’une bergerie ou d’une vacherie, avec des claies,
où l’on renferme les agneaux, les chevreaux et les veaux
pour les séparer de leur mère et les empêcher d’en absorber
tout le lait; long râtelier pour les brebis et moutons;
agneau ou chevreau chatré.
Dim. dér. du lat. Castrum, retranchement, camp re-
tranché.
Catalan, s. m. Catalan; Bohémien, race nomade qui
nous vient des montagnes de la Catalogne et de Roussillon.
— Voy. Bèmi.
Cataplame, s. m. Cataplasme, médicament mou qu'on
applique à l'extérieur.
Dér. du gr. Katémaoux.
Cataras, s. m., péjor. de Ca. Gros chat mâle, matou;
gros et vilain chat.
Catarassos, s. f. plur. Cataracte, maladie des yeux,
excroissance cornée qui se forme et adhère sur le cris-
tallin de la pupille et occasionne la cécité.
Empr. au fr.
Catari, s. m. Catarrhe, inflammation aiguë ou paca mb
des membranes muqueuses, avec secrétion; gros rhume.—
Bouné dé catari, laid et grand bonnet de nuit.
Dér. du gr. Karé, en bas, 6sw, couler.
Catarino, s. f. n. pr. de femme. Catherine. Au fig.
femme babillarde, médisante.
CAT
Catarinô, s. m. Hypocrite; chattemite; tartufe; fin
matois. Ce nom fut donné à des religionnaires séditieux de
Montpellier, en 4617, parce qu'ils se rassemblaient dans le
cimetière de Sainte-Catherine.
Catas, s. m. Gros chat, matou. Au fig. homme fin, très-
rusé, très-souple et dissimulé.
C'est l'augm. de Ca, dont cataras est le péjor.
Catéchime, s. m. Catéchisme, instruction élémentaire
sur les principes et les mystères de la foi; livre qui les
contient.
Dér. du gr. en hcttle instruire , enseigner de vive
voix.
Catétos, s. f. plur. Chatteries; caresses ; mignardise.
Dér. de Ca.
Cat-évès, s. m. Phrase faite. Chat renversé sur le dos.
Cette expression n'est usitée que pour terme de compa-
raison : S'apara coumo cat-évès, se défendre comme un
chat acculé, renversé sur le dos, c'est-à-dire des dents et
des griffes.
Catin, s. f. n. pr. de femme. Péjor. Catinasso. Variante
de Catherine, au propre et au fig., avec l'aggravation du
péjor.
Catin-Farnèlo, s. f. Phr. faite. Bégueule; superstitieuse,
bigote. — Voy. Pèpio.
Cette expression, comme une foule d’autres prises dans
le sens proverbial ou comme simples dictons, a eu sans
doute son type primitif dans une femme de ce nom et de
ce caractère dont le souvenir n'est pas resté.
Catiou, s. m. Chatouillement. — Voy. Casstou.
Cato, s. f. Dim. Catéto, Catounéto. Chatte, femelle du
chat.
Cato, s. f. n. pr. de femme. Variante de Catherine.
Cato-Bagnado, adj. des deux genres. Poule-mouillée;
chattemite; sainte-nitouche; poltron, qui a toujours peur
de se compromettre.
Cato-Borgno, s. f. Phr. faite. Ne se dit que par compa-
raison : Enquiè coumo uno cato-borgno, inquiet, fâcheux
comme un chat borgne.
Cato-Cho, s. m. Couvre-sot, couvre-chef, chapeau ou
bonnet: Cela se dit ironiquement à l'égard de celui à qui
la coiffure appartient.
Le mot est formé de Cato, contract. de acato, couvre, et
Chà, chouette, sot.
Catogan, s.m. Catogan; mode de porter les cheveux
longs, qui fut en concurrence avec la bourse et la queue.
Elle consistait à laisser les cheveux de derrière la tête
découverts et natés dans la moitié de leur longueur; la
partie inférieure se roulait en un nœud très-court et très-
gros, ficelé par un ruban, et dûment poudré et pommadé
en forme d’andouille; des deux côtés extérieurs de la
partie natée, on pratiquait une tresse dont l'extrémité |
venait se rattacher dans le nœud. Telle était, avant 4789,
la coiffure de l'armée. Sous le Directoire, les muscadins |
adoptèrent le catogan. Plus tard, cette mode est tombée
}
CAV 185
dans le domaine des rouliers, des farots el des postillons
de haute volée.
Ce mot vient d'un anglais nommé Cadogan, qui, le pre-
mier, a importé cette coiffure en France.
Catogan, s. m. S'emploie pour désigner ces inscriptions,
devises, petits-vers, madrigaux, compliments, qu'il est
d'usage de placer sur la porte de nouveaux mariés ou de
fonctionnaires municipaux nouvellement élus, pour célé-
brer leurs vertus et pour leur exprimer des souhaits.
Cato-Mâoucho, s. m. Sournois, dissimulé; rusé.
Cato-Miâoulo, s. m. Chattemite; doucereux; miel-
leux ; hypocrite; patte-pelue ; bon apôtre.
Les habitudes sournoises, câlines, de la race féline jouent
un grand rôle dans toutes ces dénominations et ont pro-
duit ces allusions.
Catou, s. m. Chaton de certains arbres, comme les chA-
taigniers, les aulnes, les coudriers, etc.; espèce de floraison
qui apparaît chez quelques-uns de ces sujets avant la
pousse des feuilles.
Ce nom est venu, disent certains glossateurs, de ce que
ces folles fleurs sont cotonneuses et présentent quelque
ressemblance avec la queue ou la peau d’un petit chat.
Catougnè, èiro, adj. Qui aime les chats, qui les caresse
volontiers et s'en fait caresser.
Catougnèiro, s. f. Chatière, ouverture qu’on laisse aux
portes des greniers ou des chambres de provision, pour
que les chats puissent y pénétrer, quoique la porte reste
fermée, afin de faire la guerre aux rats.
Catouli, iquo, s. et adj. Catholique, qui appartient à la
religion romaine, qui professe le catholicisme. — On dit
d'un marchand ou d'une marchandise : és pas catouli, il
n'est pas franc, il n’est pas chrétien; c’est fraudé.
Dér. du gr. Kalokx6e, universel.
Catouna, v. Chatter; mettre bas, en parlant d'une
chatte; pousser des chatons, catoùs, en parlant des arbres.
Catounado, s. f. Chatée; portée d’une chatte.
Catouné, s.m. Dim. de Ca. Petit et jeune chat, chaton.
— Voy. Minouné.
Catuègno, s. f. La gent féline, la race des chats.
La désinence uègno emporte de soi un sens collectif :
c'est un sufixe particulier à notre langue. Elle entraine
aussi une idée de mépris et de dédain. — Voy. Bastar-
duègno, Efantuègno, etc.
Caturo, s. f. Capture; prise; trouvaille.
Corr. du fr. ou plutôt accommodement du fr. au génie
du lang., qui proscrit radicalement la rencontre, le contact
de deux consonnes, lorsque la première est sèche et heurtée.
Catussèl , s. m. Dentelaire; malherbe ; Plumbago euro-
pæa, Linn. Plante de la fam. des Plombaginées, qui abonde
dans les haies.
Cava, v. Caver ; creuser; miner ; arracher; crever. —
. Cava lous ièls, crever les yeux. Cava dé AT extraire,
arracher des pommes de terre.
Dér. du lat. Cavare, creuser. Re
186 CAV
Cavado, s. f. Contenu d'une cave; quantité de vin
qu'on récolte, qu'on met en cave.
Cavaïé, s. m. Cavalier, homme à cheval. On dit d’une
femme solide à cheval : és cavaïèiro. Au plur. lous cavaïès
s'emploie pour désigner la cavalerie en général, les cava-
liers de la maréchaussée, les gendarmes.
Dans notre langue romane on employait le mot Cavaër
pour rendre le mot lat. miles, homme d’armes. Nous tra-
duisons aujourd'hui miles par soldat ; mais au moyen-àge,
la guerre se faisant presque toujours à cheval, à l’excep-
tion des archers, la cavalerie étant la force des armées,
miles répondait à cavalier, cavaër, dont le synonyme était
chevalier.
Lous Cavaïès, les chevaliers du vent : nom par lequel
on désigne les derniers jours d'avril et les premiers du
mois de mai. Le proverbe compte : Jourgé, Marqué, Crousé,
amaï qudouquo fès Jané. Des remarques, superstitieuses
peut-être, font croire que les jours de fête de ces saints
gouvernent le vent et qu'il souffle toujours ces jours-là.
Ces fêtes sont celles de saint Georges, le 45 avril, de saint
Marc, le 25, de l’Invention de la Croix, le 3 mai, et de
saint Jean-Porte-Latine, le 6 mai. Dans d’autres pays, lous
cavaïñès sont appelés les Saints-Grèleurs. — Voy. Vachèi-
rious.
Dér. du lat. Caballus, cheval.
Cavaïè, ièiro, adj. Cavalier, ière ; dégagé; résolu ; rond
en affaires.
Cavaïoù, s. m. Vigne en échalas. — Dans ce pays, on
distingue les vignes én cavaïoùs, et les vignes adéré. Cette
dernière occupe tout son périmètre, les ceps placés à la
même distance et plantés en quinconce. En cavaïous, elle
est espacée, c’est-à-dire que l'on place une rangée de ceps
sur deux ou trois rangs au plus qui sont rapprochés; on
laisse ensuite une espace vide doubie en largeur de celui
occupé par les files de souches, pour pouvoir y semer du
blé ou des légumes, et ainsi de suite jusqu'aux termes du
champ. Les ceps sont élevés plus haut que dans la vigne
en quinconce, mais au lieu de les échalasser avec des écha-
las perpendiculaires, comme cela se fait dans le nord de la
France, on lie toute une ligne de souches par une suite de
perches en saule ou en roseau, horizontalement placés,
comme on fait pour les treilles, et on y fixe les scions de
cep par une ligature faite avec de l'osier. La vigne ainsi
espacée, plus riche en bois et trouvant à ses côtés un ter-
rain vide et souvent fumé, produit peut-être plus de raisins ;
mais elle donne un vin moins spiritueux et plus vert, et
elle est plus coûteuse parce qu'elle ne peut être. labourée
que dans les. intervalles, le reste ou l'intérieur des rangs,
das cavaïous, ne pouvant être cultivé et travaillé qu'à bras.
Cavaire, aïro, adj. Qui creuse; qui approfondit; qui
mine en dessous. Au prop. et au fig.
Dér. de Cava.
Cavalariè, s. f. Cavalerie; milice, à cheval ; troupes de
cavalerie.
CAV
Ce nom a été donné à une foule de localités et de métai-
ries, sans doute pour avoir servi de campement à quelque
corps de cavalerie dans les diverses et fréquentes guerres
civiles, dont notre pays a été le théâtre.
Cavalcado, s. f. Chevauchée; cavalcade; troupe de
bourgeois à cheval, soit pour la promenade, soit pour une
marche pompeuse en l'honneur d’un prince ou de quelque,
grand personnage. Avant 4789, et sous le premier empire,
l'usage des cavalcades de réception était fort en crédit. On
en à fait de très-nombreuses, dont le souvenir s’est con-
servé, mème pour des préfets; et l’escorte d'honneur se
portait jusqu'aux limites de l'arrondissement, à l’arrivée
et au départ. De nos jours, nos plus grands fonctionnaires -
sont reçus avec moins de façons. Le pouvoir a-t-il perdu
de son prestige, ou sommes-nous plus indépendants? Les
chemins de fer ont fait mettre d’ailleurs bien des berlines
préfectorales sous la remise, et les entrées solennelles se font
par la gare commune et par les trains ordinaires, et mème
aujourd'hui sans privilége gratait de circulation.
Au moyen-âge, ce qu'on appelait Cavalgada était une
espèce de guèt à cheval que faisait la milice bourgeoise
autour et dans l’intérieur de la cilé ; c'était aussi le droit
qu'avait le suzerain de se faire suivre à la guerre par ses
vassaux à cheval. Les grands feudataires avaient dans cer-
tains cas ce même droit sur les bourgeois de cité. La caval-
gada était distinguée de la cavalerie en ce que celle-ci était
une troupe régulière et exercée, presque entièrement com-
posée de gentilshommes qui seuls avaient droit de cheva-
lerie et de porter l’armure de fer.
Cavalé, s. »m. Forme particulière du gerbier sur l'aire,
qui le distingue de la Garbièïro. Celle-ci est conique, tandis
que le Cavalé est un carré long, terminé en arête comme
Je toit d’une maison.
Ce mot vient évidemment du lat. Caballus ; mais il est
difficile de bien saisir sa ressemblance avec un cheval, à
moins que ce ne soit son arèête qui figure l'épine dorsale,
la croupe de l'animal, et ses pentes qui. représentent les
flancs.
Cavalé, s. m. Chevalet, en terme de dévideuse, chevau-
chement d’un fil ou eroisure produite par une erreur qui à
fait prendre une broche de dévidoir pour l’autre, ce qui
mêle et brouille l'écheveau; chevalet, pièce de bois sur
laquelle les tanneurs étendent leurs peaux pour les tra-
vailler en les sortant de la chaux; baudet ou tréteau sur
lequel les scieurs de long posent leur bois pour le scier,
Cavalindro, interj. Pouah ! Fi! Fi donc!
Ce mot est la corruption ou la variante de Cavalisquo!.
qui a la même signification. Or celui-ci est. le subjonctif
présent du verbe avali, faire disparaître, perdre, abimer,
faire évanouir, et qu’il serait plus rationnel d'écrire qu'ava-
lisquo, qué avalisquo; c'est comme si l’on disait : que
Dieu le fasse disparaître ; qu’il l'anéantisse.
Cavalino, s. f. Race chevaline, en général; express. col-
lect. qui comprend leschevaux et juments, mais encore ane,
CÉB
| la mule et le mulet; les bêtes chevalines en général. La
| désignation est synonyme de Roussaïo, autre nom collectif,
| et plus étendue que Mioulaïo, qui est plus spéciale.
| Cavalisquo ! interj, — Voy. Cavalindro.
Cavalo, s. f. Cavale; jument ; femelle du cheval, Equa.
Par ext. on le dit d'une femme découplée et hardie, bru-
| tale, mal embouchée. Le dim. est Cavaloto, jeune jument ;
1 Cavia, v. Cheviller, mettre des chevilles pour jointer
| des pièces de menuiserie; trafuser un écheveau de soie à la
E cheville du trafusoir pour le démêler à la main et le dis-
| poser à être dévidé; couronner un arbre, l'étêter.
| Dér. de Cavio.
| Gaviaïre, s. m. Ouvrier qui a pour fonction de tra-
| fuser la soie en écheveau et de la disposer à être dévidée.
.Cawio, s. f. Cheville, morceau de bois ou de fer destiné
à remplir an trou, pour le boucher, pour faire des assem-
blages ; cheville du pied. — La pu pichoto cavio déou chari
méno lou maï dé bru, la plus petite roue d’un char est
celle qui crie le plus : variante de la mouche du coche.
Y-a d'aïgo jusqu'à la cavio, il y a de l'eau seulement à la
hauteur de la cheville. Mé vèn pas à la cavio, il n'arrive
| pas à la hauteur de ma cheville. Cavïo dé jardiniè, plan-
toir, grosse cheville dont les jardiniers se servent pour
piquer les jeunes plants de salade, etc. Planta caviïo, s'in-
cruster, se fixer, rester en place comme une cheville
plantée.
Dér. du lat. Clavicula, dim. de Clavus, clou, ou de
Clavis, clé.
Cavo, s. f. Cave, sellier ; creux, trou.
Dér. du lat. Cavus, creux, profond.
Céba, s. m. Jeune plant d'oignon venu de semis et qu’on
repique en terre.
Cébé, cébéto. Nom qu'on donne à Nimes aux journa-
liers travailleurs de terre, parce qu'ils vivent en partie
d'oignon et d'ail. Cette classe, qui habite particulièrement
le faubourg des Bourgades, se prononça énergiquement, en
4792, en faveur des idées contre-révolutionnaires et souf-
frit beaucoup dans l'émeute qui fut connue sous le nom de
Bagarre de Nimes. C'est de cette époque que date le nom
de:Cébé que leur donnèrent leurs adversaires comme terme
de mépris; et qui resta dans le pays comme synonyme
d’aristocrate.
Gébièiro, s. f. Planche d'oignons; oignonnière ; champ,
terre plantée ou semée d'oignons.
= Cébiou, s. m. Poireau de chien, Pérum agreste, Allium
vineale, Linn., plante potagère de la fam. des Liliacées ;
petit oignon qui vient par touffes dans les vignes, où il.
Cébious, s. m. plur. Civette ou ciboulette, grande
ciboule; appétits ou fausses échalottes, Atlium schænopro-
_ sum; Linn:, variété cultivée de la précédente plante, et
dont la fane est bonne comme fourniture de salade.
Gébo, s:/. Oignon, Alium cepa, Linn., plante potagère
le
CÉB 187
de la fam. des Liliacées. — Cébo réinardivo, oignon de
l’arrière-saison ; on l'obtient en mettant en terrre un vieux
oignon qui pousse de nouveaux caïeux, tendres et bons à
manger, mais impuissants à former une tête. Réinar-
divo, qui serait mieux appelé Réinadivo ou Réinativo,
signifie : qui renait, remonté; mais ce terme n’est employé
que dans cette seule locution et avec le mot cébo. Cébo
granadivo, gros oignon qu’on plante comme l'espèce précé-
dente, mais pour le faire monter en graine ; c’est là le seul
moyen qu'on ait pour reproduire ce légume. L'oignon qu'on
obtient de semis ne saurait monter en graine; dès qu'il
s’est formé en tête d'oignon, sa fane se dessèche et meurt
sans monter.
Crida cébo, c'est demander grâce, crier merci! Dans une
lutte, le vainqueur dit : crido ou digo cébo, et le vaincu
s'écrie : cébo! Je ne sais si du temps des quatre fils Aimon
les chevaliers languedociens, dans leurs terribles joûtes, se
servaient de cette formule, toujours est-il qu'aujourd'hui
elle n’est plus employée que dans des occasions beaucoup
moins sérieuses, par exemple, quand denx gamins se don-
nent une petite peignée; lorsque, par une plaisanterie plus
ou moins bonne, on tire, à faire quelque mal, les oreilles
où les cheveux de quelqu'un, ou bien qu'on lui serre un
peu trop fort les doigts, etc., etc.
Dans tous les cas on ne voit guère comment l'oignon
figure en cette affaire. A moins cependant que ce ne soit
par une allusion éloignée, et pour dire qu'à pareils jeux de
main, les larmes viennent souvent aux yeux, comme
quand on épluche ou que l'on coupe des oignons.
Plutôt que de hasarder cette explication du mot Cébo, je
serais tenté de croire qu'il a été substitué à un autre mot
à peu près pareil, en d’autres termes qu'il y a corruption
de l'expression primitive. — Celui qui est vaincu par la
force ou la douleur crie: Grâce! Je me rends! Assez, je
me soumets, je cède! Et dans la langue qui a donné nais-
sance à la nôtre, il s’écriait : Cedo! que l'on prononçait
en appuyant, moins qu'on ne le fait maintenant sur la
seconde syllabe et davantage sur la première, qui était
longue. Nos pères prirent le mot et l'employèrent tant
qu’ils surent ce qu’il voulait dire; mais quand ils ne
le comprirent plus, — et cela ne dut pas tarder par l’alté-
ration, la décomposition que subit bientôt le latin pour
arriver au roman, — ils le remplacèrent par son paronyme
Cébo. Is n’y auraient guère gagné; car s'ils comprenaient
maintenant le mot, il n’en devait pas être de même pour la
phrase; mais sa signification était conservée, tout fut
pour le mieux.
En français, ne manquent pas non plus ces additions,
suppressions, changements de lettres, qui satisfont l'oreille
sinon le sens dénaturé ainsi, et qui ont été amenés par les
mêmes motifs. À Paris, il y a une vieille rue qu’on appelle
lacrue aux Ours, qui sont fort étonnés de se trouver là.
C'était très-anciennement la rue aux Oues. Dans le vieux
langage les Oues étaient des oies, et l'on appela ainsi la rue
188 CEB
parce que là étaient principalement les rôtisseurs d'oies,
qu'on prisait fort à cette époque. Si le mot Oue était resté
français, on n'aurait pas la rue aux Ours. De mème si nos
anciens avaient continué à comprendre le latin Cedo, ils ne
lui auraient pas substitué le mot Cébo, qui ne signifie rien à
cette place, mais qui du moins était compris, tandis que
l'autre ne l'était plus et que d'ailleurs ressemblant fort à
son prédécesseur, on pouvait croire qu'on avail toujours
voulu dire ainsi et qu'il était à propos de rétablir le
texte.
Je voudrais bien que de mon explication du mot Cébo on
püt dire au moins : Se non e wero e ben trovato. Mais que
voulez-vous ? Je n’ai pas trouvé mieux. Sé rés noun vwéses,
atiaquo t'as péses, selon un proverbe trop peu juste envers
les pois, car cela veut dire : faute de grives on mange des
merles, autrement dit : il faut se contenter de ce qu'on
trouve. Pour moi qui, dans ce mince repas, n'ai qu’un plat
d'oignons à offrir, assez mal accommodé par parenthèse, je
ne demande pas mieux qu'on trouve autre chose, ceci par
exemple :
Les Hébreux perdus dans le désert, exténués de fatigue,
mourant de faim, regrettaient amèrement la chère d'Égypte :
ollas carnium et panem in saturitate. Ils ne pouvaient
non plus, dans cette extrémité, oublier les oignons, si bons
au pays qu'ils venaient de quitter qu’on les y adorait, et
ils les réclamaient, les appelaient aussi de toute leur voix
à leur aide. La Bible traduite, expliquée, commentée en
langue vulgaire, enseignait à tous les détails de l’histoire
du peuple choisi, et le cri de détresse, de miséricorde des
Hébreux, dans cette notable circonstance, devint pour une
situation analogue, notre locution populaire.
Dér. du lat. Cepa, dont Isidore de Séville dit : Cepa,
ità dici videtur à capitis magnitudine, la grosseur et l'abon-
dance des racines qui donnent à la bulbe quelque ressem-
blance avec une tête, lat. Caput, en celt. Ceb, cep, cap, tête
à longue chevelure.
Le latin avait donc Cepa, qu'il l'eût pris dans son fond ou
qu’il lui fût venu du celte. Mais le latin populaire préférait
Unio, que l’aristocratique rival du languedocien a été cher-
cher dans le patois de Rome. A ce propos une citation
curieuse de M. de Chevallet :
« Columelle nous apprend que les paysans appelaient
Unio, onis, un oignon d’une certaine espèce; il était sans
doute nommé de la sorte parce que sa forme et sa couleur
le faisaient ressembler à une perle.
Nunc que per æstatem circa messem, vel eliam exactis
jam messibus, colligi et reponi debeant, prœcipimus, Pom-
peianam vel ascaloniam cepam, vel etiam marsiacam sim-
plicem, quam vocant unionem rustici, eligito. (Columelle,
liv. xx, chap. 5.)
« Les personnes qui se piquaient de science désignaient
cet oignon sous le nom de cepa marsiaca simpleæ, mais le
peuple trouva sans doute l'expression un peu longue; unio
était plus tôt dit. L'acception populaire de ce mot ne fut
CEN
pas agréée par les gens instruits; aussi l'expression res-
ta-t-elle pour eux un barbarisme de signification. Ce bar-
barisme passa du latin rustique à la langue d’oïl, en prenant
un sens plus général, et c’est à # que nous devons notre
mot Oignon. »
Franchement, il n’y a pas de quoi pour le français être
si fier. J'aime mieux, avec les vieilles gens instruits de
Rome, et en bon languedocien, notre Cébo réinardivo ou
marsénquo.
Céiïè, s. m. Cellier, cave, lieu où l’on serre le vin et
autres provisions. Ce qui le distingue de la cave, c'est que
celle-ci est creusée dans la terre et en contre-bas du sol; le
cellier est placé au rez-de-chaussée.
Dér. du lat. Cella ou cellarium, remontant sans doute à
Celare, cacher.
Céloüs, s. m., ou Arcialoüs, s. »”. Bolet comestible,
champignon gris, Boletus edulis, esculentus, bovinus. Le
mème que l’Arcialoùs, dont son nom est une contraction.
Nous avons donné sa description sous cet article.
Dans le midi de la France, et surtout dans les Cévennes,
au nord d’Alais, cet excellent champignon se récolte abon-
damment lorsque le printemps est chaud et pluvieux; on
le rencontre aussi en mai et en juin, mais il est moins
sapide qu’en automne, époque à laquelle il possède ses
meilleures qualités.
- Il atteint souvent des dimensions considérables. On en
voit dont le chapeau a plus de trente centimètres de diamè-
tre et quinze à vingt centimètres d'épaisseur, Cette espèce
est européenne et toutes ses variétés sont délicieuses. La
pulpe en est fine, délicate, d’un parfum agréable surtout
dans les jeunes individus qu’on doit toujours préférer.
Les meilleurs Céloùs croissent sur les coteaux boisés,
dans les taillis de châtaigniers, Jourguièiros, et de chônes,
dans les bruyères, Broussos, au bord des prés montueux et
-un peu ombragés. — Voy. Arcialoùs.
Céméntèri, s. m. Cimetière, lieu consacré à enterrer les
morts. — Dé jouine médéci céméntèri boussu, un jeune
médecin peuple le cimetière.
Dér. du lat. Cœmenterium, m. sign., ou du gr. Kotuntà-
pu, dortoir, lieu de repos.
Cén, n. de nombre. Cent, dix fois dix. Il se dit indéfini-
ment pour un grand nombre de choses et substantiv. pour
les choses qui se vendent au cent.
Dér. du lat. Centum.
Céndraïo, s. f. Cendrée, frésil, résidu des fourneaux +
houille ; grenaille la plus menue.
Céndras, s. m. Péjor. de Céndres. Cendrier d'un four-
neau; gros tas de cendres ; les cendres d’un foyer.
Céndras, s. m. n. pr. de lieu. Cendras, commune du
canton d’Alais, qui tire son nom d’une abbaye de Béné-
dictins, brûlée et ruinée pendant la guerre civile dite des
Camisards. Cette abbaye, fort riche et puissante, était suze-
raine de toute la contrée. Sa juridiction s’étendait sur vingt-
trois paroisses. Dans le dénombrement de la sénéchaussée de
CÉN
Beaucaire et de Nimes de 4384, ce nom est écrit Sandras-
sium; en 4435, on trouve Sandras, ce qui induit à penser
qu'il n’est qu'une contraction et une altération de Sanctus
Andræas. Saint André n'était pas cependant le patron de
l'abbaye, qui était sous l’invocation de saint Loup; mais
le nom qui préexistait au monastère était probablement
celui de l'ancienne paroisse sur le territoire de laquelle il
fat bâti. Ce qui corrobore cette explication, c'est que non
loin de Cendras et sur la même commune, dans le village
de Malataverne, il existe une petite église ou chapelle
dédiée à saint André, qu'on nomme dans la langue du pays,
Sént-Andriou, dim. évident de André.
Céndre, s. f. Cendre, poudre ou poussière qui reste de
matières brûlées.
Las Céndres, s. [. plur. Les Cendres, le jour des Cendres ;
cendres bénites dont le prêtre marque le front des fidèles,
le premier mercredi de carème; la cérémonie de leur distri-
bution.
Dér. du lat. Cinere, abl. de Cinis.
Céndréja, v. frég. Remuer les cendres, tisonner le feu,
sans sujet, par désœuvrement; se briser, s'émietter, être
friable, en parlant d’un terrain trop léger et pen: peu com-
pacte.
Céndriè, s. m. Cendrier d’un potager, d'un fourneau ;
lieu où la cendre tombe et où on la ramasse. Le cendrier
d’un four se dit Bournal. (V.c. m.) — Boufoun coumo un
céndriè, plaisant comme un cendrier. Voy. au mot Bou-
foun l'explication de ce dicton, qui nous parait un abus
flagrant du style comparatif, mais qui est familier au génie
languedocien comme au génie oriental. Il n’est pas rare
que l'usage consacre des comparaisons aussi excentriques
avec une richesse étonnante. C’est en quelque sorte une
protestation de sa part en faveur d’une figure qu'il veut
absolument employer coûte que coûte, alors même que la
raison et la logique la condamnent. Mais l’usage est bien
le maitre et il le prouve.
Céndroüs, ouso, adj. Couvert de cendres, blanchi de
cendres ; terrain léger et friable comme la cendre, comme
le sont en général les vignobles des environs de Montpel-
lier.
Dér. de Céndre.
Céndrouséto-Bachassou, phr. faite. Cendrillon ; jeune
fille peu aimée, peu importante dans la maison, et qu'on
délaisse au coin du feu. Cette expression est-elle due au
conte bleu de Perrault, qui existe en effet dans notre idiome,
avec quelques variantes, entr’autres le nom de l'héroïne,
ou bien le charmant et naïf conteur aurait-il pris le sujet
de Cendrillon dans la sornette de nos veillées cévenoles de
Céndrouséto-Bachassoù? Je ne sais, et qu'importe? si le
a opte amenant y
l'autre.
Cénténa, s. m. Centaine, nombre de cent; cent environ,
sans préciser le chiffre. a
il y avait là une centaine de femmes.
CEO 189
Cénténo, s. f. Centaine, même sens que le précédent.
Se dit surtout pour centaine, brin de fil ou de soie qui lie
l'écheveau. On sait que dans les écheveaux de fil ou de
soie, chaque cent tours sont séparés et marqués par un
nœud ; pour pouvoir les dévider, il faut couper ce nœud
qu'on appelle La cénténo. — Pèrdre la cénténo, perdre le
fil d'un discours. Trove pas la cénténo, je ne puis trouver
le nœud de la question. L'histoire du nœud gordien n'est
autre que celle d’un écheveau célèbre dont Alexandre ne
trouva pas la cénténo, et que son impatience à chercher
lui fit trancher net, d’un seul coup.
Dér. de Cén.
Céntimèstre, s. m. Centimètre ; centième partie du
mètre.
Emp. au fr.
Céntimo, s. f. Centime. C'est un de ces mots, comme le
précédent, que la marche du siècle a forcé d'emprunter au
fr., parce que l'usage en est populaire. Seulement le lang.
en a changé le genre, qui n’est jamais que féminin. Le fr.
lui-même l'a pris du lat. Centesimus, centième partie.
Céntura, v. Ceinturer ; mettre une ceinture: entourer;
environner.
Dér. du lat. Cinctus, part. pass. de Cingere, ceindre.
Cénturo, s. f. Ceinture; cordon, ruban, qui sert à
ceindre le corps; bas de la taille, partie du corps où la
ceinture s'attache. — Fio maduro porto l'éfan à la cénturo,
prvb., fille müre porte l'enfant à la ceinture, c'est-à-dire :
une fille déjà sur le retour quand elle se marie, est plus
prête qu’une autre à devenir enceinte.
Céoucla, v. Cercler, relier, mettre des cercles à un ton-
neau, à une cuve, etc. — Es mdou céoucla, au fig., il a la
tête mal cerclée, mal timbrée ; il a la tête fêlée.
Céoucle, s. m. Cercle, cerceau; circonférence, ligne
circulaire. — Faï lou céoucle, il se ploie comme un cer-
ceau, il est courbé en cercle, ratatiné par la vieillesse ou
par la maladie.
Les cercles on cerceaux de cuve et de tonneau sont le
plus souvent en fer, surtout pour les grosses pièces qui
restent à poste fixe dans les caves ou celliers. Ce procédé
plus dispendieux n’est qu'une avance de capital, qui se
trouve bien compensée d’ailleurs par la facilité du reliage
et du défonçage et par la durée presque éternelle du cer-
ceau. Quatre cercles suffisent pour les pièces ordinaires,
six au plus pour les plus longues; les foudres en compor-
tent douze.
Autrefois les cercles de tonneau étaient faits avec de gros
scions refendus de châtaignier sauvage ou de micocoulier
qu'on pliait et qu’on assujettissait avec de minces scions
d’osier jaune dit amarino; on en plaçait dix à chacun des
bouts du tonneau. C'est pour cela qu'on aménageait dans
les Cévennes de nombreux taillis de châtaignier sauvage et
de micocoulier dont on fabriquait des cercles expédiés
ensuite dans tout le Languedoc. Ces taillis se nomment
| Jourguièiros. Ce procédé est encore employé dans les pays
190 CËR
de grands vignobles pour les futailles qu’on expédie et qui
n'ont pas besoin de durée. Les cerceaux des cuves étaient
une sorte de charpente en forme de jantes, soit de mico-
coulier, soit de chène, et reliée au moyen de chevilles. Ce
genre de ligature se nomme aussi éncastre et aréscle. { V. c.
m.) Les bandes de fer, aujourd'hui, sont une simplification
et un perfectionnement.
Dér. du lat. Cireulus, dim. de Circus, m. sign.
Céouclièiro, s. f. Bois taillis de châtaignier sauvage ou
de micocoulier, destiné à la fabrication des cerceaux, des
claies à faire sécher les châtaignes, et de notre temps à la
confection des treillis ou palissades bordant et clôturant
les talus de nos chemins de fer; maie disposée pour faire
rouir les scions. de ces mêmes arbres afin de les rendre
plus doux et plus flexibles. — Voy. Jourguièiro.
Cé qué, pron. démonstr. Ce qui, ce que. — Cé qué sé
faï, cé qué sé dis, ce qui se fait, ce qui se dit. Cé qué
dévigno lou tén, ce que présage le temps.
Cérémougnè, s. f. Cérémonie ; pompe; courbettes hypo-
crites ; civilité, politesse gènante et affectée. — Faire dé
cérémougnès, faire des façons; se faire prier.
Certains glossateurs font dériver ce mot du lat. Cereris
munia, oblations à Cérès, parce que les offrandes de gerbes
à cette déesse étaient accompagnées d’un rit très-solennel.
D'après Valère-Maxime, il vient du lat. Cera, ville d'Italie,
et munia, offrande. Cette ville, proche de Rome, est citée
par les offrandes qu'y firent les Romains avec une pompe
inouïe par la crainte que leur inspiraient alors les Gaulois.
Selon d’autres, il vient des mêmes deux mots, mais dans
ce sens que, lors de la prise de Rome par les Gaulois, les
Vestales fugitives et sauvant le feu sacré, furent conduites
par Albanius, qui fit, en témoignage d’honneur et de res-
pect, descendre de son char sa femmeet ses enfants pour y
placer ces prêtresses. Enfin l'Elucidari de las proprietates,
en langue romane, dit : De ceras prendon nom ceremonia,
car ceris antiquamen hom ofria, de cire prennent nom les
cérémonies, car anciennement on offrait des cierges.
Cérièïre, s. m. Cerisier, Cerasus vulgaris, Linn., arbre
de Ja fam. des Rosacées, qui porte la cerise. — Cousè qué
cousi, davalo dé moun cérièire, prvb. Le mot.à mot est:
cousin que cousin, descends de mon cerisier. Le dicton
tient sans doute à quelque anecdote dont les acteurs sont
restés anonymes : quelque parent qui fut surpris par un
sièn cousin, croquant ses cerises, et qui, sur l'arbre, invo-
quait sa parenté pour excuser son méfait, dont le cousin
ne parut pas vouloir tenir compte. Cela ne se borne pas
aux cerises, et les applications sont nombreuses. Le fr.
rend la même chose par un dicton équivalent : Ami jus-
qu'à la bourse.
Dér. du lat. Cerasus, venu lui-même de Cerasonte, nom
d’une ville du Pont, d’où furent apportés par Lucullus, en
Italie, les premiers cerisiers.
Cérièiro, s.f. Cerise, fruit du cerisier. Les variétés sont
nombreuses; les principales de ce pays sont : la loumbardo,
CÉS
la blanquéou, la bétorgo, l'agrioto, la bigarono, la durélo.
— Voy. c: m.
Cérqua, ». Chercher, se donner du soin pour trouver;
aller quérir; provoquer ; attaquer. — Cérqua la gnué pér
lous armasis, chercher midi à quatorze heures; prendre
des détours; faire des phrases dilatoires. Dé qu'anas cérqua
aqui? Que nous chantez-vous là? Quelle anicroche allez-
vous chercher ? Cérqua soun pan, mendier. Cérqua sa vido,
a le même sens, mais il s'étend aux animaux domestiques
ou autres, quand ils sont obligés de chercher eux-mêmes
leur provende. Cérqua dé nisados, dénicher des oiseaux.
M'és véngu cérqua, il m'a provoqué. Qué cérquo trovo,
prvb., A bon chat, bon rat.
Dér. de la bass. lat. Circare ou Encercare.
Cèrquo, s. f. Recherches; perquisition; visite domici-
liaire pour découvrir un malfaiteur ou un contrevenant, ou
bien encore une chose volée : dans ce dernier. cas, on dit
plus techniquement : fa fur.
Cèrquo-brégo, s. m., phr. faite. Hargneux ; qui.cherche
querelle; brouillon. Synon. de Cérguo-réno.
Cèrquo-nisados, s.m., phr. faite. Dénicheur de merles;
jeune gars vagabond, va-nu-pieds.
Cèrquo-pous, s. m. Croc à puits; crochet à double ou
triple bec propre à pècher les seaux ou autres objets qui
sont tombés dans un puits. — Fran coumo un cèrquo-poès,
bonne foi de Bohème.
Cèrquo-réno, s. m. — Voy. Cèrquo-brégo, m. sign.
Cértèn, tèno, adj. Certain ; assuré; sûr; ferme. Il ne se
prend guère que négativement, — Es pas bièn cértèn, en
parlant d’un objet, signifie : ce n’est guère solide ou.de
bon aloi: en parlant d’un homme, il n’est pas très-franc
ou de bonne foi, ou bien son crédit n'est pas très-solide,
Es pas bièn cértèno, en parlant d’une femme, on.ne peut
guère répondre de sa vertu.
Dér. du lat. Certus, m. sign.
Gértifica, s. m. Certificat; témoignage donné ms écrit;
attestation écrite; passeport.
Emp. au fr.
Cèrto, adv. interpellatif. Certes! Oui vraiment! Ah
dame! — Cèrto! m'én dirés tan, dame ! vous m'en dires
tant.
Cérvèl, s. m. Cerveau, substance molle contenue dans
le crâne.
Dér. du lat. Cerviæ, tête.
Cérvéla, s. m. Fromage de cochon, fait avec Mr re
parties charnues.de la tête, et non cervelas, sorte d’andouilles
qui se vend cuite et qu'on ne connaît pas dans le pays. :
Cérvèlo, s. f. Cervelle, partie molle et blanche du cer:
veau. Le lang. emploie plus volontiers ce mot au plur.
las cérvèlos. — Mé faï séouta las céruèlos, il, me casse la
tête. x
Dér. de Cerviæ, tête.
Cése, s. m. Dim. Céséroù. Pois-chiche, gl ee
Linn., plante de la fam. des Légumineuses, cultivée. dans :
CÉS
tout le Midi. On dit aussi par dérision Couflo-couqui, parce
que ce légume est farineux et gonflant ; cependant il n’est
pas indigeste comme les autres espèces de farineux, parce
qu'il ne fermente pas comme eux dans l'estomac. On le
mêle avantageusement avec le gruau dans la confection de
la Cassolo. (V. €. m.) Ce légume est difficile à cuire; cela
ne tient pas à une variété de l'espèce, mais à la nature du
terrain qui l’a produit. Les fonds limoneux et schisteux
sont ceux qui sont les plus contraires; les meilleurs, les
grès et les calcaires. Cependant il se rencontre de nom-
breuses exceptions, et souvent cette dureté, que le pois-
chiche conserve après une longue ébullition, provient de
mille circonstances diverses de sa végétation. En général
aussi les eaux battues, comme celles de rivière ou de pluie
immédiate, sont les plus favorables à sa caisson et sont
préférées à celles de puits, de source ou de citerne. Cette
dernière, quoique provenant de la pluie, a contracté par
un long séjour dans l’immobilité une mollesse saumâtre
qui la rend impropre à cette cuisson. Sauvages donne une
recette pour les cuisinières à ce sujet. Il prétend que les
Céses les plus rebelles s’attendrissent et cuisent très-bien
avec l’eau où l'on a fait blanchir les épinards, ou avec de
l'eau de pluie acidulée par une pincée de sel de tartre. Il
est à craindre que ce procédé, un peu trop pharmaceutique,
ne trouve d’obstinés opposants dans le peuple, principal
consommateur des Céses.
Tout le monde sait l'usage local qui veut qu’on mange
la soupe aux pois-chiches et à l'huile au diner du dimanche
des Rameaux. Le populaire attribue cet usage traditionnel
à une commémoration pieuse, parce que Jésus-Christ aurait
traversé un champ de ces légumes lors de son entrée triom-
phale à Jérusalem le mème jour. Il est plus raisonnable de
penser que cet usage vient de ce que le dimanche des
Rameaux étant le seul dimanche de Carème où le maigre
soit ordonné, mème pour ceux qui ne font maigre que trois
jours de la semaine, on mange de préférence une soupe
aux pois-chiches, parce que c'est là un des meilleurs
potages à l'huile, et qu'il est moins indigeste que tout autre
potage aux légumes.
Dér. du lat. Cicer, m. sign.
Césé, 5. m.n. pr. d'homme. Altération contractée de
Francésé, qui est lui-même un dim. de Frangçouès, Fran-
çois.
Céséro, s. f. Draïne, grosse grive, grive de gui, Turdus
viscivorus, Linn., oiseau de l’ordre des Passereaux et de la
fam. des Crénirostres. C'est l'espèce de grives la plus grosse
et la moins délicate. Cette variété est sédentaire dans le
pays, ou du moins elle s’y fixe plus longtemps que les
autres, et niche deux fois dans la saison. Son chant, qu’on
entend surtout avant le lever du soleil, est agréable et très-
éclatant.
— Tèsto dé céséro, étourdi; tête légère, éventée ; tête de
linotte. )
Le nom lang. Céséro, dans lequel entre le mot Cése, en
CÉV
lat, Cicer, et peut-être Edo, je mange, correspond à la mème
idée qui la fait nommer Turdus viscivorus, parce que cet
oiseau fréquente surtout les champs semés de vesces ou de
pois, dont il se nourrit.
Céséto, s. [., n. pr. de femme. On croirait volontiers
que ce mot est le fém. de Césé, et qu'il représente par con-
séquent Françoise ; il n’en est rien cependant. Céséto est la
reproduction de Suzette, et représente en dim. Suzanne. Il
devrait donc s’écrire mieux par un s initial, Séséto ; nous
le plaçons ici seulement pour le rapprocher de Césé el faire
ressortir davantage la différence. — Voy. Séséto.
Césièiro, s. f. Champ de pois-chiches, terre semée de
pois-chiches.
Dér. de Cése:
Cévénôou, Cévénolo, adj. Cévenol; cévennois ; habi-
tant des Cévennes. C’est le nom générique et commun à
tous les habitants de ces contrées montagneuses, qui se
subdivisent en Raïdous, Gavès et Vivaréses. — Voy. ces
différents mots.
Cévénos, s. f. plur. Cévennes, montagnes du Bas-Lan-
guedoc, dont la chaïne se suit par la grande arête de Ja
Lozère, du Tanargne et du Mésince, de l’ouest à l’est, et
forme en contre-bas diverses autres chaines inférieures tant
au nord qu’au midi de la première. La contrée à laquelle
ces montagnes avaient donné leur nom, se divisait autre-
fois en quatre subdivisions : 4° les Cévennes proprement
dites dont Alaïs était la capitale; 2° le Gévaudan, capitale
Mende ; 3° le Vivarais, capitale Viviers; 4° le Velay, capi-
tale le Puy. Aujourd’hui la première de ces subdivisions
porte encore le nom de Cévennes et ses habitants celui de
Cévenols. Elle occupe le nord et l’ouest de l'arrondissement
d’Alais, sans dépasser cette ville au midi ni à l'est; elle
comprend encore presque tout l’arrondissemént du Vigan
et les communes occupant les versants méridionaux et
orientaux de la Lozère et la chaine inférieure de cette
montagne appelée le Bougès ; elle embrasse la plus grande
partie de l’arrondissement de Florac (Lozère), et elle se sub-
divise elle-même en Cévenols proprement dits et en Raïdous.
— F. c. m.
Le nom de Cévennes est un de ceux dont on peut le
moins douter qu’il n'existât dans la langué dés Gaules
avant la conquête romaine ; car il n’a pas en lat. ni en gr.
de radical équivalent qui offre une signification applicable,
condition première de tout nom propre de lieu. Le latin et
le gr. l'ont pris en lui conservant sa consonnance origi-
nelle et n'y ont ajouté que la términaison conforme à leur
génie. César nomme cette chaîñe Mons Cebenna; Pline et
Lucain, Gebenna; Pomponius-Mela, Gebennæ, Gebennici
Montes ; Strabon, Té Képyevov 6pos, traduits par Cemmenice,
Cemmeni Montes. Tous ces vocables sont évidemment em-
pruntés an langage du pays, et ils appelaient les récherches
des commentateurs sur leur origine. Bochard a cru en
trouver là racine dans le syriâque Gebina, sommet d’une
montagne, et ajoute qu'en hébreu Gab veut dire dos. Astruc
191
192 CHA
soutient que le mot vient du celtique Æebenn, haut d’une
montagne. Dans le pays de Galles on dit encore Eefen pour
colline. Astruc pourrait bien avoir raison.
Chabrolo, s. f. Framboise, fruit du framboisier, Rubus
Idæa, Linn., ronce du mont Ida. Le framboisier, arbuste
de la fam. des Rosacées, abonde dans nos montagnes et
croit naturellement dans les bois. Les chèvres sont
friandes de sa feuille, et c'est ce qui a valu à son fruit le
nom de Chabrolo, dér. de Cabro, qu'on dit chabro dans
les Hautes-Cévennes. — Voy. Faragousto.
Chabrôou, s. m. n. pr. d'homme. Au fém. Chabrolo,
qu'on traduit en fr. par Chabrol et Chabrole, femme de
Chabrol.
Ce nom est évidemment d'origine lang. et il signifie
chevreuil dans le dialecte des Cévennes. Ici on dit Cabrôou
en parlant de l'animal. Quant au nom propre, il arrive
tout formé du pays où il a été imaginé et on a dû le res-
pecter dans sa prononciation. La finale est, en tous cas, la
même.
Dans plusieurs articles nous avons eu occasion d’expli-
quer cette différence de prononciation du ca et du cha :
celle-ci peut être plus celtique, celle-là est toute latine.
(Voy. lettre C.) Le suffixe dou donne aussi au mot une
physionomie et un caractère qui méritent d’être remarqués.
Oou, comme Aou, parait être une contraction : il a dû
sonner © lou, ou en lat. Olum, Olium, avant d’être diphthon-
gué en dou, comme Aou est descendu de 47, À lou. Le plus
souvent encore il affecte le mot d’un sens diminutif, comme
le faisait la désinence latine ous, a, um, nous en citerons
des exemples nombreux. Ses analogies en noms d’hommes
et de lieux se signalent par les influences ethniques qui ont
pesé sur la finale et la traduisent : au Midi Cabréou ou
Chabrôou représentés par Cabrol ou Chabrol, sont au Centre
ou au Nord Chevreau, Chreveul, Chevreuil. — Voy. Oou
suffixe.
Chabuscla, v. Flamber ; passer à la flamme; échauder ;
tremper rapidement dans l’eau ‘bouillante. C’est le mème
mot que Uscla, sauf que ce dernier se borne à la première
partie de la définition, et ne convient pas à la dernière. La
syllabe Chab qui précède celui-ci ne peut étymologiquement
s'expliquer qu'en l'interprétant par Chab, dialecte des mon-
tagnes, Cab, cap, extrémité, sommet, et Uscla, brûler
l'extrémité, la superficie.
Chacun, chacuno, pron. indéfini. Chacun, chacune.
Ce mot, qui se disait autrefois et se dit même encore
Cadun, semble formé des deux mots ca et d’un, un par
tête, tête d’un. Le fr. aurait alors la même origine, ou
aurait pris la sienne dans notre idiome. Mais n'est-il pas
plutôt une corruption du lat. Quisque, encore reconnais-
sable, quoiqu'il ait bien changé en route?
Chadénédo, s. f., ou Cadénédo. Lieu, champ planté de
cades ou genévriers.
La variante que nous donnons après Sauvages est peu
usitée. La manière dont nous le prononcons et la forme
CHA
dans laquelle il a passé dans notre dialecte et a servi de
base à la composition de noms propres d'homme et de lieu,
démontrent clairement que le mot est emprunté aux Hautes-
Cévennes ou au Vivarais. S'il eût pris naissance ici, on
eût ditet on dirait Cadénédo, comme l’on dit Cadéné de
plusieurs quartiers de terrain, ainsi nommés dans les
cadastres, et qui ont la même racine, le cade.
Chafaré, s. m. Bruit; tapage; tintamarre; grabuge. —
Méno un for chafaré, il fait grand tapage.
Chaîfre,s. m. Pierre à aiguiser, sorte de grès finet tendre
dont on se sert pour aiguiser à sec les faucilles, les serpes .
et serpettes. La queux des faucheurs n’a pas la même
forme ni la mème nature; elle est d’un grès beaucoup plus
dur, aussi s’appelle-t-elle pètro dé daïo et non point chafre,
malgré l'autorité de Sauvages. — Cara coumo un chafre,
enflé, bouffi d'embonpoint ou d'importance; au prop. ou au
fig.
Chagrin, s. m. Chagrin; afiliction; peine morale;
humeur; dépit; colère.
Des étymologistes le disent dérivé de l'arabe Chakrain,
malheureux, pénétré de douleur; d’autres du fr. Aigrir, et
remarquent que dans certains endroits, on dit aigrain pour
chagrin.
Chagrina, v. Chagriner; donner, causer du chagrin;
tourmenter, inquiéter.
Chaïne, s. m., ou Rouve. Chène blanc, Quercus robur,
Linn., arbre de la fam. des Amentacées. « Le chène, a dit
Loiseleur de Long-Champ, domine en roi parmi les arbres
de l'Europe; c’est le plus beau comme le plus robuste des
habitants de nos forêts; c’est son image qui s'offre d’abord
à la poésie quand elle veut peindre la force qui résiste,
comme celle du lion pour exprimer la force qui agit. »
Chaïne et Rouve, dans l'usage ordinaire, sont parfaite-
ment synonymes ; dans le langage technique, le Chaïne est
le mot générique pour toute espèce de chène blanc; le
Rouve est le robre ou rouvre, espèce dont le bois est rouge
en dedans et la feuille cotonneuse en dessous; il est plus
flexible, moins cassant, plus imperméable : aussi est-il plus
difficile à fendre et à équarrir, comme bois de service, à
cause de ses fibres fortes et entrelacées; il brûle mal au
feu, où il noircit sans donner de la braise. — Voy. Rouve.
On trouvera sur l’étym. du mot et sur sa formation
quelques éclaircissements au mot Cassagno.
Chaïné, s. m. Genette, espèce de chat sauvage, Vivera
ginetta, Linn., mammifère onguiculé de la fam. des Carni-.
vores.
La genette, la fouine, dit Sauvages au mot Chaïné; ce
n’est pourtant pas la même chose, bien qu’il y ait quelque
analogie dans les habitudes des deux animaux. Du reste la
description qu'il en donne s'applique assez bien, à la pre-
mière et nullement à la seconde ; le Chaïné n’est donc pas
la fouine. s ;
Il est tout simple de faire venir le mot de genette; en
rendant dure la prononciation du g (dge ou tge) on atteint
CHA
à peu près celle du ch suivi d'une voyelle ; dés lors Chaïné
ou genette sont le mème vocable, le Chaïné est en effet la
genette commune, La description d'ailleurs se rapporte
exactement au Chaïné, qui n'est pas rare dans notre pays :
pelage gris, agréablement tacheté de brun ou de noir; ces
taches, tantôt rondes, tantôt oblongues; la queue aussi
longue que le corps, annelée de noir; le museau noirâtre ;
des taches blanches aux sourcils, aux joues et de chaque
côté du bout du nez. Cet animal laisse échapper une forte
odeur de muse, ce qui l'a fait classer dans un sous-genre
de civettes. Cette propriété lui est commune avec la hyène,
dont le pelage présenterait avec le sien quelque ressem-
blance, la mème distance que celle entre le chat et le tigre.
Le Chaïné se prive vite en domesticité; on le dresse pour
la chasse aux rats; aussi lui donne-t-on quelquefois le nom :
de chat de Constantinople. Il est probable que dans nos
contrées on le confond souvent avec le chat sauvage, quoi-
que celui-ci soit un autre animal.
Chalo, s. m. Châle, schall. — Encore un de ces mots
que la mode a importés du fr. Il ne saurait rester étranger
au lang. aujourd'hui que le châle, qui n'était pas dans le
costume national, est descendu aux classes populaires.
Chamas, s. m. Gros tison allumé. On s'en sert l'hiver à
‘la campagne pour s'éclairer au sortir de la veillée : c’est la
torche de pin des montagnards écossais.
Dér. du gr. KéuaË, pieu, échalas.
Chambou, s. m., n. pr. d'homme et de lieu. Chambon,
c’est-à-dire bon champ.
La moyenne latinité a fait passer le mot au roman, qui
Fa transmis au lang. et au fr. Du Cange cite un ancien
titre qui en fait foi : Cambo, terra arabilis quam rustici
Cambonam vocant. Cambo, lalin et-roman, Camboù et
Chamboù, lang., signifient donc une terre en culture. Et
remarquons, en passant, que le campus lat. ne s’est con-
servé dans nos dialectes qu'avec l'addition d'une épithète ;
camp ni champ seuls ne sont pas du pur lang. mais du fr.
véritable, bien que ficha soun can soit toléré et usité.
Le vocahle qualifié s’est fort répandu, d'abord en se
tenant dans la généralité, puis en spécialisant ce qu’il vou-
lait mieux caractériser. Les champs arables, c’est-à-dire en
plaine, étant fort rares, étaient par suite hautement prisés
dans un pays aussi montagneux et escarpé que les Cévennes,
à cause de la. facilité de leur culture, et en second lieu,
parce que ar placés au pied des montagnes, ils rece-
vaient les alluvions que les pluies et les inondations y
charriaient. C'est. pour cela que ces noms sont plus mul-
dans les contrées hautes. On compterait, dans le
seul département du Gard, plus de quinze localités, com-
munes ou hameaux, dont les désignations varient du simple
au diminutif, de Cambè, Camboù, Cambon, lous €
Fm
Chamboù, Chambon, à Cambouné, Chambouné, m-
bonnet, Chambounas, toutes formées du lat. Campus bonus.
. Cette tion donnée, d'abord aux
venons de parler, s'étendit ensuite pau ju
CHA 193
hameaux et villages qui se formérent dans leur voisinage
fertile. Da sol à l'homme qui le cultive la transition fut
aisée et naturelle. De ce nom pris pour racine il s'en forma
mille autres, qui, à la qualification générale existante , en
ajoutérent une autre caractéristique, ou bien, sur le pri-
mitif Campus, appliquérent une particularité significative.
Ainsi les noms propres de lieux et d'hommes : Chambou-
rédoun, Chamboredon, champs en plaine et de forme ronde;
Chambou-rigdou, Chamborigaud, plaine arrosée, campus-
irriguus ; Chamboverno, Chambovernes, plaine verdoyante
ou plantée de vernes. Et dans la seconde catégorie : Cam-
bargnè, Chambarnier, commune de Méjanes-le-Clap, terre
en vasselage; Camboulan, commune de Saint-Marcel et de
Saint-Martial, champ servant de limite; Canférén, com-
mune de Bernis, champ fertile; Chamcldou, Chamclaux,
commune de Sainte-Cécile-d'Andorge, Mansus de Clauso-
Claustri, enclos du cloitre; Champrläousoù, Champélauson,
commune de Ja Grand'Combe, de campo clauso, champ
fermé; Champdourous, Champorus, commune de Génolhac,
champ venteux, qui a un dim. dans Champdouridou, Cham-
pauriol, commune de Laval, de la Rouvière et de Montmirat;
Camfigoùs, Camphigoux, communede Soustelle, campus fici,
champ planté de figuiers; Camplagnè, champ en plateau;
Campérigoùs, commune de la Calmette, champ pierreux ;
Campméjè, commune de Saint-Jean-du-Pin; Camp-méjan,
commune du Caylar, campus meianus, champ moyen ou
mitoyen; Canrédoun, Campredon, commune de Nimes, de
Langlade, de Sumène, de Valleraugue, campus rotundus,
champ arrondi ; Camriou, Camprieux, commune de Saint-
Sauveur-des-Pourcils, campus rivus, champ près d’un ruis-
seau; Campsèvi, commune d’Arre, champ ensemencé;
Camplong, Camviël, ete. IL n’est pas nécessaire d’insister
sur d’autres dénominations dans lesquelles est intervenu le
nom du propriétaire, qui ont aussi la même racine et se
sont formées avec le mot campus, traduit par cam ou champ,
comme Camarti, Campmartin; Changarnier; Champ-Ber-
nard; Champ-Bertin; Champ du Four; Champ du Roussin,
etc., etc., qui n’ont pas besoin d'explications.
Chambourdo, s. f. Péj. Chambourdasso. Chambrière ;
servante épaisse et grossière ; maritorne.
Gorr. de Chambriëiro, emportant une idée de mépris ou
de ridicule.
Chambranle, s. m. Ce mot ne signifie pas chambranle,
cadre en pierre ou en bois d’une porte, mais une longue
règle de maçon. Ce technique est-il une imitation du
français? Cela parait naturel, et cependant il n'existe
aucune relation, aucune similitude entre les deux signifi-
cations.
Chambre, s.m. Écrevisse de rivière, Uancea astacus,
Linn. Crustacé de l'ordre des Astacoïdes.
Le nom de Chambre est usité à quelques lieues d'Alais,
Le
au levant, dans le canton de Saint-Ambroix, surtout aux
| bords de la fontaine d’Arlinde qui en fournit beaucoup.
Ailleurs on se sert du mot Escarabisse. — V. €. m.
194 CHA
Chambre parait une corruption, une variante de chancre,
qui traduit le lat. cancer, cancre, écrevisse; signe du
Cancer. On l’a fait aussi dér. du lat. Carabus, m. Sign, ou
de l’allem. Crebs. En ital. Gambero et Granchio; en esp.
Cangréjo.
Chambrièiro, s. f. Femme de chambre, et par ext. ser-
vante, n'importe la nature de son service. — Faï coumo la
chambrièiro dé Pilato, c'est-à-dire elle va fort au delà de ce
qu'on lui commande. Las chambriciros n'an qu'un mâou,
disou lou sécrè dé l'oustéou, prvb., les domestiques n'ont
qu'un défaut, c'est de dire les secrets de la maison.
L'anjounénquo chambriéiro, l'angélique servante, a dit
La Fare de la sœur de charité, servante des pauvres.
Chambrièiro, s. f. Trépied pour soutenir la poêle sur le
feu; quelquefois cet outil est une anse en fer et sans pied
qu'on suspend à la crémaillère.
Dér. de Cambro, qu'on dit Chambro chez les Raïols et
les Vivarais.
Champouirâou, s. m., n. pr. Champoiral, traduit le fr.
sans autre façon. Il vient. sans doute du lat. Campus em-
porii, champ de marché ou de foire.
Chancre, s. m. Chancre; ulcère; aphthe; petit bouton
transparent et douloureux qui vient à la bouche des hommes
et des animaux, surtout chez les enfants à la mamelle
quand ils tètent un lait échauffé et vicié. — Aqud's un
chancre, dit-on d’un importun opiniâtre et dont on ne peut
se débarrasser.
Dér. du lat. Cancer, m. sign.
Chanifès, s. m. Malaise; inquiétude vague; cauchemar
éveillé, ce que Mme de Sévigné appelait un dragon.
Corr. du lat. Carnifex, bourreau.
Chanja, v. Changer, échanger; quitter une chose pour
en prendre une autre; céder une chose pour une autre ;
substituer ; passer d'un état à un autre; déménager, prendre
un autre logis; permuter. — Sé chanja, changer de loge-
ment; changer de vêtement, prendre ses habits de dimanche.
— Ai chanja dé las quatre, mes vers à soie sont sortis de
quatrième maladie ou mue. Ma grano a chanja, ma graine
de vers à soie a changé de couleur; elle devient, blanchâtre
vingt-quatre heures avant d’éclore. Es bièn chanja, la
maladie l’a changé, pâli, amaigri. La luno chanjo aquéste
souèr, la lune prend ce soir un nouveau quartier. Mé véou
chanja; je vais changer de linge, d’habillement. Vous sès
chanja, vous avez changé de logement.
Dér. de l'ital. Cambiare, m. sign.
. Chanjaïre, aïro, adj. Changeant; inconstant ; qui aime
à changer; qui change aisément; d'humeur mobile. , :
Chanjamén, s. m. Changement; passage d’un état à un
autre; mutation: |
Chanje, :s..m. Intérêt d'un capital, — Amaï qué. mé
pague saun change, pourvu qu'il me paie les intérêts.
Métre dou chanje, placer de l'argent à intérêt. î
Chanjur, s. #1. Changeur; prèteur sur gage; banquier. —
Pago coumo un chanjur, il paie comptant, très-exactement,
CHA
Chantiè, s,. m. Chantier; grand emplacement à ciel
découvert où l'on emmagasine des bois. Par extension,
emplacement où un certain nombre d'ouvriers travaillent,
n'importe à quel ouvrage; réunion d'ouvriers travaillant
de concert sous l'inspection d’un piqueur pour les ouvrages
d'art, ou d'un baïle, pour les travaux des champs.
Dér. de la bass. lat. Cantherius, m. sign.
Châoucha, v. Patrouiller; marcher dans la boue, dans
un gâchis; fouler aux pieds quelque matière mouillée ou
onctueuse ; fouler aux pieds une personne, — La fachi-
gnèiro l'a châoucha, la sorcière lui a pesé sur l'estomac, il
a eu le cauchemar. A chdoucha tout lou long dé la curiètro,
j'ai patrouillé dans toute la longueur de la rue.
Ce mot est le mème que Cdouca dans quelques-unes de
ses acceptions ; il a la même origine du lat. Calcare.
Chäouchimèiïo, s. f., ou Chichoumèïo. Ripopée;
mélange de plusieurs vins; ragout sale et Ling 24: salmi-
gondis de viande ; galimafrée.
Châoucholo, s. f. Soupe au vin; tranches de pain
trempé dans le vin.
Châäouchouia, ». frég. de Chdoucha. Patrouiller; tri-
poter ; remuer ou marcher dans un bourbier épais ou dans
un liquide malpropre.
Chôouchouïaïre, aïro, adj. Qui aime à patrouiller, au
pr. et au fig. tripotier, qui aime à se mêler derce qui ne le
regarde pas, à mettre salement les doigts dans une sale
affaire.
Châoucho-vièio, phr. faite. Le cauchemar, l'incube. La
superstition populaire attribue ce malaise à la pression
d’un démon sous la forme d’une vieille femme qui pèse
sur la poitrine.
Châouma, v. Chômer ; se reposer, rester oisif. Se dit
particulièrement du bétail qui cherche l'ombre et y dort
sans manger quand la chaleur commence à se faire sentir.
Les brebis, au lieu de chercher l’air dans ce cas, se tiennent
pressées les unes contre les autres et placent leurs têtes les
unes sous les autres, pour les mettre à l'ombre.
Dér, probablement de Câou, chaud, qui se dit chdou
dans quelques localités. Cette origine peut bien avoir servi
au fr. chômer, quoique certains glossateurs, qui ne veulent
pas que le fr. puisse être redevable au lang., prétendent le
faire dériver de l’allem. Saumen; s'arrêter, négliger. Le
lang. Chdouma et le-fr. chômer, qui sont évidemment le
mème mot, paraissent plutôt tous deux venir du gr. Koïyue,
chaleur étouffante, et la preuve, c’est que-chdoumasso, à
qui l'on ne peut contester le droit de consanguinité avec
ces deux infinitifs, ne signifie autre chose que grande cha-
leur, figurant là en superlatif d’un positif perdu, qui
devait être chdoume, traduction littérale du gr. Kaÿua, et
qui.est devenu la racine de chdouma et de chèmer.
Chäoumadis, s. m. Tue chaud et AE Te invite à
la paresse.
Châäoumadou, s. #. Lieu dis par les vi pour faire
chômer le bétail; endroit propice et commode pour cet acte.
CHA
Châoumasso, s. f. Chaleur lourde, étouffante et mate,
sans un souflle d'air.
Voy. Châouma pour l'étym.
Châoupi, v. Fouler aux pieds; trépigner avec les pieds,
particulièrement" un végétal quelconque.
Il a sa racine dans le lat. Calx, plante des pieds, chaus-
sure, qui à fait calcare.
Châouri, s. m”. Sabbat des sorciers, leur assemblée noc-
turne. — Aou chdouri! allez au diable! Manjariè lou
diable amaï lou ch prvb., il avaleraitgle diable et ses
cornes.
Dans l'étym. de ce mot Lan découvrir dans la
syllabe Chdou où cdou, chaleur, quelque allusion à la cha-
leur infernale, ou bien peut-être une contraction ou inver-
sion du mot chdou-ma, parce que ces prétendues réunions
se tenaient le jour du sabbat, jour de repos des Juifs, jour
de chômage? Ce ne sont là que des conjectures très-hasar-
dées.
Châourima, v. Faire blanchir des légumes dans l'eau
bouillante; mitonner; : flétrir par la chaleur ou la séche-
resse.
Châouta (Sé), v. Se soucier; s'inquiéter, s'embarrasser.
— M'èn chéoute coumo dé mous vièls souïès, j'en fais cas
- comme de mes vieux souliers: Qudou s'én chdouto? qui
donc s'en soucie? N'a pas l'air dé s'én chdouta gaïre, il
n'a pas l'air de s'en inquiéter beaucoup.
Dér. du lat. Calere, désirer ardemment.
Chapélé, s. m. Chaperon, couronne de mariée. Symbole
de virginité qui, dans le principe, était un petit cha-
- peau. ,
Chapélé, s. m. Chapelet; grains enfilés, sur chacun des-
quels on dit un Ave Maria, à chaque dizaine se trouve
un grain plus gros sur lequel on récite un Pater.
Le chapelet sé nommait dans l'origine couronne de la
Vierge; de ce rapprochement de couronne avec petit cha-
peau est tiré le nom.
Chapélé se dit aussi de plusieurs choses enfilées les unes
à côté des autres.
Chapla, v. Hacher; couper menu, en très-petits mor-
ceaux; briser en éclats; dépecer. — Lou michan tén a tout
chapla, la grèle a tout haché.
La bass. lat. disait avec la même sign. Capulare. Cham-
pollion pense que ce mot est celtique, et le P. Puget qu'il
pourrait bien venir de l'hébreu Æapad, couper.
Chapladis, s. m:: Abattis; débris de. choses brisées ou
cassées ; cab dtarbres par r Re ou la cognée des büche-
rons.
Chaplun, s. m. Mens débris: (Cobeux de bois menuisé
à la hache; épluchure des légumes ; chapelure de pain-dont
la croûte est pilée ; recoupes de la pierre de taille.
Chaquo, adj. des deux genres. Chaque; sert à désigner
tout individu de même espèce ; toute chose individuelle de
«même nature.— Chaguo moucël, TRE re
. fés, chaque Fée
CHA 195
Chara, v. Gronder; faire des reproches de supérieur à
inférieur.
Fnital. Ciarlare signifie babiller, causer ; Sauvages même
donne à Chara cette acception, que nous croyonserronée.
Cependant, quoique les deux mots aient un sens différent,
ils paraissent sortir d'une même origine.
Charado, s. f. Gronderie ; réprimande ; mercuriale; en
style fam. un savon.
Charaïre, aïro, adj. Grondeur; qui n'est content de
rien, d'humeur grondeuse; qui poursuit toujours de re-
proches.
Charavari, s. m.Charivari; concert ridicule avec accom-
pagnement de poêles, chaudrons, sonnettes et cris, souvent
avec chanson de circonstance, dont on régale les mariages
des veufs et des veuves; plus généralement crierie, bruit
tumultueux, querelle populaire, Cependant les charivaris
politiques ne sont pas du ressort de l'idiome.
Dér. du gr. Kapn6apelz, pesanteur de tête, migraine, parce
que c’est l'effet produit par cette cacophonie, surtout sur
celle des mariés.
Charcutariè, s. f. Charcuterie, magasin, boutique de
viandes de porc.
Ce mot, ainsi que son correspondant fr., est formé de
chair et de cuite, parce qu'autrefois surtout on débitait
dans la chareutariè toute espèce de chair de porc cuite.
Charcutiè, tièiro, s. et adj. Charcutier, charcutière,
qui vend de la chair de cochon crue ou cuite, fraiche ou
salée.
Chartièl, s. m. Cerfeuil, Scandiæ cerefolium, Linn.,
plante de la fam. des Ombellifères, potagère, indigène du
Midi, cultivée pour l’usage de la cuisine,
Dér. du lat. Chærofolium, qui vient de deux mots gr.,
Xalpw, je me réjouis, et PEXkcv, feuille, à cause de l'abon-
dance de ses feuilles.
Chari, s. m. Char à bœufs; charriot. Ce mot, en lang.,
est consacré aux. seules voitures trainées par les bœufs ;
toute autre voiture différemment attelée ne prend point
ce nom. — Métre lou chari davan lous biôous, mettre la
charrue avant les bœufs.
Lou chari se dit pour le charriot de David, la grande
Ourse, constellation.
Dér. du lat. Carrus, ou plutôt du celt. karr, disent les
étymologistes, d'où l’allem. karr, char, charrette.
Chariado, s f. Charge ou contenu d’un chari: On dit
uno chariado dé mounde, n'importe dans quelle voiture ils
soient transportés, et même aujourd’hui quand il s’agit de
wagons du chemin de fer : toute une charretée de monde.
Charita, s. f. Charité, amour de Dieu et du prochain;
plus usité dans le sens de aumône. — Prémiètro charita
coumengo pér sé, charité bien ordonnée commence par’ soi-
mème. Démanda la charita, demander l'aumône. Fasès-mé,
douna-mé la charita dou noun dé Diou, faites l'aumône,
donnez-moi la charité au nom de Dieu.
Dér. du lat. Caritas.
196 CHA
Charitable, blo, adj. Charitable ; aumônier, qui aime à
faire la charité, l'aumdne; qui a l'amour de son prochain.
Charlatan, s. m. Charlatan ; marchand d'orviétan, ven-
déur de drogues sur les places publiques; hâbleur, van-
tard. — Vèngues pas faïre aïci dé toun charlatan, ne viens
pas ici nous conter des sornettes, des häbleries.
Dér. de l’ital. Ciarlare, babiller. Il est bien fort, comme
nous l'avons vu quelque part, dé le faire venir du celte
Charlataria, bavardage.
Charlô, s. m. Courlis, courlis commun ; grand courlis
cendré; Scolopax arcuata, Linn. Oiseau de l’ordre des
EÉchassiers et de la fam. des Ténuirostres. Ce courlis, qui
peut atteindre deux pieds de longueur, vit sédentaire dans
notre département. Charlà s'applique aussi au petit courlis
ou corlieu, Scolopax phæopus, Linn., espèce plus petite et
que nous n'avons guère que de passage.
Charnègou, s. ». Acariâtre ; difficile à vivre ; hargneux ;
bourru. — Voy. Rébroussiè.
Sauvages prétend que c’est le nom que l’on donne à une
espèce de chiens métis, engendrés de deux espèces difé-
rentes et qui sont toujours hargneux. D’après cette donnée,
on pourrait supposer que Charnègou serait formé de chi et
de arnégou, chien hargneux. Ce dernier mot à son tour,
suivant certains auteurs, viendrait de Hernieux, vieux mot
qui veut dire atteint de hernie, parce que cette infirmité
rend hypocondriaque. — Voy. Ernugou.
Charoun, s. #. Chaïron, qui fabrique et vend les char-
rues, charretles et voitures, et tout ce qui les concerne.
Dér. du lat. Carrus, char:
Charpa, v. Gronder; grogner; faire des reproches ; que-
reller; crier après quelqu'un; se fàcher.
Ce mot et celui de Chara, qui ont beaucoup d’analogie,
sont indifféremment employés dans notre dialecte. Au-des-
sous et à l’orient d’Alais, on dit de préférence Charpa ; à
Alaïs et au-dessus on aime mieux Chara. Cependant il peut
y avoir quelqué différence dans l’acception : Chara signifie
plus proprement gronder quelqu'un, et Charpa, grogner, se
plaindre de tout, n'être content de rien.
Dér. du lat. Carpi, carpor, bre tourmenté, affligé.
Charpado, s. f. — Voy. Charado, m. sign.
Charpaïre, aïiro, adj. — Voy. Charaïre.
Charpigna (sé), v. frég. Se chercher noise ; se picoter ;
se quereller. — Voy. Capigna.
Charpinoüs, ouso, «dj. Rabougri. Se dit d’un arbre
plein de chicots, hérissé de pointes et d’ergoits.
Dér. de Charpis.
Charpis, s. m. Charpie, filament de linge usé pour méttre
sur les plaies; menus $cions morts d’un arbre qu'on élague.
Charqua, v. Inquiéter; molester ; importuner ; chercher
noise. — Aguél afaïre mé charquo, celte affaire me tour-
mente.
Dér. du lat. Calcare, fouler aux pieds, épéronner.
Charquaïre, aïro, adj. Importun ; querelleur; brouillon,
qui tourmente sans répit.
CHI
Charuro, s. f. Charrue.
Ce mot, que le lang. a emprunté au fr. en lui faisant
subir la petite inversion qui est dans ses habitudes, n'était
pas connu autrefois où l’on ne labourait guère qu'à Paraire.
La grande culture s'étant davantage impatronisée dans le
pays, il a fallu distinguer par un technique les diverses
espèces d'outils aratoires.
Chasso, s. f. Mèche d’un fouet, ficelle déliée placée au
bout du fouet pour le faire claquer; grand coup de fouet
bien appliqué®
Chatisiè, isièiro, adj. Qui aime à faire des niches, à
jouer un mauvais tour.
Chatiso, s. f. Niche grossière ou indécente; mauvais
tour, mauvaise plaisanterie.
Ce mot est-il une corruption du fr. sottise, ou bien
vient-il d’un vieux mot lang. Chatoù, fripon?
Chi, s. m. Dim. Chiné; péj. Chinas. Chien, Cunis fami-
liaris, Linn., mammifère onguiculé de la fam. des Garni-
vores. Au fig. avare, pince-maille. — Un chi régardo bén
un avésque, amaï li lèvo pas lou capèl, un chien regarde
un évêque sans le saluer, répond-on à quelqu'un qui se
fâche de ce qu'on le fixe. Mounté lou chi japo, y a qicon
dé travès, prvb. qui répond à celui-ci : il n'y a pas de
fumée sans feu. Chi canar, chien barbet, caniche. Chi bré-
goùs a l'éouréio vérménouso, prvb., chien hargneux à
l'oreille déchirée. Quéou aïmo Marti, aimo soun chi, prvb.,
qui m'aime aime mon chien. Ddou tén qué lou chi pisso, la
lèbre fu, p'vb., du temps que le chien pisse, le lièvre s'en-
fuit; c’est-à-dire : il ne faut pas laisser pérdre l’occasion
quand on la tient. Es tro chi pér aquà, il est trop avare
pour cela. .
Chi est aussi le nom d'une brouette sans roue, dont ôn
se servait autrefois pour sortir le chagbon de la galerie
dans nos houillères, et encore de la pièce de fer adaptée à
la platine d'une arme à feu, mue par un ressort, autrefois
portant la pierre, aujourd'hui en forme de marteau creux
pour écraser la capsule ; en fr. chien.
Dér. du gr. Küwv, Kuvés, m. sign.
Chibâouqua, v. Chevaucher; aller à cheval; par méta-
phore, ilse dit de deux objets qui devraient être assemblés
et dont l’un dépasse ou surmonte l’autre.
Dér. du lat. Caballus, Cheval.
Chicana, v. Tricher au jeu; chicaner; ergoter ; poin-
tiller; chercher un procès de chicane; chercher noise.
On fait venir ce mot du gr. txavos, Sicilien, fourbe; fri=
pon, ou de Zxybs, difficile à vivre, morose.
Chicanaïre, aïro, adj. Tricheur ; chicaneur ; chicamier;
qui cherche chicane, qui fait de mauvaises querelles.
Chicanéto, adj. des deux genres./Chicanier, tricheur ;
technique du tricheur au jeu. |
Chicano, s.f. Tricherie; chicane; procédure artifi-
cieuse; subtilité captieuse; contestation mal fondée.
Chichoumèio, <. f. — Voy. Châouchiméio.
Chicouta, v. Entailler une pièce de bois pour mieux
CHI
faire prendre l'enduit de plâtre ou de mortier; la rendre
raboteusé en hachant la surface. Au fig. persécuter ; impor-
tuner ; vétiller; contrarier ; impatienter.
Chicoutaire, aïiro, adj. Importun ; tatillon ; inquiétant ; ;
qui prend plaisir à vous dire des choses facheuses.
Chifra, v. Chiffrer; calculer par le moyen des chiffres,
la plume ou le crayon à la main.
Chifro, s. f. Chiffre, caractère représentant les nombres ;
calcul; arithmétique. — Counouï bièn la chifro, il est bon
calculateur; il connait son arithmétique. Aprén la chifro,
il étudie l’arithmétique. Un quatré dé chifro, un quatre de
chiffre.
- Dér: de l'hébrèu Siphr, compter, En arabe Saphar, écri-
ture; livre; en ital. Cifera, chiffre
Chifrur, urdo, adj. Chiffreur; calculateur; arithméti-
tien, mème mathématicien.
Chignèïro, s. f. Chenil, lieu où l'on renferme les chiens
de chasse; loge à chien. Par ext. mauvais gite; taudis ; lit
mal étoffé et en désordre ; lit de chien.
Formé de Chi, chien, et du suffixe collectif iètro.
Chignoun, s. m. Chignon, derrière du cou ; cheveux
relevés en nattes par derrière et se montrant en dessous de
la cornette. Par ext. les cheveux et mème le crâne.
Dér. du fr, Chaine.
Chima, v. Boire à petits coups, Joeaiet, avec sensua-
lité; siroter en gourmet.
Dér. du gr. Xoyés, suc, où Küux, flot, liquide.
Chimara, v. Barbouiller du papier, charbonner une
muraille ; chamarrer ; griffonner en écrivant.
Chimaraduro, s. f. Barbouillage; griffonnage; trait
vague de plume où de charbon sur une surface blanche.
Chimaraïre, aïro, adj. Barbouilleur; griffonneur de
papier.
Chimarage, s. m. Grifianage, écriture ou signature
mal formée et salement conduite.
Chinarédo, s. f. Meute; troupe de chiens, telle que celle
qui suit une femelle en humeur. Au fig. bande de gens
mal famés, dévergondés.
Dér. de Chi, chien, avec le suffixe collectif édo.
Chinchourlo, s. f. Ortolan, Emberiza hortulanus, Linn.,
oiseau de l'ordre des Passereaux et de la fam. des Coni-
rostres, au plumage jaune et brun, dont la chair est très-
délicate
. On nommé encore ainsi le Verdier où Bruant, Bruant
commun, jaune, ÆEmberisa citrinella, Linn., oiseau de la
_ mème famille que l’ortolan. Le mile à la tète, les joues et
Ja gorge d'un jaune fort Me # la partie supérieure
ne
sf. Brut tint épi impor
s À pe eds er Qu
| Corr. du fr. symphonie, dent on prend le sens en
gr NÉ F ù»
_ Chin-nanano. Onomatopée itraduis, Les gamins
‘test ii ootaloote. pour Gas le son des eym-
CHI 197
bales et de la grosse caisse, que l’on frappait jadis à tour
de bras d'un côté, pendant que de l'autre, en, caressant
avec un petit balai, ce qu'en terme de métier on appelle le
timbre, on formait une espèce d'écho au bruit principal.
Ils cherchèrent donc à imiter de la voix la combinaison de
ces divers sons, et ils dirent : Boum / boum / Chin-nanano /
Un mot était créé. Pour les enfants qui aiment le tapage,
le chin-nanano, qui l'exprime surtout, représente et
dénomme toujours toute musique militaire.
Chino, s. f. Chienne, femelle du chien. Au fig. avari-
cieuse. — Voy. Chi.
Chiou-chiou! Onomatopée du cri de certains oiseaux
piailleurs ; pipi de ces oiseaux et des jeunes poussins.
Chipouta, v. Chipoter; vétiller ; lanterner ; marchander ;
chicaner sur une vétille; gâcher un ouvrage, le gâter.
Dér. de Chi, chiqué, peu, avec l’action verbale, ou du
verbe lat. Possum.
Chipoutaïre, aïro, adj. Chipotier; qui vétille; qui
marchande trop.
Chipoutous, ouso, adj. Chipotier; vétilleur d'habitude ;
barguigneur ; processif; chicanier.
Chiqua, ». Chiquer; mâcher du tabac. Par ext. manger
et boire.
Chiqué, s. m., ou Souqué. Morceau de viande qu'on
donne à la boucherie de surplus au poids livré; en fr.
réjouissance; tout supplément à un marché fait; petit coup
de vin. — À soissanto ans amaï lou chiqué, il a la soixan-
taine et quelque chose par-dessus, et le pouce.
Dér. de l'esp. Chico, chica, petit, petite. On soutient
que le gaulois aurait pu fournir l'étym. : il avait Chic pour
dire petit morceau, parcelle, finesse, subtilité, chicane,
qui pourrait bien venir aussi de là. — Voy. Souqué.
Chiquo, s. f. Chique, pelotte de tabac qu'on mâche ;
soie de qualité inférieure, faite avec le rebut de cocons tels
que les fondus et les peaux. — Voy. Foundu et Pèl.
Chiquo (Faire) phr. faite. Sorte d’onomatopée du bruit
que fait le chien d’un fusil en s’abattant à vide, c'est-à-
dire sans que l'amorce prenne feu; faire fausse queue au
billard. — Moun fusil a fa chiquo, mon fusil a raté. Cette
expression s'emploie mème au fig. pour signifier l’avorte-
ment d’une entreprise dont on attendait beaucoup et an-
noncée pompeusement d'avance.
Chivaïè, s. m. Chevalier.
Avant 4789, dans les familles nobles, quelle que füt la
qualité du chef, on donnait ce titre au puiné de la maison,
et cela dès son enfance. Aussi les nourrices et les bonnes,
suivant l'usage invariable des dim, les appelaient Chivañèiré.
Aujourd'hui personne ne s'intitule plus chevalier ; les.
puinés prennent le titre imnédiatement inférieur à celui de
l'ainé et on épuise la série jusqu'au dernier. C'est plus
commode, et si innocent d’ailleurs, que personne ne songe
_äs’en fâcher, pas même une loi récente dont les suscepti-
bilités ne prêtent plus qu’à rire et tombent en désuétude !
Voyez plutôt les lettres de faire-part, cartes de visite et pan-
198 CHO
nonceaux armoriés. Quant au titre de Chivaï, par lequel
on distinguait aussi les anciens militaires, il était donné aux
chevaliers de Saint-Louis et précédait simplement le nom
de famille; mais cet ordre du mérite militaire est presque
éteint aujourd’hui, et celui qui le remplace, en s'étendant
au civil, avec la profusion qu'on lui connait, s’il a main-
tenu dans l’idiome le mot Chivaïè, et même son dim. Chi-
vaïdiré, ne l'a fait, hélas ! qu'au préjudice de son acception
ancienne; car le peuple le rend souvent synonyme d'intri-
gant.
Chival, s. m. Dim. Chivalé; péjor. Chivalas. Cheval,
Equus caballus, Linn., mammifère de la fam. des Soli-
pèdes, animal domestique. — Chival dé carrosso, homme
brutal et grossier, ou simplement chival, au fig. homme
dur, robuste, laborieux. Chival dé troumpéto, bon cheval
de trompette; personne qui ne craint pas le bruit, que les
menaces n’effraient pas. D'à chival, à cheval, à califour-
chon. Mounta d'à chival sus la fénèstro, enjamber à cali-
fourchon l'appui d'une fenètre.
Dans quelques dialectes, al final se convertit en dou, on
dit chivdou.
Cavald, dim. comme Chivalé, indique la jeunesse de
l'animal, sa petite taille, mais avec un sens moins restreint
peut-être; c’est une bonne petite bête bien roulée, qu'il
désigne.
Dér. du lat. Caballus.
Chivalé, s.m. Danse du chevalet ou du petit cheval, en
usage dans les réjouissances publiques du Midi. Un danseur
est entouré d’un cerceau sur lequel il. étale une sorte de
large jupe en drap qui figure une housse de cheval; au
devant est ajustée une tête de cheval en carton, dont la
bride est tenue par le cavalier ; par derrière est fixée une
véritable queue de cheval. Ainsi équipé, il exécute une
sorte de danse de caractère appropriée à la circonstance et
qui imite les gambades d’un cheval, la housse fort longue
empèchant d’ailleurs qu'on ne s’aperçoive trop qu'il ne
marche que sur deux jambes ; l'illusion est parfaite. Huit
danseurs ou danseuses, en costume moyen-âge, distingués
par des couleurs différentes par, couples, exécutent autour
du centaure danseur des rondes et des passes variées et
entrelacées, tandis qu’un neuvième danseur, à reculons
devant la tête de l’animal, lui présente des dragées pour
avoine dans un tambour de basque.
Cette danse, à peu près nationale dans le Midi, rappelle
celle des jeux de la Fête-Dieu, à Aix, en Provence, connue
sous le nom de Chivdou-frus, chevaux fringants. Elle est
passée de mode de nos jours; sa dernière représentation a
eu lieu, à Alais, en l'honneur de la naissance du roi de
Rome. La tradition n'a conservé de tout cela que le sou-
venir et le nom.
Cho, s. m. Péjor, Choutaras. Hibou, hibou commun,
hibou moyen-duc, S/rix otus, Temm. Ce nom est aussi
celui du petit-duc, Strixæ scops, Temm. — Voy. Machoto,
Duganèl, Tuqué.
CHO
Le Cho, hibou moyen-duc, est un oiseau de proie noc-
turne, vivant de rats et de souris; il a 35 cent. de lon-
gueur, fauve ou jaunâtre, avec des taches allongées brunes
et grisätres, bec noir, iris des yeux jaune. Les hiboux
portent deux petits bouquets de plume sur leur front,
qu'ils peuvent redresser à volonté, caractère qui n'existe
pas chez la chouette proprement dite; ce sont ces aigrettes,
semblables à de petites cornes, qui ont fait donner au Cho
le surnom de ban.
Cho, choto se prend adjectivement pour sot, borné, idiot,
qui ne sait rien dire. Cho banu est le superlatif des
défauts précédents.
Ce mot est l'onomatopée du cri de cet animal, qui est
bref, accentué, triste et lugubre.
Chou, interj. Cri qu’on adresse aux cochons pour les
appeler au dehors de leur loge, en le répétant : Chow! Chow! s
chou!
En bas-breton, Oucx signifie porc.
Chouché, s. m. Nom d'amitié que les gardeuses de porcs
donnent à leurs élèves et dont elles les appellent dans 7
champs : t, chouché ! '
Ce mot est le dim. du précédent.
Chouës, s. m. Choix; option; préférence. Il n'est guère
employé qu'à l'occasion des baux à ferme qui donnent à
chacune des deux parties la faculté dé rompré ou de ton-
server le bail au bout de deux, trois ou six années. — À
dous ans dé chouès, il peut résilier au bout de deux
ans.
Dér. du lat. Colligere.
Chouqua, v. Laisser tomber la tête sur la poitrine,
quand le sommeil commence à gagner dans une longue
veillée. — Voy. Choura.
Chouqué, s. m. Hoquet, mouvement convulsif du dia-
phragme.
Les glossateurs français et le Dictionnaire de Trévoux,
en tête, font dériver hoquet du flamand Hick, malgré son
peu de rapport de consonnance. L’anglais CAhoked, suffo-
cation, aurait certes une analogie bien. plus remarquable
avec le fr. et le lang. à la fois; mais comment lé français
irait-il reconnaitre ou la paternité, ou seulement la confra-
ternité de son frère d'Outre-Loire? Pourquoi ici ne s'en
serait-il pas inspiré, ou ne pas avouer au moins qu'il a
trouvé cette onomatopée en même temps que lui?
Choura, v. Chômer; rester dans le silence et l'engour-
dissement, comme les brebis qui chôment / Foy. Chäouma),
ou les lazzaronis qui se couchent au soleil, dans le far-
niente. Au fig. faire l’imbécile, le niais. Il se prend aussi
pour sommeiller, être engourdi, rèver creux. Toutes ces
acceptions se ressemblent; cachent-elles au fond une ori-
gine commune avec Chdouma, qui a le même sens,
Chouqua, qui a de plus le mouvement involontaire ?
Ghourla, v. Boire à longs traits, en aspirant ; se gorgèt
de boisson; lamper. — Chourla soun fasquou, boire sa
bouteille de vin. PIE
CIC
| Chourlado, s. “c Larges et nombreuses lampées.
Chourlé, s. m. Nom propre devenu générique pour les
chiens roquets, qui sont les chiens du prolétaire, le suivent
au travail et gardent sa veste et son bissac; on les appelle
aussi Gardo-biasso.
Chourou, s. M. Péjor. Chouras. Diablotin d'un moulin
à huile; ouvrier employé aux plus bas et plus pénibles
offices; valet de pressureur de vendanges ; tisonneur de
fourneau de chaudière des filatures. Au fig. idiot, hébété,
-crétin.
Dér. de Choura.
. Chouso, s. m. ‘Un tel. Moussu Chouso, Monsieur. chose.
Terme dont on se sert pour désigner une personne dont on
__ne se rappelle pas le nom, ou que l'on ne veut pas nom-
mer devant des tierces personnes. Quelquefois c'est une
formule proverbiale : Coumo dis moussu chouso, comme dit
cet autre.
Chouso est une corr. du fr. chose, ou plutôt une trans-
figuration goguenarde : c'est assez l'usage languedocien
vis-à-vis de son heureux rival.
Chu! interj. Chut! Silence! Doucement! Expression
souvent explétive pour : Attendez donc! nous allons
voir, etc.
Chu-Chu, s. m. ef [. Silence; discrétion; secret. — 4 la
. Chu-chu, à la muette, à la sourdine. Gardou lou chu-chu,
ils restent muets, discrets.
… Cibiè, s. m. Civet, étuvée de lièvre ou de lapin, coupés
par morceaux et éuits avec du bouillon, un bouquet d'her-
. bes et un assaisonnement de vin, de farine, d'oignons, de
quelques feuilles de laurier et un filet de vinaigré; et servez
chaud.
... Dér. du lat. Cepa, où cébo, oignon, parce que ce légume
est le principal assaisonnement de ce ragoût.
Cibièiro, s. f. Civière, sorte de brancard sur lequel deux
“hommes portent à bras divers fardeaux.
_ Dér: du lat. Cænovoturium ; cænum, fumier, et vehere,
|
)
|
|
|
|
+:
fs. Rte
Giblo,s.f. ‘Cible; point de mire pour le tir au füsil où
d'à C'est aujourd'hui une planche fixée sur un
. potea ‘où l'on trace un cercle avec un point noir où blanc
. au à le principe ce devait êtré un tertre.
in Dér.. lat. Cippus, cippe. F
, ,. Gicouréio, s. f. “tas Re inlybus, Linn.,
2 plante sauv e de la far Composées Chicoracées, com-
© mune le pe les champs 'inéultes. La
Éñdivio {Voy. c! m.).
à ci des j nou
dé chicorée qui croit dans les
î
are
temps sous fente, où/elle reste
LEve
ë qu'élle : a monté l'añnée précéden
tte buchétte où
la jeune pousse, qui est fort bonne en salade. Une fois
dans le _. mème. Comme le soleil
‘tendre. PE Roque ce
te; *
Broquo, ét elle eriträine avec elle”
CIG 199
poussée hors de terre, cètte chicorée devient verte, dure,
amère et laiteuse; elle n’est plus bonne à manger.
Dér. du gr. Ken, m. sign.
Cièl, s. m. Ciel, la partie supérieure du monde; firma-
ment; paradis, demeure de Dieu, des anges et des bien-
heureux.
Dér. du lat. Cœlum, m. sign.
Cièrje, s. m. Cierge, chandelle de cire à l'usage des
églises: bougie.
Cièrje-pascdou, cierge pascal, cierge que l'on bénit et
que l’on allume le jour de Pâques.
Dér. du lat. Cereus, m. sign.
Cigalado, s. f. Accès de folie ; acte d'étourderie ; coup
de tôte; redoublement de fièvre; élancement d'une dou-
leur.
Dér. de Cigalo.
Cigalé, éto, adj. Léger, étourdi, évaporé ; jeune homme
fringant et sémillant.
Cigalé est le sobriquet donné aux habitants de Saint-
Hyppolite-le-Fort (Gard).
Cigaléja, v. frég. Aller à l'étourdie ; faire le fringant;
causer ou éprouver des élancements douloureux, comme il
arrive dans les panaris ou les maux d'aventure. — Moun
dé mé cigaléjo, j'éprouve des élancements au doigt.
Cigalo, s. f. Cigale, Cicada, Linn., genre d'insecte de
l'ordre des Héminoptères et de la fam. des Collirostres. Le
frottement d’une membrane sonore que la cigale mâle porte
dé chaque côté de l'abdomen, près du corselet, produit le
bruit qu'elle fait entendre et qu’on appelle chant.
Cigalo signifie encore caprice; étourderie ; légèreté.
— Tèsto dé cigalo, tète légère, éventée; étourdi. A dé
cigalos din la tèsto, il a des rats, des caprices. Pér faire
passa las tignos, fôou lus faïre canta uns cigalo déssus,
prvb., pour guérir les engelures, il faut leur faire chanter
uné cigale dessus, c’est-à-dire que le retour de la chaleur
est le meilleur remède. Quan la cigalo canto én sétémbre,
noun croumpes bla pér révéndre, prvb., si tu entends chanter
la cigale en septembre, n’achète pas du blé pour le reven-
dre : la spéculation serait mauvaise; les blés ne seront pas
chers.
Dér. du lat. Cicada, m. sign.
‘Cigalo, s. f: Cigare, petit rouleau de tabac propre à
fumer.
Le mot est d'importation nouvelle et vient de l’esp. Noël,
Dict. des orig., rapporte que ce sont les sauvages qui ont
l appris à famer les cigares, mais ils aspirent la fumée par
le nez et la font sortir par la bouche. — En Europe, on
fait l'inverse, au moins avec la cigarette. Ét nous nous
vantons d'être en progrès et de tout perfectionner !
Cigâoù,s. m. Cigale qui ne chante pas, c’est-à-dire
tigale femelle d'après la science, mais d'après les notions
pôpuülxires le cigdou est la cigale mâle. Sauvages affirme
Que c'est la femellé qui est privée des organes du chant,
c’est-à-dire des deux écailles vibrantes que la cigale a sous
200: CIN
le ventre. Le mot n’en reste pas moins masculin et désigne
la cigale dénuée de cette faculté.
Cigdou, étourdi comme une cigale; mêmes acceptions que
cigalé.
Cigogno, s. f. Cigogne, Ardea ciconia, Linn., de l'ordre
des Echassiers et de la fam. des Cultirostres, oiseau de
passage qui perche sur les cheminées et est une garantie
de prospérité dans les idées populaires de la Hollande et de
la Belgique. Au fig. femme haut-montée, au cou et aux
membres trop longs ; dégingandée.
Dér. du lat. Ciconia, m. sign.
Cigougna, v. Remuer ses membres ; ne pouvoir rester
en place, comme lorsqu'on éprouve des inquiétudes aux
jambes ; branler comme un meuble déjointé par la séche-
resse; secouer dans tous les sens, tirailler, étirer. Au fig.
inquiéter, importuner.
Cigougnado, s. f. Ébranlement ; secousse ; redoublement
d'un mal.
Cigougnaïre, aïro, adj. Remuant ; qui ne peut rester
ni rien laisser en place; mauvais coucheur; importun ;
ennuyeux; inquiet et inquiétant.
Cigougnéja, v. frég. de Cigougna, exprimant à un
degré supérieur et avec redoublement les acceptions de
Cigougna, au pr. et au fig.
Cimbèl, s. m. Appeau des oiseleurs; chanterelle; oiseau
que l’on attache à un filet d’oiseleur pour appeler par son
chant ou ses cris les autres oiseaux. — Prénes moun bras
pér un cimbèl? prends-tu mon bras pour une enseigne?
Dér. du lat. Cymballum, sonnette, clochette, parce que
le Cimbèl appelle comme une sonnette.
Cimbéla, v. Se servir de l’appeau, Cimbel, le placer pour
Ja chasse aux oiseaux et le faire manœuvrer. Au fig. appeler,
attirer par signes, par une démonstration qui flatte, qui
séduit, comme pour les oiseaux que le chant du Cimbèl ou
le sifflet amènent au piége de l’oiseleur.
Cimèrlo, s. f. Extrème cime d’un arbre; d’une mon-
tagne.
Dér. de Acimérla.
Cimo, s. f. Dim. Ciméto. Cime; haut; extrémité supé-
rieure d’un corps terminé en pointe; sommet aigu. — A {a
finto cimo, au plus haut sommet.
Dér. du lat. Cyma, pointe des herbes.
Cincérisi, s. m., ou Trido. Proyer, bruant proyer,
Emberiza miliaria, Linn. Cet oiseau tire son double nom
lang. de son chant, qu'on a essayé de traduire par cin-cé-
ri-zi, où bien tri-tri-tri-trii, car, comme dit Sauvages, on
écrit différemment le cri des oiseaux et le son des cloches,
selon qu'on est affecté et que l'imagination s'y prête. Le
proyer a les parties supérieures brun cendré, queue noi-
râtre, milieu du ventre d'un blanc jaunâtre, gorge blan-
<hâtre marquée de petites taches noirâtres. 11 est trés-com-
mun dans nos contrées où il vit sédentaire. I est difficile
de l'élever en cage ; il se brise la tête contre les barreaux,
où s'il vit, ilest bien rare de l'entendre chanter. N'est-ce
CIN
point cette tristesse et ce dépérissement que l'on remarque
chez le proyer captif qui ont donné naissance à cette locu-
tion familière faïre la trido, que l'on applique à quelqu'un.
qui se traine, malingre, sous le _poids de la maladie? —
Voy. Trido. Fra
Cindra, v. Cintrer; poser les cintres d’une voûte ;
courber.en cintre.
Dér. du lat. Cinctus, cinctura, de cingere.
Cindre, s. m. Cintre ; arc de charpente pour établir les
voûtes en construction; arc de cercle; courbure en arc:
Dér. du lat. Cinctura, ceinture.
Cinq, s. m., n. de nombre. Cinq, nombre impair, com-
posé de deux et trois, ou de quatre et un.
Dé cinq én quatre. Quelle est cette singulière alliañce
de nombre qui se trouve à la fois dans le lang. et dans le
fr.? D'où vient cette locution ? D’après Genin, le maitre en
recherches et en trouvailles philologiques, il faut dire en
r. : de cent ans quatre, ou mieux : de cent tems (temps)
quatre ; cette expression de temps étant prise pour fois,
ainsi que le faisaient nos pères et que font toujours les
Anglais, chez qui le mot fimes signifie temps et fois. Cette
version adoptée, je préférerais la dernière forme. Pourquoi
ans pour dividende plutôt que siècles, que jours? L’expres-
sion indéterminée de fois me semble plus à propos. Ce
dicton, ainsi formulé, s'applique à une chose qui se fait
rarement, mot à mot quatre fois sur cent.
Cette interprétation est elle la bonne ? Il semblerait:que
cela ne doive pas nous regarder; mais le lang. étant un
peu intéressé dans la question, il faut bien qu'il essaye
d'intervenir.
Le dicton de cinq en quatre existe donc en fr., cela
n'est pas douteux. Génin lui-même le constate en Je citant
une fois ainsi. Il est vrai qu'après cela il ne s'en occupe
plus ; d’où l’on doit conclure qu’il le considère comme inu-
sité, relégué peut-être dans quelque localité, mais en tout
cas comme une corruption à dédaigner de la forme qu'il a
adoptée. Une corruption, en effet, n’est pas impossible ici
par suite de la consonnance, de la prononciation assez rap-
prochée des deux textes, qui aurait causé facilement une
confusion, une méprise. Mais s’il y a eu corruption, n'a-t-elle
pas été faite en sens inverse de celui que propose Génin,
c'est-à-dire n'est-ce pas au contraire la version qu'il admet
qui serait corrompue de celle qu’il condamne? Aux lexi-
cographes français à rechercher et à débattre ce point.
Le languedocien dit carrément : Dé cinq én quatre, et
ici point de confusion, point de méprise possible ; nulle
consonnance dans la prononciation de ces mots avec le
texte Génin, s’il était traduit. D'ailleurs il ne l’est pas, ne
l'a jamais été; cette forme nous est entièrement inconnue ;
notre dicton est seul, unique, sans la moindre variante. Si
nous l'avons inventé, le français, ayant la même idée à
rendre, a pu l'inventer de son côté; il a pu aussi nous le
prendre. Dans les deux cas, il a existé, ila été répandu
chez lui plus sans doute qu'on ne veut le croire. Si nous
CIR
l'avons emprunté à nos voisins, nous l'avons pris sur un
patron connu, à la mode. Nous l'aurions de même taillé
sur un autre si nous l’avions trouvé meilleur, si nous
l'avions trouvé seulement, quitte à en avoir deux; mais
nous n’en avons qu'un. — Il reste à savoir si la version de
Génin est réellement usitée, je l’ignore, et il se pourrait
que ce ne fût qu'une correction qu'il a essayée. Pour nous
il n'y a qu'à s'en tenir à notre dé cing én quatre, qui est
le vrai texte ancien, sans altération ni compromission.
Sans compter la difficulté qu'on trouverait à changer de
vieilles habitudes, il y aurait, à mon avis, un désavan-
tage à accepter la correction. Sous la forme qui nous appar-
tient, je crois sentir quelque autre chose qui n’est pas dans
la nouvelle. Nous voulons sans doute, avec dé cinq én
quatre, dire aussi que le fait dont il est question a lieu
rarement, mais de plus qu'il a lieu irrégulièrement, à inter-
valles inégaux. Telle est la vraie signification pour nous
de ce bizarre idiotisme. Or, ce rapprochement des deux
nombres cinq et quatre, dont l’un n’est pas divisible par
l’autre, dont le second n'est pas contenu d'une manière
exacte dans le premier, ne semble-t-il pas faire entendre
cette irrégularité? Maintenant que cette division soit plus
difficile à faire que l'autre, que la construction de la
phrase s'accommode très-mal aux exigences de la syntaxe,
je le veux bien; ce n’est pas une raison pour déposséder,
en perdant plus qu'on ne gagnerait, un dicton qui, de
longue date, s'est toujours très-bien fait comprendre de
nous et de bien d’autres, j'imagine.
Dér. du lat. Quinque, cinq.
Cinquanto, n. de nombre. Cinquante, dix fois cinq.
Dér. du lat. Quinguaginta, m. sign.
Cinquanténo, s. f. Cinquantaine, nombre de cinquante
personnes ou choses ; cinquante ans.
Cinquanténéja, v. frég. Approcher de la cinquantaine ;
avoir près de cinquante ans.
Cinquantièmo, adj. des deux genres, nombre ordinal,
s. m. Cinquantième, 50me partie, 4/50.
Cinze, s. m. Punaise domestique. — Voy. Pénnaïso.
Dér. du lat, Cimea, m. sign.
Cipriè, s. m. Cyprès, Cupressus, Linn., arbre de la
fam. des Conifères, toujours vert, droit, élevé en pointe.
Il est l'emblème de la mort et de la tristesse. Son bois est
regardé comme incorruptible.
Cira, v. Cirer; enduire de cire; appliquer le cirage ;
cirer les bottes, le pavé, un fil. — Ciro, le vent soulève la
neige en poussière. Sur les hautes montagnes, le vent en
soulève une si grande quantité que l'air en est obscurci,
que bêtes et gens en sont aveuglés. Des masses de neige
ainsi transportées comblent les fondrières, effacent la trace
_des routes et exposent la vie des voyageurs. A-t-on voulu
comparer cette action du vent, qui aplanit les plus hautes
-erètes sous une couche unie de neige miroitante, à une sur-
face, à un pavé ciré, brillant de cire?
Ciraje, s. m. Cirage pour les bottes et les souliers.
CIT 201
Ciro, s. f. Cire, matiére jaune, grasse et ductile, pro-
duite par les abeilles ; chassie des yeux ; poussière de
neige soulevée par le vent.
Dér. du lat. Cera, m. sign.
Ciroùs, ouso, adj. Chassieux ; qui a les yeux chassieux.
— Voy. Carpéloùs.
Cirusièn, s. m. Chirurgien.
Le lat. Chirurgus a bien évidemment formé le lang. et
le fr. Les deux mots sont-ils contemporains et jumeaux ?
On sait que ces questions de priorité, de conception et
d’ainesse ont longtemps embarrassé les docteurs in utroque.
Cisampo, s. f. Bise froide ; froid vif et rigoureux ; vent
glacial.
Ce mot pourrait bien venir du lat. Cisalpinus, dont il
serait la corruption, parce que la bise la plus froide nous
vient de l'aspect des Alpes.
Cisèl, s. m. Ciseau, instrument d'acier, plat, tranchant
d'un bout, avec une tèle ou un manche, servant à tailler
la pierre ou le bois. — Cisèou én pèiro. ciseau de sculp-
teur, de tailleur de pierre.
Dér. du lat. Scissum, supin de scindere, tailler, couper,
fendre,
Cisèous, s. m.'plur. Ciseaux de couturière, de tailleur;
instrument d'acier composé de deux branches, terminées
chacune par une lame et un anneau, et fixées par un clou
ou pivot.
Cistèrno, s. f. Citerne, réservoir d’eau de pluie.
Dér. du lat. Cis{erna, m. sign.
Cistras, s. m. Tuf et schiste; rocher friable qui n’est
guère que de l'argile durcie, qu'on tire par dalles, mais
qui se décompose et devient terre par l’action de la pluie,
du soleil et surtout de la gelée. Le terrain dont la base
est le cistras est le plus maigre et le moins accessible aux
émanations de l’air et de la rosée.
Dér. du gr. Zytotés, qui se brise, qui s’enlève par écailles.
Cita, v. Citer ; donner ou faire donner une citation;
assigner ; faire des frais de justice à quelqu'un.
Dér. du lat. Citare, m. sign.
Citaciou, s. f. Citation ; exploit d’assignation ; ajour-
nement en justice.
Citouièn, èno, adj. Citoyen, ne; particulier. Quand on
s'en sert adjectivement, il se prend en mauvaise part,
comme quand on dit : Oh! c’estun particulier qui... C'est
un diable d'homme : Aguo vous és un citouïèn!
Dér. du lat. Civis; du gén. civitatis.
Citro, s. f. Sorte de pastèque, melon d'Amérique, Cucur-
bita citrullus, Linn., plante de la famille des Cucurbita-
cées, dont le fruit, Cifro, est de moyenne grosseur, d'un
beau vert, écorce lisse, tailladé de bandes et de tigrures
d'un jaune serin. Cette espèce de melon, sans saveur ni
douceur, n'est bonne qu’à mettre en confiture. — Voy.
Pastèquo.
Ce mot vient évidemment du lat. Citrus, citron, quoi-
qu'on n'aperçoive aucune aflinité entre ces deux fruits,
202 CLA
que leur forme sphérique. La Cifro est éminemment
fade.
Civadio, s. f. Cévadille, graine qui réduite en poudre et
mélangée avec de l'huile, a la propriété, dit-on, de faire
périr les poux de tète, ainsi que leurs œufs ou lentes. Il
est certain qu’elle contient un principe actif, un acide par-
ticulier, qu'on range parmi les poisons; mais la propriété
que le peuple lui accorde pourrait tenir aussi à l'huile
qu'on y met et qui est un vrai poison pour les animaux
qu'on veut détruire. — Voy. Grano dé capouchin.
Civado, s. f. Avoine, Avena sativa, Linn., plante de la
fam. des Graminées. Outre les services que rend l’avoine
comme nourriture des chevaux, on en fait encore du gruau,
qui est un aliment très-sain pour l’homme. — Douna
civado, s’arrèter en route pour donner l’avoine. aux che-
vaux. Gagna civado, sauter, gambader ; faire une marche,
un exercice pour se donner de l’appétit. Préne civado, se
régaler; prendre sa provende.
Civado-folo, folle avoine, averon, Avena fatua, Linn.,
plante sauvage, qui ressemble à l’avoine, mais dont l’épi
ne contient qu'une graine apparemment imperceptible,
puisqu'on ne peut la voir ni la recueillir. Elle croit spon-
tanément dans les blés, où elle étouflé le bon grain. —
Voy. Couguioulo.
Dér. de la bass. lat. Civada, m. sign., que Ménage dit
venir du chaldéen Sevada, aliment.
Cla, s. m. Pierraille; cailloutage; terre mélangée de
pierrailles.
Deux observations importantes se présentent : une qui
touche à la signification du mot, l’autre qui concerne son
orthographe.
Sauvages le traduit par : une pierre. Nous pensons qu'il
exprime une idée de collectivité, un amas, un tas de pier-
res; pierraille nous a paru le rendre plus justement.
Sauvages l'écrit Clap; il a raison si l’étymologie est prise
pour règle : la famille assez nombreuse de dérivés et de
composés qui suivent et dont aucun ne peut renier sa
parenté, le prouve suffisamment. Mais si le mot doit être
prononcé, s’il est fait pour être compris à l'audition autant
qu’à la lecture, il est nécessaire de l'écrire sans le p final,
qui ne se fait jamais sentir.
Dans le nom français de Méjanes-le-Clap, commune du
canton de Barjac, que la lettre terminale soit maintenue
puisqu'elle sonne, nous n’y faisons pas d'opposition; mais
que, dans notre dialecte qui dit Méjano-lou-Cla, il s'intro-
duise à l'écriture une consonne inarticulée, on ne s’aurait
l'admettre, tant que subsistera le principe qu’en languedo-
cien il n’y a point de lettres inutiles et de non-valeurs, et
que toutes doivent se faire entendre.
En composition ces retranchements de lettres ne sont pas
rares : le mot Cap se passe toujours volontiers de sa finale,
et nous disons couramment : Ca-dé-Rioussé, commune de
Soustelle; Ca-dél-Pra, commune de Peyroles; Sén-Witoù-
dé-Malca, canton de Saint-Ambroix ; comme dans le juron
CLA
Cadédis ou Cadédiou, et pour celui-ci la connivence du
français nous y aide un peu.
Nous en agirons de mème avec bien d’autres, surtout
parmi les monosyllabes, et par exemple un des plus rappro-
chés Co, en fr. coup, qui donne cependant Copo, Coupa,
etc., mais dont le radical primitif ne fait pas sonner la
consonne, et plus loin Trop et autres, auxquels nous pis
vons aussi des explications.
L’adjectif suivant Cla au masculin se rangerait pe cette
catégorie, à propos de la suppression de sa finale », qui a
disparu également de tous les infinitifs.
Nos observations seront mieux à leur place quand nous
traiterons, sous chaque lettre, de la méthode d'orthogra-
phe, dont nous avons commencé l’exposé au mot Aou. Il
suffit, au passage, d'avertir et de signaler les homonymies
qui poussent à chaque ligne, pour éviter toutes confusions.
Quant au radical lui-mème Cla pour Clap, vient-il du
gr. Kidouæ, éclat, morceau, formé de Kizw, briser, rompre;
ou bien le latin Lapis, pierre, par apocope Zap et par
adjonction d’un €, lui aurait-il donné naissance? Raynouard
soutient cette dernière étymologie. Sauvages remarque que
l'addition ou la suppression du € a fourni tour à tour Clo-
dovicus pour Lodovicus, ramenés ensuite à Clovis pour
Louis, dernière forme du nom qui est restée.
Avec les suflixes extensifs, Cla pour Clap donne à notre
dialecte Clapus, Clapassino, Claparédo, Clapiè, Clapier,
noms propres ou noms communs, entraînant tous à divers
degrés un sens de tas de pierres, monceau ou amas de
pierrailles, de lieux voisins ou abondants en pierres entas-
sées ou dispersées.
De là, si l’on cherche les analogies, on trouve, seulement
dans notre département du Gard, La Claparédo, commune
de Pompignan; La Claparouso, commune deRevens; Zous
Clapéirdous, Les Clapayrols, bois dans la commune de
Domessargues; La Clapéirolo, commune de Gaujac; Las
Clapéirolos, commune d'Euzet; Clapisso, commune de
Saint-André-de-Valborgne; Las Clapissos, commune de
Combas; La Clapouso, ruisseau et bois, communes de
Bonnevaux, de Génolhac et de Quissac; Clapissos; Clap-
pices, mansus de Clapissis, en 1466, dans la commune
d’Aulas. Dans tous ces noms se rencontrent les formes de
la moyenne latinité, très-pures, comme Clapa, Clapusdans
Clapas et Clapous, ou avec leurs suffixes traduisant Clapei-
rada, Où Claperia, où Claperius, où Clapiceum, ow avec
leurs diminutifs en of et‘olo; que Du Cange, à l'aide de
citations d'actes et de chartes, rend par : Congeries, acer-
vus lapidum, Clapié de peyre, clapier ou tas de pierre.
Puis, si l’on voulait se rendre compte du chemin qu'ont
fait les transformations, dans les noms propres de lieux,
sous certaines influences ethniques inappréciables, on aurait
à prendre les noms anciens de la géographie du moyen-âge
qui répondent à cette forme, et l’on trouverait par exemple :
Clichy-la-Garenne, doublement significatif, appelé autrefois
Clipiacus ; Cleppé dans la Loire nommé Clipiacus ; et tou-
CLA
jours avançant, un lieu dit aujourd'hui Pierreclos, dans le
Rhône, autrefois Clipiacus. Par où il faudrait conclure que
Clichy = Cleppé = Clapier = Clapas, Clapisse, Clapière,
Claparède = Pierreclos, qui n’est qu'une traduction fidèle :
| tous rendus par Clipiacus — Claperius = Clapiceum =
; Clapa. Mais le fr. Pierreclos — Clapouse, dans le Gard :
par conséquent Clapouse est le même nom que Peyrouse
(Hautes-Pyrénées), que Cheyrouse (Cantal), que Panouse
| (Lozère), que Rochouse (Indre-et-Loire); et il a pour cor-
| respondants Clapière (Hautes-Alpes), similaire à Perrière,
F à Queyrière, à Rochière, qui sont les mêmes que Perosa et
Sassoso en Italie, et que Queiroso en Espagne, et en com-
munauté avec La Peyrouse, et Cayrouse, et Carouse,
et Caire, Cayrats, etc.
Comme pour prouver que le fond de la langue reste par-
tout le même, que l’origine des dialectes est une source
| commune, et que les différences de climats, d'habitudes ont
| pu faire dévier la prononciation, l'impressionner et l’influen-
|
}
cer, de manière à créer des variétés qui ne sont pas des :
dissemblances réelles, à donner aux mots des physionomies
diverses, sans faire disparaitre entièrement l'air de famille
et les signes de reconnaissance.
Cla, claro, adj. Dim. Claré, éto. Clair, aire; lumineux ;
transparent; qui jette, reçoit, transmet beaucoup de
lumière ; qui n’est pas trouble; peu épais; peu serré ; clair-
semé ; rare. — Faï cla, le temps est clair. Faï cla dé
luno, il fait un beau clair de lune. D'aïgo claro, de l'eau
limpide. Aquélo tèlo és bièn claro, cette toile est peu serrée.
Y vése pas cela, je n'y vois pas clair. Parla cla, parler
clair. Séméno cla, culiras éspés, prvb., le grain clair-semé
donne une moisson abondante. Cla d'én bas, mountagno
éseuro, plèjo séguro, prvb., clair vers le midi, montagne
couverte de nuage, présage certain de pluie : orientation
d’Alais bien entendu. Las castagnos soun claros, les chà-
taignes sont rares, clair-semées.
Dér. du lat. Clarus, m. sign.
Clañi, vw. Remplir outre mesure ; farcir; gorger. — Lou
sôou és elafà dé poumos, le sol est jonché de pommes. Es
clafi dé pésouls, il a la tête farcie de poux.
Sauvages donne pour variante le terme Cldoufi, inusité
aujourd'hui; mais l'étym. ne serait-elle pas là pour elafi un
peu syncopée? Clausus fieri, du lat., aurait pu la fournir :
devenir clos, très-plein ; le sens serait juste.
Cläou, s. f. Dim. Clavéto. Clé, instrument de métal
_ pour ouvrir ou fermer une serrure ; petite clé, clavette. —
_ Téstamén à cldou, testament mystique. Drowvi sans cléou,
enfoncer une porte; forcer une serrure.
… Dér. du lat. Clavis, m. sign.
Clâou, s. m. Dim. Cldousé, Cldousèl, Cldousélé. Clos ;
enclos; closeau; closerie; petit jardin. — Il est devenu nom
propre avec la variante dialectale en Duelaux, Duclos,
Laclos et même Lenclos, et les dim. Clausel, Duclansel :
tous de même origine. Mais il est remarquable que le pre-
mier Du Claux, qui devait être traduit en lang. par déou
CLA
clâou, garde sa teinte française et se dise couramment
Ducldou, comme font au reste les noms Du Mas, Du Gas,
et autres. — Voy. Dalmas.
Dér. du lat. Clausum, m. sign.
Cläousado, s. f. Enceinte; certaine étendue de terrain
ou mème de pays, entouré de clôtures ou de limites fixes,
telles que collines, ruisseaux ou rivières.
Clâousi, v. Clore; clôturer ; entourer de murs ou de
barrières; fermer; enfermer.
Dér. du lat. Clausum, supin de claudere, m. sign.
Clâäoutriè, s. m. Cloutier, fabricant de clous ; marchand
de clous.
Claparédo, s. f. Terrain couvert de tas de pierres rou-
lantes et détachées et non de rochers ; car alors il s'appelle
Rancarédo. — Voy. Cla.
Clapas, s. m. Dim. Clapassoù. Augm. Clapassas. Au
plur. Clapasses. Tas de pierres, et par ext. tas de toute
sorte d'objets; monceau; amas. — Las pèiros van as cla-
passes, dit le prvb., lorsqu'un heureux événement arrive à
une personne déjà fort heureuse, et surtout lorsqu'un héri-
tage échoit à une personne riche : c'est-à-dire le bien
cherche le bien; un bonheur ne vient pas sans l’autre;
l'eau va toujours à la rivière. — Y-aviè un clapas dé
mounde, il y avait foule, un grand encombrement. — F. Cla.
Clapassino, s. f. Terre très-pierreuse; qui peut fournir
beaucoup de blocaille.
Clapéto, adj. fém. Ne se dit que de l’eau : aïgo elapéto,
eau à peine tiède, dégourdie au feu, telle qu'on s’en sert
pour abreuver le bétail malade.
Clapisso, s. f. Dim. à la fois de Clapas et de Claparédo,
petit coin de terre rempli de pierraille. — Voy. Cla.
Clapo, s. Sonnette de mouton, dont les flancs sont
aplatis et parallèles; sonnaille, grosse cloche de mulet con-
ducteur dans les convois de mulets. Elle a pour objet de
rappeler les mulets qui pourraient s’égarer de la file pen-
dant la nuit et dans les sentiers méconnaissables par la
neige ou les éboulis.
Claquo, s. f. Claque; taloche; coup frappé avec le plat
de la main. C'est probablement une onomatopée du bruit
que fait un pareil coup en frappant sur la joue et surtout
sur certaine autre partie du corps à nu.
Capèl à la claquo, claque, chapeau plat qu’on porte sous
le bras.
Clarénsoü, n. pr. d'homme. Clarenson.
L'origine de ce mot est bien évidemment anglaise. Il
signifie fils de Clarence, tout comme Fitz-Clarence.
Claréto, s. f. Clairette; vin clairet; raisin blanc qui
produit ce vin. La claréto est une des espèces de raisin
qu'on choisit de préférence pour la conserver sur la paille;
son grain est menu, clair-semé et très-sain.
Clari (Canta), phr. faite. Sonner creux, comme fait un
vaisseau quelconque, soit quand il est vide, soit quand il
est fèlé.
Clarin, s. ». Sonnette à brebis, la plus petite de celles
203
204 CLA
qu'on emploie; elle est à peu près cylindrique; ainsi nom-
mée parce qu'elle rend un son clair.
Clarjas, s. m. Ce mot n’est employé qu’en terme de
comparaison et sous cette seule formule : un fid coumo un
clarjas, un feu à mi-cheminée, un feu de reculée.
Sauvages le traduit par gueuse, lingot de fer fondu qu'on
coule dans le sable, au sortir du fourneau de fusion. Je ne sais
sur quoi il appuie cette opinion, puisque ce terme n’est jamais
employé en parlant de la gueuse nominativement. En sup-
posant même cette origine, Clarjas serait plutôt le creuset
dans lequel s'opère la fusion, le haut-fourneau tout entier.
Ne serait-il pas trop simple de chercher l'étym. du mot
dans la description même de l'opération au moment où la
coulée se fait et où la gueuse incandescente, rouge à blanc,
court se répandre dans son lit de sable et s'étend dans son
clar jas, sa couche claire ou en feu? Ceci dit en admettant
que la sign. donnée par notre devancier soit juste.
Claro d’idou, s. f. Blanc d'œuf; glaire d'œuf.
Dér. du lat. Clarum ovi.
Clarou, s. f. Lueur ; faible clarté; se dit de la clarté de
la lune ou même des étoiles.
Dér. de Cla, clarus.
Clarta, s. f. Clarté ; lumière ; éclat ; splendeur.
Dér. du lat. Claritas, m. sign.
Classes, s. m. plur. Glas de mort; sonnerie de cloches,
lorsqu'une personne vient d’expirer, et lorsque commence
la cérémonie des funérailles. — Lous grans classes, son-
nerie à grande volée pour les enterrements de première
classe. Sonou sous classes, on sonne pour son enterrement.
Dé qudou soun aquéles classes? pour qui sonne-t-on le glas
de mort? Sonou tous classes, tu as perdu, tu es dégoté, tu
ne peux pas t'en relever.
Dér., d’après quelques auteurs, du lat. Classicum, son
de la trompette, parce que sans doute dans les premiers
temps et avant l'introduction des cloches dans les rits reli-
gieux, on annonçait la mort avec une trompette; suivant
d’autres du lat. Clango, faire retentir, ou clamo, appeler à
grands cris, ou bien du gr. Kat, pleurer, ou de KA&w,
faire un bruit aigre et perçant. Le bas-breton a Glas, qui
a passé au fr. et qui indiquerait aussi l’origine de classes
avec la m. sign.
Classo, s. f. Classe ; salle d'école; classe de jeunes sol-
dats. — Faï la classo dé lat}, il fait ses études de latin. À
fini sas classos, il à fini ses études. Vaï à La classo, il va
à l'école. Es pas d’aqguésto classo, il ne doit pas tirer au
sort cette année. La classe est distinguée par l’année dans
laquelle a eu lieu le tirage au sort, on dit : Zu classo trénto-
trés, trénto-quatre. On s’en sert aussi dans ce sens pour
indiquer son âge : couscri dé trénto-trés, est né vingt ans
avant la date de sa classe.
Dér. du lat. Classis.
Clastréja, v. frég. Aller d’un presbytère à l'autre, pour
y faire le parasite; fréquenter les curés. — Voy. Castéléja.
Clastro, s. f. Presbytère; maison curiale. — Autrefois
CLA
ces maisons étaient habitées par une réunion ou collége de
prêtres qui y vivaient claustralement et étaient les conseils
des évèques. Plus anciennement encore, elles étaient occu-
pées par des moines qui desservaient de là un grand
nombre de paroisses, dans un lemps où le clergé séculier
inférieur était peu nombreux et fort peu rétribué. — Bé dé
clastro, propriété de main-morte, bien d'église.
Dér. de la b. lat. Clastra, du lat. Claustrum, clôture, cloitre.
Clava, v. Fermer à clé; renfermer; poser la clé à une
voüte, assujettir les voussoirs de moellon au moyen de
coins ou d’une pierre principale qui forme la clé ; séques-
trer. Au fig. achever, accomplir. — Sé clava dédin, s’en-
fermer, fermer la porte sur soi. Clava uno croto, mettre la
clé à une vote. À las déns clavados, il a les dents serrées
convulsivement.
Dér. de Cldou, lat. Clavis.
Clavèl, s. m. Dim. Clavélé. Clou, morceau de fer allongé
et pointu servant à fixer une chose à une autre ; petit clou,
broquette. — Clavèl dé caréto, clou de jante. — Voy.
Cabosso. Clavèl dé tapissarié, clou à crochet, pour fixer
les tentures d’un appartement. Aujourd’hui les tapisseries
en papier en ont diminué l'usage. Clavèl doubla, clou tortu,
tordu ou crochu. Clavèl mouru, déspouncha, elou rebouché
ou épointé. Clavèl dé girofle, clou de girofle. On dit d’un
mauvais payeur : N'aï pas pougu déraba ni fère, ni clavël,
je n’en ai pu tirer ni sou, ni maille.
Dér. du lat. Clavus, m. sign.
Clavéla, v. Clouer; attacher, fixer avec un ou plusieurs
clous. — Es clavéla dé pigoto, il a la figure toute semée
de bubons de petite vérole.
Clavélado, s. f. Raie, raie bouclée, Raia clavata, Linn.,
poisson de mer de l’ordre des Trématopnés et de la fam.
des Plagiostomes. Il parvient à une grande grosseur ; sa
chair est agréable et savoureuse. Il est plat et large, sans
écailles. Les aiguillons qu’il porte sur le dos, espèce de
cartilages ou d’osselets qui ressemblent à des têtes de clous,
lui ont fait donner le nom de Cavélado.
Clavélé, s. m. Détente d’un fusil ou d’un pistolet.
Dér. et dim. de Clavël.
Claviè, s. ». Crochet de femme, ordinairement en argent,
garni d’une chaîne, à laquelle les femmes suspendent, à la
ceinture, leurs ciseaux et les clés les plus importantes.
C'était, il y a cinquante ans, une parure pour les ména-
gères du peuple un peu huppées. Elles ne le portaient que
dans leur grande toilette, et il était alors sans clés ni
ciseaux. Ce bijou se transmettait de mère en fille, et on le
constituait en dot dans le contrat de mariage. Les filles
n’en portaient jamais. Il était le signe de l'autorité en mé-
nage. Aujourd'hui le Claviè est un crochet à ciseaux com-
mun à toutes les classes.
Dér. de Cldou, lat. Clavis.
Clavièiro, s. f., n. pr. delieu. Clavière ; closerie; champ
entouré de murs ou de haies.
Dér. de Cidou, clos, avec le suffixe collectif adjectif éètro.
CLE
Clè,s. f., ou Païo dé clè. Glui; gerbée; paille de
seigle dont on a fait tomber le grain au fléau et mieux
encore avec un rateau, afin de lui laisser toute sa longueur.
Elle sert à garnir les chaises, à faire des paillassons, à
rembourrer les colliers de labour, à lier les ceps aux écha-
las, à couvrir les toitures en chaume. s
Ce mot est tiré sans doute du fr. Claie.
Clédado, s. f. Récolte de châtaignes sèches ; quantité
comprise dans un séchoir appelé Céédo.
Clédanço, s. f. Crédence ; buffet à tenir les provisions ;
bahut. — La clédango, dans ce pays, est d'ordinaire un
meuble d'utilité, et meuble meublant dans la cuisine des
paysans cossus. C'est extérieurement un buffet bien ciré,
bien luisant, quelquefois ciselé, sculpté, et en l'ouvrant, au
lieu d'un buffet, on trouve une huche à pain.
Ce mot, comme le fr., vient de l'allem. Kredentz, buffet.
Clédo, s. f. Claie d'un parc à brebis, composée de trois
montants et de quatre traverses; claire-voie ; porte à bar-
reaux ; ridelle d'une charrette ; cadre sur lequel est tendu
un treillis en fil de fer pour passer le sable ou la terre : on se
sert de ce châssis en le soutenant de champ avec une légère
inclinaison, et à l'aide d’une pelle on jette contre ce que
l'on veut passer; séchoir à châtaignes. Dans cette dernière
‘ acception, la Clédo est un bâtiment, qu'on isole autant que
possible des habitations à cause des dangers d'incendie : il
est bas et tout d’une pièce ; à la hauteur de deux mètres
environ du sol, un rang de solives soutient un plancher
composé soit de minces chevrons joignant l’un à l’autre,
qu'on nomme sétoùs, soit de clayons faits de scions de chà-
taigniers sauvages, qu'on nomme panèls. C’est là qu'on
dépose les châtaignes fraiches, sur une épaisseur qui peut
aller jusqu’à 75 centimètres. Au-dessous on entretient un
feu continuel et lent au moyen de grosses souches, de
vieux troncs d'arbres ; lorsqu'il donne trop de flamme, on
l'étouffe à moitié avec de la cendre et avec les épluchures
de châtaignes de l’année précédente que l’on conserve dans
ce but. Par ce procédé on obtient un feu calme et qui
donne beaucoup de fumée. C'est cette fumée qui n’a d’au-
tre issue que le plancher superposé, qui, filtrant à travers
les interstices, commence à faire suer les châtaignes, à
volatiliser toute leur humidité, et finit par leur donner ce
degré de dessication qui permet de les dépouiller et les
durcit sans arriver jusqu’à la coction.
C’est souvent dans le séchoir que se passent les veillées
dites Castagnados. Comme l'on a besoin de surveiller le
feu, il faut que quelqu'un y veille à tour de rôle, même
la nuit. La veillée s'assied par terre, sur une pierre, ou
sur une souche, et toujours le plus bas possible, parce
que le local est plein de fumée qui n’a point de conduit
direct et que l’on en souffre moins dans la zone inférieure.
Dér. de la bass. lat. Cleda, formé du grec KAïÿèos, clô-
ture, haie, de KActw, je ferme.
Cléna, v. Incliner; plier; baisser. — Cléna las éspanlos,
plier, hausser les épaules, en signe de soumission ou de
-
co 205
dédain. Cléna lous ièls, baisser les yeux ; clignoter ; fermer
les yeux à demi. Cléna la tèsto, courber la tête; se pros-
terner; s’incliner de respect; s'humilier. Sé cléna, se cour-
ber; s’abaisser; se ratatiner.
Dér. du lat. Clinare, pencher, incliner.
Clèr, s. m. Clerc d'église, sous-sacristain ; servant ; clerc
de notaire; étudiant en pratique, qui travaille sous un
homme de pratique ; et en général, dans le langage fami-
lier, tout individu qui se trouve dans une position secon-
daire relativement à un autre, comme un commis, un
compagnon, un domestique.
Dér. du lat. Clericus.
Clèrci, s. m. Quercy, ancienne province; porc de l’es-
pèce qui nous vient du Quercy. Au fig. cochon; pares-
seux.
Corr. du fr. Quercy.
Cliquétos, s. f. plur. Cliquette, instrument de gamin,
composé de deux galets longs et plats ou de deux petites
douves en bois, qu'on fait battre en les tenant et les agi-
tant entre les doigts, et qui rend à peu près le même son
que les castagnéttes. — Au fig. et par ironie, se dit de
jambes dépourvues de mollets; dans le même sens qu'on
dit en fr. des flûtes. — Batré dé las cliquétos, grelotter de
froid, quand il fait claquer des dents et flageoler des
jambes.
Autrefois on obligeait les lépreux de nos maladréries à
battre des cliquettes ou à agiter des crécelles, pour avertir
les passants de ne pas les aborder.
Ce mot est une onomatopée.
Cloucha, v. Glousser. — Se dit du chant ou du eri de la
poule qui couve. — La galino cloucho, la poule demande,
ou se prépare à couver.
Dér. du lat. Glocire ou Glocitare, m. sign.
Clouchado, s. f. Couvée; troupe de poussins; tous les
œufs qu’une poule couve à la fois; les petits qui en pro-
viennent. Au fig. engeance, famille.
Clouchè, s. m. Clocher; bâtiment ou espèce de tour
élevée qui soutient et renferme les cloches d’une église.
Dans la bass. lat. Clocarium, formé de Cloca, cloche,
avait la m. sign. En allem. Æloke, cloche; en angl. Clok,
horloge, heure, dér. du vieux teutonique Kecoken, frapper.
Cloucho, s. f. Poule couveuse. — Métre la cloucho,
mettre une poule à couver, lui donner des œufs à couver.
Ce mot, comme le v. Cloucha, en lat. Glocire, est une
onomatopée du gloussement de la poule, durant la couvée
et l’éducation des poussins.
Cluta, v. Cligner, fermer à demi les yeux, comme font
les myopes, afin de diminuer l'ouverture de l'angle visuel,
ce qui le rend plus aigu et plus impressif sur la cornée
qui est trop épaisse et trop peu diaphane chez les myopes.
— Au fig. Cluta lous ièls, s'éteindre, mourir.
Dér. du gr. KAkvw, plier, ou du lat. Clusus, fermé; ou
encore du gr. K<ÿ0w, cacher, enfermer.
Co, s. m. Dim. Coupé; augm. Coupas. Coup; choc;
206 COI
heurt; mouvement impétueux; décharge et bruit d'une
arme, du tonnerre; tour subtil: geste; fait; tentative;
entreprise ; but; trait de raillerie, de médisance. — Un co
dé vi, un verre de vin. À bégu soun coupé, il a bu son
petit coup. 4ow co dé mièjour, midi sonnant; mot à mot :
quand midi frappe son coup. Un Co dé san, attaque d’apo-
plexie. Un co dé sourél, coup de soleil; insolation. Co dé
fusil, dé vén, dé tounèro, coup de fusil, de vent, de ton-
nerre. Z a fa lou co, il lui a joué un tour. — Aro séri
bièn lou co, maintenant ce serait bien le cas; l’occasion est
belle; c'est le moment. À manqua soun co, il a échoué
dans son entreprise. T'aouraï vis aqud d'un co d’ièl, j'au-
rai vu cela d’un coup d'œil. Douna un bon co dé dén,
faire un bon repas. Un co dé man, un peu d'aide. Co dé
bè, médisance, Faïre lou co dâou lapin, donner le coup
du lapin, c’est-à-dire un coup de main derrière la nuque,
parce que c’est là la manière de tuer les lapins domes-
tiques ; au fig. duper quelqu'un, lui tendre un croc en
jambe.
Tout d’un co, adv. Tout à coup. Tout énd’un co, Ou tout
émb'un co, tout à coup; soudain ; subitement.
Dér. de Cop, qu'on dit celtique; ou de la bass. lat. Col-
pus, corr. du grec Kékapos, soufflet.
Co, s. m. Fois. Syn. de Fés. — Y aviè un co, il y avait
une fois. M'ou fagues pas dire dous cos, ne me le fais pas
répéter, dire deux fois. Un co l'âoutre nou, une fois et
l'autre non, alternativement. Un co qué l'éouraï vis, une
fois que je l'aurai vu. Toutes dou co, tous à la fois. Tout
d'un co, tout en une seule fois.
Co, s. m. Vanne; écluse. — Toumba lou co, abaisser
la vanne ; éva lou co, lâcher l’écluse; au propre et au fig.
se dit de ces moulins à paroles, qui, une fois en train de
discours, ne s'arrêtent plus.
Cobre (dé), adv. De surplus; en réserve; par dessus le
marché; au-delà du nécessaire ; de relais; de reste. —
Fôou toujour avédre quicoumé dé cobre, il faut toujours
avoir quelque peu de chose en réserve ; il faut se garder
une poire pour la soif.
Dér. du lat. Cooperire, couvrir, mettre en réserve. En
esp. Cobro, à couvert.
Codou, s. m. Caillou; galet; pierre isolée; celle que l'on
lance à la fronde. — Abataïa à co dé codou, poursuivre
à coups de pierre.
Dér. de la bass.
Cautes, caillou.
Cofre, s. m. Dim. Coufré; péj. Coufras. Coffre; bahut;
meuble en forme de caisse, propre à serrer des hardes, de
l'argent, etc. Au fig. poitrine, estomac. — Agué! home a
un bon cofre, cet homme a une excellente constitution,
Coïè, s. m. dim. Couïètré. Collier, seulement dans l'ac-
ception de bijou, ornement autour du cou; jamais dans
celle de collier de trait, de labour, qui se dit : Cowlas.
Dér. du lat. Collum, cou.
Coïfo s./. Coiffe bonnet de femme: cornette. — Un
lat. Codulus, m. sign., formé du lat.
CON
prvb. irrévérencieux pour le sexe, et qui n'est pas tou-
jours vrai, a dit: Un capèl vou maï qué cén coïfos, un
chapeau vaut mieux que cent coiffes; métonymie.
Dér. de la bass. lat. Cufa on Cuphia, m. sign.
Coire, v. Cuire; préparer les aliments au feu; faire cuire,
spécialement faire cuire du pain. — Quouro cousès? quand
faites-vous du pain? Bouta coïre, mettre le pot au feu.
Aqud vou pas dé coïre, cela ne demande que fort peu de
cuisson. |
Coïre, v. Brüler; havir; cuire; faire éprouver de la
cuisson : au fig. être en danger de mort, de perte. — La
barbasto a quiè la fartaïo, la gelée blanche a flétri V'hor-
tolaille. Fas trop coïre aquélo car, tu brûles cette viande.
Souï quiè, je suis cuit, je suis perdu. Mous ièls mé cosou,
les yeux me cuisent. T'én couïra, il t'en cuira, tu t'en
repentiras.
Dér. du lat. Coquere, m. sign.
Col, s. m. ou Couol. Cou, col : partie du corps qui sou-
tient la tête. — Pourta dou col, porter un fardeau sur les
épaules. Col dé péro, col-tort, qui porte le cou de travers :
au fig. cagot; hypocrite; torticolis. Col dé pe, cou-de-pied
ou coude-pied. Col d'uno boutéio, goulot d’une bouteille.
Dér. du lat. Collum, m. sign.
Colis, s. m. Colis; ballot de marchandise; terme de
roulage; caisse; barrique; paquet.
« Importation nouvelle du fr.
Colibè, s. ». Quolibet ; sarcasme; plaisanterie grossière
et méchante; pointe; équivoque.
Dér. du lat. Quod libet, tout ce qu'on veut, c’est-à-dire
que ceux qui lancent des quolibets disent tout ce qui leur
passe par la tête sans égard ni réserve.
Colo, s. f. Colle; matière gluante et tenace qui sert à
joindre deux surfaces. — Colo forto, colle forte, faite de la
coction des parties gélatineuses des animaux; ainsi carac-
térisée à cause de sa grande ténacité.
Dér. du gr. KéXkæ, m. sign.
Colo, s. f. Bande; troupe; association d'ouvriers tra-
vaillant ensemble ; multitude. — Colo dé réssaïres, scieurs
de long qui sont associés par bande de trois. Sèn pas dé
colo, nos chiens ne chassent pas ensemble.
Dér. du lat. Collatus, assemblé, joint, et du gr. Ko}mtés,
uni, rapproché.
Comotivo, s. f. Locomotive.
C'est encore un emprunt au langage scientifique par son
côté populaire. Mais le lang., fidèle à cette antipathie de
rivalité dont le fr. a pris l'initiative envers lui, a voulu
marquer cette adjonction au cachet de son génie en défi-
gurant son modèle.
Conquo, s. f. Dim. Counquéto. Bassin ou bassine de
cuivre sans anse, dont on se sert dans les cuisines pour
faire tremper certaines provisions et pour d’autres usages ;
au fig. terrain creux ; bas-fond formant comme un bassin.
Dér. du lat. Concha, conque, vase, coquille, venant du
gr. Kéyyn, conque, coquillage.
CON
… Consou, s. ». Consul; échevin, officier municipal dans
l’ancien régime. Dans les chartes, on les désignait sous le
nom de consuls modernes, sans doute par comparaison aux
consuls romains. Ils portaient la robe et le chaperon. Pius
tard, et dans les campagnes surtout, ils se dispensaient de
la robe; leur insigne était le chaperon cramoisi bordé
d'hermine, — Aourian fa un consou, nous aurions fait un
pape, disons-nous, lorsqu'un autre émet une idée que nous
allions émettre nous-mème dans l'instant. Cette formule
proverbiale, tant en fr. qu'en lang., est une allusion au
système également suivi pour les papes et les consuls. C’est
comme si l'on disait: avec cette communauté d'idées, on
peut faire réussir toute candidature : il ne s'agit que de
s'entendre. Mais ce qui était autrefois praticable et qui a
donné naissance au dicton, pourrait-il aujourd'hui être
également vrai et juste? Nos pères avaient des franchises
qui passaient en proverbe pour attester leurs libertés com-
munales; nous avons le progrès, et si quelque dicton
se conserve jamais de nos mœurs électorales, de ce temps
de suffrage universel, il est douteux qu'il exprime une
idée pareille, qui répond à une autre locution plus étendue
encore sur la nécessité de l'accord : Enténdè-vous et farés
pléoure} entendez-vous et vous ferez pleuvoir.
Conte, s. m. Compte; supputation; nombre; calcul;
facture ou note de fournitures, contenant l'addition et le
doit. — Faïre soun conte, faire son compte à un domes-
tique, le congédier : au fig. tuer, assassiner. Conte dé
” Béoucaïre, mémoire des fournisseurs que l'on doit solder à
l'époque de la foire de Beaucaire. C'est une époque bien
critique pour tous les consommateurs dans les pays voisins |
de Beaucaire, pour lesquels la foire de cette ville est un
terme de rigueur. Le peuple des campagnes surtout renvoie
tous ses paiements à cette époque, ce qui est pour beaucoup
de gens une cause de ruine et d'expropriation, le crédit
qu'ils obtiennent dans le cours de l’année les alléchant
souvent à dépenser plus qu'ils ne peuvent payer. Aussi, la
quinzaine qui suit cette foire est-elle abondante en exploits
d'huissier.
Dér. du lat. Computum, calcul.
Conte, s. m. Conte ; sornette. — Conte dé ma gran la
borgno, conte de ma mère l'Oie. — Voy. Borgno.
Conte, s. m. Countèsso, s. f. Comte, comtesse, sei-
gneur d’un comté.
Dér. du lat. Comes, compagnon. Ce titre, d'après Dom
de Vaines, Dict. diplom., remonte au moins aux premiers
empereurs, qui nommaient leurs conseillers, comites. Au-
guste avait déjà les siens, comites Augusti. Plus tard, et en
France, les comtes étaient les compagnons, les aides de
camp des rois.
Contoronle, s. m. Enregistrement; bureau du receveur
de l'enregistrement ; marque sur l'or et l’argenterie qui ont
le titre.
Corr. du mot fr. Contrôle, ancien nom de l'enregistre-
ment. -
-
COR 207
Contorounla, v. Enregistrer; soumettre un acte à l'en-
registrement, le déposer au bureau de l'enregistrement;
marquer l'or et l'argent au titre.
Contorounlur, s. "m. Receveur de l'enregistrement ; con-
trôleur des matières d'or et d'argent.
Copo, s. f. Dim. Coupéto. Coupe ; certaine étendue de
bois que l’on coupe régulièrement; coupe de fourrage ;
coupe au jeu de cartes, séparation du jeu en deux parties.
— Y doura éncaro une bono coupélo dé révioure, nous
aurons encore une pelite provision de regain à couper.
Dér. de Coupa.
Copo-jaré, s. m. Coupe-jaret ; brigand; scélérat; mau-
vais drôle. Se dit souvent, dans le langage familier, en
supprimant le derajer mot: és un trasso dé copo, c'est un
mauvais gueux, un très-pauvre sire. Frimousso dé copo,
figure de coupe-jaret.
Formé de Coupa et de Jaré. — Voy. &. m.
Copo-roso, s. f. Couperose, vitriol en sel, nom géné-
rique qui convient autant à la couperose bleue, sulfate de
cuivre, qu’à la couperose verte, sulfate de fer, dont l'ex-
ploitation était si connue aux environs d'Alais, à Saint-
Julien-de-Valgalgues.
Dér. du lat. Cupri ros, rosée ou eau de cuivre, nom que
portait le vitriol dans l’ancienne nomenclature chimique.
Coquo, s. f. Châtaigne; poulette; mot du dictionnaire
des nourrices et des bonnes d'enfant.
Coquo, s. f. Brioche, gâteau ou patisserie fait de fleur
de farine, de jaunes d'œufs et de sucre. — Voy. Rous-
tido.
Dér. du lat. Coctus, cocta, cuit, cuite.
Coquo, s. f. Coque du levant; petit fruit à baies noirà-
tres de la grosseur d’un gros pois. Il fait périr les poux et
enivre les poissons, qui viennent mourir bientôt sur le
sable. On ne s'en sert guère que pour empoisonner le
poisson de rivière.
Dér. du gr. Kôxxos, grain.
Cor, s. m. Corps; corps humain ; cœur, organe principal
de la circulation ; affection; mémoire; affection de l’Ame ;
courage; cor, instrument à vent, tourné en spirale; corps
de jupe, corset. — Y a pas un pèou dé moun cor, il n'y a
pas un poil, une veine de mon corps. — Mdou dé cor,
mal de cœur, faiblesse, évanouissement. Apréne dé pér cor,
récila dé pér cor, apprendre, réciter par cœur. Ou save dé
pér cor, je le sais par cœur. L'aïme dé tout moun cor, je
l’aime de tout mon cœur. Cor dé casso, cor de chasse. La
paouroto, a lou cor gros, la pauvrette, elle a le cœur gros,
elle est très-affectée. — Foy. Cur.
Dér. du lat. Corpus pour corps, de Cor pour cœur, et de
Cornu pour cor.
Corcomaire, n. pr. d'une rue de Nimes.
Ce mot parait venir de la corroyerie qui se faisait dans
cette rue située le long du canal de l'Agau. D'après cela,
Corcomaïre signiferait en vieux langage du pays, corroyeur,
et serait composé de Corcom, corruption du latin Corium,
208 cos
cuir, et de la désinence aïre, commune aux adjectifs d'ac-
tion, correspondant à la désinence fr. eur.
Du reste, Sauvages traduit, comme nous, Corecomaïre,
qui est le même mot, par corroyeur, tanneur, et le fait
venir de la bass. lat. Corraterius, sans entrer dans la dé-
composition de cette origine.
Cordo, s. f. Dim. Courdéto; péjor. Courdasso. Corde,
tortis fait de chanvre, de lin ou de boyau. — Cordo fino,
ficelle employée pour mèche à fouet.— Voy. Lignéto. Cordo
dé faï. — Voy. Séngloù.
Dér. du lat. Chorda, corde d'instrument de musique,
cordeau.
Cordos, s. f. plur. Maladie des pores, des chevaux,
ainsi que des agneaux, chevreaux et veaux de naissance.
C'est une contraction nerveuse des articulations, qui les
empêche de plier les membres, et rend leurs jambes raides,
comme si elles étaient tendues avec des cordes.
Corfali, v. S'évanouir, tomber en défaillance, dispa-
raitre; se pàmer.
Formé de Cor et de Fali, manquer du cœur.
Corgno, s. f. Fruit du cornouiller, en forme d'olive,
d’un rouge vermillon, quand il est mûr. — Véou pa'no
corgno, c'est un pauvre homme, un mauvais ouvrier, qui
ne vaut pas une pipe de tabac. N'én dounarièi pa’no cor-
gno, je n’en donnerais pas un sou vaillant.
Dér. du lat. Cornum, m. sign.
Coronlo, s. f. Tresse de cheveux entortillés sur la tête
des femmes, en forme de couronne. « Cet usage, dit Sau-
vages, subsiste en Italie chez les femmes du peuple, et il
a passé de mode depuis longtemps dans nos provinces, où
les têtes de femmes sont plus changeantes. » Mais on y
revient : ce qui ne prouve pas que le spirituel abbé n'ait
pas eu raison.
Dér. du lat. Corolla, contraction de Coronula, petite
couronne.
Cor-san, s. m. Corps saint ; reliques d'un saint; corps
sacré de Jésus-Christ. — L'aï préga coumo un cor-san, je
l'ai supplié comme Dieu lui-même. Ména plan coumo un
cor-san, conduire comme un Corps saint, avec précaution
et sollicitude, comme si l’on portait des reliques.
Costi, s. m. Coût; dépens; dépenses; frais. — Crén pas
lou costi, il ne craint pas la dépense. Y doura fosso costi,
il y aura bien des frais.
Dér. de Cousta.
Costo, s. f. Dim. Coustéto. Côteau, côte, penchant d'une
montagne, d’une colline; côte, os long et courbe des par-
ties latérales de la poitrine de l’homme ou de l'animal. —
À las coslos én long, il a les côtes placées verticalement;
il ne peut se courber; c’est un fainéant qui fuit tout tra-
vail.
Dér. du lat. Costa, m. sign.
Costos, s. f. plur. Nervures des feuilles d'une plante ;
parties proéminentes d'un melon ; membrure latérale d'un
vaisseau, d’un clayon, d’une manne ; côtes de cocons de
COoU
tirage; fleuret de soie. — Costos dé blédo ou Coustélos,
cardes de poirée. — Les côtes de cocons sont ces filasses
dont on les purge dans la bassine, avant d'arriver au brin
de soie. Comme l'enveloppe extérieure du cocon est la
première travaillée, les premiers brins en sont grossiers,
baveux; c'est pour cela qu'on bat les cocons au bassin
dans l’eau bouillante pour décoller ces premiers brins; on
dévide ainsi les cocons jusqu'à ce qu'ils deviennent fins et
purs. La filasse qu'on retire de cet ensemble de cocons à
la battue, sous forme d'un gros cordon, se nomme Costos.
On la carde et on en fait du fleuret grossier.
Coua, v. ou Gouga. Couver en parlant des oiseaux qui
se tiennent sur leurs œufs pour les faire éclore; choyer,
mitonner un enfant. Au fig. préparer, caresser, surveiller.
— Sé coua, rester longtemps au lit. Laïssa coua la bugado,
laisser une lessive s’imbiber longtemps. Laïssa coua
un'afaïre, laisser chômer une affaire ; la calculer avec soin,
en soigner les détails.
Dér. du lat. Cubare, être couché.
Couacho, s. f. Lavandière, hoche-queue, bergeronnette,
petit oiseau qui fréquente le bord des rivières, se mêle aux
troupeaux de mouton et porte une queue longue, toujours
en mouvement : toutes circonstances qui lui onfvalu les
différents noms fr. que nous citons. Quant au lang. Cou-
acho, dans lequel on voit poindre un bout de queue, guoud
ou quoua, il est bien à peu près l’équivalent du fr. hoche-
queue; aussi a-t-il pour syn. Brando-quuo. Bérgèïréto est
également usité; mais celui-ci est du fr. tout pur, et dans
lé mème ordre d'idées. on ne devrait donner droit de cité
qu'à Pastourèlélo, car le lang. n’appelle les bergers que
pastres. Aussi sommes-nous ramenés vers le vrai mot, qui
traduit le fr. bergeronnette, en appelant cet oiseau Gala-
pastre. — Voy. C. m.
Couado, s. f. Couvée des œufs; action de faire éclore la
graine de vers à soie; temps de l’incubation. — An prés
méou à la couado, ces vers ont été trop échauffés pendant
l'éclosion. Ou a manqua à la couado, dit-on au fig. d'un
individu qui manque de certaines qualités : c'est un vice
de naissance.
Dér. de Coua.
Couaïos, s. f. plur. Derniers vers à soie, ceux qui sont
tardifs à éclore. Il est rare que cette arrière-garde vienne à
bien et qu’elle prospère, soit parce que ce sont les vers les
plus malingres et les moins actifs, soit parce que leur re-
tard provient de ce qu'ils ont été trop pénétrés par la cha-
leur, soit enfin parce que leur mauvaise réputation et leur
paresse les fait négliger, comme de pauvres élèves. Au
reste, on fait bien de les délaisser. Mais les magnaniers,
les femmes surtout, qui se sentent une tendre compassion
pour ce qui souffre et pour tout ce qui appartient à la gent
magnane, les conservent et les font réussir quelquefois. Il
est plus sage et d'une bonne pratique de ne conserver ni
les vers trop hâtifs, ni les retardataires, mais seulement
ceux qui éclosent à trois jours de distance les uns des autres.
Cou
Couaïre, Couaïro, «dj. Couveur, couveuse; l'individu !
qui fait éclore les vers à soie à la chaleur de son corps. Ce
qui se fait en portant la graine dans des sachets sur le
corps, entre les habits et la chemise, ou en la mettant au
lit et se couchant auprès. Ce procédé, qui a été le seul en
usage autrefois, avait du bon; mais il ne pouvait s'exé-
cuter sur une grande échelle. On y a substitué générale-
ment l’éclosion dans un appartement bien fermé { Voy. Espé-
lidouïro) et où l'on entretient un feu régularisé par le
thermomètre, C’est là le mode le plus usité. L'éclosion au
moyen du Castélé (Voy.c. m.), est d'invention relativement
récente; mais cette méthode n'est guère suivie que par les
éducateurs à théorie. Cependant on emploie encore, dans
quelque coin des Cévennes, la chaleur humaine.
Couar, s. m. — Voy. Quouar.
Couasso, s. /. Gourde faite d'une calebasse ; calebasse
fendue en deux et verticalement, dont les fileuses de soie
se servent comme d’une écope pour vider leur bassine
quand elles veulent en renouveler l’eau; cuiller à arroser
(Voy. Asaïgadouïro); écuelle de bois; sébille.
Couble, s. m. Couple; paire; altelage de deux bêtes de
labour; deux choses de mème espèce, prises ou considérées
ensemble. — Un couble dé fés, deux fois, une couple de
fois. Un bé dé dous coubles, une ferme de deux charrues.
Dér. du lat. Copula, lien, couple, lesse dont on couple
les chiens.
Coublé, s. m. Traverses; solives: add de bois de
brin ou de sciage qu'on fixe transversalement sur les
grosses poutres d'un couvert ou d'un plancher pour sup-
porter les tuiles ou le parquet. — Voy. Jaséno.
Coublo, s. f. Troupe de mulets appartenant au même
maitre. Il ne se dit que des mulets qui portent à bât et qui
ont été longtemps Je seul moyen de transport des marchan-
dises dans les pays de montagnes. Ce nom ne se donne pas
aux mulets de trait et d’attelage.
Coucaraïo, s. f. Canaille; truandaille ; réunion de gueux
et vagabonds.
Dér. de Coucarou.
Coucarda, »v. Mettre une cocarde à quelqu'un ; attacher
une ganse de ruban sur sa coiffure; mettre un nœud ou
un pompon sur la tête d’un agneau ou d’un robin-mouton.
Coucardiè, s. m. Soldat, militaire, porte-cocarde.
Coucardo, s. f. Dim. Coucardéto; péj. Coucardasso.
Cocarde, nœud de rubans ou pièce d'étoffe, plissée et ronde,
qu'on porte au chapeau : insigne national que les militaires
portent à la coiffure, et que, dans les révolutions, les divers
partis prennent comme signe de reconnaissance, — Préné
la coucardo, S'enrôler. Chanja dé coucardo, être transfuge
d'un parti dans un autre.
La cocarde nous a été importée par les soldats croates,
hongrois et polonais, chez qui elle était une touffe de
plumes de coq attachée à leur coiffure; ce qui la fit d'a-
bord nommer coquarde, se rapprochant davantage de sa
racine Coq.
COU 209
Nose-coucardo, s. [. Noix de la plus grosse espèce qui
s'ouvre très-facilement. C'est cette espèce que l'on emploie ”
pour en faire de petits nécessaires en miniature, ou des
boites à une paire de gants de femme.
Coucarèlo, s. f. ou Capéléto. — Voy. c. m.
Coucarou, s. m. Péjor. Coucaras. Gueux; truand:
mendiant dépenaillé, pauvre diable sans argent ni consi-
dération. — Méno uno vido dé coucarou, il mène une vie
de bohème, de gueux et de paresseux.
Ce mot a des assonnances avec Trutanus, trudamus,
truand, de la bass. lat., et le même sens; il peut s'être
formé de là, comme il a probablement servi lui-même à
former Couqui, coquin, et certainement Acoucara, acoqui-
ner. En esp. Cucaro, bohème, truand.
Coucha, v. Chasser, pousser devant soi ; chasser un animal
devant soi, le toucher, le frapper pour le faire avancer. —
Coucha las mouscos, chasser les mouches. Coucho ta bèstio,
touche ta bête. Couchas aquél chi, chassez ce chien.
En ital. Cacciare, chasser. Les deux mots viennent-ils
du lat. Cogere, forcer à ?
Couchè, s. m. Cocher, celui qui conduit une voiture,
un carrosse, un coche.
Ce mot est le subs. de notre verbe Coucha; il ne faut
pas lui cherchér d’autre étym. Le fr. nous en parait rede-
vable au lang.
Coucho-cha, s. m. Litorne, grive de génevrier, Turdus
pilaris, Linn., connue aussi sous le nom de Grivo dé moun-
tagno; oiseau de l'ordre des Passereaux et de la fam. des
Crenirostres. Cette grive, presque de la taille de la drame
(Céséro), tient son nom de son chant, ché, chà, seul cri
qu'on lui connaisse. Les baies de génevrier dont elle se
nourrit donnent à sa chair un goût fort prisé de certains
amateurs, mais qui n'est pas apprécié par d’autres qui la
trouvent amère. La livrée de cet oiseau, comme celle de
ses congénères, est un gris cendré, tacheté de points plus
ou moins foncés, avec les parties inférieures du corps
tirant sur le blanc. Mais on sait que l’âge, le sexe et au-
tres circonstances peut-être modifient souvent le plumage ;
et il en est du reste ainsi, par les mêmes raisons, de la
couleur des autres animaux.
Coucho-chi, s. m. Bedeau. Avant l'introduction des
suisses dans le personnel de la gent d'église, c'était le be-
deau qui était chargé de la police des chiens, d’où lui
vient son nom lang. Il est vêtu d’une robe noire ou rouge
et armé d’une baguette ou masse surmontée d’une lanterne
ou d’une boule.
Coucou, s. m. Dim. Coucouné. Cocon de ver à soie;
œuf cuit ou cru, dans l’argot des nourrices ; bouton de rose;
champignon oronge en boule, à demi développé. — Y. Fousél.
Dér. du lat. Concha et du gr. Kéyyn, coquille, conque.
Coucougnè, s. n. Péj. Coucougnétras. Sale-pot; homme
qui se mêle des détails de ménage; qui usurpe les fonc-
tions de la femme.
Dér. de Coucoù dans l'acception d'œuf, parce qu'un
27
210 COU
homme de celte espèce s'occupe particulièrement des poules
et des œufs.
Coucouiado, s. f. Cochevis, alouette huppée, coquillade ;
Alauda cristata, Linn., oiseau de l'ordre des Passereaux et
de la fam. des Subulirostres. Une huppe de plumes placée
.sur la tête et qu’elle peut redresser à volonté, représente
grossièrement une coquille, c’est ce qui lui a fait donner le
nom de Coucouiado; peut-être sa huppe a-t-elle plus de
ressemblance à un capuchon, ét Cucullata la caractérise
mieux ?
Coucoumar, s. m. Dim. Coucoumardé. Coquemar,
bouilloire en terre et à bec, pour faire chauffer l’eau, faire
les décoctions et les tisanes.
Dér. du lat. Cucuma, vase, qui répond au Coucoumar par
ses attributions.
Cucuma est formé Jui-mème de Cucumer, concombre,
parce qu’il était autrefois de la forme de ce légume.
Coucoumé, s. ». Champignon en boule, tel qu'il sort de
la terre et non encore développé. C'est dans cet état que
l'oronge est le plus délicat.
Dér. de Coucoù, œuf, dont Coucoumé est le dim.
Coucourèlo, s. f. Dim. Cocourèléto. Petite figue violette,
fort douce, qui mürit au milieu de l’été. C’est une de celles
qu’on fait sécher en les exposant au soleil, ou.en les piquant
une par une sur un buisson desséché.
Les nourrices donnent ce nom, en terme d'amitié, à leur
poupon : Ma coucourèlo! ma coucourèlélo ! mon chou, mon
petit cœur !
Coucu, s. m. Coucou, Cuculus canorus, Linn., oiseau de
l'ordre des Grimpeurs et de la fam. des Cunéirostres, de la
grosseur de la grosse draine, le dessus du corps cendré
bleuâtre, le dessous blanc sale avec des raies transversales
d’un brun noirâtre. Il se nourrit d'insectes ainsi que d'œufs
d'oiseaux. Vers la fin d'août, il est gras, et sa chair est un
bon manger.
On prétend que cet oiseau étant le seul à avoir les intes-
tins superposés à l'estomac, il lui est impossible de couver
ses œufs sans nuire à sa digestion. C'est pour cela qu'il va
pondre un seul œuf dans le nid de certains autres oiseaux,
parmi lesquels il donne la préférence à la fauvette, au rap-
+ port de notre savant ornithologue du Gard, Crespon. Quel-
quefois c’est à la couvée de l’alouette, du rossignol, ce la
pie-grièche, etc., qu'il vient apporter ces intrus. Bien que
l'œuf de la fauvette ait quelque ressemblance avec celui du
coucou et qu'il soit comme lui d’un blanc sale et tacheté,
on ne conçoit pas trop que cette couveuse ne puisse s’aper-
cevoir de la supercherie par la différence de grosseur. Dans
la nichée d’une grive, d’un merle, cela s’expliquerait mieux.
Faudrait-il expliquer cette anomalie par une destination
spéciale de la nature?
Quoi qu’il en soit, cette version parait plus plausible que
celle que nous offre Sauvages. Celui-ci prétend que le cou-
cou ne place son œuf dans le nid de la fauvette qu'après
avoir dévoré la progéniture légitime de cet oiseau. Mais il
COU
parait bien’ plus singulier que la mère consente à cet échange
meurtrier, qui ne peut lui échapper dans cette hypothèse.
C'est par antiphrase de cette donnée qu'on appelle Coucu,
en lang. et par le mot correspondant en fr... le mari dont la
femme manque à la fidélité conjugale. Cette expression, qui
est une injure sanglante, n'est plus usitée dans les deux
langues que dans le style libre et bas. I n'en était pas ainsi
du temps de Molière, ni encore du temps de l'abbé de Sau-
vages, qui cite le mot comme un terme de dérision un peu
libre, seulement.
Coucu-toupè! est l’onomatopée qui représente le chant de
cet oiseau, avec une légère variation sur la dernière syllabe :
c'est un cri que les enfants poussent en s'amusant. — En.
abriou canto lou coucu s’és viou, prvb. agricole, au mois
d'avril le coucou chante s’il est en vie : c’est en effet au
printemps qu'arrive cet oiseau, et son chant l'annonce.
Dér. du lat. Cuculus, onomatopée de son chant.
Coucu, s. m. Pain de cour; muscari, Hyacinthus muscari,
Linn., plante de la fam. des Liliacées, sauvage, bulbeuse,
qui donne un bouquet de fleurs d’un bleu foncé, disposées
en grelots le long de sa tige.
Coucudo ou Jäouvèrtasso. — Voy. c. m.
Coudasquéja, v. freg. Caqueter. — Se dit du eri de la
poule qui vient de pondre.
Le mot est probablement une onomatopée.
Coudasquo, s. f. Poule. Au fig. caqueleuse; mauvaise
langue; caquet-bon-bec.
Coudénas, s. m. Péjor. de Coudéno. Grosse et vilaine
peau; grosse couenne, au prop. Au fig. croûte d’un ulcère;
spécialement parcelle de terre aride et peu ou mal cultivée.
Coudéno, s. f. Couenne de porc, peau dure qui couvre
son lard. Au fig. on le dit d’une personne ou d’un animal
fort maigres. — Ari coudéno et l'ase qué té méno, prvb.,
avance, baudet, et l'âne qui te conduit; c’est-à-dire l’ânier
qui est aussi âne que sa bète. Es tout coudéno, il n’a que
la peau et les os.
Coudéno se dit aussi de la crasse qui, à force d'intensité,
finit par se former en écailles et par avoir toute l’adhérence
et la consistance d’une peau.
Dér. du lat. Cutis, peau, et Cutena, peau de porc.
Coudèr, s. ”#. Dim. Coudèrqué. Petit pré sec qu'on voit
communément à la campagne devant les maisons de ferme
et qui produit plutôt du gazon que du foin. C’est là que les
enfants vont jouer, lesagneaux gambader et les poules gratter.
Il est probable que le fr. coudrette dérive du lang. Coudèr.
Les glossateurs français en font un dim. collectif de coudraie;
mais son acception résiste à cette origine.
Dér. du lat. Codetum, champ en friche, ou de la bass.
lat. Coderum, place au devant d'une maison de campagne.
Coudiou, s. #. Étui de faucheur, dans lequel il met à
tremper sa pierre à aiguiser. Il a presque la forme d’un
sabot, se termine en pointe vers le bas et il est fixé à la
ceinture des faucheurs par une lanière.
Dér. du lat. Cos, cotis, queux, pierre à aiguiser, donnant
COU
Cotaria, carrière de ces sortes de pierres, et peut-être Codou,
caillou.
Coudis-coudasquo! Imitation du cri de la poule qui
vient de pondre. Il se prend substantivement, au fig. comme
augm. de Coudasquo, pour caqueteuse, mauvaise langue,
qui ne sent pas la portée de ses paroles. — Es uno coudis-
coudasquo, c’est une bavarde, une babillarde, une méchante
langue.
Coudougna, s. m. Cotignac; confiture de coings; eau de
coings, mélange d'eau-de-vie, de sucre et de coings infusés,
cordial fort employé dans la clinique populaire.
Ce mot, qui n'appartient pas au dialecte des Cévennes,
mais au gascon, à été adopté et s’est généralisé par les
poésies de Jasmin, qui l'a chanté dans sa charmante épopée
intitulée : Mous soubénis.
“Coudougnè, s. m. Cognassier, Pyrus cydonia, Linn.,
arbre de la fam. des Rosacées, cultivé et sauvage dans nos
pays. Le cognassier sauvage sert à marquer les limites des
prés et jardins, à cause de sa facilité à venir par bouture.
Dans les terrains bas et susceptibles d'alluvion, les bornes
en pierre tendent sans cesse à Ôtre recouvertes ; c'est pour
en reconnaitre toujours la place, alors mème que la terre
les recouvrirait entièrement, qu’on plante sur le point mème
des boutures de cognassier qui s'élèvent concuremment avec
le niveau du sol et indiquent toujours le point où il faut
chercher la borne. Pour plus grande süreté,'on multiplie
ces boutures sur toute la ligne divisoire à courte distance
les unes des autres.
© Dér., d'après le plus grand nombre des étymologistes, du
nom de Cydon, ville de Candie, aujourd’hui la Canée, en
gr. Kiôwv, d'où le lat. Cydonia. Mais le lat. appelait le
coing, Malus cotonea, sans doute à cause du duvet dont ce
fruit est recouvert; la bass. lat. en fit Coterum. Il pourrait
bien nous être arrivé aussi par ce chemin.
Coudoumbre, s.m. Concombre, Cucumis sativus, Linn.,
plante de la fam. des Cucurbitacées, fruit potager, raffrai-
chissant, mais aliment indigeste et lourd mangé cru.
Coudoumbre-d'ase, concombre sauvage, concombre d'âne,
Momordica elaterium, Linn.
Dér. du lat. Cucumis, cucumeris ; par substitution du b
à l'e, Cucumbris, dont le primitif est Cucc, chose creuse,
en celt.
Coudoun, s. m. Coing, fruit du cognassier. Ce fruit, sto-
machique et sain quand il est cuit, est, à l'état de crudité,
âpre et rèche, et ne se laisse pas facilement avaler. C’est
par allusion à cette qualité sans doute qu'on a fait de Cou-
doun le synonyme de chagrin, inquiétude, qui causent un
poids sur l'estomac. — Aï lou coudoun, j'ai un souci pro-
fond, une crainte qui m’empèche de respirer, comme si je
venais d'avaler un coing.
Dér. de Coudougne.
Coué, adj. m., sans fém. Coïi; silencieux ; muet d’éton-
nement ou de terreur; frappé de stupeur. — Résta coué,
rester court, ou bien sans mouvement. Pris ainsi adverbia-
COU 211
lement, Coué s'applique aux deux genres. Coi, en fr. est
adv., autrefois il était adj., coi, coite.
Dér., du lat, Quietus.
Couéto dé lapin, s. f. Lagurier ovale, Lagurus ovalus,
Linn., ou Gramen alopecouros spicâ rotundiore, graminée,
que la forme de son épi a fait nommer.
Coufi, ». Confire, faire cuire des fruits, etc., dans un
suc, une liqueur, avec du sucre, du miel, du moût, qui les
pénètre; mitonner; choyer; dorloter; remplir jusqu'aux
bords. — Coufi d'ourguièl, bouffi d'orgueil. Coufi dé mali-
cio, plein de malice. À coufi sas pochos, il a rempli ses
poches.
Sé coufi, languir dans une chambre sans sortir; se
séquestrer dans son intérieur: se mitonner chez soi.
Dér. du lat. Conficere.
Coufin, s. m. Cabas; corbeille ou panier en sparterie, ro
ou ovale, avec deux anses, propre à porter des provisions.
Ce terme est originaire du dialecte provençal, qui n’a
pas d'autre désignation pour cabas. Son importation a
commencé depuis quelques années.
Dér. du lat. Cophinus, petite corbeille, venant du grec.
Kégvos, panier d'osier, corbeille.
Coufla, ». Enfler; gonfler; causer un gonflement ;
augmenter, prendre un plus grand volume; tuer, frapper
avec violence, atteindre quelqu'un d’un coup de pierre ou de
fusil; animer quelqu'un contre un autre, l'exciter à la ven-
geance, à la haine; lui remplir les oreilles.
Sé coufla, se rengorger, s’énorgueillir; être prêt à pleu-
rer, commencer à avoir le cœur gros.
La pasto sé couflo à la pastièiro, la pâte renfle et se dilate
dans la huche. Aquélos bajanos couflou bièn, ces châtaignes
renflent beaucoup à la cuisson. Aqud couflo l'éstouma, cela
gonfle l'estomac, lui donne des flatuosités. Sé coufla dé
bitaïo, dé soupo, se gorger, s'empiffrer de mangeaille, de
potage. Gardoù couflo, la rivière grossit. Aguésto plèjo fara
coufla lous rasins, cette pluie fera gonfler les raisins. L'an
bièn coufla cronto iéou, on lui a bien monté la tête contre
moi.
Dér. du lat. Conflare, souffler, gonfler, exciter.
Couflaïre, aïro, adj. Boute-feu; mauvaise langue, qui
souffle la discorde.
Couflaje, s. m. Crevaille; autant de vivres que l'estomac
peut en contenir. — Aï manja moun couflaje dé prunos,
je me suis gorgé de pruneaux. Gn'aviè un couflaje, il y en
avait de quoi se rassasier. N’aï moun couflaje, je n'en puis
plus. — Voy. Tibaje, Ramplimén.
Coufle, couflo, adj. Enflé; gonflé; plein; dodu; qui a
le cœur gros de larmes ou de colère. — Coufle coumo un
pésoul, fier comme un pou, bouffi d'orgueil comme la gre-
nouille de la fable. Sièï coufle, j'ai le cœur bien gros. A ous
ièls coufles, il a les yeux gros, pleins de larmes.
Couflije, s. m. Gonflement d'estomac; ventosité ; météo-
risation; grosse panse. Au fig. orgueil ; chagrin ou colère
concentrés.
212 COU
Couflo-couqui, s. m., phr. faite. Tout mets grossier et
farineux, qui fermente dans l'estomac et le fait gonfler, et
particulièrement les pois-chiches et les haricots. Dans le
même sens et plus cavalièrement on dit Couflo-b....e.
Coufloti, s. m. Bout-d'homme fort gros, pansu, ventru.
— Voy. Boumbé, Boumboti.
Couga, v. Couver. .
Ce mot, qui semble le mème que Coua,a un sens moins
positif. Ainsi on ne dit pas Couga pour couver des œufs et
de la graine de vers à soie, mais on dit très-bien : — Couga
la pigoto, ètre menacé de la petite vérole; entrer dans la
fièvre par où elle commence. Couga dé poumos, conserver
des pommes sur la paille. Couga la bugado, faire mitonner
la lessive. Faïre couga las oulivos, faire fermenter les olives,
avant de les fouler. D'oulivos cougados, des olives pochées.
: Sé couga, ou couga sas gnèiros, rester au lit la grasse mati-
née, — Voy. Coua.
Dér. du lat. Cubare, être couché.
Cougna, cougnado, s. Beau-frère, belle-sœur. S'applique
également au frère et à la sœur de la femme, au mari ou à
la femme de la sœur ou du frère, au père et à la mère du
gendre et de la bru.
Dér. du lat. Cognatus, parent, allié.
Cougné, s. m. Coin, pièce de bois ou de fer, servantsoit
pour fendre du bois, soit pour déliter un banc de pierre
dans la carrière, soit pour assujettir un outil à son manche :
cale, — Issarta âou cougné, greffer en fente.
Dér. du lat. Cuneus, m. sign.
Cougnèiro, s. f. Fondrière, terrain bas et creux où la
neige, chassée par le vent, s’amoncèle à une très-grande
hauteur et se nivelle avec le sol adjacent. Dans les routes
des hautes montagnes, ces fondrières offrent un grand dan-
ger aux voyageurs, parce que la neige, nivelant les chemins
et les champs, si un voyageur égaré manque la route et met
le pied sur la fondrière avant que sa surface ne soit durcie
par la gelée, il disparait abimé, avec cheval et voiture. Le
passage est surtout dangereux quand il règne de ces bou-
rasques qu'on appelle Cira ({Voy. c. m.), parce qu’alors la
neige aveugle et empèche de voir ou de calculer la direction
de la route.
Dér. probablement du ,gr. luvla, angle, coin, ou du
cet. Kon, Kan, mème sign. — Voy. Candiargue.
Cougnéta, v. Mettre un coin à un outil pour en assujettir
le manche, et le rendre solide; caler un meuble, une table.
Cougourliè, s. m. Terrain ou lieu planté de courges;
pied de courge, la plante elle-mème. — Aquélo fio réstara
dou cougourliè, cette fille restera fille : comme une courge
qu'on laisse sur piéd sans l’employer; elle restera pour
coiffer sainte Catherine.
Cougourlo, s.f. Dim. Cougourléto; péjor. Cougourlasso.
Courge; citrouille; potiron; Cucurbita, Linn., nom géné-
rique qui comprend toute la fam. des Cucurbitacées, dont
les variétés sont nombreuses. La citrouille proprement dite,
melonnée et musquée, s'appelle Pastis; le potiron, la grosso
COU
Cougourlo; la gourde de pélerin, Énvinadouïro ; le girau-
mont, poire à poudre, fausse orange, Cougourléto; les
trompettes, Courné, etc. La généralité des courges à manger
se nomme aussi Boultéio. ;
Cougourlo est souvent employé, au fig., pour dire : une
sôtte, une niaise.
S'émbrassa coumo dos cougourlos, s’embrasser comme
pain, de tout son cœur, avec bonheur et empressement.
Dér. du lat. Cucurbita, m. sign.
Couguioulo, s. f. Primevère jaune, Primila veris, Linn.,
plante de la fam. des Primulacées, qui fleurit aux premiers
jours du printemps.
C'est le mèmenom, Couguioulo, que porte la folle avoine,
averon, Avena fatua, Linn. — Voy. Civado-folo.
Couïandro, s. f. Coriandre, Coriandrum sativum, Linn.,
plante de la fam. des Ombellifères. Sa graine est employée
dans la confiserie. — Voy. Grano dé boudin.
Couïasso, s. f. Nom d’une espèce d’olive : la plus grosse
et la plus arrondie; c’est celle que l’on fait confire de pré-
férence.
Couïda, v. Agenouiller; faire décrire un angle, un coude,
à une branche, à un provin, à une marcotte ; courber un
sarment en terre, pour lui faire prendre racine; bifurquer;
décrire un angle. — Lou cami sé couïdo énd'un tèl éndré,
le chemin forme un angle, se dévie, change de direction à
tel endroit. .
Couïde, s. m. Coude, partie postérieure de l'articulation
du bras avec l’avant-bras ; angle plus ou moins aigu formé
par la rencontre de deux lignes; changement de direction
d’un chemin. — Léva lou couïde, hausser le coude; chopi-
ner; se griser. Ai moun couïde trâouqua, mon habit est
percé au coude. Aquè faï lou couïde, cela est courbé.
Dér. du lat. Cubitus, m. sign.
Couidéja, v. frég. Coudoyer; heurter avec le coude;
donner des coups de coude ; pousser avec le coude.
Couïdéjado, s. f. Coup de coude.
Couïfa, v. Coiffer ; mettre une coiffe, une coiffure; arran-
ger les cheveux.
Sé couïfa, se coiffer, s’'amouracher; prendre une fantaisie.
Couïfé, s. m. Dim. Couifétoù. Coiffe particulière aux
paysannes en dessous d’Alais et de La Vaunage; sorte de
calèche à longues barbes de dentelle qui, après s'être croi-
sées sous le menton, viennent se fixer sur le haut de la tête.
La mode nouvelle efface peu à peu tous ces costumes natio-
naux. Cette coiffure n’est plus portée que par les femmes
de la génération précédente de la nôtre. Le type s'en con-
serve particulièrement dans le village de la Calmette, —
Voy. Coïfo.
Couïoun, s. m. Dim. Cowiouné; augm. Couiounas. Sot;
imbécile; bénêt; nigaud; lourdaud; butor; triste sire;
animal.
Tous les dictionnaires français, sauf sans doute celui des
Précieuses, mais y compris celui de l'Académie, enregistrent
le subst. masc. Coïon; et ils font bien. S'il fallait mettre
Cou
au rebut tous les mots qui ont avec certains autres une
consonnance entière ou partielle dont on peut abuser, les
dictionnaires diminueraient bien d'épaisseur et le calem-
bourg de ressources : ce qui serait un grand malheur.
L'orthographe de ce mot, qui défend de toute méprise
écrite ou parlée, sa signification qui est exclusivement
en fr. lâche, poltron, sans cœur, ce que confirme son
étymologie, car on le fait venir du lat. Quietus, paisible;
fuyant la peine; ami de la paix; en voilà bien assez pour
le faire, en sûreté de conscience, admettre à sa lettrine, en
avisant toutefois, ce qui n'est pas de trop, qu'il n’est pas
du style très-noble.
On ne doit avoir aucun scrupule d’en faire autant pour
son correspondant languedocien, qui a mème un avantage,
puisque son orthographe et sa prononciation l'isolent plus
encore et empêchent de le confondre et de le compromettre
avec qui que ce soit. Cela dit, pour les besoins de la cause,
aussi clairement qu'il m'était possible si ce n’est autant
qu’il l'aurait fallu, rentrons dans notre spécialité.
Notre vocable n'a pas du tout la signification de lâche,
couard, que lui donne le français, — et il mé semble du
reste que ce dernier a tout à fait abandonné cette acception,
qu'on ne trouve plus que dans ses dictionnaires, pour
“adopter dans l'usage la nôtre, que l'Académie fera bien
d'ajouter si ce n'est de substituer. — Couïoun, qui se fémi-
nise selon les exigences, signifie, nous venons de le dire :
sot, niais, imbécile, lourdaud et butor; animal; triste sire;
quand il est prononcé sérieusement ou dans la colère; mais
dit en riant, dans l'usage commun, il n’a aucune applica-
tion insultante et il n’est qu'une épithète qui correspond
tout au plus au fr. nigaud, employé dans les mêmes cir-
constances. Ainsi adoucie, cette appellation n'est devenue
que trop parasite dans les dialogues libres et familiers, et
mème les personnes du sexe, un peu fortes en gueule, il est
vrai, ne s’en font pas faute. Aussi, an pu lèou dit couïoun
qué moussu, On à plutôt dit Couïoun que monsieur, remar-
quait quelqu'un à propos de ces formes de discours un peu
bien sans gène. C'est ce qui fait qu'après avoir assisté à une
de ces conversations animées, où assez de monde avait pris
part, et qui par conséquent avait été abondamment lardée
du bannal vocatif qu'on se renvoyait à l’envi, un étranger
se prit à dire, moitié figue et moitié raisin : Il parait qu'il
y a beaucoup de coïons dans ce pays-ci. — Mais honni soit
qui mal y pensait! D'ailleurs, vdou maï èstre couïoun
qu'avugle, exclama un jour un combattant qui se trouva
un peu trop exposé aux balles dans une de ces escarmou-
_ches. On cessa le feu et on lui demanda le pourquoi de
cette bizarre proposition. Péreé qu'on né véi d'doutres,
répondit-il, c’est qu'on en voit d'autres; et cela est devenu
le consolant dicton dont on ne manque jamais d'user en
pareil danger, sans se fâcher autrement.
On voit qu’à regarder de près quelques-uns de ces mau-
vais garçons, ils ne sont pas aussi méchants qu'ils en ont
l'air de loin. Certes, je n'engage pas pour cela à les fré-
COU 213
quenter : ils sont suspectés, c'est assez et il faut faire d'eux
comme César de sa femme. Mais quand l'occasion se pré-
sente de les défendre, et il n'est même pas mal de la cher-
cher, alors qu'on en a fait son état, il y a utilité et justice
à le faire. J'ai cru d'autant plus à propos de le tenter encore
pour ce mot-ci qu'il entre dans un dicton qu'il eût été assez
difficile d'accueillir sans s'être bien expliqué, et assez ori-
ginal pour qu'on n’eùt pas regretté de l'avoir mis en retenue.
— Trés cowiouns manjavou’n api, él sugavo lou grél, mot
à mot : trois imbéciles mangeaient un céleri, et lui suçait
le bout ou la feuille. On dit cela de quelqu'un qu'on veut
dépeindre tellement bête que le premier idiot venu en sau-
rait plus que lui. Dans le céleri, — ceci est élémentaire en
gastronomie, — le pied seulement est bon, {ou calès; le
commencement des côtes, tant qu'elles sont blanches, est
admissible; l'extrémité de la tige, les feuilles surtout ne
valent rien, on les supprime. Dans une salade tout au plus
et pour achever de remplir le saladier, on peut laisser un
peu de ces extrémités avec quelques feuilles nouvelles,
gréls; mais elles ont toute chance de rester au fond du
plat. — Il est certain que si trois individus minces d'esprit
se trouvent attablés autour d’une telle salade et que deux
de ceux-là, visant à se garder les bons morceaux, peuvent
persuader le dernier que la mauvaise part, lou grél, vaut
autant et peut-être mieux et le lui laissent à manger, c’est
qu'ils sont plus fins que lui ou plutôt qu'il est plus hôte
qu'eux encore, bête par conséquent au dernier degré de
l'échelle.
Un sot trouve toujours un plus sot qui l’admire. Notre
troisième convive est le plus sot; et c'est ce qu'a voulu
faire entendre notre proverbe, et ce qu'il signifie dans
l'usage fréquent qu'on en fait.
Cowioun coumo l’abè Lati, plus bète que celui qui inventa
la bêtise. Notre.lang. a-t-il trouvé dans cette phrase faite
quelque consonnance ressemblant à la traduction française,
une sorte de calembourg, pour mettre en scène un person-
nage de fort sotte mémoire, qui n'est pas d’ailleurs autrement
connu? Nous ne saurions le dire; mais notre goguenardise
en est bien capable.
Couiouna, v. Tromper, duper; attraper, mystifier quel-
qu'un; plaisanter, häbler, railler, goguenarder et goailler;
dire des fariboles, des gaudrioles.
Ce mot, comme les deux suivants, n'a pas plus que
leur chef de file, qui les a formés, une figure qui prévienne
dès l’abord en leur faveur : il serait inutile de le dissimuler.
Ils sont mal vus dans la bonne compagnie. Malgré tout,
ceux-ci, bien plus que le premier, s'ils comparaissaient de-
vant un jury, auraient droit aux circonstances atténuantes.
Le fait est qu'il ne s’agit pour eux que de plaisanterie, que
de häbleries au gros sel le plus souvent, et pas davantage.
C'est dans cette acception que ces termes, qui ne sont pas
si diables que noirs, sont employés, et c’est là leur excuse
pour les faire admettre ici. C'est avec ce caractère que le
verbe ci-dessus se présente dans le dicton proverbe :
214 COoU
Couïounan ou manjan d’agriotos? est-ce pour plaisanter
ou sérieusement, dit-il, que vous faites cela? Est-ce pour
rire où tout de bon? — C'est bien là le sens du languedo-
cien, dans lequel se remarque aussi une opposition, une
alternative. Le premier mot, c'est entendu, signifie : plai-
santons-nous? rions-nous? Comment le second membre de
phrase peut-il représenter le sens du français? C’est bien
simple. Les cerises-griottes, — &yptc, du grec, ma foi!
agrioto, aigre, fort bien conservé pour son âge, — sont
assez aigres en eflet pour faire faire à qui en mange une
grimace qui ressemble assez au rire, comme le rire ressemble
parfois à la grimace, témoin le rire sardonique. C'est donc
comme si l'on demandait : Est-ce rire où grimace ? lorsqu'il
y a lieu de douter. Un dicton qui s'exprime ainsi est bien
capable de faire innocenter les mots les plus verts. Couiouna
quéouquus, tromper, duper quelqu'un; le plaisanter. Sans
couïouna? interr.: Sérieusement? Sans plaisanter? Sou
ésta bièn couiouna, j'ai été bien attrapé.
Couïounado, s. f. Tromperie; badinerie, plaisanterie
grossière, d’un goût douteux, trop libre, impertinente;
goaillerie ; hâblerie; gaudriole; coglionerie dans le sens de
celles de l’Arioste; sottise; maladresse. — Quinto couïou-
nado! quelle farce! quelle häblerie! Agud's pa’no couiou-
nado, ce n’est pas une plaisanterie. Y a dé couïounado dou
jo, il y a quelque dessous de carte; ceci n’est pas bien clair.
Pas dé couïounado, pas de plaisanterie; sérieusement.
Couïounado à part, plaisanterie à part. Tout aqud’'s dé
couiounado, tout cela ne signifie rien; ce ne sont que des
bêtises. Aimo à dire, à énténdre dé couiounados, il aime à
dire, à entendre des gaudrioles, des hâbleries. Éntén pas la
couiounado, il n'entend pas la plaisanterie. À fa uno pou-
lido couïounado, il a fait une fameuse sottise, une fière
maladresse.
Couïounaïre, aïro, adj. Railleur; plaisant; moqueur;
goailleur; goguenard; mystificateur.
Couïre, s. m. Cuivre; métal rougeâtre, sonore, dur,
ductile, fusible et malléable.
Dér. du lat. Cuprum, formé du gr. Kéxpos, nom de l'ile
de Chypre, d'où le premier cuivre a été importé.
Couïssi, s. m. Dim. Couissiné. Coussin; carreau de lit,
de siège, de sopha, etc.; oreiller ; traversin, oreiller long
qui s'étend de toute la largeur du lit. — Ox a prés dou
bégui, ou laïssara dou couässi, c'est un défaut, un vice qu'il
a pris au berceau, et qui le suivra au tombeau. Low couïssà
porto tout, l'oreiller est un remède à tous maux, dit-on d’un
ivrogne en l’envoyant au lit cuver son vin. Lou couïss)
éndor lou sagan, le lil conjugal étouffe toutes les querelles
de ménage. Un co dé couïsst, un long sommeil.
L'étym. de ce mot n'est pas sans être discutée, Du Cange
le dérive du lat. Culcita, matelas, oreiller; Hottman et
Ménage de l'all. Küssen, coussin ; Ferrari de l'ital. Cuscire,
coudre, puis de Coæa, cuisse, parce qu’on met des coussins
sous les cuisses; ce qu'approuvent fort Covarruvias et
Court de Gebelin, à cause, dit celui-ci, que l’oreiller relève
COU
la tête, comme les jambes relèvent le corps. Perrault penche
pour le lat. Pulvinus, matelas, coussin ; Roquefort les cite
tous et ne prend point parti. Nous imiterons sa réserve.
Couître, s. m. Coutre, fer de charrue, tranchant ; instru-
ment tranchant, à manche, à l'usage des boisseliers, pou:
refendre le bois d’une manière régulière. s Fe
Dér. du lat. Culter, couteau. »
Couja, v. Coucher, mettre dans un lit; étendre horizon-
talement; étendre par terre; renverser. Sé couja, se mettre
au lit; se coucher par terre. — La luno sé cojo, ou sé couÿo,
la lune se couche. Vaï té couja, va te coucher : tu m'en-
nuies, va te promener. La plèjo a couja lous blas, la pluie
a fait verser les blés. Lou coujè dou sôou, il le renversa par
terre.
Dér. du lat. Collocare, placer, mettre en place.
Coujado, s. f. Couchée; gite, lieu où les voyageurs
s'arrêtent pour passer la nuit; ce que l’on paye pour souper
et coucher dans une auberge; fin d’une journée de route:
— Sérén lèou gandis à la coujado, nous serons bientôt
rendus à la couchée; nous touchons au terme de la route
pour aujourd'hui. Çai sès dé coujado? Couchez-vous ici?
Coujan, s. m. Couchant, endroit du ciel où le soleil
parait se coucher; ouest. — Vèr lou coujan, à l'ouest, au
couchant.
Coujan, adj. m. Couchant, qui se couche. — À sourél
coujan, au soleil couchant.
Coula, v. Couler; suivre sa pente, en parlant d'un
liquide; passer quand il est question du temps; suinter;
transpirer; glisser; décuver son vin, tirer la cuve. —
Aquélo bouto coulo, @e tonneau transpire, ou perd par
quelque fissure. La coulavo dougo, il passait la vie gaiment.
Couro coulas? Quand décuvez-vous votre vin, quand sou-
tirez-vous le vin de votre cuve? Coula la bugado, abreuver
la lessive. Afaïra coumo un pâoure home qué coulo sa
trémpo, affairé comme un pauvre homme qui décuve sa
piquette; parce que le pauvre n'ayant pas ow peu de vin,
sa piquette est une grande affaire pour lui.
Dér. du lat. Colare, couler, filtrer.
Coula, v. Coller; joindre et faire tenir avec de la colle;
placer contre, appliquer, rendre adhérent. — Y és coula,
il y est collé; il est forcé de passer par là.
Dér. de Colo, colle.
Coulado, s. f. Coulée, le temps ou l’action de décuverle vin.
Couladoù, s. m. Couloir, espèce d’écuelle de boïs, ou
d'entonnoir court, en fer blanc, dont le fond percé est
garni d’un linge pour passer un liquide, particulièrement le
lait; crible pour le blé, en couenne de porc, percé de trous
ronds à travers lesquels passe le grain et qui retient les
pierres, les débris de paille et les fragments d’épis non
dépouillés. — Voy. Cruvil.
Dér. de Coula.
Coularivo, s. f., ou Coulérivo. Collier d'attelage de
bêtes de labour, disposé pour les tenir parallèlement à une
certaine distance : cette manière consiste à atteler deux
>. fumn bots dE à ST St
Cou
bètes à un araire qu'elles tirent au moyen des colliers de
labour portant sur un cadre en bois qu'on nomme jouatos ;
ce mode s'appelle aussi : Ldoura dou doublis. :
La Coularivo est encore un terme de maçon pour dési-
gner la manière de porter, à deux, quatre ou même six, un
lourd fardeau, comme poutre ou pierre de taille. On entoure
la pièce de plusieurs tours de corde lâche, à distance les uns
des. autres; on passe transversalement dans ces espèces
d'anneaux un fort rondin de bois, dont chaque extrémité
doit poser sur l'épaule d'un des porteurs, par couples : le
nombre de ces porteurs de deux à deux varie suivant le
poids ou la longueur de la pièce.
Dér. de Col, cou.
. Coulas, s. m. Collier de labour, de charrette; collier de
chien de berger, de sonnette de brebis. — Aguél chival prén
bièn lou coulas, ce cheval tire avec ardeur ; il mord bien
au collier. Préne lou coulas, au fig. s’atteler au char du
mariage; se marier.
Dér. de Co.
Coulé, s. m. Colline, petit côteau; monticule; collet
d’habit; petit manteau court qui couvre le cou et les épaules.
— Pér valouns et pér coulés, par monts et par vaux. Lou
Coulé dé Vilofort, le Collet de Villefort, n, pr. comme lou
Coulé dé Brin, commune de Concoules, le Collet de Brin;
désignations locales, traduit directement en fr. Collet,
dim. de Cot, colline. Pichô-coulé, pelit-collet, ecclésiastique.
Réde coumo lou coulé dé Roubèr, empesé comme un pédant.
Dér. et dim. de Col.
Coulèje, s. m: Collége, lieu où se fait l'enseignement des
lettres, langues et sciences. — A passa davan lou coulèje,
c'est un ignorant; il a passé devant le collége, c’est-à-dire
qu'il n’y est pas entré.
Dér. du lat. Collegium, assemblée.
Coulérèto, s. f. Collerette; collet de femme, soit mon-
tant, soit retombant sur les épaules.
Emp. au fr.
Coulérivo, s. f. — Voy. Coularivo.
Coulèro, s. f. Colère; emportement; vive indignation.
Dér, du gr. Xékos, bile : les anciens attribuaient la
colère à l'agitation de ce liquide.
. Coulétoù, s. m. Percepteur des contributions; collecteur
des tailles : personnage fort connu et fort important pour
toutes les classes.
Dér. du lat. Collector, quèteur, qui lève les impôts.
Coulina, v. Glisser; s'ébouler sur un plan incliné, lente-
ment ; s’en aller sans bruit et sans secousse brusque.
Dér. du lat. Colis, colline, plan incliné, proclivité.
Coulino, s.f. Ce mot, qui semble synonyme du français
colline, est au contraire son opposé; car il signifie : bas-
fond, comparativement aux bords plus élevés qui l'entou-
rent. C’est la partie la plus basse d’une terre, d'un pré, à
condition qu'elle ait des bords relevés; car une terre qui
finit en proclivité continue ne peut s'appeler Coulino. C’est
en petit cè qu'est en plus grand une vallée.
COU 215
Couliquos, s. f. Colique; tranchées dans le ventre. —
Mé faï véni las couliquos, il me donne le cauchemar, le
spleen, des vapeurs, par l'ennui qu'il me procure, ou par la
sottise de ses propos.
Dér. du lat. Colina, venu du gr. Kwkwés, formé de
KüAcv, intestin colon, qui est d'ordinaire le siége de la
colique inflammatoire.
Coulitor, s. m. Espèce de raisin blanc, peu agréable à
manger, mais qui donne de très-bon vin blanc.
Coulobre, s.m. Couleuvre, dragon, serpent ailé, suivant
la superstition populaire. Le peuple des campagnes est
persuadé que la couleuvre se raccourcit en vieillissant,
prend des ailes.et augmente beaucoup de méchanceté : c’est
ce qu'on appelle s'acouloubri, et par conséquent aussi
s'acouloubri, c'est grandir en malice, en méchanceté.
Au fig. un coulobre, une fille effrontée, garçonnière; un
dragon.
Dér. du lat. Coluber, couleuvre.
Couloubrignè, s. m”. Sureau, Sambucus nigra, Linn.,
arbre de la fam. des Caprifoliacées, commun partout. Sa
fleur joue un grand rôle dans la pharmacie populaire : elle est
employée surtout en décoction comme puissant sudorifique.
Le nom lang. véritable de sureau est Sambu, on ne
l'appelle Cououbrignè que par relation avec le mot Coulou-
brino, ci-après. — Voy. Sambu.
Couloubrino, s. f. Couleuvrine; instrument d'un jeu
d'enfant. C’est un tube formé d’un bout de tige de sureau
coupé entre deux nœuds et vidé de sa moëlle. On place aux
deux extrémités deux tampons de filasse ou de papier
mäché et humecté qui interceptent l'air hermétiquement ;
puis, au moyen d'une baguette taillée en forme de piston,
on force l'entrée d’un de ces tampons dans le tube, jusqu’à
ce que la compression de l'air soit assez forte pour chasser
le second tampon, ce qui a lieu avec un bruit pareil au
claquement d’un fouet : c’est en petit une sarbacanne.
Ce mot est emprunté au fr. couleuvrine, grosse pièce
d'artillerie qui a quelque rapport de fonction avec la Cou-
loubrino des enfants; sa forme d'abord, ensuite le bruit et
le projectile lancé. Le fr. vient de Couleuvre, avec qui il a
quelque ressemblahce par sa forme allongée et cylindrique.
Coulouèr, s.m”. Sorte d’ustensile ou d'outil en fer-blanc,
en forme de tuile, dont les épiciers, les regrattiers et les
grainetiers se servent pour puiser certaines marchandises du
sac ou du tiroir qui les contient, et les faire tomber peu à
peu dans la balance, jusqu’à ce que le plateau ainsi chargé
retombe au niveau de celui qui porte les poids.
Dér. de Coula.
Couloumbasso, s. f. Espèce de feuille de mürier qui est
une des plus estimées pour sa qualité et sa quantité. Elle
est large, faite en cœuret porte une seule dentelure vers le
milieu de sa circonférence. Cette feuille n’est pas plus
épaisse qu'une autre, mais son arbre pousse plus de bois et
surlout intérieurement où il garnit son enfourchure de
menus scions.
216 COU
La Couloumbasso est encore une variété de la graminée
appelée fenasse ou herbe à foin. Sa tige s'élève três-haut et
porte au sommet un épi en forme sphérique. Elle donne un
foin grossier et dur.
Coulse, s. f. Lit de plumes; matelas de plumes.
Dér. du lat. Culcitra, m. sign.
Coumaire, s. f. Dim. Coumaïréto. Joujou, jouet d'enfant.
— Faïre coumaïüre, jouer à la madone, au ménage; jeu
dans lequel l’un des enfants fait le mari, l’autre la femme,
les autres les enfants ou les domestiques, et où chacun des
acteurs apporte sa portion de joujoux, tels que petites
pièces de ménage, des poupées, de petits meubles, des
chevaux et des chaïs, ainsi que toute cette bimbeloterie
que nous expédie Nuremberg, et qu’on appelle proprement
et génériquement dé Coumaïres, ou Coumaïrétos. — M'a prés
toutos mas coumaïres, il m'a pris tous mes joujoux. Cou-
mare, et faïre coumaïre, se dit aussi pour amusettes,
enfantillages, occupations peu sérieuses, qu'on se permet à
tout àge.
Coumaïiréja, v. frég. Jouer au ménage, en parlant des
enfants, ou à la manière des enfants ; faire des commérages,
s'occuper de fadaises, de babioles.
Coumanda, ». Commander, donner des ordres ; comman-
der à un ouvrier les objets de son art; fixer, arrêter le
bout d'une corde ou d’un garrot de manière à ce qu'il ne
puisse se détordre, se dérouler. — M'ou coumandë, il me
l’ordonna. Coumanda dé souïès, commander à un cordon-
nier de vous faire des souliers. Sans vous coumanda, est
une formule de politesse lorsqu'on demande à quelqu'un un
léger service, ou un dérangement momentané : c’est comme
si on lui disait : ceci n’est pas un ordre, mais une prière.
Dér. du lat. Commendare, recommander, confier.
Coumandamén, s. m. Commandement, ordre donné;
droit de commander. — Lous coumandaméns, les comman-
dements de Dieu et de l'Église.
Coumandan, anto, adj. Celui qui commande, qui a le
droit de commander; impérieux ; un chef de corps, de troupe
quelconque, sans égard pour le grade de celui qui l’exerce.
Coumando, s. f. Commande, ordre à un ouvrier d’exé-
cuter un objet de son art. — Marchandiso dé coumando,
ouvrage exécuté par commande, par opposition à celui qui
est fait de pacotille, à l'avance, ou pour magasin, et qui
n'est jamais aussi bien confectionné que celui qui l’est par
commission spéciale.
Coumbla, v. Combler, remplir autant qu'il est possible;
remplir un vide, un bas-fond quelconque jusqu'aux bords.
Dér. du lat. Cumulare, où Complere, m. sign.
Coumble, s. m. Comblement, remblai, la matière qui
sert à combler. — Aquô démando un bèl coumble, il faut
beaucoup de matériaux pour combler cela. À un for
coumble, ce vide est fort grand à remplir.
Coumbho, s. f. Dim. Coumbéto; péjor. Coumbasso. Vallée
étroite, ou mieux gorge entourée de collines, resserrée entre
des montagnes.
cou
C'est de ce mot qu'ont été formés les noms propres
d'homme : Coumbo, Combe; La Coumbo, Lacombe; Las
Coumbos, Lascombe. Il entre aussi dans les noms de lieu :
Coumbo-bâoudo, augm. de Coumbas; Coumbo-rédoundo,
vallée arrondie; la Gran-Coumbo, la Grand'Combe, com-
mune et canton, arrondissement d’Alais, notre grand centre
bouiller. Les dim. et augm. ont fourni les noms de Coumbé,
Combet, las Coumbétos, et Coumbas; d'où Coumbalusié,
vallée luisante; et probablement Coumbiè, Combier; Dés-
coumbiè, Descombiers ; Coumbal, Combal ; qui tous ont été
francisés.
Dér. du gr. KôuËcs, enfoncement, cavité; en bas-breton
Komb, vallon, vallée.
Coumédièn, s. m. Comédien; batteleur, baladin, jon-
gleur, n'importe le genre de spectacle qu'il donne. Au fig.
hypocrite, qui joue toute sorte de rôle pour tromper la
confiance. — Au fém. Coumédièno, m. sign. 4
Coumédio, s. f. Comédie; curiosité de la foire; toute
sorte de spectacle et de jonglerie; hypocrisie, faux-semblant;
larmes ou déclamations simulées.
Dér. du lat. Comædia, formé du gr. Kwyn, bourg et
Q3f, chant.
Couménça, v. — Voy. Acouménça.
Couménçanço, s. f. Commencement d’un livre, d'un
chant, d'un spectacle. — Voy. Acouménçango.
Couméssari, s. m. Commissaire de police.
Emp. au fr.
Couméssiou, s. f. Dim. Couméssiounéto. Commission.
On appelle Couméssiou toute allée et venue que fait un
domestique, un commis, un subordonné quelconque dans
l'intérèt de son maitre; et les diverses courses que l'on fait
soi-même dans un but d’ulilité personnelle. C'est aussi un
terme générique sous lequel on désigne l’objet d’une course
qu'on veut cacher. — Aï fa vosto coumissiou, j'ai rempli
l'objet dont vous m’aviez chargé.
On remarquera la différence d’accentuation entre le mot
Couméssiou et son dim. Couméssiounéto : la prononciation
de la diphthongue iou, ici et là, est en effet très-différente.
Dans le premier, à est marqué d’un accent circonflexe pour
indiquer la lettre tonique et dominante, sur laquelle la
tenue se fait; dans le second, les deux voyelles sont privées
d’accent, la voix les fait entendre sans appuyer sur lune
plus que sur l’autre. La distinction entre ces diphthongues
homographes est que l’une, accentuée, est masculine, grave;
l’autre sans accent, est féminine, muette. — Foy. Acën."
Dér. du lat. Commissio.
Coumo, adv. Comme, de même que, ainsi que; comment,
de quelle manière. — Cowmo qué n'ane, de quelle manière
que la chose tourne. Coumo farén? comment ferons-nous ?
Coumo qué sièque, quoi qu'il en soit. Prvb.: Coumo lous géns,
l'éncén, selon les gens, l'encens. Save pas coumo n'as pas
vérgougno, je ne sais pas comment tu n’en as pas honte.
Coumo prend encore diverses acceptions qui produisent
des idiotismes propres au languedocien. — Arivè coumo
COU
m'én-anave, il arriva au moment où je partais. Es michan
coumo tout, il est horriblement mauvais. És véngu coumo
él, il est venu en même temps que ni. És pas gaïar coumo
vous, il n’est pas aussi bien portant que vous.
Dér. du lat. Quomodo, m. sign. En ital. Come, espag.
port. Como.
Coumode, odo, adj. Facile, traitable, d'une société
douce; qui jouit d'une honnête aisance, aisé dans une
condition un peu inférieure. Se dit des personnes, et moins
bien des choses, quoique la ressemblance du mot avec le
fr. l'ait soumis à quelque déviation.
Dér. du lat. Cum, prép. et Modus, mesure, mode.
Coumodo, s. f. Commode, meuble à plusieurs tiroirs pour
le linge et les hardes.
Emp. au fr.
Coumoul, oulo, adj. Comble ; comblé, plein au-dessus
des bords. Se dit des mesures de capacité de matière sèche,
comme les grains, les châtaignes, les noix, les glands, etc.,
dans lesquelles on peut entasser la denrée en cône. Un
décalitre comble ou comblé est l'opposé du décalitre ras on
rasé, quand on fait passer le rouleau sur ses bords pour
faire tomber tout ce qui dépasse ce niveau. — Séméno ras
et culis coumoul , il cueille fort peu de grains au delà de la
semence, seulement la différence de la mesure raso à la
coumoulo ; ce qui est peu de chose.
Dér. du lat. Cumulus, dim., tas, monceau, comblement.
Coumoula, v. — Voy. Acoumoula.
Coumoulun, s. m». Comble; tas; monceau; le par dessus.
Dér. du lat. Cumulus, subs. de Coumoul.
Coumpagnè, s. f. Compagnie de soldats. — Coumando
uno coumpagnè, il est le commandant d’une compagnie.
Dér. du lat. Cum, et Panis, qui mange le pain avec un
autre. D'autres soutiennent qu'il vient de l’ancien mot
teutonique Kompan, compagnon, ou de Coumpagn, Com-
pagn, d'origine incertaine. Peut-être serait-il aussi simple
de chercher son étym. dans le lat. Compages, assemblage,
liaison.
Coumpagno, s. f. Compagnie, société, assemblée de plu-
siéurs personnes; compagne, mari el femme, ou bien de
jeune fille à jeune fille. — Une femme dit de son mari :
ma coumpagno. Adioussias amaï à la coumpagno, bonsoir
(à la personne à qui l'on s'adresse en particulier), ainsi
qu'à toute la compagnie.
Mème étym. que pour le précédent et tous les composés
qui suivent.
Coumpagnoü, s. m. Compagnon, ouvrier en sous-ordre
du maitre; compagnon de route; frère d'armes; compagnon
du devoir. — La trilogie des scieurs de long se compose
dâou mèstre, dâou coumpagnoù et dé l'apéndris, du maitre,
du compagnon et de l’apprenti. Le premier et le dernier
tirent la scie d'en bas; le second, debout sur la bique, n'est
chargé que d'élever la scie quand elle est descendue, ce qu'il
fait à vide, la scie ne mordant que de haut en bas et non
de bas en haut; mais il dirige le trait.
cou 217
Coumpagnounaje, s. m. Compagnonnage, société d'ou-
vriers; un devoir de compagnon, — Dé quinte coumpa-
gnounaje siès? à quel devoir appartiens-tu?
Coumpaïre, s. m. Compère ; gaillard éveillé, réjoui; fin,
gai, adroït. — Es un coumpaire, c'est un fin compère; un
luron, un bon drille. Coumpaïre et coumaïüre ne sont plus
usités pour signifier ceux qui ont tenu un enfant sur les
fonts baptismaux. Pér coumpaïre et pér coumaire n'est que
du franchiman.
Formé du lat. Cum, avec, et Pater, père.
Coumparésoù, s. f. Comparaison; supposition, hypo-
thèse; exemple. — Pér uno coumparésoù, en supposant.
Vôou vous faïre uno coumparésoù, je vais vous poser une
hypothèse. Métèn, pér uno coumparésoù, qué sès moun frèro,
admettons un instant, supposons pour un moment que vous
êtes mon frère. Sans coumparésoù est une formule polie, une
précaution de civilité, dont on se sert quand on compare
les bôtes aux gens : Bramo coumo un ase, sans coumpa-
résoù, il crie comme un äàne, pardon de la comparaison.
Dér. du lat. Comparatio.
Coumpés, s. m.Compois, anciens cadastres des commu-
nes, où chaque propriété était désignée et confrontée, non
d’après les numéros d'un plan, comme aujourd'hui, mais
en réunissant, sous l'avération de chaque propriétaire,
toutes les parcelles de propriété qu'il possédait. Quelques-
uns de ces registres sont faits avec une précision qui étonne
de nos jours, surtout lorsque l’on compare la modicité du
prix dont ce travail était payé avec le luxe de dépense
qu'entraine le cadastre moderne, qui, malgré tout cela, est
souvent inexact. Aussi, dans une foule de discussions
judiciaires, à défaut de titres contraires, les tribunaux
attachént-ils avec raison une certaine importance aux
renseignements donnés par ces registres.
Dans les archives municipales, il existe un cadastral
communal de 4642, qui porte en tête le verbal d’adjudica-
tion des frais de sa confection, y compris le ‘coût de la
transcription au net de ce registre qui est un gros in-folio
de 4,500 pages. Il fut adjugé au prix de 470 livres.
Aujourd’hui un copiste ferait payer ce prix de sa seule
transcription.
Dér. probablement du lat. Compositus, mis en ordre.
Coumplaïre, v. Chercher à plaire à quelqu'un, le
caresser ; aller au devant de sa volonté, de ses désirs, de
ses caprices. — Té fou bièn coumplaïre à toun ounecle, il
faut cajoler ton oncle, capter son affection.
Dér. du lat. Complacere.
Coumplasén, énto, adj. Complaisant, qui cherche à être,
à se rendre agréable.
Coumplimén, s.m. Compliment; paroles civiles, obli-
geantes, affectueuses; félicitations ; éloges; politesses ; flat-
terie; cérémonies. — Farés dé mous coumpliméns à tout
lou mounde dé l'oustéou, vous présenterez mes civilités à
toutes les personnes de la maison. Mous coumpliméns à ma
tanto, mes respects à ma tante. Faïre un coumplimén,
218 COU
débiter une harangue de félicitations, ou en parlant d'un
enfant, réciter son compliment de jour de l'an ou de fète à
ses parents.
Coumpliménta, v. Complimenter, féliciter, congratuler.
Coumpliméntous, touso, adj. Complimenteur, adula-
teur, flatteur, prodigue de civilités et de révérences.
Coumplo, s. m. Complot, dessein criminel formé en
communauté.
Coumplouta, v. Comploter, conspirer; former un mau-
vais dessein en compagnie.
Dér. du lat. Cum, avec, et Pila, balle à jouer, pautne.
C’est l’avis de Ménage et du P. Labbe; mais celte étym.
demanderait confirmation.
Coumpourta (Sé), v. Se comporter, se conduire bien ou
mal; tenir bonne ou mauyaise conduite.
Coumprénable, ablo, adj. Compréhensible; intelligible;
convenable; imaginable. — Aqud's coumprénable, cela se
comprend. Agud's pas coumprénable, on ne croirait jura
cela, on n'imagine pas cela.
Coumpréne, v. Comprendre; interpréter; concevoir;
contenir, renfermer.
Dér. du lat. Comprehendere.
Coumprénésou, s. f. Intelligence, compréhension ; enten-
dement.
Coumprés, és0, part. pass. du v. Coumpréne. Compris,
entendu; contenu, renfermé.
Coumugna, v. Communier, recevoir le sacrement de
l'Eucharistie, chez les catholiques; le pain et le vin de la
Cène chez les protestants. Coumugna , recevoir la commu-
nion, quand c’est du fidèle qui s'approche de la Sainte-
Table, il est pris neutralement ; il a le sens actif, quand on
parle du prètre qui donne, distribue la communion.
Coumugnoun, s.f. Communion, réception de l'Eucharistie.
Dér. du lat. Communio.
Coumun, s. m. Lieux d’aisance, latrines.
Coumun, uno, adj. Commun, de qualité inférieure, en
parlant de marchandise ou d’étoffe. Quand on parle des
personnes, affable, populaire, de facile abord pour ses infé-
rieurs. — Uno fénno coumuno, une femme mariée sous le
régime de la communauté : expression de nouvelle impor-
tation dans nos pays de droit écrit, et qui ne date que du
code civil sans doute, mais bien faite selon le génie de la
langue. Bos coumun, bois commun, ne doit pas être con-
fondu avec Bos coumundou : celui-ci appartient à la com-
mune qui l'administre, qui l’aménage en coupes réglées,
comme un particulier; celui-là est un bois où tous les
habitants ont droit de dépaissance, et souvent d’affouage.
Four ou pous coumun, four ou puits banal.
Coumunâou, s. ”m. Communal; bien, propriété apparte-
hant à une commune; pâturages en communauté.
Coumuno, s. f. Commune, division territoriale adminis-
trée par un maire, faisant partie d'un canton ; hôtel-de-ville
ou de la mairie.
L'étym. de ce mot et de ses composés précédents vient
COU
du lat. Cum, avec, ensemble, et du radical Mun, qu
donné Munus, charge, don, emploi.
Councha, v. Salir avec des ordures; gâter, tacher,
embrener. Au fig. compromettre ; salir la réputation, accu-
ser d’une action déshonorante, infamante. — Sé sén councha,
il se sent coupable, il n’a pas le cœur net, la conscience
nette. Qué sé sén councha qué sé torque, prvb., qui se sent
morveux se mouche.
Contract. du v. fr. Conchier.
Counciénço, s. f. Conscience, sentiment intérieur du
bien et du mal; vérité. — Aqud’s uno counciénço, il y a
conscience à faire cela. En counciénço, en conscience, en
vérité. À sa counciénço pér dariès, il n’a pas de conscience,
il la porte par derrière.
Counciénço, s. f. Outil de hoisselier, sorte de plastron
en bois qu’il place sur sa poitrine pour y appuyer la pièce
de bois qu’il rabote à la plane.
Coundamino, s. f. Nom propre d’un champ. Il est rare
que dans un grand domaine il n'y ait pas une terre qui
porte ce nom-là, surtout dans un domaine jadis seigneurial.
C'est d'ordinaire un champ fort étendu et qui est attenant
au manoir.
Sauvages dit qu'il paraît être dér. du lat. Campus domini,
champ du maître, du seigneur. — Voy. cependant au mot
Candia, étym.
Coundanna, vw. Condamner, prononcer un jugement
contre quelqu'un ; improuver, blàmer; murer une porte,
une fenêtre, ou la clouer de manière à ce qu’elle ne puisse
s'ouvrir. — És coundanna, ce malade est perdu, il est
condamné par la faculté.
Dér. du lat. Condemnare, m. sign.
Coundannaciou, s. f. Condamnation; jugement, sen-
tence, arrêt qui condamne. — Agud's sa coundannaciou,
c'est ce qui le condamne.
Coundiciou, ou Coundéciou, s. f. Condition; clause
d’un pacte, d’un marché, promesse; état, qualité, situation
et position des personnes et des choses ; naissance, noblesse,
gentilhommerie;" condition de la soie.
La soie, contenant toujours une portion quelcorique
d'humidité par son séjour plus ou moins long dans des
coffres ou dans les ballots qui la serrént hors du contact
de l'air, à cause de sa nature spongieuse, il est de condition
sous-entendue dans tous les marchés qu’on ne doit la peser
pour la vente que lorsqu'elle à perdu cette moiteur. Sur
certains marchés, on résout cette différence par une retenue
sur le poids total, qui varie de quotité sous le nom de dôn ;
dans d'autres villes, surtout celles de manufactures comme
Lyon et Saint-Étienne, la condition s'exécute littéralement.
On a établi une vaste salle, qu’on nomme /a Condition, où
la soie est exposée à nu et par écheveaux et soumise à une
chaleur donnée par l'action d’un calorifère : chaleur quiest
ménagée de mauière à enlever à la soie l'humidité qui lui
est étrangère, sans lui enlever celle qui lui est naturelle et
nécessaire à sa ductilité el à sa souplesse.
COU
Chaque ballot de soie qui se vend à Lyon est ainsi exposé
à la condition, marqué d'un numéro qui se couche sur un
registre; les feuilles du commerce rendent compte journel-
lement du nombre des numéros exposés à la condition ; ce
qui annonce la fluctuation de cette marchandise mieux que
tous les bulletins de la bourse. Plus il y a de numéros, plus
ily a eude ventes, et l'on voit par là si l’article est recherché
et offert.
Dans ce pays-ci, quoiqu'on vende d'ordinaire la soie sans
la passer à la condition, il s'en présente quelquefois qui a
un degré d'humidité trop grand pour que l'acheteur puisse
l'accepter. Dans ce cas il réclame la condition, qui consiste
à la détailler et à l'exposer à l'air extérieur ou dans un
magasin ouvert et bien aéré.
Coundu, udo, part. pass. de Coundure.
Coundure, v. Ranger, serrer dans une armoire.
Sé coundure, v. S'établir, se marier.
Dér. du lat. Condere, cacher, serrer.
Counégu, udo, part. pass. de Counouïsse.
Counégudo, s. f. Connaissance ; amis. — Qudouquus dé
counégudo, quelqu'un de connaissance. Agud's dé bla, dé
grano dé cotnégudo, c'est du blé, de la graine de vers à
soie de confiance, parce qu'on connait d'où ils viennent.
‘Vous dounaraï dé counégudos, je vous offrirai le témoignage
de gens de connaissance qui répondront de moi.
Counéissable, ablo, adj. Reconnaissable, facile à recon-
naître. — Éro bé counéissable qu'èro un couqui, il était aisé
‘devoir que c'était un fripon. Es pas counéïssable, c'est à
ne pas le reconnaitre.
Counéisse, v. — Voy. Counouïsse, plus usité.
Counéissénço, s. f. Connaissance ; savoir, intelligence;
raison. — Las counéissénços soun pas d'amis, autre chose
les familiers et les amis. Aguél éfan x foço counéissénço,
cet enfant a une intelligence précoce. À garda sa counéïs-
séngo énjusquo dou darniè, il a conservé sa raison Jusqu'à
ses derniers moments.
Counférénço, s. f. Conversation, entretien. — Tène
counférénço, soutenir la conversation.
Dér. du lat. Conferre, conférer.
Counféssa, v., ou Couféssa, Confesser; se confesser;
entendre une confession et faire sa confession. — Es ana
counféssa, il est allé se confesser. Dé qudou counféssas? à
qui vous confessez-vous? Counféssa un à, faire un lit à la
hâte, sans remuer la paille ou la plume, se contenter d'en
“arranger les draps et les couvertures.
_Counféssiou, s. f. Confession, déclaration de ses péchés
à un prêtre; aveu.
Counféssiounal, s. m. Confessional.
Counfèsso, s. f. Confesse, déclaration qu'un pénitent fait
de ses péchés à un prêtre; confession.
Counféssur, s. m. Confesseur, prêtre qui confesse.
Counfiénço, s. f. Confiance, assurance en:la probité de
quelqu'un, en la bonté d'une chose, en la réussite d'un acte.
Counfirma, v. Confirmer, rendre plus ferme, assurer de
COU 219
nouveau; être confiemé, recevoir la confirmation; donner
un soufflet. — Véou counfirma, je vais recevoir la confir-
mation. Té vdou counfirma, je vais te souflleter.
Counfirmaciou, s. f. Confirmation; sacrement de la
Confirmation.
Dér. du lat. Confirmatio, m. sign.
Counfisqua, v, Confisquer; s'emparer de...
biens au fisc.
Counfissur, s. m. Confiseur, qui fait et vend confitures
et sirops.
Counfituro, s. f. Confiture; fruits confits.
Counfroun, s. m. Confins; tenants et aboutissants d'un
champ; nom des propriétaires confinant une propriété;
objets matériels qui en forment les limites, comme un
cours d’eau, une route, les eaux versantes d’une montagne.
— Gardoù és un michan counfroun, le Gardon est un
mauvais voisin. Démandarièï pas qu'aquélo tèro sans coun-
froun, je ne demanderais pour tout bien que ce champ,
pourvu qu'il n’eût point de limites, c’est-à-dire que ce serait
le continent tout entier.
Les limites ou bornes, Bolos, entre les héritages, ne sont
pas ce qu'on appelle lous counfrouns; elles ne font que
déterminer la ligne divisoire d’un champ d'avec celui qui
le confine, et ces deux champs sont Counfrouns, confins,
l'un de l’autre, Lorsque ces confins sont des limites natu-
relles, les bornes deviennent inutiles, il suffit que les titres
mentionnent cette délimitation.
Counfrounta, v. Confiner, être limitrophe, toucher aux
confins l’un de l’autre. — Nous counfrountan, nos terres
se touchent, elles sont limitrophes. Counfrounte un tâou ou
émbe un tdou, mon champ touche, se tient avec celui d'un
tel. Counfrounte dé l'âouro lou vala dé...., mon domaine
aboutit du nord au ruisseau de...
Dér. du lat. Cum, avec, et Frons, frontis, tête, face;
c'est-à-dire face à face, côte à côte.
Counglaça, v. n. Tomber du verglas; glacer; engourdir
de froid.
Dér. du lat. Congeliare, se congeler.
Counglas, s. m. Verglas, givre; frimat.
Coungria, v. Engendrer, produire par génération où par
germination; pulluler; multiplier.
Le préjugé populaire accorde à certains animalcules et à
certaines plantes la faculté de se reproduire spontanément
et sans semence ni marcotte. Nous n'avons pas à discuter
la question des générations spontanées, et nous laissons aux
naturalistes le soin de chercher à expliquer la reproduction
de vers, d'insectes, de végétaux, comme les champignons
et les truffes; mais nous combattons cette croyance popu-
laire relativement à une foule d'objets, qui se reproduisent
.; adjuger des
‘par des moyens très-naturels, quoique les agents de cette
génération ne frappent pas immédiatement les sens, tels que
| les poux, puces, punaises, et bon nombre de végétaux dont
la semence est imperceplible, ou importée par les vents ou
les eaux. C'est cette faculté présumée de se reproduire que
220 COU
le peuple désigne par ie verbe sé coungria, et qui lui à fait
dire : as fénnos coungriou las nièiros, les puces s'engen-
drent ou se reproduisent dans les jupes des femmes.
Dér. du lat. Congressus, accouplement.
Counièiro, s. f., n. pr. de lieu. Conillère, monticule
près d'Alais, dominant la grande route et le chemin de
fer, au bout de la Chaussée. Signifiait autrefois garenne,
lieu habité et fréquenté par les lapins, en v. lang. Counil,
du lat. Cuniculus, lapin. L'étym. est directe.
Counio, s. f. Sotte, prude, nicette: terme moqueur et
injurieux, suivant le ton, mais expression qui ne peut être
sans injustice suspecte de malhonnèteté, et nous lenons à
la réhabiliter si les apparences l’avaient fait mal juger. Le
mot signifie une prude, une femme qui joue la timidité, une
pudeur trop chatouilleuse, quand on le dit d’une tierce
personne; mais il est aussi une de ces appellations interjec-
tives qui émaillent les conversations féminines, aussi com-
mune que nècio, foutralo, et au besoin ma mio, avec qui
elle alterne indifféremment, équivalant à ces vocatifs fran-
çais : folle, nigaude et tout autre de ce genre qu'il ne faut
pas prendre au pied de la lettre, car ce ne sont que des
termes d'amitié familière. Les femmes emploient cette
expression plus souvent que les hommes, et ce sont surtout
les matrones les plus intraitables en fait de prudhomie qui,
malgré ce qu'en veulent dire les malins, s’en servent sans
songer le moins du monde à mal, et elles ont raison : le mot
a en effet la plus innocente origine.
Counil, qui nous a laissé Ramo-counil et Counïéiro, vient
du lat. Cuniculus : il a pour féminin Counio. Counio est
donc tout bonnement l'épouse très-légitime de Jean Lapin.
Cette brave Jeanne est bien une de ces matrones faciles à
effaroucher, et en étendant cette disposition à un autre
ordre d'idées, elle est devenue ainsi le type de la bégueule,
mot qui rend assez le sens de Counio, qui cependant, comme
on l’a vu, selon les besoins, l'application ou le ton, est
souvent modifié. — Quod erat demonstrandum, car il ne
faut pas, quand on le peut, laisser calomnier personne ni
mème en médire, comme on n’y aurait été peut-être que
trop disposé sur la seule forme graphique du mot.
Cette démonstration était facile ; il ne faut pour la faire
et pour la comprendre qu’un peu de réflexion et la moindre
connaissance de la langue. Pour achever de l’assurer, il n’y
a qu'à citer La Fare qui, dans sa Bono annado, met ce vers :
Dé qué dises, Muso counio?
Cette pièce est imprimée, l’avant-dernière, dans la seconde
édition des Castagnados, après avoir paru dans les journaux.
Ce recueil, qui peut être mis dans les mains de tout le
monde et dont la mère permet sans crainte aucune la
lecture à sa fille, n'aurait pas admis une expression qui eût
fait tache. Si cependant l’auteur s'en est servi sans scru-
pule, sans craindre mème qu'elle fût mal sonnante et püt
ètre soupçonnée, c'est un incontestable certificat de mora-
lité qu’il lui a dûment délivré.
Cou
Counjè, s. m. Adieux en se retirant; congé militaire,
permission de se retirer, fin du service. — Sans counje,
sans adieux, au revoir. À fa un counjè à Touloun, il a fait
son temps de forçat, c’est un forçat libéré.
Dér. du lat. Commiatus. .
Counlèvo, s. f. Bascule; position, mouvement, machine
dans lequel un bout se lève quand on pèse sur l’autre. —
Faïre counlèvo, faire la bascule, jeu où deux enfants,
placés à chaque bout d’une planche, se balancent. La pos
fagué counlèvo, et za! pér sou, la planche fit bascule, et
patatras à terre!
Dér. du lat. Cum et Levare.
Counouïsse, v. Connaitre ; comprendre; discerner; dis-
tinguer. — Sé counouisse, avoir sa connaissance, conserver
le sentiment et la perception au lit de mort. Sé counouï bé,
on voit bien, on reconnait bien que. Sé counoui pas quante
és lou pu nèci, on ne pourrait discerner quel est le plus sot.
Dér. du lat. Cognoscere, m. sign.
Counséiè, s.m. Conseiller; celui qui donne des conseils.
Dér. du lat. Conciliarius, m. sign.
Counsél, ou Coussél, s. m. Conseil, avis; celui dont on
prend conseil dans une affaire; réunion, assemblée où l'on
délibère. — Lou counsél, le Conseil municipal. Quéou dono
lous counséls, dono pas las ajudos, prvb., les conseilleurs
ne sont pas les payeurs : c’est la fable de l'Enfant et du
Maitre d'école. Counsél dé mouïè és pichd, qué noun lou prén
és un chô, prvb., ce n'est pas grand’chose qu'un conseil de
femme, mais qui ne l'écoute point est un sot. En parlant
d’un pauvre avocat, on dit : dounariè pas un bon counsél
pér sièïi frans, parço qué lou sa pas, il ne donnerait pas un
bon conseil pour six francs, parce qu’il ne le sait : quel-
quefois le dernier membre de phrase reste sous-entendu
comme inutile pour compléter le sens.
Dér. du lat. Concilium, m. sign.
Counsén, énto, adj. Consentant; qui consent, qui ac-
quiesce; qui approuve. — Y sès counsén? Y consentez-vous?
Counsénti, v. Consentir, donner son consentement;
approuver. — Counséntà uno véndo, uno doubligaciou,
passer une vente, une obligation à quelqu'un. En terme
d'argot de notaire, on dit aussi, en fr., consentir une
obligation.
Dér. du lat. Consentire, m. sign.
Counsérva, v. Conserver; préserver; avoir soin d'une
chose.
Sé counsérva, v. Se bien porter; prendre soin de sa
santé. — Aguélo fénno és bièn counsérvado, cette femme
est bien fraiche pour son âge. Counsérva-vous, phrase
d'adieu : portez-vous bien, conservez votre santé. Diow mé
lou counsérve, Dieu me le préserve, me le sauve, me le
maintienne en bon état!
Dér. du lat. Conservare, m. sign.
Counsinna, v. Consigner, retenir par ordre; mettre en
dépôt.
Dér. du lat. Consignare, m. sign.
-—S
LL
Cou
Counsinno, s. {. Consigne, ordre supérieur; ordre donné
à une sentinelle.
Counsoula, v. Consoler, donner des consolations ; apaiser
les cris et les pleurs d’un enfant.
Dér, du lat. Consolare, m. sign.
Counsoulaciou, s. f. Consolation; soulagement; satis-
faction.
Counsulta, v. Consulter, prendre conseil, avis, instruc-
tion de quelqu'un.
Dér. du lat. Consultare, m. sign.
Counsulto, s. f. Consultation verbale ou par écrit d'un
juriste ou d’un médecin.
Counta, ». Compter, faire des comptes; calculer; payer;
épeler les lettres. — Dé qué contes à ta fio? Quelle dot
feras-tu à ta fille? Que lui compteras-tu en la mariant?
Aquélo fénno sé conto pas pus, cette femme ne compte plus
les jours de sa grossesse, elle est prête à accoucher. M’a
counta touto ma soumo, il m'a intégralement payé.
Counta, v. Conter, faire un conte; raconter. — Dé qué
mé countasvaqui? Que me contez-vous là? Dé qué countas
dé ndou ? Que dites-vous de nouveau?
Counta (La), s. f. Comté, terre possédée par un comte.
Autrefois ce mot en fr. était féminin : il s’est maintenu tel
‘en lang. On l’a même appliqué avec ce genre dans une
appellation locale anciennement connue : La Counta, quai
de la Comté, quartier, terres au nord de notre ville, appar-
tenant aux comtes d'Alais; comme La Barougnè, la
baronnie, à l’est, appartenait aux barons. — Lou Counta,
au masc., désigne spécialement le comtat Venaissin.
Dér. du lat. Comes, Comitis, comte.
Countaire, aïro, adj. Conteur, narrateur; auteur.
Countan, adj. Comptant. — Argén countan, argent
comptant, qui est compté immédiatement après le marché.
Countén, énto, adj. Content, satisfait.
Dér. du lat. Contentus, m. sign.
Counténénço, s. f. Contenance, étendue d’un champ,
d'un domaine; capacité d’un vase; pose du corps, posture,
maintien; sang-froid, dignité. — Avès vosto counténénço,
votre terre à la superficie vendue, indiquée. Mé farés ma
counténéngo, Vous parferez ce qui manque à la contenance
de mon champ. Ténè sas counténénços, garder contenance.
Dér. du lat. Continentia, m. sign.
Counténta, v. Contenter, satisfaire, rendre content.
Sé counténta dé. …, se contenter de....., contenter ses
désirs. +
Counténtamén, s. m. Contentement, satisfaction, joie.
—N'aguërou à lus counténtamén, ils en eurent à cœur-joie.
Countra, s. m. Contrat ; acte par lequel une ou plusieurs
: personnes s’obligent, le plus souvent devant notaire; titre
de la convention.
Dér. du lat. Contractus, m. sign.
Countrari, rio, adj. Contraire, opposé; nuisible ; adver-
saire; rival. Se prend subst. au masc. — Lou countrari, le
contraire, l'opposé d’une chose. Aou countrari, au contraire,
COU 221
tout autrement. Dise pas l'én countrari, idiotisme de notre
diaiecte, je ne dis pas le contraire.
Dér. du lat. Contrarium, e contrario.
Countrèio, s. f. Contrée, certaine étendue de territoire;
région, pays.
Dér. de la bass. lat. Contrata, Contrada, m. sign.
Countugna, v. Continuer; durer; persister; prolonger.
Dér. du lat. Continuare, m. sign.
Countugno (Dé), adv. Continuellement, sans cesse:
journellement ; d'habitude.
Counvéngu, udo, part. pass. de Counvéni.
Counvéni, v. Convenir, faire une convention: être
conforme ; partager le même sentiment; plaire.
Sé counvéni, s'accorder, avoir les mêmes inclinations:
vivre bien ensemble.
Dér. du lat. Convenire, m. sign.
Counvérti, ». Convertir, changer; amender; faire aban-
donner une fausse croyance.
Sé counvérti, se convertir, revenir d'une erreur, abjurer
une fausse croyance pour la vraie; changer de mœurs;
revenir aux principes et à la pratique de la religion.
Dér. du lat. Convertere, m. sign.
Counvouèta, v. Convoiter ; désirer ardemment; dévorer
des yeux.
Dér. du lat.
Counvouqua, ». Convoquer; rassembler; faire assembler
les membres d’un corps, les appeler à une réunion.
Dér. du lat. Convocare, m. sign.
Coupa, v. Couper, trancher, diviser; casser; séparer ;
châtrer; dévier; séparer en deux un jeu de cartes, couper
avec l’atout; mélanger, en parlant de liquides, tremper
le vin; trancher, en parlant de couleurs; rompre des
accords de mariage ; à la danse, remplacer; canceller des
conventions. Sé coupa, se contredire, se démentir soi-même.
— Coupa dé pan, couper du pain. Sé coupa la cambo, se
casser une jambe. On copo lous doubléns, on châtre les
moutons à leur deuxième année. Cope dé caïre, je coupe
avec l'atout qui est carreau. Cope ddou rèï, je coupe avec
le roi, Anén, coupas, allons, coupez. Coupa l'aïgo, dévier
un ruisseau, l’eau torrentielle d’un ravin. Coupa lou vi,
tremper d’eau le vin. Lous novis an coupa, ces fiancés ont
rompu leurs accords. Escusas sé vous cope, excusez-moi si
je vous interromps, si je vous coupe la parole. Coupa lou
créi, arrêter la croissance. Coupa las taïos, faire la réparti-
tion de la contribution mobilière et transcrire sur la matrice
cadastrale les mutations de la contribution foncière. Coupa
lou pris, arrêter, fixer le prix. Coupa lou visage, affronter,
injurier en face. Coupa cour, roun, couper court, rond,
dire en peu de mots. Coupa à la bouréïo : la bourrée et le
rigaudon sont des danses pèle-mèle, où chaque danseur au
milieu de la cohue n'a affaire qu’à deux danseuses, avec
lesquelles il figure tour à tour; comme cette danse dure
sans interruption et sans repos pour tous les danseurs à la
fois, il n’y a d'autre moyen de les faire reposer que de les
222 COU
remplacer. Aussi y a-t-il toujours des danseurs et des danseu-
ses de rechange, qui remplissent cet office en venant se placer
devant la personne à remplacer et en figurant avec:son par-
tenaire ; alors le dépossédé va se défatiguer, jusqu'à ce qu'il
aperçoive un autre figurant harrassé, ou un nouveau partenai-
re qui lui convienne. C’est cette évolution de remplacement
qu'on appelle Coupa.— Vène mé coupa, viens me remplacer.
Dér. du gr. Kérretv, m. sign.
Coupado, s. f. Espèce de raisin qu’on distingue en Cu-
pado négro, grosso Coupado négro et Coupado blanquo. La
Coupado négro est trèsfertile ; elle donne de grosses grappes
dont les grains sont noirs, peu fleuris, ovoïdes, assez gros,
croquants et sucrés. C'est peut-être le meilleur, le plus
délicat raisin de table. 11 donne un vin très-fin; mais le
propriétaire dont la vigne ne serait plantée que de cette
espèce, devrait vendanger quelques jours plus tôt, autrement
son vin aurait trop de liqueur. Les sarments de ce cep sont
longs et faibles, noirâtres et très-tendres à la taille; la feuille
est d’un très-beau vert, lisse et peu découpée. La grosso
Coupado négro ne diffère de la précédente que par ses grains
plus gros; elle est encore plus productive. Ces deux espèces
demandent un bon terrain. La Cowpado blanquo, plantée
dans un terrain bas et de première qualité et taillée court,
ne produirait rien; tandis que dans une terre médiocre,
taillée plus long, elle fournit de belles grappes. Ses grains
sont blancs, ovoïdes, un peu musqués; mais ils ne sont
point fermes comme ceux de l'espèce noire. Ce cep donne
beaucoup de bois blanchâtre et dur; sa feuille est grande
et peu découpée.
Coupé, s. ». Dim. de Co, coup. Petit coup de vin.
Coupèlo, s. f. Coupelle, instrument de pesage qui tient
à la fois de la romaine et de la balance. C’est une romaine
véritable dont le crochet de suspension est un plateau de
balance. Les marchands qui vont vendre à domicile s’en
servent de préférence à la balance, qui est d’un transport
moins commode. La romaine ne pourrait servir à une foule
d'objets qu'on ne peut suspendre à un croc, comme les
légumes, les fruits, le beurre, le fromage, etc.
Dér. du lat. Cupa, coupe, dont il est dim.
Coupèou, s. m. Copeau de menuisier, ruban de bois que
détache la varlope ou la plane.
Dér. de Coupa, qui vient du gr. Kértetv, couper.
Coupia, v. Copier, faire une copie; imiter, contrefaire;
transcrire un passage d’un livre, une page d'écriture,
reproduire un dessin.
Coupio, s.
n'importe sa nature.
Coupoun, s. m. Coupon, restant d’une pièce d’étoffe que
l'on donne à meilleur marché, parce qu ‘il est trop court
pour nombre d'usages.
Couquèto, s. f. Coquette, femme qui cherche à être
courtisée; coiffure de femme dans l'ancien régime, quiétait
un bonnet à dentelles, serré et appliqué sur le front.
Dér. du fr. Cog, avec le dim. éto.
f. Copie; assignation; exploit d’huissier,
COoU
Couqui, ino, a1j. Dim. Couquiné, nélo : Couquind, noto;
péjor. Couquinas, nasso. Coquin, ine; voleur, fripon;
débauché; au fém. femme de mauvaise vie, prostituée. —
Lous couquis, les voleurs, les brigands. Jouga as couquis,
sorte de jeu qui était fort en vogue parmi les écoliers, il y
a quelques années. 11 consistait à diviser les joueurs en
deux bandes, l’une appelée lous couquis, l'autre lous gén-
darmos. C'était une sorte de guerre pour laquelle on choi-
sissait de préférence un champ de bataille accidenté,
montueux, Coupé de ravins, de murs, de rochers, qui
prêtait à tous les calculs de la stratégie. Il est à remarquer
que le parti des coquins était toujours le plus recherché.
Les mots Couqgui et Coquin fr. ont évidemment une
origine commune, si toutefois ils n’ont pas été formés l’un
de l’autre. Les glossateurs français font dériver coquin du
lat. Coquinus, de Coquina, cuisine; et comme on ne voit
pas bien la relation entre un servant de cuisine et un
malfaiteur, on a ajouté que le Coquinus était un des plus
bas officiers de bouche, état méprisé et qu’on donnait/par
dérision à tout ce qui était méprisable et wil. Si cette
déduction n’est pas très-logique, convenons du moins que
la ressemblance de famille entre le fr. et le lat. serait
merveilleuse. Dans ce cas, le lang. serait débiteur envers
le fr.
D'autre part, Sauvages nous laisse apercevoir une autre
origine ; mais comme malgré son titre de chef de clan langue-
docien, il professe un respect systématique pour le français
vainqueur, il ne hasarde sa donnée qu’indirectement et se
garde bien d'inscrire son hypothèse sous la rubrique du mot
Couqu?, parce qu’alors on en aurait déduit la conclusionque
le mot fr. coquin n’était qu'une dérivation de ce dernier,
ce qui n 'arrangeait pas le hant et puissant seigneur d'Outre-
Loire. Nous qui n'avons pas les mêmes raisons de ménager
ce rival, nous allons droit au but. -
Vers la fin du XIVe siècle et pendant les troubles de la
minorité de Charles VI, des bandes de campagnards des
environs de Nimes, excédés du poids des impôts que le bas
peuple supportait seul alors, se réunirent en armes, pillé-
rent les maisons des riches et des seigneurs, et étendirent
leurs ravages presque par toute la France. On les appela
Touch dans le pays et Touchins en langue d'oïl. L'origine
et la raison de cette dénomination sont restées inconnues ;
mais l'histoire la consacre.
Le nom advint comme surnom aux habitants de Wézeno-
bres, dans ce temps où les’ sobriquets de village à willage
étaient fort répandus. On les accusait d'avoir reçuchezeux
ces brigands et de favoriser leurs pillages.
On conçoit très-bien que dans les diverses métathèses
qu'a dù subir la langue d'Oc depuis cette date, le mot
Touchà ait pu se changer en celui de Couqui, comme la
variante Touchin a fait celle de Coquin. Quant à la res-
semblance morale, elle nous semble parfaite. D'après: cela
ce serait le languedocien qui serait l'inventeur, le or
Tl'imitateu r.
COU
- Couquiè, s. m. Coquetier, petit vase en terre ou en por-
celaine, en forme de verre à pied, qui sert à tenir debout
“un œuf à la coque.
En langage enfantin, les œufs s'appellent des Coucoùs :
ils viennent de la femelle du coq; ils sont cuits, Cocta, du
lat, Coquere : tout cela peut être entré par quelque bout
dans l’étym.
Couquinariè, s. f. Friponnerie; astuce, ruse, qui est
souvent prise plus ironiquement que sérieusement : c'est
plutôt la ruse d'un faiseur*de niches, d'un séducteur, d'un
plaisantin, que celle d’un vrai malfaiteur. — A pas qué dé
couquinariès én tèsto, il ne songe qu'à des espiègleries, des
… Couquinas, asso, adj. Gros coquin, coquin fieflé; quel-
: quefois expression amicale, suivant le ton et l'occasion.
Couquinb, oto, s. et adj. Petit coquin ; espiègle, enfant
malin : terme d'amitié.
- Dim. de Couqui. .
Cour, s. m. Dim. Cournéto. Cour, lieu où est un souve-
rain avec ses principaux officiers; siége de justice; cour ou
basse-cour d'une ferme. — Faïre la cour, faire la cour,
ne se dit guère de celle qu'on fait à une femme, locution
qui nous vient de Scudéri, de La Calprenède ou de Durfé,
‘assez mal à propos importée dans notre langage; mais on
s’en sert pour signifier la flatterie à l'adresse d’une personne
riche et puissante.
* Dér. du lat. Curia, dans les premières acceptions, et de
Chors, Chortis, du gr. X6pzos, haie, clos de basse-cour, pour
la dernière.
Cour, courto, adj. Court, qui a peu de longueur. Cour,
pris adverb. court. — Tout cour et tout né, sans détour,
sans phrase, en un mot comme en mille. Tout y és cour,
rien ne répond à ses désirs, il n'a jumais assez de rien.
Quéouquuno li séra courto, à force d'en faire, il finira mal;
tant ira la cruche-à l’eau, qu’à la fin elle s’y cassera. Souï
cour, dit un joueur dont la boule ou le palet reste en deçà
du but: Tout fougue cour, se dit de la réception d'un
amphytrion qui traite ses hôtes avec une grande abondance
et presque un excès de soins et de bonne chère. Coupa cour,
être concis, abréger. Un cour émb'un lon, l'oste sé sdouvo,
prvb. Système des compensations : ici avec un morceau
écourté, là avec une portion plus copieuse, l'hôte se tire
d'affaire et de perte.
Dér. du lat. Curtus, m. sign.
+ Couraje, s. m. Courage; constance; force. — A bon
_ couraje, il a bon espoir; ou il a une santé robuste. Coumo
: vai aquél couraje? Comment va cette chère santé?
Dér. de la bass. lat. Coragium, formé du lat. Cor et Ago.
__ Courajoüs, ouso, adj. Courageux, brave, résolu.
_ Coural, ou Pébéroù, s. m. Dim. Couraüé; péjor. Cou-
* raïas. Poivron, piment, Capsicus annuus, Linn., plante
potagère de la fam. des Solanées. Le poivron jeune et vert
__ joue un assez grand rôle dans la culinaire des campagnes.
On le mange en salade avec un fort assaisonnement de
COU 223
poivre. On le confit également au vinaigre eton le conserve
ainsi toute l'année. Lorsqu'il est mûr, il devient d'un rouge
corail et prend une causlicité si violente qu'un zeste suffit
pour mettre le feu à la bouche; la main mème qui l'a touché
communique une inflammation à toutes les parties délicates
du corps où elle se porte, surtout aux yeux. Néanmoins les
Espagnols en assaisonnent la plupart de leurs mets et le
mangent même dans l'état naturel. — Aowje coumo un
coural, rouge comme un coq.
Dér. du lat. Coralium, ou Corallum, corail, à cause de
son analogie de couleur dans sa maturité.
Couratéja, v. frég. Exercer le courtage; faire le courtier.
— Couratèja un bé, offrir l'acquisition d'u domaine par
l'entremise d’un courtier ou agent d'affaires.
Couratiè, Couratièïro, s. m. et f. Courtier, agent
d'affaires, entremetteur de marché ou d'affaires.
Dér. du lat. Cursitare, courir çà et là, ou bien du vieux
verbe lang. Goura, qui veut dire à la fois errer çà et là et
tromper, duper. Il pourrait bien se faire qu'il y eùt un peu
de toutes ces étym. et de leurs diverses acceptions dans le
fait du Couratiè.
Courba, v. Courber; recourber; ineliner; plier en arc de
cercle. — Sé corbo bièn, il devient bien courbé, il prend la
taille courbée. Courba-vous un pâou, Laissez-vous un peu,
inclinez la tête, ou courbez le dos.
Dér. du lat. Curvare, m. sign.
Courbatas, Courpatas, ou Croupatas, s. m. Corbeau,
corbeau noir, Corvus corax, Linn., oiseau de l’ordre des
Passereaux et de la fam. des Plénirostres. Sa couleur est
entièrement d'un beau noir avec des reflets pourprés et
bleuâtres sur le dessus du corps; il a jusqu’à deux pieds de
longueur. Courpatas et Croupatas sont des variantes locales
de Courbatas, qui est lui-même, par le changement com-
mun de v en b, un augmentalif ou plutôt un péjoratif du
lat. Corvus; on se croit en effet obligé, en parlant de lui,
d’enlaidir son nom. Son cri rauque, son plumage lugubre,
sa voracité ignoble inspirent jusqu'à l'horreur et le font
regarder comme un oiseau de mauvais augure. Les enfants
se sont inspirés de cette idée de terreur superstitieuse dans
une sorte de refrain injurieux qu'ils lui adressent lorsqu'ils
l’aperçoivent et où reviennent sans cesse ces mots : Cour-
batas! Diablatas!
Le scepticisme du XVIIe siècle nous a légué une sorte
de dédain pour l’habit ecclésiastique. Les esprits forts,
grands dépréciateurs du clergé, et les solidaires libres-
penseurs se plaisent à nommer un prêtre Courbatas, et ils
expliquent cette ingénieuse assimilation par la couleur de
la robe et par l'instinct commun, disent-ils, au prêtre et au
corbeau, qui les appelle l’un et l'autre auprès des morts ou
des mourants. Cela prouve la mauvaise foi et l'absurdité
d'une prétendue philosophie, qui ne sait pas comprendre
que la présence du prêtre à l’agonie du chrétien est un des
actes les-plus sublimes de son ministère; que la religion est
plus belle représentée par un de ses ministres consolateurs
224 COU
au chevet d’un pauvre mourant; et qu'il y a au moins
maladresse à l'attaquer par l'ironie de son côté le plus
noble et le plus populaire.
La corneille, qu a quelques points de ressemblance avec
le Courbatas, est souvent aussi, mañs improprement, con-
fondue dans le mème nom. — Voy. Graïo.
Courbo, s. f. Ligne courbe; bois qui fait une courbe, en
cintre, par lui-même ou par nature. — Sé tirariè dé pou-
lido courbo d'aquél âoubre, cet arbre fournirait de belles
pièces pour jantes de roue ou de puits à roue.
Dér. du lat. Curvus, Curva, m. sign.
Courchâou, Courchäoudo, adj. À courte queue, qui à
la queue coupéc ou raccourcie. — Chival courchâou ; Galino
courchdoudo, etc., cheval écourté; poule sans queue.
Dér. de Cour, Courto.
Courcho, s. f. Raccourci, chemin le plus court, sentier,
chemin de traverse, pour les gens à pied, qui abrège le
trajet. — Coupa dé courcho, prendre le raccourci, la tra-
verse, pour arriver plus tôt. C’est surtout dans les côtes
longues, où la route décrit des circuits, en faisant des
lacets pour arriver au bas par une pente ménagée, que les
piétons tracent une ligne directe fort scabreuse, qui sert de
corde au grand arc décrit par la route. Au fig. Coupa dé
courcho, signifie abréger, arriver vite et droit au but.
Courcho, s. f. Ver à soie court. C’est un ver qui com-
mence à se métamorphoser en chrysalide, avant d'avoir
grimpé sur la bruyère et d’avoir filé : son état de faiblesse
et de maladie ne lui permet pas d'escalader ni de jeter les
fils de sa trame. Quelquefois il fait un mauvais cocon dans
la litière, mais informe et fondu. Cette maladie est souvent
épidémique, et une partie de la chambrée tombe en court,
tombo én courcho, au moment de la montée. Ces accidents
proviennent aussi quelquefois d’un excès de maturité, lors-
qu’on n’est pas assez prèt à donner le bois aux vers.
La flacherie ou maladie des morts-flacs, dans la nouvelle
dénomination séricicole, n’est pas autre chose.
Toumba én courcho s'applique figurativement à tout
projet annoncé qui avorte, à une belle promesse mal
tenue.
Courcoussoü, s. m. Charançon, calandre, bruche, cha-
rançon des blés et des légumes, Curculio, Linn., de l'ordre
des Coléoptères; petit ver blanc qui se change plus tard en
scarabée. Ce dernier pond un œuf dans l'épi encore vert; il
en nait un ver qui se nourrit dans le grain et l'accompagne
au grenier, d'où il ressort en scarabée pour continuer ainsi
sa malfaisante rotation. Au fig. rabougri, ratatiné de vieil-
lesse, comme est ce ver dans son alvéole. En fr. on le
nomme aussi Cosson. — Voy. Coussoù, dont Courcoussoù
est la redondance.
Dér. du lat. Cureulio, m. sign.
Courcoussouna, ado, adj. Piqué des vers; vermoulu. —
Voy. Coussouna.
Courda, s. m. Cordat, grosse toile à trame croisée qui
sert à faire du gros linge de table.
CoU
Courda, v. Corder ; ficeler; entourer de cordes ; emballer
avec une corde.
Courdaje, s. m. Cordage de navire, toute sorte de cordes
servant à la manœuvre d'un vaisseau. :
Courdéiè, s. m. Cordelier, moine, religieux de l'ordre de
Saint-François, de l’un des quatre ordres mendiants. — Vèr
lous Courdciès, du côté du couvent des Cordeliers. Lou chival
das Courdéiès, c'est aller à pied, autrement dit avec un jeu
de mots pareils : par la voiture du comte de la marche.
Dér. de Cordo, parce que les frères de cet ordre portent
une corde pour ceinture.
Courdéja, ». Tracer, comme le fraisier et certaines espè-
ces de graminées, qui étendent à fleur de terre leurs fils
dont chaque nœud prend racine et forme une plante nou-
velle; en terme de boulanger, filer, comme la pâte qui
s’allonge en cordes quand on la soulève. — Faïre courdéja,
donner de la corde, laisser courir la corde du côté où son
bout est trop court, lorsqu'on corde un ballot, la charge
d’une charrette ou d’un bàt, ou même un fagot.
Courdèl, s. m. Cordeau de maçon ou de jardinier, corde
mème servant à prendre des aplombs ou des alignements.
— Tira dou courdèl, aligné au cordeau.
Courdéla, v. Lacer ; lacer un corset, passer un lacet dans
les œillets d’un corset.
Courdélado, s. f. Chapelet d'objets de même sorte enfi-
lés. — Courdélado dé coucoùs, chapelet de cocons de graine:
Les cocons qu’on réserve pour la graine sont choisis parmi
les plus forts et les plus réguliers de forme. On les enfile
avec une aiguille, en ayant soin de ne prendre que l’épi-
derme pour ne pas piquer la chrysalide; on les suspend
ainsi par chapelets dans une position aérée et isolée : ce
qui donne de la facilité au papillon pour percer sa coque.
Courdélado dé péissoùs, brochette de poissons, que les
pêcheurs à la ligne enfilent comme un chapelet.
Courdèlo, s. f. Lacet, cordon de fil ou de soie dont les
femmes se servent pour lacer leur corset, et qui est garni
d'un bout métallique pour passer facilement dans les
œillets.
Courdia, s. m. Grosse toile d'emballage; treillis.
Courdiè, s. m». Cordier, fabricant ou marchand de cordes.
Courdil, s. m. Dim. Courdié. Cordon, petit tissu, tressé
comme la corde, de fil, de soie, de laine, de coton, decrins,
etc. Lorsque le cordon est en cuir, il se nomme Couréjoù.
(Voy. c. m.)— Plôou coumo dé courdils, il pleut à seaux.
Quand il pleut ainsi, la pluie ne se présente pas comme une
suite de gouttes, mais par continuité, comme un filet d’eau
sous la forme et de la grosseur d’un cordon; ce que repré-
sente assez bien notre expression pittoresque.
Courdoù, s. m”. Ruban d'attache, comme ceux d'un
chapeau de femme ; cordon, décoration.
Inutile de faire remarquer que tous ces mots, depuis
Courda, et quelques-uns des suivants, augmentatifs ou
diminutifs, ont pour racine et pour principe, Cordo. —
Voy. c. m.
COU
Courdougnè, èiro, s. m. et f. Cordonnier, femme du
cordonnier; celui qui fait des souliers. — Notre mot, ainsi
que son correspondant français, est d'origine assez moderne
et ne remonte guère qu'au XVe siècle, L'un et l’autre sont
la corrupt. de Cordouanier, c'est-à-dire ouvrier qui emploie
du Cordouan, ou cuir de Cordoue. L'ancien confectionneur
de chaussures s'appelait Sabatiè. La corporation de ces
artisans a donné à une rue d'Alais son nom qu'elle porte
toujours, Sabatariè. I y a beaucoup de noms propres,
partout, qui ont cette étym. — Voy. Sabatiè.
Courdougnè, s. ». Punaise à aviron, Hydrometra sta-
gnorum, Linn., insecte de l'ordre des Hémiptères, connu
sous la qualification de Notonecte ou Hémiptère rémitorse.
Cenomigr. Nürovwzrns, de vüros, dos, et véztns, nageur,
indique une singularité de cet insecle qui nage en effet à la
+ renverse. Deux de ses jambes lui servent d'avirons pour
s'élancer en avant par secousses ; mais tout son corps est si
frèle, si léger que le moindre courant qu'éprouve l'eau où
il navigue, lui fait perdre tout l’espace qu'il avait gagné
par sa brassée; de sorte qu'il fait deux pas en avant, deux
pas en arrière, et qu'en résultat il demeure presque à la
même place. Admirable disposition et merveilleux instinct
que Dieu a déposé dans la plus infime créature! En appa-
rence, ce petit insecte, avec ses mouvements automatiques
et sa position renversée, passerait pour un animal stupide,
si l'on ne savait que tout ce manége sur l'eau n’est point
un voyage qu'il veut tenter à contre-sens, mais une chasse
des plus fructueuses qu'il fait aux moucherons microscopi-
ques qui voltigent à sa portée et qu'il happe au passage. Ses
enjambées ne sont donc point un moyen de cheminer, mais
bien de regagner l’espace que le courant lui a fait perdre;
ses exercices de natation sur le dos n'ont d'autre but que
de lui faire apercevoir et saisir facilement sa pâture. On ne
se doute guère non plus que cet insecte a des ailes qu'il
dissimule tant qu'il a affaire à un élément où elles ne sau-
raient lui être utiles; mais dès que le gibier manque sur
un point, il les déploie, les ressuie à terre et vole plus vite
qu'il ne nageait vers une autre mare ou quelque cours d’eau
‘pour se remettre à faire la planche et recommencer sa
Ou l'appelle Courdougne parce que ses enjambées ressem-
blent assez au mouvement des bras du cordonnier, quand
il tire le ligneul.
Courdouna, v. Border d'arbres un champ; planter des
js comme un cordon autour d'une terre.
Courdouné, s. m. Cordonnet, petit cordon d'or, d'argent,
’ | de soie de fil, de coton ou de laine, pour border un habit,
; une robe, etc.; passepoil.
_ Courdura, v. Coudre; Ps deux choses aû moyen
Mie aiguille et de fil; au fig. faire des zigzags, passer à
travers des objets quelconques disposés en ligne, en passant
2 alternativement de la gauche de l’un à la droite de l’au
* comme lorsqu'on tresse une natte, opération du reste
pareille à celle de l'aiguille qui coud et qui passe tantôt
COU 225
dessus, tantô! dessous l'étoffe. — Courdura lou cami, faire
des zigzags sur la route, comme font les ivrognes. Dé qué
faï aquélo fio? — Courduro : quel métier fait cette fille ?
— Elle s'emploie à la couture.
Dér. du lat. Consuere, m. sign.
Courduro, s. f. Couture; profession de couturière. —
Répassa las courduros, aplatir les coutures d'un habit avec
le carreau du tailleur : au fig. donner une volée de coups
sur le dos. Résta pér las courduros, demeurer pour les
gages : cela se dit d’une mauvaise dette dont on est obligé
de faire l'abandon : Aqu la y és résta pér las courduros.
Coure, ou Couri, v. Courir, aller, marcher avec vitesse ;
ne pas rester chez soi; glisser; en parlant des liquides,
couler; circuler; parcourir, — Coure, coure, cours,
marche, file! Faï pas qué coure, il ne reste jamais en place.
Coure qué t'aï vis, Va t'en vite, je te connais, je t'ai vu.
Faïre coure un nous, faire glisser un nœud. L'aïgo qué
coure faï pas mdou dou moure, prvb., l'eau courante est
toujours saine. Coure sus lou mérca dé quéouquus, aller sur
le marché de quelqu'un, faire des offres à un objet qu'il
marchande. Laïssara bé coure quicon, il donnera bien quel-
que chose sur le marché, il laissera bien courir quelque
chose sans le faire payer. L'annado qué coure, l'année cou-
rante. Coure qué t'éspère, prvb., va t'en voir s'ils viennent,
Jean. N'én coure lou bru, la nouvelle en circule.
Dér. du lat. Currere, m. sign.
Courédis, isso, adj. Qui court, qui roule; propre à
courir. — Un iè courédis, un lit à roulettes.
Courédoù, s. m. Corridor; galerie; allée de maison :
c'est particulièrement une galerie à ciel ouvert qui conduit
à la principale entrée.
En espag., cat. et port. Corredor, en ital. Corridore.
Couréire, éiro, adj. Coureur; léger à la course; qui
court très-vite.
Dér. du lat. Currere.
Couréjo, s. f. Courroie; lanière de peau, de cuir; fouet
du berger, qui n'est pas tressé, mais qui se compose d'une
lanière assez large et d’un bâton court et blanc; par ana-
logie, champ, terrain long et étroit en forme de lisière.
Dér. du lat. Corium, cuir; dans la bass. lat. Corrigia.
Couréjolo, s. f. Liseron des champs, volubilis sauvage;
clochette; Convolvulus.arvensis, Linn., plante de la fam. des
Convolvulacées, rampante et parasite, qui ne peut s'élever
qu'en s’entortillant aux plantes ou aux arbres voisins. Elle
produit une fleur blanche en forme de clochette, et elle est
extrèmement difficile à extirper; le tranchant de la faulx la
fait périr.
Dim. de Couréjo,
Couréjoù, s. m. Cordon de souliers en cuir; cordon de
bourse en cuir. — Voy. Courdil.
Dim. de Couréjo.
Couréjouna, v. Serrer les cordons des souliers; fermer
les cordons de sa bourse.
Courén, s. m. Plateau; pièce de bois, planche longue,
- 29
226 COU
large et épaisse, qui sert de plancher pour ce que l'on peut
appeler le second étage d’une magnanerie. Il faut se rappeler
que la magnanerie est un grand appartement, qui d'ordi-
naire s'élève du plat sol jusqu'à la toiture sans division
d’étages. Vers les deux tiers de sa hauteur, il règne un rang
de poutres transversales, destinées à fixer les pieds-droits
ou montants qui soutiennent les tables. On donne à manger
aux plus basses tables de pied ferme jusqu'à la quatrième
au plus ; au-dessus de celle-ci, on a recours à des échelles
courtes, légères et faciles à manier; mais s’il fallait en
employer de très-longues pour atteindre aux plus hautes
tables, ce serait à la fois très-pénible et très-dangereux.
Pour y obvier, on dispose, tout le long des couloirs supé-
rieurs de l'appartement, une file de longs plateaux posés
et cloués sur les poutres dont il a été question ; et les aides
magnassiers trouvent dans ce nouveau plancher un second
rez-de-chaussée, qui leur permet d'atteindre aux tables les
plus élevées, dont le nombre nes’élève pas à plus de quatre
au-dessus de ces plateaux.
Courén, énto, adj. Coulant, ante; courant; qui glisse;
qui circule. — Nous courén, nœud coulant. Aïgo courénto,
eau courante. Pris courén, prix Courant. Man Courénto,
main-coulante, pièce de menuiserie sur une rampe d’esca-
lier; main-courante, registre journalier d'un commerçant.
Courgnè, s. ». Cornouiller, arbre. — Voy. Corgno.
I est devenu n. pr. en fr. sous la forme : Cornier,
Ducornier, etc.
Couri, v. Courir. — Voy. Coure.
Couriè, s. m. Courrier; messager; qui fait le service de
la poste; qui porte les dépèches d’un bureau à un autre. —
Lou Couriè, le journal; les lettres qu'on prépare pour
envoyer.
Courija, v. Corriger; donner une correction; amender ;
réformer; châtier; reprendre; améliorer.
Dér. du lat. Corrigere, m. sign.
Couriolo, adj. f. Fille trotteuse, et non pas coureuse.
Notre expression lang. est loin d'avoir cette dernière accep-
tion. Elle signifie seulement une fille un peu légère, qui
n'aime pas à garder le logis, et qui suit les promenades, les
fêtes villageoises, etc.
Couriôou, adj. m. Dim. Courioulé. Qui aime à courir,
à trotter ; batteur de pavé; éventé; dissipé.
Couriôou, s. m. Dim. Courioulé. Roulette d'enfant:
espèce de charriot à quatre roulettes, où l'enfant est placé
debout, les pieds portant à terre et le corps enfermé dans
un cercle qui l'empêche de tomber. Comme cet appareil est
facile à mettre en mouvement, l’enfant le fait aisément
rouler, ce qui l’oblige lui-même à suivre et à changer ses
pieds de place à mesure que la machine roulante avance.
Cet exercice, qui tient tout à fait de la gymnastique, quoi-
qu'il soit fort antérieur à cette science dans l'éducation
puérile, apprend à l'enfant à se tenir sur ses pieds, à mar-
cher, et développe ses forces.
Cournal, adj. m. Terme injurieux, qui ne s'applique
COU
qu'au masc. et pour cause : mari dont la femme est peu
fidèle, et que Molière appelle : cocu.
Dér. du lat. Cornu, corne. :
Cournarédo, s. f. Plantation de cornouillers; lieu, ter-
rain, bois planté de cet arbre.
Formé de Courgnè, radical, avec le suffixe collectif édo.
— Voy. Édo. ‘
Courné, s. m. Cornet à bouquin ; sorte de trompette faite
en terre ou de la corne d'un bœuf, avec laquelle les bergers
et les vachers appellent le bétail qui est dispersé au loin.
Courné, s. m. Courge-trompette, sorte de calebasse,
Cucurbita lagenaria, Linn., plante potagère de la fam. des
Cucurbitacées, longue de trois pieds environ, qui a cer-
taine ressemblance pour la forme, sinon pour les dimen-
sions, avec l'instrument du mème nom.
Dér. du lat. Cornu.
Cournélu, udo, adj. Péjor. Cournéludas. Cornu, qui à
de longues cornes. — Voy. Banu.
Cournudo, s. f. Cornue, vase de bois à deux anses laté-
rales servant à porter des liquides. Se dit mieux Sémédou.
— Voy.c. m.
Couro, adv. de temps. Quand; à quelle époque; quel
jour; à quelle heure; tantôt; en quel temps. — Cowro vén-
drés? quand viendrez-vous? Cowro aquà s'és fa? à quelle
époque cela s'est-il fait? Couro qué siègue, en quel temps
que ce soit. Couro qué vèngo, li parlaraï, lorsqu'il viendra,
je lui parlerai avec les dents. Couro qué vèngou las prunos,
y-doura un an, vienne la saison des prunes, il ÿ aura un
an. Couro ris, couro plouro, tantôt il rit, tantôt il pleure.
Dér. du lat. Quota hora, quelle heure.
Couroubiè, s. m». Caroubier, gainier visqueux, arbre
de Judée, Cercis siliquastrum, Linn., arbre de la fam. des
Légumineuses, naturalisé dans nos pays.
Couroubio, s. f. Caroube, fruit du caroubier. C’est une
large gousse, noirâtre quand elle est müre, assez semblable
de forme à celle des pois dit goulus, mais beaucoup plus
grosse. Elle renferme une pulpe charnue et douceätre, qui
tient à la fois de la datte et de la manne. Les enfants en
sont friands, comme de tout ce qui est sucré. Elle est un
excellent engrais pour les chevaux. On leur en donne beau-
coup en Espagne, où ce fruit est très-abondant.
L'arbre de Judée, à fleurs roses, est de la mème famille,
mais ses gousses sont petites, sèches et sans saveur.
Courounèl, s. m. Colonel, chef d’un régiment.
Emp. au fr. :
Coursé, s. m. Dim. Coursioù, Coursiouné.Corset; corps
de jupe, lacé ou non; camisole de femme; habillement du
buste. On dit Coursioù, quand il s’agit de la camisole d’un
enfant au berceau.
Courto-haléno, s. f. Asthme ; essoufflement. — És mort
dé la courto-haléno, il est mort faute de respirer : mauvaise
plaisanterie pour dire : je ne sais de quelle maladie il est mort.
Courtouès, ouèso, adj. Courtois, poli; affable.
Emp. au fr.
COU
Couruciou, s. f. Odeur de corrompu; infection. —
Quinto couruciou! quelle odeur, quelle infection !
Ce mot n'est l'équivalent du fr. dont il est formé, que
sous le rapport de l'odeur.
Cous, s. m. Cours, promenade, allée plantée d'arbres,
dans une ville; cours, taux d'une marchandise. — Fou
1 [aire lou cous, ou fou faïre coumo sé faï, il faut suivre le
cours.
Dér. du lat. Cursus, ou Curtus.
Couscri, s. m. Conscrit, qui est soumis à la conscription
militaire. Par ext. novice; neuf, sans expérience.
On conçoit très-bien l'emprunt de ce mot fait au fr. depuis
les lois sur le recrutement, le point le plus important pour
la population de la politique intérieure.
Couségu, udo, part. pass. du v. Coïre, cuire, dans
l'acception de douleur inflammatoire seulement.
Cousésoù, s. f. Cuisson; action de cuire au feu; degré
de cuisson; cuisson, inflammation légère mais cuisante.
fe hs] à
Dér. de Coïre.
Cousi, Cousino, s. m. et f. Dim. Cousiné, Cousinéto;
péjor. Cousinas, asso. Cousin, cousine. — Cousi qué cousè
davalo dé moun cérièire, dicton devenu prvb. que lefr. a
: rendu par : ami jusqu'à la bourse.
“Dér. du lat. Consanguineus.
Cousignè, Cousignèiro, s. m. et f. Cuisinier, cuisinière :
domestique à gages, homme ou femme, qui fait la cuisine
dans une maison, un hôtel, une auberge. — Cousignè
. macari, Un empoisonneur. { Voy. Macari.) Cousigné lam-
- bréto, sé y-a un bon moucël, lou fréto, cuisinier lambin, le
meilleur morceau est pour lui.
Dér. de Cousino.
Cousignèiros (Las), s. f. pl. Les Pléïades, constellation
située dans le signe du Taureau et composée de sept étoiles
jadis, dont une a disparu.
Ce mot parait une corruption du fr. la Poussinière, nom
qu'on donne quelquefois à cette constellation, qui par son
assemblage ressemble à une couvée de poussins pressés
autour de leur mère.
Cousina, s. m. Potage de châtaignes sèches. — Voy. Ba-
jana.
Cousinaje, s. m. Cousinage, parenté entre cousins; manie
de traiter tout le monde de cousin.
Cousinéja, v. frég. Faire la cuisine; se dit particulière-
ment, en ce sens, d’une personne dont ce n’est pas la pro-
fession, qui met la main à la pâte par occasion ; se cousiner,
traiter tout le monde de parent pour s’en faire le parasite.
-Cousino. s. f. Dim. Cousinéto ; péjor. Cousinasso. Cui-
sine; chère. — La cuisine est la salle à manger et le salon
d'honneur pour les paysans. Pichoto cousino faï l'oustéow
. gran, prvb., petite cuisine enrichit la maison.
_ Dér. de la bass lat. Cocina, qui est la corrupt. du latin
classique Coquina, cuisine.
Cousségal, s. m. Méteil, mélange de froment et de seigle.
Formé du lat. Cum, avec, et Ségal, bas-breton, seigle.
COU
Cousséia, v. — Voy. Acousséia.
Cousséja, v. frég. Poursuivre, courir après; chasser
devant soi quelqu'un qui fuit.
Dér. de Cousso.
Coussél, s. m. — Voy. Counsél.
Coussi, adv. Comment, comment donc; eh! quoi! —
Coussi quicon, d'une façon où d'une autre; aussi bien que
nous pourrons. Coussi vaï la santa? comment va la santé?
Coussi vous pourtas? comment vous portez-vous? Coussi/
m'ou avias pas dit, est-il possible! vous ne m'en aviez pas
parlé. Coussi m'ou avias pas dit? comment se fait-il que
vous ne m'en ayez pas dit un mot? Coussi quicon sèn
arivas, à la longue nous voilà arrivés, mais ce n'est pas
sans peine. Véjo coussi camino, vois comme il marche.
Coussi! vous maridas! Eh! quoi! vous prenez femme!
Dér. probablement du lat. Quod et Sie, cela, ainsi.
Cousso, s. f. Course, marche précipitée; voyage; espace
parcouru. — À cousso, en courant, à la course. Foura bé
y-ana faïre uno cousso, il faudra bien y aller faire un
voyage. Y séraï d'uno cousso, j'y arriverai d'une enjambée.
Gnavès pér uno bono cousso, Vous en avez pour un bon bout
de chemin. — Voy. Escousso.
Dér. du lat. Cursus, m. sign.
Coussoù, s. m. Aruson, insecte ou ver, de l'ordre des
Coléoptères, qui ronge le bois; charançon du blé; vermou-
lure ou débris du bois rongé par ce ver, dont il à absorbé
toutes les parties aqueuses et nutritives : cette poussière est
un excellent dessiccatif.
Il est singulier que le fr. ait appelé cosson, l’artison, le
charançon qui ronge le blé /Cureulio), plutôt que celui-ci
(Cossus), dont la traduction était toute naturelle. Du reste,
en lang. Coussoù et Courcoussoù sont souvent confondus.
— Voy. Courcoussoù.
Dér. du lat. Cossus, Cossonus, m. sign.
Coussouna, ado, adj. Vermoulu; piqué des vers; ne se
dit que du bois. Lorsqu'il s’agit de hardes, d’étoffes de
laine, on dit Arna.
Coussu, udo, adj. Cossu, en parlant d'une personne
riche et opulente; en parlant des choses, confortable, élé-
gant, riche, bien étoffé. — M'én fichas uno coussudo, vous
m'en donnez une bonne. Aquè po sé dire coussu, voilà qu'on
peut appeler cossu, élégant, riche.
Cousta, s. m. Au pl. Coustasses. Côté, partie droite ou
gauche d’un animal, d’une chose; envers ou endroit d'une
étoffe ; face, aspect ; parti; hanches vraies ou factices d’une
femme. — Dé cousta, de côté, séparément. Pér cousta, par
côté, obliquement, de biais. Dédou cousta dé Nime, aux
environs de Nimes. Viras-ou dâou bon cousta, tournez cette
étoffe à l'endroit; prenez ceci du bon côté, sous son bon
aspect. Mé méte dé loun cousta, je me range de votre parti.
Marchavo à sous coustasses, il marchait à côté de lui. À pas
gés dé cousta ou dé coustasses, elle n’a point de hanches,
point de tournure. Les femmes tirent vanité de la protu-
bérance de leurs hanches; serait-ce pour faire ressortir
27
228 COU
davantage, par constrasie, la finesse de leur taille, ou pour
tout autre chef de coquetterie? Il importe peu de pénétrer
le secret de ces artifices que la mode impose et qui sont de
tous les temps et de tous les pays. Autrefois les paniers
ont eu leur vogue; puis on a appelé ces appareils, ou coussi-
nets adaptés à la taille, tantôt tournure, tantôt polissons ;
puis est venue la crinoline et son ampleur. Le siècle de
Périclès et le règne du Directoire ont fait exception; les
tailles en guèpe étaient proscrites. Sur l'ancien modèle grec,
les élégantes de la fin de 4700 paraissaient sous forme de
tube, ce qu'on appelait alors taille d’asperge. Après les
exagérations bouflies des modes de notre second empire, on
a semblé revenir aux lignes droites et raides du Directoire,
qui sont déjà remplacées aujourd’hui par les polissons res:
suscités ; et il en sera toujours ainsi. suivant les charmants
caprices de ce tyran, mailre du monde. Une seule chose ne
change pas ici; ce sont les mots de notre langue déjà fixée,
mais qui peut cependant s'appliquer à toutes les inventions.
Dér. de Costo.
Cousta, v. n. Coûter; être acheté à un certain prix; être
difficile à acquérir, au prix de soins, de peines, de fatigues.
— Qué qué coste, coûte que coûte. Sé mé coustavo pas qué
dous sbous, s'il ne m'en coûtait que deux sous... Saves pas
dé qué mé costes, tu ne sais pas ce que tu me coûtes.
Dér. du lat. Coustare, m. sign.
Comme remarque générale, il est à observer que la plu-
part des verbes dans- lesquels se rencontre la syllabe ow à
l'infin., présentent des irrégularités de conjugaison à diffé-
rents temps : ainsi Cousta, infin. prés., fait Coste à l'ind.
prés., Coustère au fut.; de mème Trouva, Atrouba, Acou-
mouda, Couja, infin., donnent à l'ind. prés. Trove, Atrobe,
Acoumode, Coje, etc., etc.
Coustéléto, s. f. Côtelette, petite côte de mouton,
d'agneau, de veau, de bœuf, destinée à être mangée.
Dér. de Costo.
Coustéto, s. f. Côtes de poirée, qu'on mange comme les
cardes.
Dér. dim. de Costo.
Coustiè (Dé ou pér), adv. De côté, par côté; de travers;
de biais, obliquement. — Vaï tout pér coustiè, il marche
tout de travers.
Dér. de Cousta, côté.
Coustioüs, s. m. pl. Côtelettes de porc salé. — 11 ne faut
pas oublier que les os de porc sont décharnés pour faire de
cette viande de l’andouille, de la saucisse, du saucisson, ete.;
ce qui reste après les côtes n’est qu'un résidu de cartilages,
de tendons, de membranes adhérentes. C'est là le Coustioù,
proprement dit, qui assaisonne bien un potage, et qui passe
encore pour un mets délicat à ronger, après qu'une forte
ébullition a ramolli tous ces cartilages.
Dim. de Costo.
Coustoulado, s. f. Volée de coups de bâton; volée de
bois vert.
Que le mot vienne du suivant, exprimant l'instrument
COU
qui sert à l'opération, qu'il soit tiré de la partie soumise
à la correction, son radical est à peu près le même et tout
aussi énergique.
Coustoulo, s, f. Écote, éclisse; scion d'osier ou de chà-
taignier sauvage refendu, un peu plus épais que la Bridoulo
(Voy. ©. m.); batte d’arlequin.
Dér. de Costo.
Coustoüs, ouso, adj. Coûteux, qui entraine des frais,
qui cause de la dépense.
Dér. de Cousta, coûter.
Coustré, Coustrécho, adj. Contraint; réservé; gèné;
mis à l’étroit; malaisé sous le rapport de la fortune.
Dér. de Coustrégne.
Coustrégne, v Contraindre, forcer, obliger ; resserrer,
pressurer, mettre à l'étroit, comprimer; mettre à la gène;
restreindre la liberté.
Sé coustrégne, se restreindre; diminuer sa dépense, son
train de vie.
Dér. du lat. Constringere, resserrer.
Coustumo, s. f. Coutume, usage; habitude contractée
dans les mœurs, les manières, les actions. — Uno fés és pas
coustumo, une fois n'est pas coutume.
Modo, qui a la même acception, est plus technique. —
Voy. c. m.
Dér. du lat. Consuetudo, m. sign.
Couté, s. m. Nuque; fosse occipitale derrière laquelle se
trouve le cervelet abrité par l'occiput.
Sauvages en fait une corruplion ou une variante du mot
Coupé, qui a la mème signification dans quelqu'autre dia-
lecte du Languedoc; et d'après lui, ce dernier mot Coupé
serait une déviation de Capet, petite tête. Cela parait un :
peu tiré par les cheveux. Capet d'ailleurs ne nous semble
pas un dim. de Cap, tète, témoin Hugues-Capet, ainsi sur-
nommé, dit-on, à cause de la grosseur de sa tête, ou à
cause de la cape dont il se couvrait. Notre Couté ne vien-
drait il pas plus naturellement du gr. Kôttn, tète?
Coutéiè, s. m. Coutelier, qui fabrique ou vend des cou-
teaux, ciseaux, rasoirs et autres petits instruments tran-
chants.
Dér. de Coutèl.
Coutèl, s. m. Dim. Coutélé; augm. Coutélas. Couteau,
instrument tranchant composé d’une lame et d’un manche;
coutre de charrue, lame placée au-dessus du soc, pour
trancher la terre. — Coutèl sannadoù, couteau long, mince
et très-pointu, dont se servent les égorgeurs de pores, de
moutons, de bœufs. C’est une sorte de couteau-poignard
qu'ils tiennent renfermé dans un étui en cuir. Fdou pas
lan li planta lou coutèl, il ne faut pas lui faire payer cela
si cher, il ne faut pas lui surdemander; il ne faut pas le
ruiner de frais pour ce qu’il doit, ou exiger rigoureusement
tout ce que la loi vous accorde.
Coutèl dé mariage, couteau volé. Il est d'usage dans les
noces de villageois que les convives au festin de noces
cherchent à se voler réciproquement leurs couteaux : la
COU
gloire est de voler celui d'une fille, surtout si elle est jolie
et qu'elle joue un rôle important dans ! assemblée. I! n'est
sorte de ruse que l'on n'emploie pour arriver à ses fins, car
chacun est fort sur ses gardes. Les couteaux des mariés sont
seuls exceptés : il n'est pas non plusde bon jeu de se voler
entre gens de mème sexe; ce serait alors un véritable larcin ;
entre gens de sexe différent, cette soustraction est considé-
rée comme une simple niche que l'usage rend de bonne guerre.
Coutélés, au pl. haricots verts, quand les cosses sont
encore jeunes et fort minces, imitant la lame d'un petit
couteau. — Soun pa'nearo qué dé coutélés, ces haricots sont
trop jeunes; ils ne sont encore que des fils. On dit aussi
Coutèls, en parlant des cosses de pois-verts. Aï aléja vis
dé coutèls à mous péses, j'ai déjà vu de jeunes cosses aux
pois de mon jardin. Ce nom vient aux uns et aux autres de
la forme de ces cosses plates et légèrement recourbées
comme la lame d’un sabre ou d'un couteau.
Passo-passo coutélé, jeu innocent, qui consiste à cacher
un petit couteau, un dé ou tout autre objel aussi menu,
dans la main de l’un des joueurs réunis en cercle, tandis
qu'un patient cherche à le saisir au passage. Les joueurs
font la chaine avec leurs mains et font tous semblant de se
passer l’objet, de sorte qu'il est difficile de distinguer la
‘main qui recèle le Coutélé d'avec celles qui manœuvrent à
vide : celui qui le laisse prendre dans sa main remplace le
patient.
Dér. du lat. Cutter, cultri, m. sign.
Coutèlo, Anédo ou Alédro, s. f. Grand narcisse des prés
à fleur blanche, Narcissus poeticus, Linn., iris flambe,
Iris germanicus, Linn., glaïeul, Gladiolus communis,
plantes de la fam. des Irisées, qui se confondent sous le
nom de Coutèlo, à cause de la ressemblance de la fane avec
la lame d’un couteau ou d'un stylet. — Les enfants sont
très-curieux de la fleur de Coutèlo, qui vient par masses
dans les prés, surtout dans ceux abondamment arrosés. Ils
en font des bottes énormes qu'ils vendent à leurs camara-
des citadins. Autrefois la monnaie courante de ces marchés
était des épingles. Aujourd'hui ce billon est démonétisé et
. déprécié tout autant que défunts les assignats ou les cou-
pons d'actions mexicaines.
Coutèlou, s.m. Alouette des bois, lulu, cujolier, Alauda
arborea où nemorosa, Linn., oiseau de l'ordre des Passe-
reaux et de la fam. des Subulirostres. Les plumes de la tête
de cette espèce sont un peu alongées, ce qui lui fait une
sorte de huppe; elles sont tàchées de noir et de roux ; les
parties supérieures sont rousses avec une large tâche noire
au milieu de chaque plume; queue carrée et courte, Le
mâle se perche quelquefois et fait entendre alors un ramage
_ agréable. Le nom de Lulu lui vient du eri lu, lu, lu, que
cet oiseau dit souvent avec douceur. Le nom de Mauviette,
que Sauvages donne au Coutéloù, est plutôt un nom géné-
rique que la gastronomie donne à toutes les alouettes gras-
ses et qui doit s'appliquer surtout à l’alouette ordinaire des
champs, ‘Alauda arvensis, Linn., la plus commune, la
COU 229
meilleure et dont la chasse au miroir fournit abondamment
nos tables.
Il est peut-être un peu hardi de vouloir faire dériver ce
mot du gr. Kwtdw, babiller, caqueter, gazouiller; cepen-
dant la ressemblance et l'analogie ne manquent pas d'at-
traits, surtout si l’on considère que le grec a lui-même tiré
de ce verbe un nom pour l’hirondelle, qu'il appelle, à cause
de son chant, Korn.
Coutéto, s. f. Jeune poule, poulette. Au fig. jeune fille.
Ce mot vient du cri Coto! Coto! qu'on adresse sux poules
pour les rassembler : ce n'est qu'une onomatopée de leur
cri ordinaire, cot! cot! cot!
Couti,s. m. Coutil, sorte de toile croisée dont on fait les
matelas et les lits de plume. Cette dernière espèce de coutil
s'appelle spécialement Fldousino : pour les autres ondit Couti.
Emp. au fr.
Coutinfloun (Madouméisèlo dé), qué pisso l'uïgo roso,
loc. prvb. qu'on adresse à une précieuse, à une mijaurée, à
une femme qui se donne de grands airs et affecte de super-
bes allures, quoique peu riche et de condition inférieure.
Coutioun, s. ”. Cotillon, jupe, jupon de femme, qui se
met d'ordinaire en dessous de la robe. — A fa un acrd à
soun coulioun, elle a fait un faux pas, une tache à sa répu-
tation.
Emp. au fr. Cotillon, qui vient de Cotte, et celni-ci,
disent certains, du teutonique Kutten, couvrir, cacher, et
d’autres, du lat. Crocotula, petite robe de femme, dim. de
Crocota, robe couleur de safran.
Coutouù, s. m. Coton, duvet floconneux, long et fin, qui
provient des capsules du cotonnier, dont on fait des étoffes,
des cordons, etc. — Coutoù én ramo, coton non filé.
Dér. de l'arabe A/kotonn. m. sign.
Coutounado, s. f. Cotonnade, toile de coton assez gros-
sière mais forte; gros basin.
Coutounino, s. f. Cotonnine, toile de coton légère, dont
les femmes font des jupes de dessous en été.
Coutréja, v. Labourer avec la charrue appelée coutrier.
Coutriè, s. m. Coutrier, sorte de charrue sans roues et
sans avant-train. Il est aussi facile à conduire que l'araire,
et il fait de meilleur ouvrage, parce qu’il coupe les racines
et tourne complètement la terre sens dessus dessous, tandis
que l’araire ne fait guère que la déchirer. Le soc du cou-
trier est précédé d’un coutre, Coutèl, pour trancher, tout
comme la charrue; ce qui lui a valu son nom.
Dér. du lat. Culter, couteau.
Coutrio (Dé), s. f. et adv. Associé, lié; de conserve ;
d'intelligence. — Se prend d'ordinaire en mauvaise part.
Contract. du fr. coterie.
Couvén, s. m. Couvent; maison religieuse d'hommes ou
de femmes; communauté dans son ensemble. — Pér un
mouïne, lou couvén sé pèr pas, prvb., pour un moine,
l'abbaye ne faut pas.
Dér. du lat. Conventus, assemblée.
Couvèr, s. m. Toit, toiture, couverture d’une maison ;
230 CRA
couvert de la table, tout ce qui couvre la table, les mets
exceptés; cuillère et fourchette d'argenterie. — Couvèr à
dos aïgos, toiture à deux pentes. Couvèr à l'émpérialo où à
quatre aïgos, toit à pavillon. Couvèr à téoule vis, toit où la
charpente et les tuiles s’aperçoivent du plafond, comme
celui de nos magnaneries, que l'on fait ainsi pour obtenir
plus de relation avec l'air extérieur. Répassa lou couvèr dé
quévuquus, rosser quelqu'un, ou tout-au moins lui dire
verlement son fait en reprenant un à un tous ses défauts.
Quäou rèsto souto soun couvèr, sé rés noun gagno rés noun
pèr, prvb., s'il n'y a rien à gagner à rester chez soi, du
moins ne risque-t-on pas de perdre : conseil d’extrème
prudence auquel répond cet autre dicton : Quéou és fouträou
qué rèste à soun oustéou, que le sot resteenfermé chez lui,
l'homme habile trouve toujours avantage à se produire,
Dér. de Couvri.
Couvèr, èrto, adj. Couvert; sombre, nébuleux ; obscur;
jonché. — És couvèr ou faï couvèr, le temps est couvert,
sombre. Gn'a lou couvèr s6ou, la terre en est jonchée, le
sol en est couvert.
Ce mot est dér. de Couvrè, mais il n’en est pas le part.
pass., qui se dit Couvri, couvrido.
Couvérta, v. Mettre une couverture à un livre, ou plutôt
cette espèce d’enveloppe en papier, dont les écoliers recou-
vrent leurs livres classiques pour les conserver.
Couvèrto, s. f. Couverture de lit; couverture, enveloppe
d'un livre. — Voy. Flassado.
Couvértou, s. m. Lange de dessus d'un enfant au ber-
ceau; lange de parade; couvre-pied.
Couvi, s. m. Invitation; attrait; ce qui attire; ce qui
invite et convie. —— Sès ddou couv? Êtes-vous de la fôte?
Y êtes-vous invité?
Dér. de Couvida.
Couvida, v. Convier; inviter; engager à un banquet, à
une fête. — Nous a pas couvida d’un véire dé wi, il ne
nous a pas offert un verre de vin. Couvides pas dé quicon ?
Tu ne nous payes pas quelque chose à manger ou à boire?
Dér. du lat. Cum, avec, et Invitare, inviter.
Couvri, ». Couvrir; recouvrir; couvrir une maison, y
poser le toit; saillir, en parlant de certains animaux. —
Lou couvriguère, et l'oustâou mé réstè, je .couvris son offre,
je renchéris sur son offre, et la maison me fut adjugée.
Dér. du lat. Cooperire, m. sign.
Craïoun, s. m. Crayon.
Emp. au fr.
Craïouna, v. Crayonner; dessiner; écrire au crayon.
Cran, s. m. Cräne, boîte osseuse qui recouvre le cerveau.
— Lou cran dé la tèsto, le crâne.
Dér. du gr. Kpavlov, m. sign.
Cran, s. m., ou Cranco, s. f. Crabe, cancre, Cancer,
Linn., animaux du genre des Crustacés, qui sont à peu
près les mèmes aux yeux du vulgaire.
Cranéja, v. Faire le crane, le freluquet, l'incroyable ;
afficher une mise et des airs de petit-maitre.
CRA
Cranéto, s. m. Jeune petit-maitre, freluquet, beau-fils.
Crano, a/j. des deux genres. Crane; fier; petit-maitre ;
en parlant de choses, fameux, de première qualité. —
Faire lou crano, faire le beau-fils, poser en bravaclie.
Pourta soun capèl à la crano, porter le chapeau sur
l'oreille, en fanfaron. Aquél vi és dâou crano, ou aqud's un
crano vi, c’est du fameux vin.
Dér. du gr. Koævlov, crâne de la tête.
Crantén, éno, adj. Quarantain; qui revient tous les
quarante jours, comme les roses de Bengale, les artichauts
quarantains, les fraises quarantaines, etc.; bien entendu
que cetle faculté de reproduction est suspendue en hiver.
Cranto, n. de nombre. Quarante. — Lou iè dé cranto,
le grenier à foin; le lit pour qu’rante.
Dér. et contr. du lat. Quadraginta, m. sign.
Crâäou (La), n. pr. de lieu. La Crau d'Arles : vaste
plaine entre Arles et Salon, toute couverte de cailloux
ronds et blancs de la grosseur d’un œuf. On croit qu'elle a
été formée par une inondation du Rhône, dans un temps
rapproché du déluge. Quand on considère l'élévation de ce
vaste plateau au-dessus de toutes les plaines et les bas-fonds
qui l’environnent dans toute sa longueur, on sent qu’il n’a
pu suffire d’un simple débordement du Rhône pour élever
les graviers à cette hauteur : il a fallu un cataclysme
véritable. Cette plaine est nue et ne présentait d’abord
aucun signe de végétation, entièrement recouverte qu'elle
est de ce cailloutage sans interstices. Cependant, dans la
partie la plus rapprochée d'Arles, elle a été mise en culture,
et on y récolle d’excellent vin et de riches pâturages, grâce
au canal de Craponne qui l’arrose. On retrouve cette mème
culture dans quelques coins particuliers; mais la plus
grande partie est infertile et déserte. Du reste, entre ses
cailloux, il pousse une herbe fort délicate et nourrissante
qui sert à l'élève de grands troupeaux de moutons d’excel-
lente qualité.
Diverses étym. se présentent avec une autorité à peu près
égale, qui conviennent à ce nom : le celt. Crai, Craig, Crag,
Carreg, pierre; le gr. Koavaés, raboteux, pierreux, ou
Kpxÿpos, sec, aride, brülé.
Crâoumo, s. f. Crasse de la tête et des mains; viscosité
qui se forme sur l’épiderme de la viande de boucherie,
qu'on lui enlève en la faisant blanchir à l’eau bouillante
avant de la mettre à cuire dans la casserole, où qui s'en va
dans le pot-au-feu en l'écumant.
Dér, du gr. Xpüyx, peau du corps.
Craqua, v. Craquer; onomatopée du bruit que fait le
bois en éclatant, en se rompant. Au fig. mentir, hâäbler, se
vanter faussement.
Craquéja, v. frég. Craquer, craqueter. — Se dit principa-
lement d'un meuble dont le bois travaille et craque de lui-
même ; des souliers et bottes dont le cuir trop sec fait du
bruit en marchant; d’une branche d'arbre que le vent ou
le poids de la neige fait craquer.
Fréq. de Craqua.
CRE
Craquo, s. /. Craque; mensonge; hâblerie.
Craquo! interj. Crac! soudainement. Onomatopée pour |
exprimer le bruit d'une chose qui se rompt. :
Craquur, s. ”. Craquurdo, s. f. Meuteur, hàbleur;
vantard.
Crassi, v. Salir; encrasser; rendre crasseux ; couvrir de
urasse.
Crasso, s. f. Crasse; saleté; lie; ordure; rebut. —
Crasso dé la tèsto, crasse baptismale des enfants, qu'il faut,
dit-on, se garder d'enlever dans le premier âge, parce que
c'est un exutoirenaturel aux humeurs / Foy. Lésso.); Crasso
d'oli, sédiment de l'huile au fond des jares. Aï tout véndu,
mé rèsto pas qué la crasso, j'ai vendu toute ma marchan-
dise; il ne me reste que le rebut.
Dér. à choisir, du gr. Lpésos, ordures, suint de la laine
des brebis, ou du lat. Crassus, gras, épais.
Crassoüs, ouso, adj. Crasseux, sale, sordide; avare à
l'excès.
Créanciè, s. m. Créancier. Dans le style des paysans, il
signifie plutôt débitear.
Emp. au fr.
Créaturo, s. f. Créature, ètre créé, en général; mais se
prend le plus souvent en mauvaise part pour mauvaise
“femme, femme mal famée, ou d'humeur revèche. — Sèn dé
créaturos dâou bon Diou, Dieu nous a tous créés. Aguélo
créaturo mé fai danna, cette méchante espèce me fait faire
mon purgaloire en ce monde.
Dér. du lat. Creatura.
Créba, v. Crever; rompre ou se rompre avec eflort;
percer; aboutir; mourir, en parlant des animaux. Sé créba,
»., faire de grands et vains efforts. — Lou Gardoù a créba,
le Gardon a renversé la digue. Un créba, un hernieux;
atteint d’une descente. Huroùs coumo un créba, heureux
comme un crevé. Moun dé a créba, mon abcès au doigt
a percé. Crèbo-vèsto, qui fait crevasser ses habits : anti-
phrase ironique qui s'applique à un homme très-maigre.
Aquù crèbo lou cor, cela fend le cœur. À créba, il est mort,
se dit des animaux ; mais on le dit aussi des hommes, quand
on se dispense de révérence à leur égard.
Dér. du lat. Crepare, m. sign.
Crébadisso, s. f. Hernie, descente de boyaux par la
rupture du péritoine; mort; bonheur insolent. — Faguè sa
crébadisso lou quinze, il creva ou il fit sa première mort
le 15.
Crébaduro, s. m. Hernie; crevasse, fente d’une chose
qui s’entr'ouvre; accroc.
Crébiou! interj. Sacrebleu!
Contr. de Sacrédiou.
Crébluro! interj. Sacrebleu !
Contr. de Sacrébluro.
Crèbo-bachas, s. m., phr. faite. Littéral : qui marche
dans les bourbiers. Surnom qu'on donne aux habitants
d'Anduze, sans doute parce que leur ville étant arrosée de
fontaines; l'eau circule dans la plupart des rues qui sont
CRE 231
| fort étroites; et il est difficile d'éviter les petites flaques,
Bachas, qu'on rencontre à chaque pas.
Crèbo-sa, s. m. Crève-sac, sorte de graminée ou de foin
grossier, dont la graine est dure, sèche, piquante, un peu
semblable à l'avoine, mais bien plus mince et bien plus
actrée. Elle perce à travers les sacs et les draps dont on se
sert pour la transporter, et finit par les déchirer en peu de
temps : circonstance qui lui a valu son nom.
Crèdi, s. m. Crédit; délai pour payer; réputation de
solvabilité. — Faire crèdi, faire crédit. Véndre à erèdi,
vendre à crédil. S'aï pas bono bousso, aï bon erèdi, si je ne
suis pas en argent comptant, j'ai bon crédit, on me connait
pour solvable. Merchandiso dé crèdi, marchandise de man:
vaise qualité, frelatée, avariée, celle qu’on vend aux ache-
teurs à crédit, aux mauvais payeurs, auxquels on ne donne
pas le choix.
Dér. du lat. Creditum, dette.
Crédiou! interj. Sacredieu! Dans la langue verte, le
peuple de Paris dit aussi : crédieu ! et crécoquin !
Contr. de Sacrédiou.
Crédunle, unlo, adj. Crédule; qui croit trop facile-
ment.
Dér. du lat. Credulus.
Crègne, v. Craindre, éprouver du dégout, de l'aversion,
de l'horreur; redouter. — Aqud's dé crégne, c'est dégoütant
de malpropreté. Souï pas dé crégne, je ne suis pas un pes-
tiféré. Uno bèstio dé crégne, une bête dangereuse, un animal
venimeux. On dit és dé crégne de tout ce qui offre du dan-
ger, fait éprouver du dégoût, soit à s'en approcher, soit à
manger, soit à s'en servir. Té crégne pas, tu ne me fais
pas peur. Aquélo couloù crén bièn, cette couleur est de
mauvaise teinture; elle n’est pas solide; elle craint l'eau et
le soleil. Crégne la cassiou, être sensible au chatouillement.
Aquél jardi crén la sécarésso, ce jardin éprouve plus qu'un
autre les effets de la sécheresse. Crégne pas bru, ne pas
s’effrayer des menaces, êlre courageux. On dit prvb. d'un
objet fragile : Crén pas lou bru, sibé lous cos, cela ne
craint pas le bruit, mais bien les coups.
Emp. au fr. craindre, dont le subj. prés. fait : que je
craigne.
Crégnén, gnénto, adj. Fantasque, qu'un rien dégoûte,
et non craintif. — És tant crégnén qué manjo pas dé rés,
il est tellement fantasque pour son manger, qu'il ne mange
de rien. Souï un pâou crégnén, s'ou voulès, mais també m'én
passe, je suis un peu bizarre, si vous le voulez, mais tout
aussi bien je me passe de toucher à cela, ou de faire cela.
Créï, s. m. Croit d'un troupeau; accroissement qu'il
éprouve par la reproduction; accroissement; croissance;
action de grandir ; quantité dont on a grandi. — À fa soun
créi tout d'un co, il a pris toute sa taille en peu de temps.
La maldoutiè li coupé soun créi, la maladie arrêta sa crois-
sance.
Dér. du lat. Crescere, croître.
Créire, v. Croire, estimer une chose vraie; avoir la foi.
232 CRÉ
— Crése qué! interj. de ménace à un enfant, sorte de Quos
ego, qui est aussi le commencement d'une phrase interrom-
pue. Éstre dé crêire, mériter la confiance pour ses paroles,
être digne de foi. S’én créire, se croire un personnage, avoir
de l'orgueil. S’én faïre én crére, s'en faire accroire, tirer
vanité de quelque chose. Aqud's pas qué dé pér én crèire,
cela parait plus que ça n'est, il n'y a là que du clinquant
et point de fond. Crésès aquù et bévès un co, croyez cela et
buvez après : loc. prvb. usitée lorsqu'on entend une häble-
rie ou quelque fanfaronnade gasconne, c'est-à-dire que pour
avaler un morceau de difficile digestion, il faut boire par-
dessus. Fou créire qué. .…., il est à croire, à présumer que. .
Créire soun pèro, soun mèstre, obéir à son père, à son
maitre, avoir foi en leurs avis, en leurs remontrances.
Cr& pas déngus, il n'obéit à personne, il n'écoute per-
sonne.
Dér. du lat. Credere, m. sign.
Créisse, Croitre; augmenter de nombre, de ‘aille, de
dimension quelconque; grossir. — Gardoù créï, le Gardon
grossit; il commence à se gonfler. Ni noun créi, ni noun
crèbo, il ne veut ni croitre, ni mourir : cela se dit d'un
enfant qui ne profite pas, d’un jeune arbre qui ne pousse
que maigrement, qui végète péniblement.
Dér. du lat. Crescere, m. sign.
Créisséns (Lous), s. ». pl. Douleurs de croissance
qu'éprouvent les enfants aux glandes de l’aine, quand les
tendons se dislendent pour s’allonger.
Créma, v. Bruler, flamber, dans l'acception neutre et
non active. Ainsi on dit : Aquél bos crèmo bièn, ce bois
brüle bien, et non : Créma foço bos, brüler beaucoup de
bois. — Aqud crèmo dou lun, prvb., c'est une chose abo-
minable, criante; c’est par trop raide, par trop fort. M'én
a fa uno qué crèmo dou lun, il m'a joué un tour pendable.
M'én a di uno qué crèmo dou lun, il m'a tenu des propos
horriblement injurieux. Aquélo crèmo dou lun, Voilà une
gaillardise par trop inconvenante, par trop grossière, qui
passe la permission.
Dér. du lat. Cremare, brüler.
Crémal, s. m. Dim. Crémaïoù. Crémaillère.
Les anciennes crémaillères consistaient en une tige de fer
dentelée de coches ou de crans pour graduer la hauteur du
vase qu'on exposail au feu. De nos jours, cette tige est
courte et composée d’une série d’anneaux qu'on accroche à
la tige : on peut aussi graduer de même la hauteur de la
marmite où du chaudron sur le feu. Enfin, dans les Hautes-
Cévennes, où l’on se sert d'énormes chaudrons contenant
jusqu’à 60 litres pour cuire la provende des porcs qu’on
élève en grande quantité, il serait difficile de manier à Ja
main d'aussi grands vaisseaux ; alors la crémaillère consiste
en une longue et forte tige qui descend jusqu’au foyer et y
pivote ; vers le milieu de sa hauteur, la tige porte un bras
de fer qui soutient le chaudron. On fait pivoter la tige qui
entraine le bras et décrit un arc de cercle jusqu’au milieu
de l'appartement; quand le chaudron est rempli, il pivote
CRÉ
de nouveau et va se poser de lui-même sur le feu. La mème
manœuvre s'exécute pour le retirer : on le vide à l'aise grâce
à celle suspension sans s'exposer à se brüler, et on ne
retire le récipient qu'à vide et très-allégé. — Planta lou
crémal, pendre la crémaillère, fixer son domicile. Féou
faire uno osquo âou crémal, il faut faire une croix à la
cheminée, prvb. qui exprime l'étonnement que cause une
chose extraordinaire, la vue d'un événement agréable et
inattendu ; ou lorsqu'une personne fait un acte qui semble
sortir de son caractère.
Dér. de Créma, ou du gr. Kesuastie, qui suspend.
Crémasoù, s. f. Acreté, aigreur au gosier; ardeur d’es-
tomac; soda; fer chaud ; acrimonie provenant des saburres
et gaz acides de l'estomac, occasionnée par une fermenta-
tion trop forte d'aliments lourds et farineux. L'oignon etla
châtaigne particulièrement procurent cette incommodité,
qui est combattue efficacement par une prise d’yeux d’écre-
visse en poudre, de la magnésie sèche, ou autres absor-
bants.
Dér. de Créma, brüler.
Crémèsi, Crémésino, adj. Cramoisi; qui est teint en
cramoisi ou en rouge foncé. — Sédo crémésino, soie cra-
moisie. Trougno crémésino, trogne enluminée, visage cra-
moisi.
On remarquera sur ce mot une application bien différente
de l'accent tonique du masc. au fém. L'intonation change
d'une manière notable. Ainsi au masc. Crémèsi, la voix
porte et s'arrête sur la pénultième, syllabe forte qui est
marquée de l'accent grave; dans le fém. Crémésino, la
pénultième est aussi le siége de l'accent tonique, et c’est l'x
qui est le point d'appui de la voix, par où l’accentuation
de l'é qui précède a dû se modifier, et de grave devenir
aigue, c’est-à-dire ne former qu'une syilabe faible et brève.
On voit combien ces nuances sont essentielles à noter et à
observer à la prononciation. — Voy. Acén.
Dér. de l’arab. Kermesi, de Kermes, insecte qui po
la couleur écarlate.
Crèmo, s. f. Crème, mets composé de lait, de sucre et
d'œufs, ayant une certaine consistance.
Dér. du celt. Crema, m. sign.
Crénto, s. f. Crainte, timidité; honte; vergogne. — A
crénto, il n'ose pas, ilest intimidé. Pourta crénto, imposer;
inspirer du respect. Faïre crénto, intimider, faire honte.
Dér. du lat. Tremor, m. sign.
Créntoùs, ouso, adj. Dim. Créntousé ; péjor. Créntousas,
Craintif; timide, non point dans le sens de poltron ou lache,
mais le contraire d’effronté.
Crépi, ou Grépi, v. Crépir, enduire un mur de mortier,
de plâtre.
Emp. au fr.
Crépissaje, ou Grépissaje, s. m. Crépi, enduit au mor-
tier, au plâtre; action de crépir.
Créscu, cudo, part. pass. de Créisse { Voy.c. m.). Crû
crue; accrû ; grandi.
CRÉ
Créségu, udo, part. pass. de Crére [Voy. ©. m.). —
Lou pâoure mounde és pas gaïre créségu, les pauvres gens
sont peu écoutés. _
Crésénço, s. f. Orgueil, amour-propre, confiance en soi;
fierté ; le défaut de se croire au-dessus des autres.
Dér, de Créire.
Créspa, v. Crêper, friser les cheveux.
Un créspa, s. m. Un crêpé, un retapé, un pouf, frisure
courte et mêlée, sorte de coiffure qui remonte au temps des
incroyables du Directoire. -
Dér. du lat. Crispare, friser.
Créspi (Sén), s. m., n. pr. Saint Crépin, patron des
cordonniers, qui doit sans doute ce choix, moins à cette
circonstance qu'il avait été cordonnier lui-même avec son
compagnon saint Crépinien, que par l’analogie de ces deux
noms avec le lat. Crepida, chaussure. — A manja soun
sén Créspi, il a prodigué tout son avoir : c'est ce qu'on
traduit en fr. par la phrase triviale : il a mangé son Saint-
Frusquin.
Créspino, s. f. Taie, épiploon des jeunes animaux ;
membrane graisseuse et transparente qui enveloppe les
intestins. — És nascu émbé la créspino, il est né coiffé. Il
est de préjugé populaire que les enfants qui naissent la
tête couverte d’une portion de l’amnios et du chorion dont
ils étaient enveloppés dans le sein de la mère, sont prédestinés
à d’heureuses chances. Sur cette croyanceest fondé le dicton.
Dér. du lat. Crispus, crépu, frisé. ,
Créspou, s. m. Crèpe, étoffe claire et légère, de couleur
noire, dont on porte une bande en signe de deuil.
Crésta, vw. Châtrer; hongrer un cheval; châtrer une
“ruche, en lui enlevant le miel qu’elle a de superflu pour
passer l'hiver. — Crésta uno rodo, enlever aux jantes d'une
roue leurs extrémités usées et les rejointer, ce qui, en dimi-
nuant la circonférence , resserre et raccourcit les rayons,
auxquels cette opération donne plus de solidité. Crésta dé
trufos, dé cougourlos, etc., châtrer les pommes de terre,
les courges, en coupant l'extrémité de leurs pousses, ce qui
a:rôte la sève et la fait tourner au profit du fruit. Le pin-
cement des plantes, qui est une manière de les bistourner,
produit le mème effet.
Il est probable que Crésta vient du lat. Crista, crête,
parce que lorsqu'on châtre les coqs, on leur coupe la crête.
Ce mot a donc dù être inventé pour les coqs, auxquels il
ne s'applique plus cependant aujourd'hui, depuis qu’on a
adopté pour eux le v. Capouna. — Voy. ©. m.
Créstaïre, s. m. Châtreur, coupeur; qui exerce la pro-
fession de châtrer les animaux. Cette classe d'opérateurs,
qui se fait reconnaitre par une veste rouge, est une espèce
de paria parmi le peuple. [existe pour eux un peu de cette
défaveur qui s'attache aux bourreaux et aux équarisseurs.
La veste rouge est bien pour quelque chose dans cette
répulsion qui serait moins prononcée sans cet uniforme,
qu'ils tiennent à conserver comme enseigne. Ces gens-là
courent les campagnes pour exercer leur art, et on les voit
CRI 233
dans toutes les foires de bestiaux, où ils servent d'entre-
metteurs dans les marchés. — Un créstaire se dit aussi
pour une flûte de Pan, un chalumeau, instrument de
musique triangulaire, formé de l'assemblage de plusieurs
tuyaux en roseau d'inégale longueur et disposés en grada-
tion descendante de la gamme; chaque luyau donnant une
note. On l'appelle ainsi parce qu'autrefois les châtreurs
s'annonçaient dans les campagnes par la musique de cet
instrument. ARouje coumo un créstaïre, rouge écarlate;
allusion à la couleur de la veste des châtreurs.
Créstél, s. m. Dim. Créstéloù. Chaperon d'un mur;
encrêtement d'un mur ou d’une fosse mortuaire; sommet
et forme d’un tertre de terre, s'élevant en prisme.
Dér. de Crésto.
Créstian, ano, «dj. Chrétien, ienne.— Ne se prend qu'en
mauvaise part. — Aquél créstian ! diable d'homme.
Dér. du lat. Christianus.
Crésto, s. f. Crête, excroissance charnue et rouge qui
vient sur la tête du coq et de la poule; huppe. Au fig. partie
la plus élevée d’une montagne. — Léva la crésto, lever la
tête; faire le fier, le fanfaron; s’énorgueillir.
Dér. du lat. Crista, m. sign.
Crésto dé gal, s. f. Crête de coq, cocriste, Rhinanthus
cristagalli, Linn., plante de la fam. des Rhinantacées. Elle
est nuisible aux moissons et aux prairies.
Crétièn, èno, adj. Chrétien, qui professe la foi du
Christ, — Lou crétièn se dit pour l’homme en général.
Est-ce par un sentiment élevé, par ignorance ou par mépris,
que le peuple renferme l'humanité entière dans la chré-
tienté? Le fait est qu’il ne fait que deux parts parmi les
êtres vivants, ou crélièn et las bèstios. Pour lui, lou crétièn
est l'homme générique; lorsqu'il est pris dans l'acception
religieuse, et seul, il est en bonne part. Créstian, au con-
traire, est d'ordinaire pris en mauvaise part ou sous le côté
ridicule.
Dér. du lat. Christianus.
Cri, s. m. Cric. instrument à crans pour soulever de gros
fardeaux.
Son nom est peut-être une onomatopée prise du bruit que
fait cette machine en agissant.
Crida, v. Crier; jeter, pousser des cris; gronder, donner
une mercuriale; publier. — Ma mèro m'a cridado, ma
mère m'a grondée. Crido énd’aquél chi, fais sortir ce chien.
Dé qué crides tant? Qu'as-tu donc à tant crier? Dans cette
dernière acception, le v. Fada est plus technique Crida las
anouncies, publier les bans de mariage. L'an cridado
diménche-passa, on a publié ses bans dimanche dernier.
Crida las véndimios, publier le ban des vendanges. Crida
soun vi, publier sa propre honte; rendre publique une
action déshonorante de quelqu'un des siens.
Dér. du gr. Kp&w, en Dorien Kplèèw, crier.
+ Cridado, s. m. Mercuriale, gronderie; reproche; cri que
l'on adresse de loin à quelque malfaiteur, à un maraudeur,
à un pillard, pour l'éloigner.
234 CRO
Cridaïre, airo, s. et adj. Péjor. Cridaïras. Criard, gron-
deur; qui crie beaucoup et très-haut; pleurard; erieur public.
Crido, s. f. Publication de mariage, du ban des vendan-
ges; bruit publie, nouvelle. — La crido sé nés sounado, la
chose s’est ébruitée.
Crime, s. m. Crime, infraction grave aux lois de la
morale; mauvaise action.
Dér. du lat. Crimen, m. sign.
Criminèl, èlo, adj. Criminel, condamné. — Ne s’appli-
que pas à l’acception morale de criminel.
Criouda, v. Marquer au visage, y imprimer une cica-
trice. — És tout criouda, il:a le visage criblé, marqué de
la petite vérole.
Crioudo, s. f. Cicatrice; marqué, trace de plaies, ulcères
ow blessures guéris.
Criquo-lardé, phr. faite. Jeu d'enfants, qui consiste à
éparpiller sur une table une quantité de menus fruits, ou
de petits carrés de pomme ou de gâteau; après quoi l’un
des acteurs, les yeux bandés et armé d’un couteau ou d’une
épingle, pique à l’aveuglette et croque le morceau, jusqu'à
ce qu'il arrive à celui que son adversaire a touché du doigt.
A ce coup, il cède sa place aveé son bandeau et le couteau
ou l’épingle, et le manège recommence jusqu'à épuisement
de l'enjeu.
Cris, s. m. Cri; clameur; exelamation; action d'appeler
quelqu'un de loin.
Cristal, s. m. Cristal. — Né coumo un cristal, pur
comme le cristal.
Dér. du lat. Crystallum.
Cristôou, n. pr. d'homme. Christophe. — Sén Cristéou,
u. pr. de lieu, Saint-Christol, commune du canton et
arrondissement d’Alais.
Critiqua, v. Critiquer, blâmer, censurer ; médire ; trouver
à redire.
Critiquo, s. f. Critique; blâme. — La critique déou
mounde, le blâme général. Aquélo fio és bièn à la critiquo
dâou mounde, le public médit beaucoup de cette fille{ la
voix publique est prononcée contre elle.
Dér. du gr: Kprrw6s, qui censure.
Cro, s. m. Dim. Crouqué; péjor. Crouquas. Croc, cro-
chet; instrument de bois ou de fer recourbé-servant à
suspendre ou à saisir quelque chose; hameçon. — Lous cros
dâou bos, espèce de crochets en bois qu'on suspend à l’arçon
d'un bât et dans lesquels on place bâche à bûche du bois à
brûler pour le transporter. Cro dé roumano, crochet d’une
romaine. Sémblo un cro, il est maigre comme un croc. Vièz
cro; vieux homme : cette expression est ironique-et mépri-
sante. On dit aussi en fr. vieux croc. Pénja dou cro,
remettre quelque chose au crochet pour ne plus s’en servir;
mettre sous la remise; donner les invalides. Pénja sas déns
dou cro, mettre ses dents au eroc, garder la diète, non par
régime, mais de misère. Faïre lou cro, ètre recourbé, se
courber comme un croc.
Dér. du celt. Croc, m. sign.
CRO
* Cronto, prép. Contre; près, contigu, opposé; appuyé
contre. — Jouga. la cronto, jouer la contre-parties; jouer
quitte ou double. Dé cronto, à côté; vis-à-vis; proche. Low
cronto partè, le parti opposé : cela se dit en politique;
malheureusement cela se dit aussi en politique religieuse.
Les catholiques en parlant d’un protestant disent : És ddow
cronto parti, et vice vers4. Pourta cronto, porter préjudice,
faire tort, nuire. Aqud m'és cronto, cela m'est contraire,
cela me ferait mal.
Dér. du lat. Contrà, par métathèse,
Cronto-bandiè, s. m. Contrebandier, qui fraude les
droits, n'importe sous quelle forme.
Cronto-bando, s. f. Contrebande; fraude de droits léga-
lement établis. —Ne se dit que d’une fraude habituelle, et
presque parétat.
Dér. de l’ital. Contrabbando, m. sign., formé de la
prép. Contrà, et Bando, ban, publication de défense, pro-
hibition.
Cronto-cara, v. Contrecarrer, contredire; s'opposer on
nuire aux projets de quelqu'un; se mettre à la traverse.
Cronto-co,s.m. Contre-coup; heurt; répercussion d’un
corps qui heurte sur un autre. — Aquél cami & fosso
cronto-cos, ce chemin est rempli de trous et de bosses.
Cronto-danso, s. f. Contre-danse; air de danse.
Cronto-faire, vw. Contrefaire, imiter; fausser, altérer;
défigurer, déformer.
Sé cronlo-faïre, dissimuler, feindre; se rendré difforme.
Emp. au fr. 1
Cronto-marcho, s. m. Contre-marche; ruse de guerre ;
feinte.
Cronto-marquo, s. f. Contre-marque, billet de rentrée
délivré au théâtre.
Cronto-pèou, s. m. Contre-poil, sens contraire à celui
dans lequel le poil est couché. — Faïre lou cronto-pèou,
enlever la seconde peau, au fig.
À cronto-pèou, adv. À contre-poil, à rebours du poil, en
sens contraire du poil, au pr. et au fig. — Féow pas lou
pénchina à cronto-pèou, à brousso-pèou, il ne fait pas bon le
contrarier, il ne faut pas le prendre à rebours de poil. —
Voy. Brousso-pèou (à).
Cronto-pés, s. m. Contre-poids; poids qui sert à en
balancer un autre.
Cronto-pouisoù, s. #. Contre-poison; antidote; moyen,
remède pour combattre l'effet du poison. s
Cronto-sinne, s. #. Contre-seing; visa approbatif.
Cronto-tén, s. m. Contre-temps; difficulté; obstacle;
accident imprévu ; opposition providentielle; mauvais temps,
intempérie. — Aquél pdoure éfan a agu fogo cronto-tén, ce
pauvre enfant a été arrôté dans sa croissance par nombre de
maladies.
Cronto-vén, s. m. Contrevent, volet extérieur.
Cros, s. m. Dim. Crousé; augm. Crousas. Creux, trou;
fossette; creux à planter quelque chose; fosse d’un mort,
tombeau; creux à fumier; vallon. — Lou vi l’a més dou
— ,
ue.
PR OP NT D ET
CRO
eros, C'est le vin qui a creusé sa fosse; le vin l’a mis au
tombeau. Cros, blouse, fosselte du jeu d'équipé { Voy. c.m.),
qui est un petit trou dans la terre. Cros d'amouriè, creux,
trou pour planter un mürier. Il est ordinairement carré, de
2m 50 sur chaque face et de 0® 65 de profondeur. Le plan
est placé au milieu, et on le fixe dans cette position en
formant autour de ses racines un petit tertre de la terre la
plus sèche et la plus meuble possible. C’est cette opération
qu'on nomme Souta ( Voy. ©. m.). On répand ensuite le
fumier dans tout le périmètre de la fosse. Ces précautions
” sont prises afin que, dans les premiers temps de la pousse,
les radicules tendres et les plaies des racines qu'on a dû
couper à une certaine longueur, ne soient pas trop échauf-
“fées par le contact immédiat du fumier. Dans notre arron-
dissement, la terre classique de la culture du mürier, les
soins donnés à cet arbre précieux ont assuré longtemps sa
prospérité et sa richesse : aujourd'hui les conditions sont
changées peut-être; mais il n'y a pas à désespérer, et tout
ce qui est utile, dans les pratiques et les traditions de notre
agriculture, ne doit pas être mis en oubli ni dédaigné.
Dér. du lat. Serobs, fosse pour provigner les vignes. En
lang. cette fosse se nomme Caïsso, parce qu’elle est en forme
de long parallélogramme comme une caisse ou bierre de
‘mort.
Crosso, s. f. Dim. Crousséto. Béquille, long bâton à
traverse pour les boiteux ou les personnes qui ont les jambes
faibles; crosse, bâton pastoral d'un évêque, qui, dans
l'Église grecque, a la forme d’une béquille; crosse, partie
courbe et inférieure d’un fusil; en terme de maçon, queue
de jambage : c'est une de ces pierres de taille, dans les
jambages des portes ou fenêtres, qui s’enfoncent dans la
maçonnerie par leur partie brute, et sont destinées à sup-
porter les gonds, celles qui ne forment qu’un tableau et
n'ont point de queue se nomment Laneë { Voy. €. m.). —
Quan pourtaraï las erossos, tus pourtaras lou bastoù, pour
dire : il n'y a-pas une grande différence d'âge entre nous;
mot.à mot, quand je porterai la béquille, tu porteras le
“bâton.
Dér. dulat. Cruæ, erucis; en ital. Croce, croix, parce
que les béquilles sont en forme de æroix sans haut bout,
comme un T majuscule, ainsi que les premières crosses
d'évèque.
‘Croto, sf. Dim. Croutéto; péjor. Croutasso. Grotte;
cave; voûte; pièce souterraine votée.
Dér. du lat. (Crypta, caverne, venu du gr. Kpÿxtn,
m. sign.
= Crouché, s. m. Crochet; agrafe. — Faïre un crouché,
faire un détour.
Dim. de Cro.
Crouchéta, v. Accrocher; agrafer; éeaner une porte,
ane fenêtre au crochet; décrire un crochet, former un
‘lacet; en-parlant d'une route.
:Crouchoù, s.m. Quignon de pain. Crsimnhestncios
-de Croustéchoù, dim. de Crousté. — Voy. ©. m.
CRO 235
Croucintèlo, s. f. Cartilage, partie souple qui termine
certains os; membrane à demi osseuse comme les oreilles,
les tendons, etc. ;
Dér. sans doute de Crouqua, parce que les cartilages
craquent sous la dent quand on les mange.
Croucu, udo, adj. Crochu; recourbé en forme de eroc
ou de crochet.
Dér. de Cro.
Croumpa, ». Acheter, acquérir à prix d'argent.
Ce mot n’est pas parfaitement du dialecte cévenol ; mais
il est très-usuel dans tout le Languedoc et s'emploie ici
sans barbarisme. — Qué té counouï pas, qué té croumpe,
celui qui ne te connait pas peut t'acheter, dit-on à celui
qui a mille défauts cachés. Qué bo lou croumpo, bo lou
béou, prvb., qui l'achète bon, le boit bon. Dans notre
idiome du XI®e siècle, on disait : Compra palmada, mar-
ché conclu par main touchée. — Voy. Pacho.
Dér. du lat. Comparare, m. sign.
Croupatas, s. m1. — Voy. Courbatas.
Croupi, v. Croupir; rester en stagnation, dans l'insou-
ciance ou la honte.
Dér. du lat. Corrumpi, être corrompu.
Croupièiro, s. f. Croupière, longe de euir roulée qui
passe sous la queue d’une bête de trait ou de selle.
Croupo, s. f. Croupe, hanches et fesses des animaux de
monture ou de charge. — Porto bièn én eroupo, ce cheval
porte bien en croupe. Pourta sa fénno én croupo, mener sa
femme en croupe.
Dér. de l’allem. Grub, gras, épais.
Crouqua, v. Croquer; accrocher, saisir avec un €roc;
suspendre à un crochet; emporter, enlever, escamoter. —
Lou diable té croque, le diable t'emporte. .Croguo t'aquà,
attrape.
Dér. de Cro.
Crouquarèl, èlo, adj. Agaçant, qui croque les cœurs.
— Vous a un parèl d'ièls crouquarèls, elle vous a deux
yeux fripons, coquets.
Crous, s. f. Dim. Crouséto. Croix; figure de la croix ;
croix que les femmes portent au cou; croix de Malte qui
figure.en tête des alphabets /Voy. Cagasso). — Faïre sa
crous; autrefois les notaires faisaient faire une croix pour
signature aux parties qui ne savaient pas écrire. Lou sinne
dé la crous, le signe de la croix. M'an més à la santo-
erous, je commence à apprendre l'alphabet, la croix de
par Dieu. Poudès bé faire la crous, vous n'y reviendrez
plus; vous pouvez y renoncer, rayer cela de vos papiers.
Dér. du lat. Cruæ, m. sign.
Crousa, v. Croiser; disposer quelque chose en forme de
croix ; rayer, bâtonner un compte. — M'avès crousa, Vous
-avez acquitté mon compte.
“Crousado (à la), .adv. En quinconce, en terme d'agri-
culture; en croisant les fils, en terme de dévidage et
ouvraison de la soie. — Séména à la crousado, semer en
faisant croiser les sillons.
236 CRO
Crousadoù, s. m. Bivoie; carrefour où aboutissent
divers sentiers, où l'on plantait autrefois une croix. On dit
aussi Camè crousadoù : la bivoie est proprement l'endroit
où deux chemins se rencontrent pour se confondre et n'en
former qu'un seul; le carrefour est le point de section de
deux chemins qui se croisent sans se confondre et dont
chacun suit une direction différente; l’un et l'autre se
nomment Crousadoù.
Crousé, s. m. Fossette; petit creux; petit trou.
Dim. de Cros. — Voy. c. m.
Crousélu, udo, adj. Creux, creuse; profond ; enfoncé.
— Sièto crouséludo, sorte d'assiette creuse et profonde en
guise d'écuelle, qui sert d’assiette à soupe aux paysans. On
la distingue de l’écuelle en ce que celle-ci a des anses ou
oreilles, et que l'assiette n'en a pas, mais seulement un
petit bec par où on écoule le potage à sa fin. — Voy. Sièto
bécudo.
Dér. de Cros.
Crousio, s. f. Croisure; opération, figure, forme dans
laquelle deux choses se croisent, sont placées, disposées en
croix. — Croto én crousio, voûte croisée, c’est-à-dire com-
posée de quatre arêtes ou nervures qui se croisent par le
milieu et forment quatre voussures sur les côtés, de sorte
que la clé de voüte occupe le point d’intersection des qua-
tre arêtes.
Dér. de Crous.
Crousta (Sé), v. Se couvrir d'une croûte; s’escarifier ;
se durcir à la surface, en parlant du terrain.
Dér. de Crousto.
Croustado, s. f. Tourte de pâtisserie au gras; pâté chaud
ou froid; vol-au-vent.
Dér. du lat. Crusta.
Croustas, s. m. Grosse et large croûte; grande escarre
qui se forme sur une plaie ou une blessure.
Augm. et péjor. de Crousto.
Crousté, s.m. Dim. Croustéchoù. Petit quignon de pain;
crouslille coupée en triangle dans un pain rond, afin qu’il
y ait plus de croûte que de mie. — Mé lèvo lou crousté dé
la man, il m'ôte le pain de la bouche; il détruit mes
moyens d'existence. Qué crousté/ est une formule usilée
dans le style familier, qui signifie :-Eh! qu’en dis-tu? ou
plus trivialement : Ca te le coupe, mon garçon!
Dim. de Crousto.
Croustéja, w. Croustiller; manger de grand appétit. —
Aquél pan croustéjo bièn, ce pain a beaucoup de croûte.
Aquè s'apèlo croustéja, voilà qui est bien fonctionner à
table.
Crousto, s. f. Dim. Croustéto; péjor. Croustasso. Croûte
du pain; partie extérieure et dure du pain, d'un pâté;
croûte d'ulcère, escarre; surface de terrain durcie par
l'effet des pluies et l’action du soleil, ou: par 16 foulement
des pieds.
Dér. du lat. Crusta, m. sign.
Crousto-léva (Sé), v. n. Se dit du pain gras-cuit,
CRU
morfondu, surpris par une forte chaleur du four; ce qui a
pour effet de séparer la croûte de la mie, et de laisser un
intervalle entre elles, comme l'exprime notre mot. —
Visage crousto-léva, visage couperosé, bourgeonné, soulevé,
sur lequel il se forme des boursouflures et des pellicules
qui se détachent.
Crouta, v. Voüter, jeter une voûte; courber ou arrondir
en forme de voûte.
Dér. de Croto.
Croutou, s. m. Dim. Crsutouné. Caveau, petite cave;
cachot; cul de basse fosse.
Dim. de Croto. — Voy. c. m.
Crouvél, s. m. Coquill; coque; écale ; enveloppe exté-
rieure et dure d'un œuf, d’une noix, d’une amande, de la
châtaigne. — Sor déou crouvél, il sort de l'œuf, il vient de
naitre.
Ce mot viendrait, dit-on, du Ligurien; mais d’autres le
tirent du gr. Koërtw, cacher; n'aurait-il pas été fourni par
le lat. Curvus, courbé, fait en voûte?
Crouvéludo, s. f. Châtaigne dans sa coque; celle qui,
après avoir passé au sichoir, se détache difficilement de sa
coque, ce qui provient d’une tare qui amène une adhérence,
ou quelquefois d’un feu trop vif.
Cruci, v. Grincer; imiter le bruit que fait la lime sur le
fer ; ronger avec les dents, comme font les vers et les rats
dans le bois, les grains, les légumes secs. — Kaïre crucèsas
déns, grincer des dents. Aquélo civado és touto crucido,
cette avoine à été rongée par les rats, qui n'ont laissé que
l'enveloppe.
Dér. du celt. Cruscir, craquer, ou du lat. Cruciare,
tourmenter, ronger.
Cruëlos, s. f. plur. Écrouelles; vice scrofuleux, qui
affecte particulièrement les glandes cervicales.
Dér. du lat. Scrofulæ, m. sign.
Crus, cruso, adj. Cru, qui n’est pas cuit, pas apprèté;
écru. — Dé fiou crus, dé sédo cruso, du fil écru, de la
soie écrue. Uno fièio bièn cruso, feuille de mürier qui a de
la fermeté, de la crudité au toucher. Tèlo eruso, toilequi
n'a pas été décruée. És crus; a uno mino cruso, il a un
abord sec, hautain, peu liant.
Dér. du lat. Crudus, m. sign.
Cruséja, ». frég. Craquer, être rude et ferme au toucher==
Se dit principalement de la soie écrue, qui semble grincer
quand on la manie; de la toile écrue, non lavée, gardant
un apprèt; de la feuille de mürier qui n'a pas été remuée.
Dér. de Crus, écru.
Crusije, s. f. Crudité, manque de flaccidité ; état exprimé
par le v. Cruséja.
Cruvèl, s. m. Dim. Cruvélé. Crible, sas. — Fm crible à
blé est fait d'une peau de pore percillée de petits trous
ronds {Voy Couladoù); celui des châtaignes blanches,
Bajanos, est tissu de menus cotons ou lames de bois
refendu très-minces qui laissent entr’ eux des intervalles
carrés où ne passent que les bris des châtaignes et la pous-
CUL
_sière des enveloppes. Cet outil est le mème qui sert pour le
blé sous le nom de Pisso-paio ( Voy. &. m.). Le crible à
terre ou À sable est un treiilis de fil de fer.
Le dim. Cruvélé, petit crible, devait sans doute être
employé autrefois dans les divinations. La phrase faire
vira lou cruvélé, faire tourner le sas, s'est conservée pour
exprimer quelque œuvre de sorcellerie.
Dér. du lat. Criblum, m. sign.
; Cruvéla, v. Cribler; passer au crible.
} Cuga, v. Cligner; clignoter ; fermer les yeux à demi. —
E: Ne s'emploie qu'en parlant des yeux.
Dér. du gr. Kw, plier, ou Kebtw, cacher.
Cuïè, s. m. Dim. Cuüéiré. Cuiller, ustensile de table ou
| de cuisine, — Un cuïè d'argén, dé bos, d'éstan, une cuiller
d'argent, de bois, d'étain.
Dér. du lat. Cochlear, m. sign.
Cuiïèiras, s. m. Canard souchet, Anas clypeata, Linn.,
ee - ne Éd bre :
. £
| canard à bec à palette, à cuiller, à spatule; oiseau de l'ordre
| des Palmipèdes, qui passe l'hiver dans nos pays : ainsi
À nommé de la forme de son bec.
Cuièiré, s. m. Cueilleron de chätaigne, ou châtaigne
avortée dont il ne reste que les panneaux de la peau collés
l'un à l’autre et sans pulpe. La châtaigne se forme d'ordi-
uaire dans le hérisson au nombre de trois ; lorsqu'un de ces
hérissons manque de nourriture pour amener à bien les
trois châtaignes, ou bien lorsqu'une des trois plus active
prend la substance des autres, cellés-ci restent à l'état de
. -cuéillerons. Le plus souvent c’est la châtaigne du milieu
qui résiste et devient alors ronde et beaucoup plus grosse.
| Le nom est tiré de la forme ressemblant à une petite
cuiller, Cuïciré.
Cuièiro, s. f. Cuiller à soupe; grande cuiller à ra-
goût.
Guirassiè, s. m. Cuirassier, cavalier portant cuirasse.
‘Emp. au fr.
Cuirasso, s. f. Cuirasse.
Emp: au fr.
Guja; v: Faillir, être sur le point de... — A cuja
* mouriijaiefailli mourir. Cujère véni, je fus sur le point
de venir.
Sauvages et quelques glossateurs qui lui ont emprunté
cette opinion; pensent que Cuja est le mème verbe que
Cuider, en N: fr: penser, croire, imaginer. Leur racine
commune serait dans: le lat. Cogitare. Mais le sens doit
être restreint, croyons-nous, à la seule acception que nous
lui donnons : être sur le point de... Il n'y a ici qu'une
étym. figurative. Aÿ euja mouri, aï cuja véni, j'ai pensé
vi venir, pour j'ai failli, j'ai été sur le point.
- Guli, v. Récolter; prendre, saisir. — A culà fogo vi, il a
récoliéibesicoup de vin. Culis un pâou dé tout, il a un peu
de toutes les récoltes du pays. Lous géndarmos low soun
ana culà din soun iè, les gendarmes pren nee le ere
dans son lits.
+ Dér. du lat. Colligere, ramasser.
| CUR 237
Culido, s. /. Récolte; quantité récoltée eve mème
denrée.
Cur, s. m. Dim. Curné. Cœur, organe sinciplé de la
circulation dans le corps humain; affection, mémoire,
courage; couleur des cœurs au jeu de cartes; coulant de
la croix que les femmes portent au cou et qui le plus sou-
vent a la forme d'un cœur; chœur d'une église. Se dit dans
plusieurs acceplions Cor {Voy. €. m.). — Apréne dé pér
cor, apprendre par cœur. Ou save pér eur, je le sais par
cœur. Un éfan dé cur, un enfant dechœur. Las éstalos déou
cur, les stalles du chœur. Un cur dé camiso, triangle de
toile qu'on met au bas des chemises de femme pour en
augmenter le fond, sans quoi elles seraient gènées dans
leur marche ( Voy. Simoùs). C'est aussi une petite pièce de
toile ou contrefort qu'on place aux chemises d'homme au
bas de l’ouverture sur l'estomac, pour empècher la toile de
se fendre.
Trad. du fr. Cœur.
Cura, v. Curer, vider, nettoyer quelque chose de creux,
comme un puits, une fosse, un Canal. — Cura un poulé,
un péissoù, vider un poulet, un poisson, leur enlever les
intestins et les viscères. Cura soun nas, se fouiller dans le
nez. Té curaraï lous iéls, je te crèverai les yeux. Un curo-
bouss, un mange tout, qui ruine ses parents et vide leur
bourse. On le dit aussi du fisc et de toute sorte de gens qui
légalement ou par importunité vous soutirent de l'argent.
An cura lou pous, lou bésdou, on a curé, nettoyé le puits,
le canal. Mé souï bièn eura ou éscura, je me suis bien
nettoyé l'estomac, je l'ai bien vidé par quelques vomitifs
ou purgatifs.
Dér. du lat. Curare, soigner.
Cura, s.m. Curé; desservant succursaliste d’une paroisse
lorsqu'il est chef de son église. — Ana véire lou cura,
aller à confesse. Espéras un pdou qué lou cura sé moque,
attendez un peu que le curé se soit mouché, loc. prvb.
qu'on emploie quand on suspend un instant une narration
écoutée avec intérêt. Cela doit avoir trait à quelque anec-
dote dans laquelle un curé aurait usé de cette précaution
oratoire pour se reposer un instant dans son sermon.
Le mot est sans doute une contr. du lat. Curator,
tuteur, gardien des âmes: Dans la bass. lat. on avait
cependant Curio, qui indiquerait un sens de chef ou prè-
tre d’une curie.
Curaïo, s. f. Action de curer, de vider ; curage; balayu-
res, restes, fumier qu’on sort en une fois des élables.
Curio, s. f. Menus débris d'un petit objet que l’on vide,
que l'on nettoie intérieurement; intestins des animaux, de
la volaille, du poisson curés.
Curéto, s. f. Fourgon en fer d'un fourneau à houille;
outil tranchant du sabotier pour évider l’intérieur du sabot;
curoir d’un aiguillon de laboureur / Foy. Bourboussado).
C'est aussi un triangle en fer recourhé en forme de cuiller,
‘dont les mineurs se servent pour sortir la boue et les débris
de pierre du trou qu’ils forent, à mesure qu'ils avancent.
238 D
Curioùs, ouso, adj. Curieux, qui a grande envie de
savoir, de voir, d'entendre, de découvrir; qui étonne à
voir, à our; frappant, intéressant.
Dér. du lat. Curiosus, m. sign.
Curiousitè, s. f. Curiosité, petit spectacle de la foire,
principalement la lanterne magique et les optiques portatifs.
Curo-âouréio, s. m». Perce-oreille, forficule, Forficula
auricularia, Linn., insecte de l'ordre des Orthoptères,
ayant l'abdomen terminé par des pinces à double branche,
en forme de tenaille. Un préjugé absurde prétend que ces
animaux, en s’introduisant dans l'oreille, peuvent en percer
la membrane répereussive des sons el rendre sourd. De là
le nom fr. et le nom lang. Mais d'autres, ses défenseurs,
blanchissent le Curo-douréio de ce méfait. Le plus sage est
toujours de ne pas s’y fier.
D
Curo-nis, s.m. Culot; le plus petit et le dernier éclos des
oiseaux d'une couvée. Au fig. le dernier né d'une famille.
Formé de Cura et de Nis, parce que c'est celui des oisil-
lons qui vide le dernier le nid maternel.
Curo-péro, s. m. Capricorne ou cerf-volant. — Voy.
Manjo-péro.
Curun, s. m. Curures, boues, vase, vidanges qu'on
retire des puits, des fossés, etc., qui sont un amendement
pour les terres; débris, restes, rebuts retirés des choses
qu’on nettoie.
Cusqua, v. Parer, arranger; soigner un malade ou un
enfant au berceau, les servir, les faire manger, les vêtir,
les déshabiller, les coucher; faire pour eux tout ce qu'ils
sont incapables de faire par eux-mêmes.
D
D, s. m. D, quatrième lettre de l'alphabet, troisième
consonne, Se prononce dé comme en ilal., puisque notre
langue ne connaît pas l’e muet, ni sa consonnance sourde.
Le D est une des consonnes les plus douces et les plus
euphoniques de notre alphabet. Il appartient à l’ordre des
Dentales; et son articulation se produit par une explosion
mécanique de l'organe buccal assez heureusement décrite
par Piis dans son poème de l’Harmonie imitative :
Il faut entre les dents que la langue le darde.
Les grammairiens rangent dans la catégorie des Dentales
les consonnes T, S doux ou entre deux voyelles, et Z; ce
qui veut dire que ces lettres, dont l'émission met en jeu
les mèmes organes, la langue et les dents, d’une manière
presque identique, éprouvent des propensions, dans les
langues dérivées comme la nôtre, à se substituer les unes
aux autres, ou du moins ne font aucune difficulté à entrer
dans la composition d’un mot où se trouvait primitivement
une consonne de leur ordre. C'est pourquoi Cadéno ne
s'étonne pas de descendre du lat. Catena; Cadiiro de
Cathedra; Nada de Natare; Nadäou de Natalis; Nous de
Nodum; Nousa de Nodare; Madu de Maturus; Rodo de
Rota; Courdura de Consuere; Courduro de Sutura;Dinda
ou Tinta de Tinnitun; Toundéire de Tonsor ; Endorto où
Rétorto de Retorta; Tourdu où Tourtu de Tortus; Endivio
de Intibum; Aciou de Actio; Crémasoù de Crematio: etc.
C'est la loi des permutations, dont nous avons déjà |
parlé à la lettre B, et qui, en étymologie, a une importance
notable : on le comprend sans peine. Mais cette-règle n'a |
rien d’absolu et n'est pas d’une application constante :-äl
n’y a pas à l'exagérer; on le saisit de suite.
Les permutalions ont en effet pour base l'harmonie : et
chaque peuple, chaque groupe entend l'harmonie à sa
manière. Les sons et les flexions doivent beaucoup à.des
convenances inexplicables, à des aptitudes organiques qu'il
est souvent impossible de déterminer : l'usage est le maître.
Nous ajouterons seulement à ce que nous avons dit.ailleurs,
à propos de la formation et du caractère de la langue d'Oc,
que notre idiome, étant resté plus fidèle à ses origines
latines, et peut-être des influences climatériques pareilles
le rapprochant davantage du latin, procède avec plus de
régularité à ses permutations que le français, qui tend au
contraire à s'écarter de son type romain, ou qui cède à
l'empire des influences du Nord: Les deux dialectessétaient
jumeaux, nés le mème jour dans le même berceau, le
roman; mais la Loire sépara leurs domaines, et depuis, ils
vivent en frères ennemis. Le français est le plus fort, sa
prééminence est incontestable : le languedocien ne vit plus
que de son originalité indestructible.
De là il résulte que leur vocabulaire doit avoir mécessai-
rement beaucoup de mots communs, contemporains, que
ne différencie pas la permutation; mais il est arrivé aussi,
souvent, que le français, poussé par son génie propre, s'est
éloigné de sa forme primitive en secouant la règle, et qu'il
a introduit des changements de consonnes d’un tont antre
ordre dans certains mots, et qu'il a voulu ensuite les
imposer au languedocien, Toutes les fois que celui-ci a
cédé à cette pression, il a dévié, il est sorti de sa nature,
pour devenir un patois. C’est ce que les permutations met-
tent-surtout en évidence.
Ainsi notre substantif Cadéno provient, par un change-
ment de la dentale médiane, du lat. Catena : mais le
LÉ
D'AI
fr. Chaine en dérive également, par la suppression de la
dentale. Or si le lang. s’oublie à adopter Chèïno, il fait du
pur franchiman. Pour Cadièiro, il sort en ligne directe de
Cathedra, lat.; le fr. chaire et chaise ont la même origine;
si un puriste beau diseur s'avise cependant d'employer
Chèro, dans ces phrases par exemple : L'an tracho dé la
chèro én bas; és mounta én chèro pér précha; il sera
malhéureusement compris par certains, mais il aura parlé
patois au lieu de parler languedocien.
Les exemples pourraient se multiplier; c'est pour cela
que les permutations sont utiles à observer. Elles admettent
certes des exceptions; mais elles servent en général de
piérre de touche pour éprouver les mots de bon aloi. Quand
elles se font sur les dernières consonnes S ou Z, la corrup-
tion a bien pu opérer de seconde main sur un mot déjà
modifié ow permuté; mais dans ce cas, il est facile de les
ramener au primitif. — Voy. Franchiman, Patouès, et
lettre T.
Selon les principes de notre orthographe, qui n’admettent
pas les lettres nulles à la prononciation, le D ne figure
jamais à la finale d'un mot; mais il reparait très-bien,
comme en français du reste, dans les composés, dans
l'adjectif féminin ou dans les temps du verbe où il est suivi
d'une voyelle; nous disons : Bavar, Bavardo; Segoun,
Segoundo; Vèr, Vèrdo; Pèr, qué pèrdio, pèrdre.
Da, s. m. Dé à jouer, petit solide cube d'os ou d'ivoire
à faces marquées de points de un à six; cube de pierre de
taille en forme de dé, quelle que soit sa dimension.
Dabor, adv. D'abord; en premier lieu ; de suite; incon-
tinent; avant tout. — Dabor qué, puisque, dès que. Dabor
qu'ou voulès, puisque vous le voulez. Dabor qué lou véguère,
dès que je le vis. Quelques raisonneurs franchimans
emploient assez volontiers : Primd dabor et d'uno, locution’
redondante, emp. au fr., qui donne de la force à une
démonstration qui commence et promet d’être longue.
Daïa, v. Faucher ; couper avec la faux.
Dér. de Daïo.
Daïaïre, s. m. Faucheur; celui qui coupe le foin.
Daïaje; s. m. Fauchage ; fauchaison ; action de faucher;
salaire du fauchage ; saison, temps de la fenaison.
D'aïçamoun, adv. De la hauteur qui est de ce côté-ci;
de là-haut.
Formé de Aïcaï et du lat: Moun, hauteur.
D'aigamoundâou, &dv. Mème acception que pour Aïça-
moun, dont il n'est que l’explétif pléonasmatique.
Formé des trois mots : D'aïgaï, d'ici; Moun, hauteur, et
Ddou, haut.
D'aïçalin, adv. D'ici-bas; de ce côté en bas. Suppose
une relation avec un endroit plus élevé. — Voy. Atin.
D'aïçaval, ado. Mème acception que le précédent. —
Voy. Aval.
D'aïci, adv. D'ici; de ce point-ci; de ce lieu-ci. —
D'aïci! interj. Hors d'ici! dehors! apostrophe qu'on
adresse à-un chien où à une personne, que l’on voit avec
DAL 239
colère ou avec dégoût, et que l'on veut chasser ou éloigner.
— Voy. Aiïci.
D'aïci'n-foro, «dv. Contr. D'aïci-én-foro. Sans désem-
parer; toute affaire cessante; dorénavant. — Y wdou
d'aïci'n-foro, j'y vais de ce pas.
Formé du lat. Æic, ici, et Foräs, dehors.
D'aïci'n-laï, adv. Contr. D'aïci-én-laï. D'ici-là; doréna-
vant; mais ce dernier mot, dorénavant, dont la traduction
littérale est D'houro-én laï, a une portée moins longue que
notre D'aïcin-laï, qui s'étend à une année, à une saison. —
D'aïeŸn-laï las véiados s'alongou, à partir d'aujourd'hui
les soirées sont plus longues.
Formé du lat. Hice, et Illae, ici et là.
D'ailai, adv. De l’autre côté, de là. — Soun partis
d'añei d'aïlaï, ils se sont enfuis de côté et d'autre, d'ici et
de là. — Voy. Aïlaï.
D'aïlamoun, adv. De là-haut, de par amont. — És
d'aïlamoun dé las Cévénos, il est de par là-hant dans les
Cévennes.
Formé du lat. ÆUac, ad montem, par à , vers le haut.
D'ailamoundäou, «dv. Mème acception que le précédent,
avec réduplication.
D'ailaval, adv. De là-bas, de vers l'aval. — És d’aïlaval
vèr Mounpéiè, il est de là-bas, du côté de Montpellier. —
Voy. Aïlaval.
Daïo, s. f. Faux; instrument pour faucher. — Piqua sa
daïo, rebattre sa faux pour lui donner le morfil. C'est ce
que fait le faueheur lui-même sur une petite enclume
appelée Airéto { Voy. €. m.). Aqud's lou piqua dé la daïo,
voilà la difficulté, voilà le hic : loc. prvb., qui s'applique à
toutes les situations difficiles.
En esp. Hadalla, m. sign.
Dalican, s. m. Alicant; espèce de raisin sans doute
originaire d’Alicante, dont le nom lang. est évidemment
une corruption. Le bois de ce cep est gros, court, tendre,
jaunâtre. Il porte assez de grappes de médiocre grandeur,
dont les grains sont ronds, bien serrés, très-fleuris; ses
feuilles sont assez grandes : il donne un bon vin.
D'alin, adv. Mème acception que D'aïlaval. — V. ©. m.
Dér. du lat. Zlline, de ce côté.
Dalmas, n. pr. d'homme, Dalmas.
Sous la rubrique de ce mot, Sauvages donne une disser-
tation toute philosephique sur l’origine des noms accompa-
gnés de la particule de. Cet article est trop remarquable
pour que nous ayons la prétention d'y toucher une syllabe :
on nous permettra de le reproduire en entier.
« Dalmas, n. pr., en fr. Dumas, qui est une partie de
nom, ou plutôt un surnom séparé, par exemple du nom
Pierre, avec lequel Dumas a un rapport d'appartenance :
Pierre du mas, Petrus de manso; Pierre de la métairie, et
par contr. de la Métrie.
e Le n. pr. Dal-mas ou Del-mas, nous fournit l’occasion
de parler des articles du, de la, de, des, ete., dont bien des
personnes sont jalouses de parer leur nom, comptant par
240 DAL
cette petite addition de se donner une apparence de no-
blesse.
« Ces articles ne marquaient dans leur origine d'autre
dessein, dans ceux qui les plaçaient au-devant de leur nom,
que de désigner le rapport de leur personne au lieu où ils
avaient pris naissance, ou à celui qui leur appartenait, ou
dont ils étaient voisins.
« Un homme, par exemple, appelé Jean, avait un mas,
ou métairie; on l’appela Jean dal mas ou du mas, pour le
distinguer d'un autre Jean son voisin, qui n'avait pas un
pouce de terre, et avec lequel on aurait pu le confondre.
Un autre nommé Jacques habitait près d’une porte de ville
qu'il était chargé d'ouvrir et de fermer ; on l’appela Jacques
de la Porte. Un troisième appelé Pierre, né au village de
Maubos, était venu habiter la ville ; il était tout simple que
ses voisins, qui avaient parmi eux d’autres Pierres, appe-
lâssent celui-ci Pierre de Maubos, et que lui-même, dans la
suite, allongeñt ainsi son nom, pour se conformer à un
usage reçu, et sans plus de prétention qu'un bon capucin
qui, étant né à Rémorantin, signe, sans penser à mal, frère
Jean Pancrace de Rémorantin.
« I était convenu jusque-là qu'il n’y avait dans les
articles du, de la, de, rien qui dût flatter la vanité de ceux
qui en faisaient précéder leur nom; et si le petit-fils de
Jean dal mas, devenu riche. sembla vouloir faire oublier
son grand-père, fort honnèle paysan, en mettant son nom
en français, et signant Jean de la Métairie, ou en le défigu-
rant autrement par le retranchement ou l'addition de quel-
que lettre, c'était une vanité blâmable qui faisait causer;
mais elle était d’un autre genre, dont nous parlerons ail-
leurs.
« Les nobles, qui avaient de simples fiefs, ou des terres
titrées, ajoutèrent à leur nom de baptème le surnom de ces
terres, et l'on voit dans les actes latins du XIIe siècle,
Armandus de Andusa, Johannes de Alesto, Bernardus de
Duroforti, sans d'autre dessein que de dire : un tel d’un tel
lieu, ou seigneur d'un tel lieu.
« Mais comme on abuse de tout, les articles de, du, de
la, que les nobles ont continué de prendre en français, ont
passé peu à peu dans le préjugé vulgaire pour un signe
distinctif de la noblesse. Et dès lors il n’y a eu si petit
bourgeois qui n'ait voulu décorer son nom de quelqu'un de
ces articles : et cela, sans aucun prétexte, ou quoique ce
nom ne désignât aucune propriété de fief, ni aucun rapport
d'habitation, d'origine, ou de voisinage entre la personne
et la chose nommée par le surnom : ce qui eût mis les
articles à l'abri de toute critique.
« Cependant cette mode a pris, et l'usage a fait dispa-
raître ce qu'il y avait de contraire même aux règles du
langage, en mettant quelquefois l’article de (qu’on regarde
sans doute comme le plus noble), là où il n’en faudrait
point du tout, même pour les personnes les plus qualifiées,
et où tout au plus, l'on aurait dû mettre les articles du, de
la, le; en sorte qu'on signât, par exemple : Pierre du
DAM
Rocher, Jean du Bois, Jacques de la Rive, François le
Roux, etc., et non Pierre de Rocher, Jean de Bois, Jacques
de Rive, François de Roux, etc.; et encore moins qu'on
écrivit simplement de Rocher, de Rives, de Roux, etc., ce
qui choque autant le bon sens que le langage.
« Autre usage reçu qui n'y est pas moins contraire, et
qui ne remonte pas bien loin : on ne se borne pas à l'article
qui précède le surnom, et qui sera, si l'on veut, celui d'une
seigneurie; on en place un autre devant le vrai nom, ou
celui de famille, qui n’en est pas susceptible, puisqu'il ne
marque ordinairement aucun rapport de propriété, de sei-
gneurie, de demeure, de voisinage; et qu'il cesserait même,
ce semble, d'être nom de famille, s'il marquait aucun de
ces rapports : ainsi tel qui s’appellera, par exemple, Jacques
Sabatier de Valorio, signera sans façon dans un contrat,
Jacques de Sabatier de Valorio, comme si son nom de
famille, Sabatier, était, comme celui de Valorio, un nom
de terre : il ne manquerait, pour ajouter aux prétentions
de noblesse, que de signer, par un renfort d'articles, de
Jacques de Sabatier de Valorio, etc., etc. M. de Petit-
Jean, ah! gros comme le bras, dit Racine.
« On a d'autant plus de tort en cela, que ces petites
vanités, le plus souvent sans fondement, ou sans le pré-
texte même d’un petit fief, sont tôt ou tard punies : le
public ne manque guère d'en faire justice; il remonte aux
ancètres de ces nouveaux nobles, et il ne va pas bien loin
pour trouver une naissance obscure ou fort commune, qu'il
leur aurait pardonnée, sans la faire connaitre, si, au lieu
de courir après une chimère, par une suite de l’opulence
que leurs pères ont laissée, ils s'étaient contentés, comme
eux, d'être de modestes honnêtes gens; ou bien, s'ils
avaient aspiré à s’illustrer par des talents et surtout par
des vertus. »
Qu'aurait ajouté Sauvages s’il eût vécu de notre temps?
Depuis M. de la Souche, de l'École des femmes, depuis les
Plaideurs, et le Monsieur du Corbeau du bon-La Fontaine,
malgré le ridicule qui s’est attaché à tous ces anoblisse-
ments de contrebande, la manie d'ajouter la particule à des
noms qui n’en sont point susceptibles et qui jurent avec
elle, soit par leur physionomie, soit par leur sens étymo-
logique, s'est généralisée de la façon la plus plaisante. H
est mème assez remarquable que pendant la pénultième
république cette maladie avait redoublé d'acerbationet la
contagion s'était beaucoup aggravée. Une loi spéciale, sous
le dernier empire, ne l’arrêta guère : elle est probablement
endémique et incurable.
Ah!si Sauvages revenait.
Daméjano, s. f. Dame-jeanne; grosse bouteille, recou-
verte ou revêtue ordinairement d'un panier d'osier, dans
laquelle on conserve le vin en cave. —Sé musqua én damé-
jano, se griser, se remplir de vin comme une dame-jeanne :
sorte d'euphémisme plaisant. Son étymologie est à coup sûr
anecdotique.
Damo, s. f. Dim. Damélo; péjor. Damasso et aussi au
DAN
mase, un Damas. Dame; titre d'honneur, donné à la femme
d'un homme considérable; hie ou demoiselle de paveur,
sorte de masse à oreilles pour enfoncer les pavés; batte de
jardinier, pour briser les mottes ou pour battre le gazon;
pion du jeu de dames; figure, au jeu de cartes, représentant
les dames. — Faïre la damo, sortir de son état par sa toi-
lette; porter des parures au-dessus de sa condition. La damo
dé moussu un tdou, la femme de monsieur un tel, madame
un tel. Nosto-Damo, la sainte vierge, Notre-Dame.
Damo dâou clouche, s. f: Effraie, fressaie, Striæ, Linn.,
oiseau nocturne, espèce de chouette ou de chat-huant blanc.
L'effraie se loge exclusivement dans les vieux et grands
édifices, surtout dans les clochers, qu'elle trouve partout;
elle en est la principale habitante : c'est la dame du lieu;
de là elle a été appelée Damo ddou elouchè où simplement
Damo, en supprimant le nom de son fief. — Voy. Béou-
l'oli.
Damo dé miséricordo, s. f. Nom familier et même un
peu goguenard que le populaire donne à une espèce de
hareng salé, appelé Haréneado ( Voy. c. m.). Cela viendrait-
il de ce que ce hareng n'entre guère que chez le pauvre,
comme font les bonnes sœurs ou dames de miséricorde ?
Dér. du lat. Domina, dame, seigneuresse.
Danjè ou mieux Langè, s. m. Danger, péril. —
YVoy. Langè.
Dér. du lat. Damnum, dommage, dont la bass. lat. fit
d'abord Damniarium, et plus tard Damjerium.
Danjéïroùs, ouso, adj. Dangereux, qui offre un danger,
qui est en danger de mort. — Ma fénno és bièn dangéëi-
rouso, ma femme est en grand danger de mort. És pas
dangéiroùs, il n’inspire aucune crainte; il n'en mourra
pas.
Danna, v. Damner ; juger digne de l'enfer. — Sé danna,
se damner, mériter la damnation éternelle; s'inquiéter;
s'impatienter. Faïre danna, faire enrager, faire donner au
diable. Ës danna coumo uno rabo, il est damné comme
Judas; cette loc. prvb. est une corruption de : Danna
coumo un Arabo, damné comme un Arabe, un Sarrasin,
ces peuples qui ont laissé de si vifs et si longs ressentiments
dans les provinces de la langue d'Oc.
Dér. du lat. Damnare, condamner.
Dannaciou (Ma)! interj. Juron; je jure par ma damna-
tion; Dieu me damne!
Dannarèl, rèlo, adj. Qui damne, qui est un leurre de
dammnation, qui provoque à se damner.
Danno, s. f. L'enfer, le séjour des damnés, la geôle
infernale, la géhenne. — La danno és pa’ncaro pléno, dit-
on plaisamment et sceptiquement, quand on vous menace
de l'enfer.
Danrèio, s. f. Denrée; toute sorte d'objets récoltés, de
produits, qui sont susceptibles de vente.
Dér. du lat. Denarius, denier; parce que dans le prin-
cipe on appelait Dénrèio la quantité de provision de bouche
qu'on pouvait obtenir pour un denier.
DAO 21
Dansa, v. Danser; exécuter des danses; se mouvoir en
cadence ; sauter. — Né dansaras uno bèlo, tu recevras une
belle danse, une bonne frottée. Hè bé! coumo la dansan?
Eh bien! comment réglons-nous ce compte-là? Dansa sus
las barjios, sauter de joie / Voy. Barjios). Dansa das pèses,
être pendu. Danse din mous souïès, mon pied danse, est
trop au large dans mes souliers.
Dér. de Danso.
Dansaïre, aïro, adj. Danseur, qui fait métier de Ja
danse; qui cherche les occasions de danser.
Dansarèl, rèlo, adj. Péjor. Dansarèlas. Qui aime à
danser; qui appartient à la danse; qui engage à danser. —
Lou prusé dansarèl, la frénésie de la danse. Lou galoubé
dansarèl, le galoubet qui provoque à la danse.
Danso, s. f. Danse, pas mesurés ou cadencés, au son des
instruments ou de la voix; par ext. ou par comparaison,
correction verbale ou manuelle.
Dér. de l’ital. Danza, qui lui-même vient de l'allemand
Dantzen, m. sign.
Dansur, suso, s. Cavalier d'une danseuse; dame d'un
cavalier, en termes de danse.
Dâou, art. m. Du. — C'est une contraction pour dé low,
comme Dal, forme employée dans le dialecte montagnard,
de même que le fr. du est contracté pour de le, primitive-
ment prononcé do ou del. Devant un substantif commen-
çant par une voyelle, cet article redevient dé lou, en élidant
sa dernière syllabe et fait dé l” : dé l'doubre, dé l'home.
Dâou, s. m. et adv. Haut, le haut. — Lou ddou, le haut,
dans une maison, par rapport au rez-de-chaussée; la hau-
teur, relativement à la plaine. Mounta dâou, monter au
premier étage, au grenier, en haut. Gagna lou dâou,
gagner la hauteur. Ddou/ ddou! interj., là-haut! en haut!
montez, je vous l’ordonne. Dé qué fasès ddou ? Que failes-
vous là-haut ? Aouro-ddou, vent du nord. — Voy. Aouro.
Dér. du lat. Altus, haut, élevé.
Dâoudè, n. pr. d'homme. Daudet, qui est formé du
lat. Deus det, que Dieu donne, ou Dieudonné, correspon-
dant à Déodat, le même que Donnadieu et Donnedieu.
Dâoufinén, s. m. Marronnier, châtaignier qui produit le
matron proprement dit. — L'aï issarta dé ddoufinén, j'ai
greffé ce sujet avec une ente de marronnier.
Son nom lui vient certainement de ce que les premières
greffes furent apportées du Dauphiné.
Dâoufinénquo, s. f. Chätaigne-marron, qu'Olivier de
Serre appelle Sardones, parce qu’il pense que l'espèce nous
est venue de la Sardaigne, tandis qu'il est plus probable
qu'elle nous vient du Dauphiné. A Paris, on appelle Mar-
rons ou marrons de Lyon toutes les grosses châtaignes, et
bien qu'à Lyon il n'existe pas l'ombre d'un châtaignier.
Sans doute, celles qu'on expédie viennent des montagnes
du haut Vivarais, qui fournissent en effet d'excellentes
qualités et très-précoces.
La déoufinénquo est la première châtaigne par le goût,
| la grosseur et la beauté de la forme. Elle a des reflets
242 DAO
fauves: elle est zébrée, pansue, légèrement ensellée par le
sommet où elle adhère au hérisson, dans lequel elle se
trouve souvent au nombre de trois; mais presque toujours
il n'y a qu'un fruit bien nourri et convenable. L'arbre
demande une culture soignée et alors il produit beaucoup.
Dâoumaje, s. »m Dommage, préjudice; perte, détriment.
— Aquè's déoumaÿje, c’est bien dommage ; il est fâcheux.
Ës déoumaje d'ou éstrassa, c'est dommage de perdre cela.
Dér. de la bass. lat. Damnagium, qui est lui-mème la
corruption de Damnun, M. sign.
Dâounis, n. pr. d'homme. Denis. — Sauvages et d’au-
tres lexicographes représentent ainsi en fr. notre mot
Dâounis, et les statistiques, comme la géographie du dépar-
tement, leur donnent raison, car Sén-Ddounis, commune du
canton de Saint-Ambroix, arrondissement d'Alais, est
nommée Saint-Denis. Mais nous avons aussi, comme nom
propre, Ddounis, en fr. Daunis, au mase., dont la femme
s'appelle Déounisso. Il y a si loin de là à la traduction de
Sauvages qu'un scrupule lexicographique pourrait bien en
naitre.
N'en serait-il pas de ce nom comme de queiques autres,
où se rencontre l’art. de, du, dou, dal, dèl, qui se sont
altérés par des transformations, en restant trop français
dans la moitié de leur composition? Exemple Dumas, qui
devrait être Ddoumas; Ducldou, qu’il faudrait aussi pro-
noncer Dédou clâou; Dubouës, issu de Dâou bos, en français
Dubois, qui sonnerait régulièrement Delbos, Dubosc, etc.,
etc.; formes mêlées où se fait sentir l'influence du français.
Il n’en est pas de même pour Déounis, dont l’art. et le
subst. sont bien tous deux purs languedociens ét devraient
être traduits par Du nid ou par De nid.
Une sorte de ressemblance a amené la traduction Denis ;
mais y a-t-il bien identité d'étymologie entre Denis et
Däounis? Le fém. lang. Ddounisso, quoique très-régulier
en sa forme rude et sèche, démontrerait le contraire. Mais
l'usage a prévalu ici comte dans les autres noms cités
plus haut; cependant la raison étymologique proteste, et
l'euphonie n'est pas en faveur du languedocien, ce qui est
plus rare.
Que Denis vienne du lat. Dionysius, et Denise de Dio-
nysia, tirés du grec, et que la multiplicité de leurs voyelles
et leurs flexions si douces et si harmonieuses, soient bien
rendues dans le féminin surtout : il faut le reconnaitre.
Que notre mot reproduise cette douceur de consonnance
ionique : c’est ce qui est à regretter. D'où il faut conclure
que la dérivation indiquée par Sauvages n’est pas exacte:
et nous lui préférons de beaucoup la mélodie redoublée de
la dérivation grecque ou latine, modulée dans le doux nom
français.
Dâou-pâou-pâou, adv. Petitement; petit à petit; tant
soit peu. Si nous avons peu, nous ferons peu, ou nous
donnerons peu, est la traduction presque fidèle dé cet
adv. intraduisible par un mot équivalent fr. C'est là toute
l'histoire du dfachme de la veuve.
DAR
Dâoura, v. Dorer; enduire ou couvrir d’or ou de jaune,
au fig. enrichir; farder. Au part. pass. Ddoura signifie :
excellent, précieux ; qui vaut son pesant d'or. — Aquél
por a’no maïsso déourado, ce porc a une gloutonnerie
admirable, il dévore tout ce qu’on lui présente, sans
regarder à la qualité. Cette faculté est précieuse pour l'éle-
veur, qui peut le nourrir et l'engraisser à peu de frais,
puisque l'animal se paie de tout.
Dér. du lat. Aureus, doré, couleur d'or.
Dâourado, s. f. Dorade; Awrata vulgaris, Linn. — Ce
poisson, du genre cyprin, est fort commun dans la Médi-
terranée. Sorti à l'air, il perd de ses brillantes couleurs;
mais dans l'eau il paraît couvert d’or sur un fond vert
azuré, et c'est sans contredit un des plus beaux habitants
de la mer. La Dorade atteint jusqu’à un mètre de long; les
jeunes et plus petites s'appellent Sdouquéno, celles d’une
taille intermédiaire Méjano, qui veut dire moyenne.
Il est évident par l’étymologie toute naturelle de ce mot
que c’est ici le fr. qui a emprunté au lang.; cette désinence
en ade, ado, étant toute dans le génie de notre idiome : le
fr. l'eût appelé sans cet emprunt : Dorée.
Dâoururos, s. f. pl. Joyaux en or ou en argent; bagues,
bijoux et chaines. Les filles du peuple ne manquent jamais
de faire reconnaître dans leur contrat de mariage ces joyaux
comme apport dotal.
