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Full text of "Dictionnaire pour l'intelligence des auteurs classiques, grecs et latins, tants sacrés que profanes, contenant la géographie, l'histoire, la fable, et les antiquités .."

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DICTIONNAIRE 

POUR    UINTÈLLIG  ENCE 

DES  AUTEURS  CLASSIQUES, 

GRECS     ET     L  AT  IN  Sy 

TANT  SACRÉS  QUE  PROFANES. 

TOME    ONZIÈME, 


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DICTIONNAIRE 

POUR    V I NTELLIGENCE 

DES  AUTEURS  CLASSIQUES, 

GRECS     ET     LATINS, 

TANT  SACRÉS  QUE  PROFANES, 

CONTENANT 

LA  GÉOGRAPHIE,  L'HISTOIRE,  LA  FABLE, 

ET    LES    ANTIQUITÉS. 

h  Ê  D  I  Ê 

A     MONSEIGNEUR 

xjsr  jo  izc  JD  jsr  cjsro  jt^je:  XTX, 

Par  M.  SABBATHIER  ,  Profejftur  au  Collège  de  Châlotu-fur-Mame  , 
é*  Secrétaire  perpétuel  de  l Académie  de  la  mime  Ville, 


TOME    ONZIÈME. 

^-^f    r  A  R  I  s  t 

Chez  DELALAIN,  Libraire,  rue  de  la  Comédie  Françoifè.    . 

M.   D  c  c.   L  X X  if:    ;*;....  ,   ' 

.4v«  Affrobation  &  Privilège  du.  Spi»:^  '.;•,-:'•-* 


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A  u  T  ji  E  S.  o  y  y  R  A  G  E  s 

i)U  MÊME    AUTEURf 

J^î  Jk  trouvent'  cheu  le  mime  Lik^ire.   . 

t.^  Effai  Hfflorfquèr  Critique  fur  fOirigîiie  d%  la'PuIflance 
temporelle  des  Papes;  Ouvrage  qui;  a  remporté  le  Prix  de 
l'Académie  Royale.de  Prufle.  Nouvelle  édition.  Broché  iJ^^-io.j^ 

z.^  Le  Manuel  des  Enfans>  ou  les  Maximes  des  Vies  des 
Homme*  Illuftrcs  de  Plutarquc.  i.  y'oL  in-ii..  Relié  xji^-io.f. 

^.^  Recaeil  de  Diflertatipns  fur  divers  fujets  de  THifiotre  dç 
France,  i.  P^ol,  i»-ii. 

4.^  Les  Mœurs,  Coutumes  &  Ufages  des  anciens  Peuples, 
pour  fervir  à  l'Éducation  de  la  Jcuneffe,   }.  f^oL    /a-n,  & 

I.  yoi%  »»-4,«  • 

sS  Les  Exercices  du  Corps  chez  les  Anciens  1  .aulfi  pour 
fervir  à  TÉdi^cation  de  la  JeuneiTe.  z.  f^oL  /»-it.  &  2,»  Fol. 


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AVERTISSEMENT. 

JE  me  flattois  qu'après  ce  que  )'a  vois  dit  dès  les  pemières 
lignes  du  fccoad  volume  de  cet  Ouvrage  ,  le  Publk 
a'appréhenderoic  plus  que  mon  eâcreprife  n'eût  point  de 
fudesbornes.  Il  paroît cependant  que  tout  le  monde  n'eft 
pas  entièrement  rafluré  là-deflus.  11  y  en  a  même  qui 
ifemblent  craindre  que  le  nombre  des  volumes  ne  devienne 
exceflSf.  Qu'on  me  permette  de  le  dire  ,  une  appréhenfioa 
de  cette  efpèce  part  d'un  défaut  d'attention  fur  lai  nature 
des  premières  lettres  de  l'alphabet  &  de  l'abondance  des 
matières  qu'elles  fourniflènt.  11  n'y  a  qu'à  jetter  un  coup 
d'œil  fur  nos  Diâioiînaires  ,  &  Ton  fe  convaincra  facile- 
ment que  dans  prefque  tous  les  quatre  ou  cinq  premières 
lettres  forment  près  de  la  moitié  de  l'ouvrage.  C'eft  d'après 
cette  réflexion  que  le  Leâeur  doit  juger  à  peu  près  de 
retendue  qu'aura  celui-ci.  D'ailleurs  ,  je  le  répète  ,  mon 
intention  eft  de  borner  le  nombre  des  volumes.  Quand 
"même  la  nature  des  lettres  fuivantes  ne  s'y  prêteroit  pas , 
j'y  ferois  contraint  par  la  néceffité  de  ne  pas  répéter  ce 
que  j'aurois  dit  dans  plufieurs  articles  des  premières  lettres, 
auxquels  il  fuffifa  de  renvoyer. 

J'ai  auffi  avancé  dans  l' Avertiflenœnt  du  fécond  voluotie^ 
qu'il  n'y  auroit  point  de  lettre  qui  fournît  autant  que  1^ 
^we  J  i  &  j'çfperg'^ue  je  ne  ferai  poiç«  démientî  fut  ce« 


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ij  AVERTISSEMENT. 

article.  11  eft  vrai  que  la  leccre  C  ne  fera  guère  moins 
abondance  que  la  leccre  A  ;  &  cela  n'eft  point  furprenanr* 
On  peut  remarquer  que  cecce  lettre  dans  nos  Diâionnaires 
les  mieux  feics ,  fournie  prefque  toujours  plus  que  la  lettre 
A.  Cependant ,  dans  celui-ci  elle  ne  donnera  pas  plus  de 
cinq  volumes ,  comme  a  fait  la  lettre  A.  Peut-être  même 
que  le  cinquième ,  qui  formera  le  douzième  volume  de 
rOuvrage ,  contiendra  une  partie  de  la  lettre  D.  Quant 
aux  autres  lettres ,  elles  fe  fuivront  de  prés.  Par  ce  moyen 
je  me  procurerai  à  moi-même  la  fatisfaâion  d*avoir  fourni 
plutôt  ma  carrière.  Les  encouragemens*,  que  je  reçois  fré- 
quemment ,  &  en  particulier  de  ceux  qui  tiennent  le  pre- 
mier rang  dans  la  Littérature  ,  ne  contribuent  pas  peu  à 
me  porter  à  accélérer  ma  marche. 

Quelques  Gens  de  Lettres ,  mais  en  trop  petit  nombre , 
ont  eu  la  bonté  de  m'adreflbr  quelques  utiles  réflexions  fur 
les  premiers  volumes  de  cet  Ouvrage.  Je  leur  en  fçais  un 
^ré  infini ,  &  tels  feront  toujours  mes  fentimens  à  Tégard 
de  ceux  qui  voudront  prendre  la  peine  de  contribuer  à  la 
perfeftion  de  mon  entreprife.  M,  rAbbéCounépée,préfec 
du  collège  de  Dijon ,  qui  fait  fes  délices  de  letude  de  la 
Géographie  ancienne ,  m'a  communiqué  des  remarques  fur 
plufieurs  points  de  cette  fcience  ;  je  m'en  ferviraî  avanta- 
geufement  dans  Toccafion.  Ses  talens  connus  doivent  faire 
défirer  avec  empreflèmenr  la  publication  d'un  ouvrage 
auquel  il  travaille  aduellement.  C'eft  une  defcription  géo* 
graphique  de  la  province  de  Bogrgogoe.  Il  a  pour  Aflbcié 


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AVÉRTISSEME  NT.  ù\ 

dans,  cette  encreprife ,  un  habile  hommc^  M..Béguiliec, 
membre  de  plufîeurs  Académies. 

On  dévoie  imprimer  trois  volumes  pendant  Tannée  177  r. 
Il  feroic  inutile  d'expofer  ici  les  raifons  qui  ont  empêché 
que  la  chofe  n'eût  lieu  ;  mais  il  fera  pris  déformais  des 
mefures  pour  q^ue  Timpreffion  ne  fouffre  plus  de  retard/ 
On  ,va  même  travailler,  à  réparer  la  négligence  de  Tannée 
dernière. 

Les  éditions  de  cet  Ouvrage  commencent  à  fe  multi- 
plier dans  les  païs  étrangers.  On  fent  bien  que  ces  éditions 
contrefaites  ne  fçauroient  être  à  beaucoup  près  auffi  foi- 
gnées  que  celle  que  je  fais  faire  fous  mes  yeux ,  &  à  la- 
quelle je  veille  moi-même.  Pour  avoir  cette  édition  ,  il 
faut  s'adreflèr  à  M.  Delalain  à  Paris.  G*eft  le  feul  Libraire 
qui  en  foit  chargé  aduellement. 

On  mettra  ,  fans  faute  ,  à  la  tête  du  volume  XI II*  la 
lifte  de  MM.  los  Soufcripteurs.  Ceux  qui  n'auroîent  pas 
encore  envoyé  leurs  noms ,  font  priés  de  ne  pas  différer 
davantage. 


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^^^^g  '      '  I 

ApPîiOBA^iolsi  DU  Censeur  Rot  AL. 

J\Ai  la,  par  Tordre  de  Monfeigneqr  le  Chancelier  > 
le  Tome  onzièmçf  d'un,  Manufcrk  ayant  pour  titre  : 
jbiStmnaire  pm  C InteÛt^ence,  des  Aiueuri  Clajfiques  ,  Grecs  & 
Latins ,  tant  Sacrés  :que  Projfknes  >  &  je  crois  que  la  contî- 
liuacfon  de  cer  Ouvrage,  mérite  d'être,  accueillie  favorable-^ 
ment  du  Public.  Donné  a  Paris,' le  ^^9  d'Avril  1770. 

PHILIPPE  DE  PRÈTOT. 


j-  '  f.- 


-.-. .;  .:li.>. 


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DICTIONNAIRE 

POUR    L'INTELLIGENCE 
DES  AUTEURS  CLASSIQUES, 

GRECS     ET     LATINS, 
TANT  SACRÉS  QUE  PROFANES^ 

CONTENANT 
LA  GÉOGRAPHIE,  L'HISTOIRE,  LA  FABLE 

ET    LES    AhT  IQU  ITÉS, 


CH 

H I  A ,  Chia  3  furnom 
de  Diane.  Elle  fut 
ainfi  appellée  da  cul- 
te qu'on  lui  rendoit  à 
Chio,  où  elle  avoii 
nue  ftatue  &  un  temple.  Telle 
étoic  la  faperdition  des  anciens 
Payens  ,  adorateurs  de  Diane  de 
Cluo ,  qu'ils  croy oient  que  fa  fta- 
tue  regardoit  avec  févérité  ceux 
qui  entroient  dans  Ton  temple  >  & 
avec  fatisfaâion  ceux  qui  en  for- 
toient.  Ce  phénomène  paiToit 
pour  un  miracle^  mais  ,  il  n'étoit 
pas  vrai ,  ou  ce  n'étoit  qu'un  efFet 


CH 

de  l'expofitioo  de  la  fiatue,  & 
fur  tout  de  hmagiaalion  des  Ido- 
lâtres. 

CHIBÉROTHABA  ,  Chihc^ 
roUiaba  ,  (a)  terme  Hébreu  ,  qui 
veMt  dire  les  Sépulcres  de  conçu- 
pifcence.  C'eft  le  nom  que  l'on 
donna  à  un  campement  des  Ifraë- 
lites  ,  où  il  en  mourut  un  grand 
nombre  ,  après  avoir  mangé  des 
cailles.  On  croit  que  c'eft  le  mê- 
me campement ,  qui  eft  nommé 
Jetebatha>  Hauteurs  <^e  conçu-* 
pifcence. 

CHIBR ATH ,  Chïbrath ,  me^ 


(«)  Numer.  c.  ii.  v.  34. 

Tm.  XL 


c.  }|.  V.  16. 1%. 


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a       ,        C  H 

fure  de  diftance  chez  les  Hébreux. 
Elle  étoit  de  mille  coudées  Ju- 
daïques ;  ce  qui  revenoit  à  qua- 
torze cens  foixante-huit  pieds  Ko- 
mains  (ix  pouces,  ou  à  deux  (lades 
6c  demi.  La  loi  ne  permectoit  pas 
aux  Juifs  de  faire  plus  de  deux 
Chibraths  ,  un  jour  de  fabbat. 

CHIDNÉENS,  Chidnei, 
peuples  qui  habitoient  aux  envi- 
rons du  Pont-Euxin,  félon  Or- 
phée dans  fes  Argonautes  cités 
par  Ortélius. 

CHIDON[rAirede],-^rtf^ 
Chidon,  {a)  Ceft  le  lieu  où  Aza 
fut  fubitement  frappé  de  mort , 

Eour  avoir  imprudemment  porté  . 
i  main  à  TArche  qui  cHancelok 
fur  fon  chariot.  Dans  le  fécond 
livre  des  Rois ,  cette  aire  èft  nom- 
oiée  'X9^te  de  Nachon.  On  ne 
fçait  fi  Nachon  &'  Chidon  font 
des  noms  d'hommes  ,  ou  des 
noms  de  lieux. 

CHIDORE  ,  Chidorus  ,  {b) 
Xé//«/)oç  ,  rulfleàu  de  la  Macédoi- 
ne dans  TAmphaxitide,  (èlon  Pto- 
lémée  >  qui  l'appelle  Échédore. 
Mais ,-  on  lit  Ghidore  dam  Héro- 
dote. Celui-ci  dit  que  Xerxès  , 
parti  d* Acanthe  pour  fe  rendre  à 
Thermes  ,  avec  fes  trouas  <ie 
terre ,  s'éloigna  du  rivage  ttàver- 
fânt  la  Péonie  &  la  Chreflonie 
au*deflus  du  fleuve  Chidore,  qui 
prenant  fa  fource  dans  la  Chref- 
tonie  )  coule  au  travers  de  la 
Mygdonie  le  long  du  marais  qui 
eft  au-defTus  de  TAxius.  Il  ajoute 
que  lès  Barbares  s'étant  campés 


c  H 

fur  les  bords  du  Chidore  >  ce  fleu- 
ve ne  put  fournir  feul  aflez  d'eau 
à  tant  de  monde  9  &  tarit.  S'il  n'y 
a  point  d'hyperbole  dans  ce  tait , 
nous  en  conclurions  que  le  Chi- 
dore eft  un  torrent  qui  ceflfe  quel- 
quefois de  couler  ,  &  qui  reda 
à  fec  juftement  dans  ce  tems  là. 

M.  de  rifle ,  dans  fon  Atlas  » 
met  la  fource  de  ce  fleuve  dans 
les  montagnes,  de  la  Bifaltie  ,  oii 
il  commençoit  à  couler  vers  le 
nord-oueft  à  travers  la  Chrefto- 
nie  ;  puis  fè  repliant  vers  le  fud^ 
ouefl  ,  il  arrofoit ,  félon  le  même 
Géographe,  Aflbrus ,  Palethre, 
Apollonie  ,  &  Philérus  dans  la 
Mygdonie, &  fejettoit enfin  dans 
l'Axius  »  après  avoir  côtoyé  le 
marais  que  cet  autre  fleuve  for- 
moit  entre  fes  deux  branches  , 
avant  que  de  fe  jetter  dans  le 
golfe  Thermaïque.  Les  Inter- 
prètes de  Ptolémée  nomment  pré-* 
fentement  ce  fleuve  Câlico. 

CHIEN  ,  Canis  ,  Ki/c^r  ,  (c) 
animal  quadrupède ,  le  plus  fa- 
milier de  tous  les  animaux  do- 
Aiefliques. 

L  Le  Chien  eft  peut-être  de 
tous  les  animaux,  celui  qui  a  lej 
plus  d'inftinâ  »  qui  s'attache  le 
plus  à  l'homme  >  ôc  qui  fe  prête' 
avec  la  plus  grande  docilité  à  tout 
ce  qu'on  exige  de  lui.  Son  naturel 
le  porte  à  chafler  les  animaux 
fauvages  ;  &  il  y  a  lieu  de  croire 
que  (i  on  l'avoit  laifl<é  dans  les 
forêts  ,  fans  Tapprivoifer  ,  fes 
mœurs  ne  feroient  guère  difFéren-> 


(«)  Reg.  L.  II.  c.  6.  V.  6.  Parai.  L.  1  (O  Plut.  T.  I.  p.  195  »  339.  Mém. 
I.  c.  \%.  V.  9.  I  de  PAcad.  des  InfcrJpt.  &  Bell.   Letc. 

ih)  Ptolem.  L,  II.  c.  13.  Herod.  L.  1  Tom.  III.  pag.  88 ,  90*  Tom.  IX.  pag, 
VU,  c.  114,117.  Iji.  &  fmiv. 


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CH 

tes  de  celles  des  loups  &  des  re- 
nafds,  auxquels  il  refTemble  beau- 
coup à  l'extérieur  ,  &  encore  plus 
à  Tintérieur.  Mais  en  l'élevant 
dans  les  maifons  ÔC  en  en  faifant 
un  animal  domefiique ,  on  Ta  mis 
à  portée  de  montrer  toutes  fes 
bonnes  qualités.  Celles  que  nous 
admirons  le  plus  ,  parce  que  no- 
tre amour  propre  en  eft  le  plus 
flatté,  c'efl  la  fidélité  avec  la- 
quelle un  Chien  refle  attaché  à 
fon  maître  ;  il  le  fuit  par  tout , 
il  le  défend  de  toutes  (es  forces  ; 
il  le  cherche  opiniâtrement  s*il  l'a 
perdu  de  vue  »  &  il  n'abandonne 
î)as  fes  traces  ,  qu'il  ne  Tait  re- 
trouvé. On  en  voit  fouvent  qui 
redent  fur  le  tombeau  de  leur 
maître  ,  5c  qui  ne  peuvent  pas  vi- 
vre fans  lui.  U  y  a  quantité  de 
faits  trèsfurprenans  &  très-avé- 
rés fur  la  fidélité  des  Chiens.  La 
perfonne  qui  en  efl  l'objet  ,  ne 
poarroit  fe  défaire  de  la  Compa- 
gnie de  fon  Chien  ,  qu'en  le  fai- 
ùint  mourir  ;  il  fçait  la  retrouver 
malgré    toutes    les    précautions 

Qu'elle  peut  employer.  L'oi^ane 
e  l'odorat ,  que  les  Chiens  p^- 
roiflfent  avoir  plusy  fin  &  plus  par- 
bit  qu'aucun  autre  animal ,  les 
fert  merveilleufement  dans  ces 
fortes  de  recherches ,  &  leur  fait 
reconnoître  les  traces  de  leur  maî- 
tre dans  un  chemin  ^  plufieurs 
jours  api^  qu*il  y  a  paiTé  ;  de 
même  qu'ils  diftinguent  celles 
d'un  cerf ,  malgré  la  légèreté  & 
la  rapidité  de  fa  courfe ,  quelque 
part  qu'il  aille ,  à  moins  qu'il  ne 
pafîe  dans  l'eau  ,  ou  qu'il  ne  fau- 
te d'un  rocher  à  l'autre  ,  comme 
on  prétend  qu'il  arrive  à  quel- 


CH  j 

ques-uns  de  le  faire ,  pour  rompre 
les  Chiens. 

L'odorat  du  Chien  efl  un  don 
de  la  nature  ;  mais  ,  il  a  d'au- 
tres qualités  qui  femblent  ve- 
nir de  l'éducation,  &  qui  prou*, 
vent  combien  il  a  d'iqflinâ ,  ma* 
me  pour  d^  chofes  qui  paroiffent 
être  hors  ot  fa  portée;  c'efl  >  par 
exemple ,  de  connoitre  à  la  façt>n 
dont  on  le  regarde ,  ù  on  efl  irrité 
contre  lui,  oc  d'obéir  au  fignal 
d'un  fiipple  coup  d'œil ,  &c.  En- 
fin ,  rinilinâ  des  Chiens  efl  fi 
fur,  qu'on  leur  confie  la  conduite 
6c  la  garde  de  plufieurs  autres 
animaux.  Us  les  maîtrifent  comme 
fi  cet  empire  leur  étoit  dû ,  &  ils  les 
défendent  avec  une  ardeur  &  un 
courage  qui  leur  font  affronter  les 
loups  les  plus  terribles.  L'homme 
s'aflbcie  les  Chiens  dans  la  pour- 
fuite  des  bêtes  les  plus  féroces; 
&  même  il  les  commet  à  la  garde 
de  fa  propre  perfonne. 

Ces  mêmes  animaux,  qui  mon- 
trent tant  de  courage ,  &  qui  em- 
ployent  tant  de  rufes  quand  ils 
chalFent ,  font  de  la  plus  grande 
docilité  pour  leurs  maîtres  ,  & 
fçavent  faire  mille  geniillefles  , 
lorfque  nous  daignons  les  faire 
fervir  à  nos  amufemens.  Tant  & 
de  fi  bonnes  qualités  ont ,  pour 
ainfi  dire  >  rendu  les  Chiens  di- 
gnes de  la  compagnie  des  hom- 
mes ;  ils  vivent  des  refies  de  nos 
tables  ;  ils  partagent  avec  nous 
nos  logemens  ;  ils  nous  accompa- 

fnent  lorfque  nous  en  fortons; 
Infin  ,  ils  fçavent  plaire  au  point 
qu'il  y  a  bien  des  gens  qui  en  por- 
tent avec  eux,  ôc  qui  les  font  cou- 
cher dans  le  même  lit. 
A  ij 


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4  CH 

II.  Les  Grecs  &  les  Romains 
dreflbient  leurs  Chiens  avec  foin, 
Xénophon  n*a  pas  dédaigné  d'en- 
trer dans  quelque  détail  fur  la 
«connoiiTance  &  l'éducation  de  ces 
animaux.  Les  Grecs  fairoient  cas 
de^  Chiens  Indiens ,  Locriens  & 
Spartiates.  Les  Romains  regar- 
doient    les  Molofle#comme  les 

glus  hardis  ;  les  Pannoniens ,  les 
retons,  les  Gaulois,  les  Acar- 
naniens,  &c,  comme  les  plus  vi- 
goureux ;  les  Cretois ,  les  Éto- 
liens ,  les  Tofcans  ,  &c.  comme 
les  plus  intelligens  ;  les  Belges  , 
les  Sicambres  comme  les  plus 
vîtes. 

Il  eft  fait  mention  d'un  peuple 
d'Éthiopiè  ,  gouverné  par  un 
Chien  ,  dont  on  étudioit  Taboie- 
ment  &  les  mouvement  dans  les 
affaires  importantes.  Le  Chien  de 
Xantippe  ,  père  de  Périclès ,  fut 
un  héros  de  la  race.  Son  maître 
s*étant  embarqué  fans  lui  pour  Sa- 
lamine  ,  l'animal  fe  précipita  dans 
les  eaux^  &  fuivit  le  vaiiTeau  à  la 
nage. 

L'attachement  que   quelques- 
uns  ont  pour  le  Chien ,  va  jufqu'à 
la  folie.  Henri  III  aima  les  Chiens 
-mieux  que  fon  peuple.  »  Je  me 
I»  fouviendrai  toujours  ,   dit  M. 
»  de  Sully  ,  de  l'attitude  &  de 
i>  l'attirail  bizarre  où  je  trouvai 
»  ce  Prince  un  jour  dans  fon  ca.- 
.  n  hinet.  Il  avoit  Tépée  au  côté , 
«  une  .cape  fur  les  épaules ,  une 
»  petite  toque  fur  la  tête ,  un  pa- 
»  nier  plein  de  petits  Chiens  pen- 
i>  du  à  fon  coup  par  un  large  ru- 
^  ban  ;  &  il  fe  tenoit  Ci  immobi- 
»  le ,  qu'en  nous  parlant  il  ne  re- 
n  mua  ni  tête ,  ni  pied,  ni  main.  <c 


C  H 

Les  Mahométans  ont  dans  leurs 
bonnes  villes  des  Hôpitaux  pour 
ces  animaux;  6c  M,  de  Tourne* 
fore  aifure  qu'on  leur  laifle  des 
penfions  en  mourant ,  &  qu'on 
paye  des  gens  pour  exécuter  les 
intentions  du  teUateur.  M.  Leib- 
nitz  a  fait  mention  d'un  Chien  qui 
parloit ,  &  rhiftoire  de  ces  ani- 
maux fourniroic  des  anecdotes 
très-honorables  pour  l'efpèce. 

Favin  dit  que  par  jugement  de 
Louis  XII  &  en  fa  prefence ,  un 
Chien  combattit  le  meurtrier  de 
fon  maître  ,  &  en  eut  la  viftoire; 
que  l'hidoire  en  eft  peinte  au  châ- 
teau de  Montargis  ,  &  que  les 
Gaulois  fe  fervoient  de  Chiens  à 
la  guerre. 

Alcibiade  avoit  un  Chien  d'une 
taille  extraordinaire  &  d'une 
grande  beauté ,  qu'il  avoit  acheté 
foixante-dix  mines ,  &  il  lui  fit 
couper  la  queue  qui  étoit  jufte- 
ment  ce  qu'il  avoit  de  plus  beau. 
Ses  amis  s'étant  mis  à  le  gronder, 
&  à  lui  dire  que  tout  le  monde 
parloit  de  cette  aôloh ,  &  le  blâ- 
raoit  extrêmement'  d'avoir  gâté 
un  fi  beau  Chien.  Foilâ  ce  que  je 
demande ,  reprit  Alcibiade  en  en 
riant  ;  je  veux  que  les  Athéniens 
s'entretiennent  de  cela  ,  afin  qu'ils 
ne  parlent  pas  d'autre  chofe ,  6» 
qu'ils  ne  difint  pas  pis  de  moi» 

Sur  les  médailles,  le  Chien  eft 
le  fymbole  commun  de  la  fidélité. 
Il  eft  fur  la  médaille  ^'Ulyffe  , 
parce  qu'il  le  fit  reconnoître  à  fon 
retour  à  Itaque.  On  le  donne  à 
Mercure  à  caufe  de  fa  vigilance  , 
&  de  fon  induftrie  à  découvrir  ce 
qu'il  cherche.  Diano  a  fes  lévriers 
auprès  d'elle.  Quand  il  eft  auprès 


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CH 

d'une  coquille ,  &  le  mufeau  bar* 
bouille ,  il  marque  la  ville  de  Tyr, 
où  le  Chien  d'Hercule  ayant  cro- 
qoé  le  murex ,  en*  revint  le  nez 
tout  empourpré  ^  &  fit  connoître 
cette  belle  couleur. 

III.  On  immoloit  le  Cbîen  à 
Hécate ,  à  Mars  &  à  Mercure.  Il 
étoit   en   grande  vénération  en 
Egypte ,  &  fur  tout  dans  la  pré- 
feâure  Cynopolitaine  ,  qui  en  ti- 
roit  Ton  nom.  Anubis  y  étoit  ado- 
îé  fous  la  forme  d'un  Cbien  ,  te- 
nant un  fiftre  Égyptien  ,  ou  une 
palme  d'une  mam ,  &  un  caducée 
de  l'autre  ,  comme  on  le  voit  dans 
une  médaille  de  Marc-Àurele  & 
de  Faaftine.  On  fçait  qu' Anubis 
avoit  an  temple  à  Rome ,  &  que 
Mundus    corrompit    les  Prêtres 
pour  abufer  -de  Pauline  femme 
de  Saturnin  ,  fous  le  nom  d'Anu- 
bis.  Les  Prêtres  furent  chaffés,  & 
le  temple  fut  rafé.  Les  Mytho- 
logues s'accordent  afliez  à  recon- 
noitre  Mercure  fous  le  nom  d'A- 
nubis.  Le  refped  pour  les  Chiens 
paroît  fondé  fur  ce  qu'Ofiris  &  Ifis 
avoient  un  Chien  employé  à  leur 
garde.  D'autres  rapportent  qu'a* 
près  que  Typhon  eut   aflaffiné 
Ofiris  ,  ce  fut  un  Chien  oui  garda 
le  cadavre  ,  &  qui  conduiut  Ifîs 
jufqu  au  lieu  oii  le  meurtrier  l'a- 
voir caché  ;  &  c'étoit  pour  faire 
paiTer  à  la  poftérité  la  mémoire 
de  la  fidélité  de  cet  animal ,  qu'aux 
cérémonies  célébrées  à  l'honneur 
d'ifis  I  les  Chiens  marchoient  à  la 
tête. 
Si  quelque  Chien  ft  trouvoit 


CH  y 

mort  dans  les  maifons  des  parti- 
culiers ,  tous  les  domediques  fe 
faifoient  rafer  ,  &  en  marquoient 
leur  deuil. 

Les  Romains  facrifioient  tous  • 
les  ans  un  Chien  ,  parce  que  cec  ' 
animal  ri'avoit  pas  fait  fon  devoir  , 
lorfque  les  Gaulois  s'approchèrent 
du  Capitole. 

(a)  IV.  Le  Chien,  dans  l'É- 
criture 9  eft  déclaré  impur  par  la 
loi  ;  &  il  eft  fort  méprifé  parmi 
les  Juifs.  Ils  n'ont  rien  de  plus  in- 
jurieux à  dire  que  de  comparer 
un  homme  à  un'  Chien  mort.  Da« 
yid ,  pour  faire  fentir  à  Saiil  que 
la  perfécution  injufle  qu'il  fouf- 
froit  de  fa  part  »  ne  lui  faifoit  à 
lui-même  aucun  honneur  ,   lui 
dît  :   Qui  pctfécut€{  •  vous  »  roi 
d'Ifraël  ?  Qui  perfécutc^^vous  t 
Vous  perfécute^^  un  Chien   mort^ 
Lorfque  David  fit   l'honneur   à 
Miplubofeth ,  de  lui  donner  fa  ta- 
ble 9   Miphibofeth  en  le  remer« 
ciant  »  lui  dit  :  Qui  fuis- je ,  moi 
votre  ferviteur  ,  pour  mériter  que 
vousjettie^  les  yeux  ^  fur  un  Chien 
mort  comme  mou  Job  dit  que  dans 
fa  difgrace  il  étoit  infulté  par  de 
jeunes  gens ,  aux  pères  defquels  il 
n'auroit   pas  daigné    auparavant 
confier  le  foin  des  Chiens  qui  gar« 
dolent  fes  troupeaux. 

Le  nom  de  Chien  k  met  quel- 
quefois pour  un  homme  qui  a 
perdu  toute  pudeur  ^  pour  un 
nomme  qui  fe  proftitue  par  une 
aâion  abomisable  ;  car ,  c'ed  ainfi 
que  plufieurs  entendent  la  défenfe 
que  fait  Moïfe  en  ces  termes  : 


(«)  Deuter.  c  %%,  v.  18.  Reg.  L.  I.li^.  v.  11.  Ecclefîaflic.  c.  i;.  v.  la.  ad 
c.  24.  V.  iç.  L.  II.  c.  9-  V.  8.  Job.  c.  jcIPhilipp.  Epift.  c.  5.  v.  a.  Petr.  Epift.  %^ 
T.  I.  Plalm.  11.  V.  179  %u  Piofer,  c.|c,  ».  v«  is.  Apocalyp.  c.  xx.  v.  ij. 

A  iij 


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6  G  H 

Vou/  nofirite^  point  darù  ta  mai-^ 
fort  du  Seigneur  votre  Dieu  ,  la 
recompenfe  de  la  proflituée  ,  ni  le 
prix  du  Chien  ,  quelque  vœu  que 
♦  vous  aye^fait  ,  parce  que  Vun  & 
l'autre  efl  abominable  devant  le 
Seigneur  votre  Dieu, 

C'eft  dans  le  oiême  fens  que 
Ton^ntend  ce  que  dit  rEcciéiiafti- 
que  :  (Quelle  paix  y  a-t-  il  entre 
l'hyène  &  la  chienne  ,  c'eft-à-dire, 
entre  Thonime  faint  &  le  méchant 
qui  a  l'impudence  du  Chien, 

On  lit  dans  l'Apocalypfe  : 
Qu'on  laijfe  deh<frs  les  Chiens , 
les  empoifonneurs  ,  les  fornica'» 
teurs ,  les  homicides  &  les  idolâ" 
très  ,  &  quiconque  aime  &fait  le 
menfonge. 

Saint  Paul  donne  le  nom  de 
Chien  aux  faux  Apôtres  ^  à  caufe 
de  feur  impudence  &  de  leur 
avidité  pour  le  gain  fordide.  En- 
fin ,  Salomon  &  Saint  Pierre 
comparent  les  pécheurs  qui  re- 
tombent toujours  dans  leurs  cri-> 
mes ,  aux  Chiens  qui  retournent  à 
leur  vomiflement.  David  com- 
pare audi  fes  ennemis  à  des 
Chiens ,  qui  ne  ceflbient  d'aboyer 
contre  lui ,'  par  leurs  médifances 
&  de  le  mordre  par  leurs  perfé* 
cutions  6c  leurs  mauvais  traite- 
mens. 

On  ne  voit  pas  que  les  Hébreux 
fe  fervifTent  de  Chiens  pour  la 
chaiTe.  Le  gibier  ,  qui  auroit  été 
tué  par  un  Chien ,  auroit  été  fouil- 
lé ,  &  ils  n'auroient  pu  en  £aire 
ufage.  Il  n'eft  fait  aucune  mention 
de  Chiens  quand  il  eft  parlé  de 
chafle  ,  ni  aucune  mention  de 
chaflie  quand  il  eft  parlé  de 
Chiens*  Dans  TOrient ,  on  fe  fer- 


CH 

voit  plutôt  de  lions ,  ou  de  quel- 
ques autres  animaux  femblables, 
qu'un  cavalier  portoit  en  croiipe  , 
ou  devant  lui  à  cheval  ;  Ôc  lorf- 
qu'il  appercevoic  le  gil>ier  ,  il 
ôtoit  une  efpèce  de  bourlet  que 
l'animal  avoit  fur  les  yeux  ;  &L 
dès  que  celui-ci  appercevoit  fa 
proie  y  il  fe  jettoit  deftus  avec  une 
très- grande  agilité.  On  ne  vou- 
droit  pas  cependant  nier  que  les 
Jui&  ne  fe  fervifTent  de  Chiens  » 
pourvu  qu'ils  les  empéchaiTent  de 
tuer  les  animaux  qu'ils  pourfîiî- 
voient  ;  car ,  le  Chien  ne  fouille 
pas ,  tant  qu'il  eft  en  vie. 

CHIENS  DE  CHASSE. 
Voyej;^  ChaiTe. 

CHIFFRE ,  caraSère,  dont  on 
fe  fert  pour  défigner  les  nombres. 
Les  anciens  peuples  fe  font  fer  vis 
de  difFérens  Chiffres.  Les  feuls  en 
ufagè  aujourd'hui  ,  du  moins  en 
Europe  &  dans  une  grande  partie 
de  la  terre,  font  les  Chiffres  Ara- 
bes au  nombre  de  dix  ,  dont  le 
zéro  [o]  fait  le  dixième.  Le  zéro 
s'eft  appelle  pendant  quelque  tems 
du  nom  de  Chiffre ,  Cyphra;  en- 
forte  que  ce  nom  lui  étoit  parti- 
culier. Aujourd'hui  on  donne  le 
nom  de  Chiffre  à  tous  les  carac- 
tères fervant  à  exprimer  des  nom- 
bres ;  &  quelques  Auteurs  refu- 
fent  même  le  nom  de  Chiffre  au 
zéro ,  parce  qu'il  n'exprime  point 
de  nombre  ,  maiîK  fert  feulement 
à  en  changer  la  valeur. 

L  On  doit  regarder  l'inven- 
tion des  Chiffres  comme  une  àes 
plus  utiles ,  6c  qui  font  le  plus 
d'honneur  à  l'efprit  humain.  Cette 
invention  eft  digne  d'être  mife  à 
coté  de  relie  des  lettres  ^  l'ai' 


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CH 

pbabet.  Rien  n'eft  plus  admirable 
que  d'exprimer  avec  un  petit 
nombre  de  caraâères  toutes  for- 
tes de  nombres  &  toutes  fortes 
de  mots.  Au  refte  ,  on  auroit  pu 
prendre  plus  ou  moins  de  dix 
Chiffres  ;  &  ce  n'eft  pas  précifé- 
ment  dans  cette  idée  que  confifte 
le  mérite  de  l'invention  ,  quoique 
Je  nombre  de  dix  Chiffres  foit 
affez  commode.  Le  mérite  de 
l'invention  confifte  dans  l'idée 
qu'on  a  eue  de  varier  la  valeur 
d'un  Chiffre  en  le  mettant  à  dif- 
férentes places  ;  6c  d'inventer  un 
caraâère  zéro  ,  qui  fe  trouvant 
après  un  Chiffre  ^  en  augmente  la 
valeur  d'une  dixaine. 

L'on  fe  fen  des  Chiffres  Ara- 
bes en  Arithmétique  y  en  Algè- 
bre, en  Trigonométrie  &  en  Af- 
tronomie.  Les  Arabes  reconnoif- 
fent  qu'ils  ont  reçu  ces  caraâères 
des  Indiens ,  &  ils  les  appellent 
figures  Indiennes.  On  a  commen* 
ce  à  compter  par  ces  figures  du 
tems  des  Sarrazins  ;  &  on  croit 
que  Planude ,  qui  vivoit  fur  la  fin 
du  XIIIc.  fiecle,  eft  le  premier 
des  Chrétiens  qui  fe  foit  fervi  de 
ces  Chiffres.  Alphonfe  X  ,  roi  <le 
Caftille  s'en  étoit  fervi  avant  lui 
pour  conftruire  fes  ubles  Aftro- 
aomiques. 

Les  Chiffres  Arabes  »  comme 
BOUS  l'avons  déjà  dit ,  (ont  an 
nombre  de  dix  ;  ou  bien  ils  for- 
ment dix  figures.  Les  voici  »  o.  i  • 
2.  3.  4.  5. 6. 7. 8.  9.  Le  zéro  par 
lui-même  ne  fignifie  rien.  Les 
figures  foivantes  marquent  de  fui^ 
te  depuis  un  jufqu'à  neuf.  Quand 
elles  font  plufieurs  accouplées  en- 
ieaible  >  la  première  eft  celle  qui 


CH  7 

eft  à  droite ,  &  en  remontant  de 
droite  à  gauche  ,  elles  croiffept 
toujours  de  dix  ;  de  forte  que  la 
première  en  ce  fens  ne  marque 
que  des  unités  ,  la  féconde  des 
dixaines ,  la  troifième  des  centai* 
nés ,  la  quatrième  des  milles ,  U 
feptième  des  millions ,  &  ainfi  des 
autres. 

Le  Chiffre  Romain  n'avoît  or- 
dinairement que  cinq  figures  «  que 
voici ,  I.  V.  A.  L.  C.  La  premiè- 
re figure  fignifioit  un  ;  pL  multi*- 
pliée  jufqu'à  quatre  ,  elle  faifoic 
II ,  deux  ;  III ,  trois  ;  IIII ,  qua- 
tre. La  féconde  valoit  cinq.  Avec 
les  I  ^  elle  formoit  les  nombres 
jufqu'à  dix  ;  VI ,  {\x  ;  VII ,  fept  ; 
VIII ,  huit;  VIIII ,  neuf.  La  troi- 
fième faifoic  dix  ;  6c  en  y  ajou- 
tant les  précédentes ,  elle  formoit 
les  nonâ^res  jufqu'à  vingt.  Pour 
marquer  vingt  ,  on  la  doubloit 
XX  ;  pour  trente  on  la  triploit 
XXX  ;  &  pour  quarante  joti  la 
répétoit  quatre  fois  XXXX.  La 
quatrième  figure  L  ,  valoit  cin- 
quante ;  &  en  y  ajoutant  les  pré- 
cédentes LX  ,  LXX ,  &c.  on  en 
(brmoit  tous  les  nombres  jufqu'à 
cent, qui  s'exprimoit  par  le  C^ 
qui  eft  la  dernière  figure.  Quand 
elle  étoit  double  CC  »  elle  figni- 
fioit deux  cens  \  triple  CCC,  trois 
cens  ,  &c«  pour  marquer  cinq 
cens  on  accouploit  11  &  le  d 
renverfë  en  cette  manière  io  ;  ôc 
pour  exprimer  mille ,  on  ajoûtoic 
un  C  avant  l'I  de  cette  forte  cid« 
on  l*exprimoit  auffi  par  une  M; 
&  par  la  fuite  on  fit  de  lo  en  les 
joignant  un  D>  pour  fignifier  cine| 
cens.. 

On  trouva  auftl  dans  la  fuiti^ 
Aiv 


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8  C  H 

des  abréviations  ,  qui  confiftenc 
en  ce  que  une  de  ces  figures  mife 
avant  une  autre,  fignihe  le  nom- 
bre de  la  féconde  ,  moins  celui  de 
la  première  ;  par  exemple  IV  fi- 
gnifîe  cinq  moins  un,  c'eft- à-dire,, 
quatre,  IX ,  dix  moins  un  ,  c'eft- 
à-dire  ,  neuf.  XIIX ,  vingt  moins 
deux  ,  c'eft  -  à  -  dire  ,  dix  -  huit. 
XIX,  vingt  moins  un,  c*eft-à7 
dire  ,  dix- neuf.  XL  ,  cinquante 
moins  dix ,  c'eft-à-dire ,  quarante. 
XC  5  cent  moins  dix ,  c*efl-à-dire, 
quatre-vingt-dix.  On  prétend  que 
ces  abréviations  font  récentes ,  & 
qu'elles  ne  fe  trouvent  point  fur 
les  tiuonumens  bien  antiques. 

L  origine  du  Chiffre  Romain 
vient  de  ce  qu'on  a  compté  d'a- 
bord par  les  doigts  ;  de  forte  que 
pour  marquer  les  quatre  premiers 
nombres  ,  on  s'eft  (ervi  de  I ,  qui 
les  repréfente  ;  &  pour  le  cinquiè- 
me ,  on  s'eft  fervi  d'un  V  ,  re- 
préfente en  baiflant  les  doigts  du 
milieu ,  &L  en  montrant  ample- 
ment le  pouce  avec  le  petit  doigt  ; 
&  pour  le  dixième  de  X ,  qui  eft 
un  double  V,  dont  il  y  en  a  un 
renverfé ,  &  mis  au-de(fous  de 
l'autre.  De-là  vient  que  la  pro- 
gredion  dans  ces  nombres  efi  tou- 
jours d'un  à  cinq ,  puis  de  cinq  à 
dix.  Le  cent  fut  marqué  par  fa 
capitale  C.  Depuis,  ou  en  cor- 
rompant les  figures ,  ou  pour  la 
commodité  des  Écrivains  ,  Ton  a 
ajouté  deux  Chiffres  Romains  , 
le  D,  qui  vaut  cinq  cens,  &  l'M , 
qui  vaut  mille  ^  parce  qu'elle  a 
beaucoup  de  rapport  à  l'M  Go- 
thique. Ainfl ,  il  y  a  préfentemenr 
fept  lettres  qui  fervent  à  cette  for-^ 
te  de  nombre. 


CH 

M.  Huet  eft  perfuadé  que  itos 
Chiffres  ordinaires ,  ou  Arabes  , 
ont  été  formés  fur  les  lettres 
Grecques.  Suivant  fon  (éntimenc 
le  ^  a  fervi  à  former  le  2  ;  du  y 
on  a  formé  le  3  ;  du  A ,  le  41  de 
Vi .  le  5  ;  du  0-  ♦  le  6  ;  du  Z ,  le  7  ; 
de  l'H  >  le  8  ;  du  6,  le  9.  Dom 
Calmet  prétend  que  ce  ne  font 
que  les  notes  de  Tiron.  Toute 
leur  preuve  eft  la  reflemblance 
qu'ils  croyent  appercevoir  ,  l'un 
entre  ces  Chiffres  ôc  les  lettres 
Grecques  ;  &  l'autre  entre  ces 
mêmes  Chiffres  &  les  notes  de 
Tiron.  Mais ,  une  marque  que  nos 
Chiffres  font  de  l'invention  des 
Orientaux  ,  c'eft ,  comme  l'a  ob- 
fervé  Valle ,  qu'on  les  fuppute 
de  droite  à  gauche  ,  qui  eft  la 
manière  de  lire  de  plufieurs 
Orientaux. 

IL  Chiffre  fe  dit  aufB  de  cer- 
tains caraâères  inconnus  ,  déguî- 
fés  &  variés ,  dont  on  fe  fert  poar 
écrire  des  lettres  qui  contiennent 
quelque  fecret ,  &  qui  ne  peuvent 
être  entendus  que  par  ceux  qui 
font  d'intelligence  »  &  qui  font 
convenus  enfemble  de  fe  fervir 
de  ces  caraâères.  On  en  a  fait 
une  fcience  qu'on  appelle  Poly- 

raphie  ou  Stéganographie,  c'eft- 
dire ,  écriture  diverfifiée  &  ohC- 
cure ,  laquelle  a  été  inconnue  aux 
Anciens.  De  la  Guilletière  ,  dans 
un  livre  inthulé  ,  Lacédémone 
ancienne  &  nouvelle  ,  prétend  que 
les  anciens  Lacédémoniiens  ont 
été  les  inventeurs  de  l'art  d'écrire 
en  Chiffre.  La  fcytale  qu'ils  in- 
ventèrent ,  fut ,  fdon  lui  ,  l'é- 
banche  de.xet  art  myilérieux* 
C*étoiem  deax.ioâleaux  de  bois 


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CH 

d'une  longueur  &  d'une  épaîflear 
égale.  Les  Éphores  en  gardoient 
un ,  &  l'autre  étoit  pour  le  géné- 
ral d'armée  qui  marchoit  contre 
rennemi.  Chaque  fois  que  ces 
Magiftrats  lui  vouloient  envoyer 
des  ordres  qiJi  fuflent  fecrets  ,  ils 
prenoient  une  bande  de  parche- 
min étroite  &  longue ,  qu'ils  rou- 
loient  avec  jufteiïe  au  tour  de  la 
fcy  taie  qu'ils  s'étoient  réfervée.  Ils 
écrivoient  en  cet  état  leur  inten- 
tion ,  qui  paroifToit  dans  un  fens 
parfait  &  (uivi ,  tant  que  la  bande 
de  parchemin  étoit  appliquée  fur 
le  rouleau.  Mais,  dès  qu'on  la 
développoit,  l'écriture  étoit  tron- 
quée ,  &  les  mots  fans  liaifon. 
Leur  général  po.uvoit  y  trouver 
de  la  fuite  6c  du  fens  ,  en  ajoutant 
la  bande  fur  la  fcy  taie,  ou  rou- 
leau femblable  qu'il  avoit ,  &  en 
lui  donnant  la  4nême  afiiêtte,  où 
les  Éphores  l'avoiem  mife. 

Polybe  raconte  qu'Énéas ,  fur- 
nommé  Taâicus  ,  ramafTa ,  il  y 
a  environ  deux  mille  ans,  vingt 
manières  ^lifférentes  qu'il  avoit  in- 
ventées en  partie  ,  &  dont  on 
s'étoit  fervi  jufqu'alors ,  pour  pou- 
voir écrire  d'une  manière  où  il 
n'y  eût  que  celui  qui  en  fçavoit 
lefecret,  qui  y. pût  comprendre 
quelque  chofe.  Ainfi  ,  Trithême 
n'eft  point  l'Inventeur  de  l'art 
d'écrire  en  Chiffre  ,  ni  même 
Énéas  Taâicus.  Trithême,  &  dôjt 
puis  Jean-Bapcifle  Porta ,  en  ont 
écrit  fort  fçavamment.  Vigenere 
Sl  le   ?•   Niceron-  en  ont  auffi 

CHI-KING[Le],(tf)eftun 


CH  9 

livre  de  poëfie  Chinoiiê.  Ce  livre 
étoit  un  des  ouvrages  dont  Con- 
fucius  faifoit  le  plus  de  cas.  Dans 
les  livres  qui  nous  reAent  de  lia 
&  de  fes  difciples ,  on  le  cite  (ba- 
vent, ÔC  toujours  avec  de  très- 
grands  éloges.  On  donne  ce  nom 
de  Chi-king  à  un  recueil  de  trois 
cens  cinquante  odes  ou  cantiques 
qui  fe  chantoient  dans  les  facrifi- 
ces  &  dans  les  affemblées  pubi- 
ques ,  foit  à  la  cour  des  Empe- 
reurs ,  foit  dans  les  proviiKes. 
Lu-fle-Colao  ou  premier  mimilce 
fous  les  Tchéou  ,  avoit  publié 
une  ample  compilation  de  ces 
cantiques  ,  parmi  lefquels  Coofb- 
cius  en  choifir  trois  cens  cinquan- 
te ,  qu'il  crut  les  plus  propres  à 
porter  les  hommes  à  la  vertu  &  à 
les  inftruire  de  leurs  devoirs.  Ce 
recueil  eft  de  quelque  importan- 
ce pour  la  Chronologie  ,  en  ce  - 
qu'il  nous  a  confervé  la  date  pré- 
cife  d'une  éclipfe  de  Soleil ,  que 
le  calcul  agronomique  confite 
pleinement  ;  mais ,  ce  n'eu  pas  ici 
le  lieu  de  parler  d'un  objet  de 
cette  nature. 

Ce  livre  fut  enveloppé  dans 
l'incendie  général  fous  Chihoang- 
ti  ;  on  le  crut  totalement  perdn 
au  commencement  des  Hane  ;  6c 
pour  y  fuppléer,  on  forma  diffî- 
rens  recueils  des  cantiques  cou- 
fervés  dans  les  provinces.  Le  Loii- 
^hi  ou  recueiF  des  cantiques  da 
royaume  de  Lou  ^  a  été  publié , 
par  Kiéou  -  Léou  -  pé  ,  &  com- 
menté par  Chine-Cong.*  Le  re- 
cueil des  cantiques  du  royaume 
de  Tfi  fut  publié  par  Yene-cou- 


(j)  Mém.  deTAoïd.  des  Infcapt.  &  Bell.  Lett.  Tojn.  XV.  pag.  5)8»  $|9« 


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lo  CH 

feng  y  &  celui  ^u  royaume  de 
Yene  le  fut  par  Hane-yu, 

Cependant ,  il  s'étoit  confervé 
«n  exemplaire  de  l'ancien  Chi- 
king ,  celui  de  Se-hia  difciple  de 
Confucîus.'  La  tradition  nous  a 
tranfmis  les  noms  de  ceux  par  les 
flnains  defquels  il  avoit  pafié  avant 

Se  de  tomber  dans  celles  de 
ao-kane  fon  feptième  poflef- 
feur,  qui  y  ajouta  des  notes.  Il 
y  avoit  déjà  une  préface  ,  qui 
étoit  l'ouvrage  de  Se-hia  lui-mê- 
me. Mao*tchang  petit -^  fils  de 
Mao-kane  ,  &  célèbre  par  fon 
talent  pour  la  verfification ,  revit 
avec  foin  toutes  les  odes,  &  mit  un 
court  argument  à  la  tête  de  cha* 
eu  ne ,  pour  en  indiquer  le  fujet 

L'exemplaire  de  Mao-tchang 
fiit  préfenté  à  l'empereur  Vou-ti 
la  onzième  année  de  fon  règne  ^ 
Fan  130  avant  l'Ère  Chrétienne. 
C'eft  fur  cet  exemplaire  qu'ont 
été  faites  les  copies  du  Chi-king  ; 
&  c'eft  par  cette  raifon  que  dans 
rédition  authentique  du  Che-fane- 
king ,  il  porte  le  titre  de  Mao- 
chi  ,  les  odes  de  Mao  ;  ce  Chi- 
king  6t  bientôt  oublier  le  Lou- 
chi  &  le  Yene-chi.  M.  Fréret 
affure  qu'on  lui  avoit  écrit  de 
Pé-king ,  qu'un  Miffionaire  avoit 
fait  une  traduâion  du  Chi-king , 
qu'il  comptoit  publier  avec  des 
notes  ,  &L  qu'il  étoit  aâuellement 
occupé  à  la  retoucher  ,  ne  vou* 
tant  la  laifler  paroitre  que  lorfqu'it 
lui  auroit  donné  toute  la  pérfec* 
tion  dont  il  fe  crôyoit  capable. 
•  CHILÉUS ,  ChiUus ,  X/Aft;«  » 
(tf)  Arcacfien  >  qui ,  à  ce  que  l'on 

(«}  Plut«  T.  !•  p.  114. 


fô; 


CH 

prétend  »  aida  Thémiftocle  à  af* 
loupir  les  guerres  inteflines  des 
Grecs. 
CHILI  ARQUE,  Ckitiarchûs, 
'  nom  d'un  officier  à  la  cour  de 
*erfe. 
Chiliarque,  feloni'  la  force  da 
mot  Grec  ,  fignifie  un  capitai- 
ne de  mille  hommes  ;  c'étoit  le 
nom  de  pluHeurs  emplois    fort 
différens  chez  les  Perfes.  Le  Chi« 
liarque ,  dans  la  guerre  ,  étoit  un 
emploi  qui  répondoit  à  nos  colo- 
nels felon  Hérodote.  Xénophon  , 
dans  le  huitième  livre  de  ia  Cy- 
ropédie,  donne  ce  nom  à  ceux 

3ui  commandoient  les  troupe» 
efHnées  à  défendre  les  provin- 
ces ;  c'eft  ce  que  nous  appelions 
Commandans. 

Il  y  avoit  auffi  un  Cbiliarque 
dans  le  palais  ,  &  c'eft  de  cec 
officier  que  parle  Cornélius  Nepos 
dans  la  vie  de  Çonon.  Une  de 
les  fondions  étoit  d'introduire  au- 
près du  Roi  les  perfonnes  ,  qu'il 
vouloit  bien  admettre  à  fon  au- 
dience. Cornélius  Népos  n'eft  pas 
le  feul  qui  le  dife.  Élien  nous  ap- 
prend la  même  chofe  dans  fon 
hiftoire  diverfe.  Plutarque  le  dit 
auffi  dans  la  vie  de  Thémiftocle  » 
&  nous  donne  à  entendre  que  ce 
Chiliarque  du  palais  étoit  le  ca- 
pitaine des  gardes ,  puifqu'il  nom» 
me  Chiliarque,  Artaban,  que  Dio<^ 
<|k>re  de  Sicile  nomme  capitaine 
des  gardes.  Cétoit  le  premier  Offi- 
cier  de  la  couronne ,  il  avoit  la 
furintendance  •  de  toute  la  maifon 
du  Roi ,  &  il  paroit  que  fon  auto- 
rité étoit  à  peu  près  telle  qu'a  été 

I    (h)  Corn,  Nep,  in  Conon.  c.  |, 


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CH 

depuis  celle  des  Préfets  do  prétoire 
à  Rome ,  &  en  France  celle  des 
Maires  du  palais ,  qui  difpofoient 
de  toutes  le*  charges  de  fa  cour , 
&  avoient  connoidance  de  toutes 
les  affaires  de  TÉtat.  Selon  toutes 
les  relations  de  Perfe  ,  il  y  a  enco- 
re dans  le  palais  des  rois  de  Perfe 
un  officier  de  grande  confidéra- 
tion  ,  qui  commande  à  mille  gar- 
des du  dedans  du  palais ,  ôc  à  deux 
Viiile  gardes  du  corps  qui  accom- 
pagnenc  le  Roi  quand  il  fort.  Les 
-œlations  marquent  auffi  que  la 
fonâion  de  ce  grand  officier  eft 
d'introduire  à  l'audience  du  Roi. 

CHILIOMBE ,  Chiliombe ,  (a) 
terme ,  qui  veut  dire  facrifice  de 
mille  bétes.  Il  y  a  apparence 
qu'on  a  facri6é  rarement  tant  de 
viâimes  à  la  fois.  Un  tel  facrî- 
fice  fou  vent  répété  confomoie- 
roit  bien  des  animaux.. 

CHILMINAR  ,  ou  ,  comme 
prononcent  les  Voyageurs,  Tchel- 
minar.  Ceft  le  nom  que  l'on  don- 
ne aux  plus  belles  &  aux  plus 
magnifiques  ruines  qui  nous  ref- 
tent  de  ^'antiquité  ;  ce  font  celles 
en  partie  de  ce  fameux  palais  de 
Perfépolis  ,  auquel  Alexandre 
étant  ivre  mit  le  feu  par  complai- 
sance pour  la  courtifanne  Thaïs. 
Les  Voyageurs  &  les  Hiftoriens 
ont  donné  des  defcriptions  fort 
circondancié^s  des  Chilminar , 
entr'autres  ,  Gratias  de  Silva ,  Fi- 
groa  ,  Pietro  Délia  Valle  ,  Char- 
din &  le  Brun.  Voici  en  abrégé 
ce  que  c'efl  que  les  Chilminar. 

On  voit  les  refies  de  près  de 
quatre-vingts  colonnes  dont  les 


CH  If 

fragmens  ont  au  moins  Cx  pieds 
de  haut  ;  mais  ,  il  n'y  en  a  qtie 
dix-neuf  qu'on  puifTe  dire  entiè- 
res 9  avec  une  autre  toute  feule 
éloignée  des  autres  d'environ  cent 
cinquante  pas.  Une  roche  de  mar- 
bre noir  fort  dur  fervoit  de  fonde* 
ment  à  cet  édifice.  Quatre-ving|C« 
quinze  marches  portent  au  pre-^ 
mier  plan  du  palais;  elles  tout 
taillées  dans  le  roc.  L'entriéeda 

f>alais  a  environ  vingt  fneàs  de 
arge  ;  d'un  côté  efl  la  figure  d*ua 
éléphant ,  &  de  l'autre  celle  d'ue 
rhinocéros  haut  de  trente  pieds  , 
&  tous  deux  d'un  marbre  luifaot. 
Proche  ces  animaux  il  y  a  deux 
colonnes ,  &  pas  loin  de- U^  la  fi- 
gure d'un  Pégafe.  Après  avoir 
pailé  cette  entrée ,  on  rencontre 
quantité  de  fragmens  de  colonnes 
de  marbre  blanc ,  dont  les  refies 
font  voir  la  magnificence  de  l'on* 
vrage.  Les  moindres  de  ces  co* 
lonnes  ont  quinze  coudées  de 
haut ,  les  plus  grandes  en  ont  dix- 
huit  ;  elles  ont  quarante  cannelo-' 
res  larges  chacune  de  trois  grands 
pouces  ;  d'oii  l'on  peut  juger  de 
toute  leur  grofTeur  6c  des  autres 
proportions.  AfTez  proche  de  ren- 
trée ,  on  voit  une  Infcription  gra- 
vée fur  un  carreau  de  marbre 
noir  y  uni  comme  une  glace  ;  elle 
a  environ  douze  lignes  ;  les  let- 
tres font  d'une  figure  extraordi- 
naire ;  elles  reflemblent  à  des 
triangles  ou  à  des  pyramides. 

Il  y  a  encore  beaucoup  d'au- 
.tres  Infcriptions  ,  en  caraflères 
tout  différens  de  ceux  qui  font 
formés  en  triangles  ;  quelques-uns 


<«)  Antiq.  expL.  par  D.  Bern.  de  Montf.  Tom»  II»  p.  ao$i« 


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îi  C  H 

approchent  des  caraftères  Hé- 
breux ,  Chaldaïques  ou  Syria- 
ques ;  d'autres  reffemblenc  aux 
caraftères  Arabes,  ou  Perfans; 
d*autres  enfin  font  Grecs.  M.  Hy- 
ée  ,  qui  a  expliqué  Tlnfcription 
qui  eft  en  Grec  ,  en  fuppléant 
jquelques  mots  qui  font  effacés , 
*dtt  que  ces  Infcriptions  font  gra- 
vées avec  beaucoup  de  négligen- 
ce, &  que  peut-être  elies  l'ont  été 
par  quelques  foldats,ou  fi  elles  Tont 
été  par  un  graveur ,  il  croit  qu'il 
était  de  Palmyre  ,  &  qu*ainfi  les 
Infcriptions  de  Perfépolis  font  en 
langue  Phénicienne  ;  il  ajoute  que 
puiîqu'elles  font  à  la  louange  d'A- 
lexandre ^  elles  n'ont  été  faites 
que  depuis  le  tems  où  ce  conqué- 
rant a  vécu. 

Ce  monument  fert  à  préfent  de 
retraite  aux  bêtes  farouches  & 
aux  oifeaux  de  proie  ;  ce  qui  n'a 
pas  empêché  le  Brun,  par  une 
cnriofité  qui  lui  étoit  naturelle» 
d^entreprendre  le  voyage  dé  Perfe 
dans  le  deffein  d'y  voir  les  reftes , 
de  ce  fomptueux  édifice. 

Ce  mot  vient  du  Perfien  Tch- 
cUeminar,  c'eft- à-dire,  quarante 
tours  ou  colonnes  ,  à  caufe  des 
quarante  colonnes  d'i^ne  grofleur 
prodigieufè  que  i*on  voit  parmi 
ces  ruines. 

CHILON ,  Chilon ,  X/aw,  (a) 
Lacédémonien»  qu'on  met  au  nom- 
bre des  fept  Sages  de  la  Grèce.  Il 
fut  fait  Éphore  vers  la  56*.  Olym- 
piade.Ce  Philofophe  mena  une  vie 
toujours  conforme  à  fes  préceptes, 
ce  qu'on  voit  afTez  rarement  ;  car , 


CH 

la  plupart  des  anciens  Philofophes 
ont  dit  de  très-bonnes  chofes  6c 
en  ont  fait  de  tr^  -  mauvaifes  , 
condamnant  ainfi  par  leurs  dif- 
cours  leur  propre  conduite.  Mais  , 
Chilon  ,  indépendamment  des 
exemples  de  vertu  quil  a  donnés 
pendant  fa  vie ,  penfoif  trè«-  jufte  , 
&  avoit  laîfle  plufieurs  maximes 
dignes  d'être  retenues. 

Il  difoit  ordinairement  qu'il  y 
avoit  trois  chofes  bien  difficiles 
dans  le  monde  :  Garder  le  fecret , 
fçavoir  employer  le  tems ,  &  fiof' 
frir  les  injures  fans  murmurer.  On 
dit  qu'il  mourut  d'un  excès  de 
joie,  en  embraffant Ton  fils,  qui 
avoit  été  couronné  aux  jeux 
Olympiques.  Diogène  Laërce  a 
écrit  fa  vie.  Pline  dit  qu'il  fit  gra- 
ver en  lettres  d'or  ces  maximes 
ou  fentences  au  temple  de  Del- 
phes \  Qu'il  fallait  fe  cùnnoître 
foi^même^  &  ne  défîrer  rien  de  trop 
avantageux  ^^  que  la  misère  étoit 
infép arable  des  dettes  &  des  procès. 
Stobée  nous  a  confervé  quelques 
autres  fentences  de  lui  ,  comme 
celle-ci  :  Il  faut  parler  peu  dans  le 
vin  ;  ne  point  parler  mal  de  fort 
voifln  ;  n'aller  que  le  moins  que 
Von  peut  auxfeftins  de  fes  amis  ; 
plutôt  perdre  que  gagner  par  un 
lucre  fordide, 

Chilon  ne  s'étoit  pas  feulement 
di (lingue  dans  la  Philofophie  ;  il 
s'étoit  aujfli  rendu  illuftre  parmi 
les  poëtes  Lacédémoniens. 

CHILON ,  Chilon ,  XiW .  (b) 
autre  Lacédémonien  ,  qui  avoit 
époufé  la  fœur  du  roi  Archidame. 


(0)  Pauf.  p.  191  »  «5^.  Plin.  T.  I.  p.  |  Infc.  &  Bell,  tett.  Tom.  XIX.  pag.  i8i» 
19}  >  394»  4oS«  Mém.  de  TAcâd.  deti     (O  Xduoph.  p.  6^7. 


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CH 

Xénophon  en  fait  mention  au 
fepfième  livre  de  fon  hinoire  de 
la  Grèce.  C'eft  vraifemblablement 
le  mênie  qui  fuir. 

CHILON  ,  Chilon ,  X/>«r  >  {a) 
autre  Lacédémonien.  Celui-ci  , 
prétendant  que  le  trône  de  Sparte 
lui  appartenoit  à  plus  jufte  titre 
qu'à  Lycurgue  qu'on  y  avoit  pla- 
cé ,  entreprit  de  l'en  chafTer  ^  & 
de  s'y  établir  à  fa  place.  Ayant 
engagé  dans  fon  parti  environ 
é^MX  cens  citoyens  ,  il  entra  à 
main-armée  dans  la  ville  >  tua  les 
Éphotes,  qu'il  trouva  tous  enfem* 
ble  à  table  ,  &  marcha  droit  à  ta 
maifon  de  Lyciygue  pour  l'égor- 
ger. Mais,  au  bruit  de  ce  tumulte , 
il  s'étoit  fauve.  Chilon  fe  rendit 
enfuite  dans  la  place  publique  , 
exhorta  les  citoyens  à  recouvrer 
leur  liberté ,  &  leur  fît  de  grandes 
promefles.  Voyant  que  rien  ne 
braploit  ,  &  qu'il  avoit  manqué 
fon  coup  ,  il  fe  condamna  lui- 
même  à  l'exil ,  &  fe  retira  dans 
l'Achaie. 

CHILON ,  Chilon ,  X/W,  (b) 
célèbre  Athlète  >  qui  étoit  de  Fa- 
tras, ville  d'Achaïe.  Il  furpaiTa 
tous  les  autres  à  la  lutte  >  &  méri- 
ta dix  couronnes  ;  il  en  reçut  deux 
à  Olympie,  une  à  Delphes  5  quatre 
à  Corinthe  &  trois  à  Némée.  Les 
Achéens  lui  érigèrent  un  tombeau 
à  leurs  dépens  ,  parce  qu  il  étoit 
mort  en  combattant  contre  les 
ennemis.  Il  fut  tué  ,  félon  Paufa- 
nias ,  du  tçms  de  Lyfippe ,  qui  fie 
fa  ftatue  f  c'eû-à-dire  ,  dans  la 

(«)  Roll.  Hift.  Ane.  T.  IV.  p.  177 , 1 

378. 

\,h)  Pauf.  p.  351.  Mém.  de  TAcad.  des] 
lAfcript.  &  fieli.  Lett.  T.  III.  p-  15s*    1 


CH  Tj 

bataille  de  Chéronée  contre  Phi- 
lippe ,  roi  de  Macédoine ,  où  ks 
Achéens  furent  défaits  avec  les 
autres  Grecs ,  la  troifième  année 
de  la  II ce  Olympiade  ,333  ans 
avant  J.  C.  ;  ou  bien  dans  celle 
que  les  Grecs  gagnèrent  comte 
Antipater  ,  près  du  fleuve  Lamia 
en  Theiïalie,  la  féconde  année 
de  la  114c  Olympiade,  &  avant 
J.  G.  323.  En  ce  cas,  il  faudrok 
conjeâurer  que  Chilon  n'y  cooi. 
battit  que  comme  particulier; car, 
les  Achéens  ne  s'y  trouvèrent 
point.  Paufanias ,  dans  ks  Achaî- 
ques  ,  fe  déclare  pofitivement 
pour  cette  dernière  opiniotu 

CHILON,  ChUon.Xi^o^ ,  (c) 
Achéen ,  qui  s'étoit  fait  de  la  ré- 
putation à  la  lutte.  Ce  fut  le  (evA 
de  fa  nation ,  qui  fe  trouva  à  la 
journée  de  Lamia.  Ce  Chilon  pa- 
roît  être  le  mêmequele  précédent. 

CHILON ,  Chilon ,  X^W^  (J) 
Éléen,  fut  un  des  premiers  à  fou- 
lever  fa  nation  contre  le  tyraa 
Ariftotime  «  qui  fe  réfugia  ï  Vau^ 
tel  de  Jupiter,  oh  on  le  poignarda. 

CHILON,  ChUon,  XUr,  («) 
efclave  de  Caton  le  cenfeur.  C'é- 
toit  un  fort  honnête  homme  fit  on 
bon  Grammairien  ,  qui  donnoic 
des  leçons  à  beaucoup  d'enÊins* 
Caton  ne  voulut  pas  cependant 
qu'il  enfeignât  les  Belles  Lettres 
à  fon  fils,  s'étant  chargé  de  le  fai«« 
re  lui*  même. 

CHILON  r  Q.  Magius  ]  , 
Q.  Magiiis  Chilon  ,  (/)  l'un  des 
complices  de  la   conjuratipa  de 

(0  Pauf.  p.  408. 

{d)  Pauf.  p.  494. 

(•)  Plut.  Tom.  I.  p,  J48. 

(  f)  Cicer .  Orat^  a  i .  in  Catil.  c.  5^9, 


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14  C  H 

Catîlina.  De  concert  avec'  L.  Fu- 
rius  f  il  avoit  manœuvré  fans  re- 
lâche l'intrigue  pour  la  révolte  des 
Allobroges.  Il  y  a  des  éditions 
qui  lifent  Q*  Manlius  Chilon. 

CHILUN,  Càilun.  Ortélius 
dit  que  les  Septante  nomment 
ainfi  un  lieu  de  la  PaleRine  ,  que 
Saint  Jérôme  nomme  Olon. 

L'édition  des  Septante  faire  fur 
le  manufcrit  du  Vatican  porte  Cha- 
lo  ;  6c  le  texte  Hébreu ,  Cholon. 

CHIMARRUS  ,  Chimarrus  , 
Jiu/Ltctpfoç  ,  (^a)  rivière  du  pais 
d'ArgoS)  entre  celle  d'Érafine  & 
le  bonrg  maritime  de  Lerne ,  feloil 
Paufaaias. 

Ortélius  met  auprès  de  Gonf- 
tanttnople  ,  une  petite  rivière  de 
ce  nom  ,  &  cite  Pierre  Gylies , 
lans  dire  en  quel  ouvrage. 

CmUAKUS,  Chimarus,  (b) 
Oétois  de  nation.  C'étoit  un  fol-^ 
dat  »  qui  fervoit  dans  les  troupes 
de  Macédoine,, du  tems  de  Per- 
fte ,  vers  l'an  i68  avant  J.  C. 

CHIMÈRE  t  Chimera ,  XtîfJLi" 
^,  ville  de  Sicile  »  félon  Etienne 
de  Byzance.  Ce  Géographe  cite 
Xénophon  au  premier  livre  de 
rUdoire  Grecque  ;  mais ,  dans  les 
exemplaires  de  cet  Hiftorien ,  on 
lit  à  l'endroit  cité  Himère.  La 
fuue  d'Etienne  de  Byzance  eft 
d'avoir  redoublé  l'afpiration»  en 
ajoutant  un  C  à  1'^. 

CHIMÈRE  ,  Chimera  ,  (c) 
Xii'^ff«c»  mont^ne  de  l'Afie  mi- 
neure dans  la  Lycie  ,  félon  Vi- 
bius  Séquefter.  Solin  ,  en  parle 
ainfi:  »  Ce  qu'eft  le  mont  Vefu- 


(#)  Ptuf.  j».  155» 

{h)  Tii.  Ltv.  L.  XLIV.  c.  14. 

\c)  Solini  I^as.  a66.  Virg.  vÉneid 


îd.  L.  j 


CH 

»  ve  dans  la  Campanîe ,  TÉtna 
»  dans  la  Sicile  >  la  Chimère  l'eft 
D  dans  la  Lycie.  Cette  montagne 
I»  jette  de  la  fumée  durant  la  nuir% 
M  C'eft  d'elle  qu'eft  venue  1%  fa- 
»  ble  de  ce  monftre  compofé  àt 
»  trois  formes  d'animaux,  a  Là 
fable  fuppofe  qu'il  avoir  la  tête 
d'un  lion ,  le  ventre  d'une  chèvre , 
&  tout  le  bas  d'un  ferpent.  Ce 
n'eft  qu'une  defcription  poétique  t 
qui  étant  bien  appréciée ,  ne  Si- 
gnifie autre  chofe  ,  finon  que  le 
haut  de  cette  montagne  étoit  oc- 
cupé par  des  lions  ;  le  milieu  oh 
il  y  avoit  de  bons  pâturages  , 
étoit  peuplé  de  chèvres ,  &  le  bas 
nourriftbit  beaucoup  de  ferpens. 

Virgile  parle  de  cette  qualité 
de  Volcan  qu'avoit  la  Chimère, 
C'eft  pour  cette  raifon  que  les 
Lyciens  avoient  bâti  tout  auprès 
une  ville  confacrée  à  Vulcain  f 
nommée  Hépheûie.  Pline  nous 
apprend  plus  précifément  que 
cette  montagne  étoit  dans  la  Pha- 
felide  contrée  de  la  Lycie. 

CHIMÈRE  ,  Chimera  ,  (d) 
Xei/A€fet  y  château  fur  la  côte  d  É- 
pire  dans  les  monts  Acrocénau^ 
riens  ,  à  l'endroit  oîi  aboutilfôient 
la  mer  Ionienne  &  la  mer  Adria- 
tique. C'eft  la  même  chofe  que  le 
Chimérîum  ,  que  Paufanias  met 
dans  la  Thefprotide. 

Ce  lieu  eft  préfentement  une 
ville  9  qui  garde  fon  ancien  nom  » 
&  le  dotane  aux  montagnes  voi- 
fmes  qui  font  les  monts  Acrocé-^ 
rauniens.  Chimera  eft  au  bord 
d'une    petite   rivière  auprès   de 

VI.  V.  1^8.  Plin.  T.  I.  p.  11». 
{d)  Plin.  T.  I.  p.  189.  Pauf.  p.  461, 


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CH 

Porto  Panormo  dans  la  Canîna , 
province  de  TAlbanie. 

CHIMÈRE ,  Chimctra ,  X'/jlou^ 
fa,  monftre  fameux»  à  qui  les 
Poëces ,  dans  leurs  fiâions  >  ont 
donné  une  tête  de  lion ,  un  corps 
de  chèvre  &  une  queue  de  dra- 
gon ;  &  ils  ont  ajouté  que  Bellé- 
rophon  avoit  combattu  &  tué  ce 
roonftre.  Cette  fable  eft  rapportée 
6c  expliquée  fort  au  long  à  l'arti- 
cle de  Bellérophon ,  auquel  nous 
renvoyons  le  Lecteur. 

CHIMÉRIUM  ,  Chimerîum, 
y.t'if^iftQf ,  {a)  nom  d'un  lieu  ma- 
ritime de  Grèce  ,  dans  la  Thef- 
protide.  Thucydide  &  Paufanias 
en  font  mention.  Ce  dernier  pré- 
tend qu'auprès  de  ce  lieu ,  l'eau 
de  la  mer  fe  phihroit  &  devenoît 
douce  en  paflant  fous  terre.  M. 
l'abbé  Gédoyn  croit  que  le  nom 
de  Chimérium  venoit  de  ce  qu'il 
y  avoit- là  un  torrent.  Voyc^  Chi- 
mère. * 

CHIMÉRIUM  ,  Chimérium  , 
Xel/ufft'^r  Y  {b)  promontoire  auprès 
duquel  étoit  fitué  le  lieu  dont  il 
eft  parlé  dans  l'article  précédent. 

CHIMÉRIUM  >  Chimérium, 
X€ifitef^to¥  y  montagne  de  Grèce 
dans  la  Phthiotide  félon  Pline. 

CHIMON-,  Chimofiy  Xilftotp  « 
(c)  fameux  athlète  Areien.  Il  eut 
un  fils  qui  ne  fe  diuingua  pas 
moins  que  lui  dans  la  profeiuon 
athlétique.  Celui-ci  fut  couronné 
aux  jeux  Olympiques  pour  avoir 


CH  ty 

doublé  le  flade  »  &  Cbimon  etic 
le  prix  de  la  lutte.  Leurs  (latues 
étoient  fort  près  l'une  de  l'autre.  . 
Celle  du  fils  étoit  un  ouvrage  d€ 
Pandas  de  Chio  ,  fils  &  élevé  d€ 
Softrate.  Le  père  avoit  deux  (la- 
tues qui  étoient  deux  chef*  d'œà* 
vres  de  Naucydès,  tant  celle  qii| 
étoit  à  Olympie  que  celle  qui 
avoi^  été  tranfportée  d'Argos  à 
Rome ,  6c  mife  dans  le  temple  d€ 
la  paix.  On  dit  que  Chimon  ter- 
rafla  à  la  lutte  Taurofthène  c« 
fameux  athlète  d*Égine ,  &  qvtû 
rOlympiade  fuivante  Tauroimè- 
ne  eut  fa  revanche  &  coucha  par 
terre  tous  ceux  qui  luttèrent  con- 
tre  lui. 

CHINOIS,  Chinenfes,  (i/) 
peuples  qui  paffent  pour  être  fort  | 
anciens  dans  le  monde,  enforta 
qu'il  en  eft  de  leur  origine  comm« 
de  ces  grands  fleuves  ,  dont  on 
ne  fçauroit  prefque  découvrir  la 
fource. 

I. 

Abrégé     Chronolocique 

des  antiquités  de  la  Chine^ 

La  chronologie  des  annalei 
Chinoifes  fait  remonter  fi  haut  les 
commencemens  de  cette  Monar* 
chie ,  que  non  feulement  elle  ft 
trouve  précédée  de  ceux  de  tout 
les  autres  Empires  ,  mais  qu'il  eft 
encore  au  moins  très- difficile  da 
la  concilier  avec  la  chronologie 
re^âable  de  nos  Livres  iacrés* 


Cil)  Thucyd.  pag.  5t.  Pauf.  p.  465. 

{k)  Thucyd.  p.  )i.  Scrab.  p.  324. 

(c)  Pauf.  p.  360. 

U)  Mém.  de  l*Acad.  àes  Infcript.  & 
fiell.  Lecc.  Tom.  III.  pag.  a6â.  é'  fniv. 
T.  V.  p.  312.  4sr  foiv,  Tom.  VI.  pag. 


609.  ër  fnsv.  T.  X.  p.  577.  érfi^iv.  T* 
XIII.  p.  507.  é"  friv.  Tom.  XV.  p.  49^, 
ér  fniv,  Tom.  XVIII.  p.  178.  &  fmiv» 
T.  XXVÏH.  p.  503.  &  friv.r.  XXIX. 
pag.  I .  ér  friv.  Tom,  XXX.  pa{,  got« 
&  fitiv» 


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i6  C  H 

Selon  les  annales  Chinoîfes  ,  re- 
çaes  maintenant  de  toute  la  na- 
tion ,  Se  autorifées  par  le  fuifrage 
d'un  tribunal  établi  exprès  pour 
examiner  les  queftions  de  ce  gen- 
re ,  Fo-hi  regnoic  fur  la  Chine 
dès  Tan  29^2  avant  J.  C.  ;  la 
Chine  étoit  dès-lors  peuplée^  6c 
elle  commençoit  à  fe  policer.  Fo- 
bi  eut  des  fucceilçurs  dont  ces 
annales  rapportent  les  noms  & 
les  allions ,  &  cette  hifloire  con- 
tinue fans  interruption  depuis  Fo« 
bi  jufqu'à  nous.  Ainfi  parle  M. 
Fréret  dans  Tes  mémoires  Air  l'hif- 
toire  des  Chinois  ;  mémoires  d'une 
profondeur  qui  étonne.  Ce  qu'on 
ira  lire ,  ne  fera  qu'un  extrait  de 
ces  mémoires.  Quand  je  puiferai 
dans  quefque  autre  fource ,  j'au- 
tai  foin  d'en  nommer  les  Au- 
teurs. 

L'Écriture  nous  apprend  qu'a- 
près le  Déluge  les  hommes  ref- 
terent  unis  entr'eux  dans  1^  Mé-. 
fopotamie  ,  ne  faifant  qu'une  feu- 
le &  même  famille,  julqu'au  tems 
de  Phaleg.  Vers  le  tems  de  la 
ttaiffanceide  Phaleg,  les  hommes 
fe  féparerent  Ôi  allèrent  former 
différentes  peuplades  ,  defquelles 
font  iiïues  toutes  les  nations  qui 
babkentfurla  ter^-e.  Ainfi  »  J'hif-i 
toire  d'aucune  nation  ne  peut  re- 
monter avec  certitude ,  félon  l'É* 
criture ,  au  de^-là  du  tems  de  Pha- 
bgi  Mais ,  là-defFus ,  il  faut  en- 
core oblerver  que  les  nations  ét^ar 
blies  dans  des  païs  extrêmement 
éloignés  de  la  Méfopotamie  ,  ont 
eu  befoin  d'un  tems  confidérable 

Cur  faire  çè  trajet ,  parce  que 
homnxes  ne  fe  répandant  que. 
de  proche  en  proche ,  marchant 


CH 

avec  leurs  troupeaux  ,  leurs  fem« 
mes ,  leurs  enfans  ,  leurs  meu- 
bles ,  &c.  dévoient  avancer  très- 
lentement  ,  &  qu'il  n'eft  guère 
probable  qu'ils  abandonnaHent 
un  païs  tant  qu'ils  s'y  trou  voient 
au  large ,  &  tant  que  leurs  trou- 
peaux y  rencontroient  des  pâtura-  ^ 
ges.  De-là  il  refaite  que  les  nations 
voiHnes  ,  ou  du  moins  peu  éloi- 
gnées de  la  Méfopotamie ,  com- 
me les  Babyloniens  &  les  Égyp- 
tiens ,.  peuvent  bien  faire  remon- 

/ter  leur  origine  jufqu'au  tems  de 
Phaleg  f  parce  que  leur  hiftoire 
peut  à  la  rigueur  commencer  avec 
celle  des  premiers  condudeurs  de 
la  colonie  ;  mais ,  pour  les  nations 
éloignées  ,  comme  celle  des  Chi- 
nois ,,ce  n'eft  pas  la  même  cho- 
fe.  - 

Les  peuples  de  la  Chine  font 
féparés  de  la  Babylonie  par  de 
vâftes  païs ,  par  des  déferts  arides  , 
par  des  montagnes  prefqu'inîpra- 
ticables ,  &  par  des  fleuves  larges 
&  rapides  qui  ne  font  guéables' 
que  vers  leur  fource  ;  il  leur  a 
fallu  du  moins  quelques  ftecles 
pour  faire  ce  trajet.  Les  difficultés 
qu^  l'on  trouve  aujourd'hui  à  tra- 
verfçr  les  païs  qui  féparent  la  Chine 
de  la  Babylonie,  étoient  fans  doute 
infiniment  plus  confidérables  dans* 
ces  tems  voifins  du  Déluge.  Les 
fuites  de  cette  inondation  devoientt 
avoir  boule  ver  fé  toute  la  face  de. 

'  la  terre  ;  les  plaines  fans  culture . 
dévoient  être  couvertes  de  bois; 
la  profondeur  des  rivières  n'étoic 
point  connue,  &  il  falloh  cher- 
cher les  gués  çn  les  fondant  ,  oa 
les  traverHer  fur  des  radeaux  conf-^ 
truits  exprès.  Les  paflages  par 
lefquels 


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CH 

lefquels  on  peut  pénétrer  à  tra- 
vers les  montagnes ,  n'étant  point 
frayés ,  il  £aIloit  un  tems  conHdé- 
table  pour  les  découvrir ,  &  le 
plus  (buvent  cette  découverte  ne 
pouvoit   être  due  qu'au  hazard« 
Suppofera-t-on  que  les  premières 
colonies  qui  fe  rendirent  à  la  Chi« 
ne  ,  traverferent  ces  vaAes  dé- 
fères, en  marchant  comme  des  ca* 
ravanes ,  &  fans  faire  des  féjours  i 
Mais,  oîi  ces  colonies  fe  propo-^ 
foient-eJles  d'aller  s'établir  ?  Quellç 
notion  avoient-elles  alors  des  païs 
cil  elles  fe  font  arrêtées  &  qu'elles  . 
habitent  maintenant  i  Dans  ce  cas 
même  »  il  faudroit  encore  recon- 
noître  qu'elles  ont  été  contraintes 
de  faire  pluGeurs  féjours  confidé- 
râbles  dans  les  endroits  où  elles 
fe  trouvoient  arrêtées  9  foit  par 
les  HYières  y  foit  par  les  chaînes  de 
montagnes  ^  foie  par  les  déferts 
&  les  plaines  de  fable  de  plufieurs 
journées  ,•  dans   lefquelles    dlè^ 
ignoroient  Ci  leurs  troupeaux  pour- 
roient  rencontrer  des  pâturages; 
car  9  il  faut  toujours  fe  fouvenir 
que  ces  pais  traverfés  par  cespre- 
inièr^s  colonies ,  étoient  dans  le 
fyftême  de  l'Écriture  ,^  duquel  il 
ne  nous  eft  pas  permis  d^  nous 
icarter ,  des  pais  incultes  &  inha- 
intés  9  oh  les  colonies  ne  pou- 
voient  uouver  de  refiburce  que 
dans  leur  propre  induflrie.  Cette 
confidération  ibmble  bien  fimple  » 
&  paroïc  devoir  s'être  préfentée 
d*abord  ;  cependant,  aucun  des 
Chronologiûes  qui ,  dans  des  ou- 
vrages publiés ,  ont  examiné  l'an- 
cienne Hifloire ,  &  en  particulier 
celle  de  la  monarchie  Chinoife  9 
ny  a  fait  attention  ;  ils  femble^t 

Tom.XI. 


CH  17 

■voir  craint  de  toucher  cette  dit-v 
ficuhé  ,  &  n'avoir  cherché  qu'à 
s'itourdir  eux  6c  leurs  {.eâeurs 
fur  cet  article. 

M.  Fréret  conclut  de  fes  re-» 
cherches  fur  cette  matière  ,  !.• 
que  la  chronique  Tfou-chou  ef^ 
le  plus  ancien  monument  ,  qui 
nous  donne  une  fuite  complecte 
de  la  chronologie  Chinoife  ;  2.^ 
que  les  caraâères  aftronomiques 
oc  chronologiques  (;[ui  accompa- 
gnent plufieurs  de  fes  dates ,  io|'« 
ment  des  démonftrations  qui  étar 
bliflent  la  certitude  de  Ùl  cnrono-^ 
logie  »  &  la  portent  au  plus  haut 
di^gré  oh  cette  certitude  puiflç 
s'élever.  , 

Cette  chronique  remonte  juf- 

Su'au  tems  d'Hoang-ri ,  dont  eWp 
iLe  le  commencement  i  l'an  145  { 
avant  J.  C.  ;  mais,  Hoang-U, 
n'a  pas  été  Je  premier  empereur 
de  la  Chinç.  Coiifucius  .  aiïure 
qu'avant  lui  ,  Fo-hi  &  Chine- 
noung  avoient  régné  fur  la  Chine. 
La  durée  de  ces  deux  règnes  n'eâ 
marquée  dans  aucun  des  anciens 
monumens  de  Thifloire  Chinoife  ; 
Sfé«ma-tfiene ,  le  plus  ancien  U 
le  plus  accrédité  des  HiftorienSi, 
n'a  point  marqué  la  durée  des  re- 

fnes  avant  Yao,  Le  Ta-tfay-li^ 
crit  au  comniencement  des  Har 
ne,  donne  100  ans  de  règne  |^ 
fo-hi;  leChi-penei  livre  comr 
.pofé  avant  Sfé-ma-tfiene  ^  mais 
fous  les  Hane  ,  quoiqu'on  l'ait 
donné  pour  un  Hvre  ancien  ,  fait 
regner^Chine-noung  pendant  84 
.ans.  Ces  deux  durées  feroient 
celle  de  184  ans,  laquelle  ajoutée 
à  l'an  2455  >  donneroit  l'an  2639 
pour  le  conunencement  de  Fq-U 


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\8  CH 

&  i>our  t^époque  du  premier  rè- 
gne. 

Les  Écrî^aîns  poftérieurs  ont 
lAlongé  la  durée  ae  ces  deux  ré- 
gnés ;  Hoang-fou-^i  en  166  de 
f.  C.  la  fie  de  130  ans;  l'auteur 
du  Taï-prng-yu'lane  en  976  la 
fuppofa  au(fi  de  130  ans;  &  Sfé- 
fna-couahg  en  1086  de  250  ans; 
enfin ,  le  1  ong-kiene ,  adoptant 
la  chronologie  du  Kine-lu-fiang, 
fait  cette  même  durée  de  25  5  ans  ; 
ce  qui  feroit  remonter  Tépoque  à 
fan  2710  ans  avant  J.  C,  ,  le 
Tong'kiene  -marque  deux  règnes 
pendant  102  ans  entre  Hoang-ti 
&  Chine-tîotmg.  D'autres  Chro^ 
nolpgides  en  infèrent  tm  plus 
jgrind  nombre  entre  Fo-hi  & 
feoang-ti  ;  mais ,  cela  eft  contrai- 
re à  Confucius  &  à  Tfo-kieGU* 
^ing ,  &  n^eft  fondé  que  fur  les 
"traditions  fabuleufes  des  Tao- iTé. 

En  donnant  aux  deux  règnes  de 
Fo-hi  &  d'Hoang-ti  184  ans  de 
^urée ,  on  remontera  comme  on 
Ta  dit  à  l'an  2639  avant  /•  C 
J'avoue ,  dit  M.  Fr^ret ,  que  j'di 
•peine  à  digérer  la  longue  durée 
lie  ces  deux  règnes  ;  au  tu  lesdeux 
•anciens  Écrivains  Chinois  qui  en 
ont  parlé  f  n*ont-ils  pas  (emblé 
«dignes  de  foi  à  Sfé-ma-tfiene^ 
qui  n'a  fait  aucun  ufage  de  leur 
ïÉémoignage. 

Quoique  le  nom  de  ces  deuk 
♦Princes  fe  trouve  dans  Confudus 
&  dans  le  commentaire  de  Tfo*- 
ïi-eou-ming  fur  leTchune-ffiéon, 
le  filence  que  garde  à  leur  fujet  h 
chronique  du  Tfou-^chou  ,  fait 
penfer  <}uè  de  fon  tems  on  îeno>^ 
-^roit  la  durée  de  leur  règne.  5fé- 
ma^ifiene  obferre  mcme  qae  le 


Ctî 

Chang*éhou  ou  l'ancienne  compP 
lation  hif^orique  abrégée  par  Con«^ 
fucius,  commençoit  à  Yao,  & 
ne  contenoit  rien  des  règnes  an- 
térieurs. Ainfi ,  le  parti  le  plus 
raifonnable  efl  de  régarder  com- 
me indéterminée  &  comme  in- 
connue la  durée  des  tems  anté- 
rieurs à  Hoang-ti  ou  à  l'an  245  5 
avant  J.  C 

La  conciliation  de  la  chrono- 
logie Chinoife  avec  celle  de  l'É- 
criture y  eft  le  point  le  plus  im- 
Ertant  de  cet  article  ,  parce  que 
i  Hvres  de  Moïfe ,  même  en 
ikrfânt  abftraâion  du  réfpeâ  que 
nous  infpire  pour  eux  la  religion  , 
font  ce  que  nous  connoiflbns  de 
plus  authentique  &  de.  plus  an- 
cien ;  mais  ,  il  faut  prendre  garde 
en-  examinant  ce  point  ^  de  conr 
fondre  avec  l'Écriture  les  divers 
fyHêmes  »  imaginés  par  les  Criti- 
ques pour  en  déterminer  la  chro- 
tîologie.  Ces  fyftêmes ,  qui  font 
la  plâpart  oppofés  les  uns  aux 
autres  f  ne  font  que  des  opinions 
particulières  qu'il  a  toujours  été 
libre  aux  Critiques  d'examiner  6c 
de  combattre. 

Ainfi  f  M.  Fréret  a  montré  i.^ 
^ne  la  vocation  d'Abraham  de- 
Voit  être  marquée  au  plus  tard  à 
l'an  2135  avant  J.  C.  &  au  plu- 
tôt à  l'an  2155  ;  2.^  que  l'inter- 
iralle  entns  la  naiiTance  de  Phaleg 
&  celle  d'Abraham  tarioit  dans 
les  différens  manufcrits  de  l'Écri* 
ture  ;  3.^  que  le  manufcrit  des 
Maflbréthes ,  fur  lequel  a  été  fai- 
te la  Verfion  de  la  Vulgate ,  ne 
-lui  donnoit  que  326  ans  ;  enforte 
que  la  naiflance  de  Phaleg  ,  mar* 
quée  par  TÉcriture  comme  i'épor 


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CH 

Se  de  la  dirperfion  des  peaptes, 
oit  au  plutôt  de  Tan  ^526 
avant  J.  C.  ;  4.**  que  celui  des 
Samaritains  donne  541  ans  à  ce 
même  intervalle  ;  ce  qui  fait  re- 
monter répcque  de  la  difperfion 
à  l'an  2771  ;  5.^  enfin  que  le  nxa- 
nufcrit  fur  lequel  la  Verfion  des 
Septante  a  voit  été  faite ,  donne  » 
iuivant  les  copies  de  c^tte  Verfion, 
vues  par  Jules  Affricain  &  par 
Eufebe,  661  ans  à  cet  intervalle; 
ce  qui  remonte  à  l'an  2891. 

La  naiiliance  de  Phaleg  ou  la 
âifpcrfion ,  précède  donc  le  com- 
mencement d'Hoang-ti  de  71  ans 
iêlon  le  manufcrit  des  Maflbréthes, 
de  316  ans  fuivant  le  inanufcrit 
Samaritain 9  6c  de  436  ans  fuivant 
celui  des  Septante.  De  la  naifian- 
ce  de  Phaleg  au  Déluge,  les  Maf- 
Ibréthes  comptent  199  ans;  donc 
le  I>éluge  feroit  de  2725  feule- 
ment ;  les  Samaritains^  marquent 
499  ans  9  ce  qui  fait  remonter  le' 
Déluge  i  l'an  3270  avant  J.  C* 
Enfin  tous  les  exemplaires  des 
Septante  donnem  629  ans  à  ce 
mênie  intervalle  j  ce  qui  remonte 
à  l'an  3520  &  précède  le  com- 
mencement d'Hoang-ti  de  1065 
sns* 

La  variété  de  ces  diiEérens  ma- 
ouicrits ,  tous  également  autotifés , 
Aous  laifle  la  liberté  du  choix  ;  6c 
a  nous  eft  permis  de  préférer  ce- 
lui qui  facilite  davantage  la  conci» 
liation  de  ia  chronologie  des  hlf- 
toires  profanes  arec  xelle  de  TÉ- 
criture.  Cette  concittation  eft  beau- 
coup  plus  importante  que  ne  le 
croyent  ceux  qui ,  par  un  refpeâ 
mal  entendu  pour  le  texte  des 
Alaflbréihes  »  prennent  le  parti 


CH  75 

de  rejetrer  toutes  celles  des  tra* 
ditions  hiftoriques,  qu'ils  ne  peu« 
vent  ajufter  avec  leur  chronolo* 

Les,  Critiques  qui  raifonnent 
ainfi ,  oublient  qu*ils  ne  pouvoiçnt 
démontrer  aux  efprits  forts  &  aux 
infidèles  la  certitude  des  traditions 
Hébraïques  ,  qu'en  pofant  pour 
premier  principe  de  critique ,  qu'il 
ïsùit  en  croire  une  nation  fur  fa 
propre  hiftoire  ,  lorfque  cette  hif« 
toire  eu.  fuivie  &  liée  dans  fes 
ditFérentes  parties ,  lorfqu'elle  ne 
contient  aue  des  faits  admis  corn* 
me  véritaoles  par  toute  la  nation  v 
&  lorfque  cette  perfuafion  eft 
appuyée  fur  des  monumens  d'une 
certaine  antiquité.  En  rejettanc 
des  hiftoires  profanes  qui  ont  de^ 
fembUbles   caraôères  ,   n'eft-ce 

Eis  détruire  le  principe  même  fur 
quel  on  fe  fonde  ?  A  quel  moyen 
les  1  héologieiu  auront- ils  recours 
pour  détruire  les  objeâions  de 
ceux  qui  ne  regardent  pas  la  Bible 
comme  un  livre  revêtu  d'une  au- 
torité divine  9  &  qui  ait  été  écrit 
par  des  hommes  infpirés?  Allé- 
gueront-ils ,  comme  une  excep- 
tion en  faveur  des  Juifs  >  leur  at- 
tachement à  la  religion ,  aux  loix 
&  aux  coutumes  aiiciennes  ?  Mais  ^ 
ce  même  attachement  avoit  lieu 
chez  les  autres  nations  ,  &  les 
Chinois  le  peuvent  difputer  aux 
Juifs  ;  eux  ,  dont  la  monarchie 
fubfifte  depuis  4000  ans  avec  la 
même  forme  de  gouvernement, 
les  mêmes  loix  &  les  mêmes  ufa- 
ges  ;  eux  qui  ont  toujours  été  une 
nation  ftudieufe ,  qui  font  le  plus 

Îpnd  cas  des  jettres  9  ôc  qui  con^ 
eryeptjufqu  au  moindre  fragihent 


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xo  C  H 

de  lears  anciens  livres  avec  un 
foîn  qui  va  jufqu'à  la  Aiperftition , 
&  qui  depuis  2000  ans  fait  une 
des  principales  attentions  du  gou* 
yernement. 

La  plupart  de  nos  Théologiens, 
en  écrivant  fur  ces  matières  ,  rai- 
fonnent  comme  fi  les  adverfaires 
dont  ils  entreprennent  de  réfuter 
ks  opinions  ,  avoient  les  mêmes 
opinions  qu'eux  fur  ce  qui  fait  le 
fond  de  la  difpute;  &  ils  ne  pen- 
fent  pas  que  les  principes  qu'ils 
leur  oppofent  pour  les  obliger  de 
Recevoir  les  traditions  hifioriques 
des  Jui& ,  &  de  rejetter  celles  des 
autres  nations  ,  ne  font  pas  admis 
par  ceux  qu'ils  combattent.  Une 
des  premières  règles  ^de  la  criti- 
que ,  eft  de  n'employer  que  des 
principes  communs  aux  deux  par- 
tis ,  fur  tout  que  ceux  que  nous 
attaquons,ne  puîffent  pas  fe  fervîr 
contre  nous  des  principes  d'oîi 
nous  partons.  Ceft  par  cette  rai- 
fon  ,  jointe  à   plufieurs  autres  » 

2ue  M.  Fréret  s'eft  attaché  à 
claircir  &  à  difcuter  Tandenne 
chronologie  des  nacions  profanes* 
Et  il  a  reconnu ,  par  cette  étude  ^ 
qu'en  réparant  les  traditions  véri- 
tablement hidoriques ,  anciennes, 
fuivies  &  liées  les  unes  aux  au«* 
treSy&atteAées  ou  même  fondées 
fur  des  monumens  reçus  comme 
authentiques ,  qu'en  les  féparant» 
dis-je,  de  toutes  celles  qui  font 
manifeflement  faufles,  fabuleufes 
ou  même  nouvelles  y  le  commen- 
cement de  toutes  les  nations  , 
même  cellesdonton  fait  remonter 
le  plus  haut  rorigine^  fe  trou- 
vera toujours  d'un  tems  où  la 
rraie  chronologie  de  TÉcriture 


CH 

montreque  la  teire  étoitpeaplétf 
depuis  plufieurs  fiedes.  Il  appelle 
'  la  vraie  chronologie  celle  des  Sep- 
tante &  celle  cfes  Sanuritains  ; 
car ,  pour  celle  du  manufcrit  des 
Maflbréthes ,  qui  donne  lieu  à  des 
difficultés  &  à  des  embarras ,  dont 
les  Commenuteurs  n'ont  encore 
pu  le  tirer ,  il  avoue  qu'il  n'a  pu 
la  regarder  que  comme  une  Chro- 
nologie tronquée  &  altérée ,  com- 
me l'ont  prouvé  Voffius,  le  P. 
Pezron,  le  P.  Toumemine»   ôc 

|>lufieurs  autres  critiques  Githo- 
iques  &  Proteflans. 

Admetunt ,  avec  le  manufcrit 
des  Septante  I  fuivt  par  Eufebe  » 
1069  ans  entre  le  Déluge  &  le 
commencement  du  règne  oHoan^*. 
ti  en  a45  5  ,  ce  règne  fera  polie- 
rieur  de  436  ans  à  la  nailTance  de 
Phale^i  oii  l'Écriture  marque  la 
difperfion  des  peuples  ^  &  la  for- 
mation des  fodétes  politiques  oa 
des  difiérensÉtau  particuliers.  Ce 
tems  fera  fiiffifant  pour  conduire 
des  colonies  à  la  Chine ,  pour  £ai- 
re  multiplier  ces  colonies  ,  & 
pour  qu'elles  aient  commencé  à 
le  pdicer. 

Les  défenfeurs  de  la  chronolo- 
gie du  manufcrit  des  Mafforéthes 
font  obligés  de  fuppoièr  que  Iln- 
tervalle  des  314  ans  écoulés  de- 

{)uis  la  naiâànce  4e  Phaleg  jufqu'à 
a  vocation  d'Abraham^  avoit  été 
fttffifant  pour  remplir  d^babitans , 
la  terre  qui  étoit  alors  partagée 
entre  plufieurs  nations  ,  qui  tor- 
moienc  des  États  policés  ,  qui 
avoient  des  loix  &  des  cultes  dif- 
férens,  qui  connotfToient  plufieurs 
arts,  qui  bâtiffoient  des  villes ,  en 
un  mot  qui  étoiçnt  ea  général  % 


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CH 

t>ca  près  au  mime  état  ob  elfes 
font  aujourd'hui.  Ce  qu'on  eft 
obligé  de  fuppofer  s'être  fait  en 
514  ans  ,  a  pu  fe  faire  en  436 
ans,  que  nous  comptons  entre 
Pfaaieg  &  Hoang-ti.  Rien  ne  nous 
oblige  de  fuppofer  qu'au  tems 
d'Hoang-ti  en  245  5 ,  la  Chine  fût 
déjà  au  même  état  oîi  la  Chaldée 
&  TÉgypte  fe  trouvoient  ,  trois 
£ecles  après  en  2155  ou  au  tems 
de  la  vocation  d'Abraham.  Ces 
deux  paiSyplus  voifins  que  la  Chi- 
ne de  la  terre  de  Sennaar  ou  du 
premier  féjour  des  enfans  de  Noë , 
dévoient  avoir  reçu  leurs  premiers 
habitans  beaucoup  plutôt ,  &  ces 
colonies  avoient  eu  plus  de  tems 
pour  fe  policer,  C'eft  par  cette 
raifon  que  rhiftoire  des  Égyp- 
tiens &  des  Chaldéens  remonte 
plus  haut  que  celle  des  Chinois»   , 

II. 

Idée  générale  des  principales  révo^ 

luttons  arrivées  dans  l'Empire 

des  Chinois, 

La  Chine  fe  poliça  d'abord  dans 
ùt  partie  feptenirionale  &  au  nord  " 
de  la  rivière  Jaune  ou  du  Hoang- 
I10.  Il  eft  ûir  ,  par  le  témoignage 
de  Con&icius  &  d'un  autre  Écri- 
vain du  même  tems  »  que  ce  pais 
a  eu  au  moins  fix  Rois  avant 
Yao  ;  mab ,  on  ne  connoit  guère 
que  le  nom  de  ces  Princes ,  &  le 
peu  que  l'on  fçait  du  détail  de  leur 
hiftotre ,  eft  abfblument  défiguré 
par  les  fables  dont  il  eft  rempli. 
C'eft  proprement  au  règne  de 
Yao,  que  l'hiftoire  de  la  Chine 
commence  à  être  connue  avec 
certitude  »  puifque  la  connoiflance 
en  étoit  fondée  fur  des  écrits  6l 


CH  « 

fiir  des  monumens  que  les  plus 
anciens  &  les  plus  habiles  Écri- 
vains Chinois  te  font  toujours  ac* 
cordés  à  regarder  comme  étant 
du  tems  même  de  Yao  &  de  fes 
fucceffeurs. 

Le  pals  foumb  à  Yao ,  à  Chujit 
&  à  Vu ,  qui  régnèrent  après  lui , 
s'étendoit  au  nord  8(  au  fud  da 
fleuve  Hoang.  On  voit  encore 
dans  le  Chou-kîng  compilé  par 
Confucius  fur  les  anciennes  Anna« 
les  authentiques  9  une  relation  des 
travaux  entreprb  &  exécutés ,  du 
tems  même  de  Yao ,  foit  pour 
deffécher  les  pais  inondés  par 
les  débordemens  de  ce  fleuve  6c 
par  ceux  du  Kiang  ,  (oit  pour  pré* 
venir  de  pareils  déborclemens  à 
l'avenir.  Cette  relation  contient 
un  détail  géographique  du  cours 
de  ces  fleuves  &  de  celui  des  ri- 
vières dont  ils  reçoivent  les  eaux, 
de  la  fituation  des  montagnes  & 
de  la  direâion  des  canaux  creufé» 
dans  ces  montagnes  ,  (bit  pour 
changer  le  cours  de  ces  rivières.» 
foit  pour  donner  de  l'écoulement 
à  leurs  eaux  lors  dies  déborde- 
mens. On  y  voit  auffi  une  defcrîp. 
tion  aflez  exaâe  des  limites  des 
neuf  provinces  ou  gouveraemens 
dans  lefqueis  étoit  partagé  l'em- 
pire de  Yao.  Le  chapitre  du  Chou« 
kingi  oii  cette  relation  fe  trouve,  a 
toujours  paflé  pour  être  du  tems 
même  de  Yu  conduâeur  de  tous 
ces  ouvrages  ^  c'eft-à-dire  »  pour 
avoir  été  écrit  vers  Tan  2000 
avant  TÉre  Chrétienne  ;  &^e  dé- 
tail qu'il  rapporte  ,  eft  circonftan- 
cié  de  façon  qu'il  a  été  facile  aa 
P.  de  Mailla  de  reconnoitre  tous 
le$  lieux  qui  ont  changé  de  noo^ 
B  iii 


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l±  c  rt 

aajourcl*hal,  &  d'en  drëfler  une 
carte  pour  fa  traduélion  des  Anna- 
les de  l'hiftoire  Chinoife.  Il  aflTu- 
re  que  dans  les  voyages  qa'il  â 
faits  dans  ces  mêmes  endroits , 
en  travaillant  à  la  carte  générale 
de  la  Chine ,  il  s'eft  fouvent  arrê- 
té à  admirer  la  hardiefle  &  la  fo- 
lidité  de  ces  anciens  ouvrages  qui 
fubfiflent  encore  depuis  près  de 
quatre  mille  ans.  Ce  même  cha- 
pitre du  Chou-king  contient  auffi 
un  détail  des  difFérens  tributs  que 

f)ayoiettt  -leé  '  neuf  provinces   à 
'empereur  Yao  ;  &  ce  détail  ne 
nous  permet  pas  de  douter  que 
les  arts  ne  fufTent  dès-lors  portés 
•à  un  grand  point  de  perfeôion. 
On  voit  parmi  ces  tributs  payés 
'en  efpèces  ,  des  étoffes  de  foie 
teintes  ^  rayées  ou  brochées ,  des 
peaux  paffées,  des  fourrures  de 
^out  genre ,  des  pierres  dures  tail- 
lées ,  des  jàfpes  ^  des  agathes  «  des 
marbres  précieux ,  &c. 
'*    Les  provinces  fituées  au  midi 
'du  Kiang  [t*eft  le  fleuve  qui  cou- 
lant de  l'oueft  à  Teft ,  fépare  la 
Chine  en  deux  parties  >  &  va  fe 
jetter  dans  la  mer  au-deffoiis  de 
Nane-king  ]  reçurent  peu  à  peu 
les  loix  &  les  mœurs  Chinoiles  ; 
&  TEmpire  de  la  Chine  acquit 
bientôt  l'étendue  qu'il  a  encore 
aujourd'hui.  Chu  ne  ,    aflbcié    à 
l'empire  par  Yao,  lui  fuccéda;  & 
à  foh  exemple  ,  préférant  Yu  à 
fes  propres  enfans ,  il  raffocîa  a 
la  fouveraine  puiflaoce  &  lui  laHTa 
auffi  l'Empire. 

Après  la  mort  de  Yu  ,  la  cou- 
ronne devint  héréditaire  dans  fa 
famille.  Elle  fubfifta  pendant  qua- 
tre cens  trente  ans«  fous  dix-fept 


Empereurs ,  qui  î*e  font  cepetv^ 
danr  que  quatorze  générations  ,  à 
caufe  des  fuccedions  collatérales. 
Cette  famille  porte  le  nom  de 
Hia.  Les  derniers  Empereurs  de 
Hia  ayant  aliéné  les  peuples  par 
leur  gouvernement  injude  &  vio- 
lent ,  les  provinces  fe  révoltèrent 
&  mirent  fur  le  trône  Tching- 
tang ,  roi  tributaire  dé  Chang ,  6c 
defcendu  d*Hoang-ti. 

Cette  féconde  Dynaftie  porta 
d'abord  le  nom  de  Chang ,  &  en- 
fuite  celui  de  Ine  ;  elle  fubfifta 
pendant  plus  de  cinq  cens  ans 
fous  trente  Empereurs  ,  qui  ne 
font  que  dix-fept  générations.  Les 
mêmes  raifons  qui  a  voient  fait 
élever  cette  famille  fur  le  trône  » 
fer  virent  à  l'en  faire  defcendre* 
Les  provinces  irritées  par  la  ty- 
rannie de  Tchéou  ou  Ti-fine 
[car  on  lui  donne  ces  deux  noms} 
fe  révoltèrent ,  &  mirent  à  leur 
tête  Ouenô-ouang ,  roi  tributaire 
de  Tchéon ,  dans  le  Chene-fi ,  Sc 
defcendu  d'un  des  prédéceffeurs 
de  Yao.  Son  fils  Ou-ouang  ayant 
totalement  détruit  le  parti  de 
Chang  ,  prit  le  titre  d'Empereur  , 
&  fonda  une  nouvelle  famille  qui 
porta  le  nom  .de  Tchéou ,  titre  da 
royaume  paniculier  des  ancêtres 
de  Oii-ouang.  Cette  famille  fub- 
fifta plus  long-tems  que  les  pré- 
cédentes ;  &  ayant  commencé  de 
régner  vers  l'an  1 1  lo  avant  l'Ère 
Chrétienne ,  elle  ne  ne  ceffa  que 
l'an  255  avant  la  niême  Ère. 

La  facilité,  que  Ou-ouang  avoît 
eue  d*ériger  des  royaumes  tribu- 
taires, ayant  été  imitée  par  fes 
fucceifeurs ,  ces  royaumes  fe  mul- 
tiplièrent tdlement ,  que  les  £mv 


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CH 

pcrews  dépouillés  de  leurs  do-- 
maines ,  fe  trouvèrent  hors  d'état 
de  fe  faire  obéir  par  des  vaffaux 
qui  étoient  devenus  beaucoup  plui 
puîfTans  qu'eux.  Ils  conferverent 
cependant  le  titre  &  quelques- 
unes  des  prérogatives  de  la  digni- 
té Impériale ,  tant  que  l'égalité  (^ 
tnaintint  entre  les  Rois  tributaires; 
mais  ,  lorfque  les  princes  du  pais 
de  Tfine  dans  U  partie  occidenta- 
le du  Chenefi ,  eurent  détruit  ou 
fournis  la  plus  grande  partie  des 
autres  royaumes  ,  ils  prirent  le 
fître  d'Empereurs^auquel  Tchéou» 
JdojTg ,  le  dernier  des  defcendans  . 
de  Ou-ouang ,  renonça  volodtai^ 
rement  l'an  255  avant  J.  C. 

La  nouvelle  Dynaftie  de  Tiîne 
ne  fubfifta  pas  long-tems  ;  Chi^ 
hoang-ti  qui  la  fonda  ,  regtia 
trente- fept  ans.  Il  éteignît  tous 
les  royaumes  tributaires  ^  &  l^ifb 
un  monument  de  fa  puiATance^ 
qui  étonne  encore  tous  ceui^  qui 
Je  voyent  ;  c'eft  cette  6meuf« 
muraille  qui  fépare  la  Chine  d^ 
tous  les  peuples  oui  rentoureiii. 
Mais  >  ce  Princ^e  efl  peut-êtr^  en-; 
çore  plus  connu  à  la  Chine  p$r  ia 
baine  contre  les  lettres  &  contre 
tous  les  anciens  livres  d'hiftoire , 
de  morale  &  de  jurirprudence , 
qu'il  vint  à  bout  de  fupprimer 
prefque  eotièremeot;  c'eft  un  évé^ 
nemeot  dont  nous  aurons  lieu  de 
parier  plus  au  long  daas  la  fuite» 
Six  ans  après  fa  mort  fa  Dynafiie 
fut  éteinte. 

Léoo-pang ,  foldat  de  fortune , 
qui  s'écoit  mis  à  la  tète  des  ré- 
voltés, monta  fur  le  trône  l'an 
%o6  avant  J,  C.  ;  &c  ayant  pris  le 
motq  de  Çao-rt£ui  ,  il  étdtik  U 


CH  Aï 

Dynafiie  de  Hane ,  qui  fiibfifta 
pendant  quatre  cens  foixante-dix 
ans  fous  trois  branches  différentes. 
Les  TfiAe  >  dont  le  nom  s'écrie 
&  fe  prononce  différemment  de 
celui  des  premiers  Tfine ,  fuccé- 
derent  aux  Hane  ^n  265  de  J^ 
C,  &  occupèrent  le  trône  pen- 
dant cent  cinquante  -  cinq  ans  ;. 
niais  I  ils  ne  furent  d'abord  mai* 
très  que  d'une  partie  de  TEmpire. 
La  Chine  fe  trQjkvoit  ^tors  parta- 
gée entre  trois  Souver^ns ,  ceuic 
de  Tfine»  ceux  dç  Ouey  dans  les 
provinces  ieptentrionales,  &  ceux 
de  Ou  au  fud  du  Hoang-ho.  Cet 
Ouey  étoient  Tartares  d'origine; 
leurs  Rois  prenoiem  le  titre  d*£m« 
pereurs  ;  mais^  ils  n*ont  janriait 
été  reconnus  pour  tels  dans  le 
r^Ae  de  l'Empire*  Aux  Tfine  fuc- 
çéderent  les  dou^g  pendant  cin- 
quante-neuf ans,  les  Tfi  pendant 
vingt-iroîs  ans  ,  les  Léang  pen^^nt 
cinquante-cinq  ans  ,  les  Tchine 
pendant  trente-trpis  ans  j  Si  enfiii 
les  Soui ,  qui  furent  maîtres  de 
toute  la  Chine  pendant  vingt- neu^ 
ans;  mais,  après  avoir  déjà  ré- 
gné pendant  lopg-tems  fur  lea 
provinces  du  Nord  ;  ils  avoient 
même  pris  d^abord  le  titre  d^Em- 
fi^eurs  ,  quoiqu^l  y  eût  dans 
le$  provinces  du  Midi  des  Princet 
f  ecpnnus  pour  tels  par  !ç  refte  d9 
la  Chine*  La  Pyn^fiie  des  Soui 
^ïi  l'an  617  de  J.  C.5  les  Tang 
leur  fuccéderem  ,  &  régnèrent 
pendant  deux  cens  quatre-vingt- 
peiif  ans.  Après  eqx ,  cinq  Dy- 
nafties  différentes  occuf^r^nt  fuç- 
ççiïiygmeni  le  irpne  Impérial  pen- 
à^nf  cinquante^ trois  ans,  ou  de- 
puis l'gn  997  de  /.  Ç,  jufqu'à  l'an 
B  i\r 


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H  C  H       . 

900.  Aax  cinq  petites  Dynaflîes 
fuccéderent  les  Soong,  qui  régnè- 
rent pendant  trois  cens  dix-  neuf 
ans;  ils  furent  dépouillés  en  1282 
par  les  Tartares  Mogols  ou 
Mongou  ,  defcendus  de  Genghif- 
can  ,  qui  prirent  le  nom  de  ive- 
ce.  Après  cent  ûx  ans  de  règne , 
ces  Mogols  furent  chafTés  »  &  une 
famille  Chinoife  monta  fur  le  trô* 
ne;  cette  Dynaftie  qui  porta  le 
nom  de  Taï-ming,  a  duré  pendant 
deux  cens  cinquante-Hx  ans ,  juf- 
qu*à  Tannée  1644,  dans  laquelle 
les  Tartares  Mantchou  fe  rendi- 
rent les  maîtres  de  la  Chine  ;  ils 
y  régnent  aujourd'hui  fous  le  titre 
de  Taï-tfing  qu'ils  ont  donné  à 
leur  Dynaftie.  Ce  font -là  les 
vingt- deux  familles  ou  Dynafties 
qui  ont  fucceffivement  occupé  le 
trône  Impérial  de  la  Chine,  & 
dont  l'hiftoire  compofe  les  Annales 
puUiées  en  différens  tems  par  les 
foins  d'un  tribunal  établi  exprès, 
&  avec  une  approbation  authen- 
tique de  l'Empereur* 

III. 

État  Chronologique  des  Hiflorîens 

,  publics  &  des  hiftoires  publiées 

en  diffirens  tems  à  la  Chine. 