D'aquin-foro, adv. Contraction de D'aqu én foro: À
partir de là; après cela; ensuite. — D'aqui'n-foro y ana-
ra, j'irai au sortir de là.
Formé du lat. Hac et Foras, là et dehors.
D'aqui'n-laï, adv. Contraction de D'aqui én-laï. De ce
point-là jusqu'à cet autre; de ce jour-là en avant.
Formé du lat. Hac et Ilac.
D'aquë, pron. génit. de Aquo. De cela. — Il se prend
souvent d’une manière absolue et nominative, pour expri-
mer une chose dont on ne se souvient pas, ou dont on veut
éluder le nom. Présta mé voste d'aqud, prètez-moi votre, ….
cela : phrase que l’on appuie d'ordinaire en indiquant
l'objet. À dé qué sèr aquél d'aqud? À quoi sert cet outil,
cet instrument ?
Darboussièiro, ou Endourmidouiro, ou Hèrbo dé las
tôoupos, s. f. Pomme épineuse, datura, Datura stramo-
nium, Linn., plante annuelle de la fam. des Solanées, dont
la semence disposée en alvéoles est renfermée dans une
gousse épineuse, semblable aux hérissons du marron d'Inde.
L'infusion de cette semence est un violent narcotique : sa
fleur est blanche, en forme de cloche. Elle a la propriété
d'éloigner les taupes; il suffit pour cela d'en conserver
quelques plantes dans les coins d’un jardin.
Darda, ou Dardaïa, v. Darder, frapper comme un dard.
— Lou sourél dardo, le soleil darde ses rayons.
Dér. du gr. ’Apèc, dard, aiguillon.
Dardèno, ou Piastro, s. f. Pièce de deux liards ou de
six deniers; monnaie qu'on battait à Aix en Provence sous
le règne du roi Réné.
DAV
Dariè, ièiro, adj. Dernier; tardif; retardé. — L'ase
fiche lou dariè ! phrase proverbiale que les enfants emploient
lorsqu'ils s'excitent à courir vers un but quelconque :
Malédiction à celui qui arrivera le dernier! C'est le moyen
de donner de l'émulation à la course. Zous magnas soun
bièn.dariès aquéste an, cette année, les vers à soie sont
plus retardés que de coutume. Souï bièn dariè, je suis bien
en arrière de mes travaux, ou toutes mes récoltes sont
arrièrées. Avan-dariè, avant-dernier, pénultième. Dé-s'én-
dariè, ady., en dernier lieu, vers la fin. És à soun dario,
il va mourir, ilest à son dernier soupir. Féou pas régarda
lou dariè digne, il ne faut pas être si méticuleux dans un
marché, on exiger si strictement tout ce qui est dû.
Dér. de Dariès.
Darièiraïio, s. f. Récoltes d'arrière-saison, qui ne sont
jamais très-productives, étant toujours rabougries et mal
servies par la température.
Darièirén, énquo, adj. Fruits ou récoltes qui de leur
nature viennent plus tard que les autres, en opposition à
Prémidirén.
La différence entre ce mot et le précédent consiste en ce
que Darièiraïo ne s'entend que des fruits arrivés trop tard
parce qu'on les a semés tard, ou bien des rebuts de récolte
‘qui ne sont venus en maturité qu'à l’arrière-saison : cela
s'entend encore des derniers fourrages ou régains d'automne
qui sont peu abondants, fort difficiles à apprèter et toujours
de qualité inférieure, parce que les pluies et les premières
gelées leur enlèvent la saveur. Dariéirén, au contraire,
s'entend d'espèces de fruits ou de récoltes qui, par nature,
ne Viennent à maturité qu'après les individus de Ja même
famille.
Dariès, s. m., adv. et prép. Derrière, arrière; la partie
postérieure d’un animal, d’une maison, etc. — Un dariès
dé cabri, la moitié postérieure d’un chevreau, les deux
quartiers de derrière. Dariès dé boutigo, arrière-boutique.
Y-a dariès! crie-t-on à un cocher pour lui indiquer que le
talon. de sa voiture est garnie de gamins. Régarda pér dariès,
regarder par derrière soi.
Dér. du lat. Retrè.
Data, v. Dater; mettre une date. — Agud dato dé iuëèn,
cela remonte à une date ancienne. À pas data soun conte,
il n’a pas daté sa facture. Datan pas dé hièr, nous ne
sommes pas d'hier.
Dato, s. f. Date; mention du jour et de l’année où une.
lettre a été écrite, un acte passé, un événement arrivé, un
monument commencé.
Dér. du lat. Data, datum, à cause de la formule finale
des ordonnances ou des édits royaux, qui se lerminaient
tous par ces mots : Datum où Data, donné en tel ou tel
Datus, s. f. Datte, fruit du palmier dattier, qu'on ne
connait guère chez nous que sous la forme de conserve.
Dér. du lat. Dactylus, m. sign.
Davala, v. Descendre; décroitre; baisser; déchoir. —
DAV 243
Lou sourél davalo, le soleil descend, baisse: il se rapproche
de l'horizon; il va bientôt se coucher, Davala dâou cade,
déchoir; perdre sa position de fortune ou d'honneurs.
Davalo chaquo jour, il dépérit chaque jour. Mas forços
davalou, mes forces diminuent.
Davalo se dit aussi activement pour descendre, déplacer
une chose élevée pour la mettre plus bas; porter en bas. —
Davala d'un co dé fusil, abattre d'un coup de fusil. Low
davalè d'un co dé codou, il le jeta à bas d'un coup de
pierre. Davala lous éscaïès, descendre les degrés, ou dégrin-
goler.
Dér. de la bass. lat. Devalare, formé du lat. Ad vallem
tre, aller dans la vallée, 'vers le bas / Foy. Aval). En bas-
bret. Davalem, m. sign.
Davalado, s. f. Descente; rampe, chemin ou pente, qui
est une montée en sens inverse.
Davaladou, s. m. Dim. de Davalado, qui a lui-même
son dim., Davaladouné. Petite rampe; ruelle fort étroite
qui conduit d’une maison à la rue, ou d'une terrasse à la
terrasse inférieure.
Dér. de Davala.
Davan, s. m., adv. et prép. Devant, la partie antérieure :
avant, auparavant; plus tôt.— Lou davan d'uno boutigo, la
devanture d’une boutique: Aou bèou davan dé ma porto,
tout au-devant de ma porte, et très-visiblement. Lou davan
d'un cabri, les deux parties de devant d’un chevreau. L'én-
davan d'uno porto, le devant d’une porte. Ana à soun én-
davan, aller au-devant de lui : au fig. aller au-devant de
ses désirs, de ses goûts; le prévenir. Faï té davan, passe
devant; prends les devants. Davan vous, devant vous, à
vos yeux voyants. Qudouques jours davan, quelques jours
auparavant. Davan qué vous, plus tôt que vous. Davan qué
l'y torne! avant que j'y remette les pieds! Dé davan,
autrefois. Davan Diou siè/ Puisse Dieu l'avoir reçu dans
son paradis! phrase votive et pieuse dont on accompagne
toujours la mémoire d'un défunt qui nous est cher et véné-
rable : Moun pâoure pèro, davan Diou siè/
Dér. du lat. De ab antè, qui nous parait préférable
comme étymologie, à celle Lirée aussi du lat. Ad ventum,
vers le vent.
Davan-antan, «dv. de temps. L'année avant-dernière.
— Voy. Antan.
Davan-c'houro, adv. de temps. Avant l'heure; avant le
temps prescrit; prématurément. — Mé fara mouri davan-
c'houro, il hâtera ma fin, il abrégera mes jours.
Il est formé de Davan et de Houro : le C interposé est
purement euphonique, et remplit le même office que cer-
taines lettres en français: comment va-t-il, entre quatre-z-
yeux. Toutefois cette consonnance chuintante du ch paraît
bizarre; mais l'usage le veut ainsi.
Davanciès, s. m. pl. Aïeux; anciens; ancêtres; ceux
qui nous ont précédé dans notre famille.
Dér. de Davan, ceux qui sont venus avant.
Davantäou, s. m. Tablier de femme. — Voy. Fanddou.
244 | DÉB
Ce mot n’est pas proprement du dialecte des Cévennes ;
mais il a été importé, et s’est fait adopter. On s’en sert
aujourd’hui surtout dans le style badin et ironique.
Dér. de Davan.
Davantièirasso, adv. de temps. Naguères ; il y a peu de
jours. — C’est un augmentatif de Davan-:-hièr, dont
l'effet est d’en éloigner la date, c’est-à-dire un temps plus
reculé qu'avant-hier.
Davan-trin, s. m. Avant-train d'une voiture à quatre
roues. On appelait aussi Davan-trin une sorte de fourgon
qu'on suspendait sur l’avant-train de certaines diligences,
coupés ou berlines, où le cocher se plaçait et recevait à côté
de lui deux autres places : ce qu'on nommerait aujourd’hui
la botte. Ces sortes de voitures n’existant plus maintenant,
cette place avait été remplacée par celles du coupé; mais
les diligences elles-mèmes disparaissant, ce perfectionnement
a eu le même sort.
Davan-z-hièr, adv. de temps. Avant-hier. — C'est une
variante euphonique de Avan-hièr.
Davi, n. pr. d'homme. David. — Au fém. il fait Davio ;
dim. Davioù et Daviéto.
Davi, s.m. signifie aussi un sergent, outil de menuiserie,
tout en fer, composé de deux crampons, dont un mobile,
qui sert à tenir rapprochées et serrées les parties d’une pièce
d'assemblage, pour qu'elles ne puissent se disjoindre pen-
dant qu'on les cloue ou qu'on les cheville.
Dé, art. qui correspond, selon les circonstances, aux
art. fr. de, du, des, de la, de l’, elc.; et en mème temps
prép. qui se rend par de, à, aux, des, etc. — Douna-mé dé
vi, dé poumos, dé car, d'oli, un moucèl dé pan, donnez-moi
du vin, des pommes, de la viande, de l'huile, un morceau
de pain. Vèn dé Paris, il arrive de Paris. Oou! l’home däou
sa! la fénno das idous! Holà! l’homme au sac! la femme
aux œufs! Agud’s dé moun cousè, c’est à mon cousin, cela
appartient à mon cousin.
Dér. de la prép. lat. De.
Dé, s. m. Dim. Dété; augm. Détas. Doigt, partie longue
et mobile de la main ou du pied. — Lou dé déou pous, le
pouce, mot à mot le doigt du pouls. Un travè dé dé,
l'épaisseur d'un doigt et non sa longueur : c’est une mesure
un peu idéale, qu'on emploie souvent par évaluation approxi-
mative. On dit Travè au lieu de Travès par pure euphonie :
les lettres $ et D ne se rencontrent jamais côte à côte dans
notre idiome. Un dé dé quicon, un doigt de large ou
d'épaisseur, une très-petite quantité, un rien, un œil de
poudre. Cdous? dou dé, choisi, trié au doigt, c’est-à-dire
choisi sur un très-grand nombre, avec soin, et par consé-
quent qui offre toute sorte de garanties sur sa qualité. Ma
mostro vaï dou dé, ma montre marche bien parce que je la
règle à chaque instant du doigt. Dé dé pa, doigtier, doigt
de peau formé d'un doigt de gant, dont on fait un étui pour
un doigt malade ou blessé.
Dér. du lat. Digitus, par une forte contr.
Débana, v. Dévider, au pr.; au fig. dépôcher, — Zi
#
DEB
débanarièï las tripos! menace d'horrible vengeance, comme
si l’on faisait vœu de dévider les beyaux d’un ennemi après
les avoir arrachés. Débana uno histouèro, raconter une
histoire, un conte, avec volubilité. Bé n'avès D ct: vous
en avez joliment dégoisé.
Ce mot vient-il de l'esp. Devanar, de l’ital. ausd
ou du bas-bret. Dibana, qui ont la m. sign.; ou bien sa
racine est-elle simplement dans notre propre idiome? La
Bano signifie l'aile ou le volant d’un tour à filer la soie; et
le dévidage ne consistant qu’à enrouler sur le roquet la soie
qui est sortie du tour ou de la Bano, le verbe pour expri-
mer cetle opération ne s’est-il pas foriné de là?
Débanaïre, s. m. Dévidoir, mstrument qui est de diffé-
rentes formes suivant l'œuvre de dévidage auquel il est
destiné. Lorsque c’est du fil en fuseau qu'il s’agit de dévi-
der en écheveau, il est composé d’un bâton de deux pieds
environ, pointu par le haut-bout, traversé par une broche
vers chaque bout; les deux broches formant angle droit
l'une-à l'autre : on fait courir le fil de l’une à l’autre de
ces broches, en tournant le dévidoir de la main gauche,
pour que chaque broche le reçoive à son tour, tandis que
la droite dévide le fuseau et accompagne le fil sur chacune
des quatre branches. Cet outil s'appelle proprement Esca-
vêl.
Lorsqu'il s'agit de dévider un écheveau en peloton, on le
dispose dans une espèce de charpente de forme presque
circulaire que l’on élargit à volonté à la largeur de l'éche-
veau. Ce dévidoir tourne sur un pivot ou tringle en fer, et
il est mis en mouvement par le seul tirage du fil qui se
dévide sur le peloton qu’on tient de la main gauche, tandis
que la droite manie le fil et l'y dispose régulièrement. On
donne différentes formes à cette charpente, qu'on replie
quelquefois comme un parapluie; mais le mécanisme est
toujours le mème. Cette dernière espèce de dévidoir se
nomme Guindre. — Voy. C. m.
Un proverbe a dit : Tout home qué noun vôou gaïre, on
lou bouto dou débanaïre; on met au dévidoir un homme
qui n’est pas propre à grand’chose. Celte opération méca-
nique n’exige pas en effet un fort déploiement de forces
musculaires ni de combinaisons intellectuelles. Mais la
complaisance ou d'autres raisons peuvent amener à se
prêter à ces fonctions; et le proverbe ne préjuge rien. v
Débanaïro, s. f. Dévideuse. C’est une profession dans
. les pays de fabrique et d'ouvraison de la soie. Au fig. bavarde,
qui en dégoise.
Débanage, s. m. Dévidage; action de dévider; profession
de dévideuse; frais du dévidage.
Débanaduro, s. f. Le fil ou la soie qu'on a dévidé, ou
qui est à dévider.
Débas, s. m. el adv. de lieu. Le bas, ce qui est en bas;
bas, en bas; au-dessous. — Zou débas d’un oustdou, le
rez-de-chaussée d’une maison. Dé qué fasès débas? Que
faites-vous en bas? — Voy. Bas.
Débas, s. m. Dim. Débassé ou Débassoù ; au pl. Débasses.
ee, 1
DÉC
Bas, vètement des jambes. — Un parél dé débasses, une
paire de bas. Prén toun débas, tricote. À uno maïo a soun
débas, elle a une maille qui a filé à son bas; son bas est
percé; au fig. sa renommée a reçu un échec.
Ce mot, comme son correspondant fr., vient de cette
expression : bas-de-chausses, comme les culottes se nom-
maient haut-de-chausses ; ou a seulement supprimé chausses.
_ Débassaire, aïro, s. plutôt qu'adÿ. Faiseur de bas, et
non point bonnetier, chaussetier ni fabricant de bas; car
ces trois derniers mots désignent le commerçant qui fait
confectionner des bas, des bonnets, etc.; tandis que le
Débassaïre est simplement l’ouvrier qui les tisse lui-mème,
avec un métier à bas. — Voy. Brando-nicouldou ,
Branda.
Débasta, v. Dévaster; casser; briser. — Ce mot n'en-
traine qu'une idée de fureur, mais non de rapine; celui qui
accomplit cet acte n'emporte rien au dehors.
Dér. du lat. Vastare, dévaster.
Débita, vw. Débiter sa marchandise; vendre en détail;
s'en défaire couramment; débiter un sermon, un discours
quelconque; débiter, diviser, subdiviser en parties menues,
surtout du bois, en terme dg menuisier.
Dér. du lat. Debito.
Débito, s. f. Débit; vente au détail, surtout du vin. —
On dit aussi : Soun vi a bon débi, son vin a du débit; mais
c'est sacrifier à l’idole franchimande : le vrai mot conservé
par les vrais languedociens est Débito, au fém
Dér. du lat. Debitor, débiteur, parce qu'autrefois ce mot
x io ne s'appliquait qu'à la vente à crédit, vrai et seul
4 pour le petit commerce de détail de vendre beau-
coup, vite et cher.
Débitou, Débitouno, s. Débiteur. — Encore une con-
cession au fr.; le véritable languedocien dit Créanciè, qui
convient aussi bien au titulaire d'une dette passive qu’à celui
d’une dette active. C'est sans doute la nécessité de distin-
guer le créancier du débiteur qui a entrainé à cet emprunt.
Débuta, v. Débuter; entrer en matière; faire son pre-
mier pas dans une entreprise, dans une affaire, dans une
carrière. — Lou véirén à soun débuta, nous verrons à sa
manière d'entrer en conversation, où il en veut venir.
Ep. au fr. sans adopter ses autres acceptions.
Décado, s. f. Décade; le jour de décadi ; jour de repos,
dans le calendrier républicain ; assemblée que les autorités
tenaient ce jour-là. — Déou tèn dé La décado, du temps où
l'on tenait les assemblées décadaires, c'est-à-dire sous la
Convention et le Directoire, et non tout le temps que le
ier républicain a eu une existence légale; car il a
duré jusqu'en 1806, et cependant depuis le 48 brumaire
4799 et la constitution de l'an VAN, ces ridicules parodies
des solennités chrétiennes du dimanche étaient tombées
sous les sifflets du peuple et le dégoût du premier consul.
Ana à la décado, aller aux assemblées décadaires.
Le mot Décado était familier au peuple et il est resté
dans ses souvenirs, soit parce qu'on le forçait à chômer ce
DEC 245
jour-là, soit à cause des assemblées de ce nom où sou
destin était souvent discuté. Il n'en était pas de même pour
la nomenclature arithmétique des autres jours de la semaine
décennale, primidi, duodi, tridi, ete., qui ne lui apparais-
saient que sous forme de numéros. Aussi ne les connais-
sait-il pas alors, et il n’a pu ouvrir un crédit dans sa
mémoire pour eux. Ainsi ont été oubliés les noms des mois
qui sont de l'hébreu pour lui, moins encore ceux des légu-
mes qui remplaçaient les saints qu'il vénérait et qui ser-
vaient de patrons à ses enfants. La décade seule l'a frappé
et est restée dans ses souvenirs. Nous, les interprètes de
son langage, nous l’imiterons en cela.
Décado est évidemment un emprunt forcé du fr. qui l'a
pris lui-mème au gr. Asxée, àexddos, dixaine, parce que la.
décade ou la semaine décadaire était composée de dix jours,
dont le décadi était le dernier.
Décagramo, s. m. Décagramme, poids de dix grammes,
dans le nouveau système.
Emp. au fr. qui l’a tiré du grec.
Déçaï, adv. de temps. D'ici à; en deçà. — Déçaï qué
vêngo, avant qu’il arrive. Lou tène pas quite déçaï qué
m'ague paga, je ne le tiens pas quitte qu'il ne m'ait payé.
Déçaï et délai, adv. de lieu. De çà et de là.
Décalitre, s. m. Décalitre, mesure de capacité de dix
litres.
La nouvelle nomenclature décimale s'est impatronisée
dans le langage populaire. Nous prenons la langue en l’état
où elle se trouve.
Dér. du gr. Aëza, dix, et Atpa, livre.
Décémbre, s. m. Décembre, le douzième mois de l'année;
autrefois, le dixième seulement dans l’année des Romains.
En conservant son ancien nom, il est devenu le dernier de
la nôtre, qui commence en janvier, à partir de l'édit
donné par Charles IX, en 1564.
Dér. du lat. December, m. sign.
Déciala, v. Décéler; découvrir; divulguer; trahir un
secret; dénoncer; dénoncer un complot. — Déciala soun
ami, trahir son ami en divulguant le secret qu'il nous a
confié. Déciala la mécho, éventer la mèche.
Formé de la part. négative De et du lat. Celare, cacher.
Décida, v. Décider; déterminer; résoudre; porter un
jugement. — Sé décida, se.délerminer à. .., se décider, se
résoudre.
Dér. du lat. Decidere, m. sign.
Décida, ado, adj. Dim. Décidadé.
hardi; résolu.
Découpa (Sé), v. Se couper; se contredire dans ses
paroles, dans ses déclarations.
Formé de Coupa.
Découra, v. Décorer d'un ordre, de la Légion d'honneur
ou de la croix de Saint-Louis.
Emprunt politique au fr.
Décrè, s. m. Décret; loi; ordonnance émanant d'un
pouvoir exéculif suprême. Les lois faites sous la Conven-
Décidé; délibéré ;
246 DÉD
tion et le Directoire portaient le nom de décrets, soit
qu'elles eussent une portée organique générale, soit que
leur objet fût temporaire ou particulier. Le mot était en
parfaite analogie avec la chose; car c'était l'expression de
la majorité d'une assemblée, et il dérive du lat. Decretum, ,
de Decernere, donner son avis, son suffrage. Sous l'Empire,
le mot resta, mais non la chose; car ce n'était là que l'opi-
nion du bon vouloir. Depuis la Charte, ce mot avait été
banni et remplacé par ceux de loi et d'ordonnance, dont on
connaît la distinction. Avec 4848 et la suite, le décret est
revenu.
Le mot lang. est encore un emprunt politique: le peuple
a eu trop à faire avec les décrets, et ils se sont trop multi-
pliés, pour n'avoir pas emprunté une expression qui en
rende le sens.
Décrouta, v. Décrotter: ôter la crotte; enlever la boue
de la chaussure; cirer les bottes.
Emp. au fr.
Décroutur, s. m. Décrotteur.
Dé d'aïçaï, adv. de lieu. De ce côté-ci, avec mouvement
d'un lieu à un autre; c’est-à-dire qu'il est relatif à une per-
sonne qui se trouverait dé d'ailaï, séparée par un mur, un
cours d'eau, un fossé, etc. — Vène dé d'aïcaï, passe de ce
côté-ci.
Dé d'aïlaï, adv. de lieu et de temps. De ce côté, de
l'autre côté; au-delà; par-delà. C'est le contre-pied de
l'article précédent. — Démoro dé d'aïlaï, il habite de
l’autre côté de la rivière, de la montagne. L'an dé d’aïlaï,
l’année avant-dernière. La gnuè dé d'aïlai, V'avant-dernière
nuit. Dé d'ailaï l'aïgo, de l’autre côté de l'eau, de la
rivière.
Dédâou, s. m. Dim. Dédalé; augm. Dédalas. Dé à
coudre.
Dér. du lat. Digitale. En esp. Dédal; en ital. Ditale.
Dédénta, v. Édenter; rompre, casser les dents. — Low
diable té dédénte, le diable te casse la mâchoire.
Dédénta, ado, part. pass. Édentée, qui n'a plus de
dents.
Formé de la part. négative De et du lat. Dens, dentis,
dent.
Dédin, s. m. et prép. Le dedans, la partie intérieure
d'une chose; dans, dedans, au-dedans. — Lou dédin, Vin-
térieur. Garda lou dédin, rester assidûment chez soi, ne
pas sortir. Faïre lou dédin dé l'oustéou, avoir soin du
ménage, faire le travail intérieur d’une maison, ce qui est
l'apanage d'une ménagère, par opposition dou déforo, qui
est le lot du mari et des hommes.
Il est difficile de préciser une distinction entre les diffé-
rents usages de ce mot et ceux de la prép. Din, qui sont
parfaitement synonymes dans certains cas: ainsi on dit
également : Din ma pocho et dédin ma pocho, din soun
oustäou et dédin soun oustäou. A1 faut seulement remarquer
que Din est plus générique, qu'il se plie à presque toutes
les acceptions du Dans fr. et du An lat. Dédin a le privi-
DEG
lége de pouvoir figurer à la fin d’une phrase comme le
Dedans fr., ce que ne peut faire son concurrent ; il peut
encore se substantiver, lou dédin. Exemple : On y és pas
dédin, on n’est pas dedans, répondrait-on à quelqu'un qui
vous reprocherait d’avoir acheté un mauvais melon. Laïssè
soun casquou et lou dédin, il laissa son casque et le con-
tenu, a dit La Fare. L'un et l’autre mot prennent un C
final lorsqu'ils se heurtent avec une voyelle au mot qui
suit : toutefois Dédin ne prend pas cette consonne lorsqu'il
devient substantif. On dit Dédine uno houro, dans une
heure, et Lou dédin és bièn propre, l'intérieur est très-
propre.
Formé du lat. De intus, en dedans.
Dé-fè, adv. De fait; en effet; par le fait.
Défés, adv. de temps et de nombre. Parfois; quelque-
fois. — Voy. Fés.
Défila, v. Défiler; marcher par file; s'en aller l’un après
l’autre.
Formé de la prép. Dé et de Fila.
Défléciou, s. f. Ne s'emploie qu’en y joignant dé péitrino,
pour signifier : fluxion de poitrine.
Le mot n’est au reste qu'ung corruption du fr. à l'usage
seulement du populaire.
Déforo, s. m. et adv. de lieu. Dehors, qui n'est pas
dedans ou à l’intérieur; dehors. — Lou déforo, l'extérieur,
par opposition dou dédin. Aimo lou déforo, il aime à
prendre la clé des champs. Lous homes fan lou déforo, les
hommes font le travail des champs. Ana déforo, s’absenter,
aller en voyage. Déforo Franço, hors de la France. Déforo!
interj.: Hors d'ici! Sortez. Dé pér déforo, adv., du dehors:
Dér. du lat. Foras, m. sign.
Dégas, s. m. Dégât; ravage; ruine: perte; destruction .
Dér. du lat. Devastare, dévaster.
On remarquera ici une de ces permutations assez fré-
quentes dans le lang. et que la moyenne latinité et le roman
avaient déjà consacrées, le changement de V en &, comme
dans Vasco, Gascoun, gascon; Vardo, Gardoù, Gardon. La
loi n’est pas sans exception, puisque les exceptions confir-
ment la règle au contraire. L'euphonie en a décidé ici
comme en beaucoup d’autres cas.
Dégatia (Sé), v. Se disputer une chose; n'être jamais
d'accord; vivre en mauvaise intelligence avec quelqu'un
qui est dans notre intimité; se quereller.
Ce mot, qui correspond à Sé capigna, n’aurait-il pas aussi
quelque rapport étymologique avec lni? Dans quelques
dialectes, Ca et Ga sont synonymes pour signifier chat : Sé
dégatia viendrait donc de la façon de vivre des chats, qui
s'agacent et s'égratignent, comme le fait entendre notre
verbe.
Dégavaïa, ». Détruire; gâter ; laisser perdre par sa faute ;
dissiper sa fortune.
Dér. de Dégas.
Dégavaïaïre, aïro, adj. Dissipateur; prodigue; dépen-
sier; en parlant d’une femme, mauvaise ménagère.
tn Re. À
DÉG
Déglési (Sé), v. Se disjoindré; s'entr'ouvrir; bâiller;
se dit des futailles, cuves ou vaisseaux en bois, dont les
douves, après qu'ellés sont restées quelque temps vides, se
déjoignent et bäüllent par la sécheresse, et que, pour être
employées de nouveau, on a besoin d'imbiber, Émbuga.—
Déglési quéouquus, c'est ce qu'on appelle, en argot, démolir
un homme.
* Déglési, ido, part. pass., au fig. défait, exténué par le
besoin ou la maladie / Voy. Adéli); rompu des coups que
l'on s'est donnés où que l'on a reçus.
Formé du lat. Glis, glaïse, parce qu'on enduisait autre-
fois de terre glaise les futailles pour les empêcher de couler
et de suinter; et de la part. privalive De.
Dégoù, s. m. Dim. Dégouté. Goutte; gouttelette; suinte-
ment de l'eau pluviale à travers les rochers, on du vin à
travers les douves d'une futaille; eau des toits qui tombe
goutte à goutte. — Voy. Té.
Dér. du lat. Gutta, m. sign.
Dégoubia, v. Dégobiller, vomir.
Emp. au fr.
Dégouïado, adj. f. Grasse; réjouie; un peu hardie, un
peu débraillée ét assez lurée:
Dér. du vieux mot Gouïo, jeune fille, féminin de Gouïa,
dont on a formé Goujar, c'est-à-dire qui a perdu la timi-
dité et la pudeur du premier âge.
Dégourdi, v. Dégourdir; tirer de l'engourdissement;
réveiller; raviver; rendre tiède, — Faïre dégourdi l'aïgo,
faire légèrement chauffer l’eau, la dégourdir. Dégourdis tas
cambos, donne de l'exercice à tes jambes. Couménço bé dé
sé dégourdi, il commence à prendre de l'usage, à se faire
aux habitudes sociales, à prendre de le ruse, de la finesse ;
il se dégourdit.
Dégourdi, dido, adj. et part. pass., éveillé; rusé; luron.
Formé de la part. privative De et de la bass. lat. Gurdus,
lourd, stupide.
Dégoüs, s. m. — Voy. Désgoùs, qui est plus technique.
Dégousta, v. — Voy. Désgousta.
” Dégouta, v. Dégoutter; couler goutte à goutte. — Sé
noun pléou dégouto, prvb., s'il ne pleut pas, il bruine;
dicton dont on se sert pour dire qu'on gagne toujours
quelque chose où qu'il vient toujours quelque chose, si
peu que ce soit, du travail ou de la patience qui sait atten- |
dre l’ondée et se contente de la plus légère pluie.
Le sens mème s'étend un “pen plus ou exprime encore
autre chose : ro.
Le pècheur qui remplit peu sa gibecière, mais qui peut
: he de temps en temps”come Sancho” péche toujours qui
en prénd un ;
LRmarchand que quelques p'AtqReS) rater ion oo:
solent de la vogue de ses concurrents; |
Le dévot à la loterie qui vivote d'éxs et 14 dpi
jamais l'ambe ;
L'agriculteur à qui la grèle a laissé une demi-récolte
quand il la croyait perdue tout entière;
DÊJ
Le collégien qui rate de nouveau le prix d'excellence et
va chercher son troisième accessit;
L'avocat des petites causes qui pelote en attendant partie;
Le poursuivant du gros lot ou du lingot d'or dont le
numéro gagne quelques couverts Ruolz ;
Le modeste employé qui touche son mois de cent francs
immédiatement après son chef de bureau qui vient d’émarger
le sien de mille;
Tous ceux enfin à qui échoît une chance au-dessous de
leurs prétentions sans doute, mais passable encore, peuvent
dire : Sé noun pléou dégouto, qui est le mot de satisfaction
ou de résignation du gagne-petit en tout genre.
Formé de De et du lat. Gutta.
Déguisa (Sé), ». Se masquer; prendre un déguisement
au carnaval ; se travestir.
Formé de De privatif, et Guiso, manière.
Dégus, s. pron. et udj. — Voy. Déngus.
Déima, v. Lever la dime. — On le dit ironiquement
d'un grapilleur qui lève en pillant un grave impôt sur les
récoltes.
Déimaje, s. m. Collecte de la dime; temps où elle se
levait; la viguerie ou le territoire sur lequel le bénéficiaire
avait droit de l'exercer.
Dèime, s. m. Dime : droit qu'avaient autrefois les hauts
bénéficiers du clergé sur certaines récoltes dans toute
l'étendue de leur bénéfice ou de leur dimerie. Ce droit était
quelquefois du dixième de la récolte brute, sans prélève-
ment des frais de culture; d'autres fois, et le plus souvent,
il était du quinzième et même du vingtième. La levée ou
collecte s’en faisait à l'époque mème de chaque récolte et
en nature. Ordinairement ce droit était affermé à un fermier,
qui l'exerçait toujours avec sévérité, souvent avec extor-
sion, comme certains fermiers des octrois actuels; tandis
que lorsque ce droit était exercé par les agents directs du
bénéficier, il l'était plus paternellement. Du reste, il est
aisé de voir combien il était facile d'éluder la rigueur d'un
pareil exercice et d’y soustraire une partie de la récolte: Le
lien moral et religieux était la plus sûre et à peu près la
seule garantie du titulaire : à la vérité l'Église avait mis
l'obligation de payer dans ses commandements, et dans ces
temps de foi, cela suffisait.
Dér. du lat. Decima, sous-entendu Pars.
Dèïmiè, s. m. Collecteur ou fermier de la dime.
Déjouqua, v. Déjucher; dénicher; faire dégringoler;
déloger ; dégoter. — Voy. Jouqua.
Déjuna, v. Déjeuner; rompre le jeûne. — Pour les cul-
tivateurs, le déjeuner est le second repas de la journée; le
premier, qui suit immédiatement le lever el précède tous
les travaux, s'appelle Twio-vèrme {Voy. c. m.). Dans
l'hiver et l'automne où l'on supprime un repas, c'est le
déjeuner qui est élagué. Le repas qui suit le Tuïo-vèrme, et
qui se prend sur les neuf heures du matin, se nomme Low
dina.
Dér. du lat. Jejunium, jeûne.
247
248 DÉM
Déléouse, n. pr. d'homme. Au fém. Déléouso où Déléou-
sésso; dim. Déléousé, Déléouséto; traduit aujourd'hui par
Deleuze. — Dans les vieux actes écrits en lat. on le ren-
dait par de illice, de l'yeuse, du chène vert. On voit évi-
demment que le mot lang. est tout à fait la traduction
littérale du nom latin, et que ce mot a pris naissance dans
le terroir de notre idiome. Le français a été embarrassé
pour ce nom comme pour beaucoup d’autres; il n’a pas
voulu remonter à l’étymologie qui l'aurait conduit à de
l'yeuse, de peur de n'être pas compris; d’autre part, il ne
pouvait imposer à son génie la diphthongue éou qui ne lui
va pas; il en a fait lout bonnement le barbarisme Deleuse,
qui ne répond à rien, mais qui a le mérite de s'éloigner le
moins possible de l’idiome originaire, tout en conservant la
consonnance française.
Déli, s. m. Joint d'un lit de pierres; la fissure qui sépare
une assise de rocher de celle qui lui est superposée et par
où on peut détacher celle-ci par le moyen d’un levier.
Dér. de Déslia.
Délia, ado, adj. Délié; adroit; subtil.
Déliado, s. f. Mème sign. que Déli. — Es pas que dé
déliado, ce terrain n’est composé que de couches de pierres
superposées qui peuvent facilement se disjoindre.
Délibéra, ado, adj. Décidé; hardi; sans timidité.
Délinqua, v. Fuir; vider le plancher; s'esquiver; man-
quer à l'appel. — Se dit surtout de quelqu'un qui s’est
sauvé préventivement à toute recherche de sa personne pour
l'arrêter ou le châtier.
Dér. du lat. Delinquere, faire une faute, manquer ; aban-
donner; quitter; fuir.
Délivranço, s. f. Délivrance; débarras. — Bèlo déli-
vranço! dit-on, lorsqu'on est débarrassé d’un fàcheux,
d’un importun, ou de quelqu'un qui est à charge, soit par
sa mort, soit par son départ.
Dér. du lat, Liberare, m. sign.
Déluje, s. m. Déluge; le déluge universel; grande pluie
d'inondation.
Dér. du lat. Diluvium.
Délura, ado, adj. Luron; subtil. — Se dit particulière-
ment, au fém., d’une femme qui a de la finesse et certaine
hardiesse qui lui donne la conscience de son savoir faire;
tandis que, au masc., Lura ne signifie guère autre chose
que rusé, matois.
Déman, adv. de temps. Demain, le jour qui suit immé-
diatement celui où l'on est. — Après-déman ou passa-
déman, après-demain. Déman mat}, demain matin. Déman
dou souèr, demain soir.
Dér. de la bass. lat. De mane pour Manè.
Démanda, v. Demander; questionner; s'enquérir ; exiger.
— Quâou démando? Qui frappe à la porte? Démanda
quant'houro és, s'informer de l'heure. Aqud démando dé
coïre, cela exige d'être bien cuit. Démanda soun pan, ou
simplement Démanda, mendier. Qué mé déou mé démando,
celui qui me doit me demande paiement : phrase prvb. qu'on
DÉM
emploie contre quelqu'un qui nous fait un reproche qu'il
mérite plus que nous.
Dér. du lat. Mandare, donner ordre, commission. Dans
la bass. lat. ce verbe et son composé Demandare signifiaient
aussi demander.
Démandaïré, aïro, adj. Queslionneur; quémandeur;
solliciteur; mendiant ; qui aime à emprunter.
Démando, s. f. Demande; question; interrogation ;
demande en mariage. — Ma fio a foço démandos, ma fille
a beaucoup d’aspirants à sa main. Faïre uno démando,
commissionner un achat de marchandise; déclarer le prix
qu'on demande d’une chose. La sédo a fogo démandos .
aquéste moumén, la soie est fort recherchée en ce moment;
on a reçu force commissions d'achat.
Déména (Sé), v. Se débattre; s'agiter; se démener,
comme fait quelqu'un que l’on conduit par force; résister
à la force qui vous emmène. — Sé déméno coumo lou diable
dinc un bénitiè, il se démène comme le diable dans un
bénitier.
Formé de la particule oppositive De et du v. Ména.
Déménésconte, adj. — Voy. Ménésconte.
Dé miè, dé mièjo, adj. À demi-plein, à moitié. — És
toujour pléno ou dé mièjo, cette femme est toujours enceinte,
elle n’accouche que pour recommencer.
L'adj. Miè a la même acception. La différence entre ces
deux mots, c'est que le dernier précède le substantif auquel
il s'accorde, tandis que Dé miè le suit : on dit Un mi
véire, un demi-verre, et Moun véire és dé miè, mon verre
est à moitié ou mi-plein. Une autre différence entr'eux,
c'est que Miè a une acception plus large et signifie demi
dans presque tous les cas; tandis que Démiè n’est employé
que pour les objets de capacité et se renferme dans le sens
de demi-plein.
Dér. du lat. Dimidius, moitié.
Démoun, s. m. Dim. Démouné où Démound. Démon. —
Ne se dit qu'en poésie ou dans le genre grave, sérieux, phi-
losophique : le lang. alors appelle le diable ou démoun ;
mais le mot est fort usité au fig. — Aquél éfan és un
démoun, cet enfant est un vrai démon.
Dér. du gr. Acluuwv, génie, intelligence.
Démounta, v. — Voy. Désmounta : meilleur.
Démoura, vw. Demeurer; habiter, loger; rester; rester
tranquille. — Démoro à Nime, il habite Nimes. Démoro don
Mérea, il est logé au Marché. Mounté as tant démoura? Où
es-tu tant resté? As hé démoura, tu as bien tardé. Sé vos
pas véni, démoro, si tu ne veux pas venir, reste. Démouras,
finissez donc, restez en repos. Aquél éfan démoro émbé quâou-
que sièquo, cet enfant s’habitue avec tout le monde, il se
laisse garder par le premier venu. Manjaras d'aquè ou
démouraras, tu mangeras de cela ou tu jeüneras.
Dér. du lat. Morari, tarder; attendre; mettre de la len-
teur.
Démpièi, ou Désémpièi, adv. ét conj. Depuis; depuis ce
temps-là; depuis que. — És maldoute démpiài lous magnas,
DEO
il est malade depuis la saison des vers à soie. Démpièr
qu'anère à la fiètro, depuis que je suis allé à la foire. Marche
démpièi Nimes, j'ai marché de Nimes jusqu'ici. Démpièi
Anduso jusqu'à Sén-Christéou a pas fa qué pléoure, il n'a
pas cessé de pleuvoir d'Anduze à Saint-Christol.
La différence entre Démpièi et Désémpièi, qui pourtant a
la même portée, c’est que le premier ne se place jamais à la
fin d'une phrase ou d’un membre de phrase, position qui
convient parfaitement au second : cela tient sans doute à
quelque délicatesse d'acoustique difficile à saisir. On dit :
Y-anère l'an passa, y soui pas tourna désémpiéi, et non pas
démpië; j'y fus l'an dernier, je n’y suis pas retourné
depuis
Dér. de la bass. lat. De post, m. sign., tiré du lat. clas-
sique avec la prépos.
+ Dén, s.f. Dim. Déntéto, Déntioù ; péjor. Déntasso. Dent,
chacun des petits os recouverts d'émail, implantés dans la
mächoire, servant à mâcher. — Faï dé déns, les dents lui
poussent, lui percent. Gn'a pas pér ma pichoto dén, il n'y
en aurait pas là pour mon déjeuner, pour une dent creuse;
ce travail est une bagatelle pour moi; ou bien : cet ennemi
est trop faible pour moi; je l’avalerais d'une bouchée. Mdou
dé dén, mal aux dents. Soubrédén, surdent { Voy. c. m.).
Dounèn un for co dé dén, nous fimes grande chère. Y-a un
co dé dén à douna, il y a un régal à faire. Faï cruci
sas déns, il grince des dents. Garda uno dén, garder ran-
cune. Aï/ dé ma dén! Aïe! ma dent! expression qui s’em-
ploie également comme un cri de douleur, dans une rage de
dents, ou comme exclamation de crainte, de pitié, de com-
patissance. 4h/ povero!
Dén, s.[., siguifie aussi une pointe de rocher, un chicot,
qui s'élève à fleur de terre.
Dér. du lat. Dens, m. sign.
Déngus, ou Dégus, ou Dingus, pron. indéfini, masc.
Personne. Quoique ce mot ne s'applique qu'à une phrase
négative, il n’entraine pas la négation avec lui et il faut
toujours l'y joindre. — Y-a pas déngus, il n’y a personne.
Déngus dousara pas où noun dousara, personne n'osera.
En espag. Dalguno, aucun ou d'aucun, qui vient lui-même
du lat. Aliquis unus, quelqu'un.
Déntado, s. f. Coup de dent, morsure; empreinte que
laisse la dent sur le corps qu'elle a mordu.
» Déntâou, s. m. Sep d’un araire : c'est une langue en bois,
terminée en pointe, sur laquelle est établi le soc aux deux
tiers de sa longueur, et à DE fixe par le moyen
des Téndios. — Voy. c. m.
_ Déougu gudo, part. pass. Fsrcine Dù, due.
Déoure, v. Devoir, avoir des dettes : être redevable; être
obligé. — Coumo sé ‘déou, comme il faut. Dans les temps
où le préjugé de la naissance était dans toute sa vigueur, on
“appelait les nobles les gens comme il faut; le lang. disait :
Dé mounde coumo sé déou , c'est comme si l’on disait : des
gens comme il les faut, comme ils devraient être tous. Cette
phrase beaucoup trop exclusive, est encore employée par les
DÉQ 249
gens riches entr'eux en parlant de leurs consorts. Y-aï parla
coumo sé déou, je l'ai tancé d'importance. Qudou mé déow
mé démando, quiest mon débiteur me demande de le payer.
Jouga à déoure, jouer sur parole.
Dér. du lat. Debere, m. sign. ,
Déoute, s. m, Dette; ce que l'on doit; créance, ce qui
est dù. — Un michan déoute, une créance véreuse. Tout és
dé sous déoutes, ses dettes absorbent son avoir; son bien
appartient tout entier à ses créanciers. És manja das
déoutes, il est criblé de dettes; il est dévoré par ses dettes.
Dourmi coumo un vièl déoute, dormir comme une mar-
motte : traduction par équivalent.
Dér. du lat. Debitum, m. sign.
Dépäousa, v. Déposer, témoigner en justice; faire une
déposition en justice. — Dans le sens de dépôt, Dépdousa
serait du pur franchiman.
Dér. du lat. Deponere.
Dépäousiciou, s. f. Témoignage, déposition en justice.
Départamén, s. m. Département, division territoriale,
Emp. au fr.
Dé-pér-él, adv. De lui-même ; de son propre mouvement;
volontairement; par ses seules forces; sans l'aide d'autrui.
— Aquél âoubre és véngu dé-pér-él, cet arbre a poussé
naturellement, sans. avoir été planté ni semé. Ou a fa dé-
pér-él, il l'a fait de lui-même, il n'a été ni poussé, ni aidé,
Dé-pér-én-créire, ado. Pour plaisanter, pour rire; pas
tout de bon; par jeu. — Voy. Crévre.
Dé-pér-énsin, adv. Ainsi; en conséquence; par consé-
quent; comme ainsi soit.
Députa, s. m. Député; membre de la Chambre des
députés.
Emp. au fr.
Dé-qué, s. m. et pron. interr. Le nécessaire; de quoi
vivre; que? quoi? à quoi? de quoi? qu'est-ce que? — Low
dé-qué, le nécessaire. Y manquo pas qué lou dé-qué, ilue lui
manque que l'argent nécessaire. À bièn dé-qué, il estfort
dans l’aisance. Dé-qué voulès? Que voulez-vous? Dé-qué
pénsas? À quoi pensez-vous? Dé-qué sé mèlo moun ca? De
quoi veut se mêler le petit chat? phrase prvb., fort usitée
lorsqu'un enfant, une personne faible ou peu capable veut
se mêler à un acte, à une conversation, au-dessus de sa
portée. Sa pas dé-qué dis, il ne sait ce qu'il dit. Sdoupéquè
pas dé-qué dire, il fut interdit, il ne sut que répondre. Sabe
pas dé-qué mé tèn, je ne sais ce qui me retient de... Dé-
qué sèn quan sèn mors, ce que c'est que de nous, quand
nous sommes morts. Dé-qué? Qu'est-ce que c'est? De quoi
s'agit-il ?
Dé qué-z-és qué-z-és? Qu'est-ce? Qu'est-ce que c'est?
Phrase faite, formule générale dont on fait précéder l'expo-
sition d'une énigme. On sent que le Z qui reparait deux fois
dans la contexture de cette phrase, n’est qu'explétif et
seulement dans l'intérêt de l'euphonie; le heurtement
redoublé des quatre é qu'il sépare ne serait pas supportable.
— Si dé qué-z-és qué-z-és est l’entête obligé de toutes les
32
250 DÉS
énigmes et charades que les sphinx villageois proposent à
la veillée, la terminaison, le refrain ordinaire en est : Dévi-
gnas-ou sans pénsa mou, cherchez, devinez sans songer à
mal. C'est qu’en effet, si le mot de l'énigme est d'habitude
très-innocent, la définition dont il est couvert est, autant
que faire se peut, à double sens et tourne peu ou prou à la
gaudriole, fort leste souvent. De là l'usage de la précaution
oratoire, avertissement assez charitable du reste pour vous
faire parfois songer à une malice qui sans cela vous aurait
échappé.
Déraba, v. Arracher; extraire; détacher avec force;
déraciner. — On po pas né rés déraba, on n’en peut rien
tirer, pas une parole de sa bouche. Déraba-né cé qué pourés,
tirez-en denier ou maille. Aquél vièl és pas dé bon déraba,
ce vieil avare est dur à la desserre. Déraba uno dén, arra-
cher, extraire une dent. Déraba un agaci, extirper un cor.
Déraba un éoubre, arracher, déraciner un arbre.
Dér. du lat. Deripere, m. sign.
Dérabado, s. f. Arrachis; quantité de choses que l’on
arrache en une seule séance.
Dérabaïire, aïro, adj. Qui arrache. — Dérabaïre dé déns,
dentiste; arracheur de dents. Y-vaï adéré coumo un déra-
baïre d’èsses, il ramasse tout minutieusement comme un
homme qui cueille de la vesce ; parce que ce grain est très-
menu et qu'on n’en fauche pas la tige; mais on l’arrache à
la main, ce qui est un travail minutieux.
Dérbése, s. m. Dartre, maladie de la peau, souvent avec
ulcération. — Voy. Endérvi.
Dér. du gr. Aépux, peau, cuir, épiderme.
Dérénja, v. Déranger; interrompre; importuner. —
Estre dérénja, ètre incommodé, avoir la santé dérangée.
Dér. de‘Rénja et la part. privative.
Dérévéia, v. Éveiller; réveiller. — Sé dérévéia, s'éveil-
ler, se réveiller.
Dér. du lat. Vigilia, veille, et le réduplicatif Re, de
nouveau.
Dérusqua, v. Oter l'écorce des arbres, principalement
des chènes verts pour en faire du tan. Au fig. éreinter;
frapper sur quelqu'un à lui enlever au moins l’épiderme. —
Sé dérusqua, se déchirer; s’écorcher; se meurtrir en tom-
bant; s’éreinter l’un l’autre. ‘
Dér. de Rusquo.
Dérusquado, s. f.Volée de coups de bâton, de bois-vert;
éreintement.
Désacrouqua, v. Décrocher. — Voy. Acrouqua.
Désagréable, ablo, adj. Désagréable; fàcheux; ennu-
yeux. — Voy. Agréable.
Désaméchi, ». Débrouiller les cheveux qui sont mêlés
en mèches poisseuses. — Voy. Améchi.
Désana, ado, adj. Défait; pâle, exténué, en parlant des
personnes; usé, élimé, hors de service, en parlant des
choses.
Formé de Ana, pris substantivement pour allure, habi-
tude du corps, et de la part. privative De,
DES
Désanqua, ado, adj. Déhanché, qui a la hanche dé-
boïtée,
Dér. de Anquo.
Désâoubéi, v. Désobéir; ne pas obéir à un comman-
dement, à un ordre; contrevenir à une loi.
Dér. de Aoubé?.
Désäoubéissén, énto, adj. Désobéissant; qui a l’'habi-
tude de désobéir.
Désâoubéissénço, s. f. Désobéissance; habitude, action
de désobéir. .
Désaparia, v. Dépareiller; séparer des objets qui sont
faits pour aller ensemble; désappareiller.
Dér. du lat. Disparare, m. sign.
Désapésa, v. Faire perdre pied. — Voy. Apésa.
Désarma, v. Désarmer, enlever à quelqu'un ses armes;
déposer les armes; mettre au repos la batterie d’un fusil,
d'un pistolet. — Voy. Arma.
Désarta, v. Déserter; abandonner son corps, son ser-
vice, en parlant d’un soldat; abandonner un lieu.
Dér. du lat. Deserere, m. sign.
Désartur, s. m. Déserteur; soldat qui déserte ou qui a
déserté.
Désassésouna, v. Dessaisonner un champ, une terre;
l’épuiser : ce qui vient d’un labour fait mal à propos et
hors de saison, ou du dérangement de l’ordre des assole-
ments. Les champs ainsi dessaisonnés perdent la semence
et ne produisent souvent que de mauvaises herbes.
Dér. de Sésou.
Désatala, vw. Dételer; détacher les bêtes de trait d’une
voiture, d’une charrette, d’une charrue, d’un char. — Voy.
Atala. d
Désavantaja (Sé), v. Perdre l'équilibre du corps; perdre
l'avantage de la position qu’on occupait : c’est ce qui
arrive quand on est en équilibre sur un arbre, sur une
hauteur quelconque et qu’un faux mouvement vous fait
perdre l’aplomb.
Dér. de Avantaje.
Désbadäoula, v. Ouvrir une porte à deux batlants. —
Sé désbadäoula, se crevasser; bâiller; s'entr'ouvrir comme
une figue que la pluie fait ouvrir.
Dér. de Badal.
Désbala, v. Déballer; ôter, défaire l'emballage; étaler
sa marchandise. — Sé désbala, se précipiter. Désbala un
fusil, tirer la balle d’un fusil.
Dér. de Balo, ballot, dans le premier sens; dans le
second, de la bass. lat. Devallare, descendre, formé de ad
vallem, vers le bas, vers la vallée; dans le troisième, de
Balo, balle de plomb, et De privatif.
Désbana, v. Couper ou arracher les cornes.
Dér. de Bano.
Désbanado, s. f. Petite hache à main : terme du dia-
lecte de Montpellier qui s'étend dans les localités occiden-
tales des Cévennes. On appelle ainsi cet instrument parce
que c’est une hache sans tête ni marteau.
DÉS
Désbarba, v. Arracher la barbe à quelqu'un, lui arra-
cher la moustache; le dévisager.
Désbarqua, v. Débarquer; arriver au gite; sortir de
voiture quand on est arrivé.
Désbata, v. Dessoler; enlever la sole à un cheval. —
Sé désbata, presser sa marche; courir à toutes jambes;
s'essouffler et se fatiguer à marcher.
Dér. de Bato. -
Désbérouia, v. Déverrouiller; tirer le verrou, l'enlever.
— La porto és désbérouïado, on a Ôté le verrou de la porte,
ou elle a perdu son verrou.
Dér. de Béroul.
Désbia, v. Dégarrotter une balle ou une charge de mulet,
de charrette ; défaire le garrot qui la serrait.
Dér. de Zio.
Désbiaïssa, ado, adj. Gauche; maladroit; sans tour-
nure; sans maintien.
Dér. de Biaï.
Désblasa, ». Oter la bave des cocons, l'espèce de bourre
blanche appelée Blaso (Voy. ©. m.) qu'on enlève avant de
les’filer, parce qu’elle ne ferait qu’augmenter le déchet des
premiers fils grossiers dont on purge les cocons avant d’ar-
river au brin pur de la soie. C’est le résidu de cette opé-
‘ration qu'on appelle Costos. — Voy. c. m.
Désblasairo, s. f. Ouvrière, fille ou femme, employée
à l'opération ci-dessus.
Désblétouna, v. Enlever le clou rivé d'un couteau. —
Coutèl désblétouna, couteau qui a perdu son clou rivé.
Dér. de Blétoù.
Désblouqua, v. Déboucler; dégraffer; ôter la boucle ou
les boucles d’une ceinture ou de courroies.
Dér. de Blouquo.
Désbouchina, ado, adj. Échevelé; qui a les cheveux
épars et en désordre.
Dér. de Bou, Boucho, bouc et chèvre, qui servent de
terme de comparaison à tout ce qui est sale et en désordre.
Désbounda, v. Débonder ou débondonner : ôter la bonde
d'une cuve, d'un tonneau. — Lou tindou s'és désbounda,
la cuve a fait partir sa bonde.
Au fig: Sé désbounda, se débonder; lâcher l’écluse à sa
colère, à ses secrets chagrins; se dégonfler; exhaler son
chagrin par les larmes et la confidence entière de ses in-
fortunes.
Dér. de Boundoù.
Désboutouna, v. Déboutonner, faire sortir les boutons
de leurs boutonnières. — Sé désboutouna, au fig. se dé-
boutonner; faire part de ses sentiments, de ses secrets; se
livrer avec confiance.
Dér. de Boutoù.
Désbraïa, v. Oter la culotte à quelqu'un. — Se dés-
braïa, se déculotter, se dévêtir; aller à la selle. Es tout
désbraïa, il est tout débraillé; salement ou indécemment
vêtu; mal ajusté.
Dér. de Braïo.
DÉS 251
Désbrida, v. Débrider:; ôter la bride à un cheval, à un
animal.
Dér. de Brido.
Désbroussa, w. Enlever, extirper les bruyères, qu'on
nomme Broussos. Dans les châtaigneraies, les arbres souf-
frent beaucoup de la présence de ces arbustes, qui y crois-
sent en abondance,
Désbura, v. Écrèmer le lait, en enlever la crème ou le
beurre.
Dér. de Bure.
Déscabéstra, ado, adj. Délicoté; qui a perdu son licou,
qui a rompu sa chaîne; au fig. évaporé; violent; sans
frein, comme un cheval échappé.
Dér. de Cabéstre.
Déscadäoula, v. Hausser le loquet; ouvrir une porte à
loquet.
Dér. de Cadäoulo.
Déscadéna, v. Déchainer; délier la chaine; rendre la
liberté.
Dér. de Cadéno.
Déscagnouta, v. Décoiffer une femme, une fille; lui
enlever sa coiffe. — Voy. Déscouïfa.
Dér. de Cagnoto.
Déscaï, s. m. Déchet, diminution qu'éprouve une mar-
chandise ou une denrée, soit par la manipulation, soit par
avarie, soit par la dessiccation.
Déscaïssa, ». Éprouver du déchet; diminuer de volume.
Opposé de Caïssa, qui signifie taller, multiplier.
Déscalada, v. Dépaver, enlever les pavés d'une rue. —
Au fig. manger gloutonnement, avec un vorace appétit. —
On dit : Manjo qué déscalado, où simplement déscalado,
en parlant de quelqu'un qui dévore, d’un goinfre.
Dér. de Calado.
Déscaladaïre, s. m. Dépaveur, qui n’est pas très-fran-
çais mais qui passa dans Ja langue politique après les jour-
nées de 4830, comme synonyme de révolutionnaire.
Déscambaïa, v. Oter les jarretières à quelqu'un. — Es
déscambaïa, les jarretières lui manquent ou elles sont
tombées. 4
Dér. de Cambaïe.
Déscambarloùu ou Déscambarlous, ado. A califour-
chon, à cheval sur quelque chose.
Dér. de Éscambarla.
Déscampa, v. Décamper; prendre la fuite; s'en aller
précipitamment.
Dér. du lat. Campus, champ.
Déscampéto, s. f. Ne s'emploie que de la manière sui-
vante : Préne la déscampéto, Où préne dé poudro dé dés-
campéto, s'enfuir; prendre la poudre d'escampette; pren-
dre la clé des champs.
Déscandalisa, ». Scandaliser; couvrir quelqu'un de
honte, le faire rougir.
Dér. du lat. Scandalum, scandale.
Déscâou, âousso, adj. Déchaux, déchaussé; qui n'a
952 DÉS
pas de chaussure; qui a ou marche les pieds nus. — Mar-
cha déscäou, aller nu-pieds. Es tout déscou, il n’a pas de
quoi acheter des souliers. Un pè-déscdou, un va-nu-pieds,
un vagabond. Es fach émb'aqud coumo un chi d'ana dés-
céou, il est habitué à cela comme un chien à aller nu-tête.
Dér. de Céoussa.
Déscäouquia, v. Dévaliser; mettre quelqu'un à sec, en
lui gagnant au jeu lout son argent.
Dér. de Cdouquio.
Déscâäoussa, v. Déchausser; Ôter la chaussure. — Ou
faraï bé sans mé déscdoussa, je le ferai, et sans grande
peine. Li parlarai bè amaï mé déscéoussaraï pas, je lui
parlerai sans mettre des gants, sans prendre de grandes
précautions de politesse.
On dit aussi: Déscdoussa un âoubre, Ôter la terre au
pied d’un arbre à une certaine profondeur pour lui enlever
les fils ou radicules, et lui donner du fumier plus profon-
dément.
Dér. de Céousso.
Déscaréma (Sé), v. Manger de la viande après le ca-
rême, ou même pendant les jours maigres; rompre l’abs-
tinence ou le jeune; par ext. faire une chose dont on est
privé depuis longtemps.
Dér. de Carémo.
Déscarga, v. Décharger; Ôter un fardeau, enlever une
charge; absoudre, acquitter. — Mé souï fa déscarga, j'ai
obtenu un dégrèvement d'impôt. Déscarga lou planche,
vider la place, se retirer.
Déscargo, s. f. Décharge, quittance; soulagement; dé-
charge d'armes à feu. — Bèlo déscargo, heureuse délivrance,
dit-on quand on se débarrasse d’un fâcheux. Témouèn à
déscargo, témoin à décharge.
Dér. de Cargo.
Déscarna, v. Décharner; Ôter la chair qui est autour
des os. — Un âoubre déscarna, un arbre que les pluies
ont déchaussé et qui montre ses racines. Un déscarna, un
homme qui n'a que la peau et les os.
Dér. de Car.
Déscassana, vw. Découdre, arracher la ceinture d’une
culotte ou d’une jupe.
Dér. de Cassano.
Déscastra, v. Chasser; détruire; extirper. — Déscastra
lous pésouls, lous ras, las michantos hèrbos, détruire com-
plétement les poux ou les rats, extirper les mauvaises
herbes. Pode pas mé déscastra d'aquél home, je ne puis me
débarrasser de cet importun.
Dér. du lat. Castrum.
Déscata, v. Découvrir; ôter la couverture d’un lit; en-
lever tout ce qui sert de couvert et d'abri. — Sé déscata,
perdre la couverture de son lit, la faire tomber en s’agi-
tant; se découvrir.
Dér. de Acata.
Déscatalana, adj. m. Ne s'emploie guère que pour :
Capèl déscatalana, chapeau rabattu, dont les bords ne sont
DÉS
pas agrafés ou relevés; et cela ne peut s'entendre que des
diverses formes de tricornes, comme en portaient tous les
hommes des champs, il y a quelques cinquante ans. Cette
mode des tricornes retroussés nous venait probablement
des Catalans. Autrefois on appelait ces chapeaux : Capèl
catalana, chapeau à la catalane. Le mot se perdit: ‘on les
appela plus tard : capèl gansa. L'expression déscatalana
seule est restée. On désignait aussi sous le nom de catala-
nos, les agrafes qui soutenaient les troussis. ‘
Déscato, s. f. Tranchée qu'on ouvre pour mettre à nu
un rocher, un lit de carrière.
Dér. de Déscata.
Déscavia, v. Enlever les chevilles. — Déscavia un à,
ôter les clés d’un lit.
Dér. de Cavio.
Déscindra, v. Décintrer; enlever le cintre ou la char-
pente qui soutient une voüte nouvellement construite.
Dér. de Cindre.
Désclava, v. Ouvrir avec la clé; détacher; ouvrir.
Dér. de Cléou.
Désclavéla, v. Déclouer; arracher les clous; détacher
une chose clouée.
Dér. de Clavéla.
Déscoucouna, v. Déramer les cocons, les détacher de la
bruyère, opération qu'op doit faire quatre jours au moins
après la montée des derniers vers, et quinze jours au plus
depuis que les premiers sont montés. Dans le premier cas,
en se pressant trop, on risquerait d'arrêter le travail des
retardataires, qui mourraient avant d’être transformés en
nymphes et resteraient sous leur forme première qui les a
fait nommer Douméisèlos; dans le second cas, les vers les
plus précoces pourraient s'être transformés en papillons,
parpaïouna, et avoir percé leur cocon, ce qui est une com-
plète avarie pour ce dernier.
Dér. de Coucoù.
Déscoucounaïro, s. f. Dérameuse de cocons : ce travail
est fait ordinairement par des femmes.
Déscoucounaje, s. ». Action de déramer les cocons.
Déscoufès, èsso, adj. Sans confession. — Mowri (dés-
coufès, mourir sans confession. Autrefois cela signifiait :
mourir ab intestat, c’est-à-dire sans avoir eu le temps de
faire des legs pieux, ce qui était considéré comme un
péché. Aujourd’hui cette acception est sans portée, et la’
phrase n’est connue que sous la première acception. "
Déscoufla, v. Désenfler; dégonfler. — Sé déscoufia, se
dégonfler, décharger son cœur d'un poids moral qui Pop-
presse, soit en s’ouvrant à un ami, à un confident, soit en
s'exhalant en pleurs ou en reproches.
Dér. de Coufla.
Déscougnéta, v. Enlever ou perdre la cheville ou le
petit coin de fer qui assujettit un outil à son manche.
Dér. de Cougnéta.
Déscouifa, v. Décoiffer; ôter la coiffe d’une femme; dé-
ranger sa coiffure. — Voy. Déscagnoula.
eds à à id GÉÈRS
DES
_Dér. de Coïfo.
+ Déscoula, v. Décoller; détacher ce qui était fixé avec
de la colle.
Dér. de Coula, coller.
Déscouléta, v. Décolleter; rabattre le col de son habit,
de sa chemise. — Aquélo réoubo déscouléto trù, cette robe
est trop décolletée, elle découvre trop les épaules ou la
poitrine. Au fig. donner de l'air, de la liberté.
Dér. de Couté.
Déscoumanda, ». Contremander; retirer une commis-
sion où une commande; décrocher, dénouer un lien quel-
conque dont l'extrémité est arrôtée, Par ext. on dit : sé
déscoumanda, de tout objet qui de lui-mème se dénoue,
se désunit, ou se déplace de la position où il était fixé.
Ainsi: Aquélwro sé déscoumando, ce rocher perd son équi-
libre, il se détache.
Sé déscoumanda signifie encore : perdre l'aplomb, la
* tramontane; ne savoir plus ce qu’on fait.
Dér. de Coumanda.
Déscounsoula, ado, adj. Inconsolable; aflligé; désolé.
Dér. de Counsoula.
Déscountugna, v. Discontinuer; cesser; suspendre un
travail, une entreprise.
Dér. de Countugna.
Déscouraja, v. Décourager; détourner de faire; abattre
le courage; faire perdre l'envie de.
Dér. de Couraje.
. Déscourda, v. Décorder, enlever les cordes d'emballage.
Dér. de Courda.
Déscourdéla, v. Délacer un corset.
Dér. de Courdèlo.
Déscourdura, v. Découdre; défaire une couture.
Dér. de Courdura.
Déscourduraduro, s. f. Décousure, qui ne doit pas être
confondue avec une déchirure, ni un accroc; mais la
rupture du point de couture.
Déscouvèr, s. m. Lieu découvert, sans ombrage ; lieu
exposé au soleil.
Dér. de Couvèr.
Déscouvèrto, s. f. Vide; perte; manque; fuite, — Aquél
home faï uno bèlo déscouvèrto, la mort de cet homme laisse
un grand vide dans sa famille. Faire la déscouvèrto d’un id,
enlever la courte-pointe d’un lit et faire déborder le drap
sur la couverture, ce qui se dit : faire la couverture du lit.
. Déscouvri, v. Découvrir; she es toiture d’une mai-
son pour la remanier.
A Son part. pass. ot ee Mél ain déscouvri,
_ Le part. pass. de tous les verbes réguliers en à accentué
_ est pareil à l’infinitif : règle générale.
… Dér. de Couvri.
Déscrouchéta, v. Décrocher; diese dal:
défaire un crochet ; détacher une agrafe. …
- Dér. de Crouchéta.
Déscrouchouna, v. Couper le quignon d’un pain.—Il y
DÉS 253
a de l'indiscrétion d'enlever ainsi la croûte tout autour de
ces grands pains de ménage qu'on appelle Tourtos, en ne
laissant que la mie du milieu.
Der. de Crouchoù.
Déscrousta ou mieux Escrousta. — V. c. m.
Déscrusa, v. Écruer du fil ou de la toile; leur enlever
cet apprêt, cette raideur qu'ils ont contractés dans le
filage, ou l'espèce de colle qu'on donne au tissage.
Dér. de Crus.
Déscrusado, s. f. Décrusement; lavage de viande;
bouillon dans lequel la viande n'a cuit qu'à demi, clair et
sans suc. — Lou bla crén la déscrusado, le blé ne réussit
pas bien sur des couches de terre trop fraichement renou-
velée et que l'air atmosphérique n'a pas eu le temps de
pénétrer. Uno descrusado, une volée de coups de bâton;
une perte éprouvée au jeu, ce qui se dit une lessive.
Désdénta, ado, adj. Édenté, qui a perdu ses dents, qui
n’a plus de dents.
Dér. du lat. Edentatus, m. sign.
Désdire, v. Dédiré; contredire; désavouer; affirmer
contre l’assertion d’un autre; démentir. — Sé désdire, se
rétracter ; retirer sa parole.
Dér. de Dire.
Désdoubla, v. Dédoubler; enlever la doublure.
Dér, de Doubla.
Désémbanasta, v. Oter les paniers d'un bât, ce qu’ on
nomme les Banastos.
Dér. de Émbanasta.
Désémbarassa, v. Débarrasser; vider un ustensile
quelconque, dont on a besoin, des objets qu’il contient
déjà.
Dér. de Émbarassa.
Désémbasta, v. Oter le bât d’un cheval. — Sé désém-
basta, terme de jeu, se décharger sur un nouveau joueur
de consommations perdues avec un précédent.
Dér. de Émbasta.
Désémbouia, v. Débrouiller; démêler les cheveux, des
écheveaux mêlés et entortillés; débrouiller une affaire,
l'élucider.
Dér. de Émbouïa.
Désémbriaïga, v. Dégriser, désenivrer.
Dér. de Émbriaïga.
Désémpacha, ». Débarrasser. — Voy. Désémbarassa et
Despacha.
Dér. de Émpacha.
Désémpégoumi, v. Laver, nettoyer quelque chose. de
poisseux ; démêler des cheveux collés par la sueur ou par
tout autre corps gras.
Dér. de Émpégoumi.
Désémpéita, v. Dépètrer; délivrer, dégager.
Dér. de Émpéita.
Désèémpésa, v. Désempeser; enlever l'empois du linge
en le faisant tremper,
Dér. de Émpésa.
954 DÉS
Désémpésouli, v. Délivrer, débarrasser quelqu'un de
ses poux ; en désinfecter ses habits.
Dér. de Émpésouli.
Désémpouisouna, v. Guérir quelqu'un du poison;
désinfecter; extirper les mauvaises herbes d’un champ,
l'en purger.
Dér. de Émpouisouna.
Déséndourmi, v. Dégourdir; tirer quelqu'un de sa lan-
gueur, de sa torpeur, de l’engourdissement. — Déséndourmi
soun pè, dégourdir son pied.
Dér. de Éndourmi.
Désénfanga, v. Débourber, désembourber; tirer du
bourbier, d'un mauvais pas, d’une position fàcheuse et
presque désespérée.
Dér. de Énfanga.
Désénfiala, v. Désenfiler; dépasser le fil d’une aiguille;
dépouiller une quenouille du chanvre prêt à filer.
Dér. de Fiala.
Désénfièira ou Désénfièiréja, v. Sortir, retirer le
bétail du champ de foire, soit pour livrer celui qui est
vendu, soit pour ramener celui qui ne l’est pas. Par ext. se
dit de toute marchandise qu’on emballe pour quitter la foire.
Dér. de Énfièira.
Désénfounça, v. Défoncer; enlever le fond d’une futaille.
Dér. de Founça.
Désénfourna, v. Défourner; sortir du four le pain ou
autres objets mis à cuire.
Dér. de Énfourna.
Déséngaja, v. Dégager; retirer un objet mis en gage;
donner la liberté, l’espace nécessaire à un objet gêné dans
ses mouvements, lrop resserré, pris et retenu à la gêne;
rompre l'engagement d’un soldat.
Dér. de Éngaja.
Déséngavacha, v. Dégager le gosier de ce qui l’obstrue;
faire passer la suffocation provenant d'un corps quelcon-
que qui a pénétré dans la trachée-artère, ou qui a picoté
la luette; dégager une clé de la serrure où elle ne tourne
pas; au fig. dégager, tirer d’embarras.
Dér. de Éngavacha.
Déséngourja, vw. Dégorger un conduit ou une bonde
engorgée.
Dér. de Éngourja.
Déséngrana, v. Écosser des pois et toute sorte de légu-
mes à cosse : par ext. délivrer des poux, de la vermine.
Dér. de Gran.
Déséngrava, v. Enlever le gravier que les eaux ont
entrainé sur un champ.
Dér. de Éngrava.
Déséngruna ou Éngruna, v. Égrainer, égrapper des
raisins.
Dér. de Grun.
Déséniassa, v. Désaccoupler du linge qu'on met en
liasse pour le passer à la lessive.
Dér. de Éniassa.
DÉS
Désénjassa, v. Déliter les vers à soie; leur enlever la
vieille litière qui, en se mêlant à leurs excréments, fer-
mente et peut leur causer de graves maladies. On doit
renouveler cette opération aussi souvent que possible;
mais elle est toujours indispensable au moment où les vers
entrent dans une de leurs mues, parce qu'alors ils restent
cachés dans la litière pendant le travail de ce dépouille-
ment, et si elle était échauffée par la fermentation, elle
augmenterait leur malaise, qui est une sorte de fièvre, et
leur constitution en serait très-sensiblement altérée.
Dér. de Jas.
Désénjassaje, s. m. Délitage; opération de déliter les
vers à soie.
Déséntéra, v. Déterrer; exhumer. — Sémblo un désén-
téra, il a la figure livide et terreuse comme celle d'un
déterré.
Dér. de Éntéra.
Déséntourtivia, v. Détorliller; détordre une corde, un
cordon.
Dér. de Éntourtivia. L
Désèr, s. m. Désert; solitude; lieu inhabité. — Ana
dou désèr, aller'au prèche, aux assemblées religieuses pro-
testantes qui se tenaient autrefois dans les champs et dans
les lieux les plus déserts et les moins fréquentés, à cause
de la persécution.
Dér. du lat. Deserere, abandonner.
Désèr, èrto, adj. Désert; inhabité, solitaire. Au fig. qui
est aux abois, qui ne sait plus où donner de la tête; aban-
donné.
Déséspéra, v. Désespérer; perdre l'espérance; cesser
d’espérer.
Dér. de Éspéra.
Déséspéssési, v. Allonger un liquide trop épais; éclair-
cir des plantes trop serrées.
Dér. de Espéssési.
Déséspouèr, s. m. Désespoir; perte de toute espérance.
Dér. de Éspouèr.
Déséstaja, v. Démonter les tables des vers à soie qui
sont disposées en étages les unes sur les autres.
Dér. de Éstaja.
Désfa, acho, adj. et part. pass. de Désfaïre. Défait : le
contraire de fait; démis, disloqué, luxé.
Désfaire, v. Défaire; détruire ce qui est fait. — Désfaire
lou fi, déranger le feu; l’éteindre en détisant les büches: |
Désfaïre las oulivos, pressurer les olives, faire de huile :
pour ce dernier objet, on dit simplement : désfaïre, tout
court.
Désfaïre dé favos, dé péses, elc., écosser des fèves, des
pois, etc. Désfaïre lous coucoùs, déramer les cocons. 11 en
est pour les cocons comme pour les olives : quand on dit :
désfaïre, tout court, cela veut dire, suivant la saison ou
suivant les précédents de la phrase, tantôt déramer les
cocons, tantôt presser les olives; cependant désfaïre est
plus technique pour ce dernier objet qui n’en a pas d'autre.
DÉS j
. Désfaïre soun bras, se disloquer, se luxer le bras. Sa pas
ni faïre, ni désfaïre, il ne sait ni lier, ni délier; il est
toujours indécis.
Dér. de Faire.
Désfaséire, séiro, s. m. et f. Dérameur des cocons ; pres-
seur des olives.
Désfata, v. — Voy. Ésfata.
Désfato, s. f. Défrichement partiel; champ nouvelle-
ment défriché.
Dér. de Désfaire.
Désfèci, s. m. Ennui; chagrin concentré; dégoût; mal
au cœur. — L'amouroùs désfèci, l'amoureuse langueur,
défaillance amoureuse. Aqud faï véni lou désfèci, c'est hor-
riblement dégoûtant. Lou désfèci m'arapo, le décourage-
ment me prend; l'ennui m'assomme; le mal au cœur me
gagne. Mé fasès véni lou désfèci, vous me donnez le cau-
chemar.
Dér. du lat. Deficere.
Désféndre, v. Défendre; prohiber; interdire.
. Désfénso, s. f. Défense, prohibition. — Métre soun bé
én désfénso, défendre aux voisins le pacage dans ses pro-
priétés; renoncer à la compascuité : ce qui s'indique en
marquant avec du lait de chaux des pierres ou des troncs
d'arbres qui servent de bornes au champ mis en défense.
Dér. du lat. Defendere, defensus.
Désféra, v. Déferrer, Ôter les fers; détacher un fer de
cheval, ou la ferrure d’une fermeture quelconque, d’une
charrette, etc. — Moun chival sé désfèro, mon cheval est
déferré.
Dér. de Fère, fer.
Désfèto, s. f. Rixe qui a de nombreux acteurs; bagarre
tumultueuse. — Aqud's uno désfèto, ce fut une fameuse
mêlée.
Ce mot vient du fr. défaite, dont l'acception est détour-
née.
Désfièia, v. Effeuiller; enlever les feuilles à un arbre,
à une plante : cela se dit de presque tous les arbres, ex-
cepté du mürier. On l'emploie surtout pour la vigne qu'on
effeuille quand le raisin commence à mürir, dans le but de
hâter et d'augmenter sa parfaite maturité.
Dér. de Fièio.
Désfigura, v. Défigurer quelqu'un; lui meurtrir le
visage; le rendre méconnaissable.
Dér. de Figuro.
Désfisa (Sé), v. Terme de jeu d'enfants : suspendre une
partie; se mettre un instant hors la loi du jeu; espèce
d’armistice pendant lequel les adversaires ne peuvent rien
entreprendre contre vous.
Dér. de Fisa, parce que par l’acte que désigne ce verbe,
on rend sa foi ei l'on rompt la sienne relativement aux
conditions du jeu. Le joueur qui veut faire ainsi dit: M’én
désfise; c'est à peu près comme le j'adoube aux jeux de
trictrac ou des échecs.
Désfounça, v. — Voy. Désénfounça.
DÉS 255
Désfourtuno, s. f. Malheur; accident malheureux; in-
fortune. — Diou nous garde dé désfourtuno, Dieu nous
préserve de malheur. Dé péou dé désfourtuno, crainte
* d'accident.
Dér. du lat. Fortuna.
Désfrisa, v. Défriser, défaire la frisure. Au fig. con-
trarier, dépiter; désenchanter; désappointer. — Agud mé
désfriso, cela me défrise, me contrarie, change ma joie en
tristesse. La frisure étant un signe de fête, de gala, la per-
dre, l'abattre est un signe de deuil et de désappointement.
Dér. de Frisa.
Désgâouchi, v. Dégauchir; dresser à la hache un bloc
ou une pièce de bois, c’est à dire lui enlever tout ce qui est
irrégulier et gauche. — On dit par ext. triviale et badine
d’un appétit solide : désgdouchis pas méou un moucdl,
comme dans le même style, en fr. on dit : il ne décrotte
pas mal.
Dér. de Gdouche.
Désgâoula, v. Détruire, effacer le jable d'un tonneau,
c'est à dire la mortaise des douves dans laquelle se jointe
la pièce de fond.
Dér. de Gdoule.
Désgarni, v. Dégarnir; détaler; ôter ce qui garnit.
Dér. de Garni.
Désgouïado, s. f. Péj. Désgouïadasso.Commère débraillée
et libre dans ses paroles et ses gestes. — Voy. Dégouïado.
Désgous, s. m. Dégoüt; manque d’appétit; aversion,
répugnance pour un aliment. — Lou désgoùs m'arapo, je
commence à éprouver du dégoût; tout ce que je mange me
parait insipide ou amer.
Dér. de Gous.
Désgousta, v. Dégoüter; inspirer du dégoût. Au fig.
détourner d’un projet, dégoûter de ce qu’on a.
Désgroussa, v. Dégrossir; ébaucher un ouvrage.
Dér. de Gros.
Déshabia, v. Déshabiller; ôter à quelqu'un ses habits.
— Déshabia Pière pér habia Jan, déshabiller Pierre pour
habiller Jean, dépouiller l’un pour vêtir l’autre.
Dér. de Habïa.
Déshabiè, s. m. Déshabillé, sorte de spencer de femme
d’une étoffe différente de la jupe, connu aujourd'hui sous
différentes dénominations que la mode a multipliées, mais
désignant toujours un négligé du matin, comme le mot le
dit assez.
Désia, ado, adj. Déjoint. —Se dit d'un vaisseau formé
de douves, lorsque la sécheresse les déjoint. — Voy. Adéii.
Dér. de Za ou Lia, lier.
Désjala, v. Dégeler : activ. fondre la glace, la neige;
neutre, cesser d'être gelé. — Désjalo, le dégel est arrivé.
Dér. de Jala.
Désjaladou, s. m. Ne s'emploie que dans Je sens et sous
la forme de un bon désjaladoù, pour dire un bon et grand
feu.
Désjougne, v. Dételer les bêtes de labour. — As désjoun
256 DÉS
tro lèou, tu as dételé trop tôt;
séance de labour trop courte.
Dér. de Jougne.
Désjoun, cho, part. pass. de Désjougne. Dételé.
Déslassa, ». Délasser; ôter la lassitude; reposer d’une
fatigue; récréer.
Dér. de Lassa.
Déslia, vw. Délier; défaire ce qui lie; détacher un
nœud, un lien. Au fig. absoudre, dégager d'une parole
donnée.
Dér. de Zia.
Désmaïra, v. Enlever d'auprès de sa mère. — Désmaïra
dé pasturo, éparpiller sur le pré du fourrage qui s’est agglo-
méré en séchant, ou par la pluie qui a collé les tiges les
unes aux autres. Désmaïra dé trufos, couper la plante des
pommes de terre pour les faire mürir plus vite.
Désmaira, ado, part. pass. Dépaysé: triste et inquiet
de ne plus retrouver ses habitudes, qui sont aussi chères
qu’une mère.
Dér. de Maire.
Désmaïssa, ado, adj. Qui a la mâchoire cassée; par
ext. édenté.
Dér. de Maïsso.
Désmama, v. Terme de magnanerie.
Après que la plus grande partie des vers à soie sont
montés à la bruyère, il ne reste sur les tables que les plus
paresseux ou les derniers venus et les invalides. Trois
jours après que la bruyère a été donnée, on enlève tous
ces vers : on sépare les valides des invalides et l’on réunit
les premiers sur une ou plusieurs tables réservées à cet
effet. On trouve un avantage à cette opération. D'abord les
vers ainsi isolés de leurs confrères maladifs, éloignés de
cette litière infecte qu'on ne peut plus renouveler une fois
qu’on a ramé, se portent mieux et achèvent leur œuvre
avec plus de chances de santé. Ensuite, il faut une moins
grande quantité de feuille, et moins de perte de temps,
pour leur donner à manger, que lorsqu'ils sont épars sur
toutes les tables. Si d'ailleurs on attendait que ces relar-
dataires montassent sur la bruyère où déjà leurs confrères
plus hâtifs ont commencé leurs cocons, ceux-ci seraient
achevés bien avant les lents et courraient risque de par-
païouna avant que l'on püt déramer, ou les autres ne
seraient que des dowméisèlos, si on hâtait le déramage —
Voy. Douméisèlos et Parpaïouna.
C’est cetle opération qu'on appelle Désmama.
Dér. de Mamo, mère.
Désmamaduros, s. f. plur. La portion des vers à soie
retardataires qu’on a séquestrés par l'opération ci-dessus
décrite; les cocons produits par ces vers et qu'on dérame
ordinairement plus tard que les autres.
Désmancha, v. Démancher; ôter le manche à un outil
où à un instrument; détraquer; déranger. — Ma piolo s’és
désmanchado, le manche de ma cognée s’est détaché; ma
cognée s'est démanchée. Aguélo partido s’és désmanchado,
tu as fait ton attelée, ta
DÉS
celte partie de plaisir a manqué : elle s’est démanchée,
dit-on familièrement en fr.
Dér. de Manche.
Désmantia, v. Démantibuler, en parlant d'un mésihe
ou d’une pièce d'assemblage; détraquer.
Dér. du lat. Mandibulum, mächoire.
Désmahouna, v. Décarreler; enlever le carrelage d’un
appartement.
Dér. de Mahoù où Mao.
Désmarida, v. Démarier; déclarer un mariage nul;
séparer judiciairement. — Sé désmarida, divorcer.
Désmaridaïre, s. m. C'est un être de raison, un per-
sonnage hypothétique; un dicton est resté sur lui : Sé
lou désmaridaïire passavo, douriè fosso pratiquos, si le dé-
marieur passait par ici.…., il aurait de nombreux chalands.
La phrase ne dit pas la proportion entre les hommes et les
femmes qui en seraient le plus satisfaits.
Désmémouria, v. Faire perdre la mémoire; rendre fou.
Dér. de Mémouèro, qu'on disait autrefois mémorio.
Désméscoula, v. Casser, enlever la hoche d'un fuseau.
Dér. de Méscoulo.
Désmounta, v. Démonter; désassembler; démonter une
charrue, une horloge, un meuble, etc. Au fig. calmer,
apaiser; troubler, déconcerter. — S'és mounta qué sé dés:
monte, s’il est en colère, s’il a la tête montée, qu'il se calme
de lui-même. Aqud mé désmonto, cela me met hors de moi.
Dér. de Mounta.
Désmoura, v. Couper la figure; casser le museau, le
nez, le groin d’un porc; égueuler un broc, une cruche.
Dér. de Moure.
DéSäsa, v. Couper le nez à quelqu'un. — Sé désnasa,
se casser le nez en tombant ou en se heurtant contre un
corps dur.
Dér. de Nas. à
Désnougaïa, v. Ecaler des noix. Par ext. disloquer,
luxer, désarticuler. — Sé désnougaïa lou bras, lou pougné, 3
la caviïo, etc., se DEEE se disloquer le bras, le poignet,
la cheville, etc.
Dér. de Nougaïo.
Désnousa, v. Dénouer, défaire un nœud.
Dér. de Noùs.
Désoungla (Sé), v. S'arracher les ongles, soit en ser-
rant fortement un corps dur, soit en forçant où en les
rongeant. Au fig. travailler avec ardeur.
Dér. de Ounglo.
Désoula ($é), v. Se désoler, être pris d'une afiction
extrème.
Dér. du lat. Desolare, m. sign.
Désoussa, v. Désosser; décharner.
Dér. de Os, osses.
Déspacha, v. Débarrasser; dégager de ses entraves /Voy.
Désempacha, Désémharassa). — Sé déspacha, se dépècher ;
se hâter; se débarrasser de ce qui entrave { Voy. S'én-
tancha).
DÉS
Dér. de la bass. lat. Depedicare, corrup. de Expedire,
m. sign.
Déspaïa, v. Enlever la paille ou le jonc qui forme le
siège d'une chaise.
Dér. de Païño.
Déspampa, Déspampana ou Éspampa, Éspampana,
v. Epamprer la vigne, ébourgeonner les pousses sauva-
. geonnes d'un jeune plant nouvellement greffé. — On le
dit surtout pour la vigne et le mürier. — Voy. Pampa.
Dér. du lat. Pampinus, pampre, bourgeon.
Déspampanaduro, s. f. Pampres ou bourgeons déta-
chés de la tige.
Déspampanaïire, s. m. Epampreur, ébourgeonneur.
Déspantouïia, v. Démaillotter; dépouiller ; débrailler. —
Sé despantouia, se débrailler, se mettre à l'aise dans ses
vêtements; quitter des habits qui gènent ou les lâcher.
Dér. peut-être du lat. Spoliare, dépouiller, ou du grec
Iavrée, tout, avec la particule privative. Cependant la pre-
mière racine parait plus naturelle. Déspantouïa n'est qu'une
sorte d'augmentatif de Déspouïa, qui vient évidemment de
Spoliare. N'y aurait-il pas aussi quelque rapprochement à
faire avec Pannus, étoffe, combiné avec la particule abstrac-
tive et l’action du verbe? Il est assez difficile de se pro-
nôncer sur ce mot d'ailleurs pittoresque.
Déspäoupa (Sé), v. Se démettre, se disloquer, se luxer
un membre.
Dér. du lat, Palpa, le plat de la main. Ce verbe ne
s’appliquait sans doute qu'à la luxation de la main ou du
poignet; il a étendu son acception à toutes les articula-
tions.
Déspäoupérla, v. Arracher les cils des paupières : au
fig. éblouir au point de faire perdre la vue; brüler les
yeux, arracher les yeux. — Faï un sourél qué déspdou-
pèrlo, le soleil est si fort qu’il brüle les paupières. Plouro
qué sé déspdoupèrlo, il pleure à chaudes larmes, à en per-
dre les yeux.
Dér. de Pdoupèrlo.
Déspar (A), adv. A part; de côté; séparément. — Métre
à déspar, mettre de côté, en réserve.
A déspar d'aqud, à l'exception de cela. Déspar aquo,
outre cela.
Dér. du lat. Dipartire, diviser, partager.
Désparäoula, v. Couper la parole à quelqu'un, le rendre
muet, le réduire au silence, l’interdire. — Sé déspardoula,
perdre haleine à force de parler; s'enrouer à babiller; par
ext. se hâter, se presser. Aquél toupà boul qué sé déspa-
rdoulo, ce pot bout à grosses ondes.
Déspardoula pris adjectivement signifie : prodigieux, qui
passe ce qu'on en peut dire. C'est le mot lat. inefabilis,
ou infandum.
Dér. de Pardoulo.
Désparla, v. Déraisonner; parler hors de propos; extra-
vaguer.
Dér. de Parla.
DÉS 257
Déspassa, v. Défiler; dépasser une aiguille enfilée, une
aiguille à tricoter.
Dér. de Passa.
Déspéça, v. Découper; dépecer une volaille, un quartier
de viande. On se sert de ÆEspéga (Voy. c. m.) pour dire:
dépecer, détailler du bois.
Dér. de Péço.
Déspécouïa, v. Casser, rompre les barreaux d'une
chaise, les pieds d'un siége ou d'un meuble.
Dér. de Pécoul.
Déspéitrina (Sé), v. Se découvrir la poitrine; se dé-
brailler.
Déspéitrina pris adjectivement, débraillé, qui a la gorge
et la poitrine découvertes.
Déspén, s.m. Dépense; coût; frais. — Lous magnas
portou bièn, mais fan fogo déspén, les vers à soie sont un
bon produit, mais ils exigent beaucoup de frais.
Dér. du lat. Dispendium, m. sign.
Déspénja, ». Décrocher ce qui est pendu ou suspendu.
— Sémblo un déspénja, il a une figure patibulaire.
Dér. de Pénja.
Déspénsa, ». Dépenser; employer son argent à..., en
général, mal à propos.
Dér. du lat. Dispendere, m. sign.
Déspénsiè, sièiro, adj. Dépensier; prodigue; qui en-
traine de la dépense. — Lous boulés soun pas chèrs, mais
soun bièn déspénsiès, les champignon ne sont pas chers,
mais ils le deviennent par l'assaisonnement qu'ils exigent.
Déspénso, s. f. Dépense, ce que l'on débourse; l'opposé
de la recette; argent dépensé; dépense, lieu où l’on serre
les provisions de table; garde-manger. — La déspenso est
pour la cuisine du petit bourgeois et du paysan, ce qu'est
l'office ou la salle à manger d’une grande maison, c'est-à-
dire un appartement de décharge pour certaines provisions
de table. Aquél oustdou faï fosso déspénso, cette maison
fait beaucoup de dépense.
Déspésqua (Sé), v. Se dépêtrer d'un bourbier, d'une
mare; au fig. se débarrasser d’un fâcheux; se tirer d'une
affaire mauvaise ou dificile.
Dér. de Pésqua, mettre le pied à l’eau.
Déspéstia, v. Dépouiller ses habits un à un; au fig. Sé
déspéstia, sortir d'embarras, se désenchevtrer, se dépètrer.
Dér. de Espés, se tirer de quelque chose d'épais.
Déspichous, chouso, adj. Quinteux; tatillon; boudeur;
dédaigneux; qui se fâche de rien; qui a trop de suscepti-
bilité; difficile pour son manger comme le rat d'Horace.
Dér. du lat. Despicere, mépriser, dédaigner.
Déspièi, adv. — Voy. Démpièi et Désempiët. :
Désplaïre, v. Déplaire, mécontenter; être désagréable,
le devenir.
Le v. fr. n’a qu'un régime indirect : il a déplu au public;
le lang. a son régime direct : fou pas désplaïre toun pèro,
il ne faut pas mécontenter ton père.
Dér. de Plaïre.
258 DÉS
Désplanta, v. Déplanter; transplanter un arbre, un
arbuste; repiquer une plante.
Dér. de Planta.
Déspléga, v. Déployer; étaler sa marchandise; déplier,
étendre ce qui était plié; décoiffer, enlever la coiffure
d’une femme, car celle d’un homme n’est jamais serrée et
ployée autour de la tête.
Sé déspléga, quitter sa coiffe pour se recoiffer, ou quitter
son bonnet de jour pour celui de nuit.
Dér. de Pléga.
Désplissa, v. Déplisser; défaire les plis; chiffonner.
Dér. de Plissa.
Déspluga, v. Oter le bandeau qui couvre les yeux; en-
lever les lunettes des chevaux qui foulent le grain { Voy.
Plugos). — Déspluga sous dèls, ouvrir les yeux.
Dér. de Pluga.
Déspoio, s. f. Dépouille, défroque; vêtements que l'on
quitte; mobilier; bien qui compose une succession.
Dér. du lat. Spolia, dépouilles.
Déspougne (Sé), v. Cesser de pondre : ce qui arrive
aux poules dans les grands froids et dans leur temps de mue.
Dér. de Pougne.
Déspouia, v. Dépouiller; déshabiller; exproprier. =
S’és déspouïa dé tout, il a fait cession générale de ses biens
à'ses créanciers; ou bien il en a fait donation à ses enfants
par un partage anticipé. Aquéles fouséls sé déspouïou qu'és
un plési, ces cocons se dépouillent, se dévident que c’est
ün charme. — On ditdes cocons qu'ils se dépouillent, lors-
qu'ils dévident toute leur soie et qu'ils laissent bien à nu
la chrysalide, sans cette pellicule souvent trop déliée pour
être filée et qui produit cé qu’on appelle l'Éstras.—V. c. m.
Dér. du lat. Spoliare.
Déspouncha, v. Épointer; émousser la pointe, la casser.
Dér. de Apouncha.
Déspouténcia, mieux Espouténcia, v. —Voy. c. m.
Désprouvési (Sé), v. Se dessaisir, se dégarnir; vendre
ses hardes ou son linge, les donner ou ne pas les renou-
veler quand ils sont usés; se laisser au dépourvu.
Dér. de Prouvési.
Dès qué, conj. Puisque; du moment que. — Dès qué
aquù és coumo aqud, du moment qu’il en est ainsi. Désqué
ou voulés pas, sé fara pas, puisque vous ne le voulez pas,
ça n'aura pas lieu.
Désqué, s. #. dim. Corbillon; petite corbeillé d'ouvrage
en osier.
Dim. de Désquo.
Désquia, v. Abattre des quilles au jeu de ce nom. Au
fig. abattre ce qui est perché ou droit; tuer. — Désquia
un doussèl, un home, abattre un oiseau, un homme, d’un
coup de fusil ou d’un coup de pierre.
Dér. de Quio.
Désquo, s. f. dim. Désquéto. Grande corbeille en osier
dont on se sert pour porter du linge à blanchir à la rivière,
ou des fruits et des denrées.
DÉS
Dér. du lat. Discus, disque, plat.
Désquoua, v. Couper la queue à un animal; casser la
queue ou anse d’un ustensile.
Dér. de Qud, queue.
Désrénqua, v. Éreinter; casser les reins. — Es désrén-
qua, il a l’épine dorsale déhoïitée.
Dér. de Réns.
Désribla, v. Dériver ; casser ou redresser la rivure d'un -
clou, d'une pointe.
Dér. de Ribla.
Désrouvia, v. Dérouiller; enlever, effacer la rouille ;
nettoyer, polir un instrument en fer.
Dér. de Rouvia.
Déssabranla ou Sabranla, v. Ébranler en secouant
fortement.
Ce mot est une corruption ; il devrait être en effet : Des-
soubranda, secouer par dessous, car sa racine est sous,
sou, et branda.
Déssala, v. Dessaler ; ôter le sel; faire tremper un mets
salé pour lui faire perdre le sel.
Dér. de Sala.
Déssaparti, v. Spécialement séparer des combattants,
soit qu'ils se battent à des armes honorables, soit à coups
de poings, soit en se prenant aux cheveux.
Dér. du lat. Dispartiri, diviser.
Désséla, v. Enlever la selle d’un cheval.
Dér. de Sèlo.
Déssèr ou Dissèr, s. m. Dessert; fruits servis sur la
table après les viandes; moment de les servir. Le prvb.
dit : Entre Pasquo et Pantécousto, lou déssèr és uno
crousto; entre ces deux fètes la saison des fruits n’est pas
encore arrivée, il n’y a qu’à grignoter une croûte de pain
pour dessert.
Déssoustéra, v. Déterrer; creuser sous terre; creuser
sous un arbre, sous un mur pour le renverser. Au fig.
réveiller des querelles, des difficultés depuis longtemps
éteintes ou enfouies. — Déqué vai déssoustéra? Pourquoi
aller réveiller, faire revivre des questions irritantes, des
propos oubliés?
Formé de Déssouto, sous, et de Tèro, terre.
Déssouto, adv., prép.et s. m. Sous; dessous ; au dessous;
le dessous. — Quéou aguè lou déssouto? Qui eut le dessous?
Lou déssouto d'un doubre, le dessous d’un arbre.
La différence entre Déssouto et Souto, c'est que ce der-
nier est toujours préposition simple et ne marche
sans régime. Déssouto est tantôt préposition, tantôt adverbe,
tantôt substantif, Souto ne figure jamais à la fin d'un
membre de phrase, parce qu’il est toujours suivi d’un
régime; Déssouto s'y rencontre souvent adverbialèement ou
substantivement. — Voy. Souto.
Dér. du lat. De et Sub, de dessous.
Déssubre, ou Déssus adv., prép. et s. m. Sur; dessus;
par dessus; le dessus, — Voy. Sus.
Dans les hautes Cévennes on dit: Déssoubre.
DÉS
Dér. du lat. De super, m. sign.
Déssus, adv., prép. et s.m, Le mème que le précédent.
Dé-sus-én-sus, adv. En effleurant la surface, le dessus;
en écrémant; en Ôtant la superficie seulement.
Déstanqua, v. Débâcher une porte; enlever la barre à
coulisse qui la ferme intérieurement.
Dér. de Tanquo.
Déstapa, v. Déboucher; débonder; découvrir un vais-
seau fermé par en haut, par un bouchon.
Dér. de Tapa.
Déstaqua, v. Détacher; délier; enlever les liens.
Dér. de Éstagua.
Déstégne, v. Déleindre.—Se dit d’une mauvaise teinture
qui s’efface en lavant, ou qui déteint sur le linge ou le
Dér. de Tégne.
Déstégnigu, udo, part. pass. de Déstégne. Qui a déteint.
Déstérmina, v. Exterminer, détruire; faire périr entiè-
rement, — Sé déstérmina, se déchirer, se blesser griève-
ment en tombant ou en se battant. Es tout déstérmina, il
est tout meurtri.
Un déstérmina, un déstérminadas, un évaporé; un
homme violent, emporté, que rien n'arrête.
. Dér, du-lat. Exterminare, bannir, exiler ; défigurer.
Déstésta, v. Étôter; couper la tête à un arbre, le cou-
ronner. — Voy. Éscabassa.
Dér. de Tésto.
Déstéta, vw. Sevrer un enfant, l’éloigner de sa nourrice.
— On dit d'un gros mangeur: Pouran lou déstéta quan
vouran, qué manjo tout soul, on peut le sevrer, il se nour-
rit suffisamment.
Dér. de Tété.
Déstétadoù, douno, adj. Qui est en âge d'être sevré;
qui peut se passer de sa nourrice.
Déstimbourla, v. Détraquer le cerveau; troubler l’es-
prit. — Un déstimbourla, un écervelé, une tête éventée;
un cerveau timbré.
Dér. de Timbourle.
Déstosse, v. Détordre; dégarotter une corde d’embal-
lage.
Dér. de Tosse.
Déstourba, w. Interrompre quelqu'un dans son occu-
pation; distraire l'attention ; détourner d’un projet.— Dés-
tourbo té d'aqud, éloigne ces idées de ta tête. S'és déstourba
d'aquélo fo, il a cessé ses relations avec cette fille, il s’est
distrait de cette inclination.
Dér. du lat. Deturbare, chasser, renvoyer.
Déstourbe, s. m. Interruption; contre-temps; empêche-
ment; obstacle; incident; embarras; sujet de distraction ;
dérangement. — Manquo pas déstourbe, ce ne sont pas les
contre-temps qui manquent. Sans déstourbe y-anaraï
déman, sans empèchement j'irai demain. Sans déstourbe
véndra dé cént ans, s'il ne lui arrive quelque fâcheux acci-
dent il vivra jusqu’à cent ans.
DÉS 259
Déstraire, v. Distraire; détourner, dans le même sens
que Déstourba. — Sés déstra d'aquélo fio, il a oublié sa
maitresse.
Dér. du lat. Distrahere, arracher, faire sortir, distraire.
Déstrantaïa, v. Détraquer, démantibuler.— Se dit par-
ticulièrement d'un ouvrage mécanique, comme une hor-
loge, une serrure, etc.
Dér. de Trantaïa. Cette fois le composé n’est pas le con-
traire du simple, malgré la particule dés. Trantaïa veutdire
branler, vaciller. 11 est l'effet, et Déstrantaïa la cause. La
partic. dés est explétive ou plutôt coactive, Déstrantaïa
étant proprement faïre trantaïa.
Déstrâou, s. f. Grande hache de charpentier.
Il semble que cette acception est toute contraire à son
étymologie, qui annonce une hache qu'on manie de la
main droite, c'est-à-dire d’une seule main, tandis que la
hache de charpentier exige l'emploi des deux mains, Mais
la déstrdou a 66 autrefois la hache d'armes, la fameuse
besaiguë des Sicambres, qu’on ne maniait que d'une main,
puisque c'était une arme de cavalier, quoiqu'elle fût forte
et très-lourde.
On serait presque tenté de voir dans ce mot Déstrdou
la racine du fr. Destrier, cheval de bataille des anciens
guerriers, en opposition au palefroi, qui était la monture
des dames et des voyageurs paisibles. Certains glossateurs,
et Vossius entre autres, veulent bien le dériver de Dexte-
rities, adresse, dextérité; mais cette analogie est bien
flasque pour une époque où l'on ne donnait guëére pour
racine à des objets frappants et usuels, de simples qualités
morales et peu déterminées. Il n’y a pas moyen non plus
d'attribuer cette origine à la main droite, dextera; car à
coup sûr on ne manœuvrait pas un destrier de la main
droite, qui était indispensable pour combattre, et nous ne
sachons pas que les Francs et les Sicambres fussent gau-
chers. Il ne serait donc pas impossible que Destrier signi-
fiät le cheval qui porte la hache d'armes, la désträou. I] ne
faut pas que le français s’effarouche de cette prétention; il
avait peut-être lui aussi un terme analogue pour désigner
cette arme, et ce terme peut s'être oblitéré.
On sentira que ceci n’est point une assertion, mais une
simple induction que nous a fait tirer le rapport de l'arme
au cheval, et le manque d'origine positive du mot destrier,
qui, au fond, ne nous regarde pas. Cependant, pour être
juste avec tout le monde, nous conviendrons qu'à Nimes,
par exemple, Déstrdou est le lerme générique de la hache
de quelle espèce qu'elle soit ; car, dans son dialecte, le mot
Piolo n’existe pas. A Alais, bien des personnes attribuent
ce nom à la hache du menuisier, Piolo dé man. Peut-être
est-ce la solution de Sauvages qui a entrainé cet usage.
Toutes-les opinions-sont libres. Nous livrons la nôtre à la
discussion individuelle, en faisant toutefois remarquer qu’il
serait singulier que la hache d'armes et la hache de char-
pentier n'aient pas reçu un technique spécial. Aujourd'hui
la hache de charpentier est celle qui se rapproche le plus
260 DÉS
de la hache d'armes, soit par son poids, soit par la lon-
gueur de son manche. C'est cette particularité d'étymo-
logie qui a induit en erreur Sauvages, qui a cru n’y voir
qu'un de ces outils de menuisier qu'on manie de la main
droite; la Déstrdou est proprement cette énorme hache de
scieurs de long dont le fer pèse jusqu’à sept ou huit kilo-
grammes. — Voy. Piolo dé man.
De tout quoi, pour conclure, il parait évident que Dés-
trdou dérive du lat. Dextera, main droite.
Déstraqua, v. Détraquer, déranger un mécanisme quel-
conque; au fig. déranger la santé.
Ce mot parait formé de la particule disjonctive des et du
vieux mot Track, qui n'est plus usité, mais qui signifiait
trait, jet, distance. C'est de Track qu'on a fait Tracan,
tracané. Déstraqua, d'après cette origine, signifierait pro-
prement : tirer de la voie, faire cesser son allure, sortir de
l'ornière, de la piste ordinaire.
Déstrassouna, vw. Réveiller en sursaut, réveiller avant
le temps; interrompre le sommeil. — On dit d’un enfant
és déstrassouna, quand il ne peut reprendre son sommeil
à l'heure accoutumée. Estre déstrassouna, ètre mal réveillé,
être dans un état de somnolence qui n’est ni la veille ni le
sommeil, comme quelqu'un qu'on a réveillé trop subite-
ment ou qui à mal dormi la nuit.
Dér. du lat. Extra somnum, hors du sommeil.
Dèstre, s. m. Dextre, terme d’arpentage: mesure de
longueur de 2"50c linéaires. Le Dèstre carré de Montpel-
lier répond à 20m carrés. Cette unité de surface n'était
guère employée que pour mesurer le plat sol des maisons,
cours et jardins, et tout ce qui exigeait une minutieuse
exactitude, comme l'espèce de décamètre dont se servent
les architectes et qui se nomme roulette.
Ce mot vient certainement du lat. Decem, comme les
pierres miliaires des routes romaines et certaines bornes
d’héritages qui étaient marquées d’un dix romain, X. C'était
probablement la décuplation d’une unité de mesure que
nous ne connaissons pas.
Le dextre ou l’arpent avaient la même dimension longi-
tudinale. Seulement le premier était une corde marquée
par des divisions pour mesurer les objets minutieux, et
l'arpent une sorte de compas en bois pour mesurer de
grandes longueurs. — Voy. Arpan.
Déstré, s. m. Pressoir à vin. — Vi dé déstré, vin pro-
duit par le pressurage, qui est de couleur plus foncée, mais
plus plat et plus bourbeux. — Voy. Déstrégne.
Déstré, déstrécho, adj. Dim. Déstréché. Étroit, serré,
étranglé, retréci ; au fig. avare. — Nose déstrécho, noix
angleuse, espèce de noix dont l'amande est tellement serrée
dans les angles de l’écale, si enchevèêtrée dans son zeste,
qu'on ne peut l’extraire qu’en la tirant par morceaux. C'est
du reste l'espèce la moins sujette aux vers et qui fournit la
meilleure huile. Es déstré dou brén et larje à la farino, il
fait des économies de bouts de chandelle; il est avare dans
les menus détails et prodigue dans les dépenses importantes.
DÉT
Dér. du lat. Strictus, serré, mis à l’étroit.
Déstrécési, v. Retrécir; rendre plus étroit, moins large;
devenir plus étroit. ,
Déstrégne, v. Retrécir; restreindre; serrer; pressurer
la vendange.
Dér. du lat. Stringere, serrer, presser.
Déstrégnéire, s. m. Pressureur de vendange. — Dans
les pays de vignobles, les grands propriétaires ont des
pressoirs dans leurs celliers et font pressurer la vendange
par des ouvriers à leurs gages ; mais les petits propriétaires
et les grands eux-mêmes, dans les contrées où la vendange
est une récolte secondaire, ont recours à des pressureurs
publics, qui viennent exercer leur industrie à domicile au
moyen d'un pressoir à roues qu'on transporte facilement.
Déstrémpa, v. Détremper, délayer; enlever la trempe
à un fer aciéré. — Déstrémpa l'acdou, délayer la chaux,
l’abreuver avant de la corroyer.
Dér. de Trémpa.
Déstréna, v. Détresser; défaire une tresse de cheveux;
détordre la mèche d’un fouet; détresser les nattes d’une
fascine, d’un batardeau qu'on appelle Pagnè.
Dér. de Tréna.
Désvérdia, v. Cueillir du fruit avant sa maturité; dé-
florer un fruit, lui enlever, en le maniant, cette fleur qui
est une transsudation farineuse qui se fige sur son épiderme :
au fig. marier une jeune fille avant l’âge nubile.
Dér. de Vér.
Désvérnissa, v. Enlever le vernis; effacer le lustre, le
brillant d’un objet vernissé; l’écailler.
Dér. de Vérnissa.
Désvira, v. Dévier; détourner. — Désvira l’aïgo, dé-
tourner un ravin, un biez de moulin, un canal d'irriga-
tion.
Dér. de Vira.
Désvisaja, v. Dévisager; couper la figure; insulter en
face ; faire baisser les yeux; couvrir de honte.
Dér. de Visaje.
Détado, s. f. Coup de doigt; trou fait avec le doigt;
empreinte d’un doigt.
Dér. de Dé.
Détaïa, v. Vendre en détail; détailler, couper sur la
pièce ou prendre sur un tas et céder par parties.
Dér. de Taïa.
Détaïaïre, aïro, s. m. et f. Marchand ou marchande au
détail; qui vend en boutique, nous dit Sauvages, par oppo-
sition au marchand en gros qui vend en magasin. Cette
différence n'existe plus : la boutique même n’est plus guère
connue; tout s'appelle magasin.
Détal, s. m. Détail; vente au détail.
Dér. de Détaïa.
Détras, alv. Derrière; de l’autre côté. — Détras la
muraïño, derrière le mur. Détras lou sère, sur le versant
opposé de la montagne.
Dér. du lat. Trans, au delà.
DÉV
Dévaria, v. Troubler l'esprit; obséder; chagriner quel-
qu'un; bouleverser les meubles; mettre une maison sens
dessus dessous. — Souï tout dévaria, je ne sais où j'en
suis ; je fais tout de travers. Mé dévario, il me persécute,
me tourmente; il m’obsède, il me fait perdre la tête. À
tout dévariïa, il a tout bouleversé.
Un dévarïa est un évaporé, un cerveau mal timbré ; un
Dér. du lat. Variare, varier; divaguer; changer; mêler.
Dévariaire , aïro, adj. Qui obsède ; qui bouleverse tout;
qui dérange tout le monde; un hurluberlu.
Dévé, s. m. Devoir; tâche d'un écolier. — Faïre soun
dévé, faire son bon jour, recevoir la communion eucha-
ristique. Faï toun dévé, fais ce que dois.
Dér. du lat. Debere, debitum.
Déve, {re pers. sing. prés. de l'indic. du v. Déoure. Je
dois
Dévéngu, udo, part. pass. du v. Dévéni. Devenu.
Dévéni, v. Devenir; commencer à être ce qu'on n'était
pas.
Dér. de la bass. lat. Devenire, m. sign.
Devèr ou Vèr, prép. Vers, du côté de...; aux environs
de... — Démoro dévèr Anduso, il habite aux environs
. d'Anduze. Véou dévèr moussu tdou, je vais chez monsieur
un tel. Marchan dévèr la gnuè, nous nous approchons de
la nuit; la nuit nous trouvera en chemin. Aqud éro dévèr
la Sén-Jan, c'était aux environs de la Saint-Jean. Y-anèn
dévèr las vounze houros dé gnuë, nous y allâmes vers les
onze heures du soir. Mounté gagnes dévèr? De quel côté
te diriges-tu? Dounte vénès dévèr? D'où venez-vous? Ces
deux derniers exemples présentent des idiotismes fort ori-
ginaux de construction.
Dér. du lat. Versus ou Versum, vers.
Dévérgougna, ». Faire honte; faire rougir en public.
Uno dévérgougnado, effrontée, dévergondée ; qui a perdu
toute pudeur, toute retenue.
Au masc. le même part. pass. dévérgougna est moins
usité; mais la langue fournit de nombreux équivalents.
Dér. de Vérgougno.
Dévés, s. m., au plur. Dévéses. Bois ou paccage mis en
défense ou en réserve, et sur lequel le propriétaire seul a
droit de dépaissance.
Dans la bass. lat. on donnait les noms de Defensum, de
Defecium et plus tard enfin celui de Devesium à ces bois en
défense. Ce dernier mot ne semble qu'un barbarisme lati-
niste de Dévés, qui préexistait déjà en roman. Or il est ra-
tionnel de faire dériver Dévés de Devedar, ou Vedar, roman,
“défendre, prohiber; et alors il aurait son origine dans le
lat. classique Vetare, m. sign. que défendre, qui aurait
moins contribué à sa formation.
Dévigna, v. Deviner, prédire, présager. — Quan lous
grapdous cantou dévignou la plèjo, quand les crapauds
sifflent, ils présagent la pluie. Las graïos dévignou lou fré,
quand les corneilles descendent, elles annoncent l'appro-
DÉV 261
che du froid. Lou diable té dévigne! Ah! tu ne dis que
trop vrai! Qué dévigno gagno, prvb., un sorcier ferait bien
ses affaires. Dévignas-ou, devinez.
Dér. du lat. Divinare, m. sign.
Devignaïre, aïro, s. m. et [. Qui devine, qui prévoit,
qui trouve la solution d'une difficulté, et non point devin
ni sorcier. — Aqud's un dévignaïre dé Mountélimar, il
devine tout ce qu'il voit: c'est ce qu'on dit de celui qui
annonce la découverte d'un secret qui est celui de la co-
médie, et connu par conséquent de tout le monde.
Voici à peu près quelle serait, d'après de mauvais plai-
sants, l'origine de ce dicton, qui place la scène dans une
ville du Midi. Un étranger arriva un jour à Montélimart,
et, à grand renfort de trompette et de grosse caisse, con-
voqua tout le populaire, annonçant qu'il enseignait à de-
viner et cela pour la bagatelle d'un sou par tête. Ce n'était
pas cher : les pratiques se pressèrent à la porte; mais il ne
pouvait recevoir qu'une personne à la fois : on se soumit à
la condition. Aussitôt que quelqu'un était entré, le pro-
fesseur lui présentait un petit vase, bien fermé, sauf un
trou comme à une tire-lire, dans lequel il Jui faisait intro-
duire l'index. — Sortez votre doigt, disait-il alors. Que
sentez-vous? — C'était à ne pas s'y tromper; l'odeur était
assez prononcée pour que l'élève n’hésität pas à dire ce que
c'était. — Vous avez deviné, ajoutait le professeur avec
un imperturbable sang-froid. Sortez par cette autre porte,
ne dites à personne le secret et laissez-moi l'apprendre à
d'autres. — Et comme en effet beaucoup d'habitants de
Montélimart l'apprirent de mème, c'est depuis ce temps que
les gens du pays, où la leçon n’a pas été sans doute perdue,
passent pour des sorciers infaillibles qui devinent tout ce
qu’ils voient et surtout tout ce qu'ils sentent. — Credat
Judœus Apella.
Dévignarèl, èlo, adj. Devin, sorcier; devineresse, sor-
cière. — La dévignarèlo, la donneuse de bonne fortune,
infâme métier que la crédulité populaire soutient encore de
nos jours, malgré les peines que la loi prononce contre lui.
Il y a à la fois escroquerie, parce que ces prétendues
sybilles font payer fort cher les oracles de leurs tarots;
diffamation et calomnie, parce que, consultées la plupart
du temps pour connaitre l’auteur d’un vol, elles font planer
à leur gré le soupçon sur la tête des personnes à qui elles
ont quelque motif d'en vouloir. Il s’y joint presque tou-
jours une autre industrie plus infâme encore et dont leur
clientèle de jeunes filles leur rend l'exécution plus facile.
Dévignarèl se dit aussi adjectivement de tous les outils
et ingrédients qui servent à l'œuvre des devins anciens et
modernes, comme à tous les insignes de la puissance sur-
naturelle.
Déviso, s. f. Papillote, sorte de bonbon enveloppé de
papier de couleur et frisé, contenant, outre la sucrerie, un
rébus ou une charade, ce qui lui a fait donner son nom
francisé.
Dévista, v. Découvrir, apercevoir le premier; aperce-
262 DIA
voir de loin. — Lous aguère lèou dévistas, je les eus bien-
tùt découverts.
Dér. de Visto.
Dévo, oto, s. et adj. Dim. Dévouté, dévoutéto ; péj. Dé-
voutas, dévoutasso. Dévot; pieux; qui suit avec zèle,
quelquefois avec superstition, les exercices de la religion,
dont il dépasse même les injonctions.
Dér. du lat. Devotus, voué, dévoué.
Dévoura, v. Dévorer; manger avec voracité.
Dér. du lat. Vorare, m. sign.
Dévouran, s. m». Dévorant; compagnon du devoir de la
secte des Dévorants, par opposition au devoir dit de Salo-
mon, qu'on appelle en fr. les Loups, et en lang. {ous Gavwès.
Emp. au fr. Devoir.
Dévouri ou Débouri, v. Dévorer.—S’applique surtout à
la manière de manger des animaux carnassiers; par ext.
aux personnes qui mangent gloutonnement. Au fig. même
acception que le fr. dévorer. — À tout dévouri, il a tout
fricassé.
Dér. du lat. Vorare.
Di, dicho, part. pass. du v. Dire.—Se prend aussi subst.
Diablamén, adv. Diablement; beaucoup; très-fort; Ler-
riblement. — Es diablamén bèl, il est étrangement grand.
Gn'a diablamén, il y en a une énorme quantité.
Diablariè, s. f. Diablerie, tour de lutin, d’espiègle;
niche; bruit, tumulte que font les enfants entre eux en
jouant. — Y a quéouquo diablariè aqui déssouto, il y a
quelque malice, quelque intrigue, quelque noirceur sous
jeu.
Diable, s. m. Au fém. Diablésso; dim. Diablatoù, dia-
blatouno; péj. Diablatas. Diable; démon; esprit malin et
surnaturel; diable-à-quatre, étourdi, tapageur; mauvais
garnement. — Es lou diable pér lou traval, c'est un vrai
démon au travail.
Comme il est impossible de citer toutes les phrases où
l'esprit malin entre comme superlatif, et tous les rôles
qu'on lui fait jouer depuis un bon diablas jusqu’ddu pdoure
diable, et ïls sont nombreux et variés, par cette raison
peut-être qu'on ne prête qu'aux riches : il faut se borner à
quelques locutions les plus fréquentes.
Diable! Juron, qui, comme en fr., annonce la colère, la
stupéfaction, la joie ou la douleur. Lou diablé té fariè bé
lun sé... le diable t’emporterait bien si... Lou diable té
dou cure, le diable puisse-t-il t'enlever ton trésor! Ou
peut-être avec plus d'énergie, selon le ton: le diable te
vide le ventre, t'arrache les boyaux! Lou diable-luno,
Diâoussi-luno, Didouquo-luno, jurons mélangés de païen
et de chrétien : Par le diable et par Hécate! Lou diable
siè, sé. Je jure par le diable que... Low diable ta pignas-
trije! Peste soit de ton obstination! Lou diable ta plèjo!
Au diantre soit la pluie! Dans cette dernière sorte d’im-
précation, on substitue le pronom possessif tour où ta aux
articles lou ou la, quoiqu'on ne s'adresse à personne et
même qu'on soit seul.—Voy. Diantres, Didoussi, Didouquo.
DIG
Dér, du lat. Diabolus.
Diaman, s. m». Diamant, pierre précieuse.
Emp. au fr.
Diantres, s. ”. Diable, mais il n'est employé que dans
les phrases imprécatives, ainsi que Didouquo et Didoussi :
on le dit seul aussi : Diantres! Diantre! Toutes ces varié-
tés du mot Diable tiennent au langage argotique et à la
diversité des dialectes qui les ont employées, sans qu’on
puisse y apercevoir autre chose qu’une corruption du type
primitif, et le désir d’adoucir, de gazer le mot erù, qui
jadis entrainait une sorte d'idée immonde et blasphéma-
toire qui s’attachait à sa seule prononciation.
Diâouquo, s. m. Variante du mot Diable.
Diâoussi, s. m. Autre variante du mot Diable. — Voy.
ci-dessus.
Diféra, v. Différer; être différent.
Dér. du lat. Differere, m. sign.
Diférémmén ou Diféréntomén, adv. Autrement;sinon;
différemment. — Sé plou pas y-anaraï, diférémmén rés-
taraï, s’il ne pleut pas j'irai, dans le cas contraire je res-
terai. Dans ce sens, il s'emploie quelquefois d’une manière
absolue : Sé vous décidas à paga, tammièl, diférémmén…
si vous vous décidez à payer, tant mieux, sinon...
La variante Diféréntomén ne laisse pas que d'être em-
ployée avec le mème sens par les gens qui parlent bien. Sa
composition, qui s'écarte un peu plus du fr., est tout à fait
dans le goût languedocien.
Diférèn, énto, adj. Différent, dissemblable; qui se dis-
tingue d'un autre.
Diférénço, s. f. Différence; distinction; dissemblance.
— Aqui la diférénço qué y-a, voilà la différence : c’est une
phrase explétive et de pur remplissage, que les paysans
emploient souvent dans leur verve loquace, parasite et
hérissée de pléonasmes. Ils s’en servent surtout pour ré-
pondre à une objection: c'est une préparation oratoire à
un argument contraire au vôtre. Y-anaraïi bé sé voulès,
mais aqui la diférénço qué troubaraï pas déngus, j'irai si
vous voulez, mais je n’y trouverai personne.
Dificinle, inlo, adj. Difficile; mal aisé. — Es pas difi-
cinle qué plogue, il n’est pas étonnant qu’il pleuve.
Dér. du lat, Dificilis.
Digéri, v. Digérer. Ne se prend que dans le sens figuré:
digérer un affront; supporter patiemment. — Pode pas
digéri aquél home, je ne puis supporter cet homme. Agud’s
quicon qu'on po pas digéri, c'est là une de ces avanies
qu'on ne peut avaler; pâtir; digérer.
Dér. du lat. Digerere, cuire, digérer.
Dignè, s. m. Dim. Dignéiré, dignéiroù. Denier; douzième
partie d’un sou ou les 5/12mes d’un centime. — Fou pas
régarda lou dariè dignè, il ne faut pas être si minutieux
dans un marché, ou exiger strictement son dù juqu'au
dernier denier.
Dér. du lat. Denarius, m. sign.
Dignéirolo, s. f. Tire-lire, sorte de pot de terre qui n'a
DIM
pas d'autre entrée qu’une petite ouverture horizontale,
comme celle d'une boite aux lettres en diminutif, par la-
quelle on glisse des pièces de monnaie provenant d’un
pécule quelconque et qu'on ne peut retirer qu'en brisant
le vase. C'est un moyen d'éviter les emprunts journaliers
pour les dépenses de fantaisie que l'on ferait si ce pécule
était à découvert et disponible dans une bourse ou une
armoire. Ce n’est que pour une dépense importante que la
tire-lire se casse : elle force en attendant à l'économie.
Dér. de Dign.
Dijôou, s. ». Jeudi, cinquième jour de la semaine, —
La sémmano das quatre dijôous, la semaine qui aura quatre
jeudis, c’est-à-dire jamais.
Dér. par contr. du lat. Dies Jovis, jour consacré à Ju-
piter. Nous avons la mème division de la semaïne que les
Romains; nous leur avons emprunté la dénomination des
jours. Le fr. n’a fait que renverser la syllabe di, qu'il place
à la fin du mot. L'Olympe antique a tout fourni à l'excep-
tion du samedi, dissate, et de diménche.
Dilus, s. ”m. Lundi, deuxième jour de la semaine. —
Faïre lou dilus, chômer le lundi; usage assez répandu
parmi les ouvriers artisans. Lou bon dilus, le lundi avant
la fète de Noël, qui est une sorte de foire à Alais, ou plutôt
an marché plus suivi que les autres et plus abondant en
marchandises et en bétail, surtout en porcs. Dilus dé Pas-
quos, le lundi de Pâques, renommé dans tout le Midi pour
ses omelettes et ses parties de campagne.
Dér. du lat. Dies lune, le jour d'Hécate, de la lune.
Dimar, s. m. Mardi, troisième jour de la semaine. —
Lou dimar dé carnaval, le mardi-gras, qu'on dit aussi
Carnaval tout simplement.
Dér. du lat. Dies Martis, jour de Mars.
Dimècre, s. m. Mercredi, quatrième jour de la semaine.
Dér. du lat. Dies Mercurii, jour de Mercure.
Diménchäou, châoudo, adj. Du dimanche, qui sert au
dimanche. Ne s'applique qu'aux habits et aux parures :
Lou capèl diménchäou, la manto diménchdoudo.
Diménche, s.m. Dimanche, premier jour de la semaine.
—Lou diménche das Rampans, le dimanche des Rameaux.
Lou diménche dé Carnaval, le dimanche gras ou la Quin-
quagésime. La vèsto, la rdoubo das diménches, l'habit, la
robe de fête, c'est-à-dire le vêtement le plus neuf.
Le mot, Diménche, dimanche, dans notre dialecte et en
fr, poutarriver à sa forme actuelle, a traversé bien des
fortunes et des altérations. Le latin lui a donné naissance,
et c'est en se contractant de Dominica dies, ou de dies
Domini,en se pliant aux propensions organiques de chaque
groupe de population et de chaque contrée, qu'il s'est
enfin fixé. Nous avons signalé sous plusieurs articles et
notamment aux mots Canounje et La Canowrgo, les péri-
péties des transformations de mots où se rencontraient ces
désinences latines repoussées avec une sorte d'horreur par
le roman, analogues à celle qui a servi 4 composer dimén-
che : nous n’y révenons que pour en rappeler la série. Do-
DIN 263
minica, lat., se changea en Dimèrgue, roman; la charte
romane d’Alais de 4200 disait: Diméntge; notre dialecte
en a fait Diménche; le gascon a conservé Dimèrque; d'au-
tres variantes dialectales du Midi ont encore : Diaumergue,
Dimerge, Dimeche, Dimes, Desmengea, Dismengea, Dimer-
que, Diminergue, Deminche, cités par Honnorat. L'ital.
s’est tenu seul au lat. Dominica; mais l'espag. et le port.
ont adopté Domingo; et l’ancién cat. avait Digmenge.
Partout, on le voit, c'est la proscriplion de la désinence
antipathique en inicus, inica, ou mieux nicus, nica; car la
voyelle antécédente aime à se reproduire tantôt en argques
et ergues, tantôt en orgue Où ourgue, glissant en ange,
énge ou onge, puis permutant quelquefois le G doux en la
consonnance chuintante du Ch. Cette unanimité de flexions
sur la même syllabe indique certainement des prédisposi-
tions organiques remarquables. Le mot n'est pas isolé, et
nous avons cité bien des exemples qui donnent un certain
poids à l'observation. Nous aurons occasion d'y revenir.
Dimini, v. Diminuer; baisser; amoindrir; rendre où
devenir moindre, plus petit.
Dér. du lat. Diminuere, m. sign.
Din, prép. Dans. — Voy. Dédin.
Dér. du lat. In, m. sign.
Dina, s. m. et v. Diner.
Lou dina est pour le peuple le repas du milieu du jour :
les citadins le prennent à midi; les paysans en varient
l'heure suivant la saison. Les premiers y placent le potage;
les derniers le renvoient au repas du soir, au souper. —
Voy. Déjuna.
Certains glossateurs, et Ménage particulièrement, font
dériver le mot du lat. Desinere, cesser, sous prétexte que
l'heure des repas est une suspension du travail. Cette déri-
vation parait bien tirée par les cheveux. Ne serait-il pas
plus rationnel de l'attribuer au verbe gr. Asxvéw owan
s. Aëtrvov, qui signifient souper et le repas du soir?
Dinado, s. f. Gala; repas invité; auberge de ronte où
les voyageurs s'arrêtent pour diner; coût de ce repas:
Dinamoun ou Dénamoun, ad». de lieu. De là-haut:
du côté d'en haut; vers là-haut.
Formé de Dé, En, Amoun, par contract.
Dindar, s. m. Dindon, coq d'Inde; dindon commun,
Meleugris Gallapavo, Temm:, de l’ordre des Gallinacés;
mâle du dinde.
Dindo, s. f. Dinde; poule d'Inde; femelle du Dindar:
Dindouiè, s. m. Jujubier, Zysiphus vulgaris, Linn.,
arbre de la fam. des Frangulacées.
Dindoulo, s. f. Jujube, fruit du jujubier, si commun et
si populaire à Nimes qu'on avait autrefois établi une foire,
à la Saint-Michel, pour la vente de ce seul article. Cette
foire a pris plus d'extension de nos jours, mais la jujube
y figure encore en masse, comme l'héroïne de la solennité.
Elle s’y vend en quantité incalculable. Les jeunes gens et
les jeunes filles font ce jour-là la petite guerre avec celte
curieuse espèce de projectile sur les promenades : ce qui
264 DIR
ne contribue pas peu à sa prodigieuse consommation. Les
environs de Nimes et de Montpellier produisent autant que
tout le reste de la France de ce fruit, qui du reste est ori-
ginaire des pays méridionaux et ne se plait pas dans les
températures plus abaissées que le Languedoc.
Dingus, pron. indéfini, masc. Personne.—Voy. Déngus.
Dio, interj. C'est la syncope de Diou-6/ Mon Dieu, oui!
— Diou-si! Diou-nou! Mon Dieu, si! Mon Dieu, non ! Deux
autres interj. du même genre, particulières à notre dia-
lecte, reproduisent,comme celle-ci, les formes les plus ancien-
nes; toutes trois, souvent précédées de l’exclamation Ah/
ou Oh! comme pour appuyer sur l’affirmation ou la néga-
tion, et leur donner plus de force, sont des invocations du
nom de Dieu. Il est à remarquer que la vieille affirmation
romane o et si, empruntée par l’ital., se retrouve ici dans
toute sa pureté. — OA! Did {saiqué, Oh! mon Dieu, oui!
Sans doute. Y-anaras?... Oh! Did; Tu iras?.. Oui, certes!
Diou, s. m. Dieu, le premier et le souverain être : au
fig. divinité, sujet ou passion qu’on adore.
Ce mot ne s'emploie guère ainsi seul que dans le style
poétique ou soutenu, ou pour parler d’une divinité païenne.
Ordinairement on dit: Lou bon Diou. — Voy. Bou-Diou.
L'idée de Dieu se représente en languedocien dans une
foule de locutions souvent explétives : Diou vous douse!
Que Dieu vous écoute! J'en accepte l’augure. À La gardo
dé Diou! Dieu soit béni! A la bonne heure! Diou-mécis!
Grâces à Dieu! Bénissia-Diou! Dieu merci! Sé Diou-z-ou
vôou, S'il plait à Dieu. Plét-à-Diou! Plût à Dieu! Diou té
crésque! Dieu te fasse grand et sage: souhait qu'on fait
à un enfant qui éternue. Davan Diou siè! Dieu ait son
âme! /Voy. Davan.) Diou vous lou done! Dieu vous
donne le bonsoir : formule pour prendre congé. Diou vous
n'én bonjour, contraction de : Dieu vous donne le bon-
jour; forme usitée dans les environs d’Anduze. Il est
évident que dans cette phrase, done est supprimé complé-
tement et sous-entendu, comme dans la précédente le s.
Bonsouèr. Le mot n’én n’est que le prolongement eupho-
nique de né én; c’est comme si l’on disait : Dieu vous en
donne, du bonjour. Géns dé Diou! Juron (Voy. Géns).
Diou m'ajude! Dieu me soit en aide: phrase explétive
pour donner du nombre et de la vigueur au discours, qui
indique toujours une contrariété. Diou-çaï-siè/ Que Dieu
soit avec vous, dit-on en entrant dans une maison, et on
réplique : Amaï à vous. Tout cela répond au Dominus
vobiscum du prêtre à la messe et au répons du clerc :
EU cum spiritu tuo. — Diou-si! Diou-nou! — Voy. Did.
Dér. du lat. Deus.
Dire, v. Dire. — Aquù fai bon dire, c'est fort aisé à
dire. Aqud's un bèl dire, c'est un grand avantage; il y a
bien de quoi se vanter. M'ou sdouprés à dire, vous me le
ferez savoir; vous m’en donnerez des nouvelles. Sa cé qué
né vôou dire, il sait ce qu’en vaut l’aune. Sé lou tén né
vôou dire, si la saison veut être propice. Nés pas pér dire,
mais. ce n'est pas pour s’en vanter, mais... Véou pas qué
DIS
siègue lou di, il ne veut pas en convenir. Dé qué vôou dire
qué sièque pas ana à la mésso? Pour quel motif a-t-il
manqué la messe? Dire dé nou, refuser une proposition;
se dédire. Aquélo bouto couménço à dire dé nou, ce tonneau
est sur sa fin de coulaison. Aqud's pér dire qué.… ou dé….,
c’est pour qu'il soit dit que. Sou-dis, dit-il. Digas/ Dites
donc! formule vocative qui doit être suivie du nom de
l'individu ou de sa désignation plus ou moins explicite
(Voy.Vouë). Mais, digas, l'avès visto coumo sé caravo! Dites
donc, l'avez-vous vue comme elle se rengorgeait! formule
familière au comérage féminin. Aïci digan, entre nous soit
dit. Aqud's pas pér dire, mais. ce n’est pas l'embarras,
mais... Es dé dous dire, il a deux paroles; il soutient le
pour et le contre; il a son dit et son dédit. Coumo disiè
l'âoutre (Voy. Aoutre). Tèn pas gaïre à soun di, il ne
tient pas à sa parole. Entre lou fa et lou di, y-a trés
tègos dé cami, prvb., entre la promesse et l'exécution il
y a loin. Disou, on dit. Sé fouiè éscouta lou di dâou
mounde, s'il fallait s'arrêter aux cancans. Qué li diguère,
lui dis-je. Et sé mé disias qué.…, vous me direz peut-
être que... Quoucon mou disi, j'en avais le pressentiment.
Dér. du lat. Dicere, m. sign.
Discounforme, ormo, adj. Informe; démesurément
grand ou gros ou large; hors de toute proportion.
Il est la négation du mot : conforme, semblable, propor-
tionné, relatif.
Discour, s. m. Dim. Discourné. Discours, harangue;
sermon.
Dér. du lat. Discursus, course çà et là.
Dispénsa, vw. Dispenser: exempter; faire une exception
en faveur de... — Sé iéou ère un ase, qué Diou m'én dis-
pénse! Si j'étais un âne, que Dieu m'en préserve!
Emp. au fr.
Dispénsos, s. f. plur. Dispense d’une ou deux publica-
tions de mariage, ou d’un ou deux bans à l'église.
Disputa, v. Disputer; contester. — Disputan pas qu'un
séou, nous ne sommes en désaccord que d’un sou.
Sé disputa, discuter; se quereller; se battre.
* Dér. du lat. Disputare, m. sign.
Disputaïre, aïro, adj., péj. Disputaïras. Querelleur;
disputeur; qui cherche noise.
Disputo, s. f. Rixe, querelle; dispute.
Dissate, s. m. Samedi, septième jour de la semaine. —
Lou dissale és un jour cour, le samedi est un jour où l’on
n’a le temps de rien. Dé pouns dé dissate, couture à longs
points, parce que les couturières étant fort pressées pour
rendre leur ouvrage le dimanche, se dépêchent tant qu’elles
peuvent sans tenir à la perfection. Y-a pas dé dissate din
l'an qué lou sourél noun végan ; dicton devenu une croyance
populaire, fondée sur je ne sais quelle observation, qui
veut que, par les temps les plus couverts, le soleil se mon-
tre toujours le samedi, ne fût-ce qu'un instant. Faïre lou
dissate, chômer, fêter le samedi, comme les Juifs.
Dér. par contr. du lat. Dies sabbati, jour du sabbat.
ÿ
DOR
DOR 265
Divéndre, s..m. Vendredi, sixième jour de la semaine. | sortant de terre; mais bientôt son chapeau déchire le voile
— Lou divéndre és lou pu fol ou lou pu téndre; encore
une croyance populaire qui Le que dans le temps de
grand vent, de froids rigoureux, le vendredi est le plus
mauvais ou le plus doux des jours de la semaine. Faïre lou
divéndre et lou dissate, observer l’abstinence le vendredi et
le samedi.
Dér. du lat. Dies Veneris, jour de Vénus.
Divérti, v. Divertir; amuser ; égayer.
Sé divérti, se divertir, se réjouir, se récréer ; prendre du
plaisir.
Dér. du lat. Divertere, détourner, distraire.
Divèrtissan, anto, adj. Divertissant, amusant; facé-
tieux, bouffon.
Divèrtissanco, s. f. Réjouissance, fète publique; fête
patronale; récréation.
Dogou, s.m. Dogue, chien de forte race, à grosse tête, mu-
seau court, lèvres pendantes. Le boule-dogue est une variété.
Dér. ‘de l'anglais Dog, chien.
Dôou, s. m. Deuil: affliction, tristesse; convoi funèbre;
habits de deuil. — Lou dôou li counvèn, le costume noir
dui sied. Pichè-déou, demi-deuil; noir et blanc. Dé quéou
[as déou? Pour quel parent portes-tu des habits de deuil?
Faïre soun déou, se consoler d’une perte quelconque, même
d'objets matériels de la plus mince importance. N'aï fa
moun déou, j'ai passé condamnation; m'en voilà consolé.
Vous rigues pas dé moun dôou, quan lou miou séra vièl lou
vostre séra nôou; tel qui rit vendredi, dimanche pleurera.
Dér. du lat. Dolor, douleur, chagrin.
Dooure, v. Douloir; faire mal; causer une douleur. —
Ma tèsto mé déou, j'ai mal à la tête; j'éprouve une douleur
-
* à la tête. Moun dé fai pas qué mé déoure, j'ai un mal au
doigt qui ne me laisse pas un moment de repos. M'én dôou
d'y èstre ana, il m'en cuit d'y être allé. Qu'iè! noun véi,
cor noun dôou; prvb., le mal qu’on ignore est comme non
avenu; en vieux fr.: ce que euls ne voit cuers ne duet. —
Fénno sé plan, fénno sé déou, fénno és maläouto quan-t-ou
véou; prvb., femme geint, femme se plaint, femme est
malade à volonté.
Dér. du lat. Doere, souffrir d’une douleur.
Dôousso, s. f. Cosse de légumes. — Voy. Cadéousso.
Dorgue ou Boulé rouje, s. m. Oronge; agaric-oronge,
Agaricus aurontiacus cæsareus ; fungus orleicularis aureus ;
champignon de la tribu des Amanites. — Chaque année,
au mois d'août et dans les premiers jours de septembre,
l'apparition des champignons sur nos marchés fait évène-
ment : elle est aussi le signal de quelques accidents funestes.
IL ne sera donc pas sans intérêt de résumer ici les notions
fournies par les mycologuss ies plus autorisés sur le Dorgue,
Boulé rouje, oronge vraie, comestible, pour empêcher dele
confondre avec l’autre espèce vénéneuse qui lui ressemble.
Ce beau champignon, si renommé par son goût exquis,
par son parfum délicat, est d'une forme ovoïde, entière-
ment enveloppé d’une membrane blanche, ou volva, en
qui le couvre, sans emporter de lambeaux, et acquiert
jusqu’à onze et quinze centimètres de diamètre. Ce chapeau
est alors presque plane, orbiculaire, d'un jaune orange,
d'une teinte plus vive vers le centre ; sa surface est douce,
unie partout, excepté sur les bords, qui sont sensiblement
rayés et quelquefois incisés.
Ses feuillets sont larges, épais, inégaux et d’un jaune
d’or.
Le pédicule, à peu près de la mème couleur, est plein,
bulbeux, haut de dix centimètres et quelquefois plus, en-
touré à sa partie supérieure d'un anneau jaune, large et
rabattu; chair blanche, épaisse, offrant seulement une
légère teinte jaune près de la surface ; odeur agréable,
saveur douce.
On regarde, et avec raison, l’agaric-oronge, Dorgue,
comme le plus fin et le plus délicat des champignons.
Il était connu des Romains sous le nom de Boletus; les
Grecs le nommaient Béune, et le préféraient à tous les
autres champignons. Leur amanite était le cèpe que Gallien
place au second rang.
Apicius, le plus fameux gastronome de l'antiquité, ou
comme l'appelle Pline, nepotum omnium altissimus qurges,
a tracé avec détail le mode de sa préparation. Horace,
Sénèque, Pline, Juvénal, Martial, Suétone, en font men-
tion.
Juvénal en parle comme d’un mets recherché que les
riches faisaient placer devant eux, tandis qu'on servait de
mauvais champignons aux parasites qu'ils voulaient bien
admettre à leur table :
Vilibus ancipites fungi ponentur amicis,
Boletus domino...
Mais c'est surtout Néron qui a rendu ce châmpignon
célèbre. 11 l’appelait cibus deorum, mets des dieux; mais
il faut dire que c’était par reconnaissance d'avoir envoyé
dans l’Olympe son prédécesseur, quelque temps avant
l'heure naturelle.
L'empereur Claude, en effet, fut empoisonné avec un
plat d’oronges qu’il aimait passionnément. Locuste et Agrip-
pine avaient présidé à la préparation du ragoût; et comme
il n’agissait pas assez vite, le médecin Xénophon se char-
gea, sous forme de contre-poison ou de vomitif, d'ajouter
la dose nécessaire qui acheva l'impérial malade.
Lou dorgue, oronge, a beaucoup de ressemblance pour
le port et la couleur du chapeau avec la Fausse oronge,
Agaricus muscarius. Il faut bien se garder de confondre
ces deux espèces si différentes par leurs qualités.
Voici les principaux caractères qui les distinguent : l'une,
la véritable oronge, a un volva ou une espèce de bourse qui
la recouvre entièrement dans sa jeunesse, l'autre a un
volva incomplet. La première porte un chapeau d'un jaune
orangé, uni, sans verrues; le chapeau de la seconde est de
couleur écarlate, plus ou moins moucheté de petites peaux
2%6 pou
blanches ou dorées, citrinss, écailleuses.. Los dorgue a un
doux parfum, des lames couleur d'or, un pédlicule jau-
nâtre : la fausse oroage exhale une odeur désagréable et
non pas une odeur de champignon; ses lames sont d'as
blanc de neige, ainsi que le pédicule qui est plus épais,
cflindrique, un peu écailleux, bulbeux à la base : la bulbe
du pédicale répand plus particulièrement une odeur forte
et muséaboude. Dans l2 variété à taches dorées ou citrines
les bonds de l'anneau qui entoure le pédicule sont fine-
ment dentés. :
Autant lou Boulé rouje est délicieux au goût eksain,
autant la fausse oronge est malfaisante et un poison vio-
lent, presque loujours mortel. C'est pourquoi nous avons
insisté sur leurs différences et sur leur description.
Dos, n. de nombre; fém. de Dous, deux. — Aquè. far
las des; et de deux. Sou chanjas dé las dos; les vers à
soie sont sortis de leur deuxième maladie; ils sont à leur
troisième âge. Fañre las dos mans ; dire le pour et le con-
tre; servir deux partis à la fois, ou plutôt les trahir tous
deux en ayant l'air de les soutenir.
Dér. du lat. Duo.
Doto, s- f- Dot, apport dotal. — Voy. Bérguièiro.
Dér. du lat. Dos, dot.
Doubla, s. Doubler, mettre en double; ployer en deux;
joindre et tordre deux fils ensemble; mettre une doublure ;
fausser, tortuer; plier en arc.— Doubla la journado, faire
um double journée, en travaillant la nuit. Doubla un
clavèl, tortuer un clou. Doubla wno cléou, fausser une clé.
A doubla, il à augmenté du double.
Sé doubla, se plier en deux. — Sé doublo coumo uno
amarino, il s plie comme un brin d’osier.— On dit mieux
en ce s0s Gimbla. — Voy.C. 1m.
Dér. du lat, Duplicare, 19. sign.
Doublaïro, s. f. Doubleus, ouvrière employée à dou-
ler la soie ou tout autre fil.
Doublaje, s. m. Action de doubler un fil quelconque;
frais de ce travail; provision de fil doublé ou à doubler.
Double, doublo, s. afr. et adj. Double; le double;
une fois autant; acle écrit en deux copies. — Aquélo fénno
és doublo, cite femme est enceinte. Jouga la doublo, jouer
une partie en doublant le premier enjeu. Féou sinna lou
double, il faut signer l'acte en double original. L’énvals
tout double, il l'avala sans hésiter.
Un double, un cocon qui contient deux chrysalides et
qui est l'œuvre simultanée de deux vers : ce qui fait que
leurs fils sont enchevètrés et qu'ils ne produisent qu'un
brin gros, fort et bourilleux. Aussi sépare-t-on ces cocons
des simples pour les filer à part, et ils produisent une soie
grossière el terne qu'on nomme doublo, employée à faire de
L soie à coudre, des tissus, des lacets, des galons et autres
produits qui demandent de la force et non de la finesse :
en terme de commerce, elle se nomme Doupion.
Depuis l'introduction des races chinoises et japonaises
dans nos éducations séricicoles, la proportion des doubles
pou ;
ns bi . ns. t-il ©
fléau qui éco)
des cocons s'en ressent d'une manière |
tous ceux où entre le mot mille, implique la pluralité «
dieux, et par conséquent ressemble fort à un legs de l'an-
tiquité. La racine de ce juron est Müo-Dious! mille-dieux !
Par un reste de respect pour le nom de Dieu qu'on remie
en quelque sorte, on Re 7 M
sous-entendu : Double-Milo est donc le duplicaüf de.
Diou! Il faut faire observer cependant que ce juron à
Sn CS
Diea, ils sont moins hétérodoxes que ceux qui disent ou-
vertement : Milo-Dious, parce qu'ils savent tous que test
mes ateinie Sapin ents JE PROS
ligue.
Doublén, doublénquo, s. "=. et f. Agnes me où
femelle de deux ans. — Foy. Bédigas. rt are
Doublis, «. mn. Aie de RSR
— Léoura dou doublis, labourer avec deux bêtes, par op-
pe a eee En
la limonnière, c'est-à-dire avec une seule bite.
Doublaro, s. f. Doubluse, étoile: dust. eus 10
est doublée. — On donne plaisamment ce nom à la peau
humaine, qui est en quelque sorte la doublure de nos habits.
— Fi eronlo fi, véou pas rés pèr doubluro, prvb., fin contre
fin ne vaut rien pour doublure; à bon chat, bon rat: tu
as à faire à quelqu'un d'aussi rusé que toi.
Douçamén, adv. Dim. Douçaméné. Lo pe: à petit
bruit; délicatement; avec douceur.
Dér. de Dous, du lat. Dulcis. |
Doueinoûs, ouso, adj. Douerâtre ; qui est d’une
œur fade, presque nauséabonde. — — On emplois
Doucinas, D. sign, qe eue een ASE
faire un plafond plat garni en plâtre.
Dér. de la bass. lat. Dogella, petite douve.
Dougan, s. m. Douvain, bois refenda
fort belles douves. «
Dougo, s. f- Bo dm
psp mag meer à 2 é
en bois de mürier s :
donner une certaine po qu
DOU
deux ‘traits qui commenceat par les deux Bouts oppcs
sur deux lignes qui ne sont pas la prolongation l'une de
l'autre, mais qui se coupent en angle excessivement obtus
vers le milieu de la douve.
Dér. de la bass. lat. Doga, m. sign.
Donié, douïéto, adj. Douillet; délicat: qui se dorlote:;
peut supporter la plus légère douleur.
-Dér. du lat. Dolens, dolent ; qui se plaint.
Douiétariè, s. f., ou Douiétije, s. m. Délicatesse ; gâte-
rie ; susceptibilité excessive pour la plus petite douleur.
| Ge qui constitue une différence entre ces deux. mots, qui
cependant s'emploient à peu près indistinctement, c'est que
Douïétarid est un acte de délicatesse, et Dowiétije est ce
défant lui-même, l'habitude passée à l'état chronique.
Douïre, s. m. Buire; jarre à huile; urne de cuve;
grand vaisseau en terre cuite.
Dér. du lat. Dolfum, vaisseau, tonne.
Douje, n. de nombre. Douze; deux fois six ou dix et
deux.
-Dér: du lat. Duodecim, m. sign.
Doujéno, s. {. Douzaine, nombre de douze. — Les œufs
s vendent par douzaines; la plupart des fruits se ven-
daïent de même autrefois; c'est ce qui a amené cette
proverbiale : Gn'a pas tréje à la doujéno, en par-
d'une jolie femme où d'un homme de mérite; €’est-à-
dire que c'est un objet d’une trop grande valeur pour
qu'on puisse ajouter une unité de plus par dessus le mar-
ché, comme cela se fait presque toujours pour les ventes à
douzaine. :
Doulo, s. f. Coup de poing donné sous le menton, ou à
Îa nuque où dans les côtes, avec l'angle des phalanges fer-
mées. Le mot à voulu exprimer l'effet toujours douloureux
et en a fait le suprème du genre.
Dér. du lat. Dolere.
Douloù, s. f. Dim. Dowlounéto. Douleur rhamatismale
ou nerveuse, et non la douleur, la souffrance générale, que
fait éprouver un mal physique quelconque, encore moins
fx douleur morale.
_Dér. du lat. Doler..
pe ve pee rer
| groisie qui seules avaient droit au titre de madame.
DOU 267
Douméisilo est encore un insecte de la classe des Né-
vroptères, appelé Libellule où Demoiselle, Libelisiæ, Linn.,
portant des ailes de gaze, qui vole au-dessus des ruisseaux
et des petits cours d'eau.
Dér. de la bass. lat. Domicella, dim. dé Domina.
Douméisélun, s. m«. Terme collectif : ensemble des de-
moiselles ou des filles d'une ville où d'un village.
Doumèrgue, n. pr. d'homme. Domergue.
Ce nom, comme le remarque très justement Sauvages,
est devenu n. pr. de famille après avoir été d'abord un
simple nom de baptème. Il fut en effet Dominique, que le
roman languedocien Cansforma en Doménge, et l'esp. en
Domingo, maintenu en Domingue pour l'appellation d’ane
ile des Antilles. H a done subi les mèmes métamorphoses
que ses similaires dérivés de la même source, que nous
avons déjà rencontrés. C'est encore cetle finale en iniess
où inieæ de la bass. lat. que le roman ne tolère pas. Le
latin donnait ines, ina, ümem, qu'on avait redouhlé ou
allongé; et ce sont ces consonnances sur lesquelles le roman
se plaisait à s'exercer. Aussi lous ces noms à base com-
mune prèésentent-ils les plus bizarres variantes.
Douméssargue, n. p. de lieü. Dommessargues, canton
de Lédignan, arrondissement d’Alais.
Variété de mème famille, avec la désinence plus par-
ticulière à nos contrées. Le principe est dans le latin Do-
minus. Pour en faire un nom de lieu, le suffixe onlinaire
vieñt l'approprier et dans la bass. lat. on appelle ce do-
maine, appartenant à quelque seigneur, au moyen-âge,
Domensanice, en 41235; le roman vulgaire, en mème temps,
1237, dit Domenssanègues, puis Domenssanengues, qui
arrive À notre Douméssærgue par le chemin que nous avons
indiqué sous les noms en Argue.
Doummai, conjonc. C'est la traduction du fr. Plus, pris
pour conjonction et lorsqu'il sert à établir une relation
entre deux verbes. — Doummaï vaï, dowmmaï déelino,
plus il va, plus il décline ou diminue.
Formé de Maï, plas, et du lat. Dum, tandis que.
Doummén, conjonce. Moins, dans l’acception inverss de
Doummeï. Tout ce qui est dit pour celui-ci peut s'appli-
quer à celui-là.
Doun, conj. Done, par conséquent. Le pronom fr. Dont
n'est pas connu dans le lang. et c'est un gros solécisme ou
plutôt un gallicisme que de l'employer. De qui Où duquel
ne sont pas admis davantage : lacune fâcheuse sans doute
à qui veut traduire le français; mais pour ceux qui peñt-
sent en lang. en écrivant dans cet idiome, la pensée ne
leur vient pas même d'employer cette formé. — Foy.
Adoun.
Dér. du lat. Tune, alors.
D'oun, ade. de lieu. D'où, de quel côté? Contraction de
D'ounté, mais avec cette différence que D'eun ne s'emploie
qu'interrogativement.
Douna, v. Donner; faire un éadeau, une donation; bi
| vrer, vendre, accorder; causer; ruer; frapper; atteindre.
268 DOU
Cependant une singularité : dans cette dernière acception,
la 4re et 3me pers. sing. de l'indic. prés. du verbe Douna,
n'ont pas la mème forme de conjugaison. Ainsi Douna,
donner, fait : Done, dones, dono; et le mème verbe, lors-
qu'il signifie ruer, fait aux mèmes temps: Doune, dounes,
douno.
Douna se dit d'un mur ou d'une construction quelcon-
que qui s'affaisse sur sa base et perd son aplomb. — Sé
douna à quâouquus, émb'un oustâou, se donner corps et
bien à une personne, à une famille : ce qui arrive souvent
parmi le peuple des célibataires, qui, n'ayant ni famille,
ni bonne santé, ni capacité suffisante pour gérer leurs
affaires, s'établissent dans une famille à laquelle ils aban-
donnent leur avoir, à charge de pourvoir à tous leurs be-
soins. Cette situation est la contre-partie de la tutelle offi-
cieuse et pourrait se dénommer pupillarité officieuse.
Aquélo récolto dono bièn aquéste an, cette récolte produit
beaucoup cette année.
Douna veut dire encore : avoir vue; traiter; et faire
l'aumône. — Sa fénèstro dono sus lou céméntèri, de sa
fenêtre on a vue sur le cimetière. Aquél hoste don0 bièn, ce
traiteur donne bien à diner. Dounas quoucon dou pdoure
avugle, faites l'aumône au pauvre aveugle.
Dér. du lat. Donare, m. sign.
Douminargue, n.p. de lieu. Dominargues, canton de
Connaux, arrondissement d’Uzès.
Autre variante des deux noms propres qui précèdent.
Celui-ci vient encore du lat. Dominus, c'est une terre
-dominicalo au moyen-âge, inféodée, qui, pour cela, était
désignée par Dominanicæ, et que la langue vulgaire a fini
par plier au Douminargues actuel.
Des origines communes apparentent toutes ces dénomi-
nations, qu'il faut conférer avec ce que nous avons dit de
Diménche, d'une consanguinité fraternelle, et qui a passé
par des transformations parfaitement identiques. Tous ces
rapports doivent encore être rapprochés des noms analo-
gues, et rien n’est plus curieux que ces diversités sur les
mêmes racines. Ainsi sont appelés : Domassan, Domessan,
Domenec, Domenech, n. pr., et Domme (Dordogne); Dom
(Aveyron); Daumaize (Puy-de-Dôme); Domezac (Cha-
rente); Daumazan (Ariège); Domazan (Gard); Domezain
(Hautes-Pyrénées); Domenac (Lot); Domilhac (Lot-et-
Garonne) ; Dominon (Nièvre).
La composition ethnique des noms est féconde et fournit
un intéressant sujet d’études, dont nous essayons de donner
quelques éléments. ‘
Dounaciou, s. f. Donation; don par acte public: acte
qui établit la donation.
Dounaïre, aïro, adj. Libéral; aumônier; charitable ;
qui aime à rendre service.
Doun-Doun, s. f. Dondon; grosse gagui; femme ou fille
qui a un embonpoint excessif.
Dér. du roman Dondaine, ballon à jouer.
Dounéto, adj. des deux genres. Variante de Dounaïre,
DOU
mais qui ne s'emploie que négativement: És pas dounéto,
il n’est pas généreux ; il n'aime pas à donner; il est avare,
serré. La fournigo és pas dounélo, la fourmi n'est pas
prèteuse.
Douno, s. f. Donne, la main aux différents jeux de
cartes; distribution d’aumônes à jours fixes, qui sont usi-
tées dans certaines maisons charitables. — Hiuï és jour
dé douno encù dé moussu.…, C'est aujourd'hui jour d'au-
mûne chez monsieur.
D'ounté ou D'ounte, adv. de lieu. D'où, de quel côté?
— Voy. D'oun.
Dér. de Ounté.
Dourda, v. Frapper, heurter de la corne; cosser. — Sé
dourda, se cosser; lutter à coups de cornes; au fig. se
heurter, se cogner la tête contre un corps dur quelconque.
— dJadis dans les fêtes publiques on faisait lutter deux
béliers ensemble. On trouve dans des comptes municipaux
de Nimes cet article de dépenses : Pro uno mutone qui fuit
luctatus ad luctas Sancti Laurentii V denarii.
Sauvages prétend que ce mot est d’origine celtique : il
est difficile de. prouver le contraire.
Dourdo-moucho, adj. de tout genre. —Voy. Dourdo-
mouts, dont il n’est qu’une corruption.
Dourdo-mousquo, adj. de tout genre, m. sign. que le
précédent et le suivant, dont il est une variante. Tous trois
s'appliquent fort bien à un butor, un bélitre.
Dourdo-mouto, adj. de tout genre. Sournois, taciturne;
songe-creux. Au prop. qui se heurte du pied en marchant
contre les mottes de terre, tant il est préoccupé de ses
sombres et sottes rèveries.
Dans l'usage, Dourdo-moucho a pris le dessus, et il est
plus usité.
Dourmar, aïro, adj. Péj. Dourmaïras. Grand dormeur;
roupilleur. ;
Dourméire, éiro, adj. Dormeur, qui aime à dormir.
Dourmar est son péjoratif.
Dourmi, ». Dormir; reposer; être dans le sommeil; être
calme et sans mouvement, comme l’eau dormante. — On dit
d'une toupie, térubin qué dor, lorsque, vers le milieu de
ses évolutions, elle se met à tourner sur sa pointe sans
changer de place et avec une telle régularité d'équilibre
qu'on n’aperçoit pas ses mouvements de rotation. — Lous
magnas dormou à las trés, à las quatre, les vers à soie sont
dans leur troisième ou quatrième mue.
Dér. du lat. Dormire, m. sign.
Dourmido, s. f. Méridienne, sieste; somme. C'est undes
repos qui sont dûs aux journaliers depuis le 4° mai jus-
qu'au 4er août: il a lieu immédiatement après le repas de
midi.
Dourmiouso, s. f. Torpille, Torpedo ou Torpilla, Linn.,
poisson de l'ordre des Trematopnées et de la fam. des
Plagiostomes, à bouche transversale, plat, cartilagineux,
à peu près de la figure de la raie. La plus grande torpille
a deux pieds de long. On sait la faculté qu’elle a d'engour-
DOU
dir ou endormir le bras de celui qui la touche, comme par
une décharge électrique. De là son nom.
Dourquado, s. f. Dim. Dourquadéto. Plein une cruche ;
contenu d'une cruche. — Vaï cérqua uno dourquado d'aïgo
frésquo, va remplir ta ruche d’eau fraiche.
Dourqué, s. m. Petit broc; pot à eau ou à vin; cru-
chon. — S'amoura dou dourqué, boire à mème au broc.
Dim. de Dourquo.
Dourquièiro, s. f. Violette-longue; espèce de figue d’un
noir violet en dehors et rouge en dedans. Elle a le cou
allongé et la base large et plate, ce qui lui donne certaine
ressemblance avec quelque ancienne forme de cruche,
Dourquo, d'où elle tire son nom.
Dourquo, s. f. Dim. Dourquéto; péj. Dourquasso. Cru-
che de terre ou de grès.— Les gens de la campagne s’en ser-
vent comme d'un broc pour le vin; mais pour cela cette
cruche à vin doit avoir un bec ou canal: lorsqu'elle n’a
qu’une évasure à son rebord, on l'appelle Biche.
Dér. du lat. Orca, jarre, vaisseau de terre.
Dous, n. de nombre. Au fém. Dos. Deux. — Dé dous
én dous, deux à deux : terme de jeu, quand on est associé
deux contre deux ; se dit aussi des choses et des individus
divisés par paires ou par couples. Sèn dous, nous sommes
deux, c’est-à-dire je partage tout à fait votre manière de
Voir. Proumétre et tène soun dous, promettre et tenir sont
deux choses fort différentes.
Dér. du lat. Duo, m. sign.
Dous, douço, adj. Dim. Doucé ; péj. Dougas. Doux ;
suave; agréable au goût, à l'odorat; fade; qui manque
d’assaisonnement : au fig. paisible; d'humeur douce; tran-
quille; humain; pliant; flexible; velouté. — Zou pan és
tro dous, le pain manque de sel ou de levain; il est fade.
On le dit aussi du vin qui, sans être liquoreux, n’a aucune
pointe, par opposition dou vi for, celui qui commence à
aigrir; mais il faut que ce soit dans une phrase corrélative,
sans quoi lou vi dous est simplement le vin doux qui n’a
! pas encore cuvé. La passo dougo, il passe la vie douce.
Dér. du lat. Duicis, m. sign.
Dousil, s. m. Dim. Dousié. Fausset de tonneau; bro-
chette qui ferme une petite ouverture pratiquée soit au
haut du fond pour donner de l'air à l'intérieur quand on
le remplit, soit au milieu pour en déguster le contenu, soit
au bas quand on le soutire à la brochette; ouverture mème
où se place le fausset. Au fig. petit trou, blessure étroite.
La racine de ce mot peut bien être dans le lat. Dolium,
tonneau; mais elle pourrait bien peut-être se trouver dans
… Ducere, ductus, conduire, conduit, où Duæ, ducis, chef,
, v. Douter, tre dans le doute; soupçonner. Se
prend presque toujours en mauvaise part. — Doura sus
qudouquus, soupçonner quelqu'un.
Dér. dulat. Dubitare, m. sign. ,
Doute, s. m. Doute; soupçon; hésitation; incertitude. —
Léva un doute, élever un soupçon.
DRA 269
Douvèr, èrto, adj. et part. pass. de Douvri. Ouvert;
franc; sincère; qui a le cœur sur la main. — Un chival
douvèr, un cheval à large poitrine, dont les jambes de
devant sont largement espacées. Un home douvèr, un
homme qui a les cuisses arquées et dont les genoux sont
fort éloignés.
Douvri, v. Ouvrir. — Voy. Drouvi.
Dra, s. m. Drap, étoffe ordinairement en laine; grand
châle en mousseline blanche dont les femmes cossues s'en-
veloppaient surtout quand elles étaient en grand deuil. Cet
usage est passé de mode : le châle est noir en grand deuil.
— Dra dé mor, drap mortuaire. Dra d'hounoù, poële
d'honneur qui se porte devant le cercueil.
Le mot Drappus avec la m. sign. se trouve dans les Ca-
pitulaires de Charlemagne : le celtique ayait Drap; le gr.
donne Kaoos, trame.
Dra, s. m. Dim. Draqué. Lutin, diable; mauvais génie;
esprit follet. On l'appelle aussi Jan-lou-Dra ou lou Draqué.
Dér. du lat. Draco, dragon.
Dragas, s. m. Dragon; nom que l'on donne souvent à
une femme ou à une fille effrontées, hardies au-delà de
toute pudeur. C’est une contraction du péj. Dragounas. —
Aqud's un dragas, c'est une Virago, un démon d'effron-
terie.
Dragoun, s. "”m. Dim. Pragouné; péj. Dragounas. Dra-
gon, soldat appartenant à une arme de la cavalerie; lutin,
esprit ou serpent fantastique. — Aqud's un dragouné, c'est
un petit lutin.
Draïo, s. f. Chemin affecté aux troupeaux et qui a une
plus grande largeur que les autres. — Il se dit surtout de
ceux que suivent les troupeaux qui vont passer l'été sur
la montagne et sur lesquels on croit qu'ils ont prescrit
le droit de passage, quoiqu’ils ne soient pas frayés et qu'on
ne distingue guère à l'œil leur périmètre. C'est sans doute
un préjugé qui ne repose sur aucun droit, bien que les
anciens cadastres les appellent quelquefois comme tenants
et aboutissants de délimitation. Du reste le nombre de
routes et chemins vicinaux qui se multiplient chaque jour
rendent ces Draïos inutiles.
Dériverait-il du gr. Apéw, s'échapper, s'enfuir, ou de
Teéyw, courir, passer ?
Draïôou, s. m. Petit sentier; chemin étroit, à peine
tracé.
Dim. de Draïo.
Draja, v. Cribler; passer au crible.
Dér. de'Dral ou Drajé.
Drajaire, s. m. Celui qui crible le blé.
Drajé, s. m. Crible. — Voy. Dral.
Drajèio, s. [. Dragée; amande, pistache, nélsntte;” ou
autres petits fruits enveloppés de sucre durci. — Quouro
nous fas manja dé drajèïos? Quand te maries-tu? Bada la
drajèio, au fig. cette locution signifie : Bayer aux corneilles ,
ouvrir la bouche de stupéfaction ; au prop. elle est devenue
proverbiale et prend son origine dans un jeu du carnaval
270 DRA
Dans les mascarades des jours gras, on voit toujours un
masque habillé en Cassandre et monté sur un âne, sens
devant derrière; il tient à la main une baguette : à cette
baguette pend un fil : à ce fil est accrochée une dragée que
le Cassandre fait sautiller, en frappant avec une seconde
baguette sur la première, au-dessus d’une foule de gamins
qui suivent, la bouche grande ouverte, pour happer le
bonbon, qui leur échappe par ses sautillements, car il est
prohibé d’y porter la main.
Cette définition, explication, description du mot et de la
chose est empruntée aux Castagnados, et nous n'avons pas
cru pouvoir mieux faire.
L'étymologie, nous le savons, est, d’après les glossa-
teurs. tirée du gr. Toxyuate, dessert; de là dragée, disent-
ils. Nous ne nous y opposons pas. Mais pour qui a vu
confectionner cette charmante et nuptiale friandise, une
autre dérivation se présente. Les amandes, pistaches ou
noisettes sont jetées dans un poëlon de confiseur, au milieu
d’une poudre de sucre, et soumises à un mouvement con-
tinu d’agitation, de rotation, d'oscillation, jusqu'à ce que
les molécules de sucre les ait entièrement et également
revêtues et enveloppées, de manière à leur former une
nouvelle écorce, cette délicieuse écale durcie au frotte-
ment, lisse et égale, qui distingue la dragée. Cette opéra-
tion de confiserie n'est autre que la manœuvre du crible à
blé appliquée à une friandise. Or le crible se nomme en
lang. Drajé. Pourquoi les amandes, criblées aussi, ne rap-
pelleraient-elles pas dans leur dénomination le moyen par
lequel elles sont devenues Drajéïos? Cette origine nous
semble valoir autant qu’une autre plus savante.
Dral, s. »m. Dim. Drajé. Crible à blé, en peau de pore
et à trous ronds, ce qui le distingue du Moundaïre.
Le mot Dral est un terme générique dont celui de Cou-
ladoù est la spécialité relativement au blé. Lou Drajé ou
Pisso-païño est un crible dont le fond est tissu en cottons
de châtaignier, servant à séparer le grain et la balle d'avec
un résidu de paille.
Dér. du gr. Apéw, s'échapper, s'enfuir.
Drandaïa, v. — Voy. Trantaïa.
Drapé ou Drapèl, s. m. Drapeau d'enfant, linge carré
dont on enveloppe immédiatement le corps de l'enfant au
maillot.
Dim. de Dra.
Drapèou, s. m. Dim. Drapélé. Drapeau, étendard, en-
seigne militaire. .
Dér. de Dra.
Drapiè, s. m. Drapier, marchand ou fabricant de drap.
— "Dans un acte du 40 des Kalendes de janvier 1294, qui
règle le rang des corporations à Alais, il est fait mention
des drapiers et marchands de drap, faisant commerce avec
Paris et en France: Draparü, utentes officio draparie et
omnes illi qui Parisüs aut in Francia mercaturas suas
exercent. Ms font partie de la deuxième échelle pour former
le conseil municipal de la commune, avant les avocats, les
DRE
notaires, les médecins, les apothicaires et les épiciers, qui
ne sont classés ensemble qu'au troisième rang.
Draqué, s. m. — Voy. Dra.
Dré, s. m. Droit; jurisprudence; justice; loi; ce qui est
juste; liberté; faculté. — Faïre lou dré, faire bonne jus-
tice, rendre à chacun ce qui lui appartient légalement ou
consciencieusement. À fa lus drés à sous éfans, il a par-
tagé son bien à ses enfants avec une stricte probité. Lous
drés, les droits légitimaires d’un enfant de famille, ce que
la loi lui accorde obligatoirement.
Dér. du lat. Directum pour rectum, justice, équité.
Dré, drécho, adj. Dim. Dréché. Droit; direct; qui est
debout ; escarpé; qui a une pente rapide. — Tèn-té dré,
suivant les cas, signifie : tiens-toi debout ou tiens-toi droit.
Dré-t-én-dré, vis-à-vis, en face de. Marcho tout dré, mar-
che droit devant toi. La mountado és bièn drécho, la mon-
tée est bien rapide. Dré dé tus, vis-à-vis de loi, en ligne
directe de ta position; faisant face à la direction de tes pas.
Soun mas és dré dé Larna, sa métairié est près et dans Ja
direction de Larnac. Touf és én dré, tout est régulièrement
disposé. L'douro drécho, le vent du nord. Faïre l'éoubre
dré. (Voy. Aoubre.) — Aqui dré, de ce côté, dans cette
direction. C’est une phrase explétive fort usitée dans la
région orientale d’Alais, chez ce qu’on appelle les Gounèls,
qu'on y emploie à tout usage, sans le moindre rapport avec
la phrase antécédente ou subséquente. À man drécho,
du côté droit, à main droite.
Dér. du lat. Directus, droit.
Dréchè, dréchèiro, s. m. et f. Droitier, qui se sert
particulièrement de la main droîte pour tout exercice ét
travail d'adresse. — La nature a donné une égale force,
une même dextérité à chacune des deux mains; ce ne sont
que les habitudes d'enfance ou d'apprentissage qui modi-
fient cette disposition naturelle, en faisant passer par un
exercice journalier la force et l'adresse dans celui de ces
membres qui est le plus mis en exercice.
Dans notre état de civilisation, nous avons donné là
préférence au bras droit, et dans tous les actes que nous
apprenons théoriquement, c'est lui qui joue le principal
rôle, non pas qu'il y ait été prédestiné par la nature, mais
bien parce qu'il faut, dans tout apprentissage régulier,
adopter une unité de principes. L'exercice des armes a dû
être un des premiers rudiments de l'éducation des peuples
et c'est un de ceux qui exigent le plus d'ensemble et d'u-
nité de principes. L#
La droite a été préférée on ne sait par quel motif; mais
quand on a vu que cette main avait acquis dans cet
exercice plus d'habileté et de vigueur, on a dû penser que
ce membre était privilégié de la nature à quelques excep-
tions près.
Cependant quand on considère combien sont nombreux
les gauchers dans les classes populaires; lorsqu'on voit que, :
dans ces travaux agricoles qu'on apprend par la seule
imitation, les gauchers sont aussi communs que les droi-
| DRO
tiers; lorsqu'on voit ceux-ci continuer à manier la houe,
la bôche, la hache, à jeter des pierres, de la main gauche,
mème après qu'on a exercé leur main droite à l'écriture et
au maniement des armes; lorsqu'on voit la nature lutter
victorieusement contre l'éducation dans certains individus
qui restent gauchers malgré les leçons, les exemples et les
punitions, il faut convenir que le privilége de la droite
n'est qu'une convention purement sociale.
| Cette prédisposition, qui crée les gauchers et les droi-
tiers, remonte aux premiers mouvements de l'enfance au
| maillot. Ces | premiers gesles, ce premier exercice des arti-
. eulations, sont toujours spontanés. Qu'un enfant soit un
| peu plus ou un peu moins serré dans ses langes d'un côté
que d'un autre, le membre resté le plus libre agira le
premier; sisa nourrice en lui donnant le sein lui présente
plus souvent un côté que l'autre, le bras placé en dehors
aura plus de liberté et c'est celui dont il se servira d'ins-
tinct pour saisir ou pour gesticuler. Au bout de quelques
jours ce membre se renforcera, et au moment où ces mou-
vements devront prendre plus d'intensité et de régularité,
la nature quiest en suspens pour décider de la suprématie
de ses membres, l'accordera de préférence à celui qui aura
montré plus de dextérité et d'aptitude.
* Du reste ce qui prouve que les gauchers ne sont point
une exception de Ja nature, mais bien une contravention
des lois sociales, c'est qu'ils ne sont point rares dans les
classes populaires et agricoles, où l’on n'a rien fait pour
combattre cette prédisposition.
Drésèli (Sén), n. pr. de lieu. Saint-Dréséri ou Saint-
Didier.
Dér. du lat. Sanctus Desilerius.
Drinda ou Dinda, v. Tinter; rendre un son aigre et
métallique comme des grelots. .
Dér. du lat. Tinnire, m. sign.
Inutile de faire remarquer, après ce que nous avons dit
- lett. D, la permutation des dentales du dérivé au primitif
Jai, Le fr..et le lang. suivent leur marche parallèle.
… Drin-drin! énterj. Tin-tin; onomatopée d'un son aigu
ét métallique.
_ Dringo-drango, phr. faite, sorte d'adv. pour exprimer,
par imitation, un branlement de gauche à droite, pareil au
brimballement des cloches. — Faïre dringo-drango, se
… balancer de droite à ge Se dit surtout des personnes
Druggs, drogue. à
@, s. m. Dim. Droule; augm. Droulas. Jeune gar-
. — Se dit d'un enfant qui marche déjà, Pronl à
DRRine, au commencement de la puberté. Ce mot
MR Dre, als Son ay
DU 271
n'entraine avec lui aucune idée défavorable, comme le
Drole, Îr. — Dé qudou és aquél pouli drole? à qui est œ
joli enfant, ce gentil mignon d'enfant? surtout avec le
dim. Droulé. Moun brave droulas, mon cher petit et gros
poupon : expression caressante, avec l'augin.
Son étym., ainsi que celle de l'adj., parait avoir été tirée
du danois ou saxon Trole, démon.
Drole, drolo, adj. Plaisant, drole; singulier; facétieux..
— Trobe un pdou drole que m'aguës [a aquél tour, je trouve
fort plaisant, fort mauvais que vous m'ayez joné ce tour-
là.
Drolo, s. f. Dim. Drouléto; péj. Droulusso. Jeune fille:
dans la mème acception que Drole; cependant on en pro-
roge la portée au delà de l’âge nubile. — Uno bravo drolo,
une gente bachelelte. Aqud faï uno bravo droulusso, c'est
vraiment une fille appétissante.
Drouguistariè, s. f. Droguerie, terme générique pour
exprimer les drogues en général; épicerie ; profession ou
commerce d'épicier. — Faïre drouguistariè, tenir magasin
d'épiceries.
Dér. de Drogo.
Drouguisto, s. m. Droguiste, épicier. — Le premier de
ces mots a presque disparu de la langue, comme terme
qualificatif de profession : il est remplacé en fr. par épicier.
On ne voit pas bien ee qu'il y a gagné. La mème réforme
s’est opérée pour apothicaire, qui n’est plus qu'un phar-
macien.
Droulé, s. m. Sorte de basquine ou casaque de femme,
particulière aux provençales d'Arles et de Tarascon, qui
parait avoir une origine ancienne. Le Droulé était un jus-
taucorps à basques étroites descendant à mi-jambe et ouvert
à la taille, ordinairement en soie, de couleur tendre et
tranchante sur celle de la jupé. Cette mode a disparu, em-
portant avec elle ce cachet de costume national, que mème
dans leur coiffure les Arlésiennes ont commencé à modifier.
Drouvi ou Douvri, vw. Ouvrir; le contraire de fermer.
— Sé drouvi, au fig. développer son intelligence.
Douvri serait plus correct, mais l’usage a adopté Drouvi,
qui n’est qu'une corruption cependant.
Dér. du lat. Aperire, m. sign.
Drubi, v. Ouvrir. — C'est le mème mot que le précé-
dent dont il est une variante usitée dans les hautes Céven-
nes.
Druje, drujo, adj. Dru; robuste; vigoureux. — La
plèjo és druo, il pleut dru.
Dér. du lat. urus, ferme, solide.
Drujije, s. f. Vigueur; bonne santé; sève forte et abon-
dante.
Du, duro, adj. Dim. Duré; péjor. Duras. Dur; durci;
ferme; solide; insensible; rude. — Avèr cava sièi pans
sans atrouba lou du, nous avons creusé à un mètre et
demi de profondeur sans rencontrer le terrain ferme, soit
Je rocher, soit l'argile vierge.
Dér. du lat. Durus, m. sign.
272 E
Du, s. m. Espèce de raisin qu'on peut confondre avec le
Dalican; mais son bois est rougeûtre et très-dur; ses
feuilles sont aussi plus grandes.
Duèio, s. f. Douille, partie creuse et cylindrique d’un
outil, dhun instrument, destinée à recevoir un manche.
Dér. du lat. Doliolum, petit vaisseau, baril ; parce que
la douille est effectivement comme un barillet où s'enfonce
le manche d’une arme ou d'un outil.
Duga, v. Être pensif; être rêveur; rester dans le far-
niente; songer ou rêver creux; bayer aux corneilles; se
plonger dans ses rèveries, moitié sommeil, moitié paresse.
Dér. de Dugou, grand-duc, parce que cet oiseau est dans
un état pareil pendant tout le jour, avec ses grands yeux
qui ne supportent pas la lumière et à demi-clos.
Duganèl, s. m. Au fém. Duganèlo. Duc, grand-duc,
hibou, Striæ hubo, Linn. Le plus grand des oiseaux de
proie nocturnes, il a deux pieds de longueur. Sa nourri-
ture se compose de lièvres, de lapins et de perdrix, ainsi
que de rats et de scarabées. Couleur fauve, pommelée de
brun; plumes de la face mélangées de roux, de noir et de
gris; gorge blanche. Sa chair est, dit-on, tendre et d'un
goût agréable. Son nom lang., qui se dit aussi Dugou, est
une traduction de Duc et peut-être une onomotapée de son
cri effrayant, qui est d’une consonnance exprimée par son
nom. Le fr. ne pourrait-il pas venir aussi de cette imita-
tation, et ne point signifier Duc, Dux, chef de son espèce ?
Dugou, s. m. Le même que le précédent : variante plus
imitative dans sa prononciation.
E
Dupa, v. Accuser; incriminer; se concerter pour faire
tomber une faute sur quelqu'un.
Dér. du fr. Duper, mais avec une légère déviation dans
l'acception.
Dura, v. Durer; continuer d’être; persévérer; persister;
faire un long usagè. — Lou rouve duro din l'aïgo, le chène
se conserve dans l'eau. Mès qué dure, pourvu que cela
dure ainsi. La plèjo m'a dura tout lou tén dâou cami, la
pluie ne m'a pas quitté pendant tout le temps de la route.
Tout mé duro, mes habits me font un long usage.
Dér. du lat. Durare, m. sign.
Durado, s. f. Durée; espace de temps qu’une chose dure;
long usage. — La plèjo séra pas dé durado, ce n’est pas
une pluie qui doive durer. Aguélo tèlo fara durado, cette
toile sera d’un long usage.
Durbè, s. m. Gros-bec, pinson-royal, Fringilla Cocco-
thraustes, Temm. Cet oiseau, remarquable par la force de
son bec conique, pointu et assez dur pour casser les noyaux
de l’alisier entr’autres, dont il mange l’amande, n’est sus-
ceptible d'aucune éducation. Il est sauvage et silencieux.
Il est dur d'oreille, dit Buffon, ce qui peut-être contribue
à rendre son intelligence bornée. Ce caractère connu a fait
donner le nom de Durbè, au fig., à un sot, un butor, un
lourdaud.
Durioü, s. m. Durillon, callosité qui se forme à la plante
des pieds et à la pomme des mains, par suite de la com-
pression de l’épiderme occasionnée par la marche ou par
le maniement d’un outil. |
E
E, s. m. Cinquième lettre de l'alphabet, deuxième
voyelle. E voyelle a diverses prononciations, qui doivent
être notées par l'écriture. Tantôt muet, tantôt fermé ou
ouvert, tantôt aigu ou grave, les accents correspondants
le distinguent. L'absence d'accent, qui désigne l’e muet,
ne Jui imprime pas cependant la consonnance de l’e muet
français, qui est assourdi en eu bref. L’e muet langue-
docien se prononce à l'italienne, comme un e fermé bref,
c’est-à-dire que la voix appuie légèrement sur la pénul-
tième dans les mots qu’il termine. — Voy. le mot Acén.
I nous est impossible d'adopter, au sujet de la pronon-
ciation de l'E et de son orthographe, le raisonnement et la
division de Sauvages.
On s'étonne, quand on considère la haute intelligence
de cet auteur et son esprit d'analyse, de le voir sur cette
question s'éloigner si visiblement de notre vocalisation.
Peut-être faudrait-il attribuer cette déviation à une muta-
ion dans la prononciation de ce pays survenue depuis
l'époque où écrivait Sauvages, ou bien à des types qu'i
aurait choisis dans un autre dialecte que le nôtre. Car il
est certain que les théorèmes qu'il établit sont en com-
plète contradiction avec notre prononciation actuelle.
Ainsi il n’admet que deux divisions de la voyelle Æ,
savoir l'e fermé et l’e très-fermé, qu’il qualifie par imita-
tion de l'italien, Stretto.
Or, ce qu'il appelle l’e fermé, celui qu'il marque d'un
accent aigu, est précisément celui que nous nommons l'e
ouvert et que nous caractérisons par l'accent grave. Que
l'on observe les mots qu’il donne lui-mème pour exemples
de l’e fermé: Miraïè, miroitier, Rès, chapelet d'oignons,
Pèses, pieds, Zrangè, oranger: il est évident que nous pro-
nonçons tous ces e là, comme le ouvert français, et sans
aucune différence avec la prononciation des mots suivants :
procès, commère, lumière, grève, etc. On opposera peut-
être que dans le nord et.dans l’est de la France, on appuie
davantage sur cet e ouvert et l'ouverture de la bouche est
ve
E
un peu plus grande; mais ce n’est là qu'un mode d'accen-
tuation particulière à certaines localités : comme on voit à
Lyon peser beaucoup plus qu’à Paris et ailleurs sur certai-
nes voyelles, surtout sur l'o, et prononcer par exemple
cariole comme s'il y avait un accent circonflexe sur lé,
ou s'il y avait deux o, carioole. 1 est certain que, dans
tout le Midi, les personnes qui ont l'accent le plus pur ne
prononcent pas l'e ouvert français d’une autre manière que
notre e languedocien dans rangé, pèses, ete.
Dans tous les cas, il est tout à fait irrationnel d’assi-
miler ce dernier e à l’e fermé français.
Arrivons à l’e très-fermé ou Stretto: Sauvages prétend
que ce dernier e s'écarle autant de l'e fermé français que
celui-ci s'éloigne de l'e ouvert. Voilà une assertion que
l'exemple ci-dessus détruit complétement. Nous demandons
à tous ceux qui ont quelque connaissance, quelque usage
de notre langue, s'ils aperçoivent une différence saisissable
entre la prononciation de l’e lang. et de l’e fr. dans les
mots suivants :
Rrd Pit... … Lang. Paté, lambin.
RE nr rene Couté, nuque.
CAE ME Paré, muraille.
Pécheur........ Pécadoù, pécheur.
4 TS AE Sédo, soie.
Sauvages a cru voir dans le mot italien Stretto, l'an-
nonce d’une vocalisation plus étroite, plus fermée que
l'e fr., et il l'a appliquée au lang. Mais la désignation de
Stretto n’a pas d'autre portée que celle de l'application à
l'e fermé; l'italien n'a pas d'autre terme pour l’exprimer
et la différencier de l’e ouvert : cette épithète est positive
et non superlative, comme la traduction qu'en fait Sau-
vages.
Notre glossateur n'admet pas en lang. l'existence de l’e
muet : cela est vrai, si par là nous devons entendre la
consonnance brève et muette eu du fr.; cela est faux au
contraire, si par e muet nous entendons une consonnance
en e brève, inarticulée, qui s'échappe plutôt qu'elle ne se
prononce après une pénultième grave et prolongée, et qui
s'élide devant une voyelle. IL range cette sorte d’e dans la
catégorie de l’e stretto.
Nous convenons que cette sorte d’e a une consonnance
fugitive qui ressemble assez à l’e fermé; mais si on suivait
cette analogie, il faudrait en fr. assimiler l'e muet à la
voyelle composée eu et l'appeler eu bref. I] est assez étrange
du reste que Sauvages n’ait pas senti la nécessité de dis-
tinguer et de classifier à part les syllabes iuarticulées que
nous nommons muettes, soit qu'elles se terminent en E,
en I, O, OU.
C'est l'oubli que nous relevons en dénommant voyelles
ou diphthongues muettes celles qui à la fin d'un mot sont
précédées d’une syllabe longue et prolongée et s'échappent
inarticulées comme l’e muet final en fr., comme dans les
mots : manje, gari, broquo, aïmou. Nous distinguons ces
ÉDO 273
voyelles finales de leurs correspondantes toniques, en les
privant de tout accent, tandis que ces dernières reçoivent
un accent grave. — Voy. Acén.
Il est à remarquer que ce genre de voyelles muettes ne
se trouve qu'à la fin d'un mot, et jamais au commence-
ment ni dans l'intérieur. Il devient donc inutile d'accen-
tuer celles qui ne sont pas finales, puisqu'elles sont 1on-
jours toniques dans ce cas, et que d'ailleurs cette multi-
plicité d'accents deviendrait fatigante à l'œil.
Nous établissons par conséquent en règle absolue : 4°que
au commencement et dans l'intérieur d’un mot, chaque
voyelle a sa valeur et garde le son qui lui est propre;
2° que les voyelles a et u, qui ne sont jamais muettes,
n'ont aucun besoin d’accent, quelque place qu’elles occu-
pent; 3° que les voyelles e, à, 0, et la composée ou, quand
elles sont finales, doivent avoir un accent grave ou aigu,
si elles sont toniques, et rester sans accent, si elles sont
muettes.
Nous avons dit qu'au commencement ou à la fin d’un
mot, les voyelles n'étaient jamais muettes, et qu'il deve-
nait dès lors oiseux de les marquer d’un accent. La
voyelle e fait exception à cette règle, parce qu'ayant deux
vocalisations différentes, l’e fermé et l’e ouvert, il était
nécessaire de les distinguer par l'accent qui leur est propre.
Tous les e doivent donc être accentués, hors l'e muet final.
Échantioun, s. m. Échantillon, partie d’une chose,
morceau d’une étofle ou d'une marchandise pour servir
de montre ou faire apprécier son mérite.
Emp. au fr. L
Édo, sufiire, qui, en s’ajoutant en composition à un
radical, lui imprime une idée de provenance et surtout un
sens collectif.
Cette terminaison est particulière aux idiomes méridio-
naux, et si le français s'en est emparé pour former quel-
ques-uns de ses mots, partout où il la conserve, on est
presque assuré de reconnaitre à ces vocables une attenance
avec le Midi. Seulement le français donne à la finale fran-
cisée une modulation différente de celle du languedocien.
Dans notre dialecte, Édo final est invariablement doux et
bref sur l’É pénultième tonique, que pour cela nous mar-
quons par un accent aigu : en français, l'É, tonique aussi,
est toujours grave, ouvert et long. Laquelle des deux pro-
nonciations se rapproche davantage de la vocalisation pri-
mitive de cette syllabe? nous ne saurions le dire ni en
noter autrement la nuance; mais l'espagnol et l'italien, qui
ont gardé, comme nous, la consonnance brève et douce
dans les mêmes cas, pourraient bien reproduire fidèlement
aussi la prononciation gauloise ou latine de cette désinence
partitive qui n’a pas beaucoup varié. Quoi qu'il en soit, la
présence dans un nom propre de la finale Édo ne viendrait-
elle queprouver que les appellations où elle se trouve appli-
quée à des noms de famille, indiquent que ces familles
sont certainement originaires du Midi, qu'il y aurait quel-
que intérêt à relever le caractère et l'emploi du suffixe.
35
274 EDO
Dans la formation des noms, ce cachet de race n'était pas
inutile à remarquer. Toujours est-il que le Nord et le
Centre affectionnent pour leurs terminaisons de collectivité
une autre formule, comme nous l’allons voir, bien que
provenant de la même source.
On cohnait déjà l'emploi et le fonctionnement des suf-
fixes, ces syllabes adjonctives imaginées pour donner aux
mots une extension caractéristique de sens. Nos ancêtres
avaient ek = ak, qu'ils ajoutaient quand ils voulaient ex-
primer la réunion, la pluralité de mêmes objets dans un
lieu; nous avons donné de nombreux exemples; Cass,
Casn désignait un chène, une individualité; Casnek signi-
fiait une collection de chènes, et ainsi de bien d'autres
noms. ( Voy. Agno et passim.) Les arbres, les pierres , les
rochers sont naturellement les objets qui se présentent le
plus souvent en collection : et l'office de la terminaison
collective trouvait là à s'appliquer avec plus de fréquence
et de précision. C’est pourquoi ces dénominations ont pris
en général pour base le ve de l'arbre qu’il fallait dé-
signer.
Le latin avait des procédés de suffixes tout pareils :
quand il régna en vainqueur dans les Gaules, quelquefois
il se prit à imposer ses importations, d’autres fois il se
contenta des mots tout faits; mais toujours il les marqua
au cachet de son génie linguistique, qu'il prenait dans
ses finales propres, surtout quand le radical se rapprochait
suffisamment d’un mot qui lui était familier et usité chez lui.
Ce mécanisme, que nous avons expliqué, se retrouve ici.
La moyenne latinité, qui s’imprégnait des anciennes tra-
ditions et qui tendait en même temps à ne pas trop se
séparer du romain, forma ainsi son vocabulaire de noms
propres de lieux, puis de personnes. On avait donc, par
exemple, en gaulois Cass, Casn, et Casnek; le latin faisait
Casnetum, correspondant à Quesnetum, à Quercetum, pour
dire : un lieu planté et abondant en chènes, dont le roman
du Nord fit Chesnaie où La Chesnaye, qui est devenu
notre Chadénédo.
Plus tard, la différence des climats, les aptitudes de
prononciation et mille autres causes créèrent les variétés
ethniques : et de là, quand le suffixe primitif était ek = ak,
transformé en etum latin, au moyen-âge, on disait, en
employant le latin, etum — edum — idum —eïum, et en
façonnant le roman au Nord et au Centre, on préféra les
finales en ai, aye, ais, ait, ei. eye, eis, et, es, éx, eïx, oi,
ois, oy, oye, et autres désinences équivalentes, tandis que
l'italien gardait eto, l'espagnol eda, et la langue d'Oc édo,
comme signe de la collectivité. Par l'effet de la permuta-
tion des lettres, dont nous avons aussi indiqué quelques
règles, la substitution du 4 au € ést un changémért na-
turel. Il en résulte par conséquent que notre suffixe Édo—
ch = ak = etum, et edum, ainsi que toutes les autres ter-
minaisons équipollentes du roman et du français actuél,
ont des bases communes et se substituent l'une à l'autre
sans autre motif que l'effet de certaines prédispositions
EFA
organiques, dont il n’est pas possible de se rendre compte.
Par où on est amené sans surprise, après avoir dégagé la
racine, à suivre la composition des mots et des noms, et
à saisir cependant, à travers leurs variétés, leur généalogie et
leurs formations successives : Clapas, Rancas, Blaquas,
racines secondes et individualisant un objet, conduisent à
Claparédo, Rancarédo, Blaquarédo, noms collectifs, comme
le lat. Pinetum a donné Pinay —Piney = Pinet = Pinaye,
noms de lieux, qui sont identiques à notre Pinédo : Ver-
netum, lat. = Verney (Suisse) — Vernex — notre Vérnédo,
de Vèr radical; et de même pour nos mots Aoumédo,
ormoie, Figarédo, Oulivédo, Nougarédo, Poumarédo, Pru-
narédo, Vérnarédo, Sdouzarédo, Cérièirédo, Sdouzédo,
lieux plantés d’ormeaux, de figuiers, d’oliviers, de noyers,
de pommiers, de pruniers, de saules, de cerisiers, et d'une
infinité de similaires, que le français a également traduits
suivant ses propensions.
Ce suffixe Édo n’est pas seul à exprimer la collectivité,
mais il est certainement un des plus originaux, et il a ce
mérite que sa descendance est si nette, si régulière, qu'il
était bon de nous y arrêter, afin de bien marquer des alta-
ches de notre dialecte. D'autre part, ses affinités sont
encore tellement précises, son caractère si bien indiqué, et
son rôle dans la langue si bien défini, que, s’il garde une
physionomie à part et qu’il la communique à notre idiome,
il importait de lui consacrer aussi un article spécial, qui
fera corps dans l’ensemble de l'étude sur les noms.
Éfan, s. m. Dim. Éfanté, éfantoù, éfantouné; péjor.
Éfantas. Enfant, garçon ou fille, jusqu’à l’âge de dix ou
douze ans. — Soun éJ'ans dé dos maïres, ou dé dous païres,
ils sont frères consanguins ou utérins. Éfan dé naïsséngo,
enfant nouveau-né. Faïre l'éfan, accoucher. À séntà soun
éfan, elle a senti remuer l'enfant qu'elle porte dans son
sein. Moun éfan! mon enfant! terme de familiarité affec-
tueuse fort usité en languedocien, non-seulément par des
supérieurs ou des gens plus âgés que l'interlocuteur, comme
cela se pratique en français, mais même parmi les gens de
même classe et de même âge, surtout parmi les jeunes
filles liées entr’elles : Ah/ moun éfan/ est lexorde et le
garde à vous de tous leurs comérages. Pdoure éfan! terme
d'amitié, de pitié ou de commisération affectueuse. Éfan
dé lou! Éfan dé por! sont des épithètes injurieuses que les
gamins se jettent et se rendent sans que leur susceptibilité
s'émeuve beaucoup.
On dit Éfan adjectivement et pour les deux genres
comimne en français. — Aquo's un éfan, c'est un innocent:
És éfan, il est enfant, il est plus jeune que son âge.
Dér. du lat. Infans.
Éfantas, asso, adj. Grand enfant; adulte qui a les
mœurs et les goûts d’un enfant; qui fait des enfantillages.
— Es un éfantas, il agit, il se conduit, il parle ie E
s’il n'avait pas dépassé l’âge de raison.
Éfantougnè, gnèiro, «dj. Qui aime les enfants, qui se
plait à les caresser, à badiner avec eux.
nl né |
ÉGO
Éfantounéja, v. fréq. Faire l’enfant; s'amuser d’enfan-
”tillages; caresser les enfants, jouer avec eux.
Éfantuègno, s. f. La gent puérile; les enfants considérés
en masse et comme classe.
Le suffixe Uègno, particulier à notre dialecte, indique
la collectivité; nous l'avons remarqué déjà sous l'article
Bastarduègno. — Voy. ©. m.
Éfè, s. m. Effet de commerce, lettre de change, billet à
ordre, simple promesse de paiement; domaine, métairie,
terre, bien. —Aqud's un poulit'éfè, c'est une belle propriété.
Dér. du lat: Effectus, production.
Éfla, v. Enfler, se gonfler; devenir plus volumineux.
Au fig. S'éfla, s'énorgueillir, faire le gros dos.
Dér. du lat. Inflare, m. sign.
Éfle, éflo, adj. Enflé, bouffi, gonflé, boursoufflé. —
Moun dé és tout éfle, mon doigt est tout enflé. Tapo toun
ièl qué ta gdouto és éflo, phr. faite, sorte de dicton dont
le mot-à-mot est : ferme l'œil, ta joue est enflée, et dont
le sens peut être rendu par: laisse faire, laisse aller, ou
bien : attrape, voilà, le mal est fait, la farce est jouée.
Éflije, s. f. Enflure; gonflement, tuméfaction, ædème.
Égalita, s. f. Égalité, mot que les idées nouvelles ont
rendu familier au peuple. Du reste, il se disait autrefois,
mais seulement dans l'acception de la phrase suivante :
Fou l'égalita pértout, il faut de l'équité en tout.
Éganâou, âoudo, s. Dim. Égandoudé, égandoudoi ; péj.
Égandoudas. Huguenot, calviniste; protestant.
Le mot est une corrup. du fr. Huguenot, dont l'étym.
certaine est encore à trouver.
Égâou, égalo, adj. Égal. — Cet adj. n’est guère usité
pour égal, semblable, qui se traduisent par Pariè. On
l'emploie fort ordinairement au neutre: Es égdou ; aqud
m'és égdou, c'est égal; cela m'est indifférent.
Dér. du lat. Æqualis, égal.
Êgo, s. f. Jument, cavale; rosse de quelque sexe qu’elle
soit.— L'accent grave tonique doit être très-marqué dans
ce mot et le suivant sur l'e initial.
« Dér. du lat. Egua, m. sign.
Égou, s. m. Yèble ou hièble, petit sureau, sureau her-
bacé, Sambucus ebulus, Linn. Plante de la fam. des Capri-
foliacées. Cette plante, qui vient spontanément, ne se plait
que. dans les bons terrains, et les paysans la regardent
comme un indice certain de fertilité. On raconte à l'appui
l'anecdote suivante : Un aveugle, voulant acheter un
champ, s'y rendit à âne pour le visiter. On riait de sa
simplicité, car il paraissait difficile qu’il s’assurât par’ ses
yeux des qualités du champ. En arrivant sur le terrain,
notre aveugle demanda qu’on lui indiquât un égou, une
- plante d'hièble, pour attacher son âne. On lui répondit qu'il
n’y en avait pas trace : lui de remonter aussitôt sur sa bête,
en disant qu'il n'achetait pas un champ où cette herbe
ne it pas; et les rieurs passèrent de son côté.
22m en n..pr. Aigoual; au nord du Vigan, la
montagne Ja plus élevée du département du Gard : son
ÉLO 215
altitude au point appelé l'Hort-de-Dieu, est de 4562 mètres
au-dessus du niveau de Ja mer. Elle fait partie de Ja
chaine-qui, par la Lozère, s'unit aux Pyrénées; par Ja
Lozère, le Vivarais et le Dauphiné, aux Alpes; et par le
Lévézon, dans l'Aveyron, au Cantal et au-delà. Elle est
boisée jusqu'à la hauteur de 4250 mètres; son sommet,
cependant très-accessible, est dans nos pays le plus long-
temps et le plus tôt couvert de neige.
La forme française du nom, qui a une affinité très-
grande avec ceux d'Aigues-Mortes, Aigues-Vives, Aigal-
liers, etc.,. ne Jaisse aucun doute sur son étymologie, et
représenterait mieux peut-être la racine prise du lat. Aqua,
du celt. Aa, Ag, et autres, que ne le fait notre orthogra-
phe languedocienne, si l’on ne se souvenait que le roman
disait et écrivait de même Eve, eveuæ, etc., en adoucis-
sant la première syllabe. La descendance est directe, quelle
que soit d'ailleurs la manière d'écrire et de prononcer. La
signification indique un lieu, un terrain aqueax, abondant
en eaux : c'est ce qu'exprime la première partie du mot,
et la finale en A7 sert sans doute à marquer la hauteur, —
Voy. Aïgoùs et Aïgo.
Éido, s. m. Un aide; aide-meûnier; tout individu qui
aide un artisan chef, et non point une aide, quisedit : Ajudo.
Corrup. du fr.
Éïdo-de-can, s. m. Aide-de-camp.
Emp. au fr.
Éitiquéto, s. f. Étiquette, dans le sens de celles que l'on
met sur un dossier de papiers, sur une préparation phar-
maceutique, etc.
Corrup. de la phrase latine : est hèc questio, c'est ici la
question, que l'on inscrivait autrefois sur chaque dossier
de procédure, dossier qui était alors enfermé dans un petit
sac.
Él, élo, pron. pers. Au plur. Éles, élos. Il, lui; eux,
elles. — 11 est bon d'expliquer cependant que É! ne peut
jamais se traduire par i{, quoique ce soit là véritablement
sa portée et sa signification, attendu que le pronom # ne
s'emploie que joint à un verbe, soit avant, soit après : &
aime, dit-il, ete., et qu'en languedocien comme en latin,
on ne met jamais le pronom personnel avant ou à la suite
d'un verbe. On dit en effet aïmo, amat, soudis (inquit),
pour traduire comme ci-dessus. É/ ne peut donc être ex-
primé que par: lui. Toutefois, si on peut toujours tra-
duire él par lui, on ne peut admettre le vice versd ; car lui
au datif s'emploie tel quel, sans l'article à : je lui donne;
et-pour rendre cette phrase, nous disons : li done. — Voy. Li,
Dé pér él, de lui-même, par lui-même, sans l'aide ou le
secours de personne, de son plein gré, de son propre mou-
vement. — És tout én él, il est tout en lui-même, il garde
toute-sa pensée, il n’est pas expansif.
Élo, elle, est un terme par lequel un mari désigne sa
femme, lorsqu'il est question d'affaires du ménage, sans
avoir-besoin de la nommer autrement. — #s élo qué mé
lavo, qué m'éstiro, c'est ma femme qui lave et qui repasse
276 EMB
mon linge. La femme ne se permettrait pas une pareille
licence réciproque en parlant de son mari : quand elle en
use, ce qui est certainement l'exception, Æ{ pour la cir-
constance a toujours une certaine intention de mépris ou
au moins d’ironie.
Dér. du lat. Zle, illa.
Élécious, s. f. plur. Élections. — On sent comment ce
mot et le suivant, si actuels aujourd'hui pour le peuple,
sont tombés du français dans son domaine.
Élétur ou Élétou, s. m. Électeur.
Ëli, s. m. Lis, Lilium candidum, Linn. Plante de la
fam. des Liliacées, bulbeuse, à fleurs grandes et odorantes.
Elle a plusieurs variétés; la blanche est la plus belle, Au
fig. Blancheur extrème, emblème de la pureté virginale, de
la candeur innocente et de la grandeur. — Le lang. ne le
confond pas comme le fr. avec les fleurs de lis, qui ont été
si longtemps les armoiries des rois de France. Il appelle
celles-ci Las flourdalis, par une corrup. toute française.
Dér. du lat. Lilium.
Éliou, s. m. Éclair; éclat subit et passager de lumière, qui
précède le coup de tonnerre; lumière étincelante et fugitive.
Dér. du gr. #kws, soleil dont l'éclair imite le rayon-
nement et l'éclat.
Élioussa, v. Éclairer:; étinceler; faire des éclairs. —
Éliousso, il éclaire, il fait des éclairs.
S'élioussa, s'irriter, monter aux nues de colère; dis-
paraitre tout à coup; s'enfuir subitement et précipitam-
ment. — S’és élioussa, il à disparu, il s’est échappé, dit-on
de quelqu'un qui étaitl à et qui s’est évanoui comme un éclair.
Élo, pron pers. fém. Elle. — Voy. Él.
Émbaïma, v. Embaumer, dans le sens de répandre une
bonne odeur. — Sén qu'émbaïmo, il répand une odeur
qui embaume l'air.
Dér. du lat. Balsamum, baume.
Émbala, v. Emballer; empaqueter, faire des disposi-
tions de départ. — Émbalo tant qué po, il fait ses paquets
pour l’autre monde; il dépérit chaque jour.
Dér. de Balo.
Émbaladouiro, s. f. Ne s'emploie qu’ajouté au mot
Aguïo : Aguio émbaladouïro, grosse aiguille où poinçon
pour coudre l'emballage avec de la ficelle.
Émbalaje, s. m. Emballage, action d’emballer; ce qui
sert à l'emballage.
Émbanasta, v. Charger sur une bête de somme les
paniers à bât, les mannes où banastos. Au fig. charger à
un autre son fardeau : dans ce sens, se dit mieux cepen-
dant Émbasta.
Dér. de Banasto.
Émbâouma (S’), ». S'encaver, s'enfoncer dans un ter-
rier, dans une grotte, dans un bouge.
Dér. de Bdoumo.
Émbara, v. Serrer; renfermer une chose; enférrier les
ètres vivants, le bétail, par ext. enrayer une voiture, une
charrette, ce qui se faisait par une barre cordée fortement
EMB
contre la roue, et qui a été remplacée par ce qu'on appelle
la mécanique, qui est véritablement un sabot. — Lou
tén s'émbaro, le temps se couvre; les nuages s’abaissent et
semblent nous enfermer dans un horizon plus étroit et une
atmosphère plus basse. Sentè l'émbara, avoir une odeur
de renfermé. Crégne l'émbara, aimer sa liberté; craindre
les chaines et les verroux de toute espèce.
Dans ces derniers exemples, le mot est pris substanti-
vement.
Dér. de Baro.
Émbaragna, v. Enclore un champ de haies; entourer
de buissons un passage, une issue.
S'embaragna, s'embarrasser dans une haie; s’accrocher
à des buissons; au fig. s’enchevètrer dans quelque affaire
épineuse.
Dér. de Baragno. }
Émbaras, s. ». Au plur. Émbarasses. Embarras; gène;
imbroglio; difficulté d'agir; obstacle; timidité; irrésolu-
tion. — Faïre dé sous émbarasses, faire ses embarras; faire
l'important. Agud's pas l'émbaras, ce n'est pas pour dires
cela importe peu: phrase explétive qui répond au fr. au
surplus. Fôou bièn aïma lous émbarasses, il faut en vérité
bien aimer les peines, les soucis, les procès.
Dér. de Baro.
Émbarassa, v. Embarrasser; gêner; causer de l’eni-
barras. — Embarassa coumo un ra éntre dos noses, prvb.,
embarrassé comme un rat entre deux noix, ou autrement,
la position de l’âne de Buridan. Es un émbarassa, c'est un
irrésolu, un indécis; il ne sait lier ni délier. Aquél home
és émbarassa, cet homme a de mauvaises affaires, beaucoup
de dettes; il est gèné; ses affaires sont embrouillées. Uno
fénno émbarassado, une femme enceinte.
Émbarassaïre, airo, adj. Péj. Émbarassaïras. Impor-
tun ; fàcheux; qui fait l'important; qui aime et recherche
l'embarras des affaires et qui s'en surcharge à plaisir.
Émbarqua, v. Embarquer; mettre dans une barque, un
bateau ; ou seulement mettre en chemin, en marche. Au
fig. S'émbarqua, se lancer dans une affaire, une entreprise.
Dér. de Barquo.
Émbartassa, v. Fermer, avec des buissons morts, les
entrées d’une propriété, une brèche ou la crête d'un mur,
pour en empècher l'accès au bétail et aux gens. .
Dér. de Bartas.
Émbas, s. m. et adv. de lieu. Le bas; en bas; la bi
qui s'éloigne des montagnes et s’abaisse vers la mer par
rapport à nous : l'émbas est au-dessous de Nimes et sur le
littoral de la Méditerranée, et l’énndou, les hautes Céven-
nes et la Lozère. — Vaï séga émbas, il va moissonner vers
Saint-Gilles, Aigues-Mortes, Aimargues, etc. L'émbas d'un
oustäou, le rez-de-chaussée d’une maison.
Dér. de Bas.
Émbasséga, v. Proprement, mettre un timon, une flèche
à un araire. Au fig. arranger de travers; faire quelque
chose avec mystère, ou plutôt mettre des mystères à ce
ÉMB
qui n’en vaut pas trop la peine. — Dé qué m'émbasségas
dilai? Que tramez-vous là-bas?
Dér. de Basségou.
Émbasta, v. Bâter un mulet, lui mettre le bât. Au fig.
charger quelqu'un d'un embarras (V. Émbanasta); en
style de joueur, charger son adversaire de la perte qu'on
a éprouvée auparavant avec d'autres joueurs. — Aguélo
fusto és émbastado, cette poutre est déjetée; elle s'est
arquée en cintre, soit parce qu'elle était de bois vert, soit
à cause de la surcharge qu'elle supportait; c'est-à-dire
qu'elle a pris la forme d'un bât. Part pas chaquo fés
qu'émbasto, locution prvb., qui se dit d’un lambin qui met
un très-long intervalle entre ses préparatifs de départ et
son départ lui-même, ou bien d'un indécis qui souvent
contremande ses projets. Notre dicton revient au prvb. fr. :
il ne cuit pas du premier bouillon.
Dér. de Bas, bât.
Émbasto, s. f. N'a pas d'autre acception que l'acte de
jeu défini à l’article précédent. — Jouga à l'émbasto, jouer
à la décharge; c.-à-d. que le perdant payera autant de
consommations qu'il en perdra, à la décharge et sur le
compte du vainqueur.
Émbé, prép., ou Éndé. Avec; ensemble; en compagnie
de; conjointement; par, dans, en, à, suivant certains
cas. — Partès émb'aquél tén? Vous partez par le temps
qu'il fait? Déqué dirén émb'aquéste home? Que dirons-
nous à cet homme? Déqué métès émb'aquéste sa? Que
-mettez-vous dans ce sac? Conto émbé lous dés, il compte
sur ses doigts, avec les doigts. Marche émb'él, je marche
avec lui, en sa compagnie; nous allons ensemble. Émb’a-
qud, pourtant, avec cela, en cela. Émb'aqud n'aï pas tort,
en cela, malgré tout, je n'ai pas tort.
Nous plaçgons sur la même ligne Émbé et Éndé: c’est
dire qu'ils sont synonymes ou à peu près. Il faut ajouter
cependant que, bien qu’ils puissent être substitués l’un à
l'autre sans inconvénient, Émbé est plus propre dans l’ac-
ception de Avec, et Éndé dans toutes les autres que nous
indiquons, et qui sont moins directes.
Émbé dérive évidemment du lat. Ambo, deux: cela se
sent encore mieux dans le dialecte gascon qui dit: Amb
ou Damb. Quant à Endé, il ne paraît autre chose que la
corrup. ou la variante de Émbé.
Émbégu, udo, part. pass. du v. Émbéoure.
Émbéguina (S'}, v. S'emmitoufler ; s'embéguiner ; s'en-
velopper là tête de coïffes et de bonnets l’un sur l'autre.
Au fig. se coiffer de quelqu'un, d’une idée; s’entêter ; s’a-
mouracher.
… Dér. de Zégui.
— Émbèl, s. m. Terme de cordonnier : se d'empeigne,
bat cuir avec lequel on rapièce une crevasse- à
l’empeigne d’un soulier ou d’une botte, et qui n’a rien de
commun. avec les pièces de rapport d’un ressemelage de
chaussure. Au fig. lanière d’étoffe, de cuir, ou de peau hu-
maine, qui se détache par une écorchure ou une déchirure.
ÉMB 277
Par ext. s'applique à un pan de mur écroulé, et autres
avaries du mème genre. Mais l'Émbél n'est pas l'avarie, la
déchirure elle-même : c’est le lambeau détaché.
Dér. du lat. Limbus, bord, bordure, frange.
Émbéli, v. Embellir; rendre on devenir plus beau :
augmenter en beauté.
Dér. de Béou.
Émbélousa, v. Faire tomber dans le piége; blouser ;
tromper; faire prendre ke change.
Dér. de Blouso.
Émbémia, v. Enjôler; attrapper par des séductions et
de belles paroles.
Dér. de Bèmi.
Émbèougna, ». Contrefaire; imiter les paroles, les
gestes, la physionomie de quelqu'un pour le tourner en
ridicule. Dans le style soutenu, on l'emploie pour: Être
semblable à. ;
Émbèougnaïre, aïro, adj. Celui qui aime à contrefaire;
bon mime; qui a un talent d'imitation.
Émbéoure, v. Terme de lingère ou de couturière : faire
boire une étoffe, coudre ensemble deux bords ou lisières
d'étoffe qui n’ont pas la même longueur, de manière ce-
pendant à ce que les bouts correspondent l'un à l'autre et
arrivent juste, l’un joignant l’autre : c'est ce qui se dit
Faïre émbéoure. Cela se présente lorsqu'on veut coudre
ensemble deux pièces dont l'une est à droit fil et dont
l'autre est à fil en biais; cette dernière étant naturelle-
ment plus élastique et s’allongeant quand on l'étire dans
le sens de sa longueur.
Ce mot d’ailleurs ne s'emploie qu’à l'inf. et précédé du
V. faïre.
Émbéruga (S'), v. Se couvrir de verrues; prendre,
gagner des verrues.
Dér. de Bérugo.
Émbéstia, v. Ennuyer; rendre bète à force d’ennui;
importuner; abètir; hébéter.
S'émbéstia, s'ennuyer; éprouver de l'ennui, du dégoût;
trouver le temps long.
Dér. de Béstio.
Émbéstiaje ou Émbéstiamén, s. m. Ennui; dégoût ;
fatigue; importunité. — Quinte émbéstiaje! Quel ennui!
Quelle importunité !
Émbéstian, anto, adj. Ennuyeux ; importun. — Se dit
plutôt des choses que des personnes. — Aqui un tén
émbéstian, Voilà un temps ennuyeux. Émbéstian coumo la
plèjo, ennuyeux comme la pluie.
Émbiassos, s. f. plur. Espèce de châssis à bât, d'où *
pendent deux sacs ouverts par en haut et seulement serrés
par un cordon au bas, pour charrier du sable, etc. Quandon
veut vider les sacs, on n'a qu'à lâcher les cordons par en bas.
Émbiassos, signifie aussi ces larges cabas en sparterie
qu'on place de même sur une bête de somme des deux
côtés du bât. — Voy. Énsarios.
Dér. de Biasso.
278 ÉMB
Émbloui, v. Éblouir; donner la berlue; jeter de la
poudre aux yeux; séduire, fasciner par un grand éclat.
Formé de Blu, bleu, parce que l'effet de l’éblouissement
est de teindre les objets en bleu; d’où est venue l'expression
prvb. On n’y voit que du bleu.
ouèsa, v. Tromper par des flatteries; entrainer,
séduire par de belles promesses dans un marché onéreux
ou une entreprise fàcheuse; séduire une femme ou une
fille, la tromper.
Formé de Bos, bois, comme l'ital. Zmboscare, tendre des
embüches, comme les voleurs qui cherchent à entraîner
les voyageurs dans les bois par de belles promesses pour
les dévaliser à l'aise.
Émbouèta, v. Terme de charronnerie : mettre une boîte
en fonte dans les moyeux de roue dont l'ouverture serait trop
élargie par le frottement de l’essieu. Autrefois cette boîte
était en bois, qu'on ne forait que lorsqu'il était en place;
mais la fonte l’a remplacé.
Dér. de Bouèto.
Émbouia, v. Brouiller ; embrouiller; enchevêtrer; mêler
un écheveau, des fils, des cheveux; obscurcir, compliquer
une affaire, une question. — Es tout émbowia, sa chevelure
est toute mêlée.
S'émbouïa, s'embarrasser dans ses propos, ne pouvoir en
retrouver le fil et le raisonnement.
Dér. de l’ital. Imbrogliare, embrouiller, formé lui-mème
de la bass. lat. Brolium, bois épais, fourré, dont on a fait
le mot fr. Breuil et les noms propres Dubreuil, correspon-
dant à Broglie.
Émbouïissouna, v. Entourer la tige d’un jeune arbre de
buissons, pour le préserver de la dent des animaux brou-
tants.
Dér. de Bowissoù.
Émboul, s. »”. Brouillis de fils mêlés, tortillés. Au fig.
embarras ; affaire litigieuse et embrouillée; trouble; mêlée,
bagarre; mélange confus; remue-ménage.
Dér. de l’ital. Imbroglio, m. sign.
Émboulna ou Émbourna, v. Éventrer; étriper. Au fig.
maltraiter et particuliérement renverser un corps lourd,
comme un mur ou un rocher, en lui faisant perdre pied,
de sorte qu’il s'éboule et tombe en débris.
Dér. de Zoulnado.
Émboulnadoù ou Émboulnèri, s. m. Éboulement,
éboulis; amas de ruines; action de saper, de faire écrouler,
ébouler.
Émbounigou, s. ». Nombril; ombilic.
Dér. du lat. Umbilicus, m. sign.
Émbouqua, ». Donner à manger aux petits enfants, aux
vieillards, aux malades, aux perclus et à toutes personnes
qui ne peuvent faire usage de leurs mains; appâter une
volaille, lui faire avaler de la pâtée ou du.grain par force,
en les enfonçant dans son gosier, pour l’engraisser plus
vite. On appâte les dindons avec des noïx entières sans les
écaler.
EMB
Mâou-émbougua, mal embouché; grossier, sale +)
propos.
Dér. de Bouquo.
Émbourdado, s. f. Plein un tamis à farine; quantité
de farine que l’on met en une fois dans le tamis pour la
sasser. P
Émbourdiè, s. m». Marchand ou fabricant de tamis.
Émbourdo, s. f. Tamis, sas, de la forme d’un crible,
dont le tissu est en soie, lorsqu'on ne veut obtenir que la
fleur de farine, et en crin pour fabriquer du pain-bis. On
sasse la farine chez les particuliers dans la huche même
en promenant le tamis sur un chassis en forme de croix,
qu'on appelle passadouïro. — On dit au fig. passa à l'ém-
bourdo, éplucher les qualités et les défauts de quelqu'un;
passa à l’émbourdo fino, éplucher minutieusement; faire
subir un sévère examen ; passer à l’étamine.
Émbourgna, v. — Voy. Abourgna.
Émbourna, v. — Voy. Émboulna.
Émbousqua, v. Mettre un affüt ou un bois nouveau à
un fusil.
S'émbousqua, s'enfoncer dans un bois; se cacher dans
une forêt.
Formé de os, bois.
Émboutéia, v. Entonner un liquide dans une bouteille;
mettre du vin en bouteille. Au fig. se gorger de vin. —
Lou tén émboutéio, les nuages se chargent d’eau; le ciel va
fondre en eau.
Dér. de Boutéio.
Émbouti, v. — Voy. Énglouti.
Émbouti, ido, adj. Boursoufflé; bouffi; bossué; renflé ;
gonflé. — Fialouso émboutido, quenouille en roseau re-
fendu qui est très-ventrue et sur laquelle on file surtout
les cocons dits de graine, et ceux dits Bassinas.
Dér. de Bouto, qui est le type de ce qui est ventru et.
rebondi.
Émboutiga, v. Renfermer dans une boutique. — Se dit
des céréales et autres denrées qu’on a transportées sur les
halles et que, faute de pouvoir les vendre, on rentre dans
un magasin. -
Dér. de Boutigo.
Émbranqua, v. Accrocher quelqu'un en passant: l’en-
trainer.
S'émbranqua, s'accrocher à une branche; se dtsaie É
plusieurs branches. Au fig. s'embarrasser de quelque chose
qui est à charge ; s'engager dans une affaire douteuse,
Dér, de Branquo.
Émbriaï, aïgo, adj. Ivre, soûl : qui a trop bu.
Dér. du lat. Ebrius, m. sign.
Émbriaïga, v. Enivrer; soùler; faire trop boire. - _—
S'émbriaïigo én parlan, il s’enivre de paroles.
Émbriaïgo-cabro, s. f.Lotier corniculé, Lotus corni-
culatus, Linn. Plante de la fam. des Légumineuses. Les
Latins la nommaient Lotus dorycnieum, formé du gr.
Aopézviov, de Adpu, tige, lance, parce qu'elle forme une
|
ÉMI
quantité de tiges qui s'élèvent sans former de tronc. On
prétend qu'elle donne des vertiges aux animaux qui la
broutent : de là son nom lang.
Émbrida, v. — Voy. Brida.
Émbroucha, v. Embrocher; mettre à la broche.
Dér. de Zrocho.
Émbruda, v. Ébruiter; divulguer un secret; semer
des bruits vrais, mais fâcheux pour celui qui en est
l'objet:
Dér. de Bru, bruit.
Émbruga, v. Ramer les vers à soie; former entre les
tables de petits berceaux en bruyère, qu'on appelle Caba-
nos, sur lesquels les vers grimpent et tendent les fils des-
tinés à échaffauder leurs cocons.
Les vers à soie ayant commencé à paraitre en France
dans les Cévennes et le Vivarais où l’on les rame avec de
la bruyère, il n’est pas étonnant que ce verbe ait sa racine
dans le mot Brus, bruyère. Ce mot est devenu typique
mème pour les pays où l'on rame avec d’autres arbrisseaux
ou d’autres branchages, comme le chène.
Émbrugaje, s. m. Bruyère propre à ramer les vers à
soie lorsqu'elle est coupée de la longueur voulue et débar-
rassée de ses chicots. — Aprésla l'émbrugaje, préparer la
bruyère, la couper de même longueur, la disposer dans un
même sens et en petites bottes pour la commodité de ceux
qui la placent.
Émbu, s. m. Dim. Émbuqué; péjor. Émbuquas. Enton-
noir; vase, instrument pour entonner, pour remplir de
liquide un vaisseau quelconque. — Æmbu das boudins,
boudinière, petit entonnoir de fer-blanc, qui sert à farcir
le boyau du boudin, de la saucisse, de la mortadelle, etc.
Émbu dé fièio, entonnoir à futaille, qui est une petite auge
en bois percée d’un trou an milieu, auquel est adapté un
gros tuyau de fer-blanc. C'est celui qu'on emploie pour
remplir les futailles lorsqu'il n’y a pas de pompe pour cet
objet.
Au fig. Émbu signifie : ivrogne, biberon. — És un pouli
émbu, c’estun biberon distingué. Faï émbu dé la boutéio,
il boit au goulot de la bouteille.
Dér. du lat. Zmbuere, abreuver, verser dedans :
l'esp: Embudo, et l'ital. Embuto, entonnoir.
Émbuga, v. Combuger; abreuver, imbiber, humecter
les douves d'une cuve, d’une futaille, déjointes par la sé-
cheresse. Se dit également du linge de lessive qu'on abreuve
d'où
dans Ja cuve. Au fig. S'émbuga, boire avec excès; s'im-
biber de vin.
Dér. du lat. Imbuere, imbiber.
_Éminado, s. f. Mesure de superficie ou de contenance,
qui équivaut à dix ares. — Voy. Arpan.
s. [. Mine, mesure de capacité pour les solides :
elle équivaut à 2 décalitres 5 litres. Cette mesure ainsi que
la Quarto existait en réalité sur nos marchés, et n'était pas
une quantité nominale comme le setier et la salmée. On la
nommait aussi et mieux Æmindou; mais cé dernier mot ne
ÉMM 279
s’appliquait pas théoriquement dans les comptes. On ne
disait pas : Aï achéta dès émindous dé bla, mais bien dès
éminos.
L'émino valait 8 boisseaux,
— 2 cartes,
— 4/2 setier,
— 4/8 de salmée.
On dit aussi £mino pour une mesure de superficie, mais.
Éminado est plus technique et plus usité.
Dér. du lat. Hemina, mesure de liquide qui équivalait
à une chopine. :
Émmaïgrési, v. act. Faire maigrir, rendre maigre;
amaigrir. Au fig. diminuer lé volume, l'épaisseur d’une‘
pièce de charpente, d’une pierre de taille, etc.
S'émmaïgrési, maigrir, devenir maigre ou se rendre
maigre.
Dér. de Maïgre.
Émmalicia (S'),v. n. S'irriter, se courroucer; semettre
en colère, en fureur. — Lou tén s'és émmalicia, le temps
est à la tempète.
Dér. de Maliço.
Émmanda, ». Renvoyer, congédier; éconduire; jeter
une pierre à quelqu'un. Émmanda un co dé fusil, tirer
un coup de fusil. Æmmanda la man, lancer un soufflet.
Émmanda las floundos, ruer. Émmanda lou bou, terme de
fileur de soie, lancer le brin de soie qu'on tient à la main
et provenant des cocons qu'on vient de battre, de manière
qu'il se lie et se confonde avec les brins qui se dévident
déjà et auxquels le nouveau se soude par le seul effet de la
torsion très-vive du premier.
Dér. du lat. Mandare, envoyer.
Émmanquable, ablo, adj. Immanquable; infaillible;
assuré. — La plèjo és émmanquablo, la pluie est certaine;
nous ne pouvons l'éviler. Émmanquable qué véndra
déman ; il est plus que probable qu'il viendra demain:
Émmanquablamén, av. Immanquablement; assuré-
ment; sans nul doute.
Émmarina (S’), ». Tourner au vent du midi, au marin.
— Lou tên és bièn émmarina, le vent du midi soufile avec
violence; ce qui dans ce pays annonce d'ordinaire les
inondations à la suite de grandes pluies danÿ la région des
montagnes.
Dér. de Marin.
Émmasqua, v. Ensorceler; jeter un sort; fasciner : par
ext. ennuyer, importuner; être insupportable. — Æs ém-
masqua d'aquélo fio, il a la tête tournée par cette fille.
Quéouquo ganto l'a émmasqua, quelque sorcière lui a jeté
un sort. Garo té d'aqui, qué m'émmasques, Va l'en, tu
m'ennuies, tu me fatigues. :
Ce verbe, ainsi que le mot'Masquo son correspondant,
et le Masque fr. paraissent tous dériver d'une même ori-
fe, lé gr. Baoxabw, je fascine, j'ensorcèle, Bécxavo,
sorcier, qui fascine.
280 __ EMP
Les Goths et plus tard les Lombards ont tiré de la
mème source leur Masca, sorcière; et c'est probablement
de ceux-ci que le lang. et le fr. ont tiré le mot Masquo et
Masque : ce dernier par analogie, soit que les faux visages
représentent la hideur des sorcières, soit parce que ces
dernières prenaient un faux visage dans leurs opérations
magiques.
Émmasquaciou, s. f. Sortilôge ; enchantement ; sort jeté.
— Aqud's uno émmasquaciou, c'est un malheur donné ;
cela ne peut arriver qu'à moi.
Émmasquaire, aïro, adj. Enchanteur; séducteur; qui
sait attirer dans ses filets par de belles paroles.
Émmasquan, anto, adj. Ennuyeux au superlatif; fas-
tidieux jusqu’au dégoût ; contrariant à l'excès.
Émména, v. Emmener; conduire avec soi; entrainer.—
Gardoù a émména lou pon, le Gardon a entrainé, renversé
le pont.
Dér. de Ména.
Émmoustousi, v. Engluer; oindre de moût:; enduire
d’un corps poisseux quelconque. Au fig. S'émmoustousè, se
compromettre dans une sale affaire.
Dér. de Mous.
Émpacha, v. Empècher; embarrasser; entraver. —
Soui émpacha, je suis occupé d’une autre affaire. Aquél
pagnè és émpacha, ce panier est plein ; il n’est pas dispo-
nible. Émpacho pas est une locution explétive qu'on met
à tout propos dans la conversation, et qu'on peut rendre
par : cependant, nonobstant. Émpacho pas qu'aquél bla és
bièn poulà, quoi qu'on en puisse dire, il faut convenir que
ce blé est fort beau.
Dér. du lat. Impedire, ou du gr. "Eurodeuwv, empècher :
la racine de celui-ci est Ioëés, génit. de os, pied : en-
traver les pieds.
Émpachamén, s. "m. Empôchement; obstacle; opposition.
Émpañfa, v. Empiffrer; gorger de vivres, de boisson.
S'émpafa, se gorger, s'en donner jusqu'au menton. Dans
la langue verte, se paffer, c'est boire avec excès; être paf,
se remplir l'estomac de nourriture. Le verbe lang. est-il
une traduction, ou bien a-t-il inspiré l’argot faubourien ?
Émpaia, v. Empailler, garnir de paille; empailler ou
remonter des oiseaux, des animaux. — Sémbles émpaïa, tu
es là raide et empesé comme un homme de paille.
Dér. de Paio.
Émpancéla, v. Ramer des pois, des haricots, etc.; leur
donner des tuteurs où ils grimpent et se soutiennent, et
à l’aide desquels ils projettent de nouvelles branches.
Dér. de Pancel.
Émpancéladoù, adouno, adj. Qui est de nature à
grimper sur la rame; qui est assez grand pour être ramé:
qui demande à être ramé. — Favidous émpancéladoùs,
espèce de haricots grimpants. Vostes péses soun émpan-
céladoùs, Vos pois demandent à être ramés.
Émpäouma, ». Empaumer; saisir avec la main. Au fig.
se rendre maitre de l'esprit de quelqu'un, pour lui faire
ÉMP
faire tout ce qu'on veut; l'entrainer, le capter, le captiver
par des séductions. — La pou l'émpdoumo, la frayeur
le saisit.
Dér. du lat. Palma, paume de la main.
Émpara (S'), v. S'emparer, se saisir.
Ce mot est plus restreint qu’en fr.; c'est s'emparer d’une
place ou d’un objet, qu'un autre vient d'abandonner.
Émparga, v. Renfermer le bétail dans le pare; clore les
claies. Au fig. encaisser un cours d’eau, le tenir renfermé
dans son lit par des bordures d’oseraies et des bâtardeaux.
Dér. de Pargue.
Émpéga, v. Coller; poisser; enduire de poix, de glu. Au
fig. embarrasser, empètrer.
S'émpéga, se prendre à quelqu'un ou même à quelque
chose, un travail, un ouvrage; s'installer auprès de quel-
qu'un qu'on ituportune; ne pas vouloir ou savoir s’en
détacher. Par ext. s'enivrer, parce qu’un homme ivre
perd tout mouvement, comme s’il était collé avec de la poix.
Dér. de Pégo.
Émpégno, s. f. Empeigne, le dessus du soulier.
Dér. du lat. Impilia, sorte de chaussure de feutre, selon
Pline, brodequins de poil foulé.
Empégoumi, ido, adj. Poisseux; poissé; sali, noir de
poix.
Dér. de Pégo.
Émpéira, v. Empierrer un chemin, le garnir de pierres.
Dér. de Péiro. l
Émpéita, v. Embarrasser; entraver; empêtrer. — Es un
émpéita, c’est un empètré, il ne sait ni lier, ni délier.
Dér. du lat. Impeditus, qui est embarrassé, entravé par
les pieds.
Émpèito, s. f. Embarras; obstacle; empêchement; acci-
dent qui dérange un projet; pierre d’achoppement,.
Émpéri, ido, adj. Obéré, insolvable; un homme qui
n’a rien à lui, surtout un homme sans crédit, sans consi-
dération, sans position financière.
Ce mot est même accompagné d’une idée de déconsidé-
ration morale; car on ne le dirait pas d’un honnête homme
tombé dans la misère.
Dér. du lat. Imperitus, ignorant, maladroit : la tradue-
tion languedocienne a dévié de l’acception latine, ce qui
lui est assez ordinaire.
Émpérouina, v. Goudronner; enduire de poix-résine;
cacheter des bouteilles; oindre ou luter avec la poix-résine.
S'émpérouina, se barbouiller, se tacher, se salir les
mains ou les habits avec du goudron ou de la poix résine.
Dér. de Pérouino.
Émpérquaïra (S'), v. Se blouser, se mettre dans de
mauvais draps; s'engager, se fourrer dans des affaires dou-
teuses ou du moins embrouillées. — Dé qué s’anavo ém-
pérquaïira énd'aquél home? qu'allait-il enchevètrer ses
affaires avec celles de cet homme? És bièn émpérquaïra,
ses affaires sont fort dérangées, il est très-obéré, très-
endetté.
- ÉMP
Dér. du lat. Precarius, précaire, titre précaire : c'est
comme si l'on disait, il s'est enfoncé dans le précaire, ce
qui, en terme de pratique, signifiait en lat. un bien en-
agé.
x Émpésou ou Émpésoulina, v. Garnir de poux ; donner
des poux à quelqu'un.
S'émpésouli, se laisser gagner par les poux.
Dér. de Pésoul.
Émpésoulina, v. Le même que Empésouli.
Émpésta, v. Empester, empuantir; répandre où com-
muniquer une odeur fétide. — Pu qu'émpèsto, il pue à
infecter; il pue comme un rat mort. Émpèsto lou boù, il
‘sent le bouc. La vilo èro émpéstado dé boulés, la ville
regorgeait de champignons.
Dér. du lat. Pestis, pesle, fléau.
Émpéstiféla, v. fréq. de Æmpésta.
Émplastra, v. Engluer, salir d’un corps humide et
pâteux ; souffleter. Au fig. S'émplastra, s'établir en para-
site chez quelqu'un, avec la tenacité d’un emplâtre.
Émplastre, s. m. Dim. Émplastroù. Emplâtre; onguent
étendu sur du linge ou une peau; large tache de corps
gras; soufllet appliqué sur la joue; parasile, importun
dont on ne peut se débarrasser; personne inutile, infirme,
impropre à tout, qui est à charge à quelqu'un. — Siès un
émplastre dé Bourgougno, lu es un ennuyeux, un impor-
tun, par allusion à la poix de Bourgogne dont on fait des
emplâtres. Issarta à l'émplastre, greffer à l'écusson. Cette
greffe consiste à fendre l'écorce du sujet avec la lame du
greffoir, à en écarter les deux lèvres et y introduire une
plaque d’écorce franche qui porte un œil. On lie forte-
ment le tout, de manière à empêcher toute infiltration
extérieure de la sève, en ayant soin d'écarter le lien sur
l'œil qui doit rester libre.
Dér. du gr. *Eurhaotpov, emplâtre, formé du v."Eurkasostv,
appliquer sur, coller à.
Émpoucha, v. Empocher; mettre dans sa poche. — Ce
mot entraine une certaine idée d'avidité : c’est faire des
provisions dans sa poche, quand on est invité hors de
chez soi; ou subtiliser adroïtement et peu honnêtement
quelque chose.
Dér. de Pocko.
Émpougna, v. Empoigner; saisir avec la main; s’em-
parer de; dérober.
S'émpougna, en venir aux mains, lutter corps à corps;
s'empoigner, se battre.
Dér. de Pougno.
Émpouisouna, +. Empoisonner; donner du poison, faire
par le poison. Au fig. infecter, exhaler une odeur
éfétide. — Téraïr empouïsouna pér lous amouriès , terrain
empoisonné par les müriers. On prétend que les racines
_pourries des müriers morts font périr les nouveaux plants
qu'on sur le mème terrain avant de l'avoir bien
purgé des débris de ces racines. Il est fort possible que la
matière phosphorique qui se procrée des émissions du bois
ÉMP 281
pourri produise cet effet; mais cette dégénérescence n'a
pas pour cause exclusive le mürier seul, dont la décom-
position des racines répandrait ainsi des sucs délétères, on
en accuse aussi le chène, anciennement trés-commun dans
nos pays. Les théoriciens expliquent qu'une plantation
antécédente de müriers, ou la préexistence de chènes sur
un terrain, pendant un assez long temps, ont dû arriver à
l'épuisement des sels propres et nécessaires à l'arbre le
plus précieux de nos contrées, car les deux essences pa-
raissent se nourrir les mêmes sucs. L'expérience, d'autre
part, est venue démontrer maintes fois que, dans les terres
d'où l'on a extirpé avec soin les racinages pourris, la mor-
talité se fait peu sentir; tandis qu'au contraire, dans celles
où l'expurgation n'a pas ét& complète, les jeunes müriers
font des pousses magnifiques, quelquefois pendant huît ou
dix ans, puis périssent tout à coup en pleine végétation,
comme frappés d’empoisonnement. Si l'explication scien-
tifique était vraie, ne serait-ce pas surtout dans les pre-
mières années que les nouveaux plants souffriraient de ce
manque de substance nutritive, tandis que plus tard, les
sucs naturels se renouvelant, leur rendraient peu à peu
l'alimentation normale? alors, ce serait de marasme, de
rachitisme que périraient le’ nouveaux sujets, et non de
mort subite, d’apoplexie foudroyante , si l’on peut ainsi
dire, comme ils font généralement.
En présence des faits, les causes restent incertaines;
mais des deux hypothèses, la première est la seule adoptée
par le peuple des campagnes. Elle peut n'être pas fondée;
elle peut tenir d'autre chose que d'une dégénérescence
amenée par une trop grande diffusion phosphoreuse; elle
peut dériver d'autres germes morbides; mais, à notre
avis, l'observation des agriculteurs, peu familiers avec la
chimie, pourrait bien avoir rencontré juste, et le sys-
tème scientifique ne se trouver exposé qu'aux démentis
donnés chaque année par l'expérience et la pratique.
IL était donc très-intéressant, dans une question si
grave pour nos régions séricicoles, de tenir note et bon
compte des dictons anciens et de leur raison d’être et d'avoir
cours.
Émpoulo, s. f. Ampoule; cloche, vessie, sorte de pus-
tule pleine d’eau qui se forme sur la peau, principalement
aux pieds el aux mains, par suite d'un exercice forcé, ou
du frottement continu d’un corps dur comme le manche
d’un outil, où une chaussure qui blesse et entame la peau.
Vider cette vessie par une incision est un moyen insufi-
sant, parce que l'ouverture se referme bientôt et la cloche:
se remplit de nouveau. Le remède le plus simple et le
plus efficace est d'y placer un petit séton, c'est-à-dire une
aiguillée de fil qu'on y passe de part en part avec une
aiguille et qu facilite l'évacuation successive, jusqu'à
complète cicatrisation. — Acampo pas d'émpoulos à las
mans, il ne prend pas le travail trop à cœur, ou il fait un
travail peu fatigant.
* Dér. du lat. Ampulla, m. sign. À
282 ÉN
Émpourta, v. Emporter, enlever, ôter d’un lieu; porter
avec soi; entrainer.
Dér. de Pourta.
Émprégna, v. Engrosser; rendre une femme enceinte;
féconder une femelle. — Aguélo fénno és émprégnado,
cette femme est grosse; elle a conçu.
Dér. du lat. Progigno, concevoir.
Émpudicina, v. Empuantir, infecter.
Dér. de Pudicino.
Émpura, v. Attiser le feu; fourgonner; rapprocher les
tisons; raviver les tisons couverts de cendres. Au fig.
attiser la discorde ; exciter une querelle déjà allumée;
jeter de l'huile sur le feu.
Dér. du gr. Nüp, œupés, feu.
Émpuraïre, aïro, adj. Brouillon, boute-feu; qui fo-
mente et excite des querelles.
Én, Ën, Éno, Ëno, sufires au masc. et au fém.
Nous avons essayé déjà à l’art. Agno, suff. et dans quel-
ques autres, de donner une idée générale du rôle des suf-
fixes et des formes particulières qu’ils affectent dans notre
langue d'Oc : nous n’y reviendrons, à propos de celui qui
se présente maintenant, que: pour rappeler ce qui en a été
dit, et le rattacher comme type à la famille qui s’est créée
sur sa voyelle pivot ou tonique.
Ces désinences, on le sait, s'adaptent à un radical, et
elles ont pour objet d'en modifier la signification. Syllabes
par elles-mêmes dépourvues de sens, elles donnent au mot
primitif des qualités diverses et y ajoutent une idée acces-
soire qui conslitue ses dérivations. Du substantif au verbe,
les terminaisons marquent la personne, le temps et le
mode : du substantif à l'adjectif, elles servent à distinguer
le genre, le nombre et le cas. Ce n’est pas tout à fait à ce
point de vue que nous voudrions les considérer en ce mo-
ment : la déclinaison et la conjugaison rendent compte
d’ailleurs à chaque instant de leurs fonctions et des chan-
gements qui en sont le résultat. Mais les suffixes font plus
encore, et leur véritable emploi, le plus intéressant, est
plus étendu. S'agit-il, en effet, de généraliser le sens d’un
mot ou de le restreindre, de le diminuer ou de l’augmen-
ter, de spécifier la substance dont il provient, l’action qu’il
remplit, la source dont il découle, ses relations et ses con-
cordances, sa manière d'être; alors interviennent ces dési-
nences adjectives qui déterminent tous ces rapports, par
des nuances d’inflexions et de composition qui semblent
systématiques et pour ainsi dire uniformes. Comme nos
idiomes méridionaux se sont formés en majeure partie de
radicaux venus du latin, ou du moins d'éléments que le
latin s'était appropriés, il est évident que, par tradition,
la langue nouvelle, héritière directe du latin et qui n'en-
tendait point perdre, même dans son nom, ses souvenirs,
a mis en œuvre les procédés de la latinité, toutefois sans
abdiquer l'originalité de son esprit et sans chercher à les
rendre méconnaissables. Elle a done pu, en obéissant à ses
instincts, innés peut-être, mais longtemps comprimés,
ÉN
adoucir des consonnances, préférer la concision à l'am-
pleur, accommoder à ses aptitudes organiques des into-
nations et sa prononciation qui amenaient forcément les
mots à une autre structure; mais le fond n’a été ni changé,
ni dénaturé, et certaines règles de convention n'ont pas
été abolies. Ce sont et ces origines et toutes ces transfor-
mations, indispensables à étudier pour arriver à l'étymo-
logie et au sens vrai des mots, que nous tentons de déga-
ger, de noter au passage, en suivant leurs phases souvent
obscures et en rapprochant leurs nombreusés variantes,
qui sont la richesse de notre langue.
La fréquence de cette forme de suffixe Én, En, mase.,
Ëno, Éno, fém., n'est pas précisément ce qu’il offre de
plus remarquable; mais il est la base d'une infinité de
combinaisons curieuses, qui viennent à l'appui de ce que
nous avons dit du travail de la langue, au moment de sa
rénovation. Il n’est pas douteux d’abord que la désinence
actuelle ne corresponde directement au suffixe latin Enus,
a, um = Anus, a, um. La différence même d'accentua-
tion de la voyelle euphonique, tantôt avec é fermé, tantôt
avec à ouvert, pourrait bien n'avoir été produite que par
la variété latine enus où anus; alors surtout que la portée
du suffixe et sa valeur significative n’ont point été par là
sensiblement altérées : Paganus à donné Pagan, paysan,
ainsi que Païèn, païen; Vilanus, vilèn, vilain; Christia-
nus, crétièn, créstian, chrétien ( V. ©. m.). Mais en mème
temps cette affinité de consonnance ramène à la terminai-
son celtique adjective Ec — Ac, qui tient toujours au sol.
Il n’y aura donc pas à s'étonner du rapprochement et de
la confusion de ces voyelles, non plus que de leur équi-
pollence. Ce doit ètre par ce mécanisme que la terminai-
son enus = anus latine a suppléé et reproduit la gauloïse
ec — ac, comme les autres variétés. Peut-être le celtique
était-il moins riche; mais le roman et puis la langue d'Oc
s’assimilèrent tout ce que la moyenne latinité, cette dégé-
nérescence du latin vaincu, qui était déjà le renouvelle-
ment du langage, avait entrepris de réformer, de rendre
plus vif, plus serré, plus concis, par la contraction et par
la suppression des finales, le déplacement de l’accent toni-
que, et l’adoucissement de certains sons. Cette méthode
est indiquée par les exemples pris surtout dans les noms
propres d'hommes et de lieux : et là, en effet, doit'se ren-
contrer sa meilleure démonstration.
Comme Ec = Ac, comme le latin Enus, a, um = Anus,
a, um, qui le rappelle, notre suffixe En, Eno, quel que soit
son accent, est destiné à marquer l’habitation, la relation
avec une société, un pays, une contrée, une secte, une
école, un culte, quelque idée de provenance, d'apparte-
nance, d'affiliation : alaisièn, vilèn, païèn, crétièn, langue-
doucièn, ete., sont des noms, ou plutôt des adjectifs, pro
pres où communs, dont les primitifs latins, alesia, villa,
pagus, christus, ont été adjectivés au moyen de la termi-
naison caractéristique. Quand donc il fallait, sur ce mo-
dèle, désigner plus spécialement la propriété d'un individu,
EN
le lieu où il habitait, la contrée d'où il venait, l'agréga-
tion à laquelle il appartenait ; les Gaulois avaient leur ter-
minaison pour adjectiver, soit le nom de l'homme, pour
l'appliquer à sa terre, à sa demeure, à sa propriété, à son
lieu d'origine, ete., soit le nom régionol, pour le même
effet : les Latins employaient ou leur génitif, ou leur
suflixe de même valeur, et les accumulaient quelquefois,
surtout pour les noms propres; le roman, après eux,
s'attacha à maintenir les mêmes désignations, en suppri-
mant les finales us, a, um, purement latines, en conser-
vant avec soin les formes primitives. De là les prove-
nances Alaisièn, Andusèn, Sén-lanén, Saléndrén, etc.,
les noms de nombre, céntén, masc. inusité, cénténo, cin-
quantèno, crantén, cranténo, etc., et les adj. marsén, ésti-
vén, ribidirén, hivèrnén, etc.; et sur la terminaison au fém.
en éno, où éno, s'appliquant à des propriétés, à des maisons,
à des terres appartenant à des personnes du nom de Jules,
primitif abrégé de Julius faisant Julianus, transformé en
Julièn et en la Julienne; du primitif Lucus, coupé de Luc ou
Luæ, fournissant Zucanus, ou la forme génitive Luci, ou bien
Lucius, mème racine, donnant au génitif Lucii, traduit en
Lucien qui en provient et en Lucienne, terre, propriété,
habitation de Lucius ou de Luc; arrivant probablement par la
suite à notre nom de Lussargue où Lugargue; Martin donnant
la Martinienne, se transformant en Martigny, campus, cas-
trum Martini, de même que Martignac, Martignan, Marti-
nenche, Martignargues; Cornu, lat., Courniènno, Cournéïam,
Corneilhan (Hérault), etc., qui ont subi d’autres métamor-
phoses encore, et dont la nomenclature serait trop longue.
I suffit, d'ailleurs, de mettre sur la voie du procédé
général : les différents mots donneront raison, autant que
possible sera, du mode et de l'agencement particulier des
variantes sur les noms propres. Nous ne saisissons ici
qu’une des formes qui durent être les premières intro-
duites dans nos dialectes romans et languedociens, parce
que ses affinités sont plus rapprochées du suffixe latin
Enus, a, um, et que l'impression faite sur le mot est iden-
tique de sens et de valeur.
Avec ces données, sur lesquelles il eût été facile de mul-
tiplierles exemples, on peut relier ce qui a été dit aux
articles Agno, An, et autres, au sujet des propensions qui
se manifestèrent au moment où le latin s'effaça pour faire
place aux nouveaux idiomes. Comment s'opéra le chan-
gement et par quelles phases il fut conduit, sans autre
science que l'instinct euphonique du peuple, sans système
savant et préconçu autre que de rendre l'accentuation plus
-commode et plus adoucie, et l'expression égale à la rapi-
dité de la conception, pour Le pet entrer dans le génie
national; il est possible peut-être d'en avoir le sentiment,
d'en ‘les effets, mais il est mal aisé d'en aperce-
voir et
mun: il n'ya pas à insister sur les différences qui sépa-
rent la langue d'Oc de Ja langue d'Oil. A chacune ses for-
enexpliquer les motifs. Le langage au nord, dans
le centre êt au midi, s’est construit dans. un moule com-
EN 283
mes, ses attributs, ses préférences. Mais ce qu'il y a de
général en principe, au fond, dans la racine, appartient à
l'une et à l'autre comme un héritage et au même titre. Et
c'est pour cela que dans le languedocien et dans le français,
bien des règles grammaticales et des aperçus lexicogra-
phiques doivent demeurer communs; et la correspondance
de ces remarques parailra toute naturelle.
Ce qui est particulier à notre dialecte et qu'il est néces-
saire de relever pour notre sujet est spécial aux transfor-
mations par lesquelles a passé le suffixe En, dont. nous
venons d'indiquer l'origine, l'emploi et la signification.
Comme on le voit par ce qui nous en reste, En doit être
la plus simple traduction du Enus latin, qui s’infecte peu
à peu du similaire Anuws, avec la prononciation plus forte
sur la tonique, et par la même raison qui rendait le cel-
tique ec égal à ac. Il devenait donc à peu près indifférent
d'employer l'a ou l'e comme syllabe sonnante, alors que le
même effet était produit dès que le suflixe se joignait au
radical. Ici le caractère particulier se trouvait dans la
nasale N.
Il pourrait se faire cependant que l’ancien celtique
ec — ac eût aussi voulu laisser, dans la composition nou-
velle des mots, son empreinte propre. On remarque, en
effet, que le féminin de quelques-uns des vocables cités
en exemple, porte comme un souvenir de cette intona-
tion: Andusérquo, marsénquo, Saléndrénquo; ce qui per-
mettrait de supposer que le masculin se terminait par un
C, souvenir d'origine. Mais notre dialecte, dans sa pronon-
ciation et par conséquent dans son orthographe, repousse
toujours le C final, nous l'avons vu Lettre C, bien que
d’autres l’admettent encore dans la langue d'Oc. La preuve
de cette filiation de suffixes n'en existe pas moins.
Pour en revenir à l'introduction de la nasale N, se com-
binant avec le C et le gén. en à, il est encore probable qu'elle
a amené les finales enicus, inicus, onicus, a, um, pris au plur.
fém. enicæ, inicæ, onicæ, si fréquentes dans la moyenne
latinité pour les noms de lieux, et sur lesquelles nous
nous sommes longuement expliqué. Ce sont ces conson-
nances qui élaient sans doute antipathiques à l'euphonie
du roman, qu'il adoucit en Enche, inche, onche, avec le
chuintement traditionnel du gaulois. — Voy. à l'art. Di-
ménche et autres.
D'autre part, le génitif latin en à dut intervenir aussi
dans la modification : c'était peut-être une redondance qui
augmentait l'énergie du suflixe. En tous cas, il servit à
donner une mouillure sur M inconnue encore au génie du
latin. L'expression en fut rendue par le Gn, consonnance
nasalisée et mouillée. / Foy. Agno, sufixe.) L'inversion
par le xg avec les voyelles a, e, à, o, plus conforme aux
aptitudes de la prononciation germanique, se répand da-
vantage au nord et redescend par importalion dans quel-
ques formes méridionales : ainsi Vèn, qué vènguo, ou qué
vêgno, de veniat; tèn, tèngo ou tègno, de teneat. — Voy. aux
mots Canounje, Canourgo, etc.
284 EN
Telle est la série et la diversité de cette famille de suf-
fixe en Én et Ën, mase., Éno et Eno, fém. Dans les recher-
ches étymologiques, il est indispensable de remonter par
cette chaine non interrompue jusqu'à la racine des mots,
et de les dépouiller de toutes les adjonctions qui leur ont
été imposées, pour avoir et comprendre le sens des dérivés.
Quand les mots affectés de ce signe se présenteront d'ail-
leurs, nous ne laisserons pas échapper l’occasion de nous
en référer à ces observations qui ne comportent pas de
plus amples développements dans cet article, si mème ceux-
ci ne semblent pas déjà trop longs.
Én, prép. En, dans, à, avec. — Æn Camargo, en Ca-
margue ; éx Aouséro, dans la Lozère. Lorsqu'il s’agit d’une
contrée prise vaguement et dans sa généralité comme ci-
dessus, on emploie la prép. Én; mais quand il s’agit d'une
ville ou village spéciaux, on dit À : Véou à Nime, je vais
à Nimes; démoro à Uzès, il réside à Uzès. Cependant si le
nom propre de lieu commence par la voyelle a, la délica-
tesse de notre acoustique répugne à celte rencontre dont
l'hiatus est trop heurté, et nous avons recours à notre
prép. Én: Vaï én Alais, én Arle, én Alzè; vèn d'én Avi-
gnoun : il va à Alais, à Arles, à Alger; il revient d’Avi-
gnon. Dé dous én dous, dé quatre én quatre, deux à deux,
quatre à quatre, ou deux contre deux, quatre contre quatre.
Barunlè lous éscaïès dé quatre én quatre, il roula les degrés
quatre à quatre. Én tan dé péno, avec tant de peine; én
tan d’éfans, avec tant d'enfants. Uno mostro én or, une
montre d'or. Un cuïè én arjén, une cuiller d'argent. £n
fè d'aqud, quant à cela. Ën fè d'ubésti, n’és un, pour un
butor, c'en est un. Anan én quicon, nous allons quelque
part: danscette phrase, Ën est simplement supprimé par le fr.
Én ne répond pas au pron. relatif fr. en, comme dans
cette phrase: j'en veux : on le traduit par Né; né vole
(Voy. c. m.). Il s'emploie aussi en particule comme en fr.
pour former le gérondif, en l’ajoutant au part. prés. masc. :
én marchan. Cependant comme ce participe est peu dans
les allures du languedocien, et qu’il est peu harmonique à
son génie, il est bon d'éviter cette forme que nous avons
empruntée au fr. Mais il est une autre composition de
gérondif que nous adoptons volontiers et qui se raccorde
très-bien à l'allure elliptique de notre langage; elle con-
siste à remplacer le part. prés. par l’infinitif, et nous
disons très-bien : ér véire, én faïre, én dousè, én éscrioure,
én èstre, én avédre; én préne lou café, en voyant, en
faisant, en entendant, en écrivant, en étant, en ayant;
en prenant le café, Ces phrases sont éminemment langue-
dociennes : mais il est à remarquer que cette formule ne
s'emploie jamais envers les verbes qui font A à l'infinitif.
On ne peut dire: én manja, én parla, én davala. I est
difficile de se rendre compte de cette différence, qui semble
un scrupule capricieux de l'oreille. Cela tient peut-être à
ce que les verbes en A, qui correspondent aux verbes lat.
en Are, sont les plus nombreux et les plus réguliers de
tous : dès lors le part. prés. s’en déduit naturellement ;
ÉNC
tandis que la plupart des autres conjugaisons sont irrégu-
lières et donneraient un part. prés. difficile à déduire et
souvent très-long à prononcer. Nous ne pouvons guère
trouver d'autre motif plausible à cette anomalie, ou à cette
délicatesse.
. Dér. du lat. 7n, ou du gr. “Ev, m. sign.
Énaïga, v. Inonder; imbiber d’eau. — Ce terme implique
l'idée d’un excès dans l'imbibition : on dit Enaïga des
légumes qui ont poussé par un temps trop pluvieux, d’un
potage trop étendu d’eau, comme de prairies inondées et de
terres abreuvées outre mesure.
Dér. de Aïgo.
Énaïra, v., ou Énâoura. Acrer; essorer ; donner de l'air;
exposer à l'air. — Les deux mots, que nous plaçons sur
la mème ligne, sont quasi synonymes. Mais Éndoura in-
dique un acte plus explicite : il signifie, non pas seulement
exposer à l'air, mais à l'air agité, douro, le vent, et en
remuant l'objet qu’on veut aérer, en le secouant pour le
faire mieux pénétrer par l'air ambiant dans tous les sens.
Enaïra a moins de mouvement, moins d'extension active.
On énaïro un appartamén, on l'ouvre pour lui donner de
l'air, et on ne l’éndouro pas. Au contraire on érdouro du
fourrage, en le séparant et l’agitant avec la fourche, pour
que le vent le sèche plus vite, et on ne va pas l'énaira.
La nuance est parfaitement saisissable. “
Dér. de Air.
Én-ana (S'), v. — Voy. Ana.
Énäoura, v. — Voy. Énaïra.
Éncabéstra, v. Mettre le licou.
Dér. de Cabéstre.
Éncadéna, v. Enchainer; lier, attacher avec des chaines;
cadenasser; fermer avec une chaine. Au fig. captiver;
retenir dans les liens de l'amour.
Dér. de Cadéno.
Éncadra, v. Encadrer; mettre, placer dans un cadre;
“entourer. — On dit ironiquement : Té farén éncadra,
c.-à-d. nous ferons exposer ton portrait, comme monu-
ment historique ou d'intérêt public.
Dér. de Cadre. >
Éncafourna, vw. Cacher avec soin; enfoncer profondé-
ment; mettre au fond d’un antre, d’un lieu obscur et
caché, comme le tronc caverneux d’un arbre.
Dér. de Cafour.
Énçaï, ado. de lieu. Vers ici; de ce côté; plus près de
(moi. — Fasè-vous énçaï, rapprochez-vous d'ici: cela se
dit particulièrement à des personnos rangées en file ou en
cercle, lorsqu'on veut faire de la place à un nouveau sur-
venant.
Éncaïssa, v. Ne se dit qu’au fig. pour: mettre dans sa
tête, enregistrer dans sa mémoire; concevoir, comprendre.
— Pode pas éncaïssa aquélo, en parlant d’une hablerie
trop forte, je ne puis laisser passer celle-là; je ne puis
l’adopter.
Dér. de Cuïsso.
ÉNC
Éncamba, v. Enjamber; enfourcher; se mettre à cali-
fourchon, jambe d'ici, jambe de là; franchiren enjam-
bant. — Éncamba lou fid, enjamber le feu, écarter les
jambes sur les chenets, de manière à occuper toute la
largeur du foyer. Éncambè soun chival, il enfourcha son
cheval. Éncambo low vala, il pose une jambe sur chaque
bord du ruisseau.
Dér. de Cambo.
Éncambra, v. Renfermer dans une chambre, tenir dans
une chambre. — S'éncämbro tout lou jour, cette femme
s'occupe peu de son ménage ou des affaires du dehors, elle
reste renfermée dans sa chambre.
Dér. de Cambro.
Énçamoun, adv. de lieu. En haut de ce côté; vers l'in-
terlocuteur, quand celui-ci est placé relativement au haut
de quelque chose, comme par ex. vers le haut bout d’une
table à manger. — Voy. Amoun.
Énçamoundâou, adv. de lieu, aug. et variante de Én-
çamoun.
Éncan, s. m. Encan, vente publique aux enchères.
Formé du lat. In quantèm? À combien? À quel prix?
qui est Ja formule des criées publiques.
Éncanaia (S'), v. S'encanailler; se mésallier; avoir des
relations avec de la canaille; s'unir à personnes ou à
familles mal famées.
Dér, de Canaïo.
Éncanta, v. Enchanter; charmer; séduire par des en-
chantements et des tours de magie; captiver; ravir.
r. du lat. {ncantare pour cantare, parce que les ma-
giciens accompagnaient leurs charmes de chants magi-
ques.
Éncantaire, aïro, adj. Enchanteur, magicien; séduc-
teur; qui exerce une fascination magique, qui charme et
ravit.
Éncapriça, v. Irriter, agacer, augmenter l'irritation,
l'obstination de quelqu'un.
S’éncapriça, s'obstiner; s'opiniätrer. — Lou tén és bièn
éncapriga, le temps est bien à la bourrasque.
Dér. de Caprice.
Éncaréira, v. Mettre en route; mettre sur le chemin;
donner un courant et de la pente à un ruisseau, aux eaux
pluviales. Au fig. mettre en train, mettre sur la voie.
S'éncaréira, se mettre en route, se diriger vers.
Dér. de Carièiro.
_ Éncaro, adv. Dim. Éncaréto. Encore; une autre où une
seconde fois; de plus; en outre. — Pa’ncaro, pas encore;
un moment ; dans un instant.
_ Éncaréto ne se dit que négativement. Pa’ncaréto, pas
‘encore, mais peu s’en faut.
. Dér. du lat. In hac hord ou de l'ital. Ancora fait de
| Anche ora, m, sign.
Éncarougna, v. Sentir, puer la charogne; par ext.
exhaler une odeur fétide quelconque. — Pu qu'énoarou-
gno, il pue à infecter.
ÉNC 285
S'éncarougna, s'allier avec une femme de mauvaise vie.
Dér. de Carogno, Carougnado.
Éncastra, v. Mettre les agneaux dans un petit pare, les
séparer de leur mère pour les sevrer. Au fig. emboiter;
assembler; joindre ensemble.
Dér. du lat. Castrum, lieu fermé.
Éncastre, s. m. Encadrement: toute enceinte en char-
pente. — Éncastre dé pous, parquet ou grillage de ma-
driers, sur lequel on établit la base d'un mur de puits.
Éncastre dé mouli, châssis en charpente qui entoure le gite
d'un moulin à farine. Éncastre d’un cièl dé iè, châssis
d'un ciel de lit. Éncustre dé tindou, cercle en charpente
de cuve vinaire qui consiste en jantes de chêne, épaisses
de trois pouces et larges de six, qui chevauchent avec
leurs voisines, qu'on fixe et qu'on assujétit par des che-
villes. Ce mode, qui est trop lourd et trop pénible quand
on veut défoncer la cuve, est généralement abandonné
aujourd'hui pour les rubans de fer battu, tout comme les
cercles en scions de châtaigniers sauvageons, ou de mico-
coulier. Au fig. on dit Éncastre de toute sorte de clôtures.
Dér. du lat. Castrum.
Énçaval, adv. de lieu. En bas, du côté du bas, vers le
bas, par rapport à l'interlocuteur, lorsqu'il est placé rela-
tivement plu sbas ou au bas, bout d'une table par exemple.
— Voy. Aval.
Éncavala, v. Entasser les gerbes de paille, former les
meules qu'on appelle Cavalé. —Voy. c. m.
Éncén, s. m. Encens, parfum; gomme résine aroma-
tique. Au fig. flatterie, louange. — Sé parfuma émbé
d'éncén, s'appliquer des fumigations de Carabé, ambre
jaune qui a une forte odeur d'encens. Coumo las géns,
l’éncén, prvb., selon les gens, l’encens.
Dér. de Incensum, m. sign. Formé de Incendere, brûler.
Éncénsa, v. Encenser, jouer de l’encensoir. — Ce mot
ne participe pas de l’acception figurée du fr.: Encenser,
pour louer, glorifier.
Énchéina, v. Enchainer. — Le même que Æncadéna
(V.c. m.), qui est plus pur.
Énchivoquo, s. f. Équivoque, ou plus proprement,
anicroche, dérangement, pierre d’achoppement ; subtilité;
chicane.
Ce mot est évidemment une corrup. du fr. Équivoque,
avec une différence assez sensible d'acception.
Éncho, s. f. Spécialement, anche d'un instrument à
vent, d'un hautbois, d'un basson, etc. — Mouïa l’éncho,
arroser l’anche; boire un coup.
Dér. du gr. ’Ayyos, de Ayysiv, serrer, étrangler.
Énclâousi, v. Clore, enclore; enfermer dans une en-
œæinte; entourer d’une clôture. Au fig. charmer; jeter un
sort; fasciner; ce qui consiste à retenir les objets charmés
comme s'ils étaient enfermés dans un cercle magique. —
On dit d’un vieux berger qu'éncldousis sas fédos, quand,
sans le secours de son fouet et de ses chiens, il retient ses
| brebis dans un endroit assez resserré, où elles paissent
286 ÉNC
sans s'écarter, ce qui est dù sans doute à un certain savoir-
faire, soit à la crainte ou à la confiance qu'il leur inspire.
Dér. de Cldousi.
Énclume, s. ». Enclume, masse de fer sur laquelle on
bat le fer et les autres métaux.
Dér. du lat. Incus, udis, m. sign.
Éncluso, s. f. Écluse; martellière; clôture et pertuis
garni de vannes, pour retenir et lâcher à volonté l'eau d’un
canal.
Suivant certains auteurs, le mot fr. vient du lat. Exclu-
dere, exclure, rejeter, parce que l'écluse rejette les eaux
qu'elle barre. Suivant d'autres , il est dér. du teuton
Schluse, m. sign., dont les Hollandais ont fait Sluys, et les
Anglais Sluice.
Quoiqu'il en soit de ces diverses hypothèses, le lang.
parait venir plus rationnellement du lat. Ancludere, ren-
fermer, enclore; car l’écluse forme plutôt une inclusion
qu’une exclusion. Le fr. nous aurait-il fait cette fois un
emprunt? C'est peu probable; mais il peut avoir puisé à
la même source en s’éloignant davantage du type latin.
Le teuton Schluse pourrait bien aussi avoir la même
origine. Cependant, pour ne pas nous montrer trep fiers et
trop entichés de nos origines, nous admettons comme possible
que Éncluso soit une corrup. d'Écluse, comme tant d’au-
tres termes qui appartiennent à la nomenclature des arts
et métiers.
Éncô dé, prép. Chez. — Éncd dé moussu, chez monsieur.
Vène d'éncù dé moun ouncle, je viens de chez mon oncle.
Éncoulassa, ». Mettre le collier à une bête de trait ou
de labour.
S'éncoulassa, prendre le joug matrimonial.
Dér. de Coulas.
Éncouléri, v. Mettre en colère, irriter; aigrir, exciter,
provoquer, augmenter la colère de quelqu'un.
Dér. de Coulèro.
Éncoulo, s. f. Contre-fort; contre-mur; pilier butant;
éperon, — te terme est en général appliqué à la maçonnerie
purement agricole, et non à la haute architecture. C'est
un contre-mur qu’on établit principalement au bas du
mur de soutènement d'une terrasse, soit lorsque sa fonda-
tion est décharnée, soit lorsqu'il surplombe par suite de
la poussée des terres, soit lorsqu'il menace ruine par des
lézardes ou tout autre élément de destruction.
Dér. peut-être du lat. Ancon, coude de mur, console.
Éncouqua, v. Empoisonner le poisson au moyen de la
coque du Levant /Voy. Coguo). Au fig. ennuyer, para-
lyser d’ennui; porter guignon.
S'éncouqua, s'enivrer.
Éncournaïa, v. Encorner: planter des cornes sur le
front. — Ne se dit que dans le sens fig. et injurieux.
Dér. de Cournal.
Éncrésta, v. Chaperonner un mur de clôture, le ter-
miner par un encrêtement ou un chaperon.
Dér. du lat. Crista, crête, cimier d’un casque.
ÉND
Éncréstaduro, s. f. Encrêtement, chaperon d'un mur.
— Voy. Crésto.
Éncrouqua, v. n. Tomber de dépérissement; être d'une
maigreur effrayante.
Dér. de Crouqua, accrocher, par catachrèse, comme si
les os étaient devenus si saillants qu'ils pussent servir de
crocs.
Énculpa, v. Inculper; accuser d’un fait; faire retomber
une faute sur quelqu'un.
Dér. du lat. Culpa, faute.
Éndâoumaja, v. Endommager; causer du dommage;
blesser ; faire une écorchure, une avarie qui porte un pré-
judice. — Aquél doubre és bièn énddoumaÿja, cet arbreest
gravement ébranché, soit par le vent, soit par la malveil-
lance.
Dér. de Dâoumaje.
Énd'aqud, adv. Proprement, avec cela, au surplus. C’est
aussi une locution explétive fort usitée dans une narration,
pour en lier les divers membres. Elle remplit à peu près
le mème office que le fr. Cependant ; c’est une formule que
les paysans emploient avec une grande profusion dans leurs
discours. — Y-avièi bièn récoumanda dé gai èstre, énd'aqud
és pas véngu, je lui avais fort recommandé de se trouver
ici, malgré cela, il n’est pas venu. Laïssa-mé béoure un co,
énd'aqud vène, laissez-moi boire un coup, après cela je
suis à vous. Énd'aquo qué s'én passo, attendez done qu'il
s'en prive, avec cela qu'il s'en passe.
Formé de Éndé, avec, et Aqud, cela.
Éndaréira, v. Faire perdre du temps, faire restér en
arrière. — S’éndaréira, demeurer en arrière; laisser arré-
rager les termes d’une ferme, d’une rente, les intérêts d’un
capital. — Las courchos éndaréirou, les chemins de tra-
verse font perdre du temps, parce que celui qu'on gagne
en abrégeant le trajet, on le perd par les difficultés dela
route et les obstacles qu'on rencontre. Moun drole s'én-
daréiro, mon fils s’est laissé devancer par ses condisciples,
il est resté en arrière.
Dér. de Dariès.
Éndaréïrajes, s. f. plur. Arrérages d’une ferme, d’une
rente, etc.; arriéré d’une dette, — Quouro qué morie pla-
niraï pas mous éndaréirajes, lorsque je mourrai, je n'aurai
pas de regrets sur l’arriéré de ma jeunesse; je l'aurai bien
employée. d
Éndavala, v. Avaler, engloutir, absorber. — Éndava-
lariè un bidou émbé sas banos; l'éspitäou amaï lous pdoures;
lou diable amaï lou châour?; toutes locutions proverbiales
qui répondent à un gros mangeur qui avalerait la mer et
les poissons, à un prodigue qui dévorerait le royaume de
France et de Navarre, le diable et ses cornes.
ll se prend aussi pour : faire descendre, faire tomber.
— La paré s’és éndavalado, le mur a croulé, ou il a donné
du pied, M'a éndavala l'éspanlo, il m'a disloqué l'épaule.
Un moure éndavala, une figure avalée, amaigrie. És tout
éndavala, il a le visage défait. Ç
END
Ce mot, comme Aval et Davala, est formé du lat. Ad |
vallem, vers le bas.
Éndé, prép. Avec. (Voy. Émbé.) — La différence entre
les deux formes de cette préposilion a été déjà notée.
Mais dans quelques locutions d'un idiotisme très-original
il n'ya pas non plus à les confondre et Éndé est seul
admis dans les tournures pittoresques des phrases suivantes,
où il prend Ja signification de en, avec, à, prép. : Es-ti
poussible qu'un ase sible énd'avédre lou moure tan lon?
Est-il possible qu'un ane siffle avec un museau si long?
Aqud y-és véngu éndé naïsse, il a pris cela en naissant,
cela lui vient de naissance.
Éndémési, ido, adj. Dim. Éndémésidoù. Pauvre hère,
sans portée d'esprit, qui tremble au moindre vent, qu'un
vien abat; qui s'embarrasse des moindres difficultés; qui
ne sait jamais conclure une affaire.
Sauvages donne à ce mot une tout autre acception, et le
traduit par : arrêté, ordonné, fixé. Cette signification peut
appartenir à un autre dialecte qui n'est pas à notre con-
naissance. Dans nos pays, il veut dire, au physique, un
homme sans force, sans adresse; au moral, sans esprit,
sans initiative, sans valeur : c'est un demi-homme, et c'est
ce qu'exprime son étymologie du lat. Dimidius, demi.
. Éndémési (S'), v. Diminuer peu à peu; devenir à rien.
Dér. du précédent ou du lat. Demere, Ôter, faire subir
une diminution.
Éndéouta (S'), v. S'endetter; faire des dettes; s'engager
dans des dettes, en contracter beaucoup. — Prén lou cami
das éndéoutas, il prend le chemin de l'école, c.-à-d. le
plus long, le plus scabreux et le moins utile, comme les
débiteurs qui veulent éviter la rencontre des huissiers ou
de leurs créanciers.
Dér. de Déoute.
Éndéqua, v. Estropier, donner ou causer un vice, une
tare; rendre maladif; affliger d’un rachitisme qui arrête le
développement du corps. — Un drole éndéqua, un enfant
rachitique, noué. Un doubre éndéqua, un arbre entiché.
És tout éndéqua, il est tout contrefait. És éndéqua pér sa
vido, il est estropié pour la vie.
‘Ce mot serait celtique, d'après Astruc, et le primitif
sans doute Entecou Endee, tare,vice. D’autres le font déri-
ver du gr. 'Aveümxa, aor. tiré de ’Avar{Onut exposer, imposer.
Éndèquo, s. f. Tare; défectuosité; rachitisme; défaut;
langueur; vice intérieur.
Éndéquoüs, ouso, adj. Qui a une tare; rachitique;
languissant; malsain ; maladif; chétif.
un, s. n. Cacochymie, rachitisme; enfant noué
A à anni eu ia mali
,s.m. Dim. Éndèrvioù. Dartre; maladie, in-
mation de la peau couverte de vésicules blanchâtres,
avec. ulcération. — Moure épadè, visage bour-
bas Denis SE DU
réel. Derui où Deruit, m. sign.
ÉND 287
Éndévénable, ablo, adj. Affable; d'un caractère facile
à vivre, avec lequel tout le monde est d'accord ; sociable.
Éndévéngu, udo, part. pass. de Éndévéni.
Éndévéni, v. Atteindre; frapper juste et de loin; ren-
contrer à point.
S'éndévéni, se convenir; sympathiser; s'accorder. —
L'éndévénguère ddou prémiè co, je l'atteignis du premier
coup. Endévénguën, nous convinmes. En parlant d'un
portrait : Vous an bièn éndévéngu, on a bien saisi votre
ressemblance. Mas miolos s'éndévènou, mes mules s'accor-
dent très-bien pour labourer ensemble. En parlant de vers :
Aquélo cansoù s'éndévèn bièn, cette chanson rime bien.
Éndévéni un air, saisir et rendre bien un air de musique.
Faïre éndévéni uno courduro, dous lès, égaliser les lisières
d’une couture, les bords d'un lé. Sé s'éndévèn, le cas
échéant; s'il plait à Dieu; suivant toute probabilité ; s’il
arrive jamais. Nous éndévénguèn, nous eùmes la même
pensée, nous nous rencontrâmes dans la mème idée.
Dér. de Éndé, avec, et Véni, venir avec; ce qui revient
au lat. Convenire, convenir.
Éndia, v. Hennir; faire un hennissement, en parlant du
cheval.
Dér. du lat. Hinnire, m. sign.
Éndiabla (Faire), v. Endiabler; faire donner au diable
tourmenter quelqu'un pour obtenir de lui ce qu'on désire ;
faire enrager ; dépiter.
Éndiférén , s. m. Différend; discussion; contestation ;
maille à partir. — Partaja l'éndiférén, partager le diffé-
rend.
Ce mot vient évidemment d'une corruption du fr,
Éndiférén, énto, adj. Ne s'emploie que négativement.
On dit: és pas éndiférén, pour : il est assez beau, assez
bon, pas trop désagréable, pas dépourvu de bon, tant des
personnes que des choses. Aquél bla és pas éndiféren, c'est
d'assez beau blé.
Éndil, s. m. Dim. Éndié. Hennissement. — Voy. Éndia.
Éndiméncha (S'}, v. S'endimancher, mettre ses habits
de fète ou de gala. — Voy. Diménche.
Éndinna, ». Irriter; envenimer une plaie; redoubler la
colère, l’exaspération ; réveiller, surexciter une douleur.
S'éndinna, redoubler de fureur; se surexciter; s'exas-
pérer; s’obstiner avec rage. — S'éndinna dou traval, re-
doubler d'ardeur au travail.
Dér. du lat. Indignari, s'indigner, s'irriter.
Éndiuèl, s. m. Andouille; espèce de saucisson qui se
mange cuit, et qu'on nomme également Missoù.— V.c. m.
Dér. du lat. Edulieum, tout ce qui est bon à manger,
oubien de Indusia, indusiola, chemise, camisole, parce
que l’andouille est recouverte d'un boyau qui lui sert de
chemise.
Éndivio, s. f. Endive, chicorée potagère, qu'on mange
en salade, Chicorium Endivia, Linn. Plante de la fam. des
Composées chicoracées.
Dér. du lat. Intybum, où Intubum, m. sign.
288 ÉND
Éndoulénti, v. Endolorir; rendre douloureux, plus
sensible que de coutume. — Éstre éndoulénti, avédre lou
bras tout éndouléntà, avoir le corps, le bras tout endoloris,
soit par suite de coups ou de fatigue, soit par une cour-
bature.
Dér. de Déoure.
Éndourméire, s. m. Magicien; magnétiseur; discou-
reur qui endort son auditoire.
Éndourmi, v. Endormir, procurer le sommeil; faire
bäiller d'ennui; engourdir; flatter, amuser, caresser;
charmer, calmer une douleur. — Moun pè és éndourmi,
mon pied est engourdi. Cet engourdissement, qui com-
mence par une privation complète de sentiment dans la
partie et qui est suivi d'un fourmillement quand cette vive
impression est dissipée, vient d’une compression des neifs
qui, d'après Sauvages, gène le cours du fluide nerveux,
mais qui pourrait bien suspendre et oblitérer pour quel-
ques instants la circulation du sang elle-même, source de
toute sensation dans la fibre nerveuse. Aqud m'éndor ma
dén, ce remède calme mon mal aux dents. On dit: un
doubre éndourmi d'un jeune plant qui, sans être mort,
tarde à pousser; ce qui provient sans doute de quelque
gène dan; la circulation de la sève.
Dér. du lat. Dormire, m. sign.
Éndourmidouiro, s. f. Jusquiame, Hischiamus mniger,
Linn., ou Hanebane, plante de la fam. des Solanées. Ses
semences, administrées en fumigations, dégagent une va-
peur qui a, dit-on, le pouvoir de calmer les maux de
dent les plus douloureux.
C'est aussi le nom de la pomme épineuse, l’herhe aux
taupes : autre narcotique assez puissant de la mème famille.
— Voy. Darboussièiro.
Éndourmidouiros, s. f. plur. Toute espèce de narco-
tique, en général. — A pas bésoun dé préne las éndour-
midoäros, il n’a pas besoin d’opium, dit-on d’un dormeur
sempiternel.
Éndré, s. m. Dim. Endréché, éndréchoù. Endroit, lieu,
place; pays. — És dé moun éndré, il est de mon village, de
mon canton, de ma commune. Sèn toutes dâou mèmo éndré
nous sommes du mème pays. Dans cette acception, le mot
Éndré est relatif comme celui de pays, près de chez soi :
on ne dit: ddou mèmo éndré, que lorsqu'on est au moins
de la mème commune; à mesure que l'on s'éloigne, le
cercle de cette communauté s’élargit : à cinquante lieues,
il suffit d’être du même arrondissement ; hors de France, ou
même à l’armée. le Nimois et le Raïo! sont compatriotes.
L'éndré, l'endroit d’une étoffe, le côté opposé à l'envers.
Ce mot est formé évidemment comme le fr. endroit, du
lat. in directum où in directo, sans qu'on puisse trop saisir,
pour l’un comme pour l’autre, l’analogie ou la divergence
du sens : la dernière acception ci-dessus répond seule à
cette étymologie.
Éndura, v. Endurer, supporter avec patience; souffrir.
S'éndura, se supporter réciproquement, se plier à l'hu-
ÉNF
meur l’un de l’autre; ce qui se dit surtout en ménage. —
Po pas s'éndura, il ne peut se supporter lui-même; il est
d’une humeur si peu sociable, que, quand il est seul, il se
cherche querelle à lui-mème. Pourièi pas m'éndura dinc
aquél péis, je ne saurais m'habituer dans ce pays, j'y
mourrais d’ennui.
Dér. du lat. Durare, endurcir.
Énduran, anto, adj. Endurant, qui supporte patiem-
ment une insulle, un mauvais traitement. Ne s'emploie
guère que négativement. — És pas énduran, il est fort
irascible, très-susceptible, ombrageux.
Énduro (Mâou d'), phrase faite. Mal qui n’a d'autre
remède que la patience. Il signifie aussi : mal non dange-
reux, qui ne présente que de la douleur et n’exige que de
la patience, sans danger de mort. Aqud's dé mâou d'énduro,
c'est un mal, une douleur à laquelle il n’y a pas d'autre
remède que la patience, qu'il faut endurer, supporter
patiemment.
Énémi, Énémigo, adj. Ennemi, ie: celui ou celle qui
hait quelqu'un, qui lui veut du mal. C'est Hostis, lat.
Dér. du lat. Inimicus, ennemi personnel.
Énfachina, v. Ensorceler; jeter un sort. Par ext. puer,
exhaler une odeur fétide. C’est un superlatif de puanteur.
Dér. du lat. Fascinare, m. sign.
Énfachinaïre, aïro, s. el adj. Sorcier, jeteur de sorts;
charmeur.
Énfaïssa, v. Fagoter; lier en bottes, en fagot; disposer
toute espèce d'objets menus qu'on transporte sur les
épaules, comme de la paille, du foin, etc.
S'énfaïssa, se dit d’une poutre, d’une charpente, d’un
plancher, qui, par trop de surcharge ou faute de solidité
et d'étançons, décrivent une courbe vers le milieu. C'est
alors üne corrup. du fr. S’affaisser.
Dér. de Faï, faix, poids.
Énfaïssaje, s. m. Fagotage; action de mettre de la rame
en fagot, ou d’embotteler de la paille, du fourage; frais de
cette opération.
Énfanga, v. Embourber; jeter ou laisser tomber dans
un bourbier ; salir avec de la boue. Au fig. S'énfanga, se
mettre dans quelque sale ou mauvaise affaire, spéculation
ou entreprise. — És bièn énfanga, il est embourbé dans
une mauvaise affaire; il est perdu de dettes. És énfanga
dé milo éseus énd'un tou, il s'est enfoncé de mille écus
avec un tel, c.-à-d. il s’est endetté avec un tel jusqu'à
mille écus.
Dér. de Fango.
Énfanço, s. f. Enfance, âge de l'enfance. — On ne dit
pas Éfanço, comme dans les autres composés d’Éfan ; il est
probable que ce subst. n'existait pas dans l'origine et qu'on
l'a emprunté plus tard au fr.
Énfarina, v. Au pr. enfariner, poudrer de farine, qui se
dit mieux Énfarna. Au fig. S’énfarina, s’enticher, s'en-
fariner d'une idée, d’une opinion. — S'és énfarina d'aquélo
l'io, il a la tête tournée par cette fille : il en est éperdûment
ÊNF
amoureux. Cette expression toute figurée prend son ori-
gine dans l’idée des pales couleurs, maladie qui tire aussi
son nom d’une idée de farine, une monomanie qui donne
à la figure une couleur de farine. Ce mot est l’acception
métaphysique de Énfarna, qui ne se prend qu'au sens po-
sitif. à
Dér. de Farino.
Énfarna, v. Rouler dans la farine, comme certains
poissons, certains mets préparés pour la friture; enfariner
le visage, les mains, les habits.
Dér. du lat. Far, faris, farine.
Énféra (S'), v. S'enclouer, comme fait un cheval; se jeter
sur le fer, se percer soi-même. Au fig. se nuire; se couper,
se contredire; s'engager dans une impasse en affaires.
Dér de Fère.
Énféria, v. Entraver un cheval avec les entraves qu'on
‘ nomme Énférios.
Énfèrios, s. f. plur, Entraves qu'on met à un cheval,
lorsqu'on le laisse paitre dans un pâtis sans autre atlache,
et qui suffisent pour l’empècher de s'écarter trop loin. Cet
instrument consiste en deux colliers de fer qu'on place
aux deux jambes de devant de l'animal, un peu au-dessus
du sahot, et qui sont joints par une chaine très-courte, soit
par un boulon mobile à deux têtes qui joue entre les an-
neaux des colliers. Il est semblable à celui que les acro-
bates se mettent aux pieds dans certains de leurs exercices
sur la corde roide : il oblige les chevaux à tenir les jambes
de devant rapprochées et à sauter à pieds joints, quand ils
veulent changer de place.
Dér. de Fère.
Énférnal, nalo, adj. Infernal; de l’ enfer; qui appartient
à l'enfer; diabolique.
Énfiala, v. Enfiler une aiguille.
Dér. de Fiou. .
Énfialousa, v. Charger une quenouille de matières à
filer.
Ce mot, portant dans sa contexture le subst. fialouso, et
étant actif, a pour régime direct la matière à filer.
Dér. de Fialouso.
Énfièira, v. Conduire à la foire; introduire au champ
de foire le bétail ou la marchandise qu’on a à vendre.
Dér. de Fièiro.
Énfioula, v. Enfiler, mais seulement dans le sens de
tromper, duper; engager dans une affaire douteuse.
Dér. de Fiou.
Énfiouqua (8). S'enflammer d’amo
feu; se passionner.
_ Dér. de Fio.
Énfougna, ado, adj. Rechigné; boudeur; grognon; qui
fait triste mine.
Dér. de Fougna.
| Énfounga, v. Enfoncer; pousser, mettre, faire pénétrer
au fond, plus avant; forcer une porte, une serrure. — On
dit d’un faux brave, d'un fanfaron : Énfoungo las portos
; de colère; prendre
ENG 289
douvèrtos, c’est un enfonceur de portes ouvertes, c'est un
pourfendeur de naseaux.
Dér. du lat. Infundicare, m. sign.
Énfourna, v. Enfourner; mettre le pain au four. Au
fig. avaler gloutonnement; remplir ses poches.
S'énfourna, s'engouffrer ; s’introduire, s'engager dans.
— À l'énfourna sé prén lou pan cournu, prvb., à mal en-
fourner, on fait les pains cornus. L'douro s'énfourno din
la chiminèïo, le vent s’engouffre dans la cheminée.
Dér. de Four.
Énfourqua, ». Enfourcher; piquer, embrocher avec une
fourche; monter à cheval.
Dér. de Fourquo.
Énfourquaduro, s. f. Enfourchure d'un arbre, l'angle
du tronc où se divisent les maîtresses-branches; enfour-
chure d’un pantalon; enfourchure du corps humain, le
sommet de l'ouverture de compas que forment les jambes.
Énfu (S’), 3m° pers. sing. indic. prés. du v. Énfuÿà (S').
Énfuji (S'), v. S'enfuir, prendre la fuite; déguerpir;
s’esquiver.
Dér. du lat. Effugire, m. sign.
Énfuma, v. Enfumer; noircir avec de la fumée; rem-
plir de fumée, comme on fait pour le terrier d’un renard;
entourer de fumée, comme pour un essaim d’abeilles.
Dér. de Fun.
Énfurouna, ». Transporter de colère; irriter à l'excès,
rendre furieux ; animer contre quelqu'un.
Dér. du lat. Furor.
Éngabia, v. Encager: mettre en cage; par ext. empri-
sonner; détenir en charte privée.
Dér. de Gabio.
Éngaeha, v. Regarder dans. — On dit : Éngacho,
regarde, de quelque chose dont on montre l’intérieur ou
qu'on fait voir de près; Agacho, pour quelque chose qu'on
adevantsoi; Arégacha, regarder derrière. — Voy. Agacha.
Éngaja, v. Engager, mettre en gage; promettre par en-
gagement; obliger; enrôler un soldat.
S'éngaja, s’obliger ; hypothéquer ses biens; promettre;
prendre volontairement du service dans les armées. —
Éngaja sa mostro, mettre sa montre en gage, emprunter
sur ce nantissement. Éngaja uno clou din la saraïo, em-
barrasser une clé dans la serrure. S'éngajè pér soun frèro,
il s’obligea pour son frère; il lui servit de caution hypo-
thécaire.
Dér. du lat. Vas, vadis, caution, qui a fait dans la
basse lat. Vadium, d'où Gaje.
Éngajantos, s. f. plur. Espèce de manchettes que por-
taient les dames sous Louis XV et qui étaient placées au
coude, les manches de la robe ne descendant pas plus bas.
, dans l’idée du peuple, le nec plus ultrà de la grande
toilette. Lorsqu'elles parurent, on leur donna en fr. le
nom d'Engageantes, comme la plupart des modes de l'épo-
que, à qui on prêtait une portée morale dans l'idiome de à
galanterie. Le nom fr. a disparu depuis longtemps :
37
ÉNG
lang. l'a conservé, et aujourd’hui peut-être bien des per-
sonnes qui se servent journellement du mot et de la chose,
seraient fort embarrassées de donner l’origine de cette ex-
pression et la description de cette mode.
Éngambo, adj. de tout genre. N'est qu'une traduction
du fr. ingambe, employée seulement comme sobriquet et
par antiphrase. Le caractère narquois et gaulois se montre
toujours mème dans les mots en apparence les plus insi-
gnifiants.
Éngana, ». Tromper, abuser, duper; ou mieux : rogner
la portion. C’est proprement le tort que fait une nourrice
quand elle devient enceinte avant d'avoir sevré son nour-
risson : elle fait tort aux deux enfants à la fois, qui se
rognent réciproquement leur portion. On dit de l’un et de
l’autre: Soun énganas, et ces enfants viennent rarement
à bien, ou du moins ils restent malingres et étiolés. —
S'és pas éngana, il ne s’est pas oublié dans un partage; il
s’est adjugé la plus grosse et la meilleure part. — L'a én-
gana, il l’a dupé. Aoumén nous énganén pas, je vous le
recommande, ne nous trompons pas à notre préjudice.
Dér. de l’ital. Ingannare, tromper, frauder.
Énganaïre, airo, adj. Rogneur de portion; écornifleur ;
trompeur; hypocrite.
Éngâoubi ou Gâoubi, s. ». Maintien ; tournure du corps.
Au fig. plus usité, esprit; adresse; savoir-faire. — N'a pas
gés d’éngâoubi, il est gauche; maladroit; sans savoir-faire.
Empr. probablement du fr. Galbe.
Éngâoubo, s. f. Pierre à foulon; pierre à détacher les
étoffes et qui agit en poudre comme absorbant: les dé-
graisseurs s’en servent pour enlever les taches.
Éngâouta, v. Mettre en joue un fusil; appliquer contre
la joue. Par ext. donner un soufflet.
Dér. de Géouto. Û
Éngarafata (S’), v. S'emmitoufler; se surcharger la
tête et le cou, les entourer comme font les personnes prises
d'un rhume, d’un torticolis, ou de fluxion.
Dér. de l’ital Calafatare, formé du gr. Palapaxeu, cal-
fater un bâtiment, parce qu'en s’emmitouflant on ferme
toutes les voies ouvertes à l’air, comme le calfat toutes les
voies ouvertes à l’eau.
Éngarbièira, v. Dresser les gerbes en gerbier; dresser
un gerbier.
Dér. de Garbièiro.
Éngarouna, v. Éculer ses souliers; en affaisser, en ava-
chir les quartiers, de manière que le talon est déboité;
déchausser quelqu'un en marchant sur ses talons.
S'éngarouna, faire une mauvaise spéculation, une fausse
démarche; se mettre dedans.
Éngavacha (S’),v. Étoufier; s’étrangler pour avoir avalé
une arète ou autre chose qui obstrue le gosier, un simple
fétu ou une goutte d’eau qui entre par la trachée-artère;
s’engouer, s'engorger, en parlant d’un tuyau qui s'embar-
rasse, se remplit, s'obstrue de matières qui empêchent
l'écoulement du liquide. — Éngavacha uno cldou, engager
290
ÉNG
une clédanssaserrure, sans pouvoir la faire jouer, ni laretirer.
Dér. de Gavaï, en dial. provençal, jabot des oiseaux
granivores, gosier, gorge, gésier; formé lui-même très-
probablement du lat. Cavus, creux, profond.
Éngéndra, ado, adj. Engendré; procréé, produit. —
Dans ce sens, ce mot est admis en languedocien; mais il
est plus usité comme dérivé de Géndre. — Aquél home és
bièn mâou éngéndra, ce pauvre homme n’est pas rs
en gendre.
Éngipa, v. Plaquer du plâtre ou du mortier contre un
mur avec la truelle; fouetter un mur, l’enduire au balai : ce
qui produit l’enduit qu’on nomme unorustiquo ( V. c.m). Par
ext. éclabousser; couvrir de boue, d’eau. Au fig. soufileter.
Dér. du lat. Gypsum ou du gr. Tüÿos, plâtre.
Éngipado, s. f. Éclaboussure; boue qui rejaillit sur
quelqu'un ou sur quelque chose.
Énglouti, v. Bosseler; bossuer un vase en métal quel-
conque, un ustensile, un chaudron:
Dér. du roman Clot, fosse, trou.
Éngouïssa, v. Causer du chagrin ; donner des angoisses;
donner du souci.
Éngouisso, s. f. Angoisse; afiliction; douleur amère
d'esprit et de corps; gène de l’âme; dure nécessité.
Dér. du lat. Angustia.
Éngouissoùs, ouso, adj. Angoisseux; qui se plaint
toujours; qui aime à se plaindre; qui soupire sans cesse.
Éngouli, v. Avaler goulument; engloutir; boire d’un
seul trait.
Dér. du lat. Gula.
Éngoulidoù, s. m. Gouffre; tourbillon qui forme un
entonnoir renversé, provenant d'une communication in-
férieure au niveau de l’eau avec un contre-courant. Au
fig. large gosier, grand avaloir.
Éngounsa, v. Enfoncer; engouffrer; engoncer en parlant
‘d’un habit, d’une robe trop montants, dans lesquels le cou
s'enfonce et qui gène les mouvements.
Dér. du lat. Abscondere, cacher.
Éngourdi, v. Engourdir; causer une pesanteur dans uné
partie musculaire du corps qui le prive de mouvement ou
de sentiment. — S’applique aussi au moral.
Emp. au fr. m. sign.
Éngourga, v. Engorger ; obstruer le passage d’un liquide,
un canal, un tuyau; faire engorger un moulin.— Un
moulà s'éngourgo, lorsque la fuite a un niveau trop élevé,
soit par l'élévation des eaux, soit par les dépôts de’ sable
au-dessous qui diminuent sa chute et gênent le mouve-
ment de sa roue. — Voy. Patouia.
Dér. de Gour, du lat. Gurges.
Éngourgoubia (S'), v. Se recroqueviller; se replier sur
soi-même, comme fait le charançon du blé, lou Gourgout,
dans son alvéole.
Éngraï, s. m. Bétail qu'on engraisse pour la boucherie.
En terme d'éducation de bétail, on distingue l’Engraï de
la Nourigo : celle-ci est le bétail que l'on entretient pour
ENG
la multiplication de l'espèce; celui-là le bétail que l'on
engraisse pour le vendre quand il est parvenu à son point.
— És coumo un por à l'éngraï, il en a à gorge que veux-tu
comme un cochon à l'engrais.
Dér. de Graïsso.
Éngraïssa, v. Engraisser; rendre gras, c.-à-d. donper
aux animaux une nourriture qui les engraisse; aux terres,
des engrais qui les fertilisent; oindre avec de la graisse;
graisser.
* S'éngraïssa, s'engraisser; prendre de l'embonpoint; s'ar-
rondir; s'enrichir. — Éngraïssa lou béstidou, engraisser le
bétail. Éngraïssa las rodos, oindre l’essieu d’une voiture.
S'éngraïssa las babinos, s'oindre les lèvres, c.-à-d. faire
chêre-lie. L'id dâou méstre éngraïsso lou chival, prvb.,
allusion à la fable de l'œil du maitre. Éngraïssa lou
martèl dé la porto, graisser le marteau, graisser la patte
aux valets pour avoir entrée auprès du maitre. Éngraïsso-
té, pérlé : aqui' n aménloù, engraisse-toi, avare, voilà un
denier ; ou engraisse-toi goinfre, voilà une amande : pbr.
prvb. qu'on emploie lorsqu'il s'agit d’un dédommagement
infime à une perte éprouvée. — Voy. Aménloi.
Dér. de Graïsso.
Éngrana, v. Faire moudré son grain. — Lou prémiè
qu'és dou mouli éngrano, le premier au moulin engrène :
prvb. qui renferme une leçon d'égalité, et qu'on emploie
lorsque quelqu'un veut user d'un privilége pour avoir la
primauté ou la priorité.
On dit aussi : Éngrana lou béstidou, donner du grain au
bétail, soit avoine, soit blé, soit maïs, ete.; çe qui le
rend gourmand et l'empêche de trouver goùt à la nourri-
ture ordinaire. Et encore : Lou moulà s’éngrano, lorstque la
quantité d'eau n'est pas suffisante pour faire tourner la
roue avec la vélocité requise, et que le blé tombant de la
trémie se ramasse sous la meule, sans pouvoir être broyé.
Cette expression s'emploie au fig. pour se plaindre de la
soif à table et demander à boire: Zou mouli s'éngrano,
c.-à-d. le solide a besoin de liquide.
S'éngrana, se laisser gagner par la vermine. — Éngrana
dé manjanço, couvert de poux. Zè éngrana dé cinzes, lit
infecté de punaises.
Dér. de Gran ou de Grano.
Rayrhenfigua, v. Égratigner. — Voy. Engrdouta, m
sign.
-Dér. dl'spapuiliinnr, m. sign.
Éngrâoufignaire, airo, adj. Égratigneur ; qui égratigne ;
qui fait des égratignures. — Cette forme de l’adj. est plus
usitée que celle de Éngrdoutaïre, qui n’est guère admis,
tandis que le verbe dont il est formé, est pour le moins
aussi souvent employé que Le provençal et
l'espagnol, dans le même mot, suppriment la “es -
explétive Én.
= Éngrâonta, ». Égratigner; déchirer légèrement la gran
avec les. ex das une épingle ou tout autre objet
ENJ 291
Dér. probablement de l’allem. ÆKratzen, gratter, ou
peut-être du gr. Ayxihos, crochu, recourbé.
Éngrâoutado, s. f. Égratignure, déchirure faite avec les
ongles.
Éngrava, v. Couvrir de gravier. — Voy. Agrava.
Éngruna, v. Mettre en pièces, briser de coups; assom-
mer; éreinter, — Uno bouto éngrunado, une futaille
dépecée, dont les douves sont déjointes et tombent en
pièces. ;
Évidemment, les acceptions de ce mot sont le figuré de
égrener ou arracher, séparer les grains du raisin ou d’un
épi de blé, ce qui se disait autrefois Désgruna et aujour-
d'hui Déséngruna.
Dér. de Grun.
Énguéfia, fiado, adj. Difforme; contrefait; qui a les
membres noués.
Énguën, s. m. Onguent, médicament externe, mou,
onctueux. — Enguén gris, onguent gris, onguent mer-
curiel.
Dér. du lat, Unguentum, m. sign.
Éngusa, v. Enjoler; cajoler; attirer, tromper par des
cajoleries, des séductions.
Dér. de Gus.
Éniassa, ». Mettre des papiers en liasse; accoupler du
menu linge en le donnant à blanchir, pour qu'aucune pièce
ne s’égare.
Formé du fr. Liasse.
Énjiméra, v. — Voy. Énjiméri.
Énjiméri, v. Mieux que Énjiméra. Rechigner; enticher;
redoubler l’obstination de quelqu'un.
S'énjiméri, s'obstiner; rechigner; agir par caprice, avec
mauvaise humeur. — Agud faï pas qué l'énjiméri, cela ne
fait qu'accroîitre son humeur et son obstination, Lou tén
s'énjiméris, le temps se brouille, redouble de bourrasque.
Dér. de Jimère.
Énjin, s. m. Adresse des mains; dextérité; génie par-
ticulier qui s'attache aux ouvrages purement manuels, et
qui consiste à trouver toujours les meilleurs moyens et un
remède à tout. Il ne s’applique point à l'adresse d'esprit,
à la subtilité.
Dér. du lat. Ingenium, esprit, génie.
Énjinquoüs, ouso, adj. Dim. Énjinquousé. Adroit des
mains ; doué de cette espèce de génie qui s'applique exclu-
sivement aux ouvrages des mains. — Si souvent le lang.
dans les mots ne bravait l'honnêteté, nous ne citerions pas
le prvb. très-énergique et fort pittoresque : Énjinquoùs
coumo lou quiou d'un por qué sé baro sans couréjoù; mais
par accommodement avec le devoir de tout dire, nous ne
traduisons pas.
Énjouliva, ». Enjoliver; rendre plus joli ou seulement
| joli.
Empr. au fr.
_Énjuèla, v. Enivrer avec de l'ivraie, qui, mêlée dans le
pain.à une assez forte dose, porte à la tête. C'est un pro-
292 ÉNL
cédé’ employé, dit-on, par les maquignons, qui enivrent
ainsi, ou plutôt étourdissent les chevaux rétifs ou vicieux
et les rendent par là plus calmes et comme frappés de
stupeur : il leur suffit pour cela de mêler de l'ivraie à
l'avoine. Au fig. étourdir; assoupir.
Dér. de Juël.
Én-jun, adv. À jeun; sans énergie; sans force ni cou-
rage. — Soui éncaro én-jun, je suis encore à jeun, je n'ai
rien mangé de la journée.
Dér. du lat. Jejunium, jeûne.
Én-laï, adv. de lieu. En delà; de ce côté-là. — Fasès-
vous én-laï, rangez-vous; faites place; poussez du côté
opposé à celui-ci. D'aïc)'n-laï, contract. de Aïcè én-laï, à
partir de ce jour; dorénavant. Un viro-t'en-laï, un soufllet.
Dér. du lat. Ilac, par là.
Énlamoun, ad». de lieu. Là-haut, de ce côté. — Voy.
Amoun.
Énlamoundäou, adv. de lieu. Le mème que le précé-
dent Énlamoun.
Énlapa, v. Embourber; enfoncer dans la vase, dans la boue,
Dér. de Lapo.
Énlaval, adv. de lieu. Là-bas; de ce côté. — Voy. Aval.
Énléva, v. Enlever; lever en haut; emporter; dérober;
ravir. — Lou diable t'énlève! ou par contract. simplement :
T'énlève! Le diable t'emporte ! Peste!
S'énléva, enlever une fille, ou plutôt enlever un garçon.
— S'és énlévado émb'un tâou, elle a décampé avec un tel;
elle a consenti à un enlèvement avec un tel. Ce verbe
s'emploie ainsi neutralement pour faire disparaitre l’idée
d’un rapt, d’après un préjugé assez enraciné dans les classes
populaires, qui tient sans doute à quelque loi du moyen-
âge fort sévère à cet endroit. Il est de tradition parmi le
peuple que, pour éviter l'accusation de rapt au complice
masculin, il faut que la fille déclare devant témoins au
moment de la fuite que c’est elle qui enlève son amant; ce
qu’elle fait par cette formule généralement adoptée : A
vdoutres vous én souvèngo qué iéou énlève un téou, soyez
témoins que c’est moi qui enlève un tel. Tout cela serait
vain, d’après le code pénal (car, malgré la formule, il n’y
a pas moins rapt), s’il y avait violence ou menaces anté-
rieures à cette déclaration, ou si la fille séduite n’a pas
atteint l’âge de discrétion. D'autre part, quand l’enlevée
est maitresse de ses actions, ou d’âge à en connaître toute
la portée, cette forme n’a rien d’obligatoire; car ce serait
à l'action publique à prouver la violence réelle ou morale
qui constitue le rapt des adultes, et quand il ÿ a accord
entre les parties, la morale seule en souffre, la vindicte
publique reste sourde et aveugle.
Ce mot, au reste, n’a aucune autre des acceptions du fr.
enlever: le lang. ne le lui emprunte que pour ce seul
usage dans les deux circonstances citées.
Énliga, v. Embourber, enfoncer dans la vase : le même
en ce sens que Énlapa (V. c. m.). Il signifie aussi: jeter
du limon; couvrir, remplir un objet de limon. —Voy. Aliga.
ENQ
Ce dernier mot signifie répandre la vase, le limon sur la
surface; celui-là veut dire en remplir un lieu, un objet
creux et profond. Une inondation atigo un pré; elle énligo
un puits, un fossé, l’intérieur d'une maison.
Dér. de Ligo.
Én-nâou, adv. de lieu. En haut; vers la contrée haute;
du pays des montagnes. — És d'én-ndou, il est du côté
des montagnes, il est des hautes Cévennes ou de la Lozère;
d’un pays élevé ou seulement au nord de celui de l’inter-
locuteur.
Dér. de Néou, haut.
Énnégrési, v. Noircir; salir de noir; obscurcir ; assom-
brir ;.barbouiller de noir. Au fig. noircir la réputation. —
Lou tén s'énnégrésis, le temps s’obscurcit, il devient noir.
Dér. de Mégre.
Énnévouli (S’), v. Se charger de nuages; s rchebtittles
devenir nébuleux, sombre. — Se dit du temps.
Dér. de Nivou.
Én-odi, phr. faite, qui s'emploie quelquefois substan-
tivement : Mé vénès én-odi, vous m’ennuyez; la car mé
vèn én-odi, la viande m'ennuie, me dégoûte; j'ai du rebut
pour elle. L'én-odi faï véni las cabros nècios, l'ennui fait
perdre la tête aux chèvres; sorte de prvb. qu'on cite pour
exprimer que l'ennui finit par rendre fou quand il se pro-
longe.
Dér. du lat. In odium, en haine.
Énqué, phr. faite, qui se traduira mieux par des exem-
ples que par une définition, comme tous les idiotismes. —
S'ère énqué vous, si j'élais vous, si j'étais à votre place.
Cette locution ne s'emploie jamais qu'avec cette formule et
précédée du verbe S’ère; et toujours à la 4re pers. sing. de
l'indic. prés. Lorsque le régime est le pronom é/ ou élo,
éles ou élos, on fait suivre énqué de l’art. dé: S'ère énqué
d'éles; et cela par un simple motif d’euphonie. Il en est de
mème pour quelques substantifs tels que dans ces phrases :
S'ère énqué dé moussu tdou; dé moun pèro. L'usage seul
détermine cette différence, qu'aucune exigence euphonique
d’ailleurs ne motive, au moins dans la prose.
Én-quèsto, phr. faite. En quète, en poursuite, en re-
cherches.
Dér. du lat. Quæsitum, supin de Queærere, chercher. -
Énquèsto, s. f. Enquête; recherche judiciaire; infor-
mation.
Énquicon ou Énquoucon, ou Énticon où Éntoucon,
ado. de lieu. Quelque part; en quelque lieu; en un certain
endroit.
Énquicon-mäï, quelque autre part; ailleurs.
Dér. du lat. Quocumque, m. sign.
Énquiè, s. =. Trou de la canelle ou du robinet d'une
futaille ou d’une cuve.
Dér. de Énguo.
Énquiè, èto, adj. Dim. ÆÉnquièté, Énquiètoù. Inquiet;
chagrin; d'humeur morose; grognon; qui aime à se
plaindre. — Énquiè coumo un ca borgne, prvb. Inquiet
ENR
comme un chat hong, ce qui veut dire aveugle. — Voy.
Borgne.
. Dér. du lat. Inquietus, inquiet, agité.
Énquiéta, v. Inquiéter; donner du souci, du chagrin,
de la sollicitude,
S'énquiéta, se chagriner; prendre de l'humeur; se mettre
en colère. — Faïre énquiéta, donner de l'humeur; faire
mettre en colère.
Énquiétudo, s. f. Inquiétude ; chagrin; humeur. — Ai
uno bèlo énquiétudo, anas; allez, j'ai un violent motif de
chagrin; je suis bien en souci.
Énquo, désinence adjective féminine. — Ce suffixe avait
sans doute pour masculin Énc, qui n'est pas resté avec
cette forme dans notre dialecte, qui n’admet dans aucun
mot le C final. Aujourd'hui, ce masculin est Én, Ën, qui
marque, en s'ajoutant au radical, à un nom de lieu, le
voisinage, l'habitation, l'appartenance, et que des analogies
rapprochent des autres suffixes dont il a été traité. — Foy.
Én, En, suffixes. Énquo au féminin adjective les noms
dans le même sens : son origine et ses transformations sont
expliquées dans l’article auquel nous renvoyous.
Énquo, s. f. Canelle, d'une cuve d’un tonneau, qui n'est
qu’un tube fermé par une broche. — Ana coumo uno
_énquo, aller fréquemment à la selle, avoir le dévoiement;
aller comme un robinet. Lou faï ana coumo uno énquo, il
le mène grand train; il ne le ménage pas; il le plie à ses-
moindres volontés. On dit aussi : Vaï.coumo uno énquo,
d'un outil, d’un appareil, d'un individu même, qui fonc-
tionnent parfaitement, qui font vite et bien. ,
Énquoucon, adv. de lieu. — Voy. Énquicon.
Énraja, ado, adj. Enragé; qui est atteint d’une douleur
extraordinaire, d'un mal violent, d'une colère furieuse. —
Dans le sens de rage, hydrophobie, on dit mieux, Fo:
un chi fol, un chien enragé: on ne se servirait pas de
Énraja, qui est une acception française.
Dér. du lat. Rabies, rage.
Énrâoumassa, v. Enrhumer; causer un rhume.
S'énrdoumassa, s'enrhumer, gagner un rhume.— On dit à
un enfant qui n'ôte pas son chapeau devant une personne
à qui il doit du respect : As saïqué pdou d’énrdoumassa
tous pésouls? tu crains sans doute d'enrhumer tes poux ?
Dér. de Réoumas.
Énrâouqua, v. Enrouer, causer de l'enrouement.
+ Dér. de Rdou, ”
Énraqua (S'), v. Se dit du vin qui pour avoir trop cuvé
dans le marc, prend l’Apreté et le goût de la rafle; et aussi
de la canelle d’une cuve qui est obstruée, ou bouchée par
la rafle, faute d'avoir mis un filtre quelconque à l’inté-
rieur. Au fig. S’énraqua, s'enivrer, 8e gorger de vin. —
Éstre énraqua dé quicon, être fatigué, dégoté de quelque
chose ; en avoir par dessus les yeux.
Dér. de Raquo.
Pre (S'}, v. Se raidir; devenir raide.
de Réde.
ÉNR 293
Énréga, v. Semer, planter à raies ou en sillons faits à
la houe une planche de jardin. — Énréga dé favidous ,
semer des haricots en raies. ,
S'emploie aussi pour dire : tracer le premier sillon, la
première raie. Par ext. commencer, entreprendre une
œuvre, un labeur, une tâche. — Énréga un coumplimén,
enfiler un compliment.
Dér. de Régo.
Énrégaire, s. m. Ouvrier qui exécute l'œuvre ou l'action
du verbe précédent.
Énrégistra, v. Enregistrer, — Cela ne se dit point des
actes de l'administration de l'enregistrement, qu'on nomme
Contoronle, et Contourounla; mais bien de l'inscription
sur les registres de l'état civil. — S'és pas trouva énré-
gistra, sa naissance n'a pas été constatée sur les registres
de l'état civil.
Énréia, v, Piquer, blesser une bête de labour avec la
pointe du soc.
Dér. de Réïo.
Énréssa, v. Mettre en chapelet les oignons ou les aulx.
Par ext. appareiller, ranger régulièrement et par rang de
taille ou de dimension.
Dér. de Rès.
Énrougna, v. Donner, communiquer la gale. —
Un troupèl énrougna, uu troupeau atteint, infecté de la
gale.
Dér. de Rougno.
Énrounza (S'), v. S'embarrasser, s'empêtrer dans les
ronces. — La différence de ce mot avec S'arounza est
que celui-ci signifie : être accroché par une ronce, être la-
bouré par une épine de ronce; tandis que S'énrounza
suppose un champ de ronces dans lequel on est pris et
embarrassé.
Dér. de Arounsze.
Énruga (S'), v. — 11 existe un préjugé populaire que
représente ce verbe, qui n’a pas de correspondant français,
et qu'il est nécessaire de traduire et d'expliquer par les
faits.
Lorsqu'une personne a la peau couverte instantanément
d’une éruption de petits boutons cuisants et à forle déman-
geaison causée par une ébullition quelconque du sang, on
suppose qu'elle provient de la déjection d'une sorte de
chenille, animal microscopique qui vient sur les chônes,
déjection qui atteint les personnes passant sous l'arbre.
Cette croyance a toute la fixité et l’obstination d’un théo-
rème, el les paysans se moquent de tous les raisonne-
ments contraires qu'on leur oppose. On a beau leur dire:
que l'individu atteint de ce mal n’a point passé sous un
chène; que les chenilles n'ont qu'une vie très-courte, el
qu'en toute saison elles ne peuvent exister; qu'il est
absurde de supposer que des animaux puissent se donner
le mot pour répandre à la fois leurs déjections sur les
passants, et plus absurde encore qu'ils puissent les répan-
dre constamment, de manière à ce que le passant en
294 ÉNS
reçoive l'averse dans la seconde qu'il met à parcourir le
diamètre de l'ombre d'un arbre. On a beau leur faire
observer que quand mème tout cela serait vrai, la déjec-
tion ne pourrait agir que sur les parties du corps laissées à
découvert et en contact immédiat avec elle, tandis que les
éruptions dont s’agit se produisent sur les parties les plus
couvertes, comme l’épine dorsale, le ventre et les cuisses ;
tout cela ne peut en rien altérer la crédulité de ces bonnes
gens. IT faut remarquer ici que les gens de la campagne
veulent voir à tout une cause naturelle ou surnaturelle ; du
moment que leur intelligence ne leur montre pas immé-
diatement cette cause, ils s'en créent une fantastique
plutôt que d’avouer leur ignorance ou de s’en rapporter
aux définitions de la science, chose pour laquelle ils ont
toujours une extrême défiance. C'est ce prétendu effet de
la chenille qu'on appelle Énruga : mé souï énruga, j'ai
une éruption de boutons. ;
Dér. de Arugo.
Énsabla, v. Recouvrir de sable; déposer une couche de
sable. — C'est ce qui arrive souvent aux terrains exposés
à la submersion des rivières et des torrents. Lorsque la
crue est moyenne; elle ne dépose sur les terres riveraines
qu'une légère couche de limon et les bonifie; le même
résultat s'obtient encore, même dans les grandes crues,
lorsque les bords sont fourrés et garnis d'épaisses lisières
d’oseraie, parce que le courant étant alors brisé par ces
obstacles, les sables plus pesants que le limon et qui occu-
pent une zone inférieure dans le courant, sont obligés de
s'arrêter ou de se laisser entraîner dans le courant prin-
cipal, tandis que les oseraies laissent pénétrer les eaux
chargées de particules plus grosses et plus légères qu'elles
y déposent en se retirant.
Dér. de Sablo.
Énsaja ou Assaja, v. Essayer, tenter, éprouver; faire
l'essai d’une chose; tâcher; se disposer à faire; essayer un
vêtement.
En ital. Assagiare, m. sign.
Énsalado, s. f. Salade; mets composé de légumes ou
d'herbes assaisonnées avec du sel, de l'huile et du vinaigre.
— Il se dit à la fois comme en fr. de la salade assaisonnée
et de tout légume qui sert à la composer. Cependant,
lorsque l'on prononce ce mot d’une manière absolue et
sans l'accompagner du nom de l'espèce, il ne s'applique
guère qu'aux différents genres de chicorée ou de laitue.
On dira très-bien à une personne qui tient à la main une
chicorée où une laitue : Pourtas aquè uno poulido énsalado;
mais si c’est du céleri, du cresson, etc., il faut ajouter le
nom de l'espèce. Tria, éspoussa, garni, vira l'énsalado,
éplucher, égoutter, assaisonner, tourner la salade.
En ital. Insalata, m. sign.
Énsaladiè, s. m. Saladier, espèce de panier en fil d'ar-
chal pour égoutter la salade. — On dit aussi : Souï énsa-
ladiè, énsaladièiro, adjectivement, pour : j'aime beaucoup
la salade.
ÉNT
Énsannousi, v. Ensanglanter; tacher, souiller, salir de
sang.
Dér. de Sang. à
Énsaqua, v. Ensacher; mettre dans des sacs; tasser;
presser en secouant le sac. — Énsaqua lou bla, mettre le
blé en sac. Énsaqua lou sa, soulever le sac et le secouer
quand il est presque plein pour que le.contenu s’entasse
et tienne moins de place. Ænsaqua lou boudin, la stou-
cisso, ete., farcir le boyau du boudin, de la saucisse, etc.
Énsaqua lou dina, faire de l'exercice pour abattre les
morceaux dans l'estomac, c.-à-d. pour faciliter la digestion
après diner. És tout énsaqua din sas braños, il a la taille
engoncée, entassée, lourde, épaisse. Agad's bla-t-énsaqua,
farino môouto, loc. prvb. C’est marché conclu; c’est chose
entendue ; c'est comme si vous teniez.
Dér. de Sa.
Énsarios, s. f. plur. Double cabas en sparterie. Sr à
Embiassos.
Dér. du lat. Sarcina, paquet, bagage. :
Énségna, v. Indiquer; montrer; apprendre; mais non
dans le sens du lat. Docere, enseigner. — Énségna-mé lou
cam, indiquez-moi, montrez-moi le chemin.
Dér. de la bas. lat. Insignare, faire une mvr-mnibes
signe, du lat. Signum.
Énségno, s. f. Enseigne; marque, indice; atiesté
écriteau d’un magasin, d’un cabaret, d’une auberge, etc.
Énsémble ou Énsém, adv. Ensemble; de compagnie,
l'an avec l’autre, les uns avec les autres.
Le premier n’est pas bien indigène, mais il est fort reçu,
le second est plus pur.
Dér. du lat. Insimut, m. sign.
Énsible, s. m. Ensouple; rouleau autour duquel est
roulée la chaine d’une étoffe qu’on tisse.
Dér. de la bas. lat. Insabulum, m. sign
Énsin ou Éusindo, adv. Ainsi; de cette manière; cela
étant. — Il ne signifie pas : ainsi que.
Formé de deux adv. lat., Sie et Inde, qui ont à peu près
la mème portée en ce sens.
Énsourcéla, v. Ensorceler; jeter un sort. — Aquélo
fénno l'a énsourcéla, cette femme lui a jeté un charme; il
est amoureux d'elle comme si elle lui avait donné un
philtre d'amour.
Dér.-de Sourciè.
Énsourda ou Assourda, v. Assourdir; rendre sourd à
force de crier, de faire du bruit; abasourdir. — Hrapti
sourdes, tu m’ennuies de tes propos.
Dér. de Sour.
Énsupourtable, ablo, adj. imsupportable sens:
intolérable; assommant.
Empr. au fr.
Énsuqua, v. — Voy. Assuqua.
Énta, v. Greffer; faire l'opération de la greffe.
Dér. du lat. Intùs, dedans : mettre la greffe ou scion
d’un arbre dans un autre.
ENT
Éntancha;, v. Dépêcher; hâter; avancer un ouvrage. —
S'éntancha, se dépècher; faire quelque chose avec hâte,
avec dextérité; se presser de finir un ouvrage, un travail.
Éntanchén, dépèchons-nous; avançons notre ouvrage. La
bouto s'éntancho, le tonneau sera bientôt au bas; on se
presse de le vider. Lou vi éntancho lou traval, le vin fait
avancer l'ouvrage, c.-à-d. qu’en donnant du vin aux
ouvriers, on leur donne du cœur et du zèle. S’éntancho
dé plôoure, il-pleut dru, ou la pluie redouble.
Formé sans doute du gr.'Ev et Toy, vite, promptement.
Éntanche, s. m. Ne s'emploie qu'à l'ablatif d'éntanche,
et seulement sous forme négative. — Aqud's pa’n traval
d'éntanche, ce n'est pas un travail qui puisse marcher
rondement, qu'on doive mener trop vite : c'est un ouvrage
minutieux.
Éntanchivou, adj. des deux genres et des deux nom-
bres. Il a à peu près la même signification que d'éntanche.
— Aquéles péses soun pas énlanchivou, ces pois sont menus
et longs à écosser : on avance peu l'ouvrage.
Éntavéla, v. Empiler; mettre en pile; ranger en couches
superposées, comme cela se fait pour du bois à brüler, des
fagots, des gerbes, des bottes de foin, etc.
Dér. de Tavël.
. Énte, s. m. Greffe d'un arbre; le scion qui a été greffé;
le point de soudure qui reste sur la branche greffée et
qu'on y remarque longtemps après l'opération.
Pour l'étym. v. Énta.
Éntéména, v. Entamer; Blain faire une écorchure,
une entaille, une blessure ; commencer à couper, à diviser;
entreprendre, commencer. — Éntéména la tourto, entamer
la miche de pain. Éntéména uno bouto, mettre un tonneau
en perce. A moun talou éntéména, j'ai une écorchure au
talon. Dé qu'éntéménan pret Quel travail entreprenons-
nous demain ?
Dér, du gr. Évréuvew, couper, tailler, dépécer.
Énténciou, s. f. Ce mot, qui est fr., n’est employé que
. dans le sens des phrases suivantes : Aï énténciou d’un bé,
j'ai intention d'acheter un domaine. Mais ici le langue-
docien est plus explicite que le français; il signifie: j'ai
un domaine en vue, et non l'intention générale et indéter-
minée d’une pareille acquisition. S'a énténciou d'aguélo
l'io, [éou qué s'anounce, s’il a réellement intention d'épou-
ser cette fille, il faut qu'il se déclare.
Énténdémén, s. m. Connivence; collusion; entente de
deux fripons pour duper quelqu'un. — Y-a d'énténdèmén
dou jo, il y a quelque dessous de carte : cette phrase se
dit par catachrèse de toute autre affaire que le jeu.
_ Dér. de S'énténdre.
Énténdre, v. Entendre; ouir; comprendre; deviner.
= S'énténdre, s'entendre; être d'accord: convenir; être de
connivence comme deux larrons en foire; s'appliquer à.
—Pér énténdre dire; pour l'avoir entendu répéter. Sé y-éntén
prou, il a assez de savoir-faire, il s'y entend assez bien.
Dér. du lat. ntendere, considérer avec attention.
|
ÉNT 295
Énténdu, udo, adj. Entendu, intelligent; savant et
habile dans son art; qui voit bien les choses.
Éntéra, v. Enterrer; mettre en terre; ensevelir, inhu-
mer; cacher en terre; enfouir; couvrir de terre. — Aguél
doubre és éntéra jusqu'âou cafour, cet arbre est enterré
jusqu’à l'enfourchure des branches. Moun pèro m'éntérara,
mon père vivra plus longtemps que moi. Vène dou cabaré,
Jjogue dé t'éntéra, allons au cabaret, je parie de te mettre
sous la table.
Dér. de Tèro.
Éntérado, s. f. Convoi funèbre; inhumation ; funé-
railles. — L'éntérado est proprement le convoi, la pro-
cession des assistants. Ana à l’éntérado dé quâouqus, suivre
le convoi de quelqu'un. Y-aviè uno poulido éntérado, le
convoi était très-pompeux. Le languedocien est une langue
naïve qui, en fait de convenance, le cède au fr. : celui-ci
ne dirait point un joli convoi funëbre. Le provençal va
encore plus loin que nous dans ce cas; il dit : Uno galanto
éntérado.
Éntéraire, s. m. Fossoyeur, seulement pour les fosses
mortuaires, et non l’ouvrier qui creuse des fossés.
Éntésta, v. Entôter; porter à la tête; donner des étour-
dissements, la migraine. Par ext. étourdir par le bruit;
casser la tête en parlant trop, ou d'affaires trop sérieuses
ou ennuyeuses; étourdir par la vapeur de charbon ou autre;
faire tourner la tête.
S'éntésta, s'entèter, s'opiniâtrer; ne vouloir pas démor-
dre d'une opinion. — És éntésta coumo un ase, il est entêté,
obstiné comme un mulet.
Dér. de Tèsto. :
Énticon, ado. de lieu. — Voy. Énquicon.
Éntiè, Entièiro, adj. Entier; qui n’a pas été entamé;
auquel il ne manque rien. Au fig. entêté, opiniâtre.
Dér. du lat. Integer, m. sign.
Éntina, v. Encuver la lessive; mettre le linge dans le
cuvier : ce qui est la première opération de la lessive, —
Aï éntina dé matà, c'est ce matin que j'ai commencé. la
lessive. Éntino émbé la nivou, séquaras éndé lou sourél, il
faut encuver avec le temps couvert, si l’on veut sécher son
‘ linge par un beau soleil.
Dér. de Tino.
Éntissa (S’), v. Se dépiter contre quelqu’ un, s'opiniätrer
dans son humeur contre lui : ce qui ne va pas cependant
jusqu'à la haine.
Dér. de Tisso.
Éntoucon, adv. de lieu. — Voy. Énquicon.
Éntouèlaje, s. m. Dentelle sans dessin et sans picot,
qui est en pièce et qu'on peut coudre sur ses deux lisières.
Il sert de monture à la dentelle elle-mème.
Empr. au fr.
Éntouna, v, Entonner; commencer le chant d'une
hymne, d'un psaume d'église; par ext. d’une chanson.
… Emp. au fr.
_ Éntour,s. m. Entours, environs; proximité; voisinage;
296 ENT
intimité. — És toujour à moun éntour, il est sans cesse
autour de moi, près de moi.
A l'éntour, adv. À l’entour; aux environs. — À l'én-
tour dé Pasquos, près de la fête de Pâques.
Tout l'éntour, adv. Tout autour, tout à l’entour.
De l'ital. Intorno, m. sign.
Éntoura, v. Entourer; ceindre; entortiller; environner;
enrouler.
Éntourna (S'), v. Retourner; revenir sur ses pas; s'en
retourner.
Dér. du lat. Tornare, tourner en rond, parce qu’en re-
venant sur ses pas, on décrit une demi-circonférence, un
demi-tour.
Éntourtivia ou Entourtouvia, v. Entortiller; tortiller;
entrelacer, comme font les plantes parasites autour de
leur tuteur.
Rédupl. du lat. Tortum, supin de Torquere, tordre, tordre
plusieurs fois, à plusieurs volutes.
Éntra ou Intra, v. Entrer; passer du dehors au dedans;
pénétrer ; commencer. — Pode pas éntra din moun souïë,
mon pied ne peut pas entrer dans mon soulier. Éntro et baro
la porto, entre et ferme la porte. Éntro din sous quinze ans,
il entre dans sa quinzième année. Éntro pér la Sén-Bour-
toumiou, il commence sa ferme à la Saint-Barthélemy.
Dér. du lat. Intrare, m. sign.
Éntraîfouira, v. Embrouiller; mettre en désordre. —
S'éntrafouira, s'ingérer, s’entremettre, fourrer son nez
partout, mal à propos et sans y être appelé. És tout éntra-
fouïra, il est tout entrepris, tout empêtré, comme une
personne qui aurait lâché dans sa culotte.
Formé de Éntre, dans, et du fr. Fourrer.
Éntramén, adv. Cependant; en attendant; quoiqu'il en
soit. — Éntramén qué, tandis que, pendant que, puisque.
Dér. du lat. Interim, pendant ce temps.
Én-tranto, sorte d’adv. qui ne s'emploie qu'avec le verbe
Éstre, en balance, en suspens. — Ëstre én-tranto dé faire,
être en suspens, indécis; sur le point; entre le zist et le
zest.
Dér. sans doute de Trantaïa, balancer, branler.
Éntrapacha, ado, adj. Dim. Éntrapachadé, éto; Éntra-
pachadoù, ouno. Bantroche; qui a les jambes torses, nouées;
qui est gêné dans sa marche par l’enchevêtrement de ses
jambes. Au fig. embarrassé; entravé; qu'un rien arrête ;
entrepris.
Formé de Éntre et de Pas, qui a les pas entremblés.
Éntrava, v. Entraver; mettre des entraves à la marche:
de quelqu'un, mettre des liens aux jambes des animaux;
donner un croc-en-jambe pour faire broncher quelqu'un.
Au fig. croiser les démarches; susciter des obstacles.
Dér. du lat. Trabs, poutre qui servait à entraver les
chevaux. -
Éntravaqua, v. Entraver ; embarrasser ; pate: ou plutôt
avoir placé un objet dans quelque coin dont on ne se
souvient plus. — Lou chival s'és éntravaqua din soun
ÉNT
cabéstre, le cheval s’est enchevêtré dans son*licol. Entra-
vaqua uno saraïo, mèler une serrure. Qudou sa mounté
s'és éntravaqua? Qui peut savoir où il s’est égaré?
I a la même racine que Éntrava, dont il est un aug-
mentatif. -
Éntravaquaire, aïro, adj. Qui égare toujours ce qu'il
tient à la main; chercheur de difficultés, qui ne fait
qu’embrouiller les questions.
Éntravaquoüs, ouso, adj. Dificilé à débrouiller, à
démèêler.
Éntravéssa, v. Mettre en travers; faire croiser une chose
{| sur une autre. Au fig. traverser les projets de quelqu'un,
lui mettre des bâtons dans les roues; contredire, contre-
carrer. — Un éntravéssa, un esprit de travers, caractère
rebours.
Dér. du lat. Transversus, en travers.
Éntre, prép. Entre; parmi; au milieu: dans; en. —
Pourta éntre brasses, porter à bras. Éntre aïci et uno houro,
d'ici à une heure. Éntre paga el mouri on y-és toujour à
tén, prvb., payer et mourir sont deux extrémités qu'on
retarde autant qu'on peut. Éntre fios et capélans Sabou pas
mounté manjaran lus pan, prvb., les filles et les prêtres
ne savent pas d'avance où se fixera leur domicile. Véndraï
éntre tout déman, je viendrai dans la journée de demain.
Dér. du lat. Inter, intrà.
Éntre, conj. Dès que; aussitôt que. — Éntre véni dé
dina, d'abord après diner. Éntre y-avédre parla, vous
réndraï résponso, dès que je lui aurai parlé, je vous ren-
drai réponse. Éntre lou véire, en le voyant; aussitôt que
je le vis. Éntre vira lou cantoù, en tournant le coin. Éntre
qué li séguère, à peine arrivé; aussitôt que j'y fus arrivé.
Éntrébouïa, v. Embrouiller; brouiller; mêler; entre-
mêler.
Rédupl. de Émbouia.
Éntrébouïiaire, aïro, adj. -Brouillon ; qui ne fait qu'em-
brouiller les questions, comme tout ce qu'il touche; qui
ne sait rien démêler.
Éntrébouli, v. Troubler l'eau; obscurcir une glace. —
On diriè qu'éntréboulès pas l'aïgo, il a Fair si sage, si posé,
qu'il ne troublerait pas l’eau en la passant à gué; il a Hair
de ne pas y toucher.
Dér. de Trébou. :
. Éntréboulimén, s. m. Trouble de l’eau agitée et salie
par la vase qui remonte à la surface.
Éntrédi, icho, «dj. et part. pass. de Éntrédire. Interdit;
déconcerté; confus; interloqué. — Séguè tout éntrédi, il
fut tout interdit. D’uno pardoulo l’éntrédiguère, d'un mot,
je l’interdis.
Dér. du lat. Znterdictus, m. sign.
Éntrédire (S'), v. Dire à part soi; faire un à-parte;
se dire à soi-même. — M'éntrédisièi qué tout aqud n’èro
pas vraï, je pensais à partmoi, que tout cela n’était pas vrai
Éntrédourmi (6), v v. Sommeiller; être entre la veille
et le sommeil.
4 ENT
| Éntrédoüs, adv. Entre-deux; en balance; ni oui, ni
; non; ni bien, ni mal.
Éntréfièl, s. m. Petit trèfle des près à fleurs jaunes,
Trifolium pratense, Linn. Plante de la famille des Légu-
mineuses; excellent fourrage. Les variétés de trèfles sont
nombreuses : la plus commune est à fleurs rouges, le grand
trèfle artificiel.
Dér. du lat. Trifolium, trois feuilles, parce que chacune
| des feuilles de cette plante est composée de trois folioles.
Éntréfoire, v. Serfouir la terre, y faire un second et
léger labour avec la houe ou la serfouette. Proprement, ce
| travail ne s'applique guère qu'aux Plantes potagères, pour
aérer la terre que les pluies ou l’arrosage ont durcie et
{ caillée à la surface; lorsqu'il s'agit des müriers, de la
Ê vigne, ete., on dit: Maginqua.
Formé de Éntre et Foïre, c.-à-d. entre les plantes.
| Éntrélusi, ». ». Luire; luire à travers; entre-luire ;
éclairer à demi, à peine, faiblement. — Lou sourél tout-
| éseas éntrélusis, le soleil se montre à peine, de temps en
| temps, entre les nuages.
; Dér. de Lusi.
Éntre-miè ou Éntre-mitan, adv. Entre-deux; entre
une chose ou une personne et une autre. — L'éntre-mië,
pris subst. l’entre-deux ; une chose placée entre une autre;
l'espace entre les deux.
Dér. de Mie.
fntrémièlo, » s. {. Trémie de moulin, de bluteau, etc. ;
auge en bois en forme de pyramide tronquée et renversée,
qui laisse échapper le grain par son extréinité inférieure,
petit à petit et sans s'encombrer.
Dér. du lat. Trimodium, mesure de trois boisseaux,
parce que la trémie de moulin contenait autrefois à peu
près cettequantité : elleest beaucoup plus grande de nos jours.
Éntréna, v. Tresser; entrelacer; natter. — Voy. Tréna.
Éntrénousa, vw. Faire des nœuds l'un sur l’autre, et
particulièrement de faux nœuds qui deviennent très-diffi-
ciles à démèler.
Rédupl. de Nousa.
Éntrépâou, s. m. Entrepôt; lieu où l'on met en dépôt
momentané; position provisoire. — Aï més aqu aqui pér
éntrepdou, ce n'est pas la place de cet objet, je l'ai placé
là provisoirement et en attendant de lemettre à sa destination.
Dér. de Pdousa, Pdouso.
‘Éntrépäousa, v. does; poser provisoirement;
poser en se.
_ Dér. de Pdouso. |
_Éntrépréne, v. Entreprendre; commencer à faire; s'ap-
à un travail; entreprendre quelqu'un, le quereller,
le sémondre.
_S'éntrépréne, se disputer, ‘attaquer, se chercher n noise.
jaro, sé l'éntrépréne, gare à toi, si je te pose les » mains
à Fe. n iuèï? Quel travail PIRE
nous PitietS
Dér. de Préne.
ENT 297
Éntréprénén, énto, adj. Entreprenant; hardi; qui se
lance dans des spéculations avec hardiesse ou avec loyauté.
Éntréprénur, s. m. Entrepreneur, qui se charge d'un
ouvrage, d’un travail à certaines conditions.
Importation nouvelle, empruntée au fr., qui s’est facile-
ment impatronisée.
Éntréprés, éso, adj. Entrepris; embarrassé; gauche;
qui ne sait de quel côté se tourner, ni comment s'y
prendre.
Éntrépréso, s. f. Entreprise. — Ne se dit que dans le
sens d'un ouvrage pris à forfait et par entreprise, c.-à-d.
aux périls, risques et bénéfices de l'entrepreneur.
Éntre-Ségnos (Las), s. f. plur. La ceinture d'Orion ou
les Rois Mages, constellation composée de trois étoiles de
la première grandeur, parmi lesquelles est Sirius, la plus
belle de notre hémisphère, disposées à égale distance l'une
de l’autre. C’est une horloge de nuit pour les paysans qui,
suivant la saison, savent toujours quelle heure il est en
examinant sa position sur l'horizon.
Corrup. de Trés ségnos ou trois seigneurs, pour désigner
les Rois Mages.
Éntrétène ou Éntréténi, v. Entretenir; fournir le né-
cessaire; conserver en bon état; raccommoder une chose
pour augmenter sa durée.
S'éntrétène, s'entretenir; discourir; causer de quelqu'un;
fournir, soigner son vestiaire. — Vous éntréténguès dé iéou,
vous vous êtes entretenus de moi; vous en avez médit.
S'éntrétèn bièn, sa mise est toujours soignée, propre. Féou
bé gagna pér s'éntrétène, il faut bien gagner au moins son
vestiaire. ‘
Empr. au fr.
Éntréténénço, s. f. Dépense de vestiaire; soin pour
entretenir en bon état. — La vaïssèlo démando foço éntré-
ténénço, la vaisselle vinaire exige un entretien journalier.
Éntréténéncios, s. f. plur. Entretien; conversation;
causerie confidentielle ; médisance. — Aïme pas tout aqué-
los éntrélénéncios, tous ces entretiens particuliers ne me con-
viennent guère.
Éntréténgu, qudo, part. pass. de Éntrétène.
Éntréténi, v. — Voy. Éntrétène, m. sign:
Éntrévéire, v. Entrevoir; apercevoir un instant, d'une
manière fugitive; voir à demi; pressentir.
S'éntrévéire, se visiter, se voir en passant.
Éntrévije, s. m. Herbe aux gueux, viorne à feuille
étroite, Clematis vitalba, Linn., ou Viorne à large feuille,
vigne blanche, autrement appelée Aoubovi (V. c. m.). Plante
de la fam. des Renonculacées, sarmenteuse, dont la feuille
a un goût piquant et caustique. On s’en sert dans les Cé-
vennes pour envelopper les petits fromages de chèvre non.
més Péraldoùs ou Pélardoùs, auxquels elles communi-
quent un goût piquant et poivré. Cette plante, pilée et
employée en applications sur la peau, la cautérise et y
produit une plaie factice, mais facile à guérir: c'est là le
secret que nos mendiants actuels tiennent des anciens
298 ENV
truands, et qui lui a valu son nom fr. d'Herbe aux gueux.
Éntrévis, visto, part. pass. de Éntrévèire.
Éntrévisto, s. f. Entrevue de mariage. — Ne s'emploie
absolument que dans ce sens.
Empr. au fr.
Éntriga, v. Agacer les dents. — N'a pas d'autre accep-
tion.
Dér. du lat. Intricari, embarrasser, rendre difficile :
l'agacement des dents en embarrasse le jeu.
Éntrigoüs, gouso, adj. Industrieux; qui se donne du
mouvement pour réussir, qui y emploie mille moyens bons
ou mauvais. — Il parait bien ètre emprunté à la mème
source que le fr. Intrigant et Entrant, qui lui ressemblent
d’ailleurs par le sens et la forme.
Éntrin, adv. En train, en bon train. — Éntrin dé rire,
en disposition de rire. És un pdou éntrin, il est un peu
dans les vignes du Seigneur. Lou tiraje és éntrin, la fila-
ture est en train de marcher, elle a commencé de fonc-
tionner. Sès tan éntrin, vous êtes si éveillé, si dispos, si
affairé. Souï mou éntrin ou pas bièn éntrin, j'éprouve du
malaise.
Empr. au fr. En train.
Éntrinqua, v. Mettre en train; exciter; encourager.
S'éntrinqua, se meltre en mouvement; se mettre au
travail avec ardeur; se griser légèrement.
Éntrinquaire, aïiro, adj. Boute-en-train; qui provoque
au plaisir, à la joie; qui excite et met en train. — Lou
bourigal, lou galoubé, lou tambourin éntrinquaïre, l'air de
la bourrée, le galoubet, le tambourin qui invitent à la
danse.
Énvala, v. Avaler. — Voy. Éndavala.
Énvalaire, s. ou adj. m. Sobriquet du Gripé {V.c. m.),
qu'on nomme souvent Gripé l’énvalaire, probablement
parce qu'on en fait un objet de terreur pour les enfants en
leur contant qu'il avale ceux de leur âge.
Énvaraïra, v. Empoisonner avec du Varaïre ou de l’el-.
lébore blanc. Au fig. empester, empoisonner par une odeur
fétide. — Pu qu'énvarairo, il pue comme une charogne.
Dér. de Varaïre.
Énvéira, ado, adj. Envenimé; irrité; enflammé. — Se
dit d’une tumeur, d'un aposthème lorsqu'il bleuit ou qu’il
prend une teinte violacée.
Dér. de Féri.
Énvéjo ou Évéjo, s. f. Envie; intention; besoin: ca-
price; désir, mais non point jalousie. — À toujour milo
énvéjos, il a mille fantaisies capricieuses, comme les ma-
lades chroniques. — Aquô’s uno énvéjo dé fénno grosso,
c’est une fantaisie de femme grosse, c.-à-d. une fantaisie
musquée, un désir ridicule et fantasque.
On appelle aussi Énvéjo, envie, les signes que les en-*
fants apportent en naissant, et qu'on prétend causés par un
désir inexaucé de la mère pendant sa gestation.
Énvéjo, envie, pellicule qui se forme ou plutôt qui se
détache du doigt à la naissance des ongles.
ÉNV
Pour ces deux dernières acceptions, la variante Ævéjo
n’est pas reçue.
Dér. du lat. Invidia, envie.
Énvéjoüs, ouso, ou Évéjoùs, ouso, adj. Qui désire
tout ce qu'il voit; qui a mille désirs capricieux; qui ne
sait pas se passer d'acquérir tout ce qui lui convient; qui
se crée des besoins factices, et chez qui le désir passe à
l'état de besoin.
Énvéla (S), v. Se déjeter, se voiler, se tourmenter, se
déverser, comme fait le bois employé trop vert. Au fig. il
se dit des membres humains ou de la colonne vertébrale
qui se contractent par une courbure, une déviation quel-
conque et perdent leur forme et leur direction naturelles.
— És tout énvéla, il est tout bistourné, tortu.
Dér. du lat. Velare.
Énvénciou, s. f. Mensonge; calomnie; diffamation.
Empr. au fr. avec aggravation d'acception, et jamais
dans un sens favorable.
Énvénta, ». Inventer une calomnie, répandre des bruits
fâcheux; se complaire à découvrir et à conter les défauts
des autres.
Énvénta (S'), v. S'éventer; se gâter à l'air, prendre du
vent. — Se dit particulièrement du vin mal bouché.
Dér. de Vén.
Énvéntari, s. »m. Inventaire; rôle, mémoire, état, dé-
nombrement par écrit et par article d'objets, d'effets, de
papiers, de titres, etc.
Dér. du lat. Invenire, inventum.
Énvérda, v. Faire la toilette d’un robin-mouton, en
colorant sa laine. — Les bergers sont jaloux de la toilette
de leurs plus beaux moutons. Un de leurs objets de luxe
consiste à leur laisser, lors de la tonte, trois ou quatre
flocons de laine sur le dos, dont le dernier vient former un
toupet sur le front: et, pour ajouter encore à cet ornement,
ils le teignent ordinairement en vert. C’est ce qu'on
nomme Énvérda.
Énvérina, ado, adj. — Voy. Énvéira, m. sign.
Énvérnissa, v. Vernisser, vernir; passer une couche de
vernis de quelque nature que ce soit et quel: que soit
l’objet auquel il s'applique.
Dér. de Vérnis.
Énvinadouiro ou Boutéio énvinadouiro, s. f. Grande
calebasse étranglée par le milieu, en forme du. chiffre 8;
gourde des pélerins, Cucurbita lagenaria. C'est l'espèce que
l'on prépare pour servir de bouteille à vin, en la laissant
longuement sécher à la fumée sous le manteau de Ja
cheminée : sa coque devient alors très-dure. On la perce
par l'endroit où elle tient à la tige; on en extrait avec soin
tous les pépins et les résidus de pulpe desséchée ; après
quoi, on y verse à plusieurs reprises du vin ou du vinaigre
bouillant, qu’on y laisse reposer environ quinze jours. Les
ouvriers et travailleurs de terre n'ont pas d'autre amphore
pour contenir leur provision de la journée.
Énvinassa, ». Préparer, apprèter une gourde au mo-
LT
EOU
ment de l'ébullition du vin de la cuvée; aviner; plonger
ou faire macérer dans le vin. — Énvinassa, ado, adj. et
part. pass. Qui a la figure couleur de vin.
Dér. de Vin.
Énviroun, adv. de temps. Environ; à peu près; appro-
chant; un peu plus ou un peu moins. — Ës énviroun
mièjour, il est midi ou environ. Énviroun la Sén-Jan, aux
approches de la Saint-Jean. As énviroun dé milo francs,
mille francs ou à peu près.
Dér. du lat. Gyrus, tour, circuit; dont la bass. lat.
avait fait in girum, environ.
Énzina, v. Arranger, raccommoder; mettre un objet, un
outil, en état de remplir l'usage auquel il est destiné. —
Voy. Asénga, m. sign.
_Éou, Éou, diphthongue, syllabe à deux sons, prononcée
par une seule émission de voix.
Aucun dissentiment n’a pu s'élever sur la prononciation
de cette diphthongue, dont la consonnance est seulement
modifiée par la lettre initiale tantôt surmontée de l'accent
aigu qui l'adoucit, tantôt portant l'accent grave qui la
renforce. On convient encore par toute la langue d'Oc que
le son composé ou doit s’y faire entendre, qu'il se pro-
nonce et qu'il en est partie essentielle, Mais comment faut-
il l'écrire, d'après quelle orthographe, avec quels signes?
Voilà la question qui s'est posée tant pour les dipht. ou
tripht. qui ont l'E à leur base, que pour celles qui le pren-
nent avec les autres voyelles À, 7, O0. Nous en avons parlé
à l’art. Aou: le sujet n'est pas épuisé, el nous ne préten-
dons pas que le problème soit résolu aux yeux de tous,
bien que nous persistions à croire notre système ortho-
graphique le seul logique et soutenable. Et l'occasion se
présente de l'appuyer par de nouveaux exemples, sans rien
rabattre de nos premières observations. — Voy. Aou.
‘SAUVAGES sera toujours considéré comme le législateur
par excellence de notre langue d'Oc; et c’est à lui qu'il
faut encore revenir. S'il n’est pas permis de le suivre dans
toutes les formules qu'il propose, son système d’ortho-
graphe ne laisse rien à désirer ni à reprendre quand il
traite de la liaison des voyelles 4, E, I, O, de la concor-
dance et de l'expression des sons géminés des diphthon-
gues ou des triphthongues dans une seule syllabe. Le pre-
mier entre les lexicographes languedociens, il comprit la
nécessité pour tous nos dialectes méridionaux d'établir un
rapport exact et direct entre l'écriture et la prononciation.
De là cette règle, sur laquelle nous ne cesserons d’insister
par des redites fréquentes, que, dans un mot écrit, toute
lettre sonne avec la valeur que lui accorde l'alphabet usuel;
et son corollaire obligé, qu'aucune lettre ne s'écrit si elle
ne se prononce, et ne se prononce que comme elle est
écrite, selun les liaisons et les inflexions que les signes
alphabétiques et l’usage lui impriment. Avec une langue
dont: le génie réside particulièrement dans son accentua-
tion, qui a pris tous ses éléments idéologiques dans la mo-
dulation et l'euphonie, la seule orthographe rationnelle et
ÉOU 299
possible est en effet celle qui se rapproche le plus de la
prononciation, qui figure la parole par le caractère d’écri-
ture, qui représente la voix par la lettre. Si, dans ces con-
ditions, l'alphabet usité, courant, est jugé suffisant à ren-
dre tous les sons, à les faire sentir, il n’y a pas à avoir
recours à d’autres combinaisons, à s'évertuer à ressusciter
des méthodes surannées, tombées en désuétude, pour le
seul plaisir de faire de l'érudition rétrospective. On ne
peut qu'accepter les notions reçues comme l'alphabet et les
conventions du langage les ont faites, sous leur point de
vue le plus positif et sous leur forme la plus matérielle.
Une fois le principe de Sauvaces édicté, tout alla de
soi : sa haute raison suffit à le généraliser. On en trouve
de nombreuses applications. Mais, il faut le dire, il y a un
siècle, sa manière d'orthographier les dipht. et les tripht.
languedociennes ne s'était pas encore répandue, et les an-
ciennes habitudes persistaient. Par une bizarrerie assez
singulière, l'A fut la voyelle la plus difficile à se plier à
cette méthode. D'Astros, dans lou Trimfe de la lengovo
Gascovo, employait la forme Au, et en même temps eou,
iou, oou; le prieur de Pradinas, Peyrot, dans ses Géorgi-
ques rouergates, écrit tantôt au, tantôt aow, et toujours
eou, iou, oou. Le P, Pallas reste aussi dans ce terme moyen;
son dictionnaire met au et ou à côté de eou et iou. Quel-
ques auteurs plus modernes, sans s'en expliquer, consa-
crent la même anomalie : on trouve dans les fables de
D'Astros, d'Aix, dans celles de Gros, de Marseille, dans les
poésies de Diouloufet, ax et invariablement eou, iou, oou.
Goudouli lui-même, bien plus ancien, a reconnu oow,
bien que dans son époque le son ow se traduisit encore par
un « simple, et que, pour les autres voyelles, il mette au,
eu, iu. Mais les auteurs qui se rallient pleinement à l'or-
thographe de Sauvaces, sont nombreux jusqu'à nos jours :
parmi les glossateurs, Achard, Garcin, Avril, Nicolas Bé-
ronie, Couzinié ; parmi les poètes, Peyrol, Jacynthe Morel,
Auguste et Cyrille Rigaut, Auguste Tandon, Aubanel,
Coye, Pierre Bellot, Carvin, Jasmin, et notre La Fare-
Alais, pour ne citer qu'un petit nombre de ceux qui ne
sont plus. Toutes les publications, dans les divers dialectes
du Midi, se conformaient à la règle : les œuvres du prieur
de Celleneuve, Fabre, le maître en esprit et en connais-
sance de son idiome; les proverbes provençaux de 1824,
les cantiques des Missions d'Aix, leis juechs de la Fèsto
de Diou, les Géorgiques provençales ; les pièces du théâtre
provençal, les Recueils de poésie, les Journaux en vers, les
Chansons, les fables et les contes; la Bouïabaïsso, lou
Tambourinaïre, l'Abeilho prouvençalo, lou Rambaïaïre, ne
faisaient pas autrement, et personne n'avait à s'en plaindre.
La liste est loin d’être complète des auteurs qui se ser-
vaient de cette orthographe : celle de quelques-uns qui
persévéraient dans les vieux us, fournirait aussi ses
noms et sa protestation : et l'on pourrait sans désavantage
se compter, si une question grammaticale devait être dé-
cidée par les gros bataillons. Mais on peut s'en tenir à cet
300 ÉOU
aperçu un peu historique, pour constater l'état des choses
jusqu'au moment où une école récente est apparue pour
entreprendre la réforme de l'orthographe, en la ramenant
à celle des troubadours.
Cette reprise des anciens errements de l'écriture eùt été
plus louable, si elle se fût moins annoncée comme une
fantaisie d’érudits, et qu’elle eùt commencé par prouver
que tant d'œuvres excellentes, qui font la gloire de la
langue d'Oc, n'avaient pu être goütées et appréciées par la
faute d’une orthographe vicieuse; ou bien encore si elle
avait convaincu les populations languedociennes que ce
qu'on se proposait de substituer étant meilleur où supé-
rieur, elles trouveraient la mème facilité et le mème
plaisir à lire les compositions de leurs poètes favoris habillées
à la mode nouvelle, avec des ajustements qui ne leur étaient
pas familiers. Mais si le besoin de cette rénovation d'or-
thographe ne se faisait pas sentir, pourquoi s'attacher tant
à lui trouver des prétextes et des raisonnements pour la
représenter comme un progrès? Et ce qu'ont fait des hom-
mes d’un vrai talent pour la mettre en vogue, ce qui ne
s'établit pas heureusement sans résistance, ne sera-t-il pas
plus nuisible qu'utile au développement de notre littéra-
ture méridionale, qui peut se ressentir de ces vaines dis-
putes d’école et s'amoindrir au choc de certaines suscep-
tibilités d'amour-propre de novateurs? Deus omen avertat!
Ce qui a troublé les eaux jusqu'ici limpides de l'Hippo-
crène languedocien, ce n’est pas une grosse avalanche,
bien qu’il soit tombé par-ci par-là quelques pierres et que
certaines rives fleuries aient été entamées par l'irruption
et dans la tempète. Simplement et sans figure, il s’agit, on
le sait, de la façon d'écrire les diphthongues ou triphthon-
gues formées sur les quatre voyelles a, e, à, o qui prennent
le son ow à leur finale.
On vient de voir comment il avait été procédé et les
préceptes qu'enseignait SauvaGes. Les lauriers de notre
spirituel et docte glossateur cévenol avaient assez bien
verdi : de modernes Thémistocles en grammaire n’en dor-
maient plus cependant. Les vieux manuscrits consultés
durant ces pénibles insomnies, on y avait découvert que
les troubadours, ces vénérés maitres, n'avaient jamais
employé que l'orthographe connue et usitée de leur temps,
dans laquelle, à la mode latine, la lettre w se pronongçait
invariablement ou, et que par conséquent ils l'avaient écrite
seule quand ils faisaient entendre cependant ou très-dis-
tinctement. Et là-dessus, on s’étayait des citations d’abord
d'anciennes poésies dans leurs formes originelles, puis des
méthodes suivies avant la réformation orthographique qui
introduisit la voyelle composée de deux signes ox, pour
l'empècher de se confondre avec w simple.
L'argument n’était pas fort, et mieux valait imiter ou
même surpasser les troubadours dans leurs inspirations et
par leurs beaux côtés que S’attacher à une défectuosité de
leur écriture et ramener notre orthographe en arrière. Car
le système de l’agencement des lettres pour produire les
ÉOU
sons, une fois adopté tel qu'il existe actuellement, tel qu'il
doit être dans les dialectes de la langue d'Oc, la combi-
naison par la voyelle composée ou est seule admissible,
puisqu'elle doit seule être entendue. Pas n’était besoin,
quand on l’acceptait ailleurs, de faire une exception pour
dire que, partout où ce signe apparaissait, son épellation
ne devait pas causer une hésitation, mais qu’alors que ou
articulé serait précédé d’une autre voyelle, il suffisait de
poser la simple lettre « pour lui imprimer la consonnance
obligée. Nous avons donné des exemples nombreux de
l'impossibilité de cette application.
Vouloir donc écrire au, eu, iu, ou pour faire articuler
aou, eou, iou, oou, était exiger un tour de force dont tout
le monde n'était pas capable, et créer une de ces subtilités
d’érudition que la masse des lecteurs comprendrait diffici-
lement. On pourrait mettre au défi un habitant de la cam-
pagne, quelque peu frotté du syllabaire de l’école primaire,
de traduire les diphthongues ainsi figurées autrement qu'il
n'a appris à les épeler, c.-à-d. à la française, parce qu'il
n'est imbu que des règles de l’alphabet français. Pour se
souvenir de l'exception, il aura besoin d’un effort; et pour
l’observer à la lecture, il risquera souvent de tomber dans
la confusion. Cet inconvénient seul méritait d’être pris en
sérieuse considération avant de se décider à rapprocher des
formes françaises, des syllabes qui devaient rester dans
leur originalité caractéristique et dialectale.
Qu'au contraire un lecteur quelconque, avec l'alphabet
en usage, dans l’état des conventions reçues et enseignées,
rencontre ces syllabes diphthonguées écrites en dou, éou,
èou, iou, 6ou, il sera au moins obligé d’articuler claire-
ment, et le son juste se trouvera reproduit, le sens lui
arrivera et lui deviendra instantanément intelligible. C’est
tout ce qui est nécessaire, et ce qui est indispensable dans
notre idiome qui n’obéit qu’à l'harmonie.
La méthode de Sauvaces et de LA FARg-ALAIS n’aurait-
elle que l'autorité de ces deux esprits si versés dans la
connaissance de notre langue, que c'en serait assez pour
nous engager à suivre la voie tracée par nos devanciers.
Nous ne courrions pas le risque de nous égarer après eux :
la route est tracée droit, bien éclairée, point bordée de
précipices qui donnent le vertige, ni de fondrières qui
trompent et dans lesquelles on se perd : nous la préférons
de beaucoup aux nouveaux chemins, qui ne sont que les
vieux sentiers d'autrefois, abandonnés et dangereux pour
leurs ornières. — Voy. Aou, dou, lettre U. ? ’
Retourner à l'antique manière pour le seul avantage de
faire croire que l’on connait ses auteurs et qu'il y a raison
de faire comme ils ont fait, semble un peu puéril et peut-
être grandement irréfléchi à la fois. Ce que les troubadours
né pouvaient s'empêcher de faire de leur temps en em-
ployant la méthode seule pratiquée et enseignée par l'al-
phabet, le feraient-ils aujourd’hui que le progrès a amené,
non pas l'usage de nouveaux signes, mais une notation qui
est plus vraie et plus rationnelle, pour exprimer logique-
(27
ÉOU
ment des consonnances qui ont toujours existé dans la
langue? Voilà ce qu'il fallait se demander avant de con-
damner ou de rénover. Et on ne se serait pas étonné de
voir les partisans de l'orthographe auriculaire, — et lout
le monde convenait qu'il fallait écrire en la langue d'Oc
comme on entendait, — se rapprocher, pour rendre les
diphthongues et les triphthongues, dont chaque nuance
vocalisée se faisait sentir, de la traduction par les lettres
qui en définitive les reproduisaient le plus clairement.
I n’y a pas plus raison de maltraiter et d’accuser la
pauvre voyelle © de s'entremèler aux autres pour former
un son qu'on n'a pas appris à voir autrement représenté,
qu'il n°y aurait motif à exiger qu'on n’entendit plus le son
"ou dans certaines diphthongues, et qu'on se servit du ca-
ractère u à l'instar des ftaliens et des Espagnols. En France,
nos conventions alphabétiques sont autres : elles ont mar-
ché et changé quelque peu depuis les troubadours : pour-
"quoi ne ferions-nous comme le français, puisque nous
avons le même alphabet, et que nous lisons et apprenons
à lire sur le même syllabaire qui nous sert à écrire dans
nos dialectes?
D'après Cela, comme personne ne s'est trouvé embarrassé
en entendant une syllabe sonnant ou rendue par deux
signes de convention, comment s'expliquerait-on la bizar-
rerie qui transforme le son à prononcer et à articuler par
un signe unique et différent, alors qu'il s'agit d'une
diphthongue? Comment- admettre surtout que cette con-
sonnance, se trouvant en contact dans la diphthongue avec
d'autres voyelles, ne profitera cependant du privilège d'être
exprimée par un seul signe « au lieu de deux, qu'alors
seulement qu'elle suivra une autre voyelle? Dans ce cas,
pour®distinguer l'exception, faudra-t-il faire intervenir
l'accent qui prévienne du changement d’intonation? mais
encore ici quels étranges préceples va-t-on professer? Il
convient de tenir en garde le lecteur naïf, peu au courant
des innovations et qui n’a pas étudié l'épellation dans les
anciens troubadours : or toutes les fois que la lettre u devra
sonner comme ow, dans les diphthongues ou les triphthon-
gues , pour appeler l'attention sur elle, on marquera la
woyelle lawplus proche voisine à gauche d’un accent. —
Qu'on se"ledise! — De mieux en mieux. De telle sorte
que si jusqu’iéion avait pu croire que les accents étaient
destinés en certaines circonstances à modifier le son de la
voyelle qu'ils” surmontaient : de par l'école nouvelle, l'ac-
cent, pour concorder ‘avec son système, devra jouer un
rôle entièrement contraire à celui qui lüi avait été toujours
donné, et ne servira de rien à la dettré qui le porte, tandis
qu'il fera de la voyelle le suivant, une composée sous son
apparence de voyelle simple.
+ En vérité, prétendre que le son ou éérétffsamment repré-
_ senté par un «, et que les diphthongues et triphthongues
peuvent s'en contenter, c’est prècher la confusion
. phique au lieu de se faire l’apôtre de l'unité dans les dia-
lectes de Ja langue d'Oc : c’est le renversement de toutes les
ÉOU 301
lois et règles de l'alphabet et de l'orthographe rationnelle.
C'est pourquoi nous persistons à écrire, comme l'ont fait
SauvaGes, La Fare-Arais et les autres maitres, dou, éou,
éou, tou, dou, et les tiphthongues sidou, iéou, bidou, ete, au
lieu de au, eu, iu, ou, accentués ou non sur la lettre-pivot.
Les raisons ne manqueraient pas, s'il y avait à résumer
ce que nous avons dit dans tout ce lexique et ce qu'il met
en application ; mais ce qui nous frappe est cette pensée
que nous sommes en présence d’une langue originale, d'une
vocalisation particulière, qui n'a cependant à son service
qu'un alphabet en communauté d'usage avec le français, et
qu'en somme, en France et par tout le pays où les dialectes
de cette langue sont encore parlés, tous ceux qui les par-
lent ne connaissent que l'alphabet français, n'ont appris à
lire qu'avec lui et que par lui la liaison des lettres pro-
duisant des sons. De telle sorte qu'en apportant ces con-
naissances acquises dans la lecture ou dans l'écriture de la
langue d'Oc, si ingénieuses précautions qui soient prises,
il ne pourra résulter qu’un trouble ou des confusions, si
l'orthographe employée n'est pas la représentation sonore
et exacte du mot; car l'intonation, la prononciation, font
et donnent le sens. Il faut donc de nécessité se séparer de
ses habitudes de lecture à la française ou bien, avec l'al-
phabet français, ne présenter à l'œil, pour être articulé par
la langue, que des combinaisons dans le ton juste et dans
la clé propre à l’idiome. Que le premier lecteur venu ne
soit pas exposé, par exemple, à prononcer à la française
les mots écrits comme le voudraient les réformateurs : Peu,
leu, meu, etc., à confondre avec peu, le, me: landis que
le plus ignorant doit, pour comprendre, rencontrer comme
il prononce couramment en épelant : Péou, lèou, mèou, et
il aura la certitude de comprendre et de se faire com-
prendre.
Nous ne trouvons aucun motif plausible d'adopter une
orthographe plus savante que celle qui remplit toutes ces
conditions et qui suffit à la plus complète intelligence de
notre langue, dont le premier besoin, toute harmonie et
mélopée qu’elle est, doit être dans sa notation exacte. Ce
qui sonne et se cadence doit ètre entendu, il faut donc
l'exprimer et le traduire en signes, suivant les règles adini-
ses : c'est de ce principe que nous ne croyons pas urgent de
nous départir.
Au reste, les adeptes les plus convaincus eux-mêmes du
système nouveau, Honnorat par exemple, et d’autres encore
que nous ne nommons pas, ne laissent pas que de se per-
mettre maintes infractions surtout avec la diphthonque
éou et dou. Is jugent cette forme plus claire et ils ont de
bonnes raisons pour cela sans doute quand ils éditent leurs
œuvres; mais s'ils professent, la rigueur des principes tirés
de la manière d'écrire des troubadours, les détourne de
leur voie : ces contradictions se jugent seules.
Éoufo, s. f. Hièble. — Voy. Égou.
Éounas, s. m. Grande et large plante de lierre qui cou-
vre tout un mur ou toute la tige d'un arbre et ses bran-
302 ÉQU
-ches. I ne nuit nullement à la sève de l'arbre sur lequel
il grimpe. Quant aux murs, il les soutient sans doute,
mais il en corrode le ciment, dans lequel il pénètre, et
quand il meurt, le mur s'écroule.
C'est le péjoratif de Éouno.
Éouno, s. f. Lierre, lierre grimpant; Hedera heliæ, Linn.
Arbrisseau de la fam. de Caprifoliacées, qui croit spon-
tanément dans nos pays.
Éouse, s. m. Dim. Éouséroù. Yeuse, chène-vert, Quer-
eus ileæ. Arbre de la fam. des Amentacées. — C'est l’es-
sence de bois la plus recherchée pour le feu, car il dure
plus longtemps et donne une chaleur plus intense. C'est de
l'écorce des jeunes chèneaux qu'on tire le tan pour les
tanneries.
Ce mot a évidemment la même racine que le fr. Yeuse,
dont la conformation et la consonnance annoncent une
origine celtique; il n'est pas emprunté au fr. mais bien au
moins son contemporain. Le lat. avait, à la vérité, Ilez;
mais la question serait de savoir s’il ne l’a pas pris à la
Gaule, pour mettre à côté de son Quercus.
Éousièiro, s. f. Taillis de chènes-verts; chênaie.
Formé de Éouse, radical, désignant l’essence, et de Zètro,
suffixe de collectivité, marquant l'agrégation. — Voy. Ièiro.
Éousino, s. f. Gland du chône-vert. — Car d'éousino,
chair ferme et de qualité supérieure, comme celle des
pourceaux nourris de glands.— Voy. Aousino, m. Sign.
Équipa, v. Équiper, mais seulement avec la signification
de fournir des vêtements. — És bièn équipa, il est bien
nippé, bien fourni de hardes.
Il est aussi un terme technique propre au jeu d’Equipè.
— V. ce mot.
Équipaije, s. m. Attelage de charrette.
Empr. au fr. avec une tout autre acception.
Équipè, s. m. Nom d’un jeu d'enfant ou plutôt d'é-
colier, qui se joue avec des gobilles. Voici la description
qu’en donne La Fare-Alais dans ses notes des Castagnados.
On fait en terre trois petits trous ou blouses de la dimen-
sion tout au plus suffisante pour recevoir les gobilles, et
disposés en triangle. Les deux joueurs débutent en pous-
sant leur boule vers le premier trou, et le premier des deux
qui touche la bille de l’autre, est ce qu'on appelle équipa
pour le premier trou, c.-à-d. qu'il est apte à faire ce pre-
mier trou ou à y loger sa bille. Alors tout le jeu de celui-
ci consiste à se rapprocher de ce trou et à s'en emparer ;
la finesse de l'adversaire est au contraire de l’en empôcher
en le forçant à tirer sur la boule, ce qu'il est obligé de faire
toutes les fois qu’il la rapproche de la sienne de moins de
deux empans ou deux ouvertures de main, depuis l’extré-
mité du pouce jusqu’à celle du médium, qu'on allonge à
cet effet autant que l’on peut. À chaque bille touchée on
recommence à jouer, comme au billard quand on fait des
points. Enfin, le joueur a-t-il atteint le premier trou, il
recommence à s’équipa pour le second, à y arriver, et de
même pour le dernier. Celui qui le premier a fini ses trois
ÉRN
trous, lève sa bille, et l’autre est obligé de les faire à son
tour, mais alors sans s'équipa, puisqu'il n’y à pas d'autre
bille que la sienne sur le tapis. Le vainqueur s'applique à
faire bonne garde, et pour cela à chaque coup il tire sur
la bille adverse pour l’écarter, en se plaçant prés du trou
convoité, et s'il est adroit, la corvée du second est fort
Jongue et fort ennuyeuse, car à chaque instant sa boule
est repoussée. Cette corvée se nomme Trima.
En terme d’argot, des trois trous, le premier est appelé
lou prumio, le second, lou sègo, et le dernier, lou dario.
Souï équipa pér moun dario, je suis en passe de faire ma
dernière blouse.
Ce mot d'Équipè annonce clairement, par sa désinence,
une origine française. Probablement ce jeu a été inventé
par des écoliers de la langue d’Oïl; mais il s’est oblitéré
chez ceux-ci. Il est venu s’établir outre-Loire où il a eu
une destinée brillante et longue; cependant, comme toutes
les choses humaines dont on se lasse, surtout quand elles
ont atteint du premier coup tout leur perfectionnement,
l'inconstance de la gent écolière aidant, l'équipè est un
peu négligé de nos jours.
Équipèio, s. f. Équipée; acte d'étourderie; fausse dé-
marche, imprudente, indiscrète; entreprise téméraire.
Empr. au fr. à
Érénto (à touto), adv. De toutes ses forces, de manière
à s’éreinter.
Érmas, s. #. péjor. de Ërme. — V. c. m. et Armas,
m. sign.
Érme, s. m. Dim. Érmassoü; péj. Érmas. Hermes;
terrain en friche, sans culture; vaine pâture.
Dér. du lat. Eremus ou du gr. ’Epnuos, désert inculte,
d’où sont venus en fr. Ermite et Ermitage, que notre dia-
lecte reproduit en Armito et Armitaje. — V. c. m.
Érnugou, s. m». Hargneux; homme taciturne; bourru,
d’humeur sombre et défiante, insociable.
Deux étymologies se présentent : on n’aura que le choix
à faire de celle qui paraîtra la plus satisfaisante, toutes
deux présentant certaines probabilités.
Quelque ressemblance rapproche d’abord ce mot de celui
des frères Hernutes, premier nom que portaient les frères
Moraves, secte religieuse qui vivait en communauté. Cette
communauté est célèbre par le noviciat qu'y fit Pierre-le-
! Grand. Il n’est pas étonnant que ces sectaires, qui con-
trariaient ouvertement toutes les idées reçues, fussent
mal vus et méprisés, et que leur nom soit devenu un
surnom fâcheux, dont le sens du reste se rapporte aux
mœurs austères et à l’insociabilité de ces frères, qui n’a-
vaient que des relations fort rares et peu affables avec le
reste du genre humain.
D'autre part, par sa configuration seule, Érnugou n'est
pas éloigné non plus du fr. Hargneuæ, et comme sa dési-
nence est l'indice d'une origine ancienne, il est possible
que les deux mots soient contemporains et qu'ils aient
l’un et l’autre leur racine dans le mot Hernie, c.-à-d. qu'ils
ÉSB
aient voulu, l'un comme l'autre, représenter la situation
morale d'un herniaire, qui, avec une pareille infirmité,
doit ètre un peu déclassé, et partant d'humeur sombre et
peu sociable. Cela était surtout vrai avant qu'on eût trouvé
les moyens curatifs : heureuse réduction qui a fait que la
classe de cette sorte d'infirmes n'est plus soumise qu’à une
simple incommodité, incapable d'assombrir leur esprit et
leur caractère! — Aujourd'hui, grâce aux progrès de la
science et des lumières, on ne ferait pas le mot avec les
mêmes éléments pour exprimer ce que dit celui-ci, dont
la signification est toujours applicable; mais le terme étant
donné, et l'étymologie étant à trouver, il fallait bien re-
monter à la source la plus probable.
. Érugo, s. f. Chenille : nom que l’on donne à toutes les
chenilles qui passent par l'état d'œuf, de ver, de chrysa-
lide et de papillon, excepté toutefois au ver-à-soie, bien
qu'il ne soit que la chenille du mürier; mais on lui porte
trop d'amour et de considération pour le regarder comme
une Érugo, qui est toujours un objet de dégoût et souvent
de crainte.
Le mot Érugo ne s'applique pas non plus à ces chenilles
microscopiques qui vont par myriades et causent tant de
dégâts dans les champs et aux arbres. Celles-ci se nom-
ment Canïos { V. ©. m.). — Pati coumo las érugos, souf-
frir, être misérable comme une chenille, sans doute à cause
des vicissitudes et des métamorphoses auxquelles elles sont
soutnises. Michan coumo uno érugo, méchant comme la
“gale : s'entend sans doute des chenilles de chou que le
préjugé fait regarder comme malfaisantes. C’est peut-être
aussi un rapprochement de la chenille et de la gale, amené
par la superstition mentionnée à l’art. Bérugo. — V. c. m.
Dér. du lat. Eruca, m. sign.
És, 3me pers. sing. indic. prés. du v. Éstre.
És-ariès, ado. de lieu. En arrière. — La carélo cargo
és-ariès, la charrette est trop chargée sur le derrière. Faï-
té és-ariès, recule-toi. — Voy. Dariès.
És-avan, adv. de lieu. Par devant; en avant. — L'a-
troubarés és-avan, vous le trouverez en avant, il a pris
les devants, S'és toumba és-avan, il est tombé en avant,
sur la face. Aguélo muraïo trésploumbo és-avan, ce mur
surplombe sur le devant. És és-avan din sous afaïres, il
est au-dessus de ses affaires.
Quelquefois le mot est substantivé pour dire : avances ;
den: agililé, —= Quand a léva boutigo, aviè bé’n pou
d'és-avan, quand il à commencé son petit commerce, il
avait bien quelques avances. Aquél home a pas gés d’es-
avan, cet homme n’est ni assez leste, ni assez fort. — Voy.
— Dér. du lat. Ad ventum, du côté d'où vient le vent.
- Ésbadâoula, v. Entr'ouvrir ; laisser une ouverture grande
ouverte.
_ S'éshaddoula, s'entr'ouvrir; se crevassers bäiller comme
une figue gercée, comme une chaussure décousue.
Dér. de Badal.
ÉSC 303
Ésbalâousi, ido, adj. Ébaubi; surpris, étonné ; étourdi ;
stupéfait; émerveillé; tombé des nues; abasourdi.
Ésbérla, v. Écorner; ébrècher; égueuler un broc; ébran-
cher un arbre.
Dér. de Bèrlo.
Ésbouiénta, v. Échauder; faire passer par l'eau bouil-
lante; asperger ou immerger d'eau bouillante.
Dér. de Boutén.
Ésbouldra (S'), v. Se crevasser; crever; s'ouvrir par le
ventre comme une pomme fondante qu'on met sur la
braise, comme une andouille qu'on fait bouillir.
Dér. de Bouldro ou du lat. Botulus, boyau.
Ésbourassa, v. Houspiller; arracher la bourre ou le
poil.
S'ésbourassa, se houspiller; se battre comme font les
chats et les lapins.
Dér. de Bouro.
Ésbouséna ou Ésbousouna, v. Ébouler:; faire crouler
un mur, une maison, la berge d’un fossé ou d’une tran-
chée.
Ce mot vient probablement de Bouso, qui a donné nais-
sance au fr. Bouse de vache, dont on a fait aussi Bousiller,
bâtir en torchis, parce que les premiers torchis étaient
composés de bouse de vache, et que les murs de clôture,
dans certains pays de pâturages, sont encore construits
ainsi. Ésbouséna, dans ce cas, serait renverser, ébouler ces
murs de bouse : l'acception s’est étendue.
Éscabardatudo, s. f. Ecart, divagation, au physique et
au moral.
Éscabarta, v. Chasser loin; écarter; perdre; égarer. —
Aï éscabarta moun coutèl, j'ai égaré mon couteau. Ésca-
barta lou pérpdou, se permettre des gaillardises trop fortes
ou obscènes.
S'éscabarta, s'égarer; s'éloigner; se dissiper; se disper-
ser au loin. — Las nivous s'éscabartou, les nuages se dis-
sipent. Soun la s'és éscabarta, elle a perdu son lait. T'és-
cabartes pas, ne t'éloigne pas; ne t'écarte pas du droit
chemin.
Dér. de la bass. lat. Expartiri, se séparer, prendre de
son côté.
Éscabartado, s. f. Écart, échappée. — Le même que
Éscabardatudo, et plus usité. — Voy. c. m.
Éscabassa, ». Étêter un arbre, le couronner, le réduire
au tronc : remède héroïque qu'on applique aux arbres ma-
lades dont on suppose que les branches seules sont atta-
quées et les racines restées saines. Cette opération réussit
quelquefois, mais rarement aux müriers, plus souvent aux
châtaigniers.
Dér. de Cabasso, ou de l’esp. Cabesso, tête.
Éscabour, s. m. Crépuscule du soir; la brume; le déclin
du jour.
C'est une corruption ou une métathèse un peu forte du
lat. Obscurus, dans laquelle cependant on voit se repro-
duire la plupart des lettres du type.
304 ESC
Éscacalassa (S'), ». Éclater de rire; rire à gorge dé- |
ployée et à haute voix.
Dér. de Cacalas.
Éscachoù, s. m. Petite partie, résidu d’une marchan-
dise; ce qu'il en reste d'invendu : si c’est le restant d'une
pièce d’étoffe, on dit Cowpoun où Éscapouloun:
Éscachoù est le dim. d'Éscach, vieux mot hors d'usage
que mentionne Sauvages et qui aurait eu la même signi-
fication.
Éscafouia, v. Écraser; écacher dans la main ou sous
les pieds quelque chose d’humide ou de juteux comme un
fruit. — Aquéles rasins sé soun toutes éscafouïas, ces rai-
sins sont tout meurtris, à moitié écrasés.
Éscafouiun, s. m». Gàchis produit par des choses ju-
teuses écrasées; mélange informe de ces matières avec le
jus qu'elles répandent.
Éscagassa, ». Affaisser; écraser ; déprimer; rendre épâté.
S'éscagassa, se plier en deux, s'affaisser, s’accroupir. Par
ext. se pàmer de rire, parce qu'on fait le mouvement de
s'accroupir.
Il a quelque ressemblance avec Acougassa et s’acou-
gassa. — V. €. m.
Éscagnéto, s. f. Terme de fabrique de soie écheveau de
soie à coudre que l'on dévide avant de la décruser et de la
tordre.
Dim. de Éscagno.
Éscagno, s. f. Dim. Éscagnéto. Écheveau de fil, de
laine, de coton, de soie.
Éscaïè, s. m. Dim. Éscaïèiré; péj. Éscaïètras. Au plur.
Éscuïèsses. Escalier; degré; marche d'escalier. — Éscaïè
én biséto, escalier en colimaçon.
Éscaïè est aussi n. pr. Escalier. — Fran coumo Éscaïè
est un dicton qui prouverait peu en faveur de la franchise
et de la loyauté d’un individu de ce nom, car il signifie
un homme faux, un quasi fripon, une lame à deux tran-
chants. Mais peut-être n'est-ce qu'une sorte d’allusion à la
prestation du serment dans lequel on lève la main, tandis
que l'escalier fait lever le pied, ce qui n'engage pas et
n'est qu'une manière de prêter un faux serment. Quelque-
fois il n’en faut pas tant pour faire un mot qui passe pour
spirituel et malin, et qui ne repose que sur un rapproche-
ment fort peu raisonnable et se conserve néanmoins comme
une énigme, à laquelle les malins découvrent un sens qui
n'existe pas.
Dér. du lat. Scala, Scalaria, qui a donné Echelle et
Escalier.
Éscaïèrna, v. Éblouir; donner la berlue.
Formé du gr. Zxävcs, gauche, faux, et du lat. Eucerna,
lumière, flambeau; fausse lumière, parce que l'effet de
l’éblouissement est de présenter une fausse image au sens
intérieur de l'œil.
Éscaïnoun, s. m”. Sobriquet, surnom; épithète burles-
que et dérisoire appliquée à quelqu'un, et même à tous les
habitants d’une contrée.
ESC
L'usage des sobriquets est très fréquent chez les classes
populaires. 11 est peu d'enfants qui n'en reçoivent un dans
leur famille où dans leur camaraderie; et ce surnom les
accompagne souvent toute leur vie; bien plus, il se trans-
met au fils, quoiqu'il n'ait rien des qualités on du défaut
qui l'ont valu à son père. Ajoutons que le sobriquet se
féminise aussi pour passer du mari à sa moitié : ainsi, la
femme ddou vicioùs s'appelle sans gêne La viciouso, bien.
qu'il n’y ait rien à dire d'elle. Passe encore; car au moins
il n’y a pas là de barbarisme. Mais tout le.monde a connu
un nommé B.,., dont le surnom était {a ZLouè (façon
Jlanguedocienne de prononcer le fr. la loi), parce que, lors
du régime de celle-ci, B... avait fait usage ou abus du
mot : eh bien! sa femme s'appelait {a Louëto.
Les surnoms du peuple sont rarement flatteurs ou rému-
nérateurs comme ceux que la courtisannerie a imaginés
pour les princes et pour les barons férailleurs du moyen-
âge. L'Escainoun est d'ordinaire tiré d’un défaut person-
nel, d’un vice moral ou physique, d’un ridicule ou de
quelque fait anecdotique, tournant fort peu à la gloireet
à la Jouange de celui qu'on en affuble. Il est souvent
donné par antiphrase, comme Bloundin à un individu très-
brun, Camar à un très-gros nez, etc.
Sous le système fédératif qui commença à l’émanci-
pation des communes, il s'établit une sorte de rivalité
entre les communautés et villages voisins les uns des
autres : rivalité souvent pacifique et ne consistant qu'en
une guerre de quolibets et de jeux de mots. De là cette
foule de surnoms moqueurs ou méprisants que les loca-
lités se lançaient l’une à l’autre au moyen-âge et dont le
souvenir est resté dans le pays, quoiqu’on n'y attache de
nos jours aucune pensée de haine ou de dérision. C'est
ainsi qu'on dit encore :
Tripiè d’Alais. — Crèbo-bachas d'Anduso. — Volo-biéou
dé Sént-Ambrièi. — Fégnan ou Touchà dé Bénobre. — Assu-
quo-bèmi dé Sén-Rouman. — Plaïdéjaïire dé. Sént-Andrè-
dé-Valborgno. — Braîéto dé Ménde. — Éscorjo-truêjo dé
Sén-Jan-dé-Gardounénquo. — Piquo-céses dé Mialé. —
Sdouto-rouqué où Diamané dé Sdouve. — Brounsidoù dé la
Sulo-dé-Sén-Pèire. — Cigéou dé Sént-Hipoulite-dé-Dusfor.
— Touqua dâou Sént-Espri. — Brando-pinto dâou Coulé.
— Baraban dé Sén-Chèli. — Targaire où Targués dé
Maruèje (Marvéjols, Lozère). — Ésfouiro-bari d’Aoubénas.
— Couflo-tripo dé l'Argéntièiro. — Foutralé dé Baies. —
Biaïre dé Vilofor. — Piquo-sécal dé Méjano. — Galinéto
dé Bagnéou. — Toundur dé napo dé Ginouia. — Trabas-
tairé dé Lu. — Fâou témouèn d'Aimargue. — Passéroù dé
Soumèire. — Manjo-méléto d'Uzès. — Pélachoù d’Avignoun.
— Barbo-fourcudo dé la Gardo. — Éspaséto dé Cavaïoun.
— Viro-gâou dé Béoucaire. — Souréié dé Bouléno. — Las
Oros dé Malatavèrno. — Véiaïre dé Soustélo. — Noublèsso
dé Chambourigâou. — Banastaire das Apéns. — Couqui dé
Porto. — Pésquaire où Aoubouissaire dé Nèr. — Pésquo-
luno dé Lunèl. — Badäou dâou Pour. — Manjo-blédo dé
Sén-Pdou. — Manjo-céoulé dé Lusiès. — Dansaire dé Sén-
ÉSC
Juiè.— Coucho-péras dé Roussoù.— Jasiou dé Carpéntras.
— Dévignaïre dé Mountélimar, ee.
Éscaïinoun est formé de Noun et de Escaï, qui paraît
avoir existé autrefois dans la langue et qui, dérivé du gr.
Ex, faux, du mauvais côté, donnait au mot entier la
signification de faux nom.
Éscaio, s. f. Écaille, substance dure, laminée, cornée
et luisante qui recouvre le corps des poissons et des tes-
tacés; éclat de bois qui se casse et se sépare d'un meuble.
Dér. du lat. Squamma; dim. Squamula, m. sign.
Éscaire, s.m. Équerre, instrument de géomètre pour
tirer des lignes droites et perpendiculaires, et tracer des
angles droits. — À l'éscaïre, à angle droit. Planta à l'és-
caïre, disposer une plantation en quinconce.
Dér. du lat. Quadrare, rendre carré.
Éscaïroü, s. m. Petit coin de terre; angle de terrain
clos de murs.
Dér. aussi bien, comme dim. de Escaë, morceau, que de
Éscaïre.
Éscala, v. Monter par une échelle; grimper sur un
arbre; escalader un mur; gravir une côte, une montagne ;
en général, monter, par degrés, peu à peu.
Dér. de Éscalo.
. Éscalabrina, v. Grimper sur une hauteur scabreuse et
rapide; monter avec difficulté et en employant toute son
agilité.
Dér, de Éscalabroùs.
Éscalabroüs, ouso, adj. Scabreux ; ardu ; rapide; dif-
ficile à monter; raboteux.
Formé du lat. Scala, échelle, ou de Scabrosus, àpre,
raboteux.
Éscalada, v. Escalader un mur avec ou sans échelle.
Augm. de Éscala.*
Éscalado, s. f. Escalade; action d’escalader un mur. —
Intra pér éscalado, s'introduire par escalade, en franchis-
sant les clôtures.
Éscalaïre, aïro, adj. Qui grimpe; habile à grimper au
haut des arbres.
Éscaléto, s. f. Squelette; carcasse du corps d’un animal
et particulièrement de l'homme, réduit aux os. Au fig.
personne maigre et décharnée.
Dér. du gr. Zxchetéy, corps desséché.
Éscaléto ou Tourtioù dé fère, s. f. Sorte de gauffre
faite au moule, plate et carrelée par l'empreinte du moule,
ce qui donne à son dessin la forme d’une série de petites
échelles juxtaposées.
Dim. de Éscalo.
Éscalo, s. f. Dim. Éscaléto; augm. Ésealasso. Échelle,
instrument composé de deux montants, traversés, d'espace
en espace, par des bâtons nommés Éscaloù, échelon, ser-
vant à monter et à descendre. — Mé farias mounta dou
cièl sans éscalo, vous me feriez prendre la lune avec les
dents, c.-à-d. vous me pousseriez à des extrémités fâcheu-
L'éscalo ddou moutoù, l'une des trois solives qui sou-
ÉSC 305
tiennent la machine à planter les pilotis, appelée sonnette;
c’est celle qui sert d'échelle pour grimper jusqu'à la poulie.
Elle est composée d'un seul montant traversé de chevilles
débordant d’un pied de chaque côté, qui servent d'éche-
lons. Dans le Vivarais, on se sert d’une échelle du mème
genre pour cueillir la feuille de mürier et pour élaguer ces
arbres: bien entendu que la forme seule est semblable, et
non la dimension, ni surtout le poids. Téni l'éscalo à
quéouquus, ètre complice de quelqu'un, l'aider à com-
mettre quelque mauvaise action.
Dér. du lat. Scala, m. sign.
Éscaloù, s. m. Échelon, chacun des barreaux d’une
échelle. — M'én souï fa pér un brave, un poulit éscaloù,
j'ai payé un fameux écot : au fig. dans ce sens, pour dire :
c'est un fameux degré que je viens de monter ou de des-
cendre.
Éscamandre, s. m. Dim. Éscamandroù; péj. Ésea-
mandras. Fille ou femme sale, laide, déguenillée ; effrontée;
garçonnière.
La ressemblance de ce nom avec celui du fleuve Sca-
mandre semble annoncer que c'est ce ernier qui lui a
donné naissance; cependant il est difhcile de saisir un
rapport quelconque d’acception entr'eux. Toutefois est-il
impossible que la manière mythologique et allégorique de
peindre les fleuves qu’on représentait à demi-nus, les che-
veux épars, la barbe mêlée et gluante de vase, soit venue
servir de type au genre de saleté et de désordre que nous
offre le mot languedocien? Mais, en admettant même l'hy-
pothèse, pourquoi choisir de préférence un fleuve phrygien,
dont la représentation ne se trouve guère que dans les
hautes peintures classiques et le nom dans la haute litté-
rature?.…. Concluons que si réellement le fleuve a prêté
ainsi son nom au populaire, cela ne peut tenir qu'à quel-
que fait anecdotique oublié aujourd’hui. Les étymologistes
qui ne seraient point satisfaits par cette conjecture, pour-
ront trouver l’origine du mot dans sa substance même en
le décomposant. Nous avons déjà vu que le mot, ou plutôt
la racine Escaï signifie faux et gauche; on pourrait y
joindre la corruption du lat. Matrona, dame, femme de
qualité, femme considérée et de haute position sociale.
Dans ce cas, le mot Éscamandre rendrait l'idée d’une
fausse dame, c.-à-d. dame de bas étage, dame dont la mise
sale et dégoûtante est le contrepied de la mise sévère,
digne et recherchée de la véritable matrone. Ce qui ferait
pencher vers cette dernière déduction, c’est la circonstance
des mots Mandro et Mandrouno, qui existent également
en languedocien et dérivent bien évidemment de Matrona
( Voy. c. m.), quoique dans une acception presque opposée
et qu'on peut regarder comme une ironie ou une antiphrase.
Malgré toutes ces probabilités, je ne sais quelle ressem-
blance de configuration nous fait encore revenir vers
l'étymologie phrygienne, sans partager néanmoins les
motifs qu'en donne Sauvages, qui lui paraissent cependant
si peu plausibles; mais pour ne rien négliger dans toute
39
306 ESC
cette histoire fabuleuse et fort obscure. D'après lui, ce
fleuve, fils de Jupiter et de la nymphe Doris, fut méta-
morphosé en fleuve dans le seul but de le rendre immortel.
Son père lui accorda en outre le privilége de donner une
fête à toutes les jeunes filles qui allaient se marier. La
veille de la noce, elles venaient se baigner dans ses eaux.
Scamandre sortait de ses roseaux, les prenait par la main
et leur faisait les honneurs de son palais. Nous ne voyons
pas, dans toutes ces cérémonies, un point quelconque qui
rattache notre Éscamandre au fleuve Escamandre; et
Sauvages, tout en donnant cet aperçu, le juge lui-même
et trouve toute allusion bien au-dessus de la portée du
vulgaire. Nous citons seulement à titre de curiosité, et
nous nous confirmons davantage dans Ja pensée qu’il y a
ici, plutôt qu’un fleuve, quelque anecdote sous roche.
Éscambarla, v. Écarquiller les jambes, soit assis, soit
debout; ouvrir beaucoup l'angle qu’elles décrivent entre
elles. — És éscambarla, il a les jambes arquées ou voûtées
outre mesure; il est bancal.
Dér. de Cambo.
Éscambarlado, s. f. Plus usité au fig. Étourderie de
jeunesse; propos grivois ou obscène.
Éscambarloù, adv. — Voy. Déscambarlo.
Éscamouta, v. Escamoter; jouer des gobelets. Au fig.
faire disparaître subtilement; dérober adroitement; voler,
Éscamoutaje, s. m. Escamotage, tour de passe-passe ;
larcin; escroquerie.
Éscamoutur, s. ”. Escamoteur ; larron; escroc.
Pour l’étym. des trois mots qui précèdent, en espag.
Camodar veut dire : changer des choses de face, jouer des
gobelets : dér. du lat. Commutare, m. sign., qui pourrait
bien certainement avoir formé l’un et l’autre mot.
Éscampa, v. Jeter; rejeter ; répandre; dissiper. — Aquél
lun éscampo l'oli; aquélo bouto éscampo, cette lampe a une
fuite par où l'huile se répand, ce tonneau perd le vin. À
éscampa la broquo, dit-on d'une femme enceinte, elle ne
compte plus, elle est à son terme; on suppose par là que
pour le compte des mois de sa grossesse, elle se sert d’une
büchette qu’elle marque d'une coche à chaque mois,
comme cela se pratique pour mille calculs populaires; et
que, le dernier mois étant expiré, la taille lui devient
inutile. Éscampa d'aïgo, pisser : l'expression, par pudeur
de langage, s'étend mème à tous les besoins naturels. 4
éscampa sas fèbres, il s’est débarrassé des accès de fièvre.
Éscampa lou bla, répandre le blé de semence, semer. 4
éscampa soun ase, il a perdu son âne; il a été obligé de le
jeter à la voirie. Éscampo tout pér éscudèlos, c'est un pro-
digue; il jette son bien par la fenêtre. Lou cadis éscampo
la plèjo, le cadis rejette la pluie; il est imperméable.
Dér. du lat. Campus, champ.
Éscampadouiros, s. f. plur. Versoir, oreilles d’un
araire : les deux petits ais plats, attachés au soc, qui ont
pour destination d'écarter la terre à droite et à gauche et
de vider les sillons.
ÉSC
Éscampaire, airo, adj. Prodigue; dissipateur. — Après
un acampaïre vèn un éscampañre, prvb. Après un acca-
pareur, un dissipateur; après un avare, un prodigue. —
Voy. Acampaire.
Éscampia, v. Disperser; éparpiller; répandre en détail,
un peu partout.
Dim. de Éscampa.
Éscandaïa, v. Étalonner une mesure de capacité, de
longueur, etc., une balance, une romaine; c.-à-d. les
comparer à une mesure type que l'on nomme étalon, et
les rectifier s’il y a lieu. L’étalonnage est la fonction prin-
cipale du vérificateur des poids et mesures.
Ce mot vient du lat. Scandere, scander, réciter des vers,
en marquant la mesure, en faisant sentir la division des
pieds et vérifiant ainsi s'ils sont justes.
Éscandaïaire, s m. Étalonneur; romainier: vérifica-
teur des poids et mesures.
Éscäouda, v. Échauder; passer à l’eau bouillante, en
verser dessus; faire blanchir la viande en y versant de
l'eau bouillante pour la nettoyer d’un certain empâtement
blanc qui se forme dessus, quand on la laisse mortifier.
S'éscéouda, se brûler avec un liquide bouillant.— Moun
vin s'és éscéouda, mon vin à tourné. Frucho éscéoudado,
toute espèce de fruits avortlés, qui sèchent avant leur ma-
turité. Cat éscéouda l’aïgo fréjo l'y faï péou, prvb. Chat
échaudé craint l’eau froide.
Éscâoudun, s. ". Pousse du vin; goùt du vin tourné.
— Sén l'éscéoudun, ce Vin à un mauvais goût de pousse.
Éscâoufa, v. Échauffer ; réchauffer ; donner de la chaleur.
Au fig. animer, exciter.
S'éscdoufa, se réchauffer; s’animer; s'échauffer la bile.
Dér. de Céoufa : celui-ci signifie chauffer au feu;
Éscäoufa est plus générique et plus large, il s'étend à
toutes les manières de réchauffer.
Éscâoufado, s. f. Échauffourée; situation périlleuse et
pénible; saisissement de terreur. — Éndurère uno poulido
éscdoufado, je fus un moment dans une cruelle passe.
Éscâoufamén, s. "m. Échauboulure ; veus éruptions
qui viennent sur la peau.
Éscâouféto, s. f. Réchaud; fourneau de potager. Au
fig. zèle,‘ ardeur; empressement. — Jouga d'éscéouféto,
loc. fig., s'animer, s'appliquer au jeu, ce qui dans la plu-
part des jeux d'adresse rend le coup d'œil plus sûr et la
main plus adroite : cela se traduirait en fr. Jo
d'inspiration, si cette phrase était reçue.
Éscâoufo-iè, s. m. Bassinoire, ustensile ee
le lit. — Moure d'éscdoufo-iè, visage plein, rebondi,
animé, respirant la vivacité, qui ressemble à-une bassi-
noire.
Éscâouquia, ado, adj. Se dit d’une figure qui est: bien
mise à découvert, dont toutes les lignes sont bien appa-
rentes, débarrassée par conséquent de dentelles tombantes,
de demi-voiles, mème de mèches de cheveux tombants. —
Moure éscdouquia, minois éveillé et même un peu effronté.
7
ÉSB
Dér. de Céouquio, comme si le visage était débarrassé
de sa coquille.
Éscâoutoù ou Candèl, s.m. Dim. Éscdoutouné. Pelo-
ton de fil, de soie, de coton, de laine.
Éscâoutouna, ». Pelotonner; dévider en peloton; ra-
masser en peloton.
Éscapa, v. Échapper, fuir; se sauver; éviter; échapper
d'une maladie; sortir, se tirer d'un danger. — M'éscapavo
dé gn'én parla, la langue me démangeait de lui en parler.
Sémblo éscapa dé la quiéisso dé Jupitér, il est si fier qu'on
le croirait sorti de la cuisse de Jupiter : par allusion à la
naissance de Bacchus que Jupiter, pendant un temps,
logea dans sa cuisse, après la mort de Sémélé.
+ Dér. du lat. Capere, prendre, avec la particule extrac-
tive És; en ital. Scappare.
Éscapado, s. f. Escapade; l’école buissonnière; fre-
daine; évasion; échappée; course que fait un troupeau où
partie d'un troupeau sur un terrain défendu où il peut
faire du dégât, ou bien sur la propriété du voisin.
Éscapadoü, s. m. Échappatoire; défaite; subterfuge.
Éscapadoù, ouno, se prend aussi adjectivement pour :
capable de se sauver, prèt à s'envoler, à fuir du nid, en
parlant des jeunes oiseaux; et par ext. des personnes qui
sont en voie d'échapper à un danger, de garçons ou de
jeunes filles qui cherchent à s'émanciper, à échapper à la
( tutelle.
= Éscapouloun, s. m. Coupon d'étoffe; restant d'une
pièce; reste d’une marchandise.
Formé avec la partic. privative És, et de Cap, tête;
sans tête; avec la désinence diminutive.
Éscar, s. m. Écart; changement de direction; dévia-
tion; désarticulation du pied d'un cheval par suite d'un
accident; cartes que l'on rejette à certains jeux pour en
prendre d’autres.
Dér. de Éscarta.
Éscarabia, v. Réveiller; dégourdir; donner de l'activité.
— Aquél tén éscarabio, ce temps vif donne des forces, de
la santé, de l'entrain. És éscarabia, il est vif, alerte, dé-
gourdi, sémillant. Vas véire sé te vôou éscarabia, tu vas
voir si je vais te dégourdir, te secouer.
S'éscarabïa, se donner du mouvement; s'évertuer; se
réjouir; s'égayer. — Aquél tén s’éscarabio, le temps tourne
au vif. Couménço dé s'éscarabia, se dit d'un convalescent
qui commence à reprendre des forces.
Les vieux auteurs français, qui empruntaient peut-être
au languedocien, disaient aussi Éscarabillat pour vif,
alerte, guilleret.
+ Éscaräougna, v. Égratigner; écorcher la peau; écrouter
__ Dér. de Car, avec la particule extractive És, ou du lat.
Ercoriare, enlever la peau, formé de la mème manière, de
Ex, privatif, et de Corium, cuir, peau. :
Éscaräougnado, s. f. Égratignure; déchirure de la
peau; sa marque.
ÉSC 307
Éscaras, s. m. Porte-clayon: meuble de magnanerie
composé de deux montants dont chacun est armé de che-
villes pour supporter les clayons les uns sur les autres.
C'est sur cet échafandage qu’on élève d'ordinaire les vers-
à-soie dans leur premier âge, On les soigne en enlevant
successivement chaque clayon et les mettant tour à tour
à la portée de la main.
Ce mot est une corrup. et un péjor. de Éscalo, dont il
a un peu la forme et la pose.
Éscarassoù, s. m. Sorte de caillebotte fermentée. C'est
le résidu du petit lait bouilli à petit feu, qu'on roule en
pelottes et qu'on épice de poivre, de vinaigre et d'eau-de-
vie.
La forme diminutive du mot qui est patente, n'impli-
querait-elle pas, pour son étymologie, la pensée de Je tirer
de Éscaï, éscach, morceau, dont le dim. direct lui-même
est Éscachoù? C'est un doute encore, mais on vient de
plus loin.
Éscaravisse, s. m. Écrevisse. — Voy. Chambre.
Dér. du gr. Zxépaboc, m. sign.
Éscarcaïa (S'), v. Écarquiller les jambes, soit en mar-
chant, soit assis : se gonfler; se crever. Au fig. faire le
gros dos, l'important. — Éscarcaïa sous ièls, ouvrir les yeux
comme des portes cochères; se crever les yeux à regarder;
les tenir grands ouverts, Marcho éscarcaïa, il marche les
jambes écartées.
Éscardassa, v. Tirer les cheveux à quelqu'un, les lui
arracher; étriller quelqu'un.
S'éscardassa, se prendre aux cheveux; se battre; se
peigner; se donner une peignée.
En ital. Scardassare, carder de la laine.
Éscarlato, s. f. Écarlate, couleur d’un rouge vif.
Dér. de la bass. lat. Scarlatum, m. sign. En ital. Sear-
latto, en angl. Scarlet. On croit le primitif dérivé du cel-
tique.
Éscarlimpa, ». Grimper; gravir à grandes enjambées,
étourdiment et sans mesurer ses pas.
Formé de Éscar, tiré du fr.et du roman Limpa, glisser.
Éscarlimpado, s. f. Grande enjambée; glissade; faux
pas. Au fig. faux pas; coup de tête; étourderie; acte
irréfléchi.
Éscarnaïsse (Faïre), v. Vexer quelqu'un, lui donner
de l'inquiétude ou de l'impatience en lui tenant le bec
dans l'eau; faire endèver. Proprement, causer de l'effroi,
de l'horripilation.
Ce mot semble formé de Car et de Naïsse, c.-à-d. causer
une efflorescence sur la peau, donner chair de poule. Ce
verbe, ne s'employant qu'après le v. Faïre, n'est usité
qu'à l'infinitif : c'est le premier seul qui le conjugue.
Éscarni, ». Inspirer à une personne ou à un animal un
effroi qui l'empêche de retomber dans la même. faute
qu'il vient de commettre, par le souvenir du châtiment
infligé, ou par la crainte d'une correction nouvelle, ou par
la peur d'un danger imminent. Proprement, enlever la
308 ESC
peaü ou la chair. — Le chat échaudé craint jusqu’à l'eau
froide, parce qu'il est éscarni.
Dér. de Car, avec la partic. privative.
Éscarnimén, s. ». Correction; crainte de châtiment.
Éscarpia, v. Éparpiller ; répandre ça et là. — Le mème
que Ésparpaïa, ou du moins dans la plus grande affinité
de sens / Voy. ©. m.).
Dér. du lat. Carpere, ramasser, mettre en tas, et de la
part. privative És.
Éscarpin, s. m. Escarpin, soulier à semelle légère;
soulier de danse; chaussure des dimanches pour les villa-
geois. — Jouga das éscarpins, jouer des semelles, se sau-
ver; prendre la course.
Dér. du lat. Carpisculum, m. sign.
Éscarpina, v. Courir légèrement; jouer des jambes;
marcher vite. — Éscarpina d'ésclès, chaussé de sabots :
phrase ironique qui sert à mieux faire ressortir la gros-
sièreté et la pesanteur de cette chaussure.
Éscarpinéja, v. fréq. et augm. de Éscarpina.
Éscarpo, s. f. Carpe, Cyprinus carpio, Linn., poisson
de l'ordre des Holobranches et de la fam. des Gymno-
pomes, qui vit dans les eaux douces et dans les lacs. Les
carpes, qui deviennent fort grosses et, dit-on, fort vieilles,
sont recherchées des gastronomes pour leur délicatesse. On
les engraisse pour les améliorer encore. À ce propos, un
de nos vieux amis racontait un épisode d’un voyage qu’il
fit à Paris. Il y a longtemps de cela, et à cette époque, où
l'on n'avait pas encore inventé les locomotives et les
buffets, on donnait largement aux voyageurs le temps de
diner. À un relai quelconque, notre ami, au sortir de
table où il avait très-magistralement officié et mangé sur-
tout avec abondance d’un plat de carpes fraiches et dodues
qu'il avait trouvées excellentes, s’en fut dans le jardin de
l'hôtel commencer sa digestion et attendre le départ. Dans
ce jardin était un bassin vers lequel il se dirigea, et en
avançant, il aperçoit certains objets de forme indécise qui
s'agitaient par petils bonds au-dessus de l’eau. Il s’ache-
mine et croit reconnaitre que ce sont de petits chiens venant
de naitre qui semblaient se débattre contre la noyade.
«Oh! les barbares! s’écrie-t-il, ne pas les avoir assommés
ayant de les jeter à l’eau! » et il s'approche tout à fait
pour les secourir. peut-être... C'étaient bien de petits
chiens; mais ils étaient morts depuis longtemps, et des
carpes, les compagnes de celles qu'il venait de manger
avec tant d’appétit, les avaient dévorés à moitié. C'étaient
elles qui en les becquetant leur faisaient faire ces bonds
qui simulaient leur agonie, L'hôte engraissait ainsi les
carpes de son vivier, à la façon du Romain qui jetait des
esclaves à ses murènes. On peut imaginer l'effet que ce
spectacle produisit sur l'estomac de notre voyageur : il
paya son diner et n'emporta rien, au contraire, se pro-
mettant bien de s'assurer dorénavant de l'ordinaire des
carpes qu'on pourrait lui servir.
Éscarta, v. Écarter; éloigner; séparer; mettre de côté
ÉSC
certaines cartes pour les remplacer par d'autres — Vous
éscartés pas, ne vous éloignez pas, je vais revenir. Éscarta
la granaïo, au fig. se permettre des propos par trop égril-
lards. Aquél fusil éscarto, ce fusil écarte, éparpille le
plomb; et au fig. on dit : Soun fusil éscarto, il écarte la
dragée, de quelqu'un qui laisse échapper de petites parties
de salive en parlant. Éscarta vous, faites votre écart, dit-
on à quelqu'un dans certains jeux.
Dér. du lat. Expartire, enlever de sa part, de sa posi-
tion un objet.
Éscartaïra, v. Écarteler; tirer à quatre quartiers; divi-
ser; Couper en Morceaux.
S'éscartaïra, prendre un écart.
Éscas (Tout-) ou Tout-Ésca, adv. Dim. Tout-éscasséto.
Tout à l'heure; il n’y a qu'un instant; à peine; non loin.
— Çaï y-èro lout-éscas, il était ici il n’y a qu'un moment.
Sor tout-éscasséto, il vient de sortir à l'instant mème.
Tout-éscasséto l'y vêse un pou, j y vois à peine, à peine.
Dér. probablement du grec Oÿy éxès, non loin, tout près.
Éscassa, v. Échalasser; échafauder; élever au moyen
de supports.
S’éscassa, monter sur des échasses; au fig. monter sur
ses grands chevaux; se hausser.
Éscasso, s. f. Échasses; longs bâtons munis d’une sorte
d'étrier sur lequel se pose le pied, et dont on se sert pour
s'élever, pour passer une rivière.
Dér. de la bass. lat. Scalacia, m. sign. péj. de Scala,
échelle.
Éscava, v. Évider; échancrer, terme de tailleur et de
couturière; tailler, couper en dedans.
Dér. de Cava.
Éscavaduro, s. f. Échancrure; coupure faite en dedans,
en forme de demi-cercle.
Éscavèl, s. m. — Voy. Débanaïre, m. sign.
Éscavéla, ». Dévider avec l’éscavel.
Éscharpo, s. f. Écharpe; ceinture de soie, insigne de
fonctions publiques.
Corrup. du fr.
Éschirpe ou Taïo-cébo, s. »”. Taupe-grillon, courtillère,
Gryllo talpa, Linn. Cet insecte, orthoptère, à peu près de
la longueur et de la grosseur du doigt, quelque peu sem-
blable à l’écrevisse, hideux à voir, vit presque toujours
| sous terre. Il est fort connu et fort redouté pour les dégâts
qu'il cause dans les jardins, où il coupe la racine de beau-
coup de plantes polagères. Nos paysans ne manquent jamais
de dire, avec un grand sérieux, qu’on les tue en soufilant
dessus. Ils en donnent la preuve au premier témoin qui se
trouve là quand, en bèchant, ils trouvent un taupe-grillon.
Ils le saisissent délicatement par le corselet entre le pouce ‘
et l'index, soufflent dessus à deux ou trois reprises, et en
même temps ils le serrent fortement à l’étouffer; ce double
procédé est infaillible. Le fait est que, avec ou sans
témoins, il est rare qu’un paysan, rencontrant un pr
le tue sans souffler dessus.
ÉSC
Ésclafi, v. Dégorger; lâcher la bonde d'un réservoir.
Au fig. mettre à découvert; publier un secret; déceler un
complot. — S'ésclafi dé rire, éclater de rire, rire à gorge
déployée; crever de rire.
Dér. par opposition de Clafi.
, #. m. Épanchoir; ouverture d'une vanne.
, v.— Ce mot, qui est emprunté au fr. Éclairer,
ne participe point de ses diverses acceptions. Il n’est guère
employé en languedocien que comme synonyme de Éclair-
cir, et devient surtout un terme technique de magnanerie
pour exprimer l’action de disséminer les vers-à-soie qui
ont grossi et sont devenus plus serrés, sur un plus grand
nombre de tables. On le dit également des plants de légu-
mes qui sont semés trop drus et dont on arrache une partie
pour donner plus de distance aux autres. Cependant, dans
cette dernière acception, on dit plus souvent Ésclaïrè.
Jamais on ne se sert de ce dernier verbe par rapport
aux vers-à-soie.
Ésclaïra est admis quelquefois substantivement dans
pareille locution : un home ésclaïra, un homme éclairé,
instruit; mais c'est du languedocien un peu francisé.
Ésclaïrado, s. f. Clairière; lieu découvert au milieu
d'un bois; action d’éclaircir les vers-à-soie; diverses repri-
ses de ce dernier travail. — À fa trés ésclaïrados; il a fait
trois levées de vers.
Ésclaïre ou Éliou, s. m. Éclair; clarté éblouissante. —
Ésclaïre ne s'emploie que dans le style soutenu ou en
poésie. — Voy. Éliou.
, ©. — Voy. Ésclaïra. — Lou tén s'ésclaïris, le
temps s’éclaircit.
Ésclairido ou Lucado, s. f. Intervalle de temps serein
par un temps de pluie; rayon de soleil, jet de lumière à
travers les nuages.
Ésclandre, s. m. Esclandre; scandale public; accident,
événement qui fait de l'éclat et qui est toujours fâcheux
et honteux.
Dér. du grec Zxéävôahov, scandale.
Ésclanti, ». Retentir; éclater; résonner; produire un
son éclatant.
Dér. du lat. Clangere, m. sign.
Ésclapa, v. Fendre du bois, le dépecer, le détailler en
gros quartiers; briser. Au fig. battre, meurtrir une per-
sonne, Jui casser bras et jambes.
Dér. de Clap, cla; tas, monceau de pierre, avec la part.
disjonctive És; c.-à-d. diviser une pierre.
Ésclapaïre, s. m. Fendeur de bois; charpentier.
Ésclapéto, s. f. Petite vérole volante, qui consiste en
une éruption de pustules rarés, clair-semées et qui ne
paraissent pas simultanément, comme dans la petite vérole
ordinaire. Les nouveaux boutons ot souvent Lpi
que les premiers sont déjà secs.
Ésclapo, s. f. Grand quartier de bois, de büche; jus
de bois refendue. Au fig. taille, conformation humaine.
— Uno fio dé bèlo ésclapo, un beau brin de fille; une fille
ÉSC 309
bien charpentée et de belle venue. Un por dé bèlo ésclapo,
un pourceau à laille allongée, bien développé et qui annonce
de devenir grand et gros.
Ésclato, s. f. Engelure; gerçure; crevasse à la peau
causée par le froid, ou par une humeur scrofuleuse. —
Médéci dé las ésclatos, médecin d'eau douce; avocat des
petits procès.
Dér. de Elatum, supin de Ezferre, produire au dehors,
ouvrir.
Ésclavaje, s. m. Esclavage; servitude; soumission ;
dépendance ; occupation assujétissante,
Ésclavo, adj. des deux genres. Esclave; celui dont la
profession ou l'occupation le tient à l’attache et l'empêche
de sortir de sa maison.
Dér. du lat. Sclavus, m. sign. — Ce dernier mot peut
être tiré de sa substance même et dériver de Clavis, clef,
c.-à-d. enfermé sous clé. Il peut venir aussi du latin clas-
sique Sclavi, les Esclavons, parce que peut-être ces peu-
ples perdus et subjugués par les Romains ou les Germains
étaient tous réduits à la condition d'esclaves ou de serfs.
Peut-être encore cela tient-il aussi à quelque anecdote
historique où ces peuples figurent comme le type de l’es-
clavage.
Ésclô, s. m. Dim. Éscloupé; péj. Éscloupas. Sabot,
chaussure de bois, creusée tout d’une pièce, pour y loger
commodément le pied avec ou sans chaussons, que l'on
garnit souvent de paille à l’intérieur. — Éscld à La bésé-
gudo (Voy. Béségqudo). Las sèlétos d'un éscid, le double
talon d’un sabot, dont l'un est placé au talon et l'autre
sous la naissance des orteils. Ce ne sont que les sabots les
plus grossiers, ceux des gens de peine et des montagnards
qui ont de doubles talons élevés pour mettre le pied à
l'abri de la boue et de la neige. Lou moure d'un ‘ésclà est
la partie de devant qui se recourbe au-dessus comme les
souliers à la poulaine, et présente quelquefois un angle
saillant en avant, comme le taille-mer d’une proue, afin
de mieux résister au choc des pierres. €
Ce mot paraît dérivé du latin barbare Clopus, pied
boiteux, formé lui-même du gr. Xw6xo%<, m. sign., parce
que le sabot fait marcher lourdement comme un pied-bot ;
peut-être aussi parce qu'avec cette chaussure, le pied est
informe et ressemble assez au sabot d’un cheval ou à un
pied-bot. Ce qui paraît d’ailleurs donner encore raison à
cette étymologie, c'est le P final, que le mot porte dans
ses composés Éscloupé, Éscloupiè, Éscloupéja, qui était
certainement dans son orthographe, mais que dans le pri-
mitif notre dialecte, qui ne le fait pas sentir à la pronon-
ciation, a dû supprimer en l'écrivant.
Éscloupé, s. m. Dim. de Éseld. Petit sabot, sabot d’en-
fant; petit haricot blanc, qui nous vient des montagnes
du Velai, et qui est plus délicat que le nôtre. On l'appelle
ainsi par un dim. parce que son grain, qui est plus petit
que les autres, est aussi plus arrondi et un peu dans la
forme d’un sabot.
310 ÉSC
Éscloupéja ou Éscloupinéja, v. fréq. Saboter, faire du
bruit en marchant avec des sabots; se faire entendre de
loin avec des sabots ; marcher lourdement avec des sabots,
comme les scieurs de long auvergnats, qui n'ont jamais
d'autre chaussure dans nos pays.
Éscloupiè, s. m. Sabotier, qui fabrique ou qui vend des
sabots.
Éscloupinéja, v. Double fréq. de Éscloupéja ( V. c. m.).
Ésclurci,s. m. Éclipse; disparition, obscurcissement
Lotal où partiel d’un astre, par l’interposition d’un autre.
Ce mot vient-il de Éscu, obscur, ou du lat. Ex, parti-
cule privative, et Luæ, lucis, C.-à-d. sans lumière; ou bien
n'est-il qu'une corruption du fr. Échipse? Toutes ces opi-
nions sont soutenables et rationnelles.
Éscoïre (S'), ». S'écorcher naturellement; s’entamer la
peau par un frottement continu. — Les enfants au maillot
qui ont beaucoup d’embonpoint sont sujets à s’écorcher
dans les plis que forme leur chair. On dessèche ces écor-
chures en les saupoudrant de vermoulure de bois qui est
un absorbant et un dessicatif. Comme ils ont naturelle-
ment la tête engoncée dans les épaules, faute d’avoir les
vertèbres du cou assez fortes pour la soutenir, ils s'écor-
chent souvent dans les plis de cette partie; on prévient
cet inconvénient en leur passant autour du cou un petit
collier de menue verroterie qui empêche l’adhérence et le
frottement des parties qu'il sépare.
Dér. de Coïre.
Éscolo, s. f. École, classe où l’on enseigne la lecture,
l'écriture, etc.; local lui-même de l'école; ensemble des
enfants qui la fréquentent. — Moun pèro mé fai l'éscolo,
mon père est mon professeur, mon maître d'école.
Dér. du lat. Schola, m. sign.
Éscondre, v. — Voy. Réscondre.
Dér. du lat. Condere, cacher, voiler.
Éscorfi, s. m. Avorton; enfant malingre; personne
sèche, maigre, décharnée, rachitique.
Ce mot est-il une corruption d’un composé de la partie.
privative És et de Car, par le changement de l’a en o, ce
qui signifierait: sans chair; ou bien serait-il, par imita-
tion, par mépris de ce qu’il représente, tiré de l’ital. Scor-
zone et Scorza, en cat. serpent, vipère?
Éscorjo-rosso, phr. faite. Écorcheur de voirie, équar-
risseur. — C'est un état généralement méprisé, et ce terme
devient une injure grossière donné comme sobriquet qui
n’est usité que dans les dernières classes du peuple.
Dér. de Éscourja et Rosso.
Éscorso-dé-sèr, s. f. Proprement, écorce de serpent;
ce qui semblerait en indiquer la peau, mais qui en est au
contraire la chair, la pulpe lorsqu'elle est débarrassée de
la peau, des intestins et de la tête. Les gens du peuple
salent et conservent cette pulpe à laquelle ils attribuent
de merveilleux effets médicinaux, principalement pour
l'hydropisie et les affections de vessie. Inutile de dire que
la science se refuse à lui reconnaitre les mêmes vertus.
ESC
C'est un préjugé fondé sur l'espèce de terreur superstitieuse
qu'inspire cet animal qu'on regarde comme cabalistique,
La médecine et la cabale se tiennent par la main, dans
l'esprit des classes ignorantes : nos médecins et nos char-
latans, qu'elles assimilent et confondent volontiers, ne
sont encore pour elles que des mires. Par suite de cette
mème prévention, la graisse de serpent est également re-
cueïllie avec soin et respect même, comme antidote des
douleurs rhumatismales et des simples courbatures. L'an-
guille et la lamproie, sœurs innocentes de la couleuvre,
n'ont sans doute ni plus ni moins de propriétés curatives,
il ne leur manque que cette horreur traditionnelle qui date
de la Génèse, Peut-être aussi des espèces venimeuses de
serpent, dont la couleuvre est restée solidaire, malgré son
innocuité, mais par ressemblance de conformation, ont-elles
valu à plus juste titre à la sèr la répulsion qu'elle inspire
et le crédit superstitieux qu'on à fait à sa graisse et à sa
peau par un enchainement d'idées assez singulier et qui
irest pas rare dans les préjugés populaires.
Éscorto, s. f. Escorte; troupe qui accompagne, qui fait
la conduite, pour rendre honneur ou pour veiller à la
sureté de quelqu'un.
Dér. du Jat. Cohors, m. sign.
Éscoto, s. f. Latte; mairin de châtaignier-sauvageon
refendu en lames peu épaisses, qui sert, dans nos pays, à
relier les futailles de bas-fond.
Ce mot, d'après Sauvages, parait dériver du lat. Excu-
tire, parce que les broyeuses de chanvre pour espader
la filasse, se servent d'Éscotos comme espadons.
Éscouba, ». Balayer; nettoyer avec un balai; enlever
tout, tout emporter.
Éscoubal, s. m. Écouvillon de boulanger; longue perche
au bout de Jaquelle sont assujétis quelques chiffons qu'on
imbibe d'eau pour balayer les cendres du four après
qu'avec le fourgon, Rédable, on a tiré la braise. Au fig.
femme sale, déguenillée.
Éscoubéto, s. f. Dim. de Éscoubo. Petit balai de bruyère
avec lequel les fileuses de soie battent les cocons dans la
bassine. L
Éscoubia, ». fréq. ou dim. de Æscouba. Balayer les
boues d’une ville; exercer la profession de balayeur de
rues.- Au fig. chasser; disperser; dissiper, faire dispa-
raitre.
Éscoubiaïre, s. m. Balayeur de rues; celui qui est
chargé du balayage, boueur. |
Éscoubios, s. f. plur. Balayures; immondices ramas-
sées en balayant.
Éscoubioun, s. ». Cendrillon; petite fille sale, mal
peignée, négligée par ses parents et qui n'est employée
qu'aux travaux les plus humbles de la maison, travaux |
dont le balayage fait partie.
Éscoubo, s. f. Dim. Éscoubéto; péj. Éscoubasso. Balai ;
poignée de verges, de bruyère, de genêt, de crin, de plu-
mes, ele, pour balayer. — Éscoubo dé brus, balai de
A TE, LS 1. à
ÉSC
bruyère. Éscoubo dé sagno, balai fait avec les tiges du !
millet aquatique.
Éscoubo est aussi le nom de ce long filet à pêcher, appelé
en fr. Seine, Deux pêcheurs le tiennent chacun par une
extrémité, et, en suivant le cours de l'eau, le tranent sur
le lit de la rivière qui en est ainsi balayée.
Dér. du lat. Scopæ, m. sign. En bas-bret. Skubéter.
Éscoudén, s.m. Dim. Éscoudénqué ; péj. Éscoudénquus.
Dosse, terme de scieur de long, première planche qu'on tire
d'une bille, et la dernière, qui est sciée seulement d'un
côté et-de l'autre équarrie : elle est toujours prise dans
l'aubier du bois. Cette planche est toujours mal faite,
maigre sur certains points et renflée sur d’autres. Au fig.
personne maigre, longue, plate et mal charpentée,
Sauvages lui donne pour étymologie le gr. “Esyate,
dernier, qui est à l'extrémité. Cette dérivation s'éloigne
beaucoup par la forme au moins du mot, si ce n'est par
le sens. N'aurait-il pas pu être trouvé dans Je grec aussi
une autre racine qui semblerait mieux réunir les deux
conditions? Par exemple Zxÿros, cuir, peau, puisque la
dosse est l'enveloppe ou la peau du tronc. De là s'est formé
probablement notre mot Coudéno, couenne, qui se rap-
proche sensiblement par sa configuration et présente la
plus grande analogie d'acception. Nous nous en tiendrons
là sans chercher dans le latin, qui demanderait peut-être,
comme toujours, à intervenir par quelque bout.
Éscoudre, v. Abattre des noix avec une gaule; les
gauler; faire tomber avec une gaule tout autre fruit qu'on
ne peut cueillir que par ce moyen. Au fig. appliquer une
volée de bois-vert à quelqu'un.
Sauvages donne à ce verbe l’acception de battre le blé
au fléau, : cela peut être vrai dans d'autres districts de
notre idiome, puisqu'il prétend qu'on employait l'expres-
sion Excodare bladum dans la bass. lat., qu'il confond
sans doute avec le barbarisme tabellionesque des vieux
actes; mais dans notre dialecte, l'opération dont s'agit se
dit Éscoussouna et non autrement. |
Dér. du lat. Excutere, secouer, faire sortir en secouant.
Éscoufia, v. Confisquer; faire disparaître: arrêter nue
personne, l& mettre en prison; tuer.
L'argotide la langue verte s'est emparé du mot pour en
faire Escoffier avec le mème sens.
Éscoufigna, v. Serrer; presser; entasser.
- S'éscoufigna, se presser les uns les autres ; se rencogner. —
S'éscoufigna dé rire, rire malgré soi, rire tout en se retenant.
Dér. de Coufi et de És, part. explétive.
Éscoufignaire, s. m. Qui serre, qui presse; qui aime
dans une presse ou dans une veille à pousser, à presser
les gens, surtout les jeunes filles, les uns contre les autres,
oucontre une barrière, ou dans un angle d'un appartement :
sorte d’amusement ou de niche fort usité à la campagne.
-Éscoufo, sf. Écrou d'une vis de pressoir: e'est cet
écrou que les pressureurs tournent avec leur M et qui
agit sur la-presse.
ESC
Éscougassa, v. Aplatir; renverser quelqu'un sur son
derrière, — S'éscougassa, s'aplatir en tombant. Un nas
éscougassa, un nez écrasé, épaté, écaché.
Dér. de Couga, c.-à-d. donner la position d'une poule:
qui couve.
Éscouïè, Éscouïèiro, s. et adj. Écolier, écolière; celui
ou celle qui va à l'école.
Dér. de Schola; Éscolo.
Éscoula, v. Écouler; égoutter; vider; mettre à sec.
S'éscoula, voir le fond de sa bourse, vider son sac. —
M'an éscoula, on m'a gagné tout mon argent au jeu.
Dér. du lat. Colare, couler.
Éscoulouèr, s. m. Écouloir où envidoir, outil de dévi-
deuse de soie pour envider sur un rochet ou grosse bobine
la soie en flotte : c’est une broche de fer qui tourne hori-
zontalement sur deux poupées portées sur un plateau de
bois. Le rochet est enfilé dans la broche qui à l'autre
extrémité porte une roue en fer qui lui sert de volant : on
fait tourner cette bobine en frappant dessus avec un petit
outil en cuir rembourré de crin qu'on nomme Manéto.
Éscoumoussa, v. Terme d’aire, égréner les gerbes au
fléau sans les délier. On ne fait par cette œuvre que dé-
florer la gerbe, dans le but d'obtenir du blé dont on a
besoin promptement ou plutôt du blé de semence, parce
qu'on ne recueille par ce moyen que le grain des plus
longs épis, qui est toujours plus beau et mieux nourri, et
que d’ailleurs il n'est ni mêlé, ni chargé de graines étran-
gères dont les tiges montent moins haut et sont renfer-
mées dans le corps de la gerbe. Cette défloraison opérée,
on mêle ces gerbes avec les autres pour le battage ou le
foulage généraux.
Dér. du lat. Excussum, supin de Excutere, secouer,
battre.
Éscoumoussun, s. ". Blé qu'on obtient par l'opération
décrite dans le précédent article.
Éscoundu, udo, part. pass. de Éscondre /Voy. €. m.).
Caché.
Éscourja, v. Écorcher, enlever la peau; excorier; ra-
viner une terre, en enlever la superficie par l'effet des
grosses pluies. Au fig. déchirer quelqu'un par des médi-
sances ou des calomnies ; faire surpayer ; parler mal sa fangue.
Dér. du lat. Excoriare, m. sign.
Éscourjadoù, s. m. Écorchoir; voirie; abattoir.
Éscourjaduro, s. f. Écorchure; déchirure, éraflure de
la peau.
Éscournifla, v. Écornifler ; faire le parasite ; être alléché
par l'odeur d'un repas; chercher des franches lippées.
Formé de És, part. privative, du lat. Cornu, corne, et
de Nifla, flairer ; ce qui rappellerait une idée d'£corner et.
de flairer, double étude des parasites. Sauvages prétend
cependant que le mot intermédiaire devrait signifier Cour,
par où : flairer aux cuisines des cours.
Éscourniflaire, aïro, adj. Écornifleur; parasite; pique-
assiette.
31#
312 ÉSC
Éscourpiou, s. m. — Voy. Éscroupiou.
Éscousso, s. f. Course; traite de chemin; course pour
prendre élan. — Préne l'éscousso, prendre son élan. Y-séraï
d'uno éscousso, j'y serai d'un saut.
Dér. de Cousso.
Éscoussoù, s. m. Fléau à battre le blé.
Dér. du lat. Excutum, supin de Excutere, battre, se-
couer.
Éscoussouna, v. Battre le blé avec le fléau; par
ext. s'applique à toute correction de bois-vert bien condi-
tionnée,
Éscoussounaîïre, s. m. Batteur de blé; ouvrier chargé
de battre le blé.
Éscouta, v. Écouter, prêter l'oreille pour ouir; suivre
les conseils qu'on vous donne. — Se dit aussi de la part
d'une fille pour agréer la cour que lui fait un garçon.
S'éscouta, s'écouter; se dorlotter; s'occuper à l'excès de
soi; faire trop d'attention à la moindre incommodité, à sa
santé; parler avec affectation et lentement. — Aquél home
és bièn éscouta, cet homme est fort bien en cour, il a du
crédit auprès des puissants du jour, ou seulement chez les
hommes du pouvoir.
Dér. du lat. Auscultare, m. sign.
Éscoutado, s. f. Reprise; intervalle; boutade. — Pldou
à bèlos éscoutados, il pleut par ondées, par averses inter-
mittentes, à diverses reprises. Partirén à la prémièiro
éscoutado, nous partirons au premier intervalle de beau
temps. Dourmi à bèlos éscoutados, dormir à bâtons rompus,
d’un sommeil intermittent.
Éscoutaïre, aïro, adj. Curieux; qui écoute aux portes.
Éscoutéla, v. Égorger à coups de couteau; poignarder;
éventrer.
S'éscoutéla, se battre à coups de couteau; jouer des cou-
eaux.
Dér. de Coutl.
Éscouti, v. Amener à bien ; élever, faire.éclore heureu-
sement. — On le dit des petits enfants, des poussins, des
petits des animaux domestiques, des vers-à-soie à la couvée,
qui exigent beaucoup de soins et de peines pour les pré-
server des maladies et des accidents fächeux ordinaires à
ce premier âge. On le dit aussi d’un malade qu'on amène
à la santé.
Éscoutous, s. m. plur. ou mieux sorte d’adv. Écoutes,
aux écoutes, en est la traduction. — Ana d'éscoutos,
aller aux écoutes, écouter aux portes. Qué vaï pér éscou-
toùs, éscouto sas douloùs, prvb. Qui se tient aux écoutes,
entend souvent son fait; celui qui écoute aux portes en-
tend souvent des choses fort déplaisantes pour lui.
Dér. de Éscouta.
Éscrafa, v. Effacer: biffer; raturer. — Poudès bouta
aquù âou libre das éscrafas, dit-on en parlant d’une mau-
vaise dette : vous pouvez la considérer comme un compte
biffé. Cette locution proverbiale se dit d'une manière plus
générale pour toute sorte de choses qu'il est sage d'oublier:
ESC
c.-à-d. vous pouvez mettre cela au rang des péchés oubliés
(en confession s'entend).
Formé de la partic. privative És et du gr. Ppégew,
écrire.
Éscrafaduro, s. f. Ratture; effaçure.
Éscramacha, v. Écraser; écacher; écarbouiller.
Éscramachado, s. f. Abattis d'objets écarbouillés;
action d’éraser.
Éscranqua, v. Éreinter; harasser: accabler de fatigue.
— Un éscranqua, un estropié; qui a la hanche déboïitée.
On le dit aussi des meubles qui sont désassemblés et pi
jouent par vétusté dans leurs joints.
Formé de la part. privative És et de Anquo, hanche :
le C qui précède R n’est là qu’explétif et par euphonie, la
rencontre de s et de r étant peu facile à lier.
Éscräouma, v. Échauder; jeter de l'eau bouillante
dessus, comme l'on fait aux pourceaux égorgés pour les
dépiler, et à la viande qu'on fait blanchir avant de. la
mettre dans Je pot au feu.
Dér. de Créoumo.
Éscrapouchina, ». C'est là le technique languedocien
qu'on cite le plus volontiers par la difficulté d’en traduire
toute la portée. C'est quelque chose de plus fort que És-
cramacha et Éspouchiga, qui participe cependant à ces
deux verbes et signifie : écraser, aplatir un corps juteux
par un coup violent ou une forte pression. Il ne s'applique
en général qu'à l'encontre d’un animal qu'on écrase, et
dont le crapaud est le type; car il se joint à ce verbe une
idée d'horreur et de dégoût, et d’une humeur sanguino-
lente qui s'échappe sous la pression. Nous pensons donc
que la racine de notre mot est Grapdou, crapaud, et qu'il
veut dire: Écraser comme un crapaud.
Éscrasa, v. Écraser; briser et aplatir au moyen d'un
poids, d’un effort; harasser de fatigue; ruiner par des -
impôts ou autrement.
S’éscrasa, s'ébouler, se démolir. — Aqud m'éscraso, cela
me ruine, cela complète ma ruine.
Emp. au fr.
Éscrase, s.m. Grande quantité d’une chose; abondance
extrème d’une récolte. — Aquéste an y-doura dé poumos
un éscrase, comme si l'on disait : il y aura cette année
des pommes à écraser l'arbre et ceux qui les emporte-
ront.
Éscrébassa, assado, adj. Crevassé, entr'ouvert; fen-
dillé. Au fig. personne qui marche les jambes écarquillées
comme les oies et les herniaires.
Péjor. de Créba.
Éscri, part. pass. de Éscrioure et s. m. Écrit; acte,
mémoire; convention; imprimé quelconque et en général.
Dér. du lat. Scriptus, m. sign.
Éscrioure, v. Écrire; tracer des lettres; mander par
lettre. — L'éscrioure li lèvo pas lou légà, prvb. La soif ne
lui Ôte pas la faim.
Dér. du lat. Scribere, m. sign.
| ÉSC
Éscritèou, s. m. Écriteau; affiche; cartel; devise.
Éscritori, s. m. Écritoire: encrier; vase pour contenir
l'encre. à
Éscrituro, s. f. Écriture, caractères écrits. — La Sénto-
Éscrituro, la Sainte-Écriture; les livres sacrés. Se dit
aussi au plur. et absolument : las Éscrituros, les Saintes-
Écritures. À l'éscrituro, il sait écrire. Légis touto méno
d'éscrituro dé man, il sait lire toute espèce d'écriture,
terme d'école, par opposition avec ce qui est imprimé,
lithographié ou gravé.
; , s. m. Écrivain public; clerc d'avoné, de
notaire, ete. ; auteur. — És din lous éscrivans, il est dans
la classe des écoliers qui apprennent à écrire.
Éscrô ou Éscrouquur, s. m. Escroc; filou; homme de
mauvaise foi. — Voy. Éscrouqua.
Éscroù, s. m. Écrou; pièce de fer on de bois, taraudée
en dedans, qui entre dans une vis et sert à la serrer ou à
la fixer.
De l’allem. Scranbe, vis.
Éscroupiou, ou Éscourpiou, s. m. Dim. Æseroupioulé ;
péj: Éserouptoulas. Scorpion, Scorpio ou Scorpius, Linn.,
insecte aptère, de la fam. des Acères, habitant surtout les
lieux humides. Sa description est inutile : sa figure se
trouve dans tous les almanachs, en sa qualité de signe du
zodiaque présidant au mois d'octobre. Quoi done lui a
valu tant d'honneur? car il n’a rien que de très-laid,
aucune bonne qualité, et s'il est méchant il n’a pas assez
de puissance pour faire le mal. On peut donc conseiller
aux personnes qui en trouveraient dans leur lit, — et il
est vrai qu'elles pourraient y trouver mieux, mais cela
arrivé, — de ne pas mourir de peur : elles ont longtemps
à vivre, si elles ne doivent mourir que de la piqûre du
scorpion: — Sémblo un éscroupiou, dit-on d'un homme
contrefait, bancal ou bancroche.
Dér. du lat. Scorpio, m. sign.
Éscrouqua, v. Escroquer; filouter; obtenir par fraude
plus que par adresse, mais par une manœuvre illicite et
peu honnête.
Dér: de la bass. lat, Excrustare, m. sign., ou formé de la
part.abstractive És. et de Cro, c.-à-d. tirer avec un croc.
c , Œuuso, s. et adj. Escroc; voleur, filou.—
Voy Éscrd.
Éscrousta, v. Écrouler; enlever la croûte d’une gale,
l'escarre d’une plaie, le vieux enduit d’un mur, un lit de
pierre extérieur; écrouter la terre durcie ou gelée.
Dér. de Crousto. 4
Éscruncèl, s. m. Archét de berceau, cercle que l'on
met sur le berceau d'un enfant pour soutenir les langes ou
Ja couverture en guise de rideau lorsqu'il dort, et les em-
pêcher de s'appliquer sur la figure. Se dit aussi de l’archet
placé sur une jambe malade pour soutenir les couver-
tures.
Ce mot, qui a dû suivre de nombreuses transformations
ou métathèses pour arriver à sa prononciation actuelle,
ÉSC 313
parait avoir pour racine le Jat. Arcella, berceau, tonne,
arceau de verdure; ainsi que le mot Arésele qui a à pen
près la mème signification, mais plus généralisée.
Éscu, s. m. Dim. Éscupé, augm. Éseupas. Écu, an-
cienne pièce de monnaie d'argent. — Comme en français,
cette désignation ne représente plus qu'une valeur nomi-
nale, empruntée à l'ancien système de numération, dont
le type était la pièce de trois livres ou petit écu, quoiqu'on
dise fort bien un éscu dé cin frans, pour désigner la pièce
de cinq francs : la valeur qu’on énonce par le mot éscu,
comme valeur abstraite, est de trois francs. Autrefois il y
avait une foule d'objets dont le marché se traitait par écns,
comme les mules, les porcs, ete. Aujourd'hui, il n'ya
guère que les gages des domestiques qui ont conservé ce
type; mais aussi pour les gens de nos pays ce mode de
calcul est à peu près exclusif : dès, vint, cént éscus, expri-
ment toujours trente, soixante, trois cents francs.
Dér. du lat. Scutum, bouclier, écu, venu du gr. Zxütos,
cuir, peau, dont étaient faits les premiers boucliers. L'écu
monnaie prenait ce nom de ce que l'écn de France y était
gravé. ‘
Éscu, Éscuro, adj. Obseur; noir; sombre.
Corrup. du lat. Obseurus, m. sign.
Éscudéla ou Éscunla, v. Dégoiser; divulguer ; dévoiler
par le menu, du fil à l'aiguille; déceler un complot ; avouer
tous les détails d’un secret; mettre au jour. — Éscudéla,
dans le principe, a signifié verser d’une écuelle dans un
autre vase, et par ext. verser le potage. De cette opération
s'est formé le sens figuratif; parce qu’en dévoilant un
secret, on verse, on fait paraître au grand jour ce qu'on
avait dans l'âme, comme en versant le potage, on met à
jour tout ce que renfermait le pot au feu. Éscunla n'est
qu'une corruption ou une contraction de Æscudéla. La
racine est donc Éscudlo.
Éscudélado, s. f. Écuellée, plein une écuelle; le contenu
d’une écuelle.
Éscudèlo, s. f. Dim. Éscudèléto. Écuelle; vase d'argent,
d'étain, de bois, de terre, destiné à contenir du bouillon,
du lait, du potage, etc., pour manger; assiette à soupe des
paysans, qui a la forme d’une écuelle, sans oreilles. On
l'appelle aussi Assièto bécudo, parce qu'elle a un petit bec
comme les brocs, pour faire égoutter le potage sans le ré-
pandre. — Pléou à bèlos éseudèlos, il pleut comme si on
versait de l’eau par écuellée; il pleut à seaux, appartient
au mème ordre d'idées.
Dér. du lat. Seutella, m. sign.
Éscudéloù, s. m. Dim. de Æscudèlo. Vaisselle, petit vase
en forme d'écuelle et percé de petits trous dans le fond, où
l'on met égoutter le lait caillé et où il prend cette forme
de fromage à la crème, qu'on appelle dans notre pays
Toumo.
Éscuma, v. Écumer; ôter, enlever l'écume du pot au
feu, d’un liquide qui bout. Au fig. enlever la fleur; écrè-
mer; s'approprier ce qu'il y a de meilleur et de plus net;
40
314 ESC
ne laisser aux autres que de l’eau claire. — Éscuma est
quelquefois verbe neutre : l’aïgo, la sabounado éscumou;
mais ce n’est là qu'une phrase française dont on doit se
préserver en pur languedocien, bien qu’elle soit usitée. La
véritable expression technique dans ce cas, est Éscuméja.
Éscumadouiro, s. f. Écumoire, grande cuiller percillée
de trous pourécumerle potage ou enlever la graisse d’un coulis.
Éscuméja, v. fréq. — Voy. Éscuma. Écumer; produire,
jeter de l’écume, pris dans un sens neutre. Au fig. écumer
de colère, rendre l’écume comme font les chevaux par les
pores quand ils suent fortement, soit par la bouche quand
ils sont fougueux et que le mors les fatigue; baver comme
les chiens enragés ou les personnes épileptiques.
Dér. de Éseumo.
Éscumèl, s. m. Cluseau, champignon de l'espèce des
Laminés, d’un blanc de lait, très-bon à manger. Il a au-
dessous du chapiteau une sorte de mousse ou plutèt de
peluche : il porte un anneau au collet au milieu de sa tige.
Il a beaucoup de rapport avec l’oronge, Dorgue, Boulé
rouje, pour la forme et le goût : il est même plus délicat
et d’une conformation plus régulière, parce qu’il pousse
sur des terrains plus meubles, où il ne trouve que peu
d'obstacles à son développement. Il vient d'ordinaire dans
les près, les terrains d’alluvion récente et les bruyères,
broussos, et surtout en automne.
Voici du reste la description donnée par les micologues,
qu’ilest bon de reproduire en cette matière délicate à tous
les points de vue pour bien reconnaitre ces champignons :
Éscumel, agaric élevé, Agaricus procerus, calubrinus,
Roques. Taille élancée, atteignant souvent 48 ou 20 centi-
mètres, quelquefois jusqu’à 40. Son chapeau, d’abord. de
forme ovoïde, s'étale ensuite peu à peu en forme de parasol,
mais il est toujours plus ou moins mamelonné au centre,
d'un rouge panaché de brun, couvert d’écailles imbriquées,
formées par l’épiderme qui se soulève : feuillets blanchâtres,
libres, inégaux, très-retrécis à leur base, se terminant à
une certaine distance du pédicule, lequel est panaché de
blanc et de brun, cylindrique, fistuleux, muni au sommet
d’un collier mobile et persistant : chair d’une odeur et
d’une saveur agréables.
Son nom est dû sans doute à sa couleur qui le fait res-
sembler à un flocon d’écume.
Éscumo, s. f. Écume; bave; mousse blanche qui s'a-
masse sur un liquide en ébullition; bave mousseuse qui sort
de la bouche de certains animaux irrités ou échauffés; sueur
blanche qui s’amasse sur un cheval après une course pénible.
Dér. du lat. Spuma, m. sign. :
Éscumoüs, ouso, adj. Écumeux; écumant; qui jette,
qui rend, qui produit de l’écume.
Éscunla, v. — Voy. Éscudéla. De plus que Éscudéla, il
signifie : accoucher; mettre bas. Au fig. accoucher d’une idée.
En bas bret. Éscullar, verser. ‘
Éscupagnas, s. m. Augm. de Éscupagno. Gros crachat.
Éscupagno ou Éscupigno, s. f. Salive; espèce d'écume
ESC
qu'on aperçoit au printemps sur certaines herbes et qui
provient, suivant quelques naturalistes, d’une multitude
de petites bulles d’une liqueur visqueuse que rejetterait
un insecte blotti dans la tige, et suivant d’autres, de l’ex-
sudation de la plante elle-même ou de l’ébullition de la
sève. — Aquél oustéou és basti én d'éscupagno, cette maison
est bâtie peu solidement, ses murs sont de boue et de crachat.
Éscupagnoüs, ouso, adj. Imprégné de salive; fait avec
de la salive; qui salive beaucoup.
Éscupi, v. Cracher; rejeter la salive ou les crachats de
la bouche; rejeter. — Aquélo éstofo éscupis la plèjo, cette
étoffe est imperméable. Éscupà d'émbas ou pér débas, aller
à la selle.
Dér. du lat. Spuere, supin Sputum, venant du gr. [tiw,
m. sign.
Éscupignéja, ». fréq. de Æseupi. Crachoter, cracher
peu et souvent,
Éscura, v. Écurer; nettoyer la vaisselle de cuivre, ce
qui se fait avec du sable et un torchon de laine, ou avec
des tiges de prèle, la Cassboudo. — En style peu révé-
rencieux, éscura soun péirôou signifie : aller à confesse :
on le dit surtout de quelqu'un qui n'y est pas habitué et
qui y va dans une grande occasion.
S'éscura, expectorer; purger la pituite.
Dér. du lat. Curare, soigner.
Éscuré, s. m. Épithème; sorte de topique, d’amulette,
qu’on applique sur la poitrine des personnes malades, sur-
tout des enfants, pour faire diversion à une affection et la
déplacer. La composition de ces sortes d'emplâtres diffère
suivant la nature de la maladie. Le plus souvent c'est un
composé d’ail et de persil écrasés ensemble, contre les dou-
leurs produites par les vers; quelquefois c’est simplement
du suif étendu sur un papier gris contre les quintes de la
coqueluche. Quoique ce soient là des topiques d'empirique
ou de bonne femme, et que leur vertu repose sur un pré-
jugé peu rationnel, il ne faut pas trop les confondre avec
l’amulette des anciens et du moyen-âge, dont la vertu ne
reposait que sur des croyances superstitieuses comme celle
des talismans. L'éscuré, pour ne pas mériter trop de con-
fiance, n’est qu'un topique naturel dans l’idée de ceux qui
l'emploient et ne se rattache à aucune croyance surnatu-
relle. 11 est aujourd’hui certains papiers, préparés à pen
près de même, fort savamment recommandés dans des ré-
clames de journaux, et dont l’efficacité est aussi souve-
raine, qui ont les mêmes principes et la même. efficacité
curative, et qui doivent peut-être à l'Escuré le secret de
leur vogue et de leur composition.
Dér. sans doute de Éscura, nettoyer.
Éscurési (S'), v. S'obscurcir; devenir obscur, sombre;
se rembrunir, s’assombrir. — Lou tén s'éscurésis, le ciel
s’obscurcit, il se couvre, il menace d'orage ou de pluie.
Dér. de Éscu, obscur.
Éscurésino, s. f. Obscurité; ténèbres.
Éscuréto, s. f.— Voy. Casséoudo. Prèle, plante.
PNR, Pr EN
RAR, à À nt
ÊSF
Ce nom lui vient de l'usage qu'on en fait pour écurer la
vaisselle.
Éscusa, v. Excuser; pardonner. — Éseusas/ Pardon!
terme dont on se sert comme de son correspondant fran-
çais pour tout dérangement qu'on occasionne à une per-
sonne qui a droit à nos égards. Maï qué m'éscusés, veuillez
m'excuser : formule de politesse dont on accompagne une
négation, une contradiction, une opinion contraire.
Dér. du lat. Eæcusare, m. sign.
Éscuso, s. f. Excuse; pardon; raison ou prétexte que
l'on donne pour se disculper. — À toujour quéouguo éscuso,
il a toujours quelque justification, quelque subterfuge pour
colorer ses fautes. Démanda éscuso, demander pardon, faire
des excuses : ce qui n'est souvent qu’une formule de civilité.
Ésfata, v. Défricher; effondrer un terrain; mettre une
lande, une friche, une vaine pâture en état d’être cultivées.
Ésfata, n'est que l'extension d’un vieux mot hors usage,
qui signifiait dépecer, déchirer du vieux linge.
Dér. de Fato.
Ésfatriméla, v. Déchirer une étoffe en lambeaux; dé-
pecer en loques.
S'ésfatriméla, tomber en loques, s'émietter en bribes, en
morceaux.
. Dér. de Fatrimil.
Ésfor, s. m. Tour de reins; courbature; maladie ou
lésion qui résulte d’un effort. — Le peuple est fort porté à
attribuer la plupart des maladies internes à quelque rup-
ture intérieure, à quelque anévrisme contracté par un travail
trop forcé ou à un effort subit dû à l'emploi instantané de
toutes ses forces, Quand on a dit un fré et un ésfor, on
parcouru à peu près toute l'échelle pathologique des paysans :
il faut pourtant y ajouter Za binlo, qui complète la trilogie.
Dér. de És et de For, de Forgo.
Ésforces, s. m. plur. Forces, grands ciseaux à ressort
pour tondre les brebis et les draps.
Dér. du lat. Forceps, m. sign.
Ésfougassa, v. Aplatir; écraser. — Nas ésfougassa, nez
épaté. — Voy. Éscougassa.
Dér. de Fougasso, c.-à-d. aplatir comme un gâteau ou
fougasse.
Éstouia ou Fouiïa, v. Écraser à demi du fruit. Ce n’est
pas le presser au point de lui faire rendre son jus; mais
lui faire perdre sa fleur, le meurtrir légèrement par la
pression ou le cahotement, de manière à le polluer, à le
rendre glüant, poisseux par le peu de jus qui s'en échappe.
Dér. de la bass. lat, Fullare, fouler, qui vient du lat.
classique Fullo, foulon.
Ésfouira (S'), v. Proprement, foirer; avoir le dévoie-
ment. — Se dit principalement des animaux domestiques
qui ont le dévoiement, soit par maladie, soit pour avoir
brouté de l'herbe fraiche et trop aqueuse. Par ext. s’effon-
drer, se relâcher.
Dér. de Fouïro. à
Ésfoulissa (S'), v. S'ébouriffer; se hérisser. — Au fig.
ÉSG 315
se courroucer; se gendarmer ; se mettre en colère; monter
sur ses grands chevaux. — És tout ésfoulissa, il est tout
ébouriffé, il a les cheveux en désordre. Pér pas rés s'ésfou-
lisso, il prend feu pour un rien.
Ce mot à coup sûr prend sa racine dans Fol: les fous
en général ont les cheveux hérissés et en désordre,
Ésfraï, s. m. Effroi; terreur; épouvante; peur; saisis-
sement produit par une frayeur subite. — Dé l'ésfraï né
boumbigu, de l'effroi il en mourut. Porto-ésfrai, effrayant
ou mème seulement porte-respect.
Dér. du lat. Fragor, terreur; grand bruit qui effraie.
Ésfraïa, v. Effrayer ; inspirer de la crainte, de la frayeur,
de la terreur.
S'ésfraïa, s'effrayer; s'épouvanter; éprouver de la frayeur.
Ésfraïaire, aïro, adj Porteur de manvaises nouvelles;
qui peint tout en noir; médecin tant-pis.
Ésfringoula, v. Déchirer en loques, par bandes; faire
un accroc, une estafilade.
Dér. de Fringo.
Ésfringoulado ou Ésfringouladuro, s. f. Déchirure en
long; estafilade dans le sens du droit fil. Par ext, tout
aceroc d'une longue dimension.
Ésgalina (S') on Ésgalissa (S'), v. Se mettre en colère,
se gendarmer; répondre ou riposter vertement à une in-
sulte ou à une moquerie; se hérisser comme une poule qui
défend ses poussins.
Dér. de Galino.
Ésgalissa (S'), v. —Voy. S'ésgalina. Cette fois c’est le
coq qui sert de type de comparaison, lorsqu'il hérisse ses
plumes pour le combat.
Dér. de Gal.
Ésgargaméla (S'), v. S'égosiller; crier à perdre la voix,
à se luxer le larynx.
Dér. de Gargamilo.
Ésglaja, v. Effrayer par ses cris; alarmer le public par
ses cris, ses pleurs, ses lamentations,
Dér. du vieux mot Ésglaï où Ésglari, frayeur, trouble,
épouvante, peur ; alarme ; désastre; accident fâcheux.
En esp. Aglaya, m. sign.
Ésglâäousa, v. Fendre une branche dans sa racine, dans
sa soudure avec le tronc; ce qui arrive aux arbres fruitiers
par l'affaissement causé par le poids du fruit, et aux
mûriers par le poids des ramasseurs de feuille.
Dér. du lat. Clavula, scion, surgeon, greffe.
Ésgläousaduro, s. f. Fente; blessure d'un arbre causée
par l'acte de l’article ci-dessus.
Ésgousia (S'), v. S'égosiller; crier à tue-tête; s'épou-
monner.
Empr. au fr. Cefmot qui a la m. sign. que Ésgargaméla
est plus usité dans le langage ordinaire : le dernier appar-
tient au style pittoresque et poétique.
Ésgouta, v. Faire égoutter; faire tomber goutte à goutte
lé liquide qui reste au fond d'un vase.
Dér. de Gouto.
316 ESP
Ésgrâouséla, v. Déchausser un pied d'arbre, pour y
placer du fumier; faire la mème opération aux ceps de
vigne, non pour les fumer, mais pour attirer dans cette
fosse les eaux de pluie et les infiltrations d’un terrain
supérieur, ce qui les préserve de la sécheresse. — Cette
œuvre, qui se fait en mars, est détruite par le binage de
l'été qui nivelle le terrain et comble ce petit fossé.
Ce mot parait une corruption de Déscdousséla, qui
n'existe plus, du moins dans notre dialecte, et qui dérivait
de Céoussa.
Ésmoulina, v. Faire ébouler peu à peu la terre d’une
berge, d'une tranchée, comme fait une rivière enflée sur
ses bords qui sont élevés.
Dér. de Moulina, moudre.
Éspadéla (S’), v. S'étendre en s’applatissant, comme il
arrive au pain en pâte lorsque la pâte est trop liquide. Par
ext. tomber à plat ventre, s'étendre tout de son long. —
On le dit aussi d’une chaussure qui s’élargit par l'humidité,
d’un chapeau que la pluie a déformé.
Dér. de Padèlo, par imitation de ce que fait la pâte
d’une friture dans la poële à frire.
Éspadouna, v. Espadonner; jouer de l’espadon ; faire le
moulinet avec un sabre. Au fig. s’escrimer; faire blanc de
l'épée; férailler.
Éspagno, s. /. n. pr. Espagne, royaume d'Europe, borné
au Nord par les Pyrénées; à l'Ouest par l'Océan et le Por-
tugal; au Sud et à l'Est par la Méditerranée.
Dér. du lat. Hispania.
Éspagnôou, olo, adj. Espagnol, qui est d’Espagne.
Éspagnôous, s. ». plur. Gendarmes, bluettes, étincelles
qui s’élancent hors du feu en se divisant plusieurs foistet
s’éparpillant en différents sens, avec des éclats plus ou
moins pétillants.
Ce mot a été créé sans doute du temps où les Espagnols
faisant la guerre dans nos contrées, on a comparé à leur
mousquetterie ces bluettes qu’on nomme en fr. gendarmes.
Éspagnouléto, s. f. Espagnolette, tigede fer, longueet cro-
chue à chaque extrémité, servant à la fermeture des fenêtres.
Emp. au fr. qu’il traduit littéralement, et dont le nom
vient de ce qu'on croit que l’usage de l’espagnolette a été
importé d'Espagne.
Éspaiè, s. m. Espalier, suite d'arbres fruitiers étalés le
long d’un mur en forme d’éventail.
Dér. de Pal, pou, pieu.
Éspaïma, v. Effrayer; épouvanter; produire un serre-
ment de cœur par l'effroi; faire tomber en pamoison. —
Un éspaïma, un ahuri qui s’effraie de tout; qui s'émeut
du moindre danger.
Dér. du gr. Zxéoua, spasme, agitation, convulsion.
Éspaime, s. Spasme; pamoison causée par la frayeur;
effroi; terreur; épouvante subite.
Éspalanqua, v. Éreinter; briser; déboiter, disloquer les
épaules et les hanches. — Marcho tout éspalanqua, il
marche tout de travers comme un éreinté.
ESP
Ce mot parait dérivé à la fois de É£spanlo, épaule, et
Anquo, hanche.
Éspampana, v. — Voy. Déspampana. |
Éspandi, . Étaler; étendre; épanouir. — S “éspandi dou
sôou, tomber, s'étendre tout de son long. En parlant des
fleurs, s’éspandi, s'ouvrir, s'épanouir.
Dér. du lat. Expandere , m. sign.
Éspangassa, s. m. Brome stérile, Gramen arenarum ;
Panicula sparsa, Linn. Plante de la fam. des Graminées,
commune le long des chemins et dans les champs.
Éspanla, v. Casser, démettre, disloquer l'épaule; rouer
de coups. — Un éspanla, un pauvre hère, obéré, insol-
vable : ce que des Italiens appellent Spiantato.
Dér. de Éspanio.
Éspanléto, s. f. Dim. de Éspanlo. Éclanche de mouton
ou d'agneau. — C'est là la pièce de gala pour les paysans,
ou plutôt c'était, car ils commencent à se faire très-bien
à la gigue et aux côtelettes. Sa popularité tenait sans,
doute à l'infériorité du prix, car dans les. boucheries de *
campagne il y a une différence du quart ou du cinquième
entre les pièces du devant et celles de derrière.
Éspanlo, s. f. Épaule, partie supérieure et latérale du
dos. — Cléna las éspanlos, courber les épaules. Léva las
éspanlos, lever les épaules de dédain.
Dér. du lat. Spatulæ, omoplate.
Éspanlu, udo, adj. Large d'épaules; qui a les épaules
carrées et saillantes.
Éspâouri, Éspâouruga ou Éspayvourdi, v. Effrayer;
épouvanter; faire peur d’un châtiment si l’on retombe
dans la même faute.— Un éspdouri, un poltron, un effrayé,
un abhuri, un trembleur surtout en politique.
Éspâouruga et Éspavourdà, tous synonymes, appartien-
nent au style pittoresque.
Dér. de Péou, peur.
Éspâousa, v. Exposer, faire courir un danger.— Ré-
gardo un pâou éndéqué m'éspouses, considère à quel péril,
à quel malheur tu m’exposes.
S’éspâousa, s'exposer à un danger; oser.— Sé t’éspdouses
à mé mêtre las mans déssus, si tu as la hardiesse de,me
toucher, de jouer des mains contre moi.
Empr. au fr.
Éspâoutira, v. Tirailler; tirer dans tous les sens:
Formé de Tira et de Pa.
Éspar, s. m. Sorte de raisin noir, hâtif, à grains petits,
ronds et serrés, qui donne une des meilleures qualités de
vin, très-coloré et fort spiritueux.
Ésparcé, s. m. Esparcette, sainfoin, Hedisarum onobry-
chis, Linn. Plante de la fam. des Légumineuses; un des
meilleurs fourrages artificiels connus.
Cette fois, c’est bien évidemment le languedocien qui a
prêté ce mot au français. L'Académie l’emploie sans trop
connaître la nature de ce fourrage; tantôt elle le considère
comme un sainfoin particulier au Dauphiné, tantôt comme
un fourrage méleil d'orge et d'avoine. L’esparcet du Dau-
ÉSP
phiné, tout comme le nôtre, sont certainement la même
plante que le sainfoin de Paris.
Dér. du lat. Sparsus, part. pass. de Spargere, répandre,
éparpiller.
Éspardios, s. f. plur. Espadrille; espèce de sandale,
chaussure dont la semelle est en corde tressée, en usage
chez les Espagnols et les Basques.
Dér. du lat. Sparta, de spart: en gr. Zxépros, sorte de
chiendent ou plutôt de genêt aquatique dont on faisait
autrefois des cordages et dont on fabrique encore les cordes
rs on Tridou, et tous les ouvrages de spar-
pe 4 dm ou Éspragna, v. . Épargner; économiser; mé-
nager son bien; ménager quelqu'un, le traiter doucement.
— T'éspargnaraï pas, je ne te ménagerai pas. Éspargnè
bièn quicon, il se forma un bon petit pécule à force d'éco-
nomie. Éspargna soun foure, épargner ses habits, en avoir
grand soin, les faire durer.
Dér. de la bass. lat. Exparcinare, formé du lat. clas-
sique Parcere, m. sign.
Éspargnan, gnanto, adj. Économe; avare; qui s'appli-
que à faire des épargnes dans sa dépense, dans son mé-
nage.
. Éspargne, s. m. Binet; gâte-tout; sorte de bougeoir
dont la bobèche est armée de trois pointes de fer où l'on
pique des bouts de chandelle pour les user jusqu’au bout ;
sorte de bidon en fer-blanc où l’on ramasse les reliquats
d'huile de friture pour s’en servir à la lampe.
Æn général, signifie : économie; épargne dans le ménage,
dans Ja dépense. — Lou pan cdou és pas d'éspargne, le
pain chaud n’est pas économique. C'est dans le même sens
qu'a été fait le proverbe qui résume ces principes d'éco-
nomie domestique : Pan frés, prou fios et bos vèr, boutou
l'oustdou én désèr.
Éspargue, s. m. Asperge, Asparagus officinalis, Linn.
Plante de la fam, des Asparagées, cultivée dans les jardins
potagers; aliment sain et agréable. — Éspargue séouvaÿje,
+ asperge sauvage, Asparagus acutifolius, Linn., du même
genre que l'asperge ordinaire, qui croit naturellement.
Le mot lang. qui vient du lat. Asparagus, m. sign., a,
disent les étymologistes, son origine dans le gr. Aox:puog,
formé de & privatif et de oxtpux, semence, parce que, selon
Athénée, les plus belles asperges ne sont pas celles qui
viennent de graine.
- Ésparnal, s.#. Épouvantail; homme de paille qu'on
place dans les chenevières et les semis de plantes potagères
pour éloigner les oiseaux. Au fig. personne déguenillée et
de mauvaise mine, comme les vagabonds et gens sans aveu
qui entrainent à la fois une idée de misère pour eux et de
terreur pour les autres.
Ce mot semble une contraction de Éspdournal où Éspa-
vournal, qui n'ont jamais sans doute existé, et il dérive-
rait alors du lat. Pavor, frayeur.
Ésparo, s. f. Un des deux madriers qui soutiennent-en
sans di té Mt motte Éd D Éd 6
ÉSP 317
long le plancher d’une charrette et qui ne font qu'une
pièce avec les bras. La partie qui forme les bras est cylin-
drique, celle qu'on nomme Ésparo est carrée. Les échelons
transversaux qui lient ces deux madriers se nomment
Ésparoùs, et l'ensemble total des deux Ésparos, des bras
et des échelons, se nomme Éscalo. Ce sont là les appella-
tions techniques; mais dans l'usage vulgaire on appelle
Brasses les bras dans toute leur longueur jusques et y
compris le talon, et Ésparos les échelons. C'est à l'Ésparo
de devant et de derrière que l'on passe les cordes pour
fixer et garrotter le chargement : c’est à l'Ésparo de devant
qu'est fixée la chambrière ou Cacho-foué.
Ésparpaia, v. Éparpiller; étaler; épandre; disperser.
S'ésparpaia, s'écarquiller; se mettre À l'aise; s'étendre
en tenant autant de place que possible. Au fig. faire le
gros dos. — Æsparpaïa sas alos, étendre les ailes, les
ouvrir.
En ital. Sparpagliare, augm. du lat. Spargere, semer,
répandre.
Ésparsoü, s. m. Goupillon ; aspersoir d'église.
Dér. du lat. Aspersum, supin de Aspergere, asperger.
Éspasiè, s. m. Porte-épée; officier militaire; bretteur;
fourbisseur; fabriquant d’épées; hurluberlu : dans ce der-
nier sens il a un féminin : Éspasidiro.
Éspaso, s. f. Dim. Éspaséto. Épée, arme offensive. —
Nosto-Damo dé las éspasos, Notre-Dame-des-Sept-Douleurs.
En gr. Zré0n, spatule, épée, glaive court et large du
bout.
Éspavourdi, v. — Voy. Éspdouri.
Dér. du lat. Pavor, effroi.
Éspé, s. m. Étincelle qui s'élance avec explosion, ou
plutôt explosion du gaz interne renfermé dans le bois et
que le feu dégage tout d'un coup en lançant des éclats de
braise enflammée; pétard; éclat, tout ce qui fait du bruit
en éclatant. — Voy. Éspéta.
Éspéça, v. Dépecer; rompre; briser; mettre en pièces;
débiter du bois; fendre; couper.
Dér. de Pèço.
Éspécéja, v. fréq. de Éspéça. Dépecer menu ; détailler
du bois.
Éspéia, v. Écorcher ; ôter la peau; déchirer; mettre en
pièces. — És éspéia, il est déguenillé, vêtu de haillons.
Dér. dans les premières acceptions de Pèl, peau, et dans
la dernière de Péio, haillons, qui du reste provient de la
même racine.
Éspéiandra, drado, adj. Augm. de Éspéia. Déguenillé;
dépenaillé, déchiqueté; déchiré en pièces, en loques.
Éspéio-dindo, s. m. Déguenillé; gueux en haillons;
dépenaillé.
Éspéiriga, v. Épierrer un champ; enlever les pierres
d'une terre.
Dér. de Péiro.
Éspèito, s. f. Trotte, traite, course, espace de chemin;
temps de marche sans se reposer. — Tout d’uno éspäto,
318 ÉSP
ÉSP
d'une seule traite. Y-a wno bono éspéito, il y a un long ! temps est bien long. Espèro, éspéro! Attends! attends-moi !
trajet, un bon temps de marche.
Dér. du lat. Expeditio, marche, campagne.
Éspéla, ». Peler; écorcher; enlever la peau; entamer la
peau.
S'éspéla, s'écorcher; se faire une large écorchure. — Lou
mou m'a tout éspéla, la maladie m'a fait changer de peau.
Dér. de PA.
Éspéli, v. Éclore et faire éclore, également en parlant
des fleurs qui entr'ouvrent leurs boutons et des animaux
qui naissent d'un œuf ou d’une graine, comme les oiseaux,
les vers-à-soie, ete. Éspéli est génériquement verbe neutre,
on dit: uno roso éspélès, un i6ou éspélis, lous magnas
éspélissou ; faïre éspélà d'idous, uno clouchado; mais on dit
aussi activement : éspéli dé magnas; cette exception est
exclusive aux vers-à-soie; c’est une sorte de licence, de
solécisme consacré par l'usage.
Sauvages fait dériver ce mot du lat. sigle) pousser
dehors ; peut-être est-il aussi rationnel de le faire dériver
de Pel et de la part. Es, c.-à-d. sortir de sa peau.
Éspélido, s. f. Éclosion; action d’éclore. — Ce mot est
employé principalement comme terme de magnanerie.
Aquéles magnas an prés mâou à l’éspélido, ces vers-à-soie
ont pris leur mal à l’éclosion, soit par une trop forte cha-
leur, soit par une intermittence de chaud et de- froid.
Mous magnas an fa trés éspélidos, mes vers sont éclos à
trois reprises différentes. On dit au fig. : À prés aqud à
l'éspélido, ou bien ou a manqua à l’éspélido, c'est un défaut
qu'il a contracté au berceau, ou bien c’est une qualité, une
science qu’il a manqué d'apporter en naissant.
Éspélidouiro, s. f. Cabinet, petit appartement où l'on
fait éclore les vers-à-soie, soit au feu, soit à la vapeur, et
où on les soigne dans les premiers âges.
Éspéloufi, ido, adj. — Voy. Éspialoufi.
Éspéoutièiro, s. f. Champ semé d’épautre; par ext.
terrain maigre, sec et propre seulement à l’épautre.
Éspèouto, s. f. Épautre, Triticum spelta, Linn., grande
épautre; ou petite épautre, Triticum monococum, Linn.,
plantes de la fam. des Légumineuses, ne différant guère que
par la grandeur. C’est une espèce de froment monocoque,
uniloculaire, à épi barbu, dont le grain à demi adhérent à
sa balle ne s’en détache qu’en le mondant au moulin à
monder /V. Gruda). Ainsi mondé, ce blé est délicat et
sert à faire un excellent potage. C’est une des semences
qu’on nomme blé de mars.
Dér. du lat. Spelta, m. sign.
Éspèr, s. m. Expert-géomètre, celui qu'on nomme pour
faire une prisée, un rapport, une vérification.
Dér. du lat. Expertus, part. pass. de Expertiri, expé-
rimenter.
Éspéra, v. Attendre; patienter. — Éspéra-mé, atten-
dez-moi. M'éspérarés bé jusqu'à la fin déou més, vous
voudrez bien m'attendre pour ce paiement jusqu’à fin
courant, Qu'éspèro languis, prvb., à celui qui attend le
que je te châtie suivant tes mérites.
Dér. du lat. Sperare, espérer.
Éspéranço, s. f. Espérance, longue attente.
Éspérlounga, v. Prolonger; prolonger le terme d'un
paiement par l'effet de la volonté du créancier; le différer,
le renvoyer d'un jour à l'autre de la part du débiteur. —
Un éspérlounga, une longue échine, un homme long et
maigre.
Dér. du lat. Perlongus, très-long.
Éspéro, s. f. Aguets; guet; affût. — Ana à l'éspéro,
chasser à l’affüt. Vaï à l'éspéro dé las manèflos, il est à
l'affût de tous les cancans. Low ca és à l'éspéro, lè chat est
aux aguets, il fait le guet; il guette les souris.
Éspéroü, s. m. Dim. Æspérouné. Éperon; ergot d’un
coq. Se dit aussi d’un petit ouvrage, épi de pieux, au
devant et en éperon d’un ouvrage plus fort, dit Pagné,
contre les invasions des rivières sur les bords plantés d’o-
seraie.
En ital. Sprone; en allem. Sporn, m. sign.
Éspérouna, v. Chausser des éperons; donner de l'épe-
ron ; éperonner.
Éspérta, v. Faire une expertise; faire une estimation,
une prisée comme expert.
Éspés, éspésso, adj. Dim. Éspéssé; péj. Éspéssas.
Épais; dense; dru; consistant. Au fig. lourd, épais; gros-
sier; sans tournure et sans vivacité d'esprit. — A% séména
trop éspés, j'ai semé mon blé trop dru. Qué séméno trop
éspés, euro soun gragnè dos fés, prvb. Qui sème trop épais
vide deux fois son grenier, ou s'expose à le laïsser vide
deux fois, d’abord pour sa semence, puis par le défaut de
récolte qui, trop serrée, s'étouffe et donne moins. Zspés
coumo lous pèous dé la tèsto, épais comme les cheveux.
Dér. du lat. Spissus, m. sign.
Éspési, v. Démèler; débrouiller; charpir; prendre aux
cheveux; éplucher; regarder de près; examiner avec soin
pour trouver le moindre défaut. — Éspésè lous pèous, dé-
mêler les cheveux. Éspési dé fouséls, charpir, carder avec
les doigts(ies cocons de graine, afin de les rendre propres
à être filés à la quenouille. Éspés? uno afaïre, débrouiller
une affaire litigieuse, la tirer au clair. Avès pas bésoun
d'ou tant éspési, vous n’avez pas besoin d'y regarder de
si près, d'éplucher avec tant de minutie.
S'éspési, se prendre aux cheveux, se donner une peignée.
— S'éspésiguèrou coumo sé déou, ils se prirent aux cheveux
comme il faut.
Dér. de Éspés, c.-à-d. détailler quelque chose d'épais,
de confus, le désépaissir. D'après cette acception origi-
nelle, on devrait dire Éséspési ou Déséspésà, mais l'usage a
préféré la contraction.
Éspésido, s. f. Raclée; volée de coups.
Éspésouia (S'), v. S'épouiller; chercher ses poux, les
enlever; s’en délivrer.
Dér. de Pésoul.
NT
ESP
Éspéssési, v. Épaissir; rendre plus épais, plus gras;
condenser
Dér. de Éspés.
Éspéssoù, s. f. Épaisseur; profondeur d'un corps solide ;
qualité de ce qui est épais.
Éspéssu, s. m. Dim. Éspéssugué. — Voy. Péssu. Pin-
çon, meurtrissure sur la peau qui a été pincée.
Éspéssugna ou Péssuga, v. Pincer, serrer entre le
pouce et l'index ; rogner du pain, du fromage, ou un mets
quelconque en le pinçant avec les doigts. — Éspéssugno
toutes sous vésis, il empiète journellement et peu à peu sur
les propriétés de ses voisins. —Voy. Péssuga.
Éspéssugnaire, aïro, adj. Qui aime à pincer: espèce
de niche galante fort en usage chez les beaux fils de la
campagne.
Éspéta ou S'éspéta, v. Éclater; crever. Au fig. crever
d’embonpoint. — Faï éspéta dâou rire, il fait mourir de
rire.
Dér. de Péta.
Éspétacle, s. m. Esclandre; extravagance; grande dé-
monsiration de douleur. — Faguë d'éspétacles, il fit toutes
sortes d’extravagances dans son chagrin. Aqud’s uno céouso
d’éspétacle, c’est une chose épouvantable, inouïe.
. Corrup. du fr. pour le sens.
: Éspétacloüs, ouso, adj. Prodigieux; énorme; mon-
strueux ; extraordinaire.
Éspéti, v. Crever; se crevasser; s'entr'ouvrir; germer.
— Lou bla és éspéti, le grain est crevé pour germer. Faïre
éspétà dé bla-maré, faire faire explosion à des grains de
maïs en les approchant du feu, où ils se gonflent d'abord
et éclatent ensuite avec bruit en épanouissant leur pulpe
intérieure qui prend mille formes, quelquefois en décu-
plant son volume primitif. C’est une sorte de dragée que
les enfants mangent avec plaisir, surtout à cause de la
peine qu’ils ent prise et du succès qu'ils obtiennent quand
un de ces grains acquiert un beau développement.
Dér. de Pé ou de Éspé.
Éspétiduro, s. f. Gerçure; crevasse; entamure; éclats
des grains de maïs dans le jeu dépeint au précédent
article.
Éspi, s. m., ou Badafo / V. c. m.). Brins ou paille de
lavande. — Les gens aisés dans le peuple se servent de
cette paille quand elle est sèche pour faire chauffer, en
hiver, leur linge à sa flamme odorante.
. Oli d'éspà, huile de lavande et esprit de térébenthine. On
appelle ce dernier Oli d'éspè par ignorance de son origine
et à cause de son odeur fort aromatique. Il est fort en
pe ne la campagne pour délivrer le bétail de la ver-
mine. Brulo coumo d'éspi, il brûle comme des allumettes,
de la paille.
Dér. du lat. Spica, épi, parce que les tiges fort nom-
breuses et hautes forment des épis.
Éspialoufi, ido, ou Éspéloufi, ido, adj. Rs:
hérissé; mal peigné; échevelé.
ÉSP 319
La racine de ce mot est Pèou, que dans quelques loca-
lités on dit Pidou.
ÊÉspiècle, adj. des deux genres. Dim. Éspiècloù. Espiè-
gle: lutin; éveillé; rusé; malin.
Ce mot, comme son correspondant fr. dérive de l'allem.
Ulespiegel, n. pr. d'un personnage saxon, célèbre dans le
quinzième siècle par ses tours de malice, comme Polichi-
nelle, et dont la vie a été traduite dans la bibliothèque
bleue. Ce nom est formé de l’allem. Eule, chouette, et
Spiegel, miroir : miroir de chouette.
Éspiga, v. Épier, monter en épi. — Se dit des blés lorsque
l'épi commence à sortir du fourreau — Éspigo bé, jamaï
noun grano, dit-on proverbialement d'une personne qui
promet beaucoup et ne tient pas, qui a beaucoup de clin-
quant et point de fond.
Dér. du lat. Spicare, m. sign.
Éspigal, s. m. Épis encore pleins qui n'ont pu se dé-
pouiller au foulage et qui se retrouvent quand on nettoie
le blé. On les bat de nouveau au fléau pour en tirer le grain.
Éspigna (S'), v. Se piquer à une épine; s’enfoncer une
épine dans la chair, — On dit ironiquement à une petite
maitresse ou à un fainéant qui semble prendre tout du
bout des doigts et avec dégoût : Prénès gardo dé vous
éspigna, prenez garde, cela vous gâtera la laille.
Éspignas, s. m. Augm. de Éspigno. Buisson d'épines;
tas de ronces et d’arbustes épineux, qu'on met pour défen-
dre l'entrée d'un enclos ou la brèche d'un mur.
Éspignéto, s. /. Dim. de Éspigno. Au fig. épine, pie-
grièche, esprit mordant et satirique. — Il se dit d'un homme
comme d'une femme.
Éspigno, s. f. Épine; toute espèce de piquants produits
par un végétal, même arête de poisson, c.-à-d. ces aiguilles
transversales qui sont en tous sens dans la chair des pois-
sons d’eau douce et particulièrement de l'alose. Au fig.
buisson épineux, esprit méchant, piquant. — És uno fièro
éspigno, c'est un homme terriblement contrariant el diffi-
cile à aborder; un vrai fagot d'épines.
Dér. du lat. Spina, m. sign. .
Éspignoüs, gnouso, adj. Dim. Éspignousé. Épineux,
hérissé d’épines. Au fig. acariâtre, hargneux, d’un carac-
tère difficile ; hérissé de difficultés, en parlant d'une affaire.
Éspigo, s. f. Épi, tête de tuyau de blé, etc., qui ren-
ferme le grain; épi de poil ou de cheveux, c.-à-d. touffe
dont la direction est inverse aux autres : c’est une preuve
de santé et de race pour les chevaux, lorsqu'ils les ont aux
flancs ou au poitrail.
Dér. du lat. Spica, m. sign.
Éspinar, s. m. Épinard, Spinacia oleracea, Linn. Plante
de la fam. des Chénopodées, cullivée dans les jardins,
estimée en cuisine. — Éspinar sdouringua. {Voy. ce der-
nier mot).
Son nom lui vient de ce que la cosse qui renferme la
semence est ferme, anguleuse et piquante ou épineuse.
Éspincha, v. Regarder du coin de l'œil; épier; guigner;
320 ÉSP
lorgner ; regarder en dessous; regarder à travers un trou,
une fente; génériquement, fixer son regard ; regarder avec
attention et fixité; faire les doux yeux; techniquement,
regarder comme fait un espion, un curieux.
S'éspincha, se parler des yeux, correspondre du regard ;
s’entre-regarder.
Dér. du Jat. Aspicere, regarder devant soi, apercevoir.
Éspinchaïre, airo, adj. Curieux; qui aime à voir ce
qui se passe chez le voisin ; qui fait les doux yeux.
Éspinga (S'), v. Se piquer avec une épingle.
Éspinguéja, v. fréq. Causer des fourmillements; faire
éprouver des piqüres dans les chairs, deS élancements, des
douleurs aiguës comme des piqüres d'épingle. — Moun dé
m'éspinguéjo, j'éprouve des élancements dans le doigt.
Éspinguéto, s. f. Camion, épingle de coiffure.
Éspingo, s. f. Dim. Éspinguélo; augm. Éspingasso.
Épingle, petite tige en fer ou laiton, munie d’une tête et
d'une pointe, servant à attacher et à fixer. — Né dou-
narièi pas la tèsto d'uno éspingo, je n’en donnerais pas
une tête d’épingle. Jouga à las éspingos, jouer avec des
épingles pour enjeu. Longtemps l’épingle a été une monnaie
pour les enfants non-seulement dans leurs jeux, mais dans
leurs marchés et transactions. Elles sont démonétisées
aujourd’hui, ainsi que les coups de poing, qui étaient
aussi une valeur pour les plus jeunes écoliers.
Dér. du lat. Spinacula, m. sign., qui est le dim. de
Spina, épine.
Éspioun, s. m. Espion; mouchard; rapporteur.
Éspiouna, v. Espionner; épier; observer; servir d’es-
pion.
Dér. du lat. Inspicere, regarder, inspecter.
Éspiounaje, s. m. Espionnage, action d’espionner.
Éspira, v. Suinter; transsuder; prendre de l'air par
quelque fissure imperceptible, comme fait un tonneau qui
perd.
Dér. du lat. Spirare, respirer.
Éspiroù, s. m. Dim. Éspirouné. Évent d'une futaille,
petit trou percé dans le haut du fond extérieur pour donner
de l'air au liquide qui sans cela, lorsque la pièce est
pleine, ne viendrait que difficilement par la canelle. On
bouche l’éspiroù avec le dousil.
Ésplanado, s. f. Esplanade, grande place; terrain
aplani et nivelé.
Dér. du lat. Planus. La désinence du mot fr. paraît
annoncer qu'il a été emprunté aux contrées méridionales.
Éspliqua, v. Expliquer; interpréter; développer; arti-
culer; faire comprendre.
Éspliquaciou, s. f. Explication ; démêlé qu’on explique.
— Avédre d'éspliquacious émbé quéouquus, avoir des ex-
plications, expliquer un malentendu; par ext. avoir un
différend.
Dér. du lat. Explicatio, eæplicare, M. sign.
Ésploumassa, ». Arracher les plumes; plumer. Au fig.
maltraiter; donner une volée.
ÉSP
S'ésploumassa, se déplumer pendant la mue, en parlant
des oiseaux; se prendre aux cheveux ; se battre.
Dér. de Ploumo. — ,
Éspouchiga, v. Ecarbouiller; écraser; écacher quelque
chose qui a du jus. — S’éspouchiga ddou rire, se pàmer
de rire.
Ce mot, comme le fr. Pocher, pourrait bien venir du
lat. Pungere.
Éspoudassa, v. Péjor. de Pouda. Tailler grossièrement
et à grands coups de serpe, comme le fait un mauvais
ouvrier et un vigneron apprenti. — Aquél doubre és éspou-
dassa, cet arbre semble taillé à coups de hache.
Éspoudra, v. Saupoudrer et époudrer; répandre, secouer
la poussière. — Ce verbe rend à peu près la double action,
toute différente, de couvrir légèrement de poudre quel-
conque, et de la secouer pour la faire disparaître.
Éspoudra (S’), v. Avorter. — Ne se dit que pour les
animaux et ne s'entend que des premiers temps de leur
gestation, lorsque le félus n’est pas encore formé.
Ce mot pourrait bien dériver du lat. Ex et Pondus,
dont la bass. lat. a pu faire Exponderare, se délivrer, se
débarrasser d'un poids.
Éspouèr, s. m. Espoir, espérance.
Dér. du lat. Sperare.
Éspoufa (S'), v. Se sauver; s'enfuir; gagner du pied ;
s'évader; pouffer de rire; éclater de rire involontairement,
comme si le rire retenu s’échappait, ou s’il partait comme
une explosion. C’est là sans doute ce qui rapproche le
sens des deux acceptions.
Éspouila, ado, adj. Dim. Éspouïladoù. Éreinté; épuisé;
écloppé. Au fig. obéré; criblé de dettes; sans crédit.
Dér. du lat. Spoliatus, dépouillé.
Éspoumpi, ido, adj. Dodu; mollet; potelé; renflé;
rebondi ; jouflu.
S’'éspoumpi, se gonfler; devenir rond, dodu, mollet. Au
fig. s’enfler ; se bouffir de fierté, d'orgueil.
Dér. de Poumpo ou Poumpe, ancien mot signifiant
gâteau, galette, qui se gonfle au four en cuisant.
Éspouncho, s. f. Terme de nourrice, trait ou jet du
lait qui, dans les premiers jours de l’accouchement, fait
sentir une piqüre au sein. — Fa véni l'éspouncho, faire
venir le lait en suçant et aspirant fortement, ce qui est
difficile quelquefois dans les premiers temps parce que les
voies en sont obstruées; quand cette obstruction est trop
forte, ou l'enfant trop faible, on emploie des moyens arti-
ficiels, tels que la bouche d’une personne adulte, un jeune
chien, ou une sorte de pompe aspirante que la chirurgie
a inventée spécialement pour cet objet.
Dér. de Pouncho.
Éspousa, v. Épouser, prendre en mariage; marier,
donner la bénédiction nuptiale.
Dér. du lat. Spondere, promettre, fiancer.
Éspousado, s. f. Épousée ; la mariée.
Éspousivou, adj. des deux genres. De noce, d'épou-
ÉSQ
saille, — La coïfo éspousivou, le bonnet d'épousaille.— Voy.
Nouvidou.
Éspousqua, ». Saupoudrer; poudrer.avec du sel ou de
l'eau sale; asperger; jeter de l’eau avec la main où avec
la bouche pour humecter le linge qu'on veut repasser, de
façon à imiter la pluie: jeter de l'eau avec les doigts à la
figure de quelqu'un pour l’agacer ou lui faire une niche.—
Éspousqua l'énsalado, secouer, égoutter la salade.
Ce mot est une variante de Éspoussa.
Éspoussa, v. Secouer; faire tomber la poussière;
épousseter. Au fig. battre; maltraiter; étriller; donner
une volée de coups dé houssine. — Æspoussa las douréios,
secouer les oreilles, prendre un air mécontent. On dit
plaisamment à quelqu'un qu'on va vertement corriger : Té
véou éspoussa tas gnèïros, je vais joliment secouer tes puces.
Dér. de Pous, poussière.
Éspoussado, s. . Volée de coups; coups de bâton ou
de verges.
Éspousséta, v. Épousseter; brosser; vergelter; net-
toyer, Oter la poussière. — Semblerait un diminutif, avec
un certain mouvement de fréquence, de Éspoussa.
Éspousséto, s. f. Époussettes; brosse; vergette; brosse
d’habits, de tête, de peigne, de soulier, de table, de tapis, etc.
Éspouténcia, v. Couronner un arbre, lui enlever trop
de bois en le taillant, le réduire à ses maitresses-branches,
finalement en faire une forme de potence.
Dér. de Pouténcio.
Éspoutriga, v. Écarbouiller. — Voy. Éspouchiga.
Ésprès, s. m. Exprès, commissionnaire, messager mandé
spécialement pour un but déterminé.
Dér. du lat. Express.
Ésprès ou Ésprèssi, adv. Exprès; à dessein; expres-
sément; pour cela ; pour un objet spécial. — Ou faguè pas
ésprès, il ne le fit pas par malice, en mauvaise intention.
Ou fai ésprès, il le fait exprès, à dessein, volontairement.
Dér. du lat. Expressè, m, sign.
Éspri, s. m. Dim. Ésprigqué. Esprit, jugement, imagi-
nation; sens; motif. — Pérdre l'ésprà, perdre le sens;
devenir fou. És touqua dâou Sént-Éspri, il a un grain de
folie: expression proverbiale qui répond à cette pieuse
pensée que les idiots, les innocents, sont des êtres protégés
et privilégiés de la Providence, comme si l'Esprit-Saint
. leur imprimait une marque particulière. C’est de la mème
idée que naît cette sorte de culte qu’on accorde aux crétins
et aux gens à seconde vue en Écosse.
Éspri signifie aussi alcool, ou esprit de vin, liquide
obtenu par la distillation.
Dér. du lat. Spiritus, m. sign.
Ésqualancio, s. f. Esquinancie; angine; inflammation
des amygdales, de la trachée-artère ou du larynx, qui
peut se terminer par la suffocation.
En gr. Euvaéyn, m. sign.
Ésquialassa (S’), v. Augm. dé Quiala. Pousser des
cris aigus; forcer sa voix en criant; gueuler.
ESQ 321
Ésquicha, v. Serrer; presser: exprimer ; épreindre. —
Un ésquicha, un avare, un cuistre, serré, trop parcimo-
nieux.
S'ésquicha, s'efforcer ; faire des efforts.
Dér. et augm. de Quicha.
Ésquichado, s. f. Serrée; violente étreinte.
Ésquicho-grapäou, s. m. Engoulevent, tette-chèvre,
crapaud-volant ; engoulevent ordinaire, Caprimulgus euro-
pœus, Temm. Oiseau de l'ordre des Passereaux et de la
fam. des Planirostres ou Omaloramphes. — Cet oiseau,
qui a plus de dix pouces de long, par son plumage sombre,
sa tête disgracieuse, est loin d'offrir un aspect agréable.
Le fr. l'a appelé Tette-chèvre, parce qu'on a cru supersti-
tieusement qu'il tettait ces animaux; crapaud-volant, de
Ja ressemblance qu'on trouve entre un de ses cris et celui
du reptile. C’est le lang. qui aurait dû le nommer Engou-
levent, de Éngouli, avaler, engloutir le vent; en le déri-
vant d’une origine commune, Gula, et c'est encore le fr. qui
lui a donné ce nom, à cause de son bec, petit quand il est
fermé, mais qui, en s'ouvrant, présente une ouverture
immense où viennent s’engloutir les insectes qu'il chasse
pendant la nuit ou le crépuscule, car on ne voit jamais
cet oiseau en plein jour. Pour nous, nous l'avons appelé
Ésquicho-grapdou, croyant qu’il tue et dévore le crapaud,
en le pressant cramponné sur son dos et lui perçant la
tête à coups de bec. En automne, la chair de l'engoule-
vent, qui est fort gras alors, est, dit-on, un excellent mets :
c'est possible.
Ésquicho-l'oli, phr. faite. Jeu de veillée qu'on nomme
en fr. Boute-dehors. Il consiste à se placer sur un banc en
aussi grand nombre que possible, et par places alternées
de garçons et de filles. Les joueurs aux deux extrémités
poussent chacun de leur côté en dirigeant la force de
coaction vers le centre, jusqu’à ce que l’un de ceux placés
à ce centre soit rejeté hors du rang; alors celui-ci va re-
prendre place à l’un des bouts de la file, et pousse à son
tour sur ceux qui l'ont rejeté.
Ésquichoù, s. m. Pelotte de cire dont on a exprimé le
miel, en la pressurant entre les mains.
Ésquièl, s. m. Génie; intelligence; bon sens; jugement:
instinct de l'animal poussé à un degré de développement
supérieur.
Ésquifa, v. Esquiver; éviter avec adresse. — Lou bara-
can ésquifo l'aïgo, le bouracan rejette l’eau.
S'ésquifa, s'esquiver, se subtiliser, disparaitre; s'enfuir
adroitement.
Ce mot, comme son correspondant fr., dérive du lat.
Scafa, nacelle, dont le fr. a fait encore Esquif. Æsquifa
serait donc proprement : éviter un écueil sur un esquif;
mais ce sens originaire a disparu quant à l'application.
Ésquifo (Ën), adv. De biais; obliquement; en biseau.
Ésquina, v. Échiner; éreinter; assommer; rompre l’é-
chine. Au fig. ruiner, mettre en déconfiture.
Dér. de Ésquino.
322 ESS
Ésquinado, s. f. Volée de coups; raclée; bastonnade,
éreintement.
Ésquinaje, s. m. Grande fatigue; charge trop lourde;
éreintement ; perte considérable au jeu.
Ésquinla, v. Sonner; tirer le cordon d’une sonnette pour
appeler le portier ou les domestiques.
Ésquinlo, s. f. Dim. Ésquinléto. Sonnette d'apparte-
ment ou de porte; clochette d’autel; clochette de mouton,
de mulet.
Dér. du tudesque Ske/, m. sign.
Ésquinloù, s. m. Petite clochette; grelot.
Dim. de Ésquinlo.
Ésquino, s. f. Échine; dos.— À bono ésquino, il a bon
dos, phr. prvb. qu’on applique à toute personne ou même
à toute chose qu'on charge des fautes d'autrui, ou sur qui
on rejette la responsabilité. On dit : Lous magnas an bono
ésquino, les vers-à-soie ont bon dos, c.-à-d. que les paysans
rejettent sur le succès de leur chambrée toutes les dépen-
ses, folles quelquefois, qu'ils se permettent dans l'année :
espérance dont la déception est un élément de ruine presque
certain. Faï l’ésquino d’ase, il est fait en dos d’äne.
Dér. du lat. Spina, épine du dos.
Ésquinsa, v. Déchirer une étoffe dans le sens de Ja
chaine; lacérer.
Dér. du gr. Zyleuw, fendre, diviser.
Ésqüinsaduro, s. f. Déchirure, accroc dans une seule
direction.
Ésquirôou, s. m. Dim. Ésquiroulé. Écureuil, écureuil
commun, Scirius vulgaris, Linn., petit marmmifère de la
fam. des Rongeurs. Ce petit animal fait son nid au sommet
d'un arbre élevé, et le construit d’une manière si ingénieuse
qu'il met ses petits à l'abri de la pluie. Vif, alerte, éveillé,
il se prive facilement, et apprivoisé, vit en cage en se don-
nant de l'exercice à faire tourner incessamment un cylin-
dre mobile.
Dér. du gr. Xxlovpos, m. sign. formé de Zxé, ombre et
Opé, queue, c.-à-d. qui se fait de l'ombre avec sa queue.
Ésquirounèl, s. m. Martinet; martinet noir, martinet
de muraille, Hirundo apus, Linn. Oiseau de l'ordre des
Passereaux et de la fam. des Planirostres ou Omaloramphes :
plumage entièrement noir, queue très-fourchue. IL arrive
après toutes les autres hirondelles et part le premier. La
brièveté extraordinaire de ses pattes lui avait fait donner
son nom latin de Apus, sans pieds; aussi a-t-il bien de la
peine, lorsqu'il est tombé à terre, à reprendre son essor.
Mais en revanche on admire son vol facile et infatigable.
Il parait qu'on appelait autrefois du nom générique de És-
quirounèl, les petits oiseaux de proie composant la faucon-
nerie; Sauvages le leur a conservé et appelle Aoubaléstrië,
le martinet. Pour nous, il n’est connu aujourd'hui que sous
le nom de Ésquirounèl, et il est si commun à Alais, en été
et en automne, qu'il est étonnant que Sauvages ait ignoré
un nom qui ne s'applique pas à d’autres qu’à cet oiseau.
Ésses, s. m. plur. Ers, Ervum hirsutum, Linn., plante
ÉST
de la fam. des Légumineuses; espèce de vesce noire ou de
lupin dont les pigeons sont très-friands, mais qui est un
poison pour la volaille de basse-cour et tous les animaux
non ruminants.
Éssuga, v. Essuyer; sécher; épuiser. — Aquélo tro. és
bièn éssugado, cette terre, ce champ a été épuisé, on ne l’a
pas assez laissé reposer. Fait Éssu, au part. pass. — Plous dé
lénno soun lèou éssus, prov., larmes de femme sèchent vite.
Dér. de l’ital. Asciugare, m. sign.
Ésta, éstado, part. pass. du verbe Éstre. Été, allé. — És
ésta un diable dé soun tén, il a été un vrai démon dans sa jeu-
nesse. Sès ésta à Paris? Êtes-vous allé à Paris? Quan éséstado
novio, s'és dédicho, quand elle a été fiancée, elle a retirésa
parole. Y sèn éstas, nous y sommes allés. — Voy. Éstre.
Ésta, s. m. État, métier, profession. — A pas gés d’ésta,
il n’a point de profession, d'état.
Corrupt. du fr. qui se rapproche encore davantage quand
on dit : Éta et qui ne vaut pas mieux. En lang. on se sert
de Méstiè.
Éstabla, v. Recevoir des chevaux à l’attache dans une
écurie d’auberge, sans leur donner la provende. Il se dit
aussi du maître du cheval qui le loge ainsi à l’attache;
mais, dans ce cas, on l’emploie. même quand on lui four-
nit l’avoine et le foin. — Ounté éstablarén ? à quelle au-
berge donnerons-nous l’avoine, où nous arrèterons-nous
en route pour faire souffler nos chevaux?
Au fig. Éstabla va jusqu'à s'appliquer aux personnes.
Éstablado, s. f. Fumier d’écurie; ensemble des ani-
maux, des bestiaux logés dans une écurie, ou mème des
personnes qui passent la soirée dans une auberge de route,
Éstablaje, s. m. Droit d'attache que prend l'hôtelier
pour le simple logis donné à un cheval,
Éstable, s. m. Dim. Éstabloù. Étable, écurie: nom
générique qui se divise en diverses dénominations, techni-
ques suivant les espèces de bétail qu'on y loge : pris spé-
cialement il signifie écurie; pour les moutons, il se dit
Jasso; pour les porcs, Pouciou. — Varlé d'éstable, valet
d’écurie.
Dér. du lat. Stabulum, m. sign.
Éstabli, s. m. Établi, grande table sur laquelle ou à
côté de laquelle certains artisans travaillent de leur état,
c.-à-d. qu'ils y forment leur établissement, comme les
tailleurs, les orfèvres, etc.
Éstabli (S'), v. S'établir; prendre domicile; former un
établissement industriel. Il a été étendu, par quelques fran
chimans à la vérité, jusqu'au mariage.
Dér. du lat. Stabilire, assurer, rendre solide.
Éstabourdi, v. Étourdir; faire perdre connaissance par
un coup violent. Au fig. abasourdir; srapéfier; frapper
d’étonnement.
Dér. du lat. Stupor, stupeur, élourdissement.
Éstabousi, v. n. S'évanouir; se pâmer; tomber en dé-
faillance. — Voy. Éstavani,
Éstaciou, s. f. Station, gare de chemin de fer.
EST
* Mot que de nouveaux besoins ont introduit dans le lan-
gage et qui s’y est impatronisé.
Éstadis, isso, adj. Calme; tranquille, pacifique; sans
vigueur; sans énergie; flegmatique. Au fig. et par ext. à
demi-passé, en parlant des viandes, des mets; flétri, qui a
perdu sa fraicheur et sa crudité, en parlant des fruits et
des légumes verts conservés trop longtemps; pain rassis et
miollet, pour avoir été trop longtemps renfermé.
Dér. du lat. Statutus, a, um, qui reste en place.
Éstagnè, s. m. Dim. Æstagnëïroù. Dressoir; étagère à
148 la vaisselle qu on y étale par luxe chez les paysans
pe de Éstan, étain, parce qu'autrefois, dans les mai-
sons les plus cossues, on étalait ces sortes de dressoirs dont
la vaisselle était d'étain.
Éstaja, v. Échafauder, à la manière des maçons qui
dressent leurs échafaudages à mesure que la bâtisse s'élève;
dresser les tables des vers-à-soie qu'on appelle Téowiès
(V: 0. m.). Cette espèce d'échafaudage se compose de pieds
droits, Mountans, qui, posant sur le sol, vont se fixer à
des poutrelles transversales dites Tirans. Ces montants
sont garnis d'autant de chevilles qu'on vent dresser de
rangs de tables ou d'étages et qui sont distantes l'une de
l'autre de cinquante centimètres. Ces chevilles supportent
des traverses, soit équarries, soit en bois rondin, sur les-
quelles on place trois planches dans la longueur et deux
dans la largeur destinées à supporter les clayons ou canis
(pour parler l’argot des magnaniers modernes). C'est ce
canis, en lang. Canisso, qui forme la table servant de
théâtre au drame plein de péripéties et d'intérêt de ces
troupes de précieux insectes. — Voy. Baroù, Canisso,
Mountan, Téouïè, etc.
Éstajan, anto, adj. Important; orgueilleux; qui parle
et agit én maitre; arrogant, qui fait ses embarras.
Ce mot signifiait en vieux langage, habitant, locataire
et propriétaire de maison. Le sens actuel est tiré de cette
idée de l'importance d’un bourgeois qui a pignon sur rue.
Éstaje, s. m. Étage d'une maison. — Lou prémié, lou
ségoun éstaje, le premier, le second étage.
"Dér. de la bass. lat. S/agium, habitation.
Éstajèïro, s. f. Tablettes composées de montants et de
plusieurs rayons, comme celles d'une bibliothèque, où de
chevilles placées dans le mur et d'une seule planche,
comme celles qui, dans les cuisines, supportent les chau-
drons, marmites et mille autres ustensiles. C’est l'ensem-
ble de plusieurs tablettes ou Ésfajos, qui compose uno
Éstaÿarro. s
” Éstajos, s. f. plur. Tablettes diverses qui composent
l'Éstajèiro, prises isolément. *
Éstama, v. Étamer une glace, une casserole, toute espèce
d'ustensile en cuivre ou en fer; enduire d'étain.
Dér. de Éstan, étain.
Éstamaibrasa, phr. faite. Cri de rue des étameurs de
casserole, de cuillers, de fourchettes. — Voy. Abrasaïre.
ÉST 323
Éstamaîre, s. m. Étameur de casserole. —Voy. Abrasaire.
Éstamaje, s. m. Étamage; action d'étamer; enduit,
couche d'étain qu'on applique sur le cuivre pour l'em-
pêcher de prendre du vert-de-gris.
Éstan, s. m. Étain, métal d'un gris blanc, malléable,
facile à rayer; le plus léger de tous les métaux. — Éstan
dé miral, nom qu'on a donné longtemps au bismuth.
Dér. du lat, Stannum, m. sign.
Éstan, s. m. Fil d'étaim: laine la plus fine, la plus
légère, qu'on obtient au premier trait de la carde. C'est
avec le fil de cette laine, qui est à la fois le plus fin et le
plus fort, qu'on fait la chaine des draps êt des bas tricotés.
Dér. du lat. Stamen, chaine du fil, chaîne de tisserand.
Éstan, s. m, Étang, grand amas d'eau douce ou salée.
Dér. du lat. Stagnum, m. sign.
Éstandar, s. m. Augm. de Éstan, étang. Grande étendue
d'eau de pluie ou d'inondation.
Éstanla, v. Installer; mettre en possession, en évidence,
en une place apparente.
S'éstanla, s'installer ; prendre position; s'établir. Au fig.
s'étaler; se pavaner; se prélasser.
Dér. du lat. In, dans, et Siallus, siége, stalle.
Éstaqua, v. Attacher; lier; garotter.
S'éstaqua, s'attacher à quelqu'un par sentiment; s'é-
prendre; tenir à...; s'appliquer. — Vous éstaquas à dous
sous, Vous vous arrêtez à deux sous pour conclure un
pareil marché! És trop éstaqua, il est trop intéressé, trop
parcimonieux. Té sou éstaqua dé bo, je l'affectionne tout
de bon.
Dér. de la bass. lat. Staca, pieu;
pieu.
Éstaquadoü, douno, adj. Fou à lier; par ext. furieux,
en colère, qu'on ne peut contenir.
Éstaquamén, s. m. Altachement; inclination ; affection;
lésinerie: parcimonie.
Éstaquo, s. f. Lien; lesse; cordon; tout ce qui sért à
attacher; jeune plant ou plantard d'olivier, arraché de la
souche avec son drageon, et qu'on lie en le plantant à un
tuteur : on l'appelle en esp. Estaca de olivas.
Éstarlô, s. m. Dim. Éstarlougué. Astrologue ou plutôt
astronome, que le peuple est fort énclin à confondre dans
une même catégorie, ne pouvant ou ne voulant pas sup-
poser que l'on puisse arriver à un pareil degré de divina-
tion, comme celle des éclipses par exemple, sans autre
agent que les sciences humaines.
Ce mot est purement une corruption du fr. Astrologue.
Ésta-Siâou, phr. faite, interjective. Taisez-vous, restez
tranquille. On la prend aussi substantivement : Garda
l'ésta-sidou, rester muet et immobile.
* Formé du lat. Sta, sois, reste, et Sidou, tranquillé, coi :
sois calme.
Éstavani, v. S'évanouir; tomber en syncope; faire éva-
nouir; causer de la stupéfaction. — Voy. És{abousi.
Dér. du lat. Evanescere, disparaitre.
c.-à-d. attacher à un
324 EST
Éstéia (S’), v. Se gercer; éclater; se fendre; se réduire
en esquilles, en parlant du bois. Par ext. se piquer avec
une esquille de bois, se l'enfoncer dans le doigt.
Éstéiado ou Éstéiaduro, s. /. Piqüre faite avec une
esquille, avec un éclat de bois.
Éstéïo, s. f. Esquille; écharde; menu éclat de bois qui
entre dans la chair.
Dér. du lat. Squidilla, m. sign.
Éstéious, ouso, adj. Bûche, pièce de bois, qui, étant
refendue, est hérissée de petites esquilles qui ne sont autre
chose que les nervures du bois rompues. On le dit aussi
d’une viande dure et filamenteuse qui est comme de la
charpie.
Éstéla, v. Couvrir d'étoiles ; briller comme une étoile.—
L'infinitif est peu employé: le part. pass. ou l'adj. Éstéla,
ado, étoilé, semé d'étoiles, est nécessairement plus fré-
quent. — Lou tén és éstéla, la nuit est étoilée; bien que
l’on dise aussi : Éstèlo, il fait un temps couvert d'étoiles.
S'éstéla, s'étoiler; briller comme une étoile; prendre un
regard ou un aspect rayonnant et miroitant.
Éstéléja, v. frég. de Éstéla. Rayonner; miroiter; luire
comme une étoile; se parsemer d'étoiles.
Éstèlo, ». Étoile; astre, corps lumineux la nuit. — M'a
fa vêire las éstèlos, il m'a donné un tel soufflet que j'en ai
eu un éblouissement, que j'ai vu mille chandelles. Vous
fariè véire las éstèlos, il vous éblouirait par ses belles pa-
roles, il vous ferait croire l'impossible.
Éstèlo se prend aussi, en style poétique, pour : influence
heureuse, dans le sens de Planéto, planète { V. c. m.).
Signifie encore : marque blanche au front d’un cheval;
éclat de bois obtenu par la hache.
Dér. du lat. Stella, étoile : la dernière acception pour-
rait avoir la même racine que Éstéio ( V. ©. m.).
Ésténaios, s. f. plur. Tenaille, instrument de fer propre
à saisir, prendre, arracher, etc. — On dit: Un parél d'és-
ténaïos, une paire de tenailles, quoiqu'on ne parle que
d’un seul de ces outils, parce qu’il est composé de deux
branches, comme on dit : Un parél dé boufés, dé cisèous, etc.
Dér. du lat. Tenacula, m. sign.
Ésténdre, v. Étendre; allonger; déployer; étendre du
linge.
S’ésténdre, tomber; s'étendre; se déployer; se dévelop-
per; s'agrandir. — S'ésténdre dé tout soun long, tomber de
toute la longueur de son corps. Lou vou ésténdre, se dit
plaisamment et d’une manière absolue pour : je vais me
coucher.
Dér. du lat. Extendere, m. sign.
Ésténdudoù, s. m. Étendoir; séchoir; lieu où l’on met
le linge à sécher.
Éstérnu, s. m. Dim. Éstérnudé; péj. Éstérnudas. Éter-
nûment, mouvement subit et convulsif des muscles expi-
rateurs, qui chasse avec effort et bruit l’air contenu dans
les poumons.
Ce n’est pas un Dictionnaire comme le nôtre, destiné
ÉST
à recueillir les vieux mots de notre vieux langage, qui
pourrait négliger de relever les anciennes formes, souve-
nirs et traditions des usages et des mœurs d’autrelois. A
propos du subst. qui se présente, dans cette coutume d'a-
dresser un souhait à une personne qui éternue, il nous
semble distinguer quelque chose de touchant et de respec-
table comme formule et comme sentiment, qu'il serait
peut-être fàächeux de voir perdre ou de trop mépriser. On
sait que le grand monde ne trouve plus aujourd’hui de bon
ton de faire intervenir un vœu qui appelle la protection
de la Divinité en pareille occurence : on se contente d’une
légère inclinaison de tête, et encore est-il mieux d’être
distrait; ainsi le veut l'étiquette d’une société gourmée et
prétentieuse, et la mode. Il n’en est pas de même dans nos
campagnes, où la politesse consiste toujours, comme au
bon vieux temps, à faire suivre un éternüment d’un Dieu-
vous-bénisse bien accentué : et le populaire a raison de
tenir à ses bonnes coutumes et à ses formules de civilité,
qui remontent assez haut et se sont conservées assez long-
temps pour valoir qu’on s’y attache et qu’on les aime.
Quelle est l’origine de cet usage de saluer celui qui éter-
nue et de faire des souhaits en sa faveur? Les recherches
de la science ne sont point parvenues à la découvrir, non
plus qu’à lui donner une date précise. Il est certain néan-
moins que, dès la plus haute antiquité, il est fait mention
d’une coutume semblable.
On a bien dit que, vers la fin du VIe siècle, sous le pape
Pélage I, une maladie pestilentielle ravageait Rome et
l'Italie et qu’un de ses principaux symptômes était l’éter-
nüment. De là serait venue et se serait répandue la cou-
tume de dire en pareil cas : Dieu vous bénisse! Dieu vous
vienne en aide! Diou vous bénisque! Diou vous ajude!
Mais bien plus anciennement l'usage existait. Aristote le
constate, Homère en parle dans l'Odyssée comme d'un
signe de bon augure. Les Grecs disaient, quand ils éter-
nuaient: Zeù ouXov, Jupiter sauve-moi, et les assistants
répondaient à celui qui éternuait : Zäür, vivez. Après eux,
les Romains traduisirent ces vœux par leur Sale; et ils
regardaient l’éternüment comme le troisième des présages
domestiques : heureux, si on éternuait à droite, fâcheux
si c'était à gauche.
La tradition a ainsi amené jusqu'à nous la formule de
ces souhaits, sans nous en dire autrement la cause. L'é-
branlement convulsif que produit l’éternüment sur le cer-
veau a-t-il fait craindre quelque accident? Une certaine
superstition s’est-elle mêlée à ce phénomène naturel et
fréquent? On ne saurait le dire; mais au milieu de la wie,
à chaque instant, il est un moyen de sociabilité, de bonnes
relations entre individus, et il élève en même temps l’es-
prit vers un Dieu protecteur, dont l'assistance est réclamée :
il est évident que l’usage a eu raison de s'établir et qu’il a
raison de se conserver.
Éstérnuda, v. Éternuer; faire un éternüment.
Dér. du lat. Sternuere, m. sign.
EST
Éstérpa, v. Éparpiller ; répandre; disperser ; séparer.—
nous, séparons-nous, gagnons Chacun d'un côté
différent. Éstérpa lou fumiè, étendre, éparpiller, répandre
le fumier sur un champ.
: Dér. du lat. Stirps, tronc, souche, parce que probable-
ment ce mot a eu pour première acception la pousse des
racines et des branches d’un arbre qui, en s’éloignant du
tronc, s'étendent en mille directions diverses.
… Éstérvéia, véiado, adj. Arbre, branche, rameau, étiolés,
dépouillés de feuilles par l'effet d'un tourbillon.
Éstérvéiado, s. f. Maladie causée à un arbre par un
tourbillon. Par ext. on le dit aussi de toute maladie, n’im-
porte la cause, qui, n’atteignant que les branches, est rare-
ment mortelle.
Éstérvél, s. m. Dim. Éstérvéié. Tourbillon, vent follet,
qui, dans sa plus grande extension, se nomme trombe, et
produit des sinistres extraordinaires. — Ces phénomènes,
qui ne se distinguent que par leur intensité, ont proba-
blement le mème agent, l’électricité.
On appelle aussi Éstérvél, par analogie, un petit moulin
que les enfants composent d’une noix évidée et percée,
dans laquelle tourne un pivot surmonté de deux petites
ailes en bois posées horizontalement et en croix, Un fil,
qui se dévide intérieurement autour du pivot, est l'agent
du mouvement de ce jouet. On dit d’un étourdi, qui est
dans une perpétuelle agitation : Sémblo un éstérvél, il res-
semble à un tourbillon.
Ne. dériverait-il pas du lat. Extrà, hors, dehors, et
Evellere, arracher, extirper?
Éstève, s. m. Ancienne traduction du n. pr. lat. Ste-
phanus, Étienne, que nous disons aujourd'hui Éstièine. La
première forme ne s’est conservée que pour un n. pr. de
lieu, précédé de Sént: On appelle Sént-Éstève, tous les
lieux qui se disent en fr. Saint-Étienne.
Éstève est aussi une sorte de galette ou de fouace sucrée,
ayant la forme d'un marmouset plaqué en bas-relief sur
une feuille de papier gris qui lui a servi de berceau au
four. Cette galette est fort à la mode dans la semaine de
Noël et du jour de l'an. C'est une étrenne généralement
* adoptée pour les enfants du peuple. Aussi son nom lui
vient-il de saint Étienne, dont la fête arrive le lendemain
de la Noël. Autrefois les parrains envoyaient ce cadeau à
leur filleul le.jour de la Saint-Étienne, et il avait dans le
principe la forme d'une couronne, en commémoration de
la couronne que mérita ce premier martyr.
On dit d'un homme grossier et brutal : Æs fi coumo un
éstève dé pan bru, il est fin comme pain d'orge. És aqui
coumo un éstève, il est tout ébaubi, il reste là planté comme
une figure de cire.
Éstévo, s. f. Pièce courbe qui sert de manche à un
araire et qui est surmontée du mancheron ou Manipou.
Dér. du lat. Stiva, m. sign.
Éstiblassa, v. Éreinter, rosser, M A
donner une volée de coups de bâton,
ÉST
En gr. Zr64çw, battre, fouler.
Éstiblassado, s. f. Volée de coups de bâton; râclée.
Éstido, s. f. Idée; croyance, pressentiment, — Avèdre
bono éstido, avoir bon augure.
Éstièine, s. m. n. pr. d'homme. Étienne. — Voy.
Éstève.
Éstiganço, s. f. Projet; dessein; intention; prévision:
intelligence.
Dér. du lat. Instigatio, impulsion, instigation.
Éstignassa, ». Tirer, arracher les cheveux ; trainer par
les cheveux.
S'éstignassa, se prendre aux cheveux.
Dér. de Tignasso.
Éstignassado, s. f. Action de tirer, d'arracher les che-
veux; châtiment qui consiste en cet acte ; lutte entre deux
personnes qui se prennent aux cheveux.
Éstima, v. Estimer ; priser; évaluer; juger de la qualité,
du poids ou de la valeur d’une chose par un simple calcul
d'esprit ou la comparaison avec des types dont on conserve
le souvenir.
Dér. du lat. Estimare, m. sign.
Éstimaïre, s. "”. On ne donne guère ce nom aux ex-
perts géomètres qui ont des bases fixes et presque mathé-
matiques d'appréciation, mais bien à ceux qui évaluent à
vue d'œil la quantité de feuille de mûriers que portent une
ou plusieurs plantations. Cette denrée se vendant souvent
à l'estime et sans peser, le métier d’estimeur est une
profession. L'habitude et diverses expériences contrôlées
par le pesage, jointes à la justesse d'esprit ou de coup-
d'œil, rendent ces jugements en général dignes de con-
fiance.
On donne aussi le nom d’Éstimaïre à des espèces de
prud'hommes qui estiment le bétail et les agrès d'une
ferme entre les fermiers et les propriétaires.
Éstimo, s. f. Estimation; prisée; évaluation. — Achéta
à l'éstimo, acheter sans prix déterminé, mais à celui qui
sera fixé par un ou plusieurs hommes de l'art. Aquélo fièio
és pas d'éstimo, cette feuille de mürier n’est pas encore
assez développée pour être évaluée. Il faut observer ici que
l’on n'évalue jamais la feuille de mürier d'après le poids
qu'elle est censée avoir à l'époque de la cueillette ou de
son estimation, mais bien d’après celui qu’elle aurait réel-
lement lorsqu'elle serait parvenue à tout son développe-
ment ou toute sa maturité. Cela est si vrai que lorsqu'on
a acheté de la feuille au poids, le propriétaire n’est obligé
de la peser que quand elle a atteint ce degré d’accroisse-
ment. Si toutefois l’acheteur est pressé, pour les besoins de
sa chambrée, de cueillir tout ou partie de cette feuille
achetée, on ajoute un cinquième, un quart, en sus du
poids réel pour représenter le poids qu'elle aurait pu ac-
quérir encore. C'est ce qu'on appelle dans le peuple : Faire
lous quintéous dé sètanto-cin, dé quatre-vin liouros, c.-à-d.
qu’on compte chaque soixante-et-quinze, ou quatre-vingts
livres pour un quintal.
325
326 ÉST
Éstinla, ». Styler quelqu'un, le dresser, lui donner l'in-
telligence ou la ruse des affaires.
Corrupt. du fr.
Éstinlé, s. m. Stylet, poignard à lame Lien 54 et très-
étroite.
Corrupt. du fr.
Éstiou, s. m. Dim. Éstivé; péj. Éstivas. Été, la plus
chaude des quatre saisons de l’année, qui commence du
49 au 22 juin et finit, astronomiquement parlant, vers le
21 septembre.
Dér. du lat. Æstas, m. sign.
Éstira, ». Étendre; allonger; étirer; tirer quelque chose
d’élastique dans le sens de sa longueur pour l’allonger; re-
passer le linge.
S'éstira, s'étendre; allonger les bras en bâillant; étendre
les bras; ce qui fait dire proverbialement en pareil cas :
Lou quièr séra pas chèr aquést'an, lous védèls s'éstirou, le
cuir ne sera pas cher cette année, les veaux s’'allongent.
Aquél droulas s'éstiro bièn, ce jeune gars s’allonge bien, il
grandit beaucoup.
Dér. de Tira.
Éstirado, s. f. Longue traite de chemin; traite, trajet,
distance à parcourir. — N'avès pér uno bono éstirado,vous
en avez encore pour un bon bout de chemin.
Éstiragna, v. Enlever les toiles d'araignées; housser un
appartement.
Dér. de Zrugnado.
Éstiragnaïre, s. m. Houssoir; brosse emmanchée d’une
perche pour enlever les toiles d’araignée d’un appartement.
Éstiraïre, s. m. Établi de repasseuse; tapis composé de
plusieurs doubles étoffes sur lequel elle repasse le linge.
Éstirairo, s. f. Repasseuse de linge.
Éstiraje, s. m. Linge à repasser ou déjà repassé; pro-
fession ou apprentissage de repasseuse.
Éstiva, v. Passer l'été; faire passer l'été au bétail sur
les montagnes. — Éstivo lontén aquést’an, les chaleurs se
prolongent longtemps cet été.
S’éstiva, prendre les habits d’été, se mettre en vêtements
légers d'été.
Dér. de Éstiou.
Éstivado, s. f. Saison de l'été; le temps, la durée des
chaleurs; le gain des manouvriers pendant la saison des
foins ou des moissons; le pécule des montagnards qui vont
faucher ou moissonner dans les pays aux environs de
Nimes ou de Montpellier et qu'ils appellent, eux, propre-
ment lou Languédd. — Aï fa uno bravo éstivado, j'ai faît
une bonne saison d'été, j'ai gagné beaucoup d'argent dans
cette saison.
Éstivaje, s. m. Action de conduire les troupeaux dans
la montagne; temps qu'y passent les moutons; frais de
conduite et de pacage des troupeaux; réserve de ces paca-
ges pour le propriétaire du sol; gages des bergers ou gain
du maître-berger pendant cette saison.
Éstivé, s. m. Dim. de Éstiou. Petit 616. — L'éstivé dé
ÉST
Sén-Michèou où dé Sén-Marti, le petit été de la Saint-
Michel, du 29 septembre, on de la Rien du "1
novembre.
Éstivén, énquo, adj. D'été; qui concerne l'été; qui se
produit en été. — Nosto-Damo éstivénquo, Notre-Dame d'été,
l’Assomption de la Vierge, le quinze août.
Éstofo, s. f. Dim. Æstouféto; péj. Éstoufasso. Étofre;
tissu de laine, de soie, de fil, de coton.
Dér. de la bass. lat. S/uffare, garnir, équiper. En allem.
Stoff, m. sign.
Éstôs, s. m. Au plur. Éstosses; dim. Éstoussé. Étau,
outil de serrurier ou de menuisier, pour fixer la pièce qu’ils
passent à la lime ou à la rape. ”
Dér. du lat. Sto, je reste en place, immobile.
Éstosse, ». Tordre. — Voy. Tosse.
Éstosso, s. f. Dim. Éstousséto. Entorse; torsion, frois-
sement violent, donnés à un membre ou à un arbre, soit
par accident, soit plutôt par une violence étrangère et vo-
lontaire.
Dér. du lat. Extorsum, supin de Ezxtorquere, tordre,
donner une entorse.
Éstoufa, s. m. Dim. Éstoufadé. Étuvée de viande cuite
sans eau et à la braise. — À manja foco éstoufa, se dit de
quelqu'un qui a beaucoup souffert moralement et qui par
position a été obligé de concentrer sa peine, sans pouvoir
ou oser l'épancher, de l’étouffer pour aïînsi dire.
Éstoufa, »v. Étoufler; suffoquer; asphyxier. — Éstoufa
lous fouséls, étouffer les chrysalides des cocons pour pou-
voir les conserver sans laisser éclore les papillons. Cette
opération se faisait autrefois au four avec où sans ther-
momêtre, ce qui présentait bien des inconvénients et des
pertes : dans les filatures à la Gensoul, elle se fait à la
vapeur et au thermomètre.
Dér. de la bass. lat. Stuffa, étuve.
Éstoulouira (S'), v. S'épanouir au soleil; se mettre à
Vaise devant un bon feu; s'étendre, se vautrer dans une
position commode, avec un sentiment de sensualité.
Du gr. Zropévwu, aor. Éctépesa, coucher, étendre.
Éstouma, s. m. Dim. Éstoumaqué; péj. Éstoumaquas.
Estomac, principal organe de la digestion ; le cœur, la
poitrine, que le languedocien confond volontiers avec l'es-
tomac proprement dit. — Un baramén d'éstouma, Suffo-
cation, serrement de cœur. Mowrimén d'éstouma, défail-
lance, évanouissement. Aqud crèbo l'éstouma, cela vous
fend le cœur, c’est un crève-cœur. À bon éstouma, il a la
poitrine bonne, ou une forte voix. Au fig. cette expression
est proverbiale en parlant de quelqu'un qui supporte très-
bien les reproches de sa conscience, qui ne s'émeut pas de
sa propre improbité, ou qui est loin d’exagérer la sensi-
bilité. À un éstouma dâou diable, il a un estomac d'au-
truche. Un éstouma dé fato, un tempérament débile, qui
digère mal, qu'un rien incommode. La bouquo dé l'éstouma,
le creux de l'estomac.
Dér. du lat. Stomachus, m. sign.
Te
ÉST
Éstoumaqua, v: Causer du saisissement, une stupéfac-
tion douloureuse. Au fig. étonner vivement, causer une fà-
cheuse surprise; afliger ; annoncer une mauvaise nouvelle.
Éstouna, v. Étonner; surprendre; causer dans l'âme
une forte impression de crainte, d'admiration, d'étonne-
ment; frapper; émouvoir; ébranler. — On dit proverbia-
lement : M'éstoune! par contre-vérité d’une chose toute
simple et qui n’a rien d'étonnant.
S'éstouna, s'étonner; se troubler; s'effrayer; être surpris.
Estoupado, s. f. Etoupée, sorte de topique répercussif
pour les entorses et les échymoses produites par contu-
sions. C’est ordinairement une glaire d'œuf battue et épais-
sie en cataplasme par l'adjonction de l’alun qui s'y mêle,
qui fait la base du remède, On étend cette pâte sur un
plumasseau d'étoupe, par où lui est venu son nom, et on
fait une application souveraine.
Sauvaces ajoute que l'Éstoupado est encore un excellent
remède contre la brûlure. Au surplus, ces recettes popu-
laires sont connues et fort employées. Le proverbe: A
mdou dé tèsto, éstoupado dé vi, n’a pas peu contribué sans
doute à donner crédit au topique.
Éstoupo, s. /. Étoupe, premier rebut de la filasse du
chanvre ou du coton. — Éstoupos dé san dé por. « On ap-
pelle, dit Sauvages qu'il est toujours bon de citer, Étou-
pes du sang des cochons, une pelotte charnue et spon-
gieuse qu'on forme dans la bassine où l'on reçoit le sang
de cet animal qu'on égorge; on la forme, disons-nous, en
maniant le sang et en le remuant circulairement tandis
qu'il coule de la plaie et qu'il est chaud.
« Le but de ce mouvement de la main qui tourne en
rond et qui, à mesure, s'ouvre et se ferme pour assembler
les brins épars de l’étoupe qui se forme, est d'empêcher
le sang de se figer, lorsqu'on le destine à faire du boudin.
« C’est un phénomène remarquable, qu’il se forme, par
cette seule manipulation, de vraies fibres charnues bien
distinctes et organisées, que le mouvement circulaire ra-
mène au milieu de la bassine, et qui s’enlacent et s'amas-
tomosent mème entre elles, par la pression alternative de
Ja main, et forment cette masse spongieuse appelée étoupes.
« La matière de ces fibres est la lymphe, le premier
des éléments du sang, qui, dans l'animal vivant, se con-
vertit en chair; et qui, lorsqu'elle se refroidit sans qu'on
y touche, comme dans la palette des chirurgiens, sert
comme de présure à cailler le sang, sans y former de fibres,
et d'où résulte le caillot qui se sépare de la sérosité, autre
élément du sang, dans laquelle le caillot nage.
« La pelote d'étoupes d’un rouge foncé, qui a la con-
sistance de Ja chair ordinaire, en prend la couleur, lors-
qu'on J'a fait dégorger dans plusieurs eaux, et qu'on a
séparé par ce moyen les globules rouges, ce troisième élé-
ment du sang dont il fait la couleur : éléments qu'il est
facile de séparer l’un de l’autre par les procédés ci-dessus.
« C'est la lymphe qui, dans le corps humain, forme les
excroissances charnues contre nature, telles que les lou-
ÉST 327
pes, les polypes et les caillots des vaisseaux sanguins tron-
qués ; elle s'y organise d’elle-mème, le sang y circule, elle
devient sensible et animée, par une régénération sans
germe, au moins connu, ou bien allégué gratuitement, et
dont nous avons vu des exemples dans la sève extravasée
de certains arbres ; telle est celle du chêne vert écorcé, qui
a une tendance pareille à s'organiser de même. »
Éstoura, v. on Éstouri. Essuyer; sécher, rendre sec;
dessécher et mettre à sec.
Éstourdi, ido, adj. Étourdi; inconsidéré; léger; qui
agit étourdiment.
Éstourdi, v. Étourdir; causer un étourdissement: faire
perdre connaissance par le fait d’un coup violent sur la
tête qui cause un ébranlement au cerveau. Au fig. fatiguer
par le brdit; ennuyer par un babil incessant; distraire
d’une occupation par des éclats de voix.
S'éstourdi, s'étourdir; se donner une violente commotion.
à la tête; se faire illusion.
Dér. de l’ital. Stordire, m. sign.
Éstouri, v. Essuyer. — Voy. Éstoura.
Éstouris ou Éstourisses; s. m. plur. Jaunisse, ictère;
deux maladies qui différent peu par leurs diagnostics :
leurs symptômes les plus saillants sont la couleur jaune de
la peau, du blanc des yeux, des urines, et la blancheur
des excréments. Le populaire a cent topiques plus plai-
sants et plus ridicules les uns que les autres contre cette
maladie. Il n'est pas impossible que la crédulité du malade,
réagissant sur le moral, n'ait pu amener des cures qui ne
sont dues réellement qu'à cette action morale dans une
maladie qui, produite par la bile et ayant son siége dans
les hypocondres, a une connexité avec le moral pareille à
celle du spleen, qui, comme on le sait, agit dans la même
région. — Lous éstourisses blans, les pâles couleurs.
Il semble de prime abord que ce mot vient du lat. Ez-
torris, banni, exilé; car la ressemblance graphique est
parfaite; mais comment allier les acceptions si différentes
des deux termes? Est-ce que, dans le temps, on fuyait.les
individus atteints de la jaunisse à cause de cette couleur
affreuse, répandue sur leur face, qui les faisait ressembler
à une race maudite? Étaient-ils bannis de la société comme
les ladres et les lépreux? Nous ne le savons, et nous hasar-
dons simplement une induction.
Éstournèl, s. m. Étourneau, sansonnet; étourneau vul-
gaire, Sturnus vulgaris, Linn., oiseau de l'ordre des Passe-
reaux et de la fam. des Conirostres ou Conoramphes, à
bec conique. Cet oiseau de passage, de la grosseur d'un
merle, ayant tout le corps d'un noir lustré, chatoyant de
vert et de pourpre foncé, souvent tacheté de blanc, se prive
fort bien, apprend à répéter des airs et même à parler.
Au fig. Éstournèl se prend pour nigaud, homme sans
jugement et sans tête. — Lous éstournèls én troupo soun
pas grasses, prvb. Cela se dit des familles trop nombreuses
ou du bétail trop considérable pour le pâturage.
Dér. du lat. Sturnus, m. sign.
328 - ÉST
Éstrado, s. f. Estrade; tréteau; trottoir. — Batre l'és-
trado, tenir la campagne; courir les grands chemins.
Dér. de l'ital. Strada, chemin.
Éstragoun, s. m”. Estragon, Artemisia dracunculus,
Linn., plante de la fam. des Composées Corymbifères, po-
tagère, à vertu anti-scorbutique, dont on aromatise le
vinaigre en l'y faisant macérer.
Dér. du lat. Dracunculus, de Draco.
Éstrangla, v. Étrangler; presser le gosier au point d’in-
tercepter la respiration; étouffer ; suffoquer. — Ës huroùs
coumo un chi quan s'éstranglo, il est heureux comme un
chien qui s’étrangle, dit-on d'un pauvre hère à qui rien ne
réussit.
Dér. du lat. Strangulare, m. sign.
Éstrangladoù, s. »m. Chemin fort étroit; ruelle à pli de
corps; coupe-gorge.
Éstranglo-chi, s. ”m. Colchique, safran bâtard, Cofchi-
cum autumnale, Linn., plante de la fam. des Colchicacées.
On l'appelle vulgairement : Tue-chien ou mort aux chiens.
Sa racine est un poison violent surlout pour les chiens. De
là son nom.
Éstrangoula, v. Dim. de Éstrangla. Se dit d’un vête-
ment quelconque trop juste qui met le corps à la torture,
ou d’un animal qui avale une bouchée de travers.
Éstranje, anjo, adj. Étrange, extraordinaire; qui est
contraire à l'usage, au sens commun, aux convenances.
Éstranje, au masc. seulement et pris substantivement,
signifie aussi : pays étranger. — És ana din l'éstranje, il
est allé en pays étranger, hors de France.
Dér. du lat. Extraneus, étranger.
Éstranjè, jèiro, adj. Étranger; qui est d’un autre pays
que celui où il se trouve actuellement; qui n’a aucun rap-
port avec la société, avec l'endroit dont il est question;
qui est étranger à la conversation, à l'affaire dont on traite.
— Lous éstranjès, les troupes étrangères de l'invasion.
Dér. du lat. Extraneus, m. sign.
Éstras, s. m. Au plur. Éstrasses. Dégât; débris; reliefs
d’étoffe, ou de mets, qu'on laisse perdre. — Laïsso tout à
l'éstras, il laisse tout se perdre, se gâter, s’avarier. Baïla
à éstras dé mérea, donner à vil prix, gâter le marché;
mévendre.
Dér. de Éstrassa.
Éstras, s. m., au plur. Éstrasses. Capiton: résidu des
cocons qui reste avec les chrysalides quand on en a filé la
soie; résidu trop peu consistant pour fournir un brin. Pour
profiter cette substance, chaque fileuse, à la fin de la jour-
née, fait bouillir à gros bouillons dans sa bassine les chry-
salides revètues de cette légère pellicule qui les recouvre :
en les battant avec son balai, elle en fait tomber les chry-
salides ; il en résulte un réseau de filasse grossière qu’on
appelle Éstras, que l’on carde et dont on fait un fleuret
grossier.
Éstrassa, v. Perdre; gâter ; gaspiller; laisser se perdre,
se gâter. — Aquél ouvrage és éstrassa, c'est un ouvrage
EST
gâté, gâché. Éstrassa lou pan, laisser perdre le pain. Cé
qué s'éstrasso, proufito pa'n déngus, dicton plein d’une
sage et charitable économie : le bien qui se gâte, qui se
perd, ne profite à personne, pas même aux pauvres. Au
fig. Éstrassa sa marchandiso, vendre à vil prix, gâter le
métier. Aquélo fio s'és bièn éstrassado, cette fille a bien gâché
son avenir par son mariage, elle pouvait trouver beaucoup
mieux : cela se dit seulement par rapport à la fortune et
à l'alliance. Æstrassa lou mdou, se distraire d’une souf-
france, soit par une occupation agréable, soit par un travail
sérieux et qui préoccupe entièrement l'esprit. Éstrassa un
lagui, tromper le chagrin, s’étourdir sur ses malheurs.
Anën, anén! fôou éstrassa tout aqud, allons, allons! il
faut oublier ce sujet de discorde, mettre cette injure sous
les pieds. Y-a pas rés qué s'éstrasse, il n’y a pas tant à se
récrier, il n’y a rien de trop. Æs bravéto, pamén y-a pas
rés qué s'’éstrasse, cette fille n’est pas mal, mais il n’y a
pas de quoi tant crier : venez-y voir.
Dér. de l'ital. Etraziare, maltraiter, outrager; prodi-
guer.
Éstrassaïre, aïro, adj. Péjor. Ésfrassaïras, asso. Pro-
digue; dissipateur; qui n’a pas d'ordre; qui laisse tout
perdre, tout gâter.
Éstrasso-lénçôou, s. m. Paresseux; qui passe son
temps au lit; qui se lève tard.
Éstrasso-parâoulo, s. m. Diseur de riens; qui parle
toujours pour ne rien dire.
Éstrasuia, v. Éblouir; fatiguer la Vue; appesantir la vue;
donner cette espèce de berlue ou de lourdeur de paupières
que l’on éprouve le soir quand on succombe au sommeil,
et lorsqu'on vous réveille en sursaut.
Formé du lat. Extrà, dehors, au-delà, et du fr. OEt,
qui d’après le génie languedocien devrait se prononcer UL :
c’est proprement, aveugler.
Éstravagan, ganto, adj. Extravagant ; fou, bizarre.
Ce mot, qui nous vient du fr., est formé du lat. Extrà,
en dehors, et Vagari, être errant, vagabond. Peut-être a-
t-il été pris tout fait du lat. Extravagantes, qui étaient
des lois romaines, jetées çà et là dans la jurisprudence et
non contenues dans le Corpus juris de Justinien? Ces lois
et ordonnances dont la bizarrerie les aurait fait exclure,
auraient bien pu former l'adj. Extravagant, dans son ac-
ception plus étendue.
Éstravaganço, s. f. Extravagance; état de l'âme qui
extravague; action ou discours hors de raison. — Dis pas
Ou faï pas qué d'éstravaganços, il ne dit ou ne fait que des
extravagances.
Éstre, v. Être. — Parfois il fait aussi Rèstre. L'intro-
duction de RÀ, consonnance forte et rude, est fréquente
dans la langue d'Oc: elle ne déplait pas à son génie, On la
remarque dans la formation de bien des noms propres
dans des mots où rien ne semblerait devoir l'appeler, puis-
qu'ils ne traduisent que des formes romanes ou de la
moyenne latinité qui ne l'avaient pas admise, et par ex.
ÊST
dans les reproductions des désinences en anicæ, enicæ,
onicæ, latines, pour anègues, énèques, onèques, devenues
ensuite ange, enge, onge, anche, enche, agné, ègne, ogne, ete.,
et enfin fixées en argue, ergue, orgue. Ce doit Ôtre en vertu
des mèmes propensions qu'elle apparait ici, avec cette
circonstance qu'elle se place au commencement du mot et
d'un verbe très-fréquent. Serait-ce pour éviter un hia-
tus quand le mot qui précède finit par une voyelle non
élidée? Serait-ce pour imprimer une sorte d'énergie plus
sentie à la phrase? Toujours est-il qu'elle ne peut être
considérée que comme euphonique et n'appartenant en
propre qu'à notre langue; et sa présence n’en est pas moins
très-remarquable et originale. Au reste il faut remarquer
encore que cette forme avec R initial n'existe qu'à l'infinitif :
elle ne produit dans aucun autre temps du verbe.
Éstre ou Rèstre est un des verbes auxiliaires en lang.
comme en fr. Il est irrégulier, a dit un savant grammai-
rien, dans la plupart des langues indo-européennes, c.-à-d.
qu'on emploie plusieurs verbes différents, défectueux,
chacun dans quelques-uns des temps, pour composer le
système général de conjugaison de ce verbe. — Dé qué li
sès? Qu'êtes-vous pour lui? A quel degré êtes-vous parents?
Li souï pas rés, je ne suis pas parent avec lui.
-, Dér. du lat. Esse, sum, fui.
Éstré, éstrécho, adj. Dim. Éstréché, éto; Éstréchoù,
ouño. Étroit. — Voy. Désiré.
- Dér. du lat. Strictus, m. sign.
Éstrécési, ». Rétrécir. — Voy. Déstrécési.
Éstréma, ». Renfermer; serrer; mettre à l'abri; mettre
dedans les récoltes et tout ce qui souffrirait au dehors des
intempéries ou des voleurs. — Éstréma-vous, rentrez,
mettez-vous à l'abri. Éstréma un chival, faire rentrer un
cheval à l'écurie. Las cagardoulos éstrèmou lus banos, les
escargots rentrent leurs cornes. Low sourél s'éstrèmo, le
soleil se cache dans les nuages. On dit d’un gros mangeur :
Patira pas aquéste hivèr, éstrèmo fogo pasturo, il ne souf-
frira pas de besoin cet hiver, il fait bonne provision de
Dér.du lat. Extremus, dernier, le plus reculé; parce
qu'au sens propre, Éstréma signifie serrer avec soin, ren-
fermer dans le coin le plus secret, le plus reculé de la
Éstréna, v. Donner des étrennes au jour de l'an; donner
le pour-boire ou les épingles aux servantes d’auberge, aux
postillons, aux garçons d'hôtel; mettre pour la première
fois un objet d' habillement ou de toilette; donner l'étrenne
à un marchand, être le premier à lui acheter un article ou
le premier chaland de la journée; avoir le premier usage
d’une chose.
= Éstréno, s. f. Étrenne; libéralité, gratification aux gens
. que l'on emploie ordinairement; premier argent que reçoit
un marchand; premier usage que l'on fait d'une chose. —
Las éstrénos, les étrennes du jour de l'an. N'aï agu l'és-
_ tréno, j'en ai eu les prémices. Diou vous done bono éstréno,
ÉST 329
dit-on à un marchand : que Dieu vous envoie des cha-
lands.
Dér. du lat. Strena, m. sign. — Ce mot lat. vient du
nom Strenua, déesse de la force; parce que des branches
coupées dans une forêt consacrée à cette divinité, furent
offertes le premier jour de l'an à Tatius, roi des Sabins,
qui partagea le trône de Rome avec Romulus. Ce prince
les reçut comme un heureux augure, et en autorisant cette
coutume pour l'avenir, il voulut que le nom du présent
qu'on se ferait à cette époque de l’année en rappelât l'ori-
gine.
Éstria, v. Étriller un cheval, le frotter avec l'étrille. Au
fig. battre; rosser; rouer de coups; étriller les épaules de
quelqu'un.
Dér. du lat. Strigilare, m. sign.
Éstriado, s. f. Raclée; volée de coups; correction ma-
nuelle.
Éstricado, s. f. Traite; parcours; temps de marche, —
Y-a’no bono éstricado, il y a une bonne traite, Y anaraï
d'uno éstricado, j'irai tout d'une traite.
Dér. du lat. Extricare, dépècher une affaire; s'en dé-
barrasser.
Éstrigougna, v. Tirailler; trainer; tirer par les habits
ou par le bras; secouer; houspiller. — Voy. Trigoussa.
Dér. peut-être du lat. Extringere, serrer fortement :
Éstrigougna est d'évidence un réduplicatif qui augmente
l’action.
Éstrigougnado, s. f. Tiraillement; action de tirailler,
de déchirer les habits de quelqu'un en le tiraillant.
Éstriou, s. m. Étrier, anneau de métal suspendu de
chaque côté de la selle et servant d'appui au pied du cava-
lier. — Tène l'éstriou à qudouquus, tenir l'étrier; servir
de marche-pied; aider quelqu'un à parvenir, lui prêter la
main; être son complice.
Dér. de la bass. lat. Strivarium ou Streparium, m. sign.
Éstripa, o. Déchirer; mettre en pièces, en loques; essarter
un champ; défricher; étriper; arracher les entrailles à un
animal, éventrer. — On dit par antiphrase, Éstripo-
vèsto, d'un homme très-maigre qui ne peut remplir ses
habits.
Ce mot peut venir de la particule extractive Es et de
Tripo, boyau, c.-à-d. extraire, arracher les boyaux. Dans
le sens de défricher, il peut venir du lat, Ex et Stirps, sou-
che, arracher les souches. Il reste à savoir dans les diver-
ses acceptions quelle est celle qui a été usitée la première.
- Éstripaduro, s. f. Déchirure ; accroc.
-Éstrivièiro, s. f. Étrivière, courroie double qui soutient
l'étrier. — Douna las éstriviètros, donner les étrivières,
frapper, fustiger avec les étrivières ou autrement. Cette
expression vient sans doute du moyen-âge où les chevaliers
corrigeaient les fautes de leur pages et varlets à coups d'é-
trivières.
Éstron, s. m. Dim. Éstrouné; péj. Éstrounas. Étron,
matière fécale. — Se dit aussi comme terme injurieux et
4.
330 ÊST
très-bas, appliqué à un enfant, à un jeune homme qui fait
des embarras, des traits méprisables.
Éstrouncha, v. Étronçonner les branches d’un arbre;
couper la cime d’une plante ou l'extrémité supérieure de
tout autre objet. — És/rouncha lous pèous, diminuer la
longueur d’une mèche de cheveux.
Dér. du lat. Truncare, rogner, couper par le bout.
Éstroupia, v. Estropier; casser un membre, le blesser,
l'atrophier; gâcher un ouvrage; altérer un mot, une pensée,
la langue.
Dér. de l'ital. Stroppiare, m. sign.
Éstru, s. m. Félicitation; compliment à l'occasion d’un
heureux évènement.
Éstruciou, s. f. Instruction pastorale, sermon familier
à la portée du peuple; instruction analytique que les caté-
chistes font sur le catéchisme aux enfants.
Il y a telles personnes grossières qui vont jusqu'à faire
de ce mot celui de Déstruciou : c'est de l’'hydrophobie
archi-franchimande, que nous n’adopterons jamais : rien
ne compromettrait plus sûrement la cause si belle du lan-
guedocien, que d'insérer dans sa nomenclature ces variantes
barbares.
Éstruga, »v. Complimenter, féliciter quelqu'un sur un
évènement heureux. — Vous éstrugue d'un fil, je vous
félicite sur la naissance de votre fils.
Ce mot et sa racine appartiennent au dialecte provençal ;
mais ils ont percé jusqu'à nous. La popularité des poésies
de l'abbé Favre et des Noëls plaisants de Saboly nous l’ont
importé.
Sa racine parait être le lat Strues, sorte de gateau dont
on faisait oblation en actions de grâce.
Éstrui, éstruicho, adj. Instruit; habile; savant; qui
a de l’acquis.
Corrupt. du fr. Instruit.
Éstrumén, s. m. Instrument de musique. — Ce mot,
emprunté au fr., ne s'emploie guère que dans cette phrase
ironique : La lénguo és un poulit éstrumén, la langue est
un instrument bien habile, que l’on adresse à un individu
gascon et vantard : c’est lui dire que toutes ses bravades
ne vont pas plus loin que le propos.
Éstudia, v. Étudier; tâcher d'apprendre par cœur; ap-
pliquer son esprit aux sciences; penser; réfléchir. — Dé
qu'éstudies aqui, choutaras? qu'as-tu à bayer aux corneilles,
nigaud !
Dér. du lat. Studere, m. sign.
Éstudian, $. m. Étudiant ; écolier; jeune garçon qui fait
ses études.
Éstudie, s. m. Étude; cabinet d’un notaire, d’un avocät,
d’un avoué, d’un homme de lettres, etc.
Éstui, s. m. Étui. — Nous n’ajoutons rien pour une
définition, et ce n’est qu’à regret que nous insérons ici et
seulement pour mémoire, un mot que désavouerait un vrai
languedocien, mais que le français a imposé à nos nova-
teurs, parmi lesquels il a cours journalier. Pour nous, nous
ET
nous renfermerons, pour notre usage, dans son correspon-
dant pur-sang Cargué.
Néanmoins, qu'il soit bien entendu que, dans cette objur-
gation, il ne s'agit que d’étui de couturière, qui ne peut
avoir d'autre nom que Cargué; quant aux autres accep-
tions du mot Étui, il faut bien l’accepter du fr., ne serait-
çe que pour rendre Éstui dé lunétos.
Éstuvo, s. f. Étuve; lieu qu'on échauffe pour faire
suer.
Dér. de Atuba, allumer.
Et, conjonction copulative. Et. — En lat. Et; en ital. E,
\ ed; en ancien esp. Ë, aujourd'hui Y;en port. E. Dans le
plus vieux des titres de notre Hôtel-de-Ville, la charte
romane d’Alais de 4200, cette conjonction est écrite E; les
troubadours l’écrivaient de même par un E seul; Sauvages
et bien des auteurs anciens et modernes de la langue d'Oc
n’emploient pas d'autre forme. On prononce Ë, é grave,
ouvert, sans jamais faire sentir le T final, quine sonne
point et ne fait aucune liaison, non plus que dans le fr:
avec le mot suivant, même commençant par une voyelle.
Pourquoi cependant adoptons-nous une orthographe
contraire à ce principe qu'en languedocien il n’y a point
de lettre inutile, qui ne doive se prononcer, qui ne garde
sa valeur? Pourquoi ne pas suivre tant de modèles : assu-
rément fort recommandables et qui font autorité?
C'est une exception pour laquelle nous 'n'attendions que
le moment de demander grâce ; et elle a, nous l’avouons,
d'autant plus besoin d’indulgence que, si notre conjonction
Et eût été soumise à la configuration romane par Æ simple
surmonté d’un accent grave, sa consonnance était main-
tenue et sa signification ne perdait rien. Voici pourtant les
raisonnements auxquels nous nous sommes laissé prendre.
Dans de précédents articles nous avons déjà expliqué
comment nous entendions l'orthographe languedocienne, et
d'après quels principes il lui était imposé de se diriger.
Nous faisons ici encore de l’éclectisme, et nous nous gar-
derions bien de rompre avec les traditions. Mais, avant
tout, la manière d'écrire les mots qui nous parait préfé-
rable sera toujours celle qui, sans blesser le génie parti-
culier de notre idiome, s'écarte le moins des habitudes der
lecture et d'écriture familières dès l'enfance au plus grand
nombre, par conséquent la plus accessible à tous.
Notre langue n'entend point sans doute descendre au
rang de patois du français, elle qui, même pour consentir
à entrer quelquefois en commerce avec lui, prend un soin
si minutieux d'imprimer à ses emprunts sa marque propre
et originale. Néanmoins, nous avons beau protester, elle
n'en subit pas moins les influences et l'invasion. Faute
d’avoir pu rester maitresse d’elle-mème et se gouverner
par son génie; faute d’une législation et d’une charte,
c.-à-d. d'une orthographe et d’une syntaxe incontestées,
auxquelles les dissidences pussent être toujours ramenées
et soumises, elle s'est abandonnée et s’est laissée souvent
entrainer hors de ses voies; si bien qu'un usage sans sanc-
nn.
UE SU EST
ET TE ES
ET
tion est devenu le seul maitre et l'unique règle. Mais encore -
ce tyran capricieux, qui procédait plus d’instinet que de
logique, était-il toujours bien saisissable dans ses volontés ?
Nullement : chaque auteur avait son système et en préco-
nisait l'excellence avec un droit égal. Force est donc aujour-
d'hui, sans autre autorité que l'usage mal défini, pour se
maintenir dans une certaine régularité rationnelle, d'adopter
d’abord bien des procédés orthographiques de notre voisin,
puis de représenter les mots comme nous les articulons au
moyen de signes et de combinaisons qui n’appartiennent
point en propre à la langue d'Oc, admise seulement au
partage. Notre méthode d'écrire trouve là une première
justification. :
Mais tout n'est pas dit. Les dialectes de la langue d'Oc
sont nombreux, et quelles facilités ils ont eues de prendre
leurs franches coudées, il est plus naturel de le concevoir
que d'en mesurer la licence. Chacun a apporté sa pierre
à l'édifice, et personne n'était là pour apprécier la qualité
des moëllons et diriger la pose. Tout est entré un peu
pêle-mêle; et là où manquait un contrôle sévère pour
vérifier la légitimité des droits, la possession devait finir
évidemment par valoir titre.
Ce travail d’envahissement n’a jamais cessé ; le purisme
des fidèles à crié à la profanation : ces apports, malgré
tous les scrupules, ont fini par s'impatroniser. Nos con-
structions de phrase, par exemple, à quelques rares excep-
tions près, et nous ne nous épargnons pas à les relever,
ont abandonné leur originalité romane qui, mieux que le
français, rappelait le type latin, et elles se sont formées
sur l'étalon d'outre-Loire. C’est cette similitude de con-
structions qui nous a forcé d'emprunter au français tous
ces liens, tous ces ciments de la phrase que l’on nomme
adverbes, prépositions et conjonctions surtout. Les trois
quarts en effet de nos conjonctions sont purement et stric-
tement françaises : Et, Ni, Coumo, Quand, Mais, Pas, etc.
De mème pour un autre genre de mots, substantifs ou
temps de verbes, la plupart monosyllabiques, qui ont
amené des liaisons inconnues au languedocien, et dont il
est nécessaire de tenir compte : nous les signalerons.
Nous aurons à revenir là-dessus à mesure que la cir-
constance le fera, et aussi peut-être à réclamer en leur
faveur des exceptions et des tolérances. Abrégeons, en
attendant, le douloureux chapitre des concessions pour
rester en présence de l'obligation imposée à notre lexique,
et des perplexités qui ont dù l'assaillir, au moment de se
faire un système orthographique au milieu de tant de di-
vergences.
Tout d’abord, avec un idiome dont la mélodie est l'âme
et la base, chaque mot doit être figuré par une notation si
précise qu'elle contraigne à l'épeler comme il doit être
entendu pour avoir et représenter le sens vrai: l’ortho-
graphe auriculaire, phonétique s’érige donc en principe.
Puis, si l'on considère les circonstances, le milieu dans
lesquels un lexique de cette langue va apparaître, où il est
. ET 331
appelé à vivre, n'est-il pas évident qu'il est destiné surtout
à des lecteurs qui ont fait toutes leurs études de lecture
dans le français et sur le syllabaire et l'alphabet français ?
Il ne s’agit pas ici d'abdication pour la langue d'Oc, ni de
faire acte d'humiliant vasselage envers un rival : toute
la question est de la maintenir dans son rôle littéraire, et
de donner à ses compositions, à son langage usuel, les
moyens les plus sûrs de se faire comprendre et de conser-
ver son caractère original. IL importait encore à ce point
de vue de ne pas contrecarrer des habitudes venues de
l'école à la grande masse de ceux qui ont à consulter des
livres languedociens. Tous ces intérêts expliquent suffi-
samment notre méthode.
Or, nous avons dû conclure de là que notre lexique,
pour être au courant du mouvement linguistique dans
notre pays, était tenu de reproduire les innovations et les
apports qui ont enrichi la langue, en plus grand nombre
que n’a fait et n’a voulu faire l'abbé de Sauvages, soit
parce qu'il fallait être plus complet, soit parer que la
foule des vocables, nouveaux venus depuis Sauvages, est
plus considérable que de son temps. Mais nous avons été
amené à cette autre déduction que la prononciation de
chaque mot, pour en obtenir l'intelligence, devait être
représentée par les lettres admises partout, avec leur
valeur consacrée par la pratique, constituant le son et la
cadence, ces principes essentiels de notre idiome musical.
Les risques que courait notre dialecte à se rapprocher
en cela de l'orthographe française ne nous ont point frappé.
Il semble qu'il n’y a pour lui au contraire que des avan-
tages à recueillir et que son génie n'en est nullement
blessé. 11 demande à être bien lu pour être bien compris,
à tre bien épelé pour être bien prononcé et cadencé :
la configuration visuelle, saisissante, facile de ses vocables
par l'alphabet français, le seul connu, ne leur enlève ni le
signe, ni le cachet du crü, ne les dénature point: ily a
convenance à se servir des moyens les plus simples et en
même temps les plus commodes. |
Ces considérations devaient nous décider, La première
des conjonctions dont nous avons à traiter, et la plus fré-
quente sans contredit, appelait ces remarques générales qui
préviendront les redites, et leur raison fera comprendre
leur utilité.
Comme en français, notre conjonction Et s'écrira en
deux lettres et se prononcera sans faire sentir le T final:
comme en français aussi, ce dernier T ne formera point de
liaison avec le mot qui suivra. Cette configuration ne sur-
prendra pas le lecteur, et une fois expliquée ne peut
porter aucun trouble, ni causer la moindre hésitation,
pour être prononcée comme en français. Dans l'intérêt
d'une prompte intelligence de la phrase écrite, l'exception
nous parait devoir être acceptée, et elle sera tout à fait
légalisée, quand nous aurons rappelé qu'elle a été intro-
duite, sans soulever un reproche, dans les Castagnados. Le
modèle est toujours bon à suivre.
332 F
Évangile, s. m. Évangile; partie de l'évangile qu'on
récite à la messe.
Dér. du lat. Evangelium.
Évéia, évéiado, adj. Éveillé; vif, alerte; gai; espiègle.
Évéjo, s. f. Envie. — Voy. Énvéjo.
Évéjoüs, ouso, adj. Dim. Évéjousé, éto; Évéjousd, oto.
Envieux. — Voy. Énvéjoùs.
Évès, évèsso, adj. Couché sur le dos; à la renverse.
— Ne s'emploie guère que dans ce dicton : S'aparo coumo
un cat évès, il se défend des griffes et des ongles.
Dér. du lat. Eversus, renversé.
Ézan, adj. mase. Exempt; exempté du service militaire
par le conseil de révision.
Mot nouveau : mais il est facile de voir comment cette
FA
idée et beaucoup d’autres du même genre ont pris place
dans le langage populaire.
Ézanciou, s. f. Exemption; cas, motif d'exemption.
Ézanti, v. Exempter, dans le sens du recrutement : dans
tout autre, préserver; défendre. — Sé moun ‘capèl m’aviè
pas ézantè lou co, si mon chapeau n'avait pas paré le
coup.
Ézate, ézato, adj. Exact; parcimonieux; qui exige ri-
goureusement tout ce que la légalité lui accorde; qui par-
tagerait un poil en deux pour en avoir sa quote-part.
Ézémple, s. »m. Exemple; modèle d'écriture.
Pr'ézémple, par exemple. — Se dit quelquefois interjec-
tivement : Ahk/ pr'ézémple! Ah! pour le coup!
Ézinla, ado, adj. Exilé; proserit ; banni.
F
F,s./f. F, sixième lettre de l'alphabet et quatrième
des consonnes. Se prononce dans l’épellation languedo -
cienne Éfo, et prend le genre féminin.
La classification grammaticale des consonnes range F
parmi les Labiales, aspirée forte, parce que, pour la pro-
noncer, dit un savant grammairien, « la lèvre inférieure
se retire sous les dents incisives supérieures qu'elle presse
avec quelque force, et ne laisse qu’une très-petite ouver-
ture des deux côtés de la bouche vers les dents canines ;
l'air, chassé des poumons avec une certaine énergie, s’é-
chappe avec vitesse par ces deux issues, en produisant
une sorte de souffle assez fort, dont le bruit est tout à fait
semblable à celui que fait entendre un chat qu’on irrite. »
La disposition de l'organe buccal reste à peu près la
même, quoique avec un amoindrissement sensible et plus
de faiblesse, pour la labiale aspirée faible V; et c'est ce
qui explique pourquoi entre lettres ou consonnes de même
organe, la permutation se fait assez volontiers, Mais comme
nos dialectes n'ont pas, comme le fr., des mots terminés par
F, cette permutation n'apparaît qu'au féminin ou dans les
composés, où une terminaison adoucie peut trouver place ;
et de plus, comme il est rare qu’une forte se change en
faible, tandis que la permutation contraire est plus fré-
quente, il en est résulté que, dans les recherches étymo-
logiques, on n’est pas surpris, à propos de notre consonne,
de rencontrer, par exemple, le lat. Vivus, donner vif au
fr. m., et au lang. Viou, faisant Vivo au fém., et de voir
Nôou, de Novus ou Novem, en fr. neuf, donner au fém.
Novo ; bidou de bos, bovis, en fr. bœuf; etc., et aussi
vices, lat. faire en lang. Fés, en fr. Fois; Vervex, lat.
Fédo, lang. etc. Mais une autre transformation de F se
rencontre encore dans quelques mots de notre dialecte :
elle est très-répétée dans l'espagnol, et dans le béarnais et
l'armagnac : c’est celle de F en H, et vice versd. Les dis-
positions de prononciation l’amènent naturellement par-
tout où l'aspiration de H est plus recherchée. Nous, qui
la cultivons moins qu'ailleurs, nous n’en pouvons offrir
beaucoup d'exemples : cependant les mots Fartaïo, Fardos,
Fénno, et autres que nous relevons au passage, présentent
de curieux spécimens.
Fa, v. Faire. Contraction de l'infinitif Faïre; dans
d’autres dialectes Far. — Ne s'emploie pas indistinete-
ment pour le verbe qu'il représente, mais seulement dans
certaines locutions, sous certaines conditions, qu'il est
impossible de préciser et de citer en règle. Pode pas fa dé
mén qué dé.…., je ne puis me dispenser de... Ou vole pas
fa, je ne veux pas le faire. Y vouièi pas fa mou, je n’a-
vais pas l'intention de lui faire du mal. T'ou véow fa
véire, je vais te le faire voir. Fa /io dé tout bos, faire feu de
tout bois. Fa l'ase pér manja dé brén, faire l'âne pour
avoir du son. Féou fa jo qué dure, il faut faire jeu qui
dure. | :
Fa, facho, part. pass. Qu v. Faïre. Fait, faite ; achevé,
exécuté. — Ce participe n'a point de dim. ni d’augm.;
mais quand il est pris adjectivement par une adjonction
comme bièn fa, méou fa, il est susceptible de prendre
l’un et l’autre : Aguël drole és bièn faché din touto sa pér-
sounéto, cet enfant est très-bien pris dans toute sa petite
personne. Aquél home és mdou fachas, cet homme est
vilain et mal fait.
Le prvb. dit: Éntre lou fa et lou di y-a cént lègos dé
cami, entre la promesse et l'exécution, entre la parole et
CT ES 7 Ve 317
FAB
J'action, il y a cent lieues de chemin. Ni fa ni fa, rien de
fait; je retire ma proposition ; tout marché est rompu entre
nous : espèce de formule sacramentelle.
Dér. du lat. Factus, facere.
Fabiargue, s. m. n. pr. de lieu. Fabiargues, hameau
de la commune de Saint-Ambroix (Gard). Autrefois, dans
un cartullaire de la seigneurie d’Alais, en 4345, il était
appelé Mansus de Fabayranicis. Le roman lang. était
conduit par là à Fabayranèques, qui a donné le mot actuel
par les transformations déjà expliquées sous le suffixe
Argue. Ce nom est le même avec évidence que celui de
Favédo; mème racine, même origine, mème signification.
— Voy. Favédo.
Fablo, s. f. Fable; apologue. — Le languedocien cite
souvent des traits pris dans les fables de La Fontaine :
_+Aqud’s éscri din la fablo, c'est écrit dans le fabuliste. La
. Fontaine a un tel crédit dans l'opinion du peuple, non
pour les faits qu'il rapporte, mais pour la leçon morale
qu'il en déduit, que ses maximes sont citées comme arti-
cles de foi, et qu'on dit de ses œuvres comme de la Bible :
. c’est écrit.
Dér. du lat. Fabula, m. sign.
Fabrariè, s. f. n. pr. La Fabrerie, nom d’une rue
d’Alais, parallèle à la Grand’rue .
Ce nom, comme tant d’autres noms de rues, dérive de
l’époque où les différents métiers étaient cantonnés chacun
dans un quartier spécial ( V. Bouquariè); celui-ci était le
quartier des forgerons, qui se nommaient Fabres.
IL est singulief qu'on dise: Démoro én Fabrariè, véou
én Fabrariè, il habite la rue Fabrerie, je vais à la rue
Fabrerie; tandis qu'on ne se sert pas également de la prép.
én pour les autres rues qui ont une origine semblable.
Ainsi on dit : à la Téïssariè, à la Bouquariè, et non én
Téïssariè, ên Bouquariè; on dit aussi: ér Sabatariè et
non à la Sabatariè; én cariètro Drécho, én cariètro Bâou-
bèlo, et non à la carièiro Drécho, à la carièiro Béoubèlo.
Ce sont là de ces anomalies dont on ne saurait rendre
compte, mais que l'usage prescrit impérativement .
Fabre, n. pr. m. Au fém. Fabrésso; dim. Fabroù,
Fabrouno. Fabre et Favre.
Ce nom n'est plus qu'un n. pr. : il signifiait autrefois
taillandier, dér. du lat. Faber, artisan. Le for-
geron se disait en lat. ferrarius faber; on à supprimé
mas et cet ouvrier est resté faber par excellence.
Fabrégo, n. pr. d'homme et de lieu. Au fém. Fabré-
guésso; dim. Fabrégoù, Fabrégouno. Fabrègue.
Dér. du lat. Fabrica, fabrique; nom qui plus tard à
signifié exclusivement Forge, atelier de forgeron.
Fabriqua, ». Fabriquer ; faire certains ouvrages manuels .
Au fig. et par ext. inventer; imaginer; intriguer; tatil-
lonner; tramer quelque chose en cachette.
Fabriquan, quanto, adj. Fabricant, celui qui fabrique
ou fait fabriquer. Au fig. tatillon; intrigant; qui aime à
se mêler de tout, à fourrer le nez dans tous les secrets.
FAC 333
Fabriquo, s. f. Fabrique; manufacture; principalement
dans ce pays, moulin à soie. — És à la fabriquo, elle est.
occupée au moulinage de la soie. Aquélo histouèro és dé la
fabriquo, c'est un conte de votre fabrique, de votre inven-
tion.
Dér. du lat. Fabrica, Fabricare, m. sign.
Facha, ». Fâcher; faire de la peine; donner de l'hu-
meur; choquer; chagriner.
Sé facha, se fâcher; se mettre en colère; témoigner de
l'humeur; se chagriner.
Dér. du lat. Fascis, charge, fardeau.
Fachignè, ignèiro, s. m. et f. Sorcier, magicien, qui
donne ou jette des sorts, et non devin : c’est le Jettatore:
ital. — Quelquefois on l’adjective : Un régar fachignè,
un regard qui fascine; un mauvais œil.
Dér. du lat. Fascinare, fasciner, ensorceler.
Facho, fém. du part. pass. Fa. — Voy. Fa.
Fachoüs, ouso, adj. Fàcheux, en parlant des choses et
non des personnes; désagréable; malheureux. — Aqud
mé séquè dé fachoùs, cela me fat très-désagréable, ce fut
un soufllet pour moi. Cette part. dé, qui est là une com-
plète superfétation, est tout à fait du génie particulier du
languedocien, el comme elle se reproduit en mille circon-
stances où elle joue un rôle à peu près aussi inutile, on
peut la considérer comme une constante protestation contre
le fr., alors qu’on est obligé de lui emprunter une locu-
tion.
Facinle, inlo, adj. Péj. Facinlas. Facile, aisé, qu'on
peut faire sans peine, sans efforts, en parlant des choses :
lorsqu'on parle des personnes, on ne s’en sert qu'au péjo-
ratif : Aquélo drolo és facinlasso, cette jeune fille prête
une oreille trop docile, trop facile aux amoureux; elle est
aisée à séduire, à amener à mal.
Dér. du lat. Facilis, m. sign.
Facios, s. f. plur. Figures d’un jeu de cartes, roi, dame
et valet; faces des cheveux, c.-à-d. cheveux au-dessus des
tempes.
Dér. du lat. Facies, face, figure.
Faço, s. f. Face; visage; partie antérieure de la tête,
d'un édifice. — Dé faço, en face. Soun oustéou mé faï
fago, sa maison est vis-à-vis la mienne.
Autrefois on disait Facio, mot qui n’est plus consacré
que dans l’acception de l’article précédent : c'est une des
nombreuses dégénérescences que nous fait subir le fr.
Dér. du lat. Facies, m. sign.
Façoun, s. f. Façon; manière de faire une chose;
manière dont elle est faite: façon d'agir, de parler, de
vivre; tour convenable: prix de la main d'œuvre sans
égard à la nature de la matière. — Dé façgoun qué…, de
sorte que. Sans fagoun, sans façon, naturellement, sans
gène, sans hésitation. Y-més bièn la façgoun, il tourne
agréablement la chose, il la présente convena blement, ou
il y prend peine.
Au plur. Façouns se prend comme en fr. pour : façons,
334 FAD
manières affectées, un peu minaudières; civilité, recherche
dans les procédés. — Fagués pas tant dé fagouns, ne faites
pas des façons, ne vous faites pas prier. Ak/ qué diable
tant dé fagouns ! C’est assez faire de façons et de grimaces!
Dér. du lat. Factio, action, manière d'agir.
Façouna, v. Façonner; donner un tour gracieux à un
ouvrage; le charger d’ornementations. Au fig. façonner;
habituer quelqu'un, lui donner de l'usage; le styler.
Sé façouna, être maniéré ; prendre des airs, des manières
affectées de fatuité, de minauderie, de coquetterie.
Façounoüs, ouso, adj. Cérémonieux; qui aime à se
faire prier; qui met trop d’apprèt et d'étiquette dans ses
manières; affecté; qui craint toujours de paraître indis-
cret.
Fada, v. — Voy. Fadia, qui est mieux.
Fade, fado, adj. Péj. Fadas. Fade; insipide; fat en-
nuyeux et plein de roideur.
Dér. du lat. Falcius, m. sign. dans les deux acceptions.
Fadéja, ». fréq. Badiner; folätrer; faire l’imbécile; per-
dre à demi la tête, extravaguer.
Dér. de Fado, fée, dont le caractère était badin et folà-
tre, et qui jetait des sorts : cette dernière faculté répond à
la dernière acception de Fadéja.
Fadéjaïre, aïro, adj. De fée, qui tient aux fées, qui fail
comme les fées; badin, folâtre, qui aime à s'amuser.
Fadia, ». Charmer; ensorceler, jeter des sorts; enchan-
ter. — Quéouquo fachignièiro l'a fadia, quelque sorcière
lui a jeté un sort. És tout fodia, il est pétrifié, il semble
sous l'empire d'un charme.
Dér. de Fado.
Fado, s. f. Dim. Fadéto. Fée, être fantastique, du sexe
féminin, qu'on suppose doué d’un pouvoir surnaturel.
Cette fiction des fées est sans contredit la plus originale
et la plus gracieuse des créations mythologiques du moyen-
âge. Ces sortes de divinités jouent un grand rôle dans les
contes, les légendes et les veillées du peuple qui en con-
serve encore le souvenir. Il est peu de contrées qui n’aient
leurs légendes de fées : notre charmant poèle des Casta-
gnados à consacré à celles de nos environs, dans la Béoumo
dé las Fados, la grotte des fées, une de ses plus touchan-
tes, comme de ses plus mélodieuses inspirations.
Quand on admire un ouvrage d’un fini exquis et d’une
merveilleuse délicatesse d'exécution, on dit : Sémblo qué las
fados y-an bouta las mans, c'est un ouvrage de fées; mais
quand on dit: Quéouguo fado l'éoura vis, quelque fée lui
aura jeté un sort, un mauvais coup-d’œil; ce n’est pas des
fées de la légende dont on entend parler : c'est un retour
vers les sorcières qu'on traduit là par Fado, à cause de la
parité de pouvoir surnaturel de ces deux espèces si diffé-
rentes d'ailleurs dans leurs attributs et dans leurs actes.
Dér. de la bass. lat. Fata, m. sign.
Quelques étymologistes font dériver ce dernier mot lat.
du v. Fari, parler; mais il semble plus rationnel de le
faire descendre de Fatum, destin, au plur. Fata, dont l’a-
FAI
nalogie avec le pouvoir et l'influence des fées est plus na-
turelle.
Fagô, s. m. Dim. Fagouté. Fagot; faisceau de menu
bois, de branches, etc., charge, paquet.
Dér. du lat. Fagus, hètre.
Fagoutiè, tièiro, ou Faïssiaire, aïro, s. m. et f. Fago-
teur; faiseur ou ramasseur et vendeur de fagots. — S’ap-
plique surtout aux pauvres gens de la ville qui, les jours
où l'ouvrage manque, vont faire des fagots de menu bois,
soit dans les bois communaux, soit même chez les partieu-
liers où le service des gardes-champètres n’est pas bien fait.
Fagoutièiro, s. f. Fagotière; grenier, galetas où les bou-
langers renferm ent leur provision de fagots.
Faï, s. m. Au plur. Faïsses. Dim. Faïssé ; augm. Faïs-
sas. Faix; charge; poids; fagot; paquet. — N'aï moun faï
dé tout aqud, j'en ai par-dessus la tête. Pichà faï et bièn.
dia, prvb. qui re vient à : Qui trop embrasse mal étreint.
Caréja à bèles fais, transporter à dos d'homme.
Dér. du lat. Fascis, fagot, charge.
Faï, 3me pers. sing. prés. de l’indic. du v. Faïre. Il ou
elle fait. — Voy. Faïre.
Faï, s. m. Hôtre. — Voy. Faïar.
Faïa, v. Fêler; fendre légèrement. — Uno carto faïado,
une carte retournée dans le jeu.
Dér. du lat. Fallere, faillir, manquer.
Faïanço, s. f. Faïence, poterie de terre fine, émaillée et
ordinairement blanche.
De l'ital. Faenza, ville de la Romagne où cette poterie
fut inventée, vers l’an 4299. +
Faïar ou Faï ou Fâou, s. m. Dim. Faïardé. Hêtre, fau,
fayard, fouleau, Fagus sylvatica, Linn., arbre de la fam.
des Amentacées. — Cet arbre joue un grand rôle dans la
poésie bucolique, soit parce que c’est sous son ombre que
le père des bergeries place la scène de sa première pasto-
rale, soit aussi, je m'en doute, parce qu'en fr. il rime
admirablement à champêtre. Il est vrai que de nos. jours,
pour cause d'abus, cette rime n’est plus admissible, au
mème titre que celle de guerrier et de laurier.
Ce mot est un de ceux qui se sont le mieux prêtés à des
appellations de localités et de personnes : les variantes
mêmes les indiquent. La raison en est simple: cet arbre
était commun, d’une venue remarquable, d’une grande
utilité pour les divers usages de son bois; il était naturel
qu'il servit sous différentes formes aux désignations loca-
les, comme le chène, le châtaignier, le frène, etc. Son
nom celtique parait avoir été Fao, qui se rapprochait du
lat. Fagus; aussi, sur ce radical similaire, quand il s’agit
de dénommer un lieu, un domaine où il se trouvait en
abondance, le suffixe collectif celtique ec = ac serrencon-
trait au bout de concert avec le suffixe latin de collecti-
vité acus, acum, etum, qui le représentait exactement; et
dans la moyenne latinité se trouvent naturellement les
noms géographiques Faiacus, Faiacum, Fagetum, traduits
par le roman, par le languedocien et par le français en
Es ny sd
FAI
Fay, Faï, Fays, Fey, elc., qui signifient, pour peu que le
signe partitif s’y joigne, une réunion de hètres, une fou-
telaie, lieu planté de hètres, et plus tard le nom du pro-
priétaire de ce domaine. Les altérations, sans s’'écarter
beaucoup, ont créé des variantes; les aptitudes ethniques
ont fait préférer certaines formes au Nord ou au Midi,
comme on le remarque dans tous ces noms collectifs; l'in-
- fluence latine a plus ou moins imprimé son cachet sur telle
ou telle dénomination à la désinence; mais la racine ap-
parait avec une identité constante. Nous n’en citerons que
les exemples le plus près de nous, et quelques analogues,
pour rappeler ce que nous avons dit de la composition des
noms propres.
Dans le département du Gard seulement, comme noms
de localités, montagnes ou hameaux, la Fajo, La Fage se
trouve dans les communes de Cambo, de Cruviers-Lascours,
de Mialet, d'Anduze, de Cézas et Cros, de Sumène; La
Fajé, La Faget, commune de Malons-et-Elze; Lou Fâou,
Le Fau, communes d'Aujac, de Saint-Sébastien d’Aigre-
feuille; Lous Fdous, Le Faus, commune de Martin de
, Corconac; et comme noms d'homme très-répandus, Faÿje,
Fage, Fages, Faïé, Fayet, Fagé, Faget; donnant naissance
à La Fayette, Fayel, Fayelle, Fajon, Fageon, Fayon, Fa-
yollat, Fayolles; et sans doute à Faugières, Falguières,
même Fargeau, d'où aussi Farjon et Fargeon; remontant
tous également à notre Faï, Fdou, Faïar, fayard, hêtre,
du lat. Fagus ou du celt. Fao, avec la marque plus ou
moins profonde du suffixe de collectivité.
De mème en fr. Fay (Sarthe), en lat. de cartulaire Faia-
eus; Fays (Vosges), Fagetum; Les Faix (Doubs); et les
nombreux Faux, Le Faux, Les Faux, Fay, Faye; Fey,
Feys; noms propres de lieu, el les noms communs Foute-
laie et Fouteau, pour la pluralité et le sujet isolé.
Faïno, s. f. Fouine, Mustela foina, Linn.—Voy. Martro.
Faïoü, s.m. Brandon; botte de foin, de paille ou de
toute autre matière menue inflammable, dont on se sert à
la campagne, après l'avoir allumée, pour transporter du
feu d’un endroit dans un autre, pour s’éclairer pendant la
nuit en guise de torche, et pour écarter par la fumée les
abeilles dont on châtre les ruches ou dont on enlève le
La pèche aux brandons, qu'on dit Pésquo à la luminado,
se fait à la lueur de brandons composés de brins de
bruyère sèche ou de roseaux dits Canisses : ces torches
s'appellent Faïoù, sorte de dim. de Fat.
Dér. de Faï, hètre, parce que c'était en général de menu
bois de hêtre, dans nos pays où cet arbre est: por qe
se faisaient les brandons. L
Faire, v. Faire; agir; créer, Peine lies fabri-
quer; composer; opérer ; exécuter, ete. — Sa signification,
comme .en fr., est très-étendue : des exemples peuvent
donner une idée des formes qu’il prend à ses divers temps,
comme de l'emploi varié qu’en fait notre langue. — Fasès-
wous-én-laï, reculez un peu; poussez-vous par côté, Faï-
335
t'én-gaï, rapproche-toi d'ici; serre-toi plus près. Chaguo
jour qué Diou a fa, tous les jours de la vie. Sou-faï, sou-
fasiè, dit-il, disait-il. Déman fara hiuè jours, il ÿ aura
huit jours demain. Fasès voste cami, passez votre chemin.
M'a pas soulamén di: Bèstio, dé qué fas? I n'a pas pris
la peine de me demander si j'étais chien ou loup. Qué té
faï faï-li, c'est le Par pari refertur des latins : œil pour
œil, dent pour dent. À pas rés fa qué noun siègue dé faire,
il n’a rien fait de mal; rien que de très-convenable. Aquél
méssaje faï foço mèstres, ce valet change souvent de con-
dition. Faï dé soun home, il fait l'important, l'entendu, le
fier-à-bras. Faï damo, elle s'habille comme les dames.
Faï capù, faï tartan, elle porte des chapeaux et des chäles
comme les dames. Sé faïre émbé, hanter, fréquenter, faire
sa compagnie de... Fat michan éstre péoure, tout vous
bèquo, la pauvreté est une fâcheuse condition; tout le
monde vous marche sur le pied. Faï bon pas rés séoupre,
qu'on aprén toujour quicon, il est bon d'être ignorant, on
apprend toujours quelque chose de neuf. Aqud mé fariè
gdou, voilà qui me ferait plaisir. Vouè/ sé fasias lun,
holà! si vous éclairiez un peu. Lou bla a fa d'un dès, le
blé a rendu dix pour un. M'a fa coumo un méloun, il m'a
trompé, flibusté comme an juif. Aquél méloun és trop fa,
ce melon est trop fait, il est passé. L'ase d’Aoubarno sé
faguè én manjan dé pousses, l'âne du Gascon s'engraissa
avec de la paille. Nous fasèn bièn tard pér séména, la sai-
son est bien avancée pour semer, je crains qu'il ne soit
bien tard. Sé faï din l'aje, il avance en âge, vers la vieil-
lesse. Pode pas faïre dé mén, impossible de me dispenser
de... Dé qué faïre aqui? Que faire à cela? Faire dé mita
partager, être de moitié. Faï uno, la lune éclaire.
Dér. du lat. Facere, m. sign.
Faïsséja, v. fréq. Porter à plusieurs reprises des char-
ges à dos d'homme, le faire habituellement; exercer cette
industrie illégale indiquée à l'art. Faïssiaïre, — Voy. €. m.
Faïssèlo, s. f. Écuelle sans anses et percée de petits
trous au fond, où l'on met le caillé à égoutter, et qui donne
au fromage frais cette forme sous laquelle nous l'appelons
Toumo.
Dér. du lat. Fiscellus, forme à faire les fromages.
Faïssiaire, aïro, s. ". et f. Fagotier, faiseur de fagots;
celui ou celle qui exerce l’industrie plus ou moins licite de
ramasser du bois mort ou vif, gros où menu, et d’en faire
des fagots pour vendre, sans en rendre compte au pro-
priétaire du bois. — Voy. Fagoutiè.
Faïssiâou, s. m.ou Pagnè-lon ou Païaron, qui semble
une corruption du précédent. Panier long, sorte de manne
faite de côtes de châtaigners sauvages, deux fois plus lon-
gue que large, à bords relevés, propre à porter différentes.
charges sur les épaules.
Dér. de Faï, faix.
Faïssiè, s. m. Porte-faix, crocheteur, dont le métier est.
de porter d’un lieu dans un autre les ballots de marchandise.
Dér. de Faï, faix.
FAI
336 FAL
Faïssino, s. f. Fascines pour les vers-à-soie. — On sait
que pour ramer les vers, on emploie des brins de bruyère
qui, s'appuyant sur la table inférieure, s’arrondissent par
la cime et forment le berceau au-dessous de la table supé-
rieure. Mais lorsqu'on est arrivé au dernier ou au plus
haut étage, on ne peut suivre le même procédé, puisqu'il
n'y a plus rien au-dessus pour fixer le haut bout de la
bruyère. Alors on prend des fagots de sarments, ou de
vieux élagage de müriers que l’on relie en bottes de la
grosseur de la jambe et d’une longueur égale à la largeur
de la table. On les place sur celle-ci à la distance d'envi-
ron soixante-et-quinze centimètres l’un de l’autre, après
avoir piqué dans leurs interstices des brins de bruyère qui
s'y fixent ainsi en se tenant debout. Ce sont ces fascines
ainsi disposées et garnies de leur bruyère qu'on appelle
Faïssino.
Dér. du at. Fascis, dim. Fasciculus, dans la bass. lat.
Fazxina, botte, fagot.
Faïsso, s. f. ou Bancèl. Terrasse ou bande de terrain
soutenue par un mur de revêtement; plate-bande de jar-
din. — C’est par ce procédé, fort coûteux et fort pénible
du reste, qu'on parvient à transformer un terrain en pro-
clivité, les flancs d'une montagne, en parcelles nivelées,
s'étageant pour ainsi dire les unes sur les autres: seul
moyen de retenir la terre de nos plantations et de nos vi-
gnes, qui sans cela serait constamment ravinée et balayée
par les grandes pluies, le terrain en étant toujours meuble
à cause des œuvres qu'on est obligé de lui donner. La plu-
part des montagnes de nos Cévennes sont coupées ainsi en
terrasses disposées en amphithéâtre.
Le mot Bancèl tient au dialecte cévenol ou raïol. Faïsso
est plus usité dans les environs d’Alais.
Dér. du lat. Fascia, bande, lanière.
Falaï, falaïso, adj. Péjor. Falaïsas. Nonchalant; indo-
lent; insouciant; qui ne s'émeut de rien, ou plutôt qui
prend le masque de ces défauts pour faire des dupes.
Dér. du lat. Fallax, trompeur.
Falbala, s. m. Falbala; toute garniture au bas d'une
robe; bande d’étoffe au bas d’une robe, d'une jupe. Au
fig. pompons, fanfreluches ; tout ce qui constitue la toilette
des dames du grand ton.
Quélques étymologistes assignent une origine tout à fait
fantaisiste à ce mot qui aurait été imaginé par hasard et
accepté pour sa singularité insignifiante. Les antiquaires
font remonter l’anciennelé de cet ajustement aux Parthes
et aux Perses. D'autres le font venir de deux mots alle-
mands Fald-plat, feuille plissée. Nous le tenons tel quel
du fr. sans altération.
Falèto, adj. f. Boiteuse, à demi-paralysée. — Ne marche
qu'avec Cambo. — V. c. m.
Fali, ». Faillir; manquer; s'évanouir. — Jour fali, cré-
puscule du soir, entre chien et loup.
Dér. du lat. Fallere, tromper, manquer.
Faloupado, s. f. Grosse vague; masse d'eau torrentielle
FAN
ou d'inondation, qui arrive soudainement et se retire avec
promptitude.
Ce mot parait dérivé par corrupt. du fr. Envelopper.
Dans certaines localités voisines on dit Valoupado, qui se
rapproche davantage de cette origine : simple permutation
d’ailleurs de la labiale F aspirée forte, en V aspirée faible.
— Voy. lettre F.
Falour, ourdo, adj. Péj. Falourdas. Gros lourdaud ;
butor; grossier et inepte; sot renforcé.
Formé, parait-il, par corrupt. de Fol et de Lour.
Famiè, famièiro, adj. m. et f. Familier, qui se fami-
liarise aisément; qui en use familièrement; privé, appri-
voisé, en parlant des animaux.
Dér. de Famio.
Famino, s. f. Famine, disette générale de vivres, dans
un pays, dans une ville, dans une place forte. Par ext.
simplement, faim, grand'faim. — Bramo famino, il crie
famine. ;
Dér. du lat. Fames, m. sign.
Famio, s. f. Dim. Famäüéto. Famille, tous ceux du
même sang; race, lignée; les personnes d'une même mai-
son. — Acampo dé famäo, sa famille augmente beaücoup.
Dér. du lat. Familia, m. sign.
Fanabrégou, s. m. ou Bélicouquiè ou Piquopouiè.
Micocoulier, bois de Perpignan, Celtis australis, Linn.,
arbre fde la fam. des Amentacées. — Voy. Bélicouquiè:
Ne pas le confondre avec l’alisier, quoique son nom lat.
Celtis soit le même; mais ce n’est là sans doute qu'un
nom générique. C'est avec les scions de cet arbre aménagé
en taillis, que se fabriquent à Sauve (Gard), ces fourches
à trois fourchons pour remuer la paille et le foin, qui sont
supérieures à toutes les espèces fabriquées ailleurs. Autre-
fois cet arbre était fort estimé dans ce pays parce qu'on
en faisait des cercles de futailles préférables à ceux du
châtaigner sauvageon. Les cercles de fer battu ont dépos-
sédé. cette industrie. et les micocouliers tendent à dispa-
raitre chaque jour de nos contrées.
Dér. du celtique Fana-bren, m. sign. Bren ou Prenest
le nom général des arbres en gallois et en breton: ones
distingue par le fruit : arbre qui produit la micocoule.
Fanâou, s. m. Fanal; falot; grande lanterne d'écurie,
composée d'une cage de fer, recouverte d’une toile très-
claire, au centre de laquelle se place une chandelle. à
Dér. du gr. Pavés, de Palvw, luire.
Fandalado, s. f. Plein un tablier. — Les femmes du
peuple font volontiers de leur tablier un sac pour trans-
porter du linge, des vêtements, de la soie, ete.; celles de
la campagne en font leur cabas pour transporter les légu-
mes et les herbes, sans pour cela le détacher de la ceinture.
Fandâou, s. m. Dim. Fandalé. — Voy. Davantdou.
Tablier de femme, grande pièce d'étoffe ou de toile, avec
ou sans poches, que les femmes portent devant elles sur
la robe, dont elle recouvre tout le devant depuis le cou,
ou seulement depuis la ceinture; tablier de cuir pour cer-
FAN
tains artisans. — La novio porto milo éscus din soun fan-
ddou, la future apporte mille écus comptant, au jour du
mariage, dans son tablier.
Ce mot semble une corrupt. du mot Fdoudäou, qui parait
avoir existé autrefois avec la m. sign. et qui dérivait évi-
demment de Fdoudo, giron : le tablier étant le vêtement
propre de cette partie du corps.
Fanfaro, s. /. Fanfare, air de trompettes martial. Par
ext. tapage, bruit, train bruyant; éclat avec ostentation.
Emp. au fr.
Fanfaroû, s. m. ou Lanfaroü. Dim. Fanfarouné. Coupe-
bourgeon, bèche, lisette, insecte du genre des Rynchytes.
— Ces dénominations désignent, ainsi que Fanfaroù, un
scarabée moins gros qu'une mouche ordinaire, revêtu d’une
écaille verte, relevée d'un bout à l’autre par l'or le plus
éclatant. Ce coléoptère porte au-devant de la tête une espèce
de trompe, longue, armée de dents, avec laquelle il scie
le pétiole de la feuille encore tendre de la vigne, qui se des-
sèche; il la roule autour de lui comme un cornet et la
tapisse d’une sorte de toile ou duvet pour y déposer ses
, œufs. Le cultivateur ne s'émeut pas des dégâts qu'il peut
ainsi causer, car un de ses prvb. dit: L'annado déou fan-
faroù, lou péisan béquè prou; c.-à-d. l'année où cet insecte
est abondant, la récolte du vin l’est aussi.
Quelquefois Fanfaroù s'applique au hanneton, melolon-
tha, Linn., coléoptère lamelliforme.
Dér. probablement de Fanfaro, à cause du bourdonne-
ment de cet insecte en volant.
Fangas, s. m. Dim. Fangassoù. Grand bourbier; large
creux plein de bourbe. Au fig. mauvaise affaire; gâchis;
embarras. — És din lou fangas, il est dans le pétrin.
Dér. et augm. de Fango.
Fangastièiros, s. /. plur. Pare-crotte des charrettes, qui
consiste pour elles en une bande de cuir ou de feutre qu'on
cloue au-dessus de l'ouverture intérieure au moyeu de la
roue pour empêcher.que la boue, qui tombe des jantes, ne
pénètre dans la boite.
Fango, s. f. Dim. Fanguéto; augm. Fangasso. Fange;
boue; crotte; vase; limon; matières corrompues des rues
et des chemins, délayées par l’eau de la pluie ou des ruis-
seaux.
Dér. sans doute du lat. Fimus, d'où la bass. lat. Fan-
gus, m. sign.
Fangous, ouso, adj. Fangeux; boueux; couvert de
crotte; bourbeux.
Fanguè, s. m. — Voy. Patroun-fanguë.
Fantasquariè, s. /. Bizarrerie fantasque de goût et d’hu-
meur. “
Fantasque, asquo, adj. m. et f. Fantasque; capricieux ;
bizarre; extraordinaire; bourru; qui est fort délicat pour
son manger; qui n’a que des goûts bizarres.
Dér. du lat. Phantasma, fantôme, illusion, chimère.
Fantasti, s. m. Farfadet; lutin ; esprit follet; être ima-
ginaire; génie, démon familier ; être fantastique, qui, dans
337
les idées du peuple, est cependant encore plus malfaisant
que le Gripé, mais moins redoutable que le Dra, Draqué,
et surtout que la Roumèquo et la Babarogno. — Voy. €. m.
Dér. du lat. Phantasticus, fantastique.
Fantastissiè, ièiro, adj. Fantastique; quitient du Fan-
tasti; ensorcelé; qui ensorcèle.
Fâou, s. m. Hôtre. — Voy. Faïar.
Fâou, fâousso, adj. m. et f. Faux; contraire à la
vérité; supposé; altéré ; de mauvaise foi: traitre; discor-
dant; qui manque de justesse. — Æs pas fdou, phrase ha-
bituelle pour confirmer un fait, ou une opinion d’une autre
personne : c’est bien vrai.
Dér. du lat. Falsus, m. sign.
“Fâou ou Fôou, v. impers. Il faut. — Fdow faire, féou
dire, féou marida la Jano, il faut faire, il faut dire, il
faut marier Jeanne. C'est le lat. Oportet, avec le mème
sens. Fdou bé qué sièguo vous, il faut bien que vous soyez
de mes amis,
Fâoucio, s. f. Faucille; petite faucille qui sert à couper
des herbes, du fourrage en vert, et non du blé.
Fdoucio, par un jeu de mot, se dit aussi d’une personne
un peu fausse, qui caline les gens pour les duper, qui dit
blanc et pense noir. — Ce mot devrait s'écrire préféra-
blement Fdoussio, eu égard à son origine de Fdow, féousso :
nous le plaçons ici pour faire sentir le jeu de mot.
Dér. du lat. Fatcicula, m. sign.
Fâoudéto (Faire), v. Au jeu de la main-chaude ou de
cligne-musette, c'est recevoir sur ses genoux la tôte du
joueur qui doit deviner, en lui mettant son tablier sur la
tête pour lui ôter la vue de ce qui se passe.
Fâoudo, s. j. Dim. Féoudéto. Giron; espace de la cein-
ture aux genoux d'une femme quand elle est assise; géné-
riquement, les genoux d’une femme assise. C’est l'espèce
de siége à angle droit que décrit ainsi sa taille avec ses
jambes. Cependant on dit : Pourta din sa fâoudo, porter
dans son tablier retroussé, en parlant d’une femme qui
marche. — Sus la féoudo, sur les genoux. Fdoudo dé
caréto, tablier de charrette, intervalle entre la caisse et
l'ouverture du brancard : place que prend le conducteur
quand il voyage à vide, contrairement aux règlements de
police.
En esp. Falda, jupe de dessous.
Fâoufila, ». Faufiler; bâtir les pièces d’un habit, d'une
robe, d'un ouvrage de couture, à longs points, pour les
assembler avant de leur passer le point de couture.
Fâoufilo, s. /: Faufilature; fausse couture à points
espacés.
Formé de Fdou et de Fiou.
Fâou-fio (Faïre), ». Faire faux-feu; râter, ne brüler
qu'une amorce sans que le coup parte; ne pas réussir.
Fâouquièiro, s. /. Bacule d’un bât; croupière de bois
courbée en arc, fixée au bât par des courroies, ce qui l’em-
pêche de retomber sur le cou aux descentes. Elle ne porte
pas sous la queue comme la croupière ordinaire, mais sur
43.
FAO
338
les deux cuisses de l’animal qu'elle entoure complètement.
Formé de Fdou et de Quuio, faux-cul, ou bien de Fdousso
et de Quiou, fausse queue, ou fausse croupière.
Fâoussa, v. Fausser; faire plier; faire courber. Au fig.
nier : fausser sa foi, son serment, sa parole; les enfreindre,
les violer. *
Dér. du lat. Falcare, plier comme une faux.
Fâoussio, s. des deux genres. — Voy. Fdoucio.
Fâousso-coucho, s. f. Fausse-couche; avortement;
accouchement prématuré.
Fâousso-mounédo, s. f. Fausse-monnaie; monnaie
contrefaite.
Fâousso-quuio, s. f. Queue postiche; allonge d’une
queue de cheveux, fort en usage pour les hommes, quand
il était de bon ton et de mode de porter la queue, et un
point de vanité de la porter longue et fournie : aujourd’hui
les femmes usent fort du mot et de la chose avec l’ampli-
tude de leurs chignons. Au jeu de billard, fausse queue.
Fâousso-sièfro, s. f. Sous-ventrière d'un cheval de
charrette, qui est la contre-partie de la Sièfro {V. c. m.).
Dans le langage usuel des charretiers, on la nomme sim-
plement {a Fdousso.
Fâoutèrno, s. f. ou Pantèrno. Aristoloche champètre,
Aristolochia clematitis, Linn., plante de la fam. des Aris-
toloches, fort commune dans nos vignes, et qui, dit-on, lors-
qu'elle n’est pas extirpée avec soin, communique au vin
une saveur amère et désagréable. — Comme nous ne fai-
sons pas ici un Cours de botanique médicale, nous nous
abstiendrons, comme pour toutes ses sœurs, d’énumérer
ses vertus curatives qui paraissent nombreuses,
Son nom, d'après Sauvages, est formé d’une des appel-
lations latines que la nomenclature lui donne, Fel terre,
fiel de la terre, à cause de sa grande amertume.
Fâouto, s. f. Faute; manquement contre une loi, une
règle; imperfection, manque ; absence de jugement, d'or-
dre, d'économie; maladresse, sottise, bêtise, imprudence, im-
prévoyance. — Se prend souvent adverbialement pour mar-
quer la privation, le manque. Aï /a la fâouto, faraï la péni-
téngo, j'ai commis la faute, je ferai la pénitence, je la répa-
rerai. És dé ma fâouto, c'est ma faute, tant pis pour moi.
Véndraï sans fdouto, je viendrai sans manquer. És mort
féouto dé préne, il est mort d’inanition, faute de soutenir
ses forces par une nourriture quelconque. Té véou métre én
fâouto, je vais te mettre dans ton tort. Aquél home fara
bièn fâouto, la mort de cet homme fera un grand vide dans
sa famille.
Dér. du lat. Fallere, manquer.
Fâoutul, s. m. Dim. Fdoutulé; péj. Fdoutulas. Fauteuil ;
siége à bras avec un dossier.
Corrupt. du fr.
Faquin, quino, adj. m. et f. Petit-maitre; élégant;
recherché dans sa mise.
Ce mot est un emprunt évident au fr.; mais avec un
singulier adoucissement de signification.
FAQ
FAR
Faquino, s. f. Redingote, vêtement. — Ne se dit que
d’un habit un peu fringant, d’un habit de dimanche : c'est
le costume à peu près habillé. Mais le languedocien l’em-
ploie dans un sens ironique, comme pour se moquer d’un
artisan endimanché, qui sort du costume ordinaire de sa
classe.
Fara, farado, adj. m. et f. Qui a le teint très-rouge;
haut en couleur. Au fig. effaré; animé.
Viendrait-il de Faro, ou bien peut-être du lat. Fera,
bête fauve, exprimant toute l'extension du sens?
Faragousto, s. f., ou Chabrolo. Framboise, fruit du
framboisier. — Ce nom n’est pas usuel dans nos plaines
où la framboise est rare et exotique; il lui est donné dans
les hautes Cévennes où le framboisier vient spontanément
dans les bois. — Voy. Chabrolo.
Dér. du lat. Flagrare, sentir bon.
Farandèl, èlo, adj. Péj. Farandélas. Niguedouille; dé-
gingandé; sans tournure, sans manières; gauche et décon-
tenancé; sans gène et un peu niais.
Farandouna, ». Danser, sauter la farandole,
Farandouno, s. f. Farandole, sorte de danse d'origine
provençale : c’est une longue file de jeunes gens des deux
sexes qui se tiennent par la main, ou plutôt par le bout
d’un mouchoir, et sautent en cadence par les rues et les
champs, au son du tambourin, en exécutant mille figures
et passes différentes. C'était surtout dans les réjouissances
publiques et politiques que cette danse avait lieu. L'usage
s’en perd aujourd'hui et pour cause.
La racine de ce mot parait être le vieux lang. Faro,
phare, torche, brandon, parce que probablement cette
danse s’exécutait jadis aux flambeaux, ou que les acteurs
portaient un brandon. Le fr. nous a évidemment emprunté
ce mot qu'il a accommodé au génie de sa prononciation.
L'étymologie du gr. Péhxyé, phalange, et Aoëlos, esclave,
assujéti, parce que la Farandouno où Farandoulo repré-
sente une troupe de danseurs liés ensemble, a été aussi
proposée. Nous la relevons pour ne rien laisser perdre.
Farcéja, v. fréq. Faire des farces; folâtrer ; faire le badin,
le railleur; faire des niches bouffonnes.
Farcéjaire, aïro, adj. Farceur; jovial; qui aime à faire
ou à dire des farces. — Il a un sens un peu plus étendu
que Farceur, dont il est en quelque sorte l'augm., et ne se
prend d’ailleurs qu’en bonne part.
Farci, v. Farcir; bourrer; gorger; remplir jusqu'aux
bords; remplir d’un hachis.
Dér. du lat. Farcire, m. sign.
Farço, s. f. Farce, bouffonnerie, niche; plaisanteries.—
Mélange de viande hachée menu, avec ou sans herbes.
— On le dirait pris adjectivement dans ces Jocutions :
Aqud's bièn fargo, c'est bien drôle, bien plaisant. Qué siès
farço, péraqud! Pourtant, que tu es plaisant, comique!
Dans la première acception, l’étym. du lat. Farsum,
supin de Farcire, farcir, est aussi certaine que dans la
1 seconde. La bass. lat. avait fait le mot Farsa, tiré du
FAR
même verbe, pour désigner certaines pièces dramatiques
où se môlaient non-seulement les lazzis burlesques et les
facéties les plus hasardées, mais aussi toute sorte de lan-
gages et d’idiomes. C'étaient là des pièces qu’on appelait
farcies, par ressemblance et par comparaison avec les pièces
de cuisine dans le hâchis desquelles entre un peu de tout.
De là le rapprochement des deux mots et des deux sens.
Farcin, s. ”. Farcin, maladie cutanée des chevaux.
Dér. du lat. Farciminum, m. sign.
Farçur, çurdo, adj. Farceur; plaisant; bouffon; qui
aime à faire des farces.
Farda, v. Habiller; équiper; parer; ajuster; faire enra-
ger ; frissonner.
Sé farda, mettre ses habits de dimanche; s’atifer; soi-
gner sa mise; se laver la figure comme font les chats qui
se débarbouillent le museau du bout de leur patte.
Ce dernier sens du v. est emprunté au fr., le premier
dérive de Fardos.
Par une extension singulière, l'idée du mot Fard, qu'on
dit venir au reste du celtique fard, m. sign., semble avoir
déteint sur une signification du v. Farda, par ext. dans
la phrase suivante très-bien reçue: Aquù mé faï farda,
cela me fait enrager, me met hors des gonds. Il est évident
que c’est le rouge de la colère qui monte au visage. Cette
association d'idées et de mots est curieuse.
Fardétos, s. f. plur. Layette, trousseau d’un enfant nou-
veau-né; linge, lange, maillot, béguins, etc.
Fardos, s. f. plur. Hardes de toute espèce, habits, linge,
robes; bagage; trousseau d'une nouvelle mariée. — És-
poussa las fardos, au fig. secouer les puces, étriller quel-
qu'un.
Ce mot paraît emprunté au fr. Hardes, en changeant
H en F, métaplasme fréquent dans le dialecte gascon,
ainsi que le vice-versa.
Farèlo, s. /. dim. Petite tour. — Voy. Faro.
Farfantaïre, s. m. Charlatan; batteleur; tout individu
de cette gent nomade, qui hante les foires et les places
publiques pour montrer un spectacle quelconque.
Ce mot est sans doute un réduplicatif formé du lat. Fari,
parler, donnant au part. prés. inusité Fans, fantis, comme
pour désigner un grand parleur, un braillard. L'ital. Far-
fante, qui signifie fripon, doit avoir la même origine.
Comme en fr. juifest synonyme d'usurier, en ital. char-
latan peut bien s'étendre à fripon, faiseur de dupes.
Farfantéja, v. fréq. Faire le charlatan, l’empirique;
hâbler; faire le discoureur.
Farfantèlo, s. f. Berlue, éblouissement passager, qui
semble faire danser et sautiller les objets devant les yeux.
— Mous ièls mé fan farfantèlo, j'ai la berlue, j'éprouve
un éblouissement.
Il n’est pas impossible que ce mot vienne de Farfan-
taïre, ou du moins qu'il ait une racine commune avec lui;
cet éblouissement étant pareil à celui que procurent cer-
_ tains empiriques qui font voir les objets différents de ce
FAR 339
qu'ils sont au naturel au moyen de quelque procédé phy-
sique et que le vulgaire appelle la poudre de perlinpinpin.
Dans ce pays on appelle l'action de sortilége Émblout,
éblouir. Dans cette hypothèse, Farfantèlo aurait été l'é-
blouissement fantastique produit par le charlatan Far/fan-
taïre; et son acception se serait plus tard élargie.
Fargnè, fargnèïro, adj. Qui sert à la farine. — Sa
fargnë, sac à farine.
Faribolo, s. ;. Faribole; parole légère et oiseuse; choses
vaines et frivoles; niaiserie; sornettes,
Dér. du lat. Fari, parler, et Bulla, bulle de savon.
Faribouléja, v. fréq. Dire des fariboles; s'amuser de
niaiseries; folâtrer : fariboler.
Farignèiro, s. f. Grande caisse, coffre à tenir la pro-
vision de farine et de blé suivant le cas.
Farinèl, èlo, adj. Dim. Farinélé; péj. Farinélas. Fari-
neux ; de la nature de la farine; blafard. Au fig. niais,
niguedouille, Gille, Jean-farine. — Péro farinèlo, poire de
la vallée, espèce à pulpe grossière, pre et farineuse.
Son acception figurée vient évidemment de l'usage admis
dans la comédie italienne de barbouiller de farine la figure
des pierrots et des gilles.
Farinéto, s. . Bouillie faite de farine de maïs, assai-
sonnée d'huile, quelquefois de sel seulement, comme la
Polenta des Italiens.
Farino, s. /. Farine, grain réduit en poudre, principa-
lement pour faire le pain. — Passa la farino, bluter,
sasser la farine.
Dér. du lat. Far, faris, nom d’une sorte de blé qu'on
employa d'abord pour faire de la farine.
Farloquo, s. /: Faribole. — Voy. Faribolo.
Dér. du lat. Fari et Loqui, m. sign. redoublés l’un et
l’autre : parler.
Farluqué, quéto, adj. Freluquet; petit-maitre, petite-
maitresse.
Emp. au fr.
Farna, s. m. Breuvage épaissi par la farine, surtout
par la farine de châtaignes blanches, dont on empâte les
porcs que l’on engraisse; buvée de farine.
Farnoüs, ouso, adj., au plur. Farnouses. Dim. Far-
nousé; péj. Farnousas. Blanc de farine; sali par de la
farine, comme un sac ou l’habit d’un meunier; couvert de
farine. — Éndèrvi farnots, dartre farineuse.
Lorsque les vers-à-soie sortent de leurs mues, leur nou-
velle peau est plissée, blafarde et d’une couleur farineuse,
Cette dernière qualité est un signe de santé; au contraire
une peau lisse, tendue et luisante, dénote une constitution
adémateuse qui tourne bientôt à la dissolution. C'est donc
très-bon signe quand ous magnas sorlou toutes farnouses.
Faro, s. f. du vieux lang. Dim. Faréto. Phare; tour de
signal. — Le Languedoc était semé de ces tourelles, qui
étaient destinées à prévenir le pays de l'approche de l’en-
nemi. Vers le milieu du XIVe siècle, et durant la captivité
du roi Jean, le vicomte de Narbonne, capitaine général de
340 FAT
la Langue d'Oc, fit construire un grand nombre de ces
tours dont quelques-unes subsistent encore et ne parais-
sent pas, par leur isolement, avoir servi à d’autres usages.
Beaucoup de noms pr. de lieux et de personnes ont con-
servé ce nom, et mème son diminutif : La Fare, La Farelle
avec ou sans l’article.
Dér. du gr. Pépos, nom d’une ile d'Égypte proche d’A-
lexandrie, où Ptolémée Philadelphe fit élever une tour
servant de phare, qui prit le nom de l'ile et fut classée au
nombre des sept merveilles du monde.
Faro, s, f. Figure rubiconde; face enluminée; visage
réjoui, haut en couleurs.
Dér. de Fara, adj.
Far, roto, adj. Dim. Farouté. Qui a une mise élégante,
à la mode ; élégant d’une toilette campagnarde; petit maître
de campagne, endimanché.
Farouche, s. m. Trèfle à fleur pourpre, Trifolium
rubens, Linn. Plante de la fam. des Légumineuses; bon
fourrage artificiel.
Ce mot est probablement une altération de Farouge,
venant de Farrago, foin sauvage, donnant Féraje.
Fartaia, v. Cucillir et parer les herbages, les légumes
verts d’un potager ; les laver et les disposer pour la vente.
Fartaïo, s. f. Herbes; réunion de plusieurs sortes d’her-
bes et de légumes verts; jardinage. — Ne s'emploie que
relativement à la vente de ces mêmes objets, ou à leur
consommation dans une ferme ou un ménage. Par ext. on
l’applique à la réunion de toute sorte de menus ustensiles
en bon et mauvais état et pris collectivement.
Au sens posilif, ce mot est le même que Hourtoulaïo,
que nous employons indifféremment; mais ils ont dù ap-
partenir à deux dialectes différents. L'un et l’autre ont
leur racine dans le lat. Hortus : les changements de Æ en
F, comme nous l'avons remarqué, étant très-communs et
dans le génie propre du dialecte gascon proprement dit.
Fasti, s. m. Dégoüt; répugnance. — N'est guère em-
ployé que dans la phrase suivante : Faï véni lou fasti, ou
dono lou fasti, cela est dégoûtant, cela soulève le cœur.
Dér. du lat. Fastidium, m. sign.
Fasti, v. Dégoüter; répugner; causer de l’aversion, de
l'horreur, de la répulsion. — Il a un peu plus d'extension
que le subst. précédent, dont il n’est que le composé, et
signifie au besoin : indigner, exciter le mépris. — Aqud
mé faï fastà, cela me répugne. Lèvo-té d'aqui qué fas fasti,
va t'en, tu fais peur et horreur. On dit proverbialement :
Aquù fuï fasti et régoulije, cela soulève le cœur, lorsqu'une
personne se conduit ridiculement, ou qu’elle veut prendre
des airs qui ne conviennent ni à son rang ni à sa fortune.
Il n’est pas nécessaire de faire remarquer le déplacement
de la syllabe tonique dans le substantif et dans le verbe,
l'un sans accent sur l'i final, l’autre portant l'accent grave,
qui a pour effet immédiat à la prononciation de rendre
brève ici la première syllabe, et là de la faire longue.
Fastigous, ouso, adj. Au plur. Fastigouses. Fastidieux ;
FAT
dégoütant; ennuyeux ; importun. — Se dit d'un mets trop
gras ou trop sucré; mème d’une terre trop humide ou trop
molle pour pouvoir être travaillée.
Fata, v. Envelopper d’un linge ; faire une poupée à un
doigt qui a quelque bobo; étouper, calfater, étancher une
futaille qui fuit.
Dér. de Fato.
Fataïre, aïro, s. et adj. Chiffonnier; crieur de vieux
drapeaux, de chiffons; qui les achète pour les revendre aux
papetiers. — Bada coumo un fataïre, crier comme un
aveugle, parce que les chiffonniers font leurs criées à grands
éclats de voix, quand ils crient par les rues : Dé fatos, dé
fère vièl, dé véire rou.
Fatamol, s. m. Laurier-thym. — Voy. Favéloù.
Fatéto, s. f. Dim. de Fato. Petit chiffon. C’est aussi le
pécule secret d’une femme, ramassé à l'insu du mari, parce
que d'ordinaire elle le cache dans un peloton de chiffons,
afin que si on le découvre on ne se doute guère du magot
qu'il renferme. — Amassa sas fatétos, faire son paquet, et
au fig. être à l’agonie, faire son paquet pour l’autre monde.
Fatigo, s. f. Fatigue; lassitude; préoccupation. — És
én grand'fatigo , il fait de grands préparatifs, il est en
grand travail.
Le verbe est Afatiga ( V. c. m.), et non Fatiga, barba-
risme /ranchiman.
Dér. du lat. Katigatio, m. sign.
Fato, s. f. Dim. Fatéto. En provençal, on dit Pato, qui
est aussi, dans quelques-uns de nos cantons cévenols, adopté
comme variante. Chiffon; vieux drapeau; linge à panser
une plaie; petits couporis d’étoffe dont les enfants habillent
leur poupée. — Eato dé magnaguiè, nouet ou sachet de
magnassier : petit sac où l'on tient au large la graine du
ver-à-soie pendant la couvée. On en emploie un grand
nombre pour que la graine soit plus divisée, et qu'il soit
plus facile en la remuant souvent de la faire participer
également à un même degré de chaleur. On ne met guère
que deux onces de graine par chaque sachet. Acampa sas
fatos, ramasser ses guenilles. À dé mans dé fato, il a des
mains de beurre; tout lui échappe des mains. És un home
dé fato, c’est un homme délaissé, sans force, sans courage.
A toujour uno fato qué trémpo, l'éoutro qué sé bagno, il est
toujours empêtré; il trouve des anicroches à tout; il n'a
jamais le temps de rien. À pér dous iars dé mâou, pér cinq
sôous dé fato, il fait grand bruit pour peu de mal. Fato
crémado, linge brülé, de la mèche, sur laquelle on bat le
briquet pour avoir du feu. Fato-brulo, jeu innocent, où
celui qui cherche un objet ou un gage caché, est dirigé
par un des joueurs en suivant l'indication fato-brulo, ou
brulo pas, suivant qu'il approche ou s'éloigne du but,
jusqu’à ce qu'il l'ait découvert.
Chaquo fato a soun sén : dicton qui revient trop souvent
pour mériter une explication. Le mot à mot est : chaque
chiffon a son sens; la signification : rien ne se fait sans
motif, tout à un secret motif; et cela se dit quand on voit
FAT
quelqu'un faire quelque chose dont on ne saisit pas bien
là portée.
Si l'on pouvait supposer que le mot Fato, à cause de sa
grande ressemblance de configuration, vient du lat. Fatum,
l'antique Destin, formé lui-mème de Fari, parce qu'il était
fort bavard, on dirait que ses oracles qui avaient le mème
nom, Fata, et dont il s'agirait ici, quelque obscurs qu'ils
fussent d'habitude, n'en avaient pas moins un sens, une
signification ; car le Destin ne parlait pas pour ne rien dire :
alors l’'étymologie serait toute trouvée, et elle sonnerait
assez bien; mais Fato n'a pas de si hautes prétentions : les
modestes industriels, Fataïres, qui crient dans nos rues le
chant qu'on sait, ne débitent point d'oracles, pas mème
la bonne aventure, et leur inharmonieuse mélopée avertit
seulement qu’ils achètent des guenilles, du vieux fer et du
verre cassé. Prenons donc Fato dans son humble condition,
sans nous occuper de son étymologie, qui n’est nullement
nécessaire pour expliquer notre dicton.
Un chiffon, — je ne parle pas de ceux auxquels les
dames attachent si justement une grande importance, — un
. Chiffon ordinaire est de bien mince valeur, sans impor-
tance aucune, une vétille, un rien, et qui dit l’un dit l'au-
tre. Chaquo fato a soun sén doit donc s'interpréter, se
traduire ainsi : la moindre chose a sa portée, la plus futile
en apparence peut avoir et a souvent son utilité. Suit le
commentaire : vous ne comprenez pas ce que je fais, ni
pourquoi je le fais; vous le jugez insignifiant et inutile,
mais dans une affaire, aucun détail ne doit être négligé
pour la faire réussir, tout concourt à l’ensemble, tout con-
tribue à la faire marcher : une montre s’arrêterait si la plus
petite aiguille n'était pas à sa place : Chaquo fato a soun sén.
Quant à la dérivation du mot, nous sommes fort ‘tenté
de considérer Fato comme une corruption de Pato, et
celui-ci comme de même origine que l'anglais Patch, pièce,
morceau. Il en est de mème du mot Pétas qui est évidem-
ment de la mème famille et que le fr. nous a à coup sùr
emprunté comme racine du verbe Rapetasser. Cet emprunt
ne peut être douteux pour nous qui connaissons le mot
Pétas et qui ne pouvons faire aucun état des étymologies
qui prétendent faire descendre Rapetasser du gr. Pérrew,
coudre, ravauder, rapiécer. Il nous semble donc plus ra-
tionnel de croire Pato formé d'une racine commune avec
l'anglais Patch. Après cela, les uns et les autres pourraient
bien venir vraiment du gr. Iaréw, fouler aux pieds, d'où
Hétu, chose vile et abjecté, sans consistance, comme un
chiffon, une guenille, du vieux linge.
Fatou, s. m. Facteur de la poste; facteur de camion,
de roulage; agent; intendant.
Emp. au fr.
Fatras, s .m. Dim. Fatrassoù. Mauvaise pièce de linge ;
grande loque déchirée, mise en pièces; écouvillon de four
de boulanger; haillon. Au fig. avec le sens à peu près du
fr., chiffon, personne mal mise, mal tenue; indolente ;
malingre.
FAV 341
Ce mot est un angm. de Fato, et il est probable que
c'est de lui que s'est formé le mot fr. Fatras, quoiqu'il
ait aujourd’hui une signification plus métaphorique.
Fatrassado, s. f. Tas de vieux haillons, de vieilles har-
des, de loques usées, en lambeaux. Par ext. quantité con-
sidérable d'objets réunis pêle-mêle, en désordre. — Fatras-
sado dé papiès, gros fatras de paperasses. Fatrassado d'hèr-
bos, brassée d'herbes.
Fatrassariè, s. f. Fatrasserie; médisance; niaiseries;
tracasserie; le défaut d'un tatillon, d'un homme qui se
mêle de tout ce qui ne le regarde pas.
Ce mot, ainsi que les deux suivants, nous viennent du
fr. Fatras, qui lui-même est emprunté à notre idiome.
Fatrasséja, v. fréq. Baguenauder ; dire des niaiseries ;
semer des cancans; faire des paquets; s'occuper beaucoup
des autres dans ses propos; mettre la main à tout, mème
au pot au feu.
Fatrassiè, ièiro, adj. Dim. Fatrassièiré; péj. Fatras-
siètras. Faiseur de paquets; commère; cancanier; chipo-
tier; tatillon; tracassier.
Fatrimèl, èlo, s. et adÿ. Péj. Fatrimélas. Longue loque
de linge déchirée; harde quelconque en lambeaux et qui
perce de tous côtés; dégingandé, mal vêtu; mou, indolent,
avachi.
C'est l'augm. de Fatras, au pr, et au fig., qui même par-
ticipe un peu quelquefois au sens de Fatrassiè, toutes ces
significations se ressentant les unes des autres par com-
munauté d'origine.
Favarôous, s. m. plur. Fèves sèches de haricots dits
mounjétos. — Voy. ©. m.
Favédo, n. pr. masculin ou féminin, suivant qu’il est
porté par un homme ou qu’il s'applique à une localité, et
fort usité dans notre pays : en fr. traduit par Favède ou
La Favède.
Ses analogues se trouvent dans Fabiargue, Fabiargues,
hameau de la commune de Saint-Ambroix (Gard), dit Fa-
bayranicæ, en 4345, par une transformation de désinence
dont nous avons cité beaucoup d'exemples; et dans les n.
pr. d'homme, Fabier, Favier; et de lieux, Le Favarol et
Le Faveirol, ruisseaux, Faveirolles, hameau, commune de
Saint-Marcel de Fontfouillouse; Favet, commune d'Aigues-
mortes; Favier, de Saint-André de Majencoules; Les Fa-
vières, de la Rouvière; auxquels la différence des suffixes
n’a point enlevé les signes de parenté qui les font tous re-
monter à la même souche. Ici la forme du suffixe de col-
lectivité Édo est parfaitement saisissable, pour indiquer
un champ de fèves. — Voy. Édo, suffixe, et passim.
Favéloù ou Fatamol ou Tassignè, s. m. Laurier-thym,
Viorne-laurier-thym, Viburnum tinus, Linn. Arbrisseau
de la fam. des Caprifoliacées, commun dans nos jardins,
toujours vert, donnant des fleurs vers la fin de l'hiver.
Favéto, s. f. Fèverolle, gesse tubéreuse, Lathyrus tube-
rosus, Linn. Plante de la fam. des Légumineuses ; petite fève.
Dim. de Favo.
342 FAV
Favièiro, s. f. Champ semé de fèves, abondant en fèves.
Dér. de Favo, avec le suffixe collectif #iro. — Voy. Fa-
védo. :
Favidou, s. m. Dim. Favioulé. Haricot, Phaseolus, Linn.
Plante de la fam. des Légumineuses.
Faviôou est le nom générique qui s'applique à plusieurs
variétés et espèces : {ou favidou rouje, dont la plante n’est
pas grimpante et qui forme les meilleurs haricots en vert;
las mounjétos, haricot blanc ou haricot proprement dit;
favidous garèls, le haricot bigarré, grossier à manger en
fève, mais en très-grande estime à la campagne, parce qu'il
produit énormément en vert; favidous prountes, haricots
hâtifs, qui donnent des cosses bonnes à manger au bout de
quarante jours après la semaille : ils sont de couleur olive,
roux et aplatis par les bouts; favidous sans fiou, ainsi
nommés parce que la cosse n’a pas comme dans les autres
espèces une fibre épaisse et dure sur la jointure de Ja cosse,
ce qui les rend plus délicats en vert : leur fève est peu
estimée.
Au fig. Faviôou, qui s’adjective très-bien en Fawiolo,
signifie : nigaud, bénêt, niais, imbécile, simple.
Dér. de Favo, dont il est un dim. et une variété.
Favo, s. f. Dim. Favéto; péj. Favasso. Fève, fève des
marais, Vicia faba, Linn. Plante de la fam. des Légumi-
neuses. — Manjo-favos, bredouilleur, qui a toujours la
bouche empâtée. À% ou avès prou manja dé favos, est un
de ces dictons qui se répètent à chaque instant, qui se
comprennent aussi vite, mais dont l’origine n’est pas facile
à trouver. Dans le jeu que nous entreprenons à la piste
des origines, — je suppose la partie acceptée — plus d’une
fois, après avoir longtemps et vainement cherché une
énigme qu’on appelle étymologie, il m'arrivera de dire, si
je ne l'ai déjà fait trop souvent, non point je jette ma
langue au chat, ce qui serait tout à fait la même chose,
mais aÿ prou manja dé favos. Je crains mème, sans aller
plus loin, d'être obligé de le dire justement à propos de
l'origine de ce dicton. S'il s'agissait de fèves sèches et
crues, qui doivent être aussi peu faciles à mâcher, à avaler
et à digérer que les pois de frère Tuck, je comprendrais
qu'on en eût bientôt assez. Mais il n’est pas question dans
cette circonstance de les manger ainsi, car on l'aurait dit:
et assaisonnées à la manière ordinaire, si je ne m'explique
pas l’antipathie de Pythagore, je ne vois pas non plus qu’il
y ait à les préférer aux lentilles et aux haricots. Il faut donc
chercher ailleurs que dans nos potagers, et je pense qu’une
locution vulgaire, qui vient d'être rappelée, nous viendra
en aide.
On appelle manjo-favos, mange-fèves, un bredouilleur,
celui qui en parlant semble avoir la bouche pleine : on
suppose que c'est de fèves, crues cette fois, ce qui n’est
pas commode pour bien articuler. Or, on a dû remarquer
que si l'on donne un problème à résoudre, une charade à
deviner, par exemple; le chercheur, machinalement, tandis
que son esprit est occupé ailleurs, parle entre ses dents,
FE
marmotte, répétant, scindant, essayant d’arranger des
chiffres, des mots, et semble en effet bredouiller ou man-
ger des fèves. Un jour un sphinx, voyant son OEdipe faire
ainsi, et voulant lui donner enfin le mot qu'il ne trouvait
pas, dut lui dire : As-tu assez mangé de fèves, comme cela à
mâchonner à vide entre les dents, à bredouiller? Et depuis,
d’une manière générale, qu’il y ait ou non bredouillement,
As prou manja dé favos? signifie : as-tu assez cherché,
donnes-tu ta langue au chat? et 4% prou manja dé favos,
j'ai assez cherché, je ne trouve pas, j'y renonce; dites ce
que c’est. L’anecdole s’est répandue, et la locution est restée.
Dér. du lat. Faba, m. sign.
Favou, s. f. Faveur; action, bienveillance purement
gratuite, en accordant à quelqu'un plus qu’il n’a mérité.
Ce mot est un pur emprunt au fr. que notre langue
n’admet qu’assez difficilement, et dont il n'est pas bon
d’abuser : aussi at-elle repoussé le verbe et l'adjectif com-
posés.
Favouri, s. et adj. m. Favori.
C’est encore une exception franchimande, proscrite au
fém., à peine tolérée au masc. dans le sens du fr.
Fazéiïre, fazéiro, adj. Faiseur; grand faiseur; qui fait
et sait faire un peu de tout.
Dér. de Faïre.
Fazéndos, s. f. plur. Industrie; savoir-faire. — Mot du
vieux lang. qui ne s'est conservé que dans cette phrase
prvb. assez souvent citée : Fôou réndos ou fazéndos, il
faut être riche ou être industrieux, il faut avoir ou savoir
faire.
Dér. de Faïre, ou du lat. Faciendus.
Fé, s. f. Foi; vertu théologale, croyance, confiance en
Dieu; bonne foi, sincérité, confiance; croyance. — Pér
ma fé! sur ma foi! Y-aï pas la fé, je n’y ai pas confiance,
je n’en crois rien.
Dér. du lat. Fides, m. sign.
Fé,s. m. Péj. Fénas. Foin, herbe fauchée et séchée, qui
sert à la nourriture des animaux. — Vira lou fé, faner le
foin, le retourner avec la fourche pour le faire sécher.
Cacho pas lou fé, dit-on d’un vieux cheval qui se fait
rosse, et n’a plus de dents pour mâcher.
On remarquera à propos du rapprochement de ces deux
mots, Fé, foi, et ré, foin, que les homonymes parfaits,
tant pour la prononciation que pour l'orthographe, sont
fort rares en languedocien : ce qui est une preuve de ri-
chesse qui manque bien à son rival. — Quant au mot sui-
vant, quoique avec les mêmes lettres, son accentuation le
distingue suffisamment.
Dér. du lat. Fenum, m. sign.
Fè,s. m. Fait; action; chose faite, accomplie. — Aquo’s
un fà, c’est un fait, c'est évident, hors de doute. Dé 2, de
fait, par le fait, en effet. Pér fè d'aqud, à l'égard de cela,
pour ce qui est de cela. Én fè dé .. en matière de. Aqud's
pdou fè, aqud’'s pichd fè, c'est une bagatelle, une vétillle, *
un fait de peu d'importance. Surtout dans l'appréciation
FÈG
d'un marché, cette locution est fort employée : Aïçè’s
pichà fè, c'est une petite différence qui nous sépare, cela
ne vaut pas la peine de marchander.
Dér. du lat. Factum.
Fèbre, s. f. Fièvre; mouvement déréglé, circulation
accélérée du sang avec fréquence de pouls, chaleur et fris-
son. — Las fèbres, fièvre intermittente; accès de fièvre.
Trambla las fèbres, avoir des accès de fièvre. Coumo van
aquélos fèbres? comment va cette fièvre? dit-on familière-
ment et par antiphrase à une personne très-fraiche et d’une
santé incontestable. Fèbre gaïoufardo, fièvre goulue est une
expression prvb. de même nature que la précédente, et qui
a la mème portée, Toumba dé fèbre én mdou cdou, prvb.,
tomber de fièvre en chaud mal, de Carybde en Scylla.
Dér. du lat. Febris, m. sign.
Fébriè, s. m. Février, second mois de l’année, composé
de 28 jours, et de 29 dans les années bissextiles. — Miè
fébriè, journdou éntiè, prvb., à la mi-février, la journée
d’un journalier est entière, c.-à-d. que les jours sont assez
longs pour pouvoir remplir sa journée autant qu'en été et
. &u printemps, époque où s'il travaille plus longtemps, le
nombre des repas, des repos et la sieste compensent la lon-
gueur du temps. -
Dér. du lat. Februarius, m. sign.
Fébroûs, ouso, adj. Fiévreux, tant pour les personnes
quiont la fièvre que pour les choses ou les pays qui y
prédisposent.
Fédairo (La), s. j. La gent des brebis prise collective-
ment et par comparaison ou plutôt par distinction d'avec
les autres espèces de bétail.
Dér. de Fédo.
Fédo, s.f. Dim. Fédéto; péj. Fédasso. Brebis, femelle du
bélier. — Fédo countado, lou loup l’a manjado, prvb., bre-
bis comptée le loup la mange.
Dér. du lat. Feta, pleine, qui porte des petits.
Fédoù, s. m. Sauvages prétend que ce mot signifie petit
agneau, comme son nom diminutif semble l'indiquer. Ce-
pendant un agneau ne se dit jamais ainsi. Fédoù est au
contraire un jeune poulin, une jeune pouliche, cheval ou
mule, tiré des pâturages natifs de la montagne, pour le
former et l'élever. Au reste, son nom est entré dans une
seule locution, qui ne fournit pas de grands éclaircisse-
ments et dont l'intelligence est difficile quoiqu’elle soit
très-usitée. On dit : Péta dou sou coumo un fédoù, pour
tomber à terre lourdement et avec bruit. A coup sür, ce
terme de comparaison ne désigne pas un agneau, mais il ne
caractérise pas davantage la lourdeur de la chûte d’un
poulin, si tant est même qu'il tombe plus lourdement
qu'autre chose. Nous ignorons de la manière la plus com-
plète à quoi peut tenir le mot et son acception dans cette
phrase
Fégnèiro, s. [. Fenil, grenier à foin; grande meule de
foin construite avec art pour le préserver de la pluie et
qu'on laisse passer l'hiver sur le pré pour le vendre au
FÉN 343
commencement du printemps; usage pratiqué en Provence.
Féjes, s. m. plur. Foie, organe secréteur de la bile,
situé sous le diaphragme, au-dessus de l'estomac. — Sé
manjarièou lous féjes, ils sont toujours prêts à se dévorer,
ils se mangeraient le blanc des yeux. À lous féjes ataquas,
il a un vice organique quelque part : il se dit bien qu'il ne
s'agisse pas du foie. À lous fèjes dou diable, dit-on d'un
homme très-robuste et qui résiste soit à une fatigue, à un
travail ou à un effort surhumain, soit à une maladie ter-
rible.
Fémélan, s. m. La gent, l'espèce femelle, surtout en
parlant des femmes. — C'est un terme de dérision qui ne
se prend qu'en mauvaise part, ou en faisant le détracteur
du beau sexe : tout à fait style narquois.
Fémèlo, s. f. Femelle d’un animal; femme; mais dans
ce dernier cas c’est un terme de dérision ou de mépris.
Dér. du lat. Fæmina, m. sign.
Fén, s. m. Fumier; excrément des animaux, et en gé-
néral tout ce qui sert d'engrais aux terres.— Li faï vèire lou
[én énd'uno floundo, il engraisse sa terre bien faiblement,
il y jette le fumier avec une fronde. — Voy. Fumië.
Dér. du lat. Fimus, m. sign.
Fénaira, v. Faire les foins. — Voy. Afénaira.
Fénairaire, aïro, adj. — Voy. Afénaïraire.
Fénassa, v. Mettre un champ en pré. — Voy. Afénassa.
Fénassiè, s. m. Fenassier, celui qui reçoit chevaux et
mulets dans son écurie, et leur fournit le foin, sans loger
les voyageurs.
Fénasso, s. f. Graine de foin; qui se traduit volontiers
par Fenasse, mais qui n'emprunte pas pour cela le sens
du fr.
Dér. de Fé, foin.
Féndascla, v. Fendre; fendiller; diviser, séparer. — Au
part. pass. fèlé, crevassé légèrement, fendu.
Féndasclo, s. f. Petite fente; crevasse; fèlure.
Formé de deux mots qui ont à peu près la mème portée :
Féndo et Asclo. — V. c. m.
Féndo, s. f. Fente; crevasse; fêlure.
Féndre, v. Fendre; diviser, disjoindre sans couper, mais
avec des coins ou par un effort. — Sé féndre, se fendre,
s'entr'ouvrir, se gercer, se fendiller.
Féndu, udo, part. pass. de Féndre. Fendu, ue.
Dér. du lat. Findere, m. sign.
Fénéstrièiro, adj. fém. Qui aime d'être, ou qui est
souvent à la fenêtre. — Fio troutièiro ou fénéstrièiro, ra-
ramén bono méinajètro, prvb., fille qui aime à courir et à
rester à sa fenêtre fait rarement une bonne femme de mé-
nage.
Je crois que ce proverbe est le seul où ce mot soit em-
ployé. Les proverbes inventent souvent ainsi des mots
pour donner plus de concision à la phrase; quoique étran-
gers à l’idiome, s'ils sont accommodés à son génie et d’une
facile intelligence, ces créations sont toujours d'un effet
pittoresque et se retiennent aisément. La Fontaine et
344
Molière ont enrichi le fr. de bien des locutions qui sont
restées; notre langue d'Oc a bien le droit d’user du mème
privilége que les maitres.
Fénèstro, s. f. Dim. Fénstrélo, fénéstroù. Fenêtre,
croisée ; ouverture faite dans un mur pour donner du jour
dans une maison, un bâtiment. — Se dit à la fois de Ja
baie ou ouverture, et de la fermeture, bois ou vitrage, qui
la garnissent.
Dér. du lat. Fenestra, m. sign., qui vient lui-même du
gr. Pawvés, diaphane, de Palvo, luire, briller.
Fénéstroù, s. m. Dim. Fénéstrouné. Lucarne; petite
fenêtre. — 11 est lui-même un dim. de Fénèstro.
Féni, v. Finir.— Voy. Fini. — Féniras lèou? Auras-tu
bientôt fini?
Fénna, s. m. Le sexe féminin, la gent féminine, en gé-
néral; mais c’est plus particulièrement l’ensemble des fem-
mes d’un pays, d’un lieu déterminé. Le mot n’est pas très-
révérencieux. — Voy. Fémélan.
Fénno, s. f. Dim. Fénnéto, fénnoù; péj. Fénnasso.
Femme, compagne de l'homme; femme mariée, qui se dit
aussi Mouie, en lat. Mulier, épouse, moitié {V. c. m.);
femme, en général ; dame, autrefois Dono, Domina, inusité.
— Lorsqu'on appelle une femme dont on ignore le nom,
on lui crie: Fénno! Digas, fénno! et pour qu'elle com-
prenne que c’est à elle qu’on en veut, on la désigne par ce
qu'elle porte ou ce qu’elle vend : fénno ddou pagnè, fénno
das ious, hé! la femme au panier, la femme, aux œufs!
Fénnéto et surtout fénnoù se disent moins d’une femme de
très-petite taille que commetermes d'amitié, ou pour dési-
gner une très-jeune femme qui est mariée fort jeune et qui
a encore les allures, la vivacité ou la mignardise d'une
jeune fille. Fénnasso, péj., grosse et laide femme, sans trop
d'égard à la taille, le plus souvent.
Dans toutes les langues, par tous les pays, de tous les
temps, les femmes ont été le sujet le plus riche, le plus
fécond de proverbes, d’aphorismes, de maximes, de sen-
tences : c'est hommage rendu à la place et au rôle qu’elles
occupent dans le monde, Mais on croirait que partout on
a voulu le leur faire payer chèrement, tant on leur a mé-
nagé la flatterie et les éloges et insisté au contraire sur le
dénigrement et la moquerie. La plupart des proverbes s’en
vont donc répétant, depuis que le monde est monde, plus
de mal que de bien sur la plus belle moitié, comme on
dit, et la meilleure moitié du genre humain.
S'il y a injustice ou abus, ce n’est pas à ce point de vue
psychologique que nous avons à examiner le fait : il faut
s'en tenir à constater que le fonds se trouve partout le
même, la tendance générale partout uniforme et constante,
sans en. rechercher la cause. Il serait facile d'en avoir la
preuve en rapprochant des citations où même seulement
en traduisant. Nous ne l’essaierons pas ici, peut-être l’avons-
nous fait et le ferons-nous encore sous le mot principal de
chacun; mais pour le moment notre but a été de réunir
les dictons populaires qui ont le plus de cours. L'expres-
_FÊN
FÉN
sion en appartient tout entière à la langue et ressort du
dictionnaire : ce sont ces formules vives, ce tour pittores-
que que nous voulons faire remarquer : l'esprit, la malice,
le bon sens, la raison de ces proverbes viennent presque
toujours d’ailleurs; la langue ne répond que de ses œuvres,
et c’est pour cela qu'on excusera plus aisément le défaut
de galanterie et de délicatesse qui pourraient parfois s’y
faire trop sentir; nous n’y voulons voir que le moyen de
donner une plus juste idée du langage qui a mis là son ca-
chet le plus original.
Proverbes sur les femmes.
— Aïgo, fun, michanto fénno et fo, fan fugi l’home dé
tout id.
— Aï! qué vaï mâou, quand la galino faï lou gâou !
— À la candèlo la dono és pu bèlo.
— À la fénno coumo à la barquo toujour y-a à faire
quäouquo rén.
— À la tèsto et as pès sé counouï, dono, quäou sès.
— Amour dé courtisan, caréssos dé p..., bé dé vièlan,
et fé dé fémélan noun durou pas passat un an.
— Aou més dé juiè, ni fénno ni câoulé.
— Après trés jours l’on s’anuiïo dé fénnos, d’hostes et dé
plèjo.
— Aqui ount'és lou gâou füou pas qué la galino cante.
— Argén dé fénno et bé dé campano noun flouris ni grano.
— Bèlo à la candélo, lou jour ou gasto tout.
— Bèlo fénno, michanto éspigno.
— Bèlo fénno, miral dé nècis.
— Bèouta dé fénno, miral dé fol.
— Bèlo fénno, fachoùs révéio-mati.
— Bono fénno, marido tèsto; bono miolo, michanto
bèstio; bono tèro, michan cami.
— Coussél dé mouïè és pichd, qué noun lou prén &h un
cho.
— Coutèl qué noun taïo, fénno qué noun vaïo, sé lous
pèrdes noun t’én chaïo.
— Däou tén qué la fénno és malàouto, y-a dos pôous à
l'oustâou, l’uno qué morie, l’âoutro qu'éscape.
— Dé bèlo fénno et dé flou dé maï, én bu jour la béouta
s'én vaï.
— Dé dos fénnos dins la méïsoù, dé la mita gn'a bien
proù.
— Dé marido fénno gardo-té et dé la bono noun 'én fises.
— Dono fougassiètro al cap dé l'an manjo sa bérquièïro.
— Dono gaïo mé plaï bé, mais qué jamaï noun mé
siègue ré.
— Dono qué noun manjo, lou béoure la mantèn.
— Dono viano qué faï lous éfans sans home.
— Doulou dé fénno morto passo pas la porto.
— Doulou dé mouïè, doulou dé couïde.
— Dous bèous jours à l’home sus tèro, quan prén mou,
et quan l'éntèro.
FR is. Rd
FÊN
— Éfan nouri dé vi, fénno qué parlo lati, faguèrou
jamaï bono fi.
— Émb'un home riche sa fénno li mouris, émb'un
pâour’home sa miolo.
— Én grans caloùs, sé m’én vos créïre, quito la fénno et
prén lou véire.
— Fénnos éncéntos et poulé, âou més d'aoùs an toujour
fré.
— Fénno dâourado és lèou counsoulado.
— Fénno dé bé et dé bono mino, noun vaï pu iuèn qué
la galino.
— Fénno et vi émbria ïgou lou pu fi.
— Fénno faï ou désfaï l'oustiou.
— Fénno malâouto et qué siè grosso, a un das péses din
la fosso.
— Fénno mudo fouguë jamaï batudo.
— Fénno qu'a un bon mari âou visaje ou porto pér
éscri.
— Fénno qué coï et faï bugado és miéjo folo ou énrajado.
— Fénno sé plan, fénno sé dôou, fénno és malâouto quan-
.t-ou vôou.
— Grando sartan pér fricassa, émbourdo primo pér
tamisa, uno mouiè déspénsiètro, an lèou vouida uno
pagnèiro.
— Las fénnos soun coumo las coustélétos, dounmaï on
las bat, dounmaï soun téndros.
— La mort d'uno fénno és coumo un co Aou couide.
— La bousso fournido faï la dono éstourdido.
—- La dono pot et äouso quan soun mari la louso.
— La fénno et la tèlo mâou sé caousis à la candèlo.
— La fénno et lou ris én aïgo sé nouris.
— La fénno és coumo la castagno, bèlo déforo, dédin és
la magagno.
— La fénno és un mâou nécéssari dinc un oustäou.
— L'aïgo gasto lou vi, las carétos lous camis et las fénnos
l'home.
— Las fénnos et lous éfans soun tâous qué lous homes
lous fan.
— L'home és éndigne d'home rèstre qué dé sa fénno noun
és mèstre.
— L'home n'a résoù ni bon-sén qu'à sa fénno faï tout
sabén. .
— L'home, quan-t-6s pla marida, sa pas cé qué Diou i-a
douna.
— Limassos et fénnos à véndre, mièl courou, mièl sé
fan préndre.
— Luno mèrcrudo, fénno bécudo, dé cént én cént ans
gn’a trop d'uno.
— Maridas n’an qu'un més dé bon tén.
— Mourgo qué danso, tâoulo qué brando, fénno qué
parlo lati, faguèrou jamaï bono fi.
— Näou et fénno, y-a toujour à réfaïre.
— Noun sé podou counouïsse dé iuèn lous mélouns et
las fénnos.
FÊN 345
— Noun sé podou counouïsse bèn bon méloun et fénno
dé bèn.
— Home dé païo vôou fénno d'or
— Home rous et fénno barbudo jamaï dé près noun lous
saludes.
— Oumbro d'home vôou cént fénnos.
— Parñoulos dé fénnos, béssinos d’ase
— Pér avé l'oustâou né tout l'an ni fénnos, ni capé-
lans.
— Pér vioure bé ségu, préngues pas pu grando qué ta.
— Plous dé fénnos soun lèou éssus.
— Qu'a grando padèlo et prin tamis et fénno déspén-
sièfro, mostro lou quiou nus pér cariètro.
— Quan-t-uno lèbre prén un chi és contro naturo, quan-
t-uno fénno faï bé és pér avanturo.
— Qué fénno et säoumo méno és pas sans péno.
— Qué pérd sa fénno et quinze sôous 6s gran dhoumaje
dé l’argén.
— Qué sa mouïè noun honoro 61 mèmo sé déshounoro.
— Qué vôou réloje mantène, viël oustäon éntrétène,
jouïno fénno counténta et pâoures paréns ajuda, és toujour
à récouménça.
— Sajo fénno, ournamén d’oustiou.
— Sé flatéjas fénnos et goutos, boutas lou fid à las éstou-
— Toutes lous maris qué soun counténs dansarièou sus
lou quiou d’un véfre.
— Trénto cabros et:trénto fénnos soun dos tréntanios.
— Un fiô dé fénno véouso, uno brouquéto et dos païos.
— Un home qu’és mâou marida voudriè maï qué fou-
guès néga.
— Uno bono fénno, uno bono cabro, uno bono miolo,
soun trés maridos bèstios.
— Vôou maï un capèl qué dos coïfos.
— Voulès arésta un fol, carga-li uno fénno âou col.
— Y-a gés dé vices qué las fénnos et las mouninos noun
sachou.
Dér. du lat. Femina, m. sign. Court de Gebelin et
Nodier pensent, non sans raison très-plausible, que le mot
Femina est dérivé de Homo, hominis : on a dû dire homina
au fém., delà Femina, par la permutation ordinaire de
H en F. En ilal. Femmina; en catal. Femna; en esp.
Hembra, m. sign.
Fénoudéio, s. f. n. pr. Fenoudeille, par traduction lit-
térale en fr. Nom d’un quartier au territoire d'Alais : il
signifie lieu couvert de fenouil ; et cette circonstance lui a
valu sa dénomination. C'est la corruption de l'ancien lan-
gage Fénouïado, qui avait la même acception, tirée de
Fénoul.
Fénouièiro, s. f. ou Fèou dé tèro ou Fumotèro. Fa-
meterre, Fumaria officinalis, Linn., plante de la fam. des
Papavéracées, commune dans les champs.
Pline dit que le suc de cette plante appliqué sur les
yeux les fait larmoyer, undè nomen, de là son nom lat.
#4.
346 FER
et gr. Capnos et Kanvés, fumée, à cause du même effet
produit par la fumée; mais elle a aussi un goùt de fumée
assez prononcé, ce qui peut avoir contribué à la faire dé-
nommer. Quant à la variante Fèou dé tèro, fiel de la terre,
elle lui vient de son amertume.
Fénoul, s. m. Fenouil, anet doux, anis sauvage, Ane-
thum fœniculum, Linn., plante de la fam. des Ombelli-
fères, qui croit dans les terrains pierreux.
Dér. du lat. Fœnum, à cause de son odeur de foin.
Fénta, v. Fienter, jeter son excrément, en parlant sur-
tout des animaux.
Fèou, s. »”. Fiel, vésicule où se secrète la bile. — Il
sert comme en fr. de terme de comparaison très-usité de
toute saveur amère. Ama coumo lou fèou, amer comme le
fiel.
Dér. du lat. Fe, s. m. En ital. Fele; en esp. Hiel.
Féouse, s. /. Fougère, Polydium filix, Linn., plante de
la fam. de Fougères; cryptogame. L'alcali contenu dans
les cendres de ce végétal entrait dans la fabrication du verre
blanc et vert. — Ana à Las fèouses, aller à la recherche ou
à la cueillette de la fougère, qui croît en grande quantité
dans les châtaigneraies et fournit une litière saine et fraiche
en mème temps qu'un bon engrais.
Féousièiro, s. f. Lieu couvert de fougères.
Formé du radical Féouse avec le suffixe de collectivité
sètro.
Féra, s. m. Dim. Fératé; augm. Fératas. Seau à puiser
l'eau, ordinairement en bois relié par des cercles de fer. On
donne aussi ce nom au seau à anses qui est en cuivre étamé,
dans lequel les femmes portent l'eau sur la tête. Ce dernier
ustensile se nomme également Jérlo ou Séïo (V. c. m.);
mais ces deux derniers noms s'appliquent au même usten-
sile quand il est en bois, tandis que celui de Féra ne con-
vient dans ce cas qu'au seau de cuivre. — Né bojo à plés
féras, il pleut à seaux.
Dér. du v. Féra, parce qu'il est cerclé en fer. Par la
permutation constante et fréquente dans”les langues où
l'aspiration est plus sensible comme en esp., on dit Herada,
seau,
Féra, v. Ferrer; ferrer un cheval, une charrette, un
meuble quelconque; cercler en fer; marquer un animal
avec un fer rouge.
Dér. du lat. Ferrum,
Férado, s. f. Ferrade, fête agricole fort en honneur en
Camargue et sur le littoral de la Méditerranée, dans le dé-
partement du Gard. L'objet en est la marque au fer chaud
des jeunes taureaux sauvages qui paissent dans les marais.
Comme ces animaux sont fort sauvages, difficiles à con-
duire et à terrasser, cette fête est un second spécimen de
la course des taureaux. Des jeunes gens, enrôlés volon-
taires, vont à la recherche des taureaux dans les marais, à
cheval et armés du trident; à force d'adresse et d'évolu-
tions, ils parviennent à les acheminer vers un point dési-
gné où toutes les populations voisines se rassemblent. Une
FER
enceinte en fer à cheval s'ouvre devant les arrivants. On
ménage une eutrée au moyen d'une barrière pour laisser
passer un seul bœuf à la fois : il s'y précipite, et l’un des
toréadors qui l'attend à l'extrémité opposée, l'abat en le
terrassant par les cornes. Sitôt l'animal abattu, on lui
applique le fer rouge avec dextérité et sans remise, car il
se remettrait bientôt sur pied. A peine touché, il s'élance
par l'issue qu'on tient ouverte à cet effet, et court se pré-
cipiter dans le premier courant, la première flaque d’eau,
d'où il regagne bientôt et sans guide ses pâturages pater-
nels.
Féraje, s m. Action de ferrer les chevaux; frais de
mise et d'entretien de ces fers.
Féraje, s. m. Fourrage vert, produit par des plantes
fromentacées, comme orge, avoine, vesce, escourgeon. —
On l'appelle ainsi mème lorsqu'il est mangé sec, pourvu
qu'il soit produit par les plantes ci-dessus coupées en vert.
Ce mot n’a donc pas la portée générale du fr. Fourrage, qui
s'étend à toute sorte d'herbes sèches ou vertes servant à la
nourriture des chevaux. Les plantes qu'on emploie le plus
dans ce pays pour produire lou féraje, sont un mélange
d'orge et de vesce noire, si l’on sème avant l'hiver, d'avoine
et de vesce blanche, en mars:
Dér. du lat. Farrago, mélange de plusieurs céréales
coupées en herbe.
Féraménto, s. f. Ferrure, garniture de fer; tout ce qui
compose la ferrure d’un meuble, d’une porte, d’une fenètre,
etc.; vieille ferraille.
Féramio, s. f. Bôte fauve, dans le principe; aujour-
d’hui, fantôme, loup-garou.
Ce mot, qui est d'origine gasconne, dér. du lat. Fera,
bête fauve. |
Férâou, s. m. n. pr. d'homme. Féraud.
Ce nom, originaire du Velay, signifie dans le dialecte
de ce pays, une sorte de basalte ou pierre volcanique d'un
gris d'ardoise, et que sa couleur et sa consistance font
ressembler à du fer. Cette pierre, qui est extrèmement com-
mune dans les montagnes du Vivarais, du Velay et de la
haute Auvergne, est taillée par les mains de la nature en
prismes pentagoniques, et conserve cette forme dans ses
subdivisions à l’infini.
Le nom provient sans doute de Fère, fer, avec lequel
cette pierre offre tant d’analogie.
Fératado, s. /. Contenu d’un seau, plein un seau.
Dér. de Féra.
Fère, s. m. Dim. Fèré. Fer, en général, métal fort dur,
compacte, peu malléable, d’un gris argenté ou noirâtre;
fer à cheval; fer à repasser. — És un bon fère, se dit iro-
niquement et par antiphrase pour : c'est un homme de peu
de consistance et de valeur, un homme peu loyal et peu
franc, un piètre sujet.
Dér. du lat. Ferrum, m. sign.
Fère-blan, s. m». Fer-blanc, fer en feuilles minces qui
a été recouvert d’étain.
PE
FÈS
Fère-blantiè, s. m. Ferblantier, ouvrier qui travaille
en fer-blanc.
Fèrèn, énquo, adj. Ferrugineux; qui contient du fer.
— Ne se dit que des terrains, des couches minérales.
Fère-vièl, s. "=. Vieux fer, ferraille. — Se joint d'or-
dinaire à were rou, pour former le cri des chiffonniers
autochtones qui achètent les vieux chiffons, de la ferraille
et du verre cassé. Au fig. on donne ce nom à toutes sortes
de vieilleries, de loques, d'oripeaux et à d’antiques raba-
cheries.
Fèrme, adv. interjectif. Ferme! Allons, courage! frap-
fort!
Dér. du lat, Firmus.
Férnétégo, s. f. Frénésie; impatience; démangeaison,
envie démesurée de dire ou de faire. — Aï dé férnétégos
din mas cambos, j'ai des inquiétudes dans les jambes.
Corrupt. du fr. Frénésie.
Férnétégoùs, ouso, adj. Chatouilleux; irritable; qui a
des tics nerveux. — Se dit d’un jeune chien, d’un jeune
chat, d’un jeune cheval, qui ont l'impatience, l'inquiétude
de leur âge, qu'ils traduisent par des passes, des voltes
‘ nerveuses.
Fèrni, v. Frémir; éprouver une horripilation; trembler
dans sa peau; avoir chair de poule de frayeur. — Mé fa
férni, il m'effraie par sa hardiesse, par le danger auquel
il s'expose, par l'histoire qu'il me raconte, par l'entreprise
où il se hasarde.
Dér. du lat. Fremere, m. sign.
Férnimén, s. #. Frémissement; émotion; tremblement
de frisson; horripilation.
Féroù, s. m. Dim. Férouné. Ferret d’aiguillette ou de
lacet, ordinairement de fer-blanc, de cuivre ou même d’ar-
gent. .
Dér. de Fère, dont il semble un dim.
Féruro, s. f. Ferrure; toul le fer qui entre dans la gar-
niture d’un meuble ou d’une fermeture.
Fés, s. f. Fois, qui désigne le nombre, la quantité, le
temps des choses, des actions. — À bèlos fés, de temps à
autre; un après l'autre. Dé fés, parfois, quelquefois. À La
fés, à la fois, en mème temps. La fés qué vénguë, le jour
où elle vint. Y-aviè uno fés, il était une fois. Agud faï las
dos fés, ceci fait la seconde fois.
Dér. du lat. Vices, m. sign.
Féstadiè, ièiro, adj. De fête; qui appartient aux fêtes;
qui court, qui aime les fêtes; qui prend des airs de fête.
Dér. de Fèsto.
Féstéja, v. fréq. Festoyer; fêter; chômer; faire fête à
quelqu'un; se régaler; festiner.
Dér. de Fésto.
Fèsto. s. f. Fête; solennité; jour consacré au culte,
mémoire d'un mystère ou en l'honneur d’un saint; réjouis-
sance püblique ou particulière dans les grandes occasions.
— Faïre fèsto, fêter, chômer une fête. Pér las fèstos, sui-
vant l'époque de l’année, signifie : au temps des fêtes de
FIA 347
Pâques ou de Noël, qui duraient trois jours chacune avant
le concordat. Passa las fèstos, fèter les fètes de Pâques ou
de Noël en famille. Il est assez ordinaire que les membres
d'une famille qui sont dispersés, à une distance peu éloi-
gnée, se réunissent à cette époque dans la maison pater-
nelle. Lou jour dé sa fèsto, le jour de sa fête. Après la fèsto
lou fol rèsto, prvb., après la joie, l'ennui. Moun chi mé
faï bé dé fèstos, mon chien, par ses caresses, fête mon
retour.
Dér. de lat. Festum, m. sign.
Fésuso, s. f. Tailleuse de robes; couturière en robes.
Empr. au fr. Faiseuse de robes: on retranche le mot
robe, comme si c'était la faiseuse par excellence.
Féta, ado, adj. Futé; rusé; adroit.
Corrupt. du fr.
Fétiblamén, adv. Effectivement; en effet ; réellement.
Corrupt. du fr. Effectivement.
Fi,s. f. Fin; bout; extrémité; par ext. mort, fin de la
vie. — À longo fi, à la longue. À La fin finalo sès arivu,
enfin, à la fin des fins vous êtes arrivé. Cette expression a
dû être empruntée au vieux fr., chez lequel elle était reçue :
cela se voit au mot Fin qui n'est pas languedocien : la
locution a été prise en bloc. Vole faïre fi dé iéou, je veux
mettre fin à mes jours, me tuer. À fa pdouro fi, il a fait
une triste fin, une fin misérable. À La fi, té taïsaras saïque?
te tairas-tu enfin?
Dér. du lat. Finis, m. sign.
Fi, fino, adj. Dim. Finé; péj. Finas. Fin; délié; rusé
en affaires; adroit; subtil; menu; lisse; poli; doux au
toucher; soyeux; délicat. — Pésa fi, peser extrêmement
juste sans que la balance trébuche : ce qui annonce de la
parcimonie et peu de loyauté chez le vendeur. És pas d'a-
quéles tant finasses, il n’est pas des plus lurés. Faire finé
à quéouquus, cajoler quelqu'un, lui faire patte de velours.
Dér. du lat. Finis, fin. En teuton Fein; en angl. Fine;
en ital. Fino.
Fiala, v. Filer à la quenouille ou au rouet, et non filer
de la soie, qui se dit Tira, ni filer pour marcher, décamper.
— Marida-mé, ma mèro, qué tant prin fiale, prvb., mariez-
moi, ma mère, Car je file assez fin pour cela. Cette locu-
tion prvb. se rapporte à l’époque où la quenouille était
l'occupation presque exclusive des femmes après les soins
du ménage. L'habileté à ce travail était donc une des qua-
lités requises pour former une bonne ménagère; et quand
une jeune fille était arrivée à filer assez fin pour se passer
de professeur, elle était apte à se marier.
Dér. de Fiou, fil.
Fialaduro, s. f. Action de filer; profession de fileuse;
frais du filage; matière à filer et matière filée. — Prén
vin sous dé fialaduro, elle fait payer son filage vingt sous
la livre. Autrefois on disait d'une servante : la fialaduro
és pér élo, pour exprimer qu'en sus de ses gages tout ce
qu'eile gagnait en filant était pour elle.
Fialaire, aïro, adj. Fileur, fileuse : ce qui ne s'applique
348 FIA
ni aux fileuses de soie, qui se disent Tiraïros, ni à l'in-
dustriel qui fait marcher une filature de soie à ses risques
et fortune, qui se dit Filur.
Fialandièiro, s. /. Filandière; fileuse de profession au
rouet ou au fuseau.
Fialas, s. m. Filet de chasse ou de pêche; réseau, fils
enlacés pour prendre des animaux ou des poissons.
Dér. de Fiou.
Fialousado, s. /. Quenouillée, matteau de chanvre ou
de lin dont on garnit en une fois une quenouille ; quantité
de matière à filer dont peut être chargée une quenouille.
— A acaba sa fialousado, elle a achevé sa tâche, sa que-
nouillée.
Fialousèio, s. f. Filoselle; soie grossière et commune,
qui provient des côtes ou des cocons de graine cardés et
filés au rouet ou à la quenouille.
Fialouso, s. f. Quenouille; bâton ou roseau auquel on
atlache la filasse qu'on veut filer. — Fialouso émboutido,
quenouille pansue, ventrue, faite en roseau refendu pour
filer les cocons de graine en filoselle.
Dér. de Fiou, fil:
Fian, s. m. La gent fillette; les filles considérées en
masse, collectivement.
Dér. de Fio, fille.
Fianço, s. f. Confiance; süreté; foi; assurance. — Vous
ou done à fianço, je vous le donne en ami, en toute con-
fiance. Prénès aquél cadis à fianço, prenez ce cadis en
toute sûreté, je vous le garantis. Dé grano à fianço, de la
graine de vers-à-soie de confiance, c.-à-d, celle qui a été
soignée et confectionnée par quelqu'un qui présente des
garanties tant pour la sélection et la qualité des cocons
destinés au grainage, que pour l'attention scrupuleuse et
consciencieuse donnée à leur bonne éclosion et à ce travail
délicat. Hélas! depuis bien des années que l'invasion de
maladies inconnues ravage nos chambrées de vers-à-soie,
que les importations et la spéculation ont envahi l'indus-
trie des grainages, la graine de confiance est devenue un
mythe : c'est le rara avis in terris. Cependant des expé-
riences poursuivies avec science, intelligence et succès ont
enfin appris quelques procédés qui relèvent un peu l'espoir
de nos contrées séricicoles : quand ces procédés se seront
vulgarisés davantage, il n’est pas douteux que le mot
oublié dans la langue des éducateurs de grano dé fiançgo ne
revienne etne trouveencore comme autrefois sonapplication .
Grammaticalement on aura remarqué que Æianço ne
forme que deux syllabes comme tous les autres mots où se
rencontre la diphthongue ia, prononcée en une seule émis-
sion de voix, à cause de l’accentuation imprimée par li.
Partout où se rencontre au contraire là tréma avant la
voyelle a ou autre, il y a séparation. Nous rappelons ce
qui a été dit à l’art. Acén (V. ©. m.).
Dér. du lat. Fidentia, confiance.
Fiastre, s. m. Fillâtre; beau-fils; fils de la femme.
Dér. de Fü, fils.
FIC
Fiastro, s. f. Belle-fille; fille d’un autre lit.
Roquefort dit que les deux mots qui précèdent sont for-
més du lat. Filius, ou Filia alterius; leur terminaison se
prête à cette interprétation étymologique. |
Fibla, v. Faiblir, fléchir; lâcher; plier; mollir; s’affai-
blir.
Fible, fiblo, adj. Faible; qui manque de courage onde
nerf; qui n'a pas de force, au physique comme au moral.
Il est quelquefois subst. au masc. pour: défaut princi-
pal, mauvais penchant, passion irrésistible, côté faible. —
Préne pér soun fible, prendre par son faible. À un fible,
il a du penchant, une faiblesse, un faible ou du faible.
Fiblèsso, s. f. Faiblesse; faible; défaillance; action in-
délicate; manque de force, de caractère, de conduite;
mauvais penchant.
Dér. du lat. Flebilis, employé dans la bass. lat. dans le
sens de Debilis.
Ficéla, v. Ficeler; entourer, lier avec de la ficelle. Au
fig. équiper; organiser avec soin, avec élégance.
Ficèlo, s. f. Ficelle; petite corde formée de deux brins-
tordus. — Alounga la ficèlo, au fig. différer, prolonger.
Dér. du lat. Fidicula, petite corde à boyau.
Ficha, v. Donner; jeter; lancer; mettre; appliquer. —
Ficha un co dé poun, donner un coup de poing. Mé sou
ficha dou sôou, je me suis laissé tomber. Æicha lou camp,
décamper, s'enfuir.
Ficha’n caïre pour ficha én caïre, veut dire: fatiguer,
ennuyer, scier le dos, et aussi contrarier, vexer, ficher
malheur, ce dernier verbe mis par amendement, bien
entendu, comme dans le lang. Maintenant Caëre a plusieurs
significations, selon l'occurence : coin, sens, côté et car-
reau du jeu de cartes. — Il n’est pas absolument impos-
sible que la locution vienne d'une partie de cartes, dans
laquelle un joueur aurait été obstinément poursuiviet battu
par la couleur carreau. Cependant, il y a une autre expli-
cation, assez simple, assez naïve, si ce n'est davantage,
pour ètre tout aussi vraisemblable. Lorsqu'un enfant n’est
pas sage, on l'envoie en pénitence dans un coin de la
chambre, où il doit rester, jusqu'à l'expiration de sa peine,
debout, sans bouger et tourné vers le mur. Il est clair que
cela doit l’ennuyer, le vexer, lui ficher malheur, si vous
voulez. Ces souvenirs d'enfance restent en grandissant, et,
quoique plus sage alors, on a pu, si on éprouve quelque
contrariélé, quelque ennui, quelque vexation, les assimiler
à ceux du jeune temps, quand on vous flanquait dans un
coin pour punition, et les appeler du même nom en salant
tant soit peu l'expression.
Mais il ne faut rien garder sur la conscience. Cette der-
nière explication, qui me revenait assez, je dois convenir
qu'elle ne peut être acceptée que sous bénéfice d'inven-
taire. Le dicton est exclusivement languedocien et de vieille
date. Ceux qui font les dictons étaient, en matière d'édu-
cation, pour l’ancienne méthode de M. Cinglant, et je crois
mème qu'ils le sont toujours : -comment auraient-ils fait
FIÈ
celui-ci sur une nouvelle pénalité qui n’a été édictée que
depuis et seulement dans le code des salons? C'est assez
difficile à arranger, et il faudra sans doute revenir à notre
partie de cartes, au risque de la perdre encore.
Sé ficha, se moquer; brav er; mépriser. — M'én fiche bé,
je m'en soucie fort peu; je m'en fiche. Sé ficha dé quéou-
quus, se moquer de quelqu'un , le narguer, en faire peu de
cas. C’est le lénitif du verbe malséant F ... qu'on emploie
dans les mêmes acceptions en fr.
Dér. probablement du lat. Fixare ou Figere, mais sin-
gulièrement détourné dans quelques-unes de ses acceptions.
Fichan, anto, adj. Fichant; contrariant ; désagréable ;
fâcheux ; qui cause du dépit, du désapointement . — Il est
encore un lénitif.
Fichouiro, s. f. Fichure, espèce de bident ou de trident
avec lequel on darde le poisson dans l’eau.
Dér. du lat. Fivorius clavus, fiche.
Fidèl, dèlo, adj. Fidèle; exact à garder sa foi, à rem-
plir ses engagements. — Se dit principalement de la fidélité
ou plutôt de la probité des domestiques ou gens de con-
fiance, dans le sens de l'attachement; probe et intègre. —
És fil, il est probe, il ne toucherait à rien de ce qui ne
lui appartient pas.
Dér. du lat. Fidelis, m. sign.
Fidèou, s.m.Vermicelle, sorte de macaroni pour potage.
On le fabrique avec la farine de riz qu'on teint le plus
souvent avec une décoction de safran. On lui donne cette
forme de fils ou de petits vers en le faisant passer, à l'aide
d’un piston, à travers les trous d'une filière. On dit en
esp. Fideos.
Dér. du lat: Fides, corde d'instrument de musique.
Fièïa, ». Pousser des feuilles; se garnir, se couvrir de
feuilles, en parlant des arbres.
Fièiaje, s. m. Feuillage; quantité de feuille de müriers
que contient un domaine. — Y-a un for fièaje dinc aquél
mas, il y a une grande quantité de feuille de müriers dans
cette métairie.
Fièïas, s: m. Amas de feuilles sèches pour litière. —
Coucha douvfiéias : dans les Cévennes les valets de ferme
couchent dans des amas de feuilles sèches de châtaigniers,
comme ailleurs dans la paille.
Fièio, s. f. Dim. Fidiéto, péj. Ficiasso. Feuille, en géné-
ral. — Fièio, tout court, signifie, dans nos contrées séri-
cicoles, la feuille par excellence, celle du mürier. Or, le
mürier, pris ainsi au singulier, ne signifie pas seulement
un individu de l'espèce, mais la récolte en entier: c'est
pour cela que Fiëio participe à cette extension. La fiéio és
déjà bèlo, la feuille est déjà développée. La fidio a prés
mou, la feuille a souffert; elle est tachée ou brouie par
la gelée. Achéta à fiéio morto, acheter de la feuille en hiver
et sur l'estimation qu'on fait des arbres; c'est aussi la
retenir et arrher en hiver sur l'estimation où pesage qui en
seront faits à l'époque de sa maturité. Faïré manja sa fièio,
c’est faire une éducation de vers-à-soie avec la feuille qu'on
FIÈ 349
possède : c'est dit par opposition à celle qu'on vend en
tout ou en partie; dans ce cas, on emploie aussi: Faïre
touto sa fièio. Ana à la fiéio, aller cueillir de la feuille de
mürier. Ana à las fiéios, aller ramasser des feuilles sèches
pour litière.
Fiéio dé rèsso, allumette, lame d’une scie.
Fièio d'hdouboï, anche de haut-bois.
Fidio dé papié, feuille de papier.
Dér. du lat. Folium, m. sign.
Fièiräou, s. m. Champ de foire pour le bétail gros et
menu. — Ne s'applique pas aux lieux où s'étalent les au-
tres marchandises en temps de foire.
Fièiréja, v. fréq. Acheter à la foire, y faire des em-
plettes; fréquenter les foires.— Crèse qu'éouraï bien fièiréja,
je crois que j'aurai fait un bon marché. Au fig. a bièn
fiètréja, il a eu un bon lot en mariage; il a rencontré une
femme de mérite.
Fièiro, s. f. Foire, grand marché public qui se tient à
des époques fixes. — C'étaient autrefois certains jours de
féries ou de fêtes patronales, pendant lesquels tous les droits
de lods, d'entrée, de péage étaient suspendus, ce qui attirait
la foule des acheteurs et partant celle des vendeurs. Faïre
fièiro, acheter à la foire. Té dounaraï ta fiètro, je V'achè-
terai un cadeau à la foire : les cadeaux à l'époque des foires,
comme les étrennes du jour de l'an, sont d'un usage ancien
qui commence à s’effacer ; on les fait aux enfants, aux amis
intimes, aux domestiques un peu anciens dans la maison.
Pér un éscu né véirés la fiètro, pour un écu vous en serez
quitte, ou vous pourrez vous satisfaire. À Alais, lorsqu'on
dit: Pagaraï à la fiéiro, cela signifie : je paierai à la foire
de Saint-Barthélemy, le 24 août, qui est la plus considé-
rable, la foire par excellence.
Dér. du lat. Feriæ mundinæ, m. sign. On n’a fait que
supprimer le dernier mot. ‘
Fièl, s. m. Feuillet d'un livre; feuille de papier. —Viro
fièl, mèstre Grabièl, passons à autre chose, à un autre dis-
cours : tournons la page : loc. prvb.
Dér. du lat. Folium, feuille.
Fièr, fièro, adj. Fier; superbe; orgueilleux; arrogant ;
hautain ; altier. — Faï dé soun fièr, il prend des airs.
Fièr, fièrto, adj. Grand; considérable; fort; d'une
fameuse dimension; bien étrange. — Aqud's uno fièrto
cdouso, voiià qui est bien étrange, bien extraordinaire ;
c'est une bien singulière affaire. Un fièr home, un terrible
homme. Un fièr malhur, un bien grand malheur. Una
fièrto"michantiso, une cruelle malice.
Cet adjectif ne s'emploie que de vant le substantif avec
lequel il s'accorde,
Dér. du lat. Ferus, fier, intrépide,
Fièramén, adv. Fièrement; avec orgueil ; beaucoup; en
grand nombre; très; fort. — És fléramén bo, c'est bien
bon, d'une très-grande bonté. Fièramén iuèn, excessive-
ment loin. Siès fèramén abéstè, tu es grandement sot,
ignare, grossier, impoli.
350 FIG
Figaré, s. m. Espèce de châtaignier hâtif.
Ce mot vient sans doute de Figo, figue, sans qu'on
puisse déterminer le motif de cette origine.
Figaréto, s. f. Fruit du Figaré, châtaigne hâtive, bonne,
fine, de moyenne grosseur. Elle tombe des premières; elle
est de vente facile, et se dépouille bien lorsqu'elle est
sèche.
Fignoula, v. Fignoler; faire le petit-maitre, faire le
beau; se pavaner; prendre des manières affectées, un ton
prétentieux.
Dér. de Fi, fin, avec la terminaison réduplicative et
augmentative.
Fignoulur, urdo, s. et adj. Petit-maitre; prétentieux,
affecté; beau-fils; muscadin populaire; élégant vulgaire.
Figo, s. f. Dim. Figuéto; péj. Figasso. Figue, fruit du
figuier. Au fig. nez d'homme ou de chien. — Dé figos pér
toun nas, des figues pour ton nez : ce n’est pas pour toi
que le four chauffe. C’est par contraction de cette phrase
qu'on dit interjectivement : Figos! Nenni!
Les variétés sont nombreuses : nous les indiquons sous
leur dénomination spéciale.
Dér. du lat. Ficus, figue.
Figo-lôouriôou, s. m. Loriot, Oriolus galbula, Linn.,
oiseau de l’ordre des Passereaux et de la fam. des Coni-
rostres. C'est par son plumage un de nos plus beaux
oiseaux : d'un jaune d’or; une tache entre le bec et l'œil,
les ailes et la queue noires, mais celle-ci terminée de jaune;
bec rougeâtre; iris d’un beau rouge; longueur 24 centi-
mètres. Sa chair est fort estimée, surtout à l’époque de
son second passage, dans les premiers jours de septembre.
Le loriot vit en cage, mais plus difficilement que le merle
et l'étourneau.
Ce nom de Léouridou, comme celui lat. Oriolus, que lui
donne la nomenclature scientifique, dér. du lat. Aureolus,
couleur d’or, à cause de la couleur de son plumage. Le
mot Figo a été ajouté en lang. parce que cet oiseau est
très-friand de ce fruit, et qu'on l'aperçoit souvent sur les
figuiers.
Figuièiro, s. f. Dim. Figuièiréto; péj. Figuièirasso.
Figuier, figuier commun, Ficus carica, Linn., arbre de la
fam. des Urticées, cultivé de temps immémorial. — Fi-
guièiro-Cabrôou, figuier sauvage, dont les fruits avortent
sans mûrir. La figuièirasso est une expression tout alai-
sienne pour désigner le fort d’Alais qui sert de prison. On
voyait, il y a quelques années encore, un immense figuier
sur le préau de la citadelle, au-dessus de la porte qu'on
appelait le petit poste : de là l'allusion. Mounta à la
figuièirasso, c'était simplement aller en prison.
Dér. du lat. Ficaria venu de Ficus.
Figuièirou, s. m. Arum, ou pied de veau, ou verge
d'Aaron, Arum vulgare, Linn., plante de la fam. des
Aroïdes. Sa racine est caustique quand elle est fraiche;
sèche, elle est un bon cordial. La colocase d'Égypte et le
chou caraïbe sont des variétés de l’arum, bonnes à manger.
FIO
Le nom de Figuiéïroù lui vient probablement de sa sève
laiteuse et caustique comme celle du figuier.
Figuro, s. f. Dim. Figuréto; péj. Figurasso. Figure;
visage; forme extérieure d'un corps.
Dér. du lat. Figura, m. sign.
Fil, s. m. Dim. Füé, fioù; péj. Fias. Fils; enfant mâle;
garçon. — Pichè-fil, petit-fils, le fils du fils ou de la fille,
par rapport à l’aïeul ou à l'aïeule. És un brave fl, c'est un
brave garçon.
Dér. du lat. Filius, m. sign.
Fila, v. Filer; décamper; cheminer; marcher vite.
Dér. du lat. Filum, fil, par métaphore dévider son fil,
fuir. Filer à la quenouille se dit Fiala ; mais l’'étymologie
est la même.
Fin, finto, adj. Extrème; jusqu'à la fin. — Ne s'em-
ploie guère que joint aux mots Foun ou Soun, Cimo où
Cimélo. Aou fin foun, au plus profond. A La finto cimo, à
la cime extrême. Fin-x-et un dignè, jusqu'au dernier
denier, sans rabattre une obole.
Dér. du lat. Finis. En ital. Fino, jusque.
Finablamén, adv. Finalement; en dernier résultat;
enfin ; à la fin.
Dér. du lat. Finalis, de Finis.
Finamén, «dv. Délicatement; tendrement; doucement.
— Se prend souvent ironiquement en antiphrase: Y-vai
finamén, émbé touto la banastado, il n’y met ni délicatesse,
ni finesse, ni précaution : il n’y va pas de main morte.
Dér. de Fi, fino.
Finanço, s. f. — Ce mot n’a rien de commun avec le
mot fr. Finance. C'est une espèce de jeu de mots pour dé-
signer la finesse, l’élégance de manières. Vaï sus la finanço,
il est vêtu comme un prince, comme les personnes de haut
rang, de haute position. Canta sus la finanço, chanter
comme les messieurs et les dames, chanter l'ariette et la
romance et non les airs et chansons populaires.
Dér. de Fi, fino.
Finèsso, s. f. Finesse ; astuce; ruse; artifice.
Fini, v. Finir; achever; terminer; cesser; prendre fin.
— Finissès, cessez, assez, laissez donc. — Voy. Fénà
Dér. du lat. Finire, de Finis.
Finissanço, s. f. Fin d’un livre, d’un écrit, d'une
scène.
Fino, finoto, adj. Finaud; rusé; qui finasse.
Finocho, s. m. Finasseur; madré compère ; rusé.
Dér. de Fi, fino.
Finto, s. f. Feinte; ruse; emploi d’un moyen apparent
pour masquer le but occulte qu’on poursuit. — Finto ca-
ludo, ruse de guerre à certains jeux d'enfants : traduit du
lat. Callida, rusée. Ana pér finto, employer la feinte, la
fourberie; ne pas aller droit son chemin.
Dér. du lat. Fingere, au supin Fictum.
Fi0, s. m. Dim. Fiouqué; augm. Fioucas. Feu, principe
de la lumière et de la chaleur; chaleur. — Faï fô, allume
le feu, fais du feu. Y-a fù éncd dé.…., il y a un incendie
FIO
chez... Fi dé joïo, dé Sén-Jan, feu de joie, de PO:
Y-a lou fid dou bla, le blé est d'une grande cherté. És él
qué y-a més lou fi, c'est lui qui a fait renchérir cette
marchandise.
Dér. du lat. Focus.
Fio, s. f. Dim. Füiéto, Fioù; péj. Fiasso. Fille; enfant,
personne du sexe féminin par rapport à ses père el mère ;
femme non mariée. — Bélo-fio, belle-fille, bru. Pichoto-
fïo, petite-fille, fille du fils ou de la fille par rapport à
l'aïeul ou à l'aïeule. Fio dé cambro, femme de chambre.
Comme nous l'avons fait à l'art. Fénno, nous réunissons
sous le mot Fio les principaux dictons que la malice, l’es-
prit d'observation, la sagesse aussi des âges passés leur a
consacrés. Ces petits proverbes n’ont point de date : ils ne
sont pas non plus particuliers à notre dialecte, ni même à
la langue d'Oc, qui n’y ont mis le plus souvent que le
tour et la vivacité de l'expression. On rencontre leurs
équivalents dans les autres langues et dans le français, qui
se pique cependant de rafliner la galanterie. Ils ne repré-
sentent donc pas la civilisation d'une époque ou d’un pays.
Mais, puisqu'ils se sont reproduits et qu'ils se conservent,
puisqu'ils sont encore souvent cités et appliqués, il sera
peut-être curieux de les rassembler à peu près tous dans
la mème page, et de les apprécier au moins au point de
vue de la linguistique, sans y mettre autrement de malice
ni de commentaire.
Proverbes relatifs aux filles.
— Bé vèn quan garçoü naï, s'uno fio vèn, bé s'én
vai.
.— Cièl pouméla, fio fardado, soun dé courto durado.
— Entre fios et capélans sabou pas ounté manjaran lus
— Éntre fios et éscoubios, pourièn pas êstre trop iuèn
dé l’oustäou.
— Fio, léntio et pan câou soun la ruino dé l’oustiou.
— Fio troutiëïro et fénéstrièiro raramén bono maïnajëïro.
— Fios d’hoste et figos dé cami, sé noum soun tastados
dé vèspré ou soun dé mati.
— Fio d’hoste et dé bouchè, agués pas gâou qué rés
noun té siè.
— Fio d'hoste et nd 8 cantoù soun pu lèou maduros qué
dé sésoù.
— Fio és coumo la roso, és bèlo quan-t-6s éscloso (pour
éncldouso).
— Fio maduro porto l’éfan à la cénturo.
— Fio pâou visto és dé réquisto. |
— Fio poulido sans habis, maï dé calignaïres qué dé
maris.
— Fio qu'agrado és mita maridado.
— Fio qué prén, sé vén.
— Fio qu'éscouto, vilo qué parlaménto, soun lèou présos,
— Fios qué soun à marida, michan cabâou à garda.
— Fio qué vôou êstre présado, ni visto, ni visilado,
FIO 351
— Fio sans crénto vôou pa'n brou dé ménto.
— Fio à marida, chival à véndre.
— Fio coumo és élévado, éstoupo coumo és fialado.
— Fio laïdo, bièn parado.
— Fio maïgro émbé dot gras, à cade jouïne-home plas.
— Fios et véires soun toujour én dangè.
— Las fios fou pas qué parlou qué lou fid noun siègue
acala.
— Ni trop fios, ni trop vignos.
— Nose, fio, castagno, sa râoubo cubris la magagno.
— Pan frés, prou fios et bos vèr boutou l'oustäou én
désèr.
— Päou vignos, pâou fios, et bé téngudos.
Dér. du lat. Filia, m. sign.
Fiolo, s. f. Fiole, petite bouteille de verre blanc.
Dér. du gr. Diéha, m. sign.
Fiolo, s. f. Filleule, celle dont on est le parrain ; œille-
ton ou filleule d’artichaut; drageon enraciné du talon d'une
plante qu'on arrache pour transplanter.
Dim. de Fio, dans l’un comme dans l’autre sens : l'œil-
leton étant à vrai dire la fille, la pupille de la souche-mère.
Fiou, s. m. Dim. Fioulé. Au plur. Fiousses. Fil; filasse
du chanvre, du lin, du coton, de la soie, de la laine, etc.,
tordue en brin délié et continu; tranchant d’un outil;
fibre de certaines plantes; courant d'eau; fil, cours, suite
de choses, d'une affaire, d’un discours. — Low fiou dé
l'aïgo, le fil, le cours de l'eau. Aquè vaï à fiou d’aïgo,
cette affaire marche que c'est un charme; elle va d’elle-
même comme le courant de la rivière. À trop lou fiou, il
est trop rusé, trop fin. Douna lou fiou, aiguiser, émoudre
un instrument tranchant, lui donner le morfil. Li coupè
lou fiou, il l'interrompit, il l'interloqua. Tèn pas qu'émb'un
fiou, cela ne tient qu'à un fil, à rien, à presque rien.
Dé fiou én aguïo, d’une chose, d’un propos à un autre, de
fil en aiguille.
Fiou dé richar, fil d'archal, de laiton, passé à la filière :
en lat. Auricalchus.
Fiou dé fère, fil de fer; fiou d'aran, fil d'archal.
Fiou dé vigno, vrilles où mains de la vigne.
Fiousses dé majoufo, trainasses des fraisiers, par où ils
se provignent d'eux-mêmes.
Dér. du lat. Filum, m. sign.
Fioucado, s. f. Feu de paille; feu passager et de courte
durée, tel que celui qu'on produit avec une bourrée. Au
fig. vivacité; mouvement passager de colère.
Dér. de Fi, feu.
Fioula, v. Sifller la linotte; boire à longs traits; siroter.
Ce mot nous vient peut-être de Fiolo, fiole, peut-être aussi
du gascon Fioula, sifler.
Fioun, s. m. Adresse; biais; habileté; manière de s'y
prendre. — À lou /ioun, il sait donner la tournure con-
venable.
Peut-être n'est-il qu'une corrupt. de Fiou dans une de
ses acceptions. ,
352 FLA
Fiqua, v. Placer dedans; faire entrer adroitement quel-
que chose. :
Dér. du lat. Figere, piquer, fixer.
Fisa, v. Fier; confier une chose à quelqu'un.
Sé fisa, avoir confiance; se reposer sur quelqu'un avec
sûreté. — Li fisarièi pas la quuïo dé moun ase, dit-on en
parlant d’un médicastre, d’un empirique : je ne lui con-
fierais pas la vie de mon chien. Mé /ise sus él, je me repose
sur lui en toute confiance.
Dér. du lat. Fisum, supin de Fidere, m. sign.
Fisable, ablo, adj. Qui mérite toute confiance; à qui
on peut se fier; personne süre et fidèle.
Fiso-té-li, phr. faite interjective. Ah! bien oui! va t'en
voir s'ils viennent, Jean ! Fiez-vous à lui, à cela.
Fissa, v. Fixer ses regards; fixer les yeux sur quel-
qu'un; piquer, enfoncer un aiguillon.
Dér. du lat. Fixus de Figere.
Fisso, s. f. Gardes de la houille ; pierre noire, le plus
souvent feuilletée comme l’ardoise, qui forme les assises
supérieures et inférieures des filons de charbon, et quel-
quefois se trouve intercalée dans le bloc lui-même. Elle
est de la nature du charbon; mais elle est peu poreuse et
brûle mal. Sauvages la nomme en fr. Fisse, mot qu’on ne
rencontre pas dans les dictionnaires, et c'est sans doute
un emprunt qu’il fait à l’idiome local; mais dans la lan-
gue parlée aux mines de houille même, on emploie le mot
Ficho, qui s’est francisé en Fiches, lesquels n’ont certai-
nement pas d'autre origine que le vrai languedocien Fisso,
plus ancien et meilleur, venant du lat. Fixa, plantée, en-
foncée.
Fissoü, s. m. Aiguillon d'abeille, de guèpe, de frelon.
Dér. du lat. Figere, piquer.
Fistra, v. Filtrer; distiller goutte à goutte; suinter;
s'écouler comme en passant par un filtre, où par une fuite
insensible.
Corrupt. du fr.
Fistre, interj. Juron. Fichtre! certes! peste! dame!
diable! — Ressemble fort à l'adoucissement d'un mot
grossier, un juron aussi de plus belle maille.
Fiun, s. m. La gent fille, la généralité des jeunes filles
d'un endroit donné. — Ne se prend qu'en mauvaise part,
c.-à-d. en style narquois.
Fla, flaquo, adj. Dim. Flaqué ; péj. Flaquas. Flasque;
mou; sans vigueur; lâche; sans force; indolent. — Dé
cars flaquos, Chairs flasques, molasses. Fla coumo la
bano d'un biôou, par antiphrase pour exprimer une vigueur
à toute épreuve. Fla coumo uno tèlo, coumo uno simousso,
sans force, mou comme de la chiffe.
Dér. du lat. Flaceus ou mieux Flaccidus, m. sign.
Flaïra, v. a. Flairer; sentir par l'odorat : au fig. pressentir,
prévoir; et v. n. Fleurer; avoir de l'odeur; exhaler une
odeur. — Flaïras aquél bouqué, sentez cette fleur. Agud
flaïro pas bo, cela ne sent pas bon.
Dér. du lat. Flagrare, m. sign.
FLA
Flaïre, s. m. Flair; odorat.
Flama, v. Flamber, produire ou donner de la flamme.—
Flamber, pris activement, ne se dit pas Flama, maïs bien
Uscla où Chabuscla. — Voy. c. m.
Flamado, s. f. Flamme; feu vif et clair, tel que celui
qu'on produit avec de la bourrée, des sarments, du menu
bois, etc. — Coïre à la flamado, faire rôtir à la flamme.
Flamba, v. Flamber, jeter de la flamme, des flammèches
Au fig. perdre; ruiner. — Souï flumba, je suis flambé,
perdu, ruiné.
Dér. du It. Flamma.
Flambéja, v. fréq. Flamboyer; jeter de la flamme, un
vif éclat.
Flaméja, v. fréq. Flamber, commencer à flamber; pro-
duire des flammes. Au fig. être irrité, enflammé; donner
une vive ardeur, causer une inflammation, — Moun dé
flaméjo, mon doigt est brülant d'irritation.
Flame-nôou, flame-novo, adj. Tout neuf, entière-
ment neuf; tout battant neuf; qui n’a jamais servi.
En esp. on dit dans le même sens Flamante; cela signi-
fie : qui est dans tout son lustre, qui flamboie de lustre et
de nouveauté.
Flamo, s. f. Dim. Flaméto; augm. Flamasso. Flamme,
partie subtile et lumineuse du feu.
Dér. du lat. Flamma, m. sign. En bas-breton, Flam.
Flan, s. m. Crème faite avec du lait et des œufs, qui a
la’ consistance d’une gelée.
Flana, v. Flaner; ne rien faire; se promener par dé-
sœuvrement; perdre son temps par les rues, en déambu-
lant. — C'est, avec un résultat identique, presque l'op-
posé de Duga, qui suppose la flanerie sans la locomotion.
Flandrin, drino, adj. Péj. Flandrinas. Flandrin; grand
eflanqué, paresseux et indolent. Plus usité au fém., grande
femme sans maintien, sans grâce; lâche; nonchalante; à
qui tout traine par indolence ou maladresse; une marie-
chiffon.
IL est probable que ce mot est dérivé de Flandre, et a
désigné autrefois ses habitants.
Flandrouio, s. f. Péj. Flandrouïasso. C'est un augm.
de Flandrino, avec une certaine aggravation de mauvaise
tenue.
Flanqua, v. Flanquer, donner un coup, jeter. — Lénitif
d’un mot plus énergique, comme Ficha.
Flanur, urdo, s. et adj. Flaneur; musard; paresseux ;
qui se promène par désœuvrement.
Dér. de Flana. ;
Fläougnar, gnardo, adj. Flagorneur; enjoleur; cajo-
leur; courtisan; patelin; chien-couchant.
Dér. du lat. Flare, souffler, enfler de vent, parce que
les flatteries enflent la vanité.
Fläougnardariès, s. f. plur. Flatterrie; flagornerie;
chatteries; patelinage.
Flâougnardéja, v. fréq. Flatter: faire des chatteries;
| flagorner. <
. Flâougnardije, s. m. Caractère flatteur, patelin, flagor-
neur, complimenteur doucereux.
Flâoujos, s. f. plur. Contes, sornettes dans un but de
flatterie, tels que les propos hyperboliques d'un séducteur.
Flâäousino, s. f. Coutil, toile croisée à larges raies, dont
on fait les lits de plume et les taies d'oreiller.
Ce mot doit sans doute son origine à une circonstance
anecdotique ou à quelque nom fr. de cette étofle, qui a
disparu.
Flaqua, v. Faiblir; fléchir de faiblesse; manquer de
force; mollir; devenir flasque. — Mas cambos mé flaquou,
les jambes faiblissent sous moi.
Dér. du lat. Flaccidus.
Flaquéja, v. fréq. Manquer de force, de courage; lâcher;
fléchir; flageoler, en parlant des jambes.
Flaquéto, s. f. Ne s'emploie qu'avec le v. Faïre, —
Faïre flaquéto, faiblir ; s’affaisser ; flageoler.
… Flaquije, s. m. Faiblesse; indolence; mollesse; lassitude.
Flaquo-lamo, pAr. faite. Lâche au travail; sans éner-
gie; nonchalant ; indolent; poltron ; lâche.
Flasquo, s. f. Poire à poudre, exclusivement.
* Flasquou, s. m. Flacon, bouteille de verre blanc à large
goulot terminé en entonnoir; génériquement, toute bouteille
à vin qui est en verre blanc. — Flasquou païa, flacon
clissé.
Dér. de la bass. lat. Flasceus ou Flasca, Flasco, n1. sign.
En ital. Fiasco.
Flassado, s. /. Couverture de laine. Au fig. homme
faible, sans énergie morale; poule-mouillée, qui, cédant à
toute pression, se laisse facilement aller et retourner. La
couverture aussi est essentiellement molle, flasque. — Flas-
sado vient en effet du lat. Flaccida, et son radical lang.
Fla a la même signification; — elle se laisse aisément
plier, rouler, tourner et retourner, et l’on comprend que,
par une juste comparaison, pour l’homme en question l'on
dise : és uno flassado, lorsque c’est son caractère habituel,
et a fa la flassado, lorsqu'il a fait comme elle dans une
occasion particulière.
Dans la bass. lat. Flassada ou Flasciata, m. sign., con-
traction de Filassata. En esp. Fracata.
Flata, v. Flatter; caresser de la main; traiter avec dou-
ceur, et non dire des flatteries. — Flata l'aïgo, ne pas trop
contrarier le courant d’une rivière en faisant des digues ou
fascines pour la réparation des propriétés riveraines. Flata
jo, jouer lâchement, sans application : ce que font les
fripons pour allécher leurs adversaires. — Cependant on
le dit bien dans un certain sens de dissimuler, leurrer;
vanter : Vous ou flate pas, je ne vous le dissimule point.
. Sé flata, se dorlotter, se choyer à la moindre incommo-
dité.
Dér. peut-être du lat. Flare, Flatare, souffler, donner
du vent.
Flèoume, s. m. Flegme, impassibilité; lenteur; indo-
lence. — Ne s'emploie qu'au fig.
FLO 353
Flèoumo, s. {. Flegme, pituite; glaire; humeur qui est
qualifiée de froide, et qui, dit-on, joue un grand rôle dans
l'économie animale.
Les deux mots m. et f. ont la même origine du lat,
Phlegma, du gr. Péyuæ, piluite, parce qu'on croit que
l'abondance de cetie humeur est la cause du tempérament
flegmatique.
Fléquo, s. f. Paquet de chanvre ou de laine cardée, tel
qu'il est posé sur la quenouille: boucle, mèche de cheveux.
Flétoù, s. m. Boulet d'un cheval : la jointure qui sépare
le tibia du paturon.
Dér. du lat. Flectere, plier, tourner.
Fli-fla, s. m. Terme de danse, jeté-battu.
Flin-flan ! interj. Flic-flac : onomatopée pour imiter le
bruit d’un soufflet qu'on applique sur l'une et l'autre joue.
Flisquo-flasquo, interj. Augm. du mot précédent, plus
énergique et plus imitatif que lui. — S'applique encore au
bruit que fait un liquide secoué dans un vase à moitié
plein, des vagues sur le rivage.
Flo, s. m. Dim. Flouque; augm. Flouquas. Morceau,
lopin, pièce de quoi que ce soil; flocon de soie ou de laine;
houppe de bonnet, bouffette. — Au moyen-àge, c'était un
luxe d'orner les équipages et les haquenées de main d'un
nombre infini de houppes, surtout en Italie chez les car-
dinaux et les princes de l'Église, en très grande cérémonie :
de là l'expression italiecne in fochi, qui est passée telle
quelle dans le fr.
On appelle particulièrement Flo, la houppe de laine
qu'on laisse sur les plus beaux moutons et les agneaux
lors de la tonte et qu'on teint en rouge ou en vert: c'est
le luxe des bergers. — fou fou émporto lou flo, la couture
emporte ou déchire la pièce. Aquélo éstofo s'én vaï à bèles
fes, cette étoffe s'en va par loques. Un flo de pan, un mor-
ceau de pain.
Très-certainement le primitif s'écrivait Floc, conservé
encore dans quelques dialectes, que le nôtre, qui a horreur
du € final dans la prononciation, ne peut admettre que
l'étymologie indique et qui se retrouve d'ailleurs dans les
composés.
Dér. du lat. Floccus, flocon de laine.
Fléousouno, s. f. Espèce de tarte à la crème, qui n'est
autre que du fromage frais de ceux qui sont nommés Toumo,
qu'on renferme dans une légère pate de farine et qu'on fait
cuire au four sans sucre.
C'est un mets et un nom qui appartiennent à la Lozère
et à l'Aveyron.
Floto, s. /. Dim. Floutéto. Grand écheveau de soie écrue
telle qu'elle est dévidée à la filature sur la roue du tour à
filer; poignée de chanvre prignée; mèche de cheveux.
Dér. de la bass. lat. Flottu, m. sign., pris du lat. Fluctus,
flot, parce que la Floto est ondée lorsqu'elle est libre,
comme les flots de la mer.
Flou,s. f. Dim. Flouréto; péj. Flovrasso. Fleur : terme
générique comme en fr. et qui prend la plupart de ses ac-
45.
354 FLO
éeptions figurées. Cependant lorsqu'il s'agit d'une indivi-
dualité du genre des fleurs, on dit plutôt un Douqué
(V.c. m.): un jardi plé dé bouqués, un jardin, plein de
fleurs. Coumo apélas aquél bouqué? Comment nommez-
Vous cette fleur ? — Au fig. la fleur; Ja crème; la partie
H plus précieuse d'un tout. La flou dé la pruno, le duvet,
la petite poussière qui se forme sur la prune à l'état na-
turel, et qui se déflore au contact.
Dér du sat. Flos, m. sign.
Floundéja, ». fréq. Gambiller; jouer des jambes, en
ayant le corps renversé sur le dos, comme font les enfants
au maillot, lorsqu'on leur enlève momentanément les en-
traves de leurs langes. — Se dit aussi : léva las floundos,
jouga dé las floundos ; tout à fait synonymes.
Floundo, s. f. Fronde à lancer des pierres. — Longtemps
les enfants d’Alais se sont battus à la fronde, et il se faisait
ainsi des campagnes fort curieuses, souvent très-savantes
en stratégie, quelquefois sanglantes. Uno floundo dé'quatre,
une fronde tressée à quatré brins, était alors la plus re-
cherchée.
Dér. du lat. Fünda, m. Sign.
Flouqua, +. Garnir de houppes; orner, parer de houp-
pes ; tondre un mouton en lui laissant des houppes de laine.
Dér. de Flo.
Flouquaran, arando, adj. Péj. Flouquarandas. Très-
ÿrand, très-élevé, mais sans tournure, sans grâces.
Dér. de Flo, c.-à-d. un très-grand morceau d’homme :
tune très-grande taille n'étant pas toujours le type dé la
grâce.
Ce mot peut venir aussi du n. pr. Fulérand, qui est
celui d'un saint évêque de Lodève, patron de l’église de
cette ville. Il n’est pas impossible qu'à Montpellier on
désignät les Lodéviens sous le nom de Fulcrans, comme
épithète ironique : d’où ce sobriquet aurait été formé.
Flouquariè, s. f. Loquettes, crottins ou flocons de rebut
d’une toison, qui ne font pas corps avec la toison entière :
c’est la laine du ventre et des cuisses, toujours chargée de
crottins.
Dér. de Flo, flocon de laine.
Flouquéja, ». fréq. Couper menu, en petits morceaux ;
morceler; déchiqueter.
Floura, ado, adj. Fleuri; vermeil; velouté comme un
fruit qui a conservé son duvet, sa fleur. — És floura, il à
un teint de lys et de rose, comme on disait.
Flourado, s. f. Premier choix; fleur d'une marchandise
quelconque; élite de ce qu’il y a de meilleur, de plus fin,
de plus délicat. — Y-an léva la flourado, on a déjà enlevé
la fleur, ce qui avait le plus de prix. Aï prés pas qué la
fourado dé sous moutoùs, j'ai acheté tous ses plus beaux
moutons.
Flouré, s. m. Padou, ruban de fil ou de coton. — Voy.
Cabiè.
Flouréto, s. . Dim. de Flou, Petite fleur ; fleurette. —
Voy. Flou.
|
FOL
Flouri, ». Fleurir; être en flou: pousser des fau
orner de fleurs.
Sé flouri, moisir, chancir. — Cette expression rend
d'une manière plus explicite que le fr. cette opération de
la décomposition des corps; la moisissure indique l'efflo-
rescence qui se forme en poussière blanche et ressemble
à une végétation; dans tous les cas, elle à beaucoup de
rapport avec celle de toutes les espèces de fungus, qui
n’est aussi qu'une efflorescence causée par l'humidité et un
commencement de décomposition dans les corps ligneux.
Flourido, s. f. Fléuraison; saison, époque de la forma-
tion des fleurs.
Flouridun, s. m. Moisissure, chancissure.
Flourië, s. m. Charrier; drap de toile grossière qu'on
étend sur le linge rangé dans le cuvier d’une lessive, et
qu'on charge de cendres pour séparer le linge de leur
contact immédiat.
Flouroun, s. "”. Furoncle, clou, flegmon enflammé,
abcès très-douloureux.
Flurdalis, s. f. Fleur de lis, considérée comme armes
de France. Altération en un seul mot de Flou dé lis.
Flurdalisto ou Frâoudulisto, s. m. Féodiste, qui exer-
çait la profssion, aujourd’hui perdue, de lire, de déchiffrer,
de traduire, d'expliquer les vieux titres, les anciens actes.
La variante, dérivant de Fréaudo, est inspirée par une sorte
de jeu de mots avec le premier qui n’est qu'une corr. du fr.
Flus, flusso, adj. Fil qui.n'est point tors. — Sédo
flusso, soie plate, non tordue.
Dér. du lat. Fluæus, mou, lâche.
Fluté, s. m. Dim. de Fluto. Flageolet; octavin.
Fluto, s. f. Flüte, instrument de’ musique à vent, en
forme de tuyau.
Foço, adv. Beaucoup; en grande quantité; en grand
nombre ; extrèmement.
Contraction de Forço. —V. ©. m.
Fogo, s. f. Fougue; presse; ardeur ; empressement. —
La fogo das magnas, l'époque où les vers-à-soie occupent
le plus activement, c.-à-d. quand ils sont en fraise. La
fogo dâou mâou, au fort de la maladie. Laïssa passa la
fogo, laisser ralentir le prenrier empressement.
Dér. du lat. Focus, feu, foyer.
Foire, v. Marer, houer, fouir la terre, la remuer à la mare
ou à la houe et non à Ja bèche, luché; car on dit alors luchéta.
Au fig. prendre quelqu'un dans tous les sens, le tourner et
le retourner pour le décider à quelque chose. — Aimariès
maï ana foire, j'aimerais mieux bècher avec les dents.
Dér. du lat. Fodire, fouir, bècher.
Fol, folo, adj. Dim. Foulé; augm. Foulas. Fou; en-
ragé; atteint de la rage; insensé, qui fait des folies. — Un
chi fol, un chien enragé. Un foulas n'est point un fou,
mais un écervelé; les femmes appellent Foulassas, celui
qui se porte envers elles à quelques privautés dont elles
aiment mieux rire que se fâcher.
Dér. du lat. Follis, ballon à vent.
FOR
Fon,s. f. Dim. Fountéto. Fontaine, source; eau yive
qui sort naturellement de la terre ou d'un rocher.
… Les dénominations de lieux et ensuite de personnes sont
très-nombreuses, dans lesquelles est entré ce mot, soit
simple avec la forme latine au nomin. précédé ou non de
l'article, ou celle de l'accus. marquée du T, soit com-
posée et s'ailiant à des situations caractérisées par l'ad-
jeetif. JL en est résulté des variétés dont nous indiquerons
quelques-unes des principales, et qui, pour ne former
qu'un seul mot, n'en laissent pas moins apercevoir leur
origine. — Fons, commune de Saint-Mamert; Fons-sur-
Lussan; Las Fons, commune de Molières; la Fons, ruis-
_seau, à Saint-Julien de Valgalgues ; à la Salle; et La Font,
dans les communes d’Arre, de Cambo, de Laval, de Rogues;
La Fous, près le pont du Gard; sans compter les noms
propres d'hommes : Lafont, Fontanes, Fontaine, La Fon-
taine; puis, en composition, avec ou sans séparation,
Fountarano, ruisseau, Fons arenæ; Fountarécho, Fonta-
-rèche, Fons erectus, fontaine élevée; Fountâoubo, Fon-
taube, Fons albus; Fon-bouïén, Font-Bouillant, Fons
ebulliens; Fon-cdoudo, Font-chaude, Fons calidus; Foun-
cluso, Font-Cluze, Fons Fclausus; oncouvèrto, Font-Cou-
verte, Fons coopertus ; Founfrédo, Fonfrède, Fons frigidus;
Founfouïouso, Font-Fouillouse, Fons foliosus, feuillue,
.ombragée; Founmagno, Fonmagne, Fons magnus ; Fonvivo
Fonvive, Fons vivus, etc,
Fôou, v. impers. 3me pers. indic. prés. de Foudre. Il
faut. — Fou dire, il faut dire.
Füou est aussi la Are pers. indic. prés. du v. Faïre. Je
fais. — FÜou pas qu'ana et véni, je ne fais qu'alleret venir.
. Fôoure, s. m. Provisions; hardes; bagage, ustensiles de
ménage, d'une maison; Je nécessaire, ce qu'il faut. —
ÆRécata soun féoure, soigner, renfermer ses provisions, ses
hardes.
Dér. du v. Fondre ou Foure, falloir.
For, s. m. Fort; citadelle; lieu fortifié. — A Alais, où
l'ancienne citadelle a été convertie en maison d'arrêt et de
justice, il signifie prison. Mounta dou for, mettre en pri-
son, parce que le fort est élevé au-dessus de la ville.
Dér. du lat. Fortis, fort.
For, forto, adj. Dim. Fourté; péj. Fourtas. Fort;
robuste; qui a de la force, de la consistance; de haut-
goût, àcre, piquant; extraordinaire. —Se prend quelquefois
substant., le fort, la partie principale, le plus haut degré.
— Dé vi for, du vin tournant à l’aigre. Aquélo cébo és
forto, cet oignon est d'un goût fort et piquant. dan for dé
«l'éstiou, au plus fort de l'été.
Sé faïre for, se prévaloir; s'engager à; cautionner; ré-
pondre pour quelqu'un. — Sé faï for qu'és cousi d'un t4ou,
il se prévaut de la parenté d'un tel.
Forço,. s. [. Force du corps; vigueur ; énergie; solidité ;
puissance. — Forgo mé ségu, force me fut, je fus bien
forcé de. Forgo dé né faïre, à force d'en faire. Fous séra
\forgo, force vous sera.
à:
FOU | 355
Pér forço, adv. Forcëment, par force, par contrainte. —
Pér forgo lous pénjou, par force on les pend; que voulez-
vous y faire?
Dans la bass. lat. Fortia ou Forcia, m. sign.
Forço, adv. cu Foço. Beaucoup; extrèmement; en
gr and nembre; en grande quantité. — Voy. Fogo.
Forjo, s. f. Dim. Fourjelo; péj. Fourjasso. Forge, lieu
où l'on fond le fer; atelier de forgeron.
Dér. de la bass. lat. Forgia, m. sign., venant de Fabrica.
Formo, s. {. Dim. Fourmeto; pej. Fourmasso. Forme,
configuration des corps; manière d'être d'une chose; forme
de soulier, morceau de bois façonné de manière à repré-
senter le pied; embouchoir de bottes.
Dér. du lat. Forma, mn. sign.
Foro, adv. Dehors; hors d'ici; loin d'ici, — Ou vése
d'aïcin foro, je vois cela d'ici. Y-anarén d'aïcin [oro,
nous irons en sortant de là et sans désemparer. D'oïci'n
foro, de ce pas ci. D'hiucï én foro, à partir de ce jour.
Aquô's foro man, cela est hors de portée, en dehors de la
main. Foro visto, hors de vue.
Dér. du lat. Foràs, dehors.
Fos, Fosso; au plur. Fosses, Fossos, part. pass. du
v. Foire. Labouré, creusé, foui. — Foy. Fotre.
Fosso, s. f. Fosse, lieu creusé das la terre pour ense-
velir un corps mort. — Nous n'eurcgistrons ce mot que
par souvenir d'un prvb. cité à propos des femmes : il
n'est pas de notre dialecte, qui dit Cros ou Trdou; mais il
est reçu en provençal, d'où nous vient aussi le pryb.
Dér. du lat. Fossa, m. sign.
Fouchol! interj. Dim. Fouchéto! Peste! Diantre! Foin!
Malpeste! — Juron qui est aussi un déguisement anodin.
Fouchouira, v. Ravauder; mettre sens dessus dessous,
sans but, sans nécessité ou à contre-temps.
Foudre ou Foure, v. imp. irrég. Falloir, être de néces-
sité, d'obligation. — Foudre mouri, ètre obligé de mourir.
Foué, s. m. Fouet, lauières de cuir tressées et attachées
à un baton pour fouetter; verges à châtier. -— Vaï coumo
un foué, il va comme le vent; il tait vite et bien. Faïre
péta soun foué, faire claquer son fouet, au prop. et au fig.
faire l'important; faire grand brut.
Dér. peut-être du lat. Fagus, qui a donné le vrai mot
Fouteau, Fau, hêtre, parce que c'etait, dans l'origine, des
verges ou houssines de Lètre dent on se servait pour fouet.
Fouétéja, v. fréq. Jouer du fouet, le faire cliquer sou-
vent; agir plus du fouet que de la voix pour conduire un
atelage.
Fougasso, s. f. Dim. Fougassé/o; augm. Fougassasso.
Fouace; gateau; galette; espèce de pain trés-aplati, cuit au
four; morceau de pâte très-mince et découpé en différentes
_figures qu'on place dans le four avant d'y mettre le yain,
afin d'en éprouver.le degré de chaleur : pâte mal cuite,
| indigeste et peu économique. Aussi le prvb. dit il: Fénno
| fougassièiro, péouro méinajïre, lenime qui fait des ga-
lettes est une pauvre femme de ménage. Par ext. Fougasso
356 FOU
s'applique à toute sorte de gâteaux au beurre, au gras et
au sucre. — Fougasso dé rèis, gâteau des Roïs. Dé la
pasto dé moun coumpaïre, bono fougasso à moun fiôou,
prvb., du cuir d'autrui large courroie. Vous réndrat pan
pér fougasso, je vous rendrai la pareille avec usure. Futre
dé fougasso, en terme d'agriculture, effleurer seulement la
terre avec la houe, ou en laisser une certaine longueur
sans la fouiller, et la recouvrir ensuite avec de la terre
remuée pour qu’il n’y paraisse pas. Faïre fougasso, c'est
éprouver une averse de pluie perdant les travaux de l'aire,
après qu'on a foulé le blé et avant que le grain soit nettoyé.
Dér. du lat. Focus, foyer, parce que, dans le principe,
cette galette se cuisait sous la cendre.
Fougna, v. Bouder; faire la moue à quelqu'un; être
de mauvaise humeur. — On dit d'une souche, d'un arbre,
Fougno, il boude, lorsque, sans être mort, sa sève est
engourdie, et qu'il pousse des bourgeons beaucoup plus
tard que les autres de son espèce : il se dit également d’une
ente paresseuse.
Astruc prétend que le mot vient du celtique.
Fougnadisso, s. f. Bouderie; mauvaise humeur appa-
rente; mécontentement manifesté.
Fouguaïre, aïro, a/j. Boudeur; renfrogné; qui fait la
moue; qui fait mauvaise mine.
Fougno, s. f. Mine boudeuse; grise mine; moue. —
Faï la fougno, il ou elle me regarde de mauvais œil; me
boude.
Fougu, udo, part. pass. du v. Éstre, et du v. Foudre.
Fouguè, 3m pers. sing. prété. défini du v. Éstre. Il ou
elle fut.
Fouguë, v. impers. prêt. déf. du v. Foudre. I fallut.
Fouguéirou, s. m. Foyer d’une cheminée; âtre; four-
neau.
Dér. du lat. Focus, dont 1l est un dim.
Fouguéja, v. fréq. Cuire, ressentir une cuisson, des
élancements de douleur; éprouver ou causer une douleur
âpre, aiguë, brülante. — Ma gorjo mé fouguéjo, j'ai la
bouche en feu.
Dér. du lat. Focus ou de Fogo.
Foui, fouisso, adj. Trouble, louche. — Voy. Fous.
Fouia, v. Fouler; écraser; enlever la fraicheur et la
fleur d'un fruit délicat en le maniant ou le transportant
sans précaution, comme les raisins, les fraises, les fruits
très-mürs. — Ne se dit que d’un acte involontaire : lors-
qu’on veut parler d’un frait qu'on écrase à dessein, on se
sert de Ésfouia — V. c. m.
Dér. de la bass. lat. Fullare, fouler, fait du lat. clas-
sique Fullo, foulon.
Fouiè, s. f. Folie; démence; extravagance; passion
excessive. — Faïre dé fowiès, faire des folies, des extra-
vagances. Éstre én foutè, être en chaleur, en rut, en par-
lant de certains animaux dans la saison de leurs amours.
És bé fout), c'est peine perdue, c’est inutile.
Dér. de la bass. lat. Follicia, fait de Follis.
FOU
Fouiè, 3m pers. sing. de l’imp. du v. Foudre. Il fallait,
Fouiétéja, v. fr. Chopiner; siroter; hanter les cabarets,
les bouchons.
Dér. de Fouïéto.
Fouiétéjaire, airo, adj. Ivrogne; qui aime à gobelotter;
qui aime et fréquente les tavernes.
Fouïéto, s. f. La quatrième partie d’une pinte du pays,
qui équivalait à la double pinte de Paris. — La fouïéto
répond à la chopine de Paris et contient en mesure métri-
que de litre 0,48.
Ce mot est emprunté au fr. Feuillette, qui est aussi une
mesure de capacité du vin, quoique les deux mesures
soient fort différentes d'importance : cette dernière conte-
nant 444 pintes de Paris, soit 438 litres 25.
Fouiïna, v. S'enfuir làächement; reculer devant un dan-
ger, une menace; fuir; s’esquiver. — Fovwiner est pop.
en fr., mais l’Académie l’enregistrera.
Le mot pourrait avoir été formé du lat. Fugere; mais
il est plus probable qu’il descend de Fouine, imiter la
fouine.
Fouio-mèrdo, s. m. Escarbot, scarabée stercoraire,
pillulaire, fouille-merde, Scarabœus pillularis, Linn., in-
secte de l’ordre des Coléoptères, et de la fam. des Lamel-
licornes. — On connait ce scarabée, assez désigné par son
nom, qui fait de si singulières boulettes pour loger sa pro-
géniture, et qui, dit-on, déteste la rose, dont l'odeur le fait
mourir. Il est vrai de dire cependant que si son goût est
certain, son antipathie l’est beaucoup moins.
Fouira, v. — Voy. Ésfouïra, s'ésfouira.
Fouiralado, s. f. Produit d’une décharge de ventre
liquide et en diarrhée.
Fouiro, s. /. Foire, diarrhée; cours de ventre; selles
fréquentes et liquides. — On dit d’une personne malingre
et d’une santé chancelante : À toujour pét où fouiro. On
emploie la même expression au fig. en parlant d'une per-
sonne qui a toujours quelque mal en poche, un faux: pré-
texte pour se dispenser d’une corvée.
Dér. du lat. Foria, m. sign.
Fouïita, ado, adj. Terme de tailleur et de couturière,
étriqué; affamé; qui manque d’ampleur.
Fouïita, v. Fouetter; battre de verges; fesser ; donner le
fouet. Au fig. agiter, purifier. — Fouita uno bastisso,
crépir avec un balai. Aqud fouïlo lou sang, cela fouette et
purifie le sang.
Dér. de Foué.
Fouïitado, s. /. Coups de fouet; correction à coups de
fouet ou de verges; fessée. — Ne s'applique guère qu'aux
enfants.
Fouitéja, v. fréq. de Fouïta. Fustiger; fouetter rude-
ment et à plusieurs reprises.
Fouito, s. f. Le même que Fouïtado, avec un peu de
lénitif peut-être. — Voy. €. m.
Foulas, asso, adj. Augm. de Fol. Folâtre; qui aime
à folètrer; plaisant grossier, Jlourdaud et maussade, en
s ns Ci JS
:
L uù à s 2h
|
.
FOU
mauvaise part; mais suivant le ton, badin, — Qué siès
foulas ! que tu es sot!
Foulastrado, s. /. Balourdise; bêtise; ânerie: incar-
tade; trait d’étourderie, de folie.
Foulastréja, v. fréq. Folâtrer; batifoler. — Voy. Fou-
digdoudeja .
Foulastrije, s. /. Étourderie; habitude de folâtrer, de
batifoler .
Foulé, s. m. Tourbillon de vent; petite trombe d'air
qui tourne en volute et enlève le sable, la -poussière et les
feuilles sèches.
Dér. de Fo, dans le même sens que esprit-follet, feu-
follet, etc.
Fouligâou, âoudo, adj. Folàtre; écervelé; étourdi ;
volage; enjoué.
Dér. du lat. Volaticus, léger, insouciant : permutation
de Ven F, assez fréquente.
Fouligâäoudariè, s. f. Jeux folâtres ; acte d'étourderie.
Fouligäoudas, asso, adj. Augm. de Fouligäou. Le
superlatif de Folâtre; volage; enjoué; souvent flatteur,
surtout adressé à un jeune homme par une femme qui ne
hait pas les folies.
Fouligâäoudéja, v. fréq. Faire le fou; sauter; gambiller;
foltrer ; batifoler.
Fouligäoudije, s. f. Étourderie; folàtreric; caractère
léger et turbulent.
Foumme, interj. Juron qui ressemble à Fichtre! — C'est
encore un voile sur le mot grossier.
Foun, s. m. Fond; la partie la plus basse d'une chose
creuse; mais dans cette acception on dit mieux Soun
{V. c. m.). Fond ou enfonçare d'un tonneau, d'une cuve;
ampleur d’une robe, d'un habit; fond de terre; propriété;
nature du terrain. — À four, adv., à fond, en allant jus-
qu’au fond. Aqui lou foun dé l'afaïre, voilà le point im-
portant de la question, le fond de l'affaire. Aqud's dé bon
foun, c'est du terrain excellent. Dé bé foun, du bien fond,
un fond de terre. Sièt din moun foun, je suis chez moi,
dans ma propriété.
Dér. du lat. Fundus, m. sign.
Foun, 3®e pers. sing. indic. prés. du v. Foundre. I ou
elle fond.
Founça, ado, adj. De couleur foncée, sombre, chargée.
Founça, v. Creuser profondément; foncer, mettre un
fond à un tonneau, le démonter pour reformer le jable ou
réparer les douves, où seulement pour le nettoyer et res-
serrer les cercles; donner, mettre des fonds, contribuer de
son argent; débourser.
Dér. de Foun. )
Founciè, cièiro, a/j. Propriétaire foncier ou d'immeu-
bles. — Ne s'emploie guère qu'en parlant d'une femme
mariée dont la fortune ne consiste pas en constitutions
dotales, mais en biens fonds, en immeubles, ou d’une
rente, d'une pension. L yep
- Dér. de Foun. s Re
FOU
Founciou, s. f. Fonction; profit; usage; volume, —
Aquél pan fui foçgo founciou, ce pain est très-nourrissant :
par sa bonté et ses qualités nutritives il épargne beaucoup
d’autres aliments. Moun cadis m'a bièn fa founciou, ce
cadis m'a fait un long usage. L'oli dé peis fai maï dé foun-
ciou qué l'oli d'én bas, l'huile de pays foisonne, se gonfle
davantage dans la poële que l'huile du pays bas.
Empr. au fr. :
Founçuro, s. f. Enfonçure d’une futaille; ensemble des
pièces qui en composent le fond; mairin, bois scié et des-
tiné aux enfonçures de futaille.
Founda, v. Faire fond: compter sur; se fier; donner de
l'ampleur à un vêtement. — On po pas li founda, on ne
peut pas faire du fond sur lui, compter sur lui. Té foundes
pas aqut, ne te fie pas à cela, ne compte pas là-dessus.
Foundaménta, ». Creuser, établir, bâtir les fondements
d'une construction en maçonnerie, lui donner un bon pied.
Foundaménto, s. f. Fondement d'une bâtisse, la partie
qui est bâlie sous terre en assises sur la rue.
Dér. du lat. Fundamentum, m. sign.
Foundre, ». Fondre ; faire fondre; mettre en fusion;
faire liquéfier. — Au fig. ruiner, se ruiner; démolir, dé-
truire; dissiper. — À tout foundu, il s'est ruiné, il a tout
dévoré. À foundu soun bure, il a mangé son avoir.
Sé foundre, fondre; se liquéfier; se consumer. — La
candèlo sé foun, la chandelle fond.
Foundre, interj. Juron édulcoré et mal déguisé du mot
grossier F.,.
Foundu, udo, part. pass. du v. Foundre. Fondu.
Foundudo, s. /. Fondue, œufs brouillés, préparation
culinaire.
Foundur, s. m. Fondeur d’étain; potier ambulant, qui
refond les cuillers d’étain. Par ext. et par un jeu de mots
ironique on appelle ainsi celui qui mange son blé en herbe,
qui fond son beurre.
Fountagnè, s. m. Fontainier; qui cherche ou qui creuse
les sources; particulièrement, cette espèce d’empiriques
qui courent les campagnes avec la prétention de découvrir
les sources cachées à l'aide d’une branche fourchue de
coudrier ou de figuier sauvage. Ils ont, à l'appui de leur
sortilége de baguette divinatoire, une sorte de théorie bà-
tarde sur les courants magnétiques qui n’a rien de com-
mun avec la belle théorie géologique de l'abbé Paramelle.
Dér. de Fon.
Fountaniou, s. m. n. pr. d'homme. Fontanieu. — Ce
mot porte évidemment la marque diminutive du radical
Fon, de mème que Fontenelle, Fontenille, Fontettes, Fon-
tanvuille, qui indiquent tous une petite fontaine. Ils ap-
partiennent à la mème famille que lesn.pr., communs dans
notre pays, de Fountano, Fontanes; Fountagna, Fontagnac;
Founsanjo, Fonsange autrefois Fonsanche; Fontaine;
Fountanés, Fontanès; Fountaré, Fontaret; Fountanaï,
Fontenay; Fontézy ; elc., tous formés des mêmes éléments
primitifs, dont les conditions, les situations diverses ont
357
358 FOU
amené les variétés de désinences. Ce sont de nouveaux
exemples à joindre à l'étude des noms, de l'action et de la
transformation des suffixes.
Founzâou, s. ». Dim. Founzalé; augm. Founsalas.
Fond, lieu bas; bas-fond; fond d'un vallon; terre plus
basse que les autres.
Augm. de Founzo.
Founzélu, udo, adj. Creux; profond; ventru; qui a
une certaine profondeur, en parlant d'un ustensile, d’un
engin. — Sièto founzéludo où erouséludo, assiette creuse,
assiette à soupe.
Dim. de Founzu, qui a plus d'extension.
Founzio, s. f. Eflondrilles du vin ou de tout autre
liquide; lie, mare qui tombe et reste au fond d’un vase;
sédiment, dépôt d’une liqueur.
Founzo, s. f. Bas-fond; terrain creux, plus bas que
ceux qui l’avoisinent. — Voy. Founzdou.
Founzu, udo, adj. Creux, profond, qui a de da profon-
deur. — Se dit génériquement de tout ce qui a un fond
bas et profond. — Voy. Founzélu.
Fouquo, s. f. Fouique, Morelle, Foulque, Mairoule, Fu-
tica atra, Linn. Cet oiseau est aqualique, quoiqu'il n’ait pas
les pieds entièrement palmés; il est sédentaire et très-abon-
dant dans les étangs de notre département. On peut le
conserver en domesticité dans une basse-cour. Sa chair
est, à ce qu'on dit, réputée aliment maigre par les Canons.
On en fait des chasses vraiment royales, où il s’en tue
quelquefois au-delà de deux mille dans une journée. Ces
expéditions renommées s'appellent chasse à la macreuse,
mais à tort: la macreuse, canard macreuse, Cinas nigra,
Linn., est un oiseau différent, rare dans notre pays, de
dix-huit pouces de longueur, ayant le bec à sa base sur-
monté d'une protubérance arrondie, et dont tout le plu-
mage sans exception est d’un beau noir profond et velouté.
La Foulque, au contraire, plus petite, a la tête et le cou
d'un beau noir, la queue et le dessus du corps ardoisés, le
dessous d’un cendré verdâtre avec une plaque blanche
sur le front. La Foulque ne doit pas être non plus confon-
due avec la Poule-d'eau. — Voy. Poulo-d'aïgo.
Dér. du dat. Fultigo, noir de fumée.
Four, s. m. Dim. Fourné; augm. Fournas. Fourà pain;
lieu voûté en rond et ouvert par devant, où l’on fait cuire
le pain. — La gorjo ddou four, la bouche, l'entrée du
four. Lou fandâou dâou four, la tablette, l'autel du four,
la porte-bouchoir ; c'est la pierre qui en forme le seuil et
sur laquelle s'appuie la pelle lorsqu'on enfourne le pain.
On dit d’une personne très-grosse : Sémblo un four; le
point de similitude n’est pas facile à saisir, si ce n’est par
rapport à la rotondité de d’une et de l’autre forme.
Four d’acâou, four à chaux. Four à briquo, à patè, four
à briques, à tuiles, etc.
Dér. du lat. Furnus, m. sign.
Foura ou Foudra, 3° pers. sing. fut. du v. impers.
Roure où Foudre. M faudra.
FOU
Fourbia, ». Éviter; esquiver; changer de route, de
direction pour éviter un danger, un importun. — Fourbia
quéouquus, éviler quelqu'un, esquiver sa rencontre. Fa
fourbia toun ase, détourne ton âne.
Formé du lat. Foràs viam, hors la route, qui a donné
paissance aussi au fr. Fourvoyer.
Fourça, ». Forcer; contraindre; appuyer avec force;
employer ses forces à un ouvrage. — Fourça uno cléou,
tordre les dents d'une clé. Un outis fourça, un outil quel-
conque en fer qui a été faussé par un effort.
Dér. de Forço.
Fourcado. — Voy. Fourquado, et de mème pour les
autres mots où se trouve le C dur, exprimé par Qu.
Fourçamén, adv. Forcément ; par force; obligatoirement.
Fourchétado, s. f. Quantité d'aliments qu'on peut
prendre en une fois avec la fourchette,
Fourchéto,s /. Fourchette, ustensile de table, en forme
de petite fourche. |
Dim. de Fourquo.
Fourçu, udo, adj. Taillé en force; bien membré; qui a
beaucoupde force, soiten parlantdes personnes, soit de choses
solidement établies et qui présentent une bonne résistance.
Dér. de Forgço.
Foure ou Foudre, v. impers. Falloir. — Voy. Foudre.
Fourèje, èjo, adj. Farouche; intraitable; peu civilisé;
mal apprivoisé; sauvage.
Dér. du lat. Fera, bête fauve; ou de Furor, fureur.
Fourél ou Fousél, s. m. Cocon de ver-à-soie.
Ce terme tient à l'idiome vivarais, qui s'étend aux pays
circonvoisins, les cantons de Saint-Ambroix et de Barjac.
— Voy. Fousél.
Fourés, s. m. n. pr. de lieu. Le Forez, ancienne pro-
vince de France. — Ne s'emploie que dans ce sens : Mar-
chandiso où Traval dé Fourés, marchandise de pacotille,
peu solide et fabriquée en masse à bas prix; tels sont les
ouvrages de serrurerie, de coutellerie, qu'on fabrique à
Saint-Étienne et dans la plupart des viliages du dépar-
tement de la Loire. ’
Fourés, s. m. Foret, outil d'acier servant à percer.des
trous dans des corps durs. ;
Dér. du lat. Forare, percer.
Fouréso, adj. fém. Grosse femme ou fille robustement
et grossièrement charpentée, aux formes carrées.et puis-
santes. — C'est un terme de comparaison pris sans doute
chez les habitants du Forez.
Fourfouia, v. Farfouiller; fouiller en mettant tout sens
dessus dessous; brouiller avec désordre en furelant.
Fourfoul, s. m. Fouillis; plus particulièrement, foule
en désordre; cohue; grand rassemblement tumulineux;
pèle-mèle d'individus ou d'animaux, comme les abeilles,
les insectes, etc., en masse compacte et embrouillée.
Fourgnè, ièiro, s. et a/j Fournier; boulanger, .qui
tient un four public pour cuire le pain des particuliersset
qui n’en vend pas. — Sa fourgnè, Sac à pain. +
FOU
Il a donné naissance à quelques noms propres, tirés de
cette profession : Fornier, Fournier.
Dér. du lat. Furnarius, ouvrier de four.
Fourjoù, s. m. Remuant inquiet et inquiétant; tatillon ;
qui fourre le nez et les doigts partout.
* Fourjouna, v. Fouiller avec un bâton ou un outil quel-
conque là où la main ne peut atteindre, ni pénétrer. —
Au fig. remuer; brouiller; mettre sens dessus dessous.
Corr. et ext. du fr.
* Fourlèou, s. Mercuriales; registre municipal où sont
constaués par des préposés les divers prix des denrées dans
les marchés publics.
Fourma, v. Former. — Ce mot qui serait du mauvais
languedocien dans cette acception générique, est tout à fait
technique pour désigner, chez le ver-à-soie, le moment où,
après avoir jeté les premiers fils d'attache de son cocon,
il commence à former son orbe et à tracer sa forme. Cette
premiére enveloppe, étant encore fort légère, est assez
transparente pour qu'on voie l’architecte travailler inté-
tieurement, quoiqu'on juge très-bien extérieurement de la
formedu vaisseau Couménçou à fourma, les Vers commen-
“’éent à former leurs cocons. Fourma est absolu et se dis-
pense fort bien du régime cocon, qui reste le plus souvent,
sinon toujours, sous-entendu.
Fourmén, s. m. Froment barbu, à épi gris et à longue
barbe. Il ne faut pas le confondre avec le froment propre-
ment dit, qui s'appelle ici Tousèla { V. c. m.). Le premier,
qui a le grain plus gros et plus grossier, sert particulière-
ment à faire ce qu'on nome lou Gruda. — V. c. m.
Dér. du lat. Frumentum, m. sign.
Fourmo, s. f{. Dim. Fourmélo. Grand fromage d'Au-
vergne qui est pétri en très-gros pains pesant jusqu'à 25
kilog. — Ce fromage, qu'on appelle aussi Froumaje dé
péoure, parce qu'il est grossier, débeurré et d’un prix très-
modique, est le dessert de la classe ouvrière dans nos pays.
La fourméto dé Baro est un fromage de forme beaucoup
plus petite qui se fabrique dans une partie de la Lozère :
il a la prétention d’imiter le Roquefort, dont il a à peu près
la forme, mais non la qualité. Il est sec, friable, débeurré,
fait avec du lait de vache, tandis que le Roquefort est le
fromage rouergat, tout fait de lait de brebis.
Fourmo est une corrupt., du fr. Forme, à cause du vais-
séau où il prend sa forme et qu'on appelle Formo. Au
surplus, le mot Fromage a la mêtne origine.
Fournado, s. f. Fournée de pain; cuite; quantité de
pains qu’on enfourne à la fois, ou celle que peut contenir
le four. — Faï trés fournados pér jour, il fait trois cuites
‘de pain par jour.
* Fournaje, s. m. Droit du fournier sur le pain qu’il fait
tuire; prix qu’il est en droit d'en exiger.
: Fournéja, v. Cuire le pain au four; enfourner. — Couro
fournejas? Quand faites-vous cuire du pain; quand faites-
vous votre fournée de ménage ?
En terme de magnanerie ou de filature de soie, Fournéja
FOU 359
signifie : étouffer au four les chrysalides dans leurs cocons.
Autrefois c'était le seul procédé connu pour cette opéra-
tion. Aujourd'hui l'étouffage à la vapeur est un procédé à
la fois plus prompt, plus économique, et il éloigne le dan-
ger de brüler le brin de soie par une chaleur trop forte et
trop sèche, qui se produisait souvent par l'ancienne pra-
tique à la moindre étourderie, oubli ou inadvertance de
celui qui présidait à l'opération.
Fourné, s. m. Fourneau, principalement celui qui des-
sert les bassines de filature de soie. — C'est un procédé
qui n’est plus usité que chez les particuliers et les paysans
qui font filer le produit de leur propre récolte. Dans les
filatures à la Gensoul, qui sont généralement adoptées dans
Ja fabrication en grand, la vapeur a remplacé lou Fourné.
Celui-ci est un petit fourneau carré en maçonnerie, placé
sur une grille et surmonté d’une bassine en fonte ou en
cuivre : au fond du fourneau s'élève une cheminée coni-
que, haute d'environ trois mètres. Dans les campagnes,
dans les Cévennes, on rencontre partout autour des habi-
tations, ces grossières constructions ou la trace de leurs
ruines.
Fourné est encore le fourneau, œil de bœuf, où l'on
brüle la houille dans les appartements.
Dim. de Four.
Fournèl, s. m. Fourneau de gazon écobué.
Fournéla, v. Écobuer; construire des fourneaux, Four-
nèls, en forme de voüte avec des mottes de terre garnies
de gazon, séchées au soleil, et qu'on garnit intérieurement
de bourrée sèche. Ces fourneaux brülent très-lentement, le
feu ne trouvant pas d’issue ni de courant d'air et consu-
mant pelit à petit la terre du gazon, qui réduite ainsi en
cendre volcanique, fertilise singulièrement le terrain où
elle est répandue.
Fourni, ido, a/j. Au propre, personne qui a un embon-
point raisonnable, dont les membres sont bien fournis en
chair. Au fig. nipé; équipé; pourvu. — Voy. Prouvési.
Fournigo, s. /. Dim. Fourniguéto. Fourmi, Formica,
Linn., insecte de l’ordre des Hyménoptères et de la fam.
des Formicaires ou Myrmèges, dont il y a beaucoup d'es-
pèces.
La société des Fourmis parait constituée à peu près à
l'instar de celle des abeilles. Il y a les fourmis mâles et
les fourmis femelles, qui toutes deux sont ailées et ne s'oc-
cupent que de voler et de reproduire l’espèce. Puis vient
le peuple nombreux des fourmis ouvrières; celles-ci n’ont
point d'ailes et ce sont celles qu'on nous propose comme
des modèles de diligence et de prévoyance. Les fourmis,
restant engourdies pendant l'hiver, n'ont point besoin de
faire des provisions pour le temps où vient la bise; les
grands convois de vivres qu'on les voit continuellement
charrier, ne sont que la nourriture d'un jour, d'elles et de
leurs sœurs dispensées de travail. Voilà donc leur mérite
réduit de moitié : diligentes, elles le sont pendant la belle
saison; prévoyantes, inutile qu’elles le soient si ce n’est
360 FOU
quelques jours au plus en cas de mauvais temps acci-
dentel. Ainsi l'on voit que si la cigale était venue, pendant
l'hiver, emprunter à sa voisine le plus petit vermisseau,
dont par parenthèse elle n'avait nul besoin, attendu qu’elle
ne mange point, elle l'aurait trouvée endormie et aussi
dépourvue qu'elle même.
Dér. du lat. Formica, m. sign.
Fourniguéja, ». frég. Fourmiller; démanger; faire
éprouver des fourmillements; picoter entre cuir et chair.
Dér. de Fournigo.
Fourniguiè, s. m. Fourmillière; retraite des fourmis.
Au fig. foule innombrable; multitude de personnes.
Fourniguiè, s. m. Torcol, oiseau. — Voy. Bénouri.
Fournimèén, s. ». Fourniment d’un soldat, ses armes,
ses vêtements; tout ce qui constitue l’ameublement d’un
appartement; trousseau d’une fille à marier.
Fourqua, ». Donner un coup de fourche; frapper, pi-
quer avec une fourche.
Sé fourqua, se diviser en fourche, en deux branches; se
bifurquer.
Fourquado, s. f. Coup de fourche; fourchée, quantité
de fourrage ou de paille que l'on peut piquer et emporter
en une fois avec la fourche.
Fourquaduro, s. f. Fourchure des branches d'un arbre;
bifurcation. — Voy. Énfourquaduro, m. sign.
Fourquas, s. m. Charrue à brancard, tirée par une
seule bête; fourchure d’un arbre; fourche en fer à deux
pointes, emmanchée d’un très-long manche, avec laquelle
on charge le foin sur une charrette ou sur une meule, et
on garnit de fagots un four déjà allumé; étai de bois ter-
miné en fourche pour supporter une branche qui menace
de s'écuisser ou de rompre sous le poids de son fruit
(V. Fourquèlo); pieu fourchu, dont on se sert pour fixer
les claies d’un pare à moutons. — V. Gudos.
Fourquéja, v. fréq. Remuer à la fourche; faner le foin
en le retournant à la fourche; piquer avec les pointes
d’une fourche.
Fourquèlo, s. f. Étançon fourchu qu’on emploie pour
soutenir les branches d'un arbre que les fruits surchar-
gent et font plier; étai de bois en forme de fourche.
Fourquo, s. f. Dim. Fourquélo; augm. Fourquasso.
Fourche, instrument de bois ou de fer, composé d’un
manche et terminé par deux ou trois pointes, nommées
fourchons. — La fourche à fourrage, dans ce pays-ci, est
un trident en hois à branches recourbées, fait d’une seule
pièce avec une pousse de micocoulier; elles viennent
toutes de Sauve ou de ses environs / Voy. Fanabrégou).
La fourche à fumier est un trident en fer, garni d’une
douille où s'emmanche un manche en bois légèrement
incliné.
Dér. du lat. Furca, m. sign.
Fourtéja, v. fréq. Tourner à l'aigre; prendre une saveur
acide. — Ne se dit que du vin.
Dér. de For, forto.
FOU
Fourtou, s. f. Aigreur, acidité du vin; rancissure de
l'huile; piquant de l'oignon ou du radis.
Fourtuna, ado, udj. Riche; qui vit dans l’aisance; qui
est au-dessus de ses affaires; qui a de la fortune.
Dér. du lai. Fortunatus.
Fourtunéja, ». fréq. Chercher fortune, aventure; s'in-
génier à gagner quelque chose. — 11 se prend en mauvaise
part pour : faire un commerce de gagne-petil; vivre au
jour le jour d’expédients.
Fourtuno, s. f. Fortune; richesse; biens; hasard; bon-
heur; état, condition où l’on est. — La bono fourtuno, la
bonne aventure. Pér fourtuno, par hasard; par bonheur.
En ital. Fortunache... heureusement que...
Dér. du lat. Fortuna, m. sign.
Fous, fousso, adj. Louche, qui n'est pas clair; trou-
ble; nébuleux; couvert. — Se dit du vin et de la vue.
Dér. du lat. Fuscus, sombre, obscur.
Fouségu, udo, part. pass. du v. Foïre. Cultivé; tra-
vaillé. — Voy. Foïre.
Fouséia, v. Faire un cocon, terme technique dans ce
seul sens. — An émbruga tro cla, an fouseïa din lou jas,
on a mis la bruyère trop clair-semée, les vers ont fait leur
cocon dans la litière.
Dér. de Fousél.
Fouséire, s. m». Journalier qui travaille à la mare, à la
pioche, à la houe.
Dér. du v. roire.
Fousél, s. m. Dim. Fouséïé; péj. Fouséias. Cocon du
ver-à-soie.— Dans ce pays-ci, on dit indifféremment Fousél
et Coucoù; cependant on emploie ce dernier plus généri-
quement et lorsqu'il s’agit de la récolte entières on se sert
du mot Fousél en parlant d'un individu ou de l'espèce, ou
d'un grand nombre considérés comme individus. £ous
coucoùs séran chèrs, les cocons seront chers; agud's uno
poulido formo dé fouséls, c'est une belle forme pour les
cocons.
Fousésou, s. /. Œuvre, labour à la pioche, à la houe;
différentes façons qu'on donne à la terre; saison de ces
œuvres.
Dér. du v. Foire.
Foussaje, s. ”. Action de labourer la terre à la houe ou
à la pioche; frais de ce travail. — Y-a dès journalos dé
foussuje, il y a dix journées de travail. ,
Foutèso, s. f. Minutie; niaiserie; chose de peu d'im-
portance ou de peu de valeur; bêtises.
La racine de ce mot et des suivants, sur lesquels il fan-
dra bien s'expliquer, est certainement de celles qu'on doit
traiter avec le plus de réserve et de circonspection; mais
il ne faut pas la tenir, sur la simple étiquette, pour aussi
abominable que de méchantes allusions l'ont faite. Notre
langue vulgaire l’a fait entrer dans beaucoup d'expressions
pittoresquement composées et énergiques sans peut-être
trop songer à mal; et notre lexique, sans vouloir Jes réha-
biliter absolument, ni en conseiller l'usage trop répété, ne
FOU
pouvait néanmoins les passer sous silence par une affec-
tation trop timorée qui eût donné lieu à des interpréta-
tions plus compromettantes que n'en doit être le vrai et
simple commentaire. — Voy. Foutrdou.
Foutésqué, ésquo, ésquéto, adj. Dim. Foutriquet;
cogne-fétu ; trotte-menu; qui s'occupe de vétilles, de petits
détails et exagère leur importance.
Foutésquéja, v. fréq. Vétiller; s'occuper de niaiseries,
de minuties; perdre son temps à des bagatelles; bague-
nauder.
Foutimar, ardo, adj. Indécis, chancelant dans ses
idées; qui ne sait jamais prendre une décision tranchée. —
Ne se dit guère que négativement : Souï pas foutimar, je
suis très-décidé; je ne vais pas par quatre chemins.
Foutimassa, v. Déranger; mettre sens dessus dessous;
inquiéter; tourmenter. Au passif : être inquiet, malingre,
indisposé. — Souï tout foutimassa, je suis mal à l'aise,
mal en train.
Foutimasséja, v. fréq. Baguenauder; niaiser; s'amuser
à des riens. — 11 a la même acception que Foutésquéja, à
la différence qu'il est actif et prend souvent un régime.
Dans ce cas, il se rapproche davantage de Foutimassa et
signifie : déranger, bouleverser; tarabuster.
Foutrâou, s. m. et adj. Dim. Foutralé, éto; péj. Fou-
tralas, asso. — Adj. disons-nous, au simple et dans ses
composés dim. et péjor., qui, comme bien d’autres, passe
substantif dans l’occasion.