*  Dès  les  premiers  tems  il  y  a  voit 
Il  la  Chine  un  Hiftorien  en  titre , 
chargé  du  foin  de  tranfmettre  à  la 
pofterité  ,  non  feulement  les  évè- 
nemens  généraux  qui  pouvoient 
intérefler  la  nation  entière ,  mais 
encore  les  avions  particulières , 
&  même  les  difcours  des  Princes  , 
lorfque  l'Hiftorien  jugeoit  que  Ton 
pouvoit  en  retirer  quelque  utilité, 

•  Le  Cou-Jcing,  ou  le  livre  hif-- 
torique  dont  nous  ayons  encoret 


CH 

une  partie,  n'eft  autre  chofequ*uH 
extrait  de  cette  ancienne  hiftoire  , 
fait  ou  revu  par  Confticius  ,  6c 
qui  contient  principalement  une 
compilation  des  loix ,  des  ordon- 
nances ,  &  même  des  difcours  des 
anciens  Empereurs ,  à  commencer 
à  Yao.  Confiicius  &  Mengtzé 
citent  très-fouvent  ce  recueil ,  & 
le  citent  comme  un  ouvrage  an- 
cien ,  dont  l'autorité  eft  reconnue 
de  tout  le  monde.  Le  Chon-king 
lui-même  nous  fournit  la  preu- 
ve de  ce  que  nous  avançons  au 
fujet  de  cet  Hiftorien  impérial  & 
de  l'exiftence  de  ces  Annales.  On 
y  voit  qu'à  la  mort  de  Tching- 
ouangy  arrivée  V^n  1068  avant 
7.  C.  ,  l'Hiftorien  impérial  foc 
chargé  de  mettre  par  écrit  &  d'in- 
férer dans  les  archives ,  les  der- 
niers difcours  de  ce  Prince  mou- 
rant ;  on  y  voit  auftî  qu'on  lui:  or- 
do^nna  de  chercher  dans  les  archi- 
ves ce  qui  s'étoic  pratiqué  ancien- 
nement aux  funérailles  des  Em-« 
pereurs  ,  &  aux  couronnement 
de  leurs  fuccefleurs  ,  afin  d^en 
drefter  un  mémorial  qui  fervic  de 
règle  dans  l'occafion  préfeme. 
Tching-ouang  écoit  fils  de  Ou- 
ouang  fondateur  des  Tchéou  ,  & 
on  vouloir  conftater  le  cérémo- 
nial oui  s'obferveroit  dans  la  fuite 
fous  la  famille  régnante. 

On  doit  encore  conclure  d'un 
difcours  de  Tchéou-cong ,  oncle 
de  Tching' ouang ,  rapporcé  dans 
le  Chou-king  ,  que  l'on  avoit 
alors  une  hiftoire  détaillée  de  la 
Dynaftie  de  Chang  ;  car  ,  fans 
cela  ,  il  n'auroit  pu  être  inftruit 
de  la  durée  de  différens  règnes  des 
Princes  de  cette  famille  ^  non  plus 


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CH 

tque  de  plu/îeurs  de  leurs  aâions 
particulières  qu*il  rapporte. 

Outre  la  grart^le  coUedion  tirée 
des  Annales  de  THiftorien  impé- 
rial >  il  y  a  voit  encore  des  hiftoi- 
res  écrites  par  des  particuliers. 
Confiicius  cite  avec  éloge  celle 
de  Tchéoo-gine ,  qu'il  appelle  un 
ancien  Écrivain  ;  &  dans  un  autre 
endroit  il  aflure  qu'il  n'a  pu  en- 
core  trouver  d'Hillorien  capable 
de  fufpendre  Ton  jugement  dans 
les  chofes  douteufes  ;  d'où  il  faut 
conclure  qu'il  y  a  voit  plufieurs 
hiftoires  écrites  par  dilFérens  Hif- 
toriens. 

Mengtzé,quî  vtvoit  un  peu  plus 
^'un  fîecle  après  Coiifucius ,  cite 
une  ancienne  hiftoire  authentique 
du  règne  de  Chune  fuccefleur  de 
Yao  ,  &  joint  Ton  témoignage  à 
celui  du  Chou-king ,  pour  com- 
battre les  traditions  fabuleufes 
^^s  HiAoriens  du  petit  royaume 
de  Tfi  ,  au  fujet  de  ce  même 
Chune.  A  cette  occafion  il  établit 
de  très-bonnes  règles  de  critique 
poUr  l'interprétation  du  Chou- 
king  ou  du  livre  d'hiOoire  du 
Chi-king  ou  du  livre  de  poëfie , 
&  pour  celle  des  autres  anciens 
livres* 

Les  Empereurs  n'étoîent  pas 
les  feuls  qui  eufTent  des  Hifloriens 
publics  ;  les  royaumes  tributaires 
a  voient  auili  leurs  Annales  ou  leurs 
Ki.  Confucius  eni  parle  dans  le 
Tchong-yong  ;  &  Mengtzé  ,  qui 
Taflure  en  termes  formels  de  tous 
les  royaumes  tributaires  ,  nous 
apprend  quel  étoit  en  pardculier 
le  titre  des  Annales  publiques  de 
ceux  de  Tiine ,  de  Tfou  ,  &  de 
Lou.  Un  fait  rapporté  par  Tfo- 


C  H  45 

cbî  ou  Tfo  -  kicou  -  mîng ,  con- 
temporain de  Confucius ,  &  qui 
étoit  lui-même  Hiilorien  public 
du  royaume  de  Tfou  dans  le 
Hou-couang  ,  nous  donnera  un 
exemple  des/  précautions  que  l'on 
prenoit  dès-lors  pour  conferver 
ces  Annales  particulières.  Ce  fait 
fe  trouve  dans  le  Tfo-tchouene 
ou  Commentaire  de  Tfo-chi  fur 
le  Tchune-tfiéou  de  Confucius. 

Voici  le  fait  rapporté  par  Tfo- 
chi.   La  vingt  -  quatrième  année 
de  l'empereur  Ling-vang ,  vingt- 
troifième  des  Tchéou  [  c'eft  Tan 
518  avant  J.  C.  ],  Tchouang^ 
cong ,  roi  tributaire  de  Til ,  ayant 
enlevé  la  femme  de  Tfouî-chou  » 
général  de  fes  troupes  ;  ce  Géné- 
ral outré  de  cet  affront  fit  ailài&- 
ner  le  Roi ,  &  mit  fur  le  trône  un 
autre  Prince  de  la  même  famille* 
Aufli-tôt  le  Tribunal  d*hifloire 
drefTa  une  relation  détaillée  de  cet 
événement ,  &  la  mit  dans  les  , 
archives.  Voici   quel  eu  Tufage 
établi  dans  ce  Tribunal ,  &  c'eft 
une  tradition  conflantf^  à  la  Chi- 
ne ,  que  cet  ufage  étoit  établi  dès 
les  premies  tems.    Le  Tribunal 
d'hifloire  eft  partagé  en  deux  claf-> 
fes  ;  la  premièrp  eft  chargée  d'écri- 
re ce  qui  (ê  paiTe  au  dehors  du 
palais  ,  c'efl-à-dire  y  tout  ce  qui 
concerne  les  affaires  générales  ott 
du  royaume  ou  de  r£mpire  ;  la 
féconde  écrit  tout  ce  qui  fe  paiTe , 
&  même  tout  ce  qui  le  dit  au  de- 
dans du  palais ,  les  aâions  6c  les 
difcours  du  Prince,  de  fes  miniftret 
&  de  fes  officiers ,  du  moins  ceu< 
dont  ils  jugent  que  la  connoiiTan* 
ce  doit  palier  à  la  poftérité.  Cha- 
cun de  ceux  qui  compofent  le 


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»6.  CH 

daiTe  ,  écrit  fur  une  feuille  ou  fur 
une  tablette  la  relation  de  ce  qu'il 
a  appris ,  il  la  figne,  ôcfans  la 
"communiquer  aux  autres  ,  il  la 
îette  dans  une  efpèce  de  coffre  ou 
de  grand  uonc  fermé  &  placé  au 
milieu  de  la  falle  où  s'aOemble  le 
Tribunal.  Ce  coflEire  ne  s'ouvre 
que  loriqu'it  s'agit  de  mettre  ces 
mémoires  en  ordre  pour  travail- 
ler à  rhilloire ,  foit  d'un  règne 
particulier  ,  foit  même  d'une  D/t 
mftie  entière  ;  car  y  depuis  les 
Hane»  c'eft- à-dire,  depuis  Pan 
200  avant  J.  C.  on  ne  publie 
rhîAoire  d'une  Dynaftie  que  lorf- 
qu'eile  n'efl  plus  fur  le  trône,  ou 
du  moins  lorfque  le  fceptre  ayant 
paiFé  dans  une  autre  branche ,  les 
Hiftoriens  peuvent  avoir  une  en-^ 
tîère  liberté  de  publier  les  vérités 
ies  moins  favorables  à  ceux  dont 
as  écrivent  Thiftoire.  Mais  ,  reve- 
nons au  fait  rapporté  dans  le  Tfo- 
tchouetie. 

Dès  que  le  général  Tfouï^chou 
eut  été  infermé  par  ceux  du  Tri- 
bunal qui  lui  étoient  attïichés  ,  de 
ce  qui  venoit  de  fe  pafler  ,  il  def- 
iitua  le  Préfident ,  le  fit  mettre  à 
mort,  s'empara  des  différens  mé- 
moires dreffés  par  les  membres 
du  Tribunal ,  &  mit  un  nouveau 
Préfident  à  la  place  de  l'ancien. 
Le  général  Tfoui-chou  avok  toute 
Tautorité  feus  King-kong,  qu'il 
avoit  fait  roi  de  Tù.  A  peine  le 
nonyeau  préfident  du  Tribunal 
fot-il  en  place ,  qu*il  fit  drefler  de 
nouvelles  relations  pour  rempla-* 
cer  celles  qui  avoiest  été  fuppri^ 
mées ,  &  y  fit  ajouter  le  détail  de 
ce  qui  étoit  arrivé  à  (on  prédé* 
éeiTeur.  Tibuï-cbou  1  ioftruit.  do 


CH 

cette  démarche  ,  jcafla  le  Trîba^ 
nal ,  &  fit  mettre  à  mort  prefque 
tous  ceux  dont  ë  étoit  compofé* 
Auffi-tôt ,  dit  le  Tfo-tchouene, 
on  vit  paroître  de  routes  parti 
dans  le  royaume  de  Tfi  1 .  des 
écrits  qui  fe  trouvoient  affichés 
dans  les  lieux  publics ,  &  oii  U 
conduite  du  général  étoit  dépein- 
te^vec  les  couleurs  les  plus  noi-r 
res  ;  ainfi  ,  il  jugea  qu'il  y  avoit 
moins  de  danger  à  féiablir  le  tri* 
bunal  ,  &  à  lui  laifler  la  liberté 
de  tranfmectre  à  la  poflérité  U 
connoiilance  de  fa  honte  &i  de  la 
vengeance  qu'il  en  avoit  tirée  » 
que  de  s'expofer  aux  effets  que 
pouvoient  produire  ces  écrits  pu- 
blies fur  l'efprit  des  peuples. 

Les  Annales  authentiques  de  U 
Dynaftie  des  Tang  nous  appre- 
nent  un  autre  fait,  qui,  quoique 
d'un  tems  poftérieur  &  du  Septiè- 
me fiecle  de  l'Ère  Chrétienne, 
nous  fait  connoitre  quels  font  le« 
principes  par  lefquels  fe  condiût 
ce  Tribunal.  Tai-tfang,  deuxiè- 
me empereur  des  Tang ,  demanda 
un  jour  à  Tchou-fouï-léang  f  pré- 
fident du  Tribunal ,  au*il  lui  fît 
voiries  mémoires  deltiné$  pour 
l'htftoire  de  fon  règne,  n  Seigneur^ 
I»  lui  répondit  le  Préfident  »  la 
f»  Tribunal  écrit  le  bien  6c  le  mal 
n  avec  une  égale  liberté.  Aucun 
If  Empereur  n'a  Vu  ce  que  l  on 
n  difoit  de  fon  gouvernement;  fi 
19  on  le  lui  montroit ,  on  ne  pour- 
»  roit  pkis  écrire  que  des  éloges* 
n  La  liberté  avec  laquelle  le  Tri<9 
I»  bunal  écrit  tout  ce  qui  fe  pafle» 
»  eu  ^n  frein  capable  de  retenir 
»  en  plufieors  ocç^fions  les  Prin- 
N  ces  &  tes  Miniâres.  Ceux  d*4iit 


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CH 

i»  tr'eox  qui. ne  (ont  pas  encore 
»  tout  à  fait  corrompus ,  &  aux- 
.  »  quels  il  refte  quelque  pudeur  , 
»  redoutent  les  jtigemens  que  la 
»  poftérité  portera  de  leur  con- 
»  duîte.  Eh  !  quoi  ,  dit  l'Eaipe- 
»  reur  ,  vous  qui  me  devez  ce 
»  que  vous  êtes ,  vous  qui  m'êtes 
»  û  attaché  ,  voudriez>vous  inf- 
»  truire  Tavenir  de  mes  fautes , 
»  fi  j'en  CQmmettoîs  ?  Il  ne  feroit 
»  pas  le  maître  de  les  lui  cacher , 
»  reprît  un  des  membres  'du  Tri- 
»  bunal  ;  ce  feroit  avec  douleur 
M  que  nous  les  écririons ,  mais  tel 
•^  eÔ  le  devoir  de  notre  emploi  ;  il 
»  nous  oblige  même  d'inOruire 
»  la  podéricé  de  la  converfation 
»  que  vous  avez  aujourd'hui  avec 
!>  nous,  tt 

L'ouvrage  de  Mengtzé  ne  nous 
permet  pas  de  douter  que  Téiude 
dç  lancienne  hiftotre  ne  fût  cul- 
tivée de  fon  tems  avec  foin. 
»  L'homme  fage,  dit-il  au  qua- 
»  triènie  chapitre  de  fon  fecbnd 
»  Livre,  ne  fe  contente  pas  de 
»  converfer  avec  ceux  de  fes  con- 
»  temporaîns  qui  pratiquent  la 
»  vertu  ;  il  veut  encore  connoître 
»  les  f§ges  des  fiecles  paiTés  ;  il 
»  lit  foigneufement  celles  des  inf- 
»  tna^ons  qu'ils  avoient  données 
»  à  leurs  contemporains ,  qui  font 
»  confervées,  foit  dans  le  Chou- 
n  king ,  foit  dans  le  Chi  king  ; 
»  mais  ,  comme  cette  étude  ne 
I»  lui  donne  qu'une  conrk^ifflance 
»  imparfaite  oe  ces  grands  Hom- 
»  mes,  il  cherche  à  s'inilruire par 
»  l'hiiloire  particulière  de  leurs 
S)  aéèions ,  de  la  manière  dont  ils 
»  ont  pratiqué  eux-mêmes  les 
»  vertus  qu'ib  énfeignoient  aux 


CH  47 

»  autres  ;  il  examine  avec  (bîn4*hîr 
i>  toire  des  tems  oii  ils  ont  vécu  ; 
91  il  veut  connoître  les  moindres 
»  évènemens  de  leur  vie ,  &  par- 
ti là  il  cooverlè ,  pour  ainfi  dire  9 
w  avec  ces  grands  Hommes  « 
n  comme  s'ils  étoient  encore  vi- 
n  vans.  « 

La  violente  perfécution  excitée 
par  Chi-hoang-tî,  fondateur  des 
premiers  Tfine  ,  contre  les  let- 
tres ,  fit  périr  la  ph)s  grande  par- 
tie de  ces  anciennes  hifloires ,  fok 
générales  ,  foit  particulières  ;  Se 
quoique  la  perfécution  .n'eût  duté 
que  quelques  années ,  les  effets  en 
furent  tels  ,  que  lorfquk^n  voulut 
fous  les  Hane  fucceffeurs  de  Tiioe, 
travailler  à  réparer  les  pertes  <nie 
l'on  avoit  faites ,  &  raflembler  les 
-  fragmens  des  anciens  livres  hiilo- 
riques  échappés  à  rinceatjie ,  oa 
ne  put  remonter  avec  une  pleine 
certitude  au  de  -  là  de  Tan  84! 
avant  l'Ère  Chrétienne  ,  c'eA-â- 
dire  1  au  de* là  du  tems  de  la  fon- 
dation du  royaume  tributaire  àt% 
Tfine  ,  érigé  en  faveur  des  ancê- 
tres de  Chi-hoang-ti ,  lequel  avoic 
fait  épargner  Thiltoire  particulière 
de  fa  famille.  Le  Tcbune-tfiéon 
de  Coftfucius  ,  contenant  une  par« 
tie  de  rhi{h>ire  des  rois  de  Lou  , 
ne  remontoit  même  que  jufqu'à 
l'an  721  avant  J.  C;  aînfi  ,  Sft- 
ma^tfiene,  qui,  par  l'ordre  de 
l'empjereur  Voo^ti,  écrivit  vers 
l'an  97  avant  J.  C.  la  première 
hiûoire  publiée  depuis  la  perfé- 
cution avec  le  fceau  de  l'autorité 
publique ,  ne  fit  remonter  fa  chro- 
nologie que  jufqu'à  l'an  841  avant 
J,  C^ ,  &  jufqu'au  règne  de  Li- 
vang  ^   dixième  Empereur  4çf 


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^«  CH 

Théou.  Pour  les  tcms  antériears  , 
il  fe  contenta  de  donner  la  fuite 
des  Empereurs  telle  qu'il  la  trouva 
dans  le  Chl-pene;  c*éft  un  livre 
dont  l'Auteur  ni  le  tems  n'étoient 
point  connus ,  mais  qui  contenoit 
one  lifte  des  règnes ,  à  laquelle  on 
ne  voit  pas  que  l'on  ait  rien  trou- 
vé à  changer  depuis. 

Sré»ma-t(iene  ajouta  des  con- 
jeâures  iur  la  durée  totale  de  la 
nonaKhie  depuis  Yao ,  conjeâu- 
tes  fondées  fur  quelques  fragniens 
des  anc^ns  livres  ,  &  qui  ne  don- 
noient  tout  au  plus  qu'un  à  peu 
près  ;  aufli  paroît-tl  que  Sfé-ma«- 
tiîene  laiiToit  là-deiTus  une  entière 
liberté  à  (es  L'eâeurs.  Son  ouvrage 
intitulé  Sfé-ki  ,  ou  Ché-ki  eft 
diftribué  en  dnq  différentes  par- 
ties; la  première  eft  appellée  Ou- 
ti'pene-ki ,  hiftoire  des  cinq  £m« 
peréurs  ,  Hoang-ti  ,  Tchouene- 
iilo,  Tico,  Yao  &  Chune;  la 
feconde partie  eft  nommée,  Hia- 
pene-ki  ,  l'hiftoire  de  la  dynaftie 
Hia  ;  fa  troifième  eft  appellée  Ine- 
pene^ki  ,  hiftoire  de  la  dynaftie 
lue,  autrement  Chang;  la  quatriè- 
me nommée  Tchéoui- pene-ki  , 
contient  Thiftoire  des  Tchéou  ; 
enfin  la  dernière  partie  contenoit  j 
Ibus  le  titre  de  Tfine-pene-ki  , 
l'hiftoire  des  Tfine  &  celle  de 
i'établiftetnent  des  Hane.  Le  Sfé- 
kt  de  Sfé-ma-tfiene  paiFe  pour  un 
des  livres  les  mieux  écrits  en  Chi- 
nois. Sous  les  premiers  Song  »  Pe- 
yne  donna  un  commentaire  fur 
cet  ouvrage  ;  &  fous  les  Tang, 
Sfé^ma-tchine  on  Siao-fté-ma\, 
l'un  des  defcendans  de  Sfé-ma- 
tfiene ,  en  publia  un  autre  con- 
.jointetwat  avec  Tchang-^tchéoa- 


CH 

tfié.  Sous  la  dynaftie  des  Mtng> 
deux  Lettréà  donnèrent  fous  le  titra 
de  Sfé-ki- ping»  line ,  une  édition 
de  ces  deux  Commentaires,  arec 
des  noces. 

Pendant  que  Sfé-ma-tfiene  tra-' 
vaiiloit  à  fon  hiftoire ,  Kia-y  pu- 
blia celle  de  Chi-Hoan^-ti  &  de 
la  dynaftie  Tftne  ;  mais ,  cette 
hiftoire  ne  fut  pas  revêtue  de  l'au- 
torité Impériale  par  l'examen  & 
par  l'approbation  du  Tribunal. 
Sous  le  règne  de  l'empereur  Ming. 
tî  >  oui  commença  en  5  8  de  J.  C.  9 
&  nnit  en  76  y  Pane-piao  »  & 
après  lui  fon  fils  Pane-cou ,  eu- 
rent  ordre  de  travailler  à  rhiftoire  . 
des  Hane  occidentaux.  Le  fceptra 
avoit  paflédans  une  féconde  bran- 
che de  cette  famille  ,  qui  ayant 
tranfporté  le  fiege  de  l'Empire ,  de 
Tchang-ngane  ville  du  Chene-fi  , 
à  Lo-yang  dans  le  Ho-nane,  foK- 
moit  comme  une  nouvelle  Dy- 
naftie qui  prenoit  peu  d'intérêt  à 
ceux  de  la  branche  précédente» 
&  laiflbit  aux  Écrivains  la  liberté 
de  parler  des  Empereurs  qui  l'a-» 
voient  compofée.  L'ouvrage  de 
Paoe-cou  ne  fut  achevé  qu'après 
la  mort  de  Ming-ti;  mais,  com- 
me il  mourut  lui-même  avant  que 
d'y  avoir  mis  la  dernière  main» 
ce  fut  fa  fceur  Tfao-ta-cou ,  fem. 
me  célèbre  parmi  les  lettrés  Chi- 
nois ,  qui  fut  chargée  de  la  révî- 
fion  &  de  l'édition.  L'ouvrage  ne 
parut  que  fous  le  règne  de  Ho-ti , 
après  l'examen  d'un  Tribunal  éta- 
bli exprès  ;  il  porte  le  titre  de  Si- 
hane-chu,  hiftoire  des  Haned*Oc<« 
cident.  Outre  cette  hiftoire  ,  Pane- 
cou  avoit  compofé  un  ouvrage 
fur  l'ancienne  chronologie;  ilpor* 


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CH 

te  le  titre  dé  Lu-li-tchi  ,  8c  (e 
trouve  joint  avec  le  Si^hane^chu, 
Ma  •  touane  -  Une  dans  ion 
Ouene-hiene-tong-cao ,  hifloire 
de  la  littérature^hinoîfe,  publiée 
en  1 3 1 5 ,  6c  très-eAimée  à  la  Chi- 
ne p  porte  un  jugement  aflez  peu 
avantageux  de  Pane»  cou  ;  il  le 
Bomme  un  Écrivain  fans  érudition 
&  fans  critique ,  qui  recevoir  fans 
choix  &  faiu  examen  tout  ce  que 
b  uadîtion  rapportoit.  Ce  juge* 
ment  efi  ians  doute  un  peu  trop 
ngoureux  ;  mats,  il  peut  n'être  pas 
tout-à-fait  faux  ^  fur  tout  pour  la 
clironolode  établie  par  Pane-iioii 
dans  ion  jLu*li-  tchi* 

Les  difficultés ,  que  l'on  ayoît 
trouvées  dans  la  compilation  & 
dans  Tarrangement  des  mémoires 
de  l*hiQoire  des  Hane  occiden- 
taux, portèrent  l'empereur  Chune^ 
ti ,  qui  monta  fur  le  trône  l'an  1 16 
de  /•  C  »  à  ordonner  que  le  Tri- 
èunal  commençât  dès-lors  à  met- 
tre en  ordre  les  mémoires  de  la  Dy« 
nailie  regnante^ou  de  celle  des  Ha* 
ne  orîenlàuxy  mais  avecdéfenfe 
d'en  laifler  rien  tranfpirer  au  de- 
hors; &  enfin,  rhiAoire  des  Hane 
orientaux  ne  parut  que  fous  la 
Dynafiie  fuivante ,  ou  fous  celle 
des  (econds  Tfine ,  qui  commença 
fan  159  de  J.  C  Elle  avoit  le 
^  litre  de  Hane-ki  ;  mais ,  on  la 
trouva  fi  défeâueufe  &  fi  mal 
écrite  ,  que  Ton  chargea  Tchine- 
cbéou  de  la  revoir  ,  oc  d'y  faire 
tous  les  changemens  néceflaires* 
Lorfqu'on  vint  à  ejcanûner  l'ou-^ 
vrage  de  Tchine-chéou ,  on  en 
&t  fi  m^ontent ,  ou'on  le  dégra* 
da  de  fon  titre  d  niftorîen  impé- 
rial >  pour  avoir  donné  le  titre 


CH  29 

d*Emperear  aux  prinices  de  Ouéf , 
&  pour  avoir  traité  de  rebelles  , 
non  feulement  les  princes  de  Ou  » 
mais  encore  les  Héou-hane ,  ou 
ceux  de  la  troifième  branche*  des 
Hane.  Les  Ouéy  venoient  des 
Tartares  To^pa,  établis  dans  les 
plaines  fituées  au  nord  &  au  nord- 
eft  de  Pé-kingi  entre  le  44  &  k 
49e  degré  de  latitude.  La  Chine 
avoit  été  partagée  quelque  tems 
entre  ces  Onéy  »  les  Ou  &  l«s 
derniers  Hane;  mais*,  ceux-ci 
étant  de  la  &mille  Impériale  , 
étoient  regardés  comme  les  ièuls 
Empereurs  légitimes  ;  &  lesTfiœ, 
quoique  fortis  du  pais  des  Ouéy  , 
n*o(èrent  s'écarter  de  ce  principe. 
Les  guerres  civiles,  qui  trou- 
blèrent l'Empire  fous  les  Tfine , 
retardèrent  Texécution  des  ordres , 
donnés  pour  travailler  à  une  troi- 
fième hiftoire  des  Hane  orien- 
taux ;  ainfi ,  elle  ne  parut  que  foos 
les  Soui  »  qui  commencèrent  ea 
'  421  à  régner  fur  Aine  partie  delà 
Chine  ;  il  fallut  même  encore  y 
retoucher  avant  que  de  la  publier 
avec  l'approbation  du  TrihMtMj. 
Elle  porte  le  titre  de  Héou-hane- 
chtt ,  hifioire  des  féconds  Hane  \  6c 
on  y  joignit ,  (bus  le  titre  de  Sanc- 
coué-chi,  celle  des  trois  royaumes. 
Sous  le  règne  de  Our^i ,  pre- 
mier Empereur  des  Léang,Chine- 
yo ,  Mftorien  de  l'Empire ,  publia 
en  502  ,  fous  le  titre  de  Tfine- 
fong'tfi-chu ,  une  hiftoire  des  dy^ 
nafties  Tfine ,  Song  &  Tfi ,  à  la* 
quelle  il  avoit  eu  ordre  de  travail- 
ler fous  les  règnes  précédens  ; 
mais ,  la  divifion  de  TÈnipire  en- 
tre plufieurs  '  Princes  différens  » 
l'a  voit  privé  de  beaucoup  de  mé^ 


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9Q  CH 

moires  ;  aînfi  ,  Tempereur  Taï- 
tibng ,  le  fécond  des  Tang  ,  qui 
commença  en  627 ,  &  qui ,  ayant 
fcuoïb  tous  les  royaumes  parti- 
culiers »  avoit  donné  ordre  d'ap- 
porter à  fa  cour  les  mémoires 
hidoriques  qui  éroient  confervés 
dans  les  archives  de  ces  royau- 
mes ,  nomma  dix -huit  Commif^* 
iaires ,  foit  pour  revoir  6c  pour 
réformer  Fou V rage  de  Chine-yo, 
foit  même  pour  écrire  de  nouveau 
Thiftoire  des  Dynafties  précéden- 
tes ,  Vils  jueeorem  que  cela  fût 
fiéceiTaire.  Ces  Commiflaires  fe 
partagèrent  en  trois  bureaux  dif- 
férens ,  le  premier  chargé  de  raf- 
&mbler  &  de  mettre  en  ordre  les 
matières  ,  le  fécond  d'examiner 
les  dates  &  de  difcuter  ce  qui  au- 
rott  rapport  à  la  chronologie  ou  à 
iailronomie  ,  ôcie  troifième  d  a- 
bréger  les  diverses  relations ,  6c 
d'en  former  un  lèul  corps  d'hiftoi- 
re.  Cet  ouvrage  intitulé  Ou-taï- 
IFe-tchi  ,  mémoires  hifioriques 
des  cinq  Dy naflies  ,  parut  en  Cit 
cens  kpt  livres.  Il  contenoit  auffi 
rkifloire  des  Tartares  Ouéy  »  fous 
le  titre  de  Pé-ffe,  hiftoire  Sep- 
tentrionale, 6c  celle  des  princes 
du  royaume  particulier  delchéou^ 
feus  le  titre  de  Tchéou-chu. 

Après  la  Dyiiaftie  des  Tang  » 
qui  finit  Tan.  907,  la  Chine  le 
trouva  fucceffivement  occupée 
par  les  cinq  petites  Dynafties  , 
qui  ne  durèrent  toutes  enfemble 
que  quarante-trois  ans.  Les  Song 
qui  leur  fuccéderent  en  950 ,  fon- 
gerent  en  977  à  faire  continuer 
rhiftoire  autaentique  de  l'Empire. 
Celle  des  Tang  parut  d  abord 
feus  le  titre  de  Tang-chu  1  com- 


CH 

prenant  en  3eux  ceôs  vîngt-cîncf 
livres  ce  qui  étoit  arrivé  pendant 
les  deux  cens  quatre  vingt-neuf 
ans  qu'avoir  duré  la  Dynaftie* 
On  donna  enfuitt  fous  le  titre  de 
Ou-taï-fle  rhiftoire  des  cinq  pe* 
tites  Dynafties,  divilée  en  cent 
cinquante  livres. 

La  colièâion  de  toutes  les  hif« 
toires  authentiques  étoit  compofée 
d'un  û  grand  nombre  de  volumes  , 
qu'elle  étoit  devenue  d'un  prix 
exceffif ,  6c  que  fon  étendue  en 
rendoit  l'étude  très-  difficile  ;  ainii  , 
on  penfa  à  en  faire  un  abrégé 
méthodique  fur  le  modèle  du 
Tchune-tfiéou  de  Confucius  ,  6c 
du  Commentaire  compofé  par 
Tfo-kiou-ming  fur  ces  Annales. 
Sfé-  ma-couang  fut  celui  qui  eut 
plus  de  part  à  cet  ouvrage  ;  mais  » 
il  ne  voulut  commencer  fon  abré-^ 
gé  qu*à  l'an  42.5  avant  J.  C.  » 
c'eft- à-dire ,  au  règne  de  Hœï- 
he-ouang  vingt -huitième  Empe- 
reur des  Tchéou  ,  parce  que  c'é- 
toit  à  ce  règne  que  finiiToit  le 
Coué-yu  ,  efpèce  de  continua- 
tion ou  de  fupplément  du  Tchune* 
tfiéou..  L'abrégé  de  Sfé  -  ma-» 
couang  y  divifé  en  deux  cens  qua- 
tre-vingt-quatorze livres  ,  parut 
fous  le  titre  de  Tfé-tchi-tong- 
kiene ,  vrai  miroir  du  gouverne** 
ment*  Liéou-jou  ,  qui  avoit  tra- 
vaillé à  cet  abrégé  avec  S{é«ma^ 
couang^  penfa  que  l'ouvrage  ^ 
pour  être  complet ,  devait  remon» 
ter  jufqu'au  commencement  de  la 
Monarchie ,  6c  donner  une  fuite 
continue  de  tous  les  Empereurs. 
Le  Chou-king  ne  commençant 
qu'au  règne  d'Yao,  &  ne  don*- 
nant  pas  même  le  nom  de  tous 


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les  ttnpereurs  ,  laiflbît  ignorer 
^ne  partie  de  l'hiftoire.  Pour  re- 
médier à  ce  défaut ,  Liéou-joti 
publia  fous  le  titre  de  Tfé-tchi- 
<ong-kiene-ouay-ki.,  une  intro- 
^aâ^on  an  Tong-kiene  de  Sfé- 
ma-couangy  divifée  en  dix  livres» 
Il  ajouta  les  mots  Ouay-ki ,  hif- 
toire  du  dehors  ^  dans  le  même 
fens  k  peu  près  que  Ton  a  em- 
ployé le  titre  d'Extravagantes  que 
portent  les  Décrétâtes  ajoutées  à 
la  première  coUeâion.  Liéou-jou 
par  les-  mots  Quay-kî ,  vouloît 
marquer  que  cet  ouvrage  avoit 
été  ajouté  au  Tong-kiene  de  Sfé- 
ina*-couang, 

La  réputation  de  ce  Tong- 
kîene  s^eU  maintenue  jufqu'à  pré- 
fent  ;  &  cet  ouvrage ,  augmenté 
dans  la  fuite  des  abrégés  qui  fu- 
rem  faits  fous  les  yeux  du  tribu^ 
liai  «  à  mefure  que  l'on  publia  de 
nouvelles  hiftoires  authentiques  , 
eft  encore  aujourd'hui  le  feul 
abrégé  d'hiftoire  qui  ait  quelque 
autorité.  Tout  le  changement  que 
l'on  y  a  fait,  s'efl  borné  à  y  ajouter 
nne  efpèce  de  texte  fommaire, 
duquel  les  récits  hiftoriques  font 
cenfés  la  glofe. ,  On  donne  k  ce 
texte  9  le  titre  de  Cang-mou  ,  la 
mère  ou  la  fource  de  la  narra- 
tion ;  &  c'eft  de-là  qqe  vient  le 
titre  de  Tong-kiene-cang«moa  j 
-que  porte  aujou^'dliui  tout  l'ou- 
vrage. 

Lorfque  lliiflôîre  des  Song  ent 
été  publiée  avec  l'approbation  du 
Tribunal ,  fous  King-tfong ,  qua- 
trième Empereur  (tes  Yvene  ou 
Mogi^s  iflus  de  Gen^itfcan  ,  on 
en  joignit  l'abrégé  au  Tong-kiene. 
Comme  fous  les  Ming  on  jugea 


CH  )i 

cette  hîfloire  des  Sone  défe^eu* 
fe ,  Tching-tfou ,  croiuème  Empe* 
reur  des  Ming  ,  en  £t  compofer 
une  autre  ,  de  laquelle  on  fit  auffi 
un  abrégé  pour  joindre  au  Tong* 
kiene  ;  mais ,  à  la  place  du  Ouay« 
ki  de  Liéou-jou  ,  on  mit  k  la  tér« 
du  Tong-kîene  de  Sfé-ma-couang 
le  Tfiene-piene  ,  ou  les  Annakt 
antérieures  de  Kine-lu-flang  ,  di* 
vifées  en  vingt  livres.  Cet  Écri- 
vain ,  n'ayant  confervé  qu'uni 
partie  du  Ouay-ki  9  composa  fon 
ouvrage  de  lambeîux  du  Cboii«- 
king  &  des  autres  livres  anciens  , 
dont  Liéou-jou  s'étoit  fait  une  re- 
ligion de  ne  rien  détacher.  Ces 
lambeaux  font  joints  les  uns  aux 
autres,  par  des  fupplémens  qtii 
en  remplirent  les  vuides.  L« 
Tfiene  -  piene  fait  aujourd'hui  la 
première  partie  du  Tong-kiene  i 
&  le  Ouay-ki  de  Liéou-jou  eft 
devenu  A  rare ,  que  le  Père  Gau^ 
bil  n'a  pu  le  trouver  à  Pé-king  9 
m  par  coniéquent  vérifier  quel* 
ques  citations  de  ce  livre  ^  qui  fe 
trouvent  dans  le  Tfiene-piene  ; 
vérification  qui  eut  été  cepetulant 
importante ,  pour  s'alTurer  du  dé* 
gre  de  croyance  que  méritent 
certains  détails  chronologiques  & 
même  agronomiques  tirés  de  ce 
Ouay-ki. 

Lorique  les  Ming  mrem  fait 
publier  rhiftoire  authentique  des 
V vene  ou  Mogols ,  on  en  joignit 
l'abrégé  avec  celui  des  hiftoires 
des  Song  ;  Si  ces  deux  abrégés 
forment  le  Sii-piene  ou  la  troifiè- 
me  partie  du  Tong-kiene-cangï- 
mou.  On  n'a  point  encore  publié 
d'hifloire  authentique  de  la  Dy^ 
çafii^  df  Ming  ,  &  les  Annalcai 


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5*  CH 

approuvées  ne  vont  poiiit  afi  de- 
là de  la  fin  des  Yvenes  ou  des 
Tartares  Mogols.  La  chronologie 
fuivte  dans  le  Tong-kiene  »  eft 
celle  de  Chao-yong  ,  pour  les 
tems  qui  ont  précédé  l'an  841 
avant  J.  C,  Depuis  cette  année  on 
fuit  la  chronologie  de  Sfé-ma- 
tfiene ,  de  laquelle  on  ne  s'eft  ja- 
mais écarté. 

-  En  1^63,  le  lettré  Sié  publia 
fous  le  titre  de  Kiatze-hoay-ki , 
un  abrégé  chronologi(|ue  de  l'hif- 
toire  Chinoife  qui  va  jufqu'à  cette 
année  &  qui  e(t  très-eftimée  à  la 
Chine.  La  difpofition  méthodique 
de  cet  ouvrage  le  rend  d*une  ex* 
tréme  commodité.  Cet  ouvrage 
eil  divifé  en  quatre  bornes  qui  con- 
tiennent cinq  parties. 

Vers  Tan  1660  fous  l'empereur 
Hoaï-tibng  t  on  publia  fous  le 
titre  de  Niene^yffé ,  une  collec- 
tion des  diflPérenres  hiftoires  au- 
thentiques dçs  feize  Dynaûies, 
Ce  recueil ,  qui  forme  plus  de 
deux  cens  volumes ,  contient  les 
hiftoires  originales  dont  le  Tong- 
kiene  eft  feulement  Tabrégé  ;  mais, 
on  a  ajouté  à  ces  hiftoires  la  vie 
des  Hommes  célèbres  «  &  plu- 
sieurs diflertations  fur  la  géogra- 
phie ,  l'aftronomie  ,  les  rites  ^  la 
inufique  f  Ôcc.  enforte  que  ce  re- 
cueil forme  lui  feul  uiie  bibliothè- 
que prefque  complette ,  foit  par 
le  nombre  des  volumes,  foit  par 
la  variété  de  ce  qu'il  renferme. 

Malgré  toutes  les  précautions 

Î>rifes  pour  aflurer  la  certitude  & 
a  (incérité  de  Thiftoire  Chinoife  ; 
comme  ce  font  des  hommes  qui 
l'ont  écrite,  &  qui  ont  été  char- 
,gi$  de  re«#iminer ,  on  conçoit 


ÇH 

qu'elle  n'eft  pas  exempte  de  dé»- 
fauts.  La  prévention ,  l'animofué 
des  Écrivains  daiu  THiftoire  mo- 
derne, la  crainte  de  choquer  les 
opinions  reçues ,  &  le  dé£aut  de, 
critique  dans  l'ancienne  hiftoire, 
ont  dû  fans  doute  les  jetter  dans 
plufieurs  erreurs  ;  mais  avec  tout 
cela  ,  cette  biftoire  coniidérée  en 
général  ,  doit  pafter  pour  la  plus 
parfaite  de  toutes  celles  qui  nous 
font  connues. 

I  V. 

De  l* Écriture  Chinoife. 

Les  Chinois  n'ont  jamais  connu 
que  récriture  repréfentative  des 
idées,  &  fembleçt  n'avoir  fait  au- 
cune attention  à  l'écriture  verba* 
le,  donc  les  caraâères  font  plutôt 
figues  des  paroles  que  des  chofesé 
CJn  fçait  qu'il  y  a  eu  trois  genres 
de  cette  écriture  réelle  ;  l'un  qui 
repréfentoit  les  idées  par  la  pein- 
ture ou  l'image  des  choies  mêmes  ; 
l'autre  qui  employoii  des  repré- 
fentations  de  chofes  naturelles  » 
pour  exprimer  d'une  manière  fym- 
bolique  les  chofes  incorporelles  » 
comme  les  rapports  6c  les  aâions 
des  êtres,  ou  même  nos  idées, 
nos  fencimens  &  nos  paiîîons.  Par 
exemple  ,  chez  les  Égyptiens  9 
un  œil  ouvert ,  ôc  pofé  au  bout 
d'un  bâton  ,  défignoit  la  pruden- 
ce dans  le  gouvernement  d'un 
État  ^  6c  la  providence  des  dieux 
dans  la  conduite  de  l'univers.  Le 
troifième  genre  de  cette  écriture 
eft  compofé  de  caraâères  ou  fi- 
gnes  abiplument  arbitraires ,  qui 
n'ont  qu'un  rapport  d'inftitution 
avec  les  chofes  ftgnifiées.  Les  an- 
ciens Égyptiens  s'étoient  attachés 
jprincipalemenc 


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C  R 

prittcipalemeiit  aux  deui  premiers 
genres  de  l'écriture  repréfentati-: 
ve,  c'eft-à-dire,  aux  peintures  & 
aux  Tymboles  ;  ç'étoit-là,  ce  fem- 
ble ,  récriture  facrée ,  &  Fécriture^ 
civile  de  ces  peuples* 

Les  Chinois  au  contraire  ont 
préféré  le  dernier  genre ,  *&  ont 
toujours  employé  des  Hgnes  arbi- 
traires ,  qui  n'ont  qu'un  rapport 
d  mititution  ^vec  les  chofes  ûgni- 
fiées.  Parmi  ces  peuples,  on  ne 
connott  en  aucune  façon  l'écriture 
verbale ,  dont  les  caraâères  font 
figues  de  la  parole  ;  les  caraâè- 
rei  Chinois  font  fignes  immédiats 
des  idées  qu'ils  expriment  i  Q.n 
diroit  oue  cette  écriture  auroit  été 
inventée  pour  des  muets  qui  igno* 
rent  Tufage  de  la  parole*  Nou^ 
pouvons  comparer  les  caraâères 
qui  la  compofent  avec  nos  chif-, 
fres  numéraux  ,  avec  les  fignes 
algébriques ,  qui  expriment  les 
rapports  dans  nos  livres  de  ma-* 
thématique  #  avec  les  caraâères 
aftronomiques ,  &  avec  ceux  que 
les  Chymiftes  employent.  Parmi 
nous,  ces  difFérens  caraâères  ex^ 
priment  immédiatement  les  idées 
dont  ils  font  iienes ,  6i  les  expri« 
ment  indépendamment  de  la  pa- 
role; la  preuve  en  eft  fenfible. 
Que  l'on  préfente  une  démonf- 
tration  de  géométrie  exprimée  en 
caraâères  algébriques  »  aux  yeux 
de  dix  Mathématiciens  de  païs 
différens»  à  l'indant  les  mêmes 
idées  s'excicerofit  dans  leurs  eC- 
prits;ils  entendront  la  même  cho« 
fe.  Néanmoins ,  ces  dix  hommes 
font  fuppofés  parler  des  langues 
différentes  ;  &  ils  ne  compren- 
dront rien  aux  termes  par  lefquels 
Tom.  XI. 


'i 


CH 

ils  exprimeront  ces  idées  en 
parlant.  C'ed  la  même  chofe  \  b 
Chine.  L'écriture  eft  non  feule^ 
ment  commune  à  tous  les  peuples 
de  ce  grand  païs  »  qui  parlent  des 
dialeâes  très  -  diitérens  ;  mais 
elle  l'eft  encore  aux  Japonois ,  aux 
Tunquinois  &  aux  Cochinchinois, 
dont  les  langues  font  totalement 
diftinguées  de  celle  des  Chinois. 

Ces  peuples  ne  peuvent  con- 
verfer  ei^femble  (ans  interprè- 
te ,  parce  qu'ils  n'expriment  pas 
leurs  idées  par  les  mêmes  fons; 
mais ,  ii  le  même  Chinois ,  qui  ne 
pouvoit  fe  faire  entendre  d'un  Ja- 
ponois ealui  parlant,  employé  le 
lecours  de  l'écriture,  alors  les  ca- 
raâères qu'il  a  tracés  fur  le  pa- 
fier ,  réveillent  dans  l'efprit  dq 
aponois ,  les  idées  que  le  Chinois 
vouloit  lui  communiquer.  Ces  ca« 
raâères  font  pour  lui  fignes  im- 
médiats des  idées ,  &  ils  les  ex- 
priment indépendamment  de  là 
parole.  L'écriture  Chinoife  fait 
une  langue  à  part  ;  langue  qui 
parle  feulement  aux  yeux ,  qui  ne 
dépend  ni  de  l'organe  de  la  voix, 
ni  du  fens  de  l'ouie ,  &  que  des 
gens  muets  &  fourds  de  naifTance 
auroient  pu  employer  pour  con- 
verier  enfemble.'  Les  livres  Chi- 
nois font  entendus  au  Japon  ,  & 
les  livres  Japonois  à  la  Chine  ^ 

Quoique  la  langue  d'un  de  ces  pais 
)it  ignorée  dans  l'autre  ;  mais  , 
c'efl  que  la  langue  de  l'écriture  efl 
la  même  à  la  Chine  ôç  au  Ja- 
pon. 

L'écriture  Chinoife  efl  compo- 
fée  d'un  nombre  prodigieux  de 
caraâères  ,  que  les  relations  des 
Voyageurs  &;  des  MiflTionnaires 

C 


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54  CH 

dnt  encore  enflée  par  te  privilège 
de  ceux  qui  viennent  de  loin.  Les 
diâion  narres  Chinois  en  comptent 
foixante-dix  mille  ^  l'imagination 
éft  effrayée  à  la  vue  de  cette  miil- 
thude  de  cara6lè^es•  On  ne  petit 
fe  perfuader  que  la  vie  d'un  hom-; 
me  foie  afTez  longue  ponr  appreii* 
ère  à  les  connoître ,  loin  de  croi- 

.  re  que  ta  mémoire  ptïiffe  les  rete- 
nir tous  ;  la  raifoh  en  éft  fenfible. 
On  fe  les  repréfénte  comme  indé- 
f>endans  les  uns.  des  autres  ^  *6L 
cortme  atrffi  dîftingués  entf'eux 
épe  le  font  les  lettres  de  nos 
alphabets  ;  maiis ,  cette  idée  n'efi 
f oint  exaàe  ,  il  faut  plutôt  les 
comparer  aiux  mots  de  l'écriture , 
en  tant  que  châqne  mot  eil  uiî 
àftemblage  db  plarfieurs  lettres  ; 
car  ,  les  caraélères  Chinois  fonk 
proprement  des  combinaifoiis  d'un 
nombre  borné  d'élémens  frm^s',' 
dans  lefquels  on  peut  les  réfoudrë 
i*ous.  Lescarai^ëres  foivent  î'analo-' 
gie  des  idées  qu'ils  expriment  ;  or , 
fe  nombre  de  nos  idées  primitives 
éd  afljez  borné.  Toutes  nos  autres 
idées ,  perceptions ,  jupemetis  & 
fentimens ,  font  cbmpofis  des  pre- 
mières idées  fi  m  pies  diverfement 
combinées»  Ces  différentes  corn- 
bin^ifons  forment  encore  à  tout 
moment  de  nouveaux  rapp9rts  ^ 
êi  par  conféqi^enr  de  nouveaux 
aifemblages  ;  ainfi  ,  qboîque  lè 
sombre  des  idées  primordiales 
foit  affei  borné  ,  ceh)i  des  idées 
complexes  oto  dérivées  croît  à 
proportion  que  nous  avons  acquis 
plus  de  connoiffances.   On  peut 

,  obferver  la  même  progreiîion 
dans  les  langues.  -Un  aiîez  petit 
nombre  de  termes  primitifs ,  que 


d  » 

Ton  appelle  racinei^^  répondent 
aux  idées  filnplés  »  &  forment  un 
très-grand  nombre  de  dérivés, 
qui  combinés  encore  entr'eux ,  oa 
jitttc  d'autres  raeinl!s  ,  forment 
tous  les  mots  qui  expriment  les 
idées  composes.  Le  nombre  de 
tes  mots  eft  prodigieux  dans  les 
langues  vitantes  ;  cependant ,  il 
n'eu  perfonnè  qtii  ne  fçache  à  peu 
près  tous  les  termes  dé  fa  langue 
îibturelle ,  correCpotidatis  aux  iclées 
^û^iâ  a  daiis  l'efprît ,  &  qui  n  ex-^ 
f>rime  fans  peine  tout  ce  qu'il 
fent ,  ôc  tout  ce  qu'il  penfe  dif- 
lîndement*  On  ne  s'^n  tient  pas 
ihénie  à  une  fetkle  langue.  Ceux 
^ùl  en  poiledènt  plùfieurs ,  ne  (ànt 
iiàfîemeht  em1)af rafles  de  trouver 
h  figntfication  <les  mots  qui  la 
eémpofem.  il  n'y  a  cependant 
aticdn  Heu  de  douter  que  la  fom-< 
fhë'iôtàle  des  termes  de  trois  ou 
quatre  langues  diffi^rentes  ne  fur- 
piiiSTe  celle  de  tous  les  caraâères 
de  la  langue  ChinoiA.  Il  ne  faut 
donc  pas  Croire  que  la  connoif- 
fance  ^n  foit  f\  dimcile  à  acqt^rir  ;> 
&'que  ie'tnême  travail  qui  nous 
éoiine  celle  d'une  langue  parlée  p 
ne  J10US  dtmnât  pas  celle  de  la 
hmgne  écrite  des  Chinois ,  ft  iK>uf 
hoiis  y  prenions  bien  ^iour  l'étu- 
dier. Mais  ,  quand  il  fenoit  iiécef«» 
ftîire  d'y  employer  un  tems  auffî 
Confidérable  que  lé  difent  les  Mit 
fibnnaires ,  dont  les  relations  fem^ 
blent  être  faites  à  deffein  de  dé-^ 
cotirager  ceux  qui  auroient  voulu 
s'appliquer  à  cette  étude ,  feroit- 
ce  à  nous  à  le  reprocher  aux  Chi-» 
nois  ?  Nous ,  parmi  lefquds  un 
très- grand  nombre  de  gens  paf- 
femieur  vie  entière  à  émdier  la 


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CH 

ladgoe  non  «k  kun  dtojneas  ; 
non  cdle  qu*ik  font  obliges  dd 
parier  a  toutAOttent ,  inaîs  des 
laugiits  moit^  ,  dantik  n'auront 
jamais  vue  cauuûâiince  paiiaûttw 
Oa  ne  ptétesé  pas  ks.  confiai»* 
fier  ;  mais  ^  on* peut  demander 
fXMir  Les  Cbinois  4a  mène  indnl- 
geiiee  donc  noos^avoni  be£^in  ppnr 
soas. 

li  y  a  plus ,  c'xft  jqudla  bngoe 
kaôs  ao'iis  font>obi^és  de  faite 
de  Jeitri  caraâèrés  v  doit  Ipat  don- 
ner des  idée»  iièit0i.6c  diâinâcs 
de  (otttes  4es  xhefer  défigaées  par 
^sxaraâèrcs.  Une  langue  réri^ 
«abiement  phdbfdpbktue  ftfok 
celle  qui  exfttknsHàvtota^oim»  les 
idées  fimi^  OH  •primitives  par 
des  terinesiTatdida^^.&  ieé  idétfs 
complexes  par  éop  termes  Hérii^âs 
<m  compoâs  dei^hces  pemier«. 
ie  dernier  point  4»  perfeâioti 
ftroit  de  $!e«primàf  ^  tetle  êth 
,çoa  qse  chatpie' »kX' démé  tk 
^onnoître^àfla  piipmito'vuev  Aoh 
Seulement  la  coaifiiefition  de  i*îdée 
correijpof^am»  ,  maô  encore  eh 
-quettes  idées  (tablés  il  la  ki^âron 
f éibadre  ^n  l»dédompofiat.  Noâs 
ifa^ons  point  de^  langues  où  l'on 
paroifle  avoir  etf  cette  vue ,  fi  ce 
tt'eftdansi'écritniieChînoire*  Lei 
idées  fimples  ôc  primordiales  ^  «m 
celles  qui  font  participées  par  un 
grand  nombre  d'Âtres  panioiliers  ^ 
y  font  exprimées  parades  caraâà- 
tes  fimplen  ôt  r^ëiàsair  ;  &  lefc 
idées  composes  ou  <dénvées^  font 
tepréfem^  par  des'  caraâères 
cosnpofés  de  tet  preti^ftrs  ,  qat 
nous  avon^  nommés  fimples. 

Les  traits  toa  ^gures  <pi  fi>r-^ 
ment  les  caraâères  Clûcioift  en 


CH  55 

général  ,  fiuit  la.  ligne  droite  »  la 
ligne  courbe  ,  quoique  plus  rarei^ 
ment ,  Jbi  le  point  ;  chacun  d'eux 
difiéfeaunent  placé  ,    &  répété 
^s  ou  moins  de  fpis ,  ni,ais  toà^ 
)ours  fans  faijie  aucune  çonfufioa 
m  k  viie^  Les  dtverfes  combinat^ 
fons  de  ces.  trois  fortes  de  traits 
£annent  ks  deu^  cens  quatorze 
caraâères  radicaui^ ,  ou  élémens 
<de  récriture  Ckinoife.  Chacun  de 
-ces  éiélneos  répond  à  une  idée 
£mpk  ou  générale^  plus  com« 
anuiie  ;  &  ce$  élémens  combinés 
ies  uns  avec  ks  antres ,  forment 
le»  foixaate  ou.ks  quatre- vingt 
aaiHe.  caraâères  doat   l'écriture 
dvnoiie  efi  compofée.   On  kli 
-èotmne  à  la  Qnne  ^  clefs  ou  raci^ 
jies;  &  dans  l^^di^otmaires  %i 
conftituent  ks  deux  cens  quatorze 
rjdnf&s^ou  genc^  diftéreos ,  fous 
kfiqueb  on  range  les  caraÂàrcJs 
dom  ils  font  kpjmse  prinoipak. 
Ces  caraâères  uÀt  ^pbdtvi^és  pair 
^olatfrs  fntyant  k  nofnbre  destraiss 
4u^; contiennent (  car^  ;c'e4'Ptfu 
4à  qu'on  ks  cherche  dan&'ks  dtcf* 
tiomnaiies,  &  on.yr  joint  k^r  dér 
-finition  >ou  eiqiiication ,  Cf^i^  fak 
len  décom^ofantJ^s  caraâères  ,  4t 
4es  réduifant  à  leôfs  élémeas.      > 
'    Ainfi ,  loifque rl'on  t oon aoîr  bien 
ia  fignification  des  deux  cens  qua* 
.torze  cfa^  ou  k-actnes ,  (m  eft  eip 
ét?t  de  trouver  par  ^CM^méme, 
ou  di»  moins  sar>oc  k  fecours  da 
/Mètoonaipe ,  la  fignification  des 
panâtes  compofes  ,  de  ni^ine 
qu^i'on  peut  enten^k^  une  ka* 
|ue ,  rdès  que.  Von  poiTede  k  fi* 
;nifidatioo  de  tous  les  termes  ra^* 
licaax. 
Pour  rendre  ce  4p^on  vi^fit  de 
Cij 


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3«  C  H 

dire  encore  plus  intelligible  /  H 
&udroit  donner  quelques  exem-* 
pies  de  la  compofition  6e  de  la 
flécompoficion  de  ces  carattères; 
mais  9  outre  que  cela  ne  pourroit 
(e  faire  qu'en  les  mettant  fous  les 
yeux  »  il  ne  feroit  pas  poffible 
d'entrer  ici  da^ts  un  détail  Tuffi** 
iant;  tout  ce  qu'on  en  pourroit 
dire  feroit  trop  fuperficîel.  Nous 
nous  contenterons  donc  de  don* 
lier  pour  un  plus  grand  éclair» 
ciflement  Thifloire  abrégée  des 
caraâères  Chinois,  6c  quelques 
télexions  fur  la  connoiflancè 
^\ie  nous  croyons  néceflaire  k 
xeux  qui  voudront  pénéuerdans 
ie  fyftême  de  ces  caraâères ,  6t 
dans  les  raifons  de  leur  compjfr- 
tion»  c*eû-à~dire,  une  efquittie  de 
h  philofophie  Chinoife. 

Nous  avons  déjà  obfervé  que 
les  Chinois  n'avoient  point  em- 
ployé les  deux  premiers  genres  de 
récriture  repréfentative  des  idées  ; 
qu'ils  n*om  point  eu  en  vue  les 
images  pour  les  chofes  que  la 
peinture    peut    mettre  ibus   lés 
yeux  y  ni  les  fymboles  pour  repjré. 
tenter  par  allégorie  ou  par  ^Uur 
fion  les  chofes  qui  ne  le  peuvent 
être  par  elles^méines.  Le  P*  Kii^ 
-cher  eft  d'un  autre  avis  ;  mais ,  il 
paroit  en  cette  occafion  avoir  uà 
peu  trop  donné  à  fon  imagination. 
On  ne  prétend  cependant  pasxfue 
l'qn  ait  évité  ces  reflemUances 
entre  les  chofes  &  les  caraâères^ 
lorfqu'elles   fe  ,ibnt  préfentées  ; 
mais  y'ûefkdtt  qu'on  ne  les  a  pi|s 
cherchées,  6c  qu'elles  (ont  pref 
que  toujours  détruites  par  Tana- 
lyfe  du  caraâère  où  Ton  avoit  crii 
ks  appercevoir.. 


CH 

,  Les  premiers  inventeurs  de  Vi^ 
criture  Chinoife  fe  font  attachés 
à  des  fignes  entièrement  arbitrai- 
res f  ou  qui  n'ont  qu'un  rapport 
d'infiitution  avecies  chofes  figni* 
fiées  ;  en  cela ,  ib  ont  fuiri  le  goûc 
de  la  nation  Chinoife ,  qui  même 
avant  Fo-hi,  c'eft-àdire,  dane' 
la  plus  profonde  antiquité ,  fe  fer- 
voit  de  cordelettes  nouées  en  galSt 
d'écriture.  Lemombre  des  noeuds 
de  chaque  corde  formoic  un  ca« 
raâère^  6c  l'aflemblage  des  con- 
ées  tenoitliea  d'«ne  efpèce  delî*- 
vre ,  qui  fervoit  àrappeller ,  ou  k 
Ater  dans  l'eTprit  de!i  hommes  le 
fottvenir  des  chofes ,  qui  (ans  cela 
s'en  feroieat  eâacées* 
;  Les  Péruvtçns  «voient  une  écri* 
ture  femUabley  loifque  les  E(pai- 

Înols'tirem  la:  conquête  du  Pérots. 
)es  coides  de  différentes   cou*- 
ileurs ,  chargées  id'itin  nombre  <fe 
-noeuds  plus  ou  moins  grands  êc 
idiveriementcondiinées  entrelles, 
.£[>rmoiettt  des.tegiilres  qui  conte- 
nfuient  nonfeulcaieot  un  eut  oU 
compte  des  cev^enus  publics  de 
J'empire  du  Péipu ,  mais  encore 
des  annalés-^ni' chroniques  de  l'bi(- 
rtoiredesIncas.Les  diver(ès  coift^ 
Jûnaifons   des    couleurs  6c   de^ 
jiceuds  fervoient  à  rappeller  le  hvk' 
.venir  des  tâtons  de  ces  Princes  » 
.de  leurs  exploits ,  de  leurs  c6n- 
^étes,  de  leurs  ré|;lemens  »  6cçb 
Tous  lesécrivaitts  Ëfpagnols par* 
Jent  de  ceéiît';  6c  quoiqu'ils  ne 
nous  aient  point  détaillé  la  mé« 
chanique  de  tette  écriture ,  feurs 
fémoignages  (ont  ù  confians  ,  û 
uniformes  ,  ii  nombreux,  qa'il 
n'eâ  pas  poiEble  de  les  révoquer 
ea  doute.  .... 


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-  CH 

Ce  fat  Fo-hi ,  fondateur  de  la 
monarchie   Chinoife  y  celui   qui 
avoit  policé  la  nation  ,  &^qui  l'a- 
^    Toit  tirée  de  la  barbarie  dans  la-. 
quelle  elle  avoit  été  plongée  juf- 
«ju'alors ,  <|ui  fubfiitua  à  ces  cor- 
des nouées  des  caraâères  formés 
par  la  combinaifon  de  plufieurs 
lignes  droites  &  parallèles ,  mais 
les  unes  entières  &  les  autres  bri- 
bes, pour  ^epréfenter  ces  noeuds. 
I^  Chinois    confervent   encore 
des  fragmehs  d'un  ouvrage  de 
Fo-hi,  écrit  avec  ces  caraâères. 
Us  le  nomment  lé-kin,  le  livre 
des  mutations    ou  des   produc- 
tions. On  le  regarde  comme  un 
monument  précieux  de  la  plus 
ancienne  philorophie  ,   dont  on 
croit  que  ces  caraâères  expliquent 
les  fendemens  ;  mais ,  malgré  les 
commentaires  publiés  fur  cet  ou- 
yage  I  loo  ans  avant  TÉre  Chré- 
tienne  par  le  roi  Vou-vang  &  le 
prince Tchéou-kon  fon  fils;  mal- 
gré le  nouveau  commentaire  que 
Confucius  ajouta  à  celui  de  ces  deux 
Princes,  environ  600  ans  après 
cui ,  le  livre  des  mutations  eil 
encore  inintelligible.  Ainfi ,  quoi- 
que le  lé-kin  &  k%  commentaires 
ioient  compris  parmi  les  livres 
claf&ques ,  fur  leiquels  on  exami- 
ne les  Lettrés ,  avajit  que  de  leur 
conférer  les  grades  ,  il  n'eft  guère 
regardé  que  comme  une  efpèce 
de  grimoire  9  duquel  les  Lettrés  du 
plus  bas  étage  fe  fervent  pour  pré- 
dire l'avenir  par  le  moyen  de  cer- 
taines combinaifons  cabaliAiques  1 
aiTez  femblables  à  notre    Géo-« 
inance. 

A  mefure  que  les  peuples  de 
la  Chine  fe  policereait  jous  les  fuç* 


CH  37 

ceflëars  de  Fo-hi^on  fentît  Tin- 
fuffifance  de  cette  écriture  ;  on 
travailla  donc  à  la  perfeâionner  ; 
on  multiplia  les  caraâères  >  &  on 
varia  les  figures.  On  montre  à  la 
Chine  un  livre  de  pharmacie ,  & 
un  traité  de  la  manière  de  tâter  le 
pouls  ,  atribués  aux  médecins  da 
roi  Chine- noune ,  qui  par  le  fe- 
cours  de  foii  Colao  ,  ou  Minière 
Tfane-kié,  avoit  donné  une  non-  ' 
velle  forme  à  l'écriture.  Ces  deux 
ouvrages  furent  écrits  2800  ans 
au  plus  tard  avant  TÉre  Chrétien- 
ne t    en  fuivant  la  chronologie. 
Chinoife.  On  voit  encore  dans  le 
Chou-kin  ,  des  fragmens  d'une 
bîAoire  des  empereurs   Yao  6c 
Chune,écrite  fous  le  règne  de  Kiou 
2200  avant  TÉre  Chrétienne. 

Depuis  ces  premiers   effais  ; 
l'écriture  Chinoife  fe  perfeâionna 
tous  les  jours  ,    &  s'enrichit  de 
nouveaux  caraâères  que  l'on  in- 
ventoit  à  mefure  qu'il  fe  préfen- 
toit  de  nouvelles  idées  a  expri- 
mer. Cela  continua  jufqu'au  règne 
de  Vou-vang,  qui  monta  fur  le 
trône  vers  l'an  i  rio  avant  l'Ëre 
Chrétienne.  Alors ,  cette  écriture 
fe  trouva  fuivant  les  Chinois  au 
point  de  fa  plus  grande  perfeâion. 
Selon  eux ,  ces  anciens  caraâères 
étoient  tous  fondés  fur  des  raifons 
philofophiques  ;    ils  exprimoienc 
la  nature  des  chofes  qu'ils  figni- 
fioient  I  ou  du  moins  la  détermi- 
ooient ,  en  défignant  les  rapports 
de  ces  mêmes  chofes  avec  d'au- 
tres mieux  connues. 

L'empereur  Chi-hoang-ti  y  qui 

tegnoit  vers  l'an  230  avant  r£re 

Cbrérienne ,  entreprit  >  comme  il 

^^éjà  été  ohfervé  i,  de  déuuirf 

ÇiiJ 


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3S      .  du 

tous  lois  livres  qui  ne  traîtoîent  hî' 
de  médecine  ,  ni  d'aftrologîe  St- 
de  divination.  Comnhe  le'  papier 
n'afvoit  pas  eitcote  été  inventé , 
&  que  Foft  éctivoif ,  où  phtàt 
qrïe  Fon  pdgrioit  fur  de?5  taWètte^ 
de  bois ,  les  livres  étoiétit  dîffidléf 
i  cachet  ;  ainfi  fl  s'eri  fatoya  feft 

fJeu.La  peifêcutiort  cdntîhtfâ  foûsf 
es  fticceffeu^s  de  Chr-hoâng-eî';  & 
l*écritute  Chinoife  reçut*  dort  pu 
grand  écRec.  Lès  livres  de*  méde-» 
cine  &  de  divi^dtion  né  cotité- 
iToient  qu'ufj  (>étit  nombre  de  caf- 
H&htei  ;  ori  n'ôfoît  nfioritrei^e  petr 
ée  Rvrts  qtfcf  Foà  avoit  fauve*.  Laf 
plus  grande  pafrtie  des  gens  de 
lettres  étoït  périe  (ùts  \t  règne  de 
ee  Prince ,  qui  fes  avdit  forcé*  de 
prendre  la  trueHe ,  pour  travailler 
à  la  conftruâion  de  cette  famebfe 
^twaillé  qu'il  faifoit  bâtir  podi' 
toettre  la  Chine  à  couvert  de  f  in- 
vasion des  Tarrarcj.  L'Empeteat 
ttt  voulant  que  dés  Mààt$  &dei 
ftiaçons ,  dn  jfufgé  aifément  qiae  fe* 
ïetires  ne  furent  gueres  cuMvées*; 
àinfî ,  h  tradition  ne  pdt  tùtiièt'* 
ter  etàétement  là  eoftntïU&ncé 
dé*  câràdère^  pérdtrt ,  avec  les  Ê^ 
tires  que  Ton  avoh  brûHé*. 

Cepentfattt ,  bperttcotioh  ceffai 
avec  le  régné  de  Isr  httAïfé  âtt 
Tytân.  Véne-tî ,  qtfî  rtotïftr  fdr  te 
trône  177311*  avant  TÉre  Chré. 
denné,8t  53:  an*  aprè^  Cht-hoa^gs 
il ,  s'attacha  à  réparer  fe*  ééfùt^ 
dres  introduit*  pat  ce  Pirrhcê,  qui 
A*avoit.pds  pfu*  ménagé  fe*  Àjet* 
qjue  le*  fciences.  Ve*ie-ti  fit  re- 
chercher totis  If*  livre*  échappés 
i  h  perfé(;ution.  Linveùtion  dtr 
papier\  troavée  fous  foii  regtïè,* 
tn  facîKu  h  Aluhipficatioité^  Uil 


v^îeux  Lettré  ,  qui  dans  la  fbiitude 
oii  il  s'étoii  taché  ,  avoit  élevé 
fa  6l!e  pour  les  fcfences ,  reftîtuâ^ 
de  mémoire ,  6c  par  le  fecotir*  de 
cette  6île ,  une  partie  des  caraâè- 
r^  perdti*.  Peu  après  le  règne  de 
Verte^tî  f  <î*eft-à  dire,  cem  qua- 
rante âfn*  aVânf  l*Ére  Chrétienne, 
rempereorVoteMtf,  prince  feftieiw 
par  k%  e»pàtittofi»'  dam  l'onde  , 
«'attacKa   é'tmé  rnanière  encore 
plus  efficace  à  faire  flenrir  les  let- 
tres. U  ^  rëëh^rcher  tons  les  livret 
&L  tott*  les  fr^gmén»  qâi  reftoiem , 
fit  ràflembler  Si  mme  en  ordre 
roti*  les  oavTages  de  G>nfttciif$  ^ 
dé  Lao-kioune  >  ôtdé  leurs  difci- 
l^le»,  y  fit  jc4fifdre  des  commen- 
tà^ei ,  &  en  rit  répandre  des  co« 
fres  par  tout  le  royaume.  La  pro-» 
teâion  qtfe  l'Emfpereor  accordoit 
aux  lettrés ,  invitok  fOet  le  monde 
ii  s'y  appliquer.  Chacsn  fe  piqua 
de  compôfér  &  dfe  publier  des 
ouViiéiges  ;  ce  qui  ne  puè  fe  faire, 
fait*  tnvenfér  dé  noinnea^ix  carac- 
ihes  ,  pour  tenir  Ken  de  ceux 
qu'on  avoit  perdy*.  Miftsy  comme 
on  voulut  exécuter  tOtitd*im  coup 
ce  qui  ne  fe  pOnvoit  £aire  qu'aprèi 
tfne  londiïe  étnée^de*  caraâère# 
encore  rabOflen* ,  pour  *'in(lrufre 
dtr  véritable  fyftéme  de  l'ancienne 
écHture,  11  *1*trôdin*t  im  grand 
tn>m^e  de  caraâèretbkfarre* ,  dc 
qnt  n'âvoient  aucune  analogie  na- 
tnteHe  ftvee  les  ancien*. 

L'écritnre  Chmoife  ëû  une  vé** 
rifdbie  fangue,  ^dî  ne  parle  ou'k 
kl  vue  ;  ainiî ,  elle  a  dû  fbuftrir 
toute*  le*  même»  ekérations  que 
les  langues  prononcées.  Dane 
Ftme  &  dans  FâiMre  on  avoit  corn* 
meacé  par  an  kiigege  fimple  9  oit 


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CH 

Ton  ne  çonnoîflbit  que  les  termes, 
propres  ,  &  où  i|s  fe  prenoîenc 
toujours  dans  leur  acception  natu- 
relle. Mais  9  peu  à  peu ,  fous  pré- 
texte d'élégance,  on  employa  des 
^rmes  &  des  cafàâères  figurés^ 
Qn  les  tranfporta  à  des  fignifîcsin 
tions  éloignées  par  des  metaphor 
res  afiez  naturelles  dans  leur  ori^ 
gine ,  mais  qui  devinrent  bientôt 
extrêmement  hardies. 

Dans  les  langues  parlées,  cettei 
raifon  empêche  fouvent  q^e  Voa 
ue  puiiTe  découvrir  Ifi  racine  cooir 
nuine  de  deux  expreilions ,  don^ 
le  (on  eA  très-voifin  ,  &  dont  les 
figaifications  font  tr^-éloignée;^» 
U  en  eft  de  même  des  caraâères 
de  récriture  Chinoife  ,  les  méta-r 
phores  &  les  figuf«s  oqt  dû  y 
çaufer  une  grsmde  irréeMlaitté. 

Cette  irrégularité  elt  peui-âtrei 
la  plus  grande  caille  de  la  diâi«* 
culte  que  l'on  éprouve  auionrd'hui 
en  étudiant  ces  cisraâères.  L>n* 
cienne  Philotbphie  avoit  été  gq^it 
me  abandonpé^  depuis  long  temst 
On  s'étoit  rempli  la  tête  de  far 
Ues  ,  d'ail^ries ,  de  myftago- 
gîes.  La  P^eSe  s'étôk  einpfirée  de 
U  PhUor<^e  ;  &  l'on  juge  ailé- 
n^nt  quels  Ravages  file  y  avoH 
hits  chez  des  peMpks  d'une  îm^r 
gination  natureUêmçot  énâan:!^ 
mée ,  &  qu'une  timidité  exceiliv^ 
avoit  entièremeot  tourné  vers  U 
fuperflitiom  Aii)ti,  l'oneoiplpya 
pn  Çraad  neoqnbire  de  carailW 
figurés  o«i  allé^iques  «  &  i^t\ 
{ka$  aucun  rapport  ayei:  les  cho&s 
Aiprioiiées ,  en  a  voient  ieulepeof 
avec  quelques  com^  populaires  , 
&  avec  des  uadisiaQs  f^ Wièi. 


CH  39 

V. 

De  la  Philofophie  des  Chinois^ 

Les  Chinois  ,  qui  fubfiftent  aa 
moins  depuis  plus  de  4000  ans 
avec  les  mêmes  loix ,  les  mêmes 
mœurs ,  &  les  mêmes  ufages ,  ne 
méritent  pas  moins  notre  curiofité 
que  les  drecs  ^  les  Latins  &  les 
Arabes  commentateurs  d'Ariflp- 
te ,  dont  on  enfeigne  la  Philofo^ 
phie  dans  nos  écoles ,  ne  fût  ce 
que  pour  comparer  leurs  diverfep 
9pimons.  M»  Fréret  aiTuxe  quf  ]&k 
Chinob  n*oAt  jamais  e^  une  Jbo9- 
n^  Métaphyficme  ^  ini  peut  -*  $trjS 
mêti^e  un  îyilen^e  c(Hi»pl^t  4»^ 
Philofophie*  Du  mpins  ,  |eur| 
idées, ,  ajoute-til^lonti-elles  dia-> 
métralement  pppofées  â  ce  qu€ 
nos  Philo(<^>hes  regardent  comm^ 
des  premiers  principes  &  des 
nianimfs  d'éteroel|e  vérité  e^ 
tnorale&enmétapbyriâue.  Nou$ 
%çi  pouvons  ju|er  par  la  traduc- 
tion Latine  des  livres  de  Çonfu^ 
çius,  &  par  celles  de  depip  di^- 
rens  coipuieotaires  Chinois  Àur 
les  oQvrages  de  ce  Phito^phe, 

Îui  ont  été  publiées  ^  i'JMt^e  par  1^ 
,  Complet  >  $c  iWre  par  îe  P^ 
Noël  ^  tous  deux  JéAnies.  Ôq  peii| 
encore  tirer  de  grandes  Uimières 
4es  différeiis  ouvrages  compofé* 
par  les  Millionnaires  ^  à  l'occaf^în 
des  diiputes  fur  la.  nature  du  cuhe 
jque  Ton  tend  à  Cooûiqus  &  au^ 
anciens  nwjrts.  Parmi  ces  ouvra- 

r;^  le  plus  inflrnâifed  celui  du 
Longobardi,  JéfMite  »p^rce  qu'i^ 
pontieot  un  tri^-girand  npmbre  # 
pa&iges  des  j^cisli^ésphUorp» 
Ipjpes  Chinois. 

,    L(S  commeiuaîre  ^%  le  v^ 
C  iv 


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40  CH 

Vou-vang  avoit  publié  ipr  le 
lé-kin  ,  infpira  le  goût  de  la  Phi- 
lofophie  aux  Chinois  ;  &  peu 
iprès  le  règne  de  ce  Prince  ,  on 
vit  de  grandes  feéles  de  Philofb- 
phes  fe  former.  Lao-kioune  parut 
le  premier.  Ses  ouvrages  fubfiftent 
encore ,  il  y  a  d'aflez  belles  maxi- 
mes de  morale  particulière  ;  mai^ , 
On  y  enfeigne  la  matérialité  de 
Ta  me,  &  par  conféquent  fa  mor- 
talité. Comme  ce  Phitofophe  $*é- 
toit  fort  appliqué  à  la  médecine ,  à 
la  chymie  ,  6c  aux  autres  parties 
de  la  Phyfique  i  (es  difciples  que 
Ion  nomme  Tiene-tzé  ,  ou  Doc- 
teurs céleftes,  cultivent  fort  ces 
connoiflances  »  &  fe  font  rendu 
célèbres  par  leur  moyen.  Ils  font 
même  venus  à  bout  de  perfuader 
la  poffibilité  de  la  médecine  uni- 
verfelle,  6c  d'un  remède  qui  rend 
les  hommes  immortels.  C'eft-là 
ce  fameux  breuvage  d'immortali- 
té »  dont  il  eft  u  fouvent  parlé 
dans  les  annales  de  la  Chine  ,  & 
que  les  Empereurs  recberchoient 
avec  tant  d*ardeur  &  de  dépenfes. 
Lao-kioune  enfeignoit  auÂi  que 
l'univers  étoit  gouverné ,  de  même 
que  l'empire  de  la  Chine  ,  par  un 
dieu  corporel  qui  habitoit  dans  le 
ciel ,  &  qu'il  nommoit  Chan-ti , 
roi  d'enhaut  ;  que  fous  le  Chan-ti 
étoit  un  grand  nombre  d'êtres  in* 
telligens  avec  un  pouvoir  moins 
étendu ,  mais  cependant  indépen- 
dant du  fien. 

Ce  Philofophe  cachoît  les  fon- 
demens  de  fa  métaphyfique  ôe  de 
fa  phyfique  fous  des  expreffions 
figurées ,  qui  femfaioient  ne  con. 
tenir  que  des  allégories  fur  les 
nombres  6c  leurs  propriétés»   Il 


CH 

rie  paroit  pas  qu'il  fe  foit  jamais 
expliqué  bien  clairement  fur  la 
Providence  >  ni  fur  là  diftinôion 
du  bien  &  du  mai  moral,  c'eft-à- 
dire  ,  du  jufte  6c  de  l'injuile. 
Auilî ,  peu  de  tems  après  lui ,  les 
Philofophes  fe  partagèrent .  en 
deux  feâes  ;  la  première  ,  nom- 
mée lanh ,  foûtenoit  que  l'amour 
propre  6c  l'intérêt  perfonnei  de-> 
voient  être  la  règle  unique  de  nos 
ââions;  6c  que  les  loix  ,  l'autori- 
té ,  la  reconnoiflance ,  6c  tous  les 
autres  devoirs  qui  forment  des 
engagemens  entre  les  hommes  » 
n'avoient  de  force  qu'autant  qu'ils 
contribuoient  à  nous  rendre  heu- 
reux. La  féconde  feâe  étoit  ap* 
pellée  Mé  ;  elle  s*étoit  jettée  dans 
l'excès  oppofé,  puifqu'elle  pré- 
choit la  charité  univerfelle  ,  ou 
Pamour  égal  pour  tous  les  hom- 
mes fans  diflinâion  de  liaifon  ni 
d'engagement  d'amitié ,  de  paren- 
té ou  de  dignité  ;  elle  enfeignoit 
auffi  la  deftruâion  totale  de  l'a- 
mour propre  6c  de  l'intérêt  per- 
fonnei. 

Confîicitts  qui  naquit  Tan  550 
avant  l'Ère  Chrétienne ,  prit  un 
milieu  entre  ces  deux  extrémités; 
il  prêcha  à  la  vérité  l'amour  uni-  ' 
verfel  ,  ou  la  charité  pour  tous 
les  hommes ,  mais  un  amour  réglé 
6c  modifié  fur  les  devoirs  établis 
par  les  loix  de  la  fociété  où  l'on 
fe  trouve.  C'e(l-là  le  principal 
objet  du'livre  de  ce  Philofophe  ^ 
intitulé  Tchon^yon  ,  le  milieu  rai« 
fonnable ,  l'accord  de  Tamour  pro- 
pre avec  la  charité  univerfelle.  U 
évita  toujours  avec  foin  dé  s'ex* 
pliquer  fur  les  matières  de  fpécu- 
lation  ^  fur  la  juftice  ou  l'injuffice 


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CH 

naturelle  ,  fur  la  fpirituaîité  & 
rimmortalhé  des  âmes,  fur  lexif- 
tence  &  la  nature  d*un  Dieu  dif- 
tingué  de  l'univers ,  fur  le  deftin 
&  la  providence.  Les  ouvrages 
de  ce  Philofophe  ,  lus  avec  atten- 
tion ,  marquent  une  affeâatîon 
ienfible  de  ne  fe  point  ouvrir  fur 
ces  matières  ;  &  l'on  a  même  des 
paiTages  formels ,  oîi  il  refufe  de 
répondre  à  ces  quefiions  qu'il 
traite  de  dangereufes. 

I*a  doârine  de  Confucius  n'af*- 
fujettifibit  à  aucun  dogme  fpécu* 
latif  ;  elle  recommandoic  feule- 
ment la  pratique  de  la  vertu  , 
c'eft*à-dire ,  TobéifTance  aux  an- 
ciennes loix  du  paîs  ,  la  foumif- 
fion&  lerefpeâpourfesfupérieurs, 
la  modeOie;  &  même  l'humilité 
avec  fes  égaux  »  6c  la  tendr^fle 
pour  ks  inférieurs  ;  c*eA  à  cela 
que  fe  rapportent  toutes  les  exhor* 
tarions  de  ce  Philofophe.  On  juge 
aifément  que  tous  les  honnêtes 
gens  embraflerent  fa  feâe.  Le 
nombre  en  groflit  tous  les  jours  ; 
&  comme  leur  principale  étude 
écoit  la  politique  &  la  fcience  du 

fouvernement  ,  ils  remplirent 
ientôt  les  premiers  emplois.  Les 
livres  de  Confucius  furen»  cano- 
nifés  ,  pour  ainfi  dire  »  ayant  été 
déclarés  authenriques  ,  6i  perfon- 
ne  ne  pouvant  pofléder  de  charge 
qu'il  n'en  eût  fait  une  étude  parti- 
'  cnlière»&  qu'il  n'eût  rendu  comp* 
te  de  cette  étude  dans  un  examen 
iblenmel. 

Les  phitofophes  Chinois  ne 
mettent  aucune  diftindèion  réelle 
entre  les  différentes  fubflances  , 
dont  l'afTemblage  compofe  l'uni- 
irers  ;  atnfi  ,  à  prendra  ce  mot  de 


CH  4r 

fubftance  à  la  rigueur ,  &  au  fens 
que  lui  donne  notre  Philofophie  p 
ils  ne  connoiflent  aucune  fubftan- 
ce. Selon  eux  »  tous  les  êtres  par- 
ticuliers n'ont  qu'une  même  exif- 
tence  »  à  laquelle  ils  participent 
tous  également  >  6c  qui  efi  inca« 
pable  d'augmentation  &  de  dimi- 
nution ,  ceft-à-dire  ,  infinie  &^ 
inaltérable.  La  force  par  laquelle 
chaque  être  exifte ,  ne  lui  efi  point 
propre  ;  il  n'exifie  point  indépeo^* 
damment  des  autres  ;  mais  ,  fon 
exifience  eft  néceffaire ,  &  il  ne 
peut  jamais  être  ni  détruit  ni  pro- 
duit. Dans  le  fyflême  Chinois  ^ 
tout  eft  étemel,  rien  ne  commen- 
ce ni  cefle  d'exifter.  Ce  que  nous 
appellobs  génération  &  deftruc- 
tion  y  ne  font  pour  ces  Fhilofo- 
phes  que  des  changemens  de  mo- 
difications &  de  rapports  ;  ou  plu- 
tôt ce  n'eft  autre  chofe  que  ht 
manifeftationÔc  le  développement 
de  certaines  propriétés  de  l'Être  « 
qui  fe  découvrent  à  nous  »  ou  ceA- 
(ent  de  nous  être  connues.  Lor(^ 
que  ces  propriétés  nous  devien- 
nent fenfibles ,  qous  difons  qu'elles 
font  produites,  qu'elles  commen- 
cent d*exifter.  Lorfque  nous  ne 
pouvons  plus  les  apperceyoir, 
nous  diibns  qu'elles  font  détruites. 
Cependant ,  fiiivant  la  Philofophie 
Chinoife ,  il  ne  leur  arrive  d'au((e 
changement  dans  ces  occafions  ^ 
que  celui  qui  fur  vient  à  un  objet , 
lorfque  nous  tournons  les  yeux 
fur  lui ,  &  que  nous  l'envifageons. 
Il  fe  produit  à  la  vérité  une  nou- 
velle perfeâion  dans  notre  efprit  ; 
mais  pour  l'objet ,  il  ne  s'y  pafie 
aucun  changement  réel  ;  feu- 
lement de    non    apperça   qu'H 


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4*  CH 

etoît ,    il   devient  apperço. 

Aiofi,  parmi  un  nombre  infini 
ée  propriétés  contenues  égale- 
«lent  dans  le  fond  de  l*Étre ,  tan- 
tôt nous  fommes  afFeâé»  par  Ton 
étendue,  par  fa  mobilité ,  (a  foli- 
ée» fa  couleur  Se  fa  figure;  alors 
sous  l'appelions  corps  ou  matière. 
Tamôt  nous  y  mettons  une  force 
motrice  ,  &  c'eft  ce  que  nous 
sommons  un  être  virant  qui  (é 
donne  fes  mouremens*  Tantèi 
«»fin  nous  croyons  y  appcrce-» 
Toir  diî  femiment  y  deûv^kmté^ 
ée  la  penfée  &  de  la  percepcioii  ; 
te  pour  lors  nous  lui  donnoiis  une 
ame  &  un  efprtt .  Dans  ce  iyûè* 
me,  ces  dhrer(es  propriétés ,  quoi* 
tpt  dîAinguée»  encr*eHes  par  l'idée 
^œ  nous  et»  avons  ,  &  parTim* 
preffion  qu'elles  nous  cadeot,  ne 
le  fom  nullemenr  ouant  à  la  réalité 
delemrêtre»  puiiqu'ellei  exiilent 
séceflakement  avec  une  infinité 
d^aotres,  âc  qu'elle!  participent 
téttte»  également  à  une  feule  âe 
même  exifttnce  infinie  ôi  inaltéra^ 
Me. 

Ce  principe  mm  fois  pcfé ,  on 
▼ott  aifêmenc  que  la  PhilofepKid 
Chinois  n'admet  ni  création  ,  m 
providence ,  6c  par  conféqoent  n^ 
recoiinott  point  de  Dieu  ^  c'eA-à*' 
dire»  d*Êire  diftingué  do  l'umversi 
qui  ait  prodoit  ou  créé  le  monde , 
&  qui  le  gouverne  ou  Wconferve 
en  confécnieiice  des  loi x  qu'il  a 
établies.  La  kmgue  Chmotfe  n'a 
mémel  point  de  termes  qui  ré^>on« 
dent  à  cette  Mée  ;  ceux  de  Tiene, 
Ciel ,  Ôc  de  Tiéne<^tt^  roi  du 
Cel«  eipriment  lesîdéeftdes  Ma^ 
térialiftes;  6c  ceaa  de  Tiena«>tae  ^ 
do^eort  cékAes ,  ceUee49i  Idor^ 


CH 

litres.  Les  premiers  attribuent  lee 
événemens  à  l'aâton  du  Cîel  » 
mab  à  nne  aâion  deftituée  de 
connoiffanceôcde  volonté  ;  aâion 
pareille  à  celle  que  nos  Âdrolo- 
gués  donnent  aux  infiuences  dee 
aftres.  Le  roi  du  ciel  des  Idolâtres 
agit  à  la  vérité  avec  counoiflance, 
&  à  la  manière  des  hommes  ; 
mab,  ce  n'eft  qu'une  fubftance 
particulière  ;  c'eft  comme  l'ame 
du  ciel  y  &  une  ame  non  diftio^ 
gaée  du  ciel  matériel ,  parce  cpe 
uiivant  les  idées  des  Idolâtres^  la 
matière  eft  auffi-bien  capable  de 
penfée  6c  de  fentiment ,  comme 
de  mouvement.  Mab ,  ces  idées 
(ont  prpfcrites  par  les  meilleurs 
Philolophes  Chinois  ^  qui  rejettent 
tout  ce  qui  pourroit  mener  à  la 
connoiffance  d'un  être  înteRigent^ 
^  diâingué  de  l'univers  ,  6c  qui  té* 
moignent  un  grand  mépHs  pcmt 
cette  opinion. 

Tout  étant  néce(&ire  datis  ce 
fyftême ,  on  comprend  qu'à  par-^ 
1er  exaâement  >  il  n'y  a  plus  de 
diftinâion  emre  le  bien  6c  le  tnal 
moral ,  plus  de  vertu  6c  de  vice  ^ 
plus  de  liberté ,  plus  de  perfise- 
tion  ni  d'imperfeâion.  Si  un  être 
particelier  demble  agir  fur  un  aU'v 
tre  9  cet  autre  a  non  feulement  la 
force  de  lut  réfifier  ,  force  qui  ne 
peut  être  anéantie,  mab  eiKore 
la  fbrce  de  réagir  f^r  ^^^  ^^^  u*^ 
réalité  qui  n'eft  pas  moindre  que 
la  ûenne.  Il  faut  cependam  cofl4> 
venir  qufe  ce  fyftême  n'eft  pas  ce^ 
lui  du  peuple.  Les  kommes  ordi- 
naires font  trop  groiBers  à  la  Chtt 
ne  f  de  même  qu'ailleurs  ^  pour 
être  iéduits  par  des  erreurs  Ci  ùih^ 
ûles  fie  il  déliées.  Lejir  imag^t 


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CH 

tîofn  ne  trouveroit-ià  aucune  prife. 
U  leur  faut  des  objets  matériels  , 
fcnfibtes  &  palpables  ;  &  ckî  me-  ' 
ne  que  les  Indiens  &  les  Japo- 
sois  »  ils  iom  f4oogés  dans  un 
pagaaifme ,  fondé  iur  les  fables 
ks  plus  abfitf  des* 

M^  poar  las  Lettrés  ,  &  fur 
tout  pour  ceux  qui  font  profeilîon 
de  fëivre  Confucius  ,  ôc  de  ne 
joint  s*écarcer  de  i  ancienne  Pbi- 
lofophie,  on  peut  dire  qu'ils  noiH 
point  d'aBire  fyftiême.  Il  eft  vrai 
que  dans  U  pratiqtie  ils  n'en  fui- 
vent  pas  les  conféquehces  pour 
la  morale.  Les  hommes  font  or- 
dinairement inconféquens  ;  leurs 
opinions  ne  règlent  point  leut  cort- 
dnite;  &  iln'elt  pas  plus  étonnant 
de  toir  des  Athées  viri'e  iftora- 
lement  bien ,  &  fe  fot»niettre  par 
des  moti&  de  fociété  à  des  loii 
qu'ils  ne  croyent  point  obligatoi^ 
res,  qœ  de  voir  parmi  les  nations 
feligieufes  ,  des  gens  pleinement 

Eirluadés  de  l'exiAence  d'un 
ieu  j  &  de  la  vérité  de  leur  teli- 
E'm,  violer  à  tout  moment  les 
I  qu'ils  tiennent  B«n  (eulement 
peur  obligatoires  ^  mais  encore 
pour  divines  ,  &  n*obferver  au-* 
con  des  préceptes  de  cette  reU* 
gion  y  pour  la  défenfe  de  laqi»ell^ 
lis  fe  croyent  prêts  à  tout  entre* 
predre  ^  6t  à  tout  fouffrir. 

Les  Philofophes  Chinois  ont 
aiêine  imaginé  nn  moyen  dé  Qon* 
ctfer  ,  au  moins  aux  yeux  du  peu* 
pie  9  leurs  principes  avec  la  prati<* 
que  ide  la  vertà.  Ils  dilfcm  que  par 
ï'habimde  des  aâton»  vertueufesi 
"Dotre  ame/7U  cette  paftie  de  nous^ 
qui  penfe,  qui  fent,  qui  veut^ 
Mm  Ljr  en  Qâ  fn»t  fe  tondçnfe^ 


CH  43 

fe  purifie ,  i*e  pertediotine ,  &  ac- 
quiert de  nouvelles  ibrccs  pour 
faire  plus  parfaitement  fes  fonc- 
tions ;  de  noeme  que  dans  les 
corps  le  mouvement  6c  Texercke 
en  augmentent  les  forces.  Ils  ajou- 
tent que  le  vice  &  les  paflioi» 
vives  affoibliiTent  au  contraire 
l'ame,  ou  la  propriété  de|>earer« 
&  en  troublent  les  fondions; que 
l'amour  du  juûe  ou  du  bien  mo- 
ral »  c'eft- à-dire,  de  ce  qui  eft 
«vamageux  à  la  fociété  |  fait 
goûter  à  ceux  qui  en  ibnt  4^em- 
plis,  la  même  joie  fie  la  tnfimm 
volupté  due  fait  reffentir  l'amoue 
du  beau  a  ceux  qui  en  obtiennent 
ia  )ouifiasce.  Ils  vont  jufqu'à  dire 
que  de  même  qu'il  o'eft  point 
knpoffible,  abfolunnemi>arlant^  de 
trouver  de$  remèdes  dont  l'eflef 
rende  les  bomnnes  immortels,  de 
même  auâi  la  pratique  de  1  ex- 
trême vertu  peut  rendre  notre 
ame  immortelle  ,  c'e(^à*dire  « 
empêcher  la  defiruâion  de  ia  pso- 
priété  que  nous  avons  de  penfo 
&  de  vouloir.  C'efl  par- là  qy'ili 
ajuftem  avec  leur  fyfiême Je  cidte 
d^  Ancêues ,  &  celui  des  grands 
Hofluiites morts,  comme  G» ^ 
ciu84  Us  lêi  nomment  de$  faims, 
des  immort^s  ;  ils  leur  adreflent' 
leurs  prierei ,  leur  ibitt  des  voeux  « 
leur  demandent  les  richefles,  les 
talens  du  corps»  ou  les  don»  de 
l'efprit ,  nom  qu'ils  fe  perfuadenc 
avec  le  peuple  d'en  être  exaucés  ; 
mais  ,  ib  regardétit  la  plupart  de 
ces  aâions  cotûtte  avantageufes 
à  la  fociété  ^  j^ar  Timpreffion 
qu'elles  Ant  fur  les  efprits.  Ils 
croyent  qii'eD  accoutumant  les 
boBunet  a  ifiiï>eâer  Ifi  loiX  4At 


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44  CH 

ciennes ,  &  qu'en  leur  infpirant 
nne  efpèce  de  vénératipn  pour  les 
Ancêtres  &  pour  les  grands  Hom- 
mes morts ,  on  leur  fait  prendre 
les  mêmes 'femimens  pour  leurs 
parens  vtraos ,  &  pour  les  Ma- 

erats  ;  &  que  Ton  encourage 
particuliers  à  pratiquer  la  rer- 
tii ,  pour  obcenîr  après  leur  mort 
de  femblables  honneurs  9  &  pour 
jouir  par  avance  de  la  confidéra- 
tion  qu'elle  leur  attire  de  leur  vi<» 
yant.La  plupart  des  lettrés  croyent 
que  ces  a^ons  font  néceflaire- 
ment  fuivîes  du  plaifir  &  du  bon- 
liear  qui  accompagnent  l'exercice 
de  fa  vertu  ;  &  cette  perfuafion , 

Sanâ  elle  eil  un  peu  vive  ,  leur 
r  éprouver  un  plaidr  réel ,  par- 
ce qne  pour  être  heureux ,  il  fuffic 
de  fe  perfuader  qu'on  l'eft.  Le  dé- 
tail des  conféquences  que  les  Phi« 
lofephes  Chinois  tirent  de  leurs 
principes  pour  la  Métaphysique 
particulière ,  &  pour  la  Phyfique , 
BOUS  meneroit  trop  loin.  Ce  oue 
BOUS  venons  de  rapporter  doit  luf- 
£re  pour  remplir  ce  oue  nous 
BOUS  fommes  propofés.  Nous  ter- 
minerons ce  paragraphe  par  le  ré- 
cit de  quelques-unes  des  fencen- 
ces  de  Confucius ,  après  que  nous 
aurons  raconté  de  quelle  manière 
B  e(l  honoré  par  les  Phtiofophes. 
II  y  a  proche  de  l'école  Confu- 
ctenne  nn  autel  confacré  à  fa  mé- 
moire ,  &  fur  cet  autel  l'image  de 
Confbcius,  avec  cette  Infcription  : 
C'EST  ICI  LE  TRONE  DE 
L'AME  DE  NOTRE  TRÈS- 
SAINT  ET  TRÈS- EXCEL- 
LENT  PREMIER  MAITRE 
CONFUCIUS.  Là  s'affemblent 
les  Lettrés  »  tout  Jes  équiaoxes  , 


CH 

pour  honorer  par  une  offrande  fo- 
lemnelle  le  Philofophe  de  la  na- 
tion. Le  principal  Mandarin  dn 
lieu  fait  la  fonction  de  prêtre  ; 
d'autres  lui  fervent  d'accoJyies. 
On  choific  le  jour  du  facriiice  avec 
des  cérémonies  particulières  ;  on 
fe  prépare  à  ce  grand  jour  par  des 
ieûnes.  Le  jour  venu ,  on  exami- 
ne l'hoftie ,  on  allume  dos  cier- 
ges I  on  fe  met  à  genoux  ,  on 
prie  ;  on  a  deux  coupes  ,  l'une 
pleine  de  fang ,  l'autre  de  vin  ;  on 
les  répand  fur  l'image  de  Confu- 
cius ;  on  bénit  les  adiftans ,  & 
chacun  fe  retire* 

Sentences     morales 

de  Cqafucius. 

i.^  L'Éthiqqe  politique  a  deux 
objets  principaux  ;  la  culture  de 
la  nature  intelligente  »  l'inditutioil 
du  peuple. 

a.^  L'un  de  ces  objets  deman- 
de que  l'entendement  foit  orné  de 
la  fcience  des  chôfes  ,  afin  qu'il 
difcerne  le  bien  &  le  mal ,  le  vrai 
&  le  faux  ;  que  les  paffions  (btenc 
modérées  ;  que  l'amour  de  la  vé- 
rité &  de  la  vertu  fe  fortifie  dan$ 
le  cœur  ;  ôc  que  la  conduite  en- 
vers les  autres  foit  décente  & 
honnête. 

3.^  L'autre  objet ,  que  le  ci- 
toyen fçache  fe  conduire  lui- 
même  ,  gouverner  fa  famille  » 
remplir  fa  charge  ,  commander 
une  partie  de  la  nation  »  podéder 
l'Empire. 

4.^  Le  Philofophe  eft  celui  qui 
a  une  connoiffance  profonde  des 
çhofes  &  des  livres  ,  qui  pefe 
tout ,  qui  fe  foumet  à  la  raifon , 
Çf,  qui  marche  d'un  pas  alfitré 


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CH 

d90s  Ici  voies  de  la  vérité  &  clé 
la  juAice. 

.  <.9  Quand  on  aura  confomtné 
la  force  intelleâueile  à  approfon- 
4iir  les  chofes  »  rimention  6l  la 
volonté  s'épureront  ;  les  mauvai- 
fes  affeâions  s'éloigneront  de  l'â- 
me ;  le  corps  fe  confervera  fain  ; 
k'  domeftique  fera  i>fea  otdonné, 
la  charge  bien  remplie ,  le  gou- 
.yernenDent  particulier  bien  admi- 
pÀfïré ,  rEmpire  bien  régi  ;  il  joui- 
ra de  la  paix. 

.  6.^  Qu'eft-ce  cpie  Thomme 
tient  du  Gel  ?  la  nature  intelli- 
gente ;  la  conformité  à  cette  àa* 
,tiire  confiitue  la  règle  ;  l'attention 
à  vérifier  la  règle  &  à  s'y  aflii- 
^ttir,  eft  l'exercice  du  fage. 
:  7.^  Il  eft  une  certaine  raifon 
ou  droiture  célefte  donnée  à  tous; 
il  y  a  un  fuppléroent  humain  à 
<e  don  9  quand  on  l'a  perdu.  La 
raifon  célefte  eft  du  ûtint  ;  k  fup- 
plément  eft  du  fage» 

8.^  Il  n'y  a  qu'un  feul  principe 
de  conduite  ;  c'eft  de  porter  en 
tout  de  la  fmcérité ,  &  de  fe  con- 
former de  toute  (on  ame  &  de 
tontes  fes  forces  à  la  meiure  uni* 
verfelle.  Ne  fais  point  à  autrui  ce 
:que  tu  ne  veux  pas  qu'on  te 
iaffe. 

9.^  On  connoît  l'homme  en 
-examinant  fes  aâions  ,  leur  fin, 
Jes  paftîons  dans  le^uelles  il  fe 
complaît  9  le$  cbofes  en  quoi  il  fe 
repofe. 

10.^  Il  Êiut '.divulguer  fur  le 
■champ  les  chofes  bonnes  à  tous  ; 
{j'en  réferver  un  utage  exdufif, 
une  application  individuelle  ,  c'eft 
:fpépxifer  la  vertu ,  c'eft  la  forcer 
.à  un  divorce. 


CH  4ç 

11.^  Que  le  difciple  apprenne 
les  raifons  des  choies  »  qu'il  fes 
examine ,  qu'il  raiibnne ,  qu'il  mé- 
dite ,  qu'il  pefe  ,  qu'il  confulte  le 
Sage ,  qu'il  s'éclaire ,  qu'il  ban- 
niile  la  confufion  de  fes  penlées , 
&  l'inftabiiité  de  fa  conduite. 

12.^  La  vertu  n'eft  pas  feule* 
ment  conftante  dans  les  chofes  ex- 
térieures. 

13.^  Elfe  n*a  aucun  befoin  de 
ce  dont  elle  ne.pourroit  faire  part 
à  toute  la  terre ,  &  elle  ne  penfe 
rien  qu'elle  ne  pnifte  s  avouer  à 
elle-même  k  la  face  du  Ciel. 

14.^  Il  ne  faut  s'appliquer  à  h 
vertu  que  pour  être  vertueux. 

15.^  L'hotnme  parfait  ne  fé 
perd  jamais  de  vue. 

16..?  Il  y  a  trois  degrés  de  (â- 
geffe  ;  fçavoir ,  ce  que  c'eft  que 
la  vef'tu,  l'aimer»  lapofTéder. 

17.^  La  droiture  de  coeur  eft 
le  fond/ement  de  la  vertu. 

18.**  L'univers  a  dnq  règles; 
îl  faut  de  la  juftice  enrre  le  prince 
&  le  fujet  ;  de  la  tendrelTe  entt« 
4e  père  ôcle  61s  ;  de  la  fidélité 
entre  la  femme  &  le  mari  ;  de  la 
fubordination  entre  les  ffreres  ;  de 
.la  concorde  entre  les  amis.  Il  y  a 
trois  vertus  carxlinales;  la  pru-> 
dence  qui  difcerne ,  TatiMur  uni- 
verfel  qui  embrafTe  »  le  courage 
qur  foulent  ;  la  drottuke  de  cteur 
::tes  foppofe.  .  - 

19.^  Les  mouvemens  de  i'ame 
ibnt  ignorés  dés  autres.  Si  tu  e$ 
fage  ,  veille  donc  à  ce  qu'il  n'y  a 
que  toi  qui  voyes.  . 

20,*^  La  vertu  eft  entre  les  ex- 
trêmes ;  celui  qui  a  paiTé  le  mi- 
lieu ,  n'a  pas  mieux  .fait  ^  celui 
qui  ne  l'a  pas  aueint.    , 


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4«  CH 

ai.^  Il  «'y  a  qu'une  chofefré- 
cîeufe  ;  c*eft  la  vercu. 

^^y  U»e  nation  peut  {^us  par 
.la  vertu  que  par  l'eau  &  par  le 
£su;  je  n'ai  jamais  vu  périr  le  peu- 
ple qui.  Ta  priie  pour  appui* 

2).^  Il  faut  plus  d'exemples 
aux  peuplés  que  de  préceptes  ;  il 
me  faut  fe  charger  de  kii  tranfmet- 
tre  que  ce  dont  on  fera  rempli  • 

24.^  Le  Sage  ei\  fon  ceiifeur 
Je  plus  févere;  il  eA  (on  témotn', 
ion  accuTateur ,  &  Ton  juge. 

25.^  Ceft  «voir  aueiat  l'ionob- 
cence  &  la  perfeâion  ,  qae  de 
•  être  furmonié ,  &c  que  d'avoir 
recouvré  cet  ancien  Ôc  piinkif 
éxsLt  de  4f  (Httire  céieAe. 

26.^  La  parelTe  eoeourdie  ^ 
l'ardeur  incônûdérée ,  &at  xbeux 
obftacles  égaui  au  bieni 

27,^  .L'ham€De  parfait  ae 
^e^d  |>oiat  une  voie  détournée  ; 
il  fuir  le  cheaiin  ordinaire^  :6c  s'-^ 
vêtu  6^rfne* 

28.9  L'iioanete  homme  ,<eft  un 
Jiomme  univ^fel. . 

29.^  I^a  charité  eft  cette  a|rec«> 
'^ion  CQuAiiite  ôc  ratâHinée  ,  qoi 
Aous  immole  au  genre  humain , 
comvie  s*il  ne  &Ubît  avec  noi^ 
qu'un  in4ividtt ,  &  qui  nous  mSor- 
cie  à  (es  malheurs  &  à  fes  ptoG^ 
péritéf» 

3P.f  U  ja'y  a. que  i^honnéfe 
homme  qui  ah  droh  de  hairiâc 
'd'ai*w.--. 

ji.^  C^ropenfe  Tinjai^is  rpar 
TavetAon  ri^  bien**fah  par  kjfé- 
connoiiTance,  car  c'eft  la  jufticet 

•  j%i<>  Tomber  &  ne  fe  point 
^retever ,  v<^ilàpiK>premem'6ecpie 
c'eû^foîUir» 

3  3  ,^  Ceû-  une  efpèce  de  trop- 


CH 

Vk  d'eTpnt  que  de  (bahattér  aox 
autres  »  ou  ce  qui  n'eâ  pas  eA 
notre  poHhnte  >  on  é^  dtofes 
concrav^oires. 

34.<^  L*homma  partit  agit  fc^ 
Ion  foaétat  9  &  ne  veui  riei^  <fA 
lui  (bit  étrange. 

3  5  fi  Ceki  qui  étudie  la  façeffe 
aoeuf  Duahtét  «n  vue  ;  la  peripvca- 
cité  de  l'o^ ,  la  finolife  de  roreille, 
la  UréiMé  du  ft^nt»  la  gravilé  da 
corps  ,  ia  véracité  du  propos^ 
l'exaâitude  dans  l'aéHoh  ,  le  coi»- 
ieil  dans  les  cas  douteux,  Texa* 
a»en  des  ftiifes  dans  la -vengeance 
de  dans  la  colère. 

La  moitié  de  Confucias  eft'» 
-comme  Ton  voit  bien  fupéricure 
à  fa  Métaphysique  6c  à  fa  PKyft^ 
oque.  On  peut  confultor  BuFfinger 
iur  ks  mavimes  qu'il  a  laiâ^  da 
gouvernetRent  de  la  famille  ,  des 
£>nâiofi8  ide  la  ma^rature  &<te 
4*j^dminiftttt(ioii  de  4'Ëmpipe. 

•  ./,.  yi.  ■  ; 

De  I4  fp'ific  des  CîàtioU* 

La  langue  Oiinoife  eft  la  plos 

œuiicale  &  la  plus  harmonteuie 

•de  toutes  celles  que  nous  noimoif' 

■fons ,  paiiqoa  les  mots  qu'elle  em- 

4>loie  iqnt  ara^iés ,  non  ifeulemem 

par  les  tems  plus  longs  &  pkis 

(Courts  dans  lefqueU  on  les  pro- 

jionce  ,  mais  encore  par  Téléva^ 

tioa  &  ^fbauffenMnt  '6xe  4e  4a 

vàÀx ,  &  'j[Ar  >d(VdHês  if^epQonn 

de  tons  femblahles  à  celles  de  ao»- 

«re  muâepaé.'Néantiioiiis,  fesChi* 

;nots  n'ôm  ^tniats  comui  la  imr&- 

fîcation  cadançée  par  l'arrange* 

ment  de  cessons  muficaux  ;  leur 

Poëûe  a  feuleaiem  été  confacf  ée 

par  le  nombre  des  fyllabes  «  & 


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tians  la  fbite  on  y  a  ajouté  la  rime. 
Les  premiers  vers  mefurés  étoient 
toujours  compofé»  de  quatre  mots 
OQ  fyliabes  ;  car ,  les  mots  Chi- 
tieb  ie  proRoncem  en  un  feoi 
tems. 

Les  vers  font  aujourd'hui  d'un 
aombre  impair  de  (ytlabes  ,  de 
dnq ,  de  fept  ou  de  neuf  ;  6c  les 
anciens  vers  de  quatre  fyliabes 
fefit  ab^ument  méprtfës.  Ils  font 
rimes  ,  ÔC  quoique  les  Chinois  ne 
âiftinguent  point ,  comme  nous  , 
les  rimes  mafculines  &  femtnmes , 
il  n'y  a  pas  moms  d*anifice  dans 
la  feçon  de  les  «niremêter  dans 
ks  pièces  de  vers  en  rimes  va- 
f$ées;€ar,  ksOiiaoisontd'affez 
longs  morceaux  de  Poëfie  fur  une 
même  rime ,  6c  ce  gem>e  de  ter<« 
fification  eft  fort  eftimé. 

Les  (bncesïont  toujours  com- 
^fées  d*un  nombre  pair  -,  de 
l^af^é,  de  fix,  de  huit,  de  dix 
ou  <louze  vers ,  mais  doàt  les  ri- 
Inès  fe  difpofent  6c  s'entremêlent 
dlff^eoMnenr.  En  général  >  on  fait 
toujours  rimer  enfemfble  le  pre- 
tni^  6t  le  dernier  vers  ^  dans  les 
quatrains ,  le  premier  &  Ife  qua- 
trième, le  deuxième  6c  le  troifiè- 
tne  riment  l'un  avec  Tauifre  ;  dans 
tes  iixains  ,  le  premier  ,  le  qua- 
trième êc  le  fixième  riment  en- 
fenMflk,  le  Tecond  rime  avec  le 
troiitème ,  .&  le  cinquièmfe-ne  ri- 
ittie  point  ;  car ,  c'eft  encore  une 
i«g(<e  générale ,  que  le  pénultième 
vers  Qil  libre  ,  lorfque  celui  qui 
4e  précède  rime  avec  le  dernier. 

I^ans  le  huitain ,  lé  premier ,  le 
^atfième  ,  le  Cinquième  6t  le 
iiui«ième  riment  et^femble  ;  fe 
'deuxième  rime  av^  4e  (roiâème , 


CM  47 

&  le  Cxîètne  avec  le  feptîème  ; 
ainû  le  huitain  fuit  la  règle  de^; 
quatrains.  Dans  le  dixain ,  le  pre- 
mier ,  le  quatrième  6c  le  dixième 
riment  enfemble  ;  le  deuxième 
rime  avec  le  troifième  ,  le  cio. 
4quième  avec  le  huitième  ,  6c  le 
fixième  avec  le  feptième ,  le  neu« 
vième  eft  libre.  Pour  les  douzains» 
le  premier  ,  le  quatrième  ,  le  neu- 
vième 6c  le  douzième  riment  en- 
femble; le  deuxième  rime  avec  le 
troisième  ,  le  cinquième  avec  le 
hui^me ,  le  fixième  avec  le  iêp- 
tièmé ,  6c  le  dixième  avec  le  on- 
tième. 

VII. 

D AS  navigations  àts  Chinois* 

:  Les  Chinois  n'ompastoujoun 
été  renfisnnés  dans  les  bornes  « 
que  la  nature  fembie  avoir  aûfes 
0u  p^  ^qu'ils  habitent  ;  ils  ont 
ibuvenit  feanchi  les  déferts  6c  las 
montagnes  qui  les  renieraient  dn 
coté  éa  w>và  ,  6c  paccoum  ks 
«ters'desindes  6c  du  Japon,  qui 
les  ^covironnem  à  ïeù  &  au  iud. 
Le  principal  ob^t  -de  ces  ibi^ 
.tc^deniioyages.étoity  on  lecom«- 
•mecce  ^svec.  les  Stations  étrange^ 
res  ,  ou  le  deiïein  d^ét^die  les 
limités  de  le«r  Jbnpl&e^  Dans  ces 
Toyages^^  >les  Xjhmois  x>at  6iit  des 
-obier vtaiioos  impep-^tet' ,  tant 
fur  l^iA^ire  que  ifur  in  Géogss- 
«phie.Phifienrsde  ^lwrs>généraax 
oiRt  fiak  die^erd^  cartes  ëes  pals 
qu^  ''avoient  reconnus  k  '  6c"ios 
Htftoriens  cmt  rapporté  qnekfuefs 
routiers  dont  on  peut  iaiise  jifage. 
jDaniirénuméfâcieii  oie  tous  4es 
«différens  p)tuples  ^tmngers  que  les 
X!!hinoi$  ont  connue  ^  quelques^ 


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4«       .      CH 

uns  paroHTent  devoir  être  fitués  I 
rorient  de  la  Tartarie  &  du  Ja- 
pon ,  éfins  un  païs  qui  bat  partie 
de  l'Amérique. 

C'efi  une  navigation  bien  fin- 

S'ière  &  bien  bardie  pour  des 
inois,  qui  ont  toujours  pafTé 
pour  des  navigateurs  médiocres , 
peu  capables  d'entreprendre  de 
longs  voyages  ,  6(  dont  les  vaif- 
ièaux  ne  font  point  d*une  conf- 
truâion  afTez  folide ,  pour  réHf- 
cer  à  la  fatigue  d'une  tra^erfée 
auifi  conûdérable  que  ycelle  de  la 
Chine  au  Mexique.  Ces  naviga- 
tions ont  paru  très- importantes  à 
M.  de  Guignes  ;  &  il  a  confacré 
un  mémoire  à  les  conftater.  Ses 
recherches  font  uniquement  ap* 
puyées  fur  des  faits  authentiqués  ^ 
iuivant  ce  qu'il  nous  aflure  lui«» 
même ,  &  non  fur  des  conjeâures 
pareilles^  à  celles  que  nous  trou* 
vons  dans  lés  ouvrages  de  plu- 
fîeurs  Sçavans.  Ce  qu!ii  y  a  de 
furprenant ,  c'eil  de  voir  les  vaif* 
féaux  Chinois  faire  le  voyage  de 
l'Amérique  plufieurs  fiedes  avant  , 
Chriftophe  Colomb  ,  c'eft- à-dite, 
il  y  a  plus  de  douze  cens  ans. 
voici  le  précis  du  mémoire  de  M. 
^e  Guignes. 

Libyen ,  Hiftorien  Chinois ,  qui 
irlvoit  au  commancement  du  fep- 
lième  fiecle,  parle  d'un  païs  nom- 
mé Fou-fang  »  éloigné  de  la  Chine 
de  plus  de  quarante  mille  li  vers 
l'orient  ;  il  dît  que ,  pour  s'y  renr 
dre ,  on  partoit  des  cdtes  de  la 
.province  de  Léao-tong  ,'  fituée 
au  nord  de  Pé  -  king  ;  qu'apr^ 
avoir  fait  douze  mille  ,lî  »  on  fe 
.rendoit  au  Japon;  que  de-là^ 
vers  le  nord  »  après  une  route  de 


GH 

fept  mille  H,  on  rencontroît  te 
païs  de  Ven*chin;  qu'à  cinq  mille 
li  de  ce  dernier,  vers  l'orient, 
on  trou  voit  le  païs  de  Ta-han  , 
d*oii  on  parvenoit  dans  celui  de 
Fou-fang  ,  qui  étoit  éloigné  de 
Ta-han  de  vingt  mille  li.  De  tous 
ces  païs  nous  ne  connoiflbns  que 
le  Léao-tong  ,  province  fepten- 
trionale  de  la  Chinç,  oii  l'on 
s'embarquoit  ,  .&  lé  Japon  qui 
étoit  la  principale  dation  des  vai£^ 
féaux  (Jhinois.  Les  trois  autres 
termes  où  ils  abordoient  fucceffi- 
vement ,  font  le  Ven-chin ,  ïe  Ta- 
han  6c  le  Fou-fang.  On  va  voir 
que  par  le  premier  il  faut  enten- 
dre le  Jéfo  ,  par  le  fécond  le 
Kamchatka,  &  par  le  troiûème 
un  endroit  ûtué  vers  la  Califor- 
nie. 

A  fept  mille  li  du  Japon  ,  vers 
le  nord-eft,  le  Ven-chin  que  ron 
rencontre  ,  ne  peut  être  que  le 
Jéfo ,  fitué  au  nord-eft  du  Japon» 
&  auquel  les  fept  mille  li  font 
terminés.  Un  Hiftorien  Chinois  , 
qui  nous  a  laide  des  mémoires 
tort  curieux  fur  le  Japon,  nous 
en  fournit  des  preuves.  £n  par-> 
lant  des  limites  de  cet  Empire ,  i} 
dit  qu'au  nord-eft  des  montagne^ 
qui  bQrd^nt  le  Japon ,  efi  placé 
le  royaume  de  Mao-gin  ou  des 
hommes  velus,  6c  enfuit#|celui 
de  Ven-chin,  ou  des  corps  peinu 
diftant  du  Japon  d'environ  kp\ 
mille  li.  Les  premiers  font  habi- 
tans  de  l'ifle  de  Matfumai  ;  ceux, 
ci  ont  pour  voiflns  au  nord  les 
peuples  du  Jéfo ,  qui  par  confé- 
quent  doit  être  le  Ven-chin.  Ce 
pais  ,  fuivant  les  Hifioriens  Chi«- 
nois ,  étoit  connu  dès  l'an  5  lO  oit 

5^^ 


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CH 

520  de  J.  C.  Ses  habitans  avoient 
une  figure  femblable  à  celle  dès 
animaux.  Ils  traçoient  fur  leur 
front  différentes  lignes ,  dont  la 
forme  fervoit  à  diftinguer  les  prin» 
cipaux  de  la  nation  d'avec  le  peu- 
pie.  Ils  expofoient  aux  bêtes  fé- 
roces les  criminels  qu'ils  avoient 
condamnés  ;  &  le  préjugé  étoit 
que  s'ils  étoient  innocens  ,  les 
animaux  prenoient  la  fuite»  Leurs 
villes  ou  bpurgades  n'avoient 
point  de  murailles.  La  demeure  du 
Roi  étoit  ornée  de  meubles  pré- 
cieux. Ils  ajoutent  encore  que  l'on 
y  voyoit  une  fofle ,  qui  paroifToic 
remplie  de  vif-argent ,  &  que  cette 
matière  ,  eOimée  dans  le  corn- 
merce,devenoit  liquide  &  coulan- 
te ,  lorfqu*elle  étoit  imbibée  des 
eaux  de  la  pluie.  C'étoic  au  refte 
un  pais  fertile  ,  où  Ton  trouvoit 
en  abondance  tout  ce  qui  efl  né- 
ceHaire  à  la  vie.  * 

Cette  defcrîption  eft  conforme 
à  ce  que  nous  lifons  dans  les  rela- 
tions de  ceux  qui  ont  parcouru  le 
Jéfo.  Des  Japonois ,  qui  y  furent 
envoyés  autrefois  par  un  empe- 
reur du  Japon  ,  y  trouvèrent  des 
hommes  velus  »  qui  portoient  la 
barbe  à  la  manière  des  Chinois  , 
mais  figrofSers  &fi  brutaux  qu'ils 
ne  purent  en  tirer  aucune  inftruc- 
tion.  Lorfque  les  Hollandois  dé- 
couvrirent le  Jéfo,  en  1643  »  ^^^ 
y  virent  les  mêmes  barbares ,  tels 
que  les  Chinois  &  les  Japonnois 
les  ont  dépeints,  ôc  le  païs  leur 
parut  abonder  en  mines  d'argent. 
Mais  ,  ce  qui  convient  le  plus 
avec  la  relation  des  Chinois,  c  eft 
que  ces  Hollandois  y  rencontrè- 
rent une  terre  minérale  ,  qui  bril- 
Tom.  XL 


CH  49 

loît  comme  fi  elle  eût  été  d'argent. 
Cette  terre  mêlée  d'un  fable  fort 
friable ,  fe  fond  lorfqu'on  y  met 
de  l'eau.  C'eft-là  ce  que  le^  Chi- 
nois ont  pris  pour  du  vif- argent. 
Ces  preuves ,  la  fituation  du  Yen- 
chin ,  &  fa  diftance  du  Japon  fé- 
lon les  Écrivains  Chinois  ,  ne 
nous  permettent  pas  de  douter 
qu'il  ne  foit  Tifle  de  Jéfo.  # 

A  cinq  mille  H  de  diftance  de 
ce  païs  ,  en  allant  vers  l'eft ,  les 
anciens  navigateurs  Chinois  re- 
connoiflbient  le  Ta-han.  Ceux 
oui  avoient  deflein  de  fe  rendre 
dans  ce  païs  »  partoient  d'une  ville 
fituée  au  nord  du  fleuve  Hoam- 
ho ,  vers  le  païs  des  Tartares  Or- 
tous.  Cette  ville  ,  nommée  par 
les  Chinois,  Tchung-chéoukiang- 
tching  ,  doit  être  la  même  que 
celle  qui  porte  à  préfent  le  nom 
de  Piljotaihotun.  Oif  paiToic  en- 
fuite  le  grand  défère  de  Cha-mo; 
on  arrivoit  à  Caracorom  ,  princi- 
pal campement  des  Hoei  -  ke  , 
peuples  confidérables  de  la  Tar- 
tarie;  de-là  on  fe  rendoit  dans 
le  pais  des  Ko-li-han  &  des  Tou- 

Î)0  ,  fitués  au  midi  d'un  grand 
ac ,  fur  la  glace  duquel  les  voya- 
geurs étoient  obligés  de  paffer.  Au 
nord  de  ce  lac,  on  trouve  de  gran- 
des montagnes,  &  un  païs  oh  le 
foleil  n'eft  ,  dit-on  ,  fous  l'horizon 
que  pendant  le  peu  de  tems  que 
l'on  emploie  à  faire  cuire  une 
poitrine  de  mouton.  Telle  eft  l'ex- 
preftion  fingulière  dont  les  Chi- 
nois fe  fervent  pour  défigner  un 
païs  fitué  fort  avant  dans  le  nord. 

Les  Tou-po ,  voifins  des  Ko- 
li-han  ,  ont  leur  demeure  au  midi 
du  même  lac.  Ces  peuples  ,  qui 
D 


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So  C  H 

ne  diftinguent  point  les  différen- 
tes faifons  ,  fe  renferment  dans 
des  cabannes  faites  d*faerbes  entre- 
lacées ,  oii  ils  vivent  de  poiflfons  ^ 
d  oifeâux  ,  des  autres  animaux 
qui  naiiTent  dans  leur  pais  >  6c  de 
racines.  Ils  négligent  de  nourrir 
des  troupeaux ,  6c  ne  s'appliquent 
point  à  cultiver  la  terre.  Les  plus 
riches  ^d'entr'eux  s'habillent  de 
peaux  de  zibelines  ôc  de  rennes; 
les  autres  font  vêtus  de  plumes 
d  oifeaux.  Ils  attachent  leurs  motts 
aux  branches  des  arbres  >  les  laif- 
fent  ainû  dévorer  par  les  bêtes 
féroces  ,  ou  tomber  en  pourritu- 
re ;  pratique  encore  uiitée  chez 
les  Tongoufes  ,  qui  demeurent 
dans  le  même  paîls. 

Un  autre  Hiflorien  Chinois 
nous  fait  connoitre  quelle  ed  la 
véritable  demeure  des  Ko-li-han , 
en  nous  apjfrenant  que  leur  païs 
eft  le  même  que  celui  des  Kerkis 
ou  Kergis.  Il  fait  mention  des 
fleuves  Oby  &  Angara  fous  le 
nom  d'Opou  &  de  Gang-kola. 
Nous  devons  conclure  de-là  que 
le  lac  placé  au  n6rd  des  Ko-li* 
han  y  e(l  le  fameux  lac  Pai -ical, 

Sue  ceux  qui  vont  de  Ruffie  ou 
e  Sibérie  à  la  Chine  »  font  obli- 
gés de  pafler  fur  les  glaces ,  lorf- 
qu'ils  y  arrivent  en  hiver.  Les 
Chinois  employoient  huit  jours  à 
le  traverfer.  On  y  met  moins  de 
tems  à  préfent  ;  mais  ,  il  n'en  eft 
pas  moins  dangereux  >  à  caufe  de 
rimpétuofité  des  vencs  &  de  l'a- 
bondance des  neiges. 

Il  réfulte  de  ce  deuil  que  le 
païs  des  Ko-li-han  eil  celui  des 
Kerkis  ,  peuples  belliqueux  qui 
habitent  au  milieu  des  monta<« 


CH 

gnes  >  &  que  noas  devons  regar« 
der  comme  les  ancêtres  de  ces 
Circailiens  qui  fe  nomment  en- 
tr'eux  Kirkez ,  Ôc  qui  demeurent 
au  nord  de  la  Géorgie ,  où  ils  ont 
pénétré  dans  la  fuite.  L'ancien 
pais  des  Kerkis  eft  fitué  dans  les 
provinces  que  nous  appelions  au- 
jourd'hui Sélinginskoy  &  Irkutf- 
koy ,  entre  l'Oby  &  le  Sélinga. 
C'eft  ce  qu'il  étoil  néceftaire  de 
déterminer  ,  afin  de  parvenir  à 
une  exaâe  connoiflance  de  la  rou- 
te qui  conduit  dans  le  Ta-han. 

En  quittant  le  païs  de  Ko  li- 
han  9  on  entroit  dans  celui  des 
Che-goei.  Ces  peuples  font  ûtués 
à  l'orient  du  lac  Pai-kal  6c  du  païs 
des  Ker-kis ,  fur  les  rives  fepten- 
trionales  du  fleuve  Amour.  Par  la 
defcription  aflez  détaillée  que  les 
Hiftoriens  Chinois  nous  ont  con- 
fervée  de  ce  païs  ,  on  voit  que 
ces  Barbares  s'étendoient  dans  le 
nord  de  la  Sibérie ,  le  long  de  la 
Séna ,  jufqu'aux  environs  du  foi« 
xantième  degré. 

Ce  peuple  nombreux  étoît  di- 
vifé  en  cinq  hordes  principales, 
qui  formoient  comme  autant  de 
nations  différentes.  Les  premiers 
appelles  Nan- che-goei ,  c'efl-à- 
dire  ,  Che  *  goei  méridionaux  , 
étoient  fitués  au  nord  des  Tana- 
res  Niutche  &  Khîtans  ,  aux  en- 
virons du  fleuve  Amour  >  dans  un 
pais  marécageux,  froid  6c  ûérile, 
qui  ne  produit  point  de  moutons  , 
oîi  Ton  trouve  peu  de  chevaux  , 
mais  un  erand  nombre  de  porcs , 
de  bœuh  ,  &  fur  tout  de  bêies 
féroces  dont  les  habitans  fe  ga- 
rantiifent  avec  peine.  Ces  Barba- 
res étoient  vêtus  de  peaux  de 


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CH 

cochon ,  &  fe  retiroient  au  Iblfti- 
ce  d'été  au  milieu  des  montagnes. 
Ils  avoient  des  chariots  couverts 
de  feutre  »  à  la  manière  des  Turcs^ 
&  ils  les  fatfoient  traîner  par  des 
bœufs  ;  ils  fe  conflruifoient  des 
cabannes  avec  du  bois  ôi  quelques 
rofeaux.  Leur  écriture  étoit  de 
petits  morceaux  de  bois  ;  Sa  la 
manière  dont  on  les  difpofoit , 
exprimoit  leurs  différentes  idées. 
Celui  qui  vouloît  fe  marier  com- 
mençoit  par  enlever  la  fille  qu'il 
fe  deflinoit  »  &  envoyoit  enfuite 
à  fes  parens  un  préfent  de  bœufs 
ou  de  chevaux.  Apres  la  mort  du 
mari ,  les  loix  du  païs  obligeoient 
la  femme  de  paiTer  le  refle  de  fa 
vie  dans  le  veuvage ,  &  le  deuil 
de*  la  famille  étoit  de  trois  ans , 
comme  parmi  les  Chinois.  A  l'é- 
gard des  morts  ,  on  le»  abandon* 
noit  fur  un  monceau  de  bois. 

Les  antres  branches  de  la  même 
nation  étoient  les  Che-goei  du 
nord ,  ceux  que  Ton  appelloit  Po- 
che-goei ,  &  les  grands  Che-goei. 
Ils  étoient  habiliés  de  peaux  de 
poiflbn ,  ne  s*occupoient  que  de  la 
pêche  &  deja  chaÛe  des  zibelines , 
&  pendant  l'hiver  ils  fe  retiroient 
dans  les  cavernes.  Au  nord  de  ces 
derniers,  habitoit  une  autre  na- 
tion ,  qui  alloit  faire  des  courfes 
fur  la  mer  feptemrionale. 

Ceft  ainfi  que  les  Hiftoriens 
Chinois  nous  repréfentent  les  an- 
ciens  habitans  du  nord  de  l'Afie , 
à  travers  le  païs  defquels  ceux 
qui  vouloient  aller  dans  le  Ta-han 
étoient  obligés  de  pafler.  En  effet , 
après  avoir  quitté  le  païs  des  Che- 
goei ,  &  en  marchant  à  Teft  pen- 
dant quinze  jours  ^  on  trouvoit 


CH  5t 

les  Yu-tche  >  peuples  q^  tlrpienc 
leur  origine  des  C)he-goei  ;  de-là 
en  dix  jours ,  vers  le  nord  on  ea- 
troit  dans  le  Ta-han  ,  qui  eft  le 
terme  de  la  route  que  nous  exa- 
minons. On  fe  rendoit  encore 
dans  le  Ta-han  par  mer ,  &  ea 
panant  de  Jéfo.  D'où  nous  de- 
vons conclure  néceflairement  qu« 
le  païs  des  Yu-tche  >  qui  £ût  par- 
tie de  la  Sibérie  »  eft  litué  vers  la 
rivière  Ouda ,  qui  fe  décharst 
dans  la  mer  de  Kamchatka  ;  fit 

2 ue  le  Ta  -  ban  ,  placé  au  nord 
es  Yu-tche ,  eà  la  partie  la  plus 
orientale  de  la  Sibérie  «  ôc  noo 
rifle  de  Gama  ,  qui  eu  entière- 
ment détachée  du  continent,  plus 
au  midi  &  vers  le  Jéfo. 

Cette  partie  de  la  Sibérie  nom- 
mée Kamchatka ,  eft  lé  païs  que 
les  Japonob  appellent  Oku-Jéfo 
ou  Jéfo  fupérieur.  Us  le  placent 
fur  leurs  cartes  au  nord  de  Jéfo  , 
&  le  repréfentent  deux  fois  grand 
comme  la  Chine ,  courant  a  l'eft 
beaucoup  plus  loin  que  les  côtes 
orientales  du  Japon.  C'efi-là  ce  que 
les  Chinois  ont  nommé  Ta-han» 
qui  peut  fignifier  grand  comme  la 
Chine  ;  nom  qui  répond  à  l'éten- 
due du  pais  oc  à  l'idée  que  les 
Japonois  nous  en  donnent.  Mais  , 
fuivant  les  defcriptions  plus  dé- 
taillées que  les  Ruffes  en  ont  fai- 
tes ,  ce  païs  eft  une  langue  de 
terte  qui  s'étend  du  nord  au  fud , 
depuis  le  capSuetoi-noff  jufqu'au 
nord  de  Jéfo  ,  avec  lequel  plu- 
fieurs  Écrivains  l'ont  confondu. 
Il  eft  en  partie  féparé  de  la  Si- 
bérie par  un  golte  de  la  mer 
orientale  qui  va  du  fud  au  nord. 
Vêts  l'exuêmité  feptemrionale  , 
Dii 


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5^  CH 

il  eft  habité  par  dôs  peuples  très- 
féroces.  Ceux  qui  demeurent  au 
fiîidi  font  plus  civilifés,&  tiennent 
beaucoup  des  Japonois  ;  ce  qui  a 
fait  croire  qu'ils  en  étoient  des  co- 
lonies. Il  eft  vraifemblable  que 
leur  commerce  avec  les  Japonois 
&  les  Chinois^  qui  trafiquent  fur 
leurs  c6res ,  a  contribué  a  les  ren- 
dre plus  fociables  &  plus  doux 
que  ceux  du  nord,  chez  lefquels 
ces  deux  nations  policées  ne  pé- 
nétroient  que  très- rarement. 

La  pa'rtie  méridionale  de  Kam- 
chaïka  ou  Ta-han  ,  a  été  connue 
encore  des  Chinois  fous  le  nom 
de  Liéou  kuei.  Autrefois  des  Tar- 
tares ,  qui  demeuroient  aux  envi- 
tons  du  fleuve  Amour,  s*y  rendi- 
rent après  quinze  jours  de  naviga- 
tion vers  le  nord.  Les  Hiftoriens 
Chinois  rapportent  que  ce  pais 
cft  environné  de  mer  de  trois 
côtés ,  que  les  peuples  habitent  le 
long  de  la  côte  &  dans  les  ifles 
voifines,  &  qu'ils  ont  leur  demeu- 
re dans  des  cavernes  profondes  & 
couvertes  de  bois.  Ils  font  une 
efpéce  de  toile  avec  du  poil  de 
chien.  Les  peaux  de  cochon  &  de 
rennes  leur  fervent  d*habits  pen- 
dant l'hiver  ,  &  celles  de  poiflbn 
pendant  Tété.  L'air  du  païs  eft 
froid ,  à  caufe  des  brouillards  & 
des  neiges  qui  y  font  en  abon- 
dance. Les  fleuves  y  gèlent ,  &  on 
y  trouve  plufieurs  lacs  qui  four- 
niffent  du  poiflbn  ,  que  les  habi- 
tajns  falent  pour  le  conferver.  Ils 
ne  connoiflenc  point  la  divifion 
des  faifons.  Ils  aiment  la  danfe , 
&  portent  le  deuil  pendant  trois 
ans.  Ils  ont  de  grands  arcs  &  des 
flèches  armées  d*os  ou  de  pierre. 


CH 

L'an  de  J.  C.  640 ,  le  Roî  #  ce . 
païs  envoya  fon  fils  à  la  Chine* 

Ce  détail  étbit  néceflaire  pour 
parvenir  à  une  connoiflance  exaâe 
de  la  fituation  du  païs  de  Fou- 
fang ,  qui  eft  le  dernier  terme  des 
navigations  des  Chinois.  Voici  la 
defcription  que  leurs  Hiftoriens 
nous  en  ont  confervée.  Elle  a  été 
faite  ^sr  un  Bonze ,  qui  vint  à  la 
Chine  Tan  499  de  J.  C.  fous  le 
règne  de  la  dynaftie  de  Tcy. 

w  Le  royaume  de  Fou-fang  eft 
»  fitué  à  vingt  li  à  l'orient  du  pais 
n  de  Ta-han.  Il  eft  aufli  à  Teft 
n  de  la  Chine  ;  il  produit  une 
M  grande  quantité  d'arbres  nom- 
M  mes  Fou-fang  ,  d'où  le  nom 
M  qu'il  porte ,  lui  eft  venu.  Les 
»  feuilles  de  Fou-fang  font  fem- 
n  blâbles  à  celles  que  les  Chinois 
i>  appellent  tong.  Lorfqu'elles 
n  commeAcent  à  paroître  «  elles 
»  reflemblent  aux  bourgeons  des 
Il  rofeaux  appelles  bambous  ,  6c 
Il  les  habitans  du  païs  les  man- 
w  gent.  Son  fruit  a  la  figure  d'une 
i>  poire  tirant  fur  le  rouge;  de 
Il  fon  écorce  on  fait  de  la  toile  6c 
Il  d'autres  étoffes  dont  les  habi- 
II  tans  fe  fervent  pour  s'habiller. 
Il  On  en  fabrique  auflfi  du  papier , 
»  ÔC  les  planches  que  l'on  en  ti- 
»  re ,  font  employées  à  la  conC- 
Il  truélion  des  maifons.  On  n'y 
Il  trouve  point  de  villes  murées. 
Il  Ces  peuples  ont  une  efpèce 
Il  d'écriture ,  &  ils  aiment  la  paix. 
Il  Deux  prifons  placées ,  l'une  au 
n  midi ,  &  l'autre  au  nord ,  font 
»  deftinées  à  renfermer  les  cri- 
II  mineîs ,  avec  cette  différence , 
Il  que  les  plus  coupables  font  mis 
n  dans  la  prifon  du  nord  ,    6l 


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CH 

»  transférés  enfuite  dans  celle  du 
»  midi ,  s'ils  obtiennent  leur  gra- 
»  ce  ;  autrement  ils  font  condam- 
»  nés  à  refter  toute  leur  vie  dans 
n  la  première.  Ils  ont  la  liberté  de 
»  $y  marier  ;  mais ,  leurs  enfans 
»  font  faits  efclaves.  Lorfque  les 
9t  criminels  fe  trouvent  tenir  un 
n  des  principaux  rangs  dans  la 
I»  nation ,  les  autres  chefs  s'afFem- 
»  blent  au  tour  d'eux,  les  pla- 
n  cent  dans  une  fofTe  ,  &  font  un 
'  »  grand ,  feftin  en  leur  préfence  ; 
»  on  les  juge  enfuite.  Ceux  qui 
»  ont  mérité  la  mort ,  font  enfe- 
»  velis  vifs  dans  de  la  cendre ,  & 
»  leur  poftérité  eft  punie  fuivant 
»  la  grandeur  du  crime. 

M  Le  Roi  porte  le  titre  de  no- 
n  ble  Y-chi.  Les  principaux  delà 
n  nation  après  lui  font  les  grands 
»  &  les  petits  Touy-lou  ,  &  les 
»  No-ta-cha.  Ce  Prince  eft  pré- 
»  cédé  de  tambours  &  de  cornets 
»  quand  îl  fort.  Il  change  la  cou- 
n  leur  de  fes  habits  tous  les  ans. 

I»  Les  bœufs  de  ce  païs  portent 
»>  un  poids  confidérable  fur  leurs 
»  cornes  ;  on  les  attelle  à  des 
»  chariots.  Les  chevaux  &  les 
w  cerfs  font  employés  au  même 
M  afagé.  Les  habitans  nourriHent 
I»  des  bîcl>ès  comme  à  la  Chine  , 
n  &  ils  en  tirent  du  beurre.  On 
»  trouve  chez  eux  une  efpèce  de 
»  poire  rouge  qui  fe  garde  pen* 
n  dant  un  an  fans  fe  corrompre, 
n  une  grande  quantité  de  glayeuls, 
i>  des  pêches ,  du  cuivre  ;  il  n'y  a 
n  point  de  fer ,  6t  Tor  &  l'argent 
n  n'y  font  point  éftimés, 

n  Celui  qui  veuc  fe  marier  , 
V  conftruit  une  maifon  ou  caban- 
»  ne  près  de  celle  de  la  fille  qu'il 


CH         n 

n  a  deffeîn  d'epoufer  ;  &  il  a  foin 
n  de  répandre  tous  les  jours  pen- 
i>  dant  Tannée  une  certaine  quan- 
i>  tité  d'eau  fur  la  terre  ;  il  époufe 
19  enfuite  la  fille ,  fi  eU^  veut  y 
n  confentir,  fi  non  il  va  chercher 
7}  fortune  ailleurs.  Les  cérémo- 
i>  nies* du  mariage  font,  pour  la 
i>  plus  grande  partie  ^  femblables 
n  a  celles  qui  fe  pratiquent  à  la 
n  Chine.  A  la  mort  des  parens , 
»  ils  jeûnent  plus  ou  moins  de 
n  jours ,  félon  le  degré  de  cdn- 
II  fanguinité  ,  &  pendant  leurs 
n  prières  ils  expofent  l'image  du 
n  défunt.  Ils  n*ont  point  d'habits 
Il  de  deuil,  &  le  Prince  qui  fuc- 
n  cède  à  fon  père ,  ne  prend  foin 
Il  du  gouvernement  que  trois  ans 
Il  après  fon  élévation. 

n  Anciennement  ces  peuples 
Il  n'avoiént  aucune  connoiffance 
n  de  la  religion  de  Fo  ;  l'an  45  8  de 
n  J.  C.  fous  la  dynaftie  de  Sum  , 
n  cinq  Bonzes  de  Samarcande 
Il  allèrent  prêcher  leur  doctrine 
n  dans  ce  païs  ;  alors  les  mœurs 
Il  changèrent,  m 

L'Hiftorien  dont  Ma-tuon-lin 
a'  copié  cette  relation  ,  ajoute 
qu'on  n*avoit  aucune  connoiffance 
du  païs  de  Fou-fang  avant  l'an 
458  ;  &  M.  de  Guignes  afTure 
qu'il  n'a  vu  que  ces  deux  Écri- 
vains qui  en  parlent  d'une  ma- 
nière étendue  ;  quelques  Auteurs 
de  didionnaires  qui  en  font  aullî 
mention  ,  fe  contentent  de  dire 
qu'il  eft  fitué  dans  l'endroit  où  le 
•  Soleil  fe  levé. 

Cette  relation  nous  apprend 
que  le  Foo-fang  eft  éloigné  de 
vingt  mille  li  du  Ta-han  ou  Kam- 
chatka  ,   diftance  prefque  auâi 

Diii 


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54  C  H 

confidérable  que  celle  qui  eft  en- 
tre les  côtes  du  Leao-tong  &  le 
Kamchatka.  Ainfî  ,  en  partant 
d'un  des  ports  de  ce  dernier , 
comme  de  celui  d'Avatcha ,  & 
faifant  vôile  à  l'orient  dans  un 
efpace  de  vingt  mille  li ,  ce  qui 
préfente  une  grande  étendue  de 
»er  ,  la  route  fe  termine  fur  les 
côtoies  plus  occidentales  de  TA- 
mérique ,  &  vers  Tendroic  oîi  les 
RufTes  ont  abordé  en  174 1. 

Les  Hidoriens  Chinois  parlent 
encore  d*un  pais  plus  oriental  de 
mille  li  que  celui  de  Fou-fang. 
Ils  le  nomment  le  royaume  des 
femmes.  Mais,  leur  relation  eft 
remplie  de  fables  ,  femblables  à 
celles  que  nos  premiers  Voya- 
geurs ont  débitées  fur  les  pais 
nouvellement  découverts. 

19  Les  habitans  de  ce  royaume 
»  font  blancs  ;  ils  ont  le  corps 
»  velu  &  de  longs  cheveux  qui 
»  tombent  jufqo'à  terre.  A  la  fe- 
n  conde  ou  à  la  croifième  lune , 
»  les  femmes  vont  fe  baigner 
)»  dans  un  âenve ,  &  elles  de- 
»  viennent  enceintes.  Elles  enfan- 
9}  tent  à  la  fixième  ou  à  la  fep- 
»  tième  lune.  Au  lieu  de  mam-  ^ 
»  melles  ,  elles  ont  derrière  la 
99  tête  des  cheveux  blancs  d'où  il 
tf  fort  une  liqueur  qui  (èrt  à  allai- 
n  ter  leurs  enfans.  On  dit  que 
»  cent  jours  après  leur  naiflance  » 
99  ces  enfans  iont  en  état  de  mar- 
»  cher  ,  &  paroiiTent  hommes 
I»  faits  à  trois  ou  quatre  ans.  Les 
ff  femmes  prennent  la  fuite  à  la 
9»  vue  d'un  étranger,  &  elles  font 
91  très*refpeâueufes  envers  leurs 
91  maris.  Ces  peuples  fe  nourrif- 
»  fent  d  une  plante  qui  a  le  goût 


CH 

fy  &  l'odeur  du  fel ,  &  qui  pour 
n  cette  raifon  porte  le  nom  de 
»  plante  que  Ton  appelle  en  Chi- 
n  nois,  Sie-hao»  qui  eft  une  efpè- 
n  ce  d'abfinthe.  a 

Il  eft  aifé  d'appercevoir  dans  ce 
récit ,  que  les  femmes  de  ce  pais 
allaitoient  leurs  enfans  par  deffus 
leurs  épaules ,  comme  en  plufieurs 
endroits  des  Indes  ;  ce  qui  a  donné 
lieu  à  la  fable  que  l'on  rapporte* 

On  trouve  encore  dans  les  mê- 
mes Auteurs  ,  que  Tan  507  de  J. 
C  ibus  le  règne  de  la  Dynaftie 
des  Leam  ,  un  vaifTeau  Chinois  , 
qui  faifoit  voile  dans  ces  mers, 
fut  porté  par  une  tempête  dans 
une  ifle  inconnue.  Les  femmes 
reflembloient  à  celles  de  ]a  Chi- 
ne ;  mais  ,  les  hommes  avoient 
la  figure  &  la  voix  comme  les 
chiens.  Ces  peuples  fe  nourrif- 
foient  de  petites  fèves  ,  avoienc 
des  habits  faits  d'une  efpèce  de 
toile  ,  &  les  murailles  de  leurs 
maifons  étoient  conftruites  avec 
de  la  terre  élevée  circulairement. 
Les  Chinois  ne  purent  entendre 
leur  langue. 

Il  y  a  lieu  de  croire  que  les 
fèves  dont  cm  parle ,  font  le  maïs  ; 
&  le  chevalier  de  Tonti ,  dans  fa 
relation  de  la  Louifiane ,  rapporte 
que  les  Taëncas  »  en  parlant  à 
leur  Roi ,  ont  coutume  de  faire  de 

f;rands  hurlemens,  comme  pour 
ui  rendre  plus  de  refpeâ  »  &  fai- 
re connoître  leur  admiration.  Une 
pratique  femblable  chez  les  peu- 
ples de  rifle  dont  il  s'agit  ,  a  pa 
faire  dire  aux  Chinois  qu'ils  avoient 
la  voix  femblable  a  celle  des 
chiens. 
Nous  ne  pouvons  douter  à  pré* 


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CH 

km  qoe  les  Chinois  n*a!ent  péné« 
tré  fort  avant  dans  la  mer  du  Sud , 
qu'ils  ne  Taient  parcourue ,  &  que 
par  conféquent  iis  n'aient  eu  aflez 
dehardieneâc  aflezd'habiletédans 
la  navieation  pour  fe«  rendre  vers 
la  Californie.  L'eiamen  de  la  rou- 
te qu'ils  tenoient,  &  les  diflances 
qulls  ont  données  ,  prouvent 
qu'ils  y  ailoient  Tan  458  de  Jefus- 
Chrift.  Nous  trouvons  en  effet 

Elques  traces  de  ce  commerce 
s  nos  relations.  George  Home 
nous  apprend  qu'à  l'occident  du 
païs  des  Épicériniens ,  voifms  des 
Hurons  ,  habitoit  un  peuple  , 
chez  lequel  on  voyoit  aborder 
des  marchands  étrangers ,  qui  n'a- 
voient  pas  de  barbe ,  &  qui  mon- 
toient  de  grands  vaifTeaux.  Fran- 
çois Vafquez  de  Coronado  ra- 
conte au  Ai  que  l'on  a  trouvé  à 
Quivir  des  vai^Teaux  dont  les 
poupes  étoient  dorées  ;  &  Pierre 
Mélendez,  dansAcofta,  parle  de 
débris  de  vaifleaux  Chinois  vus 
fur  les  côtes.  C'eft  encore  un  fait 
confiant  ,  qu'il  venoit  autrefois 
chez  les  Catualcans  des  mar- 
chands étrangers  vêtus  de  foie. 
Tous  ces  témoignages  joints  à  ce 
que  nous  avons  rapporté,  devien- 
nent comme  autant  de  preuves 
que  les  Chinois  trafîquoient  au 
nord  de  la  Californie ,  vers  le  païs 
de  Quivir.  Nous  ferons  obferver 
encore  ,  ce  qui  eft  une  fuite  né- 
cefTaire  de  ce  commerce  ,  que  de 
toutes  les  nations  Américaines  , 
les  plus  policées  font  fituées  vers 
la  côte  qui  regarde  la  Chine.  Aux 
environs  du  nouveau  Mexique , 
on  a  trouvé  des  pe  uples  qui  a  voient 
desmaifons  à  pluÇeurs  étages , 


CH  55 

avec  des  falles ,  des  chambres  (k, 
des  étuves.  Ils  étoient  v^tus  de 
robes  de  coton  &  de  peaux  ; 
mais ,  ce  qui  n'efl  point  ordinaire 
aux  Sauvages ,  c'efl  qu'ils  a  voient 
des  fouliers  &  des  bottes  de  cuir. 
Chaque  bourgade  avoit  fes  crieurs 
publics ,  qui  annonçoient  les  or*- 
dres  du  Kot  ,  &  par  tout  on 
voyoit  des  idoles  6c  des  temples. 
Le  Baron  de  la  Hontau  parle 
auffi  des  Morambecs  qui  habi- 
toient  des  villes  murées,  fituées 
auprès  d'un  grand  lac  falé  y  &  fa* 
briquoient  &s  étoffes  de  laine, 
des  haches  de  cuivre  &  divers  au<*> 
très  ouvrages. 

Quelques  Écrivains  ont  pré- 
tendu que  ces  peuples  policés, 
(itués  au  nord  ,  font  des  refies 
des  Mexicains  qui  prirent  la  fuite 
dans  le  tems  que  Fernand  Cortet 
pénétra  dans  le  Mexique,  &  qui, 
remontant  au  nord  de  leur  païs, 
altèrent  fonder  des  royaumes  con- 
(idérables  ,  entr'autres  celui  de 
Quivir.  Quoique  cette  conjec- 
ture paroifTe  n'être  pas  deAituée 
de  fondement ,  nous  lifons  néan- 
moins dans  Acofla ,  que  les  Mezi* 
cains  eux-mêmes  étoient,  long- 
tems  avant  l'invafion  des  £fpa« 
gnols  «  fortis  du  nord  ;  ce  qui  por- 
te à  croire  que  les  Chinois,  qui 
abordoient  dans  cette  partie  fep- 
tentrionale  de  l'Amérique  ,'  ont 
dû  coi^ribuer  à  les  civilifer.  La 
fondation  de  l'Empire  du  Mexi- 
que ne  remonte  pas  au  de- là  de 
Tan  820  après  J.  C.  Époque  pof* 
térieure  de  plufieurs  fiedes  aux 
navigations  des  Chinois  ,  dont  la 
première  efl^de  458.  Les  peuples 
qui  l'habitoient  avant  l'an  820 ,  66 
Div 


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5^  CH 

qui  portoient  le  noçi  *de  Chichî- 
meqaes ,  étoient  des  Sauvages  re- 
tirés dans  les  montagnes ,  où  ils 
vivoient  fans  loix  ,  fans  religion 
&  fans  Prince  pour  les  gouver- 
ner. Vers  Tan  820,  les  Navatal- 
ques  ,  nation  fage  &  policée ,  fe 
rendirent  au  Mexique  ,  dont  ils 
chafferent  les  habitans ,  &  y  fon- 
dèrent le  puiffant  Empire  que  les 
Efpagnols  ont  détruit.  Les  Nava- 
talques  n'apportèrent  pas  du  nord 
la  coutume  de  facrifier  des  viâi- 
mes  humaines  ;  ces  facrifices  bar- 
bares ne  furent  infiitués  qu'après 
leur  entrée  dans  le  Mexique  ,  & 
à  Toccafion  d'un  événement  dont 
on  trouve  Thiftoire  dans  Acoda. 

Il  efl  aifé  maintenant ,  dit  M. 
de  Guignes  ,  d'appercevoir  de 
quelle  manière  l'Amérique  a  été 
peuplée.  Il  y  a  beaucoup  d'appa- 
rence que  plufieurs  colonies  y  ont 
fafjfé  par  le  nord  de  l'Afie ,  dans 
endroit  oii  les  deux  continens 
font  les  plus  voifms ,  &  où  une 
grande  iile  qui  s'étend  de  l'orient 
en  occident,  &  qui  femble  les 
réunir  ,  rend  encore  le  pafTage 
plus  Éacile.  Elles  ont  pu  sy  ren- 
dre ,  foit  à  la  faveur  des  glaces 
qui ,  dans  ces  mers ,  durent  quel- 
quefois pendant  deux  ou  trois 
ans  ,  comme  on  en  a  vu  des 
exemples  de  nos  jours  >  foit  avec 
le  fecours  des  canots  en  ufage 
chez  les  Groënlandois  &  autres 
barbares  du  nord ,  voifms  de  la 
partie  la  plus  orientale  de  la  Si- 
bérie. 

On  peut  alléguer  quelques  faits 

Si  confirment  la  facilité  du  paf- 
^e  ;  nous  les  tirons  du  P.  Char- 
levoix,  qui  rapporte  que  le  P. 


C  H 

Grellon  ,  après  avoir  travaillé 
quelque  tems  dans  les  Miffions  de 
la  nouvelle  France ,  pafla  à  celles 
de  la  Chine  ,  &  de- là  en  Tarta- 
rie  ,  où  il  rencontra  une  femme 
Huronne  q^i'il  avoit  connue  en 
Canada.  Elle  avoit  été  prife  en 
guerre ,  &  conduite  d'une  nation  à 
l'autre  jufqu'en  Tartarie.  Un  au- 
tre Jéfuite  de  retour  de  la  Chine  ,* 
raconte  auffi  qu'une  femme  Efpa- 
gnole  de  la  Floride ,  qui  avoit  eu 
le  même  malheur  ,  après  avoir 
traverfé  des  régions  très- froides , 
s'étoit  enfin  rencontrée  en  Tar- 
tarie. 

Quelques  extraordinaires  que 
puiiTent  être  ces  relations ,  il  n'eil 
cependant  pas  impoflible  de  les 
concilier  avec  la  Géographie.  Ces 
femmes  parvenues  au  bord  de  la 
mer  qui  latent  les  côtes  occiden- 
tales de  l'Amérique,  ont  d'abord 
pafTé  avec  des  canots  dans  l'ifle 
qui  fe  trouve  dans  le  détroit ,  d'où 
elles  ont  abordé  au  continent 
d'Afie  ;  6r  prenant  enfuite  la  route 
du  Ta-han  ,  que  nous  avons  in- 
diquée, elles  fe  font  approchées 
de  la  Chine. 

M.  de  Guignes ,  dans  un  autre 
mémoire  ,  après  avoù:  examiné 
l'origine  des  lettres  Phéniciennes  , 
Hébraïques,  &c.  effaie  d'établir 
que  le  caraftère  épiftolique^  hié- 
roglyphique &  fymbolique  des 
Égyptiens  fe  trouve  dans  les  ca- 
caâères  des  Chinois  ,  &  que  la 
nation  Chinoife  eft  une  colonie 
Égyptienne  ,  &  celle  de  toutes 
les  colonies  de  l'antiquité,  qui  a 
le  mieux  confervé  fon  origine  .& 
(es  monuipens.  »  Cette  confé- 
n  quence  ,   ajoute  M.  de  Gui- 


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CH 

»  gnes ,  me  conduit  à  une  autre. 
n.  Les  premiers  Empereurs  de  la 
n  Chine  ,  enfuite  les  deux  pre- 
»  mières  DynaAies ,  qui  ont  régné 
w  environ  douze  cens  ans ,  ne  de- 
»  viennent  plus  que  des  Dynafties 
»  Égyptiennes,  dont  la  colonie  a 
»  fait  la  tête  de  (on  hiftoire.  Dans 
»  les  cinq  premiers  Empereurs 
»  de  la  Chine,  c'eft-à-dire,  Ki 
»  fuccefleur  de  Yu  ,  itang  , 
»  Tchong ,  Siang  ,  je  lis  dans  les 
ff  anciens  caraâères  Yadoa ,  qui 
»  répond  à  Athoës  fuccefleur  de 
-t>  Menés  ;  Yabia^  qui  répond  à 
»  Diabiès  ;  Phenphi ,  qui  répond 
n  à  Pemphos  ;  Ai  m  qui  répond 
9>  à  Amachus.  On  voit  que  ces 
»  Princes  font  les  premiers  rois 
»  de  Thebes.  En  effet  les  évene- 
»  mens  concourent  à  établir  tou- 

.»  tes  ces  vues Uancienne 

»  année  Chinoife  eft  la  même 
»  que  celle  des  Égyptiens,  La 
^  grande  muraille  eft  un  ouvrage 
91  que  des  Égyptiens  feuls  ont  pu 
»  concevoir ,  &  qui  eft  Compa- 
ny rable  aux  Pyramides.  Les  An- 
»  nales  parlent  d'une  famine  de . 
»  plufieurs  années ,  c'eft  proba- 
n  blement  la  famine  de  Jofeph. 
I»  Les  grands  travaux  faits  pour 
»  arrêter  les  débordemens  ,  ont 
»  été  faits  pareillement  en  Egyp- 
te te  pour  le  débordement  du 
»  Mil  9  &  ont  été  accompagnés 
»  des  mêmes  circopftances.  Yao 
fi  parott  connoître  toute  la  Chi- 
li ne  ;  tous  fes  fujets  paroiflent 
n  policés.  Quinze  cens  ans  après , 
»  nous  voyons  encore  la  plus 
I»  grande  partie  de  la  Chine  bar* 
n  bare  ;  c'eft  une  contradiâion 
i>  manifefte  ,  qui  ne  s'explique 


CH  57 

n  qu'en  regardant  Yao  comme  un 
»  Prince  qui  regnoit  en  Égyp<e. 
»  La  colonie  Égyptienne  ne  pa- 
w  roît  être  venue  à  la  Chine  que 
n  vers  ian  un  avant  J.  C 
,n  Alors  on  voit  un  Prince  qui  la 
i>  partage  avec  un  grand  nombre 
i>  de  capitaines  pour  les  récom* 
M  penfer.  Ces  capitaines  s'éten- 
n  dent  dans  les  provinces  ,  raA 
n  femblent  les  peuples  barbares , 
»  &  les  policent  ;  on  apperçoit  k 
n  cette  époque  la  formation  d^t^i 
»  Empire,  a 

V  I  I  L 

Chrétiens  établis  a  la  Chine, 

Nous  ne  pouvons  douter  qu'a- 
vant  rétablillement  des  Miflions 
qui  fubfiftent  aujourd'hui  dans  !a 
Chine  ,  il  n'y  en  ait  eu  de  plus 
atKiennes  »  je  veux  dire  y  fous  le 
règne  des  Mogols,  qui  ont  pofledé 
cet  Empire  pendant  environ  qua- 
tre-vingt-huit ans.  Nous  en  trou- 
vons  un  témoignage  authentique 
dans  les  relations  des  voyages  faits 
ou  à  la  Chine  ou  en  Tartarie  par 
Plan  Carpin ,  Rubruquis  ,  Marco 
Paulo ,  6c  les  autres  voyageurs  des 
douzième  &  treizième  fiedes.  Au 
rapport  de  Haiton ,  Écrivain  con- 
temporain ,  Mangou-khan  avoit 
reçu  le  baptême  des  mains  d'un 
Évêque  qui  étoit  chancelier  da 
roi  d'Arménie  ;  fon  fuccefleur 
Cublai-khan  »  qui  étoil  devenu  le 
maître  abfolu  de  toute  la  Chine  , 
avoit  imité  cet  exemple  ;  6c  Mar-  \ 
co  Paulo  y  qui  vivoit  dans  le  mê- 
me tems ,  dit  avoir  vu  dans  phi- 
fieurs  villes  de  la  Chine  ,  des 
Églifes  &  un  grand  nombre  de 
Neftoriens.  Il  eft  vrai  que ,  félon 


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58        .     CH 

Rubraquîs  ,  ces  Neftoriens  mê- 
mes étoient  moins  Chrétiens  que 
Mahométans.  ou  Payens  ;  ils 
avoient  oublié  le  Syriaque  qui 
étoit  leur  langue  naturelle  ;  ils 
époufoient  plufieurs  femmes ,  & , 
à  l'exemple  des  Mufulmans,  ils 
avoient  tranfporté  au  vendredi  la 
célébration  du  dimanche.  Ils  fai- 
foient  ordonner  prêtres  leurs  en- 
fans  au  berceau ,  &  dans  certains 
tems  de  Tannée  ,  ils  alloient  offrir 
de  Fencens  aux  cavales  de  l'Em- 
pereur. Si  les  prêtres  Neftoriens 
tiennent  une  conduite  ù  oppofée 
à  la  religion  ,  que  devons- nous 
penfer  du  Chriftianifme  des  Kans 
Moeols  ?  Nous  devons  cependant 
avoir  une  idée  plus  favorable  de 
celui  de  la  Chine  >  où  les  peuples 
font  bien  éloignés  de  cette  bar- 
barie que  nous  voyons  régner 
parmi  les  Tartares  ;  mais ,  quel 
que  puifle  être  le  Chriftianifme , 
î!  eft  toujours  certain  qu'il  étoit 
établi  à  la  Chine  dans  le  douziè- 
me fiecle  ;  nous  le  trouvons  en- 
core dans  des  tems  plus  reculés  ; 
&  vers  Tan  867 ,  Mafoudy  nous 
apprend  qu*un  rebelle  Chinois 
ayant  pris  cette  année  la  ville  de 
Canfou  9  aujourd'hui  Canton  »  il 
y  périt  fix  vingt  mille  Mahomé- 
tans ,  Jui& ,  Cnrétiens  &  Parfis  , 
qui  y  demeuroîent  pour  leur  né- 
goce. Voilà  le  témoignage  éiran- 
§er  le  plus  ancien  que  nous  ayons 
elëtabliffement  des  Chrétiens  à 
la  Chine  ;  mais  ,  Tan  1625  on  en 
a  découvert  un  dans  le  pais  même 
beaucoup  plus  authentique. 

En  creufant  dans  un  village 
près  de  la  ville  de  Sigânfou  ,  ca- 
pitale de  la  province  de  Chenfy  , 


CH 

on  trouva  une  très-grande  pierre,' 
au  haut  de  laquelle  étoit  une  croix, 
&  enfuite  une  Infcription  qui  en 
occupoic  toute  l'étendue  ;  une  par- 
tie étoit  en  caraâères  Chinois ,  & 
l'autre  en  caraôères  Syriens  ma- 
jufcules ,  appelles  communément 
Stranghelo.  Le  Magiftrat  du  lieu  , 
qui  crut  devoir  la  conferver  ,  la 
nt  tranfporter  dans  un  temple  de 
Bonzes. 

L'Infcription  Syriaque  portoit 
que  ce  monument  avoit  été  élevé 
pendant  que  Anan-yefou  ,  pa- 
triarche des  Neftoriens ,  étoit  fur 
le  fiege ,  l'an  1092  des  Grecs ,  de 
J.  C.  781  ,  par  leç  mains  de 
Mar-yazed-buzid,  prêtre  &  chor- 
évêque  de  Chumdan,  fils  d'un 
autre  prêtre  venu  de  Balkh,  ville 
du  Tokhareftan.  On  voit  enfuite 
les  fignatures  d'un  grand  nombre 
de  prêtres  Neftoriens. 

Nous  apprenons ,  par  l'Infcrip- 
tîon  Chinoife ,  que  le  monument 
fervoit  à  conferver  la  mémoire  de 
rétabliflement  de  la  très-illuftre 
loi  du  Ta-^tfm  ,  &  qq'il  avoit  été 
érigé  par  Kim-teim ,  Bonze  d'une 
pagode  de  Ta-tfin.  Tout  ce  qui 
fuit  contient  les  principaux  dogmes 
de  la  religion  Chrétienne  ;  il  y  eft 
rapporté  qu'Aloho  ,  c'eft-à-dire , 
Dieu,  en  langue  Syrienne,  créa  le 
ciel  &  la  terre  ,  Se  que  Satan 
ayant  féduit  le  premier  homme , 
Dieu  envoya  le  Meftie  pour  déli- 
vrer les  hommes  du  péché  origi- 
nel ;  qu'il  naquit  d'une  vierge 
dans  le  pais  de  Ta-tfin,  &  que 
des  Perfans  vinrent  l'adorer ,  &c. 

Ce  feroit  ici  le  lieu  d'examiner 
en  quel  tems  les  Chrétiens  ont 
commencé  à  pénétrer  dans  la  Chi. 


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CH 

ne  ;  c'eft  une  queftion  corîeure  t 
mais  qu'il  n*eft  pas  aifé  d'éclaircir 
parce  que  les  Chinois  n'entrent 
pas  dans  d'ailez  grands  détails  fur 
ce  qui  regarde  les  païs  étrangers  ; 
cependant ,  après  avoir  confidéré 
attentivement  toute  l'hiftoire  de 
la  Perfe  ,  de  la  Tartane  &  de  la 
Chine  ,  depuis  le  pretnier  fiecle  , 
on  eu  porté  à  croire  que  les 
Chrétiens  n'ont  pas  été  long-tems 
fans  y  aller. 

Une  foule  d'Auteurs  ,  tant 
Grecs  que  Syriens,  paroiflent  ne 
pas  douter  que  Saint  Thomas  n'ait 
pénétré  dans  l'Inde  pour  y  prê- 
cher la  Religion  Chrétienne,  après 
lavoir  annoncée  aux  Parthes  & 
aux  peuples  de  la  Baôriane.  On 
dit  auffi  que  Saint  Barthélemi  y 
pénétra.  Joignez  à  ces  témoigna- 
ges authentiques  cette  ardeur  que 
les  premiers  Chrétiens  avoîent  de 
porter  TÉvangiie  chez  les  Infidè- 
les. On  ne  peut  fe  perfuader  qu'ils 
aient  négligé  l'Inde  ,  fi  comiue 
alors  &  Il  fréquentée ,  en  confé- 
quence  du  commerce  qui  étoit  en- 
tre fes  habitans  ,  les  Syriens ,  les 
Perfes  &  les  Arabes.  Or,  dans  ce 
même  tems ,  les  Chinois  envoient 
chercher  dans  l'Inde  les  livres 
d'une  religion  qui  fe  trouve  être 
celle  de  Fo  ,  &  en  Tintroduifant 
dans  la  Chine  ,  ils  introduîfent  le 
culte  des  idoles.  On  pourroit  être 
tenté  de  croire  que  cette  ambaf- 
fade  ,  envoyée  dans  l'Inde  par 
l'empereur  Mim-ti,  regardoit  le 
Cbriflianifme ,  qui  y  étoit  prêché 
par  les  premiers  Chrétiens  ;  que 
les  ambafladeurs  le  firent  connoi- 
tre  à  la  Chine  9  mais  qu'infenfi- 
blement,  &  faute  d'un  aiTez  grand 


CH  59 

nombre  de  Mifilionnaires ,  il  dégé* 
néra  en  un  cuite  Idolâtre  6c  (ê 
trouva  confondu  avec  la  religioa 
Indienne  ,  comme  les  Chinois  le 
confondoient  encore  dans  le  fep- 
tième  fiecle  ;  ainfi ,  ces  peuples 
auroient  eu  connoifiance  du  ChTif> 
tianifine  dès  l'an  6j  de  Jefus- 
Chrift  ;  mais  ,  il  eft  certain  qoe 
vers  l'an  337  les  Chrétiens  étoient 
en  grand  nombre  dans  cet  Elmpi- 
re,  puifqu'uD  Bonze  du  Ta-tfin» 
c'eft-à-dire  ,  fujet  de  l'Empire 
Romain,  qui  fe  faifoit  nommer 
Héou-tfe-kouam-jo  ,  à  la  tête 
d'un  grand  nombre  de  partifan»  , 
voulut  fe  faire  déclarer  Empereur, 
fe  difant  fucceffeur  de  Fo  ,  c'eû- 
à-dire,  de  Jefus-Chrifi. 

Quoi  qu'il  en  foit ,  dans  le  pre- 
mier fiecle  les  Chinois  étoient  en 
relation  avec  les  nations  occiden- 
tales ;  leurs  armées  s'étoient  avan- 
cées  jufques  vers  la  mer  Cafpien- 
ne  ;  de  forte  qu'indépendamment 
6e  la  route  des  Indes  ,  qui  étoit 
cependant  la  plus  facile ,  les  Mif- 
fionnaires  pou  voient  s^y  rendre  par 
la  Tar tarie.  A  peine  avoient-iîs 
^  quitté  les  frontières  du  pais  des 
Parthes  ,  qu'ils  dévoient  fe  trou- 
ver fur  celles  des  Chinois,  dont  la 
domination  s'étendoic  jufqu'aux 
environs  de  Kafchgar  6c  de  la 
Baâriane.  On  ne  peut  doiK  s*ima- 
giner  que  les  premiers  Chrétiens, 
difperfés  dans  la  Perfe  &  dans  les 
Indes ,  aient  négligé  de  porter  à 
la  Chine  la  connoifiance  de  l'É- 
vangile, pendant  qu'une  foule  de  * 
négocians  y  portoient  leurs  mar- 
chandifes. 

Dans  la  fuite  ,  quelques  fe^ôes 
Chrétiennes ,  qui  avoîent  puifi 


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(>o  CH 

dans  les  Indes  quantité  d'erreurs , 
ont  îluffi  paffé  à  la  Chine  ,  &ont 
contribué  à  défigurer  ce  premier 
Chriftianirme  &  à  le  faire  confon- 
dre avec  celui  des  Indiens. 

Dans  le  feptième  fiecle  ,  les 
Neftoriens  y  établirent  une  nou- 
relle  Miflîon  ;  mais  ,  ces  Chré- 
tiens tombèrent  infenfiblement , 
comme  les  premiers  ,  dans  une 
cfpèce  dldolâtrie  mêlée  de  Chrif- 
tîanifme  ,  &  cela  parce  que  le 
nombre  des  MifEonnaires  n'étoit 
pas  fufEfant ,  dans  un  fi  vafte  Em- 
pire, pour  inftruireles  peuples  & 
maintenir  dans  la  religion  ceux 
qui  l'avoient  embrafTée ,  &  parce 
que  les  Empereurs  ne  l'ont  point 
protégée  jufqu'au  point  de  détrui- 
re les  autres  religions ,  qui  préva- 
lurent fous  les  règnes  fui  vans. 
Ajoutons  à  cela' le  mépris  que  les 
Chinois  ont  toujours  eu  pour  les 
étrangers  ,  &  leur  attachement 
pour  les  anciens  ufages. 

Il  y  auroit  encore  bien  des  cho- 
fes  à  dire  fur  les  Chinois  ;  mais  , 
il  faut  donner  des  bornes  à  cet 
article  ;  &  je  crains  même  qu'on 
ne  le  trouve  déjà  trop  long,  quoi- 
que le  détail  que  je  viens  de  faire , 
ioit  d'autant  plus  intérefTant ,  qu'il 
nous  préfente  une  idée  générale 
de  la  nation  Chinoife. 

CHIO  ,  Chïus  ,  ou  Ckïos  y  {a) 
Xr  ç ,  ifle  célèbre  de  la  mer  Egée, 
fituée  fur  les  côtes  de  TAfie  mi- 
nieure ,  au  couchant  de  la  préf- 
et) Plin.  Totn.  I.  pag.  187.  Pauf.  p. 
40»  ,  404.  Strab.  p.  589.  cîr  /i»f .  Ptolein. 
L.  V.  c.  ».  Pomp.  Mel.  p.   141.    Herod. 
L.  I.  c.  18  »  14»  «   160.  x6i.  L.  VI.  c.  %. 
4^  feef.  Diod.  Sicul.  p.  i)8  ,  239.  & 
fi^,  Vell.  Paterc.  L.  I.  e.  4.  Plut.  T.  l. 
p.  "^j.  Tucyd.  p.  285.  &  /*j.  Tit.  Li?, 


c  H 

qu'îfle  de  Clazomène  &  à  l'ortent 
de  rifle  d'Eobée ,  entre  les  ides 
de  Samos  Si  de  Lesbos ,  dont  la 
première  eft  au  fud-eft,  &  la  fé- 
conde au  nord-eft.  La  longueur 
de  rifle  eft  du  nord  au  midi  ;  & 
fa  plus  grande  largeur  eft  dans  la 
partie  feptenttionale. 

I.  Neptune,  félon  Ion,  Poëte 
tragique  &  Hiflorien  ,  cité  par 
Paufanias  ,  vint  dans  cette  ifle 
encore  déferte.  Il  y  trouva  une 
nymphe,  dont  il  devint  amou-^ 
reux.  Il  en  eut  un  fils,  &  le  jour* 
que  la  nymphe  le  mit  au  monde  , 
il  tomba  une  fi  grande  quantité 
de  neige  ,  que  le  nom  lui  en  de- 
meura ;  il  fut  appelle  Chius ,  par- 
ce que  Chion  en  Grec  fignifie  de 
la  neige.  Neptune  eut  encore 
d'une  autre  nymphe  deux  fils. 
Angélus  &  Mêlas  ;  ce  furent- là 
les  premiers  habitans  de  Tifle.  En- 
fuite,  Œnopion  y  vint  de  Crète 
avec  fes  -fils  ,  Talus  ,  Évanthe  , 
Mêlas  ,  Salagus  &  Athamas  ;  il  y 
régna ,  &  fes  enfans  après  lui.  De 
fon  tems  les  Ca riens  &  les  Aban- 
tes  de  rifle  d'Eubée  s'établirent 
aufl[i  à  Chio.  Aux  enfans  d'CEno- 
pion  fuccéda  Amphiâus  ;  c'étoit 
un  étranger  d'Heftiée  en  Eubée , 
qui ,  fur  la  foi  d'un  oracle  de  Del- 
phes étoir  venu  chercher  fortune 
à  Chio.  He£tor  ,  un  de  (e$  âeC- 
cendans  étant  parvenu  à  la  cou- 
ronne ,  fit  la  guerre  aux  Abantes 
&  aux  Cariens  établis  dans  l'ifte. 

L.  XXXVII.  c.  »7.  L.  XXXVIir.  c.  59, 
érfe^.  RolL  Hift.  Ane.  T.  II.  p.  5.  T. 
V.  pag.  491  ,  499.  Hift.  Rom.  Tom.  V. 
p.  654.  «é*  fuiv.  Méon.  de  TAcad.  des 
Infcripc.  &  Beil.  Letc.  T.  IX.  pag.  \tç>\ 
150.  T.  XII.  pag,  lia.  érfriv.  T.  XIV, 
P-307. 


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CH 

Une  partie  fut  taillée  en  pièces , 
fautre  fe  rendit  à  difcrétion  &  fut 
obligée  d'évacuer  le  païs.  Hef^or, 
après  avoir  pacifié  Tifle  ,  fe  fou- 
?int  qu'il  devoit  célébrer  une  fête 
&  un  facrifice  dans  Taffemblée 
générale  des  Ioniens  ;  il  s'en  ac- 
quitta; &  ce  fut  dans  cette  afTem- 
hlée  que  pour  honorer  fa  valeur  , 
on  lui  décerna  un  trépied.  Je  fçais, 
dit  Paufanias ,  que  le  poëte  Ion 
rapporte  tous  ces  f^jts  ;  mais ,  il  ne 
nous  dit  point  pourquoi  les  habi- 
tans  de  6hiô  furent  compris  dans 
le  dénombrement  des  Ioniens. 

n  Les  Miléfiens ,  attaqués  par 
Alyattes  ,  prince  Lydien ,  ne  re- 
çurent de  fecours  d'aucun  Ionien , 
à  l'exception  de  ceux  de  Chio  , 
qui  volèrent  à  leur  défenfe ,  com- 
me pour  leur  rendre  la  pareille  de 
les  avoir  autrefois  aflîftés ,  lorf- 
que  ceux  d'Erythrée  leur  faifoient 
la  guerre.   • 

Paftyas  ,  après  s'être  foulevé 
contre  Cyrus  ,  roi  de  Perfe ,  fut 
envoyé  à  Chio  fur  un  vaiffeau  ; 
mais  ,  les  habitans  ,  l'ayant  arra- 
ché du  temple  de  Minerve  ,  où  il 
penfoit  avoir  trouvé  un  afyle ,  le 
rendirent  aux  Perfes  »  à  condition 
qu'on  leur  donneroit  Atarnée  , 
qui  étoit  un  lieuvdans  la  Myfie  à 
l'oppofite  de  Lesbos.  Ainfi ,  les 
Perfes  firent  emprifonner  Paftyas 
pour  le  préfenier  à  Cyrus  à  la 
première  occafion  ;  &  depuis  il  fe 
pafiTa  beaucoup  de  tems  fans  que 
pas  un  des  habitans  de  Chio  fît 
des  offrandes  aux  dieux  ,  de  ce 
qui  venoit  d' Atarnée ,  parce  qu'on 
ne  vouloit  point  recevoir  dans  les 
fatrifices  ce  qui  venoic  de  cette 
terre. 


CH  6i 

Dans  la  fuite ,  Hiftiée ,  tyran  de 
Milet ,  ayant  pris  les  armes  contre 
Darius  ,  vint  dans  l'ifle  de  Chio. 
Ceux  de  Chio  fe  faifirent  de  lui 
&  le  mirent  en  prifon ,  s'imagi- 
nant  que  c'étoit  un  efpion  que 
Darius  avoit  envoyé  dans  leur 
iile.  Mais  y  quand  ils  eurent  ap- 
pris la  vérité  de  la  chofe ,  &  qu'il 
étoit  ennemi  de  Darius ,  ils  le  mi- 
rent en  liberté.  Cependant ,  Pac- 
tyas  étant  venu  à  bout  d'engager 
tous  les  Ioniens  dtns  fa  rébellion  , 
les  habitans  de  Chio  fournirent 
pour  leur  quote-part  cent  vaif- 
feaux.  Mais,  la  plupart  des  Io« 
niens  ne  montrèrent  pas  beaucoup 
de  courage  dans  la  bataille  ,  qui  fe 
donna  devant  l'ifle  de  Lade.  Entre 
ceux  qui  tinrent  ferme ,  &  qui 
combattirent  en  hommes  de  cœur, 
il  n'y  en  eut  point  de  plus  mal- 
traités que  ceux  de  Chio ,  parce 
qu'ils  ne  voulurent  point  fe  mon- 
trer perfidei ,  &  qu'ils  ne  s'épar- 
gnèrent point  dans  cette  bataille. 
Ils  avoient  comme  nous  avons 
déjà  dit  ,  amené  cent  vaiffeaux  à 
cette  guerre ,  fur  chacun  defqiiels 
il  y  avoit  entr'autres  foldats ,  qua- 
rante citoyens  d'élite  ;  6c  quoi- 
qu'ils euffent  reconnu  que  la  plu- 
part de  leurs  alliés  étoient  des  traî- 
tres ,  &  qu'ils  abandonnoient  leur 
parti ,  toutefois  ils  penferent  qu'ils 
teroient  un«  aâion  indigne  d'eux, 
s'ils  imitoient  cette  lâcheté.  Ainfi , 
avec  le  petit  nombre  qui  leur  étoit 
refté  ,  ils  fe  jetterent  avec  furie  au 
travers  des  ennemis  ,  6c  com- 
battirent Cl  vaillamment  qu'ils  fe 
rendirent  maîtres  de  plufieurs  vaif- 
feaux ennemis  ,  6c  après  avoir 
perdu  quelques-uns  des  leurs,  ils 


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6z  CH 

fe  retirèrent  avec  le  refte  dans  leur 
païs.  Comme  ils  teiioient ,  en  fe 
retirant  la  route  de  Mycale ,  ils 
furent  fuivis  par  Tennemi  ;  mais  , 
ks  vaideaux  qui  avoient  été  rom- 
pus y  ne  pouvant  aller  afTez  vite  ^ 
on  acheva  de  les  rompre  ;  & 
ceux  qui  écoient  dedans  s'en  re- 
tournèrent par  terre.  Étant  arri- 
vés de  nuit  dans  le  païs  d'Éphe- 
ie  9  ils  prirent  le  chemin  de  la 
ville  y  où  les  femmes  célébroient 
alors  la  fête  de  Cérès.  Les  Éphé- 
iiens  ,  qui  les  virent  entrer  armés 
dans  leur  païs ,  &  qui  ne  fça voient 
«ién  de  leur  infortune  >  les  prirent 
pour  des  raviHeurs  qui  venoient 
enlever  leurs  femmes  ;  de  forte 
qu'ils  coururent  tous  enfemble  au- 
devam  d*eux,&  défirent  ces  mal- 
heureux  ^  qui  périrent  par  cette 
aventure  i  ce  qui  arriva  vers  l'an 
497  avant  J.  C. 

Quelque» tems  après,  Hiftiée 
fit  voile  de  nouveau  à  Chlo  ac- 
compagné des  Lesbiens  ;  &  parce 
qu'on  ne  lui  vouloir  point  donner 
de  fecours  «  il  combattit  contre  les 
habicans  de  cette  iile  ,  en  un  lieu 
appelle  le  Pais-bas ,  &  en  tailla  en 
pièces  un  grand  nombre.  Peu  de 
tems  après  ,  il  fe  rendit  maître 
des  autres  que  la  guerre  avoit  fa- 
tigués &  aSbiblis.  Mais  »  comme 
les  grands  malheurs ,  qui  doivent 
défoler  les  villes  &  les  nations , 
foiu  ordinairement  annoncés  par 
quelques  préfages ,  dit  Hérodote  , 
il  en  arriva  d^étranees  aux  habi- 
tans  de  Chio  avant  leur  calamité. 
Le  premier  fut  >  que  de  cent 
jeunes  hommes  qu'ils  avoient  en- 
voyés à  Delphes  »  il  n*en  revint 
que  deux  ^  âdque  tous  Us  autres 


CH 

moururent  de  la  pefle.  Et  un  peu 
avant  la  bataille  navale  le  plancher 
d'une  maifon  tomba  fur  des  en- 
fans  qui  apprenoîent  à  lire  ;  &  de 
fix-vingts  qu'il  y  en  avoit ,  il  en 
demeura  feulement  un.  Cétoît 
fans  doute  quelque  dieu  9  ajoute 
Hérodote  ,  qui  leur  donnoit  ces 
préfages  de  leurs  malheurs.  £a 
effet  ,  continue- 1- il  «  on  donna 
bientôt  cette  bataille  navale  qui 
entraîna  après*  elle  la  deflruâion 
de  leur  ville.  Hi'fUée  »  étant  donc 
enfuite  arrivé  avec  les  Lesbiens  , 
n*eut  pas  beaucoup  de  peine  à 
fubjuguer  les  peuples  de  Chio, 
qui  éroienc  déjà  abattus  par  les 
calamités  précédentes. 

Vers  Tan  409  avant  J.'C. ,  on 
avoit  banni  de  Chio  qudîjues  ha- 
bitans.  Ces  bannis  ayant  donné 
beaucoup  d'argent  à  Cratéûppi- 
das ,  commandant  de  la  flotte  des 
Spartiates  ,  il  les  remena  dans 
leur  ifle^  oii  il  fe  rendit  maître 
de  la  cuadelle.  Les  bannis  ren- 
trés par  ce  moyen  >  chaflerent  à 
leur  tour  environ  fix  cens  de  ceux 
qui  les  avoient  mis  hors  de  leur 
patrie.  Ces  derniers  fe  réfugièrent 
fur  le  continent  qui  étoit  vis-à- 
vis ,  oîi  ils  fe  faifirent  d*Atarnée  , 
d'où  ils  alloient  allez  fouvent  faire 
des  infultes  à  leurs  ennemis  »  de- 
meurés poflefleurs  de  Chio. 

Depuis,  c'eft-à-dire  ,  l'an  358 
avant  J.  C.  »  les  Athéniens  ayant 
appris  que  les  habûans  de  Chio, 
de  Rhodes  &  de  Cos  ,  auili-bien 
que  les  Byzaiitins  ,  s'étoient  dé- 
tachés de  leur  alliance ,  s'engagè- 
rent dans  cette  guerre  qu'on  ap- 
pella  fociale  ,  &  qui  dura  trois 
années.  Ayant  nommé* pour  com-. 


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CH 

csandans  Charès  6i  Chabrîas  ,  ils 
les  firent  partir  à  la  tête  d'un  ar- 
mement convenable.  Ceux-ci  y 
abordant  en  l'ifle  de  Chio  ,  y 
trouvèrent  les  fecours  que  les  By- 
zantins ,  les  infulaires  de  Rhodes 
&  de  Cos ,  &  Maufole  même  fou- 
verain  de  la  Carie ,  a  voient  en- 
voyés aux  habitans  de  cette  pre- 
mière ifle.  Les  Athéniens  diftri- 
buerent  leurs  troupes  de  telle  forte 
qu'ils  afBégeoient  la  ville  par  mer 
&  par  terre.  Charès  ,  chef  des 
troupes  de  terre  ,  s'avança  juf- 
qu'au  pied  des  murailles  (k  défit 
les  habitans  qui  étoient  fortis  en 
grand  nombre  pour  le  repouffer. 
Chabrias  »  qui  avoit  pénétré  juf- 
qces  dans  le  port ,  y  donna  un 
combat  naval  »  dont  les  commen- 
cemens  furent  très-vifs  de  fa  part; 
mais  y  fon  vaiffeau  ayant  été  bri- 
fé ,  la  fortune  du  combat  changea 
totalement.  Les  vaifTeaux  qui  Tac- 
compagnoient  pourvurent  à  leur 
iûreté  par  la  retraite  ;  mais  lui- 
même  préférant  une  mort  glo- 
lieufe  à  l'aveu  de  fa  défaire^  fe 
dé&ndoit  encore  fur  les  dernières 
planches  qui  étoient  en  état  de  le 
foûtenir  ,  6c  il  mourut  enfin  percé 
de  traits, 

Longtems après ,  l'ifle  de Cnio 
éprouva  ,  de  la  part  de  Mithrida- 
te ,  roi  de  Pont  »  les  plus  horribles 
traitemens.  Ce  Prince  fe  fouve- 
noit  toujours  d'un  vaiffeau  de 
Chio ,  qui ,  au  fiege  de  Rhodes  , 
avoit  heurté  violemment  le  fien. 
De  plus,  il  paroit  que  dans  cette 
ifle  il  y  avoit  un  grand  nombre 
de  partifans  des  Romains.  Il  con- 
fifca  d*abord  les  biens  de  plufieurs, 
qui  s'étoiem  enfuis  dans  le  camp 


CH  ij 

de  Sylla.  Puis  ,  il  envoya  des 
commiflaires  pour  faire  des  re- 
cherches contre  ceux  qui  pou- 
voient  être  encore  foupçonnés  de 
favorifer  le  parti  de  Rome.  Enfin, 
il  s'en  prit  à  toute  la  ville;  ôL 
Zénobius ,  s'étant  trànfporté  dans 
l'ifle  par  fon  ordre  avec  des  trou- 
pes comme  pour  paffer  en  Grèce, 
le  rendit  maître  pendant  la  nuit , 
&  des  murs ,  &  de  tous  les  pof- 
tes  importans.  Le  lendemain ,  il 
affembia  les  habitans  »  leur  fie 
connoitre  les  foupçons  que  le  Roi 
avoit  contr'eux  ,  &  ajouta  que 
pour  s'en  purger  ,  il  falioit  qu'ils, 
livraffent  leurs  armes ,  &  don- 
naffent  en  otages  les  enfans  des 
principaux  citoyens.  Ils  obéirent 
forcément  ,  croyant  au  moins, 
comme  on  les  en  flattoit  ,  que 
Mithridace  s'appaiferoit  par-la  , 
&  ne  demanderoit.  rien  davanta- 
ge ;  mais ,  une  lettre  de  ce  Prince 
leur  fit  bien  voir  qu*ils  fe  trom- 
poient  dans  leur  efpérance.  Il  leur 
reprochoit  leur  attachement  aux 
Romains.  Il  faifoit  regarder  l'ac- 
cident du  vaiffeau  comme  un  dei^ 
fein  formé  &  prefqu'exécuté  con- 
tre fa  perfonne.  En  conféquehce 
il  leur  dédaroit  que  fon  âonfeil 
les  avoit  jugés  dignes  de  mort; 
mais  qu'il  vouloit  Jbien  fe  conten- 
ter d'une  amende  de  deux  mille 
talens.  Ceux  de  Chio  allarmés 
imploroient  la  clémence  du  Roi , 
&  ils  euffent  fouhaité  lui  envoyer 
une  ambaffade.  Mais  ,  Zénobius 
leur  en  ayant  refufé  la  permiflS^jn , 
ib  fe  virent  contraints  de  prendre 
tous  les  ornemens  de  leurs  fem- 
mes  »  &  de  dépouiller  même  leurs 
temples  >  pour  laire  la  fomme  im^ 


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6^  C  H 

poiîée.  Encore  Zénobius ,  par  une 
nouvelle  perfidie  ,  prétendit-il 
qu*il  manquoit  quelque  chofe  au 
poids  ;  &  fous  ce  prétexte  il  les 
convoqua  de  nouveau  au  théâtre , 
qui  étoit  le  lieu  d*aflemblée  dans 
les  villes  Grecques.  Là ,  il  les  en- 
vironna de  gens  armés ,  &  les  fit 
embarquer  lur  des  vaifleaux  pour 
les  tranfporter  en  Colchide ,  met- 
tant à  part  les  femmes  &  les  en- 
fans  ,  qui  furent  ainfi  expofés  aux 
infuites  &  aux  violences  des  Bar- 
bares y  entre  les  mains  defquels 
on  les  livroit.  Les  malheureux 
habitans  de  Chio  trouvèrent  néan- 
hioins  quelque  .  foulagement  à 
leurs  difgraces  dans  la  compaffion 
de  ceux  d*HéracIée,  leurs  alliés 
&L  leurs  amis.  Car  ,  lorfque  les 
vaifleaux  qui  les  emmenoient  , 
vinrent  à  pafier  devant  cette  ville , 
les  Héracléens  foriirent  tout  d'un 
coup  fur  eux  ,  &  fe  rendirent 
maîtres  des  captifs ,  qu'ils  recueil- 
lirent avec  grand  foin ,  &  gardè- 
rent fidèlement  jufqu'à  ce  que 
Mithridate  ayant  abandonné  TA- 
fie  par  la  paix  avec  Sylla ,  la  li- 
berté leur  fut  rendue  de  retourner 
dans  leur  patrie. 

L*ifle  de  Chio  appartint  fuccef- 
fivement  aux  ^Athéniens  ,  aux 
Macédoniens  ,  aux  Romains ,  en- 
fin aux  Empereurs  Grecs. 

IIL  Les  vins  de  Chio  étolent 
fort  célèbres  ;  ils  Temportoient 
fur  ceux  de  tous  les  autres  païs  de 
la  Grèce,  &  effaçoient  leur  ré- 
putation ;  jufques-Ià  qu'on  a  cru 
.  que  c'étoit  les  habitans  de  cette 
iîle  qui  avoient  planté  la  vigne, 
&  qui  en  avoient  enfeigné  Tufage 
aux  autres  peuples.  Pour  adoucir 


CH 

la  rudefle  des  vins  de  Falerne  ,  & 
dompter  leur  auftérité  ,  on  les 
mêloit  avec  les  vins  de  Chio  ;  & 
par  ce  mélange ,  on  rendoit  ceux 
de  Falerne  excellens. 

Pline  dit  qu'Éphore  appelle 
rifle  de  Chio ,  Éthalie  par  fon  an- 
cien nom.  Etienne  de  Byzance 
dit  aufli  qu'on  peut  ufer  du  nom 
d*Éthalite  pour  fignifier  un  habi- 
tant de  Chio;  car,  Tifle  de  Chio, 
a  joute- 1- il  ,  s'appelloit  autrefois 
ainfi.  Elle  a  été  nommée  encore 
Macris  &  Pityufe.  Le  premier  de 
ces  noms  marque  qu'elle  eft  lon- 
gue ,  &  le  fécond  qu'elle  étoit 
Couverte  de  pins.  Il  eft  furpre- 
nant  que  Tite-Live  fe  foit  trompé 
jufqu'au  point  de  croire  qu'Éth^- 
lie  ,  Chio  ÔC  Macris  étoient  trois 
ifles  différentes.  Pline  ajoute  :  il 
y  a  la  montagne  de  Pellen^  ;  on 
vante  le  marbre  de  Chio  ;  elle  a 
cent  vingt- cinq  mille  pas  de  cir- 
cuit félon  le  témoignage  des  An- 
ciens ;  Ifidore  y  en  met  neuf  de 
plus.  Strabon  diminue  ce  circuit 
en  le  réduifant  à  neuf  cens  fiades, 
qui  ne  font  qu'environ  cent  douze 
railles ,  &  appelle  Pélinée  la  mon- 
tagne que  Pline  nomme  Pellene; 
il  fait  aufli  mention  des  carrières 
de  marbre.  Cette  ifle  étoit  libre  . 
félon  Pline. 

Il  y  eut  à  Chio  un  évêque  fuf- 
fragant  de  Rhodes  ,  qui  fut  depuis 
Métropolitain.  Ce  lieu  eft  devenu 
fameux  par  le  martyre  de  Saint 
Ifidore ,  qui  fouffrit  fous  Dèce. 
Une  partie  de  fes  reliques  fut  por- 
tée de-là  à  Conftantinople  ,  au 
milieu  du  cinquième  fiecle  ,  deux 
cens  ans  après  fa  mort  ;  l'autre 
partie  fut  enlevée  au  douzième 
fiecle 


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CH 

fiecfe  par  les  Véniciens  ,  qui  l'ap- 
portèrent dans  leur  ville ,  &  la 
mirent  dans  une  chapelle  de  Té- 
giife  de  Saint  Marc. 

Aujourd'hui,  la  .ville  de  Chio 
e(l  habitée  par  de^  Turcs  &  des 
Ju'ik  ;  &  les  FauxJbourgs  ,  par  les 
Chrétiens ,  Latins  &i  Grecs ,  qui 
ont  chacun  leur  évêque  (k  plu- 
fleurs  maifons  religieufes.Les  feoi- 
mes  y  font  très-belles  &  tiès- 
curieufes  de  leur  parure.  On  y 
recueille  dexcellens  vins,  &L  les 
perdrix  y  font  auffi  privées  que 
les- poules  le  font  ailleurs.  A  qua- 
tre milles  de  la  ville  ,  prefque  fur 
le  bord  de  la  mer ,  on  voie  un 
rocher  où  font  taillés  des  fieges 
au  tour  d'une  chaire  pratiquée  dans 
le  même  roc  ,  &  plus  élevée  que 
les  fieges  ;  ce  que  les  habitans  du 
païs  appellent  l'école  d*Homèfe , 
parce  que,  di!ent-ib  ^  c'étoit-là 
qu'il  enfeignoit  Tes  difciples.  A 
trois  lieues  de  Chio  ,  fur  une 
montagne  qui  e^  au  midi ,  il  croit 
une  quantité  de  lentifques ,  qui 
font  de  petits  arbriiTeaux  ,  d'oU 
coule  le  roaflic  ;  ils  ont  la  feuille 
approchante  de  celle  du  myrte , 
&  pouffent  des  branches  fi  lon- 
gues, qu'elles  vont  jufqu'à  terre 
en  ferpemant;  mais,  ce  qui  eft 
furprenant  c'eft  qu'aufli-tôt  qu'el- 
les font  en  bas ,  elles  fe  relèvent 
peu  à  peu  d'elles-mêmes.  On 
fend  les  branches  dans  les  mois  de 
Mai  &  de  Juin  ,  &  il  en  fort  une 
efpèce  de  gomme ,  que  nous  ap- 
pelions maOic  ,  Ql  que  les  Turcs 
nomment  fages.Le  grand  Seigneur 
eavoie  tous  les  ans  dans  cette 


C  H  ^5 

ifle^  an  certain  nombre  de  bof- 
tangis  ou  jardiniers,  qui  enlèvent 
tous  les  maftics  pour  la  proviGon 
du  Serrail ,  &  qui  en  vendent ,  lorf> 
qu'il  y  en  a  extraordinairement* 
Toutes  les  femmes  du  Serrail  en 
mâchent  inceffamment  pour  fe 
rendre  les  dents  blanches  ,  Ôc  pour 
avoir  l'haleine  agréable. 

L'ifle  de  Chio  conferve  aujour- 
d'hui fon  nom  ,  avec  un  léger 
changement  de  lettres.  On  dit 
Scio. 

CHIO ,  Chiuj ,  Xhç,  (a)  vUle 
de  rifle  de  Chio  ,  iituée  vers  le 
milieu  de  la  côte  orientale  de  cette 
ifle.  Il  eft  fait  mention  de  la  ville 
de  Chio  dans  la  plupart  des  an- 
ciens Auteurs  ;  mais,  ce  qui  con- 
cerne cette  ville  eft  confondu 
avec  l'hiftoire  de  Tifle  de  fon  nom , 
qu'on  peut  confulter. 

Etienne  de  Byzance  met  le 
mont  Pellinée  dans  la  Carie ,  6c 
au  pied  de  cette  moiitagne  une 
ville  nommée  Chio.  Il  y  a ,  dit- il , 
une  autre  Chio  dans  la  Carie  au 
oied  du  mont  Pellinée.  Denys  le 
rériégeteavoitditque  Chio  eil  au 
pied  de  la  très- haute  montagne 
de  Pellinée,)  mais  fans  faire  men- 
tion de  la  Carie.  Saumaife  a  rai- 
fon  de  dire  qu'Etienne  de  Byzan- 
ce revoit ,  &  il  devine  affez  mal , 
lorfquetherchant  l'origine  de  cette 
méprife  ,  il  remarque  que  les  Ca- 
riens  avoient  poilédé  Tifle  de 
Chio  ,  avant  que  les  Ionien^,  qui 
les  en  chaflerent,  s'en  emparaf- 
fent  ;  mais  «  Etienne  de  Byzance 
lui-même  dit  immédiatement  au- 
paravant ,  que  l'iile  de  Chio  eft 


(s)  Ptolem.  L.  V.  c.  t.  Hciod.  L.  I.  c.  14s.  L.  II.  t.  178. 

Tom.  XI. 


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66  CH 

«ne  ifle  très-Éameofe  dés  Ioniens, 
Si  qu'elle  a  une  ville  du  même 
nom  ,  en  quoi  il  parle  juile  ;  l'au- 
tre Chio  de  Carie  ed  imaginaire. 

Le  même  Etienne  de  Byzance 
ttiet  une  autre  ville  du  nom  de 
Chio  dans  TEubée. 

CHIOM ARE ,  Chiomara ,  {a) 
femme  d'un  haut  rang ,  d'une  rare 
beauté  ^  &  plus  recommandable 
encore  par  fa  vertu.  Elle  avoir 
époufé  Ortiagon  ,  Tun  des  chefs 
des  Gaulois  ou  Galaces.  Ayant 
été  prifc;  vers  Han  de  Rome  563 
avec  plu(ieurs  autres  à  la  déroute 
du  mont  Olympe  ,  elle  étoit  gar- 
dée par  un  Centurion ,  auffi  paf- 
fionné  pour  l'argent  que  pour  les 
femmes.  D'abord  il  tâcha  de  l'en- 
gager à  confentir  à  fes  infâmes 
défirs  ;  mais ,  ne  pouvant  vaincre 
fa  rédftance  &  fa  fermeré  ,  il  crut 
pouvoir  employer  la  violence  fur 
une  femme  que  fon  malheur  avoir 
réduite  à  Tefclavage.  Enfuite,  pour 
lui  faire  oublier  cet  outrage  »  il  lui 
offrit  de  la  renvoyer  en  liberté , 
non  cependant  fans  rançon.  Il 
convint  avec  elle  d'une  certaine 
fomme  ;  &  pour  cacher  ce  com- 
plot aux  autres  Romains ,  il  lui 
permit  d'envoyer  à  fes  parens  tel 
des  prifonniers  qu'elle  voudroic 
choifir ,  &  marqua  près  du  fleuve , 
le  lieu  oii  fe  feroit  l'échange  de  la 
Dame  &  de  l'or.  Par  hazard  elle 
Àvoit  un  de  fes  efclaves  parmi  les 
prifpiniers.  Ce  fut  lui  fur  qui  elle 
jettaTes  yeux  ;  &  aufTi-tôt  le  Cen- 
turion le  coiiduifit  hors  des  corps- 
de- gardes  à  la  faveur  des  téne- 


CH 

bres.  Dès  la  nuit  fuivante ,  deux 
parens  ou  amis  de  la  PrincefTe  fe 
trouvèrent  au  rendez- vous,  où  le 
Centurion  amena  aufli  fa  prifon- 
nière.  Quand  ils  lui  eurent  pré- 
fente  le  talent  attique  qu'ils  avoient 
apporté,  c'étoit  la  fomme  dont 
on  étoit  convenu  ,  la  Dame  dit 
en  fa  langue  à  ceui  qui  étoient 
venus  pour  la  recevoir  ,«de  tirer 
leurs  épé^  «  &  de  tuer  le  Centu- 
rion qui  s'amuf()it  à  pefer  cet  or. 
Alors  cette  femme  ,  charmée 
d'avoir  lavé  par  fon  courage  l'in- 
jure faiie  à  fa  chafleté  ,  prit  la 
tête  de  cet  officier  qu'elle-même 
avoit  coupée  ^  ôc^la  cachant  fous 
fa  robe ,  elle  alla  retrouver  fon 
mari  Ortiagon  qui  s'en  étoit  re- 
tourné chez  lui  après  la  défaite 
àes  fiens  au  mont  Olympe.  Avant 
que  de  l'embrafFer  ,  elle  jetta  à  k% 
pieds  la  tête  du  Centurion.  Étran- 

§ement  furpris  d'un  tel  fpeâacle, 
lui  demanda  de  qui  étoit  cette 
tête,  ôc  ce  qui  l'avoit  portée  à 
faire  une  aâion  fi  peu  ordinaire 
à  fon  fexe.  Le  vifage  couvert 
d'une  fubite  rougeur,  6(  enâam« 
mée  en  même  tems  d'une  fiere 
indignation  ,  elle  avoua  l'outrage 
qu'elle  avoit  reçu ,  &  la  vengean- 
ce qu'elle  en  avoit  tirée.  Pendant 
tout  le  refhî  de  fa  vie  ,  elle  con* 
ferva  toujours  le  même  attache- 
ment pour  la  pureté  de  vie  &  de 
moeurs  qui  fait  la  principale  gloire 
du  fexe,  &  fofitint  merveilleufe- 
ment  l'honneur  d'une  aéèion  fi 
mâle  &  fi  généreufe. 

Plutarque  raconte  ce  fait  dans 


(«)  Tit.  Ut.  L.  XXXVm.  c«  14.  RoU.  Hift.  Rom,  Tom.  IV,  pa;.  i6u 


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CH 

le  traité  des  vertus  &  des  belles 
aâions  des  Daines ,  &  c*eft  lui  qui 
noDs  a  appris  le  nom  de  celle-ci , 
bien  digne  d'être  tranfmis  à  la 
poftérité. 

CHION,  Chion,  {a)  l'un  des 
principaux  chefs  de  la  conjuration 
formée  contre  Cléarque  ,  tyran 
d'Héraclée.  Après  avoir  tué  le 
Tyran,  il  fut  lui-même  tué  par 
fes  gardes  ,  les  autres  conjurés  ne 
lui  ayant  pas  donné  un  afTez 
prompt  fecours  pour  le  fauver. 

CHION,  Chion,  (^)  nom 
d'une  cotirtifanne,  dont  il  eAfait 
mention  dans  Juvénal. 

CHION  ,  Chion ,  (c)  terme 
qui  fe  lit  datw  le  texte  Hébreu 
d'Amos.  Le  paiïage  efl  cité  dans 
les  Aftes  des  Apôtres,  où  l'on 
lie  ainfi ,  fuivant  la  Vulgate.  Vous 
tfve{  porté  U  tabernacle  de  Mo^ 
loch  ,  &  l'étoile  de  votre  dieu 
Rempkan  ,  ^ui  font  des  figures  j 
^ue  vous  ave:(^  faites  pour  les  ado- 
fer.  Le  texte  Hébreu  d'Amos  dit  : 
Vous  avei  porté  les  tentes  de  votre 
Roi  &  le  piédeftal  [  le  Chion  ] 
de  vos  figures  ,  rétoile  de  vos 
dieux  que  vous  vous  êtes  faits* 
Il  y  a  afTez  d'apparence  que  les 
Septante  ont  lu  Rephamou  Re- 
van  I  au  lieu  de  Chion  ,  ou  Che*- 
vtn,  &  qu'ils  ont  pris  le  piédef- 
tal pour  un  dieu.  D'autres  croyent 
voir  ici  trois  fauiTes  ^  divinités  , 
Moloch  ,  Chion  &  Remphan. 
D'autres  veulent  que  ces  trois 
noms  ne  marquent  qu'un  même 
dieu ,  &  que  ce  dieu  étoic  Satur* 

(4)  Juft.  L.  XVI.  c.  ç. 

(*)  Jiiven.  Satyr.  3.  v.  13(5. 

(0  Amos  c.  ç.  V.  %6,  Aftu,  Apoft. 


CH  6r 

ne  &  fa  planète.  Saumaife  éc 
Kircher  avancent  que  Kiioneft  Sa- 
turne ,  &  que  fon  étoile  s'appelle 
Keiran  chez  les  Perfes  &  les  Ara* 
bes ,  6c  que  Remphan  ou  Rephan 
fignifioit  la  mêihe  chofe  chez  les 
Égyptiens.  On  ajoute  que  les 
Septante  qui  faifoient  leur  traduc* 
tion  en  Égypte,ont  changé  le  terme 
de  Chion  en  celui  de  Remphan, 
parce  qu'ils  avoient  l'un  &  l'autre 
la  même  fignification. 

D'autres  veulent  encore  qu'Her* 
cule  fût  repréfenté  par  Chion  , 
parce  que  ,  difent-ils ,  ce  dieu  ea 
Egyptien  s'appelloit  Chon  ;  &  ils 
ajoutent  que  c'étoit  le  fymbole 
du  Soleil  f  parce  que  foit  que  ce 
nom  vienne  de  l'Hébreu  heir  , 
col ,  c'eft- à-dire  ,  il  éclaire  tout  ; 
foit  qu'il  vienne  du  Grec  lUpoc 
)t^/  4,  c'eft- à-dire  ,  la  gloire  dç 
l'air ,  il  eft  clair  qu'il  marque  le 
Soleil  ;  car  ,  d'où  l'air  reçoit- il  fa 
lumière ,  fi  ce  n  eft  du  Soleil  ? 

M.  Bafnage  «  dans  fon  livre  în^ 
titulé  Antiquités  Judaïques  9  après 
avoir  beaucoup  difcouru  fur  Chion 
ou  Remphan,  concliit  que  Mor 
loch  étoit  le  Soleil  ^  &  Chion  ou 
Remphan  la  Lune. 

CHIONE,  Chione.Xtor^,  (d) 
fille  de  Dédalion  ,  étoit  d'une  ex- 
cellente beauté.  Dès  1  âge  de  qua» 
torze  ans  ,  elle  fut  aimée  de  tout 
le  monde  ,  &  recherchée  de  tous 
ceux  dont  la  condition  pouvolc 
leur  donner  quelque  eipérance.  Un 
jour ,  comme  Apollon  &  Mercui- 
re  revenoient ,  l'un  de  Delphes  ^ 

[d)  Ovid.  Metam.  L.  Xî.  c.  9.  Myth. 
par  M.  l*Abb.  Ban.  Tom.  VIII.  pag.45, 
47.  Métn.  de  TAcad.  des  Infc  U  B«lÛ 
Lett.  Tom.  X.  pag.  «oi. 


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68  C  H 

l'autre  du  mont  Cyllène ,  îls  la 
virent,  Ôc^tou^  deux  en  même  tems 
commencèrent  à  Faimer.  Apollon 
différa  jufqu'à  la  nuit  pour  fatis* 
faire  fa  paîlîon  ;  mais ,  Mercure 
ne  put  difFérer  plus  long-tems  ;  il 
rendort  &  fe  fatisfait  ;  &  dès  qu'il 
fut  nuit ,  Apollon  déguifé  en  vieil- 
le,  vint  à  Ton  tour  (e  fatisfaire. 
Chione  conçut  de  Tun  &  de  l'au- 
tre ,  &  neuf  mois  après  j  elle  ac^ 
coucha  de  deux  fils.  Elle  eut  de 
Mercure  un  enfant  ingénieux 
qu'on  appella  Autolycus ,  &  qui 
montra  par  Ton  adreHe  dans  toute 
forte  de  larcins ,  qu'il  ne  dégéné^ 
roit  pas  de  Ton  père.  Mais ,  elle 
eut  du  dieu  du  jour  l'excellent 
Philammon ,  qui  chantoit  parfii- 
tôment ,  6c  jouoit^e  même  de  la 
lyre ,  6c  qui  fit  voir  par  (es  qua- 
lités de  quel  fang  il  étoit  forti. 

Cependant ,  il  ne  fervit  de  rien 
à  Chione  d'être  mère  de  deux  en- 
fans  fi  renommés ,  d'avoir  eu  des 
dieux  pour  amans  ,  d'être  fille 
d'un  père  illuftre  ,  &  d'avoir  pour 
Yon  ayeul  le  plus  poiflant  de 
tous  les  dieux.  Au  contraire  tous 
ces  avantages  furent  la  caufe  de 
fa  perte.  En  étant  devenue  orgueil- 
leuse >  elle  eut  la  hardiefle  de  pré- 
férer fa  beauté  à  la  beauté  de 
Diane  ,  &  même  de  la  méprifer. 
■Mais ,  elle  éprouva  bientôt  que 
les  dieux  font  toujours  puifTans ,  6c 
que  leurs  vengeances  font  toujours 
prêtes.  Diane  offenfée  de  l'orgueil 
de  cette  fille  <  prit  Ton  arc  ,  &  lui 
lira  une  flèche  ,  qui  lui  perça  la 
langue  qui  avoit  commis  la  faute.  , 
Chione  perdit  de,  te  coup,  pre- 
jiiièrement  la  parole,  ôc.enfuite 
youlanc  s'efforcer  de  parler ,  elÏQ 


CH 

perdit  la  vie  avec  Ton  fang.  , 

L'on  dit  que  Chione  eut  deux 
maris ,  dont  l'un  étoit  un  véritable 
Mercure ,  6i  l'autre  un  véritable 
Apollon  ;  qu'elle  eut  un  fils  de 
chaque  mari ,  que  ces  deux  enfans 
tenoient  chacun  de  l'humeur  de  leur 
père;  que  le  fils  de  celui  qui  reffem* 
bloit  à  Mercure ,  fut  un  fourbe  & 
un  voleur  ;  que  l'autre  fut  un  hon- 
nête homme  qui  aima  les  fciences 
&  les  beaux  divertifTemens ,  & 
que  ce  font  ces  circonflances  qui 
ont  donné  lieu  à  cette  fable.  Car , 
de  croire  que  cette  femme  ait  en 
même  tems  coiiçu  de  deux  hom- 
mes ,  c'eft  une  chofe  qui  n'a  point 
lieu  ,  ÔL  qui  eil  contre  l'ordre  de 
la  nature.  L'on  vent  donc  faire 
voir  par  cette  fable  que  les  enfans 
tiennent  ordinairement  <ifi  leurs 
pères ,  &  que  la  nature  qui  garde 
inviolablement  cette  loi  en  toutes 
fes  opérations ,  ^uc  la  chofe  pro^ 
duite  ,  reffimbU  a  celle  qui  l'a 
produite ,  l'obfcrve  bien  fouvei^ 
en  l'homme.  ■ 

Ce  n'eft  pas  ,  dîfent  quelques- 
uns  ,  qu'Autolycus  &  Philammon 
foient  nés  ni  de  Mercure ,  ni  d'A- 
pollon ;  mais  on  veut  montrer 
par-là  qu'ils  font  nés  fous  ces  pla* 
netes  ;  &  que  fi  l'on  s'arrête  à  l'o- 
pinion dé  ceux  qui  donnent  com- 
me une  puifiance  fou  ver  aine  aux 
influences  des  aftres, on  peut  dire 
que  les  hommes  font  les  enfanis 
des  planètes  fous  lefquelles  ils  font 
nés  ,  parce  qu£  ces  planètes  les 
forment  &  les  rendent  ce  qu'iU 
font.  Autolycus  fut  donc  un  vo- 
leur, parce  que  ceux  qui  ont 
comme  lui  pour  leur  afcendanc 
Mercure  y  placé  dans  un  mauvais 


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CH 

endroit  du  ciel ,  font  pour  l'ordî- 
D^ire  de  ]*huineur  d'AutoIycus  , 
&  en  ont  les  qualités.  Nous  dirons 
la  même  chofe  de  Philammon  ; 
car  ,  ceux  à  la  naiffance  defquels 
le  Soleil  préfide ,  placé  dans  un 
bon  endroit  du  ciel ,  ont  de  Tin- 
dination  pour  les  chofes  honnê- 
tes ,  &  pour  les  belles  fciences. 

Quant  à  la  manière  dont  Chior 
ne  fut  tuée  par  Diane ,  cela  n'a 
d'autre  fondement  que  fa  mort 
prématurée.  Son  père ,  affligé  de 
la  mort  d'une  fille  unique  qu'il 
aimoit  tendrement,  fut  changé 
en  épervier  ;  fiâion  tirée  de  ce 
qu'apparemment  il  abandonna  le 
païs  pour  aller  s'établir  dans  un 
lieu  éloigné. 

CHIONE,  Ckîoney  Xio'rn,  {a) 
fille  de  Borée  &  d'Orithyic  ,  eut 
de  Neptune ,  Eumolpe ,  qui  fut  un 
homme  d'un  grand  courage. 

CHIONE,  Ckionty  X/O.M,  {h) 
Tune  des  maîtreffes  de  Neptune  < 
félon  Saint  Clément  d'Alexandrie. 
Eft-ce  la  même  qui  précède»  ou 
quelque  autre  différente  ?  quel- 
ques-uns font  Chione  mère  de 
rrîape. 

CHIONIDÈS.,  Chîonides  , 
X/W/mç»  Poëte  d'Athènes,  vi- 
voit  fous  la  70e  Olympiade  ,  huit 
ans  avant  la  bataille  de  Marathon , 
&  5Ô0  ans  avant  J.  C.  Ort  le  met 
ordinairement  le  premier  entre 
les  Poètes  de  la  commédie  an^ 
cienne. 

CHIONIDÈS  XYPÉTÉON, 
Chionidcs  Xypetaon  ,  XtoùïUnç 
At/2r(Tci.dtf' «  (c)  certain  homme, 

(a)  Pauf.  p.  70. 

(h)  Amiq.  expl.  par  D.  Bein.  de 
Montf.  Xom.  I.  pag.  65  ,  tj6. 


c  H       .69 

dont  parle  Démoflhène  dans  une 
de  fes  harangues. 

CHIONIS  ,  Chionis  l  Xionç , 
(d)  célèbre  Athlète  de  Lacédé- 
mone  ,  qui  avoit  gagné  plufieurs 
fois  le  prix  aux  jeux  Olympiques. 
Paufanias  ,  dans  fes  MelTénia- 
ques ,  dit  qu'il  remporta  la  vic- 
toire pour  la  troifième  fois  fou$ 
Tarchontat  de  Miltiade  ^  en  la  29e, 
Olympiade  ;  mais ,  c'efi  une  mé- 
prife  de  quelque  copifie  ,  qui  a 
écrit  un  nombre  pour  un  autre  , 
car  Paufanias ,  dans  fes  Arcadi-v^ 
ques  ,  dit  bien  nettement  que 
Miltiade  fut  archonte  à  Athènes 
la  deuxième  année  de  lajoe  Olym- 
piade ,  en  laquelle  Chionis  fut 
vainqueur  au  fiade  pour  la  troi- 
fième fois. 

Les  viâoîres  de  Chionis  étoîent 
gravées  fur  une  colonne  ^  qui  fe 
voyoit  à  Olympie.  Quelques- 
uns ,  &  c'étoient  fans  doute  des 
Éléens,  s'imaginoient  que  cette 
colonne  avoit  été  pofée  par  Chio- 
nis lui-même  »  &  non  par  le  peu- 
ple de  Lacédémone.  n  Parlet 
n  ainfi  ,  dit  Paufanias  ,  c'efl  par- 
»  4er  en  étourdi  ;  car ,  l'Infcrip- 
n  tion  dit  exprefTément  que  l'ufa- 
n  ge  de  courir  armé  n'avoir  pas 
»  encore  été  introduit.  Il  faudroit 
n  donc  que  Chioi^is  eût  deviné 
»  que  les  Éléens  introduiroîent 
M  un  jour  cet  ufage.  Oefl  fe  trom- 
n  per  encore  plus  lourdement  que 
n  de  prendre  la  (latue  qui  eft 
i>  adoffée  contre  cette  colonne 
n  ^ur  la  ftatue  de  Chionis,  pui(l 
»  qu^eft  Myron  qui  Ta  faite,  et 

(t)  Oeid^b.  ÎAKeasr.  p.  ^(L 

(d)  Pauf.  pag*.>6o  ,  261 ,  j66  ,  }«7  • 

Eiiî 


Digit^ed  by  LjOOQIC 


^o  CH 

Myron  Athénien  étoîtde  beau- 
coup aotérieur  à  Chionis  ;  ainfi  , 
il  n'avoit  pu  faire  la  flarue  de  ce 
Chionis  ;  voilà  ce  que  T  Au  leur 
veut  dire. 

CHIONIS,  Chionis,  Xm/;, 
(à)  fameux  ftatuaire  ,  qui  avoir 
fait  une  Minerve  &  une  Diane  | 
que  l'on  voyoit  à  Delphes. 

CHIONITES,  Chionita, 
peuples  d'Afie ,  voifins  des  Per- 
les 9  félon  Ammien  Marcellin.  Ju* 
nius  prétend  qu'il  faut  lire  Cyna- 
snolges.  Si  ce  paiTage  étoit  unique 
dans  Ammien  Marcellin  ,  un 
Grammairien  pourroit  propofer 
ce  changement  comme  une  con- 
îeâure  ;  niais ,  cet  Hiflorien  parlé 
en  plufieurs  endroits  de  ces  peu- 
ples ,  &  les  nomme  conftamment 
Chionices. 

Il  dit,  au  livre  dix-feptième , 
^e  le  roi  de  Perfe  fe  trouvant 
aux  frontières  des  nations  excé- 
\rieures,  &  ayant  fait  alliance  avec 
les  Chlonites  Ôc  les  Gelons,  les 
plus  braves  guerriers  de  tous  , 
étoit  près  de  s  en  retourner  dans 
fes  États ,  lorfqu'il  reçut  une  lettre 
de  Sapor.  Il  dit  ailleurs  :  >i  II  y 
ti  avoir  en  ce  tems-là  un  Satrape 
n  de  Corduene  ,  fournis  à  la  do- 
9}  mination  des  Fer  fes ,  nommé 
»  Jovinien ,  aipi  fecret  des  Ro- 

t>  mains Je  fus  envoyé  vers 

7>  lui  avec  un  centurion  »  homme 

n  de  confiance Il  me  donna 

»  un  guide  difciet  6c  qui  connoif- 
»9  {bit  tous  les  chemins ,  &  me  fie 
9»  aller  fur  des  roches  extrême- 
»  ment  haStes  &  afTez  éloignées 
n  de* là  ;  d*où  l'on^eût  pu  voir  à 


ÇH 

1»  cinquante  milles  de  diftarice, 
f>  rien  ne  bornant  la  vue  que  la 
n  foiblefle  des  yeux.  Après  nous 
i>  être  arrêtés  deux  jours ,  en  cet 
i>  endroit ,  le  txoifième  venant  à 
n  paroîire,  nous  vîmes  tout  l'ho- 
»  rizon  couvert  de  troupes  in- 
»  nombrables;  le  roi  de  Perfe 
n  marchant  à  la  tête ,  &  diftingué 
n  par  des  habits  qui  jettoient  un 
w  grand  éclat.  A  fa  gauche  mar- 
n  choit  Grumbate ,  roi  des  Chio-* 
i>  nites  ;  c'étoit  un  homme  entre 
19  deux  âges ,  dont  la  peau  avoit 
91  déjà  des  rides ,  mais  dont  Vame 
19  ne  formoit  que  de  grands  pro- 
99  jets ,  ÔC  qui  s^étoit  rendu  fa- 
99  meux  par  un  grand  nombre 
99  de  viâoires.  A  droite  étoit  le 
99  roi  des  Albahiens.  6cc.  u  Ce 
même  Grumbate ,  roi  des  Cîûo- 
nites  I  p&roit  encore  au  fiege  d*A- 
mide ,  où  il  combattit  avec  d'au- 
tant pitis  d'ardeur ,  qu'il  venott 
d'y  perdre  fon  fils  unique  ,  dont 
Ammien  Marcellin  décrit  les  fu- 
nérailles. 

Ces  trois  pafTages  fttfiifent,pour 
faire  voir  qu'il  ne  faut  rien  chan- 
ger au  nom  du  peuple  Chioni- 
te  y  &  en  même  tems  fervent  à 
faire  voir  oii  il  étoit.  Les  Gelons, 
dont  le  Ghilan  a  confervé  le  nom , 
&  l'Albanie  Afiatique  font  des 
pais ,  dont  la  fituation  eft  connue* 
Le  Satrape  de  la  Cordouene  com- 
mandoit  dans  la  province  où  font 
les  Curdes»  &  qu'on  appelle  le 
Curdiflan.  Ainfi ,  il  n'ed  pas  fur- 
prenant  qu'il  fe  foit  trouvé  des 
roches  telles  qu'en  vit  l'Hiftorien 
cité)  entre  ce  païs  &  celui  qu'ar.ror 


{»)  Pauf.  p.  tf33. 


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CH 

fent  l'Araxe  &  le  Cyrus  ;  car , 
Farinée  des  alliés  du  roi  de  Perfe 
s'écoit  aflemblée  vers  ces  quar* 
tiers- là  ;  les  Gelons  &  les  Alba- 
niens  habicoient  les  bordi;  de  la 
fser  Cafpienne  ,  &  les  Chionites 
étoient  leurs  voifins  ;  cela  paroit 
afTez  dans  les  paflages  qu'on  vient 
de  lire, 

CHIOS  9  Chios ,  autrement 
Chjo.  Voyez  Chio. 

CHIP  PUR,  ou  KiPPUR, 
Chippur  ,  ou  Kippur  ^  fête  de 
Fexpiation  folemnelle  parmi  les 
Juifs.  Ce  terme  vient  de  caphor  , 
ou  Ai/7/7er,  expier. 

CHIRAME  ,  Chiramus  ,  {a) 
Xf.f «^oç ,  excellent  ouvrier  pour 
toutes  fortes  d'ouvrages  dor  , 
d'argent  &  de  cuivre ,  étoit  fils 
d'un  Tyrien  ,  nommé  Ur  ,  & 
d'une  femme  de  la  Tribu  de 
Nephthali.  Ce  fut  de  lui  que  Sa- 
lombn  fe  fervit  pour  travailler  aux 
chérubins  &  aux  autres  ornemens 
du  Temple.  Outre  les  chérubins , 
il  fit  deux  colonnes  de  cuivre,  qui 
avoient  dix- huit  coudées  de  haut 
&  douze  de  tour,  au-deffus  def- 
quelles  étoient  des  corniches  de 
fonte  ,  en  forme  de  lys  ;  6c  on  y 
voyoit  pendre  en  deux  rangs  , 
deux  cens  grenades  audi  de  cuivre. 
Chirame  floriffoit  vers  Tan  du 
monde  3003  ,  ôc  avant  J.  C. 
1032. 

CHIRAMAXIUM  ,  Chira- 
maxium ,  petite  voiture  dont  la 
conftruâion  nous  eft  inconnue.  A 
en  juger  fur  l'écymologie  du  mot, 


CH  71 

ce  pouvoit  être  une  de  celles 
qu'on  pouflbit  avec  la  main,  & 
qui  reflembloit  à  nos  brouettes. 

CHIRIDATES,  CHIRIDO- 
TES,  CHIRODOTES,  Chiri^ 
data  f  Chiridota ,  Chirodota  ^  {b) 
forte  de  vêtement  en  ufage  che? 
les  Dalmates.  Il  paroit  que  c'étoit 
un  vêtement  d'une  grande  richef- 
fe  9  &  par  conféquent  très  pré- 
cieux. 

CHIRIS,  Chirîs,  vUIe  d'É- 
|ypte  dans  la  Thébaïde  félon 
Olympiodore  dans  fes  extraits  , 
cité  par  Ortélius, 

CHIRISOPHUS  ,  Chirifo^ 
phusy  XHpirQ<p0Çy  (c)  célèbre  fta- 
tuaire.  Il  y  avoit  à  Tégée  une 
flatue  de  ia  façon  ,  conlacrée  à 
Apollon.  On  fçait  que  ce  flatuaire 
étoit  de  Crète  ;  mais  ,  on  ignore 
en  quel  tems  il  vivoit,ôc  de  quelle 
école  il  étoit.  Ce  qui  eft  certain  , 
c'eft  que  Dédale  fit  un  afTez  long 
féjour  auprès  de  Minos  à  GnoiTç 

!>our  y  fonder  une  excellente  éco- 
e  de  fculpture.   Quoi  jqu'il   en 
foit,  Ch^rifophus  étoit  lui-même 
en  marbre  à  côté  d'Apollon. 
CHIRISOPHUS  ,    Chirifi' 

{hus  ,  Xtiftvo^ç  ,  (d)  capitaine 
.acédémonien.  Il  fut  mis  à  la  tête 
de  huit  cens  homntes  d'infante- 
rie ,  que  fa  patrie  envoya  an  fe- 
cours  de  Cyrus  ,  fous  la  quatriè- 
me année  de  la  94c  Olympiade, 
401  ans  avant  l'Ere  Chrétienne,' 
iorfque  ce  jeune  Prince  s'étoit 
révolté  contre  fon  frère  Artaxerx^ 
Mnénon. 


(a)  Jo&ph.  de  Antiq.  Judaïç.  p.  %6o  » 
(6)  Kofin.  de  Antl V  Rom.  p.  588  » 


589. 
(0  PaûC  p.  540. 
id)  Diodi  Sicul.  p.  405  %^%U 

£  iv 


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71  CH 

CHIROBALLISTRA^  Chiro- 
halliflra  ,  Xeip-Cetwhpet  f  (a)  ter- 
me ,  qui  veut  dire  la  ballifte  à  la 
main.  Ceft  Héron ,  fameux  ma- 
chinide  ,  qui  donna  ce  nom  à  une 
forte  de  ballifte,  dont  voici  la  def- 
cription. 

Elle'eft  compofée  d'une  plan- 
che ronde  par  un  bout ,  échancrée 
circulairement  par  l'autre  bout. 
Le  boi$  de  l'arc  eft  fixé  vers  Tex- 
'  trêmité  ronde  ;  fur  une  ligne  cor- 
refpondante  au  milieu  du  bois  de 
l'arc  &  au  milieu  de  Téchancrure, 
on  a  fixé  fur  la  planche  une  trin« 
ele  de  bois  ,  précifément  de  la 
hauteur  du  bois  de  l'arc.  Cette 
tringle  eft  cannelée  femi-circulai- 
rement  fur  toute  fa  longueur.  Aux 
côîés  de  réchancrure  de  Tun  des 
|bout^ ,  on  a  ménagé  en  (aillie  dans 
la  planche  ,  deux  émidences  de 
bois  qui  fervent  de  poignée  à  la 
ballifte.  Il  paroît  qu'on  clevoit  ou 
qu'on  baifîoit  la  ballifte  par  ces 
poignées  ;  qu'on  en  appuyoit  le 
bout  rond  contre  terre  ;  qu'on 
pla'çoit  le  corps  dans  l'éthancrure 
de  l'autre  bout  ;  qu'on  prenoit  la 
corde  de  l'arc  avec  les  mains  ; 
qu'on  Tamenoit  jufqu'à  l'extrémi- 
té de  la  tringle  cannelée  qui  la 
reteijioit  ;  qu'on  relevoit  la  ballifte 
avec  les  mains  ou  poignées  de 
bois  qui  font  aux  côtés  de  Téchan- 
crure  ;  qu'on  plaçoit  la  flèche 
dans  la  cannelure  de  la  tringle  ; 
qu'avec  la  main,  ou  autrement,  on 
taifoit  échapper  la  corde  de  l'arc 
du  bout  de  la  tringle  cannelée , 
&  que  la  flèche  étoit  chafTée  par 
ce  moyen  fans  pouvoir  être  arrê- 


CH 

tée  par  le  bois  de  l'arc  ;  parce  que 
la  cannelure  femi- circulaire  de  la 
tringle  étoit  précifément  au-deftus 
de  ce  boili ,  dont  répaifteur  écoit 
appliquée  &  correfpondoit  à  Té- 
paifTeur  du  bois  qui  reftoit  à  la 
tringle  p  au-deflous  de  la  canne- 
lure. 

CHIROMANTIE  ,  Chirc^ 
mantia  ,  Tart  de  deviner  la  deftî- 
née ,  le  tempérament  &  les  in- 
clinations d'une^  perfonne  ,  par 
l'infpeâion  des  lignes  qui  paroif- 
fent  dans  la  paume  de  la  main. 
Ce  mot  vient  du  Grec  xh  » 
manus  ,  main  ,  ÔC  de  fiayriix  » 
divinatio^  divination. 

Quelque  vain  &  quelque  im- 
pofteur  que  foit  cet  art  >  un  grand 
nombre  d'Auteurs  ne  laifTent  pas 
d'en  avoir  écrit  ;  tels  qu'Artémi- 
dore ,  Flud  ,  Joannes  de  Indagi- 
ne ,  ôcc.  Taifnerus  6c  M.  de  la 
Chambre  font  les  principaux. 

Ce  dernier  prétend  que  par 
i'infpeélion  des  iinéamens  «  que 
forment  les  plis  de  la  peau  dans 
le  plat  de  là  main  ,  on  peut  re- 
connoîere  les  inclinations  des  hom- 
mes; fur  ce  fondement  que  les 
parties  de  la  main  ont  rapport 
aux  parties  internes  de  Thomme , 
le  cœur ,  le  foie  >  &c.  d'où  dé- 
pendent ,  dit-on ,  en  beaucoup  de 
chofesy  les  inclinations  &  le  carac- 
tère des  hommes.  Cependant  ^  à 
la  fin  de  fon  traité  »  il  avoue  que 
les  préceptes  de  la  Chiromantîe 
ne  font  pas  bien  établis  ;  ni  les 
expériences  fur  lefquelles  on  les 
fonde  ,  bien  vérifiées  ;  &  qu'il 
faudroit  de  nouvelles  obfervations 


(«)  Àntiq.  expl«  par  D.  Bfecn.  de  Montf.  Tom.  IV.  p.  i|5« 


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CH   ' 

Êîtes  avec  juftefle  &  avec  exafli- 
tude  ,  pour  donner  à  la  Chiro- 
niantîe  fa  forme  &  la  foiidité 
qu'une  fcieoce  doit  avoir. 

Deirio  didingue  djeux  fortes  de 
Chirpmantie  ,  l'une  phyfique  & 
l'autre  aûrolcgique  ,  &  penfe 
que  la  première  eft  permife  , 
parce  qu'elle  fe  borne,  dit-il,  à 
connoître  par  les  lignes  de  la  main 
le  tempérament  du  corps  ,  & 
que  du  tempérament  ,  elle  infère 
par  conjeôure  les  inclinations  de 
î'ame  ;  en  quoi  il  n'y  a  rten  que 
de  fort  naturel.  Quant  à  la  fécon- 
de, il  la  condamne  comme  vaine, 
illicite  ,  &  indigne  du  noin  de 
fcience  ,  par  le  rapport  qu'elle 
prétend  mettre  entre  telles  ou  tel- 
les lignes  de  la  main ,  6i  telles  ou 
telles  planètes  ,  &  Tinfluence  de 
ces  mêmes  planètes  fur  les  évé- 
nemens  moraux  &  le  caraé^ère 
des  hommes. 

Lès  Anciens  étoient  fort  adon- 
nés à  cette  dernière ,  comme  il 
paroît  par  ce  vers  de  Ju vénal  : 

Manumque 

Prabetit    v^ti   crebrum    popifma 
rogantL 

Ceft  par  elle  que  ces  impof- 
teurs  vagabonds  ,  connus  fous  le 
nom  de  Bohémiens  &  d'Égyp- 
tens  ,  amufent  ôc  dupent  la  po- 
pulace. 

Deirio  entafle  plufieurs  raifons , 
pour  prouver  que  l'État  &  l'Églife 


C  H  7î 

ne  doivent  point  tolérer  ces  di- 
feurs  de  bonne  aventure  ;  mais  , 
la  meilleure  eft  que  ce  font  des 
vagabonds ,  que  Toifiveté  entraine 
dans  le  crime  ,  &  dont  la  préten- 
due magie  eft  le  moindre  défaut. 

Le  même  Auteur  regarde  en- 
core comme  une  efpèce  de  Chi- 
romantie  ,  celle  où  l'on  confidere 
les  taches  blanches  &  noires  qui 
fe  trouvent  répandues  fur  les  on- 
gles ,  &  d'où  l'on  prétend  tirer 
des  préfages  de  fanté  ou  de  ma-* 
ladie  ;  ce  qu'il  ne  défapprouve 
pas  abfolument.  Mais  ,  il  traite 
cette  pratique  de  fuperftitieufe  » 
dès  qu'on  s'en  fert  pour  connoî- 
tre les  événemens  futurs  qui  dé-» 
pendent  de  la  détermination  de  la 
volonté. 

CHIRON  ,  Chîron  ,  X#;>«r, 
(a)  centaure ,  qui  s'eft  rendu  cé- 
lèbre dans  la  Grèce.  Il  peut  pa(^ 
kr  pour  être  de  la  plus  haute  an- 
tiquité de  ce  pais-là ,  puifqu'il  a^ 
précédé  la  conquête  de  la  Toifoii 
d  or  &  la  guerre  de  Troye.  Sui- 
vant la  plus  commune  opinion  ^ 
il  étoit  fils  de  Saturne  &  de  Phi- 
lyre  la  Néréide,  fille  de  l'Océan  ; 
&  la  Fable  le  fait  naître  moitié 
homme  &  moitié  cheval  ,  parce 
que  ce  dieu  ,  honteux  d'avoir  été 
pris  en  flagrant- délit  avec  fa  mai- 
trefte  par  la  femme  Rbéa ,  s'étoit 
caché  fous  la  forme  de  cet  ani- 
mal. Suidas  ,  cité  dans  le  premier 
livre  de  fes  Theflaliques  par  le 


(s)  Diod.  Sicul.  p»g.  154.  Suid.  T.  T. 
p.  11*7.  Hauf.  p.  197,  515  ,  589.  Ovid. 
Metam.  L.  II.  c.  i)  ,  14.  Virg.  Gcorg. 
L.  m.  V.  550.  Quintil.  L.  I.  c.  8.  Myth. 
par  M,  PAbb.  Ban.  Totn.  VI.  p.  315, 
3)8.  &  fifiv.  Tgm.  Vil.  pag.  341 ,  34t. 


Mém  àe  PAcad.  des  Infcript.  &  BeIK 
Letc.  Tom.  III.  pag.  so  >  ai.  Tom.  VII. 
pag.  317.  Tom.  IX.  pag.  6i  ,  95  ,  95. 
Tom.  XIV.  p.  561.  Tom.  XVII.  p.  4e* 


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74  CH 

fcjîpliafte  d'Apollonius  deRhodes^ 
fait  Chiron  fils  dlxio'n  &  frère  de 
Piriiiious.  Le  fcholiafte  d'Homère 
le  dit  fils  de  Neptune  ;  &  Colu- 
iselle  lui  donne  Amythaon  pour 
père.  Mats ,  fa  mémoire  apparem- 
ment Taura  trompé  ,  obierve  M. 
Fabricius  ,  &L  lui  aura  fait  prendre 
Chiron  pour  Mélampe  dans  ce 
vers  de  Virgile. 