Ce mot signifie simplement : niais, nigaud, niguedouille,
imbécile, pauper spiritu, et pas autre chose. Nous avions
bien raison de remarquer que ce mauvais garçon n'était
pas aussi diable qu'il en avait l'air; tant est vrai, comme
on dit encore, que rien ne ressemble plus à un fripon
qu'un honnête homme. Ce vocable fort bien porté est,
cela va sans dire, très en usage; mais parmi ceux qui
l'emploient il n'en est pas un peut-être qui ne croie dire
une sottisé en s'en servant; c'est c& qui fait son malheur.
Ce que voyant, un dictionnaire est là, à éprouver toujours
une certaine hésitation pour l’admettre dans ses colonnes :
Sauvages n'en fait pas mention et c’est grand tort : que
l'on ne nous en veuille point de ne pas partager ces scru-
* pules. Car tout cela parce qu’on croit que l'expression
appartient, et elle semble en effet appartenir à une famille
de mots grossiers que repousse la bonne compagnie. Ce-
pendant je suis sûr qu’il n’en est rien.
Les choses ne se passent pas différemment entre mots
qu'entre gens : une ressemblance physique n'établit pas
seule une parenté entre eux. Ici cette ressemblance existe
sans doute, mais c’est tout. Je crois même que le fr. nous
a gâté celui-ci et en a perverti le sens pour son compte
d'abord, puis en l’aggravant d'une fâcheuse allusion. La
signification précise du mot en lang., qui ne peut être, qui
n’est. jamais déterminée, exclut en effet toute possibilité
pour lui d'une origine compromettante. Mais d'où vient-il
alors s’il ne vient pas de là, d'où vous pensez peut-être?
FOU 361
Genin ne serait certainement pas de trop pour nous aider
à débrouiller cette généalogie, lui qui, dans ses Récréations
philologiques, a si habilement et si heureusement réhabilité
quelques expressions analogues. Son succès dans cette
œuvre réparatrice doit encourager à en tenter une pareille.
Je souhaite pour la justice qu'elle réussisse aussi bien.
Pour moi, qui ne suis ni si heureux, ni surtout si habile,
il faut que je me contente de protester contre une médi-
sance, de signaler une injustice, en appelant un autre
vengeur.
La preuve, en tous cas, qu'aucun sens honteux ne se
cache, ni de près ni de loin, derrière la locution traduite
du latin, classique ou barbare, Fatuus, peut-être, et tant
soit peu déformée à la vérité, c'est son application même.
Si elle était autre chose qu'une ironie, aurait-elle servi
dans cette phrase par exemple : ddou pu foutrdou n’an fa
lou baïle, du plus sot on a fait le commandant, qu'on
prétend avoir été souvent si bien méritée? Puis encore,
le diminutif aurait-il trouvé place dans ce surnom de
Foutralé dé Bésiès, sobriquet donné aux habitants de
Béziers, que leur sottise ne distingue nullement et qui ne
l'accepteraient pas sans doute même avec l’atténuation des
malins du moyen-àge?
Ce que je dis de l'adjectif regarde également le subs-
tantif devenu et restant invariablement masculin dans une
autre acception. On dit : un foutréou dé co, un foutrdou
dé gigù, un foutrâou dé miracle, un foutrâou d'home et
même un foutrou dé fénno, ce qui se rend exactement par :
un terrible coup, un énorme gigot, un étonnant prodige,
un colosse d'homme et un colosse de femme; car le fr.
applique aussi sa désignation masculine aux deux genres.
Ce sens n’a rien de commun, ce semble, avec le premier,
à moins qu'on ne suppose qu'on veut exprimer ainsi une
grosseur, une grandeur, une forme hors de l'ordinaire,
exagérée, excessive, folle, insensée, déraisonnable en un
mot et qui n'a pas de bon sens, comme on dit vulgaire-
ment, Fatua, dirait le latin.
Bien que ce soit un peu tout cela que l'on veut dire, je
ne sais pas si mon explication paraîtra satisfaisante et sera
suffisante; mais je ne crois pas non plus qu'il y ait moyen
de donner davantage à ce dernier mot la fameuse racine
dont il est question. I faut donc aussi lui en chercher une
autre si mon étymologie latine n'est pas la bopne; et il en
a été dit assez pour indiquer au moins la voie et rétablir
la réputation d’un terme, à tort ou à raison, fort répandu.
Foutrassäou, s. m. Péj. Foutrassdoudas, asso. — C'est
l'augmentatif du précédent dans toute son étendue, qui a
lui-même son amplificatif également usité. Celui-ci seule-
ment n'a cours qu'adjectivement, tandis que le premier
et son correspondant restent le plus souvent substantifs.
Mais Foutrassdou a encore une acception, que prend au
réste quelquefois Foutrdou, surtout employés l'un et l’autre
au pluriel, et il signifie : coups, coups de bâton, de poing;
volée. — Y-a agu dé foutrassäous pér toutes, il y eut des
362 FRA
coups, des éclaboussures pour tous. Quintes foutrassdous/
Quelle distribution de bois vert! Et zou! foutrassäou où
foutrâou sus sa fénno ! Et en avant! de rosser sa femme:
ce sont les procédés caressants de Sganarelle.
Ce dernier sens des deux mots est de nature, parait-il,
à lever les doutes sur leur radical, qui n’est point tel que
le fr. le ferait croire, et à réconcilier avec lui, sinon tout à
fait la bonne compagnie et sa langue un peu prude, au
moins le parler vulgaire et courant.
Foutre, s. m., vw. et interj. Mot, juron grossier et bas, sur
lequel il a été assez. et même, trop dit pour n’y plus reve-
nir. C’est le radical de la famille plus ou. moins honnète
qui précède.
Foutringuèlo, interj. Juron diminutif ou plutôt con-
centratif de Foutringo.
Foutringo, interj. Juron qui correspond à Diantre !
Peste! Malpeste !
Foutu, udo, adj. Perdu; déconfit; mort.
Fracha, v. Rompre; briser; casser; fendre; ébrècher.
Dér: du lat. Frangere, briser. L
Fracho, s. f. Dim. Frachéto. Brèche; fente; fissure;
cassure; défaut dans une pièce de menuiserie ou de char-
pente; trou, cavité; scorie dans une pierre de taille; écor-
nure; crevasse dans un mur. Au fig. fente; accroc à l'hon-
neur, à la probité; frasque.
Dér. du lat: Fractus, de Frangere.
Fraï, s. m., ou Fraïsse: Frêne, Fraxinus excelsior, Linn.
Arbre de la fam. des Jasminées. — Cet arbre, commun
dans nos pays, fournit d’excellent bois de charronage. C'est
d’une variété de cette famille que, dans la Calabre et aux
maremmes de la Toscane, on tire la manne des pharmaciens
par une incision faite à l'écorce.
Dér. du lat. Fracinus, m. sign.
Fraïrastre, s. m. Frère d’un autre lit; frère utérin ou
consanguin.
Fraïre, s. m. Frère, qui est né du même père et de la
même mère. Par ext. pareil, semblable,
Ce terme, qui n’est usité exclusivement que dans les
hautes Cévennes, dans son acception usuelle, est encore
ici employé dans le style pittoresque et poétique, surtout
en genre goguenard. On dit dans le style ordinaire, Frèro.
— Voy. c. m.
Dér. du lat. Frater, m. sign.
Fraïssiné, s. m. Frênaie, lieu planté, couvert, abon-
dant en frènes. — Ce mot, qui a-existé longtemps avec
cette acception dans la langue d'Oc, n’est plus employé
que comme nom propre d'homme ou de lieu, rendu par
Fraissinet. En l’analysant, il est facile de.se rendre compte
des procédés et des combinaisons qui ont servi à former
les dénominations. Nous venons de voir le radical Fraï ou
Fraïsse, abrégeant le lat. Fraæinus et le reproduisant, qui
veutdire Frêne, écrit autrefois Fresne, Maintenantil s’agit
d’une collection de ces arbres, d’un bois où ils sont plantés
FRA
en grand nombre : le suffixe latin etum s'ajoute au radical
et donne Fraæinetum. Celte marche du mot est bien
simple. Dans le roman, les deux idiomes du Nord et du
Midi restent longtemps confondus; mais la séparation en
langue d'Oil et en langue d'Ocs’accuse peu à peu-et devient
tout à fait tranchée; celle-ci reste plus fidèle au type latin
et sa déformation parait moins sensible : de là Fraïssiné et
Frénaie. Sans vouloir insister davantage, cette succession
ou mieux les divergences se dessinent nettement sur le mot
qui nous sert d'exemple. Nous avons au surplus indiqué
ailleurs par quels procédés rapides de contraction et de: re-
tranchement des finales latines, notre langue était arrivée
à se donner des formes et à imaginer des combinaisons
propres à son génie, à ses aptitudes de prononciation.
lei c'est le suffixe collectif latin qu'elle adopte dans sa
simplicité: Fraæinetum répond à Fraïssiné, comme Fraæi-
nus lui avait donné Fraïet Fraïsse : la désinence romaine
disparait, mais le caractère tonique et collectif du mot se con-
serve. La langue d’Oilet le français suivent la mème voie :
au-delà de la Loire, à l’est et à l’ouest, la consonnance dus
suffixe rappelle quelquefois son origine, d’autres fois elle
s’en éloigne davantage; la forme surtout, ou mieux l'or-
thographe obéit à d’autres tendances. Ce que, au midi,
nous:exprimons par les finales 6, ié, iè, édo, itiro,ete.,
signes de collectivité, est représenté, au nord, par-ai, aïe,
ay, ée, ei, ey, où, oie, ois, oy, elC.; nous avons signalé
déjà ces différences. Elles sont peut-être plus frappantes
sur le mot actuel, parce que sa composition est plus simple
et plus directe. 11 résulte donc de là, d’abord, une nou-
velle preuve de l'équipollence des suflixes de même ordre
dans les deux langues; puis, que les mots terminés par
une de ces syllabes, en lang. comme en fr., représentent
presque toujours une idée collective, alors surtout qu'ils
dérivent d’un nom d'arbre, les arbres étant de leur nature
les objets qui se montrent le plus fréquemment en collec-
tion; enfin, qu'il est possible de déterminer par la dési-
nence l'origine régionale de bien des noms de famille,
quaud ces mots deviennent noms propres d'homme. C'est
en définitiv le profit le plus intéressant de ces curieuses
études sur fa composition des noms, sur les suflixes et sur
les étymologies. Il n’y à pas à s’y tromper : une ressem-=
blance de physionomie existe sans doute entre tous ces
mots, frères d'origine, mais le cachet de race les distingue:
et les fait reconnaitre, les uns pour être nés sous le ciel du
Midi, les autres comme élevés dans le Nord. Les désinences
servent, pour ainsi dire, à chacun d'acte de naissance etn
les localisent.
Quant à l'orthographe du corps du mot lui-même,
elle offre aussi ses variétés : si elle est fixe en lang.,iln’en
est pas tout à fait de même dans les reproductions en fr.
Peut-être trouverait-on encore là quelque indication; mais
elle nous parait un peu subtile et pas assez certaine pour
être autre chose qu’une altération dialectale. On jugera
mieux au surplus de ces observations en mettant en paral=.
FRA
lèle des appellations identiques, avec leurs formes diverses
et leurs altérations ethniques.
* Ainsi, pour nous et dans le Gard, Lou Fraïssiné se ren-
contre dans cinq où six communes; dans celle de Borde-
zac, il est nommé, en 4251, Fruissenetum, lat.; dans celle
du Vigan, en 4381, Mansus de Fraysseto ; en 1444, Frays-
sinetum ; en 1513, Mansus de Fraxineto : le fr. les écrit
aujourd'hui uniformément Le Fraissinet ; mais il n'est pas
rare de voir, quand les noms propres d'homme s'en sont
emparés, les traductions fantaisistes Fraycinet, Fressinet,
Freyssinet, Freycinet, et autres. Malgré ces nuances qui
ne changent pas la prononciation, la formation méridio-
nale est trop saisissable, pour ne pas apporter la pleine
certitude que tous ces noms désignent des localités, des
individus, des familles originaires du Midi. Au contraire,
on peut être assuré que jamais ne lui ont appartenu,
comme noms de lieux ou d'hommes, les appellations ana-
logues qui suivent, bien que signifiant aussi une frènaie
ou le propriétaire d'un domaine remarquable par ses frènes :
Franoïs (Doubs), Frenai (Orne), Fresnay (Seine-Inférieure),
Frenay (Loiret), Freney (Savoie), Frenois (Côte-d'Or),
Frenoit (Belgique), Frenoy (Doubs), Fresnais (Ile et Vilaine),
Fresnay (Aube), Fresnaye (Sarthe), Fresney (Calvados),
Fresnoy (Aisne), répondant au lat. par le même mot Fraxi-
nelum.
Et, parmi les noms d'hommes, Fray, Du Fray, Fraisse,
Dufraïsse, comme Fraissinet, viennent de source méridio-
nale : du Nord, sont sortis les Dufrêne, Du Fresne, Du
Fresnoy, Du Fresny, Frenée, La Frenay, Lafrenais, Freney,
et une foule d'autres.
Ces distinctions par zones, qui établissent la démarca-
tion de l'idiome, en remontant à la source commune, nous
ont paru utiles à noter : elles pourraîent être reproduites
sur une foule de dénominations semblables, mais il suffira
d'indiquer les analogies et les concordances sans revenir
sur les détails.
Fraïssinéto ou Pimparèlo, s. /. Pimprenelle, plante.
— Voy. Pimparèlo.
Fran, s. ”. Franc, monnaie. — Ce mot n’a pas attendu
la promulgation du système décimal pour être national et
exclusivement employé dans son acception actuelle. On ne
s'est jamais servi du mot Livre à sa place; toujours on a
dit: milo frans, un éscu dé siëi frans, et non milo liouros,
un éscu dé sièi liouros, comme en fr.
Fran, franquo, adj. Dim. Franqué; augm. Franquas.
Franc; sincère; loyal; de bonne foi. — Fran coumo un
bèmi, fran coumo un cèrquo-poùs, franc comme un bohème,
franc comme un croc à puits, contre-vérités; on comprend
facilement la première; la dernière est plus difficile à
expliquer,
Dér. du lat. Francus, Franc, peuple de Germanie, qui
signifiait libre.
Fran-carèou, s. m. Jeu d'enfant qui consiste à jeter en
l'air une pièce de monnaie qui retombe sur un pavé de
FRA 363
grandes dalles. Le joueur dont la pièce se rapproche le
- plus du centre de la dalle, et est le plus éloignée de ses
lignes de jointure, a gagné une mise ou un point.
Francés, és0, s. el adj. Français, habitant de la France,
né en France; qui appartient à la France; langue fran-
çaise. — Lou parla francés, où simplement lou francés,
le français, le langage français.
Dér. du lat. Francus.
Franchiman, ando, s. et adj. Français d'outre-Loire,
soit l'habitant, soit le langage : nom, épithète un peu iro-
nique, subst. ou adj., que nos Languedociens donnent à la
fois à ce français dont le peuple du Nord a fait une sorte
de jargon et qui est son patois, et à celui que nos com-
patriotes rapportent de leurs voyages ou de leur séjour
dans les garnisons d'outre-Loire et qu'ils affectent au
retour de mêler, non sans emphase, à l'idiome natal.
L'expression s'applique également à ceux qui parlent cêt
argot défiguré soit par leur ignorance, soit par leurs pré-
tentions au beau langage.
En consatrant un terme particulier au parler qui n’est
pas le sien, notre langue d'Oc a voulu, semble-t-il, mar-
quer plus expressément sa séparation avec la langue d’Oïl.
Quand on la qualifie de patois, elle riposte par l’épithète
de franchiman; et ce mot a, dans son vocabulaire, une
pareille signification : c’est l’altération, la corruption de
sa langue par l’immixtion de la langue étrangère qui cher-
che le plus à l'envahir. Ces distinctions entre les deux
idiomes rivaux et leurs patois, trouveront à se développer
davantage aux articles Lénguo et Patouès, auxquels nous
renvoyons et qui nous paraissent le complément nécessaire
de ce que nous avons à dire du Franchiman. Nous vou-
drions ici reprendre quelques-unes de nos observations
préliminaires, appuyer sur certains traits du tableau, et,
puisqu’enfin il passe en force de chose jugée que les dia-
lectes méridionaux ont mérité l’ostracisme, apprécier les
motifs de la sentence et avoir le signalement des cou-
pables.
Il n’y a pas d'illusions patriotiques à se faire ni à exa-
gérer : pour être une langue contemporaine du français,
issue de la mème source que lui, pour avoir partagé l'em-
pire avec lui, notre langue d'Oc est loin d’avoir eu d'aussi
brillantes destinées; mais elle en est entièrement distincte.
Si la perte de sa nationalité l’a laissée quelque peu ä
l'écart et en arrière, elle ne lui a rien Ôté au fond de son
caractère et ne lui a point fait abdiquer son génie. Elle a
été moins favorisée par les circonstances; elle est déchue
de sa condition sociale; et cependant, avec le sentiment de
son infériorité, elle n'a pas voulu rester immobile, parce
qu'elle n’entendait point mourir; et, quand il lui a été
donné de prendre la parole et de se faire entendre, elle a
protesté de son éternelle jeunesse, de sa verve harmonieuse,
de sa vigueur, de son abondance, avec tant de vitalité et
d’entrain, qu’elle a étonné la littérature et fait envier ses
richesses et ses réssources. Elle s’est classée au moins: et,
364 FRA
maintenant, bien qu'elle n’aspire point à reprendre son
sceptre provincial, elle restera dans sa dignité et méritera
encore d'être étudiée et conservée comme un monument
historique, toujours debout, de notre gloire nationale.
A part le rôle littéraire qu'elle remplit et qui lui a valu
tant de faveurs dans ces derniers temps, la langue d'Oc,
avec la variété infinie de ses dialectes, est toujours parlée
et comprise dans le tiers de la France. L’attachement du
peuple méridional à son vieux langage prouve au moins
qu'il le croit bon et suflisant à ses besoins : il en vit et il
s’en sert. Sa persistance démontre encore que cette langue
ne s’est pas plus immobilisée que l'esprit même des popu-
lations, et qu’elle a mesuré sa marche à celle des idées
qu'il leur convenait d'exprimer. Une foule de termes nou-
veaux sont devenus nécessaires : il fallait les prendre où
ils se trouvaient et s'enrichir de ces emprunts forcés.
Elle n’a point hésité; et ce n’est pas de cet accroissement
qu'il y a à se plaindre; seulement elle a voulu en appro-
prier les formes à son génie : elle leur a imprimé le sceau
de l'adoption en les façonnant suivant ses aptitudes; elle
les a naturalisés languedociens en les soumettant à ses
règles d’accentuation et leur imposant son cachet de race
et de famille. Ce n’est pas non plus d’avoir usé de ce droit
souverain qu'elle peut être blàmée, tant elle y apportait
d’ailleurs de réserve et de discernement et mettait de déli-
catesse à en ménager l’exercice et les procédés. Ce n'était
pas là faire du patois ou du franchiman, mais simplement
monter au niveau du progrès qui amène toutes les langues
à se transformer, et se tenir au courant des idées nouvelles
en s’emparant de mots nouveaux, qu'elle s’assimilait.
Cette élaboration naturelle se faisait à bon escient; alors
que la langue d'Oc était la bienvenue dans toutes les
classes de la société, admise à tous les foyers, reçue dans
toutes les relations. En plein crédit dans sa province, ses
emprunts n’éprouvaient aucune peine à être légalisés et
à prendre cours. A tous les degrés et dans tous les rangs,
tout le monde s’entendait avec le même idiome, et l’in-
troduction ou la mise en circulation d’un vocable étaient
soumises au contrôle de tous, des lettrés et des ignorants,
des grands seigneurs, des bourgeois et du peuple; de telle
sorte qu'aucune innovation n'aurait. pu s’impatroniser,
pour si peu qu’elle eût été en désaccord avec l'esprit
général et l'instinct natif qui maintenait et caractérisait la
langue. Ce fut cet état de choses que vint sanclionner
SAUVAGES dans son Dictionnaire avec l'autorité de sa
science de linguiste et d'observateur judicieux. Il fixa Je
pur languedocien de son temps, tel que le mouvement des
idées ef des besoins l'avait fait, dans son individualité
propre et originale; et il le fit avec le dessein arrêté de ne
pas le laisser confondre avec le français, dont il voulait
surtout protéger et sauvegarder la diction.
Mais une langue vivante ne s'arrête point au milieu de
populations vivantes et indépendantes, puisqu'elle repré-
sente nécessairement leurs mœurs, leur esprit, leurs ten-
FRA
dances. L'ordre social, le régime politique, les divisions
territoriales ont éprouvé de profonds changements : la
langue a suivi l'impulsion. A ne les considérer qu'au seul
point de vue de la linguistique, les révolutions qui ont
passé sur notre pays, ne pouvaient manquer d'exercer la
plus grande influence sur l’idiome. Le français est devenu
le maitre : il a commencé par se rallier les hautes classes
et la bourgeoisie; le peuple l'a subi et force lui a bien été
d’en adopter aussi une certaine nomenclature d'expressions
techniques, sous peine de rester en dehors de tout mouve-
ment et de se taire sur des matières portées à chaque
instant à l’ordre du jour, et qui remuaient toutes les âmes
et tous les intérêts.
De là sont venues ces concessions à la politique, à
l'organisation administrative, au système décimal, à la
procédure, qui ont créé ces séries de mots, d’abord
comme patrioto, assigna, aristocrato, sans-culolo, émigra,
massimoun, distri, etc.; puis préfé, sous-préfè, couscri,
ézantà, réformo, otrouè, azouèn, etc., et après charto,
députa, prougramo, éléciou, las cambros, et lou mèstre, un
litre, un kilo, cami vicindou, sustitu, etc. I] fallait s'en-
tendre à toutes les époques; et le languedocien ne dérogeait
pas, ne se convertissait pas, en imitant le français Jui-
même et en lui prêtant en mème temps ses termes d'agri-
culture, par exemple : magnanerie, canisse, mort-flac,
flâcherie, araire, etc.
C'était bien encore; car la langue d'Oc, abandonnée
depuis longtemps comme langue officielle, avait cependant
conservé assez de son prestige pour se mêler, disions-nous,
aux relations privées et familières du grand et beau monde
qui n’en connaissait guère d'autre, et à celles du populaire
et des villageois qui n’entendaient que ce langage. Sans
doute, elle n’avançait pas vers les perfectionnements et
n'y tendait par aucun sérieux effort littéraire; pourtant
son culte n’était pas tout à fait délaissé. Franchiman, au
témoignage de SauvAGEs, il y a une centaine d'années, ne
désignait que la différence d'accent entre le langage du
Nord et celui du Midi.
Le mot garde loujours ce sens, mais il a pris plus d'ex-
tension; car il signifie aussi une altération de la langue
méridionale par un autochtone même qui affecte, en se
servant du parler maternel, de le prononcer à la mode
française, dans l'intonation et dans le tour de phrase.
Cette définition n'est malheureusement que juste. Le
mal à empiré et il attaque le fond mème, la substance de
l'idiome, par une mixtion informe et inintelligente. des
anciennes racines romanes et des déformations du français
qui s'infiltre insensiblement dans ses veines; et cela sans
regarder aux antipathies qui les séparent. Le Franchiman
actuel est une corruption du languedocien et du français à
la fois; il est produit par une alliance journalière, par un
frottement incessant des intérêts et des rapports des deux
langages ; il pense en français, il traduit oralement en lan-
guedocien, et il apporte dans celui-ci la physionomie, la
FRA
construction, le génie du premier, et jusqu'à la plupart de
ses formules parasites; à peine même si les désinences
conservent leur cachet d'origine.
La dégénérescence était peut-être fatale : elle a pris de
notre temps une intensité sans frein et sans vergogne,
contre laquelle il ne faut cesser de s'élever. Depuis que le
français est devenu la langue universelle, depuis qu'il s'est
vulgarisé davantage, qu'il passe pour ètre seul de bonne
compagnie, et qu'à ce titre il est reçu parmi les classes
élevées et la bourgeoisie, qui veulent faire preuve par là
d'instruction et d'éducation, il est de bon goût de renier
l'idiome natal comme un des patois barbares du français
et de n’en faire qu'une de ses corruptions viciées, au lieu
d’une langue originale. Sur cette idée fausse, le dédain et
l'abandon : et c'est ce qui nous rappelle une de ces spiri-
tuelles boutades du maitre, quand il représentait au vif les
causes de la décadence de sa langue tant aimée et faisait le
portrait de nos franchimans. Ce qu'il y a de plus fâcheux
en cela, disait-il, c’est que l'exemple est donné de haut en
bas; de bas en haut la séduction serait moins à craindre.
Ce sont, parmi le peuple, les hommes qui ont reçu ce
commencement, j'allais dire cette fausse couche d'éduca-
tion, qui est le type particulier de notre siècle; ce sont les
militaires voyageurs qui ont puisé à toutes les sources, à
tous les jargons, à tous les baragouins; ce sont les demoi-
selles de magasin qui se pincent la bouche en cœur et
lèchent leurs paroles sur leurs lèvres, pour ne pas être
confondues avec la classe des taveleuses, race vive, alerte,
un peu débraillée, andalouse du pied jusqu’à l'œil; ce
sont les demi-savants des campagnes, tribuns du conseil
municipal, qui ont appris le français dans le code de pro-
cédure; c'est toute cette petite aristocratie populaire qui
déforme notre pur languedocien pour en faire le laquais
brodé du français.
Aussi distingue-t-on deux classes bien tranchées de
puristes franchimans dans notre idiome. La variété dont
il vient d'être question, forme ce que le bas-peuple appelle
très-logiquement d'avoucas. Ceux-ci reculent devant un
technique pur languedocien et font des détours risibles
pour tourner la position; ils craindraient, par l'emploi
d’un terme authentiquement du crü, de déroger à leur
dignité de citadins et d'être salués de l'épithète de raïdous,
la plus flétrissante des injures à leurs ÿeux ; ils sont heu-
reux quand ils peuvent amener à bien et colloquer conve-
nablement un technique bien français qu'ils ont recueilli
dans leurs rapports avec les gens de science et de bon ton;
ils appuient glorieusement dessus, ils le renflent d'une
accentuation sentencieuse, et semblent n’y accoler qu'à
regret la désinence languedocienne. Inutile de dire que la
construction est toujours française ou à peu près. Qu'ils
tombent, par hasard, sur un technique bien local, ou
mieux éncore sur une de ces phrases faites et proverbiales
qui abondent dans l'idiome, ils ne les lächent alors qu'en
les accompagnant d’un sourire sardonique ou dédaigneux,
FRA 365
qu'avec une rudesse affectée de prononciation ; ils ont l'air
de les souligner oralement, pour qu'on ne les confonde
pas avec le reste de leur phraséologie; et quand ils revien-
nent à celle-ci, ils ont grand soin de signaler la différence
par un redoublement de siffloterie, de syllabes susurrantes
et de vocalisation emmiellée.
La seconde espèce de puristes est plus logique et plus
patriote : elle tient à conserver à l'idiome sa pureté ori-
ginelle et le cachet de son indépendance; elle se compose,
quoiqu'en petit nombre, de gens instruits, mais ils doi-
vent être du crù, c’est là une condition exclusive, car
l’homme du terroir peut seul avoir la chaleureuse affection
qui pousse à défendre une cause juste, mais condamnée
d'avance. C’est là le bataillon sacré.
Viennent ensuite les vrais autochtones du pays : culti-
vateurs ou petits propriétaires, et les habitants, non dé-
classés, des communes rurales. Les puristes dans cette
classe sont particulièrement ceux que leurs voisins grati-
fient aussi du titre, d’avoucas. Bien différents des premiers
que nous avons déjà signalés par cette appellation, ceux-ci
s préoccupent quelque peu de codes, de législation et de
politique générale; ils sont surtout un recueil vivant des
théorèmes, des apophthegmes de la sagesse du vieux temps.
Leurs codes sont : Pierre Larrivay, Mathieu Lansberg; leur
doctrine, les recueils des dictons ou proverbes agricoles, as-
tronomiques et météorologiques ; leur politique, la diplomatie
municipale, ou quelque boniment en vue d'élection. La race
menaçait de s’en perdre;. mais les évènements ont formé
quelques élèves non moins prétentieux, qui s'exercent dans
les clubs ruraux. Ceux-là sont les savants de Fendroit, les
fortes têtes, les importants, les discoureurs diserts, frottés
de lecture et d'instruction primaire. C’est par eux que
l'antagonisme du français se maintient vif et constant,
comme entre Rome et Carthage. Grands parleurs d'ordi-
naire, leur verbe a une certaine énergie, leur pensée de -
l'image, leur phrase de la métaphore; la forme compara-
tive est dans leur génie particulier, comme dans celui de
la langue elle-même; ils n'évitent pas sans peine tout
retour vers la pensée française inculquée par leur journal,
et lorsque les besoins du moment les contraignent à l'em-
prunt de quelque expression inévitable, ils mettent une
sorte de coquetterie maligne, de raffinement inslinetif à la
torturer, à la défigurer, à la rendre méconnaissable pour
des oreilles françaises. Quelquefois mème ils l'étendent
sur le lit de Procuste, la mutilent ou l’étirent, suivant les
cas, pour le seul plaisir de faire affront à l'académie; c'est
ainsi que des mots bibliothèque, locomotive, cartouche,
pour ne parler qué des plus innocents, ils ont fait bléotèquo,
comotivo, cartatoucho.
A un degré un peu plus élevé, se rencontrent les puristes
écrivains, praticiens émérites, rédacteurs de correspon-
dances d’affaires, de pétitions et même de mémoires; et au-
dessus les poètes de l'endroit, faisears d'épithalames ou de
chansons charivariques, aux locutions fantaisistes et sou-
366 FRA
vent originales comme leur orthographe. Toutes ces caté-
gories professent au fond le respect de la langue.
Or, comme tout purisme est toujours entaché de fana-
tisme, il s’en est suivi quelquefois des excès que le bon
goùt doit condamner, quand ils s’avancent sur le terrain
littéraire, mais qui n'en restent pas moins liés indissolu-
blement aux destinées de l’idiome. Montrer trop de sévé-
rité pour leurs créations déformées ou dissimulées aurait
bien pu n'être pas toujours justice. Le français n’a-t-il pas
fait pire quelquefois dans ses emprunts grecs ou latins
pour ses classifications scientifiques, et dans son anglo-
manie pour toutes ses industries depuis ses vêtements jus-
qu'aux chemins de fer, pour sa Jangue parlementaire et
son argot commercial? L’omnipotence et l'impunité, l'exem-
ple et l'initiative ne sont pas des droits, mais on s’en est
toujours servi depuis qu'il y a au monde des forts et des
faibles; et en dernière analyse, il faut bien accepter, sous
bénéfice d'inventaire toutefois, quelques-unes de ces locu-
tions qui ne heurtent pas trop le génie de la langue.
Les néologismes de cette sorte ne sont pas les plus à
redouter; et ce n’est pas contre eux que l’auteur des Cas-
tagnados eùt dégainé, comme il disait, son grand sabre pér
sé garda dâow franchiman. Dans la nomenclature qu'il à
laissée et que nous suivons, il en a été enregistré un cer-
tain nombre : c’est l'acte de leur légitimation. A l’article
Patouës nous signalerons les motifs qui leur ont fait trou-
ver grâce et les raisons qui ont dù faire proscrire, les autres.
Ce qui a jeté les premiers et les plus dangereux ferments
de décomposition dans l’idiome méridional, est venu de
cette erreur qui a fait imaginer que deux langues, coexis-
tant sur le même sol, gardant certaines affinités d'origine,
avaient cependant la même nature et le même caractère;
que l'une, n'étant que l’altération de l'autre, la plus vul-
gaire et la plus pauvre devait prendre modèle sur la plus
élégante et se vêlir deses ajustements; que forcer les rappro-
chements serait avoir raison d’anlipathies inconciliables.
Mais par le mélange on n'est arrivé qu’à la confusion : les
plus habiles ne savent plus ni la langue française ni la
langue d'Oc: certes, il n'y a pas à se vanter du résultat.
On a été plus loin : du langage courant, qui se livrait à
tous ces amalgames inconscients et souvent inintelligibles,
le mal est passé et s’est propagé dans les livres, les traités,
les compositions écrites, où l’on n'a pas craint de professer
hautement l'assimilation du français et du languedocien.
C'est contre ce débordement qu'on ne saurait trop pro-
tester, en creusant plus profondément que jamais la ligne
de démar ‘ation qui sépare les deux langues.
Des principes, des natures, des types disparates et oppo-
sés ne peuvent évidemment se concilier et se fondre. On
ne l'a point vu, on n’y a point songé : le même vocabu-
laire ne saurait être commun aux deux idiomes. Mais la
langue d'Oc dépérit, dit-on : soit; et cela ne l'empêche pas
de servir encore d’instrument de relations à huit ou dix
millions d'hommes; elle est pauvre et inféconde dans sa
FRA
sénilité : cependant elle n'en a pas moins enrichi la litté-
rature nationale d'admirables et harmonieux chefs-d'œu-
vre de poésie. Mais n'est-ce pas là ce qui lui donne le
droit d’être fière de sa pénurie, de refuser l’aumône en
fausse monnaie qu’on lui jette, de repousser la livrée et le
yvasselage qui l’humilient, de vouloir être rendue à elle-
mème? Ces levées en masse chez le voisin, qu'on lui con-
seille et qu'on lui amène de force, ne feraient que la trabir
et hâter sa déchéance. Il est sans doute des auxiliaires
dont le concours lui a été utile et qu’elle a accueillis; maïs
ces recrues exotiques, hybrides, à constitution peu saine,
raccolées un peu partout, au hasard, que, pour ia vanité
du nombre, on essaie d'affubler de quelque lambeau de
costume provincial, et qui se croient déguisées sous la cocarde
d'une désinence caractéristique, une consigne inexorable
doit les bannir à jamais des rangs où ces intrus font tache.
Que peut donc en ces circonstances se proposer notre
lexique? Rien de plus que faire de l'histoire. La langue
d'Oc et ses dialectes n’ont pas pour eux l'avenir, en ce
sens que l’avenir ne peut rien leur donner et qu'ils en ont
tout à craindre. Ils vivront en se souvenant d'avoir vécu :
leur raison d’être est d’avoir été. C'est pour cela qu'il y a
un si grand intérêt, non pas à tenter un impossible rajeu-
nissement en leur insufilant un esprit nouveau, antipa-
thique à leur génie natif, mais à revivifier leurs éléments
d'origine et leurs principes vitaux en les retrempant à
leur source pure et vraie.
A deux époques critiques dont nous venons d'indiquer
l'influence, notre dialecte a eu cette rare bonne fortune
que deux maîtres, SauvaGEs et La FARE-ALAIS, ont dressé
l'inventaire de son entier et légitime patrimoine. Le der-
nier contrôle a dù nécessairement écarter les archaïsmes
hors d'usage, atteints de désuétude, comme il a dû con-
sacrer les acquêts récents, avec un savoir et une autorité
inconteslables. Dans cette classification se trouve la règle, -
et elle est si bien la loi, que tout ce qu’elle embrasse et ce
qu'elle sanctionne est l'état de notre langue, son seul
avoir, sa propriété véritable; tout le reste ne serait pour
elle que du bien mal acquis, dont elle ne veut pas. Notre
lexique, qui l’a adoptée, sera donc à ce titre pur langue-
docien et non franchiman; sa devise sera : parlons notre
langue et non son patois. — Voy. Lénguo et Patouës.
Franchimandéja, ». fréq. Imiter grotesquement la pro-
nonciation française : ce qui arrive au peuple du Midi
quand il veut se mêler de parler français, surtout aux
militaires du terroir, retour des garnisons d'outre-Loire,
qui prétendent faire croire avoir oublié l'accent natal.
Françouès, ». pr. m. Au fém. Françouèso. François,
Françoise.
Françoun, n. pr. de femme. Dim. Françounéto. Fran-
çoise, dont il est lui-même un dim.
Franja, ado, adj. Frangé, orné de franges; bordé d'une
frange.
Corrupt. du fr.
FRÈ
Franjo, s. f. Bord; bordure; frange, tissu d’où pendent
des filets servant d'ornement.
Corrupt. du fr. qui vient lui-même dulat. Fimbria, m. sign.
Franquéta, s. [. Franchise; loyauté.
Dér. de Fran, adj.
Franquo-païardo, s. /. Espèce de figue hätive et de
Frâouda, v. Frauder; employer des moyens détournés
pour frustrer quelqu'un de ce qui lui appartient, pour
éviter les droits de régie ou d'octroi; sophistiquer le vin
ou autre marchandise.
Frâoudo, s. /: Fraude; tromperie cachée à l'effet de
soustraire certains objets soumis aux droits à la connais-
sance des employés à la perception ; contrebande.
Dér. du lat. Fraus, fraudis.
Frâoudulisto, s. m. Féodiste. — Voy. Flurdalisto. —
Ce mot est une corruption du vieux terme fr. auquel le
peuple a voulu attacher ironiquement une racine injurieuse
tirée du mot Frdoudo. Le peuple et les interprètes du droit
féodal n'étaient pas fort amis.
. Frâoudur, s. m. Fraudeur, celui qui fait et pratique
habituellement la fraude, surtout en matière de droits
d'octroi ou de régie.
Corrapt. du fr.
Frâoumina, v. Havir, brüler, dessécher, brouïr par le
brouillard, en parlant des feuilles des arbres; rendre ver-
moulu, quand il s’agit du bois, du fromage, etc.
Fré, s. m. Froid, froidure; hiver. — Fai un fré qué
ploumo, il fait un froid à faire tomber les ongles. Un paro-
fré, un vêtement bien chaud, un manteau. Un pisso-fré,
un homme sans vigueur, sans énergie; flegmatique; indif-
férent; indolent. Un fré, un catarrhe, un rhume, toute
espèce d'indisposition causée par une transpiration arrêtée.
Fré dé pèses, froid aux pieds.
Fré se prend aussi adverb. pour froidement, d’une
manière froide, sèche, glaciale. — Batre fré, battre froid,
recevoir froïdement, sans démonstration amicale.
Fré, fréjo, adj. Dim. Fréjé; augm. Fréjas. Froïd, qui
a perdu sa chaleur, qui est à une température peu élevée.
Au fig. froid, indifférent pour ceux qui l'aiment; qui n’a
pas d’entrailles ni de chaleur de cœur.
Dér. du lat. Frigidus, m. sign.
Fréchan, s. m., ou Fréchio, s. f. Fressure d'agneau ou
de chevreau; ensemble du cœur, des poumons, de Ja rate
et du foie de ces animaux. C’est un friand morceau pour
les campagnards, qui mangent rarement de la viande.
Dér. du lat. Frizum, supin de Frigo, fricasser.
Fréchio, s./f.,ou Fréchan, s. m. Mème mot que le pré-
cédent.
Fréjäou, âoudo, adj. Qui est d'une température, d'une
exposition de site froide, glaciale. — Aquélo cambro és
bièn fréjdoudo, cette chambre est glacée. Pètro-fréjdou,
pierre froide, pierre calcaire. C'est par une exception bizarre
qu'ici l’adj. ne s'accorde pas en genre avec son subst.
367
Fréjou, s. j. Au propre, douleurs rhumatismales, ca-
tarrhe causé par le froid; au fig. froideur, indifférence;
air froid, sérieux et composé.
Dér. du lat. Frigus, frigoris.
Fréjoulado, s. /. Redoublement de froid; froid plus
intense; recrudescence de l'hiver qui se fait ressentir sou-
vent aux premiers jours du printemps.
Frèro, s. m. Frère, né du mème père et de la même
mère. — Voy. Fraïre.
— Lous Frèros, les frères de la Doctrine chrétienne. Lou
Frèro, le frère qui dirige spécialement ou l’école ou la classe.
Il est probable que, avec l'établissement des frères de la
Doctrine chrétienne dans nos pays, a commencé la substi-
tution du mot Frèro à celui de Fraïre, du moins l'habitude
de ne parler que français aux enfants, de n’employer que
le français dans leurs classes, a-t-elle contribué pour une
grande part à ce changement tout à fait passé dans la langue.
Frés, frésquo, adj. Dim. Frésqué, élo; augm. Frésquas,
asso. Frais, fraiche, dans toutes ses acceptions, soit pour
la témpérature, le vent, l'eau, le vin, soit pour la fraicheur
des fruits, légumes, viandes, poissons, étoffes, et pour le
teint des personnes. — Frésquasso, en parlant d'une femme,
une grosse mère bien fraiche et pourvue d'embonpoint.
Pris subst. où adv. au masc. Frais; froid agréable;
fraicheur.— Faï frés, le temps est frais. Préne lou frés, se
mettre à la fraicheur, au frais.
Dér. du Jat. Frescum, supin de Frigeo..
Frésia, siado, adj. Crèpé; crêpu; frisé comme les
feuilles d’un certain chou qu'on appelle chou frisé.
Dér. de Frisa.
Frèso, s. f. Fraise, fruit du fraisier, qui 6e dit techni-
quement Majoufo (V. c. m.); ris de veau, fraise; fraise
de collet, ornement du cou, plissé et empesé.
Dér. du lat. Fraga, m. sign.
Frèso, s. f. Frèze, temps du plus grand appétit des
vers-à-soie. — Ce redoublement d’appétit, qui précède
chaque mue, croît à chaque àge proporlionnellement à la
grosseur du ver.
Frésquairoùs, ouso, adj. Frais, humide, en parlant
d’un site, d’une maison, d’un appartement, où l'on respire
la fraicheur.
Frésquéja, v. fréq. Réverdir; être verdoyant; se cou-
vrir de verdure, de fraicheur.
Frésquièiro, s. f. Fraicheur; temps frais. Au fig. froi-
deur; indifférence. — Prène la frésquièiro, prendre le
frais. Las frésquièiros arivou, les premières fraicheurs de
l'hiver arrivent. Faï frésquièrro, il fait frais, presque froid,
humide.
Frésquoû, s: f. Fraicheur; froidure ; fraicheur de l'eau ;
fraicheur du teint.
Frésquun, s. m. Odeur de viande fraiche. + Cette
odeur est insupportable. aux habitants des Cévennes, qui,
accoutumés à une vie frugale et aux assaisonnements au
pôre salé, ont du dégoût pour la viande fraiche et le potage
FRÈ
368 FRI
de cette viande, en même temps qu'ils font grand cas du
porc un peu rance, qu’ils nomment sabourun.
Fréta, v. Frotter; essuyer; oindre; enduire. Au fig.
battre, rosser quelqu'un; lui gagner son argent au jeu.
Sé fréta, hanter; fréquenter; avoir à faire; se faire des
frietions; se battre. — Sé fréta dé quéouquus, fréquenter
quelqu'un. Sé soun bé frétas, ils se sont bien houspillés,
pelottés, battus.
Dér. du lat. Fricare, m. sign.
Frétado, s. f. Coups; rixe; volée de coups de poings ou
de bâton.
Frétadoù, s. m. Frottoir; linge qui sert à frotter, à
essuyer; essuie-main.
Fréto, s. f. Terme de charronnerie, frette, lien de fer
ou virole autour du moyeu d’une roue.
Fricandèou, s. m». Hachis ou godiveau de viande maigre
du porc, mêlé du ris et des caillettes, quelquefois avec
la fressure et le foie, et qui n’a rien de commun avec ce
qu'on entend en fr. par Fricandeau. Lou fricandèou se
façgonne en boules de la grosseur d’une pomme, qu'on
recouvre avec une enveloppe de cette membrane graisseuse
que les anatomistes appellent épiploon, et qu'on nomme
ici en terme de ménage créspino. Ces sortes de godiveaux,
que l'on fait cuire dans la graisse et quelquefois en terrine,
se conservent longtemps et sont fort estimés.
Fricäou, fricâäoudo, adj. Dim. Fricéoudé. Gentil;
éveillé; friand; ragoütant; délicat. — Un moure fricdou,
un minois friand.
Ce mot est plus usité au dim. fém. Fricdoudéto.—Friquet,
le nom du moineau, n’aurait-il pas une origine commune
à cause de ses qualités?
Dér. du lat. Fricatus, frotté, nettoyé. y
Fricassa, vw. Fricasser; accommoder; frire; faire cuire
à la poële. Au fig. manger son bien en folles dépenses. —
À tout fricassa, il a tout dévoré, tout flambé.
Fricassèio, s. f. Fricassée, gibelotte.
Fricasso, s. f. Ragoût de viande en morceaux, cuit à
la poële; galimafrée.
Dér. du lat. Fricare.
Fricô, s. m. Dim. Fricouté. Ragoût; mets cuit; régal;
repas de gourmand.
Fricoutéja, v. fréq. Fricotter; fréquenter les guinguettes ;
avoir l'habitude des repas de tavernes. -- S’entend aussi
des petits repas d'amis et de gourmands,
Fricoutiè, s. m. Gargotier ; cuisinier de taverne.
Fricoutur, s. ». Gourmand; qui aime les bons mor-
ceaux ; qui fréquente les gargotes.
Frigoulous, s. m. Terre en friche remplie de thym.
Frigoulo, s. /. Dim. Frigouléto. Thym, Thymus vul-
garis, Linn., plante de la fam. des Labiées, aromatique et
fortifiante, dont on parfume les agrès de magnanerie, soit
en en frottant les planches et les traverses, soit en la fai-
sant brüler dans l'atelier.
Dér. du gr. Pakäyyuv, plante salutaire contre les venins.
FRI
Frimo, s. f. Frime; semblant; mine; feinte. — Tout
aquÿ's uno frimo, dé frimo ou pér la frimo, tout cela n’est
que semblant, que jeu, que vaine apparence; bon pour la
frime.
Frimousso, s. /. Mine: air du visage; trogne. — Té
cope ta frimousso, je vais te souffleter.
Fringa, v. Faire l'amour; faire la cour; avoir des fré-
quentations en vue du mariage. — Se prend en général en
bonne part et pour le bon motif, du moins en apparence :
c'est une fréquentation qui s'opère en public et la plupart
du temps sous les yeux des parents. Le terme Parla à...
est encore plus explicitement consacré à la recherche pour
le bon motif.
Dér. du lat. Fringultire, frétiller, jaser, coqueter.
Fringadisso, s.f., ou Fringaje. Action de faire sa cour;
temps où l'on se fréquente avant le mariage.
Fringaïre, s. m. Au fém. Fringaïro, subst. Amant;
amoureux ; galant; soupirant. — Woy. Calignaïre.
Fringaje, s. m. — Voy. Fringadisso.
Fringarèl, èlo, adj. Qui a le cœur disposé à l'amour;
qui aime à coqueter auprès des femmes; d'humeur amou-
reuse; l’'amoureux des onze mille vierges.
Fringo, s. f. Dim. Fringuéto. Bande; lanière d’étoffe
prise sur une grande pièce. — Fringo dé tèro, lisière, lan-
gue de terre.
Dér. du lat. Fimbria, frange, ou mieux de Frangere,
diviser, déchirer.
Fripa, ». Friper; gâter; chiffonner ses hardes, ses habits;
gaspiller, dissiper sa fortune.
Fripariè, s. f. Friperie; magasin de vieux habits; bou-
tique de bric-à-brac; commerce de friperies.
Fripiè, s. m. Au fém. Fripièiro. Fripier; marchand de
bric-à-brac; qui fait commerce de vieux meubles, de vieux
habits.
Fripoun, ouno, adj. Dim. Fripouns, oto. Fripon;
trompeur; qui vole avec adresse; fourbe. — On ne se sert
guère que du dim. Fripound, oto, dans le sens de galant
ou coquette, éveillé ou luronne, appliqué à une personne
jeune ou à son air et à ses manières.
Fripouna, v. Friponner; escroquer; dérober par adresse;
attraper par fourberie.
Fripounariè, s. f. Friponnerie; action, manœuvre de
fripon.
Frisa, w. Friser; crèper; boucler en parlant des che-
veux; raser, toucher superficiellement; broyer, pulvériser,
ameublir la terre; émietter.
Frisa, ado, adj. et part. pass. Frisé, crèpu; émietté.
Frisos, s. f. plur. Frisure; cheveux bouclés par le fer.
Frisoun, s. m. Terme de filature de soie, frison; filasse
de soie mêlée et brouillée que l’on tire en mèche avant
d'obtenir le brin pur soie. Plus la soie qu'on file est fine,
plus elle doit être purgée du frison. (
Le frison diffère des côtes en ce que celles-ci sont for- .
mées de la bave du cocon, qui s'enlève par longues filasses,
nds ‘À
FRO
qu'on carde ensuite et dont on fait du fleuret grossier; au
lieu que le frison contient beaucoup de bonne soie à la-
quelle il est mêlé et qu'on ne peut purger à cause d’un
agglutinement trop considérable.
Fron, s. ”. Dim. Frounté; péj. Frountas. Front, partie
du visage qui s'étend d’une tempe à l’autre et depuis le
cuir chevelu jusqu'aux sourcils. — Lorsque le mot Front
fr. est au fig. pour exprimer hardiesse, effronterie, notre
* dialecte le rend par Froun. — V. ©. m.
Dér. du lat. Frons, frontis, m. sign.
Froumaje, s. m. Dim. Froumajoù. Fromage, lait caillé,
égoutté et salé. — Le fromage des Cévennes est le plus
souvent fait de lait de chèvre; il est du volume et de la
forme du fromage du Mondor. Quand il est frais, on l’ap-
pelle Toumo; quand il est demi-sec et gras, Froumaÿe
adraqua; quand il a subi une opération de fermentation
particulière, on le nomme Péraldoù, espèce très-appréciée
et fort estimée, mais des indigènes seuls.
Au surplus la réputation du fromage de nos montagnes
date de loin : Pline, dans son Histoire naturelle, affirme
que le fromage le plus vanté et le plus recherthé à Rome,
ce rendez-vous général de tous les produits du monde,
provient de la contrée de Nimes, de la Lozère et du pays
des Gabales, le Gévaudan, bien que son mérite supérieur
ne dure qu'autant qu'il est frais et que sa préparation
gauloise lui donne une saveur médicamenteuse : Laus caseo
Romeæ, ubi omnium gentium bona cominùs judicantur à
provinciis, Nemausensi præcipua, Lesuræ Gabalicique pagi :
sed brevis, ac musteo tantèm commendatio... nam Gallia-
rum sapor medicamenti vim obtinet.
Froumaÿe cacha se dit d’une sorte de préparation de lait
caillé fermentée, assaisonnée fortement de poivre, d'eau-de-
vie ou de vinaigre, qui se conserve dans les campagnes en
pots comme une bouillie, d’un goût très-piquant, et qu'on
appelle aussi Rubarbo {V. c. m.). Viro-froumagje, espèce
de saut périlleux qui s'exécute en se tenant suspendu par
les poignets.
Les étymologistes donnent des origines diverses à ce
mot, qui, selon les uns, viendrait du celt. Fourmaich,
m. sign.; suivant d'autres, du gr. Dopués, naîte, panier
de jonc où l'on met égoutter le fromage et qui lui donne
sa forme, d'où la bass. lat. aurait tiré Formaticum, For-
mago, changé en Fromago, par métathèse, du lat.
Forma.
Froumajèiro, s. f. Fromagerie, lieu où l’on fait et où
l'on conserve le fromage; grand panier en forme de cône
où l'on met sécher et égoutter le fromage du pays: fro-
magère, femme de la campagne qui vient vendre journel-
lement en ville Jes petits fromages frais dits Toumos.
Froun, s. m. Front; hardiesse; effronterie; andace;
impertinence. — Voy. Fron.
Frounzi, v. Froncer; rider; plisser; faire un froncis.
Dér. du lat. Frons, fronts, front, par imitation des
rides et plis qui s’y forment lorsqu'on fronce les sourcils.
FUM 369
Frounziduro, s. /. Froncis; ride; plis; rides de la
peau.
Frucha, ». Fructifier; porter du fruit. — Za vigno a
bièn frucha aquést'an, la vigne a fait beaucoup de raisins
cette année,
Dér. du lat. Fruges ou Fructus.
Fruchè, s. m. Arbre fruitier; fruitier, jardin planté
d'arbres à fruits; lieu où l'on serre le fruit. j
Fruchè, fruchèïro, adj. Qui porte beaucoup de fruits;
qui aime beaucoup le fruit; fertile. — On le dit aussi par
ext. et ironie de qui aime le fruit défendu.
Frucho, s. /. Fruit en général; les fruits pris collecti-
vement. — Souï pas for à la frucho, je ne suis pas très-
amateur de fruits.
Frui, s. ”. Fruit, production des végétaux, arbres et
arbustes, servant à leur reproduction.
Emp. franchiman au français.
Fu, 3we pers. sing. du prétér. défini. Il ou elle fuit. Va-
riante ou contraction du v. Fugi, Fugis. — Déou tén qué
lou chi pisso, la lèbre fu, prvb., pendant que le chien ba-
guenaude, le lièvre fuit. On dit aussi : S’en-fu pour : il s'en
fuit.
Fugi, v. Fuir; prendre la fuite; courir pour se sauver;
passer rapidement.
Dér. du lat. Fugere, m. sign.
Fugidis, isso, adj. Fugitif; proscrit; qui est obligé de
se cacher; qui passe vite.
Fugido, s. f. Fuite ou déchargeoir d'un moulin; canal
de fuite.
Fulobro, adj. de tout genre. Dim. Fuloubréto. Paresseux;
fainéant; qui craint la peine toutes les fois qu'il faut la
subir dans un but utile.
Composé des deux mots Fu, il fuit, et l'obro, le travail.
Fuma, v. Fumer, jeter de la fumée; engraisser la terre
avec du fumier; fumer du tabac. Au fig. s'impatienter;
être vexé, ce qu'on appelle vulgairement, fumer sans pipe.
— À las câoudétos qué fumou, vite, aux châtaignes bouil-
lies toutes chaudes, qui fument.
Dér. de Fun.
Fumado, s. f. Dim. Fumadéto; augm. Fumadasso.
Fumée, vapeur épaisse que le feu ou la chaleur fait exbaler.
— Las Fumados, les Fumades, n. pr. d'un hameau et
de sources minérales dans la commune d'Allègre, où l’on
a découvert une piscine antique, des monnaies romaines,
des vases, patères, tuiles gallo-romaines. Ce nom est encore
celui de plusieurs localités dans le Gard, ruisseaux, mon-
tagnes ou quartiers.
Fumadisso, s. f. Grande fumés, persistante, incommode.
Fumarésto, s. f. Grande et épaisse fumée, comme celle
d’un four ou des fourneaux d'écobuage, des herbes et des
racines qu’on fait brüler sur la terre.
Fumé, s. m. Hirondelle de mer, mouette, oiseau de
l'ordre des Palmipèdes et de la fam. des Longipennes. —
Les espèces de ce genre d'oiseau, qui vit autour des étangs,
a.
370 FUR
sur l’eau desquels il se repose sans nager, sont assez nom -
breuses. Fumé désigne principalement, tout en s'appliquant
aussi aux autres, l'espèce la plus commune qui est l’hi-
rondelle de mer à tête noire ou Gachet, hirondelle de mer
épouvantail, Sterna nigra, Linn., tête et partie postérieure
du cou d’un noir profond, poitrine d’un blanc pur, le reste
du corps noir cendré ou bleuâtre, bec noir, vingt-quatre
centiniètres de longueur; ainsi nommée à cause de sa cou-
leur enfumée. — Voy. Gabian.
Fuméiroü, s. m. Fumeron ; flambart; petit charbon à
demi consumé qui jette de la fumée.
Fumélan, s. m. Femme, femelle, ou plutôt femmes en
général. — Se dit ironiquement et en mauvaise part. —
Voy. Fémélan, qui est le même mot.
Fumèlo, s. /. Femelle, compagne du mâle; qui appar-
tient au sexe féminin. — Appliqué à la femme, c’est un
terme de mépris ou d’ironie. — Voy. Fémèlo.
Fuméto, s. f. Camouflet, bouffée de fumée; niche qu'on
fait à un dormeur, en lui soufflant de la fumée dans le nez.
Fumiè, s. m. Fumier, mieux dit Fén { V. c. m.); trou,
fosse à fumier. — Fou traïre aqud dou fumië, il faut jeter
cela au fumier, dans la fosse à fumier.
Dér. du lat. Fimus, m. sign.
Fumièiro, s. f. Fumée qui se répand dans un appar-
tement; celle qu'on voit dans les claies ou séchoirs à
châtaignes ; fumée déviée de son cours ordinaire et qui
incommode.
Fumotèro, s. {. Fumeterre officinale, Fumaria offici-
nalis, Linn., plante de la fam. des Papavéracées, com-
mune dans les champs. — Voy. Fénoudéio, qui est un de
ses noms.
Fun, s. ”m. Fumée, vapeur plus ou moins épaisse qui
s'élève d'un corps brûlant. — Faire foço fun, faire l'im-
portant, faire claquer son fouet. D'aqu? mounté déou sourtà
lou lun, sor lou fun, prvb., ceux qui devraient donner le
bon exemple sont les premiers à scandaliser. Un fun dé
mounde, une foule, une infinité de personnes. Un fun dé
tèslo, un étourdissement, un éblouissement .
Dér. du lat. Fumus.
Fur, s. m. Fouille; recherche dans une maison opérée
par l'autorité municipale ou de police pour découvrir un
Vol. — Faïre fur, faire des recherches:
Dér. de Furga.
Fura, v. Ronger en dedans, comme font les vers ou les
fourmis. — Fura d'acdou, faire fuser la chaux, c.-à-d.
la réduire en poudre en y jetant une petite quantité d’eau .
Pèiro furado, pierre gercée, calcinée, rongée en dedans .
Dér. du lat. Forare, percer, faire un trou, forer.
Furé,s. m. Au fém. Furéto. Furet, Mustela [uro, Linn.,
marmmifère onguiculé de la fam. des Digitigrades ou Car-
nivores. Il est trop connu des chasseurs (et qui n’est pas
chasseur?) pour le décrire. Le furet ne peut subsister
chez nous qu’en domesticité; c’est ce qui le distingue no-
tamment du Putois, Pudis, avec qui on pourrait lui trou-
FUS
ver d’autres rapporis soit de forme, soit quelquefois de
pelage, mais qui ne vit qu'à l’état sauvage.
Dér. du lat. Furo, m. sign.
Furé, s. m. Souris de la plus petite espèce. — C'est
en quelque sorte une classification par taille, de manière
qu'une souris qui grossirait un peu trop deviendrait Ra,
qui est le nom générique de ces rongeurs; celui-ci qui
s'appelle le plus ordinairement Furé est le rat souris, Mus
musculus, Linn.
Furé, s. m. Furet, pris au fig., curieux; qui s’enquiert
de tout dans l'intérieur des familles; qui fourre son nez
partout,
Furétéja, v. fréq. Faire la chasse au furet. Au fig.
fureter; chercher à découvrir; courir partout pour savoir
des nouvelles; s’introduire partout.
Furga, v. Fouiller; chercher dans les poclies, au fond
d’un trou, d’un lieu bas et où l'on ne peut pénétrer qu'avec
les mains ou un outil quelconque.
En espag. Hurgar, m. sign., permutation de F en H.
En bas-bret. Furguein.
Furgaïre, aïro, adj. Fouilleur; fureteur; qui aime à
fouiller partout, à mettre la main à tout; tatillon.
Furoù, s. f. Fureur; emportement violent; violente
agitation; passion excessive; rage.
Empr. au fr. ou du lat. Furor, m. sign.
Fus, s. m. Dim. Fusé; péj. Fusas. Fuseau, instrument
qui sert à filer à la quenouille. — Tout aqud apouncho
pan fus, dicton, mot à mot: tout cela n'apointisse pas
un fuseau; ce qui signifie: tout cela est bien inutile;
c'est en vain que vous cherchez, que vous vous escrimez,
que vous voulez démontrer quelque chose, tout cela ne
prouve rien. La corrélation entre ces idées et cette locu-
tion, qui revient souvent, est difficile à saisir: ce qui
n'empêche nullement de comprendre.
Dér. du lat. Fusus, m. sign.
Fusa, v. Terme de chasse ou d’armurerie, faire long
feu ; fuser; brüler lentement, en parlant d’une amorce. SL
Sé fusa, se consumer à petit feu, se calciner.
Dér. du lat. Fusum, supin de Fundi, se répandre, s'é-
tendre.
Fusado, s. f. Fusée; quantité de fil qui peut se dévider
sur un fuseau; épi de maïs; pièce d'artifice.
Fusia, v. Fusiller; passer par les armes. Au fig. tirer
aux jambes; ce que fait un vendeur de mau vaise foivis-
à-vis d’un chaland qui ne peut se passer de l'objet qu'il
demande, ni se le procurer ailleurs.
Fusiado, s. f. Fusillade ; plusieurs coups de fusil tirés à
la fois, soit dans une bataille, soit à la chasse par amusement.
Fusil, s. m. Dim. Fusié; péj. Fusias. Fusil; arme à
feu composée d’un canon allongé, d'une platine ou batte-
rie, d’un fût et d’une baguette. — Avant l'invention de
Ja poudre, le fusil n'était qu'un briquet, et ce mot était
emprunté à l'ilal. Focile qui a la mème acception. Lors-
qu'on donna ce nom au mousquet, au fusil à chien, c'était.
pour indiquer la manière identique d’y mettre feu, par
opposition à l'arquebuse qu'on allumait avec une mèche.
Le fusil à percussion, à piston, le chassepot du nom de
l'inventeur, à longue portée, le fusil à double canon, sont
des perfectionnements successifs qui n'ont pas encore dit
leur dernier mot.
Fusté, s. m. Petite cuiller en bois, et par extension
toute cuiller d'enfant ou à café, qu'elle soit en étain ou en
argent.
Dér. du lat. Fustis, bâton, baguette de bois.
Fustiè, s. m. Au fém. ÆFustièiro. Charpentier, artisan
qui travaille le gros bois; tonnelier. — I] est devenu n. pr.
d'homme, rendu littéralement en fr. par Fustier.
Dér. de Fusto.
G 371
Eusto, s. f. Dim. Fustéto; augm. Fustasso. Poutre;
solive; grosse pièce de bois de charpente qui sert à sou-
tenir les toitures, les planchers, à former les échafau-
dages.
Dér. du lat. Fustis, m. sign.
Futa, futado, adj. Futé; rusé; adroit, plus que ne le
comporte la probité.
Dér. du lat. Fustis, bâton, par allusion aux oiseaux qui
perchent et fréquentent les bois, et qui sont plus rusés,
plus difficiles à attraper que ceux qui n’ont pas encore
quitté leur nid.
Futur, uro, s. et adj. Futur, future; futurs époux et
l'un d’eux.
Emp. au fr.
G
G, s. m. G, septième lettre de l'alphabet, cinquième des
consonnes. Isolément se prononce Gé. Les grammairiens
le rangent dans la classe des Palatales, qui comprend aussi
le CetleJ
Le G n'existait pas dans l’ancien alphabet latin; il
n'avait pas, avant la première guerre punique, de carac-
tère spécial qui le distinguât du €, et ce fut Spurius Car-
vilius qui inventa la figure par laquelle il est représenté;
ce qui toutefois n’empècha pas les deux lettres d'être sou-
vent confondues dans leur prononciation. Au contraire les
idiomes celtiques l'avaient toujours admis, et il était une
de leurs articulations naturelles. Cette prédilection se
manifeste dans les langues néo-celtiques, et dans notre
dialecte comme dans le français, ce qui prouverait une fois
de plus leur primitive et originelle attache. Le bas breton
et le gallois, en effet, ne trouvant pas dans leurs aptitudes
de facilité à articuler le V, lui ajoutent un G pour adou-
cir une aspiration trop forte: du lat. Velum, ils font Guwél;
de Vinum, Gwin} de Ventus, Gwent; de Viridis, Gwer;
de Vanus, Gwan; de Vacuus, Gwag; de Verus, Gwir, etc.;
comme nous avons fait, sur une pareille flexion, Gas,
Gué, fr., du lat. Vadum; Gardoù et ses dérivés, Gardon,
du lat. Wardo ou Vardo. A la vérité, l'effet inverse se
rencontre : le lat. Gyrare est devenu pour nous Vira, et
en fr. Virer; Gyrus, en fr. Virole; etc., etc.
. Comme le C chez les Grecs, les Romains et les Gaulois,
le G avait toujours le son dur devant toutes les voyelles.
Mais quand la langue se renouvela, le roman, qui cher-
chait à se dégager de l'oppression du latin, tout en utili-
t ses débris et ses altérations devenues barbares, obéit
à un désir instinctif d’adoucissement dans la prononciation,
autant qu'à des préférences d'organisme vocal, à des in-
fluences climatériques peut-être, que rien ne comprimait
plus. La force ou la faiblesse des voyelles agit sur la nature
des articulations et particulièrement sur celle du G et du
€, selon qu'ils étaient suivis d'un À, d’un © ou d’un w,
voyelles au son grave et plein; on les prononçait différem-
ment que suivies d’un £ ou d’un Z, voyelles faibles; et le
G doux, prononcé comme J, n’imprima plus à l'E et à V'£
de consonnance rude qu’à la condition d'interposer un #
(Gu), entre lui et ces dernières voyelles.
Cette affinité des deux Palatales les portait facilement à
se substituer l’une à l’autre /Y. lettre C); mais les per-
mutations qui amènent le G, de beaucoup mieux connu,
sont aussi plus fréquentes. N'est-ce point pour cela que
les désinences de tant de noms propres et de noms com-
muns en anicus, enicus, inicus, onicus, presque toujours
au pluriel fém. anicæ, enicæ, inicæ, onicæ, sonnant en kæ
à la finale, furent changées des premières par la langue ro-
mane en anègues, énèques, inègues, onègues, d'où le € latin
avait disparu ? Cependant cette combinaison présentait en-
core deux flexions antipathiques au nouveau langage, celles
de Net de G durs; mais elle mettait presque en contact les
déux lettres séparées seulement par un 1 faible. Il est per-
mis de croire que ce rapprochement rappela une ancienne
articulation celtique qui manquait au latin et que le roman
se hâta de reprendre par une mouillure nasalisée avec l'al-
liance du Gn; et l'on voit en effet les appellations latines
Martinianice, répondant en roman Martinianègues, deve-
nir en lang. Martignargues, en fr. Martignae, Martignan,
Martigny ; Salvinianicæ, Salvanègues, Savignargues, Salva-
gnac, Sauvigny, Savigné, etc. Si l'idiome méridional affecte
372 G
ces terminaisons d’une forme particulière, rude encore, ce
n’est peut-être qu'un souvenir étymologique du latin dans
la Narbonaise, où il fut plus cultivé que dans le reste de la
Gaule; mais la permutation ne s’en fait pas moins sentir ;
et ce n’est pas notre dialecte qu’on peut accuser de négliger
cette vocalisation caractéristique du Gn gaulois.
Au reste, il est probable que cette forme amena, par
une légère inversion, celle du WG avec toutes les voyelles,
sur laquelle l’adoucissement du G fut encore plus marquée
par les finales en ange, enge, inge, onge, ounge, qui n'é-
taient que des variantes identiques aux précédentes, et
qui passaient par une permutation déjà expliquée, en
anche, enche, inche, onche, dérivant toutes du même prin-
cipe. — Voy. Agno, suff., les mots Canounge, La Ca-
nourgo, et la lettre AN.
Tel est le chemin qu'a parcouru le G et les transfor -
mations par lesquelles il a passé pour venir dans notre
alphabet. Le son qui lui est propre est guttural devant les
voyelles fortes a, o, u, ou, Gani, Gonle, Gulo, Gounil .
Devant les voyelles faibles e et à, il se modifie comme
en fr. et prend la même prononciation que le J, c.-à-d. à
peu près comme le J fr. précédé d’un D : Géngivo qui se
prononce Djéndjivo, et en ital. Geronimo, Gurgio .
Devant la consonne NW, lorsque celle-ci est suivie d’une
voyelle, le G ne se fait pas sentir, mais il mouille l’x
comme en fr., c.-à-d. qu'il lui donne la prononciation
qu'elle aurait si elle était suivie d’un J se liant avec elle,
sans former deux syllabes. On prononce Gagna, Pagnè,
Cougné, Mignd, Ségnur, Vignoù, comme s'il y avait
Gania, Paniè, Counié, Minid, Séniur, Vinioù, tous dis-
syllabiques, et comme en ital. Agnello, Ignado, Ogni.
Dans beaucoup de mots, le G doit conserver l’articu-
lation dure et gutturale, mème devant les voyelles e et à :
en ce cas, on place un « entre cette voyelle et le g, ce qui
est usité aussi en fr., Langue, Guerre, Guider, et on écrit
Guèto, Guiché, Guènche, Guingoï, etc.
D'après ce principe, il faudrait absolument bannir la
voyelle # de tous les mots où le g serait suivi des lettres
a, 0, u; Car pour eux le g n’a nullement besoin de cette
intercalation pour être guttural. Le fr. la supprime le plus
souvent; mais nous avons éprouvé quelque hésitation à
appliquer cette règle générale. Le languedocien, qu'on lit
moins et dont l'orthographe est moins familière aux yeux,
a besoin, pour l'intelligence de certains mots, de rappeler
leur racine, leur étymologie, et leurs rapports de famille.
Dans les divers temps d'un même verbe, par exemple, on
pourrait ne pas saisir de prime-abord la parenté entre
l'infinitif terminé en a et le prétérit défini au milieu du-
quel intervient un e-avant ces terminaisons, comme Carga
et Carguère. I1 en serait de mème de la plupart des mots
qui ont des dimin. en éto : Fournigo, Fourniguéto, etc.
Ces considérations nous ont frappé, sans nous détermi-
ner absolument. Nous n'adopterons donc l’intrusion de cet
u parasite que comme une exception et toutes les fois que
GAB
la clarté du sens ou le besoin de mieux in diquer la déri-
vation d’un mot nous paraitront nécessiter cette combi-
naison, sans l'ériger en principe d'orthographe. |
Gabiaïre; s. m. Fabricant où marchand de cages.
Dér. de Gabio.
Gabian, s. m. Hirondelle de mer; mouette; goëéland;
petite mouette des rivières; nom commun à un certain
nombre d'oiseaux aquatiques du genre Larus, Linn., de
l'ordre des Palmipèdes et de la fam. des Longipennes ou
Macroptères. — Voy. Fumé.
Autrefois, le peuple donna, comme appellation de déni-
grement qui s’est conservée, le nom de Gabian aux pré-
posés de la gabelle, commis. aux fermes, douaniers de
l'époque, qui exerçaient sur nos côtes de la Méditerranée.
Pour se mettre à l'abri des injures du temps, sur une
plage déserte, comme aussi pour surveiller la fraude de
plus loin, ces employés avaient des cahutes élevées, sortes
de hunes ou gabies, ou bien gabios, cages, d’où leur nom
fut tiré. — Le fr. a de même ses matelots gabiers, et en
terme populaire le mot Gabeloux, pour désigner les mêmes
préposés. — L’analogie fut facile entre eux et ces oiseaux
que l'on voyait, comme les commis, sans cesse allant,
venant sur la plage, et Gabian devint le nom générique
de ces hirondelles de mer, de ces mouettes dont les espèces
sont très-nombreuses et qu'on appelle encore Æumé, Vanèlo
ou Guféto, appliqués à peu près indifféremment à toutes.
Une autre étymologie, la contre-partie de la première,
se présente aussi naturellement. Mouette se dit en lat.
Gavia ; de là à Gabian il n’y a qu'un pas. Ce serait alors
l'oiseau qui aurait donné son nom au douanier qui venait,
concurremment avec lui, s'établir sur le bord de la mer.
Cette étymologie est sans doute la bonne; mais il est
certain qu'à son défaut l’autre aurait pu utilement la
remplacer, et dans aucune troupe il n’est pas ordinaire de
voir une utilité approcher autant du premier rôle,
Gabio, s. f. Dim. Gabiéto; augm. Gabiasso. Cage, ‘petite
loge en fil de fer ou d'osier pour les oiseaux, en fer pour
les animaux et les captifs. — Gabio dé manéchal, travail
de maréchal, espèce de cage où l’on enferme une bête
rétive pour la ferrer ou pour lui faire subir une opération
douloureuse.
Dér. du lat. Cavea, m. sign., par la permutation du €
en G et du v en b. En ital. Gabbia. |
Gabre, s. m. Dim. Gabroù; péj. Gabras. Jeune fille
effrontée, garçgonnière et étourdie. Par ext. le mot Gabre
s'applique indifféremment aux deux sexes et aux choses
inanimées pour : folâtre, étourdi, effronté. — Autrefois on
appelait Gabre les vieilles perdrix mâles. L’épithète actuelle
pourrait bien avoir là pris naissance.
En syriaque Gaber signifie force, virilité; homme :
Gabriel, homme ou puissance de Dieu. Tout cela annonce
que notre mot Gabre actuel tient à l’idée de Virago, de
fille ressemblant à un mäle. Ce que nous avons dit des
permutations du G ne fait pas obstacle à ce que ce mot
GAI
latin ne soit le patron exact sur lequel le lang. s'est
formé.
Gafarô, s. m. Glouteron, plante, de la mème fam. que
le Grateron, auquel il ressemble beaucoup, Arapo-man. —
Voy. Lampourdo et Tiro-pèou.
Gaféto, s. /: Mouette, hirondelle de mer. — Voy. Fumé,
Gabian.
Gafo, s. /. Tirtoir de tonnelier, composé d’un manche
en bois et d’un fer mobile et recourbé, avec lequel on tire
le cercle d’une futaille pour le faire entrer au-dessus des
douves.
Dér. du vieux nom Gaf, crochet.
Gafou, s. m. Dim. Gafouné. Gond, morceau de fer qui
soutient la penture d’une porte, d’une fenêtre.
Dér. du gr. léuyos, coin, clou, d'où le lat. Gomphus,
m. sign, ou de Kuygës, courbé.
Gagna, v. Gagner; faire un gain; attraper; obtenir; se
diriger vers... — Dé qué gagno aquél varlé? quels sont les
gages de ce valet? Aï gagna un fré, j'ai attrappé un rhume.
. Gagna lou sère, se diriger vers la montagne. Gagna lou
grés, se sauver, décamper pour éviler un danger ou la
prison: c’est ce que font les déserteurs, les proscrits, les
repris de justice. Qué gagno tén, gagno tout, prvb., avec
le temps on vient à bout de tout,
En v. 1. Gazagnar ; en ital. Guadagnare.
Gaï, gaïo, adj. Dim. Gaïé, éto. Gai; réjoui; joyeux;
frais; plaisant; libre, pas trop serré. — Lou més dé maï
frés et gaï, le mois de mai frais et vif. Un tén gaï, un temps
serein, un air frais. On és gai dinc aquélo vèsto, on est au
large, on a les mouvements libres dans cet habit.
On dit Gaï d’un ressort, d’un tenon, d'un crochet, qui
jouent librement.
Dér. du lat. Gavisus, m. sign.
Gaïamén, adv. Gaiment, de bon cœur; joyeusement ;
en pleine liberté; sans gène.
Gaïar, gaïardo, adj. Robuste; vigoureux; bien por-
tant; qui a le teint frais. Par ext. beau et joli.
Ce mot employé au subst. répond au Gaillard, fr. —
ÉS un guiar, c'est un gaillard, un franc luron.
- Augm. de l'adj. Gaï. Le lat. Validus, par la permuta-
tion connue du G substitué au VF, pourrait bien ne pas y
être étranger.
Gaïéto, s. /: Riz de veau, d'agneau; la partie glandu-
leuse qui se trouve sous la gorge au haut de la poitrine des
animaux de boucherie.
Ce mot ne s'emploie qu'en terme de cuisine ou de bou-
cherie.
Gaïo, s. f. Barbe de coq, petites membranes rouges que
les coqs et les poules ont suspendues sous la tête. Par ext.
menton à double étage; trogne; embonpoint ; visage frais .
Dér. de Gal.
| Gaïo dé nose, s. /. Quartier de noix, cuisse de noix.
Contraction de Nougaïo, qui a dù exister autrefois,
GAL 373
comme on le voit par son dim. Nougaïoù, qui est resté. —
Voy. c. m.
Gaïofo, s. m. Gros réjoui; viveur; bélitre. s
Dér. de Gaïo. — Sauvages se demande s’il ne pourrait pas
ètre une corruption de Guelfe, parti politique fameux dans
l'histoire. En esp. Gallofa signifie : menewune vie de men-
diant ; en port. Galhafa, joie, réjouissance : les deux sens
de notre mot se trouvent là reproduits.
Gaïoufardo (Fèbre), s. f. Fièvre goulue, maladie feinte
ou légère qui n'ôte rien à l'appétit.
Ce mot parait dérivé de Gaïofo. Sauvages répète, dans
une tradition, qu’il est composé de deux mots de l'ancien
roman, Galiou, avale, et Fardo, victuaille. Nous revien-
drons volontiers aux termes esp. et port. cités à l’article
précédent, qui nous paraissent fournir une origine tout
aussi probable.
Gaïre, adv. Guère, peu, pas beaucoup, presque point.
— Gn'a pas gaïre, il n’y en a guère, il n’y en a pas beau-
coup. Sou gaïre? Sont-ils nombreux? Gaïre bé, presque.
S'èn manquo pas dé gaïre, il ne s'en faut pas de beaucoup,
il s'en manque de peu.
On est loin d'être fixé sur l'étymologie : les plus savants
la tirent de l’ancien haut-allemand pour arriver à lui faire
signifier : beaucoup ; exactement le contraire de l'acception
actuelle. Autant vaudrait, et micux peut-être, faire déri-
ver Gaïre de Caïre par permutation : Caïre, quartier,
morceau, partie de quelque chose, fraction, fragment, plus
petit qué*le tout, moins, c.-à-d. pas beaucoup, ou peu.
Avec de la bonne volonté, ce rapprochement est admis-
sible.
Gaïroutos, s. f. plur. Gesse cultivée à fleur rouge, La-
thyrus cicera, Linn., plante de la fam. des Légumineuses,
bonne pour fourrage.
Gaja, v. Imposer sans jugement une amende ou une
indemnité à quelqu'un surpris en maraude ou qui a com-
mis un dégât quelconque; dresser procès-verbal contre lui
en qualité de garde-champètre.
Dér. de Gaje.
Gaje, s. m. Gage, ce qu'on livre pour süreté d’une
dette, d’une promesse, d’un engagement; nantissement,
dépôt; objet déposé au jeu comme punition; salaire; ap-
pointement; gages d'un domestique, qui s'emploie au sing.
en lang. — Gagno un bon gaje, il reçoit des gages con-
sidérables. Métre én gaje, engager, déposer en nantisse-
ment.
Dér. de la bass. lat. Vadium, venu du lat. Vas, vadis,
caution.
Gajé, s. m. Dim. de Gas, Geai, petit geai ou petit du
geai. Cependant il s'emploie peut-être plus communément
encore que Gas pour signifier l'oiseau adulte. — Voy. Gas.
Gal, s. m. Dim. Gaïé ou alé; péjor. Gaïas. Coq, mâle
de la poule, Phasianus Gallus, Linn., oiseau de l'ordre des
Gallinacés et de la fam. des Domestiques ou Alectrides.
— Lou gal cantè, séguè jour, iéou m'én anère, au point
374 GAL
du jour le coq chanta et je m'en fus : c'est la formule
terminale des sornettes et contes de veillées, qu’on suppose
durer toate la nuit et finir à l’aube comme les contes de
Shéérasade. On emploie cette formule également et par
ironie, quand on entend un récit quelconque, pour témoi-
gner qu'on le croit fabuleux et qu'on le tient pour sor-
nette.
Gal, comme en fr., s'applique au fig. pour : Coq de vil-
lage. Au pr. il signifie encore la panne d’une pioche qui est
tranchante et sert à couper les racines et les souches
mortes.
Dér. du lat. Gallus, m. sign.
Gala, v. Cocher, se dit de l'acte du coq qui couvre une
poule. — Un idou gala, un œuf fécondé et susceptible
d'éclore, ce que ne font point les œufs des poules renfer-
mées dans les maisons sans commerce avec le coq, et qu'on
appelle Glatiè. —Y. c. m.
Galabountan, s. m. Roger-Bontemps; un réjoui, un
sans-souci, qui fréquente les cabarets et les tavernes.
Ce mot est composé comme son correspondant fr. de
Bon-temps, qui s’est conservé dans son intonation, auquel
on a ajouté Gala, qui dans le vieux roman signifiait : se
réjouir.
Galan, s. m. Galant ; amant; soupirant; amoureux d’une
fille. — On le prend indifféremment en bonne et en mau-
vaise part, tandis que le Fringaïre est presque toujours
supposé amené par le bon motif. Les nourrices et les
bonnes d'enfant appellent leur poupon : moungalané,
terme d'affection et de caresse.
Dér. de Gal.
Galanga, s. m. Baudroie, raie pécheresse, poisson de
mer. — Voy. Béoudroi.
Galantino, s. f. Ancolie; églantine, Aquilegia vulgaris,
Linn., plante de la fam. des Renonculacées, commune dans
les terrains pierreux, cultivée comme plante d'ornement
pour l'élégance de sa fleur.
Galapastre, s. m. Bergeronnette, oiseau.—Voy. Couacho.
Le languedocien a purement formé ce nom : son père,
le vieux roman, disait Gala, pour se réjouir, et le latin,
son grand-père, lui a transmis de Ja main à la main Pastre,
de son Pastor. Par ses jolies couleurs, sa gentillesse, sa
familiarité, la Bergeronnette-Lavandière, qui aime les
troupeaux, ne réjouit-elle pas le berger, à qui elle fait une
fidèle et aimable compagnie?
Galariè, s. f. Dim. Galarièiréto. Galerie, terrasse cou-
verte attenant à une maison. Au fig. lieu que l'on fré-
quente, où l’on fait ses tenues habituelles. — Lou cafè et
lou cabaré, aqud soun sas galariès, le café et le cabaret
sont ses galeries habituelles, il ne fréquente que ces en-
droits-là.
Les étymologistes le font dériver de l’allem. Wallen,
marcher, se promener : permutation fréquente du W en G
sur le subst. Walleria. f
Galatras ou Pus-âou, s. m. Galetas; les combles d’une
GAL
maison sous le toit. Par ext. logement délabré et mal-
propre.
Dér. suivant les uns, de l’hébreu, Galisath, selon les
autres de l'arabe Valata, chambre haute.
Galavar, ardo, adj. Dim. Galavardoù, ouno; péj. Ga-
lavardas. Gourmand; goinfre; goulu; glouton. — Péses
galavars, pois goulus. Las trufos soun bièn galavardos,
les pommes de terre sont fort gourmandes; elles exigent,
absorbent une quantité d’assaisonnement.
Le lat. Gula doit avoir servi de base à la composition
du mot. En esp. Galavardo, prodigue.
Galavardéja, v. fréq. Goinfrer; manger beaucoup et
avidement, sans délicatesse.
Galavardije, s. f. Gourmandise sans goût; goinfrerie.
Galé, $. m. Garrot d'un cheval; cochet, jeune coq : dim.
de Gal. Par ext. du premier sens, cou, nuque.
Dér. de l’hébreu Gharon, gosier.
Galéja, ». fréq. Coquéter; lever la crête; faire le galan-
tin; plaisanter; badiner.
Dér. de Gal : gallum agere, faire le coq.
Galéjaïre, aïro, s. et adj. Galant; plaisant; badin;
moqueur; goguenard.
Galérièn, ièno, s. et adj. Galérien; forçat; condamné
aux galères.
Galèro, s.f. Galères; peine des travaux forcés. Au fig.
condition désagréable; situation pénible, tourmentée. —
Comme le fr. s'emploie souvent au plur. Coundanna à las
galèros, condamné aux galères. Sourtè d'én galèro, libéré
des galères. Éscapa d’én galèro, injure grossière : échappé
des galères; vaurien; mauvais sujet. Soun oustâou és uno
galèro, il est au supplice dans sa maison, c'est une vraie
galère.
Galèro est aussi le nom de cette sorte de ratelier double
dont on se sert dans les bergeries pour donner à manger
aux brebis et agneaux : les barreaux en sont plus serrés
qu'aux rateliers ordinaires, et on les place au niveau du
sol. S’applique également, en terme d'agriculture, à cet
instrument nommé du même nom en fr., qui est un grand
rateau ou ratissoire employé, après le fauchage, pour re-
cueillir tout le foin. — Ces deux dernières acceptions
nous paraissent avoir fourni la dénomination d’une des
rues du vieil Alais, La Galèro. Au temps où la ville n’a-
vait pas encore toute l'étendue qu’elle a acquise depuis,
c'était là peut-être que les troupeaux, au retour du pacage
communal, venaient se remiser, et que se trouvait, comme
le four banal, le moulin banal, la Galèro banale dans la
bergerie commune. Il se pourrait encore que, à cette épo-
que où les corporations avaient chacune leur quartier, il
se trouvât là des fabricants de ces sortes de rateliers, ou
l’un d'eux plus habile que les autres ou plus achalandé,
qui eussent donné le nom des instruments agricoles en
question à une rue qui éprouvait le besoin d'être connue
et d'être remarquée. Les choses ont bien changé depuis,
mais le nom rappelle toujours les traditions.
*
| _ gran dé gald, au grand gal
Galignè, s. m. Galignèïré. Poulailler ; lieu où les poules
se couchent, se juchent et pondent. — Propre coumo la
baro dou galignè, antiphrase, sale comme un juchoir à
poules.
Dér. du lat. Gallinarium, m. sign.
Galiné, s. m. Coquet: qui fait le galantin auprès des
femmes; petit-maitre.
Galinéto dâou bon Diou, s. f. Bète à Dien ou vache à
Dieu : en terme de naturaliste, Coccinelle, Coccinella, Linn.,
insecte de l’ordre des Coléoptères et de la fam. des Tri-
mérées; petit scarabée hémisphérique, de la grosseur
d’une lentille, dont les élytres sont rouges et marquées de
sept points noirs. Il a des frères semblables à lui, excepté
pour la couleur, qui est jaune ou brune, ou tachetée de
blanc; mais le rouge est le plus joli et le préféré des enfants,
” qui én font leur jouet et non point leur victime cette fois,
car ils ne cherchent qu’à le faire envoler au refrain d’une
chanson qui est composée pour lui.
Galino, s. f. Dim. Galinélo; péj. Galinasso. Poule,
femelle du coq en général; en particulier, poule qui a
.déjà pondu; la jeune poule se nomme Poulo. — Émbé las
galinos on aprén à grata, prvb., avec les poules on apprend
à gratter. Sé couja coumo las galinos, se coucher de bonne
heure, quand les poules se couchent.
Dér. du lat. Gallina, m. sign.
Galino ou Dourmiouso, s. f. Torpille, poisson. —Voy.
Dourmiouso.
Galinolo, s. f. Coralloïde, champignon de la tribu des
Clavariées ou Clavaires coralloïdes. Son tronc est épais et
se divise en un grand nombre de rameaux glabres, cylin-
driques, pleins, fragiles, taillés en branches de corail et
dont la surface est comme ondulée. Sa couleur est d’un
jaune pâle. On en distingue de plusieurs variétés ou sous-
espèces, dont la couleur est tantôt flavescente, jaune, blan-
châtre, tantôt incarnat ou d'un rouge orangé, améthyste.
Ce champignon se trouve en automne dans les châtai-
gneraies, surtout dans les bruyères /Broussos) ; sa chair
est blanche, cassante, d’une saveur agréable, d'une odeur
légère de champignon; elle fournit une nourriture très-
saine, et devient, pour les paysans qui savent la conserver
ou dans la piquette ou dans l'eau salée souvent renou-
| velée, une ressource précieuse pour l'hiver.
Galipian, ando, adj. Écervelé; indiscipliné; un polis-
son ; un bélitre.
Galo, s. m. Galop d'un eval ; allure précipitée. — A
» ventre à terre; au fig., avec
- la plus grande rapidité.
Dér. du gr. Kékmn, trot du cheval.
ï, galoïo, adj. Réjoui, de Has er: plaisant
‘divertissant ; aimable.
En fr. on disait dans le mème sens Gallois, déri-
vés sans ute l'un | et l'autre du gr. l'éw, rire, se ré-
jouir; ou du lat. Gallus, coq, galant.
Galoubé, s. m. Galoubet; flageolet de Provence, qui
GAM 377
s'accorde avec le tambourin. Il n’a que trois trous et
monte quelquefois à la dix-septième, parce qu'on subdi-
vise ses sons en fermant chacun de ses trous à moitié, au
tiers ou au quart.
Dér. du gr. l'akepés, gai, joyeux, et Oubé, dim. ou cor-
rupt. de Aouboï, haut-bois.
Galoun, s. m. Din. Galouné. Galon, passement de soie,
d'or, d'argent, de laine. — Dé galoun, du fleuret, galon
de fil ou de coton.
Galouna, v. Galonner, orner on border de galons.
Galoupa, v. Galoper, aller au galop. Par ext. aller
très-vite; courir çà et là.
Galoupado, s. f. Temps de galop; course précipitée;
course déréglée.
Galoupaïre, aïro, adj." Qui aime à courir; qui ne reste
jamais en place; qui va constamment d’un pays à un autre
sans s’y arrêter.
Galoupin, ino, adj. Dim. Galoupind; péj. Galoupinas.
Galopin; batteur de pavé; polisson.
Galoupina, v. Battre l’estrade; courir çà et là; vaga-
bonder. Par ext. fainéanter par les rues et places.
Galoupinéja, v. fréq. du précédent .
Gama, v. Donner des goitres; rendre goitreux. — Aqud
té gamara pas, tu n’en tâteras pas, cela ne te fera pas mal
aux dents.
Gama, ado, adj. et part. pass. Se dit d'un mouton ou
d’une brebis dont le foie est attaqué et qui menace de dis-
solution. Ce vice n’est point rédhibitoire, parce qu'il est
sensible et apparent pour les connaisseurs : la laine des
individus attaqués est plus blanche et plus matte, l'orbe
de l'œil est pâle et sans reflet, et privé absolument de ces
filets de sang qui y sont toujours injectés dans l’état nor-
mal. — És gama, en parlant des personnes, il a un goïtre.
Ce mot dériverait-il, comme on l’a dit, du lat. Camelus,
chameau, à cause des bosses que cet animal porte sur le
dos? Allusion par similitude.
Gamachado ou Gamatado, s. f. Augée, plein une auge
de mortier; contenu d'une auge de maçon.
Gamacho ou Gamato, s. f. Auge de maçon, espèce de
caisse non couverte dans laquelle les manœuvres viennent
déposer le mortier qu’ils apportent sur la planche ou dans
l'oiseau. et où les maçons gâchent aussi le plâtre.
Dér. du lat. Gabata où Camella, jatte, écuelle.
Gambéja, v. fréq. Gambiller; remuer les jambes de côté
et d'autre; aller clopin-clopant.
Dér. de Cambo, par permutation.
Gambio, adj. de tout genre. Boïteux ; bancal; cagneux ;
qui marche à cloche-pied .
Gamé ou Larda, s. ”. Espèce de raisin blane hâtif: à
part sa précocité, il est très-fertile et donne beaucoup de
belles grappes ; ses grains, très-serrés, sont blancs, ronds,
assez croquants; il se conserve longtemps. La feuille est
assez grande, pas trop découpée; le bois rond et tendre.
On fait rarement du vin de Gamé seul, parce qu'on en tire
376 GAN
meilleur parti en vendant cette espèce comme raisins de
table.
Le Gamé négre, variété, est un cep des plus robustes.
Il demande un bon terrain. Il est bon de le connaitre à la
taille et de le charger beaucoup en bois; alors il donne de
très-belles grappes; les grains sont gros, noirs, ronds, bien
fleuris. 11 donne un vin très-foncé. Beaucoup de bois, ten-
dre, très-condé : les yeux sont gros, feuille grande aussi,
peu découpée et d’un vert très-foncé.
Gamégno, s. f. Grive rouge-aile, mauvis, roselle, Tur-
dus iliacus, Linn., oiseau de l’ordre des Passereaux et de la
fam. des Crénirostres. Cette grive, la plus petite de la
famille, est une des meilleures à manger. Le dessus du
corps gris olivâtre ; couverture inférieure des ailes et flancs
rougeatres; ventre blanc pur; vingt-deux centimètres de
long; n'arrive qu’en automne pour disparaitre en novem-
bre. Cette espèce voyage par bande et par vols.
Gamèlo, s. f. Gamelle; grande soupière de paysans. —
Manja à la gamèlo, puiser au même plat comme les sol-
dats; être à l'ordinaire des soldats.
Dér. du lat. Camella, grand vase de bois.
Gamije, s. f. Gamme ou game, goïtre des moutons;
maladie du foie chez les moutons; commencement de dis-
solution.
Dér. de Gama. É
Gamo, s. f. Gamme, échelle des notes, des tons et des
sons en musique. — Se prend au fig. dans quelques locu-
tions qui existent aussi en fr. — Té vôou dire ta gamo, tu
vas entendre tes vérités. Li cantè uno gamo, il lui chanta
une gamme, il lui débita des injures. À pas la gamo, il n’a
pas le fil, il manque de savoir-faire, il n’a pas de ruse.
Avédre la gamo, connaître la rubrique, avoir la clé, le
truc.
Empr. au fr. Gamme, m. sign.; mais bien reçu et bien
vu.
Gan, «. m. Dim. Gané. Gant, vêtement qui couvre la
main et les doigts séparés.
Dér. du lat. Vagina, gaine.
Ganacho, s. f. Longue robe de laine ou de tricot, sorte
de chemisette, que les femmes portent par-dessous, et les
enfants de paysans par-dessus, jusqu'à un âge souvent
avancé et ridicule pour les petits garçons.
Dér. de la bass. lat. Guanacum, la tunique des anciens
Gaulois.
Ganaro, s. /. Dim. Ganaréto; péj. Ganarasso. Ivresse ;
état d'ivresse, de délire, de demi-aliénation que produisent
des libations prolongées.
Dér. d'1 lat. Ganea, cabaret.
Gandaïa, ». Battre le pavé; faire le fainéant, le marau-
deur.
Dér. probablement de l’ital. Andare, aller.
Gandar, s. m. Dim. Gandardé, Gandardoù; pejor.,
Gandardas. Batteur d’estrade; gamin renforcé; dévergon-
dé; maraudeur.
GAO
Gandi (Sé), v. Arriver; être rendu au but d’un voyage,
d’une course; se rendre; toucher au but.
Gandolo, s. f. Terrain plus bas et à bords relevés,
comme le serait le lit d’un torrent desséché; gondole, en
terme de ponts-et-chaussées, rigole pavée et fort adoucie
qui coupe à angle droit une route, pour le déversement
des eaux pluviales dans les fossés latéraux.
Gandouèso, s. f. Faribole; sornette; gaillardise; dis-
cours un peu graveleux.
Se ressent dans son étym, de l’idée de Gandar.
Gandré, adv. Assez; en assez grande quantité; passa-
blement. — És gandré iuën, c’est assez loin.
Gangassa, v. Secouer ; ébranler; agiter fortement.
Dér. du lat. Conquassare, m. sign., par la permutation
de l'articulation € en G.
Gangassado, s. f. Secousse ; ébranlement; frottée; mau- .
vais traitements.
Gani, s. ». Canif, instrument tranchant, à lame étroite,
qui sert à tailler les plumes.
Corrupt. du fr.
Gansa, ». Faire une ganse; retaper les chapeaux tri-
cornes, seuls portés autrefois, à qui on faisait prendre et
tenir cette forme au moyen de petites agrafes et ganses
intérieures. Par ext. empoigner; saisir; arrêter. — L'an
gansa, on l’a arrêlé, écroué.
Ganso, s. f. Ganse, nœud de ruban, boucle ou anneau
d’un cordon, d’une agrafe.
Dér. du lat. Ansa, anse, poignée.
Ganto, s. f. Oie sauvage, Anser segetum, Temm. Oiseau
aquatique, de l’ordre des Palmipèdes et de la fam. des
Serrirostres; plumage cendré; vivant par troupes dans le
Nord, de passage rapide dans nos contrées. — Ce nom
s'applique aussi à la grue et à la cigogne. — Vôou maï un
âoussèl à la man qu'uno ganto én l'air, prvb., mieux vaut
moineau dans la main qu’une grue qui vole.
Ganto, qui n’est plus guère connu sous cette acception,
l’est encore beaucoup dans le style bas et ordurier comme
synonyme de femme de mauvaise vie.
Pline dit que les Germains appelaient les oies Ganzæ ou
Hante. En allem. Ganz, oie.
Gâou, s. m. Envie; joie; plaisir; aise; hasard heureux.
— Aqud té faï gâou, cela te donne envie. L'arjén mé faï
pas gâou, l'argent ne me tente pas. Rés mé faï pas gâou,
je suis dégoûté de tout; rien ne me sourit; les meilleurs
morceaux me sont fastidieux. Aguèn gran gâou dé n'èstre
déforo, nous fûmes fort heureux d’en être dehors. Manjan
dé pan bru et grand gdou dé n'avé, nous mangeons du
pain bis et fort heureux d’en avoir!
Dér. du lat. Gaudium, joie.
Gâoubi, s. m. Biais; adresse; maintien. — Voy. Én-
gâoubi.
Gâouche, gâoucho, adj. Gauche; maladroit gêné;
contraint; taillé de travers; un corps sphérique ou cylin-
drique dont la circonférence est fausse. — La géoucho,
bete
.
GAO
la main gauche. À gdoucho, à gauche. À man gdoucho, du
côté gauche.
Dér. du gr. l'avsée, oblique.
Gâouchè, gâouchèiro, adj. Gaucher; qui se sert de
préférence de la main gauche au lieu de la droite, dans les
exercices des bras et des mains. — Voy. Dréchè.
Gâougno, s. f. Ouïes des poissons; glandes derrière les
oreilles de l'homme; les parties latérales des joues, les
parotides. Par ext. trogne, visage.
On a dit que ce mot était ligurien, et d’autres celtique;
mais le grec a l'évus, menton, mâchoire, et Tvéfos, joue,
mâchoire, bouche; et le lat. Gena, joue. Viendrait-il
aussi de là; et ne l’avons-nous que de troisième main ?
Gâouja, s. m.n, pr. de lieu. Gaujac; nom commun
dans le Gard à plusieurs localités, notamment dans les
cantons d'Anduze, de Bagnols, de Beaucaire, de Vézeno-
bres, du Vigan. Le latin des cartullaires anciens désignait
uniformément ces quartiers, ces agglomérations devenues
des communes, par le nom de Gaudiacum. La forme Géou-
jargue, Gaujargues, hameau du canton de Cavillargues,
représentée par le lat. en 924, par Ananica, et en 965, par
Villa Agnaniga, est une variante remarquable à rapprocher
de Gdouja. — Ce que nous avons dit du mode d'emploi et
des fonctions des désinences suffixes simplifie beaucoup ce
qu’il y aurait à rappeler au sujet de la transformation des
noms quand ils ont passé du latin au roman et du roman
au languedocien. Ici l'identité est sensible et les terminai-
sons offrent de frappantes analogies. Le radical Gdou tra-
duisant le lat. Gaudium, que vient adjectiver la finale a,
argue ou ac, du lat. Gaudiacum, Gaudianica, formés de
Gavisus, Gaudiosus, indique le caractère significatif des dé-
nominations. Mais ces variétés de désinences se confondant
dans la signification, il semble que l’ingénieuse interpréta-
tion de argue par le lat. Ager, et toutes ces origines patri-
ciennes qu'on en voulait déduire, se trouvent singulière-
ment écartées. Nous en citerons d'autres exemples : celui-ci
méritait qu'on s’y arrètât. Nous nous contenterons même
de la remarque, sans chercher les analogies avec d'autres
noms propres qui paraissent aussi venir de la même source,
et que représente au moins la même appellation latine
Gavisus ou Gawdiosus, comme Gdoussén, Gaussen, Gaus-
saint; Jaujac, Gaiïac, Gaïlhac, etc.
Gâoujé, s. m. Souci des champs, Caltha arvensis, Linn.,
plante de la fam. des Composées Corymbifères, commune
dans les champs.
Son nom est sans doute une altération dimin. de Gdou-
che, qui n’est pas droit, parce que les semences du centre
de sa fleur sont courhées en are. .
- Gâoujouno ou Gâoujouso, s. f. Sorte de châtaigne, la
plus abondante et la plus productive dans les basses Cé-
vennes, mais la plus retardée : moyenne grosseur; a besoin
d'humidité et aime les vallons, près des ruisseaux; ne
craint pas les brouillards; se dépouille facilement lors-
qu'elle est sèche : feuilles arondies ou ovales.
GAR 377
Gâoujoùs, s. m. Espèce de châtaignier qui produit la
châtaigne dite Gdoujouso.
En vieux lang. ce mot était adj. formé de la bass. lat,
Gaudiosus, joyeux, enjoué, gai, agréable; il est devenu
nom propre rendu en fr. par Gawjouæ.
Gâoujouso, s. f. — Voy. Gdoujouno.
Gâoula, v. Jabler un tonneau; faire le jable des donves.
Gâoule, s. m. Jable d’un tonneau, d’une cuve; rainure
des douves dans laquelle le fond s’enchâsse.
Ce mot est une corrupt. du fr. Jable, ou il a une origine
commune avec lui.
Gâoutaru, udo, adj. Joufllu, moufllard; qui a de
grosses joues rebondies.
Dér. de Gdouto.
Gâoutas, s. m. Soufflet; coup sur la joue.
Gâoutiè, n. pr. d'homme. Au fém. Gdoutiètro. Gautier.
— En langue romane, signifiait bucheron, forestier : de la
bass. lat. Galterius ; en v. fr. Gaultier, homme des bois,
venant de Gault on Gaude, forêt, qui était chez nous
Gâoudo. On voit la pépinière qui s'est formée et les va-
riétés analogues, Gaulthier, Gauthier, Gautier, Galtier,
Gaude, Waltier, Walter, etc. Le radical primitif est dans
le saxon Gaud ; en allem. Wald, en angl. Wood, bois,
forêt.
- Gâoutimas, s. m. Gros soufflet sur la joue. — Appar-
tient au dialecte gascon; mais très-bien reçu comme augm.
de Gdoutas.
Gâouto, s. f. Dim. Gdoutéto; péj. Géoutasso. Joue, partie
latérale de la figure; aspect d’une montagne d’un certain
côté ; penchant particulier d’une terre.
Dér. du gr. vos, mâchoire, bouche, ou du lat. Gena,
joue. En ital. Guancia, m. sign.
Gâoutu, udo, adj. Joufllu; qui a de grosses joues;
moufflard.
Gara, s. m. Dim. Garaché; augm. Garachas. Guéret,
jachère; terrain labouré pour être ensemencé; terrain en
jachère. — Li fou douna un bon gara, il faut donner un
labour bien profond. Aquél doubre a pas prou dé gara, cet
arbre n’est pas labouré assez au large, c.-à-d. le rond, le
carré ou l'allée de terrain qui doivent être labourés autour
de son pied ne sont pas assez larges. Laïssa én gara,
laisser une terre en jachère.
Dér. du lat. Varatrum, m. sign.
Gara, v. Oter; enlever; tirer; prendre garde; garantir.
— Garo-té d'aquà, Ôte-toi de là. Garo davan/ Gare devant,
prends garde à ce qui est devant.
Il est évident que l’impér. fr. Gare, gare, comme le
nôtre Garo/ garo! vient de Gara et non de garer ni de
garde, ainsi que le prétendent certains académiciens.
Garacha, v. — Voy. Agaracha.
Garafata, v. — Voy. Éngarafata.
Garafo, s. f. Carafe, bouteille de verre blanc, à large
gouleau, destinée à contenir de l'eau.
Empr. au fr.
378 GAR
Garavésso, s. f. Expression populaire et fort ancienne,
qui est usitée seulement pour dire : Péès dé garavésso, pays
sec, aride, stérile.
Corrupt. de Gallovèse, canton de la Champagne Pouil-
leuse, dont le terrain est de craie et les habitants misé-
rables.
Garbéja, v. fréq. Être abondant en gerbes; engerber ;
ramasser les gerbes, les apporter du champ. — Aguélo
tèro a bièn garbéja, cette terre a fourni beaucoup de
gerbes.
Dér. de Garbo. <
Garbèlo, s. f. Résille, réseau dans lequel en Espagne, et
aujourd’hui en France comme autrefois, paraît-il, les fem-
mes renferment leurs cheveux; nasse, espèce de filet ou
de poche à double capuchon dont l’un entre dans l’autre
et qu'on place à l'issue de ia rigole de fuite d'un ruisseau
après qu'on l’a endigué au moyen de ce qu’on nomme une
Tarido, pour faire passer toute son eau par cette ouver-
tare assez étroite, fermée entièrement par ce filet.
Garbièiro, s. f. Dim. Garbièiroù. Gerbier en général ;
spécialement ceux qui sont montés en forme de pyramide .
Les gerbiers construits sous forme de prisme se nomment
Cavalé. — Voy. ©. m.
Garbil, s. m. Grabuge; querelle; noise.
En ital. Guarbuglio, m. sign.
Garbo, s. /. Dim. Garbéto. Gerbe, petit faisceau de blé
coupé et lié.
Dér. de la bass. lat. Garba, m. sign.
Garbuje, s. m. Grabuge. — Garbil est mieux et, très-
pur.
Empr. et corrupt. du fr. que son inversion franchimande
déguise mal et qui a cependant trouvé grâce auprès de
quelques-uns.
Garço, s. f. Dim. Garcéto. — Expression injurieuse
pour une femme, sans qu’elle spécifie cependant contre
elle une accusation déterminée. Ce mot, dans l’origine,
n'était que le fém. de Garçoù, et il avait la même dériva-
tion; mais, comme en fr., il a perdu son innocence et sa
première signification .
Garçoù, s. m. Dim. Garçouné; péj. Garçounas. Gar-
gon, enfant mâle; fils; garçon de café, d'hôtel ou d’au-
berge. — Faïre lou garçoù, faire le viveur. Un tâou ma-
rido soun garçoù, un tel marie son fils. Bé vèn quan gar-
goù vèn, S’uno fio naï, bé s'én vaï, dicton qui fait consister
la richesse et la fortune des paysans à avoir plus de
garçons que de filles.
L'étymologie est très-contestée : on a invoqué le celti-
que Garcio, m. sign.; l'allem. Kart, grand, fort, vigou-
reux; l'espag. Varo, homme, formé du lat. Viro, ablatif
de Vir. Autrefois on écrivait Warçou, la permutation s'est
faite depuis. L'arabe dit Gar, gari, pour jeune homme
vaillant, audacieux, d’après Court de Gébelin; en persan,
Garan signifie fille et femme; en bas-breton, Guerc'h,
jeune fille. En vieux fr. le nominatif était Gars, conservé
GAR
encore en style fam., et le régime Garçon. Toute difficulté
n’a pas disparu : l'incertitude reste.
Garçounéja, ». fréq. Garçonner, en parlant d’une jeune
fille; fréquenter, aimer les garçons.
Garçounièïro, s. /. Garçonnière; se dit d’une jeune
fille qui fréquente les garçons, qui en a les manières.
Garda, ». Garder; tenir, avoir, prendre sous sa garde;
conserver; préserver; garder un troupeau; surveiller, gar-
der une propriété en qualité de garde-champôtre; ne pas
quitter; ne pas perdre; ne pas se dessaisir; ne pas révéler;
rester.
Sé garda, se conserver; se donner de garde; s'abstenir,
s'éloigner.
Garda las cabros, au jeu de la balançoire, c’est être au
haut de la partie qui est élevée, et y être retenu par votre
associé, qui pèse sur le bas pour vous faire garder cette
position : au fig. faire sécher d’impatience; tenir la dragée
haute. Garda l'éscampi, avoir la clé des champs, être
fugitif. Aï garda un an las fèbres, j'ai eu la fièvre d'accès
pendant une année. Diou vous én garde, Dieu vous en
préserve. Dé marido fénno gardo té, et dé la bono -noun
t'én fises, prvb., de mauvaise femme garde-toi et à la bonne
ne te fie. La péou gardo las vignos, prvb., la défiance est
mère de la sûreté. T'én gardarai bé, je saurai bien t'en
faire passer. Æ
Dér. de la bass. lat. Wardare, m. sign.
Gardaje, s. m. Action de garder un troupeau; frais de
cette garde; particulièrement, pâturage, paccage.
Gardéja, v. fréq. de Garda. Faire le guet; avoir l'œil
au guet; surveiller.
Gardian, s. m. Gardien; qui garde aux pâturages com-
muns les chevaux, les mules d'un village; gardien des
chevaux et bœufs sauvages des marais; gardeur.
Gardiano, s. f. Dim. Gardianéto. Bonne ou garde d’en-
fant.
Gardio, n. pr. de lieu et de personne. Gardies en fr. traduc-
tion littérale. — Le mot prend presque toujours en fr. cette
forme du pluriel; le lang. au contraire fait la distinction
des deux genres. Quoi qu'il en soit, il appartient à cette
famille qui a donné le suivant et ceux qui précèdent, qui
se retrouvent dans la bass. lat. avec la variante de Garda
et Warda, Gardia, Guardia, Wardia, Wardum, qui ont
fourni le verbe et les divers composés subst. ou adj.
Comme n. pr. il désigne donc les localités, assez nom-
breuses partout et dans notre département en particulier,
appelées encore : La Garde, Les Gardelles, La Garde-Mage,
La Gardette, La Gardie, Les Gardies, La Gardiole, qui
devaient être des postes d'observation, auxquels cette dis-
tinction et leur situation élevée avaient fait appliquer ce
nom significatif. On sait que très-anciennement c'était par
de semblables établissements sur les hauteurs que le pays
veillait à sa défense : on ne pouvait choisir que des éléva-
tions pour correspondre ou observer de plus loin. Les deux
idées de garde et de hauteur devaient se confondre, et
PT.
dé Hé
GAR
elles s'exprimaient par le mème radical. Ce radical pri-
mitif devait d'abord représenter la situation, avant de s’in-
fléchir à ce que comportait cette situation même. En effet,
Gart ou Garth en celtique veut dire : sommet, cime, lieu
escarpé et élevé ; dans les idiomes néo-celtiques, il en est
de même: War, sur, dessus; Bar, Barr, sommet, en bas
breton; Garth, Gart, mont, roc, en gallois. L'élévation
est le point le plus favorable pour observer et pour
garder.
: Mais on va remarquer dans un autre nom propre, celui
. de Gardoù, Gardon, les mêmes nuances de composition,
en lat, Guardo, Wardo, Gartum, Gardo. Le mot est évi-
demment identique et trahit la même origine radicale.
D'où cette affinité a-t-elle pu lui venir, sinon de Gart,
Garth, Ward, celtique, sommet, hauteur, roc, montagne;
et de l'indication caractéristique des lieux élevés où le
Gardon prend ses sources? Ces rapprochements sont assez
autorisés par la similitude des noms et très-rationnels.
Gardo, s. m. Garde; garde-champôtre; tout fonction-
naire préposé à la garde de quelque chose; sentinelle;
gardien.
= Gardo, s. /. Garde; conservation, protection, surveil-
lance; guet; défense; force armée qui fait la garde; milice
à ce préposée, — Se prend dans presque toutes les accep-
tions multiples du fr. — À {a gardo dé Diou, Dieu merci;
grâces à Dieu; va, j'y consens. Aasins dé gardo, raisins
qui se conservent. Chi dé gardo, chien de garde. À la
gardo! au secours! Souna la gardo, appeler la garde, le
guet. Mounta la gardo, faire le guet, attendre, être de
faction, surveiller, guetter. Mounta sa gardo, faire son
service de milice citoyenne. Davala la gardo, descendre
la garde; mourir, trépasser. Li mountè uno gardo, il lui
fit de vifs reproches. Prén gardo! prends garde! fais atten-
tion.
Gardo-manja, s. m. Pot de terre, bas et large, dont un
couvercle emboite l'orifice, et ayant ordinairement des
pieds, comme une marmite, à qui il ressemble beancoup,
pour pouvoir être chauflé par-dessous ; il sert à faire des
étuvées de viande, du bœuf à la mode, que l’on appelle
Éstoufa. Ce n'est qu'en déviant de sa vraie et légitime
signification que Gardo-manja en est venu à se dire aussi
pour Garde-manger, qui s'entend d'une espèce de cage ou
chassis garnis de canevas pour conserver les aliments.
Gardo-râoubo, s. f. Armoire, grande ou petite, en forme
de buffet, destinée à serrer les hardes, le linge; sorte de
fourreau de toile, ou de robe par-dessus, que l’on met aux
enfants sur leurs habits pour les protéger.
… Gardoù, s. m. n. pr. de rivière. Le Gardon ou Je Gard,
qui a donné son nom à notre département. I] se compose
de divers affluents, partant tous des Cévennes, qui, sous
la désignation de Gardon de Mialet, Gardon de Saint-Jean,
Gardon d'Anduze et Gardon d'Alais, se trouvent réunis
au pont de Ners et vont se jeter dans le Rhône sur le ter-
ritoire de la commune de Comps.
GAR 379
Pour la plupart des Cévenols, Gardon est devenu syno-
nyme de rivière. — Ana én Gardoù veut dire : aller à la
rivière ; low vala sémblo un Gardoù, le ruisseau semble une
rivière. Ces expressions sont employées par les indigènes
alors même qu'ils sont dépaysés et qu'ils veulent parler
de rivières fort éloignées du Gardon. Sauvages nous a
transmis une naïveté assez curieuse d’un domestique céve-
nol qu'il avait emmené à Rome, et qui, élant resté dehors
plus qu’il ne devait, répliqua pour sa justification : Avië
toumba moun capèl din Gardoù, j'avais laissé tomber mon
chapeau dans le Gardon, tandis qu'il était sur un pont du
Tibre.
Il est inutile de parler du Pont du Gard à propos du
Gardon. Personne n'a besoin de nouvelle description de
cette merveille archéologique et personne n’ignore qu'il est
placé sur le Gardon. -
Ce nom a subi plusieurs variantes dans son orthographe.
Sidoine Apollinaire l'appelle Vardo; Ruricius Guardo;
Théodulphe, Gardo et Wardo; Catel, le grand Guerdon.
M. Germer-Durand cite un cartullaire de Notre-Dame de
Nimes qui porte, en 984, Quardones; en 1096, Galdone,
dans l'Histoire du Languedoc, Vardo, en 4450; Gartum,
en 4456, Gardo, en 1262, dans la Gall. christ. C'est cette
dernière forme qui a prévalu.— Voy. pour l’étym. Gardio.
Gardounado, s. f. Inondation, débordement du Gardon.
— Les inondations du Gardon sont malheureusement très-
fréquentes : il ne se passe presque pas d'année sans qu'une
crue subite, à la suite d’un orage ou de pluies dans les
montagnes au nord d’Alais, ne fasse déborder ses eaux qui
envahissent et ravagent les riches prairies sur ses rives.
Mais le torrent ne cause pas toujours des désastres; et on
ne conserve la mémoire que des plus terribles Gardou-
nados, qui ont le caractère de malheurs publics. Dans cette
liste sinistre, il faut inscrire celle du 40 septembre 4604,
qui, au rapport des chroniques municipales, dura environ
cinq heures, et par lequel « déluge, ravage et desborde-
ment d'eaux, les habitants de la ville ont plus souffert de
pertes qu'ils n’ont fait durant les guerres civiles, prise et
reprise d’icelle et peste qui y a esté. »
L'invasion de la rivière qui a laissé le plus profond sou-
venir dans toute la population, fut celle du 45 septembre
4744. On la désigne encore sous le nom de Déluge d’Alais.
Les eaux alteignirent les premières marches de l'escalier
du perron, sous le clocher de l'église cathédrale.
Dans la nuit du 3 au 4 octobre 4768, la ville et ses
faubourgs furent encore envahis.
Du 29 au 30 septembre 4845, le fléau fut plus terrible,
et si le débordement des eaux n’atteignit pas tout à fait le
niveau de 4744, les ravages dans la ville furent plus con-
sidérables, car la prospérité y était plus grande; les pro-
priétés rurales souffrirent beaucoup.
Les crues de 4826, 4827 et 4834 ont offert à peu près
le mème niveau. Elles ont été dépassées par l’inondation
du 20 septembre 4846, dont le souvenir néfaste ne s'effa-
380 GAR
cera pas de longtemps. Dans la Grand'Rue, les eaux attei-
gnirent le premier étage de beaucoup de maisons. Le pa-
rapet du Quai des États fut emporté sur une longueur de
près de cent mètres, et par cette large brèche, le torrent
furieux se précipita dans le Marché et dans la moitié de la
ville. Les pertes et les malheurs à déplorer furent énormes;
et tous les dommages ne sont pas encore réparés.
Gardounéja, v. fréq. Laver du linge; aller à la rivière.
— Cette expression est prise dans un sens générique.
Gardounénquo, s. f. Vallée du Gardon: c’est le nom
particulier qu'on donne à la vallée du Gardon d’Anduze,
depuis Saint-Jean du Gard jusqu'au dessous de Ners ou de
Brignon. Ce territoire comprend environ vingt-cinq com-
munes, et à peu près douze mille habitants.
Garèl, èlo, adj. Dim. Garèlé; péj. Garélas. Bigarré,
marqué de plusieurs couleurs, noir et blanc. — Se dit par-
ticulièrement des pourceaux.
Dér. du lat. Varius, m. sign.
Garéno, s. f. Clapier; petit clos où l’on nourrit des
lapins domestiques; le trou, le terrier que creuse cet
animal.
Dér. de l’allem. Warende, lieu gardé ou clos, où l'on
enferme des animaux .
Gargaïado, s. f. Fretin du blé; blé fort chargé qui reste
sous le crible; les mauvaises graines, le blé enveloppé,
qui déprécient le beau grain lorsqu'ils s'y trouvent
mêlés.
Gargaïariè, s. f. Babioles; fretin; niaiseries; bagatelles.
— Voy. Rafataïo.
Gargalisa, v. Gargariser et se gargariser; se laver la
bouche, le gosier avec un liquide quelconque, un garga-
risme. — Le lang. emploie volontiers le mode actif.
Gargamèl, s. m. Crieur public; crieur de rue. — Ce
mot a vieilli comme l'usage des crieurs eux-mêmes, qui
ne font plus, hormis dans quelques villages, leurs pro-
clamations qu’à son de trompe. à
Gargamèlo, s. /. Gorge, gosier; trachée-artère; œso-
phage; conduit par lequel les aliments et les boissons pas-
sent de la bouche dans l'estomac.
Gargaté, s. ”. Entrée du gosier; luette.
Dér. ainsi que les trois précédents et le mot suivant, du
gr. l'apyapewv, gorge.
Gargato (à la), ado. Ne se dit qu'accompagné du v.
Béoure; c'est boire au galet, à la régalado (VW. c. m.),
c.-à-d. faire tomber le liquide d’un vaisseau dans la
bouche sans toucher à celui-ci, à la différence de la manière
qu’on traduit par s'amoura et qui consiste à appliquer les
lèvres en adhérence à l'ouverture du pot ou du vase quel-
conque ou au goulot mème : ce qui n’est ni propre, ni
convenant.
Un des avantages de boire à {& gargato, est de mieux
satisfaire sa soif et de rafraichir plus complètement l'inté-
rieur du palais.
Gargoto, s. f. Dim. Gargoutéto; péj. Gargoutasso. Gar-
GAR
gote; mauvaise taverne; cuisine détestable; mauvais petit
cabaret, où l'on sert à boire et à manger.
Dér. du jat. Gurgustium, m. sign.
Gargoutiè, s. m. Au fém. Gargoutièiro. Gargotier;
cabaretier; tavernier; mauvais cuisinier.
Garguil, s. m. Barguignage; hésitation; irrésolution ;
embarras; grabuge.
Gari, s. m. Large lampée. — Béoure soun gari, boire
son sàoul. ,
Gari, s. ». Gros rat; rat de grenier, Mus rattus, Linn.,
mammifère onguiculé de la fam. des Rongeurs, bien connu
par ses ravages dans les greniers et dans les magnaneries.
Ce mot n'est pas de notre dialecte local, il nous vient
de la Provence; mais il a pris ses lettres de naturalisation
et est devenu l'équivalent de Ra. — V. c. m.
Gari, v. Guérir; rendre la santé; être délivré d’un mal,
d’une infirmité. — Gari, gari! passo pér aqui, formule
qu'on emploie avec les enfants qui poussent de grands cris
pour un léger bobo; on leur passe la main sur la blessure
en soufflant dessus, et il est rare qu’ils ne s’apaisent en
entendant cette incantation lénitive et caressante,
Dér. du lat. Curare, dont la bass. lat. avait fait, par
permutation, Garire, qui nous a été transmis.
Garïas, s. m. Bourbier; flaque d'eau bourbeuse; mare
bourbeuse; gâchis boueux.
Garigo, s. f. Lande; vaine pâture; friche ; terre inculte
composée de collines et de légères gorges.
Dér. du celte Gari, d’où la bass. lat. avait tiré Garigia,
m. sign.
Garijes, s. /. plur. Inflammation aux glandes et aux
amygdales.
Dér. de Garo.
Garipou, s. m. Baloire, morceau de vieux feutre dont
les journaliers couvrent leur cou-de-pied et l'entrée de
leurs souliers ou sabots pour empêcher la terre d'y pé-
nétrer.
Ce mot ne semble-t-il pas formé de Gara, préserver, et
d’une corrupt. de Pé, pied, à propos de laquelle, même
pour l’assonance, nous nous garderons bien de rappeler
le gr. Ioës, xod6s, pied? }
Garito, s. f. Guérite, petite loge où se place une sen-
tinelle à couvert.
Dans la bass. lat. Garita, m. sign.
Garlopo, s. f. Varlope, grand rabot de menuisier, pour
polir et unir le bois.
En esp. Garlopa, m. sign.
Garloupa, v. Varloper; polir, unir avec la varlope.
Garni, v. Garnir; remplir; assortir; préparer; fournir.
— Garni l’énsalado, assaisonner la salade. Garnè sa fa-
louso, coiffer sa quenouille. Garnè dé cadièiros, empailler
des chaises. Garni lou lun, remplir d'huile la lampe.
Sé garni, s'habiller ; s’endimancher; se vêtir.
En ital. Guarnire, m. sign.
Garnimén, s. ». Garniture de lit; tenture, rideaux,
GAS
courtines, ciel de lit, ete. — Ne se dit point des matelas,
draps et couvertures.
Garnimén, s. m. Garnement, mauvais sujet; libertin ;
méchant garnement.
Garnos, s. f. plur. Tranches de pommes ou de poires
séchées et conservées l'hiver pour tisane.
Garo, s. f. Mächoire; grosse et large mâchoire: joue
enflée par inflammation des amygdales; bajoue, partie de la
tête depuis l'œil jusqu'à la mâchoire. —Se dit d'un cochon.
Garo, interj. Gare : prenez garde, laissez passer.
Contraction de Gara-vous, Ôtez-vous de là, où impér.
du v. Gara.
Garos, s. f. plur. Écrouelles, humeurs froides avec
tumeurs à la gorge, aux glandes.
Par allusion tirée de Garo, grosse joue enflée.
* Garu, garudo, «dj. Fort; robuste; grossièrement, mais
solidement charpenté. — Ne se dit que des personnes.
Garussièiro, s. f. Terre ou bois garni de buissons, de
broussailles, qui ne s'élèvent pas : c’est ce qui arrive d’or-
dinaire aux terrains maigres, dont on abandonne la eul-
ture et qu’on livre au pâturage des bestiaux.
Dér: du celt. Gari, qui a formé Garigo, dont celui-ci
est une sorte de variante.
Gas,s. m. Gué d’une rivière, endroit où elle est guéable.
— À manqua lou gas, au fig. il a fait fausse route; il est
empêtré, embourbé.
Dér. du lat. Vadum, m. sign.
Gas, s. m. Dim. Gajé; péj. Gajas. Geai, Geai glandi-
vore, Corvus garrutus où glandivorus, Linn., oiseau de
l'ordre des Passereaux et de la fam. des Plénirostres. —
Le geai est le cousin germain de la pie, dont il a toutes
les habitudes : son plumage est roux, vineux et cendré;
deux rangées de plumes bleues sur l'aile; tête huppée ;
gorge et couverture de la queue d’un blanc pur; longueur
trente-cinq centimètres.
Dér. de la bass. lat. Gaius, gaïa, gay; onomatopée de
son cri.
Gasa, v. Passer à gué; traverser à pied en guéant.
Gasaïre,s. m. Qui passe à gué; qui fréquente les eaux ;
qui a de longues jambes.
* Gasétaïire ou Gasétié, s. m. Gazetier, journaliste; ré-
dacteur d’un journal.
Gaséto, s. j. Gazette; journal. — Aqud's din la Gaséto,
on lit cela dans les journaux.
Mot nouveau dans le lang., mais qui est devenu une
nécessité, puisque ce qu’il représente est une puissance.
Gaspéja, v. fréq. Fournir une certaine quantité de petit
lait. — N'a que cette acception. ï
Gaspièiro, adj. fém. seulement. Chèvre ou vache dont
le lait contient trop de petit lait.
Gaspo, s. . Petit lait; sérosité du lait qui s’en sépare
lorsqu'on le fait cailler.
Dans le bas-bret. Guipad, lait; en port. Cool; crade,
GAV 381
Gasquièl, s. m. n. pr. d'homme. Au fém. Gasquidio ;
dim. Gasquidié. Gascuel. — Ce nom est assez répandu
dans notre pays : il est certainement ancien, et sa racine
ne peut que se trouver dans la première langue. En bas-
bret. Gwaskall, pressoir à vendange.
Gasta, v. Gâter; dégrader; endommager; user; dété-
riorer; corrompre; gâter un enfant, avoir trop d'indul-
gence, le trop caresser. — Gasto un parél dé souïès pér
més, il use une paire de souliers par mois. Sé gasto fogo
bos dinc aquél oustdou, il se consomme beaucoup de bois
dans cette maison. Gasta lou méstiè, gâter le métier; livrer
à trop bon compte une marchandise. Un éfan gasta, un
enfant gâté, trop dorloté, trop flatté.
Gasta, ado, dans ce dernier sens, part. pass. ou plutôt
adj., a son dim. Gastadé, et son augm. Gastadas, le plus
souvent termes de cajolerie caressante.
Dér. de lat. Vastare, pour les premières acceptions.
Gastadije, s. f. Gâterie; caprice, défaut d'enfant gâté.
Gasto-lénsôou, s. m. Paresseux; fainéant; qui se lève
tard; qui reste longtemps et volontiers au lit.
Gasto-pénche, s. m. Personne chauve, par antiphrase
ironique.
Gasto-sâousso, s. m. Gâte-sauce, mauvais cuisinier;
marmiton.
Gavèl, s. m. Sarment; fagot de sirments. — Le
sarment ne désigne guère en fr. la pousse d'une vigne que
quand elle a acquis la consistance du bois; avant, elle se
nomme pampre. En lang. Gavèl signifie à la fois cette
pousse et les fagots qu'on en forme après qu'on a taillé la
vigne. — Lou bon Diou a més un gavèl dé maï : c'est ce
que l'on dit un jour d'été où le soleil chauffe un peu plus
fort que la veille; on feint de croire ainsi que Dieu entre-
tient son vaste foyer comme nous nos humbles cheminées
et qu'il y jette simplement quelques sarments pour l'ac-
tiver. Émpuro lou gavèl, amorce, pousse le sarment sous
les bûches.
Ce mot passe pour celtique Gavella, m. sign. En esp.
Gavillia, javelle. Le fr. Javelle est certainement de même
dérivation.
Gavéla, v. Javeler, fagoter des sarments, les mettre en
javelle.
Gavélaïro, s. f. Javeleuse ou fagoteuse de sarments. —
Les femmes seules sont employées à ce travail.
Gavô, gavoto, s. et adj. Dim. Gavouté; péj. Gavoutas.
Lozérien ou Lozerot; habitant du Gévaudan. — C'est un
surnom de dénigrement ou plutôt de rancune de voisinage;
car les habitants de la Lozère ne le prennent pas eux-
mêmes, le supportent plus onu moins patiemment et s’en
fâchent quelquefois. Cependant l'origine n'en paraît nulle-
ment offensante : elle vient du lat, Gabalum, Gabalitanus,
habitant du Gévaudan. Il est vrai que les Espagnols qui
donnent le nom de Gavacho à ces mêmes individus qui,
autrefois, allaient faire la moisson jusqu'en Espagne, en
avaient fait un terme de haïne et de mépris qui existe
382 GEN
encore chez eux, et que, même dans nos contrées, pour
exprimer une certaine grossièreté de manières et d’allures
en général, on se sert de cette épithète; mais ce sont des
déviations dont la racine du mot n’est pas responsable et
qui ne préjugent rien sur le caractère et les mœurs des
habitants des montagnes. Il ne faut point, quoi qu'il en
soit, comprendre dans cette dénomination de Gavwd, les
Lozériens des versants sud de la chaîne de la Lozère : ceux-
ei sont Raïdous. — V. C. m.
Gavoto, s. f. Gavotte, nom d’une espèce de danse, dont
l'air a deux reprises, chacune de quatre, de huit ou de
plusieurs fois, quatre mesures à deux temps. — On croit
que l'air et la danse ont été inventés par les montagnards
Gavès.
Gazaï, n. pr. d'homme. Au fém. Gazaïsso; dim. Ga-
zaïssé. Gazaix, en fr. — Signifiaiten vieux lang. métayer à
cheptel. Ce bail de bestiaux qui consistait en la nourri-
ture et entretien pour la moitié des profits, s'appelait
Gazaïo, de la bass. lat. Gasalia, dérivant du lat. Gaxa,
biens, richesse. Par où se font apercevoir les analogies des
noms propres : Gazan, Gazagne, Gazagnon, etc.
Géïna, v. Gèner; serrer; presser; comprimer; ennuyer;
importuner ; embarrasser.
Sé géina, se gèner; se mettre à la gène. — És géina, il
est géné, embarrassé dans ses affaires. Vous géinés pas, ne
vous dérangez pas; ne vous gènez pas.
Gèïino, s. f. Gêne; contrainte; incommodité; peine
d'esprit; ennui; torture; question en parlant d’un criminel.
Dér. du lat. Gehenna, gône.
Géndarmariè, s. f. Gendarmerie; troupe; quartier
occupé par les gendarmes.
Géndarmo, s. m. Gendarme, soldat du corps de la
gendarmerie.
Emp. au fr.
Génébrouso, s. f. — Ce mot ne s'emploie que dans un
seul cas et comme terme de comparaison : Couqui coumo
la génébrouso.
Il est par trop évident par la composition du mot, par
l'acception qu'on lui donne dans la phrase ci-dessus, qu’il
signifie les Juifs, la gent hébreuse ou hébraïque, gens
hebræa. On ne conçoit pas qu’une déduction si simple n'ait
pas frappé Sauvages, ni comment il à pu poser un point
d'interrogation pour savoir si l’étymologie ne venait pas
du mot Ginèbre, génevrier, champ de génevriers. C’est une
faiblesse de grand homme.
Général, s. m. Général, officier supérieur de l’armée.
Emp. au fr.
Généralo, s. f. Générale, batterie d'alarme au son du
tambour.
Gengivo, s. f. Gencive, chair qui entoure les dents.
Dér. du lat. Gengivia, m. sign.
Géns,s. f. plur. Gens; la famille, les personnes qui
composent la maison; habitants d’un pays. — A la diffé-
rence du fr., où le mot gens signifie les domestiques d’une
GIA
grande maison, d'un grand seigneur, en lang. on désigne
par le mot Géns toutes les personnes qui tiennent à la
famille, quelque chose comme la Gens romaine. — Las géns
d'énndou, les habitants de la Lozère, de la montagne.
Mas géns! espèce d’interj., de juron innocent, qui revient
à Dam! Cowmo las géns, l'éncéns, prvb., selon les poissons,
la sauce. Dans ce proverbe, le sens du mot semble plus
généralisé, et voudrait dire les hommes, l’homme. Las
hounèstos géns, les honnêtes gens.
Dér. du lat. Gens, nation.
Génte, génto, adj. Gent, gentil; gracieux; joli; mignon;
aimable; agréable.
Selon le Dictionnaire de la Crusca, le mot viendrait de
la langue provençale : Voce anticha venuta dal provensale.
La désignation est comprise : provençal, langue de la pro-
vince romaine.
Gèou, s. f. Gelée, glace. — Fré coumo la gèou, froid
comme glace.
Dér. du lat. Gelu, m. sign.
Gério, s. f. Espèce de champignon. — Voy. Girbouléto.
Gèrlo, s. f. Seau ou baquet de cuivre, étamé intérieu-
rement, avec lequel on va puiser l’eau à la fontaine où au
puits. — Les femmes le portent sur la tête sans le tenir et
par les chemins les plus scabreux..
Ce terme est du haut raïol; ici on dit Séio (V. c. m.),
qui est plus générique.
Dér. du lat. Gerere, porter.
Gérma, v. Germer; pousser un germe.
Dér. du lat. Germinare, m. sign.
Gèrme, s. m. Germe, principe de reproduction du vé-
gétal. Au fig. origine; semence; cause principale et pre-
mière.
Dér. du lat. Germen, m. sign.
Gés, négat. explét. et adv. Point; aucun; nullement;
aucunement; point du tout. — On pourrait l'appeler une
négation de nombre. On l’emploie rarement sans la par-
ticule négative : Pas gés. Cependant il se place de préfé-
rence ainsi à la fin d’une phrase. Dans le style elliptique
et vif, Gn'a gés vaut mieux que Gn'a pas gés. N'êm vole
gés, je n’en veux pas.
Dér. du lat. Gens, gens, personne, et revient à l’expres-
sion lat. minimè gentium, pas une seule personne. D'après
cette donnée, il devrait ne pouvoir se passer de la part.
nég.; mais l'usage l’en a dispensé pour la fluidité et la
rapidité de la langue.
Gi, s. m. Plâtre; gypse; chaux sulfatée ou sulfate de
chaux. — Gi bastar, plâtre avec lequel on gâche une
partie de mortier.
Dér. du lat. Gypsum, m. sign. En bas bret. Gyp.
Gia, v. Fuir; décamper; s'enfuir; faire Gille; tromper
son monde.
L'origine de ce mot si court, traduit par cette petite
phrase française, faire Gille, et l’un rendant l’autre, n’est
pas chose facile à débrouiller. Qu'on nous permette d'en
GIA
dire ce que nous en avons découvert, et d'éclairer peut-
être le problème à la lueur d'une autre expression qui a
un sens tout pareil. Voici donc ce qu'on raconte, ou à peu
près, dans le Dictionnaire de Trévoux et autres gros in-
folio, sur la locution française.
Ægidius, dont on a fait Gillon et puis Gilles, — on ne
sait trop comment ni pourquoi — était, selon les uns, un
prince languedocien qui s’enfuit plutôt que d'accepter une
couronne qu'on lui offrait; — on n’ajoute pas de quel
royaume — selon d'autres, il était d'Athènes, d’une
famille illustre, qu'il quitta pour se mettre à la recherche
d’autres biens préférables à ceux qu’il abandonnait. Il vint
débarquer non loin de Marseille et s'établit dans un lieu
où plus tard fut bâtie une ville qui prit son nom. Les
commencements de la vie de saint Gilles, car c’est de lui
qu'il s'agit, nous ont paru quelque peu incertains et
obscurs, ce qui se comprend à la distance de treize ou
quatorze siècles. Mais qu'il ait renoncé aux richesses et
aux honneurs, à un trône même, ou à la plus simple vie
mondaine, pour se réfugier dans la vie religieuse; comme
l'idée d’une fuite quelconque est restée attachée à son
" souvenir, histoire ou légende à la main, on a fait en fr. le
dicton Faire Gille, pour dire : s'enfuir précipitamment,
s'esquiver, se dérober. Le languedocien a aussi le verbe
actuel Gïia pour exprimer la mème chose. Il se sert sur-
tout de son impératif Gio comme exclamation rendant
tour à tour: eh! vite, vite! cours donc, détale, file! ou
bien quand on raconte : el de courir, et de jouer des jam-
bes.
Gia s'écrivait autrefois Gikia, dont nous avons dû sup-
primer Z, qui ne se fait plus entendre chez nous, bien
qu'elle se prononce encore dans un dialecte voisin un peu
plus rude. Cette vieille orthographe indique de plus fort
que le languedocien a puisé à la même source que le fran-
çais; mais dans le principe il n'avait fait probablement
qu'un simple verbe, s’il ne l'avait déjà;. tandis que le fr.
se servait d’une petite phrase, que le souvenir légendaire
d’un saint consacrait. Or, nous trouvions que le langue-
docien, qui sans doute ne tenait pas à rester en arrière,
avait également introduit un nom d'homme dans une
locution synonyme; pour lui, faire Gille était faïre Gui-
rdou. Quels traits de ressemblance pourraient avoir
deux personnages différents pour avoir laissé dans le vo-
cabulaire la mémoire d'un trait de leur vie qui en rappe-
laït une particularité identique? Nous étions à bout de
conjectures et de recherches, quand un de nos amis, très-
érudit sur notre histoire méridionale et auteur d'un remar-
quable travail sur la maison d'Uzès, voulut bien venir à
notre aide. Ses explications ne laissent aucun doute sur
Yorigine et le sens du mot.
Gérard, Gérald, Géraud, Guiraud ou Guiraudet Amic,
plus connu sous le nom de saint Gérard, était fils de Gé-
raud ou Guiraud Amic IV et de Thérèse Gaucelin d'Uzès,
héritière par substitution de la moitié de la baronnie de
GIB 383
Lune]. Cette seigneurie fut, en 4295, l'objet d'un échange
entre Philippe le Bel et Géraud, qui reçut en contr'échange
les seigneuries de Rochefort, Fournès et autres lieux situés
dans le diocèse d'Uzès, et vint se fixer à Rochefort. —
C’est à ce moment que son fils Gérard, alors âgé d'environ
vingt-quatre ans, quitta furtivement sa famille, comme
avait fait saint Gilles, pour embrasser la vie monastique.
H se retira, disent les Bollandistes, dans une grotte située
à proximité d’un pont d'une structure remarquable, dans
lequel tous les historiens s'accordent à reconnaitre le Pont
du Gard. — Bientôt après, saint Gérard voulant se déro-
ber à l’empressement des populations qui assiégeaint sa
retraite, entreprit le pélerinage des Lieux-Saints et mourut
en 4296, en Italie, avant d'avoir pu l’accomplir.
La locution était faite et le nom trouvé en languedocien
pour correspondre au français. La situation était la même :
c'était aussi un homme remarquable par sa naissance qui
se dérobait à l'éclat de sa fortune et aux pompes terres-
tres, qui fuyait le monde pour entrer dans la solitude et
la contemplation des choses du ciel. Ce spectacle devait
frapper le peupleet le souvenir s’en est perpétué. Le temps
a bien apporté quelque déviation à l'expression, qui ne se
prend pas toujours dans une acception favorable, mais il
parait évident qu'elle vient de ces circonstances — Foy.
Guirdou (Faïre).
Giba, v. Souflrir: avoir grande peine à accomplir une
œuvre où un travail quelconque; trimer ; faire effort.—Se
dit particulièrement d’un voiturier ou d’un attelage qui
ont peine à sortir d'un mauvais pas. — Gibou, ils ont
entr'eux des différents, des procès, des incompatibilités
d'humeur.
Gibadisso, s. f. Longs efforts pour venir à bout d’une
œuvre difficile; différend ; difficulté; procès.
Gibaïre, aïro, adj. Hargneux ; d'humeur difficile, pro-
cessive, inquiète.
Dér. de Gibo.
Gibäoudan, s. =. n. pr. de lieu et d'homme. Le Gévau-
dan, aujourd’hui département de la Lozère.
Dans l’antiquité, pays des Gabales, Gabalicus pagus, qui
a formé le nom.
Gibéloto, s. f. Gibelotte; blanquette; fricassée de viande,
ordinairement d'agneau de lait ou de chevreau.
Gibèrno, s. f. Giberne, boite dans laquelle le soldat met
ses cartouches.
Eumpr. au fr.
Gibiè, s. m. Gibier; animaux bons à manger pris à la
chasse.
Dér. du lat. Cibaria, aliments, par la permutation très-
répétée du € en 6.
Gibo, s. f. Difficulté; mauvaise entente; différend;
procès. — Ëstre én gibo, n'être pas d'accord.
Gibourna, v. Grésiller; par ext. faire un froid très-
piquant. — S'applique surtout à cette variation d’atmos-
phère si fréquente au mois de mars, et à la petite pluie
384 GIM
froide qui tombe alors par intervalles. — Gibourno, il tounbe
du grésil; il fait un froid très-vif.
Dér. du fr. Givre, ou du moins de la mème racine que
lui.
Gibournado, s. /.,Coup de vent mêlé de pluie et de
grésil, tel qu'on en voit souvent en mars; giboulée; guilée;
mauvais temps.
Gibournaje, s. m. — Ce mot a à peu près la même
acception que le précédent : seulement, c’est plutôt une
situation particulière de l'atmosphère que l’accident ou le
grain produit. On le dit communément pour un froid très-
vif, ce que n'exprime pas Gibournado.
Giboüs, ouso, adj. Contrefait; bossu et tortu, rachi-
tique; qui a les membres et surtout les jambes, tordus.
Dér. du lat. Gibbus ou Gibbosus, bossu, voüté, con-
vexe.
Gie, n. pr. d'homme. Au fém. Güiésso; dim. Güioù,
Giouno. Gilles, en lat. Ægidius.
Gifla, v. Soufileter avec force : dans la langue verte,
Giffler.
Giflo, s. f. Soufllet bien appliqué : en argot, Gife ou
Giffle, qui rappelle sans doute que ce mot signifiait autre-
fois Joue.
Gignèi (Sén-), n. pr. de lieu, Saint-Genest, aujour-
d'hui Saint-Geniès, assez commun dans le Gard, traduit
du lat. Sanctus Genesius.
Gigo, s. f. Gigot; quartier d'agneau ou de mouton avec
la longe.
Gigô, s. m. Dim. Gigouté; augm. Gigoutas. Gigot coupé
exprès et régulièrement sur sa rouelle.
L'accent tonique fait la différence de quantité dans la
prononciation, et la différence de genre, dans les deux
mots qui précèdent,
Dér. du lat. Coxa, cuisse, d’après Ménage, ou de Zschium,
os de la hanche, suivant Borel.
Gimbéléto, s. /. Gimbelette; petite pâtisserie du genre
des échaudés, qu'on enfile à un fil comme un chapelet.
Gimbla, v. Tordre; plier; courber; rendre courbé,
bombé, convexe. — Au part. pass. adjectivement, Clavèl
gimbla, clou tordu; cléou gimblado, clé forcée; cambo
gimblado, jambe crochue.
Sé gimbla, ». Se plier; se courber en arc. — Po pas sé
gimbla, il n’est plus assez souple pour se plier.
Dér. du lat. Gibbus, courbé, bossu.
Gimère, èro, adj. Dim. Giméroù; péj. Giméras. Têtu;
entêté; obstiné; opiniâtre; hargneux; contrariant; diffi-
cile à vivre. — És pas gimère, il n’est pas crâne, il plie
sans peine.
Ce mot, qui est un subst. dans certaines contrées, no-
tamment en Gévaudan, y signifie un jumart, sorte de
mulet produit du croisement de l'espèce chevaline et bo-
vine. Cet animal, dont la provenance n’est nullement cons-
tatée, fort laid de formes, est très-fort et très-vicieux.
Nous avons emprunté sa qualité sans adopter le substantif.
GIN
Gimérije, s. /. Entètement; obstination; opiniâtreté
capricieuse; caractère revêche.
Ginèbre, s. m. Petit genévrier, à baies noires, Juni-
perus communis, Linn., arbrisseau de la fam. des Conifères.
— Cet arbrisseau, dont les différents genres se confondent
dans une mème dénomination en fr., se distingue dans le
lang. en Ginèbre et Cade. Celui-ci, qui devient un arbre et
non un arbuste comme le premier, fournit un fruit ou
baie de la grosseur d’une petite cerise, d’où l'on tire l'huile
de Cade. — Voy. c. m.
Dér. du lat. Juniperus, m. sign.
Ginès, s. m. Au plur. Ginèsses. Genêt, nom commun à
plusieurs espèces et qui désigne le Genêt des teinturiers, la
Genestrole, Genista tinctoria, Linn.; le Genèt d’Espagne,
Genista juncea, Linn.; dont les jets ressemblent à du jonc.
On fait confire les boutons de ses fleurs dans le vinaigre
comme les capres. Aux environs de Lodève et dans le
Camarès, on aménage le genêt d'Espagne, qui couvre des
montagnes entières; ses tiges, rouies comme le chanvre,
fournissent une’ toile grossière, mais très-solide pour l’u-
sage.
On distingue encore lou Ginès où Gruas ou Sabagol,
Genèt Cytise, grand Genèt à balais, Genista scoparia, Linn.,
et lou Ginès-Réboul, Genêt à touffes basses, Spartium-
complicatum, Linn., Cytise à feuilles pliées; tous arbris-
seaux communs, de la fam. des Légumineuses.
Les avis sont partagés sur la dérivation du nom: les
uns veulent qu'il soit tiré du lat. Geno ou Gigno; quia
spontè genatur, hoc est gignatur ; d'autres lui donnent pour
radical le celtique Gen, arbuste, arbre.
Ginéstièïro, s. f. et n. pr. d'homme et de lieu. Champ,
quartier abondant en genêts. — Quand il devient n. pr.
le fr. traduit par Ginestière.
Ginéstoüs, s.m. n. pr. d'homme et de lieu. — Variante
du mot précédent, avec une signification identique. —
Tous les deux sont au reste régulièrement formés.
Gingla, v. Sangler des coups de verges, de baguette, de
houssine.— Voy. Giscla.
Dér. de Ginguëlo.
Gingoula, v. Geindre; piauler; se plaindre; gémir;
pousser des soupirs ou des cris plaintifs, mais à petit bruit.
— Voy. Jangla et Jangoula.
Il est ingénieux, comme on l’a fait, de trouver à ce mot
une dérivation tirée du Gin, pour Chin ou Chi, par la
permutation connue, et de Gulo, gueule, pour exprimer
des gémissements ressemblanis à ceux des jeunes chiens.
Gingoulino, s. f. Ripopée, mélange de vin sans force
ni vertu, plat et fade; breuvage quelconque qui n’a ni
goût, ni saveur, ni qualité.
Ginguëlo, s. /. Scion d’un arbre; jet d’une seule pousse
et sans nœuds, comme ceux des müriers, qui, étant taillés
chaque année, sont longs et vigoureux; baguette, gaule à
battre les habits.
Dér. du celt. Gen, arbre : forme diminutive.
GIN
Ginouïa, s. m. n. pr. de lieu. Génolhac, chef-lieu-de
. Canton, arrondissement d'Alais. — Son nom est cité dans
les cartullaires ou les vieux titres et dénombrements : en
4169, Junilhacum ; en 1176, Ginolacum ; en 4499, castrum
de Genouillac; en 1243, Genolhacum; en 438%, Junilha-
cum; en 4426, Jinoliacum; depuis 1433 jusqu'en 4721 et
. aujourd’hui, avec des variantes d'orthographe, de Genolhac,
Ginolhac et Genouillac, il est arrivé à sa forme actuelle
et à la prononciation que nous représentons en lang. et en fr.
Sauvages pense que le nom lat. de Juniliacum, où il
trouve quelque chose du romain Junius, doit être con-
sidéré comme ayant formé le mot Génolhac. Un tel parrain,
noble où non, n'a rien qui nous séduise, et nous n'avons
.nulle foi en ses reliques. En général, toutes ces dénomi-
. nations géographiques, tirées du nom d'anciens possesseurs
* vainqueurs de la Gaule, nous inspirent une médiocre con-
fiance : nous les avons combattues, et l'occasion se pré-
sente ici d'apporter un nouvel argument à l'appui de la
thèse que nous soutenons.
A la place de ce chimérique Junius, qui n'a pas fait les
"noms Communs Ginès et Ginèbre que nous venons de voir
et où il aurait eu quelque raison d'entrer, il faut substi-
tuer un radical pris dans l’ancienne langue nationale, qui
soit significatif et en rapport direct avec le lieu à désigner.
Pour l'obtenir, ici comme ailleurs, la première opération
est de dégager le mot de toutes les adjonctions complé-
mentaires qui sont venues en modifier le sens et la forme.
Ainsi l'on doit être fixé sur les désinences appliquées aux
substantifs dans le but de les adjectiver, de les transfor-
ner en noms propres, en noms patronymiques ou géogra-
phiques, en des noms de propriété ou de quartiers, de
provenance ou de collectivité, de situation ou d'aspect; de
même que l'on connaît les formules par lesquelles sont
exprimés les diminutifs et les augmentatifs, qui affectent
en général des règles systématiques peu variables. Ces
procédés de composition se trouvent dans la langue la
plus anciénnement parlée dans les Gaules, celle d'où sont
sorties sans contredit la plupart des appellations régiona-
les, et dans les idiomes qui se sont succédé, le latin en
première ligne dont l'influence s’est continuée par la basse
latinité, son altération, et par le roman qui lui est encore
si redevable. Les diverses phases par lesquelles ont passé
à peu près tous les mots, ont déposé certaines couches sur
le noyau primitif auquel il faut arriver; et l'élément on
le radical, débarrassé de cette espèce d'enveloppe, donnera
la raison, c.-à-d. l'étymologie de la dénomination.
I n'y a qu'à suivre cette analytique sur le
sujet vivant; et d’abord la comparaison de sa structure
ancienne avec celle qui nous reste fait apparaître à la finale
le suffixe adjectif gaulois ac, latinisé en acum, par l'accord |
avec castrum, réduit ensuite ou ramené à la chute dé la
forme latine en ae fr. et en a simple, lang. Ce suffixe n’a
rien ici que la condition ordinaire dont nous avons déjà
parlé bien des fois. Il est lié par la mouillure à la syllabe
GIN 385
précédente de la voyelle à, du génitif, ou de /h, qui la
remplace et est équivalent, de manière à donner comme
désinence iacum, normal, La provenance, la descendance
se trouve déterminée.
Reste Junil, Ginol où Jinol : la forme est identique, elle
ne présente de remarquable que la présence de l'o à la
dernière syllabe, consonnance qui a persisté et s'est con-
servée non sans motif. Ol est en effet la reproduction du
lat. Olus, comme Olo, au fém., celle de Ola, qui ne sont
autres que des terminaisons diminutives, qui ont la pro-
priété de se convertir très-diversement suivant les dia-
lectes, comme leurs similaires en al et el, et de donnér dou
le plus souvent, et ouï, et les autres dou et éou, avec les
variantes. Le mème phénomène se retrouve dans le fr. ét
dans l’espag. et l'ital. : Filiolus, lat., Fidou et Fiol, lang.
Filhol, Fülhoù, prov. Fiolo, Fülholo ; Filleul, Filleule, fr.,
Figliulo, ital., Hijuelo, esp.; Linteolum, Lénsôou, Linsdow,
Lanséou, Lenzuelo, Lensol ; linceul, etc. Sauvages cite au
mot Brueil, en v. fr. Breuil, Brouil et Brel, bois, forêt,
de la bass. lat. Broilum, brotium, broglium, bruillus, et
Bruguëïrolo, dim: de Bruguidiro : nous trouverions encore
Cassagnolo de Cassagno, el Maruéjdou, Marvéjols, de
Maruèje; Lanuèjoou, Lanuéjols, de Lano ou Lanu, etc.
Nous les mentionnons à cause de l'analogie de la forme
diminutive existant dans notre mot et dans une foule
d’autres, composés de même.
De telle sorte que, disparaissant la désinence adjective,
suffixe sans signification par lui-même, s'il ne restait ici
que Ginol où Jinol, Ginouï, Ginoulh où Génol, la finale
aurait grande chance d'être prise pour un diminutif du
radical auquel elle aurait été attachée.
Or ce radical se rencontre précisément dans le mot que
nous venons de citer, Ginès, Genêt, et c'est le celtique
Gen, arbuste, arbrisseau. En bas-breton, Giwézen, Gwéen,
arbre.
Il semble donc très-probable que le nom de Génolhac a
suivi le mème chemin d’abord que Ginès et vient de la
fnème racine, et par suite qu'il a été approprié, par le di-
minutif et par les suffixés ordinaires, à ce qu'il était des-
tiné à représenter et à signifier. Que ce soient de petits
arbustes simplement, ou des genêts communs, qui crois-
sent en abondance sur ce revers de la Lozère où est em-
placé aujourd'hui Génolhac, la dénomination est également
justifiée : elle veut dire : quartier, lieu abondant en genôts,
et elle dépeint exactement le sile, ce qui est la prenière
condition des noms propres, bien entendu en se reportant
à l'époque où le baptème se fit.
Ceci ne signifie donc point que la petite ville actuelle
remonte aux Gaulois, ni même au temps des colonies ro-
maines : son ambition sans doute, malgré Sauvages, ne
revendique pas une Si lointaine origine; et nous n'avons
pas fait de généalogie, en trouvant à son nom, comme
pour bien d’autres, une racine celtique. La ville est née
quand elle à pu; mais elle s'est emplacée dans un quartier
49.
386 GIP
anciennement désigné : voilà tout. Les noms propres et
locaux, et les noms communs appartiennent en très-grand
nombre à la langue ancienne, qui n’a jamais été oubliée;
etc’est pour rattacher nos traditions de langage à leur vraie
source, que nous avons insisté sur cette nouvelle preuve.
La prononciation du mot en lang. ne peut offrir la
moindre difficulté ; on ne comprendrait pas qu’elle en püt
présenter en fr. Sa dernière syllabe est essentiellement
mouillée : 4h est le signe équivalant aux deux à ou à
tréma entre voyelles, et correspond d’ailleurs au lat. liacum,
dont il importe de conserver la consonnance.
Ginoul, s. m. Dim. Ginouié; péj. Ginouias. Genou, ar-
üculation qui unit la jambe à la cuisse, le fémur au Libia.
— D'a-ginouls ou D'ayinouioùs, à genoux; sur les genoux;
en posture de suppliant.
Malgré certaine ressemblance graphique, le mot précé-
dent ne peut descendre de celui-ci, et il y a pour cela
deux raisons : d'abord, il n'aurait aucun sens ‘applicable
et le dimin. si caractérisé en lat. et en fr. disparaîtrait
complétement, comme le suffixe de la désinence; puis, en
languedocien, celui-ci ne se prêterait nullement à la for-
mation; car, en vieux langage, il était Dénouï, écrit Dé-
noulh. C'est par une corruption franchimande qu'on dit
aujourd'hui Ginoul, bien qu'il dérive en droiture du latin
Genu, M. sign.
Ginoûs, n. pr. d'homme. Au fém. Ginouso;dim. Ginousé,
éto. En fr. Ginous ou Ginoux.
Ce nom de famille, assez répandu dans ce pays, a été
un prénom autrefois, qui avait pour patron saint Genou
ou Genus, évêque de Cahors, vers le milieu du Ie siècle.
Le n. pr. Ginouié, Genoyer, nous parait avoir la même
origine plutôt que le nom de saint Janvier.
Ginousclo, s. f. Tithymale, Galactis Euphorbia, Linn.,
un des noms de cette espèce de plantes de la fam: nom -
breuse des Euphorbiacées, — Il paraït que le premier nom
lat. est générique : Euphorbia ne désignerait qu'une espèce
particulière, salutaire dans les ophtalmies et qui doit son
nom à Euphorbe, médecin du roi Juba. Son lait est extrè -:
mement caustique; il tue ou étourdit le poisson dans les
viviers et les flaques d’eau non courante : aussi-son usa ge
est-il sévèrement défendu par la police, soit parce que
l'empoisonnement des rivières au moyen de drogues est-un
mode de pèche prohibé, soit parce que ce laït:est fort dan-
gereux pour le bétail qui pourrait aller s’abreuver, au-
dessous du point où il a été répandu.
Ginqua, v. Viser; mirer; viser en lançant un projec -
tile quelconque. — Ginques à mé troumpa, tu vises à me
tromper. —Voy. Guincha.
Ginquo-gal, s: ». Fronde à deux brins et à une seule
maille : la plus simple et celle qui a le moins de portée.
Son nom l'indique; il a l'air de supposer qu'elle n’est bonne
qu'à viser et qu'à atteindre un animal faible et que la
domésticité rend fort accessible.
Gipas, s. ». Au plur. Gipasses. Plâtras, débris de ma-
GIR
çonnerie, Par ext. large éclaboussure de boue compacte;
soufilet appliqué sur la joue, dans le sens de Émplastre,
qui est avec cette acception une francisation.
Dér. de Gi, plâtre. e
Gipiè, s. m. Plâtrier; ouvrier qui travaille aux car-
rières de plâtre; marchand ou fabriquant de plâtre.
Gipièiro, s. /. Platrière, carrière et four à plâtre. —
Maléïroùs coumo un ase dé las gipièiros, malheureux
comme un àne de jardinier, dit-on en fr; comme un àne
des pltrières, devrait-on traduire littéralement. L'appli-
cation est toule locale et commence mème à se perdre. Il
y a quelques années le plâtre gris n’arrivait à Alais des
plâtrières de Pleoux que sur le dos d’une. caravane d’ânes
dont chacun avait pour conducteur un gamin armé d’un
grand bâton. Les gamins montaient sur la croupe du bau-
det, le sac de plâtre était placé sur l'échine; et le bâton de
jouer et l'âne d'aller grand train, quoique sous un double
fardeau, mais sans bât ni bride. Aujourd’hui que les voitures
arrivent partout, l'âne des plâtrières est peu connu, son
rôle et ses malheurs ont cessé,-et le dicton, sans tomber
en désuétude, pourrait n'être pas bien compris, si la tra-
dition historique s’en était perdue.
Girbas, s. m. Au plur. Girbasses; péj. Girbassas. Ter-
rain envahi par le gazon, le chiendent et toute sorte de
plantes rampantes, et réduit à l’état de friche; francs-
bords et talus d’une terre élevée sur ses voisines où sur
son fossé d'écoulement.
Augm. de Girbo.
Girbo, s. f. Gazon; motte de gazon; terrain gazonné de
lui-même.
Ce mot semble évidemment emprunté au fr. Gerbe, dont
il est une corruption, quoiqu'il n’y ait aujourd’hui aucun
rapport entre les objets que chacun représente. M
Girbouléto ou Jargouléto ou Gério, s. f. Chanterelle
comestible, Cantharellus cibarius, Agaricus cantharellus,
Merulius cantharellus, Linn., Pers., Roq. Champignon de
la tribu des Agarics. — C'est un joli champignon tout
jaune ou couleur d’or, qui croit abondamment dans les bois,
les pelouses, les châtaigneraies, où il se fait remarquer par
un petit chapeau d’abord arrondi et convexe, qui prend
ensuite en se développant la forme d'un petit entonnoir
dont les bords sont diversement contournés et comme frisés.
ou festonnés. La face inférieure de ce chapeau est marquée
de nervures une ou deux fois bifurquées et décurrentes
sur un pédicule ordinairement court, plein et charnu. La
chair est ferme, blanche, un peu fibreuse; elle ne change
point de couleur à l’air. Ce champignon est très-salubre,
et son usage est sans aucun danger.
Giroîle, s. m. Girofle, clou de girofle. — Ce que nous
appelons ainsi,.et que nous; ne connaissons que sous. le
nom de Clavèl dé girofle n'est autre que le calice de la
fleur du giroflier, arbre originaire des Molusques, Caryo-
phyllus aromaticus, Linn. de la fam. des Myrtoïdes .
Le mot est une abréviation du nom lat.
#
21
GLA
Girouflado, s. f. Œillet, et plus particulièrement œillet-
plume, Dianthus plumarius, Linn., fleur ou plante de la
fam. des Caryophyllées, à odeur de girofle. — Il ne faut
pas la confondre avec la Giroflée en fr., pour nous Vidouïé,
qui est une fleur totalement distincte, quoique l'odeur de
girofle l'ait fait aussi dénommer.
” Giroufliè, s. m. Pied ou plante d’æillet.
Girouio, s. /. Carotte sauvage, faux chervis, Dancus
cärottà, Linn., plante de la fam.'des Ombellifères, com-
mune dans les champs. On la nomme aussi Pasténargo
saouvaÿo. — Voy. cc. m. : 3
ne v. Sangler à Co es de house de gaule ou de
fouet.
"Variante de Gingla, même formation et m. sign.
Gisclas, s. m. Au plur. Gisclasses. Houssine, baguette,
* gaule; mais ne représentant ces objets qu'en tant qu'ils
servent à frapper, à châtier. — S'emploie aussi pour le
"coup de houssine, le fouet lui-même, et l’action de frap-
per. — Y fichère un gisclas, je lui sanglai un coup. Garo!
s'arape un gisclas, gare, si je prends le fouet, un bâton.
Récassaras lqudouque gisclas, tu attraperas quelque coup
* de gaule. d
Gisclassa, ». augm. et fréq. de Gisela.
po 71e md s. f. Volée de coups de verges; gaulade
bien sanglée.
‘| Gistèl ou Listèl, s. m. Petite tringle de He toute
espècé dé règle en bois, mince, étroite et longue, qui sert
à divers usages, en menuiserie, souvent pour fermer un
vide ou niveler une ligne qui n'est pas à angle droït avec
ses voisines, et en plâtrerie pour clouer à petits intervalles
“entre les solives d’un plafond, les revêtir de plâtre qui
fait mieux prise et former les lambris. s
Ce mot, quoi qu’en dise Sauvages, se traduit très-correc-
tement en fr. par Liteau, en terme de ménuiserie; c’est
le Lambris, en terme de maçonnerie.
Gistèl est très-usité; il ne nous parait cependant qu’une
us de List. — V. c. m.
Glacièiro, s. f. Glacière: lieu où l’on conserve la glace
en été. Au fig. lieu, appartement très-froid; exposition
_glaciale.
"Glago, s. . Glace, eau glacée ; miroir.
Empr. au fr.
” Glaçoü, s. m. Glaçon; morceau de glace.
Glando, s. /. Glande, tumeur enflée. Dans l'usage, si-
gnifie purement l’engorgement d’une sante: — À uno
® glando, il a une glande engorgée..
1 Glâoujôou, s. m. Calmar, cornet, Loligo, poisson de
mer, cephalopède, du genre des Sèches et des Polypes.
Comme les poissons de cette fam. il à une sorte de réser-
voir d'une liqueur noire qu'il répand autour de lui dans
le danger, pour échapper à la vue d’un'ennemi. t
*Dér. du lat: GZadiolus, petit gldive, parce que ce pois-
son a sous la peau de l'échiné un os mince et ny
‘de la forme d’un glaive.
fort employée par et pour les enfants.
GNA 387
Glatiè, adj. masc. seulement. — Ne se joint jamais à
aucun autre, subst. que Jd0u: — Un idou glatiè, un œuf
couvé dont le jaune et le germe sont tombés en sérosité et
en dissolution, et qui par conséquent ne peut éclore.
‘Glèïso, s. /. Dim. Glïséto. Église; lieu où les fidèles
s’assemblent pour assister aux offices divins. — A /a gran
gléiso, à la cathédrale, à l'église principale. Encore un
exemple où l’adj. ne s'accorde pas en genre avec le subst.;
‘c'est l'effet d’une élision faite sur le lat. d'où vient le mot.
Aquél cura faï bièn gléiso, ce curé officie avec beaucoup
de dignité, ou il prêche bien; on encore, remplit bien les
fonctions de son ministère à la satisfaction des fidèles.
Dér. du lat. Ecclesia, m. sign.
Gléjoù, s. m. Dim. Gléjouné. Chaume; mais seulement
tant qu'il tient encore à la terre.
Gléna, v. Glaner; ramasser les épis restés sur la terre
après la moisson. Au fig. cueillir après les autres.
Glénaïro, s. f. Glaneuse; qui glane, qui ramasse les
épis après les moissonneurs. Au fig. il peut s’employer au
masculin, Glénaïre.
Gléno, s. f. Glane; glaneuse; petite gerbe ramassée
après la moisson; action de glaner ; au pr. et au fig.
Dér. de la bass. lat. Gelina, m. sign.
Globo, s. m. Globe, corps rond et solide; ballon;
aérostat.
Dér. du lat. Globus, m. sign.
Glorio, s. f. Orgueil; vanité; et non gloire, dans le
sens du fr. — És pas pér glorio, ce n’est point par vanité,
par luxe, mais par nécessité et besoin.
Dér. du lat Gloria, avec une certaine modification d’ac-
ception.
Glouriéto, s. f. Fournil; petit réduit dans l’arrière-
boutique d'un boulanger et près du four, où la pâte se
manipule et lève à un certain degré de chaleur. En v. fr.
Gloriette était un cabinet de verdure.
Glourioùs, ouso; adj. Au plur. Glouriouses; dim.
Glouriousé. Glorieux ; vain; superbe; vaniteux, principa-
lement dans sa mise.
Gn'a, contraction de la phrase Né y-a, il y en a, qu’on
mouille euphoniquement par l’adjonetion de la lettre G:;
par conséquent Gn’a n'est autre que le verbe avédre, avoir,
précédé du Gn qui l'accompagne dans toute sa conjugai-
son lorsque la construction de la phrase l'exige. — Gn'a
pas qué gn'ague, Ou pér gn'avédre, mais gn'a, ce n'est pas
pour dire, mais il y'en a.
Gn'a est pris quelquefois interjectivement. Gn'a/ dit-
on, il en tient, lorsqu’en jetant des pierres, on atteint juste
le but visé, ou qu'on atteint une personne.
Gnâou! Onomatopée du cri du chat. Pris interjective-
ment, il est une formule mignarde et agaçante de refus,
— Faï mé un
poutouné. — Gndou! Fais-moi un petit baiser. — Nenni.—
- Dono mén un pdou. — Gndou! té fara pas mdou, Donne
m'en un peu.— Nix! ça ne te fera pas mal.
388 GON
Gnèiro, s. f. Puce, Pulex irritans, Linn., insecte de
l'ordre des Aptères et de la fam. des Parasites ou Rhinap-
tères, trop connu et qui aurait pu se passer de sa défini-
tion scientifique. — Manjado dé gnèïro, piqüre de puce :
ce petit cercle rouge avec un point plus foncé au centre,
qui indique la petite inflammation que procure cette pi-
qüre. Tria las gnèiros, épucer. Li boulégaraï sas gnéïros,
je le tancerai d'importance .
Gnéïro est aussi un terme d'amitié très-employé. — Ma
gnèiro! mon chou, mon petit cœur !
Les uns le font dériver du ligurien, d’autres du celtiqu e
Nyer, m. sign., ou plus simplement du lat. Niger, nigra,
noir, noire,
Gnèiroùs, ouso, adj, Au plur. Gnèrouses ; dim.
Gnéirousé. Mangé de puces; qui est couvert de traces de
piqüres de puces.
Gnuë, s. f. Nuit; temps pendant lequel le soleil est sous
notre horizon; obscurité. — A gnuè ou d'agnué, ce soir,
cette nuit. La gnuè passado, la nuit dernière. Bono gnuë,
bonsoir, bonne nuit. És gnuë ou faï gnuë, il est nuit close,
ou l'obscurité est profonde. Faï un an dé gnuè, les nuits
durent une année dans cette saison. Passa la gnuë, ne pas
dormir, veiller; passer la nuit blanche.
Chaque petite circonscription en Languedoc a une ex-
pression différente pour rendre le mot Nuit. A Montpellier,
on dit Gnoch, qui semble plus primitif en ce qu’il se rap-
proche beaucoup de la racine commune, le lat. Noæ. Les
autres formules ne seraient en ce cas que la corruption de
celle de Montpellier. En provençal et en gascon, on em-
ploie Nuech, Neit, Not, Nieu, Nueyt, Gniu, Net, Ney, et
quelques autres variantes.
Gnuèchado, s. /. Nuitée; durée d’une nuit.
Go, s. m. Gobelet; verre à boire. — Voy. Gouvélé.
En bas-bret. Gob et Goblet, m. sign. Contr. de Gobelet,
fr., dér. du lat. Cupelia, dim. de Cupa, coupe.
Godo, s. /. Vieille brebis édentée et maigre, qui n'est
plus bonne à porter ni à engraisser.
Goïno, s. f. Femme de mauvaise vie; prostituée.
Dér. du gr. Kotvés, commun, indivis. Il est probable que
c'est ici le lang. qui à prèté au fr. dans l'adoption du mot
Gouine, M. sign.
Golfe, golfo, «dj. Gonflé; bouffant; raide d’apprêt,
comme une étoffe qui, au lieu de s’aplatir, se tient gonflée
d'elle-même en se courbant en rond ou en angles.
Dér. de l'ital. Gofo, lourdaud, grossier, sans grâce;
parce que l’étoffe, à cet état de raideur, ne forme que des
plis disgracieux.
Gome,s.m. Goitre, et plus particulièrement signes diag-
nostiques de la maladie des animaux qu'on nomme Gamije
CV. c. m.). — Mostro lou gome, on commence à distin-
guer, à reconnaitre le goitre,
Gonle, s. m. Cuilleron de la châtaigne qui n’est autre
chose qu'une châtaigne avortée, puisqu'elle a la même
GOU
forme et loutes les parties entièrement semblables : la
pulpe seule manque à l’avorton. — Voy. Cuitiré.
Gonle, gonlo, adj. Gauche; mal arrondi; de travers.
— Se dit d'un corps sphérique ou cylindrique dont la
ligne de circonférence est irrégulière. 2
Gorgo, s. f. Gouttière des toits ; conduit d’une fontaine,
en pierre ou en toute autre matière; tout déversoir des
eaux pluviales.
Dans la bass. lat. Gorga, canal, dér. du lat. Gurges,
gouffre.
Gorjo, s. f. Dim. Gourjéto; augm. Gourjasso. Bouche;
intérieur de la bouche; gueule; gosier. — Précha pér sa
gorjo, tre sur sa bouche. La gorjo li fumo, la gueule lui
pèle d’impatience de manger. La gorjo dâou four, l'entrée,
la porte du four. És cla coumo la gorjo dâou four, il fait
noir comme dans un four.
Dér. du lat. Gurges, abime, gouffre.
Gorjo-vira, ado, adj. Qui a la bouche de travers; dif-
formité de la bouche.
Gormo, s. f. Morve, maladie terrible des chevaux.
Le lang., peu fort sans doute en hippiatrique, a em-
prunté ce mot au fr.; mais en changeant son acception. La
gourme proprement dite est las Poujolos. — V. ©. m.
Goubélé, s. m. — Voy. Gouvélé.
Goubio, s. f. Gouge; outil, ciseau de menuisier, d’é-
béniste, de tourneur, de charpentier, etc, dont la lame
est plus ou moins courbée sur le plat, et forme une por-
tion de cercle, une sorte de canal. ;
Dé:. du gaulois Guvia ou Gugia, m. sign.
Goudoumarou, s. m”». Malotru, selon Sauvages; mais
dans l’acception usuelle, il signifie homme peu civilisé,
ours mal léché, un de ces gens qui ne disent rien et n’en
pensent pas davantage. Nous croyons donc que Sauvages
a poussé l'extension de ce mot jusqu'à la signification de
malotru pour mieux justifier l’origine qu'il lui donne.
D'après notre spirituel glossateur, il serait la corruption
de la phrase anglaise Good morow, bonjour. Pendant l'oc-
cupation anglaise des provinces méridionales de la France, .
sous Charles VI et Charles VII, on subissait ce joug odieux
avec impatience, et les envahisseurs étaient appelés ironi-
quement d’un surnom pris dans une de leurs phrases
habituelles : bonjour. Plus tard, quand on voulut désigner
un malotru, un être déplaisant, on le nomma Goudous
marou, comme l’on aurait dit : un Anglais.
A côté de cette interprétation s'en présente une seconde,
moins ingénieuse sans doute, mais plus naturelle et plus
en harmonie avec le vrai sens du mot aujourd'hui. Gau-
demar est un prénom très-commun, très-familier au moyen
âge, un individu de ce nom a bien pu servir de type à
cette appellation ironique, comme l’on dit : un Blaise, un
Gille, un Basile.
Goujar, s. m. Dim. Goujardé; péjor. Goujardas. Au
fém. Goujardo. Goujat; aide-berger, qui aide à conduire
les troupeaux; jeune garçon qui garde les cochons dans
PET SU RE -
TENTE SONT de El 32 EU
GOU
une ferme. Par ext. et injurieusement, polisson , petit
drôle; vaurien.
Goujè (La), s. f. n. pr. de rue. La Gougé, rue de la
ville d’Alais. Elle est nommée dans un titre de 4393 a
Gougia, le nom n'est pas alléré. En vieux lang. Goujo
voulait dire servante, puis jeune fille. Existait-il dans ce
quartier anciennement quelque auberge dont une servante
eût été assez remarquée pour donner son nom à une rue;
ou s'y trouvait-il une ou plusieurs de ces filles que le vieux
fr., aggravant l'acception par dénigrement, appelait gou-
ges? La question n'est pas résolue, non plus que celle de
la vraie étymologie du mot qui l'éclairerait peut-être.
Goulamar, ardo, adj. Paresseux; vaurien; batteur
d'estrade; ce que sont les lazzaroni à Naples.
Parait un augm. péj. tiré de Gulo, Goulu.
Goulu, gouludo, adj. Goulu; glouton; goinfre; qui
_ mange avidement.
Dér. du lat. Gulosus, m. sign., de Gula.
Gouludije, s. f. Gloutonnerie; goinfrerie.
Gouma, v. Regorger; abonder; foisonner, — En terme
d'agriculture, se dit de la sève d’un arbre qu'on greffe en
. flûte, lorsqu'elle remonte au-dessus de la virole de la greffe;
ce qui prouve que l'opération est bien faite, puisque la
sève, après avoir rempli hermétiquement l'espace entre la
greffe et la branche dénudée, se répand au dehors.
Gouma signifie aussi former calus au-dessus d’une plaie,
Goumo, s. f. Gomme de tonte espèce; substance col-
lante, qui est un des principes des végétaux; sève des
arbres.
Dér. du lat. Gummi, m. sign.
Gounèl, s. #1. n. pr. Au fém. Gounèlo. — Sobriquet que
Yon donne aux habitants des communes de l’arrondisse-
ment d'Alais au levant et au midi de cette ville, dans la
direction de Nimes et d'Uzès. Ce n’est point là une appel-
lation géographique comme Raïol et cévenol; mais un
surnom railleur que les intéressés répudient, ou que leurs
voisins leur donnent par dérision : il prend son origine
dans. cet esprit de rivalité qui se montra si fécond au
moyen âge dans cet échange piquant de sobriquets. Ce nom
au reste, qui porte en lui-même le cachet de son ancien-
neté, doit venir nécessairement d’un vêtement particulier
qui distinguait ces populalions. Les sources qui peuvent
l'avoir fourni ne manquent pas : l’ancien fr. Gone ou
Gonne, robe, et Gonelle, casaque d'homme pour la chasse,
étaient au moins de mème provenance, et le lang. Gounèl
avait emprunté, comme lui, et en même temps, sa signi-
fication de tunique ou longue chemise, à la. bass. lat.
Gonela, tunica, palla, qui venait du lat. Gunna; en cam-
brique Gwu, en saxon Guwon, en gr, oïvæ, ont une pa-
reille signification. Le mot remonte loin : le vêtement qu'il
désignait était connu partout. Dans nos contrées la mode
de ces longs sarraux de laine ou de toile grossière, par-
dessus tout, pour hommes et pour femmes, s’était-elle plus
longtemps conservée qu'ailleurs? avait-elle été reprise et
389
distinguait-elle les habitants des quartiers dont nous avons
parlé, à l'époque où l’on imagina d'en faire un sobriquet
plaisant ou injurieux? Il importe peu d'en connaitre au
juste la raison, quand il suffit de savoir que l'appellation
est due à une singularité de costume : la racine du mot
le dit et c'est tout ce qu'il en faut.
Gour, s. m. Dim. Gourdé ou Gourgué ; augm. Gourguas.
Fosse d’eau dans une rivière ou un ruisseau; flaque d'eau
de pluie ou d'inondation; mare. — Susa coumo un gour,
être tout en nage. Un gour dé sang, une mare de sang.
Aquélo vigno és un gour dé vi, cette vigne produit un fleuve
de vin.
Dér. du lat. Gurges, gouffre.
Goura, v. Gourer; attraper; tromper; duper.
Gourdo, s. f. Gourde; calebasse; courge servant de
bouteille.
Probablement, contraction de Cougourdo où Cougourlo,
du lat. Cucurbita, courge. — Voy. Cougourlo.
Gouré, $. m. Goret, petit cochon; porc; et par ext. en
terme injurieux, Juif.
Dér: du gr. Xoïpos, porc.
Gourga, v. Regorger d'eau; être abreuvé, imbibé à
l'excès; tremper. — Aquélo tèro gourgo, ce champ est trop
imbibé d’eau, l’eau ne peut s'y écouler ou y être absorbée.
Dér. de Gour.
Gourgnè, n. pr. et adj. m. Gournier. — Mouli gour-
gnè, moulin entouré de fosses d'eau. C’est le nom que
portait un vieux moulin dont les ruines existent encore,
sur l'emplacement duquel sont bâties quelques maisons en
face de celle de l'administration de l'usine des Fonderies
et Forges d’Alais. Il a donné son nom à tout ce territoire.
Gourgo, s. f. Bassin, réservoir d’eau de pluie ou de
fontaine, pour servir à l’arrosage d'un jardin, d'une
prairie.
Dér. du lat. Gurges.
Gourgouia, v. Grouiller; produire des borborygmes, des
flatuosités dans les intestins. — Un co déou jour las tripos
gourgouïou, littéralement, une fois le jour, les boyaux
grouillent, c.-à-d. au fig., il n’est pas de caractère si doux,
si calme, qui ne murmure, qui ne se fâche quelquefois.
Ce verbe paraît dérivé de Gour, par suite de la fausse
idée que ce sont des amas d’eau qui clapotent dans les
intestins, au lieu de gaz qui sont la véritable cause de ce
grouillement.
Gourgoul, s. m. Chalançon, calandre, qui ronge le blé,
Curculio, Linn., insecte de l’ordre des Coléoptères et de la
fam. des Rostricornes. — Voy. Courcoussoù.
Dér. du lat. Curculio, m. sign.
Gourgouli ou Léngasto, s. m. Hippobusque du mouton,
moustique des brebis, Hippobosca ovina, Linn., insecte de-
l'ordre des Diptères et de la fam. des Hanstelles ou Sclé-
rostomes. Il est plat, rouge et de la forme d’une punaise;
armé de crocs très-acérés et très-forts, qui pénètrent dans.
la peau ; il vit sur le mouton et la brebis.
GOU
390 GOU
La Léngasto et le Gourgouli sont à peu près le même
insecte : quelque différence doit probablement les distin-
guer cependant, mais les deux noms sont également fami-
liers aux bergers du pays. —Voy. Léngasto.
Gourgoulina, v. Siroter, boire à petits coups et long-
temps; boire à la régalade; gargariser; proprement, boire
au gouleau d’une gourgoulino.
Gourgoulino, s.f. Cruchon ; petite gourde; biberon.
Gourin, ino, adj, Vagabond; libertin ; débauché; ruffian;
fille de joie, coureuse; gourgandine.
Dér. de Gouré.
Gourina, v. Vagabonder, battre le pavé; courir les mau-
vais lieux; courir après les femmes débauchées; faire le
mauvais sujet.
Gourjado, s. f. Gorgée; bouchée; quantité de liquide
qu'on peut avaler. en une fois. — A bèlos gourjados, à
gorgées.
Dér. de Gorjo.
Gourjè, èiro, adj. Qui a une large ouverture; qui a un
grand avaloir. — Un sa gourjè, un sac large d'entrée. Un
moundaïre, gourjè, un crible à blé dont les trous sont fort
larges et laissent passer trop de bons grains.
Dér. de Gorjo.
Gous, s. m. Goût; saveur; celui des cinq sens dont la
langue est le principal organe.
Dér. du lat. Gustus, m. sign.
Gousiè, s. m. Dim. Gousièiré. Gosier, partie intérieure
du cou; canal de la voix et des aliments.
Emp. au fr.
Gousta, s. m. Dim. Goustadé. Goûter, petit repas entre
le diner et le souper. —. Les travailleurs de terre à Ja
journée font trois repas sur le chantier à partir du 45
février jusqu'au 4° novembre : le déjeuner qui a lieu, à
8 heures du matin et plutôt mème dans les grands jours ;
le diner, invariablement à midi; le goûter à 4 heures.
Pendant le reste de l’année, le déjeuner est supprimé, le
diner a lieu à 9 heures et le goûter à 4 heure après
midi.
Gousta, v. Goûter, c:-à-d. faire le repas dit Goûter, et
non point Goûter pour déguster, qui se dit Tasta.
Dér. du lat. Gustare.
Goustado, s. f. Goûter, lorsqu'il entraine l’idée d'un
petit régal, d’un gala, d’un extra quelconque, hors de l'or-
dinaire. C’est ordinairement un gala d'enfants, et aussi ce
gala de certains artisans aisés qui se réunissent dans un
cabaret où chacun apporte son plat. Ce mot enfin com-
porte l’id e d’un extra, mais modeste, L’habitude s’en perd
dans la classe moyenne : les mœurs ne sont plus à cette
simplicité.
Gousto-soulé, phrase faite, s. m. Avare; égoïste; qui
n'aime pas à faire part de son beurre.
Goustous, ouso, adj. Qui a du goût; qui a bon goût;
savoureux; appétissant; qui flatte le goût. — S'emploie
surtout en parlant du pain de ménage, en opposition aux
GOU
| dernières qualités du pain de boulanger, dont on a retiré
la fleur et qui est fade.
Dér. de Gous.
Goutéja, v. fréq. Suinter; dégoutter; tomber goutte à
goutte.
Dér. de Gouto.
Goutièiro, s. f. Voie d’eau à travers une toiture, causée
par la fente d'une tuile ou son déplacement, par un trou.
— Le chèneau ou conduit sur les bords des toits appelé
en fr. Gouttière se dit Acandou. — V. c. m.
Gouto, s. j. Dim. Goutéto. Goutte, pelit globule d'un
liquide ; roupie ; par ext. et multiplication, petit verre
d’eau de vie. — Béoure la gouto, boire la goutte, un petit
verre de liqueur alcoolique quelconque.
Dér. du lat. Gutta, m. sign.
Gouto-miougrano, s. f. Migraine, douleur, souvent
périodique, qui affecte un côté de la tête.
Dér. pour la seconde partie du mot, de son nom lat.
Hemicranica, du gr. ‘Hywoavlx, moitié du crâne.
Goutos (Las), s. /. plur. La goutte; maladie; fluxion
àcre, douloureuse, avec gonflement, qui attaque les join-
tures, les articulations, les nerfs. — Las goutos éstacados
à l'os, durou jusqu'âou cros, à la goutte point de remède;
elle dure jusqu’au tombeau.
Gouto-séréno, s. f. Goutte-sereine; amaurose, maladie
des yeux qui entraine la cécité.
Goutoun, s. f. n. pr. de femme. Goton : dim. de Mar-
goutoun, Margoton, qui sont eux-mêmes une variété fami-
lière et caressante de Marguerite ou Margarido.
Gouvélé, s. m. Mieux et plus usité que Goubélé. Dim.
Gouvéleté. Gobelet, vase rond à boire; verre à boire. —
Voy. Go.
Dér. du lat. Cupella, petite coupe.
Gouvélétéja, v. fréq. Gobelotter; buvotter; boire sou-
vent et à petits coups; fréquenter les cabarets, y faire de
longues séances.
Gouvèr, s. m. Gouvernement; direction, maniement'des
affaires; économie domestique; reine ou mère-abeille d’une
ruche, qu'on dit mieux Maïstro; maîtresse-branche d'un
arbre; principal rejeton d'une plante. — Y-a pas gés dé
gou vèr dine aquél oustdou, il n’y a pas d'ordre dans ce
mé nage. Aquél midou és dé michan gouvèr, ce mulet est
mal aisé à gouverner.
Dér. du lat. Gubernatio, de Gubernare, gouverner.
Gouvérna, v. Gouverner; commander ; diriger. — Quand
un étranger entre dans une maison dont il ne connait pas
les habitants, il dit, par phrase faite : Qudou gaï gouvèrno?
Qui est le maitre ici?
Gouvérnamén, s. m. Gouvernement.— Depuis le régime
constitutionnel, ce mot a dû descendre dans tous les idio-
mes, comme tant d’autres appartenant à cette politique qui
est à la portée de tous.
. Gouvèrno, s. {. Gouverne; règle, principe de conduite.
— Pér ta gouvèrno, pour te fixer, pour ta règle.
DR SE à
Gra, s. m. Gré; volonté; bon plaisir; reconnaissance.
— Sdoupré gra, savoir gré, être reconnaissant. Dé bon
gra, volontiers; volontairement, de bon cœur. Mé save
bièn gra, je me félicite, je suis heureux, content de...
| Vous én save gra, je vous en remercie.
Dér. du lat. Gratum, qui agrée.
Gracio, s. f. Grâce, faveur volontaire; remise de peine;
| grâce, agrément dans les personnes ou les choses, manières
agréables, bonne tournure.
Gracioùs, ouso, adj. Dim. Graciousé. Gracieux ; affa
ble; riant; poli; obligeant.
Dér,. du lat. Gratia, grâce.
Gragnè, s. m. Dim. Gragnéré; augm. Gragnèiras.
* Grenier à blé et autres provisions; non point grenier à foin
et paille, qui se dit Pañe.
- Dér. du lat. Granarium, m. sign. de Grana, Grano,
Gran...
Graïo, s. f. Corneille, nom sous lequel se rangent plu-
sieurs espèces : la Corbine ou Corneille noire, Corvus
corone, Linn.: le Freux, Fragonne ou Grolle, Corvus fru-
& … gilegus, Linn:; et au besoin la Corneille mantelée, Corvus
“corniæ, Linn.; celle-ci plus rare et bien reconnaissable par
le gris cendré qui recouvre le dessus et les parties infé-
L rieures de son corps et tranche sur la robe commune tou-
jours noire à divers reflets bleuàtres ou pourprés. Toutes
s ces corneilles, y compris le Freux malgré son épithète de
Frügilegus, sont omnivores. Il n’est donc pas étonnant
qu'avec tant d’autres points de ressemblance encore, elles
puissent ètre souvent appelées Courbatas où Croupatas, la
première surtout qui est la plus grande et dont les appétits
N se rapprochent davantage de ceux du corbeau. — En v. fr.
on disait aussi : Graille, tiré du lat. comme Graïa, Gra-
cula, .m. sign.
« Graïoù, s. m. Graillon: odeur de la graisse fondue ou
* de_celle.qui tombe sur les charbons ardents; goût que con-
î servent les ustensiles de cuisine qui ont servi à la prépa-
ration d'aliments gras et qui se communique à d'autres
aliments maigres.
| Dér.et sorte de dim. de Graïsso.
Graïssé, s. m. Farlouse, alouette des prés, pipi des
buissons, Anthus ‘arboreus, Linn., oiseau de l'ordre des
_ Passereaux a la fam. de Subulirostres où Raphioram-
bes, plus connu sous le nom, de Graisset ou Grassel, quoi-
que Sauvages dise que < c'est un. barbarisme ; car comment
pourrait-on mieux nommer ce petit pied, si rond, si fon-
dant, si, délicat, si apprécié des gourmands, auxquels il
_ faut d'ailleurs renvoyer, pour. le décrire a surtout en
vanter l'excellence ? si ce nom “n'existait p pas, ne faudrait-
il pas l l'inventer?
Graisso, s. /. Péjor. Graïssasso. Graisse, substance ani-
male, onctueuse, molle, huileuse. Au fig. embonpoint ;
excès ; gras. — Sé plan dé tro dé graïsso, il se plaint q
la mariée est trop
il est mort avec tout son embonpoint. Ës maldou dé tro
le. És mort émbé toutos sas graïssos,
GRA 391
dé graïsso, il est malade de trop d'aise; il se meurt de gras
fondu. Aquélo roumano, aquélo mésuro an tro dé graïsso,
cette romaine, cette mesure (de longueur ou de capacité)
font trop forte mesure, trop fort poids, c.-à-d. pèsent, me
surent ou contiennent plus que leur valeur nominale.
Graïsso-blanquo, saindoux, graisse de porc fondue.
Dér. du lat. Crassus, crassa.
Graïssoü, s. m. Cresson des fontaines, à petite fleur
blanche et cruciale, Sisymbrium nasturtium, Linn., plante
de la fam. des Crucifères siliqueuses.
Dér. du lat. Crescere, croître : permutation ordinaire
du Cen G.
Graïssoüs, ouso, adj. Dim. Graïssousé; péj. Graïssou-
sas. Graisseux ; poisseux ; gluant; enduit de graisse; taché
de corps gras.
Grame, s. m. Dim. Graméné. Chiendent, Triticum
repens, Linn., plante de la fam. des Graminées, commune
dans les terrains gras et humides, dont la racine sucrée est
employée en tisane, mais dont la présence dans un champ
est une pésle et le désespoir des agriculteurs, tant il est
difficile de l'extirper et d'en purger la terre.
Dér. du lat. Gramen, gazon.
Gramécis, phr. faite, tantôt s.m. ddj. ou interj. Grand
merci! Grâces à Dieu! merci; remerciement. — Gramécis
à iéou qué vous sès pas toumba, grâces à moi, si vous
n'êtes pas tombé. Gramécis qué l'âoubre èro paÿ ndou, qué
mé sérièi ésquina, fort heureusement que larbre n'était
pas haut, sans cela je me serais cassé les os. Aquô's lou
gramécis, voilà le remerciement que vous me faites, la
reconnaissance que vous me témoignez. Mé digue pas sou-
lamén gramécis, il ne me dit pas seulement merci.
Graménas, s. m. Augm. de Grame, mais encore avec
un séns plus étendu, car il signifie : une partie de terre, de
champ, de pré, envahie et labourée par le chiendent qu'on
ne peut extirper qu’à grañd'peiné. — Voy. Grame.
Gramo, $. mm. Gramme; terme d’unilé dans le nouveau
système des poids et mesures, valant un peu moins de
19 grains.
Il n’est pas nécessaire de relever cette importation fran-
çaise ou grecque, introduite dans la langue, par de nou-
veaux besoins.
Gran, s. de tout genre. Dim. Grané, Granéto. Aïeül, aïeule.
— Moun gran, ma gran, Mon grand-père, ma grand'mère.
— Ma gran la borgno, ma mère l'Oie. — Voy. Borgno.
Il y a aussi comme dim. terme de familiarité et de
caresse : Moun grané et ma granéto, mon petit bon papa,
ma bonne petite maman.
Gran, s. m. Dim. Grané. Grain; nom générique, mais
qui ne se dit guère qu'en parlant des céréales. Le grain
de raisin se dit Grun.
Dér. du lat. Granum, m. sign.
‘Grana, v. Grener; monter en graine; produiré beaucoup
‘de grain; en terme de magnanerie, poñdre. — Lous par-
‘païoùs an bièn grana, les papillons de vers-à-soie ont pro-
392 GRA
duit beaucoup de graine. Lous pélousses soun granas, les
hérissons des châtaigniers ont déjà formé leur fruit. Las
éspigos soun granados coumo dé sdou, les épis sont bien
grenus. Argén dé fénno el bé dé campano, noun flouris ni
noun grano, où avec la variante, sé flourès noun grano,
prvb.-qui ne témoigne aucune confiance en la prospérité
de biens provenant de femmes ou de prètres : il sous-
entend sans doute les biens spirituels qui leur reviennent
à plus juste titre, au moins comme compensation.
Granadiè, s. m. Grenadier; soldat appartenant à la
premiére compagnie d'un bataillon. Au fig. intrépide;
audacieux ; délibéré : se prend alors adjectiv.
Empr. au fr.
Granaïo, s. f. Grenaille; le plus menu plomb de chasse,
cendrée. — Éscarta la granaïo, se permettre des propos
grivois, licencieux, surtout devant les femmes et les en-
fants.
Granâou, s. m. Grandin, graneau, gurnau, gronau ou
bellicant, Trigla gurnardus, Linn., poisson de la Méditer-
ranée, de l’ordre des Holobranches et de la fam. des
Dactylés.
Son nom fr. lui vient sans doute du bruit qu'il fait en-
tendre quand on le prend : le lang. ne serait qu'uné sorte
d’altération à sa manière.
Grané, s. m. Pois ou haricots cossés et secs. — Soupo
dé granés, soupe aux haricots. Fégnan, vos dé granés? —
Où! — Porto ta sièlo. — Né vole pas gés; paresseux, Veux-
tu manger? — Oui! — Avance ton assiette. — Je n’en
veux pas.
Granéto d'Avignoun, s. /. Grain du Nerprun. — Voy.
Avignoun.
Grangala, v. n. — Ne s'emploie qu'à l'infinitif et pré-
cédé de Poudre pas. On ne dit pas: Grangala dé fré, dé
sé, dé fan, mais bien : Pode pas grangala dé fré, dé sé, dé
fan, ete., je meurs de froid, de soif, de faim; ou mieux,
le froid, la soif, la faim paralysent mes forces, je ne puis
mettre un pied devant l’autre. — Sauvages admet à la fois
Grangala et Poudre pas grangala, l'affirmative et la néga-
tive, avec la même signification, ce qui nous parait une
erreur. Dans ce pays, on ne l’emploie qu’à la négative.
Granivou, adj. des deux genres. Terre à blé très-pro-
ductive, où les céréales réussissent très-bien et produisent
beaucoup de grain.
Grano, s. f. Dim. Granéto. Graine, semence des plantes,
des herbes, des fleurs ou des fruits; graine ou œufs des
vers-à-soie. Métre la grano, mettre à couver, à incubation
la grainc des vers-à-soie. Mounta én grano, se dit des
plantes potagères qu’on laisse monter pour porter et re-
cueillir leur graine. On dit encore d’une jeune fille un peu
mûre : Réstara pér grano, elle restera pour graine; ce qui
n'est cependant qu'une contre-vérité flagrante : les filles,
vouées à coiffer sainte Catherine, ne laissent pas souche.
Michanto grano, mauvaise race, famille tarée.
Dér. du lat. Granum.
GRA
Grano dé boudin, s.f. Coriandre, plante. — Voy.
Couiandro.
On met ses feuilles dans le boudin pour l'épicer : de là
le nom.
Grano dé capouchin, s. f. Cévadille, plante. — Voy.
Cévadio.
Grano dé chapélé, s. f. Larme de Job ou larmille des
Indes, Coyx lacryma Jobis, Linn., plante de la fam: des
Graminées, exotique mais bien acclimatée, dont la semence
est en forme de perle allongée vers ses pôles et dela gros-
seur d'un haricot. Cette graine est d’un gris perle veinéet
luisant; en la perçant d'un bout à l'autre, on en faitide
jolis chapelets. De là son nom.
Grano dé por, s. f. Grains de ladrerie : petite vessie où
aphte qui se manifeste dans d'intérieur des ‘muscles du
porc. Les languéyeurs les reconnaissent sur l'animal vivant
à la racine de la langue et à l'intérieur des paupières.
Sauvages prétend que cette maladie n'altère envrien la
qualité de la viande et qu’elle peut être mangée:sans in-
convénient ; cependant l'opinion générale lui est contraire,
ou du moins le préjugé. Toujours est-il que c’est cette
opinion qui a créé la profession de languéyeur; car celui
ci n'a pas d'autre utilité que de signaler ce vice. Et cette
constatation a paru tellement importante à nos pères que
de leur temps les languéyeurs étaient des fonctionnaires
assermentés et on leur octroyait le titre de Conseillers du
roi. Au surplus, la loi, après les coutumes, a fait de la
ladrerie un vice rédhibitoire.
Granouïo, s. f. Dim. Granouïéto. Grenouille, Rana,
Linn., reptile de l’ordre des Batraciens et/de la fam.1des
Anoures. Il en existe plusieurs variétés qui sont confon-
dues sous ce nom.
Granowïo signifie encore : Crapaudine, pièce de fer ou
de fonte, en forme de dé, sur laquelle porte et tourne le
tourillon ou le pivot d’une porte cochère, ou celui d'un
joug de cloche.
Las granouïos se dit du râle qui se fait entendre dans
le gosier des moribonds, et qu'on à comparé au coasse-
ment des grenouilles.
Dér. par une formation régulière, du lat. Ranula, dim.
de Rana, m. sign.; avec le G paragogiqne.
Grâou, s. m. Le Grau: nom que l’on donne auxeme
bouchures par lesquelles le Rhône se déverse dans la mer:
— Lou Gréou, n. pr., désigne plus particulièrement le
Grau du roi, le Grau d'Aigues-mortes, lou Grâou dâourèi,
tout récemment érigé en commune, et qui acquiert €ba-
que jour plus d'importance à cause de l'affluence des bai-
gneurs. Se relie à la ville d'Aigues-mortes par le canal
Saint-Louis, sur lequel ce roi de France s'embarqua pour
sa dernière croisade.
Le mot Grdou pourrait n'être qu'une forme analogue à
Gravo, Gravas, qui a donné Gravier et Grève au fr., ou
une permutation, comme il s'en produit beaucoup, de
Crdou, la Crau /V. c. m.); on propose aussi de le faire
GRA
dériver du lat. Gradus, emportant le sens de rade, baie,
port. Ces diverses interprétations peuvent convenir.
Grâoufigna, v. Égratigner. — Voy. Éngrdoufigna et
Engrdouta.
Grâoufignado, s. /. Égratignure; coups de griffe. —
Voy. Éngrdoutado.
Grâougnäou, s. m., ou Bécar. Goujon, Bouillerot, Cy-
prinus gobio, Linn., petit poisson de rivière de l’ordre des
Holobranches et de la fam. des Gymnopomes, à opercule
lisse. — Voy. Bécar.
Grâoula, v. Miauler comme un chat en colère ou en
humeur; rouler la voix; geindre fortement; bourdonner.
Ce mot est probablement une onomatopée du. miaule-
ment du chat en colère, comme Midoula est celle de son
cri mignard et caressant.
Grâoulaire, aïro, adj. Enfant pleurard; grognon, qui
ne cesse de grogner et de geindre.
Grâoule, s. m., ou Cabridan. Frelon, la plus grosse
* espèce de guèpes, Crabro, Linn., insecte de l'ordre des Hy-
ménoptères et de la fam. des Ptérodiples. — Il y en a un
‘jaune et un autre noir; ce dernier est le plus venimeux.
Ces insectes sont forts et carnassiers et détruiraient un
grand nombre de mouches, d’abeilles surtout, si leur vol
lourd et bruyant n’avertissait leur proie de l'approche du
danger.
C'est sans doute ce bourdonnement incommode qui a
inspiré les acceptions et les locutions dans lesquelles il
intervient au fig. — À la tèsto pléno dé gréoules, c'est un
brise-raison, un querelleur, il a mille rats dans la tête;
par suile, un grdoule est un caprice, un accès de frénésie;
une lubie.
Dér. du lat. Crabro, frelon.
Grâouléja, v. fréq. Perdre la tramontane; faire le fou,
l'étourdi, la mauvaise tête.
Grâoulije, s. f. État de celui qui a des lubies, des ca-
prices ; Caractère étourdi, tapageur, brise-raison,
Grâouloüs, ouso, adj. Dim. Grdoulousd. Capricieux;
querelleur, tapageur; écervelé; évaporé; qui a des lubies.
Grâouméto, s. f. Gourmette, chainette de fer qui tient
au mors de la bride.
Emp. au fr.
Gräoumia (Sé), ». Se gratter à la manière des gueux et
des pourceaux, en se frottant contre un mur ou contre un
arbre la partie qui démange, ou en faisant un tour d'épaule
qui déplace et distrait la vermine qui cause cette déman-
geaison.
Grâouséiè, s. m. Groseillier, Ribes uva crispa, Linn.,
arbuste épineux de la fam. des Groseilliers, dont on con-
nait plusieurs variétés : le Groseillier à maquereau, fruit
blanc, Ribes grossularia, Linn.; le Groseillier à fruits
rouges, Ribes rubrum, Linn.
Dér. du lat. Grossularia.
Gräousèio, s. /. Groseille, fruit du groseillier. — On sait
quelles confitures on en fait.
GRA 393
Grâoutoù, s. m. Cretons; petits morceaux de viande
maigre de la panne du pore qui est le résidu de la graisse
fondue. Avec ces cretons racornis et rissolis, on assaisonne
une fouace ou galette, Fougasso dé grdoutoù, dont on est
friand dans le pays.
Formé d’un dimin. de l'adj. Gras.
Grapado, s. /. Poignée de grains, autant que la main
peut en contenir.
Grapâou, s. m. Dim. Grapdoudé; augm. et péj. Gra-
paias. Crapaud, Bufo, Linn., famille assez nombreuse des
Auoures, de l'ordre des Batraciens, plus laide que veni-
meuse, qui ressemble beaucoup à la grenouille, avec la-
quelle on peut les confondre.
Grapdou et son dim. Grapaïoù s'appliquent à un jeune
polisson, un drôle, incommode, insolent, qui se démène et
prend des airs d'importance, un Gavroche, un jeune voyou.
Dér. du lat. Crepare.
Grapasses, s. m. plur., ou Grapiè. Criblures du blé;
grains non dépouillés de leur balle, qu'on fait venir à la
superficie par le mouvement de rotation du crible appelé
Moundaïre, parce qu'ils sont plus légers que les autres eu
égard à leur volume. Le cribleur les enlève à petites poi-
gnées, à grapados. De là le nom de Grapasses.
Grapiè, s. m., ou Grapasses. Quantité, ensemble des
criblures du blé, pris et considéré en masse et comme
résidu de récolte.
Grapil, s. ». Grapin, outil en forme de pelle à douille
et à branche recourbée, armée de trois larges dents à son
extrémité, pour creuser les graviers dans l’eau.
Dér. de l'allem. Greifen, prendre, saisir,
Grapos (Las), s. f. plur. Maladie de la race chevaline,
sorte de dartre croûtée, qui se forme au-dessus du sabot,
entre le sabot et la naissance du poil.
Gras, grasso, adj. Au plur. Grasses, grassos. Gras; qui
a beaucoup de graisse; qui a de l’embonpoint; ‘enduit,
couvert de graisse; trop large, excédant une certaine pro-
portion, un certain degré; en parlant d'un terrain, fertile,
argileux; subst. gras par opposition à maigre; jours où il
est permis aux catholiques de manger de la viande. —
Mésuro grasso, pés gras, mesure, poids trop fort /Voy.
Graïsso). Acdou grasso, chaux hydraulique /Voy. Acdou).
És gras dou lard, il est rond de graisse. Parla gras, gras-
seyer. Manja gras, faire gras, manger de la viande.
Gras, en parlant des vers-à-soie, se dit d’une maladie
dont ils sont atteints et qui n’est autre chose qu'une disso-
lation, c.-à-d. que la liqueur visqueuse qui leur sert
quelque sorte de sang se transforme en sérosité. On appelle
le sujet ainsi malade Gras ou Jéoune, aujourd'hui mori-
flac, et le mal qui répand tant de terreur et fait tant de
ravages dans nos éducations séricicoles, la Flacherie.
Dér. du lat. Crassus, m. sign.
Grasäou, s. m. Dim. Grasalé. Petite auge en bois ou
en pierre pour servir d’abreuvoir aux poules. C'est ordi-
394 GRA
nairement une pierre de grès carrée et creusée dans le
milieu, en forme de mortier.
Dér. de Grés : aussi dans certaines localités, on dit
Grésdou, dont Grasdou n’est qu’une variante ou une cor-
ruption.
Grasia, ». Griller; faire rôtir sur le gril.
Grasiado, s. f. Grillade; tranches de viande cuites sur
le gril.
Grasio, s. f. Gril, ustensile de cuisine, petite claie en
minces lames ou baguettes de fer propre à faire rôtir la
viande.
Dér. du lat. Craticula, m. sign.
Grata, v. Gratter; râcler; frotter avec les ongles; ratis-
ser. — Grata la tèro, égratigner la terre, l’effleurer seule-
ment, lui donner un labour trop léger. Qué sé grato ounté
sé prus, fai pas tor én déngus, prvb., pour se gratter à
l'endroit qui démange, ce n’est offenser ni faire tort à
personne.
Dér. de l’allem. Kratzen, gratter.
Gratadisso, s. f. Démangeaison; action de gratter.
Gratassa, v. fréq. de Grata. Gratter; remuer la terre à
la manière des poules.
Gratèlo, s. f. Gratelle, petite galle; démangeaison opi-
niâtre.
Grati (A), adv. Gratis; gratuitement, sans qu'il en
coûte rien; de pure grâce.
Dér. du lat. Gratis, m. sign.
Gratiou, s. ». Chatouillement. —Voy. Cassiou.
Grato-Quiou, s. ». Gratte-cul, Cynorrhodon, fruit du
rosier et de l’églantier. On en fait des conserves estimées.
Gratusa, v. Chatouiller; raper du sucre; chapeler du
pain.
Dér. de Grata.
Grava, ado, adj. Marqué par la petite vérole; qui a la
figure grèlée.
Dér. du gr. lodgetv, écrire.
Gravas, s. m. Au plur. Gravasses; dim. Gravassod,
Gravéiroù. Large étendue de grève sur les bords d’une
rivière.
Augm. de Gravo.
Gravéiroù, s. m., ou Gravéirolo, s. f. Dim. de Gravo
et de Gravas.
Gravénas, s. m. Augm. de Gravo et de Gravas. Au
plur. Gravénasses.
Ce mot n'est pas employé à désigner les larges grèves
d’une plage, mais bien les dépôts de graviers que les inon-
dations font sur le littoral fertile qu’elles changent en
lande stérile.
Gravéto, s. f. Dim. de Gravo. — Ne s'emploie guère
que pour désigner un coin de grève uni, couvert d'un
sable fin, propre et argenté, tel qu'en choisissent les les-
siveuses pour établir leur atelier et pour étendre le linge.
Graviè, s. m. Large grève; gravier; sable.
Gravièiro, s. f. Grève, mais seulement dans le sens de
Li
GRÈÉ
voirie, parce que c’est sur les grèves qu'on jette commu-
nément les charognes des équarisseurs.
Gravo, s. . Grève; gravier; gravois; terrain mèlé de
sable gros et menu, de cailloux et de petits galets, aux
bords d’une rivière.
Du mot simple aux composés et dérivés, diminutifs,
augmentatifs ou péjoratifs assez nombreux, les variétés
devaient aussi être fécondes en noms propres soit d'hom-
mes, soit de lieux. Pour notre seul département, plusieurs
communes, villages, hameaux, ruisseaux, dans toutes les
directions, se rattachent à cetle forme par La Grave, les
Graves, le Gravas, Les Graventes, Le Graveron, Le Gra-
veson, Le Gravil, Gravillargues. Partout, comme noms de
personnes ou de famille, ont pris naissance par une inspi-
ration semblable, ceux de La Grave, de Graves, Dugra-
vier, Graveirole, Gravezon, qui portent un cachet méri-
dional, et Lagrève, Grève, Grevin et Grévy, qui ont dû
ètre donnés au nord au delà de la Loire pour nous, et qui
sont identiques.
Dér. de la bass. lat. Graveria, m. sign., du lat. Glarea.
Grè, s. m. Grec, espèce de raisin, — Lou grè est peu
fertile; ses grappes ne sont jamais bien fournies en grains,
qui sont blancs, ovoïdes et les plus gros que l'on con-
naisse. On le met ordinairement en bocaux avec de l'eau
de vie pour faire du ratafiat. Il ne doit pas être confondu
avec lou musca grè, qui est une variété.
Gréfiè, s. m. Greffier; secrétaire; clerc de notaire,
d’avoué; scribe.
Grâce à son origine sans doute du gr. Vpapeds, écrivain,
de lpégetv, écrire, ce mot a pris plus d'extension que son
correspondant fr.; mais il n’est pas allé jusqu'à Greffe,
pour ne pas dévier de sa racine.
Gréfuio, s. m. Houx, arbre, — Voy. Agrévou.
Gréia, v. Germer; bourgeonner; pousser, lever en par-
lant des plantes, des semailles. — Mous pèses mé gréiou,
J'ai les pieds gelés.
Dér. probablement du gr. Agtéw, pousser, croître.
Gréié ou Grié ou Gril, s. ». Grillon, cricri, Gryllus,
Linn., insecte de l'ordre des Orthoptères et de la fam. des
Grilloïdes. — Le grillon domestique et le grillon des
champs sont la mème espèce, mais la manière de vivre
a modifié leurs goûts et changé leurs habitudes; de plus
l'habitant de la campagne que devrait brunir le soleilest
moins noir que l'hôte du foyer. Tous deux ont cette espêce
de chant aigu et monotone qu'on leur connaît; mais le
mâle seul a cette faculté et il le produit en imprimant une
vibration rapide à ses élytres, qui frappent deux -mem-
branes tendues en forme de timbales.
Le nom lat. Gryllus, qui semble une onomatopée, a fait
le nom lang.
Gréïé, s. m. Dim. de Grél., — Voy. Grel. ;
Gréio, s. f. Taillis coupé depuis moins de cinq ans et
dans lequel le parcours des troupeaux est fort domma-
geable, et très-sévèrement prohibé.
GRE
Grél, s. m. Dim. Gréié. Bourgeon qui s'épanouit; jeune
pousse, rejeton; germe d’ognon; cœur de chou, de céleri,
de salade. — Léva lou grél, au fig. se redresser; s’énor-
gueillir après une disgrâce; reprendre vie et vigueur après
une forte maladie, comme un jeune rejeton flétri par
l'orage ou la gelée se redresse par un beau soleil ou une
pluie salutaire.
Dér. de Gréïa.
Gréla, ado, adj. Marqué de la petite vérole: grèlé; qui
a été frappé, gûté par la grêle. Au fig. qui a un aspect
misérable; qui manque de tout confortable ; qui dans toute
sa tenue présente les signes du malaise.
Dér. du lat. Gracilis, grêle, ou Fragilis, frèle.
Gréla, v. impers. Grêler, quand il tombe de la grêle;
v. a., frapper par la grêle, gâter par la grèle.
Grèlo, s. f. Grêle, pluie gelée, tombant en grains plus
ou moins gros. Au fig. personne méchante; misère. — Ce
météore désastreux inspire une telle terreur superstitieuse
parmi les habitants agricoles, qu'ils n'oseraient prononcer
son vrai nom, et qu'ils le désignent par la périphrase de
michan tén. Il en est de même pour la maladie des vers-
à-soie, la muscardine : ils ne disent pas dé muscardins,
mais aquélo michanto méno.
Se dit en lat. Grando, grandinis, que l'on soutient être,
comme notre mot lang., une onomatopée du bruit que fait
la grêle en tombant sur les toits.
Grélô, s. m. Dim. Grélouté. Grelot, boule de métal
creuse et bruyante.
Grèou, grèvo, adj. Lourd; pesant. Au fig. rude; diffi-
cile; pénible; fâcheux; chagrinant; insupportable. —
Aqud m'és bièn dé grèou, cela m'est un grand crève-cœur.
Dér. du lat. Gravis, m. sign.
Grèpi, s. m. Onglée, engourdissement des doigts causé
par le froid. /
D'après Astruc, le mot est celtique.
Grèquo, s. /. Chignon de femme très-relevé sur la tête
et qui donne au bonnet qui la couvre la forme d'un cimier
de casque. — Cette coiffure, qui ressemble assez à la coif-
fure grecque ancienne, fut un instant à la mode en France
où on la nomma la grecque. La mode passée, le lang. n'en
a pas moins continué à appeler Grèquo toute protubé-
rance de cheveux en forme de crête.
Grès, s. m. Grès, pierre composée de très-petits grains
de quartz, agglutinés par un ciment, qui fait feu sous le
briquet. — Téraïre dé grés, terrain graveleux : c’est celui
qui produit le meilleur vin et qui a le plus de chaleur
intérieure, aussi la germination y est-elle plus précoce. 11
y a plusieurs natures de ce terrain dit &rés; la plus com-
mune dans notre pays, où elle est en général employée en
vignobles, est un pudding rouge composé d'un gluten d’ar-
gile et de cailloux blancs et ronds. Gagna lou grés, pren-
dre la fuite, se cacher comme un malfaiteur ou un déser-
teur. LT
Dér. du celtique Craig, caillou.
+ GRI 395
Grésa (Sé), v. Se candir; se cristalliser; se tartariser,
se garnir de tartre comme font les confitures, le miel,
toutes les substances sucrées, ainsi que les futailles. —
Grésa, ado, pris adj. ou comme part, pass. Aviné, telle-
ment adonné au vin qu'il semble gagné par le tartre. —
À l'éstouma grésa, dit-on dans ce sens, d'un ivrogne, en
supposant par hyperbole que les parois de son estomac se
sont enduites de tartre, comme celles d'un tonneau.
Grésil, s. m. Dim. Grésié. Grain de sable ou de gravier,
pris dans son unité, tel que ceux qui entrent dans les yeux
par un grand vent, ou qui pénétrent dans la peau des pieds
quand on marche sur le sable ou qu'on passe une rivière
à gué.
Ce mot n'a rien de commun avec le fr. Grésil, menue
grêle, quoique l’un et l’autre dérivent de la même racine
et soient des dim. de Grés, lou grés
Grèso, s f. Tartre, acide cristallisé du vin. — Cette
concrétion est due plutôt au long séjour du vin dans une
même futaille qu'à sa qualité. C'est le défaut général de
nos vins du crà qu'on soutire rarement, ce qui leur pro-
cure une äpreté qui nuit beaucoup à leur qualité. — Dé
vi for dé gréso, du vin tartareux. Aïçd's un pdou for dé
gréso, dicton, celle-ci est difficile à avaler, en parlant
d’une histoire que l’on vous conte, sans doute comme un
vin qui est for dé gréso.
Le tartre qu'on détache des tonneaux sert à fabriquer
la crème de tartre qui est employée en teinturerie et en
pharmacie.
Cette incrustation cristallisée a quelque ressemblance
avec la composition du caillou, Grés, dont la base est le
quartz; le nom pourrait bien avoir pris là sa dérivation.
Gria, v. Griller, enclore de grilles; poser une grille, un
grillage; et non faire une grillade, qui se dit Grasïa.
Gribouïia, v. Gribouiller; faire un gribouillage, soit par
une mauvaise écriture, soit en traçant toutes sortes de
figures, de traits ou de lignes sans forme ni sens.
Gribouïiaje, s. m. Gribouillage, action décrite par le
verbe précédent.
Gribouio, s. m. Sot, niais; qui gribouille; qui confond
et brouille tout. — És fi coumo gribouïo, rusé comme gri-
bouille, qui se jette dans l'eau pour éviter une ondée, qui
se met nu pour se garder du froid.
Grié, s. m. Grillon, insecte. — Voy. Grété.
Grifa, ». Frotter ou gratter avec la main, fortement
et à plusieurs reprises; griffer, égratigner, donner un
coup d'ongle ou de griffe; battre quelqu'un, en combinant
les deux acceptions.
Dér. du fr. Griffe.
Grifado, s. f. Égratignure, coup de griffe ou d'ongle;
volée de coups; correction manuelle.
Grifaire, aïro, adj. Qui frotte, qui gratte fortement
avec la main; qui lime.
Grifou, s. m. Bigarreau, espèce de cerise à chair ferme,
grosse, croquante et bariolée de blanc et de rouge.
396 GRI
Grimaga, v. Grimacer, faire des grimaces; faire de faux
plis; avoir de fausses tournures, en parlant des vètements,
draperies ou chaussures.
Grimaciè, ièiro, adj. Grimacier; qui fait ordinaire-
ment des grimaces; qui se contrefait, se contorsionne ;
dissimulé: hypocrite, au fig.
Grimago, s. f. Grimace, contorsion du visage; mauvais
plis. Au fig. feinte, dissimulation; affectation maniérée.
Griméou, s. m». Au fém. Grimdoudo. Sorcier, jeteur de
sorts, comme le préjugé en attribue le pouvoir aux vieux
bergers.
Ce mot a une racine commune avec le fr. Grimoire, qui
peut fort bien être ou du moins se rapprocher beaucoup
du bas-lat. Rimare ou Rimaria, rimer et livre rimé, parce
que, au moyen-âge, les grimoires ou livres de. prophéties
s'écrivaient en vers et en octaves, témoin Nostradamus et
autres, à l'instar des oracles sibyllins. Grimdow peut aussi
dériver de l’ital. Grimo, vieux, ridé, grime de théâtre. Qui
sait même si le mot précédent Grimago n'aurait pas dans
ces deux interprétations quelque chose à prendre? Charles
Nodier voulait le tirer de Rima, ride, par l'addition du G
paragogique, comme de Ranula on a fait Granouwio.
Grimouèno, s. f. Aigremoine, Agrimonia cupaloria,
Linn., plante de la fam. des Rosacées, médicinale, com-
mune dans nos pays et qui croit de préférence dans les
lieux humiles et ombragés.
Son nom lat., par apocope, a donné le nom lang.
Grioule ou Ra-grioure, s. m. — Voy. Ra-grioule.
Griou, s. m. Recoupes ou son gras qui contient encore
beaucoup de farine après qu'on en a tiré la fleur pour faire
le pain de première qualité.
Gripé, :. m. Dim. Gripétoù. Lutin badin, farfadet, être
imaginaire de la mythologie féérique du moyen-âge. C'est
le Trilby cévenol, qu’il faut se garder de confondre avec
lou Fantasti, lou Draqué et surtout {a Roumèquo. Les
vrais languedociens ne commettent pas cette erreur. Low
Gripé est un être essentiellement malicieux, mais non
méchant, plutôt serviable que faiseur de noirceurs; tan-
dis que lou Fantastà, dont le nom rappelle les fantômes,
les revenants qui reviennent de l’autre monde pour faire
peur; lou Draqué, qui signifie l'antique dragon de la Fable
ou de l'Écriture; l& Rouméquo, espèce de Némésis hideuse
qui personsifie le remords, la ronce, l'épine de la çon-
science, roumèc, vieux mot; toutes ces créations imagi-
naires, et encore {ou Babdou, la Babarogno, inspiraient
une superstitieuse terreur aux grands et aux petits enfants
des montagnes, comme leurs noms seuls, inventés pour les
mieux enlaidir, et semblaient être les symboles de la plus
noire méchanceté. Lou Gripé apparaissait au contraire
dans cette capricieuse hiérarchie comme un petit génie
souvent bienfaisant et toujours folâtre dans ses malices, se
plaisant à faire des niches aux jeunes filles, familier pres-
que et accompagnant ses métamorphoses ou ses bons tours
d'un bruyant cacalas, et se moquant des paniques qu'il
GRO
causait. Le théâtre de ses exploits, c’étaient les campagnes,
les fermes, le foyer rustique : l'histoire de ses apparitions
charmait les veillées. Son nom est devenu synonyme d'en-
fant espiègle, éveillé, jeune et aimable lutin.
La légende populaire du farfadet raïol est, dans las
Castagnados, une des plus poétiques et des plus heureuses
inspirations de LA FARE-ALAIS.
Gripio, s. f. Crèche; mangeoire des chevaux et des
bœufs. — On dit au fig.: À sa gripio bièr garnido, il a du
foin dans ses bottes.
La bass. lat. avait Greppia, m. sign.; mais d’où venait
ce mot qui fournissait le nôtre? Quelques-uns pensent du
lat. Crates, ratelier; d'autres, du gr. Kpatéw, contenir, ou
de Ppalvw, manger.
Gris, griso, adj. Dim. Grisé; augm. Grisas. Gris; cou-
leur grise, cendrée; mélangée de noir et de blanc. Quant à
toutes les autres nuances fondues, le gris prend mille dif-
férents noms par suite de cet esprit de confusion qui règne
en lang. sur l'appréciation des couleurs: gris-blu, gris-
Jjâoune, gris-nêgre, gris-rouje, gris-vèr, etc., mème dans
les demi-teintes. Au fig. et au fém., chose déplaisante,
mauvais trait. — M'én a fa uno griso, il m'a fait une
avanie. — N'aï vis dé grisos, j'en ai vu de cruelles.
Dér. de la bass. lat. Griseus, m. sign.
Grisé, s. m. Nom familier qu’on donne à l'âne, dont le
fr., pour la même cause de la couleur de son pelage, a
fait aussi Grison.
Griséja, v. Tirer sur le gris, avoir une teinte grisâtre.
Grisèl, èlo, adj. Grisâtre, qui tire sur le gris. — Est
devenu n. pr.
Griséto, s.f. Grisette, jeune fille, jeune ouvrière.
Grisou, s. m. Grisou, gaz inflammable, explosible et
détonnant qui s’infiltre dans les mines et prend feu sou-
vent à la lampe des ouvriers en causant de grands ravages
et de graves.accidents.
Ce mot semble une corrupt. de Brisoù, qui est aussi un
des noms de ce gaz, parce que ses, explosions brisent et
renversent tout. Serait-il ainsi appelé peut-être parce que
sa présence dans la mine donne aux lumières une teinte
grisâtre ?
Grivo, s. f. Grive. — Ce mot, pur fr. inconnu au lang.
de Sauvages, est aujourd'hui de mise pour désigner les
diverses espèces de Tourdre : celui-ci est plus particulière -
ment la Litorne, Turdus musicus, Linn. — Voy. Tourdre.
Grivouès, ouèso, adj. Grivois; éveillé, alerte. — Ne se
prend pas dans le sens de grossier, licencieux, mais dans
celui de bon drôle.
Gros, grosso, adj. Dim. Groussé; péj. Groussas. Gros ;
épais; enflé; qui a beaucoup de volume. — Kénno grosso,
femme grosse, enceinte. Lou Gardoù's gros, la rivière. est
enflée. Faï la grosso, il grossoie, il écrit en gros,en par-
lant d'un écolier. Lous grosses, les notables d’un endroit,
les gros personnages.
Dér. du lat. Grossus, M. sign. '
GRO
Gros, adv. Gros; fort. — Gagna gros, gagner gros.
Fiala gros, filer du gros fil. Én gros, en gros, en bloc. Dé
gros én gros, Sans eXaminer, sans peser ; En gros.
Grosso, s. /. Grosse, douze douzaines d'une marchandise
qui se comple; écriture grossoyée, en gros caractères; ex-
pédition d'acte, en terme de pratique.
Grouga, v. Frayer, féconder en parlant des poissons,
pour désigner l'acte par lequel le mäle féconde le frai de
la femelle. Au fig. muser; rester tranquille; bayer aux
corneilles, comme fait le poisson qui en stationnant, im-
mobile, semble endormi quand il fraie.
Racine très-incertaine : on le prétend celtique.
Grougadis, isso, adj. — Se dit de la place favorable
aux poissons pour frayer, pour déposer leur frai ou leurs
œufs; plus directement, qui grouille, qui fourmille.
” … Grougna, ». Grogner; grommeler comme certains ani-
maux. Au fig. murnurer; gronder; être de mauvaise hu-
+ meur. — Moun véntre grougno dé fan, la faim donne des
borborygmes à mon estomac.
Dér. du lat. Grunnire, grogner comme les pores; d’où
le fr. a fait Grouin, groin.
Grougnadisso, s. f. Grognerie prolongée; grognement,
au pr. el au fig.
Grougnaïre, aïro, adj. Péjor. Grougnaïras. Grogneur;
d'humeur grogneuse.
Grougnoun, adj. des deux genres. Grognon, qui grogne;
qui aime à gronder.
Grouiè,.s. m. Savetier; mauvais cordonnier en vieux ;
rapelasseur.
Comme ceux de presque toutes les professions, ce mot a
donné naissance à quelques noms propres : Grollier, Grou-
lier, Groulard, Groulart, Grolée.
Groulo,.s. f. Dim. Groulélo; péj. Groulasso. Savale;
vieux soulier éculé et déformé. — Métre soun souiè én
groulo, porter ses souliers en pantoufle, c.-à-d. en abattant
le quartier, ce qui est une preuve de mal au pied, et par
ext. de maladie vraie ou fausse. Rabala la groulo, trainer
la savates au fig. être tombé dans la misère.
…Dér. dusgr. Toërn, vieux soulier.
Grouman, ando, s. et adj. Péj. Groumandas. Gour-
mand; qui aime, apprécie et recherche la bonne chère, les
bons morceaux; friand. — Las trufos soun groumandos,
les pommes desterre demandent beaucoup d'assaisonne-
ment. tt ne
L'étymologie de ce mot n'a pas été sans donner beau-
coup d'embarras aux chercheurs. Ménage est porté à la
prendre dans.ie celtique, ainsi que Caseneuve.. Saumaise
le prétendait originaire du persan Gour où Chour, signi-
fiant Mangeaille, et Mand, addition atiributive : d'où
Kourmand, manger. Camdem le fait dériver du breton
Gormod; trop mangeur ; ie Kimri Guyar, et le gallois
Gaor auraient fourni la racine : l’assertion de Ménage
pourrait donc être juste.
.Groumandije, s. /. Gourmandise, péché capital.
GUE 397
Groumandiso, s. /. Friandise; bonbons; mets délicat.
— Ne signifie pas Gourmandise.
Groumèl, s. m. Morve épaisse et en grumeaux, telle
qu'elle pend au nez des enfants mal soignés.
Dér. du lat. Grumus où Grumellus, grumeau, caillot.
Groussiè, ièiro, adj. Grossier; mal élevé; qui a des
manières rudes, des airs communs; rustre; rude au tou-
cher; épais. — Éstofo groussièiro, étoffe grossière, dont la
trame est grosse. Groussiè coumo pan d'ordi, poli comme
les portes d’une prison.
Dér. de Gros.
Groussoù, s. f. Grosseur; état, volume de ce qui est
gros.
Gru, s. m. Corroi de mortier, composé de chaux bien
éteinte et de sable bien grenu, dont on fait des pavés
grossiers, mais d’une grande consistance quand ils sont
bien manipulés ; espèce de glacis. Plus le corroi est grossier
plus il a de chances de durée.
Gruda, s. m. Gruau, froment mondé, c.-à-d. dépouillé
de sa pellicule au moyen du moulin à gruau. — On en
fait d’excellent potage, et il est la base de ce mets local
appelé Cassolo.— Voy. c. m.
Dér. de la bass. lat, Grutum, m. sign.
Gruda, v. Monder du froment, du riz, ete., pour en
faire du gruau; égrapper la vendange dans les cornues
pour séparer le grain de la rafle; ce qui se fait au moyen
d’un bâton disposé en forme de trident. Cette opération a
pour objet de préserver le vin de l'âpreté qu'il contracte-
rait dans la cuve si la rafle était mêlée au moût pendant
son ébullition.
Grudaïre, s m. Moulin à gruau. Sa meule est un cône
tronqué, qui tourne sur elle-même et autour d'un pivot où
elle est fixée.
On appelle aussi Grudaïre, l'égrappeur de vendange,
d’après le procédé indiqué à l'article précédent.
Grumèou, s. m. Trumeau de bœuf, terme de boucherie :
la partie du devant de la poitrine, entre les jambes, mor-
ceau très-gras et délicat.
Grumo, s. /. Grains de raisin, pris dans leur ensemble
à la vendange. — Aqud's dé poulido grumo, voilà de belle
vendange.
Dér. du lat. Grumus, grumeau.
Grun, s. »”. Grain de raisin, grain de chapelet. —
Toumba un grun, boire un coup ou plutôt plusieurs.
Gudos, s. /. plur. Petites fourches pour soutenir st arc-
bouter les elaies d’un parc à brebis.
Parait être une altération de Ajudo, aide, soutien.
Guèëino; s. /. Gaine, coulisse de jupe ou de tout autre
vèterment.
Dér. du lat. Vagina, m. sign.
Guènche, èncho, onu Guinche, incho, adj. Louche, qui
a les yeux de travers : affecté de strabisme.
Guénla, v. Chevrotter; bèler comme la chèvre.
Guéréja, v. fréq. Guerroyer, faire la guerre.
398 GUI
Guèriè, ièiro, s. et adj. Guerrier; soldat; qui aime la
guerre; qui a l'humeur guerrière.
Guèrle, guèrlo, adj. Dim. Guérlé. Bigle, qui a l'angle
visuel tourné en dedans vers le nez; équarri gauchement,
en parlant d’un meuble; maladroit, gauche, en parlant des
mains. — Émbé sa pato guèrlo, avec ses doigts maladroits
qui font tout de travers.
Guèro, s. f. Guerre, querelle; inimitié; dispute.— Soun
toujour én quèro, ils ne cessent de se quereller. De quèro
lasso, de guerre lasse. T'douraï dé quèro lasso, je finirai
par obtenir, par te vaincre, par arriver jusqu'à toi, à force
de sollicitations, d’importunité, de poursuites sans repos
ni trève.
Dér. du celtique Wer, guerre.
Guéta, v. Guetter; épier; faire le guet; briguer une
place, un emploi.
Guèto, s. f. Guèêtre, sorte de chaussure qui couvre le
bas de la jambe et le cou-de-pied, remontant souvent au-
dessus du genou. — Tira sas guèlos, tirer sa révérence,
s'enfuir.
En bas-bret. Gueltron, m. sign.
Guëétra, v. Mettre des guêtres à soi ou à un autre.
Guiäoume, n. pr. d'homme. Guillaume. — Le dim. en
lang. Guïdoumé est la forme la plus simple : en fr. il pré-
sente plus de variantes, qui sont devenues n. pr.: Guilhe-
mia, Guilleminot, Guillemot, et peut-être Guyot, se rap-
prochant de notre Guïèn, variante. En lat. Guillelmus;
en allem. Wäilhelm; en angl. William; en esp. Guellelmo;
en ital. Guglielmo.
Guïäoume, s. m. Guillaume, outil de menuisier; espèce
de rabot employé pour faire les moulures, et dont le fut
est fort étroit. — Faïre Euïdoume, en terme de maçon,
faire l'échelle, en se plaçant à distance l’un de l'autre,
pour se faire passer à la main les objets que l’on veut
monter ou transporter d’une place à l’autre.
Formé du nom d'homme.
Guigna, ». Guigner; lorgner; viser en fermant un œil;
indiquer quelque chose du doigt; faire signe, menacer de
l'œil ou de la main. — Le prvb. dit: Qué té faï, faï-li;
qué té quigno, guigno-li, bienfait pour bienfait, menace
pour menace.
La permutation signalée du V en G autorise à faire dé-
river ce mot du lat. Videre, voir, regarder.
Guignardo, s. f. Visée; menace de l'œil ou de la main.
Guiïléri, s. m. Probablement c'était dans l’origine un
n. pr. dont le porteur était un maitre-fripon. On ne l’em-
ploie aujourd'hui que dans la périphrase : Un tour dé Gui-
lérè, un tour de Jarnac, un tour de passe-passe, une fri-
ponnerie mêlée de ruse et d’hypocrisie. Cela n’a rien de
commun avec la vieille chanson de Guilleri, mais c’est
bien toujours le mème nom et sans doute le même person-
nage.
On sait que, après les troubles de la Ligue, les Guilleris,
bande de coupeurs de bourse et de filous, infestèrent Paris
GUI
et plusieurs provinces de la France. Peut-être ne descen-
dirent-ils pas jusque dans le Midi, mais le récit de leurs
exploits mis en chansons y parvint avec leur nom, qui
s’est maintenu dans la langue populaire.
Était-ce une dénomination purement de fantaisie, et un
vieux mot fr. qui se retrouvait en lang.? était-il venu na-
turellement s'adapter à l’industrie de ces hardis fripons ou
à leur chef? On peut l’admettre. Guiller, v. fr., signifiait
tromper : l’ancien proverbe le consacre : Tel croit guiller
Guillot, que souvent Guillot guille. Dans la langue d'Oc,
on avait Gïa, écrit Gilha, un synonyme de même pronon-
ciation, en donnant seulement au G devant i le son dur
qu'il avait autrefois. Le loup en bas-breton s'appelle Guil-
lou, et le diable, ce vieux trompeur, Gaillou-cox. En pressant
tant soit peu les déductions, le lang. se souviendrait encore
qu'il a eu le mot Guirdou, faux poids, et cette locution
Faïre guirdou correspondant au fr. faire Gille. Si Gille a
une origine commune avec Guirdou par Guiller où Guilha
(dur), et que le sens les rattache, ne faudra-1-il pas ratta-
cher tous ces mots à une même famille, et y faire entrer *
également Guilhérè, en v. fr. Guilleri (4 mouillées), qui a
tant de liens avec eux? Ainsi et non sans probabilités,
pourraient s'expliquer ces étymologies et ces locutions.
Guincha, v. Viser; mirer; tâcher; regarder d’un seul
œil. — Guincha dré, viser droit. Guinchavo én d’aqud, il
tàchait d'arriver là.
Ce mot est formé de l’adj. Guënche ou Guinche, parce
qu’en visant on ferme un œil et on a l’air d’être louche.
Son étym. doit se rapprocher beaucoup de celle de Guigna.
Guinche, incho, adj. —— Voy. Guènche.
Guindre, s. m. Guindre ou tournelle, instrument pour
dévider la soie dont on fait les rubans. —Voy. Débanaïre.
Guingoï (Dé), adv. De travers; obliquement; de guin-
gois; de côlé. — Voy. Dé Bingoi.
Dér. du gr. luw, boiteux, estropié, dont le provençal a
fait Goï, m. sign.; que le lang. et le fr. se sont approprié
en y ajoutant une idée de Guigna, ou Guigner, où de
Guincha et Guinche, par le changement du W Ilat., de
Videre, en B, pour Bingoï, son correspondant. Toute cette
série de mots, qui ont des airs de famille si marqués, et
tant de rapports de signification, ne viendraient-ils pas de
la mème provenance? On se ressemble de plus loin.
Guirâoudé, s. m. Faux-poids des bouchers, dit Sauva-
ges ; le gain qu'ils font par cette volerie. — Le mot n’est
plus en usage : la médisance prétend qu'il n’en est pas de
même de l’habitude.
Guirâoudé, s. m. Dim. de Guirdou, désigne aussi le
petit Héron, et s'applique au Blongion, autre variété, Butor
brun-rouge ou Butor roux, Héron Blongion, Ardea minuta,
Temm.
Guirâou (Faïre), pr. faite. Faire Gille; s’esquiver;
s'enfuir précipitamment, en se dérobant. — Voy. Giïa,
Selon Sauvages, Faïre guirdou signifierait faire faux-poids,
c.-à-d. tromper. Bien que cette acception ne soit plus usitée
OR US, D
H
aujourd'hui, le sens indiqué laisse cependant apercevoir
une certaine relation d'idées entre la signification ancienne
et celle actuelle : c’est tromper que fausser compagnie à
quelqu'un, et par conséquent s’esquiver. En tout cas,
faire faux-poids laisse au moins supposer que celui qui se
rend coupable de ce méfait a tout intérêt à faire Gille :
autre rapprochement qui peut mettre sur la voie, et que
nous avions pressenti au mot Gta, auquel nous renvoyons .
Guirâou-péscaire, s. m». Héron cendré, principalement
Ardea cinerea, Temm.; mais aussi d'autres variétés de
héron. — Sa description se trouve au mot Bérna-péscaire,
le mème exactement, à la différence du prénom. Pourquoi
cette préférence ici en faveur de Guirdou, dont nous ve-
nons de signaler un autre exemple pour Gilles? Tout rap-
port nous échappe avec l'inusité Guirdou; ce qui n'expli-
querait pas d'ailleurs pourquoi on lui a substitué Bérna :
nous laissons à de plus érudits à deviner l'énigme, qui
n'est peut-être insoluble que pour nous. — Voy. Bérna-
péscaire.
… Gula, v. Gueuler; crier à tue-tête; appeler à toute gueule.
© Dér. du lat. Gula, gueule, gosier.
Gulado, s. f. Coup de gueule, grand cri; franche lippée,
ample réfection; gorgée, si l’on boit, bouchée, quand on
mange
HAB 399
Gular, ardo, adj. Gueulard, qui parle beaucoup et très-
haut; enfant pleurard, criard.
Gulo, s. f. Gueule; grande bouche.
Gulo dé lou, s. m. Muflier à grande fleur ou mufle de
veau, Antirrhinum majus, Linn., plante de la fam, des
Personnées, qui croit dans les vieux murs, et qui est cul-
tivée comme fleur d'ornement. — Voy. Cacalaca et Pan-
toufléto.
Son nom lui vient de la ressemblance de sa fleur avec
la gueule d’un animal.
Gus, guso, adj. Dim. Gusé, Gusd; péi. Gusas. Gueux;
vaurien; mauvais sujet ; libertin; homme de mauvaise foi.
—Ne s'emploie pas dans l’acception de mendiant, en lang.
— Uno guso, fille de joie, une dévergondée, débauchée.
Gusaïo, s. f. Canaille; las de mauvais sujets; marmaille
mal élevée et malfaisante.
Gusariè, s. f. Haillons; vieux linge; vieilles hardes et
guenilles qui encombrent les galetas.
Gusas, s. m. Péjor. de Gus. Grand coquin; vaurien
fieffé; gredin ; chenapan.
Guséja, ». fréq. Guesailler; gueuser; faire le débauché,
vivre dans la crapule.
Gusô, s. m”. Jeune voyou, petit vaurien; Gavroche, au-
jourd’hui que le mot a passé.
H
H, s. /. Huitième lettre de l'alphabet; s'appelle Acho.
Cette lettre n'est point à proprement parler dans le génie
du languedocien, et elle n'aurait aucun droit à faire
nombre dans notre nomenclature; car elle ne peut y inter-
venir d'une manière absolue que pour former, comme en
fr. la consonnance ch. Mais pour rester fidèle à notre
système orthographique, et bien qu'elle ne soit point indis-
pensable, le respect de l'étymologie nous impose une
exception facile à comprendre et à justifier. Ainsi, il nous
a paru utile de l’employer dans tous les mots d'origine
française où elle figure soit comme initiale, soit comme
dérivée du grec, et nous écrivons par exemple Hérbo,
Habia, Haréncado et Philipo, Philosopho. Sans cette pré-
_ Caution, nous deviendrions d’une difficulté extrème pour
la lecture, mème aux personnes les plus familiarisées avec
notre idiome.
Cette consonne n'est en effet qu'un signe de convention,
sans valeur par elle-même. A part deux ou trois mots
comme Hièr, hier, et Hiwe, huit, et ses composés, l’aspira-
tion gutturale qu'elle représentait en latin et qui s'est
conservée en français, n'existe pas et nous disons : /’ j
l'hâousar, l'halo, l'hégandou, pour le hasard, le hussard,
la halle, le huguenot, que nous aurions pu écrire l'asar,
l'alo, etc., comme on prononce, si nous n'eussions redouté
des confusions et si avant tout nous ne nous étions fait
une règle de la clarté graphique qui facilite l'intelligence
de l'expression.
Dans l’ancien languedocien, pour figurer la prononcia-
tion du gn mouillé, on faisait intervenir une h après n,
en supprimant le g, et l'on trouve écrit en langue vulgaire
besonha, gazanha, senhor, etc., qu'aujourd'hui on prononce
et on écrit plus exactement besougno, gazagna, ségne, en
donnant aux lettres et à leur combinaison leur vraie
valeur. L'espagnol admet encore l’ancienne orthographe.
Il en était à peu près de même de l’h pour mouiller 2:
on mettait Ginoulhac, aginoulha, etc., que le fr. conserve
dans le n. pr. Génolhac et que nous remplaçons par 1x,
faisant fonction entre deux voyelles de 17 mouillée fr. pré-
cédée d’un i, fille, famille, pour nous /ïo, famio : Ginouïa.
Habi, s. m. Dim. Habiqué ; péj. Habiquus. Habit, frac;
vêtement de cérémonie. — Faïre habi, porter un frac, un
habit habillé : se dit d’un homme du commun qui prend
400 HAI
le costume d’une classe supérieure. Coupa un habè ou uno
vèsto à quéouquus, au fig. tailler des croupières à quel-
qu'un, médire de lui, le tourner en ridicule.
Dér. du lat. Habitus, vètement.
Habia, v. Habiller ; mettre, fournir un vêtement à quel-
qu'un. Au fig. critiquer; tourner en ridicule; gourmander;
réprimander.
S'habïa, s'habiller; se vôtir; mettre ses habits; se parer;
se mettre en cérémonie.
Habiaje, s. m., ou Habiïamén.Vètements de toute sorte;
habillement: mais surtout habit, veste et culotte.— Carga
sous habiajes, se vêtir. Faïre un habiaje, a le même sens
que Coupa un hab où uno vèsto, tailler des croupières.
Habinle, inlo, adj. Dim. Habinlé; augm. Habinlas.
Habile; doué d'adresse, de dextérité; qui dépêche beau-
coup d'ouvrage.
Dér. du lat. Habilis.
Habinlèsso, s. /. Habileté; adresse; dextérité.
Dér. du lat. Habilitas, m. sign.
Habitan, s. »m. Habitant: qui habite, qui réside dans
un endroit.
Habitudo, s. f. Péj. Habitudasso. Habitude, coutume,
disposition acquise par des actes réitérés. — N'est guère
employé qu’au péjor.: Uno habitudasso, un défaut, un ‘
vice d'habitude, invétérés et incorrigibles.
Dér. du lat. Habitudo, m. sign.,
Hacha, v. Hacher de la viande, des fines herbes ; couper
avec le hachoir. — Se dit mieux Capoula.
Empr. au fr.
Hachadoù, s. m. Hachoir, couteau à large lame pour
hacher les viandes.
Hai, v. Haïr; répugner à faire quelque chose; éprouver
du mécontentement; souffrir du malaise. — Haisse bièn
dé travaña, le travail m'est en horreur. Haissiè dé parti,
pamén sé décidé, il avait de la répugnance à s'éloigner, il
se décida cependant.
Dér. du lat, Odire.
La notation qu'emploie notre Lexique est essentielle à
observer dans les mots surtout comme ceux-ci et les deux
suivants, dérivés du verbe, où la différence de l'accen-
tuation sur l’i produit une si grande différence sur la pro-
nonciation prosodique.
Nous rappelons nos remarques au mot Acén et à la lettre Z.
L'accent grave sur 2? le rend tonique, fait porter par con-
séquent la tenue de la voix sur lui et le détache de la
voyelle qui le précède, de manière à en faire une syllabe
distincte : Hai, dissyllabique. L' tréma, précédé de la
voyelle, forme diphthongue et se prononce, en s’y joignant,
par une seule émission de voix, Haïssablo, trois syllabes;
si au contraire l’# tréma était placé avant la voyelle, il ne
se confondrait pas avec elle, Fian, deux syllabes. Quand
l'i simple se rencontre en contact avec la voyelle a le pré-
cédant, par exception, avons-nous dit, il sonne à, comme
en français mais, fais; lorsque l’a suit à simple, il se
HAO
diphthongue : Fianço, monosyllabe. Comme on le voit,
l'accent fait la quantité, la mesure, et l'on ne saurait trop
insister sur son influence comme sur sa position, si nôces-
saires à connaître pour bien prononcer.
Haïssable, ablo, adj. Dim. Haïssabloù; péi. Huïssa-
blas. Haïssable; qui se fait haïr; disgracieux ; fastidieux.
Haissiou; s. f. Haine ; aversion ; répugnance; anti-
pathie. — L'aï prés én haïssiou, je l'ai pris en grippe, en
aversion.
Dér. du lat. Odium, m. sign.
Halabardo, s. f. Hallebarde; pique garnie par le haut-
bout d’un fer large et pointu.
Dér. de l’allem. Hallebard, m. sign.
Halabardiè, s. m. Hallebardier; garde, soldat armé de
la hallebarde.
Halé, s. m. Haleine; souffle; respiration. Au fig. liberté;
hardiesse; courage. — Garo l'halé, il pue à enlever la res-
piration. M'a léva l'ha!é, il m'a coupé la respiration, il
m'a suffoqué. Tèn l'halé coumo un cabussaïre, il retient
son secret comme un plongeur son souffle. Préne d'halé,
reprendre courage. Dounas tro d’halé à vosl'éfan, vous
donnez trop de liberté, de licence à votre enfant. Aqud &
dounè d’halé, cela lui remit du cœur au ventre, ou bien
cela a enflé son orgueil.
Dér. du lat. Halitus, m. sign.
Haléna, v. Aspirer, respirer; prendre haleine, se repo-
ser; prendre du vent ou suinter, en parlant d’un vaisseau
qui doit être hermétiquement fermé. — Déngus n'a pas
haléna, personne n’en a soufflé le mot. Sé fasiè tén d'ha-
léna, il était temps de se reposer un peu. Aquélo bouto
haléno, ce tonneau fuit, suinte.
Halénado, s. f. Halenée, bouffée d'haleine; halenée de
vin, d'ail, etc.; respiration des punais.
Halénadoü, s. m. Dim. Halénadouné. Soupirail de cave;
fausset d’une futaille que l'on ouvre en haut de son fond
pour donner l'avant au vaisseau; toute espèce d'ouverture
étroite qui ne sert qu'à donner de l'air à un intérieur
quelconque.
Halo, s. f. Halle au blé; place publique, couverte, pro-
pre à tenir les marchés ou foires.
Dér. du gr. “Alws, aire : le celtique avait Hala, un: sign:
En bas-bret. Hall.
Häouboï, s. m. Dim. Héoubouïssé. Hautbois, instru-
ment à vent et à hanche, à sons aigus et nasillards: — Lo
hautbois et le tambourin sont l'orchestre obligé de toute
fête villageoise dans la contrée des Counèls. Les joueurs
de hautbois donnent une telle vivacité à la mesure de
leurs quadrilles et contredanses, que les danseurs sont
obligés de dédoubler cette mesure dans Jeurs pas ou d’imi-
ter celle de la gigue. Mais les danseurs Gounèls ont heu-
reusement du jarret.
Häoubouïssaïre, s. »m. Ménétrier joueur de hautbois.
Hâäouménas, s. m. Péj. et augm. de Home. Grand et
vilain homme. — Voy. Home.
HAR
Hâäouméné, s. m. Dim. de Home. Petit homme; petit
bonbomine.— Voy. Home.
. Häcumérén, énquo, adj. D'homme, qui tient à
l'homme. — Un parla héouménén, une voix d'homme,
une voix mâle et rude. Au fém. Hdouménénquo, Glle gar-
çonnière, qui aime trop à se trouver parmi les hommes,
qui les agace volontiers.
Dér. de Home, du lat. Homo, hominis.
Häâousar, s. m. Hussard, soldat du corps de cavalerie
légère de ce nom.
Ernpr. au fr.
Eâousardo (à l'), adv. A la housarde; crânement,
lestement, cavaliérement, sans se préoccuper du qu'en
dira t-on.
. Hâoussa, v. Hausser. — Voy. Ndoussa.
Hâoussé, s. m. Troussis. — Voy. Aoussé.
Eéoussuro, s. f. Hsuteur; colline: simple tertre ou le
haut d'un 1tertre en pente, lorsqu'il est composé et en
rapport avec un bas-fond. — Foy. Aoussuro.
Hardi, ido, Dim. Hardidù, oto. Haidi, courageux ;
. Héméraire, cffronté. — Dé qué véou aquélo hardidoto? Que
veut cette jeune effrontée?
Der. de l'allem. Hart, audacieux.
Eerci, interj. Courage! en avant! sus! or sus, allons !
— C'est Eta! des latins.
Harén, s. m. Hareng. — Ne s'entend que du hareng-
saur ou fumé, Huarén-sdouré.
Faréncado, s. . Hareng plus petit et qui a subi une
eutre préparation que le précédent. — Le populaire lui a
donné le nom familier et tant soit peu goguenard de Dcmo
dé miséricordo ; mais sa dénomination sérieuse et scieuti-
fique est en lat. Haleæ ou Clupea arengus, Linn., poisson
de mer, de l'ordre des Holobranches et de la fam. des
Gymnopomes, en fr. Hareng; en lang. Haren et Ifarén-
cado : ce qui veul dire pour ce dernier mot ce hareng
blanc salé, plus petit et autrement préparé que le hareng-
saur où fumé, très-proche parent de la sardine, Sardo. Celui-
ci est salé seulement, et il est encaqué dans des barils, bari-
quos, d'où on le tire un à un pour le vendre en détail au
peuple, qui ne le dédaigne pas parce qu'il est piquant, fait
manger force pain et excite à boire, Aussi un de ces phi-
losophes.de position disait qu'il n'était pas mécontent du
tout du menu que lui servait sa ménagère, attendu que
bien souvent dans la semaine il avait à son diner un pois-
son de mer et un poulet : c'est un hareng et un œuf qu'il
entendait. — C'est donc une très-grande ressource pour
le pai vre, et quoiqu'il en soit aujourd'hui du sens légère-
ment railleur qu'on attache à son surnom de Damo dé
miséricordo, il est probable qu'il lui a été donné par allu-
sion à cette haute et puissante Dame, celle qui vient tou-
e au secours de ceux qui ont besoin, ou plus hum-
blement parce que ce harerg n'entre guère que chez le
pauvre, comme font les bonnes sœurs de charité qu’on
» appelle justement aussi Dames de la miséricorde.
HR 401
Harnèi, s. m. Harnais, équipage de selle on de trait. —
Carga l'arnéï, signifie plaisamment : se marier.
Dèr. de l'allem. Harniseh, m. sign.
Harnéiïssa, v. Harnacher; mettre le harnais à une bôte
de somme, Au fig. et au passif, s'arnéissa, se harnacher, se
vêtir; s'habiller; se parer; s'ajuster.
Hasar, s. m. Hasard; évènement fortuit; rencontre;
fortune. — Pér co d’hasar, par bonne fortune. l'ér co
d'hasar, âourias pas un luché à mé présta? Pourriez-vous
me prêter une bôche? Co d'hasar, dans cette phrase, n'est
qu'explétif et comme formule. On <a gas l'hasur, on ne
sait pas le bonheur. L'hasar és tan bd, le hasard est si
grand. -
Hasarta, v. Hasarder, risquer; exposer au hasard;
essayer la chance. — Dises qué Jan és tan for, vos qué
l'h asarte? Tu dis que Jean est si fort, veux-tu que j'essaie
de me mesurer avec lui? Ha:arta un gas, lâter un passage
à gué; Ôtre le premier à oser l'entreprendre : au pr. et au
fig. s'il s'agit d'une affaire, de quelque proposition délicate.
Easartoës, cuso, adj. Hasardeux:; qui aime à risquer
ou à affrcnter le danger; hardi; téméraire.
Hastado, s. f. Brochée ; quantité de viande ou de gibier
enfilée à la fois dans une broche.
Easto, s. m. Brcche tournant à la main, verge de fer
pointu pour embrocher et faire rôtir la viande.
Dér. du celt. Asta, ou du lat. Hasta, m. sign.
Easté,s. f. Brechette; Lattelets; brochée de petits-pieds.
Dim. de Haste.
Héganâcu, hégeräovdo, s. m. et [. Dim. Hégantoudé,
hégandoudcù; péj. ITégandoudas. Huguenot; proteslant ;
calviniste.
Ce mot est un empr. au fr.: son étymologie a élé vaine-
ment cherchée jusqu'ici. Pasquier, D'Aubigné, Ménage et
autres ont our à tour proposé des solutions inadmissibles.
Ampère a vait tranché la question, en décidant que le mot
Huguenot venait certainement d'Ei/gnoten, confédérés,
eu bas allemand. Littré vieut de ruiner cette opinion, et
il laisse la controverse ouverte et non Cpuisée, sans indi-
quer la racine certaine et vraie.
Hélaïsse, v. Geindre; gémir; se plaindre; pousser des
soupirs, des liélas.
Tiré du fr. Ielas.
Eérbaïo, s. f: Mauvaises herbes qui sont à sarcler.
Hèrbaje, s. m. Herbage; prairie d’herbager, dont les
herbes se mangentsur pied par les bestiaux ; herbes d'hiver,
c.-à-d. les dernières pousses des prairies après qu'on
a fauché le regain, et qu'on fait aussi brouter sur place.
Hèrbétos, s. f. plur. Dim. d'Hèrbo. Fines herbes pour
le potage ou la salade, pour l'assaisonnement en général,
C'est aussi, à Alais, le nom d’un quartier à proximité
de la ville, {as Hèrbétos, promenade autrefois fréquentée,
dont le nom désignait les fraiches et petites prairies du
Tempéras. ‘
Eèrbo, s. f. Dim. Hèrbéto; péj. Hérbasso. Herbe, plan
402 HER
de faible consistance, qui perd sa tige en hiver; gazon. —
Soupo d’hèrbo, soupe aux fines herbes. Las hèrbos, les
herbes d'hiver, Hèrbo qué poun quan naï, toujour duro,
prvb., l'épine en naissant va Ja pointe devant.
Dér. du lat. Herba, m. sign.
Hèrbo apéganto, s. f. Pariétaire. — Voy. Panataïo ou
Hèrbo dé Nosto-Damo.
Hèrbo batudo, s. /. Flomis, Phlomis herbaventi, Linn.,
plante de la fam. des Labiées, à fleur labiée, dont les
feuilles sont couvertes de duvet.
Hèrbo däou cor, s. f. Ambroisie, Ambrosia, Linn., de
la fam. des Corymbifères, apétalée, annuelle, sudorifique ;
très-aromatique, qui croit dans les sables et graviers; elle
est originaire du Mexique, ce qui l’a fait appeler en fr.
Thé du Mexique. Son nom semblerait annoncer quelque
propriété confortative.
Hèrbo dâou féje, s. f. Hépatique de fontaine, Anemone
hepatica, Linn., de la fam. des Renonculacées; fleurs bleues
ou blanches; folioles de l’involucre entières, très-rappro-
chées de la fleur; sépales ovales; habite les haies et les
bois : vulnéraire, astringente, .apéritive, lonique.
Une autre plante est encore connue sous le même nom
d'Hèrbo dâou féje, Hépatique; c’est une sorte de crypto-
game, qui tient le milieu entre les lichens et les mousses :
on l’emploie dans les maladies du foie, ce qui lui a valu
son nom. Elle est acotylédone, formée d’une membrane
herbacée et rampante, elle croit au bord des fontaines et
dans les lieux humides.
Hèrbo dâou lagui, s. f. Myrte. — Voy. Murtro.
Son nom lang. lui vient de ce qu'on couronnait de
myrte le chapeau des nouvelles mariées, et que l’Hèrbo
dou lagui était un symbole ou une allusion aux soucis
et aux chagrins du ménage.
Hèrbo dâou mèou, s. f. Caïlle-lait à fleur jaune, Ga-
lium luteum, Linn., de la fam. des Rubiacées, commune
dans les champs.
Hèrbo dâourado, s. f. Cétérac, doradille, espèce de
capillaire, Asplenium, Linn., de la fam. des Fougères ;
croit à l'ombre sur les vieux murs; l’infusion de ses feuilles
est un excellent diurétique.
Hèrbo dâou sièje, s. f., ou Bouènsèdi. Herbe du siège,
scrofulaire aquatique, bédoine d’eau, Scropularia aqua -
tica, Linn., de la fam. des Personnées : bonne contre les
scrofules et les hémorroïdes : ses feuilles sont employées
comme vulnéraire par application pour déterger les ulcères.
Elle tire son nom, dit-on, du siège de Troie où les guer-
riers s’en servaient pour panser leurs blessures ; mais cela
pourrait aussi bien convenir à tous les sièges qui ont eu
lieu depuis. N'importe; si ce n'est lui c'en est un autre, et
l'origine de Troie est plus noble et plus antique, mais
beaucoup moins sûre.
Hèrbo dôou tal, s. f. Cynoglosse. — Voy. Léngo-cano.
Hèrbo dâou tron, s. f., ou Barbajôou. Grande jou-
barbe. — Voy. Barbajéou.
HÈR
On a ainsi nommé cette plante en lang. par suite de
l'idée ridicule qu’elle préserve du tonnerre.
Hèrbo das agacis, s. f. Un des noms encore de Ja
Grande joubarbe, parce que le suc de cette plante est em-
ployé pour détruire les cors. — Voy. Barbajoou.
Hèrbo das canaris, s. /. Mouron, morgaline, Anagal-
lis arvensis, Linn., de la fam. des Primulacées.
Hèrbo dé l'abéïo, s. /. — Voy. Hèrbo dâou mèou.
Hèrbo dé la gravèlo, s. f. Turquette, herniaire glabre
et velue, Herniaria glabra et hirsuta, Linn., de la fam.
des Chénopodées : passe pour astringente, diurétique, anti-
herniaire, anti-calculeuse : habite les terrains sablonneux.
Hèrbo dé la loquo, s. f. Morelle douce-amère, vigne de
Judée, Solanum dulcamara, Linn., de la fam. des Solanées :
sarmenteuse, grimpante, à fleurs violettes et à baies.
rouges : sa tige en décoction est un excellent dépuratif du
sang.
Hèrbo dé la rato ou dé la ratèlo, s. f. Scolopendre,
Scolopendrium ofjicinale, Linn., de la fam. des Fougères,
croit dans les lieux humides et couverts; dans les puits :
bonne probablement pour les affections de la rate.
Hèrbo dé la roumpéduro, s. f. Sceau de Salomon,
Convallaria polygamatum, Linn., de la fam. des Aspara-
gées; espèce de muguet dont la racine bulbeuse est em-
ployée contre l'ophthalmie et pour résoudre les ecchymoses
produites par une fracture ou une contusion ; de là son nom.
Hèrbo dé las alouètos, s. f. Filipendule, Spirea fili-
pendula, Linn., de la fam. des Rosacées : fleurs blanches,
rougeâtres en dehors, un peu odorantes ; ses racines sont
astringentes et nourrissantes, recommandées contre la gra-
velle : les fleurs donnent un petit goût agréable au lait :
habite les bois, les garrigues et les prairies.
Hèrbo dé las bérugos, s. f. Héliotrope d'Europe, He-
liotropium Europæum, Linn., de la fam. des Boraginées;
agreste, sa fleur roulée ressemble de loin à une chenille
ou à une verrue un peu développée.
Hèrbo dé las cardounios, s. f. Séneçon, Senecio vul-
garis, Linn., de la fam. des Composées Corymbifères. Cette
plante est appelée en fr., à part Séneçon, du nom vulgaire
d’Herbe au charpentier ; nous ne trouvons là aucun rap-
port avec celui que lui donne le lang., qui est au moins
justifié parce que les serins et les chardonnerets sont très-
friands de ses graines. Elle vient dans les lieux cullivés et
partout.
Hèrbo dé las cin costos, s. f. Plantain à feuille étroite,
Plantago minor, Linn., de la fam. des Plantaginées ; croit
sur le bord des chemins et dans les champs; à fleurs in-
fundibuliformes; vulnéraire et résolutive.
Hèrbo dé las déns, s. f:, ou Éndourmidouiro. Jus-
quiame. — Voy. Éndourmidouïro.
Hèrbo dé las fèbres, s. f: Petite centaurée des prés à
fleur pourpre, Centaurea centaurvïdes, Linn., de la fam.
des Gentianées : c'était, avant l'importation du quinquits,
le meilleur fébrifuge connu en Europe.
Hèrbo dé las gnèiros, s. . Herbe aux puces, plantain
des sables, Plantago psyllium, Linn., de la fam. des Plan-
taginées. Pline le nomme simplement Psyllion. Les graines
de cette plante, quand on les fait bouillir dans l'eau,
donnent un mucilage abondant.
Eèrbo dé les tâoupos, s. f. Jusquiame, et pomme
épineuse. — Voy. Endourmidouïro et Darboussiètro.
” Hèrbo dé las tétinos, s. j. Herbe aux mamelles, Lam-
psana communis, Linn., de la fam. des Cumposées Chico-
racées ou Synanthérées : amère, laxative, rafraichissante ;
on s'en sert pour guérir les gerçures du sein, comme son
nom l'indique : se mange crue, en salade, dans sa jeunesse;
habite daus les lieux cultivés et les haies.
Hèrbo dé l'énréiaduro ou dé l’énréiaje, s. f. Herbe
à Gternuer, Achillea ptarnica, Linn., et Mille-feuilles ou
Herbe au charpentier, Achillea millefolium, Linn., deux
variétés d'Achillées, de la fam. des Composées Corymbi-
fères ou Synanthérées. Les fleurs et les feuilles de la pre-
mière, qui croit dans les prairies, mises en poudre, sont
sternutaloires, La seconde, agreste, vivace, à fleur radiée,
. est vulnéraire, astringente, résolutive et antihémorrha-
gique. On s'en sert par application, après l'avoir écrasée
et réduite en pâte comme un cataplasme. Son nom vient
de cette propriété, parce qu'on l'applique fréquemment
pour les piqüres que se font les bètes de labour avec le soc
de ia charrue, réïo, ce qu'on appelle S’énréïa.—Voy. Énréïa.
Eèrbo d'éstan, s. f. Girandole ou Lustre d'eau, Chara
vulgaris, Linn., de la fam. des Naïadées : se trouve dans
les ruisseaux et les eaux stagnantes : elle n’a pas d'usage
connu.
Hèrbo dé Nosto-Damo, s. /. Pariétaire. — Voy. Pa-
nataïo.
Hèrbo dé Sénto-Clèro, s. /. Chélidoine ou Éclaire,
Chelidonium vulgare, Linn., de la fam. des Papavéracées.
Cette plante rend un suc jaune, âcre, que l’on emploie
pour détruire les verrues et les dartres: elle passe pour
diurétique. apéritive, fébrifuge et anti-hydropique. Son
nom du reste, qui est une corruption du mot Éclaire, est
prétentieux et peu employé : on l'appelle habituellement
Saladuègno, travestissement du mot Chelidonium, Chéli-
doine.
Hèrbo dé Sént-Éstève, s. f. Circée blanche, herbe de
saint Étienne, herbe aux magiciens, Circæa alba, Linn.
de la fam. des Onagrariées : plante grimpante, qui s'at-
tache aux habits au point d'arrêter la marche d’un homme,
comme le faisait Circée par ses enchantements.
Hèrbo dé Sén-Jan, s. f. Caille-lait, jaune ou blanc,
Gaillet jaune, Galium verum, Linn., de la fam. des Rubia-
cées : dessicalive, astringente, vulnéraire et anti-spasmo-
dique; ses sommités fleuries font cailler le lait : habite
les prairies et les bords des champs.
On la nomme aussi, mais rarement, Hèrbo ddou mèou
(V. c. m.). Sauvages désigne aussi par le nom d'Hèrbo dé
Sén-Jan, une autre plante, le Mille-pertuis, {ou Trascalan
HT 403
jéoune : il n'est pas impossible que dans d'autres contrées
ou dans d'autres temps, le mille-pertuis n'ait été désigné
ainsi; mais il est certain que les deux variétés ici connues
de Caille-lait, jaune ou blanc, sont nommées Æèrbo dé
Sén-Jan.
Hèrbo dé Sén-Ro, s. f. Herbe de saint Roch, inule
dyssentérique, Pulicaire, nula dysenterica,Inula Pulicaria,
Linn., de la fam. des Synanthérées, deux variétés confon-
dues dans le même nom lang. que l'on trouve sur le bord
des eaux ou des fossés. Leur racine est mucilagineuse,
d'une saveur âcre et amère. Le peuple les croit salutaires
contre les maladies pestilentielles ou épidémiques, et c'est
pour cela qu'il les place sous l'invocation de saint Roch.
Hèrbo grépo, s. f., ou Tèro-grépo. Picridie, Pricri-
dium vulgare, Scorsonera picroides, Linn., de la fam. des
Synanthérées. On mange, en salade, les jeunes pousses du
printemps. Elle est connue sous le nom de Laitue de lièvre,
et habite les lieux pierreux, les vignes, contre les rochers.
Hèrbu, udo, adj. Herbu, herbeux; où l'herbe abonde,
où elle croit épaisse et drue. — Uno ribo hérbudo, un
gazon épais, un talus de gazon bien garni.
Héirita, v. Hériter; recueillir une succession ; succéder.
Héiïritaje, s. m. Héritage; succession; patrimoine.
Héiritiè, s. m. Héiritièiro, s. f. Héritier; héritière;
successeur ; qui hérite.
Dér. du lat. Heres, hæredis, m. sign.
Hérmas, s. m. Augm. de Hèrme. Dim. Hèrmassoà.
Lande, friche; terre vague et vaine, qui ne sert qu'au
parcours des troupeaux.
Dér. du lat. Eremus, désert.
Hèrme, s. m. Mème sign. que Hérmas. — On dit un
Hèrme et non une Tèro hèrme. :
Hérû, s. m. Héros. — M. sign. qu'en fr. sans aspiration
de l’h. — Quelquefois employé, mais pur franchiman. ”
Héspitaïè, ièiro, adj. Habitant d’un hospice; hôte
d’un hôpital.
Héspitäou, s. m. Dim. Héspitalé. Hôpital; hospice où
sont reçus les pauvres et les malades. Par ext. une maison,
une chambre où se trouvent plusieurs malades ou même
des personnes dolentes de la famille. — Héspitéou faï té
bèl ! s'écrie-t-on quand on voit un prodigue marcher à sa
ruine, et par suite à l'hôpital.
Le n. pr. l'Héspitalé, qui est resté à plusieurs localités
ou quartiers, n’est pas un dim. : il désigne une possession
ancienne des chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem ou de
Malte, un domaine des Hospitaliers, qu'ils y eussent une
maison ou simplement des terres.
L'héspitou est encore le nom que donnent les enfants à
un jeu de cartes qui ressemble beaucoup à la bataille. I ne
serait pas étonnant qu'il y eùt là un souvenir des che-
valiers hospitaliers, qui s'amusaient peut-être à ce jeu dans
leurs loisirs, quand les cartes furent inventées.
Dér. du lat. Hospitium, hospitalis, m. sign.
Hétaro, s. m. Hectare, cent ares. —Voy. Sdoumado.
404 HIR
Héto, s. m. Hecto, cent fois plus que l'unité indiquée.
Hétogramo, s. m. Hclogramme, cent grammes.
Hétolitre, s. m. Hretolitre, cent litres. — Voy. Litre.
Tous ces mots, appirlenant au nouveau système décimal,
se sont introduits dans la langue, avec une légère modifi-
catiun de prononciation imposée par son génie, et par des
nécessités faciles à comprendre : ils sont donc languedo-
ciens comme ils sont fr., c.-à-d. que le gr. les a tous fournis.
Hièr, adv. de temps. Hier, le jour qui précède celui où
l'on parle, la veille du jour où l'on est. — Dans ce mot,
H est aspirée : on dit dé hièr et non d’hièr. Cependant on
dit Dav.n-z-hièr et davan-hièr. Peut-être une suscepti-
bilité d eu phonie a-t-elle amené ces adoucissements, comme
exceptions à la règle géaérale : des exemples pareils se
retrouvent en fr.
Dér. du lat. Heri, m. sign.
Himcà, s. /. Hu ueur, substance fluide dans les corps
organisés: tumeur, concrétion d'humeurs; par ext. humeur,
disposition du caractère, de l'esprit, du tempérament. —
Féau mainja uno émino dé sâou énsén, pér counouïsse
l'himoù Cas gens. prvb., on ne peul dire ami celui avec
qui on n'a pas mangé quelques minots de sel.
Dér. du lat. Fumor, m. sign.
Himpoutéqua, ado, adj. Maladif; rachitique; qui a
plusicurs maux à la fois; par ext. embarrassé, empètré.
Il est évident que ce mot est emprunté au fr. qui l'avait
pris du Jat., lequel le tenait du gr., et qu'il a toujours
signifié ypothèque, ou affectation du droit d'un créancier
sur les biens de son débiteur, comme garantie de sa
créance. D: tout temps aussi il a existé des créanciers et
des débiteurs; mais de tout temps la propriété immobi-
Bière n'élait pas entre les mains du peuple, qui fait la
langue, de iuanière à l’oblizer à employer un mot applicable
à une situation très-accidentelle. Cependant, comme il en
connaissait le sens et les effets, et que certains rapports
étaient de nature à le frapper, il lui donna une acception
elliptique, en le mettant au figuré plus souvent qu'au
propre, et il le conserva pour désigner un individu frappé
de divers nnux, affecté de différentes tares, par assimila-
tion à l’homme frappi et épuisé d'hypothèques. C'est
pour cela que notre définition à fait également de l’acces-
soire le princinl, sins vouloir toutefois inéconnaître quo
le sens fr., comme terme de droit et de pratique, ne soit
aussi usité.
Hiround, s. f Dim. Iiroundéto. Hirondelle, oiseau de
Vordre des Passereaux et de la fam. des Planirostres. En
lag. comme en fr. c'est un nom générique qui peut se
donner à toute la famille, anis qui s'applique principale-
ment à l'hirondelle dé chesninée ou domestique, Iirundo
rustica, Linn. Elle a Ie frontet la gorge d’un marron roux,
le dessus Ju 6rps entiérement noir à reflets violets, de
ème sur la pohrine; ventre et abdomen d'un blanc terne
ou roussitre. Elle est un peu plus grande que le Barbajôou.
— Voy. c. m.
HOC
Dér. du lat. Hirunto, m. sign.
Hisso! interj. Hisse! Pousse! Tire! Courage! Cri des
manœuvres et manouvriers quand ils veulent soulever un
fardeau de bas en haut, pour s'encourager et agir ensemble.
C’est aussi l’encouragement qu’on donne à une personne
qui grimpe: Æisso! qué t'hdousse / Grimpe, que je te pousse,
dit-on, en faisant la courte échelle à qui grimpe, ou en le
soutenant et le poussant par les jambes. à
En bas-bret. Issar, pousser.
Histouèro, s. f. Récit de faits : rarement, histoire, dans
le sens relevé du fr., mais narration, conte; difficultés;
façons; complications; chose, affaire. — Counta d'his-
touèros, faire des contes, raconter des sornettes. Zou/ pas
tan d'histouèros, allons! pas tant de façons, de lambine-
ries, d'équivoques, d'embarras. Dé qu’anas cérqua d'his-
touèros? qu'allez-vous inventer tant de choses, tant de dif-
ficultés ?
Dér. du lat. Historia.
Hiuè, s. m. n. de nombre. Huit. — L’'H est aspirée.
evant une voyelle ou une À, on dit Hiuèch. — És hiuèch
houros, il est huit heures. A Hivèch ans, il a huit ans.
D'hiuëï én hiu?, d'aujourd'hui en huit jours, en comptant
le premier et le dernier jour. On compte ainsi d’un jour
de la semaine au même jour de la suivante, d’un mardi à
l'autre par exemple, quoiqu'en réalité il n’y ait que sept
jours d'intervalle.
Dér. du lat. Octo, m. sign.
Hiuèï, adv. Aujourd’hui, le jour où l'on est, où l'on
parle. — L’ZX est tantôt élidée, tantôt aspirée. On dit : Dé
pan dé hiuëï, du pain du jour, et L'aï pas vis d'hiuët, je
ne l'ai pas vu d'aujourd'hui. Hiuèï fai hiuè jours, il y a
aujourd'hui huit jours, c.-à-d. il y a sept jours de cela;
car, dans le comput, on compte le premier et le dernier
jour (/Voy. Iliuè). — Sémblo tout hiuèï, il est énorme,
gros comme un tonneau; long comme un jour sans pain.
D'hiuèi én foro, dorénavant.
Dir. du lat. Hodiè, m. sign.
Hivèr, s. m. Hiver; saison la plus froide de l’année,
commençant le 22 décembre selon le calendrier et finissant
le 22 mars.
Dér. du lat. Hibernus venu de Hyems.
Hivérna, vw. Hiverner; prendre ses quartiers d'hiver;
choisir un local ou une contrée plus chauds pour y passer
l'hiver; passer l'hiver. — Hivèrno bièn aquést'an, Vhiver
est rude et long cette année.
Hivérnaïre, s. m. Pourceau de l’année, ou de l'année
précédente, qu’on entretient seulement pour l’engraisser et
l'égorger l'hiver suivant.
Hivérnaje, s. m. Hivernage; quartier d'hiver; saison
d'hiver: provisions de bétail en hiver.
Hivèrnén, énquo, adj. D'hiver; plantes potagères ou
fruits d'hiver.
Hocho, s. f. Clavette en fér qui retient l’essièu dan D
moyeu d’une roue de voiture.
ni. d
HOU
_ Homo, s.m.Dim, Héuméni; augm. et péj. Hdouménas.
Hume, être humain du sexe mâle; mari.—S'emploie
du reste comme dans le fr. et dans presque toutes les
mèmes acceplions. — Moun home, ou mieux Nosl'home,
dit une femme en parlant de son mari. Ës un bon home,
c'est un bon ouvrier; c'est un homme fort, robuste, adroit.
Et b:! moun home, de qué dises de ndou? Eh bien! mon
cher ami, que contes-tu de nouveau? Faïre dé soun home,
se vauter, faire le vaniard, jouer l'homme fort ou l'homme
valcureux ; se donner du galon. Vous dounarcï mièjo pér
home, je vous donnerai uv lite de vin par tête. Jouin-
home, garçon, jeune. howme / Voy. ©. m.). Un brav'home,
un honnête hoinme. À gasta trés homes, elle a eu trois
maris, où mieux, elle est veuve du troisième. Voué l'home!
Holà hé! un tel... crie-t-on pour appeler un homme £'ont
on ignore le nom. Vous, sès moun home, vous êtes l'homme
qu'il me faut. Véndraï “éman émbë moun home, je vien-
drai demain avec mon compagnon, mon associé. Aqud's un
home, Voilà qui est un homme! És adija un home, ce
n'est plus un enfaut, il a grandi et a pris la raison d'un
homme. Maïs, visès bé, moun pépur'hime, mais vous
vous Voyez bien. mon ami. Aë/ péur'home, ah! pauvrecher !
És lou co cé fu l'home, Cest le moment de se montrer.
Fagrè l'home, il fit voir qu'il avait du cœur, du courage.
Dér. du lat. Homo, mi. sign.
Horamén, a{v. Horriblement; cruellement; beaucoup.
Dér. de Ilore.
Hore, h:ro, adj Affreux; horrible; vilain; laid; abo-
minable. — Zas horos de Malatavèrno, cst le sarnom
ancien donné à Malataverne : comme il se pratiquait dans
le moyen-âge de village à village. S'appliquait-il aux
femmes de cette localité, ou bien à quelque particularité
de site, de choses quelconques? Nous ne prenons aucune
responsabilité sur celte origine. — Vo. Éscaïnoun.
Dér. du lat. Horror, horreur, effroi.
Hort, s. m. Jardin potager.
Ce mot est du haut raïol. — Quan la cabro sdouto pér
hort, sé lou cabrà ly sduto n'a pas tor, prvb., quand les
pires où mères donnent mauvais exemple, si les enfants
“ourneut mal, la faute en est aux parents.
Dèr. du lat. Hyrtus, w. sign.
Hosto, s. m. Au fon. Howsésso. Hôte, hôtelier; auber-
giste; cabaretier; logeur.
Dér. du lat. Husper, hosp'is.
” Hounèstamën, av. Inaètement; PAARRRIER ; :
avec civililé, avec politesse,
Empr. au fr.
Hounèsto, èsto, a ‘j. Hinaële; poli; bienséant.
Hounèst$ta, «. f. Houaèloié, politesse, civilité:; présent
fait par conveunnce: prévenances. — Mé fuguè fogo hou-
nèsteias, 11 ou elle me fit Free politesses .
Ces trois mots, bien que reproduits du pur latin, ont
une nuance Lrès franchmande, qui les fait mettre en
réserve par le vrai languedocien.
HUR 405
Hounoù, s. m. Honneur; probité; réputation; bonne
renommée.
Dér. du lat. Honor, m. sign.
Houro, s. /. Dim. Houréto. Heure; douzième partie du
jour. — Midj'houro, demi-heure. D’houro-én-lux, doréna-
vant; à parür de ce moment. Quan piquo d'houro:? Quelle
est l'heure qui sonne? Quan és d’houro? Quelle heure est-
il? Y-a pértout uno houro ou uno lègo dé michan cam,
prvb., chaque entreprisé à ses difficultés, chaque position
ses embarras, chaque profession ses désagréments, chaque
affaire son mauvais côté. Li vdou d'aquést’houro, j'y vais
de ce pas. D'aquést'houro soun gandis, à présent ils sont
arrivés. Vésiè pas l'houro et lou moumén dé parti, il brülait,
il trépignait d'impatience de partir, Dinc un'houréto vène,
dans une petite heure j'arrive. À quant’houro ? à quelle
heure? Qu'houro? Quand? contr. de À quanto houro.—Voys
Couro.
Dér. du lat. Hora, m. sign.
Hourtéto, s. f. Potage maigre aux fines herbes. Dans
un pot d'eau, où l'on met cuire une petite poignée d'oseille,
d'épinards, de cerfeuil, hachés à grands coups, et que l'on
assaisonne avec du sel, et, quand on veut mieux faire,
avec un peu de beurre, on délaie, au moment de servir,
un ou plusieurs jaunes d'œufs, et l'on verse le tout sur
des tranches de pain très-minces arrosées d’un peu d'huile :
telle est la recette.
IHourtéto devrait se dire jardinière; car ce mot vient du
lat. Hortus, jardin.
Hourtoulaio, s. f. Toute sorte de légumes frais; her-
bes potagères ; hortolage.
Dér. du lat. Hortulus, dim. de Hortus.
Houstésso, s. f. Hôtesse, femme de Vhôte; aubergiste;
cabaretière. — Voy. Hoste.
Houstio, s. /. Hostie, pain consacré ou qui est destiné
à l'être; mais plus communément, pain à cacheter, à
cause de sa ressemblance avec le premier.
Dér. du lat. Hostia, m. sign.
Huitanto, n. de nombre. Huitante, quatre-vingts.
Dér. du lat: Octoginta, m. sign.
Eupo, s. /. llouppe; huppe; crête; col. — Ne se prend
guère cependant en ce sens que dans la phrase suivante :
Po pas léva l'hupo, il ne peut remuer ni bras, ni jambes,
bouger ni pieds, ni pattes ; mais s'emploie aussi interjec-
tivement : Hupo lenlèro! dit-on à un enfant en le soule-
vant en l'air pour le faire sauter entre les bras.
A peu près l'interj. Houp! en fr. — En armoricain,
Iopa signifie Aller.
Hur, s. m. Hour; bonheur; bonne fortune; heureuse
chance.
Dér. du lat. Hora, heure, parce que les anciens admet-
taient les heures prospères et les heures funestes, qui, en
lang. et en fr., se sont caractérisées par l'épithète, à la
malo houro, à la mal'heure, à la bon’houro, à la bonne heure .
Hurois, ouso, alj. Ileureux; qui a du bonheur; qui
406 I
jouit du bonheur; qui donne le bonheur, qui ÿ contribue ;
qui est de bon augure.
Hurousamén, adv. Heureusement; par bonheur; d’une
manière heureuse.
I, s. m. I, troisième voyelle et neuvième lettre de l'al-
phabet.
Cette voyelle est de toutes la plus harmonique et la plus
déliée; c’est pour cela sans doute que, par un raffinement
d’acoustique, dans ces trilles mélodieux, particuliers à
notre seul idiome, où doivent se faire entendre trois sons
distincts en une émission de voix, dans toutes nos triph-
thongues, l’i est comme la base de l'accord et se trouve
tonjours le premier : iaï, idou, üèï, téou, idou, iuè. Sa
combinaison avec les autres voyelles ou avec les conson-
nes, le rôle qu’il joue suivant la place qu’il occupe, font
varier son intonation, ou pour mieux dire sa mesure pro-
sodique; il devient dès lors plus nécessaire de marquer ces
nuances de tons ou de quantité par des signes distincts.
Notre langue d'Oc, musicale avant tout, si délicate
d'oreille et d’accent, a besoin d'être solfiée pour être com-
prise; c'est donc à son orthographe qu'il appartient d’in-
diquer nettement la valeur de chaque note et presque de
chaque lettre, surtout de chaque voyelle, car pour elle il
n’y a pas, comme en français, de sons muets. Cette diffé-
rence est essentielle à rappeler au sujet de la lettre I.
En français, l'E qu'on nomme muet, reste en effet com-
plètement sourd et inarticulé : à la fin des mots, il ne se
fait pas plus entendre que s’il n'existait pas, et la voix
appuie sur la lettre ou la syllabe qui le précède. Au con-
traire, nos idiomes du Midi n’admettent, à proprement
parler, aucune syllabe muette : l’I terminal lui-même, la
voyelle la plus fluide, se fait toujours sentir, plus légère-
ment là où il n’est pas tonique, mais il ne s’efface jamais
à la prononciation, non plus que l'E, même sans accent.
Aussi peut-être conviendrait-il mieux d'appeler ces syl-
labes brèves que muettes, ou de les distinguer en fortes ou
faibles, en féminines ou masculines. Ce sont au moins ces
degrés de force ou de faiblesse, d'ampleur ou de ténuité
qu'une exacle notation par les accents doit indiquer; car
leur observance est devenue une des conditions indispen-
sables de la vraie prononciation comme de l'intelligence
et du sentiment mélodique de la langue. Après tout ce qui
en a été déjà dit, nous insistons sur ce point pour faire
mieux comprendre l'importance des signes employés qui
modifient le caractère de la voyelle où ils apparaissent et
I
Hussiè, s. m. Huissier, officier de justice qui ajourne,
fait les significations et fait la police de l'audience. — En
bon languedocien, on dit mieux Sarjan, sergent: Hussid
est un empr. au fr. Huissier.
l'impressionnent de la valeur spécifique qu'elle doit prendre:
nous nous arrêtons sur l’Z, qui est la voyelle la plus fré-
quente, pour étudier de plus près ses diverses positions.
L’I dans un mot, entre deux consonnes, garde con-
stamment le son naturel qui lui est propre : binlo, difi-
cinle, rasin, trin. A la différence du français, qui le con-
vertit le plus souvent en en, il se prononce comme dans
inique, innocent, immense.
A la fin des mots, s’il forme à lui seul la syllabe, avec
ou sans s signe du pluriel, il est tantôt bref et tantôt long,
c.-à-d. tonique ou muet, masculin ou féminin. Il est bref
dans Zaguis, chari, charis, grèpi, céméntèri, sètis, ordi; il
est long dans bégu?, matà, cami, camis, loup}, émpéri,
éspavourdà, etc. Dans ce dernier cas, nous le marquons
d’un accent grave pour appeler sur lui le repos et l’insis-
tance de la voix; tandis que, dans le premier exemple,
nous le laissons simple, parce que l'absence d’accent l'as-
soupit et le rend bref, la tenue se faisant sur la syllabe
antécédente.
Un peu plus de précision est nécessaire alors qu’il s'agit
de diphthongues, et pour le cas où l’i se trouve en contact
avec des voyelles qui ne doivent pas faire alliance avecJui.
Nous venons de voir qu'il se place toujours en tête des
triphthongues; nul besoin de Jui donner là un signe spécial.
Mais pour les diphthongues, au commencement, au milieu
ou à la fin d'un mot, l'I qui s'allie d’ailleurs avec toutes
les voyelles, est premier ou dernier. Or, les voyelles À et
U exceptées, parce qu’elles sont graves et pleines de leur
nature, toutes les autres, y compris la composée au, peu-
vent être masculines ou féminines, sonores ou muettes;
leur qualité ne dépend que de l'accent,
Quand l’i précède une voyelle accentuée quelconque, il
est sonnant, mais faible et l'effort de la voix est entrainé
par l'accent. Aussi en écrivant mi, bièn, piéla, fio, bioùlé,
nous indiquons deux sons qui n’en font qu'un, mais où
le dernier est dominant, et celui donné par l’i naturel est
presque éteint et confondu dans la voyelle sonore et mar-
quée. Par voie de conséquence, si la voyelle que l'i simple
précède, n’est point elle-même accentuée, la liaison qui se
fait ne change pas son caractère de syllabe féminine, et les
deux sons diphthongués sont pour ainsi dire égaux. Ainsi
réndie, que je rende; véndie, que je vende; glorio, gloire;
borio, ferme; énsarios, paniers de bât; gripio, crèche;
bèstios, bêtes; etc.; les désinences ie et io, privées d'accent,
sont féminines, et, voyelles diphthonguées, se prononcent
d'un jet avec leur valeur normale. Il en est autrement
dans les terminaisons en mêmes lettres réndiè, rentier;
éscarid, traitre; pid, dindon; caf, chenet, etc., qui por-
tent avec l'accent la force du son sur la seconde
voyelle.
Lorsque l'inverse se présente dans la diphthongue, c.-à-d.
que l'i termine la syllabe, pour éviter tonte confusion avec
“le français, qui a des combinaisons graphiquement sem-
blables sans les diphthonguer, il convenait de revêtir l'é
d'un signe spécial qui, sans rien ajouter au son naturel,
permit cependant de le distinguer en ne transformant pas
la syllabe en une voyelle composée. Une seule exception
a été faite pour cinq ou six mots; elle est expliquée à l'art.
Ai. Nous avons donc orthographié pantaï, rèï, créï, créire,
vêtre, galoï, souï, elc., pour avertir que la tonique repose
sur la voyelle qui précède li, en l'appelant néanmoins à
ellé pour n’en faire qu'un son.
L'i, au commencement de la diphthongue formée par la
composée ou, n'a pas à suivre d'autres principes que ceux
applicables aux voyelles non accentuées, et par là même
féminines, comme énténdiou, qu'ils entendent, véndiou,
qu'ils vendent, counéissiou, qu'ils connaissent, pérmétiou,
qu'ils permettent, etc. Mais, avec la mème composée ou,
il entre souvent dans une diphthongue essentiellement
masculine, et il devient très-tonique et long; par ex. dans
Diou, miou, siou, tiou, léssiou, liouro, éscrioure, etc. Ce
caractère plus marqué, nous le notons d’un accent circon-
flexe, qui oblige à prolonger plus longuement le son.
Enfin, à cause de la multiplicité des cadences sonores
qu'affectionne notre langue, l'Z se prodigue volontiers
entre les voyelles simples et les diphtongues et il en adoucit
le contact. Cette position est des plus difficiles à figurer,
parce que lé impressionne en même temps d'une mouillure
la voyelle qui le précède et celle qui le suit. La clarté de
là vocalisation exige alors une marque particulière qui
isole les syllabes et permetle de les scander sans confusion :
c'estle tréma sur l'x qui remplit cet office. Le tréma est
d'une nécessité absolue pour indiquer cette séparation :
sans lui les voyelles qu'il précède ne manqueraient pas de
se lier avec celles qui ne doivent pas faire corps ensemble,
et il serait impossible de se reconnaitre, d’épeler et de
prononcer cerlains mots tels que vidout, giroflée; tdouïo,
“banc de pierre; rouïdou, royal; raïdou, rayol ; viéio, vieille :
- en s'interposant, là tréma établit la distinction des syllabes ,
détache chaque partie du mot par une mesure presque
insensible et lui sert en même temps de liaison. Cet effet
se sinplifie lorsque l'? tréma se place entre deux voyelles
simples dont la seconde est diphthonguée, comme païo,
_joïo, céiè, cuïè : là toutes les lettres sonnent séparément
pour ainsi dire, seulement x, qui se fait sentir, ne forme
L 407
pas une syllabe, mais adoucit la voyelle qui le suit en
mouillant sa consonnance, et en lui laissant son caractère
masculin ou féminin suivant qu’elle a ou non l'accent.
Enfin, notre dialecte a une sorte d’J initial, qui produit
le même effet sur la syllabe précédente que l’Æ aspirée, et
que pour cela nous nommerons Z aspiré. Quelle que soit
la voyelle qui le rencontre, muette ou tonique, il n'y a pas
d’élision et point d'hiatus avec elle : la consonnance placée
avant lui ne fait pas non plus de liaison.
Quelques exemples feront mieux comprendre cette sin-
gularité : on dit dé iuèn, de loin, lou ian, le lien, èro iéou,
c'était moi; quatre iards, quatre liards; un iè, un lit; uno
téchoto, une couchette; et l'on ne peut prononcer d'iuën,
l'ian, èr'iéou, quatr'iards, un'iè, un'iéchoto, etc.
Quand nous en viendrons à étudier les élisions et les.
syncopes, nous signalerons d’autres cas également curieux,
qui s’éloignent des règles établies dans la prosodie française,
et que chez nous l'usage a adoptés et consacrés. Pour le
moment, nous avons à dire que cette bizarrerie nous
semble tenir à l'étymologie des mots cités en exemple et de
leurs consorts. En effet, iuèn, iard, ian, ié, et les autres
viennent du français loin, liard, lien, lit; dans quelques
localités, d'où s’est inspiré Sauvaces, on leur conserve
encore l’L initiale, qui disparait complètement dans notre
dialecte local; mais comme on croit encore sentir sa pré-
sence, l'oreille et l'usage se refusent à la liaison ou à l'éli-
sion de la syllabe précédente.
Cependant le mot iéou est comme une exception dans
l'exception elle-mème. Mais aussi est-il bon de remarquer
le chemin qu'a suivi notre langue pour arriver jusqu'à la
forme actuelle dans les versions dialectales usitées et sou-
vent très-diverses. Il est probable que nous avons du dire
et écrire Jou et Jéou, comme font encore quelques-uns de
nos voisins, et cela à cause de la confusion dans l'alphabet
du J ou Z consonne avec I voyelle, et aussi parce que le
pronom venu du lat. Ego, passé dans le fr. Je, avec le
changement du G dur en G doux ou J, avait apporté cette
modification dans le languedocien. Ces deux motifs ont
influencé certainement l'orthographe et la prononciation,
et ont fait maintenir l’aspiration. Elle ne peut pas être
figurée, mais personne ne s’y lrompera; ici l'oreille, le
goût et l'usage sont souverains, et il n’y à point de heurt
choquant dans ces rencontres que la nature même de notre
voyelle explique et justifie : Émbé téou, tus et iéou, sont
aussi doux et aussi faciles à articuler que Lou iè, un for
tan, uno iéchoto; sans hiatus, sans rudesse, l'i se main-
tient de même qu'il le fait en poésie, où on l'entend et où
il ne compte pas dans la mesure et le nombre des pieds.
La prose a le mème privilége et dit par ext. : lou cémen-
tèri és bèl ; lou chari anavo plan, où en scandant on trou-
verait sept sons divers, mais qui ne formeraient que six
temps, à cause de l'élision insensible. Ce ne sont pas des
licences de poètes que le quidlibet audendi absout, mais la
prose elle-même, comme on le voit, en use sans hésiter,
408 IBR
par le seul sentiment inné et harmonique de sa diction
ordinaire.
I ou Li, pron. relat. et adv. Lui, à lui, à elle; y, là, à
cela, en cela. — I dounère, je lui donnai. Z diguës, vous
lui dites. Moustras-i, montrez-lui. Anas-i, allez-y. Fdou à
gasu, il faut passer par là. Qué vos à faire? que veux-tu
faire là, à cela?
Dér. du lat. Zi, ou du datif de Jlle.
I! inter. Va! en avant, marche! c’est le cri avec lequel
on excite l'allure d’un cheval et particulièrement d'un âne.
Impératif pur lat. du v. re, à, va.
Ja, »., pour Lia, Lier, mettre un lien; serrer avec une
corde, avec un lien quelconque; joindre; unir; engager,
au pr. et au fig.
Dér. du lat. Ligare, m. sign., ou du fr. Lier.
Taïre, s. m. Au fém. faïro. Lieur de gerbes, de fagots;
enjaveleuse, femme qui lie les gerbes, les sarments, etc.
Ian, s. m. Lien, cordon ; scion d’osier qu'on tord pour
lier des fagots; tout ce qui sert à lier. — Un ian dé
rasins, plusieurs grappes de raisins réunies en faisceau par
un lien, qu'on suspend au plancher pour les conserver en
hiver.
Dér. du lat. Ligamen, lien.
Iard, s. m. Dim. Zardé. Liard, petite monnaie de cuivre
valant trois denicrs. — Un iardé, un pauvre petit liard,
la plus chétive aumône. Féou pas régarda dou dariè iard,
il ne faut pas regarder le dernier denier, c.-à-d. il faut ètre
coulant en affaires et ne pas s'arrêter à une misère de dif-
férence sur un marché.
Il est bien entendu que le d final, qui ne se prononce et
ne se lie jamais, n'est conservé que pour l’étymologie et
en faveur des composés qui le reproduisent.
Les savants ne sont pas d'accord sur la dérivation de ce
mot. Ménage, Génin, Ampère y voient un nom propre,
celui de l'inventeur de cette piécette, en 1430, Guigues
Liard, d’une famille de Crémieu en Dauphiné, où les dau-
phins de Viennois, dont un, Humbert II, avait été sci-
gneur d’Alais, battaient monnaie. D'autres prétendent que
la fabrication des liards remonte au temps de Philippe le
Hardi, et prit de lui son nom. Quelqjues-uns pensent que
cette monnaie a été ainsi appelée de argentum arsum,
argent brülé, noir, {i ars, à cause de sa couleur et par
oppsition à celle qu’on nommait Z blancs, les blancs, au-
tres pièces de couleur blanche. On a invoqué le basque qui
dit Ardita, sorte de monnaie de valeur aussi de trois
deniers.
“Tardäou, s. m. Don du prix d'un liard; maigre et mince
libéralité.
Tardéja, v. Liarder; se faire payer les plus petites frac-
tions du prix d’un marché; marchander minutieusement;
demander l'aumône.
Ibrougno, a1j. des deux genres. Ivrogne, ivrognesse;
qui est ivre d'habitude.
Dér. du lat. Ebrius, ivre.
I
Idèïo, s. f. Dim. Flèïélo; péj. Kdéïusso, Idée; pensto
réfléchie, méditée; dessein; envie; projet; représentation
qu'on se fait d’une chose existante ou chimérique; imagi-
nation; conception; parcelle, molécule, brin, petite quan-
tité de quelque chose. — Aqud's moun tdio, c'est là mon
idée arrêtée; ma volonté précise; ma manière de voir. A%
idèïo d'aquélo fio, j'ai des vues matrimoniales sur celte
jeune personne. Aï bièn idéïo dé y-ana, j'ai grande envie
d'y aller. Quinto idéïo té prèn ? quelle ité», quel projet vous
est venu là? A idèïo qué..., je présume, je pense, j'ai dans
l'idée que. Uno iditéto d'oli, dé vinaïgre, dé jiouvèr, une
goutteleite d'huile, un filet de vinaigre, une pincée, un
tantinet de persil. Zdèïassos, mauvaises pensées, projets
déshonnêtes.
Dér. de lat. Idea, m. sign.
Idèïoës, ouso, a’j. Faiseur de projets, chercheur do
plans; fantaisiste; capricicux.
Idoul ou Idoula, s. m». Hurlement du loup; cri plaintif
du chien.
Dér. du lat. Ululatus, m. sign.
Idoula, v. Hurler; pousser des cris plaintifs, des gémis-
sements.
En bas-bret. Yudal, m. sign.
Idouleïre, aïro, a. Pleurard; qui hurle; qui geint.
Iè, ièiro, suflixes.
Nous rapprochons à dessein ces deux désinences à cause
de leur communauté d'origine, et bien que la seccnde ne
soit pas toujours le féminin de la première. Elles provien-
nent du suffixe latin Arius, aria, arium; et sont expri-
mées en français par ter, ière. Une loi de notre orthogra-
phe nous fait supprimer la finale r qui ne se prononce pas
et qui a dû cependant exister dans le principe; le fr. la
maintient sans la prononcer non plus; et il se prive,
comme le provençal, de l’adoucissement de li euphonique
sur la féminine.
Le suffixe iè, dont il est ici question, ne doit pas être
confondu avec une autre finale en ie, très-commune aussi,
et issue du lat. Aria ou Eria. Ceile-ci ne s'attache qu'à des
subst. fém. et reproduit invariablement dans son intégrité
son généraleur latin par Arie, que le français rend par
Erie. Elle désigne la profession, le métier, le lieu où
s'exerce l'industrie, où est établie la corporation exprimée
par le radical; à ce titre elle était appelée à fournir bien
des noms de rues et de quartiers, an moyen-âge; elle
marque encore un exercice habituel, répété de la profes-
sion, la fréquence de l'action avec une sorte d'idée de
petitesse, de détail spécial amoindri. En voici quelques
applications diverses : Drapariè, Bouguariè, Fabrariè,
Téïssariè; Boulanjariè, Révéndariè, Manjarié; Bésuqua-
ri, Néciardariè, Gusariè; etc.: Draperie, Bouquerie, Fa-
brerie, Tisserie; Boulangerie, Revenderie, Mangerie; Niai-
serie, Gueuserie, etc. ; À
Au contraire, la terminaison ie de cet article est _atta-
chée à un subst. masc, et en fr. elle est représentée par
IË
ter ou er. Elle sert à désigner, au lieu du métier, de l'état,
celui qui l'exerce; non pas l'action elle-même, mais celui
qui agit, comme-Capéï?, Saraïè, Téissiè, Sabatiè, Tounaïè,
Éscloupiè, Carétiè, Drapiè, Télatiè, ete.; et encore la fonc-
tion, l'usage, l'emploi de la chose, Candéiè, Éscaïé, Bénitiè,
Pasto-mourtiè, ete.; la réunion, l'habitation des êtres ou
des objets indiqués par le radical : Couloumbiè, Pijougné,
Poulaï, Viviè, Fruitiè, Païè, etc. Elle marque dans ce der-
nier sens, la collectivité, l'ensemble de certaines choses
réunies, le lieu où elles se trouvent et ce qui les produit,
arrivant par là naturellement à former des noms d'arbres,
de fleurs et de plantes; exemples : Apiè, rucher, Abéïe,
troupeau, Canéiè, cannaie, Boutéiè, semis de courges,
Plantiè, plant de vignes; Plantouï?, semis d'oignons, de
choux, de poireaux, pépinière de châtaigniers, de müriers;
_ Périè, gésier, à cause des petites pierres qui le remplissent,
et Grdouséiè, Rousiè, Giroufliè, Dindouïè, Nouguiè, Cou-
gourliè, Ldouriè, Majoufè, Bélicouquiè, Aménliè, Casta-
gné, Ouliviè, Fiquiè, etc.
On peut mème remarquer que, dans beaucoup de ces
* dernières désignations, c'est la forme neutre Arium qui a
servi de base : Columbarium, Vivarium, Apiarium, Rosa-
rium, et autres. Le masculin Arius a cependant fourni le
plus grand nombre.
Notre désinence iètro, en fr. ière, qui provient du lat.
- Aria, Eria, au fém., et se montre souvent au plur. Ariæ,
Eriæ, Ièiros, Ières, a des rapports naturels avec le masc.
Arius, et par suite avec la finale 70. Comme lui, elle est
entrée dans beaucoup de noms propres de lieu; car sa fonc-
tion est de désigner les endroits de réunion de certains
animaux, les quartiers abondants en certains arbres ou
plantes, en objets particuliers de certaine nature, les ate-
liers où se rencontrent certains travaux, ouvrages ou pro-
duits fabriqués ou exploités. Dès lors, les dénominations
collectives de tout ce qui se fait remarquer en masse, en
pluralité comme ensemble, comme production, devaient
être marquées à ce signe. Dans ces différentes catégories
de dérivés, c’est à ceux qui sont restés noms propres de
quartiers que nous nous attacherons de préférence, en
citant surtout les appellations locales, et en rappelant
quelques analogies. Ainsi, la Cabriètro, Capraria, les
chèvres; las Galignèiros, Gallinariæ, les poules; la Gra-
nouièiro, Ranuncularia, les grenouilles; la Loubièiro, Lu-
-pariæ, Louvières, Louviers, les loups; la Réinardièiro, la
Renardière, et Véoupéiètro, Volpelière, les renards; la Ta-
bagnèïro, les frelons; la Tartuguiètro, les tortues; Va-
quièiras, Vaquières, Vaccariæ, les vaches, etc.
Las Avignèïros, Avenariæ, les avoines; la Blaquiètro,
la Blaquière, la Blachère, de Blaquas — Blaquarédo: las
Bouïssiètros, Buæeriæ, les Buissières — la Boissière —
Bussières — Bouïssounargue, Bouïssonargues ; Broussièiros,
Brogariæ, — las Broussos — Broussoùs — Boussargue,
Brossanicæ, les Bruyères; Canabièiro, Cannetum, Cane-
bière; Canéiè, Cannaie, les roseaux ; Évuzièiro, Helzaria,
IGN 409
Elzière, Euzière, de Elze, Iex, chènaie, les chênes; Fal-
guiètro, Féouguièiro, Falguière, Falgère, Faugère, de Fdou,
Fagus, hêtre, Foutaie, les frènes; Jounquiètros, juncariæ,
Jonquières — Jonchères, les joncs; Nouziètro, Nuxerie,
Nozières, Nougaré — Nougarédo, Noyelle = Noueilles =
Nouguiès, de Nouguiè, de Nux, nucis, noix, nose, nouse,
les noyers; la Rouvièiro, Roubière, Rouvière, Roveria =
Rouvéiran — Rouvéiréou, Rouveirol, dim. — Rouvéira,
Rouveirac = Rouvéirolo, Rouvayrolle, de Robur, Rovariæ,
les rouvres, etc.
Aourièiros, Aureriæ, les Aurières, — Aureillac, Auril-
lac — Auriasses = Auriols, Aurioul, dé Aurum ou Aura;
l'Argéntiètro, Largentière, = Argentan — Argental = Ar-
genson, de Argentum; Gipièiro, platrière, de Gipsus, le
plâtre; Mouiëiro, Molieyrie, Molière — Moulières, Molerie,
= Moulézan = Moulézargues — Molariæ, les meulières,
les moulins, les terrains bas, détrempés, arrosés d'eaux ;
Péirièros, Perrières = Peyrouse = Peyrolles, Peyrols —
Queyrières; Cadrariæ, — Carrières = Clapières, Clip-
pariæ, de lapis, lat., de Cair, Cairn, celt., des pierres;
Poulvièïiros, Polvières, Polvereriæ, — Polveriegras, Pol-
veriès, de Pulvis, les poussières; Sablièiros, Sableriæ, les
sablières — Sablons — Sablonières, de Sabula, les sables ;
Téouiéiro, Tegulariæ, = Taulières, la Teulière — Tuileries,
les tuiles; Vérièiro, Vedraria, une verrerie, etc. — Voy.
Léngo, Rouman.
Iè, s. m. Dim. Jèché; augm. Jèchas. Lit, meuble pour
y coucher, y dormir; lit d’une pierre, côté sur lequel elle
repose dans la carrière; couche de quelque chose super-
posée à une autre; en anatomie, arrière-faix ou placenta.
— Soubre-iè, ciel de lit. Zè courédis, lit à roulettes. Lou
iè ou porto tout, le lit est un spécifique excellent, dit-on
à un ivrogne qu'on engage à se coucher.
Dér. du lat. Lectus, m. sign.
Ièchoto, s. f. Dim. de Ze. Petit lit; couchette.
Ièl, s. m”. Dim. Jèïé; augm. Ièïas. OŒil, yeux, organe
de la vision; vue. — À mous ièls vésens, à ma vüe, sous
mes yeux, à mon nez. À visto d'ièl, à vue d'œil, à première
vue. La pruno dé l'ièt, la prunelle. Hdou d'ièl, mal aux
yeux. Li tombo un ièl chaquo co qué dis uno vérita, amaï
n'és pas borgne, il perd un œil à chaque vérité qu'il dit et
il n'est pas borgne. Jè! dé bidou, œil de bœuf, jour en
forme de segment de cercle ou de demi-lune, dont on
éclaire un escalier, un grenier, etc.; lucarne.
Dér. du lat. Oculus, m. sign.
Iéou, pron. pers. Moi, et non pas je. — Ce dernier pro-
nom, ni un analogue, n'existe pas en languedocien, cha-
que verbe s'y conjuguant sans les pronoms je, tu, il, etc.
— Noun faraï iéou, non ferai-je moi. És iéou, c'est moi.
Jéou tabé, mieux que fambé, moi aussi, moi de même.
Iéow tapdou, mieux que tant pdou, moi non plus.
Dér. du lat. Ego. À
Ignoura, v. Dédaigner; ne faire aucune attention à
quelqu'un, comme s’il n'existait pas, ou si l’on ne se
410 100
doutait pas de son existence; mépriser. — Vous ignore, je
ne sais qui vous êtes.
Dér. du lat. Jgnorare, ne pas savoir. — Le subst. ou
l’adj. formés en fr. de Zgnarus, in privatif et gnarus, igno-
rant, ne sont pas admis en languedocien.
Imaje, s. m. Image, estampe; gravure enluminée, à
sujet religieux ou profane. — Planta coumo un imaÿe,
immobile comme une statue.
Dér. du lat. Imago, m. sign.
Ime, s. m. Idée; sens; discernement; imagination;
jugement. — A bèl ime, approximativement, à vue de
pays. Avès bén ime qué.…, vous pensez bien que... Aï pas
gés d'ime d’aqud, je n’ai aucune souvenance de cela. At
pas ime d'y ana, je n’ai aucune envie d'y aller. Travaïa
d'ime, travailler de tête, d'imagination; faire un ouvrage
sans modèle et sans leçon. Avièï ime qué véndrias, j'avais
un pressentiment de votre venue. Achata à ime ou à
bèl ime, acheter sans mesurer, par estimation ou plutôt
par approximation. M'én'a douna sans ime, il m'en a
donné sans mesure et sans raison.
Abréviation du lat. Animus, esprit.
Imouï, imouïisso, adj., ou Moui, mouisso. Humide;
moite ; légèrement imbibé d’eau; trempé par la brume ou
le serein.
Dér. du lat. Humor.
Impoquo, s. /. Empèchement; pierre d’achoppement ;
accident fâcheux qui entrave, qui arrête ce quiestcommentcé.
Incan, s. m. Vente de meubles à l’encan, à l’enchère.
—Voy. Éncan, m. sign., m. étym.
Inlo, s. f. Ile, terre entourée d’eau de tous côtés.
Dér. du lat. Insula, m. sign.
Inoucén, énto, adj. Innocent, faible, simple d'esprit;
idiot; crétin. — Inoucén d'Agnano. — Voy. Agnano.
Intra, v. a. et n. ad libitum. Entrer, pénétrer dans, en-
foncer. — Pode pas intra moun pè din moun souï, je ne
puis faire entrer mon pied dans mon soulier. Intras aquél
éfan, qué vai plôoure, rentrez cet enfant, il va pleuvoir.
Intras voste capèl, enfoncez votre chapeau.
Dér. du lat. Intrare, m. sign.
Intrado, s. f. Entrée; endroit par lequel on entre;
action d'entrer; commencement ; début.
Intran, anto, adj. Hardi; entreprenant; qui se faufile
partout; entrant ; insinuant; intrigant.
10, s. m. Lieu; endroit; place; occasion; moment op-
portun. — Pa’n-iù, nulle part. Én’id maï, autre part,
dans un autre endroit.
Dér. du lat. Locus.
Ioou, s. m. OŒuf, corps organique que pondent les fe-
melles des oiseaux, des poissons, etc.— Caro d'idou, glaire
d'œuf. Cruvél d'idou, coquille d'œuf D'ious dou platé, des
œufs au miroir. D'idous issanlas, des œufs pochés, cuits à
la poële. D'idous d'acdou, les biscuits, les rigaux de Ja
chaux, pierres mal calcinées qui ne fusent pas.
Dér. du lat. Ovum, m. sign.
IOU
lou, diphthongue.
On aura peut-être remarqué, et nous redirons, que toutes
les diphthongues où intervient là initial, autres cepen-
dant que celles formées avec l'a ou l’u, sont masculines
ou féminines, fortes ou faibles, selon que la présence où
le défaut d’accent vient modifier leur son ou leur genre :
ex. : réndiè, fermier, rèndie, que je rende; drapariè et
aparie; papiès et répapies; fd, cafi, et bofio, sofio, etc.
La voyelle composée ou, se joignant à un à antécédent,
se conforme à la règle, mais elle offre une autre particula-
rité. Quand elle se diphthongue, tantôt la tonique porte
sur l’i, et si alors elle est finale, la syllabe est masculine ;
tantôt les deux voyelles sont égales, unies dans leur son
propre, et la syllabe est féminine : ainsi dans le premier
cas : boudiou, coudiou, éscroupiou, roumiou, et une foule
d’autres; dans le second cas, {oundiou, foundiou, éstrou-
piou, roumiou, etc., à terminaison féminine.
Lorsqu'il n’y a pas diphthongue, les voyelles à et ou, à
la finale d'un mot, ont pareïllement leur diversité de genre
déterminée cette fois par l’accent sur la composée, ce qui
la rend masculine, tandis que sans accent la syllabe est
naturellement féminine : par ex. ardioù et roudiou ; cébioù
et rébiou; coustioù et réboustiou, etc.
Cette distinction a son importance en versification; mais
elle est aussi essentielle à observer pour bien prononcer et
souvent pour arriver au sens dans les mots homographes.
Enfin ce rapprochement de voyelles se rencontre dans
l'intérieur d’un mot, et suivi d’une consonne; là, il n’est
plus question bien entendu de genre; mais, suivant les
cas, li et lou sont égaux ou inégaux en quantité, et leur
inflexion diffère, comme dans tiouno et béstiouno ; miouno
et miouno; carioun et Marioun; sioulo et maliciouso;
piouta et éspiouna, etc.
De bon compte, voilà donc la combinaison de deux
mêmes voyelles qui produit quatre modulations différentes;
en ne prenant qu’un exemple de chacune, boudiou sonne
autrement que foundiou, ardioù que roudiou, tiouno que
béstiouno, carïioun que Marioun, Sioulo que graciouso, et
ainsi d’une foule d’autres.
1 faut pouvoir distinguer ces différences. Nous les re-
présentons à l'œil autant et aussi clairement que possible
par les accents orthographiques et le tréma. L'accent
donne la valeur, rend la note longue ou brève, aiguë ou
grave : son absence la laisse avec le son naturel et propre;
le tréma détache le plus souvent la voyelle, adoucit le son
en le doublant presque ou en le mouillant en quelque sorte;
c'est pourquoi la diphthongue seule a besoin d'être accen-
tuée sur l’i qui est la voyelle-pivot, et l'accent circon-
flexe lui est réservé; pour la dissyllabe, la tonique étant
transportée sur ou, c'est celle-ci qui doit être marquée du
signe quand elle est finale et masculine, car, suivie d’une
consonne au milieu d'un mot, elle est suffisamment ren-
forcée.
Après cela, il est difficile de comprendre que notre lan-
IOU
gue d'Oc, avec ces variétés de vocalisation et d'intonation
qui exigent une précision assez rigoureuse, puisse se trou-
ver bien d’être compliquée encore par le renversement des
notions orthographiques reçues, alors qu'il n’y a pas né-
cessité. C'est là pourtant ce qui a été proposé et presque
imposé par des novateurs, sous prétexte de ressusciter l'an-
cienne et défectueuse orthographe de leurs devanciers.
Nous persistons à croire et à soutenir que l'alphabet
adopté suffit; et du moment qu'il est convenu que l'on
doit écrire comme on prononce, s’écarter des règles qui,
par le contact des lettres, leur position et leur agencement,
représentent tel ou tel accord à rendre, telle consonnance
à exprimer, c'est évidemment faire de la fantaisie et arri-
ver au trouble et à la confusion, en revenant aux méthodes
délaissées par l’enseignement.
La diphthongue qui nous occupe n’a pas échappé plus
que les autres aux prétendues réformes d’une école nou-
velle : ce ne sera pas perdre notre temps que d'essayer de
la ramener à l'orthographe véritable qui lui appartient.
Nul ne saurait contester, après l'esquisse succincte qui
vient d’être tracée, que les sons ou et w n'existent dans
la langue d'Oc, et qu'ils ne soient représentés, l’un par
deux signes et l’autre par un seul : défectuosité sans doute
de nos alphabets, mais insuffisance admise, si regrettable
qu'elle soit, et passée dans la pratique et l'usage; ce qui
n'empêche point que ou et w ne soient l’une et l'autre de
simples voyelles, reconnues comme telles dans tous les
traités et les nomenclatures grammaticales.
Ceci posé, il est encore incontestable que nos idiomes
ont adopté, dans beaucoup de mots, le son double i-u et
tou, l'un et l’autre tantôt joints, c.-à-d. diphthongués,
prononcés d'un jet, tantôt séparés, c.-à-d. dissyllabiques.
Par suite, la conclusion forcée est que, si la consonnance
existe, elle doit être figurée; si elle est distincte, le mème
caractère alphabétique ne doit pas l'exprimer: et notre
lexique s’est cru obligé par une conséquence contre laquelle
aucune objection raisonnable ne semblait devoir s'élever ;
suivant en cela les préceptes des maitres, l'abbé DE Sau-
VAGES, JAsMIN, LA FaARE-ALaïs et les autres.
Pourquoi cependant certains traités professent-ils en
règle absolue que « la voyelle u se prononce comme en
français, excepté, lorsqu'elle suit immédiatement une autre
voyelle; dans ce dernier cas, elle prend le son ou? »
Nous avons déjà exposé, en parlant des diphthongues
Aou et Éou, les raisons qui rendaient inadmissible une
pareille proposition; nous aurons occasion, sous la voyelle
0, de renouveler nos protestations contre cette hérésie
historique et grammaticale; ici, sans autre autorité, nous
l'avouons, que celle de la logique et de l'amour de notre
langue, affirmons de plus fort qu'avec à voyelle, comme
avec a, e, 0, si la voyelle ou, sonnant ou, se fait entendre
. à la suite, il convient d'écrire ou, et que la substitution
de l’u simple ne peut être un équivalent toléré, raison-
nable et satisfaisant. Puis, contentons-nous de prendre sur
IKA ait
le fait quelques-unes des contradictions des réformateurs
eux-mêmes.
Si la règle tant préconisée est vraie et juste, ils ont
raison, par exemple, d'écrire le n. pr. Marius, à la con-
dition de le prononcer Marious. Disent-ils ainsi ? Ce serait
bien romain : mais ils ne vont pas jusque-là. L'u cepen-
dant suit immédiatement l'i.
Grâce au principe, l'inverse aurait droit aussi à réclamer.
Avec un autre nom propre, très-commun, Marioun, il
suffirait d'écrire Mariun : voilà, se réalisant, cette écono-
mie bien entendue de l'o qu'ils traitent si mal, en concours
avec l’u, quand une voyelle le précède. Si l’on s'avisait,
pour l'honneur du système, de cette orthographe, serait-il
bien certain que le mot fût correctement épelé comme il
demande à être prononcé? Il est quelque peu permis d'en
douter.
Il y a mieux encore : à les croire sur parole, en écrivant
lis iuë, niuë, aniud, liuèn, dé liuèn én liuèn, etc., ne pré-
tendent-ils pas obliger, et ne se soumettent-ils pas les pre-
miers sans doute, à prononcer lis iouè, niouè, aniouë,
liouèn, dé liouèn én liouèn, etc. Que leur orthographe soit
régulière, la prononciation devra se conformer au principe :
le fait-elle? Non, certes : ils se gardent bien d’articuler
autrement qu'ils n'écrivent. Mais s’il faut ici prononcer
nettement iu et là très-distinctement iou, leur formule et
leur exception mêlent tout, brouillent et confondent tout :
pour qui donc sont-elles bonnes? à quoi servent-elles?
L'orthographe dite des troubadours est jugée.
Sur une base si malheureuse, que l’on cesse donc de
rèver l'unité orthographique de la langue d'Oc. Que le
provençal soit maitre chez lui, rien de mieux; mais qu’il
soit satisfait, et son lot est magnifique, de nous imposer
l'admiration pour ses chefs-d'œuvre en poésie, sans vouloir
nous soumettre à ses préceptes de grammaire. Le langue-
docien lui refuserait ses suffrages. Il a déjà assez à faire
à lutter contre le franchiman d'outre-Loire, sans avoir
encore à se défendre contre les importations de contrebande
d'outre-Rhône, si séduisante que soit l’estampille. Et il
dira et écrira toujours : ©h/ sdouvérdiou/ lèou, lèou,
chacun pér sé et pér lou siou; és cé qué fôou, énd’aqud pas
maï.
Iragnado, s. f. Araignée, ou plus correctement toile
d’araignée. — Dans le pays on appelle, par corruption
peut-être, l’araignée plus souvent iragnado que iragno. Ce
dernier mot est plus technique et doit ètre préféré.
Iragnas, s. m. Augm. d’Iragnado. Large toile d'arai-
gnée; cette multiplicité de toiles qu'on remarque aux plan-
chers des remises et écuries d’auberge, où l’on prend rare-
ment la peine de les enlever et où elles se multiplient.
Iragno, s. /. Araignée, nom générique qui s'applique à
toutes ses nombreuses variétés, Aranea, Linn., insecte de
l'ordre des Aptères et de la fam. des Aranéïdes ou Acères.
— L'araignée n'est point un poison pour l’homme, à preuve
l'astronome Lalande qui suçait volontiers l'animal vivant :
412 ISS
les singes en sont très-friands. Mais sa morsure, inoffensive
dans nos pays, est dangereuse et procure de vives douleurs
dans d’autres contrées.
Dér. du lat. Aranea, m. sign.
Iragnoüs, s. m. Espèce de raisin noir, à grains serrés,
ronds, assez gros. Il ne donne pas une grande quantité de
grappes, mais elles sont très-belles. Ce raisin se conserve
longtemps : le cep en est propre, les yeux bien espacés, la
feuille bien découpée.
Son nom lui vient de ce que ses grappes logent une mul-
titude de petites araignées jaunes. Cependant cette parti-
cularité n’est pas exclusive à cette espèce, mais on y ren-
contre plus souvent ces insectes, le rapprochement des
grains leur fournissant un abri plus sûr pour s'établir.
Iragnoüs, ouso, adj. Couvert, embarrassé de toiles
d'araignées. Au fig. qui est de mauvaise humeur; inquiet;
et cettte acception vient sans doute du rapport de conson-
nance avec Argnoùs, mauvaise traduction de Hargneux,
dont le franchiman a fait faire une sorte de jeu de mots.
Iranjariè, s. f. Orangerie, serre où l’on renferme les
orangers en hiver.
Iranje, s. m. Orange, fruit de l’oranger.
Iranjè, s. m. Oranger, Citrus aurantium, Linn., arbre
de la fam. des Hespéridées, cultivé en pleine terre dans
quelques parties de la basse Provence, à Hyères. Les pre-
miers orangers furent apportés en 4547 de la Chine en
Portugal : de là ils se répandirent aux iles Majorques, en
Italie et en Afrique.
Dér. du lat. Aurantium, m. sign.
Irèje, irèjo, adj. Capricieux; difficile à vivre; bourru;
revèche; rèche; quinteux.
La racine du mot parait être le lat. Zra, colère : Irèje,
colérique.
Issama, ». Essaimer, former de nouveaux essaims, pro-
duire un essaim, comme font les plus jeunes abeilles qui
sortent de leur ruche-mêre, une jeune reine en tête, pour
aller coloniser ailleurs.
Issama, en parlant des abeilles, multiplier. Activement,
éparpiller, disposer, dissiper, répandre, comme un essaim.
Dér. du lat. Examinare, m. sign.
Issan, s. m. Essaim, peuplade de jeunes abeilles qui
quittent la ruche-mère, trop étroite pour toute sa popu-
lation. Une ruche bien entretenue essaime deux fois et jus-
qu'à trois fois dans l’année.
Issan se dil aussi dans le sens de multitude serrée,
compacte, remuante. — Un issan dé mounde, une foule de
monde ; — d’éscouïès, une troupe d’écoliers;-— dé grdoules,
d'âoussèls, de frelons, d'oiseaux.
Dér. par corrupt. du lat. Examen, m. sign. D'autres
disent du celt. Eczaim, m. sign. ou du lat. Exire, sortir,
qui avait donné au vieux fr. Eissir.
Issanla, ». Pocher des œufs, les faire cuire à la poële, où
il se forme attour du jaune une pellicule qui Je recouvre
comme s'il était dans une poche, — Jssanla, qui n’a
ZE
pas du reste d'autre acception, est une fioriture variée du
V. Sanla, envelopper. — V. c. m
Issar, s.m. Dim. Issarté; augm. Issartas. Essart; lande;
garrigue; bois nouvellement défriché. C'est un terrain dont
on n’a fait qu'effleurer la croûte, dont on a arraché les
souches, les ronces, les épines, et seulement enlevé les
pierres de la surface pour les réunir en tas de distance en
distance. On y sème du blé qui y réussit très-bien d’or-
dinaire pendant trois années, sans autre culture, sans
engrais, ni jachères. i
Ce mot a donné naissance à quelques noms pr.:
Issartel, Des Essarts, Des Issarts.
Dér. du lat. Sartus, réparé, rapiécé, remis à neuf; essarté.
Issarta, v. Greffer, enter un arbre; essarter; remettre
à neuf. — Jssarta un débas, refaire à neuf le pied d'un
bas, ce qui se pratique en faisant un tout du neuf et du
vieux, qui sont joints ensemble sans suture comme la
greffe d’un arbre. Issarta un râoumas, prendre un rhume
sur l’autre; — uno mounino, s'enivrer de nouveau avant
d'être dégrisé d'une première ivresse. Zssarta dow cougné,
à l’émplastre, dou siblé, greffer en fente, en écusson, en
sifflet.
En esp. Enæestar, M. sign.
Issartaduro, s. f Ente, greffe; joint de suture entre
l'ente et le sujet, qui se remarque encore sur l'arbre long-
temps après l'opération et quelquefois toujours.
Issartaïre, s. m. Qui greffe, qui ente; qui fait sa pro-
fession de greffer.
Issartéja, v. fréq. Faire un essart, défricher un ter-
rain comme il fest expliqué à l’art. Issar. — Il ne faut
point confondre Zssarta et Issartéja, non plus que Issar et
Issèr ; leurs acceptions sont tout à fait disparates.
Issèr, s. »m. Jeune arbre nouvellement greffé, ou qui ne
l'est pas encore et qu’on destine à être enté.
Issèrques, s. m. plur. Sentiers tortueux et difficiles,
qui allongent souvent le chemin au lieu de l'abréger
comme las courchos, et qui ont pour but de suivre les sinuo-
sités d’un torrent, d’un ruisseau, d’une rivière, sans les
traverser. Sauvages les appelle Fschirpos ou Fschirquos.
Issoulén, énto, adj. Dim. Issoulént. Insolent; orgueil-
leux; effronté; qui manque de respect.
Issoulénço, s. /. Insolence; effronterie; parole hardie,
irrespectueuse et provoquante; outrage.
Dér. du lat. Insolentia.
Istanço, s. f. Distance d'un point à un autre.
Corrupt. du fr. Distance,
Iuèn, adv. Loin; à une grande distance. — Dé iuèn én
iuèn, de loin en loin, par longs intervalles. Sé vér dé iuèn,
on l’aperçoit de loin. Po pan'a pu iuèn, il est au bout de
sa course, il ne peut plus vivre au-delà.
L'i initial est aspiré; il ne s'élide pas et ne fait pas
hiatus.
Dér. du lat. Zongè, m. sign.
Izèto, s. f. Z, nom de la dernière lettre de l'alphabet.
Issarte,
J
3, s. m. Consonne, dixième lettre de l'alphabet : se
nomme et s'épelle Ji.
La consonne J se classe comme aspirée palatale faible.
L'articulation qu'elle représente était inconnue dans les
langues anciennes, et le signe n'en existait pas; ii resta
mème longtemps confondu avec I, celui-ci considéré tou-
jours voyelle, et 3 ou I long pris comme consonne. Au-
jourd'hui encore, les langues qui ont la même origine que
la langue d'Oc et la langue d'Oil, l’expriment d'une ma-
nière différente : l'ital. écrit Giamma, Giardino, Giallo;
que le fr. écrit jamais, jardin, jaune, comme le lang.
jamaï, jardà, jdoune. L'esp. adopte le caractère, mais le
confond avec l'æ et le prononce avec une forte aspiration
- gutlurale, sonnant presque comme K, ÆKota écrit Jota.
Nous sommes plus près de la vocalisation italienne, douce
et sifllante; et c'est pourquoi, tout en conservant le signe,
sa dénomination et son articulation la rappellent.
Ainsi nous employons le J :
4° Dans tous les mots où nous avons à faire sentir la
prononciation du G doux, c.-à-d. devant les voyelles a,
o,u;
2° Dans les mots, qui semblent communs avec le fr., où
l'on pourrait placer le G sans inconvénient de pronon-
cialion, seulement dans le but de leur conserver la phy-
sionomie de leurs correspondants: ex.: jante, jénto; jeton,
jütoù ; jumelle, jimélo ; jeter, jéta, etc.;
3° Dans des mots et divers temps de verbe où le J est
suivi des lettres e ou à, lorsque ces mots sont les com-
posés ou les co-composés d’autres mots chez lesquels le G
deviendrait dur et guttural. Nous écrivons Viluje, car si
nous mettions Vilage, comme la terminaison française,
nous obliendrions au dim. et à l’augm. Vilagoù et Vilagas.
Or, il nous a paru impossible d'avoir deux orthographes
différentes sur des mots d'une origine identique. Ceci est
encore plus sensible dans les conjugaisons : les verbes en
ja à l'infinitif sont très-nombreux, il nous a paru néces-
saire de laisser subsister ce ÿ dans tous les temps où il est
suivi des voyelles e, à, ou : chanja, chanÿe, chanjou, chan-
jamén, chanjin, chanjèrou, ete.
Ja! inter. Dia, cri ou plutôt commandement des char-
retiers pour faire aller ou tourner les chevaux à gauche,
comme Audou, et en fr. A hue, où à hurau, à hurant, si-
gnifie : à droite. — L'un tiro à ja, l'âoutre à rudou, l'un
tire à dia, l'autre à hurant; au fig., ils ne sont nullement
d'accord, ils agissent en sens contraire; quand l'un veut
blanc, l'autre veut noir.
JAL 413
Jabô, s. m. Dim. Jabouté; augm. Jaboutas. Jabot, or-
nement de mousseline plissée ou de dentelle à la fente du
haut d'une chemise d'homme. Par ext. estomac, poitrine.
— Faïre jabè, se pavaner, s'enorgueillir; prendre plaisir
à la louange.
Jacoù, ou Jacoupé, éto, dim., s. m. et f. Niais; dadais,
imbécile. — Le fr. emploie dans le même sens : Jaquinet,
composé de même.
Dér. du lat. Jacobus, Jacques.
Jaïé, s. m. Jais, bitume, fossile d'un noir très-brillant
et solide, qui prend un très-beau poli; sorte de verre teint
en noir, qui en est une imitation.
Jaire, v. Coucher; être couché; reposer à plat. — Se
dit d'une pierre qui pose bien sur sa base. Faï-la jaïre,
pose cette pierre de manière qu’elle touche hermétique-
ment sur son assise.
Sé jaïre, se coucher; se lenir couché. — Vaï t6 jaïre,
va te couche’, tu m’ennuies.
Dér. du lat. Jacere, coucher.
Jaïsso, s. f. Gesse, espèce de lupin ou de féverolle,
Lathyrus sativus, Linn., plante de la fam. des Légumi-
neuses, cultivée partoat.
Jala, v. Geler, glacer; endurcir par le froid; faire périr
de froid. — Sé jula, mourir de froid. Aquô's un mariaÿe
jala, dit-on ou disait-on de celui où l'amour ne joue qu'un
faible rôle : dans notre siècle positif, où l'on a changé tout
cela, cette phrase siguifie aussi un mariage où il y a plus
d'amour que d'argent.
Dér. du lat. Gelare, m. sign.
Jalado, s. f. Gelée; action de la gelée, froid qui la pro-
duit; saison des frimas.
Jaladuro, s. f. Gelée, dans le sens de l'impression qu'elle
fait sur les êtres vivants et inanimés: gelivure.
Jalarèio, s. f. Gélatine, gelée animale, suc cu jus coa-
gulé.
Jalibra, v. Verglacer; faire du givre; faire de la gelée
blanche, du verglas. — Fos jalibra, bois roulé, dont quel-
qu’une des couches circulaires manque d’adhérence et se
sépare quand on le travaille, ce qui le rend impropre à
tout ouvrage. Ce vice provient de ce qu'à la formation de
cette couche la sève a été surprise par une forte gelée qui
l’a glacée et a empêché l'adhésion successive des couches
superposées.
Jalibre, s.m.,ou Barbasto. Givre, gelée blanche; ver-
glas. — Ce météore est formé par les vapeurs qui s'élèvent
de la terre et que le froid surprend la nuit et condense à
414 JAN
la surface du sol et sur les plantes, en s'y formant en cris-
tallisation.
On donne de préférence le nom de Jalibre au givre
d'hiver, et celui de Barbasto aux gelées blanches du prin-
temps, qui sont si funestes aux bourgeons et mème à la
feuille épanouie du mürier et de la vigne.
Jalo-fré, adj. des deux genres. Frileux, transi de froid,
qui craint le froid. Au fig. personne difficile à émouvoir,
d'un tempérament froid et insensible à l'amour; un pisse -
froid. #
Jaloùs, ouso, adj. Jaloux; envieux ; désireux; attentif
à conserver une chose acquise, à garder, à maintenir, à
accroitre un bien, une satisfaction. — És jaloùs dé sous
doubres, dé sous bouqués, il tient fortement à la belle venue
de ses arbres ou de ses fleurs; il en prend un grand soin.
Jalousiè, s. f. Jalousie; envie; chagrin de voir possé-
der par un autre ce qu'on désire avoir pour soi-même;
treillis, sorte de volet de fenêtre à claire-voie.
En ital. Gelosia, m. sign.
Jamaï, alv. de temps. Jamais, dans aucun temps /Voy.
Jamès). — Jamaï fôou dire d'aquélo aïgr noun béouraï,
prvb., il ne faut pas dire, fontaine, je ne boirai pas de ton
eau, Jamaï amouroùs vérgougnoùs noun aguèê bèlo amigo,
prvb., jamais honteux n'eut belle amie.
Deux proverbes qui se trouvent anciennement dans les
deux langues, avec leur expression particulière qui n’est
pas tout à fait une traduction mot à mot, mais où l'iden-
tité de sens est reproduite. Est-ce le lang. ou le fr. qui
doivent en revendiquer la primauté ? Ni l'un ni l’autre,
sans doute; car la sagesse des nations n'avait pas attendu
leur formation pour mettre ces vérités en axiomes; mais
chaque idiome les a rendues à sa manière.
Dér. du lat. Jam magis.
Jambar, ardo, «dj. Bancroche, bancal, qui a les jambes
tortues.
Jamès, adv. de temps. Jamais, en aucun temps. —
S'emploie plus rarement que Jamaï; mais il semble avoir
quelque chose de plus énergique, de plus virtuel, de plus
tranché; il appartient au dialogue plus qu'à la narration.
Bien qu'il soit plus identique au fr., il est fort dans le
génie du languedocien.
Jan, s. m. n. pr. d'homme. Dim. Jané, Jand. Jean,
Dér. du lat. Joannes où Johannes, venu de l’hébreu
Jchohhanan, grâce de Dieu. En v. fr. Jehan; en ital. Gio-
vanni; en esp. Juan.
Nous avons dù placer ici alphabétiquement ce mot, ses
dérivés et ses composés, pour nous conformer à la règle
de notre orthographe, qui supprime toutes les lettres qui
ne se prononcent pas.
Jan (Sén), n. pr. Au masc., n. pr. de lieux en grand
nombre partout : au fém. fête de Saint-Jean Baptiste, le
24 juin. — La Sén-Jan où pér Sén-Jan, le 24 juin. C'est
une des époques principales de l'année pour les termes de
paiement et autres affaires. Cette échéance de la fête de
JAN
Saint-Jean Baptiste vient sans doute de ce qu'à cette date
on a fini et réalisé la récolte des cocons, et que tout le
monde est censé avoir de l'argent. Elle divise aussi l'année
également en deux semestres. Ces cisconstances concou-
rent à en faire un terme remarquable.
Sén-Jan das anèls, Saint-Jean de Maruéjols, .commune
du canton de Bafjac (Gard), ainsi nommée parce qu'au-
trefois il s'y fabriquait une quantité de bagues, anèts, en
crin avec chiffres et devises. Il s'y tenait une foire exprès
pour cette industrie.
Sén-Jan dé Gardounénquo, Saint-Jean du Gard, chef-
lieu de canton, arrondissement d'Alais.
Sèn-Jan dé las cébos, Saint-Jean de Valériscle, commune
du canton de Saint-Ambroix (Gard), renommée pour sa
production d'un petit oignon délicat, espèce d'échalotte,
dont elle fait commerce et exportation : de là dérive son
surnom.
Nous ne rapportons pas un plus grand nombre de ces
localités qui ont le nom de Saint-Jean, bien que notre dé-
partement et l'arrondissement d’Alais en fournissent beau-
coup d’autres, parce qu'en lang. elles-conservent le mème
surnom distinetif qu’en fr. Nous avons cité les trois coma
munes ci-dessus à cause de la différence de leur appella-
tion française avec leur désignation usuelle et populaire.
Jané, s. m. Dim. de Jan. Fils de Jean, quand il-est
n. pr.; mais, subst. m., il signifie : un jeannot, un niais,
un imbécile, qui se laisse mener par le bout du nez; qui
se laisse insulter, molester; ou encore un Jocrisse.
Janén (Sén), Sén-Janénquo, a/j. De la Saint-Jean;
qui vient à la Saint-Jean, en parlant des fruits et produits
de la terre; habitant de l’une des communes qui portent
le nom de saint Jean; membre de la confrérie de Saint- :
Jean, qui existe à Alais, dont la cathédrale est sous l'in-
vocation de saint Jean Baptiste.
Janénquo (Sén), s. f. Territoire de l’une doi communes
nommées Saint-Jean, ou de plusieurs communes dont un
Saint-Jean serait comme le chef-lieu.
Janéto, s. f. n. pr. de femme. Dim. de Jano: Jean-
nette.
Janétoun, s. f. n. pr. de femme. Dim. de Jano, qui a
lui-même un dim., Janétouné. Jeanneton.
Jan-fénno, s. m. Homme qui se mèle des ouvrages
réservés aux femmes, des menus soins du ménage; un
tâte-poule.
Jangla, vw. Glapir; crier comme un chien qu'on frappe:
— Jangla dâou fré, grelotter, trembler de froid.
Dér. du lat. Gemere, gémir.
Jangladisso, s. f. Glapissement d’un chien qu’on
châtie.
Jangoula, v., ou Gingoula. Geindre, gémir; se plaindre
languissamment, à diverses reprises, comme par habitude.
Dér. du lat. Ululare.
Jangoulaïre, aïro, adj. Pleurard; qui se plaint d’ha-
bitude; qui ne cesse de se lamenter.
JAO
Jangoulino, s. /. Ripopée, boisson sans saveur ni vertu:
— Voy. Gingoulino.
Jano, s. f. n. pr. de femme. Dim. Janéto, Janoù, Jané-
toun, Janctouné. Jeanne.
Jan, s. m. n. pr. d'homme. Dim. de Jan. Jeannot. —
Cette variante touche de prés à notre dim. Jané; mais Janû
a un peu moins le caractère de cetle ingénuité niaise que
celui-ci représente. Le fr., au contraire, son correspondant,
en. est devenu le type, depuis la fin du siècle dernier. Une
pièce de Durvigny lui donna une vogue extraordinaire, el
le Janotisme, longtemps de mode, fit fureur. Les calem-
bredaines et le langage de Janot, après un succès fou, sont
aujourd’hui abandonnés et ne font plus rire le public, qui
se prend au charme d'autres farces, ni plus ni moins spi-
rituelles peut-être, mais qui le sont autrement et l'amusent
davantage.
Jansono, s. f. Gentiane, Gentiana luteo, Linn., à fleurs
jaunes, plante de la fam. des Gentianées, commune dans
le Midi. Sa racine, tonique et stomachique, est employée
avec succès, dit-on, contre la goutte.
Pline assure que son nom lat., dont le nôtre parait
formé avec quelque inversion, lui vient de Gentius, roi
d'Ilyrie, qui, environ 150 ans avant Jésus-Christ, décou-
vrit les vertus de cette plante.
Janviè, s. m. Janvier, premier mois de l’année suivant
notre calendrier actuel, composé de trente-un jours.
Dér. du lat. Januarius.
Jâoune, s. ». Jaune, la couleur jaune.
Dér. du lat. Galbinus, vert pale.
Jâoune, jâäouno, adj. Dim. Jéouné; péj. Jdounas.
Jaune, qui a la couleur du safran, du citron; livide; pâle.
— Le jaune foncé se dit Rouge.
Jäoune, s. ”. En terme de magnanerie, désigne le ver-
à-soie, magnan, atteint de cette maladie, qui est une dé-
composition véritable, et une variété où un symptôme de
ce qu'on nomme aujourd'hui /a Flacherie.
Jâounéja, v. fréq. Jaunir; tirer sur le jaune; paraitre
ou devenir jaune.
Jâounije, s. /: Couleur jaune, celle que prennent les
feuilles en l’arrière-saison, et non jaunisse, qui se dit ous
Éstouris. — Voy. ©. m.
Jäoussémi, s. m., ou Jâoussémin. Jasmin, Jasminum,
Linn., arbrisseau de la fam. des Jasminées. Il est origi-
naire du Malabar. Sa fleur blanche, étoilée, à suave odeur,
et la flexibilité de ses rameaux en font l'ornement et le
charine des berceaux et tonnelles de jardin.
Jâouvèr, s. m. Persil, Apium petroselinum, Linn., plante
de la fam. des Ombellifères, cultivée pour les usages de la
cuisine.
On a dit que son nom était une corrupt. du fr. Jus vert.
Jäouvèrtasso, s. f., ou Goucudo ou Joubèrtino.Ciguë,
Conium maculatum, Linn., plante de la fam. des Ombel-
lifères qui croit dans les lieux humides et gras. C'est le
suc de cette plante qui fournit le poison de Socrate.
or ac 0. À Goes Se ni ZT es rit) lc ESS £.
K A p Tr D ue y f - ue
JAQ 415
Son nom lang. lui vient de sa ressemblance avec Je
persil, et il en est le péjor. à cause dé sa vertu malfaisante,
ILest prudent en cucillant le persil de ne pas faire con-
fusion, ce que l'on prévient en remarquant que la ciguë a
la feuille plus large, qu'elle exhale une odeur désagréable
et différente du persil, et que sa tige est parsemce dé taches
noiràtres.
Japa, v. Japper; aboyer; pousser des aboïiements; aver-
tir par ses cris; crier beaucoup. — És péoure qué japo, il
est au dernier degré de misère, au point de manquer de
paio et de crier famine.
Formé par onomatopée.
Japadis, s. m., ou Japariè. Aboi ; aboïiement de plusieurs
chiens à la fois.
Japaire, aïro, adj. Aboyeur; clabaudeur; qui se plaint
de tout et de tout :e monde.
Japariè, s. f. — Voy. Japadis.
Jaquas, s. m. n. pr Augm. de Jaque. Gros Jacques;
gros et vilain homme du nom de Jacques. — Pdoure
coumo Jaquas, pauvre comme Job. Faïre Jaquas, faire le
chien couchant; caresser, flatter l'homme ou plus fort on
plus puissant que soi.
Le n. pr. vient certainement du lat. Jacobus; mais à la
dernière acception, le lat. Jacere, se coucher, pourrait
bien avoir quelque peu participé.
Jaque, s. m. n. pr. d'homme. Dim. Jaqué. Jacques.
A propos de ce prénom, il convient de faire une obser-
vation qui s'applique à tous les autres: c'est qu'en dési-
gnant un individu par nom et prénom, on les sépare d'or-
dinaire par la particule dé, de, non point par aucune pré-
tention nobiliaire, mais comme si le nom était pris là pour
appellation de race, de famille, dans la personne du pére.
Ainsi l'on dit: Juque dé Bédos, c.-à-d. Jacques, fils de
Bédos. Quelquefois la chose se pousse plus loin : c'est la
mère que l’on prend pour type de la famille, et l'on dit:
Jaque dé Bédosso ; ce qui arrive soit lorsque cette mère,
restée longtemps veuve, a été regardée comme chef de
famille, soit lorsque la mére, un peu -maitresse-femme,
plus connue du public que son mari, est réputée, come
on dit, porter les culottes.
Jaqué, s. m. n. pr. d'homme. Dim. de Jaque. Petit
Jacques.—Faîïre Jaqué, faire le poltron; mettre les pouces;
s'enfuir devant un danger ou une rixe. Un jaqué est
une coiffure, ou plutôt une manière de tailler les cheveux
en brosse : le toupet ainsi taillé se nomme jaqué.
Jaquéli, s. m. n. pr. d'horime. Sorte de dim. de Jaque,
qui se rapproche par le sens de cet autre dim. Jané et
implique aussi une idée de niaiserie candide et ingénue;
un Nicaise, un Nicodème, un Janot.
Jaquélino, s. f: n. pr. de femme. Jacqueline. — Comme
le précédent, son masc., également formé de Jaque, et rap-
pelant une certaine synonymie avec Nicetle, d'une sim-
plicité un peu sotte.
Jaquéto, s. f. Corps de jupe; habillement court de
16 JAS
femme ou d'enfant, sorte de spencer qui lient à la jupe
sans Ôtre de la même étoffe.
Ce mot, qui a été francisé pour désigner un vêtement
d'homme qui tient le milieu entre la veste et la redingo te,
est un dim. de jaque, nom passé de mode d’une sorte de
pourpoint et de cotte d'armes au moyen-âge. Le fr. Ja-
quette est donc fort de mise. Jaque élait une sorte d’an-
cienne casaque à l'usage des gens de guerre. Dans le mème
sens l'esp. dit Jaca et l’ilal. Giaco. En holl. Juk, casaque,
cape; en island. Jacka; en angl. Jacke; en allem. Jack-
chen, surtout, jaquette.
Jardi, s. m. Dim. Jardiné; augm. Jardinas. Jardin,
lieu clos où l'on cultive des fleurs, des légumes, des arbres.
En gallois Gard; en allem. Garden, m. sign.
Jardignè, s. m. Jardinier; maraicher. — Barbo dé jar-
dignè, barbe clair-semée : l'origine ou l’allusion de ce
dicton n’est pas assez propre pour pouvoir être expliquée.
Jardignèiïro, s. f. Jardinière, femme d’un jardinier ;
marchande d'hortolage.
Jardinaje, s. m. Hortolage; légumes et herbes de toute
espèce cultivés dans un jardin potager; plantes potagères.
Jardinéja, v. fréq. Jardiner; s'occuper aux travaux de
l'horticulture; arranger, travailler un jardin.
Jaré, s. m. Jarret: partie postérieure du genou; endroit
où se plie la jambe des animaux à quatre pieds; jarret de
cochon.
En bas-breton, Garr, jambe; Jaritel, jarret; en gallois,
Gar, jambe et jarret; en irlandais, Cara, jambe.
Jarétiè, ièiro, a2j. Cagneux, dont les genoux se tou-
chent ou chevauchent en marchant; jarreté, en parlant
d'un cheval dont les jarrets de derrière frottent et se
croisent.
Jarétièiro, s. f. avec la signification de jarretière, est
du pur franchiman : on dit Cambaïë. — V. c. m.
Jas, s. m. Gile: couche, endro% où on a demeuré et
couché; limon, bourbe, dépôt au fond d'un vase, d'un
tonneau. — Jas dé mouli, gile d’un moulin, la meule
gisante et immobile. Lou jas ddou fé, la fane inférieure du
foin qui ne monte pas et qui reste druéet touffue : celte
herbestoujours plus verte et plus tendre, donne beaucoup
“de volume et de qualité au foin. Lou jas d'un méloun, la
couche d'un melon, le côté sur lequel il repose et qui
mürit plus vite. Lou jas dâou vinaïgre, le sédiment qui
reste au fond d'un tonneau à vinaigre et qu'on y laisse
déposé. On trobo pas dos lèbres dou mèmo jas, on ne prend
pas deux lièvres au même gite : c'est un heureux hasard
qui ne se répète pas deux fois.
Dér, de Juïre, formé du lat. Jacere, ,
Jasén, énto, part. prés. du v. Jaïre. Qui est couché,
qui pose horizontalement. — Aoubre jasén, madrier hori-
zontal qui forme l’essieu, l'axe de la grande roue d’un
puits à roue.
Jasén, s. f. En provençal signifie : femme en couches,
nouvelle accouchée,
JAS
Jaséno, s. f., ou Coublé. Chevron; pièce de charpente
de couvert qui pose sur les pannes et supporte elle-même
la tuile sans autre intermédiaire. — Las jasénos doivent
avoir huit centimètres d'équarissage et 2m25 ou 4m12 de
longueur; dans le premier cas, elles portent sur trois pan-
nes et mesurent deux intervalles; dans le second, elles ne
portent que sur deux pannes et n'occupent qu'un inter-.
valle. Celles qu'on emploie pour l’échafaudage d'une ma-
gnanerie doivent avoir en longueur 2"25 et quelquefois
davantage, suivant la distance des montants : elles posent
sur les chevilles ou les mortaises du montant et supportent
les tables. -
Dér. de Jasén.
Jasiôou, jasiolo, s. et adj. Dim. Jasioulé; péj. Jasiou-
las. Juif, Israélite; qui professe le judaïsme. Au fig. usu-
rier; qui prête à usure; qui vend trop cher; àpre au gain.
— Les juifs avaient, au quatorzième siècle, des synagogues
dans les plus petites villes du Languedoc, et déjà même
pendant la première moitié du IXme siècle, leur nombre
était considérable; un de leurs rabbias les plus célèbres,
Benjamin, fit un long séjour à Lunel, où de nombreux
disciples suivaient son école et ses enseignements publics
de la médecine. Notre ancienne Charte d'Alais, en 4200,
contient des dispositions relatives au costume qui doit Jess
distinguer et à la condition sociale à laquelle ils étaient
soumis. Comme monument de notre ‘ancienne langue et
des mœurs de cette époque, il n'est pas sans intérèt ide
rapporter cet article des vieilles coutumes alaisiennes :
Derrecap establem que entre christians e iusieus, lascalz
sofrem per sol umanitat, en habite de vestir sion manifest,
e sia talz la deferentia quel iusieu leugieiramenz sion co-.
negut de celz quelz veiran; e mandam que porton habite
dessemblan a lhabite delz cristians. Oltra aizo-velam des-
treilament e mandam quel iuzieu per aleua maneira non
auson obrar alz ditmenges nien-las autras granz festas
nostras davan los oilz delz cristians que il o puescun veser;
mas lur portas clausas arescost obron aquo que lur les
obrar. Plus fort empena de lur cors velam que non auson
aparer en publege lo ioux nil mercres sainz nil venres nil
sapte denant la nostra pasca.
Jasses, s. m. plur. de Jas. Litière de vers-à-soie, com-
posée des débris de la feuille rongée et des crotins de ces
animaux. Ce mélange nécessairement humide entre facile-
ment en fermentation, à cause surtout de la chaleurdu
local ; il est donc prudent de la prévenir en délitant sou-
vent, c.-à-d. en enlevant cette litière, surtout au moment
où l'animal va entrer dans une de ses mues, et au moment
de la fraise : dans le premier cas, parce que dans le pa-
roxisme de sa mue, le ver se tient enfermé sous la litière
et qu'il périrait si cette litière entrait en fermentation;
dans le second cas, parce que, la feuille étant fournie plus
abondamment, Ja litière est plus épaisse et que les déjec-
tions des vers sont plus volumineuses.
On emploie cette litière, après l'avoir fait sécher pour.
… ini M.
_ JOB
la conserver, en la donnant bouillie aux pourceaux. On la
donne sèche aux vaches et aux moutons, souvent même à
l'espèce chevaline; mais c'est un tort grave, car les cas
morbides qui résultent de cette nourriture sont très-fré-
quents. Pour les porcs et les animaux ruminants au con-
traire, cet aliment n’a aucun danger, et ils en sont trés-
friands.
Jassino, s. f. Couche; couchette; empreinte qu'un
corps laisse sur la paille ou la litière où il a couché; ac-
couchement, action de mettre bas. — És dé michanto jas-
sino, c'est un mauvais coucheur; un camarade de lit in-
commode.
Jasso, s. f. Bergerie, étable à moutons, spécialement.
Jénto, s. f. Jante de roue, pièce de bois de charronnage
-courbée, qui fait partie du cercle de la roue d'un char,
d'une charrette.
* Jimèlo, s. f. Jumelle, la bigue ou plutôt les deux
bigues de bois qui servent de coulisse à ce qu'on nomme
mouton ou sonnette pour enfoncer les pilotis. Ces jumelles,
retenues par en baut au moyen d'un boulon, sont libres et
flottantes par le bas; le contre-maitre chargé de la direc-
tion des ouvrages, les tient dans ses deux mains par le
petit bout, et suivant qu'il les dévie légèrement, il dirige
la chute du mouton sur la tête du pieu.
Jita, v. Vomir, rejeter par la bouche ce qui est dans
l'estomac; pousser des jets, bourgeonner, en parlant des
arbres. — N'a pas toutes les acceptions du v. fr. jeter, mais
seulement le sens restreint et spécial ci-dessus : les autres
ressemblent fort à des licences franchimandos.
» Dér. du lat. Jactare.
«Jitou, s. m. Jeton, pièce de métal, d'os ou d'ivoire,
pour compter ou pour marquer au jeu. — Fdou coumo un
jitoù, faux, menteur, trompeur comme un jeton de jeu,
qui favorise souvent les tricheries.
Jo, s. m. Dim. Jouqué. Jeu, en général; la chose que
l'on joue, l'enjeu. — Tène jo, tenir l'enjeu. Faï toun jo,
mets ton“enjeu, fais ta mise. Flata jo, ne pas jouer à la
rigueur, ne pas surmonter la carte de son adversaire lors-
que la règle l'exige: en général, ce n'est pas tricher au
jeu, mais c'est employer certaines feintes ou ruses non
licites. Té fut bou jo, il te fait beau jeu, il joue largement
- etloyalement, de manière à te faire prendre ta revanche.
Més lou jo trop iuèn, il éloigne trop le but, le lieu où il
faut jouer.
+ Dér. du lat. Jocus, m. sign.
Jo, s. m. n. pr. d'homme. Au fém. Joto; dim. Jouté.
Job. |
» Jobi, s. m. Nigaud, benût; musard ; badaud.
Ce nom provient probablement de celui du saint homme
Job de l'Écriture, ce modèle devenu proverbial de la pa-
tience, dela résignation, de la mansüétude, surtout envers
sa femme; ce qui pouvait bien, aux yeux de nos pères, le
faire assimiler à un niais. La langue d'Oil et puis le fran-
çais aux XIVe et XVe siècles, avaient fait aussi sur le même
JOU 417
patron Jobet, Jobelin, Jobelot et Jobard, fort communs,
signifiant niais. Jobard seul a passé avec ce sens dans les
noms communs et correspond très-bien à notre Jobi; plu-
sieurs de ceux qui le portaient comme nom propre ont
oblenu de se faire débaptiser.
Joïo, s. f. Joie; contentement; satisfaction; réjouis-
sance. — Fiù dé joïo, feu de joie, qu'on allume en signe
de réjouissance.
Joïo! interj. Au revoir! Dieu vous maintienne en joie!
soubait que l’on forme en quittant quelqu'un.
Les étymologistes sont partagés sur sa racine : quelques-
uns indiquent le lat. Jocus, jeu, mot pour rire; Ménage
préfère Gaudium, gaudia, joie, qui nous a déjà fourni
Gâou.
Jor, s. m. Dim. Jourgué; augm. Jourgas. Houssine;
gaule; propr. scion de mürier, d'osier, etc., de la pousse de
l'année. — Ramassa lous jors, ramasser les scions d’éla-
gage de müriers pour en faire des fagots. Ces scions sont
quelquefois si longs et si gros que les enfants en font des
fouets. Pour cela ils les écorcent en long, en laissant seu-
lement un pied où un pied et demi du gros bout pour
servir de manche; les lanières écorcées et qui tiennent au
manche sont tressées à trois brins, et l’on oblient un fouet
très-long et très-gros, dans la forme de celui des muletiers.
Comme les fibres de cette écorce sont très-ductiles et ner-
veuses, ces sortes de fouet dureraient assez longtemps en
les faisant tremper chaque jour dans l'eau pour prévenir
leur dessiccation.
Jou, s. m. Joug, pièce de bois, garnie à chaque extré-
mité d’attelles ou de courroies propres à la fixer sur la tête
des bœufs ou animaux de trait. Au fig. servitude.
Dér. du lat. Jugum, m. sign.
Joubértino, s. f. Ciguë. — Voy. Jéouvértasso.
Jouga, v. Jouer; s'amuser, se divertir; s'occuper au
jeu; mettre au jeu; parier; faire une gageure, un pari;
jouer d'un instrument de musique. — Jogue qué pléoura
déman, je parie qu’il pleuvra deinain. Té jogue dous séous,
je joue deux sous contre toi, je parie deux sous. Nous jou-
guè un air, il joua ou exécuta un air.
Dér. du lat. Jocure, jouer, badiner.
Jougadoù, douno, adj., ou Jougaïre, aïro. Joueur de
profession; qui a la passion du jeu.
Ce mot est plus technique pour marquer l'habitude, la
passion du jeu, que celui de Jougaïre, qui n'indique sou-
vent que les membres d'une partie de jeu, sans entrainer
une idée de passion.
Jougaïo, s. f. Joujou, jouet d'enfant. — Voy. Cou-
maire.
Jougaire, aïro, adj. Péj. Jougaïras. Joueur. — Voy.
Jougadoù.
Le péj. Jougaïras implique toujours la passion du jeu.
Jougne, v. Accoupler des bœufs; atteler des chevaux
ou des mules, deux à deux, pour le labourage; atteindre;
unir; rapprocher. — Anan jougne, nous allons accoupler
418 JOU
les bœufs. Nous jougniquè én cam, il nous atteignit en route.
Dér. du lat. Jungere, joindre. s
Jougué, s. m., ou Sucé. Bimbelot; hochet d'enfant;
jouet d'argent ou d'or, orné de grelots, dans lequel est
emmanché un morceau de cristal, d'ivoire ou de corail,
qu'on suspend au cou des enfants à la mamelle et qu'ils
portent volontiers à la bouche en le serrant avec leurs
gencives, ce qui charme en partie la douleur de la den-
tition, facilite la salivation et ramollit la gencive.
Joui, v. Jouir; éprouver un sentiment général de
bouheur, de jouissance; se délecter; avoir l'usage, la pos-
session, l’usufruit. — On po pas jou d'aquél éfan, on ne |
peut être maitre de cet enfant, on ne peut le retenir à la
maison, l'empêcher de courir et de polissonner. Mé sou-
véndraï qué m'as fa joui, je me souviendrai du bonheur
que tu m'as donné. Jouis d'aquél oustäou, il a l'usufruit
de cette maison.
Dér. du lat. Gaudere ou Gaudire.
Jouiè, s. m. Au fém. Jouiiro. Gedlier; femme d’un
geôlier; concierge d’une prison.
Jouine, jouino, adj. Dim. Jouiné; augm. Jouinus.
Jeune, qui n’est pas avancé en âge; qui a de la jeunesse;
étourdi, évaporé. — Sé tournave jouïne, si je redevenais
jeune. Aqud's jouïnas, c'est un grand enfant. Ma pu jouino,
Ja plus jeune de mes filles.
Dér. du lat. Juvenis, m. sign.
Jouinèsso, s. f. Jeunesse, âge qui suit l'adolescence; la
gent juvénile; les jeunes gens d’une contrée, d’un village,
d’une ville. — Voy. Lou jouvén.
Jouin’home, s. m. Jeune homme; garçon; célibataire.
— À maï dé cranto ans, amaï és éncuro jouïin'home, il à
passé la quarantaine et il est encore garçon.
Jouïoùs, iouso, adj. Joyeux; gai; qui a ou donne de
la joie. — Maï lou jouïoùs, le mois de mai gai et riant.
Dér. de Joïo.
Jouissénço, s. f. Jouissance; usage et possession de….;
plaisir, délice de la passion. — À pas laïssa qué la jouis-
sénço à sa fénno, il n'a légué à sa femme que l’usufruit
de ses biens. Lou bonhur dé la jouïssénço, le bonheur de la
jouissance, pléonasme expressif, qu'une femme seule pou-
vait trouver, je ne saurais dire à quelle occasion ni dans
quelle des deux acceptions.
Dér. de Joui.
Joun, s. m. Jonc, Juncus, Linn., genre de plante qui a
fourni le type de la fam. des Joncées, qui comprend un
assez grand nombre d'espèces, croissant presque toules
dans les endroits marécageux.
Joun se dit encore de toute sorte de canne, bâton, ba-
guette, badine ou rotin.
Joun, jouncho, part. pass. du v. Jougne. Joint, accou-
plé pour le labour en parlant des bœufs; joint, rapproché
et les doigts entrelacés, en parlant des mains. — À mans
Jounchos, vous n'én prègue, mains jointes, je vous en prie.
Säowa d'à pè joun, sauter à pieds joints.
JOU
Jounchado, s. f. Jointée de grain ou d’autres objets
menus, ©.-à-d. autant qu'en peuvent contenir les deux
mains jointes, rapprochées et ouvertes.
Jouncha et jounchado, dans le sens de Joncher et Jon=.
chée, ne sont pas de notre dialecte.
Jounchis, isso, adj. Jointif; parfaitement joint, her-
métiquement fermé.
Dér. du lat. Junctus, de Jungere.
Jouncho, s. f. Temps de labour; durée d'une attelée;
séance de labourage sans dételer. Par ext. tout travail fait
de suite sans désemparer. — Les laboureurs font d'ordi-
naire deux attelées par jour.
Jounchuro, s. f. Jointure, articulation des membres;
point où deux os se touchent l'un l'autre au moyen de
ligaments. "
Jounquas, s. m. Terrain aqueux, marécageux et rempli
de joncs.
Dér. de Joun.
Jounquino, s. f. Mauvais pré qui ne produit guère que
des jones et des herbes de marécage; les joncs pris en
général et en masse pour servir de litière.
Joupi! interj. Cri ou commandement des muletiers pour
faire rentrer dans les rangs le mulet qui se dévie.
Jouqua, v. Jucher, percher sur le juchoir ou sur une
branche, comme font les oiseaux pour dormir.
Dér. probablement du lat. Jacere, par de changement
de Jac en Jouc.
Jouqué, s. m., ou Chouqué. Hoquet, mouvement con-
vulsif du diaphragme.
L'élément germanique paraît dominer dans la formation
de ce mot, reproduit en lang.eten fr. En islandais, Hiæta,
avoir le hoquet; anc. allem. Hixen, m. sign.; en hollan-
dais et en danois, Hikken, avoir le hoquet; en anglais,
Hiccough, en allem. Huckup, hoquet. — Voy. Chouqué.
Jour, s m. Dim. Journé. Jour; clarté, lumière; espace
de vingt-quatre ou de douze heures; époque indéterminée
du passé ou de l'avenir; baie, fenêtre, ouverture par où la
clarté passe; vide entre deux choses mal unies; facilité,
moyen de pénétrer. — Se prend à peu près dans toutes les
acceptions du français. — Jour fal, au déclin du jour.
Faï jour, le jour se lève. Un jour et l'âoutre nou, de deux
jours l’un. Qudouque jour, bélèou y véndras, peut-être un
jour, tu y parviendras. Jour créïssén, fré cousén, à mesure:
que les jours commencent à croitre, en décembre «et, jan-
vier, le froid augmente de rigueur. Mous magnas vènou
as hiuè jours, mes vers-à-soie arrivent à la mue au hui-
tième jour. Mé tapo mous jours, il ferme mes jours de
souffrance ou d'aspect, il m'oblige à les supprimer. Faïre
soun bon jour, recevoir la sainte communion. Dé ma vido
et dé mous jours! excl. de surprise : de ma vie ou jamais}
Dér. du lat. Diurnus.
Jourga, ». Donner des coups de houssine; sangler un
coup de gaule.
Dér. de Jor.
= Dec à 7 de" ”
A
JUE
Jourguièïro, s. f. Taillis de châtaigniers sauvageons,
qu'on aménage par coupes réglées tous les cinq ans, pour
faire avec les jeunes rejetons des cercles de futaille, des
élaies à sécher les châtaignes et toute sorte d'ustensiles
tressés d'éclisses.
Jouriflado, s. /. OEillet. — Voy. Girouflado.
Journado, s. f. Dim. Journadéto. Journée ; espace d’un
jour employé au travail des champs; travail ou chemin
qui se fait dans un jour; temps depuis le lever jusqu'au
coucher. Ana'n journado, aller travailler chez un pro-
priétaire à la journée. Saïqué és trop fort pér ana’n jour-
nado, sans NT ee se croit trop excellent ouvrier pour se
« dé la journée ordinaire, il ne veut tra-
/ rfait, à ses pièces. À pas qué sa journadelo,
le pauvre homme n'a que le prix de sa journée pour nourrir
sa famille; il n’a d'autre gagne-pain que ses bras. Vigno
dé dès journados, vigne de dix journaux de piochage.
N'avès pér bono journado, vous avez pour une bonne
journée de marche. Sèn à fi dé journado, nous arrivons à
la fin de la journée, au bout du travail.
- Journâou, s. "”. Journal de labour, quantité de terrain
qu'un seul homme peut labourer à la mare ou à la pioche
en un jour.
Journdou, journal, gazette périodique, quotidienne, est
une imporlation franchimando que les besoins nouveaux
ont fait admettre.
Jouve, s. f. Jeune fille. — Ma jouve, ma bonne amie,
celle que je fréquente en vue du mariage.
On dit aussi : la jouve dé moussu un » tdou, la maitresse
en titre de monsieur tel.
Dér. du lat. Juvenis, jeune.
Jouve, adj. des deux genres. Dim. Jouvéné; augm.
Jouvénas. Jeune, qui a de la jeunesse; jouvenceau, ado-
lescent; jeunét, presque enfant, pour le dim.; et à l'augm.
grand garçon qui fait encore l'enfant. — Voy. Jouïne.
Jouvén (lou), s. m. La gent juvéniie, la jeunesse d'un
endroit spécial, prise dans son ensemble.— Foy. Jowinèsso.
Dér. du lat. Juventus.
Juël, s. m. Ivraie, Lolium perenne, Linn., ivraie vivace,
ét Lolium temulentum, Linn., ivraie enivrante, plante de
la fam. des Graminées, qui vient dans les blés, et pro-
duit une petite graine noirâtre qui altère la qualité du
pain et peut même causer l'ivresse, dit-on. Toujours est-il
que cette opinion est fort ancienne et générale, puisque
c'est elle qui a valu à la plante son nom fr. Juraie, tra-
duction évidente du lat. Ebrius, où Ebrietas, ivre ou
ivresse. Une opinion encore très-répandue, quoique peu de
personnes en aient vu la justification, c’est que les ma-
quignons qui ont quelques bêtes rétives ou vicieuses, les
enivrent avec de l’ivraie avant de les exposer à la vente,
un jour de foire, afin dadissimuler leurs vices; car, pré-
tend-on, dans cette ivresse, elles deviennent douces comme
des agneaux. Mais on comprend difficilement cotnment ces
trafiquants peuvent se procurer une quantité suffisante
JUR ds
d'ivraie, ou qui la leur fournit, qui s'amuse à ce commerce
et à ce triage; et comment le maquignon, en achetant
celte ivraie, ce qui doit revenir souvent fort cher et tou-
jours suspect, ne craint pas les mauvais propos du public
et de la rivalité.
En allem. Lolch; en esclavon, Lyuuly, m. sign. Sau-
vages et autres citent Ye, celt. m. sign., comme la racine
première.
Jui, s. m. Au fém. Juivo; dim. Juité. Juif. — Voy.
Jasiôou.
Jui est du patois ; Jasibou, du languedocien.
Juiè, s. m. Juillet, septième mois de l’année actuelle,
composé de trente-un jours.
Dér. du lat. Julius, m. sign.
Juja, v. Juger, rendre la justice, prononcer un juge-
ment, une cofidamnation: apprécier; conjecturer. — Juyjas
un pdou, réfléchissez, voyez un peu. L'an juja dou capi-
tdou, on l'a condamné à mort, on a prononcé contre lui
la peine capitale.
Dér. du lat. Judicare, m. sign.