Phillyrides  Chiron  Amythaoniuf" 
que  Mdamplis 

Il  naquît  en  TheiTalie,  parmi 
les  centaures  ,  qui  les  premiers 
des  Grecs  eurent  l'adrefTe  de  mon- 
ter  un  cheval  &  de  le  dompter  ; 
d'où  la  fable  qu'on  a  débitée  fur 
leur  figure  monflrueufe  ,  tire  fon 
origine.  Chiron  habitoit  d'abord 
pne  grotte ,  dans  cette  partie  du 
mont  Pélion  ,  appellée  Péléthro- 
nion ,  comme  qui  diroit  le  pied  « 
la  bafe  »  l'afiTiette  ,  le  trône  du  Pé- 
lion ;  mais  ,  dans  la  fuite  >  tes  La- 
pithes  Ten  ayant  chaflfé  ,  il  fe  re- 
tira vers  le  promontoire  de  Ma- 
lée. 

On  le  regarde  comme  Fun  des 
premiers  inventeurs  de  la  Méde- 
cine, de  la  Botanique  y  &  fur  tout 
de  la  Chirurgie  ;  ne  fût-ce  que  par 
aliuiion  à  fon  nom  tiré  du  Grec 
ytlf  «  qui  défigne  la  main  ;  & 
Chiron  »  comme  fils  de  Saturne  , 
devroit  prendre  date  en  ce  genre 
de  fcience»  avant  Apollon  &  fon 
fils  Ëfculape.  On  lui  attribue  la 
découverte  de  plufieurs  plantes 
très-falutaires  pour  la  guérifon , 
foie  des  plaies ,  foie  des  maladies  , 
&  auxquelles  od  a  donné  fon 
nbrh.  Telles  font ,  entr'autres ,  la 
Sryone  ^  appellée  Chironia  »  & 


CH 

deux  efpèces  de  Panacée  ,  fur- 
nonlmées  Tune  Chironium  ,  l'au- 
tre Centaurium ,  qui  eft ,  dit-on  , 
notre  grande  centaurée.  Il  y  avoit 
de  plus ,  certains  ulcères  ihalins 
appelles  chironiens ,  à  ce  qu'on 
prétend ,  parce  que  pour  en  faire 
la  cure,  il  ne  falloit  pas  moins 
qu'un  Chiron*  Mais ,  peut-être 
cette  dénomination  leur  venoit- 
elle  principalement  de  ce  caraâère 
de  malignité  ,  qui  les  rendoic  les 
plus  difficiles  à  guérir  ,  les  plus 
dangereuse  ,  ôc  les  pires  de  touf 
les  ulcères. 

On  aiTure  qu'il  exerça  le  pre« 
mier  la  Médecine  chez  les  Ma* 
gnéfiens  ,  d*oh  ces  peuples  de 
i  heflalie  avoient  pris  la  coutume 
de  lui  confacrer  tous  les  ans  les 
prémices  des  plantes  médicinales 
qui  croiiToient  chez  eux  ;  &  d^ 
tems  de  la  guerre  de  Troye ,  on 
ne  mettoit  en  œuvre  d'autre  mé- 
decine que  celle  de  Chiron.  Une 
des  plus  merveilleufes  cuTes  de  ce 
Centaure  »  fat  celle  qu  il  fit  >  à  la 
recommandation  de  Pelée»  en  la 
perfonne  de  Phénix  ,  depuis  gou- 
verneur d'Achille  ,  &  qu'il  guérit 
de  l'aveuglement ,  que  la  barba- 
rie de  fon  pçre  Amyntor  hii  avoit 
caufé.  Les  connoiffances  de  Chi- 
ron ne  fe  bornoient  pas  à  la  feule 
médecine.  Il  y  joignit  celles  de  la 
philofophie  «  de  Tailrologie  ,  de  la 
mufique  ,  de  la  gymnai^ique ,  de 
la  chalfe  &  de  l'arc  militaire. 

Héfiode  lui  fait  époufer  Naïs. 
D'autres  lui  donnent  pour  femme 
Chariclo  ,  fille  d'Apollon  fuivant 
quelaues-uns ,  de  Perfée  ou  de 
rOcean  félon  d'autres.  On  dit 
qu'il  en  eut  un  fils  nommé  C^y  f« 


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CH 

tos.  On  eft  peu  d'accord  fur  le 
nombre  de  Tes  filles.  Le  faux  Die 
tys  de  Crète  le  fait  père  de  Thé- 
tis,  femme  de  Pelée.  S'il  ne  l'étoit 
pas  en  effet ,  du  moins  fe  trouva- 
t-il  aux  noces  de  ceue  Néréide  ;. 
il  fie  ton  préfem  à  Tépoux ,  com- 
me les  autres  convives  ,  qu'il  a 
plu  aux  Poëtes  de  traveilir  en 
autant  de  divinités ,  &  ce  préfem 
confifloit  en  une  lance  de  frêne. 
Ce  Prince  lui  avoir ,  en  quelque 
forte ,  l'obligation  d'un  mariage  ù 
avantageux,  Ôc  le  Centaure  lui 
avoir  fuggéré  les  expédiens  les 
plus  fiirs  pour  y  amener  Thétis , 
malgré  fes  difficultés ,  &  pour  la 
réduire  au  poinc  de  ne  pouvoir 
plus  s'en  dédire  ;  fur  quoi  les  Poë- 
tes ont  feint  qu'à  l'exemple  de 
Protée ,  elle  prenoit  dîverfes  for- 
mes ,  pour  s'échapper  des  mains 
de  Pelée.  C    , 

Apollodore  &  plufîeurs  autres 
donnent  à  Chiron  pour  fille ,  E»- 
déis ,  à  laquelle  ils  font  éponfer 
Éaqu^  ayeul  d'Achille  ,  &  père 
de  Pelée  &  de  Télamon.  Sur  ce 
pied-là,  Chiron  eût  été  le  bi- 
Éiyeul  d'Achille  ;  au  lieu  que  dans 
l'hypothèfe  de  Diéîys ,  qui  le  fait 
père  de  Thétis  ,  il  n'eût  été  que 
i'ayeul  de  ce  héros.  Mais ,  il  ne 
£iut  pas  chercher  beaucoup  de 
îudeiie  dans  les  généalogies  des 
cems  héroïques.  Il  eut  encore  unç 
autre  fille  nommée  Hippo ,  qui 
fut  femme  d'Éole  ,  auquel  elle 
communiqua  la  phyfique ,  l'aflro* 
nomie ,  &  les  autres  fciences ,  dont 
fon  père  faifoit  profeilion. 

La  fagefTe  de  Chiron  &  fon 
grand  fçavoir  en  tout  genre ,  fi- 
rent de  la  grotte  ^u'il  àabitoit^ 


CH  7S 

récole  la  plus  fameufe  &  ta  plus 
fréquentée  de  toute  la  Grèce. 
Prefc^ue  tous  les  héros  de  fon  tems 
voulurent  être  fes  difciples  ;  6l 
Xénophon  qui  en  fait  le  dénora« 
brement,en  compte  jufqu'à  vingts 
on  ;  fçavoir  ,  Céphale  ,  Efci:» 
lape  ,  Ménalion ,  Neftor ,  Am- 
'phiaraiis ,  Pelée ,  Télamon ,  Mé- 
léagre ,  Théfée ,  Hippoly te ,  Pa- 
lamède  ,  UlyfTe  ,  Ménellhée  » 
Diomède ,  Caflor  &  Pollux ,  Ma^ 
chaon  &  Podalire  ,  Antiloque  » 
Énée ,  Achille.  On  voit  par  ce 
catalogue,  que  Chiron  a  fouvenc 
inflruit  les  pères  &  les  enfans  ;  Se 
Xénophon  fait  de  chacun  d'eux  , 
un  court  éloge  ,  qui  tourne  à  la 
gloire  du  précepteur.  L*Hifloriea 
Grec  cependant  ne  les  a  pas  tous 
nommés  ;  il  a  omis  Hercule  , 
Bacchus  ,  Phénix  ,  Cocyte  , 
Ariflée,  Jafon,  &  fon  fils  Mé- 
déus  9  Ajax  »  Protéfilaiis.  Ce  n  eft 
point  ici  le  lieu  de  les  pafler 
tous  en  revue  ;  nous  nous  conten- 
terons de  nous  arrêter  fur  quel- 
ques-uns de  ceux  qui  femblenc 
intéreiTer  Chiron  plus  particuliè- 
rement. 

Pélée^chaiTé  de  la  maifon  de  foa 
père  Éaque ,  pour  un  meurtre  » 
le  retira  auprès  du  Centaure,  âc 
puifa  dans  ce  commerce  plufieurs 
conno^ances  capables  de  le  con- 
foler  dans  fa  difgrace.  Ce  fut  du 
même  maître ,  s'il  en  faut  croire 
Laâance ,  en  cela  d'accord  avec 
Xénophon  ,  qu'Efculape  ,  qui  fs 
difoir  pourtant  fils  d'Apollon ,  ap* 
prit  la  médecine.  On  prétend  que 
Bacchus  fut  le  difciple  bien-aimé 
du  Centaure ,  &  qu'il  apprit  de  ce 
maiire  hs  réjoaiflances,  les  orgies , 


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7^  CH 

les  Bacchanales ,  &  les  autres  cé- 
rémonies qui  appartiennent  au 
culte  Bacchique.  Ce  fut ,  comme 
le  témoigne  rlutarque  ,  à  l'école 
de  ce  Centaure  ,  qu'Hercule  étu- 
dia la  mufique,  la  médecine  &  la 
juflice. 

Ariftée ,  fils  d'Apollon  &  de  la 
nymphe  Cyrène,  fille  de  Pénée' 
roi  d*Arcadie,  régna  dans  \e  mê- 
me païs  ,  &  fe  diftirtgua  parmi 
les  difciples  de  Chiro»,  entre  les 
mains  de  qui  Ton  père  le  reVnit 
dès  Tenfance.  11  y  devint  habilie 
dans  la  médecine,  dans  l'art  de 
deviner ,  dans  tou.t  ce  qui  concer- 
ne le  ménage  de-  la  campagne , 
c'eft- à-dire  ,  la  chaiTe ,  le  gou- 
vernement des  beftiaux ,  celui  des 
abeilles  ,  la  manière  de  recueillir 
le  miel,  celle  d'exprimer  Thuile 
des  olives ,  &c.  &  il  répandit  ces 
connoifiances  chez  divers  peu- 
ples. L'antre  du  Centaure  fut  en- 
core un  afyle  bien  favorable  pour 
Jafon  ,  que  fes  parens  y  portè- 
rent ,  dès  Hnftant  de  fa  naiflance , 
pour  le  dérober  à. la  fureur  de 
fon  oncle  Pélias ,  à  qui  on  fit  ac- 
croire que  l'enfant  étoit  mort.  Il 
reda  chez  le  Centaure  juiqu'à  l'âge 
de  vingt  ans  ;  il  y  fut  inftruit  dans 
tous  les  louables  exercices  f  & 
particulièrement  dans  l'art  de  la 
médecine  ,  d'où  Chiron  le  nom- 
ma Jafon,  vrapoc  ri»  /««'ly^  félon 
quelques-uns,  à  caufede  la  cure 
des  maladies  ,  dans  laquelle  il 
excelloit. 

>  Mais ,  entre  tant  de  Héros  qui 
ont  été  les  difciples  du  Centaure  , 
nul  ne  h\  a  fait  autant  d'honneur 
qu'Achille,  dont  il  a  partagé  en 
quelque  forte  la  renommée  ,  & 


CH 

à  réducatîon  duquel  il  a  donné 
tous  fes  foins  ,  étant  ,  comme  on 
l'a  vu  ,  fon  ayeul  ou  fon  bifayeul 
maternel.  Ptolémée  Hépheftion 
raconte  que  Thétis  avoit  fait  dif- 
paroître  fecrétement ,  par  le  moyen 
du  feu  ,  les  fix  premiers  enfans 
qu'elle  avoit  eus  de  Pelée.  Elle 
vouloit  en  faire  autant  du  fep- 
tième ,  qui  étoit  Achille  ;  mais  , 
fon  père  étant  furvenu  fort  à  pro- 
pos,  le  retira  du  feu ,  qui  ne  lut 
avoit  encore  confumé  que  le  talon 
droit ,  &L  le  porta  dans  la  grotte 
de  Chiron ,  qui  entreprit  de  le 
guérir.  Il  'déterra  dans  cette  vue 
le  cadavre  de  Damyfe  ,  le  plu$ 
léeer  de  tous  les  géans  à  la  courfe , 
lui  ôta  l'os  du  talon ,  &  l'adapta 
au  pied  d'Achille  avec  tant  de 
juftefTe  ,  qu'à  l'aide  des  médica- 
mens  appliqués  par  le  Centaure, 
ce  talon  pofliche  prit  corps  ,  ôc 
répara  avantaeeufement  la  perte 
du  premier.  Dans  la  fuite,  lor& 
qu'Achille  fuyoit  Apollon ,  ce  ta- 
•lon  s'étant  malheureufemem  dé- 
taché ,  fit  .tomber  ce  héros  ,  qui 
fut  ainfi  tué  par  le  dieu. 

Mais  ,  pour  revenir  à  l'éduca- 
tbn  d'Achille  »  le  Centaure  le 
nourrit  d'entrailles  de  lions,  de 
moelles  de  cerfs ,  d'ours  ,  de  fan- 
gliers;  de  tels  alimens  ne  pou<» 
voient  manqber  de  faire  naître 
chez  lui  ce  courage  invincible  ^ 
qui  alloit  qu^quecois  jufqu'à  la 
férocité.  Il  lui  enfeigna  la  méde- 
cine ,  fur  tout  cette  partie  qui  prè- 
fide  au  régime  ;  n'oubliant  pas 
d'y  joindre  la  mufique ,  fi  propre 
à  infpirer  les  paffions  vertueufes  « 
&  à  réprimer  celles  qui  nous  ty- 
rannifenc.    Il  lui  donna  le  nona 


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CH 

tf Achille,  au  lieu  de  celui  de  Lî- 
gyroo  ,  que  portoit  d*abord  ce 
leune  héros.  On  attribue  ce  chan- 
gement de  nom  à  diverfes  caufes , 
qu'il  feroit  luperflu  d'alléguer  ici. 
Ptolémée  Hépheftion  prétend  que 
k  Centaure  ne  le  fit  qu'en  mé- 
moire de  fon  précepteur ,  qui/  fe 
nommoit  Achille;  c'eft  un  i'enti- 
ment  qui  eft  particulier  à  cet  Au- 
teur. 

Chîron,  parvenu  à  une  extrême 
vieilleffe ,  fut  bleffé  par  une  flè- 
che empoifonnée ,  qui  l'atteignit, 
après  avoir  percé  le  bras  d'Élatus, 
auquel  Hercule ^'avoii  tirée,  en 
pourfuivant    les   centaures    dans 
leur  déroute.  D'autres  difent  que 
ce  fut  Chiron  lui-mênie  qui  fe  fit 
cette  bleffure  ,  en    maniant  les 
flèches  d'Hercule  ,  dont  l'une  lui 
tomba  fur  le  pied.  Les  uns  affu- 
rent  qu'il  en  guérit ,  par  la  vertu 
des  plantes  médicinales ,  qu'il  con- 
noifîbit  mieux  que  perfonne.  Les 
autres  n'en  conviennent  pas  ,  6c 
prétendent  au  contraire,  que  dé- 
fefpérant  de  fa  guérifon  &  vaincu 
par  la  douleur  ,    il  fouhaita  de 
mourir  ,    &   céda  l'immortalité 
dont  il  jouiffoit  à  Proniéthée ,  qui 
confentit  à  devenir  imniortel.  On 
plaça  Chiron  après  fa  mort  parmi 
4ey  conftellations  ,    par   refpeû 
pour  fes  vertus ,    &  par  recon- 
•fioiilance  pour  les  grands,  ferÇices 
qu'il  âvoit  rendus  aux  peuples  de 
4a  Grèce.  On  comptoitf  dans  cette 
conftellation  jufqu^à  trente  -  trois 
.étoiles. 
,    On  n'a  pas  tnanqué  au  furplus , 


CH  77 

ié  fuppofer  quelques  ouvrages  à 
Chiron.Suidas  lui  attribue  des  pré« 
ceptes  ,  compofés  en  vers  pour 
Achille ,  &  Ml  traité  de  médecine, 
dediné  à  la  cure  des  chevaux  & 
des  autres  beûiaux.  Ce  Lexico* 
graphe  prétepd  même ,  que  c'eft 
de  ce  dernier  écrit  qu'eft  venue  à 
Chiron  la  dénomination  de  Cen- 
taure.   D'autres  ont  mis  fur  le 
compte  d'Héfiode  les  préceptes 
attribués  à  Chiron  ;  &  le  poëte 
comique  Ariftophane  s'en  moque» 
dans  une  de  fes  pièces  ,  comme 
d'un  ouvrage  d'Héfiode  ;  quoi- 
que les  Béotiens  eux>mêmes,&le 
grammairien  Ariftophane  ,  chez 
Quintilien ,  foûtiennent  qu'il  n'ap. 
partient  nullement  à  ce   Poëte. 
C'eft  fur  quoi  l'oit  peut  confuher 
la  bibliothèque    Greque  de  M. 
Fabricius ,  ainfi  que  fur  plufieurs 
autres  circonftances  qui  concer- 
nent la  perfonne  de  Chiron.  Il  en 
parle  encore  dans  le  treizième  vo- 
lume de  fa  bibliothèque ,  où  il  le 
fait  pafier  en  revue  dans  fon  grand 
catalogue  des  anciens  Médecins. 
On  peut  recourir  encore  fuf  le 
même  article  à  l'hiftoirede  la  mé- 
decine de  Daniel  le  Clerc-  . 

(a)  Lucien  a  fait  Chiron  inter- 
locuteur d'un  de  fés  dialogues  des 
morts. 

CHIONIDES  PETRiE,  nom 
d'une  montagne  dé  Grèce  ,  dans 
ia  ThefTalie ,  félon  Callimaque. 

CHIRONIENS  ,  {h)  nom  de 
certains  ulcères  malins  ,  qui  ne 
pouvoient  être  guéris  que  par  un 
médecin  tel  que  Chiron.  ^.Chiron. 


'à    U)  Lttcian.  TomV  I.  pag.  »S j.  ër /e^.  1    (j)  Mém.  de  l'Acàd.  des  Infcript. 
^^  ; ,lBeil.  Lcu.  X.  XVII.  p.  47, 


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7»  CH 

CHIRONIS  VILLA ,  lieu  dà 
Péloponoèfe  ,  prèl  de  la  ville  de 
Mefiène,  félon  Polybe.  Elle  fut 
détruite  &L  faccagée'  par  tes  Pi« 
rates. 

CHIRONIUM  ANTRUM  , 
lieu  dont  parle  ApoUodore ,  ^ité 
par  Ortélius. 

CHIRONOMIE,  mouvement 
du  corps  y  mais  fur  tout  des  mains  ^ 
fort  ufité  parmi  les  anciens  comé- 
diens f  par  lequel ,  fans  le  fecours 
de  la  parole,  ils  dédgnoient  aux 
fpeâateurs  les  êtres  penfans  » 
dieux ,  ou  hommes  ,  foit  qu'il  fût 
queilion  d'exciter  le  ris  à  leurs 
dépens  ,  ou  qu'il  s'agit  de  les  dé« 
figner  en  bonne  part.  Cétoit  auffi 
un  figne  dont  on  ufoit  avec  les 
enfans ,  pour  les  avertir  de  pren- 
dre une  pofture  de  corps  conve- 
nable. Cétoit  encore  un  des  exer- 
cices de  la  gymnaflique. 

CfflROPONIES  ,  Chîropo*  ' 
nia  ,  (a)  fêtes  des  Rhodiens ,  oii 
les  enfans  mendioient  en  chantant» 
Cette  manière  de  chanter  s'appel- 
loit  x^^^^^^l^i^  »  chanter  comme 
les  hirondelles. 

CHIROPSALAS  ,  Chiropfa^ 
las ,  l'on  des  furnoms  donnés  à 
Bacchus. 

CHIROTONIE ,  Chirotonia , 
yLstooTovia.  y  (^)  imposition  des 
mains  qui  fe  pratique  en  conférant 
les  Ordres  facrés. 

L'origine  de  ce  terme  vient  de 
ce  que  les  Anciens  donnoient  leurs 
fufFrages  en  étendant  les  mains  ;  ce 
qu'exprime  le  mot  Xs.foroy/a  , 
compofé  de  x^h  «  ^^^^  à  >maia. 


CH 

&  de  TgiV»  ^tendo,  je  tends.  C*e(l 
pourquoi ,  chez  les  Grecs  &  les 
Romains  ,  Téleâion  des  Magif- 
trats  s'appelloit  Xf/foToy/a  ;  com- 
me il  paroit  par  la  première  Phî- 
lippique  de  Démoflhène  ,  parles 
harangues  d*Efchinc  contre  Ctéfi*- 
phon  ,  &  de  Cicéron  pour  Flac-* 
eus. 

Il  eft  certain  que  dans  jes  écrits 
des  Apôtres  ce  ter  jie  ne  figoifîe 
quelquefois  qu'une  éle^ion  ,  qui 
n'emporte  ^ucun  caraôère ,  com* 
me  dans  la  féconde  Épître  aux 
Corinthiens.  Mais  ,  quelquefois 
auffi  elle  figni6e  une  confécration 
proprement  dite  ,  &  difiFérente 
d'une  (impie  éle^Uon  ;  c'efi  fuir 
tout  lorfqu'il  efl  parlé  de  l'ordina* 
tion  des  Prêtres,  des  Évêques^ 
&c.  comtne  dans  les  Aâes ,  cùm 
eonflUuiffent  illu  per  finsulas  Ec^ 
cUfias preibiteros  [le  Grec  porte 
%e//>cTo)'ii«r«i'Tfç  ]  6*  orajfent  cum 
jcjunatiombus. 

Théodore  de  Beze  a  abafé  de 
cette  équivoque  pour  jufli6er  la 
pratique  dès  Égljfes  réformées  « 
en  uaduiCant  ce  paiTage  par  ces 
mots  f  cum  per  fuffirapa  creajfem 
presbyteros  ,  comme  fi  les  Apôtres 
s'étoient  contentés  de  choifir  des 
Prêtres  en  étendant  la  main  a« 
4atlteu  de  la  tmiltitude ,  à  peu  près 
comme  les  Athéniens  &  les  Ro«> 
mains  choifiifotent  leurs  Magif- 
trats. 

Mais,  les  Théologiens  Cathot- 
4iques  >  Ôc  entr*autres  Fronton  da 
Duc  ,  M.  de  Marca ,  6c  les  PB. 
:PetaQ  &  Goar ,  ont  obfervé  que 


(s)  Antiq.  escpl.    par   D.   Bem. 
Montf*  Tom*  II.  p.  tix. 


dei     (6)  A&a.    Apoft.  cl  14.  t. 
I  CoriDcb.  £pi(t  U.  c.  8.  ?»  if  • 


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CH 

dans  les  Auteurs  eccléfiafliques 
X'f^oToria  fignifie  proprement 
une  confécration  particulière  qui 
imprime  le  caraélère ,  6c  non  pas 
une  (impie  députation  à  un  mi- 
niûère  extérieur ,  faite  par  le  fim- 
ple  fufFrage  du  peuple  ,  ôc  révo- 
cable à  fa  volonté, 

CHIRURGIE  ,  Chirurgia  , 
fciènce  qui  apprend  à  connoitre  & 
à  guérir  les  maladies  extérieures 
du  corps  humain  ,  6c  qui  traite  de 
toutes  celles  qui  ont  befoin  pour 
leur  guérifon ,  de  l'opération  de 
la  main  ,  ou  de  fapplication  des 
topiques.  C'eft  une  partie  confti- 
tutive  de  la  médecine. 

Le  mot  de  Chirurgie  vient  du 
Grec  x-'f •^/'7"'  »  ff^anualis  opera'^ 
tio  y  opération  manuelle ,  de  y^nr^ 
manus  ,  main,  &  de  tf-^oif ,  opus , 
opération. 

I.  La  Chirurgie  eft  fort  ancien* 
ne ,  6c  même  beaucoup*  plus  que 
la  médecine  ,  dont  elle  ne  fait 
maintenant  qu'une  branche.  C'é-  * 
toit  en  effet  la  feule  médecine 
qu'on  connût  dans  les  premiers 
âges  du  monde  ,  oii  Ton  s*appli- 
qua  à  guérir  les  maux  extérieurs , 
avant  qu'on  en  vint  à  examiner  6c 
\  découvrir  ce  qui  a  rapport  à  la 
cure  des  maladies  internes. 

On  dit  qu'Apis ,  roi  d'Egypte , 
fat  l'inventeur  de  la  Chirurgie. 
Efcolape  fit  après  lui  un  traité  des 
plaies  6c  des  ulcères.  Il  eut  pour 
fucceffeurs  les  Philofophes  des  fie- 
des  fuivans ,  aux  mains  defquels 
la  Chirurgie  fut  uniquement  con- 
fiée ,  Pythaeore  ,  Empédocles  , 
Parménide  ,  Démocrice  ,  Chiron , 
Péon  ,  Cléombrotus  qui  -^guérit 
l'oeil  d'Amiochns.  Pline  rappoi'te , 


CH  79 

fur  Tautorité  de  Caffius  Hémina  ^ 
qu'Arcagathus  fut  le  premier  Chi- 
rurgien qui  s'établit  à  Rome  ;  que 
les  Romains  furent  d'abord  fort 
fatisfaits  de  ce  vulnerarius  i  corn* 
me  ils  l'appelloient  ;  6c  qu'ils  lut 
donnèrent  des  marques  extraor- 
dinaires de  leur  eOime  ;  mais  qu'ils 
s'en  dégoûteront  enfuite ,  6c  qu'ils 
le  nommèrent  alors  du  fobriquec 
de  Carnifcx ,  à  caufe  de  la  cruauté 
avec  laquelle  il  couj)oit  les  mem- 
bres. Il  y  a  même  des  Auteurs 
qui  prétendent  qu'il  fat  lapidé 
dans  le  champ  de  Mars  ;  mais  , 
s'il  avoit  eu  ce  malheureux  fort  , 
il  feroit  furptenant  que  Pline  n'en 
eût  point  parlé. 

La  Chirurgie  fut  cultivée  avec 
plus  de  foin  par  Kippocrate ,  que 
par  les  médecins  qui  Tavoient  pré- 
cédé. On  dit  qu'elle  fut  perfec- 
tionnée en  Egypte  par  Philoxène, 
qui  en  compota  plusieurs  volu- 
mes. Gerzias ,  Softrates ,  Héron , 
les  deux  Apollonius ,  Ammonius 
d'Alexandrie,  &  à  Rome  Triphon 
le  père  ,  Évelpiftus ,  6c  Mégès , 
la  firent  fleurir  chacun  en  leur 
tems. 

II.  L'état  des  Chirurgiens  a  été 
différent ,  fuivant  les  révolutions 
différentes  que  la  Chirurgie  a 
éprouvées.  On  l'a  vue  dans  trois 
états  différens  ,  6c  les  feuls  qui 
étoient  poilîbles  pour  elle.  De  ces 
trois  états  ,  deux  ont  été  com- 
muns à  toutes  les  nations  étran- 
gères ,  6c  le  troifième  a  été  par- 
ticulier à  la  France. 

Le  premier  érat  de  la  Chirur- 
gie ,  celui  qui  ^nt  nos  yeux,  com- 
me le  plus  éclatant ,  du  moins 
chez  les  nations  étrangères  ^  ce 


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8o     .       C  H 

fut  celui  ob  cet  arc  (e  troava  après 
la  renaiHance  des  lettres  dans 
TEurope.  Quand  les  connoiffan- 
ces  dies  langues  eurent  ouvert  les 
tréfors  des  Grecs  &  des  Latins, 
il  fe  forma  d*excellens  hommes 
dans  toutes  les  nations  &  dans 
tous  les  genres.  Mais  ,  ce  qu*il  y 
eut  de  particulier,  par  rapport  à 
la  Chirurgie ,  fur  tout  dans  lltalie 
&  dans  TAllemagne  ,  c*eft  que 
cette  fcience  fut  cultivée  6c  exer- 
cée par  les  mêmes  hommes  qui 
cultivèrent  la  médecine  ;  de  forte 
que  Ton  vit  dans  les  mêmes  Sça- 
vans ,  &  des  Chirurgiens  admira- 
bles, &  de  très-grands  médecins. 
Ce  furenc-là  les  beaux  jours  de  la 
Cliirurgie  pour  l'Italie  &  pour 
l'Allemagne.  C'eft  à  ce  tems  que . 
nous  devons  rapporter  cette  foule 
d'Hornmes  illuières ,  dont  les  ou- 
vrages feront  à  jamais  le  foûcien 
&  rhonneur  de  l'une  &  l'autre 
médecine. 

La  difpofition  des  loix  avoit 
favorifé  la  liberté  d'unir  dans  les 
mêmes  hommes  les  deux  arts  ;  ce 
fut  cette  liberté  même  qui  caufa 
la  chute  de  la  Chirurgie.  Il  n'eft 
pas  difficile  de  fentir  les  raifons  de 
cette  décadence.  Les  dehors  de  la 
Chirurgie  ne  font  pas  attrayans; 
ils  rebutent  la  délicateile.  Cet  art , 
hors  les  tems  de  guerre  ,  n'exerce 
prefque  les  fondions  qui  lui  font 
propres  que  fur  le  peuple ,  ce  qui 
n'amorce  ni  la  cupidité  ni  l'ambi- 
tion ,  qui  ne  trouvent,  leur  avan- 
tage que  dans  le  commerce  avec 
les  riches  6c  les  grands  ;  de-là  les 
Sçavans ,  maîtres  de  l'un  6c  l'autre 
arc ,  abandonnèrent  l'exercice  de 
U  Chirurgie.  Les  maladies  médi- 


CH 

cales  font  les  compagnes  ordinai- 
res des  richefles  6c  des  grandeurs  ; 
6c  d'ailleurs  elles  n'offrent  rien 
qui ,  comme  les  maladies  chirur- 
gicales ,  en  éloigne  les  perfonnes 
trop  délicates  ou  trop  feniibles  ; 
ce  fut  pour  ces  raifons ,  que  ces 
Hommes  illuftres  ,  médecins  6c 
chirurgiens  tout  à  la  fois ,  aban- 
donnèrent les  fondions  de  la  Chi- 
rurgie ,  pour  n'exercer  plus  que 
celles  de  la  médecine. 

Cet  abandon  donna  lieu  au  fé- 
cond état  de  la  Chirurgie.  Les 
médecins  chirurgiens ,  en  quittant 
l'exercice  de  cet  art ,  retinrent  le 
droit  de  le  diriger ,  6c  commirent 
aux  barbiers  les  fondions  ,  les 
opérations  de  la  Chirurgie  ,  &L 
l'application  de  tous  les  remèdes 
extérieurs.  Alors  ,  le  chirurgien 
ne  fut  plus  un  homme  feul  âc 
unique  ;  ce  fuc  un  compofé  monf- 
trueux  de  deux  individus  ;  da 
médecin  ,  qui  s'arfogeoit  exclu- 
Tivemem  te  droit  de  la  fcience  ^ 
6c  cpnféquemment  celui  de  diri- 
ger ;  6c  du  chirurgien  manœuvre, 
a  qui  on  abandonnoit  le  manuel 
des  opérations. 

Les  premiers  momens  de  cette 
divifion  de  la  fcience  d'avec  l'art 
d'opérer ,  n*en  firent  pas  fentir 
tout  le  danger.  Les  grands  maîtres 
qui  avpient  exercé  la  médecine 
comme  la  Chirurgie  ,  vivoient 
encore  ;  6c  l'habileté  qu'ils  s'é- 
toient  acquife ,  fufHfoit  pour  diri* 
ger  l'automate  ,  ou  le  chirurgien 
opérateur.  Mais  ,  dès  que  cette 
race  hippocratique  ,  comme  l'ap- 
pelle Fallope  ,  fut  éteinte  ,  les 
préjugés  de-  la  Cliirurgie  furent 
non  uulement  arrêtés ,  mais  l'art 
lui-même 


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CH 

hî-même  fut  prefqùe  éteint  ;  il 
n*en  refta ,  pour  ainfi  dire ,  que  le 
nom.  On  ceflia  de  voir  Texeinple 
de  ces  brillantes ,  de  ces  efiicaces 
opérations  ,  qui  du^regne  des  pre- 
miers médecins  av oient  fauve  la 
vie  à  tant  d*homines.  De- là  cette 
peinture  fi  vive  que  fait  Magatus 
da  malheur  de  tant  d*infortuné$ 
citoyens  ,  qui  fe  trouvoient  aban- 
donnés fans  reflburce ,  lorfqu'âu- 
nefois  fart  auroit  pu  les  fauver  ^ 
mais,  ils  ne  pouvoient  rien  en 
efpérer  dans  cette  fituation.  Le 
chirurgien  n  ofoit  fe  déterminer  à 
opérer ,  parce  qu*il  étoit  fans  lu** 
mières  ;  le  médecin  n*ofoit  pren- 
dre fur  lui  d*ordonner  ^  parce  qu'il 
étoit  fans  habileté  dans  ce  genre. 
L'abandon  étoit  donc  le  feyl  parti 
qui  reûât ,  tk  la  prudence  elle- 
même  n'en  permetcoit  point  d'au- 
tre. 

La  Chirurgie  Françoife  ne  fut 
point  expofée  aux  mêmes  incon» 
véniens.  Une  légidation ,  dont  on 
ne  peut  trop  louer  la  fagefle  , 
avoit  donné  à  la  Chirurgie  le  feul 
état  qui  pouvoit  la  conlerver.  Cet 
état  eft  le  troiûème  où  la  Chirur- 
^e  s*eft  vue  ,  ôi  qui  jufqu'à  nos 
jours  n'a  été  connue  que  de  la 
France. 

Long-tems  avant  le  règne  de 
François  I  ,  la  Chirurgie  £iifoit 
un  corps  fçavant  ,  mais  unique- 
ment pccupé  à  la  culture  de  la 
Chirurgie.  Les  membres  de  ce 
corps  poiTédoient  la  totalité  de  la 
fcience  qui  apprend  à  guérir; 
mais  y  ils  n'étoient  autorifés  par  la 
loi  qu'à  faire  l'application  des  rè- 
gles de  cette  fcience  fur  les  mala- 
dies extérieures  ^  6c  nullement  fur 
Tom.  XI. 


CH  8r 

les  maladies  internes ,  qui  faifoienc 
le  partage  des  phyficiens  ou  mé- 
decins. La  fcience  étoit  liée  à  l'arc 
par  des  nœuds  qui  fembloient  in- 
diflblubles.  Le  chirurgien  fçavant 
étoit  borné  à  la  culture  de  (on  art. 
La  vanité  ^  l'ambition  ou  l'intérêt 
ne  pouvoient  plus  le  diAraire  pour 
tourner  ailleurs  fon  application. 
Tout  fembloit  prévu  ;  toute  four- 
ce  de  défordre  fembloit  coupée 
dans  fa  racine  ;  mais ,  la  fageHe 
des  loix  peut-elle  toujours  préve- 
nir les  effets  des  pailions  ,  &  les 
tours  qu'elles  peuvent  prendre  ? 
Les  letttes ,  qui  faifoient  le  par- 
tage des   chirurgiens   François  , 
fembloient  mettre  un  frein  éternel 
aux  tentatives  de  leurs  adverfai- 
res.  Mais ,  enfin  les  procès  &  les 
guerres   outrées  qu'ils  eurent  à 
Ibûtenir  »    préparèrent  l'aviliffe- 
ment  de  la  Chirurgie  ;  la  faculté 
de  médecine  appella  les  barbiers  > 
pour  leur  conner  les  fecours  de  la 
Chirurgie  minîArànte  ;  enfuite  , 
elle  les  initia  aux  fondions  des 
grandes  opérations  de  la  Chirur- 
gie ;  enfin  ^  elle  parvint  à  faire 
unir    les  barbiers  au   corps  des 
chirurgiens.    La  Chirurgie    ainft 
dégradée  par  fon  aiTociation  avec 
des  artifans ,  'fut  expofée  à  tour  \€ 
mépris  qui  devoit  fuivre  une  fi 
indigne  alliance.  Elle  fut  dépouil- 
lée ,   par  un   arrêt  folemnel   çn 
1660 ,  de  tous  les  honneurs  litté- 
raires ;  &  il  les  lettres  ne  $*e:^ile- 
rent  point  de  la  Chirurgie  ,  du 
moins  ne  parurent-elles  y  reflet 
que  dans  la  honte  &  dans  l'humi- 
liation. 

Par  une  efpèce  de  prodige  , 
malgré  les  lettres  pre/aue  éteintes 

F 


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îz  C  H 

dans  le  nouveau  corps  9  la  théorie 
s'y  conferva.  On  en  fut  redeva- 
ble au  précieux  refte  de  Tàncien 
corps  de  la  Chirurgie.  Ces  grands 
hommes  ,  malgré  leur  humilia- 
tion ,  malgré  la  douleur  de  fe  voir 
confondus  avec  de  vils  artifans , 
efpérerent  le  rétabliflement  de 
leur  art.  Ils  conferverent  le  pré- 
cieux dépôt  de  la  doârine ,  &  fi- 
rent tous  leurs  efforts  pour  le 
tranfmettre  fidèlement  à  des  fuc- 
ceileurs ,  qui  pourroient  un  jour 
voir  renaître  la  Chirurgie  ;  leur 
zèle  n'oublia  rien.Parmi  cette  trou- 
pe d'hommes  avec  qui  ils  étpienc 
confondus  ,  ils  trouvèrent  dans 
quelques-uns  des  teintures  des 
lettres  ,  prifes  dans  une  heureufe 
éducation  ;  dans  d'autres  >  des  ta- 
lens  marqués  pour  réparer ,  dans 
un  âge  avancé  ,  le  malheur  d'une 
éducation  négligée  ;  &  dans  tous 
enfin ,  le  zèle  le  plus  vif  pour  la 
confervation  d'un  art  qui  étoit  de- 
venu le  leur. 

Ce  fut  ainfi  que  la  Chirurgie 
fe  maintint  dans  la  poneiTion  de 
la  théorie.  Ce  fut  le  fruit  des  fen- 
timensque  ces  pères  dei'art,  refle 
de  l'ancienne  Chirurgie,  fçurent 
înfpirer  à  leurs  nouveaux  affociés. 
Mais,  cette  poiTeffion  n'étoit  pas 
une  pofleffion  d'état ,  une  poiTef- 
fion publique  autorifée  par  la  loi  ; 
c'étoit  une  pofTeflion  de  fait ,  une 
.poiTeffion  furtive,  qui  dès-lors  ne 

£  ou  voit  pas  long'tems  fe  foûtenir. 
a  féparation  de  la  théorie  ,  d'a- 
vec les  opérations  de  l'art»  étoit 
la  fuite  infaillible  de  cet  état,  &  la 
Chirurgie  fe  voyoit  par- là  fur  le 
penchant  de  Ùl  ruine.  On  fentit 
même  plus  que  le  préfage  de  cet-- 


CH 

te  décadence  ,  &l  Ton  ne  doit 
point  en  être  furpris  ;  car ,  les 
diâées  &  les  leâures  publiques 
étant  interdites  ,  on  n'avoit  d'au- 
tre moyen  que  la  tradition  pour 
faire  paiTer  aux  élevés  les  connoif- 
fances  de  la  Chirurgie  ;  &  l'art 
dut  néceiTairement  fe  reiTemir  de 
rinfuffifance  de  cette  voie,  pour 
tranfmettre  Tes  préceptes. 

La  perte  de  la  Chirurgie  étoit 
donc  alTurée.  Il  ne  falloit  rien 
moins  pour  prévenir  ce  malheur , 
qu'une  loi  fouveraine  qui  rappel- 
lât  cet  art  dans  Ton  écat  primitif. 
L'établiiTement  de  cinq  démonf- 
trateurs  royaux  en  1724 ,  pour 
enfeigner  la  théorie  &c  la  pratique 
de  l'art,  la  fit  efpérer.  Bientôt 
après  y  elle  parut  comme  prochai- 
nement annoncée  en  173 1  par  la 
formation  de  l'académie  royale  de 
Chirurgie  dans  le  Corps  de  Saint 
Côme  ;  &  ce  fut  enfin  TimpreiSon 
du  premier  volume  des  mémoires 
de  cette  nouvelle  compagnie ,  qui 
amena  l'inftant  favorable  où  il 
plut  au  Roi  de  prononcer.  Cette 
loi  mémorable  non  feulement;  pré- 
veint  en  France  la  chute  de  la 
Chirurgie ,  mais  en  aiTure  à  ja- 
mais la  confervation  &  les  pro» 
grès,  en  fermant  pour  toujours 
les  voies  par  lefquelles  on  avoit 
penfé  conduire  la  Chirurgie  à  fa 
perte. 

III.  Suivant  le  droit  Romain  , 
oh  l'impéritie  étoit  réputée  une 
faute ,  le  chirurgien  étoit  tenu  de 
l'accident  qu'il  avoit  occafionné 
par  fon  impéritie.  Mais  ,  parmi 
nous  ,  un  chirurgien  n'eil  pas  reC» 
ponfable  des  fautes  qu'il  fait  par 
ignorance  ou  par  impéritie  ;  il  faut 


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CH 

quil  y  ait  du  dol  ou  quelqu*autre 
circonftance  qui  le  rende  coupable. 
CHITON  ,  Ch'uon  ,  XiTûîr  ♦ 
(a)  nom  que  les  Grecs  donnoient 
à  leur  habit  le  plus  ordinaite  ;  & 
cet  habit  étoit  la  tunique  ,  efpèce 
de  robe  ,  qui  defcendoit  jufqu'aux 
genoux,  &  quelquefois  jufqu'aux 
talons.  Ils  appelloient  ces  tuniques 
longues ,  «ïto/m/ïm;  X'''"*^''* 

CHITONE,  Chitone,{h)  fur- 
nom  de  Diane.  Elle  fut  ainfi  ap- 
pellée,  du  culte  qu'on  lui  rendoit 
dans  un  petit  bourg  de  TAttique , 
ou  peut-être  du  mot  Grec  X''^ùûy% 
habit ,  parce  qu'on  lui  confacroit 
les  premiers  habits  des  enfans.  On 
la  nommoitaufli  Chitonie. 

CHITONÉADE,  Chitoneas, 
(c)  efpèce  de  danfe  en  l'hon- 
neur  de  Diane.  On  y  jouoit  de  la 
flûte. 

CHITONIE,  Chltonia,  fur- 
nom  de  Diane  ,  le  même  que  ce- 
lui de  Chirone,  Foye^  Chitone. 

CHITONIES .  Chïtonia,  (d) 
Çêtes  que  Ton  célébroit  en  l'hon- 
neur de  Diane  de  Chitone ,  village 
de  l'Attique ,  d*ou  cette  Diane  fut 
appellée  Chitonie. 

CHITONISQUE  ,  Chitonif^ 
eus  ,  X/T<»fiVx»ç  »  (e)  nom  d'une 
tunique  de  laine  que  les  Grecs 
portoient  fur  la  peau ,  &  qui  leur 
fervoit  de  chemife.  Les  Romains , 
qui  avoient  le  même  vêtement  » 
l'appelloient  fubucula» 

(*)  Antîq.  cxpl.  par  D*  Bern.  de 
iklontf.  Tom.  III.  pag.  3. 

(*)  Amiq.  cxpl.  par  D.  Bcrn.  de 
Monif.  Tom.  II.  pag.  jï». 

(c)  Antiq.  expl.  par  D.  Bern.  de 
Montf.  Tom.  III.  pag.  31X. 

{d)  Antiq.  expl.  par  D,  Betn.  de 
Mom£  T.  II.  p.  xia. 


CH  85 

CHIUS,  Chius,  X-c;,  (y) 
£ls  de  Neptune  &  d*une  nymphe» 
Il  eft  parlé  de  Chius  au  commen- 
cement de  l'article  de  Chio.  Foyei^^ 
cet  article. 

CHIUS  ,  Chius ,  un  des  jet$ 
des  dés*  Quelques  Auteurs  pen- 
fent  que  c*étoient  les  trois  trois  ; 
d'autres ,  les  trois  unités» 

CHLAMYDE,  a/tf/nyj,  {g) 
forte  d'habit  »  qui  fut  fur  tout  cil 
ufage  chez  les  Grecs  &  chez  les 
Romains.  On  le  mettoit  fur  la 
tunique  comme  un  furtout  ou 
comme  un  manteau.  Voilà  ce  qu'il 
y  a  de  certain  ;  car ,  pour  ce  qui 
eft  de  fa  forme  ,  les  Auteurs  ne 
font  pas  plus  d'accord  entr'eux  ^ 
que  fur  la  plupart  des  autres  vê- 
temens  des  Anciens.  Quelques- 
uns  ont  dit  que  c'étoit  la  même 
chofe  que  la  toge  Romaine  ;  mais , 
ce  fentiment  eit  rejette  de  la  plu- 
part. D'autres  difent  plus  vraifem- 
blablement  que  la  Chlamyde  ne 
difFéroit  point  du  fagum  ou  palu- 
damentum  ,  fondés  fur  Tétynrolo- 
gie ,  qui  dit  que  la  Chlamyde  eft 
ce  qu'on  appelloir  (ra7cç  %  &  fur  la  ' 
définition  de  Nonius  qui  aHure 
que  le  paludamentum  étoit  ce  que 
l  on  appelloit  de  fon  tems  ,  Chla- 
ftiyde.  Chez  les  Grecs  on  fe  fer- 
voit de  cet  habit  en  guerre  &  en 
paix  >  comme  plufieurs  Auteurs 
en  font  foi. 

La  Chlamyde  étoit  toute  ou« 

{$)  Antiq.  expl.  par  D.  Berû.  de 
Montf.  Tom.  III.  pag.  4. 

(/)  Pauf.  p.  404.  ^    ^  . 

(/)  Antiq.  expl.  pat  D.  Bcrn.  de 
Montf.  Tom.  III.  p.  6.  «Jr  friv,  Mém. 
de  TAcad.  des  Infcripc.  &  ficll.  Lecc. 
T.  IX.  p.  185 1  186. 


Fij 


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84  C  H 

verte  ,  &  s'attachoit  avec  une 
boucle  fur  l'épaule ,  enforte  que 
le  côté  oîi  s'attachoit  la  boucle 
étoit  tout  découvert.  On  mettoit 
ordinairement  la  toucle  fur  l'é- 
paule droite  ,  afin  que  le  bras 
droit  denieurat  libre  ,  comme  on 
robferve  fur  lès  monumens* 

Il  y  avoit  deux  fortes  de  Chla- 
mydes  y  la  Macédonienne  ,  &  la 
commune  \  la  Chlamyde  Macé- 
donienne étoit»  félon  quelques- 
uns  ,  fermée  à  rextrêmité  d'en 
bas  ;  on  prétend  trouver  la  forme 
de  la  Chlamyde  commune  dans 
ce  paffage  de  Macrobe  :  Les  An- 
ciens cm  dit  que  toute  la  terre  ha^^ 
hitahle  étoit  femblable  à  une  Chla* 
myde  étendue.  Mais  ,  Rubénius 
foûtient  qu'il  n'y  avoit  aucune 
différence  entre  ta  Chlamyde  Mai- 
cêdonienne  &  la  commune,  11  eft 
en  effet  fort  difficile  d'entendre 
comment  une  Chlamyde  ,  qui 
étoit  une  efpèce  de  manteau ,  pou- 
voît  être  fermée  à  Fextrêmité 
d'en  bas.  Le  paffage  d'Ammonius 
qu  on  allègue  pour  prouver  qu'elle 
étoit  fermée  en  bhs  ,  peut  fort 
bien  s'entendre  en  cette  manière  » 
que  la  Chlamyde  Macédonienne 
étant  fort  large  ,  les  deux  côtés 
fe  réunifToient  par  le  bas  »  fans 
€tre  joints  ni  cou  fus  enfemble  , 
comme  les  deux  cô;és  de  nos 
manteaux  fe  touchent  fans  être 
attachés  l'un  à  l'autre. 

Démétrius ,  roi  de  Macédoine  , 
dit  Plutatque  ,  fit  faire  une  Chla- 
fnyde  de  grand  prix  ,  qui  avoit  la 
figure  du  monde  ,  &  qui  repré- 
fentoit  les  aflres;  ce  qui  femble 
marquer  une  Chlamyde  étendue 
&  qui  n'eft  pas  fermée,  Pline  efl 


CH 

plus  clair ,  lorfqu'il  dit  que  Dîno- 
charès  qui  bâtit  Alexandrie  ,  fous 
les  ordres  d'Alexandre  le  Grand , 
donna  à  cette  ville  la  forme  d'une 
Chlamyde  Macédonienne  ;  qu'elle 
avoit  la  rondeur  de  la  Chlamyde 
avec  quelques  inégalités  fur  les 
bords  ,  &  que  fes  deux  angles 
s'étendoient  à  droit  &  à  gauche  ; 
ce  qui  marque  évidemitient  que 
la  Chlamyde  Macédonienne  n'é- 
toit  pas  jointe  en  bas  aux  angles 
des  deux  côtês«  Cela  prouve  en 
même  tems  que  la  Chlamyde 
Macédonienne  ne  différoit  point 
des  autres  Chlamydes ,  hors  peut- 
être  pour  la  grandeur. 

11  faut  convenir  que  ce  nom  de 
Macédonienne  ,  donné  par  les 
Auteurs  à  cette  efpèce  de  Chla« 
myde  ,  femble  marquer  quelque 
diiOférence  ;  mais ,  on  ne  fçauroic 
dire  précifément  en  quoi  elfe  dif- 
féroit des  autres  ^  non  plu>  que  U 
Theffalienne ,  dont  parle  Héfy* 
chius  ôc  les  autres  Gramipairieas, 
&  à  laquelle  Philoflrate  ^  dans  k% 
Héroïques,  femble  donner  une  for- 
me particulière» 

La  ChUmyde  étoit  aufli  eo 
ûfage  chez  les  Romains  ;  nous 
trouvons  dans  les  anciens  monu- 
mens  plufieurs  Empereurs  &  offi- 
ciers d'armée  avec  cette  forte  de 
manteau  qu'on  appelloit  paluda- 
mentum.  S'il  étoit  la  même  chofe 
que  la  Chlamyde ,  comme  il  y  a 
apparence  »  &  comme  le  dit  ex- 
preffément  Nonios  Marcellus  , 
nous  ne  manquons  pas  de  figu- 
res de  la  Chlamyde.  D.  Bernard 
de  Montfaucon  nous  en  donne  un 
nombre  dan«  fes  amiquhés.  Il  efl 
viaifemblable    que    l'Éphefiride 


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CH 

étoît  la  même  chofe  que  la  Chla- 
myde  ;  Ariémidore  dit  expreffé- 
ment  que  ce  qu'on  nommoit  Chla- 
oiyde  y  s'appelloit  auffi  Man- 
dyas ,  Épheftride  &  Birrhus. 

Certains  prétendent  qu'il  y  avoît 
quatre  ou  cinq  efpèces  de  Chla* 
mydes ,  celle  des  enfans  ,  celle 
des  femmes,  &  celle  des  hom* 
mes  ;  &  parmi  les  Chlamydes  des 
hommes ,  on  diflineuoit  celle  du 
peuple  &  celle  de  TEmpereur. 
^  CHLAMYDIA,  a/^/wy</w, 
l'un  des  noms  ,  qu'a  porté  lifle 
de  Délos.  Voyej^  Délos. 

CHLANIS ,  CHLANIDION , 
Chlanis  ,  Chlanidion,  V,  Chlene. 

CHLARHILES  [  la  Nation 
des  ]  ,  ChlarhUorum  gens.  C'étoit 
on  peuple  des  Gaules  près  du 
Rhône  ,  félon  FeOus  Aviénus, 
ou  plutôt  félon  les  éditions  qu'a 
eues  Ortélius  ;  '  car ,  celle  d'Ox- 
ford porte  Chahilcorum. 

CHLENE  9  Chiana  ,  X}iatfct , 
U)  efpèce  de  vêtement ,  que  les 
Romains  appelloient  Lene  *  étoit 
en  ufage  dès  les  tems  héroïques. 
Cétoit  une  efpèce  de  furtout  »  qui 
fervoit  à  garantir  du  froid  &  des 
autres  injures  des  faifons. 

Il  y  en  avoit  de  doubles  ,  & 
d'autres  toutes  (impies  fans  four* 
rore  ;  on  s'en  fervoit  la  nuit  com- 
me de  couverture.  On  donna  à 
Priam ,  lorfqu'il  coucha  dans  la 
tente  d'Achille ,  des  Chlenes  four- 
rées pour  fe  couvrir  la  nuit.  Saint 
Benoit  veut  qu'on  en  donne  une  à 
chaque  religieux ,  fans  doute  pour 
cet  ufage  :  Stramenta  autcm  Icfto' 
Tumfu^cîant  matta  ,  fagum  ,  /<f- 


,     CH  8î 

na  &  capitale.  Dom  Bernard  de 
Montfaucon  croit  que  le  religieux 
fe  mettoit  dans  le  fagum  ou  le 
faie,  &  qu'il  fe  couvroit  de  la 
Chlene.  On  s'en  fervoit  à  la  guer- 
re ,  comme  on  peut  le  voir  dans 
l'Odyffée  d'Homère.  Il  n'eft  guè- 
re ^'habit,  dont  l'ufage  fe  trouve  ' 
plus  fréquemment  dans  les  Au« 
teurs.  Il  eft  quarré ,  dit  Ammo* 
nius  ;  figure  propre  à  fervir  la  nuit 
comme  le  jour. 

Il  y  avoit  un  autre  habit  à  peu 
près  femblable  pour  la  forme, 
qu'on  appelloit  Chlanis  ou  Chla-» 
nidion ,  qui  étoit  d'une  étoffe  plus 
légère  &  plus  douce ,  &  qui  fer- 
voit aux  femmes  aufli-bien  qu'aux 
hommes.  On  croit  auffi  que  U 
fifyre  écoit  une  efpèce  ou  Chlene 
d'une  étoffe  plus  groflière ,  &  qui 
fervoit  auffi  le  jour  &  la  nuit. 

Le  Chlanidion  fe  nommoit  en- 
core Hymation.  Il  paroit  par  celui 
qu'on  voit  à  la  femme  de  Prufias  , 
préfet  de  Tifle  de  Cos ,  qu'il  ne 
defcendoit  pas  jufqu'aux  talons. 
Le  Chlanidion  faifoit  auffi  [>artie 
de  l'habillement  des  Babyloniens  ; 
mais ,  il  ne  defcendoit  pas  ù  bas 
aux  Babyloniens  qu'aux  femmes 
Grecques. 

CHLÉNÉAS  ,  CfiUneas  ,  (^) 
Étolien ,  qui  fut  député  vers  les 
Lacédémoniens  pour  les  engager 
à  entrer  dans  un  traité  ,  que  teux 
de  fa  nation  avoient  fait  avec  les 
Romains.  Il  repréfenta  vivement 
aux  Lacédémoniens  ,  tous  les 
maux  dont  les  rois  de  Macédoine 
les  avoient  accablés  ;  le  deffeia 
qu'ils   avoient  toujours  eu  »   & 


C*>  Antiq.  cxpU  par  D,   Bern. 
Mootf.  T.  m.  p.  8« 


de  I     (*)  RoU.  Hia.  Ane.  T.  IV.  pag.  408  j^ 
1^  p  ... 

t  ni 


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8^        ,    CH 

qu'ils  avoîent  encore  d*opprîmer 
la  liberté  de  la  Grèce  »  en  parti- 
culier l'impiété  facriiege  dont  avoit 
ufé  Philippe  en  pillant  un  temple 
dans  la  ville  de  Therme  ;  la  noire 
perfidie  &  la  cruauté  qu'il  avoit 
exercées  contre  les  Meuéniens*  Il 
ajouta  qu'ils  n'avoient  rien  à 
craindre  de  la  part  d^s  Achéens , 
lefquels ,  après  toutes  les  pertes 
qu'ils  a  voient  faites  dans  la  der- 
nière campagne,  fe  trouveroient 
fort  heureux  de  pouvoir  défendre 
leur  pais  ;  que  pour  Philippe  , 

.  quand  il  Verroit  les  Étoliens  les 
attaquer  par  terre ,  les  Romains 
&  Attale  par  mer ,  il  ne  fongeroit 
point  à  porter  Tes  armes  dans  la 
Grèce.  Il  conclut ,  en  demandant 
que  les  Lacédémoniens  perfévé- 
radent  dans  l'alliance  qu'ils  avoient 
faite  avec  TÉtolie  »  ou  que  du 
moins  ils   demeuraient  neutres. 

,  Le  fragment  de  Polybe ,  oii  cette 
harangue  eil  rapportée ,  en  de- 
meure là  ,  &  ne  marque  point 
quel  en  fut  le  fuccès. 

CHLÉVOCHARME ,  ChU^ 
yocharmus  ,  %\suoXf*Pf*o^*  W  C'é- 
toit  un  homme ,  que  Lucien  re- 
préfente  fans  chapeau  ni  (buliers , 
couvert  d'un  méchant  manteau , 
ii  qui  parloit  entre  fes  dents. 

CHUDON  ,  Chlidon  ,  X>r- 
/ûtfr»  {éi)  Thébain,  Hippofthéni- 
<las,  l'un  de  ceux  qui  s'étoient 
joints  à  Pélopidas  pour  délivrer 
Thebes  de  la  tyrannie  d'Archias 
&  de  Léontidas  j  vint  à  sHmagi- 
ner  que  c'étoit  une  entreprife  trop 
pleine  de  difficultés  &  d'obfiacles  ; 


CH 

&  îl  réfolut  d'engager  les  conju- 
rés à  différer  du  moins  l'exécution. 
Il  leur  dépêcha  pour  cet  effet  Chli- 
don qui  étoit  un  de  fes  amis.  Chli- 
don s'en  va  chez  lui  en  diligence, 
tire  fon  cheval  de  l'écurie ,  &  com- 
mande à  fa  femme  de  lut  apporter 
la  bride.  Sa  femme ,  ne  fçachanc 
où  elle  étoit ,  &  ne  pouvant  la 
trouver  ,  dit  qu'elle  l'a  prêtée  à 
un  voifin.  Chlidon  s'emporte  ;  on 
en  vient  aux  injures ,  &  de- là  aux 
malédiâions.  Sa  fethme  vomit 
contre  lui  les  imprécations  les 
plus  affreufes ,  &  prie  les  dieux 
que  fon  chemin  lui  foit  funefte  à 
lui  &  à  ceux  qui  l'ont  envoyé  ; 
de  forte  que  Chlidon  ayant  perdu 
par  fon  emportement  la  plus  gran- 
de partie  du  jour  à  ce  démêlé ,  & 
.  tirant  même  de  ce  qui  venoit  d'ar- 
river une  fprte  de  mauvais  augure, 
renonce  à  ce  voyage ,  &  va  d'un 
autre  côté.  On  dit  qu'il  alla  cher- 
cher Hippothénidas  &  ne  l'ayant 
pas  trouvé  ,  il  alla  chez  un  des 
conjurés  oU  il  fe  doutoit  bien  qu'il 
le  trouveroit  ;  &  il  y  alla  pour  lui 
dire  d'envoyer  un  autre  meiïàger 
à  fa  place.  Ce  fut  cependant  ce 
retardement  même  de  Chlidon, 
qui  fauva  la  ville  de  Thebes ,  par- 
ce que  pendant  ce  tems-là  Pélb- 
pidas  6c  ceux  de  fa  bande  y  en- 
trèrent ,  &  exécutèrent  leur  def* 
fein  contre  les  tyrans. 

CHLIDON  ,  Chlidon  ,  X>f- 
/«F ,  (c)  forte  de  bracelet ,  qui 
étoit  en  ufage  çhe:&  les  Grecs  & 
chez  les  Romains. 

CHLOE ,  Chloe  ,  {d)  furnom 


(s)  Lucian.  T.  II.  p.  1005- 

(h)  Plut.  T.  I.  p.  981. 

Iç)  Antiq.  expl.  ^   D.  Itercu  é 


JMontf.  Tom.  III.  p.  50. 
{d)  Hom.  L.  UU  Ode.  ap.  r.  1^ 


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CH 

que  Ton  donnoit  à  Cérès.  Horace 
^  parle  de  Chloé  ,  qu'il  appelle  ar- 
rogante. 

CHLOÉ,  Chloe,  Xaoh,  {a) 
dame  Chrétienne  de  la  ville  de 
Corinthe ,  qui  fît  avertir  S.  Paul 
des  contefiations  furvenues  encre 
les  fidèles  au  Ai  jet  des  difFérens 
partis  qu'ils  épouibient  »  l'un  di- 
Um  je  fuis  a  Paul  y  Vzutre  je  fuis 
à  Apollos  f  l'un  je  fuis  à  Pierre , 
&  l'autre  je  fuis  à  Jefus-Chrift. 
L'Apôtre  entreprit  d'étouffer  ces 
faâions ,  en  leur  repréfentant  que 
Paul ,  Apollos  &  Pierre  n'avoient 
pas  été  crucifiés  pour  eux ,  &  qu'il 
n'y  avoit  que  Jefus-Chrifî  qui  fût 
leur  Sauveur  ;  que  Jefus-Chrifl 
nëtoit  point  divifc  pour  faire  tant 
de  partis,  &  exciter  tant  de  tumul- 
te; que  Paul ,  Apollos  &  Céphas 
ne  prêchoient  &  ne  bâtifoient 
point  pour  fe  faire  des  feâateurs, 
mais  pour  gagner  des  membres 
&  des  difciples  à  Jefus-Chrifl. 

Au  refte ,  Chloé  n'écrivit  pas 
elle-même  à  Saint  Paul  ;  mais , 
elle  fit  écrire  par  quelques-uns  de 
fa  maifon.  Saint  Chry foftôoie  con- 
jeâure  qu'elle  employa  pour  cela 
Etienne,  Fortunat  &  Achaïque  , 
qui  étoient  les  premiers  de  l'A- 
chaïe.  Quelques-uns  ont  pris 
Chloé  pour  un  homme;  mais, 
c'eft  un  nom  de  femme, 

CHLOIES  ,  Chloia ,  {b)  fêtes 
que  l'on  célébroit  à  Athènes.  On 
immoloit  à  cette  fête  un  bélier  à 
Cérès.  Quoique  Paufanias  dife 
que  cette  dénomination  a  quelque 
chofe  de  myûérieux ,  M.  Potter 


CH  87 

dit,  avec  vraifemblance  y  qu'elle 
peut  venir  de  Chloé  ,  herbe ,  nom 
qui  convient  à  la  DéefTe  des  moif^ 
ions. 

CHLORÉE  ,  Chloreus  ,  (c) 
capitaine  Phrygien  ou  Troyen  , 
qui  étoit  confacré  à  Cybele.  I( 
avoit  été  autrefois  prêtre  dans  le 
temple  de  cette  Déefle. 

Dans  une  bataille,  oii  Camille, 
reine  des  Volfques  ,^ombaitoit 
contre  les  Troyens  ,  Chlorée 
s'offrit  par  hazard  aux  yeux  de 
cette  Princefle  ,  avec  des  armes 
éclatantes,  monté j|ar  un  courtier  ' 
écumant ,  dont  la  houife  étoit  une 
peau  garnie  d'or  &  couverte  d*é- 
cailles  de  bronze ,  en  (orme  de 
plume.  Ses  habits  étoient  d'une 
teinture  étrangère ,  couleur  de 
pourpre.  Une  agraffe  d'or  re- 
trouiîbit  fon  manteau  militaire  de 
(in  )aune.  Son  arc  de  corne  étoit 
de  Lycie ,  &  fes  flèches  de  Gorty- 
ne  ;  fes  tuniques  &  fes  brode* 
quins ,  à  la  manière  des  Barba*- 
res ,  étoient  brodés.  L'or  éclatoit 
fur  le  cafque  de  ce  Prêtre ,  fur  fon 
carquois ,  &  fiir  fon  arc.  Camille  , 
foit  pour  avoir  la  gloire  de  fuf- 
pendre  des  armes  Troyennes  à  la 
porte  d'un  temple  ,  foit  pour 
le  parer  elle-même  de  ces  fuper- 
bes  armes  dans  les  forêts  ,  ne 
cherchoit  qu'à  combattre  contre 
ce  Phrygien  ,  dont  la  brillante 
dépouille ,  excitant  la  cupidité  de 
fon  fexe ,  étoit  l'objet  de  fes  aveu- 
gles défirs.  Tandis  que  fans  pré- 
caution elle  s'avance  pour  l'attein- 
dre >  Aruns  lui  lance  fon  dard. 


{a)  Ad  Corinth.  £pifi.  I.  c.  1.  v.  11.  iMontf.  Tom.  H.  p.  xi%. 
ér  fi<i,  I     (e)  Virg.  i£neid,    L.  XI.  v. 

ib)  Antîq.    expL  par  P.   Bern.  de|/ff.  L.  XU«  v.  36^* 

Fiv 


768.* 


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88  CH  V 

dont  il  la  blefle  à  mort.  Pour 
Chlorée  ,  il  fut  tué  depuis  par 
Turnus. 

CHLORIS,  Chlorls,XxZpiÇy 
(a)  la  plus  jeune  des  filles  d*Am- 
phion  &  de  Niobé  ,  naquit  à 
Orchomène  ,  ob  regnoic  fon  père, 
Nélée  répoufa  à  cauf'e  de  fa  par- 
faite beauté  ,  après  lui  avoir  fait 
une  infinité  de  préfens  très- ma- 
gnifiques* Elle  régna  avec  lui  à 
Pylos  ,  &  lui  donna  trois  fils  ^ 
Neftor,  Chromius&  le  fier  Péri- 
clymène  ,  &  une  fille  nommée 
Péro ,  qui ,  par  fa  beauté  &  par 
fa  fageile  ,  fut  la  merveille  de 
fon  temSé 

L'on  voyoit  à  Argos  dans  le 
temple  de  Latone,  une  flatue  de 
Chloris*  Les  Argiens  prétendoient 
que  le  premier  nom  de  cette  prin- 
cefTe  fut  Mélibée  ;  qu'Apollon  6i 
Diane  immolèrent  à  leur  reffen- 
timent  tous  les  enfans  d'Amphion, 
à  la  réferve  de  cette  jeune  fille , 
&  de  fa  fœur  Amyde ,  qui  feules 
avoient  bien  voulu  implorer  les 
bontés  de  Latone  ;  que  Mélibée 
effrayée  de  la  colère  de  ces  divi- 
nités n'avoit  pu  s'empêcher  de 
marquer  fa  crainte  par  fa  pâleur, 
&  que  cette  pâleur  lui  étant  tou- 
jours reftée  depuis ,  on  a  voit  chan- 
gé fon  nom  de  Mélibée  en  celui 
de  Chloris.  Si  Ton  en  croit  les 
Argiens ,  ce  furent  ces  deux  filles 
qui  firent  bâtir  un  temple  en 
l'honneur  de  Latone  ;  mais  »  pour 
tnoi ,  die  Paufanias  ,  qui  m'atta- 
che à  Homère  plus  fcrupuleufe- 
ment  que  les  autres ,  je  ne  puis 


CH 

croire  qu'il  foit  refté  aucun  des 
enfans  de  Niobé  ;  le  Poëte  s'en 
explique  affez  nettement  : 

Pas  un  ne  fe  fauva  de  leur  juflc 
courroux. 

On  peut  juger  par  ce  vers  fi  Ho- 
mère n'étoit  pas  perfuadé  que  tou- 
te la  race  d'Amphion  avoit  été 
détruite. 

Le  nom  de  Chloris  en  Grec 
(x^mÇiQ  pallidus  ,  pâle. 

Les  Éléens  difoient  que  Chlo- 
ris fut  la  première  qui  remporta 
le  prix  de  la  courfe,  aux  jeux  qui 
avoient  été  inditués  en  Thonneur 
de  Junon. 

CHLORIS,  Chloris^  Xx^piç^ 
déefle  des  fleurs  ,  la  même  que 
Flore  ,  qui  fut  mariée  au  vent 
Zéphire. 

CHLORIS  ,  Chloris  ,  XaS^/ç» 
femmf  d'Ampyx,  duquel  elle  eut 
Mopfus. 

CHLORON,  Chloron,  {h) 
terme  qui  fe  \k  fur  un  monument. 
M.  le  comte  de  Caylus  l'interprète 
ainfi  :  Collyre ,  efpèce  de  diar- 
rhodon  ,  â  colore  viridi, 

CHLORUS,  Chlorus,  rivière 
de  l'Afie  mineure  dans  la  Cilicie  » 
félon  Pline. 

e  H  N  A  ,  Chna.  Etienne  de 
Byzance  dit  :  c'ed  ainfi  que  l'on 
appelloit  autrefois  la  Phénicie. 
Saumaife  ,  ne  trouvant  aucun 
Ancien  qui  lui  ait  donné  ce  i^om, 
croit  qu'Etienne  de  Byzance  avoit 
écrit  :  c'ed  ainfi  que  s'appelloit 
une  ville  de  Phénicie.  Mais,  le 
içavant  Bochart  a  beaucoup  mieux 

[s)  Homer.  OdylT.  L.  XI.  v,  280.  ér  |  T.  VI.  p.  97. 
/f^.  Pauf.  p.  i»4>  Î18  ,  665.  Myih.  pari     (*)  Recueil  d'Anwq.  par  M.  le  Cûmtt. 
M.  TAbb.  Ban.  Tum.  IV.  p,  196  »  i97.|deCayl.  Xom.  I.  p.  %%f. 


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CH 

rencontré ,  lorfqu'il  a  dit  que  Chna 
e(l  un  diminutif  de  Chanaan ,  & 
le  mot  Chna  fe  trouve  dans  Phi- 
Ion  de  Bibbs  ,  interprète  de  San- 
clîoniaton  ,  dont  Eurebe  nous  a 
confervé  quelques  tVa^mens. 

CHNODOMAIRE,  Chno- 
domarius  ,  roi  des  Allemands  , 
vainquit  Décence  ,  frère  du  tyran 
Magnence  ,  en  bataille  rangée  » 
fous  l'empire  de  ConOance  ,  l'an 
ce  J.  C.  351,  courut  les  Gaules , 
lîi  ravagea  fans  réfilUnce  ,  & 
filla  plufieurs  villes  fort  riches. 
Julien  ,  après  une  grande  vidoire 
cu'il  remporta  fur  lui  près  du 
xhin ,  le  fit  prifonnler  en  3 57 ,  & 
ienvoya  à  Tempereur  Confiance 
â  Rome ,  où  il  mourut  de  ma- 
hdie. 

CHNOUBIS  ,  ou  Chnou- 
Ms  ,  Chnoubis  ,  Chnoumîs ,  {a) 
>you£);  ,  XK:t/^:ç.  On  remarque 
qie  cette  Infcription  Chnoubis  fe 
rencontre  affez  fouvent  fur  les 
^.braxas,  &  que  quelquefois  au 
liîu  du  X  il  y  a  une  croix  parfaite 
anfi  f .  Saumaife  croit  que  c'eft 
m  des  trente-fix  doyens,  qui, 
fdon  les  Gnoftiques  ,  préfidoient 
à  coût  le  Zodiaque.  Ne  pourroit- 
01  pas  dire  que  la  croix  efl  là 
pour  un  A  »  6c  qu*il  faut  lire 
A'it/fe<ç ,  Anubis  ,  dieu  des  Égyp- 
tiais,  qui  fe  trouve  aflez  fréquem- 
ment fur  ces  pierres. 

CHOANE,  Choana  y  X^av*, 
(h)  ville  d'Afie  dans  la  Médie , 
feUn  Ptolémée.  Quelques  exem- 
plares  portent  Choave.  C'eft  la 

(é  Anciq.   expl.   par    D.   Bcrn#    de 
Monrf.  Toin.   II.   pag.  }6i, 
(*)  Ptolem.  U  Vï.  c.  i. 
(c)  Piolcm.  L.  VI.  c.  5. 


CH  «9 

même  que  Diodore  de  Sicile,  ap- 
pelle Chaoi\e. 

CHOANE  ,  Choana  ,  Xd%»fle  « 
(c)  ville  d*Afie  dans  la  Panhie^ 
félon  Ptolémée. 

CHOANE,  Choana  y  Xiorvof, 
{d)  ville  d' Afie  dans  la  Badriane , 
félon  ïe  même. 

CHOANIENS,  Choani,  {e) 
peuples  de  TArabie  heureufe  ,  fé- 
lon Pline.  On  lit  dans  les  Meta- 
morphofes  d*Ovide  : 

Infiabant  parte  fini/ira 

Chaonius  Molpeus  ;  dextra  Naba^ 
thaus  Ethemon. 

Quelques  Commentateurs  d'O- 
vide l'expliquent  de  la  Chaonie 
contrée  d'Épire  ;  mais  ,  comme 
Tont  judicioufemetu  remarqué 
d'autres  Critiques  qui  ont  travaillé 
fur  cet  Auteur  ;  pourquoi  Ovide 
auroit-il  mis  un  Grec  encre  des 
Arabes  dans  un  combat  donné 
en  Ethiopie  au  fujet  du  mariage 
d'Andromède  ?  Ils  ont  bien  vu 
qu'il  falloit  lire  dans  Ovide  Choa- 
nius  ,  &  non  pas  Chaonius.  Le 
P.  Hardouin  eft  auffi  de  ce  fen- 
timenc.  On  objeéle  que  les  ma- 
nufcrits  portent  tous  fans  varia- 
tion ,  Chaonius  ,  excepté  celui  de 
Leyde  oîi  Ton  lit  Cahonius  ;  cette 
uniformité  prouve  tout  au  plus 
que  la  faute  eft  ancienne  ,  & 
qu'elle  a  été  copiée  par  un  grand 
nombre  de  gens  ,  qui  n  enten» 
doient  pas  ce  qu'ils  écriv  oient. 

CHDASPES  ,  Choafpes  , 

(i)  Ptolem.  L.VI.  eu. 
\e)  Plin.  T.  I.  p,  340.  Ovid.  Mctam, 
L.  V.  c.  s. 


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9o^  CH 

Xo/>tm;  ,  (a)  fleuve  d'Afie  ,  qui 
avoit  fa  fource  dans  les  monta- 
gnes de  Médie ,  au-deffus  d'Ec- 
batane ,  ville  fituée  fur  les  rives 
de  ce  fleuve.  Pline  dit  qu'il  fe 
jetcoit  dans  le  Pafitigris. 

Strabon ,  qui  fait  auflS  mention 
du  Choafpes  ,  rapporte  que  félon 
Polyciete,  le  Choafpes,  TEulée 
&  le  Tigre,  c'eft-à-dire,  lePafi- 
tîgris ,  fe  joignoient  dans  un  même 
lac  ^  &  fe  rendoient  de-là  dans  la 
mer;  ce  qu'il  faut  entendre  du 
golfe  Perfique.  Le  même  Au* 
teur  ,  parlant  de  la  ville  de  Sufe  , 
dit  :  n  Elle  eft  fituée  au  milieu  des 
9  terres  au  de-là  du  Choafpes 
»  auprès  d'un  pont  ;  la  Sufiane 
»  s'étend  jufqu'à  la  mer  ;  &  fa 
»  côte  eft  depuis  les  frontières 
»  de  celle  de  Perfe  jufqu'à  l'em- 
»  bouchure  du  Tigre  ,  environ 
»  Tefpace  de  trois  mille  ftades. 
»  Le  Choafpes,  qui  traverfe  la 
»  Sufiane,  finit  à  cette  côte ,  &  a 
»  fpn  origine  chez  les  Uxiens.  a 
Cette  dernière  opinion  de  Strg- 
bon  n'eft  point  exa£le ,  Ci  la  pofi- 
tion  que  M.  d'Anville  donne  aux 
Uxiens  ,  dans  fa  carte  des  AiTy- 
riens  &  autres  peuples  d'Afie,  eft 
jufte  ;  car  ,  il  les  met  dans  les 
montagnes  près  de  la  Sufiane. 

L'eau  du  Choafpes ,  au  rapport 
de  Quinte-Curfe ,  étoit  fort  cé- 
lèbre pour  être  exquife  &  déli- 
cieufe  à  boire.  Et  Hérodote  par- 
lant des  préparatifs ,  qu'on  avoit 
faits  pour  une  expédition  de  Cy- 
rus  ,  dit  que  Ton  portoit  entr'au- 
tres  chofes   de  l'eau   du  fleuve 


CH 

Choafpes  qui  paiToit  dans  Sufe, 
parce  que  le  Roi  ne  buvoit  point 
d'autre  eau  que  de  cette  rivière. 
Une  quantité  de  chariots  qui 
étoient  traînés  par  des  mulets  y 
portoient  dans  des  vaifleâux  d'ar- 
gent ,  cette  eau  qu'on  avoit  fait 
auparavant  bouillir  ,  &  fuivoient 
par  tout  le  Roi. 

CHOASPES  ,  Choafpes  ,  {h) 
Xoa0-7Mç  y  fleuve  des  Indes  ,  qai 
naiflbit  au  monc  Paropamife>  & 
alloit  tomber  dans  le  Cophé. 
Quinte-Curfe  fait  mention  de  ce 
fleuve.  Selon  cet  Hiftoricn  ,  Ale- 
xandre le  pafla,  dans  fon  expéd- 
tion  des  Indes.  L'embouchure  du 
Choafpes  dans  le  Cophé  étoit  aa- 
deflus  de  TArachofie. 

CHOBA  ,  Ckoba  ,  Xa^U.  (c) 
Le  livre  de  Judith ,  félon  les  Sep- 
tante ,  dit  que  les  Ifraëlites  ayant 
appris  la  mort  d'Holopherne  ,  & 
voyant  que  les  Aflyriens  s*ett- 
fuyoient  en  défordre  ,  les  pour- 
fuivirent  jufqu'à  Choba  ,  les  paf- 
fant  au  fil  de  Tépée.  La  Vulgate 
ne  nomme  point  ce  lieu^  &  et 
fimplement ,  ^  jufqu'à  l'extrémité 
des  frontières.  Dans  le  verfei  pré- 
cédent ,  on  lit  qu'Ozias  envoya 
à  Béthomafta ,  à  Bébaï ,  à  Cho- 
baï ,  à  Cholam  ôi  à  toutes  les  ex- 
trémités de  la  terre  d'Ifraël  peur 
leur  porter  la  nouvelle,  de  ce  qui 
venoit  d^arriver  ,  &  les  avertir  de 
tomber  tous  enfemble  for  l'ente- 
mi  qui  s'enfuyoit. 

CHOBAR,  ChoBar,  XoCtp^ 
(i)  fleuve  dont  il  eft  parlé  dans 
le  prophète  Ézéchiel.  Ce  propteiQ 


(a)  Plin.  T.  I.  p.  35?.  Strab.  p.  7*8.  le.  10. 
Q.  Curt.  L.  V.  c.  1.  Hero4.  L.  I.  c.  188.  |     (r)  Judith,  c.  15.  7.  y ,  6. 
(&J  Strab.  pag.  697,  Q.  Cuit.  L,  Vill,  I    {d)  £zech,  c.  1.  v«  1.  ë>*  /«f^ 


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CH 

ëcoît  fur  îe  bord  du  fleuve  Cho- 
bar  ,  lorfqu'il  eut  des  vifions  di- 
vines. Fbye^  Chabor. 

CHOBUS ,  Chohus ,  fleuve  de 
la  Colchide.  Arrien ,  dans  fa  lettre 
à  l'empereur  Adrien ,  contenant 
on  Périple  du  Pont-Euxin ,  comp- 
te du  (Charles  au  Chobus  90  fia- 
des  ;  de  -  là  au  fleuve  Singame 
210  Aades  tout  au  plus  ;  &  il  en 
met  630  du  Chobus  à  Sébaflopo- 
lis.  Agathias  le  nomme  àuffi  Cho- 
bus  ,  &  Pline  lit  Cobus  fans  afpi- 
ration  ;  il  dit  qu'ayant  fa  fource 
dans  le  Caucafe,  il  traverfe  le 
pais  des  Suanes. 

La  carte  de  la  Colchide  »  par  le 
père  Lamberti,  marque  bien  ce 
fieuve,  &  on  y  avertit  que  les 
habitans  le  nomment  Copî  ;  mais , 
il  y  a  une  erreur  confidérable  ; 
c'eft  qu'il  met  le  Sigamen  au  Sin- 
game d* Arrien  entre  le  Phafe  & 
le  Chobus ,  au  lieu  que  le  Cho- 
bus eft  ,  félon  Arrien  témoin  ocu* 
laire ,  entre  le  Phafe  &  le  Singa- 
me. De  plus  ,  il  fait  tomber  cette 
dernière  rivière  dans  le  Phafe ,  de 
forte  qu'elle  ne  va  point  félon  ce 
Père  jufqu'à  la  mer.  Or ,  Arrien 
dans  fon  Périple  ne  fait  mention 
que  des  embouchures  des  rivières 
qu'il  vit  en  côtoyant  le  Pont- 
Euzin,  &  en  faifant  le  tour  par  eau, 
félon  que  portoit  la  commiflion  , 
dont  Adrien  l'avoit  chargé.  S'il 
entroît  dans  quelque  rivière  »  il 
avoit  foin  d'en  avertir ,  comme 
il  fait  en  parlant  du  Chobus. 

CHOCHOME  ,  Chochome  , 
lieu  d'Egypte,  dans  lequel  Véne- 

{À)  Ezech.  c.  17.  V.  i/Ç. 
.  (*)  Juft.  L.  XXIV.  c.  «. 
(0  GeAcC  c.  14.  V.  I.  é*  fij*  M6n. 


CH  9t 

phes  V ,  roi  des  Thinîtes ,  fit  éle- 
ver des  pyramides  ,  fuivant  Hé- 
rodote ,  cité  par  Moréri. 

CHODCHOD  ,  Chodchod  , 
(tf)  nom  d'une  forte  de  marchan- 
diies,  que  le  prophète  Ézéchiel 
met  parmi  celles  que  Ton  appor- 
toit  à  Tyr.  Les  anciens  Interprè- 
tes ont  confervé  ce  terme  dans 
leurs  traduâions,  ne  fçachant  ce 
qu'il  fignifioit.  Saint  Jérôme  avoue 
qu'il  n'en  a  pu  trouver  la  fignifi- 
cation  ;  le  (Jhaldéen  l'entend  des 
perles  ;  d'autres ,  de  l'onyx ,  ou 
du  rubis  ,  ou  de  l'efcarboucle ,  ou 
du  cryilal ,  ou  du  diamant.  Cha«> 
cun  devine  comme  il  peut* 

CHODION  ,'Chodion  ,  (b) 
l'un  des  favoris  d'Afinoë  ,  fœur 
&  femme  de  Ptolémée ,  roi  de 
Macédoine.  Il  fut  député  par  cette 
Princeffe  vers  Ptolémée  ,  lofC- 
qu'elle  voulut  contraâer  avec  lui 
un  mariage ,  dont  les  fuites  furent 
fi  funedes,  &  pour  elle  &  pour  les 
enfans  ^  qu'elle  avoit  déjà  eus  d'un 
autre  mari. 

CHODORLAHOMOR ,  (c) 
Chodorlahomor ,  Xo/oMo70f(op ,  roi 
des  Élamites ,  au  tems  d*Abraham. 
Ce  Prince ,  s'étant  joint  au  roi  de 
Sennaar  6c  à  deux  autres  Rois  ^ 
porta  fes  armes  au  midi  de  TEu- 
phrate  ,  &  obligea  les  petits  rois 
de  Syrie  &  du  pais  de  Chanaan  à 
lui  payer  tribut.  Ces  Princes ,  étant 
demeurés  fournis  pendant  douze 
ans  ,  tentèrent  de  (êcouer  le  joug 
la  treizième  année  ;  ce  qui  obligea 
Chodorlahomor  de  venir  avec  fes 
alliés  dans  ce  pais.  Les  Chana- 

de  TAcad.  des  Infcript.  &  Bell.  Lett. 
Tom.  III.  pag.  348.  T.  V.  p.  334,  335, 
386. 


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92  CH 

néens  furent  battus  ;  maïs ,  Abra- 
ham étant  tombé  pendant  la  nuit 
for  l'armée  viftorieufe  avec  fes 

fjens  &  ceux  de  trois  de  fes  amis , 
a  tailla  en  pièces ,  &  reprit  tout 
le  butin  que  ces  rois  emmenoienc  ; 
ce  qui  montre  que  Tarmée  de  ces 
quatre  Princes  ligués  n'étoit  pas 
confidérable.  Comme  dans  tout 
lerede  de  la  Génèfe  ilneftplus 
parlé  de  ces  rois  d*Élam  &  de 
Sennaar ,  il  y  a  grande  apparence 
que  la  viftoire  remportée  pat 
Abraham  leur  ôta  Tenvie  de  paf- 
fer  davantage  TEuphrate  ,  pour 
faire  de  nouvelles  courfes  au  midi 
dé  ce  fleuve. 

CHŒAC   y    Chœac ,   Xo/erx  % 

Îa)  nom  d*un  des  mois  de  Tannée 
égyptienne  y  félon  Plutarque.  Ce 
mois  répondoit  à  notre  mois  de 
Décembre. 

ÇHOÊNICIDES  ,  Chocnici^ 
des.  Ce  mot ,  qui  fignifie  de  petits 
boiffe^ux  f  eft  le  nom  que  les 
Grecs ,  établis  à  Sinope  fur  le 
Pont-Euxin ,  donnoient  à  certains 
creux  enfoncés  dans  les  rochers  ^ 
&  qui  fe  rcîmpliflbiem  d'eau  lorf- 
que  la  mer  étoit  haute.  Les  Sino- 
péens  y  pêchoient  en  abotidance 
le  poifTon  qu'ils  nommoient  pela- 
mides ,  6c  qui ,  félon.  Rondelet , 
font  de  jeunes  thons* 

CHCENIX  ,  Chanix  ,  (h) 
X^mg  k  forte  de  mefure  Greque , 
qui  fut  adoptée  par  les  Romains. 
Quatre  mefures  différentes 
avoient  le  noth  de  Chœnix.  La 
plus  petite  9  communément  appel- 
léc  Chœnix  Attîque ,  ayoit  trois 


CH 

cotyles  Attiques;  la  feconde  en 
avoit  quatre.  On  en  comptoit  fis 
à  la  troifième,  &  huit  à  là  qua- 
trième ,  qui  eft  celle  dont  Fan- 
nius  a  parlé  comme  d'une  mefure 
naturalifée  à  Rome.  Aucun  An- 
cien que  nous  connoilHons  ,  n'a 
dit  qu'elle  fût  Attique  ;  mais  ,  il 
efl  aifé  de  montrer  fon  origine  & 
le  lieu  de  fa  naifTance;  il  faut  feu- 
lement fe  fou  venir  de  ce  qu'Héro- 
dote a  écrit ,  que  la  coudée  roya- 
le de  Perfe  étoit  plus  grande  de 
trois  doigts  que  la  coudée  Gre- 
que 9  OU  d'Athènes.  Par- là  nous 
voyons  que  la  proportion  entre 
les  pieds  fimples  ,  Ôc  par  confé- 
quent  entre  les  pieds  cubes  des 
deux  nations ,  étoit  celle  de  huit 
à  neuf.  Mais ,  on  ne  la  trou veroit 
pas  dans  leurs  pieds  cubes  ,  fî , 
comme  il  y  avoit  vingt -quatre 
doigts  à  la  coudée ,  il  n'y  avoit 
eu  auffi  vingt- quatre  Chœnix  At- 
tiques ,  au  médimne  Attique  ;  car 
le  même  Hiftorien  afTure  que  Tar- 
tabe ,  mefure  de  Perfe  ,  étoit  plus 
grande  que  le  médimne  Attique 
de  trois  Chœnix  Attiques,  Or ,  ce 
médimne  avoit  quatre-vingt-feize 
fextiers  ,  comme  le  dit  Galien  ,  oq 
cent  quatre-vingt-douze  cotyles 
Attiques  ;  ainfi,  le  Chœnix ,  qui  en 
étoit  la  vingt- quatrième  partie  , 
avoit  quatre  fextiers ,  ou  huit  co- 
tyles ,  comme  celui  de  Fannius. 

M.  RoUin  ,  parlant  de  l'ordre 
que  l'on  gardoit  pour  les  vivres 
dans  les  armées  des  Grecs  Ôc  des 
Romains  ,  dit  que  la  ration  de 
bled  que  Von  donnoit  à  chaque 


(s)  Plut.  T.  T.  p.  14.  I  V.  p.  741,  Mém.  de  TAcad.  des  Infc.  & 

ik)  RoU.  nm.  Ane.  T.  II.  p.  390*  X*  l  Bell.  Lect,  T.  VIII,  p.  )8o,  400.  &  friv. 


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CH 

feldat  pour  fa  nourriture  ]ourna- 
lière  ,  étoit  un  Chœnix  chez  les 
deux  peuples.  Il  ajoute  que  c'étoit 
auffi  la  nourriture  des  efclaves 
par  jour.  M.  RoUin  évalue  le 
Chœnix  ,  la  huitième  partie  d*un 
boifTeau  Romain  ;  êc  le  boifTeau 
Romain  contenoit  les  trois  quarts 
du  nôtre  &  un  peu  plus  ;  &  le 
nôtre  a  feize  litrons.  Ainfi  c'étoit 
près  de  deux  litrons  par  jour.  Ce 
Chœnix  étoit  celui  qui  contenoit 
crois  cotyles  Attiques. 

CHŒR ADES ,  Chœrada ,  (a) 
Xcipei/ctt ,  ifle  de  la  mer  lonienae 
fur  la  côte  dltalie  près  du  pro- 
montoire lapygien^  félon  Thu* 
cydide. 

Cafaubon,  dans  Tes  notes  fur 
Strabon ,  troit  que  c'eft  la  même 
chofe  que  ce  Géographe  appelle 
les  trois  promontoires  des  tapy-- 
niens. 

CnCERAÙES  ,  Ckawada  f 
Xoipiffat ,  noip  qu'Héfycbius,  Fa- 
vorin  &  autres  Lexicographes 
donnent  aux  ifles  ou  écueils  du 
Pont- Eu xin.  près  de  rHellefpont. 
Ortélius  croit  que  ce  font  les  mê- 
ines  que  les  Cyanées. 

CHŒRADES  ,  Chœrada, 
T^'ytpdttcu.  Diâis  de  Crète  ,  dans 
Ton  hidoire  de  la  guerre  de  Troye^ 
dit  :  »  Ajax ,  roi  des  Locriens  , 
n  ayant  tâché  de  fe  fauver  à  la 
i>  nage ,  &  les  autres  ayant  faiQ 
9)  des  planches ,  ou  ce  qu'ils  trou* 
»  voient  pour  gagner  le  bord  de 
»  la  mer  ;  après  qu'ils  furent  ar- 
ï9  rivés  à  Tifle  d*Eubée ,  &  qu'ils 
99  eurent  abordé  les  écueils  nom- 
19  mes  Chœrades  ^  ils  y  périrent  ; 


C  H  9} 

99  car  ,  Nauplius  fçachant  l'em- 
99  barras  où  les  jettoit  la  tempé- 
91  te ,  ôc  voulant  venger  la  mort 
»  de  PaUmède,  alluma  des  feux 
99  pour  les  attirer  vers  les  ro- 
99  chçrs ,  comme  fi  c'eût  été  un 
99  port.  €i  Ces  écueils  étoient  voî- 
fins  du  mont  Capharée  ;  de- là 
vient  que  Sénéque ,  le  tragique ,  les 
nomme  Para  Capharides.  Orté- 
lius trouve  que  Phalaris  &  Dion 
de  Prufe  les  nomment  Caphéri- 
des  ;  &  qu'ils  font  appelles  Ca- 
phurides  par  Q.  Calaber,  Il  ajou- 
te que  ce  fut-là  qu'Ajax  fit  nau- 
frage ,  après  avoir  violé  Gaffait- 
dre. 

Homère ,  âans  TOdyffée ,  ap- 
pelle ces  écueils  TvpaUr  TtVfJMK, 
que  Madame  Dacier  rend  par  les 
roches  Gyréennes ,  fur  quoi  elle 
fait  la  note  fuivante  :  99  Les  ro- 
p  chers  appelles  Gyra  &  Chot- 
99  rades  étoient  près  du  promon* 
)9  toirç  de  l'Eubée  »  lieu  très- 
99  dangereux  ;  &  c'eft  ce  qui 
99  avoit  fait  donner  à  ce  promon- 
99  toire  le  nom  de  Capharée  du 
99  Phénicien  Capharus  »  qui  figni- 
p  fie  un  écueil  le  brifeur ,  en  La- 
19  tin  fcopulus  contritqr  ^  félon  la 
99  remarque  de  Bqchart.  u 

CHCERADES,  Chœradte ^ 
Xoipei/ai  «  iiles  OU  écueils  dans  le 

Srolphe  Perfique ,  félon  Arrien  dans 
es  indiques  citées  par  Ortélius. 

On  a  mis  aufli  des  écueils  de  ce 
nom  auprès  du  détroit  de  Gibral- 
tar. Ortélius  obferve  qu'il  y  a  en- 
core à  préfent  des  écueils  dans  le 
golfe  ae  Cadix  ,  qui  confervent 
cet  ancien  nom,  mais  traduit  dans 


(#)  Thucyd.  p.  511, 


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94  C  H 

les  langues  modernes  ;  que  les 
Efpagnols  les  nomment  los  Poer- 
cos  ,  &  que  les  François  difent 
roches  de  la  Truye ,  ce  qui  re- 
vient au  même  fens.  ' 

Gerbelius  dit  que  les  ifles  Ba- 
léares font  nommées  Chœrades 
par  Apollonius.  Ortélius  ajoute 
qu'elles  font  appellées  de  même 
par  Iface  ,  commentateur  de  Ly-  . 
Cophron. 

CHCERADES,  Chœrada,, 
Xo;/}cc/<t/  «  ville  d'Afie  au  païs  des 
Mofynéciens.  Scylax  dit  qu'elle 
étoit  habitée  par  des  Grecs.  Etien- 
ne de  Byzance  en  parle  auffi  fur. 
l'autorité  d'Hécatée ,  qui  dans  fon 
Europe  la  donne  de  même  aux 
Mofynéciens. 

CHŒRÉAS  ,  Chœreas  ,  {a) 
Xoipçctç  »  nom  d'un  lieu  dans  Tifle 
d*Eùbée.  Il  étoit  fitué  fur  la  côte 
d*É rétrie.  Hérodote  eft  le  feul  qui 
faffe  mention  de  ce  lieu.  C'eft  à 
Foccafiort  des  Perfes ,  qui  débar- 
quèrent un  jour  fur  cette  côte. 

CHŒRÉATES  ,  Chœreata  , 
Xo//)eaTa/  ,  {b)  nom  d'une  tribu 
des  Sycioniens  dans  Le  Pélopon- 
nèfe.  Ce  mot  veut  dire  la  tribu 
des  Porchers.  On  attribue  cette 
dénomination  à  Cliûhènes. 

CHCERILE  ,  Chœrilus  ,  (c) 
Xiipaoç ,  Poëte  tragique ,  qui  étoit 
d'Athènes  ;  il  floriflbit  vers  la 
64c  Olympiade.  Quelques-uns 
prétendent  qu'il  inventa  les  maf- 
ques  &  les  habits  de  théâtre.  On 
dit  qu'il  avoit  compofé  cent  cîn- 

(a)  Herod.  L.  VI.  c.  loi. 

(*)  Hcithi.  L.  V.  c.  68. 

(c)  Suid,  Tom.  II.  p.  1160..  Mém.  de 
PAcad.  des  Infcript.  &  Bell.  Lett.  Tom. 
XIX.  p.  «ly. 


CH 

quante  tragédies  ,  &  qu'il  avoît 
remporté  le  prix  treize  fois.  On 
ne  trouve  le  nom  que  d'une  feule 
de  fes  tragédies  ;  ce  nom  e(l  Alo- 
pe.  Alope  étoit  fille  de  Cercyon , 
de  laquelle  Neptune  eut  Hippo-» 
thoon  ,  un  des  dix  héros  qui 
avoient  donné  leurs  noms  aux  dix 
tribus  d*Athènes.  Euripide  &  Car- 
cinus  avoient  chacun  compofé  une 
tragédie  aufli  intitulée  Alopc,  Dio- 
gène  Laërce  cite  Tautorité  d'un 
poëte  Chœrile  ,  pour  prouver 
que  Thaïes  avoit  été  le  premier 
Philofophe  qui  eût  foûtenu  que 
\qs  âmes  font  immortelles  ;  ce  qui 
prouveroit  qu'au  moins  quelques- 
uns  des  ouvrages  de  Chœrile 
exifloient  encore  du  tems  de  Dio- 
gène  Laërce  ;  mais  il  n'efl  pas  fur 
que  ce  Chœrile  foit  le  poëre  tra- 
gique Chœrile  :  car  »  il  y  a  eu 
deux  autres  poètes  très  fameux  de 
ce  nom, 

CHCERILE  ,  Chœrilus ,  (J) 
Xolfiihoç ,  fameux  Poëte  ^  dont  la 
patrie  n'eft  pas  bien  connue. 
Etienne  de  Byzance  dit  qu'il  na« 

?uit  dans  la  petite  ifle  appellée 
afe ,  près  de  la  Carie.  Héfychius 
foûtient  qu'il  étoit  de  Samos  ;  & 
fi  l'on  en  croit  Suidas,  il  étoit 
d'Halicarnaffe.  On  peut  concilier 
ces  trois  Auteurs  ,  en  obfervant 
que  l'iile  ,  où  étoic  né  Chœrile  9 
étoit  de  la  dépendance  de  Samos , 
&  qu'étant  allé  demeurer  à  Hali- 
carnafTe  ,  il  y  acquit  le  droit  de 
bourgeoifie.    Ce  fiit  dans  cette 

(d)  Suid.  T.  II.  p.  II 60,  1161,  PluU 
T.  I.  p.  44).  Strab.  p.  30;..  Mém.  de 
PAcad.  des  Infcript.  &  Bell,  Lett.  Xt 
XIX.  p.  ai9>  aao. 


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I 


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CH 

dernière  ville ,  ainfi  qu'on  l'ap- 
prend des  Auteurs  cités  ,  qu'il  fe 
lia  étroitement  avec  Hérodote, 

2u'on  accufe  de  l'avoir  trop  aimé. 
i  s'appliqua  à  la  Poëfîe  ;  ôc  le 
poëme  où  il  décrivît  la  viâoire 
que  les  Athéniens  remportèrent 
contre  Xerxcs ,  leur  parut  fi  beau , 

Îi'ils  lui  firent  donner  une  pièce 
or  pour  chaque  vers.  Ce  qui  en 
a  été  confervé  par  Arifioje  dans 
fes  livres  de  la  Rhétorique  ,  ôc 
parJofephe,  jufiifie  le  bon  goût 
des  Athéniens. 

Plutarque  aflure  dans  la  vie  de 
Lyfandre ,  que  ce  général  voulut 
toujours  avoir  Choerile  auprès  de 
lui,  pour  immortalifer  Ton  nom 
par  les  vers  de  ce  Poète  ;  &  fi  Ton 
en  croit  Suidas  ,  il  fut  ordonné 
que  fes  poëfies  feroient  récitées 
avec  celles  d'Homère.  Il  avoit 
auffi  décrit  en  vers  la  guerre  de 
Darius ,  roi  de  Perfe ,  >donc  Stra- 
bon  a  confervé  un  beau  fragment. 
Il  avoit  encore  compofé  quelques 
autres  poëmes  ,  ainfi  qu'on  l'ap- 
prend de  Suidas.  Il  mourut  chez 
Archélaiis  ,  roi  de  Macédoine. 

CHCERILE,  Chœrilus  ,  (a) 
Xoîf/Aoç,  autre  Poëte  qui  vivoic 
près  d'un  fiecle  après  le  précédent. 
Malgré  la  groffièreté  de  fes  vers 
fans  goût  6c  fans  beauté ,  il  fut 
eftimé  &  chéri  d'Alexandre.  Ce 
Prince  avoit  coutume  de  dire  qu'il 
aimeroit  mieux  être  le  Therfite 
d'Homère ,  que  l'Achille  de  Chœ- 
rile.  On  dit  qu'Alexandre  con- 
vint avec  ce  Poëte  qu'il  lui  don- 


CH  95 

neroît  une  pièce  d'or  pour  chaque 
vers  de  fon  poëme  qui  feroic  trou« 
vé  Jbon ,  à  condition  qu'à  chaque 
mauvais  vers  on  lui  donneroit  on 
foufflet  ;  on  dit  qu'il  expira  fous 
les  coups. 

Au  refte ,  Alexandre ,  comme 
le  remarque  Horace,  en  hono- 
norant  de  fon  eflime  un  poëte  tel 

3ue  Choerile ,  marquoit  bien  peu 
e  goût ,  lui  qui  d'ailleurs  étoit  û 
délicat  en  fait  de  peinture  6c  de 
fculpture,  qu'il  avoit  défendu  par 
un  édit  ,  à  tout  autre  pejnrre 
qu'Apelle  de  le  peindre  ,  6c  à 
tout  autre  Aatuaire  que  Lyfippe 
de  le  tirer  en  airain.  Sylla ,  chez* les 
Romains,  en  ufa  aufi[i  libérale- 
ment ,  mais  plus  prudemment 
qu'Alexandre  à  l'égard  d'un  Poë- 
te ,  qui  lui  avoit  préfenté  des  vers 
pitoyables.  Il  lui  fit  donner  une 
récompenfe  ,  à  condition  qu'il  ne 
feroit  plus  jamais  de  vers  ;  condi- 
tion bien  dure  pour  un  mauvais 
Poëte  ,  mais  fondée  en  raifon. 

CHCERILE  ,  Chœrilus  ,  (h) 
XoiptT^oç ,  fameux  athlète  ,  Èléen. 
Il  eut  rhonneur  du  Pugilat  dans 
la  clafie  des  jeunes  gens.  On 
voyoit  à  Olympie  fa  ftatue  en 
bronze  ,  qui  étoit  un  ouvrage  de 
Sthénis  Olynthien. 

Le  texte  de  Paufanias  ,  ob  il  eft 
parlé  de  cet  athlète ,  paroît  cor- 
rompu. M.  l'abbé  Gédoyn  croît 
qu'il  faut  lire  de  la  manière  que 
nous  venons  d'en  parler. 

CHCERIUS  ,  Chœrius  ,  (c) 
Xo/./oç,  nom  d'un  bois  du  Pélo- 


(#)  Horat.  L.  II.  Epift.  i.  v.  ij».  ér  \Tom,  XIX.  p.  aao. 
pf.  de  Art.  Poëc.  v.  557,  5^8.  Boll. }  (*)  Pauf.  p.  375. 
Hift.  Ane.  T.  VI.  p.  119,  i)o  Mém.  1  (c)  Pauf.  p.  ai6« 
de  TAcad.  des  Infcript.  &  Bdl.  Lcit,  I 


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96  CH 

ponnèfc.  Paufanias  dit  que  c*étoit 
par  ce  bois  que  les  Mefféniens, 
fuivant  qu*il  avoit  plu  à  Augutle 
de  les  borner  du  côté  de  la  Laco- 
nie  ,  confinoient  avec  les  Géré- 
niens. 

CHCEROGLYLLUS,  Chœro^ 
glylliis ,  XotpoyhvMtoç^  J^a)  animal 
déclaré  impur  par  la  loi  de  Mo^fe. 
Ce  Légiflateur  dit  que  le  Choero- 
glyllus  rumine  ;  mais ,  comme  il 
n'a  pasl'ongle  fendu ,  il  eft  cenfc 
fouillé.  L'Hébreu  Schaphan  n*eft 

f»as  bien  connu.  Quelques  -  uns 
'expliquent  du  lièvre;  &  d'autres, 
du  lapin.  Mais ,  Moïfe  a  déjà  parlé 
du  lièvre  auparavant  ;  Si  le  lapin 
ne  rumine  point.  Ce  ne  peut  donc 
être  aucun  de  ces  deux  animaux. 
Ce  n'eft  pas  non  plus  le  Chœro- 
glyllus,  ou  rhériffon  ,  puifqu'il 
ne  rumine  pas.  Bochart  croit  que 
c'eft  une  efpèce  de  gros  rat ,  com- 
mun en  Arabie,  bon  à  manger, 
&  nommé  aliarbuho.  Ces  ani-* 
maux  ruminent ,  demeurent  dans 
les  rochers ,  &  vont  en  troupes  ; 
qualités  que  TÉcriture  attribue  au 
Schapîun.  ""^ 

CHCERUS  ,  Chœrus ,  Xo/p-ç , 
(/>)  père  de  Smicythus ,  qui  avoit 
confacré  un  grand  nombre  de 
riches  préfens  dans  le  bois  d'O- 
lympie.,  ^ 

CHOÈS ,  ou  Chous  ,  Choes , 
Cho'ûs ,  (c)  nom  que  Ton  donnoit 
au  fécond  jour  de  la  fête  des  An- 
thiftéries.  Ce  jour- là  chacun  bu- 
voit  dans  fon  propre  pot ,  appelle 

Ça)  Levît.  c.  II.  V.  5. 
(b)  Pauf.  p.  340. 

{€)  Antiq.    expl.    par   D.   Bern,   de 
Montf.  Tom.  II.  p.  115. 
{d)  Mém.  ^e  rAc9d.  des  Infcript.  & 


CH 

choiis  ,  du  Grec  xooî»  On  voit 
par- là  d'oîi  venoit  à  ce  jour  le 
nom  de  chous. 

Un  jour  à  cette  fête  ,  Timon  le 
mifanthrope  &  Apémantus  étoient 
à  table  tous  deux  feuls.  Apéman- 
tus commença  «  dire  :  Ha ,  le  bon 
fiftin  que  nous  faifons  ,  Timon  ! 
Oui ,  lui  répondit  Timon ,  fi  tu 
nen  étais  pas. 

Il  n'y  avoit  pas  de  meilleurs 
feftins  pour  Timon  &  pour  Apé- 
mantus  ,,  audi  mifanthrope  que 
Timon  ,  que  celui  qu'ils  célé- 
broient  en  l'honneur  de  Mercure 
Terreftre ,  conducteur  des  morts, 
qu'on  honoroit  pendant  la  fête  de 
thoès.  Ceft  en  cela  que  confifte 
tout  le  fens  de  ce  paiTage  ,  qui 
n'en  auroit  point  autrement. 

Choès  étoit  aufli  le  nom  d'une 
mefure  Attique  pour  les  liquides. 

OHCEUR  ,  Chorus  ,  Xc/»iç, 
{d)  terme  ,  qui  ,  dans  la  poëfie 
dramatique ,  fignifie  un  ou  plu- 
fieurs  aâeurs  qui  font  fuppofés 
fpeâateurs  de  la  pièce  y  mais  qui 
témoignent  de  tems  en  tems  la 
pari  qu'ils  prennent  à  l'adion  par 
des  difcours  qui  y  font  liés  ,  fans 
pourtant  en  faire  une  partie  eflen- 
tielle. 

I.  La  tragédie ,  dans  fon  origi- 
ne ,  n'étoit  qu'un  hymne  facrct 
chanté  &  danfé  en  l'honneur  de 
Bacchus  \  les  fujets ,  dont  on  pre- 
noit  occafion  de  louer  ce  dieu» 
venant  à  s'épuifer ,  les  Poètes  fu- 
rent obligés  de  recourir  à  diffé- 

Bell.  Letc.  Tom.  I.  pag.  144  »  145.  T. 
IV.  p.  4S7.  Tom.  VIII.  p.  199.  ér  f»iv» 
Tom  XII.  pag.  96  ,  97.  T.  xm.  p.  joj. 
Tom.  XIX.  p.  417.  Tom.  XXI.  p.  149. 

&  fttiv, 

rentes 


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CH 

rentes  inventions  pour  ne  point 
toujours  rabattre  les  mêmes  cho- 
(a.  De- là  vinrenc  ces  épifodes 
qae  nous  appelions  aftes  aujour- 
d'hui ,  qui  le  récitèrent  par  un  ou 
plufieurs   hiftrions  9    entre  deux 
chants  de  ces  hymnes  ou  Chœurs. 
De  ces  épifodes  ou  aâes ,  fe  for- 
ma dans  la  fuite  le  corps  de  la 
tragédie,    &    infenfiblement  les 
^    Chœurs  n'en  furent  plus  qu-'une 
I    partie,  qu'il  fallut    ajufter  avec 
I    les  autres^d'une  manière  vraifem- 
blable  ;  mais,  ce  ne  fut  pas  fim- 
'    plement ,  pour  fatisfaire  à  la  coû- 
1    tume ,  que  l'on  les  conferva  ,  ce 
futàcaufe  des  grands  avantages 
que  la  tragédie  en  retiroît.  Car, 
les  Chœurs  fervoient  à  rendre  la 
I    tragédie,  &  plus  régulière,  &  plus 
■.    variée.  Ils  lui  donnoient  de  l'iè- 
I    clat  &  de  la  majeflé.  Ils  en  aug- 
I    mentoient  le  pathétique. 

i.°  Chez  les  Anciens ,  le  lieu 
de  la  fcene  étoit  toujours  le  de- 
vant d'Cin  temple ,  ou  d'un  pa- 
lais ,  ou  quelque  autre  endroit 
public  y  6l  c'efl  aulTi  celui  qui 
pâroit  plus  convenable.  Il  faut 
que  les  (peâateurs  puiflenc  aifé- 
ment  fe  perfuader  qu'ils  font 
prélens  à  l'aâion:  &  comment 
peuvent-ils  fe  l'imaginer,  lor(- 
qu'elle  fe  pafTe  dans  un  cabinet , 
ou  dans  une  chambre  de  confeil  ? 
Parquel  enchanteftient  pourroient- 
ils  croire  qu'ils  y  ont  été  intro- 
duits ?  Par  quelle  efpèce  de  ma- 
gie ,  en  levant  un^  (impie  toile  , 
un  lieu  exadement  fermé  de  tou- 
tes parts,  peût-il  devenir  tout-à- 
coup  ouvert ,  &  expofé  aux  yeux 
de  plufieurs  milliers  de  perfonnes? 
En  un  mot ,  comment  eû-il  pof- 
Tom.  XI. 


CH  97 

fible  qu'un  lieu  que  Ton  fuppofe , 
fecret ,  fdit  en  même  tems  public  ? 
Outre  cela ,  une  aâion ,  pour 
pouvoir  être  expofée  fur  la  fcene 
avec  vi'aifemblance  ,  doit  être 
éclatante ,  fe  pafler  entre  les  {>re- 
mières  perfonnes  de  l'État,  &  être 
de  nature  à  intéreffer  tout  un  peu- 
ple. U  s'enfuît  de-là  qu'elle  doit 
alTémbler  un  grand  nombre  de 
témoins  qui  y  prennent  part  ;  ces 
témoins  torment  le  Chœur.  U  ne 
feroit  pas  naturel  que  des  gens  in- 
térefles  à  l'aâion ,  &  qui  en  at* 
tendent  Tiffue  avec  impatience, 
demeuraflent  toujours  fans  rien 
dire  ;  la  raifon  veuc  au  contraire 
qu'ils  s'entretiennent  de  ce  qui 
vient  de  fe  pafFer  ,  &  de  ce  qu'ils 
ont  à  efpérer  ou  à  craindre ,  lori- 
que  les  principaux  perfonnages , 
en  cédant  d'agir  ou  de  paroître 
fur  le  théâtre ,  leur  en  donnent  le 
loifir  ;  &  voici  la  matière  des 
chants  du  Chœur.  C'efl  de  la  for- 
te que  la  néceffité  des  Chœurs  ré- 
fuite  du  choix  judicieux  de  l'aâion 
théâtrale  &  du  lieu  de  la  kene^ 
Comme  on  ne  pourroit  avec  rai- 
fon les  introduire  dans  une  cham- 
bre de  confeil  ou  dans  un  cabi- 
net, on  ne  peut  pas  lesfupprimer 
dans. une  place  publique,  &  ainfî 
le  lieu  de  la  fcene  ,  l'aâion  6c  le 
Chœur,  fe  prêtent  une  vraifem- 
blance  réciproque ,  dont  ils  man« 

.  quent  fitôt  qu'oil  les  fépare. 

Il  fufiit  d'examiner,avec  un  peu 
d'attention,  telle  tragédie  de  la 
bonne  antiquité,  que  Ton  voudroit 
choifir  ,  pour  voir  que  la  plupart 
des  régies  fondamentales  de  théâ- 
tre ,  font  une  fuite  naturelle  des 

^  Chœurs.Les  Anciens  ne  manquent 

G 


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^8  C  H 

lamaîs  de  garder  l'unité  du  liéa  ; 
cette  règle  leur  paroifToit  çaême 
de  nature  à  ne  pouvoir  jamais 
être  violée  ;  &  ils  n*en  faifoiënt 
point  de  précepte.  La  raifon  en 
eA  «  qu'il  vaut  beaucoup  mieux 
manquer  à  la  vraifemblance  dans 
les  chofes  où  l'on  a  befoin  de  rai- 
fonnement  pour  s'en  ippercevoir, 
que  dans  les  chofes  qui  frappent 
lés  fens ,  &  qui  ne  manquent  pas 
de  révolter  à  la  première  vue  un 
fpeâateur  attentif  &  intelligent. 
L'unité  du  lieu  violée  eût  fufli  feu- 
le à  Athènes  pour  faire  fiffler  une 
pièce.  Un  Poète  nommé  Carci- 
nus  f  au  rapport  d'Ariflote ,  fai- 
foit  fortir  Amphiaraus  du  tem- 
ple fans  qu'on  le  vit  ;  la  pièce 
tomba ,  les  fpeâateurs  ne  pou- 
vant fouffrir  qu*on  leur  voulût 
perfuader  qu' Amphiaraus  éioit 
lorti  véritablement,  lorfqu'ils  n*en 
^voient  rien  vu.  Aujourd'hui  on 
ne  nous  pérfuade  pas  feukment 
qu'un  homme  foit  forti  d'un  tem- 
ple ou  d'un  palais ',  quand  nous 
n'en  avons  rien  vu;  on  va  jufqu'à 
nous  faire  croire  que  ce  qui  étoit 
une  falle  ,  il  n'y  a  qu'un  moment^ 
eft  devenu  tout-à-coup  un  jar- 
din; &  l'on  nous  métamorphofe  , 
fans  fcrupule,  l'appartement  d  une 
Princefle  en  un  temple ,  ou  en  une 
place  publique. 

Les  Chœurs  fufHfoiçnt  aux  An- 
ciens pour  les  empêcher  de  tom- 
ber dans  ce  défaut;  car,  le 
Chœur  ne  fortant  prefque  jamais 
du  théâtre ,  lorfqu'il  s'en  étoit  une 
fois  emparé ,  il  eût  été  trop  vifi- 
blement  ridicule  de  fuppofer  que 
le  théâtre  f/^t  changé  »  lorfque  les 
perfonnes  qui  l'occupoient  n*a« 


CH 

voient  poiot  changé  de  place.  Les 
Chœurs  fervoient  encore  à  mar* 
quer  la  durée  de  Taâion.  La  re- 
préfentation  de  leur  tragédie  ne 
duroit  guère  plus  de  tems  qu'il 
n'en  auroit  fallu  pour  l'aôion  mi- 
me repréfentée  ;  cette  régularité 
lui  donnoit  un  air  de  vraifem- 
blance  >  qui  faifoit  une  de  fes  plus 
grandes  beautés.  Quand  bien  mê- 
me nous  fuivrions  aujourd'hui  cet- 
te pratique  ,  elle  ne  frapperait 
prefque  pas.  La  fymphonie  qui 
remplit  nos  intermèdes  ,  n'ayant 
aucun  rapport  à  la  pièce  ,  y  fait 
un  vuide  que  rien  ne  fixe  ;  au  lieu 
que  les  danfes  &  les  chants  des 
Chœurs  »  étaient  une  efpèce  de 
mefure  du  tems  qui  s'étoit  écou- 
lé entre  un  aéèe  &  un  aâe. 

Outre  cela,  ils  arrêtoîeff!  le 
fpeâateur  en  continuant  de  l'oc- 
cuper ,  &  ils  ne  manquoient  pas 
de  lier  la  fin  de  l'aàe  avec  le 
commencement  del'aâefuivant; 
ce  qui  eft  plus  important  que  l'on 
ne  penfe ,  puifque  cette  liaifon 
contribue  à  faire  fentir  l'unité  de 
l'adion.  Nos  cinq  aâes  ifolés  les 
uns  des  autres  ,  forment  en  quel- 
que forte  cinq  pièces  difFérentes  , 
que  Ion  joue  les  unes  après  les 
autres. 

Plufienrs  Sçavans  ont  fait  voir 
par  un  grand  n^bre  de  paiTages 
d'Auteurs  anciens ,  que  les  tragé- 
dies fe  chantoientxi'un  bout  à  Tau- 
tre,&  que  la  mufique  des  Chœurs 
n'étoit  pas  la  tnême  que  celle 
des  fcenes.  Il  eft  vrai  que  tout  ce 
qui  regarde  la  mufique  ancienne  » 
eft  plein  de  difficultés ,  &  qu'on 
ne  fçait  pas  bien  fi  le  chant  des 
tragédies  étoit  une  véritable  mu-^^ 


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CH 

fique,  telle  que  la  nôtre.  Il  y  a  ap* 
parence ,  cependant ,  que  la  muu- 
que  des  fcenes  revenoit  à  ce  que 
nous  appelions  dans  leS'  opéras  le 
récitatif,  &  que  la  mufique  des 
Chœurs  étoit  ce  que  nous  appel- 
Ions  des  airs. 

Quoi  qu'il  en  Toit ,  îl  eft  aifé  de 
voir  quelle  variété  les  Choeurs 
produifoient  dans  la  tragédie.  De 
quelle  variété^  en  effet,  n*e(k  point 
fufceptible  une  mufique ,  qui  s'ac- 
commode à  tant  de  différentes  (!• 
tuations ,  &  à  tant  de  difFérens 
fentimens  répandus  dans  une  bon- 
ne tragédie  ?  La  poëiie  des  fcenes^ 
&  la  poëfie  des  Chœurs  n*étoit 
pas  la  même  ;  Tiambe  >  comme 
plus  propre  aux  difcours  ordinai- 
res ,  étoit  pour  les  (cènes  ,  &  l'on 
eniployoit  une  autre  mefure  plus 
vive ,  plus  cadancée ,  &  plus 
harmonieufe  pour  les  Chœurs. 
Les  expreflîons  n'étoient  pa^  non 
plus  les  mêmes;  durant  les  aâes  , 
ie  Poëte  facrifioit  en  quelque  forte 
une  partie  de  fon  feu  à  la  vrai- 
femblance  de  l'aûion ,  &  le  mefu- 
roit  de  forte  que  le  dialogue  con- 
fervoit  le  naturel  qu'il  devoit 
avoir,  fans  que  le  poëme  perdît 
rien,  ni  de  fa  majeflé  ni  de  fon 
harmonie  ;  mais ,  dans  les  Chœurs 
rien  ne  le  gênant  plus ,  il  donnoic 
un  libre  eSbr  à  fa  verve,  &  mon- 
troit  qu'il  "étoit  véritablement  Poë- 
te ;  il  employoit  alors  les  penfées 
les  plus  brillantes  di  les  plus  rele- 
vées ,  les  tours  les  plus  forts  ,  les 
cxpreffions  les  plus  hardies  &  les 
plus  figurées ,  &  fi  durant  les  ac- 
tes il  avoit  parlé  le  langage  des 
Héros  &  des  Rois  ,  on  peut  dire 
que  dans  les  Chœurs  il  parloit  ce« 


•  CH  99 

lu!  des  Dieux.La  mufique  s'accom- 
tifiodoit  fans  doute  à  cette  variété  ; 
une  efpècie  de  mufique  plus  fimple 
regnoit  durant  le  cours  de  la  piè- 
ce, une  mufique  plus  compofée 
étoit  réfervée  pour  les  Chœurs  ; 
ils  étoient  toujours  accompagnés 
de  danfes.  C'eft  ainfi  que  la  tra- 
gédie ancienne  ,  variant  fans  ceffe  - 
les  objets  »  &  offrant  continuelle- 
ment de  nouveaux  plaifirs  aux 
fpeâateurs ,  fçavoit,  fans  les  fati- 
guer, les  retenir  &  les  occuper 
jufqu'à  ce  qu'elle  les  renvoyât 
pleins  des  paf&ons  qu'elle  fe  pro- 
pofoit  d'exciter  en  eux. 

2.^  Que  l'on  fe  repréfente  un 
moment ,  l'effet  que  devoit  faire 
fur  le  théâtre  ce  grand  nombre 
d'aâeurs ,  de  différens  fexes  &  de 
différens  âges  ,  dont  les  Chœurs 
étoient  compofés  ,  leurs  danfes , 
leurs  chants,  la  magnificence  de 
leurs  habits;  tout  cela  ne  contrï- 
buoit-il  pas  merveilleufement  à 
relever  l'éclat  du  fpeélacle?  On 
voit  qu'un  des  meilleurs  moyens 
d'attacher  les  peuples  &  de  les 
tenir  comme  enchantés  ,  a  tou- 
jours été  d'employer  la  mufique  , 
&  les  cérémonies  que  les  Anciens 
auroient  fans  doute  comprifes  fous 
le  nom  général  de  danfes. 

Ce  grand  nombre  de  perfon- 
nés  qui  prennent  intérêt  à  l'ac- 
tion, en  relevé  encore  l'importan- 
ce ,  &  la  rend ,  ÔC  plus  grande  >  ôc 
plus  éclatante  ;  on  a  beau  vanter 
l'intérêt  que  prend  le  peuple  à  une 
aâion  ;  on  a  beau  faire  un  récit 
fidèle  de  fes  craintes ,  ou  de  fes 
empof temens  ;  on  en  efl  tout  au- 
trement frappé ,  lorfqu'on  le  voit 
paroître  lui  même  repréfente  par 
Gij 


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loo  C  H  * 

fes  chefs ,  &  que  l'on  eft  témoin 
de  fes  différens  mouvemens , 
comme  dans  TCEdipe  de  Sophocle. 

Les  Chœurs ,  par  leurs  refpeâs 
&  par  leurs  louanges,  relèvent 
auflî  la  dignité  des  perfonnage^,  6c 
les  rendent  plu;  grands  aux  yeux 
des  fpeftateurs»  Voyez  dans  Eu- 
ripide j  de  queiie  forte  le  Chœur 
tannonce  l'arrivée  de  Clytemnèf- 
nît  &  d*Iphigénie.  n  Les  grandes 

pFofpérités  ne  font  que  pour  les 

plus  grands.  Voyez  Iphigénie 
^  la  fille  d*Agamemnon  ;  voyez 
^  la  fille  de  Tyndare,Clytemnef- 
»  tre  notre  Reine  ;  elles  fortent 
»  d'une  race  illuftre  »  &  leur 
^  fortune  répond  à  leur  naifTance. 
»  Ce  font  les  Dieux  tout-puif- 
n  (ans  qui  comblent  de  biens  les 
»»-foibles  mortels.  Filles  de  Cal- 
»  cide  arrêtons-nous  ici  ,  pour 
»  nous  préfenterà  la  reine  à  la 
»>  fortie  de  fon  char  ;  efforçons- 
»  nous  de  lui  prouver  notre  fin- 
1}  cere  affeâion  ;  qu'elle  foit  reçue 
Il  dans  nos  bras;  aidons  auffi  à 
9»  defcendre  la  jeune  &  timide 
»  Princeffe.  u  Un  tel  Chœur 
fi*e{l-il  pas  en  quelque  forte  une 
cour  nombreufe  Ôc  brillante ,  que 
Clytemnefire  trouve  à  fon  arri* 
vée. 

La  fin  &  le  but  des  poëmes 
dramatiques  ,  c*eft  certainement 
rin(lruâion  du  peuple  ;  il  faut 
qu'il  remporte  toujours  du  fpec- 
tacle  quelque  maxime  utile  >  dont 
il  ait  été  frappé.  Or,  ilparoît  que 
les  Chœurs  étoient  autrefois  def- 
tinés  particulièrement  à  cet  ufage, 
&  que  ce  fut  une  des  principales 
raifons  qui  les  fit  conferver.  Le 
jPoëte  n'ofe  bazarder  dans  les  fce- 


CH 

nés  un  grand  nombre  de  ma«!mes, 
parce  que  rien  ne  feroit  plus  op- 
polé  à  la  vérité  du  dialogue  ;  mais^ 
'  rien  ne  Tempêche  de  répandre 
dans  les  Chœurs  la  morale  la  plus 
fublime  ;  6t  c'eft  audi  ce  qui 
compofoit  prefque  toujours  les 
Chœurs  des  tragédiesanciénnes* 
3.^'  Mais ,  le  plus  eonfidérable 
des  effets  des  Chœurs  dans  la  tra- 
gédie ancienne  ^  c'ell  lô  pathéti- 
qu(e  qu'ils  y  produifoient.  Cette 
tragédie  noble  &  majeftueufe  emr 

Eruntoit  de  la  morale  ^s  plus  bel- 
îs  maxinies ,  s'autorifoit  de  la  re- 
ligion, fics'embellifToit  de  fes  plus 
augufles  cérémonies  ;  &  dé- 
ployant tout  ce  que  la  poëfie  a  de 
charmes  pour  ravir  les  efprits,& 
toucher  les  cœurs  ,  elle  y  joi- 
gnoit  encore  tout  ce  qui  peut  en- 
chanter les  fens ,  fe  propofant 
toujours ,  comme  fa  principale  fin, 
d'infpirër  l'horreur  du  vice  ,  &  de 
faire  du  théâtre  uqe  école  de  tou- 
tes les  vertus  ,  &  de  le  rendre  un 
des  meilleurs  moyens  qu'eût  la 
fageffe  humaine ,  de  ramener  & 
d'entretenir  les  peuples  dans  tous 
leurs  devoirs. 

La  tragédie  ainfi  conçue  a  fes 
pailions  qui  lui  font  propres. 
Toute  fa  perfeâion  confifte  à  les 
imprimer  fortement  dans  les  ef- 
pries ,  &  c'efl  à  quoi  fervoient 
beaucoup  lc<s  Chœurs.  Tout  le 
monde  connoît  la  force  de  la  mu- 
fique  &  de  la  danfe  ;  il  feroit  inu- 
tile d'en  difcourir  ici.  Il  n'y  a  per- 
fonne  qui  nefçache,  par  fa  propre 
expérience^qu'elles  impreflions  el- 
les font  capables  de  faire.  Ainfi , 
i.^  Les  Chœurs  ,  par  la  mufique 
&  la  danfe  qui  les  accompagnoient 


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^     CH. 

toujours ,  contribuoîent  merveîl- 
leufement  à  remuer  les  paflîons. 
H  eftnéceflaire  qu'il  y  ait  des  in- 
termèdes ;  mais ,  il  ne  faut  pas 
pour'  cela  laîder  refroidir  le  fpec- 
tateur  ;  il  faut  au  contraire  foute- 
nir  en  lui ,  &  fortifier  les  pafTions* 
qu'on  a  coir.mencé  d'y  exciter. 
Rien  ne  prodljifoit  mieux  cet  effet 
que  les  Chœurs ,  qui  par  leurs 
danfes  &  par  leurs  chants ,  rem- 
pliflbient  les  efprits  d'idées  conve- 
nables aux  fujets  9  &  ne  faifoient 
qu'exprimer,  &  donner  par -là 
une  nouvelle  force  aux  fentimens 
que  les  difconrs  des  perfonnages 
venoient  d'exciter  ;  2.^  Les 
Chœurs  fervoient  encore  à  émou- 
voir les  paffions ,  en  offrant  aux 
fpeôateurs  d'autres  fpedateurs , 
pour  àinfi  dire ,  fortement  tou- 
chés. Ce  n'eft  pas  feulement  un 
fpe£lacle  digne  de  crainte  ou  de 
pitié  ,  qui  excite  en  nous  la 
crainte  ou  l^  pitié  ;il  fuffit  fou  vent, 
pour  reffentir  ces  dçux  paffions  , 
de  voir  quelqu'un  qui  en  foit  for- 
tement touché.  C'eft  ce  que  les 
peintres  ont  fort  bien  conçu  ;  lorf- 
qu'cn  tableau  eft  fait  pour  émou- 
voir ,  ils  ne  Ce  contentent  pas  de 
repréfenter  feulement  l'aélion ,  ils 
peignent  ehcbrô  fur  les  vifages 
des  affîftans  les  différentes  paf- 
fions que  leurs  tableaux  doivenft 
faire  naître  ;  ils  vont  même  jafqu'à 
întéreflcr  les  chofes  les  plus  infen- 
^les.  Un  bon  Poëte  doit  faire  la 
même  chofe  ;  &  Iphigénie  fur  le 
théâtre  ,  doit  être  environnée  de 
perfbnnes  qui  foient  fenfibles  à  fes 
malheurs. 

Ce  qui  doit  bien  nous  conv^n- 
w  des  grands  effets  des  Cb€&ur$ 


CH  ror 

anciens,  c*eft  lé  fuccès  de  nos 
opéras.  On  en  peut  enco^^e  juger 
par  l'Efther  &  TAthalie  de  Raci- 
ne ,  où  le  Chœur  fait  un  fi  bel 
effet,  tout  détaché  qu'il  efl  de  la 
pièce.  ^ 

IL  Les  Chœufs  n'étoient  pas 
moins  néceffaires  àjla  vieille  comé- 
die ,  qu'à  la  tragédie.  Auffi  en 
avoit-elle  toujours. 

I.*  Ils  fervoient  à  varier  le 
fpeftacle.  La  vieille  comédie  n'é- 
toit  point  partagée  régulièrement 
en«cinq  aâes;  feulement  Kaâion 
étoit  entrecoupée  de  tems  en 
tems  par  le  Chœur.  Il  y  en  avoit 
de  grands ,  compofés  de  plufieurs 
parties,  qui  toutes  avoient  leurs 
noms  particuliers  ,  &  qui  étoient 
faites  fur  le  modèle  des  Chœurs 
des  tragédies.  Quelquefois  le 
Chœur  ne  chantoit  qu'un  ou  deux 
couplets.  Les  Chœurs  compofés 
de  plufieurs  parties ,  étoient  de 
vrais  èntr'aâes;  les  autres  étoient 
de  petits  repos  entre  les  fcenes  » 
&  même  au  milieu  des  récits ,  pour 
donner  aux  A6^eurs  le  tems  de 
Tefpirer  ,  &  pour  ne  pas  ennuyer 
les  fpeâateurs  par  trop  d'unifor- 
mité. 

2.®  Comme  la  vieille  comédie 
étoit  an  fantôme  dé  tragédie ,  elle 
avoit  befoin  d'un  appareil  brillant; 
îrfalloitque  le  théâtre  fut  garni. 
Le  nombre  des  Aâeurs  du  Chœur 
varia  (buvent  dans  les  tragédies , 
il  varia  de  même  dans  les  comé- 
dies ;  mais ,  le  Chœur  des  comé- 
dies n'étoit  inférieur  en  rien  à  ce- 
lui des  tragédies.  Ils  avoient  l'iin 
&  l'autre ,  ôc  chants  &  danfes  ; 
les  habits ,  les  décorations  ,  le^ 
machinef  que  le  Chœur  occafioo:^ 
Gii) 


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IÔ2  C  H 

noit  dahs  les  comédies ,  ornoîent 
beaucoup  la  fcene ,  &  contraf- 
toient  quelquefois  par  leur  éclat , 
&  par  leur  magnificence»  d'autre- 
fois par  leur  burlefque  >  avec  la 
pompe  des  trag^ies. 

3.^  Le  Poète  comique ,  tou- 
jours rival  du  Poëte  tragique ,  ne 
lui  cède  dans  fes  Chœurs  ,  ni  par 
la  beaucé,  ni  par  lafublimicé  des 
penfées  v  ni  par  la  force  des  ex-' 
preflions.  M.  Boivin  a  fort  bien 
remarqué  que  la  verfification  d'A- 
rillophane ,  en  beaucoup  d^n- 
<lroits ,  n'efl  point  inférieure  à  cel- 
le des  plus  excellens  tragiques; 
que  fes  ïambes  ôc'fes  anapeAes 
(ont  travaillés  avec  touc  le  foin 
poffible ,  ôc  que  les  Choeurs  d'Eu- 
ripide 6c  de  Sophocle  ne  font  point 
écrits  avec  plus  d*art  que  ceux  du 
comique. 

4.^  C'étoit  dans  l'invention  des 
perfonnages  du  Chœur  que  con- 
iîûoit  principalement  la  malignité 
du  Poëte  comique  ;  &  c'étoit  pour 
lui  une  fource  abondante  de  ridi- 
cule. Les  nuées  avec  lefquelles 
Socrate  converfe ,  &  parmi  lef- 
quelles il  vit>  font  un  emblème 
ingénieux  des  vaines  fpéculations 
des  Philofophes.  Le  Chœur  de 
juges  repréfentés  par  des  guêpes  , 
^ans  la  comédie  qui  en  porte  le 
nom^  eft  feul  une  fatyre  des  ma- 
giftrats  d'Athènes. 

Les  A^eur^  du  Chœur  aidoienc 
encore  par  leur  jeu ,  à  rendre  le 
fpeâacle ,  &  plus  réjouifTant ,  & 
plus  fatyrique. 

Dans  la  comédie  des  Oifeaur , 
ce  font  des  oifeaux  qui  forment  le 
Chœur  ;  ils  étoient  repréfentés 
par  des  hommes  prefqueiiusj  avep 


CH 

des  crêtes ,  des  becs ,  des  griffes  8t 
des  plumes  en  grande  quantité  , 
parce  que  cette  comédie  fut  jouée 
en  hiver  ,  &  que  pour  cette  rai- 
fon  le  poëte  (uppofoit  que  les  oi- 
feaux avoient  beaucoup  de  plu- 
mes. Les  poftures  ,  les  grimaces, 
&  les  figures  de  ces  oifeaux  pré— 
tcndus,faifoient  beaucoup  de  plai- 
(ir  au  peuple.  On  pouvoit  remar- 
quer parmi  eux  plufieurs  particu- 
liers d'Athènes  ,  reconnoiiTables 
par  le  m'afque.  Ainfiy  des  oifeaux 
de  proie  repréfentoient  des  frip- 
pons  connus 9  des  hiboux,  des  gens 
de  mauvaife  humeur  ,  &c.  Il  y 
a  bien  de  l'apparence  que  pour 
eroffir  le  Chœur  ,  on  y  mêloit 
des  figures  de  bois  ou  d'autres 
matières  qui  reffembloient  à  de 
véritables  oifeaux  ;  ajoutés  à  cela 
l'imitation  de  leurs  chants  &  de 
leurs  fredonnemens.  De  pareils 
Aâeurs  fi  mordans  &  fi  bouffons 
dévoient  beaucoup  réjouir  la 
multitude.  Le  Chœur  ,  comme 
l'on  voit ,  étoit ,  pour  ainfi  dire  , 
l'ame  &  la  principale  partie  de  la 
vieille  comédie  ;  c'eù.  pourquoi , 
c'jétoit  du  Chœur  qu'elle  prenoit 
fouvent  fon  nom.  Aufii  ,  dès 
qu'on  voulut  réformer  la  vieille 
.  comédie  ,  on  commença  par  lui 
retrancher  le  Chœur ,  &  dès4ors 
elle  ne  put  plus  fe  foûtenir* 

lU.  Éfchyle  diminua  le  nombre 
des  Aâeurs ,  qui  compofoient  le 
Chœur  ;  mais  »  il  y  fut  contraint 
par  le  Magiftrat  >  à  caufe  du  dé- 
fordre  qu'avoit  produit  le  Chœur 
des  Euménides.  Ce  Chœur  corn* 
pofé  de  cinquante  perfonnes ,  qui 
repréfentoient  des  furies ,  fit  une 
telle  impreffion  fur  les  en£iixs  & 


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CH 

furies  femmes  grofles  »  qae  plu- 
fieors  en  moururent ,  &  d'autres 
(e  bleflerent,  Il  fut  donc  réglé 
qu'à  l'avenir  le  Choeur  ne  feroit 
plus  que  de  quinze  perfonnes. 

M.  Burette  obferve  que  dès  le 
tems  d'Âridote  >  les  Poëces  dra- 
matiques s'étoient  mis  dans  l'ufaee 
commode  de  ne  plus  compofer  de 
Chœurs  exprès  pour  leurs  pièces; 
mais  de  prendre  çà  &  là  divers 
morceaux  de  poëCe ,  &  de  les  in- 
férer dans  leurs  entr'aâes ,  com-  ' 
me  autant  d'intermèdes ,  qui  par 
conTéqueht  n'avoient  pas  plus  de 
rapport  &  de  liaifon  avec  la  pièce 
de  théâtre  que  l'on  jouoit ,  qu'a- 
vec toute  autre.  Ce  fut  Agathon  , 
félon  Aridote  ,  qui  le  premier  in- 
troduifit  ce  mauvais  ufage  ;  &  l'on 
pouvoit  accufer  Euripide  d'une 
pareille  négligence  dans  quelques- 
unes  de  Tes  tragédies.  Ces  fortes 
de  Chœurs  méritoient  fort  la 
qualification  dé  rapfodies  9  &  de 
poëfies  bigarrées. 

Donner  le  Chœur,  c*étoit,chez 
les  Grecs  ,  acheter  la  pièce  d'un 
Poëte  9  &  faire  les  frais  de  la  re- 
préfemation..  Celui ,  qui  faifoit 
cette  dépenfe  ,  s'appelloit  *à 
Athènes  (^lv>tege.  On  confioit 
ce  foin  à  l'Archonte ,  &  chez 
les  Romains  aux  Édiles. 

CHŒURS  ou  Danses  EN 
ROND ,  CApri  Circulâtes  ,  (a) 
Xopçi  §yKÙK>t9U  On  fait  Arion  Tin- 
venteur  de  ces  danfes.  Ainfî ,  La- 
fus  n'en  fut  poim  Fauteur  ;  mais, 
du  moins  il  les  perfeâionna  beau- 
coup, au  rapport  du  Scholiaile 

(4)  Mém.  de  TAcad.  des  Infcrîpt.  &| 

BeU.  Lcit.  Tom.  XV.  pag.  313  ,  ja6.     | 

(0  PUit.  T.I.P.15J.  J 


CH  10) 

d'Arîfiophane  »  qui  produit  fes 
garans.  On  appëlloit  ceux  qui 
compofoient  la  poëfie  &  la  mufl- 
que  poar  ces  fortes  de  danfes ,. 
Cycliodidafcales  ,  \que  le  même 
Scholiafle  explique  Poëtes  Dithy- 
rambiques ;  car ,  telles  étoient  la 
po^ie  &  la  mufique ,  qui  en- 
troient dans  ces  fortes  de  danfes* 

CHOL ARGUE,  Cholargus^ 
{b)  bourg  de  l'Attique  dans  la 
tribu  Acamantide.  Plutarque  par- 
le de  ce  bourg  ;  il  nous  apprend 
que  Périclès  en  étoit  natif.     . 

CHOLHOZA ,  Cholhoia\  (c) 
X«>fÇs ,  fut  père  de  Sellum ,  oui , 
au  retour  de  la  Captivité  de  Da- 
bylone  ^  bâtit  la  porte  de  la  fon- 
taine. 

CHOLLE,  ,CholU,  XoMM, 
{d)  ville  d'Afrique  ,  félon  Appien; 
mais,  comme  le  remarque  Ûr- 
télius ,  il  faut  lire  A^holla.  Ptolé- 
mée  met  dans  la  Palmyrene  une 
ville  du  nom  de  Choile. 

.  CHOLLIDES  ,  ChoUida  , 
peuples  de  Grèce  dans  TAttique,^ 
fous  la  tribu  Léontide.  Etienne  de 
Byzance  l'écrit  par  deux  LL  ,  ou 
AA  ,  &  un  /  fimple.  M.  'Spon 
met  le  peuple  ChoUides  dans  la 
tribu  Égéïde ,  &  dit  que  ce  nom 
fe  trouve  aufîi  écrit  Cholleides  « 
malgré  la  critique  trop  fcrupu- 
leufe  de  Meurfius  ,  qui  n'y  veut 
point  la  diphthongue  u, 

CHOMER  ,  Chômer ,  ou  Ho- 
MER  ,  forte  de  mefure  Hébraïque. 
C'étoit  la  même  que  le  Corus,qut 
contenoit  dix  baths ,  &  par  con- 
féquent  deux  cens  quatre-vingt- 

{c\  Efd.  L.  II.  c.  3.  V.  15. 

{d)  Piolem»L.  V,  c.  15. 

Giv 


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104        .  C  H 

dix  -  huit  pintes ,    une  cliopîne  , 
un  demi^feptier  ,  &  un  peu  plus» 

CHONÉNIAS  ,  Chonenias  , 
XstfKfr/aç  1  {a)  chef  des  Lévites , 
préfidoit  à  la  mùflque.du  temple, 
du  tems  de  David.  Il  commençoit 
le  premier  la  fainte  fymphonie  , 
parce  qu'il  étoit  très-fage  &  nhs-' 
habile ,  dit  l'Écriture. 

CHONÉNIAS,  Chonenias^ 
Xmtvlctç  9  {h)  vivoit  du  tems  de 
JofiaS)  roi  de  Juda.  Lui  &  fès  frê- 
nes Sémeias  &  Nathanaël,  comme 
auiH  Hafabias  ,  Tehiel  &  Jozabad, 
chef  des  Lévites  ,  donnèrent  aux 
autres  Lévites  ,  pour  célébrer  la 
Pâque  ,  cinq  mille  menues  bêtes , 
&  cinq  cens  bceufs, 

CHONIDAS ,  Choriidas  ,  (c) 
gouverneur  de  Théfée.  Par  Ion 
application  &  Tes  talens ,  il  répon- 
dit^ ù  bien  aux  intentions  de  la- 
yeul  de  fon  élevé ,  que  les  Athé- 
niens dans  la  fuite  l'honorèrent 
comme  un  demi-Dieu ,  lui  immo-^ 
km  tous  les  ans  un  bélier ,  le  jour 
qui  précédoit  la  fête  de  Théfée  ; 
honorant  ainfi,comme  le  remarque 
Plutarque ,  avec  plus  de  raifdn  & 
de  juftice  »  la  mémoire  de  celui 
quiavoit  formé  leur  héros,  que 
Silanius  &  Parrhafius ,  qui  n'en 
avoient  fait  que  des  fiatues  &  des 
portraits. 

CHORA  ,  Chora  ,  X4p(t  , 
nom  dont  lès  Grecs  fe  font  fervis 
pour  déHgner^un  lieu.  Ils  don- 
noient  à  ce  mot  des  étendues  fort 
dtfiFérentes  ;  car ,  ils  nommoient 
X 'pne  ou  Xjpoç  ,  un  païs  ,  une 
région ,  une  province ,  une  terre , 

(a)  Parai.  L.  I.  c.  15.  ▼.  ts. 
Ih)  Paral.L.  U.  €.35.  V»  9. 


CH 

on  hérîtase,  un  champ  ;  ils  avoient 
auffi  le  mot  Chorion  ,  Xvphy 
pour  fignifier  la  même  chofe ,  & 
Temployoient'  auffi  pour  fignifier 
une  citadelle ,  un  château ,  une 
fortereffe  ,  fans  parler  des  autres 
fignifications  de  ces  mots,  lefquels 
n'ont  point  de  rapport  avec  la 
géographie.  C'eft  dans  le  fens  de 
Chora ,  pris  pour  une  campagne, 
qu'un  païfan  étoit  nommé  dans 
cette  langue ,  Chorites ,  Xar^/rHç. 

CHORA  ,  Chora  ,  {d)  tivière 
de  France.  Les  Anciens  ont  fou- 
vent  fait  mention  d'une  rivière  8c 
d'un  lieu  de  ce  nom.  Adrien  de 
Valois  eft  le  premier  qui  ait  re- 
cherché quelle  rivière  s'appelloit 
ainfi  ;  &  il  a  trouvé  que  Chora 
efl  la  Cure  qui  a  fa  fource  dans  le 
Nivernois,  auprès  de  Plachei  , 
paffé  à  Domecy-fur-Cure  ,  à  Cu- 
re ,  &  à  Pierre-Pertus  ,  auprès  de 
Vezelay,  à  Arci ,  &  fe  perd  dans 
rionne,  à  Crevan  dans  TAuxer* 
rois. 

Quant  au  lieu  du  nom  de  Cho- 
ra ,  Ammien-Marcellin  en  fait 
mention  fur  la  route  qui  conduit 
d'Autun  à  Auxerre.  On  trouve 
Chora  fur  cette  même  route  dans 
la  vie  de  Saint  Colomban  ,  écrite 
par  le  moine  Jonas  dans  le  fep- 
tième  fiecle.  M.  d'Anville  dit  que 
le  nom  de  ce  lieu  fubfifle  encore 
dans  l'emplacement  d'une  métai- 
rie ,  à  l'entrée  du  diocèfe  d' Au- 
xerre-, en  fortant  de  celui  d'Au- 
tun.  On  peut  voir  dans  les  éclair- 
ciflemens  fur  l'ancienne  Gaule, 
qui  ont  paru  en  1741 ,  les  raifons 

(«)  Myth.  par  M.  l^Abb.  Ban.  Tom. 
VI.  p.  97' 
(d)  Notic.  de  ULGauL  par  M.  d'Aavill. 


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CH 

quî  ne  permettent  pas  d'adhérer  à 
l'opinion  de  M.  le  Bœuf,  en  con- 
fondant Chora  avec  Crévan ,  qui  • 
étott  diAingué  par  Ton  nom  de 
Crevennum  ,  dès  le  tems  de 
Charles  Martel ,  ce  qui  eft  apte- 
rieur  d'un  (îecle  à  la  mention  qui 
eu  faîte  de  Chora  dans  la  tranila- 
lion  des  Saints  George  &  Aurèle. 
Il  eft  intéreiïant  de  connoitre  la 
pofition  de  Chora  par  rapport  à 
cet  endroit  de  la  Notice  de  l'Em- 
pire ,  Prafeêlus  Sarmatarum  geti" 
tilium  à  Chora  Parijîos  ufque. 
Sanfon ,  en  plaçant  Chora  à  Cor- 
beil ,  ne  voyoit  point  que  le  nom 
de  Corboilum,  qui  efî  celui  de 
Corbeil,  ne  fçauroit  être  confondu 
avec  Chora  par  une  fuppofition 
d'analogie. 

CHORAGES,  Choragiay{a) 
partie  des  théâtres  anciens.  C'en 
étoit  comme  le  fond  des  coulifles; 
c'eft-là  qu^on  difpoToit  quelque- 
fois des  chœurs  de  mu^ue,&  qu'- 
on gardoit  les  habits  oTles  inftru- 
mens  de  la  fcene  ;  c'efl  de-là  que 
l'on  tiroit  tout  ce  qui  paroifioit 
aux  yeux  ;  d'où  l'on  voit  ^ue  ces 
endroits  dévoient  être  afTez  fpa- 
cieux. 

CHORAMNÉENS ,  Choram^ 
n(zi  ^  Xop<ijujfetTot  »  (b)  peuples  de 
Perfe  ^  félon  Etienne  de  Byzan- 
ce  ,  qui  dit  que  c*étoit  des  fauva- 
ges.  Il  cite  Ctéfias  au  dixième  li- 
vre des  Perfiques  ,  oii  il  dit  qu'ils 
étoient  fi  légers  à  la  courfe,  qu'ils 
atteignoient  &  prenoient  les  biches 
tn  courant. 


CH  loç 

Ces  Choramnéens  font  fans 
doute  les  mêmes  dont  il  jeù  parlé 
dans  EHodore  de  Sicile  ,  qui  les 
met  au  nombre  de  ceux  qui  furent 
foumis  par  Ninus  ^  roi  des  A(Fy- 
riens. 

CHOROMNÉENS ,  Chorom^ 
nai  ,  XofOfivaTot',  autrement  Cho- 
ramnéens.  Foye{^  Choramnéens. 

CHORASMIENS  ,  Càoraf^ 
mil  ^  Xûùi>ei6f4tct ,  (c)  peuples  d*A- 
fie  ,  dont  parle  Quinte  -  Curfe. 
Cet  Hiftorien  paroit  les  mettre 
dans  la  Sogdiane.  C'eft  la  pofition 
que  leur  donne  Ptolémée  ;  car  ,  il 
nomme  les  Chorafmians  parmi  les 
nations  qui  habitoient  dans  la  Sog- 
diane. Cela  convient  avec  le  té- 
moignage de  Pline ,  qui  les  place 
auiu  vers  ces  quartiers-là. 

Les  Chorafmiens  font  appelles 
Chorafmes ,  Chorafmi ,  dans  Jui- 
tin,  qui  nous  apprend  que  ces 
peuples  furent  foumis  par  Ale- 
xandre. Du  tems  de  Darius ,  ils 
faifoient  partie  de  la  feizième  Sa- 
trapie y  qui  payoit  trente  ralens  à 
ce  Prince.  Hérodote  ,  de  qui  nous 
tenons  cette  particularité ,  dit  ail- 
leurs ,  que  les  Chorafmiens  al- 
loient  au  combat  armés  de  la  mê- 
me manière  que  les  Ba*âriens. 

Denys  le  Périégete  diftingae 
les  Chorafmiens  d'avec  les  habi- 
tans  de  la  Sogdiane  ;  car ,  après 
avoir  parlé  des  Meffageces  ,  il 
ajoute  :  n  Après  eux  font  les 
n  Chorafmiens  vers  le  nord ,  & 
M  après  ce(jx-ci  eft  la  Sogdiane , 
I»  pan  le  milieu  de  laquelle  coule  ^ 


(«)   Antiq.  cxpl.  par  D.  Bem.  iejL.  VI.  c.  ii.  Plîn.  T.  I.  p.  514.  Strab. 
Monif.  Tom.  III.  pag.  145.  Jp.  ^15.  Aihen.  p.  70.  Juft.  L.  XII.  c. 

(i)  Diod.  Sicul.  p.  64.  16.  Herod.  L,  lU.  c.  93.  L,  VU,  c,  66. 

(c)  Quint.  Coït.  L.  Vil.  c«  4,  Ptokm.  I 


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I 


io6  C  H 

»  l'Oxus.  tt  On  doute  que  ces 
Chorafmiens  foient  les  mêmes  que 
ceux  d'Athénée  ;  mais ,  ils  ne 
différent  pas  des  Chorafmufmes 
deStrabon,  ni  même  à  ce  que 
nous  croyons ,  des  Choramnéens 
d'Etienne  de  Byzance.  Ces  Cho- 
rafmiens ,  chaires  de  leur  patrie, 
fsi  jetterent  dans  la  Syrie  où  ils 
temporterent  de  grandes  viâoires 
far  les  Francs  ,  qui  y  avoient 
établi  le  royaume  de  Jérufalem. 

Ce  font  les  mêmes  que  M.  l'ab- 
bé de  Vertot  appeUe  Corafmiens. 
Cétoic^  dit. il»  des  peuples  fortis 
récemment  de  la  Perfe  ,  &  iffus , 
à  ce  qu'on  prétend  V  des  anciens 
Panhes  ;  du  moins ,  ils  en  habt<" 
telcm  alors  le  pais  appelle  Yraca- 
gémi  ou  Hyrcanie  Perfienne, 
D'autres  les  placent  dans  le  Cou* 
varzem ,  proche  de  la  Corofane  ; 
mais ,  je  ne  fçais  ,  ajoute  M.  de 
Vertot ,  fi  ces  Corafmiens  n'é- 
toiem  pas  plutôt  origip^^ires  du 
royaume  de  Carizme ,  que  Pcolé- 
mée  appelle  Chorafmia  ,  d'où  ces 
barbares,  la  plupart  pâtres ,  &  qui 
B'avoient  guère  de  demeures  fi- 
xés ,  pouvoient  être  paiTés  dans 
quelques-unes  des  provinces^  de 
ia  Perfe.  Quelque  haute  eftime 
qoe  les  Ouvrages  de  ce  fçavant 
abbé  m'ayent  fait  naître  pour  fa 
perfonoe^  dit  M.  de  la  Martinièrej 
je  ne  pub  diffimuler  qul'il  y  a  bien 
r  de  Hneiaâitude  dans  ce  peu  de 
mots.  Outre  qu'il  devoit  direCou- 
Fsô-ezm ,  ou  plutôt  KNouc^rezem  i 
&  Coraflan  ou  Khoraflan ,  il  ne 
devoit  pas  ^idinguer  le  païs  dé 


CH 

Couarezm  »  de  celui  de  Carîzme  i 
qui  font  fynonymes  ,  &  répon- 
dent à  la  Chorafmie  de  Ptolémée^ 
à  quelque  différence  près  des  li- 
mites. Quant  à  ce  qu'il  dit  qu'ils 
écoient  iffus ,  à  ce  qu'on  prétend^ 
des  anciens  Parthes  ;  cela  peut 
être  vrai ,  parce  qu'il  y  avoit  d'au- 
tres Chorafmiens  dans  la  Parthîe» 
Pour  ceux  qui  cauferent  taiit  de 
maux  dans  la  Paleftine  >  &  qui 
s'étant  brouillés  enfemble ,  fe  dé- 
truifirent  eux  mêmes  ,  de  forte 
que  tout  en  périt  j  jufqu'à  leur 
nom,  cela  ne  doit  pas  s'entendre 
des  Chorafmiens  en  général  ,mais 
de  ce  détachement  de  la  nation  , 
qui  étoit  fous  les  ordres  de  Barba-* 
can. 

CHORASMIENS ,  tkoraf^ 
mil  ,  Xœpifr/uiioi ,  (j)  peuples  d'A- 
ûe  dans  la  Parthie ,  vers  l'Orient, 
felon  Athénée.  Arrien  ,  dans  foQ 
Hiffoire  des  guerres  d'Alexandre  9 
fait  ment^  d'un  peuple  qu'il 
nomme  Cnorafmenes  ;  mais  ,  il 
eft  différent  de  ceux-là  ,  car  il  le 
met  au  voifinagede  la  CôlchideâC 
des  Amazones. 

CHORAUtE,  thauroUs,  {h) 
nom  que  l'on  donnoit  chez  les 
Grecs  &  chez  lès  Romains  »  à 
celui  qui  pçéftdoit  fur  les  Choeurs* 
Celui ,  qu'on  voit  dans  les.  antif 
quités  de  D.  Bernard  de  Mont? 
faucon^  eft  revêtu  d*une  tunique , 
&  tient  de  chaque  main  une  flûtei 
dont  le  petit  bout  eft  appuyé  fur 
fa  poitrine. 

CHORAZIN,  Chora^iR. 
Voyt\  Corozaïm. 


(«)  &x\axu  p.  70. 


I(*)    Antiq.  cxpL  par  D.   Bern,  de 
Montf.  Tom.  III.  p.  341. 


,Digitized 


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CH 

CHORÉE,  terme ,  qui ,  dans 
la  poëfie  Grecque  &  Latine  ,  Ci- 
gnifie  un  pied  ou  une  mefure  de 
vers,  compofée  d'une  longue  & 
d'une  brève  ,  comme  arma.  On 
l'appelle  ordinairement  Trochée. 
Foye^i;^  Trochée, 

CHORÈGE  ,  Choragus  ,  (a) 
fone  de  Maeidrat  à  Athènes.  Le 
peuple  d'Athènes  étoit  partagé 
en  dix  tribus  ,  dont  chacune  avoit 
un  Magiftrat ,  que  l'on  nommoit 
Cfaorège.  C'étoit  àlui  faire  les  frais 
des  repréfentations  tragiques  pour 
fa  tribu.  A  la  vérité ,  la  tribu 
dônnoit  une  fomme  ;  mais ,  il  en 
coutoit  toujours  au  Chorège  9  qui 
ne  pouvoir  guère  dans  ces  occa^ 
fions  ,  fe  difpenfer  de  fe  piquer 
de  magniâcence.  Lorfqu'il  choi- 
fiiToit  une  pièce  »  on  difoit  qu'il 
lui  accordoit  le  chœur  ;  c'eft-à- 
dire ,  qu'il  fourniiToit  au  Poëte  des 
aâeurs ,  des  danfeurs  ;  des  habits, 
en  un  mot ,  tout  ce  qui  étoit  né- 
ceiTairé  pour  faire  jouer  une  pie- 
ce.  Chaque  Chorège  cherchoit  à 
l'emporter  fur  ks  émules ,  &  la 
gloire  qui  lui  en  revenoit  »  réjail- 
bâbit  ft^ir  toute  fa  tribu  ;  il  étoit 
iiufli  jaloux  de  cet  honneur  ,  que 
,d^une  viéèoire  qu'il  auroit  rempor- 
tée les  armes  a  la  main  fur  les 
ennemis  de  la  république  ;  ce  qui 
paroît  bien  par  ce  que  Plutarque 
raconte  de  Thémiftocle.  Thémif- 
tocle  ,  dit-il ,  vainquit ,  Caifant  les 
fondions  de  Chorège  pour  les  tra- 
gédies ,  ces  jeux  étant  alors  dans 
kur  plus  grande  célébrité  ,  &  fît 
dreiTer  un  monument  de  fa  vic- 

(«)  Mém.  de  PAcad.  det  Infcript.  & 
Bell.  Lett.  Tom.  XV.  pag.  164.  Tom. 
XVlILp.  7O971. 


C  H  107 

toîre  avec  cette  Infcription  :  Thé- 
miftocU  Phrédrien  était  Chonge  ; 
Phrynicus  faifoit  repréfenter  la 
pièce  ;  Adimante  préfidoit. 

On  avoit  accordé  au  Chorège 
de  la  tribu  viâorieufe ,  le  droit 
de  faire  graver  fon  nom  fur  le  tré- 
pied que  cette  tribu  fufpendoit  aux 
voûtes  du  temple.  Cette  fonâion 
quoique  ruineufe  ,  étoit  fort  re- 
cherchée, &  devoir  l'être  dans  un 
état  républicain.  Outre  qu'elle 
conduifoit  aux  honneurs ,  comme 
la  dignité  d'Édile  Curule  à  Rome, 
eile  donnoit  beaucoup  de  cré(|it 
dans  l'efprit  d'un  peuple ,  plus  fen- 
fible  au  plaifir  qu'on  lui  procuroit, 
qu'à  la  grandeur  des  fervices ,  & 
qui  eftimoit  autant  un  Chorège 
prodigue  ,  qu'un  Général  viâo- 
rieux. 

CHORÈIQUE ,  Choreus,  {b) 
XcspiîQC,  y  forte  de  rhythme ,  dont 
on  trouve  l'explication  dans  Arii- 
tide  Qt^ntilien. 

Cet  Auteuf  qualifie  le  rhythme 
Chorèïque  irrationel,  parce  qu'il 
commencfs  par  le  levé ,  dit  Mei- 
bom ,  pour  finir  par  le  frappé  ;  Se 
il  en  fait  deux  efpèces  , .  l'iamboï- 
de  &  le  trochoïde.  Le  Chpr^ï- 
que-ïamboïde  e(l  compofé  d'une 
loiigue  pour  le  levé ,  &  de  deux 
brèves  pour  le  frappé.  //  efifem- 
blabU  au  d^6iyU  ,  qfi,ant  aii 
rhythme  y  dit  Ariftide  ,  6»  i  Viam^ 
be  ,  quant  au  nombre  des  fyllabes' 
Surquo;  le  f^avant  Meibom  fait 
cette  judicfeufe  remarque.  Cela 
doit  s'expliquer  en  cette  manière  : 
Qua/it  au  tems  des  pieds ,  rïam^ 

(h)  Mém.  de  TAcad.  des  Infcript.  8c 
Bell.  Lett.  Tom.  XV.  pag.  sai  >  iix. 
T.  XVII.  p.  lao. 


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io8  CH 

hoïde  répond  au  daStyle  ;  mais  f 
^uant  au  rhythme  »  il  répond  à 
Flambe.  Car  ^  comme  le  rhythme 
îamhique  commence  par  le  levé  ; 
de  même  V'iamboHque  commence 
aujjipar  le  levé.  Suivant  cette  ex- 
plication de  Meibom ,  il  y  a  donc 
faute  dans  le  texte  d'Aridtde,  ce 
que  l'interprète  n'a  point  remar- 
qué. Il  faut  lire  'iamhe  au  lieu  de 
da6lyle  ,  &  dadyle  au  lieu  d*wm- 
he^  en  ce^e  manière  :  Il  ejlfem" 
tlaUe  à  riambe  ,  quant  au  rhytH^ 
me  ;  &  au  dafïyle  ^  quant  au 
nombre  desfyllabes. 

Il  patoit  que  cette  faute  ou  cet- 
te méprire  eft  très-ancienne  dans 
le  texte  d'Ariftide,  puifqu'elle  fe 
trouve  dans  Marcien  Capelle,qui 
en  parlant  de  ces  rhythmes  d'a- 
près Ariftide,  qu'il  n'a  fait  que 
traduire  en  Latin  \  s'explique  en 
ces  termes  :  Suntfane  [  rhythmi  ] 
qui  etiam  irraiionabiles  effe  dicun^ 
tur,  quos  analogos  voc'uamus y 
quos  etiam  chorios  appellare  con^ 
fuevimus.  Sunt  autem  numéro  duo; 
quorum  alter  diiambi  figuram  ref- 
picit ,  &  confiât  ex  elatione ,  qua 
longaeft,  &  duabus  pofitioriibus  ; 
&  numéro  quidem  eft  ad  daêlyU- 
cumfimilis  ;  partibus  verb  ad  nU' 
merum  ionicum  jungitur  &  iambi^ 
cum.  Aa  travers  des  fautes  d'un 
texte  Latin  fi  corrompu  ,  on  ne 
laii&  pas  de  reconnoitrediftinâe- 
ment  celui  d' Ariftide  ,  tel  qu'on 
le  lit  aujourd'hui  dans  l'édition  de 
Meibom  ,  &  fur  lequel  celui  -  ci 
rétablit  le  texte  de  Capelle  >  fans 
s^appercevoir  de  la  tranfpoiftticm 
des  deux  mots  daflylo  &  'iambo.  - 

La  féconde  efpèce  de  rhythme 
Chorèïque  étoit  le  trochoide^com- 


CH 

pofé  de  deux  brèves  pour  le  levé, 
d'une  longue  pour  le  frappé ,  fie 
qui  n'étoit  que  Tinverfe  du  pré- 
cédent. Du  refte  ,  le  rhythme 
Chorèïque  tiroit  <re  nom  de  l'em- 
ploi qu'on  en  faifoit  dans  pluûeurs 
airs  deftinés  aux  danfes. 

CHORÉVÉQUE ,  Chorepif' 
copus  9  nom, y  que  l'on  donnoit  à 
celui ,  qui  exerçoit  quelques  fonc- 
tions épifcopales  dans  les  bour- 
gades &  les  villages.  On  l'appel- 
bit  le  Vicaire  de  rêvêque.  Il  n'çft 
pas  queflion  dans  TÉglife  de  cette 
ronâion  avant  le  IVe  fiecle.  Le 
Concile  d'Aniioche  tenu  en  340 
marque  fes  limites.  Armentariui 
fut  réduit  à  la  qualité  de  Choré- 
vêque  en  439  9  par  le  Concile  de 
Riez,  le  premier  de  ceux  d'Occi- 
dent où  il  foit  parlé  de  cette  di- 
gnité. Le  Pape  Léon  III  l'eutabo- 
Re  ,  s'il  n'en  ^i  été  empêché  par 
le  Concile  de  Ratisbonne. 

Le  Chorévôque  ,  au-deffus  des 
autres  Prêtres ,  gouvernoit  fous 
rÉvêque  dans  les  villages.  U  n'é- 
toit  point  ordonné  Évéque  ,  il 
avoit  rang  dans  les  Conciles 
après  les  Evêques  en  exercice , 
&  parmi  les  Évêques  qui  n'exei^ 
çoient  pas  ;  il  ordofinoit  feu!  des 
Clers  mineurs  &  des  Soûdiacres , 
&  des  Diacres  &  des  Prêtres  fous 
l'Évêque.Les  Chorévêques  d'Oc- 
cident, portèrent  l'extenfion  dé 
leurs  privilèges  prefqu'à  toutes  les 
fondions  épifcopales  ;  mais ,  cette 
entreprife  ne  fut  pas  tolérée.  Les 
Chorévêques  cédèrent  prefque  en- 
tièrement au  X.e  fiecle ,  tant  en 
Orient  qu'en  Occident ,  où  il  pa- 
roit  qu'ils  ont  eu  pour  fucceffeurs 
les  Archiprêtres  ^  les  Doyens 


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C  H 

Ruznix.  Il  y  a  cependant  des 
Dignitaires  encore  plui  voifms  des 
anciens  Ghorévêques ,  ce  font  les 

Khds-Vkaîresy  tels  que  celui  de 
ntoife,  auxquels  les  Évéquesou 
Archevêques,  ont  confié  les  fonc- 
tions épifcôpales  fur  une  portion 
d*un  diocèle  trop  étendu  pour  être 
adminidré  par  un  feul  fupérieurè' 
Le  premier  des  fous- Diacres  de 
Saint  Martin  d'Utrecht  9  &  le 
premier  Chantre  des  Collégiales 
de  Cologne  ,  ont  titre  de  Cnoré- 
vêque,  &  fondions  de  Doyens 
Ruraux  ;  TEgliie  de  Trêves  a 
auffi  dés  Chorévêques. 

Ce  nom  vient  de  *w/>oç ,  locus  » 
lieu ,  &  de  imaKoTfoç  *  epifcopus  , 
Évêque,  c*eft  -  à  -  dire  ,  Évêque 
d'un  lieu  particulier. 

CHORIAMBE ,  terme  ,  quî, 
dans  l'ancienne  poëfie ,  veut  dire 
un  pied  ou  mefure  de  vers ,  com-  • 
pofée  d*un  chorée  ou  trochée ,  6c 
oun  ïambe  ,  c*e(l-à-  dire ,  de  deux 
brèves  entre  deux  longues,  com- 
me  hïftorïâs.  • 

CHORIAS  ,  ChorUs  ,  {a) 
Xaûflaç-i  Ménade  ,  dont  on  voyoit 
le  tombeau  à  Ârgos.  C'étoit  une 
de  ces  femmes  qui  fuîvoient  Bac- 
chus,  ôc  qui  fecvoîent  dans  Tes 
troupes  ,  lorfqu'il  vint  afliéger 
Argos  ;  on  dit  que  Perfée  rem- 
porta la  vidoire  ,  &  que  piuHeurs 
de  Tes  femmes  ayant  été  tuées 
dans  le  combat ,  elles  eurent  une 
commune  fépulture  ;  mais ,  com- 
me celle-ci  étoit  la  plus  diftin- 
gttée  ,  elle  eut  fon  tombeau  à 
part.   . 


G  H         /109 

CHORICOMACHIAN. 

Foyei  Céladian. 

CHORIENIS  PETRAJÎeti 
de  rinde  au  pais  des  Parétaaues  , 
félon  Arrien.  C'étoit  une  torte- 
reiTe  qui  portoit  le  nom  de  fon 
feigneur ,  appelle  Choriénès. 

CHORINÉE  ,  Chorlnaus ,  (h) 
capitaine  >  qui  fut  atteint  6i  percé 
d'une  âeche  ,  qu'Afylus  lui  avoit 
décochée. 

CHORINÉE ,  ChorifKxus,  (c) 
prêtre  Troyen.  Aprls  qu*on  eut 
recueilli  &  lavé  avec  du  vin  les 
cendres  de  Mifène  ,  ami  d'Énée  , 
Chorinée  les  enferma  dans  une 
urne  de  bronze  ;  enfuite  ,  prenant 
un  rameau  d'olivier ,  qu'il  trempe 
dans  Feau ,  il  fait  trois  fois  le  touf 
deTaflemblée^  afperfe  &  purifie 
les  aflîftans  »  ôc  prononce  enfin 
les  derniers  mots. 

Quelques- nns  prétençlent  que 
ces  derniers  fl|Éts  confidoient  dans 
ces  trois  fyllabes ,  ilicet  ^  adref- 
fies  au  peuple  ;  c*eft  -  à  -  dire  , 
alle:^  -  vous  ,  en  la  cérémonie  efi 
finie.  Mais,  ce  mot  ilicet  étoit 
d'ufage  dans  tous  les  facrifices, 
&  c'eft  de  cette  ancienne  coûtu- 
me  qu'eu  dérivé  Vite  ,  mijfa  eft  ; 
ce  que  nos  Théologiens  ne  nient 
point.  Il  eft  donc  vraifemblable 
qu'il  s'ajgit  ici  plutôt  de  Tadiea 
qu'on  difoit  au  mort:  Vale  [tn 
l'appellant  par  fon  nom  1 ,  magna 
fupremum  voce  ciemus.  Revenons 
au  prêtre  Cïiorinée. 

Ébufe  étant  venu  l'attaquer  ,' 
ce  Prêtre  prit  un  tifon  ardent  fur 
les  autels ,  &  le  lui  porta  au  vi- 


(•)  Pauf.  p.  i«o. 

{^)  Virg.  i£neid.  L,  ÏX.  v.  571. 


w 


L.  XII.v.t98.  ër/ff. 


V,  satf.  é* 


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iio  C  H 

fage.  Le  feu  ayant  pris  à  la  barbe 
vd't^bufe  ,  Chorinée  profite  de  Ton 
trouble  ,  le  prefle  ,  le  faifit'aux 
cheveux ,  le  renverfe  par  terre , 
&  le  perce  de  Ton  épée, 

CHORCEBE,  CAorœbus.Foyei 
Corœbe. 

CHOROGRAPHIE,  Choro^ 
graphia  ,  Tart  de  faire  la  carte , 
ou  la  defcription  de  quelque  païs 
ou  province. 

Ce  mot  vient  des  mots  Grecs 
X^po^  »  région  ,  contrée  ,  lieu  ;  & 
de  7^a(pûtf  »  je  décris. 

La  Choragràphie  efi  différente 
de  la  Géographie,  comme  la 
defcription  d'un  païs  Ve&  de  toute 
la  terre. 

Elle  eft  difFérente  de  la  Topo- 
graphie ,  comme  la  defcription 
d'un  païs  Teft  de  celle  d'un  lieu , 
d'une  ville ,  ou  de  fon  didrid. 

CHOKKÉENS^korrai  .  (a) 

yoopaioi^  peuples  appelles  aufli 
Horréens.  Ce  furent  les  premiers 
habitans  du  païs  de  Séïr  ou  Séhïr, 
qui  fut  depuis  occupé  par  les  Idu- 
méens.'Ils  étoient  déjà  puiffans 
du  tems  d'Abraham  ,  &C  long- 
tems  avant  la  naifTance  d'Éfaii. 
Séhïr,  fort  différent  d'Éfaii ,  étoit 
leur  père.  Les  enfans  d'Éfaii  con- 
quirent le  pa,ï$  de  Séhïr,  ou  fe 
mêlèrent  avec  les  Horréens  , 
defcendans  de  Séhïr  ;  car,  on  ne 
fçait  pas  comment  cela  s'eft  fait. 
Mais ,  on  fçait  qu'ils  font  regardés 
comme  ne  fjifant  qu'un  même 
peuple ,  ayant  leur  demeure  dans 
l'Arabie  Pétrée ,  &  dans  l'Arabie 

(a)  Gcnef.  c  14.  ?.  6.  c.  56.  v.  20 ,  |     (h)  Suppl.    à  TAntiq.  expK  par  D» 
»i.  Deuter.  c.  a.  v.  i.  c.  33.  v,  1.  Rcg.  j  Bern.   de  Montf.  Tom.  UI.  p.  173. 
L.  m.  c,  ti.  V.  8,  '1     (0  Diod,  Sicul.  p.  603. 


CH 

déferre,  au  midi  &  à  l'orient  de 
la  terre  de  Chanaan. 

On  trouve  le  nom  de  Hor- 
réens dans  un  fens  appellatif ,  aa 
troifième  livre  des  Rois ,  oh  les 
interprètes  l'ont  traduit  par  Opti» 
mates  ,  ou  Heroës. 

CHORS.  {b)  L'on  trouve 
foovent  dans  les  Infcriptions  Ciiors 
^omt' Cohors^  M.  Fabretti ,  dans 
(es  Infcriptions  ^  en  fournit  quatre 
ou  cinq  exemples. 

CHORTACANE  ,  Chorta-^ 
cana ,  Xdpra jtava ,  (c)  ville  d'Hyr- 
canie  «  félon  Diodore  de  Sicile. 
Elle  étoit  une  des  plus,  confidéra* 
blés  du  païs  ,  &  extrêmement 
forte  par  la  nature  même  de  fon 
afiîette.  C'eft  là  que  le  Satrape  Sa- 
tibarzane  s'étoit  mis  en  défenfe 
aux  approches  d'Alexandre  ,  mais 
il  n'en  fut  pas, moins  obligé  de  fe 
rendre. 

CHORZIANES,  Choriianij 
peuple  d'Afie  ,  félon  Procope. 
M.  Coufm^  dans  fa  tra'.  ftion  | 
ne  fïomme  pas  le  peuple ,  mais 
'  le  païs ,  6(  dit  :  »  Philimuth  ÔC 
»  Vérus  allèrent  dans  la  Chor- 
»  zianne  avec  les  Éruliens  qu'ils 
n  commandoient ,  &  s'arrêtèrent 
i>  tout  proche  de  Martin,  a  Pro- 
cope dit,  quelques  lignes  plus  haut, 
que  ce  dernier  capitaine  des  trou- 
pes d'Orient ,  étoit  arrivé  au  fort 
de  Citharife  ,  à  quatre  journées  de 
Théodofiopolis  où,  Valérien  étoit 
campé. 

CHOSE  ,  Re? ,  nom  général, 
que  l'on  donne  à  tout  ce  qui  eft 
dans  la  nature. 


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^      CH 

On  défigne  indiftindement  par 
ce  mot  tout  être  inanimé,  (bit 
réel ,  fôit  moral ,  être  eft  plus  gé- 
néral que  chofe  ,  en  ce  qu'il  fe  dit 
indiiltndement  de  tout  ce  qui  eft  ; 
au  lieu  qu'il  y  a  des  êtres ,  dont 
chofe  ne  fe  dit  pas.  On  ne  dit  pas 
de  Dieu ,  que  c'eft  une  chofe  ;  on 
ne  le  dit  pas  de  l'homme.  Chofe  fe 
prend  encore  par  oppoHtion  à 
mot  ;  ainfi  >  il  y  a  le  mot  6c  la 
chofe;  il  s'oppofe  encore  à  Simu- 
lacre y  ou  apparence. 

Les  chofes  appellées  mancipi  j 
chez  les  Romains ,  étoient  celles 
qui  étoient  profledées  en  pleine  • 
propriété.  Elles  étoient  ainfi  ap- 
pellées de  mancipium  y  qui  figni- 
noit  le  droit  de  propriété  &  de 
domaine,  dont  les  feuls  ciroyens 
Romains  jouiflbient  fur  tous  les 
fonds  de  lltaiie  »  fur  les  héritages 
de  la  campagne ,  fur  les  efclaves , 
&  fur  les  animaux  qui  fervoient  à 
faire  valoir  ces  mêmes  fonds. 
Toutes  ces  chofes  étoient  appel- 
lées Res  mancipi  ^  ou  mancipii ,'  à 
la  différence  des  provinces  tribu- 
uires  des  Romains ,  où  les  parti- 
culiers n'avoiem  que  Tufufruit  & 
la  poffeiTion  de  leurs  fonds  &  des 
cbofes  qui  y  étoient  attachées. 
Ceft  pourquoi ,  on  les  nommoit 
Res  nec  mancipi. 

Par  l'ancien  droit  Romain  ,ru- 
fucapion  n'a  voit  lieu  que  pour  les 
chofes  appellées  mancipi  ,  foit 
meubles  ou  immeubles.  Les  cho- 
fes appellées  nec  mancipi ,  éroient 
feulement  fujettes  à  la  prefcrip- 
tion  ;  mais  ,  Juftinien  fupprima 
ces  diftinélions  frivoles  entre  ces 
deux  manières  de  pofféder  &  de 
prefcrire. 


CH  Ht 

Les  chofes  publiques  (ont  celles 
dont  le  public  a  l'ufage ,  telles  quo/ 
les  rivières  navigables  &  leurs 
rivages,  les  rues  &  places  publi- 
ques. Chez  les  Romains  «  le  peu- 
ple avoir  la  propriété  de  ces  Cho- 
fes ,  au  lieu  que  parmi  nous , 
elles  appartiennent  au  Roi ,  ou  au 
Seigneur  haut  jufticier  ,  dans  la 
juilice  duquel  elle&  font  fituées. 

Les  Chofes  publiques  6c  les 
Chofes  communes  conviennent 
en  ce  que  l'ufage  en  eft  commun 
à  tous  les  hommes;  mais,  elles 
différent  en  ce  que  la  propriété  ^ 
des  Chofes  publiques  appartient  à 
quelqu'un  «  au  lieu  que  celle  des 
Chofes  communes  n'appartient  à 
perfonne/ 

Les  Chofes  religîeufes  font  \e% 
lieux  qui  fervent  à  la  fépulture 
des  Fidèles.  Chez  les  Romains  , 
chacun  pouvoit  ,  de  fon  autorité 
privée  ,  rendre  un  lieu  religieux  , 
en  y  faifant  inhumer  un  mort  ; 
mais ,  parmi  nous ,  cela  ne  fufHt 
pas  pour  mètre  ce  lieu  hors  du 
commerce.  11  ne  devient  religieux 
qu'autant  qu'il  eft  béni  &  defliné 
pour  la  fépulture  ordinaire  des 
Fidèles. 

Les  Chofes  facrées  font  celles 
qui  ont  été  confacrées  par  les 
Évêques  ,  avec  les  folemnités 
requifes  ,  comme  les  vafes  fâcrésj 
les  églifes ,  &c. 

Les  Chofes  faîntes,  en  droit, 
font  celles  que  les  loix  ordonnent 
de  refpeâer^  telles  que  les  portes  6c 
les  murailles  des  villes,  la  perfonne 
des  fouverains  ,  les  ambaffadeurs , 
les  loix  mêmes.  On  appelle  ces 
Chofes,  faintes,  parce  qu'il  eft  dé- 
fendu de  leur  faire  injure  ^  ou 


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ÏI2  C  H  . 

d'y  (donner  aucune  atteinte. 
N  CHOS^IOÈS  ,  Chofroes,  {a) 
'  cV/)OMç ,  61s  de  Pacorus  ,  roi  des 
Parthes  ,  gouverna  cette  nation , 
après  la  mort  de  Ton  père.  11  avoit 
un  ^rere ,  nommé  Parthamafiris  , 
félon  Texpreil^on  de  Dion  Caf- 
(îus.  Il  efl  vrai  que  quelques  li- 
gnes plus  bas  9  Parthamafiris  eft 
appelle  neveu  de  Chofroès.  Mais, 
on  doit  fuppofer  que  c'eft  par 
erreur  de  copifte  »  &  qu'il  faut 
lire  eècTf  Aç>or  »  au  lieu  d'a/eA^//?r. 

Exédare,  roi  d'Arménie,  avoit 
reçu  de  Chofroès  Tinveftiture  de 
ce  royaume.  L'empereur  Trajan 
prétendit  que  c*étoit  un  attentat 
aux  droits  de  l'empire  Romain, 
&  réfolut  d'en  tirer  vengeance  y' 
ou  plutôt  de  profiter  de  Toccafion 
pour  s'agrandir.  Mais  ,  quelque 
pafîionné  qu'il  fût  pour  les  armes» 
îl  edimoit  les  bons  procédés  »  ^ 
îl  ne  vouloit  point  paroitre  violent 
fii  injufle.  Il  s'étoit  donc  plaint  à 
ChoiVoès  de  Tenireprife  faite  par 
lui  fur  les  droits  du  peuple  Ro- 
main au  fujet  de  la  couronne 
d'Arménie.  Mais ,  il  en  reçut  une 
réponfe  fière ,  qui  le  mit  à  l'aîfe  , 
&  lui  donna  pleine  liberté  de  fe 
fatisfaire.  En  conféquence ,  il  6t 
tous  les  apprêts  d'une  guerre  aufG 
importante  ,  &  il  fe  mit  lui-même 
en  marche. 

A  peine  étoit-il  arrivé  à  Athè- 
nes ,  qu'il  vit  venir  à  lui  une  am- 
baffade  de  Chofroès ,  à  qui  l'ap- 
proche du  danger  avoit  fait  pren- 
dre d'autres  penfées.  Le  roi  des 
Parthes  lui  envoyoit  des  préfens  ^ 


CH 

lui  demandoit  fon  amitié ,  l'infor- 
moit  que  ne  trouvant  point  qu'É- 
xédare  convînt  ni  aux  Romains , 
ni  aux  Parthes  ^  il  Tavoit  dépofé. 
£n6n ,  il  prioit  Trajan  d'accorder 
à  Parthamafiris  ,  fon  frère,  Hn- 
veftiture  du  royaume  d'Arménie, 
comme  Néron  l'avoit  donnée  à 
Tiridate.  | 

Il  auroit  été  peut-être  difficile  .  ' 
à  Trajan  de  rejetter  ces  propoû- 
tions ,  il  elles  lui  eufTent  été  faites 
d'abord  ;  mais  ,  elles  venoient 
trop  tard.  Il  s'étoit  mis  en  avan- 
ce ,  &  il  fe  croyoit  en  droit  de  ne 
point  reculer.  Il  répondit  donc 
aux  ambafTadeurs  de  Chofroès , 
que  l'amitié  fe  prouvoit  par  des  ' 
effets  ,  &  non  par  des  paroles  ; 
qu'il  feroit  bientôt  en  Syrie,  & 
que  là  ,  voyant  les  chofes  de  près, 
il  fe  détermineroit  au  parti  le  plus  ; 
convenable.  Le  parti  qui  lui  çon- 
venoit ,  étoit  la  guerre  ;  &  le  fuc- 
cès  répondit  au  de-là  de  fes  efpé- 
rances.  Tout  plia  devant  lui.  Par- 
thamafiris ,  ne  pouvant  çonferver 
fon  royaume  ,  voulut  au  moinX 
périr  en  Roi.  Il  fe  fit  tuer  dans  un 
combat  ,  &  laifTa  ainfi  les  Ro- 
mains paifibies  po^TefTeurs  de  l'Ar- 
ménie. Trajan ,  ne  bornant  point 
là  fes  projets  ambitieux  ,  pouffa 
plus  loin  (t%  conquêtes  ;  &  Auré- 
lius  Viâor  nous  apprend  que 
Chofroès  fut  obligé  de  lui  donner 
des  ôuges. 

La  guerre  fe  ralluma -quelques 
années  après.  Trajan  fit  prifon- 
nièré  la  fille  de  Chofroès ,  dépouil- 
la ce  Prince  de  fes  États ,  ôc  devint 


U)  Dio.  CaflT.  pag.  778.  ér  /«f .  Crév.  \fmv,  Mém.  de  TAcad.  des-  Infcript.  & 
Hilt.  des  fimp.  Toin,  IV.  pag.  ajô^  ^  JBcll.  Lett.  Tom.  XXI.  p.  57.. 

Hiaîire 


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•     CH 

maître  du  trône  d'or ,  fur  lequel 
les  rois  Parthes  rece  voient  les  hom- 
mages de  leurs  fujets.  Llnfortu- 
né  Choû-oès  dut  alors  mener  une 
vie  errante  &  fugitive.  Mais  , 
Trajan  ne  crut  pas  convenable  à 
ks  intérêts  de  le  replacer  fur  un 
trône ,  que  ce  Prince  n'auroit  ja- 
,  mais  regardé  comme  ua  don  des 
VRomartfrs ,  mais  comme  le  patri- 
moine de  fes  ancêtres.  Il  jetta  les 
yeux  fur  Parthamafpatès  »  qui  ne 
nous  eft  pas  connu  d^aiileurs. 
Mais  )  les  Farthes  dédaignant  ce 
Roi ,  le  dépoferent ,  &  ra'ppelle- 
tent  Chofroès ,  qui  fut  reconnu 
par  Adrien  ,  après  la  mort  de 
Trajan.  Un  bienfait  de  cette  na- 
ture n'empêchant  pas  Chofroès  de 
fe  fouvenir  de  ce  qu'il  avoit  fouf- 
fert  de  la  part  des  Romains ,  vou- 
lut s'en  venger ,  &  fit  des  prépa- 
ratifs de  guerre.  Mais,  Adrien, 
qui  lui  avoit  déjà  abandonné  tou- 
tes les  conquêtes  de  Trajan  , 
acheva  de  le  calmer  ,  en  lui  ren- 
voyant fa  fille  ,  qui  étoit  reftée 
prifonnière  entre  les  mains  des 
Romains.  Il  promit  de  lui  rendre 
le  trône  d'or  enlevé  par  Trajan 
aux  Parthes  ;  &  quoique  cette 
promefTe  n'ait  point  eu  d'exécu- 
tion ,  la  paix  n'en  fubflfla  pas 
moins  entre  les  deux  Empires. 
Tiie  Antonin  ne  voulut  pas  non 
plus  rendre  ce  trône  d'or  à  Volo- 
gèfe  ,  fils  de  Chofroès. 

CHOUETTE  ,    Noflua   (a) 

Sirix  ,  oifeau  noâurne  ,  que  la 

loi  de  Moïfe  avoit  déclaré  impur. 

I.  Cet  oifeau  a  l'ouverture  de 

la  bouche  grande  à  proportion  de 

(*)  Levît.  c.  11,  V.  17. 

Tom.  XI. 


CH  irj 

la  longueur  du  bec  ;  la  langue  eil 
un  peu  fourchue  à  l'extrémité; 
fon  empreinte  e(l  marquée  fur  le 
palais.  Les  yeux  font  gros  &  fail- 
lans  ;  la  membrane  ,  qui  fe  trou- 
ve entre  l'œil  &  la  paupière  ,  a  le 
bord  noir,  celui  des  paupières  efl 
large  &  rougeâtre.  L'ouverture 
des  oreilles  eft  très- grande  ,  ÔC 
recouverte  d'une  pellicule.  Les 
yeux  6c  le  menton  font  entourés 
d'un  double  rang  de  plumes  ,  qui 
forment  une  efpèce  de  fraife.  Ces 
deux  rangs  de  plumes  font  fitués 
l'un  derrière  l'autre  ;  celui  de  de- 
vant efl  compofé  de  plumes  roi- 
des  &  parfemées  de  blanc  ,  de 
noir  6c  de  roux  ;  celles  du  rang 
inférieur  font  fouples  &  teintes  de 
blanc  &  de  couleur  de  feu.  Le 
milieu  de  la  tête  efl  noirâtre  ;  les 
yeux  foftt  très -près  des  oreilles  ; 
il  y  a  au  de-là  àQs  narines  au- 
defTous  des  yeux ,  éti  poils  ronds 
&  droits. 

La  face  fupérieure  du  corps  efl 
mêlée  de  couleur  noirâtre  &  de 
roux.  Les  bords  des  plumes  font 
roux,ôc  le  milieu  efl  noirâtre;mais, 
fi  on  examine  de  près  chaque  plu- 
me  en  particulier  ,  on  y  voit  des 
lignes  ondoyantes  qui  les  traver- 
fent ,  ôc  qui  font  alternativement 
brunes  &  cendrées.  Le  ventre  ÔC 
le  refle  de  la  face  inférieure  du 
corps  ,  ont  à  peu  près  les  mêmes 
couleurs  que  le  dos.  En  générai , 
les  plumes  du  corps  de  la  chouette 
font  plus  douces ,  plus  longues  & 
plus  élevées  que  dans  la  plupart 
des  autres  oileaux  ;  ce  qui  la  fait 
paroître    beaucoup   plus    groffe 

H 


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Ti4  CH 

qu'elle  ne  Teft  en  eflfet. 

Les  pattes  font  couvertes  pref- 
que  jufqu'aux  ongles  d*un  pluma- 
ge épais  de  couleur  blanche  fale , 
avec  de  petites  lignes  noires  & 
ondoyantes  ;  il  n'y  a  que  deux  ou 
trois  écailles  annulaires  dans  cha- 
que patte  qui  foient  à  nud. 

Chaque  aîle  a  vingt -quatre 
grandes  plumes  ;  les  barbes  exté- 
rieures de  la  première  font  termi- 
nées à  la  pointe  par  des  poils  ré- 
parés les  uns  des  autres  ,  &  dif- 
pofés  en  forme  de  dent  de  peigne. 
On  voit  fur  les  grandes  plumes 
des  ailes  &  de  la  queue  ,  fix  ou 
fept  taches  Kanfverfales  qui  font 
d'un  blanc  fale  ,  &  teintes  de  roux 
ou  de  brun.  Les  petites  plumes 
des  aîles,  qui  recouvrent  les  gran- 
des ,  fur  tout  celles  du  milieu  & 
les  plus  longues  des  épaules  qui 
couvrent  les  côtes  du  dos ,  font 
marquées  de  taches  blanches  , 
fur  tout  fur  les  barbes  intérieures 
de  chaque  plume, 

La  queue  a  fix  pouces  de  lon- 
gueur ;  elle  e(ï  compofée  de  douze 
plumes  ,  celles  du  milieu  font  les 
plus  longues  ,  &  les  autres  dimi- 
nuent de  longueur  par  degrés  juf- 
qu'à  Texte  Heure  ,  qui/eft  la  plus 
courte  ;  elles  font  toutes  poin- 
tues. 

La  plante  des  pieds  e(l  calleufe 
&  de  couleur  pâle  ;  les  ongles 
font  longs  &  de  couleur  de  corne 
ou  noirâtre.  Il  ny  a  point  de 
membrane  entre  les  doigts.  L'ex- 
térieur de  devant  peut  fe  plier  en 
arrière ,  comme  ù  en  effet  c'étoit 


CH 

un  doigt  de  derrière  ;  ce  qui  a  feît 
dire  que  cet  oifeau  avoit  deux 
doigts  de  derrière. 

(a)  IL  La  Chouette  étoit  con- 
facrée  à  Minerve.  On  la  lui  avoit 
donnée  comme  un  fy mbole  de 
prudence  ^  la  pénétration  de  cet 
oifeau ,  dans  l'avenir ,  ayant  été 
reconnue  par  les  Anciens.  Dion 
Chryfoftôme  cite  là-deflus  Tapo- 
logue  d*Éfope  ,  pour  faire  enten- 
dre que  c'eft  par-là  que  la  Chouet- 
te a  fçu  plaire  à  la  plus  belle  ôc  à 
la  plus  faee  de  toutes  les  déefTes. 
Ce  font  (es  propres  termes ,  qui 
font  plus  d'honneur  à  Minerve 
que  rimagination  de  ceux  qui  lui 
ont  donné  des  yeux  de  Chouette, 
pour  autoriiêr  le  fy  mbole. 

Sur  les  monnoies  des  Athé. 
niens ,  on  voit  d'un  côté  la  tête 
de  cette  déefle  ,  6t  de  l'autre  une 
Chouette.  On  croit  que  cela  peut 
avoir  quelque  rapport  aux  Athé- 
niens mêmes.  C'étoit ,  dit  Antî- 
phone  dans  Athénée  ,  un  oifeau 
fort  commun  dans  leur  territoire; 
&  après  cela  ,  il  n'y  a  point  d'in- 
convénient à  confentir  qu'il  y  ait 
eu  communauté  de  fy mboles 
entre  la  déeffe  &  la  ville  d'A- 
thènes. Ce  qu'il  y  a  de  certain, 
c'eft  que  le  nom  de  Chouettes 
avoit  été  donné  aux  monnoies  de 
TAttique.  L'efclave  d'un  riche 
Lacédémohien  a  dit  en  ce  fens-là, 
qu'une  multitude  de  Chouettes 
nichoient  fous  le  toit  de  fon  maî- 
tre. 

Mais ,  pourquoi  les  Chodettes 
font- elles  pofées  fur  des  vafes  dif- 


(4f)  Mém.  de  PAcad.  des  Infcript.  &  Bell.  LqïU  Tom.  T.  pag.  %%i ,  %t^,  Tt 
y.  pag,  »68.  T,  XVI.  p.  104. 


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C  H 

tîngués  par  différentes  lettres  ?  les 
Athéniens  y  comme  la  plupart  des 
Antiquaires  Tont  cru  jufqu'icî  , 
auroient-ils  voulu  fignifier  par- là 
qu'ils  ont  inventé  la  fabrique  des 
vafes  de  terre  ?  c*eft  un  honneur 
qu  on  ne  leur  difpute  point.  On 
fçait  même  que  delà  leur  eft  ve- 
nu le  nom  de  Prométhées  ;  mais , 
ils  ont  trouvé  des  chofes  plus  im- 
portantes, dont  ils  ne  fe  font  point 
vantés  dans  leurs  monnoies, 

La  Chouette  fe  voit  aufli  avec 
Minerve  fur  une  médaille  dilium. 
Sur  quoi  Ton  propofe  cette  diffi- 
culté; pourquoi  trouve-t  on  avec 
la  Minerve  d'Ilium  le  fymbole  de 
celle  d'Athènes  ?  M.  l'abbé  de 
deFontenu  répond,  i.^  que  peut- 
être  le  Palladium  deTroye  n'étoit 
qu'une  copie  de  celui  qui  étoit  à 
Athènes  depuis  l'arrivée  de  Ce- 
crops ,  &  qu'on  croyoit  auffi  être 
tombé  du  ciel.  Le  culte  de  Miner- 
ve ,  apporté  d'Egypte  dans  la 
Grèce  ♦  pafla  dans  la  Samothrace , 
&  de-là  dans  TAfie  mineure  ,  oîi 
peut-être  Dardanus  lui-même  le 
fit  connoître.  2.^  Il  e(t  tièi- pro- 
bable que  les  Iliens ,  que  la  valeur 
des  Athéniens  avoient  affranchis 
de  la  domination  dés  Perfes ,  vou- 
lurent ,  en  reconnoiflance  de  ce 
fervice ,  faire  graver  fur  leur  mé- 
daille, le  fymbole  de  la  déeffe,  qui 
étoit  lé  plus  en  vénération  chez 
leurs  -bienfaiteurs  ;  comme  par  un 
femblable  motif  de  reconnoiflan- 
ce ,  ils  firent  auffi  graver ,  fur  une 
autre  médaille  de  leur  Minerve 
Hiade  ,  qui  eft  dans  le  cabinet  du 
Roi,  le  cheval  Pégafe  qui  étoit 


CH  115 

le  fymbole  que  lui  donnoîent  les 
Corinthiens*  3  .^  Les  Iliens  vou- 
lurent peut-être  exprimer  par  ce 
fymbole  qu'ils  avoient  été  afTujet- 
tis  par  les  Athéniens  ,  dans  le 
tems  que  ceux  -  ci  fe  rendirent 
maîtres  d'une  grande  partie  de 
l'Afie  mineure, comme  le  rappor- 
te Strabon  d'après  Thucydide  ;  ÔC 
cette  réflexion  feroit  tomber  la 
critique  de  Cafaubon  ,  qui  accufe 
Strabon  de  n'avoir  pas  bien  en- 
tendu le  texte  de  Thucydide. 

Pline  a  vanié  la  chair  de  la 
Chouette  pour  la  paralyfie.  Tous 
les  auteurs  de  matières  médicales 
ont  rapporté  cette  vertu  d'après 
lui ,  &  comme  un  trait  d'érudi- 
tion. Cette  .piopriéié  6c  quelques 
autres  qu'ils  lui  ont  auffi  accor- 
dée, chacun  fur  l'autorité  de  fou 
prcdécefleur  ,  ne  font  pas  con- 
firmées par  des  obfervations.  L'u^ 
fage  médicinal  de  cet  oilëau  eft 
très- rare  parmi  nous,  ou  même 
abfolum.ent  nul. 

^  CHOUETTE ,  forte  de  danfe 
des  Grecs  ,  dont  nous  ne  fçavons 
autre  chofe  ,  finon  qu'elle  étoit 
dans  le  cara^èère  pantomime  ÔC 
bouffon. 

CHRÊMES  ,  Chrêmes  ,  (a) 
fameux  peifonnage  dans  les  co- 
médies de  Térence»  Horace  ea 
fait  auffi  mention ,  &  il  le  repré- 
fente  comme  uil  vieillard  fort 
avare. 

CHRÉMETES  ,  Chremetes. 
Ariftote,  faifant  une  énumératioa 
des  rivières  ,  pour  faire-  voir 
qu'elles  ont  leurs  fources  dans  des 
montagnes ,  dit  :  ^i  De  même  éa 


(4)  Horat.  Spod.  Ode  1.  v.  3|. 


H 


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ii6  CH 

»  Afrique  il  y  en  a  comme  1*^- 
»  gon   &  le  Nife   qui  tombent 
I»  des  montagnes  d*£thiopie  ;  & 
n  d*aucres  ,   qui   étant  les  plus 
f)  grandes ,  entre  celles  dont   on 
n  parle  le  plus ,  comme  le  Chré- 
I»  metes  qui  fe  décharge  dans  la 
»  mer  extérieure  [  TOcéan]  ,  ôt 
»  le  premier  bras  du  Nil  ,  ont 
n  leur  fource  dans  la  montagne 
»  nommée  le  mont  d'argent,  ic 
Il  n*eft  pas  furprenant  qu*Ariftote 
fuive  l'ancienne  erreur ,  qui  met- 
toit  la  fource  du  Nil  aux  monta- 
gnes de  la  Lune  »  puifque  de  fça- 
vans  géographes ,  tels  que  Mef- 
lieurs   Sanfon  ,    l'ont  maintenue 
dans  leurs  cartes,  paruneniéte- 
tnent  qu'on    ne  fçauroit  louer , 
quelque  raifon  que  l'on  ait  de  ne 
parler  de  leur  fcience  qu'avec  une 
cftime  refpe^lueufe.  A  préfent  que 
l'on  connoSt  les  fources  du  Nil , 
on  fçaic  ,  à  n'en  point  douter  , 
que  des  lieux  où  il  naît  ,  il  ne  fort 
aucune  rivière  qui  fe  rende  dans 
rOcéan.    Ainfi  ,  les  fignes  que 
donne  Ariftote  pour  reconnoîcre 
le  Chrémetes  ,  ne  conviennent  à 
aucune  rivière  du  monde.  Cepen- 
dant, à  les  examiner  fur  le  pied 
de    l'ancienne    erreur  ,  on  peut 
foupçonner  qu'il  a  voulu  parler 
de  la  rivière  de  Zaire.  Les  An- 
ciens ,    avoient  fait  le  tour   de 
l'Afrique  ;   mai^  ,    ils    n'avoient 
qu'une  connoiflance  bien  confufe 
de  toute  fa  partie  méridionale  ^ 
qu'ils  ont  peuplée  ôc  entrecoupée, 
de  rivières  ôc  de  montagnes ,  con- 
formément à    leur   imagination. 


CH 

Héfychîus  parle  au/Ii  du  Chré^ 
metes, 

CHRÉMON  ,  Chremon  ,  {a) 
^pif^uv ,  l'un  des  trente  tyrans , 
que  ceux  de  Sparte  donnèrent 
aux  Athéniens. 

CHRESES  ,  ou  Chresis  , 
Chrefes  ,  Chrejis  ,  X^momç.  C'eft 
une  des  parties  de  l'ancienne  Mé- 
lopée ,  qui  apprend  au  compos- 
teur à  mettre  un  tel  arrangement 
dans  la  fuite  des  fons  »  qu'il  en 
réfulte  une  bonne  modulation  & 
une  mélodie  agréable.  Cette  par- 
tie s'applique  à  différentes  fuccef- 
Hons  des  fons  ^  appeliées  par  les 
Anciens  ,  agoge  ,  euthia  ,  ana- 
camptofa  ,  6tc. 

CHRESMOTHETES,  ar(?/l 
motheta  ,  (b)  forte  de  miniftrei 
des  temples.  On  appelloit  ain(î 
ceux  qui  donnoient  les  forts  à 
tirer. 

CHRESPHONTE  ,  Chref 
phontusj  (c)  l'un  des  Héraclides , 
étoit  fils  de  Cléodée  &  petit-fils 
d'Hillus.  Après  que  fes  frères  6c 
lui  fe  furent  rendus  maîtres  de 
quelques  villes  du  Péloponnèfé, 
ils  les  partagèrent  entr'eux,  My- 
çènes  échut  à  Chrefphonte,  qui, 
dans  la  fuite ,  fe  rendit  aufli  maî- 
tre de  Mefl  ene  ,  d'où  il  chaiîa  les 
defcendans  de  Neftor ,  Alcméoa 
&  Péon ,  qui  allèrent  fe  réfugier 
à  Athènes.  Son  fils  Épitus  lui  lue- 
céda  à  la  couronne  de  MeHène  » 
ôc  donna  le  nom  d'Épitides  aux 
Rois  les  fucceffeurs. 

CHRESTIENTÉ,  terme  dont 
1*5  ne  fe  prononce  point.  On  ap- 


(«)  Xénoph.  p.  461.  I     fO  Myth.  par  M.  TAbb,  Ban.  Tom« 

\h)  Mych»  par  M.  TAbb.  Ban.  Tom.  Ivil.  p,  391.  &  fuiv. 
I.  p.  49»»  1  V. 


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CH 

|)elle  aînfi  les  pais  ,  ob  la  relîgîon 
Chréiienne  efl  la  dominante ,  non 
feulement  ceux  où  règne  la  reli- 
gion Catholique,  mais  même  ceux 
où  l'on  fait  profeflion  du  chriftia- 
nifme  altéré  par  le  fchifme  ou  par 
rhérérie. 

CHRESTODEME  ,  Chrcfto-^ 
demus ,  auteur  d'une  hifloire  de 
Thebes  ,  fi  Ton  en  croit  Micliel 
Apoftole. 

CHRESTOMATHIES  ,  (^} 
nom  que  les  Gtecs  donnoient  a 
certains  ouvrages.  Cétoient  ceux 
qu'ils  compofoient  en  ramaffant 
ce  que  dans  leurs  leftures  ,  ils 
avoient  marqué  cl*un  xT ,  pour 
fignifier  ;v/'«Ç0K    bonum  ,  bon. 

CHRESTON  ,  Chrefton,  {h) 
roi  de  Bithynie  ,  qui  fut  tué  par 
Mithridate  le  grand  ,  roi  de  pont. 
La  mort  de  ce  Prince  ne  lui  fut 
pas  imputée  à  crime  ,  parce  que 
le  Sénat  l'avoit  déclaré  ennemi  du 
peuple  Romain ,  6c  qu'il  étoit  par 
conféquent  de  Tintérêt  de  cette 
nation  ,  que  Chrefton  fût  aflaffi- 
né.  Judin  nous  inflruit  de  ces  cir- 
conilances  dans  une'  harangue 
qu'il  met  dans  la  bouche  de  Mi- 
thridate. 

CHRESTUS  ,  Chreftus,  (c) 
Xpî^joç ,  préfet  du  Prétoire ,  fous 
l'empire  d'Alexandre  Sévère.  Julie 
Marnée ,  mère  de  ce  Prince  >  lui 
donna  le  célèbre  Ulpien  pour 
collègue  ,  ce  qui  fouleva  les  fol- 
dats  mécontens  de  ce  nouveau 
miniflre.  Julie  Mamée  prévint  la 
confpiration  ,  &  fit  tuer  Chrefius 
&  Flavien ,  qui  en  étoient  appa- 


CH  117 

remment  les  auteurs.  Xiphilin  éc 
Zonare  difent  que  ce  fut  Ulpien 
même  qui  fit  afiafiiner  les  deux 
préfets  ,  pour  leur  fuccéder  ,  l'an 
de  J.  C.  228. 

CHRESTUS  ,  Chreftus  ^ 
X/>Î5*:ç ,  prince  de  la  Cherfonnèfe  , 
Ôc  tributaire  de  l'Empire  ,  fous 
Dioclétien,  entra ,  en  faveur  des 
Romains  ,  dans  les  états  de  Crif- 
con  ou  Sauromate  prince  du 
Bofphore ,  vers  Tan  de  J,  C« 
294  ,  pilla  le  païs  des  Sarmates  , 
prit  la  ville  de  Bofphore,  &  fit 
plufieurs  prifonnniers  ,  entre  lef- 
quels  fe  trouvèrent  les  femmes  de 
Crifcon ,  que  ces  avantages  obli- 
gèrent à  demander  la  paix.  Dio* 
clétien  la  lui  accorda ,  6c  en  re- 
connoifiance  des  ferv  ices  de  Chre(^ 
tus,  déclara  la  Cherfonnèfe  libre  6c 
exempte  de  tributs. 

CHRESTUS  ,  Chrefius  , 
X/JÏro;  ,  officier  de  l'empereur 
Confiance  dans  fon  armée  des 
Gaules ,  fut  un  de  ceux  qui  trahi* 
rent  ce  Prince  en  faveur  du  tyran 
Magnence  ,  qu'ils  élevèrent  à 
l'empire  l'an  350  de  J.  C.  Mais , 
il  fut  défait  la  même  année,  âc 
puni  avec  fes  complices. 

CHRESTUS,  Chrcnus  ^ 
Xfviçoç ,  profeflfeur  à  Conftanti- 
nople ,  y  enfeigna  le  Latin  fous 
l'empereur  Confiance ,  qui  le  fie 
fuccéder  à  Évantius  Tan  de  J.  C 

359- 

CHRETES,  Chretes,  lac  de 
Libye  ,  oh  fe  trou  voient  trois 
ifies  4  félon  le  Périple  de  Han- 
non. 


(s)  Mém.  de  TAcad.  des  Infcrip.  &  I 
BeU.  Lett.  Tom.  XX.  p.  16.  [ 


(k)  Juft.  t.  XXXVIII.  e.  s 

le)  Dlod,  Cafl*.  p.  917. 

Hii) 


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it8  C  h 

CHRISTODORE  ,  Chrijîo^ 
dorus  ,  Kpii'oJ'cupo:  ♦  •  (tf)  poète 
Grec  ,  dont  on  ne  trouve  rien 
dans  l'anthologie  imprimée  ,  Si 
dont  il  y  a  des  pièces  dans  l'an- 
thologie manufcrite  de  la  biblio- 
thèque du  Roi. 

CHRISTODORE  ,  Chriflo-^ 
dorus  ,  X/'.rc/w.iç  ,  (^)  autre 
poëte  Grec  qui  vivoit  dans  le 
cinquième  fiecle  ,  fous  l'empire 
d'Anaftafie.  Il  compofa  un  poëme 
en  fix  livres  ,  de  la  conquête  de 
rifaurie ,  par  le  même  Empereur, 
avec  quelques  autres  ouvrages 
rapportés  par  Suidas.  Il  étoit  fils 
de  Panifcus  de  la  ville  de  Coptos 
en  Egypte. 

CHRITILIUS  ,  Chritilius  , 
(c)  cenain  homme ,  qui ,  au  rap- 
port a^  CicéroQ ,  fut  accufé  par 
C.  Rotbius ,  &  défendu  par  Si- 
fenna. 

CHROCUS  ,  Chrocus  ,  (J) 
toi  des  Allemands ^  fut  l'auteur  & 
le  chef  d'une  irruption  violente 
dans  les  Gaules  ,  &  de  mille 
Cfuautés  exercées  par  les  barbares 
Gu'il  commandoit.  Il  fut  vaincu 
CL  tué  par  un  certain  Marius  ,  qui 
de  fimple  foldat  s'étoit  avancé  pa^ 
(a  valeur  dans  les  eiiiplois  mili- 
taires. 

CHROMATIQUE,  Chroma, 
(e)  l'un  des  crois  genres  de  la  mu- 
iique  ancienne.  Boëce  attribue  à 
Timothée  de*  Milet  ,  l'invention 
du  genre  Chromatique  ;  mais  , 

(s)  Mém.  de  TAcad.  des  Infcript.  & 
Bell.  Letc.  Tom.  II.  p.  «65. 
(h)  Suid.  T.  II.  p.  II5S>  "Sl*^ 

(c)  Cicer.  Brutus  c.  141. 

(d)  Crév.  Hitt.  des  Emp.  Tom.  V 


C   H 

Athénée  la  donne  à  Épigonus, 
Ce  genre  étoit  moins  naturel  & 
moins  ancien  que  le  genre  diato- 
nique. 

11  y  a  voit  trois  efpeces  de  gen- 
re Chromatique  ;  i.^  le  genre 
Chromatique  mol  ou  foible ,  dont 
les  trois  intervalles  étoient  un  tiers 
de  ton  y  un  autre  tiers  de  ton  ,  un 
ton  &  demi ,  &  un  tiers  ;  2.^  le 
genre  Chromatique  fefquialtère , 
dont  les  trois  intervalles  étoienc 
un  dièfe  ou  quart  de  ton  &  de- 
mi ,  un  dièfe  &  demi ,  fept  dièfes 
ou  quarts  de  tons;  3.®  le  genre 
Chromatique  fort  ou  conique  , 
dont  les  trois  intervalles  étoient 
un  demi-ton ,  un  autre  demi  ton, 
un  ton  ÔC  demi. 

Des  trois  efpèces  de  genre 
Chromatique ,  le  tonique  étoit  le 
plus  aigu. 

Ces  réflexions  font  de  M.  Bu- 
rette ,  qui ,  dans  un  autre  endroit, 
explique  le  genre  Chromatique, 
d'une  manière  encore  plus  détaillée. 
n  Dans  le  Chromatique  mol  ou 
n  foible  y  dit- il  >  les  intervalles 
Il  étoient  i.^  de  Thypate  à  la 
n  parhypate ,  un  tiers  de  ton  ou 
»  un  dièfe  Chromatique  ;  2.*  de 
n  la  parhypate  au  hchanos  ,  un 
n  autre  tiers  de  ton  ;  3.^  du  li- 
n  chanos  à  la  nête  ,  un  ton  & 
n  demi  &  un  tiers,  par  indivis 
n  ou  non  divifé.  Dans  le  Chro- 
n  matique  fefquialtère ,  les  inter- 
I»  valles  étoient  i.^  de  l'hypate 

(e)  Mém.  de  TAcad.  des  Infcrîpt.  & 
Bell.  Lett.  Tom.  VIII.  p.  89.  Tom.  X^ 
p.  155,  279.  Tom.  Xni.  p.  175,  i8a  » 
186,  «71  ,  a7a,  T.  XV,  p.  37»,  «89  $ 
Î90.T.XVII.P.70. 


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CH 

»  à  la  parhypate  ,  un  tiers  & 
n  demi  de  ton  ,  ou  un  dièfe  8c 
»  demi  Chromatique  ;  2.^  de  la 
»  parhypate  au  lichanos  ,  encore 
»  un  tiers  &  demi  de  ton  ;  3.^ 
Il  du  lichanos  à  la  nête  ,  fept 
p  dièfes  enharmoniques  ou  quarts 
)'  de  ton ,  ou  un  ton  &  demi ,  6c 
»  un  quart  par  indivis.  Dans  le 
»  Chromatique  tonique  ou  dur, 
»  les  intery ailes  étoient  i,^  de 
»  rhypate  à  la  parhypate  ,  un 
»  demi- ton;  2.®  de  la  parhypate 
n  au  lichanos  ,  encore  un  demi- 
»  ton;  3.^  du  lichanos  à  la  nête, 
»  un  ton  &  demi  par  indivis  , 
»  c'eft-à-dire  ,  mi  /fa  ,  fa  dièfe 
n  la,  a     ' 

On  demandé  pourquoi  le  genre 
Chromatique  étoit  exclus  de  la 
Tragédie.  Pbtarque  nous  en  allè- 
gue une  raifon  générale,  &  qu'il 
applique  également  à  tous  les  re- 
tranchemens  de  même  nature , 
faits  en  différentes  occa fions  ;  8c 
cette  raifon  e(l  celle  de  la  décence 
de  la  bienféance ,  de  la  convenan- 
ce au  propre  caradère  de  la  tra- 
gédie. Il  confiûoit^  ce  caraâère, 
dans  la  grandeur  d'ame ,  dans  le 
courage ,  dans  la  magnificence  &i 
dans  les  autres  qualités  héroïques, 
mifes  fur  la  fcene ,  ce  qui  s*ap- 
pelloit  îfôoç  //«rraxT.xài'.  Ce  ca- 
raâcre  devoit  être  foûcenu  fur 
tout  par  les  chœurs  ;  &  c'eft  à 
quoi  la  poëfie  &  la  mufîque  dé- 
voient concourir  à  Tenvi.  Or ,  des 
trois  genres  de  mufique ,  le  diato- 
nique étoit  le  feul  qu'on  pût  em- 
ployer dans  ces  chœurs  avec  fuc- 
cès  ;  cette  forte  de  modulation 
étant  la  plus  propre  à  exprimer 
les  fentimens  pleins  de  grandeur 


CH  119 

&  d*élévatîon  ,  que  la  poëfie 
vouloit  infpirer.  Le  genre  Chro- 
matique ,  dont  le  caraâère  avoit 
quelque  chofe  de  lâche ,  de  mol 
&  d'efféminé  ,  n'y  eût  pas  été 
convenable.  On  ne  doit  donc  pas 
être  furpris  qu*il  fût  banni  de  la 
mudque  des  tragédies. 

A  cette  première  caufe  d'exclu- 
fîon  qu'afïîgne  notre  Auteur ,  on 
peut  en  joindre  une  féconde ,  qui 
fans  doute  ne  laiffoit  pas  d'y  en- 
trer pour  beaucoup.  C'étoit  la 
difficulté  des  chants  Chromati« 
ques  >  moins  naturels  <{ue  les  dia- 
toniques ,  à  caufe  des  demi-ton$ 
multipliés  ,  &  par-là  d'une  exé- 
cution plus  épineufe.  Moins  la 
voix  fe  plie  aifement  à  cette  efpè- 
ce  d'intonation  ,  moins  elle  eft 
capable  (l'y  chanter  bien  jufte  ; 
&  il  eût  été  beaucoup  plus  diffi- 
cile de  faire  chanter  d'accord  en- 
femble  dans  le  genre  Chromati- 
que ,  un  grand  nombre  d*aâeurs 
muficienS)  que  dans  le  diatoni* 
que.  On  y  jouoit  le  Chromati- 
que ,  &  même  l'enharmonique 
avec  autant  de  facilité  que  le  dia- 
tonique ,  parce  que  ces  inffru- 
mens ,  montés  ou  percés  fur  un 
certain  ton  ,  le  confervoient  plus 
invariablement. 

Le  mot  Chromatique  vient  du 
Grec  x^^Awe»  quifignifie  couleur, 
foit  parce  que  les  Grecs  mar- 
quoient  ce  genre  par  des  caraûè- 
res  rouges  ou  diverfement  colorés, 
foit  parce  que  le  genre  Chroma- 
tique ed  moyen  entre  les  deux 
autres  ».  comme  la  couleur  entre 
le  blanc  &  le  noir  ;  ou ,  félon  d'au, 
très  ,  parce  que  le  genre  Chro- 
matique varie  &  embellit  le  eence 

Hiv 


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J20  C  H 

diatonique  par  (es  femî-tons ,  qui 
font  dans  la  mufique  le  même 
effet  que  la  variété  des  couleurs 
fait  dans  la  peinture. 

CHROME  ,  terme  de  Belles- 
Lettres.  Il  lignifie  couleur  ,  raifon 
fpécieufe  ,  prétexte  ,  qu'emploie 
un  orateur  au  défaut  des  motifis 
folides  &  fondés.  Ce  mot  eu  ori- 
ginairement Grec,  X  w>«  fignifie 
a  la  lettre,  couleur. 

CHROMIE  ,  Chromîa  ,  (a) 
X-po/u  ce ,  fille  d'Itonus  &  petite- 
fille  d'Amphiftyon.  Quelques- 
uns  prétendent  qu'elle  fut  mariée 
à  Endymion.' 

CHROMIS  ,  Chromis  ,  (b) 
Xpof4iç  9  capitaine  ,  qui  comnlan- 
doit  avec  Ennomus  les  Myfiens 
durant  le  fiege  de  Troye. 

CHROMIS  ,  Chwrms,  (c) 
XpofAtç  «  capitaine  Troyen  ,  qui 
fut  tué  par  la  reine  Camille. 

CHROMIS  ,  Chromis,  (d) 
XpzfJLKi  ♦  Tun  des  Centaures.  Il  fut 
tué  par  Pirithoiis ,  l'un  des  prin- 
cipaux d'entre  les  Lapithes. 

CHROMIS ,  Chromis  ,  Xfi- 
fiiç ,  fiis  d*HercuIe ,  fut  foudroyé  ' 
par  Jupiter,  parce  qu'il  nburrif- 
foit  fes  chevaux  de  chair  humaine. 

Un  Satyre  prenoit  auffi  le  nom 
de  Chromis. 

CHROMIUS ,  Chromius  ,  (e) 
Xfow.&ç  »  capitaine  Grec  qui  par- 
tit pour  le  ffege  de  Troye. 

CHROMIUS  ,  Chromius  , 
Xpo/nloç ,  (/)  capitaine  Troyen  , 

(a)  Pauf.  p.  »8f . 

(^)  Homer.  Iliad.  L.  II.  v.  %€^, 

(c)  Virg.  iEneid.  L.  XI.  v.  67 j. 

(d)  Ovid.    Metam.    L.  XII.    Fabul. 
Centaur. 

(«;  Homer.  Iliad.  L.  IV.  v.  »9^. 


CH 

qui  fut  tué  par  Ulyfle.  Il  y  en  eut 
un  autre  de  même  nom ,  qui  fiit 
tué  par  Teucer  ,  fils  de  Téla- 
mon. 

CHROMIUS,  CAromius,(g) 
Xpo/uloç  ,  fils  de  Nélée  &  de 
Chioris ,  périt  par  les  mains  d'A- 
pollon &  de  Diane. 

CHRONIES  ,  Chronia.  Foye^ 
Cronies. 

CHRONIUS  ,  Chronius  ,  (k) 
Xfir/oç»  tua  le  tyran  Ariftoméli- 
dcs.  Foye^  Ariftomélidas. 

CHRONOS ,  Chronos.  Voyti 
Cronos. 

CHRONUS  [Diodore]. 
Voyc:^  Diodore. 

CHROUBIS ,  ChrouhU  ,  (i) 
X^obCiç  «  nom  d'un  des  dieux  par- 
ticuliers ou  fubahernes  des  Égyp- 
tiens. Mais ,  peut-être  faudroit-il 
lire  Chnoubis  fur  le  monument 
qui  nous  a  confervé  ce  nom.  Un 

Î graveur  peut  avoir  mis  un  P ,  au 
ieu  d*un  N.  C*eft  la  remarque  que 
fait  M.  le  comte  de  Caylus;  mais,  » 
il  ajoute  que  fi  le  graveur  ne  s'eft  . 
point  trompé  ,  on  pourroit  croire 
'  que  ce  nom  défignoit  le  taureau 
Apis  ,  ou  Mnévis  adoré  en  Egyp- 
te. Chroub  ,  dans  la  langue  Hé- 
braïque ,  dont  l'affinité  avec  l'an- 
cien Égyptien  eft  connue  ,  /igni- 
fioit  un  veau  ou  un  taureau.  Ezé- 
chiel  donne  le  nom  Chroub  à  l'a- 
nimal qu'il  appelle  ailleurs  Schor, 
un  veau ,  ou  un  taureau.  IC  ne 
doit  être  regardé  que  comme  une 

(/)  Homer.  Iliid.  L.  V.  v.  ^rf*  ^» 
VIII.  V.  S75. 

f^)  Homer.  OdyiT.  L,  XI.  v.  aSj. 

(h)  Pauf.  p.  5J1. 

{i)  Recueil  d*Antiq.  par  M.  le  Comt* 
de  Cayl.  Tom.  V.  pag.  70.  T.  VI.  vf^ 


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C  H 

termînaîfon  Grecque  ajoutée  au 
nom  Égyptien, 

CHRUSIENS,  Chrufiy  peu- 
pies  d'Afie  ,  dont  le  pais  éroit 
traverfe  par  le  fleuve  Halys,  félon 
Vibius  Séquefter ,  ou  plutôt  félon 
(es  copiftes  ,  qui  ont  défiguré  cet 
endroit.  Ortélius  »  dont  on  ne 
fçauroit  trop  louer  la  fagacité  en 
mille  endroits  des  Anciens  ,  dont 
il  a  très-heureufement  corrigé  les 
premières  éditions ,  a  été  trompé, 
comme  bien  d'autres ,  à  ce  pafla- 
ge.  L'édition  de  Vibius  Séquefter, 
in- fol,  à  Pézazo,  chez  Hierôme 
Soncin  ,  porte  :  Halys  Lydia 
Enifos  tranfit  vel  Chrufos,  Celle 
des  Juntes  porte:  Halys  Lydia 
Chrufos  tranfit.  On  voit  par-là 
que  vel  Chrufos  eft  une  efpèce  de 
note  ajoutée  par  le  copiue,  qui 
ne  fçavoit  fi  le  mot ,  qui  fuit  celui 
de  Lydia ,  devoit  être  lu  Enifos 
ou  Chrufos.  Il  eft  aifé  de  voir 
qu'il  ne  faut  lire  ni  l'un  ni  l'autre; 
qu'il  n'eft  point  queftion  d'un  peu- 
ple habitué  fur  les  bords  del'Ha- 
lys ,  &  qu'enfin  Vibius  Séquefter 
avoit  en  vue  le  fameux  oracle  : 

Crctfus  Halyn  penetrans  magnam 
pervertet  opum  vint. 

Ainfî  y  il  faut  lire  dans  Vibius 
Séquefter  Halyn  Lydia  Crœfus 
tranfit.  Le  fleuve  Halys  terminoit 
la  Lydie ,  ou  plutôt  l'empire  de 
Lydie  ,  comme  il  paroît  par  la 
lettre  de  Darius  à  Alexandre.  Ce- 
la fufHt  pour  l'appel  1er  un  fleuve 
de  Lydie.  Crœfus  le  pafla  ,  trom- 
pé par  le  fens  équivoque  d'un  ora« 

{a)  Myth.  par  M.  TAbb.  Ban.  Tom.l     («)  Homcr.  Iliad.  L.  I.  v.  57,  450, 
VI.  p.  40.  1 4P  »  45 1<  Scrab.  p.  604.  &  fit» 

(i)  Plut.  T.  I.  p.  I»,  1 


CH  i2t 

cle  ,  &  trouva  fa  perte ,  au  lieu 
des  conquêtes  dont  il  (è  flattoit. 
Voilà  ce  que  Vibius  Séquefter  a 
voulu  dire  en  peu  de  mots ,  Ha" 
lyn  Lydia  Crœfus  tranfit. 

CHRYASUS  ,  Chryafus  ;  {a) 
cinquième  roi  d'Argos.  Ce  fut  Tun 
de  ceux  qu'on  appella  Inachides  , 
à  caufe  d'inachus ,  qui  avoit  été  le 
premier  roi  d'Argos. 

CHRYSA  ,  Chryfa  ,  Xpva^t . 

(b)  nom  d'un  lieu  de  l'Atiique  , 
dont  parle  Piutarque  dans  la  vie 
de  Théfée.  M.  Dacier  traduit  ce 
motjla  place- dorée.  Ce  fut  près  de 
ce  lieu  que  fe  donna  la  bataille  en- 
tre les  Amazones  &  les  Athéniens 
commandés  par  Théfée. 

CHRYSA  ,  Chryfa  , 
Xpv^d  ,  ville  de  l'Afie  mineure 
dans  la  Troade.  Foye^  l'article 
fuivant. 

CHRYSA,  Chryfa  y   Xpu^ct. 

(c)  autre  ville  de  l'Afie  mineiire  , 
auflS  dans  la  Troade ,  étoit  fous  la 
proteéèion  particulière  d'Apollon. 
Homère  parle  de  cette  ville.f//yj/<t 
dit-il  ,  qui  conduifoit  à  Apollon 
VHécatombefacrée ,  arrive  dans  le 

Îort  de  Chryfa.  Sur  quoi  Madame 
)acier  fait  cette  remarque.  »  Ho- 
n  mère  eft  un  Géographe  ft  exaâ , 
n  que  non  feulement  il  marque 
n  la  diftance  des  lieux  dont  il 
»  parle  ;  mais ,  il  les  défigne  en- 
n  core  de  manière  qu'on  puiffe 
n  toujours  reconnoitre  leur  (îtua- 
n  tion.  Ici  on  voit  que  cette  Chry- 
91  fa  n'étoit  pas  éloignée  du  porc 
n  d'oii  Ulyfte  étoit  parti ,  du  che- 
n  min  d'une  journée  entière,  puif- 


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rzi  C  H 

n  qu'Ulyffe  arrive  le  même  jour 
»  a  allez  bonne  heure  pour  faire 
»  un  grand  facrifice,  qu'il  eft  fong- 
»  tems  à  table  ,  &  qu  on  a  tout  le 
»  lolfir  pour  chanter  des  hymnes 
»  à  Apollon  avant  le  coucher  du 
»  foleil.  Ainfi ,  Chryfa  n'eft  éloi- 
»  gnée  du  port,  que  de  fix  ou  fept 
»  cens  ftades,  comme  Strabon  l'a 
»  remarqué.  Or,  on  compte  pour 
»  le  chemin  d'une  journée  ,  mille 
»  ou  douze  cens  ftades.  Pour  ce 
»  qui  eft  de  la  fituation  ,  on  voit 
»  qu  a  cette  Chryfa  il  y  a  un  port, 
»  &  tout  auprès  un  temple  d'A- 
n  poHon.  Cette  remarque  érok 
»  néceflaire  pour  empêcher  les 
»  ledeurs  curieux  de  la  Géogra- 
»  phie ,  de  fuivre  Terreur  de  quel- 
le ques  Anciens ,  qui  ignorant  les 
»  anciennes  Hiftoires  ,  ont  cru 
w  qu'Homère  parle  d'un  autre 
»  Chryfa  qui  étoit  près  d'Hama- 
»  xite  ;  car  ,  celle  -  ci  n'avoit 
»  m  port  ni  temple  ,  &  elle  ne 
9f  fut  même  bâtie  que  long- tems 
^  après  la  guère  de  Troye.  « 

CHRYSA,  Chryfa.,  Xpv'sa^ 
{a)  ifle ,  Tune  de  celles  qui  étoient 
auprès  de  Tifle  de  Crète  du  côté 
du  Péloponnèfe  ,  félon  Pline. 

^  CHRYSiE  FANUM ,  nom 
d'un  lieu  de  la  Sicile  ,  dans  une 
campagne  près  du  chemin  ,  qui 
menoit  de  la  ville  d*Aflbrus  à  celle 
d*£nna. 

CHRYSAME,  Chryfama  , 
prêtreflfe  de  la  Theffalie,qui  ayant 
nourri  un  taureau  de  certaines 
herbes  venimeufes ,  le  fit  conduire 

(a)  Pliti.  T.  I.  p.  aip. 
Ib)  Plut.  Tom.  I   pîjr,  317.  Xcnoph. 
pag.  51.  ^/rj.  Roll.  Hift,  Ane.  Tom. 


CH 

vers  les  ennemis.  Les  principaux 
d'entr'eux,  ayant  mangé  de  la 
chair  de  ce  taureau  ,  devinrent  in- 
fenfés  ^  &  ce  ftratagême  fit  que 
les  Éréthriens  furent  facilement 
vaincus  par  les  Grecs. 

CHRYSANDRIENS ,  Chry^ 
fandrii,  efpèce  de  peuples  fabu- 
leux. Ces  peuples  faifoient  partie 
des  habitans  du  royaume  de  Nu- 
raifmacie  ou  de  la  monnoie  ;  6^ 
ils  parloient  toutes  fortes  de  lan- 
gues. 

CHRYSANTAS ,  Ckryfanlas, 
Xpvrstyrat;,  (b)  capitaine  de  Cy- 
rus,  commandoit  Taile  droite  de  la 
cavalerie  à  la  bataille  de  Tym- 
brée. 

Xénophon  trace  en  peu  de 
mots  un  beau  portrait  de  Chryfan- 
te.  Il  n'étoit ,  dit-il  ,  ni  grand  de 
taille ,  ni  robufte  en  apparence  , 
mais  d'une  prudence  confommée , 
brave  &  également  propre  à  pbéir 
&  à  commander. 
-  On  dit  qu'il  fut  extrêmement 
loué  par  Cyrus ,  de  ce  qu'ayant 
un  jour  fon  ennemi  en  fa  puifTance, 
&  1  epée  déjà  levée  près  de  le 
tuer ,  il  arrêta  le  coup ,  &  le  laifïa 
aller  f  fitôt  qu'il  entendit  fonner 
la  retraite. 

Chryfantas  avoir  été  gouver- 
neur de  rionie  &  de  la  Lycie,ou, 
félon  d'autres,  de  la  Lydie.. 

CHRYSANTHIS  ,  Chryfan^ 
this  y  Xpva-oty^iç  ,  (c)  apprit  à  Gé- 
rés Tenlevement  de  fa  fille,  au 
rapport  de  Paufanias. 

CHRYSA'NTINA ,  Chryfan-^ 

I.  pag.  4^1,   454. 
CO  Pauf..p.  »s. 


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CH 

t'ina  ,  (a)  nom  de  jeux  folemnels , 
qui  ^é  célébroient  à  Sardes.  Il  en 
eft  fait  mention  dans  les  ancien- 
nes Infcriptions  XPTCANeiMA 
ES  CAPz^EClN.  Us  font  mar- 
qués iur  les  médailles  de  Sardes, 
de  Julia  Domna ,  de  Caracalla , 
de  Sévère  Alexandre,  de  Tran- 
quiliinie  &  d'Otacilia.  M.  Vail- 
lant  penfe  qu'ils  étoient  ainfi  nom- 
més d!une  couronne  de  fleor  d*or, 
qui  étoit  le  prix  des  vainqueurs  ; 
en  effet ,  cette  couronne  eft  re- 
préfentée  fur  quelques  médailles. 
L'urne  de  ces  jeux  porte  une ,  & 
quelquefois  deux  branches  de  pal- 
mier ;  d'où  l'on  peut  inférer  que 
le  fpeâacle  étoit  compofé  d'une 
ou  de  deux  fortes  de  combats.  Au 
refte ,  nous  voyons  dans  le  droit 
Romain ,  que  ces  jeux  ,  comme 
les  jeux  Olympiques  ,  fe  célé- 
broient tous  les  cinq  ans  ,  c'e(l-à- 
dire  ,  après  la  quatrième  année 
révolue.  Les  monumens  ne  nous 
apprennent  point  fi  ces  jeux  étoient 
célébrés  en  l'honneur  des  dieux 
ou  des  empereurs ,  ou  fi  c'étoient 
des  jeux  qui  fufient  particuliers  à 
cette  ville. 

CHRYSAOR ,  Chryfaor,  (h) 
m^vcdotp  ,  fils  de  Neptune  &  de 
Médufe.  Voici  comme  on  raconte 
fa  naiflance.  n  Le  dieu  de  la  mer , 
»  dit  Héfiode,  fut  fenfible  aux 
»  charmes  de  Médufe  ;  &  fur  le 
19  tendre  gazon  d'une  prairie ,  au 
n  milieu  des  fleurs  que  le  printems 
1»^  fait  édore  >  il  lui  donna  des 
n  marques  de  fon  amour.    Elle 


CH  12^ 

»  pérît  cnfuîte  d'une  manière  fu- 
i>  nefte.  Perfée  lui  coupa  la  tête  , 
»  ÔC  du  fang  qui  en  fortit  naqui- 
»  reot  le  héros  Chryfaor  ÔL  le 
n  cheval  Pégafe.  Chryfaor  tira 
Il  fon  nom  d  une  épée  d  or  qu'il 
Il  tenoit  à  la  main  au  moment  de 
n  fa  naifTance.  Dans  la  fuite ,  il 
Il  devint  amoureux  de  Callirrhoé, 
n  fille  de  l'Océan  ,  &  en  eut 
n  Géryon  ,  ce  fameux  géant  à 
n  trois  têtes,  a 

M.  Tabbé  Banier  dit  qu'il  adop- 
te volontiers  l'explication  ,  que 
M.  Fourmont  donne  de  cette  fa- 
ble. Il  regarde  Chryfaor  comme 
un  habile  ouvrier  ,  qui  travailloit 
en  or  &  en  ivoire  ;  ce  que  Tépée 
d'or  qui  lui  fit  donner  le  nom  de 
Chryfaor  ,  marque  afleï  ;  fon 
nom  même  veut  dire  ouvrier  en 
métaux.  Phorcys  s'en  fervoit 
pour  mettre  en  œuvre  les  dents 
d'éléphant  &  les  cornes  de  diffé- 
rens  animaux,  que  fes  vailTeaux 
lui  portoient.  Oferoit-on  même 
bazarder  une  conjeâure  au  fujet 
de  Tépée  d'or  ,  avec  laquelle 
Chryfaor  vint  au  monde,  &  dire 
que  ce  fut  avec  cette  épée  qu'il 
parut  pour  la  première  fois  à  la 
cour  de  Phorcys  ?  fi  le  même 
Poète  dit  que  Chryfaor  époufa 
la  belle  Callirrhoé  ,'  fille  de  l'O- 
céan ,  de  laquelle  il  eut  Géryon , 
c'eft  que  Phorcys ,  pour  fixer  un 
fi  bon  ouvrier  dans  fes  États,  lut 
procura  un  parti  confidérable;  car 
enfin  ,  il  faut  humanifer  ces  fic- 
tions ,    &  croire  qu'on  agiffoit 


(4)  Mém.  de  PAcad.  des  Infcript.  &ii7t.  &  fniv,  Mém.  de  PAcad.  <le8 
Bell.  Lett.  Tom.  XVIil.  p.  145.  {infcript.  &  fiell.  Lett.  T.  III.  pag.  69. 