Jujamén, s. #1. Jugement, arrèt de justice. — Ne s'em-
ploie que fort mal et improprement dans le sens de faculté
d'appréciation, esprit judicieux.
Juje, s. m. Juge, magistrat préposé pôur rendre la jus-
tice; arbitre; celui qui juge de quelque chose.
Jun, s. m. Juin, sixième mois de l'année, de trente jours.
Dér. du lat. Junius, m. sign.
Jun (én), adv. À jeun, sans avoir mangé de la journée.
— Voy. Ën-jun.
Dér. du lat. Jejunus.
Juna, v. Jeüner, se priver d'aliments pendant un certain
temps: manger peu; observer les jeunes prescrits par
l'Église. Au fig. se priver de. s'abstenir forcément.
Dér. du lat. Jejunare, m. sign.
June, s. m. Jeüne, abstinence de viande ou d’un repas;
jour de jeûne; abstinence commandée ou volontaire d’ali-
ments ou de plaisirs.
Dér. du lat. Jejunium, m. sign.
Jura, v. Jurer; prèter serment; affirmer par serment;
prendre le nom de Dieu ou des choses saintes à lémoin,
comme le prohibe l'article 2 du Décalogue; proférer des
paroles obscènes; blasphémer. — Jura Diou, jurer par le
nom de Dieu.
On appelle encore un jura, un prêtre qui avait prêté
serment à la constitution civile du clergé par l’Assemblée
constituante : les orthodoxes refusaieut d'entendre leur
messe et de recevoir les sacrements administrés par eux.
Un jura est aussi un membre du jury institué près les
cours d'assises ou pour l'expropriation pour cause d'utilité
publique.
Dér. du lat. Jurare, m. sign.
Juraïre, aïro, adj. Péj. Juraïras. Qui a l'habitude des
| blasphèmes, des jurons, des mots obscènes.
Juramén, s. m. Jurement; serment prêté en justice. —
420
N'est pas bon lang., qui préfère dans la seconde acception
Séramén, et qui sait se passer d'employer le mot dans la
première.
Jus, s. m. Jus; suc: sauce; suc qu’on tire d'une chose
par expression, par ébullition ou par infusion.
Dér. du lat. Jus, m. sign.
Jusclos, s. . plur. Longes de joug, longues lanières de
cuir ou cgurroies au moyen desquelles on fixe le joug sur
la tête des bœnfs.
Dér. du lat. Jugalia, m. sign.
Jusquo, prép.. ou Énjusquo. Jusque, pour désigner le
terme, le but, la fin du temps; adv. marque l'excès, le
terme, le degré, le but.
Justamén, adv. Justement; précisément; c’est cela même.
Juste, s. m. Corsage de jupe qui ne tient pas avec elle
et juste à la taille et aux manches : ce qui lui a valu son nom.
KIL
KIR
Juste, justo, adj. Juste, équitable, qui est suivant la
justice; conforme au droit et à la raison; exact; trop
étroit. — Pris comme subst., un juste, un bienheureux,
celui qui a bien observé la loi divine. — Coumo dé juste,
comme de raison, comme il convient. Juste, y toumbas,
vous devinez juste. Mourè juste, mourir sinon insolvable,
du moins ne laisser aucune fortune. És l'houro justo, c'est
l'heure exacte. Aquélo vèslo és bé justo, cette veste est
bien étroite Juste coumo un mantèl, dicton ironique en
parlant d’un vêtement qui n'est pas précisément à pli de
corps, qui #st trop large.
Dér. du lat. Justus.
Juste, adv. Tout juste; justement; précisément.
Justiço ou Justicio, s. f. Justice, droit, raison, équité; .
la justice, ordre judiciaire; les gens de justice.
Dér. du lat. Justicia, m. sign. |
K
K, s. m. K, onzième lettre de l’alphabet, huitième con-
sonne ; s'appelle Ka.
Cette lettre serait rigoureusement à supprimer; mais il
convient de lui ouvrir un compte pour lui attribuer quel-
ques mots qu'on ne pourrait écrire autrement qu'avec elle
sans déconcerter l'œil, et qui, comme d'autres termes du
système décimal, ont bien aussi le droit de bourgeoisie,
depuis que la lieue de pays s'est raccourcie et qu'on ne
peut plus vendre à la livre sans être à l'amende. Il est
vrai que tous les membres de cette famille tant soit peu
barbare n’ont point été également accueillis : le stère et
ses composés ne sont point connus; l’hectomètre, le déca-
mètre, le centiare, le kilolitre, le décilitre, sont des divi-
sions inusitées, et toute la mince hiérarchie des grammes
jusqu'au déca est trop peu de chose pour qu'on s'en
occupe.
Kilô, s. m. Nom générique et qui signifie mille fois la
chose. — Ne s'emploie, ainsi qu'en fr., que comme abré-
viation nouvelle de kilogramo. — Lou miè-kilo, le demi-
kilo, représente notre livre ordinaire. Rabala soun kild,
locution nouvelle, devenue synonyme de Rabala soun
lagui, trainer le poids, le boulet de son chagrin.
Kilogramo, s. m. Kilogramme, mille grammes; moins
en usage que son abréviation Kio. — Les nouvelles me-
sures dont le rapport avec les anciennes était exact et
clair, furent assez aisément adoptées; mais il n'en fut pas
de même pour le kilogramme, dont le rapport avec l'ancien
poids ne se rend que par des fractions indéfinies, et est
par conséquent difficile à saisir. Aussi, jusqu'à ces der-
niers temps, les paysans avaient persisté à n'acheter et
vendre, surtout leur principale récolte, les cocons, qu'à la
livre, ancien poids du pays. Vint 41848; alors cette
livre de cocons ne valut plus que 75 ou 80 centimes.
C'était un crève-cœur de livrer à ce prix-là, la moitié à
peu près de ce qu'ils vendaient de coutume; ils cédèrent à
4 fr. 90 c. le kilo. C'était la mème chose, la bourse n'y
gagnait rien; mais, comme en rentrant chez eux ils sont
dans l'habitude d’énoncer le prix de leur vente sans
parler de l'unité de poids, qui va desuile, cette fois encore
ils purent dire un chiffre assez rond, et l'honneur fut sauf:
Depuis on n'a plus traité ces marchés, ainsi que tous les
antres, qu'au kilogramme; et c'est de celle époque que
date son adoption définitive. Du reste on a bien fait, car
les acheteurs patentés, qui étaient tenus de peser avecune
romaine étalonnée et par conséquent au nouveau système,
devaient ensuite traduire le rendement en petit poids, et
la traduction était rarement à l'avantage du vendeur: —
Foy. Liouro.
Kilomèstre, s. m. Kilomètre, mille mètres. — Ainsi
que nous l'avons dit, l'abréviation kid ne serait passici
de mise, car elle s'applique exclusivement au kilogramo
et n’exprime que ce mot.
Kirièleïson, s. m. Kyrie-eleison, partie de la messe où
l'on invoque la miséricorde de Dieu; commencement des
litanies.
Cette prière, chantée ou prononcée à haute voix et sou-
vent répétée, en a rendu la formule populaire : l'expres-
sion en est rendue comme le pouvait la langue.
Dér. du gr. Küpæ, seigneur, et "Ecioov, impér., ayez
pitié.
LA 4
L
L, 5. f. L, neuvième des consonnes et douzième lettre
de l'alphabet.
Cette consonneest classée parmi les Linguales à cause
de son : on produite par un mouvement particulier
de la langue; et on la qualifie aussi de Liquide, pour
exprimer la facilité avec laquelle elle se coule et s'allie au
milieu des autres consonnes.
Ælle se nomme et se prononce Énbo; et cette prononcia-
tion se reproduit dans presque tous les mots que le fr. ter-
mine en ale, alle, ile, ille (non mouillé), olle, oule ; soit que
notre dialecte les lui emprunte, soit qu'il les prenne comme
Jui à une source commune : ex. : binlo, panle, sanle, inlo,
Bazinlo, tranquinle, facinle, coronlo, monle, utinle. Serait-
ce par suite de cette propension, qui leur viendrait du
nom et de la nature de la lettre elle-même, que les méri-
dionaux mériteraient le reproche adressé à leur façon de
parler, par SauvaGEs, de prononcer les mots français où
se trouve cette articulation en y intercalant un NW, et de
dire vicieusement inlustre, inlumination, inlégitime, au
lieu de illustre, illumination, illégitime? I y a faute sans
doute au regard du langage d'outre-Loire; mais le Midi
se souvient peut-être que dans la moyenne latinité on
disait de même vir inluster pour vir illuster ; et le nom de
sa lettre, comme son usage et son articulation, ne seraient
alors qu'une tradition d'assez bonne origine, qui, pour ne
pouvoir être transposée d’un idiome à l’autre, serait loin
d'être condamnable dans le nôtre. C’est une différence de
plus à noter.
Il en est une autre que nos remarques sur la lettre Zont
pu faire pressentir, et qui touche à l'orthographe, cette
représentation de la prononciation. Le français emploie,
pour figurer certains sons, deux 4 précédés d’un à, et
appelle cette combinaison Z mouillée : notre dialecte
n’admet pas cet agencement de lettres ni les variations qui
tantôt les laissent simples et tantôt les redoublent. Pour
ui, dans les cas pareils, la labiale ne se fait pas sentir;
il n'avait donc pas à l’introduire ; mais la mouillure existe
et elle a dû ètre représentée par là tréma, qui produit le
même effet sans complications : ainsi nous écrivons famio,
fio, bataïio, émbrouïo, qui correspondent au fr. famille,
fille, bataille, il embrouille. Notre orthographe obéit par là
à deux règles également essentielles : écrire comme on |
prononce et ne pas redoubler des lettres qui ne sont pas
articulées.
Sur ce point, SauvaGes a fait quelques observations
qu'on nous saura gré certainement de recueillir : nous
nous sommes attaché, plusqu'il ne fait peut-être lui-même,
à sa leçon, qui est l'anatomie, comme il le dit, ou le dé-
veloppement de cette espèce de prononciation :
« On voit dans les plus anciens manuscrits langue-
dociens, une orthographe particulière dont on était con-
venu pour mouiller l’{, qui consistait à faire suivre cette
lettre d’une h, sans y joindre la voyelle &, quoiqu'on la fit
sonner dans la prononciation; c'est ainsi qu'on écrivait:
ulh, falha, nuvalhos, ovelha, malha nigra, et bien d'autres:
orthographe qui ne subsiste plus que dans les n. pr. tels
que Troulhas, Verdelhan, Ventalhac, Salhen, Péoulhac,
Grefulho, Lagulhon, etc., qu'on prononce Troulias,
Verdelian, Ventaliac, etc. Les gens sensés qui portent ces
noms, ont été d'autant plus jaloux de retenir cette ancienne
orthographe, que les altérations qu'ils s’y seraient per-
mises, pour se rapprocher du français, auraient pu donner
des atteintes à leurs propriétés, et devenir matière à
procès.
« Cette orthographe, au reste, pour mouiller V4, était
aussi peu naturelle que celle qui est usitée en français
pour certains mots, tels que fille, famille, etc., qu’il
serait plus simple et moins sujet à équivoque d'écrire
comme filie, familie : c.-à-d. en mettant un à après une
seule 4, et ne faisant qu'une diphthongue des deux der-
nières voyelles ie, afin qu'on ne prononçât pas, comme on
le ferait en français, famili-e, en séparant ces voyelles qui
devraient être jointes en une vraie diphthongue.
« Pour mouiller l'? en français, il faut nécessairement
prononcer comme nous, mais faiblement, nos diphthongues
aï, di, où, ouï et ui, et ainsi dans bouilli, par ex., il faut
prononcer notre diphthongue oui comme nous la pronon-
çons dans ouïre, bouïras. »
La, pron. relatif et article fém. sing. La; elle. — Le
masc. est Lou; au plur. Las. — La fénno, la femme. La
véguère, je la vis. Aïmo-la, aime-la.
Dér. du lat. Ia ou Ea.
La, s. m. Dim. ZLachoù. Lait, liqueur blanche des
mamelles; suc blanc de certaines plantes. — Agnèl dé la,
agneau de lait, qui n’a encore été nourri qu'en têtant sa
mère. — On disait autrefois Lach, et l'inflexion ch s'est
conservée dans ses composés.
Dér. du lat. Lac, lactis, m. sign.
La, adv. Assez, suffisamment; arrêtez-vous. — C'est
une locution que n'oublie jamais celui à qui l’on verse à
54.
422 LAG
boire. Mais son acception ne se borne pas là, et on l’em-
ploie ainsi interjectivement pour arrêter la continuation
d’un acte quelconque.
Laboù, s. m. Labour; labourage; œuvre de charrue ou
d’araire. — Aquélo tèro a agu dous laboùs, cette terre a
reçu deux œuvres de labourage.
Dér. du lat. Labor, travail, œuvre.
Lacha, vw. Lâcher; abandonner; laisser; lâcher pied;
faire le lâche; mettre les pouces; détendre; relàcherlesliens.
Dér. du lat. Lazare, m. sign.
Lachassouü, s. m., ou Lachéirou ou Lachéto. Laiteron,
lauron, laitue sauvage, Senchus oleraceus, Linn., plante
de la fam. des Chicoracées, cultivée et commune.
Son nom lui vient de ce qu'en la coupant elle répand
une liqueur qui a la consistance et la couleur du lait,
Lach, dit autrefois pour La.
Lache, lacho, adj. Péj. Lachas. Lâche; mauvais
ouvrier, sans force ou sans bonne volonté; mou, amolli ;
détendu; desserré. — Aquél courdil és tro lache, ce cordon
n’est pas assez serré.
Dér. du lat. Laæus, m. sign.
Lachèïro, s. f. Marchande de lait; laitière; qui donne
du lait. —Vaquo lachèïro, vache laitière. És bono lachèro,
elle a beaucoup de lait.
Lachéïroù, s. m. Laiteron. — Voy. Lachassoù.
Lachén, s. m. Porc, cochon de lait, jeune pourceau. —
Dans le principe, c'était cette dernière espèce que l’on
appelait spécialement Lachén ; aujourd’hui, par ext., on
donne ce nom aux porcs de tout âge.
Dér. de Zach, vieille dénomination de lait.
Lachéto, s. f. Laiteron. — Voy. Lachassoù.
Lachugo, s. /. Dim. Lachuguëto. Laïtue, Lactuca sativa,
Linn., plante de la fam. des Chicoracées, dont on cultive
plusieurs espèces et de nombreuses variétés : se mange en
salade.
Dér. du lat. Lactuca, venu de Lac, lait.
Ladre, ladro, adj. Ladre, lépreux; atteint de ladrerie;
au fig. avare, fesse-mathieu; insensible. — Un por ladre,
un cochon ladre. — Voy. sur cette maladie de la race
porcine, l’article Grano dé por.
Ladrije, s. . Ladrerie, maladie des porcs; au fig. ava-
rice sordide, cuistrerie; vilenie.
Lagagno, s. /. Ophtalmie, maladie des yeux; humeur
à peu près semblable à de la cire qui coule des yeux;
chassie.
En celtique Zaig; en bas-bret. Lagad, œil; et encore en
bas-bret. Lagen, bourbier.
Lagagnoüs, ouso, adj. Chassieux ; qui a mal aux yeux;
qui a les yeux larmoyants.
Lagaïno, s. f. Renoncule des champs, Ranunculus
arvensis, Linn., plante de la fam. des Renonculacées. —
On donne aussi ce nom au pissenlit.
Lagrémuso, s. f. Lézard gris des murailles. — Yoy.
Réngloro.
LAM
Lagui, s. m. Chagrin; inquiétude; souci rongeur,
incessant; ce que Horace appelle Atra cura.— Rabala un
lagui, trainer avec soi un chagrin qui monte en croupe et
galope avec nous. Aquélo éstofo duro à lagui, cette étoffe
est d’une telle durée qu'on s'ennuie à la porter.
Dér. du lat. Langor, langueur, tristesse, ennui.
Laguia, v. Causer de la peine; donner du chagrin;
tourmenter; inquiéter.
Sé laguia, se chagriner ; s'inquiéter.
Laguia, ado, part. pass. et adj. Chagrin; inquiet; tour-
menté de noires préoccupations ; triste.
Laï, laïdo, adj. Dim. Laïdé, Laïdoù; péjor. Laïdas;
péjor. rédup. Laïdassas. Laïd; difforme; déplaisant; hor-
rible, abominable; vilain gros laid. Au fig. laid; honteux;
sordide. NAT
Laïde, laïdo, adj. Laïd, au pr. et au fig.
Ces deux adjectifs sont absolument identiques et s'em-
ploient indifféremment; s’il peut y avoir une légère diffé-
rence dans l'usage, c’est que Laïde ne se place guère qu'à
la fin d’un membre de phrase. On dit : Zaï coumo lou péca,
laid comme le péché,{et non Zaïde. Cependant le second ne
serait pas une faute. Il y a là une nuance imperceptible.
Dér. du lat. Lœdere, blesser, gâter, endommager
Laïssa, v. Laisser; délaisser; quitter; abandonner;
céder; permettre. — Vos pas véni, laïsso l’én, tu ne veux
pas venir, demeure, tu peux t'en dispenser. Laïssén aqud-
ilaï, laissons cela, brisons là-dessus. ZLaïssas un pdou,
permettez un moment.
Dér. de la bass. lat. Laæare, m. sign.
Laïsso-m'ista, s. m. Indolence; mélancolie; douillet-
terie; l’état d’une petite maitresse’, à l'air dolent et
inquiet, qui a ses nerfs ou des vapeurs.
Ce substantif est une sorte de phrase faite, correspon-
dant en fr. à Laisse-moi ici ou laisse-moi tranquille. Le
mot Jsta est du vieux lang. pris des adv. lat. Zstac ou
Istic, ici ou par ici, ou plutôt du verbe Stare. L'ital. dit
de mème Lasciare star.
Laïsso-m'istous, ouso, adj. Indolent; maladif; qui a
l'humeur dolente.
Lalo, s. m. Dim. Lalouté; augm. Laloutas. Dada; nom
du cheval dans le langage des nourrices et des enfants qui
commencent à baragouiner. — Il est à remarquer que
presque tous les mots du lexique enfantin ne sont que des
doublements d’une même consonne, ce qui les rend plus
accessibles à l'oreille et à la langue de l'enfant, qui, de
lui-même, dans la composition de ces mots, n’emploie
guère qu'une consonne -à la fois: boubo, papa, mama,
tété, etc.
Lambourdo, s. f. Masse d’eau, roseau des étangs, Typha
palustris, Linn., plante de la fam. des Thyphacées, qui
habite dans tous les lieux marécageux.
Lambrusquo, s. f., ou Rimièiro. Lambrusque, vigne
sauvage, Vitis vinifera, Linn., plante de la fam. des Sar-
mentacées, qui produit des raisins à grains très-petits et un
LAN
vin un peu Apre, mais susceptible d'une certaine bonifica-
tion en vieillissant.
Dér. du lat. Lambrusca, m. sign.
Lamo, s. f. Lame, table de métal, mince, tranchante;
lame de couteau, d'épée, etc. — Fino lamo, au fig. homme
fin et rusé; grand diseur; enjoleur. Flaquo-lamo, indolent,
molasse, apathique; lâche au travail.
Dér. du lat. Zamina où Lamna, m. sign.
Lampa, ». Lamper; boire; siroter; soiffer.
Dér, du lat. Lambere, lécher.
Lampèse, s. f. Lamproie, sorte d'anguille de mer, Pe-
tromizon, Linn:, poisson de l’ordre des Trématropnés et de
la fam. des Cyelostomes. On en connait de plusieurs
espèces : la grande lamproiïe a jusqu’à un mètre de long
et habite principalement la mer; on en trouve dans la
Méditerranée, La plus petite, qui ne dépasse pas vingt-
cinq centimètres, se rencontre dans le Gardon.
Son nom scientifique lat. tiré du grec Tlérpos, pierre, et
Miw, je suce, Lambo petras, qui a formé le nom fr. et
par altération le lang., lui vient de ce que la lamproie
s'attache aux pierres avec la bouche comme ferait une
sangsue,
Lampourdo, s. f. Bardane, glouteron; hérisson, tête ou
fruit de la bardane; Arctium lappa, Linn., plante de la
fam. des composées Cynarocéphales. — Le hérisson qui
contient sa semence, est formé de petits dards qui s’accro-
chent au poil des animaux et aux cheveux, et s’y enche-
vêtrent en un instant de telle façon qu'on ne peut plus
les arracher qu'en coupant. SAUVAGES remarque que cette
faculté de s'accrocher au poil des animaux doit être une
prévision du Créateur pour porter au loin la semence de la
plante, comme toutes ces semences emplumées que le vent
transporte et multiplie.
C'est pour cela que la Lampourdo est encore connue vul-
gairement sous le nom de Tiro-pèou. On l'appelle aussi
Gafard et Arapo-man.—Voy. ©. m.
Dér. du gr. Aaéstv, prendre, ou selon Théis, du celt.
Liap, main.
Lana, ado, adj. Lainé, laineux, fourni en laine.
Lanaje, s. m. Toison; lainage; qualité de la toison des
moutons et des brebis; récolte de la laine.— Aqué! troupel
a un poulà lanaje, ce troupeau a une belle qualité de
Lancè, s.m. Lancis, terme d'architecture, pierre de taille
longue et étroite mise en parement au jambage d’une porte,
d’une fenêtre, reposant sur une autre plus large qui s’en-
fonce dans l'épaisseur et se nomme Crosso. — V, ©. m.
Lancéja, v. fréq. Donner ou éprouver des élancements
douloureux. — Moun dé mé lancéjo, j'éprouve au doigt
des élancements douloureux, comme dans l'inflammation
d'un apostume.
Dér. de Lanço, parce que cette douleur ressemble à celle
que causerait un coup de lance ou d’une lame quelconque
en pénétrant dans les chairs. 2
LAN 423
Lancéjado, s. /. Élancement douloureux qu'on éprouve
au foyer d’une inflammation ou apostume.
Lancéto, s. f. Lancette, instrument de chirurgie, com-
posé d'une lame à deux tranchants, montée sur une chasse
à plaques mobiles, servant à saigner les veines; en terme
de filature, va-et-vient d'un tour à filer la soie, qui est un
liteau ou une règle de bois mince, ayant un mouvement
direct de droite à gauche, et qui, portant une petite fiche
à anneau où passe le brin de soie, le distribue dans toute
la largeur de l’écheveau et l'empêche de s'appliquer deux
fois de suite au même endroit, ce qui ferait coller les
divers tours du brin l’un à l’autre et nuirait au dévidage.
— Voy. Maréla.
Lanciso, s. f. n. pr. de lieu commun à plusieurs loca-
lités. Lancise, — Signifie dans l'origine un rocher ou un
terrain taillés à pic.
Dér. du lat. Incisus, coupé, tranché.
Lancisolo, s. f. n. pr. de lieu et d'homme. Lancisole.
La désinence du mot en fait évidemment un diminutif
du précédent Lanciso. Appliqué à une localité, il désigne
une coupure, une anfractuosité moindre; à une personne,
c’est un habitant de l'endroit dénommé.
Landa, v. Ouvrir une porte à deux battants. — Dans
ce sens, il est identique à Alanda. — V. c. m.
Sé landa ou Sé landra, s'étendre au soleil à rien faire
comme les lazzaroni; prendre ses aises ; fainéanter. —Voy.
Alanda.
Landiè, s. m. Landier, gros chenet de cuisine en fer qui
supporte la broche.
En allem. Handeiren, en angl. Handiron, pied de fer,
de Andes, jambage. Landiè serait-il pris pour Jambier, ou
bien l’article se serait-il joint tout simplement au radical
Andes?
Landoro, s. m. Fainéant, batteur de pavé.
Landra (Sé), v. Fainéanter.— Voy. Sé landa.
Landrin, s. ». P6j. Landrinas. Grand flandrin; propre
à rien ; fainéant.
Les trois mots précédents, formés par le même généra-
teur, ont d'intimes rapports pour la signification et une
parenté évidente avec Flandrin et Gandar. — Voy. ©. m.
Landuro, s. f. Sorte de jeu de mot qui n’a d'autre
emploi que dans la phrase suivante : Aqud’s dé mdou dé
landuro, c’est un mal auquel il n’y a rien à faire que de
l'endurer. Il n’y a ici qu'une reproduction, avec une légère
variante, de la phrase faite déjà citée: Mdou d'énduro. —
Voy. Énduro.
Lanéja, v. Porter, produire de la laine.— Se dit des mou-
tons et brebis qui fournissent plus ou moins de laine. —
Lous bédigasses an pas gaïre lanéja aquést'an, les moutons
d’un an n'ont guère produit de laine cette année.
Dér. de Lano.
Lanfios, s. f. plur. Futilités; sornettes; simagrées;
mignardises affectées dans les manières et dans les paroles.
Langè, s. m. Danger, péril. — Se dit mieux que Danÿé
424 LAN
(Ve: m.).— Lanjè d'y laissa moun nas, au péril de mon
nez; danger de me casser le nez; je devrais m'y casser le
nez. Langè! crie-t-on au jeu de colin-maillard ou de cli-
gne-musette, quand celui qui a les yeux bandés s'approche
d’un obstacle ou d’un danger quelconque.
Corrupt: du fr. Danger.
Langéïroùs, ouso, adj. Dangereux, périlleux; qui
menace d’un danger; qui est en danger de mort. — És bé
langéiroùs qué l'atroubarés pas, il est bien à craindre que
vous ne le trouviez pas. Aquél maldoute és langéiroùs, ce
malade est en danger de mort. Crésès qué sièque lan-
géiroùs? vous croyez qu'il est dangereusement malade, en
danger de mort? —Voy. Danjéiroùs.
Langui, v. S'ennuyer; dépérir d’ennui, de tristesse;
éprouver le mal du pays. — Les habitants de la campagne,
les femmes. et les enfants surtout sont sujets plus que
d’autres à cet ennui, à ce dégoût nostalgique lorsqu'ils
changent de domicile et qu’ils ne rencontrent plus sous la
main tous leurs objets d'habitude et ne voient que des
sites, des horizons, des meubles nouveaux, des figures
nouvelles. Sé garda dé langui, se désennuyer, se parer
contre l'ennui, s'amuser, se distraire. Languisse dé vous
véire, il me tarde de vous voir. Mé faï langu? pér moun
argën, il me fait attendre mon paiement. Mé languisse, je
m'ennuie à périr : je ne sais que devenir.
Dér. du lat. Languere, m. sign.
Languidouïro, s. f. Séjour triste et ennuyeux; mo-
ments d’ennui et de découragement. — Y-aï fa dé bravos
languidouïros, j'y ai éprouvé de longues heures d’ennui:
Languimén, s. m. Ennui, abattement; tristesse, C’est
une variante de Zanguitudo.
Languino, s. /. Mélancolie; tristesse; découragement.
Languissable, ablo, adj. Ennuyeux, qui porte à l’en-
nui, aux regrets, en parlant d’un séjour, d’une localité, —
Lou pêis és pas languissable, le pays n’est pas désagréable ;
on ne doit pas s’y ennuyer.
Languitudo, s. f. Ennui; langueur causée par la maladie
du pays. — La languitudo m'arapo, la tristesse me saisit,
la nostalgie me gagne.
Lanla, adv. Coussi-coussi; ni trop ni trop peu; parci
par-là; là là; tout doucement.
Lanlèro, terme enfantin, sans signification précise, quand
ilse joint à Hupo! interj. (V. c. m.), mais qui semble
avoir plus de portée dans la bouche des grandes personnes
et dans cette phrase : L'aï manda fa lanlèro, je l'ai envoyé
paitre. Il dissimule alors un mot plus énergique; qui n'est
pas de bon goût.
Lano, s. f. Laine, toison des brebis; des moutons, des
agneaux. — Lano surjo, laine surge, crue, laine en suin.
Débas dé lano, bas de laine.
Dér. du lat. Lana, m. sign.
Lansoman, s. m. Grand escogriffe; homme de haute
taille; mal charpenté. — C’est un sobriquet que: nous
LAN
donnons volontiers aux Allemands et que nous avons
emprunté à leur langue, Landsman, homme du pays.
Lantérgnè , s. m. Ferblantier, et plus spécialement
fabricant où marchand de lanternes, qui parcourt lés rues
et les chemins en colportant toutes sortes d’ustensiles de
fer-blanc et de fil d’archal.
Lantèrnéja, v. Lanterner, muser; lambiner; faire atten-
dre; retarder; différer; s'occuper de bagatelles lorsque des
affaires plus importantes vous appellent.
Lantèrno, s. f. Lanterne, boite transparente pour en-
fermer une lumière.
Dér. du lat. Laterna, de Latere, cacher, qui cache le
feu.
Lanu, lanudo, adj. Laïneux, couvert de laine; qui a
beaucoup de laine. — Lou béstidou lanu, les bêtes à laine,
en général.
Lanuéjôou, s. m. n. pr. de lieu. Lanusiols; commune
de Trève, arrondissement du Vigan (Gard). — Il ne saurait
y avoir aucun doute sur la signification diminutive que la
désinence en dou pour ol, ols, imprime au radical : il
s'agit certainement d’un objet, d'un lieu, représenté en
petite quantité, de petite dimension, de moindre abon-
dance. Mais le radical lui-même, quel est-il? L'appellation
au moyen-àge peut fournir des éclaircissements. M. Ger-
mer-Durand donne les dates des anciens titres où cette
localité est mentionnée: elle avait nom, en 4450, Faissæ
de Lanejol; de Lanoyol, en 1163; de Noculis, en 4467, de
Lanogo, en 1474; la forme Lanueÿolz, Lanuejol et Lanie-
jol se trouve dans le roman de 4229 à 4257; puis le latin
reprend Villa de Nuogolis, en 1314, de Nuyolo en 1321,
de Nugulo en 1332; la dénomination revient à Lanuejolis
en 438%, pour redonner de Nujulo en 4446, et dire La
Nueiols en 4582; qui ont produit en tout un mot la forme
actuelle. On aurait pu croire d’abord que la laine, Zana,
pouvait entrer dans la composition du nom; mais le dimi-
nutif se prète peu à cette combinaison pour s’allier avec ce
sens de laine.
On remarque d’ailleurs dans le latin l'affectation de
s’écarter de cette signification de Lana, en écrivant le mot
sans la première syllabe caractéristique; par où on est
amené à une autre racine, qui est suffisamment indiquée
et ne peut être que Nuces, les noix, les noyers; ce qui
voudrait dire, pour faire raison au diminutif, un petit
lieu planté de quelques noyers, où se trouvait peut-être un
seul noyer, ou bien un lieu dans lequel les noïx étaient
plus petites. IL suivrait de là que l’article La serait venu
faire corps avec le mot lui-même, ce qui n'est pas rare
dans la formation des noms.
Quant aux analogies, il y aurait identité parfaite avec
une dénomination d’une ville d’Espagne, Llanuejelo, et
l'on arriverait aux représentations du lat. Nucetum et de!
la bass. lat. Nugaretum, Nogaredum, champ de noyers,
passés dans le lang. avec Nougaré, Nougarédo, ete.
Cependant un autre radical pourrait peut-être encore
ee IT
préméditation, i
LAO
ètre proposé, dont la consonnance au moins se rapproche ;
et’ sa signification où sa raison appellative ne manquerait
pas de justesse d'application. En gaulois, Now signifie
Prairie, comme Noue en roman : un grand nombre de
noms de lieux, ayant des rapports avec le nôtre, tirent de
là leur origine : Noailles, Noaillac, Noyelle, Neuilles, ete
Notre première interprétation nous parait préférable.
Lôoujd, jèiro, adj. Léger, au physique et au moral;
plus particulièrement au moral, étourdi, qui ne sait s'oc-
cuper de rieñ de sérieux; inconséquente, en parlant d'une
fille.
Dér: sans doute du lat. Levis; m. sign., mais non sans
avoir subi des altérations.
Lâoujèiramén, adv. Légèrement, avec légèreté, sans
inconsidérément.
Lâoujèirije, s. /. Légèreté; inconséquence ; marque
d’aplomb, de bon sens.
Lôoura, v. Labourer à la charrue ou à l’araire, et non
à là mare où à la bèche. — Ldourou pas dé col, ils ne
vivent pas en bonne intelligence; ils sont mal d'accord;
ils sont comme deux bêtes de labour qui ne peuvent pas
s'accoupler.
Dér. du lat. Laborare, travailler.
Lâourado, s. f. Égratignure longitudinale, comme celle
que fait uné ronce sur la peau humaine; estafilade à la
peau.
Läouraïre, s. m. Laboureur, c.-à-d. celui qui Jaboure
lui-même ; valet de charrue, dans le sens de son savoir-
fairéret de son adresse. — N'a rien de commun avec le
laboureur en fr., qui est un chef de ferme, exploitant en
grand.
Léouraje, s: mi. Labourage; manière dont une terre est
labourée ; quantité de terrain labourable dans un domaine.
— Ÿ-a pas gran ldouraje, il n’y a pas une grande étendue
dé térrain susceptible d’être labourée.
Lâäouréja, v. fréq. Labourer légérement; effleurer la
terre.
Lâouriè, s. m. Dim. Zdourièiré. Laurier, laurier franc,
laurier commun, Laurus nobilis, Linn., arbre de la fam.
des Lauriacées, naturalisé depuis longtemps dans le Midi
avec ses nombreuses variétés.
Le laurier est en grande aflection ou vénération parmi
la population rurale, soit comme fournissant un assaisonne-
miénit et servant d'épices à presque tous les ragoüts, soit parce
qu’il lui offre des palmes pour le dimanche des Rameaux,
qui en fait un laurier bénit, conservé au chevet du lit. —
Émpourta lou ldouriè, oblenir la palmé. Émpourtara pas
lou lâourid d'aquélo afaïre, il n'aura pas le dessus dans ce
procès. Planta lou léouriè, couronner d’un laurier où d’une
branche enguirlandée, Je faite d’un e construction qui vient
d’être achevée : petite fète ou cérémonie que l'on arrose en
payant aux ouvriers une étrenne.
Dér. du lat. Laurüs, mi, sign
Lâouriolo, s. /. Lauréole, garou, Daphne thymalæa,
LAP 425
Linn., plante de la fam. des Thymelées. — Le laurier-
thym des jardins est de la même famille; peut-être le
garou, £douriolo, n'a-t-il d'autre différence avec lui que
d’être sauvageon et agreste.
Lâouriôou (Figo-). — Voy. Figo-Léouriéou.
Lâousas, s. #. Augm. de Ldouso. Grande pierre plate;
grand pertennement de schiste à la superficie d’un terrain,
qui s’exfolie ou se lève par couches.
Lâouséro ou Aouséro, s. f., n. p. de lieu. Lozère ;
montagnes, pays de la Lozère, au nord d'Alais. — Voy.
Aouséro.
Cette variante du nom nous parait en être la forme pri-
mitive dérivée de Zdouso. On dit très-bien sus Ldouséro,
sur les montagnes de la Lozère ; dévèr Lédouséro, vers la
Lozère, sans l’article et en un seul mot, comme £Ldouso;
mais le nom était connu des anciens. Strabon, César, Pline,
citent les Lesuræ montes ; c'est de là que Rome tirait les
fromages tant appréciés des gourmands /Voy. Froumaÿe).
Des dénominations encore existantes en divers lieux attes-
tent le passage des légions à la suite du grand vainqueur
des Gaules. Le mot ZLeswra était donc répandu, et son
rapprochement de celui de Lozère prouve qu'il s'est con-
servé; mais les Romains n'avaient pas inventé l’appellation
géographique; ils n'avaient pu la prendre que dans la
langue nationale et ils l’avaient latinisée. Il devrait done
se trouver dans le celtique un mot ressemblant de forme
ét de consonnance appliqué à ces hautes montagnes, adopté
dans le pays, que les conquérants firent passer dans leur
langue. Ce mot était-il le gaulois £awr, pavé, répondant
à Ldouso, dalle, actuel? C’est possible; mais le latin
aurait quelque peu défiguré peut-être la prononciation en
remplaçant l’a par un e, et le lang. l’aurait ramené au son
primitif et à sa signification ancienne. A la vérité, on
trouve dans le grec AGos ou Xésoç, pierre, rocher, qui
pourrait avoir donné Zdouso êt Ldouséro.
Lâouséro ou Aousérd, s. m. et adj. Au fémm. Zdouséroto;
Lozerot, Lozérien, habitant des montagnes, du pays de la
Lozère. — Voy. Aousérô.
Lâouséto, s. f. Alouette des champs, Alanda arvensis,
Linn. — Voy. Alouèto, dont le nom ZLéousélo n’est qu'une
corrupt.
Lâousisso, s. f. Amas, dépôt, tas de /dousos.
Lâouso, s. f. Dim. Ldouséto; augm. Ldousas. Pierre
plate et mince, relativement à sa surface. — Dans les
hautes Cévennes, on en couvre les maisons comme avec
l'ardoise; mais l'épaisseur est beaucoup plus considérable,
ce qui surcharge excessivement les couverts et exige l’em-
ploi d'un: bois très-fort pour la charpente. Ces sortes d’ar-
doisés, qu'on devrait appeler plutôt dalles, sont en général
en mica-schiste.
Les étymologistes font dériver ce mot du celt. Lawr,
pavé, ou de la bass. lat. Lastrum; mieux encore peut-être
du gr. Años où Xéoûs, pierre, rocher, contr. dé Xëaé, m.sign.
Lapas, s. m. Augm. de Lapo. Large bourbier; large
426
dépôt de limon au bord d’une rivière, où, après une forte
pluie ou une inondation, gens et bêtes s'enfonceraient quel-
quefois jusqu'à moitié du corps, et cela d'autant plus aisé-
ment qu’il se forme à la surface une croûte sablonneuse
qui a une certaine apparence de solidité,
Lapignèiro, s. f. Clapier, enclos couvert ou découvert
où l'on nourrit et l’on fait multiplier des lapins.
Lapin, s. m. Dim. Lapiné, Lapin; augm. Lapinas.
Lapin, sauvage ou domestique, Lepus cuniculus, Linn.,
mammifère unguiculé de la fam. des Rongeurs. — Il con-
vient de dire en passant que ce qu'on appelle communé-
ment ici un lapin de garenne n’est autre chose qu'un lapin
de clapier, réduit étroit et infect où le pauvre animal est
condamné au chou à perpétuité. En empruntant le mot au
fr. le languedocien en a tout à fait modifié le sens, et c’est
aux dimensions du clapier qu’il a réduit la garenne, vaste
enclos, bois menu fermé de murs, où le lapin, prisonnier
sans s’en douter, a toutes les facultés, la nourriture, les
habitudes et ce qui vaut mieux encore, le goût du lapin
sauvage.
On dit: un lapin, un bon lapin, pour un fameux luron,
un bon compagnon, hardi, solide. — Uno lapino, lapine,
une femme féconde, qui fait beaucoup d'enfants. Lou co
déou lapin, le coup du lapin, coup sur la nuque qui abat
son homme, dans le genre de celui qu’on applique aux lapins.
Lapina, v. Mettre bas, en parlant des lapins.
Lapinado, s. f. Portée d’un lapin femelle; quantité de
petits qu’elle met bas dans une portée.
Lapino, s. f. Dim. Lapinéto; augm. Lapinasso. Femelle
du lapin, lapine. Au fig. femme très-féconde.
Lapo, s. f. Boue provenue d’une alluvion, du déborde-
ment des eaux d’une rivière, d’un torrent, composée de
menu sable et de limon, ce qui la distingue de la Fango,
qui est produite par toute sorte de matières triturées et
délayées, comme celle des rues et des routes.
Laqua (Sé), ». Se vautrer dans la boue liquide, à la
façon des pourceaux; barboter, se crotter dans la fange.
Lar, s. m. Dim. Lardé; augm. Lardas. Lard, graisse
ferme du porc, entre la chair et la peau; en général, graisse,
partie adipeuse de la chair, appliqué à l’homme comme
au cochon. — Sé laïsso pas manja soun lar, il] sait tirer
son épingle du jeu. Ésténdre soun lar, s'étendre, se coucher
pour fainéanter ou pour dormir. Faïre dé lar, s'engraisser
à ne rien faire.
Dér. du lat. Lardum, m. sign.
. Lar, adv. du v. lang. Largement; libéralement. — N'est
guère usité que dans ce vieux dicton, toujours employé
tant il est juste : Lou bon Diou pago tar, mais pago lar,
la justice de Dieu se fait quelquefois attendre, mais alors
elle est sévère.
Larda, v. Larder; mettre des lardons; piquer de lar-
dons; habiller une volaille, en terme de cuisine. Au fig.
percer de coups; piquer ; embrocher, traverser comme avec
une lardoire.
LAR
LAS
Larda, s. m., ou Gamé. Espèce de raisin. — Voy. Gamé.
Lardièiréto, s. f., ou Lardièiro. Mésange. — Voy. Lar-
guiètréto.
Lardoù, s. m. Lardon; morceau, aiguillette de lard. Au
fig. mot piquant, brocard.
Lardouiïro, s. f: Lardoire, instrument pour barder et
piquer la viande,
Largan, anto, adj. Généreux, libéral; qui rend large-
ment un service.
Dér. du lat. Largus, m. sign. En ital. Largo.
Larguiè, s. m. n. pr. d'homme. Au fém. Larguièiro;
dim. Larguièiré. Larguier. — Est, d’après SAUVAGES, une
corrupt. de Larquiè, par la liaison de l’article, mot du
v. lang. signifiant archer, dér. du lat. Arcarius.
Larguièiréto, s. f., ou Sénsérigaïo. Mésange bleue,
Parus cœruleus, Linn., oiseau de l’ordre des Passereaux
et de la fam. des Subulirostres : tête noire et blanche avec
calotte azurée ; le dessus du corps cendré olivâtre, le des-
sous d'un beau jaune; gorge et ailes blanches. — Le lan-
guedocien à voulu par des diminutifs exprimer la petitesse
de ce joli oiseau qui n’est guère plus grand que le roitelet;
du catalogue de ses noms on peut enlever Lardiëïro où
Larguièiro, pour le donner à la grosse mésange qu'on
appelle aussi Séraïè. — Voy. c. m.
Larje, larjo, adj. Large; ample; qui n’est pas étroit.
Au fig. libéral, généreux. — À 74 mancho larjo, il est
facile, tolérant, bon, complaisant; il a la manche large.
Dér. du lat. Largus, m. sign.
Larjoù, s. f. Largeur, dimension d’un côté à l’autre
d’une chose.
Larméja, v. fréq. Pleurnicher; larmoyer; pleurer sans
grosses ni bien vraies larmes. Au fig. suinter, laisser
tomber des gouttes d'humidité.
Dér. du;lat. Lacrymare.
Larmo, s. f. Larme, pleurs; goutte d'eau qui sort de
l'œil; goutte d’un liquide, d’une liqueur.
Dér. par contract. du lat. Lacryma. d
Las, art. fém. plur. de La. Les. ;
Las, s. m. Lac, lacet ou collet, piège pour prendre des
oiseaux, formé d’un fil ou d’un lacet.
Dér. du lat. Laqueus, m. sign.
Las, lasso, adj. Las, fatigué; accablé de fatigue, — Sa
bièn préne las lèbres lassos, il sait prendre les lièvres par
lassitude : on le dit d’un usurier qui tend ses filets aux
gens obérés, qui ne trouvent plus de crédit que dans
l'usure. És las dé bièn faïre, il s'ennuie de bien faire.
Dér. du lat. Lassus, m. sign.
Lassa, v. Lasser, fatiguer ; ennuyer, importuner à force
d’assiduités.
Sé lassa, se lasser, se fatiguer; prendre du dégoût pour
une chose, se dégoüter.
Dér. du lat. Lassare, m. sign.
Lassije, s. f. Lassitude, fatigue, état d’une personne
lasse ; dégoût; abattement.
TRS
VTT
ve afin
LÉ
Latas, s. m. Augm. de Lato. Grande et longue latte,
pièce de bois longue, mince, étroite et plate.
Lati, s. m., ou Latis. Latin, le latin, langue latine, parler
ou langage latin.
Latinisto, s. m. Écolier, collégien arrivé aux classes
de latin.
Lato, s. f. Dim. Latéto; augm. Latasso. Gaule, perche,
brin de bois de trois ou quatre mètres, dont on se sert soit
comme échalas, soit pour la vigne plantée en Cavaïoùs. —
V. c. m.
Ce terme ne doit pas être confondu avec le mot fr. Latte,
qui se dit Douèlo. — Y. ©. m.
En gallois, Lath, m. sign. Mais ne viendrait-il pas aussi
bien du part. pass. du v. lat. Fero, Latus, porté, qui
porte ?
* Lava, v: Laver, nettoyer avec de l'eau; purifier.— Lava
un goubélé, rincer un verre. Lava lou péissoù, la viando,
faire dégorger le poisson, la viande. Lava dé linge, laver
du linge; simplement Lava, sous-entend le plus souvent la
pensée de laver du linge. Lava sas mans, se laver les
mains.
Lava signifie encore : vendre à perte un objet que l'on
‘avait acheté pour le garder ; dissiper étourdiment son bien
en l’engageant, en le vendant. — A Java sa mostro, il a
mis sa montre à la lessive, c.-à-d. il l'a vendue et en a
mangé le prix. À tout lava, il a mangé tout son avoir.
Cette acception, qui n’est pas cependant récente, nous
parait une importation de l’argot français.
Dér. du lat. Lavare, m. sign.
Lavadoü, s. m. Lavoir public; endroit sur le bord d’une
rivière, non disposé particulièrement à cet usage, mais
commode pour laver le linge.
Lavagna, v. Flatter; caresser; amadouer; adoucir une
personne chagrine ou irritée.
Lavagnaïre, aïro, adj. Caressant ; flatteur, enjoleur.
Lavaïro, s. /. Laveuse; blanchisseuse.
Lavaje, s. m. Lavage; linge fraichement lavé et non
encore sec; breuvage trop étendu d’eau; vin trop trempé,
ressemblant à de la rinçure de bouteille; potage beaucoup
trop allongé.
Lavamén, s. m. Lavement; clystère, remède.
Lavarido, s. 7. Boue occasionnée par le dégel.
Lavassi, s. m. Pluie torrentielle, qui lave tout à grande
eau. Par restriction, et plus expressif que Lavaÿe, vin,
bouillon, tisane, sauce, où l'on a mis trop d'eau.— Lavassi
dé plous, torrent de pleurs, déluge de larmes. ;
Lavo-pè, s. m. Grand vase de terre où de métal servant
"à se laver les pieds.
Lé, s. m. Cochonnet, but; terme de jeu de boules ou de
palets; boule plus petite que les autres {qui sert de but ;
petit palet.qui fait le même office. — Avédre ou tène lou
lé, tenir le haut du pavé, le dé dans la conversation; être
le premier personnage d’une réunion. Cela vient de ce que
au eu de boules, celui qui tient le but ou cochonnet, le
LED 427
jette ainsi qu’il l'entend, près ou loin, et oblige les aûtres
joueurs à faire ce qu'il veut, à lui céder.
Lébrâou, s. m. Dim. Lébrdoudoù. Levreau, jeune lièvre;
petit du lièvre.
Lèbre, s. f. Dim. Lébréto; augm. Lébratas, 8: m. Lièvre,
Lepus, Linn., mammifére onguiculé de la fam. des Ron-
geurs, trop connu pour être plus amplement décrit. —
Tèsto dé lèbre, tète éventée et sans mémoire. Uno lébréto,
une jeune fille fort éveillée, égrillarde.
Dér. du lat. Lepus, leporis, m. sign.
Lébriè, s. m. Levrier, chien-levrier:; chien de chasse
pour les lièvres. — Afama coumo un lébriè, affamé comme
un chasseur.
Lédignan, s. m. n. pr. de lieu. Lédignan, chef-lieu de
canton dans l’arrondissement d'Alais.
Ce n’est pas tout à fait l'étymologie de ce nom qui
appelle particulièrement notre attention : elle est du reste
assez difficile et peu claire. Serait-elle prise du vieux mot
Lédo ou Zèoudo, en lat. Leudum, Leude, droit de hallage,
ou péage payé aux seigneurs pour un passage; ou viendrait-
elle d’un nom d'homme; ici désignant un propriétaire
appelé Zedus où Ledinus, où ZLedinius, possesseur d’un
domaine devenu plus tard un centre d'agglomération; là
signifiant peut-être le lieu où se percevait un droit de
leude, à la limite de deux héritages seigneuriaux? La
question est indifférente à la composition du mot, qui
indique par sa désinence un sens de provenance, d’appar-
tenance ou d'attribution; et c’est cette finale surtout qui
nous fait insister.
Sur la première partie du mot, si les conjectures sont
permises, si même l'incertitude domine à propos de sa
véritable racine significative, sur sa terminaison il ne
saurait y avoir doute. Disons-le donc tout de suite, ce qui
dans ce nom mérite d'être remarqué, c'est sa forme d'abord
qui, bien que témoignant d'une provenance purement
latine, garde cependant, par le gn mouillé, une saveur
très-franche du vieux crà celtique; puis ce sont les ana-
logies que sa désinence fait naître avec les suffixes déjà
étudiés, et qui doivent la faire classer par droit de parenté
dans cette grande famille issue des primitifs Ac — Ee,
s’alliant avec le latin qui s'impose, déclinant et se contrac-
tant avec la moyenne latinité, et par les variantes romanes
arrivant à la langue d'Oc, sans avoir trop perdu des
anciennes empreintes au point d'être entièrement mécon-
naissable.
Lédignan est mentionné pour la première fois, à notre
connaissance, dans une donation faite par deux frères,
seigneurs de Sauve et d’Anduze, en 4042, où il est écrit
de Laninhan; il se retrouve, en 4052, dans le testament
de l'un desdits seigneurs, avec la variante de Zedinhano;
du XIIe au XVe siècle, il reparait en ZLadinanum, de
Leodinhaco, de Ledinhano, et Ledinhanum, pour se fixer
en Ledignan, en 4435 et 1539, comme aujourd'hui, sans
autre changement important.
498 LÉD
On le voit, la terminaison latine en anus, anum, est la
plus persistante; mais elle n’a pas empêché le gaulois Ac
latinisé de se montrer sous la forme de Zeodinhaco. La
consonnance originelle d'ailleurs persévère à tous les âges
du mot, qu’elle s'exprime par le nk qui mouille la syllabe,
ou qu'elle prenne le gn, sa forme la plus ordinaire : les
deux modes d'orthographe et de prononciation étant éga-
Jement usités, comme on sait.
Le nouveau suffixe se dégage avec netteté: c'est une
variété caractéristique pour désigner la provenance, pour
donner au radical un sens de propriété, d'appartenance,
pour l’adjectiver, ou faire d’un nom d'homme le nom d’un
domaine qu'il possédait. C’est à cet emploi que servait
chez nos ancêtres leur suffixe Ac, dont un ressouvenir se
décèle ici, et ce que faisait aussi le suffixe latin anus,
anum, traduit par an, ane, et se métamorphosant ensuite
par l'intervention du génitif et de la syllabe Ni, en une
cadence nasalisée ou adoucie par la mouillure du g gaulois,
et passant, suivant certaines prédispositions ethniques, en
Agne, Egne, Igne, Igné, Igny, transformés en Ange, Inge,
et Anigue, Anègues, Aniche, Anche, Enche, avant d'at-
teindre dans les régions méridionales Argues, Ergues, Or-
gues, qui en définitive correspondent à toutes ces variantes
et dont la filiation est certaine. Zgnan appartient à la
même catégorie de suffixes. La conséquence forcée est
donc que cette terminaison imprime au radical qui la
porte la mème signification adjective qui est donnée par
ses congénères:
La vérité de cette déduction se démontre mieux par le
rapprochement de quelques noms à finale identique, et sur
lesquels la succession des variantes se laisse mieux aper-
cevoir. À part Zicinianus, lat., qui a donné Lézignan, dans
l'Aude, Zesignana et Lesignano, en Italie; Zucinianus,
Lusignan; Pompeianus, Pompignan, commune de Saint-
Hippolyte du Fort (Gard): Pompignas, de la commune de
Valleraugue; Pompeano et Pompejana, en Italie; on peut
citer encore comme reproduisant des combinaisons de finales
analogues à côté desquelles d’autres se sont greffées, du
lat. Albinianus où Albanacus, Aubignan et Albanhac =
Albignac — Albigny et Aubigny et Aubigné — Aubignar-
gues — Albignano (Italie) = Albinana (Espagne); Cavinia-
cum et Cavilhanicæ traduits par Cavignan, et Cavignac, et
Cauvignac, et Cavaniac, et Cavagnac, et Cavigny, et
Cauvigny, et Cavillargues; Marinianus, faisant Mari-
gnano en Jalie, et pour nous Marignan; comme Marti-
nianus et Martinacum étaient rendus par Martignan,
Martignas, Martignac, Martignat, Martigny, et Martignar-
gues, et Martinenche, etc., suivant la situation au midi,
au nord, à l'est ou au centre; puis, et toujours dans de
semblables conditions, Mayrinanum où Mayrinacum, lat.,
dans la basse lat. Mayrinanicæ, qui produisent Mérignan
et Mérignargues (Gard), — Mérignac (Charente, Gironde),
Merignas (Gironde), Merignat (Creuse), Meyrignac, Mey-
rinhac (Corrèze, Lot) ; — Meyrannes et Meyrargues (Gard),
LED
et se syncopent en Meyrac, Mayran et Maires, ete,; de
mème pour Sérignan et Sérignargues (Gard), du lat. Seri-
nacum, à côté de Sérignac (Gard); et le lat. Synanum,
rendu par Signan et Signargues (Gard), ailleurs par Signac,
Signes, etc.
En donnant ces exemples, qu’il serait facile de multiplier,
nous ne prétendons pas expliquer la raison qui a fait
accorder la préférence à telle forme plutôt qu'à telle autre
dans la composition de noms dont le radical est similaire
au fond et dont le suffixe doit représenter une idée et nn
sens identiques. Pour remplir le même office, le gaulois
avait son Ac — Ec le plus fréquent, qui s’employait.avec
peu de variantes; le latin diversifia davantage ses finales;
mais les langues romanes s’enrichirent de toutes les in-
flexions qui les avaient précédées et y ajoutèrent deilleur
fond propre, suivant leurs aptitudes et leurs propensions
que des conventions ou des règles faites d'avance ou im-
posées ne gênaient plus: ce fut le génie nouveau du lan-
gage qui se donnait carrière. J1 est peu probable qu’en
créant des dénominations on ait à aucune époque procédé
au hasard, surtout dans le principe où toute appellation
devait ètre significative; les allérations sont venues après,
et chaque groupe a entendu et prononcé à sa manière, ense
rapprochant assez du primitif reçu pour se reconnaître et
être compris. La diversité des climats, qui agit sur les
organes, a fait naître les différences de dialectes, et, comme
par zones, le langage s’est nuancé ou altéré dans des cir-
conscriptions à peu près fixes. Et l’on comprend combien
en pareille matière l'exception devait tenir de place, et
comme il était facile, par exemple, au moyen d’une syn-
cope qui favorisait la rapidité de la pensée, d'une inflexior
qui flattait davantage l'oreille ou se prêtait mieux à Ja
flexibilité de l'articulation, d'arriver à des variantes et de
les laisser s’impatroniser même à côté les unes des autres. |
De là ces ressemblances et aussi ces transformations dans
les noms. Le fond reste; la désinence tantôt s'allonge,
tantôt est abrégée; elle s’adoucit ou devient rude; elle est
sourde ou éclatante; elle obéit à des propensions inconnues,
inexplicables, mais le mot garde presque toujours l'em-
preinte de son origine. Et il est remarquable comme cer-
taines sympathies de sons el de formes se font jour et
affectent de se produire sous les mêmes latitudes. Comme
nous venons de le dire, c’est ce qui fait la particularité ou
l'étrangeté pour les gens du Nord de quelques-unes denos
terminaisons méridionales. I n’y a pas exclusion systé-
matique, puisque dans les appellations toutes les finales se
rencontrent et se cotoient; mais des préférences évidentes
apparaissent et répondent très-certainement à dés aptitudes
organiques toujours persistantes. Nous avons signalé
ailleurs ces sortes de;divergences de prononciation, quine
constituent point des déviations ou des altérations du sens.
C'est ce qui peut-être fait l'accent de la langue d'Oc et
de la langue d'Oïl; et aujourd’hui que cette distinction
s’efface de plus en plus, et que le français se généralise,
LÉG
tandis que le langnedocien persisle et se maintient, c’est
ce qui rendra toujours une fusion ou une assimilation
impossible entre les deux langues, car les noms propres de
lieux et d'hommes seront toujours là pour soutenir les
Quoi qu'il en soit de cette observation, elle devait
trouver place dans nos études des suffixes. Dans la re-
cherche des étymologies, leur classification, leurs évolutions,
tout leur rôle, sont d’une extrême importance : ils déter-
minent en quelque sorte le payset le dialeete d’où provient
an mot ou un.nom propre et auxquels il appartient. Si la
terminaison fgnan ne fournit point par elle-même tous les
degrés de sa descendance et ne trahit directement qu'une
source latine, ses analogues la ramènent au moins au
centre commun, et les rapprochements établissent son vrai
‘caractère. Il faut la rattacher aux autres et reconnaitre
J'emploi de procédés pareils pour affecter un radical. Zgnan
est le, signe adjectif destiné à lui communiquer une idée
de propriété, comme le font les finales en Agne, Igné,
Igny, Ac, Ange, Anche, Argues, Ergues et les autres.
Léga, s. . Legs, donation testamentaire.
égi, v. Lire; faire une lecture; parcourir des yeux un
écrit. — Lou légè li lèvo pas l'éscrioure, dicton très-sou-
vent employé comme allusion; savoir lire ne lui ôte pas le
savoir écrire, c'est ce qu'il dit; ce qu'il entend et veut dire,
c’est : la soif ne lui Ôte pas la faim; il à faim et soif à la
fois, et l’un ne nuit pas à l’autre tant il s'en acquitte bien.
Comme on le voit, le sens littéral ne suffit pas à expri-
mer toute la pensée; on ne peut y arriver que par une
inversion. Il ne s'agit guère en effet, dans cette petite
‘phrase, de grade à prendre, d'examen à passer, pour
constater qu'un jeune lauréat de l’école primaire mérite
un bon point de lecture et un prix d'écriture, deux cou-
ronnes qui prouveraient que pour savoir lire couramment,
il serait parvenu mème à apprendre à écrire. C’est bien à
“une tout autre mention honorable que s'applique notre
dicton, et notre traduction ne le trahit pas. Formule
d'admiration, de félicitation, elle n’a jamais été employée
‘à vanter des succès scolaires, quoi qu'elle en dise. C’est
“un de ces euphémismes, assez fréquents du reste, dont
notre langue use volontiers pour faire compliment à quel-
qu'un de ce qu'il fait également bien deux choses où la
decture et l'écriture ne sont pour rien. Voici, par exemple,
un joyeux compagnon à table, qui hoit sec et qui mange
à l'avenant : lou légè li lèvo pas l'éscrioure, bienfboire ne
l'empêche pas de mieux manger, au contraire; il est digne
de cet éloge.
Le mot n’est pas fait d'hier. Il est d’évidence que cette
locution remonte à une époque où savoir lire et écrire
“pouvait passer. pour une merveille de science, si bien qu’on
en fit un terme de comparaison pour exprimer un prodige
de capacité, pour caractériser une supériorité non intel-
‘lectuelle mais physique, non point un esprit cultivé, mais
“un brillant appétit servi par un bon estomac. Rien n'est
LEI 429
plus simple et à la fois plus délicat. Ce n’est pas aujour-
d'hui qu'on eût trouvé cette tournure; ce n'est pas notre
siècle, qui se moque du fort en thème, en mème temps
qu'il aspire à inventer l'instruction gratuite et obligatoire
et le progrès, qui songerait à s'étonner de la multitude. des
forts en lecture, voire en écriture anglaise, ronde, bâtarde
et courante, et en ferait une fine allusion. Mais en ce
temps-là, où l'on trouvait ce dicton, une instruction si
complète, au point de savoir lire et écrire, était prodige,
et la phrase.était juste : c'est pourquoi elle s’est conservée.
A la vérité, on assure que la poule au pot se prôtait au
rapprochement des deux idées; mais depuis. le niveau de
l'appétit n’a pas baissé, pas plus que celui des études et les
lumières, et cette espèce de proverbe familier a besoin de
commentaire pour en faire sentir toute la justesse. Aurons-
nous réussi? Nous le voudrions, et surtout, pour nos
lecteurs et nous, de quelque façon qu’on le prenne, que
de longtemps lou légi nous lève pas l'éscrioure!
Dér. du lat. Legere, m. sign.
Légno, s. f. Bois à brûler.
Ce mot n'est pas parfaitement indigène, mais haut-
cévenol et vivarais; il est très-bien employé dans notre
pays.
Dér. du lat, Lignum, m. sign.
Légo, s. f. Envie; convoitise; désir, — Faïre légo, faire
montre, faire parade de quelque chose, pour exciter l’envie,
pour faire venir l’eau à la bouche, sans permettre d'y tou-
cher: imposer ainsi le supplice de Tantale. Légo-légo! est
le terme dont on accompagne ironiquement ou mécham-
ment la montre de l’objet. Tout aqud mé faï pas légo,
toutes ces belles choses ne me sourient nullement, n'excitent
pas la plus petite convoitise, ne me tentent pas.
Étymologie au moins incertaine, sinon inconnue.
Lègo, s.f. Dim. Lèguélo ; augm, Lègasso. Lieue, mesure
de distance.—ÆEn Languedoc, la lieue usuelle, qui est encore
dans l'usage vulgaire, était de 5,837 mètres ou trois mille
toises. — Y-a pértout uno lègo dé michan cami, en toute
chose il y a un revers de médaille; en toute entreprise,
quelque heureuse qu'elle soit, on rencontre des embarras,
des difficultés. Y-a uno lèguéto, il y a une petite lieue, an
peu moins d’une lieue; ce qui veut dire le plus souvent
qu'on en a encore pour deux heures de marche. Uno
lègasso, une grosse lieue, de celles qu'on trouve intermi-
nables.
Dér. du lat. Leuca, m. sign.
Légumaje, s. m. Ensemble des légumes secs de diffé-
rentes espèces. — És un péès dé légumaÿje, c'est un pays
qui produit tonte espèce de légumes.
Légun, s. m. Légume sec, on plutôt celui qui vient en
gousses, en cosses, comme fèves, haricots, pois, etc.
Ce mot a moins d'extension qu’en fr. et ne s'applique
pas aux légumes verts et aux plantes potagères.
Dér. du lat. Legumen, mn. sign.
Lèi, s. j. Loi, règle établie par l'autorité divine on
55.
430 LÉN
humaine; foi religieuse, croyance, culte, dans sa compa-
raison ou sa rivalité avec un autre; règlement, disposition
législative ; droit, justice. — Sèn pas dé la mèmo lëï, nous
ne sommes pas de la même religion. Aquélo marchandiso
és pas dé lèï, cette marchandise n'est pas de recette, elle
n’est pas recevable en justice. Té véou apliqua la là, je
vais te faire le droit que tu mérites.
Dér. du lat. Leæ, legis, m. sign.
Lén, lénto, adj. Légèrement humide; qui commence à
moisir.—Se dit surtout des herbes fourragères qui ne sont
pas parfaitement sèches et qu'on pourrait tordre en corde.
Dér. du lat. Lentus, flexible, ramolli.
Lénçôou, s. ». Drap de lit; linceul. — C'est avec le
drap de lit que se font la plupart des transports de paille,
de fourrage, de feuilles et de mille autres récoltes, pour les
renfermer à la ferme; lorsqu'ils sont fort grands et de
grosse toile grise, on les nomme Bourén.—V. ©. m.
Dér. du lat. Linteolum, linge, drap de lit.
Lénçoula, s. »#. Plein un drap de lit, ce qu'il peut
contenir.
Lénçoulado, s. f. — Mème sign. que Lénçoula, mais
moins bon languedocien que lui.
Lénde, s. m. Lente, œuf de pou. — On les détruit,
comme les poux eux-mêmes, avec de la poudre de céva-
dille.— Voy. Grano dé capouchin.
Dér. du lat. Lens, lendis, m. sign.
Léngado, s. j. Coup de langue; médisance ; quolibet.
Plusieurs fois l’occasion s’est présentée de citer ce subst.
et le suivant comme exemples de prononciation. Il y a entre
eux identité de lettres : la mesure est tout à fait différente,
et l'accent suffit pour déplacer la tonique et changer la
quantité. Le premier, à terminaison féminine, est composé
de deux longues et une brève finale : la voix appuie et
s'arrête sur sa syllabe médiane ga. Le second a une brève
entre deux longues : la voix glisse sur sa médiane ga
pour tomber fortement sur l’à final, masculin, éclatant et
accentué. La mesure, la cadence ou l'accent font en défi-
nitive la signification et le sens: la prononciation donne
l'intelligence des mots, et l'orthographe ne saurait trop
s'attacher à la reproduire et à la figurer.
Léngadô, s. m. n. pr. Languedoc, province de l'an-
cienne division de la France. Elle formait le plus grand
gouvernement du royaume, après celui de Guyenne-Gas-
cogne; il était borné au nord par le Forez, à l'est par le
Rhône, au sud-est par la Méditerranée, au sud-ouest par le
Roussillon et le Comté de Foix qui leséparaient de l'Espagne,
à l'ouest par le Cominges, la Gascogne, le Quercy, le
Rouergue, et au nord-ouest par l'Auvergne. Il était divisé
en Bas-Languedoc, comprenant les diocèses d'Uzès, de
Nimes, d’Alais, de Montpellier; en Haut-Languedoc, formé
des diocèses de Toulouse, du Cominges languedocien, du
Lauraguais, du Sault, du Carcassez et du Rasez; en littoral
méditerranéen, où se trouvaient les diocèses d'Agde, de
Béziers et de Narbonne; et en provinces annexes, qui
LÉN
étaient, vers le nord, le Vivarais, le Velay et le Gevau-
dan, au sud-est le Quercy languedocien el l’Albigeois.
Cette circonscription comprend aujourd’hui les départe-
ments de l'Ardèche, de l'Aude, du Gard, de la Haute-
Garonne, de l'Hérault, de la Haute-Loire, de la Lozère et
du Tarn.
Le Languedoc correspond en grande partie à la Narbo-
naise première des Romains, habitée par les Volces Tecto-
sages et Arécomiques et quelques autres peuplades ou tribus
de race celtique. Il fut appelé Septimanie, puis Gothie,
lorsqu'il passa sous la domination des Visigoths. Ceux-ci,
dépossédés par les Franks de Clovis, gardaient encore quel-
ques lambeaux de territoire et leur passage vers le siége de
leur royaume d’Espagne, mais les Sarrasins les rempla-
cèrent et furent à leur tour expulsés par Charles-Martel et
Pépin-le-Bref. Charlemagne réunit la Septimanie au
royaume d'Aquitaine : elle en fut ensuite séparée pour former
Comté et Duché, s’annexant la Provence, étendant sa
puissance, sa domination par la force de ses armes et le
prestige des arts, de sa culture, de sa langue et de sa civi-
lisation sur tout le Midi et sur la France et l’Europe. La.
quasi-royauté des comtes de Saint-Gilles et de Toulouse,
à l’apogée de leur grandeur, touchait d’un côté aux Alpes
et de l’autre aux Pyrénées : c’est en son état le plus floris-
sant qu’elle fut réunie à la France au XIIIe siècle, en 4270,
sous Philippe-le-Hardi, et que, de ce moment, le paysentier
prit le nom de Languedoc.
On sait que le mot Langue s'employait autrefois dans
l'acception de pays : on disait la langue de France ou la
langue d'Oïl, et la langue d'Oc, l’idiome méridional, à
cause de la différence de prononciation. Le Languedoc, Lou
Léngadà, est donc le pays de la langue d'Oc; tout ce qui
est compris entre la Loire et les Pyrénées, qui ne parlait
pas la langue d'Oïl, l’ancienne province romaine, le vieux
territoire des Volces, Gaulois ou Celtes.
Lou Léngadd désigne le pays : pour son idiome, on dit:
la léngo d’O, dont nous allons avoir à parler. On entend
quelquefois employer le mot Languédd; ce n’est là que du
patois, c.-à-d. du français accommodé aux désinences du
languedocien. Notre mot Léngadù n'est guère lui-même
qu'une corruption, qui sent son latin du moyen-âge, mais
elle a pour elle la priorité, l’ancienneté d’origine; et c'est
ce qui nous la fait distinguer dans l'application. Quant à
la question d’idiome, voy. Léngo d'O, O et Oc particules.
Léngasto, s. f., ou Gourgouli. Hippobosque du mouton,
insecte.— Voy. Gourgouli.
Léngo, s. f. Dim. Lénguéto; péj. Léngasso. Langue,
partie charnue, musculeuse, mobile dans la bouche; organe
du goût et de la parole; langage, idiome d’une nation,
d'un peuple, d'un pays. — Faïre la léngo, servir d’inter-
prète, parler pour un autre; haranguer au nom d’une
assemblée, d’une troupe, d’une collection quelconque d'in-
dividus. Faïre la léngo à quéouquus, styler quelqu'un, lui
soufller ses réponses, lui faire la leçon, en lui dictant ce
LEN
qu’il doit dire. À uno léngo de pétar, il a la langue bien ;
affilée; il manie très-bien l'ironie ou la médisance. Mous-
sigo dé la léngo, il mord de la langue, c.-à-d. il a la parole
mordante, incisive. Ma léngo mé prus, j'ai une déman-
geaison de parler. Moussiga sa léngo, se retenir de faire
une réponse indiscrète ou compromettante. À pas qué dé
léngo, il n'a que du babil. Avès La léngo trop longo, vous
parlez beaucoup trop; se dit d'un bavard ou d'un indiscret.
Préne léngo, prendre langue; s'informer. Ma léngo m'a
vira, la langue m'a fourché; je me suis trompé. Énvala sa
léngo, mourir, rendre le dernier soupir; métaphore éner-
gique et en même temps ironique. És uno lénguéto, c'est
une langue dorée; une fine mouche; un doucereux diseur,
calin et insinuant. Uno léngasso, une mauvaise langue.
Dér. du lat. Lingua, m. sign.
* Léngo-bouino, s. f. Langue de bœuf, Hypodrys hépa-
tique, Boletus hepaticus, Boletus buglossum, Linn., Roques;
champignon du genre des Agarics, fistuleux, dont les
micologues donnent ainsi la description : chapeau d’un
rouge-brun, d'autant plus foncé que le sujet est plus Agé,
parsemé à la surface supérieure de papilles de mème cou-
leur; surface inférieure couverte de tubes allongés, accolés
les uns aux autres, d’un jaune blanc ou jaune rougissant ;
chair mollasse, fibreuse, zone, ressemblant au tissu de la
betterave rouge lorsqu'elle est cuite ; saveur un peu acide,
odeur nulle. 11 croît sur les vieilles souches, le plus sou-
vent au pied des vieux chênes et des vieux châtaigniers.
On le désigne en fr. sous les noms de Foie de bœuf, lan-
gue de bœuf, glu de chêne; en Toscane Lingua di cas-
tagno, rassa buova.
Par son volume et sa saveur agréable, ce champignon
doit être mis au nombre des espèces alimentaires les plus
utiles. Mais, pour ceux qui se trouvent dans les châtai-
gneraies, il arrive qu'ils sont tellement saturés de la sève
âpre et acerbe de l'arbre, en s’attachant à son tronc ou
aux maitresses-branches, qu'il faut les faire tremper long-
temps et blanchir à l'eau bouillante pour leur enlever cette
Acreté.
La composition du mot ne présente aucune difficulté :
Bouino est là comme traduction de bovine.
Léngo-cano, s. f., ou Hèrbo dâou tal. Cynoglosse,
Cynoglossum offcinale, Linn., plante de la fam. des Bora-
ginées. Sa feuille est légèrement veloutée et douce au
toucher comme la langue du chien, dont elle a du reste la
forme et pris le nom. Sa racine est adoucissante et somni-
fère : sa feuille est employée par application contre les
dartres.
Dér. du lat. Lingua canis, langue de chien.
Léngo d'O, s. f. Langue d'Oc; languedocien; langage,
idiome languedocien ; langue parlée dans le pays de Lan-
guedoc, par opposition à la Langue d'Oïl, parlée dans le
nord de la France. k
La dénomination seule de Zéngo d'O, la langue d'Oc,
trace les limites dans lesquelles doivent se renfermer ces
LÉN 431
observations. Nous reviendrons à rechercher nos origines
dans la langue romane /Voy. Rouman), et, sous le mot
Troubadour, à exposer sa marche et son développement ;
nous en sommes, le mot l'indique, au moment où l'idiome
méridional a déjà conquis la plénitude de son individualité
propre, où il est si bien fixé par le caractère particulier
de son euphonie que son accent et sa prononciation ser-
vent à le classer par une démarcation territoriale. — Voy.
Léngadà.
Il doit être accordé une assez large part aux influences
climatériques sur le langage pour faire admettre en prin-
cipe que, de tout temps, des différences dialectales ont
distingué les groupes de populations d'un vaste pays, de
même race et de mème langue. Ce que nous voyons au-
jourd’hui permet d'affirmer ce qui a été avant nous. Dans
l’ancienne Gaule, où les divisions par tribus furent si
nombreuses, ces différences existaient : la conquête romaine
constitua une sorte d'unité sous sa domination; mais elle
laissa forcément vivre ce qu'elle ne pouvait atteindre, le
génie national dans son sentiment intime et dans la parole,
sa manifestation la plus persévérante.
La Narbonaise première s'était donnée plutôt qu’elle
n'avait été soumise. Entre les mains des vainqueurs du
monde, elle était devenue la plus florissante et la plus
riche de leurs provinces transalpines. Peut-être cette pros-
périté était-elle due à ce qu'ils avaient su conserver chez
elle plus de son esprit natif d'indépendance, en lui appre-
* nant à se gouverner elle-même dans ses municipes, et parce
qu'ils avaient été amenés aussi, par calcul ou par néces-
sité, à respecter ses habitudes et ses traditions de langage,
en conservant toutes ses dénominations géographiques, en
latinisant beaucoup de ses locutions usuelles qu'ils s’ap-
proprièrent, à mesure qu'ils lui imposaient, dans les lois et
les affaires, la langue officielle, et dans leurs relations
privées, le charme de leur littérature. C'est au moins ces
caractères de la politique romaine qui ont survécu pour
attester les traits les plus saillants de notre nationalité. Ce
double courant s’est creusé un lit profond à travers les
contrées méridionales.
Dans un intervalle de trois ou quatre siècles de l’éta-
blissement des colonies romaines, le flot commence à se
troubler, où plutôt une nouvelle ère s'annonce. La Gaule
comprend qu’elle n’a plus besoin de maitres : elle a donné
des empereurs au monde, des sénateurs au Capitole, des
orateurs à la tribune, des rhéteurs et des grammairiens
aux écoles; elle a un instant disputé à Rome même le
siége de l'empire; un effort encore, elle va s'appartenir.
Mais à ce moment les irruptions des Barbares recommen-
cent; les Wisigoths viennent occuper le Midi, les Sicam-
bres ravagent le Nord : partout se montrent les signes pré-
curseurs d'un grand déplacement de puissance et de réno-
vation d'idées et d'idiomes.
Le christianisme se propageait. Les Wisigoths admiraient
les institutions romaines et ils conservèrent beaucoup de
432 LÉN
l'organisation administrative : le latin était la langue de
leur cour de Toulouse, et celle dont ils se servaient dans
les édits et dans leurs codes : et le latin n'avait jamais
entièrement effacé le celtique.
A leur tour, les Sarrasins s'étaient répandus dans le
Midi : ils tenaient Nimes, Carcassonne et Narbonne: les
Francks de Clovis, de Childebert, de Pépin, y avaient été
appelés. Comment les traces de tous les envahisseurs, re-
connaissables sur notre sol, n’auraient-elles pas laissé quel-
ques empreintes dans la langue? Cependant, ni le gothique,
qui avait légué son nom à la province romaine, ni l'arabe,
que les dévastations des bandes sarrasines, l’antipathie des
croyances et l'épouvante rendaient odieux, ni le franci-
que ou le tudesque aidé même de toute la puissance de
Charlemagne, n'avaient pu s’acclimater sous notre soleil
et sur cette terre où le vieux tronc gaulois gardait ses
racines vivaces et qu'avait si merveilleusement fécondée
la culture latine.
Mais l’ébranlement et la chute de l'empire, les guerres et
les invasions, tous ces chocs de peuples divers ne pouvaient
manquer de produire des bouleversements, des perturba-
tions dans les esprits et une étrange confusion dans les
rapports habituels et nécessaires des populations. Au milieu
de ces conflits et de la diversité d’idiomes qui se heurtaient
et se repoussaient, l'unique moyen de s’entendre et de se
comprendre était de composer, presque d’instinct, sans se
soucier des règles et de la syntaxe, un langage courant,
populaire, dont le fond, comme la forme, se füt généralisé
et qui ne pouvait avoir pour base que le latin, la langue
la plus répandue.
Alors, en effet, dans la nuit intellectuelle de ces âges
troublés et malheureux, apparaît la langue romaine rus-
tique, le roman, comme une transaction éclatante entre
la civilisation décrépite de la vieille Rome, et une société
rajeunie, turbulente, presque sauvage encore, pleine de
ses traditions nationales, exubérante d'ardeur, nouvelle-
ment retrempée aux sources du christianisme. Tous les
peuples qui s'étaient disputés l'héritage lacéré de la gran-
deur romaine, furent appelés à apporter leur moellon à
l'édifice de régénération. Bientôt le roman était en posses-
sion de toute la Gaule, de la Méditerranée au Rhin; et, né
dans la province latine, comme on appelait la Gaule nar-
bonaise, il régnait au nord de la France au IX£ siècle, et
formulait, en 841, les serments réciproques de Louis-le-
Germanique et de Charles-lé-Chauve, son frère.
Cependant, si le roman était universel et commun à
tout le territoire des Gaules, les éléments divers dont était
composée la population, réagissaient naturellement contre
l'unité d’un langage dont le lien fondamental, le latin,
déjà miné et altéré, ne trouvait plus ni sanction ni con-
trôle, et tendait chaque jour davantage à se dissoudre. Des
propensions ou des aptitudes opposées, du midi au nord,
dirigeaient d’ailleurs le mouvement en sens contraire. Par
une convention tacite et instinctive, partout il y avait un
LEN
accord unanime pour donner à la diction la rapidité et la
clarté, pour supprimer les inversions, pour abréger les
finales, pour répudier les redondances : c'était le travail,
la recherche, l'instinct de l'esprit nouveau et son affaire.
Mais la mécanique du langage et l'oreille avaient aussi
leurs droits : ici, la sonorité et l'éclat des voyelles, quel-
quefois mème la rudesse affectée de certaines consonnes
rappelant le vieux gaulois, l'harmonie surtout étaient dans
les prédilections natives et semblaient mieux servies par
la souplesse et la dextérité de l'organe obéissant à la
promptitude de la pensée ; là, le son ne redoutait pas de
s'assourdir, la voix de s’effacer et de tomber avec les
désinences et les inflexions, comme pour se soumettre à
une conception plus lente, qui ne demandait pas à faire
explosion; et l'expression devenait lourde, traîuante, em-
barrassée et incolore; mais la phrase et les mots, aw prix
de la mélodie sacrifiée, prenaient une ferme netteté et une
concision qui n'étaient pas sans forces ni sans charmes. Ces
différences, que la nature, les dispositions organiques,
l'influence des climats, les impressions d'origine avaient
mises entre les dialectes du Midi et du Nord, ne s’effacè-
rent jamais, et plus le défaut du trait d'union qui les
reliait à la source principale se relàcha, par l'oubli ou
le mépris de la littérature romaine, plus aussi les tendances
divergentes prenaient d’empire et accusaient leurs anti-
pathies.
De ce tableau de l’état de la Gaule après la chute de
l'empire romain, trop imparfaitement esquissé, qu'on nous
permette de reprendre quelques-uns des traits les plus saïl-
lants.
Les provinces du Midi, plus cultivées et plus fières de
leur culture intellectuelle, moins exposées aux incursions
germaniques, vivaient dans leur prospérité pleine des sou-
venirs de Rome; mais toujours impatientes du joug, elles
ne l'avaient souffert dans leur langue que par une sorte
d’accommodement et à la condition de prêter aw vainqueur
presque autant qu'elles consentaient à en recevoir. Elles
s'étaient identifiées avec le latin, et l'avaient pour ainsi dire
attaché à leur fortune.Les Barbares apportèrent le premier
élément dissolvant sans parvenir à substituer leur idiome
à celui des Gallo- Romains. Les nouveaux conquérants
d’ailleurs s'entendaient dans la même langue que ceux
qui avaient envahi le Nord et toutes les bandes qui
franchissaient continuellement et sans obstacle le-Rhin à
la recherche d'une autre patrie. L'ancienne province roma-
nisée pressentait vaguement que la force qui avait renversé
l'empire la dominerait un jour, et bien des fois elle l'avait
regardée et avait recherché son alliance et son secours.
Quand le flot menaçant des Arabes était venu inonder les
Gaules, c'est au nord que s'était élevée la digue qui le
repoussa jusqu'au -delà des Pyrénées. Chaque jour la
puissance franque s'était accrue, et au milieu des secousses
et de ces terribles tremblements de terre, sa prépondérance
ne fit que grandir. Sous les rois de la première race, les
LÉN
habitants des contrées méridionales n'étaient connus que
sous le nom de Romains. La loi salique consacrait cette
distinction de peuples; et la terre des Franks ne se con-
fondait pas, pour les- priviléges que la possession y atta-
chait, avec les provinces de la Gaule méridionale. La
langue commune était la basse latinité dégénérant déjà, s'im-
prégnant au nord de tudesque et de teuton, et elle ne per-
sévérait au midi que sous le nom un peu méprisé de langue
romaine rustique. Durant cette longue période de guerres et
de déplacements continuéls de peuples, toute culture intel-
lectuelle avait:été abandonnée, les écoles publiques, autre-
fois si renommées, n’existaient plus; les esprits troublés
marchaient au hasard et sans règle dans les terribles inquié-
tudes d'un présent sans fixité, mais avec des aspirations
d'avenir à reconstruire sur d’autres bases. Le génie de
Charlemagne avait un moment essayé de reconstituer
l'unité de l'idiome et de l'empire : entre les mains de ses
débiles successeurs, son œuvre s'était démembrée. Mais
dans lé morcellement, lorsque la Gaule méridionale eut
reconquis sa part, elle commença à respirer; et sur elle
une ère nouvelle allait se lever, en lui redonnant, avec
l'indépendance et le repos, l'amour des arts et des lettres.
De petits états s'étaient formés qui relevèrent en droit plus
qu’en fait de la souveraineté royale établie au nord, et qui
s'érigèrent bientôt en gouvernements héréditaires sous leurs
seigneurs locaux : ils furent le berceau de la rénovation
politique et de celle du langage.
Ce fut au moment où la seigneurie suzeraine atteignait
son plus haut degré d'importance, que la délimitation du
domaine féodal, tracée par la possession, se manifeste et se
fait par le nom du dialecte qu’on y parle. La langue dési-
gne et caractérise le territoire; et alors on choisit, pour
diviser la Gaule en langue d'Oc et en langue d'Oïl, le mot
d’affirmation le plus usuel, suivant la manière dont il était
articulé au midi et au nord. — Foy. O et Oc.
Cette dénomination n'était en réalité que la reconnais-
sance et la sanction des faits. Comme nous venons de le
voir et de le redire, des deux côtés de la Loire, prise pour
limite, le langage n'avait pas attendu jusque-là pour
prendre sa voie et suivre ses tendances; mais il n'avait
fait que traverser une phase de préparation et placer ses
jalons. Seulement alors l'unité du roman se dédoublait, et,
sortis dela même source, les deux dialectes, qui avaient
longtemps suivi une marche parallèle, se séparaient en un
cours différent.
La langue d'Oïl n'était pas encore parvenue à se
débrouiller des langes grossiers de son enfance, que la
langue d'Oc, plus fidèle à ses traditions, s'était organisée
d’après des règles savamment étudiées. Elle avait ses gram-
mairiens et surtout ses poètes; et elle était devenue la
langue politique, la langue légale, la langue des traités de
commerce et d'alliance qui unissaient les cités industrieuses
du Midi aux plus puissantes républiques ilaliennes, avec
Gênes, Pise, Florence et Venise, la langue dans laquelle se
LEN 433
réveillaient les formules et l'esprit des vieux municipes
romains de la Gaule méridionale, lorsque les communes
naissantes obtenaient de leurs seigneurs féodaux leurs
chartes d’affranchissement.
Dans le XIe siècle, l'époque où les comtes de Saint-
Gilles et de Toulouse réunirent sous leur sceptre la Pro-
vence au Languedoc, fut l’époque où cette langue prit
toute l'extension, toute la richesse, toute la régularité que
les troubadours lui avaient données / Voy. Troubadour).
Son influence ne s'était pas amoindrie par la cession de
la Provence au comte de Barcelone : la maison de Tou-
louse régnait toujours dans ses états indépendants qui
s'étendaient du Rhône aux extrèmes Cévennes, et de la
baute Dordogne aux Pyrénées ; et les comtes de Provence
en même temps comtes de Barcelone et rois d'Aragon, lui
conservaient sa primitive aflinité avec le catalan. — Voy.
Prouvénçdou.
Longtemps encore après que la comté de Toulouse fut
passée dans le domaine de la couronne, sous Philippe-le-
Hardi, la langue d'Oc conserva sa portée et sa valeur
politique. Philippe-le-Bel et ses successeurs, par divers
édits, ordonnèrent la publication des lois et l'instruction
des procédures dans chacun des idiomes qui divisaient Ja
France. La légalité de la langue d'Oc, son authenticité
juridique s’affirmaient ainsi, et l'unité se maintenait dans
les diverses circonscriptions de son vaste territoire, tant
que l'institution politique générale faisait tout ressortir du
centre commun. Mais la cause qui, dès le principe, avait
amené la grande division en deux langues, ne pouvait pas
cesser de les suivre dans leur développement : c'était l'in-
dépendance originelle de chaque groupe de population qui
se faisait jour.
Les seigneuries vassales du pays de la langue d'Oc
rendaient foi et hommage à leur suzerain, avec la même
soumission à peu près que celui-ci en usait avec le roi:
l'hérédité des fiefs passée en principe, la force et l'impor-
tance de la terre constituant le droit, sans troubles trop
violents pour la hiérarchie, dans les subdivisions, des
compositions étaient devenues souvent d'impérieuses et de
légitimes nécessités. Du peuple au seigneur les rapports
étaient relativement les mêmes, et des concessions étaient
également forcées en tout ce qui relevait du peuple serf ou
vassal, où formé en commune. Le parler, dont il était le
maitre, et qu'il faisait, se pliait à ses aptitudes et obéissait
à ses téndances: là aussi il avait à prendre librement ses
franchises. De là les dialectes de Ja langue d'Oc, ralliés
par une sorte de fédération ou de vassalité à sa constitu-
tion centrale et souveraine, mais se nuançant en indivi-
dualités distinctes et se multipliant par fractionnements qui
correspondaient à ceux des domaines particuliers, sans.
méconnaître jamais leur génie natal.
Aussi, quand le centre dominant, qui imposait aux.
autres son esprit et ses habitudes, vit amoindrir sa pré-
pondérance et qu'elle se déplaça, quand une littérature:
434 LÉN
acceptée également par tous cessa d’être accueillie et favo-
risée par les cours princières, et que ce foyer, d’où jaillis-
saient la lumière et tant d'éclat, s'éteignit, le prestige de la
langue d'Oc commença aussi à décroître. A mesure que se
fit l'unité française, et que les provinces ne formèrent plus
que le royaume, en restant encore pays d'états, de plus
en plus s’abolit la division tracée autrefois par la Loire,
qui n'était que nominale. Le français s'était constitué dans
ses formes définitives : la langue d'Oc avait perdu son
privilége de centralité et de métropole; et, sans autre
règle que ses intérêts ou ses besoins, ses souvenirs ou ses
propensions, plus que jamais, dans ses anciens domaines,
chaque généralité, chaque baillage, chaque paroisse même,
morcelèrent à l’envi son héritage, et chacun l’appropria à
son génie particulier, à son accentuation locale, à l'in-
fluence de son voisinage immédiat, de son organisme ou
de sa température.
A ce point semblerait terminée l’histoire de la langue
d'Oc: il n’en est rien cependant; si l’avenir est fermé
pour elle, elle peut vivre de son passé et se consoler. La
nouvelle division de la France a effacé sa dénomination
provinciale; depuis longtemps avant, elle n'était plus
langue officielle; mais une langue ne s’anéantit point et
n’a pas à disparaître ni à se renier devant un décret
de proscription. Notre langue d'Oc, que nous affectons
d’appeler ainsi pour ne pas la réduire à un de ses dialectes,
mérite mieux. Comme nous l'avons dit dans quelques
considérations préliminaires, elle est restée populaire et
c’est être quelque chose; à ses chefs-d'œuvre anciens, sa
renaissance, retrempée à ses sources, vient en ajouter de
nouveaux; quatorze millions d'habitants l’entendent, la
parlent et la chantent encore dans tous ses dialectes; pour
le monde savant, son étude et sa connaissance sont indis-
pensables à tous les travaux de linguistique et de philo-
logie; elle fait partie au meilleur titre de notre gloire
nationale; et c’est ce qui nous fait aimer et entourer
d’un culte patriotique et fervent ses autels délaissés.
Son nom même est, en effet, devenu une généralisation,
qui s’est encore restreinte en transformant le nom de l’an-
cienne province romaine. Le parler d'Oc résiste toujours,
mais chacun de ses dialectes a une vie à part : le toulou-
sain, le gascon, le provençal, l’auvergnat, le cévenol ou
raïol n’en sont point des branches détachées, mais des
pousses vigoureuses sorties du même tronc, que la même
sève alimente et que distingue cependant une floraison
différente. Ces dialectes ont eu et gardent encore l'empreinte
du type primitif que leur frottement avec le français n’a
point effacée ; et c’est pour cela, pour conserver à la langue
sa physionomie vraie, que, de toutes parts, dans Je Midi, sa
terre natale, la poésie rajeunit ses traits et ses couleurs.
Nous ne rallumerons pas son flambeau, nous le savons,
et peut-être cette flamme ravivée n'aurait que des ardeurs
factices ; mais ne fit-elle que rappeler son premier éclat, il
était bon de suivre à travers les âges ces longues trainées
LEN
de lumière venues du Midi. La langue d'Oc est dépossédée
de sa souveraineté : elle décline vers une décadence fatale,
qui ne doit pas cependant s’accomplir de sitôt, pour si
peu qu'elle veuille rester elle-même. Le français peut la.
remplacer et se substituer à elle; mais une fusion ou une
alliance est impossible. Le danger est là: le mélange ne
serait qu'un patois informe; et quelle que füt la livrée
dont cette transformation se revêtirait, elle ne représen-
terait ni le français, ni le languedocien / Voy. Patouës).
C’est à cet abaissement qu'elle ne doit pas descendre, si,
blessée au cœur, elle doit mourir. Elle doit rester une dans
ses variétés dialectales propres, sans se laisser déshonorer
et défigurer par des raffinements prétendus qui la corrom-
pent, vulgaire dans sa forte vitalité, simple, harmonieuse,
originale sans les atours, les sophistications et les ajus-
tements qui la déparent. Elle est assez riche pour se passer
d'emprunts, trop fière pour recevoir l’aumône, de race+et
d'extraction assez nobles et assez anciennes pour avouer
ses origines. Pour cela, nous avons voulu dire son histoire,
et nous faisons effort pour la maintenir dans ses traditions.
Léngoù, s.m. Dim. de Léngo. Petit bout de la langue;
dans le langage des nourrices, langue d’un enfant.
Léngousto, s. f. Langouste, Astacus, Palinurus locusta,
Linn., crustacé de l’ordre des Astacoïdes et de la fam. des
Longicaudes ou Macroures, grosse écrevisse de mer, com-
mune dans la Méditerranée. Ce qui la distingue du homard,
c'est qu’elle manque des deux formidables pinces dont
celui-ci est armé : ils ont d’ailleurs assez de ressemblance
pour qu'on ne leur ait pas donné des noms différents :
celui de Léngousto suffit et s’applique à tous les deux.
Léngu, udo, adj. Dim. Léngudé, éto; péj. Léngudas,
asso. Babillard; bavard; parleur; qui a la langue trop
longue; qui ne sait pas se taire sur ce qu'il doit garder
secret. — Taïso-té, léngudo, tais-toi, bavarde.
Lénguéja, v. fréq. Languéyer; examiner la langue
des porcs pour reconnaitre les grains de ladrerie. — Voy.
Grano dé por.
Lénguéjaïre, s. m. Languéyeur; qui fait métier de
languéyer les porcs dans les foires et marchés. — Woy.
Grano dé por.
Lénguéta, v. Terme de menuiserie, évider en boudin,
ou en languette le bord d’une pièce d'assemblage pour le
faire entrer dans la rainure ou canal de la pièce à joindre.
Léntio, s. /. Lentille, lentille commune, Ervum lens,
Linn., plante de la fam. des Légumineuses.
Lénto, s. f. Luzerne sauvage, luzerne faucille, Medi-
cago falcata, Linn., plante de la fam. des Légumineuses, à
feuilles menues, à fleurs jaunes, qui se propage d'elle-
même dans les champs de blé. Comme elle est vivace,
qu’elle se marcotte et se multiplie, ses racines très-fortes,
très-ligneuses, arrêtent quelquefois la charrue et font même
briser le soc. Elle est fort gourmande et fort nuisible au
blé et en outre difficile à extirper.
Dér. du lat. Lentus, flexible, ou lent, qui ralentit.
sans ie it. tm née,
TT
Land
LÉS
Léntou, s. /. Humidité; flexibilité causée par l’humi-
dité; moisissure. — Voy. Lén.
Lèou, s. m. Péj. Lévatas. Terme de boucherie, mou ou
poumon des animaux; morceau peu recherché, dont les
pauvres gens seuls font usage. Le mou du porc est plus
délicat; on le mêle à la viande des andouilles et saucis-
sons, on l’alterne avec le foie, et ces carrés de viande
maigre qu'on nomme poupo, dans les garnitures que l’on
fait au boudin.
Dér. du lat. Levis, léger, parce que la substance spon-
gieuse et fistuleuse du poumon le rend léger et le fait sur-
nager sur l’eau.
Lèou, adv. Bientôt; promptement; vite. — Lèou, lèou/
Vite, vite! dépêchons. Pu Zèou qué, plutôt que.
Dér. du lat. Levis, léger : l’analogie entre léger, leste et
vite explique facilement la signification.
Léquo, s. [. Piège pour les oiseaux ou les rats, com-
posé ordinairement d’une pierre large et plate, placée de
champ et inclinée en angle de 45 degrés, soutenue dans
cette position par une charpente de bûchettes si légère, si
délicatement montée que la moindre pression d’un animal
qui s’y hasarde pour manger l'appât semé au-dessous, fait
crouler brusquement l'échafaudage, qui écrase presque
toujours le téméraire. En général, piège, traquet, traque-
nard, trébuchet, quatre de chiffre.
On l’a dit dér. du celt. Laische ou Lech, pierre, ou
figurativement du lat. Laqueus.
Lès, s. m. Lé, largeur d'étoffe; longueur quelconque
d’étoffe prise dans toute sa largeur d’une lisière à l’autre.
Lésarda (Sé), v. Se lézarder; se couvrir de lézardes.
Lésardo, s. f. Lézarde; fente, crevasse; fissure qui se
produit dans un mur quelquefois par vétusté, mais qui
date d'ordinaire de sa construction et provient le plus
souvent d’un affaissement dans une partie des fondations.
Dér. du lat. Læsum, supin de Lædere, offenser, léser.
Lésé, s. m. Loisir; temps disponible et suffisant pour
faire une chose. — Souï pas dé lésé, je n'ai pas le temps.
Quan séras dé lésé, quand tu y seras; quand tu seras
dispos; quand tu auras le temps.
Dé lésé, à loisir, à son aise.
Dér. du lat. Licet, il est permis.
Léséno, s. j. Alène, outil de cordonnier pour percer le
cuir; poinçon courbe emmanché.
En espag. Alesna, m. sign.
Lésquo, s. f. Dim. Lésquéto. Tranche de pain ; mouillette.
— Voy. Lisquo.
Léssiou, s. m. De la lessive, eau imprégnée des sels
lixiviels de la cendre.
Dér. du lat. Livivium, m. sign.
Léssiou, s. m. Essieu de voiture, pièce de fer qui passe
dans le moyeu des roues.
Dér. du lat. Axis, aæilium, m. sign.
Lésso, s. j. Crasse de la tête, pellicules qui s’amassent
sous les cheveux; crasse qui se forme en petites écailles
LEV 435
sur d’autres parties du corps par une habitude de mal-
propreté, surtout aux genoux: cette dernière se nomme
aussi Péréso (Voy. ©. m.). — Vous lèvo la lésso, au fig. il
emporte pièce dans ses quolibets.
Lèste, lèsto, adj. Leste; agile; qui a de la légèreté;
dispos; préparé; prêt; prompt; vif; éveillé.
Létro, s. f. Lettre, caractère de l'alphabet; lettre-
missive. — Counouï la létro, il sait lire et écrire. Fasès-y
uno létro, écrivez-lui. Li mandaraï uno létro, je lui écrirai.
Dér. du lat. Littera, m. sign.
Lètrou, s. m., ou Lusèr. Lézard, Lacerta, Linn., reptile
de la fam. des Sauriens, dont les variétés sont nombreuses.
— Au-dessous du plus grand de nos lézards qui dépasse
deux pieds de longueur, on en trouve bien d’autres diffé-
rant de taille et de couleur, ce qui tient peut-être autant
à l'âge qu'à l'espèce; et par une gamme descendante, on
arrive au lézardeau de muraille, qui atteint à peu près
cinq pouces dans son plus grand développement. En thèse
générale, les plus gros de ces reptiles, tous conformés de
mème, s'appellent ZLètrou ou Lusèr; ceux de moindre
dimension ont des noms divers; mais à quel degré de
l'échelle faut-il s'arrêter pour que le Lètrou devienne Rén-
gloro (V. c. m.)? Ce point de démarcation n’est pas bien
déterminé. Disons toujours néanmoins que le lézard ocellé,
Lacerta ocellata, Linn., et le lézard vert, Lacerta viridis,
un peu moins grand, tous deux remarquables par leur
belle couleur verte se modifiant quelquefois par du brun
et du jaune, communs dans notre pays, où ils sont les
plus grands du genre, sont essentiellement le Zètrou ou
Lusèr : on s'arrange avec les autres et on leur donne l’épi-
thète de pichô, pour arriver au nom spécifique de Réngloro.
Léva, v. Lever, en général; mais les nombreuses et
variées acceptions de ce verbe ne peuvent être bien con-
nues que par des exemples. — Zéva, pousser en parlant
du blé qui germe en terre, des plantes qui sortent de terre;
lever, fermenter, en parlant du levain. Zéva un éfan,
accoucher une femme, recevoir l'enfant. Zéva uno maïo,
relever, reprendre une maille à un tricot, à un bas. Zéva
la tdoulo, desservir, enlever le couvert. Zéva lou capèl, -
ôter son chapeau; saluer quelqu'un, le reconnaitre pour
son supérieur. Zéva las taïos, percevoir les contributions,
être percepteur; par ironie, mendier. Léva lou nas, lou
moure, être orgueilleux, porter la tête haute. Zéva, quèter,
faire une collecte. Zéva la man, prêter serment. Zéva
boutigo, commencer à tenir un magasin, à faire un com-
merce; ou par ext. entrer en danse, se disposer à en venir
aux mains, se battre. Zéva, faire un rabais : Mé lévarés bé
quicon, vous rabattrez quelque chose. Aqud vdou pas lou
léva dâou s6ou, cela ne vaut pas la peine de se baisser
pour le ramasser. M'ow lévarias pas dé ma tèslo, Vous ne
me feriez jamais croire autre chose. Jamaï noun mé lève:
d'aïci s'és pas vraï, je consens à ne jamais bouger de place
si je ne vous dis pas la vérité; formule d'imprécation ou
de protestation fort usitée. Léva las nisados, chercher des.
456 LEV
nichées, dénicher des oiseaux. Té vdou léva dâou séména,
je vais te relancer d'importance. Zéva dé cassolo, dégoter
quelqu'un du jeu, prendre sa place. Aouriè pas qu'à léva
Jou dé, il n'aurait qu'à faire un signe.
Sé léva, se lever, en parlant d’une personne couchée,
sortir du lit; se mettre debout; monter, paraître sur l’ho-
rizon. — Zou sourél, la Luno sé lèvo, le soleil, la lune
parait, se lève. Lou tén sé lèvo, le temps se hausse, il
commence à s'éclaircir, à faire beau. Sé léva dé davan,
disparaitre, quitter la partie, s’en aller, s'esquiver.
Dér. du lat. Zevare, venant de Zevis, léger.
Lévadéto, s. f. Dim. de Zévado. Fressure d'agneau, de
chevreau. — Voy. Lévado.
Lévadis, disso, adj. Qui peut se lever, s’enlever, se
hisser facilement ; aisé à lever; à remuer; mobile, muable.
— Pon lévadis, pont-levis.
Dér. de Zéva.
Lévado, s. f. Dim. Zévadéto. Terme de boucherie, fres-
sure d’un porc, d'un mouton, etc. Elle se compose du foie,
du poumon et du cœur, qui tiennent ensemble et que le
boucher enlève à la fois, en dépeçant l'animal.
Ce mot vient-il de cette dernière action et parce que la
fressure ne compte pas comme viande, ou bien du mot
Lèou, qui donne à son péj. Zévatas, d’une grande ana-
logie, et parce que le poumon, qui est une partie essen-
tielle de la Zévado, pourrait bien avoir servi de racine à
l’ensemble de la fressure?
Lévado, s. f. Digue; chaussée; déversoir d'un moulin;
barrage quelconque en travers d’un cours d'eau pour le
dévier dans un canal de moulin ou d’arrosage.
Lévado, s. f. Levée; action de lever, d'enlever. En
terme de magnanerie, c'est une certaine quantité de vers
qu'on enlève des tables où ils sont trop serrés et trop
nombreux, pour les disposer sur des tables nouvelles, ce
qui arrive après chaque mue par le développement de
leur volume. — Au jeu de cartes, levée, cartes qu'on lève
en gagnant.
Lévadoü, s. m. Levier d’une meule de moulin à farine,
composé, dit Sauvages, de deux pièces, l’une verticale,
appelée l'épée, l’autre horizontale, qui fait l'office de
levier et qu'on appelle la trampure : l'une et l’autre servent
à hausser la braie, et par ce moyen la meule tournante.
Lévado signifie aussi un clayon, sorte de panier plat,
plus long que large.— Voy. Campanèje.
Ce mot, qui n’est pas connu à Alais en ce sens, est tout
à fait technique à nos portes, dans la Gardonenque et
l'arrondissement du Vigan.
Lévan, s.m. Levain, morceau de pâte aigrie qui sert à
faire fermenter la pâte du pain. — Métre loulévan, opé-
ration préparatoire à la manipulation du pain, qui consiste
à détremper un morceau de levain avec une petite quantité
de farine dans la huche, qu'on laisse fermenter quelques
heures ensemble et qui augmente le volume du levain en
LIB
même temps que la force de fermentation; on mêle le tout
ensuite avec la pâte nouvelle.
Dér. de la bass. lat. Zevamen, m. sign.
Lévan, s. m. Levant, Orient, Est, partie du ciel où le
soleil se lève; pays situés au levant de la Méditerranée.
— Sourél lévan, lever du soleil ; soleil levant.
Lévandièiro, s. f. Sage-femme, accoucheuse.
Dér. de Zéva ; léva un éfan, prendre ‘un enfant du sein
de la mère, accoucher une femme.
Lévatas, s. m. Péj. de Zèou. Terme de boucherie,
poumon, principalement de bœuf : ce qui est toujours un
mauvais mets. — Voy. Lèou.
Lévito, s. j. Lévite, redingote, sorte d'habit long, croisé
par devant.
Empr. au fr.
Lèvo, s. f. Terme de palemardier, lève, cuiller d’un
mail, sa face taillée en biseau et qui sert à enlever la
boule, tandis que la face opposée, la masse, la fait rouler
terre à terre. — Jouga dé lèvo, enlever la boule pour la
porter à une plus grande distance, sans être arrêtée dans sa
course par des ricochets ; par ext. au fig. agir hardiment,
avoir de la vigueur, de la verdeur, de l’entrain.
Lèvo, s. f. Levée; quête; collecte. — Faïre uno lèvo,
faire une quête.
Dér. de Zéva.
Lèvo-quiou, s. m. Fourmi rouge, fourmi à tête rouge,
qui va toujours en procession le long des vieux murs ou
des vieux troncs d'arbre. Elle passe pour méchante et sa
morsure cause une légère inflammation. On l'appelle Lèvo-
quiou de ce qu’elle relève volontiers son abdomen.
Lévuro, s. f. Tranche extérieure de panne de porc, qui
est devenue rance et qu'on enlève pour ne pas laisser ce
goûtaux assaisonnements. On donne ces reliefs aux pauvres
mendiants.
Li ou I, pron. relat. et adv. Lui, à lui. — Voy. I.
Lia, »., ou Ia. Lier. — Voy. Ia.
Lian ou Ian, s. m. Cordon, ce qui sert à lier; lien;
cordon de sac. — Voy. Ian.
Liardo, s. f., ou Piastro. Pièce de deux liards, depuis
longtemps démonétisée, hors d'usage dans la circulation
comme en dénomination. — Voy. Iard et Piastro.
Liasso ou Jasso, s. f. Liasse; paquet de menu linge,
lié ensemble; trousseau de elés réunies. — Le fr, Liasse
ne s'entend que de papiers; le lang. a presque une autre
signification et ne s'applique qu’à de menus objets. Il dit
au reste beaucoup mieux Trousso. — V..c. m.
Libérta, s. f. Liberté; indépendance; état d'une per-
sonne libre.
Dér. du lat. Zihertas, m. sign.
Libértin, ino, adj. Dim. Zibértind; péj. Libértinas.
Libertin. — Cet adj. au masc. n'entraine pas l'idée de
mauvaises mœurs comme le fr. Libertin: c’est plutôt un
coureur de cafés et de cabarets; un homme qui pense-peu
V+Y
LIG
à ses affaires et vit dans le vin et le jeu. Au fém. c'est
différent, le mot Zibertino ne porte que sur les mœurs.
“Libraïre, s. m. Libraire; marchand de livres.
© Dér. du lat. Librarius, m. sign.
Libramén, adv. Librement; sans contrainte; sans gène.
Empr. au fr.
‘Libre, s. m. Dim. Zibré; péj. Zübras. Livre; volume,
feuilles imprimées reliées où brochées; ouvrage d'esprit
qui fait un volume. — Zibre dé dous iars, la croix de par
Dieu. Parlo coumo un libre, il parle d’or.
* Dér. du lat. Ziber, gén. dibri, m. sign. ‘
Libre, libro, adj. Libre; exempt de contrainte, de
gène, d'embarras, de liens, d'obstacles.
© Dér. du lat. Ziber, m. sign.
®\ ‘Liéol, s.m. Licol ou Jicou, lien autour du cou du cheval,
mule ou mulet: — Le vrai mot est Cabéstre, mais celui-
*. ci, qui n’est peut-être qu’un empr. au fr:, s’est facilement
Es
\
.impatronisé.
Liçoù, s. jf. Dim. Ziçounéto. Leçon, instruction; ce
qu'un maitre donne à apprendre et ce qu'apprend par cœur
un écolier. — As pas di ta digoù, tu n'as pas récité ta
leçon. Té dounaraï uno ligounéto, je t'appliquerai une
” légère correction pour t’apprendre.
Dér. du lat. Zectio, m. sign.
Lidor, s. m. Louis d'or, pièce de vingt-quatre francs.
— Malgré l'adoption presque générale du système décimal,
il y a encore certains marchés qui persistent à se faire sur
le type des anciennes monnaies, parmi le peuple; dans les
” foires, celui des chevaux et des mules se fait en louis d’or.
Il'est encore certains nombres dans les sommes d'argent
qui ne s’énoncent qu'en ces vieilles dénominations, en fr.
comme en lang., ainsi: dès éscus, cént éseus, milo éscus,
l'winto-cin lidors, cinquanto lidors, cént lidors, malgré le
Changement de valeur de ces différentes pièces, signifient
toujours trente, trois cents, trois mille, six cents, douze
cents, deux mille quatre cents francs, puisqu'il n’y a plus
de livres.
Liè, s. m. Lit.—Voy. 1è, seul usité dans notre dialecte.
Lièchoto, s. f. Dim. de Ziè. Petit lit, couchette. — Se
dit mieux Zèchoto. — Voy. €. m.
Liéto, s. f. Layette; petit coffre en forme de bahut, en
carton où en bois très-mince, qui sert aux jeunes femmes
et jeunes filles à renfermer leurs objets de toïlette, bonnets,
cols, collerettes, et tous les atours qui craignent d'être
aplatis ou chiffonnés. C’est là aussi que sont serrées leurs
dorures et chaînes.
Lifré, lifréto, adj Gai; éveillé; coquet; accort;
‘détone
! Liga, v., ou Aliga. Limoner; couvrir de lie, de limon,
ji vase. — Voy. Énliga.
"7 'Ligas, s. m. Gros amas où dépôt de limon,.où:le pied
| enfane, dans les premiers temps de sa Ft:
Augm. de Zigo, lie, boue. : ::
_ Lignéto, s. f. per bitord; corde dfouet.
ph eh mé
LIM 437
Ligno, s. f. Ligne, instrument de pèche; canne, perche
légère en roseau d'ordinaire, à laquelle est attaché un fil
ouune mince corde et un bout de crin blanc qui porte le
hameçon.
Dans le sens du fr. Ligne, trait simple, le lang. ne
connait que Régo, et pour Rangée, file, rièn que la variante
Rén. — Voy. ©. m.
Dér. du lat. Linea, fil, ficelle.
Lignôou, s. m. Ligneul des cordonniers, fil ciré avec
de la poix, doublé plusieurs fois, qui sert à coudre les
souliers.
Dér. du lat. Linetum, de Zinum, lin.
Lignoto, s. f. Linotte, Gros-bec linotte, Fringilla can-
nabina, Temm., oiseau de l'ordre des Passereaux et de la
fam. des Conirostres ou Conoramphes. — Ce joli oïseau
vit longtemps en, cage et rivalise avec le chardonneret pour
le chant et l'intelligence.
Ligo, s. f. Lie du vin; dépôt, sédiment, vase des
rivières.
Ligo, s. f. Acabit, qualité bonne ou mauvaise d’une
chose, des fruits, des productions de la terre ; race, origine,
source, en parlant des personnes. — Il est probable que
c'est mème dans cette dernière acception que le mot a été
imaginé d’abord, et qu'il ne s’est étendu que par analogie
aux objets inanimés. L'homme ayant été formé de limon,
la ligo a été sa source, son origine; quand on dit: És dé
la bono ligo, il est de la bonne souche, de la vieillé roche,
on semble supposer que le Créateur se servit de diverses
qualités de limon pour former les diverses races.
Dér, sans doute du lat. Zigare, lier.
Ligousso, s. f. Brette; épée longue; sabre.
Lima, »v. Limer; polir; couper; amincir, user avec la
lime, par le frottement. Au fig. perfectionner par un
travail assidu, attentif.
Dér. du lat. Zimare, m. sign.
Limaio, s. f. Limaille, partie de métal en poudre, que
la lime enlève.
Limâouchoüs, ouso, adj. Péj. Limdouchousas. Gluant;
poisseux; visqueux, mucilagineux; baveux, comme l'hu-
meur qui couvre le corps de la limace.
Dér. d'Alimase, limace, limaçon.
Limase ou Alimase, s. m. Limace, limaçon sans
coquille, Zimaæ, Linn. — Voy. Alimase.
Limbardo, s. j. Limbarde, inule, perce-pierre, Inula
chrithmoïdes, Linn., plante de la fam. des Corymbifères,
qui croît dans les lieux marécageux, au bord de la mer.
Limborou, s. m. Varaire, plante. — Voy. Varaïre.
Limo, s. f. Lime, carrelet d'acier, de fer, à raies, pour
polir, user, couper les corps durs. — Zimo dougo ou limo
sourdo, au fig. sournois, hypocrite; homme qui vous
mine, qui vous ruine en vous caressant, qui agit -
ment avec de mauvais desseins.
Limougnè, limougnèiro, adj. Cheval, mule ou mulet,
attelés au limon d’une voiture, c.-à-d. au brancard, par
56.
438 LIO
opposition à ceux qui sont attelés devant, et qu’on dit:
Atalas én cavio.
Limoun, s. m. Limon, dépôt de terre détrempée; boue ;
bourbe, vase; limon, fruit du limonier, plus petit que le
citron, avec lequel on le confond cependant ; limon, bran-
card d’une voiture, d'une charrette; pièce de bois qui
soutient les marches d’un escalier.
Dér. du lat. Zimus, limon, vase, boue.
Limouna, v. Limonner une terre, l’engraisser de dépôts
de limon. — Se dit d’une prairie couverte par une inon-
dation qui y a déposé du limon.
Limounado, s. f. Limonade, boisson du jus du limon
ou du citron, avec de l’eau et du sucre.
Limounéto, s. /. Mélisse, citronnelle, plante. — Voy.
Abéiano.
Limpa, v. Vieux et hors d'usage. Glisser. — Est entré
dans Éscarlimpa, V. très-usité. — Voy. ©. m.
Dér. de Zimpo, boue, en v. lang.
Limpéto, s. f. Pierre mince et plate, galet; caillou plat,
rond, sur une grève: ce sont ces galets avec lesquels les
enfants s'amusent à faire des ricochets dans l’eau. — Voy.
Soupéto.
Lin, s. m. Lin, lin commun, ZLinum usitatissimum,
Linn., plante de la fam. des Caryophyllées ; dont l’écorce
se file et fait des tissus, et dont la graine possède des qua-
lités émollientes fort appréciées en pratique.
Linde, lindo, adj. Clair; transparent, limpide, comme
l'eau de roche ou celle qui court sur une grève unie et
argentée. — Lou cièl és linde, le ciel est pur, sans nuage,
ni brume. Un jouïn’home linde, un jeune homme à taille
svelte. — Ainsi pris au fig. dans ce dernier sens, Zinde a
contracté une extension qui semble participer de celle du
vieux mot Zinje, ou n’en être plutôt qu’une corruption :
car il revient à Fluet, efflanqué, effilé, élancé; se rappro-
chant de la signification du mot en espag. et en port.
En espag. Lindo, beau, net, pur; en port. Zindo, joli,
gentil. :
Linja, ado, adj. Nippé; qui est bien fourni en linge;
pourvu de linge.
Linjariè, s. f. Ensemble du linge d’une maison, d’un
ménage, et non lingerie, qui est un appartement réservé à
la conservation et à la réparation du linge, en fr.
Linje, s. m. Linge, toile employée aux besoins du
ménage; linge pour le corps.
Dér. du lat. Linium pour Lineum, transformé en Linjum,
linjeum, et par suppression de la finale, Linge.
Linla, s. m. Lilas, Lilas vulgaris, Linn., arbuste de la
fam. des Jasminées, originaire des Indes, à fleurs mono-
pétales, tubulées, disposées en grappes.
Lio, s. f., ou Rédorto. Lien formé d’un jeune scion
d'arbre ou d'arbrisseau, où même de jonc ou de tige her-
bacée, qui est tordu par les bouts et assez flexible pour
lier un fagot.
Dér. du lat. Ligamen, lien.
LIR
Lio ou 16, s. m. Lieu, endroit; place; occasion. — Est
plus dans le dialecte montagnard que dans celui de la
plaine. — Voy. 1è.
Liourèio, s. f. Livrée. — Voy. Livréio.
Liouro, s. f. Livre, unité de poids d'après l'ancien
système, qui se divise en 46 onces, 420 gros, 384 scru-
pules, 9,316 grains, et qui variait suivant les localités.
Celle d’Alais valait 415 grammes 89 centig. — La liouro
dé déssouto, retenue de un pour cent que les acheteurs de
cocons font subir à leurs vendeurs en certaines localités :
c'est pour tenir compte du déchet que peut avoir éprouvé
la marchandise, soit dans le transport, soit par défaut
d’un triage préalable assez exact. Cette retenue n’a rien de
commun avec la proportion, qui n’est qu’un escompte. —
Voy. Proupourciou.
Dér. du lat. Zibra, m. sign.
Lipa, v. Lécher. Au fig. manger son bien. — À tout
lipa, il a tout achevé. — Voy. Liqua.
Dér. de l’allem. Zippe, lèvre.
Lipado, s. f. Lippée; bouchée; coup de langue d'un
animal qui lèche; franche lippée, repas copieux et gratuit.
Lipaire, aïro, s. et adj., ou Liquaïre. Qui lèche, qui
aime à lécher; et au fig. écornifleur, parasite; gourmand,
moins délicat que Lipé.
Lipé, lipéto, adj. Dim. Lipétoù. Friand; raffiné gour-
mand ; délicat mangeur; qui est sur sa bouche.
Liqua, v., ou Lipa. Lécher avec la langue; effleurer avec
la langue. Par ext. et au fig. enlever, emporter; effacer;
faire disparaître. — Gardoù a liqua las castagnos, le
Gardon a emporté la récolte des châtaignes, bien entendu
dans une inondation après orage, qui charrie les produits
et la terre des montagnes. L'éouro-dâou, la liquo-fango,
le vent du nord, qui sèche la boue.
Dér. du gr. Aslyw, je lèche.
Liquado, s. /. Bouchée; action de lécher. — Voy.
Lipado.
Liquaïre, aïro, adj. Qui lèche. — Voy. Lipaire.
Liquofroio, s. f. Lèchefrite, ustensile de cuisine pour
recevoir le jus du rôti.
Liquo-sièto, s. m. Gourmand; parasite; ce qu'on pour-
rait traduire mot à mot en fr. par lèche-plat, lèche-assiette.
Liquoù, s. . Liqueur; liquide en général; boisson dont
l’eau-de-vie est la base. — Un véire dé liquoù, un petit
verre d’eau-de-vie ou d'autre liqueur.
Dér. du lat. Liquor, m. sign.
Lirgo, s. f. Glaïeul, iris ou flambe, Zris Germanicus, ou
Gladiolus communis, Linn., plantes de la fam. des Irisées,
qui se confondent avec la Coutèlo. —V. c. m.
Liroun, s. m. Loir, rat des Alpes, loir commun, Myoxus
glis, Linn., petit mammifère de la fam. des Rongeurs.
Ce nom n’est point très en usage; et comme le Loir,
plus rare que le Lérot, lui ressemble beaucoup, on lui
donne, ainsi qu'à ce dernier, le nom de Ra-caïé. —
Voy. c. m.
Rs
LIU
Lis, liso, adj. Poli; lisse; usé par le frottement; mince,
fluet. — Bago-liso, jonc, bague unie, sans chaton ni guil-
lochage. Soupo liso, potage sans garniture, eau bouillie
sans grand assaisonnement. Péço-liso, pièce de monnaie
usée, élimée, mais conservant encore quelque valeur.
Dér. du gr. Al, Atocés, m. sign.
Lis, adv. En courant, sans bruit, comme en glissant. —
Passa lis, passer sans s'arrêter, sans saluer, en voulant
être inaperçu.
Liséto, Liso, Lisoun, s. /. n. pr. de femme. Lisette,
Lise, Louison, dim. de Louise ou de Elise.
Lisièiro, s. f. Lisière, bord d’une étoffe, d’un champ.
Dér. de la bass. lat. Lisiera, du lat. Licium, trame;
mais importé du fr.
Lisquo, s. j., ou Lésquo. Dim. Lisquéto. Lèche, tranche
de pain fort mince; tranche de viande, de saucisson, etc.;
tartine de beurre, de fromage frais. — Lisquo ddourado,
friandise dont on fête un heureux accouchement chez le
peuple, en la distribuant aux personnes qui viennent faire
visite à laccouchée et à celles qui assistent au baptème.
. Elle consiste en de larges tranches de pain blanc, trempées
à diverses reprises dans une pâte faite de lait, d'œufs et de
sucre, et cuites ensuite à la poële. Les pâtissiers ont per-
fectionné cela et en ont fait ce qu’ils appellent des mi-
nerves.
Lissandro, s. m. n. pr. d'homme. Alexandre. — Alté-
ration par apocope.
Listèl, s. m., ou Gistèl. Liteau. — Voy. Gistèl.
Listo, s. . Bande de toile ou de mousseline claire dont
les femmes en grand deuil garnissent leurs bonnets, en
guise de dentelles. Elle doit ètre empesée, lisse et sans
aucun pli.
Listo, dans le sens du fr. Liste, est du pur franchiman
réprouvé.
En angl. Zist, bande, lisière.
Litièiro, s. . Litière. — Ce mot comprend, en lang.,
non-seulement la litière dont on fait le lit des chevaux,
bœufs, porcs, etc., mais toute autre substance qu'on mêle
au fumier dans les cours, pour servir de véhicule aux
déjections des animaux, comme buis, hérissons de chà-
taigniers, mauvaises herbes, etc.
Litre, s. m. Litre, mesure de capacité du système déci-
mal. C'est un des termes de la nomenclature nouvelle qui
est devenu plus tôt et plus généralement familier dans le
peuple. — Toumba’n litre, boire, vider un litre. Toumba
soun litre, boire une bouteille de vin d'un litre en un
repas, déjeuner ou diner.
Litur, liturdo, adj. Lecteur, lectrice; celui ou celle qui
lit, qui fait la lecture.
Lituro, s. f. Lecture; savoir, étude. — À a lituro pér
él, il’a l'avantage de savoir lire: A dé Lituro, il a de l’in-
struction, du savoir, il sait lire et écrire.
— Dér. du lat: Lectura, du v. Legere, lire.
Liuèn, adv. de lieu et de temps, ou Iuèn. Loin, à grande
LON 439
distance. — Dé liuèn én liuèn, à intervalles espacés, à
distance l’un de l’autre, de loin en loin. — Voy. Iuëèn.
Livrèio ou Liourèio, s. [. Livrée; uniforme; signe dis-
tinctif comme drapeau, cocarde, etc.
Logo, s. f. Dim. Louguéto. Espèce de foire ou plutôt de
rendez-vous, où l’on loue des ouvriers pour la moisson, la
vendange, l'éducation des vers-à-soie, et surtout pour les
travaux d'hiver. Ce sont en général des ouvriers de la
Lozère qui se présentent le jour dit, qui est toujours un
dimanche : ils se réunissent en masse sur quelque petite
place autour de l'église, et les enchères commencent à
l'issue de la messe.
Dér. du v. Louga.
Logo (A), adv. Au lieu, tout au contraire. — A logo
d'un chi, mé mandè un lou, au lieu d'un chien, il m'en-
voya un loup. As agu bèou din ta campagno? — A logo,
a plougu tout lou tén, as-tu eu beau temps dans ton
voyage? — Bien au contraire, il a toujours plu.
Dér. du lat. Loco, au lieu.
L'on, particule, ou mieux pronom personnel indéfini.
On, l'on.
Ce mot est le même que On, et l’euphonie seule règle
les cas où chacun doit être employé de préférence, absolu-
ment comme dans le fr. On et l’on.
Comme en fr. contraction de Homines, les hommes.
Long, longo, adj. Dim. Loungué; péjor. Loungas.
Long; qui a de la longueur, de la durée, de l'étendue;
tardif; lent. — Dé long péis longo nouvèlo, a beau mentir
qui vient de loin. S'ésténdre dé soun long, tomber de tout
son long. Sès bièn long, vous tardez bien; vous êtes bien
lambin.
Dér. du lat. Longus, m. sign.
On a compris que le G final, au masc. sing., ne se fait
pas sentir : il n'aurait donc pas dû être écrit, d’après les
principes de notre orthographe. Mais dans ce mot, et dans
quelques autres monosyllabes surtout, conjonctions ou
adverbes, une exception à la règle était nécessaire, moins
peut-être en faveur de l’étymologie, qu'à cause de la for-
mation des composés qui prennent presque toujours la
lettre caractéristique du primitif.
Long, adv. Le long; amplement; d'une manière diffuse.
— Long dé l'aïgo, tout le long de la rivière, sur les bords
de l’eau. Long ddou jour, tout le long de la journée. N'én
sa long, il en sait long, il est très-expert. À la longo, à la
longue, avec le temps. Tout ddou long, en longueur, en
long.
Longamén, adv. Longuement; durant un long temps.
Longo-maï, adv. ou mieux interj. Souhait, vœu, féli-
citation de politesse que l'on adresse à une personne en la
complimentant sur un vêtement neuf, sur une maison, sur
un domaine nouvellement acquis. La phrase entière usitée
en ces circonstances ou en occasions semblables, est :
longo-maï, én bono santa, c.-à-d. puissiez-vous en jouir
longtemps encore en bonne santé. La syncope abrège, et
440 LOU
se fait suffisamment comprendre. La mème formulé simple
Longo-maï s'emploie aussi comme adieu, lorsque deux per-
sonnes se quittent pour quelque temps et se prennent la main.
Longos (Las), s. f. plur. — Ne s'emploie spécialement
qu’en terme de vigneron : Douna las longos, laisser de très-
longues vieltes au bout des sarments de la vigne en la
taillant. Comme le nombre des bourgeons laissés est beau-
coup plus considérable, la vigne a beaucoup plus de raisins;
mais la quantité ne s'obtient qu'aux dépens de la qualité
du vin et de la vitalité du cep. Aussi n'est-ce guère qu'à
une vigne vieille, rabougrie et destinée à être arrachée que
Von fait subir cette épreuve. — Voy. Cargo.
Longo-vuio, s. f. Longue-vue, lunette d'approche.
Trad. du fr.
Lonjo, s. f. Longe, bande, lanière de cuir, ou corde,
qui tient au licou des bêtes de somme; échine du veau ou
sa moitié, depuis les épaules jusqu’à la queue.
Empr. au fr.
Lontén, adv. Longtemps; durant un long espace de
temps. — Té parle dé. lontén, je te parle de longtemps.
Y-a lontén, il y a longtemps.
Loquo, s. f. Dim. Louquéto. Loche, loche des rivières,
loche franche, Cobitis barbatula, Linn., poisson de l’ordre
des Holobranches et de la fam. des Cylindrosomes : dessus
du corps d’un brun olivâtre; côtés jaunâtres nuagés et
pointillés de brun; six barbillons aux mâchoires; longueur
de 12 à 45 centimètres, quand Dieu leur prête vie. Ce
petit poisson, fort commun dans le Gardon, reste au fond
de l’eau, caché dans l'herbe et les pierres; sa chair est
d’un bon goût.
Lou, art. et pron. m. Le. — S'élide devant une voyelle :
l'éoubre, l'arbre, comme en fr. Au gén. dé lou, contracté
en dèl, dal, aujourd'hui déau ou dé !’ devant uné voyelle,
équivalent au fr. de, du / Voy. Ddou). Au dat. à lou, con-
tracté en dou ou à l’, au. Le plur."masc. nomin. et accus:
est lous, les; gén. das, des; dat. et abl. as, aux. Son fém.
sing. fait a, la; gén. dé la; dat. à la; au plur. nom. et
accus. las, les; gén. dé las, des; dat. à las, aux.
Lou capèl, le chapeau; ddou capèl, du chapeau; dou
capèl, au chapeau; l'éoubre, l'arbre; dé l’âoubre, de l'arbre;
à l'âoubre, à l'arbre ; ous capèls, lous doubres, les chapeaux,
les arbres; das capèls, das doubres, des chapeaux, des
arbres; as capèls, as doubres, aux chapeaux, aux arbres.
La fénno, la femme; dé la fénno, de la femme; à La fénnd,
à la femme; las fénnos, les femmes; ‘dé las fénnos, des
femmes; à las fénnos, aux femmes.
Dans le sens pronominal, Lou, m. sing., le; f. sing. La,
la; au plur. m. Lous; f. Las, les. — Aïma -lou, aimez-lé;
low vése, je le vois. Lous aïme, je les aïe; vwésè-lous!
voyez-les. Aimo-la, aime-la; la vwése, je la vois; las aïman,
nous les aimons; vésè-las, voyez-les. Lou qué, célui qui,
celui que; la qué, celle que. Lou qué vèn, celui qui vient?"
lou qué vése, celui que je vois; la qué ’aimo, celle qui
t'aime; Za qué préne, celle que j'épouse.
LOU
Dans la région montagneuse, au nord d’Alais, où les
raffinements du français ont moins pénétré, il s'est conservé
une formule habituelle de langage et d'emploi de l’article
que nos pays de plaine ont presque perdu. Pour désigner
une personne dont on parle, on fait précéder de l'article
son nom où son prénom; on dit : {ou Dumas, low Rocho,
lou Jan, lou Polito, lou Pièré; la Bdoudano, la Mièrguésso,
la Béloun, la Jano, la Mariouné, etc. Dans quelques noms
commençant par une voyelle, on euphonise par une liaison
la rencontre mal sonnante à l’oreille, ou-z-Idoro, le Isidore,
ou bien d’autres fois on compose le nom en supprimant la
voyelle initiale, lou Lissandro, le Alexandre.
Ce sont là, me parait-il, les anciennes traditions qui se
perpétuent, les tendances harmoniques de l’idiome qui se
maintiennent, même avec des mots de forme relativement
récente et plus recherchée. C'est le mème esprit qui a créé
l'élision et qui, à la place de la contraction au gén. déou,
du, substitua le dé {’ avec l’apostrophe. C’est encore ce qui
amena la prosthèse ou addition de l’article au substantif et
au nom propre commençant par une voyelle, avec lesquels
il s’est si souvent confondu.
Pour se rendre complètement raison de cette dernière
particularité si essentielle à noter dans la recherche des
étymologies, il faut se reporter à l’époque. où la langue
aspire à se renouveler et prépare ses voies. Sa grammaire
viendra plus tard; en attendant son vocabulaire, se forme ;
il retient tous les mots qui suffisent à se comprendre; mais
les expressions et les tournures sont empruntées à tous les
idiomes qui courent dans le pays. Le latin en est toujours
la base, le latin dégénéré, corrompu d’abord par son mé-
lange avec l’idiome des provinces romanisées, et par la
prononciation gauloise toujours persistante, puis descendant
encore dans la basse lalinité rustique, et plus que. jamais
laissant dénaturer son caractère. La fixité lui manque; une
ordonnance régulière n'avait ni les moyens, ni le témps de
se formuler en lois assez précises pour discipliner des
esprits différents d'habitudes et indépendants les uns des
autres, l'autorité magistrale du latin ayant disparu. De
loin on pouvait déjà pressentir que le roman, issu de cette
latinité sans cohésion et sans règles, arriverait bientôt à
se diviser lui-même en dialectes qui, sans se séparer ! tout à
fait de leur ‘principe commun, s’en affranchiraient assez
pour être distingués en deux langues, la langue d'Oïl et la
langue d'Oc. — Voy. Rouman.
Aussi, au moment de la-rénovation,, disons-nons, la
langue, qui ne désertait pas son vocabulaire, 1 manifestait-
elle une irrésistible tendance à lui donner une autre forme.
Les modes de déclinaison et de, conjugaison, ayaient com-
mencé par s'éloigner du pur latin classique : par la sup-
pression des désinences et de la quantité, l'accent, tonique
se déplagçait et la prononciation modifait le sens et l'ortho-
‘graphe des mots selon de nouvelles exigences, ; les flexions
n'avaient aucune valeur grammaticale; tous les cas dispa-
rurent, et l’article détermina la relation et les genres, en
LOU
précédant invariablement tous les substantifs, mème les
noms propres, qui ont fini cependant par le supprimer.
Avant tout, la nouvelle langue vise un but et ne semble
préoecupée que du besoin de rendre sa forme plus brève,
plus adoucie et plus commode,
Nous ne voulons saisir au passage qu'un des phénomènes
de ce mouvement qui amène le roman à modifier les prin-
* cipes et le caractère de l'idiome générateur dont la déca-
! dence ne suffit plus aux besoins intellectuels. Nous avons
précédemment indiqué les procédés dont on avait usé envers
les finales latines et les suflixes / Foy. Agno, suff.), il est
évident que, les cas et les genres une fois supprimés, la
* désinence avait dù tomber, puisque sa [portée était nulle
“et qu'elle devenait un embarras à la prompte expression de
t'la pensée. Mais en mème temps devait intervenir un signe
sensible pour suppléer aux genres et donner aux mots une
détermination précise, et leur acception, nécessaires à la
clarté du discours : et l'article se posa en avant de tous les
noms, au masculin et au féminin, au singulier et au pluriel.
“A1 fut pris au Jatin ile, illa, son pronom démonstratif le
“plus usuel: son rôle et son emploi étaient fixés. De la basse
M Iatinité, où son usage n'élait pas inconnu, il se transmit
au roman, et advint à la langue dOïl et à la langue d'Oc.
L'idiome, qui arrivait ainsi à se simplifier en secouant
+ Ja gène des règles grammaticales et des flexions trop variées
ettrop diverses, représentatives du genre, du nombre, des
cas, de la personne, des temps et des modes, avait encore
à obéir aux instincts d’euphonie qui convenaient le mieux
” à l'oreille et d’une plus facile articulation. La contraction
et l’adoucissement. modifièrent donc la forme latine : en
07 ‘roman, comme dans les langues d'Oîl et d'Oc, l’article faisait
au masc. sing. nom. El, do; gén. del, de lo; dat. al, el, a lo;
W au plur: nomin. els, los, li; gén. dels, de los, de li; dat.
M als, a los, a lis; le féminin, au sing. et au plur., était en
+ tout conforme au nôtre, sauf au nomin. qui disait La et à,
+ Ce n'était pas suffisant pour le français et le languedocien
” modernes : leet Z’ fr. remplacent ez et Lo, au sing. masc., et
” ainsi desuite pour les autres cas; pour nous, la conson-
‘"nancé est aussi amortie par lou, ddou, dou; lous, das, as,
"1 n Mais l'introduction de l'article précédant tous les noms
* devait avoir un résultat également notable. Lo, le et lou,
“de formation ‘identique, se terminaient par une voyelle
+ ou moins sourde, et qui était exposée à rencontrer un
++ mot portant une voyelle initiale. L'élision eût sauvé un
1°: heurtement désagréable: le-roman, plus dominé par l'in-
+ *‘fluence latine, ne s'en préserva pas toujours ; le français et
Je languedocien en redoutèrent le choc, et la combinaison
LS la première lettre de l'article avec l'apostrophe, La
* déguisa l'inconvénient à l'oreille. Mais peu à peu cette
ie formé, qui était purement orthographique, fut impuissante |
‘5 1 adistinguer le substantif auquel elle. s'adaptait, et elle fut
# © absorbée par ce substantif. I s'en suivit un écart qui
je < * transfgu rait lé primitif, puisque l'article accessoire de
le mot lui-même, et de là des obscurités étymologiques
‘ LOU +41
souvent difficiles à débrouiller. Ce qui même augmente
l'embarras, c'est que ces incorporations d'articles constituant
un mot ne sont qu'un accident qui n'a rien de systéma-
tique ni de régulier : elles se sont impatronisées dans le
vocabulaire par l'usage et sans parti-pris d'application
générale; car on peut remarquer souvent, à côté dlun
substantif dans lequel l’article s'est agrégé, un autre nom
dans les mêmes conditions qui a résisté à l'amalgame.
Dans le vieux français les exemples ne manquent pas :
on cite Lierre, du lat. Hedera, qui fit primitivement eure,
puis ierre, ière, avec l’art. l'ière, et enfin par la confusion
Lierre, et qui est pour nous Éouno; Loriol, qui reste, après
avoir été Oriol, l'oriol, du lat. Oriolus où Aureolus, notre
Figo-Léouridou ; Luette, de la basse lat, Uveta ; Landier, de
Anderia ; Lendemain, dans le principe endemain ou demain ;
Liard, que nous avons gardé avec sa forme si particulière
de l'i initial aspiré; ete., etc.
Dans le domaine de la langue d'Oc, de semblables trans-
formations se sont produites, sans s’assujettir à celles
qu'opérait la langue d'Oil ou le français; ce qui est une
nouvelle preuve de son indépendance et justifie sa préten-
tion d'être considérée comme une langue à part, de mème
origine que le français et non un de ses patois corrompus.
Nous ne relèverons pas les différences ou les similitudes
dans les substantifs communs autrement que par ce qui
ressort de la nomenclature; nous ne voulons ici nous
attacher qu’à certaines dénominations locales, territoriales,
et aux noms propres qui en peuvent dériver, sur lesquels
ont agi les influences dont nous parlons. Le nombre des
mots appartenant à cette catégorie est nécessairement assez
restreint, bien que les agrégations de l’article se soient
étendues au masculin et au féminin, au singulier et au
pluriel; mais ces accidents, et nous ne les signalons pas
tous, ont dû nous arrêter, si peu considérables qu'ils
semblent en apparence, car ils intéressent l’histoire des
noms propres et ne peuvent être négligés dans la recherche
de leurs étymologies.
Voici quelques-uns des exemples à l'appui des indications
qui précèdent et qui leur serviront ‘de commentaire. Il
suffira le plus souvent de placer à côté du nom actuel la
plus ancienne de ses formes mentionnée par les vieux titres,
pour avoir raison de celle dans laquelle il s'est fixé et des
adjonctions parasites qui lui donnent une nouvelle physio-
nomie, sans qu'il se prive cependant aujourd'hui de: l'ajus-
tement pléonastique de l'article.
Lacan, n. pr. de lieu, dit Mansus de Campo.
” Lafoùs, Mansüs Fontium. — Voy. Fon.
Lagriniè, Mañsus de Agrinerio.
. Lanciso ‘du lat. Incisus, incisa.
Tail: appelée en 4425 Anglata, én 4244 de Anglada.
PES ñoï partitif, lieu planté d'ormes, formé du
lat. Uimus, Uilmetum, en fr. Ormoie, dit en 4460 de
Ulmeto, en 4554 l'Olmède, aujourd’hui Laumède, commune
‘de Roquedur (Gard); le n. pr: d'homme Lomède, avec le
442 LOU
simple Lolm n. pr. de lieu, commune de Saint-Christol-
lès-Alais, L'hom, variante; d'où les noms d'hommes Aou-
méssas, Aouméras, lang., et les analogues Almessas, Omes-
sas, et Ormoy (Eure), lous venus de l’ancien lang. Ome,
Oume, en fr. Orme, sans compter les composés Delorme,
Dormoy, comme les autres en un seul mot.
Léouriéou, Lauriol, n. pr. de lieu et de personne, du
lat. Aura ou Aurum, donnant Aureolus, dimin., dit en
4237, ad ripariam d'Auriol ; en 1463, Vallatum de Auruol ;
Loriol plus tard, et enfin en fr. Lauriol.
Larna, s. m. n. pr. de lieu. Larnac, hameau près Alais,
de la commune de Saint-Hilaire de Brethmas, mentionné
en 1314 Ecclesia de Arnaco. — Le mème nom est commun
à d’autres hameaux, notamment dans les communes des
Mages et de Montaren, pour le Gard. Il est devenu aussi
n. pr. d'homme.
L'ancienne désignation donne la clé de l’étymologie. Il
s'agit évidemment du nom tudesque ou goth Arnald,
devenu Arnaud, Arnal, abrégé en Arna, tous assez répandus
dans notre pays, auquel s’est ajouté l’article lou, le, élidé
et syncopé avec la première syllabe du mot, comme on le
trouve fréquemment.
Larza, s. m. n. pr. de lieu. Larzac, plateau fort élevé
dont une partie se trouve à l'extrémité du département du
Gard, commune de Trève, et forme la ligne de séparation
entre la Dourbie (Gard) et la Jonte (Aveyron).
Le même mode de formation par la fusion de l’article nous
paraît avoir, comme pour le précédent, fait le mot actuel :
lou Arza, l'Arzac, Larza, Larzac. Le primitif dégagé serait
Arzac, forme romane, conservée par le fr. mais réduite
dans notre dialecte qui supprime toujours le c final, en
Arza, provenant du lat. Arsacus, avec l’adoucissement
euphonique du z pour s et la modification ordinaire du
suffixe caractéristique; de sorte qu’il se présenterait deux
étymologies également probables et justes. L'une, tirée du
lat. Aræ, arcis, forteresse, venue du gr. ’Apzxx, sommet,
sormmité, prise dans ce dernier sens; l’autre, du lat. Arsus,
arsa, brûlé, indiquant un lieu qui aurait été ravagé par
les flammes : circonstance assez fréquente, soit pendant les
invasions des Barbares, soit à la suite des guerres de reli-
gion, pour perpétuer le souvenir de ces calamités à la place
qu'elles avaient le plus frappée. Comme analogues les n. pr.
Larcy, Darcy, etc., malgré la variante des désinences, sont
trop rapprochés pour n'avoir pas une des deux racines à
s'appliquer : c’est toujours l’incorporation de l’article au
radical,
Lascours, du canton de Vézenobres, qu'on trouve, en
1003, Curtes, en 129% Mansus de Curtibus, et en 1547
Las-Cours; comme dans la commune d'Aulas, le roman
écrivait en 4074 Las Cors, le latin de 4447 Mansus de
Curtibus, et en 4513 territorium de las Cortes.
Laval, commune de la Grand'Combe, de Colias, de Nimes
et autres lieux, d’abord mentionné, en 4099, pour la pre-
mière indication sons le nom de Vadlis, et en 4344, 4345
LOU
et 4561, Parrochia ou Ecclesia de Valle, traduit en 4620,
avec la séparation de l'article par Notre-Dame de La Val,
et enfin avec la réunion par Notre-Dame de Laval.
Dans cette série pourraient encore être compris des noms
propres, qui, à divers degrés, par la prosthèse ou par apo-
cope, ont donné lieu à des variantes singulières, comme :
Leyris ou Lairix, n. pr. de lieu dans les communes de
Castillon de Gagnère et de Quissac, et nom d'homme;
Leyrollo, Leyrolles, commune de Génolhac, dimin. formés
sans doute de Aïro, aire à blé, du lat. Area, m. sign., que
la bass. lat. rendait par Laïranicæ, donnant ensuite Lai-
rargues (Hérault), et Alairargues (Hérault), Alairanicæ,
dont les analogues pourraient amener Alleirac, Alleyrac,
Olérargues, Oulérargues, comme Oleyra et Lerrac (Cha-
rente), et encore une nombreuse famille; à moins cependant,
ce qui n’infirmerait en rien notre thèse, que ces derniers
commençant par o, ou, n’eussent leur primitif dans le lat.
Olla, qui a donné par la même addition, à côté de nous et
dans le Gard, le n. pr. Loulos, Loules, commune de Tornac,
dans lequel l’article avait plus de facilité à se confondre.
Léousièiro, Leuzière, la Leuzière, les Leuzières, dans
plusieurs de nos communes, de Éousé, chène, en lat. Ne,
ayant pour analogues La Lauzière, Lozière, et peut-être
Luziès, et Luziers, commune de Mialet, seraient toujours
dans le même cas.
Lou, s. m. Dim. Loubé, loubatoù; péj. Loubatas. Loup,
Canis lupus, Linn., mammifère unguiculé de la fam. des
Digitigrades ou Carnivores. C'est l'animal le plus dan-
gereux de nos contrées. I] habite les montagnes au nord
de notre département; mais quelquefois la faim le chasse
de ses bois et il vient visiter nos plaines; on organise alors
de grandes battues officielles : on y fait bombance, on tue
quelques lièvres ou quelques perdreaux qui n’en peuvent
mais, le plus souvent rien, et le loup s’en retourne chez lui.
— À las coslos én long cowmo lous lous, c’est un faïnéant
qui ne veut pas se baisser pour travailler : ce dicton tient
à un préjugé d'autant plus sot que tout le monde est à
même d'en vérifier la fausseté, quand on tue un loup, ce
qui arrive et n’est pas même bien rare, en dehors des
battues. D’après cette croyance, le loup aurait les côtes
placées en long, parallèlement à l’épine dorsale, ce qui
l'empècherait de faire des voltes et des mouvements
ondulés dans le torse. Le fait est qu'il a un peu moins
d’élasticité et de souplesse que les chiens; mais il wen est
pas moins agile, et le dicton s’applique sans doute à sa
paresse que le besoin seul lui fait secouer au point de le
rendre féroce. És counégu coumo lou lou blan, il est connu
comme Barabas à la passion. Grano dé lou, race biscaïne,
maudite, vagabonde. À vis Lou lou, il est pris par le gosier,
il ne peut parler, articuler un son : d’après un préjugé
vulgaire et très-ancien, puisque Platon lui-même le rap-
porte, la vue de l’homme sur le loup, et réciproquement
celle du loup sur l’homme, a une influence telle, que si
c’est le loup qui aperçoit le premier l’homme, celui-ciest
LOU
frappé d'une extinction subite de voix ; que si au contraire
c'est l'homme qui voit d'abord l'animal, le loup perd
complètement sa force. Le dicton perpétue cette ridicule
croyance.
Dér. du lat. Lupus, m. sign.
Lou, s. m. Loup, lubin, bars commun, Labrax lupus,
Linn., poisson de mer, de l'ordre des Holobranches et de
la fam. des Acanthopomes, qui atteint une grande taille,
et dont nos gastronomes font, ainsi que les anciens Romains,
beaucoup de cas. Son nom lui vient de sa voracité. A
l'approche du printemps il cherche à remonter dans les
eaux douces et pénètre en quantité dans les étangs de la
Méditerranée, d’où il regagne la mer en septembre.
Lou, s. m. Dim. Loubé. Louve, petite fenêtre, lucarne,
pour communiquer des combles d’une maison sur les toits.
!-Loubäou, adj. des deux genres. — S'emploie comme
qualificatif pour désigner certains sols : tèro ou téraïre
loubdou, terrain friable, léger, semé de rocailles à fleur de
terre toutes percillées. Les racines des plantes et des
arbres y pénètrent et y trouvent toujours de la fraicheur
et de l'humidité.
Ce nom a été imaginé sans doute à cause de l'aspect
étrange et hérissé de ces pierres et rochers.
Loubatado, s. f. Portée d'une louve; nichée de louve-
teaux. Au fig. famille mal famée.
Loubatas, s. m. Augm. et péjor. de Lou. Gros loup,
dangereux et redoutable. Au fig. homme avide, sauvage,
dur.
Loubatièiro, s. f. Lieu hanté, habité par les loups; site
escarpé, sombre et sauvage.
Loubatou, s. m. Dim. de Lou. Louveteau; petit de la
louve; jeune loup.
Loubé, s. m. Dim. de Zou. Petit ou jeune loup, et n.
pr. de chien; petit chien-loup. — C'est cette espèce parti-
culièrement qui fournit aux journaliers le chien qu’ils ap-
pellent Gardo-sa, garde-sac.
Loubièiro, s. f. el n. pr. de lieu et de personne. Lou-
bière, la Loubière. — Cette appellation est commune et
comme celle de ZLoubatièiro { V. c. m.), a été inspirée ou
par l'aspect sauvage du site lui-mème, ou par ce qu'il était
fréquenté par les loups : ce qui se tient. Le masc. Loubiè,
en fr. Loubier, Louviers, ses analogues, ont la même
Loubo, s. . Louve, femelle du loup.
Loubo est aussi un terme injurieux pour une femme:
“une réminiscence du mot fr. Louve, traduisant le lat.
Lupa, qui était jadis donné aux femmes de mauvaise vie.
Cependant cette injure ne comporte point dans notre
dialecte cette ancienne acception : Loubo veut dire plutôt
une méchante, une cruelle, une brutale femme.
Loudro, s. f. Bourbe; débris ou détritus pourris et
délayés; tout dépôt d’un liquide épais, croupissant, entrai-
nant l’idée de la saleté et du méphitisme.
Dér. du lat. Lutum, m. sign.
LOU 443
Loufo dé lou, s. . Vesse de loup, sorte de champignon
de la tribu des Lycoperdonés, très-facile à reconnaitre :
forme arrondie, surface lisse, chair homogène, et transfor-
mation de sa partie intérieure en une poudre brune ou
noire d'une excessive ténuité. La production de cette
poussière noire à l’intérieur n'arrive que peu à peu et par
les progrès de la végétation; dans le jeune âge, la chair est
d’un blanc pur. Cette espèce est suspecte, quoique certains
auteurs affirment qu’elle soit comestible. Roques ne partage
point cette opinion. Le mieux est de se priver d'en pré-
parer et d'en manger.
Louga, v. Louer; prendre ou donner à loyer; affermer,
donner ou prendre à ferme; louer un domestique à gages.
— Aï louga moun drole pér manobro, j'ai loué mon jeune
garçon pour servir de manœuvre. S'és lougado pér cham-
brièiro, elle s'est mise en service. Louga un varlé, prendre
un valet. Louga un chival, louer un cheval.
Pour les immeubles, il vaut mieux dire Arénta (V. c. m.)
un bé, un oustéou, uno cambro. Dans cette acception,
Louga et Arénta, comme le fr. Louer et Affermer, se
disent du propriétaire et du fermier, du bailleur et du
preneur.
Dér. du lat. Locare, m. sign.
Lougaje, s. m. Louage, location d’un meuble, d’une
chose. — Un chival dé lougaje, un cheval de louage, un
locati. Lougaje d'uno cadiètro, location d’une chaise.
Louïro, s. f. Loutre, loutre commune, Mustela lutra,
Linn, mammifère unguiculé de la fam. des Digitigrades ou
Carnivores. — Cet animal, aux pieds palmés, ne s’écarte
jamais de l’eau, car, marchant difficilement, il deviendrait
une proie aisée pour ses ennemis, s’il s’éloignait de son
refuge. Il vit uniquement de poisson, et comme il est très-
adroit pècheur, il suffit d'un seul de ces animaux pour
dépeupler une grande partie de rivière. Il est d’un naturel
très-sauvage. Il atteint soixante centimètres de longueur.
Sa fourrure, assez prisée dans Je temps, a beaucoup servi
depuis à confectionner des casquettes qui ornèrent le chef
des conducteurs de diligences, quand il y avait encore des
diligences.
Dér. du lat. Lutra, que Pline affirme être venu du gr.
Aoveuw, détruire, ou laver, par cette double raison que cet
animal coupe et détruit les racines des arbres au bord des
rivières, ou qu'il est presque toujours dans l’eau.
Louiso, s. f. n. pr. de femme. Louise. — Le dim.
est Louisoun, Louison. Le fr. Louis, au masc., a fourni
son similaire Louis au lang., qui fait au dim. masc. Louisé,
Luisé. — Voy. Luis et Luiso.
Dér. du lat. Ludovicus, formé lui-même de l’ancien
frank ou tudesque ZLuit, illustre, et Wich, vaillant guerrier.
Louja, v. Loger; donner à loger; héberger. — Dans
l’acception de Habiter, Démoura et Résta sont de meilleur
aloi.
Dér. du lat. Locare, placer.
Loujamén, s. m. Logement, habitation, gite.
44 LOU
Loujis, s. m. Hôtellerie; auberge; maison où on loge
les voyageurs et qui porte encore souvent pour enseigne :
Bon logis.
Loumbar, s.m. Lombard, établissement où l'on prêtait
sur gages ; espèce de mont-de-piété. — Des Italiens, sortis
particulièrement de la Lombardie, vinrent en France où
ils se firent prêteurs, banquiers et surtout usuriers; ils
durent créer les premiers établissements de ce genre, qui
prirent leur nom. Lowmbar désigne donc la maison de
prêt fondée par les Lombards, et aussi l’individa qui exer-
çait leur profession. Il est devenu nom,propre.
Loumbardo, s. f. Espèce de cerise, grosse guigne, ainsi
nommée parce que probablement elle fut apportée de la
Lombardie.
Loungamén, adv. Longuement, pendant longtemps. —
Variante de Longamén.
Loungano, s. f., ou Loungagno. Longueur; lenteur ;
retard; musardie; lambinerie.
Loungaru, udo, adj. P6j. Loungarudas, asso. D'une
longueur exagérée et disgracieuse, comportant aussi, pour
certaines choses, l’idée de mince qui semble ajouter encore
à la longueur. C’est un péjoratif capricieux de ZLoungas
qui est déjà un augm. de Zong.
Loungoü, s. f. Longueur; étendue d’une chose d’un
bout à l’autre; durée de temps. — Réssa dé fustos dé
loungoù, scier des poutres à la même longueur, les débiter
à la longueur voulue. Faïre uno batudo dé loungoù, faire
une séance qui compte.
Lounguëto, s. f. Nom d’une châtaigne de très-bonne
espèce, grosse, en cœur, productive.
Lounjèiro, s. f. Enseigne qu’un particulier suspend
accidentellement à sa porte pour annoncer qu'il vend au
détail le vin de sa récolte; elle resle en permanence au
contraire à l'entrée du cabaret, qui en reçoit son nom;
taverne, bouchon, cabaret. — Achata soun vi à la loun-
jéiro, acheter son vin à pot et à pinte dans un de ces
endroits. En fr. le cabaret s'appelle Bouchon, de son
enseigne composée ordinairement dans le Nord de plusieurs
bouchons de bouteille enfilés. La lounjètro est un paquet
de verdure ou de linge. ;
Dér. de la bass. lat. Longieria, m. sign.
Loupio, s. f. Loupe, tumeur enkistée sous la peau;
excroissance charnue, ronde, indolente.
Dér. du lat. Lobus, m. sign.
Lour, lourdo, adj. Lourd, non pas de poids, mais
d'esprit; grossier; épais; lourdaud.
Dans l'acception de Pesant, nous employons Grèou. —
Voy. c. m.
Dér. de la bass. lat. Zurdus, m. sign.
Lourdije, s. m. Lourdise; grosssièreté ; épaisseur, pe-
santeur d'esprit. En parlant des animaux et spécialement
des moutons, vertige, tournis, maladie qui leur est par-
ticulière.
Louta (Faire), ». Faire une loterie d'une chose, la
(RS,
LUC
mettre en loterie. — Quouro tirou aquélo mostro qué fan
louta? Quand tire-t-on la loterie de cette montre?
Empr. au fr. Lot. af
Loutariè, s. f. Loterie, sorte de tirage au sort de divers
lots ou objets.
Loutoü, s. m. Laiton, cuivre jaune; métal d’un jaune
pâle, résultant de l'alliage du cuivre et du zinc... ="
En gallois, Lœtum, m. sign.; en flamand, Laœtéon; en
angl. Zatten.
Lu (Sén), s. m.n. pr. Saint Luc, dont la fête est le
48 octobre. — Pér Sén-Lu séméno mol ou du, à la Saint-
Luc, sème la terre molle ou desséchée, dure: c'est: le
temps des semailles, et il n’est pas bon de les retarder
quel que soit l’état du terrain.
Dér. du lat. Lucas, Luc.
Lucado, s. f. Éclaircie, court intervalle de beau temps
pendant une pluie continue; rayon de soleil ou jour plus
clair qui luit à travers les nuages qui s'ouvrent.un
moment.
Dér. du lat. Lux, lucis, lumière.
Lucha, v. Lutter; combattre à la lutte, corps à corps.
Au fig. chercher à l'emporter dans une lutte quelconque.
Dér. du lat. Zuctare, m. sign.
Luchaïre, s. m. Lutteur; qui fait sa profession de lutter
dans les jeux publics. — La lutte et la course de taureaux
sont toujours fort en vogue parmi les populations du midi
de notre département. Pour figurer. comme: acteur! dans
une de ces courses, il suffit d’un peu de hardiesse et
d’agilité dans les jambes au besoin; il n’en est pas de
même pour la lutte. Il y a là des règles €t un cart dans
l'attaque et la parade à l'aide duquel un adepte abattra un
homme deux fois plus fort s’il n’en sait pas autant que
lui. Aussi dans ces localités, dès leurs plus jeunes-ans,' les
enfants s'exercent à ce jeu, et c'est de là que l'on voit
sortir cette foule d’athlètes qui vont se disputer le prix
dans nos cirques romaïns ou de fabrique plus moderne et
plus modeste qui s'impro visent dans toutes fètes de village.
Mais parmi ces lutteurs combien peu atteignent Ja gloire
des Vénitien, des Mazard, des Rabasson! N'importe : ce
n’en est pas moins devenu une profession; il est vrai de
dire qu'elle ne mène guère à la fortune, et comme on s’y
use vite, bien moins encore par les efforts qu'on yfait que
par les habitudes de cette singulière vie d'artiste, il wyau-
drait mieux faire autre chose. is
Luché, s. m. Louchet, espèce de bèche, outil d'agri-
culture et de jardinage. — La forme dela bêche varie
dans les diverses localités; le louchet se compose invaria-
blement d'un manche de bois, ayant à son extrémité
supérieure une main ou petite traverse en forme de T :
l'autre extrémité, sur le mème plan, formant la pelle, du
même morceau de bois, est recouverte ou chaussée d’un
fer large, aplati et tranchant, parallélogramme de. 33 cen-
timètres sur 48 environ, au-dessus duquel est un éperon
en fer en marchepied. On enfonce verticalement le louchet .
: t AL]
+R
LUC
en appuyant les deux mains sur la petite traverse et en
forçant vigoureusement du pied sur l'éperon. La tranche
de terre ainsi coupée est détachée tout à fait en faisant
levier avec le manche de l'outil; l'ouvrier l’enlève comme
une pelletée et la jette sens dessus-dessous devant lui.
Dans les terrains trop caillouteux où le fer plein du lou-
chet ne peut pénétrer, on se sert d’un louchet à trois
pointes, sorte de trident, qu'on manœuvre de la mème
manière. Le travail au louchet est le meilleur de lous; car
il est profond, uni, et la terre en est complètement retour-
née; mais c’est celui qui va le moins vite et qui par con-
séquent est le plus cher: néanmoins, ici, dans toutes les
terres où ne peut aller la charrue, le premier labour se
fait au louchet de préférence au béchar (V. c. m.), qui le
remplace aussi dans les sols caillouteux.
Luchéta, v. Travailler au louchet; bècher au louchet,
puisque le Dictionnaire de l’Académie ne nous permet pas
encore de nous servir du verbe Loucheter, après avoir
cependant adopté le louchet, qu'il définit du reste fort mal.
Luchétado, s. . Coup de louchet; sa profondeur; la
portion de terre qu’il remue ou qu'il enlève. — Émb'un
parél dé luchétados lou trdou séra prou bèl, encore deux
coups de louchet, et le trou sera assez grand. À dos ou
trés luchétados trouvas l'aïgo, à la profondeur de deux ou
trois coups de louchet, vous trouvez l'eau. Trasès aïci
qudouquos luchétados, jetez ici quelques pleins louchets de
terre.
Luchétaïre, aïro, adj. Ouvrier qui travaille au louchet.
Lucho, s. f. Lutte, exercice gymnastique. Au fig. com-
bat d'esprit, d'énergie, d'argent, contre un adversaire
quelconque; effort, résistance. — Y-a cént francs à la
lucho, le prix de la lutte est de cent francs. Soun pas
pariès énd’aquélo Lucho, ils ne sont pas d’égale force dans
cètte lutte. La trouèsiémo és lucho, ou mieux à las trés
_sou luchos, prvb., ce qui correspond au lat. Tertia solvet.
Cette locution vient d’une règle de la lutte qui veut que
les deux adversaires qui se disputent en dernier lieu le
prix, aient déjà renversé chacun deux hommes: c'est ce
qu'on appelle Éstre din lou rampèou (V. c. m.). Cette
troisième lutte est donc la bonne ou la belle, celle qui
décide tout. C’est bien la signification du dicton langue-
docien, que le fr. avait anciennement rendu aussi par:
A la troisième voit-on la lutte. |
Dér. du lat. Lucta, m. sign. par apocope.
Lucièn, s. m. n. pr. d'homme. Lucien.
Lucio, s. f. n. pr. de femme. Lucie.
Lugo, s. f. n. pr. de femme. Luce. — Ce dernier, par
une altération familière, est devenu aussi n. pr. d'homme,
abrégeant Lucièn.
Ces trois noms du reste paraissent avoir le même radical
lat. Lux, lucis, Lucere, qui a donné Lu, Luc, Lucas.
Lucre, $. m. Lucre; gain; bénéfice; profit d’une indus-
trie, d’un négoce, d’un travail.
Dér. du lat. Lucrum, m. sign.
LUN 5
Lucre, s. m. Cabaret, petite linotte; gros-bec-sizerain,
Fringilla linaria, Temm., oiseau de l’ordre des Passereaux
et de la fam. des Conirostres ou Conoramphes. Sommet de
la tête d'un cramoisi foncé; la gorge et la poitrine d’un
cramoisi plus clair; ventre blanc-rosé; parties supérieures
roux-brun avec des taches noires; deux pennes d’un blanc
roussâtre traversant l'aile. Son cri d'appel ressemble à
celui du tarin et ses allures sont celles de la mésange;
lorsqu'il est en cage, on le voit toujours en mouvement et
sa gaité ne se dément jamais.
Lugar, s. m.— Ce mot qui, dans l'origine, s'appliquait
à toutes sortes d'étoiles, surtout aux plus brillantes et
notamment aux planètes qui sont plus apparentes, ne
s'emploie guère que dans cette phrase : lou lugar ddou
pastre, l'étoile du berger; c’est la planète Vénus qu'on
appelle aussi. l'étoile du soir ou du matin, selon l'heure à
laquelle elle se lève.
Dér. du lat. Lucere, luire, briller.
Luis, s.m. n. pr. d'homme. Louis. — Son dim. est
Luisé et par fantaisie Lisaïo; Louisé est presque franchi-
man. — Voy. Louiso.
Luisan, s. m. OEil. — Ce terme est de pur argot cita-
din, inconnu dans la campagne, où il n'a été importé que
par quelque loustic revenu de l’armée ou de son tour de
France; il ne s'emploie guère qu'au plur. {ous luisans, les
yeux. | à
Luiso, s. f. n. pr. de femme. Louise. — Son dim. est
Lisoun où Louisoun, mème Léséto, qui pourrait cependant
venir de Élise ou Lise, en fr.
Luiténén, s. m. Lieutenant.
Empr. au fr. qui, pour le même besoin, a dù prêter
sou-luiténén et luiténén-courounèl, etc.
Lun, s. m. Lampe en fer et quelquefois en fer-blane,
composée d’un petit récipient où est l'huile, dans laquelle
nage une mince mèche qui sort par un bec pour brüler
sans verre, et d’une queue verticale, dont la première
moitié est fixe et la seconde, mobile au moyen d'un anneau
qui les joint, est terminée par une pointe et un crochet :
cette mobilité sert à maintenir le récipient de niveau, la
pointe et le crochet à porter et à suspendre la lampe. Il
est bien cerlain que le mot Lun ne s'applique qu'à cette
lampe primitive ct que toutes celles d'invention moderne
s'appellent Lampos. Le lun, qui ressemble beaucoup à la
lampe antique, est léger, peu embarrassant, commode;
c’est ce qui le conserve -obstinément dans l'usage domes-
tique. Cependant comme sa lumière, qui n’est point pro-
tégée, éclaire assez peu, qu'elle s'éteint au moindre cou-
rant d’airet qu’elle peut aisément mettre le feu, justement
par la facilité dont on abuse d’accrocher le Zun partout, il
serait à désirer de le voir remplacer par quelque lampe
perfectionnée et surtout par la lanterne, là où il offre du
danger.
Lun se prend aussi en général pour lumière, la lumière
d’une chandelle, d'une lampe, etc. — Fasès-mé lun,
517.
446 LUN
éclairez-moi, mot à mot, faites-moi lumière. Amoussas
lou lun, éteignez la chandelle, la bougie. Pourtas dé lun,
apportez de la lumière. Pourias pourta sèt candèlos qué
j'amaï noun mé farias Lun, quand vous auriez sept Chan-
delles allumées, ce n’est pas à vous que je demanderais de
m'éclairer; c.-à-d. je n’ai pas confiance en vous, ni en vos
conseils; je n’ai pas foi en vos reliques. Ounté vaï sans
lun? où va-t-il ainsi à l'étourdie, en aveugle, pour se
casser le nez? Lou més p'dou lun, il n’en fait pas fi, dit-on
de quelqu'un soupçonné de hausser le coude, en comparant
le vin à de l'huile qu’il aime mieux boire que mettre à la
lampe. Lou diable vous fariè bé lun sé, le diable vous
pousserait bien, vous inspirerait bien, si... M'én fiche coumo
dé pissa sans lun, je m'en moque comme de coucher nu-pieds .
Lun sans doute plus anciennement s'écrivait Lum; notre
dialecte fait sentir très-nettement la finale n et nous la
maintenons comme à bien d’autres, tels que issan, essaim,
noun, nom, fun, de fumus, etc.; il dérive du lat. Zumen,
lumière.
Lunar, ardo, adj. Lunatique; capricieux; fantasque;
d’humeur inégale; quinteux.
Dér. de Luno.
Lunardiè, ièiro, adj. — Mème sign. que Lunar. —
Jamaï lunardiè noun rampliguè soun gragnè, prvb., jamais
capricieux, inconstant, ne fit fortune.
Lunèl, s. m. n. pr. de lieu. Lunel, ville, départ. de
l'Hérault. — Le sobriquet ironique, donné au moyen-àge
aux Lunellois, Pésquo-Luno, qui pèche la lune, était-il une
allusion au nom de leur ville, ou à l'esprit sottement avan-
tureux et préoccupé de chimères impossibles de ses habi-
tants? — Voy. Éscuinoun.
Lunétos, s. f. plur. Lunettes à deux branches qui
serrent les tempes, plutôt que celles qui tiennent en pin-
gant le nez, qu’on appelle Méricles. — Lunétos! liuèn
f'iétos, bonjour lunettes, adieu fillettes.
Dér. de Zun.
Luno, s. f. Lune, planète satellite de la terre; lunaison;
quartier de la lune. — Faï luno, la lune éclaire, il fait
clair de lune. Son aspect, sa clarté ou sa pâleur, la lim-
pidité ou la brume de l’atmosphère qui l'entoure ont donné
lieu à des observations passées en proverbes. Le latin
disait en un hexamètre :
Pallida luna pluit, rubicunda flat, alba serenat.
Le languedocien traduit, en rimant :
Luno panlo, l’aïgo davalo;
Luno roujo, l’âouro sé boujo.
Le français dit à son tour :
La lune pâle fait la pluie et la tourmente,
L’argentine, temps clair et la rougeâtre vente.
L'influence de la lune sur les divers travaux de l’agri-
culture est encore une croyance fort répandue, et la lune
nouvelle et la vieille lune jouent toujours un “très-grand
rôle, dont les nombreux dictons en cours parmi les agri-
LUS
culteurs rendent témoignage. Couper le bois, planter,
semer, tailler ér luno vièio où én luno jouino, sont loin
d’être une chose indifférente pour les cultivateurs. IL n’y
a pas grand mal à observer pour tout cela les phases de
la lune, mais il y en aurait si l'on renvoyait un travail
pressant, lorsque d’ailleurs toutes les conditions de l’at-
mosphère et du terrain sont réunies, pour attendre la lune
favorable qui n'offrirait pas ces mèmes conditions. Bos
coupa dé luno, bois coupé dans le quartier favorable de la
lune. Quan ténèn dé luno? Quel est le quantième de la
lune? Pléoura tout aquésto Luno, il pleuvra tout ce quartier.
Ës pas dé luno, il n’est pas disposé, il n’est pas dans son
bon jour. Aou quiou d'aquésto luno, réponse évasive pour
renvoyer aux calendes grecques. Quan la luno doura trés
bès, quand le croissant de la lune aura trois becs, trois
pointes, c.-à-d. jamais. Low diable luno, imprécation appro-
priée aux nouvelles croyances, du lat. Me diva luna,
sous-entendu adjuvet. Luno mérerudo, fénno bécudo, dé
cént ans én cént gn'a trop d'uno, lune qui commence au
mercredi et femme bavarde, c'est trop d’une tous les cent
ans.
Dér. du lat. Luna, m. sign.
Lupégo, s. f. Huppe, puput, Upupa epops, Linn.,
oiseau de l’ordre des Passereaux et de la fam. des Ténui-
rostres où Leptoramphes. — Une belle huppe, formée par
deux rangées de longues plumes rousses terminées de noir,
a fait donner son nom à ce joli oiseau. Il est dommage
qu'on ne réussisse que diffirilement à l'élever en cage: Sa
taille est celle d’un merle, et sa chair est délicieuse à son
passage de septembre et d'octobre ; il est insectivore.
Luquétaïre, aïro, adj. Vendeur d’allumettes appelées
Luquétos; modeste industriel qui vendait ordinairement
ce qu'il fabriquait, détrôné aujourd’hui sans espoir de
restauration et dont le nom mème sera oublié, car il n'y
a plus de luquétos ni brouquétos. — Voy. ©: m:
Luquéto, s. f. Allumette en chènevotte, qui se dit aussi
| Brouquéto. — Ces anciennes allumettes, remplacées par
les nouvelles qui, tout en offrant quelques dangers, valent
infiniment mieux et sont meilleur marché, n’ont pu mème
léguer leurs noms qui s’appliqueraient parfaitement aussi
à leurs héritières, puisque Zuquéto vient de Aluqua, de ce
qu’elles sont destinées à allumer ou à s’allumer facilement,
et Brouquéto veut dire menu bois, buchette. On dit eom-
munément aujourd'hui Aluméto. — Voy. Brouquélo:
Lura, ado, adj. Luron; rusé; subtil; hardi; habile avec
finesse. — Voy. Délura.
Luro, s. f. Allure; manière d'agir; ruse; manigance.
— Boutas! counowisse vosto luro, allez! allez! je connais
votre affaire; je vous vois venir ayec vos gros sabots.
Corrupt. du fr. Allure.
Lus, pron. pers. des deux genres, sing. et plur. Leur,
à eux, à elles. — Douna lus quicon, donnez leur quelque
chose. Lus part séra lèou facho, leur part sera bientôt
faite. Aqud’s lus, c'est à eux ou à elles.
ä
Lusèr, s. m. Lézard, — Voy. Lètrou.
-Dér. du lat. Lacerta, m. sign.
Lusèrno, s. /. Luzerne, Medicago sativa, Linn., plante
de la fam. des Légumineuses, qui fournit un fourrage très-
bon et très-abondant.
Dér. selon Bullet, du celt. Lus, herbe; herbe par excel-
lence.
Luséto, s. f. Lusette, ver-à-soie qui fait son cocon bien
avant ceux avec qui il vit et dont il semble être un
avorton. On attribue cette précocité à ce qu'il n'aurait
accidentellement que trois mues. Si cela était, ce serait en
effet un accident, car les vers provenus de sa graine ou de
son papillon rentrent, dit-on, dans l'espèce ordinaire de
cinq âges et de quatre mues. Peut-être aussi les lusettes
sont-elles soumises aux phases régulières de l’insecte, que
‘seulement des causes inconnues leur font accomplir avec
plus de rapidité. Quoi qu’il en soit, on considère comme
d'un bon augure ces avant-coureurs qui sont ordinaire-
ment en petit nombre dans une chambrée, et on ne s’avise
que par la petitesse, de leurs cocons qu’on voit paraître
lorsque la masse des vers n’est encore qu'à la quatrième
rue.
On donne aussi le nom de ZLuséto à ces vers petits,
maigres, sans force et sans vigueur, qu’on voit dresser et
balancer machinalement leur tête transparente et qui ne
sont qu'une variété de la pernicieuse engeance des Passis.
L'Académie, qui enregistre dans son Dictionnaire mainte
expression provinciale lorsqu'elle a mieux ou tout aussi
bien, adoptera sans doute Zusette ou le reste, comme il
lui plaira, et tant d’autres techniques de la langue séri-
cicole, pour lesquels elle n’a point d'équivalents et que le
languedocien lui offre tout faits et bien faits.
Dér. de Zusi, à cause de la transparence de ces vers,
provenant chez les uns de maladie et chez les autres d'une
maturité hâtive.
Luséto, s. 7. Ver-luisant, lampyre luciole, Lampyris
nocticula, Linn., insecte de l'ordre des Coléoptères et de
la fam. des Apalytres ou Mollépennes. La femelle est
aptère, c.-à-d. sans ailes, et jette une clarté phosphorique
et brillante qui, dans les nuits d'été, fait le charme des
M 447
promeneurs champêtres; le mâle est ailé et beaucoup
moins brillant, et la nature se montre ici admirable dans
ses dispositions : la luciole, qui ne peut voler, se laisse
découvrir dans l'herbe, grâce au phare amoureux qui
trahit sa présence.
Dér. de Lust, Lucere, briller.
Luséto, s. j. Vesce sauvage ou vesceron, Vicia segetum
parva, Linn., plante de la fam. des Légumineuses, qui
croit entre les blés, aux tiges grèles et rameuses, aux
feuilles étroites, vertes, opposées par paires le long d'une
côte qui finit par une vrille avec laquelle elle s'attache aux
plantes voisines; ses fleurs sont blanches et les gousses qui
leur succèdent sont velues. Cette vesce est résolutive ap-
pliquée extérieurement.
Luséto, s. /., ou Nivouléto. Luette, dont ce mot est une
corruption. — Foy. Nivouléto.
Lusi, . Luire; briller; étinceler; éclairer: répandre de
la lumière, de la clarté, un brillant éclat.
Dér. du lat. Lucere, m. sign.
Lusido, s. j. Rayon; jet de lumière; lueur accidentelle;
éclaircie en parlant du temps brumeux, pluvieux; inter-
valle lucide dans le délire de la fièvre. — Faguè uno
lusido, la pluie cessa un moment, eut un instant de répit.
À bé quéouquos lusidos, ce malade a bien quelques inter-
valles lucides.
Dér. de Lusi.
Lustre, s. m. Lustre, appareil pour éclairage; lustre
d’une étoffe est du pur fr. — Sauvaces définit Lustre,
crépuscule, clarté de l'aurore, et Lustres au plur., mouches,
morceau de tafletas noir que les femmes mettaient sur
leur visage pour faire paraître leur teint plus blanc. Ces
deux acceptions ne sont point de notre idiome, ou se sont
oblitérées.
Lustro, s. f. Huitre.
Ce mot, hors d'usage, est remplacé sans façon par
Huitro, franchiman qui ne le vaut pas.
Dér. du lat. Ostrea, m. sign.
Ly ou Y, adv. Y, en fr. — Selon les besoins de l’eu-
phonie ou le caprice, on dit l’un ou l'autre: Vaï-ly ou
Vaï-2-y, Vas-y; ly vÜou où y véou, j'y vais.
M
M, s. f. M; s'appelle Émmo, treizième lettre de l’al-
phabet, dixième des consonnes.
M est classée grammaticalement parmi les labio-nasales,
_à cause de l'intervention simultanée des lèvres et du nez
dans son émission. Elle est une des articulations que l’en-
fant réussit le mieux et le plus vite à former, et se pro-
duit presque par la seule commissure des lèvres qui oblige
l'air et le son à remonter et à ressortir : ma mamo, mama,
maïre, mèro, sont les premiers mots prononcés el les plus
faciles. Aussi, dans toutes les langues, M sert-elle à dé-
signer l’idée de maternité, de mère.
L'orthographe et la prononciation des mots où intervient
448 M
l'Émmo, M, appelle une observation. Quand elle précède
une voyelle, elle la saisit de sa vraie articulation: point
de difficulté. Mais quand elle est suivie d’une consonne,
le B ou le P particulièrement, et complétant une syllabe,
ou qu’elle se redouble, par exemple : cambo, poumpo,
témpouri, toumple, simple, simbèl, émmasqua, émpéita,
émmaïgrési, etc, alors, comme en fr. elle prend le son
de l’n. Le français et quelques-uns de nos lexicographes
vont plus loin : à la fin de certains mots dans lesquels M
se rencontre, ils l’écrivent pour ne pas la prononcer et
font entendre nettement un n, comme dans essaim, par-
fum, nom, renom, etc., et à la première personne plur.
des verbes aimam, aïmaviam, avèm, énténdiam, etc. Il y
a là une anomalie à laquelle nous n’avons accédé qu'à
regret et à demi : dans les cas de redoublement et devant
le B et le P, nous suivrons l'orthographe usitée; mais
nous n'avons pu nous résoudre à placer l’èmmo finale,
comme fait le français, au bout des mots où le son nasalisé
est si distinctement accentué, dans les subst. et dans les
verbes; nous la refusons encore aux noms venus de lan-
gues étrangères, comme Jérusalem, Mathusalem, Bethléem,
qui, pour notre dialecte, ont une très-franche terminaison
par èn grave. Ces réserves faites, l'explication est aisée.
Cette orthographe n’est qu'une concession étymologique
au latin; mais elle ne s’imposait pas avec la même force
aux idiomes issus du latin, qui la conservent en l’altérant
au moins dans beaucoup d’inflexions. Le latin faisait pres-
que toujours suivre m d’une voyelle, excepté dans quel-
ques nominatifs neutres, à l’accusatif et au génitif plu-
riels, et il l’articulait distinctement, comme signe carac-
téristique des cas et des genres. La moyenne latinité
n'avait pas à enfreindre ces règles : elle attaquait autre-
ment la langue. Peu à peu le roman, qui était aussi une
dégénérescence si l'on veut, et une rénovation, se montra
plus hardi dans ses procédés. Une de ses principales pré-
occupations fut de donner à la parole la rapidité et la
concision ; il y arriva par les syncopes, les retranchements
de finales et par ses méthodes d’abréviation des mots et
des syllabes; il se reprit aux consonnances et aux tradi-
tions de prononciation longtemps oubliées, et se plia aux
nécessités que lui faisaient subir les importations de nou-
veaux conquérants. De ce travail, aidé par les instincts
pationaux et par un esprit différent, sortirent la langue
d'Oc et la langue d’Oïl, qui ne répudiaient pas la suc-
cession : qui gardaient l’alphabet latin avec toute la valeur
de ses lettres, mais qui arrangeaient leur prononciation à
leur manière et la combinaient suivant leurs dispositions.
Les troubadours, auxquels nous sommes redevables des
plus sérieux efforts de transformation et qui furent les
interprètes et les initiateurs du génie de la langue, étaient
imbus de la diction latine, de sa syntaxe et de son ortho-
graphe : ils transposèrent tout cela dans la langue écrite,
peut-être dans la langue parlée : ainsi, par respect pour le
romain, les infinitifs de leurs verbes s’écrivaient par r
MAC
final avec la simple suppression de la voyelle : amar, légir,
far, pour amare, legere, fari, ete.; les substantifs se débar-
rassaient de leurs désinences : templum, tempus, fames,
lumen, nomen, fumus, pour faire temple, temps, faim,
nom, fum, lum, etc.; les temps des verbes amamus,
habemus, venimus, sûmus, elc., s'écrivaient amam, avèm,
vénèm, som, etc. Ils écrivaient avec les lettres étymolo-
giques; il est douteux qu'ils les fissent entendre à la pro-
nonciation : le temps au moins est-il venu y apporter de
sensibles modifications. Un seul exemple encore: Hom,
roman, homme, tiré du lat. Homo, hominis, est représenté
par ces trois lettres originaires dans les vieux manuscrits;
il est devenu Om, dégagé de l’H parasite; il est aujour-
d’hui le pronom indéfini On, ét le son nasal se fait sentir
comme il est écrit.
La lettre M a passé par tous ces degrés; et les mots qui
la portaient, en arrivant dans la langue d'Oc et dans la
langue d'Oïl à travers le roman et la basse latinité, n’ont
pas su se dégager suffisamment de son empreinte en écrivant,
alors qu’elles retournaient à leurs véritables tendances
organiques en la prononçant comme un #. La nasale N est
en effet gauloise, une consonnance que le celtique recherche
et affectionne ; M est une lettre plus latine, essentiellement
latine. La langue d'Oc et le français redoutent également
cette inflexion à vide que produit M dans un mot ou à sa
finale, puisqu'ils la transforment, ce que ne faisait pas le
latin.
Nous n’apercevons donc pas bien pourquoi notre ortho-
graphe ne représenterait pas aussi exactement que possible
une articulation si précise. Si, cependant, nous avons
voulu concilier toutes choses, en redoublant les m comme
en fr., et en les conservant devant le b et le p, nous nous
révoltons contre les exagérations et les tyrannies étymo-
logiques, en la remplaçant par la lettre réellement son-
nante et à la finale de certains mots; nous croyons par là
nous rapprocher davantage de la prononciation eupho-
nique, qui est le vrai génie de la langue d'Oc.
Ma, pron. poss. f. Ma. — Le masc. est Moun, mon;
cependant comme en fr., devant les mots qui commen-
cent par une voyelle, on dit Moun, quoique au fém. :
Moun amigo, mon amie.
Contr. du lat. Mea, m. sign.
Ma,s m. Mt. — Ma dé cocagno, mât de cocagne, que
nos fètes publiques ont tant vulgarisé.
Ma, en entrant dans ce composé, doit être ainsi écrit
d’après la rigueur de notre orthographe; mais peut-être
vaut-il mieux lui conserver sa forme française et lui laisser
le & étymologique final, puisque aussi bien c’est un mot
tout français, seulement avec la désinence languedocienne.
— Voy. Mat.
Maca, v., et ses composés et dérivés. — Voy. Maqua.
Macaroun, s. m. Macaron, massepain, pâtisserie de
pâte d'amandes et de sucre.
Ce mot est ancien: il existait dans la moy. lat. avec la
7
MAD
MAD 449
mème signification, témoins les Actes de la vie de Guil- | jourd'hui qu'une appellation polie qui se répand chaque
laume l'ermite, qui rapportent que Ad prandium, ei
apposuerunt maccarones seu lagana cum pastillis.
Machoto, s. f. Chevèche, petite chouette, Strix passe-
rina, Linn., oiseau de l'ordre des Rapaces et de la fam.
des Nocturnes ou Nyctérins : c’est la chouette pour laquelle
les petits oiseaux ont tous tant d’antipathie et qui sert à
leur faire une chasse fort amusante. Elle est la plus petite
de ses sœurs, 25 centimètres de longueur, et comme elle
n'est guère plus grande que le hibou petit-duc fou Cho ou
Tuqué), on peut facilement les confondre et échanger leurs
noms. — On appelle également Machoio, la Hulotte ou
Chat-huant de Buffon, chouette hulotte, Striz aluco,
Temm., quoique celle-ci soit plus grande et atteigne jus-
qu'à quarante centimètres. — Nous rappelons ici que ce
qui distingue surtout les chouettes des hibous, c'est que
les premières n'ont point de plumes en forme de petites
cornes que les seconds dressent à volonté sur leur tète;
tous. deux ont d'ailleurs beaucoup de traits de ressem-
blance qui peuvent faire confondre certains d’entr'eux.
On devrait, au reste, mieux tenir compte aux uns et aux
autres des services signalés qu'ils rendent à l’agriculture
en détruisant les petits mammifères rongeurs qui causent
tant de dégâts aux récoltes.
Cho semble être entré dans la composition du mot
Machoto. — Voy. Cho, Duganèl, Tuqué.
Machou, s. m. Gros lourdaud, grosse bête; mauvais
compagnon; vilain homme. — Il est d'ordinaire accom-
pagné de cette épithète qui ajoute à sa portée : Vilèn
machou, appellation injurieuse et méprisante, comme : sot
animal, méchant voisin, difforme de visage et d'esprit.
En espag. Macho, mulet.
Machuga, v. Meurtrir ; causer, produire, faire des meur-
trissures; mâcher; mâchonner; broyer. — Dans le premier
sens, il renchérit sur Maqua (V. ©. m.). S'és machuga la
man, il a eu la main écrasée, broyée. Aqud’s tout machuga,
c’est tout abimé, tout charcuté. Machuga un crousté,
mächonner un morceau de pain. — Voy. Machuguéja.
Machugaduro, s. f. Violente meurtrissure.
Machuguëja, v. fréq. de Machuga. Màcher négligem-
ment et par petits morceaux ; mâchonner ; pignocher.
Maçoü, s. m. Maçon, ouvrier ou artisan qui fait les
bâtiments, les maisons, à chaux, pierres, ciment.
Macoumèou, s. f: Ambrette; graine musquée, Bamia,
nom des semences de la Ketmie musquée ou odorante,
Ibiscus abelmoschus, Linn., plante de la fam. des Mal-
vacées, qui croit dans les Indes, l'Égypte et l'Arabie.
Maçouna, v. Maçonner; bâtiren pierre, brique ou moellon.
Maçounariè, s. f. Maçonnerie, ouvrage du maçon; art
ou profession de bâtir.
Macruso, s. f. Macreuse, oiseau { Foy. Fouquo), avec
laquelle celle-ci ne doit pas être confondue.
Madamo, s. /. Madame : nom, titre qui ne se donnait
jadis qu'aux femmes d’un certain rang. Ce n’est plus au-
jour davantage : aussi que de Mas sont devenues Madamo!
— Voy. Mas.
Ma-dannaciou, s. . Par ma damnation! que ma dam-
nation, sous-entendu arrive! — Bien des jurons ont été
tellement adoucis ou masqués que ce ne sont plus même
des paroles dénuées de sens, mais plutôt de simples sons.
Quant à ceux qui ont conservé leur pureté primitive, ils
sont ordinairement revètus d'une construction elliptique
qui en rend l'intelligence assez difficile au premier abord,
et, si l'on veut bien, la signification presque douteuse. Il
ne faut donc pas croire que les personnes, et c'est heureu-
sement le plus grand nombre, qui emploient ces tristes
formules sans songer à toute leur portée, soient aussi cou-
pables que si elles la complétaient par l'intention. Cepen-
dant, s’il faut absolument à la colère des paroles qui sou-
lagent en s'échappant, comme le vocabulaire des jurons
est certes assez riche, que le choix des plus innocents
prouve du moins que l'instruction que l’on répand sert à
faire comprendre ce que l’on dit.
Madéiréso, s. f. Espèce de pomme, calville blanc,
bariolé de cramoisi.
* En espag. Madera, bois.
Madéléno (La), s. [. La Magdeleine ; jour de la fête de
sainte Magdeleine, le 22 juillet; pris comme date. — Par
singularité, la Madéléno qui, dans cetle acception, s'écrit
et se prononce avec les deux é fermés, prend le dernier à
ouvert lorsqu'il devient nom pr. de baptème, Madélèno. —
Pér la Madéléno la nose és pléno, lou rasin véira, la figuo
maduro, lou bla-t-éstréma, prvb., à la Magdeleine, la noix
est pleine, le raisin tourné, la figue müre, le blé renfermé.
Rasin dé la Madéléno, raisin de la Magdeleine, espèce
_ précoce qui ne réussit bien que dans les bons terrains et
en treille suspendue. En espalier, elle donne fort peu et
en vigne basse encore moins; mème pour obtenir du fruit
faut-il, en la taillant, ne lui laisser que des viettes,
Cargos, qu'on courbe en les attachant. Si on ne lui laissait
que des coursons, elle produirait peu. Elle donne alors
beaucoup de belles grappes dont les grains assez serrés
sont de moyenne grosseur, ovoïdes et assez fermes. Le bois
est tendre, les yeux renflés, les feuilles bien découpées. La
fiéiro dé la Madéléno ou dé Béoucaïre, parce qu’elle a lieu
à cette époque, la fameuse foire de Beaucaire qui est une
époque importante dans nos localités. C'est à ce moment
que marchands, artisans, fournisseurs de toute sorte, qui
donnent à crédit toute l’année, apportent leurs comptes à
k payer. Deux raisons avaient introduit cet ancien usage :
le vendeur tenait à toucher tout son argent à la fois pour
aller à Beaucaire renouveler ses approvisionnements de
douze mois, et le propriétaire consommateur n'avait guère
d'argent qu'alors où il venait de vendre ses cocons. La
facilité qu'ont maintenant les commerçants de s'approvi-
sionner au jour le jour, et l'invasion des industriels qui
n’attendent pas une seule époque dans l’année pour toucher
450 MAG
des fonds, doivent tendre à diminuer beaucoup les comptes
de Beaucaire.
Dér. du lat. Magdalena, m. sign.
Madéloun, s. f. n. pr. de femme. Dim. ou variante de
Madélèno. Madelon, formation française.
Madoun, s. f. n. pr. de femme. Dim. et contraction de
Madéloun, qui ne peut se rendre que par Madon, en fr.
Madouno, s. f. Madone; représentation de la Sainte
Vierge. — N'est pas tout à fait de l’idiome local; dans ce
cas, on dit ordinairement la Sénto-Vièrjo, comme Nosto-
Damo, lorsqu'il s’agit d’une dévotion, d’un lieu de pèle-
rinage.
Composé de Ma et du vieux mot Dono, traduit par Ma
Douno, ma dame.
Madu, maduro, adj. Mür, mûre; qui a acquis toute sa
maturité; en parlant des fruits de la terre, quand ils n’ont
plus de verdeur; d’un abcès, quand il est prèt à crever;
d’une fille, quand elle arrive à un âge où elle est bonne à
marier.— Magna madu, ver-à-soïe prêt à faire son cocon
et qui devient alors quasi-transparent, d’une couleur jaune
dorée. Fio maduro porto l'éfan à la cénturo, fille mûre a
chance d’être bienlôt mère.
Dér. du lat. Maturus, m. sign.
Madura, v. Mürir. — Se dit mieux Amadura. —
Voy. c. m.
Madurun, s. ". Portion d’une quantité de fruits ayant
atteint leur maturité que tous n'ont point encore. —
Sapartà lou madurun, séparer le mûr de ce qui ne l’est
pas. — Voy. Amadurun.
Magagna, v. Tracasser; malmener; incommoder; gâter.
— Lou magagnés pas, né le tourmentez pas. És tout ma-
gagna, il est tout mal hypothéqué, il a bien des infirmités.
Dér. de la bass. lat. Matignare, m. sign., dont le v. fr.
avait fait aussi Méhaigner.
Magagno, s. f. Malaise; tracas; incommodité; fatigue;
défectuosité; vice, tare, défaut. — A toujour quéouquo
magagno, il a toujours quelque dérangement, quelque in-
commodité. Crén la magagno, il redoute la peine. La
fénno és coumo la castagno, bèlo déforo, dédin és la ma-
gagno, la femme est comme la châtaigne, belle au dehors,
la tare est au dedans.
Magagnoüs, ouso, adj. Malade; dolent; chétif; valé-
tudinaire; tourmenté ; inquiet ; accablé.
Magasin, s. m. Magasin, lieu où l’on tient, où l’on vend
des marchandises. = Voy. Boutigo.
Empr. au fr. qui avait pris le mot de l'arabe Maghaxzin,
trésor, lieu où il est renfermé.
Magna, s. m. Ver-à-soie, bombyx du mürier, insecte de
l'ordre des Lépidoptères et de la” fam. des Filicornes. On
sait que c’est la chenille de cet insecte qui forme le pré-
cieux cocon d'où on tire la soie. — Faïre dé magnas,
élever des vers-à-soie, pour son propre compte, soit que
le propriétaire en dirige lui-même l'éducation, soit qu'il
la confie à un magnaguier. Faire lous magnas, élever les
MAH
vers-à-soie d'autrui, en qualité de magnaguier. Fasès dé
magnas ou véndès vosto fièio? Élevez-vous des vers-à-soie
ou vendez-vous votre feuille? Jan faï lous magnäs éncù
dé moussu…, Jean élève les vers-à-soie, ou est magnaguier
chez monsieur.
En langue romane, Manger se disait Maniar; de là a dû
venir Magna, à cause de la voracité du ver-à-soie à son
dernier âge. Le vieux français l’appelait aussi Magnan,
que le nouveau aurait dû garder. Magnan qui, du reste,
commence à revenir dans la langue savante, finira par
avoir cours partout ainsi que plusieurs autres termes de la
sériciculture, que le français est bien obligé de prendre
dans les pays séricicoles.
Magnaguiè, s. m. Magnanier, ou magnagnier ou magna-
guier, chef d’un atelier où l'on élève des vers-à-soie; celui
qui les élève pour le compte d'autrui. Magnaguièïro est
le fém.; celle qui remplit le même emploi. — Jéou sou
moun magnaguiè, je dirige moi-même l'éducation de mes
vers-à-soie. Quouro davalo voste magnaguiè?' Quand doit
arriver celui qui élève vos vers-à-soie? — Les conditions
auxquelles le propriétaire traite avec le magnaguier sont
diverses : tantôt il le paie entièrement en argent, tantôt il
diminue la somme fixe et l’intéresse dans la réussite, en
lui donnant un tant pour cent du produit; enfin, et ceci
est pour le magnaguier spéculateur qui doit avoir quelques
avances, le propriétaire donne sa feuille, fournit la magna-
nerie avec tous ses agrès et n’est plus chargé de rien : le
magnaguier fait tous les frais de l'éducation et prend les deux
cinquièmes ou le tiers des cocons. C'est ce qu’on appelle :
Faire lous magnas el Douna sous magnas dé trés un ow dé
cin dous. I] est bien entendu qu’en cas d’échec, l’un perd
le prix de sa feuille et l’autre les dépenses qu'il a faites. -
Magnaguièiro, s. f. Magnanerie, et tout aussi bien ma-
gnaguière; coconnière; atelier où l’on élève des vers-à-
soie ; femme qui dirige une éducation de vers-à-soie.
Magnèrétos, s. f. plur. Petites façons; petites mines;
minauderies.
Dim. de Magnèro.
Magnèro, s. f. Manière; façon d'agir, où de faire ou
d’être; sorte, espèce; usage, coutume; habitude; affecta-
tion. — Dé magnèro qué..…., de manière que..., de sorte
que. espèce de conjonction.
Mago-muôou, s. m. Jacée des prés, Centaurea jacea,
Linn., plante de la fam. des Composées Cynarocéphales, à
tige haute d'un mètre, cannelée, droite et rougeñtre, à
racine ligneuse et vivace, à fleurs en tuyaux purpurins
et serrés; excellent vulnéraire, bonne pour les hernies
et pour guérir en gargarisme les aphtes, les maux de
gorge, et en application, employée pour les contusions ou
les écorchures que le bât ou les traits font aux mulets et
aux bôtes de somme. ;
Son nom lui vient probablement de cette circonstance,
car il semble une altération de Maquo-mudou où Miou,
mulet meurtri, blessé.
MAI
Mahoûù, s. m. Carreau en terre cuite. — Voy. Maoù. -
Mahouna, v. Carreler. — Voy. Maoùna.
Mai, s. m, Mai, cinquième mois de l’année, composé de
trente-un jours; arbre orné de rubans et de banderolles,
planté devant la porte de quelqu'un pour lui faire honneur,
parce qu'originairement cela se faisait le 4er mai. — Lou
més dé maï frés et gaï, le mois de mai frais et gai.
Dér. du lat. Maïus, m. sign.
* Maï. s. m”., adv. conj. Plus, le plus; davantage : se rend
encore différemment selon qu'il est employé. — Lou maï
et lou mén, le plus et le moins. Né vole pas maï, je n’en
veux pas davantage. N'aï maï qu'él, j'en ai plus que lui.
Né vos un pdou maï? En veux-tu un peu plus? Lou maï
qué vou’n pièsque léva, és cin sôous, le plus que je puisse
_vous en rabattre, c'est cinq sous. Aquô vou un éscu, lou
maï, cela vaut un écu au plus. Né vos maï? En veux-tu
encore? Dé qué voulès maï? Que voulez-vous de plus?
Aquè véou maï, cela vaut mieux, cela vaut davantage.
Aime maï y-ana, j'aime mieux y aller. L'haisse mai qué
mañ, je le hais au possible, plus qu'il n'est possible de le
dire. W farias maï el maï qué vous ou diriè pas, Vous
auriez beau faire, il ne vous le dirait pas. Y pode pas dé
maï, je n'y puis autre chose, ou faire autre chose. Né maï
ni mén, quoi qu'il arrive, quoi qu'il en soit, de toute façon,
quoique vous en disiez. Faguén un tour et pas maï, faisons
un tour seulement, sans plus. És tus qu'aime lou maï,
c'est toi que j'aime le plus. Dé maï én maï, de plus en
plus: Tant et maï, autant que possible.
Dér. du lat. Magis, m. sign.
| Maïa, adj.m. Maillé. — Se dit du perdreau qui se maille
| lorsqu'il devient adulte, c.-à-d. dont l'extrémité des pennes
| prend de petites marques ou taches blanches, appelées
mailles, qui disparaissent en vieillissant. Au fig. par ext.
. on le dit d’un adolescent qui commence à se sentir, et par
antiphrase d'un ci-devant jeune homme.
Dér. de Maïo.
Maïa, v. Terme du jeu de quilles pour exprimer que la
boule passe au travers sans en renverser aucune.
Maïdiou (Lou), s. m. n. pr. de lieu. Le Masdieu, vil-
lage de la commune de Laval dans l'arrondissement d’Alais.
— Les vieux titres donnent à ce lieu, en 4223, le nom de
Mansus Dei, et aussi Mansa Dei. Le lat. Mansus, Mansa,
Mansio, maison, demeure, à fait le lang. Mas; de là
Mas-Diou, qui, par hyperbole d’euphonie, est devenu
Maï-Diou. C'est une formation analogue à celle de Hôtel-
Dieu, Lachaise-Dieu, ete. Il existe encore au Mas-Dieu
une vieille église à laquelle était sans doute attachée quel-
que Mense. Il est connu au surplus que le Mas-Dieu était,
avant 4790, une communauté indépendante, faisant partie
de la viguerie d'Alais et du diocèse d'Uzès, doyenné de
Sénéchas.
Maïgramén, adv. Maigrement, petitement; parcimo-
nieusement.
Maïgre, maïgro, adj. Dim. Maïgré ; augm. Maïgras.
MAI 451
Maigre, qui n'a point de graisse; aride; sec. — Acdou
maïgro, chaux maigre. — Voy. Acdou.
Maïgre, s. m. Maigre, partie de la chair où il n'y a
point de graisse; le maigre, chère où l’on s'abstient de
viande; ordinaire des jours maigres. — Faïre maïgre, ne
pas manger de viande, s'abstenir du gras.
Dér. du lat. Macer, macra, m. sign.
Maïgri, v. Maigrir, devenir maigre. — On dit mieux
S'émmaïgrési. — Voy. ©. m, ;
Maïgrinèl, èlo, adj. Maigret, maigrelet.
Dim. de Maïgre.
Maïgroù, s. f. Maigreur; état de ce qui est maigre.
Maïgroustèl, èlo, adj. Maigre; décharné; mince; sec.
Variante ou péj. de l'augm. Maïgras.
Maiïo, s. f. Maille, d’un bas, d’un filet, d’un tissu fait à
l'aiguille ou au métier. — Toumba uno maïo, laisser tomber
ou s'échapper une maille en tricotant. Y-a uno maïo à
voste débas, il ÿ a une maille échappée, un trou à votre bas.
Au fig. À uno maïo à soun débas, en parlant d’une fille,
veut dire qu’elle a fait une tâche à sa réputation, un
accroc à son honneur. Pérdéquén pas la maïo, ne nous
embrouillons pas dans les feux de file; ne perdons pas la
tête; ne perdons pas la tramontane; ne perdons pas la
carte. És dé la bèlo maïo, se dit au pr. et au fig. pour une
chose ou un homme d'importance, qui ne saurait passer
inaperçu ni à travers maille, comme le frétin.
Maïo, Maille, désignait aussi une petite monnaie de
cuivre valant un demi-denier, une obole, dont le nom
s'est perdu comme l'usage, en lang. et en fr. Cependant
on entend encore dire quelque fois : À pas pus ni sdou ni
maïo, qui traduit peut-être le fr, : il n’a plus ni sou ni
maille, il n’a ni denier ni maille. [
Dér. du lat. Macula, tache, maille.
Maïdou, s. m. Bande, morceau d'étoffe dont on enve-
loppe l'enfant au maillot, — Ce mot comprend la couche,
les langes, etc., qui servent à l'enfant au berceau et se
rend par Bourasso.
Dér. du gr. MaX6s, tresse de laine.
Maïôou, s. ». Avantin, sarment que l'on plante pour
obtenir un cep. — C'est une erreur de croire que la cros-
sette, sarment auquel tient un peu du vieux bois, lou ca-
vièl, prend mieux que le sarment qui n’en a pas : l'expé-
rience a prouvé que ce dernier est tout aussi bon. Quant à
l'avantin appelé Barbu, Barbudo, parce qu'il a du chevelu,
il reprend un peu plus aisément bouture el a de l'avance
sur elle.
Dér. du lat. Molleocus, m. sign.
Maioto, s. f. Maillet; petite masse en bois dont se servent
particulièrement les memuisiers. :
Maillet, contre les règles phoniques de la formation des
mots, esten réalité un augm. de Mail ; il en serait de même
de Maïoto, si on le faisait venir de Maïou, mail; mais il
est plutôt le dérivé dim. de Mal, et s'écrivait originaire-
ment Malioto, ou Malhoto, comme on le prononce encore,
452 MAI
ainsi que les mots analogues, en faisant sentir la labiale
mouillée, dans des dialectes voisins.
Maïou, s. m. Mail; jeu de mail; instrument dont on se
sert pour y jouer, espèce de masse de bois ferrée, longue-
ment emmanchée.
Dér. du lat. Malleus, maillet.
Maïoula, v. Envelopper l'enfant au berceau des langes
appelés Maïdou.
Maïrastro, s. f. Belle-mère, seconde femme du père à
l'égard des enfants du premier lit. — Ne se dit point en
mauvaise part comme en fr. Marâtre; il est clair pourtant
que c’est un péjor. de Maire.
Maire, s. f. Mère.
SauvaGes dit sur ce mot :
« La plupart des Languedociens de certains cantons disent :
ma maïre où ma mèro, suivant leur fortune ou leur con-
dition. Les paysans pauvres disent ma maïre, les honnêtes
gens et ceux du peuple qui jouissent de quelque aisance
disent, même en parlant languedocien, ma mèro. Il en est
de même des noms paire, fraïre, sore où souore, au lieu
de pèro, frèro ou sur.
« L'origine de cette différence dans le langage remonte
probablement au temps où la langue française commença à
s’introduire dans nos provinces ; elle fut sans doute apportée
par ceux que les dignités, les emplois ou la fortune rappro-
chaient plus de la cour, et qui étaient dans le cas d’en
parler la langue par nécessité (n’en sachant pas d'autre),
ou par émulation, ou par air,
« Le français devint par là comme le caractère distinctif
de ce qu'on appelait les honnêtes gens. Le peuple, moins
inconstant pour ce qui est de mode, continua à parler
comme auparavant, soit par attachement pour l’ancien
langage, soit par éloignement de tout ce qui sent le faste
et pour ne pas affecter un usage qui semblait n’appartenir
qu'aux personnes d’un étage supérieur; et cette coutume,
ou cette façon de penser est si bien établie, mais seulement
parmi les pauvres gens de la campagne éloignés des villes,
que ceux qui sont sages et modestes disent à leurs enfants
qui reviennent du service, que leur condition ne leur
permet pas de parler français. En conséquence il ne leur
arrive d’écorcher cette langue que lorsqu'ils sont pris de
vin : ce délire, les mettant bien au-dessus de leur fortune,
leur fait oublier leur misère ou leur condition présente.
« Mais ceux qui jouissent de quelque aisance cherchent
depuis quelque temps à se mettre de niveau avec ceux
qu'on appelle les honnêtes gens, en mêlant dans leur
idiome certains termes français qui flattent le plus leur
amour-propre, parce qu'ils semblent affectés à cette classe
d’honnêtes gens : tels sont les termes de pèro, mèro, frèro
et sur, qu'ils prononcent de cette façon, comptant que
c'est la même chose que père, mère, frère et sœur. »
Ces altérations depuis SAUVAGES, on en comprend la cause,
se sont étendues, mais surtout dans les villes et jusque
parmi les artisans du plus bas étage. Et c’est ce qui donne
MAI
tant de piquant à une citation qu’il fait ailleurs sur le
même sujet :
« On trouve dans les actes du xmm siècle les expres-
sions suivantes : Lo païre dèl viscomte dé Béziès; la sore
dèl rèi d'Aragon. Moun païre lo donat à ma sore, dit le
comte de Cominges, etc. On disait : {o san Païre, en parlant
du Pape, et la santa Madre Gléia. Le Pater commençait
ainsi : Lo noste Païre qué ès as cièls, et on faisait le signe
de la croix, dans un autre dialecte, en disant : Én nun dèl
Païre et dèl Filh, etc. Et un savetier de ville s'offensera si
on lui demande : Ount'és toun païre? quéou és ta sore?»
Cependant le raffinement franchiman ne s’est élevé que
jusqu'aux personnes. On ne pouvait guère moins faire, en
parlant de soi, de sa famille, de ses enfants, de Dieu même,
que de se rapprocher servilement du français! Mais quand
il s'agit des animaux, ou dans les mots homonymes qui
suivent, l’ancienne forme s’est conservée. — Li vaï plan,
coumo s'anavo préne la maïre dou nis, il y Va tout doux,
comme un preneur de taupes.
Dér. du lat. Mater, m. sign.
Maire, s. f. Matrice, partie du corps de la femme où se
fait la conception. — Ne s'emploie guère que pour : mal
de mère, vapeur de mère. On dit en plaisantant, d’un
homme qui est pris d'insurmontables bâillements : À 4a
maire, il a le mal de mère.
Maire, s. f. Lie, dépôt, formant un corps mollasse au
fond du baril dans lequel la plupart des ménages tiennent
leur provision de vinaigre; c'est ce qu'on fait aigrir, ce
qu'on äjoute au baril de tous les fonds de bouteille, et qui
sert comme de mère au vinaigre.
Maïrino, s. f. Marraine, celle qui tient un enfant sur
les fonds baptismaux. — Voy. Païri.
Mais, ou Mès, conj. Mais, cependant; pourtant: marque
la contrariété, l'opposition, la balance, la comparaison, la
restriction, l'objection, — C'est un des emprunts faits par
le lang. au fr. de ses adverbes, prépositions et conjonctions
surtout, lorsqu'il abandonpa la construction romane pour se
former sur l’étalon d’outre Loire. Mais ayant conservé
sans altération aucune le sens et la prononciation qu’ila en
français, nous lui avons laissé ainsi son orthographe, bien
que la diphthongue ai, sonnant comme l’é ouvert, n'existe
point dans les mots de pure formation languedocienne. Al
en est de mème de quelques autres mots analogues de pro-
nonciation, Air, Alais, etc., qui, ainsi, mieux et plus vite
compris par l'œil, le seront aussi par l'intelligence. —
Voy. l’art. Ai, diph.
Maïssa, v. Donner un coup de mâchoire; jouer de la
mâchoire ; par ext. bavarder, dégoiser.
Dér. de Maïsso.
Maïssaire, airo, adj. Bavard; qui parle sans discrétion
et sans mesure.
Maïsséja, vw. rédupl., de Maïssa. Bavarder; jabotter ;
cancaner.
Maïsso, s. f. Mâchoire; os dans lequel les dents sont
MAJ
implantées. — Mé mandè un co dé maïsso, il me lança les
dents. Té cope la maïsso, fam., je te casse la gueule. És
uno bono maïsso, se dit d'un porc à l’engrais qui a bonne
dent, qui a bon appétit et n’est point difficile : de même,
uno maïsso déourado, une mâchoire d’or. Par métaphore,
uno maïsso, uno bono maïsso, S'entendent d'une personne
fort bavarde et quelque peu mauvaise langue au besoin.
Quinto maïsso! Quel caquet honbec! Vous prouméte qu'és
uno bono maïsso, je vous assure qu’il ou qu'elle a la langue
bien pendue. .
Dér. du lat. Maæilla, m. sign.
Maïssu, udo, adj. Qui a une forte mâchoire, une bonne
mâchoire; une grosse ganache. Au fig. gourmand; fricot-
teur. .
Dér. de Maïsso.
Maïstre, s. m. Maitre; chef; principal. — Se disait
d'abord Magistre, du lat: Magister; mais il n’est plus
guère usité, même avec la forme que nous inscrivons, et
bien que, à la campagne, on l'emploie quelquefois pour
désigner proprement le maître du domaine ou le maïtre-
valet, le chef : Aïci lou maïstre qué vèn, voici le maitre
qui vient. Il est d’un usage plus ordinaire pris adjective-
ment dans cette expression : vala maïstre, ruisseau ou
mieux fossé principal, car c’est ordinairement une tranchée
faite de main d'homme, dans laquelle tous les petits ruis-
seaux ou fossés des champs voisins viennent jeter leurs
eaux.
Maïstre est devenu un nom propre, et s'écrit en fr.
Mahistre. Sa dérivation n’est pas douteuse.
Maïstro, s. f. Féminin de Maïstre, avec la mème signi-
fication. — Se dit encore de la reine abeille, et du châton
femelle de certains arbres, particulièrement du châtaignier
qui porte sur le même pied des châtons mâles et femelles.
La maïstro est le maïître-châton qui décide de la bonne ou
de la mauvaise récolte selon que le châtaignier en est plus
ou moins fourni après la chute des châtons mâles. — La
remarque est de SAUVAGES, qui s'y connaissait.
Maje, adj. des deux genres. Grand; plus grand; aîné;
plus Agé. — Aquéste és lou maje, celui-ci est le plus grand.
Lou maÿe, V'ainé. La maje-part, la plus grande partie, la
plupart. La maÿe-fèsto, la fète patronale.
Dér. du lat. Major, majus, m. sign.
Majéncoulo, s. m., n. pr. de lieu. Majencoule; Saint-
André de Majencoules, commune de Valleraugue (Gard). —
Cette désignation est évidemment antérieure à celle du
patronage sous l'invocation duquel aurait été placé ce vil-
lag et appartiendrait à la mythologie païenne, si l'on
croyait à l'origine du nom de Majencoules que donne Sau-
VAGES. « Majéncoulo, rapporte-t-il en effet, nom propre de
lieu qu'on dit probablement pour Maïéncoulo, en prenant
li voyelle pour un 7 consonne; et dès lors Majéncoulo res-
semblerait au lat. Maiæ-incolæ, et signifierait les habitants
d’un lieu consacré à Maïa, mère de Mercure, divinités,
l'une et l’autre, des anciens Gaulois; en sorte qu'on pour-
MAJ 453
rait appeler ce lieu, Fanum Maiæ incolarum ; et pour dire :
à Majéncoulo, on traduirait en lat. Ad Maiæ incolas : ce
qui est une étymologie assez naturelle.
« L'on remarquera à ce sujet que la prononciation de
Majëncoulo par le j consonne, est plus récente que celle
par l'é voyelle, Maïéncoulo ; puisque dans les plus anciens
manuscrits languedociens , le ÿ consonne esl inconnu,
comme il l’est dans l'italien, et comme il l'était probable-
ment dans la langue des anciens Romains. »
Nous ne disconvenons point que les déductions du glos-
sateur ne soient ingénieuses et naturelles, et cependant,
sans invoquer ce nom perdu de déesse gauloise, il nous
paraitrait tout aussi naturel de prendre au plus près notre
adjectif Maÿe, grand, de Maÿjus, lat., écrit ou prononcé à la
romaine Maïus, pour la première partie du nom en la liant
euphoniquement par un n à la seconde, en lat. aussi colis :
colles, les cols ardus et élevés de ces montagnes justifient
d’ailleurs l'application; et le mot aurait alors caractérisé
un lieu aux pics élevés. Toutefois, dans cette hypothèse,
la dérivation par incolæ serait sacrifiée, et il faut recon-
naître qu’elle a son mérite, d'autant que le plus ancien
titre où il soit fait mention du nom, en 4224, dit de
Magencolis, ablatif pluriel qui laisse supposer la forme
incolæ, nomin. Par comparaison, un autre nom de lieu
dans notre département, Concoulo, Concoules, a une termi-
naison identique. Si on élait tenté, à cause de sa situation
sur le versant le plus élevé de la Lozère, de lui attribuer
une dérivation du lat. cum collibus, se traduisant par : au
milieu des montagnes, ce qui serait caractéristique, il fau-
drait rappeler aussi sa forme appellative dans un cartulaire
de 4476, qui le désigne par de Concolas, et dans le dénomi-
brement de 4394 par Concolæ, ce qui ramènerait de plus
fort vers l'étymologie de éncolæ, habitants, proposée par
SAUVAGES pour Majéncoulo.
Que si l'on voulait s’aventurer plus loin en ces rechéréhes,
tenant la terminaison des deux mots prise dans le lat.
colla, collis, dat. plur. de collum, cols, montagnes, ne
trouverait-on pas le celt. Magen = Mage — Mag, qui est
représenté en lat. par Mansio ou notre Mas, avec la signi-
fication plus large de Lieu? (Voy. l'art. suiv.) Majéneoulo
voudrait dire en ce cas : lieu des cols, des montagnes; et
l'attribution serait aussi exacte que pour Concoulo, forme
du radical celt. Kon, coin, ou du lat. Cum, avec, eupho-
niquement lié à collis, signifiant coin sur les montagnes
ou avec les montagnes, dans où au milieu des cols de
montagnes, que l'aspect et l'emplacement justifient.
Majes (Lous), s. m. plur., n. pr. de lieu. Les Mages,
commune de Saint-Ambroix (Gard). — Le cartulaire de la
seigneurie d’Alais, cité par M. Germer-Durand, appelle ce
lieu, en 4337, locus vocatus als Malhs, désignation toute
romane; prononciation mouillée par Zh. Près de Montpellier,
les Mazes est le nom d’un village : l'appellation est la mème
que la nôtre.
En 4745, on trouve Les Mages, en 1789 Le Mage, et en
58.
454
1842, Les Mazes. C’est cette dernière forme qui est la vraie
et qui met sur la voie. Mazxes est en lang. le pluriel de
Mas, qui répond au lat. mansio, mansus, lieu, demeure.
Or Mag, avec le g doux équivalent au ÿ, traduit en lat. par
Magus, dans les noms propres, correspondait au mot lat.
Mansio, selon Adrien de Valois et d’après Zeuss, dans sa
Gramm. celt. Par conséquent, Mag ou Mages = Mas ou
Mazxes = Mansio : la forme et l’origine gauloises du mot
ne sauraient être mieux accusées. Dans les langues néo-cel-
tiques, en gaëlique Mag signifie champ; en breton, Mag
représenté par Maes = Mages, avec le mème sens.
Majinqua, v. Biner, donner un second labour, moins
profond que le premier, aux vignes, aux müriers et à diverses
récoltes. Cette façon, qu'on donne avec le Béchar (Voy.
c. m.), détruit les mauvaises herbes que le printemps a fait
croître en abondance. Aussi dit-on communément pour la
vigne, par exemple, que le premier labour’est pour elle, et
le second pour le propriétaire. En effet, si par suite du pre-
mier, le cep végète vigoureusement, par le second la terre
est débarrassée des plantes parasites qui la dessèchent et
l'épuisent, et les racines, qui n'auraient pu grossir faute
de l'humidité nécessaire à leur développement, se gonflent
et fournissent un jus abondant qui remplit le cuvier.
On a dit Majinqua pour Maïénqua, parce que le binage
se fait en mai.
Majinquaje, s. »m. Binage, second labour, seconde façon
donnés à la terre. — Voy. l’art. précédent.
Major, s. m. Major, désignation de divers grades de
l’armée. — S'emploie comme en fr.; seulement si l'on
s'adresse à la personne elle-même, en se servant sans plus
de façon de cette appellation, il est probable qu'il s'agira
d’un tambour-major ou d’un sergent-major:
Major se dit aussi quelquefois, par extension, pour dési-
gner le principal, le maître, le chef, le premier.
Dér. du lat. Major.
Majorto, s. f. et adj. — Évidemment le féminin du
précédent Major, dans sa seconde acception; mais en tous
cas et en tout sens, toujours un peu d’argot. — Uno cano
majorto, est non-seulement la canne du tambour-major,
mais toute autre canne de dimension quelque peu exagérée
et dont on se sert avec une certaine affectation.
Majoufiè, s. m. Fraisier, Fragaria vesca, Linn., plante
de la fam. des Rosacées, commune dans nos bois et cultivée
pour ses nombreuses et remarquables variétés, qui donnent
en grosseur ce qu’elles perdent en parfum.
Majoufo, s. {. Fraise, fruit du fraisier.
Pourquoi faut-il que Majoufiè et Majoufo, mots du véri-
table crù, cèdent insensiblement le pas à Frésiè et Frèso,
qui ne sont que du jargon ? Ne pouvant mieux faire, con-
statons du moins la légitimité, toutes les fois que l'occasion
s’en présentera. — Voy. Frèso.
Astruc soutient que le nom lang. de la plante et du fruit
vient du celt. Mefus où Mefous, qui est conservé encore
dans le pays de Galles.
MAJ
MAL
Majourano, s. f. Marjolaine, Origanum majorana,
Linn., plante vivace, cultivée dans les jardins, aromatique,
bonne pour les nerfs, l'estomac.
Dér. du lat. Majorana, par une meilleure traduction que
le fr. Marjolaine.
Majourano-fèro, s. f. Origan commun, marjolaine sau-
vage, Origanum vulgare, Linn., plante médicinale, diuré-
tique, histérique, stomacale, sudorifique, pour les maux de
tête, les indigestions. — Voy Ménuguéto.
Formé du lat. Majorana et Fera, sauvage.
Majourâou, s. m. Maitre, chef; premier; ainé de la
famille; maitre-berger; coq du village; le premier, le plus
considéré, le plus important de l'endroit par sa fortune,
son savoir, les services qu’il a rendus.
Dér. du lat. Major, plus grand.
Mal, s. m. Gros maillet ou masse en bois, avec un long
manche, pour fendre le bois. — A uno tésto qué sémblo un
mal, il a une tête énorme, difforme.
Dér. du lat. Mallus, m. sign.
Malabouséno, s. f., ou Malobouséno. Malheur; malen-
contre; mauvaise chance ; guignon.— Pourta malabouséno,
porter malheur, guignon.
Composé de Mala ou Malo, du lat. Malus, mauvaise, et
de Bouséno, dont l’exacte signification nous est inconnue
et qui n’est pas employé isolément, mais qui rs à
heur, encontre; de-là le sens du mot.
Maladéstraciou, sorte d’interj. d'exclamation, qui est
un adoucissement masquant l’imprécation Maladiciou, que
l’on commence et dont on escamote la fin pour y substi-
tuer des syllabes vides de sens qui.en font un tout.assez
innocent, sinon bien intelligible ni suffisamment applicable
peut-être.
Maladéstréto, variante diminutive de Maladéstraciou,
sans plus de sens.
Maladiciou, s. f. Malédiction; action de maudire; mau-
vaise dessinée; fatalité. — S'emploie aussi comme excla-
mation, imprécation, mais, dans ce cas, l’usage ne Jui
donne pas toujours la même gravité qu'en français—
Maladiciou! quinte fré! Peste! quel froid il fait! Zow
crésès riche? — Oh! maladiciou! Vous le croyez riche?
— Oh! certes!
Malagué, s. m. Cerisier sauvage. — Son écorce est un
fébrifuge : son fruit est amer.
Malaïrosos, s. f. plur. Rose de Provins, ainsi nommée
en fr. parce que cette variété fut apportée dans ce pays par
un comte de Brie revenant de la croisade. Le ton vigoureux
de leur couleur pourpre dut les faire appeler d'abord Hates-
roses; et c'est ce nom que le lang. s’est approprié.
Malamén, adv. Beaucoup, extrèmement, extraordinai-
rement, étrangement. — Gn'a malamén ? Y en a-t-il beau-
coup ? Gn'a pas malamén, mais gn'a, il n’y en a pas d’une
manière extraordinaire, mais il y en a passablement.
Dér. du lat. Malè, parce que dans le principe Malamén
dut exprimer l'excès d'une chose mauvaise.
MAL
Malamor, s. f. Male-mort; mort funeste, violente, tra-
gique. — Mouri dé malamor, mourir de la main du bour-
reau. Qué la malamor té vèngue quère! Puisses-tu faire une
triste fin!
Formé du lat. Malus, mala, mauvais, mauvaise, et
Mors, mort.
Malandro, s. f. Chétivité; état misérable de santé; ma-
rasme; mal indéfini qui mine; maladie ayant un caractère
épidémique; malaise, langueur qui consume. — Aï agu la
malandro, j'ai eu la grippe, par exemple, ou la cholérine.
Aï la malandro, je suis tout mal en train, tout chose,
On appelait autrefois les lépreux Malandrins, du mal
ladre ou de saint Ladre, corrupt. de saint Lazare qu'on invo-
quait dans cette maladie; de là sont venus Ladrerie et
Ladre, synonymes de lèpre et lépreux. C’est aussi l'origine
de Malandro, quoique ce mot n’exprime plus le mème
mal. — Sous pors crébèrou dé la malandro, ses cochons
tombèrent dans le dépérissement et crevèrent. Cette ex-
pression qui, de tous les animaux, ne s'applique guère
qu’au porc sujet à la ladrerie, prouverait encore plus son
origine.
En fr. on appelle Malandres, un mal qui vient au genou
du cheval, sortes de crevasses d’où découle une humeur
fétide.
Maläou ou Malâäoute, to, s. et adj. Malade; qui n'a pas
de santé; qui n'est pas sain; celui dont les facultés sont
altérées. — Maldoute, avec la m. sign. que Waldou, est un
peu plus en usage dans la partie haute de notre contrée. —
Féou pas démanda à maldoute sé vôou médécino, prvb., il
ne faut pas demander à un malade s’il veut santé.
Les dim. de l'adj. sont Maldouté, élo; Maldoutinà,
inoto.
Dér. de la bass. lat. Malatus, formé de Malo ou Malè
aptus, apte ou prédisposé au mal, ou mal disposé. Henri
Étienne le fait venir du gr. Mahæx6, mou, languissant.
Malâoutas, asso, adj. Augm. de Maldou, maldoute.
Très-malade ; malade qui se traine; malingre; cachec-
tique.
Maläoute, 0, adj. Malade. — Voy. Maldou.
Maläoutéja, vw. Être malade; avoir une maladie; lan-
guir, trainer par l'effet d’une maladie. — Maldoutéjè pas
gaïre, sa maladie ne fut pas longue. Y-a lontén qué maldou-
téjo, il y a longtemps qu'il traine. |
Malâäoutiè, s. f. Maladie; privation, altération de la
santé. — Faïre uno maldoutiè, avoir une maladie. — Las
maldoutiès das magnas, les mues des vers-à-soie, qui sont
au nombre de quatre, mais qu'on désigne par leurs numéros
d'ordre sans ajouter maldoutiès : mous magnas jasou à la
Prémidiro, à las dos; s'ajassou à las trés, sortou dé las
quatre, mês vers-à-soie dorment à la première, à la seconde
mue; ils vont s'endormir à la troisième; ils sortent de leur
quatrième mue. Dans ces derniers temps, en agriculture et
en parlant de la vigne surtout, et même des vers-à-soie, le
MAL 455
mot a pris toute son extension : il désigne pour la vigne
l'oïdium et l'invasion désastreuse du philoxera vastatriæ,
comme pour les magnas, la pébrine et la flacherie.
Maläoutièiros, s. f. plur. Maladrerie, léproserie; hôpi-
taux placés sous le patronage de saint Lazare, dont on
avait fait saint Ladre, et destinés aux lépreux. — Le lang.
donne à ces maisons une dénomination plus générale, parce
que plus tard elles furent consacrées à recevoir d'autres
malades que ceux pour lesquels elles avaient été fondées ou
que ceux-ci étaient les malades par excellence.
Il est, au surplus, peu de villes où, comme à Alais, le
souvenir d’un de ces établissements ne soit resté attaché à
quelque quartier à proximité. Mais la désignation est deve-
nue tout à fait n. pr. pour quelques villages; comme La
Maldoutiëiro, traduit en fr. par La Malautière, communes
de Bellegarde, de Colias, de Montfrin, et las Maladièïros,
plus francisé, les Maladières, commune de Nimes.
Maläoutis, isso, adj. Maladif; sujet à de fréquentes
maladies; malingre; valétudinaire ; infirme.
Malatavèrno, s. f., n. pr. de lieu. Malataverne, village
de la commune de Cendras, canton d’Alais (Gard).
Ce nom, d'assez mauvais augure pour les voyageurs, est
formé du lat. Mala taberna, par le changement du & en v;
le fr. l’a pris tel quel du lang. Il a du reste quelques simi-
laires dans le département, et on le trouve encore dans les
communes du Garn, de Lussan et de Saint-Hippolyte du
Fort. Partout était-il significatif pour désigner une halte
dont il fallait se méfier à cause du peu de sécurité qu’elle
présentait, ou de la mauvaise chère qu'on y faisait, ou
simplement de sa chétivité misérable? On ne saurait trop
le dire. En tous cas, ici, un ancien sobriquet renforçait
l'appellation ; on disait au moyen-âge : las oros dé Malata-
vèrno, les horreurs de Malataverne; mais à qui ou à quoi
s’appliquait ce surnom ? Aux femmes du lieu, la méchan-
ceté jalouse de quelques voisines en était bien capable; à
la localité elle-même, cela peut être. Rien ne justifierait
aujourd'hui un pareil dénigrement contre ce village qui
proteste contre sa réputation d'autrefois.
Malapéndiciou, s f. interj. Male-pendaison. — La
malapéndiciou té vèngue! Puisses-tu être pendu ! Que male-
mort t'advienne!
Malapéndiciou, comme beaucoup de ses consorts, simple
interjection à qui on n'ajoute aucun verbe, sans même le
sous-entendre pour compléter le sens, n'est qu'un de ces
maudissons sans portée qui échappent au dépit et à l’impa-
tience; au besoin ce n'est même qu'une forme explétive
correspondant au fr. Peste! mâtin! malepeste!
Malé, s. m. Dim. de Mal. Maillet, petite masse, — Est
devenu n. pr. reproduit en fr. par Mallet.
Maléncho, s./f., n. pr. de lieu. Malenches, hameau de
la commune de Sénéchas, arrondissement d’Alais.
La terminaison de ce mot indique suffisamment un
adjectif féminin faisant au masculin, inusité, Malénc,
réduit à Malén, par la suppression ordinaire du c final,
456 MAL
mais qui a dù en reprendre la consonnance au fém., en
donnant d’abord Malénco, adouci ensuite en Maléncho.
Le nom n’a fait que suivre la marche indiquée sous les
articles Én, Ën, suf., Énquo, et Diménche, etc. (Voy. c.
m.). Cette désinence, adjectivant le mot, le transformait en
nom propre, et l’épithète, ainsi ajoutée et isolée, sert à
trouver sa signification. Malén veut dire mauvais; Ma-
léncho devra donc se traduire par mauvaise : nous n’avons
pas à savoir comment ni pourquoi ce petit village mérite
la qualification. Tel est le sens étymologique qui se présente
le premier. Son correspondant serait La Maléno, La Malène,
n. pr. d’une autre localité, qui vient certainement de la
mème provenance et d’une formation très-rapprochée.
Cependant un scrupule peut naïtre au sujet d’une signi-
fication assez mal sonnante. La première syllabe du mot,
qui est seule la cause de l'interprétation, n’aurait-elle pas
été altérée euphoniquement en changeant par un a sonore
une primitif, qui eût donné alors Méléncho, dérivant du lat.
Melleus, mellicus, mellicosus, de miel, produisant du miel?
Une permutation semblable s’est bien faite sur le nom
propre Malérargue, dans la commune de Saint-Bonnet -de
Salindrenque, appelé en 4345 Mansus de Melarnicis,
métairie des ruches d’abeilles /Voy. Bagar). On dit encore
La Mialouso, avec un a, rendu en fr. par La Melouse. Ceci
soit dit pour rétablir la bonne renommée de notre hameau.
Maléncougnè, s. f., ou Mélancougnè, moins bien.
Mélancolie; tristesse; chagrin; biie noire, en terme d’an-
cienne médecine.
Dér. du lat. Melancolia, m.sign., venu du gr: Mehxyyoklx,
de M£x, noir, et Xok4, bile.
Maléspèls, s. m. plur., n. pr. de lieu. Malespels, ferme
dans la commune de Galargues.
Nous ne relevons cette dénomination que pour son éty-
mologie assez curieuse. À cause de sa forme au pluriel et
du sens apparent des deux mots qui composent, on serait
tenté de la traduire par mauvaises peaux. Ce serait une
faute lourde. Le nom est mentionné dans les plus vieux
titres, en 964, Villa Malum Expelle; en 965, In terminio
de villa Malum Expelle, et encore, en 4007, Villa Malum
Expellis in littoraria. Rien n’est plus clair.et ne peut être
appuyé de meilleurs titres : c’est bien la villa. qui expulse
et chasse le mal. Qu'en étymologie on se fie ensuite aux
apparences et aux assonances.
Malhéïroüs, ouso, adj. Malheureux, indigent, misérable ;
qui est dans le malheur, dans une situation fâcheuse, ou
qui amène le malheur et qui a des suites funestes. — És
un malhéiroùs, c'est un mauvais homme, un homme perdu,
qui a commis quelque mauvaise action; plutôt qu'un
pauvre homme, indigent. Aqud's malhéiroùs, c'est bien
fâcheux, c’est malheureux. Uno malhéïrouso, en parlant
d’une femme, signifie aussi une femme perdue, une intri-
gante, et s'emploie le plus souvent comme terme de blâme,
de reproche, en mauvaise part.
Ce mot et le suivant, dont il dérive, sont écrits avec une
MAM
h par une concession étymologique, contraire aux principes
de l'orthographe romane qui posait » après / pour la mouil-
ler : ici la mouillure ne se fait pas sentir, et ces mots ne
devraient être séparés que par un trait d'union. L'euphonie
de Mal est au reste toute française, ce qui en fait des
expressions presque franchimandes.
Malhur, s. m. Malheur; infortune; mauvaise chance;
sort contraire, — Éstre déou malhur, être en malheur,
jouer de malheur. — Voy. Hur.
Maliciado, s. f. Malice; acte, tour de malice; quinte;
mutinerie. Au fig. giboulée : ces intempéries ayant lieu le
plus souvent en mars, mar, sont une malice, un tour de ce
mois, et le languedocien, dans ce cas, a bien pu d’abord
être aussi Mariciado, qui à été ensuite confondu avec
Maliciado.
Malicious, ouso, adj. Dim. Maliciousé.
méchant ; enclin à faire des malices; colérique.
Maliço, s. f. Méchanceté, plutôt que malice, qui est
quelquefois moins odieuse et ne cherche qu’à faire des tours
pour se divertir; colère. — Y vaï dé maliço, il y va mé-
chamment. La maliço l'éstoufo, la méchanceté l’étrangle,
l'empêche de parler. Mé faras vén? la malico, tu me feras
mettre en colère.
Dér. du lat. Malitia.
Malingre, ingro, adj. Malingre ; infirme; chétif; maladifs
épuisé.
Malo, s. f. Malle; valise; coffre pour contenir des Hardes;
voitures des courriers pour les lettres.
Empr. au fr.
Malofacho, s. f. Méfait; mauvaise action; contraven-
tion; délit. — Es ana én malofacho, ilest allé en maraude,
il est à marauder.
Malo-fan, s. f. Faim dévorante; famine; misère. —
Mouri dé malo-fan, mourir de faim, de misère.
_ Malo-fi, s. f. Mauvaise fin. — Faïre malo-fi, mal finir,
faire une triste fin.
Comme tous ces mots dans la formation desquels entre
l’adj. lat. Malus, Maladiciou, Malapéndiciou, etc., on em
ploie aussi Malo-fà dans les phrases imprécatives contre
quelqu'un à qui l’on souhaite qu'il mésarrive.
Malous, malouso, adj. Qui a une humeur dartreuse;un
ulcère, une lèpre à la figure ou sur le corps.
Mama, s. f. Maman, terme enfantin, Mère. — Mama,
papa, sont les premiers sons articulés que prononce l'en-
fant; de sorte que l'on peut dire que c’est lui qui, pour
nommer sa mère et son père, a créé ces deux mots que
beaucoup de langues anciennes et modernes ont adoptés. On
ne voit pas pourquoi le fr. ne les a pas pris sans y rien chan-
ger, et ne dit pas Mama comme ildit Papa.— Voy. Papa.
Mamäâou, s. m. Bobo; petit mal; petite douleur, dans
le langage des enfants. — Faï véire tour mamdou; y-an
fa mamäou à sa manélo, montre-moi ton bobo; on luia
fait bobo à sa menotte. Ge
Réduplicatif mignard de Médou, mal. y:
Malicieux ;
Mamé, s. f., ou Maméto. Grand'maman, bonne-maman ;
aïeule.
Dér. de Mama.
Mamo, s.f. Variante de Mama, maman, à l'usage de
l'enfant un peu plus grandelet. Mère, du vocabulaire enfan-
tin comme les trois articles précédents.
Mamour, s. f. M'amour, mon amour; ma chère amie;
terme d'amitié, de mignardise, de caresse, envers une
femme ou un enfant. — Mamours, au plur., faire dé ma-
mours, signifie caresses, faire des caresses, combler de pré-
venances.
Contraction de Moun amour.
Man, s. f. Dim. Manélo; augm. Manasso. Main, extré-
mité du bras divisée en doigts. — Man drécho, man
gdoucho, main droite, main gauche. Man cdoudo où manéto
cdoudo, jeu de main-chaude. Man ouvèrto, mesure un peu
arbitraire de la main étendue qui passait à peu près pour
l'ancien pan. Faïre la man à qudouquàs, donnér, prèter
la main à quelqu'un, l'aider dans une entreprise, ordinai-
rement répréhensible. Éscrituro dé man, écriture, caractères
écrits à læ main. Y-a bono man, il y a la main heureuse.
Aqud's pas ma man, Où soui pas dé man, je ne suis pas du
bon côté pour agir avec la main, pour porter avec l'épaule
dont je me sers habituellement. Aqud's pas dé man, ou
aquèd’s foro man, ce n’est pas commode, à portée, sous la
main, ou cela est outre main. Avédre dé mans dé fato, avoir
des mains de beurre, qui laissent tomber tout ce qu’elles
tiennent. Faïre la man, jouer seul contre deux aux cartes
où aux boules. A sous amouriès à sa man, il tient, il fait
valoir ses müriers lui-même. Faire las dos mans, être un
double-main, qui mange à deux rateliers, et crie selon les
gens vive le roi! vive la ligue! À man révèsso, du revers
de la main. Préne éntre mans, embrasser une affaire avec
attention. Uno man dé papiè, une main de papier. Avéüre
la man, au jeu de cartes, de boules, être le premier à don-
ner, ou à jeter le but, jouer le premier.
Dér. du lat. Manus, m. sign.
Manado, s.f. Botte, poignée de légumes; ce que la main
peut en serrer. — Aù déjuna dé matè émb'uno manado dé
rabes, j'ai déjeuné ce matin avec une botte de radis.
Manado, troupeau de bestiaux.— Uno manado dé pors,
un troupeau de porcs, de cochons.
"SAUVAGES prétend que, dans ce dernier sens, Manado est
une altération de Ménado, d'un autre dialecte, conduite de
troupeaux, quantité de bestiaux qu'on mène à la foire;
mais il n’est pas nécessaire qu’il en soit ainsi puisque le
lat. Manus, qui a formé le mot dans les deux acceptions,
signifie main et en même temps troupe, bande.
Mancéno, s. f. Mancelle, attache qui tient par un bout
au billot fixé aux attelles du collier du cheval, et forme de
l’autre bout un grand anneau dans lequel on passe le bout
du timon de la charrette jusqu’au trou où elle est attachée
par une cheville; c'est le trait par lequel tire le limonier.
— La mancéno, qui était en cuir, est remplacée aujour-
MAN 457
d'hui par une chaine en fer qui ne s'attache plus de même
et ne s'appelle plus ainsi; on la nomme Tiréto. — Voy.
c, m.
Altération de Mancelle, et, comme le fr. sans doute, dér.
du lat. Manipula, petite main. — Voy. Mancioù.
Mancha, v. Emmancher; mettre un manche à un outil.
— Daïo manchado dé réboùs, faux emmanchée à rebours,
c.-à-d. dont la lame est dans la même direction que le
manche. Souï pas mancha dé véno, je ne suis pas en veine,
je n'ai pas la main heureuse ou je n’ai pas bonne main.
Manche, s. m. Manche, poignée adaptée à un instru-
ment; à un outil, un couteau, une hache, une pioche, etc.
Dér. du lat. Manubrium, m. sign.
Mancho, s.f. Dim. Wanchéto ; augm. Manchasso. Manche,
partie du vêtement pour le bras; sac pour filtrer; terme
de jeu, partie gagnée quand on joue en parties liées ; espèce
de filet en forme d’entonnoir.
Dér. du lat. Manica, m. sign.
Mancho, oto, adj. Manchot, estropié d'un bras, d’une
main. — On dit plus purement Maniqué. — Voy. ©, m.
Empr. au fr.
Mancioù, s. m, Anneau en cuir, appelé billot, qui entoure
l'attelle du collier du cheval de trait et tient au crochet
auquel s'attache la mancelle qui est fixée de l’autre bout
au timon de la charrette. — Voy. Mancéno.
Dim. de Mancéno.
Manda, ». Envoyer; mander; faire savoir; faire dire;
lancer. — Mandas-i sdoupre dé véni, envoyez-lui dire ou
mandez-lui de venir. Mandas éncd dé M..., envoyez chez
M..1 mandè un co dé poun, il lui lança un coup de poing.
Dans ce dernier sens, Émmanda, qui est un composé de
celui-ci, est préférable.
Dér. du lat. Mandare, m. sign.
Mandamén, s. m. Mandement, en général, ordre par
écrit émané d’une autorité quelconque; plus spécialement
lettre pastorale d’un évèque à ses diocésains.
Dér. du lat. Mandatum, m. sign.
Mandian, mandiano, s. »#. et f. Mendiant, mendiante;
qui mendie; qui demande l’aumône.
Dér. du lat. Mendicus, m. sign.
Mandianaio, s. f. Mendiants, en général; engeance des
mendiants; race, troupe de mendiants.
Man d’obro, s. f. Main-d'œuvre, façon d'un ouvrage;
travail d’un ouvrier.
Dér. du lat. Manus et Opera.
Mandrasso (A la), adv. Gauchement; tout simplement;
sans se gêner; mollement ; nonchalamment ; sans goût à la
chose. — S'ên vaï à la mandrasso, il marche avec noncha-
lance.
En catalan, Mandra, paresse.
Mandre, s. m. Tourillon de l'arbre horizontal de cer-
taines machines qui tourne dans les crapaudines. — Voy.
Mandrin.
Mandre, s. m. Mendiant, qui fait plus que son état de
458 MAN
mendier, et qui a la tournure et la mine d’un pire mendiant.
Ce mat puisé à la même source que la catalan Mandra,
paresse, désigne l’homme valide et paresseux qui se fait
mendiant; ce qui suppose chez l'individu une certaine
adresse pour soutenir son rôle et réussir dans son métier;
c’est sans doute pour cela que Mandre, d'après SAUVAGES,
voudrait dire en même temps fin et adroit. Cette acception
est tout à fait hors d'usage et Mandre lui-même ne reste
plus que pour indiquer la formation de quelques mots qui
en sont dérivés.
Mandrigoulo, s.f. Mandragore, Atropa mandragora,
Linn., plante très-narcotique, purgatif violent, bonne,
employée à l'extérieur, contre les squirres et les écrouelles.
On en distingue deux espèces, la blanche ou la mâle, la
noire ou la femelle. Sa racine, qui prend souvent une forme
bizarre, se bifurque quelquefois et représente grossièrement
les parties inférieures du corps humain. De prétendus sor-
ciers achèvent de leur mieux la ressemblance et la vendent
comme une amulette, ou l’enterrent avec des conjurations
pour faire doubler l'argent que leurs dupes mettent
auprès. Mais les sorciers commencent à avoir moins de
pratiques.
On a dit que le mot lat. et par suite le lang. et le fr. qui
le reproduisent, avaient été formés par deux mots grecs,
Mévôpa, étable, et Ayaupéc, nuisible, Mavdpæyépas, dange-
reuse pour les bestiaux : ce qui est vrai de cette plante.
Mandrin, s. m. Mandrin, pièce de tour en l'air sur
laquelle on assujettit les ouvrages qui ne peuvent se tour-
ner entre les ‘pointes; pièces que l'on place ordinairement
dans d’autres qui sont creuses pour tenir celles-ci lorsqu'on
les travaille.
Ce mot et Mandre ci-dessus ont la même origine, et le
lat. Manubrium, manche, y est sans doute pour quelque
chose.
Mandrin est aussi le nom du fameux chef de brigands
qui rivalisa avec Cartatoucho, Cartouche, dans les légendes
populaires. Il sert encore à désigner un malfaiteur, un bri-
gand, qui ressemble beaucoup à Mandre (Voy. c. m.). Il y
a des noms prédestinés.
Mandro, s. f. Fém. de Mandre. Pauvresse rusée et ma-
toise. — Uno viéio mandro, une vieille bohémienne, une
vieille sorcière,
Mandroun, s. ». De Mandre, par un dim. qui est loin
d'être atténuant, car le Mandroun est un gars jeune, vigou-
reux, ce qui le rend plus blämable, vagabond pour fuir le
travail, maraudeur par instinct, qui demanderait au besoin
mais qui trouve plus commode de prendre.
Mandrounéja, v. frég. Mendier à la manière de ceux
dont il est question dans les mots Mandre, Mandro, Man-
droun, Mandrouno ; car les véritables pauvres, ceux qui
sont dignes d'intérêt, lous péoures enfin, démandou et
mandrounéjou pas.
Mandrouno, s. f. Dim. de même nature que le précé-
dent Mandro, mais qui indique moins une différence d'âge :
MAN
jeune ou vieille mendiante, valide ou qui l’a été, mais
toujours paresseuse, avec bien d'autres défauts que com
porte une telle profession ainsi comprise. — Voy. Mandre,
Mandro, Mandroun, Mandrounéja.
Mané ou Manè, s. m., n. pr. d'homme. Dim. de Ma-
nuël, qui est l’abréviation ordinaire du prénom Emmanuel.
Mané, subs., se dit de certaines choses dodues où il y a
à manier. — Y-a dé mané, il y a de quoi prendre à pleines
mains, à manéja.
Faïre lou mané, autre acception pour désigner la ma-
nœuvre dont se servent divers ouvriers et notamment les
maçons pour changer de place un tas de tuiles, de briques,
etc., en se les faisant tenir ou se les jetant de main en
main, selon que les chainons de cette chaine sont plus ou
moins éloignés.
Manéchal, s. m. Maréchal-ferrant. — Altération ou
adoucissement très-bien adopté de Maréchal. — Voy. c. m.
Manéchalo, s. f. Maréchale : nom d’une place d’Alais,
en plate-forme élevée, au devant de la citadelle. — Le mot,
par le même principe que le précédent, est une corruption
de Maréchalo : La Fare-Alais l'a employé sous cette forme
dans ses Castagnados; c'est une consécration. Les notes
ajoutent une explication que nous croyons devoir renvoyer
au mot Maréchalo.
Manéflariè, s. f. Flagornerie, flatteries, cajolerie, pour
faire mieux admettre les rapports, les tripotages qui engen.-
drent les brouilleries.
Manèfle, s. m. Faiseur de cancans, de commérages;
brouillon qui fait des tripotages; rapporteur qui flagorne
ceux à qui il s'adresse pour s’en faire bien venir et leur
inspirer plus de confiance par cette manière de faire.
Le mot est formé du lat. Manu flectere, adoucir, flatter
de la main.
Manéfléja, v. fréq. Faire des cancans, des commérages;
faire des paquets, des rapports vrais ou faux; flagorner. —
Voy. Manèfle.
Manèflo, s. f. Commérage; cancans; paquets; tripo-
tages. — Il est aussi le fém. de Manèfle.
Manéja, v. Manier; toucher, palper à pleine main.
Dér. du lat. Manu agere, m. sign.
Manèje, s. m. Mange, machine destinée à imprimer un
mouvement de rotation suivant deux directions rectangu=
laires, au moyen d’un engrenage à lanterne dont l'arbre
vertical est muni d’un levier ou timon horizontal à course
circulaire, sur lequel s'applique la force motrice.
Dér. du lat. Manu agere, agir avec la main ou comme
avec la main.
Manéto, s. f. Dim. de Man. Menotte; petite main. —
Faïre manéto, faire main morte pour en caresser douce-
ment. Jouga à manéto, jouer au pied de bœuf.
Manéto est le nom d’un petit instrument en cuir rem-
bourré de crin, dans la forme d’un fer à repasser, dont se
servent les dévideuses de soie pour frapper la bobine et la
faire tourner. — Voy. Escoulouër. Li
LEE LÉ SO à
Manéto-cäoudo ou Man-càoudo, s. f. Jeu de la main-
chaude.
Manétos, s. f. plur., ou Pantacousto. Chèvre-feuille
commun, Loniara caprifolium, Linn.., arbrisseau de la fam.
des Caprifoliacées, cultivé dans les jardins.
Le nom de Manéto lui vient de ce que ses pétales sépa-
rés ressemblent un peu aux doigts d’une main demi-fermée.
Man-forto, s. f. Main-forte, assistance donnée à la
justice.
. Mangougnè, s. m. Au fém. Mangougnèiro. Regrattier ;
qui vend, au petit détail et de la seconde main, toute sorte
de menues denrées.
Dér. du lat. Mango, mangonis, maquignon; fripier,
revendeur qui déguise sa marchandise pour en tirer plus
d'argent.
Mangounariè, s. f. Regrat; boutique ou vente de me-
nuës denrées au détail. — Faïre mangounariè, être regrat-
tier, faire le regrat; vendre de la regratterie.
Mani, manido, adj. Dim. Manidé, éto, Manidoù, ouno.
Petit; petit enfant. — Uno poulido manido, une jolie fil-
lette, et mème une jolie fille. On en fait un superlatif en
le répétant : mani, mani, très-pelit. Cette façon de faire
des superlatifs est très-ordinaire en lang. Ce n’est pourtant
pas ainsi que les gardeuses de cochons emploient cette
expression et qu'elles disent mani, mani, pour appeler ces
animaux : c’est dans leur bouche un terme d'affection, car
ces manès, mans, petits, petits, sont fort souvent du plus
énorme volume et pèsent au-delà de deux cents kilog.
Dér. du lat. Minutus, moindre, petit. ”
Manifique, iquo, «dj. Magnifique; superbe; splendide ;
somptueux ; qui a beaucoup d'éclat.
Empr. au fr. mais fort naturalisé.
Manigança, v. Manigancer; tramer de petites, de mau-
vaises ruses.
Maniganço, s. f. Manigance; petites manœuvres cachées ;
intrigue; mauvaise ruse.
Dér. du lat. Manu agere, et dans la bass. lat. Manipu-
lare; id est, dit Du Cange, manibus ludificare uti agunt
præstigiatores, jouer adroitement des mains comme font les
escamoteurs.
Manio, s: f. Anse d'un vase, d’un chaudron, d’un
-panier; portant d'une malle; anse ou corne de la tinette,
sémdou, vulgaïrement connue dans nos pays sous le nom
de Cornue que l'Académie n'accepte point pour cela, et
qui sert à transporter des liquides et notamment la vendange.
En espag. Manilia, m. sign. :
+ Manipolo, s. f. Ruse; fraude; tromperie. — Faïre la
manipolo, tromper, filouter. Le prestidigitateur qui monte
ses cartes, le marchand en fraudant ses denrées, l'homme
de mauvaise foi qui tripote les affaires, font également Za
+ Dér. du lat. Manu où Manibus spolio, je dépouille avec
les mains, ou simplement de la bass. lat. Manipulare, ma-
nipuler, arranger avec les mains.
MAN 459
Manipou, s. »m. Mancheron, extrémité du manche de la
charrue, que le laboureur tient dans la main.
Dér. du lat. Manipulus, poignée, ce que l'on empoigne.
Manivèlo, s. f. Manivelle, manche pour faire tourner
l'essieu d'une machine ; machine quelconque elle: mème.
Dér. du lat. Manibula, petit manche.
Manja, v. Manger, mâcher et avaler des aliments ;
prendre sa nourriture; prendre son repas; ronger, miner,
détruire. — Lou iè cdou faï manja la soupo fréjo, prvb.,
le lit chaud fait manger la soupe froide, pour dire que la
paresse n’enrichit pas. Qué manjo soun capitdou prén lou
cam dé l'éspitdou, prvb., celui qui mange son capital prend
le chemin de l'hôpital. Lou tro manja rèn abésti, trop
manger abétit. Manja pér las gnèiros, piqué, dévoré par
les puces. Manja pér lou rouvil, pér las arnos, pér un
chancre, rongé par la rouille, par les teignes, par un
chancre. Wanja, élimé, usé par le frottement. Dé qu'avès
manja iuëï? Sur quelle herbe avez-vous marché aujour-
d’hui ? dit-on à quelqu'un de mauvaise humeur sans qu'on
sache pourquoi. Avès prou manja dé favos? Donnez-vous
votre langue au chat? Lorsqu'on cherche le mot d'une
énigme, la réponse à une question embarrassante, on peine
comme un forçat, dont on sait que l'ordinaire frugal est
composé en grande partie de fèves; la locution languedo-
cienne ne serait-elle donc pas une paraphrase pour dire :
avez-vous assez subi les galères ? voulez-vous que je vous
en tire en vous disant le mot que vous cherchez ? Quant à
son équivalent français : consenitez à donner votre langue
au chat, c'est avouer qu'elle n'est bonne qu'à cela, puis-
qu'on ne sait pas s’en servir pour répondre à la question
posée. Au surplus, une autre explication du dicton a été
essayée, qu'on peut consulter. — Voy. Favo.
Dér. du lat. Manducare, m. sign.
Manjadis, isso, adj. Mangeable ; qui est bon à manger;
qu'on peut manger.
Manjado, s. f. Mangeure.
sign.
Manjadoü, s.m. Auget, pelit vase, vaisseau quelconque
où l’on met la mangeaille des oiseaux, de la volaille que
l'on tient en cage. — Mangeoire, en fr., n’exprime, d'une
manière directe, que la crèche des chevaux, en lang. Gri-
pio; cependant, dans l'usage familier, on s'en sert pour
rendre Manjadoù.
Manjaduro, s. f. Mangeure; endroit d’un drap, d'une
étoffe, d’un pain mangé, rongé par les souris, par les vers,
par les chats. — Manjaduro dé gnèïros, piqüre de puces.
— Voy. Manjado.
Manjaïre, aïro, adj. Gros mangeur; qui mange beau-
coup. Au fig. prodigue, dissipateur; exacteur; grugeur;
mangeur de chrétiens.
Manjamén, s. m. Démangeaison vive; picotement entre
— Voy. Manjaduro, m.
cuir et chair; prurit.
.. Manjanso, s. f. Vermine; poux en général, qui attaquent
la tête et les autres parties du corps.
460 MAN
Manijarël, èlo, adj. Qui aime à manger, dans le sens de
grager quelqu'un. Qui est bon à croquer, dans l’acception
d'agaçant, mais moins délicat que Crouquarèl. — Un
amour manjarèl, un amour intéressé, mü par l'intérêt;
uno géouto manjarèlo, une joue à dévorer de baisers.
Manjariè, s. f. Mangerie, action de manger; exactions;
frais de chicane; action de gruger quelqu'un.
Manjio, s. f. Mangeaille; victuaille; vivres en général
des hommes et surtout des animaux ; pâtée.
Manjo-favo, s. des deux genres. Bredouilleur; qui parle
d’une manière mal articulée et peu distincte, comme s’il
avait la bouche pleine de fèves, par exemple; ce que les
Romains, en employant la même figure, disaient d’un ora-
teur empâté : versat in ore fabas. — Voy. Favo.
Manjo-nèci, s. des deux genres. Parasite; attrape-lour-
daud. — Le renard de la fable qui vit aux dépens du cor-
beau qui l'écoute est un manÿo-nèci.
Manjo-péro, s. m., ou Banar. Capricorne, capricorne
musqué, Cerambyx moschatus, Linn., insecte de l'ordre des
Coléoptères, et de la fam. des Lignivores ou Xilophages,
genre des Scarabées, remarquable par ses antennes articu-
lées aussi longues que le corps. Le plus grand de ces colé-
optères, tout noir et qui a trois centimètres environ, reçoit
le nom de Manjo-péro : ces poires qu'on trouve à demi-
rongées seraient, dit-on, sa pâture; mais ici ne l’accuse-t-on
pas du méfait d’autres insectes voraces, du gros frelon ou
gréoule, par exemple ? Plusieurs scarabées, dont il est une
variété, déposent leurs œufs dans l'écorce rugueuse ou
dans le tronc de vieux arbres : en voyant le capricorne se
poser sur des poiriers pour accomplir cette œuvre, on a
pu mal juger ses intentions.
Manjo-roso, s. m. Capricorne du même ordre, de la
mème famille et de la même forme, moins la taille, que le
précédent, scarabée, qui se. niche et s'endort sans doute
dans le calice des roses, le sybarite! sans craindre que le
pli d’une feuille blesse sa peau assez dure pour supporter
de plus rudes atteintes.
Manjuquéja, v. frég. Grignoter; pignocher; manger
nonchalamment, sans appétit et à petits morceaux. — Le
rat de ville qu'Horace nous peint mangeant du bout des
dents, dente superbo, le maigre ordinaire de son ami des
champs, manjuquéjavo : il est le type.
Manjuquéjaïre, aïro, adj. Petit mangeur d'habitude;
celui qui, par occasion, fait comme il est dit au mot pré-
cédent du rat d'Horace.
Manléva, v. Emprunter; demander et recevoir un prêt.
— Vos arouina toun vési ? manlèvo-z-i dé matt et pago dé
vèspre, prvb. Veux-tu ruiner ton voisin ? emprunte-lui le
matin et rends-lui le soir.
Dér. du lat. Manu levare, lever avec la main.
Manno, s. f. Manne, nourriture miraculeuse que: Dieu
envoya aux Israélites dans le désert.
Ce mot est de toutes les langues puisqu'il est dans:la Bible,
et le lang. l'emploie aussi pour désigner, par similitude, tout
MAN
alimen tabondant venu à propos, réparateur et de bon goût.
Manno, pris pour la substance purgative, l’inséparable
du séné, est un autre empr. obligé au fr. Manne.
Manobro, s. »m. Manœuvre, ouvrier subalterne; exclu-
sivement, aide-maçon, celui qui sert le maçon. — Cet em-
ploi est d'ordinaire rempli par des enfants ou des adoles-
cents à qui ce travail facile procure, en attendant autre
chose, quelques ressources en les enlevant à l'oisiveté, mais
c'est le noviciat obligé de ceux qui veulent devenir maçons.
Les manœuvres sont les souffre-douleur des maçons, qui
les radoient, les rabrouent sans cesse pour hâter leur
paresse, qui les laisse manquer de tout et les force à l'inac-
tion; mais les manœuvres pensent sans doute que la paresse
qui a un tel résultat ne nuit guère à personne, car ils ne
s'inquiètent pas autrement de menaces qui, il faut le dire,
sortent rarement à effet.
Lou manobro, le manœuvre de profession, és manobro;
l’ouvrier qui en fait accidentellement le travail fai mano-
bro; aussi le premier dira : Ëre manobro quan bastiguèrou
aquél oustâou, j'étais manœuvre quand on bâtit cette
maison; et le second : faguère manobro. — Faïre manobro
se dit aussi d’un aide qui sert un ouvrier quelconque qui a
besoin qu’on lui fournisse sur place les matériaux à em-
ployer.— Éspèro, éspèro, té faraï manobro, attends, attends,
je viens t'aider, dit-on à un maraudeur qu'on trouve sur le
fait remplissant ses poches : offre qui n’est pas souvent
acceptée, on le pense bien. Au fig. faire manobro à quéou-
quàs, c'est, dans une dispute où l’on en vient aux coups,
se servir activement de ses mains et ne se laisser manquer
de rien de ce qu’il faut en ce genre.
Dér. du lat. Manu opera, œuvre ou ouvrier de la main,
Man et Obro.
Manoul, s. ». Paquet; botte; poignée, — Ne s'emploie
plus guère que dans le sens du mot suivant quoiqu'il soit
bien moins usité. à
Dér. du lat. Manualis, qu’on peut empoigner, tenir avec
la main.
Manouné, s. m., ou Canouné. Petit paquet, petite botte
de tripes de certains animaux, tels que chevreau ou agneau.
— Voy. Canouné.
Ces deux mots, quoique ayant une racine différente, sont
parfaitement synonymes; mais Manouné est beaucoup plus
en usage à Alais. Il est le diminutif de Manoul, mais il
reste dans son application toute spéciale de terme detriperie.
Manqua, v. Manquer; faillir ; être de moins; faire défaut;
ne pas atteindre, ne pas toucher. — Y-a maï d'un an qué
soun frèro manquo, il y a plus d'un an que son frère est
absent. S’én manquo bé qué y-aduse, il s’en faut bien qu'il
y atteigne. S’én manquo bé! Tant s'en faut, bien loin de
Ja! S'én manquè pas dé gaïre qué mouriguèsse, il s’en fallut
peu qu'il mourût. N’agues pas lagui, té manquaraï pas,
n’aie pas souci, je t'attraperai, je te trouverai. L’a pas
manqua, il l’a bien touché.
Dér. du lat. Mancus, manchot.
si on? J
e
}
MAO
Manquamén, s. m. Manquement; omission; faute que
l'on commet en manquant de faire ce qu'on doit; mais d'un
emploi assez restreint. — Aqui faguère bé un manquamén,
là je manquai bien de dire ou de faire ce que je devais.
Aquélo fio a fa un manquamén, celte fille a eu une fai-
blesse ; elle a manqué à son honneur.
Manqué, éto, adj. Manchot; estropié d’un bras ou
d'une main; à qui l’un ou l'autre manque. — Voy.
Dér. du lat. Mancus, m. sign.
Manquo, s. /. Manque; faute, déficit. — Lou manquo
dé sén, le manque de bon sens. Manquo d'argén, faute
d'argent. Aquéste an y-doura uno forto manquo din la
récolto, cette année il y aura un grand déficit dans la
. récolte. Quan avès agu dé manquo ? combien avez-vous eu
de moins, quelle diminution avez-vous eue ?
Man-révèsso, s. f. Revers de la main; main renversée.
— Un co à man-révèsso, un revers, un coup d'arrière-main,
du revers de la main.
Mantèl, s. f. Dim. Mantélé; augm. Mantélas. Manteau,
ample vêtement qui se met par dessus l’habit; manteau de
la cheminée. — Juste coumo un mantèl, juste comme la
manche d’un cordelier.
Dér. du lat. Mantellum, m. sign.
Mantélé, s. m. Dim. de Mantèl. Mantelet, mantille. —
Faïre lou mantélé, se dit des oiseaux malades, vieux ou
blessés, dont les ailes pendent comme un manteau; et au
fig, d’un malade, qui se traine faible, languissant et
amaigri dans ses habits devenus trop larges.
Mantène, v. Maintenir; soutenir un poids; soutenir,
affirmer une chose; parier pour quelqu'un au jeu, se mettre
de son côté. — Manténès un pdou, soutenez un peu la
charge. Mantène moun di, je persiste dans mon dire,
j'affirme ce que j'ai dit. Vaï, té mantène, marche, avance,
je suis avec toi, je te soutiens.
Manténgu, udo, part. pass. de Mantène, Maintenu, sou-
tenu; confirmé.
Manto, s. f. Ancien mantelet, assez ample et d’étoffe
commune, que portaient les femmes du peuple, à peu près
abandonné aujourd’hui ou peu à peu remplacé par le man-
telet de forme moderne et d'étoffe plus élégante.
Mao, s:m. Carreau en terre cuite, servant au carrelage
d’un appartement.
L'italien appelle ce carreau Mattone, et le fr. Malons
une espèce de briques. Maoù a-t-il une origine commune ?
Est-il une imitation de ces mots ou vient-il de Mahon, lieu
d’où l'on aurait importé son usage ?
- Dans ce dernier cas, peut-être eût-il fallu Jui donner
l'orthographe figurative quelquefois employée et écrire
Mahoù. Mais d'abord cette origine n'était pas assez sûre
pour nous faire introduire une À parasite et de pure super-
fétation, et puis nous n'avions pas à craindre que notre
accentuation ne füt point suffisante pour distinguer le mot
du suivant composé des mêmes lettres et laisst quelque
LÀ
MAO 461
hésitation sur la manière de l'articuler. C'est une occasion
de rappeler ce que nous avons dit de l'accent et de son rôle
aux articles Aou, dipht., et Aoùs, s. m., auxquels nous
renvoyons. Il est bien évident ici que l'accent grave placé
sur la voyelle double où signifie qu'elle est tonique et ne
doit point se confondre ou se diphthonguer avec l'a précé-
dent comme dans mdou, tout autrement orthographié. Dans
maoù deux syllabes, deux temps, une brève suivie d’une
longue : dans mdou, une seule émission de voix, une seule
syllabe diphthonguée, dans laquelle l'appui du son se fait
plus fort sur l'4 circonflexe et long, que sur ou qui tombe
et est absorbé. Voilà l'accent et sa raison d'être.
Mâou, s. m. et adv. Mal, le contraire du bien ou de
bien; peine; travail; douleur; maladie; incommodité;
dommage; perte; faute; péché; crime; mal, de mauvaise
manière. — Mdou dé dén, dé tèsto, mal de dent, de tête.
Aï mou dé dén, dé tèsto, j'ai mal aux dents, à la tête. Aï
mou à moun éstouma, s'emploie ordinairement d'une
manière impropre en le rapportant aux douleurs de poi-
trine. Mdou d'éstouma, mal au cœur. Aï mdou à moun dé,
j'ai mal au doigt. Sé faïre mdou, se blesser. Ma cambo
mé faï mdou, j'ai mal à la jambe, ou la jambe me fait
souffrir. Aqud mé fariè mou, cela m'incommoderait, me
dérangerait. Avédre lous mdous, en parlant d'une femme,
éprouver les premières douleurs de l’enfantement, avoir le
mal d'enfant. Préne mdou, en général, contracter une ma-
ladie; d'une femme, sn a accoucher avant terme. És
plé dé mâous, il est plein d'ulcères, de pustules à la tête.
Gardoù a fa fosso mdou, le Gardon a fait beaucoup de
ravage, a causé de grands dommages. Mé fagues pas dire
lou mou, ne me fais pas mentir ou dire de mauvaises
choses. A fa lou mâou émbé moussu …, elle a eu des rap-
ports coupables avec M. .… Qu'a fa lou mdou, fara la
péniténgo, celui qui a fait le péché, fera la pénitence, en
portera la peine. Aqud faï mdou dé vêire, cela fait mal à
voir. Mdou vaï quan las cambos flaquou, mauvais signe
quand les jambes défaillent, flageolent, fléchissent. Tan
vdou bé batu qué mdou batu, tant pleure mal battu que
bien battu. Sé sdoupre mdou, se fâcher, se piquer, se for-
maliser {Voy. Sdoupre). Aoutre mdou noun y-ague, Dieu
nous garde de pire! Aoutre mdou noun y-aguèsse, ce serait
un petit mal s’il n’y avait que cela. Faï mdou ou michan
èstre pdoure, il est triste, fâcheux, il n’est pas bon d'être
pauvre. Pour établir une resssemblance, un rapport, on se
sert de cette tournure : Avèdre lou mou d'aquéles qué.….,
être comme ceux qui. És pas poulido, a lou mou dé
téou, elle n'est pas jolie, elle a cela de commun avec moi.
À lou méou dé la candi, la fémélo vou maï qué lou mascle,
il en est comme du chanvre, la femelle vaut mieux que le
mâle, dicton que le fr. a rendu par cet autre proverbe :
mariage d'épervier, la femelle vaut mieux que le mâle.
Dér. du lat. Malum, m. sign.
Mäou-adré, écho, adj. Maladroit, qui n'a point
d'adresse.
59.
462 MAO
Mâou-adréchamén, adv. Maladroitement, sans adresse;
gauchement.
Mâou-aprés, és0, adj. Mal élevé; malhonnète; insolent;
malotru,; — Ce dernier mot fr. a originairement la m. sign.
que Maléstru, mal instruit, ignorant, vieux mot lang.
peut-être encore en usage dans des localités voisines.
Mâou-aquis (Dé), locution adverbiale, phrase faite, em-
ployée seulement dans cette construction : Aqu'ôs dé bé dé
méou-aquis, c'est du bien mal acquis, de provenance mau-
vaise, illégitime.
Môou-avisa, ado, adj. Mal avisé; imprudent; irréfléchi;
étourdi.
Mâou-avisamén, s. "”. Étourderie; imprudence ; mé-
garde; irréflexion.
Mâou-basti, ido, adj. Mal bâti, mal fait; mal tourné.
Mâoubérna, s. m., n. pr. d'homme. Maubernard. —
Signifiait autrefois Bernard-le-Mauvais, et devait s'écrire
avec un trait d'union. Le fr. en fait Maubernard ainsi qu’il
a fait pour beaucoup d'autres qui ont la même origine, et
que Sauvaces cite et traduit, tels que Mau-bué, mal les-
sivé; Mau-clerc, ignorant; Mau-duit, mal conditionné;
Mau-piteux, inexorable ; Mau-pas, passage dangereux;
Mau-pertuis, mauvais trou; Mau-pèou, mauvais poil;
Mau-roi, mauvais-roi; Mau-vilain, mauvais paysan; et de
même de Mau-bec, Mau-croix, Mau-ron, Mau-buisson,
Mau-levrier, Mau-repas, Mau-voisin, etc.
Tout cet article mérite d’être cité. Les judicieuses obser-
vations du maitre, à propos de ces noms propres et de leur
orthographe, sont d’une piquante actualité. Elles font jus-
tice de ce prétendu progrès qu'une nouvelle école de réfor-
mateurs préconise avec. ardeur en prêchant la croisade
en faveur de l'orthographe des troubadours.
SAUVAGES ajoute donc :
« Nous l’avons déjà annoncé comme une conjecture, mais
il est plus que probable que l’ancien mau français des noms
précédents, est le même que notre mdow, et se prononçait
de mème ou conformément à notre orthographe, qui est
celle des sons ; et que l’u s’y faisait sentir dans son ancienne
prononciation ow, avant qu’on eût fait de la diphthongue
au, dans mau, un o long, et qu’on prononçât ce terme
comme mo, sans que l’« y entrât pour rien.
« Nous avons dit ailleurs que, dans l’origine des langues,
la prononciation courante en a réglé l'orthographe, et qu'il
n’est pas naturel qu’on ait commencé d'écrire d’une façon,
et de prononcer d’une autre; cette contradiction ne s'est
introduite que dans la suite; on prononçait l’«, puisqu'on
l'écrivait : mais de plus, il est comme certain que, dans
les premiers termes que le français avait imités du latin ou
du roman, on retint d’abord la prononciation de l’& en où
de ces anciennes langues; prononciation qui s’est perpétuée
dans l'italien, l'espagnol et le languedocien, qui en descen-
dent comme le français; et qu'ainsi on prononçait maw
comme mdou, et non comme #0 dans Maupertuis, de la
même façon que le mot latin autem, que les Français pro-
MAO
noncent aujourd'hui otem, est prononcé par les Italiens et
les Espagnols, comme doutem.
« Cette orthographe des sons que nous suivons était
autrefois inutile lorsqu'il était généralement reçu de pro-
noncer lu comme l'ou. On écrivait donc par un « simple
dans mau; et cet usage s’est si bien établi que tous ceux
qui ont écrit dans notre idiome, depuis les premiers trou-
badours jusqu’à nous, n’ont pas orthographié autrement :
ils n’ont mis qu’un « où il est bien certain qu'ils pronon-
çaient ow, comptant bien de rendre par là leur prononcia-
tion. Les anciens avaient raison, en ce que cette ortho-
graphe ne contrariait point leur prononciation : les Langue-
dociens modernes auraient dû en voir le vice, depuis les
changements arrivés à la prononciation du français, dont
l'orthographe a réglé la leur. »
Mâoubos, s. #., n. pr. d'homme et de lieu. Mauvaise
forêt; bois mauvais, dangereux ; Malbos en fr. ou Malbosc,
plus ancienne forme. — Même formation que le précédent,
Mdou et Bos, et devenu un seul mot.
Mäâou-câou, s. ». Chaud mal, fièvre chaude, fièvre
maligne, parce que cette fièvre est accompagnée d'une
grande chaleur. — Toumba dé la fèbre n méou-câou, au
fig. tomber de la fièvre en chaud mal, de Charybde en
Scylla.
Mâou-céoucla, ado, adj. Écervelé; cerveau mal timbré ;
fou ; qui a la tête fèlée. — Se dit également d’un vaisseau
en bois, d’un tonneau, mal jointé, imparfait, ou en mau-
vais état, qui suinte et perd comme uno tèsto mdou-céouclado,
qui laisse fuir le bon sens.
Mâou dé la mort, s. m. Maladie fâcheuse, dangereuse
ou mortelle. — Gn'a pér préne lou mdou dé la mort, il y
‘| a de quoi périr ou gagner une maladie mortelle en s'expo-
sant ainsi.
Mâou dé la tèro, s. m. Epilepsie, mal caduc, haut-mal.
— Toumba dâou mou dé la tèro, ou simplement dédou
mdou, comme si les autres n'étaient rien en comparaison,
être attaqué du mal caduc. On l'appelle ainsi de çe que
ceux qui en sont atteints tombent par terre comme si-elle
les attirait.
Mâoudi, mâoudicho, adj. Maudit; chargé de malédic-
tions; réprouvé. — Quante mdoudè drole! quel maudit
garçon, quel coquin, quel jeune scélérat! Ah! lou mdoudi
d’home! ah! le diable d'homme, ah! le vaurien d'homme!
Mâou-émbouqua, ado, adj. Mal embouthé; qui a tou-
jours à la bouche des paroles grossières, indécentes et sot-
tisières.
Mâou-ên-trin, adj. des deux genres. Indisposé; mal à
l'aise; débiffé, dérangé. — Souï tout mdou-én-trin, je suis
tout mal en train,
Mâou-èstre, s.m. Mal-être, maladie de langueur ; indis-
position vague; malaise; détresse; pauvreté; l'opposé de
bien-être.
Mâou-faire, v. Mal faire; faire du mal. — Sa pas qué
méou-faïre, il ne s'applique qu’à mal faire.
Le —
N
MAO
Mâoufasén, énto, adj. Malfaisant, qui se plait à faire
‘du mal; nuisible; dont la nature est de nuire.
Mâou-fisa, ado, adj. Mal confié; mal gardé; qui n’est
pas en sûreté.
Mâou-gouvèr, s. m. Impéritie; mauvaise conduite dans
le gouvernement, la direction, le maniement d'une affaire.
— Lou jo dé capitani Mdou-gouvèr, jeu d'enfant où l'on
se dépouille de ses habits qu'on jette pièce à pièce l’un
après l’autre.
Mâougrè, prép. Malgré; contre le gré de quelqu'un;
nonobstant quelque chose. — Médougrè tus, malgré toi.
Müougrè qué n'én vèngue, qué n'én digou, quoi qu’il en
“advienne, qu'on en dise. Ow faï mdougrè soun pèro, ou
mdougrè qué soun pèro y-ague déféndu, il fait cela contre
- le gré, la volonté de son père, ou quoique son père le lui
aît défendu.
Mâoulo, s. f. Mauve ou grande mauve à feuilles rondes,
Malvia sylvestris, Linn., plante de la fam. des Malvacées,
commune partout, dont les fleurs et les feuilles servent
également pour amollir et calmer, employées extérieure-
“ment où intérieurement. — Ana fuma las mdoulos, aller
prendre sa place au cimetière, où les mauves abondent sur-
(t.
Dér. du lat. Malva, m. sign., venu lui-même du gr.
Moéyn, mauve, formé de Moaxle, mollesse, ou de Make,
amollir.
Mâoulo-blanquo, s. f. Guimauve, Althœa officinalis,
Linn., plante de la même fam. que la précédente, qui a les
mêmes propriétés émollientes et adoucissantes.
Maoüna, v. Carreler; poser des carreaux de terre cuite
appelés Maoùs. — Voy. c. m.
On remarquera la différence de l’accent, qui a pour effet
d’empècher la première partie de ce mot de se diphthonguer,
qui détache par conséquent la syllabe où et force la pro-
nonciation à scander le mot comme si un trait d'union
séparaît ses syllabes, Ma-où-na.
Nous avons expliqué cette orthographe aux mots Aoùs
et Maoù.
Mâou-parla, v. Médire; calomnier; critiquer mécham-
ment; dire des injures.
Mâou-parlan, anto, adj. et part. pass. du précédent.
Médisant; insolent ; impertinent; sottisier.
Mâou-quiè, iècho, adj. Indisposé; dérangé; mal bâti;
tout je ne sais comment.
Mâou-réjoun, ouncho, adj. Hors de place, détourné de
sa place, dérangé; mal serré; mal ramassé; mal gardé. —
Sé lou trove énticon mdou-réjoun, si je le trouve dans
quelque coin à l'écart.
Mâourèl, s. m., n. pr. d'homme. Maurel. — Savvaces
donne encore Mourèl, lang., et Morel, fr., qui ne sont en
effet que.des variantes d'orthographe, et il ajoute : « En
vieux fr. Moreau, tanné, tirant sur le brun, en lat. Sub-
fuscus. Le n. pr. Chan-mdourél est un de ses composés et
Méouro est son féminin dans le n. pr. Roco-mdouro, mis
MAO 463
en fr. dans Roche-more. Autant valait-il le traduire en
entier, et dire Roche-brune, ou plutôt le laisser dans’sa
première intégrité, Roco-mauro. — Le nom de la localité
sur les bords du Rhône est en effet aujourd'hui Roque-
maure.
« Les altérations dans les noms qui se font peu à peu
deviennent de droit incontestables lorsqu'il s'est passé
quelques générations, et que personne n’a eu aucun intérêt
de les attaquer ou de les contredire. »
Dér. du gr. Mavpés, obscur, sombre, qui a donné au lat.
Maurus, m. sign:, d'où notre Morou, More et Maure, nègre.
Mäouréla (86), v. Se rouiller, être attaqué de la rouille,
en parlant du blé et de cette maladie. — La sève trop
abondante des blés trop vigoureux s’extravase, couvre
l'épiderme des tiges et des fanes et engorge les vaisseaux
sécréteurs; le soleil achève d'épaissir cette sève, qui prend
une teinte couleur de rouille. L'épi, ayant ses conduits obli-
térés, ne reçoit plus de nourriture et son grain devient
maigre et étique, tandis que la paille est grosse et trop
nourrie. C’est ce qu'exprime ce verbe.
Dér. du lat. Maurus, bistre, qui est la couleur de cette
rouille.
Mâouréléto, s. f. Morelle, crève-chien ou morelle noire,
Solanum nigrum, Linn., plante de la fam. des Solanées,
commune Île long des murs et sur le bord des chemins.
Mâourèlo, s. f. Morelle, tournesol des teinturiers, Cro-
ton tinctorium, Linn., plante de la fam. des Euphorbiacées.
— De temps immémorial, les habitants de Gallargues,
arrondissement de Nimes, après avoir cueilli cette plante
chez eux ou dans les pays voisins, la broient, en exprimant
le suc dont ils imbibent des chiffons qu'ils exposent à la
vapeur de l'urine mêlée avec de la chaux vive, de l’alun et
du fumier de cheval; c'est ce qu'on appelle tournesol en
drapeaux dans le commerce. Cette plante est pourtant très-
différente de celle qu'on nomme vulgairement tournesol ou
Viro-Sourél.
Mâouri ou Mâourin, s. m., n. pr. d'homme. Maurin.
— Sauvaces le dit corrompu de Mdou-riou, mauvais ou
dangereux ruisseau.
Mâou-traïire, v. Faire mal; tourner à mal; se mal con-
duire; être en peine pour quelqu'un, craindre pour lui;
mal penser; mal augurer. — Cassaïre el jougaïre noun
podou qué mdou-traïre, prvb., chasseur et joueur ne peu-
vent que mal tourner, mal finir. És pas dé mdou-traïre,
il n’est pas à plaindre, il ne faut pas être en peine de lui.
Nous a fa méou-traïre, il nous a mis en peine, en souci.
Aquÿ mé fa* mdot-traïre, cela me fait mal augurer.
Mâou-trata, v. Maltraiter; malmener; faire éprouver de
mauvais traitements; réprimander vigoureusement avec
accompagnement de coups ou de très-dures paroles.
Mâou-valé (Sé faïre), v. Se faire haïr, se faire méses-
timer ou regarder de mauvais œil; se faire des ennemis.
Mâou-valénço, s. f. Malveillance; inimitié; haïne.
Altération du v. Voulé ou Voudre, vouloir. — Mdouvoulé,
464 MAQ
Mäou-vâougu, udo, adj. et part. pass. de Mdou-valé.
Mal vu; qui n’est pas estimé; qui est regardé de mauvais
œil. — Y souï pas méou-véougu, je n’y suis pas mal vu,
on y a des bontés pour moi. Mdou-vdougu és miè péndu ou
méou-vougu mia péndu, prvb., variante qui assure le
même sort à celui qui est mal vu et à celui qui mérite
qu'on lui en veuille; ce qui est à peu près même chose et
aboutit à pareille fin.
Mâouvès, èso, adj. Mauvais; méchant.
Mot français prononcé et écrit à la languedocienne et
qu'on pouvait se dispenser d'emprunter, puisqu'on avait
Michan pour la même chose. Cependant, avec ses allures
étrangères, Mdouvès a su se faire bien accueillir, et, em-
ployé à propos, presque exclusivement au masculin, il a un
certain cachet et ne manque pas d'énergie.
Mäâou-vivén, énto, adj. Homme ou femme de mauvaise
vie; mal-vivant.
Mäou-voulé, s. m. et vw. Mauvais vouloir; inimitié;
haine; en vouloir à quelqu'un, lui vouloir du mal; avoir
de la rancune, de la haine contre lui. — Sous les deux
formes, il est du reste l'équivalent de Mdou-valé et Mdou-
valéngo, avec lesquels il est à peu près confondu.—Voy. c. m.
Maqua, v. Meurtrir; contusionner; blesser ; cotir, meur-
trir un fruit. — À lous ièls maquas, il a les yeux battus,
pochés au beurre noir, comme on dit populairement.
Dér. du lat. Maculare, tacher, maculer, noircir.
Maquaduro, s. f. Meurtrissure; contusion livide; cotis-
sure pour les fruits.
Maquarèl, èlo, adj. Proxénète; maquereau, maquerelle ;
entremetteur ou entremetteuse; qui débauche et prostitue
des femmes et des filles. — Se prend le plus souvent subs-
tantivement.
On le fait dériver de l’allem. Mdkler, entremetteur, ou
du vieux mot Maca, maque, qui signifiait vente, venant
probablement de l'hébreu Maker, vendre.
Maquarélaje, s. m. Métier de maquereau ou de maque-
relle; métier d’un souteneur d’une maison de tolérance.
Maquarèou, interj. Même acception que notre mot
Maquarèl, et emprunt au dialecte provençal, qui prononce
en èou nos finales qui sonnent chez nous en è/. — Ce mot
pris, ainsi qu’il l’est en Provence, comme interjection, dis-
simule pour nous sa vraie signification sous une prononcia-
tion étrangère qui le défigure un peu; il est très-bon pour-
tant d'en éviter l'usage.
Maquari ou Macari, s. m. Employé seulement avec
Cousignè, et encore dans une locution peu usitée: Cousignè-
Macari où Maquari, cuisinier du diable, mauvais gâte-
sauce, Coquus nundinalis.
Maquéiroù, s. m. Ecchymose; petite meurtrissure noire,
comme un pinçon.
Dim. de Maquaduro.
Maquigna, v. Tripoter, faire des tripotages; brouiller ;
mêler; gâter; mettre de la confusion, en parlant d’affaires.
Sorte de péj. de Maqua, meurtrir, gâter.
MAR
Maquignaje, s. m. Tripotage; mélange désagréable
au goût, malpropre; intrigue ; tracasserie; confusion ;
désordre.
Maquignoun, s. m. Maquignon, qui vend et achète des
chevaux, qui les revend et les troque.
Dér. du gr. Méyyavoy, ruse, fard, d’où le lat. Mango,
mangonis, Maquignon.
Maquignouna, v. Faire le maquignon, ou comme les
maquignons; user d'artifice pour dissimuler, déguiser, cou-
vrir les vices d’une chose qu’on veut vendre.
Mar, s. m. Marc, lie, résidu des fruits pressés, des subs-
tances bouillies, d’un liquide qui dépose. — Mar dé cafè,
marc de café; ou simplement mar, qui est suffisamment
entendu et presque exclusif.
Il est très-probable en ce sens que le mot vient, par
apocope, du lat. Amarus, reproduit dans l'ancien lang.
Amar, à cause de l'amertume du marc de café.
Mar, s. m. Mars, troisième mois de l’année, composé de
trente-un jours. — Mar douroùs, abriou pléjoùs, fan lou
péisan ourguioùs, prvb., mars venteux, avril pluvieux,
font le paysan orgueilleux. Mar martèlo, abriou coutèlo,
prvb., mars martelle, avril coutelle.
Mar (Pés dé), s. m. Poids de marc, qui était l’ancien
poids usuel de nos localités, celui dont la livre avait deux
marcs ou seize onces, ou bien aujourd’hui un demi-kilo-
gramme.
Mar, s. m., ou Péiroù. Maîtresse branche d’un arbre.
Dér. du lat. Mas, maris, mâle, vigoureux. Le vieux fr.
avait aussi Mar, qui signifiait grand, haut.
Marano, s. f Ver, mite, insecte. — Voy. Arcisoùs.
Marano, s. f. Espèce de phthisie ou de marasme, qui
attaque les brebis; dépérissement du mürier dont les
branches languissent, se dessèchent et meurent petit à
petit. Quand ce mal est le résultat de la vieillesse, il est
irréparable; mais le plus souvent, surtout quand il semble
prendre un caractère épidémique, comme il provient alors
d’une culture négligée, par des amputations à propos de
branches et de racines, par des labours et des engrais, en
rendant au sol appauvri les sucs nécessaires à l'arbre,
on peut encore le rétablir, ce qui est plus avantageux que
d'en planter de nouveaux.
Dér. du gr. Mapalvw, dessécher, consumer peu à peu.
Marcandéja, v. Marchander ; discuter le prix d'une
chose; débattre le prix. Au fig. hésiter; balancer.
Dér. du lat. Mercari, faire le marchand.
Marcandéjaire, aïro, s. m. et f. Marchandeur; qui
aime à marchander. Au fig. barguigneur, qui hésite, qui
balance.
Marcha, v. Marcher; cheminer; aller; avancer; faire son
chemin. — Marchas qué vous démandou, dit-on à quelqu'un
en lançant de son mieux un projectile, en jetant de toutes ses
forces un objet quelconque, comme pour hâter sa marche
en l’avertissant qu'on le demande; cela s'adresse aussi à
quelqu'un qui vous importune, qui vous fatigue et dont'il
MAR
tarde d’être débarrassé. Marchas , trasso d’ , allez
donc, triste sire !
Dér. de l’anc. allem. Marchieren, aller à cheval, che-
vaucher, de March, marach, mark, cheval; qui, par inter-
version, en est venu à signifier aller à pied, marcher,
marcha.
Marchaïre, aïro, s. m. et f. Marcheur, marcheuse: qui
marche beaucoup, sans se lasser. — Ne se dit guère qu'avec
une épithète pour signifier celui qui marche beaucoup ou
qui marche peu : un michan, un bon marchaïre, un mau-
vais, un bon marcheur.
Marchamén, s. m. Démarche, allure, manière de mar-
cher; le pas, le marcher de quelqu'un.
Marchan, ando, s. m. et f. Marchand, marchande;
celui qui vend; acheteur, chaland. — Marchan dé bla,
marchan danna, prvb., marchand de blé, marchand
damné. Sé vèn marchan, véndraï moun oustdou, si je
trouve acquéreur, je vendrai ma maison.
Dér. du lat. Mercator, m. sign.
Marchandiso, s. f. Marchandise; toute chose qui se
vend, en gros ou en détail. — Marchandiso préséntado,
mita dounado, prvb., marchandise offerte vaut moitié
prix.
Marcho, s. f. Marche, action de marcher, chemin,
route que fait celui qui marche ; distance à parcourir. Au
fig, combinaison, mesure que l’on prend. — Chacun bat
sa marcho, chacun marche, agit à sa guise, sans entente et
sans ensemble, — Marcho d'Ancono, locution un peu
argotique : un joueur de piquet embarrassé pour écarter,
le fit d’une manière bizarre à étonner ses voisins : Dé qu’és
aquélo marcho ? murmurèrent-ils ; et lui : Aqud's la
d'Ancono, ajouta-t-il par un affreux calem-
bourg, car il était un peu lettré. Depuis, l’expression est
restée dans un certain rayon local pour signifier une
manière de faire, une marche que personne ne comprend,
pas même souvent celui qui la suit; mais on voit qu’elle
est de pur argot, et elle ne doit pas remonter au-delà des
premières guerres d'Italie de la fin du dernier siècle, où il
était fort question dans les journaux de la marche d'Ancône
occupée par les Autrichiens.
Dér. de la bass. lat. Marca, marcha, frontière, limite,
pays frontière : d’où est venu Marquis, en bass. lat.
Marchio, gouverneur d’une province frontière, d’une
marche.
Mardiou, interj. Mort-Dieu, juron, qui peut être rendu
aussi bien par Morbleu, qui est une autre altération léni-
tive, avec cette différence que le lang. a formé le mot avec
l'initial mar, substitué souvent à mal et entré en compo-
sition de beaucoup de mots en mauvaise part, tandis que
le fr. n’adoucit que la dernière syllabe en la convertissant
avec un sens qui n’a pas de signification.
Mardioune, interj. Variante du précédent, équivalent
de Mordienne.
Maréchal, s. m. Maréchal-ferrant, artisan qui ferre les
MAR 465
chevaux, les mules et mulets et les bœufs. — Voy. Mané-
chal, qui est peut-être plus pur.
Dér. de la bass. lat. Manescallus, m. sign.
Maréchalo, s. f. Maréchale, place publique à Alais, en
plate-forme, au devant de la citadelle, servant de prome-
nade d'été. — Dans les notes des Castagnados, il a été
inséré, sur cette place dont notre ville s'est toujours mon-
trée assez fière, un article que nous recueillons avec plai-
sir, en rappelant cependant que le trait final a été écrit
en 4843 et qu'aujourd'hui la place est entièrement nette :
le miracle attendu n'est pas encore accompli, et c'est ce qui
manque seulement à notre belle promenade.
«On varie sur l'origine de ce nom de Maréchale. Le
doit-elle au maréchal de Vauban, qui changea le château
comtal en citadelle royale ? Il aurait bieu pa donner son
nom à une place qui n’en est que l’appendice et qui a pu
figurer sur les plans de ce grand homme. Est-il dù, au
contraire, au maréchal de Montrevel qui commandait à
Alais à l'époque de la construction de la Maréchale, c’est à
dire en 4702 et 4703 ? Cette dernière version parait plus
fondée et plus conforme à la tradition.
« Cette promenade, qui domine la ville et sa verdoyante
banlieue, et qui rappelle, en miniature, le Peyrou de Mont-
pellier, a subi bien des vicissitudes depuis sa naissance.
Sous le règne des Montagnards de la Convention, on y
éleva une montagne. Ce furent les dames principalement
qui en firent les frais et y travaillèrent de leurs propres
mains : le petit nombre par enthousiasme, le plus grand,
crainte de pis. Depuis lors on y a fait des prolongements,
des accessoires plus ou moins gracieux. Dernièrement on a
voulu un trait de plus de ressemblance avec le Peyrou :
un château-d’eau. On a déjà un bassin et le cippe d’un jet
d’eau; quant à l'essentiel... Dieu seul est grand! »
Maréla, v. Terme de fileur de soie, vitrer : c’est distri-
buer le brin de soie sur l'écheveau de la roue du tour, de
façon qu'il y fasse des losanges.
Dér. du gr. Metgw, distribuer, partager.
Marélaje, s. m. Vitrage d'un écheveau de soie, ou les
losanges que le brin de soie y forme en se croisant sur lui-
mème au moyen du va-et-vient. Lorsque ces losanges sont
trop grands ou trop larges, le brin revient souvent au même
endroit avant que celui sur lequel il s'attache ait eu le
temps de sécher; c’est alors un vitrage vicieux qui a un
double inconvénient : les brins, se collant l’un sur l’autre,
rompent fréquemment au dévidage pour les décoller, et la
dévideuse perd beaucoup de temps pour retrouver le
bout de soie rompu qu’il faut nouer avec celui qu'elle
tient.
Marèlo, s. f. Mérelle et quelquefois Marelle, jeux d’en-
fants; car il y en a deux de ce nom. Pour le premier, on
trace sur un plan quelconque un petit carré traversé par
quatre-autres lignes qui partent des coins et du milieu des
lignes déjà tracées pour se croiser au centre; il s’agit, en
posant chacun à son tour une marque, une petile pierre
466 MAR
sur l'endroit où se trouvent deux raies, de faire arriver
trois marques sur la même ligne. Le malin, qui connaît
les finesses de ce jeu, est sûr de gagner lorsqu'il pose le
premier, ce qui s'appelle bouta fid. La seconde marelle con-
siste à pousser à cloche-pied, entre des lignes circonscrites
et dans un certain sens, un palet qui ne doit s'arrêter sur
aucune raie et ne doit sortir du polygone que par le côté
voulu, sous peine, pour le délinquant, d'avoir perdu.
Maréso, s.f. Citrouille, plante dont les feuilles sont
découpées et tachetées de blanc. — Voy. Boutéio, dont elle
est une des nombreuses variétés.
Son nom lui viendrait-il de ce qu'elle se sème au mois
de mars, mar? C'est probable.
Marti, v. Flétrir; faner; ternir, froisser; chiffonner.
Marfi, ido, part. pass., qui fait aussi au masCc. Warfe,
flétri; fané; chiffonné; bouchonné; froissé.
Dér. du lat. Marcere, m. sign.
Marfoundre (Sé), v. Se morfondre; se refroidir subite-
ment lorsqu'on était en sueur; gagner une maladie par cela
ou par un excès de fatigue. Au fig., s'ennuyer à attendre;
perdre son temps à attendre; perdre sa chaleur.
Marfoundu, udo, part. pass. de Marfoundre. Morfondu ;
refroidi trop vite après avoir eu chaud. Au fig., dégoûté,
fatigué d'attendre, de poursuivre un but sans succès.
Margal, s. m. Herbe des prés, graminée, que les Anglaïs
appellent Ray-grass, la meilleure et la principale, dont on
recueille la graine pour ensemencer un pré, connue en
botanique sous le nom de Lolium perenne, Linn. Une de
ses variétés, du même nom, croît aussi, comme une sorte
d'ivraie, sur le bord des chemins et dans les champs après
qu'on a coupé le blé.
Margaridéto, s. f. Paquerette, petite marguerite, Bellis
perennis, Linn., plante de la fam. des Composées Corym-
bifères, commune dans les prairies. On la nomme en fr.
Paquerette parce qu'elle fleurit au temps de Pâques.
Margaridéto, n. pr. de femme, dim. de Margarido.
Margaridiè, s.m. Camomille romaine, Anthemis nobilis,
Linn., plante de la fam. des Composées Corymbifères. Ses
feuilles et ses fleurs, à odeur assez agréable, sont prises en
infusion comme fébrifuges et stomachiques; en applications
externes, elles sont très-résolutives.
Margarido, s. f., n. pr. de femme. Marguerite.
Margarido, s. f. Marguerite; grande paquerette, grande
marguerite ; Chrysanthemum leucanthemum, Linn., plante
de la fam. des Composées Corymbifères, qui croît dans les
champs et les prairies. — A la franquo margarido, à la
franche marguerite; franchement; simplement; bonne-
ment. L'amoureux superstitieux, comme ils le sont tous,
consulte la marguerite en l'effeuillant pour savoir s’il est
aimé à son tour; si la dernière feuille arrachée lui dit : un
peu ou pas du tout, il se désespère; mais qu'elle Jui
réponde : passionnément, il s’enivre de joie et croit au
bonheur: car la marguerite est trop franche pour le trom-
per. De là l'origine de la locution que nous citons.
MAR
Margasso, s. f. Pie-grièche, oiseau. — Voy. Tarnagas.
Formé de Mar et Agasso : Mar pris pour Mal ou
Mdou, inversion ou altération assez fréquente, et Agasso,
pie; mauvaise pie.
Margô, s.f., n. pr. de femme, dim. de Margoutoun,
qui l’est déjà de Margarido. Margot, Marguerite.
Margô, s. f. Margot, nom donné à la pie surtout quand
elle est privée; il se donne aussi à une femme bavarde, à
une péronnelle.
Margouia, v. Patauger, patrouiller dans l'eau bour-
beuse; tremper, remuer dans l'eau. Au fig., être dans le
margouillis, dans une mauvaise et sale affaire.
Ne serait-il pas formé du radical Mar, presque toujours
péjoratif au commencement d'un mot, pour Mal, mdou,
et de Grouïa ou Grouga, grouiller ?
Margoul, s. m. Margouillis; gâchis; désordre; fouillis
de choses sales et dégoûtantes. Au fig., embarras d’une
mauvaise affaire.
Margoulin, s.m. Pauvre et mauvais ouvrier; petit mar-
chand qui ne peut faire que des affaires étriquées; en ce
sens, vrai regrattier du commerce.
Margoutoun, s. f., n. pr. de femme. Variante et enlaï-
dissement de Margarido, Marguerite, qu'on peut pr en
fr. par Margoton.
Mari, s. m. Mari; époux; conjoint par mariage. 210$
l’emploie surtout quand on parle des maris en général,
afin de ne pas confondre, dans certains cas, les deux signi-
fications d’home, qui veut dire homme et mari. — Toutes
lous maris qué soun counténs dansarièou sus lou quiou
d'un véêtre, prvb., tous les maris qui sont contents danse-
raient sur le cul d’un verre.
Dér. du lat. Maritus, m. sign.
Mari, marido, adj. Mauvais; chétif; de peu de valeur;
méchant par le caractère ou par le cœur. — Un mari
capèl, un mauvais Chapeau. Uno marido bèstio, une mé-
chante bête. Uno bôno fénno, uno bono cabro, uno bono
miolo, soun trés maridos bèstios, prvb., une bonne femme,
une bonne chèvre, une bonne mule, sont trois méchantes
bêtes. Un mari mdou, un mauvais mal, dangereux, à
craindre. Un mari récontre, ‘une mauvaise fortune, ‘un
facheux malentendu, un malheur, une mésaventure.
Dér. de la bass. lat. Marrire, mal agir, affliger.
Mariaje, s. m. Dim. Mariajoù. Mariage, union légitime
de l’homme et de la femme; dot; contrat, acte dressé par
le notaire ou l'officier de l’état civil; solennité des noces;
cérémonie; cortége, réunion de la noce; espèce de jeu
de cartes. — Y-an fa un bon mariaje, on lui a fait une
bonne dot. Avès pourta voste mariaje? dit l’homme d’af-
faires consulté par un client, avez-vous apporté votre con-
trat de mariage? Anan véire passa lou mariaje, nous
allons voir passer la noce, les époux, les parents, les invités.
Dér. de la bass. lat. Mariagium, m. sign.
Mariano, s. f., n. pr. de femme. Marianne.
Marias, asso, adj. Péjor. de Mari, ido.
MAR
napan; mauvais sujet; homme sans honneur et sans pro-
bité, de conduite répréhensible.
Le mot n’est pas tout à fait de notre dialecte; mais à
cause du voisinage de la Provence, il s'est très-bien impa-
tronisé.
Marible, s.m”., ou Maruble, ou Bouènrubi. Marrube,
marrube ordinaire, noir, puant, ou ballote fétide, Ballota
nigra, Linn., plante de la fam. des Labiées, commune le
long des chemins.
Marida, v. Marier, unir légitimement par le mariage un
homme et-une femme. Au fig., joindre, unir, rapprocher,
allier, accoupler. — Sé marida, se marier, contracter
mariage. Aï marida moun garçoù, j'ai marié mon fils. Ma
sur s'és maridado, ma sœur s'est mariée. Fios qué soun à
marida, michan troupèl à garda, filles bonnes à marier
sont. un troupeau difficile à garder. Fio qu'agrado és mia
maridado, fille qui plait est à moitié mariée. Qué sé marido
pér amours a bonos gnuès et michans jours, qui se marie
par amour a bonnes nuits et mauvais jours. Qué sé marido
sébrido, qui se marie se bride. Qué sé marido pér amours
sé péntis lèou pér doulours, qui se marie par amour se
repent bientôt par douleurs. Qué sé marido dé coucho sé
répéntis dé lésé, qui se marie en hâte à loisir se repent.
Maridas n'an qu'un mês dé bon tén, les mariés n'ont qu'un
mois de bon temps.
Dér. du lat. Maritare, m. sign.
Marida, s. m. et part. pass. Marié, épousé; nouveau
marié; allié intimément.
Maridado, s. f. et part. pass. Nouvelle mariée ; l'épou-
sée; la mariée.
Maridadoù, maridadouno, adj. m. et f. Nubile; en âge
d'être marié; bon à marier.
Maridaire, s. m. Marieur; faiseur de mariages; officier
de l'état civil préposé aux mariages.
Mariéto, s. f. Femme ou fille faisant partie de la con-
grégation de la vierge Marie, fort nombreuses à Alais, où on
les appelle communément en fr. Mariettes.
Marin, s. m. Marin, homme de mer; officier, soldat ou
matelot, appartenant à la marine.
Marin, s. m. Augm. Marinas. Vent de mer, vent du
midi relativement à Alais, où il donne ordinairement la
pluie. — Marin blan, vent du sud-est, ‘sec et chaud, plus
redouté encore pour les vers-à-soie que le vent du sud.
Marino, s. f. Marine; ce qui concerne la navigation sur
mer.
Mario, s. f., n. pr. de femme. Marie, nom de la sainte
Vierge, que portent beaucoup de personnes, femmes et
hommes
Marioun, s. m., n.pr. Dim. Mariouné, Mariounéto.
Marion, Marionnette, nom dim. donné à presque toutes les
femmes qui s'appellent Mario.
Marmaïo, s.f. Marmaille ; les petits enfants en général et
particulièrement ceux quisont incommodes et impatientants.
Dér. du gr. Mupumué, fourmilière, de Mépuné, fourmi:
MAR 467
Marmando, s./f., n. pr. de lieu. Marmande, ville. —
I est inutile de donner de plus amples renseignements sur
une localité dont notre lexique, qui ne fait pas précisé-
ment de la géographie, ne retient le nom que parce qu'il
revient souvent dans le discours, et ne s'emploie d'ailleurs
que dans cette locution : Aïgd’s pas Marmando.
Le sens exact de ce dicton, si ce n'est sa traduction litté-
rale, est celui du français : ce n’est pas le diable; ce n’est
pas le Pérou. Du diable, nous n'en avons que faire. Mais
un chef-lieu d'arrondissement du Lot et Garonne assimilé
à l'empire des Incas! Cela sent un peu le terroir dont
le fleuve inspirateur, qui arrose ce pays sans doute fertile,
ne roule pas cependant l'or dont les imaginations avaient
pavé et bourré le Pérou. Quoi qu'il en soit et sans pro-
noncer sur leurs mérites comparalifs, toujours est-il que c'est
la même pensée qui a fait choisir les deux pays pour types
d’une excellence, d’une supériorité à laquelle rien ne peut
atteindre. Le choix qu'on avait fait du Pérou s'explique
assez par les succès récents de la Californie et ceux en voie
d'aboutir de la Nouvelle-Calédonie; mais celui de Marmande
donne plus à chercher. Si le dicton avait pris naissance
dans l’Agenois, il serait dù aux regrets d'un indigène
dépaysé et pris de nostalgie, dulces reminiscitus Argos, où
mieux aux vanteries d’un autre, ce qui serait plus con-
forme à l'humeur gasconne. Mais comme il semble particu-
lier à notre localité, — je ne me rappelle pas l'avoir
entendu employer ailleurs, — voici ce qui est pro-
bable.
On n'a pas toujours eu des chemins de fer, pas plus que
des diligences. Il fut un temps où, faute même d'un coche,
Racine partit à bidet de Paris pour Uzès, tout comme
d’Artagnan s'était acheminé du Béarn à Meung sur son
poney orange. Dans ces temps antédiluviens, où voyager
était si grosse et si rare affaire, un Alaisien fut obligé
d'aller à Marmande. Personne d'ici n’y était jamais allé,
cela va sans dire. Il fallut sans doute un motif bien grave
pour le décider à s’aventurer si loin. 11 partit cependant ;
on ignore par quelle voie. Mais, dira-t-on, on ne va pas à
Marmande. — On y va bien, puisqu'on en revient, comme
d’Astrakan. Notre homme revint donc, et Dieu sait les
merveilles que le nouveau Pizarre cévenol raconta de cet
autre Pérou qu'il avait découvert. C'est depuis lors que
pour nous, rien n'a valu Marmande.
Marmito, s. f. Marmite; ustensile de cuisine, en métal
ou en terre, dans lequel on fait bouillir la viande, ou sim-
plement de l’eau. — Sé vira ddou cousta dé la marmito,
se tourner du côté de la marmite, c.-à-d. de ceux qui font
manger, comme faisait Sancho aux noces de Gamache; et,
par extension, se tourner du bon côté, de celui où il y a
quelque chose à gagner.
Dér. du lat. Marmor, marbre, a-t-on prétendu, parce
que les premières marmites étaient faites de marbre.
Marmitoù, s. #. Marmiton, bas valet de cuisine.
Marmoto, s.f. Marmotte, Mus alpinus, Linn., mammi-
468 MAR
fère unguiculé de la fam. des Rongeurs. — On ne connaît
ici, bien entendu , que la marmotte apportée par les
Savoyards de leur pays; ils en ont appris, dit-on, à
monter dans les cheminées en Ja voyant grimper, par une
manœuvre qu'ils ont imitée, entre deux parois de rocher.
Marmoto est aussi comme le fr. Marmotte, le coffret
plein d'échantillons que porte le commis-voyageur courant
la pratique, nom qui lui a été donné sans doute par
un rapprochement avec la boîte où le petit Savoyard tient
sa marmotte en vie.
En ital. Marmotta.
Marmousé, s. m. Marmouset, petite figure d'homme ou
de femme ; figurine, statuette ; petit homme mal fait; petit
garçon.
Dér. du gr. Mopu, masque.
Marmoutoù, s. m. Bélier, mouton entier, Aries.
Ce mot, dans la composition duquel entre évidemment
le lat. Mas, maris, signifie mouton mâle, le mouton sans
épithète ayant perdu cette qualité. Marmoutoù n’est point
tout à fait de notre dialecte, qui dit Aré pour le même
animal. — Voy. c. m.
Marouquin, s. m. Marocain, espèce de raisin noir, à
grains très-fermes, gros et peu serrés, cultivée dans le
Languedoc, et qui sans doute a été importée d'Afrique, du
Maroc; maroquin, peau apprêtée de chèvre ou de bouc,
employée à la chaussure et à la reliure des livres.
Marqua, v. Marquer, faire une marque, imprimer un
signe; tracer des lignes apparentes; indiquer, désigner,
noter par une marque quelconque; annoncer, pronostiquer,
promettre; écrire; donner à connaître; imprimer une tache,
une empreinte, la flétrissure en parlant d’un condamné à
la marque par le bourreau; indiquer ses points, ou les
parties gagnées au jeu. — À marqua sa plaço, il a marqué
sa place. Ta ploumo marquo pas, ta plume ne marque pas,
ne laisse aucune trace sur le papier, faute d'encre. Lou co
marquavo, le coup était apparent. Aquélo nivou marquo
dé vén, ce nuage annonce du vent, est un signe, un
pronostic de vent. Marquas la pajo, faites un signe, un
onglet à la page de ce livre. Marqua soun linje, mettre
son chiffre, ses initiales à son linge. L'an marqua à
l'éspanlo, le bourreau l’a marqué à l'épaule. Marquo tous
pouns, marque tes points. Marquo pas pus, en parlant du
cheval, il ne marque plus, on ne reconnaît plus son âge à
la dent : par extension et iron. se dit de quelqu'un qui
baisse, qui vieillit.
Dér. de Marquo.
Marquaïre, s. m. Marqueur; qui marque les points
dans une partie de jeu. — Jéou séraï lou marquaïre, je
serai le marqueur, je marquerai les points.
Marquan, auto, adj. Remarquable; considérable; qui
marque, qui produit des points. — Aqud’'s un home mar-
quan, c’est un homme marquant, un personnage. La carto
marquanto, l'atout, la carte qui fait le point; une
figure.
MAR
Marquis, marquiso, s. m. et.f. Marquis, marquise,
titre d'honneur et de distinction.
Dér. de la bass. lat. Marchiones, officiers préposés à la
garde des frontières, Marcho, marches, de l’allem. Mark,
bord, frontière.
Marquo, s. f. Marque; signe quelconque pour désigner,
pour distinguer un objet; empreinte, indice; figure; im-
pression; trace apparente, sensible; signe; chiffre, carac-
tère, sur un ouvrage, une marchandise; jeton, fiche pour
marquer où compter; instrument dont on se sert à cet
effet; témoignage, preuve; présage; peine infamante de la
flétrissure. — Marquo dé cè, idiotisme, de prononciation
surtout, preuve de cela.
Dér. de l’allem. Mark, marque, signe.
Marquo, s. f. Craie, pierre blanche, calcaire et tendre,
plâtre blanc, dont on se sert pour tracer des lignes, pour
marquer. — Uno Sénto-Vièrjo én marquo, une statue de
la Vierge en plâtre : métonymie.
Marquo-mäâou, s. des deux genres. Qui marque mal;
qui dénote mal; qui montre des intentions, des penchants
mauvais.
Mar-sâouse, s. m. Marseau, saule-marseau, Salix capra,
Linn., arbre de la fam. des Amentacées, qui croît bien
dans les terrains secs et craïeux; son bois est plus dur
et plus plein que celui du saule aquatique; on s'en sert
avec avantage pour faire des perches et des échalas. Le
marseau donne aussi d'assez bon bois à brüler.
Formé de Mar, du lat. Mas, maris, mâle, et Sdouse,
saule.
Marséiés, és0, s. m. et f. et adj. Marseillais, aise;
habitant de Marseille; qui est, qui provient de Mar-
seille.
La Marséiéso, la Marseillaise, la fameuse chanson de la
Révolution.
Marséiïo, s. f., n. pr. de ville. Marseille, chef-lieu du
département des Bouches du Rhône.
Les opinions sont fort divisées sur l’étymologie du nom.
Les analogies ne manquent point et s'appliquent à des
localités d’une bien mince importance et de moindre
ancienneté : ce qui ne diminue en rien l'embarras. Le
prendre dans le lat. Massilia, qui traduisait le gr. MacoaAle,
ne fait que déplacer la question. Où le grec et le latin
l'avaient-ils pris eux-mêmes? Adrien de Valois indique
comme radicaux Méooew, mollire, amollir, ow bien
Maœdaxlx, mollities, calme de la mer, peu différent de
Masoakla. Expilly et d'autres tirent des inductions du nom
des Salyes ou Salyens, peuples qui occupaient ces rivages
gaulois au moment où les Phocéens y abordèrent et vinrent
bâtir la ville. Cette dernière interprétation pourrait faire
intervenir l'élément celtique dans l'appellation, Mas,
mansio, lieu, demeure, pour la première syllabe, Salyes,
évidemment régional et pris sur les lieux et dans la langue
du pays, ou dans le Ligurien.
Marséja, v. impers. Faire un temps de mars, pour
MAR
exprimer les intempéries, les giboulées habituelles dans ce
mois. — Marséjo, il fait un temps de mars.
Marséjado, s. f. Intempérie, giboulée de mars.
Marsén, marsénquo, adj. Du mois de mars; qui appar-
tient au mois de mars; qui nait, pousse, est cueilli en
mars. — Lous marséns, les mars, menus grains, orge,
avoine, millet, ete., que l'on sème au mois de mars.
Marsioure, s. m. Hellébore vert, rose de Noël, Helle-
-borus viridis, Linn., plante rustique de la fam. des Renon-
_culacées, qui fleurit pendant la gelée, et dont on emploie
la racine, sous le nom d'hellébore noir, à faire des setons
pour les maladies contagieuses des chevaux.
Dér. de Mar pour Mal, mdou, mauvais, et Sioure,
liège.
.… Martèl, s. m. Dim. Martélé; péj. Martélas. Marteau,
outil de fer, à manche et à une ou deux têtes, pour
frapper; heurtoir d'une porte.
Dér. du lat. Martellus, m. sign.
Martéla, v. Marteler; battre, travailler avec le marteau;
frapper à coups de marteau.
Martélado, s. f. Coup de marteau. Au fig., inquiétude,
souci imaginaire; folie, lubie : dans le mème sens, à peu
près, le fr. emploie encore le v. m. Martèl, se mettre
martel en tête.
Martélaje, s. f. Martelage, marque que l’on fait sur les
arbres que l’on doit abattre, ou sur ceux exposés à un
cours d'eau torrentiel, pour que le propriétaire puisse les
réclamer s'ils sont emportés ; coups de marteau répétés,
leur bruit, leur roulement.
Marti, s. "”., n. pr. d'homme. Dim. Martiné. Au fém.
Martino. Martin. — Comme patron très-vénéré par sa
sainteté, comme date du jour de sa fête, le 41 novembre,
comme locution proverbiale, le nom de Marti, Martin, est
entré dans beaucoup de locutions, d'appellations et de
phrases faites, en lang. et en fr. — À Sén-Marti, tapo toun
vi, prwb., à la Saint-Martin, bouche tes tonneaux. Manquo
pas d'ases à la fièiro qué s'apèlou Marti, à la foire il y a
bien des ânes qui s'appellent Martin, pour dire qu’en une
foule de choses il ne faut pas se fier à la première appa-
rence, non plus que se contenter d’un nom, même hono-
rable, pour se confier et croire au premier venu sur cette
_ seule étiquette.
Dér. du lat. Martinus où Martius.
Martignargue, s. m., n. pr. de lieu. Martignargues,
dans le canton de Vézénobres (Gard).
Nous ne relevons le nom de ce petit hameau inconnu
-que parce qu'il représente dans sa forme un des spécimens
- les plus authentiques des diverses altérations par lesquelles
sont passés les noms propres revètus aujourd'hui de la
fameuse désinence en argues,et parce qu'il sera plus facile
ici de vérifier ce que nous avons dit à ce sujet par les
. rapprochements et les analogies qui s’y rattachent. Il n’est
. besoin pour cela que de suivre la série des dénominations
successives, et. de placer en regard ou à la suite les simi-
MAR 469
laires, qui tous, comme celui-ci, ont eu pour parrain ou
pour patron le nom du grand et saint apôtre des Gaules,
évèque de Tours, mort à la fin du rv° siècle. L'identité de
valeur significative des suflixes servant à adjectiver un
substantif nom propre, pour en faire un nom de localité,
de domaine ou de propriété, en sera mieux démontrée,
depuis leur formule ancienne tirée du celtique, et ses chan-
gements dans la moyenne latinité et le roman, jusqu’à leurs
variantes ethniques adoptées par la langue d'Oc et la
langue d'Oil. :
Le nom de ce village est mentionné, en l'an 850, Mar-
tiniacum colonica; Ecelesia de Martinhanicis, en 4344;
le lieu de Saint-Martin de Martingnanges, en 4346; Mar-
tinhanice, en 4384, dans le dénombrement ; Martinhargues,
en 4547; Saint-Martin de Martinhargues, en A620; et
enfin fixé en Martignargue, et Martignargues.
Comme analogues, on trouve Martignac (Ariège, Lot);
Martignas (Gironde); Martillac (Gironde); en latin, Mar-
tinacum, notre plus ancienne forme; Martignan (Gard,
Haute-Garonne); Martissan (Tarn et Garonne); Martinens
(Gers), en lat. Martinanum, amenant dans la bass. lat.
Martinhanicæ, el dans le roman Martinanges et Marti-
néncho, Martinenche, que nous allons voir, produisant
aussi Wartigné (Mayenne); Martigni, Martigny ou Mar-
tinhac, dans le Valais; Martinengo, dans la Lombardo-
Vénétie; Martinho, en Portugal.
Tous se retrouvent dans Martignargue sous ses différents
aspects, et avec les terminaisons que, au Midi et au Nord,
ont modifiées les influences du climat, de la contrée et
leur prononciation propre; mais tous adjectivant le mème
nom propre et le convertissant en un nom de propriété,
avec la signification de domaine de Martin ou lieu sous
l'invocation de Martin et dont il est considéré comme
maitre.
Nous n'avons donc pas à redire que ces exemples con-
firment de plus en plus cette opinion que la désinence
argue, particulière à notre Midi, est purement adjective,
équivalente aux suflixes ac, at, é, igny, et autres, et n'a
point à revendiquer une racine dans le latin Ager. —
Voy. Argues, An, En, elc., elc.
Martiné, s. m. Martinet, gros marteau, müû par la force
de l'eau et plus souvent aujourd'hui par une machine à
vapeur; se dit en mème temps de la forge et de la fonderie
elle-même. Aussi est-il devenu un nom de lieu pour plu-
sieurs endroits où il existait des usines de ce genre.
Il est encore le dim. du n. pr. Marti, Martin.
Martinéncho, s. f., n. pr. de lieu et d'homme. Marti-
nenche, hameau dans la commune de Sénéchas, arrondis-
sement d’Alais.
La forme féminine de ce nom le fait remonter au masc.
Martinén, avec le suffixe chuintant éncho provenant de
én, èn, ènc, énquo, variantes déjà étudiées, et établissant
son analogie avec Martignargue ci-dessus et les autres. Sa
signification est en tout semblable, le suffixe adjectif ne
470 MAR
changeant point le sens du radical. — Voy. Én, Ën, suff.,
et Martignargue.
Martre, s. f., ou Martro. Marte, marte commune,
Mustela martes, Linn., mammifère unguiculé de la fam.
des Digitigrades ou Carnivores : pelage entièrement brun
avec une tache jaune-clair sous la gorge; queue longue et
bien fournie. — Cet animal, de la taille à peu près d’un
chat ordinaire mais plus bas sur ses jambes, est rare dans
le Midi, et l'on n’en trouve quelques-uns que dans les
montagnes de l'Ardèche, de la Lozère et des Cévennes. La
fouine au contraire est commune chez nous; elle ne diffère
de la marte, d'une manière un peu distincte, que parce
qu'elle a le. dessous de la gorge blanc; leurs mœurs sont
d’ailleurs entièrement semblables : aussi ont-elles été con-
fondues toutes deux, et, pour le languedocien, la fouine
est aussi {a Martro. Du reste, les anciens naturalistes en
avaient fait autant, et pour eux la fouine était la marte
domestique, non qu'il fût bien facile et plus habituel alors
qu'il ne l’est aujourd'hui de la réduire en domesticité, mais
sans doute parce qu'on la voyait rôder plus volontiers que
la marte autour des habitations. Lorsque les savants con-
fondent ainsi, pourquoi le languedocien, qui n’est pas
savant, eùt-il fait mieux ? La science a marché et classé
distinctement la marte et la fouine; le languedocien per-
siste à n’en pas faire la différence et à ne leur donner qu'un
seul nom, celui de Martre ou Martro.
Martro, s. f., n. pr. de femme. Marthe. — Ddou tén
qué Martro fialavo, disons-nous pour exprimer ce que dit
le français : du temps que Berthe filait; il n’y a que la
filandière de changée. Mais tout le monde connaissait peu
ou prou la reine Berthe, et l'on n'en peut dire autant
de la Marthe qui l'a détrônée chez nous: à moins que ce
ne soit la sœur de Lazare, et rigoureusement cela peut
être. Comme il s’agit, dans les deux dictons, de remonter
dans des temps très-reculés, où les choses se passaient
autrement que du nôtre, où par exemple les rois épousaient
des bergères, il est possible que le languedocien ait voulu
renchérir sur son voisin; et, ne se contentant pas du moyen-
âge, il est allé jusqu’à la Tarasque. Cependant il n’est pas
à croire que cette course au clocher rétrograde ait eu lieu;
et voici comment je soupçonne que, simplement et sans
songer à la chronologie, à Berthe on a substitué Marthe.
Le premier de ces noms n’était pas usité ni connu dans
nos contrées; le second au contraire l'était beaucoup, et
l'on disait Marto mieux peut-être que Martro, qui est
cependant resté. En entendant prononcer le nom étranger,
le languedocien crut que c'était le sien qu'on estropiait;
l'assonance aida à son erreur; il corrigea ce qu’il avait mal
dit, et la correction nous a été transmise. C'est là tout le
secret.
Cette marche me paraît évidente et la conservation de la
quenouille est, à mon avis, la confirmation du fait. La
reine Berthe filait, cela n’est pas douteux : l'histoire'et la |
tradition avaient appris à tous ce modeste emploi du temps |
MAS
de la mère de Charlemagne; et il était assez excentrique
en si haut lieu pour être rappelé comme contraste à ce qui
s'est passé plus tard, car aujourd’hui et il y a longtemps
les reines ne filent plus. Mais qu'importe que Marthe
s’occupät à filer, à coudre ou à tricoter, ce qui devait être
une partie des soins du ménage dont elle était chargée ?
Dans sa position plus humble, cela n’avait rien que de fort
naturel, de fort ordinaire, et elle filerait encore si le mi-
racle qui ressuscita son frère se renouvelait en sa faveur;
il n’y avait donc pas à le remarquer, à le relever, à en
faire une opposition à nos usages. Il faut, en effet, bien
reconnaître et constater que le proverbe n’a pas voulu
seulement citer une époque reculée. Pour cela il n'avait
pas besoin de s'arrêter en si bon chemin, et il pouvait
remonter au déluge où, par parenthèse, s'il y tenait, il
pouvait, sans trop de crainte de se tromper, faire filer et
même tisser la femme et les brus de Noé qui ne devaient
pas s’y épargner pour vêtir la famille, attendu qu'on man-
quait un peu de magasins de confection. Mais il à voulu
surtout parler d’un temps où les usages, les habitudes, les
mœurs, les choses, meilleurs ou plus mauvais, étaient tout
différents des nôtres, où l’on voyait ce qu'on ne voit plus.
Le français a rendu cette pensée; le languedocien nella
rend pas. Il me parait donc certain que ce dernier n’a
point fait son proverbe qu'il aurait fait différemment, et
qu'il l’a pris du français, en l'altérant, sans s’en douter, en
effaçant même le sens qu'il doit avoir.
Martroü, s. f., n. pr. de femme. Dim. de Martro.
Marthe.
Mas, s. f. Madame ou Mademoiselle. — ‘On dônnait
autrefois le nom de Madame à la bourgeoïse mariée. Mas,
abréviation de Madoumésèlo, s'appliquait de même, et
descendait jusqu'aux femmes d'une condition bien infé-
rieure encore. Ce mot n'allait jamais seul; on y joïgnait
toujours le nom de la personne précédé lui-même de l’artiéle
dé, qui n'était pas tout à fait la particule; ainsi l'on disait :
Aï vis mas dé Sâouri; Coumo anas, mas dé Pièchégu?'etc.
Aujourd'hui Madamo est venu égaliser toutes les femmes :
aussi Mas ne reste que comme souvenir d’usages passés de
mode, ou tout au plus pour servir quelquefois d'appella-
tion plaisante. :
Mas, s. m. Maison de campagne; ferme, métairie, habi-
tation des champs; campagne, depuis la modeste demeure
du paysan jusqu'au château exclusivement. Mas
exprime en général l’ensemble de la propriété rurale,
habitation, bâtiments d'exploitation et terres dépendantes ;
mais quelquefois il peut s'entendre seulement de la maison.
Dér. du lat. Mansus, m. sign.
Masado, s./f. Tour du Mas, de la ferme, le vol du
chapon, les champs les plus rapprochés et par conséquent
les mieux cultivés.
Masado est aussi l’agglomération de quelques Mas, et
alors à peu près l’équivalent de petit hameau. De là le-
nom du village de Maza, Mazac, aux environs d'Alais.
de
DEP ae
. laide, défigurer; ce qui a lieu quand on la barbouille de
-churée, charbonnée, barbouillée avec du noir.
MAS
Masäouri, s. m., n. pr. d'homme. Mazauric. — La
traduction n'est pas heureuse, et le français y a rarement
bonne main pour nos noms propres. Le e final qu'il a
introduit dans celui-ci a l'inconvénient de le défigurer
complètement.
Le mot est une contraction de Mas dou riou, du lat.
Mansus ad rivum, métairie près du ruisseau.
Mascara, v. Mächurer; noircir; charbonner; barbouiller
de noir. — Lou péirdou véou mascara la sartan, le
chaudron veut noircir la poële, ou la pelle se moque du
fourgon.
Le languedocien Caro, mine, figure, de la bass. lat.
Cara, m. sign:, précédé de Mas, altération de Mal, malo,
mauvais, a formé Mascara, rendre la figure mauvaise,
noir. De mème se sont formés par contraction Masquo et
Masquéto, vilaine et fausse figure, faux visage par exten-
sion, parce qu'aussi dans le principe pour se masquer, il
suffisait peut-être de se noircir, sé mascara, le visage.
Mascaraduro, s. f. Noircissure; état d’une chose mà-
Mascaroü, s. m. Chaudronnier, mineur de houille, for-
geron, ouvrier ou artisan que son travail ou son métier
expose à avoir souvent la figure noircie; jeune ramoneur
de cheminées.
Mascle, s.f. Augm. et péj. Masclas. Mâle; qui est du
sexe masculin; opposé de femelle.
Dér. du lat. Masculus, m. sign.
Mascloüs, s. m. plur. Crinons, dragonneaux ou dra-
concules, petits vers microscopiques, de la grosseur d’un
cheveu (Crinis), et longs en proportion, qui naissent de
préférence sous la peau des enfants maigres et délicats,
surtout de ceux qui manquent de soins de propreté, et se
logent dans les parties musculeuses du corps où ils causent
des démangeaisons continuelles et fàcheuses qui rendent
l'enfant malade. On s’en débarrasse au moyen de frictions
avec de l'huile ou d’une pommade légèrement mercurielle.
Le ciron, type de la petitesse, est un insecte aptère qui a
les mèmes aptitudes et doit être compris sous le même
nom. é 1
‘On remarquera que l'on n'emploie guère le mot Mas-
cloùs qu'au pluriel, ces animaux étant si petits qu’il n’y a
pas lieu de s'occuper d’un seul.
Masé, s. m. Dim. de Mas. Maisonnette de, plaisance,
pour lequel on a aventuré en francisant le mot : Mazet. —
Les Mazets ont bien autant de droit que les Bastides, leurs
sœurs germaines, à être nommés de leur nom en français :
ils sont du reste en assez grand nombre pour faire valoir
leurs titres, car les.campagnes qui entourent nos villes en
sont couvertes.
Masé est le dim. de Mas, diminutif s’il en fut jamais,
car il se compose ordinairement d'une seule pièce au rez-
de-chaussée servant à la fois de salon, de cuisine et surtout
de salle à manger; une autre pièce au premier, où l'on ,
MAS 471
grimpe par une échelle de meunier, accuse déjà beaucoup
d’ambition, et quelque chose de plus lui ferait perdre son
caractère et jusqu'à son nom pour atteindre celui de
Mas.
Masèl-Vièl, s. m. Mazel-Viel, nom d’un des quartiers de
la ville d'Alais, auquel on a bien fait de conserver en
français, en classant les.rues, sa forme originaire, quoi-
qu'on püt cette fois le traduire d’une manière exacte par :
vieille boucherie.
Du lat. Macellum, boucherie, on avait fait Masèl, avec
la m. sign., mais le mot est tombé en désuétude et ne sert
plus que pour dénommer d'anciens quartiers ou des loca-
lités où ont dù exister dans le temps des boucheries.
Quelques noms propres d'homme sont sortis de là.
Maséla, v. Terme de boulangerie, former le pain lors-
qu'il est en pâte et levé, le marquer de la tranche de la
main; presser, entasser la pâte, la condenser, la patiner,
au lieu de la remuer largement ou légèrement, sans la
presser ni l'aplatir,
Maséla, ado, adj. et part. pass. Pressé, entassé; con-
densé.
Dér, du gr. Mésow, pétrir, exprimer en pressurant.
Masiè, s. m. Métayer; qui habite et cultive un Mas.—
Ne se dit que de celui qui est dans une métairie de peu
d'importance.
Masqua, v. Masquer; déguiser; cacher; dérober à la vue.
Sé masqua, se masquer; mettre un masque sur la figure,
un habit de masque; se déguiser.
Dér. de Masquo, masquéto.
Masquarado, s. f. Mascarade; troupe, cortége de car-
naval, de gens masqués et déguisés.
Masquéto, s. f. Masque; faux visage en carton avec
lequel on se déguise en carnaval; personne masquée,
déguisée. — S'abia én masquéto, se masquer, se déguiser.
— Voy. Mascara.
Masquo, s. f. Masque, sorcière; parce que les sorcières
se cachaient sous un faux visage pour faire leurs conjura-
tions. Aujourd'hui ce mot n'est plus qu'une injure dite à
une femme pour lui reprocher sa vieillesse, sa Jaideur et
surtout sa méchanceté. Cependant, comme beaucoup de ces
termes injurieux qui ont perdu de leur signification pre-
mière, celui-ci, dont l'application s'est fort étendue, change
de valeur selon la personne à qui il s'adresse et le ton avec
lequel on le prononce. Car il y a loin de Masquo/ dit à la
fillette malicieuse, espiègle et un peu démon par sa mère
qu'elle fait enrager, à Vièio masquo/ dont on apostrophe
une femme vieille, laide, méchante, ayant enfin tous les
défauts qu'on reprochait aux sorcières — Foy. Mascara.
Massa, vw. Piler, écraser; assommer; frapper avec la
masso, Masse. À
Massacra, v. Massacrer; tuer; blesser fortement; char-
cuter; travailler mal; massacrer, gâcher, barbouiller un
ouvrage.
Massacre, s. m. Attiseur, celui qui attise le feu dans
472 MAS
une filature de soie; dans les moulins à huile, on appelle
l'attiseur lou Chourou. — S'entend aussi d’un ouvrier qui
travaille mal, un massacre, qui gâte un ouvrage.
Massacre, s. m., dans le sens du fr. Massacre, carnage,
tuerie, est bien reçu, transmis qu'il a été directement par
la bass. lat. Mazacrium, m. sign.
Massano, s. f., n. pr. de lieu. Massanes, commune du
canton de Lédignan (Gard).
Deux autres localités, quartiers ou fermes, portent Ja
même dénomination, le village du canton de Lédignan est
le plus considérable; il a été chanté par Florian dans sa
charmante idylle d’Estèle et Némorin : ce serait un titre
pour ne pas être passé sous silence, mais pour le moment
c'est aux noms seuls que nous en voulons. À décomposer
le mot, on obtient sans effort pour la première partie Mas,
abréviation connue et fréquente du lat. Mansus où Mansio,
et pour la seconde, le lat. encore Sana ou Sane, au sing.
ou au plur.; ce qui représente une ou plusieurs habitations
saines, salubres, et se trouve parfaitement applicable, pour
peu qu'on soit de l'avis de Florian, qui n’a fait que la
description cependant, et non le baptème.
Eh bien! cette interprétation étymologique, si naturelle
semble-t-il, risquerait de ne pas être vraie. Le doute
s'appuie des meilleures raisons; car aucune des deux par-
ties du mot ne résiste à une analyse un peu sévère. D'abord
Mas pourrait bien n'être que ce radical transformé dont on
rencontre tant d'exemples, mis ici pour Mal, venu de
Malè où Malum, et la signification serait l'inverse de ce
qu'on croirait. Puis, la finale, à la bien considérer, n’est
autre que le suffixe d'attribution lat. Anus, a, um, au
nominatif sing. ou plur. féminin : par conséquent l’expli-
cation par le lat. Sana ou Sanæ, saine, se détache absolu-
ment. Et il est à peu près certain qu'il doit en être ainsi
pour les deux fractions du nom, car sa syllabe initiale
n’est qu'une altération adoucie; et sa désinence qu'un
retour ou mieux qu'une restitution de forme du suffixe.
La preuve en ressort évidente de l'appellation gallo-latine
de Massano, Massanes, qu'un cartulaire cité par M. Ger-
mer-Durand désigne, en 4038, par Villa que vocant Mar-
sanicus, changé par le roman de 4435 en Marsane, devenu
seulement, en 4582, Massanes et Massannes. De plus, il
se rencontre que la forme rude s’est conservée dans le nom
d'un autre lieu de la commune de Bellegarde, appelé encore
Marsane; sans mème tenir note des analogues Marsan
(Gers) et Massan (Aude), non plus que de Marsac (Cha-
rente, Creuse, Dordogne, Lot, Lot et Garonne, Puy-de-
Dôme, Hautes-Pyrénées, Tarn, Tarn et Garonne), corres-
pondants à Massac (Aude, Charente-Inférieure, Tarn).
Mais, par l'appellation dans la moyenne latinité, nous
sommes amené à une autre identité plus rapprochée et plus
familière à notre contrée : elle se trouve dans Massargue,
Massargues, hameaux ou quartiers des communes de Car-
nac, de Saint-Martin de Saussenac et de Saint-Quentin
(Gard), ce dernier dit aussi, en 1245, Marsanice.
MAS
Voilà un nouvel exemple frappant de la similarité ou de
l'équivalence des suffixes : la forme gallo-latine anicæ,
représenté par le roman, le languedocien et le français en
ano, anes, et argue, argues, se tenant avec an, ac et as.
Nous verrons au reste les mêmes phénomènes d'inversion
se reproduire dans Massillargue et Marsillargues, et bon
nombre d’autres. — Voy. €. m.
Il ne s’agit donc ici que d’une désinence suffixe : les
variantes ne changent point l'attribution, le sens reste le
même avec ac, an, ano, anes, argue, as; et, suivant la
forme première ou plus ancienne du mot, si son radical est
Mars, du lat. Mars, martis, ou du génitif du nom de
Marcus on Maricus, avec une légère permutation, il est
probable qu’il signifiera, par l’adjonetion du suflixe, le
domaine de Mars ou de Marcus, un lieu dédié à Mars, divi-
nité gauloise et romaine, ou appartenant à Marcus ou
Marcius.
De là il n’y a pas à inférer que tous ces villages ou
hameaux remontent à une date perdue, comme on dit,
dans la nuit des temps; mais il ne serait pas impossible
qu'un souvenir du dieu Mars se fût peut-être conservé. Ce
qui est pourtant plus vraisemblable, c'est le nom simple
du propriétaire, ou bien le patronage de l’évangéliste
Marc, sous l’invocation duquel une église, toujours le pre-
mier étabissement fondé, aurait été placée.
Massapan, s. m. Petite boîte en bois léger où l’on met
des friandises, des confitures sèches; boîte aux graines
pour les couvées de vers-à-soie.
Massaparén, s. m., ou Pissagô. Potiron rouge, poly-
pore bigarré, Polyporus versicolor, Linn., espèce de cham-
pignon vénéneux, comme l'indique son nom qui signifie
tue-parent, du lat. Mactare, tuer, en ital. Mazzare. — Ce
champignon devient bleu ou violet lorsqu'on le casse, où
simplement en y appuyant le doigt. Il cesse, dit-on, d'être
malfaisant quand on l’a fait bouillir et dégorger ensuite
dans l’eau fraiche; mais nous ne voudrions pas garantir
l'efficacité du procédé. — Voy. Pissagd.
Masséto, s. f. Maillet en fer de tailleur de pierre.
Dim. de Masso, masse.
Massiargue, s. m., n. pr. de lieu. Massillargues, dans
le canton d'Anduze et dans la commune de Saint-Maximin
(Gard).
Ce nom et quelques-uns de ses analogues présentent des
particularités de formation qui nous paraissent assez
curieuses : leur orthographe s’est modifiée d’une manière
si diverse avant de se fixer comme elle est aujourd’hui,
qu'il en résulte une certaine incertitude sur leur véritable
dérivation.
Massiargue, d'abord, reproduit en fr. par Massillargues,
était désigné, en 4345, dans deux titres différents par
Parrochia Sancti Marcelli, et par Castrum et mandamentum
de Massilianicis, devenu, en 4402, de Marcilhanicis, en
4435, Massillargues en Anduze, forme romane, et encore,
en 4437, de Marcilhanicis, en 4485, Marcelhanicæ; puis,
MAS
Masilharge, en 4525, et Marcilhargues, en 4868; pour
flotter toujours entre ces variantes jusqu'à l'appellation
actuelle qui parait définitive dans la langue vulgaire et
dans le français. On sait à quoi s'en tenir sur la transfor-
mation de la finale de la basse latinité anicæ en argue,
languedocien : ici une complication du mot se produit sur
ses premières syllabes avec la lettre r qui parait et dispa-
rait au gré de je ne sais quel caprice.
Pourquoi le même phénomène se montre-t-il dans le nom
de Marseille, que le grec et le latin faisaient nettement
sonner en Massalia, et qui a pris la forme rude en langue
d’Oil et en langue d'Oc?
Plus près de nous, l'appellation analogue Massia, Mas-
sillac, commune de Bouillargues, était, en 9M, Villa que
vocant Marceglago; elle devint, en 4146, Marciliachum et
Marcellacum, en 4200, Marsillacum, en 4479, Massihac,
pour finir en Massia, ou Massillac dans notre dernière
orthographe.
Par le rapprochement, sinon de la forme actuelle, au
moins de celle donnée à notre Massïargue dans le moyen-
âge, il faut reconnaitre la même composition non altérée
dans Marsiargue, Marsillargues, autrefois Massillargues
(Hérault), en lat. Marcellianicæ, Marcellianicus. Dans la
mème catégorie viendront se confondre Marcilhac (Lot);
Marcilhac (Aveyron, Corrèze, Dordogne, Gironde, Lot);
Marseillac (Haute-Garonne) ; Massillac et Marcillat (Creuse,
Puy-de-Dôme); Marsillat (Creuse) ; Marsellan (Gers) ; Mar-
cellanges, n. pr.; Marséian, Marseillan (Gers, Hérault,
Hautes-Pyrénées); Marsian, Marsillan (Gard); et de plus
les Marcillé, et vingt-deux Marcilly, répandus sur tous les
points, sans compter les Marsilly, qui sont aussi de la
famille, et les Massilly, dans lesquels se retrouvent les
formes latines Marcellus, Marcellianus et Marcellianicus.
La question n’est pas de remarquer une fois de plus
l'identité de dénomination malgré la différence des dési-
nences. Il est bien certain qu’en ajoutant à un nom, à un
substantif, le suffixe final, qu'il soit a, ac, an, at, anges,
argues, 6 ou y, on a voulu, suivant une méthode que
nous avons déjà exposée, et par des procédés connus el
variés, faire de ce nom un nom de propriété, de localité.
Mais quel est le mot générateur ? Est-il clairement précisé
par la forme en Mass où Mas, ou bien par la consonnance
en Mar, Mars, Marce? Deux voies ne se présentent-elles
pas à l’étymologie à cause de ces variations ?
. L'une, comme pour Marséïo, Marseille, venant de Mas-
salia, adoptant cependant la consonne r, n’indique-t-elle
pas, pour les analogues correspondants, un primitif égale-
ment en Mas pris dans l'idiome gaulois et si fidèlement
conservé ?
L'autre ne mène-t-elle pas, avec autant de probabilité,
vers le nom propre latin Marcellus, porté par un saint
Marcel, évêque, sous le patronage et l'invocation duquel
ces nombreux villages, qui ne remontent pas au-delà de
Y'ère chrétienne, auraient été placés ?
MAS 473
Contre ce dernier aperçu s'élève une objection de quelque
importance : pas une de ces appellations n’est précédée de
l'adjectif qualificatif Sén, Saint, ce qui arrive d'ordinaire
quand un patron religieux est adopté. Quant à l'origine
par le nom romain de Marcellus, il est possible que ce
nom ait été plus répandu au moyen-âge qu'il ne l'est
aujourd’hui, mais elle ne peut être attribuée à la famille
patricienne qui aurait laissé son souvenir dans la Gaule
avec cette profusion.
Faut-il revenir au Mas celtique, avec la signification de
lieu, demeure, habitation, plus générale que l'acception
restreinte de maison, avec laquelle nous le trouvons si
souvent employé, soit seul, soit en composition ? Pour
Marséio il semble qu'il n’y a pas doute /Voy. ç. m.). Mais
pour la terminaison, qu’elle soit ceilla, cilhac, seillac, sïa,
silhargue, sian, cilhy, silly, etc., il convient de la cher-
cher ailleurs que dans le mot Salyes ou Saliens, nom d’une
tribu gauloise. Mais les Salyes n'auraient-ils pas été eux-
mèmes dénommés d'un radical de leur langue? Et dès-lors
le primitif ne pourrait-il pas avoir été pris dans la racine
Cal ou Chal, que l’ancien cornique rend par Kelli, et le
gaëlique par Caï, transformé par le lat. du moyen-âge en
Scyllæ, correspondant à Sylvæ, et par le roman en Seilles,
Celles, avec la mème signification, métamorphosé encore
en Salles, que nous gardons /Voy. Sallos), d’où sont sorties
tant de variétés avec le sens de forêt, bois ?
L'assemblage des deux racines donnerait par conséquent
à tous ces noms de lieu, plus ou moins transformés, le
sens de : lieu de la forèt ou dans les bois, au milieu des
bois. La topographie ancienne du pays pourrait assurer à
cette dérivation quelque vraisemblance; et nous n'avons
pas le moyen de vérifier autrement nos conjectures et ces
indications.
Peut-être une interprétation plus simple s’ajouterait-elle
à celle-ci, en admettant toujours pour la dernière partie
du mot, à part les suflixes, le radical synonyme de Sylva
ou de Nemus, ceille, celle, silly ou autres, mais en remar-
quant le commencement du nom formé de Mar ou Mas,
ce radical si fréquemment employé en composition pour
imprimer la signification péjorative qui correspond au lat.
Malum où Malë, dont nous avons cité beaucoup d'exemples.
On sortirait ainsi de ces dénominations légendaires qui se
justifient difficilement, et on serait ramené à des mots des-
criptifs, inspirés par l'aspect de la contrée à laquelle ils
s'appliquent, situation ou nécessité sans aucun doute com-
mune dans la Gaule remplie de forêts. On voit dès-lors que
ces appellations voudraient dire naturellement : petite,
mauvaise forêt, bois mauvais; et cette signification aurait
dans bien des lieux trouvé sa raison d'être.
Massimoun, s. »m. Maximum, le plus haut degré, le
prix le plus élevé que puisse atteindre une chose, une
marchandise, — Ce mot, de physionomie assez étrange,
est dù à la première révolution où la fameuse loi du maxi-
munm frappa bien plus encore sur le peuple que les lois de
474 MAS
proscription et de sang : aussi adopta-t-il Massimoun, dont
il était tant question et dont il souffrit, et le corrélatif
Minimoun lui resta étranger.
Massis, s. m. Jetée en maçonnerie, digue, boulevard,
sur le bord d’une rivière torrentielle pour briser le cours
de l’eau, le détourner et empêcher les terres qui sont der-
rière d'être sapées et emportées. — Un massis plus consi-
dérable dans un port de mer est un môle.
Massis ou Massi, adj. m. Au fém. Massipo où Mas-
sivo. Massif; matériel; ample et épais; lourd; grossier;
matériel.
La déviation singulière du mot au fém. Massipo n’est
pas toute due à l'euphonie ; elle suppose à un masc. inusité
là présence d'un p final. Il est difficile d'en voir et d'en
savoir la raison.
Masso, s. f. Masse; maillet de menuisier, de tonnelier,
de chaudronnier, etc.
Masso, s. f. Masse; fonds d'argent, d’une succession,
d’une société. — Rapourta à la masso, faire rapport à la
masse. Métre à la masso, mettre à la masse : c'était une
assurance mutuelle entre quelques parents de jeunes gens
souris à la conscription qui formaient, par part égale, un
fonds commun : si le sort était favorable à tous, chacun
retirait sa mise; sinon, le mauvais numéro prenait la
masse entière, ou les mauvais se la partageaient, pour faire
un remplaçant. Cet usage était un peu passé de mode
depuis l'établissement des compagnies pour les remplace-
ments militaires; mais traiter avec elles se disait encore
souvent métre à la masso. L'intervention du gouvernement
avait porté le dernier coup à la locution : la nouvelle loi
sur l’organisation de l’armée, qui abolit le remplacement,
la fera mettre tout à fait en oubli.
Masso-bidou, s. m., n. pr. d'homme. Ancien nom des
bouchers pour la viande de bœuf, et proprement Tue-
bœuf, de l’ital. Mazxare, tuer; en esp. Matador, du lat.
Mactare, mactator, d'où Matar, m. sign.
Sur ce mot, SAUVAGES, qu'il fait bon toujours citer, dit
dans un article plein de haute raison :
« Ce dernier nom, ou tue-bœuf, serait préférable à celui
de masse-bœuf, que nos notaires emploient constamment
dans leurs actes, s’il était cependant permis de changer
les noms propres en tout ou partie, sous prétexte de les
franciser en les rendant méconnaissables : ce qui est con-
traire aux bonnes règles.
« Cet usage est d'autant plus extraordinaire, que lorsque,
dans un ouvrage français, on cite un nom propre anglais
où allemand, on ne s'avise pas d'en changer l'orthographe,
quelque hérissée qu'elle soit de consonnes qui n'ont pas
coutume de se trouver ensemble dans des mots français;
encore moins les traduira-t-on dans cette dérnière angue ;
on écrira, par ex., le nom propre Schenchzer, sans y chan-
ger une seule lettre.
« Et l'on se permet des changements dans les in. pr.
languedociens , dont beaucoup ‘sont cependant du ‘haut
MAS
allemand, étant mis en parallèle à côté du français. N'est-il
donc pas permis à un languedocien d'être de sa langue
maternelle, la première qu’il a appris à bégayer, celle qui
lui est la plus familière, et qu'ont parlée ses aïeux, pour
qui le français fut longtemps une langue presque aussi
étrangère que celle des peuples qui nous environnent ?
« Cette manie d’altérer les n. pr. ou de les défigurer
gagne tous les jours parmi nous; on signe différemment de
ses ancôtres, soit qu'on imagine qu'il y ait quelque chose
d’ignoble dans l'orthographe et la prononciation languedo-
ciennes, soit peut-être que, rougissant de son origine, on
cherche à la faire oublier par ce moyen et se rapprocher
d'un nom ou plus illustre, ou qui sonne mieux à l'oreille,
on se débaptiserait volontiers pour s'élever au-dessus de la
condition de ses pères. Mais si l’on venait un jour disputer
à ces franciseurs de noms leur héritage et leur filiation,
quelle autre voie auraient-ils pour l'établir, que l’exacte
conformation de leur nom avec celui de leurs aïeuls?
« Il faudrait donc écrire en fr., sinon Massabiôou (ce
qui serait le mieux), au moins Massebiou où Massebiol;
comme on le trouve dans les anciens cadastres; et non
Massebœuf. — Voy. Déléouxe et Méourèl. »
Massoula, v. Assommer; abattre d’un coup de masse;
battre avec un batloir.
Le radical Masso entre certainement dans la composition
de ce mot, comme il se trouve dans Massacre, Massabidou,
etc., pour leur donner la signification.
SAUVAGES cite immédiatement après Massouliè où Mar-
souliè, du vieux lang. et n. pr. que nous aurions écrit
Massouï, s’il eût été encore usité. Il lui donne la signifi-
cation de Assommeur, garçon de boucher qui assomme les
bœufs. Nous ne le relevons que pour indiquer quelques
noms propres, assez répandus, tels que Maxollier, Mar-
sollier, Mazoyer, qui se confondent presque avec Mazelier,
Marsellier, venus du lat. Macellarius, boucher, et qui ont
une singulière affinité de sens et d’origine avec notre verbe
et le substantif n. pr. : ce qui confirmerait la dérivation
et le sens.
Masté, s. m. Mastic; composition pour joindre, coller
ou enduire certains ouvrages.
Mastéga, w. Mâcher; broyer avec les dents. Au fig,
préparer, disposer un ouvrage pour le rendre plus facile à
faire à quelqu'un; éclaircir une affaire pour la rendre plus
facile à comprendre, à suivre. — Aqud’s tout mastéga,
c'est tout préparé, tout mâché, comme si l’on ajoutait : il
n'y a qu’à avaler. Y-ou aï pas mastéga, je ne le lui ai point
mâché, je le lui ai dit crûment, je le lui ai servi tout
cru.
Dér. du lat. Masticare, m. sign.
Mastiqua, v. Mastiquer, joindre, coller; fixer, boucher
avec du mastic. ”
Mastiqua, en languedocien tant soit peu excentrique, se
dit aussi pour manger, officier, et vient alors du lat. Mas-
ticare, dont le fr. a su faire du même coup Mastication et
MAT
puis Mâcher ; tandis que notre verbe dérive de Masté, subst.,
qui abandonne sa finale pour se rapprocher de la conson-
nance française.
Mastis, s. m., ou Masti. Mâtin, espèce de gros chien,
de garde, de basse-cour, de berger. Canis loniarius, Linn.
— Qu'a bon vési a bon masti, qui a bon voisin a bon
mâtin.
Dér., d'après les plus accrédités étymologistes, du lat.
Massalivus, chien de la métairie, de la maison.
Mat ou Ma, s. m. Mât, arbre d'un navire. — Mat dé
cocagno, mât de cocagne, expression qui nous vient direc-
tement du fr. — Voy. Ma.
Dér. du lat. Malus, m. sign.
Mata, v. Mâter; humilier, abattre; surpasser quelqu'un,
l'effacer en esprit, en adresse, dit SAUVAGES, ce qui équi-
vaut un peu à l'humilier.
Dér. du lat. Mactare, immoler, sacrifier. En espag.
Matar ; en ital. Mattare, tuer, dompter.
Matable, s. m Battant de cloche, de sonnaille, de son-
nette.
:Dér.. avec une légère altération, de la bass. lat. Batal-
lium, m. sign., qui a fait aussi Battant.
Matado, s. f. Dim. Matadéto. Cépée ; touffe de tiges de
bois sortant de la souche d'arbres récemment coupés. —
Uno matado d'éouses, une cépée de chènes-verts.
Augm. de Mato, ou plutôt réunion de plusieurs Matos.
Matafa ou Matafan, s. m. Gros plat de résistance, quel
qu'il soit, qui mâte ou mieux qui tue la faim.
En esp. Mattar, tuer ; en gr. Marrew, dompter.
‘Matalas, s. m. Dim. Matalassé. Matelas, sac plat et
piqué, rempli de laine, de bourre, de crin ou de plumes,
pour un lit.
Les étymologies ne manquent pas : Ménage trouve la
vraie dans le lat. Matta, natte; Roquefort est pour le lat.
Materies; d'autres J'attribuent au celt. Matt, lit, et Ras,
laine; la bass. lat. avait Matalacium ; et dans le bas-bre-
ton, Matalaez, m. sign., existe toujours. Nous sommes
‘Gaulois.
Matalassaïre, aïro, s. m. et f. Matelassier ; ouvrier qui
fait et qui rebat des matelas.
* Matas, s. m. Buisson; hallier.
Augm. de Mato.
* Matéloto, s. f. Vètement de femme : camisole, che-
“misette, “espèce de gilet ou mieux de corset sans ba-
“eine et sans lacet, en étoffe chaude ou légère suivant la
‘saison.
"Probablement ce nom a été donné à ce vêtement de
ce que, par sa forme aisée, il rappelle la jaquette du
matelot.
“Matéloto, s. f. Matelotte, ragoût, apprèt, manière
d’accommoder le poisson à la façon des matelots.
- Matèn, èno, s.m. etf.,etinterj. Mâtin; luron; matois ;
rusé compère. — Se prend quelquefois en bonne part, plus
souvent en mauvaise : sa valeur change du reste suivant
MEC 475
son emploi. Un bon matèn, un gaillard déterminé, qui a
l'adresse et la force de se défendre et d'attaquer aussi.
Aqud's uno matèno qué..…. C'est une luronne qui... Un
matèn qué sé laïsso pas émbouësa, un fin matois qui ne se
laisse pas mettre dedans. Sès un poulè matin dé vous faïre
espéra, vous êtes un joli monsieur de vous faire attendre.
Interjectivement, Matèn/ quinte fré, Mätin! quel froid! Le
fr., en style familier ou populaire, se sert du même dans
toutes ces locutions; le lang. le lui a bonnement emprunté
sans songer qu'il avait lui-même Mastis pour rendre aussi
le mâtin, chien fort et hardi, qui a donné lieu à cette
expression figurée.
Mati, s.m.et adv. Dim. Matiné. Matin, première partie
du jour ; de bonne heure. — L'aï visto dé mati, je l'ai vue
ce matin. Lou bon mati, de grand matin, de très-bonne
heure. Sé léva mati, déman mati, se lever matin, demain
matin, Qué pago dé vèspre déou pas rés dé mati, qui paie
le soir ne doit rien le matin. Rouje dé mati éscoumpisso
lou camà, prvb., le ciel rouge le matin verse l’eau sur
le chemin.
Dér. du lat. Matutinum, m. sign.
Matignè, ignèiro, adj. Matinal; matineux. — Sès bièn
matignè hiuëï, vous êtes bien matinal aujourd'hui. Souï
toujour ésta matigné, j'ai toujours eu l'habitude de me
lever matin, j'ai toujours été matineux.
Matinado, s. f. Matinée, du point du jour jusqu'à midi.
— La matinado faï la journado, prvb., la matinée fait la
journée.
Matino, s. f. Matin, matinée. — Variante de Mati-
nado.
Matinos, s. f. plur. Matines, première partie de l'office
divin. — Aquû s'acordo coumo lou manificat à matinos,
prvb., c'est chanter magnificat à matines.
Mato, s. f. Toufle d’une ou plusieurs plantes, de celles
dont la fane sort immédiatement de terre ou dont la tige-se
garnit de feuilles à partir du sol. — Uno mato dé trufos,
dé lusèrno, dé brus, une touffe de pommes de terre, de
luzerne, de bruyère.
Mato se dit aussi d’arbrisseaux ou d'arbres dont le pied
a été coupé et dont la souche donne de jeunes pousses
formant également une touffe. — Uno mato d'arbousiè, dé
castagnè, une touffe d'arbousier, de châtaignier. — Voy.
Matado.
En cat. Mata, arbrisseau.
Mé, pron. pers. Me, moi. — Ne s'emploie que comme
objet ou régime du verbe. — Fouïè mé crêire; crésè-mé, il
fallait me croire; croyez-moi. Douna-mé quicon, donnez-
moi quelque chose. Qué mé déou mé démando, qui me doit
me demande.
Dér. du lat. Me, me.
Méchas, ‘s.-m. Morveau, morve plus épaisse et plus
recuite.
Augm. et péj. de Mécho.
Méchéiroù, s.m. Lamperon; principalement, bec creusé
476 MËI
en gouttière qui soutient la mèche de l’ancienne lampe
appelée Lun; lamperon des nouvelles lampes; languette,
petit canal pour contenir la mèche.
Méchino, s. f. Fressure d'agneau ou de chevreau, com-
prènant le foie, la rate, le cœur et le poumon.
Dit pour Méjino, qui dérive de Méjan, comme si l’on
disait : partie du milieu, du centre.
Mécho, s.f. Augm. Méchas. Morve du nez, humeur
visqueuse des narines, qui sort souvent sous forme de
mèche.
Mécho, s. f. Mèche, cordon de coton pour les lampes;
mèche, corde préparée pour mettre le feu à une mine, au
canon; mèche de vilebrequin, d'une vrille, d’une tarière ;
pointe de fer d’un outil pour forer; touffe aplatie ou pen-
dante, ou roulée de cheveux.
Dér. du lat. Myœus, lumignon.
Méchoüs, ouso, adj. Morveux, qui a de la morve au
nez.
Médaio, s. f. Médaille, pièce de métal portant une effigie
et des inscriptions.
Dér. du lat. Metallum.
Médar, s. m., n. pr. d'homme. Médard. — La fête de
Saint-Médard tombe le 8 juin, et le proverbe dit :
Quan pléou pér Sén Médar,
Pléou cranto jours pu tar.
Un autre ajoute :
Quan pléou pér Sén Médar,
Dé la récolto émporto un quar ;
Quan pléou pa,
N'émporto la mita.
Médéci, s. m. Médecin, docteur en médecine, qui exerce
la médecine. — Dé jouine médéci céméntèri boussu, prvb.,
de jeune médecin cimetière bossu. Vié! médéci, jouïne
barbiè, riche apouticari, prvb., vieux médecin, jeune bar-
bier, riche apothicaire.
Dér. du lat. Medicus, m. sign.
Médécina, v. Médiciner; faire abus de médecines, de
drogues, de remèdes de toute sorte dans le traitement des
maladies.
Médécino, s. f. Médecine; art de traiter les maladies;
purgation employée dans ce traitement.
Mégnè, s. m. Souche-mère du châtaignier franc, dont
on recèpe annuellement les jets pour en greffer les châtai-
gniers sauvages.
Dér. de Méno, comme si l'on disait faiseur, producteur
de Méno, ou porte-greffe.
Mèïla (Sé), v. Se mêler; s’entremettre; s'occuper d’une
affaire, d’une chose, bien ou mal à propos. — Dé qué sé
mäïlo ? de quoi se mêle-t-il? Sé mêïlo pas dé trop, il s'en
ürera, il n’entreprend pas au-dessus de ses forces.
Mèila, avec la légère altération qui essaie de dissimuler
l'emprunt au fr., a un peu plus de cachet que Méla, qui
MËI
s'emploie aussi dans les mêmes circonstances. — Voy. Méla.
Méïnaja, v. Ménager; épargner; traiter avec égard, avoir
soin de... — Méinaja soun co, frapper doucement, avec
précaution. Adioussias, méinaja-vous, bonjour, ménagez
votre santé. ;
Méinaje, s. m. Ménage; économie, gouvernement domes-
tique ; meubles; ustensiles d’une maison; vaisselle de cui-
sine. — Sé boula din soun méinaje, se mettre en ménage.
Lava lou méinaje, laver la vaisselle. Faïre lou méinaje,
balayer, frotter, nettoyer, mettre tout en ordre dans un
appartement, dans une maison.
Dér. de la bass, lat. Mainagium, venu de Mansio,
demeure.
Méïnajè, s. m. Homme aisé qui vit de son bien qu'il
travaille, et qui ne travaille point pour autrui; fermier,
laboureur.
Méïnajèiro, s. f. Ménagère, femme qui entend l’écono-
mie et la conduite du ménage. — Fo troutièiro et fénés-
trièiro raromén bono méinajèro, prvb., fille trottière et
fenestrière rarement bonne ménagère.
Méïrano, s. f., n. pr. de lieu. Meyranes, commune dans
le canton de Saint-Ambroix (Gard).
Nous ne voulons, à l'appui de notre thèse sur les dési-
nences suffixes, que présenter la série des variantes de ce
nom et des analogies qu’il attire. Ces rapprochements
seront des conclusions suffisamment déduites et prou-
vées.
Le Dictionnaire topographique du Gard de M. Germer-
Durand, si plein de savante érudition, nous fournit les
citations. Méirano, Meyranes, est, en 964, Villa que vocatur
Mairanichos; en 1037, Mairanègues; en 4A210, de May-
ranis; en 4314, Ecclesia de Mayranicis; en A549, May-
rannes; enfin, depuis 4634, Meyranes.
Dans la même commune, un hameau se nomme Mairas,
de Mayrassio, en 4463.
Sous la forme gallo-latine, Mayranicæ, prononciation
identique, représente Meyrargues (Hérault, Gard et Bouches
du Rhône); la forme correspondante latine, Mayranum,
Mayracum, Mayranæ, a donné, dans des départements
divers, Mayran, Mayrens, Mayres, Mayrac, Meyrac,
Mairac, Meyras, Meyriat, Meyrié, Meyries, Meyrieu,
Meyrueis, etc. '
De même, les formes similaires Merinhanicæ, moy. lat.
et Mayrinacum et Marignacum, lat., fournissent Méri-
gnargues (Gard), dit aussi Müirignanicus, Merignanicus,
de Marignanicis, Merinhanicæ et Marinhanicæ, comme
les noms de Mérignan, Mérignac, Mérignas, Mérignat,
Mérigneux, Mérignies, Mérigny, Mayrinhac, Mayrinhagues,
Mayrignac, Meyrinhac.
Par où il devient évident que tous ces noms, où la dési-
nence reste indifférente pour le sens, dérivent du même
“principe, ont la même racine, qui se rencontre dans le
celtique Maer, chef, préposé, gardien ; d’où le gallois à fait
au pluriel Mairi, fermier, métayer, gardien; en bas-breton
MÉL
Maer, maire; en roman, Mairin, Mérin, échevin, maire.
La signification amène pour tous celle de domaine, pro-
priété du gardien, du préposé, du fermier-chef, du métayer,
du maïeur, maire, major.
Méjan, méjano, adj. Moyen; mitoyen; ce qui est entre
deux. — Un méjan, s. m., une allée ensemencée entre
deux qui ne le sont pas.
Cet adj. du reste devient facilement subst. masc. ou fém.
et forme ainsi des noms propres, ou bien entre en compo-
sition, en se déterminant suivant le genre du mot auquel
il s'allie.
Méjan, n. pr. d'homme. Méjan, a formé Masméjan,
Méouméjan, Malméjan, Mauméjan, Camméjan, Camp-
méjan, Cdousséméjan, etc.
Méjano est devenu n. pr. de lieu, rendu en fr. par
* Méjannes, qui signifie moyenne ou intermédiaire, sans
doute de ce que l'habitation autour de laquelle se groupa
le hameau ou le village, était à moitié chemin entre des
agglomérations préexistantes. De la même manière et pour
les mêmes raisons se sont produits les noms de Viloméjano,
Saroméjano, etc.
Méjano, 8. f., désigne également la dorade moyenne, de
moindre taille, poisson. — Voy. Ddourado.
Dér. du lat. Medius, media, m. sign.
Méjanciè, ièïro, adj. Moyen; médiocre; de moyenne
. grandeur; intermédiaire.
Méjanèl, èlo, adj. Mitoyen; moyen. — Désigne aussi
un habitant de Méjannes, village. — Voy. Méjan.
Mél ou Mil, s. m. Mil, millet, Panicum miliacum,
Linn., plante de la fam. des Graminées, dont la tige est
terminée par une panicule ou de menues branches éparses
et chargées de grains. — Avédre lou gran dé mél, expres-
sion figurée, sorte de phrase faite, qu’il n’est pas difficile
de traduire mot à mot : avoir le grain de millet. Voilà qui
est fait. Mais il n'est pas aussi commode d’en donner
l'explication. Nous essaierons cependant de faire comprendre
un dicton qui revient assez souvent.
La peur, dit-on, grossit les objets; c’est possible, mais
pas tous, car il en est qu’elle diminue notablement. Pour
exprimer jusqu'où cela peut aller chez quelqu'un frappé
par cette divinité à laquelle sacrifiait l’intrépide Romain,
— la Peur avait un temple à Rome, — le languedocien
inventa cette phrase pittoresque : I lou taparias émb'un
gran dé mél; taparias du verbe tapa, boucher, émb’un
gran dé mél ou dé mil, avec un grain de millet. On com-
prend que le pronom Lou, le, fut, conformément à ses fonc-
tions, mis plus tard pour couvrir le mot primitif lui-même,
quand on le trouvait trop énergique. C'était traduire par
une métonymie risquée sans doute, et un peu crue, mais
juste, un des effets physiques causés par la frayeur; si
bien qu’en suivant cette voie d’adoucissement et en cher-
chant à réprésenter l’effroi, la terreur, cette crispation ou
cet éréthisme nerveux donnés par la peur, par une singu-
lière succession ou déplacement d'idées, le grain de mil est
MÉL 477
devenu lui-même synonyme de peur, et avédre lou gran dé
mél, c'est avoir peur... Ah! quelle peur!
Dér. du lat. Milium, m. sign., qui a été fait lui-même
de Mille, pour exprimer la fécondité du millet, qui rend
mille pour un.
Mél-négre, s. m. Blé noir, blé sarrasin ou sarrasin,
Polygonum fagopyrum, Linn., plante de la fam. des Poly-
gonées, fromentacée dont le grain triangulaire est noir, ce
qui lui a valu son nom, et la fleur blanche. On peut en
faire du pain, mais il est indigeste et ne convient qu’à des
estomacs robustes; aussi l’emploie-t-on surtout à engraisser
les volailles.
Méla, v. Mêler, faire un mélange; assortir; brouiller;
particulièrement mêler les cartes, les battre.
Sé méla, se mêler; s’entremettre ; s'occuper d'une chose,
à tort ou à raison. — Qué copo et mèlo dé trop sé mélo,
qui coupe et mêle de trop se mêle. Dé qué sé mèlo moun
ca? de quoi se mêle mon chat? dit-on à quelqu'un qui
essaie de dire ou de faire plus qu'il ne sait ou qu'il ne peut.
— Voy. Sé mêila et Méscla.
Empr. au fr.
Méléto, s. f. Melet, joël athérine, Atherina hipsetus,
Linn., poisson de mer de l’ordre des Holobranches et de la
fam. des Gymnopomes, long et très-mince. — Voy. Caga.
Dans nos environs, d’après Crespon, le nom de Méléto
appartient véritablement au joël du Languedoc, variété, si
c'en est une, qui se confond avec le melet. Les joëls habi-
tent la Méditerranée, mais ils pénètrent dans nos étangs et
y vivent en grande troupe. C'est aussi un très-petit
poisson que les anciens nommaïent Aphia; ils pensaient
qu'il naissait de l’écume de la mer. Sa chair est bonne en
friture.
Mélgouirés, éso, adj. Melgorien, enne; nom que l'on
donnait à la monnaie de l'ancien comté de Melgueil ou
Mauguio, qui, de 4432 à 4474, fut par suite d’une alliance
possédé par Bernard Pelet, seigneur d’Alais. Le sol Melgo-
rien, sol Mélgouïrés, qui était d'argent, valait huit sols
tournois, et la livre Melgorienne, Mélgouïréso, huit livres
tournois.
Ce mot n’a survécu que pour servir de nom distinctif à
un village important de l’arrondissement d'Uzès, Sén-Gignèt
dé Malgouirés ou Mélgouürés, Saint-Geniès en Malgoirès,
qui devait être une dépendance du domaine Melgorien.
Dans le Bullaire de Saint-Gilles, cité par M. Germer-
Durand, on le trouve, en 4449, appelé Sanctus Genesius de
Mediogozes ; en 1381, dMe edio Guoto; en 4384, de Medio
Goto; en 4464, de Malgorio et de Mandegoto; il n'arrive
qu'en 4547 à Saint-Géniès de Malgoirès, dénomination
actuelle. Il faut convenir que les plus anciennes formes
s ’écartent beaucoup du primitif Melgueil et Melgorien, ce
qui infirme nos conjectures sur son origine. Toules nos
recherches ne remontent pas plus loin, et nous ajouterons
ce pendant, toujours d’après le savant auteur du Dictionnaire
to pographique du Gard, que le Malgoirès, pays du diocèse
61.
478 MEM
d'Uzès, était un pagus formant, au x® siècle, une viguerie
qui comprenait quinze villages, dont il donne les noms, et
appartenait à la circonscription du doyenné de Sauzet. Ce
pagus était désigné, en 943, sous le nom de Vallis Medio
Gontensis in comitatu Uzetico; dans le dénombrement de
4384, on trouverait Medium Gotum. Comme notre Saint-
Géniès, un autre village de cette viguerie, Saint-Mamert, est
nommé Sanctus Mametus de Medio Goxes, en 4204. La
finale Goto, gotum, confondue avec le mot, se rencontre
dans l'appellation d’un village éloigné de là, aujourd’hui
Mandagout, dit, en 1088, Mandagot; en 4233, de Manda-
gotio; en 1280, de Mandagoto; en 129%, Mandagotum.