{h)  Pauf.  p.  67,  Mytb.  par  M.  PAbb.  [T.  VI.  p.  341.  T.  VU.  p.  45  $46,  Tom. 
Ban,  Tom,  I.  p.  196  >  ao».  X,  VI.  pag.  |XVI1I.  p.  7 ,  10. 


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1^4  C  H 

•lors  coinme  on  agiroît  aujour- 
d'hui en  pareille  occafion. 

Nous  trouvons  dans  les  Mé- 
moires de  r Académie  des  Infcrip- 
fions  &  Belles  Lettres ,  une  expli- 
cation de  la  même  Fable ,  bien 
différente  de  celle  qu'on  vient  de 
lire.  Quand  on  nous  dit  que  Chry- 
faor  naquit  du  Tang  qui  fortit  de 
la  tête  de  Médufe  ,  cela  fignifie 
que  c'étoit  un  des  deux  vaifleaux 
que  Perfée  emmena  après  avoir 
tué  cette  Princefle.  On  a  regardé 
ces  vaiffeaux  comme  les  enfans  de 
cette  Gorgone  ,  parce  qu'ils  lui 
appartenoient  ;  &  on  a  dit  qu'ils 
étoient  fortis  de  fon  fang ,  parce 
que  fa  mort  les  livra  au  vainqueur. 
Lorfqu'Hygin  ajoute  que  Neptu- 
ne étoit  leur  père  ,  on  voit  aflez 
qu'il  a  voi^lu  dire  que  de  fi  bons 
voiliers  étoient  regardés  comme 
l'ouvrage  du  dieu  des  Mers. 

CHRYSAOR  ,  Chryfaor,  (^) 
"X^Virica^  y  fils  de  Glaucus  »  & 
petit-fils  de  Sifyphe ,  fonda  la 
ville  de  Chryfaoris  en  Carie ,  & 
lui  donna  fon  nom  j  au  rapport 
d'Etienne  de  Byzance. 

CHRYSAORE ,  Chryfaotus , 
Philo(ophe,difciple  du  fameux  Por- 
phyre  ,  qui  lui  adrefla  fon  intro- 
duâion  fur  les  Univerfaux* 

CHRYSAORIS ,  Chry faons, 
'Xp¥9'ioptç ,  (b)  ancien  nom  de  la 
vilfe  de  Stratonice.  Foye^  Strato- 
nice. 

(«)  Mém.  de  TAcad.  des  InCcript.  & 
Bell.  Lett.  T.  ÎX.  pag.  ii6, 119. 

a)  Paùf.  p.  319*  Mém.  de  PAcad. 
des  Infcripc.  &  Beli.  Lect.  Tom.  111. 
pag.  110. 

(c)  Amiq.  expl.  par  D.  fiern.  de 
Mouti.  T.  I.  p.  5|. 


CH 

Ce  nom  fut  aufii  donné  à  tonte 
la  Carie  ,  félon  Épaphroditus  ÔC 
Taufanias. 

CHRYSAORIUS  ,  Chryfao^ 
rius ,  (c)  l'un  des  furnoms  de  Jupi- 
ter. 

CHRYSARGYRE ,  Cbryfar- 
gyrium  ,  (d)  tribut  célèbre ,  dont 
Zozime  veut  que  Condantin  foit 
l'auteur.  Il  fe  payoit  tous  les  qua- 
tre ans  par  les  marchands  >  le  me- 
nu peuple ,  Ôc  les  gens  de  mauvaife 
.  vie.  Il  y  a  néanmoins  apparence 
que  ce  tribut  fe  levoit  fur  des  per- 
fonnes  infâmes  ,  long-tems  avaiit 
Condantin  ,  comme  on  le  peut 
apprendre  de  Suétone  dans  la  vie 
de  Caligula ,  &  de  Lampride  dans 
celle  d'Alexandre.  Evagre  ,  bien 
loin  de  convenir  que  Conflantia 
Tait  impofé  le  premier  ,  rapporte 
que  l'ayant  trouvé  établi ,  il  eut 
intention  de  l'abolir;  ce  que  fit 
dans  la  fuite  l'empereur  Anaftafe, 
l'an  de  J:  C.  501. 

CHRYSARIUM ,  (e)  Cbryfa- 
rlum,  Xpvrecptof,  perfonnage  ima- 
ginaire. Lucien  dit  que  c'étoit  une 
magicienne,  qui  fe  changeoit  la 
nuit  en  hibou  ,  &  alloit  criant  par 
les  cimetières.  On  dit ,  ajoute  Lu- 
cien ,  qu'elle  peut  faire  defcendre 
la  lune  en  terre  par  fes  fortilè- 
ses. 

CHRYSAS  ,  Chryfas  ,  {f) 
Xpt/0«; ,  ruifleau  de  Sicile  fuivant 
Cicéron.  Le  Chry  fas  étoit  un  ruif- 

(d)  Crév.  Hift.  def  Emp.  Tom.  VI* 
p.  5*s  ,  1x6. 

(«)  Lucian  T.  II.  p.  70». 

(/)  Cicer.  in  Verr.  L.  VI.  c.  8tf. 
Oiod.  Sicul.  p.  44^.  Mém.  de  TAcad. 
des  Infcripc.  &  Bell»  Lett.  T.  V.  pag.  94«t 


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CH 

&ati ,  qui  couloit  à  travers  -les 
champs  des  Aflbrins.  Il  paflbit 
chez  eux  pour  un  dieu  ,&  ils  Thono- 
roient  avec  une  extrême  religion. 
Son  temple  étoit  dans  la  campa- 
gne ,  auprès  du  chemin  par  où  l'on 
alloit  d'Aiïbrus  à  £nna.  Il  y  avoit 
dedans ,  une  belle  flatue  de  mar- 
bre ,  qui  repréfentoit  le  dieu 
Chryfas.  Fazel  en  parle  ainfi: 
o  De  ce  temple  qui  étoit  fitué  au 
»  pied  du  mont  AfTorus ,  il  rede 
»  encore  trois  grandes  arcades  de 
n  pierres  quarrées  &  neuf  portes^ 
»  qui  font  les  monumens  de  l'an- 
19  tiquné.  a  Dans  la  campagne  on 
trouve  adez  communément  des 
médailles  de  bronze  ,  oîi  Ton  voit 
fur  un  côté  le  Chryfas  tout  nu ,  & 
de  l'autre  une  léte  d'homme  avec 
ce  mot  AJforon.  Cluvier  met  ce 
temple  à  la  gauche  de  cette  ri- 
vière. M.  de  ilfle  l'en  éloigne  un 
peu. 

C'eft  maintenant  la  rivière  de 
Tavi,  qui  prend  fa  fource  à  la 
montagne ,  &  près  du  village  de 
même  nom.  Elle  ferpente  d*abord 
vers  le  midi ,  &  fe  tournant  vers 
l'orient  «lie  fe  perd  dans  le  Dittai- 
Do,  au  midi  d'Affaro  qui  eft  TAffo- 
rus  des  Anciens.  Fazel  la  nomme 
Afforo.  Cluvier  &  plufieurs  autres 
la  prennent  pour  le  commence- 
ment du  Dittaino. 

CHRYSE,  Cbryfe,  Xpucr^ 
(a)  ville  confacrée  à  Apollon  au- 
près de  Lemnos,  félon  Etienne 
de  Byzance.  Cette  ville  étoit  fans 
doute  dans  Tifle  de  même  nom 
dont  parle  Paufanias.Cela  eft  d'au- 


C  H  I2J 

tant  plus  vraîfemblable  que  cet  Au- 
teur met  fon  ifle  de  Chryle  dans 
le  voifmage  de  Lemnos  ;  &  il  nous 
apprend  même  une  particularité  » 
qui,fans  lui,fetoir  peut-être  entiè- 
rement ignorée.  C'eft  que  les  ftors 
avoient  englouti  cette  ifte ,  & 
qu'alors  une  autre  ifle  .étoit  fortie 
du  fein  de  la  mer.  Paufanias  don- 
ne le  nom  d'Hierâ  à  la  nouvelle 
ifle  ;  &  M.  l'abbé  Sévin  n'eft  pas 
éloigné  de  penfer  que  ce  nom  eft 
de  la  façon  de  quelque  copifte , 
qui  a  confondu  l'ifle  en  queftion  ^ 
avec  celle  d  Hiéra  bien  plus  con- 
nue y  &  dont  la  naiflance  eft  rap- 
portée dans  Pline  à  la  féconde 
année  de  la  CLXVIII.*  Olym- 
piade. 

CHRYSE,  Chryfe,  X;,i;rî, 
promontoire  du  pais  des  'Sercs. 
Ortélius  ,  trompé  par  de  mauvais 
exemplaires  de  Pline ,  a  cru  que 
c*étoit  un  golfe.  Ce  promontoire 
étoit  voifm  de  la  rivière  nommée 
Lano^par  le  même  Pline. 

CHRYSE,  Cbryfc  ,  Xpurj:. 
ifle  dans  le  voifmage  &  au  de- là 
du  fleuve  Indus  ^  au  rapport  da 
même  Pline. 

CHRYSE,  Chry/e,  X/)t/crî, 
ville  de  TAfie  mineure  dans  la 
Carie ,  félon  Etienne  de  By- 
zance. 

CHRYSE,  Chryfi,  XptW , 
promontoire  de  Tifle  de  Lemnos  , 
près  d'Épheftias  ,  à  roppofite  de 
hfle  de  Ténédos  ,  fuivant  le  me* 
me  Etienne  de  Byzance. 

CHRYSE,  Cbryfi,  KpvcS^ 
ville  du  Pont,  fdoh  Sophocle, 


(«)  Pauf.  pa{.  509.  Mém.  de  TAcid.  des  Inficript.  &  BelU  Lett»  Tom.  XIV. 
p.  »05. 


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126  CH 

dans  la  tragédie  dé  PhiloSetc. 

Etienne  de  Byzance  parle  de 
quelques  autres  lieux  de  même 
nom ,  mais  Ci  confufément  qa'on 
ne  peut  guère  en  tirer  de  fecours 
pour  la  Géographie. 

CHRYSE  ,  Cbryfe  ,  Xop.?  , 
(a)  fille  d'Halmus,  eut  de  Mars  , 
un  fils  qui  fut  nommé  Phlégyas. 
Ce  fut  lui  qui  fuccéda  à  Étéocle , 
roi  d'Orchômène  ,  mort  fans  en- 

CHRYSÉENS ,  Chryfel ,  peu- 
pies  des  Indes.  Ils  habitoient  les 
montagnes  entre  llndus  6c  le  Jo- 
manes. 

CHRYSÉIS  ,  Chryfels  ,  (b) 
X  t'Wç ,  fille  de  ChryCès,  prêtre 
d'Apollon;  elle  eft  plus  connue 
feus  le  ^om  patronymique  de 
Chryfeis ,  que  fous  celui  d'Afty- 
nomé  ^  qui  étoit  fon  nom  propre. 
Elle  fut  prife  par  Achille  ,  loil'qu'il 
faccagea  Lyrnefle  &  quelques 
Autres  endroits  voifins  de  Troye. 
Elle  étoit  mariée  au  Roi  de  ce 
pais-là.  Agamemnon  la  trouva 
fort  à  fon  goût  &  la  retint  pour 
lui. 

Cependant ,  Chryfês  alla  aux 
vailTeaux  des  Grecs ,  chargé  de 
préfens  pour  la  rançon  de  fa  fille, 
&  tenant  dans  fes  mains  les  ban- 
delettes facrées  d'Apollon  avec 
lefceptre  d*or  ,  &  pria  humble- 
ment les  Grecs ,  &  fur  tout  les 
deux  fils  d'Atrée  leurs  généraux  ; 
n  Fils  d'Atrée  ,  leur  dit  -  il ,  & 
»  vous ,  généraux  Grecs ,  que  les 
n  Dieux  qui  habitent  l'Olympe , 
n  vous  faflent  la  grâce  de  détruire 
D  la  fuperbe  ville  de  Priam ,  (k  de 


CH 

»  vous  voir  heureufement  tie  re- 
»  tour  dans  votre  patrie  ;  mais , 
i>  rendez- moi  ma  fille  en  recevant 
n  ces  préfens  ,  &  refpeélez  en  moi 
»  le  fils  du  grand  Jupiter  ,  Apol- 
»  Ion,  dont  les  traits  font  inévita- 
w  bles.  «  Tous  les  Grecs  firent 
connohre  par  un  murmure  favo- 
rable ,  qu'il  falloit  refpeâer  le  mi- 
nière du  Dieu  ,  &  recevoir  fes  ri- 
ches préfens  ;  mais  ,  cette  deman- 
de déplut  à  Agamemnon  aveuglé 
par  fa  colère.  Il  renvoya  dure- 
ment Chryies  ,  &  accompagna 
fon  refus  de  menaces ,  qui  intimi- 
dèrent ce  vénérable  vieillard. 
Plongé  dans  une  profonde'  triftef- 
fe  ,  il  s'en  alla  le  long  du  rivage 
de  la  mer.  Quand  il  (e  vit  feu l  6i 
éloigné  du  camp  ,il  adrefla  fa  priè- 
re à  Apollon.  Ce  Dieu  defcend 
auffi-tôt  de  l'Olympe ,  le  cœur 
plein  de  colère  ,  avec  fon  arc  6c 
fon  carquois.  Les  flèches  ,^  agitées 
parle  vol  rapide  de  ce  Dieu  irrité» 
retentiflbient  fur  fes  épaules  ;  6c 
couvert  d'un  nuage  ,  il  marcholt 
femblable  à  la'nuit.  Il  s'ailit  loin 
des  vailTeaux,  &  tira  fes  flèches 
qui  fendirent  les  airs  avec  un  fiffle- 
ment  épouvantable.  Il  ne  frappa 
d'abord  que  les  mulets  &  les . 
chiens;  mais,  bientôt  après,  les 
Grecs  furent  eux  mêmes  la  proie 
de  fes  flèches  martelles,  &  l'or» 
ne  voyoit  par  tout  que  monceaux 
de  morts  fur  des  bûchers  qui  brû- 
loient  fans  ceffe. 

On  convoque  alors  une  affem- 
Wée  générale ,  &  l'on  confuhe  le 
devin  Calchas  ,qui  répondit  en  ces 
termes  :  »  Apollon  ne  fe  plaint,  ni 


U)  Pauf.  p.  ^96. 


l    (b)  Homer.  Iliad.  L,  I.  v.  8.  &  fii* 


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,     CH 

»  de  vos  vœux  ni  de  vos  facrîfi- 
I)  ces  ;  mais ,  il  eft  irrité  de  ce 
n  qu'Agamemnon  a  inaltraitérofi 
n  facrificateur  9  de  ce  qu'il  ne  lui 
n  a  pas  rendu  fa  611e ,  ôc  de  ce 
»  qu*il  a  refufé  Tes  prcfens.  Voilà 
»  le  crime  dont  il  rtous  punit  ,  & 
»  dont  il  nous  punira  encore  ; 
»  car ,  il  ne  ceffera  d'appefantir 
n  Ton  bras  fur  nous  ,  que  nous 
»  n'ayon*  rendu  la  belle  Chryféis 
I)  à  Ton  père  fans  rançon  ,  que 
ï)  nous  n*ayons  conduit  à  Chryfa 
»  une  Hécatombe  facrée.  Peuc- 
II  être  qu'alors  touché  de  nos 
n  prières,  il  voudra  bien  k  laifler 
»  fléchir,  tt 

A  ces  mots  ,  Agamemnon  , 
quoiqu'oucré  de  colère  ,  répondit 
qu'il  aimeroit  bien  mieux  garder 
Chryréis,&  qu*il  la  préféreroit  mê- 
me à  la  reine  Clytemneftre,fa  fem- 
me I  à  laquelle  elle  n'étoit  infé- 
rieure ni  en  beauté ,  ni  en  efprit  , 
ni  en  adrefTe  pour  les  beaux  ou- 
vrages; que  cependant  il  vouloit 
bien  la  rendre ,  fi  c'éioit  rintérêt 
des  Grecs.»  Qu'on  prépare  un 
»  vaiffeau  ,  ajoûta-t-il,  qu'on  l'é- 
I)  quipe  dfe  bons  rameurs,  qu'on  y 
lî  charge  les  vidimes  pour  l'Héca- 
»  tombe  ;  que  la  belle  Chryféis  y 
»  monte  ,  &  qu'un  des  chefs  de 
»  l'armée  aille  pour  la  conduire  1 
n  Ajax  ,  ou  Idoménée  ,  00  Ulyf- 
»  fe.  a  Ce  dernier  fut  choifi. 

Quand  oA  fut  arrivé  dans  le 
port  de  Chryfa  ,  on  commença 
par  faire  fortir  les  vi6limes.  Chry- 
féis defcend  aufli-,  &  Ulyfle  la 
prenant  par  la  main ,  la  mené  à 
l'autel ,  &  la  préfente  à  fon  père  » 
&  lui  dit  :  »  Chryfès  ,  le  grand 
»  X9Ï  AgamemnoA  m*a  envoyé 


CH  T27 

»  pourvçus  amener  votre  fille, 
n  &  pour  offrir  à  Apollon  une 
n  Hécatombe  facrée  en  faveur 
n  des  Grecs,  afin  que  nous  fadîoos 
Il  tous  nos  efforts  pour  appaifer  ce 
fi  Dieu ,  qui  nous  a  accablés  de 
Il  maux  épouvantables  ^  que  nous 
n  ne  fçaurions  afTez  pleurer.  « 
Après  lui  avoir  ainfi  parlé  ,  il  lui 
remet  fa  fille  entre  k$  mains. 
Chryfès  la  reçoit  avec  une  extrê- 
me joie.  En  même  tems  ,  les 
Grecs  rangent  les  vidimes  au  tour 
de  l'autel ,  ils  lavent  leurs  mains  9 
&  préparent  l'orge  facrée  ,  né- 
cerfaire  pour  Toblation  du  facriSr> 
ce  ,  pendant  que  Chryfès  ,  levant 
les  mains  au  ciel,  prioit  pour  eux 
à  haute  voix. 

Après  ces  prières  qui  furent 
exaucées  dans  le  moment,  ilscon- 
facrent  les  vi^^imes  par  lorge  fa- 
crée*, ils  leur  tournent  la  tête  vers 
le  ciel  ;  ils  les  égorgent  &  les  dé- 
pouillent ;  ils  coupem  enfuite  les 
ciiiiTes  ;  ils  les  enveloppent  d'une 
double  graille,  &  mènent  par- 
deffus  des  morceaux  de  toutes  les 
autres  parties.  Le  (àcrificateur  les 
fait  brûler  lui  même  fur  le  bois  de 
l'autel ,  &  fait  les  afperfions  de 
vin.  Près  de  lui  de  jeunes  hommes 
tenoient  des  broches  à  cinq  rangs 
'toutes  préparées.  Quand  les  cuif- 
fes  furent  toutes  confumées  par  le 
feu  &  qu'on  eut  goûté  aux  en- 
trailles ,  on  coupa  le  refte  par 
morceaux ,  &  on  le  fit  rôtir  avec 
grand  foin.  Tout  étant  prêt ,  les 
tables  furent  fervies  &  l'on  fe  pla- 
ça. Chacun  fut  content  de  la  por- 
tion qui  lui  avoit  été  diftribuée  ; 
&  quand  le  repas  fut  fini,  de  jeu- 
nes gens  rempUrem  de  vin  de  gran- 


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t28  CH 

des  urnes  ;  d'où  ils  verfoîent  dans 
les  coupes  qu'ils  préfentoient  à 
tout  le  monde.  Après  avoir  fait 
les  libations  >  on  ne  s'occupa  le 
refte  du  jour  qu  a  défarmer  la  co- 
lère d'Apollon ,  en  chantant  des 
hymnes  à  fon  honneur  ^  &  ce  dieu 
prenoit  plaitir  à  les  entendre. 

Chryfeis  étoit  grofle ,  lorfqu'elle 
fut  renvoyée  à  Ion  père.  Cepen- 
dant ,  elle  fe  vantoit  <jue  perfon- 
ne  ne  l'avoit  touchée  ;  6c  lorfqu'- 
elle ne  put  plus  cacher  Ton  état , 
elle  foûtint  que  ce  n*étoit  point  le 
fait  d'un  homme  ,  mais  du  dieu 
Apollon.  Le  61s  ,  dont  elle  accou- 
cha ,  fut  nommé  Chryfes  ;  il  n'ap- 
prit qu'un  peu  tard  Ton  extraâlon. 
Le  jeune  Chryfès  fut  établi  prê- 
tre d'Apollon  dans  Tifle  de  Smin- 
the.  Orefte  &  Iphigénie  ,  s'étani 
fauves  de  la  Cherfonnèfe  Tauri- 
que  avec  la  (latue  de  Diane,  a];>or- 
derent  dans  cette  ifle.  Chry/es ,  ne 
connoiffant  point  ce$  deux  perlon- 
nes,  les  vouloient  renvoyer  à 
Thoas ,  roi  de  la  Taurique  j  mais, 
Agamemnon  fon  père  lui  fit  fça- 
voir  la  fraternité  qui  étoit  entre 
lui  &  ces  deux  nouveaux  venus. 
Alors ,  le  jeune  Chryfès  fe  joi- 
gnit à  Orefte ,  pour  retourner  dans 
la.  Taurique  ,  afin  d'y  tuer  Thoas; 
&  cela  ayant  été  exécuté  »  ils  s'en 
allèrent  a  Mycènes  avec  la  (latue 
de  Diane. 

Quelques-uns  difent  qulphigé- 
nie  étoit  fille  d' Agamemnon  ôc  de 
Chryféis.  D'autres  croyent  que 
Chryfès  ,  ayant  fçu  le  bon  traite- 
ment que  les  Grecs  firent  à  fa  fille, 

(s)  Pauf.  p.  115 ,  167. 
(*)  Antiq.  cxpl.    par    D. 
Montf,  Tom.  III.  p.  14^. 


fiein,   dej 


CH 

la  ramena  à  leur  armée ,  &  la 
remit  entre  les  mains  d'Agamem- 
non.  Briféis  &  Chryféis  écoient 
cou  fines  germaines  ;  car ,  Brifès 
6c  Chryfès  étoient  frères  feloa 
Eudathe. 

CHRYSEIS,  Cbryjeis,  {a) 
X/>'i,> iç^  prétrefife  de  Junon  dans 
un  temple  que  cette  Déefle  avoit 
à  quinze  ftades  de  Mycènes.  Ce 
temple  fut  brûlé  par  la  faute  de 
Chryféis ,  qui ,  s'étant  endormie  , 
ne  s'apperçut  pas  que  le  feu  d'une 
lampe  avoit  pris  à  des  couronnes 
fort  feches  qui  en  étoient  trop  près. 
Cette  Prêtrefle  s'enfuit  auffi-iôt  à 
Tégée  pour  fe  réfugier  à  l'autel 
de  Minerve  Aléa  ;  mais  ,  les  Ar- 
giens ,  quelque  grand  que  fut  ce 
malheur,  bien  loin  de  vouloir  pu-> 
nir  Chryféis,  laifTereht  fa  flatue 
où  elle  etoit,  6c  on  la  voyoit  en- 
core du  tems  de  Paufanias  ,  de- 
vant le  temple  qui  avoit  été 
brûlé. 

D'autres  racontent  cette  hifloi* 
re  avec  quelques  circonftances  dif-. 
fé rentes.  Foyei  Chryfis. 

CHRYSENDETA ,  Cbryfcn- 
de  ta  ,  X^voerJéra  ,  (h)  force  de 
vafes.  On  nommoit  ainfi  ceux, 
qui  étoient  liés  de  bandes  d'or. 

CHRYSERMUS  ,  Cbry/er- 
mus,  Xot/ô^/ucç  ^  (c)  père  d'un 
Ptolemée ,  qui  âvoit  rendu  de 
bons  offices  à  Cléomene ,  roi  de 
Sparte,pendantque  ce  Prince  étoit 
à  Alexandrie  en  Egypte. 

CHRYSERMUS,  (^  Cbryfer^ 
mus  f  XivJ'/^ç%  certain  peribn- 
nage ,  qui  vivoit  du  tems  de  Mé- 

(«)  Plut.  T.  I.  p.  8«*. 
(^d)  Antiq.  expliq  par  D.   fiem.  de 
Montf.  T,  II.  p.  299* 

ron. 


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CH 

ron.  On  dît  qu'étant  pris  de  tnou- 
rir  >  pour  avoir  bu  du  fang  de  tau* 
reau ,  il  fut  guéri  par  Sérapis. 

CHRYSERMUS,  Chryfer^ 
mus ,  XfVT}pfjti(, ,  (a)  Écrivain  , 
cicé  par  TÂuteur  du  uaité  des  fleu- 
yes.  Cet   Écrivain ,  parle  d'une 

fiante,  qu'on  tiroit  du  fleuve 
aâole ,  èc  qui  plongée  dans  de 
l'or  en  fufion  ,  fe  convertiflbii  elle 
même  en  or.  Cette  abfurdiié  fyt 
à  nous  donner  un  exemple  du  peu 
de  difcernement  des  Écrivains  du 
moyen  âge. 

CHRYSÉRUS  ou  Chryso- 
rus  ,  Chryferus  ,  Cbryforus  , 
af&ancbi  de  l'empereur  Marc- 
Aurele,  vers  l'an  de  Jefus-Chrift 
162.  Ilavoit  compofé  un  ouvrage, 
où  l'on  irouvoit  une  lifte  de  tous 
ceux  qui  avoient  commandé  à 
Rome  depuis  la  fondation  de  cette 
ville.  Scaliger  a  inféré  cette  lifte 
dans  Tes  additions  à  la  chronique 
d'Eufebe. 

CHRYSÈS,  Cbryfcs^  Xpitvu 
fils  d'Ardis  ,  &  prêtre  d'Apollon, 
fut  père  de  Chryféis.  Voyc;;^  Chry- 
féis. 

CHRYSÈS,  Chryfes  ,  X.i/V  » 
petic-fils  du  précédent ,  étoit  fils 
d'Agamemnon  6c  de  Chryféis, 
Voyc^  Chryféis. 

CHRYSÈS ,  Chryfes ,  Xpv'inç  » 
(h)  fils  de  Neptune  &  de  Chry- 
logénée ,  fuccéda  à  Phlégyas  au 
royaume  d'Orchomène.  Il  laiffa 
en  mourant ,  un  fils  nommé  Mi- 
nyas. 

CHRYSIPPE  ,    Cbryjïppus  , 
XfviTi'Tr'TrGÇ  ,  (c)  fils  naturel  de  Pé- 

(4)  Mém.   de  TAcad.  des  Infc   It 
Bell.  Lett.  Tom.  XXI.  pag.  15. 
Ci)  Pauf.  p.  597. 

Tom.  XL 


CH  119 

lops.C*éto!t  un  Prince  d'une  beauté 
incomparable.   Latus    en    devint 

λaftionnément  amoureux ,  &  l'en-* 
eva  ;  mais  ,  il  fut  pourfuivi  avec 
tant  de  promptitude,  qu'on  lui 
arracha  fa  proie,  &  qu'on  l'ame- 
na prifonnier  à  Pélops ,  qui  lui 
pardonna  cette  a£lîon  ,  en  confia 
fidérant  que  l'amour  l'y  avok 
pouffé. 

L'amitié  de  Pélops  pour  Chry- 
fippe  étoit  plus  grande  que  celle 
qu'il  avoit  peur  (es  enfans  légiti- 
mes. C'eft  pourquoi,  Hippodamie» 
fon  époufe ,  animée  de  l'eiprit  de 
marâtre,  exhorta  Atrée  &  T hyef- 
te ,  deux  de  fes  fils ,  à  ôter  la  vie 
à  ce  bâtard,  ne  doutant  point  qu'il 
ne  dût  un  jour  afpirer  à  la  cou- 
ronne. Ils  lupî  refuferent  cet  aâe 
de  complaifance  ,  &  alors  elle  prit 
la  réfolution  d'exécuter  elle-même 
ce  mauvais  deftein.  Elle  prit  l'épée 
de  Laius  pendant  qu'il  dormoit , 
&  s'en  fervit  à  tuer  Chryfippe* 
Les  foupçons  tombèrent  fur  Laius 
à  caufe  de  fon  épée  ;  mais,  Chry- 
fippe  avant  que  de  rendre  Tame  « 
eut  foin  de  le  difculper.  Pélops  fe 
contenta  de  chafter  Hippodamie. 
Il  y  a  des  Auteurs  qui  difent 
qu'elle  ne  tua  point  Chryfippe  de 
(a  propre  main  ,  mais  qu'elle  fit  ce 
meurtre  par  Atrée  &Thyefte,  & 
qu*après  avoir  tué  Chryfippe  >  ils 
le  jetterent  dans  un  puits.  Leur 
père  ne  les  voulant  plus  voir ,  ils 
fe  retirèrent  à  Triphylie,  dans 
l'Élide  au  Péloponnèfe.  Quelques- 
uns  prétendent  que  Pélops  ne  fc 
contenta  pas  de  bannir  fa  femme , 

C«)  Pauf,  pag.  î8i.  Athcn.  pag,  6o|. 
Myth»  par  M.  TAbb.  Ban*  Tom.  VII. 
p.  3ti»3a8. 


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Tjo  CH 

&  que  ce  fut  principalement  fur  el- 
le qu*il  voulut  venger  la  mort  de 
Chryfippe  ;  mais  ,  qu'il  ne  le  put , 
parce  qu'elle  te  fauva  à  Midée, 
ville  du  païs  d'Argos.  D'autres 
difentque  fe  voyant  accufée  par 
fon  mari ,  elle  fe  tua.  Thucydide 
raconte  qu'Atrée  fe  réfugia  chez 
Euryfthée  fon  neveu ,  roi  de  My- 
cènes. 

Ce  Chryfippe  n'eft  point  diffé- 
rent de  celui  que  Clément  d'Ale- 
xandrie ,  Arnobe  &  Firmicus 
Maternus  ont  aflbcié  à  Gany» 
tnéde. 

CHRYSIPPE,  Cbryjîppus, 
X/)wo."3r^oç  »  (a)  célèbre  Philoiophe 
de  la  fe£le  Stoïcienne,  naquit  à 
Soles  ,  ville  de  Cilicie,  ou àiarfe 
félon  d'autres.  Il  étoit  "fils  d'un  cer- 
tain Apollonius.  D'abord,  il  s'étu- 
dia à  bien  conduire  un  chariot ,  & 
fut  enfuhe  difciple  du  philofophe 
Cléanthe ,  fucceffeur  de  Zenon.  Il 
avoit  l'efprit  fi  fubtil  &  fi  porté  à 
la  difpute ,  qu'en  plufieurs  rencon- 
tres, il  fe  faifoit  un  plaifir  de  corn* 
fcattre  les  fentimens  de  fon  maître, 
auquel  il  difoit  qu'il  n'avoit  be- 
foin  que  de  la  connoifiance  des 
principes,  parce  qu'il  étoit  affez 
capable  de  trouver  des  raifonne- 
mens  pour  les  foûtenir.  Vâlère 
Maxime  rapporte  qu'à  l'âge  de 
quatre-vingts  ans  ,  il  acheva  fon 
trente-neuvième  traité  de  Logi- 
que. Il  a  fi  fort  excellé  en  cette 
icience,  que  les  payens  difoient 


CH 

qtje  fi  les  Dieux  euffent  pu  fe  fer- 
vir  de  la  logique ,  ils  n'en  auroient 
point  chbifi  d'autre  que  celle  de  ce 
Philofophe.  Diogène  Laërce  écrit 
qu'il  laifia  trois  cens  onze  traités  de 
dialeâique*  Quelques  Auteurs  en 
font  monter  le  nombre  jufqu'à 
fept  cens  cinq. 

On  prétend  que  ce  qui  l'enga- 
gea à  écrire  beaucoup ,  ce  fut  l'en- 
vj^  qu'il  portoir  à  Épicure  ,  qui 
avoit  fait  plus  de  livres  qu'aucun 
autre  Philofophe  ;  mais  ,  il  n'égala 
jamaisce  concurrent.  Ses  Ouvra- 
ges étoient  peu  travaillés  ,  &  par 
une  fuite  néceiTaire  peu  correâs  , 
pleins  de  répétitions  eniiuieufes , 
&  fouvent  même  de  contradic- 
tions. C'étoit  le  défaut  ordinaire 
des  Stoïciens,  de  mêler  beaucoup 
de  fubtilités  &  de  fécherelTe  dans 
leurs  difputes  ,  foit  de  vive  voix , 
foit  par  écrit.  Ils  évitoient ,  ce 
femble ,  avec  autant  de  foin  tout 
agrément  dans  le  ftyle,  comme 
tout  relâchement  dans  les  mœurs« 
Cicéron  ne  les  blâmoic  pas  beau- 
coup de  manquer  d'un  talent  en- 
tièrement étranger  à  leur  profef- 
fion  ,  &C  qui  n'y  étoit  pas  abfo- 
lument  néceffaire.  Si  un  Philofo- 
phe ,  dit- il ,  a  de  l'éloquence,  je 
lui  en  fçais  bon  gré  ;  s'il  n'en  a 
point ,  je  ne  lui  en  fais  point  un 
crime.  Il  fe  contentoit  qu'ils  fuf- 
fent  -clairs  &  intelligibles ,  &  c'efl: 
par  ou  il  eftimoit  Épicure. 

Quintilien  cite  fouvent  avec 


(*)  Plin.  T.  II,  p.  557-  Pauf.  p,  »9,f  Mal.  L.  I.  c.  39.  Roll.  Hift.   Ane.  T. 


■57.  Athen.  pag.  535.  |Quint.  L.  1.  c, 
1  ,  3  ,  8  ,  10.  L.  XII.  c.  7.  Lucian.  T.  11. 
p.  641.  Strab.  p.  610 ,  671.  Suid.  T.  H. 
.  1156.  Cicer.  de  Ocat.  L.  I,  c.  «7.  de 
^ffic*  L.  I1I«  c«  10*  de  finib.  Boti^  & 


h> 


VI.  p.  446,  447.  Mém.  de  PAcad.  def 
Infcript.  &  Bell.  Lett.  T.  111.  pag.  a  y. 
Tom.  VII  p.  175.  érficiv,  T.  X.  p.  80f 
Tom.  XXI.  p.  19. 


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CH 

éloge  un  Ouvrage,  que  Chryfip- 
pe  avoit  fait  fur  l'éducation  des  en- 
fans.  Ce  Philofophe  s'aflbcia  pen- 
dant quelque  tems  aux  Académi- 
ciens ,  foûtenant  à  leur  manière  le 
pour  &  le  contré.  Les  Stoïciens  fe 
plaignirent,  de  ce  que  Chryfippe 
avoit  ramafTé  tant  &  de  fi  forts  , 
argumens  pour  le  fyftême  des 
Académiciens ,  qu'il  ne  put  enfui- 
te  les  réfuter  ;  ce  qui  avoit  fourni 
des  armes  à  Carnéade  leur  anta- 
gonifte. 

Sa  doârîne,  fur  plufieurs  points, 
ne  faifoit  pas  honneur  à  fa  feâe^ 
&  nëtoit  capable  ique  de  la  dé- 
crier. Il  croyoit  les  Dieux  périffa- 
bles ,  &  foûtenoit  qu'ils  périroient 
en  effet  dans  l'incendie  du  monde. 
Il  permettoit  les  incefles  les  plus 
crians  &L  les  plus  abominables  > 
&  admettoit  la  communauté  ^es 
femmes  parmi  les  f^es.  Il  avoit 
compofé  pluficurs  écrits  remplis 
d'obfcénités  y  qui  faifoient  horreur. 
Voilà  ce  qu'étoit  le  Philofophe, 
qui  paffoit  pour  le  plus  ferme  ap- 
pui du  Portique,  c'efl-à-dire  >  de 
lafeâe  la  plus  févère  du  paganifme. 

Il  doit  paroitre  étonnant  après 
cela,  que  Sénèque  faffe  de  ce 
Philofophe  ,  .en  le  joignant  à  Ze- 
non ,  un  éloge  fi  magnifique ,  juf- 
qu'à  dire  de  l'un  ôc  de  l'autre  qu'ils 
ont  fait  de  plus  grandes  chofes  par 
les  travaux  de  leur  cabinet ,  que 
s'ils  avoient  commandé  des  ar- 
mées ,  rempli  les  premières  places 
d'un  État,  établi  de  fages  loix  ;  6c 
qu'il  les  confidere  comme  des  Lé- 
giiîateurs ,  non  d'une  feule  ville , 
mais  du  genre  humain  entier. 

Ce  n'eft  pas  néanmoins  que^ 
Sénèque  adoptât  indidinâement 


CH  Tjr 

tout  ce  qu'avoit  écrit  Chryfippe^ 
On  fçait  que  l'antiquité  avoit  ren- 
fermé toute  la  dodrine  des  grâces 
&  des  bienfaits  dans  les  figurés  al- 
légoriques ,  fous  lefquelles  on 
avoit  coutume  de  les  repréfenter. 
Chryfippe ,  ayant  entrepris  de 
traiter  cet  endroit  important  de 
la  morale,  crut  qu'il  ne  pouvoi^ 
mieux  exécuter  ce  dedein,  qu'en 
donnant  l'explication  de  ceb  diffé- 
rentes figures.  Sénèque  qui  tra- 
vailla depuj^  fur  la  même  matière, 
blâme  fort  fon  prédéceffeur  de  s'y 
être  pris  de  la  iorte ,  l'accufant  d'an 
voir  traité  fon  fujet  plutôt  eii 
Poëte  qu'en  Philofophe ,  &  pré- 
tendant qu'on  inflruit  tout  autre- 
ment les  hommes  par  des  maxi- 
mes férieufes ,  que  par  des  allégo- 
xies  agréables.  Quoi  .qu'il  en  foit  » 
nous  avons  au  moins  l'obligation 
à  Chryfippe  de  nous  avoir  tranf- 
mis  ce  que  les  Anciens  penfoient 
fur  les  attributs  des  grâces  ^  &  de 
nous  avoir  révélé  les  mydères 
qu'ils  cachoient  bien  ou  mal  fous 
ces  attributs.  Nous  difons  bien  ou 
mal  ;  car ,  on  eA  obligé  de  conve- 
nir que  la  plupart  de  ces  fens  myf- 
tiques  font  un  peu  recherchés. 

On  dit  que  quelques  -  uns  des 
difciples  de  Chryfippe  le  prièrent 
de  fe  trouver  à  un  facrifice,  & 
qu'y  ayant  bu  du  vin  pur,  il  en  fut 
tellement  oppreffé,  qu'il  mourut 
cinq  jours  après  ;  d'autres  ailurent 
qu'il  mourut  de  rire ,  voyam  un 
âne  qui  mangeoit  des  figues  dans 
un  badin  d'argent,&  commandant 
qu'on  lui  apportât  à  boire.  Sa 
mort  arriva  fous  la  i43.e  Olym- 
piade ,  207  avant  l'Ère  Chrétien- 
ne. Ce  Philofophe  étoit  âgé  dé  73 


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ija  CH 

ans»  Mon  Diogène  Laërce,  &<Ie 
8i  félon  Lucien.  On  lai  drefla  un 
tombeau  parmi  ceux  des  plus  iU 
luâres  Athéniens.  Sa  flatue  fe 
voyoic  dans  le  Céramique. 
'  Chryfippe,  au  rapport  de  Cicé- 
ron ,  a  dit  un  bon  mot  entre  beau-** 
eoup  d'autres;  que  comme  dans  la 
lice>chacun  doit  faire  defon  mieux 
Jpoureropofterle  prix  ,  mais  qu*il 
n'eff  pas  permis  d6  tendre  la  jam- 
be à  fon  concurrent ,  ni  de  le  re- 
pouiTer  de  la  main  ;  de  même,  dans 
la  vie ,  chacun  a  droit  de  chercher 
ce  qui  lui  peut  être  utile  ;  mais  non 
pas  de  le  prendre  aux  autres. 

CHRYSIPPE  ,  Chryfipvus  , 
Xf i/6i7rT«« ,  (*j)  médecin  Grec, 
qui  étoit  de  Cnide.  On  ne  fçait 

{>as  en  quel  tems  il  a  vécu.  Il  fut 
'auteur  de  la  nouvelle  feôe  des 
médecins  Empyriques ,  qui  rejet- 
te rem  la  faignée  &  la  purgation 
en  ufage  jufqu'alors,  pour  établir 
des  remèdes  particuliers.  Pline 
parle  du  médecin  Chryfippe  ,  en 
une  infiqité  d'endroits  f  mais ,  eft- 
ce  précifément  de  celui-ci  ou  de 
quelqu'autre  ? 

CHRYSIPPE  ,  Chryfwpus , 
XoyV/TTTTo?,  {b)  difciple  d'Érafif- 
crate  »  &  médecin  de  Ptolémée. 

On  parle  de  plufieurs  autres 
Chryfippes,  dont  un  avoit  écrit 
des  Géorgiques  ;-un  autre  natif  de 
Tyanes  ,  étoit  auteur  d'un  livre 
de  la  manière  de  faire  le  pain. 
Athénée  l'a  nommé  habile  difcou« 
teur  de  tarte^  &  de  gâteaux. 

CHRYSIPPE  ,  Cbryfippus^ 
Hpuat-^TTù^ ,  (c)  l'un  des  princi- 


g, 


^4i)  Pin.  T.  II.  p.  190.  é*  /«f  • 

(»)  Atben.  p.  647. 

(0  i-ttciani  T,  I.  p.  374.  ^  /#^ 


CH 

paux  Interlocuteurs  d'un  dialogue 
de  Lucien.  C'eft  celui  oii  cet  Au- 
teur tourne  en  ridicule  les  diffé- 
rences fe£èes  de  Philofophes. 

CHRYSIPPUS,  Cbryfippus, 
nom  d'un  des  Chevaux  du  CirquCé 
^oy^\  Chevaux  du  Cirque. 

CHRYSIS ,  Cbryfis  ,  Xpt/Viç  » 

\  Prétreffe  de  Junon  à  Argos. 
^''étte  Prêtreffe,  ayant  mis  une 
lampe  proche  des  ornemens  fa- 
crés ,  &  s'étant  endormie  »  fut 
caufe  par  fa  négligence  y  de  l'in- 
cendie du  temple  confacré  à  cette 
DéefTe.  Elle  fe  fauva  à  Phliunte , 
pour  éviter  le  reffemiment  des 
Argiens,  qui  créèrent  une  autre 
Prêtreffe  en  fa  place.  D'autres 
ont  cru  ,  d'après  Arnobe ,  qu'elle 
avoit  péri  elle-même  dans  l'em- 
brafement.  Saint  Jérôme  ,  dans 
fon  premier  livre  contre  Jovinien, 
a  obfervé  que  cettjî  prêtreffe  de 
Junon  étoit  werge.  Marins  Viâo- 
linus ,  dans  fes  notes  fur  cet  en- 
droit-là ,  dit  mal  à  propos  que  ce 
Père  parle  de  Chryféis  qu'Aga- 
memnon  enleva» 

Chryfis  vivoit  avant  la  guerre 
du  Péloponnèfe.  Il  y  avoit  huit 
ans  &  demi  que  cette  guerte  étoit 
commencée,  quand  Chryfis  prit  la 
fuite. 

CHRYSIS,  Cbryfis  y  Xpf^ic, 
(e)  l'une  des  courtifanne^  de  Dé« 
métrius. 

CHRYSIS ,  Cbryfis  ,  XpJwc , 
(/)  fameufe  courtifanne  de  l'iile 
d'Andros ,  que  Térence  introduit 
dans  fon  Andrienne.  Sa  pauvreté 
&  la  négligence  de  fes  parens  l'a- 

(i)  Thucyd.  p.  99,  14s. 

(«)  Plut.  T.  I.  p.  899. 

(/)  Terent.  T.  I.  p.  19.  &  ftf. 


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CH 

Voient  contfainie  de  quitter  fon 
païs.  Elle  étoit  belle  &  à  la  fleur 
de  fa  jeunefle.  Au  commence- 
ment ,  elle  étoit  fage  ,  &  vivoit 
d'une  manière  dure  &  laborieufe, 
gagnant  petitement  fa  vie ,  à 
nier  &  à  faire  de  la  tapifTerie; 
mais ,  depuis  qu*il  fe  fut  préfenté 
des  amans  qui  lui  promirent  de 
payer  fes  faveurs  ;  comme  Tefprit 
eft  naturellement  porté  à  quitter 
la  peine  pour  le  plaifir,elle  ne  put 
fe  foûtenir  dans  un  pas  fî  gHfTant. 
Elle  fe  contenta  d*abord  a  un  ou 
de  deux  amans  ;  mais  ,  dans  la 
fuite  elle  reçut  chez  elle  tous  ceux 
qui  voulurent  y  aller.  Quand  elle 
fut  morte ,  fes  amans  prirent  foin 
de  fes  funérailles. 

CHRYSIS  ,  Chryfis ,  XpLciu 
a)  autre  fameufe  courtifanne  , 

»nt  il  eft  fait  mention  dans  Perfe* 

CHRYSIS  .  Cbryfis  ,  X^inq  » 
{h)  autre  fameufe  courtifanne  > 
£lle  de  Déménétus  »  au  rapport 
de  Lucien.  Elle  étoit  facile,  &  on 
en  pouvoit  faire  tout  ce  qu'on 
youloit  5  avec  peu  de  chofes.  Elle 
accQuroit  au  fon  de  l'argénr ,  dit 
Lucien ,  comme  les  fpeares  s'en- 
fuient au  fon  de  Tairain.  Cette 
courtifanne  fut  fort  aimée  d'un 
jeune  homme  nommé  Gl§ucias. 

Lucien  ,  dans  un  de  k%  dialo- 
gues des  courtifannes  »  introduit 
une  autre  Chryfis,  qui  s'entretient 
avec  Ampélis  »  des  maux  qu'elle 
avoit  à  foufFrir  de  la  part  de  Gor- 
gias  9  fon  amant  ;  car ,  elle  en  étoit 
extrêmement  maltiaitée,  Et  Lu* 

^â,y  Perf;  Satyr.  5.  t»  165. 
\h)  Lucîan.  T.  II.  p.  475.  jàr  /#f  •  T. 
|Ivp.  ^^.&f$q. 
(0  PauC  p.  596,597» 


.      .   .     CH  I3J 

c!en  lui  fait  dire  par  Aœpélis ,  que 
c'étoit  une  preuve  que  Gorgias 
Taimoit. 

CHRYSIS,  Cbryjîs,  nom  d'un 
chien  de  Chafle.  Foye^  Chiens 
deChaffe. 

CHRYSOGÉNIE,  Cbry/oge^ 
nia  3  XfvaoysyeicL  »»  (c)  fille  d'Hal- 
mus ,  eut  de  Neptune ,  un  fils  qui 
fut  nommé  Chryfès,  &  qui  monta 
fur  le  trône  d'Orchomène ,  après 
la  mort  de  Phlégyas. 

CHRYSOGONUS ,  Chryfis 
^Çonus  ,  Xf»çiyvf9ç%  (J)  excellent 
joueur  de  âût9  ,  qui  avoit  rem- 
porté le  prix  aux  jeux  Pythiques; 
Selon  E^uris  de  Samos ,  Chryfa- 
gonus  régloit  au  fon  de  la  flûte  les 
mouvemens  âc  la  cadence  des  ra** 
meurs ,  un  jour  qu'Alcibiade  re^ 
venoit  à  Athènes  comme  ea 
triomphe ,  avec  un  grand  nombre 
de  vaifleaux  ,  dont  la  plupart 
avoient  été  pris  fur  les  ennemis*. 

CHRYSOGONUS ,  (c)  [  U 
Corn.},  ^,  Corn,  Cbryfogonus ^ 
le  plus  riche  des  affranchis  de 
Sylla.  Un  jour,  celui-ci  faifant 
vendre  à  l'encan  le  bien  9'un  ci- 
toyen, qui  avoit  été  comthe  prof- 
crit,  &  l'ayant  îait  adjuger  à 
à  Chryfdgonus ,  pour  la  fommè 
de  deux  mille  drachmes ,  Rofcius, 
fils ,  &  héritier  du  mort ,  en  fiic 
très-affligé ,  &  fit  voir  que  ce 
biea  valoit  au  moins  deux  cens 
cinquante  talens.  Sylla  ,  qui  fe 
voyoit  par -là  coavaincu  d'une 
înjuftice  afFreufe,  s'emporta  ex- 
cefliyement;  &  à  la  ibllicitatioa 

(<0  Plat.  T.  L  p.  109* 
(#)  PluN  T.  I.  pag.  Stfa.  Cicer.  Ora^  ' 
CCoCdiL  Amer.  fdiJP^u* 

T    ••• 


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T34      .     C  H 

&  (uggeftion  de  Chryfogonus ,  îl 
fit  à  Kofcius  une  aflPaire  criminel- 
le ,  l*accufant  d'avoir  tué  fon  père 
de  fes  propres  mains. 

Voilà  ,  pour  le  dire  en  paffant , 
une  injuftice  bien  atroce.  Un  bien, 
qui  valoit  deux  cens  cinquante  ta- 
lens ,  c'eft-à-dire  y  deux  cens  cin- 
quante mille  écus ,  Sylla  te  fait 
adjuger  à  fon  affranchi ,  pour  deux 
inrlle  drachmes  ,  c'eft  -  à  -  dire  , 
^our  mille  livres.  Ceft  ainfi  que 
'  Cicéron  lui  -  même  l'écrit  dans 
fon  oraifpn  pour  Rofcius  ;  Bona 
patris  bujufce  Sexti  Rofcii ,  qua 
funt  fexagies ,  qva  de  L.  Sylla 
'duobus  millibus  nummûm  fefe  dieu 
tmijfe  Z.  Cornélius  Chryfogonus. 
Phtarque  a  fort  bien  rendu  ces 
deux  fommes  ,  fexagies  ,  c*eft 
deux  cens  cinquante  mille  écus  : 
&  duobus  millibus  nummûm  y 
c'eft  deux  mille  drachmes  ;  car , 
nummus  chez  les  Latins,  eft  fou- 
vent  la  même  chofe  que  drachma 
chez  les  Grecs.Et  c'eft  inutilemeiît 
que  Scaliger  a  vouli?  corriger  ce 
paflage  qui  n'eft  nullement  cor- 
rompu. 

Il  faut  entendre  Cicéron  lui- 
même  parler  de  c«t  affranchi. 
91  Chryfogonus  j  dit-il ,  qnand  il 
»  veut  defcendre  de  fon  château 
)9  du  mont  Palatin  ,  a  pour  les 
M  délaffemens  de  fon  efprit ,  une 
1»  délicieufe  maifon  de  campâgn^e 
s>  aux  portes  de  Rome  ^  outre 
ri  plufieurs  héritages  confidérables 
f>  &  à  fa  proximité.  De  plus  ,  tfn 
f>  palais  rempli  de  vafes  de  Co- 
D  rinihe  &  de  Délos,  entre  lèf- 
ti  quels  eft  cette  fameufe  marmite 
D  qu'il  avoit  depuis  peu  achetée 
»  fi  cher ,  que  les  paflans  à  qui 


Il  Ton  en  difoit  le  prix  ,  croyoîent 
»  que  c'étoit  un  fonds  de  terre 
»  qu'on  vendoit.Combien  croyex- 
II  vous  qu'il  ait  chez  lui  d'ouvra- 
n  ges  de  gravure  en  argent  ^  de 
Il  tapifferies  fuperbes ,  de  peintu- 
»  res ,  de  tableaux  ,  de  ftatues  6c 
»  de  figures  de  marbre  ?  Il  y  en  a, 
»  Memeurs ,  autant  qu'après  les 
Il  pertes  de  plufieurs  illuftres  fa- 
it milles  ,  les  déprédations  &  les 
Il  troubles  en  ont  pu  faire  rafTem- 
II  bler  dans  une  feule  maifon. 

Il  Vous  dirai-  je  combien  eft 
M  nombreux  fon  domeftique  «  l'art 
Il  &  l'élégance  qui  régnent  dans 
Il  fa  maifon  ?  LaiÎTons-Iàles  talens 
Il  fubalternes  des  cuifmiers  ,  des 
Il  pâtiffiers,  des  porteurs  de  lî- 
II  tière.  Il  y  a  pour  le  feul  plaifir 
^1  du  goût  &  des  oreilles ,  tant 
»  d'hommes  à  fes  gages,  que  le 
Il  concert  des  voix ,  des  inftrU- 
II  mens  ,  des  flûtes  ,  &  le  bruit 
w  des  fêtes  célébrées  la  nuit,  font 
Il  continuellement  retentir  toutes 
il  les  maifons  voifines.  Combien 
Il  penfez-vôus ,  Meflieurs,  qu'u- 
»  ne  telle  vie  fuppofe  de  dépen- 
n  fes  &  de  profufion  tous  les 
n  jours  ?  Quels  font  ces  feftins  \ 
Il  Les  croirai. )e  honnêtes,  dans 
n  cette  maifon  ?  Si  ce  féjour  doit 
n  être  appelle  maifon  ,  plutôt  que 
»  le  réduit  de  la  débauche  &  de 
Il  l'infamie.  Pour  lui ,  Meflieurs, 
»•  vous  voyez  de  quel  air  ,  avec 
»  fà  chevelu rp  bien  arrangée  âc 
n  bien  parfum^^  ,  il  va  &  vient 
9  par  la  place  publique ,  accom- 
II  pagné  d'uïie  troupe  de  gens  en 
»  longues  robes  ;  vous  voyez 
If  d'ailleurs  comme  il  méprife  le 
p  genre  humain,  &  ne  connok 


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CH 

n  pcrfonne  au-deffus  de  luî,  nî 
?>  plus  heureux  ,  ni  plus  puiHant.M 

CHRYSOGONUS,  Cbryfo^ 
gonus  ,  Xpî  «-070^0;  ,  {a)  joueur 
d'inftrumens.Il  donnoit  des  leçons 
aux  jeunes  gens ,  moyennant  une 
certaine  rétribution.  Juvénal  ne 
nous  dit  pas  s'il  faifoit  payer  cher, 
ou  non  ,  {^s  leçons. 

CHRYSOGONUS ,  Chryfo- 
gonus  ,  Xpvroyofoç ,  (b)  traître  , 
qui  livra  aux  Scythes  la  .ville  de 
Nicom^die.  Le  butin  en  eût  été 
im^lenfe ,  fi  les  habitans  ,  préve- 
vant  rarrivée  des  Barbares ,  ne  fe 
fufTent  enfuis  pour  la  plupart  avec 
tout  ce  qu'ils  purent  fauver  de 
leurs  tréfors.  Les  Scythes  ne  laif- 
ferent  pas  d  y  trouver  encore  de 
quoi  fatisfaire  abondamment  leur 
cmpidité^ 

CHRYSONDION ,  Cbfy/oa' 
dion  y  ville  de  Macédoine  dans  la 
Darétide ,  félon  Polybe. 

CHRYSOPRASE  ,  Chryfo- 
frafus  »  ILpuco'xpetTû;  »  (c)  nom 
d'une  pierre  préçieufe ,  qtii  ferr 
voit  de  dixième  fondement  aux 
murs  de  Ja  cékike  Jérufalem.  Sa 
couleur  eft  verte  ,  femblable  à  la 
verdeur  d'un  porreau  ;  auili  fon 
nom  figni6e<^t-il  un  porreau  d*or. 
Le  Grand  -  Prêtre  ,  au  lieu  du 
Chry^oprafe,  ayoit  une  agathe 
dans  fon  rational. 

CHRYSOPOLIS,  Cbryfopo. 
Us ,  Xpua-l-TTiTuç  >  (J)  lieu  de  TAfie 
nioeure ,  fitué  près  de  Chalcé- 
dmae*  G'étoit  comme  l'arfenal  & 

(*)  Juven.  Saiyr^  6.  v.  74.  Satyr.  7. 
V.  176. 
(b)  Crév.  Hift,  des  Emp.    Tom.  V. 

^  4»7- 

v)  Apoc.  c*  IJ.  V.tQt 


CH  155 

le  magafm   de  cette   ville. 

Pierre  Gilles  en  parle  ainfi.  On 
trouve  enfuite ,  dit  Denys  de  By- 
zance,  uii  port  ttès-beau  &  très- 
bon  ,  à  caufe  de  fa  grandeur ,  & 
du  calme  qui  y  règne.  Au-deffus 
de  la  mer  ei\  une  campagne  ,  qui 
par  une  douce  pente  defcend  vert 
le  rivage.  On  l'appelle  Chryfopo- 
lis  ,  à  caufe ,  félon  quelques-uns  ^ 
que  les  Perfes  y  étant  maîtres  ,  y 
afTemblolent  des  monceaux  d*or  , 
des  tributs  levés  fur  les  villes  ; 
mais ,  pluHeurs  difent  que  ce  nom 
lui  vient  de  Chryfès,  fils  d'Aga- 
memnon  &  de  Chryféis  ;  que  ce 
jeune  Prince  fuyant  la  cruauté 
d'iEgifthe  &  de  Clytemneftre,  & 
voulant  fe  réfugier  dans  la  Tauri« 
que ,  guprès  d'iphigénie  fa  fœur  , 
qui  y  étoit  prêtreUe  de  Diane  » 
tomba  malade  à  Chryfopolis ,  y 
mourut,  ôc  y  eut  fa  fepulture  ;de 
forte  qu'on  donna  fon  nom  à  cette 
ville.  On  pourroit  auffi  Tappeller 
ainfi,  c'eft-à-dire,  la  ville  d'or, 
à  caufe  de  la  bonté  de  fon  port  » 
félon  l'ufage  des  Anciens ,  qui 
comparent  à  l'or  tout  ce  qu'il  y  a 
d'excellent. 

Chryfopolis  étoit  le  lieu  de  corn- 
merce  des  Chalcédoniens.  C'eft-là 
que  Xénophon  dit  que  les  Grecs ^ 
qui  avoient  fervi  fous  Cyrus ,  s'ar- 
rêtèrent fept  jours  pour  vendre  ce 
qu'ils  avoient  pris.  Le  même  hif- 
torien  dit  dans  fon  hidoire  de  la 
Grèce  ,  que  les  chefs  des  Athé- 
niens ayant  pris  la  route  de  Chry- 

(d)  Diod.  Sicul.  p.  565, 41  j.  Xenoph. 
p.  39».  &  feq,  Strab,  p.  56;.  Plîn.  T. 
L  p.  S91.  Crév.  Hift.  des  Emp.  Too^ 
V.  pag.  465,  T.  VI.  p.  |oj. 


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ijô  CH 

fopolis  de  Chalcéddine .  Tentou- 
rerent  de  murailles  ,  &  en  firent 
une  place ,  pu  ils  ailembloient 
l'argent  provenant  des  dix  mes  ; 
qu'ils  y  établirent  un  impôt  du 
dixième  fur  les  vaifTeaux  qui  ve-» 
noient  du  Pont-Euzin ,  &  qu'ils 
y  laifTerenc  une  flotte  de  trente 
voiles  fous  deux  commandans  , 
pour  la  fureté  du  port.  On  lit  les 
mêmes  circonflances  dans  Diodo- 
re  de  Sicile. 

Il  paroit  que  cette  place  fut  en- 
fuite  démentelée ,  puifque  Strabon 
ne  la  traite  que  de  village.  De 
.  même  à  préfent  ce  n'efl  plus  une 
ville,  mais  un  village,  dont  les 
maifons  (ont  écartées  l'une  de  l'au- 
tre ;  ce  qui  fait  qu'il  a  environ 
deux  mille  pas  de  circuit*.  C'efi 
préfentement  le  village  de  Scuta- 
ri ,  nom  qui  peut  lui  être  venu  de 
Scutarii ,  dont  il  y  avoit  de  plu- 
sieurs fortes  dan»  les  armées  Ro- 
maines ,  comme  on  peut  le  voir 
dans  la  Notice  de  l'Empire.  Ainfi 
on  a  pu  dire  Scutarii  pour  Scuta^ 
riorum  Statio ,  afin  d'abréger.  Le 
port  étoit  autrefois  beaucoup  plus 
grand  qu'il  n'efl  à  préfent  ;  une 
partie  en  a  été  remplie ,  lorfque  la 
ville  de  Chalcédoine  a  été  détrui- 
te ;  une  autre  partie  ,  pour  enl- 
pêcher  les  Barbares  de  s'en  fervir. 
Et  Pierre  Gilles  dit  que  de  fon 
tems  même ,  la  fille  du  Sultan  So- 
litnan  en  fit  combler  une  partie 
pour  fervir  d'emplacwnent  à  une 
mofquée  &  a  un  hôpital ,  gu'elld 
faifoit  bâtir/  où  tous  les  toits  font 
de  plomb,  &  les  édifices  ornés  de 
colonnes  de  marbre ,  de  portiques, 
de  grandes  cours  &  de  fontaines. 
.  CHRYSOPOLIS ,  Chry/opo-, 


CH 

lis ,  XpudoTToxiç  y  non  donné  quel- 
quefois à  la  ville  de  Béfançon* 
Poye^  Béfançon. 

CHRYSOPOLIS,  C^ry/^jpo- 

/w,Xf.t;oo7rox/ç,  ville  épifcooale  d' A- 
fie.  Il  en  eflplufieurs  fois  tait  men- 
tion dans  le  Concile  de  Conftan- 
cinople  ,  qui  éfl  le  cinquième  Con- 
cile général.  Ortélius  dit  qu'on  la 
nommoitaufli  Diofuros>  c'efl-à- 
dire  le  théâtre  de  Jupiter  ;  c'eft  la 
même  que  Chriflopoli$,que  Holf- 
ténius  dit  avoir  été  nommée  Diof- 
hiéron. 

CHRYSOPOLIS,  Chryfopo. 
lis  ,  Xit^îTToAiç ,  ville  épifcopale 
dans  le  département  de  la  féconde 
Mauritanie,  félon  la  Notice  de 
Léon  le  Sage.  Il  ne  faut  pas  con- 
clure de  -  là  qu'elle  fut  en  Afrique; 
car  ,  elle  efl  nommée  après  plu- 
lieurs  villes  de  la  Sàrdaigne  »  ou 
des  villes  adjacentes  ,  comme  Ca-, 
ralis ,  Turris ,  Sulchi ,  Phanfania , 
&c.  Aubert  le  Mire  ,  &  le  P, 
Charles  de  Saint  Paul  n'en  font 
aucune  mention. 

CHRYSOPOLIS ,  ar^yc^/To- 

/w,  X^l/ro7ro^/ç  ,  (7tf  ChRISTOPO- 
Lis  ,  Cbriftopolis  »  Xp<s'0'3ro><;  > 
ville  épifcopale  du  Patriafchat 
d'Antioche,  fous  Boflra  métropo- 
le. De  ces  deux  noms ,  le  premier 
efl  dans  le  texte  de  la  Notice  de  ce 
Patriarchat  ^  &  le  fécond  efl  en 
marge.  La  Notice  de  l'abbé  Milon 
met  de  même  dans  ce  qu'il  ap- 
pelle la  grande  Arabie ,  fous  la 
métropole  Boflra  ou  BufTeleth , 
une  ville  nommée  Chryfopolis. 

CHRYSOPOLIS ,  Chryfopo' 
lis ,  X^i'srsTTcA/; ,  /a  même  que  la 
ville  d'Amphipolis.  Une  Notice 
des  villes  qui  ont  changé  de  nom. 


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CH 

porte  AmphîpoUsy  nunc  Chryfo" 
polis. 

Il  faut  remarquer  que  la  reflem- 
blance  des  deux  noms  Chryfopolis 
&  Chriftopolis ,  eft  taufe  que  dans 
des  tems  d'ignorance  ,  des  copif- 
tes,  ont  pris  fou  vent  Tan  pour 
l'autre. 

CHRYSOUHOAS ,  a/y/or- 
koas  ,  Xpva-ifoaç  ,  (tf)  fleuve  du 
Péloponnèfe  f  félon  Paufanias. 
Ceux  de  Trcezene ,  à  qui  appar- 
tenoit  ce  fleuve ,  le  nommoient 
Chryforhoas  ,  parce  que  durant 
une  féchereffe  de  neuf  années  qu'il 
ne  tomba  pas  une  goutté  de  pluie , 
&  que  toutes  les  autres  fources  ta- 
rirent ,  il  fut  le  ieul  qui  conferva 
toujours  (es  eaux  ,  &  qui  coula  à 
l'ordinaire. 

CHRYSORHOAS,  ao/or- 
hoas  f  XovtropQctç^  (b)  fleuve  de 
Sytie ,  qui ,  félon  Ptolémée  ,  cou- 
loit  auprès  de  Damas  >  &  fes  in* 
terpretes  prétendent  que  fon  nom 
moderne  efl:  Adegelo.  Ortélius 
dit  que  c'eft  Bélon  qui  le  nomme 
ainfi.  Le  même  Bélon  dit  que  le 
Chryforhoas  eft  partagé  en  tant 
de  rameaux  p  que  chaque  maifoq 
&  chaque  jardin  de  la  villa  ont 
une  fontaine  qui  en  eil  dérivée. 
Cela  convient  avec  le  récit  des 
Anciens  ;  en  effet ,  on  lie  dans 
Strabon:»  Le  Chryforhoas ,  qui 
n  prend  fa  fource  près  de  la  ville 
s»  &  du  territoire  de  Datpas  ,  k 
n  confume  prefque  tout  entier  en 
»  ruiffeaux  ;  car ,  il  arrofe  des 
n  lieux  en  quantité ,  &  fort  pro- 
n  fonds.  «  Pline ,  parlant  de  la 


CH  137 

Décapole  »  dit  :  »  La  plupart  y 
n  mettent  Damas ,  que  le  fleuve 
»  Chryforhoas  rend  fertile  par 
»  les  arrofemens  auxquels  fl  eft 
i>  employé,  a  Etienne  de  By- 
zance  nomme  Bardine ,  un  fleuve 
de  Damas ,  &  on  croit  que  c'eft 
le  même  que  le  Farfar  de  Saint 
Jérôme. 

La  fource  du  Chryforhoas  , 
Chryforrhoa  fontes ,  pour  ufer  des 
termes  de  Philippe  de  la  Rue  ,  eft 
aiTez  mal  placée  dans  VAjfyria 
vêtus  divlfa  in  Syriam ,  &c.  de 
ce  Géographe ,  d'ailleurs  habile 
&  des  plus  exaâs  fur  la  Syrie  en 
général;  car,  il  met  cette  fource 
au  midi  de  la  ville  de  Damas ,  6c 
c'eft  prefque  tout  le  contraire, 
puifqu'une  bonne  partie  de  fon 
cours  eft  dirigée  ,  &  qu'il  fe  perd 
enfin  de  ce  même  côté  du  midi. 

Il  eft  parlé  dans  le  cinquième 
chapitre  du  quatrième  livre  des 
Rois ,  des  rivières  de  Damas,  fous 
les  noms  d*Abana  &  de  Pharphar; 
ce  qui  ne  peut  s'entendre  que  des 
deux  principales  branches  dn 
fleuve  nommé  •  par  les  Grecs 
Chryforhoas  ;  lequel  a  encore 
changé  de  nom  fous  les  Arabes 
qui  l'ont  appelle  Baradi.,  Ainfl , 
ceux  qui  ont  pris  le  Pharphar  de 
l'Écriture  pour  TOronte  ,  fe  font 
doublement  trompés. 

Ce  fleuve  eft  très-mal  repré- 
fenié  dans  la  Carte  de  la  Terre 
Sainte ,  par .  le  Père  Bonfrerius  ; 
mais  ,  il  l'eft  très  -  bien  dans  la 
Carte  du  même  païs ,  dans  Don 
Calmet.  C'eft  aujourd'hui  le  Ba- 


(a)  Pauf.  p.  14c.  [755.  Plin.  T.  I.  p.  262.  Rcg.  L,  IV^  e. 

O)  Pcolçm.  L,  V*  c,  15.  Strab.  p^g.ls*  K*  is« 


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138  CH 

radi  ,  feîon  M.  de  la  Roque. 

CHRYSORHOAS.  Chryfo- 
thoas  ,  X/>i^co^o£«ç .  (<z)  fleuve  qui 
fe  déchargeoit  dans  le  Bofphore 
de  Thrace. 

Denys  de  Byzance  ,  Géogra- 
phe cité  par  Pierre  Gilles,  fait 
]a  defcription  d*ui>  Phare  célèbre 
fitué  à  Tecnbouchure  de  ce  fleuve. 
Aofommet  de  la  colline,  dit-  il, 
au  bas  de  laquelle  coule  le  Chry- 
ibrhoas,  on  voit  la  tour  Timée 
d*une  hauteur  extraordinaire,  d'où 
Ton  découvre  une  grande  plage 
de  mer ,  &  que  l'on  a  bâtie  pour 
la  fûteté  de  ceux  qui  navigeoient , 
en  allumant  des.  feux  à  (on  fom- 
met  pour  les  guider  ;  ce  qui  étoit 
d^autant  plus  néceflaire  que  Tun  ÔC 
Fautre  bord  de  cette  mer  eft  fans 
ports ,  6c  que  les  ancres  ne  fçau- 
f oient  prendre  à  fon  fond  ;  mais , 
les  Barbares  de  la  côte  allumoient 
d'autres  feax  aux  endroits  les  plus 
élevés  des  bords  de  la  mer  pour 
tromper  les  mariniers ,  &  profiter 
de  leur  naufragé ,  lorfque  fe  gui- 
dam  par  ces  faux  fignaux  ,  ils  al-, 
loîent  fe  brifer  fur  la  côte.  A  pré- 
sent, pourfuit  Pierre  Gilles  ,  la 
four  efl  à  demi -ruinée ,  &  Ton  n'y 
met  plus  de  fanal. 

CHRYSORHOAS,  Cbryfo^ 
rJhàSf  X^vcropoo'<;,  ancien  nom  du 
Paétole.  Fbyei  Paôole. 

CHRYSORHOAS,  Chryfa- 
rhoas^  Xwropo^xç  ,  fleuve  de  la 
Cholchide ,  félon  Pline. 

Lç  nom  de  Chryforhoas  fignî- 
fie  que  le  fleuve  auquel  on  le  don- 
ne ,  a  des  paillettes  d'or  ,  que  fes 

(i»)  Mém.  de  TAcad.  des  Infcript.  & 
Bdl.  Lett.  T.  VI.  p.  584.  585» 
U)  Mém.  de  i'Acad.  des  Infcript.  & 


CH 

canx  entraînent  des  montagnes  ; 
oii  elles  paiïiçnt,  Si  qui  s'arrêtent 
ordinairement,  dans  le  fable,  oU 
les  pauvres  vont  l'amafler.  Tels 
font  TArriège ,  le  Rhin  ,  le  Tage  ^ 
&  quantité  d'autres  fleuves. 

CHRYSORRHOAS  ,  Cbry. 
forrboas  ,  XpvroffocK; ,  autrement 
CHRYSORHOAS.  Foyc^  Çhryfo* 
rhoas. 

CHRYSOSTOME ,  Cbryfof. 
tomus  ,  Xpviriçcfioç  ,  (^)  terme 
qui  veut  dire,  qui  a  une  bouche 
d'or.  C'eft  le  nom  que  Ton  donne 
à  S.  Jean  Chryfoftôme ,  qui  prê- 
choit  avec  tant  de  fuccè^  fous  l'env- 
pire  du  grand  Théodofe  &  d'Ar^ 
cadius  fon  fils. 

Ce  Saint  étoit  Syrien  de  nair- 
fance,  &C  il  vérifie  ce  que  Saii»t 
Jérôme  a  dit  de  cette  nation ,  que 
les  Syriens  fe  fervent  volontiers  de 
paraboles  &  de  Jîmilitudes,  Les 
compararfons  font  fort  fréquentes 
danscetOrateur.il  y  fait  entrer 
tout  ce  qui  fe  pafloit  de  fon  tem$ 
dans  la  cour  des  Empereurs ,  chez 
les  Confuls,  les  grands- Seigneurs, 
&  parmi  le  peuple.  Il  décrit  les 
cirques  »  les  théâtres ,  &  toutes 
Tortes  de  fpeâacles ,  la  forme  & 
les  ornemens  des  maifons  ,  la  ta* 
ble ,  les  feflins ,  &  cent  autres 
chofes  ,  fou  vent  avec  un  détail  des 
plus  finguliers. 

CHRYSOTHÉMI$,  Cbryfo-' 
tbemis  ,  XpuroUjutç ,  (c)  fille  d'A- 
gamemnon  &  de  Clyiemneftre , 
félon  les  Poètes.  Homère  en  pat* 
ticulier  en  fait  mention. 

CHTHONIA  ,  Chtbonia,  (d) 

Bell.  Lett.  T.  XIII.  p.  474.  &  friv, 
(O  Homer.  Iliad.  (.,  IX.  vw  1450 


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C  H 

X^cr/a  ,  fille  de  Phoronée ,  au  rap- 
port de  Paufanias.  Foye^  Cérès 
Chihonia. 

CHTHONIA,  Chthonia,  {a) 
X^ovlct.  ,  fille  de  Colontas  ,  fîut 
élevée  par  la  deeffe  Cérès.  Foye^ 
Cérès  Chthonia. 

CHTHONIES,  Chthonîa,{b) 
X'vtcf  ,  fèces  que  Ton  célébroic 
en  l'honneur  de  Cérès  Chthonia. 
Foye^  Cérès  Chthonia. 

CHTHONIUS,  Chthonîus, 
X'oYioq ,  (c)  l'un  de  ceux  à  qui  Ton 
donna  le  nom  de  Spartes  ,  &  qui 
fe  rendirent  fort  puiffans  fous  le 
règne  de  Cadmus. 

CHTHONIUS ,  Chthonius  , 
ÏQoK/oç  ,  (^)  Tun  des  Centaures, 
lequel  fut  tué  par  Neftor.Ce  Cen- 
taure portoit  pour  armes  une 
grande  fourche. 

CHTHONIUS,  Chthonius, 
Xôov/oç,  (e)furnom,  que  l'on  dit 
avoir  été  donné  à  Mercure  ,  par- 
ce qu'il  alloit  dans  les  enfers  ,  ou 
félon  d'autres,  parce  qu*il  alloit 
fur  terre  ;  ce  dernier  fens  eft  plus 
conforme  à  l'étymologie. 

CHTHONIUS,  Chthonius  , 
XicVo<;.  (J^  On  donnoit  aufti  ce 
nom  à  Jupiter ,  félon  D.  Bernard 
de  Montfaucon;  Jupiter  Chtho- 
nius étoit  la  même  chofe  que  Ju- 
piter Terreflre. 

CHUN,  Chuny  (g)  ville  de 


CH  139 

Syrie,  qui  appartenoit  au  roî 
Adarézer.  Elle  fut  prife  par  Da- 
vid ,  qui  en  enleva  une  grande 
quantité  d'airain.  D.  Calmet  croit 
que  c'eft  la  ville  de  Cunna ,  mar- 
quée dans  l'Itinéraire  d'Antonin  , 
nommée  peut-être  Ganna  dans 
Ptolémée. 

CHUS,  Chus,  X.^ç,(^)fils 
aîné  de  Chan^ ,  fut  père  de  JNem- 
rod.  Il  avoit  eu  plufieurs  autres 
enfans ,  tels  que  Saba ,  Héviia  , 
Sabatha  ,  Regma  &  Sabatacha. 

Nous  ne  connoifTons  dans  l'É- 
criture qu'un  feul  Chus  ;  mais  ,  on 
y  trouve  plufieurs  païs  qui  por- 
tent ce  nom  ,  foit  que  le  même 
homme  ait  demeuré  en  plufieurs 
endroits ,  foit  qu'il  y  ait  eu  quel- 
qu'autre  Chus ,  qui  ne  nous  eft 
point  connu.  La  Vulgate,  les 
Septante  ,  &  les  autres  Interprè- 
tes ,  tant  anciens  que  modernes  , 
traduifent  ordinairement  Chus  par 
l'Ethiopie.  Mais  >  il  y  a  plufieurs 
pafliages ,  ou  certainement  cette 
traduâion  ne  peut  avoir  lieu.  Il 
faut  donc  examiner  en  particulier 
les  diverfes  acceptions  du  nom  dç 
Chus. 

i.*^  Chus  m.arque.le  païs  qui 
ctoit  arrofé  par  l'Araxe.  Ceux , 
qui,  en  cette  occafion,ont  traduit 
Chus  par  l'Ethiopie,  ont  donné 
lieu  à  l'opinion  infoûtenable  qui 


(*)  Pauf-  pag.  15a* 

{h)  Pauf.  pag.  15a. 
^  (f)  Pauf.  p.   549. 

U)  Ovid,  Mctam.  L.  XII .  c.  1 1 . 

Ce)  Antiq.    expliq.  par  D.    Bern.  de 
jSiiontF.  T.  |[.  p.  ijj. 

(/)  Antiq.  cxpliq.  par  D.  Bern.de 
Moncf.  T.  I.  p.  53. 

to  ParaL  L.  I.  c.  iP.  v.  8. 

Q)  Genci.  c.  2.  v«  13.  c.  10.  v.  6.  ër 


feq.  Numcr.  ci»,  v.  i.  Reg.  L.  IV.  c. 
f9.  V.  9.  Parai.  L.  II.  c.  14.  v.  9.  Job. 
c.  »8.  V.  19.  Ifat.  c.  II.  V.  II.  c.  i8. 
V.  I.  Jerem.  c.  13.  v.  %^.  Ezecb.  c. 
%9*  V*  lo.^abac.  c.  |.  y.  7.  Sophon.  c. 
3.  V.  10.  Jofeph.  de  Antiq.  Judaîc^ 
p.  I  j.  Plin.  T.  I.  p.  34a.  Hetod.  L.  I, 
c.  aoi.  L.  IV.  c.  n.  Juft.  L.  I,  c.  P, 
Mém.  de  PAcad.  de»  Infcript.  &  Bell* 
Letc,  T.  Ili.  p.  123. 


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140  C  H 

a  entendu  le  Géhon  du  Nil.  Le 
Nil  eft  trop  éloigné  de  TEuphrate 
&  du  Tigre  ,  pour  qu'on  puifle 
dire  quil  fortoit  comme  eux  du 
Paradis  Terreftre.  Nous  croyons 
donc ,  dit  D.  Calmet ,  que  Chus 
Ctr  le  Géhon  n'eft  autre  chofe  que 
Fancien  païs  des  Scythes  fur  l'A- 
laxe.  Hérodote  dit  que  la  premiè- 
re demeure  de  ces  peuples  fut  fur 
TAraxe ,  &  qu'ils  paflerent  ce 
fleuve  étant  chafTés  par  les  Mafla- 
getes ,  6c  fe  retirèrent  dans  le  païs 
des  Ciœmériens.  Juftin  donne  1 A- 
raxe  pour  limites  des  Scythes  du 
c6té  du  midi.  Diodore  de  Sicile 
dit  que  les  Scythes ,  qui  font  vol- 
fins  de  rinde  ,  habitèrent  d'abord 
fur  FAraxe ,  &  que  les  Saces  & 
les  Maffagetes  font  diverfes  bran- 
ches des  Scythes.  Le  nom  de 
Cutbai  &  à^Cutha ,  d'où  Ton  a 
fait  Scytha  ^  ou  Scutha  ^  eft  le 
même  que  Chus.  Les  Chaldéens 
mettent  d'ordinaire  le  tau  ,  les 
Hébreux  emploient  le  Sçhiu  ;  ils 
difent ,  Chut  au  lieu  de  Chus,  Les 
Chutéens  ,  qui  vinrent  habiter  le 
pais  de  Samarîe ,  étoient  originai- 
res du  pais  dçs  Medes  fur  la  mçr 
Cafpienne.  Ils  étoient  donc  du 
païs  de  Chus ,  dont  nous  parlons. 
On  trouve  dans  les  environs  de  ce 
pais ,  des  vefiiges  fenûbles  du  nom 
de  Chus.  Les  Quitiens ,  les  Cé- 
théens  ou  Coetae; ,  les  Cy théens  , 
les  vilfes  de  Cotatb ,  Cétémane  , 
Gthanum  ,  Cyta,  Cytaîa,  Ce- 
thiseum  &  Cethena. 

2.^  Jofephe  dit  que  les  Éthio- 

^        piens  s'appellent  eux-mêmes^  du 

nom  de  Chus ,  &  que  toute  TA- 

fie  les  nomme  de  même.  Saint 

Jérôme  dit  auOi  que  les  Hébreux 


CH 

donnent  aux  Éthiopiens  le  nord 
de  Chus ,  &  les  Septante  ne  les 
nomment  pas  autrement.  Jérémie 
dit  que  comme  un  Chuféen  »  oa 
Éthiopien,  ne  peut  changer  la 
couleur  de  fa  peau ,  de  même  les 
Juifs  ne  peuvent  changer  de  coo» 
duite.  Dans  Ézéchiel  «  le  Seigneur 
menace  de  réduire  l'Egypte  enfo- 
Ktude ,  depuis  Mygdoi  jufqu'à 
Syéne  &  jufqu'aux  confins  de  Chus 
ou  de  l'Ethiopie.  Et  dans  Ifaïe ,;  il 
dit  qu'il  rappellera  fon  peuple,  qui 
eft  difperfé  dans  l'Aflyrie ,  dans 
l'Egypte ,  dans  Phétros  &  dans 
le^païs  de  Chus.  Tous  ces  carac- 
tères conviennent  à  l'Ethiopie 
proprement  dite  ,  qui  eft  au  midi 
de  1  Egypte. 

3.*  M.  Bochart  a  fort  bien 
montré  qu'il  y  avoit  une  terre  de 
Chus  dans  l'Arabie  Pétrée ,  fron- 
tière d'Egypte  ;  que  ce  païs  s'é- 
tendoit  principalement  fur  le  bord 
oriental  de  la  mçr  Rouge,  &  ail 
fond  >  à  la  pointe  de  cette  mer , 
tirant  vers  TÉgypte  &  la  Palefti- 
ne.  Voici  les  preuves  de  ce  fen- 
timent,  Séphora,  femme  de  Moïfef 
laquelle  étoit  de  Madian  ,  eft 
nommée  Chufite  par  Moïfe  lui- 
même.  Or  ,  Madian  habitoit  fur 
la  mer  Rouge  ,  à  l'orient  de  cette 
mer  dans  TArabie  ,  du  confeme* 
ment  de  Jofephe ,  de  Ptolémée  & 
de  Saint  Jérôme.  Chus  étoit  donc 
dans  le  même  païs.  Habacuc  met 
le  païs  de  Chus  ou  Chufan  com- 
me fynonyme  à  celui  de  Madian. 
J*ai  vu  ,  dit  -  il ,  les  tentes  de 
Chufan  mal  ajfurées.  fai  vu  Ui 
pavillons  de  Madian  ébranlés^  La 
Vulgate  dit  les  tentes  d*Éthiopic. 
Job  parle  du  topafe  de  Chus }  01  ^ 


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CH 

le  topafe, difent  Pline  &  Strabon, 
fie  fe  trouvoît  que  dahs  une  ifle 
de  la  mer  Rouge ,  voifine  du  païs 
doi^t  nous  parlons.  Ifaïe  &Sopho- 
aie  nous  décrivent  TÉgypte  com- 
me finiée  au  delà  des  fleuves  de 
Chus  ;  ce  qu*on  ne  peut  pas  en- 
tendre des  fieuves  d'Ethiopie.  Le 
roi  Tharaca  qui  vint  attaquer 
Sennachérib ,  ôi  Zara ,  qui  vint 
nne  autrefois  faire  irruption  dans 
le  pais  de  Juda ,  étoient  rois  de 
Chus ,  du  païs  dont  nous  venons 
de  parler ,  frontière  d*Égypte  6c 
^  de  Paleiline ,  comme  le  montrent 
toutes  les  circonflances  de  THifloi- 
re.  Ainii ,  conclut  D.  Calmet  » 
voilà  trois  païs  de  Chus  bien 
marqués  dans  l'Écriture,  tous 
confondus  par  les  Interprètes 
fous  le  nom  général  d'Éihiopie. 

Après  avoir  entendu  les  fenti- 
mens  de  ce  fçavant  Bénédiâin  , 
a  eft  jufte  d'entendre  ceux  de  M, 
Huet ,  dont  le  fyftême  efl  très- 
difFérent ,  &  qu'il  appuie  fur  des 
raifons ,  qui  ne  font  pas  moins 
plaufibles. 

Je  trouve ,  dit  ce  doâe  Évêque 
dans  fon  livre  de  la  fituation  du 
Paradis  teneftre ,  trois  provinces 
de  ce  nom  ,  l'Ethiopie ,  l'Arabie 
&  la  Sufiane.  Ces  deux  premières 
ont  partagé  le  nom  de  Chus  ,  qui 
eft  MU  mot  général» qui  comprend 
les  païs  qui  font  des  deux  côtés 
du  golfe  Arabiaue  ,  qu'on  appelle 
ordinairement  la  mer  Rouge.  M. 
Bochart ,  en  fon  Phaleg ,  a  pré- 
tendu que  l'Ethiopie  neft  nom- 
mée Chus  en  aucun  endroit  de 
l'Écriture.  Mais ,  je  crois ,  dit  le 
même  M.  Huet ,  avoir  prouvé  le 
contraire  dans  mes  observations 


C  H  14T 

fur    Origène.   Cette   région    de 
Chus  ou  d'Ethiopie  étoit    donc 
partagée  en  deux  lifières  »  le  long 
des  deux  côtés  du  âeuve  Arabi- 
que, (k  même  au  de- là  de  foa 
embouchure ,    nommée    aujour- 
d'hui Bab-el- Mande  ;  la  hfière 
oriemale,  qui  faifoit  une  partie 
de  la  grande  péninfule  de  l'Ara- 
bie; l'occidentale  qui  eft  entre  ce 
golfe  6l  le  Nil.  Homère ,  Héro- 
dote &  quelques  autres  «  ont  par- 
tagé de  cette  forte  les  Éthiopiens 
habitans  de  cette  contrée ,  &  voi- 
fmsd'Égypte,en  Orientaux  &  Oc- 
cidentaux. Et  Euftathe  nous  ap- 
prend que  les  Anciens  ont  ainfi 
entendu  les   paroles    d'Homère. 
De- là  vient  que  les  Homérites  , 
peuples  de  l'Arabie,  fitués  fur  la 
'  côte  méridionale  ,  font  appelles 
Éthiopiens  par  le  Géogrophe  Sté- 
phanus.  Et  Holfténius  ,  tout  ha- 
bile qu'il  étoit ,  faute  d'avoir  fça 
cela,  s'eft  mépris  bien  grofllère- 
ment ,    en  changeant  les  paroles 
deStéphanus,  6c  mettant  A'pa^ùr 
au  lieu  d*A'iG/o'jr»i',  félon  la  loua- 
ble coutume  des  Critiques  ,  d'al- 
térer dans  les  Ouvrages  des  An- 
ciens tout  ce  au'ils  n'entendent 
pas,  La  partie  de  la  province  de 
Chus,  qui  eft  du  côté  de  l'Arabie, 
ne  s'éloignoit  pas  beaucoup   du 

§olfe  &  de  la  mer  qui  eft  au  delà 
e  lembouchure  du  golfe  ,  & 
étoit  véritablement  une  lifière;  8c 
ce  feroit  témérairement  qu'on 
voudroit  l'étendre  jufqu'au  côté 
oriental  de  l'Arabie  &  à  l'embou- 
chure occidentale  de  l'Euphrate , 
Î)our  donner  quelque  couleur  à 
'opinion  qui  prend  cette  embou- 
chure pour  le  Géhon.  On  n'a  ja- 


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142  C  H 

mais  étendu  jufque-là  les  bornes 
de  la  Chus  Arabique ,  &  c'efl  une 
preuve  décifive  contre  cette  opi- 
nion ,  qu'on  a  eue  du  Géhon  ; 
comme  au  contraire ,  fi  je  prouve 
que  la  Sufiane  a  porté  ce  nom ,  & 
le  porte  encore  aujourd'hui ,  ce 
fera  une  preuve  invincible  que  le 
Géhon  eft  l'embouchure  orientale 
de  TEuphrate. 
Toutes  les  relations  des  Voya- 

feurs  nous  apprennent  que  la  Su- 
ane  s'appelle  aujourd'hui  Chu- 
zeflan  ;  nom  compofé  de  celui  de 
Chus  &  de  la  terminaifon  Perfi- 
que.  Benjamin  Navarrois  ,  dit  que 
la  grande  province  d'Élam  ,  dont 
Su(e  eft  la  capitale ,  &.  que  le  Ti- 
gre arrofe,  s'appelle  ainfi.  Cette 
province  d'Élam  eft  TÉlymaïde  , 
qui  s'étend  fur  la  côte  du  golfe 
Perfique  à  l'orient  de  l'embouchu- 
le  de  l'Euphrate.  Le  Géographe 
de  Nubie  &  d'autres  Arabes , 
l'appellent  Chureftan  ;  mais ,  la 
faute  eft  venue  apparemment  des 
Copiftes  ,  qui  n'ont  pas  distingué 
la  lettre  r  &  la  lettre  {  des  Ara- 
bes ,  qui  ne  différent  que  d'un 
point.  Les  habita ns  du  païs  l'ap- 
peilent  même  fimplement  Chus , 
fi  nous  en  croyons  Marius  Niger,  * 
Cette  même  région  s'appelle 
Chuta  dans  le  quatrième  livre 
des  Rois,  félon  la  diverfité  des 
dialeéles  ;  &  c'eft  de-là  en  partie , 
que  Salmanafar  tranfporta  une 
colonie  qui  alla  occuper  la  place 
des  habitans  de  Samarieôcdes  dix 
tribus  ,  qu'il  avoit  fait  paffer  ail- 
leurs. Cette  nouvelle  peuplade  , 
connue  dans  la  fuite  fous  le  nom 
de  Samaritains ,  retint  aufli  le 
nom  de  fon  origine,  &  fat  ap- 


CH 

pellée  les  Chatéens.  Scalîger; 
avec  tout  fon  grand  fçavoir,  s'eft 
bien  lourdement  troihpé  ,  quand 
,  il  a  dit  que  les  Samaritains  ont 
^  été  nommés  Cuthéens  d'une  ville 
de  la  Colchide  nommée  Cytaa ,' 
où  Salmanafar  tranfporta  les  dix 
tribus.  Les  Samaritains  furent 
nommés  Cuthéens  de  la  provin- 
ce de  Cutha  ,  d'où  ils  venoient  ; 
6c  les  dix  tribus  ne  furent  point 
tranfportées  dans  la  Colchide , 
mais  dans  l'Affyrie  ;  &  quand  el- 
les auroient  été  tranfportées  dans 
la  Colchide  ,  il  eft  ridicule  de 
penfer  que  les  Samaritains  au- 
roient  pris  leur  dénomination 
d'une  ville  d'où  ils  ne  vinrent 
point ,  &  où  ils  ne  demeurèrent 
point ,  mais  feulement  parce  que 
les  dix  tribus ,  donc  ils  prirent  la 
place ,  y  demeurèrent.  Je  ne  fçais 
pas ,  c'eft  toujours  M.  Huet  qui 
parle ,  où  Jofephe  a  trouvé  ce 
fleuve  Cuthus ,  qu'il  dit  être  l'ori- 
gine du  nom  Cutha,  qui  a  été 
donné  à  cette  province  de  Perfe. 
Le  mot  Cutha  ou  Cutk  ,  s'eft  for- 
mé de  celui  de  Chus ,  dont  les 
Chaldéens  changent  fouvent  la 
dernière  lettre  en  t  ou  th  ^  en  lui 
donnant  un  fon  plus  dur  ôc  moins 
fiflant,  comme  Dion  Ta  remarqué. 
Ainfi,  ils  ont  dit  thor  pourybr, 
Atyrie  pour  AJfyrie,  Il  ne  faut 
pas  croire  cependant  ce  que  quel- 
ques-uns ont  penfé ,  que  le  nom 
de  la  ville  de  Sufe,  qui  étoit  la 
capitale  de  ce  pais  ,  vienne  de 
Chus.  Elle  a  tiré  fon  nom  dés  lys, 
que  (on  terroir  porte  en  abondan- 
ce ;  &  le  lys  s'appelle  fufan  ,  en 
langue  Hébraïque.  Les  Grecs 
n'oac  pas  ignoré  cette  origine, 


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CH 

&  plufieurs  d'entr'euï  Font  mar- 
quée. Cette  ville  s*appelle  aujour- 
d'hui Schoufter. 

On  trouve  encore  beaucoup 
d'autre  traces  du  nom  de  Chus 
dans  la  Sufiane.  On  y  trouve  les 
CofTéens ,  voifms  des  Uxiens  , 
félon  la  pofitiou  de  Pline ,  de 
Ptolémée  &  d'Arfîen.  Schickard 
s'eft  abufé  quand  \\  a  cru  que  ces 
Ccfleens  avoient  donné  le  nom  à 
la  province  de  Chuzeftan.  Le  nom 
de  Chuzeftan  &  celui  de  Cofféens 
viennent  d'une  même  fource,  à 
fçavoir  de  Chus  ,  &  non  pas  l'un 
de  Tautre.  Le  nom  de  la  KifTie  & 
des  Kiflîens  en  vient  au  (fi  ,  c'étoit 
une  petite  province  de  la  SuHane, 
quia  donné  fon  nom  h  tous  les 
Sufiens.  Le  poëte  Efchyle  parle 
aufîâ  d  une  ville  de  ce  nom ,  fituée 
dans  le  même  pais  ;  de  ce  qui  eft 
remarquable  ,  11  la  diftingue  par 
fon  antiquité.  Il  appelle  au(fi  Kif- 
fienne  la  mère  de  Memnon ,  c'eft- 
à-dire  ,  l'A.urore. 

CHUS  ,  Chus  ,  ou  Choa  ,  en 
Grec ,  Xovç  ,  de  Xù.r ,  fundere  ^ 
répandre;  c'étoit  une  mefure  de 
liquides  chez  les  Grecs,  Les  Au- 
teurs ne  s'accordent  point  fur  la 
quantité  de  liquides ,  que  le  Chus 
contenoit  ;  les  uns  prétendent  qu'il 
tenoit  quatre  feptiers  ;  les  autres  , 
fo,ou  un  congé.  Fabri  dit  neuf 
livres  d'huile ,  dix  de  vin  ,  &  trei- 
ïe  livres  quatre  onces  de  miel, 
Pitifcus ,  dans  fon  Diâionnaite  , 
eftime  que  le  Chus  contient  fix 
feptiers  Attiques ,  ou  douze  co- 
tyles  ;  que  cette  mefure  pefoit , 
pleine  d'huile,fept  livres  &  demie, 


&  huit  livres  &  un  quart  d^eau  ou 
de  vin. 

En  général ,  rien  de  plus  obfcur 
que  ce  qui  regarde  les  mefures 
des  Grecs  &  des  Romains  ;  leur 
variété  en  divers  tems  &  en  dif- 
férens  païs  ,  leur  inftabiiité ,  les 
mêmes  dénominations  employées 
j^our  exprimer  des  chofes  différen- 
tes ,  ont  jette  fur  ce  fujet  »  la  pJus 
grande  confufion.  Faut- il  en  être 
lurpris?  Les  mêmes  inconvéniens 
ne  fe  rencontrent- ils  pas  dans  les 
poids  &  les  mefures  des  Moder- 
nes ?  Nous  n'avons  rien  à  repro- 
cher aux  Anciens;&  les  nations  Eu- 
ropéennes ont  un  be(bin  journalier 
d'avoir  perpétuellement  là-deflus 
un  tarifa  la  main  pour  faire  leur 
commerce  non  feulement  chez 
l'étranger  ,  mais  encore  dans  les 
diverfes  provinces  d'un  même 
royaume.  Cependant,  ceux  qui  dé- 
fireront  les  détails  ou  les  conjeâu- 
res  de  nos  littérateurs  fur  le  Chus 
&  fur  le  congé  ,  que  quelques-uns 
prétendent  être  une  même  mefure, 
pourront  confulter  les  Mémoires 
de  l'Académie  des  Infcripiions  6c 
Belles- Lettres ,  &  quantité  d'au- 
tres livres  fur  les  poids  &  les  me- 
fures antiques,  qui  ne  prouvent 
que  trop  l'incertitude  qui  règne  ici. 
Voyei  aufli  Congé  à  fon  article* 
.  CHUSAI ,  Chufaï,  Xr  «r; ,  {a) 
l'un  des  amis  de  David  ,  étoit  de 
la  ville  d'Arach.  Lorfque  ce  Prin- 
ce ,  obligé  de  fuir  devant  Abfalcn 
fon  fils  ,  arrivoit  au  haut  de  la 
montagne*  où  il  devoit  adorer  le 
Seigneur  *  Chufaï  vint  au-deviint 
de  lui  ayant  fes  habits  déchirés. 


(«)  Rcg.  L.  II.  c.  15.  ?.  31.  è-ff^*  c.  16*  V.  26.  ^/fj.  c.  17.  V.  1.  &fif* 


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ï44  C  H 

&  la  tête  couverte  de  potjflSère. 
£>avid  lui  dit  :  »  n  Si  vous  venez 
ft  avec  moi ,  vous  me  ferez  à  char- 
»  ge;  mais,  (î  vous  retournez  à 
»  la  ville  ,  &  n  vous  dites  à  Âb- 
n  falon  :  mon  Roi ,  je  viens  vous 
n  offrir  mes  fer v ices ,  je  vous  fer- 
ïi  virai  comme  j*ai  fervi  votre  pe- 
n  re ,  vous  pouvez  diffiper  lecon- 
M  feil  d*Achitophel.  Vous  avez 
n  avec  vous  les  grands-Prêtres 
»  Sadoc  ÔC  Abiathar,  auxquels 
n  vous  direz  tout  ce  que  vous 
»  ajirez  appris  du  palais.  Ils  ont 
)i  leurs  deux  fils  «  Achimaas  fils 
»  de  Sadoc  &  Jonathas  fils  d'A- 
9}  biî^thar  ;  vous  m'enverrez  dire 
»  par  eux  tout  ce  que  vous  fau- 
ff  rez.  ((  Chufaî  ,  ami  de  Da- 
vid ,  retourna  donc  à  Jérufalem  ^ 
&  Abfalon  y  entroit  en  même 
tems. 

Chufaî  vint  lui  faire  la  révéren- 
ce, &  lui  dit  :  Que  le  Roi  vive^ 
que  Dieu  le  conferve.  Abfalon  lui 
répondit  :  w  Eft-ce  donc-là  la  re- 
I)  connoifTançe  que  vous  ^vez 
»  pour  votre  ami  ?  D'où  rient 
w  que  vous  n*êtes  pas  allé  avec 
i>  lui  ?  Je  n*irai  pas  avec  David  , 
9>  dit  Chufaî  ;  car ,  je  ferai  à  celui 
}>  qui  a  été  élu  par  le  Seigneur  » 
9>  par  tout  le  peuple  »  &l  par 
i>  tout  Ifraël  »  &  je  demeurerai 
»  avec  lui*  Et  de  plus ,  oui  eA 
M  celui  que  je  viens  lervir  ?  N'eft- 
n  ce  pas  le  fils  du  Roi.  Je  vous 
99  obéirai  comme  j'ai  obéi  à  votre 
97  père.  «  Abfalon  dit  alors  à 
Achitophel:  w  Confultez  enfemble 
99  pour  voir  ce  que  nous  avons 
9>  à  faire.  «  Après  cela  ,  Achito- 
phel dit  à  Abfalon*:  j>  Je  vais 
ti  prendre  dix  mille  hommes  ,  8c 


Ctt 

S)  je  poufferai  DavidI  cette  mki 
99  je  tomberai  fur  lui,  &  je  Tac- 
19  câblerai  ,  pendant  au'il  eft 
n  épuifé  de  fatigue.  «  Cet  avis 
parut  bon  à  Abfalon ,  &  à  totis 
les  fiens. 

Mais  »  Abfalon  voulut  encore 
fçavoir  l'avis  de  Chufaî, &  l'ayant 
fait  venir,  il  lui  propofa  ce  qu'A* 
chitophel  avoit  dit.  Chufaî  ré- 
pondit :  >9  Le  confeil  qu'Achito- 
99  phel  a  donné,  n'eft  pas  boa 
99  pour  cette  fois.  Vous  fçavez 
99  que  votre  père  ,  &  tous  cenx 
99  qui  l'accompagnent ,  (ont  très- 
99  vaillans  ôc  outrés  de  douleur. 
n  David- efl  grand  capitaine,  il 
19  n'aura  garde  de  s^arrêter  dans 
99  la  campagne,  il  eu  peut-être  à 
99  préfent  caché  dans  quelque  ca- 
99  verne.  Si  vous  l'attaquez  ,  & 
99  que  vous  receviez  quelque 
99  échet  ,  on  dira  audi  tôt  que  le 
99  parti  d'Abfalon  a  été  battu  ;  & 
99  les  plus  courageux  de  ceux  qui 
99  font  attachés  à  vous ,  tombe- 
99  ront  dans  le  découragement. 
99  Mais ,  voici  ce  qui  me  paroit 
99  plus  avantageux.  Faites  affem^ 
99  bler  tout  Ilraët ,  depuis  Dao , 
99  jufqu'à  Betfabée;  après  cela, 
99  vous  irez  tomber  fur  votre  pc- 
99  re  ;  &.  vous  ruinerez  fon  parti, 
99  fans  qu'il  lui  refte  un  feul  bom* 
99  me  ;  que  s'il  s'eft  enfermé  dans 
99  quelque  ville  ,  tout  Ifraël  l'y 
99  adîégera,  &  tirera  avec  des 
99  cordes  toutes  les  pierres  de  fes 
99  murailles  dans  le  torrent ,  fans 
99  qu'il  en  reAe  une  feule,  a 

Cet  avis  de  Chufaî  fut  approu- 
vé d'Abfalon ,  &  de  tous  les  An- 
ciens du  peuple  \  &  Dieu  pemiit 
que  le  confeil  d' Achitophel  fut  ainfî 
renverfé 


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CH 

renverfé  pour  le  malheur  d'Abfa- 
Ion.  Chutai  fit  auffi-tôt  fçavoir  aux 
grands-Prêtres  Sadoc  &  Abiathar» 
ce  qui  s'étoit  pafliê  ,  &  la  nouvelle 
en  fut  promptemem  portée  ^  Da. 
vid ,  qui  fit  au  plus  vite  paiTer  H 
Jourdain  à  toute  fon  armée  y  de 
peur  qu'Abfalon  ,  changeant  de 
réfolation ,  ne  vint  fondre  fur  lui 
avec  fes  troupes.  Achitophel 
voyant  que  fon  confeil  n'avoit  pas 
éié  fuivi ,  &  prévoyant  la  perte 
d'Abfaloti  ,  s*en  retourna  dans  fa 
maifon  ,  &  fe  pendit  de  défefpoir. 
Nous  ne  fçavons  pas  quelle  nit  la 
fin  de  Ch^faî. 

CHUSAN  RASATHAIM  , 
Cbufan  Rafatha*im^  X^t/o-ccf a-«9«!^9 
(a)  roi  de  Syrie ,  ou  de  Méfopo- 
tamie  »  au  rapport  de  l'Écriture» 
Elle  l'appelle  en  effet  roi  de  Syrie 
dans  un  endroit ,  &  roi  de  Méfo- 
potamie  dans  un  autre.  Jofephe  le 
dit  roi  des  Afly  riens  ,&  l'appelle 
Chufarthe. 

Ce  Prince  fit  la  guerre  aux  If- 
raëlites,en  tua  plufieurs en  divers 
combats»  força  une  partie  de  leurs 
villes  p  reçue  les  autres  à  compo- 
fition  y  &  leur  impofa  à  tous  de 
très-grands  tributs.  Aiiifi  ,  ils  fe 
trouvèrent,  durant  huit  ans ,  acca- 
blés de  toutes  fortes  de  maui.  Au 
bout  de  ce  terme  ,  les  Ifraëlites 
crièrent  au  Seigneur  ;  &  il  leur 
fufdta  un  libérateur ,  en  là  perfbn- 
œ  d'Othoniel ,  fils  de  Cénez,  & 
gendre  de  Caleb.  Othoniel  mar- 
cha contre  Chufan  Rafathaim  ; 
&  le  Seigneur  le  lui  livra  entre  les 
mains. 

U)  Judîc.  c.  }.  V.  8*  &  /ff  f  Jofcpht  I 

4e  Amiq.  Jadaïc  p.  1 50  »  1 5 1 .  1 

a)  Reg.  L.  U.c.  18.V.  »i.  ér/'i*    I 

Tm.  XI. 


C  H  î4y 

CHUSARTHE ,  Chufanhus, 
Xoi/o-a/îGc;,  le  même  que  Chufair 
Rafathaïm.  Voye;^  Chufan  Raià- 
thaïm. 

CHVSlyCbufi.  Le  texte  Grec  du 
livre  de  Judith,  parlant  d'Écrébel, 
dit  qu'il  eft  près  de  Chufi ,  laquelle 
eft  fur  le  torrent  de  Mochmur.  Le 
texte  Latin ,  beaucoup  moins  am** 
pie  que  le  Grec ,  ne  parle  d'aucun 
de  ces  lieux  qui  étoient  dans  la 
Paleftine  >  aux  environs  de  Béthu-« 
lie. 

CHUSI,  Çbufi,  Xw^\,  {h) 
fiit  charcé  par  Joab  d'aller  annon- 
cer à  David  la  mort  de  fon  fils 
Abfalon.  Après  lut  avoir  fait  une 
profonde  révérence ,  il  fe  mit  à 
coiirir.  En  arrivant  devant  David, 
il  lui  dit  :  n  Mon  Seigneur  &  mon 
t)  Roi ,  je  vous  apporte  une  bon- 
19  ne  nouvelle  ;  car,  le  Seigneur  a 
n  jugé  aujourd'hui  en  votre  fa- 
»  veur ,  éc  vous  a  délivré  de  la 
n  main  de  tous  ceux  qui  s'étoient 
Il  foulevés  contre  vous,  a  Le  Roi 
demanda  à  Chufi  fi  fon  fils  Ab- 
falon étoit  en  vie  ?  Chufi  lui  ré- 
pondit: f>  Que  les  ennemis  de 
ti  mon  Roi ,  &  tous  ceux  qui  fe 
9f  foulevent  contre  lui  pour  le  per- 
n  dre  »  foient  traités  comme  il  l'a 
»  été.  a  Cette  nouvelle  caufa  une 
vive  douleur  à  David. 

CHUSI  ,  Chufi,  X.uû^  {ç) 
fut  père  de  Sémélias ,  donc  il  eft 

Îarlé  dans  le  prophète  Jérémie. 
1  y  en  a  qui  prétendent  que  ce 
Chufi  n'eft  pas  différent  de  celui 
qui  précède. 
CHUSI  ,  Chufi,  X,ycU  00 

fe\  Jerem.  c.  }6.  v.  14. 
W  Sopbon.  c  I»  V.  I. 


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•t^  CH 

£is  de  Godolias ,  fut  perd  du  pro- 

f>hete  Sophonie  »  comme  Tattefte 
ui-  même  ce  Prophète. 

CHUTÉENS  .  Chutai  ,  ou 
Chutheens,  Chuthai,  Xoi/6  '/o/, 
(<z), peuples  qui  habitèrent  d'abord 
au  defà  de  1  Euphrate.  Salmana- 
far  les  tranfporta  dans  la  Samarie, 
en  la  place  des  Ifraëlites  qui  y  de- 
meuroient  auparavant.  D.  Calmet 
croit  qu'ils  éioient  venus  du  pais 
de  Chus ,  ou  de  Chuta  fur  l'Ara- 
se, 6c  que  leurs  premières  demeu- 
re^ étoient  dans  les  villes  des  Me- 
des ,  fubjuguées  par  Salmanafar 
&  par  les  Rois  d'Aflyrie  Tes  pré- 
décefleurs;  &  que  Ton  tranfporta 
les  Ifraëlites  aux  mêmes  lieux  d*oii 
étoient  fortis  les  Chutéens. 

Ceux-ci  ne  furent  pas  les  feuls 
que  Ton  établit  alors  dans  les  villes 
de  Samatie.  L'Écriture  dit  qu'on 
avoit  encore  fait  venir  des  habi- 
tans  de  Babylone ,  d'Avath  ,  d'É- 
math  &  de  Sépharvaïm.  Lorfque 
ces  peuples  eurent  commencé  à 
demeurer  dans  la  Samarie  ,  corn- 
xn«  ils  ne  craignoient  point  le 
Seigneur,  il  envoya  contr'eux  des 
lions  qui  les  tuoient.  On  en  porta 
la  nouvelle  au  roi  des  Aflyriens  , 
&  on  lui  vint  dire  :  »  Les  peu-' 
»  pies  ,  que  vous  avez  transtérés 
n  &  établis  dans  les  villes  de  Sa- 
»  marie ,  ignorent  la  manière 
91  dont  le  Dieu  de  ce  païs  •  là 
n  veut  être  adoré;  &  ce  Dîeu  a 
»  envoyé  contr'eux  des  lions  qui 
9f  les  tuent ,  parce  qu'ils  ne  fça- 
91  vent  pas  la  manière  dont  l^ 
ji  Dieu  de  cette  terre  veut  être 


CH 

n  adoré.  «  Alors  ^  le  roi  des  Af- 
fyriens  leur  donna  cet  ordre ,'  6c 
leur  dit:  n  Envoyez  en  Samarie 
M  l'un  des  Prêtres  que  vous  avez 
»  emmenés  capti£i  ;  qu'il  y  re- 
n  tourne,  &  demeure  avec  ces 
M  peuples,  afin  qu'il  leur  appren-» 
n  ne  le  culte  qui  doit  être  renda 
n  au  Dieu  du  païs.  n  Aïnfi ,  l'un 
des  Prêtres,  qui  avoient  été  em- 
menés captif  de  la  province  de 
Samarie ,  y  étant  revenu,  demeu- 
ra à  Béthel ,  &  il  leur  apprenoit 
la  manière  dont  ils  dévoient  ado- 
rer le  Seigneur.  Chacun  de  ces 
peuples  enfuite  fe  forgea  fon  dieu, 
&  ils  les  mirent  dans  les  temples 
6c  dans  les  hauts  lieux ,  que  les 
Samaritains  avoient  bâtis  ;  chaque 
nation  mit  le  Tien  dans  la  ville  où 
elle  habitoit. 

Les  Babyloniens  firent  pour 
leur  dieu  Sochothbénoth;  les  Chu- 
theens, Nergel;  ceux  d'Émath^ 
Afima.  Ceux  de  Hava  firent  Né- 
bahâz  &  Tharthao;  mais  ,  ceux 
de  Sépharvaïm  brûloient  leurs  en- 
fans  en  l'honneur  d'Adramélech 
&  d'Anamélech  ,  dieux  des  Sé- 
pharvaïm. Tous  ces  peuples  ne 
JaifToient  pas  d'adorer  le  Seigneur. 
Ils  choififlbient  les  derniers  du 
peuple  pour  les  établir  Prêtres  de 
leurs  hauts  lieux  ;  &  ils  ofFroient 
leurs  facrificesdans  ces  temples.  Et 
quoiqu'ils adoraiTenc  le  Seigneur, 
ils  fervoient  en  même  tems  leurs 
dieux  ,  félon  la  coutume  des  na- 
tions, du  milieu  defquelles  ils 
avoient  été  uansférés  en  Sama- 
rie. 


(ai)  Reg.  L.  IV.  r.  17.  v.  6.  ér  feq.  c.  |  Jofeph.  de  Antîq.  Judaïc.  p.  345  ,  3$$. 
^8.  V.  S*).  Efiir.  L.  I,  c.  4.  V.  i.  &  fi^,  i&  fif. 


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CH 

Mais ,  dans  la  fuite  >  ils  aban* 
donnèrent  le  culte  des  Idoles ,  ôc 
s'attachèrent  uniquement  a  Tob- 
fervance  de .  la  loi  de  Moïfe , 
comme  l'obrervent  encore  aujour- 
d'hui les  Samaritains  defcendus 
des  Chutéens.  Lorfque  les  Juifs 
furent  de  retour  dç  la  captivité , 
les  Samaritains  leur  députèrent 
quelques-uns  d'entr'eux  ,  pour  les 
prier  de  trouver  bon  qu'ils  travail- 
lafTent  avec  eux  au  bâtiment  du 
temple ,  difant  que  depuis  le  rè- 
gne d'Aflaradon  ,  ils  avoient  tou- 
jours adoré  le  Seigneur.  Mais  , 
Zorobabel ,  Jofué  fils  de  Jofédech, 
&  les  Anciens  du  peuple  leur  ré- 
pondirent qu'ils  ne  pouvoient  leur 
accorder  ce  qu'ils  demandoient; 
le  roi  de  Perfe  n'ayant  permis 
qu  aux  feuls  Juifs  de  conflruire  un 
temple  au  Seigneur.  Il  paroît  par- 
là  que  jufqu'alors  les  Cbutéens 
n  avoient  point  de  temple  com- 
mun dans  leur  pais  ;  mais  que 
dans  chaque  ville  ils  adoroieiit 
Dieu ,  &  peut-être  les  idoles , 
dans  les  lieux  confacrés ,  ou  fur  les 
hauteurs  des  anciens  lû-aëlites.  En 
effet  y  Jofephe  nous  apprend  que 
ce  ne  fut  que  fous  Alexandre  le 
Grand  qu'ils  obtinrent  de  pouvoir 
bâtir  un  temple  cohimun  fur  le 
mont  Garizim. 

CHUZA ,  Cbu^ayX^vZ^  ,  (a) 
intendant  de  la  maifon  d'Hérode 
Agrippa  ,  &  mari  de  Jeanne , 
de  laqiielle  Saint  Luc  fait  men- 
tion. 

CHYNALADANUS ,  Chy- 
naladanus  ,    autrement    appelle 

(â)  Luc.  C.8.  V.  3. 

(A)  Antiq.    expl.    par    D.    Bern.    de 
Montf.  Tom.  II.  pag.  418.  &  fuiv. 
{c)  Anciqé   espl*    par  D.  Bern*   de 


CH  147 

Saracus.    yoyei    Saracus. 

CHYNDONAX  ,  Chyndo^ 
nax,  X  Yitwui,.  (^)  Jean  Guene* 
bauld  de  Dijon  ,  publia  Tan  i6it 
un  livre  intitulé ,  le  Réveil  dt 
Chyndonax^  Ce  fut  à  ToccaCon 
d'un  tombeau  de  ce  Chyndonax  ^ 
que  Ton  avoit  trouvé  à  cinq  cens 
pas  de  la  ville  de  Dijon  ,  en  uti 
lieu  nommé  PouHbt.  L'infcripùoti 
de  ce  tombeau  étoit  en  caraâèrei 
Grecs  ;  en  voici  le  fens  :  Dans  U 
facré  bocage  de  Mithras  ^  ce  tont" 
beau  couvre  le  corps  de  ChyndO'^ 
nax  j  Prince  des  Prêtres.  Retire^» 
vous  d*ici  impie»  Les  Lyjîens  ,  oU 
les  dieux  Mânes  regardent  fes  cen» 
dres» 

Dom  Bernard  de  Monifaucon 
foupçonne   que  cette   Infcription 

Îourroit  bien  avoir  été  forgée  par 
ean  Guenebauld.  Ce  qu'il  y  a 
de  furprenant ,  ajoûte*t-il ,  c'eft 
que  les  plus  habiles  ,  comme  Ca- 
faubon  &  Sau&aife,  la  crurent 
véritable  >  en  même  tems  que  plu« 
fieurs  autres  bien  moins  fçavans  « 
mais  qui  peut  être  connoifToient 
mieux  Guenebauld  qu'eux  ^  la  rer 
gardèrent  comme  fabriquée  par 
celui  même  qui  la  publia,  A  la 
faveur  de  deux  aufli  grands  hom- 
mes que  Cafaubon  &  Saumaife  « 
rinfcription  paffa  enfin ,  &  beau- 
coup d'habiles  gens  s'en  fervirent 
fans  aucun  fcrupule^ 

CHYPRE.  Voyei  Cypre*       ^ 
CHYTRES ,  Chytm ,  XJr^o'/ , 
(c)  efpèce  de  marmite  en  ufage 
chez  les  Grecs. 

CHYTRES  ,    Chytra ,   (d) 

Montf.  Tom.  III.  p.  121. 

(d)  Antiq.  cxpl.   par   D.   Bein«   dt 
Montf,  T,  II.  p.  ai). 

Kij 


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T48  C  H 

fête  des  Athéniens ,  renouvellée 
tous  les  ans  le  13  du  mois  An- 
theftéfion ,  le  troifième  des  An- 
theftéries.  La  folemnité  confiftoit 
à  faire  cuire,dans  une  marmite,des 
femènces  de  toute  efpèce  en  l'hon- 
neur de  Bacchus  &  de  Mercure 
Terreftre,  qui  conduifoit  les  âmes 
aux  enfers.  Selon  Athénée ,  on 
repréfentoit  ce  jour- là  des  com- 
médies  &  des  tragédies.  Ce  qui 
donna  lieu  à  rétabliiTement  de 
cette  fête  ,  c'eft  qu'après  le  Délu- 
ge de  Deucalion  ,  ceux  qui  fur- 
vécurent ,  offrirent  à  Mercure 
Terreftre  toutes  fortes  de  graines 
&  defetnences,  pour  le  rendre 
propice  aux  Mânes  de  ceux  qui 
avoienc  été  fubmergés  dans  les 
eaux.  Il  n'étoit  permis  à  perfonne 
de  toucher  à  cette  offrande,  & 
«ucun  Prêtre  n'y  goûtoit. 

CHYTRINDA  ,  Chytrînda  , 
jeux  d'enfans ,  daiis  lequel  il  y  en 
a  un  affis  à  terre  au  milieu  des  au- 
tres qui  courent  au  tour  ,  le  pouf- 
fent ,  lui  font  des  niches ,  jufqu'à 
ce  qu'il  en  ait  attrapé  un  qui  prend 
fa  place. 

CHYTROPODES,  Chytro- 
podes  s  Xvrp'.'TieSfç  «  (a)  terme  , 
qui  fe  lit  dans  le  Lévitique.  Dieu 
commande  de  brifer  les  Chytro- 
podes  »  dans  lefquelles  il  feroit 
tombé  quelque  chofe  d'impur.  Le 
terme  Hébreu  Kiraïm  ,  que  Saint 
Jérôme  a  rendu  par  des  marmites, 
eil  entendu  par  d'autres»  d'un 
foyer ,  ou  d'un  fourneau  ,  ou  d'u- 
ne cuvette ,  ou  d'un  bailîn  à  la- 


c  H 

ver  le;s  pieds.  Kiraïm  eft  au  duël ,' 
&  (îgnine  un  vaifleau  compofé  de 
deux  pièces, 

CIANIENS  ,  Ciani  ^  nom, 
que  Tite-Live  donne  aux  habi- 
tans-  de  Cium  ou  Cius.  Voye^ 
dus, 

CIBDÉLl ,  Cibdeli ,  nom  d'un 
lieu  dont  parle  Vitruve ,  &  qui 
n'étoit  pas  loindeTrœzene.  Pref- 
que  tous^  les  habitans  de  ce  lieu 
avoient  les  pieds  gâtésl,  ce  qu'il 
regarde  comme  un  effet  de  la 
mauvaife  eau  qu'ils  bu  voient. 
Pline  parle  aufti  de  ce  mal  aux 
pieds ,  &  dit  que  les  habitans  de 
Troëzene  y  étoient  fu  jets,mais  fans 
parler  de  Cibdéli. 

CIBORIUM  ,  Ciborîum,  {h) 
nom  d'une  coupe.  Athénée  nous 
en  a  feulement  confervé  le  nom. 
Ce  n'eft  pas  là  la  feule  chofe, dont 
les  Anciens  ne  nous  aient  con- 
fervé que  le  nom.  Il  y  en  a  mal* 
henreufement  bien  d'autres. 

CIBS  AIM  ,  Cibfaïm ,  (c)  ville 
de  Paleftine  dans  la  tribu  d'É- 
phraïm  ;  elle  fut  deftinée  pour  être 
une  ville  de  refuge,  &  fut  affi- 
gnée  pour  demeure  aux  Lévites 
de  la  tamille  de  Caath. 

ClBYSTRES,Ci^yy?rtf .  Voyti 
Cybiflres. 

CICÉREIUS  [C],  C.  Ci^ 
cereius ,  (d)  qui  avoit  été  fecré- 
taire  de  ocipion  l'Africain.  L'ai 
de  Rome  578  ,  il  fe  préfcnta  pour 
briguer  la  Préture,  &  il  arrîva  que 
lé  fils  de  Scipion  fe  préfenta  aufE 
pour  briguer  cette  charge.  Et  on 


an 


S* 


ta)  Lcvit.  c.  II.  V.  jj.  I     W)  Tic.  L.  XLI.  fuppl.  4.  c.  %.  c.  a8. 

ih)  Antîq.   cxpl.    par   D,  Bcrn.  deJL.  XLII.  ct,  ai ,  16.  L.  XLV.  c.  17. 

Moncf.  Tom.  III.  pag.  149,  j  Ciév.  Hiit  Kom.  Tom.  IV.  pag.  493  > 

ic)  /ofu.c«ai,v.  aift  1^94 


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CH 

s'attendoît  qu'au  moins  51  empor- 
teroit  la  dernière  place  ,  toutes  les 
autres  étant  déjà  remplies.  Mais, 
il  parut  avoir  tellement  dégénéré 
des  venus  de  fon  père  ,  que  tou- 
tes les  centuries  lui  auroient  pré- 
féré C.  Cicéreius ,  fi  ce  citoyen , 
craignant  de  fe  rendre  odieux^ 
n*eût  corrigé  par  fa  modeflie,  ou 
le  crime  de  la  fortune ,  ou  Terreur 
de  Taflemblée.  Il  ne  put  prendre 
fur  lui  de  l'emporter  fur  le  fils  de 
fon  patron  ;  &  quittant  fans  héû- 
ter  la  robe  de  Candidat ,  il  devint 
de  rivai  afTuré  de  vaincre ,  client 
plein  de  reconnoiirance,&  partifan 
2élé  de  Scipion.  Ainfi ,  ce  fils  de 
l'Africain  obtint,  par  la  retenue  de 
C  Cicéreius  y  une  dignité  que  le 
peuple  lui  avoit  refufee  ,  mais  qui 
lui  fit  moins  d'honneur  qu'à  celui 
qui  la  lui  cédoit. 

La  modeftie  y  que  C.  Cicéreius 
montra  en  cette  occafion ,  ne  rac- 
compagna pas  toujours  dans  tou- 
tes les  ai^tres  circonClances  de  fa 
vie,  comme  on  va  le  voir  bientôt. 
Dès  l'aniiée  fui  vante  ,  il  fut  nom- 
mé à  la  Préture.  Ayant  été  en- 
voyé contre  les  Corfes,  il  les  cona- 
battit  en  bataille  rangée  >  leur  tua 
fept  mille  hommes ,  oc  en  prit  plus 
de  dix-fept  cens.  Avant  cette  ac- 
tion ,  il  promit  un  temple  à  Junon 
Monéta.  Cette  défaite  obligea  les 
Corfes  à  demander  la  paix ,  qui 
leur  fut  accordée  à  condition  de 
fournir  deux  cens  mille  livres  de 
ciré.  C.  Cicéreius ,  ayant  foumis 
cette  province ,  pafla  dans  la  Sar- 
daigne.  Le  tems  de  fa  Préture  eiç- 
piré ,  il  retourna  à  Rome  »  &  le 


C  H  749 

Sénat  lui  donna  audience  dans  le 
temple  de  Bellone.  Apres  qu'il 
eut  rendu  compte  de  fe$  avions , 
ÔL  demandé  inutilement  lô  triom- 
phe y  il  fe  le  décerna  lui-même  de 
fon  autorité  privée ,  &  en  fit  la 
cérémonie  fur  le  mont  Albin  , 
i^irant  un  ufage  qui  s'étoit  infen- 
fiblement  établi  »  au  mépris  de 
l'autorité  publique. 

Ce  fut  un  des  trois  commifla!- 
res  que  l'on  choifit  ,  peu  de  tems 
après ,  pour  les  envoyer  en  Illy- 
rie  vers  le  roi  Gentius.  Ls  avoient 
ordre  de  repréfenter  à  ce  Prince 
les  hoflilités  &  les  violences  , 
dont  s'étoient  plaints  dans  le  Sé- 
nat des  peuples  alliés  des  Ro- 
mains >  6c  d'en  demander  fatis- 
faâion.  C.  Cicéreius  fut  encore 
envoyé  environ  cinq  ans  après  , 
en  qualité  de  commiflaire ,  dans 
la  même  province ,  &  on  lui  don- 
na quatre  Collègues.  L'objet  de 
cette  commifilion  étoit  de  régler 
les  affaires  de  l'Illyrie ,  avec  les 
deux  généraux  Romains  ,  qui 
étoient  alors  datis  ce  païs. 

CICÉRON  ,  Cicero  ,  Ki^^pcov  » 
(a)  nom  devenu  célèbre ,  depuis 
qu'il  a  été  porté  par  le  père  de 
l'éloquence  Latine.  Celui, qui  fe 
nomma  le  premier  Cicéron ,  pa- 
roit  avoir  été  un  perfonnage  con* 
fidérable,au  rapport  de  Pluta.rque* 
C'eft  pourquoi ,  ajoute  cet  Au- 
teur^  fes  defcendans  ne  rejetterejit 
pas  ce  furnom,  &  le  portèrent 
avec  plaifir,  quoique  la  plupart 
s'en  moquaflent ,  parce  que  ci- 
c€r  en  Latin  fignifie  un  pois  chi«. 
che ,   &  que  celui  qui  le  porta 


W  Plut.  T.  I.  p,  861.  Plin.  T,  I.  p.  97 ,  98. 


Kiii 


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1 50  C  H 

le  premier,  avoit  au  bout  du  nez 
une  petite  excreHence  de  chair 
comme  une  verrue  ,  qui  reflem- 
bloit  à  un  pois  ;  ce  qui  lui  fit  don- 
ner ce  fur  nom. 

Selon  Pline ,  ce  furnom  avoit 
line  autre  origine.  Il  prétend  que 
comme  Tagriculture  étoit  en  hon- 
neur anciennement  à  Rome  & 
dans  tout  le  Latium ,  ôc  que  la 
plupart  cultivoient  la  lerre  de 
leurs  propres  mains ,  le  norn  de 
Cicéron ,  auffi  bien  que  celui  de 
Fabius  &  de  Lentulus  »  venoient 
des  légumes  ,  que  quelqu'un  de 

'  ces  familles  aimoit  ou  excelloit  à 
cultiver ,  pois  ,  fèves  ,  lentilles. 
Quoi  qu'il  en  foit  ,  lorfque  Cicé- 
ron fe  mit  fur  la  route  des  hon- 
neurs, fes  amis  lui  confeillerent 
de  quitter  ce  furnom ,  qui  leur 
paroifToit  avoir  quelque  chofe  dV 
gnoble.  Mais,  il  leur  répondit  avec 
xette  confiance  qu'infpirent  le  mé- 
rite &  ta  jeunefle ,  qu'il  préten- 
doit  rendre  ce  furnom  de  Cicéron, 
plu6  noble  que  ceux  de  Catulus 
&  de  Scaurus.  La  comparaifon 
étoit  iufte  quant  aux  furnomscon- 
fidérés  en  eux-  mêmes  ;  car  ,  Ca- 
tulus fignifie  petit  chien ,  &  Seau-, 
rus,  pied- bot. 

CICÉRON  [M.TuLLius], 
M  TulUus  Ciccro  ,  M.  To^mj* 
KDLir^m  .  (a)  ayeul   de   Cicéron 

'  Torateur.  Il  demeuroit  ordinaire- 
ment dans  une  petite  ville  du  pais 
des  Volfques,  nommée  Arpine. 
Quoique  cç  fût  le  lieu  de  fa  naif- 
fance  &  de  fon  origine ,  il  n'en 
étoit  pas  pour  cela  moins  citoyen 


CH 

Romi^în ,  parce  qu'on  avoît  de^ 
puis  Ibng-tems  incorpora  peu  à 
peu  la  plupart  des  peuples  d'Ita- 
lie dans -celui  de  Rome ,  en  forte 
qu'ils  jouifibient  des  mêmes  droits 
que  les  Romains  naturels  ;  &  c'eft 
pourquoi  chacun  de  ces  peuples 
étoit  agrégé  à  quelqu'une  des 
trente-cinq  tribus,  dans  lefquelles 
celui  de  Rome  étoit  divifé.  Celle 
où  les  habitans  d* Arpine  étoient 
afibciés ,  s'appelloit  la  tribu  Cor- 
nélia. 

M.  Tullius  Cicéron  étoit  donc 
de  cette  tribu  >  &  en  outre  de 
l'ordre  des  chevaliers.  Il  fe  (igna- 
la  dans  Arpine  ,  en  réfiftant  à  M. 
Cratidius ,  frère  de  fa  femme  , 
qui  y  voulut  abolir  toutes  les  det- 
tes pour  fe  rendre  agréable  au 
peuple.  Le  bruit  en  étant  vena 
jufqu'àRome^  Marcus  Scaurus , 
Conful  de  cette  année-là ,  &  le 
plus  grand  peribnnage  de  la  répu- 
blique ,  dit  hautement  qu'il  auroit 
bien  été  à  fouhaiter  qu'un  homme 
de  ce  courage  &  de  cette  probité 
eût  fait  éclater  ces  qualités  dans 
la  capitale  de  l'Empire.  Ce  fut  lui 
auffi  qui  dit  ce  bon  mot ,  que  Ci- 
céron rapporte  dans  le  fécond  li- 
vre de  l'Orateur  :  Nos  gens  font 
fcmblables  aux  Syriens  quon  ex* 
pofe  en  vente  ;  celui  qui  fçait  le 
plus  de  Grec  ^  efi  le  plus  mé' 
cbant, 

CICÉRON  [M.TuLLitfs], 
Ai.  Tullius  Cictro,  (b)  M.  ToiÎM/eç 
K  irLffouf  ,  fils  du  précédent ,  avoit 
époufé  Helvia ,  de  la  famille  des 
Helviens:^l{ui  étoit  une   famille 


(fi  Clcer.  de  Legib.  L.  IIL  c.  |5. 


{h)  Plut,  Tom.  I.  pag.  8tfi.  Dlo,  Caf* 


I     (*)  P 


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CH 

I  noble ,  &  en  eut  Cicéron ,  le  pe- 
j  re  de  1  éloquence  Xatine.  Il  paffa 
la  plus  grande  partie  du  tems  à 
la  campagne .;  c'eftà^dire ,  à  Ar-  • 
pine,  oïl  il  ^occupoit  à  l'étude 
oa  à  fei  affaires  domefliques,' 
parce  qu'il  avoic  peu  de  famé. 

Un  tribun  emporté ,  dans  Dion 
Cadius ,  reproche  à  Cicéron  »  que 
fon  père  étoit  foulon»,  &  avoir 
cultivé  toute  fa  vie  des  vignes  & 
des  oliviers  ;  mais ,  outre  que  cet 
Hiftorien  eft  manifeftement  fuf- 
peft  lur  Cicéron,  du  confentement 
de  tous  les  Critiques ,  &  que  Sal- 
lofte ,  qui  paYoît  n'avoir  rien  ou- 
blié ,  dans  la  déclamation  fanglan- 
te  qui  nous  refte  ,  de  tout  ce  qui 
fé  pouvoir  dire  contrelui ,  ne  dit 
rien  de  femblable,  cela  ne  s'ac- 
corde pas  avec  ce  qui  a  été  rap- 
porté de  fon  ayeul  dans  l'article 
précédent.  Il  étoit  facile  à  un  ora- 
teur ennemi ,  comme  le  tribun , 
dont  parle  Dion  Caflius ,  vingt- 
cinq  ans  après  la  mort  d'un  habi- 
tant de  la  campagne  peu  connu  à 
Rome  ,  tel  qtie  fe  père  de  Cicé- 
ron, de  repréfenter  fes  occupa- 
tions œconomiquès  Sç  rufliques  , 
comme  s'il  en  eût  fait  métier  pen- 
dant fa  vie. 

CICÉRON  [UTuLLius], 

L  Tullius  Cicero,'  A.  Totlmoç 
KuLipatr ,  '(a)  frère  de  celui  qui 
précède,  &  par  conféquei^t  on- 
cle.de  Cicéron  l'orateun  II  vécut 
familièrement  avec  l'orateur  Marc- 

.  ^)  Cicer.  de  Orat;  L.  H.  c.  s. 

(*)  Plut.  Tom.  I.  pag.  877.  ër/ef. 
Appian.  p.  600.  Dio.  CaiT.  p.  %i'i,Cx(. 
àt  Bell.  Gall.  L.  V.  p.  178.  ér  feq,  L. 
VI.  pag.  455.  ér  fii»  Crév,  Hift,  Roou 


CH  lyr 

Antoine  »  ayeul  du  Triumvir  de 
même  nom. 

CICÉRON  [M.  Tullius], 
M.  Tullius  Cicero  9  M.  ToJm/o; 
KtufiOùt ,  célèbre  orateur  Romain. 
Foyei  ToUius. 

CICÉRON  [  Q.  Tullius  ] , 
Q.  Tullius  Ciccro  ,  K  oUt  o(  «  Toi/a- 
>i9;  KtK§pm%  (b)  frère  du  précé* 
dent ,  après  avohr  été  Préteur  l'an 
de  Rome  691 ,  eut  ,au  fortir  da 
charge  ,  le  département  de  l'Afie  , 
&  il  y  demeura  trois  ans.  Une  (i 
longue  adminiftration  n'offre  rien 
d^e  mémorable  ,  &  les  plus  beaux  . 
monumens  qui  nous  en  reftent» 
font  les  lettres  que  fon  frère  lui 
écrivit  pendant  ce  tems  ;  particu- 
lièrement la  première ,  qui  eft  con- 
nue de  tout  le  monde ,  &  qui 
renferme  les  plus  fages  maximes , 
&  les  avis  les  plus  excellens,  pour 
tous. ceux  qui  occupent  de  gran- 
des places.  Q,  Tullius  Cicéron  , 
étoit  un  homme  bien  différent  de 
fon  frère  ,  impétueux ,  fantafque» 
ai(é  à  s'irriter.  Il  eft  vrai  qu'il  re- 
venoit  aifémenc  »  ce  qui  marque 
au  fond ,  un  bon  caraâère..  Mais  « 
fes  emportemens  écoient  fort  à 
charge  à  ceux  qui  dévoient  lui 
obéir  ;  &  fes  caprices ,  fes  boutades 
exercèrent  fouvent  la  patience  » 
foit  de  fon  frère ,  foit  d'Atticus  , 
dont  il  avoit  époufé  la  fœur.  Q- 
céron  lui  propofe  plus  d'une  fois 
l'exemple  de  C.  Oûavius ,  père 
d'Augufte, 

Q.  Tullius  Cicéron  écoit  enco-. 

Tom.  VI.  pag.  Ç44.  ér  fuiv,  Tom.  Vif. 
pag.  158.  cr  friv.  Tom.  VIII.  pag.  i99« 
&  fuiv,  Mém.  deî  TAcad.  des  Infcripu 
&  Bell.  Lett.  Tom.  I.  p.  298.  ér  fuiu^ 
T.,YU.p.i5},i54. 

K  îv 


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T52  CH 

reen  Âfie,  lorfque  Ton  frère  fat 
exilé  ;  mais ,  il  ne  tarda  pas  à  re- 
venir à  Romei  qu'il  trouva  agitée 
de  grands  débats.  Il  y  arriva  dans 
un  équipage  convenable  à  fa  dou*- 
kur,  &  il  fut  reçu  par  un  très- 
grand  nombre  des  meilleurs  Ci- 
toyens ,  qui  allèrent  au-devant  de 
lui  9  mêlatit  leurs  larmes  aux  fien- 
nes.  Il  vint  fortifier  les  follicitatiotit 
&  les  prières  du  gendre  de  Cicé* 
ron ,  Pifon  Frugi ,  jeune  homme 
d'un  très-grand  mérite  ,  &  qui  fe 
montra  ihviolablement  attaché  à 
fon  beau-pere ,  mais  qui  ne  put 
recueillir  le  fruic  de  fa  vertu  ^ 
étant  mort  un  peu  avant  que  de  le 
voir  de  retour. 

Dans  la  fuite ,  Q.  TuUius  Cicé- 
ron  fut  lieutenant  de  Céfar  dans 
les  Gaules;  &  ayant  établi  fes 
quartiers  d*hiver  au  pais  des  Ner- 
viens^  il  y  fut  attaqué  par  Ambto- 
rix  y  qui  »  après  avoir  défait  tota- 
lement Titurius  Sabinus  ,  étoit 
venu  foulever  les  Nerviens.Ceux- 
ci  marchèrent  contre  Q.  Tullius 
Cicéron  avec  tant  de  promptitude 
qu'ils  arrivèrent  avant  même  qu'il 
fût  informé  du  défaftre  de  Titurius 
Sabinus.  Son  premier  foin  avoit 
été  d'écrire  à  Céfar,  pour  Tinf- 
truire  du  péril  où  il  fe  trouvoît* 
Mais ,  comme  tous  les  chemins 
étoient  gardés  par  lés  ennemis, 
les  différens  courriers  qu'il  dépê- 
cha^ furent  arrêtés.  Il  fut  donc 
réduit  pendant  un  tems  aux  feuler 
reflburces  que  lui  fourniflbient  fon 
courage  &  fon  habileté  dans  la 
guerre.  Il  mît  en  ufage  tous  les 
moyetis  connus  alors  pour  la  dé- 
fenfe  des  places.  Ses  foldats  em- 
ploy oient  à  confirnire  des  tours» 


CH 

à  fehifier  leurs  lignes  ,  à  garante 
de  parapets  leurs  remparts  ,  tous 
les  intervalles  où*  ils  n'éto^m 
pas  obligés  de  combattre.  Leur 
Ardeur  à  Touvra^e  étoit  incroya- 
ble. On  ne  cefloit  de  travailler 
ni  jour  ni  nuit.  Les  malades  mê- 
mes &  les  bleflfés  y  mettoient  la 
main.  Q.  Tullius  Cicéron ,  quoi- 
que d^une  trèf-foible  famé ,  ani- 
moit  tout  ,  préfidoit  à  tout  ;  6c 
il  falloit  que  les  foldats  1«  forçaf- 
fent  de  prendre  de  tenfs  en  tems 
quelques  momens  de  repos. 

Ambiorix ,  après  avdir  plufieurs 
fois  tenté  inutilement  d'emporter 
par  la  force  le  camp  des  Romains, 
voulut  eflayer  de  la  rufe  ,  qui  lui 
avoit  fi  bien  réufli  auprès  de  Ti- 
turius Sabinus.  Mais,  Q.  Tul- 
lius Cicéron  ne  fut  point  la  dupe 
de  tous  k%  artificieux  difcours ,  & 
il  n'écoiHa  aucune  propofition. 
Les  foldats  Romains  étoient  lo- 
gés dans  le  camp  fous  des  huttes 
couvertes  de  chaume.  C'eft  ce 
qui  fit  naître  aux  aflaillans  la  peit* 
fée  d'y  mettre  le  feu.  Le  feptième 
jour  de  i'actaque  ,  un  grand  vent 
s'étant  levé ,  les  Nerviens  tancè- 
rent dans  le  camp  Romain  des 
balles  d'aq^lle  enflammées ,  6c  des 
javelots  brûlans.  Le  feu  aidé  par 
le  vent  fe  répandit  en  un  inftant 
dans  toute  l'étendue  de  la  place; 
&  les  ennemis  encouragés  par 
Tefpérance  d'achever  prompte- 
meht  la  viâoire,  firent  avancer 
leurs  tours  &  leurs  tortues  ,  &  fe 
Mifpoferent  à  efcalader  le  rempart* 
La  confiance  des  foldats  Romains 
fut  telle^que  pendant  qu'ils  étoient 
environnés  de  flammes ,  &  acca- 
blés d'une  grêle  de  traits ,  pea^ 


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GH 

Jant  qu'ils  voyoient  brûler  leurs 
cabanes  ^  leurs  bagages  ,  &  toute 
leur  petite  fortune,  non  feulement 
aucun  ne  quitta  fon  pofte  pour 
aller  fauver  quelque  chofe  de  ce 
qui  lui  appartenoit  »  mais  il  ne  s'en 
trouva  que  très-peu  <}ui  regardaf. 
fent  feulement  en  arrière.  Tous 
étoient  occupés  du  foin  de  com- 
battre &  de  reponiler  Tennemû 
Une  il  haute  valeur  fut  récom- 
penfée  par  le  fuccès  ;  &  fi  ce  jour 
iut  le  plus  difficile  &  le  plus  dur 
pour  les~  Romains  9  ce  fut  auffi  ce- 
loi  où  les  ennemis  perdirent  beau- 
coup de  monde. 

Cependant,  îa  défenfe  devenoit 
de  jour  en  jour  plus  périlleufe 
pour  les  Romains ,    à  caufe  du 

g  and  nonibre  de  leurs  bleffés;  & 
Ifar  n'étoit  point  averti  ;  aucun 
des  courriers  de  Q.  TuUius  Ciçé- 
ron  n'avoir  pu  pafler.  Enfin ,  un 
efclave  Gaulois ,  que  l'on  enga- 
gea 4  en  lui  promettant  la  liberté , 
a  fe  charger  d'une  lettre  d'avis , 
échappa  aux  Nerviens  à  la  faveur 
de  la  conformité  de  l'habillement 
&  du  langage ,  &  arriva  heureu- 
fement.  Céfar  ne  nous  dit  point 
cfb  il  étoit  alors  ;  mais  ,  il  falloit 
qu'il  ne  fût  pas  fort  éloiené* 

Rien  ne  paroit  plus  digne  d'ad- 
miration daiu  Cé(ar ,  que  fon  ac- 
tivité, qui  efl  comparable  à  celle 
de  la  foudre.  Il  reçut  la  lettre  de 
Q.  Tullius  Cicéron  fur  le  foir, 
lorfqu'il  n'y  avoir  plus  qu'une  heu- 
re de  foleil.  Sur  le  champ  il  envoie 
ordre  à  M.  CrafTus ,  qui  étoit 
dans  le  païs  des  Bellovaces ,  de 
partir  à  nrinoit  avec  fa  légion ,  & 
de  le  venir  joindre.  Il  dépêche  un 
autre  courrier  à*C.  Fabiuij  qui  lu* 


vemoic  chez  les  Morîns,  &  lui 
ordonne  de  mener  fa  légion  dans 
l'Artois ,  qui  étbic  fur  le  chemin 

E^ur  aller  à  Cicéron.  Il  écrivit  à 
abiénus  pour  lui  commander 
de  fe  rendre  fur  les  terres  des  Ner- 
viens. Céfar  lui-même  raffemble 
environ  quatre  cens  chevaux. 

Après  ces  préparatifs ,  il  mar- 
che à  grandes  journée»,  &  fait 
prendre  lesdevans  à  un  cavalier 
Gaulois  j  porteur  d'une  lettre , 
dans  laquelle  il  donnoit  avis  à  Q. 
Tullius  Cicéron  de  fon  arrivée  , 
mais  qu'il  prit  la  précaution  d'é- 
crire en  Grec ,  afin  que  ù  elle 
tomboit  entre  les  mains  des  enne- 
mis ,  elle  ne  fût  pas  entendue.  Le 
Gaulois  avoit  ordre  ,  en  cas  qu'il 
ne  pût  pénétrer  jufqu'au  camp, 
d'y  jetter  la  lettre  avec  un  javelot, 
au  tour  duquel  il  l'auroit  attachée. 
La  chofe  fut  ainfi  exécutée ,  &  la 
lettre  portée  par  le  javelot ,  s'ar- 
rêta par  haiard  à  une  tour ,  oii  el- 
le demeura  pendant  deux  jours 
fans  être  apperçue.  Le  troifième 
jour,  un  foldat l'ayant  remarquée, 
la  prit  &  la  remit  à  Q.  Tullius 
Cicéron  j  qui  la  lut  fur  le  champ 
en  pleine  afTemblée ,  &  répandit 
ainlila  joie  dans  tout  fon  camp* 
En  même  tems ,  on  voy oit  la  fu- 
mée qui  s'élevoit  des  villages  voi* 
fins  incendiés  par  Céfar;  ce  qui 
ne  permettoit  pas  de  douter  de 
l'approche  du  fecours.^ 

Les  Gaulois  en  eurent  aufG 
avis  par  leurs  coureurs,  &  ils 
prirent  le  parti  de  laifler  Q.  Tul- 
lius Cicéron ,  &  d'aller  au-devant 
deCéfar.  Leur  armée  étoit  de 
plus  de  foixante  mille  hommes.  Q 
TuUitts  Cicéron  fit  fur  iie  champ 


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is4  CH 

donner  nouvelle  à  fon  Çénéral  de 
f  U  marche  des  ennemis  ;  &  le  len* 
demain ,  Céfar  les  découvrit  lui- 
même  au  de-là  d'un  grand  valloa 
traverfé  d'un  ruiffeau.  Comme 
rien  ne  l'obligeoit  plus  de  fe  hâ- 
ter, il  campa  dans  l'endroit  où 
il  fe  trouvoit ,  pour  fe  préparer  à 
combattre. 

La  confiance  des  ennemis  alloic 
fi  loin,  qu'ils  firent  proclamer  tout^ 
autour  du  camp,  que  fi. quelque' 
Gaulois  ou  Romain  vouloir  pa{l 
fer  de  leur  côté  ,   il  le  pouvoit 
jufqu'à  la  troifième  heure  du  jour  ; 
^        mais ,  qu'après  ce  moment  >  ilsne^ 
feroient  quartier  à  perfonne.  Déjà 
ils  fe  préparoient  à  efcalader  le 
rempart%  &  à  combler  le  foffé  » 
lorfque  Célar  fait  une  fortie  gêné* 
raie  par  toutes  les  portes  du  camp 
à  la  fois*  Infanterie  6c  cavalerie , 
tout  fe  jette  fur  les  Barbares ,  que 
la  furprife  &  l'effroi  mirent  hors 
d'état  de  faire  aucune*  réfiftance. 
Tous  prirent  la  fuite  ,  &  un  très- 
grand  nombre  reflerent  fur  la  pla- 
ce«  Auffi  fage  que  hardi ,  Céfar 
ne  voulut  point  poufler  trop  loin 
la  pourfuite  des  fuiards,  à  caufe^ 
des  bois  &L  des  marais  dont  le  païs 
étoit  couvert.  Comme  il  avoit  peu 
de  monde  avec  lui ,  il  fentoit  qtte. 
le  moindre  échet  pouvott  lui  être 
funefte.  Ainfi  ,  fans  avoir  fouffert 
aucune  perte  *  il  délivra  &  joignit 
Q.  Tullius  Cicéron.  Quand  il  vif 
les  ouvrages  des  Barbares  ,  leurs 
tours  ,  leurs  lignes ,  il  en  fut  frap- 
pé d'admiration.   Ayant  enfuiie 
fait  la  revue  des  foldats»  il  trouva, 
que  fur  dix,  à  peine  y  en  avoir-, 
il  un  qui  fût  refté  fans  bleffure  ;  ce 
qui  lui  fit  juger  quelle  avoir  été  la 


CH 

grandeur  du  péril ,  Se  la  vigueur 
de  la  réfidance.  Il  loua  beaucoup 
&  le  commandant  ,  &  la  légion. 
Il  donna  des  marques  particuliè- 
res d'eftime  &  de  bienveillance 
aux  officiers  dont  Q.  Tullius  Ci- 
céron lui  rendit  un  honorable  té- 
ipoignage. 

L'année  fuivante ,  Q.  Tullius 
Cicéron  courut  encore  le  plus 
grand  péril.  Il  avoit  été  laifié  avec 
une  légion  dans  un  fort ,  où  les 
Sicambres  vinrent  l'attaquer.  Il 
s'en  fallut  peu  que  les  Romains 
ne  fuffent  entièrement  taillés  en 
pièces.  U  en  périt  un  nombre  con^ 
ûdérabie.  , 

■  Après  avoir  ainfi  fervi  plufieurs 
années  dans  les  Gaules  en  qualité 
de  lieutenant  de  Céfar  ,  Q.  Tul- 
lius Cicéron  ne  laiHa  pas  de  pren- 
dre parti  pour  Pompée  dans  la 
guerre  civile,  &  obtint  de.  çe^ 
dernier,  la  furintendance  des  bleds 
^n  Sardaigne  pour  toute  l'Italie.' 
Cela  ne  pouvoic  manquer  d'of- 
fenfer  fenfiblement  fon  ancien  Gé- 
néral. Bien  plus  Céfar  penfoit  que 
c'étoit  lui  qui  avoit,  déterminé  fon 
frère  à  quitter  l'Italie ,  &  battu  U 
caiffe  [  c'eft  l'expreffion  dont  il  fy 
fervit  J  pour  lui  donner  le  fignal 
du  départ.  Cicéron  éroit  à  Brin« 
des ,  fort. en  peine  de  ce  qu'il  de*- 
viendroit  lui  -  même ,  lorfque  CQ 
mot  de  Céfar  lui  revint.  Toujours, 
plein  de  bon  cœur  6c  d'amitié  poui: 
fon  frère ,  quoiqu'il  ejut  déjà  quelr 
que  lieu  de  fe  plaindre  de  lui  »  il. 
écrivit  fur  1^  champ  à  Céfar  en., 
ces  cerme^:.  »  Je.  ne  m'intéreiTe. 
n  pas  moins-  vivçment  à  mon 
n  frère,  qu'à  ce  qui  me  touche 
n  'moi-même  i  mais  ^.  dans  U .  fx% 


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CH 

»  taation  oîi  je  fuis  ,  je  n*ofe 
n  vous  le  recommander.  Tout  ce 
»  que  je  puis  me  permettre  ,  c*eft 
»  de  vous  prier  de  ne  point  croi- 
)>  re  qu'il  ait  tenu  à  lui ,  que  je  ne 
»  fuiviffe  un  fyftême  de  conduite 
n  qui  vous  fût  agréable ,  &  que 
p  mon  amitié  pour  vous  ne  (e 
I  »  foûtint  fans  aucune  altération. 
»  Il  m'a  toujours  exhorté  à  de- 
»  meurer  uni  avec  vous  ;  &  lorf. 
n  que  nous  fommes  partis  enfem- 
n  ble  de  l'Italie ,  il  a  été  mon 
n  compagnon  de  voyage  ,  & 
»  non  pas  mon  guide.  A  tout  autre 
»  égard  ,  il  ne  me  convient  point 
»  de  me  rendre  fon  intercefleur 
»  auprès  de  vous.  Votre  douceur 
»  naturelle ,  l'amitié  qui  eft  entre 
n  vous  &  luîyvoilà  ce  qui  vous  dé- 
»  cidera.  Mais ,  fi  la  confidération 
9»  de  mon  nom  ne  peut  lui  être 
n  utile ,  au  moins  je  vous  prie 
»  inflamment  qu'elle  ne  lui  fafle 
»  point  de  tort.  « 
Cette  lettre  ,  qui  refpîre  l'amî- 
;  tié  fraternelle,  en  même  tems 
i  qu'elle  étoit  écrite  avec  une  pru- 
dence &  une  circonfpeâion  infi- 
nies ,  paroît  faire  beaucoup  d'hon- 
neur à  Cicéron.  Son  frère  au  con- 
traire ,  en  ufa  au  plus  mal  avec 
lui.  S'étant  retiré  à  P^tras  ,  après 
la  défaite  de  Pompée  ,  il  ne  fe 
contenta  pas  de  déclamer  contre 
Cicéron  en  préfence  de  quiconque 
voulut  l'entendre  ;  il  di  paffer  fes 
indécentes  inveâives  jufqu'à  Cé- 
far.  Son  fils ,  jeune  homme  pétu- 
lant &  impétueux ,  alla  en  Afie, 
moins  pour  demander  la  grâce  de 
fon  père ,  que  pour  charger  & 
accufer  fon  oncle.  Tous  les  amis 
de  Cé(ar,  qui po^r  la  plupart  le- 


CH  155 

toîent  aufli  de  Cicéron,  furent 
indignés  de  l'ingratitude  de  fcn 
frère.  Ils  ne  laifierent  pas  de  lut 
être  favorables  ,  parce  qu'ils  fça- 
voient  bien  que  Cicéron  étoit  fans 
doute  affligé  de  la  noirceur  de  fes 
proches  ;  mais  qu'il  étoit  fort 
éloigné  de  défirer  d'en  être  vengé. 
Q.  Tullius  Cicéron  le  fils ,  ayant 
vu  Céfar  à  Antioche ,  obtint  de 
lui  I  à  la  recommandation  d'Hir- 
tius  ,  tQut  ce  qu'il  demandoit. 

Q.  Tullius  Cicéron ,  fut  avec 
fon  fils ,  une  des  viâimes  de  la 
cruauté  des  Triumvirs,  l'an  de 
Rome  709  &  43  avant  Jefus- 
Chrifl.  Le  fils  fut  pris  le  premier, 
ayant  été  trahi  par  fes  efclaves. 
C'étoit  un  caraftère  qui  avoit 
donné  bien  des  fujets  de  plainte  à 
fa  famille  ;  &  les  lettres  de  Cicé- 
ron à  Atcicus  font  remplies  de 
plaintes  contre  lui.  Néanmoins, 
dans  cette  dernière  &  trifte^oc- 
cafion  ,  il  fit  preuve  d'une  ten« 
dreiTe  filiale ,  qui  ne  peut  être  af- 
fez  louée.  Il  cachoit  fon  père ,  6c 
quoique  livré  aux  bourreaux  ,  qui 
le  tourmentoient  pour  lui  arracher 
fon  fecret ,  il  s'obftinoit  à  garder 
un  généreux  filence.  Le  père ,  qui 
n'étoit  pas  loin  ,  &C  qui  entendoit 
tout  ce  qui  fe  paffoit ,  ne  put  fouf- 
frir  que  fon  fils  fût  fi  cruellement 
traité  à  caufe  de  lui  ;  il  vint  fe  dé- 
couvrir lui-même.  Il  y  eut  com- 
bat encr'eux,à  qui  mourroit  le  pre- 
mier. Les  bourreaux  les  mirent 
d'accord ,  en  les  égorgeant  tous 
deux  en  même  tems. 

Q.  Tullius  Cicéron  devoit  être 
un  homme  d'un  mérite  fort  dif- 
tingué  ;  &  pour  peu  qu'on  fe  don- 
ne la  peine  de  lire  le  commence- 


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i5<î  C  H 

ment  du  premier  livre  des  dialo- 
gues de  l*orateur,on  en  fera  enco- 
re plus  particulièrement  perfuadé, 
par  le  foin  que  Cicéron  a  pris  de 
lui  adneflfer  cet  ouvrage ,  comme 
ayant  été  élevé  avec  lui  dans  les 
belles  lettres  dès  leur  enfance ,  & 
ayant  cultivé  de  même  les  beaux 
arts  dans  leur  jeuneffe. 

aCÉRON  [Q.TuLLius], 
Ç.  Tullius  Ciccro  ,  X.  ToJm/oç 
KiH^^pcav  y  fils  de  Q.  Tullius  Cicé- 
f on  &  de  Pomponia.  Il  en  a  été 
parlé  dans  Tarticle  précédent. 
yoyei  cet  article. 

aCÉRON  [  M.  Tullius  ] , 
M,  Tullitts  Cicero  ^  M.  ToJm/oç 
KiK^pcûv ,  (tf)  fils  de  Cicéron  lo- 
rateur  ,  naquit  Tan  de  Rome  687. 
Son  père  l'envoya  à  Athènes  pour 
y  prendre  les  leçons  de  Cratippe, 
qui  étoit  aafîi  honnête  homme 
que  bon  Phllofophe,  &  qui  fçavoit 
quitter  h  propos  la  févérité  de  la 
Phiîofophie,  pour  entrer  dans  les 
plarfirs  &  les  divertiflemens  des 
jeunes  gens  qu'il  inftruifoit.  Cicé- 
%Cfn ,  qui  ne  s'aveugloit  pas  fur  le 
peu  de  talens  que  fon  fils  avoit 
leçn  de  ta  nature,  fe  promettoit 
cependant  beaucoup  des  foins  d'un 
snaître  fi  habile  ,  dans  une  ville  fi 
célèbre  pour  les  fciences  &  pour 
la  politefi!e.  II  voulut  que  fon  fils 
joignît  à  rétude  de  la  phiîofophie 
celle  de  l'éloquence ,  &  qp'il  s'at- 
tachât ,  ponr  cet  effet ,  à  un  certain 
rhéteur  Grec,  nommé  Gorgîas  , 
qui  avoit  alors  beaucoup  de  répu- 
tation ,  mais  qui  étoit  fort  adonné 
aux  excès  de  la  débauche  ,  &  fur 


CH 

tout  de  la  bonne  chère  &  du  vin*' 
M.  Junîus  Brutus  «  ^tant  venu 
à  Athènes ,  mit  à  l'épreuve  le 
jeune  étudiant  ;  &  fatisfait  de  fes 
progrès ,  il  le  louoic  beaucoup  en 
écrivant  à  fon  père  :  n  Votre  fils , 
n  lui  dit-il ,  me  fatisfait  tellemenc 
n  par  fon  aâivité,par  fa  confiance 
9»  dans  le  travail ,  par  fa  grandeur 
n  d'âme  y  par  fon  exaâitude  à 
I»  remplir  Ces  devoirs  ,  que  jamais 
Il  il  ne  paroît  perdre  de  vue  de 
Il  quel  père  il  eft  né.  Perfuadez- 
n  vous  que  pour  parvenir  à  des 
n  honneurs  pareils  aux  vôtres , 
Il  la  gloire  de  fon  père  fera  fa 
n  moindre  recommandation.ee  II 
paroit  en  effet  par  différens  traits 
que  l'on  peut  recueillir  des  lettres 
de  Cicéron,  touchant  fon  fils ,  que 
ce  jeune  homme  avoit  lecœur  bon 
&  généreux  ;  enforte  que  fans 
briller  beaucoup  par  les  talens  de 
fefprit ,  ii  auroit  pu  foûtenir  juf- 
qu'à  un  certain  degré  la  gloire  de 
fon  nom  ,  fi  dans  la  fuite  il  ne  fe 
fût  pas  abruti  par  le  vin  ;  a  quoi 
il  avoit  commencé  à  s'adonner  à 
l'exemple  de  fon  maître  Gorgias. 
Tant  il  eft  vrai  que  l'on  prend  in- 
fenfiblement  les  habitudes  de 
ceux  que  l'on  fréquente ,  &  qu'if 
efl  de  la  dernière  importance  de 
ne  confier  l'éducation  de  la  jeu- 
nefte  qu'à  des  maîtres  auffi  ver-, 
tueux  qu'habiles. 

M.  Tullius  Cicéron  fut  enve- 
loppé avec  fon  père  dans  la  prof- 
cription  des  Triumvirs  ;  mais  |  il 
eut  le  bonheur  d'échapper  an  car- 
nage,parce  qu'il  étoit  alors  auprès 


C^)  Appian.  p.  600.  Plui.  T.  I.  p.  883 ,  886.  Crév.  Hifl.  Rom,  T.  VUL  p.  106^ 


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CH- 

ide  M.  Junius  Bri^us»qui  lui  aroit 
donné  un  commandement  dans 
fon  armée.  Après  que  le  parti  de  ce 
dernier  eut  été  entièrement  ruiné 
par  la  perte  de  la  bataille  de  Phi- 
lippes  ,  M.  Tulliuis  Cicéron  fe 
retira  d'abord  en  Sicile  auprès  de 
Sextus  Pompée.  Il  revint  appa- 
ramment  à  Rome  par  le  traité  de 
Mifène  ,  &  fe  trouvant  ainfi  à 
portée  de  recevoir  les  bienfaits 
d'Oâavien ,  il  fut  fait  augure ,  & 
enfuite  élevé  au  Confulat»  qu'il 
géra  depuis  le  treize  Septembre 
de  Tannée  30  avant  Jefus-Chrift 
îufqu'au  premier  Novembre. 

Ce  fur  pendant  ce  court  efpace 
de  tems  ,  que  les  flatues  de 
Marc- Antoine  furent  renverfées, 
en  vertu  d'un  arrêt  du  Sénat ,  au- 
quel préfidoit  M.  Tullius  Cicéron,- 
en  qualité  de  Conful  ;  circondance 
fingulière ,  &  qui  fut  remarquée 
de  tout  le  monde ,  comme  une 
efpèce  de  confolation  accordée  aux 
mânes  de  Cicéron  ,  dont  le  fils 
portoit  à  fon  ennemi  &  à  fon 
bourreau  le  dernier  coup  de  flé- 
triflure  &  de  vengeance.  Car,  ce 
même  Sénatus  -  Confulte  ordon- 
iioit  que  tout  ce  qui  avoit  été  dé- 
cerné en  l'honneur  de  Marc- An- 
toine fût  aboli ,  que  le  jour  de  fa 
naiiTance  fût  mis  au  rang  des  jours 
malheureux  ,  ôc  qu'aucun  de  la 
famille  Antonia  ne  portât  jamais 
le  prénom  de  Marcus.  Qeft  ainfi , 
conclut  Plutarque  y  que  la  jufti- 
ce  divine  réferva  la  fin  de  la 
punition  de  Marc- Antoine  à  la 

(/f)  Horac.  L,  I.  Satyr,  5.  v.  51.  ér 
feq, 

(h)  Ovid.  Mctam.  L.  Vf.  c.  15.  L.  XI. 
c.  I,   Virg.  Oeorg.  L,  IV,  y.  540,  Plin. 


157 


CH 

malfon  de  Cicéron. 

CICHLES  ,  C'uhîes  ,  port  de 
Thrace.  C'etoit  celui  de  la  ville 
de  Térone  »  félon  Suidas. 

CICIRRUS  [MEssius],(tf) 
MeJJius  Cicirrus  ,  certain  homrue 
dont  parle  Horace  ,  &  qu'il  fait 
Ofque  d'origine.  Ce  Poëte  le  m€t 
aux  mains  avec  un  eiciave ,  qu'il 
nomme  Sarmentus.  Ilsfe  difent 
mille  injures.  Comme  Médius  Ci- 
cirrus avoit  fur  le  fourcil  gauche 
une  vilaine  cicatrice  y  bordée  de 
poil ,  Sarmentus  en  prend  occa- 
fion  de  lui  reprocher  qu'il  feroit 
terrible ,  fi  on  ne  lui  avoir  pas  fcié 
une  corne  au  front ,  puifque  tout 
écorné  qu'il  eft ,  il  fait  eneore 
tant  de  bruit. 

Il  y  a  des  Commentateurs 
d'Horace  »  qui  ,  au  lieu  de  Ci- 
cirrus ,  lifent  Cicerrus.  C'eft  U 
leçon  que  fuit  M.  le  Batteux. 

CICONIENS  ,  Cicones  ,  {h) 
Ktit,ov€ç  «  peuples  de  Thrace*  M, 
d'Anville,  dans  fes  Cartes,  les' 
place  fur  le  bord  de  la  mer  Egée  , 
à  l'oppoGce  de  Tifle  de  Samothra- 
ce.  Ils  ont  à  l'occident  la  ville  de 
Maronée  ,  au  nord  celle  de  Dy^ 
me  ,  &  à  l'orient  le  fleuve  d'He- 
bre.  Leur  païs  paroît  être  cravexfé 
par  un  autre  fleuve ,  du  nord  au 
midi ,  oii  il  fe  rend  dans  la  mer. 

Cette  pofîtion  &  ces  circonf- 
tances  femblent  être  confirmées 
par  le  témoignage  d'Hérodote, 
Cet  Auteur  en  parlant  de  Xerxès, 
dit  :  n  Quand  il  fut  parti  de 
n  Dorifque ,    il  pafTa   première- 

T.  î.  p.  104.  Pomp.  Mel.  p.  104.  Herod, 
L.  VII.  c.  59  ,  108.  &fiqj  Homcr.  Iliafl. 
L.  H.  V.  353  ,  35^,  Ody/r,  L,  IX.  39.  & 


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158  CH  , 

»  ment  près  d'une  ville  de  Samo- 
»  thrace,  qui  eft  la  dernière  du 
»  côté  de  l'occident.  On  Tappelfe 
I»  Méfambrie  ;  elle  a  pour  voifine 
»  une  autre  ville  des  Thafiens  ^ 
»  nommée  Stryme,  &  entre  les 
»  deux^coule  la  rivière  du  Liflus» 
»  qui  ne  put  fuffire  pour  Tarmée 
»  de  Xerzès  &  fut  bientôt  épui- 
sa fée.  On  appelloit anciennement 
f>  ce  païsGalaïce;-on  le  nomme 
i>  aujourd'hui  Briantice  ,  &  il  ap- 
7f  partient  proprement  aux  Cico-> 
t>  niens.  Après  avoir  paflé  le  Lif- 
n  fus  9  que  Ton  avoir  mis  à  fec , 
»  Xerxès  traverfa  ces  villes  Grec- 
«  ques ,  Maronée  ,  Dicée  ,  Ab- 
}>  dère  j  6c  les  fameux  étangs  qui 
»  font  à  Tentour. 

Pomponius  Mêla  met  les  Cîco- 
niens  auprès  de  l'Hebre.  Pline  les 
étend  au  de-là  de  ce  fleuve  ,  du 
côté  de  l'orient.  Car,  il  afTure  que 
le  païs  d'^nos ,  ville  libre  ,  leur 
appartenoif. 

Homère  a  connu  ces  peuples  , 
ce  qui  prouve  leur  antiquité.  Il  fait 
dire  à  Ulyfle  :  »  Je  n'eus  pas  plu- 
^>  tôt  mis  à  la  voile  [  en  partant 
n  de  Troye  ]  avec  toute  ma 
»  flotte»  que  je  fus  battu  d'un 
n  vent  orageux  qui  me  poufla  fur 
»  les  côtes  des  Cicôniens ,  vis-à- 
n  vis  de  la  ville  d'Ifmare.  Là  je 
j>  fis  une  defcente;  je  battis  les 
n  Cicôniens  ;  je  faccageai  leur 
n  ville ,  &  j'emmenai  un  grand 
n  butin.  Nous  partageâmes  notre 
3>  proie  avec  le  plus  d'égalité 
n  qu'il  fut  poffible  ,  &  je  prefTois 
3>  mes  compagnons  de  fe  rem- 
5>  barquer,  fans  perdre  de  tems  ; 
n  mais ,  les  infenfés  refuferent  de 
19  me  croire ,  &  s'amuferem  à 


CH 

»  faire  bonne  chère  fur  le  rivage; 
ï>  le  vin  ne  fut  pas  épargné  ;  ils 
»  égorgèrent  quatité  de  moutons 
»  &  de  bœufs.  Cependant ,  les 
i>  Cicôniens  appellerent  à  leur  fe- 
n  cours  d'autres  Cicôniens  leurs 
)>  voifins  j  qui  habitoient  dans  les 
i>  terfes  ,  &  qui  étoient  en  plus 
»  grand  nombre,  plus  aguerris 
w  qu'eux,  mieux  difciplinés  ,  & 
n  mieux  dreffés  à  bien  combattre 
»  à  pied  6c  à  cheval.  Ils  vinrent 
"  le  lendemain  à  la  pointe  du  jour 
»  avec  des  troupes  auffi  nom- 
n  breufes  que  les  feuilles  &  les 
>ï  fleurs  du  printems.  Alors,  la 
»  fortune  commença  à  fe  déclarer 
»  contre  nous  par  l'ordre  de  Ju- 
w  plier ,  &  à  nous  livrer  à  tous  les 
n  malheurs  enfemble.  Les  Cico- 
»  niens  nous  attaquèrent  devant 
i>  nos  .  vailTeaux  à  grands  coups 
»  d'épée  6c  de  pique.  Le  com- 
V  bat  fut  long  6c  opiniâtre.  Tout 
»  le  matin  pendant  que  la  facrée 
i>  lumière  du  jour  croiffoit ,  nous 
i>  foutînmes  heureufement  leurs 
»  efforts  ,  quoiqu'ils  tuflent  très- 
»  fupérieurs  en  nombre  ;  mais. 
Il  quand  le  foleil  commença  à 
51  pencher  vers  fon  couchant  ,  ils 
»  nous  enfoncèrent  6c  nous  tue- 
II  rent  beaucoup  de  monde.  Je 
31  perdis  fix  hommes  par  chacun 
w  de  mes  vaifl'eaux.  Le  refte  fe 
3>  fauva ,  6c  nous  nous  éloigna- 
»  mes  avec  joie  d'une  plage  qui 
n  nous  avoir  été  fi  funefte.  c< 

Madame  Dacier  obferve  qu'U- 
lyfle  attaqua  les  Cicôniens ,  parce 
qu'ils  avoient  envoyé  du  fecours 
aux  Troyens ,  comme  on  le  voit 
dans  l'onzième  livre  de  l'Iliade, 
cil  Homère   di.t  qu'Euphémus, 


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CH 

fits  de  Trœzénus ,  &  petit  fils  de 
Céus^  commandoit  les  belliqueux' 
Ciconiens. 

CICONIENS  ,  Cicones  ,  K/. 
ïto  rf  ?;,  peuples  d*Afie ,  dont  parle 
Pline.  Peut  -  être  ces  Ciconiens 
étoient-ils  une  colonie  de  ceux  de 
Thrace. 

CICONIENS  [  le  Fleuve  des], 
Ciconum  Flumen.  {a)  Pline  nom- 
me ainfi  un  fleuve  ,  qui  avoit  la 
propriété  d'incrufter  de  pierre,  le 
bois  que  Ton  y  tenoit  quelque 
tems.  Ovide  avoit  déjà  dit  : 

Flumen  habent  Cicones  ,  quod  po-- 
tumfaxeea  reddit 

yifcera  ,  quod  taElis  induit  marmO' 
ra  rébus. 

Séneque ,  dans  fes  queftions  na- 
turelles ,  cite  ces  deux  vers  d'Ovi- 
de 9  &  les  allègue  comme  une 
preuve  du  choix  que  Ion  doit 
faire  des  eaux  que  Ton  boit.  Mais, 
Ovide  n*étoit  pas  grand  Phyficien; 
&  Séneque ,  qui  avoit  plus  cultivé 
la  morale  des  Stoïciens  que  la 
fcience  des  chofes  naturelles ,  étoit 
dans  la  même  erreur  que  les  autres 
Philofophes  de  Tantiquité.  En 
voyant  les  incruftations  pierreufes, 
que  certaines  eaux  produifoient 
avec  le  tems  au  tour  du  bois  6c 
des  autres  matières  que  Ion  y  te- 
noit plongées  ,  ils  ont  cru  que  ces 
eaux  dévoient  produire  le  même 
effet  fur  les  entrailles  &  les  vifce* 
res  du  corps  humain  Cependant , 
Texpérience  détruit  ce  préjugé. 
On  remarque  même  que  des  eaux 
qui  produisent  ces  incruflations  , 
ne  laiiTent    pas  de   difloudre   la 


CH  IS9 

pierre ,  qui  Te  forme  dans  le  corps 
humain  ;  tant  il  eft  vrai  que  ces 
pierres  font  d'une  nature  très-dif> 
férente.  Le  fleuve  des  Ciconiens 
couloit  dans  le  païs  de  ceux  de 
Thrace. 

CICONIENS  [  la  Montagne 
des],  Ciconum  Mons,  On  croit 
que  cette  montagne  des  Ciconiens 
n'étoit  autre  que  le  mont  Ifmarus  ; 
&  en  ce  cas  le  fleuve  des  Ciconiens 
doit  être  le  Liflus. 

CICONIENS  [  le  Promontoi- 
re  des  ] ,  Ciconium  Promontoriunim 
Il  étoit  fur  le  Bofphore  du  côté 
de  l'Afie.  Denys  de  Byzance  > 
dans  Ton  traité  du  Bofphore  de 
Thrace  >  dont  nous  n'avons  plus 
que  des  fîragmens  dans  la  collec- 
tion d'Oxfort,  encore  ne  les  avons- 
nous  qu'en  Latin ,  le  Grec  étant 
vraifemblablement  perdu  ;  cet 
Auteur ,  dis- je ,  parle  ainfi  de  ce 
promontoire  :  »  Près  du  promon- 
»  toire  Lycadien  eft  le  Naufima- 
»  chien ,  lieu  iUuftre  par  un  com- 
yy  bat  naval  [  c'eft  ce  que  veut 
n  dire  fon  nom]  ;  enfuite ,  efl  le 
w  promontoire  des  Ciconiens  , 
fi  ainfi  nommé  à  caufe  de  la  mè- 
n  chanceté  de  fes  habitans.  Car, 
}>  ayant  été  ruinés  par  une  vio- 
»  lente  fédition  ,  ils  furent  chaf- 
M  fés  de  cet  endroit,  a 

Pierre  Gilles ,  après  avoir  vu 
dans  des  Scholies  très-anciennes  « 
écrites  fur  Denys  de  Byzance/» 
que  lé  Bofphore  eft  le  plus  étroit 
entre  TAnapIe  &  le  promontoire 
des  Ciconiens  ,  en  conclut  que  ce 
promontoire  doit  être  un  lieu  voi- 
fm  de  Néocaftro,  lieu  nommé  par 


(«)  Plin.  T.  I,  p.  xso« 


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léo  CH 

les  pécheurs  Cormion.  Il  ajoute 
que  ce  nom ,  félon  eux  ,  vient 
d'un  arbre;  mais  qu'ils  fe  trom- 
pent ,  puifqu'il  n  y  en  a  là  aucun 
de  cette  efpfcce.  Ils  ne  fçavent 
point  que  ce  nom  eft  corrompu  de 
Ciconium. 

CICURINUS  [C]  ASIA. 
TIC  US  ,  Ç.  Cicurinus  Afiatïcus^ 
(<ï)  garde  du  temple  de  Sylvain , 
qu*on  appelloit  Littoralis.  Il  nous 
reAe  de  lui  un  beau  monument , 
qui  ed  une  urne  fépulchrale.  C. 
Cicurinus  Afiàticus  exercée  fa 
charge  pendant  Tefpace  de  (eize 
ans  ;  ce  qui  ed  ^exprimé  en  ces 
termes  ,  Mdïiuavit  annis  XVI  y 
&  mourut  âgé  de  foixante-dix 
an^  neuf  mois  fept  jours.  Son  fils 
Titus  Cicurinus  Dimarus  lui  fit 
faire  ce  monument  >  qui  repréfen- 
te  {\xx  le  haut ,  le  bufle  du  père  & 
du  fils,  &  fur  un  côté  un  arbre  & 
un  dauphin.  L'arbre  ,  indioue ,  à 
ce  que  croit  D.  Bernard  de  Mont- 
faucon  ,  Sylvain  ,  qu'on  peignoit 
toujours  avec  un  arbre  ;  &  le 
dauphin  marque  Sylvain  ,  qu'on 
appelloit  Littoralis ,  parce  qu  on 
rhonoroit  au  bord  de  la  mer. 

CIDÉSSA  ,  Cidejfa  ,  bourg 
près  de  Gifcala ,  en  la  tribu  d'A(- 
îer,  aux  confins  de  celle  de  Neph- 
tali. 

CIDON ,  CUo  ,  {V)  petit  -fîls 
de  Minos ,  embellit  la  ville  d'A* 
pollonie  en  Crète  ,  &  lui  fît  por- 
ter depuis  le  nom  de  Cidônie. 

CIE ,  Cïa ,  KU  { la  même  que 
Cée  royei  Cée. 


C  H 

CIEL  3  Cœlum  ,  ivpotK^  ,  (<?J 
le  plus  ancien  des  dieux  y  étoit  » 
félon  Héfiode  »  fils  de  la  Terre. 
Seule  elle  Tenfanta  égal  à  elle- 
même  »  afin  qu'il  pût  la  couvrir 
de  toutes  parts  &  devenir  le  féjour 
des  Dieux^ 

Le  del  s'allia  enfuite  avec  la 
Terre  même  ,  &  en  eue  un  grand 
nombre  d'enfans;  i.^  L'Océan  ôc 
Téthys  ;  de  qui  naquirent  Dioné  ^ 
Métis ,  plufieurs  autres  filles ,  dont 
Styx  fut  la  plus  illuftre ,  les  Riviè- 
res &  les  Fontaines  ;  2.^  Cœus  & 
Phcebé ,  de  qui  vinrent  Latone  & 
Aftérie  ;  3.«  Hypérion  &  Théïa, 
dont  l'alliance  produifit  le  Soleil 
la  Lune  &  l'Aurore;  4.<>  Japet,quî 
de  Clymène ,  l'une  des  filles  de 
rOcéan ,  eut  Atlas ,  Ménœtius  , 
Prométhée  &  Épiméthée;  y^ 
Creios,  qui  époufa  Eurybie  ,  fille 
de  la  Terre  &l  du  Pont ,  &  en  eut 
trois  fils  ;  fçavoir  ,  Aftréus  ,  Pal- 
las  &  Perfès. 

De  l'alliance  du  Ciel  &  de  la 
Terre  naquirent  auffi  Rhéa ,  Thé- 
mis  &  Mnémofyne.  Saturne  vint 
après  tous  ceux  qu'on  a  nommés  ; 
&  la  Terre  eut  encore  après  luijes 
Cyclopes  &  les  Hécatonchires.Les 
Cyclopes  furent  appelles  Brontès, 
Stéropès  &  Argès  ;  ils  n'avoient 
qu'un  œil  au  milieu  du  front  ;  du 
refte ,  ils  étoient  femblables  aux 
autres  immortels.  Pour  les  Héca- 
tonchires  ,  Coctus  ,  Briarée  & 
Gygès  ,  ils  avoienc  chacun  cin- 
quante têtes  &  cent  bras.  Le  Ciel 
n'en  put  foûtenir  la  vue  ;   &  à 


{a)  Antiq.   expl.  par   D.  Bem 
Montf.  Tom.  V,  pag.  66 


det     (c)  Mych.  par  M.  TAbb.  Ban.  T.  I.  p. 


1194  »  195  •  Mém.  de  PAcad.  des  Infcript. 
&  Bell.  Lett.  T.  I.  p.  aoa.  T.  III.  p.  ».  T 


jri.  i)ag.  14e, 


I VII.  p,  a.  (ùrfrUI*  XVIII.  p.  ).  èr  fuiv. 

jnefure 


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CH 

mefure  qu'Us  naquirent ,  51  les  ca- 
cha dans  les  fombres  demeures  de 
la  Terre ,  &  les  chargea  de  chai* 
nés. 

Le  Terre  ,  indignée  de  les  voir 
traiter  ainfi ,  foreea  une  faulx  d'a- 
cier ,  &  propofa  à  fes  autres  en- 
fans  de  la  venger  ;  mais ,  Saturne 
fut  le  feul  qui  ofa  l'entreprendre  ; 
auffiavoit-il  toujours  haï  fon  pè- 
re. Il  le  furprit  pendant  la  nuit , 
&  le  mutila.  La  Terre  reçut  dans 
fon  fein  une  partie  du  fang  qui 
coula  de  la  plaie;  &  de  là  naqui- 
rent les  Géans ,  les  Furies  &  les 
Nymphes  Mélies.  Le  refte  fui 
jette  avec  la  faulx  dans  la  mer 
voifme  de  TÉpire  ;  &  dans  Técume 
qui  s'y  éleva  ,  fe  forma  Vénus  , 
cette  iinmortelle  beauté ,  que  les 
flot*  conduidrent  vers  l'ifle  de 
Cythère  ,  puis  en  Cypre  où  elle 
defcendit. 

Le  Ciel ,  ainfî  privé  de  la  fou- 
veraineté ,  fit  des  reproches  à  tous 
fes  eofans  ;  il  les  appella  Titans , 
à  caufe  qu'ils  avoient  approuvé 
inconfidérément  la  vengeance  que 
la  Terre  avoît  exercée  Air  lui ,  & 
leur  prédit  qu'ils  s'en  repentiroient 
un  jour.  Saturne  lui  fuccéda. 

Il  n'eft  pas  difficile  de  deviner 
pourquoi  on  a  fait  paiïer  le  Ciel 
pour  le  plus  ancien  des  dieux  ,  ÔC 
le  père  de  Saturne  ou  de  Cronos, 
puifque  ce  font  les  mouvemens 
céleftesquifontla  mefure  du  tems. 
Que  fi  Ion  dit  que  Saturne  a  ôté  la 
fécondité  à  fon  père  9  c'eft  parce 
qu'avec^  le  tems  ,1a  fécondité  du 
Ciel  a  cefTé  de  produire  de  nou- 
veaux êtres ,  laifTant  à  Vénus  le 


C  H  j6i 

foin  de  la  propagation  &  de  la 
multiplication  des  animaux  une 
fois  formés.  Auffi  feint  -  on  que 
Vénus  eft  née  des  parties  naturel- 
les du  Ciel ,  &L  de  l'écume  de  la 
mer ,  comme  l'explique  Macrobe; 
Aiunt  Saturnum  abfcidijfe  patris 
pudenda;  quihus  in  mare  proje fils, 
f^enerem  procreatam,  quds  àfpumà^ 
unde  coaluit  ,  aa3^©//Ti  ,  nomen 
accepit. 

CIÉRUS,  Cîerusy  K'^oa^ 
ville ,  la  même  que  Çàvls.  Voyez 
Clus. 

CIGU]^  ,  Cicuta,  {a)  forte  de 
plante  à  fleurs  en  rofe  ,  difpofées 
en  ^pibelle ,  compofées  de  plu- 
{\tm  pétales  en  forme  de  cœur  , 
inégales  »  &  foutenues  par  un  ca- 
lice qui  devient  un  fruit  prefque 
rond  ,  dans  lequel  il  y  a  deux  pe- 
tites femences  renflées  &  canne- 
lées d*un  côté ^  &  plates  de  lau- 
cre. 

La  Ciguë ,  qu'on  appelle  Cicuta 
Major  ,'eik  une  de  celles  qu'on 
range  parmi  les  venimeufes ,  & 
la  plus  renommée  de  fon  genre. 
La  mort  de  Socrate  a  feule  fuffi 
pour  en  immortalifer  les  eflPets. 

Comme  on  ne  lit  point  fans 
attendriflement  dans  le  Phédon  de 
Platon  ,  l'Hiftoire  circqnflanciée 
de  ce  qui  précéda  la  mort  de  ce 
Philofophe  ,  qui  avoit  pafl^'é  fa  vie 
à  être  utile  à  fa  patrie  ,  &  à  la 
fervir  de  tous  fes  talens  ,  qui  ne 
fe  démentit  jamais  dans  fa  condui- 
te ;  qui  témoigna  jufqu'au  dernief 
fbupir,  utle  grandeur  héroïque, 
émanée  de  la  fermeté  de  fon  ame 
&  de  la  confiance  dans  fon  inao- 


Cl)  Ferfî.  Satyr.  V.  y,  144  ,  145.  Horat.  L.  II.  Epift,  II,  y,  51.  ér  fep 

Tom.  XI.  L 


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i6i  CH 

cence;  il  réfulte  néceiTaîrement 
de  cette  le6lure  ,  que  tout  ce  qui 
regarde  la  fin  tragique  d*un  hom- 
me fi  refpeâ^ble  »  devient  inté- 
reflant ,  jufqu'à  la  plante  même 
qui  finit  (es  jours.  Le  nom  de  cet- 
te plante  fe  joint  dans  notre  efprit 
avec  celui  de  Socrate.  Nous  la 
cherchons  dans  nos  climats  ,  nous 
voulons  la  connoitre  par  nos  yeux» 
on  du  moins  nous  en  lifons  la  def- 
cription  avec  avidité, 

Lorfque  le  bourreau  d'Athènes 
vint  préfenter  à  Socrate  la  coupe 
de  fuc  de  Cigae  ,  il  l'avertit  de  ne 
point  parler ,  pour  que  le  poifon 
qu'il  lui  donnoit  opérât  ^us 
promptemem.  On  ne  voit™as 
comment  les  eflPets  du  poifon  pou- 
voient  être  accélérés  par  le  filence 
de  la  perfonne  qui  le  prenoit. 
Mais  que  ce  fût  un  fait  ou  un  pré- 
jugé >  le  bourreau  n'agifTott  ainû 
3ue  par  avarice ,  &  dans  la  crainte 
'être  obligé ,  fuivant  la  coutume, 
de  fournir  à  fes  dépens  une  nou- 
velle dofe  de  ce  breuvage  ;  car , 
Plutarque  remarque  dans  la  vie 
de  Phocion ,  t^ue  comme  tous  fes 
amis  eurent  bu  de  la  Ciguë  ,  & 
qu'il  n'en  reiloit  plus  pour  ce 
grand  homme  ,  Texécuteur  dit 
qu'il  n'en  broyeroit  pas  davanta- 
ge ,  fi  on  ne  lui  donnoit  douze 
drachmes,  qui  étoit  le  prix  que 
chaque  dofe  coûtoit.  Alors ,  Pho- 
cion, voulant  éviter  tout  retard» 
fit  renàettre  cette  fomme  à  l'exé- 
cuteur ;  puifquc  ,  dit- il  ,  dans 
Athtgts  ,  i/  faut  tout  acheter  ,, 
jufqutàfamort, 

Prcfque  tout  le  monde  convient 
que  la  Ciguë  prife  intérieurement 
%Q,  un  poifpni  &  çQipmg  oa  fient 


CH 

de  le  voir ,  c'étoit  celui  des  Athé- 
niens; mais>  quelles  que  fufient 
les  qualités  morcelles  de  la  Gigue 
dont  ils  fe  fervoient ,  il  efl  certain 
que  celle  qui  croît  dans  nos  con- 
trées ,  n'a  point  ce  même  degré 
de  malignité.  On  dit  qu'on  a  va 
dans  nos  païs  des  perfbnnes  qui 
ont  mangé  une  'certaine  quantité 
de  fa  racine  &  de  fes  tiges  fans  en 
mourir. 

Ce  qui  eft  fingulier  /  &  dont  il 
faut  pourtant  convenir  ,  c'eft  que 
la  Ciguë  ne  padoit  point  à  Rotne 
pour  un  poifon  »  tandis  qu*à  Athè- 
nes on  n'en  pouvoir  douter.  Aa 
contraire ,  on  la  regardoit  à  Rome 
comme  un  remède  propre  à  me 
dérer  &  à  tempérer  la  bile,  Perfe 
dit  là-defTus. 

•  •....  Calido  fuh  peHorc  maf'- 
cula  hil'is 

Intumuit ,   quant  non   extinxerh 
urna  Cicuta, 

Horace  en  parle  aufli ,  comme 
d'un  remède  ,dans  fa  féconde  épî- 
tre  :  " 

»  Préfentement  que  j'ai  plus  de 
n  bien  qu'il  ne  m'en  faut ,  ma  fô- 
n  Ik  ne  feroic-elle  pas  à  l'épreu- 
M  ve  de  toute  la  Ciguë ,  fi  je  n'é- 
n  tois  perfuadé  qu*il  vaut  mieux 
)>  dormir  que  faire  des  vers,  ce 

Pline  vante  la  Ciguë  pour  pré- 
venir l'ivrefTe  ,  &  prétend  qu'on 
en  peut  tirer  plufieurs  remèdes. 

Il  y  a  une  autre  efpèce  de  Ciguë, 
nommée  Cicuta  Minor ,  qu'oa 
fubf^icue  à  la  précédente  dans  les 
boutiques  pour  l'ufage  externe; 
&  elle  ne  diffère  de  1^  première , 
qu'en  ce  qu'elle  eft  plus  petite , 
que  fa  tige  o'eft  poim  marbrée 


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CH 

de  taches  rougeâtres ,  &  que  (on 
odeur  n'eil  point  aufli  forte  ;  da 
refte ,  elle  a  les  mêmes  propriétés, 
mais  moindres.  On  a  nommé  cette 
dernière  efpèce  de  Ciguë  ,  le  per- 
fil  des  fous ,  par  la  grande  reflem- 
blance  de  Tes  feuilles  à  celles  du 
perfil  ;  reffemblance  qui  a  trompé 
quelques  perfonnes , ôcles  a  pref- 
qu'empoifonnées. 

CILÉNO ,  Cileno\  Tune  des 
Pleïades. 

,CILICIE  ,    Cilicia ,   K/>/)c/ûc  , 

ia)  province  de  TAfie  mineure  » 
ituée  fur  les  bords  de  la  Méditer- 
',  ranée ,  à  Toppofite  de  Tifle  de 
Cypre.  Elle  étoit  bornée  au 
couchant  par  la  Pamphylie,  au 
nord  par  la  Lycaonie ,  la  Cappa- 
doce  &  r Arménie  mineure,  à 
l'orient  par  la  Comagène ,  &  au 
midi  par  la  Méditerranée.  Selon 
Hérodote,  la  Glicîe  étoit  féparée 
de  TArménie  par  l'Euphrate.  En 
général ,  ce  pais  étoit  entièrement 
environné  de  montagnes,  à  l'ex- 
ception de  la  partie  qui  étoit 
baignée  par  la  mer.  Le  mont; 
Amanus  s'étendoit  à  Torient ,  & 
le  mont  Taurus  au  nord  &  au 
couchant.  La  Cilicie  étoit  beau- 
coup plus  longue  que  large.  Sa 
largeur  alloit  de  l'orient  au  cou- 
chant. 
L  Les  Ciliciens ,  félon  Hérodo- 


C  H      '     j^j 

te ,  s'appellerent  d'abord  Hypa- 
chéens.  Ils  prirent  enfuite  le  nom 
de  Ciliciens  ,  de  Cilix  Phénicien , 
fils  d*Agénor.  On  prétend  qu'ils 
obéirent  à  Sémiramis.  Quoi  qu'il 
en  foit ,  la  Cilicie  fut  anciennement 
un  grand  royaume,  dont  les  Sou- 
verains prenoient  part  aux  plus 
grandes  affaires  du  Levant.On  voit 
dans  Hérodote ,  qu'un  roi  de  Ci- 
licie fut  avec  le  roi  de  Babylone, 
médiateur  de  la  paix  entre  Cyaxa- 
re  roi  des  Medes  ,  &  Alyatte  roi 
-de  Lydie.  On  voit  auffi  dans  Xé- 
nophon ,  que  les  defcendans  des 
Rois  de  Cilicie  avoient  confervé 
quelques  marques  de  leur  pre- 
mière grandeur  ;  ils  étoient  fou- 
rnis aux  rois  de  Perfe  ,  à  qui  la 
Cilicie  payoit  un  tribut  annuel^  de 
cinq  cens  talens  d'argent  ,  dont 
t  cent  quarante  étoient  employés  à 
l'entretien  de  la  cavalerie ,  &  le 
refte  étoit  porté  dans  Içs  coffres 
du  grand  Roi  ;  mais  ,  quoiqu'ils 
n'euflem  guère  plus  de  pouvoir 
que  de  fimples  Gouverneurs  ,  ils 
confervoient  eiicore  le  titre  de 
Rois ,  &  vivoient  avec  beaucoup 
de  fplei\deur. 

On  ne  fçait ,  fi  en  parlant  des 
portes  de  Cilicie  ,  qui  étoient  peu 
éloignées  de  Tarfe  &  du  golfe  If- 
fique ,  Xénophon  nous  oblige  à 
croire  que  la  Cilicie  ne  s'étendoit 


(  a  )  Ptolfin.  L.  V.  f .  j  ,  « ,  8. 
Strab.  pag.  668.  ér  f"j»  Pomp.  Mch  p. 
«9«  ér  feq,  Solin.  pag.  »6i.  ér  fe<i, 
Piin.  Tom,  I,  pag.  169.  &  fiq>  Herod. 
L.  II,  c,  17.  dr  feq,  L# m.  c.  90  ,  91. 
L.  V.  c.  49  ,  5».  L.  VU.  c.  91.  L.  IX.  c. 
106.  Diod.  Sicul.  pag.  6i8.  &  ftq.  VcU. 
Patercul.  L.  II.  c.  39.  Tacit.  Annal.  L. 
IL  c.4t.  &  /«j.  L.  XH.  c.  55.  L.  XIII. 
c.  3J.  Plut.  Tom.  I.  pag.  495,  ér  [«%* 


Xcnoph.  p.  ».  ér  /#j[.  Juft.  L.  XI.  c.  ii. 
L.  XIII.  c.  4  ,  6.  Q.  Curt.  L.  III.  c.  4. 
ér  feq.  Tic.  Liv.  L.  XXXÏII.  c^  19 ,  ao. 
L.  XXXVIII.  c.  18.  Mém.  de  PAcad. 
des  Infcript.  &  Bell.  Lett.  Tom.  Ilf.  p. 
5.  Tom.  V.  pag.  187 ,  384.  Tom.  VIII. 
pag.  343.  é-  /««v.  Tom.  X.  pag.  loa  , 
103.  Tom.  XIX.  p.  69.  T.  XXI.  p.  411, 
&  jMiv,  T.  XXVI.  p.  35  ,  36  ,  404. 

L  ij 


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1^4  C  H 

plus  de  fon  tems  au  nord  de  ces 
portes.  A  l'égard  d'Hérodote ,  'il 
lemble  qu'il  fait  adez  comprendra 
que  ce  païs  avolt  de  fon  tems  bien 
plus  d'étendue ,  lorfqu'il  le  met  au 
nombre  de  ceux,  dont  le  nom 
étoit  commun  à  de  valles  contrées, 
parce  que  c*étoit  le  même  peuple 
qui  les  occupoit.. 

Nous  avons  d'ailleurs ,  dans  le 
com  de  la  Préfedure  même  où 
Mazaca  étoit  fituée  ,  une  preuve 
de  l'ancienne  étendue  de  la  Cilicie 
vers  le  nord.  Cette  Préfeûure, 
s'appelloit  Cilicie,  dit  Strabon, 
qui  ajoute  que  les  rois  de  Cappa- 
doce  pofTédoient  encore  d'autres 
parties  de  la  Cilicie  ,  entr'autres 
les  villes  de  Caftabales  &  de  Cy- 
biftres ,  dont  la  dernière  n'étoit 
qu'à  trois  cens  (lades  de  Mazaca. 
Il  obferve  que  de  ces  deux  villes 
&  de  leur  terroire ,  les  Romains 
formerent,après  la  mort  d'Arché- 
laus,une  onzième  Préfefture, qu'ils 
joignirent  aux  dix  Préfeduresdont 
la  Cappadoce  étoit  compofée  ; 
mais  que  la  province  de  la  Cili- 
cie recouvra  la  ville  d'Éléuffeavec 
fon  territoire ,  &  tout  lé  païs  d'où 
les  pirates  étoient  fonis ,  quoiqu'il 
eût  été  ,  comme  les  autres  >  fous 
la  domination  d'Archélaiis. 

On  voit  par- là  que  la  Cappa- 
doce ayant  été  agrandie  par  des 
•  démembremens  des  provinces 
voifmes  ,  lorfqu'il  plut  aux  Perfes 
de  faire  deux  gouvernemens  ou 
fatrapies  de  ce  nom ,  celle  des  deux 
fatrapies ,  qui  fut  nommée  grande 
Cappadoce  ,  reçut  encore  de 
nouveaux  accroiflemens  fous  fes 
Rois ,  &  toujours  aux  dépens  de 
|a  CiUcie  f  à  laquelle  rien  ne  nous 


CH 

empêché  de  donner  dans  les  tems 
qui  ont  précédé,  tout  le  païs  au 
midi  de  THalys ,  puifqu'Hérodo- 
te  le  lui  donne ,    fans  qu'aucun 
Ancien  le  contredife.  La  Cappa- 
doce n'étoit  qu'un  païs  peu  con- 
fidérable  ,  avant  qu'on  l'agrandît 
ainfi  4  comme  il  paroît  par  la  mo- 
dicité du  tribut, qu'elle  payoit  aux 
rois  de  Perfe.  On  avoir  joint  les 
Cappadociens  avec  les  habitans  de 
l'Hellefpont ,  les  Thraces  d'Afie  , 
les  Phrygiens ,  les  Mariandy nés  , 
les  Paphlagoniens  ;  &  tous   en- 
femble ,  ils  ne  pay oient  que  trois 
cens    foixante   talens  de  tribut  ; 
cent  quarante  de  m^ins  que  les 
Ciliciens  feuls.  Après  cela  ^  nous 
ne  pouvons  douter  que  ceux-ci  ne 
fufTent  un  peuple  nombreux  6c 
fort  étendu  ;  &  on  n'a  pas  de  pei- 
ne à  reconnoitre  qu'ils  occupoient 
tout  le  païs  en  de-çà  de  l'Euphra- 
te  ,  depuis  l'endroit  où  ce  fleuve 
fe  retourne    au  nîidi  jufau'à  ce 
qu'il  entre  dans  la  Syrie,  Ceft-là 
qu'étoient  la  Cataonie  &  la  Méli- 
tène  ,  païs  autrefois  féparés  de  la 
Cappadoce ,  comme   Strablon  l'a 
remarqué,  &  qui  n'ont  pu  fai^e 
partie  de  la  Cilicie  ;  car ,  il  faut 
obferver  que  ,   félon  Hérodo'te  , 
toute  l'Afie  en  de-çà  de  l'Euphra- 
te  étoit  divifée  en  cinq  départe- 
mens  pour  les  tributs.  Il  y  en 
avoit  trois  pour  ce  qui   étoit  en 
de  -  çà  de  l'Halys ,  &  pour  la 
Cappadoce  ;  le   quatrième  étoit 
celui  de  la  Cihcie»  &  le  cinquième 
celui  de  Syrie  ,    où   l'on    avoit 
compris   toute  la  Syrie  propre- 
ment   dite  ,   non    feulement    la 
Phénicie  &  la  Paleftine,mais  ViÛ9 
lie  Cypre  ;  &  tous  ces  païs  en- 


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CH 

fembîe  ne  payoient  que  trois  cens 
cinquante  talens  de  tribut  ;  ce  qui 
montre  que  la  Cilicie  avoit  plus 
d'étendue  ,  puifque  ce  n'étoit  pas 
à  raifon  de  fes  richeHes  qu'on 
exigeoit  de  plus  grands  tributs ,  le 
commerce  étant  plus  vif  dans  la 
Phénicie  ,  que  dans  aucune  autre 
province  de  la  domination  des  rois 
de  Perfe. 

II.  La  Cîlicîe ,  aînfi  que  le  refle 
de  VAQe  mineure,  paffa  fous  les 
loix  d'Alexandre  ;  &  lorfque  ce 
Prince  fut  mort,  le  gouvernement 
en  fut  confié  à  Philotas.  On  l'en 
dépouilla  enfuite  pour  en  revêtir 
Phiioxène. 

Les  Romains  envoyèrent  des 
armées  ^contre  les  peuples  d^  Ci- 
licie fous  le  Proconful  P*  Servilius, 
Ces  peuples  ,  voyant  l'embarras 


aig||kpa 
c^Bre 


longueur  de  la  guerre  cOTtre  Mi- 
thridate  ,  prireiit  la  réfolution  de 
faire  des  courfes  fur  terre  &  fur 
mer  dans  leur  voifinage.  Ils  firent 
i  forti^er  des  places  pour  leur  fer- 
vir  de  retraite.  Leurs  courfes  ma- 
ritimes s'étendoient  dans  la  mer 
Egée  ,  au  tour  de  Tifle  de  Crète 
&  du  Péloponnèfe ,  dans  la  mer 
Ionienne  ,  &  dans  la  mer  de  Cy- 
rène  le  long  de  l'Afrique.  Leurs 
courfes  de  terre  s'étendoient  dans 
la  Pamphylle ,  dans  la  Carie  Se 
dans  la  Lycie.  Ils  avoient  amafle 
de  grandes  richeffes  par  leurs  pil- 
lages ,  ils  les  avoient  retirées  dans 
leurs  villes.  P.  Servilius  les  défit 
premièrement  fur  la  mer ,  &  les 
renferma  dans  la  Cilicie  ;  enfuite> 
U  les  adiégea  dans  leurs  villes.  Les 
plus  fortes  de  ces  villes  étoient 
Oricum ,  Phafélis ,   Olympe  & 


C  H  i6s 

Ifaure.  P.  Servilius  prit  &  démolit 
ces  places.  La  pn(e  d'Ifaure  lui 
parut  une  ù  belle  conquête  ,  qu'il 
en  prit  le  furnom  d'ifauricus  ;  le 
Sénat  lui  confirma  ce  furnom,  ea 
lui  accordant  les  honneurs  du 
triomphe. 

Tigrane ,  roi  d'Arménie  ,  avoit 
enlevé  aux  rois  de  Syrie  la  Cili- 
cie de  la  plaine  ,  ou  la  Cilicie 
champêtre ,  dont  il  fera  parlé  ci- 
après  ,  vers  Tan  de  Rome  670. 
Mais,  ce  Prince  ,  ayant  été  vaincu 
par  Lucullus  ,  fut  obligé  de  reti- 
rer fes  troupes  ;  &  cette  partie  de 
la  Cilicie  fut  foumife  à  la  domina-r 
tion  Romaine  l'an  683;Épiphanre 
&  les  autres  villes  fubirenc  le 
même  fort.  Le  gouvernement  de 
ce  païs  éprouva  difFérens  change* 
mens  ;  enfin ,  la  Cilicie  forma 
feule  une  province ,  dans  laquelle 
Pline,  Ptoîénvée ,  Ammien-Mar- 
cellin  ont  toujours  compris  la 
ville  d'Epiphanie.  L'Empereur 
Arcadius ,  ou  Théodofe  le  jeune^ 
partagea  la  Cilicie  en  deux  pro- 
vinces civiles ,  la  première  Cilicie 
fous  la  métropole  de  Tarfe  ,  la 
féconde  Cilicie  fous  la  métropole 
d'Anazarbe.  La  ville  d'Epiphanie 
étoit  de  la  féconde  Cilicie  ,  &  fes 
Évêques  dépendoient  du  métro- 
politain d'Anazarbe. 

III.  Quime-Curfe  dit  que  la 
Cilicie  étoit  enfermée  d'une  chaî- 
ne de  montagnes  rudes  &.  inac- 
ceffibies  ,  qui  s'élevoient  au  bord 
de  la  mer  en  forme  de  croifla  nt , 
&  s'étendoient  en  pointe  jufqu'à 
l'autre  bout  du  rivage.  Au  dos  de 
ces  montagnes ,  dans  les  endroits 
les  plus  reculés ,  il  y  avoit  trois 
entrées  fort  itroites  &  de  difficile 
L  iij 


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j66  CH 

accès  ,  par  Tune  defquelles  il  fal- 
loit  pafler  pour  entrer  dans  la  Ci- 
licie  ^1  &  au  bas  ,  en  tirant  vers  la 
mer  9  on  découvroit  des  plaines 
arrofées  de  quantité  de  ruifleaux 
&  de  fleuves  célèbres ,  le  Pyrame 
&  leCydnus.  Dans  cette  contrée, 
pourfuit  Quinte- Curfe  ,  le  tems 
avoit  effacé  plufieurs  monumens 
célébrés  par  les  Poètes.  On  y 
montroit  encore  la  place  oîi  éroient 
les  villes  de  LyrnefTe  &  de  The- 
bes ,  &  l'on  y  voyoit  la  caverne 
de  Typhon  ,  la  fameufe  forêt  de 
Coryce  ,  oîi  croifToit  le  fafFran  , 
&  autres  chofes  dont  il  ne  reftoit 
que  le  bruit  qu*elles  avoient  fait 
autrefois.  Selon  Quinte-Curfe, 
les  chaleurs  d'été  en  Cilicie  étoienc 
audî  grandes  qu'en  aucun  lieu  du 
inonde.  Cette  opinion  ne  feroit 
pas  adoptée  de  tout  le  monde. 

Les  Ciliciens  portoient  des  ar« 
mers  ,  &  au  lieu  de  boucliers»  des 
targes  couvertes  de  peaux  de 
bœuf  ,  leurs  habits  écoient  de 
laine  ;  chacun  étoit  armé  de  deux 
javelots  &  d'une  épée  ,qui  refTetn- 
bloît  à  celle  des  Égyptiens.  Ils 
avoient  inventé  une  forte  d'étoffe 
faite  de  poH  de  chèvre  ,  dont  on 
iaifoît  des  habits  pour  les  matelots 
&  les  foldacs  ;  comme  elle  étoit 

trolîîère  &  d'une  couleur  fombre 
i  noire,les  Hébreux  s'en  fervoient' 
dans  le  deuil  &  dans  la  difgrace. 
De-là  eft  venu  le  nom  de  ci- 
lice. 

Sous  Darius ,  les  Ciliciens  «  qui 
faifoient  la  quatrième  Satrapie  ; 
donnoient  tous  les  ans  trois  cens 
foixante  chevaux  blancs  ;  c'efl-à- 
dire,  un  cheval  pour  chaque  jour, 
iBc  outre  cela  cinq  cens   talens 


GH 

d'argent  ,  dont  cent  quarante 
étoient  diftribués  dans  cette  partie 
de  la  Cilicie,  oîi  l'on  nourrifToit 
ces  chevaux  ;  le  refle  entroitdans 
l'épargne  de  Darius, 

IV.  Comme  une  partie  de  la 
Cilicie  étoit  un  païs  plat  &  uni , 
&  l'autre  toute  hériffée  de  mon- 
tagnes ,  entre  lefqueiies  on  trou- 
voit  rarement  quelque  plaine  ;  on 
divifoit  cette  province  en  Cilicie 
champêtre  ,  &  en  Cilicie  monta- 
jgneufe.  Pour  donner  une  idée  de 
chacune ,  nous  con^mencerons  par 
la  dernière  qui  écoitàloccidentde 
l'autre. 

La  Cilicie  montagneufe  étoit 
furnommée  par  les  Grecs  Tpotx*'^*» 
Trachea  ,  &  par  les  Latins  Jfpc' 
ra,  épithetes,  qui  veulent  dire 
raboteufe ,  inégale  ;  ce  qui  con- 
vient kjm  païs  de  montagnes.  Les 
Grecs  ™tnes  formèrent  un  fob- 
tantif  de  if>etx^7tt  «  qui  n'étant 
qu'unr  adjeftif ,  fuppofoit  toujours 
le  mot  de  Cilicie  ,  exprimé  ou  ^ 
fous -entendu  ;  &  ils  en  firent  un 
nom  de  païs  ,  félon  Strabon.  Us 
l'appellerent  donc  Tp^x^ij^rti;  , 
Tracheotis  ,  &  les  habitans  T|t«- 
XsioùTeu  »  Tracheota*  Cette  parde 
de  la  Cilicie  étoit  entre  la  Pam- 
phylie  &  la  Cilicie  champêtre. 
Les  Anciens  ne  conviennent  pas 
de  l'endroit  ôîi  elle  commençoit 
au  couchant.  Pline  dit  que  l'an- 
cienne borne  étoit  le  fleuve  Mê- 
las. Strabon  le  donne  à  la  Pam- 
phylie ,  &  met  le  commencement 
de  la  Cilicie  à  la  fortereife  de  Co- 
racéfium.  Ptolémée  compte  de 
même  cette  place  ,  comoie  la 
première  qu'on  trouvoit  en  en-% 
trant  de  la  Pampuy'Iie  datts  la  Ci- 


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CH 

licîe.  Pomponius  Mêla  veut  qo'A- 
némurium  foit  la  borne  entre  ces 
deux  pais.  Ils  ne  s'accordent  pas 
davantage  far  le  Heu  oîi  elle  finif- 
foit  à  Torient.  Strabon  Tétend  juf- 
qu  a  Soli.  Ptolémée  la  borne  aa 
promontofre  de  Zéphyrium,  & 
commence  la  Cilicie  propre  à  Co- 
rycus. 

Pomponius.  Mêla ,  Pline  &  Scy- 
lax ,  ne  diftinguent  point  les  deux 
Cilicies ,  &  n'en  font  qu'une  qui 
s'étendoit  entre  la  Pamphylic 
jufqu'à  la  Syrie  tout  de  fuite.  rto« 
iémée ,  au  contraire ,  fait  la  dif- 
tinâion  ordinaire  en  Cilicie  mon- 
tagneufe  &  en  Cilicie  champêtre  ; 
mais  y  il  partage  encore  la  pre- 
mière en  Sélentide  &  Cétide. 

Il  met  dans  la  Sélentide ,  les 
villes  fuivantes  ;  fçavoir ,  lotape  » 
Sélinus ,  Antioche  fur  le  Crazus  » 
Néphélis,  Clyftre  ou  Cayftre , 
Domitiopolis  ,  Philadelphie  ,  Sé- 
leucie  la  raboteufe  Se  Diocéfarée  : 
&  dans  la  Cétide  »  il  place  Ané- 
murium.  L'embouchure  du  fleuve 
Arymagdus  ,  Arfinoë  ,  Célende- 
ris ,  Aphrodifias  ,  le  promontoire 
de  Sarpédon ,  Tembouchure  du 
Calycadnus,  le  promontoire  de 
Zéphyrium  &  Olbafa. 

La  Cilicie  champêtre  ou  la  Ci- 
licie propre  ,  eft  appellée  m  n«//ccç 
par  Strabon ,  &  lî  T/Za  par  Ptolé- 
mée :  ce  qui  iignifte  champêtre  ou 
propre.  Le  mot  champêtre  ne  doit 
fe  prendre  ici  que  dans  le  fens 
d'un  pais  de  plaines  &  de  campa- 
gnes. Elle  avoit  à  Toccident  la  Ci- 
licie montagneufe  ,  à  l'orient  la 
Comagène  ^  &  au  midi  la  mer  & 
la  Syrie. 

Nous  avons  déjà  ol?fervé  que 


C  H  167 

les  Anciens  ne  s'accordent  pas  fiir 
les  bornes ,  qui  la  diAinguem  de 
l'autre  Cilicie.  Ptolémée  la  com» 
mence  à  Corycus  ;  Strabon  à  So- 
li ,  ville  qui  fut  enfuite  nommée 
Pompeiopolis.  Ses  bornes  du  coté 
de  la  Syrie  embarraflent  moins* 
C'étoic  le  mont  A  m  anus. 

Ptolémée  donne  à  la  Cilicie 
propre  ou  champêtre  ,  Corycus, 
Sébafte  y  l'embouchure  du  Làmus, 
Pompeiopolis  ou  Soli,  rembou- 
chure  du  Cydnus  &  fes  fources  i 
l'embouchure  du  Sarus  ou  Sina-^ 
rus ,  l'embouchure  du  Firame  & 
fes  fources ,  Mail  us  »  Serrépolis  9 
iEges  ,  Iflus  ,  Tarfe  ,  Adana  , 
Céfarée  près  d'Anazarbe  ,  Mopr 
fuefte  ,  Cadabala  ,  Nicopolis  i. 
Epiphanie  ^  &  le  paflage  du  mpnc 
Amanus. 

Ptolémée  donne  encore  de* 
noms  particuliers  à  quelques  can- 
tons de  la  Cilicie.  Ils  étoient  la 
plupart  ^u  nord  ,  le  long  du  mont 
Taurus.  Tels  étoient ,  la  Dalafida 
qui  avoit  pour  ville  Nécica  ;  U 
Characine ,  dont  la  ville  étoit  Fia- 
viopolis  ;  la  Lamotide ,  qui  tiroit 
fon  nom  de  Lamus ,  ville  bàiie  fur 
une  rivière  nommée  aùffi  Lamus  ; 
la  Lacanitide,  dont  la  ville  étoie 
Irénopolis  ;  &  la  Bryélice ,  qui 
avoit  pour  ville  Augufta. 

Dans  la  fuite ,  ainfi  que  nous 
l'avons  déjà  obfervé  ^  on  divifa 
autrement  la  Cilicie  ;  fçavoir  j  en 
première  &  en  féconde.  La  pre- 
mière étoit  gouvernée  par  un  hom- 
me Confulaire  »  &  la  féconde  par 
un  Préfident. 

La  première  Cilicie  avoit  huit 
fieges  épifcopaux  »  félon  les  No- 
tices de  Létn  le  Sage  &  de  tfié^ 

Liv 


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i68         .  C  H 

rocle$.  Cetoient  Tarfe  métropo- 
le, Pompeiopolis  [c'eft  la  Soli  de 
Strabon  ]  ,  Sébafte ,  Corycus  , 
Adana ,  Agufia  félon  Hiérodes  , 
Auguftopolis  félon  Léon  ,  Mal- 
chus félon  Hiérocics  ,  Malus  fé- 
lon Léon,  &  ZépKyrium. 

Les  mêmes  Notices  donnent  à 
la  féconde  Cilicie  neuf  villes  épif- 
copales,  qui  font  Anazarbe  mé- 
tropole ,  Mopfuefte  ,  ^ges  »  Epi- 
phanie ,  Alexandrie ,  Rofus  oa 
Roflus,  Irénopolis  >  Flavia  ou 
Flavias  ,  &  Caftabale.  Celle  de 
Léon  y  met  de  plus  CabifTus. 

Du  tems  que  ces  Notices  fu- 
rent dreffées ,  llfaurie  5*étoit  fort 
accrue  aux  dépens  de  la  Cilicie  ; 
car,  les  villes  de  Séléucie ,  Célen- 
déris ,  Anémurium ,  Lamus ,  An- 
tioche,  Sebafte ,  Sélinus ,  lotape, 
Diocéfarée  ,  &  autres  qui  éioient 
de  la  Cilicie,  félon  Ptolémée ,  font 
données  à  llfaurie  dans  ces  Noti- 
ces. 

La  Cilicie  fait  partie  préfeme- 
ment  de  la  Cara  manie  dans  la 
Turquie  d*Afie. 

CILICIE,  Ciiicia,  K<^/xla  , 
(iz)  province  de  la  Cappadoce  , 
félon  Ptolémée,  Ce  Géographe 
la  qualifie  préfefture  ou  gouver- 
nement militaire.  Il  y  met  Muf- 
tilia ,  Siva  ,  Campes ,  Mazaca  ou 
Céfarée  ,  Coziftra  ou  Cyfiftra  , 
•Sébagéna  ou  Ébagéna ,  Archama 
ou  Archalla  ,  &  Soroba  ou  So- 
bara. 

CILICIE ,  CUicia  ,  KimkU  , 
(b)  pah  de  la  Pamphylie ,  félon 
le  même  Ptolémée  ;  &  il  l'appelle 

(a)  Ptolem.  L.  V.  c.  6. 

(b)  Ptolem.  L.  V.  c.  5. 

le)  Plio.  T.  I.  p.  181.  Strab.  p.  aai  » 


CH 

la  Cîlîcîe  raboteufe  ou  inégale.  Ce 
païs  étoit  fitué  vers  le  milieu  des 
terres.  On  y  trouvoit  cinq  villes , 
Laerte ,  Cafés,  Lyrope  ,  ou  Lyr- 
be  ,  Colobroffe  &  Cybire. 

Les  deux  païs ,  dont  on  vient 
de  parler ,  dévoient  être  des  dé- 
membremens  de  la  Cilicie,  que 
nous  avons  dit  être  contigue  à  la 
Pamphylie  &  à  la  Cappadoce. 

CILICIE.  CUicia,  KiMiUy 
{c)  province  fituée  entre  la  Troa- 
de  &  l*Éolide  auprès  du  golfe 
d'Adramy tte  dans  T Afie  mineure, 
à  l'oppofite  de  Tifle  de  Lesbos.    ' 

Ce  païs  étoit  divifé  en  deux 
parues.  La  première,  la  plus  fep- 
tentrionale,  étoit  furnommée  Thé- 
baïca  ou  la  Cilicie  Xl^ébaïque  ,  à 
caufe  de  la  ville  de  Thebes  qui 
en  étoit  le  chef-lieu.  La  partie  la 
plus  méridionale^  prenoit  le  fur- 
nom  de  Lyrneffiè ,  de  la  ville  de 
LyrnefTe  qui  en  étoit  la  capitale, 

Pline  donne  aux  habitans  de 
cette  Cilicie ,  le  furnom  de  Man- 
dacadenes ,  ôi  les  met  au  nombre 
des  peuple*  qui  alloient  Vendre 
leurs  denrées  à  Adramytte.  Le  P. 
Hardouin  croit  que  c'étoit  une 
colonie  des  Ciliciens.  Strabon  eft 
d'un  fenriment  tout  oppofé,  & 
dit  que  félon  quelques-uns,  les  Ci- 
liciens ,  chaffés  deiroye ,  s'étoient 
emparés  fur  les  Syriens  du  pais 
nommé  enfuite  la  Cilicie.  M.  de  la 
Martinière  croît  que  ce  qui  a  été 
remarqué  ci-defTus  de  l'ancienne- 
té des  étoffes  nommées  cilices., 
s'accorde  mieux  avec  le  fentiment 
du  P.  Hardouin,  qu'avec  celui  de 

617 ,  6j6,  Métn.  de  PAcad.  des  Infcript. 
&  fiell.  Lett,  Tom.  XIX.  p.  598,  6ou 


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C  H  1^9 

ClUX,Cmx,KlMÎ.(c)ïun 
des  fils  d'Agénor,  qui  allèrent 
courir  le  monde  pour  chercher 
leur  foeur  Europe ,  que  Jupiter 
avoit  enlevée.  Il  ie  fixa  dans  cette 
parrie  de  l'Afie  mineure  qui  fut 
depuis  nommée  Cilicie. 

CILIX,  Cilix,  Ki>ii,  (d)  nom 
d*un  gladiateur  fameux.  Il  étoit 
fort  loué  au  ,  rapport  de  Juvé- 
nal. 

CILIX ,  Cilix  ,  K/>/^  »  (e) 
nom  d'un  voleur  ,  dont  Lucien 
fait  mention  dans  un  de  fes  Dia- 
logues. 

CILLA,  Cilla,  K/m*,  (/) 
ville  de  TAfie  mineure  dans  l'A- 
dramyttene ,  qui  étoit  un  canton 
de  la  Troade.  Cette  ville  a  été 
célébrée  par  Homère  ,  qui  nous 
append  qu'elle  étoit  fous  la  pro- 
teâion  d'Apollon.  Strabon  dit 
que  de  fon  tems ,  elle  étoit  voifine 
de  Thebes.  Il  ajoute  que  dans  ce 
lieu  de  Cilla,  étoit  le  temple  d'A- 
pollon Cilléen  ;  que  tout-auprès 
couloit  le  fleuve  Cilléen  qui  a  fa 
fource  au  mont  Ida.  w  Ces  lieux  , 
99  pourfuit  Strabon ,  font  près 
99  de  l'Antandrie.Il  y  a  auflî  dans 
99  rifle  de  Lesbos,  Cilléum,  qui 
99  tire  foni  nom  de  Cilla  ;  &  entre 
99  Gargare  &  Antandre  efl  une 
99  montagne  nommée  Cilléum* 
99  Daës  Colonien  dit  que  le  tem- 
99  pie  d'Apollon  Cilléen  fut  pre- 
99  mièrement  bâti  à  Colone  par 
99  des  Gi;iecs  venus  d'Éolie.  u 
Cette  même  ville ,  fi  nous  en 
croyons  Héfychius,  étoit  nommée 

(ê)  Plin.  T.  I.  p.  265,  I     (d)  Ju^en.  Satyr.  6.  v.  i»i. 

(()  Jofepb.  de  Amiq.  Judaïc.  p.  46s.   1     (e)  Lucian.  T.  II.  p.  187. 
{c)  Myth.  par  M.  l'Abb.  Ban.  Tom.l     (/)  Homer.  Iliad.  L.  I.  v.  58  ,  4^», 
yi'  p*  115  9  141»  I  Strab.  p.  61»  9  613.  Plin.  T.  I.  p.  lèu 


CH 

Strabon.  Ce  dernier  appelle  ces 
Ciliciens  du  furnom  de  Troyens , 
pour  les  diftinguer  des  autres,  & 
fait  mentron  de  Thebes  &  de  Lyr- 
nede  qui  éi9pient  leurs  villes  ;  il 
leur  donne  pour  voifins  les  Pélafges 
.d'Afie. 

Outre  les  villes  dont  on  vient 
de  parler  ,  il  y  en  avoit  une  autre 
dans  le  même  païs ,  celle  d'An- 
tandros ,  au  pied  du  mont  Ida. 
Les  Cimmériens  s'en  étant  empa- 
rés ;  en  refterent  les  maîtres  pen- 
dant un  fiecle  entier. 

CILIÙE  [  la  Mer  de  ]  ,  Mare 
Cilicium  ou  Cilicium  Mare.  On 
appelloit  ainfi  la  partie  de  la  mer 
Méditerranée  ,  qui  baî^noit  les 
côtes  de  la  Cilicie. 

'    CILICIENS ,  Cilîces  ,  X'^/xeç, 
peuples  de  Cilicie.  Voye:^  Cilicie. 

CILICIENS  [  l'Ifle  des  ]  , 
Cilicum  infula.  C'étoit  une  ifle 
du  Pont-Euxîn ,  félon  Arrieh.  Elle 
appartenoit  au  pont  Polémonia- 
que ,  &  étoit  à  quinze  flades  du 
promontoire  lafonien.  * 

CILICIUS  AULON,  C/7icitfx 
Aulon.  {a)  Ce  nom ,  félon  Pline, 
fe  dofuioit  à  la  mer  de  Cilicie. 
Nous  l'appelions  préfentement 
mer  de  Caramanie  ;  mais  le  nom 
moderne  figiîifie  une  étendue 
beaucoup  plus  grande. 

CILICIUS  AULON ,  Cilî- 
dus  Aulon  9  KiTiktoç  AVAto»» ,  (^) 
ville  des  Moabite^s,  félon  Jofephe. 
C'étoic  une  des  villes ,  dont  les 
Juifs  s*étoient  emparés. 


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170  C  H 

auffi  Callios  ,  Cyléas  &  Cyly- 
péra. 

CILLA,  Cilla,  KiT^oL,  {a) 
autre  ville  de  l'Afie  mineure,  dans 
TÉolide  ,  félon  Hérodote.  Mais , 
elle  pourroit  bien  être  la  même 
que  la  précédente  ;  6c  il  y  a  tout 
lieu  de  le  croire. 

CILLA ,  Cilla  ,  KiMfle  ,  ville 
de  r Afrique  propre  ,  félon  Ap- 
pien.  Saint  Cyprien  dans  le  con- 
cile de  Carthage  ,  fait  mention 
dTun  Évêque  de  ce  lieu. 

CILLACTER,  CilUéeri,  (b) 
poëte  Grec ,  dont  on  ne  trouve 
rien  dans  l'Anthologie  imprimée , 
&  dont  il  y  a  des  pièces  dans  l'an- 
thologie manufcriie  de  la  biblio- 
thèque du  Roi. 

CILLAS,  Cillas,  FCiMaç,  (c) 
étoit  récuyer  de  Pélops.  D'autres 
Tappelloient  Sphérus  au  lieu  de 
Tappeller  Cillas. 

CILLÉUS ,  Cillauf ,  furnom 
que  Ton  dotina  à  Apollon. 

QLLICON  ,  ailic(m  ,  K  >- 
T^if^r  »  citoyen  de  Milec ,  s'enri- 
chit lâchement ,  en  livrant  fa  pa- 
trie aux  habitans  de  Priene,  Lorf- 
qa'il  étoit  fur  le  point  d'exécuter 
(k  trahlfbn ,  on  lui  demanda  ce 
qu*!l  méditoit  ?  Rien  que  de  bon  , 
répondit -il  ;  d  où  eft  né  le  prover- 
be Grec:  -.ra/r*  àycêct  <àh%^^^  Kiu  • 
jCMK  9  rien  que  de  bon  ,  comme  a  die 
Cillicon. 

On  rapporte  qii'un  jour  qu'il 
achecoit  à  Samos  de  la  viande 
d'un  boucher  nommé  Théagènes, 

(a)  Herod.  L.  I.  c.  149.  1 

(i)  Mém.  de  TAcad.  des  Infctipt.  & 
leli.  Lett.  T.  II.  p.  165. 
(r>  Pauf.  p.  305. 
{4)  Dio.  CaiT.  p«  687.  Xaçit.  Annal. 


CH 

&  qu'il  en  vouloit  faire  couper 
un  morceau  qui  lui  paroifloit  trop 
gros  9  le  boucher  lui  coupa  la 
main  9  en  lui  reprochant ,  qu'il  ne 
s'en  ferviroit  plus  à  vendre  d'ai}^ 
très  villes.    ^ 

CILNIUS  MÉCÈNE  ,  CU^, 
nius  Mecanas,  Foye^  Mécène. 

CILO  [  JuNius  ]  ,  Junius 
Cilo  f  wm^  Kl^uff  «  (^)  étoit  in« 
tendant  de  Bithynie  &  du  Font , 
oh  il  fit  paroître  fon  avarice^  &  fa 
méch^^nceté.  Les  Bithyniens  s'en 
plaignirent  à  l'empereur  Claude  > 
&  demandèrent  qu'il  fût  puni.  Ce 
Prince ,  n'ayant  pas  bien  entenda 
ce  que  les  Bythiniens  difoient  >  fe 
tourna  vers  d'autres  gens  pour 
les  écouter  &  leur  rendre  juftice. 
Alors  un  nommé  NarcifFe ,  qui 
portoit  les  intérêts  de  Taccufé ,  dit 
hardiment  que  ceux  de  Bithynie 
rendoient  grâces  à  Junius  Cilo  de 
la  manière  douce  &  bienfaifante 
dont  il  les  avoit  traités,  durant 
tout  le  tems  de  fon  intendance  : 
Hé  bien  ^  dit  l'Empereur,  qu'il 
gêuverne  ces  provinces  encore  deux 
ans, 

Mithridate ,  qui  avoit  été  roî  du 
Bofphore ,  fut  livré  à  Junius  Ci- 
lo s  qwi  le  conduifit  à  Rome  ,  & 
qui-,  en  reçut  pour  récorapenfe  les 
ornemens  du  Confulat. 

CILO  [  L,  Fabius  Septi- 
MUS  ]  ,  £.  Fabius  Septimus  Cila^ 
Ce)  appelle  Chilo  dans  Idace  & 
dans  la  chronique  d'Alexandrie  , 
fut  un  des  iavof is  de  l'empereur 

L.  XII.  <i.  »i.  Crév.  Hift.  des  Emp.  T. 
n.  p.  194,  195' 

(e)  Dio.  CaflT.  pâg.  87a  ,  873-  Crév, 
Hift.  des  Emp»  T,  V,  p.  147 ,  14S. 


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ÇH 

Sévère.  II  géra  deux  fois  le  confu- 
lat  en  192 ,  &  204,  &  fut  Préfet 
de  Rome  fous  ce  Prince.  Il  (au va 
la  vie  à  Macrin ,  depuis  Empe- 
reur,  qui  ëtoit  fur  le  point  de  pé- 
rir avec  PIautien,dont  il  étoit  alors 
intendant.  Le  crédit  de  L.  Fabius 
Septimus  Cilo  parut  fe  foûtenir 
fous  Caracalla ,  qui  l'appelloit  fon 
nourricier  ,  fon  biewaiteur ,  & 
fouvent  fon    père.    Cependant , 

Farce  qu'il  avoit  voulu  ménager 
union  de  ce  Prince  &  de  fon  frère 
Gét^  ,  Caracalla  réfolut  de  fe  dé- 
faire de  lui  ;  il  n  ofa  pas  cependant 
ordonner  ouvertement  fa  mort. 
Mais,  des  fôldats  conduits  par 
un  Tribun  ,  agiflant  néanmoins 
comme  par  un  zèle  volontaire 
pour  TEmpereur ,  allèrent  enlever 
L.  Fabius  Septimus  Cilo  dans  le 
bain ,  pillèrent  fa  maifon  ,  &  le 
traînèrent  indignement  dans  les 
rues ,  lui  déchirant  fa  chemife  de 
bain,  qui  étoit  le  feul  vêtement 
qu'il  eût  fur  le  corps,  &  le  frap- 
pant au  vifage.  Leur  plan  étoit  de 
le  conduire  ainfî  au  palais  ,  pour 
recevoir  à  fon  fujet  les  derniers 
ordres  de  l'Empereur.  La  vue 
d'un  homme  fi  refpeélable  traité 
fi  outrageufement ,  excita  une  fé- 
dition.  Les  foldats  des  cohortes  de 
la  ville  9  qu'il  avoit  commandés 
en  fa  qualité  de  Préfet  de  Rome» 
firent  des  mouvemens  qui  effrayè- 
rent Caracalla.  Il  accourut ,  & 
couvrant  L.  Fabius  Septimus  Ci^ 
lo  de  fa  cafaque ,  il  s'écria  :  n  Que 
l'on  cejfc  de  frapper  mon  père,  mon 
maîtreycelui  qui  m'a  élevé  dans  mon 
enfance  ;  V attaquer  ,  c'eji  m'atta* 

Ca}  Cicer.  ad  Heren.  L,  III.  p.  sg. 


CH  171 

quer  moi-même^  Il  fut  atnfi  con- 
traint de  laifler  la  vie  à  L.  Fabiuf 
Septimus  Cilo.  Mais,  il  s*en  vep- 
gea  fur  le  tribun  &  fur  les  foldats , 
qui  furent  mis  à  mort  fous  pré- 
texte des  excès  auxquels  ils  ^*é- 
toient  portés  contre  L.  Fabius 
Septimus  Cilo  ;  &,  dans  la  vérité, 
pour  ne  l'avoir  pas  tué  dès  qu'ils 
s'écoient  vu  maîtres  de  fa  per- 
fotine. 

CILON,  Cilon^  Athénien; 
fortoit  d'une  famille  puiflante  & 
ancienne.  Après  avoir  remporté 
le  prix  aux  jeux  Olympiques  ,  & 
avoir  époufé  la  fille  de  Théagène, 
tyran  de  Mégare ,  il  confulta  l'o- 
racle de  Delphes  fur  le  defTein 
qu'il  avoit  de  s'emparer  de  la 
fortereffe  d'Athènes;  &  il  eut 
ordre  de  l'exécuter  à  la  grande  fê- 
te de  Jupiter.  Secondé  de  fes  amis 
&  de  quelques  troupes  de^  fon 
beau -père  ,  il  en  fit  l'entrcprife 
pendant  les  jeux  Olympiques  , 
s'imaginant  que  c'étoit  la  plus 
grande  fête  de  Jupiter^  la  premiè- 
re année  de  la  45.6  Olympiade  , 
&  l'an  600  avant  Jefus  -  Chrift. 
Mais,  étant  aflîégé  par  les  ci- 
toyens ,  il  fiit  obligé  de  s'enfuir 
avec  fon  frère.  Ceux  de  fon  parti, 
qui  s'étoienc  réfiigiés  à  l'autel  des 
Éuménides,  y  furent  maflacrés  ; 
ce  qui  fut  pris  pour  un  ttès-grand 
facrilege;  de  forte  que  ceux  qui 
avoient  violé  cet  afyle ,  paflerenc 
pour  des  impies ,  tant  eux  que 
leurs  defcendans ,  &  furent  bannis 
d'Athènes. 

CIMBER  ,  Cimber,  (.2)  héros, 
que  Cicéron  met  au  nombre  dQ 


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17^  CH 

ceux  quî  voulurent  fuborner  Iphî- 
génie,  Agam^mnon  6c  Ménélaus. 

CLMBER  GABÏNIUS  ,    (a) 

Cimber  Gabinîus  ,  l'un  des  prin- 
cipaux agens  de  la  conjuration  de 
Catilina.  Gceron  Tayant  envoyé 
chercher ,  il  commença  d'abord  à 
fépondre  avec  impudence.  Mais , 
à  ta  fin  »  il  convint  de  tous  les 
faits.  Oeft  tout  ce  que  l'on  fçait 
de  ce  Cimber  Gabinius,  qu  on  ne 
connoît  point  d'ailleurs. 

CIMBER,  Cimber,  Klf^^po;* 
{è)  Van  de  ceux  qui  entrèrent 
dans  la  conjuration  contre  Céfar. 
Le  vin  ne  lui  fit  point  échapper 
cet  important  fecret ,  quoiqu'il  fût 
très-fujet  à  s*enivrer,  &  qu'en 
plaifantant  fur  le  vin  auquel  il 
ctoit  enclin  ,  il  eût  dit  :  Moi  qui 
ne  puis  porter  le  vin ,  comment  fup» 
porter  ai 'je  Céjar^ 

Le  jour  marqué  pour  l'exécu- 
t\on  du  complot,  lorfque  Céfar 
fat  entré ,  &  que  le  Sénat  fe  fut 
levé  pour  lui  faire  honneur,  Cim- 
b^lui  denvanda  le  rappel  de  Ton 
^ere.  En  même  tems  ,  tous  les 
conjurés  environnèrent  Céfar  , 
comme  pour  joindre  leurs  prières 
a  cette  de  Cimber.  Céfar  rejetta 
toutes  leurs  fupplications ,  &  fe 
fôcha  même  contr'eux.  Alors 
Cimber ,  lui  prenant  fa  robe  avec 
{es deux  mains,  lui  découvrit  le 
col.  C'étoit  le  (îgnal  dont  les  con- 

(a)  Ciccr  in  Catil.  Orat.  5.  c.  ç»  ,  57. 

{h)  Plut.  Tom.  I.  p.  759.  Crév.  Hitt. 
Rom.  T.  VIII.  p.  46 ,  54. 

(c)  Tir.  Liv.  L.  XX  VIII.  c.  57. 

iS)  Vell.  Patcrc.  L.  II.  c.  8.  &  /r^. 
tacit,  Hift.  t.  ly.  c.  75.  de  Morib. 
Germ.  c.  %y.  Plut.  Tom.  I.  pag.  411. 
é^ïfi.  Ptolcm.  L,  II.  c.  II.  Plin,  Tom. 


C  H 

jurés  étoîent  cohvenus  pour  fc 
jetter  fur  lui. 