Comment la différence de traduction ou de reproduction
s’est-elle faite? par quelle altération est-on arrivé à Mal-
gouïrès ici, et là à Mandagoùs, un peu plus fidèle? Ces
rapprochements amèneraient-ils à faire admettre une ori-
gine wisigothe ou un souvenir d'appellation de ces anciens
possesseurs de nos contrées ? Il est difficile de se prononcer
sur ces indices; mais elles se présentent assez naturelle-
ment à la pensée.
Méloun, s.m. Melon, Cucwmis melo, Linn., plante de
la fam. des Cucurbitacées, originaire de l’Asie, dont les
variétés par la culture sont aujourd’hui très-nombreuses. —
Un amateur, sans doute frappé de la difficulté de distinguer la
bonté d’un fruit qui ne souffre pas la médiocrité, a consigné
en latin les qualités qu’il doit avoir : Melo sit formosus,
leprosus, rotundus et ponderosus, le melon doit être beau
de forme, rugueux, rond et pesant. L'an fa coumo un
méloun, on l'a joué, dupé, mis dedans : jeu de mot sur fa,
fait à point, qui est une des qualités du melon. Noun sé
podou counouïsse dé iuèn lous mélouns et las fénnos, prvb.,
femme et melon à peine les connait-on.
Dér. du gr. Mÿov, pomme.
Mémbra, ado, adj. Membru, qui a des membres gros,
puissants, forts.
Mémbre, s. m. Membre, partie extérieure et mobile du
corps, la tète exceptée; chambre, pièce d’une maison. —
Y-a trés mémbres d'un van, il y à trois pièces de plain-pied.
Dér. du lat. Membrun, m. sign.
Méméto (Aro), adv. Dim. de Mèmo. A présent mème,
à l'instant mème. — Réduplication pour raccourcir encore
l'intervalle, le moment dont on parle. Vèn dé m'ou dire
aro-méméto, il vient de me le dire à pes à présent; il
n’y a pas une seconde.
Mèmo, pron. des deux genres et adv. Mème, qui n’est
point autre, point différent; semblable, pareil; même;
plus; aussi; encore. — Se met immédiatement après les
personnes pour marquer plus expressément celle dont on
parle. — Éstre én mèmo dé. être en état, en disposition,
en mesure de.
En ital. Medesimo, m. sign.
Mémorio, s.f., ou Mémouèro. Mémoire; faculté de
souvenir.
Dér. du lat, Memoria, m. sign,
MÉN
Mén, s. m”. et adv. Le moins, la moindre chose, la
moindre quantité; moins, pas tant, en plus petite quantité.
— N'a pas mén, il n’en a pas moins. Ou laïssarés bé pér
quicon dé mén, vous le laisserez bien pour quelque chose
de moins. Ni maï ni mén, ni plus ni moins. Aow mén, au
moins. À tout lou mén, pour le moins, à tout le moins.
Gn'én dounère lou mén qué pouguère, je lui en donnai le
moins que je pus. Pode pas faïre dé mén, je ne puis faire
autrement, je ne puis me dispenser. Né voulé où né voudre
dé mén, mot à mot, en valoir moins, c.-à-d. mourir. L'ita-
lien a une expression analogue : Venir mèno, s'évanouir,
tomber en défaillance. À mén qué..…., à moins que, si ce
n'est que. À mén dé…, à moins de. À mén d'ou faire ésprès,
à moins de le faire exprès. Aow mén qué vèngue pas, de
grâce qu’il ne vienne pas. À mén qué lou sone, si ce n’est
que je ne l'appelle.
Dér. du lat. Minüs, m. sign.
Ména, v. Mener; conduire; amener; diriger; donner
accès. — Sa fénno lou méno, sa femme le mène. Ména
uno carélo, conduire une charrette. Ména la caréto, ètre
voiturier. Véndrés dilus et ménarès vosle cougna, Vous
viendrez lundi et vous amènerez votre beau-frère. Ména
d’aïse, manier, mouvoir un objet doucement, peu à peu, à
petits coups, sans secousses. Ména carosso, rouler carrosse.
Ména fosso fun, mener beau bruit, grand bruit, faire des
embarras. Ména fosso rambal, faire beaucoup dé remue-
ménage, grand bruit et surtout beaucoup de. bruit pour
rien. Ména dé bru, faire du tapage. Chu, ménés pas tan dé
bru, chut, ne faites pas tant de bruit. Sé voulès ména
moun afaïre, si vous voulez vous charger de mon procès.
Ménarés mous afaïres, Vous dirigerez mes affaires. Mdou
ména, malmener, réprimander, maltraiter. Aqud lou ménara
pas iuën, cela ne le mènera pas loin. Aquélo travèsso méno
à la plago, cette rue conduit à la place. Méno soun bé à sa
man, il fait valoir lui-même sa propriété.
Ménaça, v. Menacer, faire des menaces; pronostiquer.
— Aquélo muraïio ménago, ce mur menace ruine. Aquél
tén ménagço dé plèjo, ce temps annonce la pluie.
Dér. du lat Minari, m. sign.
Ménaço, s. f. Menace; parole ou geste pour faire con-
naître ou faire craindre à quelqu'un le mal qu’on veut lui.
faire.
Dér. du lat. Minaciæe, m. sign.
Ménaïre, s. m. Valet de meunier; charretier des mou-
lins à blé et à huile, qui va chercher le blé et les olives,
et rapporte la farine et l’huile chez les particuliers.
Ménaïre, s. m. Meneur; celui qui, à une noce et pen-
dant toute sa durée, est le cavalier affidé d’une invitée.
Chaque jeune fille ou femme a le sien, qui lui donne le bras
dans le cortége de couples à la file qui accompagnent les.
mariés à la mairie, à l’église et dans la promenade consa-
crée où toute la noce va parader triomphalement dans les-
endroits les plus fréquentés, ménétrier en tête et au son du
violon qui la fera danser le soir. Il est bien évident qu'il:
Fr:
MËN
ne s'agit ici que des noces du peuple, les autres vont en
voiture, dédaignent la promenade traditionnelle, et n’ont
plus besoin de Ménaïres.
Ménaïre se dit aussi du mouton sonnailler, meneur ou
conducteur du troupeau, et du mulet qui marche en tête
de la bande appelée Coublo.
Ménairos, s. f. plur. Les deux jeunes filles, amies,
compagnes d’une nouvelle mariée, qui sont ses meneuses,
parce que, dans la cérémonie des noces, elles la conduisent
chez son époux et la mènent au lit nuptial.
Ménar, s.m. Arbre moteur ou conducteur d'une ma-
chine. Il est placé comme prolongement de l’axe de la roue
motrice et porte aussi loin qu'on veut son mouvement
qu'il distribue en même temps sur toute sa longueur. On
_ appelle Chapoù l'appareil en fer qui relie bout à bout deux
pièces de bois lorsqu'une seule n'est pas suffisante pour la
longueur voulue du Ménar.
Mén-dicho, s. f. Rabais; adjudication au rabais. — A
la mén-dicho, adjudication d’un ouvrage, d’un travail,
d’une construction, d'une entreprise au plus fort rabais.
. Dér. de Mén, moins, et Dicho, dite.
Méndre, méndro, adj. Moindre; plus petit; moins grand.
— Lou pu méndre, le plus petit. Aqud's moun pu méndre,
c’est le dernier, le plus jeune, le plus petit de mes enfants.
Dér. du lat. Minor, m. sign.
Méndrigoulé, éto, adj. Mingrelin, mince, fluet; de
petite taille, avec de petits traits et sans vigueur.
Dim. de Méndre.
Ménéja, v. Produire de son espèce, s’il s'agit des végé-
taux, et de sa race si c’est d’un animal. — Méno ménéjo,
dit le prvb., l'espèce fait la mème espèce, la race se repro-
duit, se continue par la même race : idée que l’on rend
aussi par Zous chos fan pas dé canaris, un hibou ne fait
point un canari, l'aigle n’engendre point la colombe, en un
mot bon:sang ne peut mentir; ce qui se dit particulière-
ment et par antiphrase de Méno. — Voy. c. m.
Ménésconte, s. f. Mécompte; erreur de calcul.
Dér. du lat. Minùs, moins, et Computare, compter.
Ménéscor, s. m. Discord; désaccord. — Se dit des par-
ties qui ne peuvent s'entendre pour conclure un marché.
Formé du lat. Minàs, moins, pour mauvais, et Acor.
Ménéscordi, s. m. Discord; désaccord. — Même mot
que le précédent; la différence finale tient tout au plus à
quelque délicatesse d'acoustique, selon la place que ce mot
occupe. Ainsi l'on dira: Sèn én ménéscor dé quicon, et
Y-aviè trop dé ménéscordi.
Ménésfisa (Sé), v. Se méfier; se défier; ne pas se fier;
avoir de la méfiance.
Formé de Mén et de Fisa.
Ménéspris, s. m. Mépris; dédain; dépréciation.
Dér. du lat. Mints et Pretium.
Ménésprisa, v. +: sh dédaigner; avoir du mépris;
MÉN 479
qualité, — Uno souquo, un doubre dé bono méno, Où dé
michanto méno, un cep, un arbre de bonne ou de mauvaise
espèce. Chi dé bono méno, chien de bonne race. On dit
également d'un homme qu'il est de bonne race, dé bono
méno. Trasso dé méno, mauvaise espèce et mauvaises gens,
mauvaise engeance. Gn'a pas méno; il n'y en a pas trâce,
il n’y en a pas un, pas la moindre chose. Éntra ou $é
métre én méno, au pr. commencer à avoir d’une espèce
pour la multiplier; au fig. c'est ce qu'on dit ordinairement
d’un joueur malheureux qui marque un premier point
longtemps attendu, d'une personne qui commence une
série quelconque qu'il craint ou désire voir augmenter, Un
pou dé chaquo méno, un peu de chaque espèce, de tout
genre. Aquélo méno, cette espèce; locution restrictive et
technique. — Voy. Muscardin.
Méno, s. f. Scions, jeunes pousses d'arbres dont on veut
propager l'espèce et que l’on coupe pour en tirer des greffes.
On le dit surtout du mürier. A l’époque où l'on a coutume
de le greffer, sa feuille est entièrement développée et sou-
vent cueillie : on ne pourrait prendre de la greffe, dé méno,
sur l'arbre; il faut donc s'en prémunir à l’avance,et quand
la sève se met en mouvement, on coupe des jets, jingudlos,
qu'on lie en bottes; on les enterre dans un endroit frais,
on les met le pied dans l’eau. Les bourgeons restent ainsi
sans se développer jusqu’au moment de greffer.
Méntastre, s. m. Menthe sauvage, Mentha sylvestris,
Linn., et Menthe àfeuillesrondes, Mentha rotundifolia,deux
plantes du même nom en lang. de la fam. des Labiées, aro-
matiques, communes dans les fossés et leslieux marécageux.
Dér, du lat. Mentastrum, m. sign.
Ménti, v. Mentir; affirmer comme vrai ce que l’on sait
ètre faux; dire un mensonge; tromper. — Sé disès aqu,
vous faraï ménti, si Vous avancez cela, je le dénierai, je
soutiendrai que c'est faux, je vous donnerai un démenti:
Aqui moussu qué mé gardara dé méntà, Voilà monsieur qui
sera mon garant, qui attestera que je dis vrai. Badaï® po
pas méntà, sé noun vou manja, véou dourmi, dicton,
bailler ne trompe point, si ce n’est indice de la faim, c’est
celui du sommeil:
Dér. du lat. Mentiri, m. sign.
Ménto, s. f. Menthe, non donné indistinctement en lang.
eten fr. à la menthe verte ou baume vert, Mentha viridis,
Linn., et à la menthe ou baume des jardins, Mentha gen:
tilis, Linn., plantes de la fam. des Labiées, cultivées à
cause de leur odeur forte et agréable. — Fio sans’créñto
véou pas un brou dé ménto, dict., fille effrontée ne vaut
pas un brin de menthe.
Méntoù, s.m. Dim. Méntouné. Menton, partie du visage
sous la bouche.
Dér. du lat. Mentum, m. sign.
Méntougnèiro, s.f. Mentonnière; bande d'étoffe ow
simple cordon sur les-côtés d’un bonnet, d'une coiffe, d'an
casque, qui passe et s'attache sous le menton.
Empr: au fr.
480 MËR
Méntre, conj. souvent est l'équivalent de Éntre (Voy.
©. M.). — Méntre qué, tandis que; pendant que; aussitôt
que. Méntre qué dinaraï, pendant que je dinerai. Méntre
qu'anaraï dina, aussitôt que j'irai diner.
En ilal. Mentre, m. sign.
Méntur, ménturdo, adj. Menteur. — Moins bon que
Méssourguiè. — Voy. G. m.
Ménu, ménudo, adj. Menu; délié; mince; qui a peu de
volume. — Vous ou diraï tout pér lou ménu, je vous dirai
tout par le menu, jusqu'aux plus petits détails. à
Dér. du lat. Minutus, m. sign.
Ménuda, v. Couper menu; diviser par petits morceaux,
par petites parties. — Voy. Aménuda.
Ménudaio, s. f. Menuaille; fretin; béatilles; menues
choses délicates et friandes que l’on met pour garniture
d’un plat ou qui composent le plat lui-même; toute sorte
de petits objets. — Aï agu fosso ménudaïo, j'ai eu force
menuaille, dit un magnagnier qui a eu beaucoup de petits,
pichds, dans sa chambrée de vers-à-soie.
Dér. du lat. Minùs, moindre, petit.
Ménudos, s. f. plur. Fourniture de salade, menues
herbes : cerfeuil, civette, estragon, etc.
Ménugué, s. ». Menuet; sorte de danse à trois temps,
grave et compassée, qui ne fut jamais bien populaire et
dont le nom même est aujourd’hui presque oublié; air sur
lequel on la dansait.
Ménuguéto, s. f. Origan, espèce de mélisse, de thym
ou de marjolaine, Mellissa nepeta, Linn., plante de la fam.
des Labiées, aromatique, stomacale, sudorifique, commune
dans les bois. On la confond avec la Majourano fèro. —
Voy. c. m.
Mèou, s. ». Miel, suc doux des abeilles. — Voudrias
lou mèou amaï las brésquos, vous voudriez le miel et les
rayons, c.-à-d. tout.
Dér. du lat. Mél, mellis, m. sign.
Mèr, s.f. Mer, amas des eaux salées qui environnent
les continents. — La mèr brulo pas, la foire n’est pas sur
le pont, il n’y a rien qui presse. La mèr fai dé riches et dé
pdoures, la mer fait des riches et des pauvres, pour dire
aussi qu'il n’y a pas le même bonheur pour tout le
monde.
Autrefois on disait Mar, plus près du lat. Mare; l'usage
ou l’altération franchimande à fait prévaloir Mèr, comme
en fr.
Mérca, s. ”m. Marché; lieu public où l’on vend; vente
dans le marché; assemblée de marchands et d'acheteurs;
pacte; convention; prix d’un achat, d’une vente. — Lou
mérca és trop pichà, le marché est trop étroit, trop petit.
Y-aguè un for mérca dilus, lundi, il y a eu un très-bon
marché. Faïre mérca, discuter, conclure un marché. Coupa
lou mérca, rompre le marché. À éstras dé mérea, à marché
donné : se dit d’une chose vendue à très-bas prix, au-
dessous de sa valeur, à gâter, éstrassa, le métier.
érca dé Soumèire, marché de Sommières, et l'on sous-
MËR
entend d'habitude comme complément du dicton devenu
proverbe : tout d'un cousta, pas rés dé l'âoutre, tout d'un
côté et rien de l’autre. Le mot est fait depuis longtemps et
reçoit bien des applications variées et figurées : en voici
peut-être l’origine. Plusieurs foires importantes de chevaux,
notamment celle du dimanche des Rameaux, se tiennent à
Sommières. Elles sont fort en renom dans nos contrées, et
vendeurs, acheteurs, échangeurs, s'y rendent en foule de
tous côtés. Or, on sait qu'autrefois du moins, maquignons
de profession et maquignons par circonstance ne passaient
pas pour priser très-bas leur marchandise et pour vendre à
prix fixe. Aussi les chalands au courant, et tant pis pour
ceux qui n’y étaient pas, ne se gènaient guère pour offrir
cinquante pour cent de rabais sur le prix demandé, ce qui
généralement, non sans force débats, finissait par être
accepté. Cette manière connue de conclure les affaires
donna lieu au dicton qui s'étend à bien d’autres choses
qu'à un marché quelconque à débattre, et en tous cas
l’apostrophe Mérca dé Soumèire signifie aussi : on ne peut
croire que la moitié de ce que vous dites, rabattez donc
d'autant.
On voit que le caractère des habitants de Sommières
n’est nullement compromis en ceci, et pas même en cause.
De certains marchés scabreux qui se passaient chez eux,
mais auxquels ils étaient étrangers, il n’y a pas à conclure
à leur avidité mercantile, ou à leur déloyauté, que le
proverbe reste dans sa concision où même avec son com-
mentaire de supplément. Du temps que villes et villages
s'infligeaient mutuellement des sobriquets souvent véri-
diques et injurieux le plus possible, inspirés qu'ils étaient
par les haines qu’enfantaient les guerres féodales, on n’eüt
pas manqué d’infliger ce reproche, tandis qu’on n’a trouvé
rien de pis contre les gens de Sommières que de les
appeler Passéroùs, moineaux. Certes le moineau n’est pas
parfait non plus, sans doute : il est tapageur, égrillard, un
peu maraudeur et très-amoureux. Mais un défaut n’est pas
tout à fait un vice : et si les dictons sont contemporains,
ce qui paraît probable, on ne se fût pas fait faute de
stygmatiser le vice pour peu qu’il eût été mérité.
Dér. du lat. Marcatus, m. sign., de Merx, mercis,
marchandise.
Mércadén, énquo, adj. Du marché; qui appartient au
marché, considéré comme place, quartier; qui habite le
quartier du marché, ou qui s’y trouve; marchand qui y
tient échoppe.
Mércouïrôou, s. m., n. pr. de lieu. Mercoirol, hameau
de la commune de Saint-Florent, arrondissement d’Alais.
— Ce nom, comme ceux de Mércouli, commune de Saint-
Martin de Valgalgues, de Méreouiro, Mercoire, communes
de Peyremale, de Portes, de Saint-Martin de Corconac
(Gard), et de Melcoire (Lozère), celui de Mércoù, dans le
Gard encore, dit, en A124, Castrum de Mercorio, et, en
1944, de Mercurio, avec la forme propre ou diminutive,
désignent évidemment des endroits autrefois consacrés à
MËR
Mercure, une des principales divinités des Gaulois. Les noms
analogues français, soit géographiques, soit noms propres,
comme Mercour, Mercuire, Mercurol, Mercurin, etc.,
appartiennent à la mème origine.
Mèrdo, s. f. Merde; excrément; matière fécale. —
Mèrdo d'abéio, miel, bien qu'il ne soit pas un produit de
cette nature. Dounmaï on boulégo la mérdo, dounmaï pu,
prvb., la traduction n'est pas nécessaire; au fig., cette
locution, sous une forme triviale et basse, fait entendre cet
excellent conseil de ne pas ressasser une mauvaise affaire
qui ne ferait que s’envenimer, en revenant sur les torts on
l'indélicatesse de ceux qui y ont pris part.
Dér. du lat. Merda, m. sign.
Mérdoùs, ouso, adj. Dim. Mérdousé, éto. Merdeux,
-bréneux. — Pris substantivement, au masc. ou au fém.
surtout avec le dim., quoiqu'il puisse être rendu littérale-
ment dans le langage populaire, il équivaut au fr. Mor-
veux, qui se dit d'un enfant qui veut jouer l’homme
entendu, et même d’une personne plus âgée qui affecte des
airs au-dessus de sa capacité et de sa position.
- Méricles, s. f. plur. Bésicles, dont il ne parait être
qu'une altération. — Ce nom s’appliquait particulièrement
à l'ancien pince-nez qui figurait assez bien le huit de
chiffre, 8, et comme il a vieilli avec l'instrument qu'il
désignait, il n’est plus que l'équivalent goguenard de
Lunétos.
Méricouqua, v. Émailler; peindre de diverses couleurs ;
couvrir de fleurs.
Si le mot, comme il le parait, est dér. du lat. Mirè
coccus ou coccinatus, admirablement teinté, écarlate, il ne
doit indiquer que les couleurs les plus voyantes.
Mérlan, s. m. Merlan, merlan de la Méditerranée, Gadus
merlucius, Linn., poisson de l’ordre des Holobranches et de
la fam. des Jugulaires ou Auchénoptères, commun et abon-
dant dans la Méditerranée .
Dér. du lat. Merlangus, m. sign .
Mérlato, s. f. Merle femellé; d’un brun noirâtre ou
‘couleur de suie. — Voy. Mèrle.
Mèrle, s. m. Merle, merle noir, Turdus merula, Linn.,
oiseau de l'ordre des Passereaux et de la fam. des Créni-
rostres. — La finesse proverbiale du merle est souvent en
défaut, car on voit beaucoup de ces oiseaux en cage où ils
s’apprivoisent aisément et vivent de longues années. Il est
vrai qu'ils y sont souvent enfermés au sortir du nid. Le
merle est le chantre préféré dans la boutique de l'artisan,
qu'il charme en sifflant les airs qu'on lui apprend. Aussi
nous ne saurions dire pourquoi le lang. et le fr. ont pris
cet oiseau au ramage charmant, quoique un peu triste,
comme type de l’homme désagréable; car on dit : vilèn
mère, vilain merle, et toujours ironiquement un pouli
mèrle, un joli merle.
On sait que le merle blanc n'est plus impossible, pas
même difficile à trouver. Cette couleur ne semble pas créer
“une nouvelle espèce et n’est sans doute qu’une exception,
MER 481
plus où moins rare, chez un individu. — Nous avons
aussi, sédentaire dans le pays, le merle bleu, Turdus
cyanus, Temm. Il a toutes les parties supérieures (excepté
les ailes et la queue qui sont d’un noir profond) d'un beau
bleu foncé, et toutes les parties inférieures d’un bleu plus
clair. Ce bel oiseau, très-semblable au suivant par ses habi-
tudes, n'a guère d'autre nom que lui.
Mèrle-rouquiè, s. »m. Merle de roche ou Paisse solitaire,
Turdus saæatilis, Linn., oiseau du même ordre et de la
mème fam. La tête, le cou, la gorge et les petites couver-
tures des ailes d'un bleu cendré; un espace blanc sur le
milieu du dos; les ailes el les deux pennes de la queue
brunes ; les autres pennes caudales et les parties inférieures
d’un roux ardent. Cette espèce nous visite au printemps et
nous quitte en automne. Ainsi que le merle bleu, il
recherche les endroîits les plus pierreux et les plus solitaires
des montagnes, et ni l’un ni l’autre ne supporte facilement
la captivité. Le merle de roche est plus petit que le merle
bleu, qui est lui-mème moins grand que le merle noir.
Mérlé, s. m. Créneau ; ouverture de distance en distance
au haut des murs des châteaux-forts ou des anciens rem-
parts des villes.
En ital. Merlo, m. sign.
Mérléta, v. Orner de créneaux, créneler le haut d’une
muraille, d’une tour.
Mérlusso, s. f. Merluche, morue, Gadus morrhua,
Linn., poisson de l’ordre des Holobranches et de la fam.
des Jugulaires ou Auchénoptèrés. — La merluche est une
morue qui a subi une préparation particulière : la morue,
appelée verte ou blanche, que l’on ne connait guère que
dans le Nord, est seulement salée et emportée ainsi. La
merluche est salée et séchée, à l'air ou au vent, car le
soleil chauffe peu dans le pays où l'on fait cette pêche. La
morue est un poisson excessivement goulu; aussi a-t-il
reçu le surnom latin de Merlucius, maris lucius, parce
qu'on le compare au brochet, lucius, pour sa voracité :
c’est le brochet de la mer. De là sont venues les dénomi-
nations en lang. et en fr. Il faut avouer que si la morue
mange beaucoup, elle est aussi considérablement mangée.
Pour compenser l'énorme quantité qu'en dévorent journel-
lement les hommes et les poissons, une morue femelle, au
dire d’un fameux naturaliste, porte jusqu'à 9,344,000 œufs;
il y a donc espoir que l'espèce ne se perdra pas.
Mèro, s. m. Maire, premier officier municipal d'une
commune. — Comme dans chaque commune il y a un
maire et un ou plusieurs adjoints; que, dans les villages
surtout, ces fonctions donnent à ceux qui les remplissent
une certaine importance et peut-être quelques avantages:
que dès lors, ambitionnées par plus d’un, elles sont le sujet
de bien des conversations; low mèro et l’azouèn devaient
prendre place dans le vocabulaire languedocien. Du reste,
si le dernier mot est vraiment un nouvel intrus, l’autre a
pu prendre rang depuis très-longtemps; car, sans remonter
à l’époque reculée où des villes achetèrent de leurs seigneurs
482 MÉS
le droit d'élire des consuls ou des maires; sans parler de
limitation que dut suivre cet exemple et des modifications
successives que l'autorité royale apporta depuis, quant au
fond et quant à la forme, à cette institution, nous rappel-
Jlerons seulement, comme date de ce mot dans notre loca-
lité, que, le 5 avril 1693, Louis des Ours de Mandajors,
juge en la cour des premières appellations de la comté
d’Alais, pourvu par le roi de la charge de conseiller du
roi, maire perpétuel de cette ville, fut installé en cette
qualité pour en jouir lui, ses hoirs et ayant-cause, hérédi-
tairement, aux gages de 400 livres par an et exemption de
taille, logement militaire, charges et toutes contributions,
etc., etc. Même nomination eut lieu dans toutes les com-
munes du royaume.
Mèro, s.f. Mère; celle qui a donné naïssance à un
enfant. — Bèlo-mèro, belle-mère, la mère de l’un des
époux à l'égard de l’autre; deuxième femme du pêre à
l'égard des enfants du premier lit : dans cette acception,
lorsqu'il existe de bons on de passables rapports entre les
alliés, bèlo-mèro est employé plutôt que maïrastro, quoique
ce dernier mot n'ait pas tout le sens injurieux de Marâtre.
Îl est bien entendu que ceux qui disent encore maïre pour
mère, disent également bèlo-maïre; mais le nombre de
ceux-là diminue chaque jour et l’on peut prévoir que bien-
tôt maire, après avoir régné seul, sera rélégué dans les
emplois que dédaignera méro, qui s’appliquera exclusive-
ment et sans partage à la femme. — Sémblo qué vai préne
la mèro, ou mieux La maïre dou nis, c'est marcher à pas
de loup, doucement, dans le dessein de surprendre, aller
comme un preneur de taupes. — Voy. Maïre.
Méruïè, s. m. Amélioration ; soulagement; mieux dans
une maladie, dans la douleur. — Y-a un pdou dé méruïè,
il y a un peu de mieux, un peu d'amélioration dans son
état.
Dér. du lat. Melioratus, amélioré.
Més, s. m. Mois, douzième partie de l’année. — Quoi-
qu'on dise fort bien Més dé maï, més dé janvié, etc., on
préfère souvent, pour rendre plus fluide la première syl-
labe, mé dé maï, mé dé janvië, etc.
Dér. du lat. Mensis, m. sign.
Mès ou Mais, conj. Nous écrivons en effet Maïs comme
en fr. par une exception dont il est rendu compte. — Voy.
Mais et Ai.
Més, mésso, partic. pass. de Métre, mettre. Mis, mise.
Mésado, s. f. Durée approximative d’un mois; salaire,
loyer d’un mois. — Véndraï dinc uno mésado, je viendrai
dans un mois environ. Y réstère uno mésado, j'y restai à
peu près un mois. Quan gagnères din ta mésado? combien
as-tu gagné pendant ton mois?
Mésadiè, ièiro, s. et adj. Ouvrier engagé pour un mois,
à tant le mois. — C’est surtout pour l'éducation des vers-
à-soie que l’on prend ces ouvriers supplémentaires.
Méscla, v. Mèler; mélanger; réunir et confondre plu-
sieurs choses ensemble; faire un mélange.
MES
Dér. du lat. Miscere; dans la bass. lat., Misculare,
m. sign. qd
Méscladis, s. m. De l'entrelardé, viande en F
mêlée naturellement de gras et de maigre. — Dé lar més- .
cladis, du lard entrelardé tel que celui de la poitrine, dit
Véntrésquo.
Méscle, mésclo, adj. MÈl6, mélangé. — Un taïoù dé
boudin émbé quéouques flos dé poupo méscles, un morceau
de boudin et quelques garnitures avec.
Méscle, adv. Ensemble; pêle-mêle. — Boujas-ou tout
méscele, versez tout ensemble, pêle-mêle.
Mésclo, s. f. Mouture, méteil, mélange par tiers de fro-
ment, de seigle et de paumelle; mélange de foin ou de
luzerne et de paille pour les bestiaux.
Méscoula, v. Entailler un fuseau par une coche, le
marquer d’une cannelure.
Méscoulo, s. f. Coche, cannelure en spirale d’un fuseau,
an bout opposé au peson, vértél, qui sert à arrêter le fil
pendant que, pour le tordre, on fait tourner le fuseau sur
lequel on l’enroule ensuite.
Méscounégu, udo, part. pass. de Méscounouïsse. Mé-
connu. — Voy. Méscounouisse.
Méscounéïssable, ablo, adj. Méconnaissable ; que l'on
ne peut reconnaître; qui n'est pas facile à reconnaitre.
Méscounouïsse, v. Méconnaître; ne pas connaitre. Au
fig., désavouer ; oublier par ingratitude.
Dér. de Més pour Mdou, mal, et Counouwisse, con-
naître.
Mésoulo, s. f. Moëlle, substance molle et grasse dans
les os; substance molle dans le cœur du bois.
Dér. du lat. Medulla, m. sign.
Méspouiè, s. m. Néflier, Mespilus germanica, Linn.,
arbre de la fam. des Rosacées, qui produit la nëfle.
Pourquoi le fr. s’est-il tant écarté du radical lat. que le
languedocien à reproduit ? Un étymologiste a trouvé que
le celtique avait Nesp où Nespl avec la signification de
tronqué, coupé en deux, et que le grec Meoxln, d'où était
venu le lat. Mespilus, et puis notre Méspouiè, était formé
de Mésos, moitié, et de I£Aos, boule; par où sans doute le
fruit du néflier assez ressemblant à une moitié de globe,
avait mérité son nom gaulois représentant la particularité
que notait le grec. Nous ne voyons pas mieux pour cela
pourquoi le français aurait adopté la forme prétendue cel-
tique, tandis que le:languedocien s’en serait tenu au grec
et au latin. L
Méspoulo, s.f. Nèfle, fruit du néflier, qui ne mürit
jamais sur l’arbre et qui a besoin, pour être mangeable, de
même que la sorbe, de blossir sur la paille.
Mès qué, conj. Pourvu que; en cas; à condition que.
— Mès qué n'y-ague, pourvu qu'il y en ait. Mès qué
vèngue, à condition qu'il arrive.
En vieux langage, on disait Mas qué, de Mas, pas plus,
seulement : Mas un drap, un drap seulement. Mas qué
s'amor m'anci, pourvu que son amour me tue. Le simple
MES
Mas s'est perdu; le composé Mas qué s'est altéré ou adouci,
en gardant son ancienne acception. L'adverbe et la con-
jonction ont évidemment une commune origine dans Maï,
plus, provenu du lat. Magis.
Méssajariè, s. f. Messagerie, voiture publique pour
transporter les voyageurs, qui fut d'abord chargée aussi
des messages ou des lettres, ce qui lui valut son nom. —
Ces voitures, que les chemins de fer font maintenant
prendre en pitié et un peu en haine, n'ont pas toujours
marché aussi vite que dans leurs derniers beaux temps,
poussées qu'elles étaient presque toujours par une rude
concurrence. Au commencement de ce siècle, rapportent
les chroniques, il y avait ici une messagerie qui, pour
charrier diréctement les Alaisiens à Nimes, ne leur pre-
naît pas moins de quinze à seize heures. Pour savoir com-
ment elle pouvait parvenir à exécuter un pareil tour de
force, il faut lire, dans les Castagnados du Marquis DE LA
Fare-Azais, l’épopée de Rocho et Plagndou, ces deux
automédons du Consulat et du premier Empire, dont main-
tenant le nom vivra autant chez nous que celui de leur
devancier.
‘Méssaje, s. m. Domestique de fermier ou de paysan;
messager; commissionnaire, envoyé; message, envoi, Com-
mission.
_ Dér. de la bass. lat: Messagium, m. sign., du lat.
Missio.
Méssajè, s. m. Messager; commissionnaire; envoyé;
qui est chargé de porter les lettres d’un endroit dans un
autre. — Avédre l'ésprit méssajè, avoir un secret pressen-
timent; ce qui rappelle l’ancienne croyance aux esprits
familiers.
Mésso, s. f. Messe, sacrifice du corps et du sang de
Notre Seigneur Jésus-Christ. — Mésso basso, messe basse
ou petite messe. Mésso dé mor, messe des morts. Préne la
mésso, recevoir la prètrise, èlre ordonné prêtre. À pas la
mésso, il n'est pas encore prêtre. Pode pas èstre dou prèche
et à la mésso, je ne puis être au prêche et à la messe, c.-à-
d: partout en même temps; je ne puis sonner les cloches et
aller à la procession. Au fig. Sans argén sé canto pas
mésso, locution qui-s’emploie pour dire que sans argent,
sans payer on ne se met pas en frais, on ne fait pas de
Dér. du lat. Missa, m. sign.
Méssorgo, s. f. Mensonge; menterie; fausseté; impos-
ture.
Méssorgos, au plur., signifie ces petites taches blanches +
qui viennent sur les ongles de la main, parce que c’est sur
leurnombre et sur leur forme, fait-on accroire aux enfants,
que l'on reçonnait la quantité et la grosseur des mensonges
qu'ils ont dits:
Dér. de la bass. lat. Mentionia, du lat. Mentitia, dont
le fr. a fait Mensonge, l'ital. SU et notre lang. avec
MÉS 483
trompeur ; qui dit un ou des mensonges; qui a l'habitude
de mentir. — Méssourguiè se dit mieux et vaut mieux
que Méntur, qui n’est qu'uné traduction franchimande.
Méssourguiè coumo un lébriè, menteur comme un chas-
seur.
Méstiè, s. m. Métier; profession d'un art mécaniqe;
profession qui exige l'emploi des bras; machine dont se
sert l'artisan pour la fabrication de son ouvrage — Douna
un méstiè, faire apprendre un métier, mettre en môtier.
Sabatiè, fai toun méstiè, savetier, fais ton métier, c'est le
Ne sutor ultrà crepidam, du latin; chacun son métier et
les vaches seront bien gardées.
Dér. de la bass. lat. Ministerium, office, occupation.
Méstièiräou, s. m. Artisan; celui qui exerce une pro-
fession mécanique ; corps d'artisans ; gens de métier.
Mèstre, s. m. Maître; qui a des serviteurs; qui com-
mande; instituteur; professeur; qui enseigne un art, un
métier, une science; propriétaire; maitre, titre d'honneur;
principal. — Sès bé lou mèstre? vous êtes bien le maitre ?
vous pouvez commander. Ou diraï à toun méstre, je le
dirai à ton précepteur, à ton maitre d'école. Véou pas pus
as mèstres, je ne vais plus à l’école, au collége. Aquél chi
a trouba mèstre, le propriétaire de ce chien est trouvé.
Mèstre Blasi, Maître Blaise. Un mur mèstre, un mur-
maitre. Un mèstre d'armos, se dit d’un maitre d'escrime,
et au fig. d’un habile joûteur, d'un madré compère, qui ne
craint personne en fait de ruses, de tours d'adresse, de
finesses. Lou méstre-varlé, le maitre-ouvrier, le principal
valet de ferme.
Il se prend quelquefois au féminin, Méstro, pour Més-
trésso, maîtresse, surtout en parlant de la femme d’un
maitre-valet.
Dér. du lat. Magister, m. sign. En ital. et en espag.
- Maestro.
Mèstre, s. m. Mètre, mesure de longueur. — Le mêtre
a été plus facilement et plutôt vulgarisé que les autres
mesures du système décimal, parce qu’il est continuelle-
ment dans les mains d’une foule d'artisans, menuisiers,
serruriers, maçons, charpentiers, qui sont un peu plus
lettrés et d’ailleurs sans cesse en rapport avec des archi-
tectes, des ingénieurs, hommes officiels; aussi depuis long-
temps, avec ses subdivisions, a-t-il détrôné Za cano, la
touèso, lou piè, lou pouce, la ligno, dont il n’est plus ques-
tion. Un mèstre courén, cara, cube, sont fort de mise, car
il faut bien être à la hauteur de la science et parler de
mètre courant, carré ou cube, quand on en a besoin. On
sait que le mètre, unité fondamentale du nouveau système,
est la dix-millionième partie du quart du méridien terrestre,
allant du pôle à l'équateur; il vaut, en ancienne mesure,
3pieds, 44 lignes 296. — Voy. lettre K.
Méstréja, v. Maitriser; dompter ; réduire; faire le maître;
commander ou gouverner én maître.
Méstrésso, s. f. Maitresse; celle qui commande dans
une maison; institutrice, qui enseigne une science, un art,
484 MÉS
un métier; amante, bonne amie; pris adjectivement : prin-
cipale.
Mésura, v. Mesurer; déterminer une quantité, une
étendue, un espace par une mesure.
Dér. du lat. Mensurare, m. sign.
Mésuraïre, s. m. Mesureur; celui qui mesure; préposé
ayant droit et charge de mesurer.
Mésuraje, s. m. Mesurage; action de mesurer; droit
qu’on prend pour mesurer.
Mésuro, s. f. Mesure; ce qui sert à déterminer la quan-
tité, les dimensions; instrument pour mesurer; contenu
d'une mesure de capacité; quantité mesurée. — Mésuro
raso, coumoulo (Voy. Coumoul). Dé mésuro, à mesure, au
fur et à mesure. Dé mésuro qué, à mesure que : sorte
d’adverbe. Bono mésuro, évent, excédant donné en sus de
la juste mesure; par ext. on l’emploie pour répondre à une
personne qui, en parlant d'une chose quelconque, énonce
une quantité, une dimension, un chiffre, que l’on sait ou
que l'on croit bien au-dessous de la vérité : Aguélo fio a
vin-t-ans. — Bono mésuro, réplique-t-on, si on lui en
croit davantage. On dit aussi dans le mème cas : Mésuro
dé Sént-Ambrièï, mesure de Saint-Ambroix. Et un mot
d'explication ne sera peut-être pas de trop pour bien faire
comprendre la synonymie de ce localisme. — On sait
qu’autrefois, en France, les poids et mesures variaient d’une
localité à l’autre, cause continuelle pour le commerce de
difficultés dans les calculs, de malentendus, d'erreurs et de
déceptions, auxquels l’uniformité du système décimal est
heureusement venue mettre un terme : c’est la seule, la
vraie égalité qu'aient fondée les faiseurs à qui nous le
devons. A Saint-Ambroix, la mesure de capacité, sous une
même dénomination, était plus grande que celle d’Alais.
Dans cette dernière ville, qui alors comme aujourd'hui et
à charge de revanche s’approvisionnait dans les marchés
de sa voisine, on devait s'occuper beaucoup de la supério-
rité de contenance de la mesure de Saint-Ambroix. Il en
résulta qu'on appliqua l’idée qu’on en avait à toute autre
chose; et lorsque quelqu'un avançait une appréciation qui
paraissait insuffisante, on complétait sa phrase en ajoutant
ces mots : mésuro dé Sént-Ambrièi, équivalents plus pitto-
resques de bono mésuro; comme si l’on avait dit : soit,
vous voulez parler de la grande mesure et non de la petite,
sans quoi vous seriez au-dessous du vrai, mettez-en donc
plus largement, etc., etc. Et en avant, par exemple dans
le cas ci-dessus, citait-on l’âge d’une personne que l’on
savait plus vieillotte, ou bien elle-même retranchait-elle
quelques printemps de ses années, au lieu de glisser doucet-
tement, comme de coutume, la petite réflexion : Et le
pouce ! ou : Sans compter les mois de nourrice! on prenait
un tour figuré également expressif en murmurant : Mésuro
dé Sént-Ambrièi!
Ce dicton, qui ne peut être que local, est sans doute
d’ancienne date; mais il n’y a plus que les aînés du kilo-
gramme ou du décalitre qui en connaissent l'origine, qu'ou-
MIA
blieront bientôt, si ce n’est déjà fait, ceux qui ne savent
pas qu'il fut un temps où l’on n'avait pas besoin de tant
de grec pour mesurer son blé et ses châtaignes. C'est pour-
quoi notre Dictionnaire, à qui la tradition en est revenue,
et qui, pour être de son époque, ne rougit pas du parler et
des usages du bon vieux temps, en a cherché et donné
l'interprétation.
Dér. du lat. Mensura, m. sign.
Métre, v. Mettre; placer; poser; établir; disposer. —Sé
métre, se mettre, se placer; commencer; s'habiller. Métre
dé pièi, prendre du pis, se dit des femelles des mammifères
lorsque, étant pleines, leurs mamelles ou leurs pis com-
mencent à se gonfler. Métre la grano, mettre à couver,
mettre à éclore, à l’incubation, la graine ou les œufs de
vers-à-soie. Métre lou lévan, mettre le levain {Voy. Lévan).
Métre lou toupi, mettre le pot au feu. Métre bièn sus lou
papiè, bien écrire, rédiger, composer. Métre lou pétas dou
trdou, mettre le doigt dessus, deviner quelque chose de
secret; mettre le doigt sur la plaie, sur l’enclouure. Métre
uno réoubo, un capèl, mettre une robe, un chapeau. Métre
la téoulo, mettre le couvert. Sé métre à téoulo, s'attabler,
se mettre à table, Sé métre én trin, s'enivrer; commencer
un ouvrage. Aquélo fénno sé més bièn, cette femme se met
fort bien. Métre trémpa lous granés, faire macérer, tremper
les pois-chiches. Més pas la man dou sé pér un pésoul, au
fig., il ne se dérange pas pour peu qui vaille.
Dér. du lat. Mittere, mettre.
Mialada ou Miélado, s. f. Miellat, miellée, miellure;
gouttelettes d’une substance visqueuse et sucrée assez abon-
dante parfois pour former une sorte de vernis sur les
feuilles de certains arbres et particulièrement sur celles du
tilleul, de l’érable, du platane, du châtaignier, etc. On
attribue la miellée soit à une espèce de rosée, soit à la
transsudation même des feuilles, ou enfin à des pucerons.
Elle apparaît dans la première sève du mois de mai et le
lendemain d’une forte chaleur. Elle est purgative, et la
feuille du müûrier, qui en est cependant moins attaquée,
devient un poison mortel pour les vers-à-soie lorsqu'il y
en a quelques restes que la pluie, la chaleur ou le vent
n'ont point lavés ou fait disparaître.
Dér. du lat. Mél, miel.
Mialé, s. m., n. pr. de lieu. Mialet, commune dans le
canton de Saint-Jean du Gard. — Nous ne relevons cette
dénomination que pour signaler une variante semblable à
celles dont nous avons parlé au mot Maléncho. Mialé,
rendu en fr. par Mialet, s'appelait, en 4294, en 4345 et
4384, de Meleto, Meletum; le roman en fit Mellet, et, en
4545, Mialet, qui est resté. Son radical primitif est pris
dans le lat. Mél, miel, comme celui de La Mialouso, en
fr. La Melouse, et sans doute de Maléncho pour Méléncho. :
Ces propensions se font jour dans le mot précédent Mia-
lado plus usité que Miélado : c'est l'introduction de la con-
sonnance éclatante a remplaçant e, tout à fait dans le génie.
de la langue d'Oc et de la ce a d'Oil. PV à
MIC
Mialous, mialouso, adj. Mielleux; qui tient du miel;
fade, doux ; doucereux.
La Mialouso, La Melouse, village de l'arrondissement
d’Alais, sur les confins de la Lozère, dit en 4092 jusqu'en
4508, de Melosa, qui tire évidemment son nom du lat.
Mel, à cause de la quantité de miel qu’on y récolte.
Miâou. Onomatopée du miaulement du chat. — Ou
voudrias?.… Midou! dit-on à quelqu'un à qui l'on présente
une chose qu'on ne veut pas lui donner; ce qui répond à :
Vous le voudriez 2... Je vous en souhaite, vous n'en cro-
querez que d'une dent.
Miâoula, v. Miauler : formé de l'onomatopée du cri du
chat, Midou.
Lou midoula, s. m. Le miaulement du chat.
Miâoulaïre, aïro, adj. Miauleur, qui a l'habitude de
miauler. — Jamaï ca midoulaïre noun fuguè bon cassaïre,
prvb., jamais chat miauleur ne fut bon chasseur.
Miâouquo, s. f. Millet sauvage; pied de poule ou chien-
dent pied de poule, Gramen dactylon radice repente, Linn.,
plante de la fam. des Graminées, graminée de l'arrière
saison, dont la racine sert au même usage que celle du
chiendent ordinaire.
Dér. de Mit ou M4, millet, du lat. Millium.
Mias, s.m. Pain, ou plutôt gâteau de millet ou de maïs
cuit au four. — Aromatisé avec quelques grains d’anis,
quoique lourd et indigeste, il n’est pas encore trop dédai-
gné par les enfants que les nouvelles friandises n'ont pas
rendus trop gourmands et délicats.
Dér. de Mit ou Mél, millet.
Michan, michanto, adj. Méchant, mauvais; qui est
par nature, par caractère, par tempérament, porté et
enclin au mal; en qui les défauts dominent. — Bono miolo
michanto bèstio, bono fénno michanto tèsto, bono tèro michan
cami, bonne mule méchante bête, bonne femme mauvaise
tête, bonne terre mauvais chemin. Pértout y-a uno lèguo
dé michan cami, il y a partout une lieue de mauvais chemin.
Dé michanto fénno gardo té et dé la bono noun l'én fises,
garde-toi de méchante femme et ne te fie pas à la bonne.
Bèlo fénno michanto éspigno, belle femme mauvaise épine.
A michan-t-ouvriè gés dé bos outisses, mauvais ouvrier ne
trouve jamais de bons outils. Michanto sésoù quan-t-un
low manjo l'éoutre, mauvaise saison quand les loups se
mangent entr'eux. Fios qué soun à marida michan troupèl
à garda, filles à marier sont un troupeau difficile à garder.
Douna un michan co, donner un mauvais coup, un coup
dangereux. Un michan capèl, un mauvais chapeau, vieux,
usé. Michan vi, michan pan, mauvais vin, mauvais pain.
Michan tén, mauvais temps : se dit surtout d’un orage
accompagné de grèle. Aï pôou qué tombe dè michan tén, je
crains que nous ayons de la grêle. Michan mdou, charbon
qui vient. au visage, ulcère cancéreux, que la superstition
empêche, comme pour la grèle ou pour les maladies des
vers-à-soie, de nommer par leurs noms. Aquélo michanto
méno, michanto mêno, — Voy. Muscardin.
MIË 485
Michan se prend adverbialement : Séntè michan, sentir
mauvais; faire michan, faire mauvais temps. Faï michan
èstre maldou, il est pénible, triste d’être malade. Faï
michan véni vièl, il est fâcheux de vieillir. Faï michan ana
déscdou, il n'est pas bon, il est désagréable d'aller nu-pieds.
— Faï michan est plus usité que Faï mdou, qui s'emploie
aussi dans ces locutions.
Lou michan, pris subst., le démon, le diable, pour ne
pas l'appeler par son nom; comme on dit en fr. le malin :
c’est en effet le méchant par excellence.
Dér. du lat. Mis pour Malë, et Cadere, choir, Mis-cadens,
mal échéant, méchant, méschant, v. fr. Michan.
Michantiso, s. f. Méchanceté; malignité; inclination à
faire le mal; calomnie. — A un enfant boudeur, obstiné,
rageur, on dit : Michantiso! comme s’il était la méchan-
ceté incarnée; cela revient à Méchant! vilain méchant ! et
le reproche n'a point d'autre portée.
Micho, s. f. Pain de brasse, pesant de vingt à vingt-
cinq livres; petit. pain formant la ration quotidienne du
berger pendant qu'il est aux champs. — Cette similitude
de noms appliqués à deux pains si différents de taille est
une singularité qui doit venir de ce que l'un et l’autre sont
faits de la même pâte.
Dér. du lat. Mica, mie et morceau.
Miè, s.m. Muid, mesure de vin valant dans l'Hérault
sept cents litres. — Se dit aussi spécialement pour une
mesure de contenance de la chaux : un miè d'acdou, un
muid de chaux.
* Miè, s. m. Milieu; centre. — Coupa dou miè, couper au
milieu. Aou miè déou jardi, au milieu, au centre du jardin.
Dér. du lat. Medium, m. sign.
Miè, mièjo, adj. Mi, demi; moitié; milieu. — Mièjour,
mièjognuè, midi, minuit. Mièjo-houro, demi-heure. Miéjo-
lèguo, demi-lieue. Uno houro et mièjo, une heure et demie.
Mièjo journado, moitié journée. Un an et miè, un an et
demi; mais on dit plutôt au masc. un an et démi, mièjour
et démi. Gn'a jusqu'à müièjo cambo, il y en a jusqu’à mi-
jambe. À miè-cami, à mi-chemin. Miè-nèci, demi-fou,
demi-imbécile; écervelé; niais. Miè-moussu, demi-mon-
sieur, demi-bourgeois, demi-manant. Manjo pas soun miè
sadoul, il ne mange pas à demi son soûl. Y véï pas sa
mièjo vido, locution bizarre en parlant d’une personne qui
a mauvaise vue, qui n’y voit qu'à demi et à peine pour
gagner sa vie ou ne pas se casser le cou. À mié-troùs, à
peu près à moitié de la hauteur, à hauteur moyenne, à mi-
tronc, du lat. Truncus. Un sa dé miè, un sac à moitié
plein. La païèiro és pas dé mièjo, la cuve n'est qu'à moitié
pleine, que demi-pleine. On dit cavalièrement d’une femme
qui fait beaucoup d'enfants : És toujour pléno ou dé mièjo.
Douna soun bé à mièjo, affermer son bien à moitié fruits,
amodiation par laquelle le propriétaire prête sa terre et les
produits sont partagés. Miè-fébriè journdou éntiè, prvb., à la
mi-février, la journée du travailleurestentière.— Voy.Fébrié.
Dér. du lat. Medius, a, um, m. sign.
486 MIL
Mièjo, s. f. Moitié de la pinte d’Alais qui équivalait au
pôt ou à deux pintes de Paris. — La mièjo contient 0,90
céntilitres, elle est donc à peu de chose près le litre. Anén
béoure mièjo, allons boire un litre. Ma fénno és économo,
d’un paqué dé brouquélos né faï sièt més et dé mièjo né faï
pas qu'un co, ma femme est bonne ménagère, d’une botte
d’allumettes elle fait six mois, et d’un litre une seule
fois.
Mièl, s. m. et adv. de comparaison. Mieux; le mieux.
— Fasès-ou tout pér lou mièl, faites tout pour le mieux.
Quan-t-on és vièl on danso pas mièl, quand On est vieux
on ne danse pas mieux. Aïmne mièl véni, j'aime mieux,
je préfère venir. Aqud vai mièl, la santé va un peu
mieux.
Dér. du lat. Meliùs, m. sign.
Mièro, s. f. Ne s'emploie que dans cette locution : Sala
coumo la mièro, salé comme la mer, dont Mrèro est proba-
blement une altération.
Miétou, s. m». Milan, oiseau. — Voy. Tartaño.
Mignar, mignardo, adj. Mignard, gracieux et gentil
avec un peu d'afféterie ; délicat; douillet.
Dér. de Mino, mine.
Mignardéja, v. fréq. Mignarder; dorloter; pouponner ;
faire des mignardises, des coquetteries délicates.
Mignardije, s. f. Mignardise; gentillesse un Fu affectée;
délicatesse, coquetterie, caresses.
Mignô, mignoto, s. et adj.
terme d’amoureux et de nourrice.
Mignounéto, s. f. Mignonette, mignardise, œillet mi-
gnardise, œillet plume, Dianthus plumarius, Linn., plante
de la fam. des Caryophyllées, cultivée comme fleur
d'agrément, et qui croit naturellement sur nos mon-
tagnes.
Mignouta, v. Mignoter; caresser; flatter doucement;
dorloter; traiter délicatement. — Il est aussi réciproque :
Sé mignouta.
Migou, s. ”#. Fumier ou crottin de brebis; fumier de
bergerie.
Dér. du gr. Mupés, pelit, d’où le lat. Mica, petit mor-
ceau, miette, grain, à cause de la petite dimension du
crottin de brebis. Ce qui donne raison à cette étymologie,
c'est que, dans le mème ordre d'idées, ce crottin, pris
isolément, s'appelle Pécolo, qui vient de Picho, en ital.
Piccolo, petit.
Mijè (Dé), adv. De moitié, par moitié. — Faïre dé
mijè, faire de moitié; être de moitié au jeu; donner la
moitié de son lit, de son diner, etc. L'ase dé mijè fuguè
toujour lou pu mou émbasta, prvb., l'âne en communauté
fut toujours le plus mal embâté. — Mijè est djt pour
Mièjè ou Mièjo.
Mil, s. #. Millet. — Voy. Mél.
Milanés, s. =. el adj. Milanais, du pays lombard. —
Ce mot désignait surtout, il y a quelques années encore,
dans nos contrées cévenoles, une race de vers-à-soie prove-
Mignot; mignon; gâté;
MIN
nant de la Lombardie, dont on distinguait plusieurs variétés
de cocons : le milanais ordinaire, jaune, assez gros, coupé
ou serré par le milieu; le petit milanais qui n’en différait
que par son moindre volume, et enfin le milanais blanc,
semblable au jaune par la forme, mais qui laissait quelque
chose à désirer pour la couleur. Depuis l’invasion du fléau
qui ravage nos chambrées, l’importation a amené et répandu
d'autres races de la Chine, du Japon, de la Natolie, du
Chili, du Caucase, qui n'ont pas fait oublier les belles
réussites des milanais ; mais la confiance et l’ancien crédit
ne leur sont pas encore revenus, car la Lombardie souffre
des mèmes maladies que les Cévennes séricicoles. Espérons
cependant une régénération prochaine que des expériences
scientifiques promettent et font présager.
Milanto, s. »”. Des millions, des milliasses; nombre
indéfini et considérable de choses quelconques.
Dér. du lat. Mille.
Millimèstre, s. m. Millimètre, millième partie du mètre.
— Voy. Méstre.
Importation nouvelle et obligée du fr.
Milo, s. m. Mille, nom de nombre, et Mil, lorsqu’ il sert
pour une date. Notre langue ne fait pas cette distinction.
— Milo résoùs, mille raisons. Milo hiuè cén sèlanto-trés,
mil huit-cent soixante et treize.
Milo reste toujours indéclinable.
Dér. du lat. Mille, m. sign.
Milo-flous, s. m. Boule-de-neige, arbuste.
Toumiè.
Mina, vw. Miner, faire une mine; creuser; caver. Au
fig., consumer, détruire peu à peu par le chagrin, les
regrets.
Minable, ablo, adj. Minable; pitoyable; dont l’appa-
rence, le costume, l’air font pitié.
Miné, s. »”. Dim. Minouné. Minet, petit chat; nom
caressant donné aussi à un vieux chat familier. — aire
miné, manger plus de pain que de viande : ce qui doit être
sans doute une antiphrase, car on dit également : Grouman
coumo uno cato, gourmand comme une chatte, pour expri=
mer le type de la gourmandise délicate et quelque peu
recherchée.
Minéto, s.f. Dim. de Mino. Minette; petite chatte. —
Ainsi que le précédent, se donne aussi à une chatte favorite
quel que soit son âge.
Minganèlo, s. f. Minauderie; manières affectées pour
plaire; petites façons de l'enfant gâté ou de la jeune fille
minaudière, où perce une pointe naissante de coquetterie.
En bas-breton, Mingan, simagrées.
Mingre, mingro, adj. Chélif; un peu minable; piètre ;
débile; qui n’a point de forces.
Mino, s. f. Mine; air; apparence; expression de la phy-
sionomie, de l'accueil; mine; métaux, minéraux à exploi-
ter, de cuivre, de charbon, d'or, d'argent, etc.; mine de
carrier, de mineur, pour faire sauter une roche à l'aide de
la poudre; minette, chatte, femelle du chat.
— Voy.
MIO
Dans le premier sens, en bas-breton Min, mine; dans le
second, du lat. Minera, mines, minières.
Minoù, s. ». Dim. Minouné. Minon, petit chat qui
vient de naître, — Chanja sous minoùs, changer d'amour,
porter ailleurs ses affections, en prenant métaphoriquement
ce que fait au propre la chatte en changeant de place ses
petits qui sont aussi ses affections.
Minouna, v. Chatter, faire des petits en parlant de la
chatte.
Minounado, s. f. Chattée; petits chats qu'une chatte
met bas d’une fois.
Minuto, s. f. Minute, soixantième partie d'une heure;
original des actes qui demeure chez le notaire, ou original
des actes judiciaires, qui reste au greffe.
Dér. du lat. Minutus, minuta, petit.
Mio, s. f. Mie; amie; maîtresse. — Ana véire mio, aller
voir sa bonne amie. Ma mio, mon amie, m’amie, est un
de ces vocatifs que s'adressent les femmes dans leurs con-
versations, qui la plupart du temps est moins une expres-
sion d'amitié qu’un terme souvent indifférent et banal, fort
semblable au fr. : ma chère.
‘ Contraction de Amigo, moun amigo.
Miolo, s. f. Dim. Miouléto; augm. Mioulasso. Mule,
femelle du mulet, produit de l'âne et de la jument. —
Bono miolo, michanto bèstio, bonne mule, méchante bête.
Rendre l'argén dé la miolo, rendre gorge, reperdre ce qu'on
a gagné; en général, tout revirement de fortune, tout revers
de médaille. Faïre uno miolo, faire une sottise, une faute,
une maladresse.
Dér. du lat. Mula, m. sign.
Miôou, s. m». Dim. Mioulé; augm. Mioulas. Mulet, bète
de somme. — L’Ane et la jument produisent les grands
mulets; le cheval et l'ânesse les petits que l’on appelle
Bardôs.
Dér. du lat. Mulus, m. sign.
Miou, miouno, s. et pron. poss. Mien; à moi; qui est à
moi ; qui m'appartient; le mien. — És miou, il est à moi.
És miouno, elle est à moi. Démande pas qué lou miou, je
ne veux que le mien, je ne réclame que ce qui m'appar-
tient.
Dér. du lat. Meus, mea, meum, m. sign.
Mioù, miouno, s. et adj. Mieux, le mieux; meilleur.
— La trémpo és bono, lou vi mioù, la piquette est bonne et
le vin meilleur. Béoure bo et müioù, boire du meilleur.
Foste mioù sériè dé..., ce que vous auriez de mieux à
, Yotre meilleur parti serait de.
Dir. du lat. Melior, m. sign.
| Miougragné, s. m., Où Miougragnèiro, s. f. Grenadier,
Punica granatum, Lion, arbre de la fam. des Myrtes, qui
produit la grenade.
Son nom latin le suppose originaire du nord de l'Afrique,
d'où il aurait été transporté en Italie pendant les guerres
puniques; sa dénomination languedocienne et française lui
vient de Grano, grain, à cause de son fruit.
MIR 487
Miougrano, s. f. Grenade; fruit du grenadier; en lat.
Malum granatum, pomme grenue, pleine de grains. — Ce
fruit, dont le malade suce avec plaisir la ‘pulpe, trop peu
charnue d'ailleurs pour être un aliment qui fatigue son
estomac, contient un acide agréable qui flatte le goût,
nettoie, rafraichit la bouche et apaise l’ardeur de la soif
excitée par la fièvre; ces précieuses qualités ont bien pu
lui valoir aussi son nom languedocien qui serait formé de
Grano, graine, grain, et de Mioù, la meilleure.
Miougrano (Gouto), s. f. Migraine, douleur qui affecte
ordinairement une moitié de la tête, un seul côté.
En lat. Hemicrania, qui rend bien la localisation du
mal, et qu'il semble que la langue d'Oc a voulu exprimer
aussi, sans y réussir aussi bien.
Mioulan, s. ». Mule ou mulet vieux, mauvais et laid,
Rossinante du genre.
Mioune, miouno, s. et pron. poss. Mien, le mien. —
Variante de Miow, miouno, avec la m. sign.
Miquèl, s. m., n. pr. d'homme. Au fém. Miquèlo.
Michel. — Se dit aussi couramment Michél, Michèlo et
Michèou.
Miquélé, s. m. Miquelet, bandit des Pyrénées, dont le
nom a été retenu dans cette seule locution : Arma coumo
un miquélé, armé comme un miquelet.
Mirabèlo, s. f. Mirabelle, sorte de prune ronde, jaune
et sucrée.
Dér. du lat. Mirabilis, m. sign.
Miracloüs, ouso, adj. Miraculeux; prodigieux; qui
tient du miracle; merveilleux; surprenant; extraordi-
naire.
Miraïa (Sé), v. Se mirer; se regarder dans un miroir ou
dans une surface unie qui rend l’image. Au fig., se regarder
avec complaisance; s'admirer. — Qué trop sé miraïo pdou
fialo, fille qui trop se mire file peu. Sé miraïa din sous
poulis habiages, s'admirer dans ses atours, se mirer dans
ses atours. Quan réslarés aqui à vous miraïa ? dit-on à
quelqu'un qui n’a pas l'air de comprendre ce que vous lui
dites et reste là tout ébaubi, planté devant vous comme
s’il ne songeait qu’à se mirer dans vos yeux.
Miraïé, s.m. Dim. de Miral. Petit miroir; écusson d’un
trou de serrure, de bouton de porte. — Cassa dou miraïé,
faire la chasse au miroir.
Miral, s. ». Miroir; glace de verre; surface polie, unie,
qui rend les images. — Bèlo fénno, miral dé nècis, prvb.,
jolie femme, miroir de niais.
Dér. du lat. Mirari, admirer, considérer avec admira-
tion.
Mirgaïa, ado, adj. Diapré, émaillé de diverses couleurs
brillantes.
Altération peut-être du mot Miraïa, mais avec une cer-
taine extension.
Mirgo, Murgo ou Mirguéto, s. f. Souris. — Ces déno-
minations qu'on trouve dans SAUvAGES sont peu usitées.
Le lat. Mus, muris, ou Musculus, rat, pourrait bien être
488 MIT
pour quelque chose dans leur formation. Nous disons Furé.
— Voy. c. m.
Miricoutoun, s. #”. Brugnon, espèce de pêche dont la
pulpe adhère au noyau; sa peau est lisse, d’un blanc un
peu jaunâtre du côté de l'ombre, et dan beau rouge violet
du côté du soleil; sa chair est ferme, sucrée, et d’un jaune
clair excepté auprès du noyau où elle est très-rouge.
En espag. Malacoton.
Miscarolo, s. f. Alouette calandrelle. Alauda brachi-
dactyla, Temm., oiseau de l'ordre des Passereaux et de la
fam. des Subulirostres, commune dans le pays. — Elle a
les allures du cochevis, Couquiado, avec qui elle se mêle
volontiers, ce qui peut les faire confondre, quoique celle-ci
ne soit pas huppée.
SAUVAGES, à ce mot Miscarolo, se contente de dire :
Petite alouette. Cela signifie-t-il petite de taille, quelle que
soit d’ailleurs l'espèce, ou s’applique-t'il à l’alouette la plus
petite du genre, car elle ne dépasse pas douze centimètres ?
Mais cette dernière n'a pas, comme les autres, de nom
particulier que nous lui connaissions. Miscarolo ne semble
pouvoir désigner que l’alouette calandrelle.
Missard, s. f. Marmotte. — Elle n’est vulgairement
connue que sous le nom de Marmoto. — Voy. ©. m.
Missoü, s. m. Espèce de saucisson de ménage, de cer-
velas, plus court que le saucisson ordinaire et fait avec de
la viande moins choisie et coupée moins menue, que l’on
ensache aussi dans des boyaux lisses ou non, de manière
qu'il est souvent assez informe. On le mange cru ou cuit,
et, dans ce dernier cas, chaud ou froid, et il est toujours
également bon. Le missoù est, pendant toute l’année, la
grande ressource de la plupart de nos modestes ménages,
et comme son apprèt particulier et son emploi ne permet-
tent pas de le désigner pour un équivalent français, on
devrait bien franciser son nom et l'appeler Misson : nous
le recommandons au Dictionnaire de l'Académie.
Dér. de la bass. lat. Missonum, paquet, botte : le missoù
étant une agglomération de petits morceaux de viande
réunis en paquet ou faisceau.
Missounariè, s.f. Confection, fabrication du Missoù
(Voy. ©. m.). — Comme dans la plupart des ménages du
pays, qui peuvent le faire, on est dans l'habitude d’égorger
tous les ans un cochon, plus ou moins gros selon les
moyens, on appelle Faïre missounariè, en faire la salaison,
parce que confectionner les missoùs est la chose principale
dans cette opération.
- Mistrâou, s. m. Mistral, vent du Nord-Nord-Ouest, le
plus froid et le plus impétueux de ceux qui soufilent en
Provence, d’où ce mot a été importé.
Contract. de Magisträou, du lat. Magister, le maître, le
plus fort des vents.
Mita, s. f. Moitié; une des parties égales ou à peu près
du tout. — És dé Moussa, aïmo maï lou tout qué la mita,
prvb., il est de Moussac, il aime mieux le tout que la
moitié. Ase dé mita és toujour mâou émbasta, l'âne de la
MOL
communauté est toujours le plus mal bâté /Voy. Mijè). À
mita cami, à moitié chemin. Mita quiè, à moitié cuit.
Éstre dé mita, Ôtre de moilié. Faïre dé mita, partager.
Mita mita, moitié chacun, part égale. Mita l'un mia
l'doutre, moitié de chaque : équivalant de mila mita. À
mita, ou mieux dé mita, à moilié, à demi.
Dér. du lat. Medietas, moitié.
Mitadiè, s. m. Qui fait de moitié avec quelqu'un; objet
qui sépare par moitié, comme un mur, un fossé divisant
un héritage.
Mitau, s. m. Milieu, centre, point central. — En v. fr.
popul. on disait aussi Mitan. — Y-a pas dé mitan, il n'y
a pas de moyen terme, point de milieu, de tempérament.
Éntre mitan, au beau milieu.
C’est le synonyme plus usité de Mie et plus étendu.
Dér. du lat. Medius, m. sign.
Mitèno, s. f. Mitaine; long gant de femme qui recouvre
le bras et n’a que le pouce et l’origine des doigts; gant qui
n’a de distinct que le pouce.
Mito, s. f. Mitaine; gant qui n’a que le pouce de dis-
tinct, souvent fourré en dedans, dont se servent particu-
lièrement les voituriers. — Il est synonyme de Mitèno
dans sa dernière acception.
Dér. de la bass. lat. Mitana ou Mite, m. sign., Lanea
vel pellicea chirotheca, dit Du Cange.
Mitouna, v. Mitonner; faire cuire lentement; dorloter;
cajoler.
Dér. du lat. Mitis, doux.
Mo, s. m. Mot; expression; terme; parole. — Aqud's
pas lou mo, ce n’est pas répondre; ce n’est pas là l'affaire;
ce dont il s’agit. Té diraï un mo, je te dirai ton fait; je te
parlerai. Z diguè soun mo, il lui parla comme il faut. Vôou
i-éscrioure un mo, je vais lui écrire un petit mot, un bout
de letire. Quinquè pas lou mo, il ne dit mot, il ne répliqua
rien.
Dér. du lat. Muttum.
Moble, s. m». Meuble, tout ce qui sert à orner une
maison, une chambre, et qui n’en fait point partie, n'y
étant pas attaché à perpétuelle demeure.
Dér. du lat. Mobilis, mobile.
Modo, s. f. Mode, usage dans les vêtements, les plai-
sirs, les mœurs ; vogue passagère; manière d'agir, de
parler.
Dér. du lat. Modus, manière, façon.
Mol, molo, adj. Mou; tendre; qui n’est pas dur. Au
fig., mou; lent; flasque et sans vigueur; sans énergie;
indolent. — És trop mol pér ana ldoura, la terre est
encore trop trempée pour être labourée. Boudiou/ qué siès
mol! Bon dieu! que tu es indolent! À Zas cars bé molos,
elle a les chairs bien flasques.
Dér. du lat. Mollis, m. sign.
Molo, s. f. Meule, cylindre plat pour broyer, pour
aiguiser; meule de moulin, de coutelier.
Dér. du lat. Mola, m. sign.
MOR
Molo, s.f. Terme de boucherie, cimier, partie de la
cuisse du bœuf, qui contient plusieurs tranches de diffé-
rentes qualités : la pièce ronde, la semelle ou bè-d'éouquo,
le tendre ou din-dé-quidisso ; le derrière du cimier, depuis
les tranches jusqu'à la queue, s'appelle Culotte.
Molo, s. f. Relâche; intermission ; rabais. — Y-a molo,
la presse n’y est plus pour louer à haut prix les journaliers
lors des forts travaux agricoles ; y-a molo, quand le prix
des denrées baisse par la concurrence des marchands ou
l'abondance de la marchandise; quand il y a interruption
dans les arrivages sur un marché. Par extension, on le dit
toutes les fois qu il y a ralentissement dans l'animation
d’une partie de jeu, d’un plaisir, d'un travail.
Dér. du lat. Mollis, mou.
. Monle, s. ”. Moule, instrument ou matière creusée pour
donner une forme au métal fondu, au plâtre, à la cire, etc.;
modèle. — Monte dé boutoù, moule de bouton, qu’on
recouvre d’étoffe.
Dér. du lat. Modulus, m.'sign.
Môoure, v. Moudre, réduire le grain en farine au moyen
des meules; par ext. broyer, réduire en poudre par un
moyen quelconque.
Dér. du lat. Molere, m. sign.
Môouto, s. f. Mouture; action de moudre; ce que l’on
moud à la fois; salaire que prend le meünier.
Mouto, part. pass. fém. du v. Mboure, moudre. Moulue;
broyée. — Bla énsaqua, farino méouto, littéralement, blé
mis en sac, farine moulue; locution figurée employée sou-
vent pour dire : affaire conçue, chose conclue; entreprise
commencée, succès assuré,
Mort, s.f. Mort; fin de la vie; mortalité; désastre;
massacre; carnage. S. #., mort; cadavre; un mort; mort,
morto, part. pass. et adj., mort, morte, qui a cessé de
vivre. — Jouine qué véio, vièl qué dort, sinne dé mort,
prvb., jeune qui veille, vieux qui dort, signe de mort. La
mort d'uno fénno és coumo un co dou coude, prvb , la
mort d’une femme est comme un coup au coude, douleur
vive qui passe vite, à peu près comme celle qu'éprouve la
matrone d'Ephèse. La mort das blas: quand éclate une
catastrophe, qu'arrive ce qu'on appelle vulgairement le
commencement de la fin, dans une débandade, une décon-
fiture, une déroute, dans un sauve qui peut, on s’écrie : {a
mort das blas! Le blé étant la chose la plus utile, la plus
précieuse, sa destruction serait le plus grand malheur
possible, et l’on ne peut déplorer davantage tous les autres
désastres qu'en les assimilant à celui-là. Aïçd’s pas la
mort dé Turèno, dicton conservé dans nos contrées, qui
fait comprendre l'impression profonde que causa la mort
du grand capitaine, et qui sert encore de comparaison pour
témoigner que le malheur dont on peut avoir à se plaindre,
si déplorable qu’il soit, n’est pas aussi grand que la mort
de Turenne. Lou pdoure mort, locution ordinaire en par-
lant d’une personne décédée depuis peu, emportant l'estime
et les regrets. Un mort-dé-fan, un meurt-de-faim, un famé-
MOU 489
lique, un besogneux à genoux devant un écu. La morto-
sésoù, la morte-saison, celle où le mauvais temps arrête les
travaux, où un ouvrier ne trouve pas d'ouvrage. Douloù
dé fénno morto passo pas la porto, prvb., deuil de femme
morte dure jusqu'à la porte. Morto la bèstio, mort lou véri,
prvb., morte la bête, mort le venin. Lou maï atrapa és
lou mort, le plus dupe c'est le mort. Lou fiù és mort, le
feu est éteint. D'argén mort, de l'argent qui ne rapporte
rien. À mort, adv., à mort, mortellement, Travaïo à mort,
il travaille rudement. Mort subito, mort subite.
Dér. du lat. Mors, mortis, m. sign.
Mor, s. "m. Mors; fer de la bride qui entre dans la bouche
du cheval. — Préne lou mor à las déns, au prop. et au fig.
prendre le mors aux dents, s’emporter.
Dér. du lat. Morsus, parce qu'il est mordu par le cheval.
Morço, s.f. Amorce, poudre dans le bassinet d’un fusil,
sur la lumière d’un canon, à l'ouverture d'un trou de mine;
appât mis à un hameçon, à un piège; pierre d'attente qui
avance d'espace en espace à l'extrémité d'un mur pour faire
liaison avec un autre mur qu'on doit y joindre; entaille
faite au joint d’une pierre que l’on veut soulever ou arra-
cher, pour y introduire la pointe d'une pince, d'un levier.
Dér. du lat. Morsum, supin de Mordere, mordre.
Morou, s. #2. Nègre, et non pas seulement Maure.
Dér. du lat. Maurus, noir.
Mostro, s. f. Montre, machine pour indiquer les heures;
montre, marchandise exposée sur la porte d'un magasin;
boite, étagères, vitrage, où elle est étalée; échantillon. —
Mostro, échantillon pour les grains et autres denrées ana-
logues, se dit Tasto{Voy. c. m.) lorsqu'il s'agit de liquides.
— Dilus y-doura fosso mostros, lundi il y aura beaucoup
de montres : sans autre désignation s'entend exclusivement
des cocons à l’époque surtout où leur vente préoccupe tout
le monde. Aqui la mostro et lou mouloù, voilà la montre et
le magasin, la pièce avec l'échantillon, c.-à-d. tout œæ
qu'on a, tout ce dont on peut disposer.
Dér. du lat. Monstrare, montrer.
Moubla, v. Meubler, garnir de meubles.
Dér. de Moble.
Mouchétos, s. f. plur. Pincettes pour tisonner le feu;
mouchettes pour la chandelle. — Le mot languedocien
semble la traduction de ce dernier et l'on ne comprend pas
pourquoi le mème nom a été donné à deux instruments
d'usage fort différent. Il est certain pourtant que Mouchétos
est la bonne signification de pincettes, et si vous aviez
besoin de mouchettes, il serait bon d'ajouter : pér mouqua,
car autrement, dans le doute, il est probable que ce seraient
des pincettes qu'on vous apporterait.
Mouchoù, s. #”. Dim. Mouchouné; augm. Mouchounas.
Peloton; bouchon; paquet de quelque chose ramassé en
pelotte. — Un mouchoù dé pèous, dé fiou, dé graïsso, dé
lano, etc., une poignée, un bouchon de cheveux, un paquet.
de fil, un peloton de graisse, un flocon de laine, etc.
En ital. Mocchio, tas, amas, monceau.
490 MOU
Mouchouèr, s. ». Mouchoir; fichu; cravate, qui se dit
Mouchouèr dé col, fichu ou cravate, suivant qu'on parle
d’une femme ou d’un homme. Pour mouchoir de poche,
Mouquadoù est préférable. — Voy. c. m.
Empr. au fr.
Mouchounado, s. f. Tas, amas; monceau; réunion de
Mouchoùs. — Voy. ©. m.
Moude, s. m. Mouton qui n’a pas de cornes.
Moude, adj. des deux genres. Émoussé, épointé, en par-
Jant d'un outil tranchant.
Dér. tous deux du lat. Mutilus, mutilé, à qui il manque
quelque chose : on sous-entend Cornibus dans la première
acception.
Moudélas, s. m., où Moulédas. Gros morceau de mie
de pain, ou plutôt gros morceau de pain où il y a beau-
<oup de mie.
Moudélas où Moulédas se dit aussi pour désigner l’en-
droit le plus charnu du corps d’un animal. — Lou moulédas
dé la cambo, le gras de jambe, le mollet.
Augm. de Moudélo.
Moudélo, s. f., ou Moulédo. Mie de pain.
Dér. du lat. Medulla, moëlle : la mie étant la moëlle du
pain, et la métathèse des deux mots Ci sé ag ne chan.
geant rien à leur signification.
Moudèlo, s. »m. Modèle; exemplaire; original d'écriture
dont un écolier fait la copie.
Dér. du lat. Modulus, mesure.
Moudéloü, s. #. Petit morceau de mie de pain, ou petit
morceau de pain où il y a surtout de la mie.
Dim. de Moudélo. L
Moufle, mouflo, adj. Maflé; maflu; dodu; potelé;
rebondi ; épais; moëlleux ; gros; considérable. — Dé gdoutof
mouflos, des joues potelées, rebondies, mañflées. Un iè
moufle, un lit épais, moëlleux. Y-én faguè paga un pris un
pou moufle, il lui en fit payer une somme un peu forte,
Le fr. Moufle signifie un visage gras et rebondi : ce
qui ne veut pas dire que nous lui ayons emprunté le mot.
En esp. Mafleles, qui a les joues enflées comme Borée.
Le lat. Flare, souffler, ne doit pas être étranger à tous ces
mots, au moins pour une moitié.
Mouflèti, s. m. Gros enfant joufilu, ange bouffi. —
S’applique plus particulièrement au visage ou au corps, et
aux enfants.
Mouflije, s. f. État, qualité de ce qui est Moufle. —
Voy. c. m.
Mouflos, s. f. plur. Moufles, gants fourrés, sans doigts,
n'ayant ordinairement que le pouce de distinct.
Dér. de Moufle, à cause de l'épaisseur.
Mougnè, mougnièiro, s. ». et f. Meunier, meunière;
qui dirige un moulin à blé. — La carièiro dé la Mougniètro,
la rue de la Meunière, une des vieilles rues d’Alais, qui
conduisait et conduit encore au moulin appelé le Moulin-
Neuf, depuis bien des siècles, déplacé ou reconstruit comme
pour mériter toujours le même nom.
MOU
Mouia, v. Mouiller; humecter; tremper dans l'eau.
— Sé mouïia, recevoir une averse de pluie ; se baigner.
Mouiïaduro, s.f. Mouillure; action de mouiller; état de
ce qui est mouillé, trempé.
Mouïcé, s. m. Épervier, Falco nisus, Temm., oiseau de
l'ordre des Rapaces et de la fam. des Plumicolles, dont le
mâle est appelé en fauconnerie Tiercelet, Emouchet ou
Mouchet, qui a bien évidemment engendré notre vocable
Mouïcé. Néanmoins on donne également ce nom à plusieurs
autres petits oiseaux de proie, qui n’en ont point de parti-
culier en languedocien, tels que Je hobereau, falco subbuteo,
l’émérillon, falco æsalon, la crescerelle, falco tinnunculus,
Temm. Ces oiseaux du même genre à quelque différence de
taille près, se ressemblent beaucoup entr'eux et avec l'éper-
vier, et habitent de même nos contrées où ils sont seule-
ment un peu moins connus que ce dernier. — Voy.
Tartano.
Mouiïè, s. f. Femme, épouse; moitié. — N'est pas pré-
cisément de notre dialecte,
Dér. du lat. Mulier, m. sign.
Mouïèiro, s.f. et n. pr. de lieu et d'homme. Terre
molière, grasse et marécageuse; Molière ou Molières, dési-
gnation d’une dizaine de communes, seulement dans le
Gard, dites, dans les anciens titres, de Moleria, de Mo-
lieyriis, de Moleriis, Moleriæ, à cause de la nature des
terrains sur lesquels l’agglomération s'était fondée. Des
noms d'homme se sont formés de là, qui doivent se rendre
en fr. par Molière, tout comme le fief de Poquelin. — És
argénta coumo lou calice dé Mouïèiro, ilest argenté comme
le calice de l’église de Molière; vieux dicton ironique,
parce qu'on prétend que ce calice était de bois : cequi
répond au fr. : chargé d'argent comme un crapaud de
plumes.
Dér. du lat. Mollis, mou.
Mouïèn, s. m. Moyen; expédient; voie pour réussir ou
parvenir à..…; facultés pécuniaires; talents naturels, au
plur. — Tacha mouïèn, essayer, tenter, que le languedo-
cien pur-sang ne manque guère de rendre par tâcher
moyen. Fdou tacha mouïèn dé s'én tira, il faut tâcher,
essayer tous les moyens de s’en tirer. Tachas mouïèn dé
véni, faites en sorte de venir. Véjan sé y-a mouïèn dé
mouïéna, voyons s'il y a moyen de s'arranger, de sortir
de là; si l’on peut moyenner, ménager une bonne issue.
AquÔ's un home dé mouïèn, cet homme a des moyens,
quelque fortune.
Empr. au fr.
Mouïéna, v. Essayer de plusieurs moyens; tenter une
voie, essayer d’un expédient, pour amener à bien. une
affaire, une entreprise.
Mouïéna, ado, part. pass. Qui a des moyens, des facultés
pécuniaires, de l’argent à sa disposition.
Mouïènan, prép. et conj. Moyennant; au moyen de.
— Mouïènan aqud, au moyen, à l’aide de cela, mi a
cela. Mouiènan qué, pourvu que. l
EE
MOU
Ce mot, emprunté, comme les précédents, au fr., est
aujourd'hui très-souvent et très-bien employé dans les
divers dialectes de la langue d'Oc.
Mouine, s. ”m. Moine, religieux d’un ordre monastique ;
meuble pour chauffer les pieds dans le lit, en place
d'ane chaufférette, à l'aide de charbon allumé ou d’eau
bouillante. — L'abadiè sé pèrd pas pér un mouïne, prvb.,
pour un moine l'abbaye ne faut point, où pour un moine
on ne laisse pas de faire un abbé.
Dér. du lat. Monachus, m. sign.
Mouïssäou, s. ». Dim. Mouïssalé. Moucheron; cousin ;
Cuüle>, Linn., insecte de l'ordre des Diptères et de la fam.
des Hanstelles ou Sclérostomes. — L'espèce la plus com-
mune, parce qu'elle est la plus incommode, est le Culex
pipiens, Linn. La femelle pond ses œufs sur le bord des
eaux; elle en fait, selon Réaumur, plus de 850 qui éclosent
dans deux jours. Il y a aussi entr'autres les moucherons
du vinaigre, qui abondent surtout au moment de la ven-
dange, ét ceux qui volent par essaims semblant ne vivre
que d'air, car l'on voit souvent des promeneurs dans la
cainpagne être entourés d’une nuée de ces insectes sans ên
éprouver la moindre piqüre. Mais ces derniers sont de
. petits êtres inoffénsifs au regard des premiers, chanteurs
agaçants et enragés à piquer venimeusement, qui sont un
vrai fléau, surtout dans les nuits d'été.
Mouïsse, mouisso, adj. Moîte; un peu humide ; un peu
mouillé.
Dér. probablement, à l'aide d'une syncope, du lat.
Hümiidus, m. sign. :
Mouïssé, mouisséto, adj. Émoussé; écourté; qui a les
oreilles courtes. — Fédo mouïsséto, brebis à courte oreille,
qui est une variété et non une espèce différente.
En ital. Mezzo, tronqué, écourté.
Moulan, s. m. Espèce de raisin noir hâtif. — Le
Moulän ne veut pas être placé dans un terrain bas et
hümide; il s’y rouille et ne produit rien. Dans toute autre
condition, en ayant soin de le bien charger à la taille, il
donne de très-belles grappes; ses grains sont gros, ronds,
ñoïrs, bien fleuris. Le raisin s’égrène beaucoup lorsqu'il
ést mûr. Quand on en écrase un grain entre les doigts, sa
» péau les noircit comme de l'encre : aussi fait-il un vin
ñoir. Le bois est très-facile à reconnaitre, gros et long,
rougeâtre, avec de raies longitudinales noirâtres; feuille
Le hde, peu découpée.
"Moulari, s. m., n. pr. d'homme. Au fém. Mowlario.
Moulari. — Est resté seulement comme appellatif; le sub-
stantif est inusité, ainsi que l'adjectif : Pierre à meule,
oulari, et péiro moulari où moulario, pierre meulière,
ou roche dont on tirait les meules, du lat. Molaris lapis,
m. sign. |
Moulas, asso, adj. Molasse, très-mou. Au fig., lambin
renforcé, très-indolent.
Augm. de Hol.
Mouléire, s. m. Ouvrier de moulin à huile, celui, spé-
MOU 491
cialement parmi les ouvriers qui ont chacun leur emploi
et leur nom distinct, qui est chargé du broiement des
olives.
Dér. du lat. Molere, moudre.
Moulén, s. m. Espèce de terrain aqueux, humide. Uno
tèro moulén fait la mouïètro, terre molière, grasse et maré-
cageuse. — Voy. Mouïèro.
Dér. de Mol.
Moulésan, s.m., n. pr. de lieu. Moulézan, commune
de Saint-Mamet (Gard). — Ce village et celui de Monta-
gnac, annexe, ne forment qu’une seule commune dans
l'arrondissement de Nimes. Ils sont situés sur un terrain
montueux et aride, ce qui a valu directement à l’un le
nom de Mountagna, Montagnac, et sans doute à l'autre
celui de Moulésan, dérivé, non de Moulén, ét analogue à
Mouñèiro, comme sa consonnance semblerait l'y porter,
mais ayant pour radical significatif le lat. Hola, meule,
qui a donné Molaris, roche meulière. Il est en effet cité,
en 1419, sous le vocable de Molasano, en 1383 Molazanum,
et varie peu dans la suite. Dans son territoire sont situées
les carrières de Lens, qui ont servi à la construction de
plusieurs monuments; et d'ailleurs sa contiguïté avec Mon-
tagnac rend encore probable l’étymologie de Afola au lieu
de Mollis.
Moulésan, pris comme simple s. m., reprend cependant
une signification qui en fait un synonyme de Mol, Moulas,
Moulén, et veut dire : un musard, lent, nonchalant, indo-
lent, au superlatif.
Moulétoun, s.m. Molleton; étoffe croïsée de laine et de
coton, dont le poil est tiré, ce qui le rend très-moëlleux et
très-chaud.
Dér. de ol.
Mouli, s. »”. Dim. Mouliné, Moulissoù, et Moulinôto,
s. f. Moulin, machine à meule pour moudre ; moulin à
farine. — Mouli blan, moulin où l'on fait la plus belle
farine. Mouli brun, celui où l'on fait la farine inférieure.
Mouli d'âouro, moulin à vent. Houli d'oli, moulin, pres-
soir à huile. Mouli dé la farino, bluteau. Mouli paradis,
moulin à foulon. Mouli dé sédo, moulin à soie, pour ouvrer
la soie. Lou prémiè qu'és dou mouli éngrano, prvb., le
premier au moulin engrène : ce proverbe, usité poar dire
que la diligence dans les affaires en facilite et en assure le
succès, est basé sur les anciennes coutumes qui voulaient
que la première personne arrivée au moulin, quel que füt
son rang et son état, fût aussi la première à moudre.
Dér. du lat. Molinum, m. sign.
Moulignè , s. m. Moulinier, ouvrier qui travaille au
moulinage de la soie, ce qui consiste à la tordre plus ou
moins, à plusieurs reprises et de diverses façons, selon le
besoin.
Moulina, v. Mouliner la soie, la faire passer au motlin
où elle arrive sur des bobines, rouqués, pour être tordue :
c'est l'œuvre du Moulignè.
Moulina, v. n. S’ébouler petit à petit; couler, en par-
492 MOU
lant des terres et du sable, comme coule de l’anche, pour
tomber dans la huche, la farine sortant du moulin à blé.
— En fr. Mouliner se dit, pour un effet à peu près pareil,
des vers qui creusent la terre ou rongent le bois.
Moulinaje, s. #. Moulinage, préparation que l’on fait
subir à la soie au moulin. — Voy. Moulina.
Mouliné, s. m. et n. pr. de lieu. Moulinet ; petit moulin.
— Ce nom est commun à bien des localités et à des quar-
tiers : à Alais, il désigne un des quatre moulins qui des-
servent la ville et qui doit avoir grandi depuis son bap-
tème, car il a aujourd’hui la même importance que les
autres.
Un autre diminutif de Mouli était Moulissoù, mot qui
n’est plus en usage et ne sert plus qu’à dénommer une de
nos places, Moulisson en fr., au bout de laquelle existait
jadis un moulin sur le Gardon. — Voy. Moulissoù.
— Faïre lou mouliné, au fig., a la m. sign. qu'en fr. :
faire le moulinet, c’est faire tourner rapidement devant soi
un sabre, un bâton, que l’on tient à la main, de manière
à empècher que l'arme de l'adversaire puisse vous at-
teindre.
Moulino, s. f. Moulin à tourille ou à petite roue hori-
zontale et découverte, d'après SAUVAGES.
Le mot est devenu n. pr. d'homme, et se met au masc.
Moulino, en fr. Moline, Moulines, et n. pr. de lieu restant
fém. traduit en fr. par Moline, la Moline et Molines. Par
une autre bizarrerie, Moulè, s. m., est rendu naturellement
en n. pr. fr. par Moulin, mais le n. pr. en lang. affecte la
consonnance finale française et l’on dit plus souvent Mou-
lin que simplement moussu Moul : c'est une exception
singulière.
Moulinoto, s. f. Petit moulin. — Dim. de Mouli ou de
Moulino.
Moulissoü, s. #”., n. pr. d’un quartier. Moulisson. —
On trouve dans un vieux titre aux archives de la ville
qu'en 4388, une proclamation, faite par le crieur public
dans tous les quartiers ordinaires, eut lieu aussi in trivio
seu quantono de Montelissono, au carrefour ou au coin de
Montelisson, littéralement. Il y a là une erreur ou une tra-
duction fantaisiste du tabellion rédacteur de l'acte, peut-
être du copiste; car Montelissonum ne répond à rien en
latin. La langue vulgaire a mieux conservé la vraie déno-
minalion que cette moyenne latinité barbare qui la défi-
gure. En appelant ce carrefour, Moulissoù, comme on le
nomme encore, on employait un diminutif représentant ce
qui existait alors, c’est-à-dire un petit moulin, établi au
bord du Gardon, dans cette partie de la rue du Bari, du
rempart, dont les murs protégeaient la ville et formaient
son enceinte sur l'emplacement même de la rue et place
actuelles. — Voy. Mouliné.
Mouloù, s.m. Dim. Moulouné; augm. Moulounas. Tas;
monceau ; amas, de pierres, de blé, de fumier, etc. — Un
mouloù dé fé, une meule de foin. Céousi dou mouloù ou
din lou mouloù, choisir, prendre dans le tas.
MOU
Mouloù se prend aussi pour : groupe, attroupement;
troupe.
Dér. du lat. Moles, amas.
Moulounado, s. f. Foule; troupe ; réunion nombreuse et
pressée. — Se dit surtout des personnes et des animaux,
et a la m. sign. que Mouloù. — A bèlos moulounados, par
pelotons, par bande. Uno moulounado dé pâoures, une
troupe, un attroupement, une foule, une multitude de
pauvres.
Dér. de Mouloù.
Moulounéja, v. frég. Former une réunion pressée, un
attroupement sans cesse croissant, uno moulounado; for-
mer un tas, ur mouloù.—Répond également aux deux mots.
Moumén, s. »m. Moment; instant; occasion propice. —
Un moumên qué lou cura sé moque, un instant! laissez-moi
respirer, me remettre, reprendre haleine. Allusion au mo-
ment de repos que prend un prédicateur, entre les points
de son sermon, pendant lequel il se mouche et tout son
auditoire aussi. À tout moumén, à chaque instant, à tout
moment. Pér mouméns, par intervalle. À cdousè soun
moumén, il a saisi le moment favorable.
Dér. du lat. Momentum, m. sign.
Mouméné, s. m. Petit moment; très-court instant. —
Quoiqu'un moment n’ait pas de durée précise, et indique
rigoureusement le plus court espace de temps possible, le
languedocien, avec sa propension et sa facilité à donner des
diminutifs et des augmentatifs à presque tous les mots, a
voulu encore raccourcir celui-ci en disant : #n mouméné,
un tout petit moment, comme il a cherché d’autres fois à
l’alonger par : #n bon mouwmén, un long moment. Tour-
naraï dinc un mouméné, je reviens à l'instant. Y-a un bon
mouméné qué vous éspère, j'ai pu compter les minutes à
vous attendre.
Moun, pron. poss. masc. Mon : son fém. est Ma. —
Moun ami, moun capèl, mon ami, mon chapeau. Cepen-
dant devant un mot féminin qui commence par une voyelle,
comme en fr., il faut mettre moun : moun aguïo, moun
éscalo, mon aiguille, mon échelle.
Moun, n. pr. de lieu. Mons, commune dans le canton
d’Alais, désignée, en 4156, par Villa de Montibus. — La
forme plurielle du nom ne se reproduit pas en languedo-
cien. L'emploi de ce radical dérivé évidemment du lat.
Mons, montis, est du reste assez rare, seul; mais en com-
position il est entré dans un grand nombre de dénomina-
tions géographiques, dont plusieurs sont ensuite devenues
des n. pr. d'homme; et l’aspect, la position, la culture des
localités lui donnent des qualifications appropriées et signi-
ficatives.
Mountagu, Mountéqu, francisant Montaigu, traduit le
latin de 4204 Castrum ou Mansus de Monte acuto.
Mountéouri, Montaury, une des sept collines de Nimes,
en 1080, In Monte Aureo.
Mounclus, Montclus, canton du Pont Saint-Esprit, Mons
Serratus.
maté
MOU
Moundardiè, Montdardier, que nous croyons formé du
lat. Mons Arduus, bien qu'en 1255, un cartulaire le nomme
de Monte Desiderio.
Mounmira, Montmirat, du canton de Saint-Mamet, Mons-
Miratus.
Mounrédoun, assez commun dans plusieurs communes,
Montredon, Mons-Rotundus.
Mounsdouve, Montsauve, dans la commune de Géné-
rargues, dit : Locus de Monte-Salvio. — Voy. Séouve.
Mounsèlque, Montselgues, hameau de la commune de
Ponteils et Brésis, de Monte-Securo.
Mounpeïroùs, Montpeirous, Mons petrosus.
Moun-Véntoù, Mont-Ventou, Mont venteux, Mons ven-
losus.
* A cette liste s’ajouteraient, avec l'adjectif qualificatif, les
‘noms de Montgrand, Montgros, Montjardin, Montlouvier,
Montplan, Montferrand, Montferré, Montfaucon, Montfrin,
Montval, etc., etc., dont on voit la formation. — Voy.
Mountagna, Mountél, Mountéou, Mounpéiè.
Mounastiè, s. m. Monastère, couvent de religieux ou
dereligieuses.— Lou mounastiè és pâoure quan las mounjos
van gléna, le monastère est pauvre quand les nonnes vont
glaner; le fr. traduisait le même dicton par : l’abbaye est
bien pauvre quand les moines vont aux glands.
Ce subst. est devenu n. pr. de localité, à cause de quelque
ancienne abbaye autour de laquelle se sont formées des
agglomérations devenues villages. — Lou Mounastiè, Le
Monastier, ancien monastère de Tornac.
Dér. du lat. Monasterium, m. sign.
Mounda, ». Cribler le grain au crible appelé Moun-
daire.
Dér. du lat. Mundare, nettoyer.
Moundaïre, s. m. Grand crible de peau, dont les trous
sont oblongs, pour monder, nettoyer le grain; cribleur,
celui qui se sert du crible pour vanner, monder le grain.
Moundaje, s. m. Action de monder ou cribler le grain,
de le passer au moundaïre.
Mounde, s. m. Monde; l'univers; la terre; l'espèce
humaine; gens; personnes. — Dans ceite dernière accep-
tion, qui est la plus commune, on voit souvent lappli-
cation de la règle latine des noms collectifs; turba ruit ou
ruunt ; ainsi on dit : ou mounde savou pas dé qué s'ima-
gina, lesgens ne savent que penser : lou mounde sou bièn
michans, le monde est bien méchant, les gens sont bien
méchants. Aqud’s pér faïre tia lou mounde, cela est mis
pour faire tuer les gens. Dé qué diriè lou mounde? Que
dirait-on ? Lou bou ddou mounde?(Voy. Bou.) Manquo pas
mounde, il y a foule. Mandas dé mounde, envoyez du
monde, des gens.
Dér. du lat. Mundus, m. sign.
Moundio , s. f. Criblure de grains, tirée par le moun-
daïre. — Voy. Moundaïre et Grapasses.
.Mouné, s. m. Minet, minon; uom donné au petit chat
et mème au chat.
MOU 493
Mounéda, ado, adj. Pécunieux ; qui a de la monnaie,
pour de l'argent comptant ; riche.
Mounédo, s. /. Monnaie; petites espèces d'argent ou de
billon. — Rèndre la mounédo dé l'argén, au fig., rendre la
monnaie de la pièce, c.-à-d. la pareille.
Mounino, s. f. Dim. Mouninéto. Singe, mâle ou femelle;
de la petite espèce seulement : pour désigner les grandes,
on emprunte au fr. le mot Singe. — S'applique surtout
aux espèces qui ont les fesses nues : mouninélo quiou
plouma, petite guenon au cul pelé. Pagamén dé mounino,
sous et gambados, paiement en monnaie de singe, en gri-
maces. Doun pu nâou monto la mounino, doumaï mostro
lou quiou, prvb., plus le singe s'élève, plus il montre son
cul pelé : conseil de prudence et de modestie à ceux qui
veulent sortir de leur sphère et risquent de montrer un
petit bout d'oreille échappé par malheur.
Mounino est une qualification donnée à une jeune fille
effrontée ; une petite morveuse.
En espag. Mona, singe.
Mounino, s. f. Ivresse, état de celui qui est ivre, saoul
ou gris. — Préne, carga la mounino, se griser. Avédre la
mounino, être gris, être dans les vignes. On assure que les
singes aiment beaucoup la soupe au vin et qu'ils s'enivrent
en en mangeant. D'un autre côté, l’homme, que le vin
prive de la raison, imite le singe par ses contorsions, ses
gambades et ses grimaces ; à telles enseignes que nos anciens,
désignant les diverses sortes d'ivresse, appelaient vin de
singe celui qui faisait sauter et rire. Tout cela a donné
naissance à l'expression languedocienne, qu'ont à peu près
aussi les Espagnols, qui disent : dormir la mona, pour
cuver son vin.
Mounjéto, s. f. Variélé de haricots blancs à ombilie
noir, qui se mangent secs. — En vieux langage, mounje
signifiait moine ou chanoine régulier ; on appelait mounÿo,
une religieus?, mais seulement celle qui était vêtue de
blanc, de l'ordre de Citeaux, par exemple ; le dimin. était
mounjéto, petite religieuse. Cette conformité dans la cou-
leur de l’habit dût valoir au haricot, à la féverolle, dont
il est ici question, le nom de Mounjéto, qui se donne
généralement à tous les haricots blancs quand ils sont
secs.
On appelle aussi Mounÿéto une espèce de limaçon blanc,
comme on nomme Mourguéto la variété de couleur foncée.
— Voy. Mourguéto.
Moujôou ou Mounjoï, s. m., n. pr., est évidemment
le lat. Mons Jovis, mont de Jupiter ou consacré à Jupiter ;
on le rend par Montjoie. C'est la manière d'écrire l’ancien
cri de guerre des rois de France, qui remonte, dit-on, à
Clovis. Mais s’il est vrai que, à la bataille de Tolbiac,
Clovis, invoquant le dieu des chrétiens pour en obtenir la
victoire, s’adressa aussi au patron de la France en l'appe-
lant dans son langage encore païen : Mon jove, mon pro-
tecteur, ma divinité, c'est Montjoie - Saint - Denis qu’il
faudrait écrire pour rendre le véritable sens de ces paroles
63.
494 MOU
devenues sacramentelles, — Notre languedocien a d’autres
mots qui sont de même formation : Dijéou, Barbajôou,
Castèljdou, etc., dies, barba, castellum Jovis. On voit,
comme le remarque l'abbé ne SAUVAGES, que ces mots et
bien d’autres, que nous rencontrerons, conservent des ves-
tiges où l’on trouve, comme dans des médailles, le langage,
les divinités et le culte de nos pères.
Mounla, v. Moxler; jeter au moule; faire au moule. —
Mounla, ado, part. pass. et adj. Moulé; fait au moule,
accompli et parfait de forme. Aquél home és mounla, cet
homme est fait au moule. Létro mounlado, lettre, carac-
tères moulés, c.-à-d. imprimés. Agud's mounla, c'est moulé ;
se dit d’une belle écriture, nette et propre.
Dér. de Monle.
Mounmar, s. "., n. pr. d'homme. Montmart, ou Mom-
mar, ou Montemar. Tous dérivés en lang. et en fr. du lat.
Mons Martis, montagne consacrée à Mars, dont le français
a fait encore Montmartre. — Voy. Mounjéou.
Mouno, s. f. Dim. Mounéto; augm. Mounasso. Chatte.
chatte favorite ; mot dont on se sert surtout pour l'appeler,
c'est une variété que la ménagère retourne de cent façons
caressantes : Mino, Mounéto, et en fr. Minette, Mou-
moute, etc.
Mounpéiè, s. m. n. pr. de lieu. Montpellier, chef-lieu
du département de l'Hérault.
Monspestellarius, en 975. Monspistilla, en 1060. Mons-
pislerius, en 1068: Monspistellarius, en 1076. Monspeller,
Montpeslier, en 1090. Villa Montispessulani, en 1118,
4118, 1132. Monspessulus, en 1119, 1162, Monspessulanus,
au xue siècle. Her ghéss, Mons concussionis, montagne du
tremblement, au xne siècle, dans l’Itinéraire de Benjamin
de Tudèle. Monspelius, Monspellerius, en 1240.
L'origine de Montpellier ne peut pas être ici en cause :
c'est de son nom et de son étymologie seulement qu'il s’a-
git; mais ces deux choses se tiennent. Les commencements
de Montpellier touchent à la légende, et cette légende a été
inspirée par le nom mème de la ville. C’est cet aperçu qui
peut donner la clé de l’énigme.
Nous l’avons assez répété : il n’est point contestable que,
dans les temps les plus anciens, tout le littoral de la Médi-
terranée n’ait été occupé par les tribus celtes ; que la lan-
gue celtique ne s’y soit maintenue pendant des siècles,
même après l'invasion romaine; qu'elle ne fût parlée en
même temps que le latin, et que le gauloiset le latin, d'ac-
cord ou séparément, n’aient servi à la désignation, à la
dénomination des points les plus remarquables du territoire.
N n'est pas douteux, non plus, que la tradition a gardé
les traces de ces appellations plus ou moins altérées, mais
souvent très-reconnaissables encore.
L'emplacement sur lequel's’est bâtie la ville de Montpel-
lier était connu ; il étail par conséquent nommé. Sa topo-
graphie, le site, son aspect étaient assez remarquables pour
mériter une qualification individuelle, comme tous les lieux
environnants, à plus de titres peut-être. Les anciens géo-
MOU
graphes parlent de marécages entourant un monticule : celte
particularité, il est naturel de le croire, avait dù provoquer
une dénomination. Quand on songea vers le vrre ou le vire
siècle, à établir des constructions sur cette colline située au
milieu des marais, et qu'on voulut les désigner, leur situa-
tion se présentait d’elle-mème et le baptême fut fait. Il suffit
du simple contact d’un mot pris dans le langage gaulois,
plus ancien, usuel, commun mème aux deux idiomes, mais
signicatif, précis, appliqué à toute la contrée, pouvant
caractériser l'établissement nouveau, et d’un mot latin qui
était compris par tous, accepté par l'usage, qui détermi-
nait et précisait le point culminant où se fondait un éta-
blissement agricole. Celui-ci était le subs. Mons, éminence,
colline, monticule, hauteur. Celui-là venait de pol, pël,
pull, marécage, marais, palustre; pyllauc, marécageux ;
dans la bass. lat. pabula, poël, traduit par palus, que la
Belgique représente aujourd'hui par Puelle et Pevelle, plus
fidèle à l’ancien roman, qui n’est autre que le sing. du gén.
plur. puella rum
La situation était à décrire; mons, éminence, colline se
présentait d’abord; mais cette élévation était entourée de
marais, poll, poël, pull, marécage, pyllauc, marécageux, en
celt. traduits en latin par pabula et palus, était trouvé. La
dénomination était simple et juste. Elle précéda peut-être
toute agglomération d'habitants et toutes constructions :
Mais le site attirait ; on s’y fixa ; il grandit, il prit de l’im-
portance ; une ville y fut fondée. En même temps, la vieille
langue était oubliée; un nouveau langage, formé de ses
débris, mêlé de son souvenir, la remplaçait; ce n'était plus
le celtique, ce n’était pas le latin, mais le roman qui se
parlait parmi le peuple ; les savants, les tabellions usaient
de la basse latinité et défiguraient à plaisir les deux langues
anciennes, au profit de locutions hybrides. C’est certaine-
ment à quelque érudit ingénieux de ce temps que nous
devons la traduction du gaulois poll ou poël, ou du latin
pabula, où puellarum, et l'arrangement de Monspuella-
rum. Ce fut la première époque. De là, à la légende des
deux sœurs, puellarum, qui viennent fonder la ville, il n'y
a que la main. L'histoire sonnait bien et flattait des vani-
tés : elle a fait son chemin dans le monde des étymolo-
gistes, puis est venu Monspessulus et monspessulanus ; les
verrous, les barricades verrouillées, fermant l'entrée de la
ville, ont joué leur rôle, en méconnaissant leur véritable
origine. Cette dernière forme est cependant aussi une autre
corruption un peu plus éloignée et plus méconnaissable, à
cause de la disparition de la source; mais elle se compose,
je crois, des mêmes éléments, et il est facile de les retrou-
ver par l'analyse. Cette dérivation pourrait bien être exacte
et vraie : En tout cas, comme les autres n’ont pas paru
jusqu'ici satisfaisantes, elle peut espérer de trouver grâce
par sa simplicité même et parce qu'elle explique assez
naturellement les autres.
Mounta, v. a. et n. Monter; élever ; porter dans un lieu
plus haut; monter; croitre; se transporter dans un lieu
"
MOU
plus haut; s'élever ; disposer ; agencer ; préparer.— Mounta
une muraïo, élever un mur. Mounta dé fé, monter du foin
au grenier, Lous magnas montou bièn, les . vers à soie
montent bien, quand ils grimpent sur la bruyère pour faire
leurs cocons. On dit à Ajais : Mounta à Vilofor, monter,
aller à Villefort, comme on y dit : Davala à Nime, descen-
dre aller à Nimes, pour spécifier le voyage du pays bas au
pays de montagne et viceversd. Quouro mountas à Ginouïa?
ou seulemént Quouro mountas? Quand montez-vous ? dit
à Alais, par exemple, un habitant de Génolhac à quelqu'un
qui doit y aller ou y retourner. En changeant le rôle des
interlocuteurs et le lieu de leur conversation, on dit :
Quouro davalas én Alais? ou Quouro davalas? Quand
descendez-vous ? Faï pas qué mounta et davala, il ne fait
u'aller et venir, monter et descendre. L'aïgo monto, la
rivière croit. Y-an mounta lou co, on lui a dressé une em-
büche, monté un coup.
Dér. de Ja bass. lat. Montare, m. sing., formé de Mons,
montis, Montagne.
Mountado, s. f. Dim. Mountadéto. Montée; côte;
rampe; plan incliné qu'on suit en montant et qui devient
descente en sens inverse; chemin qui va en montant ;
action de monter. — Mountado d'éscaïè, escalier. Aï pérdu
fosso magnas à la mountado, j'ai perdu beaucoup de vers à
soie à la montée, au moment où ils grimpent sur la bruyère
pour faire leurs cocons. Davalurén un pdou à la moun-
tado, nous descendrons un peu à la côte, ce qu’on ne man-
quait jamais de solliciter des voyageurs, du temps des
diligences. La mountado faï tira, la montée, la côte est rude,
le chemin montant fait trimer bôles et gens.
Mountadou, s. m. Marche d'escalier ; montoir ; pierre
ou élévation qui sert à monter, à s'élever ; montoir, côté
gauche du cheval. — Dim. de Mountado.
Mountagna, s.m.,n. p. de lieu. Montagnac, dans le canton
deSt-Mamet, etdansles communes de Meyrannes et deSt-Cris-
tol-lez-Alais (Gard), sous l'appellation latine Montanhacum.
Il n'est pas peut-être de dénominations géographiques
plus répandues que celles où est entré le radical Mons,
montis, lat., mont, hauteur, éminence, caractéristique
d’une situation. Et on se l'explique facilement par cette
préférence de tous les peuples et dans toutes les époques de
choisir les lieux élevés pour y former leurs établissements.
Aussi était-il naturel, pour éviter les confusions, pour
signaler un accident de position, pour mieux particulariser
une localité de s'attendre à des variétés très-nombreuses
sur lesquelless’est répandue la richesse des surflixes destinés
à adjectiver ou à modifier le radical. Et c’est là ce qui n'a
pas manqué d'arriver tant les circonstances s'y prêtaient ;
mais c’est ce qui démontre avec une évidence plus sensible
en même temps, on nous permettra de le remarquer, que
toutes ces’ désinences, si variées qu'elles se rencontrent
partout, en a, ac, argue, ergues, orgues, igny, etc., sont
équivalentes entr'elles et n'affectent le radical que d’une
manière uniforme. Les exemples que nous citerons ont pour
MOU 495
but de faire ressortir ces analogies et une parfaite identité ;
ils ne sont qu'une application pour ainsi dire de ce que
nous avons répété plusieurs fois au sujet de nos divers
surfixes; il n'est donc nécessaire que d'en donner une
simple nomenclature et d'indiquer les variantes par les-
quelles ces appellations ont passé, en suivant les modifica-
tions de la langue elle-même et sous les influences ethniques
qui ont agi sur elle,
Mountagna, Montagnac, Montanhacum correspond à
Mountignargue, Montignargues, dit, en 4169, Montina-
nègues, forme romane, et Montinhanicæ, en 4384, forme
latine, et à Mountusorgue, Montuzorgues, commune de
Durfort, dit, en 4280, Montusanicæ; et à Mountéirargue,
Monteirargues, commune de Saint-Cristol-lez-Alais, dit-en
1345, Montusanicis, et à Montésorgue, Montézorgues,
commune de Saint-Jean-du-Gard, dit, en 4249, de Montis-
sanicis, en 1277, Montusanicæ, en 1346, de Montuzanicis ;
mêmes terminaisons, mêmes reproductions, mêmes signif-
calions. Tous ces noms encore se rapprochent de ceux de
Mountése, Montèze, commune de Verfeuil ; Lous Mountéses,
les Montèzes, commune de Monoblet, et Mountéses, Mon-
tèzes, commune deSaint-Christol-lez-Alais, appelé, en 1384
Monthesie, en 1435, de Monteziis.
Et s'il fallait sortir de notre département, les concor-
dances abondent ; nous ne rappelons que les plus proches,
sans parler des identiques Montagnac, en Franche-Comté,
dans l’Agenois, en Guienne, en Provence, en Armagnac, et
Montagnat, en Bresse, dans le Coudomois, en Périgord,
Montignac (Aveyron, Charente, Dordogne, Gironde, Lot-et-
Garonne, Lozère); Montagné, Montagney, en Franche-
Comté eten Dauphiné, Montagny, en Normandie, en Bour-
gogne, dans le Beaujolais, dans le Lyonais ; Montagnieux,
en Dauphiné; Montenay, dans le Maine et la Lorraine,
Monteynard, en Dauphiné; et, surtout ces points, les nom-
breux Montigné et Montigny; comme sur les dernières
formes, Montus, Montussan, Montussaints, elc., etc. —
Voy. Moun, Mountél.
Mountagnar, s. m. Soulcie, moineau des bois, gros-bec
soulcie, Fringilla patronia, Linn., oiseau de l'ordre des
Passereaux et de la fam. des Conirostres ou Conoramphes.
— La soulcie a tout le fond du plumage d'un brun cendré
mèlé de blanchâtre sur les parties inférieures, avec des
taches blanches çà et là et une jaune-citron sur le haut de
la poitrine. Cet oiseau nous arrive en bandes nombreuses
des montagnes voisines quand le chasse la neige, ce qui l’a
fait appeler Mountagnar. :
Mountagnar, s. m. Au fém. Mountagnardo.Montagnard ;
habitant dés montagnes; habitant des hautes Cévennes, de
la Lozère et de l'Auvergne pour les Alaisiens. — On avait
aussi pris au fr. ce nom pour désigner un parti politique
qui, dans la secondeet la troisième république, a préféré
s'appeler Rouge, mais qui a conservé le thym et le serpolet
symboliques pour rappeler son origine.
Dér. du lat. Mantanus, m. sign.
496 MOU
Mountagnè, s. m. Au fém. Mountagnéiro. Mème signi-
fication que le précédent, sauf la dénomination politique,
mais moins usitée que Mountagnar.
Mountagno, s. f. Montagne, ou plutôt région monta-
gneuse, car il ne s'entend qu’ainsi.— La mountagno, pour
l'arrondissement d’Alais, est surtout la Lozère, qui est à
son Nord. Y-a dé nèou én mountagno, il y a de la neige
sur la montagne, sur la Lozère. Lous troupèls van ên moun-
tagno, les troupeaux vont à la montagne, passer l'été sur
Ja Lozère. Mountagno éscuro, plèjo séguro, prvb., montagne
(Nord) obscure, pluie assurée, certaine. — Est aussi n. pr.
de lieu et de personne, avec de nombreux analogues.
Dér. du lat. Montana, de Mons, montis.
Montagnu, udo, adj. Montagneux ; montueux ; entre-
coupé de montagnes.
Mountan, s. m. Montant total d’un compte; montant,
poutrelle, bigue de bout dont on se sert pour dresser les
tables des vers à soie /Voy. Éstaja) ; parties en saillie des
côtés d’une porte, d’une fenêtre, qui en soutiennent la cor-
niche; goût relevé, odeur forte et piquante.
Mountäou, s. m., n. pr: de lieu. Montaut, dans la
commun d’Anduze (Gard). — Synonyme de haute - mon-
tagne. !
Mountarén, s. m.,n. pr. de lieu. Montaren, dans la
commune d'Uzès (Gard). — 11 est dit, en 44514, Mons
Helenus, qui doit être une altération, et qui est rétablie
sans doute, en 4277, par Mons-Arenus, et dans la suite par
Locus de Monte-Areno, du lat. Arenosus, de Arena, sable ;
ce qui est plus conforme à son aspect et à la nature des
terrains.
Mounté ou Ounté, ad. de lieu. Où, en quel lieu, en
quel endroit. — Ounté, du lat. Undë, est le mot original
auquel on y ajoute quelquefois une M initial pour raison
d’euphonie : l'oreille seule décide donc de l'emploi de l’une
ou de l’autre forme. Mouté ou Ounté vaï? Où va-t-il? Dé
mounté où d'ounté vèn? D'où vient-il? Li diguè mounté,
vous diraï ounté, il lui dit où, je vous dirai où. Mounté, là
où ; mounté qué, tandis que, au lieu de. Y mandè, mounté
qu'douriè déougu y-ana, il ÿ envoya au lieu d'y aller, tandis
qu'il aurait dù y aller. Lou charère mounté fouïà lou batre,
Je le grondai là où il fallait le battre. Mounté et Ountéont
quelque différence, peu sensible néanmoins, dans ces der-
nières locutions, où Mounté parait préférable, quand Ounté
n’est pas faute.
Mountél, s. m., n. pr. de lieu et d'homme. Monteil, en
fr. que la bureaucratie écrit Mouteils, sans aucune raison
de cette s finale. — C'est un hameau sur une éminence,
chef-lieu de la commune de ce nom, dans le"canton de
Vézenobres, arrondissement d’Alais. Il est dérivé de la
bass. lat. Montile, Montilæ, pelite montagne, monticule.
Montilia est, d’après SauvaGes, le nom d’une ancienne
petite ville où s’est tenu un concile. On n’en voit plus que
des débris et pour ainsi dire que la place appelée Ciouta,
ou Viè-ciouta, du lat. Civitas, vetus civitas, vieille cité.
MOU
Samson, dans sa cartes des conciles, place Montilia au
même endroit où cette Ciouta est située, près du hameau
de Monteil, à environ un kilomètre de distance. Des
fouilles ont été tentées plusieurs fois sous ces ruines qui
couvrent une surface d'au moins deux hectares; on a pré-
tendu que deux beaux vases d’albâtre y avaient été trou-
vés : nous ne les connaissons pas ; mais des visites plus
récentes et des recherches heureuses ont déterminé le carac-
tère de Viè-ciouta qui peut être considéré comme un des
plus curieux restes de la forteresse gauloise dans notre pays;
et elles ont fait découvrir, dans ses substructions, au
milieu de divers tronçons de colonnes, des débris de pote-
ries grossières, d’amphore, de poteries en terre de Samos,
des fragments de mosaïque, des urnes funéraires, des
fioles lacrymatoires en verre et des lampes en bronze, qui
marquent les occupations successives de l'antique oppi-
dum et son importance aux époques celtiques, romaine et
gallo-romaine.
L'habitude bien connue chez tous les peuples et dans
tous les temps de s'établir de préférence sur les hauteurs,
a singulièrement multiplié les dénominations que caracté-
rise une désignation de montagne, d'éminence, soit au
simple, comme un autre village peu éloigné de Viè-ciouta.
nommé Mour, Mons (Voy. c. m.), soit en composition pour
des localités, que nous avons citées, où est entré le mème
substantif. Il ne s'agit ici que de la forme diminutive de
Mountél, qui se présente également avec une longue série
de variantes, dont nous avons à signaler seulement autour
de nous les principales.
Ainsi Mountél, ou lous Mountéls, au sing. ou au plur.
en fr. Monteil, Monteils, Montels, est rendu uniformément
dans la bass. lat. par Montilium, Montilius, Montille, de
Montillis, de Montellis, forme diminutive correspondante à
monticule; et la ressemblance devient frappante avec
Mountio, Monlille, commune d’Aiguesmortes, las Mountios,
les Montilles, canton de Beaucaire, en 1227, in loco dicto
de Montillis. Mountalé, Montalet, commune de Meyranes,
où se font remarquer les ruines d’un vieux château légen-
daire, paraît être de même formation. — Voy. Moun,
Mountagna.
Mounturo, s. f. Monture : bête, mule, cheval ou âne sur
laquelle on monte, destinée à ètre montée.
Mounumén, s. »m. Monument; édifice public; tom-
beau.
Empr. au fr.
Mouoi (Pér), Pérmouino ou Pér moï, ou Pér moid,
adv. et interj. Par ma foi ! Peste!l Parbleu! certes, assuré-
ment, sans doute. D'abord, sorte de serment, puis, jure-
ment, n’est plus dans le discours, dénué qu'il est de tout
sens, qu'un mot purement explétif. — Pér moi / ou dourièi
pas créségu, Dame! parbleu ! par ma foi ! ma parole ! je ne
l'aurais pas cru.
Sauvaces le croit formé du lat. Per Maïam, par Maïa,
mère de Mercure.
MOU
Motor, trois. pers. sing. de l'indice. prés. du ù. Mouri,
mourir. Il où elle meurt. — Cette variante, de teinte un
peü raïole, est néanmoins Commünément employée à trois
où quatre kilomètres au-dessus d'Alais ; on y dit de préfé-
rence : Aquél doubre mouor, cet arbre meurt. On va plus
Join : dans cette circonstance on retranche l’r final : lou
fiù moud, lou lun mou, le feu, la lampe s'éteint:
Le part. pass. du mème verbe fait également Mouor,
Mmouorto. — Aquél doubre és mouor, cet arbre est mort,
Cependant les mêmes disent : La mor és un michan moussèl
à énvala, la mort'est un mauvais morceau à avaler. Il est
vrai que, là où ces mots se prononcent de cette manière,
on dit aussi : lot couol, lou pouor, etc., pour lou col, lou
por. IL est difficile dese rendrecompte de toutes cesnuances
de langage ; notre intention n'est pas non plus de constater
toutés les différences de prononciation qui se produisent
d'une localité à un localité voisine ; nous avons voulu seu-
lément en donner un spécimen dans un mot, en usage tout
près de nous qui, en poésie surtout, peut remplacer d'une
manière heureuse lé mort ou mouris, qui ont l'inconvénient
de sé rapprocher un peu trop du français.
Mouqua, v. Moucher le nez, la chandelle. Au fig., rebif-
fer, river ses clous à quelqu’un.— Sé mouqua, se moucher,
s'ôter la morve du nez. On en est venu aussi à dire Sé
mouqua, pour Se moquer : locution, empr. au fr., vicieuse
en languedocien. Moquo-té, mouche-toi, dit-on à un enfant :
moquo, souffle, lui dit celui qui le mouche. La barbasto
a mouqua lous gréls, la gelée blanche a broui les jeunes
pousses. Lou mouquère bièn, je lui relevai bien la mous-
tache, je lui rivai bien son clou.
Dér. da lat, Muccare, m. sign. de Mucus, morve.
Mouquadoù, s. m. Mouchoir. — Ce mot, dérivé de
Mouqua, moucher, n'a dû d'abord s'appliquer qu'au mou-
choir de poche, et ce n’est que par une ressemblance de
forme qu'on a ensuite donné le mème nom au mouchoir de
cou, servant de fichu ou de cravate. Mouquadoù semble
revenir plus particulièrement à sa première signification
depuis l'adoption du fr. Mouchouër, qui, tout en expri-
mant la même chose, s'emploie aussi pour mouchoir de
cou.
Mouquariè, s. f. Moquerie ; risée; dérision ; acte pour
tourner quelqu'un en ridicule.
Mouqué, mouquéto, adj. Penaud ; confus; honteux ;
attrappé ; interdit; trompé dans son attente.
Dér. du gr. Moxaw, se moquer.
Mouquéta v. Mortifier, confusionner ; rendre penaud,
interdit ; rendre mouqué.
Mouraïa, v. Museler; mettre une muselière à un
animal.
Dér. de Moure, museau.
Mouraïos, s. f. plur, Morailles, sorté de tenailles, qu'on
place à la lèvre supérieure des chevaux ou des mules, pour
les empêcher de mordre, quand on les tond ou qu'on les
ferre.
MOU 497
Mouräou, s. m. Sac à foin ou sac à avoine, le premier
en sparterie à jour, le second en toile, que l'on suspend à la
tête des mulets ou des chevaux de travail pour les faire
manger lorsqu'ils s'éjournent hors de l'écurie ou qu'ils sont
en route, — Métre lou pè din lou mourdou, au fig., dofner
dans le piége, dans le panneau.
Der. de Moure, museau.
Mourça, v. Amorcer ; mettre une amorce à un fusil, à un
hameçon, à un piége.
Dér. de Morço, amorce.
Moure, s. m. Museau ; mufle; groin ; par ext. figure;
visage ; face. — Un pouli moure, un joli minois. Véro aïci
toun moure, tourne ta façe de ce côté. Faïre lou moure,
faire la moue, la mine; se renfrogner. Léva lou moure,
lever le nez, porter haut la tête; prendre un air insolent,
provoquant,
Moure, se prend pour un gros quartier de rocher, qui sort
de terre, pour un térrain en surélévation.
Dér. du celt. Mourre, m. sign.
Mouréja, v. Montrer le nez; commencer à paraître;
rudoyer quelqu'un, lui faire la mine, lou moure; donner
des soufllets.
Mourga, v. Ravaler; raccourcir une branche d'arbre,
un cep. de vigne; châtrer, écourter les pousses d'un abre,
d'une plante trop orgueilleuse ; morguer ; narguer.
Mourgo, s. f. ou Mounjo. Dim. Mourguéto. Nonne;
nonnain ; religieuse. Avec cette différence que la Mourgo
était vètue de noir, comme les Bénédictines, les Cla-
ristes, les Ursulines, etc., et Za Mounjo de blanc. — Voy.
Mounjélo.
Co mot désigne encore à Alais une vieille rue, La carrièira
dé las Mourgos, qu'on traduit : rue des Mourgués, sur
laquelle était bâti un vaste couvent des Dames de Saint-Ber-
nard. Au masc. inusité comme nom commun, Mourgues,
est cependant nom propre d’hommeet de diverses localités,
de hameaux dans les communes de Castillon-de-Gagnère,
de la Rouvière, de Saint-Anastasie, de Vergèze et d'un
quartier dans le canton de Nimes, dont le nom rapporté
dans un compois de 4380, en lat., serait en contradiction
avec ce que dit SAuvAGEs de l'application de Mourgo on
Mourgue à une religieuse ou religieux vêtu de noir; car le
vieux titre porte Ad Monacum Album, et, en 4479, Morgue-
Blanc, pour Les Mourgues aujourd'hui.
Mourguéto, s. f. Petit escargot. Hélice vermiculé, Heliæ
vermiculata, Linn., mollusque de l’ordre des Gastéropodes
et de la fam. des Adélobranches. — Comme l'indique son
nom diminutif, il est en effet petite de taille, ce qui ne le
rend pas plus beau. Il est en tous cas difficile d'établir
un rapprochement entrè l'objet du présent article et celui
du suivant; l'an est le type de la légèreté, l’autre de
la laideur; et on leur a donné le même nom! Cela ne
peut s'expliquer que par quélque rapport de couleur,
trouvé dans leur robe, qui les a fait comparer tous deux
à la Mourgo où Mourguéto, qui serait bien alors vrai-
498 MOU
ment la religieuse habillée de noir. Peut-être aussi est-ce
à cause de la coquille de l’escargot, considérée comme son
capuchon ou sa cellule, qu'on est arrivé par un autre chemin
à en faire de même une Mourguéto. — Voy. le mot suivant.
Mourguëto, s. f. Libellule, demoiselle, Zibellula, Linn.,
insecte de l’ordre des Névroptères et de la fam.des Libelles
ou Ordonates, au corps allongé, à la taille fine, aux ailes
de gaze, qni vole avec une grâce charmante sur le bord des
eaux. Les libellules sont, suivant les espèces, bigarées de
diverses couleurs, mais la plus commune, celle qui a donné
son nom aux autres, a les ailes noirâtres ; c’est ce qui lui
a valu d’être appelée Mourguéto, d'une religieuse du même
nom dont le costume était noir; elle est cependant plus
connue aujourd'hui par celui de Douméisèlo on Douméisé-
léto, imité du français. — Voy. Douméïsèlo, et le mot pré-
cédent.
Mouri, v. Mourir, cesser d'exister, de vivre. Au fig.
finir, souffrir beaucoup; éprouver un vive et douloureuse
impression. — És mort dé La courto haléno, il est mort de
la respiration arrêtée, ou faute de pouvoir respirer : mauvaise
plaisanterie à propos d’un défaut sur la maladie duquel on
discute. Aquélo tèro mourès én pouncho, ce champ finit, se
termine en pointe. Mé fai mour? dâou lagui, elle me fait
mourir de chagrin.
Dér. du lat. Mori, m. sign.
Mourimén s.m. Défaillance ; spasme ; syncope; éva-
nouissement. — Mourimén dé cor, n’a pas d'autre signifi-
cation.
Mouriscâou, âoudo, adj, Moricaud, qui a le teint ou le
poil noirâtre.
Dér. du lat. Maurus, m. sign.
Mournifle, s. ». Au fém. Mourniflo. Petit morveux,
petite morveuse.— C'est comme si l’on disait : Moure qué
réniflo, museau qui renifle. Taïsa-vous, mourniflo, taisez-
vous, péronnelle.
Mourtalén, s. m. La gent mortelle, les mortels. — Ex-
pression qui n’a cours qu’en poésie.
Mourtäou, alo ou Mourtèl, mourtèlo, adj. Mortel, elle.
— Ne s'emploie, dans le sens du français, que pour péché
mortel, péca mourtdou, car il faut pouvoir dire son caté-
chisme dans toutes les langues : mais dans l'usage ordinaire,
il signifie : dangereusement malade, qui est en danger de
mort. — Sé créi pas mourtéou où mourtèl, il ne se croit
pas en danger de mort. Low crésès mourtèl? croyez-vous
sa maladie mortelle, qu’il ne peut en réchapper ?
Dér. du lat. Mortalis.
Mourtiè, s. m. Mortier, vase pour piler; pièce d'artillerie
pour lancer une bombe, — Low mourtiè sén toujour l'aïé,
le mortier sent toujours les aulx, proverbe qui se rend aussi
en fr. par : la caque sent toujours le hareng. On l’applique
à une personne qui, par quelque action on quelque parole,
fait voir qu'elle retient encore quelque chose de la bas-
sesse de son origine on des mauvaises impressions qu'elle a
reçues.
MOU
Mourtiè, s. m. Mortier, mélange de chaux éteinte et de
sable pour bâtir.— Mourtiè gras, mortier où il y a beaucoup
de chaux ; mourtiè maïgre, celui où le sable domine. Mour-
tiè bastar, mortier fait le plus souvent avec des platras et
de la chaux.
Dér. du lat. Mortarium, m. sign.
Mourtigoùs, ouso, «dj. Malingre, languissant ; rabougri.
— Se dit des arbres dont les feuilles sont petites, jaunes,
flétries et dont quelques branches sont sèches, en un mot
qui menacent de mourir. 4
Mouru, mourudo, adj. Rebouché ; émoussé ; mousse, en
parlant du tranchant et surtout de la pointe d’un outil ;
lippu, qui a de grosses lippes ou lèvres, en parlant princi-
palement de la lèvre inférieure.
Mouru, s. m. Au fig. Se prend pour : bourru, rustre;
incivil ; fâché ; de mine renfrognée et d’humeur sombre.
Dér. de Moure, museau.
Mourudo, s. f. ou Biäou ou Granâou. Groneau, Gran-
din, poisson dè la Méditerranée.— Voy. Grandou, qui est
une espèce de Muge, si ce n’est le Muge lui-même, déguisé
sous ses divers noms locaux. Ses lèvres fortes, son museau
court lui ont valu son appellation de Mourudo.
Mourvis, s. m. ou Cade-mourvi, Génevrier dePhénicie,
Juniperus Phæœnicea, Linn., arbrisseau de la fam. des Co-
nifères, commun dans nos bois. — Voy. Cade.
Mous, pron. pers. mas. plur. de Moun, Mes. — Mous
éfans, mes enfants.
Mous, trois. pers. sing. de l'indic. prés. du v. Mouse,
traire. Il ou elle trait.
Mous, s. m». Moût, jus de raisin qui n’a pas encore fer-
menté : se prend, dans le style goguenard, pour le vin
même.— Y-a dé mous, dit-on à quelqu'un ou de quelqu'un
en pointe de vin, un peu dans les brindesingues.
Dér. du lat. Mustum, m. sign.
Mouscal, s. m. Émouchoir; queue de cheval attachée à
un manche pour émoucher les chevaux pendant qu'on les
ferre; lanière de papier autour d’un petit bâton pour
chasser les mouches des enfants et des malades, ou dont
se sert un marchand de sucrerie en plein vent, par
exemple, pour garantir des mouches sa marchandises; par
extension, pompon, panache, que l’on met à la tête des
mulets, qui est un ornement après avoir été d'abord un
chasse-mouches ; gland de bonnet, qui semble avoir le
même emploi.
Dér. de Mousquo, mouche.
Mouse, v. Traire; tirer le lait des vaches, des chèvres,
etc. — Au fig. Mouse quéouquus, obtenir de quelqu'an ce
qu'on désire par des caresses, de calines instances; Jui
gagner ou lui soutirer son argent par petites saignées douces.
Dér. du lat. Mulgere, m. sign.
: Mousi, mousido, adj. Moisi; qui est atteint, altéré par
la moisissure. Au fig. És pas mous, se dit de quelqu'un
remuant, retors, qui ne risque pas de se moisir par inaction
de corps ni d'esprit. À
TS
MOU
Lou mousi, s. m. le moisi ; odeur, goût de moisi ; moi-
sissure ; partie d’une chose moisie. — Voy. Mousidun.
Dé. dulat. Mucidus, m. sign.
Mousidun, s. m. Moisissure; le moisi.— Exprime d'une
manière plus générale que Mousi et Mousiduro, une partie
de chose moisie sur une quantité ; ainsi on dira : fou tria
lou mousidun d'aquélos poumos, il faut enlever les pommes
moisies de ce tas, et : /évas lou mous) d'aquélo poumo, Ôtez
la partie moisie de cette pomme.
Mousiduro, s. f. Moisissure, altération d'une chose moi-
sie. — Voy. Mousidun.
Mousqué, s. #. Mousquet ; fusil dont le canon est court;
ancienne arme à feu, en usage avant le fusil.
Mousquéja, v. Émoucher ; chasser les mouches. — Un
chival mousquéjo, se dit d’un cheval qui chasse les mouches
à coups de pied et de queue, qui bat ses flancs de sa
queue.
Dér. du lat. Muscas agere, chasser les mouches.
Mousquéto, s. f. Dim. de Mousquo. Petité mouche.
Mousquo, s. f. Dim. Mousquéto; augm. Mouscasso. Mou-
che, Musca, insecte classé en histoire naturelle dans l'ordre
des Diptères et la fam. des Latérisèles ou Chetoloxes qui a
d'innombrables variétés, toutes confondues sous le nom
commun de Mousquo, sans classification savante. — L'hip-
pobusque, Hippobosca equina, Lan. cette mouche si incom-
modeaux chevaux, si tenace et si dure à écraser, est la seule
qui ait reçu une qualification distinctive : on l'appelle
Mousquo dé chival et surtout Mousquo d'ase.
Dér. du lat. Musca.
Mousquo, s. f. Mire; mouche, visière d’une arme
à feu.
Mousquo où Mousquéto, s. m. touffe de barbe sur le men-
ton, qu'on a souvent appelée royale, puis impériale , et
mouche qui n'a pas de couleur politique, quand un des
mots précédents n’était plus de mise.
Moussa, s. m., n. pr. de lieu, Moussac, commune dans
le canton de Saint-Chaptes (Gard), nommé en 4469, Mozac,
roman, et Mazacum, latin; en 1228, Mociacum, variant un
peu plus tard en Mossacum et Mossiacum. Ce village, sur
les bords du Gardon, exposé souvent à ses ravages, aurait-
il pris son nom de cette situation ou de quelque accident
causé par la rivière? Sa formation lui viendrait-elle de la
même source ou de la mème idée que Moussèl, morceau,
synonyme Bouci, dans un autre dialecte dérivant de Morsus,
de mordere, mordre, qui nous a donné le verbe Mous-
siga ? C’est probable !
— Sou dé Moussa : aïmou maï lou tout qué la mila,
provb., ils sont de Moussac : ils aiment mieux le tout que
la moitié. La Rouviëiro sansvi, La Cédoumélo sans couqui,
Moussa sans bla, lou péisan és arouïina. La Rouvière sans
vin, La Calmette sans coquin. Moussac sans blé, le paysan
est ruiné : dicton ancien que les rivalités de village à vil-
lage se jetaient volontiers et sans ménagement. — Foy.
Éscaïnoun.
MOU 399
Moussa, v. Mousser, faire de la mousse, en parlant d'un
liquide; Escuma est préférable dans ce sens.
Fort ressemblant à un empr. au fr.; aussi, presque
inconnu dans les campagnes et dans les endroits où le
languedocien est resté plus pur.
Moussèl, s. m. Dim. Moussélé ; augm. Moussélas. Mor-
ceau, partie d’un tout et quelquefois le tout; bouchée,
fraction d'une chose bonne à manger. — Moussèl énvala
n'a pas pus dé gous, provb. qui ne manque pas et ne man-
quera jamais d’applications, non plus que de traductions
ou reproductions dans toutes les langues et dans tous les
temps ; car il se rend en fr, par : service rendu est bientôt
oublié; plaisir passé ne laisse pas de trace : bonheur
savouré n’a ni goût ni souvenir. N'a pas fa qu'un moussèl,
il n’en a fait qu'une bouchée. Aqud’s un pouli moussèl dé
fio, voilà un beau brin de fille, un friand morceau.
Dér. du lat. Morsus, part. pass. de Mordere, mordre : ce
que l’on enlève en mordant.
Moussiga, v. Mordre; serrer, entamer, diviser avec les
dents, avec le bec, avec tout ce qui serre ou pince.
Dér. du lat. Morsus.
Moussigado, s. f. Dim. Moussigadéto. Morsure; action
de mordre; meurtrissure ; empreinte, marque faite en mor-
dant ou en piquant avec le bec.
Moussigaïre, aïro, adj. Qui mord, mordant.— Au fig.
n'est guère admis qu'en style poétique : la langue est avant
tout positive.
Mousso, s f., ou Moussi. Mousse, apprenti matelot.
En esgag. Mogo, jeune garçon, jeune valet.
Mousso, s. f. Traite des vaches, des chèvres, des bre-
bis, etc. ; action de les traire; quantité de lait qui en pro-
vient.
Dér. de Mouse, traire.
Mousso, s. {. Mousse, écume. — Se dit mieux Éscumo.
— Voy. c. m.
Mousso, s. f. Mousse, cryptogame, plante ou herbe
parasite.
Dér. du lat. Muscus, m. sign.
Mousso d'araire, s. m. Versoir de charrue.
Mousso dé mèr, s. f., ou Aoubo dé mèr. Algue de mer,
algue marine, foin marin, dont on enveloppe le verre, les
bouteilles, pour les transporter ; on en fait des matelas, des
coussins et même du papier ; elle croît dans la mer et sur-
tout dans nos étangs.
Une autre plante du mème genre, le Mousso dé mèr, la
mousse de mer, Fucus helminthocorton, Linn., de la fam.
des Algues, qu'on trouve dans la Méditerranée, est un
des meilleurs vermifages connus.
Mousso (Fiou dé) s. m. Fil de moche, de Quibray ou
de Bretagne, paquet de soies filées, disposées pour le pei-
gnage. Le nom lang. n’est qu'une altération du fr. Moche,
soie en moche, en paquet.
Moussu, s. ». Monsieur ; titre donné par civilité, par
respect ou par bienséance.— Un moussu, moussu un tdou,
500 MOU
un monsieur, monsieur tel. Au plur. il est toujours pré-
cédé de l'art. lous ; lous moussus, les messieurs, en géné-
ral, les gens qui ne sont pas du peuple; ous moussus un
tdou, les messieurs tels; mais on ne l’emploie qu'en par-
lant des personnes et non point en s'adressant à elles-
mêmes. Ainsi l'on dit : Coumo anas, moussu ? et Coumo
anas, méssius? Ce dernier n’est qu'une autre traduction
plus moderne de messieurs. — Un miè- moussu, un demi-
bourgeois, demi-manant, Moussu Chouso, monsieur Chose,
dont le nom ne vient pas à la mémoire /Voy. Chouso).
Moussu moun ami, phrase purement explélive : Ah!
certes. — Voy. Ami.
Dér. du vieux langage Moussen ou Mossen, formé du
pronom poss. et du subst., abrégés ou transformés de
Moun, du lat. Meus et du roman Seiner, Senher, Seinhor,
donnant Sieur, Sire, Seigneur, venus du lat. Senior, plus
àgé.
Moussudé, s. m., ou Moussurdé, Jeune monsieur. —
Dim. presque toujours respectueux, qu’il ne faut pas con-
fondre avec ce que le fr. exprime par : Petit monsieur,
qui est le plus souvent un terme de raillerie ou de mépris.
Moussurô, s. m. Petit monsieur; jeune freluquet; arti-
san qui veut se donner des airs de monsieur.
Moustacho, s. f. Dim. Moustachéto; aug. Mousta-
chasso, Moustache ; barbe qu’on laisse croître au-dessus de
la lèvre supérieure ; longs poils autour du mufle, de la
gueule de certains animaux.
Dér. du gr. MSooteë, d'où le lat, Mystax, m. sign.
Moustachou, s. m. Mornifle; petit soufflet ; coup de la
main sur la figure.
Moustachouna, ». Souffleter ; donner des mornifles, de
petits soufflets, des moustachoùs.
Moustachu, udo, adj. Qui a des moustaches, surtout
de grandes moustaches.
Moustardiè, s. m. Moutardier, petit vase dans lequel
la moutarde est servie sur la table. — Sémblo lou prémiè
moustardiè dâou papo, dicton qui s'applique à un homme
qui prend des airs d'importance et d'autorité, qui veut
trancher du grand seigneur ou du personnage très-entendu :
et fondé sans doute sur ce que le peuple s'imaginait qu’au-
près du Pape devait se trouver, à titre d'office, un ser-
viteur de sa maison, ayant charge de Moutardier, et qu'on
le supposait ironiquement jouissant d’une grande in-
fluence.
Moustardo, s. f. Moutarde, Sinapis, Linn., plante dela
fam. des Crucifères, dont il y a deux espèces, la blanche
et la noire. Ce n'est guère à la plante, peu connue, que
l'on applique ce nom, mais au condiment fort en usage pour
exciter l'appétit et faciliter la digestion des estomacs pares-
seux, que l'on fait avec la graine réduite en poudre. Sous
cette forme, elle est également vulgarisée par l'emploi qu’en
fait depuis longtemps la médecine dans les bains de pied et
les sinapismes ; pour cela la moutarde noire est préférable
comme plus âcre et plus excitante.
MOU
Ce mot vient du la. Multum ardet, qu'en vieux fran-
çais on rendait par Moult ard, il brûle beaucoup ; ou de
Mustum ardens, parce que l’assaisonnement de table se
composait quelquefois de cette farine délayée dans du moût
de raisin.
Moustardo, s. f. Raisiné ; moût de raisin cuit en conf-
ture. — Comme on y mêle parfois quelques grains de
moutarde pour le rendre piquant, il prendrait de là son
nom. C’est à cette composition que s’appliquerait fort bien
la seconde étymologie donnée à l'article précédent. Néan-
moins ce mélange n’est point ordinaire,et Moustardo, con-
fiture, est le plus souvent la même chose que Rasiné. —
Foy. c. m.
Moustas, s. m. Gros souflet, bien appliquésur la figure,
sur la moustacho.
Augm. de Moustachoù.
Moustéja, v. Rendre du moût ; être juleux. — Au fig.
on dit : Aiç maustéjo pas, ceci n’est pas brillant, d’une
affaire qui s'annonce mal, qui ne rend pas ce qu'on espérait.
Dér. du lat. Mustum agere, m. sign.
Moustèlo, s. f. Belette, Mustela vulgaris, Linn., mam-
mifère unguiculé de la fam. des Digitigrades ou Carnivores.
La Belette, la dame au nez pointu, est beaucoup plus
petite que la marte et le furet; mais elle leur ressemble par
la forme. Son corps mince n’a que six à sept pouces de
longueur ; sa queue, plus courte même en proportion, n’est
aussi garnie que de poils très-courts. Son pelage est d’un
roux vif, cendré en dessus et blanc en dessous. Malgré sa
petitesse, elle est courageuse et forte, et ne craint pas d’at-
taquer une proie plus grande qu’elle; elle n’épargne pasles
poules et est très-friande surtout de leurs œufs et de ceux
des perdrix et des cailles dont elle fait ample destruction.
Dans les montagnes du nord du département on trouve,
quoique rarement, l’Hermine, Mustella erminna, Linn., et
comme elle est en tout semblable à la belette, à la couleur
près, on l'a prise pour elle, et tout simplement appelée
Moustèlo blanquo, belette blanche.
On dit Moustèlo d’une fillette rusée, matoise, fine mouche
et un peu effrontée.
Moustoùs, moutouso, adj. Plein de moût; qui rend
du moût; gluand ; juteux; visqueux ; douceâtre.
Moustra, v. Montrer ; indiquer; faire voir; enseigner.
Dér. du lat. Monstrare, m. sign.
Moustre, s. m. Monstre ; production ou être contre na-
ture; individu très-laid, très-méchant, dans l'usage ordi-
naire; mais comme exclamation, ou apostrophe, il n’a pas
toujours cette gravité et le ton peut l'adoucir jusqu’à un
simple reproche de bouderie ou même d'affection. Dans la
même acception, il devient aussi interjection.
Dér. du lat. Monstrum, m. sign.
Moustroüs, ouso, adj. Monstrueux; prodigieux ; exces-
sif; effrayant; épouvantable.
Moutas, s. m. Augm. de Mouto. Grosse motte, surtout
de terre; gros grumeau, gros morceau.
MOU
- Moutèl, s. m. Grumeau; morceau d’une matière quel-
conque, alhérente, coagulée, caillée.
Dim. de Mouto.
Moutifläou, âoudo, adj. Moufilard ; gros joufflu ; qui a
de grosses joues.
. Serait-il formé de Mouto, motte, et du lat. Flare, souf-
fler, enfler ? ou bien un augmentatif, un peu capricieux, de
Moufle ?
Mouto, s. f. Dim. Moutéto; augm. Moutas. Motte ; mor-
ceau de terre soulevé par la charrue ou tout autre outil ara-
toire ; terre adhérente aux racines d’un arbre déplanté. —
Mouto dé carboù, motte de houille, morceau d’un plus gros
volume, par opposition au menu, Tris. On fait des Moutos,
des mottes artificielles; en pétrissant et pressant en pains
de la houille menue, du tan, rusquo, qui ne peut plus
servir, et du marc d'olives ou grignon, osses d'oulivos :
c'est le combustible des pauvres ménages, et là aussi est
l'idée première et perfectionnée de la fabrication des agglo-
mérés, l’utilisation des menus de mines, cette invention
qui a été une si grande ressource dans nos grandes indus-
tries houillères. Mouto dé nèou, boule de neige.
‘Dér. de la bass. lat. Mota, m. sign.
Dér. du Meus, a, um, m. sign.
Moutou, s. m. Mouton, Verveæ, Linn., mammifère ungui-
culé de la fam. des Ruminants ; mâle châtré de la brebis.—
S’'emploie, de même qu’en fr., pour signifier les moutons,
brebis et béliers, en troupeau, un troupèl dé montoùs, un
troupeau de moutons.
L'origine du radical qui a formé le mot Moutoù à lassé
tous les étymologistes, dit Honnorat : « Jean Picard l’a fait
venir du gr. Méduv, qui désigne une espèce de danse dans
Pollux, à cause des sauts que font les moutons; Caseneuve
pense qu'on pourrait le dériver du lat. Mutilus, employé
dans le sens d'écorné; Bochart prétend qu'il vient de Mons,
montis, d'où l’ital. Montone et._Monton, parce que les mou-
tons se tiennent sur les montagnes. Ce qui paraît justifier
cette étymologie, c'est le mot Montero, qui signifie chasseur
en espag., et qui est bien évidemment dérivé de Montis ;
Huet le prend de Mutus, muet, parce que cet animal est
silencieux; enfin, selon d’autres, il viendrait de l’allem.
Mutzen, couper, tronquer, parce. que le mouton, proprement
dit, est un bélier coupé. »
Littré résume à peu près ces anciennes opinions, et il
constate que la forme primitive du mot portait un 4, en
ital. etdans la bass. lat. Multonem, Moltonem, Mutlonem :
Il trouve dans le celtique : gaël. Mult; Kimry, Mit; irl.
Molt; bas-breton, Maoud, bélier ; il y voit une forte raison
pour croireque le mot est indigène, et que l’étymogie incline
vers le celtique. :
Moutoù, s. m. Mouton ou sonnette, masse de fer, ou
gros billot garni et armé de fer, qui se lève à bras ou à
machine, et qui, en retombant, sert à enfoncer des pilotis.
de pieux : ainsi appelée parce que le mouton, dont la ma-
chine entière porte le nom, donne des coups avec la tête
MUL 501
et que la sonnette semble cosser, dourda, les pieux, comme
l'animal.
Moutoù se dit aussi des anses en bois dans lesquelles
on fait entrer les anses d'une cloche, un moutoù dé cam-
Moutougnè, èïro, adj. Moutonnier; qui suit l'exemple
des moutons et fait comme les moutons de Panurge.
Mu, mudo, adj. Muet; qui n'a pas l'usage de la parole;
qui ne parle pas, ou qui reste sans parler. — ZLéngo ou
fénno mudo fouguè jamaï batudo, prvb., langue ou femme
muette ne fut jamais battue; excellent conseil à ceux ou
à celles qui parlent trop. À la mudo, à la muette, sans
parler.
Dér. du lat. Mutus, m. sign.
Muda, v. Remuer un enfant au maillot ; le nettoyer, le
changer de langes. — Pèou-muda, muer, changer de poil,
et par ext. changer de plumage. de peau. Aquél qué sé
mudo, Diou l'ajudo, prvb., qui pèche et s'amende, à Dieu
se recommande.
Dér. du lat. Mutare, changer.
Mudaïro, s. f. Remueuse, femme qui remue, mudo, un
enfant, qui l'emmaillotte.
Mudo, s. f. Mue; changement de poil, de plumes ou de
peau, dans l'animal et particulièrement des vers à soie à
chacune de leurs maladies.
Dér. de Muda.
Mugan, s. m. Ciste cotonneux à fleurs roses, Cistus
albidus Linn., arbrisseau de la fam. des Cistes, qui croit
spontanément sur les collines arides du Midi.
Mugo, s. f. Ciste de Montpellier à feuille étroite et à
fleur blanche, Cistus Monspeliensis, Linn., plante de la
fam. des Cistes. — Il y a un grand Ciste, dans nos landes,
qui est le même que celui sur lequel on récolte dans le Le-
vant, dit SAUVAGES, la résine appelée Labdanum, drogue
de pharmacie.
Mugué, s. m. Jacinthe orientale, Jacinthe des jardins,
Hyacinthus orientalis, Linn., plante de la fam. des Li-
liacées, commune et dont on cultive des variétés très-nom-
breuses.
Mugué, est encore le nom d’une autre jolie plante, Con-
vallaria majalis; Linn., de la fam. des Asparagées; qui
vient naturellement dans les bois humides du Midi, et qui,
par ses petites fleurs blanches en campanules, répandant une
odeur suave, mérite aussi d’être comptée parmi les plantes
des jardins.
Mujou, s. m. Muje ou mulet, Muge de la Méditerranée,
Mugil labeo, Cuvier, poisson de l’ordre des Holobranches
et de la fam. des Lépidopomes.— Ce poisson, très-commun
dans la Méditerranée et dans nos élangs, atteint 42 centi-
mètres de longueur ; il a le dessus brun verdätre, les côtés
et le bas-ventre blancs, les lèvres fortes et crènelées. F
Mulatiè, s. m. Muletier; celui qui conduit des mules et
mulets pour le transport du vin ou des marchandises. —
Jusqu’aux premières années de ce siècle, le muletier a été
64.
502 MUS
un personnage bien autrement important que ne le fut
jamais un roulier, lorsqu’à la têtede quinze ou vingt mulets,
et quelquefois davantage, dont chacun pour la plupart ne
valait pas moins de mille francs, et qui tous lui apparte-
naient, il était seul chargé du transport de nos marchan-
dises dans toutes nos montagnes jusqu’au Puy-en-Velay.
11 n'existe presque plus de muletiers et encore ne sont-ils
que des grandeurs déchues qu’on rencontre par hasard dans
un chemin écarté et difficile : l'ouverture de nouvelles
routes et l'amélioration des anciennes leur firent céder la
place aux rouliers qui, à leurtour, tendent à disparaitre,
écrasés sous la concurrence plus redoutable encore des
chemins de fer.
Mur, s. m. Mur, muraille; rempart.— Mur est un fran-
çais qui nous est arrivé avec son cortége franchiman de :
Mur én briquos, gros-mur, mur-mèstre, mur dé réfén, mur
milouïèn, mur d'appui, etc., qu'il faut bien accepter, faute
de mieux, pour s'entendre.
Dér. du lat. Murus, m. sign.
Muraïa, v. Murer, clore, entourer, enceindre de mu-
railles.
Muraïo, s. f. Dim. Muraïéto; augm. Muraïasso. Mu-
raille; mur. — Quoique Muraïo soit aussi une traduction
du français, ce qui prouve en sa faveur c’est qu'on ne pour-
rait la bien mettre à la place de Mur, dans les locutions
citées à l’article de ce dernier mot.
Murgo, s. f. Souris. — Voy. Mirgo.
Murtro, s. f. ou Hèrbo dâou lagui. Myrte, myrte com-
mun, Myrtus communis, Linn., arbrisseau de la fam. des
Myrtes. — Cet arbrisseau toujours vert était consacré à
Vénus; il devint le symbole de l'amour et de l’hymen aussi,
car les nouvelles mariées en couronnaient leur front : On
prétend qu’alors on lui donna son autre nom d’Æèrbo d'ou
lagui, pour rappeler les soucis et souvent les chagrins qui
suivent le mariage. — Voy. c. m.
Dér. du gr. Mupros, d'où le lat. Myrtus, que notre dia-
lecte a un peu altéré à sa manière.
Mus, s. m. Musc, parfum.— Inutile de dire que le musc
est fourni par une sorte de chevrotin ou de chevreuil; le
languedocien ne connaît que son odeur : ila pris pour cela
seulement le mot au français, en supprimant le c final qui
Jui est antipathique. La Fare-Azaïs l’a heureusement appli-
qué, dans les Castognados, dou basalà, le basilic, qu'il
appelle mus dâau péisan et raïôou pachouli.
Mus, s. m., n. pr. de lieu. Mus. — Il existe dans notre
département deux localités qui portent ce nom : Mus,
commune, canton de Vauvert dans l'arrondissement de
Nimes, et ce qu'on appelle la ville de Mus, dans la com-
mune de Durfort, arrondissement du Vigan, ruines d’une
villa gallo-romaine.
La commune de Mus est connue par ses carrières d'où
l'on tire les dalles appelées Bars dé Mus. Ces pierres pren-
nent un beau poli et l'on en pave les appartements, surtout
ceux du premier étage, car au rez-de-chaussée elles se
MUS
détériorent facilement par l'humidité; mais c'est principa-
lement au pavage des fours qu’elles sont employées parce
qu'elles résistent bien à l’action du feu.
« Quant à la ville de Mus, dit SauvAGess, elle paraît n’a-
voir été qu’une maison de campagne, villa, appartenant à
quelque grand seigneur. Elle était dans un endroit aride,
élevé et resserré par des rochers d’un aspect affreux. L'on
ne conjecture sa situation, et cet endroit n’est remarquable
que par un aqueduc de bonne construction, qui aboutit à
un petit espace susceptible de culture. Cet aqueduc, dont il
y a de beaux restes, amenait par de longs circuits au
milieu de ces rochers, l’eau d’une fontaine appelée Fon das
Sarazis.
« Mus, serait-il le même nom que celui d’un général des
Sarrazins appelé Musa ? Ces infidèles avaient fait d'assez
longs séjours dans la Septimanie pour y avoir construit ce
monument peu connu, quoique digne des Romains, et le
nom du général abrégé dans celui de Mus, serait en même
temps resté au lieu de son habitation.»
Musa, v. Muser; s'arrêter en chemin; être oisif; s’a-
muser à des vétilles au lieu de faire son travail. — Doit
signifier encore : se repentir, dans le sens au moins que la
perte du temps ou de l’occasion peut donner lieu à se
repentir; appert le proverbe : Qudou réfuso, muso, qui
refuse, qui retarde, se repent. |
Musaïre, aïro, s. et adj. Musard ; fainéant ; lambin ; lent;
tardif ; qui muse.
Musca, s. m. Muscat, raisin et vin dont tout le monde
connaît le goût qui rappelle le parfum du musc. — On
cultive dans le pays trois espèces de muscats : ou musca
blan ; il ne réussit pas dans les plaines où le sol est humide;
il s’y rouille et ne produit rien; il lui faut un terrain
élevé; le sol siliceux, formé de débris de grès, grés, ou fer-
rugineux, Jui convient très-bien. 11 donne de très-belles
grappes; les grains sont blancs, ronds, très-serrés, de cou-
leur dorée à la maturité. Son bois est un peu roux, ten-
dre, et sa feuille assez grande. Lou musca négre, le muscat
noir ne diffère du blanc que par sa couleur qui est très-
noire. Lou musca grè, le muscat grec : ses grains sont gros,
blancs, ovoïdes, croquants et légèrement musqués; ses
grappes ne sont pas très-bien fournies.
Muscadëèl, èlo, s. et adj. Musqué ; qui a le parfum du
musc. — On donne ce nom à une espèce de poire appelée
Muscadelle et l’on dit Péro muscadèlo ou seulement Musca-
dèlo, subst. comme Muscadèl, s. m. ou Périè muscadil,
adjectivé.
Muscadin, s. m”. Muscadin; fat musqué; freluquet;
damoiseau ; s'emploie aussi au fém. Muscadino : pour petite
maitresse, élégante; muscadine.
Muscado, s. f. Muscade, noix du muscadier aromatique,
Myristica aromatica, Linn., employée assez communément
comme épice et dans des remèdes. Quant à la muscade,
une petite boule de liège qui parait et disparaît dans les
doigts du prestidigitateur, le mot languedocien ne la désigne
MUS
point parce qu’il ne la connaît pas, et que, seuls, les fran-
chimans ont pu l'emprunter au fr., si même il leur arrive
de s'en servir dans de rares occasions.
Muscardin, s. m. Muscadin, pastille, espèce de dragée
que l'on faisait en enduisant une graine de coriandre d’une
pâte sucrée, aromatisée avec du musc. Ce bonbon n'est
guère plus connu, mais son homonyme ne l’est que trop.
Muscardin, s.m». Muscardin, ver à soie mort de la mus-
cardine. — Sa ressemblance avec le Muscardin de l'article
précédent lui a certainement fait donner son nom : en effet,
le ver, mort de cette maladie, se roidit, se dessèche et sem-
ble couvert d'une couche de plâtre blanc ou plutôt semble
être un plâtre de l’insecte. On le nomme même quelquefois
Dragèio, dragée, lorsqu'il meurt, racorni en chrysalide
ébauchée, dans le cocon qu’il a pu faire et qui tinte alors
comme un grelot : ce qui achève de donner raison à cette
étymologie en la complétant.
De mème que bien des gens se gardent d'appeler le Diable
par son nom, de crainte qu'il ne réponde à l'appel, de mème
les magnagniers évitent avec le plus grand soin que le mot
Muscardin soit prononcé dans leur magnanerie, et s'ils sont
forcément amenés à en parler, ils ne le font qu'en disant :
aquélo méno, cette engeance, la plus mauvaise, la plus à
craindre de toutes : superstition bien innocente d'ailleurs
si, après une éclosion attentivement soignée qui est une
MUS 503
première condition de succès. viennent une bonne nourri-
ture, une température égale, des délitements fréquents
autant que possible, et une aération bien entendue, qui
forment l'ensemble indispensable des soins hygiéniques à
donner aux vers à soie. C'est jusqu'ici ce qu'il y a de mieux
à faire pour écarter la muscardine ou en arrèter les progrès
lorsqu'elle a fait invasion; en attendant que la science,
qui a découvert enfin d'une manière assurée le Botrytis,
nous donne aussi un moyen également sûr de le chasser où
de le tenir loin.
Muscle, s. m. Moule, Mytilus, Linn., mollusque de
l'ordre des Acéphales, coquillage bivalve de mer, de rivière
et d’étang, dont les variétés abondent. — On ne connaît
guère sous le nom de Muscle que la moule de mer, com-
mune sur nos côtes et dont la couleur est d'un bleu foncé.
Muso, s. f. Délai ; relardement; ce que fait le musard.
— Faut-il dire que Muso, muse, a été pris quelquefois dans
le sens du français pour une des neuf sœurs, divinités des
arts et de la poésie ? C’est un de ces anachronismes qui ne
vont pas cependant à la langue d'Oc; mais il est tout per-
mis aux poètes !
Musqua, v. Musquer; parfumer de muse.
Empr. au fr.
Musquéja, v. frég. Sentir le muse; avoir le goût du
muse ou du muscat.
N
N
N,s. f. dans l’ancien système; s. m., dans le nouveau.
N, quatorzième lettre de l'alphabet, onzième des consonnes.
On la prononce ènno isolément. Correspond au nu des
grecs, au #un Où noun des Phéniciens. Il est employé dans
l'articulation spéciale gn que les espagnols écrivent au
moyen d'un #n simple surmonté d’un signe appelé tilda d'où
lui vient le nom d’n tifdé. Dans les anciens manuscrits
cette consonne est souvent remplacée par un trait marqué
sur la consonne précédente. Employée en abréviation, cette
lettre suivie d'un S, N.-S. signifie Noste-Ségnou, N.-D.,
Nosto-Damo. En astronomie N. est mis pour nord. Dans
les livres, N suivi de quelques points ou astérisques désigne
une personne dont le nom est inconnu ou qu'on ne veut
pas faire connaître. N. B. signifie nota bene. On n'est pas
bien sûr de son ancienne valeur numérale; les uns lui
attribuent la valeur de 90; les autres de 900. N était
l'ancienne marque monétaire de Montpellier. Cette consonne
ne se double pas en languedocien. Par une contradiction
siagulière, les Cévenols qui n'articulent pas ln final dans
certains mots Janguedociens tels que on, vin, fin, qu'ils
prononcent bo, wi, fi, articulent au contraire cette con-
NAB
sonne dans les mots français équivalents bon, vin, fin,
qu'ils prononcent bonne, vènne, fènne, ce qui produit un
effet, on ne peut plus disgracieux,
Au commencement d’un mot ou dans l'intérieur, lors-
qu'elle est suivie d'une voyelle, cette lettre se prononce
comme en français; mais au milieu, suivie d’une consonne,
ainsi qu'à la fin des mots elle sonne comme dans examen,
amen, bymen, abdomen : ainsi, autant que peut le rendre
la prononciation figurée, antan, ancièn, éndiférén, printén,
bouchin, son, lun, roundèlo, soun, etc.,se prononcent comme
si l'on écrivait anetane, aneciène, éndiféréne, prineténe,
bouchine, sone, lune, rounedèlo, soune; c'est la pronon-
ciation latine conservée aussi par les Italiens.
Naba, v. Gagner, plumer, dépouiller quelqu'un au jeu;
lui gagner jusqu’à son dernier sou; dauber, battre à coups
de poings. Soui naba, je suis enfoncé, j'ai perdu ; l'an naba,
on l'a gagné.
Nabé, s. m. Navet. Brassica napus, plante potagère ; du
latin napus. Ës pas pu néou qu'un nabé, il n'est pas plus
grand qu'un navet, se dit d'un enfant malingre, d’un
homme de petite taille. Nabé se dit aussi de la racine de
504 NAD
diverses plantes pivotantes dont la racine charnue s'en-
fonce verticalement dans le sol, comme le radis long, rabe,
dont ce pivot porte aussi le nom.
Nabé, to, adj. et subst. Nabot, de petite taille, pas plus
baut qu'un navet.
Nabisso, s. f. La fane de la rave, du navet; la partie
herbacée et extérieure de la plante. On dit aussi Rabisso.
Nabo, s. m. Nain ; du lat. Nanus ou plutôt Napus navet,
qui n’est pas plus haut qu'un navet. /Voy. Nané.) — C'est
le nom dont s'appellent entr'eux les petits ramoneurs et
décrotteurs savoyards ; ila sans doute la mème origine que
notre nabé et le français nabot, et correspond à petit, pitiot,
gamin. Ce mot s’est naturalisé à Alais pour désigner un de
ces jeunes artistes.
Naciou, s. f. Nation, peuple, et dans un sens plus
restreint : population, famille, assemblée, réunion ou asso-
ciation d’un certain nombre d’invidus. Quinto sanlo naciou!
Quinto tristo naciou! Les vilaines gens! Quelle mauvaise
engeance!
Dér. du lat. Natio.
Nada, v. Nager. Nada à la révésséto, faire la planche,
nager sur le dos. Savèn coumo nado! se dit d’un homme
dont on devine les allures suspectes.
Dér. du lat. natare, m.s.
Nadado, s. f. L'espace que peut parcourir dans l’eau
un nageur de force moyenne. Dans un sens plus restreint,
l'espace parcouru par un seul effort des quatre membres,
et que l’on désigne plus communément sous le nom de
brassado, brasse.
Nadadoù, s. m. Baignoir ; endroit d’une rivière propre
à nager et à se baigner. On dit aussi bagnadoù; mais ce
terme s'applique plus spécialement à une baignoire, à un
cuvier destiné aux bains domestiques.
Nadaïre, aïro, adj. et subs. Nageur.— Un bon nadaïre
à la fi sé nègo, un bon nageur finit par se noyer; tant va
la cruche à l’eau qu'à la fin elle se casse.
Nadâou, s. m. Noël; francisé par Natal ou Nadal, du
lat. Natalis. Ce terme est souvent donné comme nom de
baptême à ceux qui naissent le jour de la Noël. Souc dé Na-
dâou ou Nadalén ; Caléndäou, la buche de Noël. On dit pro-
verbialement : À Naddou déou fio ; à Pasco dâou ro. — Qu'à
Nadäou sé souréio, à Pasquos crèmo sa légno.( Voy. Caléndo.)
On dit aussi Nouè ou Nowvè, dans le voisinage de la Pro-
vence: Pér Nouë dou fio, pér Pasco, dou jo. A Noël, au balcon,
à Pâques, au tison.
Nadèlo, s. f. Sardine fraiche de la Méditerranée; nom
peu répandu aujourd’hui.
Nadièlou Nadiuèl, s. »”. L'orvet fragile, anguis fra-
gilis, Linn., petit serpent couleur d'acier bruni, à la queue
émoussée, court, tardif, ferme, lisse et très-fragile.
Ce serpent mesure environ 40 centimètres. Quand on le
touche, il se roïidit tellement qu'il se casse, ce quiluia
fait donnerson surnom scientifique et l'appellation vulgaire
de serpent de verre. Il est commun dans nos campagnes.
NAI
Suivant un préjugé populaire, l’orvet serait aveugle et
très-venimeux ; deux accusations également erronées. Le
nom languedocien de l'animal rappelle la première de ces
deux erreurs : JV'a d'ièl qui n’a point d'yeux. On dit pro-
verbialement : Sé lou nadièl à vésiè, sé la vipèro i’énténdiè,
davalarièou soun cavaiè. Si l'orvet voyait, si la vipère en-
tendait; ils démonteraient un cavalier.
On dit aussi : Sé lou nadièl à vésiè, sé la talabréno
i'énténdiè, etc. Si l'orvet y voyait, si la salamandre enten-
dait, etc.
Il est certain que l'orvet est tout-à-fait inoffensif et qu'il
y voit fort bien.
On donne aussi le nom de nadièl au Seps, Seps chalcides,
Ch. Bonap.) qui ressemble beaucoup à l'orvet, par la forme
de son corps allongé, mince et presque cylindrique, etaussi
par la couleur, bien qu'en général elle soit plus cuivrée et
que le noir y apparaisse davantage. Le seps est d'ailleurs
muni de pattes qui ne l’empèchent pas de ramper, car elles
sont attachées à la naissance du cou et à côté de l'anus, ce
qui ne leur permet pas de soutenir le corps de l'animal au-
dessus du sol. Tout imparfaites qu’elles sont, elles aident
cependant le seps dans sa course qui est très-rapide, et elles
l'ont fait aussi conserver dans la grande famille des Sau-
riens comme transition pour arriver à celle des serpents.
Ainsi que l’orvet, le seps, qui n’est pas plus rarechez nous,
habite surtout la plaine, parmi les herbes des fossés, et
s’abrite sous les pierres des vieux murs éboulés. En pre-
nant le nom de nadièl, le seps devait être chargé de toute
la mauvaise réputation de l’orvet : il est de toute justice de
dire qu’il ne la mérite pas davantage.
On voit par l'exemple de ce mot n'a-dièl, dit SAUVAGES,
que le languedocien ne le cède point au grec pour la faci-
lité de faire des noms, et des noms énergiques.
Nado, s. f. La nage, natation, l’art et l’action de nager.
Nadio, s. f. Anille, Plaque de fer en carré long, dont
les deux bouts sont en queue d’aronde; elle est encastrée
dans la partie inférieure et au centre de la meule tournante
d'un moulin à farine, laquelle est soutenue par l’anille qui
porte elle-même sur l'axe vertical qui fait tourner cette
meule.
Naîo.— Voy. Aïgo.
Nafra, u. Blesser, balafrer, estafilader avec un instru-
ment tranchant.
En vieux fr. Mavrer, d'où ce mot parait être une çor-
ruption.
Nâfro, v. f. Blessure, balafre.
Dér. du celt. Naf, couper, ou du catal. Nafra, bles-
sure.
Naï ou Naïs, v. m. Naïs dé cambe ou dé cande, routoir
ou creux dans une rivière où l’on met à rouir le chanvre.
« Que nulla persona aye faire nais de cambe en la rivieyra
de Gardon sans licence desdi Consouls.» (G. Charvet. Cou-
tumes de Remoulins, publiées dans la Revue des lang. Ro-
manes. T. 1v, p. 226.)
NAS
Naïsse, v. Naitre, venir au monde. On dit aussi gréia
en parlant des plantes. (Voy. &. m.) — En parlant d'un
terrain où l’on voit sourdre l’eau on dit : l'aïgo y naï dé
périout ; lous amouriès an bièn gréïa; lous blas naïssou
bièn.
Dér. du lat. Nasci, m. 8.
Naïsséduro, s. f. Mal d'aventure; tourniole; sorte de
panaris, moins grave que le panaris ordinaire et qui n'at-
teint que le tissus sous-cutané. On dit aussi un roudaire,
et près du Rhône, un lavouraïre.
Nané, éto, subst. Nain; Nabot. — Dans un jeu d'enfant,
où l’on énumère chaque doigt de la main en lui donnant
une épithète, le petit doigt est appelé pichd nané.
Dér. du lat. Nanus, m. 8.
-Nanèto, s. f. Nom de femme diminutif dérivé d'Anne,
On dit aussi en fr. Nanette, au lieu d'Annette. — Voy.
Nanoun.
Nani, adv. Nenni ; non ; pas du tout. Cette expression
s'emploie par politesse de préférence à Nou, comme le pro-
nom vous au lieu de tu.
Nanoun, s. f. Nom de femme, dérivé d'Anno. — (Voy.
Nanèto.) — On dit aussi Vèno, en languedocien.
Nâou, s.m. Auge où les charcutiers échaudent les porcs;
auge à pourceaux, ordinairement creusé dans un tronc
d'arbre; fosse au tan où l'on fait macérer les peaux; auge
de moulin à foulon; bateau, navire, vaisseau.
Dér. du lat. Navis, du grec vads. On dit aussi au fém.
Nâouquo.
Nâou, to, adj. Haut, élevé. Ndou, ndou ! très-élevé. —
Aquél ome és ndou, cet homme est grand. — Ce mot est
aussi employé adverbialement : Dé ndou-én-bas; de haut en
bas. — Toumbè dé gaïre ndou? Tomba-t-il de bien haut ?
— Dé la cadièiro én ndou, du haut de la chaire. — És
d'én ndou, il est du haut pays — highlander ; — de la mon-
tagne.
Nâou, n'est autre que dou du lat, Altus.
Nâouquado, s. f. Plein une auge, une augée.
Nâouqué, adj. Dim. de ndou, une petite auge.
Nâouquo, s. f. Piso ou pièlo. — Voy. Ndou.
Nâoussa, v. Exhausser, hausser, rendre plus haut; aug-
menter de prix.
Dér. de Ndou, haut, élevé.
Nâousso, s. f. Hausse; lout ce qui sert à élever; aug-
mentation de prix.
Nâousso-pè, s. #7. Marche-pied.
Nâontoù, s. f. Hauteur, élévation, És dé ma ndou-
toù, il est de ma taille.
Nâoutres, Nâoutros, pron. pers. plur. de iéou. Nous,
nous-mêmes, et non pas nous autres. Contraction de nous
doutres.
Nario, s. f. Les narines des hommes et des animaux.
Dér. du lat. Naris, m. s.
Nas,s. m. Dim. Nasé, augm. Nasas. Le nez de l'homme.
Acù n'a pas gés dé nas, cela n’a ni Lète ni queue, c’est insi-
NÉB 505
gnifiant. Aï agu bon nas, se dit lorsqu'on a eu le bon
esprit d'éviter un mauvais pas, une mauvaise affaire.
Dér. du lat. Nasus.
Nascu, do, part. pass. de Naïsse. Né. És nascu émbé
la créspino, il est né coiffé. Voy. Crespino. — On dit en
jouant sur les mots : És bé nascu, d'un homme qui a un
gros nez.
Naséja, v. Montrer le nez; épier furtivement, à la déro-
bée; flairer. Dé qué vèn naséja ? de quoi vient-il se mêler?
où vient-il mettre son nez?
Naturo, s. f. Nature; l'ensemble des créatures; les lois
qui régissent l'univers ; la propriété de chaque être créé, sa
complexion, son tempérament, sorte, espèce, affection,
et parties sexuelles des femelles en général.
Dér. du lat. Natura.
Navacèlo, n. pr. de localité. Navacelle, commune du
canton de Saint-Ambroix. En lat. Nova cella. Mème étym.
que Celleneuve, commune de l'Hérault. — Pendant l'occu-
pation romaine on appelait Cella une ferme, une grange
isolée où l’on enfermait les récoltes. Au moyen âge on
donna ce nom à une retraite de moine dépendante d’un
prieuré.
Né, pron. relat. ou particule relative. En. L'é de né s'élide
devant une voyelle : Quan avès d’éfans ? —N'aï trés, Com-
bien avez-vous d'enfants ? — J'en ai trois. Né vène, j'en
viens. — Né vole pas, je n'en veux pas. — N'douras pas
gés, tu n'en auras pas, — Né vos? Véjo-n'aqui, en veux-tu?
en voilà.
Né, Néto, adj. Net, propre, sain, poli, luisant.
Du grec vite ou du lat. Nitere, nettoyer. — Aquél bla
és né, aquélo civado és néto, ce blé, cette avoine sont nets,
c.-à-d. sans mélange de corps étrangers. És révéngu né, il
est revenu ruiné.
Nébla, v. Bruiner. Se dit des fruits et surtout des blés
gâtés par la bruine, épais brouillard qui est une des causes
principales de la carie ou charbon. Au fig. obscurcir, voiler,
couvrir de nuages, intercepter la lumière. Se dit de certains
oiseaux ou insectes dont le grand nombre forme une sorte
de nuage. Néblavou, il y en avait une nuée, une foule.
— Nèbloupas, il y en à peu. À lous ièls néblas, se dit d'une
personne dont la vue se trouble, s'affaiblit.
Nèblo, s. f. Brouillard, brume. Du lat. Nebula. Vapeur
épaisse dans l'air; Bruine, vapeur qui est une des causes
du développement, de la maladie des blés appelée carie ou
charbon, maladie contagieuse qui se reproduit par la semence
quand elle en est attaquée; le chaulage du blé en est un
remède efficace.— Voy. Cédoussino.
Neboù, do, s. Neveu. Dim. Néboudé, to. Le diminutif
ne concerne que l'âge; pour exprimer le fils du neveu, le
petit-neveu, il faut dire picho-néboù. Qué nouris néboudos
et néboùs, nouris loubos et loubétoùs, qui nourrit nièces et
neveux, nourrit louves et louveteaux.
Dér. du lat. Mepos, m. 8.
Néboudé, to, s. Dim. de néboù.
506 NEG
Nèci, Nècio, s. Fou, sot, niais, nigaud, imbécile. Du
lat. nescius, ignorant. És nèci dé sa fénno, il raffole de sa
femme ; és nèci à coure cariètro, il est fou à courir les rues ;
anés pas faïre lou nèci, n'allez pas faire la bête ; és pu nèci
que l'aïgo és longo, il est plus fou qu’on ne saurait dire;
nisado dé nèci, une couvée, une famille d’imbéciles.
Un pâoure nèci, un pauvre innocent; un michant nèci,
une méchante bête; sès bé nèci dé créire acd, vous êtes bien
simple de croire à cela; sou pas tant nèci! je ne suis pas
si sot! anés pas faïre lou nèci, n'allez pas faire la bête. —
Voy. Bajanèl.
Néciardariè, s. f. Niaiserie, sotlise, bagatelle, conduite
ou action d’un sot.
Néciardas, s0, s. homme simple, péjoratif de nécias,
qui est lui-même une augm. de nèci.
Nécias, asso, s. augm. de nèci, gros lourdaud, gros
imbécile.
Nécié, éto, s. dim. de MNeci.
Nécije, s. f. Niaiserie, simplicité, bêtise, imbécillité, sot-
tise, mauvaise plaisanterie, privauté. Ac és dé nécije, tout
cela n’est pas sérieux ; finissès vostos nécije, CESSEZ VOS ges-
tes, vos plaisanteries déplacées; quinto nécije! quelle folie!
faï pas, dis pas qué dé nécije, il ne fait, il ne dit que des
bêtises.
Néga, v. Nier, déclarer faux ce qui est vrai ou considéré
comme tel; du lat. negare. — Saique, ou négarias pas?
Vous n’auriez pas sans doute le front de nier cela? Ou a
néga, il l’a nié.
Néga. v. Noyer, faire périr, étouffer dans l’eau, submer-
ger, inonder, délayer dans une trop grande quantité d’eau.
As néga ta soupo, tu as mis de l’eau outre mesure dans ton
bouillon; ra néga démando pa qué d'aïgo, rat noyé
ne demande que de l’eau, se dit de celui qui s’osbtine à Intter
contre la mauvaise fortune, au risque de s’empêtrer de plus
en plus.
On dit d’un homme timide, irrésolu : a toujour péou
dé sé néga pér quiou, il craint de se noyer dans un verre
d’eau; poudèn néga lou chi, aro qu'avèn dé la méno,
nous pouvons ncyer le chien, à présent que nous avons de
la race; mauvaise plaisanterie adressée à un père À qui naît
un premier garçon.
Dér. du lat. necare, tuer, faire périr.
Négadis, s. m. Un noyé.
Négadisso, s. f. Noyade. Au fig., ruine, catastrophe.
À tout pérdu din aquélo négadisso , il a tout perdu dans
cette catastrophe.
Négadoü, s. m. Endroit propre à se noyer, gouffre
d’eau à bords escarpés.
Négadoü, no, s. #”. et f. Celui qui nie une dette.
Celui ou celle qui doit être noyé, qui mérite de l’être.
Dér. de néga, noyer.
Négôci, s.m. Négoce, commerce, trafic de marchandises
ou d'argent; embarras, tracas; du lat. negotium, m. s. Lou
Diable lous négècis! au diable les affaires enauyeuses! |
NI
Négo-fol, s. m.. Petit batelet qui chavire facilement, on
dit aussi : nègo-chi.
Négre, négro, adj. Noir de couleur noire. És négre coumo
lou péca, il est hideux comme le péché. Négre-dé-fun, noir
de fumée.
Dér. du lat. niger, nigra, m.s.
Négréja, ». tirer sur le noir, se rembrunir, prendre une
teinte sombre. Couménço à négréja, le crépuscule com-
mence à paraître, le jour commence à tomber.
Négrâou, âoudo, adj. Moricaud ; noiraud ; personnage
au teint très-brun, hâlé, à la peau tirant sur le noir.
Négrou, s. f. Noircissure, taches de salissure, et non
pas noirceur qui ne s'emploie qu'au figuré. Qualité de ce
qui est noir, tache noire.
Nèn, s.m. Nain, emprunt fait au français. Employé seul,
ce mot signifie exclusivement mürier nain, mürier à basse
tige qui se dit aussi nané. Pour désigner tout autre arbre-
nain, il faut mentionner son nom : wn iranjè nèn, un
oranger nain.
Néné, subs. m. Nom d'enfant, dim. d’éfantouné ou de
Jan, Jané. Faï toun néné, endors-toi, se dit en parlant à
un petit enfant à la mamelle. — Nèno, nom d’une petite
fille, dim. de Jeanne ou d'Anne.
Nèou, subs. f. La neige. Sé n'és tira blanc coumo la nèou,
il s'en est tiré blanc comme neige, en parlant d’une affaire
facheuse. Tombo dé nèou, il neige. La nèou dé huiè jours,
maïre dé la tèro; dé huiè jours én laï, maïrastro, neige
de huit jours nourrit la terre, au-delà, c’est une marâtre.
Dér. du lat. nix, nivis, m.s.
Nère, et non pas Nèr, s. #. Ners, village du canton de
Vézenobre. Le nom vulgaire et la situation de cette loca-
lité pourraient en indiquer l'étymologie. Ners se trouve
placé au point où l’ancienne voie romaine de Nimes à Ger-
govie et le nord de la Gaule, par la vallée de l'Allier, fran-
chissait le Gardon par un pont dont les vestiges subsistent
encore. Un droit de passage était perçu sur ce pont, et ce
droit était sans doute équivalentà un néret monnaie de
bronze où monnaie noire équivalente à une maille. Une
grant quantité demailles ou néretx, pesant le poix de soizante
siæ livres pesant ou environ. — Lit. remiss. ann. 4462, in
Reg. 198, ch. 372.
Voy. Ducance. Glossarium, T. 1v. p. 624; col. 4, au
mot Neretus.
Nétéja, v. Nettoyer. L'an nétéja, l'an rascla, se dit d'un
homme qui a tout perdu au jeu.
Dér. du lat. Nitidum agere, faire net.
Néviè, s.m. Grande quantité de neige tombée à la fois;
grande surface de pays couverte de neige; tapis de neige.
Dér. du lat. nix, nivis, neige.
Ni, particule négt. et conj. Du lat. nec ; de l'ital. ni ou
ne; de l'esp. cat., ni. Ni, en français. Acù és ni-tu-ni-vous,
se dit d’une chose ou d'une personne insignifiante et sans
conséquence.
On dit aussi dans le même sens : És bo ni pér bouli ni
NIS
pér roustà, il n'est bon à rien. — Ou voulès pas? — Ni maï
iéou, vous ne le voulez pas? — Ni moi non plus. — Ni pér
aquélo, n'importe, peu importe, nonobstant cela. — Voy.
Nitu-ni-vous.
Nifla, v. Flairer, renifler, espionner au fig.
Niflado, s. f.Reniflement; action de renifler, de flairer.
Niflaïre, Niflaïro, s. Un homme qui a le défaut de reni-
fler constamment ; renifleur.
Niflan, s. m. Le nez. C’est un mot de fantaisie, imité de
l'argot, qui est habitué à donner aux divers membres ou
aux parties du corps un nom qui rappelle ou représente
leurs fonctions. Ainsi, de même que l'on a appelé les yeux
luisants où quinquets, parce qu'ils éclairent, on a fait du
nez niflan parce qu’il renifle. — Un cù dé poun sus lou
niflan, un coup de poing sur le nez. Douna un cà dé
Pre , approcher son nez de quelque chose pour en sentir
Niflard, s. ”. Un individu qui a le défaut d'espionner,
d'épier furtivement, à la dérobée.
Niflo, s: f. La morve qui pend au nez des enfants. Tira
la niflo, Où nifla, ou nifléja, renifler.
Nime, nom pr. m. Nimes, nom du chef-lieu du départe-
ment du Gard, et de l'ancienne Civitas des Volkes- aréko-
mikes. — Nimes (Nemausus en lat.) a la signification de
source sacrée, céleste. » « Ce nom trouve son explication
dans l’ancien irlandais nem, ciel, gén. nime. On trouve
Nemesa (Auson. Mosel, v. 354) affl. de la Moselle appelé
aujourd’hui la Nims, qui est le nom vulgaire de la ville de
Nimes, articulé en faisant sonner l’s final. (Voy. G.
CHARVET. — Les voies romaines chez les Volkes-arékomikes,
deux. part. — ch. Ier, page 48.)
Ninfro, s. f. Une petite effrontée. Ce mot ne serait-il pas
une corruption de #info, la mythologie nous ayant rare-
ment représenté ses nymphes comme des modèles de mo-
destie et de retenue?
Nipa, ado, adj. Nippé, ée ; pourvu d'habillements; És bé
. nipa, il est bien pourvu de vêtements.
Nipo, s. f.Hardes, nippes, vêtements, trousseau. Ce terme
ne s'emploie qu’au pluriel, comme dans le français; mais si
on ne le relève de quelque épithète, il signifie ordinairement
une défroque de peu de valeur.
Niquouès, adj. Narquois, goguenard, malin, nigaud,
simple. Én dé soun èr niquouès, avec son air narquois ou
badaud.
Nis, s. m. Nid. du lat. Nidus. Petit réduit de diverses
formes, ordinairement circulaire, composé d'élémentsdivers,
dans lequel les oiseaux pondent leurs œufs et élèvent leurs
pétits. Sémblo qué vaï préne la maïre dou nis, se dit d'un
homme qui agit avec des ménagements, des précautions
ridicules
Nisa, o. Nicher. Qudou sa ounté niso? qui sait où il
niche, où il perche? se dit en demandant où quelqu'un
demeure. On dit aussi nisa; terme de jeu pour mettre sa
mise, dont c’est sans doute alors une corruption.
NIS 507
Nisado, s. f. Nichée. Se dit familièrement pour désigner
“une famille nombreuse. Vaqui uno bèlo nisado, voilà une
belle famille. Léva dé nisados, dénicher des oiseaux. Par
extension on dit : uno nisado dé rats, dé sèrs, une nichée
de souris, une couvée de serpents. — Nisado dé cassibraïos,
nichée ne canailles, nichée de racaille.
Nisâou, s. ». L'œuf couvain, en v. fr. nicheul, l'œuf
qu'on laisse dans un nid de poule pour engager la volaille
à pondre d’autres œufs au même endroit. Nid de la poule
qui pond et de celle qui couve. Nisdou de pijouniè, un
boulin : trou pratiqué dans un colombier pour faire nicher
les pigeons.
Nisétaïro, s. f. Marchande d’anisette, de coco. Type qui
disparait et que Lafare a si bien dépeint dans ces vers :
L'aigo és fresquo, méssius, vène dé la tira ;
Nisèto, cartazèno et sird, qu'âou voudra
Sé sara dé ma tâoulo âoura bono mésuro.
Il fallait la voir, les dimanches d'été, dans les promenades,
triomphante surtout les jours de foire, portant, d'une main,
sa crache pleine d'eau qu’elle n’osait tout-à-fait garantir
comme étant à la glace, et de l'autre, un petit panier où
étaient deux ou trois verres et l’intarissable fiole —1doupéto —
contenant son anisette dont elle blanchissait, pour un sou,
les verres d'eau qu’elle débitait à ses nombreux chalands.
C'était-la son bon temps. Plus ‘tard, au lieu de courir,
alerte et provoquante, dans la foule, elle s'établit, immobile,
auprès d'une table où s'étalaient, à côté de l'anisette déjà
dédaignée, des sirops et des ratafias ; et cette transformation
mème n’a pu la sauver ! Les cafés l'ont tuée, et l’absinthe
malfaisante et plus chère, a remplacé pour toujours peut-
être la pauvre anisette qui n’est autre chose d’ailleurs qu'un
équivalent du raki des Arabes.
Nisèto, s. f. Anisette. Liqueur fabriquée avec de l'anis.
Dans le midi on l'extrait du fenouil par la distillation,
et elle n’arien de communavec cette liqueur moelleuse, onc-
tueuse et parfumée connue sous le nom d’anisette de Bor-
deaux.
Nissôou, s. ”. Bunium bulbocastanum, plante de la
famille des Ombellifères vulgairement appelée terrenoiz.
Racine formée par un bulbe arrondi de la grosseur d’une
cerise, bonne # manger, fournissant de l’amidon. On trouve
cette plante dans les champs et prairies, au bord du Gardon,
à La Baume, à Uzès, à Alzon, au Vigan. Elle fleurit en
juin-juillet.
Quelques-uns de ces bulbes ont la grosseur et mème la
saveur de la châtaigne.
Nista, v. Flairer, fureter; espionner; écornifler ; s'in-
former avec curiosité; fourrer son nez; pressentir ; prévoir ;
découvrir de loin.
Nistéja, v. épier furtivement, fureter à la dérobée. Fré-
quentatif de nista.
Nistéjaïre, s. m. Homme curieux, indiscret, importun,
facheux ; fureteur, qui fourre son nez partout.
508 NOO
Ni-tu-ni-vous, Voy. Ni. Mot à mot, ni toi ni vous,
phrase-faite dans laquelle on supprime, par euphonie, l's
final de us qui la prend toujours. Noun és ni-tu-ni-vous,
il n’est ni chair ni poisson, en parlant d’une personne irré-
solue, qui ne sait prendre un parti sur rien, ou qui nage
entre deux eaux : On le dit également d’une chose qui
n’est ni mauvaise, ni bonne, qui n’a ni vice ni vertu.
Nivèl, s. m. Niveau, instrument de géodésie. État d’un
plan qui n’a aucune inclinaison, qui est horizontal.
Dér. du lat. Zibellum, pris pour Zibella, fléau d'une
balance qui, pour être juste, doit être horizontal.
Nivéla, v. Niveler, mettre de Niveau.
Nivou, s. m. et f. Nuage, nuée. Lou tén és nivou; faï
nivou, le temps est couvert, nébuleux. Low nivou gagno, le
temps se couvre. Low nivou dé la nèou, temps qui menace
de neige. Ndou coumo las nivous, haut comme les nuages.—
Au fig, on le dit d’une personne qui se rembrunit, dont la
mauvaise humeur couve et va éclater.
Dér. du lat. Nubes, m. s. ou du celt. Nul.
Nivoulado, s. f. Nuée d'orage qui donne une pluie de
peu de durée. Agud's pa qu’uno nivoulado, ce n’est qu'une
averse sans importance, un nuage qui crève.
On dit aussi troussado, mais cette dénomination s’ap-
plique à une pluie d'orage plus intense, accompagnée de
tonnerres et quelquefois de grèle.
Nivouléto ou Lucéto, s. f. luette; on dit aussi ntowléto,
par contraction. Luette, appendice charnu à l'entrée du gosier
dont il forme la communication avec le nez; cet organe est
nécessaire à la prononciation et à la succion. Du lat. wva,
m. s. à cause de la ressemblance de la luette avec un grain
de raisin, et de son dim. wvula. Le français a fait uvette,
uvulette, puis luetle, et le languedocien l’a imité par
nivouléto et luséto.
Nivouléto, s. f. dim. de nivou ou plutôt de nivoulado;
celle-ci est une nue qui porte souvent le tonnerre et la
grèle ; la nivouléto ne jette ordinairement qu’une ondée.
Noço, s. f. Noce, festin. Anan faïre la nogo,nous allons
festoyer, banqueter, faire ripaille. L'assemblée qui assiste à
une noce.
Nonanto, adj. numéral. Nonante, quatre-vingt-dix. Du
lat. nonaginta, m. s.
Nono, s.f. Dim. nounéto. Dodo, terme de nourrice, som-
meil d’un enfant. Faï sa nono, se dit d’un enfant qui som-
meille. Faïre nono, faire dodo, dormir. Nono-nounéto est le
commencement d’une chanson sur un air monotone, très-
propre à endormir un enfant.
Nôou, Novo, adj. et s. Neuf, neuve. És ndou coumo un
pifre, se dit d’un homme naïf, sans expérience. — Éscoubo
novo faï l'oustâou né, balai neuf fait maison nette; c.-à-d.
tous les commencements sont beaux. Flame-ndou, v. ce
mot. Faïre dé nou, refaire, faire à neuf.
Dér. du lat. novus, m.s.
Nôou, nom de nombre. Neuf. Du lat. novem, m. s.
Nôou! loc. prononcée sous forme d’interj. et dont on se
NOU
sert lorsqu'on décortique les châtaignes dans les Cévennes
pour indiquer que le battage est suffisant. Cette expression
signifie littéralement : elles sont assez battues; elles en ont.
Noro, s. f. Belle-fille ou bru. Du lat. nurus. On dit prvb.:
amour dé noro, amour dé géndre, és uno bugado sans céndre.
Nose, s. f. Noix, fruit du noyer. Du lat. nuz. La
nose d'âou ginoul, la rotule. Soun sa tèn pa las noses, son
sac ne retient pas les noix, se dit d’une personne qui parle
sans réserve, qui raconte indistinctement tout ce qu'elle
sait, même ce qu'elle devrait cacher. On dit aussi nouse.
(Voy. SAUVAGES.)
Tèsto de nose, tête de linotte, étourdi, tête creuse. Nose
boufo, noix creuse, vide. Quièïsso dé nose, quartier de
noix; nose muscado, noix muscade, nose loumbardo ou
nougo, noix de jauge, fruit très-gros dont l'amande n'est
pas aussi volumineuse que Ja coque semble l'indiquer. Nose
d'éstrécho, noïx anguleuse dont le fruit est petit, serré el
très-difficile à casser; nose-coucardo.— Voy. ce dernier mot.
Nostre, nostro, pr. poss. et subst. Qui est à nous, le
nôtre, la nôtre. Low nostre, ce qui nous appartient. Lows
nostres, les nôtres, nos parents, nos partisans. Sèx din lou
nostre, nous sommes sur nos terres et non pas fermiers.
Lou bon Diou té fague nostre! que le bon Dieu vienne te
prendre! Démandan pas qué lou nostre, nous ne deman-
dons que ce qui nous revient, ce qui est à nous.
Noto, s. f. Note de musique. Facture de commerçant,
mé dounarés ma noto, vous me donnerez facture de ce que
je vous dois.
Notos, s. f. plur. Les minutes d’un notaire. Ce mot ne
s'emploie qu'au pluriel. Les notaires sont les gardes-notes
des actes originaux déposés dans leur étude.
Nou, part. négat. Non. Expression plus familière que
nani, bien qu'ayant la mème signification. À di dé nou, il
a renoncé à son idée, à son projet, il a reculé, il a caponé,
il a fouiné (langue verte). Un jour et l'doutre nou, de deux
jours l’un. {Voy. jour.) Ah! Diou nou! Ah! grand Dieu,
non ! Ah! non pas certes !
Noublèsso, s. f. Noblesse, qualité de celui qui est noble,
s'emploie au fig. comme qualité du cœur.
Nouga, s. »”. Nougat. Sorte de gâteau fait avec du miel
et des amandes.
Nougaïo, s. f. Articulation. S'és désnougaïa l'éspanlo, lou
ginoul, il s'est démis l'articulation de l'épaule, du genou.
Cerneau, moitié d’une noix verte tirée de sa coque avec un
couteau appelé cernoir, du lat. cernere, séparer.
Nougarédo, s. f. Noiseraie, terrain planté de noyers. Ce
terme s'emploie souvent comme nom de lieu ow nom
d'homme. On dit aussi Nougaré, Nogaret, nom d'homme, et
Nousièiro. — Voy. ce mot.
Nouguiè, s. m. Noyer. Juglans regia, Linn., arbre de
la famille des Juglandées qui produit le fruit connu sous
le nom de noix. Nom propre rendu en français par Noguier.
Nou’n, contr. de nous-én. Nou’n dounarés, Vous nous en
donnerez.
NOU
Noun, part. nég. On ne l'emploie jamais isolément, car
il n'est pas le même que l’adv. Non, opposé de oui, qui se
dit toujours nou. Noun, dans une phrase, suivi ou non de
pas, équivaut à ne pas, non pas, quelquefois à ne, seule-
ment. Noun save, je ne sais pas, je ne sais, je n’en sais rien.
Noun faraï, pardiou, je n’en ferai pardieu rien! Y-anaraï,
noun pas pér acù, maï… J'irai, non pas pour cela, mais...—
Cependant noun pas remplace nou, comme composé donnant
même plus de force à la négation : Ou voulès? — Noun pas!
Le voulez-vous ? non pas! non, certes !
Noun, s. ». Nom; terme dont on se sert pour désigner
un être. Les noms propres, dans l’idiome Cévenol, comme
dans les autres langues, sont tirés en général de la religion,
des diverses professions, des qualités et des défauts moraux
ou physiques, des habitudes, des mœurs, des noms de lieu
‘d’origine et de choses qui nous entourent. Quelques exem-
ples épars, que nous allons donner, indiqueront suffisamment
le mode de formation et surtout les difficultés, les inconvé-
nients d'une traduction de ces noms; quant à leur emploi,
quelques tournures locales, tout-à-fait différentes des habi-
tudes françaises doivent être mentionnées.
: De même qu'en ftalie où l’on dit : l’Alighieri, l’Ariosto,
il Boiardo, il Petrarca, il Tasso, il Boccaccio, le languedo-
cien emploie volontiers le même article et l’ajoute indistinc-
tement au nom de famille et au nom de baptème : lou Sa-
batiè, l'Antouëèno, lou Rocho, la Jano. 11 est aussi d'usage de
dire : Pière dé Déssaïén, Jan dé Rouvéïréou, Céséto dé
Mdourin, César d'Arnavièio, la particule dé n'ayant, cette
fois, d'autre prétention que d'indiquer la filiation; et lorsque
la mère a été veuve de bonne heure ou que, maïitresse-
femme, elle passe pour avoir, du vivant de son mari, une
bonne part dans l'administration de la communauté, c’est
elle qui donne son nom aux enfants, et l'on dit alors :
Jané dé Roso, Luisé dé Rouvéirolo, Jâousè dé Miérquésso,
Andrè dé Blanquo.
C’est une politesse en languedocien, de nommer par son
nom la personne que l’on salue en passant ou à laquelle on
adresse la parole, ft-elle seule, et quoiqu'il n'y ait aucun
risque d'équivoque. Cette coutume est usitée aussi en Italie,
où on ne l'emploie cependant qu'avec le nom de baptème.
On sait qu’en français il n’est point de bon ton de dire
ainsi, et qu'il suffit, dans ce cas, de dire Madame ou Mon-
sieur.
Les noms de famille languedociens sont tous susceptibles
de féminin ou de diminutifs. Comme on ne dit pas, pour
le peuple, madamo uno tèlo, comme en français, il a fallu
donner, à chaque nom propre, une désinence féminine
pour l'épouse de tel et tel. On est souvent fort embarrasé
pour former ainsi le nom des femmes; les principes suivants
sont assez généralement reçus à quelques rares exceptions
près :
Les noms terminés au masculin par un e, un i, uno
un ow muets, font ésso au féminin :
Rouvièiro — Rouvièirésso — Dim. Rouviéiré.
NOU 509
Mièrgue — Mièrguésso — Dim. Mièrgué.
Gardio — Gardiésso —Dim. Gardioù.
Sdouvi — Sdouviésso — Dim. Sdouvioù, Sdouviéto.
Basquou — Basquésso — Dim. Basqué.
Les noms en a font ado :
Priva — Privado — Dim. Privadé.
Bérna — Bérnado — Dim. Bérnadé,
Exc. cependant certains mots qui, en français, pren-
nent un c final et qui font ago :
Altéira — Altéirago — Dim. Altéiragué.
Brassa — Brassago — Dim. Brassagué.
Ceux en al font aïo :
Rigal — Rigaio — Dim. Rigaïé.
Guibal — Guibaïo — Guibaié.
Ceux en an font quelquefois anto, quelquefois ando,
quelquefois anquo, quelquefois ano :
Paladan — Paladano — Dim. Paladané.
Duran— Duranto — Dim. Duranté.
Mdouran — Médourando — Dim. mdourandé.
Blan — Blanquo — Dim. Blanqué.
Ceux en dou font, suivant le cas, alo quand il fait a
en français et doudo quand il fait aud :
Pourtéou — Pourlalo — Dim. Pourtalé.
Barnassâou — Barnassalo — Dim. Barnassalé.
Arndou — Arnéoudo — Dim. Arnéoudé.
Béréou — Bérdoudo — Dim. Béréoudé.
Ceux en ar font ardo :
Bérar — Bérardo — Dim. Bérardé.
Gaïar — Gaïardo — Dim. Gaïardé.
Foucar — Foucardo — Dim. Foucardé.
Ceux en as font asso :
Dumas — Dumasso — Dim. Dumassé.
Dalgas— Dalgasso — Dim. Dalgassé.
Ceux en é fermé font éto :
Coulé — Couléto — Dim. Coulétoi.
Bouné — Bounélo — Dim. Bounétoi.
Ceux en è ouvert font èto :
Déâoudè — Déoudèto — Dim. Ddoudété.
Balè — Balèlo — Dim. Balété.
Cependant :
Andrè fait Andrèio — Dim. Andréné ou Andréssé.
Ceux en iè font iètro :
Cavaiè — Cuvaïèiro — Dim. Cavaièiré.
Larguiè — Larguièiro — Dim. Larguièiré.
Piè fait Piècho — Dim. Pièché ainsi que Dalpiè, Tié, etc.
Ceux en él font éio ceux en èl èlo ;
Dounzél — Dounzéio — Dim. Dounzéioù.
Roussèl — Roussèlo — Dim. Roussélé.
510 NOU
Brunèl — Brunèlo — Dim. Brunélé.
Ceux en én font énto :
Sirvén — Sirvénto — Dim. Sirvénté.
Clamén — Claménto — Dim. Claménté.
Ceux en èou font èoudo :
Chapèou — Chapèouno — Dim. Chapèoudé.
Vèou — Vèoudo — Dim. Vèoudoi.
Ceux en èr font erto :
Roubèr — Roubèrlo — Dim. Roubèrloù ou té.
Masèr — Masèrlo — Dim. Masèrté.
Ceux en és font éso :
Pagés — Pagéso — Dim. Pagésé.
Courtés — Courléso — Dim. Cowrtésoù.
Cependant :
Brés fait Brésso — Dim. Bréssé.
Ceux en ? accentué font ino :
Baldi — Baldino — Dim. Baldiné.
Sabouri — Sabourino — Dim. Sabouriné.
Méourin — Mdourino — Dim. Mdouriné.
Ceux en iow font ivo :
Donadiou — Danadivo — Dim. Donadivé.
Matiou — Mativo— Mativé.
Fountaniou — Fountanivo — Fountanivé.
Cependant :
Fiou fait Fiousso — Dim. Fioussé.
Cariou — Carioudo — Dim. Carioudé.
Ceux en à accentué font oto :
Ribd — Riboto — Dim. Ribouté.
Mord — Moroto.— Dim. Morouté.
Ceux en ol font olo :
Ravassol — Ravässolo — Dim. Ravassoulé.
Tréscol — Tréscolo — Tréscoulé.
Ceux en dou font olo :
Souléiréou — Souléirolo — Dim. Souléiroulé.
Massabidou — Massabiolo — Massabioulé.
Ceux en or font ordo :
Itor — Itordo — Dim. Itourdé.
Ceux en os font osso :
Bédos — Bédosso — Dim. Bédoussé.
Mâoubos — Mdoubosso — Méouboussé.
Ceux en ox et en oun font ouno :
Chapoù — Chapouno — Dim. Chapouné.
Chardoù — Chardouno — Dim. Chardouné.
Pièrédoun — Pièrédouno — Dim. Pièrédouné.
Ceux en ou font owlo :
Coumoul— Coumoulo — Dim. Coumoulé.
Réboul — Réboulo — Réboulé.
NOU
Gourdoùs — Gourdouso — Dim. Gourdousé.
Ceux en dus font tantôt owso, tantôt ousso À
Rous — Rousso — Dim. Roussé.
Ginoùs — Ginouso — Dim. Ginousé.
Cahoùs — Cahousso — Dim. Cahoussé.
Ceux en x font wdo :
Téstu — Téstudo — Dim. Téstudé.
Cependant :
Cadu fait Caduquo — Dim. Caduqué.
Ceux en ws font uso où wsso :
Périus — Pértuso — Dim. Pértusé.
Tabus — Tabusso — Dim. Tabussé.
Ceux en un font no:
Déoutun — Déoutuno — Dim. Déoutuné.
Véirun — Véiruno — Dim. Véiruné.
On sent que ce ne sont là que des noms usuels et com-
munsdans le pays; il en est une foule d’autres qui n’ont pu
suivre les règles générales, surtout ceux que le français à
introduits parmi nous. A leur égard, on doit suivre, autant
que faire se peut, les analogies et les étymologies, surtout la
lettre finale du masculin dans le français. Quand aux dimi-
nutifs, il est difficile de préciser ceux qui doivent être ter-
minés en é et en où : l'usage et l'euphonie sont les seuls
juges en cela. Le féminin des diminutifs se forme en ajou-
tant la syllabe muette to à ceux en éet la syllabe muétte
no à ceux terminés en où.
Il ést bien entendu que les noms de baptème ont aussi
leurs diminutifs ét c’est sous cette forme surtout qu'ils sont
employés. Mais qui pourrait essayer de poser des règles aux
capricieuses transfigurations qu'ils subissent ainsi ? L’inva-
sion de prénoms nouveaux rendrait plus vaine encore cette
prétention ; car s’il était possible, par habitude peut-être,
de reconnaitre Alexis, François, Isabelle 6ù Élisabeth, Thé-
rèse, voire Jacques sous le masque de Sissé, Césé, Béloun,
Trésoù et Jacourlo, qui s'imaginerait que Fre, Dalè, Mané
représentent Ferdinand, Edmond, Emmanuel? Mais ces
diminutifs ne sont pas seuls méconnaissables : lorsque le
beau monde français, ne voulant plus s'appeler Pierre,
Paul ou Jean, comme ses pères, alla chercher ses patrons
dans les légendes étrangères, le languedocien eut la vani-
teuse pensée de le suivre dans cette voie. Mal lui en prit; et
s'ilbaptise ses enfants des noms d’Oswald, d'Edwige, de
Wilfrid, il est obligé de les appeler autrement; car ces noms,
il ne peut pas les prononcer, qu'il revienne donc, pour ne
plus les quitter, aux jolis prénoms Thérèse, Marie, Jeanne
et tant d’autres du même genre, si propres à son fluide lan-
gage, dût-il continuer à en faire des Frésoù, des Mariouné,
des Janoù, Janétoù ; cela vaudra toujours mieux que Ci-
tènnéstrélo, ou Brutusé, petits noms dont nous avons entendu
une mère appeler ses enfants que l'on avait trouvé de bon
goût de baptiser Clytemnestre et Brutus. — Voy. Escaï-
noun, Dalmas, Déléouse, Masèl, Massabiôou.
téianns ou
NOU
Noun-dé-noun, Nom de-nom ! juron qui était sur le
point de transgresser le second commandement de Dieu et
qui, étranglé à temps, finit en murmurant un vain son.
Nouri, v. Nourrir. Du latin nutrire, alimenter ; four-
nir les aliments nécessaires; allaiter; entretenir; élever.
—Mé donou vin sôous et nourè, on me donne vingt sous par
jour, plus la nourriture,
Nouriço, s. [. Nourrice, femme qui allaite un enfant
qui n’est pas le sien,
Dér. du lat. nutriæ, où de nutricia, tie.
Nouridoù, s. m. Cochon d’un an, cochon à engraisser,
prèt à être mis à l'engrais.
Dér. du lat. nutriendus.
Nouris, s, m. Le nourricier, le père nourricier, Le mari
de la nourrice. — Voy. Nouriçgo. On dit ordinairement :
Païre où pèro-nouris. Cependant la mère, en parlant du
mari de la femme qui allaite son enfant, le désigne fort
bien ainsi : Moun nouris. L'enfant l'appelle plus tard de
même, et il va plus loin encore car, du frère de cet homme
il dit : moun ouncle-nouris.
Nous, s. m. Nœud. Du lat. nodus, par la suppression
du d, Protubérance, saillie, tubérosité. Nous-courén, nœud
coulant.
Nous, pr. pers. Nous, régime et jamais pluriel de je, le
verbe se conjuguant toujours sans pronom. Fasès-nous un
plési, faites-nous un plaisir. Nous ou dounè, il nous le
donna. Faguén coumo lous sarjans : sé nous aimou pas,
aïmén-nous éntre ndoutres, faisons comme les huissiers :
si l'on ne nous aime pas, aimons-nous entre nous.
Nousa, v. Nouer. Po pas nousa lous dous bous, il a de
la peine à joindre les deux bouts de l’année pour subsister
avec ses revenus.
Nousa, do, adj. Nouée, 6e; chose fixée au moyen d’un
nœud. On dit en parlant d’un enfant rachitique et qui ne
grandit pas : és nousa.
NUS 5ti
Nouscléto, s. f. Sorte d'annean en métal qui fait partie
| d'une agrafe. On dit aussi maïéto.
Nous-courén, s. m. Nœud-coulant et non pas nœud-
| courant — Voy. Nous.
Nouse, s. f. Noix. — Voy. Nose.
Nousièiro, n. pr. de lieu. Nozières, hameau de lacommune
de Boucoiran, canton de Lédignan, près duquel se trouve
une station du chemin de fer d'Alais à Nimes. Lieu plantéde
noyers, noiseraie, synonyme de Nougarédo. — Voy. ce mot.
Nouïso, s. f. Dim. de Nose, petite noix. Le roitelet, qui
n'est pas plus gros qu'une noix: c'est le plus petit oiseau
d'Europe.
Nontäri, s. m. Notaire.
Nouvèl, adj. Nouveau, nouvelle.
Nouvèlo, s. f. Nouvelle, première annonce d’un événe-
ment récemment arrivé, bruit, rumeur. Brebis qui a atteint
sa seconde année. Nouvélos au plur. se dit surtout des nou-
velles données par les journaux. Avès légi las nouvèlos ?
avez-vous lu les journaux ?
Nouvémbre, s.m. Novembre, nom du onzième mois de
l’année Julienne et Grégorienne. Du lat. novembris, fait de
novem, neuf, parce que ce mois était le neuvième de l’an-
née romaine, lorsque cette année n'avait que dix mois.
Nouviäou, do, adj. Nuptial. 4bà nouvidou, réoubo
nouvidoudo, habit ou robe de noces.
Nouzélu, do, adj. Noueux, euse.
Dér. du lat. nodosus, m. sign.
Novi, Novio, subs. Le fiancé, la fiancée, au plur. Nôvis,
les fiancés. Sès préssa coumo un nôvi, vous tes pressé
comme celui qui va se marier.
Dér. du lat. novi.
Novo, adj. f. — Voy. Nôou.
Nus, uso, adj. Nu, nue, Ëro nus coumo un vèrme, il
était nu comme un ver. M'an laïssa tout nus, on m'a
dépouillé de tout.
O
0
0; s. m. La lettre O. L'o final, même suivi de l's qui se
fait toujours sentir qu’elle soit ou non la marque du plu-
riel, est muet ou tonique. Muet, il est le pendant de l'e muet
français et se perd, assez peu articulé, exactement comme
dans l'italien meco, mio, petto ; tonique, il a toute sa valeur
accentuée comme dans le français écho, numéro, zéro, ou
le latin ergo, cicero. Pour le distinguer dans ce dernier cas,
il prend un accentgrave. L'Italien encore procède de même,
il écrit faro, phare, et fard, je ferai. Le languedocien a
également besoin de différencier les deux valeurs de son o
final, et l'accent qui indique la prononciation peut changer
0
en même temps la signification d'un mot : fio et fio, fille et
feu, babo et babo, bave et chrysalide, tantos et tantès, tantes
et tantôt.
Dans la triphtongue, d'un usage très-fréquent, l'o, ainsi
que l'a et l'é prendun accent circonflexe. Cet accent n'a point
pour effet de changer le son de la lettre, mais d'indiquer
quel est la tonique de la triphtongue c.-à-d. que celle-ci se
prononce en forçant sur la voyelle accentuée et en coulant
sur les autres, mais le tout par une seule émission de voix,
sans l’allonger comme s’il formait deux syllabes : méoure,
féoure, biou. — 6 prend encore le même accent, par ana-
512 OH
logie avec le français et pour le distinguer du suivant,
lorsqu'il est particule précédant ou indiquant le vocatif : 6
moun Diou ! à mon Dieu! — Voy. la lettre I.
O, part. affirmative. Oui. Peu en usage et jamais qu'a-
vec les personnes que l’on traite très-familièrement, o est
l'ancien oc abrégé, adouci ou dégénéré. C'est encore le oui
des Hautes-Cévennes. — Voy. Oc.
Obro, s. f. Œuvre, travail, ouvrage. Y-a prou obro, y-a
fosso obro aqui, il y a là beaucoup d'ouvrage, beaucoup de
travail, de la difficulté. Y-dowra bé d'obro, il y aura bien
du travail, el aussi bien des difficultés. Faïre dé l'obro lou
vala, faire de la terre le fossé, c.-à-d: tirer de la chose
les dépenses nécessaires pour l'agrandir, pour l’entretenir,
ou bien faire de nouvelles dettes pour en payer d'anciennes,
L'obro léouso low mèstre, l'ouvrage recommande l’auteur,
autrement : à l’œuvre on connaît l’ouvrier. Fulobro. —
Voy. ce mot.
Dér. du latin opera, m. sign.
Obro, s. f. Labour, façon. Douna uno obro, donner une
façon, un labour à un champ. Y-a pa ‘ncaro l'obro, la terre
est encore trop humide ou trop sèche pour être labourée,
pour recevoir un bon labour. Y-a michanto obro, le travail
est difficile, pénible. Y-a bono obro? le labour se fait-il
aisément ? et, par extension, cette question s'adresse à une
personne occupée d'un travail quelconque. Lou ban dé
l'obro, le banc de l’œuvre, des marguillers. Bon jour, bon
obro, phrase de salutation adressée à des gens qui tra-
vaillent.
Oc, particule affirmative dont se servaient nos provinces
méridionales qui, pour cela, furent appelées la langue d'Oc,
séparée par la Loire de la langue d'Oil ou d'Oui, parce que
ces deux derniers mots élaient l'affirmation de cette autre
moitié de la France. Oc n'est autre chose que le lat. hoc,
ellipse de hoc est, cela est. Après avoir été l'expression
caractéristique d’une langue au point de donner son nom
au pays oùon la parlait, oc est complètement tombé en
désuétude. I est encore employé dans les environs du Vigan ;
mais pour nous, il n'existe plus; oï l'a depuis longtemps
remplacé, et il ne reste qu’un souvenir presque effacé de
lui dans o qui en est la corruption et dont on fait même
peu usage.— Voy. Où.
Ocho,s. f. Esse, clavette en fer que l'on met su bout de
l'essieu pour retenir la roue. Ocho serait-elle une altération
bien forte et bien gratuite du français esse ? — On donne
aussi ce nom aux groseillers épineux communs dans les
haies. *
Odi, s. m. Ennui, dégoût. On ne l’emploie qu'ainsi :
Véni én odi. La car mé vèn én odi, la viande me répugne,
m'est devenue fastidieuse. Mé vènes én odi, tu m'ennuies,
tu me fatigues, tu m'es insupportable. C’est du pur latin
mi venis in odium, tournure que l'italien a aussi imitée en
disant : venir a noia, ennuyer.
Oh! interj. commune à toutes les langues. Oh! qui
marque la surprise, l'admiration. On se sert aussi de cette
ON
exclamation, en prolongeant le son, pour appeler quel-
qu'un de loin.— Oh/ hé! oh! vraiment, oh! bien. Oh!
Did.— Voy. Did.
Oï, partic. affirmative. Oui. Ainsi qu'on peut le voir aux
articles nani, nou, o et voui, le languedocien a deux néga-
tions et deux affirmations, l’une familière et l’autre respec-
tueuse. Ces nuances sont scrupuleusement observées dans
l'usage et l'on en verra l'origine à l'art. Vouè. Où est l’af-
firmative familière; on en use seulement envers les per-
sonnes que l’on tutoie ou avec qui l’on agit du moins très-
familièrement si on leur dit vous; il est par conséquent
le corrélatif de nou. Ilne parait pas être une altération du
vieux oc aujourd’hui abandonné; c’est bien plutôt l’oil d’ou-
tre-Loire, qui du reste devait se prononcer à peu près de
même et qui est devenu l'oui français. Cet oil, dont le lan-
guedocien fit oï, dût être adopté par imitation d’un langage
plus élégant, et plustardil resta comme affirmation tutoyante
lorsque le oui, qui parut encore plus raffiné, et dont on fit
voui, lui succéda et s'établit définitivement comme affir-
mation respectueuse que devaient employer les gens bien
élevés.
Oli, s. m. Huile. Dans un pays où la cuisine se fait à
l'huile, il est bien entendu que si on n'indique pas une
qualité particulière il ne s’agit que de l'huile d'olive. Dé
bon àli, de la bonne huile. Ok for, huile forte. Oli d'anfèr.
(Voy. Anfèr.) Oli d'éspi, dé cade. (Voy. ces deux mots.)
Oli dé pè-dé-bidou, synovie, liqueur visqueuse, de la nature
du blanc ou de la glaire d'œuf, qu’on trouve dans les join-
tures des grands os des animaux et en plus grande quantité
dans celles du bœuf, à raison de sa grosseur; on l’emploie
pour la brülure. Aqud ’s taquo d'ôli, c’est tache d'huile qui ne
s’efface pas, cela vaut contrat. Oli dé couïde, on le dit plai-
samment d'un travail où il faut faire agir vigoureusement
les bras, user de la graisse de coude. Déou et d'ôli ! Allons !
courage !
Dér. du lat. oleum, mème signification ou plutôt d'oli-
vum, huile d'olive.
On, pron. pers. indéfini ou l’On. On, l'on. C'est à la
langue romane que le français a pris ce pronom qui n’est
autre chose que l’abréviation du lat. homo où homines. Le
roman disait : per tal que hom sapia, afin qu'on sache ou
que homme sache; non volem que hom prendan las per-
sonas des clerghes, nous ne voulons pas qu'on saisisse Ja
personne descleres, etc. Mais il est à remarquer qu’alors que
le français s’accommodait de la tournure romane, le Jan-
guedocien l'abandonnait pour revenir à la tournure latine ;
et s’il reprend parfois, avec quelque utilité, son bien passé
en d’autres mains, comme dans : on po pas y tène, on ne
peut y tenir, etc., etc. Par euphonie on rend souvent ox
par don, dans le dialecte alaisien & « Don sé forço, doutramén
vost’ éstouma sé bare. » (Leyris, poésie inédite.) Là où le fran-
çais emploie on, le Janguedocien peut presque toujours
rendre la phrase d'une manière différente et souvent préfé-
rable : on dit, on fait beaucoup de choses, sé dis, sélfaï
0SQ
fosso cdousos; on vous le fera voir, vous ou faran véire ;
on vous le dit, on vous l'a dit, vous ou disou, vous où an
di, on va commencer, van acouménga; on ne prend pas les
mouches avec du vinaigre, émbé fèou noun sé prénou mous-
quos.
Oouh! interj. qu'on peut rendre par ho là ! hé! Oouh! y-a
pas dingus? holà ! hé!il n’y a personne dans la maison ? —
Oouh ! en appuyant longtemps sur le premier 4, est aussi
le commandement à la bète de somme ou de trait de s'ar-
rêter et, dans ce cas, l'opposé de 5; le français le rend par
oh! ou ho! que le languedocien emploie aussi.
Ordi, s. m. Orge (hordeum), dont il y a plusieurs espè-
ces; l'orge commune, orge carrée, grosse orge ou escourgeon,
qui a quatre rangs de barbes, est la plus connue sous ce
nom. Fe
- Dér. du lat. hordeum, m. sign.
Orgue, s. m. Orgue ; toujours du mème genre au pluriel
comme au singulier.
Dér. du lat. organum, m. sign.
Orle, s.m. Bord, margelle d’un puits; bord d’un vase
quelconque; ourlet, repli et couture au bord d’une étoffe,
d'un tissu, pour qu'il ne s’effile pas.
Dér. du lat. orula, dim. de ora, bord.
Orviatan, s, m. ou bien Ourviatan. Orviétan, qu'un
charlatan de la ville d'Orviète, en Italie, importa à Paris
dans le xvne siècle. C'était un électuaire dans la compo-
sition duquel il entrait, disait-on, 54 drogues et qu'on
regarda longtemps comme un remède infaillible contre
beaucoup de maux. Selon M. Magnol, on donne ce nom à
Montpellier, à l'Anchusa monspeliaca. Il n’en reste plus que
le nom, et le languedocien s'en sert en disant : marchan
d'ourviatan, pour désigner un hableur, un charlatan qui
débite toute autre chose que des électuaires; mais ce mot
est aujourd'hui tombé en désuétude.
Os, s. m. plur. Osses. Noyau de cerise, de pèche, de
prune, ete., osses d'oulivos, marc d'olives pressuré. Piqua
lous osses, casser les noyaux. Leur dureté, pareille à celle
de l'os, a valu ce nom aux noyaux que le lat. appelait aussi
Ossa, ium.
Os, s. m. plur. Osses. Os, partie de l'animal dure,
solide, qui forme comme la charpente de son corps. À bon
chi bon os, à bon chien bon os. Os-pudén, os pubis; du lat.
pudens, pudique où pudendus, que l'on cache par pudeur.
Os-Bertran, l'os du croupion, l'os sacrum, la dernière des
vertèbres, terminée par un petit os un peu recourbé appelé
coccix. C'est là qu'aboutit une foule de nerfs dont la luxa-
tion est toujours dangereuse et souvent mortelle, ce qui à
fait donner par les anatomistes à cet os le surnom de
sacrum parce qu'il n’y faut pas toucher. Quant à ce qui lui
à Valu son nom languedocien, il serait difficile de le dire, et
cela tient sans doute à quelque fait anecdotique oublié. Os
dé supio, os de seiche que l'on met dans les cages d'oiseaux
et qui leur sert à affiler leur bec.
Osquo, v. f. Hoche, encoche, entaillure pour marquer
OUI 513
sur une taille le pain, le vin, la viande qu'on prend à crédit,
ou pour tenir toute autre espèce de compte ; cran, entaille sur
un solide, pour accrocher ou arrêter quelque chose, comme
en ont notamment certaines crémaillères. Ndoussa d'uno
osquo, hausser d'un cran. Féou faïre uno osquo âou crémal,
il faut faire une croix à la cheminée, se dit lorsqu'il se pro-
duit un fait extraordinaire, en dehors de toute prévision.
Vous faraï uno osquo à l'éouréw, je vous couperai un petit
bout de l'oreille pour vous en faire ressouvenir. Save cé qué
né vôou l'osquo, je sais ce qu'en vaut la marque ou l'aune.
À fa uno osquo, il s’est endetté.
Dér. du lat. occare, couper.
Osquo, part. affirmative qui répond à oui, assurément,
certainement. C'est le mot précédent devenu affirmation
familière et plaisante, en l’employant d'une manière ellip-
tique, comme si l’on répondait : ce que vous dites est
entendu, acquis au procès-verbal, marquons-le, enregis-
trons-le, faguën uno osquo. Osquo dé ségù, se dit dans le
mème sens.
Otobre, s. m. Dixième mois de l'année actuelle qui n'é-
tait que le huitième, comme ce nom l'indique, lorsqu'elle
commençait le 4° mars.
Dér. du lat. october, m. sign,
Ou, pron. relat.Le. Vous ou dise, crésès-ou, ou créségués
pas, aqud m'és égdou, je vous le dis, croyez-le, ne le croyez
pas, ça m'est égal. Ou faraï, je ferai cela. M'ou a di, il
m'a dit cela.
Dér. du lat. hoc, m. sign.
Ou, conj. alternative. Ou. Hiuëï ou déman, aujourd'hui
ou demain. On le fait suivre aussi de bé : Véndraï dilus,
oubé ow mandarés, je viendrai lundi, ou bien vous l'en-
verrez ; c'est à l'habitude et au goût à décider de l'emploi
de cette variante.
Ou ! est un de ces sons, comme oh! ho! elc., qui appar-
tient à toutes les langues pour exprimer, sans paroles, la
surprise, l'admiration, la douleur, le dégoût, selon l’into-
nation qu'on leur donne? Ou, que l'on fait ordinairement
très-long, peut se rendre au besoin par fi! fi donc! Ou
lou por! fi! le cochon ! fi done! le vilain! Ou/ n'dourièi bé
vérgougno! fi donc! j'en aurais bien honte ! — On crie
aussi aux pourceaux : Ou/ pour les chasser, comme on dit
en anglais out, hors! dehors !
Dans la bass. lat. huesium signifiait huée.
Oui, est une de ces intérjections ou exclamations, dont
il est question à l’art. précédent, qui exprime la douleur,
la souffrance : Ouï mé fasès mdou! aïe, vous me faites
mal.
Ouièirado, s. f. Le contenu d'un huilier plein, ouwüèro.
Ouièiro, s. f. Huilier en verre et surtout en fer-blanc,
ne se dit bien que du récipient qui contient l'huile pour
l'usage courant ou journalier; ce serait donc plutôt une
huilière ou cruche à l’huilé. Ouïèïro, pour huilier composé
des burettes où l'on met l'huile et le vinaigre, est un galli-
cisme.
514 OUL
Ouira ou Bouira, v. Frapper, meurtrir, briser les os, et
proprement, faire une outre ou préparer pour cela la peau
d'un vieux bouc, ce qui se fait de la manière suivante :
Le boucher, après avoir égorgé animal, le frappe à coup
de barre par tout le corps, pour ramollir les chairs et briser
les os, qu’il détache ensuite par l'ouverture du cou dont il
a séparé la tête. Quand tout le dedans est net, il fait à la
peau les préparations nécessaires pour qu'elle puisse con-
tenir le vin ou l'huile sans leur communiquer de mauvais
goùt.
On voit par là que l'expression lou Diable vous ouire
serait une imprécation horrible si l'on savait la force du
terme ou qu'on l’eût dans l'intention; mais ce ne sont le
plus souvent que des expressions qu'on peut appeler explé-
tives, qui ne signifient rien ou tout au plus que de l'im-
patience dans la bouche de ceux qui les emploient. (SAu-
VAGES.)
Outre, peau de bouc accommodée pour y mettre. des
liquides. Les outres faits avec une peau de vache cousue
d’un bout à l’autre sont plus solides que ceux de bone. Ils
sont beaucoup moins en usage depuis que les transports se
font très-peu à dos de mulet.
Dér. du lat. uter, m. sign.
Oulado, s. f. Le contenu d’une marmite, oulo.
Dér. du lat. olla, m. sign.
Ouliva, v. Cueillir les olives dans nos localités où l’on
récolte les olives avant qu'elles soient assez mûres pour
tomber d'elles-mèmes, et où les oliviers n'atteignent pas
des dimensions telles qu'il soit nécessaire d'en gauler le
fruit. Ouliva doit se rendre par cueillir et non ramasser
les olives. Ce mot peut être pris dans le sens de frucha :
Mous ouliviès an bièn ouliva, ont donné beaucoup de fruit.
Oulivados, s. f. plur. Olivaison, saison où l’on récolte
les olives, la récolte elle-même ou l’action de cueillir ce
fruit. Pér oulivados, à l'olivaison, au temps de l'oli-
vaison.
Oulivaire, Oulivairo, s. m. et f. Cueilleur, cueilleuse
d'olives, qui fait la cueillette des olives; ici ce travail est
ordinairement dévolu aux femmes, ce qui fait que le fé-
minin oulivaïro est presque usité. On dit aussi ouli-
varèlo.
Oulivastre ou Aoulivastre-Bouscas, s. m. Troëne.
Ligustrum vulgare, Linn., arbrisseau indigène, à fleurs
petites et blanches et baies noires, dont on forme des palis-
sades et des haies. C’est en parlant de lui que Virgile a dit :
O formôse puer, nimium ne crede côlori :
Alba ligustra cadunt; vaccinia nera leguntur.
« © bel enfant, ne t'enorgueillis pas de tes fraiches
couleurs : les blanches fleurs du troëne tombent; des baies
noires leur succèdent. »
Oulivédo, s. f. Olivette, champ planté d'olives.
Dér. du lat. olivetum, m. sign.
Ouliviè, s. m. Olivier, arbre qui produit l'olive, olea
OUN
luropea, Linn., l'olivier sauvage, olea sylvestris, Linn. —
Oulivid dé toun gran, castagnè dé. toun, pèro, amouriè
dé tus-mêmo, olivier de ton aïeul, châtaignier de ton père,
mürier de toi-même. Très-lent à venir, l'olivier, coûteux à
soigner, ne rend qu’en raison de ce qu'on lui donne, ainsi
qu'il le dit lui-même dans cet autre dicton : Ouncho-mélou
pè l'ouncharaï lou bè, graisse-moi le pied, je te graisserai le
bec. Ajoutez que son produit, qui n’est point annuel, n'est
que trop souvent détruit, pour de longues années, par les
hivers rigoureux qui ravagent presque périodiquement no8
olivettes.
La culture de l'olivier semblerait donc peu avantageuse;
mais comme il vient bien sur nos collines en terrasses, où
il ne serait pas utilement remplacé, et qu’il fournit cette
huile indispensable à tous nos apprêts culinaires, il partage
toujours, avec le mûrier et le châtaignier, l'amour, les
soins et la reconnaissance de notre pays.
Dér. du lat. oleaster, m. sign.
Oulivo, s. f. Olive fruit de l'olivier. À Toussan, l'oulivo
à la man, à la Toussaint, l'olive à la main.
Dér. du lat. oliva, m. sign,
Oulo, s. f. Marmite de potin ou de fonte où l’on fait
cuire toutes sortes d'aliments, Chacun sa cé qué boul din
soun oulo, chacun sait ce qui bout dans son pot, chaçun
sait où son soulier Je blesse.
Dér. du lat. olla, m. sign.
Oumbra, ». Ombrager, faire de l'ombre, défendre du
soleil.
Oumbraje, s. m. Ombrage, ombre que fait un corps
opaque en interceptant les rayons du soleil et particulié-
rement celle que font les arbres.
Oumbréja, v. Variante d'oumbra.
Oumbrén, quo, adj. Ombragé, couvert d’ombrage, qui
est à l'ombre; soupçonneux, pour une personne; ombra-
geux, pour une bête, un cheval surtout.
Oumbro, s. f. Ombre, obscurité causée par un corps
opposé à la lumière; espace privé des rayons du soleil.
Oumbro d’home vôou cént fénnos, l'ombre d'un homme vaut
cent femmes.
Dér. du lat. umbra, m. sign.
Oume, s. m. Orme, ormeau, ulmus campestris, Linn.,
on disait autrefois om et oum et c’est de là que sont venus
plusieurs noms de lieux : Sént-Éstève dé Lon, lou mas dé
Lon, que le languedocien prononce ainsi et que le français,
plus respectueux cette fois pour l’étymologie, écrit Saint-
Etienne-de-Lolm, etc. Le nom propre Delon Déloun, à
sans doute la même origine, mais alors le languedocien et
le français auraient repris leurs rôles.
Ouncha, v. Oindre, enduire d'un corps gras, graisser.
Ouncha las rodos, graisser les roues.— Salado mâou oun-
chado, salade qui manque d'huile, affaire mal conduite.
Dér. du lat. wngere, m. sign.
Ounchuro, s. f. Graissage, action d'oindre; toute sorte
de matières grasses et huileuses ; ce qu'on mange de gras
OUR
avec du pain. Faï michan manja soun pan sans ounchuro,
il'est désagréable de manger son pain sec. An plagnégu
l'ounchuro, on n'a pas employé assez d'huile dans cé ragoût,
dans cette salade ; qudou manjo soun pan sans ounchuro,
lou manjo sans mesuro. On dit aussi : ounchaduro.
Ouncle, s. m. frère du père ou de la mère, mari de la
tante : Dans le vocabulaire plaisant, ouncle signifie créan-
diér, qu'on appelle aussi comme dans le Nord, anglès,
anglais.
Dér. du lat. avunculus , m. sign.
Ounço, s. f. Articulation, nœud ou jointure des doigts
de la main ; la phalange elle-même.
Dér. du lat. uncus, croc, crochet.
Ounço, s. f. Once; seizième partie de l’ancienne livre;
elle vaut à Alais 25g. 99. soit en chiffre rond 26 grammes *
L'once de Provence était équivalente à 31 g. 25, C'était la
douzième partie de la livre romaine. L'once se subdivisait
en 8 gros. Il y avait la petite once, comme la petite livre.
Le quintal de 400 grosses livres contenait 424 livres
petit poids. L'once d’Alais était la petite once de 26 gr.
Dér. du lat, unoia, once, qui n'était contenue que douze
fois, dans la livre romaine.
Oundado, s. 7. Onde. flot, lame, vague, de la mer, d’une
rivière débordée. L'aïgo sor à bèlos oundados, l'eau sort par
lames, à flots pressés, par ondes : c'est un aug. dé oundo.
Oundo, s. f. Bouillon, en parlant de l'eau qui bout. Zi
fôou pas qu'uno ou dos oundos, il ne lui faut qu'un ou deux
bouillons. Low toupi boul à bèlos oundos; le pot bout à gros
bouillons.
Dér. du lat. wndo, faire des ondes, bouillir.
Ounglado, s. f. Coup d'ongle, de griffe, ounglo, égra-
tignure. L
Ounglo, s. f. Ongle ou griffe selon l'individu. D'oun-
glos pounchudos, des ongles pointus ou des griffes
pointues.
Dér. Du lat. wngula, Sÿn. de unguis, m. sign.
Ounté, ado. de lieu ou Mounté. Voy.ce dernier. Ount’-
anas ? ounté vai? où allez-vous? où va-t-il ?
Our,s.m. Ours. Ursus arctos, Linn., quadrupède plan-
tigrade. Sémblo un our, se dit de quelqu'un à ia structure
informe, agissant lourdement ou surtout velu comme
un Ours. — Our est un nom propre commun dans le pays,
qu'on est dans l'habitude d'écrire Hours en français; du
reste, pour témoigner d'une même origine, son fém. fait
Ourso et son dim. Oursé.
Ourdre, s. m. Andain, espace que parcourt en largeur
la faux d'un faucheur op la faucille d’un moissonneur,
en avançant en droite ligne; bande de terre que chaque
vigneron ou journalier laboure sans empiéter sur les rangs
de ceux qui sont à ses côtés: rayon ou rangée de ceps de
vigné. Suvè soun ourdre, suivre son andain, son rang.
Tira un ourdre, faire un somme, — On dit aussi andano,
andaïdo, où cambado.
L'abbé pe Sauvaces pense que le terme andain est dit
OUR 515
pour ondain, parce que chaque coup de faux laisse sur un
pré des ondulations pareilles à celles de l'eau agitée par le
vent. Une rangée de ceps de vigne ne s'appelle pas un
ourdre, commé paraît le croire l'abbé be Savvaces:; il
porte le nom de cavaidou.
Dér, du lat. ordo, rang, rangée.
Ourgansin, s.m. Organsin, avec celte différence que le
français se dit d'üne soie moulinée, tordue aü moulin,
tandis que le languedocien s'entend de la soie la plus fine
qu'on obtient à la filaturé, par opposition à tramo et tra-
mélo, eét-qui n'a reçu encore aucun apprèt.
Dér. de l'italien organsino.
Ourguéno, s. f. Sirène, monstre fabuleux qui séduisait
par le charme de sa voix. Canta coumo uno ourguéno,
chanter comme une sirène.
Dér. du lat. organum, organa, nom que l'on donnait à
toute sorte d'instruments de musique.
Ourjôou, s. #m. Dim. Ourjoulé. Orgeolet, orgelet, cri-
the, orgueilleux, vulgairement grain d'orge, petit bouton,
petite tumeur inflammatoire aux paupières. Le peuple dit
que ces petites pustüles viennent en punition à ceux qui ont
refusé quelque chose à une femme enceinte. — Une crache
en poterie.
Dér. du lat. hordeolum, Dim. d'hordeum , grain d'orge.
Ourla, v. Ourler, faire un ourlet, orle.
Ourno (l'),#. pr. Rivière qui prend sa souree à Saint-
Félix-de-Pallières, traverse les territoires d'Anduze et de
Tornac et se jette dans le Gardon sur le territoire de Mas-
sillargues et Attuech. C'est l’ancienne VRNIA des Romains
citée dans une inscription antique trouvée à Nimes.
Ouroù, s. f. Erreur, méprise, erreur de calcul. Faguén
pas ouroù, ne nous trompons pas, ne commettons pas de
méprise. frouvère uno ouroù din soun compte, je trouvai
une erreur dans son compte. Ce mot est une corruption du
français poussée au point de le faire ressembler à la tra-
duction d'horreur pour laquelle il ne faut pas commettre
l'ouroù de l'employer.
Ourqué, s. m. Blette vulgaire des jardins; espèce d'ar-
roche, propre à lever les taches d'huile sur les étoffes de
laine; on les frotte avec la feuille de cet herbe, on lave
énsuile l'endroit de la tache. (SauvaGes.)
Oursan, n. pr. de lieu. Orsan, village du canton de
Bagnols-sur-Cèze, dans l'arrondissement d'Uzès. Orsanüm,
en 4340 et 4485.
Dans un mémoire adressé à Pierre-François Orsino, car-
dinal de Gravina, qui fut pape de1724 à1730, sous le nom
de Benoit XIE, M. de Mandajors a cru pouvoir admettre que
cette localité doit son nom aux cardinaux Orsini, seigneurs
de Bagnols, dont les possessions s'étendaient, dit-il, sur le
territoire du village précité; mais cette opinion hasardée ne
doit être accueillie que sous toutes réserves.
Ourtéto, Voy. Hourtéto.
Ourtiga, v. Ortier, piquer avec des orties, s'ourtiga,
se piquer ainsi. :
516 OUS
Ourtigado, s. f. Piqüre d'ortie.
Ourtigo, s. f. Ortie, plante dont il y a partout en
abondance plusieurs variétés; la plus petite, l'ortie-grièche,
est la plus piquante ; la grande ortie romaine ou pilulaire,
urtica pilulifera, Linn., donne une filasse dont on peut
faire de la toile ; ses semences sont excellentes pour les
pertes et pour les crachements de sang.— Toutes les orties
sont sudorifiques. Dans les environs de Nimes ont dit :
outrigo.
Ourtoulan, s. m. ou Sansanvi.— Voy. ce mot.
Ousqua, v. Entailler, faire une hoche ou coche, osquo.
Oustaïè, iro, adj. et s. Casanier, qui aime à rester
chez lui. ,
Oustalado, s. f. Maisonnée, tous les habitants d’une
maison, oustéou ; tous les membres d’une famille qui de-
meurent ensemble. Touto l’oustalado, toute la famille. Uno
oustalado dé mounde, une maison pleine de gens.
Oustalariè, s. f. Agglomération de quelques habitations
dans la campagne et, dans ce sens, à peu près le synonyme
de masado, pouvant se rendre par petit hameau. On l’ap-
plique aussi aux divers et nombreux bâtiments appartenant
à la même exploitation rurale, à la même usine. On dit
même d'une seule et vaste maison : Y-a fosso oustalariè, il
y a beaucoup de logement dans cette maison. On dit aussi
masaÿe.
Oustâou, s. m. Aug. Oustalas. Dim. Oustalé. Maison,
logis, bâtiment pour y habiter; maison, famille, ménage.
Oustâou païrouläou, maison paternelle, celle où l’on est
né et qu'ont habité nos ancêtres. Un oustéou és pas cabdou,
mais lou câou, une maison n'est pas un avoir mais il en
faut une. Qudou és foutréou qué rèste à soun oustéou, que
le niais et maladroit croupisse chez lui ; l’homme habile se
donne du mouvement, court après la fortune et l'attrape,
car cela se dit à propos de l’un de ces derniers. Pér réfourma
OUV
cé qué vaï mâou couméngo tus pér toun oustéou, pour prècher
la réforme, réforme d’abord ta maison, Bos vèr et pan câou
fan la ruino d'un oustéou, bois vert et pain frais ruinent
une maison. Faïre oustéou né, faire maison nette, congé-
dier toute la maison. Lou fio n’és pas à l'oustdou, rien ne
presse.
Oustdou, pourrait venir du lat. stalio, demeure ; Sau-
VAGES cite à Ce propos un passage d’un vieux titre où ilest
dit : in stare comitis Bermundi, pour dans la demeure du
comte Bermond. Cette étymologie, lorsqu'on sait la pronon-
ciation languedocienne des lettres initiales : St,expliquerait
et légitimerait même la variante éstéou dont se servent à
tort cependant quelques personnes, car il est plus naturel
de faire dériver simplement oustdou de la bass. lat. Aosta-
laria, m. sign. dont on fit d'abord ostal et oustal.
Outis, s. m. — Plur. Outisses, Outil, instrument d’arti-
san, de laboureur, etc.
Dér. du lat. utilis, utile.
Ouvra, v. Ouvrer ne se dit que de la soie et signifie : lui
donner, au sortir de la filature, soit aux tavelles, au dou-
blage ou au moulin, les divers apprêts nécessaires, selon
l'emploi qu’on veut en faire. Dé sédo ouvrado est donc de
la soie ouvréeen opposition à la soie grège prise en sortant
du tour.
Ouvrésoù, s. f. Façon, apprèt donné à la soie ainsi qu’il
est dit à l’art. précédent. Ouvraison, qui devrait être fran-
çais car il est formé, selon l'esprit de la langue, de, son
verbe ouvrer, est très-reçu en style de filateur et de mou-
lineur de soie.
Ouvriè, iro, s. m. et f. ouvrier, ouvrière. À michant
ouvriè gés dé bos outisses, mauvais ouvrier ne trouve jamais
de bons outils. — És un ouvriè, uno ouvriètro qué, c'est
compère, une commère qui saura bien se tirer d'affaire.
Trago d'ouvriè, mauvais ouvrier. — Emprunt au français.
Fa
PA
P. Pé, s. m. La lettre P.; mêmes valeur et emploi qu’en
français.
Pa ou Pas, part. négat. Pas, point. En français, il est
ordinairement précédé de la négative ne; en Janguedocien,
il s'emploie seul et quelquefois se rend simplement par ne.
Ou vole pas, je ne le veux pas. Dise pas, je ne dis pas.
Y-anés pas, n’y allez point. Gouste pas jamaï, je ne goûte
jamais. Y-a un an qué l'aï pas vis, il y a un an que je ne l'ai
vu. Pas fosso, pas beaucoup. Noun pas, non pas, non, point
du tout.
Pas est un emprunt au français. Le roman employait la
construction latine : Establem que nostres successors non
PA
dom ghisaje que quel que plaïgon no sidou greugat, ete. En
délaissant cette tournure pour se servir de la particule
française, le languedocien lui conserve souvent son orto-
graphe; toutefois, contrairement à la règle générale qui
veul que l’é final se fasse toujours sentir, même devant
une consonne, celle de pas ne sonne jamais dans ce dernier
cas. C'est un vice, car pas, démarche, qui s'écrit de même,
se prononce différemment; mais en faisant ainsi, on évite
beaucoup d’hiatus qui créeraient surtout trop de difficultés à
nos poètes. Cependant on écrit également pa et il le faut
bien pour expliquer certaines syncopes fort en usage :
pa ’ncaro pour pa éncaro, pas encore; és pa quÿ, pOur és pas
PAC s
aquÿ, ce n'est pas cela, y-a pa 'n ca, pour pa un ca, iln'y a
pas un chat, contractions où, par étrangeté, ce n’est point la
première mais la seconde voyelle de l'hiatus qui est élidée.
D'après Gébelin, la particule pas viendrait du lat. passus :
iln'y en a pas; c'est comme si l’on disait : iln'y en a trace,
vestige,
Pachéja, v. Faire pacte, conclure une affaire, un marché,
Dér. du lat. pactum, m. sign.
Pacho, s. /. Pacte, traité, convention, accord, marché.
Faïre-pacho, conclure un marché ou absolument, conclure.
Aquà 's pas din nosto pacho, ce n’est pas dans nos conven-
tions, dans notre traité. À fa pacho émbé lou Diable, il a
fait pacte avec le démon; se dit d'un homme qui a une
chance extraordinaire.
Dér. du lat. pactio, m. sign.
Pacholo,s. f. Pot-pourri, tripotage, ripoppée, mélange
hétéroclite de choses diverses qui s'annoncent difficilement ;
choses qui se voient rarement ensemble dans un mets;
- mélange de différentes sauces, vins ou liqueurs, le tout peu
agréable à l'œil et au goût, Pâtée pour la volaille faite avec
du son et des herbes cuites à l'eau et pétries ensemble.
Pachoquo, s. f. Margouillis, gâchis, flaque d'eau sale,
de boue liquide. Femme minutieuse, tripoteuse, épilogueuse,
bigote, ridiculement scrupuleuse, diseuse de riens. Pachà
paraît en être le masc., comme si l'on disait brouillon, tri-
poteur.
Pachouqua, v. Patauger, marcher dans la boue liquide,
s'y crotter; barboter comme un canard dans une mare;
tripoter, brouiller, gâter, gâcher.
Pachouqué, to, adj. ets. Tâtillon, vétilleur, lanternier,
chipoteur, minutieux, barguigneur, qui ne sait se tirer
d'affaire.
La racine de Pachouqué semble être pachd, et l'adjectif
serait un diminutif comme si l’on disait petit feseur ou
feseur de petites affaires. On dit à un enfant : anén, pa-
chouqué ! Allons, petit barbouilleur.
Pachouquéja, v. Vétiler, tatillonner, être un pa-
chouqué.
Pacién, to. adj. et subst. Patient. Du lat. patiens, m.
sign. — Un patient, une personne souffrante ou malade
avec résignalion ; celui qu’on doit supplicier.
Paciénço, s. f. Patience. Paciénçgo, médécino das
péoures, la patience est la médecine des pauvres. Paciénço
laïssè brula soun oustâou, Patience laissa brüler sa maison,
se dit souvent proverbialement pour indiquer que la patience
doit avoir des limites.
D. du lat. patientia, m. sign.
Pacoutio, s. f. Pacotille. Ce fut d'abord les marchandises
que les officiers et les gens de l'équipage avaient le droit
d'embarquer gratis pour leur propre compte; et comme elles
étaient en petite quantité, on les appela pacotille, petit
paquet. On donna ensuite le même nom à l'assortiment que
de petits spéculateurs emportaient avec eux sur un navire
PAG 517
pour aller trafiquer au loin ; et les uns et les autres ayant
à faire à des chalands ordinairement peu connaisseurs,
ces marchandises étaient de qualité fort inférieure. De la,
toute chose fabriquée sans soin ou de mince valeur, est
dite de pacotille ou de balle. Le languedocien emploie pacou-
tio dans le même sens. Foy. Fourés. Il dit aussi, comme
le français, d'objets quelconques réunis en assez grand
nombre : quinto pacoutio! quelle pacotille, quelle pro-
vision !
Padélado, s. f. Poëlée, plein une poële, padèlo, ou sim-
plement poële. Uno padélado dé péissoùs, d'afachados, plein
une poële de poissons, de châtaignes. On dit aussi padé-
nado et sartanado. '
Padéléjà, v. Frire, fricasser à la poële, passer à la poële.
Padèlo, s. f. Poële à frire. Z6ous à la padèlo, œufs à la
poële. Adouba uno padèlo, affriter une poële, c'est, lors-
qu’elle est neuve et pour la rendre propre à s'en servir, lui
donner un apprêt qui consiste ici à la chauffer presque au
rouge et à la frotter fortement à l'intérieur avec un oignon
puis avec du lard. Padèlo dé las afachados, poële où l'on
fait rôtir les châtaignes et qui, pour cela, est percée
d'un grand nombre de trous. — On dit aussi padéno ou
sartan.
Dér. du lat. patella, plat, assiette.
Paga, v. Payer. Paga én mounédo dé singe, payer en
grimaces, c.-à-d. pas du tout. À paga n'doustres dévèn, il
a payé le tribut que nous devons; il est mort et nous
mourrons. Éntre paga et mouri on és toujour à tén, à payer
et mourir on est toujours à temps. Pago cé qué déves et
gariras dâou mdou qu'as, paie ce que tu dois et tu guériras
de ton mal. Quan dévès [6ou paga, quand on doit il faut
payer.
On le fait dériver du celt. paga, m. sign. ou du lat.
pactare, traiter, accorder.
Pagaïre, Pagaïro s. m. et f. ou Pagadoù ne s'emploie
guère qu'avec la qualification de bon où michan, bon ou
mauvais payeur. Pour désigner l'employé du Gouvernement
qu'on appelle payeur, il faut dire péiur ; on dit de mème
ouficiè péiur.
Pagamén, s. m. Paiement d'une dette, d'une rente,
salaire d’un ouvrier; honoraires d'un médecin, d’un avocat.
Aquà ’s ésta moun pagamén, dit-on de quelqu'un qui vous
a payé d'ingratitude.
Page-dé-cour, s. m. Cette expression toute française ne
sert qu'à rendre la comparaison : effronté comme un page
de cour, hardè coumo un page dé cour.
Pagèl, s. m. Pagel. Sparus erythrinus, Linn., Pagrus
pagel, Dict. des sciences nat., poisson de mer, à nageoires
épineuses, de l'ordre des Holobranches, de la famille des
Léiopomes, dont le dos est roux en hiver, bleuâtre en été, et
le ventre blanc. Sa chair est blanche, grasse et d’une saveur
agréable. On le trouve dans la Méditerranée.
Dér. du lat. pagellus.
Pa-gés, négat. Qu'on peut écrire aussi pas gés, est un
66
518 PAG
composé de ces deux négat. et signifie aucun, point. Né
vése pas gés, je n'en voit point, aucun. On dit pa-gés, en
parlant des choses et pa-rés, en parlant des personnes. —
Voy. Gés.
Pagés, 0, s. et n. prop. Vieux mot, hors d'usage chez
nous, qui signifiait paysan, villageois ; métayer, fermier ;
il est resté nom propre fort commun dans le pays.
Dér. du lat. paganus, m. sign,
Pagnè. s. m. Dim. Pagnèiré, aug. Pagnèiras. Panier.
Ce mot, générique en français, l'est beaucoup moins chez
nous où la plupart de ces engins ont un nom particulier :
bértoul, banastoù, désquo, elc. Pagnè est le panier d'osier
n'ayant qu'une anse en demi-cercle qui va d'un bout à
l'autre et qui sert à le porter d’une seule main. Lorsque ce
panier est fermé par un couvercle, on l'appelle pagnè-ba-
radis. On dit aussi, pour le contenu : wn pagnè dé figos,
dé rasins, un panier ou plein un panier de figues, de rai-
sins.— Pagnè-lon. (Voy. ce mot.) Sot coumo un pagnè,
se dit d’une personne qui vient d'éprouver un affront, une
contrariété, un échec.
Dér. de Pan, parce qu'on le fit d’abord pour contenir
le pain, ou du lat. panarium, corbeille à pain.
Pagnè, s. m. Sorte d’épi ou de batardeau, fait avec des
pieux et des fascines, sur le bord d’une rivière pour dé-
tourner les eaux ou en amortir le choc. La manière dont
on entrelace les fascines dans les pieux, assez semblable
à celle dont on tresse les joncs d’un panier, a fait donner
le même nom à cet ouvrage.
Pagnèïrado, s. /. Panerée, plein un panier de quelque
chose.
Pagnèiraïre, s. m. Vannier, fabricant de paniers.
Pagnèiro, s. f. Panetière, huche, armoire au pain,
lieu où l’on serre le pain; panier de boulanger. Véou
m'aï pan à la pagnèiro qué bèl home à la carièiro, Vaï-
sance vaut mieux que la beauté.
Pagnè-lon. s. m. Pagnè-loungué, aug. Pagnè-lounguas.
Panier long, manne ou mannequin, fait avec des scions
refendus du châtaignier sauvage; il est deux fois plus long
que large et sert à porter différentes charges sur l'épaule :
c'est pour cela qu’on l'appelle encore faïssidou, de faï,
fardeau, charge.
Pagnoto, s. f. Pagnote, poltron, couard. és uno pognoto,
c’est un trembleur.
Pago, s. f. Paie. Dissate fan la pago, samedi est jour
de paie. Pér la pago, en revanche, pour récompense. Dé
qué mé daunarés pér la pago? que me donnerez-vous, en
récompense, si c'est un service qu'on vous demande, en
dédommagement ou en échange, s’il s'agit d’une espèce de
marché qu'on propose? Pago dé bourèl, paiement fait
d'avance : autrefois le bourreau percevait une contribution,
en argent ou en nature, sur les denrées de la halle, le jour
où il devait faire ane exécution. On dit même qu'en cer-
lains lieux il attendait, pour se mettre à l'œuvre, qu'un
officier de justice lui eût jeté sur l'échafaud, en présence
PAI
de la foule, la somme qui lui revenait. C’est sur cet nsage
qu'est fondée la locution se faire payer en bourreau. Il y a
une autre explication : du temps que l'on brülait et que
l'on rompait, un condamné, redoutant avec raison les souf-
frances d’un supplice beaucoup moins expéditif qu’aujourd’-
hui, promit au bourreau une bonne somme s’il les lui épar-
gnait en lui donnant promptement le coup de grâce; celui-
ci accepta et tint parole, mais il perdit sa créance, car il n’est
aucun moyen d’actionner son débiteur. Mieux avisé depuis
lors, lui et ses collègues, qu’il informa de sa mésaventure,
prirent l'habitude de se faire payer d'avance lorsqu'on leur
proposa de pareils marchés. Diou pago tar maï pagô lar,
Dieu paye tard, mais avec largesse.
Dér. du celt. paga, m. sign.
Pago-läougè, s. m. mot à mot : qui paie lentement, qui
a bientôt payé, parce qu’il ne paie pas du tout. C'est une
qualification qu’on donne à un mauvais payeur.
Païa, v. Rempailler des chaises; clisser une bouteille,
un flacon ; envelopper, garnir de paille un ballot, un paquet,
une caisse
Dér. de païo.
Païado, s. f. Jonchée de paille, qu’on met sous les bes-
tiaux, et dans une basse-cour ou dans une rue pour la faire
pourrir et la convertir en fumier.
Païado, s. f. Charivari donné à un homme qui se laisse
battre par sa femme. Dans l’origine, cetteburlesque comédie
avait de plus grandes proportions : on mettait sur un âne
un complaisant qui jouait le rôle du mari quand on ne pou-
vait pas l’y hucher lui-même. On armait le patient d’une
qguenouille et, au milieu des huées et d’une musique appro-
priée à la circonstance, on le promenait triomphalement.
Comme, pour lui faire plus d'honneur, on jonchait de paille
le chemin qu'il devait parcourir, cette cérémonie s’appela
paiado.
Païaron, s. m. Dim. Païarounqué, aug. païarounquas.
C'est une variante et une corruption également usitée de
pagnè-lon, dont on fit d’abord pagnalon, ainsi que le pro-
noncent beaucoup de personnes.— Voy. Pagnè-lon:
Païarouncado, s. f. Le contenu d’un païaron où pagne-
lon.
Païas, s. m. Grand tas de paille ; amas de balayures.
Païasso, s. f. Paillasse, sac de toile rempli de paille pour
servir à un lit; cesac, cette paille.
Païasso, s: m. Paillasse, bouffon, bateleur de la foire.
On l'appelle sans doute ainsi à cause de son vêtement de
toile, large, informe comme le sac dont il est question à
l’art. précédent.
Païassoü, s. m. Dim. païassouné. Panneton, panier
rond de paille, en forme de coupe ou de vasque, où l'on met
la pâte qu’il faut pour faire un pain.— Ce mot peut rendre
aussi celui de paillasson, couverture de paille longue sous
laquelle les jardiniers abritent les plantes de la gelée ou
nattes dont on se sert pour essuyer les pieds; mais alors
c’est le français que l’on emploie. “ets
fehs s. -—
me ile nd À À
PAI
- Païè, s. m. Grenier au foin plus encore qu’à la paille,
malgré ce que semblerait indiquer l'étymologie; mais la
paille qui entre dans ces magasins y tient de toute façon
une place moins importante que le foin : de sorte que fénil,
qui.a son équivalent parfait dans fégnéiro, peut aussi
Dér. du lat. palearium,, m. sign.
Païè, s. m. Palier, repos, plate-forme sur le même esca-
lier après plusieurs marches, sur lequel s'ouvrent plusieurs
portes. Réstan sus lou mèmo païè, nous demeurons sur le
mème palier, au même étage, porte à porte.
Paièirés, s..m. Espèce de raisins dont les grappes sont
grosses et divisées en grapillons. Ses grains sont gros, ronds,
blancs et de couleur dorée à la maturité, légèrement mus-
, sujets à se pourrir. Ïls donnent un bon vin blanc.
Le cep n’est pas bien vigoureux, sans doute à cause de sa
grande fertilité. Le bois est tendre, les feuilles assez grandes
et pas trop découpées. Les sarments sont assez remarqua-
bles ; quelquefois ils se fendent en deux et se pèlent.
Païèiro, s. f. Cuve, vinaire en bois, moins grande que le
tindou qui, de plus, est ordinairement en maçonnerie. Le
vin blanc, se faisant en moindre quantité, devait se mettre
dans la plus petite cuve qui prit son nom de païèiros,
raisin qui fournit principalement à ce vin; ce qui n’em-
pèche pas qu'on met aussi à cuver du vin rouge dans la
païëiro. Le français paillet a beaucoup de rapports avec
ces diverses expressions.
Païèiro, n. pr. de lieu. Paillères, nom qui désigne plu-
sieurs Jocalités du Gard, dans les communes de Laval, de
Soustelle, le ruisseau de la Grande-Paillère qui prend sa
source dans la commune de Thoiras, et surtout Saint-Félix-
de-Paillères, commune du canton de Lasalle, désignée en
959, sous le nom de Villa de Patellaco. Patellacum signifie
le lieu où l’on fabrique les plats d’étain. C’est en effet dans
le hameau de Paillères dépendant de la commune de Saint-
Félix, quese trouvent les mines de plomb argentifère, exploi-
tées par les Romains et dont l'exploitation continue encore
‘de nos jours.
Païéja, v. Remuer la paille, ce qui se fait surtout en la
faisant sauter sur l'aire à l’aide d’une fourche, pour faire
“tomber le grain qui y est mêlé. On le dit aussi du mouve-
ment continuel des mains et des doigts d’un malade à l’a-
gonie qui semble vouloir prendre ou arracher de la paille,
délire qu’en terme scientifique on appelle carphologie, du
grec Kapeñ, fètu, kcyw, je ramasse.
Païéjaïre, s. m. Pailleur, qui vend ou qui voiture de
la paille.
Païéto, s. f. Clayon, éclisse pour faire égoutter le fro-
mage frais, {owmo, en le sortant de l’éscudéloù ou faïssèlo.
Elle est faite en paille ou en jonc. Brin de paille, fétu.
Tira la païéto, tirer la courte-paille.
Païo, s. . Paille, tige des graminées et particulièrement
des céréales; défaut de liaison dans les métaux. Home dé
paï véou fénno d'or, homme de paille vaut femme d'or.
PAJ 519
Faï d'uno paño un pañé, il fait d'une mouche un éléphant.
Anén à la païo! allons nous coucher !
Dér. du lat. Palea, m. sign.
Païo-dé-clè, s. f. Glui, paille longue de seigle qui sert
à garnir les chaises, à faire les paillassons des jardiniers, à
emballer les marchandises, à couvrir les chaumières, etc.
On l'appelle gerbée lorsque, deuni-battue et contenant un peu
de grain, on la donne à manger aux chevaux. — Voy. Clé.
Corrup. de glui où du flamand gheluys, dont on le fait
dériver.
Pairastre, s. m. Partre, beau-père, second mari de la
mère. Païrastre et Maïrastro sont des péjoratifs de paire
et maïre, comme si l'on disait faux ou mauvais père, fausse
ou mauvaise mère.
Paire, s. =. ou Pèro. Voy. maïre et pèro.
« Les noms païre, maïre, fraire, sorre, dit l'abbé px
Sauvaces,... ne sont plus usités que parmi les pauvres
gens du Bas-Languedoc et des Cévennes. Les artisans du
plus bas étage qui habitent les villes et les paysans de la
campagne, qui ont un peu de fortune, dédaignent ces noms
comme avilissants et disent moun pèro, ma mèro, moun
frèro, ma sur. Ce changement introduit dans notre langage
ou celte affectation d'imiter ce qu'on appelle les honnêtes
gens, qui parlent plus communément français, ne date pas
de bien loin ; elle est une conséquence du luxe ou de la
vanité qui gagne tous les rangs : elle a bien pénétré dans
les provinces gasconnes méditerranéennes, éloignées des
grandes routes et du commerce des grandes villes: L'ancien
idiome y est bien moins altéré; les mœurs anciennes qui
vont d'ordinaire de compagnie avec les bonnes mœurs, s'y
sont mieux conservées. Dans le Rouergue, ajoute SAUVAGES,
les personnes de la première qualité ne se distinguent point
du bas peuple, pour le langage, et disent encore avec lui:
moun paire, comme dans les siècles précédents, où Pon
ignorait cette bigamie de termes français ou presque français.
Nous devons ajouter que les poètes et les écrivains de la
Renaissance provençale se sont bien gardés d'employer ces
mots francisés que le marquis pe LA FARE a pourtant cru
devoir adopter.
Paire, s. m.Maitre-valet, qui, dans une ferme, a autorité
sur les autres domestiques, comme le père de famille dont
il tient la place. On l'appelle aussi baïte.
Pairè-nouris, s m. Père-nourricier, le mari de la nour-
rice. — Voy. Nouris.
Païrè, s. m. Parrain. Le plus vieux parent, dans une
maison.
Païsse, v. Paître, Qué dé ca naï, dé ra sé paï, qui de
chat nait de rat se pait. Qudou dono à naïsse, dono à païsse:
celui qui donne la vie, donne aussi la subsistance! A. Ley-
ris, Lous Quatres poutoùs.
Dér. du lat. pascere. m.
Pajo, s. f. Page, côté du fouiliet d'un livre, d'un cahier;
l'écriture qu'elle contient.
Dér. du lat. pagina.
520 PAL
Palado, s. f. Pelletée, pellée, pellerée, ce qui peut tenir
sur une pelle, palo. Bouléguo l'argén à palado, se dit d'un
homme qui a la réputation d’être très-riche.
Palafargnè, s. m. Palefrenier, valet qui panse les che-
vaux.
Dér. du bas-lat. palafredus, palefroi, cheval de marche
ordinaire. Court de Gibelin fait dériver le mot palefroi de
pal en roman grand, et /red ou vred, cheval.
Palafiqua, Perdre, égarer. Sé palafiqua, tomber rude-
ment, tomber de haut, se précipiter, Palafiqua, do, impo-
tent, perclus.
Pal où Pdou, pieu, et fiqua, du lat. figere, ficher, faire
entrer, semblent former ce verbe, lorsqu'il est réciproque;
c’est comme si l’on voulait dire entrer, s’enfoncer comme
un pieu; le participe impotent est la conséquence d’un tel
accident. Quant à l’acception première, on ne voit pas le
rapport qu'il peut y avoir entre ces idées, et nous donnons
la définition d’après SAUVAGES.
Palamar, s. m. Mail, du lat. pila, boule, dont l'italien
a fait aussi palla et de mar, alt. de mal, dérivé de mal-
leus, marteau, marteau de boule, ou bien de palus et de
martellus, marteau emmanché d’un pal, bâton ou long
manche. Le français procédant de mème, mais se servant
de malleus, avait fait palemail. Ce mot, remplacé par maïou,
n’est guère plus en usage, et il se trouve surtout ici pour
expliquer l'origine du suivant, fort usité au contraire.
Palamar, do, adj. et s. Lourdaud, gros lourdaud, qui
parle et agit lourdement, par assimilation à l’objet précé-
dent qui agit et frappe de mème.
Palamardiè, s. m. Fabricant de mails; celui qui loue
des mails et des boules à la journée.
Palastraje ou Palastrajo, s. f. Penture, bande de fer
qui sert à soutenir les portes et les contrevents et dont
l'œil reçoit le gond.
Palé, s. m. Palet, sorte de disque, pierre plate et ronde
ou circulaire qu'on jette vers un but pour en approcher le
plus possible, dans le jeu qui porte ce nom.
Dér. du grec Bäkw, lancer.
Paléja, v. Remuer avec la pelle, se servir de la pelle,
palo.
Paléjaïre, s. m. Ouvrier qui remue avec la pelle, qui
travaille avec la pelle. Dans les greniers à sel on lui donne
le nom de palayeur.
Paléto, s. f. Férule, petite palette de bois ou de cuir
avec laquelle les pédagogues frappent sur la main ou sur
les doigts des écoliers en faute; un coup de férule. Paléto
est le dim. de palo, pelle, l'instrument de correction ayant
cette forme.
Paléto, s. f. Lançoir, petite vanne ou pale, pelle de fer
emmanchée qui bouche l’abée, par où l'eau s'élance de l'6-
cluse sur la roue horizontale, rodo, d'un moulin. Dim.
de palo.
Paléto, s. f. Omoplate, os de l'épaule, mince, large et
triangulaire. En terme de boucherie, c'est le paleron, pièce
PAM
de viande qui enveloppe l'omoplate et dans laquelle, si elle
est de bœuf, on distingue le premier et le second travers
et la joue de bœuf. Dans le premier travers est la veine
grosse.
La forme de cet os lui a valu son nom languedocien.
Paléto-dé-l'éstouma, s. f. Brechet, extrémité inférieure
du sternum ou os de la poitrine, qui correspond au creux
de l'estomac.
Pali, s. m. Dais ; poële, drap mortuaire.
Dér. du lat. pallium, manteau, couverture.
Pallissoù, s. #. Échalas, pieu, palis, qui sert de tuteur
à un jeune cep ou que l’on plante de distance en distance
pour soutenir les perches horizontales d'une rangée de
vigne en cavaïoùs, car on n'a point ici de vigne entière
échalassée. Palissoù est le diminutif de pdou, pieu, qui se
dit aussi pour le même objet.
Palmosalado, n. pr. de lieu. Palmesalade, ancienne
chapelle ruinée dite de N.-D. de Palmesalade, dans la com-
mune- de Portes, et située au bord de l’ancienne voie
romaine appelée Régordane qui conduisait de Nimes à la
Loire, par Gergovie et la vallée de l’Allier, On trouve, à
proximité de cette chapelle, un point de la route appelé les
Calades qui présente des traces de l’ancien pavé de la voie
romaine, et un pont antique jeté sur le ruisseau de Palme-
salade. Sur les terrains qui entourent la chapelle s’éten-
dent les anciennes exploitations de minerai de fer, prati-
quées à l'époque romaine, reprises à notre époque et récem-
ment abandonnées. !
Suivant la tradition, le nom de Palmesalade, que porte
ce quartier, lui aurait été donné à la suite d’un combat
meurtrier livré aux Sarrasins, sur lesquels l’armée franque
aurait remporté une victoire chèrement achetée.
Palo, s. f. Pelle de toute sorte, en bois ou en fer.
Dér. du lat. pala, m. sign.
Paloumbo, s. f. Ramier, pigeon sauvage. (Colombe ra-
mier, Columba palumbus, Temm.) Sous ce nom et celui
de Bisé. (Voy. ce mot.) on confond facilement les diverses
espèces de pigeons sauvages, ramiers ou bisets, il n'y a pas
jusqu’à la tourterelle qui n’y puisse être comprise, quoique
son vrai nom soit Tourtouro.
Palun, s. m. Marais, marécage; en Provence, on appelle
surtout ainsi un ancien marais desséché et mis en culture.
Dér. du lat. palus, m. sign. ou du grec rakw, boue,
marais.
Pamén, adv. Cependant, néanmoins, pourtant, nonobstant
cela. Formé de pas, négat. et de mén, moins, ce qui fait que
de bons languedociens ne se gènent guère pour dire pas
moins au lieu de cependant.
Pamoulo, s. f. Paumelle, orge distique, petite orge,
baillarge, orge à deux rangs sans barbes. Hordeum dis-
tichum, Linn.
Pampaligourno, n. de lieu. Nom de fantaisie d’un pays
imaginaire, si loin qu'on n'en revient pas, auquel on.a
coutume d'envoyer les gens qui vous ennuient. IL pourrait
PAN
se faire pourtant que ce füt un enjolivement de Pampelune,
ville d'Espagne qu'on supposait fort éloignée autrefois; et
en effet on dit encore : té mandaraï à Pampaligourno, je
enverrai à Pampelune, aux grandes Indes, aux antipodes,
voire au Diable. On dit aussi Pampaligousto où Pampa-
ligosso.
Pampe, s. m. ou Pampo, s. f. Pampre, jeune pousse
franche ou sauvageonne qu'on doit enlever pour former la
plante, empêcher qu'elle en soit fatiguée ou que la greffe en
soit affamée. Voy. Déspampa. — De toute les ramées que
l'on donne pour nourriture aux bestiaux, le pampre de
vigne est sans contredit la plus mauvaise: c'est pour cela
que, par métonymie, on appelle aussi pampo un cheval
efflanqué haridelle ou Rossinante, qui semble n'avoir pas
d'autre provende. Anara jusqu'as pampos, il ira jusqu'à la
chüûte des feuilles, se dit d’un poitrinaire dont la mort pa-
raît inévitable à la saison d'automne la plus rapprochée.
Pan,s. m. Dim.pané. Pain, dont la forme et les qualités
sont diverses. Pan d'oustdou, pain de ménage, de cuisson,
de bourgeois. Pan-bru, pain bis. Pan émbé soun tout, pain
à tout, dont on n'a point Ôté le son. Pan-séda, pain de
seigle, dont la farine a été tamisée, sassée, sédado. Pan dé
mouniciou, pain de munition. Pan dé cousino, pain de cui-
sine ou plutôt pain de la cuisine, acheté chez le boulanger
ou fait dans la maison pour les domestiques, plus grossier,
par opposition au pain plus blanc de la table des maitres.
Pan d'ordi, pain d'orge, lourd et grossier, ainsi que l’in-
dique le dicton : groussiè coumo pan d'ordi. Le pain de
boulager reçoit d'autres noms : Pan blan, pain blanc, de
frequalité. Pan ségoun, pain second, de 2e qualité. Pan darié,
pain dernier, de dernière qualité. Pan ou pané d'un s6ou,
petit pain, pain wollet, valant un sou. Pan roussé, pain de
recoupes, pain bis blanc. Pan réquiè, petit pain de luxe,
de forme ronde : le pain de luxe n'étant point taxé pour le
poids, les boulangers le font cuire davantage, de là Pan-
réquié, recuit. Pan crousto léva, pan mâou apéloui, crousté
dé pan, lisquo, pèço dé pan. Voy. ces mots. Ou aï fa én
moun pan, én moun vi, je l'ai fait sans l’aide de personne,
à mes dépens, de mes propres ressources. Avédre lou pan
et lou coutèl, avoir le pain et le couteau, avoir une chose
à sa discrétion, être dans toutes les conditions pour la faire
à sa fantaisie.
* Dér. du lat. panis, m. sign
Pan, s. m. Empan, mesure linéaire qui avait été fixée à
9 pouces, 8 lignes, pied-de-roi, soit 262 millimètres et demi.
Lors de l'adoption du système métrique, on ne l’appliqua
‘pas d'abord dans toute sa rigueur; tenant compte des
vieilles habitudes, et dans l’idée erronnée de faciliter la
transition, on conserva le nom de beaucoup d'anciennes
mesures, et l'on se contenta de les modifier pour les mettre
én rapport avec les nouvelles. C'est ainsi qu'on allongea le
pied-de-roi, tandis que l'empan fut raccourci pour qu'ils
fussent contenus d’une manière exacte dans le mètre : le pre-
mier trois et le second quatre fois; le pan valut donc 9 pou-
PAN 214
ces du pied métrique ou 25 centimètres. Quoique proscrit
aujourd'hui, on se sert toujours beaucoup de son nom et il
est bien plus ordinaire d'entendre dire d’une étoffe : M'acousta
cinq s0ous lou pan, que vingt sous lou mèstre, où bien : mous
tdouïès an hiuè où nou pans, plutôt que dous méstres ou
dous mèstres et quart, surtout dous mèstres vinto-cinq. C'est,
en effet, une mesure fort commode, car chacun la porte tou-
jours avec soi : c'est l'espace compris entre le bout du petit
doigt et du pouce très-écartés; et les mains trop petites
ajoutent la première phalange du pouce, en l'abattant pour
compléter cette mesure, que chacun s'étudiait sur un
étalon à rendre assez exacte et qui suffissait lorsqu'il ne
s'agissait pas d’un mesurage rigoureux. — Le pan s'entend
de la mesure elle-même comme de la chose mesurée. Mié-
pan, demi-empan. Avédre un pan dé nas, avoir un pied
de nez.
Dér. dela bass. lat. spanna, qui était cette mesure ainsi
formée. En allemand spannen, étendre, mesurer avec la
main.
Pan! s.m”.Onomatopée pour rendre le bruit d'une claque,
d’un souflet, d’un coup que l'on donne ou que l’on reçoit.
Y dounè uno anquado, pan ! il le fouetta, flan, vlan, pan !
ad libitum.
Pana, do, adj. Qui a des taches de rounsseur sur la
figure ; tacheté de rousseurs auxquelles les personnes blondes
ou rousses sont plus sujettes. La sève de la vigne, au
moment de la taille, est, dit-on, un excellent cosmétique
pour faire passer les rousseurs. Ces taches, qui apparaissent
aussi nombreuses que les mille petits yeux d'un pain bien
apprèté, ont pu donner lieu à un rapprochement qui a eréé
l'expression de pana.
Panado, s. f. Panade, pain émietté et longtemps mi-
tonné dans du bouillon ou simplement de l'eau dans laquelle
on met ensuite du beurre ou de l'huile.
Panar, do, adj. et s. Boiteux.
Panardéja, v. Boiter, clocher, clopiner.
Panari, s. m”. Panaris. Voy. Roudaïre. Inflammation
phlegmoneuse des doigts qui provoque souvent la carie
de l'os des phalanges. Du lat. panaritium, formé du grec
rapovuyla, dont les racines sont xapa, auprès et ovuy,
ongle.
Panataio, s. f. Hèrbo-dé-Nosto-Damo. Pariétaire, casse-
pierre, herbe de Notre-Dame. Parietaria officinalis, Linn.,
plante qui croit sur les vieux murs dont elle prend le uitre
qui lui donne ses vertus : elle est émolliente et diurétique ; on
l'emploie pour les tisanes, les cataplasmes et les lavements.
Panataïo est une corr. de parélaïo, formé de paré, en lat.
paries, muraille. On désigne aussi cette plante, dans plu-
sieurs localités du Gard, sous le nom de Paraddou, dont
l'étymologie du lat. paries est plus régulière.
Panatièiro, s. f. Blatte/Blata); insecte orthoptère, très-
vite, lucifuge, brun-noir, plat et large, à deux longues
antennes, qui habite autour des cheminées et des fours. I
est assez difficile de se débarrasser de cette blatte domes-
522 PAN
tique là où elle a établi son domicile. Sa préférence pour
la farine et le pain lui a fait donner le nom de panatièïro;
elle est plus connue sous celui de Babaroto.
Pan-blanc-d'ase, s. m. Chardon-Roland, chardon à cent
têtes, panicaut commun, ÆEryngium campestre, Linn. Sa
racine faisait partie, avec celle du chiendent, du caprier,
de la garance et de l’arrète-bœuf, des cinq petites racines
apéritives; elle passe pour être diurétique, néphrétique,
propre à provoquer les règles et à exciter à l'amour; tou-
tefois la médecine en fait beaucoup moins usage qu’autre-
fois. Le goût bien connu de l'âne pour le chardon, duquel
il fait son pain blanc, explique suffisamment le nom
languedocien du panicaut. Celui-ci n’est pas cependant l’es-
pèce dont les ânes sont le plus friands, et le français, de
son côté, appelle chardon aux ânes le chardon hémorrhoï-
dal, Serratuba arvensis, Linn., qui est notre céoussido.
Pané, s. m. Petit pain, dim. de pan. Pané d'un sou,
pain mollet qui vaut un sou. Pané dou la, petit pain au lait.
Panéja, v. On le dit du bléet de la farine qui fournissent
plus ou moins de pain. Aquélo farino panéjo bièn, cette
farine foisonne bien, et elle. fait ainsi lorsqu'elle boit
beaucoup d’eau : ce qui arrive quand le blé qui la produit
croit dans un terrain ou graveleux ou sec, tel que celui des
côteaux ou des champs en pente.
Panèl, s. ”. Claie à sécher les châtaignes. Foy. Clédo.
Panèl, s. »m. Pan, basque d’un habit, d'un corps de jupe.
Panèl dé camiso, le bas, les bouts inférieurs d’une chemise.
Dét. du lat. pannus, drap, étoffe, qui, dans la bass. lat.
signifiait aussi, portion, segment.
Panéto, s. f. Pain de boulanger, par opposition au pain
de ménage, qui est plus gros.
Fém. de pané, dim. de pan.
Pan-Froumén, s.m.Mâche, Doucette, Valeriana locusta,
Linn., qui porte encore beaucoup d’autres noms : blanchette,
clairette, poule-grasse, boursette, salade de-chanoïne. Cette
plante croît naturellement et en abondance dans les champs,
et on la cultive aussi dans les potagers. Elle fournit une |
excellente salade, du moins d’après le goût de plusieurs de
ses parrains qui l'ont nommée salade de chanoine et pan-
froumén, parce qu’elle est au-dessus des autres comme le
pain de froment est au-dessus des autres pains. On dit aussi
Pan-fourmén.
Panis,s. "”. Panis ou Panic, mil blanc, millet desoiseaux,
Panicum italicum, Linn. Dans l'usage, ce millet est con-
fondu avec le millet commun ou petit mil panicum milia-
ceum; l'un porte son grain en panicules tandis que l’autre
n'a qu'un épi ras, cylindrique où tout le grain est entassé :
c'est là toute leur différence et ils sont d’ailleurs employés
aux mêmes usages. — Voy. Mél.
Panissièiro, s. f. et n. pr. de lieu. Champ de panis,
devenu nom de lieu.
Panle, panlo, adj, Päle, Panle coumo las céndres, pâle
comme la mort. Voy. la lettre L.
Dér. du lat. pallidus, m. sign.
PAO
Panléva, v. Soulever. Le languedocien prononce énlo la
lettre /, et lui conserve cette prononciation dans beaucoup
de mots quand elle est entre deux voyelles; il met alors
une » qui précède l’£, ou qui, lorsqu'elle est double, rem-
place la première : de sorte que panléva n'est autre que
pal léva, ce qui équivaut à /éva avec un pal ou péou qui,
dans ce cas, signifie levier ; il ne s'emploie par conséquent
que pour rendre soulever au propre, élever quelque chose
de matériel et de lourd.
Panli, ». Pälir. Du lat. pallere, m. sign.
Panloù, s. f. Päleur. )
Panos, s. f. plur. Rousseurs, taches de rousseur. Foy.
Pana.
Pan-réquiè, s.m. comp. Pain recuit. Voy. Pan.
Pansèio, s. f. Pensée, violette tricolore, Viola tricolor,
Linn., imit. du français.
Pansèl, s. ». Rame, petite branche, branchage, pour
ramer ou soutenir, énpanséla, des pois, des haricots.
Var. de païssèl, d'un autre dialecte, dim. de péou,
pieu.
Pantaï, s. m. Rève, songe, qu’on fait en dormant.
Dér. du grec oévraaux, fait de pau, fantôme, vision.
Pantaïsa, vw. Rèver, songer, faire des rêves, des
songes.
Pantécousto, s. f. La Pentecôte, fète que célèbre l'Église
cinquante jours après Pâques en mémoire de la descente
du Saint-Esprit sur les apôtres. Éntre Pasquos et Panté-
cousto, faï toun déssèr d'uno crouslo.
Pantécoustos, s. f. plur. Un des noms du chèvre-
feuille, qui lui a sans doute été donné parce qu'il fleurit
vers la Pentecôte. Son autre nom est Manétos.
Pantèrno, mieux Fâoutèrno, seul en usage ici. Voy.
ce dernier.
Panto, s. f. Bamboche, ribote, orgie. Faïre la panto,
faire sas pantos, faire la débauche.
Pantoufléto. s. f. Un des noms du mufle de veau. Voy.
Cacalaca.
Pâou, s. m. Échalas, quand on l'emploie pour palisser
la vigne; pieu ou piquet, quand il sert à tout autre usage
analogue. Dé qué fas aquè planta coumo un pâou, que
fais-tu là immobile et tout étonné ?
Dér. du lat. Palus, m. sign.
Pâou, adv. de quantité. Peu, dont il n’est point cepen-
dant l'équivalent ordinaire qui est plutôt pas gaïre. Il
mange peu, se dit manjo pas gaïre et non point manjo pou ;
il a peu d'argent, a pas gaire d'argén et non a pdou d'ar-
gén. Pâou ne s'emploie donc guère que dans certaines
phrases faites, et le plus souvent comme substantif, Douna-
mé n'un pdou, donnez-m'en un peu. Pdou ou prou, peu
ou prou, plus ou moins, et par ext. de manière ou d'autre,
par bécarre ou par bémol. Pér pdou qu'ou digués maï, pour
peu que vous le disiez encore, si vous le répétez. Dé péou à
pou, peu à peu. Ddou pdou pou c'estleproverbe: petit à
petit l'oiseau fait son nid, ou maille à maille se fait le hau-
PAO
bergeon. Laïssa-mé un pdou passa, laissez-moi passer, je
vous prie. Douna-mé un pdou aqud, donnez-moi cela, s'il
vous plait. Véire un pdou, Voyons, examinons attentive-
ment. Ou voulès pas ? el iéou tan pdou, vous ne le voulez
pas? ni moi non plus. Éntre trop et pâou, mésuro li câou,
ni trop ni pas assez ; c'est le lat. est modus in rebus et
la devise du juste-milieu : in medio virtus. Péou-vdou,
un vaurien. Pdou-parlo, homme sournois, silencieux, qui
parle peu.
Dér. du lat. paucus, où paucè, peu, en petit nombre.
Pâou (Sén). La Saint-Paul, fête de l'apôtre célébrée le
29 juin. — Nom de lieu fort répandu que porte une com-
mune du canton d’Alais, à qui l'on ajoute Lacosto, parce
que le chef-lieu est sur une montagne, Saint-Paul-Lacoste.—
1 faut observer que, lorsque ce nom devient nom de bap-
tême, il se prononce comme en français et qu'il faut alors
l'écrire Pol où Paul, si l'on veut conserver l’étymologie;
son dim. est Poulé, Pouloù, Poulétoù. Sén-Poulé, désigne
le village de Saint-Paulet-de-Caissons, localité du canton de
Bagnols.
-. Pâou-dé-Sén, s. des deux genr. Personne de peu de
sens. Aqud ’s un pdou dé sén, c'est une petite tête, et
l'on dit souvent le péjoratif pdou-dé-sénas, c'est un im-
bécile.
Pâoufère, s. m. Pince, levier, pour soulever une masse,
ébranler ou détacher un bloc de pierre, etc. I est presque
pointu par un bout; et l’autre, plus gros, est taillé en pied
de biche. Planta uno vigne dou pdoufère, planter une
vigne à l’avant-pieu et planter des oseraies à l'aguio,
{Voy. ce mot, et brouqua), c’est faire en grand ce que fait le
jardinier avec son plantoir; seulement le plantoir, appelé
agüio où péoufère, qui n’est plus le levier, est une barre
de fer pointue d’un côté. — En terme de meunier, pdou-
fère est l'axe de fer vertical qui porte à son bout supérieur
J'anille enchassée dans la meule tournante et dont le bout
inférieur est encaissé dans une rainure de l'arbre de bois.
(Voy. Candèlo.)
Péoufère est'un composé de pdou et de fère, pieu de fer,
barre de fer qui s'applique à toutes ses acceptions.
Pâoumo, s. /. Balle pour jouer au jeu de courte et de
longue paume; ce jeu lui-même. Drouvè d'ièls coumo dé
péoumos, ouvrir des yeux grands comme des salières,
comime des portes cochères. Pdoumo dé la man; paume de
la main; cette dernière acception explique la première
parce que c'est avec la paume de la main qu'on renvoie
la balle quand on ne se sert pas de la raquette où du
battoir.
Dér. du lat. palma, paume de la main.
Paoün, s. m. Voy. Pavoün.
Pâouparlo, s. des deux genr. Mot à mot, qui parle peu,
ce qui n'est pas toujours un défaut; aussi n'adresse-t-on
guère ce reproche qu'à un sournois, à quelqu'un qu'on
suppose avare de ses paroles par calcul.
Pâoupèrlo, s.”, Paupière, voile membraneux et mo-
PAO 523
bile qui couvre l'œil, et cils où poils qui garnissent la pau-
pière. On dit d'un avare : Viou pas qué dé pdoupèrlos
d'agasso.
Dér, du lat. palpebra. m. sign.
Pâoupa, v. Manier, toucher avec la main.
Dér. du lat. palpare, m. sign.
Pâouqué, s.m. Bien peu, très-peu, une idée, un soupçon.
Douna-mé n'un pdouqué, qu'on pousse quelquefois jus
qu'au pdouquété, où péouquéné, donnez-m'en un tantinet.
És un pdouqué maldou, il est indisposé.
Dim. de pdou, peu.
Pâouramén, adv. Pauvrement, misérablement, triste-
ment, mesquinement; car ce mot, comme le suivant, a
plus d’une nuance. Mouriguè péouramén, il mourut triste
ment, mwisérablement. Mé toumbère bièn pdouramén, je
tombai bien malheureusement. M'én dounè tan péouramén,
il en donna si peu, si petitement, si mesquinement.
Pâoure, Pâouro, adj. et s. Dim. pdouré, aug. pdouras.
Pauvre, nécessiteux ; mauvais au physique et an moral;
infortuné, qui est à plaindre ou à regretter; mendiant. Las
glèisos sou pâouros : las vitros sou dé papië, les églises sont
pauvres, les vitres sont de papier. Pdoure coumo Jaquas,
pauvre comme Job. Mouririè pu lèou l'ase d'un pdour'
home, l'âne d'un pauvre homme crèverait plutôt, se dit à
propos de quelqu'un de mince valeur qui réchappe d'une
maladie, et le français dit de mème : il mourrait plutôt
quelque bon chien de berger. Aquél vi és bièn pdoure, bièn
pdouras, ce vin est bien mauvais, bien piètre, détestable
Dé pdouros résoùs, de mauvaises paroles, de vilains
propos. Dé pdouros magnèros, de mauvaises, de tristes,
d'inconvenantes manières. Pdoure iéou ou pdoure dé iéou !
malheureux que je suis! Pdoure dé vous! que je vous
plains! Pdoure, vièl et maldou, souhait de malheurs que
l'on adresse à un ennemi : {Je te souhaite pauvreté, vieil-
lesse et maladies ! Zou pdoure mort, formule qu'on n'omet
guère en parlant d’une personne décédée depuis peu, sur
tout lorsqu'elle mérite l'estime et les regrets. Moun péoure
pèro davan Diou siègue ! feu mon père, que Dieu absolve,
ou devant Dieu soit son Ame! La seconde partie dévotieuse
de celte phrase n'est pas toujours employée et ne se répète
pas dans la même conversation; mais un languedocien,
parlant de son père ou de sa mère qui n’est plus, ne manque
jamais, et cela ordinairement toute sa vie, de se servir à
leur égard de la première formule, respectueuse et tendre,
qu'il traduit même littéralement au besoin sans s'éloigner,
ce nous semble, de l'esprit de la langue française : Moun
pdoure pèro disiè souvén, mon pauvre père disait souvent. —
Un pdoure, uno pdouro, ui pauvre, une pauvresse, un
mendiant, une mendiante. Batre lous pdoures, on dit cela
de quelqu'un de fort pauvre et aux expédients pour expri-
mer sans doute qu'il battrait les mendiants pour leur
disputer et leur prendre l’aumône dont il a plus besoin
qu'eux.
Dér. du lat. pauper, m. sign.
524 PAO
Pâoure (rasin dé) s. m. qu’on appelle aussi simplement
pdoure, raisin de pauvre ; aucune espèce ne donne d'aussi
belles grappes, qui sont divisées en plusieurs grapillons,
très-serrés, aux grains assez gros, de couleur rouge ou rose.
IL n’est pas rare de voir des grappes qui pèsent deux kilo-
grammes. Ce raisin donne un vin rose; sa peau est un peu
coriace maïs il a bon goût, Sarments gros et tendres, feuille
assez grande, pas trop découpée.
La grosseur de ses grappes, dont une seule suffit pour le
repas d’un pauvre à qui on le donne ou qui le prend, lui
a valu son nom.
Pâour’ home, interj. Cette expression n'est point de
notre dialecte et a 6t6 importée chez nous du Gévaudan où
elle est fort en usage; elle n’a point de rapport aux facultés
pécuniaires, ni aux qualités du cœur ou de l'esprit; c'est
simplement un terme d'affection familière qui répond à
mon ami, mon cher, mon camarade. Maï pdour’ home, vésès
bé, mais vous voyez bien, mon cher. Il en est de même de
pdouro fénno.
Pâourièiro, s. f. Pauvreté, misère, indigence. Pdou-
rièiro méno lagno, de pauvreté fatigue et peine. Péourièiro
fai l'home impourtun, pauvreté rend importun. Péouriètro
faï coure carièiro, pauvreté fait courir les rues, fait perdre
la tête.
Pâourous, Pâourouso, adj. Peureux, craintif, poltron.
Il serait mieux de dire péouroùs; puisqu'il vient de péou,
peur, mais l’usage a consacré l’altération .
Pâousa, v. Poser, placer, déposer, décharger, ôter. Péousas
aquè sus la téoulo, mettez cela sur la table. Pdousa un fai.
uno caréto, décharger un faix, une charrette. Péousa sa
vèsto, Ôter sa veste. — Pdousa marquo, Voy. ce mot. —
Sé péousa, se reposer, faire une pause. Vénès vous pdousa
qué dévès èstre las, Venez vous reposer, vous asseoir, car
vous devez être las. Péousén-nous un péou, suspendons
un moment ce travail, reposons-nous un peu, prenons
haleine.
Le second du lat. pausa, pose, repos, et le premier de
ponere, posui, positum, poser, mettre bas, quoique la
prononciation s'éloigne du radical et se confonde avec
l'autre.
Pâousadis, Pâäoussadisso, adj. Tranquille, reposé, au
propre comme au figuré.
Pâousadou, s. m. Lieu où l'on se repose; endroit, objet
où l’on dépose quelque chose.
Pâousaire, s. m. Poseur. Lorsqu'on demande, d’un fai-
néant qui ne sait ou ne veut rien faire, ce qu'il veut être :
péousaïre, répond un tiers qui le connaît, et cette espèce
de calembourg, tiré du verbe sépdousa, se reposer, est à peu
près le seul emploi de ce mot que le français remplace
assez drôlement par inspecteur... des pavés.
Pâousado, s. f. Terme de chasseur pour le gibier ailé.
Tira à la pâousado, c'est, pour les perdrix, tirer à la re-
mise; mais on le dit surtout des autres volatiles pendant
qu'ils sont posés sur une branche on par terre. On peut
PAP
rendre cela par : tirer au repos, par opposition à tira à da
voulado, tirer au vol ou en volant.
Pâouso, s. f. Pose et pause. En termes d'arts et métiers,
il se dit surtout de la pose des pierres. Faguén uno pdouso,
faisons une pause, reposons-nous un moment. La pdouso,
proprement dite indique, pour les ouvriers, l'intervalle com-
pris entre deux reprises de travail.
Pâoutéja, v. Manier, patiner, remuer, toucher grossière-
ment une chose avec les mains, pdoutos.
Pâouto, s. f. Patte, mais on entend presque toujours par
ce mot une grosse et vilaine main qui ressemble en effet à
une patte. Marcha, camina dé quatre pâoutos, marcher à
quatre pattes.
Pâoutu, do, adj. Pattu; qui a de grosses ou vilaines
mains, de gros vilains pieds. Au fig. grossier, lourdaud,
pataud. Pijoun péoutu, pigeon pattu, variété de pigeon
appelée aussi pigeon de maison ou jacobin. Ce pigeon a des
plumes jusqu’au bout des pattes.
Papa, s. m. Terme enfantin synonyme de père. Dans l'u-
sage français, il n’est par rare de voir des hommes et sur-
tout des femmes d’un âge avancé, dire à leurs parents papa
et maman. Dans le languedocien et surtout parmi le peuple,
il n’en est jamais ainsi : Le tout jeune enfant qui balbutie
papa et mama, dit bientôt papo et mamo dès qu'il articule
un peu mieux ;et, à peine est-il grandelet, qu’il ne dit plus
que pèro et mèro, ou mème païre et maïre. Aussi serait-il
parfaitement ridicule de demander à un homme fait et
même à un jeune adolescent : Coussè vaï ta mama? Voy.
Mama. Du grec rérxas, père en terme enfantin.
Papa, s. m. Jabot, poche ou premier estomac des oiseaux
dans lequel la nourriture est humectée et macérée, ce qui
la dispose à recevoir la digestion dans le gésier; périé,
second estomac où elle passe ensuite.
Dér. du lat. pappare, manger des choses qu’il n’est pas
besoin de mâcher.
Papassar, s. »m. Augm. et péj. de papiè, papier qui est
formé dans le même esprit que paperasse. On l’applique
aussi bien à une grande affiche collée au coin d’une rue qu'à
un long et ennuyeux manuscrit.
Papé, s. m. Variante plus courte et plus facile à pro-
noncer du mot suivant.
Papéto, s. m. Grand-papa, bon-papa, dans le vocabu-
laire des petits-enfants qui ne disent moun gran qu'un peu
plus tard. Papéto et papé sont les dim. de papa ; et le fran-
çais, par la même antiphrase câline, dit aussi au grand-père :
petit papa.
Papiè, s. m. Papier. Papiè-béseui, feuille de papier sur
laquelle les pâtissiers disposent leurs biscuits vulgairement
appelés langues-de-chat avant de les mettre au four. Les
biscuits enlevés, les pâtissiers vendent ou plutôt vendaient
ces papiers vides aux enfants qui en suçaient les em-
preintes.
Papiè-magna, qu'on appelle ailleurs papier d'emballage,
grand papier gris, grossier, fort employé dans l'éducation
PAR
des versàsoie, pour couvrir le fond des clayons appelés cam-
panèjes, où on les tient au premier âge, ou bien les tables
sur lesquelles on les transporte encore petits, pour qu'ils ne
passent pas au travers. Ce serait, dans les Cévennes, le plus
connu de tous les papiers, si ce n'était le papié-marqua qui
ne l'est que trop; sans compter lous papiès ou papiès-nou-
vèlos qui cependant commencent à passer un peu de mode
pour prendre le nom français de journal. — M'a fa un
papië, il m'a fait un billet. Quan papiès parlou, barbos
calou, quand le papier parle les hommes se taisent. A quel-
qu'un qui veut dissimuler un état d'ivresse encore niable,
on dit de prononcer : figo lignolo papiè blu ; mots qui n’ont
aucun sens mais dont l'articulation est un effet assez dif-
ficile pour qu'une langue qui commence à s’embarrasser ne
puisse sortir de l'épreuve avec honneur.
Papièiréja, v. Paperasser, remuer, feuilleter, arranger
des paperasses ; en avoir les poches pleines, faire beaucoup
d’écritures, le plus souvent inutiles.
Dér. de papiè, papier,
Papièiréjaire, s. nm. Paperassier, écrivassier, qui aime à
papiétréja.
Papo, s. m. Pape, le chef de l'Église catholique.
Dér. du lat. papa, père et pape.
Papo, variante de papa, pour père, etqui, comme mamo,
est le second degré de cette dénomination enfantine. —
Foy. Papa.
Papogaï, s. m”. Perroquet. L'italien dit papagallo et le
portugais papagajo, comme le français disait papagai ou
papegai, aujourd'hui parouqué, seul nom en usage, est
tout français. Papogaï n'est usité que dans cette phrase :
Sémblo aqui lou Papogaï, il est là comme le pape Colas,
qui est dit pour Nicolas.
Paqué, s. m. Paquet, assemblage de plusieurs choses
liées, ficelées, enveloppées, réunies ensemble.
Par, s. f. Part, portion d’une chose divisée, partie d’une
chose commune à plusieurs. Dé trés pars, uno, le tiers;
dé trés pars, dos, les deux tiers; dé quatre pars, uno, le
quart, ete. — Le français est ici plus concis; mais notre
ancien langage, comme le fait observer SAuvAGES, n’était
pas familiarisé avec les termes abstrails. — Ma par ! je
* retiens ma part! dit-on à quelqu'un qui ramasse une chose
perdue et que l'on retrouve en notre présence. Cette locution
qui n’exprime plus aucun droit, à moins qu'on ne le fasse
valoir par la force, vient du droit de part en vigueur dans
certains pays où celui qui avait fait une trouvaille était
obligé de la partager avec celui qui en avait été le témoin. —
Y-ou dirés dé ma par, vous le lui direz de ma part.
-Dér. du lat. pars, m. sign.
Para, v. Parer, ragréer avec la serpette la place que la
scie a faite à une branche d’arbre; enlever les chicots, le
vieux bois de la vigne, d’un arbre, avec la serpe; parer le
cuir ; enlever avec le couteau à deux manches appelé bou-
toir, ce qui est resté de l'épiderme de l'animal attaché à la
peau; en terme de sellier, ravaler, amincir le cuir; parer
PAR 525
le pied d’un cheval avant de le ferrer; couper la corne avec
le boutoir, butavan ; fouler, dégraisser le drap dans les fou-
lons. On le dit aussi pour parer, éviter un coup : paro aquél,
pare celui-là. .
Parabondo, s. f. Parapet, garde-fou, balustrade d'an
pont, d'un quai, d'une terrasse, d'un balcon; rampe d'un
escalier. — Un curé retraçait en chaire les difficultés du
Paradis. On ne peut y arriver, disail-il, que par un pont
jeté sur le gouffre de l'enfer, et ce pont est si étroit !...—
A cette peinture émouvante qui ne laissait pas de l'in-
quiéter, un paroissien s'écrie du milieu de l'église : Y-apas
gés de parabondo; moussu lou cura ? — Nani, moun ome.
— Alor, à bas mé vése.
Parabondo est dit pour parabando, et c'est de cette der-
nière manière que l'écrit SauvAGEs, malgré sa prédilection
pour le dialecte rayol ; il paraîtrait, dès lors, que ce mot
est formé de para, défendre, préserver, et de bando, troupe,
foule; c’est dans ce sens qu'est formé le français garde-fou.
Paradis,s. m. Paradis, séjour des élus, des bienheureux.
* Dér. du grec rapéôeuos, jardin. Le premier paradister-
restre était en effet un jardin.
Paradis, s. m. Paradis; dernières galeries d'un théâtre.
Ce n’est point parce qu'on y est mieux, mais parce qu'elles
sont très-élevées que, par un rapprochement irrévérencieux,
on a donné à ces places la dénomination de paradis que
les voyous remplacent aujourd’hui par celui de poulailler,
lieu où s’entassent les poules pour se jucher.
Paradis, Paradoù et Paraïre, adj. et s. m. Mouli pa-
radis, moulin à foulon, pour fouler et dégraisser les draps.
— Ce nom est encore celui d'un moulin à blé et à huile
d’Alais, bien qu'il ne serve plus à sa première destina-
tion et souvent on retranche, en en parlant, le mot mouli :
— Ounte anas môoure ? — Ên paradis.
Paradouù, adj. et s. m. C'est le synonyme de Paradiset
paraïare-: mais aussi, comme substantif, il signifie le foulon
lui-même.
Dér. de la bass. lat. paratorium, lieu où l'on prépare les
draps. — Coutèl paradoù où seulement paradoù, paroir,
couteau à parer dont se servent les sabotiers pour donner
la dernière façon aux sabots.
Paraïre, Foy. Paradis, dont il est le synonyme.
Parâoulassos, s. f. plur. Paroles grossières, sales, ce
que l'on appelle populairement gueulées, d'où l'on a fait en-
gueuler, dans le même style, péjor. de pardoulo.
Parâouli, s. m”. Parlerie, babil, caquet, bavardage,
verbiage.
Paräoulo, s. f. Parole. Parlan-t-én réspè, qué pardoulos
pudou pas. sauf votre respect, car paroles ne puent point.…
précaution oratoire dont on ne se dispense guère en parlant
d'un animal immonde ou peu noble, ou de choses de même
nature. Ploumos et pardoulos, l'ouro las émporto, plumes
et paroles le vent les emporte. Pardoùlos volou, éscris démo-
rou, paroles s'envolent, écrits restent ; c’est le mot-à-mot
de l’adage latin : verba volant, scripta manent, idée que l'on
67
526 PAR
rend encore par : les paroles sont des femelles, les faits sont
des mâles.
Parapèl, s. m. Parapet, garde-fou, murs à hauteur d'ap-
pui sur un pont, un quai, une terrasse. Altération du mot
français parapet qui est formé de l'italien parapelto, qui
défend la poitrine, petto.
Parapléjaire, s. m. Fabricant et marchand de parapluies,
surtout le marchand ambulant, qui court la ville et la cam-
pagne, sa boutique sur le dos, raccommodant plus de vieux
qu’il ne vend de neuf.
Paraplèjo, s. m. Dim. Paraplèjéto; aug. paraplèjasso,
parapluie.
Dér. de para ou apara, défendre, et de plèjo, pluie.
Parasol, s.m. Dim. parasoulé ; aug. parasoulas. Para-
sol, emprunté au français, mais pour signifier plulôt para-
pluie plus soigné et d'étoffe plus coûteuse.
Parasoulaïre, s. m. fabricant et marchand de para-
pluies, et de parasols, comme le paraplèjaïire. — Voy.
Parasol.
Parço, conj. Abrév. de parço-qué, qui ne sert que pour
faire une réponse fort usitée et la plus péremptoire de toutes.
Pér dé qu'ou vos pas? — Parço. Pourquoi ne le veux-tu
pas ? — Parce que. Dans la même circonstance pargo qué
est aussi employé.
Parço qué, conj. Parce que. Par pour par, qui se dit
pér, n’est pas languedocien ; cela indique du reste que pargo
qué est une de ces conjonctions empruntées au français,
et il s'emploie dans les mêmes cas que parce que.
Pardi, interj. Pardi, pris au français pour adoucir,
comme lui, le juron pardiou, pardieu..
Pardinche, interj. Pardienne, parbleu. C’est une de ces
nombreuses variations exécutées par une bouche timorée
pour faire presque disparaître le thème original pardiou.
Pardiou, interj. Pardieu ! Le languedocien devrait faire
et dire pérdiou; ce mot est donc une copie servile-du fran-
çaïis qui a prêté jusqu’à sa préposition par, qui n’est point
Jlanguedocienne. Pardiou, comme ses atténuations, pardi,
pardinche, est une sorte de jurementet d’affirmation. Par-
diou! tou faraïvéire, pardieu! je te le ferai bien voir. Oh!
pardiou, nou, non certes pas !
Paré, s.f. Paroi, mur, muraille. Parés blanquos, papriès
dé fols; muraille blanche, papier de fou, d'imbécile; avis
aux personnes qui y inscrivent leur nom : Nomina stulto-
rum semper parietibus insunt.
Dér. du lat. paries, m. sign.
Parégu, do, part. pass. de Paréïsse.
Paréiïsse, v. Paraître, se faire voir, se montrer; avoir
l'air, l'apparence, sembler. Mé paré, il me semble.
En esp. parecer, M. sign.
Parél, s. m.Paire, couple. Paire, lorsqu'il s’agit de l’as-
semblage de deux choses qui vont ordinairement ensemble
et d’une chose unique essentiellement composée de deux
pièces séparables : un parél dé bidous, dé souïès, dé pistou-
lés, dé poulés, dé pijouns, une paire de bœufs, de souliers,
PAR
de pistolets, de poulets, de pigeons; un parél dé cisèous,
d’ésténaïios, dé braïos, une paire de ciseaux, de tenailles ; un
pantalon. Aqud’s un poulà parél, C’est un joli couple, en
parlant de deux époux. Couple qui, dans ce cas, est mas-
culin, redevient féminin lorsqu'il est considéré comme un
certain nombre de choses à peu près indéterminé : un parél
d'idous, dé lidors, dé jours, une couple d'œufs, de louis,
de jours. — À bèles paréls, deux-à-deux.
Dér. du lat. par, paris, pareil, égal.
Parèn, to, s. m. et f. Parent, qui est uni par le sang.
Aguën d'argén, manquara pas paréns, ayons de l'argent,
les parents ne manqueront pas. Paréns sans amis, farino
sans tamis, parents sans amis, farine sans tamis. Quant
aux parents par alliance, ils sont encore plus mal traités
par le proverbe : paréns dé ma fénno, paréns dé moun
quiou. — Paréns, ceux de qui l’on descend et plus ordi-
nairement le père et la mère. Sous parëns soun éstas dé
Ginouïa, ses parents, ses ancêtres, ses ascendants, étaient
de Génolhac. S'és brouïa émbé sous paréns, il s’est brouillé
avec ses parents, avec son père et sa mère. On donne le
nom générique de parén pour laisser dans le vague le
degré de parenté qui est souvent plus éloigné : Coumo
anas, parén ? Comment allez-vous oncle ou cousin ?
Dér. du lat. parens qui s'entendait des ascendants directs.
Paréntaje, s. m. Parentage, parenté.
Paréntèlo, s. m. Parentelle, les parents en général; tous
les parents. \
Pargado, s. f. Étendue de terrain parqué ou occupé
par un parc, pargue, et amendé par le crottin et le pissät
des moutons; SAUVAGES dit parquée.
Pargue, s. m. Parc à brebis, clôture faite avec des claies,
clédos, soutenues par des pieux auxquelles elles sont atta-
chées. Vira lou pargue, changer le parc, ce qui se fait en
laissant en place les claies, d’un côté du terrain circonscrit,
et repliant les autres pour former une nouvelle enceinte
pareille et contiguë à la première; opération bien mieux
précisée par le terme vira, tourner, retourner. — Aÿ bé
d'éoutres pargues à vira, j'ai bien d'autres affaires, d'au-
tres chiens à fouetter.
Parquéja ou Parga, v. Parquer ou faire parquer les bre-
bis : pratique qui procure à ces animaux la santé, un bon
engrais aux terres à blé, et un belle toison au propriétaire.
(SAUVAGES.)
Paria, v. Parier, faire tenir un pari, une gageure.
Empr. au français : on dit mieux jouga.
Pariè, iro, «dj. Pareil, égal, semblable. Lou pariè man-
quo ou soun pariè és à naïisse, son pareil n'existe pas Ou
son pareil est à naître, dit-on d’un original, d'un extrava-
gant. Sou pariès, ils sont égaux, de mème force, du même
âge, de même taille. Sow pas pariès, ils ne sont pas
égaux de force, d'adresse ou d'intelligence. Sé féou
faire émbé sous pariès, il faut se faire, se fréquenter avec
ses égaux. M'én féou un pari, il m'en faut un eh
Dér. du lat. per, paris, m. sign.
PAR
+ Pariuro, s. f. Pari, gageure. Faguén uno pariuro, pa-
rions, gageons, faisohs une gageure, un pari.
Parla, ». Parler. Parla coumo la bèlo Jano, babiller,
bavarder, comme une commère, comme une pie borgne. Sé
siès bono céouso, parlo ; sé qué dé nou, rétiro-té, si tu es
bonne chose, parle; sinon retire-toi; ce qui veut dire:
Si tu viens de Dieu, parle; si tu viens du démon, va-t-en ;
sorte de conjuration que font les poltrons qui croient voir
des spectres dans l'obscurité. — Aquû s'apèlo parla ! Voilà
ce qui s'appelle parler! — Parla-mé dé Méjano, pér lou
bon vi! vive Méjannes pour le bon vin! — Parla-mé qu'ou
savièi, — Notez que je le savais, le bon de l'affaire c’est
que je le savais. — Parla-mé qu'ou aï pas vis, je ne l'ai
sans doute pas vu! se dit ironiquement pour montrer qu'on
est au courant d’une affaire. — Eh bé, quan sé parlo! Eh
bien qui l'aurait dit ! Parla dé tèsto, délirer. Parla coumo
un libre, parler comme un livre, ex professo. Parlan-t-én
réspè, sauf le respect que je vous dois, que je dois à la com-
pagnie, sauf révérence, révérence parler, formules familières
au français; mais le languedocien emploie la sienne dans
toutes les occasions où il parle de quelque chose dont il
craint que l’idée ou l'expression peut choquer ou blesser;
etil complète souvent sa formule par : pardoulos pudou pas.
— Voy. Pardoulo.
Parla à uno fio ou émb'uno fio, faire la cour à une fille,
la rechercher dans des vues honorables. Sé parla est plus
réciproque et se dit des fréquentations souvent fort lon-
gues, connues de tout le monde, autorisées, approuvées
par les parents, qui ont lieu entre un garçon et une fille,
et dont presque tous les mariages du peuple sont précédés.
Sé parla, éveille l’idée d’une grande réserve dans ces rela-
tions, réserve que n'indique pas tout-à-fait le terme fringa,
qui laisse un peu plus de prise à la médisance, — Voy.
Fringa. :
Parladisso, s. /. caquets, parlage, longs propos, longs
entretiens.
Parlaïre, Parlaïro,s. m. et f. Parleur, causeur, bavard,
indiscret.
Parlamén, s. m. Entretien, causerie, conversation. Se
prend aussi pour synonyme de parla, subst. : l'aï counégu
àsoun parlamén, où à soun parla, je l'ai reconnu à sa voix,
à sa manière de parler.
Paro-fré, s. mn. mot-à-mot pare-froid qui devrait bien
être françait au même titre que parapluie, paravent. On
peut donner ce nom à une chose quelconque qui garantit
du froid; mais on l’applique communément à tout vôtement
chaud.
Paro-mousquo, s. m. Émouchette, caparaçon à treillis
ou réseaux avec des bouts de cordes pendantes, appelées
volettes, pour garantir les chevaux des mouches. Comme
nom générique on peut aussi donner ce nom à l'émouchoir
ou chasse-mouches. — Voy. Mouscal.
+ Parouassièn, 0, s. Paroïssien, habitant d'une paroisse.
Parouassièn, livre qui contient les prières qu'on dit dans
PAR 527
la paroisse, Emprunt fait an français. És un parouassièn
qué s'émbèstio pas, c'est un gaillard qui n'a pas de pous-
sière aux yeux.
Parouèsso, s. f. Paroisse, territoire d'une cure; ses
habitants.
Parouqué, s. m. Perroquet. Psittacus. Oiseau grimpeur,
frugivore, à bec crochu, dont les variétés nombreuses sont
remarquables par leurs riches couleurs. L'Italien dit Papa-
gallo, et le Portugais Papagayo, comme nous disions
Papagaï. Aujourd’hui Parouqué, nom tout français, a
prévalu.
Parpaïou, s. m. Papillon. Papilio. Tout le monde sait
que les papillons, la plupart remarquables par leur robe
brillante, ont été d’abord des chenilles, en général fort
laides. C'est l'insecte arrivé à l'état parfait après avoir passé
par ceux d'œuf, de chenille et de chrysalide.
Parpaïouna, v. Lous fouséls parpaïounou, les cocons
percent, les papillons éclosent; parpaïouna est dit ici
pour faire des papillons. Au moment de la mue des vers à
soie, quand Ja plupart sont endormis, pour préparer les
retardataires, on jette quelques feuilles çà-et-là jusqu'à ce
qu'on cesse tout-à-fait de donner à manger : cela s'appelle
parpaïouna. Lorsqu'il tombe de ces flocons de neige rares
eL assez gros, on dit encore : la nèou parpaïouno, Dans ces
deux dernières acceptions, parpaïouna exprime papillonner,
faire comme le ‘papillon. Parpaïouna, papillotter, remuer
involontairement les paupières qui imitent le mouvement
rapide des ailes du papillon.
Parténço, s. f. Départ. Souï dé parténgo, je suis sur
mon départ, à la veille de mon départ.
Parti, s. m”. Parti, union de personnes contre d'autres
qui ont un intérêt contraire; détermination, usage, utilité;
personne à marier, considérée sous le rapport des avantages
qu'elle apporte. Sèn ddou mèmo parti, nous sommes du
même parti, de la même opinion politique. Aquél luchaïre
faï soun parti tout soul, ce lutteur est seul de son parti, il
est sans associés. Préne soun parti, prendre son parti, se
décider. Tira parti, tirer parti. Aquélo fio fara un bon
parti, celte fille sera un bon parti. Outre ces acceptions
toules françaises, on dit parti pour exprimer une certaine
quantité ‘ achatère un parti, un pichà parti dé bla. j'achetai
une certaine quantité de blé. Y-a aqui un pouli parti dé
fiéio, il y a là une belle quantité de feuille, un beau produit
en feuille.
Dér. du lat. partiri, partager, el pars, partis, partie.
Parti, v. Partir, se mettre en chemin; prendre sa course,
son vol; partir, pour un coup de fusil, de mine; fendre,
partager, Partis pas lou jour qu'émbasto, il ne cuit pas du
premier bouillon, se dit d’un Jambin. La tèsto mé partis, la
tête me fend. Partiriè un pèu én dous, il partagerait un
cheveu; il couperait un liard en quatre, se dit d'un
avare.
Dans les premières acceptions, du français partir ; dans
la seconde, du lat. partiri, partager, séparer.
528 PAS
Particuiè , iro, s. "=. et f. Particulier. Ce mot français
n'est emprunté que pour cette locution populaire : és un
particuïd, uno particuïèiro qu'é n'én sa prou, C'est un
gaillard, un malin qui en sait long, qui ne se gène pas, elc.
Partido, s. f. Partie, portion, parlie de plaisir, de jeu.
Purtido! gagné! cri de triomphe qu'on ne pousse pas seu-
lement au coup qui donne une partie de jeu, mais encore à
un accident ou un évènement qui décide d’un succès quel-
conque et mème d’un revers, d’un échec. Seulement, dans
ce dernier cas, l’intonation l'indique, et c’est le consum-
matum. est!
Pas, s.m. plur. Passes, dim. passé. Pas, déplacement des
jambes en avant pour marcher; pris pour mesure, lou pas,
équivaut à un mètre. Préne sous quinze passes, faire ses
quinze tours. Véou davan mous passes, je vais tout droit
devant moi, répond-on à un curieux indiscret. Régardo
davan tous passes, fais attention où tu marche, regarde
à tes pieds, recommandation adressée aux enfants qui
marche à l'étourdie. Lèvo-té dé duvan mous passes, Ôte-toi
de mon chemin. Pas-à-pas l’on vai iuèn, pas à pas l'on
va loin. Après lou repas, lou fid ou lou pas, après le repas,
il faut se chauffer ou marcher. — En terme de métier
pa-dé-vis, pas de vis, distance comprise entre les filets
d’une vis, et du français; il faudrait autrement dire : pas
d'avis. — Le pas romain équivalent à la millième partie du
mille romain, dont la longueur a été fixée par M. Aurès à
148150, présentait donc un intervalle d’un peu ‘plus de
1m48. Dans l’acception moderne, le pas proprement dit
représente l'intervalle compris dans une enjambée, et peut
être assimilé au gressus ou gradus des Romains, équivalent
à deux pieds et demi (0"74); tandis que le passus romain
représente deux enjambées (148), c’est-à-dire l’espace par-
couru par un même pied, en mouvement de marche,
pendant que l’autre pied, servant de point d'appui, reste
immobile.
Dér. du lat. passus, m. sign.
Pas, part. nègat. Pas. — Voy. Pa.
Pas-d’ase, s. #1. ou Pa-d'ase. Pas-d’âne ou Tussilage.
Tussilago farfara, Linn., plante dont les fleurs jaunes
qui paraissent avant les feuilles, sont employées en infusion
contre les rhumes, ainsi que l'indique son nom français et
latin, formé de tussim ago, je chasse la toux. Celui de pas-
d’âne lui vient de ce que sa feuille a quelque ressemblance
avec la trace qu'imprime sur le sol le sabot d’un âne.
Pasquâou, adj. m. Pascal, de Pâques. Cièrge pasqudou,
nom d'homme Pascal, dont le fém. est Pasqualo et le dim.
Pasqualé.
Pasquéja, v. Célébrer la fète de Pâques, mais seulement
au point de vue mondain et gastronomique : c’est faire le
premier repas où l’on retrouve le gras, si longtemps proscrit
pendant toute la semaine sainte; se décarèmer, comme dit
SAUVAGES. Pasquéja s'entend surtout des parties champêtres
du lundi de Pâques ; et ount'anas pasquéja équivaut à ount’-
anas faire ou manja l'éouméléto? — Voy. ce dernier mot.
PAS
Pasquétos, s. f. plur. Pâäques-closes, le dimanche de
Quasimodo qui suit immédiatement celui de Pâques et elot
le temps pascal. Pasquétos, dim. de Pâques, petite fête de
Pâques.
Pasquo, s. f. ou Pasquos, s. f. plur. Pâques, jour de
la résurrection du Sauveur. Comme la fête de Pâques est la
règle de toutes les autres fètes mobiles de l'année, le con-
cile de Nicée, tenu l'an 325, fixa Pâques au dimanche après
le 44 de la lune de mars, c.-à-d. après la pleine lune Ja
plus proche de l'équinoxe du printemps.
On dit {a Pasquo, si l'on parle de la Pâque des juifs ;
mais quand il s’agit de la fête chrétienne, Pasquo ou Pas-
quos, qui s'emploient également, ne prennent point l'art.
la ou las. Pér Pasquos, à Pâques. Faïre sas Pasquos, faire
ses Pâques, communier. La quinzéno dé Pasquos, la quin-
zaine de Pâques, tout l'intervalle compris entre le dimanche
des Rameaux et celui de Quasimodo, inclusivement, com-
prenant ce que l’on appelle le temps pascal. La sémmano dé
Pasquos, la semaine de Pâques, qui suit le dimanche, en y
comprenant le dimanche suivant. Lou dilus dé Pasquos, le
lundi de Pâques où la ville est déserte et morne, et les ma-
sets peuplés et joyeux, parce que c’est le jour des repas de
campagne où l’omelette joue un tel rôle qu'on appelle sou-
vent ce lundi: lou dilus de l'éouméléto. Voy. Aouméléto.
I n'ya pas un très-grand nombre d'années qu'il était une
règle fort suivie de mettre, le jour de Pâques, les habits
d'été, quelque temps qu'il fit, et fallèt-il endossér de nou-
veau les habits d'hiver le lendemain. On en était quitte pour
dire : füou moun dévé, qué lou tén fague lou siou. On est
moins formaliste aujourd’hui, et l'on attend assez générale-
ment que le tempscommence lui-même par faire son devoir.
Pasquo mouiudo fai l'éspigo carado ; le vieux français
disait : les Pàques pluvieuses sont souvent fromenteuses ; il
est vrai qu'il ajoutait maintes fois la restriction : et souvent
fort menteuses.
Dér. De l'hébreu pesahh ou phasé qui signifie passage, d’où
les Grecs avaient fait xéya et les Latins pascha ; les Hébreux
célébraient dans la Pâque la commémoration du us
de la Mer Rouge, à leur sortie d'Egypte. :
Passa, v. Passer, dans tous ses emplois. Passa-lis, passer
sans dire mot, sans s'arrêter, sans saluer. Passa un libre,
lire un livre d’un bout à l’autre. Passa pér la plèjo, percé,
mouillé jusqu'aux os par la pluie. Passa-hier, avant-hier.
Passa-déman, après-demain. Passa-hiuèï, aujourd'hui passé.
Passa dilus, y sérés pas pus à tén, après lundi prochain
expiré, vous n’y serez plus à temps. Quan mé passarés
aquo? Combien me comporterez-vous cela ? A quel prix me
le laisserez-vous ?
Dér. de pas et de la désinence active a pour ar, ancienne
terminaison de l’infinitif emportant l’idée de faire, dérivé du
lat. agere; lilléralement faire le pas.
Passado, s. f. Dim. passadéto. Ce mot a, sans aucun
doute, la même origine et avait primitivement le même
sens que « passade » qui signifie passage dans un Jieu‘où
.
FIFT
PAS
J'on séjourne peu. Mais, de plus que le Français, passado
exprime un intervalle, une durée de temps indéterminée,
que l'intonation, un diminitif, une épithète allongent ou
raccourcissent, sans néanmoins les préciser davantage. C'est,
dans ce cas, le synonyme de briou, brivado, sassi, et sussi-
gado. Y souï résta uno passado, j'y ai fait une passade.
Aquél capèl mé fara éncaro uno passado. Ce chapeau me
servira encore quelque temps. Y-a« uno bono passado qué
l'aï pas vis, il ya déjà longtemps que je ne l'ai vu. Y-a uno
passadéto qué gaï èro, il y a peu de jours qu’il était ici. Towto
uquéslo passado, tous ces jours passés, pendant ces derniers
jours.
Passadou, s. ». Passage, brèche, trou ou trouée à tra-
vers un mur ou une haie de clôture.
Passadouiro, s. f. Chassis pour passer la farine et sur
lequel on fait aller et venir le tamis dans la huche.— Voy.
Émbourdo.
Passage, s. m. Passage, action de passer; lieu par où
l'on passe; droit qu'on paie pour passer ; corridor.
Passar, s.m. Nom donné au turbot, Rhombus et à la plie
Plya, poissons de mer, de figure rhomboïdale, larges, plats,
à nageoires molles. Tous deux se trouvent sur nos marchés ;
mais le turbot, comme partout, est préféré.
Altér. de pansar, pansu, à cause de sa forme.
Passa-rés, s. m. C'est l'interrogation ne passe-t-il rien ?
In'y a personne qui remplace : Gare l'eau ! pour avertir
les passants attardés dans les rues, qu'on va jeter d’une
fenêtre quelque chose qui n'est pas toujours de l’eau; et,
comme on a remarqué qu'en pareille circonstance, la menace
et le coupétaient d'ordinaire une seule et même chose, quand
la première n’arrivait pas après, passa-rés est devena sub-
stantif, qui signifie : — passons vite — le contenu solide
d'un vase de nuit. Ce n’est même que comme substantif que
ce mot, qui nest point de notre dialecte, est connu et
adopté dans le nôtre; car ici, un pareil avertissement,
lorsqu'il. est donné, ce qui est rare, l’est dans d’autres
termes. !
Passa-tén, v. Prescrire, acquérir la prescription. Voste
papiè a passa-tén, votre billet a prescrit, la dette est
“prescrite faute d’en avoir demandé le paiement en temps
xtile. — On le dit aussi d'une chose passée de mode, hors
didiagesa: va; 2 +
Passa-tén, adv. autrefois, jadis au temps passé.
… Passa-vala, ou Passavala, w. et s. m». Cette expression
-est une contraction de passa-à-vala. Passavala, v. c'est faire
Je travail agricole dont nous allons parler; Passavala, s.
_estcemèmetravail fait. Passa signifie passer, etvala, ruisseau
naturel et aussi fossé ou tranchée creusés de main d'homme.
Pour rendre le mot de cette expression, on a dit d'abord
- effondrer, défoncer, qui ne rendent pas le véritable sens. On
a essayé dé dire alors : passer à fossé, passer à tranchée ;
et, enfin, peu satisfaits de leur traduction, nos agriculteurs
- lettrés ont, de guerre lasse, hasardé le français passavalat.
Nous nous garderons bien d’en faire autant, et nous nous
PAS 529
contenterons de décrire l'opération à laquelle ce mot s'ap-
plique.
A l'extrémité d'un champ et du côté le plus élevé, s'il est
en pente (car la terre tend toujours à descendre et on la
remonte ainsi), parallèlement au franc bord et sur touté sa
longueur, on ouvre avec le louchet /Voy. Luché) une tran-
chée d'environ cinquante centimétres de largeur. A l'aide
d'une pelle en fer. on achève ensuite de réjeter au dehors
la terre détachée, mais non enlevée en entier par le lou-
cbet. Sur ce second plafond, ainsi nettoyé, on recommence
le même travail, en y revenant une troisième fois au
besoin, selon la culture que l'on se propose de faire: car
la profondeur, suffisante pour les plantes annuelles, ne .
le serait pas pour des arbres. On appelle céla passer à dos
Où très-pounchos, à deux ou trois longueurs de louchet.
Cette première tranchée achevée, on en fait, de la mème
manière, une seconde contiguë, avec cette différence que,
cette fois et les suivantes, la terre que l’on enlève, au lieu
d'être éparpillée sur le champ est rejetée, au fur et à mesure,
dans la première tranchée restée vide et qui se trouve par
conséquent comblée. On passe à une troisième tranchée et
l'on continue ainsi jusqu'à ce que le champ entier soit
retourné. Bien souvent le sous-sol est de telle nature
qu'il ne permet plus l’usage du louchet : on trouve parfois,
dans les couches inférieures, de l'argile durcie, du tuf, des
poudingues, amenla (Voy. ce mot}, et même le rocher com-
pact, dans les terrains qui n'ont jamais subi cette opération,
Dans ce cas, la pioche, le pic, La trénqguo et lou piquoù, et
mème l'emploi dela poudre de mine deviennent nécessaires.
C’est alors que ce travail devient coûteux, au point que l’on
achète véritablement le sol ; mais on donne ainsi à l'agricul-
ture des terrains qui seraient restés improductifs; et les
bons terrains mêmes sont améliorés par cette opération qui
ameublit la terre, l'amende par les engrais qu'on y mêle
ordinairement, et la renouvelle, pour ainsi dire, en ramenant
à la surface celle qui était au-dessous. Aussi est-ce un des
travaux d'hiver les plus usités, et les plus utiles pour l'ou-
vrier qui en manquerait, et pour le propriétaire qui place
bien son argent.
Passègre, s. m. ou Péssègre. Pôche des vignes. Le
français donne le nom de persique et persèque à des
variétés de la pêche, en lat. persica, et c'est ainsi qu'a été
formé passègre ou péssègre qui n'est qu'une variante.
Passègriè s. m. ou Péssègriè. Ce fut d'abord le nom
générique du pècher, amygdala persica ; aujourd’hui il s’ap-
plique seulement au pècher des vignes qui paraît être du reste
le type de toutes les espèces améliorées par la culture. Pour
celles-ci on se sert des mots français pêché, et péché, où
péchèiro. Quan lou passègriè és én floù, jour et gnuè dé
mèmo léungoù, quand le pêcher est en fleurs, jour et nuit on
mème longueur.
Passéja, v. Parcourir. Aï passéja téw’ aquéles éndrés,
j'ai parcouru, arpenté tous ces parages. — Passéja et sé
passéja, se promener. — Low méndre vén qué fasiè, lous
530 PAS
passéjavé ounté vouïè, le moindre vent les promenait, les
ballotait à son gré. Anén nous passéja, allons nous pro-
mener.
Dér. du lat. passus et agere, faire le pas.
Passéjado, s. f. Promenade, action de se promener ;
lieu où l'on se promène; parcours, espace à parcourir et
action de parcourir.
Passéjaire, Passéjairo, s. m. et f. Promeneur, qui aime
la promenade.
Passéria, v. Sécher des raisins, préparer les raisins secs
appelés passério: flétrir, faner, vider, faire devenir comme
ces raisins. C’est dans ce dernier sens surtout que ce terme
. est employé. Un pdoure vièié tout passéria, an petit vieil-
lard tout ridé, tout ratatiné.
Passério, s.f. Passe ou panse, passerille ou passarilles,
et plus communément raisins secs. Ces raisins cuits ou séchés
au soleil ou au four, sont un des quatre fruits mendiants, en
compagnie des figues, des noisettes et des amandes.
Dér. du lat. passa uva ou passula, m. sign.
Passéro, s. f. Si l’on demandait à la plupart des chas-
seurs ce qu'ils appellent la passéro, ils répondraient proba-
blement que c'est une espèce de grive ou de merle. Ils ne
peuvent dès lors appliquer ce nom qu'aux femelles de
genre, tous ceux des espèces étant pris, et ils le donnent
communément, en effet, à la femelle du merle de roche.
Mais un autre oiseau, sans autre nom languedocien, a par-
ticulièrement droit à être appelé passéro, et c'est sans doute
ainsi qu'il l'est le plus souvent : c’est le merle d’eau ou
cincle, cincle plongeur, Cinclus aquatieus; Temm.; il est
d’un brun foncé, teint de cendré en dessus, avec la gorge, le
devant du cou et la poitrine blancs et le ventre roux ; sa
longueur est de 20 centimètres. Il recherche les eaux dont
le fond est pierreux ; et, quoique son organisation soit opposée
à celle des oiseaux aquatiques, il ne craint pas de s’immer-
ger, de marcher même au fond de l’eau qu'il coupe dans
tous les sens pour y chercher les insectes qui font sa prin-
cipale nourriture. Il aime à vivre solitaire, et son chant a
quelque analogie avec celui du merle noir.
Passéroü, s. m. Moineau, passereau, pierrol; du lat.
passer. Le moineau, moineau franc on moineau domes-
tique, gros - bec moineau, Fringilla domestica, et le friquet,
(gros-bec friquet, Fringilla montana, Temm.,) qui aime
beaucoup moins que l’autre le voisinage des villes, portent le
même nom, distingués tout au plus, le premier par passéroù
das téoules et le second par passéroù dé tréou, de ce que ce
dernier, plus campagnard, niche dans les troncs des arbres
ou des vieux murs, et l’autre sous les toits de nos maisons
qui sont sa résidence habituelle.
Passi, vw. Flétrir, faner. Sé .passi, se flétrir, se faner,
passer, se rider. Dé fièio passido, de la feuille flétrie. Uno
poumo passido, une pomme ridée ; #no flou passido, unefleur
flétrie si elle est trop maniée ou séparée depuis longtemps
du rameau, ou bien passée si elle a fait son temps. D'hèrbo
passido, de l'herbe fanée. Un visaje passi, un visage flétri,
PAS
sec, décharné. On dit d’un enfant étique, quidépérit ou
tombe en chartre : és passi. (Chartre, carreau ou atrophie
mésentérique.)
Dér. du lat. passus, a, um, cuit, séché, dont l’ital. a fait
appassire, M. sign. que passi.
Passi, s. m. La maladie des passis, (car, en terme de
magnanerie, on appelle ainsi lous passis), est, d'après Sau-
VAGES, une espèce de phtisie propre aux vers à soie qui fait
que, bien qu'ils mangent, ils ne profitent point, sèchent et
périssent. Cette maladie est souvent due à la chaleur trop
forte et trop concentrée qu'on donne imprudemmentou qui
survient par accidents à la graine pendant la couvée, ou aux
vers qui viennent d’éclore. Lorsque la cause de cette maladie
a eu plus d’intensilé dans ses effets, ce :sont les: prétendus
brûlés, qu'on jette avec raison ; lorsqu'elle a agi.avec moins
d'activité, elle produit les passis. Mais ce n’est pas seule-
ment à l’origine que s’engendre et se développe cettemaladie:
la maladresse ou l'ignorance du magnagnier y expose une
chambrée à chaque nouvelle mue. Lorsqu'à ce moment le
ver est enterré sous la litière, s’il survient du froid, le tra-
vail de la mue est ralenti; le magnagnier impatient veut le
hâter par la chaleur, et pour cela ik augmente le feu et
ferme les ouvertures. Mais la maturité du ver ainsi obtenue
est loin d’être de bonaloi; et comme le fruit trop hâtif ou
le fruit cueilli avant l’heure se fane, se ride etmm'est jamais
bon, de même le magnan, qui est sortiprématurément de
sa mue, reste dans un état de langueur et ne tarde pas à
périr.
Il existe une autre espèce de passès qu'on appelle:aussi
lusétos : ce sont des vers à tête transparente qui, au moment
d'entrer en mue, n’ont pu se placer convenablement pour
dormir, par l'effet de la trop grande chaleur. Ils ne peuvent,
par suite, se dépouiller et par conséquent se développer et
ils ne valent absolument rien. On a vu des chambrées
avorter entièrement sous l'influence de-celte maladie.
Passiduro, s. f. Flétrissure, altération de la fraicheur,
de la vivacité de couleur, de la délicatesse des fleurs, des
fruits, des couleurs, du teint, de la peau.
Passiou, s.f. Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ, le
récit de la Passion dans l'Évangile; sermon sur ce sujet:
Dér. du lat. pati, passus, souffrir,
Passiou. s. f. Passion, goût très-vif, penchant irrésistible.
pour quelque objet ow quelque occupation. Ainsemployé,
ce mot flaire un peu le français; mais il est de pur aloi
dans cette locution-ci : préne uno passiou, se mettre uses
une violente colère.
Passo, s. f. Une de ces grosses pierres sur lesquelles les
piétons traversent un ruisseau qui coupe un chemin. Las
passos, qui désigne un de ces passages, est devenu presque
un nom de lieu que le français rend par : les passes. — Éstre
dine uno, michanto .passo, être dans une mauvaise passe ;:
èstre én passo dé faïre, êtreen passe de faire ; passo, terme
de jeu, sont des expressions françaises. ,.: : : : «1
Passo-pértout, s. m. Passe-partont, clé qui ouvre plus
PAS
sieurs serrures; clé commune à plusieurs personnes pour
ouvrir une mème porte.
Passo-ros0, s. m. Passerose, rose trémière, guimauve,
alcée, rose de Damas. Alcea rosea, Linn. , plante originaire
de Syrie, d’où elle fut apportée par les croisés, bisannuelle
et souvent vivace par ses racines. Sa grandeur, l'élégance de
son port, la richesse de sa végétation, la prodigieuse quan-
tité de ses fleurs, la longue durée de leur épanouissement,
la variété de leur forme simple, semi-double ou parfaite-
ment pleine et celle de leur couleur, depuis le blane le
plus pur, jusqu’au pourpre presque noir, toutes ces bril-
lantes qualités en font un des plus beaux ornements de nos
jardins et l’ont fait appeler passerose, plus belle que la rose.
Passo-soulitaris, s. f. Paisse solitaire, dit SAUVAGES,
qui est probablement le mème oiseau quela passéro.— Voy.
ce mot.
Pass0-tén, s.m. Passe-temps, plaisir, amusement, diver-
tissement. Expression française.
Pasta, v. Pétrir se rend de différentes manières : Pasta,
seul, s'entend comme en français d'ailleurs, pour pétrir du
pain. Pasta dé mourtiè, corroyer du mortier. — Pasta dé
gi, gâcher du plâtre. Pasta d'argèlo, coroyer, pétrir de
l'argile. — És soun pèro tout pasta, c'est son père tout
craché. — Sa pa cé qué sé pasto ! il ne sait pas ce qui se
prépare, ce qui se brasse, ce qui se mitonne.
Dér. de pasto, ou du lat. pistum, de pinsere, pétrir.
Pastadoù, s. m. ou Glouriéto. — Voy. ce dernier mot.
Pasténargo, s. f. Carotte. Daucus carota, Linn., racine
potagère, rouge, jaune ou blanche, de la famille des ombel-
lifères, fort connue en cuisine et cultivée aussi pour les
bestiaux, qui en mangent la feuille, et pour qui la racine est
une excellente nourriture d'hiver.
Dér. du at. Pastinago, m. sign.
Pasténargo-sâouvajo ou Fèro, s. 7. ou bien Girouio.
Carotte sauvage, faux chervis. Daucus vulgaris, dont la
racine; mangée en friture, a le goùt et l'odeur de la carotte
des jardins: Le cherchis porte le nom de girolles, ce quilui
a fait aussi donner le nom de gérowio.
Pastèquo ou Gitro, s. f. Faux melon d’eau ou melon
d'Amérique. Voy: Cüitro. On appelle également pastèquo,
pastèque, le vrai melon d'eau. Cucwrbita citrullus, Linn.,
semblable, à l'extérieur, au melon d'Amérique, citro, mais
dont la chair fondante, sucrée, de couleur rose et pleine
d’eau est très-rafraichissante; ses pepins rouges ou noirs
sont une des quatre semences froides.
Pastièiro, s. f. Huche, pétrin, maie ou maie à pétrir.—
Pastièiro, échaudoir, huche des charcutiers, de mème forme
que la précédente, mais sans pieds, dans laquelle on échaude
les cochons pour les épiler après les avoir égorgés sur la
huche retournée. On procède à l’épilage à l’aide d'une râcloire
qui est ordinairement une petite sonnaille sans battant.
Cette méthode, inconnue dans Je Nord, où l'on grille le poil
des pores sur un feu de paille, a l'avantage d’arracher les
soies jusqu'à la racine et il est peu probable qu'elle ait l'in-
PAS 531
convénient de rendre le fard moins ferme que par le gril-
lage. Pastidiro dé mouli. huche d'un moulin à blé; grande
caisse dans laquelle tombe la farine en sortant de dessous
la meule et qui lui sert de récipient.
Pastièiro (cambo dé). Cagneux, qui a les jambes en
manche de veste, dans le langage populaire. La forme éva-
sée d'un pétrin exige que ses pieds, qui partent de la partie
la plus étroite s'écartent en sens inverse de la caisse pour
être solides, de manière que le tout, vu dans le sens de la
longueur, ressemble assez à un X, dont les extrémités des
branches tendent à s'écarter de leur point de croisement.
Cette similitude de forme avec les jambes en question à
donné naissance à l'expression de cambo dé pastièiro, appli-
quée à un cagneux.
Pastis, s. m. Pâté, pâtisserie renfermant de la viande,
du poisson, ele. — Pastis d'ancro, pâté d'encre, goutte
d'encre tombée sur le papier ; on est convenu d'appeler cette
tache un pâté. — Pastis, gros pâté, enfant potelé, joufilu,
mais cacochyme et stupide; quand pastis s'applique à une
grande personne faite, on le rend par gros pataud.
Pastissariè, s. f. Patisserie, pâte préparée et assaisonnée
par les pâissiers ; art du pâtissier.
Pastissiè, iro, s. m. et f. PAtissier, celui qui fait de la
pâtisserie.
Pastissoù, s. m. Petit pâté, dim. de pastis.
Pasto, s. f. Pâte, farine détrempée et pétrie pour faire
du pain, et, par analogie, tout ce qui y ressemble. On dit
des choses trop cuites ; és én pasto, c'est en charpie, en
purée, en boullie,en marmelade, selon cedont il s'agit, viande,
légumes, etc. Dé la pasto dé moun coumpaïre, bonno fou-
gasso à moun fiéou; de la pâte de mon compère, grosse
fouace à mon filleul, c.-à-d. du cuir d'autrui large courroie.
On dit d’un homme accommodant, de bonne composition,
qui se range facilement à l'avis des autres : és uno bono
pasto, ou bien és uno pasto.
Dér. de la bass. lat. pasta, m. sign. Du lat. pastus, nour-
riture ; ou de pistum de pinsere, pétrir.
Pasto-mourtiè, s. m. Houe, rabot à corroyer; outil de
maçon qui sert à éteindre, à détremper la chaux et à la
mélanger à du sable et à corroyer le mortier. Cet instru-
ment, en fer ou en bois, assez semblable à une petite boue
aux coins arrondis, est emmanché comme elle, mais à un
manche fort long, avec lequel elle forme un angle plus aigu.
Dér. de pasta et mourtiè.
Pastoü, s. ”m. Tasde mortier corroyé et prèt à être em-
ployé; la quantité que l'on corroye en une fois.
Pastourèl, 0, s. m. et f. Dim. Pastourélé, ta. Pastou-
reau; pastourelle, jeune et gentil berger ; mots un peu tombés
en désuétude, depuis que l'églogue est passée de mode et
que le Gardon a emporté, avec les prairies de Beau-Rivage, ,
près de Cardet, jusqu'au souvenir des Estelles et des
Némorins.
Pastourèl est aussi un nom propre d'homme qui se
rend par Pastourel. — Voy. Pastrésso, dim. de pastre.
532 PAS
Pastras, s0,s. m. et f. Péjoratif de pastre, gros et lourd
berger, bergère épaisse et lourde. On donne, par extension,
cette qualification à une personne grossière dans sa tour-
nure et dans ses paroles. — Voy. Pastrésso.
Pastre, s. m. Berger qui garde les moutons; car pâtre,
qui a la même origine, signifie celui qui conduit les bœufs,
les chevaux, les mules au pâturage, et se rend en langue-
docien par gardian. — Né sa maï qu'un vièl pastre. Les
bergers, que leur vie solitaire entoure d’un certain pres-
tige, passent pour avoir une foule de remèdes et des secrets
de toute sorte et même pour se livrer à des pratiques qui
frisent la sorcellerie : dans l'esprit des paysans, c’est donc
en savoir beaucoup qu’en savoir plus qu’un vieux berger,
qui a eu le temps d'apprendre beaucoup. Pour notre part,
nous avons eu occasion de rencontrer dans les Cévennes, à
Mallenche, dans la commune de Sénéchas, un vieux berger
qui existait encore en 4876, et qui professait autrefois l'état
de meunier au moulin du Péras. Cet homme s'était adonné,
sans maître, dans sa jeunesse, à l'étude du grec et du latin,
et certain professeur de la faculté des lettres de Montpellier
ne dédaignait pas de converser avec lui sur ces deux
langues.
Dér. du lat. pastor, m. sign.
Pastrésso, s. f. Fém. de pastre, bergère; mais cela ne
peut s'entendre que d’une femme qui garde quelques brebis
autour de la maison, car il faut un homme, un pastre,
pour garder de grands troupeaux, les conduire à la mon-
tagne et coucher au parc. Remarquons d’ailleurs que nous
sommes toujours bien loin de Florian et de ses bergères;
car la pastrésso est le type de la femme lourde et grossière,
etce mot rivalise avec pastrasso, qui n’est guère pire,
pour désigner toute personne du sexe taillée sur ce vilain
patron. — Voy. Pastre et Pastras.
Pastroü, pastrouno, s. m. et f. Petit berger, enfant
ou adolescent qui n’a que quelques moutons à garder. Le
pastroù peut être aussi employé à la garde d’un grand
troupeau sous la direction du berger, pastre.
Pastrouia, v. Patrouiller, manier salement et grossiè-
rement; patrouiller, tripoter, remuer avec les pieds ou les
mains de l’eau bourbeuse ou sale.
Pastrounéja, v. Être berger; se dit surtout d'un jeune
garçon, d’un pastroù ou d’une pastrouno, qui garde quel-
ques moutons.
Pasturga, v. Pâturer, paître, pacager, en parlant des
animaux qui broutent l'herbe ou la ramée.
Pasturgaje, s. m. Pâturage; droit de pacage.
Pasturgâäou, s. m. Une pâture, un herbage, des pacages,
une varenne : étendue de pays où il croît de l'herbe non
semée, que l’on ne fauche point et où l’on mène paître les
bestiaux.
Pasturo, s. f. Sous cette dénomination on comprend
toute espèce d'herbe ou de feuille que l’on enferme pour
nourrir les bœufs, les chevaux, les moutons, etc., mais elle
désigne cependant d’une manière plus particulière, le foin
PAT
et les fourrages. En style goguenard, véou éstréma dé pas-
turo, je vais manger, diner ou souper.
Pata, s. m. Patac ou Patard, ancienne monnaie pon-
tificale d'Avignon appelée aussi double, parce qu'elle valait
un double denier tournois ou deux deniers. Le patac exista
jusqu'à la Révolution, dans le comtat Venaissin où il valait
alors un peu moins que le double tournois. Aussi était-il
peu prisé dans nos contrées, et il en est resté cette locution :
né dounarièi pas un pata d’'Avignoun Où un pata, jem'en
donnerais pas un double, une obole, une pipe de tabac.
On fait dériver pata de pater; nom que portait: cette
mème monnaie en Flandre; et patar de l'allemand peter,
parce que la pièce flamande portait sur une des surfaces
l’image de Saint-Pierre. Le pata d'Avignon portait d’ailleurs
aussi, d’un côté, la croix, et de l’autre, les clés de Saint-
Pierre en sautoir.
Patafioula, ». Ce verbe emprunté au français familier,
n’est aussi employé que de cette manière en languedocien:
Lou bon Diou lou patafiole ! que le bon Dieu le patañole ! le
bénisse avec son grand bénissoir! 1l est difficile de trouver
l'origine de ce mot qui n’a rien de malveillant et qui
exprime mème un certain sentiment de pitié pour celui à
qui on l'adresse.
Pataflèou ! Espèce d'onomatopée pour exprimerle bruit
que fait un corps en tombant, faïre pataflèou, faire pata-
tras. Toumbè aïlaval, pataflèou! il tomba là bas, patatras!
Patantèino, s. /. Prétantaine, accomodée augoùt du
pays, n’est d'usage, comme en français, que dans cette
phrase : Coure la patantèïno, courir la prétantaine, pour
dire aller, venir, courir çà et là, sans sujet, sans dessein.
Cependant, comme en français aussi, coure la patantèino,
surtout quand on parle d’une femme, signifie encore
faire des allées el venues, des courses, des voyages, contre
la bienséance et dans un esprit de libertinage.
Patâoudas, so, s, m. et f. Superlatif dont. le positif
n'existe pas : gros pataud, gros lourdaud. — Voy. Patéoudo.
Patäoudo, adj. et s. f. Femme lourde, grosse, pataude.
L'adj. patdoudo n’a point de masculin régulier, quidevrait
faire patäou, et l'on dit patù, prononcé comme Je français
pataud, quand on veut employer cette expression quine
sert guère que de nom à un chien ou de sobriquet à un
individu grossièrement et lourdement conformé.
Patarafo, s. f. Paraphe ou parafe. On pourrait voir
encore ici la faiblesse ou la malice du languedocien à
dèguiser ses emprunts, si le français n'avait pas aussi pata-
rafe qui signifie écriture, traits informes, lettres confuses :
patarafo doit venir de la même source, d'autant qu'un
parafe ressemble souvent à une patarafe. Boutas aquè vosto
patarafo, mettez là votre parafe, signez là, ce mot se pre-
nant aussi maintefois pour la signature elle-même, qui se
dit plus exactement sinné.
Patato, s. f. Topinambour, artichaut de Canada et poire-
de-terre, Hélianthus tuberosus, Linn. Celte plante connueen
Europe avant la pomme de terre et la patate, et comme
DL nn
dire, il n’a que des misères à vous dire,
PAT
elles, originaire d'Amérique, a été cultivée en France à la
fin du 46° siècle : Olivier de Serres en parle dans son
Théâtre d'agriculture. Ses tubercules irréguliers, charnus,
nourrissants, dont la saveur approche de celle de l'artichaut,
offrent un bon aliment pour l'homme et surtout pour les
bestiaux ; mais comme, en somme, le topinambour est en
tout inférieur à la pomme de terre, il est beaucoup moins
cultivé, du moins dans ce pays ci. — On donne aussi à la
pomme de terre, trufo, tuféro ou tartifle, le nom de patato,
quoique elle et le topinambour diffèrent essentiellement de
la patate, batate ou liseron patate, Convolvulus batatas,
Linn., plante rampante dont les racines bulbeuses sont très-
sucrées et d'un goût excellent, mais qui n’est encore, même
pour nos climats chauds, qu'une culture de luxe. 11 parait
que batatas est le nom mexicain de la pomme de terre, et
l'on a donné, comme nom générique, celui de patato, qui
en est formé, à toutes ces plantes qui ont quelques rapports
de végétation, de goùt et d'émploi.
Paté, to, adj. et s. m. et f. Lambin, qui agit lentement,
en style d'argotier, un lambinos; mais il a un autre sens,
qui dérive de celui-ci, également technique, et signifie
scrupuleux, simple, timoré; qui a des peines de conscience
sur les moindres choses. És uno patéto, c'est une bonne
fille, mais qui s'embarrasse de tout et n'ose pas dire que son
âme est à elle. Anas sès un paté, allez, vous êtes une
poule mouillée, — Patéto, dim. de pato.
Patèr, s. m. Pater, oraison dominicale; grain de chape-
let plus gros que les autres à la rencontre duquel on dit le
Pater. Aqud t'és déféndu coumo lou patèr as ases, cela t'est
défendu comme le pater aux ânes, c.-à-d. cela est autant
au-dessus de tes forces, de ta capacité, de ton intelligence,
qu’il est impossible à un âne d'apprendre le pater.
Patèr-dé-là, s. m. Pater de lait, grain de verre, d'émail
ou d'agathe, espèce d'amulette que les femmes supersti-
tieuses portent au cou, lorsqu'elles nourrissent, pour faire
monter le lait au sein, en avoir beaucoup ou le faire passer.
I fallait sans doute, dans le principe, y joindre quelques
pater, ce qui l’a fait appeler ainsi.
Patèrnéja, v. Dire des patenôtres, marmotter des
prières, être grand diseur de patenôtres.
Patétariè, s. f. Lambinerie ; scrupules, simplicité, les
petitesses ou les. minuties de la dévotion. Tout aquà sou
pas qué dé patétariès, ce ne sont que de vains scrupules,
des vétilles, des niaiseries. N'a pas qué dé patétariès à
Dér. de paté.
Patété, to, s. m.et f. Diminutif ou plutôt réduplicatif,
car il augmente le défaut ; dér. de paté pris dans sa deuxième
acception de vétilleux, timoré, scrupuleux outre mesure,
* Patétéja, v. Lambiner, faire lou paté ou être paté,
lambin.
* Pati, v. Souffrir, pâtir; endurer, supporter ; peiner, avoir
de la peine, de la difficulté. Pati coumo las érugos, coumo
las sèrs, coumo las pèiros, être misérable comme les ;
PAT 533
chenilles, comme lès serpents, malheureux comme les
pierres. Aquél pdoure mounde patissou, sé savias, vous ne
savez pas combien ces pauvres gens pâtissent, souffrent de
la misère. À pas fini dé pati, il n'est pas au bout de ses
peines. Lou faguëés pas pati, ne le faites pas souffrir, ne
prolongez pas son agonie, expédiez-le vite. Lou pode pas
pat, je ne puis le souffrir, il m'est insupportable. Pode pas
pati lou bure, je ne puis sentir, supporter le beurre, je l'ai
en aversion. Patira à sé gandi dé jour, il lui sera difficile
d'arriver de jour, il aura de la peine à arriver avant la
nuit. Lou tén patis à sé léva, le temps à grand'peine à se
mettre au beau. Vous prouméte qué patissièi pas à tène lou
rire, je Vous assure que je n'avais pas de peine à m'empê-
de rire, phrase assez originale dont on se sert en racontant
un très-mauvais moment qu'on a eu à passer, un danger
que l'on a couru.
Dér. du lat. ou plutôt le lat. pati, m. signif.
Patimén, s. m. Souffrance, misère.
Patin, s. m. Patin, soulier dont la semelle en boïs est
mobile dans la moitié du côté du talon. Le patin, fourré
en dedans, était excellent pour le froid et pour la boue;
c'était la chaussure ordinaire des femmes pendant l'hiver
et plus d'un homme ne le dédaignait pas. Aujourd'hui il
est fort passé de mode : le caoutchouc en fera fin.
Patin-patourlo. Pati-pata ou bredi-breda, mots fabri-
qués pour exprimer là trop grande volubilité de la langue
et pour s'en moquer.
Pati-pata-pas-rés, Patati-patata et puis plus rien ; mot-
à-mot à peu près de ce cliquetis de syllabes inventé pour
donner une idée de beaucoup de paroles ou beaucoup de
bruit pour rien, et que l'on répond à quelqu'un qui vous
fatigue de mauvaises raisons, de sottes excuses.
Pato, s. f. Dim. Patéto, augm. Patasso. Patte. Le fran-
çais fait une différence entre pied et patte, en ce qui con-
cerne les animaux : il dit pied, des animaux solipédes ou
au pied fourchu, le bœuf, le cheval, le porc, le mouton, etc.,
et patte, des quadrupèdes qui ont dés doitgs, des ongles ou
des griffes; des insectes et de tous les oiseaux, hormis les
oiseaux de proie qui ont des serres. Le languedocien fait
une différence du mème genre entre bato et pato et géné-
ralement il emploie la première pour pied et la seconde
pour patte; mais la règle peut être moins rigoureuse qu'en
français : on dit plutôt par exemple, la bato d'un lioun ; et
pato sert aussi à rendre la serre de l'oiseau de proie. —
Pato d'éspargue, patte d'asperge. — Pato, patte, clou à
tête plate, et percée pour recevoir une pointe ou une vis
qui sert à attacher un lambris, une glace, etc. — Voy.
Bato.
Dér. du grec 72720, fouler aux pieds.
Pato, s. m. Brique dont la forme est un carré long
presque aussi épais que large ; sa massiveté lui a fait donner
ce nom qui est l'appropriation languedocienne de pataud. —
Patù, masc. de patdoudo. — Voy. ce mot.
Patouès, 0, adj. ets. m. et f. Qu'on ne doit pas rendre
58
534 PAT
par patois, du moins dans l’acception du dictionnaire de
l’Académie. De même qu’ils disent parla francés, éspagnéou,
voire Latis, les habitants du Languedoc disent au même
titre parla patouès, car c’est ainsi que s'appelle la langue
qu’ils parlent : le languedocien n’a pas d'autre nom que
patouès, et celui-là en vaut bien un autre. Qu'importe que
le français ait altéré le sens du mot et en fasse un reproche
ou une moquerie, quand il devrait en faire un titre d’hon-
neur : Patouës tire son origine de patria ou patavinitas, la
langue des pères ou de la patrie; c’est ainsi que le langne-
docien l'entend, l'emploie et l’accepte de son vainqueur.
L'article suivant de l’abbé n£ SAUVAGES, que nous tenons à
tous égards à reproduire, démontrera péremptoirement
qu’en donnant le nom de patois, avec le sens qu'il lui
attribue, à son rival malheureux, le français manque de
justice aussi bien que de courtoisie.
Le mot patois est un terme général qu'on applique aux
différents jargons grossiers et rustiques que parle le bas
peuple, soit dans les provinces, soit dans la capitale,
puisqu'on dit, le patois normand, champenois, et le patois
des halles. Mais il paraît que cette sorte de langage n’est
réputé rustique et grossier que relativement à un autre de
mème genre, qui est plus pur, plus correct, plus cultivé,
que parlent les personnes lettrées ou bien élevées.
Ainsi le patois normand, par exemple, est un patois du
français; et il n’est réputé tel, que parce que ce langage du
bas peuple de Normandie, est du français corrompu ou
altéré, et fort inférieur à celui de la cour et des honnêtes
gens de la capitale; en un mot c’est un langage dégénéré
d’une langue plus parfaite, mais de même genre, et qui ont
l’un et l’autre une origine commune.
Il n’en est pas de même du gascon ou languedocien,
auquel on a donné la dénomination de patois par une suite
de l'espèce d’avilissement et d’oubli où il est tombé depuis
environ un siècle, faute de culture ou d'encouragement ;
tandis que depuis la mème époque on s’est appliqué à per-
fectionner la langue française, qui a fait presque éclipser
son ancienne rivale, et qui la fait de plus en plus dédai-
gner.
Le languedocien, quoique négligé, et en partie dégénéré,
n’en est pas moins une langue à part, loin d’être le patois
d'aucune autre : langue aussi bien à soi, que puissent
l'être aucune de celles de l’Europe, et qui a ses termes
propres, sa syntaxe et sa prononciation entièrement étran-
gères au français, et dont le génie, le tour des phrases et
des constructions sont si différentes de cette dernière langue,
qu'on les appelle gasconismes, lorsqu'ils s’y trouvent mèlés.
« Le nom de patois ne peut convenir à une langue subsis-
tante (disent D. Vaissette et M. Court de Gebelin), depuis
plus de quinze cents ans, formée sur les plus anciennes
de l'Europe, plus ancienne qu'aucune de nos langues
modernes, entre autres le français, et dans laquelle on
trouve tout ce qui constitue une langue abondante à cer-
tains égards, et surtout agréable. »
PAV
I n'y a pas de doute qu’il n’a manqué à ce prétendu
patois, pour devenir la langue dominante du royaume, que
de s'être trouvé dans les mêmes circonstances qui ont favo-
risé les progrès de la langue française, ou que nos rois
eussent pris pour la capitale de leur empire et leur séjour
ordinaire, une des villes de la langue d'Oc : c’est bien
alors que la langue d’Oil eût été regardée, à plus juste
titre, comme un jargon grossier et rustique. — Voy,
Rouman.
Patouia, v. Patrouiller, patauger, marcher dans une
eau bourbeuse ou dans de la boue liquide. On dit, par
extension, patouïa, patauger, lorsque embarqué dans. une
mauvaise affaire, on essaie divers moyens d’en sortir sans
trouver le bon qui souvent n'existe pas, comme celui qui
patauge dans un bourbier, fort embarrassé de s’en tirer.—
Patouia; qui se dit patrouiller, dans certaines provinces
françaises : lorsque dans une rivière ou un canal, un
barrage inférieur fait monter l’eau de manière que la roue
motrice d’une usine en amont est immergée et ne peut plus
tourner parce que la chute est diminuée ou annulée, on
dit de cette roue ou de cette usine qu’elle patouïo, et c’est
encore par assimilation à quelqu'un qui se trouve enfoncé
dans une mare sans pouvoir marcher.
Patouiaïre, patouiairo, s. =. et f. Pataugeur; en style
familier, irrésolu; qui ne sait pas se décider, qui essaie
maladroitement et inutilement plusieurs partis sans savoir
en suivre aucun.
Patouiar, s. m. C'est le nom de celui qui, dans un
moulin d'huile, empile sous la presse les cabas remplis de
pâte d'olives.
Patouio, s. f. Lavoir, pièce à portée d’une cuisine où on
lave et où l’on tient la vaisselle.
Patoul, s. m. Patrouillis, gâchis, margouillis, amas de
boue liquide ou d’eau bourbeuse, altér. de la bass, lat.
pasta, pâte, mélange de farine et d'eau pétries et tout ce
qui y ressemble.
Patraquo, s. f. Patraque, personne à santé délabrée,
corps faible, usé; patraque, machine mal faite, .ou bien
usée, détraquée.
Patrifas, s. m». plur. Patrifasses, tripotage, fagot, médi-
sance, paquet, micmac.
Patrifasséja, v. Bavarder, tripoter, faire des micmacs,
des fagots, des patrifasses.
Patrifasséjaire, Patrifasséjairo, s. m. et f. Brouillon,
feseur de tripotages, de fagots, de micmacs, de patrifasses.
Patrifassiè, iro, s. m. et f. Variante de patrifasséjaire.
Patroun-fangué, s. m. Cogne-fôtu, tâtillon, embarrassé
dans tout ce qu’il fait, comme on le serait en marchant
dans la boue, fango, pour ne pas se crotter, ou peut-être :
comme un patron manœuvrant sa barque dans une mare
fangeuse.
Pavano, s. f. On ne l’emploie que dans cette phrase :
batre la pavano, battre l’estrade, vagabonder; peut-être
par quelque rapport de consonnance avec battre le pavé..n
PÈ
. Pavoun, s. m. ou Paoun, Paon, paon domestique, Pavo
cristatus, Linn. Originaire des Indes orientales, le paon
existe depuis si longtemps, en Europe, qu'il peut être consi-
déré comme un oiseau indigène ; c'est le plus beau de tous.
Malgré la laideur de ses pattes et de son cri affreux, on
l'admire pour les magnificences de son plumage tout en
. riant dé la vanité quelque peu sotte qu’il met à les étaler.
Ainsi que l'oie, avec laquelle il serait bien humilié d'être
comparé, il est de très-bon goût et, du haut des toits on
des arbres où il aime à se percher, il crie, comme il sait le
faire, aussitôt qu’il aperçoit venir quelqu'un. Le jeune paon
est un rôti de luxe; la chair des vieux est dure et sèche.
Cet oiseau cause beaucoup de dégâts aux jardins et aux
toits des maisons; de sorte que, malgré ses qualités ou
plutôt à causé de ses qualités, assez peu de personnes peu-
vent en avoir et on l'élève plutôt comme objet d'ornement
que comme utilité. {Le paon blanc, dont l'introduction en
France est due, dit-on, au roi René, est une variété de paon
domestique. a
Pavouna (sé); v. Se pavaner, se panader, se carrer,
marcher avec ostentation et complaisance, d'un air fier et
superbe : c’est faire le paon ou comme le paon qui fait la
roue et qui, tout en s'adtirant, semble dire : admirez-moi.
* Pé, s. m. Pet, vent qui sort avec bruit du fondement;
tout bruit qui se produit en éclatant comme celui d’un
fusil, d’une mine, du tonnerre, d’un fouet qui claque, d'une-
branche qui craque et se rompt. De quelqu'un qui fait
beaucoup d'ouvrage, qui dépêche besogne, on dit : né faï
coumo un ase dé pés. Parlas à l'ase, vous fara dé pés,
chantez à l'âne, il vous fera un pet, le proverbe languedocien
a-un équivalent dans : fasès dé bé à Bèrtran, vous ou rén-
dra én caguan.
Dér. du lat. peditus, de pedo, m. signif.
Pè, s. m. plur. Pès ou Pèses. Dim. péné, augm. pénas.
Pied, partie du corps, à l'extrémité de la jambe, qui sert
à se soutenir et à marcher. On ne le dit que de l'homme :
là où le français dit pied pour un animal, le languedocien
se sert de bato, col-dé-pè, cou de pied. Pè-dé-bourdo, pied-
bot, qui ressemble à la boule noueuse, bourdo, qui termine
par en bas un gros bâton ou gourdin. Sdouta dé pè-joun,
sauter à pieds joints. Passa dé pè-joun, passer de plein
saut, arriver sans passer par les degrés intermédiaires.
A pè-couqué, à cloche-pied. Peé-déscdou, nu-pieds, les
pieds-nus. Tène pè, au jeu de boules, piéter, tenir le
pied au lieu marqué. Tène pè à qudouqus, marcher aussi
vite que quelqu'un, le suivre pied à pied, et par exten-
sion, faire autant d'ouvrage que lui. Sé cdoussa d'un
pè ‘n doutre, contraction de d'un pè un doutre, chausser un
pied pour l’autre; au fig. Faïre ou préne quicèn d'un pè ‘n
doutre, c'est faire une chose à rebours, en comprendre une
autre à l'envers. Douna lous pèses à un éfan, habiller un
enfant, lui donner sa première robe quand il commence à
marcher. Trouba sabato én soun pè, trouver chaussure à
son pied. — Pè est encore la tige, le pied d’un arbre, qui
PÉC 535
se dit pourtant mieux cambo, la base, le support, le pied
d'une table, d'un lit, d'une échelle, ete. — Le pied de roi,
mesure, se dit pie.
Dér., du lat. pes, m, signif.
Pébérin, s. m. Pièce d'artifice tout-à-fait primitive :
c'est un peu de poudre écrasée et pétrie avec de l’eau ou de
la salive, puis moulée en petite quille; quand elle est à peu
près sèche, on met le feu à la fpointe et elle brûle, sans
éclater, en fusant, à la grande joie des enfants qui s'amu-
sent ainsi. De quelqu'un emporté, qui part comme une
soupe au lait, qui est vif comme la poudre, on dit : és un
Pébérin.
Dér. du lat. pulvis, pulveris, poudre.
Pébéroù, s. m. et mieux Coural. — Voy. ce dernier.
Pébra, v. Poivrer, assaisonner avec du poivre. Au fig.
survendre, vendre trop cher; on dit de quelqu'un qui a
surpayé quelque chose : y-ou an pébra, on le lui a poivré
ou salé, tous deux s'emploient dans le style familier.
Pébrado, s. f. Poivrade, sauce avec du vinaigre, de
l'huile, du sel, où le poivre n'est point ménagé.
Pébre, s. m. Poivre, fruit du poivrier aromatique, Piper
nigrum, Linn., arbrisseau qui ne croit que dans les Indes
orientales. Le poivre blanc n'est autre chose que le poivre
commun dépouillé de son écorce noire. C'est l'épice qui
tient le premier rang dans la cuisine de nos campagnards
surtout ceux de la montagne; ils en font une large consom-
mation, car il n’est guère de mets où il n'en jettent abon-
damment.
Dér. du lat. piper, m. signif.
Pébriè, s. m. Gatilier, Vitex agnus-castus, arbrisseau
dont les feuilles sont à peu près comme celles du chanvre.
Ses fruits ressemblent à des grains de poivre dont ils ont
un peu l’äcreté et l’arome ; c'est de là que lui vient lenom
de pébriè, poivrier. j
Pébriè, s. m. Autrefois on appelait ainsi l'épicier, mar-
chand de poivre, la principale ou la seule épice alors en
usage parmi le peuple, quand c'était lui qui faisait et
donnait les noms.
Dér. de la bass. lat. pebrarius, marchand de poivre.
Pébrièiro, s. f. Poivrier, boite, ordinairement en fer-
blanc, pour contenir le poivre moulu ; c'est le plus souvent
par sa forme, un moulin-à-vent microscopique, une minia-
ture ‘de ces tourelles qui en avaient pris leur nom : à la
pointe de son toit en cône est une petite ouverture par
laquelle s'échappe le poivre dont on saupoudre les divers
apprêts. La poivrière, toute différente, est une boîte à com-
partiments dans lesquels on tient le poivre, le girofle et les
autres épices.
Pécadoù, Pécadouno, adj. et s. Pécheur, pécheresse,
Dér. de péqua, pécher.
Pécaire, interj. Variante de péchaïre. — Voy. ce dernier.
Pécata, s. m. Peccata, nom que le français donne seu-
lement aux ânes qui figurent dans les combats d'animaux
et que le languedocien a pris pour en faire un nom commun
536 PÉC |
à tous les individus de l'espèce. Dans ces tristes jeux, le
pauvre baudet est le souffre-douleurs, le paillasse de la
troupe qui reçoit tous les coups, et l’on a trouvé plaisant
de l'appeler peccata parce qu’il porte les péchés des autres.
Péchaïrasso, interj. Augm. de péchaïre; il est aussi
trop compalissant pour n'être pas souvent ironique : C'est
alors le Pauvre homme! de Tartufe, prononcé par une
autre bouche que celle d'Orgon.
Péchaïre, Dim. péchaïréto, aug. péchaïrasso, interÿ.,
qui exprime ordinairement la compassion, l'amitié, la
tendresse, que l'ironie rend parfois dédaigneuse ou nar- :
quoise, et qui souvent n’est qu'explétive. Les Italiens ont
poverello, poverino, poverelto, poveraccio, à la place de
notre péchatre et ses dérivés, que le français pauvret, quoi-
qu'il s’en approche le plus, ne peut cependant rendre dans
toutes ses métamorphoses. S'és tout amaluga péchaïre! il
s’est brisé, moulu en tombant, le pauvre diable, le pauvre
malheureux! Déqué faran aquéles éfan, péchaïre! que
deviendront ces pauvres petits enfants! És tan trasso,
péchaïrélo ! elle est si frêle, si malingre, la pauvre fillette!
Péchaïre! souï bièn maldou, hélas! ou mon Dieu! je suis
bien malade. Péchaïre! à dounarias lou bon Diou sans
counféssa, le pauvre homme! la bonne pièce! Vous lui
donneriez le bon Dieu sans confession. S'ès bé dé plagne,
péchaïre! Vraiment! vous êtes bien à plaindre, c’est bien
à vous à vous plaindre. Et iéou, péchaïre, sans pénsa
mâou, et moi bonnement, sans songer à mal. — Des
dialectes voisins prononcent pécaïre qui, anciennement,
signifiait pécheur, celui qui commet des péchés; ce mot
n’est plus d’usage dans ce sens, mais il est resté pour
s'appliquer à quelqu'un qui est à plaindre comme doit
l'être un pécheur.
Pèço, s. f. Dim pécéto. Pièce, morçeau, uno pèco dé lard,
une pièce, un quartier de lard, wno pèco dé pan, une
tranche de pain pour faire une tartine, uno pèço dé souïd,
une hausse, pièce de cuir que les cordonniers attachent
à une semelle usée. Il s'emploie en général pour rendre le
français pièce, mème lorsqu'il s’agit de certaines choses qui
font un tout complet, À tan la pèço, cing s6ous pègo, à
tant la pièce, cinq sous pièce. Uno pèço dé tèlo, uno pèço
dé cranto-sôous, une pièce de toile, une pièce de quarante
sous. — Le dim. pécéto ne se dit que d’une petite pièce
d'argent, une piécette.
En Italien Pezzo, morceau.
Pèço-dé-la-crous, s. f. Gras double, partie de la panse
du bœuf ou ligament en croix de son premier ventricule,
ou de celui qui est au-dessus du réseau.
Pécolo, s. f. Crotte, crottin de lapin, de souris, de
ver à soie, de chèvre, de brebis, etc., toujours moulée sous
la même forme et dure, en l’état de santé de ces animaux;
excrément dur et arrondi des personnes constipées.
Dér. du lat. pecora plur. de péeus, pris particulièrement
par brebis où mouton dont le produit en question est le
le type du genre.
PÈG
Pécolo, s. f. Pécore, personne sotte, stupide, bète,
animal. Les latins employaient aussi dans le mème sens
pecus, pecoris.
Pécoul, s. m. Pied d’une table, d’une chaise, d'un banc,
d’un lit; queue ou pédoncule d’un fruit, pétiole d’une
feuille; par extension, bras dodu, vigoureux et surtout
jambe grosse et forte. À dé bos pécouls, il est solide sur
sa base, il a de bons piliers.
Dér. du lat pediculus, dim. de pès, m. signif.
Pécoula, v. Mettre un pied ou les pieds à un meuble,
mettre un pécoul.
Pécoula, v. Lacher du crottin, fienter à la manière des
animaux qui font des pécolos.
Pécoula, s. »m. Fumier de crottin, crottin de bergerie
qu’on appelle également migou : c'est l’amas, l'agglomé-
ration de pécolos.
Péga, v. Poisser, enduire de poix ; c’est particulièrement,
marquer les moutons, et les brebis, c.-à-d. imprimer sur
leur toison, avec de la poix, le chiffre du propriétaire : cette
marque est nécessaire pour les reconnaître, quand on réunit
plusieurs troupeaux, pour les envoyer passer l'été à la
montagne. Aqud pégo, cela est poisseux, gluant, cela poisse
les mains.
Pégadoù, s. m. Marque en fer ou en bois, qu'on trempe
dans la poix pour imprimer les signes qu'elle porte sur le
‘dos des bêtes à laine, pour les pega.
Pégas, s. m. Emplâtre de poix, qu'on nomme plus
communément émplastre, —Voy.ce motet Pégo. — Pégas se
dit aussi d’une grande tâche poisseuse, grasse ou visqueuse,
formant enduit, comme serait celle de moût ou de cambouis.
Il est également l’augm. de pégo dans le sens d’importun,
obsédant.
Pégassou, s. »m. Dim. de pégas dans toutes ses acceptions.
Pégô, s.:m. Nom méprisant que l’on donne en général
aux cordonniers et particulièrement aux mauvais, aux
savetiers. Il vient de l'emploi fréquent que ces artisans
font de la poix, pégo. — Pégà devient souvent une quali-
fication injurieuse qui correspond .à grossier, malotru. On
dit de mème: és un pégù, comme en français : C'est un
savetier, d’un mauvais ouvrier, en quelque métier que ce
soit. Dans les deux derniers sens on féminise souvent
l'expression et l'on dit pégoto.
Pégo, s. f. Poix, ne s'entend que de la poix noire ser-
vant, dans l'emploi le plus commun, à marquer le bétail,
à poisser le ligneul des cordonniers qui, à cause de cela,
ont reçu le surnom dont il est question à l'art. précédent.
On l'obtient par la combustion étouffée du bois de pin ou
de sapin dont la résine, noircie par la fumée ou la suie qui
s'y mêle, dans l'opération, forme cette poix. Négrecoumo la
pégo, noir comme la poix, comme l'encre. Dans un endroit
très-sombre et surtout d’une nuit très-obscure on dit : és
éscu coumo la pégo, il fait noir comme dans un four. —
És uno pégo; qué siès pégo! s'adresse à un importun, un
fâcheux qui vous obsède et dont on ne peut pas plussse
PËI
débarrasser que de la poix qui vous tient aux mains: en
langage familier on rend cette acception par : C'est un
emplâtre.
En espagnol pega et en ital. pece.
Pégo, s. f. Meconium, excrément noir, épais et gluant
qui, pendant la grossesse, s'amasse dans les intestins du
fœtus, et qu'il rend par le fondement deux ou trois jours
après sa naissance. A défaut de terme scientifique, on désigne
ainsi cette matière à cause de sa ressemblance avec la poix
noire; on voit que c'est bien moins un nom qu'une com-
paraison.
Pégo-dé-Bourgougno, Poix de Bourgogne, poix blanche
ou plutôt d’un blanc jaunâtre; suc résineux de plusieurs
espèces de pins, lorsqu'on en a extrait la térébenthine ; elle
ést exlrèmement tenace, et c'est pourquoi on l'emploie à
faire des emplâtres dessicatifs. Du reste, les emplâtres de
poix de toute espèce, sous toutes les formes, pour toutes
les maladies, jouent un très-grand rôle dans la médecine de
campagne. —On dit par syncope : Siès un émplastre-dé-
Bourgougno, à un importun, un fâcheux des plus tenaces.
— Voy. Émplastre.
Pégoumas, s. m. Emplâtre de poix; variante de pégas
avec l’idée toutefois d’une plus grande dimension. —
Sauvaces donne aussi à pégoumas la signification de tor-
chon, qui n'est alors en usage que dans les dialectes
voisins.
Pégoumassa, v. Poisser, empoisser, enduire largement
de poix et, par extension, de toute autre matière épaisse et
gluante ; couvrir d'un pégas, d’un pégoumas.
Pégoùs, Pégouso, adj. Poisseux, gluant, visqueux.
Au fig. pégoùs, avec toute la série des pégo, pégas, pégas-
soù, pégoumas, pégoutuègno, forme ce répertoire gradué
dont on qualifie, un importun, un fâcheux, un emplâtre,
selon son degré de tenacité ou la dose d’ennui qu'il
procure,
Pégoutuègno, s. f. Tout ce qui poisse, englue, forme
une tâche visqueuse, s'attache et tient comme la poix et,
par extension, la-gent fatigante des fâcheux, des importuns.
On sait que la terminaison wègno exprime ordinairement le
mépris, le dédain et le dégoût.
Péia, v. Boucher, calfeutrer, tamponner avec du vieux
drapeau, du chiffon, péio.
Péiard, s: #. Chiffon, drapeau, petit et mauvais mor-
ceau de linge, d’étoffe. Dim. de péio.
Péila, v. Fermer à clé, mot à mot faire mouvoir, faire
jouer low pèïle.
Pèile, s. m. Ne dut être d'abord que le pène, cette partie
mobile d'une serrure qui joue au moyen de la clé et entre
dans la gâche, faisant ainsi fonction de verrou; mais dans
l'usage on prend la partie pour le tout, et péïle signifie la
serrure elle-même, qui se dit autrement saraio.
Dér. du lat. pessulus, dont le français avait fait aussi pèle
qu'on disait autrefois pour pène.
Péio, s. f. Haillon, chiffon, peilles qui sont les vieux
” PEI 537
chiffons qu'on emploie dans la fabrication du papier.
Carguo-péio. — Voy. ce mot.
Dér. de la bass. lat. pellia, m. sign. formé du lat.
pellis, peau, enveloppe, couverture.
Péiofo, s. f. Ecale, peau des pois qui se détache à la
cuisson; écorce brune, première peau de la châtaigne;
coque-vide de la graine ou des œufs de vers à soie, après
que l'insecte éclos l'a abandonnée. En général péiofo
s'emploie aussi, indistinctement, avec péiou et péloutro,
pour désigner la peau, l'écorce, la coque de beaucoup de
fruits et de grains, principalement lorsque cette pelure,
enlevée d'une manière quelconque, est séparée de ce qu'elle
enveloppait.
Dér. du lat. pellis, peau, enveloppe.
Péidou, s. m. Coque, coquille, écale d'œuf. D'une
personne fort jeune, d'un blanc-bec qui veut faire l'entendu,
l'olibrius on dit : faï pas qué dé sourti dou péidou, il ne
fait que sortir de la coquille. — Voy. péïofo. — Péidou,
ivresse, état de celui qui est pris de vin. Avédre, préne ou
cargua un péibou, ètre soùl, se griser, s'enivrer, se soùler.
ILest souvent impossible de chercher mème à expliquer
une phrase, un mot d'argot : un simple rapport de conson-
nance, un mai-entendu, un quiproquo, un caprice, le
hasard leur donnent naissance ; puis ils se perpétuent, mème
quand ils semblaient n'être pas nés viables. Ici cependant
on peut indiquer du moins l'origine et le sens probables de
Péïdou dans son dernier emploi. Péidou, du lat. pellis, ne
serait, dans cette acception, qu'un équivalent de pèl et se
prendrait pour la peau de mounino autre technique fort
usité pour la même chose. La locution signiferait donc,
plus énergiquement encore, revêtir cette peau et devenir
ainsi mounino au lieu seulement de lui ressembler. Ce qui
ferait valoir cette dérivation ce sont lesexpressions trdouqua
la pèl, la séqua, qui s'emploient en pareille occurence. —
Voir ces mots et mounino.
Péirado, s. /. Buvée, ce qu'on fait cuire dans un
chaudron pour le repas des pourceaux. Péirado doit être
une altération, une syncope de péiroulado, chaudronnée;
cependant une auge à cochons, faite en pierre, péiro, a pu
former cette expression qui sigaifierait le contenu d'une de
ces auges.
Péiral, s. m. Margelle d’un puits, seuil d'une porte;
tablette d'appui d’une fenêtre.
Pèire-Bufèire, n. p. de lieu. Pierre-Buflière, petite ville
ou village du Limousin, dont le nom n'est venu jusqu'ici
que par la réputation d'un de ses curés, fort saint homme
sans doute, mais trés-loin d'être savant, à ce qu'il parait.
Aussi lorsqu'il s’agit de quelqu'un de peu lettré, ne manque-
t-on pas de dire : és coumo lou cura dé Pèire-Bufèire qué
saviè pas légà qué din soun libre, amaï din sa glèiso, il est
comme le curé de Pierre-Buffère qui ne savait lire que dans
son livre et encore dans son église.
Péirèlo, s. f. Pérelle ou parelle, Patellaire parelle
(Patellaria parella, Hoff.), plante qui croît sur les rochers
538 PÊI
sous forme de croûte blanchâtre, de la famille des lichens.
On l’emploie dans les teintures en rouge, après l'avoir
préparée avec de la chaux et de l'urine, et en avoir formé
une pâte connue sous le nom d’orseille que porte aussi la
plante elle-même. 11 y a diverses qualités d’orseille prove-
nant de. divers pays : la plus commune est l’orseille d’Au-
vergne.
Dér. de pêtro, pierre sur laquelle croit cette plante.
Pérelle n’est autre que péirèlo prononcée en français; celui-
ci aurait formé différemment ce môt s'il l'avait créé.
bâtir, médtion: ou L pisrts de taille.
Quelques dictionnaires français enregistrent perrière,
mais alors, cette fois, nous dirons que C’est du langue-
docien.
Pèirigal, s. m. Pierraille, amas de petites pierres ; par
exagération on le dit d’un champ très-pierreux, très-
caillouteux.
Pèiro, s. f. Dim. péïréto, aug. pérasso. Pierre, corps
solide et dur, non ductile, formé de particules terreuses
qui, en se rapprochant les unes des autres, ont pris diffé-
rents degrés de liaison, Péiro dé taïo, pierre de taille.
Pèïro-fréjéou, pierre vive, calcaire, espèce de marbre ou
se rapprochant du marbre dont elle a la densité et la froi-
deur. — Voy. Fréjdou. Pèïiro négro, pierre noire, schiste
aluminéux noir, qui se sépare en écailles, comme l’ardoise,
et que les maçons et tailleurs de pierre emploient pour
tracer leur ouvrage ; cette sorte de crayon ne marque que
lorsqu'il est mouillé. Pétro-plantado, pierre plantée, espèce
de cippe ou de poteau placé à une bivoie ou à un carrefour,
sur lequel on inscrit la direction des divers chemins qui y
aboutissent. Muraïo à pètro séquo, mur de pierres sèches,
c'està-dire bâti avec des pierres seules sans mortier ni
aucun ciment. Pêtro dou jo, terme de jeu de boules où i}
est de règle que la personne qui, sans le vouloir, arrête
ou détourne une boule, est considérée comme une pierre
au jeu ou dans le chemin et que, par conséquent, le coup
étant bon ne doit pas être rejoué. Aquù vaï como la pèiro
à l’anèl, cela va comme une pierre, un brillant à une bague,
cela vient fort à propos. Pichoto pèiro vèn à poun à gran
bastimén, pour exprimer qu’on a souvent besoin d’un plus
pêtit que soi.
Dér. du lat. petra, m. sign.
Pèiro-jono, s. f. Nom d’une ‘espèce de châtaigne. Les
végétaux portent souvent le nom de leurs inventeurs ou de
la personne à qui ceux-ci les dédient. Pétro-jon, Pierre-
Jean, qui est la manière dont certains dialectes languedo-
ciens prononcent Pierre-jean, dût ainsi être le nom de
l'arbre dont le fruit féminisé a fait Péïiro-jono.
Pèïiro-malo, n. p. de lieu. Peyremale, commune du
canton de Bessèges, qui faisait antréfois partie du canton
de Génolhac.
L'étymologie de ce nom, qui s'applique à diverses autres
localités du Midi de la France ne présenté aucune obscurité.
PÊÉI
Peyremale est aussi le nom de l’une des deux montagnes
qui dominent le cours du Gardon, en amont de la ville
d’Anduze. Celle qui porte ce nom est située sur la rive
gauche de cette rivière, en face de celle de Saint-Julien qui
domine la rive droite.
Ces deux montagnes appartiennent à l'étage oxfordien et
celle de Peyremale où Pierremale est spécialement remar-
quable par les plissements et les contournements des strates:
La hauteur sur laquelle est assis le village de Peyremale
est formée par un contrefort de schiste talqueux qui pré-
sente une sorte de presqu’ile contournée par la Cèze.
Le peu de consistance de cette formation schisteuse, qui
s'effrite au contact de l'air, justifie l'appellation de cette
localité : Péiro-malo, Pierre-male où mauvaise pierre.
Péirôou, s. m. Dim. péiroulé, aug. pétroulas, chaudron,
ustensile de cuisine, petite chaudière en cuivre avec une
anse pour la porter et la suspendre à Ja crémaillère. Un
plén péiréou, une chaudronnée, plein un chaudron. Au
fig. On appelle aussi péiréou un endroit creux et fait en
chaudron, soit une cavité qui contient de l’eau, soit un
bas-fond entouré de montagnes ou de collines. Lous Vans,
Ginouta sou dinc un péirdou, la ville des Vans, de
Génolhac sont bâties dans un chaudron.
SauvAGEs, qui mentionne le bas-breton ou gallois pairer
comme signifiant chaudron, incline cependant à faire déri-
ver notre péiréou de pèiro, de ce que, dans un canton delà
Lombardie, on fait au tour, avec un marbre appelé serpen-
tine, en lat. lapis ollaris, pierre à pot, des chaudronset
autres vases pareils qui auraient été les premiers ustensiles
de ce genre. Cette étymologie est sans doute bien préférable
à celles de certains savants qui vont la chercher dans
l'hébreu parour, chaudron, marmite, parce que l’hébreu
est bien loin de nous; ou dans le grec ropetoy, pot dans
lequel on met du feu, attendu qu'ici c'est dehors [qu’on le
met. Toutefois une origine plus modeste et toute 160418 né
se présente-t-elle pas?
Païréou, qui se dit presque aussi communément que
péiréou, de même que ce dernier et beaucoup d’autres
mots à terminaison semblable, se prononçait autrefois et
se prononce encore dans plusieurs dialectes païrol. 1Ce
mot dès lors se formerait de païre, père, signifiant par
extension, chef, principal, le premier et de owlo; en lat.
olla; on désignerait ainsi la plus grande, la principale
marmite. Le mot suivant présente une analogie à l'appui
de cette étymologie.
Péiroù, où Mar. s. m. Maiîtresse-branche d’un arbre,
grosse, principale branche. Péiroù est dit pour païroù,
dim. de paire, père, auteur, d’où naissent les branches
secondaires, ou premier, principal en sous-entendant le
substantif. Dans les deux cas, païroù étant en seconde
ligne après le tronc a dû être un diminutif. Son synonyme
Mar, formé dans la même pensée, vient du lat. mas, maris,
mâle et par suite fort vigoureux, le même substantif restant
toujours sous-entendu. , #
PEI
… Péirouiè, s. »”. Chaudronnier, qui fait et vend des
chaudrons et autres ustensiles de cuisine du mème genre,
U s'applique surtout au chaudronnier ambulant appelé
drouineur, qui porte tout son bagage dans sa drouine ou
havresac et improvise son atelier sur la place publique.
Ces artisans nomades sont quelquefois catalans ou calabrais ;
mais le plus souvent ils nous arrivent du Cantal, pays
classique du métier. Dans le cri qu'ils font entendre pour
s'annoncer en parcourant nos rues, on reconnait avec
quelque attention les paroles suivantes que défigurent un
peu leur accent et leur trainante mélopée : Péirgou rout
à brasa, cassérolo à éstama, à blanchi les fourchettes.
Péiroulado, s. /. Chaudronnée, ce qui est contenu dans
un chaudron, péiréou.
- Péiroulariè, s. f. Chaudronnerie, fabrique, marchan-
dise et métier de chaudronnier. Si ce mot n’exprime plus
qu'un nom de rue, ainsi que tous les noms de même genre,
il ne doit pas être traduit et il faut seulement le prononcer
à la française : c’est ainsi qu’à Alais on dit la rue Pérolerie
qu'on écrit souvent Peyrolerie.
Péirouna, ou Caïssa v. Taller; se dit des céréales : un
grain qui germe n'a d’abord qu'une seule tige, mais lorsque
multipliant ses racines latérales, il développe d'autres tiges
à côté de la tige principale, il talle ou forme des talles et
produit ainsi à lui seul plusieurs épis; c'est ce qu'on
appelle péirouna ou caïssa.
De péiroù, maitresse-branche, on a formé ce verbe qui
signifie faire des branches, des tiges.
Péis, s. m. Pays, région, contrée. Lou péi-bas, car alors
ls ne se fait plus sentir; pour les hautes-Cévennes, la
Lozère, l'Aveyron et mème pour les pays montueux plus
éloignés encore vers le nord, c'est tout le plat-pays méri-
dional du Gard en y adjoignant les parties limitrophes de
l'Hérault, de Vaucluse et des Bouches-du-Rhône, Quan las
mountagnos soun blanquos, lou péi-bas és bièn fré, quand
il neige sur la montagne, il fait bien froid dans la vallée :
les personnes, dont l'âge a blanchi les cheveux, remarquent
que ceci n'est point une simple observation météorologique.
Péisan, do, s. m. et f. péj. péisandas, so. Paysan,
paysanne, homme, femme de village, de campagne, ou
habitant la ville qui ne s'occupe que des travaux des
champs. Un bon péisan, un paysan aisé. À La péisando, à
la manière des paysans, à la paysanne. — L'augmentatif
ne concerne point la condition, mais l'éducation, les habi-
tudes : un péisandas, un gros paysan, lourdaud, s'applique
aussi, par assimilation, à tout individu grossier, sans
formes, inculte au physique et au moral.
Dér. du lat. paganus, dont la bass. lat. avait fait pagens,
m. sign.
Péisandaio, s. f. Paysannerie, la classe des paysans, la
gent paysanne. Ce mot comporte un sens déprisant comme
beaucoup d’autres à désinence semblable. Y-aviè pas qué
dé péisandaïo, il n’y avait que des paysans.
Dér. de péisan et de la terminaison aïo qui donne aux
PÊI 539
mots à qui on l'unit l'idée de généralité, de collection; elle
parait dérivée de al, qui dans les langues germaniques
signifie tout, le tout ensemble. C'est ainsi que se sont
formés gusaïo, tripaïo, etc., tous les gueux, toutes les
tripes, comme en français mangeaille, pierraille, ete.,
tout ce qui se mange, toutes les pierres, un amas de
pierres.
Péisandoù, péisandouno, s. m. et f. Petit, jeune
paysan. Il prend quelquefois une signification particulière
et de même qu'on moussurd est un artisan, un paysan qui
cherche à s'élever et fait le monsieur, un péisandoù, est
un monsieur qui se laisse aller, tend à descendre et, par
ses habitudes, se fait paysan, est un peu paysan,
Péissou, s. m. Dim. péissouné, augm. péissounas. Pois-
son, animal qui nait et vit dans l'eau. Péissoù d’Abriou,
poisson d'Avril, attrape fort en usage le premier de ce mois
et qui consiste à faire accroire à quelqu'un une fausse
nouvelle ou à l'induire à une course inutile. Qué prén un
péissoù pésquo, pèche toujours qui en prend un, les petits
profits ne sont pas à dédaigner. Ounte y-a lou bouïoùn y-a
lou péissoùn, il n’est que pêcher en grand vivier : conseil
qui ne s'adresse pas seulement aux pêcheurs mais aux
gens timides pour les engager dans les grandes entreprises
où il y a plus à gagner. Ajoutons que comme bouioùn
signifie aussi l'eau trouble d’une inondation, dans laquelle
en effet la pêche est ordinairement fructueuse, d'autres
pècheurs en eau trouble s'arrangent volontiers de ce dicton
en en détournant un peu le sens,
Dér. du lat. piscis, m. sign. dont l'ital. a fait aussi pesce
et pescione.
Péissougnè, s. m. Poissonnier, qui vend le poisson
frais, la marée. On dit aussi par fantaisie péissougnè de
quelqu'un qui aime le poisson comme on dit soupier pour
celui qui aime la soupe,
Péissougnèiro, s. {. Poissonnière, marchande de pois-
sons ; poissarde, qui a la mème origine : les poissonnières
étant partout un peu fortes en gueule comme les dames de
la halle de Paris. — Péissougnéiro, poissonnière, ustensile
de cuisine dans lequel on fait cuire le poisson en entier.
Péissounariè, s. f. Poissonnerie, endroit, halle où
l'on vend le poisson.
Péissounén, quo, adj. Poissonneux; qui abonde en
poissons.
Péitavi, n.p. qu'il faut rendre par Peitavin, bien qu'il
ne soit autre que Poitevin, car il est formé du lat. pictavi,
habitants de Poitiers, du Poitou. On ne se doute pas de ce
qu'on a sous la main lorsque, pour désigner un de ces
compagnons du devoir qui portent le surnom de Poitevin,
on l'appelle pouatevèn ; il est vrai que d’autres lui disent
podévèn, mais les premiers font du patois et les autres ne
savent ce qu'ils font. — Péitavi est encore le nom qu'à
Saint-Ambroix et dans ses environs on donne à la ronce
bleue. (Rubus cæsius, Linn.)
Péitrâäou, s. m. Poitrail, le devant, entre les deux
540 PEL
épaules au-dessus de l’encolure, des bêtes de trait et de
somme; poitrail, harnais qui passe sur cette partie.
Dér. du lat. pectus, pectoris, poitrine.
Péitrâou, s. ». Terme de scieur de long : les anses ou le
joug de la partie inférieure de la scie, par où les scieurs qui
sont à terre tirent de haut en bas la scie, que celui qui est
sur la ligne laisse descendre et remonte ensuite pendant que
les premiers cessent à leur tour de tirer. L'un tiro la rèsso
et l'doutre lou péiträou, moyen excellent de ne rien faire
quand on ne s'entend pas, car c’est tirer chacun de son
côté en même temps.
Ce mot est dit aussi à cause de la position que cette
partie de l’outil tient contre la poitrine de l’ouvrier.
Péitrino, s. f. Terme de boucherie, poitrine ou bas-côté
de l'animal : c’est la partie au-dessous du haut-côté on du
brou et qui contient, pour le mouton, les houts des côtes
ou carré de cotelettes; le bas-côté s'étend depuis le milieu
de la cavité de la poitrine jusqu'au bréchet, paléto dé
l’éstouma. La poitrine de veau contient les os cartilagineux
appelés tendons. — Bien qu'on dise, par imitation uno
défléciou dé péitrino pour une fluxion de poitrine, éstouma
s'emploie le plus souvent, quoique d’une manière impropre,
pour désigner l'intérieur de la poitrine et les organes essen-
tiels qu'elle renferme. — Voy. Éstouma et Méou. Péitrino,
quand il s’agit de l’homme, s'entend donc ordinairement
de la partie extérieure. Sé tusta la péitrino, se frapper la
poitrine. Z baïlè un santus sus la péitrino, il lui donna un
grand coup sur la poitrine. — Voy. Santus.
Dér. du lat. pectus, pectoris, et alt. de poitrine.
Pèl, s. f. Peau, enveloppe du corps de l'animal. Elle est,
particulièrement pour l’homme, composée de trois parties
ou membranes superposées : 4° l'épiderme, péléto ou pré-
miëiro pèl, surpeau, la première peau et la plus mince,
celle que les vésicatoires et les brülures font soulever ;
20 le tissu réticulaire qui se trouve entre celui-ci et le sui-
vant; 30 le derme, le cuir de la peau ou la peau propre-
ment dite qui lui donne la consistance. — Pèl, peau,
pellicule, écorce, pelure des plantes, des fruits, des graines,
du fromage, etc. Pèl d’iranje, écorce d'orange. Pèl dé
poumo, pelure de pomme. Pèl dé sèr. — Voy. Sèr. Pèl-
morlo Où car-morto, chair morte, insensible, durillon,
petit calus que Ja marche et le travail forment sous les
pieds et dans les mains. — En langage libre, pef est une
prostituée que le français, dans le mème style, appelle aussi
peau; on donne même ce nom à une femme à qui on ne
peut rien reprocher que de n'être plus jeune. — Léva la
prémiéiro pèl, au jeu, dans une affaire d’argent quelconque,
c'est gagner, pressurer vigoureusement quelqu'un, en un
mot lui enlever la première peau, ce qui est bien près de
l'écorcher tout-à-fait, Dans le vocabulaire figuré des viveurs,
tréouqua la pèl c'est, après une ribotte, ce qu’on appelle,
par une autre métaphore, en venir à un règlement de
comptes et reslituer ce qu'on à pris de trop; c’est une
allusion au péiéou, à la pèl dé mounino qu'on est censé
PÈL
revêtir dans une orgie bachique. Voy. ces mots. Il paraît
que l'accident susdit aurait pour effet de trouer, de percer
cette peau, ce qui la déprécie beaucoup au dire des connais-
seurs; il est donc essentiel en pareil cas de la séqua; de la
sécher, c.-à-d. de la bien préparer pour'qu'elle soit de
bonne qualité. — Disputa la pèl avan d'avédre l'agnèl,
vendre la peau de l'ours avant de l'avoir couché par terre.
Maï toquo la pèl qué la camiso, ma chair m'est plus près
que ma chemise ; mes parents me sont plus que des étran-
gers; mon intérêt me tient plus à cœur que celui des autres.
Y-a mai dé pèls dé cabris qué dé pèls dé cabros, il va plus
au marché de peaux d’agneaux que de vieilles asian il
meurt plus de jeunes que de vieux.
Dér. du lat. pellis, peau.
Pèl, s. f. Peau, en terme de magnanerie, mauvais cocon,
inachevé, incomplet et par conséquent mince, faible et
fournissant peu de soie d’une qualité inférieure. Les
papillons qui proviennent de ces cocons produisent de la
bonne graine; il est vrai qu’on croit avoir remarqué qu’elle
cessait de l'être à la seconde génération, ce qui dénoterait,
chez le premier ver qui a fait un mauvais travail, les
germes du moins d’une maladie et un commencement de
dégénérescence. Aussi, ce qu'il y a de plus prudent et de
mieux à faire, pour la reproduction de la graine, c’est de
choisir les meilleurs cocons annonçant dans leurs auteurs
toutes les conditions de santé et une vigueur qu'ils doivent
transmettre entière à leur race. — Pèl, en terme défilature,
est un cocon en grande partie dévidé, dont le fil est plus
mince, parce qu’il tire à sa fin; on le met, soit comme
appoint à des cocons neufs pour compléter la grosseur
voulue du brin de soie, soit pour maintenir égale cette
grosseur lorsque le fil des cocons neufs commence à son
tour à s'amincir. On file à deux, trois, quatre cocons et
une ou deux peaux, à dous, trés fouséls et uno, dos
pèls, etc.
Péla, v. Peler écorcher. Tèsto pélado, une tête chauve,
un chauve.
Pélado, s. f. Écorchure; le poil, la peau; pelade, alo-
pécie, maladie qui fait tomber les poils et les cheveux. Y-a
émpourta la pélado, il lui entamé, enlevé la peau, il Va
mordu, écorché jusqu'au vif, jusqu'au sang.
Pélaje, s. m. Pelage, couleur du poil de certains animaux,
du cheval, du bœuf, du chien, etc.
Pélandro, s. f. Houppelande, dont on pourrait supposer
que c’est une corruption, si ce n’était plutôt un péjoratif
capricieux de pal, la houppelande étant primitivement une
cappe, un manteau de berger fait de cuir ou de peau avec
le poil. Des glossateurs font venir la chose et le mot
d'Upland, province suédoise où cette sorte de casaque est
en usage, de toute anciennelé, contre le froid et la pluie.
Depuis, pélandro, comme houppelande, s’est dit d'autres
surtouts d'homme. Aujourd'hui, on l'applique souvent par
plaisanterie à toute redingote ou lévite ample et longue.
Péläou, do, s. m. et f. Avyare, vilain, ladre,- pince-
PÉL
maille, fesse-mathieu ; malotru, bélitre, gredin ; car l’avare
bien caractérisé est un peu tout cela.
Pélar, s. m.— Voy. Péraldoù.
Pélardoù, s. m. — Voy. Péraldoù.
Pélégri, s. m. Espèce de châtaignier qui fait la pélégrino.
ILest probable que ce châtaignier, introduit plus derniè-
rement dans le pays, reçut alors le nom de pélégri, du lat.
Peregrinus, étranger.
_ Pélégrino, s. f. Espèce de châtaigne, fruit du pélégri, la
seconde en bonté, la meilleure après la ddoufinénquo, le
marron, qui est la meilleure de toutes. Il n'est pas d'usage
local de.franciser le nom de l'arbre qui la produit, mais,
pour le fruit, on dit ici couramment pélégrine, et nous
proposons ce nom, si le climat et la culture l'ont modifiée,
appropriée au pays, et en ont fait une variélé inconnue
ailleurs. — Voy. le mot précédent.
Péléstioù, s. m. — Voy. Péloustioù.
Péléto, s. j. Épiderme, surpeau. Dim. de Pèl, il se dit
surtout d’un petit morceau d'épiderme enlevé par excoria-
tion. — Péléto est aussi le fém. du nom d'homme Pélé,
Pelet.
Pélican, s. m. Va-nu-pieds, poiloux, homme de néant.
C'est, dit SAuvAGEs, une corruption de poblican, publicain,
nom qu'au XIIe siècle on donna aux hérétiques albigeois,
haïs et fort décriés. On sait que les publicains étaient, sous
les Romains, les fermiers des impôts et revenus publics, et
que leur nom, en horreur chez les Juifs, servit à désigner
un grand pécheur, un homme de mauvaise vie, détestable
par son caractère et par ses mœurs. Ce nom, ainsi défiguré,
est resté dans le pays comme une qualification injurieuse
dont on ne recherche pas l’origine et qui, de chute en chute,
répond assez à celle de voyou, du vocabulaire populaire.
Cela n'empêche pas que, si l’on avait à parler du pélican
(Pelecanus onocratolus, Linn.), oiseau dont la réputation,
méritée ou non, est bien le contre-pied de celle du publicain
romain, on dirait également pélican.
Péligantiè ou Pélissiè, s. m". Pelletier, fourreur,
peaussier. Le français désigne sous ces noms et d’autres
encore, les divers ouvriers qui donnent aux peaux d'ani-
maux les différentes préparations dont elles ont besoin selon
l'usage auquel elles sont destinées; le languedocien les
confond tous sous la dénomination de Péligantiè ou Pélissie,
qui s'appliquent aussi aux ouvriers qui travaillent ces
peaux comme à ceux qui les vendent. Le nom commun de
péligantiè semble formé de pèl et de gan ou gantiè, faiseur
de peaux de gants, qui est particulièrement le peaussier.
Péligor, s. m. Périgord, nom d’une ancienne province
française qu'on donne ordinairement à quelqu'un qui en
est originaire, comme on appelle Limoùs et Bérà un natif de
la ville de Limoux ou de la province de Berry. Ce mot est
au besoin féminisé et l'on dit la Péligordo d'une périgour-
dine; on le dit même de la femme du Péligor, bien qu’elle
soit étrangère au pays qui a donné son surnom à son
mari.
PEN 541
Pélissiè, s. m. Synonyme de Péligantiè. (Voy. c. m.)
Toute l'industrie qui concerne la manipulation diverse des
peaux d'animaux, autre que celle de la tannerie, étant
devenue rare dans le pays, les mots qui la désignent trou-
vent peu à être employés, et pélissiè surtout n’est presque
plus qu’un nom propre que l’on rend par Pélissier.
Pélissariè, n.p. de lieu. Par les raisons données à l'art.
précédent, ce n'est plus guère qu'un nom de rue, que le
français rend par pelleterie on peausserie et que dans nos
localités on traduit avec raison par pélisserie. Du reste, la
rue d'Alais qui prit ce nom à l’époque où la plupart des
métiers donnaient ainsi le leur, étant fort petite, semble
témoigner que même alors cette industrie était peu impor-
tante.
Pèl-morto, s. f. — Voy. Pèl.
Pélouiro, s. f. Pelure, de pomme, de pois, etc. ; peau
dégoütante des viandes; peaux flasques et pendantes des
vieilles gens. C’est, notamment dans ses dernières acceptions,
un péj. de Pèl.
Pélous, s. m. Hérisson, bogue, enveloppe piquante de la
châtaigne. Péloùs est dit pour péouloùs, poilu, hérissé de
poils, qui, cette fois, sont un peu rudes.
Dér. du lat. Pilus, poil, ou Pilosus, velu, convert de
poils.
Péloussiè, s. m. L'arbre au hérisson, le châtaignier, le
porteur ou faiseur de hérissons. Ce mot n'est pas du lan-
gage ordinaire; mais la poésie peut en faire un heureux
emploi.
Péloustiou, s. m., ou Pélèstioù. Espèce d’huitre de la
Méditerranée; plus petite que celle de mème provenance
appelée pied-de-cheval pour sa massiveté; elle remplaçait
pour nous, avant leur arrivage si facile, si rapide et si
abondant, les huîtres de l'Océan qui ne l'ont pas fait
oublier, et à côté desquelles elle tient son rang avec honneur.
Le Péloustioù, que certains prononcent pélèstioù, a la
coquille très-raboteuse et souvent garnie de pointes et de
parties hérissées, ce qui lui a valu sans doute son nom
pour quelque rapport de ressemblance avec le péloùs ou
hérisson de la châtaigne. — Sauvaces définit le péloustioù :
petite huitre qui tient à une plus grosse. Peut-être en effet
n'est-ce point une espèce particulière mais seulement une
jeune huître attachée à une autre de la grosse et même
espèce qui l’a produite. Ce qui le ferait croire c'est que, à
la différence de taille près, le péloustioù et le pied-de-
cheval sont, pour l'œil seulement, absolument semblables.
Péluqua, v. Picoter, becqueter, croquer çà et là des
grains d’une grappe de raisins, picorer sur un panier de
cerises. Péluqua, au propre, se dit des oiseaux.
Péna, v. Faire de la peine; peiner, fatiguer, travailler
beaucoup, difficilement. — Mé pénavo prou dé y-ou dire, il
m'en coûtait assez de le lui dire. Fouguë péna pér ou
mounta, il fallut peiner, il fallut du travail pour le
monter.
Pénable, pénablo, adj. Laborieux, infatigable, qui ne
69
542 PÊN
craint point la peine; pénible, difficile. — Aquél home és bien
pénable, cet homme est très-laborieux, àpre au travail, c’est
un homme de grand travail. Un chemin montant, sablon-
neux, mal-aisé est un chemin pénable. Un pêis pénable, un
pays montueux, difficile, où l’on ne va qu'avec beaucoup de
fatigue, où les travaux sont pénibles. S'és bé pénable dé...
vous êtes bien complaisant, vous êtes bien bon de, etc.;
cette tournure est souvent ironique et équivaut à : Vousavez
bien de la complaisance de reste, de quoi vous mêlez-vous?
Pénado ou Pésado, s. j. Empreinte du pied, pe.
Pénche, s. f. Peigne, pour démêler, tenir, fixer les
cheveux, pour décrasser la tête, etc.— Pénche dé las grossos
puos, démêloir, peigne clair pour démêler. Pénche de las
pichotos puños, peigne fin, à décrasser. Uno péncho bérquado,
un peigne édenté. Pénche, séran, espèce de cardé faite
d’une pièce de bois ou de fer, en carré long, garnie de
longues pointes de fer entre lesquelles on passe le chanvre
et le lin pour les dégager des restes de la chenevotte et les
affiner. Pénche, dent de la roue de champ d'un puits-à-
roue ; elle est placée perpendiculairement sur le plan de la
roue ou parallèlement à son axe. Ce mot est ici bien
modifié, puisqu'il n’exprime plus qu'ane dent de cette sorte
de peigne.
Pénchignè, s. m. Chanvrier, filassier, artisan qui sérance
ou qui peigne le chanvre et qui l'habille ou le met en
paquets pour le rendre propre à être vendu et filé: Lorsque
c’est une femme qui fait ce travail, on l'appelle pignaresse.
— Voy. Pénche.
Pénchina, v. Peigner, démêler, nettoyer, arranger les
cheveux avec un peigne. — Pénchina dé candi, peigner,
sérancer du chanvre. { Voy. Pénchignè et Pénche.) Pén-
china dé réboùs, peigner à rebrousse poil; et, comme cette
manière de faire est douloureuse et irritante, on se sert au fig.
de cette expression pour dire : contrarier, heurter vivement
quelqu'un et, par conséquent, lui échauffer les oreilles, lui
faire monter la moutarde au nez. Pénchina, peigner, soigner,
travailler, faire; aquo's bièn où méou pénchina, c'est
bien ou mal fait, arrangé, etc. Ou pénchino pas méou, il
ne s'en tire pas mal, il s'en acquitte on ne peut mieux, et
la phrase étant souvent ironique, alors elle signifie juste-
ment le contraire. Sé pénchina, se peigner, se gourmer ; de
l'usage assez ordinaire où l'on est de se prendre aux che-
véux en pareille occasion.
Pénchinado, s. f. Coup de peigne; gourmade, volée,
frottée, coups que l’on donne, reçoit ou échange, en langage
pop. peignée.
Pénchinio, s. f. Le champignon denté on en hérisson,
genre de champignon à chapiteau, différent des laminés et
des fistuleux, et dont le dessous est hérissé de pointés
charnues et pendantes ; il est bon à manger. Les botanistes
l’appellent Fungus erinaceus, esculentus, crassus, albus.
(SAUVAGES.) — Dans des nomenclatures plus récentes, ce
champignon, dépeint comme ressemblant un peu à une
perruque suspendue à un arbre, et qu'on trouve ordinai-
PEN
rement sur les vieux chênes, est appelé hydne hérisson,
hydnum erinaceus.
Péndén, s. m. Pendant, boucle d'oreille; pendant,
pareil, symétrique, qui correspond.
Dér. du lat. Pendere, pendre.
Péndiciou, s. f: Pendaison. — Voy. Mala-péndictou,
pour l'emploi le plus ordinaire de ce mot.
Péndigoula, v. Pendiller, être suspendu en l'air et agité
par le vent. Sé péndigoula, se suspendre parles mains à
une barre, à une branche d’arbre.
Péndid, s. m. Pendeloque; mot générique qui s'applique
à tout objet de petite dimension qui pend naturellement
ou qu'on: accroche quelque part, comme une breloque
suspendue à la chaine d’une montre ou ces appendices
charnus, couverts de poils, qui pendent sous la gorge des
chèvres et qu'on appelle glands ou pendants,
Dér. du lat. Pendere, pendre
Péné, s. m. Petit pied, peton en terme familier et
enfantin. Pénoù est le synonyme mignard. — Dé pénés,
pieds d'agneau ou de chevréau mis en ragoût.
Dim. de Pe, pied.
Pénéqua, ». Avoirde la peine, peiner, souffrir, être à l'étroit.
Dér. de Péno, du lat. Pœna.
Pénéquéja, v. Même sign. que le précédent, mais avec
l'expression diminutive de la désinence éja, qui, en se
joignant aux verbes, indique toujours que l'action est
commencée, répétée ou imitée.
Pénèquo, s. f: Petite figue sèche.
Pénétra, v. Réfléchir, penser. — Pénétrave pa'qui, je
ne réfléchissais pas à cela ; je n'avais point pensé à cela:
Pénja, vw. Pendre, suspendre, attacher en haut une
chose par une de ses parties, à un mur, à une branche
d'arbre, à un plancher; attacher à un gibet; être suspendu,
attaché; descendre trop bas, incliner, pencher. Comme en
français, le verbe languedocien est en même temps actif et
neutre. — Sé pénja, se suspendre, se pendre, se suicider
par la pendaison.
Pénjo-col, s. m. Figue bien müre, pendante, à col
tordu. Au fig. hypocrite, faux-dévot. Le français emploie
familièrement dans ce sens le mot torticolis : c'est la même
image employée pour représenter ces faux-dévots au cou un
peu incliné et de travers, à la tête penchée.
Pénjoula, v: Pendiller. M. sign. que son synonyme
Péndigoula. — Voy. ©. m.
Pénnaïso, s: f. Punaise, insecte et vermine plate’ et
puante. Terme emprunté au français.
Pénnéja, v. Gambiller, remuer les jambes de côté et
d'autre; piétiner, ruer, piaffer, lever les pieds en l'air en
restant sur place.
Pénnéjaïre, pénnéjairo, s. m. et f: Qui s'agit,
qui remue sans cesse les jambes ou les pieds; qui
gambille et piétine ; animal qui rue, qui est enclin à ruer.
Dér. du verbe précédent Pénnéja, formé de Pè, avec la
désinence fréquentalive éja. +
en ,vie. À
/PÉN
Péno, ss. f. Peine, souci, travail, fatigue, soin; affliction,
-souffrance; inquiétude d'esprit. Notre langue n'accepte pas
péno dans le.sens français de peine, punition, châtiment. —
_Sé n’avèn la péno, si Dieunous le permet, si nous sommes
qu vÜow la péno, cela est grave ou cela est à
considérer. Cette expression est quelquefois employée par
ironie et signifie alors : cela n’en vaut pas la peine, c'est
une-niaiserie. N'én vou pas la péno, ne faites pas atten-
tion, cela ne-vaut pas:que vous vous dérangiez. Préne
péno, mettre ses soins à quelque chose, se fatiguer, s’appli-
quer, faire des efforts pour parvenir à un.but. Y prén péno,
il faititout ce qu'il faut pour réussir. Faï péno, il fait
peine à voir. Mé faï péno, il me répugne de faire ou de
croire... Préngués pas la péno, ne vous dérangez pas, n'ayez
‘pas souci. Mé fariè pas péno, je ne craindrais pas.-Mé faï
prou péno, il m'en coûte assez. F-a prou péno, il y a assez
de travail, ilest assez pénible. Y-a prou péno pér gagna
sa pdouro vido, les temps-sont bien durs pour arriver à
gagner :sa -misérabble vie. ,Douna-vous la péno, veuillez
bien. Tira dé péno, tirer. d'embarras; (tira péno, être en
souci, avoir des craintes; cette dernière expression se rap-
proche de traïre mdou, m. sign.
‘Ce mot s'emploie très-bien-au pluriel, Zas pénos, dans
les phrases suivantes : sé métre dins las pénos, se metire
dans l'embarras ; par extension, se marier. És dins Las
pénos, se dit d'une fille enceinte.
À péno, adv. Presque pas, un peu.
Én péno, adv. Avec.eflorts, difficilement. — Marcho én
péno,-il marche difficilement. ‘
Dér. du lat. Pœna.
‘Péno, s.'f. Bout de Ja trame d’une étoffe. Péno dé riban,
le pène d'une pièce de ruban, ou les restes du fil de la
chaine qu'on n’a point tissés, qui dépassent en franges le
tissu.-De là leur étymologie, du lat. Penna, plume.
Péno dé por, panne de porc. — Voy. Saï.
IPénsa, ».Penser.-Avoir ou former dans son esprit l’idée,
l'image de quelque chose; croire; réfléchir; songer. — Aro
qué y pénse, maintenant que j'y songe, que j'y réfléchis.
Ou pénse'bé, je le crois bien. Mé pénsave, je me disais ;
m'ou pénsave, je m'en doutais. Pénsas bé... vous imaginez
bien, vous vous doutez bien. N'én pénso pas mén, il n'en
pense pas moins: 0Y pénsas pas! Vous n'y pensez pas! y
pensez-vous ? Dis pas tout cé qué sé pénso, il ne dit pas
tout ce qu'il pense. S'ou dis pas, s'ou pénso, s'il ne le dit
pas, il le pense. Bouta-vous, n'én pénso pas maï, allez donc!
._ il n'en pense pas davantage. Dévignas-ou sans pénsa mdou,
devinez sans songer à mal, dit-on en proposant une énigme
ou une charade dont le mot est honnête, mais dont les
subdivisions paraissent présenter un sens un peu scabreux.
-Dér. du Jat. Pensare, peser, examiner.
‘Pénsa, v. Panser, appliquer un remède sur une plaie ;
soigner un cheval, en faire le pansage.
Arr s. f. Pensée; cé que l'esprit pense, a pensé;
on, projet, dessein, réflexion.
PÈO 543
Pénsiou, s. f. Rente foncière; revenu annuel -ou rede-
vance annuelle, établis sur un immeuble en vertu d’an bail
à locaterie perpétuelle. — Aqué! oustdou ‘mé faï pénsiou,
j'ai une rente foncière établie sur cette maison. Pénstou,
signifiant pensionnat, est une concession nouvelle faite au
français. H faut bien se faire comprendre.
Pénsiouna, adj. Pensionné, qui reçoit une pension.
Pénsiouna, subst. Dans le sens de pensionnatest comme
pénsiou une concession faite au français.
Pénsiounari, s. m. Débi-rentier, celui qui paie ‘une
rente foncière.
Pénti, o. Punir, attraper; faire repentir, causer du
déplaisir. — Souï bé pénti, je suis bien puni. T'én faraï
pénti, je t'en ferai repentir. T'én péntiras! tu en seras
faché, tu t'en mordras les doigts.
Dér. du lat. Pœnitere.
Pèou, s. m. Cheveu de la tête; poil du corps; se dit
aussi, au singulier, pour la chevelure d'une |femme. —
Pénchina, tréna soun pèou, peigner, tresser, arranger ses
cheveux. Moun pêou tombo, ma chevelure se dénoue.
Partiriè un péou én-dous, il tondrait sur un œuf, il cou-
perait un liard en quatre, dit-on d'un avare. Cérqua dé
pèou énd'un i6ou, chercher des tâches dans le soleil,-des
fautes où il n'y en a pas plus-que des poils sur un œuf.
Aqui un bla, uno: lusèrno, un doubre qu'à bon pèou, se dit
d’un champ de blé, de luzerne, d'un arbre qui commence
à pousser et qui présente bien. Aichan pèou, au fig., mauvais
caractère, hargneux, hérissé. Fa à réboùs. dé pèou, esprit
de travers, fait à rebrousse poil. Y-a pas un pou dé ma
tèsto qué y pénse, jen’ai pas veine de mon corps qui y tende.
Faïre lou pèou, tondre, couper les cheveux, les poils. Au
fig. Aguèn un pèou, nous nous primes de querelle; nous
eûmes une altercation. Est-ce une allusion à ce qu'enthan-
guedoc le plus pressé, en pareil cas, est de se prendre aux
cheveux? Péou fouladis, poil follet; le premier poil qui
vient avant la barbe, aux jeunes gens, avant les plumes
aux oiseaux. Pêou rouge, un rousseau, qui a les cheveux
ou le poil roux, les cheveux carotte.
Pèou, s. ”m. Brin de quelque chose, petite quantité. —
Un pèou dé jéouvèr, un brin de persil.
Pèou dé la, le poil ou la fièvre éphémère des femmes
nouvellement accouchées.
Pèou d’uno lamo, paille dans la lame d'un instrument.
Pèou, glace ou lame dans un diamant, fil dans une pierre
de taille; paille.
Faï pa un pèou d'douro, il ne fait pas un soufile de vent.
Gna.pa'n pèou, néant!
Pas le plus petit morceau
De mouche ou de vermisseau.
Tira un pèou, couchèr un sarment pour le provigner.
Dér. du lat. Pilus, m. sign.
Pèoulü, udo, adj. m.et f. Poilu, velu, couvert de poils.
Dér. de Pèou, poil.
544 PER
Pèou-muda, v. Muer, changer de poil, de plumage, de
peau, au prop. et au fig.
Dér. du lat. Pilum mutare.
Pépido, s. m. Pépie ; pellicule qui se développe au bout
de la langue des oiseaux ; maladie des poules, dit SAUvAGES,
dont on croit vulgairement que la langue est le siège. Pour
la guérir, on écorche, en conséquence, cette partie cartila-
gineuse, ce qui ne fait qu'ajouter un nouveau mal à celui
qu'éprouvent ces animaux. On croit avec plus de raison
que la pépie est occasionnée par des poux que les poules
ont à la tête, et dont il est aisé de les délivrer avec quel-
ques gouttes d'huile de poisson ou d'essence de térében-
thine, qui tue subitement cette vermine.
Mé faï véni la pépido, mot à mot : il me donnela pépie,
il me scie le dos.
Dér. du lat. Pituita, employé par Columelle dans le
mème sens.
Pépidos, s. f. plur. Envies; filets de la peau des doigts
qui se soulève autour des ongles ; pellicules à la racine des
ongles.
Pépiéja, v. Avoir la pépie ; être souffreteux, maladif; se
plaindre souvent et douloureusement.
SauvAGEs emploie dans le même sens Pépidéja.
Dér. du subst. Pépido, pépie.
Pépignièiro, s. f. Pépinière, plants de jeunes arbres
destinés à être replantés.
Pèpio, s. f. Pecque, bégueule, sotte et impertinente qui
fait l’entendue.
Le masculin Pèpi n'est pas dans la langue. Le sexe fort ne
saurait cependant en conclure que ce soit parce qu'il ne se
trouverait pas chez lui de nombreuses applications.
Péqua, s. m. Péché, — Voy. Péca.
Péqua, v. Pécher.
Péquadoü, s. et adj., au fém. Péquadouno. — Foy.
Pécadoù.
Pèquo-lèbre, s. m. Apprenti chasseur, tirailleur. La
composition du mot indique assez qu'il s'applique à celui
qui « manque les lièvres. »
Pér, prép. Par; exprime la cause, le motif : pér nécije,
par bétise; pér glorio, par vanité, par amour-propre; il
exprime aussi le moyen : pér mouïèn, de cette manière;
pêr forgo, par force ; il marque encore la division, l'ordre :
pér réngo, pér tavèls, par rangs, par tas; le lieu, l'endroit :
pér nèou, par terre; pér péès, pér cami, par pays, en
chemin.
Dér. du lat. Per, m. sign.
Pér, prép. conj. Pour, afin de, en échange de, au lieu
de, selon, suivant, dans, en, moyennant, pendant, à travers,
comme, de mème.— Aféciouna coumo uno daïo pér Caléndo,
se dit d’un homme nonchalant, paresseux. Pér rire, pour
rire, pour plaisanter; pér dousi dire, pour avoir ouï dire;
pér vioure, pér parti, pour vivre, pour partir; pér un sou,
pér un sa dé bla, en échange d’un sou, d’un sac de blé;
un pér loutre, l'un au lieu de l'autre; pér iéow, à ma
PÉR
place; pér toutes, pour tout le monde; pér l'hivèr, pér
l'éstiou, en hiver, en été; pér cin frans, moyennant cinq
francs; pér Caléndos, au temps de la Noël; pér séménços,
à l'époque des semailles; pér bdouris et valas, par préci-
pices et torrents, par monts et par vaux; passa pér mort,
passer pour mort. — És bon ni pér bouli, ni pér roustà, il
n'est bon à rien.
Pér afin, conj. réduplicative, pour afin de. La construc-
tion prafi, dans le langage courant, est également usitée.
— Voy. ce dernier mot.
Dér. du lat. Pro, pour.
Pèrd, 3° pers. du présent de l'indic. de Pèrdre. Il ou elle
perd. — Qué tout ow véou, tout ou pèrd, pour tout vouloir,
on s'expose à tout perdre.
Péraldoù ou Pérâoudoù et Pérardou, s. m. Péraldon :
petit fromage de lait de chèvre, piquant, propre à la région
des Cévennes. Ce fromage était renommé aux temps les
plus reculés. Pline le Naturaliste le mentionne comme
très-estimé de son temps, pour sa saveur particulière.
(Hist. nat., lib. VI; lib. XE, cap. XCVIL.) Péraldoù est sans
doute une corruption de Pébraldoù, qui prend la désinence
diminutive à cause de sa petite forme; son nom rectifié
paraît dérivé de Pébre, poivre, à cause de son goût
piquant.
Pér-amoun, Pér-amoundäou, adv. Par en haut, par
là-haut.
Pér-amour dé on qué, ado. conj. À cause de ou que,
parce que. — Pér amour dé iéou, pour me faire plaisir, pour
m'obliger, à ma considération. Pér amour dé vous, par
égard pour vous. Il est presque synonyme de pér afi dé,
prafi dé, dans la même acception : pér afi dé vous, à cause
de vous, par rapport à vous.
Pér-aqui, adv. conj. Par là; par cet endroit; par ce
moyen; par ces paroles; ainsi; c'est pourquoi; par quoi. —
A travéssa pér aqui, ila traversé, il a passé par là, par cet
endroit. És pér aqui qué m’éntrépréngue, c'est de cette
façon, par ces mots qu'il m'aborda, qu'il commença la
conversation. Pér aquè sé véi, ainsi on comprend; pér
aqui poudès vous pénsa, c'est pourquoi vous pouvez croire,
ou par là vous pouvez croire.
Pér-aqui, adv. Couci-couci, tout doucement, par-ci,
par-là. — Coumo anas, péchaïre? Comment vous portez-
vous, mon pauvre ami? Et l'ami, dont la santé laisse
à désirer, n'est pas bien rétablie, de répondre : Pér aqui,
tout doucement. Et s’il est satisfait de son médecin ou de
la médication qu'il a suivie, de continuer toujours : Pér
aqui, avec l'expression d’une satisfaction atténuée, modérée,
sans bläme ni présomption.
Pér-aquo, adv. Pourtant, néanmoins.
Pér-aquo-d’aqui, adv. Pour cela, à cause de cela. —
És pér-aqud-d'aqui qué, c'est précisément pour cela, pour
cette raison que.
Pér-aquo ou Pér-aquo-pamén, adv. Cependant, quoi
qu'il en soit. — Pér-aqud-pamén, sémblo pas poussible,
PÈR
oh! pourtant, cela ne semble pas possible. Expression
redoublée de doute, d’hésitation, d'indignation. Oh! pér
aquè ou praqud! par contraction; oh! c'est indigne !
Péras, s. m. Poirier sauvage. Cet arbre est très-recherché
pour l'ébénisterie et la marqueterie. Il existe dans le Midi
et dans les Cévennes surtout, plusieurs fermes, habita-
tions ou hameau qui portent ce nom, et notamment le Péras,
maison de campagne située dans la commune de Sénéchas,
au confluent de l'Homal et de l'Amalet ou Homolet.
Dér. du lat. Pyrus, m. sign.
Pérasso, s. f. péjor. Fruit du poirier sauvage; poire
d'étranguillon, d’une saveur âpre et rude.
Pér-aval, adv. Là-bas; par opposition à pér-amoun, qui
exprime le côté opposé. — Fdou davala pér aval, c'est par
là-bas qu'il faut descendre.
Pérbouli, v. Faire blanchir la viande ou les légumes
dans l'eau bouillante; leur laisser prendre un ou deux
bouillons. — Faïre pérbouli la viando, passer la viande à
l'eau bouillante.
Pércè, adv. Par cette raison, pour cause. C'est la
réponse évasive de ceux qui ne savent ou ne veulent pas
en donner.
Pércuro, s. f. Procuration, pouvoir d'agir donné à
quelqu'un ; acte qui le contient. — Douna proucuro,
donner pouvoir, procuration à quelqu'un.
Pércouroùü, s. m. Procureur, qui défend en justice,
connu aujourd'hui sous le nom d’avoué. SauvAGES enregistre
péreuraïre, procureur, qui est de formation plus régulière.
Pércuroù se rapproche du français, et il n’est pas tout-à-fait
pur; mais que dire de proucuroÿ, qui s’est introduit par
altérations successives ?
Dér. du lat. Prôcurator, m. sign.
Pérdéqué, adv. interrôg. Pourquoi, pour quelle chose ;
pour quelle raison. — Sans démanda pérdéqué, sans
demander le motif, sans demander pourquoi. Pérdéqué
y-anavias? pourquoi y alliez-vous ?
Variante de Pérqué. (Voy. ©. m.) En ital. perchè, m. sign.
Pérdigaïado, s. f. Couvée; volée, compagnie de perdrix.
Formé de Pérdigal.
Pérdigal, s.m. Dim. Pérdigaïé et pérdigaïoù. Perdreau ;
jeune perdrix ; perdrix rouge.
Dér. du lat. Perdrix et gallus.
Pérdigolo, s. f. Aigrette des graines de certaines plantes ;
sorte de duvet que portent les semences et que le moindre
vent soulève, fait voltiger et va semer au loin.
Pérdigouno, s. f. Perdrigon, sorte de prunes de l’espèce
de celles qu'on prépare à La Salle (Gard), connues sous le
nom de pruneaux de La Salle, aussi estimés que ceux de
Brignolles.
Pérdise, s. f. Perdrix, oiseau du genre, Tetrao, Linn.,
de l'ordre des Gallinacées et de la famille des Domestiques
ou Alectrides.
Dér. du lat. Perdiz.
Pèrdo, s. f. Sauvaces cite Pérdio : c'est la forme
PER 545
ancienne; Pérdo lui a succédé, et il est lui-même menacé
de se transmuter, au moyen d'une annexion, en Pérte,
qui est du français et qui s'est déjà impatronisé. Sous ses
diverses transformations ou altérations, le mot signifie :
perte, ruine, privation d'une chose agréable, avantageuse,
d'un gain; dommage; hémorrhagie ou perte de sang chez
les femmes après l'accouchement; mort, absence d'une
personne chère. — Aqud fara sa pèrdo, cela causera sa
perte, sa ruine. Bèlo pèrdo! se dit par antiphrase et
avec ironie d’une perte insignifiante, de la mort d'un mau-
vais garnement. ,
Pérdoù, s. m. Pardon ; indulgence ecclésiastique, rémis-
sion des péchés. — Vous démande bièn pérdoù, veuillez
bien m'excuser. Comme interjection de repentir, d'exense :
Pérdoù ! Pardon ! est une importation française.
Pérdouna, v. Pardonner; accorder la rémission d'une
faute, d’une offense ; excuser, épargner. — Pérdounas-nous
nosles pécas, coum'à qui nous an doufénsas, nous doutres
pérdounan l'éoufénso, pardonnez-nous nos offenses comme
nous les pardonnons à ceux qui nous ont offensés : traduce-
tion languedocienne de l’oraison dominicale donnée par
SAUVAGES.
Dér. de la bass. lat. Perdonare.
Pérdounable, ablo, adj. m. et f. Excusable, pardon-
nable, qui mérite d'être pardonné. És pas pérdounable, il
n’est pas excusable.
SAUVAGES remarque avec raison, qu'en français pardon-
ner et pardonnable ne s'appliquent activement qu'aux
choses et jamais aux personnes : il n’y a que les fautes qui
soient pardonnables, et on pardonne à quelqu'un. Le
languedocien n’a pas les mêmes scrupules et on dit très-bien :
és pas pérdounable, qui serait mal rendu par : il n’est pas
pardonnable, mais que : il n'est pas excusable, satisfait
pleinement.
Pèrdre, v. Perdre; cesser d’avoir, n'avoir plus: faire
une perte, un mauvais emploi; répandre, s'enfuir, en
parlant d’un tonneau ou d'un vase qui laissent couler une
partie du liquide qu’ils contiennent; perdre son sang,
appliqué à une blessure ou aux lochies et aux menstrues
des femmes.
Pèrdre la fénno et quinze sous, és gran ddoumage dé
l'argén, perdre sa femme et quinze sous, l'argent perdu est
grand malheur, dit un proverbe. A propos de cet irrévé-
rencieux dicton, il est à remarquer que dans toutes les
langues, — et le languedocien ne doit pas en être excepté,
— les proverbes contre les femmes sont plus nombreux
que ceux qui s'appliquent aux hommes, et qu'en général
ce n’est point précisément sous forme de compliments au
beau sexe qu'ils se présentent, ni par un excès de galan-
terie qu'ils se distinguent. La sagesse des nations aurait-elle
préféré, avec une unanimité si constante, la malice à la
vérité? — Aquélo bouto pèr, ce tonneau fuit. Pèrdre la visto,
lou sén, perdre la vue, le bon sens. À pérdu tout soun
san, il a perdu tout son sang. Qué pèr soun bé, pèr soun
546 PÉR
sén, qui perd sa fortune perd sa raison. On dit encore
comme variante : Qué pèr lou siou, pèr lou sén.
Pèrdre (Sé),v. S'égarer, ne plus retrouver son chemin,
disparaître, se ruiner. Au prop. et au fig. sé pèrdra én
cami, il s'égarera en route. — Pér un poun, Marti pérdéguè
soun ase, la réussite d'une affaire tient souvent à fort peu
de chose.
Pèrdu, do, adj. etpart. passé m. et f. Perdu, ue; qu'on
ne retrouve plus; ruiné; frappé mortellement; sans répu-
tation. — Sièi un home pérdu, je suis perdu, c'en est fait de
moi, s'écrie le pauvre diable qui se seat mourir où qui se
voit ruiné. Uno fio pérdudo, une fille trompée. L'avès
pérdudo, vous l'avez trompée, séduite, est un reproche
adressé à un libertin.
Pér-én-créire (Dé),.se dit d'une chose croyable, digne
de foi..— Acd's dé pér én créire, cela est croyable,, cela est
probable. Acd's pas dé pér én créire, cela n'est guère
croyable.
Péréso,s. . Paresse, indolence, nonchalance, fainéantise.
— Mé fai péréso, l'indolence me tient, me gagne : j'ai la
paresse de ne pas faire telle chose.
Pérésos, s. f. plur. (Cals, durillons aux pieds, aux
mains, aux genoux, etc.
Pérésoùs, 0, adj. Paresseux, indolent, nonchanlant,
fainéant.
Péréto, s. f. Dim. de Péro, petite poire. On donne aussi
ce nom au fruit de l’aubépine.
Pèréto, s. m. Dim. de Pèro. Terme enfantin qu'on peut
rendre en français par : mon bon petit papa. La seule
différence de l'accent sur la première syllabe des deux
mots, dont la configuration est la même, fait la différence
du sens et du genre, tant pour le primitif que pour le
dérivé, dans l'un et l’autre mot.
Pérfuma, ». Parfumer, purifier l'air avec des. odeurs,
faire des fumigations. C'est plus spécialement un terme de
magnanerie. Les parfums des plantes odoriférantes, telles
que le thym, la lavande et le romarin, celui, de la poudre
à canon et même du cuir brûlé, sont considérés comme un
excellent moyen pour corriger l'air vicié par les exhalaisons
mauvaises qui se développent dans nos chambrées. ILest
inutile de dire que c'est une pure illusion et qu'on ne fait
en cela que remplacer ‘une odeur mauvaise par une autre,
qui souvent ne l’est pas moins.
Pérfun, s. m. Parfum, odeur, senteur, traduit du français.
Dér. du lat. Per, à travers, et de Fumus, fumée.
Pérgami, s. m. Parchemin, peau de mouton préparée
pour écrire; titre de noblesse.
Le parchemin tire son nom de la ville de Pergame où il
aurait été inventé vers l'an 263 av. J.-C., dans le but de
suppléer au papyrus qui manquait. Dans ce cas, le terme
languedocien se rapprocherait plus que.le terme français
de la vraie étymologie. Le parchemin, a été presque exclu-
sivement employé au .moyen-âge pour transcrire les manus-
crits, les chartes et les actes. Aujourd’hui il n’est guère en
PÉR
usage que pour les titres importants : diplômes ou actes
diplomatiques. Faute d'emploi l'industrie a disparu et,
avec elle, le nom de pérgaminiè, parcheminier, qui n'est
plus de la langue usuelle.
Péri, v. Salir, gâter, tacher. — M'a péri tout moun
fanddou, il a sali, taché entièrement mon tablier. Sou
touto pérido, me voilà toute salie.
Péri, v. Périr, mourir de mort violente. — L'an fa
péri, on l'a tué. Occire, détruire. — Périra pas qué dé
mas mans, il ne mourra que de ma main.
Périduro, s. f. Salissure; c’est moins qu'une tâche, mais
ce n’est pas propre.
Dér. de Péri, v.
Périè, s. m. Poirier, arbre à fruits, Pyrus communis,
Linn. Le féminin périèiro est aussi usité et semble même
plus pur. — Mé brandusses coumo uno périéïro, tu me
secoues comme un poirier. Mé prénes pér uno périèira?
me prends-tù pour un poirier? dit-on à quelqu'un qui
vous secoue violemment, ou vous presse de questions
importunes, au propre ou an fig.
Dér. du lat. Pyrus.
Péri, s. m. Gésier, le second estomac des oiseaux, dans
lequel se trouvent souvent de petites pierres, ce qui lui a
valu son nom languedocien. Au.fig. et _ironiquement : sé
régala low périè, s'épanouir la rate.
Pérlé, s. m. Nom affectueux, calin, adressé à un ani-
mal et.surtout à un chien, à un porc. — Éngraïsso-té,
pérlé, aqui un aglan.
Pérlino, s. f. Praline, amande rissolée dans du sucre.
Trad. du français.
Pér-lou-mén, adv. Au moins, pour le moins.
Dér. du lat. Minùs, moins.
Pér-lou-ménûü, expr. adverbiale. Par le menu, en détail.
— Vols vous counta aqud pér-lou-ménx, je Veux vous
raconter cela en détail.
Pérlounga, v. Prolonger, continuer, étendre.
Dér. du fr. et du lat. Prolonger, prolongare.
Pérloungamén, s. m. Prolongement; durée.
Dér. du fr. Prolongement.
Pérména, v. Se promener, promener. Ce verbe s'emploie
très-bien activement en languedocien : Vôou pérména, je
vais me promener. Anas pérména lou drole, allez promener
l'enfant. On dit mieux passéja, sé passéja.
& Dér. du lat. Prominare, conduire, mener.
Pérménado, s. f. Promenade, action de se promener;
lieu où l’on se promène.
Trad. du français.
Pérmoi! Pérmoïnos! Pérmoiol interj. En vérité, cer-
tainement. Trois variantes d’affirmation fort usitées; sorte
de jurement, de formule très-ancienne comme le per Bacco!
par Bacchus ! des Italiens.
(#Son origine est-elle, comme le veut SAUVAGES, per Maïam,
par Maïa, mère de Mercure, ou simplement per me, !
fide? Dans ces deux cas, le juron remonterait au latin.
PÉR
Viendrait-il de pér Maho, pér Mahom, par Mahomet? C'est
à l'invasion sarrasine que le devrait alors la langue d'Oc. Les
deux étymologies datent de loin et peuvent être soutenues.
Pèro, s: m. Père. — Voy. Païre et Maïre.
L’as pas castia.coumo un pèro mais coumo un paire,
à dit le’poète Leyris dans sa comédie inédite : Lou Maou
vouGu, pour marquer la nuance qui existe aujourd'hui
entre lesens des deux mots pèro et païre, le premier pris
en bonne part et lé second en mauvaise part.
Pèro, s. m. Petit-père, tèrme caressant. Il a pour dim.
Pèréto, bon petit-père. L'accent tonique qui rend longue ou
brève la première syllabe et la dernière, fait la différence
du diminutif.
* Pérû ou Parû, s. m. Agneau, mouton bèlier.
Péro, s. f. Poire, fruit du poirier. Les variétés dé poires
sont nombreuses. Dans le long'catalogue des jardiniers, qui
s'augmente chaque jour, toutes n'ont pas un nom en lan-
guëdocien: Nous ne citerons donc pas toutes celles qu'on
cultive, mais au moins celles qui se distinguent par une
appellation propre.
Péro dé Sén-Jan, hâtiveau.
Péro d'éstiou, d'hivèr, poire d'été, d’hiver.
Péro muscadèlo, poire muscade. Elle tire son nom d'un
faible goût de musc.
Péro sucrdou où Sucrdou tont court, poire très-sucrée.
Péro (Manjo), s. m. Insecte; capricorne musqué, de
l'ordre des Coléoptères. C'est le Cerambyæ noir.
Péro (Manjo) ou Banar, s. m. Insecte; capricorne
musqué, Cerambyæ niger, Linn., genre de scarabée remar-
quable par ses antennes articulées, aussi longues que
son corps. Outre l'élégance de leurs formes, la vivacité de
leurs mouvements et souvent la richesse de leurs couleurs,
quelques espèces de capricornes se distinguent encore par
une odeur très-agréable, un peu musquée, recherchée par
les priseurs, qui conservent cêt insecte dans leur tabatière,
ou par le son strident qu'elles produisent lorsqu'elles
éprouvent quelque contrariété. Le plus grand de ces coléop-
tèrés, tout noir, et'qui a trois centimètres de longueur
environ, reçoit le nom de Manÿo-péro. Les poires que l'on
trouve a demi-rongées seraient, dit-on, sa pâture; mais il
pourrait bien’ se faire que l'on accust injustement le
capricorne des méfaits d’autres insectés voraces, du frèlon
ou Grdoule, par exemple. Plusieurs scarabées dé la même
famille déposent leurs œufs dans l'écorce rugueuse ou dans
les cavités dés vieux arbres; et la larve creuse des trous
profonds dans le tronc des gros chènes et leur cause beau-
coup de mal. Cuvier pense que c’est peut-être le Cossus des
anciens. En voyant le capricorne se poser sur des poiriers
pour y déposer ses œufs, on a pu mal juger de ses intentions.
Péroù, s. m. Pérou. C'est le mot français, que le lan:
guedocien a adopté dans le mème sens et dans cette seule
locution proverbialé : Aqud's pas lou Péroù, ce n'est pas
grand’chose,
PER 547
Pérpäou, s. m. Propos, discours, entretien. Il s'emploie
plus souvent au pluriel : pérpdous. — M'a téngu dé pér-
pdous ; il m'a tenu des propos; il m'a fait des propositions .
Cette façon de parler n'est pas toujours prise en bonne part.
Dér. du lat. Propositum.
Pérpäou (A), adv. A propos; convenablement au temps,
au lieu, aux personnes. — Vénès à pérpdou, vous tombez
bien. A pérpdou, disian..… À propos! nous-disions:., Nôus
disions donc. A pérpdou est pris aussi quelquefois
comme adjectif, dans le sens de convenable : Cé qué fus
aqui n'és pas à pérpdou, ce que tu fais là n’est pas convenable.
Pérpâoumai, adv. Pour un peu plus, traduction mot-à-
mot, sorte de phrase faite.
Pérpâouqué.. ade. Pour si peu que... pour peñ que.
— Pérpâou qué n'y-ague, pour si peu qu'il y en ait, qué
vous en donniez. Pérpdou qué lou végue, que je le voie
seulement.
Pérqu'aïiçaï, ado. Par ce côté-ci, par-ci. — Dans ce
mot et les suivants, le qu’ élidé devant la voyellé, ou le
qué, ne paraît que purement explétif et euphonique.
Pérqu'aiçamoun, adv. Par çà-haut.
Pérqu'aiçamoundâou, adv. augm,. Par çà-haut, mais
un peu plus haut.
Pérqu'aiçaval, ado. Par ici-bas; par là-bas. C'est une
nuance de pérqu'aval.
Pérqu'aïici, ado. Par-ci, çà et là; de fois à autre; vers
cet endroit-ci.
Pérqu’aïlaï, ado. Vers cet endroît-là.
Pérqu'ailamoun, adv. Par là-haut. Pérqu'aïlamoudéou,
adv. réduplic.
Pérqu'alin, ado. Par là-bas.
Pérqu'amoun, adv. Par là-haut et Pérqu'amounddo,
adv. réduplic. Vers là-haut, plus haut.
Pérquant, adv. Quant à cela: — Pérquant aqud,
quant à cela.
Pérqu'aqui, adv. Là, là, tout doucement. C'est le
pér aqui un peu adouti, dans ce sens. Mais adv. de lieu,
il signifie par-ci, par là; vers ct endroit-ci.
Pérqu'aval, ado. Par là-bas, plus loin.
Pérqué, conj. Pourquoi, pour quelle raison. — Sans
dire pérqué, sans dire pourquoi. — Interrog. Pérqué faire?
pourquoi faire cela ?
Pérqué (Lou), s. m. La raison, la cause, le motif. —
Démando pas lou pérqué, il ne demande pas la raison, le
pourquoi.
Dér. de l'ital. Perchè. En lat. Perqué.
Pérqu’in-amoun, et Pérqu'in-amoundäou, adv. Par
là-haut, vers là-haut, sans déterminer le lieu.
Pérsouno, s. f. Personne, un homme ou une femme.
Pr. indéf. Nul, qui que ce soit; quelqu'un. — Bèlo pérsouno,
grande femme. Pas pérsouno/ Holà ! quelqu'un.
Trad. du français.
Pértout, ado. Partout, en tous lieux. — Dé pértout, de
| tous côtés, de toutes parts. Dé pértout piquavo mièjour, dit
548 PÉR
quelqu'un qui a été assailli de toutes parts : les coups
pleuvaient de tous côtés ; les questions tombaient toutes à
la fois, de tous côtés. Mot à mot : J'entendais sonner midi
à toutes les horloges. Un pdou périout, un peu partout.
Saquo soun nas, sas mans, un pou pérlout, il fourre le
nez, les mains, un peu partout : c'est un curieux, écouteur
aux portes, fureteur.
Pértout (Passo), s. m. Passe-partout, clé commune à
plusieurs personnes, pour ouvrir une même porte.
Pér-travès, adv. En travers, de biais, de côté, à contre-
sens, transversalement.
Dér. du lat. Transversim. -
Péruino ou Pérésino, s. f. Poix-résine, résine.
Péruquiè, s. m. Perruquier, celui qui fait des perruques,
et, par extension, celui qui peigne, qui rase, qui coiffe.
Dér. de Péruquo.
Péruquo, s. f. Perruque, coiffure de faux cheveux; les
cheveux eux-mêmes. Au fig. réprimande. Dim. Péruquéto,
s. f., petite perruque, et péjor. Péruquasso, s. f., grosse et
laide perruque.
L'italien et le catalan ont aussi : Parruca et Perruca,
parruchino et perruqueta; parrucaccia el perrucassa.
L'histoire des perruques se perd dans la nuit des temps,
si, comme le prétendent les savants, les faux cheveux
étaient d'un usage général chez les Mèdes, les Perses et
autres peuples de la haute antiquité. Le mot perruque a du
reste une origine très-ancienne : il vient du grec dorique
rbpéryos, pour rf66s, fauve, jaune, parce que les premières
étaient en cheveux blonds. Les Romains en usèrent pour
cacher leur calvitie, les Romaines pour le même but, et
aussi pour se composer des coiffures très-ouvragées et très-
élégantes, qu’elles appelaient tutulus, corymbus, galerus,
galericulus. Cette mode ne fut guère introduite que sous les
empereurs, mais elle devint si générale, qu’il y a des bustes
en marbre de grands personnages, hommes ou femmes,
avec des perruques mobiles que l’on changeait probable-
ment suivant la mode, comme pour leur donner une
jeunesse perpétuelle, au moins du vivant des originaux.
Au moyen-àge les perruques étaient encore en usage et il
paraît que c'était un luxe, car les prédicateurs du XVe et
du XVIe siècle tonnèrent contre les perruques des femmes.
En France, la mode des perruques, pour les hommes,
commença à se répandre sous le règne de Louis XIII, vers
1630; on les appelait mowtonnes, parce qu'elles étaient
ordinairement faites en laine de mouton. Cette mode prit
une extension plus grande à l'avènement de Louis XIV, qui
portait, tout enfant, de longs cheveux bouclés, et dura
pendant tout ce règne. Au XVIII siècle, tout le monde
portait perruque, et il eùt été indécent à un homme bien
élevé de s'habiller sans cette chevelure d'emprunt, qui fut
adoptée même par la plus petite bourgeoisie. La poudre
était l'accompagnement obligé de cette coiffure. Pendant la
* Révolution et sous le Directoire, on imagina de porter les
cheveux plats sur les faces, et l'on appela cette mode
PÉS
oreilles de chien. Bonaparte, général, se coïffait ainsi.
Brissot, le premier, fit couper ses cheveux ras et les porta
dans leur couleur naturelle. Bonaparte adopta cette mode
et, avec lui, presque toute l’armée française. Aujourd'hui
la perruque chez les hommes n’est plus qu'une ressource
contre les rhumes de cerveau; mais l’artifice des faux
cheveux a été de nos jours plus que jamais remis en vogue
et en honneur parmi les femmes du grand et du demi-monde.
Pérus, s. m. Poire sauvage, poire d’étranguillon. —
Dans les environs d’Alais, le quartier dit de Pérusso, tire
son nom de quelque fameux poirier sauvage ou de la quan-
tité de ces arbres qui s’y trouvaient.
Dér. de Péro, du lat. Pyrus.
Pés, s. m. Poids; ce que pèse une chose; balance,
instrument de pesage, Au fig. pesanteur et de là : impor-
tance, considération. — Lou gran, lou gros pés, le côté
fort d’une romaine; lou pichd pés, le côté faible. Acd's un
home dé pés, c'est un homme d'importance. És uno résoù.
dé pés, c'est une considération importante, une raison
majeure. Siès pas dé pés, tu n’es pas de force.
Dér. du lat. Pensare, penso, peser.
Pès, s. f. Paix; tranquillité; concorde; calme; silence.
— Pès! interj. Paix-là ; silence.
Dér. du lat. Paæ, et trad. du français.
Pésa, v. Peser, juger de la pesanteur d'un objet avec
des poids; peser, accabler, fatiguer, être à charge. — Pésus-
mé dous sôous dé fourmo, pesez-moi pour deux sous de
fromage. Quan péso? quel est son poids? Moun soupa
mé péso, mon souper me fatigue. Vous pésara prou, il vous
sera assez à charge.
Dér. du lat. Pensare.
Pésado, s. f. Pesée, ce qu'on pèse, ce qui a été pesé en
une fois.
Dér. de Pésa.
Pésado, s. f. Trace, empreinte du pied, foulée. Il
s'emploie aussi pour : giron d’une marche d’escalier, sur
lequel porte le pied.
Dér. du lat. Pes, ou du grec Héa, pied.
Pésaire, s. m. Peseur public; celui qui pèse. —
L'invasion du français tend à introduire pésur, qui est
encore de plus mauvais aloi.
Pésaje, s. m. Action de peser; salaire du peseur. — La
grande industrie de notre pays, la récolte des cocons, a
introduit tous ces mots.
Dér. de Pés.
Pése, s. m. Pois, petits-pois, pois verts; Pisum, Linn.
Plante potagère de la famille des Légumineuses. — Pése
grouman où galavar, pois goulu, pois gourmand, sans
parchemin, ou pois-mange-tont. Pése-dé-séntoù, pois de
senteur, pois à fleur; gesse odorante, Lathyrus odoratus.
Sé pu rés noun véses, éstaquo t'as péses, faute de mieux,
contente-toi de pois.
Péséroù, s. m. Dim. du précédent, et proprement,
petits-pois.
ii
nt fl
PES
Pésièiro, s. f. Champ de pois; planche, table plantée
de pois.
Pésouié (Faïre), phr. fuite. C'est mot à mot : faire le
petit pou; ce qui signifie : vivoter, sous le rapport de la
fortuue ou de la santé; vivre pelitement, pauvrement, être
malingre, mener une existence précaire ; dans un commerce
ou au jeu, carolter, ne hasarder que peu, jouer mesquine-
ment, ne pas se lancer dans de grosses entreprises. —
L'explication donnée par SAUVAGES, qui remarque, du
reste, la difficulté de traduire ces dictons, ne paraît pas
être le véritable sens de cette phrase, telle au moins qu'elle
est aujourd’hui comprise et appliquée. Il ne's'agit pas en
effet, de vains efforts pour se venger ou pour témoigner
son dépit; l’idée que réveille le dim. familier pésowiè, ce
pauvre diable de parasite, vivant de peu, toujours caché et
toujours poursuivi, éveille platôt une idée de faiblesse,
de mesquinerie chétive, que de taquinerie insolente, quoique
vaine.
Pésouious, 0, adj. Pouilleux; qui a des poux; sujet
aux poux; tâché de pourriture.
- Dér. de Pésoul.
Pésoul, s. m. Pou, insecte du genre des Aptères;
vermine. — Lous pésouls lou manjou, les poux le dévorent,
la vermine le ronge. Lous pésouls l'acabou, m. sign. Tria
sous pésouls, s'épouiller, secouer ses poux, au prop. et au
fig. Més pas la man dou sé pér un pésoul, pour dire : ilne
se met pas en souci pour une vétille; il ne s'émeut pas
d’une bagatelle; et presque mot à mot : pour se mettre à
chercher un pou sur sa peau, encore faudrait-il que la
chose en valût la peine.
Étym. du lat. Pediculus, m. sign.
Pésoulino, s. f. Vermine; poux en général; race,
. engeance pouilleuse ; pucerons, insectes qui attaquent les
plantes, les arbres, la volaille.
Dér. de Pésoul.
Pésoul-révéngu, s.m. comp. Gueux revêtu, homme de
rien qu'un coup de fortune a rendu riche et qui prend des
airs insolents.
Formé de Pésoul et de révéngu. — Voy. c. m.
Pésqua, v. Pècher, prendre du poisson; retirer de l’eau;
repècher; faire eau ; s'imbiber; par extens. trouver, pren-
dre, découvrir. — Manda-lou pésqua, envoyez-le à la pêche,
cà-d. se promener. Pésqua lou féra, repècher un seau
tombé dans un puits. Én travéssan lou cardou, aï pésqua,
en traversant le ruisseau, je me suis mouillé. Moun souiè
pésquo, mon soulier laisse pénétrer l'eau. Ounté l'avès
pésqua? Où l'avez-vous pris, trouvé? Ounté vaï las pésqua?
Où va-t-il les chercher? «
Dér. de Pésquo et du lat. Piscari.
Pésquaire, s. m. Pêcheur; s'applique également à celui
“qui fait de la pêche sa profession ou son amusement.
Dér. du lat. Piscator, ou de Pésquo.
Pésquairôou, s. m. Alouette de mer, Pelidna platyrin-
cha, Linn. Oiseau de passage, de l'ordre des Échassiers et
PÉS 541
de la famille des Ténuirostres. — Le pésquaïréou est haut
monté sur jambes, et l'on dit volontiers d'un homme
ainsi conformé : À dé cambos dé pésquaïréou, où : sémblo
un pésquaïréou. ;
Dér. de Pésquo, ces oiseaux vivant de la pêche.
Pésquariè, s. f. Poissonnerie; lieu destiné à la vente du
poisson ; pêcherie, lieu propre à la pêche. Dans les anciens
titres et lo compois d'Alais de 4393, il est fait mention de
la Cariëïro dé la Péscariè ; elle partait de la Soubeirane,
après le couvent des Cordeliers, aujourd'hui le théâtre,
pour remonter vers les châteaux. Peut-être y avait-il là
une balle aux poissons, qui lui avait fait donner son nom,
ou plutôt prenait-elle sa dénomination d'un pésquiè, réser-
voir d’eau ou vivier, situé dans le jardin des seigneurs.
Pésquiè, s. m. Réservoir, vivier, bassin où l'on nourrit
le poisson.
Dér. de Pésquo.
Pésquo, s. f. Pèche; l'art, l'exercice ou l'action de
pêcher du poisson; le poisson que l'on a pris. — 4 fa
bono pésquo, il a pris beaucoup de poisson. Manda à la
pésquo ou à la pésquariè, envoyer un importun se prome-
ner.
Dér. du lat. Piscatura, formé de piscis.
Péssamén, s. m. Peine, chagrin, souci, inquiétude. —
Manquo pas dé péssamén, il n'est pas sans inquiétude.
N'avès pas gés dé péssamén, vous n'avez souci de rien.
Sès pus pér vioure, avès tro dé péssamén, vous n'êtes pas
ici-bas pour longtemps, vous avez trop de soucis. M'a tira
d'un bèl péssamén, il m'a tiré d'un grand embarras. Mé fai
péssamén dé parti, dé vous quita, je ne puis me décider à
partir, j'éprouve bien de la peine à vous quitter. Tout di
faï péssamén, tout le peine. Le proverbe dit : Cént éseus dé
péssamén pagou pas un déniè dé déoutes, le chagrin ne
suffit pas à payer la moindre dette.
Etym. du lat. Pensare, pensatum, penso, ou peut-êtrede
Pati, passus, patior.
Péssaméntoüs, 0, adj. Soucieux, qui a du souci;
préoccupé de soins.
Péssègre, s. m. Pèche de vigne, fruit du pêcher.
Dér. du lat. Persica; en ilal. Persica ; en port. Pessego ;
en cal. Presseg; en esp. Passega.
Pésségriè, s. m. Pôcher, Amydalus persica, Linn.,
arbre qui porte la pêche, de la famille des Rosacées, ori-
ginaire de la Perse.
Mème étym. que le subst. précédent.
Péssü, s. m. Pincée; la petite quantité qu'on peut prendre
d'une chose entre deux ou trois doigts. — Un péssà dé
sdou, une pincée de sel. Un péssù dé taba, une prise de
tabac. À més dos ounços dé grano et lou péssà, il élève un
peu plus de deux onces de graine de vers à soie, deux
onces plus une pincée supplémentaire.
Péssü, s. m. S'emploie aussi pour désigner quelque chose
de premier choix; la fleur d’une chose, la partie la plus
délicate et la plus recherchée. Ainsi : uno douméisèlo, uno
70
550 PÊT
fio dâou péssü, une demoiselle qui n’est pas du commun;
comme dirait le français : un beau brin de fille. Agud's
dâou péssè, ceci est du premier choix:
Péssuü, s. m. Pinçon; action de serrer la superficie de la
peau entre les doigts; marque qui reste lorsqu'on a été
pincé. Le même que Éspéssù. — Voy. c. m.
Péssuga, v. Pincer; serrer, presser la peau entre les
doigts, de manière à produire une marque; faire des
pinçons. Au fig. critiquer, railler, mordre. — Voy.
Éspéssuga.
Etym. du lat. Pellem sugere ou du grec Ilw, presser,
serrer.
Péstél, s. m. Pilon, instrument propre à piler dans un mor-
ter. Ilest synonyme avec Trissadoù, Trissoù. (Voy. c. m.)
On dit: Réde coumo un péstél, raide etdroit comme
un pieu.
Étym. du lat. Pislillum, dér. du grec Héssahos, pieu.
Péstél, s. m. Pène, partie mobile d'une serrure qui
entre dans Ja gàche; verrou. Dans le premier sens, syn.
de Pèile. — Voy. c. m.
Étym. du lat. Pessulus, dér. du grec Héocw, ficher,
planter.
Pésü, udo, adj. Pesant, lourd, qui pèse.
Dér. de Pés.
Pè-su-fièio, phr. faite. Trois mots de cabale, sorte de
formule de sorcellerie qu'on prète aux prétendus sorciers
qui fréquentent le sabbat. — Sauvaces l'explique très-
bien : « La route ordinaire pour se rendre au sabbat, dit-
il, est le tuyau de la cheminée. On met un pied sur la
crémaillère, comme sur un élrier, on prononce la formule
Pè-su-fitio, le sorcier disparait et tout est dit. »
La locution faïre pê-su-fièio tire de là son origine et
signifie par conséquent : disparaître à la manière des
sorciers; lever le pied, s'esquiver adroitement, furtivement.
Péta, v. Péter, faire un pet. Éclater, faire des éclats ;
claquer; casser; se rompre; se cassor. Au fig. crever,
mourir. En terme de jeu, faire la dévole. — Lous faviéous
fan péta, les haricots donnent des vents : c'est la ventosa
faba des Latins. Faire péla soun foué, faire claquer son
fouet, au prop. et au fig, prendre le verbe haut, faire
sonner haut son importance. Faïre péla sa noublèsso, se
targuer de sa noblesse, de sa condition. Faï péta las éfos,
il sacre, il jure :
Les F et les B voltigeaient sur son bec,
disait Gresset en parlant de Vert-Vert perverti. Fa
péta las méssorgos, C'est un impudent menteur. Aguélo
f'usto vèn dé péta, cette poutre vient de craquer, de se
rompre. La branquo vaï pêta, la branche va casser. Low
bos vèr dou fid péto, le bois vert éclate en brülant, Nous
fasiè péta dâou rire, il nous faisait mourir de rire. /Voy.
Éspéta.) A manqua y péta, il a failli crever. Né manjé à
péta, il en mangea à crever. Péla dou poun, échouer au
PÉT
port. C'est un peu aussi ce qui arriva à ce Martin qui,
pour un point, perdit son âne.
Dér. de Pé ou du lat. Pedere.
Pétaire (Lou), s. m. Le derrière, le fondement. Méto-
nymie hardie et familière,
Pétar, s. m. Mine, trou de mine, cavité que les carriers
et les mineurs pratiquent dans une roche pour la faire
sauter et la briser, en la chargeant de poudre.
Pétar, s. m. Mèche de fouet.
Pétarado, s. f. Pélarade, suite de pets; sauts que fait
un cheval en pétant; quantité de crotins qu'il lance. Au
fig. bruit qu’on fait avec la bouche, par imitation de pets
et par mépris pour quelqu'un.
Dér. de Pé et de Péta.
Pétarda, v. Faire jouer la mine, miner un rocher, le
percer pour y établir une mine,
Dér. de Pétar.
Pétardiè, s. m. Mineur, celui qui fait des mines.
Dér. de Pétar.
Pétarèlo, s. f. Larme de verre; goutte de matière vitri-
fiée en fusion, qui s’est échappée de la canne ou sarbaçane
trop chargée de l'ouvrier verrier, et refroidie en forme de
larme. La cassure de son fil la fait éclater avec bruit par
suite de la brusque invasion de l'air extérieur, ce qui lui
a valu son nom.
Dér. de Pé ou de Pétar.
Pétarino, s. /. Canonnière; jouet d'écolier. Le même
que Couloubrino. — Voy. ©. m.
Pétarufo, s. f. Fâcherie, bouderie, mauvaise humeur,
colère. — M'a fa préne la pétarufo, il m'a mis de
mauvaise humeur.
La signification que SAuvAGES attribue à Pétarofo, qui
est au fond le même mot, et qu'il traduit par : homme
sans conséquence, est tombée en désuétude.
Dér. de Pé et de Rufe.
Pétas, s. m. Dim. de Pétassoë. Pièce, petit morceau
d'étoffe quelconque pour rapiécer un vêtement, pour
panser une plaie. Au plur. Pétasses, pour dire : loques,
haillons, lambeaux de vieux linge usé.
Étym. de la bass. lat. Petacia.
Pétassa, v. Rapiécer, mettre des pièces; rapiéceter el
rapetasser; raccommoder. Au fig. remettre en bon état,
réparer, rajuster, arranger, rectifier, tâcher de justifier.
— Pélassa sas braïos, rapiécer son pantalon. Camiso touto
pélassado, chemise rapetassée. Pétassas-ou coumo voudrés,
arrangez cela comme vous l’entendrez. Argén pétasso pas
vilaniè, argent ne répare pas vilenie. :
Dér. de Pétas.
Pétassaire, ro, s. m. et adj. Ravaudeur, ravaudeuse,
celui ou celle qui fait métier de rapiécer; fripier, celui
qui vend ou achète les chiffons, par ext. Ne s'emploie
jamais au fig.
Dér. de Pétas.
Pétassaje, s. m. Rapiécetage, action de rapetasser; au
PÈT
prop. et au fig. — Aquô’s pas qué dé pétassage, ce n'est
que du rapiécetage, c'est un mauvais replàtrage.
Dér. de Pétas.
Pétassäou, s. m. Grand coup; coups redoublés. — Vus
véire aquéles pétassdous, tu vas voir quelle tripotée, Zou /
pétassdous sus sa fénno, En avant! coups de trique sur sa
femme.
Étym. du grec Ilatésow, frapper avec bruit, battre.
. Pétéja, v. frég. de Péta. Pétiller, craqueter, briller avec
éclat. Au fig. pétiller d’ardeur, d'impatience ; désirer vive-
ment; s'impatienter. — Zou ldouriè et l'amouriè pétéjou
dou fiè, le laurier et le mürier pétillent en brûlant. Lous
ièls das lous pétéjou, les yeux des loups brillent dans
l'obscurité. Mé fai pétéja, il m'impatiente. Pétéjo dé s'én
äna, il est impatient de partir. Pétéjavo dé l'avèdre, il
brülait d'envie de l'avoir.
Dér. de Pé.
Pétito, s. f. Poupée, jouet d'enfant, qui remonte à la
plus haute antiquité et dont on a trouvé des spécimens
chez les Grecs. Hroniq. jeune fille bien parée, bien
attifée.
Étym. du lat. Petilus, mince, grêle.
Péto, s. f. Crotte; crottin; ordure; fiente durcie et
arrondie de plusieurs animaux, tels que le cheval, la
brebis, la chèvre, le lapin, le lièvre, le rat, la souris, etc.
Au fig. par ext. métonym. de l'effet pour la cause : peur,
crainte. — Pétos dé magna, du crottin de ver à soie.
Sauvaces remarque qu'un bon ver à soie a toujours le
crottin dur au derrière. Quanto péto! Quelle peur! À tou-
jour la péto, il a toujours peur.
Dér. de Pé.
Péto-bas, s. m. Ironiq. petit homme court de jambes.
S. f. Terme de mépris, trousse-pète, bas-de-cul, petite
fille.
Pétofio, s. f. Médisance; commérage ; tracasseries, sor-
nettes; propos inutiles et médisants. — M'a fa ‘qui uno
pétofio que... il m'a fait là une tracasserie dont je me
souviendrai. Taïsa-vous, aquû soun dé pétofios, laisez-Vous
‘ donc, ce ne sont que sornettes, médisances, tripotages.
Péto-fré, s. m.Ironig. homme flegmatique, d'un froid
glacial, sans àme, d’une indifférence souvent composée.
Pétoufiè, s. m. et adj. Au fém. Pétoufièiro. Bavard;
médisant; rapporteur; brouillon; flagorneur; faiseur de
pétofio. C'est une nuance, peut-être un peu adoucie, du
Patrifassiè (Voy. c. m.), avec lequel il semble avoir quelque
rapport d'origine et d'étym.; mais il ne vaut pas mieux.
Pétoufiéja, v. Colporter des rapports indiscrets et médi-
sants contre quelqu'un; dauber sournoisement et mécham-
ment.
Pétoüs, o, adj. Péteux, terme de mépris. — Dé qué
vôou aquél pétoùs? que nous veut ce péteux, ce morveux?
L'an coucha coumo un pétoùs, on l'a mis dehors comme un
péteux.
Dér. de Pé.
PI 551
Pétuito, s. f. Pituite; humeur visqueuse, lymphatique
et visqueuse du corps humain.
Étym. du lat. Pituita.
Pi, s. m. Pin; arbre de haute futaie; Pinus pinea,
Lino. Arbre toujours vert, à feuilles persistantes, résineux,
conifère. Ses variétés sont nombreuses, et la plupart s'aceli-
matent facilement suivant les terrains. Dans les calcaires,
le pin d'Alep, le pin maritime, etc. ; dans les sols schisteux,
le pin sylvestre, le pin à pignon, le pin noir d'Autriche et
autres, se plaisent de préférence. Depuis quelques années
le reboisement de nos montagnes des Cévennes a été entre-
pris sur d'assez larges proportions : les Compagnies houil-
lères ont, les premières, donné l'exemple que plusieurs
propriétaires ont suivi, et l'administration des eaux et
forêts a établi un service de reboisement qai promet de
beaux résultats. Ce sera un grand bienfait dont les consé-
quences ne sauraient être trop bien appréciées, et déjà la
Compagnie de la Grand'Combe possède de vastes forèts de
pins dont la valeur se chiffre par millions de francs.
Îl n'existe pas, du reste, de meilleur moyen à employer
pour retenir les terres sur les pentes montagneuses, et pour
prévenir ces terribles inondations 1orrentielles qui, après
avoir raviné et excorié les montagnes, descendent sans
obstacles sur nos plaines en torrents impétueux, entrainant
les rochers et l'humus végétal.
Les États de Languedoc; par une sage prévoyance,
avaient prescrit des mesures sévères contre le déboisement
des montagnes; par malheur, ces règlements avaient été
trop mal observés. Mais si, de nos jours, les communes
qui peuvent s'assurer de bons revenus, si les propriétaires
de grands tènements se sont ravisés, et qu'ils continuent à
être encouragés et favorisés dans leurs plantations on semis,
il est permis d'espérer que le développement de ces cultures
forestières portera d'heureux fruits et que notre région tont
entière ne tardera pas à en ressentir les avantages. L'expé-
rience est faite, et l'on peut prévoir, dès à présent, quele
jour où Ja végétation, reconstiluée sur les versants des
montagnes, en aura consolidé la surface, où les cours d'eau
torrentueux y auront été dérivés, où tous lesanciens ravins
auront été obstrués, les vallées principales et les plaines
cultivées n'auront presque plus rien à redouter de la
violence des inondations.
A part ces améliorations générales, si désirables pour
notre agriculture du haut et du bas pays, la culture et
les plantations de pins peuvent encore être considérées
comme une autre source de richesses. La résine que produit
cet arbre pourrait sans doute être exploitée, mais la bonne
qualité de son bois, l'emploi qui en est fait dans nos
grandes industries minières, le font surtont rechercher et
le recommandent particulièrement.
Étym. du lat. Pinus, dér. probablement du celt. Pin;
en armor. Pin; Peinge, en langue erse; Pinwidden, arbre
pin, en gallois; Pinn, en anglo-saxon. Tous ces mots ont
peut-être leur radical primitif dans lecelt. Pen, montagne.
552 PIC
Pi, s. m. Pivert, oiseau au plumage vert, à tète rouge;
Picus viridis, Linn. Cet oiseau fait son nid dans le tronc
des vieux arbres qu'il creuse avec son bec; la femelle y
pond de quatre à cinq œufs verdâtres, tachetés de points
noirs. Les pics font leur nourriture principale d'insectes ;
et, pour faire sortir leur provende cachée sous l'écorce, ils
frappent les arbres à coups de bec redoublés, et allongent
démesurément leur langue : quand il la trouvent suffisam-
ment chargée d'insectes, il la rentrent et le repas est fait.
Le dicton : Maïgre coumo un pi, sec comme un pivert,
est-il une allusion à cette espèce d'oiseaux, qui n’ont pas la
renommée de beaucoup s'engraisser ? ‘
Le Pi-col-dé-sèr, s. m. Torcol, oiseau, variété du précé-
dent, dont il se distingue par son cou allongé et mobile,
qu'il peut tourner comme un serpent, ce qui lui a valu son
nom. Il se nourrit de fourmis en enfonçant aussi la langue
dans les trous des fourmilières. {Voy. Fourniguie.) Dans les
environs de Nimes cet oiseau porte le nom vulgaire de
Fourmiè et Tiro-léngo.
Dans plusieurs dialectes, on écrit et on prononce Pic;
de mème, le français écrivait Pic-vert. Notre idiome sup-
prime la lettre finale c; mais cette suppression, purement
euphonique, ne change rien à l’étymologie. Ces mots
dérivent tous du latin Picus, dont le radical pic indique
toujours une pointe, un dard, un instrument qui sert à
frapper, à piquer, et se trouve dans le bas-breton pik ou
pigel. C'est une onomatopée commune à bien des langues,
imitant le bruit que fait cet oiseau en frappant de son bec
les’arbres ou les pierres.
Pia, v. Piller; saccager; voler.
Piage, s. m. Pillage; dégât; désordre. — Din soun
oustâou, tout y-èro dou piage, dans sa maison, tout était au
pillage, ou tout était en désordre.
Étym., par la suppression de Z qui est mouillée et ne se
fait pas sentir, du lat. Pilare, ou du grec IAôw, fouler,
presser.
Piar, do, adj. Pillard; enclin à piller. Pris subst., il
signifie : gueux; mendiant; voleur.
L'étym. des mots précédents a peut-être concouru ici,
avec celle de péio, guenille, pour les former; ce dernier,
du moins, s'en rapproche beaucoup.
Piastro, s. /. Pièce de deux liards; un demi-sol ou deux
centimes et demi; monnaie de très-basse valeur, depuis
longtemps hors d'usage. — Vôou pas und piastro, il ne
vaut pas deux liards, pas une obole. T'én dounariëi pa ’no
piastro, je ne t'en donnerais pas deux diards. Celui
dont on parle ainsi, ou la chose que l’on estime à ce prix,
seraient encore trop payés tous deux.
En ital. Piastra.
Picarèl, s. m. Mendole, poisson; Sparus mana, Linn.,
de l’ordre des Holobranches et de la famille des Léiopomes.
On le pèche dans Ja Méditerranée ; sa chair est maigre et
coriace; on le vend sec, et sa salure très-prononcée, qui
pique fortement la langue, lui a fait donner son nom.
PIÈ
Picata, do, adj. Tächeté, tiqueté.
Rad. Pic, pointe.
Pichéténé, to, adj. double dim. Très-petit; le plus
petit; très-mignon.
Dér. de Picho,
Pichô, oto, s. et adj. Petit enfant ; enfant nouvellement
né, pris subst. Petit; qui a peu d'étendue ou de volume,
pris adj. — Avès aqui un brave pichd, vous avez là un
charmant enfant. La bravo pichoto! la gentille petite fille!
Aquél capèl t'és tro pichè, ce chapeau est trod petit pour
toi. Pich faï et bé ia; ce qui répond à : qui trop embrasse
mal étreint. Pichoto plèjo d'abriou faï bèlo ségado d'éstiou,
petite pluie de printemps promet grande moisson d'été.
En v. fr. on disait Petiot. En ital. Piccolo, en port.
Pequeno. Étym. du celt. Pichon, d'où aussi le lat. Petilus.
Pichô-fil, s. m. Petit-fils, fils du fils ou de la fille.
Pichô-t-home (Lou), s. m. Le petit homme, envie de
dormir. — Lou pich-t-home l’arapo, dit-on aux enfants
qui, les yeux gros de sommeil, voudraient s'endormir
avant l'heure. On leur fait croire que c’est un petit homme
qui jette du sable dans leurs yeux, ou qui pose les pieds
dessus pour les fermer.
Pichougnè, s. m. Pigeonnier; lieu où l'on élève des
pigeons. Le même que Pijouniè. — Voy. €. m.
Pichoulino, s./. Olives confites à la saumure; très-
petite olive.
Dér. de Picho, et du lat. Oliva.
Pichoun, s. m. Pigeon; Columba, Linu., oiseau de
l'ordre des Galliiacés. On en distingue plusieurs espèces
et un grand norûbre de variétés qui toutes n'ont pas un
nom languedocien.
Pichouté, to, s. et adj. Dim. de Pichè. Trés-petit
garçon; très-petite fille. Adj., très-petit, bien moindre,
L'augm. Pichoutas, asso, signifie un grand garçon, gros
et jouflu ; une jeune dondon grasse et fraiche.
Dér. de Pichà.
Picopouiè, s. m”. Micocoulier. Le même que Bélicouquiè,
et Fanabrégou. — Voy. ©. m.
Picopoulo, s. f. Espèce de raisin blanc ou noir, à petits
grains. On l’a francisé en pique-poule, comme on devrait
faire de bien d'autres termes languedociens.
Picourèlo, s. f. — Voy. Bufadel.
Piè,s. m, et n. pr. Pic; colline; montagne. Le nom
propre est rendu en français par Puech, qui a passé aussi
dans quelques désignations de lieux. — Lou Piè dé Sén-Lou,
le pic de Saint-Loup, montagne située dans l'Hérault. Low
Piè dé Céndras, le Puech de Cendras, dans le canton
d'Alais, sur lequel est bâtie l'église de Cendras, près d'ane
ancienne tour isolée. Lou Piè das fabres, le Puech des
fabres, nom ancien que nos Compois donnent à la colline
où se trouvent des fours à chaux, sur la rive droite du
Gardon, en face du quai neuf d'Alais. Là devaient se trou-
ver jadis les industries des forgerons, maréchaux et
taillandiers, fabres; ou peut-être la dénomination venait-
PIÈ
elle du voisinage des fabreries moyennes et hautes, deux
-rues du vieil Alais, séparées de ce monticule par le seul lit
de la rivière, avant l'existence du quai.
Le mot Piè esl aussi entré dans la formation de plusieurs
noms propres, avec quelques variantes imposées par l'eu-
phonie; ainsi Pièlon, Pièchégü, Piéredoun, Pièchäou, que
le français a traduits par Puechlong, Puechegut (le mème
que Montaigu et Rochegude), Puechredon, Péchaud. Pujol,
Poujoulat doivent avoir le mème radical.
- Étym. du lat. Podium.
Piè, s. m. Pied de roi ou de Paris, mesure de longueur
composée de douze pouces et qui forme la sixième partie
de la toise; elle équivaut à 032484. Le pied était une
mesure de longueur, en usage chez la plupart des peuples
anciens et modernes, mais avec des dimensions très-dissem-
blables, variant entre 0m247, longueur du pied Delphique
ou Pythique, et 0"5136 qui représente le pied employé
dans le Piémont. Il résulte des travaux de M. Aurès, que
le pied gaulois doit être évalué à 03248 et le pied romain
à 0M2963. Le pied gaulois serait donc le même que le pied
dé roi ou de Paris, qui fut en usage en France jusqu'à
l'introduction du système métrique. Le savant archéologue
que nous venons de citer a déduit de la longueur du pied
gaulois celle de la liene gauloise, laquelle étant composée
de 4500 pas de 5 pieds, soit 7500 pieds gaulois, présentait
un développement de 2346 mêtres. Quant au pas romain,
comprenant aussi 5 pieds romains, il équivalait à 4m4845,
d'où le mille romain, composé de mille pas, présentait un
développement de 4484m50; et la lieue romaine, composée
de 4500 pas ou 7500 pieds romains, possédait une longueur
de 2222 mètres, qui représente très-exactement la moitié
de la lieue commune de France, de 25 au degré, dont la
longueur est de 444% mères,
Emprunté du français.
Pièché, s. m. Dim. de Pie, pic, soit comme subst., soit
comme n. pr. Petite éminence, petite élévation, ou fils
de Puech.
Pièço, s. . Champ; vigne; pièce de terre. — És ana
faire un tour à sa piègo, il est allé visiter sa vigne, son
champ. Pièço dé sère, cé qué porto ou vèn quère, terre de
côteau, dit ce proverbe, coùte autant que ce qu’elle rapporte.
Étym. de la bass. lat. Piecia, m. sign.
Pièï, s. m. Pis, tétine d'animal, plus particulièrement
des vaches, chèvres ou brebis.
Pièi, adv. de temps. Puis: ensuite ; après; tantôt. — Ou
farén piëï, nous ferons cela tantôt. Ou vétrén pièr, nous le
verrons ensuite. Pièi y-anaraï, puis, j'irai. Et pièi? et
après? Pièi qué, tandis que, puisque. Pièi quém'én souvène,
tandis que je me le rappelle. Pièï qué di Pr puisque,
tandis que nous y sommes.
Étym. du grec ’Exel, m. sign.
Pièi (Lou), n. pr. Le Puy, ville, chef-lieu de la Haute-
Étym. du lat. Podium.
PIG 553
Pièlo, s. f. Auge où l'on abreuve les bestiaux ; lavoir.
IL est synon. de Piso.
Étym. du grec léehos, baignoire, bassin.
Pière, n. prop. d'homme. Dim. Piéré, Pièroë, Piéroto,
au fém. Pitrélo; augm. Pièras. Pierre; dim. Pierrot,
Pierrette; augm. Gros-Pierre.
Étym. du lat. Petrus et Petruneulus.
Piéta, s. f. Pitié, compassion. — Aqud faï piéta, c'est
à faire pitié.
Dér, du lat. Pietas.
Piétadoüs, ouso, adj. Compatissant, miséricordieux,
tendre; sensible au malheur des anis.
Dér. de Piéta.
Piètre, adj. Piètre, chétif, mesquin. — Piitro mino,
pauvre figure, mine chétive,
Traduction du français.
Pifra, v. Jouer du fifre, du flageolet. — Sé siès pas
countén, pifro, si tu n'es pas satisfait, si cela ne te va pas,
prends un fifre,
Pifraire, s. m. Joueur de fifre.
Pifre, s. m. Fifre, flageolet à son très-aigu. On dit au
fig. : Touqua ou jouga ddou pifre, pour ronger son frein,
croquer le marmot.
Pigasso, s. f. Houe, instrument d'agriculture et de
labour. Son fer a la forme d'un carré long, large vers son
extrémité et qui se recourbe vers le manche.
Étym. de Pi, avec l’augm. asso. En bas-br, Pighel.
Pigna, ado, adj. Bien garni ; bien arrangé; proprement
taillé. Se dit surtont en terme de magnanerie : Dé fouséls
bièn pignas, des rameaux bien garnis de cocons; dé brus
bièn pignas, des bruyères bien garnies. Un doubre bièn
pigna, un arbre bien taillé.
Dér. de Pigno, pomme de pin, par une comparaison
avec la disposition des écailles,
Pignastre, tro, adj. Têtu, entêté; opiniâtre. — Vdow
mai èstre sot qué pignastre, ce qui signifie : mieux vaut
paraître un sot et céder, que’ s'obstiner dans son opinion,
sa volonté, son avis. Un observateur a remarqué que
l'opiniâtreté est une qualité on plutôt un défaut habituel
aux bêtes, aux sots et aux enfants.
Pignastrije, s. m. Opiniâtreté, entêtement déraison-
nable et stupide, < marque d'un petit esprit, » dit
SAUVAGES.
Pigno, s. f. Pomme de pin d'Italie, qui renferme sous
ses écailles des pignons, sortes d'amandes que la maturité
fait détacher. Le gros pinson appelé bec-croisé se nourrit
de ces amandes. On dit d'an avare on d'un cuistre : És sara
coumo uno pigno vèrdo.
Pignoun, s. m. L'amande ou semence du pin d'Italie
contenue dans la pomme de pin.
Pigoto, s. f. La petite vérole. La clavelée des bestiaux.
— Adiôussias, ténès-vous cdou et sara, qué la pigolo vous
sourtira, se dit ironiquement à des voyageurs qui, par un
grand froid, se mettent en route sur un véhicule non fermé.
554 PIN
Pigouta, do, adj. m. et f. Marqué on gravé de la petite
vérole. On dit aussi gréla. — És tout gréla, il est tout
grêlé, tout marqué de la petite vérole.
Pigoutoùs, so, adj. m. et f. Malade attaqué de la
petite vérole.
Pigre, adj. m. Paresseux.
Dér. du lat. Piger.
Pigrije, s. m. Paresse.
Pijougnè. s. m. Un colombier, un pigeonnier.
Dér. de Pijoun. — Voy. C. m.
Pijoun, s. m. Pigeon {Columba), le pigeon domestique.
Pilo, s. f. La pile d'un pont. |
Dér. du français. ,
Pilô, s. m. Une pile, un tas, un petit tas.
Pilouta, v. Planter des pilotis pour établir un ouvrage
en maçonnerie dans l'eau ou sur un lerrain exposé aux
affouillements.
Pimpa (Sé), v. S'attifer.
Pimpa, do, adj. m. et f. Attifé, vêtu avec recherche.
— Aquélo fénno és bé pimpado, cette femme est bien
aitifée.
Pimpanèlo, s. f. Pimprenelle, Sanguisorba officinalis,
Linn., où Fraïssinéto. (Voy. c. m.) On l'appelle aussi
Pimparèlo. — La grando pimpanèlo, la pivoine. Pœonia
officinalis, Linn.
Pimpouna, v. Pomponner, dorlotter, être aux petits
soins.
Pimpourla, v. Soigner quelqu'un avec excès, le combler
d'attentions exagérées. — Sé pimpourla, se dorlotier,
soigner sa santé avec exagération.
Pinchoù (Faïre). Épier et se montrer à la dérobée;
guetter, montrer le nez, se montrer en partie et se cacher
alternativement. — Pinchoë-babdou. — Voy. Babâou.
Pinédo, s. f. Terrain planté de pins, bois on forêt de
pins.
Dér. de Pi, pin.
Pino, s. m. Terme sous lequel on désigne le vin en
plaisantant. — Aï dé bon pin, j'ai du bon vin.
Pin-pan! interj. Pif-paf! Onomatopée inventée pour
exprimer l'action de frapper à coups répétés et précipités,
afin de donner au discours plus de rapidité et d'énergie.
— Li baïlè dous souflés, pin-pan ! il lui ficha deux soufilets,
pif-pafl
Pinta, ». Pinter, chopiner, boire avec excès, s’enivrer.
Pintardo, s. f. Pintade commune, Numida meleagris,
Linn., oiseau de basse-cour. — Bataïa coumo dé pintardos,
jacasser, caqueter, bavarder; se dit des femmes.
Pinto, s. f. La pinte d'Alais, dit SAUVAGES, pesant
environ quatre livres poids de table, vaut un litre neuf
décil., et répond à la quarte ou au pot de Paris de même
poids, où qui contient deux pintes, mesure de Paris, où
quatre livres poids de mare, ce qui fait entre ces deux
mesures une pelite différence.
Pintra, »v. Action de peindre; faire de la peinture.
PIQ
Pintre, s. m. Peintre, celui qui se livre à l'art de la
peinture. +
Pistruro, s. f. Peinture, tableau. — Acô's uno bèlo
Pintruro, voilà un beau tableau. La pintruro d'uno porto,
d'uno fénèstro, la peinture d’une porte, d'une fenètre.
Pio. Onomatopée du piaulement du dindon, dont on a
fait son nom et qui, féminisée, est devenue Pioto, nom de la
dinde. — Préné la pioto, s'enivrer.
Piolo, s. f. Une hache, une cognée. On dit aussi
Déstréou. (Voy. €. M.) — Planta la piolo, faire un marché
usuraire, hors de proportion avec la valeur de l'objet vendu.
Piolo bouscardiètro, hache de bücheron. Piolo-dé-man,
hache de menuisier.
Pio-pio (A la), s'applique à la manière de donner
certaines choses telles que dragées, pièces de monnaie que
l'on jette aux enfants sur la voie publique et dont chacun
tâche d’avoir la plus grosse part. — Aquél oustäou és à la
pio-pio, c'est une maison livrée au pillage, d'où chacan
emporte le plus qu'il peut.
Pioto, s. f. La femelle du dindon. — Voy. Pio.
Piou-piou! Onomatopée du cri des poussins. Pi! Pi! en
français. — Piou-piou toujour viou, Celui qui geint et se
plaint de sa santé vit toujours. Petit bonhomme vit encore.
Faï toujour piou-ptou, il se plaint, il se lamente, il geint
sans cesse; il a toujours quelque chose qui cloche.
Piouta, v. Piauler, pépier. Les poules d'Inde piaulent;
les poussins et les moineaux pépient. Au fig. piouta, crier,
criailler, chamailler, geindre. En parlant de quelqu'un qui
se plaint toujours de quelque infirmité, on dit : toujour
piouto, il ne fait que geindre.
Pioutaïre, s. m. Celui qui criaille et se plaint tou-
jours.
Pipa, v. Fumer du tabac, fumer la pipe surtout. On dit
aussi fuma, mais ce terme est dérivé du français.
Pipado, s. f. Une bouffée, une gorgée de fumée de tabac,
chassée par le fumeur qui fume la pipe.
Pipaire, s. m. Fumeur.
Pipi, s. m. Terme de nourrice employé aussi en français
en parlant aux enfants. Action de pisser. — Faï toun pipi,
fais ton pipi.
Pipo, s. /. Pipe servant à fumer du tabac. — Vôou pas
uno pipo dé taba, il ne vaut pas une pipe, il ne vaut pas
cher.
Piqua, v. Frapper, heurter. — Qudou piquo? Qui va là?
Qui frappe à la porte? Lou piqua dé la daïo, action
d'affuter le tranchant d’une faux, opération difficile, d'où
l'on dit au fig. en présence d'une difficulté : Acd’s lou
piqua dé la daïo, c'est ici que commence la difficulté,
l'embarras.
Piquasoù, s. f. Picotement, prurit, démangeaison occa-
sionnée sous Ja peau par l’acreté des humeurs ou la mal-
propreté du corps. — Voy. Prusije.
Piquatièiro, s. f. Cavité pratiquée dans un bloc de
pierre et dans laquelle on introduit an coin en fer, pour la
PIS
partager en plusieurs pièces, en frappant sur le coin avec
une masse de fer appelée bouro.
Piqué, s. m. Le piquet, jeu de cartes, que l'on joue
à deux ordinairement. Piqué-voulur, jeu de piquet qu'on
joue à trois. — Jamaï lou piqué és pa'ntra din la tèsto
d'un ase, le piquet n'est jamais entré dans la tète d'un âne,
pour dire que le piquet est un jeu difficile.
Piquélé, éto, adj. m. Pelit, petiot, malingre. Se dit
d'un enfant mignon, de petite taille, par rapport à son âge.
On dit aussi péquélé, éto.
Piquét, s. m. Piquet, morceau de bois aiguisé par un
bout et pouvant être enfoncé dans le sol.
Piquétado, s. f. Rangée de piquets plantés au bord d’une
rivière pour soutenir des fascines et servir de défense
eontre les affouillements, les envahissements d'un cours
d’eau. Se dit aussi d'une clôture fixe en bois.
Piquo, s. f. Pic de mineur, de terrassier.
Piquo, s. . Pique, une des quatre couleurs d'un jeu de
cartes.
Piquo, s. f. Brouillerie, animosité. — Y vai dé piquo,
il'agit avec passion, avec animosité.
Piquoni, s. m. Pique-nique, repas où chaque convive
paie son écot. De l'anglais Pick-an-each, littér. où chacun
est piqué, où chacun paie.
Piquo-poulo, s. f. Nom lang. du fruit du micocoulier.
Sorte de raisin à petits grains noirs ou blancs.
Piquou, s. m. Instrument de mineur ou de carrier,
-pointu et acéré.
Pire, adv. Très, beaucoup, infiniment. — És pire qué
pouli, il est très-joli. És pire qué brave, il est honnète au-
dessus de toute expression.
Pis, s. m. L'urine; le pis de la vache, de la chèvre,
de la brebis.
Pisa, v. Décortiquer les châtaignes, les dépouiller de leur
écorce. Se dit aussi par extension de quelques légumes secs.
Dér. du lat. Pinsus, broyer, piler.
Pisado, s. f. Époque de l’année affectée au décortiquage
des châtaignes, qui s'étend environ de fin novembre au
milieu de décembre. — Véndrén pér pisado, nous vien-
drons à l'époque du dépiquage des châtaignes. Pisado se
dit aussi pour désigner la quantité de châtaignes sèches
que lon peut décortiquer en une seule fois, en une seule
opération.
Pisadoù (Sa), s. m. Sac en forte toile écrue, ouvert
par les deux bouts et qui contient la quantité de châtaignes
composant une pisado. — Voy. ©. m.
On mouille fréquemment ce sac pendant l'opération du
dépiquage, qui a lieu sur le sou-pisadoù. — Voy. c. m.
ci-après.
Pisadou (Sou), s. m. Billot en bois de chène ou le plus
souvent de châtaignier sur lequel on frappe les chätaignes
sèches pour les dépouiller de leur écorce.
Pisaïire, s. m. Ouvrier employé au dépiquage des
châtaignes.
PiT
Piscu, part. pass. du verbe Poudre, pouvoir. — Aï pas
piscu véni, je n'ai pas pu venir.
Piso, s. f. Auge de pierre, placée près d'un puits, d'une
fontaine, auge à abreuver; auge à huile.
Dér. du grec Iécaos, baignoire, bassin à laver les pieds.
Pissa, v. Pisser, uriner; jaillir, — Lou san pisso, le
sang jaillit, quand on pique la veine. À pissa vérgougno,
il a bu toute honte. Laïssas pissa lou béstidou, laissez
pisser le mouton, c.-à-d. prenez patience.
Pissadoù, s. m. Pot-de-chambre, vase de nuit, pissoir
public ou privé.
Pissagno, s. f. Urine, pissât. — Aï pissagno, j'ai besoin
d'uriner.
Pissaïre, arèlo, s. m. et f. Pisseur, pisseuse. Terme de
dédain ou de mépris à l'égard d'un individu qui fait
l'unportant et se mèle de ce qui ne le regarde pas. —
Achas, aquél pissaïre dé qué s6 mèlo! Voyez un peu de quoi
se mêle ce faquin!
Pissarado, s. f. Grande quantité d'urine rendue en une
fois; tache ou marque d'urine sur le drap de dessous
lorsque quelqu'un a pissé au lit.
Pisso-can, s. m. — Voy. Amouréléto.
Pisso-fré, s. m. Se dit d'une personne à tempérament
froid et lymphatique; d'un cacochyme.
Pissogo ou Pissago, appelé aussi Massaparén, s. m.
Potiron rouge, champignon vénéneux.
Pisso-iè, s. m. Pissenlit, liondent, Leontodon protei-
formis, Linn., plante de la famille des Composées.
Pisso-paio, s. m. Crible à larges mailles. — Voy.
Cruvil.
Pisso-rato, s. f. Chauve-souris.
Pissourlé, s. m. La pissotte d'un cuvier à lessive; un
petit jet, un filet de liqueur; une pissotière.
Pissourléja, v. Pissoter; se dit aussi d'une fontaine qui
ne donne qu’un mince filet d’eau.
Pissourliè, s. m. — Voy. Pisso-ié.
Pissoüs, ouso, adj. m. et f. Mouillé par le pis, qui a
l'odeur du pis. Se dit d’un enfant qui sent le pisst,
Pistoulé, s. m. Pistolet, arme à feu à canon court, que
l'on tire d'une seule. main. Dim. de pistole, qui, au
XVIe siècle, désignait une carabine. Au fig. un homme de
rien. — És un triste pistoulé, c'est un vaurien.
Henri Estienne dit qu'on fabriquait autrefois à Pistoie
de petits poignards appelés Pistoyers, et que ce nom fut
ensuite appliqué à toutes sortes d'armes de petite dimen-
sion.
Pitança, v. User d'une chose avec ménagement, ne
prendre, n'employer une chose quelconque qu'avec écono-
mie frisant même la parcimonie. Manger dans un repas,
proportionnellement aux mets qui sont servis, une quan-
tité de pain plus considérable, de façon à ménager les mets
et à ne les employer que comme véhicules pour aider à
absorber le pain. Dans ce dernier sens on dit aussi :
Coumpanéja. — Coumpanéjo-té, dit la mère à son jeune
309
596 PLA
enfant qui, par friandise, est porté à substituer le mets au
pain.
Pitançaïre, s. m. Celui qui ménage les mets pour se
nourrir de pain de préférence et en plus grande propor-
tion.
Pitanciè, s. m. Pitancier, office du religieux chargé
dans une communauté de distribuer la pitance, e.-à-d, la
quantité de pain, de vin et de viande ou de légumes qui
revient à chacun.
Pitanço, s. f. Pitance. Ce mot se dit pour toute sorte de
mets qu'on à coutume de manger avec du pain. Il n’a pas
la même signification en français, où le mot pitance désigne
la portion de pain, de vin et de mets qu'on donne à chaque
repas dans les communautés. — Manjo soun pan san
pilango, il mange son pain sec. À dé pan, dé vi et dé
pitanço, il a du pain, du vin et de la viande on autres
mets. De la bass. lat. Pictansia où portion monastique de
la valeur d'une picte ou pitte, monnaie des comtes de
Poitiers, Pictaventium, qui valait le quart d’un denier.
Pitre, s. m. La poitrine de l’homme, le poitrail des
bestiaux.
Dér. du lat. Pectus, pectoris.
Pivèr, s. m. Pic-vert. Picus vwiridis, Temm., oiseau
dont tout le dessus de la tête, l’occiput et les moustaches
sont d'un rouge brillant; le dessus du corps d’un beau
vert, le dessous blanc jaunâtre et le croupion d’un jaune
verdätre. Il a environ 0,35 cent. de long. Les pics-verts
ne sont pas rares dans nos contrées, où ils vivent séden-
taires;' d’autres espèces y apparaissent aussi et, comme
elles n'ont point cette couleur qui caractérise le premier,
elles ne devraient recevoir que le nom générique de Pi;
mais l'espèce la plus commune l'a emporté et le nom de
Pivèr est ordinairement donné à toute la famille, sans
faire grâce de l’épithète, qui parfois s'applique assez mal.
Pivou, pivolo, s. m. et f. Peuplier, Populus nigra et
populus alba, Linn., qui sont les deux. espèces indigènes.
On applique aussi ce nom au peuplier d'Italie (Populus
fastigiata, Poiret), qui a la feuille du peuplier noir et le bois
du peuplier blanc.
Dèér. de Populus, nom lat. de ces arbres.
Pivoulado, s. m. Champignons de souche qui viennent
au pied des peupliers.
Pla, s. m. Plat, ustensile de ménage sur lequel on pré-
sente les mets à table. — Métre la man dou pla, mettre
la main au plat.
Platé, dim. de plat. — D'iôou dou platé, des œufs au
plat.
Plataras, augm. de plat. — Nous an douna un plataras
dé soupo, on nous a donné une gamelle de soupe.
Pla, ato, adj. m. et f. Plat, plate. — És pla coumo uno
Pénnaïso, il est plat comme une punaise.
Plaça, v. Placer, mettre quelque chose en Me + donner
une place, une position à quelqu'un. — És bé di ila
ane place, une bonne position.
PLA
Placar, s. m. Armoire pratiquée dans l'épaisseur d’un
mur.
Placiè, s. m. Coureur de places, désœuvré; mais ce mot
s'applique surtout à un commissionnaire, à celui dont le
métier consiste à placer les marchandises, et au fermier
des places du marché d'une ville.
Placioù, s. m. Petit emplacement où l'on peut cons-
truire.
Placéto, s. f. Petite place; dim. de Plaço. ({ Voy. c. m:)
Palier situé au sommet d’un escalier extérieur, au devant
d'une maison et quelquefois recouvert d’une toiture:
Plaço, s. f. Place, lieu ou espace que peut occuper une
personne où une chose; lieu public découvert, situé dans
l'intérieur d’une ville ou d'un village et ordinairement
entouré de bâtiments, soit pour l’embellissement d'une
ville, soit pour la facilité du commerce et l'étalage des
marchandises et des denrées ; rang, emploi.
Dér. du lat. Platea.
Plagne, v. Plaindre, regretter, épargner sa peine, ses
dépenses. — Aquél péoure home és bé dé plagne, ce pauvre
homme est bien à plaindre. Plagne bé lou pâoure mort, je
regrette bien le pauvre défunt. Plun lou béoure à sous
varlés, il lésine sur le vin qu'il doit livrer à ses domes-
tiques.
Dér. du lat. Plangere.
Plagnén, énto, s. mm. et f. Plaignant, plaignante; celni
qui se plaint, qui porte plainte.
Plago, s. f. Plaie, blessure. Au fig. préjudice, dommage.
— Plago d'argén és par mourtèlo, perte d'argent n'est pas
une plaie mortelle.
Plaïdéja, ». Plaider. Au fig. hésiter avant de prendre
une détermination. — Dé qué plaïdéjes? pourquoi hésites-
ta? On dit proverbalement : Quéou plaïidéjo, maldoutéjo;
tout ço qué manjo y'amaréjo, celui qui plaide est toujours
maladif, et tout ce qu'il mange lui parait amer. On dit
vulgairement d'un homme atteint d'une maladie désespérée :
Plaïdéjo, 1 plaide, il est entre la vie et la mort.
Plaïdéjaire, arèlo, s. #”. et f. Plaideur, plaïdeuse,
celui qui aime à plaider, qui plaide souvent. — Un plaï-
déjaïre és un mari vési, un plaideur est un mauvais
voisin.
Plan, s. m. Plan, projet, décision arrêtée. On ditau
fig. : Auès un famos plan! vous avez un fier aplomb!
un flegme étonnant! Tiro dé plan, se dit de celui qu'on
appelle valgairement un batteur de pavés, un paresseux.
Plan, s. m. Plant: jeune arbre, jeune plante, bout à
planter ou nouvellement planté, rejeton que l'on enlève à
un arbre pour le replanter. — Dé bon plan, planto ta
vigno; dé bon san, marido ta fio; de bons plants FE ta
vigne, d'un sang pur marie ta fille.
Plan, adj. m. Plain, uni. — Plan coumo la man, uni
comme une glace.
Plan, «dv. Doncement, posément, lentement. — Plan-
plan! tout doux, tout beau. Asén plan, acampén bé,
PLA
agissons avee mesure et faisons notre profit, Qudon vaï
plan, vaï san, celui qui agit avec prudence évite bien des
mécomptes, Plan dâou lé qué jougan cinq sdous! Ne tou-
chez pas au cochonnet, nous jonons cinq sous! dieton
proserbial employé facétieusement par les joueurs de
boules.
Planas, asso, s. m. el f. Grande et large plaine;
augmentatif de plan; de même que plané, plagnôou, petite
plaine, en est le diminutif.
Planchar, s. m. Grosse planche épaisse, madrier,
Dér. de Pluncho, dont il est un augmentatif.
Planchè, s. m,. Plancher, assemblage de poutres, de
solives et de planches qui sépare deux étages consécutifs
d’une maison.
Planchéira, ». Plancheyer, parqueter.
Planéja, v. Se dit d’une région située en plaine, très-
peu accidentée,
Plano, s. f. Plaine; poisson de mer appelé plie en fran-
çais ; outil de tourneur et de tonnelier.
.Plan-paousè, s. comp. m, Homme indolent, flegmatique,
sans initiative,
Plan-piè, «dv, Plain-pied. — Aquéles mémbres soun dé
plan-piè, ces pièces sont de plain-pied.
Planquéto, s. f. Une chaufferette ; une petite planche.
Planquo, s. f. Passerelle jetée sur un ruisseau et çons-
truite avec des planches.
Plansoü, s. ». Plançon, jeune plant d'arbre ou d'autre
plante; un poteau.
Plansouïiè, s. m. — Voy. Plantouïe.
Planta, s. m. Gerbes dressées côte-à-côte sur l'aire, les
épis en haut et formant une arène circulaire sur laquelle
on fait piétiner les chevaux pour dépiquer le blé.
Planta. v. Planter. Planter un champ, planter un clon.
— Vaqui un home bé planta, voilà un homme bien bâti.
M'avès planta, vous m'avez faussé compagnie.
Dér. du lat. Plantare.
Plantado, s. /. Plantation d'arbres. Ce terme s'applique
surtout à un champ planté de müriers ou d'oliviers
disposés en quinconce où par rangées.
Plantage, s. m. Plantain à larges feuilles, Plantago
latifolia; Linn., appelé, aussi Erbo à cinq costos, herbe à
cinq côtes; plante vulnéraire, astringente.
Plantiè, s. m. Nouvelle ou jeune plantation de vignes.
Planto, s. /. Plante, végétal. Au fig. on dit : Planto dé
pigoto, un grain ou un bouton de petite vérole. — Acù és
uno bèlo planto, se dit en parlant d’une femme de taille
élevée et bien constituée.
Plantun, s. m. Jeune pousse de salade ou de légume
destinée à être repiquée dans an jardin potager.
Plataras, s, m. Plat de grande dimension; augm. de
Pla. + Foy. €. m.
Platèou, s. m. Grosse planche très-épaisse, madrier
ordinairement débité dans un bois dur tel que le chène on
le noyer.
PLO 597
Plantouiè, s. m. Semis de châtaigniers, de müriers,
d'ognons, de choux et en général d'arbres ou de légumes
nouvellement sortis de terre.
Plé, Pléno, adj. m. et f. Plein, pleine. On dit aussi
Plén au masc. — Un plén eapil, un plén pagné, plein an
chapeau, un panier. N'aï mas plénos mans, j'en ai les
mains pleines, Aquélo cabro, aquélo fédo és pléno, cette
chèvre, cette brebis est pleine.
Pléga, v. Plier, ployer. — Pléga-vous bé, couvrez-vous,
enveloppez-vous bien. Aquél homme és pléga, cet homme
est perdu, il est dans un état désespéré. L'a fa pléga, il l'a
fait caponner, il lui a fait mettre les pouces. Sé pléga, se
coiffer. Pléga boutigo, fermer boutique, faire faillite.
Dér. du lat. Plicare, m. sign.
Plégadis, isso, adj. m. et f. Souple, flexible, pliant,
facile à plier. — Cadièiro plégadisso, chaise pliante.
Plégaje, s. m. Pliage, action de plier.
Plégo, s. j. Une main, une levée an jeu de cartes. —
Lou j0 dé plégo-ma-tèlo, le jeu de la toile,
Pléjas, s. m. Augm. de Plèjo. Grosse averse, pluie
subite et de peu de durée.
Plèjo, s. f. Pluie. — Plèjo ménudo, bruine, petite pluie.
Dér. du lat. Pluvia.
Pléjous, onso, adj. m. et f. Pluvieux.
Plén, adj. m. — Voy. Plé.
Plési, s. m”. Plaisir, satifaction, sensation agréable, joie,
amusement, volonté, service, office. — Coumo vous fara
plési, comme vous voudrez, à votre choix.
Dér. du lat. Placere.
Plèt-à-Diou ! interj. Plaise à Dieu! Exclamation inter-
jective employée pour témoigner le désir qu'on éprouve de
voir un vœu, un souhait se réaliser.
Plèti? quest, interj. Plait-il ? — Faïre plèti, se plier aux
circonstances, faire des courbettes.
Plis, s. m. Pli, point où une chose se plie, marque qui
reste à l'endroit plié. — Acù fara pas un plis, cela ira de
soi, cela aura lieu sans difficulté.
Dér. du lat. Plica.
Plissa, v. Plisser, faire des plis à une étoffe pour l'agré-
rmenter. Adjectivement on dit Phissa, do, plissé, ee. —
Aquélo fénno és touto plissada, cette femme est ridée.
Plo, s. m. Petit plateau qui surmonte un chainon,
un contrefort de montagne. Quand ce plateau se trouve
situé sur la sommité la plus élevée d’une région, il prend
le nom de Caim, Can. — Voy. c. m.
Plôoure, v. n. et impers. Pleuvoir. Ce terme s'emploie
pour désigner l'ean qui tombe du ciel. On dit de quelqu'un
qui flâne au lieu de travailler : éscouto sé pléou, il écoute
s'il pleut.
Dér. du lat. Pluere. .
Plouma, v. Plumer, ôter les plumes d’un volatile; peler
on fruit, un légume; effeuiller, écorcer un arbre. —
Plouma dé castagnos, dé rabos, peler des châtaignes, des
raves. Plouma un amouriè, effeuiller un mürier. Ploume
7
558 PLO
un éouse, écorcer un yeuse ou chène-vert. Faï un fré qué
ploumo, il fait un froid très-vif. T'an plouma, on t'a
plamé, se dit à un joueur qui a tout perdu.
Ploumado, s. f. Une volée, une râclée. — T'an fitu uno
ploumado, on t'a fiché ane râclée. Ploumados, châtaignes
fraiches pelées et prêtes à mettre à cuire.
Plouma, ado, adj. m. et f. Plumé, plumée, pelé, pelée.
— Tèslo ploumado, tête chauve. On l'emploie comme
sobriquet : Bérna lou plouma, Bernard le Chauve.
Ploumas, s. »m. Bûche de chêne écorcé, de bois pelard .
Ploumba, v. Plomber, appliquer du plomb; prendre
l'aplomb d'un mur, d’une chose quelconque à laquelle on
veut donner une position verticale ; élaguer les branches
d’un arbre de manière à ce qu’elles ne dépassent pas une
certaine limite fixée.
Dér. du lat. Plumbare.
Ploumba, ado, adj. m. et f. Plombé, mis d’à-plomb.
— Aquél home és gaïre ploumba, cet homme n'a pas beau-
coup de jugement, se dit au fig.
Ploumé, s. m. Plumet, niveau de plomb, en vieux fr.
plomet. Au fig. : Préne un ploumé, se griser.
Ploumio, s. f. Débris de plumes ou de matières re ssem-
blant à de la plume; épluchures.
Ploumo, s. /. Plume, duvet qui recouvre le corps des
oiseaux et leur sert à voler; plume à écrire ou plume d'oie
qui a subi certaine préparation. Par extension, on donne
aussi le nom de plume à la plume de fer inventée depuis
quelques années et qui a presque complètement remplacé
la plume d’oie.
Dér. du lat. Pluma, m. sign.
Ploumous, ouso, adj. m. et f. Plumeux, plumeuse,
garni de plumes.
Ploun, s. "». Plomb, fil-à-plomb, instrument de maçon
propre à prendre l'aplomb ; plomb de chasse.
Plounjoù, s. m. Plongeon, nom donné à certains oiseaux
de passage de l’ordre des Palmipèdes qui ont l'habitude de
plonger. Dans le Gard, on donne surtout cenom au Casta-
gneux ou grèbe de rivière. {Colymbus minor, Linn.)
Ploura, v. Pleurer, déplorer, regretter. — Plôura sous
pécas, pleurerses péchés. Plouro qué sé déscréstiano, expres-
sion intraduisible, pour indiquer qu'une personne pleure
abondamment. Las soucos plourou, la vigne entre en sève.
Plouro coumo un védèl, il pleure comme un veau. On diriè
qu'a ploura pér l'avédre, on dirait qu'il a pleuré pour
Vobtenir, se dit d'un vêtement mesquin, étriqué, manquant
de l'ampleur suffisante.
Dér. du lat. Plorare, m. sign.
Plourado, s. f. Intervalle de temps plus ou moins long
passé à pleurer. — À fa uno plourado, se dit surtout d'un
enfant qui a pleuré longtemps sans discontinuer.
Plouraire, Plourarèlo, s. m. et f. Pleurard, celui qui
pleure habituellement, qui se plaint de tout, qui n'est
content de rien.
Plouroùs, ouso, adj. m. et f. Pleureux, pleureuse, qui
POC
est en pleurs, qui a les yeux mouillés de pleurs. — És tout
plouroùs, il est tout en larmes.
Plous, s. ”. pl. Pleurs, larmes répandues.
Plouvina, v. Bruiner. Se dit de la rosée qui tombe.
Dans le voisinage de Nimes, Plouvina signifie geler
blanc. :
Plouvinas, s. »m. Bruine intense, rosée abondante. Dans
le voisinage de Nimes, on appelle Plowvinas la gelée blanche
désignée à Alais sous le nom de Barbasto. — Voy. ©. m.
Plouvinéja, v. Bruiner.
Dér. du lat. Pluvia, pluie.
Plouvinéjado, s. f. Bruine peu intense; menue pluie
telle que celle provenant des brouillards qui se résolvent en
pluie fine. Dim. de Plouvino. (Voy. c. m.) Sur les hautes
montagnes il ne tombe guère que de la bruine. — Faï uno
plouvinéjado, il fait une petite rosée.
Plouvino, s. f. Bruine, rosée de la nuit ou du matin;
pluie fine. Nom de la gelée blanche en Provence.
Dér. du lat. Pluvia, pluie.
Pluga, v. Fermer les yeux, les bander comme on le fait
aux jeux de colin-maillard et cligne-musett e. On dit : Quéou
plugo ? que l'on doit rendre par : à qui est-ce à faire? —
És icou qué plugue, c'est moi qui fais. Té vou pluga, je
vais te bander les yeux. Ce terme paraît être dit pour
pléga, plier ou fermer.
Dér. du lat. Plicare, plier, m. sign.
Plugos, s.f. pl. Antoques ou lunettes des fchevaux;
sortes de calottes de cuir opaques, avec lesquelles on
recouvre les yeux des chevaux de manège et de ceux que
l'on emploie au dépiquage du blé. 1! ne faut pas confondre
les antoques avec les œillères des chevaux de voitures ou
avec les flaquières, qui empèchent seulement les chevaux
et les mulets de voir latéralement, ce qui contribue à les
tenir dans le droit chemin.
Plugoüs (Dé), ado. A tâtons, les yeux fermés ou à
l’aveuglette.
Plugué, s. m. Le jeu de cache-cache ou de cligne-
musette, appelé aussi Réscoundudo.
Plus (Sans). Loculion qui s’emploie dans le sens de :
sans ajouter davantage. — Quan aguè parla, partiquè
sans plus, quand il eut expliqué son affaire, il partit sans
rien ajouter de plus.
Po, subst. m. Pot, vase de terre on de métal destiné à con-
tenir quelque chose.
Dér. du lat. Potus, boisson.
Po, v. 3e pers. du pr. de l'ind. des v. Poudre, Poude où
Poudé, pouvoir. Il ou elle peut. — Po sé dire, on peut le
dire.
Dér. du lat. Potere, pouvoir, m. sign.
Pocho, s. /. Poche, petit sac aplati fixé aux habits et
servant à serrer divers objets que l'on emporte habituel-
lement avec soi ; faux pli d'une étoffe cousue, sinus dans
une plaie; partie interne d’une tumeur. On dit au fig: :
Ac és din ma pocho, c'est une chose comprise, une chose
EE PC
POR
qui m'est acquise. — Rasin dé pocho, raisin de poche, à
grains durs et qui mürit fort tard.
Dér. de la bass, lat. Punga, Puncha, Pochia, m. sign.
Po-dé-cambro, s. m. comp. Pot-de-chambre, vase de
nait. — Voy. Pissado.
Pon, s. m. Pont, ouvrage en pierre, en bois ou en fer
jeté sur une rivière, un fleuve, un cours d'eau quelconque
pour en faciliter le passage.
Dér. du lat. Pons, pontis, m. sign.
Pon-lévadis, s. m. comp. Pont-levis.
Pôou, s. f. La peur, l'effroi. — N'ai maï dé péou qué
d'énuéio, j'en ai plus peur qu’envie, se dit d'une chose
qu'on redoute de voir se réaliser. La péou gardo las vignos,
la peur garde les vignes.
Por, s. m. Cochon commun, cochon domestique. /Sus
scrofa, Linn.) Mammifère onguiculé de la famille des
Pachydermes, dont on distingue six ou sept races ayant
toutes Je sanglier pour souche. Au fig. un individu sale,
malpropre ou dont le langage est. grossier et inconvenant.
— És coumo un por à l'éngraï, se dit d'un individu qui n'a
d'autre souci que de manger et dormir. Por sénglas, san-
glier ou porc sauvage. Ploures pas, pichoto, avèn troubu
lôu por, n'ayez aucun.souci, nous avons trouvé le nœud
de la difficulté.
Dér. du lat. Poreus, m. sign.
Pore, s. m. Poireau. — Vèr coumo un pore, vert comme
la fane d’an poireau. On dit aussi Pori.
Pori, s. m. Poireau. — Voy. Pore.
Porje, s. m. Porche, espace couvert placé à l'entrée
d'un édifice, d'un monument, d'une maison; parvis d'une
église.
Dér. du lat. Porticus, m. sign.
Porto, x. pr. de lieu. Portes, ou Portes-Bertrand,
comm. du canton de Génolhac, — Castrum et villa de
Portis, 4102; Ad Portas, 1294; Castrum de Portis-Ber-
trandi, 1344. Cette localité, qui peut être considérée comme
la porte des Cévennes, est. située sur la ligne du faite qui
sépare les deux vallées du Gardon et de la Cèze. La voie
romaine de Nimes à Gergovie, par le Collet de Villefort,
passait par Portes et on en trouve encore des vestiges sur
son territoire.
Porto, s. f. Porte, ouverture par où l’on pénètre dans
une maison, un édifice, une ville, etc.; la clôture elle-
mème, la cloison qui sert à fermer l'ouverture. — Bara La
porto, fermer la porte. Piqua én toutos las portos, frapper
à toutes les portes, réclamer un service de tous les
côtés. Porto-à-v itro, porte vitrée.
Dér. du Jat. Porta, m. sign.
Porto-ésfrai, s. m. comp. Épouvantail, mannequin
bourré de paille qu'on met au bout d’un poteau au milieu
d'un champ pour effrayer les oiseaux. Au fig. personne
Jaide, hideuse, qui fait peur; rabat-joie, croquemitaine. On
applique quelquefois ironiquement cette ARS àäun
agent de police, à un gendarme.
POU 559
Porto-fai, s. m, comp. Porte-faix, crocheteur.
Porto-fuio, s. m. comp. Portefeuille,
Porto-mantèl, s. m. comp. Porte-mautean.
Porto-réspè, s. m. comp. Une arme quelconqne que
l'on porte ostensiblement dans un voyage ou une
occasion où l’on peut courir des dangers, et qui impose le
respect à ceux qui l'aperçoivent,
Pos, s. /. Planche. Du lat. Postis, — És sé coumo uno
pos, il est sec comme une planche. L'an més éntre quatre
pos, on l'a mis entre quatre planches, on l'a mis au
cercueil.
Pos, v. Tu peux; 2° pers. du prés. de l'ind. du +.
Poudre, Poude Ou Poudé, pouvoir. — Pos ou crêire, tu
peux le croire. Pos-ti ou dire? Peux-tu dire cela?
Pous-barâou, s. mn. comp. Puits que l'on ferme au
moyen d'une porte. C'est un puits semblable, encore
existant, qui a donné son nom à la rue Puits-barral à Alais.
Pouce, s. m. Le pouce de la main. — Métre lou pouce,
caler, se plier à une nécessité, à une exigence; se laisser
convaincre par une démonstration, avouer que l'on a tort.
Ancienne mesure aujourd'hui abindonnée.
Poucèl, s. m. Jeune pourceau, goret, cochon de lait.
Dér. du lat. Porcellus, m. sign.
Poucéla, v. Cochonner, se dit de la truie qui a mis bas.
Poucélado, s. f. Cochonnée; portée de petits cochons;
ce qu’une truie met bas en une seule portée. SAUVAGES
ajoute que le nombre des jeunes pourceaux est ordinai-
rement égal au nombre des pis de la truie.
Poucèlo, s. f. Une jeune truie qui n'a point porté.
Pouchado, s. f. Une pochée; plein une poche. —
N'aviè uno pléno pouchado, il en avait une poche pleine.
Pouchéja, v. Se fouiller; mettre la main dans sa poche
comme pour en retirer de l'argent.
Pouchou, s. m. Gousset, bourson, petite poche de la
culotte on du gilet. Dim. de Pocho.
Pouciou, s. m. Pourcil, loge ou étable à cochons. Du
lat. Porcinum (sous-entendu stabulum), — Sanlo coumo un
pouciou, sale comme un pourcil; se dit d’une maison
très-mal tenue.
Pouda, v. Tailler la vigne, former la tête d'un mürier
nain, d’un jeune arbre fruitier.
Dér. du lat. Putare, rendre pur, tailler, émonder,
nettoyer.
Poudaire, s. m. Vigneron qui taille la vigne.
Poudar ou Bartassiè. Grande serpe à tailler les haies
et les charmilles. Elle est emmanchée d'un long bâton, et
le fer a la forme d'un croissant, comme, celui d'une
faucille.
Poudasoü, s. f. La taille des vignes; l'époque, 1
saison où a lieu cette opération. — Pér poudasoù, au
temps de la taille.
Poudé, s. m. Serpette à greffer, à émonder, à tailler.
Dér. du lat. Putus, a, um, pur, purifié; d'où Putare,
rendre pur, tailler, émonder, nettoyer.
560 POU
Poudé, s.m. Pouvoir, autorité, crédit. — S'avièt lou
poudé, si j'avais le pouvoir.
Poudé, v. Pouvoir.
Poude, v. n. Pouvoir, — V. Poudé et Poudre.
: On dit au PRÈS. DE L’IND. :
Pod... eh cetpre-p ee Je peux
Podés :..., ee tu peux
Po. ARS TRS il peut
Poudèn ...….......,..... nous pouvons.
Poudès . 4,5. recu cer Vous pouvez.
POULE ste tee se? ils peuvent.
A L'IMPARFAIT :
Pondiéti. s5 00 V8. 2m ent je pouvais.
Poudiès.. sis és sinèn + ver tu pouvais.
Poème sltte HQE il pouvait.
Poudian ste plole sut eye nous pouvions.
Poudins.. se i Sense vous pouviez,
Poudidn:. enr. cures .. ils pouvaient.
Au PASSÉ DÉFINI :
Pouguère..... 1." 1% je pus
Pouguëres....0.. 0. tu pus
Pouguê.tssi SAT il put
Pouguën. ste. ee nous pimes.
Pougubks. du. un ur vous pütes.
Pouguèrou............. ils purent.
Dér. du lat. Potere, pouvoir, m. sign.
Camine tan qué pode, je marche aussi vite que je puis.
Courissian tan qué Diou poudian, nous courions à toutes
jambes ou autant que Dieu nous donnait des forces. Pico
tan qué po, il frappe de toutes ses forces. S'én vai tan qué
po, en parlant d'un malade qui approche de sa fin. Plôou
tan qué po, il pleut à verse. F6ow poude, il faut pouvoir.
Poudios, s. f. pl. Les émondures, les menus brins,
les scions et les branches enlevées d’un arbre que l’on
émonde avec la serpette ou la hache ; les sarments que l'on
coupe sur un cep de vigne.
Poudo, s. f. Serpe à couper les ronces, emmanchée d’un
bâton long de quatre à cinq pieds. Son fer «est plus petit
que celui du Poudas; il est un peu plus grand que celui
du Poudé ou serpette. On appellé aussi Powdo, la serpette
à talon allongé qui sert à tailler les vignes.
Poudra, v. Poudrer, couvrir de poussière. — Soui tout
poudra, je suis tout couvert de poussière. — Futur absolu
du v. Poudre. Il ou elle pourra.
Poudre, v. Pouvoir. — Voy. Poude et Poudé, V
Poudro, s. f. Poudre, poudre à canon, à fusil; poudre
à poudrer; poussière, matière pul vérisée.
Dér. du lat. Pulvis, pulveris.
Pouèlo, s. m. Poèle, fourneau servant à chauffer un
appartement, à faire la cuisine. Appareil essentiellement
moderne dans le midi de la France surtout, et dont le nom
. “est emprunté au français. Drap d'honneur que l’on porte
dans une cérémonie funèbre.
POU
Pouèn, s. "”. Point; point final dans l'écriture où les
ouvrages imprimés ; point que l'on marque au jeu. On dit
aussi Poun. — Voy. ©. m.
Pouètro, s. m. Poète. Emprunt fait aù SEE en le
dénaturant.
Pougé, n. pr. m. Nom d'homme et de localité. Dim: de
Piè, Puech, Puy, élévation, tertre, monticule, pic.
Dér. du lat. Podium, m. sign.
Pougéso, adj. f. Qualificatif appliqué à certaines
monnaies du Puy émises sous le signe de saint Louis. —
Maïo pougéso, maille pougeoise ou du Puy.
La pitte pougeoise valait la moitié d’une maille et celle-
ci la moitié d'un denier. D’après certains auteurs la Pougéso
proprement dite équivalait à la moitié d’une pitte ou au
quart d’une obole où le huitième d’un denier. La pitte
proprement dite, picta, était une monnaie du Poitou,
Pagus piclavensis .
Pougnado, s. f. Une poignée, autant que la main
fermée peut contenir d’une chose; partie d'un instrument
où d'un outil que l'on saisit avec la main; poignée de
main.
Pougné, s. m. Poignet, l'articulation qui relie la main
à l'avant-bras; partie de la manche d’une chemise, d’une
blouse, d’une veste, etc., qui correspond à celte articula-
tion.
Pougne, v. Piquer, percer, transpercer avéc uné chose
aiguë; mordre en-parlant du serpent et de la piqüre des
abeilles. Au fig. inquiéter, irriter, fàcher.
Dér. du lat. Pungere, m. sign.
Pougne, v. Poudre. Travailler la pâte avec les poings
fermés.
Pougnédisso, s. f. Douleur vive et aiguë; point-de-
côté.
Pougnéduro, s. f. Piqüre d'abeille, de gaèpe, de frelon,
de puce, de scorpion, etc.
Pougno, s. f. La force qui réside dans le poignet et la
main. — À bono pougno, il a le poignet solide.
Pougu. Pu. Part. pass. du verbe Poudre, Poude ou
Poudé. On dit aussi Piseu ou Pouseu dans le mème sens.
Dér. du lat. Putere, possum.
Pouio, s. f. Injures grossières.
Du celt. Poulk, ou plutôt de Pediculus, pou, traiter
quelqu'un de pouilleux.
Pouisou, s. f. Poison, substance qui, introduite dans
l'organisme, peut donner la mort. Au fig. un méchant
homme, une méchante femme. — Quinto pouisoù! quel
gredin ! quel coquin!
Dér. du lat. Potio, potion, breuvage.
Pouitroun, s. m. Poltron, lâche, pusillanime, dépourvu
de courage.
Dér. du lat. Pollex, pouce, et de Truncus, coupé, mutilé.
Autrefois les Romains qui par lâcheté ne voulaient pas
servir dans les armées se coupaient le pouce, mt:
lextruncus, Poltrunc el poltron.
POU
Pouitrounariè, s. {. Poltronnerie.
Poul, s. m. Cochet, jeune coq.
Poulardo, s. f. Poularde, jeune poule que l'on a
engraissée après lui avoir enlevé les ovaires.
:Poulé, s. m. Poulet, poussin de la poule.
Dér. du lat. Pullus, M. sign. — És mor coumo un poulé,
il est mort sans souffrance, sans agonie ; il s’est éteint.
Poulèje, s. f. Poulie. On dit aussi Tirolo.
Poulèjo, s. f. Cigogne ou bascule de puits. — Voy.
Balandro.
Poulétariè, s. f. Poulaille ; troupe de volailles.
Pouli, s. m. Poulain, jeune cheval, Anon, jeune mulet.
Aufig. jeune garçon sans expérience, aux allures vives.
— Quéou noun travaïo pouli, travaïo roussi, qui ne tra-
“aille pas dans sa jeunesse, travaille parfois dans sa
Pouli, ido, adj. m. et f. Joli, jolie ; gentil, gentille. —
M'én avès fa uno poulido, vous m'en avez fait une qui
compte. Siès un poulà mèrle! tu es un fier nigaud! Vous aï
éspéra un pouli briou, je vous ai attendu bien longtemps.
© Pouliço, s. f. Police.
Dér. du lat. Policia, ordre, règlement établi pour la
sûreté d’une ville.
Pouliço, s. f. — Faïre la pouliço, gaminer, faire le
polisson par les rues.
Poulidié, s. /. Beauté, gentillesse.
Poulina, Pouliner, mettre bas un poulain, se dit de la
jument et aussi de l’Anesse.
Poulinado, s. f. Escapade d'écolier, d'un jeune libertin
qui fuit la maison paternelle pour prendre la clé des
champs; escapade. — À fa poulinado, il a décampé.
Poulinas, s. m. Gros poulain et au fig. gros garçon qui
gambade et folâtre comme un poulain; fiente de poule ou
de quelque autre oiseau de basse-cour.
Poulisso, s. m. Polisson. — Siès uno bravo poulisso, tu
es un fier gamin.
Poulissoun, s. m. Polisson, espiègle, libertin, débauché.
Poulissouna, v. Polissonner ; dire ou faire des polisson-
neries.
Poulissounado, s. f. Polissonnerie, acte inconvenant,
insolence.
Poulissounariè, s. /. Action, parole, tour de polisson ;
bouffonnerie, plaisanterie déplacée.
+ Poulo, s. /. Jeune poule et par extension la femelle du
coq, que l'on appelle surtout Galino. — Voy. ©. m.
Dér. du lat. Pulla, m. sign. — Gardas vostos poulos, aï
douna van à moun gal, gardez vos filles, mon fils est
émancipé.
: Poulo-d'aïgo, s. /. Poule d’eau; poule d'eau ordinaire.
(Gallinula chloropus, Linn.) Oiseau aquatique qui a la tête,
la gorge, le cou et la poitrine d'un noir bleuâtre, le dessous
‘du corps blanc,.et le dessus brun olivâtre avec une plagüe
rouge sur:le front. Il atteint près de quarante centimètres
de longueur.
POU 561
Indépendamment de cette espèce, il en est une autre,
la poule d'eau Marouette /Gallinula porzana, Temm.), assez
pareille de couleur à la précédente, mais moitié plus
pelite, qui, comme elle, se trouve souvent au bord des eaux
douces. Celle-là, sans compter d’autres variétés qui ne
quittent guère les étangs et les marais, doit aussi recevoir
le nom de poulo-d'aïgo; il n’est pas jusqu'au râle d'eau
(mieux dit cependant rasclé) qui ne puisse se confondre
sous la même appellation avec les précédentes : il est vrai
que tous sont bien proches parents.
Pouloumas, s. /. Ficelle tordue à un seul brin de
diverses grosseurs.
Dér. de la bass. lat. Polomarium, m. sign.
Pouloumbo, s. f. Palombe; pigeon sauvage plus petit
que le ramier. /Columba turricola sexatilis, Linn.)
Pouma, ado, adj. m. et f. Pommé, 6, en forme de
pomme. %e dit principalement des choux et des salades, —
Vaqui un cdoulé bièn pouma, voilà un chou bien pommé,
Dérivé de Poumo.
Pouma, v. Pommer, se développer en forme de pomme.
Se dit principalement des choux.
Poumada, v. Pommader, enduire de pommade. Se
pommader, enduiré ses cheveux de pommade.
Poumado, s. f. Pommade, composition molle, grasse ou
onctueuse employée soit en médecine, soit comme cosmé-
tique.
Dér. du lat. Pomatum, fait avec la pomme, parce que
jadis on faisait entrer la pulpe de ce fruit dans cette
composition.
Poumarédo, s. /. Pommeraie, lieu planté de pommiers
ou d'arbres fruitiers produisant des fruits à pepins. Ce mot
est aussi employé comme nom propre d'homme : Poumarédo,
Pomarède, La Pommeraie.
Dér. du lat. Pomarium, m. 5.
Poumiè, s. m. Pommier, arbre qui porte des pommes;
poirier commun. {Malus communis, Dec.) — Voy.
Poumièiro.
Dér. de Poumo.
Poumièiro, s. /. Pommier. On dit aussi Poumiè. —
Voy. ©. m.
Poumo, s. . Pomme, le fruit du pommier.
Dér. du lat. Pomum, fruit bon à manger.
Poumo-d'Adam, s. /. comp. Pomme d'Adam, saillie plus
ou moins prononcée formée au devant du cou, par le nœud
de la gorge.
Poumo-d'amour, s. f. comp. Pomme d'amour, tomate
(Solanum lycopersicum, Linn.), plante potagère de la
famille des Solanées, originaire de l'Amérique méridionale
et cultivée dans tout le midi de la France.
Poumo-dé-tèro, s. f. comp. Pomme de terre. Emprunté
au français. On dit plus ordinairement Trufo.
Poumpa, v. Pomper, élevér de l'eau au moyen d'une
pompe, aspirer un liquide ou un gaz. Au fig. boire outre
mesure.
562 POU
Poumpé, s. m. Galette, morceau de pâte aplatie qu'on
fait cuire à l'entrée du four. On l'appelle aussi Flamado ou
Poumypo. — Voy. c. m.
Poumpèire, s. m. Pomme de rambour, d’un très-gros
volume et très-fondante à la cuisson.
Poumpiè, s. m. Pompier, sapeur-pompier. Au fig. un
buveur. — És un famoùs poumpiè, c’est un fier buveur.
Poumpo, s. f. Pompe, appareil pour élever l'eau et
dans lequel la pression de l'air est le principal agent;
lampe à huile dans laquelle l'huile monte au moyen d’une
pompe foulante.
Poumpouna, vw. Dorloter, caresser, soigner délicatement
quelqu'un.
Poun, s. m. Point; point final dans l'écriture ou la
typographie; point de couture. — Poun dé dissate, couture
à longs points ou faits négligemment et à la hâte.
Dér. du lat. Punctum, m. sign.
Poun, s. m. Poing; la main fermée. — À lous pouns
saras, se dit d’un avare.
Dér. du lat. Pugnus, m. sign.
Pounchè, s. m. Étui, étançon, pointal, pièce de bois
employée à soutenir une poutre qui plie ou un mur qui
menace ruine.
Pounchéja, v. Poindre, sortir, commencer à paraitre.
— Lou jour, las éstèlos pounchéjou, le jour, les étoiles
commencent à poindre.
Pouncho, s. f. Pointe, bout eflilé, aigu ou piquant;
extrémité d'un objet qui se termine en pointe; sorte de
coiffure ancienne; mouchoir triangulaire que les femmes
emploient dans leur toilette.
Dér. du lat. Punctio.
Pouncho-dâou-jour, s. m. cômp. Le point du jour.
Pounchoù, s.m.Pointe, piquant, aiguillon, sommet, faite,
Dim. de Pouncho.
Pounchouna, ». Piquer, aiguillonner, pousser quelqu'un
hors des gonds, le mettre hors de lui.
Pounchounado, s. /. Piqüre. Au fig. excitation.
Pounçoù, s. m». Poinçon, instrument en fer servant à
percer ou à marquer.
Dér. du lat. Punguiculus.
Pounsé, s. m. Terme employé sous forme de plaisan-
terie pour désigner l'estomac. — Aï bièn rampli pounsé,
je viens de faire un bon repas.
Pounté, s. m. Pontceau, petit pont.
Poupéto, s. f. Panade, sorte de bouillie préparée pour
les petits enfants.
Poupo, s, f. Le filet extérieur du bœuf, du mouton, du
porc; celui qui règne le long du dos de chaque côté de
l'épine dorsale. Le filet intérieur prend le nom de fié,
emprunté au français.
Ce mot s'emploie avec une deuxième signification pour
désigner la chair, les muscles proprement dits; ce qu'il ya
de plus solide et de plus charnu dans les muscles de l'animal.
Dér. du lat. Pulpa, m. sign.
POU
Poupoun, s. "=. Un poupon, un très-jeune enfant.
Dér. du lat. Pupus, petit garçon.
Ce terme s'emploie aussi pour désigner un melon.
Dér. du. lat. Pepo, peponis.
Poupouna, ». Choyer, dorloter, mitonner, prendre un
soin excessif de la santé, des aises d’une personne.
Pourado, s. f. Gain, profit, durée. — Fara pas longo
pourado, il ne sera pas de longue durée, il aura bientôt
pris fin, il mourra bientôt. On dit proverbialément :
Chambrièiro rétournado, soupô récâoufado, noun faï jamaï
bono pourado.
Pouraquo, s. f. Asphodèle. — Voy. Alapédo.
Pouraquo est sans doute un nom dérivé de Pori ou Pore,
à cause de la ressemblance des feuilles radicales gladiées
de l’asphodèle avec celles du poireau.
Pourcariè, s. f. Viande de porc, charcuterie. Au fig.
cochonnerie; saleté, ordure.
Dér. de Por.
‘Pourcas, s. ». Gros pourceau. Augm. de Por. Au fig.
un homme grossier, qui dit des paroles grossières.
Dér. de Por.
Pourcatiè, s. m. Marchand de cochons; charcutier.
Pourcino, s. f. Troupeau de cochons, la gent porcine.
Poure, v. Pouvoir. — Voy. Poudé, Poudre et Poude,
qui sont d'autres formes patoises du même verbe:
Pouréto, s. f. Menu plant de mürier arraché du semis
et transplanté dans une pépinière,
Dér. de Pore ou Pori, parce que ces plants sont vendus
en petites bottes comme les poireaux.
Dans le voisinage de Nimes, le mürier nain est aussi
appelè Pouréto.
Pouri, v. a. Pourrir, altérer, gäter, corrompre: On dit
au fig. d’une mère qui gâte trop son enfant : ox pouris.
Dér. du lat. Putrere, m. sign.
Pouri, v. ». Pourrir, tomber en putréfaction, se décom-
poser. On dit au fig. d’un enfant gâté : Aquél éfan és
pouri. Mème étymologie que le mot précédent. ,
Pouridoù, s. m. Creux ou fosse à fumier.
Pouriduègno, s. f. Pourriture, saleté, débris de choses
gàtées.
Pourituro, s. f. Pourriture, corruption; état Fa
chose pourrie. Maladie des bêtes à laine.
Dér. du lat. Putredo.
Pourqué, s. m. Du porc frais. — Pourqué-dé-mèr,
cochon d'Inde. Manja dé pourqué émbé dé sdouvié, man-
ger un mets avec grand appétit.
Pourquéirargue, n. pr. de lieu. Porcairargues, hameau
de la commune des Salles-du-Gardon, à cinq kilomètres en
amont d'Alais. On pense que c’est le lieu d'origine de la
célèbre Azalaïs de Porcairargues, poète en langue romane,
qui vivait vers le milieu du xn siècle, et qui fut aimée de
Gui Guerréjat, fils de Guillaume VI, de Montpellier, dont
la mère, Béatrix de Melgueil, avait épousé, en 4144, Rays
mond Pelet premier seigneur d’Alais. DUT LL
he
er tu
POU
Pourquiè, ièiro, s. m.
cochons.
Pourquije, s. "”. Saleté, malpropreté. Au fig. paroles
sales et grossières.
Pourta, v. Porter, apporter, rapporter.
Dér. du lat. Portare, m. sign. — Porto lou cur sus
la man, il porte le cœur sur la main. Ou pourtara pa'n
paradis, il ne l’emportera pas en paradis; il me le paiera
tôt ou tard. Porto-ésfraï. — Voy. ©. m.
Pourta (Sé), v. n. Être en bonne on en mauvaise
santé : Sé porto bièn, sé porto pas bièn ou sé porto mou.
Pourta-cronto, Porter préjudice, faire opposition, —
M'as pourta-cronto, Lu as agi contre mes intérêts.
. Loc. composée de Pourta, v., et de Cronto, contre.
Pourtalé, s. m. Dim. de Pourtdou; petit portail; porte
secondaire percée dans les anciens remparts.
Pourtamén, s. #”. Santé, bon état du corps. — Vous
démande pa voste pourtamén, je ne vous demande pas com-
ment vous vous portez; je vois que vous vous portez bien.
.Pourtan, adv. Pourtant, néanmoins, cependant.
Pourtanèl, s. m. Guichet, petite porte pratiquée dans
une porte plus grande, telle qu’une porte de ville ou de
prison, une porte cochère, une porte de boutique.
Pourtâou, s. m. Portail; porte cochère, de basse-cour,
de ville. Grande porte d'une maison.
Pourtoulaïgo, s:"”. Pourpier commun (Portulaca
oleracea, Linn.), plante grasse potagère, astringente et ra-
fraichissante. On l'appelle aussi Bourtoulaïgo. — Voy. c. m.
Dér. du lat. Portulaca.
Pourtur,s. m. Porteur; celui qui porte les commissions,
les voyageurs, les paquets, les denrées, d'une localité à
une autre; un facteur rural.
Pous, s.m. Puits; excavation plus ou moins profonde
pratiquée dans le sol pour avoir de l’eau.
Dér. du lat. Puteus, m. sign.
Pous-à-ranco Où Pouséranquo, puits à roue. — Voy. ©. m.
Pous, s. m. Le pouls ou battement des artères. Ce terme
s'applique surtout au battement qui se fait sentir aux
poignets ou à la tempe., — N'a gés dé pous, son pouls ne
bat plus.
Dér. du lat. Pulsus, qui vient de Pulsare, battre.
Pous, s. f. Poudre, poussière.
Pousa, v. Puiser de l’eau ou d’un liquide quelconque.
Pousadoù, s. m. Puisoir ; récipient servant à puiser un
liquide quelconque dans le vase qui le contient.
Pousage, s. m. Action de puiser.
Pouséranquo, s. f. Puits à roue ; machine hydraulique
servant à puiser de l’eau dans un puits de grande dimen-
sion. Elle est composée d'une grande roue en bois garnie
de godets et-que l’on fait mouvoir au moyen d'un manège
auquel un cheval ou le vent donne l'impulsion. Selon
SAUVAGES, Pouséranquo viendrait par corruption de
pousar-aïgo.
Pousia, n. pr. de lieu. Pouzilhac, commune du canton
et f. Porcher, gardeur de
POU 563
de Remoulins. — Castrum de Posilhac, 41% ; villa de
Posiliaco, AN76; Pozilhacum, 4384. Cette localité tire
sans doute son nom de sa situation élevée sur la ligne de
faite qui sépare la vallée du Gardon de celle de la Cèze. De
quelque direction que l'on arrive à Pouzilhae, il faut s'éle-
ver par une côte raide, au sommet de laquelle se trouve
situé le village, à 220 m. d'altitude, qui est le point le
plus élevé de l'arrondissement d'Uzès.
Dér. du celt. Pouja, v. monter, où Pouja, adÿ., élevé,
juché sur un puech. — Poujado, signifie aussi rampe,
montée.
Poussa, v. Pousser, faire un effort pour déplacer une
personne où une chose; faire marcher, faire avancer,
exciter; porter plus loin; faire faire des progrès. Lever, en
parlant des plantes. On dit dans le même sens Buta. —
Voy. c. m.
Poussado, s. f. Secousse, heurt, poussée.
Poussé, s. m. Pousse; maladie des chevaux poussifs.
— Aquél chival a lou poussé, ce cheval est poussif.
Pousséja, v. Soulever, exciter la poussière.
Pousses, s. f. pl. Menue paille; balle des grains criblés ;
poussiers; pellicule de la nature et de la couleur de la
paille; enveloppe du grain de froment où d'avoine;
poussière de paille. Débris de peaux de châtaignes prove-
nant du battage des châtaignes sèches. — L'ase d'Aoubarno
s'éngraïssè bé én manjan dé pousses, se dit d’une personne
qui se porte bien tout en vivant chichement.
Pousséto, s. f. Petite planche; dim. de Pos.
Poussi, poussivo, adj. m. et f. Poussif, poussive. Se
dit d’un cheval atteint de la pousse ou d’une personne
asthmatique.
Poussible, iblo, adj: m. et f. Possible. Se dit d'une
chose qui peut avoir lieu, qui est vraisemblable.
Pousso, s. f. Mamelle de la vache, de la chèvre, de la
brebis. Organe glanduleux qui secrète le lait chez les
femelles des espèces ovine ou bovine,
Poussoüs, ouso, adj. m. et f. Poudreux, couvert de
poussière.
Pousta, s. m. Soupente, plancher qui divise en deux
parties une pièce dans le sens de la hauteur et sur lequel
on établit la couche des domestiques, des ouvriers, et sur
lequel on peut aussi emmagasiner diverses denrées encom-
brantes. Cette soupente est toujours établie en planches.
On y monte par une échelle de meunier qui aboutit à une
large trappe.
Dér. du lat. Positum.
Poustioun, s. m. Postillon, valet de poste qui conduit
ceux qui courent la poste.
Dér. de l'ital. Postiglione.
Poutage, s. m. Du bouälon et non du potage.
Poutagè, s. m. Potager; fourneau de cuisine sur lequel
on prépare les mets. — Mounta sus lou poutagè, se metire
en frais, se mettre en cuisine pour un hôte que l'on veut
bien traiter.
564 PRA
Poutarado, s. j. Une potée, plein un pot, plein une
marmite ; dans le style fam. un pot-de-chambre plein.
Poutaras, s, m. Grand broc de vin; grand vase plein
d'un liquide quelconque. On dit proverbialement dans
quelques localités :
Pér lou râoumas
Fôou lou poutaras.
Pour guérir le rhume, il faut boire du vin.
Pouténcio, s. f. Potence, gibet où l’on exécute les
criminels condamnés à être pendus.
Dér. du lat. Potentia, puissance, pouvoir, droit de haute
justice.
Poutèrlo, s. f. Gros baiser de nourrice. — Faï mé ’no
poutèrlo, donne-moi un gros baiser, se dit en parlant à un
enfant.
Poutèto, s. /. Petit baiser, petite caresse.
Dér. de Poutoù, du celt. Pot, lèvre.
Pouticari, s. m. Apothicaire ou pharmacien, celui qui
prépare des remèdes suivant les ordonnances des médecins.
Dér. du grec Aron, boîle, boutique.
Poutinga, v. Droguer, médicamenter.
se droguer, prendre des remèdes.
— Sé poutinga,
Poutingo, s. f. Remède, médicament, médecine, pur-
gation.
Poutoü, s. m. Baiser.
Dér. du celt. Pot où Pout, lèvre.
Poutounéja, v. Baisotter.
Poutounéjaïire, s. ». Celui qui baisotte à chaque
instant.
Poutouras, s. m. Grand broc à soutirer le vin. Mesure
d’un pot de vin. On dit plutôt Poutaras. — Voy. €. m.
Pra, s. m. Pré, prairie, étendue de terre sur laquelle on
récolte du foin. — Pra sécéou, pré qui n’est arrosé que
par les pluies.
Dér. du lat. Pratum, dér. de Paratus, préparé.
Pradariè, s. f. Quartier de territoire exclusivement
composé de prairies. — Aquél téraïre és tout én pradarib,
ce territoire est entièrement composé de prairies.
Pradèl, s. m. et n. pr. de lieu. Dim. de Pre. Petit
pré ou coin de pré. Plusieurs hameaux ou villages des
Cévennes ou de l'Ardèche ont reçu ce nom.
Prado, s. f. Prairie; suite de plusieurs prés dans le
voisinage d’une rivière.
Dér. de Pra.
Prafi, exp. ado. Contraction de pér-à-fi. — Sian aïci
prafi d'aquél afaïre, nous sommes venus dans le but de
régler cette affaire.
Pratiqua, v. Pratiquer, mettre en pratique: exercer un
art; fréquenter, hanter. — Aï pratiqua qui péis, j'ai
fréquenté ce pays.
Du grec [lpaxreds, pratique, qui agit.
Pratiquo, s. f. Pratique, le côté pratique d’un art,
d’ane science ; client. Se dit en mauvaise part d'un mau-
PRÉ
vais sujet. — Uno bono pratiquo, un bon client. Quiñto
pratiquo! quel mauvais sujet !
Pratiquous, ouso, adj, m. et f. Industrieux, euse. Se
dit aussi d’une personne qui tire parti de tout et ne laisse
rien perdre.
Précha, v. Prècher, exhorter, faire un discours 4 en
chaire dans une église ou un temple; admonester. quel-
qu'un, exhorter.
Dér. du lat. Prædicare, proclamer.
Prèche,s. ». Prèche, prédication, sermon.
Prèchi, adv. Près, proche, auprès. On dit aussi Prooke.
Préga, v. Prier, supplier, prier Dieu, faire des prières.
Dér. du lat, Precari, m. s.
Prègo-Diou, s. m. comp. — Prègo-Diou-dé-rastouble,
ou simplement Prègo-Diou où Cabro. Mante, mante reli-
gieuse. Coléoptère de couleur verte un peu sombre, on
couleur de chaume, se rapprochant beaucoup de la saute-
relle, qu'on trouve arpentant pédestrement les chaumes, .
car ses ailes ne lui servent pas à voler. On le voit quel-
quefois se tenant presque droit sur ses longues patles de
derrière, pendant que les deux de devant, qu'il a beaucoup
plus courtes, sont repliées et posées l’une contre l'autre.
Cette attitude, assez semblable à celle d’une personne qui
joint les mains ou croise les bras sur sa poitrine, pour
prier Dieu, a suffi pour en faire un [insecte dévôt, a dit
Réaumur, et lui a valu son nom languedocien. Les enfants
ne rencontrent jamais une mante sans lui demander des
nouvelles du loup; c'est qu'il y a longtemps, la crédulité
populaire lui attribuait, on ne sait pourquoi, le don de
deviner (mante, en grec, veut dire devin). Les enfants la
consultent toujours; les hommes ne s’adressent plus pour
cela qu'aux tables tournantes, dansantes et même par-
lantes.
Pré miè, èiro, adj. num. ord. Premier, ère. — Souï
prémië, je suis le premier à faire.
Dér. du lat. Primus ou Primarius.
Prémiè (D'én), adv. D'abord, autrefois, jadis: —
D'én prémiè fasiès pa tan lou fièr, autrefois tw n'avais pas
tant de jactance.
Prémièirén, énco, adj. m. et f. Précoce, hAtüf, Se dit
des fruits qui mürissent les premiers.
Préne ou Préndre, v. Prendre, saisir, attraper, s'em-
parer, dérober, voler, surprendre, prendre sur le fait,
manger. — Prén pas rés, il ne mange rien. Préndra fénno,
se marier. Préndre fré, prendre froid. Préne mdou, con-
tracter une maladie. Préné-vous gardo, tenez-Vous sur vos
gardes. Préne pér forço, violer. Préne la mésso, ètre
ordonné prêtre. Préne van, prendre son élan. Préne la
mousco, prendre la mouche, se mettre en colère. Préne la
barunlo, dégringoler. — Voy. Barunlo.
Dér. du lat, Prendere, m. sign.
Prénso, s. f. Pressée, quantité d'olives on de raisin
mise au pressoir en une seule fois; résidu de marc. pro
venant d'une pressée. RAA |
PRÈ
Prés, és0, adj. m. et f. Pris, prise. — Sout prés, je
suis pris, je suis malade, je suis enrhumé.
Dér. du lat. Prehensus.
Près, adv. Près, auprès.
Présa, v. Apprécier, évaluer, estimer; faire ças, tenir
compte. — Sé préso pa, il n’est pas fier, il ne fait pas
d’embarras, il n’est pas vantard.
Présaje, s. m. Terme de cadastre; présage on estima-
tion d’un champ, d'une maison.
Dér. de Pris, prix, valeur, estimation.
Ce terme n'a rien de commun avec le mot français
présage, augure.
Présémple! interj. Par exemple! Est-il possible! cela
serait-il vrai! c’est singulier!
Contraction de Pér-ésémple.
Présén, s. m. Présent. — Présén dé boudin, cadeau
que l’on fait à ses parents, à ses amis, et ‘qui consiste en
un plat de boudin qu'on leur envoie quand on égorge un
porc dans la maison. Présén dé nogço, cadeaux de noces.
Pér lou présén, pour le moment, présentement.
Présénta, v. Présenter, offrir, introduire en la pré-
sence de...
Dér. du lat. Præsentare, m. sign.
Présèntamén, adv. Présentement, à présent même,
sans délai, sans retard, dans le moment.
Présfa, s. m. Entreprise à forfait ou à la tâche, d’après
laquelle et pour un prix convenu d'avance, les ouvriers
font le travail et fournissent diverses choses indiquées.
Présfachè, s. m. Ouvrier qui exécute un travail à
forfait.
Présicadou, s. m. Prédicateur, prècheur, frère prècheur
ou Dominicain, désignés à Paris sous le nom de Jacobins.
A Alais, le pont du Marché s'appelait autrefois Pon-das-
Présicadoùs, parce que le couvent des Dominicains était
situé à son extrémité occidentale, sur la rive droite dn
Gardon.
Préso, s. f. Une prise de tabac, un bol de lait d’Anesse;
prise d'eau, barrage de moulin constrait pour établir une
dérivation d’un cours d'eau.
Préssa, ado, adj. m. et f. Pressé, ée, impatient,
affairé.
Dér. du lat. Pressus, pressé. — Sès bé préssa? vous
êtes bien pressé de partir ?
Prèsso, s. f. Empressement, diligence, hâte; presse,
foule, multitude de personnes qui se pressent les unes les
autres. — Y'a prèsso, il y a grande affluence. Y'a pasprèsso,
il n'y a pas péril en la demeure.
Dér. du lat. Pressus, pressé, foulé.
Présta, v. Prôter, donner sous condition de rendre à
ane époque déterminée avec ou sans intérêts. — Sé présta,
aider, faciliter, seconder les désirs ou les volontés de
quelqu'un; prêter, s'allonger, s'assouplir sous un effort
sans se rompre.
Dér. da celt. Prest, ou du lat. Prestare.
PRO 565
Préstaire, airo, s. m. et f. Prèteur, prèteuse; celui
ou celle qui prête.
Préténdu, udo, s. m. et f. Prétendu, prétendue, an
accordé, une accordée, un fiancé, une fiancée.
Prim, imo, adj. m. et f. Mince, fin, délié, grèle, svelte,
menu.
Primacholo, s. /. Plante étiolée, menue, grêle, élancée
pour avoir été semée trop dru. — Primacholos, plur, Défaut
d'égalité dans le fil qui n’est pas uni, dont certaines parties
sont trop fines, d’autres trop grosses.
Primo, s. . Le printemps.
Dér. du lat. Prima. — Primo, une jeune traie qui n'a
pas encore porté.
Dér. du lat. Primapara.
Primo, adj. f. Première. — La Primo-doubo, le point
du jour, la première clarté qui annonce, qui précède
l'aurore.
Dér. du lat. Prima, m. sign.
Prim, primo, adj. m. et f. Économe, ménager avec
excès ; avare, tenace, — Voy. Cago-prim.
Priou, s. m. Prieur; le possesseur d'un prieuré.
Dér. du lat. Prior, le premier.
Pris, s. m. Prix, valeur d'un objet; récompense accordés
à celui qui réussit le mieux dans un exercice mis au
concours.
Dér. du lat. Pretium, prix; et, dansle deuxième cas, de
Præmium, récompense.
Prisa, v. Priser, prendre du tabac à priser.
Prisoü, s. f. Prison, maison de force ou de détention
où l'on enferme les accusés et les coupables.
Dér. du lat. Prehensio, d'où la bass. lat. Prisio, prison.
Prisougnè, èiro, s. m. et f. Celui ou celle qui est
détenu en prison ou qui est tombé au pouvoir de l'ennémi,
en parlant des soldats.
Priva, v. Priver, ôter à quelqu'un une chose qui lui est
agréable.
Dér. du lat. Privare, m. sign. — Vous n'én privés pas,
ne vous faites pas faute de cela, prenez-en à votre volonté.
Proche, adv. Près, auprès. — Démoro proche dé moun
oustdou, il habite dans mon voisinage.
Dér. du lat. Proæimè,
Prochi, adj. m. et f. Proche. — És moun pu prochi
parén, c’est mon plus proche parent. Soun mas pu prochi
paréntos, ce sont mes plus proches parentes.
Dér. du lat. Proximus, m. sign.
Proio, s. [. Proie.
Prone, s. m. Discours ou sermon que le curé ou le
vicaire prononcent le dimanche, à l'église paroissiale, sur
l'épitre ou l'évangile du jour,
Dér. du lat. Præconium, publication.
Prou, s. m. Profit. — Bon prou vous fague, grand bien
vous fasse. N'éx fara pas jamaï soun prou, ilnes'en tirera
jamais.
7
566 PRU
Prou, «dv. Assez, suffisamment, On l'emploie aussi dans
le sens de beaucoup, trop.
Parla prou et bièn
Van jamaï pa ’nsén.
Proufi, s. m. Profit, avantage, utilité, progrès, amélio-
ration.
Dér. dulat. Profutus, progrès, avancement, profit. —
Poudès pas vous apara dou proufi, Vous ne pouvezpas vous
garer de la bonne chance.
Prounte, ounto, adj. m. et f. Vif, bouillant, emporté;
actif, diligent. — Siègues pas tan prounte, ne sois pas si
vif.
Dér. du lat. Promptus, formé de Promere, mettre devant,
tirer; disposé, résolu.
Prountitudo, s./. Promptitude, vivacité, emportement.
— És un co dé prountitudo, c'est un mouvement de
vivacité.
Prouvénçäou, alo, adj.
çal, ale; qui est de Provence.
Dér. de Prouvénço, Provence, dont l’étymologie vient
de Provincia, province, nom que lui donnaient les Romains.
Prouvénço, s. pr. f. Provence, ancienne province de
France, formée des départements des Bouches-du-Rhône,
du Var et des Basses-Alpes et dont Aix était la capitale.
Dér. du lat. Provincia, province, nom par lequel la
désignaient les Romains.
Prouvénquo, s. f. Pervenche, Vinca major, Linn..Les
anciens la considéraient comme le symbole de la joie.
Plante de la famille des Apocynées.
Prouvési, v. Pourvoir, donner, fournir, donner ce qui
est nécessaire aux besoins ; prévoir.
Dér. du lat. Providere, m. sign.
Prouvési (Sé), v. Se pourvoir, se fournir de choses
nécessaires ou utiles, en appeler devant les tribunaux.
Prouvésiou, s. f. Provision, collection de choses néces-
saires ou utiles; trousseau de linge; réserve de denrées
ou substances alimentaires.
Dér. du lat. Provisio, m. sign.
Prudome, s. m”. Ormin des prés, Salvia verbenaca,
Linn. Cette plante ressemble beaucoup à la Touto-bono
(Salvia sclarea), et les botanistes les désignent toutes deux
par le mème nom; mais cette dernière est aromatique.
Prugnè, s. ». Prunier, arbre de la famille des Rosacées,
dont il existe plusieurs espèces.
Dér. du lat. Prunus.
Prunarédo, s. f. Prunelaie, champ planté de pruniers.
Nom pr. de lieu.
Pruno, s. /. Prune, fruit du prunier, — Flowra coumo
uno pruno, (qui a le visage rose et plein de fraicheur.
Prus, s. m. Le fil d'une lame tranchante, d’un couteau,
d'un rasoir, — Douna lou prus, donner le fil à une lame.
A bon prus, ce couteau, ce rasoir sont bien affilés. Au fig.
Bouta én prus, mettre en appétit.
et subst. m. et f. Proven-
PUR
Pruséto, s. f. La chatouille. — Faïre prusét6, faire la
chatouille.
Prusi, v. Démanger, cuire. —Ségrato ounte i'é prus,
se dit au fig. pour il se gratte où cela le chatouille; il sent
où le bât le blesse,
Prusije, s. m. Démangeaison, prurit.
Pu, adv. Plus, davantage. Expression quantitative
opposée à mén, moins. — Sèr pu-z'éroùs qué brave, nous
avons plus de chance que de mérite.
Dér. du lat. Plus.
Pu, puro, adj. m. et f. Pur, pure; qui n'est point altéré
par le mélange d'une matière étrangère; qui n’est pas souillé.
— Dé vi pu, d'aïgo puro, du vin pur, de l’eau pure.
Dér. du lat. Purus, m. sign.
Pu, 3° pers. du s. du présent de l'ind. du v. Pudi, puer,
avoir mauvaise odeur. Il ou elle pue. — Sén qué pu, il pue.
Acù mé pu, cela m'ennuie, cela m’agace.
Dér. du lat. Putere, m. sign., ou du grec uw, corrom-
pre, pourrir.
Pudén, énto, adj. m. et f. Puant, puante, qui répand
une mauvaise odeur.
Dér. du lat. Putidus, m. sign.
Pudi, s. #7. Nom donné dans le Languedoc à l'Anagyris
fœtida.
Pudi, v. Puer, répandre une mauvaise odeur. —
Pardoulos pudou pas, paroles ne puent pas.
Dér. du lat. Putere, m. sign., ou du grec Iuôw, corrom-
pre, pourrir.
Pudicino, s.f. Puanteur, infection.
Pudis, subst. m. Le putois, Mustela puterius, Lino.
Sorte de belette nommée Pudis à cause de la mauvaise odeur
qu’elle répand lorsqu'elle est échauffée ou irritée ; l'Anagyris
fœtida, Linn., ou ‘bois puant, plante qui croit en Lan-
guedoc.
Puio, subst. f. Dent de râteau, de roue dentée, de herse,
de peigne.
Dèér. de l’espagn. Puia, pointe, épine.
Pupu, s. #1. La huppe. — Voy. Lupégo.
Purèïo, s. f. Purée; légumes réduits en pâte, tels que
pois, haticotéé lentilles, etc,
Dér. du lat. Purata pisa.
Purèsi, s. m. Pleurésie; maladie causée ‘par l'inflam-
mation de la plèvre du poumon.
Dér. du lat. Pleuritis, plèvre.
Purgatori, n. pr. m. Purgatoire, lieu où les âmes des
justes expient les fautes légères qui n’ont pas été purifiées
pendant la vie; lieu de souffrance. — Mé fai passa
moun purgatori, il me fait passer en ce monde par le
purgatoire, il me cause des ennuis, des souffrances morales.
Dér. du lat: Purgatorium, dér. de Purgare, purger,
nettoyer, purifier.
Purja, v. Purger, donner un purgatif; nettoyer, Ce
Dér. du lat. Purgare, m. sign.
Purjo, s. /. Une purgation, un purgatif.
PUS
| Puro, adj. 1. — Voy, Pu.
Pus, subst. m. Pus, liquide prodait par la suppuration
d'ane plaie ou d’un uleère.
PUS 367
Pus, adv. Plus, expression privative, — N'én pode pus,
je n'en puis plus, je suis harassé.
Pusäou, s. m. Le galetas, le grenier, le plus haut étage
de la maison. Composé de deux mots pus et dou, plusethaut.
Q
QUA
Quadrublo, s. f. Quadruple ou demi-pistole, monnaie
d'or d'Espagne, valant de 80. à 84 francs.
Dér. du lat. Quadruplex, parce que sa valeur est de
quatre louis. y
Qualita, s. f. Qualité, différence qui distingue une chose
d'une autre; propriété de chaque chose; ce qui modifie
l'essence des choses; ce qui fait qu’elles sont bonnes ou
mauvaises, grandes ou petités; noblesse distinguée, titre
d'honneur.
Dér. du lat. Qualitas, m. sign.
Quand, adv. Quand, lorsque. — Quand i sérès? Quand
vous serez prêt ? se dit comme avertissement lorsqu'on fait
une chose qui demande. un effort simultané de deux ou
plusieurs personnes. Véndraï quand mèmo, je viendrai
quand même. Véndra noun saï quand, il arrivera je ne
sais quand.
Dér, du lat. Quando, m. sign.
Quant, adv. Combien, quel nombre. — Quant sès?
Combien êtes-vous? Quant n'ia? Combien y en at-il?
Quant qué n'iague, quel qu'en soit le nombre. N'ia noun
saï quant, il y en a je ne sais combien.
Dér. du lat. Quantum, m. sign.
Quant à, adv. Quant à, pour ce qui est de. — Quant
à iéou, pour moi, en ce qui me concerne. Quant à sou,
quant à soi. — Garda soun quant-à-souè, conserver sa
liberté d'action, se tenir sur la réserve.
Quante, quanto, pr, conj. m. et f. Quel? lequel? —
Quante vos? lequel veux-tu? Quante és lou mioù? quel est
le meilleur? Quante qué sièque, quel que ce soit.
Quäou, pr. conj, m. Qui? — Qudou pico? qui frappe?
Qudou tron és aquél? qui diable est celui-là? Quéou qué
sièque, qui que ce soit.
Quäouque, quâouquo, pr. indéf. m. et f. Quelque,
certain, un ou plusieurs, quelques-uns, quelques-unes. —
Qudouque pdou, quelque peu. Quéouque jour, un certain
jour. Qudouque marias, quelque polisson. Qudouques
moutous, quelques moutons: Quéouquos figos, quelques
figues |
Quâouquun, uno, s. indéf. m. et f. Quelqu'un, quel-
qu'une; un homme, une femme, un entre plusieurs. —
Quéouquun és véngu, quelqu'un ou un homme est venu.
Quéouquun vous démando, quelqu'un vous demande.
QUA
Quäouquus, s. indéf., s'emploie aussi pour Quéouquun.
Quaréla, v. Quereller, chercher querelle.
Dér. du lat. Querela.
Quarèlo, s. f. Querelle, dispute, rixe.
Dér. du lat. Querela, plainte, lamentation.
Quart, subst. m. Quart, quartier, quarteron. — Ës uno
ouro manquo un quart, il est une heure moins le quart.
Dér. du lat. Quarta pars.
Quartalado, s. /. Plein une quarto, — Voy. €. m.
Quartäou, s. ”. Un quartaud, mesure de capacité
équivalente à 25 litres, qui est le quart de cent litres.
Quartéïirou, s. m. Quarteron, quatrième partie d'un
cent et d'une livre. — Un quartéiroù dé poumos, un quar-
teron de pommes ou 25 pommes. Un quartéiroù dé sucre,
quatre onces de sucre, qui forment le quart de la livre de
16 onces, équivalente à 500 grammes. Le quarteron pêse
donc 425 grammes, et l'once 31 grammes 25 cent.
Quartiè, s. ”m. Quartier, quatrième partie d'une chose ;
gros morceau tiré d'une masse plus considérable; partie
d’une ville, d'un village, d'un territoire; les deux côtés de
l'empeigne d'un soulier qui embrassent le talon; l’une des
quatre phases de la lune. — Un quartiè dé poumo, un
morceau d'une pomme coupée en quatre. Un quartiè dé
ran, un fragment, un quartier de roc. Un quartiè dé por,
un morceau de viande de porc. Sèn ddou mèmo quartiè,
nous sommes du même quartier de la ville. Lou quartiè dé
Maze, le quartier du territoire d’Alais appelé Mazac. Un
quartiè dé moun souïè mé cacho, un quartier de mon
soulier me blesse,
Quarto, s. j. Ancienne mesure de grains, équivalente à
un décalitre. D'après SauvAGss, il parait que de son temps
la quarte était équivalente à la seizième partie de la salmée,
tandis que de nos jours on la considère comme équivalant
au vingtième de la salmée composée de 20 décalitres.
La quarte est aussi une ancienne mesure agraire équi-
valente au vingtième de l'hectare, soit cinq ares. D'après
Sauvaces elle équivaudrait au seizième de la salmée
agraire, dont la surface est de 79 ares 80 cent... c.-à-d.
5 ares, à un centiare près.
Quatre, adj. num..m. Quatre, nom de nombre. Le
caractère &,. qui indique le nombre quatre. — Quatre dé
chifro, sorte de piège soutenu. par de petits bâtons disposés
568 QUI
en forme du chiffre 4. Lous quatre cantous, le jeu des
quatre coins; le carrefour de deux rues qui se croisent.
Dér. du lat. Quatuor, m. sign.
Quatre-vingt, adj. num. m. Quatre-vingt, nom de
nombre exprimant quatre fois le nombre vingt.
Qué, pr. conj. Qui, qu'est-ce, eh bien, dont. —
Qudou és qué crido? qui est-ce qui crie? Qué? Qu'est-ce ?
quoi? Qué? crousté! Eh bien, qu’en dis-tu ? (Voy. Crousté.)
Douno ié ço qu'a dé bésoun, donne lui ce dont il a besoin.
— Voy. aussi Dé-qué.
Qué, con. Que. — Vous dise qué véndraï, je vous affirme
que je viendrai. Voulés qué partié? voulez-vous que je parte ?
Què,s. m. Quai, chaussée, ouvrage défensif qui longe
et encaisse une rivière; gros mur en talus construit au
bord d’une rivière pour retenir les terres et empècher les
ravages des inondations.
Dér. du v. lat. Caïare, arrêter, retenir.
Quèli, s. m. En style badin, habit. — Aï més lou quèli,
j'ai mis l'habit, j'ai fait toilette.
Quénti (Sen), n. pr. de lieu, m.s. Saint-Quentin, village
situé près d'Uzès, où l’on fabrique de la poterie grossière.
Quéntignè, gnièiro, s. m. Cantinier, cantinière.
Dér. de Quéntino.
Quéntino, s. f. Cantine, lieu de réunion où les soldats
se rendent pour boire et manger à leurs frais dans la
caserne.
Dér. de l’ital. Cantina, cave.
Quère, v. Chercher, quérir. — Mé véndrés quère!
attendez-moi sous l'orme. Dé qué i'anavias quère? qu'alliez-
vous faire dans cette galère? Manda quère, envoyer
chercher.
Dér. du lat. Querere, m. sign.
Quéstiou, s.f. Question, demande ; altercation, dispute.
— Dé qués quéstiou ? de quoi s'agit-il? An agu dé quéstiou,
ils ont eu des querelles, des discussions.
Dér. du lat. Questio, dont le rad. est Querere,
demander, chercher (dispute).
Quéstiouna, v. Questionner, demander des renseigne-
ments, interroger.
Quèto, s. f. Quête, collecte faite dans un but religieux,
charitable ou patriotique. Emprunt fait au français.
Dér. du lat. Queærere, demander.
Quia, ado, adj. m. et f. Debout, dressé, planté, perché,
jaché. — Ës quia coumo un pancël, il est planté comme
un échalas.
Dér. du bas bret. Kit où Quille, m. sign.
Quia, v. Dresser des quilles.
Quiaïre, s. m. Celui qui est chargé du soin de remettre
en place les quilles abattues par les boules des joueurs.
Quiala, v. Crier, pousser des cris vifs et perçants, plaintifs
ou stridents, comme certains animaux, tels que les chiens.
Dér. du sanser. Khyd, crier, parler.
Quialadisso, s. /. Suite de cris vifs et perçants continués
sans intermittence. — Voy. Quiala.
QUI
Quialaïire, aïro, s. et adj. m. et f. Celui ou celle qui
pousse des cris perçants ou stridents. .
Mème étym. que les deux mots précédents.
Quicha, v. Serrer, presser. On dit aussi ésquicha. —
Voy. c. m.
Quichado, s. f. Serrée, violente étreinte. — Voy.
Ésquichado.
Quiché, s. ». Verrou plat, targette.
Quicho-quichou, s. comp. m. Jeu d’attrappe parmi les
écoliers, dont l’un dit savoir une nichée : Save uno
nisado dé quicho-quichoÿ. Si quelqu'un prête son dos au
dénicheur, il en est puni par quelque coup de genou sur
les épaules et sur le dos.
Quicon ou Quoucon, s. indéf. Quelque chose. — Quicon
m'ou disiè! j'avais le pressentiment de cet évènement.
Y'a fa quicon, on voit qu'il a travaillé à cela. T'a fa qui-
con ? as-tu à te plaindre de lui?
Quicoumé, dim. de Quicon. Quelque petite chose. Un
mendiant dit : Douna-mé quicoumé, donnez-moi quel-
que petite aumône.
Quiè, quiècho, adj. m. et f. Cuit, cuite, qui a reçu
par l’action du feu le degré de cuisson nécessaire. — Au fig.
Aquêl home és quiè, cet homme est perdu.
Dér. du lat. Coctus, m. sign.
Quiècho, s./f. Cuite, quantité d'ouvrage qu’on fait cuire
à la fois; cuisson, l’action de cuire. — Uno quiècho dé pan,
une fournée de pain. Aquélés césés soun débono quiècho, ces
pois chiches sont de facile cuisson.
Dér. du lat. Cocta.:
Quièïisso, s. f. Cuisse; partie du corps des animaux
qui s'étend jdu genou au bassin. Elle est soutenue d’an
seul os nommé fémuar.
Dér. du lat. Coxa, m. sign. — Quiéisso dé nose, un
quartier de noix.
Quièr, s. m. Cuir, la peau des grands animaux en
général, préparée et tannée ou corroyée.
Dér. du lat. Corium, m. sign. — Té véou tana lou quièr,
je vais te donner une râclée. Rabala coumo un quier,
ravaler un homme, le mépriser, l’accabler d’injures et de
coups.
Quinarédoun, s. ». Cynorrhodon, ou rose sauvage.
Dér. du grec Kuvés, chien, et Péèov, rose. ,
Quincaïaïre, s. m. Quincaillier, petit mercier.
Quincaïaïriè, s. f. Quincaillerie, magasin de petite
mercerie.
Quincaïè, s. m. Quincaillier, petit mercier.
Même sign. que Quincaïaïre.
Quinqua, v. Soufller, ouvrir la bouche, murmurer. —
Né quinco pas uno, il ne souffle pas mot.
Quinqué, s. m. Quinquet, lampe à suspension et à
double courant d'air.
Du nom de l'inventeur, M. Quinquet.
Quinsar, s."”,. — Voy. Quinsoù.
Quinsoü, s. m. Pinson, gros-bec pinson, Fringilla
QUI
o œlebs, Temm. Pinson commun; oiseau à front noir,
haut de la tête et nuque bleu cendré, dos châtain, un peu
olivtre, croupion vert, tout le dessus du corps lie-de-
vin un peu roussâtre, des bandes blanches sur les ailes;
c'est le pinson ordinaire dont la gaieté est devenue prover-
biale.. Une autre variété, appelée pinson des Ardennes,
gros-bec des Ardennes /Fringilla montifringilla, Temm.),
qui a le dos d’un noir luisant, le ventre blanc, la poitrine
d'un beau roux et la queue noire liserée de blanc, nous
visite également et porte le mème nom.
Étym.. probable de l'allem. Pinck, mot dont la pronon-
ciation imite assez bien le chant de cet oiseau; ou de Kin/
Kin! onomatopée qui se rapproche de ce même chant, —
. Voy. Quinsar.
Quintaïè, s. m. On donne ce nom à des hommes qui,
pendant l'éducation des vers à soie, ramassent la feuille de
mürier à tant le quintal; le peseur public.
Quintâou, s. m. Quintal, poids de cent livres; quintal
métrique, poids de cent kilog. ou dixième de la tonne.
L'ancien quintal d'Alais on quintal petit-poids, équivalait
à 1 k. 589, soit 83 livres en nombre rond.
Du grec Kevrévaptov, cent livres.
Quinte, quinto, adj. conj. m. et f. Quel, quelle. Au
plur. Quintes, quintos. — Quinte malur! quel malheur!
Quinto. michanto bèstio ! quelle mauvaise bête! Quintes
camis! quels mauvais chemins! Quintos carièiros/ quelles
rues mal tenues!
Quinze, adj. num. Quinze.
Dér. du lat. Quindecim.
Quinzéno, s. . Quinzaine, nombre de quinze jours
consécutifs. — As touca ta: quinséno? as-tu touché le
salaire de tes quinze journées de travail? On appelle à
Alais la quinzéno, le quinzième jour qui suit la foire de la
Saint-Antoine, qui.est fixée au 47 janvier. Véndraï pér la
quin séno, je viendrai le quinzième jour après la foire.
Quinze-ounco, s. m. comp. Quinze-onces; se dit d'un
homme où d'un enfant d'une faible corpulence, pour dire
qu'il est frèle et malingre.
Quio, s. f. Quille, morceau de bois en forme de cône
allongé servant au jeu de quilles, que l'on abat avec des
boules.
Dér. du bas bret. Kil ou Quille, m. sign.
Quiou, s. m. Cul, partie postérieure du corps de
l'homme et des animaux. — À moustra soun quiou, il s'est
enfui.
Quioulas, augm. de Quéou.
Quiouté, dim. de Quiou.
Quiou-blan, s. m. comp. Motteux ou vitrec, cnl-blanc,
traquet-motteux, Saæicola œnanthe, Temm. Toutes les
parties supérieures du: corps de cet oiseau sont gris-cendré ;
les inférieures et la queue blanches, la poitrine roussâtre,
QUU 569
les ailes et le dessous de la queue noirs. Cet oiseau arrive
ici en avril; recherche d'abord les lieux arides et mon-
tueux; au mois d'août, il descend dans les plaines et
affectionne les terres labourées; il choisit les mottes
saillantes pour s'y poser et on le voit alors faire un mou-
vement continu, pareil à celui da hoche-queue. Le nom de
cul-blanc est une sorte de nom générique qui peut s'appli-
quer à plusieurs oiseaux du mème genre.
Quiou-plouma, s. m,. comp. Sobriquet que l'on donne
à l'espèce des singes qui ont les fesses dépourvues de poil.
Mouninéto, quiou-plouma,
Pér un sôou té fan dansa.
Quista, v. Quêter,
Quistaire, s. m. Quêteur, celui qui quête; un solli-
citeur.
Quita, v. Quitter, laisser; se dépouiller d'un vêtement,
cesser une action commencée. — Quitæ lou traval, sus-
pendre ou cesser de travailler. Quités pas dé faïre aqud,
n'interrompez pas le travail que vous faites.
Dér. de l'espagn. Quitar, ter, arracher, enlever.
Quitança, v. Quittancer, donner une quittance, un
reçu, un acquit à un débiteur.
Dér. du lat. Quietare, dér. de Quietum facere, laisser
tranquille, laisser les débiteurs en repos.
Quitanço, s. /. Acte par lequel un créancier libère son
débiteur. — Aï un véntre coumo uno quilango, j'ai le
ventre vide.
Quite, quito, adj. m. et f. Quitte, libéré à l'égard
d'un autre. — Sèn quite et bos amis, nous sommes quittes
et bons amis.
Quo, s. /. Queue, appendice formé par le prolongement
de la colonne vertébrale chez certains animaux. (Foy.
Quuïo). — Siès un la qud, tu es un nigaud, an niais, un
bénèt. La Qud dé Blannavo, l'innocent de Blannave.
Dér. du lat. Cauda, m. sign.
Quouar,s. m. Portion du corps d'un animal compre-
nant toute la région caudale et ses dépendances.
Quoucon, s. indéf.— Voy. Quicon.
Quouro, adv. Quand? Quand est-ce? Tantôt. — Quouro
véndrés? quand viendrez-vous ? Quouro canto, quouro
plouro, tantôt il chante, tantôt il pleure.
Dér. du lat. Quota hora.
Quuio, s. f. Queue d’un animal; poignée d'un vase,
d'une casserole, d’une poële; portion d’une pierre de taille,
d’un pavé qui pénètre et fait prise dans un mur ou dans
le sol. — Au.fig. faïre la quuio, tromper, duper quelqu'un;
lui faire tort. Toufle de plumes qui forme le prolongement
du corps des oiseaux; le dernier rang d'une troupe
d'hommes ou d'animaux.
Dér. du lat. Cauda, m. sign. — Voy. Quo.
570
R
RAB
R. La lettre R est la dix-huitième lettre de l’alphabet.
S'il faut en croire Pomponius, son premier emploi serait
dû à Appius Claudius. Cette lettre joue le plus grand rôle
dans la composition des langues, et il n’est guère possible
d'admettre l'origine récente que lui attribue l'écrivain
romain. Elle est la caractéristique de tous les infinitifs
des langues néo-latines, à l'exception de quelques dialeétes
provençaux et’ languedociens qui l'ont supprimée, etielle
est le signe, non seulement de l'actif, mais encore de
l'action.
Ra, s: m. Rat, Mus, Pour tous ces rongeurs, nos hôtes
toujours incommodes et: souvent très-malfaisants, que le
français nomme: à peu près indistinctement, surtout dans
le langage habituël, rats ou souris, lé languedocien se sert
seulement du prerier, et ce n'est que lorsqu'il s’agit dé la
très-petite souris qu'il emploie exceptionnellement le mot
furé. (Voy. ©. m:) Räa-dé-cavo, terme de mépris employé
pour désigner les employés des contributions indirectes. —
A bon ca, bon ra, à bon'chat, bon rat. Émpéita: coumun
ra ôn trés noses, empèché comme un rat entré trois
noix, ou comme un aveugle qui a perdu son bâton.
Dér. de la bass. lat: Ratus, m. sign:
Ra, s. m. Caprice, fantaisie. Se dit surtout. des très-
jeunes enfants qui pleurent souvent sans motifs apparents.
— Aquél éfan a soun ra, cet enfant à ses caprices: Vèn
d'avédre un ra, il vient d'avoir un moment de caprice.
Ra, adv. Près, auprès. On dit aussi raz, al raz. — Ra
dé vous, auprès dé vous. Ra'd’ase} voisin d’un âne,
Raba, s. m. Rabat; morceau de. toile qui fait le tour
du cou, monté sur’ un porte-rabat et qui descend sur la
poitrine en forme de carré long. Cette partie! de vêtement
portée autrefois par tons'les hommes n'est plusteñ/usäge,
depuis longtemps, que parmi les ecclésiastiques et lésigéns
de robe; ilest ainsi nommé parce qu’antrefoisicé n’était que
le col de la chemise rabattue en dehors: On appelle aussi
raba une peau de mouton que l'on déploie sur le’ dos d'un
cheval en! temps de pluie et que l’on roule. sur le
garrot'en la rattachant au collier /coulas), en temps ordi-
nairé.
Rabala, v. Trainer, entrainer, .emmener. — Sé rabalu,
se traîner avec peine. Rabala coumo un quièr, trainer
quelqu'un par terre; l’accabler d’injures. Sé faï rabala,
il se fait emmener de force. Po pa sé rabala, il peut à
peine se trainer.
Rabaladis, s. m. Bruit que l'on fait en traïnant quelque
chose; train, embarras, remue-ménage; objet trainé;
personne embarrassante, ficheux. — Quinte rabaladis!
RAB
avèn prou dé rabaladis, quel vatarme! nous avons bien
assez d'embarras. Véjo aïcà un rabaladis, voici un fâcheux.
Rabalado, s. f. Trainée, action de trainer, s'emploie au
fig. pour indiquer les avanies que l'on a fait subir à
quelqu'un. — Té y-aù ficha uno rabalado! je l'ai mis plus
bas que terre, je l'ai accablé d'injures.
Rabaléto (Dé), eæpr. adv. Terre-à-terre, rez-terre, —
Gita uno päro dé rabaléto, lancer une pierre rez-terre' ou
à la surface de l'eau, de manière à produire des ricochets:
Rabanèlo, s. f. Grillade-de châtaignes.
D'après SAUVAGES, ce terme serait employé pour rabi-
nèlo, dér. de rabina, grillé, brûlé.
Rabanénquo, s. f. Ombré commune, Salmo thymallus,
Linn. Ce poisson est assez abondânt dans le Gardonet il
est presque aussi recherché que la truité à cause de la
saveur de sa chair. Tête arrondié, semée de points noirs;
dos d'un vert bleuâtre, rayé longitudinalement de’ bandes
noirâtres, ventre blanc, nagéoires rougeâtres, là grande
dorsale tachée de verdâtre et mouchetée de brun.
Rabasso, s. f. Truffe noire. On l'appelle aussi Trufo-
négro. (Voy. c. m.) Truffe comestible, Zycoperdon tuber,
Linn. Cryptogame qui végète dans la’térre sans racines
et sans feuilles. |
Dér. de Rabo, rave, et dé la termin. augm. où péjorat.
asso, grosse rave ou vilaine rave.
Rabassô, oto, adj. m. et f. Trapu et fortement consti-
tué. Homme ou femme de petite taille mais à la muscula-
ture bien développée; courtaud.
Rabasto, s. f. Pièce de charpente de moyenne grosseur
posée entre la poutre et les solives. Au plur. Rabastos,
traverses du plancher d'une charrette, sur lesquelles portent
les montants (ranchés) qui soutiennent les ridelles. Débris
du filage de la soie.
Rabe, s. m. Radis ou raifort, racine potagère de la
fam. des Crucifères, que l'on mange’ crue à la croque-au-
sel au commencement des repas ou comme entremets
(Raphanus). — Uno manado dé rabes, une hotte de radis.
Rabe, s. m. Racine d’une plante à racine pivotante;
pivot central de la racine d’an’arbre.
Rabéirés, s. ». Châtaigner d’une espèce particulière.
Rabéïréso, s. f. Châtaigne d'une espèce particulière
produite par le Rabéïrés. — Voy. C: m-
Rabi, s. m. Radis, raifort /Raphanus). On l'appelle
aussi Rabe. — Voy. c. m.
Rabidos, s. m. La rotule du genou des moutons, en
v. fr. le garignon. C'est l’astragalus ou le talus, avec lequel
les Romains jouaient aux osselets. — Jouga dâou rabidos
RAC
ou à bédin-bédès, jouer aux osselets. — Voy. Bédin-bédèds.
Rabièiro, s. f. Une ravière, on champ de raves. On
* appelle ravière, en Normandie, un champ de navets.
*_ Rabina, s. m. Le rissolé d'une pièce rôtie ou de tout
autre mets cuit au four qui a pris-trop de cuisson et sent
le roussi. — Sén lou rabina, cela sent le roussi, le brülé.
Rabina,v. Roussir, brüler, laisser trop cuire un mets;
roussir le linge en le repassant.
Rabino-sardo, s, mn. comp. Un avare qui met si peu
d'huile dans: la-poële qu'au Jieu de frire les sardines il les
brüle. Synonyme. de fesse-mathieu.
Rabissano, s. f. Fane. d'une rave, d'un navet; feuilles
radicales de certaines plantes; viorne des haies à large
- feuille ou grande clématite, connue sous les noms de vigne
blanche, berceau de la vierge, herbe au gueux (Clematis
vitalba, Linn.). Celle.que l'on trouve près d’Alais, sur les
bords du Gardon, est la Clematis recta de Linn,, plante de
la famille des Renonculacées.
Rabisso, s. f. La fane d'une rave, d'un navet. On dit
aussi Rabissano. — Voy.c. m.
Rabo, s. f. La rave proprement dite, on navet rond,
Brassica rapa, Linn., plante de la famille des Crucifères.
Cette racine, fort commune dans les Cévennes, l’est encore
plus dans le.Limousin dont Rabelais appelle les habitants
mâche-râbes.
Du lat. Rapa, dér. du celt. Rab.
Rabô,,s. m. Rabot, outil de menuisier servant à unir
où à amincir le bois. Le rabot ne diffère de la varlope
qu'en ce que ses dimensions sont, moindres.
Dér. du lat. Radere, râcler.
Rabouta, .v. Raboter, polir, unir, aplanir le bois avec
le rabot.
Dér. de Rabd.
Racagné, s. f. Saletés, ordures. — Quinto racagnè/
quelle saleté !
Dér. de Raca, vomir.
Racaié, ou Ra-caïé, s. m. Lérot, Mus nitela, Gmel.
Ratdes champs qui ravage les fruits des. jardins et pénètre
mème dans les maisons isolées des campagnes. Il est d'un
gris brun ou fauve au-dessus, blanchâtre au-dessous, avec
une plaque noire autour de l'œil qui va en s'élargissant
jusqu’à l'épaule ; le bout de sa queue est touffa, formant
une sorte de houppe.noire terminée de,blanc, ce qui lui a
valu le surnom de caïé, qui veut dire pie ou blanc et noir.
Le Loir, un pen plus gros toutefois que le Lérot, dont le
nom ne semble qu'un dimin. de celui de Loir, ne diffère
du Lérot que par sa queue qui est touflue sur toute sa
longueur. Is ont d'ailleurs tous deux les mêmes habitudeset
s'engourdissent pendant l'hiver, le Lérot un peu moins
profondément que l'autre, devenn en français le type du dor-
meur, et qui aussi pour cela a reçu du languedocien le nom de
-dourmêire mais. ce nom, pas plus que.celui de Ziroun,
n'est en {usage. Le Loir, beaucoup moins, commun, passe
pour un Lérot de plus grande taille.
RAF 571
Racaïo, s. [. Racaille, le rebut et la lie du peuple, et,
par extension, tout ce qui est mauvais ou de rebut.
Du grec Parce, nn gueux, un va-nu-pieds, un homme
de rien.
Racéja, v. Tenir de sa race, en avoir hérité des bonnes
comme des mauvaises qualités. — Raço racéjo, s'emploie
proverbialement pour dire que les enfants tiennent de leur
pére.
Racina, v. Pousser des racines. — Aquél doubre a bièn
racina, cet arbre a jeté de nombreuses racines.
Racina, ado, adj. m. et f. Qui a de belles et fortes
racines. — Aquél doubre és bièn racina, çet arbre a de
nombreuses.et fortes racines.
Racinaje, s.m. L'ensemble des racines d'une plante,
d’un arbre, comme le branchage est l’ensemble des branches
d’un arbre.
Racinas, s. m. Grosse racine, augm. de Racino.
Racino, s. f. Racine, portion du végétal par laquelle ce
dernier est attaché au sol et emprunte à.la terre ses sucs
nourriciers; base des cheveux, des dents.
Dér. du lat. Radiçina, m. sign.
Raço, s. f. Race, extraction, lignée, tous ceux qui
viennent d'une même famille, qui descendent d'une. mème
souche; on le dit aussi pour espèce. — Cassa dé raro,
chasser de race; avoir les bonnes ou les mauvaises qualités
de ses parents.
Dér. du lat. Radix, Radicina, m. sign.
Racrô, s. m. Raccroc. Coup inattendu dans certains
jeux d'adresse. — Acd's un racrà, c'est un coup dehasard.
L'as prés pér racer, tu l'as attrappé par hasard.
Radécavo ou Ra-dé-cavo, s. m. Terme de mépris par
lequel on désigne les employés des droits réunis, les:com-
mis des contributions indirectes. Ce sobriquet, que l'on
doit traduire littéralement en français par rat-de-cave, ire
son étymologie des fonctions mème de ces employés dont
la mission est de fouiller les caves pour s'assurer qu'il n'y
existe aucune contravention.
Radouta, v. Radoter, tenir des discours dépourvus de
suite et-de sens, effet ordinaire de la décrépitude.
Radoutur, uso, #. m.-et f. Radoteur, euse, celui on
celle:qui radote.
Rafataio, s..f. Herbages communs et de peu de valeur ;
rebut d'une denrée; objets embarrassants plutôt qu'utiles.
Au fig. la lie du peuple.
Rafatal, s. m. Embarras, objets encombrants, choses
ennuyeuses, objets sordides. -— Éscampo-mé aquél rafatal!
Jette-moi toutes ces loques !
Raflo, s. f Rafle, coup où tous les dés viennent au
mème point. — Raflo dé bidé, coup de dés qui amène le
point un sur tontes les faces.
Rafo, s. f. Grande corbeille de marchand de verre
ambulant, qui de là est ;appelé rafè. — Pourta én rafo,
porter un paquet entre les deux épaules comme,les, soldats
portent leur havresac.
572 RAL
Rago, oto, adj. m. et f. Trapu, gros et court. — Voy.
Rabassd.
Ra-grioule, s. m. Rat d’eau, campagnol amphibie,
Arvicola amphibius, Lacép. Quadrupède à peu près de la
couleur et de la longueur d’un rat ordinaire, mais plus
gros, avec le museau et la queue plus courts. Quoiqu'il ait
les doigts séparés, il nage facilement et plonge pendant
longtemps. Il choisit de préférence les cours d’eau les
moins fréquentés pour y établir domicile, vivant comme
la loutre à qui, par le naturel et les habitudes, il res-
semble beaucoup plus qu’au rat.
Grioule, vient de Glis, gleris (Loir), dont on avait fait
un nom de famille. — Ésfraïa coumo un ra-grioule, se
dit d'un homme qui s'épouvante facilement, d’ane poule
mouillée.
Raï, s. ". Rayon de lumière, rayon de soleil; rais ou
rayon d’une roue de voiture, de charette qui rattache le
moyeu aux jantes.
Dér. du lat: Radius, m. sign.
Raïa, v. Rayer, bifler.
Dér. de Raïo, ligne, barre. — Voy. c. m.
Raïa, v. Railler, se moquer.
Raïo, s. f. Raïe, ligne, trait que l’on marque avec une
pointe à tracer, une plume, etc.
Raïôou, olo, subst. et adj. m.et f. Royaliste; sobriquet
donné aux Cévenols sous les premiers Valois à cause du
zèle qu’ils déployèrent pour les intérêts du roi de France
et du courage avec lequel ils s'opposèrent aux entreprises
des Anglais qui occupaient la Guyenne. Cette dénomi-
nation, considérée aujourd’hui par le peuple comme inju-
rieuse, n'est que le synonyme de fidélité.
Raïre, s. m. Arrière grand-père.
Raïre-gran, s. f. Arrière grand'mère.
Raïsséja, v. Gémir, geindre, se plaindre ; être en con-
testation ; hésiter, balancer, marchander ; réchigner.
Raïsséjaire, s. m. Celui qui se plaint et gémit de ce
qu’il est forcé de faire quelque chose à contre-cœur et à
son corps défendant; celui qui obéit en réchignant.
Raja, v. Couler, perdre, ruisseler, fuir. — Za fon rajo,
la fontaine coule. Aquélo bouto rajo, ce tonneau perd. Raÿo
coumo la cambo, cette source coule gros comme la jambe.
Rajado, s. f. Un filet de liquide. — Uno rajado d'oli,
un filet d'huile.
Rajo, s. f. Rayon de lumière, rayon de soleil. — Za
rajo déou sourél, les rayons du soleil.
Dér. de l'ital. Raggio, rayon.
Rajôou, s. m. Le jet, le coulant d'une fontaine qui
s'échappe par un tuyau ou un robinet; le rapide d’une
rivière, le point où, la pente du lit d'une rivière étant plus
grande, l’eau coule aussi plus rapidement. L'eau étant
ordinairement moins profonde en amont du rapide, ces
points d’ane rivière offrent généralement un gué praticable.
Ralamén, adv. Rarement. — Acd arivo bé ralamén,
cette chose arrive bien rarement.
RAM
Rale, ralo, adj. m. et f. Rare. — Sès bé rale, vous êtes
bien rare, on vous voit bien rarement.
Dér. du lat. Rarus, m. sign.
Rama, v. Pousser des feuilles, se garnir de feuilles. —
Lous amouriès an bé rama, les müriers sont bien feuillés.
Rama, ado, adj. m. et f. Feuillu, feuillue, garni de
feuilles. — Rama coumo un câoulé, feuillu comme un chou.
Dér. du lat. Ramus, m. sign.
Ramado, s. f. Ramée, tonne couverte de ramée, sorte
de hutte ou de hangar, chambre ou cabinet de verdure
couvert d’une toiture de rameaux verts, garnis de leurs
feuilles ; une jonchée de feuillages.
Dér. du lat. Ramus, m. sign.
Ramado, s. f. Une averse, une ondée de pluie.
Dér. de l'esp. Enderamar, verser.
Ramaïsa, v. Adoucir, apaiser, calmer, faire cesser. —
Voy. Amaïsa.
Ramas, s. m. Augm. de Ramo. Gros rameau d'arbre;
bourrée composée de rameaux d'arbre.
Ramassa, vw. Ramasser, réunir, rassembler, entasser,
récolter, recueillir. — Fan ramassa lou mounde, ils ameu-
tent la foule, ils font de l’esclandre.
Ramassado, s. f. Ondée de pluie; attroupement, amon-
cellement. — Uno ramassado dé mounde, un attroupement.
Ramassaïre, s. m. Celui qui ramasse tout ce qu'il
trouve, qui ne laisse rien perdre, qui fait profit de tout.
Ramassaje, s. m. Ramassage, cueillette des fruits, de la
feuille. On le dit aussi pour ramassis.
Dér. de Ramassa. — Voy. c. m.
Rambaïa, v. Trainer rudement, mêler, embrouiller, et au
fig. rabrouer quelqu'un, le rembarrer, tracasser, brouiller.
— Té l'aï rambaïa, je l'ai vertement rembarré.
Rambaïado, s. f. — Séména à la rambaïado, semer à
pleines mains ou à terre perdue, par FEES à la
semaille en rayon ou grain à grain.
Rambaïaïre, s. m. Tracassier; celui qui traîne toujours
quelque embarras à sa suite.
Rambaïous, ouso, «dj. m. et f. Embarrassant, encom-
brant, qui occupe beaucoup d'espace et contient peu de
matière.
Rambal, s. m. Embarras, tracas, embrouillement. An
pr., objets encombrants, embarrassants. — Tout és én
rambal, tout est pêle-mêle, en désordre.
Ramboura, »v. Rabrouer, rembarrer. Ce terme s 'emploie
aussi dans le sens de rembourrer, matelasser avec de la
bourre, de la laine, du crin, ou autres matières élastiques.
Raméja, v. Donner à la vigne, à un champ de blé une
première culture.
Ramèl, s. ». Un rameau d'arbre ou d'arbuste coupé
avec toutes ses feuilles; enseigne de cabaret, de taverne,
de marchand de vin. L'usage de suspendre un rameau au-
dessus de la porte d'un cabaret remonte à la plus haute
antiquité. — À passa souto lou ramël, il s'est enivré.
Dér. de Ramo, feuillage, ramée.
TE OO
RAM
On dit raméous au plur. Lou diménche das ramèous, le
dimanche des Rameaux.
Dér. du lat. Ramwus, rameau.
Ramélu, udo, adj. m. et f. Rameux, euse; convert de
rameaux, feuillu.
Ramio, s. f. Bourrée formée de rameaux d'arbres;
ramilles; ramassis de menues branches.
Ramo, s. . Ramée fraichement coupée pour le bétail ;
de la feuille de mürier. — Ana à la ramo, aller à la
ramée; aller conper des rameaux pour le bétail; aller à la
cueillette de la feuille pour les vers à soie.
Dér. du lat. Ramus, rameau.
Ramo-counil, s. m. comp. Asperge sauvage, Asparagus
sylvestris, Linn. Les jeunes pousses de cette plante, bonnes
à manger, ont une saveur analogue à celle de l’asperge
des jardins, mais plus accentuée. Comme cette dernière,
elle est diurétique. Dans le Gard, on fait avec un paquet
de cette plante, une sorte de filtre que l’on place dans la
cuve vinaire au devant du trou d'écoulement pour l'empè-
cher de s'obstruer et de donner passage au marc du raisin.
- damo-counil, signifie littéralement : ramée de lapins.
Ramouna, v. Ramoner, nettoyer le tuyau d’une che-
minée, le débarrasser de la suie qu’il contient.
Dér. du v. fr. Ramon, sorte de balai fait avec des
branchages, que l'on fait couri r dans les tuyaux de cheminée
pour en détacher la suie.
Ramounè, s. m. Ramoneur, c elui dont le métier est de
ramoner les cheminées.
Dér. du chant des ramoneurs qui annoncent leur pré-
sence en criant par les rues : Oh/ ramoner les cheminées
de haut en bas!
Rampa, v. Ramper, se trainer sur le ventre; au fig.
s'humilier, s'abaisser devant les puissants.
Dér. du lat. Repere ou Reptare, m. sign.
Rampan, s. m. Rameau de laurier; rameau bénit de
Pâques-fleuries. Ce mot, dit SAUVAGES, paraît composé de
ram (rameaub),et de pan (pain), à cause des pains ou gâteaux
bénits que l'on suspend à ces rameaux le jour de Pàques-
fleuries. — Planta lou rampan, planter un rameau de
laurier au sommet d’une maison ou d'un édifice que les
maçons viennent d'achever, de couvrir sans accident.
Arousa lou rampan, sorte de banquet de gala que l'on
offre aux maçons pour les récompenser de ce qu'ils ont
achevé un édifice sans qu'il y ait eu de malheur ou
d'accident grave à déplorer.
Rampèl, s. m. Rampean. On fait rampeau au jeu de la
fossette, lorsque les deux joueurs font le mème point.
Dér. de Rampela, rappeler.
Rampéla, v. Rappeler, battre le rappel avec un tambour.
Au fig. grogner, bougonner; trouver sans cesse à redire.
Rampélan, s. m. Celui qui a triomphé deux fois dans
un jeu, une joute, une lutte.
Rampèou, s. m. Appeau ; oiseau captif qui appelle et attire
les autres par son chant, pour les faire tomber dans le piége.
RAN 573
Rampli, o. Remplir, emplir de nouveau, achever de
rendre plein; rendre complet; exercer, occuper an emploi;
compléter un écrit, en rédiger le libellé. — Voudrid mai
lou carga qué lou rampli, il vaudrait mieux le charger
que le remplir; se dit d'an en d'un goulu, d'an
bomme qui mange avec excès.
Dér. du lat. Implere on Repiere.
Ramplimén, s. m. La quantité d'aliments suffisante
pour un repas. — Ai manja moun ramplimén, je suis repu,
rassasié ; j'ai suffisamment mangé. — Voy. Couflage et
Tibage.
Rampo, s. f. Rampe, série de degrés d'un escalier d'an
palier à un autre; volée d’escaliers, balustrade à hauteur
d'appui qui borde un escalier ou un balcon pour prévenir
les chûtes.
Rampo, s. f. Crampe; raideur subite et convulsive
d’un muscle ou d’un tendon accompagnée souvent d’ane
douleur vive.
Rampogno, s./. Différend, noise, querelle. — Cérea
rampogno, chercher noise. An toujour quéouquo rampogno,
ils ont toujours maille à partir.
Rampogno, s. /. Ruses, détours, finasseries, roueries.
Dér. du v. fr. Ramponner, railler, blAmer, injurier.
Ran ou Ranc, s. "m. Roche, rocher. — L'aïgo sor dâou
ran, l’eau suinte du rocher.
Rancarédo, s. /. Région rocheuse, escarpements à pic
formés par des dislocations rocheuses ou sur les flancs des
vallées d'érosion ; sortes de falaises.
Dér. de Ran ou Ranc. — Voy. c. m.
Rance, ranço, adj. m. et f. Rance, qui a l'odeur on
la saveur du vieux lard ou de l'huile vieille.
Dér. du lat. Rancidus, m. sign.
Ranché, s. m. Pieux verticaux servant d'appui et de
soutien aux ridelles d'une charrette. 11 y en a ordinai-
rement quatre ou six.
Rancouüs, ouso, adj. m. et f. Rocheux, rocheuse.
Dér. de Ranc. — Voy. ©. m.
Rancugna, v. Garder rancune.
Dér. du bas lat. Rancor, rancune.
Rancugnaïre, s. m. Rancunier, haineux.
Dér. du bas. lat. Rancor, rancune.
Rancugno, s. f. Rancune, haine, ressentiment profond
et caché, souvenir d'une offense.
Dér. du bas lat. Rancor, rancune.
Rançun, s. m. L'odeur ou la saveur inhérentes aux
corps rances. — Sén lou rançun, cela sent le rance. Cette
expression s'emploie surtout pour déterminer la saveur on
l'odeur du lard ou de l'huile rances.
La rancidité des corps gras est due à la combinaison
d'ane trop grande quantité d'oxigène avec le principe
extractif des huiles.
Dér. du lat. Rancidus, m. sign.
Rancura (Sé), v. Se plaindre, se fâcher.
Dér. du bas lat. Rancor, rancune, plainte.
el
574 RAO
Rancuro,s. f. Plainte, querelle, différend, regret, ressen -
timent, contestation, tristesse.
Ranäort, s.4m. Renfort; cheval supplémentaire que l'on
ajoute à un attelage pour l'aider à gravir une côte, à
franchir un pas difficile; contrefont établi pour soutenir
un mur; morceau de cuir servant de .contrefort à rane
chaussure.
Ranfourça, ». Renforcer, fortifier,, rendre plus fort.
Râou, ràouquo, adj. m. etf. Rauque,enroué. — Parla
rdau, avoir la voix .enronée.
Du lat. Raucus, m. sign.; dér. de Ravus, enroué. —
Voy. Réouféloës, .
Râouba, w. Voler, dérober, escroquer, prendre ce qui
ne nous appartient pas pour se l’approprier; ravir. —
Rdouba uno fio, enlever une jeune fille.
Dér.. du lat. Rapere, ravir.
Râoubatori, s. f. Vol, larcin; chose volée, volerie,
pillerie.
Dér. du lat. Rapere; ravir.
Räoubo, s. f. Robe, robe de femme; robe d'avocat.
L'ancien terme rdôubo se prenait pour toute sorte de
meuble, de vêtement, d'ustensile, de provision, -de denrée,
etc., et c’est encore sa signification en italien, Robba. De là
le verbe dérober, ou enlever quelqu’une de ces choses. —
Faïre uno réoubo méou taïado, faire une cotte mal
taillée, ç.-à-d. arrêter un compte, conclure un marché en
rabattant de part et d'autre, sans trop s’appesantir sur la
valeur des objets.
Râoubo-miolo, ou Räoubo-säommo, s. m. comp.
Sobriquet donné à un individu sans probité, à un filon.
Räoufèl, s. m. Le râle ou Je râlement avant-coureur de
la mort.
Dér. du bas br. Ronkel, m. sign.
Râouféla, ». Râler, avoir le râle.
Râoufélous, ouso, adj. m.etf. Qui a le râle.— Vouës
réoufélouso, voix cassée. Campano répufélôuso, cloche fèlée.
Râougna, v. Rogner, diminuer, etrécir, couper.
Râougna, “. Pressentir un événement fâcheux. — Lou
cor mé réougno, j'ai un fâcheux pressentiment .
Râougnaduro, s. f. Rognure, bande de papier, d'étoffe,
de cuir, mince et de peu d'étendue, coupée avec des ciseaux,
un couteau ou tout autre instrument tranchant,
Räoumas, s. ». Rhume, maladie qui affecte la mem-
brane muqueuse de l’intérieur du nez, de la trachée artère
ou des bronches, et qui est caractérisée parl’enchifrènement,
la toux et l'évacuation d’une matière visqueuse plus ou
moins abondante.
Du lat. Rheuma, m. sign .; dér. du grec Peüyia, fluxion,
formé de Psw, je coule.
Räoumi, v. Roussir, faire roussir au feu; griller,
flamber. — Acd sén lou râoumi, cela sent le roussi.
Râoumi, ido, adj. m. et f. Roussi, brûlé, grillé,
flambé; brouï. — La fièio és rdoumido, la feuille a été
brouïe par la gelée.
RAS
Râouquéja, v. Avoir la voix prise, la woix. nue.
comme une personne enrhumée. 3
Râouquije, s. »m. Enrouement.
Rapourta, v. Rapporter, apporter une chose d'un lieu
à un autre; rapporter, raconter, répéter ce qui s'est passé
ou ce qui s'est dit; cançaner .
Dér. du lat. Reportare; m. sign.
Rapourtur, uso, s. ». et f. Rapporteur, euse; celui ou
celle qui, par légèreté ou envie de bavarder, a coutume de
rapporter, de répéter ce qu'il a vu ou entendu.
Raqua, v. Grapiller, glaner le raisin après la vendange.
— Voy. Rapuga.
Dér. de Raquo, marc de vendange.
Raqua, v. Vomir; rejeter par le vomissement: rendre
une chose par force; perdre au jeu; être forcé de payer.
— A raca cin fran, il a été forcé de débourser cinq francs.
L'as prés, lou racaras, tu as pris cela, tu le xendras par
force.
Suivant M. Diouloufet, ce mot aurait une origine ligu-
rienne ou viendrait de l'hébreu Raquag, cracher. Ô
Raquado, s. . Avinage ; manière d’abreuver le fond et
l'intérieur d'un tonneau en y répandant le surmoüt tout
chaud ou de l’eau dans laquelle on a fait bouillir du marc
de raisin. — Faïre uno raquado, aviner ou abreuver un
tonneau.
Raquaïre, s. m. Grapilleur; celui qui ramasse les
raisins oubliés dans les vignes après la vendange.
Raquéto, s. f. Raquette; instrument dont ‘on se sért
pour jouer à la paume ou au volant,
Dér. du lat. Reticulum, m. sign.
Raquita (Sé), v. Se racquitter, réparer une ds faite
au jeu.
Raquo, s. f. Le marc dela vendange ; le mare qui n’a
point été pressé; la grappe de raisin PSC de ses
grains.
Dér. du lat. Racemus, grappe.
Ras, as0, adj. m. et f. Ras, rase; plein, pleineet arasée
sans déborder. — Uno sémäou raso, une cornue pleine.
Un véire ras, un verre plein, une rasade.
Dér. du lat. Rasus, m. sign. F
Ras, prép. Rez, tout contre, tout proche, joignant. —
Ras-dé-tèro, rez-terre. Vi dé ras-dé-cuvo, vin de ri
goutte.
Dér. du lat. Rasus, rm. sign.
Rasa, v. Raser, couper la barbe, les re avec un
rasoir; araser, terme de maçon, couronner un mur, ache-
ver l’assise d'un mur; abattre une chose au ras d’une autre ;
raser un édifice, l’abattre à ras de terre; receper un arbre,
le couper rez de la souche. — Sé rasa, se raser, se couper
la barbe.
Rasa, v. Effleurer, passer tout auprès, avec rapidité.
— M'a rasa ém'uno péro, il m'a efileuré d'un coup de
pierre.
Rasal, s. m. Epervier, sorte de filet de forme conique,
ee.
té homme
RAS
lesté avec des: balles de plomb et que l'on développe en le
lançant à l’eau. — Quinte co dé rasal! Quel coup de filet!
se dit lorsqu'on fait main basse sur une bande de: malfai-.
teurs; lorsqu'on fait une rafle au jeu, ete.
Dér. du lat. Retis, filet.
Rascalâou, s: m. Espèce de prune de Damas où Damas
noir, petite prune d'un violet foncé; commune-et peu déli-
cate;: une noix sèche. Les prés Rasclauz à Alais tirent
peut-être leur nom de ce qu'ils étaient autrefois complantés
de cette sorte de prunier.
Rascas, asso; s: m. et /. Teigneux, euse; celui ou celle
quiesbatteint de larache ou teigne. Au fig. avare, crasseux ;
rade, piquant. Un des anciens seigneurs d’Uzès, Raymond,
fils de Bermond:ler et père de Bermond IH, portait le surnom
de Rascas, 11 vivait de 4468 à; 1209.
Dér, de Raseo ou Raselo, teigne, et du. péj. as.
* Rascas, s. m. Large croûte ou plaque de teigne.
Rascasso, s. f. Un perré, un cassis établi en travers
d'une route; au fond, d'un ruisseau où d’un ravin'pour
arrêter les affouillements ou-les ravinements d'un cours
d'eau, Cette construction est établie-au moyen de-grosses
pierres posées. de champ. |
Rascla, w. Ràcler, râtisser; raser, toucher légèrement en
passant. Au fig. ÆRascla, s'esquiver, s'enfuir, s'échapper
sans tambour ni trompette. — Rasela; dé canèlos, garder
les manteaux, croquer. le marmot.
Dér. du.lat. Radere;, m. sign.
Rasclado, s..f. Atteinte légère ou passagère de maladie ;
volée de coups de. bâton, râclée.
Rascladuro, s. /. Râclure, ratissure, petits fragments
que l’on: enlève en! râclant.
Rascläousa; v. Amasser l'eau dans le bief d'un moulin
qui ne peut moudre que par éclusées,
Dér. de Rascldouso, écluse.
Rascläousado, s. f. Éclusée, plein une écluse, la quantité
d’eau que, peut contenir le bief d’un moulin quandilest fermé.
» Dér. de:Rasoldouso, éeluse.
Rasclâouso, s. /; Écluse, ouvrage de maçonnerie, de
charpente, de: terrassement, destiné à sontenir, à amasser,
àcretenir les eaux !que/l'on destine à'l'arrosage, à la navi-
gation, au-fonctionnement des usines.
Dér. du lat: Reclusa, renfermée.
Rasclé, s. m. Râle d'eau; Rallus aquaticus, Temm.
Gorgerette blanchâtre, poitrme et ventre d'un cendré
bleuâtre; tout'le déssus: du corps d'un roux:olivâtre avec
des: tâches noires: au centre de chaque plume, longueur
26 cent. Le râle d'eau reste dans le pays-toute l'année; il:
est très-rusé et ne sort guère que le soir de ses. jones ettde
ses-fourrés, C'estrun gibier: des plus recherchés. — Vüy.
Poulo-d'aïgo et Cabussé.
Rasclé, s. m. Lièvre mâle, bouquin.
Rasclé,.éto, adj: m. etf: Teigneux, euse; tête chauve
ou pelée par la teigne,
Dér: de Rasclo, teigne.
RAS 575
Rasclo, s. 7: Rcloire, coupe-pâte, ustensile de fer qni
sert à détacher la pâte du pétrin. Râtissoire servant à
détaclier le tartre des tonneaux .
Dér. de: Rasola, râcler.
Rasclo on Rasco, s. /: Rache ou teigne de la tête; la
grosse teigne, gale ou teigne plate et sèche.
Dér. du bas bret. Rdch, gale on teigne.
Rascloüs, ouso, adj. m. et f. Teigneux, euse: rade
au toucher. On appelle Rasclousos, les bajanes où châtai-
gnes qui ne sont pas encore dépouillées de leur’ pellicule
intérieure.
Dér. de Rasolo, teigne. — Voy. c: m.
Rasin, s. "”, Raisin, le fruit de la: vigne. Pline en-cite
plus de 80 espèces, M. Bosc en avait: réuni dans la
pépinière du Luxembourg, à Paris, plus-de: 4.400 espèces.
Parmi celles que l'on cultive-dans lés' Cévennes, nous ne
citerons que la Coupado (Voy: c. m.), qui est peutéêtre
le meilleur raisin de table et le plus délicat: le Gamé ou
Larda (Voy. ©. m.), sorte de chasselas. Le phylloxéra, qui
a commencé de sévir antour d'Alais em 4872, æ depuis lors
détrait à peu près toutes les vignes «1 la région.
Dér. du lat: Racemus; grappe.
Raso, s. f. Limite, ligne dérisoire: = £'an més din sas
rasos, On l’a circonscrit dans: ses limites, on lui à fixé ses
bornes.
Dér. du catal. Rasa, ravin.
Raso, s. /. Les bergers:donnent ce nom aux brebis qui
ont: atteint l'âge de cing'ans.
Rasouèr, s: m. Rasoir; réseau. — Tèlo dé rasouèr,
toile de réseaux on de- carrés en réseaux ou en dentelle,
alternativement. mêlés: de: carrés de’ toile unie, employés
dans le dernier siècle à des garnitures de lit, des tapis de
table et de toilette. — Mé fas pissa dé lamo dé rasouër,
tume mets àla torture, tu m'agaces.
Dér. de Ras.
Rasouiïro, s; . Räeloire; radoire pour mesurer le grain
ou les châtaignes ainsi que le sel. On dit anssi Rasadouiro.
Dér. de Ras.
Raspa, v. Râper, polir un corps avec une râpe; réduire
en poudre avecune-râpe:; enlever le poil d'uneétoffe, d'un
drap par le frottement.
Raspa, ado; adj: m., et f.. Räpé, râpée. — Dé pan
raspa, du pain râpé. Raspa. coumo un garçoi laïur, il a
les habits :râpés.comme un-ouvrier tailleur.
Dér. de l’allem. Raspen, râper.
Raspado, s. f. Raclée, volée de coups de poings, de
coups de bâton,
Dér. de l'all. Raspen, râper.
Raspaïa, v. Balayer avec. un balai usé; amasser un tas:
nettoyer. Au fig. rafler, faire rafle, faire place nette,
emporter tout, s'emparer de tout. —:A tout raspaïña; il a
tout emporté.
Raspal, s. m. Un balai usé, un ramon; un balai de
broussailles, de genèts; de bruyère; d'auhépines les épis
576 RAS
qui restent à l'air après qu'on a dressé les gerbiers.
— Proufèto raspal, prophète de malheur.
Raspo, s. f. Râpe, ustensile de cuisine; outil d'acier
trempé en forme de lime, servant à limer le bois, la
pierre et à dégrossir le fer; ripe on räpe de maçon;
mauvais ouvrier, mauvais artiste. — Quinto raspo ! Quel
mauvais ouvrier! quel mauvais musicien !
Raspous, ouso, adj. m. et f. Rugueux, couvert
d'aspérités.
Rasso (Ën), ado. En bloc, l’un portant l’autre.
Rastagagno, s. f. Les débris de bois mort, de feuillages,
de matières ligneuses ou surnageantes qu'une rivière
entraine pendant les inondations; les menues broutilles,
pailles, fétus qu’elle dépose sur ses bords lorsqu'elle décroît.
La rastagagno marque d’une manière précise après l'inon-
dation la hauteur atteinte par l’eau.
Dér. du lat. Stagnatio, débordement, inondation.
Au fig. les restes d’une maladie; les derniers vestiges
d'un rhume qui se traduisent par des expectorations.
Raste, rasto, adj. m. et f. Se dit d'une région dépour-
vue de végétation, d’une plaine sans arbres et dont les
herbes sont fauchées rez-terre, d’une lande inculte. — Un
péis raste, un territoire nu, sans arbres, sans végétation .
Dér. du lat. Rastrum, râteau, ou de Radere, râcler,
râtisser.
Rastéiè, s. m. Râtelier, sorte de claie posée obliquement
contre le mur d’une écurie et au travers de laquelle les
bestiaux prennent, au fur et à mesure, le foin nécessaire à
leur alimentation ; porte-manteau; l'ensemble des dents
qui composent la mâchoire humaine. — Aoussa lou rastéiè,
tenir la dragée haute; rationner; mettre au régime;
empêcher quelqu'un de disposer d’une chose à sa fantaisie.
Dér. de Rastèl.
Rastèl, s. m. Râteau, fauchet. Le râtean est ordinai-
rement en fer et à une seule rangée de dents; le fauchet est
en bois et a deux rangs de dents opposés ; l'épine dorsale;
l’échinée d’un porc.
Dér. du lat. Rastellum, dim. de Rastrum, m. sign.
Rastéla, v. Faucheter, si l’on se sert du fauchet; râteler
où râtisser si l’on unit un terrain avec un râteau.
Dér. du lat. Radere, m. sign.
Rastélado, s. f. Plein un fauchet on un râleau d'herbes,
de fourrage ou de pierrailles. Au fig. un nombreux abattis.
— Unô rastélado d'âoucéloùs, un abattis d'oisillons tués
d’un coup de fusil.
Dér. de Rastèl.
Rastélaje, s. m». Action de faucheter ou râteler; la
portion de fourrage ramassée sur un champ au moyen du
fauchet après l'enlèvement de la récolte.
Dér. de Rastèl.
Rastélun, s. ”. La portion de la récolte recueillie avec
le râteau.
Dér. de Rastèl.
Rastoubla ou Réstoubla, v. Semer sur le chaume;
RAT
semer deux années de suite le mème champ; ramasser le
chaume. Au fig. réstoubla signifie revenir deux fois sur
une même chose; récidiver; manger deux fois du même
plat. — S'aquél fricd vous counvèn, fôou réstoubla, si ce
plat vous convient, revenez-y.
Dér. de Réstouble, chaume. — Voy. c. m.
Rastouble ou Réstouble, s.m". Le chaume qui reste
sur la terre après que le blé est moissonné; l’étoule et,
dans quelques provinces françaises, le rastouble : herbes
mèêlées avec le chaume qui restent dans un champ après la
moisson et qui sont une päture pour le bétail; terre
en jachère; champ couvert de chaume et non encore
laboaré.
Dér. du lat. Restibilis, qui porte toutes les années.
Rata, ado, adj. m. et f. Rongé des rats ou des souris.
— Püirin rata, un parrain qui ne donne point de DES
à ses amis et connaissances.
Dér. de Ra, rat.
Rata, v. Rater, faire long feu; manquer une occasion,
ne pas réussir; manquer son coup.
Ratado ou Rataduro, s. f. Rongeure ou manjeure
(prononcez ronjure et manjure) faite par les rats ou les
souris.
Dér. de Ra, rat.
Ra-tâoupén ou tâoupiè, s. m. comp. C'est le nom que
SauvacEes donne au Lérot et qui appartient mieux encore
au Mulot /Mus sylvaticus, Linn.), le véritable rat des champs
et des bois, si destructeur des récoltes, qui se loge souvent
sous terre, et surtout au Campagnol de Savi /Arvicola
Savii, de Selys), extrèmement abondant dans nos contrées,
qui vit dans les champs couverts de céréales et de luzernes,
sous lesquelles il établit ses magasins, en y pratiquant des
trous comme la taupe {Téoupo).
Raté on Rataté, s. m. Grimpereau, Grimpereau familier,
Certhia familiaris, Temm. Le Grimpereau est un oiseau
de couleur noirâtre et roussâtre, tacheté de blanc, : plus
pâle en dessous, avec le croupion roux; il atteint à peine
quinze centimètres de long. Il ressemble beaucoup, par
les habitudes comme par la taille, au Torchepot ou
Sitelle, avec qui il est facile de le confondre, et qui reçoit
souvent le même nom languedocien. Voy. Bouscarido
(grosso). Le Grimpereau, comme le Torchepot et comme
les pies, qui sont ses parents éloignés, grimpe le long des
arbres et les frappe avec son bec pour en faire sortir les
insectes cachés sous l'écorce; il semble alors le voir courir
comme une petite souris. Raté exprime très-bien cette
ressemblance et la petitesse du Grimpereau.
Dér. de Ra, rat.
Ratèlo, s. f. La rate des bœufs, des moutons ; la rate
de l’homme, viscère impair situé dans l'hypochondre
gauche, entre le diaphragme et l'estomac.
Ce nom parait lui être donné de sa forme oblongue qui
lui donne quelque apparence d’un rat.
Ratéto, s. f. Une dent de petit enfant. C'est un terme
RÉB
de nourrice qui s'emploie surtout au pluriel : Æatétos,
les dents, les quenottes des petits enfants. On l'applique
plus spécialement aux deux dents incisives du milieu de
la mâchoire, qui poussent les premières et qui, par leur
nombre et leur situation, ressemblent à celles des rats d'où
est tiré le dim. Ratétos. — Véjan tas ratélos, voyons tes
petites quenottes.
Ratiè-vala, v. — Voy. Vala-ratiè.
Ratièiro, s. f. Ratière, souricière, piège à rats on à
souris.
Dér. de Ra, rat.
Ratigas, s. m. Restes, ressentiment de quelque maladie
dont on est guéri depuis peu de temps; bouffée de fièvre,
dernières attaques d'une maladie qui tend à disparaitre.
* Dér. du grec Pélæyos, claquement de dents.
. Rato-pénado, s. f: comp. Chauve-souris, Vespertilis,
Linn. Il en existe, même dans nos pays, de nombreuses
espèces dont les différences ne frappent pas les yeux du
vulgaire; par conséquent, rato-pénado sufit à les dési-
gner toutes. Les anciens naturalistes considéraient la
chauve-souris comme une sorte de monstre qu'ils ne
savaient comment classer; aujourd'hui elle aurait beau
dire : « Je suis oiseau, voÿez mes ailes! » les savants, plus
habiles que la belette de la fable, ne la croiraient pas; ils
ont clairement établi que c'est un vrai mammifère, dont un
repli de la peau des flancs, étendue de chaque côté entre
les membres postérieurs et les doigts de la main, imite une
voile et forme une sorte de parachute qui les soutient
dans l'air, lorsqu'il s’y lance d’un point élevé. On sait en
effet que, tombées à terre, les chauves-souris ne peuvent
se relever. Elles sont vivipares et allaitent leurs petits,
qu’elles portent, en volant, attachés à leurs mamelles.
Au reste, le languédocien avait devancé la science en
faisant de cet animal un rat ailé : rato, rate; pénado du
lat. Pennata, ayant des ailes.
Ratos, s. f. plur. Incisives, quenottes des petits enfants.
On dit aussi Ratounos et Ratétos. — Voy. Ratélo.
Réba, s. m. Reflet, réverbération du soleil.
Dér. de Rebatre, renvoyer.
Rébala, v. Trainer quelqu'un ou quelque chose. — Pode
pa mé rébala; je peux à peine me trainer. L'an rébala
coumo un quièr, on l’a trainé dans la boue, on l'a traité
avec le plus grand mépris, on l'a injurié. Sé rébala, au
fig. ramper devant quelqu'un, s’aplatir devant un supérieur.
Laïsso tout rébala, il laisse tout trainer dans la maison,
il laisse tout en désordre.
Rébaladis, s. m. Train, embarras, remue-ménage; tin-
tamarre; bruit que l'on fait en trainant quelque chose.
— Quante rébaladis! quel train ! quel tracasi YF-a dé réba-
ladis, il y a du train dans cette maison.
Dér. de Rébala.
Rébaléto (Dé), ezp. adv. Terre-à-terre, à la glissade.
— Jita uno pèiro dé rébaléto, jeter une pierre de façon à
ce qu’elle rase la surface de la terre ou qu'elle glisse à la
REB 577
surface de l'eau, de manière à produire des ricochets. Dé
rébaléto, au fig. se mettre à plat ventre, s'abaisser devant
quelqu'un.
Rébatre, v. Rabattre, diminuer, retrancher; déduire
une certaine somme sur la valeur d'un marché conclu;
réverbérer; rebattre. — Rébatre un matalas, rebattre un
matelas.
Dér. de Batre.
Rébéqua, v. Se rebiffer contre quelqu'un, lui donner la
répartie; répondre insolemment à quelqu'un à qui on doit
du respect. — Rébèques? tu oses riposter? tu as le front
de répliquer?
Dér. de Bé, pour bouche, parole.
Rébéquaire, airo, s. m. et f. Raisonneur, euse; qui se
rebiffe.
Rébéssina, v. Se relever, se redresser par derrière,
comme la queue de certains chiens; porter la queue en
trompette.
Rébéssina, ado, adj. m. et f. Relevé, redressé, reco-
quillé par derrière, comme la queue de certains chiens qui
se relève en trompette et s'enroule sur elle-mème.
Rébéti, v. Repousser, faire ressortir un objet enfoncé,
tel qu'un clou, un boulon, que l'on cherche à chasser en le
repoussant par la pointe. <
Rébia, v. Raccommoder, rapiécer un vêtement, un
meuble, un ustensile.
Rébiaire, s. m. Celui qui raccommode les objets déchi-
rés, cassés ou dégradés.
Rébiaje, s. m. Rhabillage, raccommodage, rapiècetage.
Au fig. faïre un bon rébiaje, faire un bon repas après un
jeùne prolongé.
Rébifa, v. Requinqué, retroussé. — Sé rébifa, se
rebifier.
Rébiscoula, v. Ranimer, ravigoter, regaillardir, — Acû
m'a rébiscoula, cela m'a remis, restauré, ranimé le cœur.
On dit aussi Réviscoula.
Dér. du lat. Reviviscere, reprendre vie.
Rébla, v. Garnir les vides d'une maçonnerie avec de la
blocaille ; remplir les interstices entre les moellons. — Un
ome rébla, un homme bien musclé, bien räblé.
Réblataïo, s. f. Remblai, matériaux de remplissage,
ballast.
Rèble, s. m. Räble d’un lièvre, d'an lapin; région
lombaire, chez les animaux, mais plus particulièrement
chez le lièvre, le lapin, le chat, le chien.
Dér. du lat. Rapulum, dim. de Rapum, racine, petite
rave.
Rèble, s. m. Caillou de forme conchoïdale ou à cassure
irrégulière; blocage, ballast, cailloutage servant à remplir
les vides des moellons, dans les maçonneries ou les reins
d’une voûte.
Même étym. que le mot précédent.
Rébobis, s. m. Partie de plaisir; bon repas; partie de
fourchette ; gala. On dit aussi Révobis.
578 RÉC
Rébor, s. m. Rebord, orifice ; bord,d'un vêtement formant
un repli.
Dér. de Bor, bord.
Rébouchi, v. Rétorquer un argument, combattre une
opinion avec des arguments victorieux. — L'a bièn rébou-
chi, il l’a bien mâté, il l’a.bien remis à sa place.
Rébouli, v. S'amender, après avoir souffert bien. des
épreuves; avoir subi bien des souffrances; réaction éprou-
vée dans la circulation en passant d'un grand froid. à une
température chaude.
Dér. de Bouli, bouilli.
Réboulo, s. f. Grateron, galiet grateron, nom de plante.
— Voy. Réjistèl et Arapo-man.
Réboumbo, s, f. Gros surtout; vaste houppelande.
Rébounda, v. Trousser. — Sé rébounda, retrousser ses
manches, ses vêtements. Rébounda. pour Rébrounda, s'em-
ploie comme. synonyme, d’élaguer le pied, la, tige ou les
branches d’un arbre.
Dans ce dernier cas, il est dérivé de Broundo, branche
d'arbre, brande.
Réboundaïre, s. »m. Ouvrier que. l’on. emploie à, l'éla-
gage des, arbres, à.la, taille des.oliviers ou des müriers:
Dér. de Broundo, branche d’arbre, brande.
Rébous, s. m. Rebours; contre-poil, contre-pied. —
Préne d'à réboùs, prendre au rebours; contrarier. À, réboùs
dé pèou, à rebrousse-poil.
Dér. de la bass, lat. Reburrus, velu, hérissé, qui, vient
de Burrus, bourre.
Réboustia, v. Retrousser; retrousser. ses. manches. jus-
qu'au coude.
Réboustia, ado, adj. m. et f. Retroussé, 6e.
Réboutigna, v. Bouder, — Voy. Kougna.
Rébroussiè ou mieux Réboussiè, s. #1. Caractère. mal
fait; celui qui prend toujours. le, contre-pied, des choses,
qui.a, des idées opposées à tout le monde; homme contra,
riant; esprit paradoxal.
Dér. de Réboùs, rebours.
Récaïre, s. m. Recoin. — Voy. Récantod,
Récaliva, v. Rechuter, avoir une rechute, faire. une
rechute, récidiver, retomber.
Dér. de, Récaïéou, débris de braise, reste de. feu. caché
sous la cendre.
Récalivado, s, f: Rechute.
Dér. de Récaliva, rechuter.
Récantou, s. m. Recoin.
Dér. de, Cantoù, coin.
Réçäoupégu, udo, adj. m. et f. Reçu, reçue.
Réçâoupre, v. Recevoir.
Dér. du,lat, Recuperare.
Récäouqua, v. Récidiver, doubler la dose d'un, mets, y
revenir; répéter sans cesse la même chose; rabâcher:
— Récdouqua las boutos, achever, de remplir. les, ton-
neaux,
Dér. de Céouqua, fouler:
“REC
Récäouquaïre, s. m. Rabâcheur, celui qui revient
toujours sur le mème:sujet.
Récäouquaje, s: m. Rabâchage, |
Récâouquia (Sé), v. Se remettre dans ses affaires, les
rétablir, se remplumer;, revenir à la santé, se rétablir à la
suite d’une maladie. Ce, terme signifie. littéralement :
refaire sa coquille.
On l’emploie aussi dans le sens. de : ses recoquiller, se
croqueviller.
Récarga, v. Recharger, charger de nouveau, imposer.
une nouvelle charge.
Dér. de Carga, charger.
Récassa, v. Attraper, recueillin avec la, main où la
bouche une chose qu’un autre a lancée ;: prendre. de bond!
ou de volée ce: que l’on jette. — Récassa à: la ‘voulado,
attraper une chose. lancée avant. qu'elle.ait-touché. le: sol ;
happer, eu parlant d’un chien;qui reçoit un objet dans sa
gueule.
Récata, v. Serrer, ramasser quelquechose qui traîne, le
mettre en lieu sûr; soigner quelqu'un, l'équiper, le rapié-
cer, pourvoir à ses besoins; donner retraite à quelqu'un qui
cherche à se cacher. — És bièn récata, ilestmis proprement.
Dér. de l'esp. Racatar, cacher avec soin.
Récate, s. m. Ménage, économie, soin, attention: =
Vioure dé récate, vivre. d'économie: Provision. de bouche
qu’un journalier porte à la, campagne: pour: sa, nourriture
de la journée. — Pourtaisoun récate, porterce qui.est néces-
saire pour sa nourriture de la journée. Ana, dou récate,
aller manger un morceau. Tout-aqud ésidé récate, tout cela
est arrangé, fini, mis en ordre: Gousta, soupa âvu. récate:
Dér. de l'esp. Recato, précaution, prévision:
Récatoüs, ouso, adj, m. et, f: Soigneux; ménager,
économe.
Dér, de Récate.
Récavala, v. Récompensé, bien.lotis enrichi.
Lou soulda qué fai la guèro
És pa mai récavala.
Récélur, uso, s. m. et j. Receleur, celui qui recèle.
Dér. du lat. Celare, cacher.
Récéta, v. Faire l'examen d’une marchandise, vérifier
si,elle est de la. qualité convenue, requise.
Dér. de. Récéto, recette.
Récèto, s. f. — Marchandiso;dé-récèto, marchandise.de
bonne qualité, de qualité requise.
Dér. du lat. Recepta, chose reçue, admise.
Réchange, s, m. Rechange, droit de changer: — Cdouso
dé réchange, chose, que; l'on a en double, pour en rem-
placer une autre en-cas. de besoin:
Réchäoucha, v. Ressassen: les. mêmes, idées; rabâcher.
Au prop. tripoter, remanier une choseà plusieurs reprises.
Réchâouchaïire, s. m. Rabâcheur.
Réchuto, s, f. Rechute, retour d’une maladie. dont:on.
n'était pas complètement guéri.
REC
Réci, s. m. Renseignements, bavardages, caqnets, racon-
tars. — Faïre milo récis dé quéouquus, raconter mille bali-
vernes sur le compte de quelqu'un. Mé n'an fa dé michan
récis, on m'a donné de mauvais renseignements sur son
compte.
Récoire, +. Se dit d'un ragout qui prend à da gorge,
qui écorche ou picote le gosier. On dit aussi de I'huile
forte : Aquél oli récoi.
Récontre, s. m. Hasard, occasion, chance, rencontre.
= $é lou récontre ou fui, si le hasard le veut. L'aï agù
dé récontre, j'aieu cet objet d'occasion. Aou prémiè récon-
tre, à la première occasion. At agu ‘n michan récontre,
j'ai eu une mauvaise chance, une mauvaise rencontre, j'ai
éprouvé un fâcheux accident.
Récoumanda, v. Recommander, exhorter, charger de
faire en ordonnant; prier d'être favorable. = És bièn
récoumanda dou prone, il est connu pour ce qu'il est; il a
mauvaise réputation.
Dér. du lat. Commendare, recommander.
Récoumandaciou, s. f. Recommandation, action de
recommander ,
Dér. du lat. Commendatio, m. sign.
Récounégu, udo, adj. m. et f. Reconnu, ue; considéré
comme tel.
Dér. du lat. Recognitus, in. sign.
Récounéisse, v. Reconnaître, être persuadé; découvrir ;
observer; avouer; vérifier, Comparer; considérer sous un
certain point de vue.
Dér. du lat. Recognoscere, m. sign.
Récounéissable, ablo, adj. m. et f. Reconnaissable;
que l’on peut reconnaitre; facile à être reconnu.
Dér. de Récounéisse, réconnaitre.
Récountra, v. Réussir dans une entreprise. — Aï bièn
récountra, j'ai bien réussi. S'acù sé récontro, si l'occasion
se présente.
Récourda (Sé), v. Se ressouvenir, se rappeler.
Dér. du lat. Recordari, m. sign.
Récoure, w. Termeemployé par les ramasseurs de chà-
taignes. Rechercher, repasser, revenir sur ses pas, pour
ramasser très-exactement de façon à n'avoir plus besoin
d'y revenir.
Dér. du lat. Recurrere, revenir en courant.
Récura, v. Émonder la tête, les branches d'un arbre,
en couper les branches inutiles, les rameaux chiffonnés.
Récura se dit pour les branches, rébounda, pour la tige ;
sagata, pour les rejetons, les surgeons du pied. En français,
on ‘dit indifféremment pour les trois cas, élaguer ou
émonder. On élagué les grosses branches avec la scie, la
serpe ou la hache; on émonde les menues avec la serpette.
Au fig. et adjectiv. gentil, propre.
Dér. du lat. Curare, prendre soin, soigner.
Récurado, s. /. Retranchement, déchet. Terme de
magnanerie ; épidémie qui diminue ou fait périr bon nom-
bre de vers à soie, qui éclaircit les tables où ils sont éla-
RED 579
lé. — Aquélo maldoutié a fa ‘no forto récurado, cétte
maladie à causé un grand déchet.
Récuraire, s. m. Émondeur, celui qui émonde ou taille
les arbres.
Récuraje, s. m. Émondage, action d'émondér, de
nettoyer un arbre, de le débarrasser de ses branches mortes,
de ses raméaux Chiffonnés, de ceux qui se huisent pour
dtre trop serrés.
Récurun, s. m. Le robut des grains ; le fond du grenier ;
des fruits dont on a pris ee qu'il y afait dé meilleur.
Rédable, s. m. Le ble où fourgon d'un boulanger;
râcloire en fer emmanchée d'une tige ‘en hoïis et qui sert à
ramener la braise à la bouche du Tour. On dit anssi
rédiable dans quelques localités.
Rédamén, aëv. Trèsfort, beaucoup, infiniment, —
Aquél ome és rédamêën for, @et homme est très-fort.
Réde, rédo, adj. m. et f. Roïde, ferme. 11 s'emploie
aûssi dans an sens adverbial. = Camina, müurcha rède,
marcher rapidement. Ména réde, mener rondement, dure-
ment, Cavalièrement. Tusta réde, frapper fort. Towmba
réde, tomber roide-mort.
Dér. du lat. Rigidus où du celt, Red, m. sign.
Rédire, v. Redire, répéter, dire une seconde fois ; rappor-
tr, révéler ce que l'on a apptis, raconter; reprendre,
Hlainer, censarèr. = M'a troubà à rédire, l m'a blâmé.
Dér. du lat. Redicere.
Rédoù, s. m. Redoul, herbe aux tanneurs, sumac des
corroyeurs ou des teinturiers /Rhus coriaria), arbrisséau
de un à trois mètres, à rameaüx nombreux. Toutes les
parties de cet arbrisseau sont astringentes et rafraichissantes ;
réduites en poudre, elles servent à préparer le cuir. On le
trouve dans les terrains rocailleux, au milieu des boïs de
chènes verts de la vallée inférieure du Gardon. au pont du
Gard, à Collias, à la Baume de Sanilhac, au Pont Saint-
Nicolas. Les habitants de Collias le recueillent en grandes
quantités et en font le commerce. Ils le désignent sous le
nom de Mèrto. L'abbé de Sauvaces signale les baies de
cet arbrisseau comme un poison des plas violents. Il à sans
donte confondu le sumac /Rhus coriaria), avec la corroyère
à feuilles de myrte (Coriaris myrtifolia), qui s'emploie
aussi dans la tannerie et dont les feuilles prises en décoction
produisent les accidents les plus terribles et mème quel-
quefois la mort,
Rédoun, ouno, adj. m. el f. Rond, arrondi, de forme
mamelonnée ou en cône arrondi au sommet. On en à formé
les noms propres : Can-rédoun, Campredon, champ arron-
di; Chamboù-rédoun, Chamboredon, petit champ arrondi ;
Moun-rédoun, Montredon, montagne arrondie; Piè-rédoun,
Puechredon, puech ou pic arrondi.
Rèdre, +. Rendre, lasser, fatiguer. — M'a fa rêdre, il
m'a éreinté.
Rédu, udo, adj. m. et f. Rendu, fatigué. — Souï rédu,
je suis rendu.
Dér. du lat. Reductus, M. sign.
580 RÉG
Réfa, acho, adj. m. et f. Refait, réparé, rétabli,
restauré.
Dér. du lat. Refectus, m. sign.
Réfaiïre, v. Refaire, faire une seconde fois, réparer,
racommoder, recommencer, remettre en état, restaurer.
Dér. de Re, itérat., et de faire, faire.
Réfoufa,-v. Regorger. Se dit d’un liquide qui se répand,
quand on le verse dans un vase dont l'ouverture est trop
étroite, ou qu'on le verse en trop grande quantité à la fois,
et que l'air du dedans n’a pas d’issue pour s'échapper à
mesure que le liquide en prend la place.
Réfoula, +. Refouler, repousser.
Réfréja, »v. Refroidir, rendre froid. Au fig. calmer,
diminuer l’ardeur, refroidir l'enthousiasme ou le zèle de
quelqu'un. — Ço qué m'an di m'a réfréja, ce que l'on
m'a raconté m'a refroidi, a changé mes idées.
Dér. du lat. Frigefacere ou de Refrigerare.
Réfrésqua, v. Rafraichir, rendre frais, calmer la cha-
leur; réparer, rétablir, nettoyer en lavant; rappeler,
renouveler. — Réfrésca lou linje, mouiller le linge avant
de le mettre à la lessive ; remuer le linge dans l’eau claire
avant de le tordre, après l'avoir lavé, et pour en faire sortir
le savon. Réfrésca uno bouto, un vêéire, rincer un tonneau,
un verre, ou le passer simplement dañs l’eau claire après
l'avoir rincé. Bouta lou vi à réfrésca, mettre le vin à
rafraîchir. Réfrésea la mémouëro, rappeler une chose
oubliée ou ancienne.
Dér. du lat. Refrigerare, refroidir.
Réfrésquado, s. f. Une ondée; un léger lavage; [une
tripotée. — Avèn agu uno réfréscado, nous avons essuyé
une averse. Douna uno réfréscado dou linje, laver légè-
rement le linge. Fitre uno réfréscado, ficher une tripotée
à quelqu'un.
Réfréscadoü, s. m. L'eau à rafraichir, où l’on met
le vin à rafraichir; petit lavoir contenant de l’eau claire
et où l’on trempe le linge lavé, avant de le tordré pour le
mettre à sécher,
Réfrésquaje, s. m. Linge ou lessive essangée à laquelle
on donne un léger blanchissage avant de la mettre au
cuvier. — Blan dé réfrésquaje, premier blanchissage ou
un simple savon.
Réfréta, ». Ce terme s'emploie dans le sens de radouber,
réparer les roues d’un véhicule en resserrant les jantes et
les rayons dont l'usage ou les grandes chaleurs ont amaigri
les points d'assemblage.
Réfus, s. m. Refus, action de refuser. — Aqud n'és pa
dé réfus, j'accepte cela volontiers, ce n’est pas une chose
à refuser.
Dér. du lat. Refutare, refuter.
Réfusa, v. Refuser, ne point accepter une chose offerte,
ne pas accorder une chose demandée.
Dér. du lat. Refutare, réfuter.
Régagna, v. Rechigner. Au pr. Régagna las déns,
montrer les dents, soit par un défaut nature}, soit par une
REG
mauvaise habitude. Au fig. Régagna las déns, tenir tête à
quelqu'un, lui montrer les dents, lai montrer de la fermeté.
Le sens fig. est pris des chiens qui grondent et menacent
de mordre en montrant les dents.
Dér. de l'esp. Resgagnar, grincer des dents.
Régagnado, s. f. Brusquerie, brusque incartade,
rebuffade .
Régagnas, s. m. Gros rire sardonique et moqueur.
Dér. de Régagna. — Voy. c. m.
Régal, s. m. Régal, grand festin, grand repas, grand
plaisir, vive satisfaction. — És un régal pér él dé sé pér-
ména, la promenade est pour lui un vrai régal.
Régala, v. Régaler, inviter quelqu'un à un festin, faire
un gala.
Dér. de Régal.
Régalisso, s. f. Réglisse Glykyrhiza glabra, Linn.,
plante de la famille des Légamineuses, cultivée dans la
Provence méridionale. C’est de la racine de cette plante
que l'on retire, par ébullition, l'extrait que l’on nomme
jus de réglisse.
La réglisse sauvage, astragale à feuilles de régliss
(Astragalus glykyphyllos, Linn.), plante de la même famille
que la précédente à laquelle elle ressemble par ses feuilles. .
Dér. du grec PX«, racine, et de , TAdxos, doux, racine
douce.
Régalo, s. f. Régal, festin, bon repas, gueuleton. —
Pagues pa ‘no régalo? n’es-tu pas décidé à payer un bon
diner?
Dér. de l'esp. Regalo, m. sign.
Réganèl, s. m. Regard, aspect, exposition, rayonnement
du soleil. — Ëro dou réganèl dâou sourél, il était exposé
aux rayons, aux ardeurs du soleil.
Dér. de Régo, raie.
Réganta, v. Regretter, se repentir trop tard. — Fricas-
ses toun bé, lou régantaras un jour, tu dissipes ton bien,
tu le regretteras un jour.
Régâäougna, v. Rechigner, grommeler, montrer de
l'humeur, de la répugnance; relancer quelqu'un, le
rabrouer, le rebuter avec rudesse. On dit aussi Régagna.
— Voy. c. m.
Régâäougnado, s. f. Brusquerie, brusque incartade,
rebuffade. On dit aussi Régagnado. — Voy. c. m.
Régâougnaïre, s. m. Personnage brusque, grognon,
rechigné, qui trouve sans cesse à redire à tout le monde.
Dér. de Régâougna.
Régâäoula, v. Couler, dégoutter.
Régâoussa, v. Regarder de travers ou d'un air dédai-
gneux:; donner à son visage une expression de mépris. —
Régoussa lous ièls, montrer le blanc des yeux comme dans
un évanouissement ; regarder d’un air farouche.
Régâoussado, s. /. Regard farouche, regard torve,
menaçant.
Régar, s. m. Regard; égard. — Pér voste régar, par.
égard pour vous. Pér régar d’aqud, à l'égard de ceci.
RÈG
Régarda, v. Regarder; avoir égard. — Aqud és dé
régarda, c'est une chose à laquelle il faut avoir égard.
Régarda ou lénguéja, langueyer un porc pour y découvrir
les grains on boutons de ladrerie.
Régardaïre, s. m. Langueyeur de pourceaux; inspec-
teur.
Régardèlo, s. /. — Un pla dé régardèlo, un plat pour
les yeux. Manja dé régardèlo, diner des yeux ou en
regardant les autres manger.
Dér. de Régardèlo, plante ou produit imaginaire.
Régiscla, v. Rejaillir, éclabonsser. — M'a tout régiscla,
il m'a tout éclaboussé.
Régisclado, s. f. Éclaboussure, rejaillissement; ondée,
. pluie, averse subite et de peu de durée.
Régiscle, s. m. Rejaillissement, éclaboussure. On dit au
prop. et au fig. N'aï agu lou régiscle, j'en ai eu les écla-
boussures.
Régistèl, s. m. Nom de plante; garance des teinturiers
(Rubia tinctorum, Linn.). Grateron. — Voy. Arapo-man et
Réboulo.
Régistre, s. m. Registre ; livre où l’on inscrit les actes
de l'état civil, les délibérations municipales, les affaires, de
chaque jour, les fournitures de métier, etc.
Dér. du lat. Registrum.
Régital, s. m. Piège, traquenard pour prendre les bêtes
fauves ; traquet pour prendre les rats et les souris; sorte
de piège à ressort composé de deux mâchoires armées de
pointes qu'un ressort fait détendre et qui saisissent l'ani-
mal qui a donné dans le piège.
Régla, vo. Tirer des lignes droites avec une règle et une
pointe à tracer; régler, mettre une règle en vigueur, ar-
rêter, déterminer, régulariser ; arrêter un compte. — Soun
conte és régla, il a son compte; il a reçu le châtiment qu'il
méritait; il est mort,
Dér. du lat. Regulare.
Réglé, s. m. Règlement relatif à divers objets, En
terme d'église et dans le st. fam. guide-âne, ordo ou ordre
à suivre, livret qui indique l'office de chaque jour. En
style administratif, cette expression s'emploie surtout pour
désigner le règlement relatif à la dépaissance des troupeaux
dans les terrains communaux. Dans les Cévennes ce mot
désigne un thermomètre. Quand l'abbé pe Sauvaces mit le
thermomètre entre les mains des éducateurs de vers à
soie, pour régler le degré de température, il lui donna
le nom de réglé, qu'il a conservé. On dit au fig. lou métrén
dou réglé, nous lui apprendrons à se bien conduire, à
ne pas agir selon ses caprices.
Règlo, s. f. Règle, instrument allongé, plat ou carré,
en bois ou en métal, servant à tracer des lignes droites, et,
par extension, principe, maxime, loi ; bon ordre, exemple,
modèle, préceptes ; statuts d'un ordre religieux.
Dér. du lat. Regula, m. sign.
Employé au plur., il a la signification de règles, mens-
trues, écoulement périodique et mensuel des femmes.
RÉG 581
Régo, s. f. Raie, ligne, trait de plume ou de crayon;
bande étroite ; rayon ou sillon de jardinier ; ligne divisoire
qui sépare deux champs; rigole de jardinier: règle de
conduite; culture. — Uno régo dé coutrié, un labourage
simple. Douna dos régos, faire deux labours successifs où
l'an sur l’autre en sens inverse. Planta à régo, planter par
sillons ou par rigoles. Tira régo, planter, borner, délimiter
deux champs contigus. Téni la régo drécho, tenir une
conduite régulière. Passa La régo, dépasser les bornes per-
mises.
Dér. du grec Pryf, fente, crevasse, ou du lat. Riga, dor.
và.
Régolo, s.f. Rigole, petit fossé peu profond, creusé
dans la terre pour faire couler l'eau dans un jardin, un pré ;
caniveau établi dans une rue pour l'écoulement des eaux
pluviales. — Sdouto régolo, saute-ruisseau, petit jeune
homme malingre et prétentieux; petit polisson, enfant des
rues.
Dér. du celt. Rigol ou du lat. Rigare, arroser.
Régor, s. m. Agneau tardif, agneau de l'arrière-saison,
celui qu'une brebis met bas dans un âge où communé-
ment elles ne portent plus. Ces agneaux sont ordinairement
maigres, chétifs, vieillots et malsains. On le dit au fig. des
enfants nés sur le déclin de l’âge de leur mère.
Dér. du lat. Cordus, qui vient dans l'arrière-saison..
Régoubia, adj. Recourbé. — Camino tou régoubÿa, il
marche tout courbé.
Ce mot est sans doute employé pour Régourbïa, qui vient
à son tour de Gourbio, serpette recourbée ainsi nommée
dans le voisinage du Rhône.
Régoubiun, s. m. Nausée, vomissement ; aliments rendus
à la suite de nausées.
Régoula, v. Couler, dégoutter ; vomir, rendre gorge;
être rassasié jusqu'au dégoût. — La suzoù mé régoulô din
l'ésquino, la sueur me coule dans le dos; je ruisselle de
sueur.
Régoulije, s. ». Dégoût, aversion; nausée, envie de
vomir, dégobillis. — Acù faï véni lou régoulije, cela sou-
lève le cœur.
On dit aussi Fastije.
Régoumas, s. m. Grimace, faux pli que fait un vête-
ment mal taillé, on par l'application d'une pièce mal
cousue, mal appliquée, mal posée.
Régoumassa, v. Grimacer, présenter un pli défectueux.
Se dit d'un vêtement mal taillé.
Dér. de Régoumas, grimace. ;
Régourdano (cami dé). Nom donné à l'ancienne voie
romaine qui conduisait de Nimes à la Loire par Alais,
Villefort et la vallée de l'Allier. Strabon en fait mention.
On en voyait des vestiges, il y a quelques années, près
d’Alais, sur la partie de l'ancienne route de Saint-Ambroix
appelée les Calades; aux abords de l'Affenadou, sur un
point désigné aussi sous le nom des Calades.
Régrè, s. m. Sorte de sérénade amoureuse, dont l'air et
7
582 RÉI
les paroles sont d'un caractère plaintif et que les paysans
des Cévennes chantent sous la fenètre dé leur amoureuse.
Ce terme s'emploie aussi dans le sens de pitié. — Aquél
éfan fai régrè! cet enfant me fait pitié. At régrè d'él, j'ai
pitié de lui. Dans le sens propre il signifie regret, souvenir
pénible d’avoir fait, dit ou perdu quelque chose; de n'avoir
pas dit ou fait telle autre chose ; repentir.
Dér. du lat. Regressus, retour.
Régréta, v. Regretter, être fâché, afiligé d'une perte
qu'on a faite, d'avoir manqué une occasion favorable, où
de n'avoir pas fait une chose.
Réguiè, s. m. Sillon, rigole; rigole ou chenal de’ jardin
qui longe une plate-bande et sert à introduire suécessi-
vement l'eau d'arrosage dans la série des rigoles ‘qui
composent la plate-bande ou carré affecté à une même
espèce de culture.
Réguinna, v. Ruer. Au fig. regimber.
Réguinnado, s.f. Ruade.
Réguinnaïre, &dj. m. Enclin à ruer. =— Aquél midou
és réguinnaïre, ce mulet à une tendance à rar.
Rèï, s. m. Roi, célui qui gouverhe un état. — Rd dé la
favo, le roi de la fêve; celui à qui est échue la fève du
gâteau, le jour dés Rois. Countén coumo un rèï, content,
heureux comme un roi.
Dér. du lat. Rex, regis, In. sign.
Rèi-dé-caïo, s. m. comp. Räle de genèêt, roi des cailles,
poule d’eau de genêt. (Gallinula ou Rallus Crex, Temm.)
Depuis le haut de la tête jusqu’au croupion, d'un brun
foncé; chaque plume bordée de roux et de cendré; ventre
blanc lavé de roux; longueur 26 cent. Get oiseau arrivant
toujours à la suite des cailles, on a supposé qu'il avait
autorité pour les pousser devant lui et on l'a nommé Roi
des cailles. Il n’y a aucun rapport entre éux. Il est vrai que la
science, ayant égard à certains caractères extérieurs, et ne
tenant aucun compte de ses mœurs disparates, l’a rangé
à son tour parmi les poules d'eau; mais son nom scienti-
fique est déjà une contradiction; car ce n’est pas au milieu
des genêts que cette poule viendrait satisfaire son gout
pour l'eau. Le fait est qu’elle n’aime pas l'eau. Le langue-
docien a traduit au choix, le Roi ou le Râle du français.
Réïnage, s. m. La royauté du repas des Rois où de la
fète de l’Epiphanie. — Las fougassos de réinage, les gâteaux
des Rois.
Dér. de R&, roi.
Rèïnâou, ». pr. m. Reynaud, que l’on trouve quelque-
fois écrit Raynaud, Raynal, Raynald où mème Réginal.
Dér. de la bass. lat. Reginaldus, royal.
Réïinar, s. m. Renard. (Canis vulpes, Linn.) Mammifère
onguiculé de la famille des Digitigrades où Carnivores,
signalé de tout temps comme l'emblème de la ruse et de la
finesse. — És un fi réinar, c'est un rusé Compèré.
Réïnar, s. m. Terme de maçon. Pierre attachée au bout
d’une ficelle et tenant lieu de fil à plomb.
Réinardivo, Rénardivo ou Rénadivo, s. f. Ognon de
RÉL
l'arrière-saison; ceux qui renaissent, pour ainsi dire, ou
qui repoussent du germe des vieux ognons qu'onavait
laissés en terre par oubli ou à dessein. Cesognons ont, à la
fin de l'automne, la fraicheur des ognons du printemps:
Dér. du lat. Renatus, Venu de nouveau, reproduit. :
Réinéto, s. f. Pomme de rainette, sorte de pomme
commune dans les Cévennes où l'on en trouve diverses
variétés. La rainette du Vigan jouit d’une réputation
justement méritée.
Dér. de Räno, reine, eu égard à sa qualité supérieure.
Réinéto, s. f. Raine verte ou graisset /Rana arborea,
Linn.), petite grenouille verte qui se perche sur lés buissons
ou les arbustes. Reptile de l'ordre des Batraciens et de la
famille des Anoures (sans queue).
Dér. du lat. Rana, grenouille.
Rèïino, s. /. Reine, femine de roi, souvéraine dun
royaume. |
Dér. du lat. Regina, m. sign.
Réïo, s. f. Le soc de la charrue. — BORNE la cd
rebattre le soc.
Réïre, adv. Arrière, derrière. = Qui én réf) sen
ou par le passé. Acd és toujour à réire, c'est toujours à
recommencer. Ên rétre, jadis, autrefois, postérieurement,
de nouveau.
Dér. du lat. Retro.
Réire-ban, s. ». comp. Arrière-ban. — An vira ban et
réire-ban, on a fait des perquisitions très-minutieuses; ‘on
a fait un grand remue-ménage,
Réïre-boutigo, s. f. comp. Arrière-boutique; ‘arrière :
magasin.
Réïre-gran, s. m. et f. comp. Arrière grand-père;
arrière grand’mère. — Moun réire-gran ; ma réire-gran.
Réïre-léndéman, s. m. comp. L'après-demain.
Réïre-poun, s. m. comp. Arrière-point, rang de points
de couture continus que l’on fait avec ‘une aïguille et du
fil ou avec une machine à coudre, sur le poignet de la
manche ou le plastron d’une chemise ou de tout autre
vêtement.
Réïre-sourêl, s. m”. comp. La réverbération du rl;
un reflet de soleil donné par un nuage:
Réjougne, v. Serrer, enfermer, ranger, mettre en place,
soigner. — Ténés acd bièn réjoun, gardez cela avec Soin;
tenez-le bien soigneusement serré, ajusté, rangé. |
Réjoui, v. Réjouir, donner de la joie, du plaisir. —Sé
réjoui, se réjouir, se livrer au plaisir, se divertir.
Réjouïissanço, s. f. Réjouissance, fête, festin, fète
votive, réunion où l'on s'amuse.
Réjoun, adj. m. Serré, ajusté, rangé, soigné. — Voy.
Réjougne.
Rélaïssa, ado, s. m.et f. Abandonné, ée. En vieux
langage rélaïssado signifiait une veuve; la femme de celui
qui, embrassant l'état ecclésiastique, jurait de conserver
l'état de viduité. De la bass. lat.
Rélaïssé, s. »”. Rebord, relief, saillie, plinthe, impôstes
|
|
|
EE —
DS D 7 7 7
RÈM
toute partie saillante d'une construction, d'un meuble;
tablette de cheminée, bord d'une armoire, d'nne commode.
Littéralement : petit relief.
. Rélassa, nn et.f. Celui ou cle qui est affecté
d'uie. hernie, & : «0
Dér: du lat. Ralozatus, relàché.
Réléva, v. Relever, ramasser, exhausser ; rétablir une
fortune; faire valoir, donner plus d'éclat, faire remarquer;
répondre vivement à quelqu'un, mettre à la place d'un
autre; sortir de maladie.
Dér. du lat. Relevare, m. sign.
-Rélévairo, s. f. orme de. filature, désignant. une
apprentie fileuse.
:! Réloge, s. m. on oder — Réloge d'araïrés anneau ou
.crochet en S d'une charrue, auquel on. attache le timon.
Régla coumo un réloge, se dit d’un homme très-ponctuel.
ru Dérs du lat. Horologium; m. sign.
Rélougè, s. m. Horloger, celui qui fait ou raccommode
les horloges, les pendules et-les montres.
+Déride Réloge. — Voya cm.
. Rémarqua, v. Remarquer, marquer de nouveau, faire
ane remarque, distinguer quelque particularité.
& Dér. de, Marqua, marquer.
:Rémarquable, ablo, adj.m. et f. Remarquable, digne
de remarque; qui n'est pas ordinaire, qui présente,des
particularités exceptionnelles.
: Dér. de Rémarqua.
«Rémarquo, s. f. Remarque: marque, observation parti-
culière sur quelqu'un, sur quelque chose.
«Dér..de Marquo, — Voy. ©. m.
Réména, v. Ramenter, revenir sur un sujet, rabächer,
chanter, toujours la même gamme. — Faï pas qu'ou
réména, il ne fait que répéter toujours la même chanson.
Ou réménave désémpidi un an, je ruminais cela depuis
un an. Remanier une toiture, un pavé de rue; remuer un
mélange, une liqueur circulairement. Réména low quiou,
agiter, tortiller le derrière en marchant avec affectation et
d'une façon ridicule.
Dér. du v. lat. Rimenare.
.: Rémés, éss0, adj. m. et f. Remis, remise; replacé en
son bien; rélabli d’une maladie.
+ Dér. du lat. Remissus, m. sign.
-Rémétre, v. Remettre; mettre une chose à l'endroit où
elle était auparavant; donner à quelqu'un, différer, rendre.
-Dér. du lat. Remittere, m. sign.
Rémisa, ». Loger, héberger, mettre à l'abri, enfermer
dans une remise ou dans un.endroit qui sert d’abri.
Dér. du lat. Missum, de Mittere, mettre.
.Rémiso, s. f. Remise, lieu destiné à mettre à couvert
les voitures, les ustensiles agricoles, les denrées, les récoltes.
Du grec: ’Hesuljw, mettre en repos, par la suppression de
4, ou du lat. Missum, de Mittere, mettre.
- Rémouia, v. Mouiller, humecter de nouveau. — Péssè-
gres rémouïas, pèches sèches et ramallies dans du vin.
RÉN 583
Rémoulin, n. pr. de lieu, Remoulins, chef-lieu de canton
de, l'arrondissement d'Uzés, situé sur la rive gauche du
Gardon, à 3 ken aval du Pont du Gard.
Nom dérivé de Rémoulis, — Voy. €. m.
Rémoulina, ». Tournoyer, pirouetter, On le dit de
l'eau, d'un bief de moulin qui s'engouffre dans le radier,
ce qui produit, à la surface stagnante de l'eau, des tourbil-
lons creux en forme d'entonnoir.
Dér. de Rémoulis. — Voy. €, m.
Rémoulis, s. 1. Tourbillon d'eau, détours d'un cours
d'eau.
Du cat. Remoli, ou de l'espagn. Remolino, m. sign.
Rémoulu, udo, adj. m. et f. Avide, insatiable, goulu;
en parlant de l'avidité de ceux qui, comme on le dit, ont
les yeux plus.gros que le ventre.
Dér. de Rémoulige, avidité du_bien, désir insatiable d'en
acquérir, mêlé d'un sentiment de jalousie (SAUVAGES). —
Voy. Arémouli.
Rémounfrina, v. Réprimander,. faire des reproches.
Rémounfrinado, s. /. Réprimande, semonce, mercuriale.
— Ai agu una rémounfrinado, j'aiessuyé une réprimande.
Rémounta, v. Restaurer, remettre à flot, fortifier,
ravigoter, réjouir. — Un pdou dé vi mé rémonto, un doigt
de, vin me restaure. Cént éseus mé rémountarièou, une
somme de cent écus me remettrait à flot, me serait. très:
utile. Lou vi rémonto l'éstouma, le vin: fortifie, Aquélo
plèjo a rémounta lous blas, cette pluie a donné de la
vigueur aux blés.
Dér. de Mounta, monter.
Rémountaciou, s. f. Fortune, richesse. — Acd's da
rémountaciou d'ou péis, cela. constitue. la. richesse, du
pays. Acù sérié ma rémountaciou, ce serail. une fortune
pour moi.
Dér. de Rémounta,
Rémoustra, v. Remontrer, représenter à quelqu'un. les
inconvénients d'une chose qu'il n’a pas. faite, ou qu'ila
faite ou qu'il est sur le pointide faire.
Dér. de Moustra, montrer.
Rémoustranço, s../. Remontrance, reproche, représen-
tation, avertissement,
Dér. de Rémoustra.
Rémuda, v. Changer, remplacer.— Rémuda dé jarman,
coussin issu de germain.
Dér. du lat. Remutare, m. sign.
Rémuda, s. m. Un rassis ou un relevé, terme de
maréchal. On rassied un fer de cheval lorsqu'on. y.remet
les elous qui y manquent et qui faisaient locher le fer.
Rén, s. m. Rein, reins. — Aï mdou dé rén, je souffre
des reins.
Dér. du grec Pas, comes.
Rén, s. m. Rangée, nombre. — Adéré, se, dit d'objets
disposés par rangées, disposés en file.
Réna, v.. Gronder, murmurer sourdement, grogner ;
pleurer, se chagriner sans sujet et avec mauvaise humeur,
584 RÉP
geindre. — Dé qué rénes? Üe quoi grognes-tu? Réna coumo
un por, grogner comme un cochon. Sour véntre réno, son
ventre grouille.
Rénaïre, s. m. Grognon, inquiet, grondeur, qui se plaint
toujours.
Réndiè, s. m. Fermier, locataire.
Dér. de Réndo, rente.
Réndo, s. f. Rente, ferme, revenu annuel, fermage,
loyer.
Dér. du lat. Reddita, m. sign.
Rénéga, v. Jurer, blasphémer, proférer des jurons, des
imprécations: — Rénégavo coumo un fol, il jurait comme
un possédé.
Dér. de Negare, désavouer, renier (Dieu).
Rénégaïre, s. m. Celui qui jure, qui blasphème:
Réngloro, s. f. Petit lézard gris; lézard gris des
murailles, lézardeau (Lacerta muralis): C'est un crocodile
en ‘miniature; car ‘on luia/fait l'honneur de le’classer avec
lui dans l'ordre des Sauriens. Le gentil saurien dont nous
parlons, timide, inoffensif, éveillé et agile quand'il guette
ou poursuit sa proie ou qu'il fuit le danger} est ün vrai
lazzarone, se dorlotant'avec délices au soleil, quand on veut
bien'le laisser tranquille. C’est ainsi qu'il passerait sa vie,
dormant l'hiver, se chauffant l'été, ‘au ‘milieu ‘dé nos
espaliers, qu’il protège en les débarrassant d'une foule
d'insectes dont il se nourrit; mais les enfants le poursui-
vert continuellement et bien à tort:
Réngo, s. f. Rangée d'arbres placés sur un même
alignement.
Rénifla, v. Reniflér, aspirer avec force par les narines ;
on le dit plus particulièrement des liquides.
Dér.: du lat. Renasiculare; formé de ‘re, itérat. et de
nasiculare.
Rénja, v. Ranger, placer dans son rang, mettre en place;
arranger, raccommoder, léparer. — Rénja sas cdousos,
arranger ses affaires. Faï rénja sa caréto, il fait arranger,
réparer sa charette.
Rénjo, s. f. Rangée, ligne de plantations, même signi-
fication que Réngo. — Voy. ©. m.
Réno, s. f. Plainte, soupirs d'un malade, pleurs traiz
nants d'un enfant gâté. — Aro a sa réno, maintenant, (cet
enfant} a un accès de pleurs.
Dér. du lat: Rana, grenouille.
Rénouncia, v. Renoncer, se désister, se départir de
quelque chose; quitter, abandonner; renier, désavouer;
mettre au jeu une carte d’uné autre couleur que celle dont
on joue.
Dér. du lat. Renunciare, m. sign.
Rénoüs, ouso, adj. m.et f. Grondeur, grognon, har-
gneux, pleurard.
Dér. de Réno. — Voy.c. m.
Répâou, s. m. Repos, cessation de mouvement, de
travail; tranquillité d'esprit, sommeil; palier ou repos
d'escalier. — Démouras én répdou, finissez; restez tran-
RÉP
quille, laissez-moi. — Laïssa-mé dé répéou, laissez-moi
tranquille. — Un répdou d'éscaiè, un paliers + 1814)
Dér. du lat. Reponere. Ù à
Répäousa, v. Reposer, mettre dans une situation tran-
quille, dormir ; cesser de travailler, d'agir ; Béci pers
Dér. de Répdou, repos.
Répapia, v. Radoter, rabâcher, revenir constamment
sur le mème sujet. — Répapio soun pr il rabâche
tant qu'il peut.
L'abbé pe Sauvaces fait dériver ce mot de re, itératif,
et de papa, père. Répapia signifierait donc : répéter le mot
papa, comme les enfants, c’est-à-dire devenir a
tomber dans l’enfance.
Répapiaïre, s. m. Radoteur, qui répète toujours la
mème chose, qui ne dit que des riens, des choses qui n’ont
souvent aucun rapport entre elles.
Répapije, s. m. Rabâchage, radotage, verbiage; pes
désordonné, dépourvu de sens et de raison: Le
Répara, v. Réparer, remettre en élat ce qui a soufre
| quelque dommage, rétablir. — À répara soun sg mu
a fait réparer sa maison.
Dér. du lat. Reparare, m. sign.
Réparaciou, s. f. Réparation, ouvrage que l'on! fait
effectuer pour réparer un dommage; satisfaction donnéé ou
exigée.
Dér. du lat. Reparatio, m. sign.
Répassa, v. Repasser, passer de nouveau Au fig! frotter,
houspiller, charger de coups.
Répassado, s. f. Volée de coups; reprinratidé mercu-
riale, correction.
Répasso, s. f. Repasse, grosse farine qui contient du
son; produit d’une seconde distillation de l'eau-de-vie.
Répéntén, énto, adj. m. et f. Repentant, repentante,
celui qui se repent d'avoir commis une faute où de tue
engagé dans une mauvaise affaire. .
Répénti, s.m. Repentir, repentance.
Dér. du lat. Pæœnitere, m. sign.
Répessa, v. Rejaillir par ricochet; se dit d’un filet ou
d’une chute d’eau qui tombe sur une surface dure et'se
répand en rejaillissant.
Répésa, v. Peser de nouveau.
Répéta, vw. Regimber, ruer, murmurer, se rebiffer,
répondre avec vivacité. Dans ce dernier sens on dit plutôt
Rébéca
Répéti, s. m. Le roitelet. -
Répéti, express. lang. — N'avès répéli, Vous en avez
menti, c’est vous-mème qui en imposez, vous mentez
doublement,
Répi, s. m. La répétition de la sonnerie d'une horloge,
d'une pendule, les heures qu’elle sonne pour la seconde
fois. — A souna lou répi, les heures ont sonné pour la :
seconde fois. Æspérén lou répi, altendons la répétition des
heures.
Répiqua, v. Sonner une seconde fois; se dit d'une»
ds
RÉQ
horloge. — Répiqua dé boutos; relier, radouber les tonneaux;
remplacer les cercles usés ou resserrer les anciens A coup
de maillet.
- Dér.. de Piqua, frapper.
Réplèga (Sé), w. Se recroqueviller, se dit des feuilles
des arbres que le froid, la sécheresse, les piqüres d'insectes
font bosseler ou recroqueviller.
: Dér. de Pléga, plier.
Répounchou, s. ». Raiponce (Campanula repunculus,
Linn:}, On en mange la racine comme salade d'hiver.
:-Répourta, v. Rapporter, apporter une chose, du lieu où
elle.est au lieu où elle était auparavant.
Dér. de Pourta, porter.
- Répoussa, v. Repousser, rejeter, renvoyer, faire reculer,
-faire sortir, chasser au dehors.
Dér. du lat. Repulsare, m. sign.
« Répoussadou, s. ». Chassoir des tonneliers, des menui-
siers ou des serruriers; sorte de cheville en fer qui sert à
repousser où chasser une pièce de fer engagée dans un orifice.
LRépoutéga, +» Marmotter,. murmurer, bougonner;
pester, se plaindre, se fàcher; répliquer brusquement.
Dér. de Pout, lèvre.
-Répoutégaire, s. m. Celui qui murmure, qui marmotte
entre ses dents, se plaint, se fâche, réplique brusquement.
Dér. de Répoutéga. — Voy. ©. m.
Répréne, v. Reprendre, recommencer, prendre de nou-
veau; réprimander, corriger. — Fôou réprène lous éfans,
il faut réprimander les enfants quand ils se conduisent
mal. .Sé répréne, se corriger soi-mème après avoir mal dit.
Dér. de Préne, prendre.
Réprés, és0, adj. m. et f. Repris, ise, pris une seconde
fois; réprimandé, ée.
Réprin, s. m. Recoupe; son dont on a tiré la fleur et
qui.-contient encore beaucoup de farine; cette recoupe
repassée au moulin donne, après avoir été ressassée, une
autre farine plus chargée de son et que l'on nomme
récoupéto.
Réproches, s: m. plur. Rapports d'estomac, ordinaire-
ment. acides et désagréables.
Réproucha, v. Donner lieu à des rapports d'estomac on
à des gaz ou vapeurs qui s'élèvent dans la bouche d’un
estomac dérangé. — Aquélés rabes mé réprochou, ces radis
me donnent des rapports.
Réquéri, v. Requérir, demander, rechercher.
Dér. du lat. Requirere, m. sign.
Requiè, ècho, adj. m. et f. Recuit, ite. Cuit une
seconde fois.
Dér. du lat. Recoctus, m. sign.
Réquiècho, s. /. Lait bouilli.
Réquinquia, ado, adj. m. et f. Requinqué, paré avec
soin, avec: affectation, plus que l'âge et la condition ne le
comportent. — Sé réquinquia, se parer.
Réquioula, v. Reculer, se porter en arrière, marcher à
reculons.
RÉS 585
Réquiouladou, s. m. Reculoir; courroie qui entoure le
train postérieur du chevalet s'y applique quand le véhicule
| descend une côte rapide.
Réquisto, adj, f. Vérifié, examiné, recherché, requis.
— Acÿ's dé réquisto, c'est une chose rare, recherchée,
précieuse, exquise.
Rés, adv. Rien; personne. — Acù faï pa dé rés, cela
ne fait rien, S'és pas fdougu dé rés, il ne s'en .est presque
rien fallu. Rés n'és pa véngu, personne n'est venu. Ondit
aussi ré Ou rén, dans le sens de rien.
Rès, s. m. Unetressée, une cordée, un chapelet d'ognons
ou d'ails attachés sur deux rangs et formant une double
tresse. '
Dér. du lat. Restis, corde. Pline dit dans.ce sens : Restis
alliorum, que l'on traduit en langued: par un rès d'aïés:
Réscondre, v. Cacher. — Sé réscondre, se cacher:
Dér. du lat. Condere, m. sign.
Réscôs, adj, m, Caché, On dit aussi Raseds où Réscoundu.
Réscôs (dé ou én), adv: En cachette, secrètement, à
la dérobée. On lit dans les Coutumes de Remoulins : -« Que
degun: bochier, n'aya a vendre carn a rescos, » @.-à-d.x
Qu'aucun boncher ne vende de la viande en cachette.
Réscoundéire, s. m. Cachottier, sournois,. homme
dissimulé, qui ne dit jamais ce qu'il fait nice qu’il pense.
Réscoundéto (dé), adv. En cachette, à la dérobée,
Réscoundre, v. Cacher. — Voy. Réscondre. |
Réscoundoùs (dé), adv, En cachette, à la dérobée. On
dit aussi d'éscoundoun.
Dér. du lat. Reconditus.
Rése, s. m. Tique; tique. des. chiens, ricin, louvette
(Acarus ricinus, Linn.); insecte aptère, armé de pattes
ou plutôt de serres puissantes avec lesquelles il se cram-
ponne surtout aux oreilles des chiens, dont il est si difficile
de l'arracher qu'il fant souvent le couper pour les en
débarrasser. Quand il s'est-bien fepu, sa couleur grisâtre
prend une teinte vineuse que lui donne le sang dont:il s’est
gonflé; il est alors gros et rond comme un pois où mieux
une fève de Palma Christilou Ricin, qui lui a valu son
nom. Beaucoup d'animaux sont attaqués par différentes
espèces de tiques;. celle, qu'on, trouve sur: les brebis est
appelée Gourgouli où Léngasto. Voy. ce dernier, — Tèn
coumo un rése, il est tenace comme une tique. Sé couflo
coumo un rése, il est bouffi de vanité, d'orgueil.
Rèsi, s. m. Mème signification que Rése. — Voy. ©. m.
Résible, iblo, adj. m. et f. Risible, qui provoque le
rire: ridicule, digne de moquerie.
Dér. du lat. Risibilis, m. sign.
Résoù, s. /. Raison; faculté maturelle par laquelle
l'homme peut diriger les opérations de son âme ; bon sens,
équité, justice. Au plur. contestations, difficultés, dispute:
_— An agu dé résoùs, ils ont eu des contestations, des
disputes. Acd's la résoù, cela est très-juste. Dé résoùs
trdoucados, des propos insensés, dépourvus de raison.
Dér. du lat. Rationis, gén. de Ratio, w. sign.
586 RÈS
Résouna, v. Raisonner, répliquer; prendre les intérêts
ou la défense d’un autre; apprécier une chose qui est à
vendre. — Résouna lou bé déou mèstre, prendre les intérêts
du maitre: Résouna uno marchandiso, offrir un : prix
raisonnable. Résouna sous drés, défendre ses intérêts, ses
droits, Résouna quéoucun, prendre le parti, la défense, les
intérêts de quelqu'un. Sé résouna, se défendre par, de
bonnes ou de mauvaises raisons; faire bonne contenence
devant une accusation, se rébiffer.
Dér. du lat Ratio, raison.
Résounable, ablo, adj. m.et f. Raisonnable, susceptible
d'entendre raison ; juste, équitable. .— L'an paga un pris
résounable, on en a payé unprix équitable.
Dér. du lat. Rationabilis, m. sign.
Résounaïre, adj. m. Celui qui cherche toujours à justi-
fier ses actes, bons ou. mauvais, qui discute sur tout et à
propos de tout,
Dér. de Résoù, raison.
Réspè, s. m. Respect; soumission volontaire, déférence
que l’on a pour quelqu'un ou,pour quelque chose, à -cause
de son mérite ou de sa supériorité. .— Parlan pér réspé,
sauf votre respect, révérence, parler. À réspè d'aqud, eu
égard à cela.
Dér. du lat Respectus, fait de Respicere, regarder, avoir
égard à...
Réspéta, v. Respecter, porter respect, épargner, me-point
endommager, ne point porter atteinte. —Séréspéta, se
respecter, garder les bienséances convenables à sa position.
Réspondre, v. Répondre, faire une réponse à une ques-
tion; à une demande ; se porter caution, assurer; commencer
à éclore, en parlant de la graine de vers à soie.
Dér. du lat. Respondere, m. sign.
Résponso, s. f. Réponse; lettre adressée en réponse à
une Jettre reçue; réfutation.
Dér. du lat. Responsunr, m,: sign. ?
Réspoundèire, s. m». Caution, garant, — Véici moun
réspoundèire, voici ma caution.
Réspounsable, ablo, adj. m. et f. Responsable, qui est
garant de quelque chose, qui doit rendre .compte de son
administration ou de ses.actes.
Résquia, v. Glisser, mettre le pied sur.une: chose glis-
sante, chanceler ou tomber en glissant.
Dér. du bas bret. Risglar, m. sign.
Résquiado, s. f. Glissade, faux pas que l'on-fait en
glissant.
Résquiéto, s. f. Glissoire, chemin frayé sur la glace
pour y glisser; rocher ou corps poli et incliné sur: lequel
ou s’amuse à glisser. — Jouga à résquiéto, jouer à écorche-
cul, glisser en. se trainant sur le derrière, Dé nésquäéto,
par ricochet, en glissant,
Réssa, v. Scier, couper avec une scie.
Du grec P{saw, couper, rompre.
Réssadoù, s. ». Baudet des scieurs de long: poutre
ordinairement fourchée par un bout. qui pose. à terre, el
RÈS
dont le bont opposé est élevé sur un chevalet. La bille à
scier est liée sur le baudet: ‘f
Réssaïre, s. m. Scieur, scieur de long. — Pants
un réssaïre, manger comme un scieur de long, est un
dicton qui s'emploie fréquemment pour indiquer: un
excellent appétit dont ces ouvriers ne sont jamais dépourvus,
ce qui pourrait bien tenir à leur genre de travail, qui doit
fortement activer la digestion stomacale et intestinale, ‘en
les obligeant à se baisser et à se redresser sans relâche.
Réssaïres, s. m. plur. Sorte de moucherons qui, par de
petits vols alternatifs et continus, de bas en haut et'de
haut en bas, imitent le mouvement de: va-et- vient me
scieurs de long ou Réssaïres.
Dér. de Résso, scie.
Réssâou, s. m. Cahot, ressaut, contre-coup,rebon-
dissement, sursaut. Ce terme s'emploie ordinairemeént'pour
designer les cahots d’une pres d’une voiture.
Dér. de Sdou, saut.
Réssâouta, v. Ressauter, éprouver de es tunis
successifs, des soubressauts, rebondir, SERRES D
Dér. de Sdou, saut.
Réssé, s. m. Scie de main, propre à scier-une bride
d’arbre de moyenne grosseur. L
Dim. de Rèsso, scie.
Résségre, v. Rechercher; revenir sur: ses pas, cime
travailler à la pioche les endroits qu'on n'a: pu labourer
avec la charrue,
Dér. de Ségre, suivre, chercher.
Résséméla, v. Carreler, mettre de nouvelles sidléé à
des souliers.
Dér. de Sémèlo, semelle.
Réssémélaïre, s. m. Savetier, celui ‘qui remet de
nouvelles semelles à des souliers, qui les répare.
Dér. de Sémèlo, semelle.
Réssémélaje, s. »m. Carrelure des souliers, semelles que
l'on ajoute à des souliers quand la première est usée.
Rèsso, s. f. Scie, outil dont la pièce principale estiune
lame dentée, destinée à couper ou refendre le bois; Ha
pierre ou les métaux. y"
Dér. du grec Phssw, rompre, frapper avec force.
Réssounti, v. Retentir, vibrer, résonner, — Aquéléot
m'a ressountà din l'éstouma; :@e ‘contre-coup s'est fait
ressentir dans ma poitrine.
Réssoutimèn, s. m. Frémissement, vibration d'une
cloche, d'un corps résonnant; vibration de l'air causée par
la chûte d’un corps ou par quelque bruit analogue à celui
du tonnerre ou du canon.
Résta, v. Loger, demeurer; tarder, être en retard: —
Ounté réstas? où demeurez-vous ? où logez-vous? Avès bièn
résta! vous avez bien tardé à arriver. Réstæ aqui émbé
lou béstiâou carga, se dit d'une personne qui demeure.
interdite ou ne sait comment se tirer d'affaire pour
s'acquitter d’une commission dont on l'a chargée. |
Réstanqua, v. Arrèter l'écoulement d'un liquide, d'an.
PE ‘4
cours d'eau au moyen d'ane digue ou arrèt; clore une
écluse en baïssant la vanne. -
, 8. f. Arrêt, digue, vanne d'écluses barre
qu'on met en travers et derrière une porte ou une fenètre
pour les tenir fermées; vanne ou planche servant d'arrèt
pour retenir la pâte dans le pétrin de boulanger: tout ce
qui sert à retenir, à arrêter.
Réstouble. Chaume; ce qui reste en terre de la tige du
blé, dans un champ après la moisson; un, champ en
chaume,
Rèstre, v. Mème signification que Ëstre, être, .
substantif.
Rétal, s. m. Rognure d’étoffe, d'habit ; retaille ; recoupes
. de pierre de taille.
… Dér, de Tat, entaille.
Rétapa, v. Reboucher, boucher après avoir débouché;
retaper, retrousser les bords d’un chapeau d'une manière
insolite ou originale; répondre vertement à quelqu'un. —
L'aï bièn rétapa, je l'ai joliment retourné.
. Dér. de Tapa, boucher, fermer.
Rétar, s, m. Retard, retardement ; délai, remise, renyoi.
Dér. du lat. Retardatio, m. sign.
Rétarda, v. Retarder, arrêter, suspendre; aller trop
lentement en parlant d'une montre ou d’ane horloge — Ma
mostro rétardo, ma montre est en retard.
Rétégne, v. Reteindre, teindre à nouveau.
Dér. du lat. Retingere, retremper.
Rétène, v. Retenir, reprendre, garder en son pouvoir,
faire séjourner ; opération de calcul qui consiste à retenir
un nombre pour le reporter à une autre colonne de chiffres ;
réprimer, modérer; mettre dans sa mémoire, empècher,
attraper. Se dit.des arbres qui nouent, dont les fruits n'ont
pas coulé. — Lous doubres an bièn réténgu, les arbres (à
fruit) ont bien noué.
Réténgu, udo, adj. m. et f. Retenu, ue; modéré, cir-
conspect, sobre.
Dér. du lat. Retentus, m. sign.
Réténgudo, s. /. Réserve, retenue, discrétion, qualité
par laquelle on règle ses discours et ses actions de manière
àdes mettre en harmonie avec les règles de la prudence, de
la modération, de la modestie, des convenances.
Rétira, v. Recevoir, loger, recueillir, héberger ; donner
asile, refuge, retraite, donner l'hospitalité.
: Rétira (Sé), v. Se rétrécir, se racornir. — Lou quièr sé
rétiro, le cuir se racorniL.
Rétirado, s. f. Logement, hospitalité, asile que l'on
donne à un étranger, à un indigent, à un parent, à un
ami. — Douna la rétirado, donner l'hospitalité à quel-
qu'un, l'héberger ; l'heure de la retraite, où l'on se retire,
— És l'ouro dé la rétirado, il est l'heure de rentrer.
Rétor, s. m. Retors, fin, rusé, artificieux. — Ës un
rétor, c'est un homme plein de ruse.
Dér. du français.
Rétos, rêtosso, adj. m. et f. Tordu, contourné, enrouli. ,
REV -b87
Rétosse, v. Tordre, contourner; corriger, metire à la rai-
son. — Té vas faïre rétosse, Wu vaste faire mettre à la raison.
Rétour, s. m. Retour; détour, contour, — La ribidiro
[a un rétour, la rivière forme un détour.
Rétraïre, v. Faire le portrait d'une personne, la figure
d’un corps quelconque ; imiter la resseiblance: ressembler,
avoir de l'analogie; reprocher. — Aquélo couloù rétrat sus
lou jâoune, cette couleur tire sur le jaune; elle est appro-
chante du jaune. Aquél éfan rétraït à soun paire, eet enfant
ressemble à son père. Y rétrasidou sas fdoutos, on lui
reprochait ses fautes, sa conduite.
Rétroüs, s. m. Débris de foin ‘on de paille tombés à
terre, du râtelier ou de la mangeoire d'une écurie,
Révéiè, s. m. Sérénade, que les jeunes gens chiantenit la
nuit sous les fenêtres des jeunes filles.
Révéiou, s. m. Réveillon, collation ou medianoche de
la nuit de Noël que l'on fait au retour de la messe de
minait; petit repas extraordinaire que l'on fait entre le
souper et le coucher; collation, ete.
Révéiouna, v. Faire le réveillon; fairé an repas
nocturne entre le souper et le coucher, à une heure avancée
de la nuit.
Dér. de Révéioù:
Révéire, v. Revoir, voir de nouveau, — Aou révéire?
au revoir !
Dér. de Véire, voir.
Révénan, s. m. Revenant, fantôme, esprit que l’on
croit revenir de l'autre monde; personnage’ à figuré ou
accoutrement fantastique. — Sémblo un révénan, il a l'air
d'un revenant.
Emprunt fait au français.
Révéndariè. s. m. Petite boutique de regrat ou d'épicier
qui revend les denrées de seconde ou de troisième main:
Révéndaïre, s. m. Regrattier et non revendeur. Petit
épicier qui revend de seconde on dé troisième main. On
dit aussi Mangouniè. — Voy. c: m.
Révéngu, s. m. Revenus, rentes. — À dé bos révéngus,
il a de jolis revenus. .
Révéngu, udo, adj. m. et f: Refaït, blanchi, en terme
de cuisine. On le dit aussi de la viande qu'on fait revenir
ou cuire légèrement sur la braise. — Pésoùl révéngu, un
parvenu, un homme naguère misérable et qui fait le vani-
teux après avoir gagné quelque argent.
Révéni, v. Faire reprendre à quelqu'un ses esprits, le:
ranimer. — Fa révéni, faire blanchir ou refaire, en terme
de cuisine. Pér vous révéni, pour revenir à ce que nous
disions; c'est une locution qui s'emploie dans la conver-
sation après une digression, quand on revient sur le
premier sujet.
Révès, s. m. Averse, ondée, Painde pui SERRE
dit aussi Révéssado. — Voy. ©: m.
Révéssa, v. Être pire, surpasser. sé Les past ets,
lou fil révèsso, cet homme est méchant, mais son fils le
surpasse en méchanceté.
588 RIB
Révéssado, s. f. Averse, ondée, pluie de peu de durée.
On dit aussi Révès. — Voy. ©. m.
Révésséto (de ou à la), Loc. adv. A la renverse ou sur
le dos. — Nada dé révésséto, nager sur le dos. Les nageurs
se délassent, par cette façon de nager, lorsqu'ils sont fati-
gués de celle qui est ordinairement employée.
Révèsso (man), subst. comp. Revers de main. —
Émplastra à man-révèsso, soufileter d’un revers de main.
On dit aussi dans certains pays man-rébousso.
Révièn, s. m. Produit, rapport, revenu. — Aquélo tèro
és d'un bon révièn, cette propriété est productive.
Révioura, v. Raviver. — M'as di : fai révioura ta
léngo matérnèlo. (LAFARE.)
Révioure, s. m. Regain des prés, de la luzerne, de la
feuille de mürier. C’est la dernière pousse.
Révira, vw. Riposter à quelqu'un, lui rabattre le caquet,
le rabrouer, lui river son clou. — L'a bièn révira, il l'a
bien retourné. Sé révira, retourner, rebrousser chemin,
revenir sur sès pas.
Révirado, s. j. Retour, accès subit de certaine maladie,
maladie grave. — A’gu uno famouso révirado, il a éprouvé
une forte secousse, il a &té bien éprouvé par cette maladie.
Révouluciou, s. f. Révolution; bouleversement, trouble,
secousse morale. — Acù m'a fa uno révouluctou! cette
nouvelle m'a tout bouleversé.
Emprunt fait au français. :
Révouluma, v. Tourbillonner. On le dit du vent qui
tourbillonne en soulevant des flots de poussière ou de
débris de substances légères, telles que les feuilles sèches,
la paille, etc.
Dér. du lat. Revolvere, m. sign. d
Révoulumado, s. f. Tourbillon de vent ou de fumée;
monceau, amas de divers objets entassés pèle-mèle. —
Révoulumado d'âouro, tourbillon de vent. Révoulumado dé
fun, tourbillon de fumée. Uno révoulumado dé mounde,
un rassemblement de personnes.
Révoulun, s. »”. Tourbillon de vent, de fumée, de
neige, de pluie, etes
Rial, s. m. Ruisseau. — Voy. Riou.
Riasso, s. f. Laiche; foin peu délicat qui vient naturel-
lement et sans culture dans les terrains humides et maré-
cageux. Le souchet ou plantain d’eau domine dans ces
herbages.
Riban, s. m». Ruban. Tissu mince, plat plus ou moins
étroit, ordinairement composé avec de la soie.
Du celt. Riband, m. sign.
Ribanéja, v. Se développer en forme de ruban.
Ribâouto, n. pr. de lieu. Ribaute. Village situé sur la
rive gauche du Gardon d’Anduze (canton d’Alais est).
Cette localité tire son nom de sa situation sur une rive
ou berge élevée qui la tient à l'abri des inondations.
Nom composé de deux mots : Ribo-douto, rive élevée.
C'est le même que Rivesaltes. Ribaute a donné naissance
à Jean Cavalier, le 28 novembre 1684.
RIB
Ribas, s. m. Augm. de Ribo. Grand talus gazonné ou
couvert de broussailles.
Ribéja, v. Confronter, confiner, limiter, avoisiner,
aboutir, être limitrophe.
Dér. de Ribo, rive.
Ribièiro, s. f. Rivière, cours d’eau formé par la réunion
de plusieurs ruisseaux et qui se jette dans un fleuve ou
dans une autre rivière.
Les deux principales branches du Gardon, celle d'Alais
et celle d'Anduze, ont leur confluent (jougnadoù) en face
de Vézénobres. — Anan én ribièiro, nous allons à la
rivière.
Dér. de Ribo, bords entre lesquels le cours d’eau est
compris. — Voy. Ribo.
Ribla, v. River un clou, un morceau de métal; en
rabattre la pointe après l'avoir planté; battre le pavé,
l'enfoncer avec la hie. On dit au fig. Z riblère sous
clavèls, je lui rivai son clou, je rabattis son caquet, je
retorquai ses arguments.
Riblé, s. m. Rivet.
Riblo, s. f. Hie ou demoiselle dont se servent les paveurs
pour battre le pavé.
Riblou, s. m. De la pierre concassée de petite dimension
et qui sert à remplir les joints dans la confection des
maçonneries en moëllons; de la blocaille ou ballast.
Ribo, s. f. Talus gazonné, terrain élevé en terrasse au
bord d'un champ auquel le talus tient lieu de mur de
soutènement; la lisière d’un champ, le bord d’une chose
telle que la lisière d’un pré, :e bord d’un champ, d'une
forêt, d’une table, la rive d'un cours d’eau, le bord de la
mer. Ce terme s'emploie aussi pour désigner la mauvaise
herbe qui croît sur les talus (verdage de talus) et dont les
ânes s’accommodent volontiers. C’est dans ce sens que l'on
dit proverbialement : Aquélo ribo n’és pa pér açuél ase,
ce n’est pas de la pâture pour cet oiseau, ce n'est pas pour
lui que le four chauffe. Sé i'a uno bono ribo, un ase la
manjo, S'il y a un bon emploi, c'est un incapable qui
l’obtient.
Le mot Dougo, douve, employé jadis pour désiguer le talus
d’un fossé et encore usité pour désigner en quelques lieux
le revers des anciens fossés de circonvallation établis
autour des remparts, n’est plus guère en usage.
Ribo vient du lat. Ripa, m. sign., d’où l’on a fait
Riparia et en bas lat. Riberia, Ribiera, d'où le français
Rivière et le langued. Ribiëiro, c.-à-d. eau qui coule entre
deux rives.
Ribo-taïado, s. f. comp. Rive taillée à pic; escarpement
d'un rocher, d'une montagne; berge d'une rivière, d’un
fossé coupé à pic.
Les falaises sont en grand, sur le bord de la mer, ce que
sont les berges sur le bord de certaines rivières.
Terme composé de deux mots : Ribo et Taïado, rive-
taillée.
Riboto, s. f. Ribotte; débauche de table; gueuleton..
RIM
. Ribouta, v, Se livrer à la bonne chère ; rechercher les
plaisirs de la table; manger ou boire à l'excès et, pendant
longtemps.
Riboutur, s. m. Celui qui recherche les plaisirs de la
table, les parties de plaisir; un joyeux compagnon.
Ricana, vw. Ricaner, rire à demi pour se moquer de
celui qui parle ou agit.
. Ricanado, s. f. Rire de moquerie à demi étouffé.
… Dér. de Ricana.
Ricanaïre, s. m. Mauvais plaisant, moqueur, gouailleur,
qui.se moque des autres.
On dit aussi Ricanur.
Richar, s. m. Un homme riche, un Crésus; un thésau-
riseur.
Riche, richo, adj. m. et /. Riche. Il est aussi employé
substantivement. — Lous riches et lous pdoures, les
riches et les pauvres. Faï un riche tén, il fait un bon
temps pour les récoltes.
Richèsso, s. f. Les richesses, la fortune.
Ridèlo, s. f. Ridelle, sorte de claie qui forme les deux
côtés d’une charrette et. préserve le chargement du frotte-
ment des roues. Les charrettes chargées de foin ou de
paille sont toujours garnies de ridelles.
Dér. du lat. Ridica, échalas, support.
Ridèou, s. m. Rideau: pièce d'étoffe qu'on emploie
pour fermer, couvrir, cacher, entourer ou préserver un
objet, un meuble de la poussière, et qui se développe ordi-
nairement sur des tringles avec des anneaux, au moyen
d'un cordon qui permet de l'étendre ou. de la ramasser ;
objet qui masque la vue et s’interpose ‘entre la personne
et l'objet observé; pièce d’étoffe que l’on suspend ordinai-
rement au devant d’une fenêtre dans les appartements.
Dér, de Ride, qui se plisse.
Rifla, v. Riper, râcler, râtisser avec % ripe une pierre
taillée.
Dér. de Riflar, ripe.
Riflar, s. m. Riflard ou demi-varlope; gros rabot dont
le fér est'un (peu cintré ou arrondi sur les angles et qui
sert à dégrossir le bois; ripe de tailleur de pierre.
Du celt. Riflar, m. sign.
…Riflo, s. f. Meuble de cuisine de paysans. :Sorte de
tablette servant à poser une lampe à pied et les cuillers du
ménage. La tablette appelée rafo est destinée à supporter
les verres, les tasses et autres ustensiles de mème nature;
d’où l'on dit d'une maison dépourvue de tout ou qui à été
pillée ou dévalisée, qu'il n'y a plus ni riflo, ni rafo; qu'on
n'y a laissé ni riflo, ni rafo, c.-à-d. qu'on n'y a rien
laissé.
Rima, v. Brûler ou trop cuire; roussir. En v. fr. rimer.
On dit aussi des arbres dont le feuillage est brouï par la
gelée : Soun rimas.
Lou Rima, le gratin ; ce qui s'attache d’un mets au fond
d'un plat quand on donne trop de cuisson. — Sén lou
rima, cela sent le roussi. j
RIR 589
Rima se dit aussi par syncope de rasima, fleurir, pousser
des grappes de fleurs. On dit des oliviers : An bièn rima,
ils ont bien fleuri, la floraison a été abodnante.
Rima, v. Rimer; se terminer par des rimes.
Dér. du français.
_Rimië, s. m. Arbre ou arbuste qui sert de tuteur à Ja
vigne sauvage.
Rimièiro, s. /. Une lambruche, une vigne hante ;
sorte de treille ou de cep. de vigne à tige haute que l'on
fait monter et qui se développe sur un arbre élevé.
Se dit pour Rasimièiro, m. sign.
Rimo,.s. f. Rime, retour des mêmes consonnançes:à ls
fin des vers; mots qui riment ensemble. — Aqud rimo pa
mdou, ces choses-là s'accordent assez bien. Aqud n'œvni
rimo: ni résoù, cela ne rime à rien, cela n’a pas le sens
commun.
Rimoun-rimasso, terme d'argot. : — Rimoun-rimasso,
toun nas din moun ésclè, se dit à celui qui parle d'une
chose sans la connaître et particulièrement qui se pique de
rimer sans raison.
Rintra, vw. Rentrer; entrer ce qui avait déjà été sorti.
On le dit aussi pour entrer..— Rintro doun/ Entre donc!
Rioto, s. f. Querelle, débat, contestation, mauvaise
humeur; éclat de rire. — Anes pa y cérea riolo, ne Va pas
lui chercher querelle.
Riou, s. m. Ruisseau; cours d'eau de faible dimension.
Ea v. fr. Rieu.
Dér. du lat. Rivus, m. sign.
Parmi les dérivés, nous-citerons :. Rioussé, Rivatél,
Rivoulé, Rigoulé, petit ruisseau. Parmi les composés. de
Riou : Rioumalo, mauvais. ruisseau; Rioutor, t ruisseau
tortueux, sinueux; ÆRiouclar,, clair ruisseau; . Canriou,
camprieu, champ voisin d'un ruisseau. Ces dérivés sont
presque tous des noms de lien.
Ripaio, s. /. Ripaille, grande chère, festin somptueux.
Amédée de Savoie, qui fut l'anti-pape Félix. V,. s'était
retiré à Ripaille, bourg situé sur le bord.du lac de Genève,
pour y mener, dit-on, une existence fastueuse.. De là le
dérivé, employé en languedocien comme.en français.
Riquétéja, v. Faire des petits repas de gala ou d'extra,
des collations hors de l'heure des repas,
Dér. de Riquéto. — Voy. ©. m.
Riquétéjaire, s. m. Un homme qui aime à faire des
dinettes d'extra, ou en dehors. de l'heure des repas.
Riquéto, s. f. Petit repas d'extra; collation: faite en
dehors de l'heure des repas ; déjeuner ou goûter léger.
Rire, s. m. Rire, ris, l’action de rire. — Low rire mé
prén, j'ai envie de rire. Créba ddou rire, crever de rire.
Avès bé lou rire, vous riez bien. S'émbounna ddou rire,
s'éspouchiga dé rire, ponffer de rire.
Dér. du lat. Ridere, m. sign.
Rire, v. Rire, éprouver nn sentiment de satisfaction qui
se traduit par un mouvement involontaire des muscles du
visage. — Ris coumo una tacho, il a un rire inextinguible.
75
590 ROD
Fariè rire las péiros, il ferait rire les pierres, c.-à-d. il est
très-facétieux. On dit d'un vieux vêtement, d’une étoffe
usée : Couméngo à rire, elle commence à montrer la trame.
Préne pér rire, prendre en plaisanterie. L'aïgo couménço
à rire, se dit de l’eau qui commence à s’agiter à la surface
avant d'entrer en ébullition.
Dér. du lat. Ridere, m. sign.
Ris, s. m. Riz. — Uno soupéto dé ris, une bouillie de
riz que l'on prépare pour les enfants; sedum acre, espèce
de joubarbe qui croit sur les vieux toits ou les vieux murs.
Risèio, s, f. Risée; partie de rire, réunion où l’on plai-
sante, où le rire domine; moquerie. — Faïre la risèio,
faire une partie de rire. Éstre la riséio déou mounde, se
rendre ridicule aux yeux du public.
Risouïè, risouièiro, s. m. et /. Rieur, euse; celui ou
celle qui rit souvent, qui rit volontiers.
Dér. du lat. Risor, m. sign.
Rispa, ado, adj. m. et f. Saisi par le froid, ridé, crèpé.
Se dit de l’eau qui commence à se congeler; de la peau du
visage ou des mains qui se gercent sous l’action du froid ;
du linge mouillé qui se roidit sous l’action du froid.
Rispo, s. f. Vent glacé, bise froide.
Dér. du grec Puf, souffle impétueux, coup de vent.
Rispo, s. /. Pelle à feu. Ce mot serait, selon Astruc,
dérivé du celtique.
Risqua, v. Risquer, exposer sa personne ou son bien,
ses marchandises, son argent, sa vie, sans craindre de les
perdre, dans l'espérance d’un profit ou d’un avantage quel-
conque; courir un risque. — Risquè toumba, il faillit
tomber.
Risque, s. m. Risque, danger, hasard, chance.
Rival, s. m. Rival, concurrent, celui qui aspire à la
même chose qu'un autre, qui la lui dispute.
Dér. du lat. Rivalis, m. sign.
Rô, s. m. Roc, rocher; bloc de pierre; grosse pierre
dure. Dans les Cévennes on désigne plus volontiers un
banc de rochers sous le nom de ran ou ron. Voy. €. m.
— Sén âou rà, nous sommes descendus jusqu’au rocheren
creusant le sol.
Rouqué, dim. de Rù. Roucas, augm.
Ce mot entre dans la formation d'un grand nombre de
noms composés : Rocoful, Roquefeuille, ou roche feuilletée ;
Rococervièiro, roche aux cerfs; Rocomäouro, roche maure
ou roche brune ; Rocopertuse, Rochepertuis ou roche percée ;
Roucâouto, Roucaute, roche-haute, etc.
Ro, n. pr. m. Roch, nom propre d'homme. — Sén R,
saint Roch, originaire et patron de Montpellier dont la fête
s’y célèbre le 46 août. — Pér Sén-Rù, pour la foire de la
Saint-Roch qui se lient à Nimes et à Montpellier.
Ro, s. m. Rot. Action de rôter; sortie bruyante par la
bouche des gaz contenus dans l'estomac.
Dér. du Jat. Ructus, m. sign.
Rodo, s. /. Roue, machine circulaire qui tourne sur un
essieu comme centre; botte ou molle de cerceaux en bois
ROU
de châtaigner servant à cercler les tonneaux. — Roudéto,
petite roue.
Dér. du lat. Rota, m. sign.
Rôdou, s. ». Tour, circuit, rond, circonférence, étendue
circulaire, emplacement. — Un rédou dé boulés, un point
de terrain où naissent habituellement des champignons.
Roge, s. m. Le mésentère sale, région intestinale chez
l’homme et les animaux; la fraise, en terme de boucherie;
membrane graisseuse et glanduleuse à laquelle tiennent
tous les boyaux.
Ron, s. m,. Roc, rocher, banc de rochers. — Lou Ron
trdouca, le Roc percé, coupure ou tranchée que l'on ren-
contre sur la route départementale n° 2, de Beaucaire à
Mende, au 44me kilomètre à partir d'Alais et au-dessus de
la Croix-des-Vents, près de l’embranchement du chemin
de Périès, commune de Soustelle (Gard).
Roquo, s. f. Roche, rocher, gros bloc ou éminence de
rochers calcaires, de schiste ou de granit, etc. — La Roquo,
quartier d’Alais, au sommet duquel s’élevaient autrefois
les châteaux des seigneurs d’Alais et où est aujourd'hui
bâti le fort de ladite ville. La Roque, rue d’Alais qui se
développe à la base du rocher du fort et par laquelle
Louis XIII fit son entrée à Alais, en 4629.
Roso, s. f. Rose; la fleur du rosier, à qui la suavité de
son parfum et l'éclat de sa couleur ont fait donner le titre
de reine des fleurs.
Dér. du lat. Rosa, m. sign.
Roso, n. pr. de femme. — Rouséto, Rosette, dim. de Rose.
Rosso, s. f. Rosse, vieux cheval usé, efflanqué; hari-
delle ; terme de mépris employé par les femmes du peuple
à l'égard d’une autre femme qu’elles veulent déprécier.
De l'all. Ross, cheval, pris dans un sens dépréciatif.
Roù ou Rout, fém. Routo, adj. m. et f. Rompu, cassé,
brisé, fèl6. On l'emploie quelquefois dans le sens de déchiré.
— Sas braïos soun routos dou quiou, son pantalon a le
fond déchiré.
Dér. du lat. Ruptus, m. sign.
Rouanés, s. m. Rohannais, monnaie de la valeur d’un
sou, que le duc Henri de Rohan, chef des huguenots, faisait
battre à Nimes en 4622.
Roubal, s. m”. Le rouge-gorge appelé aussi Rigal ou
Rigâou. (Bec-fin, Rouge-gorge, Sylvia rubecula, Temum.)
Cet oiseau à le dessus du corps d'un gris-brun teint d’oli-
vâtre, le ventre blanc, le front, la gorge et la poitrine d'un
roux ardent. Le Rouge-gorge, qui n’aime pas la société de
ses semblables, recherche celle de l’homme : il n’est guère
d'habitation, des champs surtout (car il vient quelquefois
dans les villes), qui n’ait dans son petit jardin ou sur la
haie voisine, un de ces charmants oiseaux gazouillant son
joli ramage, qui plait d'autant plus que c’est péndant l'hiver
où les autres chantres ailés sont absents ou se taisent. Il est
si fidèle, si confiant, si familier, qu'on le dirait un
commensal de la maison, dans laquelle il ne craint pas
d'entrer pour y chercher un abri ou prendre sa pâture.
ROU
Roubal vient de Rubellio, un de ses noms latins, du
verbe Rubeo, rougir. ÆRigal ou Rigdou, plus expressif
encore, est formé de gaudium, d'où le vieux français avait
fait aussi Se rigoler, ou Rigoler, se réjouir.
Roubiné, s. m. Robinet, appareil destiné à faciliter
l'écoulement d'un liquide ou d'un fluide quelconque, ou
son passage d’un récipient dans un autre.
Dér. de Roubin, petit canal.
Roubino, s. f. Roubine, canal de rivière ou de dessèche-
went d'un marais, d'un étang. Nom que l'on donne, dans
la Camargue, aux canaux qui servent de communication
entre les étangs salés et la mer, ou qui servent à introduire
l'eau douce du Rhône dans les terrains bas, pour les
Roncâouts, n. pr. Roucaute pour roche-haute (roco-
douto). Le changement de Ro en Row est ordinaire dans
les noms composés de ro ou de roco.
Rouda, ado, adj. m. et f. Ceint, entouré, cerné, clos,
mis en défense. Champ en éteule, autour duquel on fait
trois ou quatre sillons, sur lesquels on jette quelques grains,
pour indiquer qu'on veut garder l'herbe du champ et
empècher les troupeaux étrangers d'y entrer.
Rouda, v. Roder, tourner. — La tèsto mé rodo, il m'a
pris un vertige, un tournoiement de tête.
Dér. de Rodo, roue.
Roudado, s. . La quantité de fil enroulée autour d'un
dévidoir et formant un écheveau.
Dér. de Rodo, roue,
Roudaïre, s. m. Rôdeur, vagabond; mal d'aventure,
tourniole, abcès qui se forme au bout des doigts.
Dér. de Rodo, roue.
Roudamén, s. m. Tournoiement, vertige. — Un rou-
damén de tèsto, un vertige, un tournoiement de tête.
Roudé, s. m. Rouet, petite machine qui tourne au
moyen d'une pédale et qui sert à dévider.
Dim. de Rodo, roue.
Roudèlo ou Roundèlo, s. /. Rouelle de veau, de
mouton, de saucisson, de thon. On emploie aussi ce terme
dans le sens de Ridèlo, ridelle. — Voy. c. m.
Roudia, v. Rôder; regarder autour de soi, jeter des
regards méfiants autour de soi.
Roudiaire, roudiaïro, s. ». et . Celui ou celle qui
rède, qui épie sans cesse les actions d'autrui.
Roudiè, s. m”. En v. fr. Rodier, faiseur de roues ou
charron; dénomination prise de l'ouvrage des charrons qui
exige le plus d'intelligence. Le nom lui-même de charron
est pris du mot char ou chariot. — Pous roudid, puits à
roue. On dit plus voloutiers Pousaranco. — Voy. ©. m.
Roudrigo (vièl), s. m. Vieux sournois, vieil avare,
vieux rusé, vieux malin.
Roufian, s. m. Débauché, proxénète ; homme de mau-
vaises mœurs.
Dér. de l'ital. Rwfiano, m. sign.
Roufla, v. Ronfler; räler, renifler, sangloter, pousser
ROU 591
des sanglots; renâcler. — Lot chival ou lou por roufle, le
cheval où le cochon renâcle ou râle.
Roufle (à), Loc adv. A foison, abondamment. — N'a à
roufle, il en regorge. — Azaïga à roufle, arrosèr à grande
eau.
Rouflo, s. m. Instrament ou joujou d'écolier composé
d’une planche fort mince attachée au bout d'un cordon,
laquelle, en tournant, produit un brait sourd qui imite le
hurlement du lonp. — Voy. Brounzidoù .
Rougno, s. f. La gale ordinaire; la rogne; éruption
cutanée éminemment contagieuse, se manifestant par de
petites pustules accompagnées d'une vive démangeaison
surtout dans les jointures. Cette maladie est produite par
un insecte de la famille des Acares, classe des Aptèrés,
nommé par Linnée Acarus scabiei. La figure des galeux
est en général exempte de l'invasion.
Dér. de l’ital. Rogna, m. sign.
Rougnoü, s. m. Rognon, rein des animaux et de
l'homme; organe double, sécrétant l'urine, et placé de
chaque côté de la colonne vertébrale, dans la région lom-
baire. — Lou rougnoù d'und téro, la partie la plus fertile
d'une pièce de terre.
Dér. du lat. Renes.
Rougnounado, s. /. Partie d'une longe de mouton ou de
veau à laquelle tiennent les rognons; le filet, en français;
la selle, en terme de cuisine ; la partie de l'épine du dos
qui répond, dans le bœuf, à l'aloyau.
Dér. de Rougnoù.
Rougnous, ouso, adj. m. et f. Galeux, euse; qui est
atteint de la gale, de la rogne; qui a la gale.
Dér. de Rougno.
Rouiè, s. m. Roulier, charretier, conducteur de char-
rettes, qui fait son métier du roulage.
Roujas, asso, adj. m. et /. Augm. de Rouge, rougeaud,
rougeaude.
Roujastre, astro, adj. m. et f. Rougeâtre, roussätre.
— Uno couloù roujastro, une couleur, une nuance tirant
sur le rouge.
Dér. de Rouÿe, rouge.
Rouje, s. m. Le rouge, la couleur rouge. Sobriquet
donné parmi le peuple à ceux qui ont les cheveux roux.
— Rouje dé séro, bou tén éspéro; Rouje dé vèspre bèou
tén déou èstre, rouge le soir, espoir de beau temps. Rouÿe
coumo un coural, rouge comimne un poivron mür. Lou
rouje, lou mdou rouje, maladie à laquelle sont sujets les
pourceaux..
Roujé, s. =. Rougeton, petit surmulet, Mullus barbatus,
Linn.; Mullus ruber, Lacép. Poisson de l'ordre des Holo-
branches, commun dans la Méditerranée.
Roujé, éto, adj. m. et f. Dim. de Rouje, — Siès roujé,
tu as de jolies couleurs rouges ou roses. Las poumos roujétos,
les pommes rouges, petites pommes d’api.
Roujéja, v. Rougir, prendre la teinte rouge. — L'aoubo
roujéjo, l'aube rougit; elle va poindre.
592 ROU
Roujéto, s. f. Poisson de rivière. — Voy. Sofio.
Roujinoùs, ouso, adj. m. et f. Rougeâtre, tirant sur le
rouge. :
Dér. de Rouge.
Roujoù, s. f. La rougeur, la couleur rouge qui teint les
joues sous l'impression d’un sentiment subit ou émouvant ;
la couleur rouge en général.
Rouléto, s. f. Roulette, jeu de boules qui consiste à
lancer le but aussi loin que possible. Le gagnant est celui
des joueurs qui, avec une seule boule, se rapproche le plus
du but; ruban gradué qui sert à mesurer et qui s’enroule
dans une boîte close.
Roumagnè, s. m. Ouvrier, artisan qui fabrique les
balances appelées romaines ; le peseur public d’une ville,
d'une localité.
Dér. de Roumano. — Voy. c. m.
Roumanaje, s. m. Droit de pesage, rétribution perçue
par le peseur public dans un marché sur les marchandises
vendues au poids.
Roumanis, s. ”». Nom de plante. Romarin, Rosmarinus
officinalis, Linn., arbuste de la famille des Labiées, com-
mun dans le Midi, — Zou dimèrgue das Roumanis, le
dimanche des romarins ou de la Sexagésime, jourauquel
les jeunes gens de certaines localités portent, le grand
matin, une branche de romarin à la porte des jeunes filles
de leur connaissance.
Dér. du lat. Rosmarinus, formé de Ros, rosée, et de
Marinus, de mer.
Roumano, s. f. Balance appelée romaine. Cette balance
est composée d’un fléau ou levier gradué,..muni à une de
ses extrémités de trois crochets. On accroche au dernier
de ces crochets la’ chose qui doit être pesée; celui du
milieu est le point d'appui du côté fort, le troisième est le
point d’appui du côté faible: Sur la partie graduée du fléau
court un poids qui détermine la pesée. — Quan tiro vosto
roumano? Combien pèse votre romaine?
Roumano (Léngo),:s. f. La:langue romane, autréfois
généralement parlée dans le midi de la France. C’est au
XIIIe siècle que correspond chronologiquement pour. Alais
le moment où s'opère la transformation de :son‘idiome,/et
où son langage commence à se fixer avec le caractère. et
l'originalité qui doivent lui rester propres.
Notre dialecte ne se fait pas faute de chercher ses racines
dans le vieux tronc celtique; et il n’est pas, on le sait, un
des moins vigoureux de ses rameaux.
La dénomination d’Allez, dont l'orthographe Alais est
toute récente et ne date que des commencements du
XVillme siècle, nous parait devoir se rattacher soit au
celtique, soit au latin. En effet, A7 en celtique, comme
Altum. en latin, s’emploie dans le sens de hauteur,
élévation ; et Zez vient du latin Zatus. Dans la basse-
latinité, latus fut employé pour juæta et signifiait près, !
auprès, au -bord, :à côté, sur la limite ::Plexitiumlatus
Turonem, le Plessis-lez-Tours. En vieux fr. lez était
ROU
substantif : le ro1 est sur son trône et son fils à son lez,
c.-à-d. à son côté, traduction littérale du latin ad latus ;
d’où Allez signifierait exactement et littéralement : au
bord, au pied des hauteurs, dénomination qui ne saurait
être mieux appliquée qu'à une localité. exactement située!
au point précis où viennent expirer, sur la rive droite du
Gardon opposée à cette ville, les premiers contreforts des
Basses-Cévennes.
Allez pourrrait aussi être traduit littéralement de Ad
latus, au bord, à côté (sous entendu des hauteurs ou des
montagnes). Il faut pourtant convenir que cette étymologie
n’a aucune connexité avec le nom d’Alestum, sous lequel
Alais est désignée dans les chartes latines du moyen-àge.
La contrée que nous bhabitons fut possédée tour à
tour par les Néro-Ligures, les Celtes, les Romains, les
Francs, les Visigoths, les Sarrasins; elle a fait partie de la:
Gaule celtique, de la Province narbonnaise, de l’Aquitaine,
de la Septimanie, de la Gothie, du Languedoc; elle a parlé
le celte, le latin, le roman, le languedocien, Ces populations
et ces langues se sont mêlées; toutes ont laissé l’ineffaçable
empreinte de leur passage ou de leur séjour, dans ies appel-
lations de localités, de sites, de montagnes, de vallées, de
rivières, dans les mots les plus usuels de notre dialecte.
Ces noms, souvent bizarres, étranges, médailles altérées
par le frottement, mais reconnaissables au cachet de l’épo-
que qui les a vues naître, portant le titre des civilisations
qui les ont déposées sur le sol, ne sont-ils pas le témoignage
authentique de ces diverses occupations, superposées les
unes aux autres, et se continuant jusqu’à notre époque ?
Les campagnes, toutefois, se laissèrent moins pénétrer,
et leur obstination à repousser le parler des conquéranits
fut plus rebelle : elles surent mieux conserver leur idiome
originel et son accentuation. Nos dialectes vulgaires en
fournissent la preuve. Néanmoins le latin, importé parles
légions et les colons, devait rencontrer auprès des:classes
inférieures plus de facilité à se vulgariser, «+ + + #1
Il ne ressemblait guère au beau langage classique et
littéraire de la métropole; et, altéré ou corrompu qu'il était
déjà, peu soumis à la règle grammaticale toujours gènante, ,
il se plia aisément aux exigences de la situation. Pour se
reconnaître au milieu de ces régions ignorées, dans. les
communications journalières, pour s'entendre dans la
conversation familière, ici il respecta les formes locales, là
il emprunta les vocables usités; presque partout il se con-
tenta de ses désinences caractéristiques sans altérer le
radical, et substitua de proche en proche et sans violence
ses expressions et ses formes à celles qu'une nationalité
opiniâtre et fière entendait défendre et s’obstinait à conser-
ver comme une propriété plus intime et plus inattaquable
que le sol. Le travail d'assimilation du langage et des
esprits suivit la même marche.
Il était réservé au christianisme, le grand civilisateur
pacifique, d'achever l’œuvre. En adoptant le latin pour ses :
prières et sa liturgie, il arrèta sa complète dégénérescence,»
ROU
tandis que dans ses prédications, il le mêlait avec intelli-
gence au langage usuel et populaire, toujours compris, et
qui ne voulait point mourir. Il fit plus, car il enseigna et
introduisit dans la Gaule narbonnaise cet esprit d'agrégation,
d'ordre régulier, de solidarité, d'égalité, qui prépara le
renouvellement social.
-Ce ne fut qu'après bien des luttes et des secousses que
tous ces éléments parvinrent à se combiner et à s'organiser.
Les invasions franques, germaniques, sarrasines, promènent
sans cesse leurs ravages sur nos contrées; mais plus affermie
dans ses traditions, la Gaule méridionale les repousse
d'instinct; elle ne peut se résoudre à faire alliance avec le
Tudesque-et l'Arabe; elle se retranche dans sa culture et
son-indépendance, Puis, quand ces ouragans ont cessé,
‘laissant après eux la désolation et la ruine, la population
se rélève enfin; et il semble que les barbares du Nord et
du Midi ne sont venus que pour donner à ses besoins de
cohésion un ressort plus actif, et pour fournir quelques
matériaux de plus à l'expression de sa pensée,
:Alors'son génie lui crée une langue dans laquelle viennent
se suspendre, comme des trophées de combat, tous ses
souvenirs. Le nouvel idiome chante et résonne comme un
écho d’Ionie; il a les notes pleines et énergiques de l'accent
romain; il mêle à la gravité et parfois à la rudesse des
consonnes gothiques et germaines, la rapidité et la souplesse
des voyelles arabes. Chaque conquête, chaque occupation
lui a laissé son empreinte, et sous le nom de langue romane,
comme si le titre était un symbole de puissance, il est
répandu et admis par tout l'Occident, et les belles inspi-
rations de ses troubadours seront prises pour modèle par
toutes les langues de l'Europe.
-Roumatimo, s. m. Rhumatisme; douleur rhumatismale.
Maladie" des systèmes musculaire et fibreux, caractérisée
par des douleurs plus ou moins vives, continues ou inter-
mittentes. |
Dér: du lat. Rheumatismus, formé du grec Pcw, je coule,
et de: Pepæ,ufluxion, ‘c:-à-d. fluxion qui se déplace, qui
coule d'un point à un autre.
Roumèno; s: f. Laïtue romaine, Lactuca sativa romana,
Linn.; ‘plante .de: la famille des Synanthérées, cultivée
comme salade dans les jardins potagers. Elle a des feuilles
oblongues et des akènes noirâtres finement chagrinés. La
variété Capitata; où laitue pommée a des feuilles subor-
biculaires, très-concaves et ondulées, êt des akènes blan-
châtres et lisses. Elle porte à Alais le surnom de Rougét.-
La Laciniata où laitue épinard se distingue par des
feuilles laciniées, qui lui ont fait donner le surnom de
Frisado.
: Roumèquo, s. f. Être fantastique-et rmalfaisant dont le
nom parait venir de Roumèc, vieux mot languedocien, qui
signifie épine, ronce; Roumèquo personnifiant le remords
et:ses:aiguillons -qui déchirent. Voy. dans Las Casta-
gnados du marquis de Lafare-Alais, une pièce intitulée La
('
Roumèquo.
ROU 593
Roumia, v. Ruminer, Ce terme s'emploie au pr. et'au
fig. — Dé qué roumies? Que ramines-tu? A quoi songes-tu ?
< Manjo ca, qué roumiaras ! » Profite de l'aubaine qui se
présente, plus lard tu feras maigre chère.
Dér. du lat. Ruminare, m. sign.
Roumiaïre, s. m. Homme sournois, méditatif, qui
réfléchit sans cesse, qui rumine ses pensées.
Dér. du lat. Roumia, ruminer.
Roumiou, s. m. Pélerin qui va à Rome, — Cami rou-
mfou, Voie romaine, chemin qui conduit à Rome. Nom
propre, en v. fr. Romier où Romieu.
Dér. du lat. Romeus.
Roumpre, v. Rompre, briser, casser. Défricher un
champ, en arracher les arbres, les racines, les pierres,
pour le rendre propre à la culture. — Roumpre las cas-
tagnos séquos, première opération de décorticage des
châtaignes.
Dér. du lat. Rumpere, m. sign.
Roumpu, udo, adj. et m. Rompu, ue, brisé, 6e, cassé,
6e. — Aquél roumpu, empl! substantivement : ce roué, ce
coquin ! Roumpu dé Valénço; dicton populaire.
Roumpu, udo, part. du v. Roumpre. Rompu, ue; cassé,
ée; brisé, moulu, fatigué, harassé. — Souï roumpu, je
suis moulu.
Dér. du lat. Ruplus, m. sign.
Roumpudo, s. f. Un défrichement, une novale : terre
nouvellement défrichée et mise en valeur.
Le mot français roturier vient du lat. Ruptuarius,
rompeur de terre ou défricheur de terrain. Au moyen âge,
les seigneurs cédaient aux paysans certains espaces de
terrain en friche, moyennant une redevance déterminée
par un bail emphytéotique ou à long terme, à la condition
que ce terrain serait mis en culture par l’emphytéote,
Roun, subst. Cercle, circonférence, disque, arène où
les lutteurs se livrent à leurs exercices; le turbot, poisson
de mer; en lat. Rhombus. — Faïre lou roun, faire
cercle.
Rounca, v. Ronfler.
Du bas br. Roncha, m: sign.
Rouncas, s. m. Gros bloc de rocher.
Augm. de Ro, rocher.
Roundina ou Réna, v. Gronder, quereller par mauvaise
humeur. Grogner, gémir, pleurnicher sans raison. —
Toujour roundino! il grogne sans cesse. Lou por roundino,
réno, le cochon grogne.
Roundinaire, aïro, s. m. et f. Grondeur, grognon, qui
est sans cesse de mauvaise humeur; pleurard.
Roundino, s. f. Plainte continue, gémissement constant
habituel aux enfants gâtés.
Roundinoùs, ouso, adj. m. et f. Grondeur, inquiet, de
mauvaise humeur. — Un vièl roundinoùs, un vieux
2 | . -
:‘Rounfla, v. Ronfler; s'ébrouer. Se dit des chevaux qui
renàclent avec force. — Voy. aussi Roufla.
544 ROU
Rounqua, v. Ronfler.
. Du bas br. Roncha, m. sign. — Voy. aussi Rounfla et
Roufla.
Rounquaïire, aïro, s.m. et f. Ronfleur, euse, celui ou
celle qui ronfle habituellement en dormant.
Rounsa (pron. Rounza), w. Jeter. — Sé rounsa, se
ruer sur quelqu'un, sur quelque chose.
Rounsado, s. /. Bourrade, agression, attaque, poussée,
rossée, bousculade ; un renfoncement en terme d'argot.
Rounzas, s. ”. Une touffe de ronces, un buisson, une
ronçaie, un bhallier épineux. On dit aussi Rounziè ou
Roumeégas.
Dér. de Rounze, nom languedocien de la ronce: — Foy.
Arounze.
Roupo, s..f. Sorte de houppelande en forme de robe de
chambre, vêtement ample servant de surtout.
Dér. du bas lat. Raupa, robe.
Roupio, s. f. Vieux manteau en loque, vêtement usé;
haillons; souquenille.
Rous, ousso, adj, m. et f. Roux, rousse; fauve; blond .
Rous, n. pr. d'homme, Roux.: Roussé, Roussélo, dim. de
Roux. — Pan roussé, pain bis.
Dér, du lat, Rufus.
Rousé, s. m. Roseau des marais.
Rousèlo, s. . Le coquelicot, le ponceau; plante annuelle
à fleur rouge de la famille des Papavéracées. Les feuilles
tendres de la plante sont comestibles; la fleur s'emploie
comme. sudorifique. Cette plante porte aussi le nom de
Parpèl.
Rousèrgue, s. m. Nom languedocien de,la Patience,
Rumezx. La racine de cette plante est dépurative.
Rouséto, s. f. Rosette, n. pr. de femme, dim. de Roso,
Rose.
Dér. du lat. Rosa, m. sign.
Rousiè, s. m. Rosier, arbuste épineux qui produit la
rose. Arbrisseau de la famille des Rosacées, dont les variétés
sont devenues innombrables par la greffe.
Dér. du lat. Rosa, rose.
Rousiga, +. Ronger. — ARousiga low pan, mordre à
wême dans le pain. Rousiga un moucèl, manger un petit
morceau. Sé laïssa rousiga, se laisser gruger. Rousiga un
os, ronger un 08. Aquél afaïre lou rousigo, cette affaire: le
préocçupe, l’inquiète ; cette inquiétude le ronge.
Rousigaduro, s. f. Rongeure. Traces que laissent un
animal ou un mal rongeur. Au fig. remords, inquiétude.
Dér. de Rousiga:
Rousigaïre, aïro, s. m. et f. Rongeur, euse. Celui ou
celle qui grignote toujours quelque chose.
Dér. de Rousiga.
Rousigariè, s. f. Grugerie, exactions par lesquelles on
ruine les pauvres gens.
Rousigoü, s. m. Un trognon de fruit; un croûton de
pain, un relief de repas, les rogatons d'un festin, — Manja
lous rousigoùs dé quéoucus, manger les restes d’un autre,
ROU
Roussaïo, s. f. Bète de somme ou de trait complètement
usée. Au fig. un vaurien, un chenapan, un fainéant; une
femme de mauvaises mœurs. | {
Dér. de Rosso, rosse.
Roussé, s. m. Un jaune d'œuf; un louis d'or. — Sous
idous an dous roussés; se dit de celui qui a la prétention
d'avoir toutes choses meilleures que celles de son voisin.
Dér. de Rous, roux.
Roussèl, èlo, n. pr. m. et f. et adj. m. et f. Roussel,
n. pr. d'homme. Rousseau, qui a le poil roux, les cheveux
carotte. On le dit aussi de ceux qui ont les cheveux blonds.
Dér, de Rous, roux.
Roussèto ou Quo-rousso. Rossignol des murailles.
Rouge-queue, bec-fin de murailles, Sylvia Phœnicorus,
Temm. Front d'un blanc pur, gorge noire, tête et dessus
du corps d’un cendré bleuâtre foncé, ailes brunes, milieu
du ventre blanc, poitrine, flancs, croupion et rectrices d'un
roux vif. Ce petit oiseau a un ramage mêlé d’accents tristes
et mélancoliques qu'il fait entendre surtout le soir et le
matin ; il jette aussi un petit cri qu'il etre toujours
d’un mouvement de queue.
Roussi, s. m. Roussin, cheval, monture; vieux cheval
ou rosse.
Dér. de l’allem. Ross, cheval.
Roussièiro, s. m». Bruant, Bruant de France, bruant
jaune, Emberiza citrinella, Temm. La tête, la gorge et le
milieu du ventre jaunes; dos et croupion marrons; poi-
trine et flancs tachetés de rougeâtre. Le nom de Roussiètro
s'applique également et avec autant de raison au moins, à
deux autres espèces de Bruants, aussi communs dans le
pays, à l'Ortolan des roseaux, Bruant des roseaux, Embe-
riza Schœniculus, et au Zizi ou Bruant de haie, Emberiza
ciclus, Temm., deux espèces qui, avec quelques variantes
dans les couleurs et leurs dispositions, portent aussi du
marron et du roussâtre, et dont les femelles surtout.sont
distinguées par cette dernière couleur plus prononcée.
Roussignôou, s. m. Rossignol, Bec-fin rossignol,
Sylvia Luscinia, Temm. Il y en a une seconde espèce,
Bec-fin philomèle, Sylvia Philomela, Temm., un peu
plus grosse, plus sauvage ou plus prudente, qui arrive et
se mêle avec la première et qui a la voix encore plus belle.
On les confond toutes deux. Pour glorifier les Damoreau,
les Grisi, les Sontag, les Persiani, les Malibran et toutesles
reines du chant, on n’a rien trouvé de mieux que de les
comparer au rossignol.
Dér. du lat. Lusciniola, dim. de Luscinia, qu'on pronon-
çait Loussignola, d'où l'on à fait Loussignéow et enfin
Roussignéou.
Roussignoulado, s. f. Roulade, éclat de voix, chant
joyeux d’une jeune fille.
Dér. de Roussignéou, rossignol.
Roustan, n. pr. »m. Nom d'homme assez commun dans
le Midi. C’est la forme languedocienne de l’ancien prénom
, Rostaing ou Rostang (Rostagnus). ir oés
ROU
Roustéga, v. Grignotter; machonner du bout des dents.
Roustégo, s. m. Rogaton ; débris de mangeaille. — Vidl
roustégo, vieux ladre, vieil avare, vieux gueux.
Rousti, s. m. Rôti; viande, volaille ou gibier cuits au
four ou à la broche.
Dér. de l'all. Rosten, m. sign.
Rousti, vw, Rôtir; faire rôtir, faire cuire de la viande,
de la volaille ou du gibier au four ou à la broche. — Souï
rousti, je suis perdu; j'ai perdu la partie ou mon enjeu.
Roustido, s. f. Rôtie, tranche de pain, tartine, sur
laquelle on étend du beurre ou du fromage mou, ou que
l'on met sous le gibier qui cuit à la broche. — La bécasso
et La grivo fan bièn la roustido. Brioche.
Dér. de Rousti. — Voy. ©. m.
Rouve ou Roure, s. m. Chène blanc, Quereus robur,
Linn. En bas-lat. Rover; en v. fr. Rouve ; en ital. Rovere.
C'est de ce mot que dérivent les noms pr. du Roure,
Rovérié, de la Rovère. Les maisons de ce nom portent en
effet un chône dans leurs armes. — Rouve ramassiè, Pivou
ramassiè, chène ou peuplier que l'on taille de bonne heure
pour en prendre les rameaux, que l’on donne comme four-
rage aux bestiaux, après les avoir liés en bottes ou bourrées
(Ramas). — Voy. Chuïne.
Rouvéirôou, s. »”. et n. pr. d'homme. Pelit bois de
chènes, dim.de Rouvièiro. — Voy. c. m.
Rouvèné, s. m#. Petit chène; chène de petite taille,
jeune chène,
Dér. de Rouve, chène.
Rouvia, ado, adj. m. et f. Rouillé, 6e, couvert de
rouille, oxydé. — Bla rouvia, blé rouillé, jauni.
Dér. du lat. Rubigo, rouille.
Rouvèrgas, s. "Nom de champignon. Agaric faux
mousseron; mousseron d'automne, Agaricus tortilis. Ce
champignon ressemble un peu au vrai mousseron (Blan-
qués), dont il a presque le parfum. Son chapeau est d'abord
hémisphérique, aplati, ondulé, retourné en dedans, en
bourrelet, d’un jaune fauve ou d'un blanc roux. Les lames
sont inégales, libres, plus colorées sur les bords; le pédicule
estcylindrique: On le rencontre en automne dans les bois,
les châtaigneraies, les bruyères, assez souvent exposés au
nord. Parfumé, d'un goût agréable, il s’apprète comme les
mousserons. A
Rouvièiro, s. 7: Une rouveraie, ane chênaie, lieu planté
de chênes blancs. On dit aussi Rouvédo. Ce terme est
très employé dans le Midi comme n. pr. d'homme. Rou-
vèrgue, le Rouergue, l'Aveyron, signifie littéralement la
région des chènes, comme le Querci.
Dér. de Rouve, chène.
Rouvil, s. m. La rouille produite par l'oxydation des
métaux, mais principalement du fer. — Préne lou rouvil,
être attaqué de la rouille.
Dér. du lat. Rubigo, rouille.
Rouvil, s.m. Fruit avorté, rouillé, chétif, entiché. — Aco's
pas qué dé rouvil, ce n'est que de la marchandise de rebut.
RUS 595
Rubarbo, s. /. Rhubarbe de fromage; sorte de mets
usité dans les Cévennes et qui n'a rien de commun aveé la
drogue médicinale du même nom. On le prépare avee le
fromage frais provenant du lait de chèvre, que l'on triture
en y ajoutant de la mie de pain, du poivre et du sel on
autres épices, et qu'on laisse fermenter dans des vases de
terre jusqu'à ce que le mélange offre une consistance
suffisante. Ce mélange acquiert avec le temps un goût
piquant qui le rend appétissant. On le désigne dans les
Cévennes sous le nom de Rubarbo, à cause de la proprièté
qu'il possède de réveiller l'appétit, Ce mets est désigné
dans la Provence et dans les environs de Nimes sous lé
nom de Cacha.
Rubisso, s. . Nom de plante, Adonis.
Rude, rudo, adj. m. et f. Rude. Brusque, bourru;
dur, inflexible. — Rude dou traval, dur au travail,
travailleur acharné. Un rude afaïre, une affaire embrouillée
et difficile à résoudre.
Dér. du lat. Rudis, m. sign.
Rudéja, v. Rudoyer, dire des duretés, traiter avec hau-
teur, avec rudesse; maltraiter.
Dér. de Rude.
Rudo, s. f. Nom de plante. La rue, Ru graveolens,
Linn. Plante de la famille des Rutacées, vermifuge,
sudorifique, emménagogue, détersive. Elle arrète les pro-
grès de la gangrène. Deux poignées de cette plante, placées
sous la paillasse du lit, suffisent pour en chasser les
punaises. On s'en sert en infusion pour rétablir les
menstrues.
Dér. du lat. Ruta, m. sign.
Rufa, v. Froncer, rider; réchigner au fig.
Rufe, rufo, adj. m. et f. Raboteux, rude au toucher,
hérissé de poils, plein d'aspérités. Au fig. rude, brusque,
bourru.
Ruino, s. j. Décombres, débris provenant d’un bâtiment
démoli. On comprend sous ce terme les plâtras, gravois,
débris de mortier, et non les moëéllons.
Dér. du lat. Ruina, m. sign.
Runla, v. Rouler, dégringoler. — À runla lous éscaïès,
il a dégringolé, roulé l'escalier.
Runladouiro, s. f. Rouleau en bois ou en pierre tournant
autour d'un axe et servant à dépiquer le blé. Ce rouleau
n’est pas cylindrique, mais le plus souvent hexagonal et
présente l'aspect d’une pyramide tronquée.
Dér. de Runla, rouler.
Runlo, s. f. Plan incliné, descente rapide.
Rüôou! interj. Cri ou commandement des charretiers
pour faire aller ou tourner les chevaux à droite. Hue! en
français. — Voy. Ja!
Ruôou ! s'emploie aussi avec une intonation plus prolon-
gée pour arrêter les chevaux.
Rusa, ado, adj. m. et j. Rusé, ée, fin, adroit, roné.
Rusca, v. Écorcer les jeunes chènes des bois taillis pour
la préparation des cuirs ; dé ouiller les arbres de leur écorce.
596 RUS
Dér. du bas brel. Ruse, écorce. — Voy. Dérusca.
Ruso, s. f. Ruse, voie détournée, adresse employée pour
arriver à ses fins.
Rusqua, ado, adj. m. et f. Couvert d’une écorce dure
et solide; roncé. — Un ome bièn rusca, un homme bien
taillé, solide, robuste, dur à la fatigue, de formes athlé-
tiques.
Rusquaïre, s. m. Ecorceur; ouvrier que l'on emploie à
dépouiller les arbres de leur écorce.
Rusqué, s.m. Outil en fer tranchant et un peu recourbé,
servant à enlever l'écorce des arbres.
Rusqué, s. f. Écorce des arbres, surtout celle des jeunes
chênes, que l’on emploie à tanner les peaux et les cuirs: le
tan, ou l'écorce brisée et moulue dans un moulin à tan; la
tannée; nom que l’on donne au tan qui a déjà servi à
tanner les cuirs et dont on fait des mottes que l’on brüle.
Dér. du bas bret. Ruse, m. sign.
SA
S, 49me lettre et 15me consonne de l'alphabet. C’est une
sifflante, dont l'articulation exige le concours de la langue
et des dents. Les Grecs et les Romains changeaient quel-
quefois la dentale £ en sifflante ; par permutation contraire,
le français donne le son de l’s au £ dans certaines finales,
comme dans action, captieux, martial, etc. Le même
phénomène se remarque en anglais. Dans les langues
française, anglaise, espagnole, portugaise, et dans l’idiome
languedocien cévenol, y compris le dialecte alaisien, l's
finale est le signe ordinaire du pluriel des mots, contrai-
rement au provençal rhodanien qui la supprime. Cette
tendance commence à s'accuser aussi pourtant dans le
dialecte alaisien, qui supprime l’s finale dans bien des cas,
laissant à l’article qui précède les noms, le soin de faire la
distinction du pluriel ou du singulier. Chez les Romains
l'S équivalait au nombre 7 et même, suivant quelques
auteurs, à 90. Surmontée d’un trait, S représentait 90.000.
Sa, s. m. Sac. Grande poche en cuir, en toile ou autre
étoffe, que l’on a cousu sur les côtés et par le bas, de
manière à laisser une ouverture au sommet par laquelle on
introduit les matières ou denrées que le sac doit contenir.
— Sa dé vi, un sac à vin, un ivrogne. Un sa dé bla, dé
castagnos, volume de cinq doubles décalitres ou un hecto-
litre de blé, de châtaignes. M'an douna moun sa, on m'a
donné congé, on m'a mis à la porte. Toumba coumo un sa
dé bla, tomber lourdement, s’affaisser comme une masse.
Téni lou sa, être complice d’un vol, participer à une mau-
vaise action. Faïre soun sa, s’en aller, partir, mourir.
Dér. du lat. Saccus, m. sign.
RUS
Russi, v. Réussir, parvenir au but que l'on se propose,
. avoir eu bonne chance. — A bièn russi, se dit dercélui
qui a obtenu une excellente récolte de cocons. N'aï pa
russi, j'ai échoué dans cette affaire. ;
Russido, s. f. Réussite; chance tavorshéÿ sübobé:
De Re ilér. et de Uscire, sortir, vaincre une difficulté.
Rustiqua, v. Enduire, couvrir une construction, une
maison, un édifice, au moyen d’une couche de mortier ou
de ciment préparé d’une manière spéciale et fouetté au
moyen d’un petit balai de bruyère, de façon à donner à ln
couche une surface rugueuse.
Rustiquo, s. f. Enduit d'apparence rugueuse et chagri-
née, dont on recouvre les façades de certaines constructions,
au moyen d'un mortier ou ciment que l’on fouette sur'le
mur avec un balai de bruyère. 3
S
SAB
Sa, adj. poss. Sa, au plur. Sas. — Ramassa sas péios, sas
fatos, réunir toutes ses ressources,
Dér. du lat. Sua, m. sign.
Sa! interj. Appel réitéré du berger à son troupeau,
quand il lui présente du sel. Sa / Sa!
Dér. de Sdou, sel.
Saba, s. m. Vacarme, cris bruyants, tapage prolongé.
— Quinte saba! quel vacarme !
Saba, ado, adj. m. et f. Battu, assommé de coups. —
Un rabe saba, un radis creux. Uno rabo sabado, une rave
creuse.
Saba, v. Frapper à petits coups redoublés sur une tige
ou un rameau qui esten sève, pour en détacher plus faci-,
lement l'écorce, soit pour greffer le rameau, soit pour
en Ôter l'écorce. Au fig. rosser.
Dér. de Sabo, sève.
Sabarnâou, s. m. Savetier ambulant qui s'établiten
plein air et pour peu de temps dans les lieux où il passe:
Sabatariè, s. f. Sayaterie, cordonnerie. Nom de lieu, de
quartier, de rue. Nom que porte une des rues d’Alais
parallèle à la Grand’'Rue et s'étendant de la Ris du.
Marché à la place Berthole.
Dér. de Sabato, savate, soulier.
Sabatèlo, s. j. Nom d’un champignon de la tribu des
Polypores, Polyporus tuber, Linn. Polypore-trufle. Cette
espèce, que Paulet a décrite sous le nom de Savatelle-truffe,
présente une surface chagrinée, grenue, semblable à celle
de la truffe noire dont elle a d’ailleurs la couleur, le goût
let le parfum. Son chapeau large de deux ou trois pouces,
SAB
est garni en dessous de pores blancs qui prennent une
teinte rousse avec l’âge. Le pédicule est latéral, plein, de
la couleur des pores, et de la même substance que le
chapeau. Toute la plante est d’une texture ferme, cassante,
blanche.et de bon goût; aussi est-elle fort recherchée. Elle
abonde vers la fin de l'automne dans les Cévennes. On
prépare les Savatelles comme les truffes noires : croûtes
au vin ou garnitures.
L'aspect superficiel de ce champignon est celni d'une
vieille semelle, d’où vient son nom de Sabatèlo, dér. de
Sabato, savate, soulier.
Sabatiè, s. m. et n. pr. d'homme. Savetier, cordonnier.
. Sabatier, nom propre d'homme, très-commun à Alais et
dans le Midi. — Sabatiè, fai toun méstid, mèle-toi de tes
‘affaires et non de celles des autres, ne sors pas de tes
attributions. Ne sutor ultra crepidam.
Dér, de Sabato, savate.
Sabato, s. f. Savate, soulier, chaussure en général.
Dér. du celt. Sab, pied.
Sabé, s. m, Savoir, science acquise, instruction, érudi-
tion. — Faïre sabé, faire part. On dit aussi faire-sdoupre.
Lou gaï-sabé, le gai savoir, la poésie des troubadours.
Dér. du lat. Sapere, empl. pour Scire.
Sabino, s. f. Nom de plante. — Voy. Cade-Sabi. Sabine
ou genévrier sabine, Juniperus sabina, Linn. Arbrisseau
dela famille des Conifères, commun sur les côteaux expo-
sés au midi, dans la partie septentrionale de la Provence
et dans le Gard.
Dér. du lat. Sabina, parce qu'on cru que cet arbuste
était originaire du pays des Sabins.
Sablas, s. m. Banc de sable, grand amas de sable,
plaine de sable, ensablement formé sur le bord d’une
rivière, dunes formées par le vent le long des rivières,
comme celles qui existent sur la rive droite du Gardon
entre le Pont du Gard et Remoulins, au quartier dit de
la Couasse, et qui sur les plages de l'Océan envahissent et
recouvrentrpeu à peu des villages entiers. Carrière de sable
ou sablonnièré d'où l'on extrait le sable propre à confec-
tionner le mortier nécessaire aux travaux de maçonnerie,
— Béoure coumo un sablas, boire comme un trou ou
comme un templier.
Dér. de Sablo, sable.
Sablo, s. f. Sable, réunion de particules pierreuses pro-
venant de cailloux pulvérisés ou usés par le frottement.
Ce mot, fém. en languedocien, est masc. en français. — N'és
bon qué pér métre dé sablo sus lou papiè, il n’est propre
qu'à suivre l'avis des autres; il est incapable de donner
un avis.
Dér, du lat Sabulum, m. sign.
Sabloù, s. m. Sable, sablon, gravier, terrain arénacé.
Dér. de Sablo, sable.
Sabo, s. f. Sève, fluide transparent, ordinairement
incolore et limpide, qui circule dans les organes des végé-
taux, remplissant à peu près les mêmes fonctions que le
SAB 597
sang chez les animaux. — Lous doubres soun én sabo, les
arbres sont en sève, la sève commence à monter. Sabo
marsénco, sève de mars. Sabo avousténco, sève d'août.
Dér. du lat. Sapa, suc.
Saboü, s. m. Savon, mélange de potasse et de sonde
combiné avec les corps gras tels que les huiles, et qui sert
à nettoyer le linge.
Dér. du lat. Sapo, m. sign.
Saboula, v. Battre, rosser.
Sabouna, v. Savonner, blanchir au savon, dégraisser
avec le savon et l'eau. Au fig. battre, rosser, réprimander.
Dér. de Saboù, savon.
Sabounado, s. f. Savonnage, provision de menu linge
que l'on met tremper à la fois dans le savon; eau de savon
dans laquelle on met tremper le linge que l'on veut savon-
ner. Au fig. vigoureuse correction. — Quinto sabounado!
quelle tripotée! |
Sabounaje, s. m. Savonnage; action de savonner, de
blanchir au savon. Portion de linge que l’on destine à être
nettoyée au savon.
Dér. de Saboù, savon.
Sabounéto, s. j. Savonette, morceau de savon sphérique
que l'on employait autrefois chez les barbiers pour préparer
la barbe et raser les clients. Saponaire officinale, Saponaria
officinalis, Linn. Cette plante, à fleurs roses ou blanches,
passe pour détersive, diurétique, sudorifique et dépuratives
elle est employée pour laver le linge. Elle croit sur les
bords des rivières et des ruisseaux.
Dér. de Saboù, savon.
Sabourun, s. m. Du savouret, os rance et décharné de
porc salé dont les pauvres gens dé la campagne assaison-
nent leur potage, assaisonnement qu'ils préfèrent à celui
de Ja viande fraiche. Terme d'injure : Qué vdou aquél widl |
sabourun? Que demande ce vieux libertin?
Dér. du lat. Sapor, saveur.
Sabouti, ido, adj. m. et [. Fatigué, secoué, éreinté,
moulu, brisé de fatigue. — Souï sabouti, je suis moulu.
Sabouti, v. Secouer, mener rudement, malmener quel-
qu'un, le rudoyer. — L'aï hièn saboutà, je l'ai bien rudoyé.
Saboutimén, s. m. Ébranlement, fatigue occasionnée
par le trot dur d’une monture. F
Sabra, v. Sabrer, couper, trancher. Au fig. trancher
une difficulté, juger une affaire sommairement.
Dér. de Sabre, sabre.
Sabranla, v. Ébranler en secouant fortement. — Foy.
Déssabranla. f
Sabre, s. m. Sabre, arme à lame large, tranchante d'un
seul côté et ordinairement un peu recourhée, et destinée à
frapper de taille plutôt que d'estoc.
Dér. de l'all. Sabel, épée courbe.
Sabre-dé-bos! Sabre-d'orl interj. Sorte de juron
anodin employé dans le langage familier. — Sabre-dé-bos,
pistoulé-dé-païo! autre forme du même juron un peu plus
compliquée.
76
598 SAD
Sacado, s. /. Une sachée, plein un sac. — Uno sacado
dé nouse, une sachée de noix.
Dér, du bas lat. Sacamentum..
Sacaje, s. m. Action de mettre dans ün sac. On dit
plus communément énsaquaje. — Voy. Énsaqua.
Sacamandéja, v. Vivre licencieusement ou dans le
désordre; piller, rançonner, saccagér. — Lous Prussièns
an sacarmandéja la Franço, les Prussiens ont saccagé,
ravagé la France.
Dér. de Sacaman.
Sacaman, ando, s. "m. et f. Voleur, brigand, coupe-
jarret, homme dur et impitoyable. Au fém: Coureuse.
Dér. de l’all. Sac-nan, homme de sac, pillard. En ïtal.
Sacco manno, m. sign.
Sachu, udo, part. pass. du V. Säoupre, savoir. —
S'avièi sachu/ si j'avais su! Acd's sachu, cela est connu,
c'est une chose avérée.
Sa-col, Cabussäou ou Cassäou, s. m. Le bourrelet des
manœuvres, des portefaix ; sac à demi-plein de paille qui
forme coussinet Sur leurs épaules et leur aide à porter les
fardeaux. — Voy. Cassdou.
Sacramén (Sén), s. m. comp. Un ostensoir. Le langue-
docien est dépourvu d’un terme qui désigne ce vase sacré,
et on exprime le contenant par le terme qui désigne le
contenu.
Sacréja, v. Jurer, blasphémer; entremèler ses paroles
dé jurons comme les gens grossiers et mal élevés.
Sacréjaire, s. m. Jureur, blasphémateur, célui qui à
l'habitude de jurer et de blasphémer:
Sacre-moun-amo, s. »m. Un jureur, un homme déter-
miné à commettre tous les excès, — À la sacre-moun-amo,
à la manière des bandits, des hommes qui ne reculent
devant rien, qui sont décidés à tout faire.
Sacre-pa-dil interj. Juron assez anodin employé dans
le langage familier et qui signifie littéralement : Je ne jure
pas le nom de Dieu. C'est l'opposé du juron frança is
Jarnidieu! pour je rente Dieu, qui était dit-on familier à
Henri IV non moins que celui deVentre-saint-gris!
Sacripan, s. m. Sacripant, rodomont, homme turbulent,
casseur d’assiettes, homme déterminé à tout entreprendre.
Ce terme, comme celui de Rodomont, est un nom de
personnage de l’Orlando furioso de l’Arioste.
Sacristan, ano, s. m. et f. Sacrislain, sacristaine, celui
ou celle à qui est confié le soin et la garde des vases et des
ornements sacrés, ét en général de tout ce qui est renfermé
dans la sacristie d’une église. Dans un monastère de
femmes, la religieuse à qui est confié le soin de la sacristie.
Dér. du lat. Sacristia, m. sign.
Sadoul, s. m. Saoul. — Manja soun sadoul, mangér
tout son saoul; être repu. Au fig. N'ai moun sadoul! j'en
ai plein le dos; j'en suis ennuyé, fatigué, dégoûté .
Dér. du lat. Satullus, dim. de Satur.
Sadoul, oulo, adj. m. et f. Saoul, saoule ; repu, repue.
Rassasié, fatigué, gorgé de nourriture; dégoûté d'une
SAI
personne ou d’une chose. — Sadoul coumo un por, saoul
comme un porc. ?
Dér. du lat. Satullus.
Sagan, s. m. Le sabbat. Au fig. bruit, train, tapage.
— Sagan e magan, désordre, confusion, mélange de toutes
sortes de gens. Dér. du lat. ou du celt. Saga, sorcière,
et Magus, magicien. Peine, tout ce qui donne de l'inquiétude
et du souci.
Sagata, v. Poignarder, frapper à coups de couteau un
homme ou un animal. Au fig. presser vivement, solliciter,
arracher de force un aveu ou une faveur. Juguler ‘quel-
qu'un; lui faire rendre gorge. Couper les rejetons, les
drageons, surgeons gourmands qui poussent au pied d’un
arbre et arrêtent son développement.
Dér. de Sagato, surgeon.
Sagati, s. f. Étoffe composée d'un mélangé mi-partie
laine et filoselle. — L'abi dé sagati est le titre de l'unedes
pièces les plus remarquables du marquis de Lafare-Alais,
dans les Castagnados.
Sagato, s. f. Surgeon, drageon, rejeton que les arbres
poussent de leur pied. — La sagato a manja l'âvubre, les
surgeons ont épuisé l'arbre.
Dér. du celt. Sagastra, m. sign.
Sagnè, s. m. Nattier; ouvrier qui fait des sitdiats
sparterie, qui rempaille les chaises.
Sagnèiro, s. f. Terrain marécageux sur lequel croit la
plante appelée Sagno, qui sert à rempailler les chaises
communes ét à confectionner divers ouvrages de sparterie.
Dér. de Sagno. — Voy. c. m.
Sagnèirolo, s. f. Dim. de Sagnéiro; flaque d'eau
marécageuse et stagnante dans laquelle pousse la Sagno:
— Voy. c. m.
Sagno, $. f. Sparganium erectum, Linn. Plante de la
famille des Typhacées qui croit dans les marais et dont la
tige sert à rempailler les chaises.
Sagriècho ou Sabruiècho, s.f. Nom de eus sariette
vivace, annuelle,
Sai, s. m. La paune d’un porc, dont on retire l'axonge
ou saindoux. Les paysans s’en servent comme du savouret
(Sabourun), pour assaisonner leur potage, surtout celui.
qui est fait avec des raves ou des choux. — Faire! dé sat,
faire du lard, engraisser, vivre paresseusement, en sybarite.
Dér. du lat. Sagina, graisse.
Saïèiro, s. . Salière; petit vase de métal, de cristal, de
faïence, de verre, servant de récipient au sel el mème au
poivre que l’on met sur la table.
Dér. de Sdou, sel.
Saïour, saïourdo, s. m. et f. Sale, malpropre, dégoù-
tant. Saïourdas, péjor. de Saïour.
Saïoù, s. m. Sorte de jaquette, sayon ou robe servant à
vêtir les jeunes garçons, jusqu'au commencement du
XVIIIe siècle, avant de leur faire revêtir la culotte.
Dér. du lat. Sagum, m. sign.
Saïqué, adv. Sans doute, peut-être, apparemment. —
———_—_—
SAL
Saïqué.siès méci? Es-tu devenu fou? Aoubé saïqué, oui, :
sans doute.
Saïsséto, s. f. Froment de la plus belle qualité ; tou-
selle. à petits grains (Tritioum hibernum aristis carens),
-que l'on cultive beaucoup dans le Comtat venaissin et la
côte du Rhône. Ce froment donne le pain de la plus belle
qualité,
Saje, sajo, adj. m. et f. Sage, posé, raisonnable, qui.a
ne conduite réglée. En parlant d’une fille ou d’une femme :
modeste, sage, pudique, 17
:DérAdu lat. Sapere, avoir. de la sagacité.
Sala, w..Saler ;, mettre du sel dans les mets ou sur la
wiande, que l’on veut conserver. Au fig. et adj. cher,
coûteux. — Acd's sala,.cela est fort cher. Mé l'an fa sala,
* on me l'a fait payer fort cher.
Dér. de Sdou, sel. |
Sala, ado, adj.m. et.f. Salé, ée, assaisonné avec du sel
ou-préparé-avec du. sel. pour être conservé.
Saladoù, s. m. Saloir, vaisseau ou table à rebords qui
sert/à faire -la-salaison. C'est.anssi le vase où l'on conserve
de-sel.à l'abri de l'humidité.
Dér. de Sdou, sel.
Saladuègno, s. f. Nom. de. plante. La , Chélidoine, ou
grande-éclaire.: Chelidonium. majus, Linn. Plante à suc
laiteux et jaune un peu caustique. Elle est employée
comme anti-dartreux. On. la désigne aussi sous les noms
de Saraduègno où Sarajuègno.
«Salaje, s. m. Salaison. de la viande des porcs; temps de
la salaison. Viande de porc pour la salaison.
…Salamalè, s..m. Salamalec, révérence profonde, adula-
tion, politesse exagérée.
Dér. de l'arabe Salam alaïka, la paix soit avec toi.
Salan,.#: m..La région. du littoral où se trouvent les
marais salants,
Saléïroù, s. »m. Une salière. — Voy Saïéiro.
:Sali, w. Chasser, mettre dehors. — M'an sali déforo,
on m'a chassé.
.Dér, de l'ital, Salire, sortir.
Salis S, M. Grenier à sel.
+ Dér de Sal, sel. :
LSalivéja, v. Saliver, rendre de la salive abondamment.
+ Dér. du lat. Saliva, dér, de Sal, sel.
Salivo, s. f. La salive, sécrétion spumeuse qui prend
waissance dans les glandes salivaires de la bouche.
Dér. du lat. Saliva, dér, de Su, sel.
Salo, s. f. Une salle, grande pièce servant aux réceptions
dans les maisons riches. — ZLasalo, Las Sallos, Lasalle,
Les Salles, n. pr. de villages et de hameaux qui furent
dans l'origine de petits prieurés, des hospices, dépendants
d'un monastère qui envoyait dans ces maisons, devenues
etes nt das S religieux pour prendre soin du
temporel. :.
Dér. du lat. Cale, ferme, grange. Navacelle,, Neal,
a la mème origine. — Voy. Ceï.
SAN 599
C'est de, Sato ou Salle qu'ont été formés les noms des
communes les Salles-du-Gardon, les Salles-de-Gagnières,
Lasalle, etc., situées dans le département du Gard, et les
dim. Salèlo, Saléto, Saléndro on Salindro et Saléndrénco.
Salô, salopo, s. m. et f. Homme sale, mal élevé,
grossier dans sa tournure, ses paroles ou ses actes: femme
prostituée, de mauvaises mœurs, souillon.
Salo-toupi, s. m. Tätllon; se dit par dérision d'an
homme qui se mêle des menus détails du ménage réservés
aux femmes.
Saloupariè, s. f. Saleté, grossièreté, vilenie, préjudice,
bassesse, Au fig. paroles grossières et obscènes,
Salu, s. m. Salutation, salut, action de saluer, acia dé
politesse,
Dér, du lat. Salus, salutis, santé.
Salu! interj. Adieu! Portez-vous bien! Bonjour !
Saluda, v. Saluer; honorer par une 1narque extérieure
de civilité, — Saludae, bocher la tête en dormant.
Dér. du Jat. Salutare, m. sign.
Saludaïre, s. m. Un homme obséquienx, qui salue tout
le monde sans distinction et souycut sans raison.
Sambu, s, m. Sureau. — Voy. Couloubrigné.
San, sano, adj.m. et [. Sain, saine. Se dit des personnes
et des choses. — Aquél bos és san, ce bois est sain. San
coumo un métal, solide, bien portant, plein de santé, Faïre
san, terme de moulinage des soies, dépouiller la soie mise
au moulin des bouchons qui embarrassent le fil ou dépassent
la trame d'une étoffe.
Dér. du lat. Sanus, M. sign,
San, prépos. Sans, — San-z'ounou, homme ou femme
décriés, de mauvaise réputation, sans délicatesse.
Dér. du lat. Sine, m. sign.
Sanfloura, v. Déflorer, prendre le dessus du panier,
faire un choix sur un certain nombre d'objets: écrèmer,
prendre ce qu'il y a de plus beau.
Sanflourado, s. f. Choix que l'on fait sur une certaine
q uantité d'objets. — A prés lasanflourado dé las poumos,
il a choisi les plns belles pommes de la récolte ou du panier.
Sang, s. m. Sang; liqueur rouge qui circule dans, les
artères et les veines des animaux vertébrés. Race, famille.
— Moun sang és véngu tout rouge, locution ironique qui
signifie : Cela ne m'a pas surpris; cet évènement ne m'a
nullement ému. Sang dé coudoumbre, sang de concombre,
homme sans énergie, froid, que rien n'émeut ; poltron,
poule mouillée. Lou sang sanno, ce qui offlense un
membre de notre famille, nous offense également.
Dér. du.lat. Sanguis, m. sign.
Sanguinado, s. f. La sanie, le liquide sanguinolent qui
découle des plaies; sang délayé dans quelque humeur qui
le rentl d’un rouge sale,
Dér. de Sang.
Sanla, v. Couvrir, envelopper. — Sanla-vous bièn,
couvrez-vous bien. Sé sanla d'un mantil, se couvrir d'un
manteau,
600 SAN
Sanle, subst. La saleté. —: Aimes bièn lou'sanle, tu
aimes bien la saleté, la crasse. Aquod crén bièn low sanie,
cette étoffe prend facilement la saleté.
Dér: de l'all: Sal, ordure, saleté.
Sanle, sanlo, adj. m.1et f. Sale, des deux genres,
malpropre, couvert d’ordure.
Sanli, v. Salir, rendre sale. — Aquél éfan sé sanlis
bièn, cet-enfant digère bien, remplit bien ses. fonctions
digestives.
Sanna,-v. Saigner, égorger ou couper la gorge; pra-
tiquer unesaignée. — Quan mé sannarias, quand bien
même vous me tueriez je ne pourrais vous satisfaire.
Sannarias pulèou uno pêtro, Vous tireriez plutôt du sang
d'une pierre. Lou nasi sanno, il capone, il recule, il
hésite. On raconte qu'au moment ou Guillaume de Nogaret
pôursuivait, à Avignon, la condamnation de la mémoire'de
Boniface VIIT auprès de Clément V, ce dernier cherchait
à gagnér du temps, pour ne pas prendre une décision
irrévocable: Un saignément de nez qu'eut le pape pendant
la nuit, lui servit de prétexte pour faire renvoyer une
séance. Or, on dit proverbialement, ën Languedoc, d'un
homme qui hésite où recule au moment de prendre une
grave détermination : Lou nas à sanno! le nez lui saigne,
en mémoire, sans doute, du fait historique que nous venons
de rappeler.
Sannado, s. f. Une saignée. Au fig. une dépense, une
perte considérable d'argent. Une dérivation d’une petite
portion d’un cours d’eau.
Dér. de Sang. — Voy. €. m.
Sannadou, subst. m. Le bout saigneux, l'extrémité du
quartier, du‘côté de la gorge, à l'endroit de la plaie où il
reste toujours du sang sur lanimalégorgé; couteau : de
boucher, coupe-gorge; abattoir rustique. C’est aussi le banc
à écorcher sur lequel on égorge les moutons et les porcs.
Sannadoü, adj. m. Propre à saigner ou à être saigné:
— Coutèl sannadoù, couteau de boucher servant à égorger
les animaux de boucherie. Aguél por és sannadoù, ce porc
est parvenu au degré d’engraissement voulu pour être tué.
Sannaïre, s. m. Saigneur, celui qui saigne les animaux
de: boucherie.
Sannoüs, ouso, adj.m. et f. Saignant, ante; tâché de
sang; ensanglanté, saigneux.
San-pus, adv. Uniquement, seulement. — Péndraï uno
crousto, san-pus, je mangerai seulement un crouton de
pain. Jouga uno partido san-pus, jouer une seule partie:
Sanqué, s. m. Du sang d'agneau, de chevreau, de
poulet, de volaille, que l’on frit à la poële avec-un peu
d’ail et de persil additionnés d’herbes fines.
Dér. de Sang.
Sansanvi, s. m. Ortolan, Bruant ortolan, Emberiza
hortulana, Temm. Tête et cou olivâtres, poitrine d'un
jaune verdâtre, les parties inférieuresrousses, les supérieures
brunes et noires à leur centre. Sansanvi est une prétendue
onomatopée de son chant, qu'on a voulu faire plaisante.
SAO
On connait l'aptitude de cel oiseau à engraisser rapidement,
et comme pour cela on le conserve «en: cage,? il avun
mérite de plus pour les gourmands, c’est de pouvoir leur
être servi quand les autres petits pieds, si succulents'aussi,
nous ont quittés. 1
Sansi, v. Fouler aux pieds.
Sansogno, s. f. Une cornemuse; chant monotone et
ennuyeux ; rabächages; chant de berceusé pour éndormir
les enfants. — Acd's toujour la mèmo sansogno, c'est tou-
jours la même chanson. Le fanon des bœufs, qui leur pend'
sous la gorge comme la poche vide d’une cornemuse.
Sansognos au pluriel, barbe de coq, cartilages ou caron-
cules rouges qui pendent sous le bec des coqs. — Voy. Gaïo.
Dér. de l’ital. Zampogna, cornemuse.
Sansougna, v. Chanter à demi-voix, fredonner. Au fig.
importuner quelqu'un par des instances, des sollicitations.
Lambiner, tarder, user de longueurs vimutiles, Corner aux
oreilles.
Sansougnaïre, s. m. Joueur de cornemuse, On dit aussi
Sampougnaïre. Au fig. importun, ennuyeux, rabaoBoRr,
qui tombe dans des redites.
Sansura, v. Presser, solliciter, importuner, ennuyer. —
M'a sansura tout lou jour, il m'a fatigué toute la journée
de ses importunités.
Dér. de Sansuro, sangsue.
Sansuro ou Sannaïrolo, s. f. Sangsue, Hirado où
Sanguisuga. De ce second nom latin, le français avait
fait d’abord suce-sang qui est dévenu sangsue; sansuro n'en
est que l’imitation. On a pourtant délaissé pour ce nom
celui de Sannaïrolo, qui pouvait revendiquer une origine
plus légitime provenant du languedocien même : Sanna,
saigner, Au fig. un fâcheux, un importun, un parasite, un
usurier.
Santa, s. f. Santé.
Dér. du fr. qui, à son tour, vient du lat. Sanitas, m. sign.
Santa-dil interj. ExcJamation admirative. Invocation à
la Vierge : Sancta Dei genitrix.
Santa-fiou! inter. Sorte d'exclamation marquant l'éton-
nement.
Santa-pal inter. Exclamation d'étonnement.
Dér. du Jat. Sancia paz.
Santaroüs, ouso, adj. m. et f. Plein de santé, bien
portant. — Péis santaroùs, une contrée, une région dont
le climat, l'air est salubre.
Dér. de Santa, santé. |
Santi-bèli, s. m. Statuette en plâtre que les modeleurs
italiens colportent dans les rues en criant :: Santi belli/
beaux saints! Une personne à figure insignifiante, à phy-,
sionomie effacée, sans expression.
Santus, s. m. Un grand coup appliqué sur la poitrine
ou ailleurs. — Aou santus l'espère.
Sâou, s. f. Sel; le sel marin, chlorure de sodium, le sel.»
gemme ou fossile. Le sel marin est composé de 60 parties!
SA0
de chlore:et de 40 de sodium. — Y courou coumo à la
sdou, on y court:comme le bétail au sel.
Dér. du lat. sal
Sâou, sm. Saut, action de sauter, chûte, bond que
l'on fait en sautant, — Faire lou gran sou, mourir.
Dér. du lat. Saltus, m. sign.
..Sâouça, v. Saucer, tremper du pain dans la sauce;
mettre. les pieds dans le plat, commettre une bévue;
mettre le pied dans un bourbier; tremper quelqu'an: da ns
l'eau, — Sé,sdouga, se tremper de pluie, être surpris par
une avérse, un.orage.
.Sâoucéto, s. f. Dim. de Sdougo, petite sauce, — Faïre
sdaucéto, faire trempette, tremper un morceau de biscuit
dans du” vin blanc ou rouge; faire la soupe au perroquet.
* Sâouciè ou Sâoucièiro, s. m. et f. Saucière, petit vase
dans lequel on sert les sauces ou rémoulades.
Dér,.de Sdougo, sauce:
Sâoucino, s. »m. Nom pr. de lieu et d'homme. Saussine ;
env, fr. Socine,. boutique,
-Dér, du bas lat. Socinum.
: Sâoucissiè, s. m. Charcutier dont la spécialité consiste
à confectionner des saucisses ou des saucissons.
…Dér. de Sdoucisso, saucisse.
Sâoucisso, s. /. Saucisse, viande de porc hachée menu,
salée et épicée, et introduite dans des boyaux du même
animal, de manière à présenter une forme cylindrique. Les
saucisses. ainsi préparées peuvent être conservées une
partie de l’année, On les mange cuites.
Dér. de Sdou, sel...
Sâoucisso, s..m. Saucisson. Augm. de Sdoucisso.
Saucisse de grossé dimension, préparée à peu près comme
la précédente, mais avec plus de soin et de manière à ce
que la viande, fortement enchassée dans des boyaux de
grande dimension, puisse être conservée plus longtemps. Le
saucisson est mangé cru.
Säougo, s. [. Sauce. Assaisonnement liquide, où il entre
du sel et des épices. Au fig. frais, dépens. — N'én pagaras
la sdougo, tu en payeras les dépens. Ficha uno sdougo,
administrer une correction, une trempée.
Dér. de Sdou, sel.
Säouda, v. Souder. Joindre bout à bout et relier par le
moyen d'une soudure les deux parties séparées d’un objet
en métal, au moyen d'un métal plus fusible.
Dér. du lat. Solidare, affermir.
Sâougnè, s. m. Saunier, celui qui fabrique le sel on
qui le débite.
Dér. de Sdou, sel.
Sâäoumadado, s. f. Une salmée de terrain environ. —
Voy. Sdoumado.
Sâoumado, s. f. La charge d'un âne ou d'une änesse
(Sdoumo); ou plus généralement une charge de bête de
somme. Une salmée de terrain; mesure agraire dont la
surface équivaut à 79 ares 80 centiares, mesure d'Alais.
La salmée se divisait en quatre setiers ou sesterées; le
SAO üo1
selier en deux mines, la mine en deux quartés, la. quärte
en. quatre ‘boisseaux, le boissean én six dextres et un
quart.
La salmée, mesure de capacité pour les céréalesy les
châtaignes, les glands, les légumes secs, équivaut ehnou-
velles mesures métriques à 20 décalitres 5.909.
Elle se divisaiten
Setier 5 déc. 1477
nt PE 5739
Quand”, NES 197108. 14 2869
TU ira nl que Pb LOE | 3217
Ces Valeurs sont calculées pour la salmée, mesure
d’Alais. À
Voy. SauyAGEs pour plus amples renseignements,
Dér. du. lat,, Summa; bass. lat. Summata, Somata,
Salmata, charge d'une bête de somme.
Säoumo, s. f. Anesse, femelle de l'Ane. — Mitre dou la
dé sdoumo, prescrire J'emploi du. lait, d'ânesse dans. une
maladie ou une convalescence.
Dér. du Jat., Summa, bête de somme.
Säoupiqua, +. Saupoudrer an.-mets -ou. de Ja viande
avec du sel et des épices.
Dér.. de Sdou, sel.
Säoupiqué, s. m. Saupiquet, sauce piquante: préparéé
avec du sel et des épices. Le lièvre. rôti:se. mange avee un
saupiquet composé du sang, du foie broyé et délayé de
l'animal, relevé par des épices et du:sél.
Dér. de Sdou, sel.
Sâoupégu, gudo, part, pass. du v. Sdoupre, savoir: —
Ou aï pa sdoupégu, j'ignorais cette circonstance;
Dér. du lat. Sapere, savoir.
Säoupètro, s. m. Salpètre, nitrate de polasse. Litté-
ralement sel de pierre, parce qu'il se produit naturellement
par efflorescence, sur les vieux murs, les molassescalcaires,
les voûtes de cave, l'intérieur des grottes.
C'est du salpêtre que l'on retire le: sel de -nitre-ou
salpêtre purifié qui, uni au soufre et au charbon, compose
la poudre à canon.
Säoupre, v. Savoir, connaître. — Faïre à sdoupre,
annoncer un événement, un mariage, une naissance, un
pécès; en faire part à ses amis et connaissances. M'ow
sdouprés à dire, vous me le ferez savoir, vous m'eu direz
des nouvelles. Sdoupre mdou, vouloir du mal,.en vouloir
à quelqu'un, lui garder rancune,
Dér. du lat. Sapere, savoir.
Sâouquéno, s. /. Nom langaedocien de la jeune dorade,
poisson de la Méditerranée (Aurata Vulgaris). — Foy.
Déourado.
Sâäouri, v. et nom prop. Saler et fumer, saurér, ss.
nom d'homme.
Sâouri, ido, part. pass. du V. Sdouri, sa urer.
Dér. de Sdou, sel.
Sâouringa, ado, adj. v. m. et f. Fricassésan:sel:età
602 SA0
l'huileet au vinaigre. Apprêté au sel; assaisonné avec du
sel.
Dér. de Sdou, sel.
Sâousarédo, s. /. Unesaulaie, une saussaie, lieu: planté
de saules.
Dér. de Sdouse, saule.
Sâouse, s. ”m. Saule, genre d'arbres et d’arbrisseaux de
la famille des Amentacées, dont il existesun grand nombre |
d'espèces. Par le mot Sdouse on entend en sgénéral®les
grandes espèces et en particulier lesaule blanc, Salix alba,
Linn. Une des petites espèces porte le nom de Vige:{Voy.
c: mx). C'est l'osier qui est employé dans la vannerie: —
Dé qué fas aquè planta coumo un sdouse? que fais-tu-là |
planté comme un-échalas?
Sâousé, n. pr. de localité, Sauzet, village de l'arroncis-
sement d'Uzès. — Barbiè dé Sâousé. —:Voy. Barbiè.
Sâouse-latiè, 52 m:e0mp :Saule: d'une espèce particulière
à tige droité et très-élancée, que l’on refend pour en faire
des lattes où montants d’échelles.
Säousio ou Sauzédo;, s. f. Saulaie, saussaie; lieu com-
planté de saules, champ:couvert de saules. — Voy. Vijéiro.
Sâäouta, v. Sauter, s'élever de terreavec efforts s'élancer,
franchir un obstacle;: descendre ou remonter’ d’un. bond de
haut en bas ou de bäs-en haut 1Omettre, négliger, oublier:
— Sdoûta sus la couvèrto, être berné.
Dér: du lat. Saltare, m.sign.
Säoutarèl, s. m. Jeu d'enfant, jeu du bâtonnet. — Voy!
Brésco.
Dér. de Sdouta, sauter:
Sâoutarèlo, s. f. Sauterelle {Locusta). Insecte coléoptère
qui ne pouvait être mieux nommé ; car :on prétend que,
d'un seul bond, il:saute ‘deux cents fois la longueur de son
corps. On l'appelle aussi Sdouto-bouqué. — Voy. ©. m.
Sâäouto-bartas, s. m. comp. Un pillard; jeune libertin,
maraudeur qui vit de vols et de: rapines en franchissant
les haies et les murs declôture des propriétés. — Voy:
Tréouco-baragnado!
Sâouto-bouqué, s. m. comp. Sauterelle; ce surnom lui
est donné parce qu'elle saute par dessus les,fleurs:
Sâouto-cambéto, Loc: \adv. comp. Cloche-pied. «— Dé
sâbuto-cambéto, à cloche-pied.
Sâouto-lingrin, s. m. comp. Au phys:-un homme
maigre, mince, fluet. Au fig. un homme léger, -frivole,
sans consistance.
Sâouto-régolo, s. m. comp. Saute-ruisseau, ‘petit clerc
de notaire, d'avoué, d’'huissier où antre-tabellion.
Sâoutur, tuso, s. m. et f. Sauteur, euse, celui ou celle
qui saute; se dit d'un homme léger, sans consistance,/qui
manque de sérieuxtet ne sait pas se conduire. :Sdoutuso,
se dit d'une femme qui a une conduite légère.
Sâouva, v. Sauver, garantir, tirer d'un péril; pr
conserver, réserver ; procurer le salut éternel.
Dér. du lat. Servare, dans les premiers pas et de Salvare
dans le dernier.
SAO
Säouva (Sé), v. r. Se sauver, s'enfuir, ps faire
son salut, mériter le paradis.
Sâouvadou, s. m. Le Sauveur du monde.
Dér. du lat. Salvator, m. sign.
Sâouvadou, ouno, adj. m. et f. Un enfant qui commence
à se former, qui est sorti des premiers accidents de l’en-
fance. Un agneau qui commence à se suffire; un oiseau
qui a quitté le nid. — Aquél agnèlés sâouvadoù, cét agneau
peut se passer des soins de sa mère.
Sàäouvagna, n. pr. de lieu. Salvagnac; lieu sauf, c.-à-d.
jouissant de certaines immunités ou franchises; qui ne
devait aucune imposition au domaineroyal: Lieu de sûreté,
d'espérance, d'asile, commie il en existait sous la féodalité.
Dér. du lat. Salva, sauve.
Sâouvaje, ajo, adj. m. et f. Sauvage; qui dépend des
bois ou forêts, qui n’est pas cultivé. Homme: non: civilisé,
sans lois, qui habite les forêts. Au fig. homme sansculture,
homme dur, inabordable, aux manières brusques let dures.
Dér. du lat. Silvaticus, de Silva, forêt.
Säouvaje, n. pr. d'homme et de lieu: Domaine situé
près d'Alais, d'où est sortie la famille des Boissieré de
Lacroix de Sauvages, qui a produit un médecin célèbre et
l'abbé de Sauvaces, auteur du Dictionnaire languedocien.
Säouvajino, s. f. Nom collectif qui comprend toutes les
bêtes fauves, les bêtes sauvages, ‘telles que les ours, les
loups, les renards.
Dér. de Sdouvaje, sauvage. , %
Sâouvajun, s. m. Odeur qui s'échappe des bêtes fauves.
— Sénti lou sdouvajun, contracter l'odeur qui s'échappe
des bêtes fauves.
Dér. de Sdouvaje, sauvage.
Sâouvan, s. m. Expédient, ressource, sauvegarde,
planche de salut. — Acd’s moun sdouvan, c'est là ma
dernière ressource.
Sâouve, n. pr. de lieu. Sauve, chef-lieu de canton de
l'arrondissement du Vigan, département du Gard.
Dér. du lat. Salvium, nom que lui donnent les Chartes.
Comme le nom fréquent de Salvetat, ce terme désigne une
localité, un domaine qui, sous la. féodalité, étaient affranchis
de certaines charges.
Sâouve (Dé), loc. adv. Sauf, quitte, absous, délivré, - —
Souï dé sdouve, je suis hors de danger.
Säouvèr, adj. m. Prodigieux, effrayant, surprenant, —
Plôou qué fai sdouvèr, il pleut à torrents. Acô faï sdouvèr,
cela est effrayant.
Dér. du lat. Silva, dans le sens de forêt solitaire et
épaisse, profonde.
Sâouvèrdiou! interj. Exclamation de surprise ou de
crainte. Dieu sauveur! Dieu terrible!
Säouvèrtous, ouso, adj. m. et f..Solitaire, désert,
effrayant; lieu qui inspire la mélancolie: ou la terreur.
Dér. de Sdouvèr. — Voy. c. m. 26
Säouvésou, s. f. et n. pr. d'homme. Salvation, salut,
SAQ
sauvegarde, franchise. psprs nom d' bésane commun
dans les Cévennes.
Sâäouvio, s. . Nom deplante. “4 sauge, Salvia offcinalis,
Linn:, plante de la famille des Labiées, à l’état cultivé ou
sauvage, très-commune dans le Languedoc et la Provence ;
elle est stomachique et céphalique. — Saivia à salvando,
disent les auteurs et l’ancien proverbe, Cur moriatur homo,
dit l'école de Salerne, eui salvia crescit in horto.
Quau a de sèuvi dins soun jardin
N'a pas bésoun de médécin,
disent les Provençaux.
. "On »voit par ces témoignages le cas, peut-être exagéré,
que l'on a fait de tout temps de cette plante. Sdouvio
‘ bouscasso, plante labiée à fleurs jaunes, Phlomis hérba
venti, Linn. Phlomis, herbe au vent, qui: n'estnullement
une sauge. Manja dé pourqué émbé dé sdouvio, au propre,
mangerdu filet de porc piqué de sauge, qui.est le régal
par excellence des paysans. Au fig. se pourlécher les babines,
sedélecter, éprouver un vif contentement, une vive satis-
faction.
Dér. du lat. Salvia, de Salvare, sauver.
Sapa, ado, adj. m..et . Touflu, serré, ramassé;. on le
dit des. plantes, et des branches d'arbres touffues.
Saparténgço, s, /. Séparation, division, limite séparative,
ligne de démarcation, partage.
Dér. du lat. Separare, séparer, diviser,
On dit aussi dans le même sens : Déssapartén go.
Saparti, v. Séparer, couper, diviser, disjoindre, refendre,
partager; séparer deux combattants.
Dér. du lat. Separare, séparer, couper .
Sapian, sapiènto, adj. m. et f. Savant, ante; prudent,
Dér. du lat. Sapiens, m. sign.
-Sapianço ou Sapiènço, s. m. ou f. Sagesse, science,
prudence..— Un ome dé sapièngo, un homme de bon
conseil, prudent, instruit, savant.
Dér. du lat. Sapientia, m. sign.
Sapino, s. f. Planche de sapin. On dit d’une personne
Jlanguissante et aliaquée de la poitrine : Sén la sapino,
elle sent le sapin ou le cercueil, que l'on construit avec
les planches de sapin.
Sapur, s. m. Sapeur ; soldat dont l'arme est une hache
qui lui sert à saper les obstacles. L'institution des sapeurs
ne date que du 7 avril 4806; un décret impérial du
48 février 4808 en fixe le nombre à quatre par bataillon.
— Acd's un sapur, Se dit d'une virago, d'une femme
hommasse, qui a des allures masculines.
Dér. du français.
Saqua, v. Ensacher, mettre dans un sac, dans une poche,
introduire, placer. — Saqua-vous aqui, placez-vous là.
Saquas-i voste dé, introduisez-y le doigt. Saqua fid, me tire
feu, boute-feu.
Dér. de Sa, sac.
SAR 504
Saquado, s. f. Plein.un saë. -— Uno saquado dé nouses,
plein un sac de noix. Uno saquétado dé gp plein une
sachetie de feuille de mürier,
Saqué, s. m. Dim. de Sa, sac. ur Matt de sé,
prendre congé, donner congé.
Saquéto, s. f. Sac de petite dimension, dont oh se.sert
généralement pour ramasser la feuille de mrier. 2
Dér. de Sa, sac
Saquo, s. f. Sac de grande dtnensioëé plus large que
le sac ordinaire. On lui donne aussi le nom do:Dajès _
Voy. c: m. |
Sara, w. Serrer, étreindre; mettre en diewsür, serrer ;
lier un fagot où un paquet. — Sara lou mérea; conelure}
arrèter le marché. Sara-vous aïci; approchez1Sarawous}
prenez-garde à vous! Sara-vous aïlaï, éloignez-=vous: * :
Sarado, s. f. Etreinte, serrement;raction de serrer: =
Fichà uno sarado, serrer les côtes. Sarado, terme de
maçonnerie; point de jonction entre la toiture d'une
maison et le mur latéral de la maison contiguë, oule
point où une cheminée émerge au-dessus d’un toit.
Saraïè, s: m. Servurier ; celui qui fabrique les serrurès
et en général les ferrures des portes et fenêtres.
Saraïè ou Lardièïro, s. m. Mésange (Parus). On a oru
trouver dans-le chant dela charbonnière -ou + grosse
mésange (Mésange charbonnière, Parus major, Tetmu.),
une imitation du bruit du marteau sur l'enclametetde la
limé, et on lui a donné le nom de Saraié, serrurier. Ce
nom a passé aux variétés de cet oiseau ; on peut dire pourtant
qu'il est plus habituellement donné à la grosse mésange et
que les petites sont distinguées par celui de Lardièiréto
(Woy.c. m.). La famille nombreuse des mésanges est du
reste celle qui fournit le plus à cette appellation collective
de Pè-négre, dans laquelle sont confondus beaucoup, de
petits oiseaux du même genre.
Saraïéja, v. Tourmenter une serrure; y introduire. la
clé avec difficulté, agiter inutilement la clé dans la serrure
sans pouvoir ouvrir, soit qu'on s’y prenne mal, soit.quela
serrure soit dérangée.
Dér. de Saraïo, serrure:
Saraio, s, . Serrure, appareil construit en métal, et qui
sert à fermer une porte, une armoire où autres meubles
destinés à serrer certains objets.
Les serrures modernes sont très-compliquées, pour la
plupart, et ont dù être inconnues ou peu employées jadis.
La fermeture la plus anciennement usitée est sans doute
celle que l’on opérait au moyen-d'une barre de bois. placée
derrière la porte, soit en travers, soit sous forme d'
boutant.
Le verbe barra, fermer, mettre la barre, désigne encore
toutes les manières de fermer. On dut ensuite employer les
verroux et enfin la serrure, — Voy. aussi lès mots Tangua
et Tanguo.
Dér. du lat. Sera, fait de Serare, fermer. :.
Plusieurs noms de lien tels que Sarragna, Sernhac
604 SAR
Gard), Sérignan (Hérault) dérivent- du mot Sara pris dans
lesens de fermer, et ont la signification de Lieu clos, lieu
fermé, lieu de péage. Le nom des villages de Barre (Lozère),
et de Barjac, Bariacum (Gard), a la même origine.
Sarci, v. Repriser, faire des reprises sur une étoffe qui
a été déchirée ou endommagée. Au fig. battre, frapper,
administrer une volée, une correction. — Té faras sarci,
tu te feras appliquer une râclée.
Dér. du lat. Sarcire, rapiécer.
Sarcido ou Sarciduro, s. f. Reprise à l'aiguille; vivelle,
rentraiture, sorte de tissure à l'aiguille que l’on fait pour
réparer une étoffe déchirée ou fortement endommagée. Au
fig. ficha uno sarcido, administrer une fâclée, volée ou rossée
+ Dér. de Sarci.
Sarcissèire, s. m. Celui qui fait des reprises sur les
étoffes déchirées ou endommagées.
Dér. de Sarci.
Sardo, s. . Sardine (Sardina), poisson du genre Clupé,
que l’on sale à la façon des anchois et des harengs.
C'est le même poisson, de grosseur différente, le plus
petit étant naturellement désigné par le diminutif Sardino,
qui s'emploie exclusivement quand on parle de la sardine
fraiche.
Sarèto, s. m. Avare, cuistre, fesse-mathieu.
Sarjan, s. m. Sergent, grade militaire; huissier, recors.
Sarjan, outil de menuisier, à crémaillère, qui sert à assu-
jétir les pièces de bois que l’on veut assembler ou coller.
Le garafa est un outil de tonnelier, semblable au
sarjan; c'est le calfat, fer de vingt à trente centimètres,
coudé des deux bouts et servant à deux fins.
Dér. du lat. Serviens, serviteur, ,
Sarjans, s. m. plur. Des gendarmes ou tirailleurs;
étincelles qui s’élancent des charbons ardents et éclatent
loin du feu en pétillant. — Voy. Baïuèrno,
Sarjéto, s. f. Sergette, petite serge, étoffe de laine
croisée et légère.
Dér. de Sarjo.
Sarjo, s. f. Serge, sorte d’étoffe de laine grossière croisée,
où demi-laine et fil, fabriquée à quatre marches, le plus
souvent en laine.
Saro! interj. Serre! exclamation usitée dans le Midi
pour porter un rassemblement, une foule à se livrer à des
voies de fait envers un ou plusieurs individus à ‘qui l’on
veut faire un mauvais parti. Cri d'émeute analogue au
Zoù des Provençaux.
Sarû, s. m. Sarrau ou sayon, sorte de souquenille en
éioffe grossière que portent quelquefois les paysans, les
rouliers et les soldats.
Saro-piastro, s. m. comp. Avare, thésauriseur, pince-
maille.
Sartan, s. f. Poèle à frire, ustensile de cuisine en fer,
composé d’un bassin terminé par un manche de fer-très-
allongé qui sert à le manier.
Dér. du lat. Sartago, m. sign.
SEC
S assi,. m. Intervalle ou espace de temps indéterminé.
— Démoura un bon sassi, demeurer ou attendre bien
lon gtemps.— Voy. Briou.
Sassigué, s. m. Dim. de Sassi. Un espace de temps peu
considérable, un court intervalle de temps.
Savantas, s. m. Angm. de savant; gros savant, homme
qui a des connaissances très-étendues, une vaste érudition.
Ce terme s'emploie quelquefois ironiquement en parlant
d'un homme qui a des prétentions à la science non justi-
fiées. "
Sé, s. f. Soif, désir, besoin de boire. — Créba dé sé,
mourir de soif. Sé dé galino, soif de poule, se dit en
parlant d’un petit buveur. Faï michan faïre béoure un ase
quan n'a pas sé, il est difficile de faire boire un âne qui
n’a pas soif, il n’y a de pire sourd que celui qui ne veut
pas entendre.
Dér. du lat. Sitis, m. sign.
Sé, éco, adj. m. et f. Sec, sèche. — $é coumo un bèrlé
ou coumo uno bèrlo, sec comme un éclat de bois mort. se
coumo uno aréncado, coumo un clavèl, sec comme un
hareng, comme un clou.
Ce terme s'emploie aussi substantivement : Métre dou
sé, mettre dans un endroit sec, à l'abri de l'humidité;
dépouiller quelqu'un de ce qu'il possède, le mettre à sec.
Dér. du lat. Siceus, m. sign.
Sé, s. m. Sein, gorge, mamelle. — Més pas la man dou
sé pér un pésoul, il ne se contente pas d’un maïgre bénéfice.
Dér. du lat. Sinus, m. sign.
Sé, pr. poss. Soi, il, elle, eux, ils, elles. — Chacun pér
sé, chacun pour soi.
Dér. du lat. Se, m. sign.
Sé, conj. Si. — Sé véou béoure, s'il veut boire. Sé qué
dé nou, sinon.
Sé, pr. indéf. On. — $é dis talo câouso, on dit telle
chose, on raconte que... Acds’és di, on a dit cela, cela s’est
dit. £
Sécal, s. m. Bois mort, rameaux desséchés ; fruits dessé-
chés sur l'arbre, tels que les cerises, les prunes, les
figues, etc.
Sécoudre, v. Jeter, lancer, secouer. — Li én sécoudrai,
je le rosserai.
Dér. du lat. Succutere, secouer, ébranler.
Sécouri, vw. Secourir, porter secours, venir en aide à
quelqu'un qui se trouve dans un danger imminent.
Dér. du lat. Succurrere, courir au devant de quelqu'un.
Sécoûs, s. m. Secours, aide, assistance, — Crida sécoùs,
appeler au secours. Sécoùs / cri de détresse : Au secours !
Sécun, no, subst. m. et f. Homme sec et décharné,
phtisique ; enfant tombé en chartre, enfant malingre. Au
fig. i mportun, ennuyeux, parasite, que les Italiens appellent
Seccatore. nee” :
Sécuta, v. Poursuivre, rechercher, importuner. — L'ai
sécuta pérlout, je l'ai recherché, réclamé de toutes parts.
Sécutinos, s. »m. Un homme ou une femme qui n'ont
SÉG
que la peaucet les os, qui sont mälingres; un importun,
un ficheux. Les gens du peuple, qui affectionnent les
expressions figurées, ont cru trouver une certaine analogie
entre l'expression latine Sicut et nos et un individu qui est
aflligé d'une maigreur extrème.
Séda (Pan), s. m. Pain de seigle dont la farine a été
sassée avec un tamis ep sédas, et qui est d’un goût
très-appétissant.
-Sédo, 5: /: Soie, fi délié que l'on retire du cocon des
vers à soie. — Un vésti dé sédo, un cochon."
Dér: dulat. Seta, m. sign. ?
Sédoù..s.m.Séton; cordon fait de julie fils que
l'on-passessous la peau pour produire un ulcère artificiel;
laes: de crin, nœud pont ou lacet servant à prendre les
oiseaux.
Du lat. Setaceum, dér. de Seta, soie.
Sédous, ouso, adj. m. el /. Soyeux, euse. — Aquélés
fousélsrsoun bièn sédoùs,| ces cocons sont très-fournis en
. Soie, 100
‘Séga;ws Couper, scier, faucher, moissonner, faire la
moisson.
Dér. du lat. Secare, couper.
-Ségado;, s. f: La moisson l’action de moissonner; la
saison: où lon moissonne. — Pér ségado, au temps de la
moisson.
Dér: du lat. Secare, couper.
Ségaire,airo, s. m. et f. Moissonneur, euse ; coupeur
ou scieur de blé. En vieux fr. seguier.
Dér: du lat. Secure, couper.
Ségasoù, s. f. La moisson ;
Voy. Ségado.
Ségna, v. Bénir, jeter de l'eau bénile. — Sé ségna,
faire le signe de la croix. Pan ségna, aïgo ségnado, du
pain bénit, de l’eau bénite.
Dér, du lat: Signare, fait de Signum, signe.
Sègne, s: m. Maitre, seigneur; titre que l’on donne par
déféreuces aux hommes âgés. — Moun sègne-gran, mon
grand-père Noste Sègne, Notre Seigneur J.-C. Ce terme, dit
SAuvAGES, dérive du lat. Seneæ ou Senior, le plus ancien et
le mieux.établi des titres, celui qui convient le mieux à
l’homme: C'est: de là que l’on a formé le français Senieur et
puis Seigneur. + +
Ségnoù, s. m. Seigneur: pré qui, avant la Révolution,
était à la tèle d’un fief, soit comme suzerain, soit comme
tenancier, — Noste Ségnoù, Notre pion J.-C.
Dér, du lat, Seneæ ou Senior.
Ségoun, do, adj. de nomb. Second, pe gen
ségoun, du pain bis.
Dér. du lat. Sequens, suivant.
Ségoundari, s. m. Le vicaire és paroisse ; puvaii
est adjoint au curé dans l’exercice de son ministère.
Dér. du lat. Secundarius, nom que les ennemi =>
aux sous-acteurs on comparses, ou doublures.
Ségoudéno, s. f. Seigle précoce semé en mars, dans les
la saison des moissons. —
SÉM 605
Cévennes. Le seigle ordinaire se sème de novembre #
décembre et donne un grain plus grossier.
Ségu, ro, adj. m. et f: Sûr, sûre, certaif, ferme, indu:
bitable, stable, exempt de danger. — Dé ségu, assé
Jouga dé ségu, jouer à coup sûr.
Dér, du lat. Securus, M. sign.
Ségui, v. Suivre, poursuivre, accompagner, fmiter,
copier. — Mé poudiè pa ségul, il ne pouvait peer
pied.
Dér. du lat. Sequi. |
Séiado, s. f. Plein une jarre appelée Séïo en languedocien.
Séio, s. f. Seigle. -— :Voy. aussi SAUVAGÉS ‘au mot
Séghio qui n'est plus usité à Alais.
Séio, s. f. Jarre en cuivre appelée anssi Gérlo ën jengéti
docien. — Voy, €. m.
Séioù, s. m. Dim. de Séio;-seau à traire le lait.
Séiou, s. m. Petit seigle.
Séje, adj. de nomb. Seize.
Séjoù, s. m. Séjour! demeure, résidence plus’ ou "moins
longue dans un lieu, dans un pays. —"Sèn dé séjoù, nous
séjournons. Sèn à séjoù, nous chômons,
Séla, v. Seller, mettre une selle.
Séléto, s. f. Portion de harnais sur laquelle appuïé la
dossière. — Faëre séléto, prêter appui, assistance fairé la
courte échelle.
Sèlo, s. f. Selle, siége en cuir que l'on adapte sur le dos
d'un cheval pour la commodité et la sûreté du cavalier.
Dér. du lat. Sella, m. sign.
Séloun, adv. Selon. — Acd's séloun, c'est selon. Séloun
cé qué farés, faraï, je suivrai votre exemple, je prendrai
exemple sur vous.
Sémaïè, s. ”*. Bâton aux cornues. — Foy. Assémdou et
Séméou.
Sémalou, s. m. Dim. de Sémdou. Un baquet, cuviér à
bas bord.
Dér. de Sémdou. — Voy.c. m.
Sémâou, s. m. Une cornue, une benne, une comporte
que l'on emploie pour charrier la vendange et le vin et
tirer le moût d'une cuve. — Voy. Assémdou.
Sémbla, v. Sembler, ressembler. Ce verbe s'emploie
dans les deux acceptions françaises sembler et ressembler,
qui ont une signification toute différente. — Sémblo um
émplastre, il est immobile comme un terme. Sémblo qué
vaï préne la maïre dou nis, on dirait qu'il va prendre la
pie au nid. Moun fil mé sémblo, mon fils me ressemble:
Dér. du lat. Simulare, m. sign.
Sémblan, s. m. Semblant, similitude, ressemblance,
apparence, aspect. — Faïre lou sémblan, faire semblant.
Avédre lou sémblan, avoir l'apparence.
Dér. du fat. Similis, semblable.
Séméla, v. Ressemeler, mettre des semelles à une
chaussure.
Dér. du celt. Semellen, semelle.
Sémélaje, s. m Carrelure de souliers où'autres chaus-
T1
606 SÉN
sures. On met une carrelure ou des semelles neuves à de
vieux souliers qu'on semelle à nouveau.
Sémèlo, s. f. Semelle, pièce de cuir qui forme le dessous
d’une chaussure quelconque.
Dér. du celt. Semellen, m. sign. — Faguè véire sas
sémélos, il montra ses semelles; il s'enfuit,
Séména, v. Semer, jeter le grain sur une terre préparée
pour l’ensemencer. Au fig. répandre, dissiper. — Séména
lèou et pouda tar, prov : semer tôt et tailler la vigne tard.
Séména, s. ». Semis, blé nouvellement semé et encore
en herbe; emblavure, champ ensemencé. — Travéssè. lou
séména, il traversa le champ nouvellement semé.
Dér. du lat. Seminare, m. sign.
Séménadou, s. m. Sac à semence.
Séménaire, s. m. Semeur, celui qui sème, qui répand
le grain sur la terre préparée.
Dér. du lat. Seminator, m. sign.
Séméncio, s. f. Menues semences, menus grains.
Séménço, s. f. Semailles; époque où l'on sème les
céréales et surtout le blé. — Vous pagaraï pér séménço,
je vous payerai ce que je vous dois à l’époque des semailles
prochaines.
Dér. du lat. Semen, contract. de Serimen, formé de
Serere, semer.
Séménço, s. f. Grain destiné à être ensemencé; grain
de choix propre à être semé. — Bla dé séméngço, blé de
choix que l'on réserve pour les semailles.
Même étymol. que le mot précédent.
Sémmagnè, s. m. Semainier; ouvrier employé à la
semaine et qui reçoit un salaire hebdomadaire, celui qui
remplit un office hebdomadaire.
Et qu’as éscrafa dé ta pénche
Lou sémmagnè rabaladis (La FARE).
Dér. de Semmano, semaine.
Sémmanado, s. f. Semaine complète, la durée d’une
semaine; le salaire dû à un ouvrier pour une semaine de
travail, — Touca sa sémmanado, toucher son salaire de la
semaine.
Sémmano, s. /. Semaine, série de sept jours consécutifs
du lundi au dimanche ou du dimanche au samedi. Sém -
mano-sénto, la semaine sainte. Sémmano das trés dijéous,
la semaine des trois jeudis, dicton analogue à celui qui
renvoie aux calendes grecques, c.-à-d. à une époque qui
n'existe pas.
Dér. du lat. Septimana, formé de Septem, sept, et. de
Mana, matin, matinée, sept matinées.
Sén, s. m. Sens, bon sers, raison, jugement, intelligence.
— Quéou pèr soun bén, pèr soun sén, celui qui perd sa
fortune, perd sa raison, son sang-froid; devient capable
d’actes violents et irréfléchis. És dou sén dé l'éfan, il tombe
en enfance. Parlo pér lou sén qué-z-a, ses propos prouvent
son peu de raison. N'a pas tout lou sén qué i-f4ou, il n’a
pas toute sa raison. Ou dis dé tout soun sén, il dit cela
SEN
sérieusement. Bouta san sén, mettre sans raison. Agués
maï dé sén qu'él, ayez plus de bon sens, de raison que
lui. Pdou dé sénas, augm. et péj. pour désigner quelqu'an
qui n’a pas l’ombre du sens commun.
Dér. du lat. Sensus.
Sén, sénto, adj. mn. et f. Saint, sainte.
Dér. du lat. Sanctus, sancla, m. sign.
Séné, s. m. Dim. de Sén. Sens; l'intelligence des petits
enfants. — Picho séné, petile raison, intelligence naissante.
.Dér. du lat: Sensus.
Sénépiou, s. m. Larougeole, maladie originaired'Afrique.
Dér. de Senepo, petit clou à tête large, appelé ainsi dans
la Haute-Provence et connu sous le nom de Tacho dans le
Languedoc. On en garnit le dessous des semelles de chaus-
sures des paysans ou des chasseurs et en général des
marcheurs par profession.
Séngla, v. Sangler; serrer le tour du corps avec une
courroie ou sangle; sangler, ou appliquer un coup de fouet,
de cravache.
Dér. du lat. Cingulum, formé de Cingere, ceindre.
Sénglas, s. m. Sanglier, Sus serofa, Linn. Cet animal,
autrefois commun dans nos contrées, en a complètement
disparu. On lui donnait aussi le nom de Por-sénglas. —
Voy. c. m. |
Sénglo, s. f. Sangle, bande ou courroie large et plate
qui sert à ceindre ou à serrer le corps des animaux de
trait ou de selle.
Sénglou, s. m. Dim. de Sénglo, petite sangle ; lisière ou
bande de petite dimension; petit cordage appelé chablot
en terme de corderie, et qui sert à attacher ou lier un-objet:
Dér. du lat. Cingulum, m. sign.
Sénglouna, v. Attacher, lier, serrer, ceindre.
Dér. de Séngloù. — Voy. c. m.
Sénsérigaio, s. f. Petite mésange bleue, Parus cæruleus,
Temm., appelée aussi Lardièiro, Lardièiréto où Larguiëï-
réto. — Voy. c. m.
Séntèrio, s. f. La dyssenterie.
Sénti, v. Sentir, répandre ou percevoir une odeur bonne
ou mauvaise; ressentir, éprouver. — Acè sén bo, cela à
bonne odeur. Sénti soun bo, être cossu, avoir bon air,
bonne prestance. Podou pas sé séntà, ils ne peuvent pas se
supporter. Sé sénti, se dit d’un jeune homme ou d'une
jeune fille qui atteignent l’âge de puberté. Avoir la con-
science de ses forces, de sa valeur, de son intelligence.
Dér. du lat. Sentire, m. sign.
Sénti, v. Fendre, user, fèler, affaiblir, — Uno dourco
séntido, une crûche fèlée. Uno pos, uno fusto séntido, une
planche, une poutre fendues.
Séntido, s. f. Odorat; sentiment, sensation; flair. —
Avédre séntido, avoir vent de quelque chose. À bono séntido,
il a du flair.
Séntou, s. f. Odeur, senteur, parfum. — Aïgo dé séntoù,
eau ou essence parfumée.
Dér. du lat. Sentire. Ts
SÈR
+ Séntre, v. Sentir, recevoir une impression; ressentir,
éprouver une impression, une émotion; répandre une
odeur bonne où mauvaise; flairer, apercevoir, percevoir,
avoir le pressentiment d'un évênement.
Dér. du lat. Sentire.
Sénu, udo, adj. m. et f. Sensé, 6e
Sèou, s. m. Suif; graisse des animaux employée jadis
dans la confection des chandelles.
Dér. du lat. Sebum, et par contraction Sewm.
Séoucla, v. Sarcler, arracher les mauvaises herbes.
Dér. du lat. Sareulare, m. sign.
Séouclaire, airo, s. m. et f. Sarcleur, sarcleuse; celui
-ou celle que l’on emploie à arracher les mauvaises herbes
d’un champ.
wSépio, s. f. Sèche /Sepia), sorte de poisson de mer, du
genre des Polypes, qui n’a ni écailles ni nageoires : il a
les bras garnis de suçoirs et répand au besoin une liqueur
brune, qui, le couvrant d'un nuage, le dérobe aux attaques
de l'ennemi. Cette liqueur est employée dans la peinture
à l’aquarelle appelée Sépia.
‘La sèche diffère des autres poissons du mème genre par
unros blanc, oblong, opaque et très-léger, de la longueur
du corps de l'animal On suspend cet os dans la cage des
petits oiseaux pour leur permettre d’aiguiser leur bec.
Sept, adj. denomb. Sept, nombre impair qui suit
immédiatement le nombre six et précède immédiatement le
nombre huit.
+ Dér. du lat. Septem, m. sign.
Séqua, vw. Sécher, dessécher, devenir sec, mourir en
parlant des végétaux; mettre à sec, tarir; fatiguer, obséder-
— M'avès séqua, vous m'avez fatigué, ennuyé; dans le
langage trivial : vous m'avez scié le dos.
Dér. du lat. Siccare, m. sign.
Séquadou, s. m. Séchoir.
Séquaje, s. m. Ce qu'on a mis à sécher. Au fig. une
importunité.
Séqual, s. m. — Voy. Sécal.
Séquarésso, s. f. Sécheresse, absence de pluie et
d'humidité ; saison sèche. — Avès pas séquarésso? N'êtes-
vous pas altéré?'voudriez-vous vous rafraichir? A% bièn
séquarésso, j'ai bien soif.
nSéquèlo, sf. Sequelle, multitude, rassemblement,
troupe de gens ameutés. — fs véngu émbé touto sa séquèlo,
il est arrivé avec toute sa suite. Uno séquèlo d'éfans, une
troupe d'enfants, une nombreuse famille.
Dér. du lat: Sequela, m. sign.
+ Séquèstre, s. m. Séquestre, dépôt d'une chose litigieuse
en main tierce, fait par ordre de justice ou par conven-
tion des parties; celui à qui l'on confie le dépôt.
* Dér. du lat. Sequestrum, m. sign.
Sèr, s. f. Serpent (Anguis). La vipère et l'orvet /Vipéro
et’ Nadièl) sont les seuls du genre ophidien à qui le langue-
docien ait donné un nom particulier; toutes les autres
espèces sont pour lui des Sèrs. C'est sous cette dénomination ,
SÉR 607
commune que sont connues les diverses couleuvres du pays,
sans qu'on ait même pris la peine de les distinguer par
aucune qualification particulière. Ces couleuvres sont
parfaitement innoffensives et n'ont pas plus de moyens que
d'envie de nuire à l’homme : loin de là, elles lui rendent
service en faisant leur proie d'une foule de petits animanx
nuisibles à ses récoltes; mais elles ont le malheur de
n'inspirer que le dégoût et l'horreur parce qu'elles sont
d'une race maudite et généralement malfaisante, et on les
tue quand on devrait les protéger.
Dér. du lat. Serpens, m. sign.
Séramén, s. m. Serment, assurances.
Séré, s. m. Serein, temps clair et serein, vapeur
humide et froide, ordinairement malsaine, qui se fait
sentir le soir depuis le coucher du soleil et qui donne
naissance à la rosée. Cette vapeur ne se développe quepar
les nuits sereines.
Dér. du lat. Serenus.
Sère, s. m. Montagne, colline élevée, cime, érète de
montagne.
Dér. du bas lat: Serrum ou de l'esp. Sierra, ou du
catal. Serra, m. sign.
Séréna, v. Exposer à la fraicheur ou à la rosée des
nuits. — Faïre séréna, exposer au serein.
Dér. de Séré, — Voy. ©. m.
Sérénado, s. f. Sérénade, concert d'instruments où de
voix que l’on exécute le soir sous les fenètres d’une
personne que l’on veut honorer.
Séréno, s. f. Le serein, la rosée du soir; une syrène,
monstre fabuleux, moitié femme, moitié poisson.
Sérichou, s. m. — Voy. Sérioù.
Sérin, s. m. Cini, serin de Provence, Gros-Bec Cini,
Fringilla serinus, Temm. Cet oiseau, qui a le dessus du
corps olivâtre avec des taches noires et cendrées, les flancs
grisâtres et le reste jonquille, est un de nos plus agréables
chanteurs. On le marie avec la femelle du serin Canari, et
les métis qui en résultent sont d'excellents musiciens.
Dér. du lat. Siren, sirène.
Séringa, s. m. Syringa, nom de plante, vulgairement
Seringat, Philadelphus coronarius, Linn. Arbrissean de
la famille des Myrtées, originaire de la Suisse, de la Savoie
et du Piémont, que l'on cultive comme plante d'ornement.
Dér, du lat: Syringa, nom que les anciens donnaient à
cet arbrisseau parce que sa tige dépouillée de sa moëlle est
creuse comme une flûte ou syrinx.
Séringa, v. Seringuer, lancer une liqueur au moyen
d'une seringue, injecter, donner des lavements.
Dér. du lat. Syringa.
Séringo, s. f. Seringue, pelite pompe portalive et
foulante qui sert à attirer et rejeter l'air ou les liquides et
que l'on emploie le plus ordinairement pour donner des
lavements ou faire des injections.
Dér. du lat. Syringa, dér. du grec Zpr£, flûte ou
syrinx, tube cylindrique creux.
608 SÈS
Sérioùu ou Sérichou, s. ». Petite colline, éminence,
monticule, butte de terrain.
Dér. de Sère, colline, montagne. — Voy. ©. m.
Sérma, v. Tremper le vin, y ajouter de l’eau. — Dé
vi sérma, du vin trempé, que l'on appelle dans les lycées
et les pensionnats « de l'abondance. »
Dér. de l'ital. Semare, diminuer.
Sérmoü, s. m. Sermon, discours chrétien prononcé en
chaire dans une église pour instruire ou édifier les fidèles.
Au fig. remontrance longue et ennuyeuse .
Dér. du lat. Sermo, discours.
Sérmouna, v. Sermonner, faire de longues remontrances.
Dér. de Sérmoù, sermon.
Séro, s. f. Le soir, la soirée; l'espace compris entre la
fin du jour et la nuit close. — Rouje dé séro, bèou tén
éspéro, ciel rouge le soir, espoir de beau temps.
Dér. du lat. Sero, sur le soir (Cicéron).
Sèrpatas, s. m. Augm. de Sèr (Voy. & m.).
serpent, reptile énorme.
Sèrpatièiro, s. f. Repaire, refuge, retraite de serpents.
Sèrpièiro, s. f. Serpilière, toile grossière à tissu très-
lâche dont se servent les marchands toiliers ou drapiers
pour envelopper leurs ballots ,et, par extension, couverture
en lambeaux dont les mendiants se recouvrent.
Sérpoul, s. m. Serpolet, Thymus serpillum, Linn.,
Nom propre d'homme. — Voy. Frigoulo.
Sèrti, v. Affirmer, certifier, assurer, — Vous ou sèrtisse,
je vous l’affirme.
Sèrvanto, s. j. Servante, domestique femme. — Faire
sèrvanto, saluer avec respectet déférence. Sèrvanto expres-
sion elliptique qui signifie : je suis votre servante.
Dér. du lat. Serva, m. sign.
Sèrvi, v. Servir, être attaché à un maitre; rendre
service, être utile, aider, tenir lieu ; être attaché au service
militaire, à une administration ; servir une table, distribuer
aux convives une portion des mets servis sur une table.
Dér. du lat. Servire, m. sign.
Sèrvice, s. m. Service, ce que l’on fait pour remplir un
service; fonctions d’un domestique, d'un employé; con-
ditions de ceux qui servent; ce que l’on fait pour être
utile à quelqu'un que l'on veut obliger; temps passé sous
les drapeaux; cérémonies d'un culte religieux; usage,
utilité, emploi; nombre de plats que l’on sert à la fois sur
la table; série de pièces de vaisselle de mème forme
servant dans un repas.
Dér. du lat. Servitium, m. sign.
Sèrviciäou, âoudo, s. m. et /. Domestique, serviteur,
servante, garde-malade.
Dér. de Sérvice, service,
Serviteur ! interj. empruntée au français. Je suis votre
serviteur; salutation, affirmation ou négation quelquefois
ironique.
Séséto, s. f. nom propre de femme. Suzette, dim. de
Suzanne. — Voy. Céséto.
Gros
SIA
Sésido, s. f. Saisie, confiscation, vente de biens æ
voie judiciaire, par autorité de justice.
Dér. du français.
Sésio, s. f. Tenue, contenance, persévérance; assemblée,
réunion, session, assises. — N'a pas gés dé sésio, il n'a
point de tenue, point de contenance; il ne comprend, il ne
saisit rien; il ne peut rester en place.
Sésoù, s. f. Saison, l’une des quatre parties de l’année ;
époque où l’on sème, où l’on recueille; temps propice à
faire ou à combiner une chose.
Dér. du lat. Satio, action de semer.
Sésoù, s. j. Suzon, nom propre de femme, dim. de
Suzanne. — Voy. Séséto,
Séssoü, s. m. Suçon, sorte de gousset ou de morceau
d’étoffe taillé en coin que l’on ajoute à un vêtement, à un
objet confectionné avec une étoffe, pour lui donner plus
d'ampleur sur un point déterminé.
Séssoüs, n. pr. de lieu, m. Cessous, commune: de
Chamborigaud, siège de la compagnie des mines de houille
de Cessous et Trébiau.
Dér. du lat. Sessarium, siège.
Sestiè, s. m. Sélier ou quart de la salmée, mesure
équivalente à 5 décal. 4477, mesure d'Alais. — Voy.
Sâoumado.
Dér. du lat. Sextarius, parce que chez les Romains le
sétier était la sixième partie du Conge.
Séstièirado, s. f. Surface de terrain labourable suffisante
pour un sétier de grain. — Séstièirado dé tèro, un arpent
de terre.
Sétanto, adj. de nomb. Septante ou soixante-dix ;
réunion de sept dizaines: t
Sétémbre, s. m. Septembre, nom de l’un des douze
mois de l’année, le neuvième de lannée actuelle, le
septième chez les Romains, le second de l’année égyptienne,
le troisième de l’année grecque.
Dér. du lat. September, nom que ce mois portaitrchez
les Romains.
Sèti, s. m. Siège, terme générique qui désigne tous-les
meubles sur lesquels on peut s'asseoir, mais plus particu-
lièrement un siège grossier où champètre; un siège de
gazon; un banc de pierre, de bois, etc. ; le siége d’une
ville. — Sèti dé bouto, les pièces de bois qui servent.de
support aux tonneaux dans une cave,
Dér. du lat. Sedile, m. sign.
Si ou Sin, s. "»m. Nœud du bois dans une planche ou
toute autre pièce de bois.
Dér. du Jat. Signum, marque, signe.
Si, adv. Particule affirmative, oui, assurément.
Dér. du lat, Sie, ainsi, de mème, de cette façon, de
cette manière.
Siâou, adj. m. Calme, serein, tranquille, paisible, —
Lou tén és sidou, le temps, l'air est calme. Parla sidou,
parler doucement, à voix basse.
Dér. du lat. Siere, garder le silence, dér. lui-mèmedu
SIC
grec uwrdw, m: sign., ou de Zwrf, silence, calme, !
tranquillité, ou de Écyéw, se taire.
Sévén, s. m. Clou, furoncle, abcès.
Siâoume, s. m. Psaume, chant biblique; lamentation,
plaintes, reproches, gémissements. — Aourés-lèou féni
vostes sidoumes? aurez-vous bientôt fini vos doléances?
Lous sept sidoumes, les sept psaumes de la pénitence.
Sibla, v. Sifiler, produire un son aigu en chassant
l'haleine avec force et serrant les lèvres après avoir disposé
la langue d'une certaine manière. Sifiler avec un instrument
appelé sifflet, siblé; siffler ou moduler un air en sifflant ;
siffler un oiseau; désapprouver avec dérision, marque de
. mépris. — Siblo toun chi, appelle ton chien, apaise-le en
sifflant. Las ouréios mé siblou, les oreilles me cornent, on
‘parle de moi. Ce préjugé était l’un des trois présages
domestiques admis par les Romains. Il annonçait à la
personne qui éprouvait le tintement d'oreilles (tirmitus
aurium), que l'on parlait d'elle. Les personnes supersti-
tieuses supposent:encore de nos jours que l'on parle d’elles
en bien quand c'est l'oreille droite qui corne, qu'on parle
‘d’elles en mal, quand c'est la gauche.
Dér. du lat. Sibilare, m. sign.
. Siblado, s. f. Siflement, coup de sifilet.
Siblaïre, s. m. Siffleur, celui qui a l’habitude de siffler.
Dér. de Sibla, siffler.
Siblamén-d'âouréio, s. 1. comp. Aoisionétboht dans
les oreilles, tintement d'oreilles.
Dér. du lat. Sibilus.
Siblé, s. m. Sifflet, petit instrument à vent qui sert à
siffler. —:Coupa lou siblé, couper la parole, empècher de
répondre. Énta dou siblé, greffer en flûte. — Siblé dé
créslaïre, flûte de Pan. — Voy. Créstaire.
» Siblo, s. f: Cible ou sible. Plaque en bois, en carton
ou en métal peinte-en blanc et sur laquelle sont tracés des
cercles concentriques et servant de point de mire et de but
à ceux qui s'exercent au tir des armes à feu.
Siblo=-z-y, loc. imp. que l'on adresse à une personne
pour l'engager à souffler une réponse à celui qui est embar-
rassé pour la faire.
Sica, s. m., que l'on devrait peut-être écrire Sicap. —
Dé soun sica, de sa tête, de son chef, de son estoc, de son
proprejugement, de son propre mouvement, sans que
cela lui ait été suggéré. Aqud vèn pa dé soun sica, ce n'est
pas de son propre jugement qu'il a pris cette détermination.
A forgço sica, il a beaucoup de jugement.
Dér. du lat. Sie, ainsi, et de Cap, tête; de sa tète.
Sicrè, s. m. Secret, ce que l'on tient caché, ce que l'on
ne doit pas faire connaître ou divulguer; procédé, recette,
moyen que l'on découvre ou que pen de personnes connais-
sent pour faire certaines choses, produire certains effets;
moyen, invention tenus secrets . — Garè ddou sicrè, guérir
par des formules cabalistiques en usage chez les campagnards.
Dér. du lat. Secretum, fait de Secretus, part. passé de
Secernere, séparer, mettre à part.
SIM 609
Sièfro, s. f. Dossière d'un harnais de charrette. On dit
aussi Sufro. C'est le surdos, large bande de cuir qui porte
sur la sellette du cheval attelé au brancard d'une voiture
ou d'une charrette.
Dér. du lat. Suffrago, jarret des jambes de derrière des
quadrupèdes, parce que cette bande de euir empêche le
tablier de la charrette de tomber sur le train de derrière et
les jambes des chevaux.
Sièi, Nom de nombre. Six, nombre pair, qui suît le
nombre impair cinq et précède le nombre sept.
Dér. du lat. Sex, m. sign.
Siétado, s. f. Assiôtée, plein une assiette.
Dér. de Siéto, assiette,
Siéto, s. f. Assiette; nstensile de table rond et plus ou
moins creux, sur lequel chaque convive prend pour manger,
une certaine portion des mets qui sont servis. — Siéfo bécudo,
écuelle à bec. Siéto crouséludo, assiette creusé et profonde
qui-sert d'assiette à soupe aux paysans. — Foy: Bécu et
Crousélu.
Sifè, adv. Si fait, expression que l'on emploie pour
affirmer une chose contredite par un autre interlocuteur.
— Sès pa ‘na à Nime? Sife. Vous n'êtes pas allé à Nimes”?
Si fait. Emprunt fait au français. *
Dér. du lat. Sie factum, oui bien.
Signäou, s. m. Signal, signe dont on est convenu pour
donner quelque avis; seing ou signature; marqué où tache
naturelle de la peau que l’on apporte én naïssant.
Dér. du lat. Signum, m. sign.
Signoüs, adj. m. Bois noueux.
Simbèl, s. m. Appeau, chanterelle : oïsean que les
oiseleurs mettent dans une cage, dans le voisinage de leurs
filets, pour attirer d'autres oiseaux ; signe, signal, enseigne.
Au fig. occasion, cause, sujet.
Dér. du lat. Symbolum, signe, indice pour avertir:
Simoüs ou Cimoüs, s. #. La lisière d'une toile, ce qui
est à la cime, à la partie supérieure d’une pièce de drap on
de toile ou d’un tissu quelconque; ce qui la borde.
Dér. de l'ital. Cimossa, dér. du lat. Cima, bout, extrè-
mité. — Voy. Cur dé camiso.
Simousso, s. /. Lisière d'un ‘drap de lit. — Fla eoumo
uno simousso, mou comme de la charpie.
Mème étym. que Simoüs. — Voy. ©. m.
Simplardariè, s. /. Badinage, paroles badines, niaiseries,
bêtises, simplicité.
Dér. de Simple, niais, idiot.
Simplardéja, v. Se livrer à des niaiseries, des enfan-
tillages.
Dér. de Simple.
Simplardije ou Simplige, s. m. Nigauderie, bêtise,
enfantillage.
Dér. de Simple. — Voy. ©: m
Simple, s. m. Imbécile, niais, idiot, nigaud, benèt.
Dér. du lat. Simplex, formé de Sine plicis, sans plis,
sans arrière pensée.
610 SIR
Sinagogo, s. f. Synagogue, temple où s'assemblent les
juifs pour se livrer à l'exercice de leur culle. Au fig. une
réunion où tout le monde parle à la fois. où il est impos-
sible de rien entendre ni de se faire entendre. — © quintb
sinagogo! Dieu ! quel brouhaha, quel vacarme!
Du lat. Synagoga, m. sign., dér. du grec Evvaywyf,
congrégation, assemblée.
Sinodi ou Sénodi, s. m. Synode, assemblée ecclé-
siastique catholique où protestante. Au fig. une personne
très-ennuyeuse, une conversation ennuyeuse, une demande
importune, une narration assommante.
Dér. du grec. Züèovos, m. sign.
Sinna, vw. Signer; apposer sa signature au bas d’une
lettre, d’un contrat, d’un document écrit.
Dér. du lat. Signare, fait de Signum, signe, parce que
jadis on n'écrivait pas son nom, mais un paraphe ou un
signe, pour toute signature.
Sinne, s. m. Signature, seing. — Faire soun sinne,
apposer sa signature. Signe, marque, geste. — Ac 's sinne
dé plèjo, cela présage la pluie; c’est signe de pluie. Sé fas
low sinne, fara lou co, situ lèves la main sur moi, je te
frapperai. Kaïre lou sinne, lever la main ou le bâton pour
frapper.
Dér. du lat. Signum, m. sign.
Sinné, s. m. Le signet d’un livre. Dim. de Sinne.
Siou, siouno, adj. poss. m. et f. Sien, sienne. —
Chasquun lou siou, à chacun lesien. Acd ’s siou, cela est à
lui. Aguél ome és tout siou, cet homme n’est occupé que de
lui-mème ; c'est un égoïste, il n'aime que lui.
Dér. du lat. Suus, sua, suum.
Sioula, v. Pousser ‘un cri aigu et perçant comme
font les jeunes filles qui folâtrent; glapir en chan-
tant.
Dér. du lat. Sibilare, siffler. ;
Sioule, s. m. Cri aigu et perçant, habituel aux jeunes
filles qui folètrent.
Dér. du lat. Sibilus, sifflet.
Sioune, siouno, adj. poss. m. et f. Sien, sienne, autre
forme du pr. poss. Siou, dont l'emploi est le même:1—
Voy. c. m.
Sioure, s. m. Chène-liège ; écorce du chène-liège: Sorte
de chêne vert dont l'écorce supérieure se détache-etdont
on fait des planches de liège dont le tissu léger et spongieux
est impénétrable à l’eau. On en fait des bouchons, des
bonées pour les vaisseaux, des chapelets pour les filets,
des scaphandres pour nager, des semelles intérieures ‘pour
les chaussures, etc.
Du lat. Suber, dér. de Sub, parce qu'anciennement
les femmes en mettaient sous leurs souliers pour se pré-
server de l'humidité ou pour paraître plus grandes.
Siro, s. m. Sirop, liquide visqueux ordinairement
sucré.
Dér. du lat. Sirupus, m. sign.
Siroutéja, ». User de sirops, de médicaments sirupeux:
SOL
— Sé faï qué siroutéja, il ne fait que se médicamenter
avec des douceurs.
Sirvén, s. m. Serviteur, domestique, valet. Nom pr.
d'homme.
Dér. du lat, Serviens, m. sign.
Sirvénto, s. f. Servante, domestique femme. Nom pr.
de femme.
Sisampo, s. f. Vent glacial; bise très-froide.
Si-vous-plè ou Siou-plè, Loc. adverb. S'il vous plait;
si cela peut vous être agréable.
Empr. fait au français.
Sô, soto, adj. m. et f. Sot, solte, sans esprit et sans
jugement; impertinent. En langage de nourrice un enfant
qui n'est pas sage. — Sù coumo uno banaslo, coumo un
paniè. Vodu maï èstre sù qué pignastre, mieux vaut biaiser
que se raidir, que s’opiniâtrer.
Dér. du sax. Sot, m. sign.
Sofio ou Rougéto, s. /. Sauvages la confond avec la
Rabanénque ou l'Hombre. Crespon en fait le Spirlin, Cypri-
nus bipunelatus, Linn. Ce poisson, qui ne dépasse guère,
dans la partie haute du Gardon, une longueur de quinze
centimètres, atteint dans la partie basse de cette rivière,
c.-à-d. entre le pont Saint-Nicolas et son confluent avec le
Rhône, jusqu’à vingt-cinq ou trente centimètres de lon-
gueur. Il a le dos grisâtre, les côtés d’un brun vert; deux
rangs de points noirs le long de la ligne latérale qui est
rouge; ventre blanc et très-brillant, nageoires rougeätres,
à l’exception de la dorsale qui est verdâtre. Il'est très-
agile dans ses mouvements et on ne le trouve que dans les
eaux vives dont le fond est :caillouteux. Ce signalement
qui légitime très-bien son second nom de Roujéto, s'applique
à notre Sofio, qui ne serait donc pas l’hombre mais le spirlin:
Soissanténéja, ». Approcher de la soixantaine, de l’âge
de soixante ans.
Dér. de Soissanténo, soixantaine. — Voy. €. m.
Soissanténo, s. f. Soixantaine; l'âge de soixante ans.
— Saras la soissanténo? vous devez approcher de la soïxan-
taine?
Dér. de Soissanto, soixante. — Voy. ©. m.
Soïissanto, nom de nomb. Soixante; réunion de six
dizaines d'unités.
Solo, s. f. Nom d’une sorte de chaussure à semelles de
bois, armées de pointes de fer dentelées, qui servent à
blanchir les châtaignes, à les dépouiller de leur écorce,
dans quelques cantons des Cévennes; semelle de bas, de
chausson, semelle de flanelle que l’on met dans les chaus-
sures. :
Solo, s. f. Sole commune ou perdrix de mer, Pleuro-
nectes solea, Linn. Solea vulgaris, Dict. des sc. nat.
Poisson de l’ordre des Holobranches et de la famille des
Hétérosomes, à corps dissemblable, que l'on pèche dans la
Méditerranée et dont la chair est trés-délicate.
Le nom de la sole lui vient de sa forme plate et allon-
gée qui la fait ressembler en effet à une semelle. m&
SOR
Son, s. ». Somme, sommeil, envie de dormir, — Aï fa :
un bon son, j'ai fait un bon somme. Lou son m'arapo, le
sommeil me prend.
Dér, du lat. Somnus, m. sign.
Son, son,
Vène, vène,
Son, son,
Vène bon.
Lou son-son vôou pa véni,
Lou toto voudriè dourmi.
Son, son,
Vène, vène,
Son, son,
Vène bon.
Chant de nourrice qui sert à endormir les jeunes
enfants. .
Sono, s. f. Sonnerie, annonce, symptôme, présage. —
Michanto sono, triste présage, fâcheux symptôme. Se dit
d'un symptôme avant-coureur d'une grave maladie, de la
mort, d’une fâcheuse nouvelle.
Dér. du lat. Sonus, son, bruit, éclat.
Sôou, s. m. Sol, surface du sol. — Sé ficha dou s6ou,
se laisser tomber, faire une chüte. Pérdre séou, perdre
terre. Sé rabala pér lou séou, se rouler à terre.
Dér. du lat. Solum, m. sign.
Sôou, s. m.Sou, monnaie autrefois en usage, équivalente
à la vingtième partie de la livre et valant douze deniers.
Le sou est aujourd'hui représenté par la pièce de cinq
centimes.
Au moyen-âge on comptait par sous d'or ou d'argent,
dont la valeur était beaucoup plus considérable que celle
du sou commun.
Dér. du lat. Solidus, ou sollus, tout, entier, unilé. —
Poulè coumo un, séou, joli comme un ange; gentil à
croquer. Brave coumo un sôou, se dit d'un enfant bien
sage, d’un homme qui a un bon caractère.
Sôouquo, s. f. Billon, labourage par planches d'une
largeur arbitraire qui divisent le champ labouré en zones
longitudinales de largeur à peu près égale et parallèles
entre elles.
Sopha, s. m. Sofa, canapé et par extension un fauteuil.
Dér. du ture qui l'a emprunté de l'arabe Ssofah ou
Sophah, banc, estrade.
Sorbo, s. f. Corme ou sorbe; fruit du cormier, qui a des
qualités astringentes très-prononcées.
Dér. du lat. Sorbum, m. sign.
Sore, s. f. Sœur, dans le langage populaire. Fém. de
fraïre, frère. On dit aussi Sur, qui est un terme plus
raffiné se rapprochant du français.
. Dér. du lat. Soror, m. sign.
Sorgo, s. f. Source. — Tène sorgo, tenir lète où compa-
gnie à quelqu'un; servir d'interlocuteur, donner la réplique
à quelqu'un.
SOU 611
Sossèio, s. f. Chaussée; nom d'une promenade d'Alais
qui longe la rive gauche du Gardon à l'arrivée de Nimes
et d'Uzès, entre le mas de Nègre et le Pont-Vieux. Cette
promenade, plantée d'une magnifique allée d'ormes, a été
créée en 4843, avec l'aide des prisonniers russes, qui y
furent employés. C'est la plus suivie en hiver par les
babitants d'Alais. — Voy. les Recherches historiques sur
Alais, p. 366.
Sou, s. m. Gros billot de bois; grosse pièce d'un tronc
d'arbre. Billot de cuisine sur lequel on dépèce la viande.
Billot sur lequel on frappe pour opérer le décorticage des
châtaignes sèches enfermées dans un sac ouvert des deux
bouts. — Dourmi coumo un sou, dormir comme ua sabot.
Pica coumo sus un sou, frapper sans raison, sans discer
nement. Soucas, augm. de Sou.
Soubarbo, s. m. Sous-barbe; barbe en collier qui
encadre le visage. Mode vulgaire, en usage sous la royauté
de juillet et aujourd'hui à peu près abandonnée,
Soubéiran, soubéiranno, adj. m. et [., pris quelquefois
substantivement et employé aussi commenom pr. d'homme.
Souverain, souveraine; principal, ale; supérieur, eure;
haut, haute. — La carièiro Soubéirano à Alais, la rue
haute, la plus rapprochée du château seigneurial. Le
portail Sobéiran à Collias, la porte principale ou du nord,
par opposition au portail Sobtéiran, la porte inférieure ou
du midi.
A Remoulins, la Soubéirano, quartier de territoire qui
longe la rive droite du Gardon jusqu'aux limites de
Fournès et Sernhac et qui devait faire partie du domaine
royal avant l'acte d'échange du 7 mars 1290, passé entre
Philippe le Bel et Brémond Il}, d'Uzès.
Dér. du lat. Superans.
Soubra, v. Ménager, dispenser, mettre de côté; affran-
chir, être en excédant. — Soubra dos anèlos, supprimer
ou laisser sans usage deux anneaux d'une chaine, c.-à-d.
mettre le point d'attache au troisième anneau à partir de
l'extrémité de la chaine. — Lou pan y-a soubra, il a eu
du pain de reste.
Dér. du lat. Superare.
Soubrasa, v. Fourgonner, soulever la braise d'un foyer
pour lui donner de l'air. — Soubrasa sous ésclos, passer
de la braise et des cendres chaudes dans l'intérieur des
sabots pour en chasser l'humidité ou leur donner un peu
plus de chaleur.
Soubre-jour, s. m. comp. La seconde moitié du jour,
la portion de la journée comprise entre midi et le coucher
du soleil.
Soubre-sémmano, s. f. comp. La seconde moitié de la
semaine comprise entre le jeudi et le dimanche suivant ;
par extension un jour de la semaine autre que le dimanche
ou le lundi.
Soubros, s. f. plur. Restes, excédants, reliefs d'un
repas ou de ce qui a été servi à un convive qui n'a point
achevé de manger. ‘
612 SOU
Soucaras, s. m. Augm. de Soù. Grosse souche de bois;
billot de grosse dimension.
Dér. de So.
Soucarèl, s. m. Champignon du genre des Agarics, qui
vient par touffes sur les souches des arbres morts. Les
meilleurs sont ceux qui croissent sur les souches de peu-
pliers, de müriers ou de chènes verts. — Un fricù dé sou-
carèls, un ragoût de champignons.
Dér. de Soù, tronc d’arbre ou billot.
Souci, s. m. Souci, souci des jardins, Calendula offici-
nalis, Linn., plante de la famille des Composées corym-
biféres; souci sauvage, souci des champs, Calendula
arvensis, Linn. Souci, peine, chagrin, préoccupation. —
N'agués pa soucè, ne vous préoccupez pas de cela. Aÿ bièn
dé soucè, je suis bien inquiet.
Dér. du lat. Solisequium, Solsequium, fait de Sol, soleil,
et de Sequi, suivre, parce que sa fleur, comme celle du
tournesol, suit le cours du soleil.
Souci (San), s. m. comp. Homme imprévoyant; qui ne
se préoccupe de rien de sérieux. Quinte san souci! quel
homme indifférent !
Soucianço, s. f. Souci, inquiétude, préoccupation.
Dér, de Souci. — Voy. ©. m.
Soucianço (Én), loc. adv. En repos, tranquillement,
sans se remuer. — És toujour én soucianço, il vit tran-
quillement, sans travailler, sans préoccupation.
Cette locution nous paraît être une altération du mot
Insouciango, dér. du fr. insouciance.
Soucita (Sé), v. pr. Se soucier, s'intéresser à quelque
chose. — Mé n’én soucite pas, cela m'est indifférent; je ne
m'en soucie pas.
Dér. de Souci.
Souçoun, s. "”. Soupçon, pressentiment, opinion désa-
vantageuse sur quelqu'un où quelque chose, mais sans
complète certitude.
Dér. du lat. Suspicio, m. sign.
Souçouna, v. Soupçonner, avoir une opinion désavan-
tageuse mais dubitative.
Dér. de Souçgoun, soupçon.
Soudado, s. f. Famille de cochons; compagnie de porcs
réunis dans la mème étable. — Aï céous) low pu bèl dé la
soudado, j'ai choisi le plus bel échantillon du troupeau.
Sou-dis, loc. adv. affirmat. Terme parasite qui revient
irès-souvent dans la bouche des hommes du peuple,
dans une narration. — Digué, sou-dis, il dit (dit-il).
C’est le qui dit des troupiers. Sou-diguë, sou-disiè sont des
formes de la même locution
Sou-faï, loc. adv. affirmat. analogue à la précédente et
qui s'emploie dans le mème sens. — Sou-faguè, sou-fasiè,
sont des formes de la mème locution.
Soufra, v. Soufrer, mettre du soufre; brûler une mèche
soufrée dans une futaille; soufrer une vigne pour la pré-
server ou la guérir de l’oïdium.
Dér. de Soufre, soufre.
SOU
Souîfraje, s. m. Soufrage, action de soufrer, soufrer une
futaille; soufrage d’une vigne pour la préserver ou la sur
de l’oïdium. À
Dér. de Soufre, soufre.
Soufre, s. m. Soufre, substance non métallique que l’on
trouve dans le voisinage des volcans, tantôt cristallisée en
octaèdres, tantôt et le plus souvent en masses amorphes
ou en poussière fine comme dans les solfatares. Cette
substance est employée à une foule d’usages.
Dér. du lat. Sulfur, m. sign.
Soufri, v. Souffrir, pâtir, ressentir de la douleur ; endu-
rer, supporter; languir, patienter. — Podou pa sé soufri,
ils ne peuvent se supporter, vivre ensemble. Pode pa mé sou-
frè din moun oustdou, je ne puis rester dans ma maison.
Soufris-té, reste tranquille, sois moins turbulent, se dit à
un jeune enfant qui ne peut rester en place.
Dér. du lat. Sufferre, formé de Swb, par-dessus, et de
Ferre, porter.
Sougna, vw. Soigner, avoir soin de quelqu'un ou de
quelque chose ; travailler, traiter avec soin, avec sollicitude.
— Sougna-vous bé, prenez soin de votre santé.
Soui, pr. pers. du pr. de l’ind. du v. Éstre, je suis. —
Souï roustà, je suis un homme perdu, je suis bien malade.
Dér. du lat. Sum, m. sign.
Souïar, souïardo, s. »,. et f. Homme malpropre,
crasseux ; un souillon, une servante malpropre.
Souïardo, s. f. Petit cabinet ordinairement dépendant
de la cuisine et ‘spécialement affecté au lavage de la
vaisselle.
Souiè, s. m. Soulier, chaussure en cuir, — Préne la
voituro dé moussu souïè, faire une route à pied. Souïe, n
pr. d'homme et de lieu.
Dér. du lat. Solea, semelle, ou de Solum, sol, parce que
la chaussure appuie sur le sol.
Souiro, s. f. Une truie. Au fig. une femme de mauvaise
vie, une souillon.
Péj. Souirasso.
Dér. du lat. Suillus, suilla, qui tient du cochon.
Soul, oulo, adj. m. et f. Seul, seule. Dim. soulé, sou-
léto, seulet, seulette; solitaire, isolé. — Manjo soun pan
soul, il mange du pain seulement, Un gousto-soul, un
sournois, un égoïste, un misanthrope.
Dér. du lat. Solus, seul.
Soulado, s. f. Jonchée d'herbes ou de fruits. — Uno
soulado dé garbos, une jonchée de gerbes, une airée. On
dit aussi un couvèr-sdou, un sol couvert.
Dér. du lat. Solum, sol.
Soulaïrôou, s. m. Lieu exposé au soleil, galerie abritée
et exposée au midi, cagnard, abri où l'on prend le soleil;
n. pr. d’hômme. On dit aussi Souréiadoù.
Dér. du bas lat. Solarium, qui désignait un plancher
d'appartement. Le solarium invanatum était un étendoir,
un belvédère, une terrasse couverte au haut d’une maison.
— Voy. aussi Courédoù.
SOU
Sou-lâäoupio, s. f. Abri formé par un auvent qui
s'avance en saillie sur une façade de maison.
Une /doupio ou laupie n'est autre chose qu'un auvent.
La sou-léoupio, c'est le dessous d'un auvent, la portion du
sol que l’auvent abrite.
Soulas, s. m. Soulagement, consolation, aide, protection.
— Faire soulas, tenir compagnie dans une circonstance
difficile, triste où pénible.
Dér. du lat. Solatium, consolation, soulagement.
Soulda, s. m. Soldat, militaire, homme de guerre. —
Siès un bon soulda, lu es courageux, tu ne crains pas bruit.
Dér: du lat. Solidum, paye, solde, parce que dans l'ori-
gine la paie était d'un sol.
Souldato, s. »”. Femme d'un soldat: virago; femme à
” allures masculines. — Acd's uno souldato, c'est une Mar-
phise.
Dér. ile Soulda.
Soulédre, s. m. Le vent d'ouest; le vent dont la
direction se déplace avec le cours du soleil et qui est occa-
sionné par la raréfaction que cet astre produit dans l'air.
© Dér. du lat, Sol, soleil.
Soulénguo, s. ”. Le filet ou frein de la langue; mem-
brane placée au-dessous de la langue et qui la régit. Son
développement anormal occasionne une difficulté plus ou
moins grande dans l'articulation des consonnes; on peut
atténuer ce défaut par une incision convenable. — F-an
bièn coupa lou soulénguo, il a le filet bien coupé, dit-on
d'un bavard.
Souloumbra (Dé), v. pr. Se mettre à l'ombre ou à
l'abri du soleil.
Dér. du lat. Subtus umbram.
Soumia, v. Sommeiller, roupiller, être assoupi, dormir
d'un sommeil léger.
Dér. du lat. Somnus, sommeil.
Soumiaÿe, s. m. Demi-sommeil, somnolence, sommeil
léger. ©
Dér. du lat. Somnus, sommeil.
Soumousta, s. m. Surmoüt, vin tiré de la cuve sans
être cuvé ni pressé. On donne aussi ce nom au vin fait
avecle moùt séparé de la grappe et du raisin, sorte de tocane.
Le vin de Tavel est fabriqué par ce procédé.
Soun, s. m. Le bout, l'extrémité, le fond de quelque
chose. — Aou soun ddou pous, au fond du puits. Aou soun
dé la carrièiro, au bout de la rue.
Dèér. du lat. Summum, m. sign.
Soun, pr. poss. m. Son, au fém. Sa et au plur. Sous et
Sas. — Coumo faï soun fièr! comme il est fier! Coumo
faï soun ome! comme il fait l'important!,
Dér. du lat. Suus, sua, suum.
Souna, v. Appeler, sonner, rendre un son. — La mésso
sono, la messe sonne. Mé sounarès én passant, VOus
m'appellerez en passant. L'aï souna, m'a pa réspoundu, je
l'ai appelé, il ne m'a pas répondu.
Dér. du lat. Sonare, m. sign.
SOU 613
Sounado, s. / Coup de cloche, sonnerie, — La daridtro
sounado, le dernier coup de cloche, le dernier appel de
cloche.
Dér, de Souna, sonner.
Sounaia, v. Sonner, agiter des cloches ou des sonnettes
d'une manière continue et ennuyeuse,
Dér. de Souna, sonner.
Sounaio, s. /. Sonnaille, clochette au son sourd, que les
bergers suspendent au cou de leurs moutons, ânes où
chèvres.
Dér. de Soun, son.
Sounaire, s. m. Sonneur, celui qui est chargé de sonner
les cloches.
Dér. de Soun, son.
Sounariè, s. f. Sonnerie, le bruit des cloches, le son
simultané de plusieurs cloches mises en branle.
Dér. de Soun, son.
Sounal, s. m. Clocher, tour élevée dans laquelle sont
suspendues des cloches.
Dér. de Soun, son.
Souncù ou Sounquo, adv. Excepté cela. — Dégus n'és
pa cdouso d'aqud souncù tus, personne n'est cause de cela
si ce n’est loi. Séra pa d'iudi ni déman, souncù divéndre,
ce ne sera ni aujourd'hui ni demain, mais après-de-
main.
Souné, s. m. Sifllet en os ou en métal avec lequel on
imite le cri ou le chant d'un oiseau; et par extension,
appeau, chanterelle; oiseau que les oiseleurs mettent dans
une cage près de leurs filets et qui attire par son chant
d’autres oiseaux. — Voy. Simbèl.
Sounglé, s. m. Un grapillon, une petite portion d'une
grappe de raisin, brin que l'on en détache. — N'én'wole
pa qu'un sounglé, je n'en veux qu'un brin, un grapillon.
Dér. de Soun, bout. Sounglé, petit bout.
Sounja, v. Rèver, penser, réfléchir. — Sé sounÿa,
penser, avoir la pensée. Mé sounjave, je me disais. Mé
souï sounja, j'ai pensé, j'ai réfléchi.
Dér. du lat. Somniare, faire des songes.
Sounlèou, s. m. Nausée, envie de vomir, répugnance,
dégoût. — Acù mé dono lou sounlèou, cela me soulève le
cœur, me donne des nausées.
Sounléva. v. Soulever, exhausser, exciter l'indignation,
soulever le cœur, faire éprouver du dégoût.
Dér. du lat. Sublevare, m. sign.
Sounquo, adv. Excepté, sauf. — Voy. Souncè.
Soupa, s. "=. Souper; le dernier repas du jour, le repas
du soir.
Dér. de Soupo, soupe, parce qu'on mange habituellement
la soupe le soir.
Soupa, v. Souper, prendre le repas du soir. — Avèn
soupa, nous AVONS SOUPÉ; un soupo sans lun, un avare.
Soupéto, s. f. Dim. de Soupo, soupe; bouillie, soupe
légère que l'on prépare pour les enfants et pour les malades
ou les convalescents.
LL
ül14 SOU
Soupièiro, s. f. Soupière, sorte de plat profond et orné
d’un couvercle, dans lequel on sert la soupe, le potage.
Dér. de Soupo.
Soupiè, èro, s. m. et f. Mangeur de soupe; celui ou
celle qui en mange volontiers, beaucoup et souvent.
Dér. de Soupo. — Voy. C. In.
Souplè (A), loc. adv. A l'abri, à couvert. — Sèn à
souple, nous sommes à l'abri.
Littéral. Soust-plèjo, à l'abri de la pluie.
Soupléja (Sé), v. pr. Se mettre à l'abri de la pluie.
Dér. de Sou-plèjo, à l'abri de la pluie.
Soupo, s. /. Soupe ou potage, ordinairement composé
de tranches de pain minces trempées dans un bouillon
gras ou maigre. — Soupo coufido, soupe mitounée. Soupo
liso, potage sans garniture. Soupo dé maldoute, potage de
santé. Tuïa la soupo, dresser le potage.
Dér. du celt. Soub, ou de l’anglo-saxon Suplen, tremper
dans le bouillon ou dans un liquide quelconque.
Souquado, s. f. Ce qu'un cep de vigne porle de raisins.
Dér. de Souquo, souche.
Souqué, s. ”. Le surplus, la bonne-mesure, la réjouis-
sance, le comble, ce qui est en dehors de la ligne de
compte. — Voy. Chiqué.
Souquo, s. f. Souche, cep de vigne. — Souquo dé pisaïre,
billot sur lequel on bat les châtaignes.
Sour, Sourdo, s. m. èt f. Sourd, sourde; atteint de
surdité; qui n'entend pas bien, ou n’entend pas du tout.
Au fig. qui a l'air de ne pas entendre, qui n’obéit pas.
Dér. du lat. Surdus, sombre, confus. qui ne peut être
perçu.
Sour, Sourno, adj. m. et f. Noir, obscur, sombre,
ténébreux.
La grotte de la Baume, située dans la commune de
Sanilhac, sur la rive gauche du Gardon, porte le nom de
Béoumo sourno, grotte sombre.
Sourbiè, s. m. Cormier, arbre fruitier qui produit des
cormes, appelées Sorbo en lauguedocien.
Sourbièiro, s. ». Champ planté de cormiers.
Dér. de Sourbiè, cormier.
Sourciè, s. #1. Sorcier, magicien, devin.
Ce terme peut venir de la bass. lat. Sortiarius, ou pent-
ètre de Suurço, source, parce que l'on donne ce nom aux
bydroscopes ou chercheurs de sources.
Sourdaras, s. m. Péj. de Sour, sourd; celui qui est
très-sourd ; qui n'entend absolument rien de ce qu'on lui
dit.
Sourdije, s. #”. Surdité, privation plus ou moins com -
plète du sens de l’oure.
Dér. du lat. Surdilus, m. sign.
Souréia, ado, adj. m. et f. Hälé, noirci, brülé par le
hâle. — Sé souréia, V. pr. prendre le soleil, s’exposer,
se chauffer au soleil. On dit proverbialement : Qué pér
Caléndos sé souréio, pèr Pascos crémara sa légno, celui qui
prend le soleil pour la Noël, est souvent obligé de se
SOU
chauffer à Pâques. C’est le proverbe français : € Noël a son
pignon et Paques son tison. »
Dér. de Sourél, soleil :
Souréiado, s. /. Rayons de soleil: action plus ou moins
prolongée des rayons du soleil; exposition aux rayons du
soleil. — Préne uno bono souréiudo, s'exposer longuement
au soleil. Au fig. Y manco pas uno souréialo, se dit. d'une
personne qui, malgré sa jeunesse, a beaucoup de présence
d'esprit, de bon sens et de raison. Faï uno souréïalo, il fait
une éclaircie à travers les nuages dont le ciel est couvert.
Dér. de Sourél, soleil,
Souréiadoù, s. m. Un étendoir, une galerie abritée et
exposée en plein midi; abri où l'on prend le soleil. On dit
aussi Soulaïrdou. — Voy. CG. m.
Souréian, s. m. La chaleur du soleil; un endroit où
celte chaleur se concentre plus particulièrement. — Se
mélre dou souréian, S'exposer aux rayons du soleil.
Dér. de Sourél, soleil.
Sourél, s. m. Le soleil, astre lumineux qui éclaire le
monde et dont la présence sur l'horizon constitue le: jour.
— Faï bon sourél, le soleil est ardent. Lou sourél nouris
tout, le soleil féconde tout. Préne lou sourél, s'exposer aux
rayons du soleil. Au fig. Arampa'n co dé sourél, axoir
un peu trop bu; se griser. ;
Dér. du lat. Sol, solus, seul, unique au monde, sa
splendeur effaçant celle de tous les autres astres.
Sourti, v. Sortir, passer du dedans au dehors: être issu ;
commencer à sortir de terre en parlant des semences, lever,
pousser, germer., — L'an sourtè dé soun oustéou, on Va
dépossédé de ses biens. Las boucos m'an sourti, mes lèvres
se sont enflées.
Dér. du lat. Sortire, tirer au sort.
Sourtido, s. f. Sortie, issue, — Aquél oustéou a dos
sourtidos, cetle maison a deux issues. La sourtido dé
véspro, dé l'assémblado, la sortie des vèpres, de l'assemblée,
du prèche.
Dér. de Sourti, sortir.
Souscava, v. Creuseren dessous, miner, sonder, prendre
en sous-œuvre, Au fig. sonder la pensée d'une personne,
tâcher de lui arracher des aveux.
Dér. du lat. Subtus cavare, creuser en dessous.
Souspésa, v. Soupeser, lever un fardeau avec la main
et le soutenir pour juger de son poils et l’évaluer approxi-
mativement.
Sousqua, v. Sangloter, pousser des soupirs; soufiler,
ranimer le feu.
Sousta, v. Épargner, pardonner, épauler, soutenir. —
Pér uno fés, té souste, pour une fois, je te pardonne, je
l’excuse.
Dér. du lat. Subtus stare.
Souste, s. m. Soutenu, garanti, abrité. — Sou souste,
je suis gardé, terme de jeu de cartes qui signifie que l’on .
est gardé sur une carte élevée soutenue par d'autres cartes
de même couleur.
——
SOU
Soustélo, a/ÿ. m. el n. pr. d'homme et de lieu. Subtil,
fin, dissimulé, rusé. Ce nom a été sans doute donné au
lieu de Soustelle, près d Alais, parce que cette localité
se trouve située dans une vallée retiré”, cachée, dissimulée,
Le ruisseau torreutiel appelé le Rieusset, qui suit le fond de
celle vallée, est un affluent du Galeizon. Cette commune
est du reste composée de plusieurs hameaux dispersés,
dont les noms suivent : 4° Le château de Soustelle et l'église
Saint-Pierre; 2 Périès; 3° Peyraube; 4° Vammale;
59 Olympie; 69 Le mas-Rôou; 7° Camp-Figoux: 8° Ar-
bousses; 9° Bougères; 40° La Grave; 41° Le Soulier;
420 La Croix-des-vents.
Soustène, vw. Soutenir, prèter appui, étayer. Au fig.
affirmer, — Sé soustène, se maintenir, se conserver.
Dér. du lat. Sustinere.
Soustéra, v. Recouvrir de terre, enfouir, enterrer. Se
dit des animaux morts que l'on enfouit dans la terre.
Dér. du lat. Subtus terra.
Soustièn, s. m: Soulien, étai, appui, défenseur. —
Soustièn dé famio, soutien de famille.
Dér. du lat. Sustentatio, m. sign.
Soustira, v. Soulirer, transvaser.
Sousto, s. f. Crédit: — Préne à la sousto, prendre à
crédit ; mais aujourd'hui on dit plus habituellement : préne à
crèdi. Soustos au plur., corde à garrotter qui fait partie d’un
agrès de bât de mulet.
Soustre ! inter. Juron adouci employé à la place d'un
mot plus grossier.
Soustréja, v. Prononcer des paroles grossières telles que
lejuron dont il est parlé à l'article précédent.
Dr. de Soustre.
Souta, v. Terme de vigneron; couder un avantin, faire
des” provins, recourber un sarment de vigne que l'on
couche dans la terre pour qu'il prenne racine. On appelle
aussi cette opération faire de cabus. — Voy. Cabus, Cabussa
et Cros.
Soutièiro, $. . Un silo, une conserve, une cache à
chataignes; "marrons où autres productions de la terre.
Dir. par allérat. de Soutéro, sous-terre.
Soutisiè, èiro. s. m. et f. employé aussi adjectivement.
Celui ou celle qui injurie ou insulte habituellement ; celui ou
cellequi tient des propos grossiers, inconvenants, obscènies.
Dér, de Soutiso, sottise.
Soutiso, s. f. Injure, insulte, tort, préjudice; paroles
grossières.
Souvén, alv, Souvent, fréquemment.
Dér. du lat, Sæpe où Subinde.
Souvénénço, s. f. Souvenir, souvenance. — N'a sou-
vénénço, je me le rappelle, j'en ai gardé le souvenir.
Souvéni (Sé), ». pr. Se souvenir, se rappeler. — M'én
souvêne, je me le rappelle. Véoutres, vous én souvèngue,
je vons prends à témoin.
Souvéntos-fés, adv. Souvent, bien souvent, plusieurs
fois. — Voy. Souvén.
SUR 615
Su, s. m. Le devant de la tête, la région frontale ou
coronale du crâne.
Dér. du grec Yuy#, âme, esprit, sens, raison.
Sup, supo, s. m. el [. Myope, celui qui a la vue courte
et ne voit distinctément les objets qu'avec des lunettes à
verre bi coneave.
Subre-cièl, s. m. comp. Ciel de lit; dais dressé au-
dessus du lit dans une chambre de parade.
Subredén, s. m. Surdeut, s. /. Dent surauméraire qui
pousse hors de la ligne des autres dentset s'éloigne plus ou
moins de l'arcade alvéolaire.
Dér. du lat. Super, sur, et Dens, dent.
Suça, v. Sucer, aspirer un liquide avec les lèvres,
dissoudre dans la bouche certaines substances fondantes
telles que les sucreries, la réglisse, les gommes, elc.;
gruger, pressurer,
Dér. du lat. Sugere, m. sign.
Sucé, s. m. Hochet des enfants qu'ils portent fréquem-
ment à la bouche.
Dér. de Suya, sucer.
Sucra, v. Sucrer, mettre du sucre dans un liquide ou
un mets, saupoudrer avec du sucre. — Suera-vous, prenez
du sucre.
Dér. de Sucre, sucre.
Sucre, s. m. Sucre, substance extraite des végétaux et
. qui possède une saveur particulière à laquelle elle donne
son nom. Cette substance est soluble dans l'eau et est
employée dans une foule de préparations domestiques ou mé-
dicales et dans la confection des sirops et des liqueurs douces.
Dér. du lat. Saccharum dont la racine vient du sanscrit
Schakar. :
Sugo-man, s. m. comp. Essuie-mains, pièce de linge ou
serviette dont on se sert pour essuyÿer les mains après les
avoir lavées.
Suito, s. f. Chouette-effraie, — Voy. Béou-l'oli,
Sujè, s. m. Sujet, motif; personne, individu. — N'avés
pa sujè dé faïre acd, vous n'avez aucun motif de faire cela.
— Michan sujè, mauvais sujet, polisson.
Sujo, s. /. Suie, matière noire plus ou moins dure ou
épaisse que la fumée dépose dans les tuyaux de cheminée.
Dér. du celt. Suga.
Surje, s. m. Suint, sueur huileuse qui transpire de Ja
peau des bêtes à laine. — Sénti lou surje, avoir l'odeur
du suint. Lano surjo, laine non lavée, prise dans son état
naturel, laine en suint à laquelle on attribue de grandes
vertus résolutives, parmi le peuple.
Surjé. s. m. Surget, terme de couturière ; sorte de cou-
ture qui se fait en tenant les deux étoffes qui doivent être
jointes, appliquées l'une sur l’autre, bord à bord, de
manière à les traverser toutes deux à chaque point
d'aiguille.
Surjén, s. m. Eau qui jaillit du sol sur un plan hori-
zontal et recouvre la surface environnante.
Dér. du lat. Surgere, m. sign.
616 SUS
Surmounta, v. Surmonter, s'élever au-dessus, franchir.
Au fig. venir à bout, vaincre, dompter. — Sé surmountu,
se surmonter, se vaincre soi-même.
Sur-qué-tout, adv. Par dessus tout, au-dessus de tout.
Surtout, adv. Surtout, principalement, par dessus tout,
Sus, prép. Sur, dessus; on dit aussi Désus, locut. prép.
qui a la mème signification.
Dér. du lat. Susum et Sursum.
Susa, v. Suer, rendre par les pores de la peau le liquide
désigné sous le nom de sueur; suinter en parlant des corps
inanimés; travailler beaucoup, se donner de la peine. —
Aquél carcul m'a fa susa, ce problème m'a donné beaucoup
de peine à résoudre. Susa trés cumisos, tremper de sueur
trois chemises.
Dér. du lat. Sudare.
Susa-l'ancro, v. Éprouver beaucoup de résistance, avoir
grand'peine. — Faïre susa l'anero, donner du fil à retordre,
Susaïre, s. m. Celui qui sue facilement; par ironie et
antiphrase, un fainéant, un paresseux. — Quinte susaïre/
quel fainéant! N'és pas un fort susaïre, ce n’est pas un
fort travailleur.
SUV
Suscle, s. m. Petit poisson méditerranéen; mendole
(Mæna). — Voy. Cagarèl et Picarèl.
Susari, s. m. Suaire, linceul dans lequel on ensevelit un
mort. — Bouta dou susari, ensevelir, envelopper un mort
d’un linceul.
Susoù, s. /. Sueur, odeur de gousset.
Susoun, s. /. Nom pr. de femme. Suzon, dim. de Suzanne.
Susourléja, v. Suer légèrement et d'une manière con:
tinue, suotter.
Suspréne, v. Surprendre, prendre sur le fait; tromper,
abuser, étonner, attaquer par surprise. Au fig. un mets
qui a été saisi, c.-à-d. dont la partie superficielle a été
attaquée par un feu trop vif. Se dit surtout du pain mis
dans un four trop chauffé et qui est brûlé à la surface
tandis que l’intérieur manque de cuisson. — L'èr m'a
susprés, l'air frais m'a saisi.
Suta, v. Exciter, hâter, pousser, harceler, faire dépêcher,
diligenter.
Suvi, v. Suivre, accompagner, escorter, aller à la suite
de quelqu'un ou de quelque chose; parcourir une route. Se
dit des animaux qui sont en rüt. ,
Dér. du lat. Sequi, suivre.
T
TAB
T, seizième consonne et vingtième lettre de l'alphabet,
Elle a été employée dans l'antiquité au lieu du C ou du D
et de l'L; comme lettre numérale, T vaut 460, et avec une
ligne au-dessus 460.000.
Ta, s. m. Bouchon de liége ou autres substances, telles
que le bois, le verre, etc.
Ta, adj poss. f. Ta. — Ta fénno, ta femme.
Dér. du lat. Tua.
Taba, s. m. Tabac, Petun nicotiane, herbe du grand
prieur, herbe de la reine (Wicotiana tabacum Linn.), plante
de la famille des Solanées, originaire de l'Amérique méri -
dionale et cultivée en France depuis 4559, époque à
laquelle Jean Nicot, ambassadeur de France en Portugal,
la présenta à la reine Catherine de Médicis, après l'avoir
lui-même reçue d'un Flamand qui arrivait de la Floride.
Son nom lui vient de Tabaco ou Tabago, contrée du littoral
de la mer des Antilles où les Espagnols le trouvèrent pour
la première fois. — Y-a dé taba! il y a du grabuge!
Taban, s. m. Taon (Tabanus), sorte de mouche trés-
grosse, à deux ailes de couleur ordinairement sombre, qui
s’acharne sur les chevaux, les bœufs, etc., pour sucér leur
sang et dont la piqüre est si aiguë et si douloureuse qu'elle
va jusqu’à les rendre furieux. Ce nom de Taban se donne
aussi par extension à une foule d’autres insectes, tels que
certains coléoptères qui sortent au crépuscule et à d’autres
grosses mouches au corps velu, au vol bruyant, parmi
TAB e.
lesquelles on peut citer le Bourdon. — Taban-mérdancié,
scarabée stercoraire, Scarabœus stercorarius, Linn.
Dér. du lat. Tabanus.
Tabanéja, v. Ne s'emploie qu'au figuré avec la signifi-
cation de s’agiter dans le vide, sans but préconçu, à seule
fin de se donner un mouvement inutile. Se dit en parlant
d’un tâtillon, de celui qui a la prétention de toucher à
tout, et surtout à des choses qui lui sont étrangères.
Dér. de Taban. :
Tabatéja, v. Prendre fréquemment du tabac à priser;
priser constamment et par manie; avoir sans cesse recours
à la tabatière.
Dér. de Taba, tabac.
Tabatéjaïre, s. m. Celui qui a sans cesse la tabatière à
la main.
Tabé, També ou Atabé, adv. Aussi, aussi bien, tout de
même. — Tabé ou faraï, tout de mème je ferai cela.
Toujour y sèrco nouëso, tabé soun pas ami, il lui cherche
toujours querelle, aussi sont-ils loin de s'entendre.
Tabo, interj. Cri de guerre des écoliers qui se battent à
la fronde ou à coups de poings.
Voui, tabù pér lou vièl Alais!
Tab dé léngo amaï dé floundo !
(LAFARE-ALAIS, Las Castagnados. — Rocho et Plagnéou,
2° édit. p. 227.)
TAC
SAuUvAGES fait venir celle expression par corruption de
Tèn bù! tiens bon ! ne lâche pas.
« Je serais tenté, dit Larare (Las Castagnados, Notes,
p. 389), de chercher une autre étymologie au mot Tabè. En
latin, Tabes où tabum, qui fait au datif et à l'ablatif tabo,
signifie ce sang épais et noir qui s'échappe à flots des
blessures et forme des ares sur le champ de carnage.
Pourquoi ne serait-ce pas là l’origine de notre Tabè/ vrai
cri de guerre el de sang, alors ; mais, dans ce cas, il aurait
pris naissance à une époque où la guerre était une vérité
et ce ne seraient point des enfants qui l'auraient poussé les
premiers. »
Tabôsi, s. m. Nain, avorton, personnage de taille
exiguë.
Dim. de Ta, bouchon.
Tabouiïé, s. m. Un courtaud, un petit ragot.
Din. de Ta, bouchon.
Tacha, v. Tàcher, s'efforcer de faire. — Tacha mouïèn,
faire en sorte; garnir de clous à tête large, appelés tacho,
des semelles de souliers ou de sabots.
Dér. du lat. Satagere, s'empresser.
Tachaïre, adj: Celui qui fabrique des clous à tête large
appelés tacho dont on garnit les semelles de gros souliers.
Dér. de Tacho.
Tacha-mouïèn, faire en sorte. — Voy. Tacha.
Tacho, s. f. Clou à large tête dont on garnit la semelle
des souliers de fatigue. Ces sortes de clous sont désignés
dans le commerce sous le nom de pastres, parce que les
bergers où pâtres en font un grand usage.
Dér. du celt. Tach, clou. — Faïre dé tacho, claquer des
dents en grelottant de froid. Rire coumo uno tacho, com-
paraison extravagante, amphigourique, du nombre de celles
qui ont la prétention d'être d'autant plus expressives
qu’elles ont moins de sens. Le languedocien n'est pas le
seul à les affectionner, à les inventer; d'autres langues en
font sans doute de même, et le français ne dit-il pas, entre
autres choses, s'amuser comme un croùton de pain derrière
une malle? A force de se griser de mots incohérents, on
s’imagine mieux exprimer sa pensée et l’on éblouit son
monde; et le fait est que la chose finit par être reçue pour
valable. La preuve qu'il en est ainsi, et que si l'on dit
quelque chose c'est justement le contraire de ce qu'on
devrait dire, la voici : Rire coumo uno tacho est bien pris
affirmativement; c’est rire de bon cœur, à montrer sa
dernière dent, mais sans cacalas, sans éclats, de ce rire
muet du trappeur de Cooper, devenu légendaire. Et que
peut-il y avoir de moins gai, de moins disposé à rire qu'un
clou de soulier, tacho, assommé pour entrer dans la
semelle, foulé aux pieds, écrasé sous le poids du corps,
trainé dans la boue? En le supposant animé, ce serait l'être
le plus malheureux de la création. Cette fois, on dit done
bien réellement le contraire de ce qu'il faudrait.
Tachou, s. m. Dim. de Tacho (Voy. ©. m.). Petit clou
court et à tête élargie.
TAI 617
Ta-d'houïèiro, s. m, Bouchon en verre qui sert à hon-
cher un huilier; littéralement bouchon d'huilier.
Tafanäri, s. m. Le derrière, les fesses et plus parti-
culiérement l'anus.
S'il faut en croire Honnorat, ce mot dériverait du grec
Tagos, anus. Nous lui laissons la responsabilité de cette
aflirmation que rien ne semble justifier.”
Tafatas, s. m. Tafletas, éloffe de soie tissue comme la
toile; c'est l'étoffe nommée cendal chez les ancisns ; ono-
matopée imitant le bruit produit par le froissement de
cette éloffe.
Tafatassaire, s. m. Tafetassier, fabricant de taffetas.
Dér. de Tafatas, taffetas. On dit aussi Tafataire.
Tafo, s. f. Éclat, blancheur de la neige. — Blan coumo
la tafo dé la nèvu, blanc comme neige.
Tafura, v. Fureter, chercher minutieusement avec un
sentiment de curiosité.
Tafuraïre, s. m. Fureteur, celui qui cherche avec
curiosité et persévérance ; esprit curieux et investigateur.
Taï, s. m. Blaireau, Taisson, Taæus ou Melos. Cet
animal est assez commun dans nos pays; il offre une sin-
gularité : son pelage est d'un gris brun à la surface et noir
en dessous, ce qui est l'inverse de ce que l'on remarque
chez presque tous les autres animaux. Le Blaireau est
solitaire, défiant, paresseux, passant les trois-quarts de sa
vie dans son terrier, dont il ne sort guère que la nuit;
mais il s'en écarte peu, car il a les jambes trop courtes
pour fuir le danger, s'il se présentait loin de son refuge.
Tout cela fait douter qu'il fasse chère vie et qu'il puisse
s’engraisser à devenir un type d'obésité comme le suppose le
dicton languedocien : Gras coumo un tai. Ceci s'explique :
autrefois les charlatans avaient mis en très-grande vogue,
comme panacée, la graisse de blaireau; ils en vendaient
considérablement, et il fallait bien supposer que l'animal
qui en fournissait tant était bien gras; seulement les
badauds achetaient de toute autre graisse, qui était
également bonne, et c'est ainsi que se font les réputa-
tions.
Taïa, v. Tailler, inciser, couper, séparer, diviser;
donner une forme convenable, enlever à un arbre les
rameaux inutiles; limiter ce qu'on doit faire, tailler la
besogne ; faire une incision à la vessie pour en retirer la
pierre. — Sé taïa, s'entailler, se faire une entaille avec un
instrament tranchant.
Dér. du lat. Talea, taille.
Taïan, s. m. Tranchant des oatils.
Taïado, s. f. Taillis, bois taillis mis en coupes réglées ;
bois qui commence à repousser.
Taïaduro, s. f. Coupure, entaille, balafre, estafilade.
Taio, s. f. Taille, coupe, action de couper, de tailler les
arbres, les pierres, etc.; incision, coupure.
Taille, hauteur et grosseur du corps humain et de celui
des animaux; la taille d'un vêtement, la partie qui re- .
couvre la longueur du dos.
üIS TAI
En terme de musiqae, la partie qui, dans un chœur, se
trouve comprise entre les ténors et les basses.
Tribüt, impôt, contribution.
Taille, morceaux de bois fendus en deux parties égales,
sur lesquels le vendeur et l'acheteur font des encoches pour
arquer la quantité de marchandises prises, Le vendeur
conserve la souché et l'acheteur la seconde partie appelée
échantillon, que l’on contrôle en les appliquant l’une contre
l'autre.
Taïo (Faïre), Expression employée pour indiquer que
l'on prend à crédit chez un fournisseur en marquant sur la
taille en bois les quantités de marchandises livrées à crédit
par le commerçant. — Voy. l'art. précédent.
Taïos, s. f. plur. Impôts, contributions, tribut, tailles.
— Léva las taïos, lever les impôts, percevoir les contri-
bations.
Taïoù, s. m. C'est en général une portion peu volumi-
neuse d'un objet comestible, coupé par un instrument
tranchant; c'est, en français, un morceau de viande, de
lard; une tranche de pâté, de jambon, de saucisson, de
fromage; un tronçon de poisson, .d’anguille, de saucisse,
de boudin. — Lou taïoù, se dit dans les campagnes, du
morceau de lard que l'on met dans la soupe de ménage
pour la rendre plus savoureuse.
Dér. de Tal.
Taïsa (Sé), v. Se taire, garder le silence, cesser de
parler, ne pas faire de bruit. — Ah! taïsa-vous/ ou sim-
plement Taïsa-vous/ est souvent une exclamation d’éton-
nement, de surprise employée dans le sens de : Que me
dites-vous là! Est-ce bien possible?
Dér. du lat. Tacere, m. sign.
Taïssariè, s. f. Tisserie, tisseranderie; le métier de
tisserand; le quartier habité par ces artisans. Il y à à
Alais la rue Tisserie et à Paris celle de la Tixeranderie.
Taïssougnèiro, s. /. Terrier de blaireau. Nom pr.
d'homme.
Dér. de Taï ou Taïssoù, blaireau.
Taïtéto (Faïre), loc. adv. Tàtonner, chercher une chose
à tâtons.
Taï-touè! Loc. interj. pour imposer silence : Tais-loi!
Laisse-moi tranquille! As-tu fini?
Taïu, s. ». Bière, cercueil.
Taïu, udo, adj. m. et f. Tranchant, affilé, qui coupe ou
taille facilement.
Dér. de Tal, tranchant.
Taïur, s. m. Tailleur; ce mot spridie à tous les
ouvriers dont le métier est de tailler. — Taïur dé pèiro,
tailleur de pierre. Mais il est à remarquer que, lorsqu'on
emploie ce mot sans autre indication, il signifie seulement
un tailleur d'habits.
Dér. de Tal.
Taïurdo, s. f. Couturière, celle qui taille et fait les
robes où autres vêtements de femmes.
Dér. de Taïur, tailleur,
TAM
Tal, s. m. Tranchant, le fil, le côté qui coupe, en par-
Jlant d'un instrument tranchant. — Vira lou tal, émousser,
ébrêcher.
Tal, talo, adj. m. et f. employé quelquefois substan-
tivement. Tel, telle. — Un tal, uno talo, un tel, une telle.
Talabréna, ado, adj. m. et f. Tacheté, moucheté,
bigarré, tigré, bariolé de diverses couleurs.
Dér. de Talabréno. — Voy. ©. m
Talabréno ou Bléndo, s. f. Salamandre, sourd, mouron
(Salamandra). Ce reptile batracien, assez semblable de forme
au lézard gris, a la peau tuberculeuse, luisante comme le
crapaud; les formes massives, les mouvements paresseux,
les habitudes tristes et solitaires. Il y a la Salamandre
terrestre et la Salamandre aquatique; la première se tient
dans les lieux ombragés et humides, sous les pierres et les
racines et ne va à l'eau que pour y déposer son frai.
L'autre y passe sa vie, bien qu'il lui soit nécessaire de
venir à la surface pour respirer; elle en sort aussi quelque-
fois pour chercher sa proie à terre. Nous avons dans le
pays la premiere espèce et plusieurs variétés de la seconde,
On avait fait à la Salamandre une réputation prodigieuse
dont il ne reste plus rien. En revanche, on lui a découvert
une faculté bien enviable : celle de se refaire, à plusieurs
reprises, les membres qu'elle a perdus. Cela vaut mieux
assurément pour elle que de résister aux flammes dont,
par ses habitudes, elle n'a guère à s'inquiéter.
Talamén, adv. Tellement, de telle sorte; on l’emploie
aussi dans un sens affirmatif. — Talamén, bé talamén,
certes, assurément, certainement, sans doute.
Dér. de Tal, tel.
Talan, s. m. Talent, aptitude naturelle, disposition,
instruction, connaissances, science. — És un ome dé talan,
c'est un homme instruit. À forço talan, il a beaucoup
d'instruction.
Talén, s. f. Désir, envie; faim, envie de manger, appé-
tit. — Ai talén, j'ai faim.
Dér. du grec Oékew, désirer, vouloir.
Talèou qué, adv. Aussitôt que, dès que. C'est une
contraction de l'expression Tan-lèou-qué, doutan-lèou-qué:..
Tal-lis, s. m. Coupure nette; tranche, incision sans
bavure, coupure lisse.
Talocho, s. f. Oiseau de petite dimension, sorte de
palette sur laquelle le plâtrier dépose le plâtre gàché.
Du vieux fr. Taler, battre, meurtrir.
Taloù, s. m. Talon, partie postérieure du pied, d’un
soulier, d’une botte, d’une bottine, d’un bas; partie d'une
hache, d'une bèche, d’une serpe, d’une faux, opposée au
tranchant.
Dér. du lat. Talus, m. sign.
Talounado, s. f. Empreinte d'un ae dans un terrain
inculte. Au fig. vanterie, fanfaronnade, gasconnade.
Tal-vira, o. Émousser, ébrècher le tranchant d'un
outil.
Tamarisso, s. m. Tamarise /Tamariæ), arbrisseau de la
TAN
famille des Portulacées dont on connait deux espèces dans
le Languedoc : le tamarisc de France ou de Narbonne
(Tamuriæ gallica, Linn.), qui croit le long des ruisseaux ;
le tamarise d'Allemagne /Tamarix germanica, Linn.) bean-
coup plus petit que le précédent.
També, adv. Aussi, aussi bien, desmême, également,
pareillement ; soit, j'y consens.
Comp. de Tant et de Bon.
Tambour, s. m. Tambour, instrument formé d'une
caisse cylindrique dont les deux fonds sont recouverts de
peau eldont on se sert dans les armèêes pour marquer les
differentes allures du soldat; dans les casernes il règle
les heures du service ou des repas. — Lou tambour das
cagardoulos, le tambour des escargnts, c.-à-d. le tonnerre,
"précurseur de la pluie qui fait sortir les escargots de leurs
retraites. Tambour dé masco ou dé basco, tambour
de basque. Tambouriné, pelit tambour, dim. de Tam-
bour.. c
Dér. de l'arabe Tambur.
Tambourgnè, s. m. Celui qui bat du tambour.
*_ Dér. de Tambour.
Tambourin, s. m. Tambourin de Provence, sorte de
tambour à caisse très-allongée et d'un moindre diamètre
que le tambour ordinaire ; on ne le bat qu'avec une seule
baguette, avec laquelle on marque la mesure et dont on
accompagne le son avec un galoubet. C'est un instrument
de ménétrier.
Dér. du grec Tôéuxavov (Tympanion où tympanon),
tambour sur lequel on ne battait qu'avec une baguette.
Tambourina, v. Tambouriner, battre le tambour ou le
tlambourin: faire une criée, une publication au son du
tambour, donner une volée à quelqu'un.
Tambourna, v. Battre du tambour.
Tammièl, adv. Tant mieux.
Tampis, ado. Tant pis.
Tanloro; s. m. Ecervelé, un homme dont la tête tourne
à tous les vents, qui n’a aucune idée fixe.
Tanqua; v: Fermer, barrer, bâcler une porte au moyen
d'une barre envois placée derrière à l'intérieur; arrêter
une pâte molle ou un liquide au moyen d'une vanne mobile
qui l'empêche de se répandre outre mesure ou au-delà
d'un espace déterminé ; arrèter, saisir.
Dér. de Tanquo. — Voy. ©. m.
Tanquo, s. /. Barre que l’on met en travers, derrière
une porte pour l'arrêter, la bâcler, la fermer à l'intérieur.
Sorte de vanne mobile dont se servent les boulangers pour
arrêter la pâte dans le pétrin.
D'après l’auteur de la Statistique des Bouches-du-Rhône,
ce mot serait ligurien.
Tant, ade. Tant, autant, tellement, si fort, en si grand
nombre, à tel point; si, aussi, — Tant-fa-tant-ba, autant
de gagné, autant de dépensé ; sitôt dit, sitôt fait. Tant-y-a
qué mouriguë, bref, en résumé, par le fait, il mourut.
Tant-si-pu, si peu que. très-peu. Pér tant qué m'én digués,
TAO 619
quoi que vous me disiez. Acd's tant dé fa, c'est autant de
fait.
Dér. du lat, Tantum.
Tantaravèl, s. m. Houblon, Humulus, lupulus, Linn.
Plante grimpante appelée aussi vigne du Nord et que l'on
emploie dans la confection de la biére. On le cultive en
grand dans le nord de la France.
Tanto, s. /. Tante, la sœur du père ou de la mère; on
donne aussi ce nom à la grand'tante.
Suivant Huet et Ménage, du lat. Amita, en y présapposant
un t, lamila; ce qui parait justifier cette étymologie c'est
qu'on disait jadis anto au lieu de tanto.
Tantôs, s. m.— Sus lou tantès, sur le soir, dans l'après-
midi.
Tantôs, adv. Tantôt, dans peu de temps, dans un instant;
il y a un moment, aussitôt.
Dér. de l'ital. Tosto, Tantosto, ou du lat. Tam citù?
Tanur, s. m. Tanneur, corroyeur, peaussier, mégissier.
Ce nom s'applique, comme on voit, indistinctement à tous
ceux qui s'occupent des diverses préparations que l'on fait
subir aux peaux.
Le tanneur tanne les cuirs dans une fosse à tan.
Le corroyeur corroie, graisse, assouplit, donne le
dernier apprèt aux peaux déjà tannées.
Le mégissier prépare les peaux blanches et les peaux à
poil.
Le peaussier donne les premiers apprêts au parchemin
et au vélin.
Le chamoiseur emploie les peaux de toute nature et les
passe à l'huile,
Dér. de Tan.
Tâou, talo, s. indéf. — Un tdou, uno talo, un tel, une
telle.
Tâou, talo, adj. indéf. — Tâou ménagço qu'a bèlo pôow,
tel affecte de menacer qui tremble de peur.
Dér. du lat. Talis.
Tâouiè, s. m. Etal, établi, planche à porter le pain,
banc en pierre ou en bois placé devant un magasin on une
boutique et sur lequel on étale des marchandises ; table de
magnanerie sur laquelle on élève les vers à soie. — Dourdo
lous tdouiès, se dit de quelqu'un qui va étourdiment, comme
un imbécile, un idiot.
Dér. de Téoulo, table.
Tâoulado, s. f. Une table garnie et entourée de convives.
— Sian uno bèlo téoulado, nous étions nombreux à table.
Uno tdoulado dé câoulés, dé [avidous, d'éoubérginos, une
planche ou un carré de choux, de haricots, d'aubergines.
Dér. de Tdoulo, table.
Tâouléja, v. Rester longtemps à table.
Tâouléjaire, s. m. Celui qui se plait à table.
Tâoulo, s. f. Table, meuble ordinairement en bois,
servant à manger, à jouer, àécrire, ete. — Métre la tdoulo ,
léva la téoulo, préparer le repas, desservir une table.
Dér. da lat. Tabula, planche.
620 TAP
Tâoulo, s. /. Planche ou carré de légumes ou de jardi-
nage. — Uno tâoulo d'éspinars, dé lachugos, dé cébos, une
planche, un carré d’épinards, de laitues, d'ognons.
Dér. du lat. Tabula.
Tâoulo-doublo, s. /. Table pliante, ronde ou carrée.
Tâoupado, s. f. Taupinière, petit monticule de terre
qu'une taupe retire en creusant ses galeries. On dit aussi
Tâoupièiro.
Dér. de Téoupo, taupe.
Tâoupén, adj. m. De la nature de la taupe, qui a des
mœurs analogues. — Un ra tdoupén, un mulot ou rat des
champs, qui creuse des galeries comme la taupe et forme
des taupinières.
Dér. de Téoupo, taupe.
Tâoupéto, s. f. Taupette, petit flacon de pharmacie ou
de confiserie.
Tâoupièiro, s. f. Taupinière. On dit aussi Téoupado. —
Voy. C. m.
Dér. de Téoupo, taupe.
Tâoupo, s. f. Taupe, Talpa. Par son genre de vie, la
taupe n'a pas besoin d'y voir parfaitement; elle a cependant
des yeux qui y voient fort clair. Aveugle ou non, elle n'en
remontrerait pas moins à tous nos mineurs, et il n’est pas
d'ingénieur qui püt trouver à reprendre à ses travaux; mais
les agriculteurs lui font une guerre acharnée. Ce n'est
jamais dans les terres incultes ou fortes que s'établit la
taupe; il lui faut les terres souples et cultivées, engraissées
de fumier, dans lequel elle trouve des vers dont elle fait sa
pâture préférée. Mais cet ordinaire ne lui suffit pas et les
racines des plantes lui fournissent de copieux suppléments.
Tapa, vw. Boucher, fermer avec un bouchon; cou-
vrir. — Tapa'no porto, boucher une porte avec une
cloison. Tapa lou fi, couvrir le feu. Sé tapa, se couvrir,
se tenit chaudement. Tapa-vous bièn, couvrez-vous
bien.
Dér. de Ta, bouchon.
Tapaje, s m. Tapage, bruit, grand désordre accompagné
de bruit. — Faïre tapaje, faire du tapage.
Dér. du grec Héræyos, bruit, fracas, craquement, par la
transposition du x et du x.
Tapajur, s. m. Tapageur, celui qui fait du tapage.
Dér. de Tapaje.
Tapâou, adv. Aussi, si peu, non plus. — Tapéou y-ana-
raï pas, aussi n'irai-je pas.
Composé de Tant et de Pdou.
Taparas, s. m. Sorte de poudingue ou conglomérat
lacustre très-.ommun dans le Gard et qui, au-dessous de
la terre végétale, forme une couche imperméable plus ou
moins épaisse. Cette imperméabilité du sol rend la terre
infertile, et on ne peut la rendre productive qu’en brisant
et extrayant ces bancs de poudingues quand ils n'ont pas
une épaisseur trop considérable.
Dér. de Tapa, boucher, couvrir, parce qu'en effet cette
poudingue recouvre le sol et le bouche pour ainsi dire en
TAR
le rendant imperméable. On désigne anssi ces poudingues
sous le nom de Cistre, Cistras.
Tapas, s. m. Gros gifile, soufflet fortement appliqué.
Tapé, s. m. Nain, courtaud, petit avorton. — Lou tapé,
le jeu du bouchon.
Dér. et dim. de Ta, bouchon.
Tapériè, s. m. Cprier cultivé, Capparis spinosa, Lino...
arbrisseau de la famille des Capparidées et dont les baïes se
conservent dans le vinaigre pour l'assaisonnement des mets.
Le câprier croit naturellement en Grèce et dans les iles
de l’Archipel. C'est de là qu'il doit avoir été transporté en
Italie et dans la Provence.
Dér, du grec Taxevés, rampant.
Tapéro, s. f. Càpre; baie de càprier confite dans le
vinaigre et servant de condiment pour relever les mets. —
Voy. Tapériè.
Tapo, s. f. Tape; coup légèrement appliqué avec la
main sur la joue ou toute autre partie du corps en signe de
familiarité ou de correction anodine.
Dér. du français Tape, m. sign.
Tapo-quiou, s. m. comp. Le gratte-cul, baie rouge de
l'églantier, Agalanciè (Voy. ©. m.). Al est ainsi nommé
parce que l'on compose avec cette baie des conserves
astringentes qu'on emploie pour arrèter la diarrhée. Tape-
cul, tilbury, sorte de voiture légère à deux roues.
Taqua, v. Tacher, faire une tache, souiller, salir. Au
fig. flétrir, déshonnorer.
Dér. de Taquo, tâche.
Taquo, s. /. Tâche; empreinte d'huile, de graisse,
d'encre, de vin, etc. ; salissure de boue, souillure au propre
et au figuré. — Lèvo bièn uno taquo, il avale volontiers
un verre de vin, c'est un excellent buveur. Acd’s taquo
d'oli, c'est une chose indélébile, ineffaçable ; une injure ou
un service rendu que l'on n'oublie jamais, un fait qui laisse
un souvenir impérissable. Uno taquo din l'ièl, une taie.
Du bas bret. Tach, souillure, ou de l'arabe Taca, tâche.
Taquo-d'oli, s. /. comp. — Voy. Taquo.
Tar, s. m. Tard, longtemps après midi, aux approches
de la nuit, après la nuit close. — Sus lou tar, sur le soir,
dans la soirée.
Tar, adv. Tard, au delà du temps fixé, du temps ordi-
paire, du temps convenable. — Un pdou tardé, un peu
tard.
Dér. du lat. Tardè, m. sign.
Tarabastéja, v. Faire du bruit, du fracas. s'agiter pour
peu de chose, importuner, troubler, ravauder, tracasser.
Dér. de Tarabast, larabat, sorte de crécelle dont les
religieux se servaient jadis pour éveiller ceux qui, pendant
la nuit, devaient chanter l'office et doût on se sert encore
pour les offices de ténèbres pendant la semaine sainte.
Billot, bâton ou crochet en bois qu'on mettait en travers
au cou des chiens pour les empêcher de chasser seuls et
d'aller dans les vignes.
Tarabastéjaïre, s. »m. Homme importun, espril tracas-
PP
TAR
sier, qui s'agite constamment à propos de rien ou de peu
de chose.
Dér. de Tarabast.
Tarabastèri, s. ”. Tracas, vacarme, — Voy. Tarabas-
téja.
Tarabastiè, s. m. Homme tracassier, qui s'agite beau-
coup, un brouillon.
Dér. de Tarabast. — Voy. Tarabastéja.
Taraïre, s. m., où Taradouiïro, s. f. Grande tarière ou
bondonnière servant à percer la bonde des tonneaux. Elle
est ie d'une légère amorce.
Tarasquaïre, s. m. Un des hommes qui sont employés
à faire mouvoir la tarasque pendant les fêtes de Sainte-
Marthe, à Tarascon-sur-Rhône.
Dér. de Tarasquo, dont l'étymologie vient de l'espagn.
Tarasca, fantôme.
Tarda, v. Tarder, différer, ne point arriver assez tôt,
se mettre en retard. |
Dér. du lat. Tardare, m. sign.
Tardé, adv. Dim. de Tar, tard ; un peu tard. — Voy. Tar.
Tardiè, èiro, adj. m. et f. Lent, en retard; tardif,
qui vient tard, qui ne mürit que dans l’arrière-saison.
Dér. de Tar, tard.
Taréirôou, s. m. Grande manne d'osier ronde et en
forme de cône tronqué renversé, qui sert à transporter la
vendange ou autres productions végétales.
Targa (Sé), v. pr. Se targuer, se prévaloir, tirer avan-
tage, faire parade.
De Targo, large, bouclier que l'on plaçait devant soi
pour se défendre.
Targo, s. f. Targe, bouclier; trogne, bonne mine,
mine fière, démarche assurée.
Tariblamén, adv. Terriblement, énormément, beaucoup,
très-fort. — À plougu tariblamén, il a plu énormément.
Tarible, blo, adj. m. et f. Terrible, gros, énorme,
redoutable. — Un ome tarible, un homme athlétique.
Dér. du lat. Terribilis, m. sign.
Tarnagas ou Margasso, s. »m. Noms donnés, le premier
surtout, beaucoup plus usité, au genre Pie-grièche, Lanius.
Parmi les cinq variétés plus ou moins répandues dans le
pays, le languedocien distingue : 4° lou tarnagas dé la
bèlo méno (pie-grièche grise, Lanius ercubitor, Temm.),
de la grosseur d'un merle, cendré sur le corps, blanc
dessous, avec la queue et une bande autour de l'œil noires,
et du blanc parsemé sur les parties les plus foncées ;
20 lou tarnagas dé la tèsto roujo (pie-grièche rousse,
Lanius nifus, Temm.), plus petit que le précédent; le
dessous du corps blanc, sauf les flancs lavés de roux ; tout
le dessus d'un noir profond, avec un demi-cerele blanc sur
les ailes, le derrière de la tête d’un roux ardent; 3° lou
tarnagas téré ou térén est la femelle de ce dernier : l'épi-
thète de téré lui vient de ce qu'elle place son nid plus
près de terre que la première espèce. Pie seulement par sa
couleur, la pie-grièche, par son bec recourbé, ses ongles
TAR 621
crochus, et surtout ses instincts audacieux et cruels, est
un véritable rapace qui chasse et dévore les petits oiseaux
qu'il attire en imitant leur ramage. Ses différents noms
ont voulu dépeindre son caractère : le latin Lanius ayant
la signification de boucher, le grec “Aypuwe, Sauvages,
a fait grièche. Margasso est le parfait équivalent du nom
français, par la contraction d'agasso, pie, et de mari,
marido, mauvais, méchant, à moins que la premiére
syllabe ne vienne de mas, maris, mäle, c.-à-d. forte, cou-
rageuse. Tarnagas enfin comprend toujours le mot Agasso,
mis au masculin agas, précédé de tarn qui, avec une légère
altération, peut être car ou carn, — ce dernier mot, vieux
roman — de Caro, carnis, chair, ce qui équivaudrait à pie
carnassière. Le français donne justement le nom de pie-
grièche à une femme criarde, acariâtre. Comment le lan-
guedocien a-t-il été si mauvais observateur cette fois que
de faire de son tarnagas le synonyme de sot, de balourd?
La pie-grièche se précipite souvent sur les appéaux des
oiseleurs, qui la prennent ainsi dans leurs filets : a-t-on
attribué à l'aveugle sottise ce qui est l'effet de son
audacieuse rapacité? La captivité doit aussi l'affecter
beaucoup, et, dans les premiers moments surtout, elle doit
en paraitre comme hébêtée. Jugé dans ces circonstances,
le Tarnagas a pu être pris pour un sot, et devenir ainsi le
prototype dé l'espèce.
Tarnäou, s. m. Un gros, une drachme, la huitième partie
de l’once; le gros pèse trois deniers, et le denier un grain.
Ce mot parait étre dérivé de ternarius ou de ternalis, de
trois, parce que le gros est composé de trois deniers.
Taro, s f. Tare, déchet, déduction faite sur une pesée
de denrées ou de marchandises du poids de l'enveloppe ou
du récipient qui sert à les contenir; vice, défaut, défec-
tuosité. — Vigno én taro, une vigne en sève ou en fleur.
De l'arabe Tharah, rejeter, rebuter; ou de Talah, défaut,
vice.
Taros, s. f. plur. Défauts, vices. — Voy. Taro.
Tartanis-tartanas! interj. Onomatopée employée dans
le jeu de cache-cache.
Tartano ou Tartanas, s. #. Le milan et principalement
la buse. Le milan est fort rare dans nos contrées ; la buse,
au contraire, y est commune. On peut établir, en règle
générale, que, parmi les oiseaux de proie diurnes, les plus
gros, en bornant toutefois cette classe à ceux qui font la
guerre à nos basse-cours, sont confondus sous le nom de
Tartano, comme les petits le sont sous celui de Mowïcé.
Quant aux plus gros, tels que l'aigle, le vautour, dont
quelques variétés habitent les montagnes voisines et nous
visitent quelquefois, ils conservent leurs noms français
légèrement assaisonnés à la languedocienne.
Ce nom a sans doute été donné à la buse parce que ses
ailes sont triangulaires ét en forme de voile latine, comme
celle du vaisseau appelé tartane, qui sert à la pêche et an
cabotage sur la Méditerranée. Le nom de cette embar-
cation parait lui-même dérivé du celtique.
7
622 Ph TE
Tartèlo (Faïre la). Mot qu'emploient les gamins en
jouant à pile ou face, pour indiquer que leur adversaire
cherche à tricher, en faisant retomber la pièce du côté qui
peut le faire gagner.
Tartéléto s. m. Bonbon, petite tarte.
Tartifle, s. m. La pomme de terre.
Dér. par corruption de l'allemand Æartoffe, dont la
prononciation se rapproche beaucoup du mot Tartifle.
Tasséla, ado, adj. m. et f. Tacheté, moucheté, qui a
des taches sur la peau.
Tassèou, s. m. Tasseau, morceau’ de bois servant à
soutenir une tablette, une étagère, un rayon de bibliothèque;
grosse pièce faisant tache que l’on met sur une autre étoffe ;
emplâtre, tache.
Tasso, s. f. Tasse, petit vase servant à boire du café, de
la tisane ou autres breuvages que l’on prend à petites doses.
Dér. du celt. Tass, m. sign.
Tasso, s. f. Taxe, taux, prix, cours, tâche. — L'an
més à la tasso, on le fait travailler à la tâche. Acôd's la
tasso, c'est la taxe, le prix fixé.
Dér. du français Taxe.
Tasta, v. Goüter, déguster, essayer, éprouver; agir
avec circonspection, sonder le terrain.
Dér. du lat. Tactum, supin de Tangere, toucher.
Tasto, s. f. Dégustation, essai d’un fruit, d’une liqueur,
mais surtout des melons, du fromage, du vin et de l'huile ;
échantillon. — Préne un méloun à la tasto, choisir un
melon en en goûtant plusieurs. Mé pourtaran la tasto
d'aquél vi, on m'apportera l'échantillon de ce vin. Douna
à la tasto, offrir à l'essai.
Dér. de Tasta, goûter.
Tastoù, s. m. Reste de pâte dont on fait de la galette ou
une fouace qui imite grossièrement une forme humaine
appelée Éstève. — Voy. ©. m.
Tastounéja, v. Tâtonner; chercher à tâtons dans
l'obscurité. Au fig. tâtonner, procéder avec hésitation, avec
incertitude, faute de lumières ou de renseignements précis.
Tavèl, s. m. Pile, tas, agglomération. — Tavèl (Tavèou,
en provençal), village du canton de Roquemaure, a la même
signification que réunion, agglomération d'habitations,
centre habité.
Té, s. m. Une goulte; la roupie qui pend au nez;
gouttière, chenal par lequel les eaux d'un toit s’écoulent
sur le sol. — N'én vole pa qu'un té, je n'en veux qu'une
goutte, une larme.
Té, pr. pers. de la 2€ personne. Te, toi, à toi. — Té
vése, je te vois. Prén-té gardo! prends garde à toi. Garo-té
d’aquà, dte-toi de là. Dé qué té prén? qu'est-ce qui te prend?
Té ié parlère coumo fdou, je lui parlai d'importance.
Dér. du lat. Te, ou du grec Te, te, tu, toi.
Tèl! interj. Tiens! vraiment! Est-ce bien vrai! Est-il
possible ! Te, véjo-lou! Tiens, vois-le! Tè tu, {à iéou! s'em-
ploie en parlant de gens qui se disputent et se renvoient
__ réciproquement des injures.
TÉM
Tébés, éso, adj. m.et f. Tiède. — Aïgo tébéso, eau
tiède.
Dér. du lat. Tepidus, m. sign.
Técha, v. Dégoutter, tomber goutte à goutte. — Soun
nas técho, son nez dégoutte. Técho, il pleut légèrement, il
bruine. Aquél ron técho, l'eau suinte de ce rocher.
Técho, s. f. Goutte. — Voy. aussi Té et Dégoù.
Téchoù, s. m. Petite goutte. Dim. de Té et de Técho.
On dit aussi Téché.
Tèfle, s. m. Gros morceau, grosse pièce. — Tèfle dé pan,
un quignon, un gros morceau, un Chanteau de pain; un
buflle, un animal de grosse taille; un homme obèse, joufflu;
un soufflet appliqué sur la joue.
Tégne, v. Teindre, donner à une étoffe ou à toute autre
chose une couleur voulue, en la plongeant dans une disso-
lution liquide préparée à cet effet,
Dér. du lat. Tingere, m. sign.
Téious, ouso, adj, m. et f. Filamenteux, fibreux,
coriace, comme la teille du chanvre, la filasse.
Tèl, tèlo, s. indéf. — Un tèl, uno tèlo, un tel, une telle.
Se dit dans un sens général pour désigner vaguement une
personne dont on parle. On dit aussi: un téou, uno
talo.
Dér. du français.
Télado, s. f. Une pièce de toile.
Dér. de Tèlo. — Voy. c. m.
Télatiè, s. m. Marchand de toile, tisserand, marchand
toilier.
Téléto, s. f. Éblouissement, obscurcissement de la vue
chez les moribonds, dont la cornée devient trouble et
opaque. — La téléto, le voile de la mort.
Tèlo, s. f. Toile, tissu de fil de lin ou de chanvre,
tissu ou filet des araignées. On le dit aussi pour le 16 ou
largeur d'une toile. — Tèlo d'oustéou, toile de ménage.
Tèlo cruso, toile écrue, non lessivée, non blanchie. Las
tèlos sé toquou, je suis sans le sou.
Dér. du lat. Tela, formé par syncope de Texula.
Tèlo, s. indéf. [. Telle. — Madamo uno tèlo, madame
une telle. — Voy. Ta.
Témouèn, s. m. Témoin, celui ou celle qui a vu ou
entendu un fail; preuve ou marque; fragments de pierreou
de tuile que l'on place à côté d’une borne-limite, et qui
étant rapprochés, se soudent de manière à reprendre leur
forme entière.
Dér. du lat. Testimonium, m.s.
Témpéstéja, ». Tempèter, faire grand bruit, se fâcher
bruyamment, faire de violents reproches.
Dér. de Témpèsto, tempôte.
Témpèsto, s. f. Tempête, ouragan, agitation violente de
l'air, le plus souvent accompagnée de pluie, d'éclairs et de
tonnerres.
Dér. du lat. Tempestas, tempète.
Témpiè ou Trémpiè, s. ». Pluie abondante, qui pénètre
très-avant dans la terre et suffit à alimenter les sources
TEN
et les fontaines et à les faire grossir. — À fa un bon trémpié,
la pluie a bien trempé la terre.
Dér. de Trémpa, mouiller.
Témpièira, v. Tremper, saturer d'eau. — A bièn tèm-
pièira, la pluiea bien trempé la terre ou l'a bien abreuvée;
il a plu abondamment.
Dér. de Témpiè. — Voy. C. m.
Témple, s. m. Temple; édifice consacré au culte pro-
testant. — Anan dou témple, nous nous rendons au service
religieux dans le temple protestant.
Dér. du lai. Templum, m. sign.
Témpouri, ». Finir son temps, sa tâche, sa journée, son
année; supporter la grande chaleur, le grand froid, le vent,
la pluie, et en général les températures extrèmes. — L'on
- po pa témpour?, on ne saurait tenir contre ce froid, contre
cette chaleur. Pode pa lou témpouri, je ne puis le suppor-
ter; sé dit en parlant d’un fàcheux, d’un homme ennuyeux.
Dér. du lat. Temporis, gén. de Tempus, temps.
Témpouros, s. f. plur. Les saisons, mais surtout le
renouvellement de chaque saison, les Quatre-Temps ou
‘saisons de l'année qué l'Église consacre au jeûne et à
l'abstinence ; la saison des semailles ou autres opérations
principales de l'agriculture.
Dér. du lat. Tempora.
Tén, s. m. Temps, durée qui s'écoule d'une époque à
une autre plus ou moins éloignée; loisir; délai; terme;
saison propre à chaque chose; occasion; état, disposition
de l'atmosphère. — Sèn dou bèou tén, le beau temps est
arrivé. Prou tén et bèlo ouro, se dit de-celui qui néglige
ses affaires, qui croit toujours avoir le temps d'y songer,
de s’en occuper, et ne s'en occupe jamais.
Dér. du lat, Tempus, m. s.
Tén, téncho, adj. m. et f. Teint, teinte, qui a été
plongé dans un bain de teinture.
Dér. du lat. Tinctus, m. s.
Tèn, 3° pers. de l'ind. du verbe Téni ou Tène, tenir. Il ou
elle tient.
Dér. du lat. Tenere, tendre.
Ténal, s.”. Locution employée comme terme de com-
paraison : Maïgre coumo un ténal, sec comme un hareng,
maigre comme un cent de clous. Le mot Ténal dérive
peut-être de tenaille, outil qui rappelle vaguement, avec sa
tête et ses deux branches, les bonshommes naifs que les
enfants dessinent sur les murs.
Ténchura, v. Teindre, donner de la teinture à une
étoffe, passer une couleur à l'huile, au vernis ou à l'eau
sur une porte, une fenêtre, un meuble, une construction
en bois. — Aÿ ténchura ma porto, j'ai passé de la peinture
sur ma porte.
Dér. du lat. Tingere, m.s.
Ténchuriè, ténchurièiro, s. m. et f. Teinturier, celui
qui exerce le métier de teindre les étoffes.
Dér. du lat. Tinctor, m.s.
Ténchuro, s. f. Teinture, liqueur préparée pour teindre ;
TÉN 623
impression de couleur que cette liqueur laisse sur les
étoffes ; l'art du teinturier.
Dér. du lat. Tinctura, m. s.
Téndièiro, s. /. Amorçoir, tarière dont les charpentiers
se servent pour commencer un trou daus le bois.
Dér. de Tendre, diriger.
Téndi, s. m. Piège pour prendre les pelits oiseaux,
composé d'une pierre plate soulevée d'un côté de manière
à présenter une inclinaison d'environ 45°, et soutenue sur
un appui fragile composé de quatre büchettes disposées de
telle sorte que le moindre attouchement les détraque et
fait tomber la pierre sur l'oiseau. — Voy. Léco.
Téndios? s. f. plur. Terme de laboureur, Ce sont deux
verges ordinairement en fer qui passent à travers le sep
d'une charrue et le relient au mancheron.
Dér. du lat. Tenere, tendre.
Téndos, s. /. plur. — Téndos dâou col, les muscles, les
tendons du cou.
Téndroù, s. f. La tendreté d'une viande, d'une salade,
du pain, d’un comestible quelconque, qualité de ce qui est
tendre ou facile à couper; les châtaignes qui, après le
dépiquage, ne sont pas encore complètement desséchées. —
Y'a dé téndroù dince aquélo pisado, il y a des tendrons
dans cette quantité de châtaignes sèches soumises au dépi-
quage.
Tène, v. Tenir, être ferme; être lié, attaché, collé;
ressembler. — Tène pè, piéter; marcher avec quelqu'un
d'un pas égal, le suivre de près. Fasès mé tène ac, failes-
moi passer cela. Quan ténén ddou més? combien avons-
nous? quel est le quantième du mois? Tèn dé soun pèro,
il a les qualités ou les défauts de son père. Sé tèn bièn,
il s'habille avec goût.
Dér. du lat. Tenere, tendre.
Ténésou, s. f. Constance, fermeté, cohésion, solidité.
— Lou tèn n'a jés dé ténésoù, le temps est inconstant,
variable.
Dér. de Tène, tenir.
Téngudo, s. /. Lieu où l'on se tient habituellement;
maisons que l’on fréquente ordinairement; habitat, en
parlant des plantes; gîte, en parlant des animaux. — Avè
soun sas téngudos, c'est là qu'il se tient d'habitude.
Dér. de Tène, tenir.
Ténguëén-ténguén, locut. employée en Languedoc et
équivalente à donnant-donnant, tenant-tenant. Cette ex-
pression est très-employée parmi les enfants qui, en voulant
troquer une bagatelle contre une autre, se défient l'un de
l'autre et conviennent, en pronongçant cette locution, de se
nantir réciproquement, mais seulement à demi, de ce qu'ils
veulent échanger. J
Dér. de Tène, tenir. — Voy. C. M.
Téni, v. Tenir, avoir à la main ou entre les mains;
posséder; être lié, attaché; prendre, recevoir ; avoir hérité ;
proférer, tenir des propos; avoir de la ressemblance;
entretenir, accomplir, garder, effectuer. — Téni d'à-mén,
624 TÉR
surveiller, épier, M'ou tène dé di ou pér di, je me le tiens
pour dit. Ce mot s'emploie d’ailleurs dans le mème sens
que Tène, dont il est un équivalent.
Dér. du lat. Tenere, tendre, à cause de l’état de tension où
sont les muscles de la main quand on tient quelque chose.
Ténquo, s. m. Coup, brèche. — À réçaupégu uno
ténquo, cet objet est écorné, fendu, il a reçu une brèche.
Ténta, v. Tendre des toiles sur le devant des maisons
ou au-dessus des rues pendant les grandes chaleurs de l'été
pour se garantir des rayons du soleil. Dans certains pays,
et notamment à Avignon, on tend des toiles au-dessus des
rues où passent les processions de la Fête-Dieu.
Dér. du lat. Zenere, tendre.
Ténto, s. f. Tente, pavillon militaire, abri de toile sous
lequel on campe; banne, toile que l’on tend pour se mettre
à l'abri de la pluie et du soleil.
Dér. du lat. Tentorium.
Téouiè, s. m. Tuilier, ouvrier qui fabrique des tuiles
avec de l'argile cuite.
Dér. du lat. Tegularius, m.Ss.
Téouièiro, s. f. Tuilerie, fabrique de tuiles; briqueterie,
usine où l'on fabrique et où l’on cuit des briques d'argile.
Dér. du lat. Tegularium, m. s.
Téoulado, s. f. Toiture faite avec de la tuile et, par
extension, une toiture en général.
Dér. de Téoule, tuile.
Téoule, s. m. Tuile, sorte de plaque en argile cuite et
ordina rement cintrée, qui sert à couvrir les maisons, à
construire des toitures; une visière de casquette. — Faïre
lou téoule, avoir l'air malade ou déconfit.
Dér. du lat. Tegula, de Tegere, couvrir.
Téoule-vis, s. 7. comp. — Téoulado à téoule-vis, toiture
à tuile découverte, sans doublure de planches ou de briques
plates,
Téoulisso, s. f. Toiture de maison construite avec de la
tuile. On dit aussi Téoulado et Couvèr. — Voy. ©. m.
Dér, de Téoule, tuile.
Tèoune, tèouno, adj. m. et f. Mince, aminci, grèle,
frèle, terne, pâle, sans couleur.
Dér. du lat, Tenuis.
Térado, s. f. Champ, plantation, pièce de terre semée
ou complantée d’une même espèce d'arbres ou de plantes.
— Uno térado dé bla, un champ de blé. Uno térado dé
trufos, un champ de pommes de terre. Uno térado d'amouriès.
une terre plantée de müriers.
Dér. de Tèro, terre.
Téragnas, s. m. Rocher pourri ou pierre morte; roche
qui s’effrite et se décompose à l’air, qui se réduit en pous-
sière ou en écailles; terrain inculte, rocailleux et couvert
de broussailles.
Dér. de Tèro, terre.
Téraïè, s. m. Potier de terre, faïencier, revendeur
d'ouvrages en poterie, en faïence, en porcelaine.
Dér. de Tèro, terre.
TR
Téraïo, s. f. Poterie, vases en terre cuite, ustensiles de
cuisine en terre cuite, vaisselle en poterie. La poterie de
Saint-Quentin, près d'Uzès, est très-usitée dans les environs
d’Alais. Cette poterie est commune, mais solide et légère.
— Lava la téraïo, laver la vaisselle.
Dér. de Tèro, terre.
Téraïre, s. m. Territoire; l’ensemble du territoire d’une
commune; surface de pays dépendant d’une mème juri-
diction. — Téraïre loubdou, portion de terroir alternati-
vement formé de rochers et de terre végétale, présentant
des veines et des cavités. — Téraïre bravén, sorte de
terrain lacustre, ancien fond d’étang.
Dér. de Tèro, terre.
Téralado, s. f. Terreau, terre neuve, limon transporté
sur une terre maigre pour l’engraisser; terreau, humus
des forêts et des bois, fumier réduit en poudre noirâtre
que l'on emploie pour cultiver des plantes délicates ou
rares.
Dér. de Tèro, terre.
Térassiè, s. m. Terrassier, ouvrier terrassier, ouvrier
que l’on emploie dans les travaux de terrassement, surtout
dans la construction des routes. Se dit, par extension, d’un
homme qui cherche à agrandir son champ aux dépens de
ses voisins par des empiètements successifs.
Dér. de Téro, terre.
Téré, s. m. Sorte de raisin bon à manger que l'on
cultive dans le Languedoc. Il y en a de plusieurs espèces :
le téré proprement dit d'un rouge brun; le téré-bôuré,
rouge pâle et blanchâtre; le téré-éscalan, dont les grains
sont très-Jâches et très-espacés.
Téréja, v. Remuer, gratter la terre, comme font les
enfants en se jouant par terre ou sur un tas de sable.
Dér. de Tèro, terre.
Térino, s. f. Terrine, vase en terre évasé servant à la
cuisine. Ce mot s'emploie surtout pour désigner un bassin
de garde-robe ou de chaise-percée ; un bassin de malade,
plat, évasé, que l’on fait glisser dans un lit, sous le malade.
Tèrme, s. m. Terme, borne, limite d'an champ, d'un
territoire, d’un domaine. — Planta tèrme, procéder à un
bornage, à une délimitation de propriétés contiguës.
Dér. du lat. Termen, terme.
Tèrméja, v. Aborner un champ, y planter des bornes.
Dér. de Tèrme, terme.
Tèro (Faïre), loc. adv. Succomber à une grande douleur.
— Né fara tèro, il en mourra de chagrin.
Tèro-bravénquo, s. f. comp. Terre forte et argileuse
des terrains lacustres.
Tèro-labourivo, s. f. comp. Terre labourable, propre à
être labourée, à recevoir la semence.
Tèro-loubâou, s. f. comp. Terrain rocailleux, mélangé
de terre végétale.
Térous, ouso, adj. m. et f. Terreux, euse; mélangé ou
souillé de terre.
Dér. de Tèro, terre.
TÈS
Térubin, s. m. Toupie de grosse dimension. On dit
aussi Turbin.
Tès, s. m. Tèt; morceau de poterie cassée; fragment
d'an pot cassé, d'une faïence, d'un verre, — Aquél fricd
sén lou tès, ce ragoût à l'odeur de poterie brülée. Il existe
près de Rome une colline assez élevée appelée Monte-
Testaccio, entièrement formée par des débris de poterie
cassée et dont l'origine n’est point encore expliquée.
Dér. du lat. Testa, vase de terre cuite.
Téscoù, s. m. Le coin de la charrue qui assujétit le
mancheron à la queue du soc et dont l'enlèvement suffit
pour démonter la charrue.
Téso, s. f. La gomme, la sève qui découle des arbres
résineux,
Téstari, s. m. Tètu, entèté, opiniâtre.
Dér. de Tèsto, tète.
Téstéto, s. f. Petite tête, tête d'agneau, de chevreau.
— Aï més uno téstéto, j'ai mis à cuire une tête d'agneau.
Dim. de Tèsto, tête.
Téstièiro, s. f. Chevet d'un lit: le chatourné d’un lit;
pièces qui font partie d’un bois de lit du côté du chevet;
têtière, portion de la bride qui passe sur la tête du cheval.
Dér. de Tèsto, tête.
Tèsto, s. f. Tète, portion du corps de l’homme ou de
l'animal qui contient le cerveau, les organes de la vue, de
l'ouïe, du goût et de l'odorat. — És un home dé tèsto,
c'est un hommeintelligent. Faï coumo lous aïés, travaio dé
tèsto, c'est un homme qui réfléchit continuellement. Grosso
tèsto pdou dé sén, celui qui a une grosse tête a souvent peu
de bou sens. Parla dé tèsto, être dans le délire. Tèsto dé
fol n'a jamaï blanqui, tète de fou n'a jamais blanchi.
Aquél éfan a bono tèsto, cet enfant est intelligent, il a de
la mémoire, il apprend facilement. Tèsto d'aïé, une tèle
d'ail, l'ensemble des gousses qui la composent. Tèsto d'ase,
têtard, larve de la grenouille. Tèsto duro, intelligence
lente; conception difficile, celui qui possède ces défauts.
Tèsto/séquo, étourdi, évaporé, qui ne sait pas se conduire.
Tèsto-flou, jeu de pile ou face. Contraction de l'expression
Tèsto ou flou, tête ou fleur, parce que jadis les pièces de
monnaie françaises présentaient, d'un côté l'effigie du
souverain et de l'autre l'écu fleurdelisé aux armes de
France.
Dér. du lat. Tésta, employé dans le sens de crâne.
Téstoù, s. m. Teston, ancienne monnaie de France
ainsi nommée parce qu'elle portait sur l’avers l'effigie du
roi régnant. Les premiers testons furent frappés sous
Louis XII; ils valaient d'abord dix sous, leur valeur
s'éleva jusqu'à vingt-quatre sous.
Téstoulo, s. f. Morceau de tuile cassée, débris de tuile
ou de brique.
Dér. de Tès, tèt.
Tèstu, s.-m. Gros marteau de maçon employé dans
les démolitions de maçonneries, et servant à dégrossir ou
briser les moëllons bruts. Ce marteau est pointu d'un côté.
TIA
Téstudo (Piolo), s. f. Hache à talon où à marteau.
Tèt, s. m. Toit, toiture, couverture de maison.
Dér. du lat, Tectum, m. sign.
Téta, v. Têter, se dit d'un enfant à la nourrice, —
Éncaro této, il n'est point encore sevré. Avédre lou téta dous,
être persuasif, avoir la langue dorée. Téta se dit aussi dans
le jeu de boules pour indiquer que la boule touche le but.
Dér. du celt. Tetar, ou du grec Tdi, mamelle.
Tétaire, s. m. Rejetons, branches gourmandes des
arbres; un enfant qui demande souvent à têter, un rude
tèteur.
Tétarèl, s. m. Le hochet ou suçoir des petits enfants.
On appelle aussi Tétarèl vu tétarèlo, celui ou celle qui
fait métier de têter les femmes que le lait incommode.
Tétin, s. m. Le sein d’une femme, le pis d'une vache,
d'une chèvre, d'une brebis.
Dér. du grec Txü, mamelle.
Tétinardo, s. f. Une grosse femme aux fortes mamelles,
et par ironie une grosse commère, une grosse maritorne.
Dér. de Tétin, sein.
Tétino, s. f. Le pis des animaux eten particulier d'une
chèvre, d'une vache, d’une brebis qui portent du lait.
Dér, de Tétin. — Voy. ©. m.
Této, s. [. Châtaigne bouillie, marron bouilli que l'on
mange comme en têtant; on l'appelle aussi Céoudéto, —
És fla coumo uno této, il est mou comme un linge mouillé.
Té crèbe coumo uno této, je te crève comme une vessie,
une outre.
Této-lèbre, s. ». Nom vulgaire du Lychnis syluestris
alba simplez, ou Compagnon blanc. — Voy. Cédoulichoù.
Ti, s. m. Mouvement convalsif et involontaire de
quelque muscle; geste singulier et non justifié que l'on
fait par habitude et sans raison; tie, grimace habituelle;
caprice, passion ; maladie ou mauvaise habitude du cheval
qui le porte à mordre sa mangeoire ou à frapper dessus
avec la tête. — Préne lou ti, s'entèter. Préne à ti, prendre
en grippe. Aquè és soun ti, c'est son habitude, sa manie,
son caprice, son défaut. À lou ti dé béoure, il a la manie
de boire.
Tia, o. Tuer, ôter la vie d'une manière violente;
détruire, fatiguer à l'excès, éprouver un violent chagrin.
— La barbasto a tia lous amouriès, la gelée blanche a
brûlé la feuille. Aquél chagrin mé tuïo, ce chagrin me tue.
Dér. du grec 6$w, immoler, tuer.
Tiadoù, s. m. Tuerie, abattoir, lieu où les bouchers
tuent les animaux de boucherie.
Dér. de Tia, tuer.
Tiadouiro, s. /. Tuerie, massacre, carnage, boucherie:
coupe-gorge; endroit dangereux, escarpé, difficile à fran-
chir, où l’on court risque de la vie.
Dér. de Tia, tuer.
Tiaire, s. m, Tueur de cochons, égorgeur, garçon
boucher.
Dér. de Tia, tuer.
62%
626 TIM
Tiba, v. Tendre ou étendre en tirant. On dit aussi Tibla.
— Tiba uno cordo, tendre une corde. Sé tiba, se serrer la
taille. És tiba, au fig. il est ivre. On suppose que ce mot
vient du celtique.
Tibage, s. m». Une mangeaille. — Avèn fa un tibage,
nous avons fait un repas homérique. — Voy. Couflage et
Ramplimén.
Dér. de Tiba, tendre.
Tiblado, s. f. Une truellée. Au fig. une grande cuillerée
de potage.
Dér. de Tiblo, truelle.
Tiblassado, s./. Augm. de Tiblado. Une grosse truellée de
mortier, de plâtre, etc., au fig. une grande cuillerée de potage.
Dér. de Tiblo, truelle.
Tiblo, s. f. Truelle, outil de maçon qui sert à prendre
le mortier, à l'étendre; il sert aussi à gâcher le plâtre, à
le délayer et à polir les enduits.
Dér. du lat. Trulla, plat, écuelle.
Ticun, s. m. Personne capricieuse, qui a contracté une
habitude, un tic, une manie. — Acd’s un ticun, c'est un
maniaque.
Tièiro, s. f. File, rangée, rang, ordre, suite ; une allée
d'arbres; un rang de pieux, de ceps de vigne, de choux.
Tico-taco, s. m. Tic-tac, terme servant à exprimer le
battement du cœur. — Sour cur à fasiè tico-taco, son cœur
battait avec force.
Tifo-tafo, Bagarre, dispute, émeute, échaffourrée,
tapage. — Y-doura quéouco tifo-tafo, il y aura du grabuge.
Tignassiè, ièiro, s. m. et f. Celui ou celle qui a une
chevelure épaisse, rude et inculte. — Tignassiè téstu,
homme à la tête ébouriffée, mal peignée, hirsute, et dont
l'entêtement n’est pas moindre.
Tignasso, s. f. Teignasse el non tignasse d’après l’abbé
de Sauvaces; chevelure mal peignée, vieille perruque. —
Tignasso dé candi, une perruque de chiendent, une che-
velure d’un blond fade. Tignasso, dit SAUVAGES, est cor-
rompu du fr. teignasse dérivé à son tour de teigne, maladie
de la tête qui provoque la chüte des cheveux, dont la
perruque dissimule l'absence. C'est pour obvier aux con-
séquences de cette maladie que la perruque a été sans
doute inventée, et les teigneux avaient, plus que personne,
le plus grand intérêt à l’adopter.
Dér. de Tigno, teigne.
Tignos, s. f. Les engelures qui surviennent aux pieds
et aux mains; tumeur phlegmoneuse, accompagnée de
démangeaisons et occasionnée par le froid. On dit aussi
Cidoulos. — Voy. ©. m.
Timbourlo, s. f. Sonnette de bélier qui rend un bruit
sourd et que l’on suspend au cou des chefs du troupeau.
Timbra, v. Tendre fortement. Se dit d’une corde à
boyau de violon, de guitare, de harpe et de tambour. —
Timbra un tambour, tendre la double corde à boyau placée
sous la peau inférieure d’un tambour et que l'on serre avec
une vis à écrou pour précipiter ses vibrations.
TIO
Timbra, ado, adj. m. et f. Tendu, tendue. — Tiro
aquélo cordo et faï la bièn timbra, tire cette corde et tends-
la bien.
Dér. du v. Timbra.
Timbre, s. »m. Timbre, marque imprimée ; petite cloche
dépourvue de battant et que l’on frappe avec un marteau.
On l'a appliqué aux horloges, aux pendules, aux portes
d'entrée dés maisons pour remplacer le marteau.
Timo, s. m. Timon, longue pièce de bois qui sort de
l'avant-train d'une voiture ou d’un chariot et à laquelle
on attelle les chevaux; gouvernail d’un vaisseau, d’un
bâteau, qui sert à le diriger.
Dér. du lat. Temo, onis, flèche de char, appareil qui
sert à le conduire, à le trainer.
Timou, s. f. Tumeur, tuméfaction, soulèvement de la
peau ou de la surface d’un organe, produit soit par un
corps étranger qui cherche à pénétrer au dehors, soit par
un amas plus ou moins profond de liquide, soit enfin par
un développement de tissus organisés.
Timouniè, s. m. Cheval attelé au brancard d’une
charrette.
Tinado, s. f. Une cuvée; plein une cuve; ce que l'on
fait à la fois de vin dans une cuve ; une cuvée de linge
lessivé. .
Dér. du grec Tiv06s, cavité, chaudron.
Tinâou, s. m. Cuve vinaire; cuveau en maçonnerie ou
en bois où l'on met à fermenter le raisin préalablement
foulé sur un plancher supérieur.
Étym. du mot précédent,
Tino, s. f. Cuve en bois servant à lessiver le linge:
fosse où les tanneurs font macérer les peaux dans la
chaux détrempée, pour les épiler.
Étym. des deux mots précédents.
Tintamarado, s. f. Tintamarre, bruit insolite et intense ;
vacarme, bruit désordonné et confus.
Dér. de Tinta, frapper, tinter, et de Marro, sorte de
bêche ou de houe qui sert à bècher la terre et sur laquelle
les paysans frappent pour marquer l'heure des repas et en
donner le signal à leurs compagnons.
Tin-tin! interj. Onomatopée traduisant le son des
pièces d'argent. — Té pagaraï tin-tin! je te payerai
comptant, argent sonnant. Cette locution désigne aussi
le son d’une petite cloche. La campano a fa tin-tin, la
cloche a sonné, a tinté. Lou tin-tin dé la campano, le
tintement de la cloche. Dans ce dernier cas l'expression
tin-tin est employée substantivement.
Tiou, tiouno, pr. poss. m. et [. de la 2€ pers. du sing.
Tien, tienne; qui est à toi, qui t'appartient. — Aqud és
tiou, cela est à toi.
Dér. du lat. Tuus, dér. du grec Teés, m. sign.
Tioune, pr. poss. seconde forme de Tiou, dont la signi-
fication est la même et dont le féminin est aussi tiouno.
Nous devons faire remarquer toutefois que Tioune s'em-
ploie plus souvent substantivement pour le tien, ton bien,
-
|
|
|
TIR
ton avoir, ce que tu possèdes. — Siés din lou tioune, tu
es établi dans ton bien, dans ton héritage, sur tes do-
maines.
Mème étymologie que le mot précédent.
Tira, v. Tirer, amener vers soi, dans le sens où l’on
marche; dévider la soie du cocon; tirer ou puiser de l'eau
dans un puits, dans un réservoir; tirer un coup de fusil.
— Tira d'aïgo, puiser de l'eau. Au fig. Tira d'aïgo, signifie
être mal dans ses affaires, être réduit aux expédients.
Faire tira soun pourtrè, se faire peindre. Tira dé la,
traire une vache, une chèvre, etc. Tira un cù dé fusil,
tirer, décharger un coup de fusil. Quan tiro vosto rou-
mano? combien pèse votre balance romaine? quelle est sa
portée? Tira un plan, lever un plan ; tromper quelqu'un
© par de faux récits; lui donner Je change sur les véritables
intentions que l'on a. Tira dré, aller droit devant soi,
suivre le droit chemin. Tira d'argén, retirer, toucher de
l'argent. Un émplastre qué tiro, un emplâtre qui provoque
la suppuration. Tiro, se dit au jeu de boules quand un
joueur lance la sienne contre Je but ou contre celle de
‘son adversaire, pour la chasser. Tira péno ou plutôt
Traïre-péno, ètre en souci sur le comple de quelqu'un,
sur le dénouement d’une affaire. Tiro dé soun paire, il
ressemble à son père, il a ses manies, ses qualités, ses
défauts. Tiro-té d'aqui, retire-toi de là ou tire-toi de là
comme tu le pourras. Faire tira sous papiès, faire expé-
dier, transcrire un extrait d'un acte de naissance, de
mariage, de décès, ou tout autre document particulier.
Tira, v. Oter, enlever, arracher, retirer, — Y-an tira
dé san, on l’a saigné. Tiro-mé ‘quélo éspigno, dte-moi,
arrache-moi celte épine.
Dér. de l'ital. Tirare, ou de l'espagnol Tirar, par
corrupt. du lat. Trahere.
Tira (Sé), v. réfl. Se tirer, se dégager, se délivrer,
échapper. — M'én souï tira d'uno bélo! je l'ai échappée
belle! je me suis tiré d'un fier embarras! Sé tira d’én
dé souto, se tirer de dessous. Lous èrs sé tirou, il y a un
courant d'air. Sé n’és tira las braïos nétos, il s'en est tiré
sain et sauf,
Tiradis, isso, adj. m. et f. Qui est souvent tiré, qui se
renouvelle souvent. Aïgo tiradisso, pous tiradis, fontaine,
source, puits dont l’eau est souvent puisée.
Dér. de Tira.
Tiradoù, s. m. Tiroir, sorte de boîte carrée enchassée
dans une table, une armoire, une commode, et qu'on
ouvre à volonté en la tirant à soi.
Dér. de Tira, tirer.
Tiradoù, s. m. Atelier de filage de soie, où on la dévide
sur le cocon, et dans lequel sont établis plusieurs tours à
tirer ou à filer. — Voy. Tiraje. }
Tiraïro, s. f. Tireuse ou fileuse de soie; l'ouvrière qui
la dévide sur le cocon, au moyen de l’eau chaude. On
disait aussi jadis Tiraïre, pour désigner les ouvriers mâles
employés à ce dévidage ; mais depuis de longues années, le .
TIR 627
dévidage des cocons est exclusivement réservé aux femmes
dans la région alaisienne,
Tiraje, s. m. Filature: atelier où l'on tire la soie du
cocon ea le plongeant dans l'eau chaude. On appelle aussi
l'atelier où l'on tire la soie, tiradoù; celui où on la
mouline, mouli dé sédo.
Tirassa, v. Trainer; trainer après soi, trainer par terre:
au fig. dire à quelqu'un des paroles méprisantes.
Dér. du lat, Trahere ou du grec Tivésow, mouvoir,
agiter, secouer.
Tirassa (Sé), Se trainer, languir, se trainer par terre,
dans la saleté. — Sé po pas tirassa, il ne peut pas se
trainer.
Tirasso, s. f. Tirasse ou trainasse, filet aussi large que
long qui sert à prendre les oiseaux; herse, trainoïre ou
traineau dont on se sert dans certaines fermes pour trainer
du fumier, des pierres, etc., sur un terrain où les voitures
ne peuvent passer.
Tirlan, s. m. (henapan.
Tirliatéïino, s. f. Tiretaine, sorte d'étoffe dont la chaine
est de fil et la trame de laine. Ce nom, qui s'applique à
une étoffe fragile, s'emploie au fig. pour déprécier une chose.
— Aquè ‘s pas qué dé tirlintèino, se dit d’une chose de
mauvaise qualité, et mème d'un homme de peu de valeur
au point de vue dé l'honorabilité.
SaUvAGEs pense que la tiretaine a pris son nom de la
ville de Tyr où on l'aurait fabriquée dans l'antiquité; mais
cette étymologie ne nous parait devoir être acceptée qu'avec
la plus grande réserve.
Tiro, s. m. Diflérend, débat, contestation sur le prix, la
valeur d’un objet; écart dans deux évaluations. distinetes
d'une denrée, d'une marchandise. — Sèn dé tiro dé trés
frans, nous sommes en discord de trois francs. Dé quan
sès dé tiro? De combien différez-vous dans vos appréciations,
pour la conclusion de votre marché? Sèn dé tiro dé quicon,
nous sommes en discord d’une faible différence. Soun pas
dé tiro qué dé l'amitiè, ils n'ont aucune sympathie l’un
pour l’autre,
Tiro-lancè ou Tirlancè, s. m. Bilboquet; amusette
pour tuer le temps, amuser les enfants, leur faire prendre
patience; pour aider les personnes désœuvrées à tuer le
temps dont elles ne connaissent ni le prix ni l'emploi.
Tiro-larigo (A), adv. En français à tirelarigot. A foi-
son, en abondance, à profusion, avec excès. Expression émi-
nemment rabelaisienne, fréquemment employée par l'auteur
dé Gargantua et de Pantagruel. — Manjèn et béguèn à
tiro-larigù, nous mangeâmes et nous bümes à tirelarigot,
à profusion, à ventre déboutonné. On diL aussi vulg. en fr. :
à bouche que veux-tu.
Tirolo, s. f. Poulie, appareil mécanique composé d’une
chape qui soutient le rouet, au moyen d'un boulon de fer.
Le rouet tourne sur cet axe, et reçoit dans la gorge creusée
sur sa tranche la corde qui se déroule dans la gorge et à
laquelle sont suspendus les fardeaux que l'on veut élever
628 TOQ
ou descendre. Les doubles poulies destinées à soulever de :
lourds fardeaux sont appelées moufles. On dit aussi Poulèjo
et Carèlo. — Voy. c. m.
Tiro-longo, s. f. Délai, retard. — Aqud fui uno grando
tiro-longo, cela éprouve bien des retards, cela traine fort
eu longueur. On donne aussi ce nom à une ruelle étroite
et longue telle que la ruelle d'Alais qui s'ouvre entre le
Palais de justice et le couvent des Dames-Blanches et se
prolonge sur une grande étendue, à travers les jardins du
Plan-d'Alais, dans la direction du couchant au levant.
Tiro-pèou, s. ». Tiraillement des cheveux; l’action de
tirer les cheveux à quelqu'un. — Crégne lou tiro-pèou, j'ai
les cheveux très-sensibles, je souffre quand on me les tire.
— Jouga à tiro-pèou, se prendre aux cheveux pour se
disputer quelque chose qu'on a jeté à terre, comme
lorsqu'on jette des dragées ou de l'argent à une troupe de
polissons.
On appelle aussi Tiro-pèous, les têtes de bardane, Zappa
major et minor, plante à larges feuilles qui croît au bord
des chemins, dans les décombres, autour des habitations, et
dont les capitules portent un involucre à folioles imbriquées
dont les extérieures, terminées en pointe aiguë et recourbée
en hameçon, s’accrochent aux cheveux avec une grande
ténacité.
Tiros, s. m. pl. Les tirants de la viande de boucherie,
les aponévroses et les tendons blancs, flexibles et difficiles
à couper par un effort de tension.
Dér. de Tira, tirer.
Tisoù, s. m. Tisonnier, instrument de forgeron qui sert
à attiser le feu et qu'il ne faut pas traduire par Tison.
Tisso (Én), s. f. Manie, habitude, tic, forte envie. —
Préne én tisso, prendre en grippe, en aversion; avoir une
dent contre quelqu'un.
Togno, s. f. Femme difforme, stupide, grossière.
Tombo-lèvo, s.m. comp. Chance alternativement bonne
ou mauvaise, qui submerge ou remet à flot. Se dit d’un
homine qui après avoir été à deux doigts de sa perte, se
relève et remonte sur sa bête.
On donne ce nom en Provence à un filet que l’on plonge
dans le Rhône et que l'on relève à volonté au moyen d’un
jeu de bascule ingénieusement combiné.
Tompo, s. f. Bassin, réservoir; a la même signification
que Toumplino, bassin, réservoir, en provençal, dérivé
lui-même de Toumple, gouffre, abime.
Tonquo, tounquarèlo, s. f. Sotte, stupide, grossière,
correspondant à Togno (Voy. ©. m.), qui devrait plutôt
s’écrire Tonio, forme vulgaire du nom d’Antoinette et fém.
de Tôni, Antoine.
Toquo, s. f. La touche ou le but, au jeu de mail.
Pierre que la boule doit toucher ou approcher Je plus près
pour gagner la partie; büchette dont les enfants se ser-
vaient jadis pour toucher les lettres qu'ils épelaient sur
l'abécédaire. — És à la toquo, il en est à la croix de par
Dieu. IL s'emploie aussi dans le sens d'époque : Sé cou-
TOU
nouïssou dé longo toquo, ils se connaissent de longue date,
depuis longtemps. Sèn toquo-toquo, nous sommes côte à côte,
à côté l’un de l’autre; nous sommes voisins.
Toquo, v. Il touche; 3me pers. du présent de l'indicatif
du verbe Touqua, toucher. — Toquo-lou! touche-le!
frappe-le! ne le manque pas!
Tord, torso, adj. Tordu, tordue. — Dé fiou tord, dé
lano torso, du fil tordu, de la laine tordue.
Toro, s. f. Chenille; on donne aussi ce nom à l'aconit,
au cormier des oiseleurs, à la chrysomèle de l’osier franc;
mais surtout aux plantes et aux insectes dans lesquels on
soupçonne une qualité malfaisante.
Torou, s. m. Un tronçon, une tranche d'an bois cylin-
drique; un rondin; une grosse pièce en bois de grume,
ronde et entière.
Le mot Touradouiro, qui désigne une scie à deux mains,
employée à débiter le bois ou la pierre de taille, dérive de
Torou.
Tosse, ». Tordre, donner le tords au fil, à la soie, à la
laine ; câbler de la corde, de la ficelle, un lien d'osier. —
Sé po pas tosse, il ne peut ni se tourner, ni se baisser. —
Tosse uno amarino, tordre un lien d'osier. Y-a pas rés à
tosse, il n’y a rien à prendre, rien à gratter, rien à
manger.
Toto, tototo, s. m. et f. Petit enfant, bambin, bébé.
Dim. de Pichà, pichoto, Pichouté.
Tou, s. m. Un égoût, un cloaque. On dil aussi Towat
ou Grun.
Tout, adv. Tout. — N'én vèn dé pértout, il en vient de
toutes parts. Dé pértout est un italianisme; c’est le da
per tutto des Italiens.
Tout, touto, s. indéf. m. et f. Tout. — N'és pas lou
tout, ce n'est pas le tout. Mé n'a di dé las toutos, il n’est
pas d'injures qu'il ne m’ait adressées.
Dér. du lat. Totum.
Tout, touto, adj. m. et f. Tout, toute.
Dér. du lat. Totus, tota, m. sign.
Toul! inferj. Onomatopée employée dans le jeu de
cligne-musette, pour indiquer que le jeu est fait, que l'on
est caché. Oui, c’est fait!
Touchi, s. m. Tuchin, touchin ou coquin. Nom qui fut
donné à des troupes de paysans des environs de Nimes,
qui, excédés du poids des impôts qu'ils supportaïent
presque seuls, prirent les armes et commirent toutes sortes
de pilleries dans les maisons des riches. Cette qualification,
Touchà dé Bénobre, est restée appliquée aux habitants de
Vézénobres, que l’on accusait d’avoir reçu chez eux ces
révoltés et favorisé leurs pillages. — Touchinariè, coqui-
nerie. Touchinat, rebellion. ,
Toucho, s. jf. Tournure, allures grotesques. Emprunté
à l’argot parisien. C’est quelque chose de plus que binette.
Toucho se dit des dehors d’un personnage, considérés dans
leur ensemble. Quelle bonne touche! s'écrie-t-on à l'aspect
d’un grotesque. Ce terme a dù naître dans les ateliers
ET ——
TOU
de peinture, dit M. Lorédan Larchey (Excentricités du
langage français).
Toufo, s. . Mouffette, exhalaison pernicieuse qui se
développe dans les mines, dans les souterrains profonds où
l'air ne circule pas.
En terme de magnanerie, c'est une chaleur concentrée,
une vapeur suffocante, un coup de chaleur forte et subite
qui survient dans les appartements où l’on élève les vers à
soie. Cette influence relâche les fibres des vers à soie, les
rend languissants et les tue, si l’on n'y apporte un prompt
remède. C'est une sorte d'asphyxie.
Dér. du grec Tüpos, fumée, stupeur.
Tougnas, asso, s. m. et f. Péjoralif de Toni et de
Togno. Sobriquet donné à un homme, à une femme. Gros
* Antoine, gros benêt, gros pataud, gros imbécile, gros
joufilu, paysan lourd et grossier, gros nigaud.
Touïâou, touiàäoudo, s. m. et f. Surnom donné à un
gros joufflu, un gros poupard, un gros plein-de-soupe. On
dit aussi Moutifldou.
L'augmentatif Touidoudasso s'applique aussi à une grosse
* femme joufflue, une grosse maman.
Touisso ou Bouissounado, s. /. On donne ce nom aux
buissons ou haies vives qui entourent un champ sous
forme de clôture.
Dér. du grec Toïyos, mur, rempart.
Toulipo, s. f. Tulipe.
Toumba, vw. Tomber, chûter; démolir, renverser,
abattre; être entrainé de haut en bas par son propre poids.
Ce verbe, neutre en français, est le plus souvent actif en
languedocien, ce qui occasionne pour les habitants du
Midi une foule d'erreurs grammaticales. — Mé sièï
toumba, je suis tombé. Aï manca mé toumba, j'ai failli
tomber. Toumba un oustéou, abattre une maison, M'a
toumba, il m'a renversé, La tdoulo tombo, il n'y a pas de
pain sur la table. Auès toumba quicon, Vous avez laissé
tomber quelque chose. Mé toumbaraï, té toumbaras, je
tomberai, tu tomberas. Toumba dé soun lon, tomber à
plat. Acd's toumba én prouvèrbi, cela est passé en proverbe.
Acù toumbè pas dou séou, cela ne tomba pas à terre, ne fut
pas oublié. Las mans mé tombou, je ne me sens pas les mains
du froid qu'il fait; j'ai l'onglée. Touwmban lou cas, le cas
échéant. Pode pas y toumba, je ne puis y réussir, le moyen
m'échappe. Towmba dé vi, dé bouïoun, répandre du vin, du
bouillon. Toumban-lévan, à grand'peine, cahin-caha, tant
bien que mal.
Dér. de Toumbo, c.-à-d. aller dans la tombe, en bas.
Toumbado, s. f. Vogue, aflluence. —- Aguélo boutigo,
aquélo doubèrjo a uno forto toumbado, il y a grande
affluence de clients. dans ce magasin, dans cette auberge;
tout le monde y afflue.
Dér. de Toumba, tomber.
Toumbaduro, s. f. Chûte; effets, conséquences, bles-
sures, contusions, produits par une chûte.
Dér. de Toumba, tomber.
TOU 629
Toumbaïre, s. m. Langueyeur de pofes, ainsi désigné
parce qu'il abat ces animaux pour examiner s'ils sont
atteints de la lèpre.
Dér. de Toumba, tomber.
Toumbarèl, s.m". Tombereau, sorte de charrette servant
ordinairement à transporter des matières terreuses ou pier-
reuses et que l’on décharge en lui imprimant un mouve-
ment de bascule en arrière.
Dér. de Toumba, tomber.
Toumbaréla ou Toumbarélado, s. m. ou f. Charge
d'un tombereau, plein un tombereau. — Un toumbaréla dé
sablo, plein un tombereau de sable.
Dér. de Toumbarèl, tombereau.
Toumbo, s. /. Un caveau mortuaire, une tombe ma-
çonnée, et non pas une simple fosse, que l'on appelle un
Cros.
Dér. du lat. Tumba, m. 8.
Toumo, s. f. Fromage mou, fraichement caillé, une
jonchée. — Blan coumo uno toumo, päle comme un fro-
mage frais.
Toumple, s. m». Gouffre, abime, endroit profond d'une
rivière ou d’une vallée. On trouve dans la commune de
Concoules, sur une partie profonde de la rivière de
l’Amalet ou Homolet, un hameau de deux ou trois mai-
sons qu'on appelle Lou Toumple,
Toun, s. m. Ton, le son de la voix, la note musicale;
air, manières. — As manqua lou toun, tu n'as pas saisi
l'air de ce chant. Aviè un toun dé créséngo, il avait un air
de fierté. Lou toun faï La cansoun, le ton fait la chanson.
Dér. du lat. Tonus, m. s.
Toun, adj. poss. m. dont le fém. est Ta. Au plur.
Tous, Tas. — Toun chi, La pardoulo, tous amis, tas tèros,
ton chien, ta parole, tes amis, tes propriélés. Coumo fas
toun fièr! comme tu es fier !
Dér. du lat. T'uus, tua.
Tounaïè, s. m. Tonnelier, fabricant de tonneaux, de
foudres, de cuves vinaires en bois.
Dér. de Tounèl, tonneau.
Toundar, s. m. Mouton nouvellement tondu très-ras.
Dér. de Toundre, tondre.
Toundéire, s. m. Tondeur, celui dont le métier est de
tondre les moutons, les chevaux, les chiens.
Dér. de Toundre, tondre.
Toundésoù, s. f. La tonte des troupeaux, l'époque où a
lieu celte opération, l'action de tondre les animaux.
Dér. de Toundre, tondre.
Toundrâou, s. m. Sot, nigaud, niais, crédule; qui se
laisse mystifier, gruger, tondre sans résistance.
Dér. de Toundre, tondre.
Toundre, v. Tondre les bêtes à laines, les chevaux;
couper les cheveux ras. — T'an toundu, on t'a coupé les
cheveux très-court. Acd's toundu, voilà une affaire réglée.
Sé laïssa toundre, se laisser gruger, se laisser voler. Faliè
véni quan toundian, dourias agu dé lano, se dit prover-
s0
630 TOU
bialement à celui qui n'arrive pas à temps pour profiter
d'une bonne occasion.
Dér. du lat. Tondere, m. s.
Toundre! interj. Adoucissement apporté parmi le
peuple à un juron plus accentué, dont il existe diverses
variantes et notamment le mot Foundre! qui se rapproche
davantage du type original. Cette interjection est surtout
employée par les femmes, et n'indique pas, chez celui ou
celle qui la prononce, un degré de colère ou d’impatience
bien caractérisé.
Toundu, do, adj. m. et f. Tondu, tondue; qui a les
cheveux coupés ras. Au fig. celui qui est volé, grugé,
mystifé.
Dér. de Toundu, tondu, à cause de son aspect lisse.
Toundudo, s. f. Petit pain de millet noir ou sarrazin,
ou de maïs, pesant et indigeste, cuit dans l'eau bouillante.
Dans quelques parties du Gard, le petit pain de maïs porte
le nom de Mäas et dans les pays du nord celui de Gaude.
Dér. de Toundre, tondre.
Toupé, s. #. Toupet, touffe de cheveux placée au-dessus
du front. Au fig. effronterie, audace, outrecuidance, im-
pudence, — Quinte toupé! Quel toupet! quel effronté!
. Dér. du bas all. Topp, touffe de cheveux.
Toupi, s. m. Pot de terre à poignée, qui sert ordinaire-
ment à faire cuire la viande du potage ou la viande à
l'étouffée. — Toupè méjanciè, pot de grandeur moyenne.
Lou toupè vèsso, le pot répand par ébullition. Au fig. sot,
niais, imbécile, dépourvu d'intelligence. Méci coumo un
toupà, bète comme un pot. Toupinas, gros nigaud, grosse
bête.
Toupina, s. m. Potage grossier cuil dans un pot; sorte
de panade épaisse et gluante.
Dér. de Toupi, pot.
Toupinado, s. f. Une potée, plein un pot.
Dér. de Toupi, pot.
Toupinèl, èlo, s. et adj. m. et f. Sot, sotte: borné,
bète comme un pot.
Dér. de Toupà, pot.
Toupino, s. f. Vase de terre de plus grande dimension
que le Toupè. On lui donne en quelques localités du Gard
le nom de Glouto. Vase en terre servant à faire nicher les
moineaux.
Dér. de Toupi, pot.
Touqua, v. Toucher, manier, palper, tâter ; chasser devant
soi, mener, conduire en se tenant derrière; frapper, corri-
ger; concerner, importer; émouvoir; éprouver. — Aquélo
malâoutiè l'a touqua, celle maladie l’a fortement éprouvé.
Sé noun siès brave, té toucaraï! si tu n'es pas sage, je te
corrigerai d'importance! S tèros sé toquou, leurs pro-
priélés sont contiguës. Toquo toun chival, donne un coup
de fouet à ton cheval. Las tèlos sé toquou, je suis sans
ressources, je n’ai plus un sou.
Touquadoü, s. m. Conducteur ou meneur de bêtes de
trait ou d'animaux de boucherie, tels que bœufs, chevaux,
TOU
ete.; celui qui les touche ou les chasse devant lui, avec
un fouet, un trident ou un aiguillon.
Dér. de Touqua, toucher.
Touquéja, v. Toucher, manier, palper à plusieurs
reprises. Ce verbe s'emploie dans un sens fréquentatif, à la
place du verbe Touqua, toucher.
Tour, s. m. Mouvement circulaire; métier à filer la
soie; tour de promenade; tour d'adresse, de prestidigita-
tion; machine qui sert à façonner le bois, la pierre, les
mélaux, etc. — Faïre soun tour, fienter, en parlant des
petits enfants.
Toura, v. Scier en travers, un billot de bois, un tronc
d'arbre.
Dér. de Torou, billot, rondin. — Voy. c. m.
Touradouiro, s. f. Le passe-partout des scieurs de long;
scie à deux manches, adaptés aux deux extrémités de Ja
lame, et qui sert à débiter le bois, la pierre, ete. Cette scie
à quatre mains est maniée par deux ouvriers placés en
face l’un de l'autre et tirant alternativement. Dans cer-
taines localités du Gard on donne à cet outil le nom de
Loubo.
Dér. de Torou, tronc, billot de bois.
Touraïo et Tourasso, s. m. Grosse et vieille tour. Augm.
de Toure. — Voy. c. m.
Touras, s. m. Fièvre éphémère des femmes en couches:
tumeur qui vient au pis des chèvres.
Tourdre, s. m. Une Tourde, et non pas un Tourdre.
Grive des vignes; merle-grive (Turdus musicus, Tem.).
Dessus du corps d’un gris brun, poitrine d'un jaune rous-
sâtre, avec des tâches brunes; gorge et flancs blancs. Lon-
gueur 0m20 cent. La Céséro, la Gamégno, le Couchacha,
variélés de la même famille, sont souvent désignés sous le
nom commun de Tourdre; mais les gourmands savent
en faire la différence, et préfèrent de beaucoup ce dernier,
quand il est en bon point, assurés que c'est de lui
qu'Horace, qui s'y connaissait aussi, a dit : Obeso! nil
melius turdo.
Toure, s. f. Tour, construction qui, dans un château,
une église, une enceinte de ville forte, dépasse en hauteur
le restant des constructions, et leur sert de défense ou
d'ornement; nuages lourds et floconneux qui présagent
un orage, et que les météorologistes désignent sous le nom
de Cumuli.
Touril, s. m. Petite tour, claperole de forme circulaire,
construite à pierres sèches et servant à indiquer un tracé,
une limite, un terrain mis en défense; moulin à tourille
dont la roue horizontale est indépendante. — Zow mouli
dâou Tour où déou Tourél, sur la Cêze, au tournant de
la Tune, dans la commune de Peyremale.
Dér. du lat. Turris, tour. On dit aussi Tourio. —
Voy. c. m.
Touril, s. »#. Soupe à l’ognon.
Tourio, s. f. Tourelle, petite tour, claperole, moulin à
; tourille. — Voy. Touril.
TOU
Tourméntino, s. f. Térébenthine, gomme ou suc rési- :
neux qui découle du térébinthe, du mélèze et de plusieurs
espèces de pins. Le terme languedocien est une corruption
du mot français.
Tourna, v. Remettre en place; rendre une chose prètée ;
revenir à une chose, — Tournas acù ounte èro, remettez
cela à sa place. Y-as-ti tourna sa barioto? Lui as-tu rendu
sa brouette? S'atrouvas la soupo bono, tournas-y, si vous
trouvez le potage à votre goùt, revenez-y.
Tourna, adv. De nouveau, derechef, encore, une seconde
fois. — Vène dé la vilo, y vôou tourna, j'arrive de la ville,
j'y retourne. Towrna dire, redire, dire de nouveau.
Onditaussi Tourna-maï, adv. comp. dans le même sens
et dans celui de « plus encore. »
Tourné, s. m. Rouet à pédale, machine servant à filer.
Cet instrument, plus encombrant que la quenouille, et
difficile à transporter hors de la maison, constitue cepen-
dant un perfectionnement sur la première, et permet de
produire trois fois plus de fil et un travail plus parfait.
Dim. de Tour.
Tournéja, v. Tourner, façonner au tour. Au fig.
tourner, rôder autour. On dit aussi, dans le mème sens,
Virouléja.
Tournioù, s. m. Tourneur, ouvrier qui façgonne des
ouvrages au tour.
Dér. de Tour.
Touroun, s: m. Sorte de nougat blanc fait avec des
amandes grillées, du miel et du sucre.
Dér. du lat. Torreo, griller, torréfier.
Tourqua, vw. Torcher, nettoyer, essuyer, frotter. —
Sétourca, se torcher. Sé torquo pas low nas émb'uno fusto,
il ne se torche pas le nez avec un soliveau; comme on
dirait en français : il ne se mouche pas des pieds.
Dér. de Torquo, bouchon de paille.
Tourtioù, s. m. Sorte de pâtisserie indigeste, confec-
tionnée avec de la fleur de farine, des œufs et du sucre, et
formant une sorte de bracelet appelé brassadèou, en
Provence.
Dim. de Tourto, tourte. — Voy. c. m.
Tourto, s. f. Pain de ménage, pain bis, de forme circu-
laire, en forme de couronne.
Dér. de Tour.
Tourto-douço, s. . comp. Tarte, sorte de pâtisserie
composée de deux feuilles de pâte recouvrant une couche
de confiture, de crème, de frangipane, etc.
… Tourtouièiro, s. f. Cable de charrette ou de chariot que
l'on tend au moyen d'un tour mis en mouvement par
- une barre, pour assujettir le chargement en diminuant
quelquefois son volume.
Dér. du lat. Tortus, tordu.
Tourtouro, s. f. La tourterelle (colombe tourterelle,
Columba turtur, Temm.), oiseau de l'ordre des pigeons,
nombreux dans le Midi. Cette dénomination s'applique
également à la tourterelle à collier.
TOU 631
Tourtugo, s. . l'ortue. Testudo, Linn. Animal à quatre
pattes, classé par Linné dans le premier genre de son
ordre des Reptiles, et par Al. Brongniart dans le premier
ordre des Reptiles appelés par lui Chéloniens. Il en existe
plusieurs espèces ; la plus connue est la tortue grecque,
Testudo græca, Linn. La plus commune en Europe est la
Tortue d'eau douce, Testudo lutaria, Linn.
Dér. du lat. Tortus, tortu, à cause de la forme des pattes
de la tortue.
Tous, s. /. La toux, phénomène physiologique lié à la
fonction de la respiration et qui consiste dans une expec-
toration forte, rapide et sonore, déterminée par l'irritation
de la membrane muqueuse des voies aériennes, ayant pour
but d'expulser les corps étrangers qui causent cette irri-
talion. — Michanto tous, marido tous, une toux de mau-
vais augure. La tous passo bé as cas, la toux passe bien
aux chats, les défauts de jeunesse finissent toujours par se
guérir.
Dér. du lat. Tussis, m. 8.
Touséièiro, s. f. Champ de froment ou de touselle.
Dér. de Tousèlo, touselle.
Tousèlo, s. /. Froment, touselle, blé sans barbe, Triti-
cum hibernum aristis carens: 1 en existe deux espèces: la
tousèlo blanco et la tousèlo rousso, qui sont cultivées dans
nos contrées, et très-employées dans la panification, chez
les populations rurales des pays de plaine.
Toussan, n. pr. f. La Toussaint, la fête de tous les
saints, qui se célèbre le 4e novembre de chaque année. —
Pér Toussan, l'oulivo à la man, à la Toussaint, il faut
commencer la cucillette des olives.
Mot composé, formé de Tous et de San, tous les saints.
Toussi, s. m. La toux. — Lou toussè m'arapo, la toux
me prend, je sens que je vais tousser. — Voy. Taus.
Dér. du lat. Tussis, Im. 8.
Toussilage, s. su. Tussilage, Tussilago farfara, Lion.,
plante pectorale commune dans tous les terrains humides et
argileux du département du Gard. Elle est connue sous le
nom vulgaire de Pdouto-d'ase, pied-d'âne ou pas-d’äne, à
cause de la forme de ses feuilles. Ses fleurs, ses feuilles et
ses racines sont adoucissantes et pectorales, et employées
comme telles dans les campagnes.
Dér. du lat. Tussis, toux, parce qu'on l'emploie habi-
tuellement pour combattre cette affection.
Tout, s. m. Tout, l'ensemble d'une chose considérée
dans son entier. — Lou tout és dé s'énténdre, le tout est
de s'entendre. Ac n'és pas lou tout, ce n'est pas le tout...
És pa lou tout d'acouménça, féou acaba, ce n'est pas le
tout de commencer, il faut finir. N'y én diguè dé las toutos,
il n'est pas d'injures qu'il ne lui ait dites.
Tout, 0, adj. m. et /. Tout, toute; au pl. toutes et
toutos, tous, loules.
Tout, adv. Tout, tout-à-fait, entièrement. — À l'èr tout
néci, il a l'air tout hébété. Tout, adverbe, s'emploie souvent
avec un suffixe : Tout-aro, tout-à-l'heure ; tout-aréto, dans
622 TRA
un petit moment. Tout plan-plan, tout bas, tout doucement,
sans se presser. Tout d'un tén, entre-temps.
Dér. du lat. Totus, m. s.
Toutaréto, loc. adv. Il n’y a qu'un instant, dans un
instant.
Dim. de Toutaro. — Voy. ce mot.
Toutaro, «dv. Tout-à-l'heure, dans un moment, bientôt.
— Toutaro y sèn! nous allons arriver au moment critique ;
je m'en vais le mettre à sa place.
Loc. comp. de Tout et de Aro, à présent.
Toutes, os, adj. m. et f. pl. Tous, toutes. — Toutes
lous bibous dé la Camarguo pourièn mouri qué noun m'én
véndriè uno bano, tous les héritages pourraient pleuvoir,
qu’il ne m'en reviendrait pas une obole.
Tout-éscas, loc. adv. Tout à l'heure; il n’y a qu'un
instant.
Tout-éscasséto, loc. adv. Dim. de Tout-éscas; il n’y
a qu'un très-pelit instant.
Tout-houro, s. f. Grosse prune oblongue, d’un rouge
brun, bonne à manger en confiture et en marmelade. C’est
une variété de la prune Perdrigon.
Tout-obro, s. ». Ouvrier, manœuvre dont l'aptitude se
prête à toute sorte de travaux.
Mot composé de Touto, toute, et Obro, œuvre, travail.
Tout-un, adj. ind. Tout un, la même chose. — Acù ’s
tout-un, c'est tout'un, c'est une même chose.
Trabado, s. f. Une travée, terme de charpenterie; la
travée d’un pont suspendu ou métallique est la partie du
plancher comprise entre deux points d'appui, culées ou
piles. Un pont à trois travées est un pont suspendu ou
métallique composé de trois planchers soutenus par deux
culées et deux piles en rivière.
Dér. du lat. Trabs, m. 8.
Trabasta, v. Pencher d’un côté, avoir une tendance à
tourner sens dessus-dessous. Se dit surtout d’un bât de
mulet ou de la charge d’une bête de somme lorsqu'ils pen-
chent d’un côté plus que de l’autre, faute souvent d’avoir
suffisamment sanglé le bât; se dit aussi par extension de
toute autre chose qui perd son équilibre.
Dér. de Tra pour Trans, au-delà, et de Bast, bât.
Trabuqua, ». Trébucher, broncher, faire un faux pas,
tomber le corps en avant.
Dér. de Trabue, chute, culbute.
Tracan, s. m. La marche des affaires, le tran-tran du
jeu, du négoce. Dim. Tracané. — Quinte tracan! quelle
multiplicité d’affaires! Faire soun tracané, faire tranquille-
ment son petit commerce, ses affaires journalières.
Tracana, v. Terme de manufacture de soie : envider une se-
conde fois la soie qui avait été mal envidée une première fois.
Tracané, s. m. Dim. de Tracan. — Voy. c. m.
Trachèl, s. m. Touffe de laine ou d’étoupe; touffe de
cheveux coupés ; masse floconneuse de diverses substances
filamenteuses. — Trachèl dé nèou, flocon de neige.
Dér. du lat. Truncatus, détaché, coupé.
TRA
Trafi, s. m. Tracas, trouble, désordre ; chose difficile et
embrouillée. — Lou trafi d'un oustdou, le tracas d’un mé-
nage. Au fig. les soucis, les peines, les tourments que l’on
éprouve, auxquels on est exposé. -
Pauri cor doulènt qu’avès voste abounde
Di tràfi dèu mounde.
Léontine Gorranp.
Traficho, s. f. Gros clou allongé dont la tête est ordi-
nairement triangulaire et qui sert à fixer les chevrons sur
les poutres et les charpentes.
Le lat. Fixorius clavus répond au terme languedocien.
Trafiqua, v. Rôder dans une maison, déplacer les objets,
les remettre en place, tracasser par ses manières les gens
du logis; fréquenter une maison, un pays, un lieu. —
Tout lou jour trafico, toute la journée il tourne et retourne,
place et déplace. Trafiquo moun oustdou, il fréquente ma
maison, il y vient journellement.
Trafiquan, s. m. Trafiquant, commerçant; intrigant;
celui qui achète et revend toutes sortes de marchandises.
Dér. de Trafiqua. — Voy. c. m.
Trahi, v. Venir à bout de couper, de trancher avec les
dents ou de mâcher un aliment dur ou coriace, — Pode pa
trahà la crousto, il m'est impossible de mâcher la croûte de
pain.
On dit aussi Vénc?, dans le même sens.
Traïo, s. f. Traille, câble d’un puits à roue qui supporte
les godets et sert à puiser l’eau d’un réservoir inférieur pour
l'amener dans un réservoir supérieur; câble en chanvre ou
en fil de fer tendu en travers d’une rivière pour faciliter le
passage d’un bac. On fabriquait jadis les câbles de puits à
roue avec des sarments de vigne sauvage entrelacés; on en
fabrique encore en sparterie.
Les sarments de vignes portent encore, dans le Var, le
nom de Traïo, synonyme de Tréto.
Traïre, v. Tirer, lever, jeter, lancer, tomber, marcher.
— Traïre dé pèiros, tirer de la pierre de taille d'ane car-
rière; jeter des pierres contre quelqu'un. Aquélo pèiro traï
dé fi, cette pierre lance des élincelles. Traï dé nèou, il
tombe de la neige. Mdou-traïre, mal tourner, aller de mal
en pis, empirer, se débaucher. Fénira pér mou traïre, il
finira par se gâter. Traïre-mdou, avoir de fâcheux pressen-
timents sur une chose ou sur quelqu'un, être en peine sur
le compte d'une personne, sur les suites d’une affaire.
Dér. du lat. Trahere, tirer.
Trambla, v. Trembler, être agité, craindre, avoir peur.
L'expression Qué faï trambla, est prise comme terme du
plus haut degré de comparaison. — Y-« d'aïgo qué fais
trambla, il ÿ a une quantité d'eau effrayante. À d'ésprà
qué fai trambla, il a beaucoup d'esprit. Y-a« dé castagnos
qué fai trambla, il ÿ a une superbe récolte de châtaignes,
les châtaigners sont chargés de fruits. Ac faï trambla, ce
récit, cet événement, cette catastrophe sont effrayants.
Dér. du lat. Tremulare, dim. de Tremere, m. s,
TRA
Tramblamén, s. m. Fremblement, agitation, action de
trembler, frisson. — Acù és un affaire dâou tramblamén,
se dit d'une chose extraordinaire, inouïe, effrayante.
Y-aviè la troupo, la musiquo et tout lou tramblamén, il y
avait à cette cérémonie, les soldats, la musique et tout ce
qui s'ensuit.
Tramble, s. m. Frisson, impression de froid, qui carac-
térise la première période d'un accès de fièvre; impression
de peur et d'effroi. — M'a prés un tramble, j'ai été saisi
par des frissons ; j'ai eu une peur atroce.
Tramo, s. f. Trame, fils conduits par la navette entre
ceux qui forment la chaine; laine grossière et pleine de
bouchons qui s'arrête au bas du peigne et qu’on sépare de
la laine fine, laquelle devient alors de l’étaim, dont le poil,
plus net et plus long, a plus de force pour être employé à
la chaine des étoffes.
Dér. du lat. Trama, m. ss.
Tranché, s. m. Tranchet, outil de cordonnier, sorte de
longue lame d'acier, munie au sommet d'un tranchant en
biseau latéral et qui sert à couper le cuir.
Transi, do, adj. m. et f. Transi, saisi par le froid, par
la peur; ayant l'air malheureux, misérable.
Dér. du lat. Trunsire, aller au-delà, du côté opposé;
verbe qui, dans la basse latinité, signifiait mourir, passer
de vie à trépas.
Transidoù, s. m. Le flanc, la partie latérale du ventre.
— M'a piqua dou transidoù, il m'a frappé au flanc.
Trantaïia, v. Chanceler, vaciller, perdre son équilibre. —
As trop bégu, trantaïes, tu as trop bu, tu chancelles.
Trâou, s. m. Trou: ouverture percée dans un corps
quelconque, intentionnellement ou non; perforation acci-
dentelle. — M'én sièi sourtà émb'un trdou à la tèsto, je
me suis sorti de la bagarre avec une blessure à la tête. On
appelle aussi trdou les petites excavations pratiquées par
les enfants pour jouer aux billes, dans le jeu de fossette.
Ai fatrdou, ma bille est entrée dans la fossette. Low {rdou
d'éou"quiou, l'anus, le fondement. Un trdou dé ra, un
trou de rat: Au fig. on dit : És nascu dine un tréou, il
est né dans un misérable village, il n’a l'usage de rien, il
ignore les plus simples lois de la politesse. Béou coumo un
trou, il boit comme un trou. Faire un trdou à la luno,
faire une dette que l'on ne paye pas, s'endetter, mettre la
clé sous la porté. Tapa sous trdous, payer ses dettes. Faïre
un trdou pér n'atapa un doutre, déshabiller saint Pierre
pour habiller saint Jean; faire une nouvelle dette pour en
solder une ancienne. Mé saridi més dinc un trâou, je me
serais réfugié dans un trou (tellement j'avais honte ou tel-
lement j'avais peur).
Dér. de la bass. lat. Traugum.
Trâouqua, v. Percer, trouer, pratiquer un trou, une
ouverture; ouvrir, pénétrer, — Trdouqua uno bouto, mettre
un tonneau en perce. Trdougua uno dén, percer une dent,
en parlant des jeunes enfants. À las mans trdoucados,
c'est un panier percé, il dépense l'argent sans compler.
TRA 633
Résoùs tréouquados, paroles, discours inconsidérés, dérai-
sonnables, insensés.
Dér. de Trdou, trou.
Trâouqué, s. m. Dim. de Trdou. Petit trou, petit
pertuis, faible ouverture.
Dér. de Tréou, trou.
Trâouquia, do, adj. m. et f. Dim. de Trdouqua. Criblé,
percé de petits trous en grand nombre, comme l'est
un crible; plein d'yeux comme le pain bien levé et bién
travaillé, et comme le fromage de gruyère; vermoulu.
Trapo, s. f. Trappe, petite ouverture, petite porte
servant ordinairement de communication entre un étage
supérieur et un étage inférieur.
Dér. de l'anc. allemand Trapp, m. 8.
Trapô, s. m. Trapu; court de taille; court et gros. On
dit aussi Trapé.
Trapoü, s. m. Petite trappe ; terrine au riz ou au gruäu.
Trapougnièiro, s. /. Chattière. On dit aussi Catou-
gnèiro. — Voy. ©. m.
Tras (Dé), adv. Derrière, à côté, au-delà, de l'autre
côté. — Dé tras aquel oustdou, derrière cette maison.
Aquél oustdou done sus lou dé tras, cette maison donne sur le
derrière de la rue. Tras lou sère, de l'autre côté de la colline.
Dér. du lat. Trans, au-delà.
Trasséjà, v. Ravauder, ranger des hardes, des meubles;
remanier l'ordonnance d'un ameublement, dans une maison.
Trassije, s. m. Etat valétudinaire, mauvaise santé,
mauvais penchant.
Trasso, adj. m. et [. Se dit en parlant de choses usées,
vieilles, de peu de valeur; d'une santé usée; d'une chose
mince, fragile, facilement destructible. — Un érasso dé
capèl, un vieux chapeau. Dé trassos dé groulos, de vieilles
savates. Un ome trasso, un homme chétif, malingre, sans
vigueur. Un trasso d'ome, un homme de peu de valeur,
mauvais sujet. Souï bièn trasso, je suis bien affaissé, bien
affaibli. Papiè dé trasso, papier Joseph.
Dér. de l'italien Strassa, guenille.
Trassun, s. m. Rebut, déchet, portions de denrées à
rejeter. — Lou trassun das poumos, das castagnos, le rebut,
des pommes, des châtaignes.
Trassuègno, s. f. Péjoratif de Trassun, le rebut du rebut.
Trata, v. Traiter, servir, donner à manger chez soi, ou
dans un restaurant, chez un traiteur; injurier. — Trato
lous vouyajurs, il donne à manger aux voyageurs. M'a
bièn trata, il m'a servi un excellent repas. M'a trata dé
voulur, il m'a traité de voleur, il m'a appelé voleur.
Travaia, v. Travailler, agir; façonner, exécuter un tra-
vail; cultiver; troubler, inquiéter, tourmenter; se déjéter,
se tourmenter, en parlant des ouvrages en bois. — Sèn
nascu pér travaïa, nous sommes nés pour le travail.
Travaïa soun bé, cultiver sa propriété. Aquélo afäire mé
travaïo, cette affaire m'inquiète. Aqud és mdou travaïa,
c'est mal agir de faire ainsi.
Dér. de Traval, travail.
634 TRA
Travaïadoù, s. m. Travailleur de terre, journalier, ma-
nœuvre, paysan, cultivateur.
Dér. de Traval, travail.
Travaïaïre, ro, s. m. et f. Travailleur, travailleuse;
laborieux, porté au travail, qui aime à travailler. És un
bon travaïaire, c'est un homme laborieux.
Dér. de Traval, travail.
Traval, s. m». Travail, ouvrage; difficulté, peine, fati-
gue; agitation, bruit, vacarme. — Quinte traval ès pas
acd! quel travail pénible! quelle affaire difficile à dé-
brouiller! Y-a dé traval! cette difficulté n'est pas facile à
résoudre. Lou traval fa yé faï pas pou, le travail accom-
pli ne lui fait pas peur; se dit d’un paresseux avéré.
Travès, s. f. Travers, étendue en largeur; revers de
colline, de côteau, penchant de montagne, surface de
terrain en pente. — Sé métre én travès, se mettreen travers.
Mésura én travès, mesurer dans le sens de Ja lar-
geur. Cassa sus lous travès, chasser sur le penchant des
vallées.
Dér. du lat. Transversum.
Travès (Dé), loc. adv. De travers, de guingois, de côté,
à contre-sens. — Parla dé travès, parler contre les règles
du bon sens, d'une manière insensée. Dé résoùs dé travès,
des paroles inconvenantes. Préne las câousos, lous homes dé
travès, donner aux choses une fàcheuse interprétation;
prendre les hommes à rebrousse-poil, les contrarier, les
blesser au moral.
Travès (Pér), loc. adv. Par le travers. — Sé podes pas
douboura aquélo fusto pér lou bout, prén-la pér travès, si tu
ne peux soulever cette pièce de bois dans le sens de sa
longueur, prends-la par le travers.
Travéssan, s. m. Pièce d'assemblage de menuiserie,
posée en travers pour en affermir d’autres; traversin,
long oreiller cylindrique posé en travers du lit et sur lequel
repose la tête. On dit aussi Travéssiè.
Dér. de Travès.
Travéssiè, s. m. Traversin; traversine ou étrésillon,
pièce de bois entaillée qui en assujétit ou en soutient
plusieurs autres: pièces de bois posées en travers d’une
charpente.
Travèsso, s. f. Ruelle traversière, reliant deux autres
rues parallèles plus larges ou plus longues; chemin de
traverse, présentant un raccourci sur la route ordinaire. —
Travésséto, dim. de Travèsso. — Travéssasso, augm..
de Travèsso; à Alais, {a Travéssasso est une rue qui relie
la place de la République à la place Florian, appelée
aujourd'hui rue des Hortes.
Travèsso, s. f. La traverse, le vent qui traverse, du
couchant au levant, la ligne nord-sud considérée comme
point de départ dans la rose des vents; vent du nord-ouest
ou même le vent d'ouest. — Un co dé travèsso a éscavarta
las nivous, un vent d'ouest a dispersé les nuages.
Travéto, s. f. Solive, soliveau ordinairement soutenu en
dessous par les grosses poutres d'un plancher et sur lequel
TRÉ
s'appuient et sont clouées les planches qui soutiennent le
carrelage.
Dér. du lat. Trabs, poutre.
Trébouli, v. Tressaillir; fermenter; être surexcité,
agacé, exacerbé. — Mé fas tréboulà, tu m'impatientes, tu
m'agaces.
Dér. de Tré pour trans et de Boul}, bouillir. — Woy.
Éntrébouli.
Tréboulino, s. f. De l’eau, du vin, du café trouble ou
toute autre liqueur non limpide. — És pa qué dé trébou-
lino, ce ne sont que des effondrilles. Au fig. trouble, émo-
tion, effroi.
Dér. de Trébouli.
Tréfouli, v. Être transporté de joie, d'impatience;
trépigner, tressaillir, griller d'envie. — Tréfoulis d'énvéjo dé
parti, il meurt d'envie de partir.
Tréïas, s. m. Vigne ou treille rustique, plantée en
pleine campagne, non disposée en tonnelle, mais qui vient
naturellement, soutenue par de simples perches ou adossée
à un arbre.
Péjor. de Tréïo, treille.
Tréio, s. m. Treille, cep que l'on fait monter sur les
arbres ou plutôt devant une façade de maison et que l'on
dispose parfois en berceau; sorte de danse nationale en
usage à Béziers depuis un temps immémorial, et dans
laquelle danseurs et danseuses tiennent des cerceaux qui
forment comme une treille en tonnelle au-dessus de Jeurs
têtes.
Tréje, nom de nombre, m. s. Treize.
Dér. du lat. Tredecim, m. s.
Trélu, s. m. Changement de lune, à partir du troisième
quartier, correspondant à la pleine lune ; éclat, lueur, clarté.
Dér. du lat. Translucere, se réfléchir, luire au travers.
* Tréluqua, v. Entrer dans son plein, en parlant de la
lune. — La luno a tréluqua, c'est aujourd'hui pleine lune.
Dér. du lat. Translucere, se réfléchir, luire au travers.
Trélusi, v. Briller, reluire. On dit aussi Éntrélusi,
entreluire; entrevoir; luire vaguement, à-demi. — L'aï
vis éntrélusi, je l'ai entrevu.
Dér. du lat, Translucere.
Trémoula, v. Trembler, frissonner, frémir, grelotter.
— Trémoula dé pôou, frissonner d’épouvante. Aviè uno fré
qué trémoulavo, il grelottait de froid.
Dér. du lat. Tremulare, trembler.
Trémpa, v. Tremper, mouiller, saucer; mettre, laisser
macérer dans un liquide. — Trémpa la soupo, verser le
bouillon sur les tranches de pain. Bouta la mérlusso à
trémpa, mettre la morue dans l’eau pour la dessaler.
Dér. du lat. Temperare.
Trémpe, po, adj. m. et f. Trempé, ée, abondamment
mouillé; être en nage, ruisselant de sueur. — Trémpe
coumo un rat, mouillé comme un rat, Trémpe coumo uno
soupo, mouillé comme une soupe.
Dér. de Trémpa, tremper.
TRÉ
Trémpièiro, s. {. Tonneau, baril où l’on met ‘a piquette.
— Boulo trémpièiro, tonneau à piquette.
Dér. de Trémpo, piquette.
Trémpo, s. f. Piquette de vin, que l'on prépare avec du
mare de raisin, sur lequel on fait cuver de l’eau ordinaire
pendant quelques jours, ce qui donne une sorte de vin plus
ou moins léger. — Trémpo parisièno, piquette dite parisienne,
que l'on prépare en remplissant une barrique de grains de
raisins non foulés, et achevant de remplir le récipient avec
de l'eau ordinaire. Au bout de quelques jours on commence
à soutirer le liquide au moyen d’un robinet établi au
fond de la futaille, et on remplace par de l'eau ordinaire
la quantité de piquette soutirée, de manière à ce que le
tonneau reste toujours plein du liquide, qui va s'affaiblis-
‘sant de jour en jour. Trémpo dé la prémièiro, piquette que
l'on fait avec du marc non lavé. Trémpo dé la sécoundo
piquette plus faible que l'on prépare avec le marc qui reste
après en avoir ubtenu la première piquette. Péoure coumo
la trémpo, pauvre comme un rat d'église. És afatiga coumo
un pdoure ome qué coulo sa trémpo, il se démène comme
* une corneille qui abat des noix.
Trémpo, s. /. Trempe, qualité, sorte, espèce. — Dé
géns dé bono trémpo, des gens houorables.
Trémuda, v. Changer, déplacer, transvaser ; transformer,
convertir, métamorphoser, transfigurer. — Trémuda lou
vin, transvaser le vin.
- Dér. du lat. Transmutare, m. s.
Tréna, vw. Tresser, tordre, entrelacer; trainer, tirer
après soi, entrainer.
Dér. de Tréno, tresse.
Tréncado, s. /. Tranchées, coliques éprouvées par les
femmes en travail d'enfant.
Dér. du lai. Truncare, trancher.
Tréno, s.. Tresse, natte de cheveux ou de cordons.
Trénquéja, v. Piocher, travailler la terre à la pioche.
Dér, de Trénquo, bèche.
Trénquéjaire, s. m. Travailleur de terre; celui qui
travaille avec une bèche.
Dér. de Trénquéja, bècher.
Trénquièiro, s. f. Crevette des ruisseaux et des fon-
taines, Grammarus pulex, Linn., crustacé de l'ordre des
Astacoïdes et de la famille des Capités.
On croit, parmi le peuple, que si l'on avalait vivant un
de ces insectes, on en éprouverait de vives tranchées : de
là son nom de Trénquiètro. On le désigne aussi sous le
nom de Trérquo-l'aïgo.
Trénquo, e. f. Une pioche, une bèche; sorte de houe;
hoyau.
Dér. du lat. Truncare, trancher.
‘Trénquo-largo, n. comp. f. Pioche, houe à lame large.
Trénténéja, v. Approcher de la trentaine; être âgé
d'environ trente ans. — Acouménce dé trénténéja, j'appro-
che de la trentaine.
Dér. de Zrénto, trente.
TRÉ 635
Trénténo, s. f. La trentaine; les approche de l'âge de
trenle ans. — Aï passa la trénténo, j'ai plus de trente ans.
Siès sus toun trénto-un, tu es en grande toilette. Marcha
us soun trénte-un, aller] sur un grand ton, marcher avec
fierté, se pavaner.
Dér. de Trénto, trente.
Trénto, n. de nomb. Trente.
Trépa, v. Courir, sauter, folâtrer, gambader, bondir,
se jouer comme les jeunes chiens, les jeunes poulains.
Dér. de l'ital, Trepare, m. s.
Trépadisso, s. /. Course fülatre, avec gambades et
sauts joyeux.
Dér. de 7répa.
Trépadoü, s. m. Endroit où les enfants jouent et pren-
nent leurs ébats ; sorte de plancher, disposé en plan incliné,
servant à entrer dans un bac ou à en sortir. On trouve
souvent des quartiers de territoire désignés sous le non de
Trépaloù ou Trépéloù, nolamment dans les communes
d'Alais et d'Allègre, et l'abbé de Sauvaëes se demande si
cette désignation indiquerait un lieu d'assemblée pour les
louveteaux. D'un autre côté Ducange mentionne le mot
bas latin Zrespallum comme désignant le lieu des exécu-
tions, où l'on pendait et que l'on doit traduire par les trois
piliers. A Nimes, en effet, le lieu désigné sous le nom des
Trés piéloun, est encore occupé par les trois piliers qui
soutenaient le gibet sous l'ancien régime,
Trépaire, s. m. Celui qui aime à sauter, à guimbader,
à courir. S
Trépi, v. Piétiner, fouler aux pieds. — An trépi moun
bla, on a foulé aux pieds mon champ de blé; on l'a piétiné.
Dér. de Trépa. — Voy. c. m.
Trépido, s. f. Les traces d'un piétinement, un endroit
foulé et piétiné, qui porte l'empreinte des pieds.
Trépo-trépo, loc. adv. Expression usitée pour indiquer
l'envie, l'impatience que l'on éprouve de faire quelque
chose que l'on désire. — Sa léngo y faï trépo-trépo, sa
langue lui démange, il voudrait parler coùte que coûte.
Dér. de Trépa. — Voy. ©. m.
Trés, n. de nomb. Trois. — Dormou das trés, se dit
des vers-à-soie, pour indiquer qu'ils entrent dans la troi-
sième mue. N'doutres trés, nous trois. Faïre trés-trés, gre-
lotter, claquer des dents sous l'impression du froid ou de
la peur.
Trésana, v. Tressaillir, s'agiter convulsivement, s'éva-
nouir.
Tréscantoù, s. m Le point ou aboutissent trois che-
mins; carrefour formé par trois rues ou trois routes allant
dans des directions différentes et formant par conséquent
trois angles aboutissant à un mème sommet.
Comp. de Trés, trois, et de Cantoù, coin.
Tréscol, s. m. Crète de colline, colline à triple sommet
et présentant par conséquent trois échancrures où trois
cols. Nom de lieu; le hameau de Tréscol, qui fait partie de
la commune de la Grand'Combe. y
636 TRÉ
Tréscoula, v. Disparaitre furtivement, passer outre,
passer par delà la colline ou la montagne. — Lou sourél
a tréscoula, le soleil a tombé derrière la montagne. On
emploie aussi cette expression dans le sens de couler à
travers, filtrer, suinter.
Dér. de Trans, au-delà, et de Coula, couler.
Tréscoulé, s. m. Dim. de Tréscol.
Tréspana (Sé), v. Tomber en avant, dans une course
rapide ; se fendre la tête à la suite d’une chüte faite en
courant.
Tréspassa, v. Passer par delà, dépasser, et par exten-
sion trépasser, mourir, passer de la vie à la mort. — Mé
tréspasso dé touto la tèsto, il me dépasse, il est plus grand
que moi de toute la tête. Émb’uno pêiro tréspassarièï lou
Pont-dâou-Gard, en lançant une pierre je dépasserais la
hauteur du Pont-du-Gard.
Dér. de Trans, au delà, et de Passa, passer.
Trèso, s. f. Coiffure de femme, sorte de capuchon muni
de deux barbes qu’on peut croiser sur la poitrine et atta-
cher sur le dos.
Dér. de Trèso, Thérèse.
Trèso, n. p. [. Thérèse, du grec On, Onpos, bête farouche.
Trésploumba, v. Surplomber, pencher, en parlant d'un
mur, d’un rocher à pic, d'une falaise. — Un ran qué trés-
ploumbo, un rocher qui surplombe.
Dér. de Trés pour Trans, au-delà, et de Ploumb,
aplomb.
Tréspougne, v. Piquer, larder avec une aiguille ou un
poinçon; piquer à l'aiguille une jupe, une courte-pointe,
une étoffe quelconque à arrière-point. — Pér bièn énsaca
las sdoucissos, féou las tréspougne, pour bien tasser la
viande dans les saucisses, il faut piquer le boyau.
Dér. de Tré, entre, et de Pougne, piquer.
Tréspourta, v. Transporter, exciter des transports,
mettre hors de soi. — L'amour lou trésporto, il est trans-
porté d'amour, il aime comme un insensé. Lou méou lou
trésporto, la douleur, la souffrance qu’il éprouve le met
hors de lui.
Dér. de Très pour Trans, au-delà, et de Pourta, porter.
Tréssusa, v. Suer, transpirer, émettre une sueur froide
et subite, causée par un malaise, une appréhension, une
crainte, l'annonce d'un malheur.
Dér. de Trés pour Trans, au-delà, et de Susa, suer.
Tréssusou, s. f. Sueur froide et subite, causée par un
malaise, une faiblesse, une crainte, un événement fâcheux
et inattendu; les sueurs glacées qui précèdent la mort. —
Mé faï véni la tréssusoù, il me met sur les épines, il me
fatigue, il m'ennuie à mourir.
Dér. de Trés, pour Trans, au-delà, et de Susoù, sueur.
Tréstoulo ou mieux Téstoulo, s. /. Fragment de tuile
cassée.
Dér. de Tès, tèt, tesson, fragment de poterie cassée.
Dér. du lat. Testa, qui désigne généralement Loute espèce
de vase en argile cuite ou en terre de potier.
u
TRI
On voit près de Rome, entre le pied du Mont-Aventin et
la rive gauche du Tibre, une colline artificielle désignée en
italien sous le nom de Monte-Testaccio, et entièrement
composée de tessons d’amphores ou autres poteries. Des
opinions diverses ont été émises pour expliquer les raisons
qui peuvent avoir motivé cet énorme amas de débris.
Tréva, v. Hanter, fréquenter; aller et venir dans un
mème lieu; y faire des apparitions fréquentes, en parlant
surtout des revenants et des esprits; rôder. — Qudou sèn
trèvo, sèn dévén, qui saint fréquente, saint devient; dis-
moi qui tu bantes et je te dirai quitues. Lous lous trèvou
din la gnuë, les loups rôdent pendant la nuit. Lous morts
trèvou dinc aquél vièl castèl, les esprits hantent ce vieux
château.
Du Gallois Tréfa, habiter.
Trévéli (Sé), v. S'élimer, s’user, en parlant d’une
étoffe, d'un vêtement. — Aquélo camiso couméngo à sé
trévélà, cette chemise commence à s’user.
Dér. du grec Toléw, rpléeu, user par le frottement.
Trévira, v. Bouleverser, mettre tout sans dessus dessous ;
troubler. — Sé trévira, s'alarmer, s’'émouvoir, s’épouvan-
ter, changer de couleur, pâlir d’épouvante, d'émotion ou
de surprise ; ètre effaré.
Dér. de Tré pour Trans, et de Vira, tourner.
Tria, v. Ce terme à deux sens différents : trier et éplu-
cher. Il signifie aussi choisir, distinguer. — Tria dé bajanos,
éplucher des châtaignes bouillies. Tria La salado, éplucher
la salade. Tria dou dé, trier sur le volet. Sé tria, se choisir,
faire bande ou ménage à part. Tria sas niètros, s'épucer.
Triaclo, s. f. Thériaque, composition pharmaceutique
employée par l’ancienne médecine et dans laquelle entrent
soixante-et-douze substances différentes; boisson désa-
gréable au goût, vin frelaté.
Dér. du lat. Theriaca, m. 8.
Triado, s. f. Les objets de choix, la première qualité
d’une marchandise, d’une denrée; le dessus du panier.
Dér. de Tria, trier.
Triaïre, arello, s. m. f. Celui ou celle qui fait le triage
d’une denrée, d'une marchandise; qui épluche la salade,
écosse les légumes frais; trie la première qualité d'une
récolte de fruits; fait le triage des laines dans une fabrique.
On dit aussi Triaïro pour désigner une personne qui, dans
les filatures, est occupée à trier les cocons.
Dér. de Tria, trier.
Triaje, s. m. Triage, action de trier, de choisir, séparer
ce qui est bon de ce qui est de rebus.
Dér. de Tria, trier.
Triäou, s. ». Câble, corde à puits en sparterie, qui sert
à descendre et retirer le seau destiné à puiser l'eau. Ce
câble est ainsi nommé parce qu'on se servit d’abord, pour
cet usage, de sarments de vigne entrelacés, ou Tréio. On
devrait, en effet, écrire et dire : Tréidou.
Triate, s. m. Théâtre. On dit aussi Tiatre.
Dér. du lat. Theatrum et du grec Oéxtpov.
TRI
Tribe, $. m. Toufle d'herbe ou de foin sur le bord des
chemins ou dans les bois, où les loups et les chiens ont
eoutume d'uriner ou de fienter. Ceux qui sont fréquentés
par les loups, sont situés sur les plateaux montagneux ou
les cols où aboutissent divers sentiers formant carrefour,
ce qui revient au Trivium latin, ou carrefour formé par le
croisement de diverses routes.
Dér. du grec Tol6os, chemin, sentier battu.
Tribla, v. Tripler; devenir triple.
Dér. de Trible.
Trible, o, s. et adj. Triple, qui contient trois fois
l'unité.
Dér. du lat. Triplus, m. s.
Trico, s. m. Jeu de paume ou de tripot; rondin, gros et
* court bâton, gourdin, sorte de trique.
Tricô, s. m. Tricot, tissu qui s'exécute avec des aiguilles
longues et mousses.
Tricouta, v. Tricoter, faire du tricot ; donner une volée
de coups de bâton, — L'aï bin tricouta, je lui ai appliqué
une rude tripotée de coups de trique.
Dér. de Trico. — Voy. ©. m.
Trido, s. f. Proyer, bruant-proyer. — Voy. Cincérisi. —
Faïre la trido, faïre lou mantélé, ètre tout frileux, tout
ébouriffé, être gravement malade.
Trigôs, s. m. Bruit, tapage; fatigue, travail fatigant;
chagrins, peines, ennuis, tracasseries. On dit aussi Trimal.
— Luèn ddou trigès, loin du bruit, dans le calme.
Trigoussa, v. Trainer, houspiller, tirailler, secouer avec
violence, entrainer quelqu'un malgré lui. — Sé trigoussa,
se battre, se tirailler, se prendre aux cheveux, lutter, sé
po pas trigoussa, il ne peut se trainer; il est malade.
Trima, v. Trimer, peiner, fatiguer, travailler, marcher.
— Fôou trima pér gagna sa pdouro vido, il faut se donner
de la peine pour gagner de quoi vivre.
Trimal, s. m. Fatigue, labeur, travail, longue course.
Trin, s: m. Train, tapage, potin, vacarme.
Trin (Ën), Loc. adv. — Sièï mdou én trin, je suis indis-
posé, languissant, malade.
Trinqua, v. Rompre, casser; trinquer, choquer le verre
en buvant avec un compagnon.
Dér. du lat. Truncare, couper, et de l’all. Trinken,
boire.
Trinquaïre, s. m. Celui qui aime à trinquer, à boire;
celui qui casse, qui brise.
Dér. de Trinqua, couper ou trinquer.
Trinquo-taïio ou Tirasséto, s. f. Nom de plante.
Renouée des petits oiseaux, Polygonum convolvulus, Linn.
On désigne aussi cette plante dans certaines localités sous
les noms de Jinowiado, Tirasso, Couréjolo.
Le village de Trénco-taio, situé sur la pointe septentrio-
nale du Delta de la Camargue, ne payait, dit-on, jadis
aucun impôt. Son nom est synonyme de taille-rompue. On
marquait, en effet, autrefois cet impôt sur une latte de bois
refendue appelée taille, d'où l'impôt prit ce nom. Le village
TRI 637
précilé en ayant été exempté, le bâton sur lequel on mar-
quait ses impôts avec des encoches, fut rompu, trénea,
comme étant devenu inutile.
Trioulé, s. m. Trèfle, et particulièrement le trèfle
rampant. Chant mèlé de traits et de roulades, mais dépourvu
de toute méthode et comme peuvent les exécuter des
paysans sans instruction.
Tripaïo, s. /. Tripaille; l'ensemble des boyaux d'un
animal, des intestins de l'homme.
Dér. de Tripo, boyau.
Tripiè, s. m. Tripier, celui qui prépare et vend les
boyaux des animaux tués à la boucherie. — Coutèl triplé,
couteau de tripière, à deux tranchants. Au fig. un homme
à double face, qui souflle le froid et le chaud, qui manque
de franchise et agit d'une façon diamétralement opposée,
selon les circonstances.
Tripos, s. f. et pi. Tripes, boyaux, intestins des animaux
et de l'homme. — Rèndre sas tripos, être pris d'un vomis-
sement violent et prolongé.
Dér. de l'espagnol Tripa ou de l'italien Trippa, m. 8.
Tripo-liso, s. f. comp. La partie supérieure du côlon,
le premier boyau au-dessus des boyaux grêles, que l'on
emploie comme enveloppe ou sac dans la confection des
saucissons ou cervelas.
Dér. de Tripo, tripe.
Tripo-quioulâou, s. /. comp. Le boyau gras, boyau-
culier ou rectum, qui aboutit à l'anus.
Dér. de Tripo, tripe.
Triquétéja, v. Agiter des cliquettes. — Voy. Triquétos.
On obligeait jadis les lépreux des maladreries du moyen-
Age à agiter des cliquettes entre leurs doigts, quand ils se
montraient en public, pour avertir les passants et les tenir
àdistance.
Triquétos, s. f. pl. Cliquettes, jeu d'enfants composé de
deux galets longs et plats, ordinairement eh micaschiste, ou
de deux fragments de côtes de cheval ou de bœuf, qu'on
agite de manière à produire un cliquetis en les tenant entre
les trois premiers doigts de Ja main. — Voy. Triquétéja.
On dit aussi Criquéto.
Triquo, s. f. Trique, gros bâton qui sert ordinairement
à frapper.
Triquo-niquo, s. m. Un homme qui s'attache à des
vétilles, à des choses insignifiantes;, un tâtillon, — Uno
vèsto dé triquo-niquo, une veste faite d'une étoffe fragile,
usée, sans valeur.
Dér. du lat. Tricæ, nugæ.
Tris, s0, adj. m. et f. Trituré, réduit en poudre plus
ou moins fine, pulvérisé. — Tèro trisso, lerre légère,
meuble, sablonneuse ; exténué, pauvre, manquant de tout.
Dér. du lat. Tritum.
Trissa, v. Triturer, broyer, piler, pulvériser. Au fig.
ce terme s'emploie avec la signification de manger avec
appétit. — Trisso bièn/ il triture bien, c'est un joyeux
convive! Trissa de sdou, piétiner sur place. Se dit surtout
si
638 TRO
d'un cheval qui trotte sans avancer. Trisso-ménu, lrotte-
menu. Zrisso-moutos, brise-mottes; maillet de bois à long
manche servant à émotter ; l'ouvrier qui en fait usage.
Trisséto, s. /. Nom deplante, Asina media, Morgeline
ou mouron blanc; Stellaria media, stellaire intermédiaire.
On la donne ordinairement à manger aux petits oiseaux.
En médecine, elle est recommandée pour la guérison des
ulcères du poumon. Elle pousse ordinairement dans les
jardins potagers.
Trissou, s. m. Pilon, ou plutôt le mortier, comprenant
aussi le pilon; appareil qui sert à triturer, broyer, piler,
pulvériser.
Dér. de Trissa, triturer.
Triste, to, adj. m. et f. Triste, peiné, affligé. On le dit
aussi d'une chose facheuse, désagréable, affligeante, pénible,
difficile à supporter; d’un objet, d'une denrée de mau-
vaise qualité. — Triste sujè, mauvais garnement. Aquél
bla és bièn triste, ce blé est d’une mauvaise venue, d’une
mauvaise qualité. Tristas, enclin à la tristesse.
Dér. du lat, Tristis, m. s.
Tristé, s. m. Soupente ; sorle de grenier ou de plancher
en bois, suspendu sous le plancher d’une pièce quelconque,
d’une habitation, dont il fait partie intégrante et forme une
dépendance. Elle sert ordinairement de réduit où couchent
les domestiques et n’occupe qu'une partie de la hauteur de
la pièce qui la contient, dont elle reçoit le jour et la com-
munication avec le reste de la maison.
Dér. du bas lat. Transtega ou Tristega; cubiculum
superius.
On donne aussi à la soupente le nom de Pousta, parce
qu’il est ordinairement construit en planches ou post.
Triun, s. ». Épluchures, denrées de rebut, retranchées
et choisies sur celles qui sont de bonne qualité. Se dit sur-
tout des épluchures faites sur les châtaignes et qui repré-
sentent la plus mâuvaisequalité. — Quan véndés lou triun?
combien vendez-vous les épluchures ?
Dér. de Tria, trier. '
Tro, s. m. Trot, allure du cheval, intermédiaire entre
le pas et le galop. — Té faraï marcha âou tro, je te ferai
suivre la ligne droite.
Dér. du cat. Trot, m. 8.
Tro, s. m. Morceau, portion d’un objet. — Un tro dé
pan, un morceau de pain. Un tro dé car, un morceau de
viande. À cha tro, morceau par morceau.
Dér. du cat. Tros, m.s.
Tro, s. m. Tonnerre, bruit de la foudre. On dit aussi
Tron. — Ës un tron dé Diou, c'estun diable incarné. Lou
tron lou péto, il a le diable au corps, il s’impatiente,
Lou tron té cure! que le tonnerre te vide le corps! Tron
dé milo! mille tonnerres! Tron dé Diou! tonnerre de
Dieu !
Dér. du lat. Tonitru, m.s.
Trop, adv. Trop, adverbe de quantité, plus qu'il ne fauf,
avec excès. — Madamo dé Trop, une fille nouvellement
TOU
née, venant après d'autres enfants et formant sufcroit dans
la famille, arrivant au monde sans être désirée.
Dér. du cat. Trop, m.s.
Trouba, ». Trouver, inventer ; se livrer à la poésie, genre
de littérature qui exige beaucoup de talent, d'invention,
d'imagination. M. Gabriel Azaïs fait dériver ce mot du lat.
Turbare, remuer, « parce que, dit-il, pour trouver, il faut
ordinairement remuer. »
Troubadour, s. m. Nom donné aux poëtes des XIIe et
XIIIe siècles, qui contribuèrent pour une large part à la
formation définitive du langage méridional, désigné sous le
nom de langue romane.
On appelait Troubaïre, trouvères, ceux qui chantaient
dans la langue d'Outre-Loire. Cette qualification est pour-
tant employée pour désigner aussi les poètes du Midi. La
région d’Alais compte trois troubadours romans qui ontété
l'objet d'une étude publiée dans les Mémoires de la Société
scientifique et littéraire d’Alais, t. XI, 1880, p. 429-451.
Ce sont Azalaïs de Porcairargues, Clara d’Anduze, et Pierre
de Barjac.
On sait que les poètes méridionaux de nos jours ont
adopté la qualification de Félibres.
Dér. de Trouba, trouver.
Troubaïo, s. f. Trouvaille, découverte, invention; idée
originale.
Dér. de Trouba, trouver.
Troucho, s. f. Truite, truite commune, Sa/mo-fario,
Linn. Ce poisson, qui varie beaucoup selon l’âge et les eaux
dans lesquelles il vit, se distingue surtout par les taches
noires ou brunes et rouges sur les flancs, qui tigrent le fond
bleuâtre, blanc, jaune doré ou même brun foncéde sa peau.
C’est le meilleur de tous les poissons qui fréquentent nos
rivières, Quelques sujets atteignent, dans le Gardon, le
poids de six kilogrammes.
Trougno, s. f. Trogne, figure bouffie, rouge et luisante,
qui caractérise habituellement les ivrognes et les goinfres
de profession. — Faïre la trougno, avoir l'air de mauvaise
humeur, faire la mine, exprimer son mécontentement par
l'expression du visage.
Trouia, v. Fouler les raisins sur la cuye, piétiner,
exprimer le jus des raisins; patauger dans un bourbier. Au
fig. piétiner sur place, être incapable de prendre une résolu-
tion.—Dé qué trouio? pourquoi hésite-t-il ? Trouian, nous
foulons notre vendange.
Dér. du lat. Torcuium, pressoir.
Trouïadoù, ouiro, s. m. et f. Cuve ou fouloire servant
à fouler la vendange.
Dér. de Trouïa, fouler.
Trouïiaïre, s. m. Fouleur de raisins après la ven-
dange.
Dér. de Trouïa, fouler.
Troumpa, vw. Tromper, tricher, duper, causer une
déception. — Aquél bla m'a troumpa, j'ai mal apprécié le
rendement de ce blé, j'aurais cru à une plus grande (ou
TRO
plus faible) quantité de récolte. Sé troumpa, se tromper, se
méprendre, tomber dans l'erreur.
Dér, du catal. Trompar, m. s.
Troumpaïre, arèlo, s. m. et f. Trompeur, trompeuse;
celui ou celle qui trompe, qui induit en erreur.
Dér. de Troumpa, tromper.
Troumpéta, v. Sonner de la trompette; trompeter. Au
fig. divulguer, médire, cancaner. — L'a prou troumpéta
pér la vilo, il l’a passablement répété par la ville.
Dér. de Troumpéto, trompette.
Troumpétaïre, s. m. Trompette, celui qui publie, qui
annonce à son de trompe, dans une ville; trompette muni-
cipal.
Dér. de Troumpéto, trompette.
Troumpéto, s. f. Trompette, instrument à vent, en
métal, clairon militaire. — Au fig. lou troumpéto dé la vilo,
un bavard, une colporteuse de cancans ou de médisances.
Dér. de Troumpo, trompe.
Troumpo-la-mort, s. m. comp. Celui ou celle qui a
échappé heureusement à plusieurs accidents graves pouvant
. occasionner la mort.
Dér. du français.
Trouna, v. Tonner, se dit du bruit de la foudre. Au fig.
Trouna, gronder, maugréer, tempèter. — Ris quan trono,
il ne rit, il ne plaisante jamais. Se dit d’un caractère
sombre, hargneux, atrabilaire.
Dér. du lat. Tonare, m.s.
Trounado, s. f. Court orage, accompagné de pluie. Au
fig. accès de mauvaise humeur.
Dér. de Trouna, tonner.
Trounché, s. m. Mouton ou brebis armés de très-petites
cornes.
Dér. du lat. Truncus.
Trounfle, s. f. Terme de jeu de cartes. Le jeu de la
triomphe. La triomphe est trèfle. — Jogue dé trounfle, je
joue dutrèfle. Au fig. victoire, triomphe.
Dér. du lat. Triumphus, m. s.
Troupèl, s. m. Troupeau, troupe d'animaux de mème
espèce rassemblés en un même lieu. Se dit surtout des ani-
maux domestiques ou de basse-cour. — Un troupèl dé
chivals, débidous, dé moutous, dé pors, dé fédos, dé dindos,
* un troupeau de chevaux, de bœufs, de moutons, de cochons,
de brebis, de dindons. Un troupèl dé mounde, une foule de
gens.
Dér. de Troupo, troupe.
Troupélado, s. f. Une troupe de gens assembiés; une
foule, une multitude. — Uno troupélado d'éfans, une mul-
titude d'enfants. Uno troupélado dé méssorgos, une bordée
de mensonges.
Dér. de Troupèl, troupeau.
Troupo, s. f. Troupe, rassemblement, foule, multitude;
les troupes militaires, les soldats. — És à l& troupo, dins
la troupo, il est militaire, il est soldat.
Dér. du bas-lat. Troppa, m. s.
TRU 639
Troussa, v. Couper, tordre, plier, envelopper.— Troussa
un pérdigal, plier les pattes d'un perdreau, le trousser, le
disposer de façon à être mis en broche.
Dér. de Tro ou Tros, morceau. — Voy. ce mot.
Trousso, s. . Faix ou charge liés dans un gros drap ou
bourén, qui sert à serrer et à transporter de la paille, du
foin, des récoltes encombrantes et légères. — Uno trousso
dé païo, un faix de paille.
Dér. de Troussa, plier, envelopper.
Trouta, v. Trotter, aller au trot. — Y vaï coumo un ase
quan troto, il y va bon jeu, bon argent.
Dér. du lat. Tolutarius, trotteur.
Tru, s. m. Troc, échange. — Tru pér tru, troc pour troc,
échange de deux objets sans soulte ni retour.
Tru, s. m. Avarie, dommage, tare, choc, blessure, con-
tusion, difficulté. — Préne tru, prendre mal, éprouver un
malheur.
Trucal, s. m. Batte, tertre, monticule.
Dér. de True, difficulté à surmonter.
Truéjéto, s. f. Cloporte, insecte aptère, d'environ un
centimètre de longueur, de couleur gris cendré, qui habite
les endroits humides, sous les pierres, les troncs d'arbres
ou autres abris qui le cachent. Au moindre attouchement,
il se roule en boule comme le hérisson, et clot ainsi sa porte,
ne présentant à l'ennemi que la partie la plus résistante de
son corps, formée par une carapace imbriquée; il échappe
mème quelquefois en roulant, s'il se trouve sur un plan
incliné. Cet insecte ne sort que la nuit. Les Latins le nom-
maient Porcellio. Dans certaines localités, on l'appelle
aujourd’hui Porcelet de Saint-Antoine : c'est le mème ordre
d'idées qui lui a valu dans notre pays le nom de Truéjéto
(petite truie), de ce qu'on avait cru lui trouver quelque ana-
logie, bien éloignée sans doute, d'habitudes ou de forme
avec le pourceau. L'ancienne médecine employait le eloporte
comme dépuratif, et en cataplasmes, comme résolutif.
Truëjo, s. f. Truie, femelle du porc. S'applique au fig.
dans le langage populaire, à une femme sale et dégoütante.
— La truèjo a énvéssa lou fdouiè. Se dit d'une maitresse
dont la malencontreuse intervention vient rompre un mariage
qui est sur le point d'être conclu.
Dér. du bas-lat. 7roja, m. s.
Trufa, v. Truffer, bourrer de truffes. — Trufa, ado,
truffé, truffée, parfumé, préparé aux truffes. Sé trufa, se
moquer, railler, tourner en ridicule.
Dér. du bas-lat. Trufare, m. s.
Trufaire, aïro, adj. m. et f. Moqueur, euse.
Dér. de Sé trufa, se moquer.
Trufo, s. f. Truffe noire, Tuber cibarium, Linn. On l'ap-
pelle aussi Rabasso. Les paysans cévenols appellent Tru/o
la pomme de terre, et pour en distinguer la truffe ordinaire,
ils appellent celle-ci trufo négro.
Trufo-mando, s. /. Nom de plante. La garde-robe,
santoline, petit-cyprès. Santolina ehamæcyparicios , Linn.
Sous-arbrisseau d'une odeur forte, qui croit dans les envi-
640 TRU
rons de Nimes. On suppose que, par son odeur, elle écarte les
insectes des étoffes de laine : de là son nom peu mérité de
garde-robe.
Trufo-négro, s. f. comp. — V. Trufo.
Trunle, s. m. Gros, bouffi, ventru. — Un gros trunle,
un gros ventru. Sémblo un trunle, il a l'air d'un ballon, d’une
citrouille.
Dans la basse latinité on appelle Trullus un édifice de
forme ronde et convexe, comme la voûte d’un four ou la
coupole d’un édifice byzantin.
On désignait une partie du palais des empereurs de Cons-
tantinople sous le nom de Trullum. Elle était recouverte
d’un dôme. Le palais de Constantin, à Arles, était aussi
appelé La Trouille ; une des tours du palais des papes d’Avi-
gnon porte le nom de tour de Trouilhas, et plusieurs
châteaux du Languedoc ont aussi reçu la même désignation
qui dérive de la mème origine. Cette appellation s'applique
au palais principal, à l'habitation souveraine d’un empire,
d’une principauté, ou mème, par extension, à l’habitation
principale d’une simple seigneurie, relevant du suzerain.
Truqua, v. Troquer, échanger; heurter, choquer,
frapper ; cogner, heurter contre un obstacle, se faire une
contusion.
Dér. de Tru: — Voy. ce mot.
Truquétéja, v. Chopiner, boire du vin abondamment, à
tout propos.
Dér. de Truquéto, mesure pour le vin. — Voy. ce mol.
Truquétéjaïre, s. m. Celui qui boit du vin à chaque
üistant et à tout propos. Dimin. d’ivrogne, mais ayant une
signification analogue.
Dér. de Truquélo. — Voy. ce mot.
Truquéto, s. f. Mesure pour le vin au détail; huitième
partiede la pinte d'Alais. Celle-ci étant de 4 litre 90, la Tru-
quéto équivaut exactement à 0 litre 2375, soit environ un
quart de litre ou plutôt un verre de vin rempli à rasade.
Tubâou, s. m. Sot, niais, imbécile.
Tucle, s. m. Myope, celui qui a la vue basse. On dit
aussi Sup ou Calu. .
Au XIVe siècle, les rebelles des Cévennes furent appelés
Tuchins, Tucles ou Coquins, sans doute parce qu'ils exer-
çaient de préférence leurs attaques et leurs brigandages à la
faveur de la nuit et des ténébres.
Le village de Vézenobres fut un de leurs principaux re-
paires, et les habitants de cette localité en ont conservé la
dénomination. On dit encore Touch? dé Bénobre, Tuchinsde
Vézenobres, en parlant de cette population.
Tufériè, s. m. Truffier, chercheur de truffes noires.
Dér. de Tuféro, truffe.
Tuféro, s. f. Pomme de terre, Solanum tuberosum,
Linn., plante de la famille des Solanées, dont il existe un
grand nombre de variétés. On l'appelle aussi Trufo. —
Voy. ce mot.
Tuia, vw. Tuer, occire, donner la mort. — Sé tuïa,
prendre une peine excessive pour venir à bout d'une chose.
TUR
Tuiadouù, s. m. Abattoir où l’on tue les animaux de bou -
cherie destinés à la vente.
Dér. de Tuïa, tuer.
Tuio-mounde, s.m. Coupe-gorge, endroit désert et dan-
gereux, favorable à un guet-à-pens.
Dér. de Tuïa, tuer.
Tuio-vèrme, s. m. Premier repas léger que font ordinai-
rement les ouvriers et les paysans, en se levant de grand
matin.
Tulin, s. ». Nom d'oiseau. Tarin, gros-bec tarin, Frin-
gilla Spinus, Temm. Il a le dos vert nuancé de brun noi-
râtre ; la queue et les ailes bariolées de jaune et de noir, le
sommet de la tête noirâtre; tout le reste du corps jonquille,
sauf l'abdomen, qui est blanchâtre, Le tarin vit longtemps
en volière; il est vif et gai, et son chant n’est pas sans
agrément, Il s'apprivoise et s’accouple facilement avec le
chardonneret et le cini, mais surtout avec le canari. De ce
dernier accouplement naissent de très-bons chanteurs.
Par analogie avec le gros bec du Tarin, on dit communé-
ment à Alais, en parlant d’un homme qui a un gros nez :
Quante tulin! quel nez !
Tuno, s. f. Bassin, réservoir, cuve, citerne. Le plateau
qui domine le cours de la Saône et sur lequel est bâti le
couvent des Carmes de Lyon comprend un quartier dit des
Tunes. On y trouve la grande et la pelite Tune.
Ces désignations de quartiers se retrouvent dans l’arron-
dissement d’Alais : las Tunos, dans la commane d’Aujac ;
la Tuno, qui s'applique à un grand détour du lit de la Cèze,
existant jadis dans la commune du Chambon, en aval du
confluent de l’Homol, à l'endroit où l’isthme formé par ce
détour accentué a été coupé pour redresser le lit de la rivière
en amont du moulin du Tourrel ou Tourril. Avant que
cette coupure füt effectuée, le lit de la Cèze formait, sur ce
point, comme un vaste bassin ovale, qui avait valu à ce
quartier le nom de Tuno.
Faire tuno, signifiait, en vieux français, faire ripaille, se
remplir largement l'estomac, considéré comme un réservoir
de bombance,
Dans le langage alaisien, Tuno s'applique aussi à un lieu
éloigné: És én Tuno, il est loin, là-bas, au diable, à
Tunis (?) que l’on appelait Thunes dans le vieux langage
français.
Dér. du bas-lat. Tuna, m.s.
F. dans les Mém. de la Société littéraire, hist. et archéol.
de Lyon, année 1876, p. 483, l’article de M. le baron
Raverat, portant pour titre : Le tènement de Thunes.
Le nom de Concoules, concullæ, petites conques, petits
réservoirs, a la mème origine.
Turgan, s. m. Lotte, Gardus Lotta, Linn., poisson de
rivière qui ne pèse pas au-delà d’une demi-livre (250 gram-
mes) et qui est aussi délicat que la truite. Il a deux barbil-
lons à la mâchoire supérieure, et un à chaque angle de la
bouche; six osselets à la nageoire de l'anus ; le dos tacheté
de noir. Ses œufs sont, dit-on, un poison pour la volaille
UIA
et provoquent l’urticaire chez l'homme, comme ceux du
barbeau. C'est ainsi que Sauvages décrit le Turgan ; mais
Crespon, bon observateur aussi, dans la description qu'il
donne de la Lotte, diffère quelque peu de la précédente, et
prétend d’ailleurs que le nom de Turgan est donné, sur les
bords du Gardon, à la Vaudoise (Cyprinus leuciscus, Bloch.)
qui a le dos rond et brun, le ventre argenté, les nageoires
grises, la caudale et la dorsale marquées de noirâtre avec un
peu de rougeâtre sur les autres, le corps étroit, le museau
un peu proéminent, ne dépassant guère 34 centimètres de
longueur. Ce poisson se multiplie beaucoup ; il est très-fa-
rouche. Sa chair est légère et d’une digestion facile, mais
trop remplie d'arètes. Cette dernière circonstance, qui le rend
désagréable à manger, prouve évidemment que ce poisson
appelé Barbèl, entre le Pont Saint-Nicolas et le Rhône,
n’est pas notre Turgan de la Gardonenque, qui est fort
recherché, qui a peu d'arètes, et serait bien alors, en effet, la
Lotte décrite par Sauvages, dont les qualités s'accordent
parfaitement avec celles que l'on reconnait au Turgan.
Turgno ou Turgo ou Tourigo, s. f. Brebis bréhaigne ou
« stérile; celle qui n'a jamais porté. On dit bréhaigne par op-
position à portière ou brebis portière, celle qui à déjà porté.
Turno, s. f. Caverne habitée; mauvais cabaret, habita-
tion d'apparence misérable ou mal famée.
Tus ou plutôt Tust, s. m. Choc, coup que l’on se donne
en heurtant quelqu'un ou contre un corps dur.
* Dér. de Tusta, frapper, heurter.
UIÉ 641
Tus, pr. pers. Toi.
Tusta, v. Frapper, heurter, Se dit aussi d'un orateur qui
perd la tête, s'embrouille et frappe à tous les coins pour re-
trouver ses idées. — Tusto pér tout, se dit également d'un
homme difficile dans son choix, et qui heurte à toutes les
portes pour trouver une femme à sa convenance.
Dér. du grec Térrw, m. 8.
Tustado, s. /. Coup, choc, heurt, tape, bourrade,
Dér. de Tusta, frapper.
Tustadoù, s. m. Marteau de porte, heurtoir.
Dér. de Tusta, frapper.
Tusto-balustro (A), loc. adv. A la bonne aventure, au
hasard, à la bonne venue, inconsidérément, à l'étourdie.
Tutéja, v. Tutoyer. C'est, dit Sauvages, un raffinement
de politesse qui a introduit, dans les langues européennes
modernes, l'usage de parler au pluriel en ne s'adressant
qu'à une seule personne.
Cet usage n'existait pas jadis. On se tutoyait chez les
Latins, comme chez les Grecs,et comme cela a lieu aujour-
d'hui encore dans les langues orientales, même quand on
s'adresse à des personnes du plus haut rang.
Tutou, s. m. Tuteur. Celui qui dirige l'éducation, l'exis-
tence et les intérêts d’un enfant jusqu'à l'âge de sa majorité.
Un échalas, un support employé pour soutenir les plantes,
les arbres fruitiers, qui fléchissent à cause de leur faiblesse
ou à cause de la grande quantité de fruits qu'ils portent.
Dér. du lat. Tutor, m.s.
[8]
U, s. m. Cinquième voyelle et vingt-unième lettre de
l'alphabet. Dans le dialecte cévenol U s'emploie pour l'ad-
jectif numéral Un. — U pdouqué, un peu, une petite
quantité; un peu de temps, un faible intervalle. Prénès
n'én u, prenez-en un.
Ucre, s. m. Oil, — Y-a ficha ’n cù dé poun din sous
ucres / il lui a donné un coup de poing dans les yeux.
Ugno, s. f. Ugne, sorte de raisin dont il existe deux
espèces : l'Ugne blanche et l'Ugne noire, L'une et l’autre ont
le grain sphérique, qui les distingue de l’Uïado ou Coupado,
dont le grain est oblong.
L'Ugne müûrit de bonne heure; elle est d’une digestion
facile et on la donne aux convalescents.
Via, v. Remplir, tenir plein un tonneau ou un vase con-
tenant du vin, à la suite du déchet qui s'opère par l'évapo-
ration, dans les premiers mois de la mise en fût.
IL est à remarquer que, par un singulier phénomène, cette
évaporation est plus considérable par un temps humide,
avec vent du sud et une forte dépression barométrique,
tandis qu'elle est presque nulle quand souffle le vent du nord.
Uiado ou Coupado, s. /. OEillade. Cette qualité de raisin
non mentionnée par Sauvages est pourtant une des plus
délicates de celles que l'on récolte, ou plutôt que l'on récol-
tait, hélas ! jusqu'à ces dernières années dans le Gard, d'où
elle a presque complétement disparu, comme tant d'autres.
Celles que produisait le territoire de Saint-Jean-du-Pin, près
d'Alais, jouissaient surtout d'une réputation méritée,
Le grain de ce raisin, dont la saveur se rapproche de celle
de l'Ugno, est oblong, à peau fine et délicate.
Uiaje, s. m. Remplissage d'une futaille dont le contenu
a diminué par suite de l'évaporation.
Uiäou, s. ”m. La dent de l'œil ou dent œillère, dont il
existe deux dans la mächoire supérieure, correspondant
au-dessous de l'œil.
Dér. d’Zuèl, œil.
Uié, s. m. OŒillet; petit trou circulaire, bordé d'un
cercle ordinairement métallique et dans lequel on passe le
ferret d'un lacet.
642 ” VAI
Un, uno, «dj. de nombre.On dit aussi w, uno. (Voy. ce
mot.) Quint'uno ! quelle bêtise! quel mensonge! quelle
mystification ! quelle énormité! Mé n'a di uno qué crèmo dou
lun, il m'a raconté, il m'a dit une chose inouïe, incroyable .
Uni, unido, adj. m.et f. Uni, unie. D'une couleur, d’une
nuance uniforme.
Upo, s. f. Huppe, et par extension les sourcils et les
cils. On dit d’une personne affaiblie, percluse : Pot pas léva
l’upo, elle ne peut pas ouvrir les yeux, elle ne peut remuer
ni pied ni patte.
Us, s. m. Usage, coutume, habitude. — Counouïsse lous
us dé l'oustéou, j'ai l'habitude de cette maison, j'en connais
les aitres.
Dér. du lat. Usus, usage.
Usaje, s. m. Coutume, usage, habitude; solidité, durée,
résistance. — Aquélo vèsto m'a fa forço usaje, cette veste a
longtemps résisté à l'usure.
Dér. du lat. Usus, usage.
VAL
Usanço, s. f. Usure, détérioration, déchet.
Dér. du catal. Usansa, m. s.
Uscla, v. Flambler, griller, brûler, roussir. — S'uscla
lous pèous, las ussos, se griller les cheveux, les sourcils.
Dér. du lat. Ustulare, m. s.
Uscla, ado, adj. m. et f. Roussi, flambé, grillé, brûlé.
Usso, s.f. Sourcil. Faïre las ussos, froncer lessourcils.—
Un co dé poun sus l’usso, un coup de poing au front. Fasiè
d'ussos coumo dé brosso, il hérissait ses sourcils d’un air
caurroucé .
Ustancio, s.f. Ustensile, outil, tout ce qui sert au menu
ameublement d’un ménage et principalement de la cuisine,
tels que la vaisselle, la batterie de cuisine, etc.
Dér. du lat. Ustensilia, m. s.
Usunfui, m»,. s. Usufruit, jouissance des récoltes, des
revenus d’un héritage dont la propriété appartient à un
autre.
Dér. du lat, Usufructus, m.s.
y
V, s. m. Dix-septième des consonnes et vingt-deuxième
lettre de l'alphabet. Dans un grand nombre de dialectes méri-
dionaux du Sud-Ouest de la France, le V se prononce b, mais
il ne doit jamais être remplacé par cette derni ère lettre,
dans l'orthographe des mots où il est employé.
Les latins l'employaient pour U dans beaucoup de cas.
Vacanço, s. f. Place ou fonction inoccupées , vacantes,
dépourvues de titulaire.
Vacant, s. m. Un terrain inoccupé, une parcelle non culti-
vée et pouvant servir d'emplacement pour une con struction.
Dér. du lat. Vacantem, m. s.
Vachéïrious, s. m. pl. Les quatre derniers jours du mois
de mars et les trois premiers du mois d'avril, composant une
période que l’on considère, à tort ou à raison, comme étant
souvent fatale aux récoltes, et durant laquelle les gelées
blanches brouissent quelquefois les jeunes bourgeons.
On appelle aussi ces sept jours ous Cavaliès, dénomi-
nation que l'on applique également aux saints grêleurs ou
vendangeurs, tels que Saint-Georges, Saint-Marc, Sainte-
Croix, Saint-Jean et Saint-Médard, dont les fêtes sont décriées
parmi le peuple, à cause des pluies, des grèles, des orages
qui les accompagnent souvent de près ou de loin .
Vacina, v. Vacciner, donner la vaccine.
Dér. du lat. Vacca, vache.
Vacino, s.f. Vaccine; vaccin.
Dér. du lat. Vacca, vache.
Vaïén, énto, adj, m. et f. Diligent, actif, laborieux .
Dér. du lat. Valentem, vaillant: mais il ne s'emploie
plus, en languedocien, avec cette dernière acception.
Vaï-et-vèn, s. m. comp. Va-et-vient. Cette expression
s'emploie avec la mème acception qu'en français. Elle
exprime l’action de se promener de long en large, sans but
déterminé.
Val, s. m. Val, vallée. Ce terme devait être jadis employé
au féminin puisqu'on le retrouve dans les noms de lieu
féminin. La Val, Valborgno, Valérdougo, Valérisclo, Véou-
malo, Valgalgo, Valéiquièiro, etc. — Voy. ces mots.
Dér. du lat. Vallis, m. 8,
Vala, s. m. Fossé, lit de ruisseau, ruisseau lui-même.
Tranchée faite de main d'homme pour défricher un champ,
donner un écoulement aux eaux.— Passa à vala, passer un
champ en friche à tranchées, le défoncer à une grande pro-
fondeur. Dé l'obro, lou vala, c'est par l’œuvre que l’on juge
l'ouvrier. S'én ana coumo un vala, s'éloigner, disparaître,
s’en aller sans dire mot, sans demander son reste.
Dér. du lat. Vallatus, m. s.
Vala-mabhistre, s. m. comp. Fossé ou lit de ruisseau
mayronal, c'est-à-dire d’un ruisseau qui reçoit tous les
autres affluents de la région ou d’un mème quartier de terri-
toire, et dont le sol n'appartient pas aux riverains par
moitié, comme cela a lieu pour les fossés qui formaient limite
divisoire entre deux héritages situés sur un même plan
horizontal; car pour deux pièces de terrain contiguës, mais
situées sur deux plans différents, l'usage veut que la berge
de soutènement, qui borde la parcelle supérieure, appartienne
à cette parcelle, tandis que le fossé creusé au pied de cette
mème berge doit appartenir à la parcelle située en contre-
bas, d’où l’axiome suivant: Ribo d’dou, vala dé-bas,
c.-à-d. la berge appartient au propriétaire d'en haut, le
fossé appartient au propriétaire d’en bas.
VAL
Formé de Vala, fossé, et de l'adj. Mahistre, magistral,
principal ou mayronal.
Valabrégo, s. f. Vallabrègue, village du canton d'Ara-
mon, autrefois situé dans une ile du Rhône qui s'est depuis
soudée à la rive gauche du fleuve. Cette appellation a la
signification de vallée double ou à deux lèvres (brégo), à
cause des deux branches du Rhône qui l'entouraient jadis
et la placaient entre deux rives, l’une orientale regardant
la Provence, et l’autre occidentale en face du Languedoc.
Valâäourio, s. j. Nom de lieu et d'une rue d’Alais orientée
du levant au couchant,et partant de la place de l'Hôtel-
de-Ville pour se terminer à la rue Bouquerie, qui en forme
le prolongement, à partir du carrefour des rues Raymond-
Pelet et du Doyenné.
Dér. du lat. Vallis auraria, vallée ou rue du vent ou de
l'aure.
Vala-ratiè, s. m. comp. Fossé de drainage, creusé en
tranchée dans une pièce de terre marécageuse pour favo-
riser l'écoulement des eaux, et rempli de menues pierres
ordinairement recouvertes de dalles minces.
Composé de Vala, fossé, et de ratiè, pour les rats; fossé
habité par les rats.
Valborgno, s. f. Nom de lieu. Vallée borgne, c'est-à-dire
qui n'a qu'une ouverture inférieure, un seul débouché en
aval, celui d’amont étant clos par des crètes ou des plateaux
élevés. La ville de Saint-André-de-Valborgne, chef-lieu de
canton de l'arrondissement du Vigan, est située dans la
vallée dite Valborgne, formée par la branche du Gardon de
Saint-Jean-du-Gard, qui prend son origine sur le flanc
oriental du Causse ou Calm de l’Hospitalet, et débouche
dans la vallée principale de la Gardonenque, un peu en
amont de Saint-Jean-du-Gard.
Valérisclo, vallée close, a la même origine. — Voy. ce mot.
Formé de Val, vallée, et de borgno, borgne.
Valé, v. Valoir, avoir du prix, du mérite; rapporter,
produire, procurer, tenir lieu, profiter, être utile, aider. —
Sé faire valé, se donner de l'importance. Sé faire bièn valé,
acquérir de l'estime, de la considération, par son mérite ou
sa conduite. Sé faïre mâou valé, perdre par sa conduite l'es-
time deshonnêtes gens Faïre valé uno plaço, s'intéresser à
quelqu’an pour lui obtenir une place, des fonctions qu'il dé-
sire remplir. Pdou-vdou, vaurien, homme de peu de valeur.
Valénço, s. f. Valeur, vaillance; vaillantise.
Valérâougo, s. f. Nom de lieu. Chef-lieu de canton de
l'arrondissement du Vigan, sur la rivière de l'Hérault qui
lui donne son nom. — Valérdougo, vallée de l'Hérault.
(Arauris en latin.)
Valérisclo, s. f. Vallée haute de l'Auzonnet, affluent de
la Cèze, au milieu de laquelle se trouve le village de Saint-
Jean-de-Valériscle qui emprunte son nom. Cette dénomina-
tion offre une signification identique à celle de Valborgno.
Dér. du lat. Vallis clausa, vallée fermée ou close, cette
vallée étant en effet fermée à son orgine par les hauteurs de
Portes.
VAN 643
Valgalgo s. f. Valgalgue, Vallegualga, nom donné à la
vallée haute du ruisseau du Grabieu, affluent du Gardon,
et qui se jette dans cette rivière au nord de la ville d'Alais
après avoir reçu le ruisseau de Bruège. Cette vallée a donné
son nom à deux localités du canton d'Alais-Est, Saint-Mar-
tin et Saint-Julien-de-Valgalgue, situées toutes deux au
passage de l'ancienne voie Régordane, aujourd'hui route
nationale n° 406, de Nimes à Moulins, dont la direction
est sensiblement parallèle, sur cette région, aux cours
du Gardon et du Grabieu entre lesquels elle se trouve
comprise.
A part le ruisseau du Grabieu et ses affluents, cette vallée
large et plate est sillunnée par une multitude de petits
ruisseaux, qui la coupent dans tous les sens et qui lui ont
valu sa dénomination : Valgalgo, Val-das-aïgos ou Val-
éigouso, synonyme de Valiguidiro on Val-éiguièiro, —
Voy. c. m.
C'est à l'origine de cette vallée, au levant du willage de
Saint-Julien-de-Valgalgue, que fut fondé, en 4229, le monas-
tère des religieuses de N.-D. des Fons ou de Sainte-Claire-
d’Alais, de l'ordre de Citeaux, dont il reste encore la chapelle
convertie en filature. Cette abbaye est placée à côté d’une
source abondante qui alimentait le couvent.
Dér. du lat. Vallis aquaria, m. s.
Valiguièiro, s. f. ou plutôt Val-éiguièiro, Vallis aqua-
ria, vallée des eaux, synonyme de Valgalgo. C'est le nom
d’une petite rivière, affluent du Gardon, qui traverse les terri-
toires de Valliguière, de Castillon, de Saint-Hilaire-d'Ozilhan
et de Remoulins. Elle donne son nom au village de Valli-
guière, situé près de sa source, et qui fait partie du canton de
Rem oulins. Elle longe sur une grande partie de son cours
la route nationale n° 86, de Lyon à Beaucaire, qui fut
jadis l’ancienne voie romaine de Nimes à Alba-Helviorum.
Dér. du lat. Vallis aquaria, m. 8.
Vanmalo, ou plutôt Vâoumalo ou Valmalo, s. f. Vallée
mauvaise, dangereuse. On trouve Vanmalo dans la com-
mune de Soustelle, et la Combe de Valmale, aval du
Pont-du-Gard, rive droite. Malaval a la mème origine.
Dér. du lat. Vallis mala, m. 8.
Van, s. m. Van. Appareil en osier qui sert à vanner le
grain et les légumes, à le dépouiller de la balle, des pelli-
cules où menues pailles qui s'y trouvent mêlées.
Dér. du lat. Vannus, m. 8.
Van, s. m. Élan. — Préne van, prendre son élan,
reculer pour mieux sauter. Grand van, pichè co, se dit de
celui qui fait beaucoup d'embarras pour arriver à un mince
résultat. Douna lou van, donner l'autorisation, le ban des
récoltes, du grapillage; élargir le bétail, lui donner la clé
des champs; mettre un prisonnier en liberté; donner la
fuite à l'eau d'un bassin, d'un réservoir; au vin d'une
futaille. Trés mémbres tout d'un van, trois pièces de plain-
pied, dans une maison.
Van, v. Ils vont, trois. pers. plur. du verbe Ana, aller.
— Coumo y van! quelle ardeur!
644 VAO
Vana, v. Vanner, dépouiller le grain des pellicales ou
pailles légères qui y sont mêlées.
Dér. de Van, van.
Vanèlo ou mieux Vanèou, s. f. ou m. Vanneau Vanel-
lus cristatus, oiseau aquatique de l’ordre des Échassiers et
de la famille des Tenuirostres. Il est remarquable par l'ai-
grette longue et noire qui se relève sur le derrière de sa
tête, et il est fort recherché par les gastronomes, sans tou-
tefois mériter l'exagération du dicton : « Qui n’a pas
mangé de vanneau, n’a pas mangé de bon morceau. » Son
nom français, dont le languedocien n’est que la traduction,
lui vient, paraît-il, de ce que son vol, quoique léger, se
fait entendre d'assez loin et imite assez bien le bruit du
van dont on se sert pour vanner le blé.
On appelle aussi Vanèlo, Banèlo ou Gaféto, la mouette
(Larus) en y comprenant les mouettes, mauves ou goëlands,
car des nombreuses variétés de ce genre d'oiseau qui sont
ici de passage et dont plusieurs restent sédentaires sur nos
côtes, on ne saurait trop à laquelle appliquer plus parti-
culièrement ces noms, y compris même le Gabian.
Dér. du lat. Vanellus, m.s.
Vanèlo, s. f. Nonchalance, paresse. — Quinto vanèlv !
quelle paresse ! On emploie aussi ce terme substantivement
dans le sens de paresseux, fainéant.
Vano, s. j. Vanne, couverture, courte-pointe, couverture
de coton ou de laine dont on recouvre un lit. — Dim.
Vanoù, petite couverture, couvre-pieds. Vano piquado,
couverture piquée. Vanne de moulin.
Vanta, w. Vanter, prôner, faire l'éloge, relever les qua-
lités d’un homme ou d’une chose. — Sé vanta, se vanter,
se glorifier, à tort ou à raison.
Dér. du lat. Vanitare, m. sign.
Vantaciou, s. f. Louange, flagornerie, vanterie.
Dér. de Vanta, vanter.
Vantéto, s. m. Vantard, fanfaron. — És un vantéto,
c'est un vantard, un homme qui se glorifie constamment,
qui fait sans cesse son éloge.
Dér. de Vanta, vanter.
Vantouèr, s. m. Éventail.
Dér. de Vén, vent. Régulièrement on devrait dire Vén-
touèr.
Vâougrand, s. f. Nom de lieu, vallée grande ; large vallée.
Vâäoumagno, s. f. Mème signification que Véougrand.
Dér. du lat. Vallis magna, m. s.
Vâoupièiro, s. f. Nom de lieu, dans les communes de
Valleraugue et de Sumène. Localité ruinée, située sur le
territoire de Théziers ; terrier de renards.
Dér. du lat. Vulpes où Vulpis, renard.
Vâourièn, s.m. Vaurien, mauvais sujet, coquin ; homme
sans moralité, sans probité.
Dér. de Vdou et de Rièn, qui ne vaut rien.
Vâouriènaio, s. f. Race de vauriens, famille de coquins,
mauvaise engeance.
Dér. de Vdouwrièn, vaurien.
VÈ
Vâoutres, os, pr. pers. de la 2% pers. plur. Vous. On
l’emploie aussi pour vous doutres, véoutres étant en effet
une contraction de vous doutres.
Comp. de Vous et de Aoutres.
Va-qué-va, adv. Vaille-que-vaille.
Vaquiè, èiro, s. f. et m. Vacher, vachère, celui ou celle
qui prend soin des bœufs ou des vaches, dans un domaine,
ou qui fait métier d'élever les bœufs et les vaches.
Dér. de Vaquo, vache.
Vaquo, s. f. Vache, femelle du taureau. — La vaquo
a bon pè! expression employée par les plaideurs, pour
indiquer qu'ils ont des ressources suffisantes pour soutenir
un procès onéreux. Lou planche dé las vaquos, le plancher
des vaches, la terre ferme. Qué sé fiche la vaquo, mès qué
lou védèl téte! peu importe la mère, si le fils se porte bien!
Parlo francés coumo uno vaquo éspagnolo, se ditd'un homme
ou d’une femme qui ont la prétention de s'exprimer en
français, mais qui ne peuvent y parvenir que d’une manière
très-défectueuse.
Varaïa, v. Roder en tous sens, fureter, chercher, bou-
leverser, brouiller.
Varaïaïre, aïro, s. m. et f. Celui ou celle qui rôde, furète,
brouille et bouleverse toute chose.
Dér. de Varaïa, rôder.
Varaïre, s. »m. Nom de plante de la famille des Colchi-
cacées, qui s'applique à l’Ellébore de toutes les espèces :
blanc, Veratrum album, Linn.; noir, Helleborus niger,
Linn.; vert, Helleborus viridis, Linn. Cette pue fleurit
en hiver et sa racine est vénéneuse.
Varal, s. m. Môlée, attirail, multitude d’affaires, trouble,
désordre, confusion, remue-ménage. — Voy. aussi Rambal.
Variso, s. f. Varice, veine très-renflée qui se manifeste
ordinairement dans les jambes.
Dér. du lat. Varicem, m. s.
Varlé, s. m. Valet, domestique, serviteur; valet deferme,
laboureur; valet de meunier. — Varlé-dé-vilo, valet-de-
ville, appariteur. Un des quatre personnages qui figurent
sous ce nom dans un jeu de cartes. Terme de menuiserie :
instrument en fer qui sert à assujétir une pièce de bois sur
l'établi, pendant qu'on la travaille. À varlé fou pas cham-
bridiro, à un valet on ne fournit pas une domestique.
Dér. du bas-lat. Vassaletus, vassal, subalterne.
Vas, s. m. Mesure de quantité équivalant au nombre
cent. Ce mot s'emploie particulièrement dans les environs
de Nimes, et surtout à Besouce. — Un vas dé cébos, un cent
d'ognons.
Vaso, s. m. Vase, ustensile destiné à contenir une
liqueur ou des grains. Poterie d’ornementation; pot où l'on
tient des fleurs dans les jardins ou sur une fenêtre.
Vè ! interj. Vois ! expression employée pour exprimer la
surprise ou l'admiration. — Où vwè/ oh! vois! Te, vè!
tiens, vois !
Dér. de Ve, seconde personne du futur absolu de l’impé-
ratif du verbe Véire, voir.
VÉI
Védèl, s. m. Veau, le petit de la vache. — Aoura la vaco
amaï lou védèl, se dit d’un homme qui épouse une fille déjà
enceinte. Brama coumo un védél, crièr comme un brûlé,
comme un veau.
Un éboulis de terre ou de mur reçoit aussi, au figuré, le
nom de Védèl.
Dér. du lat. Vetillus, m. 8.
Védéla, v. Vôler, mettre bas un veau. Au figuré s’ébou-
ler. — Aquélo faïsso a védéla, ce mur de soutènement s'est
éboulé.
Dér. de Védèl, veau.
Védélé, s. m. Maladie inflammatoire des enfants.
Védia, v. Altacher les sarments de la vigne aux écha-
las, les provins et les jeunes plants aux tuteurs.
Dér. de Védil. — Voy. ce mot.
V édil, s. m. Lien fait avec un rameau d'osier; brin de
jonc ou de rameau flexible dont on se sert principalement
pour attacher aux échalas les jeunes plants de vigne, les
provins et les jeunes plants aux tuteurs, les branches des
arbres fruitiers en espalier à leurs supports.
Védio, s. f: Le cordon ombilical. — Nousa la védio,
nouer le cordon. Cowpa la védio, couper le cordon.
Les femelles des animaux, qui mettent bas, coupent avec
les dents le cordon sans le lier, et il n'en survient aucun
accident; les enfants périraient si l'on oubliait de faire
cette ligature.
Dér. de Védil, lien.
Véia, v. Veiller, passer la veillée ; se coucher tard.
Se dit de ce qui surnage à découvert dans un liquide quel-
conque, de ce qui surmonte et dépasse le liquide contenu dans
un Vase, — La raquo véio din la cournudo, la grappe
surmonte le moùût contenu dans la cornue. La car véio din
. lou toupi, la viande surmonte le bouillon dans le pot au feu.
Véïado, s. f. Veillée. Le temps que passent, réunis
dansune maison, les parents, amis ou voisins, pendant les
longues soirées d'hiver.
Dér. de Veia, veiller.
Véiéto, s. f. Veilleuse ; lamperon d'une lampe, lampion
d'une lanterne. On dit aussi Véïuso.
Dér. de Véia, veiller.
Véira, $.m. Maquereau, Scomber, poisson de mer très-
connu dans les poissonneries. Il est moins gros dans la
Méditerranée que dans l'Océan. Véira vient du latin Varius,
tacheté, moucheté et de couleur changeante, car le maque-
reau, de jaune qu'il est, change de couleur en sortant de
l’eau, et devient vert-bleuâtre ou irisé.
Véira, v. Il verra. 3e pers. du futur absolu de l'indicatif
du verbe Véire, voir. Tourner, approcher de la maturité,
en parlant des fruits et surtout du raisin.
Véirado, s. f. La saison d'automne ; les approches de la
maturité des fruitset surtout du raisin.
Véire, s. m. Le verre. Verre à vitre, verre à boire, verre
à lunettes, Corps transparent et fragile produit par la
fusion d’un mélange de sable siliceux et de sel ammoniac.
VÉL 645
Depuis quelques années, on fabrique des verres trempés
dans un corps gras et beaucoup moins cassants que le verre
ordinaire.
Dér. du lat. Vitrum, m, 8.
Véire, v. Voir, apercevoir, examiner, observer ; fréquen-
ter. — Vaï, y vése! va, j'y vois clair! Y véï pas pu win
qué soun nas, il ne voit pas plus loin que son nez. Mé n'a
fa vire! il m'a fait la vie dure! N'a jamaï vis lou sourél
qué pér un trou, il n'a jamais rien vu, il ne connait rien,
tout l'étonne. Té vése véni / je vois où tu veux en venir!
Vése pas lou moumén dé parti, je suis impatient de partir,
Qudou a jamaï vis? qui a jamais vu pareille chose? Pér
véire! voyons! Je voudrais bien voir cela.
Dér. du lat. Videre, m. 8.
Véiriè, s. m. Verrier, ouvrier qui fabrique, qui travaille
le verre ; le marchand qui vend des objets en verre.
Dér. de Véire, verre.
Véirièiro, s. f. Verrerie; usine où l'on fabrique les
objets en verre.
Dér. de Vire, verre.
Véiroù, s. m.Vairon, Cyprinus phozinus, Linn., petit
poisson qui recherche les eaux limpides et courantes à fond
graveleux. J1 nage avec grâce et se rapproche souvent des
bords.
Véirun, s. m. et nom propre de personne, Ce nom est
très-commun dans la Lozère et dans la région d'Alais.
Sauvages l'identifie avec le nom d'un saint originaire du
Gévaudan, saint Véran ou Vérain. Nous serions plutôt
tenté de croire que ce mot est une variante de Véiroë,
vairon, petit poisson de rivière de couleur irisée comme le
Véira où maquereau, et que l'on appelle aussi Ravalio, —
Voy. Véiroù.
Dér. du roman Vair ou Vaire, dérivé lui-même du lat.
Varius, de diverses couleurs.
Véissèlo, s. . Vaisselle eten général tous les vases qui ser-
vent à contenir des liquides, tels que futailles ou tonneaux.
Véjan! prem. pers. du pluriel du futur absolu de l'im-
pératif du verbe Vêïre, ou interjection. Voyons! — Véjan
s'ou faras! voyons si tu feras cela! Nous allons voir si tu
auras cette audace!
Vèjo! deux. pers. du sing. du fut. abs. de l'impératif
du verbe Vêire, ou interj. — Vèjo-lou! regarde-le! N'y-
én diguè : Né vos? Vèjo-n'aqui! il l'agonisa d'injures.
Vélo, s. . Voile, pièce de toile forte que l'on attache aux
antennes des vaisseaux pour recevoir le vent et presser la
marche des navires. — Dédou vén, la vélo, suivant le vent, la
voie.
Dér. du lat. Velum, m. s.
Véloù, s. m. Velours, étoffe de soie on de coton à poil
ras et touffu, doux au toucher.
Dér. du lat. Villosus.
Vélouta, v. Velouter, donner à une éloffe tissée les
propriétés, la nature du velours.
Dér. de Véloù, velours.
646 VÉN
Vélouta, ado, adj. m. et f. Velouté, ée; qui est de la :
nature du velours.
Dér. de Véloù, velours.
Vélouté, s. ». Nom de plante de la famille des Synan-
thérées. OEillet d'Inde, Tagetes erecta, Linn. La tige de
cette plante est peu rameuse et porte des feuilles ailées,
d'un vert clair, à folioles linéaires, ponctuées et dentées.
Les fleurs sont radiées, solitaires ; le calice simple à côtes
anguleuses; la corolle d’un jaune éclatant plus ou moins
foncé. Il en existe plusieurs variétés, les unes à fleurs
orangées, rayées de jaune ou veloutées; d’autres à fleurs
doubles. Ces plantes sont originaires du Mexique; elles:
séduisent la vue par la richesse de leurs couleurs, mais
elles exhalent, quand on les touche, une odeur forte et
désagréable.
Vén, s. m. Le vent; air agité, souffle, courant d'air. —
Vaï coumo lou vén, il va comme le vent.
Véna, ado, adj. m. etf. Veiné, 6e; qui présente des
veines de diverses nuances ou de diverses couleurs.
Dér. du lat. Vena, veine.
Vénado, s. /. Veine, filon métallifère; filet d'eau qui
jaillit à travers les rochers.
Vénci, v. Vaincre, surmonter une difficulté; avoir le
dessus dans une discussion ; triompher d'un adversaire, d’un
ennemi.
© Dér. du lat. Vincere, m.s.
Véndéire, éiro, s. m. et f. Vendeur, venderesse. Celui
qui fait une vente.
Dér. de Véndre, vendre. — Voy. ce mot.
Véndimia, v. Vendanger, récolter les raisins.
Dér. du lat. Vindemiare, .m. s.
Véndimiaire, aïro, s. mn. et f. Vendangeur, euse; l’ou-
vrier qui est employé aux vendanges.
Dér. de Véndimia, vendanger. ;
Véndimio, s. f. Vendange; l’époque des vendanges; le
raisin recueilli pendant les vendanges et destiné à la fabri-
cation du vin. — Pér véndimios, au temps des vendanges.
La véndimio sé vén trénto frans, le raisin se vend à
raison de trente francs les cent kilos. Moure dé véndimio,
trogne d’ivrogne, figure barbouillée de raisin,
Dér. du lat. Vindemiare, vendanger.
Véndo, s. /. La vente. Vente, aliénation d’une chose à
prix d'argent; débit de denrées ou de marchandises.
Dér. du lat. Venditus, part. passé de Vendere, vendre.
Véndre, v. Vendre, aliéner. Au fig. trahir. — Sé véndre,
se vendre, recevoir de l'argent ou un bénéfice quelconque
pour commettre une action honteuse, lâche ou indélicate.
Dér. du lat. Véndere, m. s.
Véndu, do, adj. m. et f. Vendu, e. On l'emploie aussi
substantivement. — Un véndu, se disait jadis d’un rem-
plaçant militaire. On l’applique aussi en politique, à celui
qui abandonne son parti et embrasse une cause adverse
pour des motifs d'intérêt.
Dér. du lat. Venditus.
VÉN
Véngu, do, adj. m. et f. Venu, e. — Mdou véngu, mal
venu, qui n’a qu'un développement incomplet. Aquél bla
és mâou véngu, ce blé n’a pas réussi.
Véngudo, s. f. Venue, arrivée. — Un amouriè d'uno -
bèlo véngudo, un mürier vigoureux, qui a jeté des branches
fortes et vigoureuses.
Dér. de Véni, venir.
Véni, v. Venir, arrriver; provenir ; naître, croître: de-
venir. — És véngu, il est arrivé. Vaï vén?, il va venir.
Faï pas qu'ana et véni, il ne fait qu’aller et venir. Soun
gran véniè dé Ginowia, son grand-père était originaire de
Génolbac. És véngu gran, il a grandi.
Dér. du lat. Venire, venir.
Vénja, v. Venger. — Sé vénja, se venger, avoir satis-
faction d’une insulte, d’un outrage.
Dér. du lat. Vindicare, m. s.
Vénjadisso, s. /. Vengeance. On dit aussi Vénjéngo.
Vénjan! prem. pérs. du futur abs. de l'impératif du
verbe Véire. Voir; employé comme interj. Voyons! —-
Vénjan, s'âourés aquél toupé/ Voyons un peu si vous aurez
le front de faire ou de dire cela.
Dér. du v. Vire, voir. — Voy. Véjan.
Vénjando, même signification que Vénjan. — Voy.
ce mot.
Vénjan-véïire! interj. Redondance réduplicative de
vénjan! voyons! traduction littérale de celle qui est
employée en mauvais français, par les gens du peuple :
Voyons-voir !
Véno, s. f. Veine: vaisseau sanguin qui ramène vers le
cœur le sang porté aux extrémités du corps par les artères ;
filon minéral ; raies de colorations diverses qui apparaissent
dans le bois, les terrains, les marbres; petit filet d’eau sou-
terrain. — Mé fas faïre dé vénos! tu me surexcites, tu
m'irrites au plus haut degré, tu m’agaces.
Dér. du lat. Vena, m.s.
Vénta, ». Venter, soufller; venter ou éventer le blé ou
autres grains en le lançant en l’air avec une pelle ou une
fourche en bois pour en chasser la poussière et la balle.
— Sé vénta ou plutôt sé van{a, s’éventer avec un éventail.
Dér. du lat. Ventus, vent.
Véntadouiro, s. f. Pelle ou fourche en bois à fourchons
plats et rapprochés, qui sert à venter ou éventer le bléen
le lançant en l'air.
Dér. de Vénta, venter ou éventer. — Voy. ce mot.
Véntrado, s. f. Ventrée, portée; les petits que les
femelles d'animaux font en une seule fois; la quantité
d'aliments que l'on a absorbée dans un copieux repas.
Dér. de Véntre, ventre.
Véntre, s. m. Ventre; la partie de l'abdomen qui con-
tient les boyaux. — Rampli soun véntre, faire un repas
copieux. Véntras, gros ventre,
Dér. du lat. Ventrem, m. s.
Véntrésquo, s. f. Le petit lard qui recouvre le ventre
et la poitrine du cochon; panse, bedaine.
Dér. de Véntre, ventre.
dot. Éd
ace dat
ET die ARS nr ee TRES
VER
Véntrudas, asso, s. =. et f. Péjoratif de Véntru, do,
ventru, e. Se dit de quelqu'un qui est très-ventru.
Véousage, s. m. Veuvage, état de viduité.
Dér. de Véouse, veuf.
Véouse, 50, s. m”. et f. Veuf, ve. Le mari qui a perdu
sa femme; la femme qui a perdu son mari. — Tirassa
un véouse, se dit d'une jeune fille dont le vêtement s'ac-
croche à un buisson, et qui, par cela même, est, dit-on,
prédestinée à épouser un homme veuf.
Dér. du lat. Viduus, m.s,
Véouso, s. f. Nom de plante. Scabieuse, Scabiosa atro-
purpurea, Linn., et en général toutes les scabieuses. Genre
de la famille des Dipsacées. La Scabieuse des Veuves à été
admise dans nos jardins. On la croit originaire des Indes;
. elle a des fleurs d’un pourpre foncé, avec des anthères
blanches.
Les scabieuses, négligées par les botanistes des premiers
siècles, ont été dotées, par leurs successeurs, de propriétés
qui leur ont valu pendant longtemps une grande répu-
tation, fondée, comme beaucoup d'autres, sur des idées
superstitieuses. La seule dénomination de Scabieuse (de Sca-
bies, gale), en annonçant la vertu curative de la gale, établis
sait déjà une erreur.
Vèr, s. m. Aulne ou vergne, Betula ulnus, Linn.,
Ainu glutinosa, W.; arbre très-commun dans le Gard, le
long des cours d'eau. C’est à cette essence d'arbres que
beaucoup de localités doivent leur nom dans notre région :
La Vernède, la Vernarède ; Vers, Vern ou Verns dans le
Midi; Verneuil et Vernon dans le Nord. Ces noms ont la
même signification qu'en français le terme Aulnaie, qui
désigne un lien planté .d’Auines, comme la Nougarède
indique un lieu planté de noyers; la Pommarède, l'Elzière,
la Felgère, etc., des terrains plantés de pommiers, d'yeuses,
et où pousse la fougère, etc.
Ce genre de plantes, de la famille des Amentacées, avait
été réuni par Linné au bouleau. C'est un des arbres qui vé-
gètent le mieux dans les terres humides et marécageuses,
dont il fait l'ornement et la richesse. Il s'élève parfois jus-
qu’à quinze et vingt mètres. Cet arbre brave également les
. grands froids et les grandes chaleurs. On le trouve depuis
la Laponie jusque sous le soleil brülant de l'Algérie. Pline
dit que, de son temps, on le plantait le long des rivières
pour les contenir dans leur lit. Le bois d'aulne acquiert
en séchant une teinte rougeâtre. Il prend très bien le noir.
Pline et Vitruve assurent que les pilotis d'aulne sont d'une
éternelle durée. L'écorce de cet arbre sert à teindre les cuirs
en noir; on lui attribue de grandes vertus fébrifuges.
Vèr, s. m. Le vert, la couleur verte, — Métre dou vèr,
mettre au vert, faire manger des herbes vertes, au prin-
temps, ‘aux mulets et aux chevaux, pour les rafraichir.
L'an més dou vèr, on l'a mis à la portion congrue, on lui a
rétranché une partie de l'argent dont il disposait mal à
propos.
Dér. du lat. Viridis.
Vèr, Verdo, adj. m. et f. Vert, verte; de couleur verte; ;
VÉR 647
fruit qui n'est pas mûr; bois qui n'est pas sec; vin fait »
avec des raisins insuffisamment mûrs. Au fig. se dit d'un
homme encore vigoureux malgré son âge avancé.
Dér. du lat. Viridis, m. s.
Vèr, prép. Vers, du côté, dans la direction de; cette locu-
tion s'emploie aussi pour désigner une date approximative :
Vèr Nouvè, aux environs de la Noël.
Dér. du lat. Versus, m. 8.
Véramén, adv. Vraiment, en vérité. — Véramén vous
ou dise, je vous le dis en vérité. ,
On dit en latin dans le mème sens : Amen, Amen, dico
“vobis
Vérbal, s.m. S'emploie dans le sens de procès-verbal.—
Lou gardo m'a fa un vérbal, le garde champètre m'a fait
un procès-verbal. Les paysans prononcent souvent Barbal
pour Vérbal.
Dér. du lat. Verbalis, m. 8.
Vérbalamén, adv. Verbalement, de vive-voix. — Ço
qué m'aviè di vérbalamén, vouïèi qué m'ou dounèsse pér
éseri, je voulais qu'il me donnât par écrit ce qu'il m'avait
dit de vive-voix.
Dér. du lat. Verbalis.
Vérbouissé ou Bréségoù, s. m. Nom de plante. Petit
houx, houx frelon, fragon piquant, Ruscus aculéatus, Linn.
Cet arbrisseau, de la famille des Smilacées, croit partout
dans les bois montueux des contrées tempérées de l'Europe,
mais principalement dans le Midi. Il a l'aspect (d'un petit
myrte; les feuilles sont dures, ovales, d'un vert métallique,
piquantes à leur sommet; la tige est du même vert que les
feuilles. Ses baies d'un rouge vermillon ont une sayeur
fade et douceâtre; elles sont de la grosseur d'une petite
cerise, sessiles et collées sur le revers de la feuille. La
racine et les fruits de cet arbrisseau passent pour apéritifs,
diurétiques et emménagogues.
Dér. de Vèr vert, et de Bowässé, buisson, buisson vert:
Vérdastre, 0, adj. m. et f. Verdätre, tirant sur le vert.
Dér. de Vèr, vert.
Vérdé, s. m. Verdet ou vert de gris, oxyde de cuivre.
Dér. de Vér, vert.
Vérdé ou Argnè, s. m. Nom d'oiseau, Martin-Pécheur,
Alcyon, Alcedo ispida, Temm. C'est le plus bel oiseau
d'Europe qui, par ses magnifiques couleurs, peut rivaliser
avec les plus brillantes espèces des tropiques. On l'appelle
Vèrdé, à cause des teintes verdâtres qui chatoient sur sa
robe d'azur, et Argnë, de ce que l'on a cru qu'en le
mettant desséché dans une armoire, son odeur en chassait
les teignes /Arnos); mais loin d'en préserver les étoffes de
laine, on voit souvent, dans les collections d'oiseaux em-
paillés, l'Argnè être un des premiers atteints par ces
insectes.
Vérdéja, v. Verdoyer, verdir, reverdir, tirer sur le
vert.
| Dér. de Vèr, vert.
Vérdiè, s. m. Verdier, nom propre d'homme et nom d'oi-
seau. Verdier, plus souvent appelé Vérdun. — Voy. ©. m.
648 VER
Vérdoù, s. m. Verdeur, verdure; saveur du via qui est
vert, c’est-à-dire composé avec du raisin incomplètement
mür; vigueur de la jeunesse.
Dér. de Vèr, vert.
Vérdun, s. m. Nom d'oiseau et nom propre d'homme,
Verdier, gros bec verdier; Fringilla Chloris, Temm.
Le mäle a toutes les parties supérieures, la gorge et la
poitrine d’un vert jaunâtre et le ventre jaune; la femelle
est d’un gris cendré, légèrement teint de verdâtre en-dessus.
De tous nos oiseaux des ehamps, le verdier est peut-être le
plus facile à prendre, à quelque piège que ce soit, et celui
qui s’apprivoise le plus aisément. A peine. prisonnier, et
semblant ne pas s’apercevoir de sa captivité, il se met à
manger et à faire entendre son ramage éclatant et varié. 1]
parvient à prononcer quelques mots. On l’appareille avec
le canari, et les mulets qui en proviennent sont les plus
estimés pour la vigueur et pour le chant.
Vère ou Vèri, s. m. Verrat, cochon mâle et entier ;
escargot de grande taille et non comestible.
Le cochon domestique descend du sanglier, qui ne se
rencontre plus vivant dans nos contrées; mais il en existait
encore dans nos bois au siècle dernier, comme l’attestent
plusieurs documents.
Dér. du lat. Verres, m, s.
Vérgnièiro, s. /. Nom générique donné à la foule des
petits poissons de rivière que l’on appelle le fretin, parmi
lesquels sont comprises les espèces qui ne grandissent point,
telles que : la Loguo, le Véiroù, l'Ase, le Gofi ou gou-
jon, etc.
Vérgo, s. f. Verge, baguette, badine, gaule.
Dér. du lat. Virga.
Vérgougno, s. f. Honte, vergogne, timidité. — Faire
vérgougno, faire honte, inlimider. Acù és uno vérgougno!
c'est une chose honteuse! Déourias avé vérgougno! vous
devriez être honteux !
Dér. du lat. Verecundia.
Vérgougnoüs, ouso, adj. m. etf. Honteux, timide, qui
éprouve un sentiment de pudeur naturelle. — Siègues pas
vérgougnoùs! ne sois pas timide.
Dér. de Vérgougno, timidité.
Véri, s. m. Venin, poison; malice, haine concentrée. —
À dé vèri, se dit d'une personne naturellement méchante
et vindicative. Le brou de la noix.
Dér. du lat. Venenum, m. 8.
Vérinado, s.f. Eruption, enflures ou pustules qui survien-
nent sur diverses parties du corps et notamment aux lèvres,
à la suite de diverses circonstances, et qui sont souvent attri-
buées à des causes imaginaires. Sortes de fluxions érésypé-
lateuses produites quelquefois par une secousse morale, un
effroi violent éprouvé d'une manière inattendue, le contact
de certains sucs de plantes ou de substances vénéneuses.
On donne aussi le nom de Vérinado à l'Euphorbe des
moissons, Euphorbia vegetalis.
Dér. de Véri, venin.
VÉR
Vérinoüs, ouso, adj. m. etf. Venimeux, euse; véné-
neux, euse. — Uno èrbo vérinouso, une plante vénéneuse,
Uno bèstio vérinouso, un animal venimeux.
Dér. de Véri, venin.
Vérma, v. Diminuer, abaisser; lâcher, laisser retomber
peu à peu; amoindrir. — Lou toupi a vérma, le potage a
diminué. Lous jours vérmou, les jours décroissent. Laïsso
vérma, laisse retomber peu à peu. Vérma lous gages,
diminuer les gages, le traitement.
Vèrme, s. m. Ver, nom donné indistinctement à tous les
animaux à sang blanc qui rampent sur la terre ou qui
vivent dans le corps de l’homme, des animaux, des fruits,
des plantes, etc.
Tuïa lou vèrme, faire le matin une petite collecte de la
plus grande simplicité, un repas succint, arrosé d’un verre
de vin, Frustulum. «
Dér. du lat. Vermis, m. s.
Vèrména, ado, s. m. et f. Vermoulu, attaqué, rongé
des vers; véreux, en parlant des fruits.
Dér. de Vèrme, ver.
Vèrménoüs, ouso, adj. m. et f. Véreux, euse; rongé
des vers; vermoulu; sujet aux vers.
Dér. de Vèrme, ver.
Vèrminado, s. f. Maladie vermineuse causée par une
invasion vermiculaire fréquente chez les enfants en bas-
àge.
Dér. de Vèrme, ver.
Vèrmino, s. f. Vermine, toute espèce de vers et par
extension tous les insectes qui pullulent sur les personnes et
les objets malpropres ; tels que poux, puces, punaises, etc. ;
les gueux, les mendiants, les gens de basse extraction, les
vagabonds, etc. — Aquél éfan a la vèrmino, cet enfant a
une maladie vermineuse; il est attaqué des vers.
Dér. de Vèrme, ver. :
Vèrmiou, s. m». Kermès, gallinsecte, que l’on recueille
sur le petit chène vert épineux Quercus coccifera, Linn.,
et que l’on appeile aussi graine d'écarlate. Il sert à préparer
la couleur rouge la plus estimée avant la découverte de la
cochenille. — Vérmioù est évidemment le diminutif de
Vèrme, Ver, bien qu’on puisse le prendre pour la traduction
littérale de Vermillon, qui, du reste, a sans doute la même.
origine.
Vérnarédo, s. f. Terrain ou région complantée d'aulnes
(Vèrno en languedocien). Nom propre de lieu équivalent
comme signification à l'appellation française Au/naie.
Plusieurs localités du Gard portent ce nom dans lequel ont
été introduites certaines variantes : La Vernarède, com-
mune du canton de Génolhac; La Vernède, hameau et
fermes de l’arrondissement d'Uzès et de Nimes; Vers, com-
mune du canton de Remoulins; Verns, hameau de la
commune du Chambon, et peut-être même Hiverne, hameau
de la commune d’Aujac.
Dér. de Vèrno, aulne.
Vérquièiro, s. f. La dot d’une fille.
RTE DT
VÈS
< Ceterme, défiguré dans bien des endroits, dit Sauvages,
pourrait bien être, en dernière analyse, Vérguiètro, comme
on leprononce dans certaines localités. Or, Vérguièiro n'est
pas bien loin de Virguièiro, qui se rapproche du lat. Virgo,
fille; d'où on aurait fait, dans la basse latinité, Vérqueria,
pour indiquer ce qui appartient à une fille, son apanage,
sa dot.
. « Mais il est plus simple de prendre Vérquièiro dans
. J'acception de la basse latinité Vercheria, terme qui, dans
un ancien titre cité par Ducange, signifie une portion de
champ ou d’héritage, un fonds de terre : Volumus quod
qui habent vineas, hortos vel Vercherias. .... »
. . Vértél, s. m. Fusaïole; peson de fuseau. Bouton en bois,
en verre, en poterie ou en métal qui sert de volant au
fuseau et le fait tourner plus longtemps.
Cet objet remonte à la plus haute antiquité. On en
trouve dans les stations préhistoriques, gauloises et ro-
maines.
Dér. du lat. Verto, je tourne.
Vértu, s. f. Force, vigueur, robusticité, en parlant de
. l'homme, des animaux et des plantes; propriété, efficacité
en parlant des choses.
Dér. du lat. Virtus, m.s.
Vérturioüs, ouso, adj. m. et f. Fort, vigoureux, robuste,
résistant.
Dér. de Vértu, force, vigueur.
Vès, prép. Vers, dans la direction, chez, auprès, du
côté de, — Démore vès la plago dé l'Abadiè, j'habite près
de la place de l'Abbaye. Anas vès vosto tanto, allez chez
votre tante. L'aï vis qu'anavo vès Anduso, je l'ai vu
allant dans la direction, du côté d'Anduze.
Dér. du lat. Versus, m. s.
Vès ou Bès, s. m. Nom de plante. Bouleau blanc,
Betula alba, Linn., genre de la famille des Amentacées. Les
bouleaux et les aulnes (Alni) forment, d'après Tournefort,
deux genres distincts que Linné avait conservés dans ses
premiers ouvrages : il les a ensuite réunis et le langage de
nos pays les rapproche et les confond quelquefois. Aujour-
d'hui la plupart des botanistes modernes les tiennent
séparés.
L'écorce du bouleau sert à diverses préparations. La sève
de cet arbre est, de toutes les substances végétales, celle
qui fournit le meilleur moyen d'imiter le vin de Champagne,
qu'on falsifie à Londres et à Hambourg avec diverses baies,
surtout celles du myrtillus.
Le Vs, comme la Vèrno, a donné son nom à diverses
localités du Gard. — Voy. Vérnarédo.
Vès, Vers, village du canton de Remoulins. — Cébo dé
ès, oignons de grosse taille que l'on récolte sur le territoire
de Vers. — Bés ou Bez, village du canton du Vigan;
Bessèges, dans l'arrondissement d'Alais; les hameaux
de Besses, Bessède, Bessières, Bessettes, dans le Gard;
Bessas, dans l'Ardèche, etc.
Dér. du lat. Betula, bouleau.
VES
Vési, ino, s. m. et /. Voisin, ine; qui est situé ou qui
habite à proximité d'ane autre chose on d’une autre per-
sonne. Proche, touchant, contigu. — L'aïgo és un mari
vési, le voisinage des cours d'eau est dangereux,
Dér, du lat. Vicinus, m. s.
Vésia, ado, adj. m. et f. Délicat ou douillet; mignard,
mièvre, — Acû ’s un vésia, c'est une poule mouillée, un
mignard. Un parla vésia, un langage mignard et affecté.
Un éfan vésia, un enfant gâté. Faï la vésiado, c'est une
minaudière, une sucrée,
Dér. de l'it. Vezzoso, mignon.
Vésiada, v. Choyer, gâter, soigner, dorloter, traiter avec
délicatesse, — Sé vésiada, se soigner avec trop de délica-
tesse, se dorloter. Vésiada un éfan, élever un enfant trop
délicatement, avec trop de complaisance.
Dér. de l'it. Vezzeghiare, m. s.
Vésiadamén, ado. Avec trop de délicatesse, de mignar-
dise.
Dér. de Vésiada, dorloter, soigner.
Vésiaduro, s. f. Mignardise, délicatesse affectée. — N'és
pas maldou qué dé vésiaduro, il n'est malade que par trop
de bien-être. On dit d'un cheval fringant : Crébo dé
vésiaduro, il! gambade, il folâtre parce qu'il est trop dru.
— La vésiaduro lou gagno, il commence à s'enorgueillir.
Dér. de Vésiada, soigner, dorloter.
Vésinaje, s. m. Voisinage, proximité; l'ensemble des
habitants logés dans le mème quartier d'une ville ou d'un
village.
Dér. de Vési, voisin.
Vésinéja, v. Se fréquenter entre voisins; être en bons
rapports avec les gens de son voisinage.
Dér. de Vési, voisin.
Vésito, s.f. Visite; action d'aller voir une personne par
déférence, par civilité, par devoir, par amitié; visite de
médecin; inspection, recherche, perquisition. ‘
Véspiè, s. m. Guépier, nid de guèpes formé de plusieurs
rayons horizontaux et superposés, reliés entre eux à la
partie centrale. On dit au figuré : Bouléga low véspié,
susciter des querelles; réveiller le chien qui dort.
Dér. de Vèspo, guèpe.
Vèspo, s. f. Guèpe; mouche carnassière et fragivore
dont il existe plusieurs variétés. Comme les abeilles, dont
elles sont une élégante mais mauvaise copie, celles qui
vivent en société ne font point de provisions pour l'hiver;
aussi, après de terribles discussions intestines, qui boule-
versent les guépiers, la faim et le froid les font d'ordinaire
presque toutes périr,
Quelques femelles fécondées, qui échappent au désastre
et se remisent pendant l'hiver dans quelque trou, suffisent
pour former, au printemps, une nouvelle colonie et perpé-
tuer cette race toujours trop nombreuse. Le Grdoule ou
frelon est la plus grosse et la plus mauvaise espèce de
guèpes.
Dér. du lat. Vespa, m. 5.
650 VÉT
Vèsprado, s. f. Le soir, la vesprée en vieux fr., la
soirée, la veillée. — Nous sèn pérménas touto la vèsprado,
nous nous sommes promenés toute la soirée. Véndraï vous
véire din la vèsprado, je viendrai chez vous dans la soirée.
Dér. de Véspre, soir.
Vèspre, s. m. Soir. — Lou vèspre, le soir. Dé vèspre,
ce soir. Bon véspre, bonsoir, bonne soirée. Rouge dé vèspre,
bèou tén déou èstre, ciel rouge le soir, espoir de beau temps.
Dér. du lat. Vesper, m.s.
Vèspros, s. f. p. Les Vèpres. Vèpres, partie de l'office
religieux qui se dit ou se chante dans l'après-midi.
Dér. du lat. Vesper, dér. de Vesperæ, et sous-entendu
horæ ou horæ vespertinæ. On les disait anciennement à six
heures du soir.
Véssa, v. Verser, se répandre par les bords. Se dit d’une
liqueur qui se répand d’elle-mème d’un vase trop plein.
— Lou toupà vèsso, le bouillon, l’eau du pot se répand. On
verse une liqueur d’un vase dans un autre en inclinant le
vase qui la contient.
. Dér. du lat. Versare.
Véssaro, s. m. Vesce cultivée, vesceron ou vesce sau-
vage, blanche ou brune, Vicia sativa. Vesce à feuilles
étroites, Vicia angustifolia. Plante de la famille des Papil-
lonacées. — Voy. Vésso, vesce.
Vésso, s. f. Vesce (Vicia). La vesce fournit un excellent
fourrage; on la cultive pour la nourriture des bestiaux.
Les tiges, lorsqu'elles ont été battues, sont encore bonnes
pour nourrir les moutons. Cette plante sert aussi à fertiliser
les terres : pour cela il faut la renverser avec la charrue,
lorsqu'elle est en fleurs. Cet usage était connu des Romains.
Les graines servent particulièrement de nourriture aux
pigeons.
Dér. du lat. Vicia et de Vincire, lier, à cause des tiges
grimpantes et des vrilles qui caractérisent cette plante.
Vésti, s. m. — Un vésti, un vêtement. Bos vésti, bois
en grume, dont l'écorce n'a point été enlevée. Bla vést?, blé
. dont la balle est adhérente au grain.
Dér. du lat. Vestire, vêtir.
Vésti, do, adj. m. et f. Vêtu, vêtue. — Bièn vésti, bien
vêtu, vêtu avec soin. Se dit au fig. de celui qui a une belle
fortune. Véstà dé sédo, un porc, un pourceau, ainsi désigné
par un jeu de mots rappelant les soies qui forment la
fourrure de cet animal.
Dér. du lat. Vestire.
Vésti, v. Vêtir, revêtir, habiller; fournir des vêtements.
Dér. du lat. Vestire, vêtir.
Vèsto, s. f. Veste, sorte de justaucorps sans basques qui
compose le vêtement supérieur des paysans méridionaux.
Dim. Vèstélo, Vèstouno, petite veste.
Dér. du lat. Vestis.
Véto, s. f. Ruban étroit et grossier, ordinairement en fil
de chanvre ou de soie de rebut, servant à attacher les
cheveux, les vêtements.
Dér. du lat. Vitta, bandelette. — Voy. Cabie.
VIC
Vézénobre, s. m. nom propre de lieu. — Voy. Bénobre.
Vi, s. m. Vin, liqueur extraite du raisin fermenté. — y4
dé prénso ou dé déstré, vin de pressurage.
Dér. du lat. Vinum, m.s.
Viaje, #. s. Voyage, la route que l'on parcourt pour se
rendre d’un lieu à un autre. — Un viaje dé fé, une char-
retée de foin. Viaje blan, course inutile. On dit aussi: un
viaje, une fois. Aquéste viaje, cette fois. Un doutre viaje,
une autre fois. Lou grand viaje, le dernier voyage, la mort.
Dér. du lat. Viaticum.
Viâouiè, s. m. Violier ou giroflée. Genre de la famille
des Crucifères. Le nom vulgaire de giroflée est une cor-
ruption de yep, main (prononcez Khir), et de flos, fleur.
L'espèce la plus connue est la giroflée jaune ou violette
(Cheiranthus cheiri, Linn.), cultivée dans les jardins et dont
l'odeur approche de celle de la violette.
Viâoulé, s. m. Violet, la couleur violette. Lou vidoulé,
le violet.
Viâäouléto, s. f. Violette, Viola odorata, Linn., genre
type de la famille des Violariées, d’une odeur suave. Cette
plante croît également dans le Nord et dans le Midi, aux
lieux couverts, dans les prés, les bois, le long des haies.
Elle était en grande vénération chez les Athéniens, qui la
nommaient Jon. Pour justifier cette étymologie, les poètes
grecs ont prétendu que Jupiter, ayant métamorphosé en
génisse la belle Jo, fit naître la violette pour lui procurer
une pâture digne d'elle.
Viäouloun, s. m. Violon, instrument de musique en
bois et à quatre cordes dont on joue avec un archet.
Patience-violon, Rumex pulcher, Linn., genre de la
famille des Polygonées, caractérisée par ses feuilles radi-
cales en forme de violon, qui croit communément sur le
bord des routes et dans les lieux incultes.
Dér. de l’ital. Violino ou Violone, m.s.
Viâoulouna, v. Violonner, jouer du violon.
Dér. de Vidouloun, violon.
Viâoulounaïre, s. m. Celui qui joue du violon.
Dér. de Vidouloun, violon.
Vibre, s.m. Castor, bièvre, en latin Fiber. Quadrupède
amphibie qui tend à disparaître, traqué par les chasseurs
dans toutes les parties du monde. Ce n'est que par une
très-rare exception qu’on rencontre encore quelque castor
égaré sur les bords du Gardon ou du Rhône, où-on le
voyait assez souvent autrefois; et c'est en vain qu'on ÿ
chercherait des traces de leurs constructions modèles.
Notre savant et éminent compatriote, M. J.-B. Dumas, le
célèbre chimiste, a choisi pour emblème un castor construi-
sant sa maison, avec cette devise en exergue: Quéou travaïo
faï soun mas, celui qui travaille édifie sa maison, allusion
délicate au modeste point de départ de ses propres destinées.
Vicàri, s. m. Vicaire, le prêtre qui aide et remplace au
besoin le curé dans l'exercice de ses fonctions. On dit aussi
ségoundari.
Dér. du lat, Vicarius.
VE «+
VIË .
Vice, s. m. Vice, défaut, ruse, adresse, malice, four-
berie. — Aquél éfan a dé vice, cet enfant est rusé, madré,
roué pour son âge. Un chival qu'a dé vice, un cheval vicieux.
Dér. du lat. Vitium, m. s.
Vicious, s0, adj. m. et f. Vicieux, rusé, madré, mali-
cieux, fourbe. Se dit d'un traité, d'un contrat qui manque
de quelque formalité essentielle.
Dér, du lat. Vitiosus, m. s.
Vidasso, s. f. Existence pénible, misérable; mauvaise
vie, vie de débauche, — Michanto vidasso! triste exis-
tence !
Augm. et péjor. de Vido. — Voy. c. m.
Vido, s. f. Vie, existence; état des tres animés, tant
qu'ils ont en eux le principe ‘des sensations et du mouve-
ment; l'intervalle de temps qui s'écoule entre la naissance
et la mort d'un être vivant. Au fig. la conduite et les
mœurs. — Faïre la vido, avoir une conduite débauchée,
Cérea sa vido, mendier pour vivre. Dé ma vido vidanto,
avièt pa vis acù/ jamais de la vie, au grand jamais, je
n’avais.été témoin d'une chose semblable!
Dér. du lat. Vita, vie.
Viédase ou Aoubèrgino, s. m. Aubergine melongène,
Solanum melongena, Linn. Plante de la famille des Sola-
nées, dont le fruit est un aliment fort agréable, C'est une
grosse baie, très-lisse, allongée, ordinairement de couleur
violette, quelquefois jaune. Selon Hasselquist, les Poma so-
domitica de la vallée du Jourdain, près de la Mer morte,
seraient les fruits du Solanum melongena ; mais c'est une
erreur, ces fruits appartiennent à l’Asclepias gigantea,
Linn. Cette plante, très-commune dans les jardins pota-
gers du midi de la France, est originaire des Indes ; c'est la
Mérinjano des Provençaux. On apprête ses fruits de diffé-
rentes manières, en leur adjoignant, le plus souvent, ceux
du Solanum licopersicum, Linn., ou pomme d'amour.
Le nom de viédase donné à ce légume lui a été attribué
par analogie avec sa forme particulière : Veretrum asini.
Au fig. Viédase, se dit d'an homme dissimulé, faux, d'un
Viédase! inter. Peste! diantre! fichtre !
Vièièsso, s. f. Vieillesse, Age avancé. Mot français tourné
en languedocien.
Vièïje, s. m. Décrépitude, en parlant des personnes;
vétusté, en parlant des choses. — Mourèi dé vièije, mou-
rir de vieillesse. On dit aussi Viéiounge.
Dér. de Vial, vieux.
Vièio, s. f. Vielle, instrument de musique à clavier dont
jouent ordinairement les mendiants de la Savoie.
Vièïun, s. m. Vieillesse avancée, décrépitude. — Foy.
aussi Vidije et Viéiounje.
Vièl, ièïo, s. et adj. m. et f. Un vieux, une vieille, an
homme, une femme d'un âge avancé. La viéto disiè toujour
qué vouñà pa mouri, une certaine vieille femme disait tou-
jours qu’elle ne voulait pas mourir, (sous entendu : parce
qu’elle était bien aise de connaître toutes les inventions
VIG 651
nouvelles qui se produisent journellement). Pdoure, vil et
maldou! pauvre, vieux et malade! trois des pires conditions
de l'humanité réunies sur un seul individu,
Vije, s. m. Rameau, pousse, scion d'osier, dont on fait
des ouvrages de vannerie; la plante elle-même, laquelle
est une variété du saule, qui forme le genre type de la
famille des Salicacées.
En botanique, l'osier est appelé saule hélix, Satis halis,
Linn, On l'emploie avec avantage pour fixer, par ses
racines, les sables mobiles, et fixer les berges le long des
cours d'eau. Ses rameaux longs et pliants servent de liens.
On en fabrique des paniers, des corbeilles d'un usage très-
répandu. La piqüre d'un insecte, le Cynips du saule, occa-
sionne, vers l'extrémité des rameaux, une excroissance
rougeâtre, en forme de tête écailleuse, qu'on nomme rose
de saule, et que l'on retrouve sur le saule marceau. C'est
encore sur cette espèce et plusieurs autres qu'on trouve le
beau Capricorne à odeur de rose, Cerambixz moschatus, Linn.
Il existe encore diverses sons-variétés de cet arbuste,
telles qué l'osier rouge ou verdiau, l'osier brun, l'osier
jaune ou amarinier, etc.
D'après Servius, le nom latin du saule, Salis, sioninit
de Salire, monter, parce que le saule croît très-vite; selon
Theis, du celtique Sul, proche, et Lis, eau. -
Vijèiro, s. f. Oseraie, saulaie, saussaie. Lieu planté
d’osiers ou de saules de toute espèce. Ces plantations sont
fréquentes sur les bords du Gardon où elles servent de
défense contre les crues torrentielles de cette rivière. On
dit aussi Sdouzédo.
Dér. de Vige, osier.
Vignâou, s. m. Vignal ou garde-vignes, employé muni-
cipal chargé de garder la vendange, au moment de la
maturité du raisin, Au moyen âge, les gardiens des récoltes
portaient surtout le nom de bagné, bannier (bannerius),
dérivé de ban, criée publique, proclamation, défense. Ce
terme est aussi employé comme nom propre d'homme,
Dér. du bas-lat. Vinearius, en vieux fr. Vigoau.
Vigno, s. f. Vigne, Vitis, Linn. Genre type de la
famille des Vitifères. Arbrisseau sarmenteux conau de tout
le monde et dont le fruit produit le vin.
L'époque à laquelle remontent la connaissance de Ja vigne
et l'usage du vin se perd dans la nuit des temps. La Bible
en fait honneur à Noé. D'autres veulent qu'Osiris, le
Bacchus des Grecs, ait trouvé la vigne dans les environs de
Nysa, dans l'Arabie-Heureuse, d'où il l'aurait transportée
dans les Indes.
Les Phéniciens, qui parcouraient souvent les côtes de Ja
Méditerranée, en introduisirent la culture dans les iles de
l'Archipel, la Grèce, la Sicile, en Italie et dans le territoire
de Marseille. De là, elle s'étendit progressivement dans les
Gaules, où elle occupait déjà une partie des côteaux de nos
départements méridionaux, lorsque Domitien fit arracher
toutes les vignes qui croissaient dans la Gaule, à la suite
d’une année où la récolte du vin avait été aussi abondante
652 VIL
que celle du blé était chétive et misérable. Cette destruction,
qui remonte à l'an 92, dura deux siècles entiers, et ce n’est
que sous le règne de Probus que l'interdiction fut levée.
Deux cents ans après, la reproduction de la vigne avait fait
de rapides progrès dans nos pays, et s'était même avancée
dans le nord de la Gaule. Les vins de France sont de
beaucoup les plus estimés du monde et, certains crûs ont
acquis une renommée universelle et incontestée.
Le terrible fléau dit Phylloxera vastatriæ, qui a pris nais-
sance sur le territoire de Pujaut (Gard), vers l’année 4862,
et qui continue depuis lors ses ravages, a presque entiè-
rement détruit les vignes de nos contrées méridionales et
menace de s'étendre sur toute la France et sur les pays
circonvoisins. L'avenir seul prouvera que la reconsti-
tution de la vigne par les plants américains, essayée sur
une large échelle, peut nous rendre cette source de richesses
dont nous sommes privés depuis si longtemps.
Les principales espèces de raisins de nos contrées portent
les noms vulgaires suivants :
Baraqué. Musca-grè.
Bèouno. Paièirés.
Blanqué. Péoure.
Claréto-blanquo. Picholo méno.
Claréto-roujo.
Coulidor-roussé.
Coulidor-vérdäou.
Coupado-blanco.
Coupado-roujo.
Coupado (grosso) négro.
Dalican.
Du
Éspar.
Éspiran où Aspiran ou Piran
Gamé ou Larda.
Gamé négre.
Granaïrôou.
Grè.
Gragnoou.
Larda où Gamé.
Madéléno.
Moulan.
Musca-blan.
Musca-négre.
Picopoulo bourélo.
Picopoulo calosso.
Picopoulo fialaïro.
Picopoulo (grosso ou far-
nouso)
Picopoulo (pichoto).
Rasin dé pocho.
Rousérgù.
Sadoulo-bouviè.
Sdouro.
Téré-calos.
Téré (gros).
Téré (pichd).
Téré rouje.
Ugno blanco.
Ugno négro.
Ugno d'Éspagno où
Ugnélo rousso.
Ugno d'Usès.
Vignoü, s. m. Petit carré de vigne.
Dér. de Vigno, vigne.
Vilagnè, s. f. Vilenie, saleté, ordure, grossiéreté, impo-
litesse; action mauvaise; propos indécents; femme de mau-
vaises mœurs.
Vilaje, s. m. Village, agglomération d'habitations d’une
faible importance, mais supérieure à celle d'un simple
hameau,. et ordinairement habité par des cultivateurs et
des propriétaires fonciers. — Vilajas, gros village. Vila-
joù, petit. village.
Dér. du bas-lat. Villaticum, m. s.
VIO
Vilèn, èno, s. et adj. m. et f. Un ladre, un avare. —
Quand un vilèn s'alargo, tout y vaï, il n'est chère que de
vilain. Dans certaines localités des Cévennes, on appelle le
diable : lou vilèn. 4
Vilain, e, adj. m. et f. Rustre, grossier, sale, malpropre,
désagréable, fächeux, avare. — Hou/ lou vilèn! oh! le
vilain! se dit à un enfant qui touche ou fait des saletés.
Dér. du bas-lat. Villanus, et du lat. Villa, métairie.
Vilèn-mèrle, s. »#. Un homme désagréable, mal élevé,
grossier, grincheux, mauvais-coucheur, acariâtre, rageur.
Vilo, s. f. Ville, agglomération considérable d'habita-
tions disposées par rues et jadis entourées de remparts et de
fossés. — Vilasso, grande ville ordinairement peu agréable.
Viloto, petite ville assez agréable.
Il faut bien se garder de traduire le latin Villa, métairie,
maison de campagne, hameau, par le mot français ville.
Vinaïgra, v. Vinaigrer, préparer, accommoder, assai-
sonner un mets avec du vinaigre. — Décourals à la vinai-
grado, des poivrons à la vinaigrée, préparés au vinaigre.
Dér. de Vinaïgre, vinaigre.
Vinaïgrado, s. f. Plat de légumes assaisonnés à l'huile
et au vinaigre; sorte de salade.
Dér. de Vinaïigre, vinaigre.
Vinaïgre, s. m. Vinaigre, vin devenu acide, employé
comme condiment dans les usages de la table et de la cui-
sine où dans la parfumerie. Mot composé de Vin, vin et
aïgre, aigre. — Pisso-vinaïgre, individu acariâtre, aigre
dans ses relations, dans ses manières, dans ses paroles,
mauvais coucheur, d'humeur difficile. Mot composé, dér.
de pissa, pisser, et vinaïgre, vinaigre.
Vinaïgre! interj. Cette onomatopée est employée comme
encouragement à travailler plus vite; à presser le mou-
vement soit dans le travail, soit dans un exercice du corps,
tel que le saut à la corde que les enfants pratiquent en
hiver.
Vinaje, s. m. Au moyen-âge, droit seigneurial perçu sur
le vin. Addition d’une certaine quantité d'alcool à un vin
faible pour lui donner un degré suffisant. Pot de vin payé
à celui qui fait conclure un marché.
Dér. de Vin, vin.
Vingt, adj. num. Vingt, nom de nombre correspondant
à vingt unités.
Dér. du lat. Viginti. — Voy. Cén.
Vinoüs, s. m. Sorte de champignon de couche, de couleur
vineuse.
Dér. de Vin, vin.
Vinoüs, s0, adj. m. et f. D'une couleur vineuse, rou-
geâtre, approchant de celle du vin.
Dér. de Vin, vin.
Vinténo, s. f. Une vingtaine d'objets, vingt environ.
Dér. de Vin, vingt.
Viou, vivo, adj. m. et f. Vivant, e; vif, vive, alerte,
éveillé, pétulant. — Aïgo-vivo, eau vive au moment où elle
sort de la source; fid viou, un feu ardent. Mé taïère én
VIR
_jusqu'dou viou, je me coupai jusqu'à la chair vive, Viou/
interj. Vite! dehors! à la porte!
Dér, du lat. Vivus.
Viôouiè, s. m. Giroflée, — Voy. Vidouié.
Viôure, v. Vivre; être vivant; subsister; se nourrir. —
Aï pér vioure, j'ai de quoi vivre, j'ai des revenus suffisants
pour me nourrir et m’entretenir. *
Vioure, s. m. Nourriture, aliments, ce qui sert à la
nourriture de l'homme, provisions de bouche, comestibles;
façon de vivre, habitudes. — Sdoupre-vioure, savoir-vivre,
éducation.
Vira, v. Tourner; se mouvoir circulairement; retour-
ner dans un autre sens. — Vira dé caïre, tourner de côté,
mettre de champ. Vira dé biaï, placer commodément, dans le
sens voulu. Lous doubricès virou, les abricots commencent
à mürir. Vira cabosso, vira canturlo, devenir fou, insensé,
perdre la boule. Vira l'aïgo, détourner lecours de l'eau,
arroser une planche de jardinage. Vira l'aste, tourner la
broche. Vira lous iuèls, loucher. Lou rasin aïgre mé faï
vira las déns, le raisin qui n’est pas mûr m'agace les dents.
Viro dé piquo, il tourne pique. Au fig. c'est le moment où
les coups vont pleuvoir. Vira lou quiou, tourner le dos,
s'en aller, rompre avec quelqu'un. Vira casaquo, changer
d'opinion ; abandonner une idée, un parti, pour en suivre
un autre. Vira lou troupèl, détourner le troupeau de la
direction qu'il a prise. Vira lous cantoùs, tourner les coins,
arrondir les angles. Ës countén coumo qué tout vire, de
quelque façon que les choses marchent, il se déclare satis-
fait.
Dér. du lat. Gyrare, tourner.
Virado, s. f. Le tournant d'un chemin, d’une rue; action
de tourner, de se retourner. Au fig. émotion, secousse, effroi ;
maladie violente qui éprouve fortement, mais qui dure peu.
Dér. de Vira, tourner.
Viradouiro, s. f. Petite pelle ou spatule de fer ou de
cuivre percée de trous, comme une écumoire, et qui sert à
retourner ou à retirer la friture de la poële.
Dér. de Vira, tourner.
Viraire, s. m. Celui qui tourne le volant d'une machine
d'imprimerie, la roue d'un cordier, la meule d'un coutelier.
Virairo, s. f. L'ouvrière employée au tour qui sert à
dévider la soie.
Dér. de Vira, tourner.
Viro, s. f. La retourne dans le jeu de cartes; la carte
que l'on retourne pour faire connaitre l'atout. — Viro dé
piquo! c'est le moment propice pour recevoir des taloches ;
c'est à présent que les coups vont pleuvoir.
Viro-bourdouiro, s. f. comp. — Sé métre dé viro-bour-
douïro, se coucher la face contre terre ; se mettre à l'envers.
Viro-col, s. m”. comp. Torticolis; refroidissement ou
affection rhumatismale qui empêche de tourner le cou sans
éprouver une douleur plus ou moins vive.
Comp. de Viro, tourne, et de Col, cou.
Viro-froumage, s. m. comp. Culbute, chüte à l'envers,
VIR 653
comme celle d'un fromage frais que l'on retourne sur une
assiette pour le servir,
Viro-gâou ou Viro-gâouto, s. m. comp. Soufllèt rude-
ment appliqué. — Y'a baïla un viro-gdou, il lui a admi-
nistré un soufllet, une giffle.
Comp. de Viro, tourne, et de Gdou pour gdouto, joué.
Viro-passo, s. f. comp. Culbute, virevolte; tour que
l'on fait sur soi-même, sans changer de place. — Faïre la
viro-passo, faire la culbute,
Dér. de Vira, tourner, et de Passa, passer.
Viro-sourél, s. m. comp. Nom de plante. Tournesol
Helianthus annuus Linn., genre de la famille des Compo-
sées; tribu des radiées. Cette plante est originaire du Pérou;
elle représentait pour les anciens habitants de cette contrée
l'emblème du soleil, c'est-à-dire de l'astre qu'ils adoraïent
comme le père de la nature. L'habitude que nous avons de
la voir fréquemment est cause de notre indifférence à
l'admirer. On ne peut cependant se refuser à lui accorder
une attention bien naturelle qu’elle provoque par sa fleur,
du plus bel éclat, quelquefois d'un pied de diamètre, incli-
née sur sa tige et constamment tournée vers le soleil.
L'hélianthe tubéreux ou topinambour est également une
plante de la même tribu. On la croit originaire du Chili.
Viro-t'én-laï, s. m. comp. Soufllet, gifile, coup de poing
fortement appliqué. Mème signification que Viro-gdou.
Littéralement, cette expression signifie : tourne-toi là-bas
ou de l’autre côté.
Viro-tour, s. m. comp. Virevolte, consistant à tourner
sur place, volte-face. — Faguè un viro-tour et partiqué,
il fit volte-face et partit.
Viroù, s. m. Vrille. Le mot perçoir est impropre, dit
SauvaGes; l'amorçoir est la plus petite espèce de tarière;
le foret est un instrument tout différent de la vrille. L'avant-
clou, la percerette, ne sont pas des termes français acceptés.
Dér. de Vira, tourner.
Virougnèiro, s. f. Vrille de grande dimension, tarière,
bondonnière.
Dér. de Vira, tourner.
Viroula, v. Tourner, tournoyer, rouler, culbuter, cabrioler.
Fréquentatif de Vira, tourner.
Viroulé, s. m. Tourniquet, toton; cabriole, pirouette;
tourbillon formé par les eaux courantes ou dormantes qui
s'échappent ou se précipitent vers le fond, en forme d’en-
tonnoir.
Dér. de Viroula, tourner.
Virouléja, v. Tournoyer, aller de çà de là, sans motif
apparent; s'agiter dans le vide. — Fas qué virouléja’ tu
ne fais que t'agiter en tous sens.
Viroun-viréto, s. m. Géranium ou bec de grue, à canse
de la forme du fruit, genre type des géraniacées. Le caractère
le plus saillant de cette planté consiste dans le fruit qui
présente la forme d’un Jong bec affilé; ce bec est le pro-
longement en crète de cinq capsules réunies autour d'un
axe central.
654 VOS
Notre contrée possède diverses espèces de géraniums,
parmi lesquelles nous citerons le géranium sanguin, le
géranium des prés, le géraninm velouté, le géranium dit
Herbe à Robert, Geranium rubertianum Linn. Les anciens
désignaient ce dernier sous le nom de ruberta, rubertiana,
puis, par altération, rupertiana, robertiana et enfin Herbe
à Robert.
Vis, to, part. passé du verbe Véire, voir. Vu, vue. —
Passo qué l'ai vis! décampe au plus vite!
Dér. de Vére, voir.
Visaja, v. Envisager, regarder en face, entre les deux
yeux et quelquefois d’un air menaçant. — M'a visaja, il
m'a regardé d’un air insolent. Sé visaja, se regarder face
à face.
Dér. de Visaje, visage.
Visaje, s. m, Visage, figure, face.
Dér. du lat. Visus, m. 8.
Visoù, s. m. Prunelles de l'œil; vers qui prennent nais-
sance sur la viande corrompue.
Dér. du lat. Videre.
Vispre, 0, adj. m. et f. Apre au goût, acre. — Aquélo
pruno és vispro, cette prune est pre.
Visproü, no, s. m. et f. Jeune enfant lutin, diablotin,
espiègle.
Vitamén, adv. Vite, rapidement, ‘vivement. — Fasès
aquù vilamén, faites vite cela.
Vite, adv. Vite, promptement, rapidement, vivement.
— Fasès vite, dépèchez-vous, faites vite.
Vitraïre, s.m. Vitrier, l'ouvrier qui pose les vitres.
Dér. de Vitro, vitre,
Vitraje, s. m. Chassis en bois, en fer, en un métal quel-
conque, garni de vitres; l’ensemble des vitres d’un bâti-
ment.
Dér. de Vitro, vitre.
Vitro, s.f. Vitre, plaque on carreau de verre que. l’on
pose à une croisée, à un dôme.
Dér. du lat. Vitrum, verre.
Volo-biôou, s. m. Surnom burlesque donné par dérision
aux habitants de Saint-Ambroix, au sujet desquels a été
inventée une légende dont le récit a fourni le sujet d’un
poème héroï-comique au félibre alaisien Albert ARNAVIELLE.
Composé de Volo, vole, et de Bidou, bœuf ; bœuf qui vole.
Voste, 0, adj. poss. de la 2% pers. du pluriel. Votre,
qui est à vous, qui vous appartient.
Dér. du lat. Vestrum, m. s.
Vostre, s. m. — Lou vostre, le vôtre, ce qui. est à vous,
ce qui vous appartient, votre propriété, votre domaine.
Sès din lou vostre, vous êtes dans vos possessions, vous
cultivez votre domaine.
Dér. du lat. Vestrum, m. s.
Vostre, 0, pron. poss. m. et f. — Lou vostre, la vostro,
le vôtre, la vôtre. Véïc? moun oustéou, vaquè lou vostre,
voici ma maison, voilà la vôtre.
” Dér. du lat. Vester, vestra, vestrum, M. S.
VOU
Voto, s. f. Fête votive ou patronale, qui est une occasion
de réjouissances annuelles dans chaque commune du midi
de la France, telles que luttes, courses de taureaux, bals
champêtres, jeux d'adresse, etc.
Dér. du lat. Votum, vœu.
Votro! interj. Mes compliments! Votre serviteur!
Vouè ! interj. Ouais! Vraiment!
Vougué, v. Vouloir. — Féou vougué, il faut vouloir.
On dit aussi Voulé. — Voy. ce mot.
Voui, adv. Oui; particule aflirmative opposée à la par-
ticule négative nou, non, et qui sert à affirmer une chose.
Formé par contraction du lat. hoc illud, c'est cela.
Voula, v. Voler, se mouvoir dans l’espace avec des ailes,
courir rapidement. —- Courissiè qué voulavo, il courait si
vite qu'il semblait voler.
Dér. du lat. Volare, m. s.
Voulado, s. f. Volée, l'étendue du vol d’un oïseau entre
deux repos; bande d'oiseaux volant de concert. — Uno
voulado dé pijouns, une troupe, un vol de pigeons. Tira à
la voulado, tirer au vol. Préne la voulado, prendre son
vol, partir. Au fig. une volée de coups de poings ou de bâton,
une tripotée. ù
Dér. de Voula, voler.
Vouladoü, adj. m. Se dit d'un oiseau, d’un volatile par-
venu à l’âge de croissance où il est susceptible de prendre
son vol, où il est capable de voler. — Aoucèl vouladoù,
oiseau prêt à s'envoler hors du nid. On dit aussi Vouladis.
Dér. de Voula, voler. d
Voulaje, ajo, adj. m. et f. Volage, inconstant, changeant,
sans consistance.
Dér. du lat. Volaticum.
Voulaje (Fid). Eruption cutanée très-bénigne et fugitive,
commune chez les enfants en bas-âge, sorte de rougeole.
Voulan, s. m. Grande faucille des moissonneurs .
« Lou voulan dâou ségaïre anavo dé davan. »
Paul GAUSSEN.
Voulastréja, v. Voleter, voltiger en tous sens, s'essayer
à voler, voler à plusieurs reprises, vol pénible d'un oiseau
blessé.
Dér. de Voula, voler.
Voulé, v. Vouloir, désirer d'acquérir, de posséder; dési-
rer, souhaiter. — Mé n'én voulès? vous me gardez rancune?
N'és pa maläou sé voulès, mès sé porto gaïre bièn, à propre-
ment parler, iln'est pas malade, mais iln’en vaut guère mieux.
Dér. du lat. Volere, m. 8.
Voulounta, s. f. Volonté, bonnes dispositions que l'on a
à faire une chose; aptitude, ardeur au travail.
Dér. du lat. Voluntatem, m. s.
Voulountoüs, ouso, adj. m. et f. Doué de bonne vo-
lonté, plein d’ardeur pour le travail, naturellement porté au
travail, à l'étude; obéissant, docile, souple de caractère.
Au fig. qui se plie facilement, flexible comme l'osier
employé dans la vannerie.
ZIN
Voulur, urdo, s.m, et f. Voleur, voleuse; petite aigrette
qui surmonte les graines de certaines plantes, que le vent
fait envoler.
Vou'n, adv. Où. — Vou’n-t-anas? où allez-vous? On
dit aussi Énté-anas? on Ént'anas?
Dér. du lat. Ubi, m. sign.
ZOU 655
Vounze, adj. num. Onze, nombre composé d'une dizaine
plus un.
Dér. du lat. Undecim, m. 8.
Vous, pr. pers. de la 2% pers. du plur. Vous, à vous.
Dér. du lat. Vos, m. s.
Vraï, adj, m. Vrai, conforme à la vérité. — Vraï? Est-
cæ bien vrai? Contraction de Véraï.
S 4
La lettre Y est la vingt-quatrième de l'alphabet. Dans les
idiomes romans, elle n’a pas d'autre valeur que celle de l'i.
Dans les mots français dérivés du grec, on l’emploie de pré-
férence à cette dernière lettre, pour indiquer leur origine.
Dér. du lat. Y correspondant à l'Y grec.
Y, adv. Y, là, dans cet endroit, à cela, à lui, à elle, Ini,
à lui. — Dounas-y dé pan, donnez-lui du pain. Y-anarai,
j'irai. Y pourtaraï, je le lui porterai. Y saraï, j'y serai.
Anas-y, allez-y. Vous y fisés pa, ne vous fiez pas à lui.
Dér. du lat. Z6i, là.
Z
La lettre Z est la vingt-cinquième et dernière lettre de
l'alphabet et la dix-neuvième des consonnes.
Elle a été empruntée au latin qui, lui-mème, l’a prise au
grec Z.
Za! interject. — Za! l'arape, Crac! il le saisit.
Zèou! interj. Mot employé pour exprimer le bruit que
font certains corps durs, secs et solides. — Zèou és parti,
s'és coupa, crac, il est parti, cetobjet s’est cassé, cette élofe
s'est déchirée.
Zingo-zango! s. f. Bruit successif et alternatif comme
celui d'un corps qui frotte ou râcle sur un autre dans nn
mouvement de va-et-vient; secousse imprimée en poussant
et retirant alternativement un objet avec la main.
Zoù ! interj. Cette onomatopée correspond exactement au
Zéou des Provençaux. Cri des foules, pour s'encourager
mutuellement à une manifestation, à une émeute, à des
voies de fait contre un personnage, une assemblée où une
action qui a soulevé l'indignation publique. Les méridio-
naux ont emprunté ce cri à la langue grecque, si fertile en
onomatopées, et qui a laissé bien d'autres traces dans notre
langage.
Dér. du grec Zooç, Zow, élan, essor, croissance, où de
Zaw, vivre.
Alais, 20 septembre 1883.
FIN
- ES DEN TR Lea TC SRE “, las ic) AIR CH
ATOS els woù tabs? sui db à ru — #} de RUNL ra re Ti 2 fi
} tra Pr art: li déurri ill nf LT Hem dome #', VE à Eu LOT bre, rôt à w +
AALA 1 EE ET eur ot tale, % “à "FR
et y: Bu ds ‘4 ist >
+ LRQ" se LA ; v à bent dut ub l pus | PH Lan 4e Hé
ice Ta utérus :!:; CL, fe
Et F [2 ?
L ‘
# \' À,
i ; Là. .
: Ami LEA f CALE)
' Phi (|
r ll Le WTA ot Us th
. Ï Ce pra (1 tir ut ul | AN fe
: j 1 r Ù
Ce ACT Sn ADO UEY À 2 ATEN L 4 an) fai | étés AU SN) ANS F50% ° EH
ven iv AP Dr at UN df à ras STATE a non À Ut TN d 2 V0 AT à a En. ce 1
: 2 ent KE Là WTA TA ET 2 27 COQUE T | LOT L PR LEDUC EL ME ETATS
el Ai D LA 2 |
+ Lu
, Le nuire is SAT Write fre: UA (ETES
À ni snobaniu real we. BH ae 10 alu À
AY soliste DE dis porte sc 0e NAT MALE
( Ê d
n
» £ Lidf
à _ L «
Pr pe ù ; k "2 LS w*
cd ne | L J'HR ste
FCO an: un: 7
à b ) ï
1n ; . …
À u v< æ )
AE "po Lu LA
F N _æ. dur
d LL 2R Cote.
Fe 2e. DAC, ar
BINDING SECT.
SEP 4 4079
RANGS
A Le te
RE rue 1
HN 4 4
ds AUX
="
y
LS
FN
ne
NL
11A
È CUVE
Pass
s '
De
KA fi
ne el