Plutarque  donne  à  Cimber  le  \ 
prénom  de  Métillius.  C'eft  plutôt 
Tillius.  Il  fe  lit  ainfi  dans  un  ma- 
nufcrit;  &  Suétone  l'appelle  de 
même  :  Illicoque  Cimber  Tillius^ 
qui  primas  partes  fufceperat ,  quafi 
aliquid  rogaturus  ,  propiàs  aC'» 
cejjit,^  Il  eft  vrai  qu'Appien  l'ap- 
pelle Atilius  .  Cimber  ;  &  on  le 
trouve  aind  dans  une  médaille  , 
Atilius  Cimber,  Mais  ,  cette  mé- 
daille e(l  fufpe6èe  aux  antiquaires 
avec  raifon.  H  faut  lire  dans  Ap- 
pien  ,  Tillius  Cimber.  Ni  Fulvius 
Urfmus  ,  qui  a  ramafTé  toutes  les 
médailles  de  la  famille  Atilia  ,  ni 
Antonius  Augudinus  qui  a  fait  un 
long  dénombrement  de  tous  ceux 
qui  en  ont  été  ,  ne  reconnoilTent 
cet  Atilius  Cimber.  Le  paffage  de 
Plutarque  pourroit  faire  croire  que 
ce  Cimber  s'appelloit  M.  Tillius 
Cimber ,  &  que  de  M.  Tillius,  les 
copiées  ont  fait  Métillius. 

CIMBIS,  Cimbis,  (c)  lieu  ma- 
ritime d'Efpagne  dans  le  voifinage 
de  Gades  ,  félon  Tite-Live.  Juf- 
te-Lipfe  ,  par  une  démangeaiibn 
de  corriger,  vouloir  qu'on  lût 
dans  cet  Auteur  Ambros  p  au 
lieu  de  Cimbim, 

CIMBRES,  Çîmbri.K  '/jlQooi,  {J) 
peuples  qui  fortirent  des  bords  de 
l*Océan  feptentt;ional ,  c'eft.à-dire> 
du  voifinage  de  la  mer  Baltique. 

I.  pag.  106  ,  «»o.  ^  /ej.  Tom.  H.  pag. 
«j.  &feq,  Roll.  Hift.  Ane.  Tom.  V.  p. 
396  ,  397.  ter  ftiiv»  Crév.  HtU.  des  Emp. 
Tom.  1.  p.  14a  ,  143.  Mém.  de  l*Acad, 
des  Infc,  &  Bell.  Leit.  Tdrn.  X\''III.  p, 
61.  Tom.  XIX.  pag.  591 ,  J91,  T.  XX. 
pag.  75.  é*  fniv. 


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CH 

I.  Ces  peuples  ont  été  fi  peu 
Connus ,  qu'on  a  fait  à  leur  fujec 
des  fabie's  infinies.  On  peut  voir 
le  feptième  livre  de  Strabon ,  qui 
approuve  la  conjeâure  de  Pofido- 
nius ,  qui  croit  que  les  Cimbres 
étoient  des  peuples  errans  &  des 
bandis ,  qui  ne  faifoient  que  piller» 
&  qui  s'éiendirent  par  les  armes 
Jufqu'aux  Palus  -  Méotides ,  & 
donnèrent  au  Bofphore  le  nom  de 
Cimméiien  ,  comme  Cimbrien, 
les  Grecs  donnant  le  nom  deCim- 
mériens  aux  Cimbres. 

Selon  Plutarque,  le  peu  de 
commerce  ,  que  les  Cimbres 
avoient  avec  leurs  voifins  ,  &  le 
grand  éloignement  des  pais  qu'ils 
occupoient ,  font  qu'on  ne  fçait  au 
vrai ,  ni  quelles  nations  c'étoient ,  ' 
ni  d*ovi  elles  étoient  parties  pour 
yenir  fe  répandre  comme  un  gros 
nuage  fur  la  Gaule  &  fur  lltalie. 
On  conjeâuroit  feulement  que 
c*étoient  quelques  nations  de  la 
Germanie  ,  à  çaufe  de  leur  grande 
taille ,  6i  de  leurs  yeux ,  d'une 
couleur  entre  le  verd  &  le  bleu  , 
&  parce  que  les  Germains  appel- 
aient les  voleurs  &  les  bandis , 
des  Cimbres. 

D'autres  diftntquela  Celtique, 
à  caufe  de  la  profondeur  &  de  la 
vafte  étendue  de  fon  continent . 
qui  s'étendoient  depuis  la  mer  de 
1  Océan  &  les  climats  feptentrio- 
naux,  vers  le  levant,  jufqu'aux  Pa- 
lus Méotides ,  touchoit  d'un  côté 
à  la  Scythie  Pontique  ;  &  qu'à 
caufe  du  volfinage,ces  deux  nations 
fe  mêlèrent  enfemble  ,  &  foni- 
rent  de  leur  païs  non  pas  tout  à  la 
fois  ni  tout  de  fuite ,  mais  chaque 
année  vers  je  printemsj  &  gagnant 


aînfi  peu  à  peu  du  terreîn  par  Jes 
armes  ,  enfîn  après  plufieurs  an- 
nées  elles  eurent  traverfé  ce  grand 
continent  de  l'Europe ,  &  arrivè- 
rent en  Italie,  C'eft  pourquoi, 
quoiqu'elles  euflent  plufieurs 
noms  différens  ,  félon  la  diverfité 
des  peuples  qui  les  compofoiem  ^ 
toute  leur  armée  fut  pourtant  cona- 
prife  fous  un  nom  général ,  &  ap- 
pellée  les  Celto-Scy  the«. 

D'autres  enfin  pi  étendent  que 
ces  nations  étoient  une  partie  de 
ces  Cimmériens ,  connus  des  an- 
ciens Grecs  ,  &  que  cette  petite 
partie  ,  ayant  pris  la  fuite ,  ou 
ayant  été  chafTée  parles  Scythes, 
a{Bès  quelque  fédition ,  pafTa  des 
Pafus-Méotides  en  Afie  ,  fous  la 
conduite  d'un  chef  appelle  Lyg- 
damis.  Mais  ,  les  autres  ,  qui 
étoient  le  plus  grand  timbre  ,  ôc 
ce  qu'il  y  ayoit  de  plus  belliqueux, 
habitoient  à  l'extrémité  de  la  terre 
près  de  l'Océan  feptentrional,dans 
un  païs  toujours  couvert  d'épaif- 
fes  ténèbres  ,  &  fi  rempli  de  boii  , 
que  le  foleil  ne  le  pénétroit  jamais 
de  fes  rayons ,  à  caufe  de  la  hau^ 
teur  &  de  l'épaifTeur  de  ces  forets, 
qui  étoient  d'ailleurs  fi  vaftes  & 
fi  profondes ,  qu'elles  s'étendoient 
jufqu'à  la  forêt  Hercinienne.  Ils 
étoient  fous  c^tte  partie  du  ciel  , 
où  l'élévation  du  pôle  eft  ù  haute 
à  caufe  de  la  déclinaifon  des  cercles 
parallèles ,  qu'elle  fait  prefque  le 
point  vertical  de^  ces  peuples ,  & 
que  les  nuits  égales  aux  jours  , 
partagent  le  tems  en  deux  parties 
égales.  C'efl  ce  qui  a  donné  à 
Homère  l'idée  de  la  fable  de  fes 
enfers ,  qu'il  place  dans  le  païs  des 
CuttmérieQs. 


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174  C  H 

Voilà  d'où  partirent  ces  Barba- 
res, pour  venir  en  Italie.  D  abord, 
ils  ^furent  appelles  Cimmériens  , 
&  enfin  Cimbres  ,  fans  que  leurs 
mœuts  euffent  aucune  part  à  cet- 
te appellation.  Mais  ,  quant  à 
ces  chûfes ,  on  les  devine  plutôt 
par  conjecture ,  qu*on  ne  les  fçait 
avec  certitude  par  le  témoignage 
de  l'Hiftoire. 

Il  y  a  peu  d'exaâitude  dans  ce 
récit  de  Plutarque;  car,  en  pre- 
mier, lieu  ,  tout  le  païs  des  Cim- 
bres s*étendant  à  peine  jufqu'au 
cinquante-feptième  degré  trente- 
cinq  minutes  de  latitude  »  il  eu, 
bien  éloigné  d*avoir  l'élévation  du 
pôle,  ou  le  pôle  même  pour  pottt 
vertical.  Cette  égalité  des  jours 
&  des  nuits  eft  une  chimère  ,  6c 
dans  ce  pais-là  comme  dans  tout 
le  refte  de  l'Europe,  elle  ne  fe  voit 
qu'au  tems  des  équinoxes.  En  fé- 
cond lieu ,  Homère  y  n'a  jamais 
fongé  à  mettre  fes  enfers  dans  la 
Cherfonnèfe  Cimbrique,  ni  mê- 
me chez  les  Cimmériens  Scythi- 
ques ,  mais  en  Italie  dans  la  Cam- 
panie  >  près  du  lac  d'A verne ,  de 
B^les  Si  de  Cumes.  Les  ténèbres 
Cimmériennes  ,  qui  ne  convien- 
nent qu  a  ce  dernier  lieu ,  ont  été 
tranfportées  dans  le  Scythie  & 
dans  la  Cimbrique ,  &  ont  donné 
lieu  au  profeffeur  Rudbeck ,  Sué- 
dois ,  de  tranfporcer  les  Cimmé- 
riens de  l'antiquité  au  fond  de  la 
Scandinavie ,  ou  ce  qui  eft  la  mê- 
me chofe  ,  chez  les  Lapons  ;  car , 
ce  profefleur  avoit  la  foibleffe  de 
vouloir  attirer  de  gré  ou  de  force 
.  dans  fa  patrie  ^  tout  ce  qu'il  lifoit 
de  fingufîier.  La  Suéde  étoit  pour 
lui  une  efpèce  de  gibecière  dans 


CH 

laquelle  il  fourroit  bien  ou  mal ,' 
tout  ce  qu'il  pouvoit  recueillir 
dans  les  Écrits  des  Anciens.  C'ed 
ce  qui  a  jette  un  ridicule  ineffaça- 
ble fur  fon  Atlantica ,  livre  rem- 
pli d'ailleurs  d'une  érudition  peu 
commune. 

Mais,  revenons  à  Plutarque.  Il 
fe  trompe  encore  ,  quand  il  croit 
que  le  peuple,  dont  il  s'agit  ,fut 
d'abord  appelle  Cimmérien ,  & 
enfuite  Cimbre.  Il  devoit  dire 
tout  le  contraire.  Son  vrai  nom 
étoit  les  Cimbres ,  &  ce  ne  fur 
que  par  la  négligente  des  Grecs, 
que  ce  nom  iè  trouva  confondu 
avec  celui  des  Cimmériens  ,  peu- 
ple très-différent  ,  quand  même 
il  feroit  certain  qu'ils  venoient 
l'un  de  l'autre.  Les  noms  des 
François  &  des  Allemands  font 
des  noms  de  peuples  très-dîffé- 
rens ,  quoiqu'ils  foient  voifins  ,  ÔC 
que  les  Francs  foient  venus  d'au 
de- là  du  Rhin  ,  c'eû-à-dire, 
d'Allemagne. 

II,  On  avoit  à  peine  reçu  à 
Rome  la  nouvelle  de  la  prife  de 
Jugurtha ,  qu'on  y  apprit  la  def- 
ceiue  des  Cimbres.  D'abord ,  on 
eut  de  la  peine  à  croire  ce  qu'on 
difoit  du  nombre  &  de  la  force  de 
leur  armée  ;  mais,  bien*tôt  après, 
on  connut  que  tout  ce  qu'on  en 
rapportoit ,  étoit  "encore  au-def- 
fous  de  la  vérité.  Car,  il  y  avoit 
trois  cens  mille  hommes  portant 
les  armes  ,  &  ils  étoîent  fuivis 
d'un  plus  grand  nombre  de  fem- 
mes &  d'enfans  ,  tous  demandant 
des  terres  capables  de  nourrir  cette 
multitude  innombrable,  &  des  vil- 
les pour  s'y  établir ,  comme  ils 
ayoient  oui  dire  que  les  Celtes 


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( 


CH      , 

avoîent  fait  avant  eux  ,  s*étant 
emparés  de  TÎtalie  ,  la  meilleure 
,&  la  plus  fertile ,  qu'ils  ôterent 
aux  Tofcans. 

Il  eu  Cionflant ,  &  la  plupart  des 
Hifloriens  en  conviennent  9  4"^  ^^ 
nombre  des  Cimbres ,  bien  loin 
d  être  moindre  ,  étoii  encore  plus 
grand  que  nous  ne  lavons  dit. 
Pour  le  courage,  Taudace  y  la  vi- 
vacité &  la  torce ,  qu'ils  témoi- 
gnoient  dans  les  combats,  on 
peut  les  comparer  à  l'impétuofité 
&  à  la  violence  de  la  foudre.  Rien 
ne  pouvoir  tenir  devant  eux ,  ni 
refluer  à  leurs  efforts;  par  tout  oîi 
ils  pafToient ,  les  peuples  étoient 
entraînés  comme  des  troupeaux 
dont  ils  faifoient  leur  proie. 

£n  effet ,  les  Cimbres ,  s'étant 
d*abord  avancés  du  côté  de  la 
Bohême,  furent  repoufTés  par  les 
Boïêns,  habitans  du  païs.  Mais,  ils 
s  approchèrent  du  Danube,  le 
paflerent  ,  &  pénétrèrent  juf- 
qu'aux  Scordiques  ,  que  l'on  pla- 
ce fur  la  Save.  DeAz  tournant 
vers  l'occident ,  ils  entrèrent  dans 
k  païs  des  Tau  rifles  ou  Tauri-^ 
ciens,qui  répond  à  ce  que  nous  ap- 
pelions aujourd'hui  la  Styrie.Tou- 
tes  les  nations,  par  iefquelles  nous 
venons  de  tracer  la  route  des  Cim- 
bres, étoient  Gauloifes  d'origine. 
Il  ne  paroit  point  qu'ils  aient  pu 
ou  voulu  fe  6xer  dans  aucune  de 
ces  régions.  Ainfi  continuant  leur 
marche,  ils  entrèrent  dans  le  No- 
rique  ,  y  faifant  leurs  ravages  or- 
dinaires ;  ôc  ce  fut  là  qu'ils  le  trou- 
vèrent pour  la  première  fois  com- 
mis avec  les  Romains. 

Ce  païs  ,  qui  renferraoit  à  peu 
.'ft^   ce    que  nous  comprenons 


C  H  175 

maintenant  fous  les  noms  de  hau- 
te Autriche  &  de  cercle  de  Ba- 
vière ,  jnettoit  les  Cimbres  trop 
à  portée  de  l'Italie ,  pour  ne  pas 
donner  de  la  jaloufie  aux  Ro- 
mains. Le  conful  Cn.  Papirius 
Carbon  fe  poila  dans  les  gorges 
des  Alpes  pour  leur  fermer  le  paf^ 
fage.  Puis  voyant  que  les  Cim- 
bres paroifloient  avoir  de  tout 
autres  deffeins  ,  il  devint  plus  har- 
di, &  envoya  des  députés  leur 
demander  avec  menaces,pourquoî 
ils  ravageoient  les  terres  des  No- 
riques ,  qui  étoient  amis  &  hôtes 
des  Romains. Il  n'y  avoit  pourtant 
point  de  traité  d'alliance  ,  qui 
obligeât  les  Romains  à  prendre  la 
défenfe  de  ces  peuples.  Les  Cim- 
bres chargèrent  des  ambaffadeurs 
d'aller  porter  leur  réponfe ,  qui 
fut  tfès  modérée.  Ils  proteflerent 
qu'ils  refpeâoient  le  nom  Romain^ 
qu'ils  ne  vouloient  attaquer  au- 
cune nation  qui  fût  alliée  de  Ro- 
me ;  qu'ils  alloient  fortir  du  No- 
rique ,  &  fe  chercher  un  établifTe- 
ment  dans  les  pais  auxquels  les 
Romains  n'euffent  point  de  raifon 
de  s'inféreffer.  Le  Confol,  prenant 
apparemment  pour  timidité  ce  qu; 
étoit  un  effet  de  modération  dans 
ces  Cimbres  ,  plus  équitables  qu^ 
lui ,  crut  faire  un  grand  coup  de 
prudence  de  tâcher  de  les  fur* 
prendre.  Il  donna  à  leurs  ambaf- 
fadeurs des  guides  qui  les  condui- 
firent  par  de  longs  circuits  ;  &  lui, 
menant  fon  armée  par  des  che- 
mins plus  courts  ,  il  marcha  con- 
tre les  Gmbres ,  qu'il  trouva 
campés  près  de  Norcia  ,  ville  que 
Freinshémius  croit  être  Gorice  en 
Carimhie*  Sa  rufe  lutréuffît  maL 


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176  Ç  H 

Les  Cîmbres  quoique  furprîs  & 
attaqués  pendant  la  nuit ,  trouvè- 
rent une  refTource  dans  leur  cou- 
rage. Le  Conful  fut  repouffé  avec 
perte  ;  &  li  une  groffe  pluie  n*eût 
mis  ûîï  au  combat ,  Tarmée  Ro- 
maine auroit  été  taillée  en  pièces. 
Les  vainqueurs  ne  fçurent  pas 
profiter  de  leur  avantage  ;  ôc  fans 
qu'on  en  puifTe  dire  la  raiibn  ,  ils 
tournèrent  du  côfié  de  la  Gaule  &L 
des  Helvétiens. 

Ces  peuples ,  aujourd'hui  les 
SuifTes  ,  bien  différens  alors  de  ce 
qu'ils  font  maintenant  ,  étoient 
fort  riches  au  rapport  de  Strabon, 
&  p^iTédoient  beaucoup  d'or. 
Mais ,  comme  ils  virent  que  leurs 
nouveaux  hôtes  ,  par  le  pillage 
de  tant  de  contrées ,  étoient  deve- 
nus encore  plus  riches  qu'eux ,  le 
métier  leur  parut  bon,  particulier 
rement  aux  Tiguriens  &  aux  Tu- 
géniens.  Les  peuples  de  ces  deux 

,  cantons  fe  joignirent  aux  Om- 
bres ;  mais ,  il  eft  difficile  d  aiïi- 
gner  la  date  de  cette  jonftion  , 
qui  pourroit  bien  ne  s'être  faite 
que  quelques  années  après  la ,  dé- 
faite de  Cn.  Papirius  Carbon. 

On  perd  de  vue  les  Cimbres 
pendant  trois  ou  quatre  ans  ,  au 
boutdefquels,  ils  reparoiflTent  dans 
la  Gaule  ,  demandant  au  conful 
Silaifns  des  terres  où  ils  puifTent 
s'établir  ^  &  offrant  aux  Rçmains 
à  ce  prix  le  fervice  de  leurs  armes 
&  de  leurs  bras.  On  n'avoit  garde 

^  d'accepter  de  pareilles  offres.  Ils 
réfolurent]  donc  d'obtenir  par  la 
force  ce  qu'on  refufoit  à  leurs 
prières.  Ils  allèrent  attaquer  le 
Conful,  &  remportèrent  fur  les 
Rgmaips  une  féconde  viâoire* 


CH 

Les  Teâofages ,  ci- devant  al- 
liés des  Romains ,  s'éiant  laiffés 
entraîner  à  la  révolte  par  les  pro- 
meffes  des  Cimbres ,  furprirent  ÔC 
mirent  dans  les  chaînes  la  garnifon 
Romaine  ,•  qu'ils  avoient  dans 
leur  ville.  Cépion  marcha  contre 
eux,  &  à  l'aide  d'une  intelligence, 
il  entra  dans  Touloufe,  &  livra  la 
ville  au  pillage.  Ce  n'eft  pas  ici  le 
lieu  de  raconter  les  fuites  de  cet 
événement.  * 

L'année  fui  vante ,  l'an  de  Ro- 
me 64J  ,  &  avant  Jefus  -  Chrift 
105  9  M.  Aurélius  Scaurus ,  l'un 
des  Lieutenans  généraux  du  con- 
ful Cn.  Manlius ,  fut  défait  par  les 
Cimbres  avec  un  aflez  gros  déta- 
chement qu'il  commandoit ,  & 
refta  prifonnier  entre  les  mains  des 
vainqueurs.  Bientôt  après  ,  les 
Cimbres ,  ayant  appris  la  jondion 
des  deux  armées  Romaines  ,  fup- 
pofant  qu'elle  étoit  l'effet  de  la 
réunion  dQs  efprits  [  car  ils  avoient 
été  informés  de  la  difcorde  quire-. 
gnoit  entre  les  généraux  ]  ,  en- 
voyèrent des  députés  vers  les  Ro- 
mains pour  traiter  de  paix.  Cé- 
pion ,  dans  le  camp  duquel  ils  en- 
trèrent d'abord,  voyant  que  ce 
n'étoit  point  à  lui  ,  mais  au  Con- 
ful ,  qu'ils  avoient  ordre  de  s'a- 
drefTer,  en  conçut  une  baffe  & 
ridicule  jaloufie  ,  &  bien  loip  de 
leur  tenir  un  langage  pacifique  , 
peu  s'en  fallut  qu'il  ne  les  fît  met- 
tre à  mort. 

Une  conduite  fi  miférabîe  eut 
le  fuccès  ,  qu'elle  devoir  avoir  ,  & 
attira  aux  Komains  la  plus  horri- 
ble défaite  qu'ils  euffent  jamais 
éprouvée.  11  ne  nous  refle  aucun 
détail  de  cette  aâion  fanglame. 


N 


ous 


DigitizedbyVjOOQlC 


CH 

Nous  ne  fçavons  pas  même  au 
jufte  le  lieu  oii  elle  fe  donna  ,  que 
l'on  peut  pourtant  conjeâurer  n'a- 
voir pas  été  loin  d'Orange.  Nous 
apprenons  feulement  de  quelques 
Abréviateurs  ,  que  le  carnage  fut 
affreux  ôc  prefque  incroyable.Les 
deux  armées  furent  abfolument 
taillées  en  pièces,  les  deux  camps 
furent  pris.  On  fait  monter  le 
nombre  des  morts,  jufqu'à  qua- 
tre-vingt mille  foldats  y  tant  Ro- 
mains qu  alliés ,  entre  lefquels  on 
compte  deux  fils  du  Conful ,  & 
quarante  mille  valets,  ou  autres 
gens  qui  fuivoient  l'armée.  On 
prétend  qu'il  ne  s'échappa  pas  du 
carnage  plus  de  dix  hommes, 
pour  en  aller  porter  la  nouvelle.. 
Les  Ombres ,  avant  le  combat , 
s'étoient  engagés  par  un  vœu  , 
aflez  ordinaire  alors  parmi  les 
Gaulois  &  les  Germains,  à  fa- 
crifier  aux  dieux,6c  à  détruire  tout 
ce  qui  tomberoit  en  leur  pouvoir. 
Ils  s'acquittèrent  avec  fidélité  de 
ce  voeu  barbare.  Voi  &  Targent 
fûifent  jettes  dans  le  Rhône  ;  le 
bagage  fut  mis  en  pièces ,  les  ar- 
mes ôc  les  cuiraiïes  brifées,  les 
brides  des  chevaux  rompues  «  les 
chevaux  eux-mêmes  noies  ,  Se  les 
hommes  pendus  à  des  arbres.  Le 
célèbre  Sertorius  qui ,  fort  jeune 
alors,  fer  voit  dans  l'armée  de  Cé- 
pion,  eut  aflez  de  force  &  de  cou- 
rage pour  pafler  le  Rhône  à  la  na- 
ge tout  armé  avec  fa  cuirafTe  &  fon 
bouclier. 

Eutrope  &  Orofe  nomment 
quatre  peuples  qui  eurem  part  à 
cette  viàoire ,  les  Cimbrqs  ,  les 
Teutons,  les  Tiguriens,  ôt  les 
Ambrons.  Plutarque  en  attribua 
Tom.  XI. 


CH  177 

le  principal  honneqr  aux  Am- 
brons ,  qui  paroiffent  avoir  été  un 
canton  helvétique.  Il  en  parle 
comme  dugiprps  le  plus  brave  & 
le  plus  tefcle  de  toute  Tarmée 
liguée.  Ils  étoient  au  nombre  de 
trente  mille. 

Après  une  fi  grande  viftoire  , 
bn  délibéra  fur  ce  qu'il  çonvenoit 
de  faire  pour  en  profiter.  Les  avis 
ne  fiirent  point  partagés,  on  con- 
vint qu'il  ne  falloit  point  laifTer 
aux  ennemis  le  tems  de  fe  recon- 
noître.  Les  Cimbres  ,  ayant  û 
facilement  vaincu  ceux  qu'ils 
avoienj  rencontrés  ,  réfcdurent  de 
ne  s'arrêter  &  de  ne  s'établir  nulle 
part ,  qu'ils  n'euflenc  iuiné  Ro-  ' 
me ,  &  faccagé  toute  l'Italie. 

On  comprend  aifément  quelle 
allarme  6c  quelle  confternation 
jeita  dans  Rome  une  perte  fi  ter- 
rible ,  qui   menaçoit  d'un  danger 
encore  plus  grand.    On    voyoit 
aux  portes  de  ritalie,une  nuée  ef- 
froiable  de  Cimbres  ,  trois  cens 
mille   hommes    portant    armes , 
marchant  avec  leurs  femmes  & 
leurs  enfans  ,  non  pour  fubjuguer 
l'Italie ,  mais  pour  l'envahir  ,  s'é- 
tablir dans  les  villes  ,  s'emparer 
des  terres  ,  &  exterminer  la  plu- 
part des  habîtans.  La  renommée  , 
dès  le  commencement ,  avoit  pu- 
blié des  chofes  effi-aiantes  de  leur 
force  ,  de  la  grandeur  de    leur 
taille ,  de  leur  valeur  ,  ou  plutôt 
de  leur  férocité ,  qui  emportoit  Se  * 
ravageoit  tout,"  comm^  un  torrent  ' 
impétueux  ;  &  les  effets  furpaf-  - 
foient  encore  ce  que  -la  renom-  • 
mée  en  avoit  d'abord  annoncé. 
Les  Romams  ,"  toujours  fages  ' 
.  dans  l'adverfitéi  arcwenr  enfin  pris  * 
M 


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178  CH 

les  meilleures  mefures  pour  aVrê-  ' 
ter  la  tempête  qui  les  menaçoit. 
Mais  ,  ces  mefures  auroiem  été 
peut-être  tardives ,  û  l^roviden- 
ce  f  qui  veilloit  à  la  cflfervation 
de  Rome  ,  &  qui  dedinoit  cette 
ville  à  devenir  la  capitale  &  la 
inaîtreffe  de  l'univers ,  n'eût  pris 
foin  d  écarter  d'abord  &  d'éloi- 
gner le  danger.  Le  tems  n'étoit 
pas  encore  venu  ,  où  l'empire 
îlomain  devoir  être  la  proie  des 
Barbares.  Nous  venons  de  laifler 
les  Cimbres  dans  la  réfolution  de 
marcher  contre  Rome.  Et  s'ils 
euflient  exécuté  fur  le  champ  cette 
réfolution  ,  tout  étoit  à  craindre» 
Mais ,  fans  qu'on  en  fçache  la  rai- 
fon  ,  ils  tournèrent  le  dos  à  l'Ita- 
lie, &  après  avoir  ravagé  tput  le 
pais ,  depuis  le  Rhône  jufqu'aux 
Pyrénées,  ils  paflerent  en  Efpa- 
gne.  Ainfi ,  les  Romains  eurent  le 
tems  de  fe  remettre  de  leur  frayeur. 
Cependant,  les  Cimbres  ne  fu- 
rent pas  heureux  dans  leur  expé- 
dition d'Efpagne.  Les  Celtibériens 
les  vainquirent  ;  mais ,  il  faut  que 
leur  perte  n'ait  pas  été  confidéra- 
ble.  Ils  revinrent  joindre  les  Teu-  . 
tons ,  &  fe  préparèrent  à  faire  en-  - 
fin  tomber  tous  leurs  efforts  (ur 
l'Italie.  Avant  que  les  deux  peu-  ; 
pies  fuflem  réunis,  Marius  fut 
élu  Conful  pour  la  quatrième  fois,  î 
avec  Q.  Lutatlus- Caculus*   . 

Nos  deux  Cotifuls ,  qui  a  voient., 
tout  préparé  pour  fe  mettre   tn , 
Campagne  y  partirent^  de  Rome  , 
dès  qu'ils  .apprirent  que  les  enne^ 
mis  étoientiea  jmarche.  Ceux-ci ,  - 
ayant  part9g,é  ieurs.  troupes  ,  s'a*  . 
vançQient;pa£:deyx  routes  diffé- 
ireates.  h^  Cimbf  ç$  prenoieat  par 


CH 

leNorique  pour  entrer  dans  l'Ita*^ 
lie  par  le  .Treiuin.  Les  Teutons 
èi  les  Ambrons  fe  propofoient  de 
traverfer  la  province  Romaine, 
&  de  tourner  par  la  Ligurie.  Les 
Confuls,  fur.  ces  nouvelles ,  fe  fé- 
parerent  auili.  Q.  Lutatius  Catu- 
lus  fe  porta  du  côté  des  Alpes 
Noriques  pour  y  atteindre  les 
Cimbresi&  Marius  alla  camper  an 
confluent  de  llfère  &  du  Rhône, 
pour  s'oppofer  aux  Teutons  & 
aux  Ambrons.  Nous  laifferons-là 
le  récit  de  ce  qui  regarde  ces  der« 
niers ,  comme  étranger  à  notre 
fujet. 

La  marche  des  Cimbres  fut 
longue  ;  mais ,  étant  eniin  arrivés 
près  des  Alpes  du  côté  du  Tren- 
tin }  ils  fe  préparoient  à  entrer  en 
Italie.  Q.  Lutatius  Catulus  ,  qui 
s'étoit  d'abord  faifi  des  hauteurs 
pour  y  arrêter  Içs  Cimbres  ,  crai- 
gnant que  forcé  de  féparer  fon  ar- 
mée en  pluûeurs  pofles ,  il  n'en 
fût  trop  affoibli  ,  prit  donc  le  par- 
ti de  defcendre  en  Italie,  mit  de* 
vant  lui  la  rivière  d'Athéfis  ,  ^l 
forma  fur  les  deux  rives,  deux 
campi  pour  en  défendre  le  paiTa- 
ge  ,  le  plus  grand  en  deçà  de  Ja 
rivière ,  &  l'autre  au  de-là ,  du 
côté  où  arrivoient  les  Cimbres  ; 
&L  pour  la  communication  de  ces 
deujc  camps ,  iL  jetta  fur  TAihéfis 
un  pont ,  qui  le  mettoit  en  état 
d'aikr  au  (ecours  de  to^ut  ce  qui 
pourroit  être  attaqué  par  les  en- 
nemis. Les  Cimbres  avoient  tant 
de  inépris  pour  fe&  Romains  ,  & 
étôient  fi  pleins*  d*ufte  folie  arro- 
gance ,  que  pouMiîontrer  fimple- 
metit  leur  force  &'  leur  audace , 
f^as  aucune  u^ilté-  ou  néceflité. 


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CH 

Ils  s'expofoient  à  la  neige  tous  nus, 
grimpoient  aux  fommets  des  mon- 
tagnes ,  aux  travers  des  monceaux 
de  neige  &  de  glace  ;  &  quand  ils 
étoient  au  haut  ,  mettant  leurs 
boucliers  fous  eux  ,  ils  s*abandon- 
noient  ainfi  aux  penchans  de  ces 
montagnes ,  &  fe  laifToient  xou- 
1er  le  long  de  ces  rochers ,  dont 
la  pente  étoit  fort  roide  ,  &  qui 
avoient  fous  eux  des  fondrières 
&  des  abîmes  épouvantables. 

En6n  ,  après  qu'ils  fe  furent 
campés  près  des  Romains ,  6c 
qu'ayant  fondé  la  rivière  ,  ils  eu- 
jent  vu  qu'ils  ne  pouvoient  la 
pafler,  ils  entreprirent  de  la  com- 
bler ;  6c  déracinant  les  plus  gros 
arbres  ,  détachant  d'énormes  maf- 
fes  de  rochers ,  &  roulant  de  gref- 
fes buttes  de  terre  ,  ils  les  traî- 
noicnt  dans  le  fleuve  ,  dont  ils 
refîerroient  par- là  le  cours.  Pour 
ébranler  les  poutres  qui  fervoient 
comme  dé  fondement  au  pont  des 
Romains,  ils  jettoient  dans  la  ri- 
vière de  groiTes  mafles  ,  qui  étant 
rapidement  entraînées  par  le  iil 
de  l'eau ,  battoient  rudement  le 
pont,&  lui  donnoient  des  fecouf- 
fes  fi  terribles,  qu'il  ne  pouvoit 
réfifter  long-tems. 

La  plupart  des  foldats  Romains, 
faifis  de  frayeur  à  cette  manoeuvre 
des  ennemis  ,    abandonnèrent  le 

frand  camp  &  fe  retirèrent.  Q. 
utatius  Catulus  tint  en  cette  oc- 
cafion  une  conduite ,  qui  a  été 
louée  par  Plutarque,  mais  qqi 
néanmoins  eft  fufceptible  d'une 
interprétation  peu  avantageufe. 
Voyant  qu'il  ne  pouvoit  retenir 
les  fuyards  ,  il  ie  mit  lui-même  à 
leur  tête ,  afin  de  fauver  Thonneur 


C  H  179 

delà  nation,  &  n^  voulant  pas 
qu'il  fût  dit  que  les  Romains  euf- 
fent  fui  devant  les  Cimbres  , 
mais  qu'ils  paruflent  plutôt  avoir 
fuivi  leur  général.  Q.  Luiatius  Ca- 
tulus facritia  donc  ici  fa  gloire  à 
l'honneur  du  nom  Romain  ;  &  on 
ne  peut  fe  difpenfer  deTeri  louer , 
s'il  ne  pouvoit  mieux  faire. 
Mais ,  il  eût  mieux  valu  fans  dou- 
te ranimer  le  courage  de  fes  fol- 
dats, que  de  fauver  ainfi  leur 
honneur.  Marius  en  une  pareil-» 
le  occafion  ,  n'auroit  pas  voulu 
mériter  une  pareille  louange, 
Auffi, Plutarque  dit-il  ailleurs,  que 
Q.  JLutatius  Catulus  étoit  peu 
guerrier. 

Ceux  qui  étoient  dans  le  petit 
camp  au  de-lâ  de  la  rivière ,  quoiy 
que  plusexpofés,  montrèrent  plus 
de  réfoluîion.  Ils  fe  défendirent  û 
vigoureufement ,  que  les  Cim- 
bres ,  admirant  leur  valeur ,  leur 
,  pern.irent  de  fe  retirer ,  en  leur 
accordant  une  capitulation  hono- 
rable qu'ils  jurèrent  fur  leur  tau- 
reau d'airain.  Après  la  prife  du 
petit  camp ,  tout  le  païs  des  envi- 
rons étant  fans  défenfe ,  les  Cim- 
bres fe  répandirent  par  tout  &  le 
pillèrent. 

On  ne  trouve  rien  ,  nulle  autre 
part ,  de  ce  taureau  d'airain  ,  fur 
lequel  les  Cimbres  juroiem,  Plu- 
tarque en  parle  pourtant  comme 
d'une  chofe  connue.  Les  Cimbres 
adoroient-ils  un  taureau  ? 

Flc^rus  prétend  que  s'ils  avoient 
marché  droit  à  Rome,  ils  auroient 
pu  y  eau  fer  les.  mêmes  défaftrcs 
qu^avoient  fait  long-tems  aupa- 
ravant les  Gaulois  en  pareille 
conjonfture.  Mais ,  pour  attendre 
M  ij 


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i8o  C  H 

, leurs  compagnons ,  comme  ils  en 
étoient  convenus  avant  que  defe 
féparer  ,  ils  s'arrêtèrent  dans  cette 
contrée  ,  dont  la  douceur  les  char- 
ma.  Cet  agréable  féjour  ,  où  ils 
trouvoient  tout  en  abondance  , 
leur  devint  funefle  en  énervant 
leurs  corps  ^  ôc  en  amollifTant 
leurs  courages  par  des  délices 
auxquelles  ils  fe  Hvroient  avec 
d'autant  plus  d'avidité  &  d'ardeur, 
qu'ils  y  étoient  nloins  accoutu- 
més. 

Dans  cette  extrémité  ,  Marius 
partit  pour  aller  joindre  Q.  Luta- 
tius  Catulus  4  &  fit  venir  Tes  trou- 
pes de  la  Gaule  Natbonnoife  ,  oîi 
il  les  avoit  laiiïées  après  la  défaite 
des  Teutons.  Il  paroît  que  Q. 
Lutatius  Catulus  avoit  mis  le  Pô 
entre  lui  &  les  Barbares ,  puifqu'il 
eft  dit  que  Marius  ,  lorfqu'il  fe 
fut  joint  avec  lui ,  pafla  ce  fleuve, 
&  que  ce  fut  auprès  de  Verceil 
que  la.bataille  fe  donna. 

Les  Cimbres  étoient  à  peu  de 
diftance  des  Romains  ;  mais ,  ils 
diiféroient  de  donner  labataille,at- 
tendant  toujours  les  Teutons  avec 
impatience  ,  foit  qu'ils  ignorafl!snt| 
foit  [  ce  qui  eft  plus  vraifembla- 
i)le]qu'ils  ne  voulufTent  pas  croire 
leur  défaite.  Voyant  que  les  deax 
généraux  avoient  réuni  leurs  trou- 
pes ,  ils  envoyèrent  à  Marius  des 
ambafTadeurs  »  lui  demander  pour 
eux, 6c  pour  leurs  frères,  des  terres 
&  des  villes  fufHfantes  pour  les  lo- 

fer  &  les  nourrir.  Interrogés^  qui 
toient  ces  frerei  dont  ils  par- 
loient,  ils  répondirent  que  c'é- 
toient  les  Teutons.  Toute  l'affem- 
blée  fe  mit  à  rire ,  &  Marius ,  en 
fç  mpqugpt ,  leur  çlit  :  Laipi^U 


CH 

déformais  vos  frcres  f  &  ne  vous 
en  mettes^  point  en  peine.  Ils  ont  la 
terre  que  nous  leur  avons  donnée , 
&  ils  la  garderont  éternellement. 
Le  Cimbres  piqués  de  l'ironie, 
lui  dirent  d'un  ton  menaçant  qu'il 
fe  repentiroit  de  cette  infulte  y  &L 
qu'il  en  feroit  puni  inceflamment 
par  les  Cimbres,  &  bien-tôt  après 
par  les  Teutons,dès  qu'ils  feroient 
arrivés.  Ils  font  arrivés  ^  reprit 
Marius  ,  les  voici  :  Et  il  ne  feroit 
pas  honnête  que  vous  vous  en 
allaffie\  avant  que  d'avoir  falué 
&  embrajfé  vos  frères.  En  même  , 
tems,  il  ordonna  qu'on 'amenât 
les  Rois  des  Teutons  »  chargés  de 
chaînes. 

Quand  les  Ambaffadeurs  eu- 
rent fait  ce  rapport  aux  Cimbres, 
ils  prirent  la  réfolution  de  com- 
battre ;  &  Boiorix ,  un  de  leurs- 
Rois ,  à  la  tête  d'un  petit  corps 
de  cavalerie  ,  s'approchanc  du 
camp  du  Conful ,  l'appella  à  hau- 
te voix  ,  &  le  défia  à  prendre  jour 
&  lieu  pour  en  venir  aux  mains , 
&  décider  qui  demeureroit  maître 
du  païs.  Marius  lui  répondit  que 
jamais  les  Romains  ne  prenoient 
confeil  de  leurs  ennemis  fur  ce 
qui  regardoit  le  combat  ;  mais 
qu«  cependant  il  vouloit  bien 
avoir  cette  complaifance  pour  les 
Cimbres.  Ils  convinrent  donc  que 
ce  feroit  le  troifième  jour  après 
celui  où  ils  parloient  aâuellement, 
&  dans  la  plaine  de  Verceil  %  qui 
paroifToit  conimode  aux  Romains 
pour  déployer  leur  cavalerie ,  & 
aux  Cimbres  pour  y  étendre  leurs 
nombreux  bataillons. 

Ni  les  uns  ni  les  autresne  man- 
quçifnt  au  rçnd^ï  ^  V9(^s«  i^  ^^ 


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CH 

mettent  en  bataille.  Q*  Lutat'ius 
Catulus  avoit  fous  lui  vingt  mille 
trois  cens  hommes  d'infanterie ,  & 
Marks  trente-deux  mille.  Q.  Lu*, 
tatius  Catulus  fut  mis  au  centre  , 
&  les  troupes  de  Marins  furent 
partagées  furies  deux  ailes ,  com- 
me Tecrit  Sylla  qui  fe  trouva  à 
cette  bataille.  On  dit  que  Marius 
rangea  ainfî  Tarmée  malicieufe- 
ment,  dans  l'efpérance  qu'avec  les 
deux  aîles,  il  tomberoit  fur  fes  en- 
nemis 9  &  les  romperoit  ;  & 
qu'ainfî  la  viâoire  feroit  entière- 
ment due  à  fes  troupes  ,  fans  que 
Q.  Lutatius  Catulus  y  eût  aucune 
part ,  &  qu'il  fe  fût  feulement 
mêlé  avec  les  Cimbres.  Car, tou- 
tes les  fois  qu'un  front  de  bataille 
eft  fort  large  &  fort  étendu ,  il 
arrive  ordinairement  que  les  ailes 
font  avancées,  &  le  centre  enfon*- 
cé  ;  &  ce  qui  confirme  ce  fait , 
ajoûte-t-on  ,  c'eft  l'apologie  que 
Q*  Lutatius  Catulus  même  fut 
obligé  de  faire ,  dans  laquelle  il  fe 
plaignit  hautement  de  la  malice 
de  Marius ,  &  du  mauvais  tour 
qu'il  lui  avok  joué. 

Les  Cimbres  faifoient  fortir 
leur  infanterie  de  leurs  forts ,  dou- 
cement &  fans  bruit ,  &  les  ran- 
geoienten  bataille  en  leur  donnant 
autant  de  profondeur  que  de 
iront  ;  de  forte  que  c'étoit  une  ba- 
taille quarrée  »  dont  chaque  face 
occnpoit  trente  Aades  de  terrein. 
Leur  cavalerie^qui  étoit  de  quinze 
mille  chevaux ,  marchoit  en  fu- 
perbe  équipage.  Tous  les  cava- 
liers a  voient  des  cafques  en  forme 
de  gueules  ouvertes,  &  des  mufles 
de  toutes  fortes  de  bêtes  étranges 
&  épouvantables  ;  &  les  rehauf- 


CH  i8t 

fanrpar  des  pannaches  faits  com- 
me des  ailes  >  &  d'une  hauteur 
prodigieufe  ,  ils  paroiflbient  enco- 
re plus  grands.  Ils  étoient  armés 
de  cuiralfes  de  fer  très-brillantes  , 
&  couverts  de  boucliers  tout 
blancs.  Ils  portoient  chacun  deux 
javelots  à  darder  de  loin;  &  quand 
ils  avoient  joint  l'ennemi ,  ils  fe 
fervoient  de  grandes  &  de  fortes 
épées.  En  cette  rencontre  ils  n'al- 
lèrent pas  heuner  les  Romains  de 
front  ;  mais ,  prenant  à  droite  ,  ils 
avançoient  peu  à  peu  ,  cherchant 
à  les  enfermer  entr'eux  &  leur  in- 
fanterie qni  étoit  à  la  gauche. 

Les  généraux  Romains  s'apper- 
curent  incontinent  de  cette  rufe  ; 
mais ,  ils  ne  purent  retenir  leurs 
foldats.  L'un  d'eux  s'étant  mis  à 
crier  que  les  ennemis  fuyoient,tous 
les  autres  commencèrent  auffi-tôt 
à  courir  pour  les  pourfuivre.  Ce- 
pendant ,  l'infanterie  des  Cimbres 
s'avançoit  comme  les  flots  de 
la  mer.  Dans  ce  moment ,  Ma- 
rius ,  s'étant  lavé  les  mains  ,  les 
leva  vers  le  ciel ,  &  voua  aux 
Dieux  une  hécatombe  ;  &  Q.  Lu- 
tatius Catulus  ,  levant  aufB  fes 
mains,  fit  voeu  de  confacrer  la 
fortune  de  ce  jour ,  en  lui  dédiant 
un  temple.  On  dit  que  Marius 
ayant  fait  fon  facrifice  ,  on  ne  lui  , 
eut  pas  plutôt  montré  les  entrailles 
des  viâimes  ,  qu'il  s'écria  :  La 
viâoire  eft  à  moi.  ^ 

Mais ,  quand  on  fe  fut  ébranlé 
pour  donner,  il  arriva  un  accident 
qui  ^  comme  l'écrit  Sylla ,  parut 
un  effet  de  la  vengeance  divine 
contre  Marius.  Il  s'éleva ,  comme 
cela  eft  vraifemblable,  une  Çi  gran- 
de pouflièrei  que  les  4eux  arméei 
Miij 


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i82  C  H 

en  forent  couvertes  &  cachées. 
Marius,  qui  s'étoit  ébranlé  le  pre- 
mier pour  charger  avec  (qs  trou-, 
pes ,  eut  le  malheur  de  manquer 
rennemi  dans  cette  obfcurité  où 
les  deuit  armées  étoient  enfevelies; 
&  ayant  pouffé  fort  loin  au  de-là 
de  leur  bataille,  il  fut  long-tems 
errant  dans  la  plaine  fans  pouvoir 
fe  retrouver.  Cependant ,  le  bon- 
heur de  Q,  Lutatius  Catulus  fit 
que  les  Ombres  tombèrent  fur 
lui ,  &  que ,  contre  Tintention  de 
Marius ,  il  n'y  eut  que  lui  ÔC  les 
foldats  au  nombre  defquels  étoit 
Sy lia  ,  qui  foûtinffent  tout  Teffort 
de  cette  bataille.  La  chaleur  da 
pur  ,  qui  étoic  fort  grande  ,  &  le 
foleil  qui  donnoic  dans  le  vifage 
des  Cimbres  ,  aidèrent  beaucoup 
aux  Romains.  Gar  ,  les  Cimbres, 
naturellement  endurcis  à  fuppor- 
.ter  les  plus  grandes  gelées  ,  & 
nourris  dans  des  lieux  froids  & 
couverts  de  bois  ,  ne  pouvoient 
réfider  au  chaud  ,  mais  fondoient 
tous  en  eau ,  6c  n'avoient  que  la 
force  de  mettre  leurs  boucliers 
devant  leur  vifage  pour  fe  garan- 
tir du  foleil,  ;  car ,  ce  combac  fe 
donna  après  le  folftice  d*été ,  trois 
jours  avant  la  nouvelle  lune  du 
mois  d'août ,qui  étoic  alors  appelle 
Sextilis.  La  pouilière  ne  fut  pas 
moins  favorable  que  le  foleil  aux 
foldats  de  Q.  Luiatiu's  Catulus  , 
&  elle  fervit  beaucoup  à  augmen- 
ter leur  audace  Si  leur  confiance, 
en  leur  cachant  la  plus  grande 
partie  de  leurs  ennemis  ;  car  ,  il 
s*en  fallut  beaucoup  qu'ils  ne 
viffent  leur  multitude  innombra- 
ble. Mais,  chaque  corps  ayant 
ÇOMïix  promptement  charger   ce 


CH 

qui  étoît  devant  lui ,  lis  enéto'ient 
aux  mains  avant  que  d'avoir  pu 
être  effrayée  par  cette  vue.  D*ail- 
leurs  ,  ils  étoient  fi  endurcis  à 
la  fatigue  &  au  travail ,  fi  exercés 
&  fi  aguerris ,  qu'on  ne  vit  pas 
un  feul  Romain  fuant ,  quoique  la 
chaleur  fût  extrême  ,  l'attaque 
très-vive  ^  &  qu'ils  eufîent  couru 
de  toute  leur  force  pour  charger. 
Car ,  c'eû  ainfi  que  Q.  Lutatius 
Catulus  lui-même  l'a  écrit ,  en 
relevant  beaucoup  la  force  ÔC  le 
courage  de  fes  troupes. 

La  plupart  donc  des  ennemis , 
&  tous  les  plus  braves  furent  tail- 
lés en  pièces  ;  car ,  tous  ceux  des 
premiers  rangs  9  afin  qu'ils  ne  puf- 
fent  rompre  leur  ordonnance  , 
étoient  liés  les  uns  aux  autres  par 
de  longues  cordes  qui  tenoient  à 
leurs  baudriers.  Tops  les  autres 
furent  renverfés  &  pou  (Tés  jufqu'à 
leur  camp.  Lci ,  on  vit  les  chofes 
du  monde  les  plus  tragiques  &  les 
plus  épouvantables.  Les  femmes , 
vêtues  de  robes  noires  étoient  fur 
leurs  chariots  ,  d'où  eljes  tuoient 
les  fuyards  ;  les  unes,  leurs  maris; 
les  autres ,  leurs  frères  ;  ceUes-là , 
leurs  pères  ;  celles-ci ,  leurs  fils. 
Enfin  i  voyant  qu'il  n'étoit  pas 
pofliible  de  réûfter  aux  vain- 
queurs ,  elles  députèrent  à  Marius 
pour  lui  demander,  finon  la  liber- 
té «  du  moins  un  efdavage  con- 
venable à  leur  iexe  &  à  leur  ver- 
tu ,  s'ofFrant  d'êtr^  efclaves  des 
Veftales,  à  condition  qu'elles 
garderoient  comme  elles  une 
perpétuelle  continence.  Mais  , 
cette  grâce  leur  ayant  été  refufée, 
elle^  fe  livrèrent  au  défefpoir  le 
plus  affreux.  Prenant  leurs  petits 


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cnfans  ,  elles  les.  étouffoîent  de 
leurs  propres  mains,  &  les  jet- 
toient  fous  les  roaes  des  chariots, 
&  fous  les  pieds  des  chevaux  ,  & 
fe  tuoient  enfaite  elles  -  mêmes. 
On  dit  qu'il  y  en  eut  une  qui  fe 
pendit  au  bout  de  fon  timon  , 
après  avoir  attaché  par  le  cou  à 
Tes  deux  talons ,  deux  de  fes  en- 
fans  ,  Fun  deçà  ,  l'autre  de-là.  Les 
hommes,  faute  d*arbres  pour  fe 
pendre ,  fe  mettoient  au  cpu  un 
noeud  coulant,  qu'ils  attachoient 
aux  cornes  ou  aux  jambes  des 
bœufs;  &  piquant  ces  bêtes  pour 
les  faire  marcher,  ils  périiToient 
miférablement ,  ou  étranglés  ou 
foulés  "aux  pieds.  Cependant,  quoi- 
qu'ils périfTent  ainii  par  tant  de 
différentes  voies ,  on  ne  laifla  pas 
de  faire  plus  de  foixante- mille  pri- 
fonniers  ,  &  celui  des  morts  mon- 
ta aa  double. 

Les  foldats  de  Marins  prirent 
les  bagages;  mais ,  les  dépouilles, 
les  enfeignes,v&  les  trompettes 
furent  portées  dans  le  camp  de 
Q.  Lùtatius  Catulufi  ;  ce  qu'il  fit 
valoir  comme  une  preuve  que 
c'étoit  à  lui^fèul  que  la  vr6loire 
étoit  due;  îl  n'çft  pomt  dit  quelle 
part  Mawus  prit  à  cette  querel- 
le ,  qui  devoir  l'intéreffer  fi  vi- 
vement. Mais,  là  difpnte  s'échatjf- 
fant  entre  les  foldats  des  deux  iar- 
mées ,  on  choiHt  p«ur  arbitres 
les  Ambaffadeurs  de  Parme ,  qui 
fe  trouvèrent  préfens.  Les  foldats 
de  Q.  Lutatius  Catulus  les  menè- 
rent fur  le  champ  de  bataille  vifi- 
ter  les  morts  ;'  ils  leur  firent  voir 
qu'ils  étoient  toas  percés  de  leurs 
javelots,  qui  étoient  aifé  ment  & 
fûrement  reconnoiiïables ,   parce 


CM  185 

que  Q.  Lutatius  C^/ulus  avoit 
pris  foin  de  faire  grav^^r  fon  nom 
fur  le  bois  de  toute'  les  piques  de 
fes  foMats.  Si  le*  faits  font  conl- 
tans  ,  on  ne  peut  douter  que  Q. 
Lutatius  Catulus  ne  foit  îe  vérita- 
ble vainqueur  des  Cimbres.  Mais, 
la  renommée  en  a  autrement  déci- 
dé. Tout  l'honneur  de  cette  gran- 
de journée  eft  refté  à  Marins  ;  & 
Q.  Lutatius  Catulus  n'efl  connu 
que  des  Sçavans.  Lors  même  que 
l'événement  étoit  tout  récent ,  on 
crut  lui  faire  afTez  d'honneur  de 
l'afTocier  en  fécond  à  la  gloire  de 
Marius. 

IIL  Quoique  l'expédition  des 
Cimbres  contt'e  les  Âomains  ne 
foit  pas  leur  première  fortie ,  & 
aue  Plutarque  dife  qu'ils  avoient 
déjà  long-tems^couru  toute  l'Euro- 
pe ;  c'efl  pourtant  la  première  dont 
nous  fçachions  les  détails.  Quin- 
tilién  dit  ,  en  parlant  d'eux ,  que 
cette  nation ,  qui  avoit  déjà  par- 
couru la  plus  grande  partie  de  la 
terre ,  6c  qui  s'étoit  rendu  formi- 
dable par  fes  viâoîres ,  fut  arrêtée 
par  la  valeur  de  Marius.  Les  hif.* 
toriens  Romains  om  peut-être 
exagéré  la  déroute  de  ce  peuple. 
Sa  défaite  ne  fut  pas  fi  totale  » 
qu'il  n'en  échappât  un  corps  affez 
confidérable ,  iinon  pour  tenter 
de  nouveau  fortune  contre  (es 
vainqueurs  ,  du  ipoins  pour  faire 
une  retraite.  Les  débris  de  cette 
armée  pafTerem  par  les  Gaules  , 
où  apparemment  quelques  -  uns 
s'arrêtèrent.  Céfar  dit  dans  {qs 
Commentaires ,  que  les  Aduati- 
ques  étoient  fils  des  Cimbres  & 
des  Teutons.  On  trouvoit  fur  le 
Rhin  des  Harudes ,  &  ce  nom  cft 

M  iv 


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i84  C  H 

le  même  que  les-  Charudes ,  peu- 
ples que  Pline  met  dans  la  Cher- 
îonnèfe  Cimbrique  ;  &  ainfi  de 
quelques  autres  peuples ,  <|ui  fati- 
gués des  mauvais  fuccès  d'une 
longue  &  pénible  expédition  ,  & 
n'ayant  rien Jaiffé  dans  leur  pa- 
trie qui  les  y  attirât ,  s'arrêtèrent 
d^ns  les  lieux  où  ils  trouvoient 
occaûon  de  s'établir.  Les  autres 
regagnèrent  le  païs  comme  ils  pu- 
rent. Leur  païs  étoit  raifonnable- 
ment  peuplé  ;  &  ils  faifoient  une 
nation  qui  n'étoit;pas  à  méprifer , 
félon  Strabon  ;  lorfqu' après  avoir 
harcelé  les  Romains  ,  ils  envoyè- 
rent à  Augufle  des  députés  pour 
lui  demander  l'oubli  du  paiTé  ,  une 
meilleure  imelligence  à  ravenir,& 
pour  lui  préfenter,to^me  un  gage 
de  la  paix ,  une  chaudière  qu'ils 
regardoient  comme  un  vafe  très- 
facré. 

Il  paroît  cependant  que  dès  ce 
tems-îà  le  nom  des  Cimbres  n'étoii 
plus  que  celui  d'une  très-petite  cir 
té  de  la  Germanie ,  les  peuples 
qui  compofoient  autrefois  cette  li- 
gue, l'ayant  quittée  pour  fe  joindre 
â  celle  des  Sicambres  ou  des  divers 
euples  9  compris  fous  le  nom  de 
uèves.  Au  tems  de  Tacite ,  il  ne 
leur  reftoit  plus  que  la  célébrité 
attachée  à  leur  nom.  Il  efl  proba- 
ble que  les ,  Sicambres  étoient  un 
démembrement  des  Cimbres  ,  & 
/de  ceux  qui  étoient  voiHns  de  la 
mer  9  comme  leur  nom  le  fignifîe. 
Les  Sicambres,  félon  la  remarque 
de  Rudbeks  ,  Cimhri  Maritimi  , 
avoient  été  nommés  ainfi  fans 
doute  par  oppofition  aux  Cimbri 
Medu.erranei  ,  dont  parle  Pline. 
Avec  le  tems ,  les  Cimbres 


I 


C  H 

s'appliquèrent  à  la  marine  &  à  U 
piraterie  ;  &  comme-  les  Saxons 
s'y  étoient  rendu  très- célèbres  ,  ik 
fe  joignirent  à  eux  ,  &  leur  nom  fe 
perdit  infenfiblement  ;  de  forte 
qu'ils  furent  <:onfondus  fous  celui 
de  Saxons:  On  les  appelloit  enco- 
re Cimbres  du  tems  d'Honorius» 
Claudien  dit  : 

Hac  &  Teutonico  quondam  pate^ 
faB,afurori 

,  Colla   catenati   vidît  fquallentia 
Cimbri, 

Il  appelle  Cimbrique  la  mer  i 
où  le  Rhin  a  fes  embouchures. 

......  Je  Cymbrica  Tethys 

Divifum  bifido  confumit  ,  Rhene, 
meatu. 

Il  eft  à  remarquer  que  les  Cim- 
bres  relevoient  leurs  cheveux  fur 
le  haut  de  la  tête  comme  les  Prin- 
ces des  Suèves ,  tandis  que  les 
Rois  &  les  Princes  portoient  leurs 
cheveux  épars  &  âottans  fur  \es 
épaules.  Cette  coutume  fubfifta 
parmi  les  Francs^  jufqu'aa  tems 
de  la  conquête  jie  la  Gaule.       ^ 

IV.  Quant  à  l'origine  du  nom 
des  Cimbres  ,  nous  avons  déjà 
obfervé ,  d'après  Plptar^ue  ,  que 
les  Germains  donnoient  ce  nom 
aux  voleurs  ;  &  un  voleur  en 
Grec  s'appelle,  ^kMoiii;.  Feftus  dit 
que  le;s  voleurs  étoient  appelles 
Cimbres  dans  la  langue  des  Gau- 
lois. Cimbri  linguâ  Gallicd  la- 
trônes dicuntur»  Ailleurs,  il  expli- 
que le  mot  latrones  d'un  homme 
qui.  s'engage  dans  une  guerre 
étrapgère  pour  une  folde ,  qui 
conduài  militant.  L'explication  , 
que  Plutarque  6c  Feflus  donnent 


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CH      . 

au  mot  Cimhrcs  o\x  Kimher ,  & 
Kimriyeù,  conforme  à  ce  qui  nous 
refte  de  monumens  des  plus  an- 
ciennes langues  du  Nord.  Le  mot 
Kember  &  Kemper  s'y  trouve  em- 
ployé pour  défigner  celui  qui  s'en- 
gage dans  le  fervice  militaire  pour 
une  folde ,  ou  par  Tefpoir  du  pil- 
lage ;  ce  mot  dans  Ton  origine  H- 
gniâoit  proprement  un  homme 
robufte  ,  un  lutteur. , 

Ainfî  ,  les  mots  de  ^mctS;  &  de 
latro  ^  par  lefquels  Plutarque  & 
FeAus  rendent  celui  de  Cimber  , 
n'avoient  rien  d'ofFenfant  dans  les 
principes  des  nations  Celtiques  & 
Germaniques.  Céfar  dit  ,  en  par- 
lant de  ces  dernières  '  Latrocinia 
nullam  habent  infamiam  »  qu^ 
extra  fines  cujufque  clvilatis  fiunt, 
Poiybe  nous  apprend  que  les 
Gaulois  d'Italie  turent  toujours 
dans  les  mêmes  principes.  Et  Ti- 
te-Live  >  faute  d*y  avoir  fait  atten- 
tion ,  a  pris  pour  des  guerres  avec 
le  corps  entier  de  la  nation  Gau- 
loife,  ce  qui  n'étoit  que  des  cour- 
tes d'une  bande  d'aventuriers,  que, 
Tenvie  de  piller  faifoit  entrer  fur 
les  terres  des  Romains  &  de  leurs 
alliésy  invafions  faciles  à  repouder, 
&  que  la  nation  ne  foûtenoit 
point ,  parce  qu'elles  étoient  faites 
fans  fon  aveu. 

On  voit ,  par  ce  qu'on  vient  de 
lire,  que  le  rtiot  latro,  que  l'on 
reni  aujourd'hui  par  larron  ,  vo- 
leur ,  brigrand  ,avoit  autrefois  une 
iigniâcation  bien  différente.  Il  fi^ 
gnifioit  un  foldat ,  Ôc  plus  parti- 
culièrement un  garde  du  corps. 


C  H  i8s 

Plaute  dit  latrones  ,  pour  dire  des 
foldats ,  &  latrocinari,  pour  dire 
faire  la  guerre.  Les  Romains , 
ayant  anciennement  appris  que  le 
nom  de  Cimbres  fignifîoit  dq| 
guerriers  >  l'expliquèrent  en  Latin 
par  latrones  ,  qui  a  voit  alors  un 
fens  favorable.  Les  ravages ,  que 
ce  peuple  caula  dans  la  luite ,  fit 
qu'on  continua  d'expliquer  leur 
nom  par  le  même  mot  Latin , 
mais  qui  fe  prenoit  alors  en  mau- 
vaife  part. 

CIMETERRE ,  (tf)  forte  d'ar. 
me.  Ce  fut  une  des  principales 
divinités  des  Scythes.  Ces  peuples 
juroient  par  le  Cimeterre  ,  com- 
me étant  une  des  caufes  les  plus 
ordinaires  de  la  mort. 

CIMETRE  ,  Cimetra  ,  (b) 
ville  d'Italie  ,  fituée  au  païs  des 
Samnites.  Elle  fut  priie  l'an  de 
Rome  455  »parleconful  Q.  Fa- 
bius ,  qui  y  fit  deux  mille  quatre 
cens  prifonniers  ,  &  y  tua  envi- 
ron quatre  cens  trente  de  ceux 
qui  oferent  fe  défendre. 

CIMINIE ,  ou  CIMINIEN- 
NE  ,  Ciminia  ,  {c)  nom  d'une 
forêt  d'Italie  ,  fituée  dans  l'Étru- 
rie.  Il  eil  eft  beaucoup  parlé  dans 
le  neuvième  livre  de  la  première 
décade  deTite-Live.  Cet  Auteur, 
fous  l'an  de  Rome  444  ,  dit  que 
les  Étrufques ,  ayant  été  vaincus 
par  les  Romains ,  s'enfoncèrent 
dans  la  forêt  Ciminienne;il  prend 
de-là  occafion  de  donner  une  def- 
cription  de  cette  forêt.  i>  La  forêt 
n  Ciminienne  »  dit-il ,  étoit  alors 
91  plus  impénétrable  &   plus  af- 


(4)  Mém.   de  l'Acad.  des  Inlcript.  &|     (f)  Tît.  \M,   L,  IX.  c.  35.  &  fif 
Bell.  Leit.  Tom.  1.  p.  196.  j  Plin.  T,  I.  p.  116, 

(*)  Tit,  Uv,  t.  X,  c.  M«  l 


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lU  C  H 

»  freafe ,  que  celle  d'Her cynîe  ne 
n  Ta  paru  depuis  peu.à  nos  foldats 
»  en  Germanie.  Perfonne  jufqu'à 
79  ce  tems-là  n'en  avoit  pénétré 
M  répaiffeur  ;  les  marchands 
»  avoient  toujours  craint  de  s  y 
»  engager.  Il  n*y  avoit  perfonne 
»  dans  Tarmée  qui  crût  qu'on  en 
»  dût  tenter  l'aventure  ,  excepté 
»  le  général.  Tous  les  autres 
»  étoient  retenus  par  le  fou  venir 
j»  des  défilés  de  Caudium.  ^lors, 
yr  un  de  ceux  qui  fe  trouvoient 
n  dans  le  Confeil ,  s'offrit  d'aller 
n  la  reconnoître,  promettant  d'en 
»  rapporter  bientôt  des  nouvelles 
»  certaines.  c<  C'efl  ce  qu'il  fit  en 
effet. 

Sur  (on  rapport ,  le  Conful  ût 
partir  Tes  bagages  à  la  première 
Teille  dé  la  nuit  j  &  ayant  ordon- 
iré  à  l'infanterie  de  les  iuivre ,  il 
fefta  avec  fa  cavaleriie;  &  dès  que 
fe  jour  fut  venu  ,  il  alla  caracoller, 
îufqo'aux  gardes  avancées  y  que 
les  ennemis  avoient  laiflees  hors 
des  bois.  Après  les  avoir  tenues 
aflez  long-tems  en  haleine,  il 
rentra  <}ans  ifon  camp  ;  puis  étant 
fcrti  par  h  porte  oppofée,  il  rejoi- 
gnit fes  troupes  avant  la  nuit.  Le 
lendemain  ,  au  point  du  jour  ,  il 
fe  retrouva  fur  le  fommet  du 
mont  Ciminien.  De- là  ayant  con- 
templé à  fon  aife  les  riches  plaines 
de  la  Tofcane  ,  il  y  conduifit  fes 
(oldats.  Us  avoient  déjà  fait  un 
grand  butin  ,  lorfque  quelques  co- 
hortes ,  compofées  des  habitons 
de  la  campagne ,  6c  levées  à  la 
hâte  par  les  premiers  de  ce  can- 
ton ,  vinrent  au-devant  des  Ro- 


CH 

maîns  avec  fi  peu  d'ordre  &  de 
difcipline ,  que  peu  s'en  fallut 
qu'elles  ne  devinflent  elles-mê- 
mes la  proie  de  l'armée  Romaine, 
au  lieu  de  lui  arracher  celle  qu'- 
elle venoit  de  faire  fur  leurs  ter- 
res. Les  Romains  les  ayant  taillées 
en  pièces  ou  mifés  en  déroiite  ^  6c 
ravagé  tout  le  païs  d'alentour,  s'eo 
retournèrent  dans  leur  camp  ^ 
viélorieux  5c  chargés  d'un  riche 
butin  de  toute  efpèce.Ce  fut  alors 
qu'il  arriva  en  ce  lieu  cinq  dépu- 
tés avec  deux  tribuns  qu'on  avoît 
dépêchés  de  Rome,  pour  venir 
défendre  au  Conful ,  de  la  part  da 
Sénat ,  de  s'engager  daiis  les  rou- 
tes inconnues  de  la  forêt  Cinfii^- 
nienne.  Ils  furent  ravis  d'être  ar- 
rivés apris  une  expédition  à  la- 
quelle on  les  avoit  chargés  de 
s'oppofer  ,  &  Ven  retournèrent  à 
Rome  porter  la  nouvelle  d'une 
viéloire  qu'ils  auroient  empêchée, 
s'ils  avoient  été  plus  diligens. 

CIMINIE,  Ciminia.^  con* 
trée  d'Italie  ,  félon  Ammien-^ 
Marcellin,  qui  dit  qu'une  ville, 
qu'il  nomme  Succinïenfc  oppidum, 
y  fut  engloutie  par  un  tremble- 
ment de  terre.  Voye;^  l'article  fui- 
vant. 

CIMINIEN  [  le  Mont],  (^) 
Ciminîus  Mons.  Cette  montagne , 
fituée  en  Italie  dans  l'Étrurie  , 
étoit  au  nord  &  au  noi*d-eft  du 
lac  du  même  nom.  Nous  avons 
dit  un  mot  du  mont  Ciminien 
dans  l'article  précédent ,  au  fujec 
de  cette  expéditio»  que  les  Ro- 
mains firent  dans  la  forêt  Cimi-* 
nienne ,  l'an  de  Rome  444  ;  & 


ia)  TicXî?.  L.  IX.  c.  36 ,  37.  Virg.  jEneid.  L.  VII.  v.  6^'^.  Sirai>.  p.  t26U 


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CH 

cette  expédition  quoîque  fort  heu- 
reufe,  ne  fervit  -qu'à  attirer  un 
plus  grand  nombre  d'ennemis  à  la 
République.  Car  ,  ceux  qui  habi- 
I  toient  au  pied  du  mont  Ciminien, 
indignés  des  ravages  qu*on  avoit 
exercés  fur  eux ,  fouleyerent  non 
feulement  les  peuples  de  la  Tofca- 
ne,  mais  même  ceux  qui  étoient 
dans  le  voifinage  de  l'Ombrie.Ileft 
vrai  que  ce  foule vement  général 
n*eut  pas  le  fuccès,  qu'on  â'étoit 
flatté.  Tous  ces  rebellés  furent 
vaincus  &  opprimés  dans  leur 
camp. 

Virgile  parle  du  lac  ,  de  la  fo- 
rêt ,  oc  de  la  montagne ,  en  un 
ièul  vers  : 

Et  Ciminî  cum  monte  lacum  lucof- 
que  Cdpenos, 

Luci  Capeni  ne  font  ici  autre 
chofe  que  l'extrémité  orientale  de 
cette  forêt  où  étoitî  Capcne.  Un 
chemin,  qui  traverfoitla  montagne 
&  la  forêt  dans  leur  partie  occi-* 
dentale ,  &  qui  paiToit  à  l'orient 
du  lac  ,  étoit  nommé  Ciminia  via» 
C*eft  apparemment  tout  ce  can- 
ton que  Marcellin  appelle  Cimi-* 
me;  &  peut-être  que  le  Succi^ 
nienfe  oppidum  ,  qui  fut  abforbé 
par  un  tremblement  de  tene , 
occupoîc  la  place  du  lac  qui  fe 
forma  dans  le  creux  ,  que  ce  ter- 
rein  laiiTa  en  s'afTaifTant.  On  a 
quantité  d'exemples  d'événemens 
pareils. 


CH  187 

Clavier  foupçonne  que  le  n^ont 
Ciminien  efl  préfentement  le 
mont  di  Viterbo ,  &  le  lac  ,  ce- 
lui qu'on  nomme  di  RoncigHone. 

CIMINiUS  SALTUS.  Foyci 
Ciminie. 

CIMMÉRIEN  [  LE  Bospho- 
re ].  Foy<r^  Bofphore. 

CIMMÉRIENS  ,  Cîmmtriî  , 
KtjUfAtptci ,  (a)  peuple  fort  connu 
dans  l'antiquité.  Les  Cimmériens 
font  la  plus  ancienne  colonie 
étrangère ,  que  nous  fçachions 
avoir  habité  les  païs  fitués  au  nord 
du  Danube ,  &  à  l'occident  du 
Pont-Euxin.  Mais ,  quelque  célè- 
bre que  fût  le  nom  de  ce  peuple 
dans  l'antiquité ,  le  détail  de  fes 
aventures  ne  nous  eft  connu  que 
très  -  imparfaitement  i  &  nous 
ne  pouvons  former  la  fuite  de 
fon  Hiftoire ,  qu'en  réunifiant 
quelques  témoignages  détachas 
les  uns  des  autres  >  &  qui 
laifTent  entr'eux  des  vuides  qu'il 
fout  néceffairement  remplir  par 
des  conje^ures  &  par  des  fuppo- 
(itions ,  fondées  fur  ce  que  nous 
connoiffons  de  l'état  de  ce  peuple, 
&  de  la  nature  du  païs  qu'il  oc- 
cupoit ,  ou  même  fur  ce  que  nous 
pouvons  imaginer  au  fujet  des 
motifs  qui  le  déterminoient  ,  ou 
le  dévoient  déterminer  à  former 
les  entreprifes ,  dont  l'hj^oire  nous  ' 
aconfervé  le  fouvenir.  Ainfi  parte 
M.  Fréret  dans  un  fçavant  mé- 
moire fur  cette  nation  ;  mémoire 


{s)  Strab.  p.  6.  149,  ér  feq.  Hcrod. 
L.  I.  c.  6  •  1 5.  «^  fej^t  !-•  IV.  c.  1  ,  1 1. 
ér  f^*  Homer.'Odyfr.  £.  XI«  v.  14»  i^« 
ër  /«î.  Pomp.  Mel.  p.  19.  Plin.  T.  I. 
paj;.  154  ,  )io.  Plut.  Tom.  I.  pae.  411. 
Mém.  de  TAcad.  des  Infcript^  &  Bell, 


Lett.  Tom.  IV.  pag.  «oj.  Tom.  V.  pag. 
165.  ièr  friv*  T.  Vlï,  p.  145  ,  159  ♦  544. 
&  fitiv.  Tom.  XII.  p.  i;4,  ^24)  %%^, 
Tom.  XVIII.  p.  61.  Tom.  XIX.  p.  577. 
&  friv,  '     ■ 


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ï88  CH 

dont  a  été  extrait  ce  qu'on  va 
lire. 

I.  Pofidonius  croyoit  que  les 
Cimtnériens  ,  établis  au  nord  du 
Danube ,  étoient  de  la  même  na- 
tion que  les  Cimbres,  qui  fortis 
du  voifinage  de  la  mer  Baltique, 
&  des  bords  de  l'Océan  feptentrio- 
nal ,  traverferent  la  Germanie  , 
&  s'avancèrent  jufque  dans  la 
Gaule  &  jufque  dans  l'Italie  ,  & 
furent  vaincus  par  Marius  un  (ie- 
cle  avant  TÉre  Vulgaire.  Quoi 
qu'il  en  foit ,  il  eft  vifible  que  les 
Cimmériens  venoient  de  la  Ger- 
manie proprement  dite ,  &  de  la 
prefqu'ifle  qui  a  long-tems  con- 
îervé  leur  nom. 

Le  tems  précis  de  Tarrivée  de 
ces  peuples  fur  les  bords  du  Pont- 
Euxin  nous  éft  inconnu  ;  mais , 
0ousne  pouvons  douter  que  leur 
établiiTement  dans  ce  païs  ne  fût 
^rès-ancien,  &  qu'ils  n'euffent  dé- 
jà acquis  une  certaine  célébrité , 
\rrfqu*Homère  écrivoit  fes  Poë- 
mes ,  c*eft-à-dire ,  dans  le  9.^  Cie- 
de  avant  Jefus-Chrift.  Ce  Poëte 
parle  des  Cimmériens  dans  fon 
Odyflee  ;  mais  ,  tout  ce  qu'on 
peut  conclure  de  ce  qu'il  en  dit , 
c'efl  qu'ils  habitoient  au  nord  & 
^  au  nord-ouefl  de  la  Grèce ,  fous 
on  climat  voiHn  du  Pôle.  Car, 
c'eft  ainfi  que  les  Anciens  ont  ex- 
pliqué ce  que  dit  ce  Poëte  de  leur 
léjour  dans  le  païs  des  Cimbres , 
&  dans  le  voifmage  de  ces  portes, 
d'où  la  nuit  fort  tous  les  foirs  pour 
aller  répandre  les  ténèbres  âcTob- 
fcurité  fur  toute  la  terre. 

Cette  étrange  aftronomie  étoit 
encore  celle  -des  poëtes  Grecs, 
long- tems  après  Homère.  Sopho- 


CH 

cle,  cité  par  Strabon,  plaçoît  dan^ 
fon  Orithye ,  le  palais  de  Borée  , 
auprès  des  fources  de  la  nuit ,  & 
de  l'ancien  jardin  de  Phébus.  Les 
Grecs  ne  commencèrent  à  pren- 
dre des  idées  un  peu  exaâes  des 
pais  (itués  au  nord  &  à  l'occident 
de  la  Grèce  ,  qu'après  qu'ils  y  eu- 
rent établi  des  colo'nies  ;  &  les 
Poëtes  ne  purent  même  jamaif 
s'aflujettir  tout-à-fait  à  fuivre  une 
Géographie  &  une  Aftronomie  , 
conformes  aux  nouvelles  décoa- 
vertes.  Il  fuffic,  pour  s'en  con- 
vaincre ,  de  lire  le  Prométhée 
d'Efchyle",  &  d'examiner  la  route 
qui  eft  prefcrite  à  la  nymphe  la» 
pourfe  rendre  du  pied  du  Caucafe 
jufque  fur  les  bords  du  Nil.  Ce 
Caucafe  d'Efchyle,  qui  eft  au  nord 
de  la  Grèce,  &  à  l'occident  da 
Bofphore ,  eft  fans  doute  le  Car* 
path  des  modernes. 

Les  poëtes  Latins  ne  (ont  gue-^ 
re  meilleurs  Aftronomes  que  les 
poëtes  Grecs.  Virgile  &  Ovide 
font  pafTer  l'axe  du  monde  par  le 
mont  Atlas  ,  &  par  la  zone  torri- 
de;  c'eft- à-dire,  qu'ils  confondent 
le  Pôle  avec  l'équateur. 

Eufèbe,  dans  fa  Chronique  ,  011 
il  avoit  fait  entrer  un  précis  des 
principaux  ouvrages  de  ce  genre , 
donnés  par  les  anciens  Grecs,mar- 
que  à  l'ap  1076  avant  Jefus-Chrift, 
ou  108  ans  après  la  prife  de 
Troye  »  une  incurfion  des  Cimmé- 
riens &  des  Amazones  dans  l'Afie 
mineure.  Orofe  en  rapporte  une 
autre  vers  l'an  782 ,  trente  ans 
avant  la  fondation  de  Rome  ,  & 
dix  ans  avant  la  guerre  de  Mefli* 
ne  ,  à  laquelle  il  joint  cet  évépe^ 
mem.Str^on  prétend   que  ai 


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CH 

temsd*Homère,  on  même^n  peu 
avant  Ton  fiede^  les  Cimmériens 
&  les  Amazones  entrèrent  dans 
l'Afie  mineure ,  &  pénétrèrent 
jufque  dans  TÉolie  &  dans  llonie; 
ce  qui  peut  avoir  quelque  rapport 
à  rinvafion  qu'Euiebe  met  à  Tan 
lO/ôyCar  ,  Homère  doit  être  né, 
félon  Hérodote ,  vers  Tan  880. 

Pofidonius  afîure  que  lesCim- 
mériens ,  s'étoient  avancés  d'a- 
bord de  proche  en  proche  des 
bords  de  TOcéan  |  jufque  dans  le 
milieu  de  la  Germanie ,  &  que  de 
nouveaux  eiTains  fe  joignant  tous 
les  ans  aux  premiers  ,  ils  avoient 
à  la  fin  occupé  tous  les  païs  qui 
s'étendent  depuis  l'Océan  jufqu'au 
Pont-Euxin.  Ce  n*étoit-là  ,  félon 
les  a|>parences ,  qu'une  conjeâure 
de  Fofidonius  ;  mais  ,  elle  eft  affez 
probable ,  quoiqu'il  ne  faille  pas 
(ans  doute  luppofer  que  la  ligue 
des  Cimmériens  avoit  effeâive- 
ment  rempli  cette  vafte  étendue 
des  païs ,  &  que  tous  les  peuples 
qui  l'occupoient ,  n'eufient  formé 
qu!une  feule  cité  ou  corps  politi- 
que ,  au  même  fens  que  Céfar  le 
dit  de  la  ligué  des  Suèves  ,  dont 
les  cent  cantons  ou  pap  compre- 
noient  tous  les  païs  qui  s'étendent 
depuis  le  Rhin  jufqu'à  l'Océan , 
&  même  jufque  dans  la  Scandina- 
vie. 

M.  Fréret  fuppoferoit  au  con- 
traire que  les  Cimmériens  ayant 
pailé  le  mont  Carpath  ,  &  s'étant 
avancés  le  long  du  Tyfas  &  de 
l'Hypanis  9  jufque  fur  les  bords  du 
Pont-Euxin ,  fe  féparerent  des 
Oimmériens  occidentaux  ,  qui 
étoient  reftés  dans  la  Germanie  , 
&  formèrent  une  cité  indépendant 


C  H  189 

te.  Cette  cîté  des  Cimmériens 
orientaux  dévoie  cependant  être 
très-nombreufe  &  très-puiflante  ; 
fansf  quoi  elle  n'auroit  pas  été  en 
état  d'envoyer  au  loin  des  armées 
•confidérables  ,  comme  on  vote 
qu'elle  l'a  fait  plus  d'une  fois . 

Hérodote ,  le  feul  des  Anciens 
qui  ait  donné  l'hiftoire  décès  Cim- 
mériens avec  une  certaine  fuite 
&  un  certain  détail^  nous  apprem^ 
i.^  Que  leur  principal  établiffe- 
ment ,  &  pour  ainfi  dire  le  chef- 
lieu  de  la  cité ,  étoit  vers  les  bords 
du  Tyras ,  puifque  c'étoit-là  qu'ils 
s'afFemblerent  pour  tenir  la  diète  « 
ou  le  coiifeil  général  de  la  natioii, 
au  fujet  de  l'invafion  des  Scythes. 
2.^  Que  s'étant  avancés  vers  l'O- 
rient, ils  avoient  traverfé  THy- 
panisôc  le  Boryflhène,  Ôcavoienc 
paiFé  dans  la  Cherfonnèfe  ou  pref- 
qu'ifle  qui  a  toujours  confervé  leur 
nom.  Celui  de  Crime  ou  de  Cri- 
mée qu'elle  porte  encore  aujour- 
d'hui ,  n'eft  qu'une  corruption  de  ^ 
Pancien  nom  de  Kimmeria,  3.^ 
Qu'après  être  rentrés  dans  ce  païs, 
ils  s'étoient  avancés  jufqu'au  Bof- 
phore  ou  détroit  qui  le  fépare  de 
TAfie  ,  &  par  lequel  les  eaux  du 
Tanaïs ,  après  avoir  formé  le  lac 
oU  Palus- Méotide,  fe  déchargent 
dans  le  Pont  -  Euiin  ;  qu'ils  s'é- 
toient emparés  des  deux  rivages 
de  ce  détroit  p8c  qu'ils  y  conftrui- 
firent  des  forts  ou  retranchemens, 
dont  on  voyoit  des  vertiges  de  fon 
tems ,  ôc  qui  portoienc  encore  leur 
nom. 

Strabon  parle  d'une  ville  de 
Çimméricum ,  conftruite  fur  la  ri- 
ve Afiatique  du  détroit  ,  fur  le 
promontoire  qui  en  forme  l'en- 


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190  CH 

trée  du  côté  Palus  -  Méotide. 
Les  Cimmériens  n'avoient  pu  tr^- 
verfer  ce  détroit ,  &  pafler  en 
ailez  grand  nombre  fur  la  côte 
d'Alie  ,  fans  avoir  des  barques,  & 
fans  quelque  ufage  de  la  oaviga-* 
tion. 

Nous  voyons  encore  dans  Hé- 
rodote ,  que  les  Cimmériens  » 
après  avoir  traverfé  le  détroit , 
fuivirent  la  côte  de  la  mer,  &  s  a- 
vancerent  le  long  de  cette  mer 
jufque  dans  l'Âfie  mineure. 

Sans  doute  que  leurs  premières 
entreprifes  furent  contre  les  peu- 
ples, qui  habitoient  les  monta- 
gnes qu'occupent  aujourd'hui  les 
Circaffes  &  les  Abcades  ;  mais 
que  trouvant  un  païs  pauvre ,  ÔC 
des  peuples  belliqueux  ,  ils  fe  conr 
tentèrent  de.  les  contraindre  à  leur 
donner  paffage,  parce  que  leur 
projet  étoit  de  s  avancer  dans  TA- 
lie  mineure  ;  païs  plus  fertile  ,  & 
occupé  par  des  naâons  que  les  ri- 
cheffes  &  le  luxe  avoient  amol- 
lies. 

Strabon  répète  en  divers  en- 
droits ce  qu'il  avoit  dit  au  pre- 
mier livre,  que  les  Cimmériens 
ravagèrent  plufieurs  fois  difFérçn- 
tes ,  l'Afie  mineure.  Hérodote 
femble  ne  parler  que  de  la  der- 
nière invafion  qu'ils  firent  dans  ce 
païs  ,  au  tems  même  où  les  Scy- 
thes ravageoient  la  Médie  &  la 
Paleftine.  Mais,  ce  qu'il  dit  de 
rétabliffemenc  des  Cimmériens 
dans  la  prefqu'ifle  de  Sinope,  doit 
fe  rapporter  à  un  tems  antérieur  j 
car ,  la  fondation  de  Sinope  par 
les  Grecs,  eft  de  Tan  1631  avan{ 
l'Ère  Vulgaire ,  félon  Eufèbe  ,  & 


•  C  H 

du  tems  même  de  l'invaHon  des 
Scythes,  félon  Scymnus  deChîo, 
qui  avoit  vu  l'ouvrage  de  Deny  s 
de  Chalcis,  furies  colonies  Grec- 
ques du  Pont-Euxin  &  de  la  Pro- 
pontide ,  &  qui  le  cite  en  quelques 
endroits.  Il  faut  pourtant  obferver 
que  Scymnus  donne  peut  -  être 
une  trop  grande  antiquité  à  la  ville 
Grecque  de  Sinope  ;  car ,  il  en 
fait  remonter  la  fondation  au  tems 
d'une  expédition  contre  les  Ama- 
zones. Il  ajoute  qu'Andron  de 
Milet  y  mena  depuis  une  nou- 
velle colonie ,  &  que  ce  fut  fiir 
ce  même  Andron  que  les  Cimmé- 
riens en  firent  la  conquête;  mais 
que  dans  la  fuite  ils  en  furent  chaf- 
fés  par  des  bannis  de  Milec ,  qui 
vinrent  y  chercher  une  retraite  , 
&  qui  en  firent  une  ville  confidé— 
rable.  Hérodote  fuppofe  au  con- 
traire ,  que  la  prefqu'iile  de  Sino- 
pe étoit  déferte  ^  Icrfque  les  Cim- 
mériens s'en  emparèrent. 

Nous  ne  parlerons  point  ici  des 
anciennes  invafions  de  l'Afie  mi- 
neure par  les  Cimmériens  ;  le  dé- 
tail  nous  en  eft  inconnu.  Nous 
n'examinerons  point  non  plus 
commcfnt  ils  purent  traverfer  les 
défilés  des  Heniochi  &  des  Zyg- 
hi  o\i  de  la  Circadie  ,  ceux  qui 
féparent  la  Çolchide  des  régions 
Pontiques,  &  comment  ils  vin- 
rent à  bout  de  furmonter  tous  les 
obftades  qui  durent  fe  préfehter  à 
eux.  Il  eft  fur ,  par  le  fait ,  que  ces 
obftades  ne  les  arrêtèrent  point , 
&  qu'ils  pénétrèrent  le  long  de  la 
mer  jufqu'à  Sinope  ,  où  ils  formè- 
rent un  premier  étabfifiement.  Ils 
ne  purent  arriver  dans  ce  païs,  en 
fuivant  le  bord  de  la  mer ,  fans 


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C  H  • 

tmverfer  de  grandes  rivières ,  en- 
tf'aucres  le  Thermodon  &  l'Ha- 
lys.  Avoient-ils  des  barques  ? 
Conftruifirent  -  ils  des  radeaux,  ? 
C*e(l  ce  que  nous  ignorons. 

Nous  connoiflbns  deux  inva- 
fîons  de  ces  peuples  dans  TAfie 
mineure  ,  poftérieures  l'une  & 
l'autre  à  Tan  1076.  Il  eft  proba- 
Jble  que  ce  fut  dans  la  première  de 
ces  deux  expéditions,  qu'ils  s'em- 
parèrent d'Antandre  ,  ville  fituée 
au  pied  du  mont  Ida ,  au  fond  du 
golfe  d'Adramytte  ,  &  dans, la 
Cilicie  voifine  de  la  Troade. 
Ariflotecité  par  Etienne  de  By- 
zance  ,  difoit,  dans  un  Ouvrage 
-hiftorique  dont  nous  n'avons  plus 
que  des  lambeaux  ,  que  ces  peu- 
ples avoieni  donné  le  nom  de 
Cimméris  à  cette  ville  ,  &  qu'ils 
en  refterent  les  maîtres  pendant 
un  Hecle  entier. 

Callinus  ,  cité  par  Strabon  ,  di- 
foit que  dans  chacune  de  ces  deux 
invaiions ,  les  Cimmériens  avoient 
pris  6c  pillé  la  ville  de  Sardes  ; 
que  dans  la  première ,  ils  fe  con- 
tentèrent de  la  piller ,  mais  que 
dans  la  feconde,ils  y  mirent  le  feu, 
&  qu'elle  fut  entièrement  détrui- 
te, à  la  réferve  de  la  citadelle. 
Hérodote  n'a  fait  mention  que  de 
cette  dernière  prife  de  Sardes  ,  & 
il  la  place  fous  le  règne  d'Ardys  , 
fils  de  Gygès ,  dont  le  règne  a  dû 
finir  vers  ran'628  ;  mais ,  au  rap. 
port  de  Calliflhène ,  le  poète  Cal- 
linus avoit  parlé  de  la  première 
prife  de  Sardes ,  comme  d'un  fait 
arrivé  de  fon  tems. 

Strabon  nous  a  confervé  un 
rers  de  ce  Poëte  ,  danss  lequel  il 


C  H       ,     rçr 

dît  que  l'armée  des  redoutables 
'  Cimmériens  s'avança  dans  le'païs 
des  Éfionéens  ,  c'eft.-à-dire  ,  des 
Lydiens  de  la  plaine  du  Cayftie, 
nommée  Afia  dans  Homère  ,  fui- 
vant  la  remarque  de  Scepflus.  L« 
vers  cité  par  Strabon  femble  faire  ■ 
partie  de  l'Élégie  compofée  par 
Callinus ,  pour  exhorter  les  peu- 
ples de  rionie  à  prendre  les  armes, 
&  dont  Stpbée  nous  a  confervé 
vingt- deux  vers.  Le  Poète  y  re- 
prélente  aux  Ioniens  qu'ils  ne  dé- 
voient pas  efpérer  de  refter  tran- 
quilles ,  lorfque  la  guerre  défoie 
les  païs  qui  les  entourent. 

Ce  poëme  de  Callinus  étoit 
adrefféjdit  Strabon,  aux  Magné- 
fiens  du  Méandre  ,  &  fuppofoit 
leur  ville  dans  un  état  floriflant  ^ 
puifqu'ils  venoient  de  ^îemporcer 
plufieurs  avantages  dans  une 
guerre  contre  les  Éphéfiens,  Ils  ne 
profitèrent  point  des  avis  de  Cal-  • 
linus  ,  ou  du  moins  ils  firent  de 
vains  efforts  pour  fe  défendre 
contre  les  Cimmériens  ,  qui 
prirent  &  détruifirenc  leur  ville. 

Le  Poëte  Archiloque  faifoit 
mention  de  cette  deftruâion  de 
Magnéfie  ;  d'où  Strabon  conclud 
que  le  tems  du  poëte  Callinus  & 
celui  de  l'invafion  des  Cimmériens 
avoient  précédé  le  Cecfe  d' Archi- 
loque. 

Le  même  Écrivain  dit  que  ce 
fut  dans  la  guerre ,  dont  les  vers 
de  Callinus  faifoient  mention,  que 
Midas  ,  roi  de  la  grande  Phrygie  , 
ayant  été  vaincu  par  les  Cimmé- 
riens ,  fe  donna  la  mort  pour  ne 
pas  jomber  vif  entre  les  mains  de 
ces  barbares.  É tienne  de  Byzâti- 


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1^1  C  H 

ce  dit,  en  parlant  de  Syaflus^ 
bourgade  de  la  grande  Phrygie  , 
que  les  Cimmériens  y  trouvèrent 
une  grande  quantité  de  bled  ren- 
fermé dans  des  foûterreins.  Nous 
n^obfervons  cette  circonAance  peu 
.importante  ,  que  pour  montrer 
qu'on  avoit  le  détail  de  cette  in- 
vaHon,  dans  les  anciens  Hido- 
riens  ,  peut-être  dans  Xanthus  de 
Lydie-,  contemporain  de  Darius 
&  de  Xerxès. 

Comme  Hérodote  ne  donne 
aucun  détail  de  Thiftoire  de  Ly- 
die avant  le  règne  de  Gygès ,  il 
n'eft  pas  étonnant  qu'il  n'ait  point 
parlé  de  la  première  prife  de  Sar- 
des ,  qui  doit  être  arrivée  fous 
Candaule ,  ou  peut-  être  même 
fous  le  règne  de  fon  prédéceffeur 
qui  a  fini  vers  Tan  732. 

Scrabon  donne  aux  peuples  qui 
pillèrent  Sardes,  &  détruifirent 
Magnéfie,  tantôt  le  nom  de  Cim- 
-mériens ,  commun  à  toute  la  na- 
tion ,  tantôt  celui  de  Trères  ou  de 
Trérons ,  qui  étoit  celui  d'un  peu- 
ple particulier.  Il  appelle  leur  chef 
Lygdamis  ;  ôc  c'eft  auffi  le  nom 
que  lui  donne  Callimaque ,  qui 
dit  que  Lygdamis  écoit  roi  des 
Cimmériens,  qui  vinrent  de  la 
Scythie  &  des  bords  du  Pont- 
Euxin  ,  ravager  les  plaines  du 
Cayftre.  Héfychius  affure  que 
ce  Lygdamis  pilla  la  ville>&  brûla 
le  temple  d'Éphèfe.  Callimaque 
xie  convient  pas  de  ce  dernier  fait, 
&  prétend  que  l'arc  &  les  flèches 
de  Diane  n'ont  jamais  cédé  de 
protéger  fon  temple, &  que  Lyg- 
damis périt  dans  l'Afie  uns  pou- 
voir retourner  dans  fa  patrie. 

IL  Hérodote  dit  que  les  Cim- 


CH 

ménens,)£tablis  fur  les  bords  dtk 
Danube ,  apprenant  que  les  Scy- 
thes avoient  traverfé  î'Araxé  >  6c 
s'avançoient  avec  une  armée  for- 
midable vers  TQccident,  en  furent 
extrêmement  allarmés.Cet  Araxe 
n'eft  pas  le  même  que  celui  dont 
Hérodote  parle  ailleurs ,  &  qu'il 
fait  tomber  dans  la  mer  Cafpien- 
ne ,  en  coulant  vers  l'Orient ,  ce 
qui  défigne  l'Araxe  d'Arménie  ; 
c'eft  le  Volga  ,  auquel  Ptolémée 
donne  le  nom  de  Rha.  La  marche 
des  Scythes ,  pour  fe  rendre  de 
la  Scythie  ou  des  bords  orientaux 
de  la  mer  Cafpienne  fur  le  bord 
du  Tanaïs  ,  montre  qu'ils  dévoient 
rencontrer  le  Volga  ou  le  Rha  fur 
leur  route. 

Les  Cimmériens  fe  trouvèrent 
partagés  dans  la  diète  générale  in- 
diquée vers  les  bords  du  Tyras  > 
fur  le  parti  qu'ils  dévoient  pren- 
dre. Les  chefs  des  différens  can- 
tons ,  ceux  à  qui  Hérodote  don- 
ne le  nom  de  Rois ,  étoient  d'avis 
de  marcher  au  devant  des  Scythes, 
&  de  les  combattre.  Cet  avis 
n'ayant  pas  été  reçu  par  le  corps 
de  la  nation,  la  difputes'échaufÈa; 
&  pour  en  prévenir  les  fuites ,  on 
convint  de  choifir  un  nombre  égal 
de  champions  pour  chacune  des 
deux  opinions  ,  6c  de  remettre  la 
décifion  au  fort  des  armes.  Héro- 
dote ne  nous  apprend  point  quel 
fut  le  fuccès  du  combat  ;  il  dit  feu- 
lement que  les  morts  avoient  été 
enterrés  fur  les  bords  du  Tyras  , 
&  que  de  fon  tems  on  montroit 
encore  leurs  tombeaux.  On  peut 
obferver^en  paCant^que  cette  ma- 
nière de  décider  les  queftions  dou- 
tçufes  par  les  firmes,  étoit  parti- , 
culière 


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Cl 

tuliire  aux  nations  Germaniqueit 
&  Celtiques ,  &  qu'elle  a  fubtiflé 
longrcems  chez  eux  ;  mais ,  'nous 
ne  voyons  pas  qu'on  ait  fait  atten- 
tion à  cet  exemple ,  qui  montre 
combien  la  coutume  écoit  ancien- 
ne paraii  les  Germains. 

On  voit  par  la  defcription  àa 
pais  qu'occupoient  alors  les  Cim- 
mériens  entre  le  Danube  &  le 
Bory(Uiène,qu*ils  avoient  derrière 
eux  au  nord  &  au  nord-oueft , 
un  païs  ouvert  &  d'une  grande 
étendue  ,  par  oii  ils  s'Itoient 
avancés  de  la  Germanie  fur  les 
bords  du  Pont^Euxin ,  &  par  le- 
quel il  leur  étoit  facile  de  fe  reti« 
rer  &  de  s'éloigner  des  Scythes  » 
qui  cherchant  feulement  un  païs 
oii  ils  puffent  s'établir,  &  vivre 
avec  leurs  troupeaux  ,  fe  feroient 
contentés  de  celui  que  leur  aban- 
donnoient  les  Cimmériens  ,  & 
n'auroient  eti  garde  de  s'engager 
i  les  pourfuivre  dans  un  païs  in- 
connu» Il  n'y  a  voit  d'ailleurs  aa« 
^un  fujet  de  haine  particulière  en- 
Ire  les  deux  nations. 

Ce  parti  n'eft  point  celui  qu'- 
Hérodote ùût  prendre  aux  Citn- 
mériensà  II  fuppofe  que  réfolus 
d'abandonner  leur  païs ,  parce 
qu'ils  ne  fe  croyoient  pas  en  é»t 
de  réfiûer  aux  Scythes ,  ils  s'a- 
vancèrent vers  rOrient  ;  i.^  C*é- 
toit  aller  à  leur  rencontre ,  &  non 
pas  les  éviter  ;  i.^  Par  cette 
route  ils  fe  mettoient  dans  la  né- 
ceffité  de  traverfer  le  Boryfthène , 
&l'Hypanis,  qui  ne  font  point 
guéables  ,  même  aux  endroits  oh 
les  Tartares  les  traverfent  aujour- 
d'hui ;  car ,  il  faut  qu'ils  fe  met- 
tent à  la  nage,  &  qu'ils  fe  fou* 

Tom.XI. 


CI  î9) 

tiennent  psr  des  efpèces  de  ra- 
deaux ,  ou  par  des  fafcines  de 
rofeaux  qui  s'attachent  même  aux 
chevaux.  Peut-on  fuppofer  qu'une 
nation  qui  ne  penfoit  qu'à  éviter 
un  ennemi ,  qu'elle  n'ofoit  at- 
tendre f  &  qui  marchoit  avec 
fes  troupeaux ,  fes  femmes  &  fes 
enfans ,  eût  choift  une  pareille 
route  î 

3.^  Au  de-là  du  Boryfthène 
les  Cimmériens  qu'Hérodote  lup- 
pofe  avoir  formé  le  projet  de  fe 
rétirer  dans  l'Afie  mineure  ,  pou- 
voient  prendre  deux  routes;  la 
première  ^  en  fuivant  les  bords  du 
Palus- Méotide  ,  jufqu'au  Tanaïs^ 
&  alors  il  falloit  qu'ils  trouvaffenc 
le  moyen  de  traverfer  encore  cet-' 
te  rivière.  Mais ,  par  cette  route  , 
ils  s'expofoient  à  rencontrer  les 
Scythes  dans  les  plaines  de  Cir- 
cadie  ,  &  ils  ne  pouvoienc  éviter 
d'être  enveloppés  ôc  taillés  en 
pièces  par  la  cavalerie  de  ces  peu- 
ples. Le  fécond  chemin ,  que 
pouvoient  prendre  les  Cimmé- 
riens ,  étoit  d'entrer  danslaCher- 
fonnèfe  Taurique  par  l'ifthme  qui 
l'attache  au  continent ,  &  d'aller 
gagner  le  détroit  ou  Bofphore  fur 
lequel  ils  avoient  des  places.  Ils 
pouvoient ,  il  eft  vrai  y  efpérer  de 
le  traverfer  fur  les  barques  &  fur 
les  radeaux  qu'ils  confervoienc 
dans  ces  places;  mais,  au  de- là  ils 
fe  trouvoiei^t  dans  le  même  in- 
convénient de  rencontrer  les  Scy- 
thes ,  à  moins  de  s'engager  dans 
les  montagnes  impraticables  des 
CircalTes.  Et  on  ne  comprend  pas 
que  les  Cimmériens ,  marchant  en 
corps  de  nation  avec  leurs  effets 
&  leurs  familles  ,  euiïent  jamais 


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194  Cl 

pu  les  tràverfer  ;  car ,  îls  n'étoîeflt 
pas  alors  dans  le  même  cas  que 
les  armées  qui  les  avoieot  précé- 
dés. Ces  armées  ne  portoient  que 
leurs  armes ,  6c  elles  étoient  en 
état  de  s*ouvrir  un  pafTage  par 
la  force  en  cas  de  réfiftance. 

Hérodote  dit  que  les  Scythes  » 
s'étam  emparés  du  païs  des  Cim* 
mériens ,  envoyèrent  une  armée  à 
leur  pourfuiie  du  côté  de  TOrient; 
que  cette  armée  ayant  perdu  leui' 
trace  dans  les  montagnes  ,  s*égara 
en  traverfant  le  Caucafe ,  Si  qu'a- 
yant fuivi  une  vallée  qui  la  mena 
fur  les  bords  de  la  ^ner  Cafpienne, 
elle  continua  cette  route  qui  la 
conduifit  dans  h  Médie ,  tandis 
que  les  Cimmériens  ,  ayant  pris 
à  r  Occident  du  Caucale  ,  fui  vi- 
rent les  bords  du  Pont-£uxin ,  ôc 
fe  rendirent  dans  FAfie  mineure 
par  la  Colchide. 

Au  fond  ce  n'étoît  qu'une  con- 
jeâure   d' Hérodote  ;  les  termes 

Îu'il  emploie  le  font  voir.  Les 
limmériens  paroiffent ,  dit  -  il  t 
être  venus  dans  TAfie  mineure  en 
fuyant  les  Scythes  ;  &  les  Scy- 
thes femblent  être  entrés  dans  la 
Médie  en  pourfuivant  les  Cimmé- 
rienj^.  Hérodote^  avoit  appris  d'une 
part  que  les  Scythes  peu  après  s'ê- 
tre établis  dans  la  Cimmérie , 
étoient  entrés  dans  le  païs  des 
Medes  par  le  pafiage  qui  efl  entre 
le  Caucafe  &  la  mer  Cafpienne  ; 
de  Pautre ,  que  dans  le  même  tems 
les  Cimmériens  avoîent  ravagé  la 
Lydie  &  Tlonie ,  détruit  Magnéfie 
&  brûlé  Sardes. 

Hérodote  chercha  à  lier  ces 
deux  faits;  &  comme  il  paroit 
avoir  ignoré  que  les  Cimmériens 


CI 

étolem  depuis  long  -  tems  iant 
r Afie  mineure,  &  qu'ils  cpnferve— 
rent  leurétablilTement  d'Antandre 
ou  de  Cimméris  pendant  un  (ie- 
de ,  il  imagina  qn'au  tems  de  la 
ruine  de  Sardes  fous  Alyacte ,  la 
nation  entière  étoit  venue  dans 
VACie  mineure  ,  fuyant  les  Scy- 
thes, fans  trop  examiner  fi  cette 
fuppo(ition  étoit  probable  ,  &  fi 
elle  pouvoit  s'ajuàer  avec  les  da- 
tes de  fa  propre  Chronologie» 

III*  On  doitconfidérer,la  na<^ 
tion  des  Cimmériens  comme  étant 
divifée  en  trois  parties  différentes 
au  tems  de  l'invafion  des  Scythes, 
i.^  Ceux  qui  étoient  dans  l'Afie 
mineure ,  &  qui ,  ouoique  maîtres 
de  deux  places,  de  oinope  &  d' An« 
tandre ,  formoient  moins  un  peu- 
ple qu'une  armée ,  plus  occupée 
du  défir  de  piller  le  pais ,  que  d'y 
former  un  établiâement  fiable* 
%.^  La  Colonie  de  la  Cherfonnèfe 
Taurique  >  qui  avoit  des  établifife- 
mens  fixes  fur  les  bords  du  Bof^ 
phore  Ciramérien  ,  mais  qui  étoit 
féparée  du  gros  de  la  nation  pat 
le  Boryfthène  &  par  THypanis. 
3  .^  Enfin  ,  le  corps  principal  de 
la  nation ,  qui  occupoit  les  païs  fu 
tués  entre  le  Danube  &  le  Boryf^ 
tHIne  ,  &  qui  avoit  fes  plus  con- 
fidérables  établiflemens  fiir  les 
bords  du  Tyras ,  &  dans  la  val- 
lée  fertile  oh  coule  ce  fleuve  fur 
lequel  il  y  a  aujourd'hui  d*afiez 
grofies  villes  &  un  grand  nombre 
de  villages. 

Nous  allons  examiner  féparé- 
menc  ce  qui  a  pu  &  dû  arriver  à 
chacune  de  ces  trois  portions  des 
Cimmériens.  i.^  Les  Cimmériens 
de  r  Afie  mineure ,  formant  moins 


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et 

tah  peuple,  comme  nous  Tavonk 
déjà  obfervé ,  qu'une  armée  ac- 
coutumée à  vivre  de  brigandages 
&  de  rapines  ,  continuèrent  de 
faire  des  incu  riions  dans  les  diver- 
fes  provinces  de  ce  paifs;mais,com- 
ine  t'invaHon  des  Scythes  &  la  re-- 
traite  des  Cimmériens  du  Tyras 
les  mectoient  hors  d^état  de  faire 
aucunes  recrues,  le  défaut  dé  ma- 
gafins  ,  d'économie  &  de  difcipli- 
ne  les  obligeait  de  fe  partager 
en  difFérens  petits  corps  pour  fub- 
fider  ;  &  plufieurs ,  ne  pouvant 
manquer  d*être  enveloppés  & 
taillés  en  pièces  »  foie  par  les  pay. 
fans ,  foit  parles  troupes  Lydien- 
nes ,  oii  conçoit  qu'ils  dévoient 
S*affoiblir  de  joui"  en  jour;  en  for- 
te qu'Al^atte ,  Prince  habile  & 
courageux  ,  vint  en6n  à  bout  de 
réduire  ce  qui  en  reftoit* 

Ceux  des  Cimthériehs  j  qui 
avoient  échappé  au  fet  dès  vain- 
queurs ,  furent  i-éduits  en  efclava- 
ge  ,  &  difperfés  dans  les  campa- 
gnes de  la  Lydie  &  de  la  Méfié. 
Alors ,  n'ayant  plus  de  commercé 
les  uns  avec  les  autres  >  ils  prirent 
les  mœurs  &  la  langue  de  leurs 
maîtres  ;  &L  leurs  entatis  ,  perdant 
bientôt  tout  ce  qui  pouvoit  lés 
faire  fouvertir  de  leur  première 
origine  ,  devinrent  Lydiens^  My- 
fiens  ou  Phrygiens. 

Les  Galates,  qui  pafferent 
quelques  fiecles  après  dans  la 
Phrygie  ,  étoient  dans  une  fitua- 
tion  bien  différente  ;  &  quoiqu'ils 
ne  fuifent  qu'au  nombre  de  dix  ou 
douze  mille  guerriers ,  il  leur  fut 
facile  de  fe  conferver  en  corps  dé 
nation.  Ils  étoient  appelles  par 
ks  tob  de  Bithynie  qui  fe  lièrent 


avec  eux  par  un  traité  folemnel  » 
dont  la  fubftance  fe  trouve  dans 
les  extraits  de  Memnon.  Les  rois 
de  Bithynie ,  qui  regardoient  ces 
Gaulois  comme  un  rempart  qu'ils 
oppofoient  aux  entreprifes  des  rois 
de  Pont  y  de  Cappadoce  ôc  dé 
Pergame ,  leur  fournirent  les  fe- 
cours  dont  ils  avoient  befoin  pour 
commencer  un  établidement.  Oé 
plus  y  ces  Gaulois  avoient  mené 
avec  eux  leurs  femmes  &  leurs 
enfans  ;  ils  étoient  conduits  par 
leurs  Rois  ou  par  leurs  Chefs ,  Sc 
obfervoient  entr'eux  une  policé 
exaâe.  On  peut  juger  de  l'ordre 
qu'ils  avoient  établi  par  le  grand 
nonjbrede  {Petits  cantons,  dai^ 
lefquels  les  trois  peuples  qui  com- 
poioient  la  nation ,  étoient  divifés; 
Pline  les  (ait  monter  à  cent  quatre- 
vingt-quinze.  Les  divers  cantons 
envoyoient  des  députés  aux  aflem- 
bléés  générales  qui  fe  tenoient 
régulièrement ,  &  dans  lefquelles 
on  régloit  les  affaires  communes. 
C'efi  par  cette  police ,  &  par  l'u^ 
nion  que  ces  trois  peuples  Gauloii 
de  la  colonie  conferverent  entré 
eut  y  qu'ils  fe  rendirent  la  terreur 
de  tout  ce  pais  ,  6c  qu'ils  furent 
en  état  de  fe  faire  refpèâer  par 
les  rois  de  Poilt ,  de  Cappadoce  , 
de  Pergame ,  &  même  par  ceux 
de  Bithynie  ;  ce  qui  continua  juf- 
qu'au  tems  oîi  les  Romains  firent 
la  conquête  de  l'Afie ,  6c  ils  né 
cédèrent  qu'à  cette  puiffance  à 
laquelle  rien  n'avoit  pu  réfifter. 

Si  les  Cimmériens  qui  brûlèrent 
Sardes ,  avoient  été  en  état  de 
former  un  corps  de  nation  ,  ils  fe 
feroieht  fans  doute  maintenus  dans 
leurs  établidemens  ,  &  n'auroiént 

Nij 


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196  C  I 

pu  être  détruits  par  les  Lydiens. 

2.*^  Les  Cimmériens  de  la 
CherConnèfe  Taurique  &  du  Bof- 
phore  avoient  des  villes  fur  les 
deux  bords  de  ce  détroit ,  ôc  ils 
écoient  probablement  les  maîtres 
de  toute  la  prelqu'ifle  ;  mais ,  il 
leur  auroit  été  difficile  de  la  dé- 
fendre contre  les  Scythes.  La 
CherfonnèfeTaurique  n'eft  jointe, 
i  la  vérité,  avec  le  Continent  que 
par  un  lilhme  de  peu  de  largeur , 
&  facile  à  couper  ;  mais ,  comme 
la  mer  e(l  guéable  des  deux  cô- 
tés de  riAhme  »  un  retranchement 
n'auroit  pas  empêché  la  cavalerie 
des  Scythes  d'entrer  dans  le  pais. 
Les  Cimmériens  de  la  Cherfonnè- 
fe  Taurique  ne  pouvoient  entre- 

E rendre  de  fe  rejoindre  au  gros  de 
i  nation,  fans  s'expofer  à  être 
coupés  &  enveloppés  par  les  Scy- 
thes^ dans  les  plaines  qui  font 
entre  le  Boryfthène  &  le  Tanaïs, 
parce  qu'étant  obligés  de  conduire 
9vec  eux  leurs  femmes  &  leurs 
effets  ,  ils  n*auroient  pu  faire 
qu'une  marche  très-lente.  Ainfi , 
il  eft  fon  probable  qu'abandonnant 
ies  plaines  voiflnes  de  IKlhme  & 
du  Bofphore»  ils  fe  retirèrent  dans 
les  montagnes  qui  font  au  midi  & 
a  Torient  de  la  Péninfule ,  mon- 
tagnes fertiles ,  mais  d*un  accès 
difficile  à  la  cavalerie  des  Schy* 
thés. 

Il  faut  voir  à  l'article  de  Cher- 
fonnèfe  Taurique,  ce  qui  e(l  rap- 
porté touchant  les  Cimmériens  qui 
s'y  étoient  établis. 

3.®  Le  corps  le  plus  confidéra- 
bie  des  Cimmériens,  ou  ce  qui 
compofoit  proprement  la  cité  ÔC 
la  nation ,  habitoit ,  comme  nous 


CI 

l'avons  dit ,  entre  le  Danobe  &  je 
Borydhène ,  &  fon  principal  éta-* 
bliffement  étoit  fur  les  bords  da 
Tyras.  Au  tems  de  Darius^  c'eft- 
à-dire ,  vers  Tan  500  avant  Jefus- 
Chrift ,  &  cent  trente  ans  après 
la  retraite  des  Cimmériens  ,  les 
Scythes  étoient  encore  les  maîtres 
de  tout  le  païs  qui  s'étend  depuis 
le  Volga  jufqu'au  Tanaïs  ,  6c  de- 

£uis  le  Tanaïs  jufqu'au  Danube, 
es  Grecs  avoient  plufieurs  colo- 
nies fur  la  côte  maritime  ;  &  les 
colonies  ,  qui  avoient  étendu  leor 
commerce  dans  l'intérieur  du  païs 
où  elles  avoient  même  formé 
'  quelques  établiHemens  ,  connoif- 
foient  aflez  bien  les  Scythes  &  les 
nations,  qui  habitoient  au  de-là 
de  ces  peuples  vers  le  nord. 

C'eft  fur  ce  rapport  &  fur  les 
converfations  qu'Hérodote  avoit 
eues  ,  avec  un    prince  Scythe , 
obligé    d'abandonner  (à  patrie  f 
qu'il  a  compofé  la  defcry)tion  très- 
détaillée  qu'il  a  faite  de  ces  païs. 
Il  n'y  a  aucun  des  peuples  dont 
il  parle,  de  qui  le  nom ,  la  figure 
ou  les  mœurs ,  aient  quelque  rap- 
port avec  les  nations  Germani- 
ques. Tous  ceux  de  ces  peuples 
qui  a'étoient  pas  Scythes  ou  Sar- 
mates ,   écojent   des   Nomades  « 
d'origine  fennique  ,   ancêtres  des 
Lithuaniens  d'aujourd'hui ,  &  qui 
parloient  une  langue  différente  de 
celles  des    Sarmates  ,  des  Ger- 
mains Ôc  des  Scythes. 

Il  faut  conclure  de-Ià  que  les 
Cimmériens  avoient  non  feule- 
ment remonté  jufque  fur  le  fom- 
met  ou  plateau  du  mont  Car- 
path,  mais  qu'ils  étoient  même 
defcendus  dans  la  partie  occidema- 


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Cl 

le  de  cette  montagne ,  &  vers  les 
fources  de  la  Viftule  &  de  l'Oder. 
Dans  cette  retraite,  ou  plutôt 
dans  cette  fuite  ,  les  diflférens  peu- 
ples qui  cofspofoient  la  ligue  des 
Cimmériens ,  fe  réparèrent  les  uns 
des  autres ,  &  s'arrêtèrent  en  des 
endroits  différeps,  La  ligue  ne 
fubfifle  plus,  le  nom  qui  la  défî- 
gnoit ,  ceHa  d'être  en  ufage.  Cha- 
que peuple  commença  à  former 
une  cité  particulière ,  indépen- 
dante des  autres,  &  reprit  fon 
ancien  nom,  à  peu  près  comme 
il  arriva  du.  tems  d'Augufte  aux 
Sicambres  ou  Cimbres  maritimes, 
dont  le  nom  s'éteignit  dans  la 
Germanie  6c  dans  la  Gaule ,  après 
que  les  plus  mutins  eurent  été 
tranfportés  &  difperfés  en  de-çà 
du  Rhin  dans  la  Belgique.  Ce 
nom  ne  fubfida  plus  que  dans  les 
Ouvrages  des  Poètes  &  des  Écri- 
vains,, qui,  pour  Ce  donner  un 
faux  air  d'érudition  ,  affectent 
d'employer  les  anciens  noms  des 
peuples. 

Les  Cimmériens  n'ayant  eu 
d'autre  objet  en  quittant  le  païs  , 
que  celui  d'éviter  les  Scythes ,  ils 
durent  s'arrêter  dans  les  endroits , 
où  ils  crurent  pouvoir  fubfider 
fans  avoir  rien  à  craindre  de  ces 
peuples.  Comme  ils  marchoient 
avec  une  fuite  embarraffante ,  il 
eft  probable  que  ceux  niiême  qui 
pouffèrent  le  plus  loin ,  firent  plu- 
fieurs  fiations ,  &  qu'il  fe  paffa 
plufieurs  années  avant  qu'ils  fe 
fuflfent  déterminés  à  former  des 
établiflemens  fixes. 

M.  Fréret  foupçonne  même 
[car  fur  ces  matières  où  nous 
n'avons  aucunes  notions  certaineS| 


CI  197 

il  peut  être  permis  de  propofer  des 
foupçons  ,  pourvu  qu'on  les  don- 
ne pour  ce  qu'ils  font  ] ,  que  ks 
Cimmériens  cherchant  à  fe  rap* 
procher  du  Danube  ,  pafTerent  à 
la  fin  au  midi  des  montaghes  qui 
féparent  la  Siléfie  d'avec  la  Mo- 
ravie, &  que  de-Ià  ils  entrèrent 
dans  la  Bohème  ou  dans  le  païs 
auquel  les  Boïens  donnèrent  peu 
après  leur  pom. 

La  lenteur  avec  laquelle  les 
Cimmériens  durent  s'avancer  vers 
l'Occident ,  après  avoir  quitté  les 
pais  voifins  du  Pont-Euxin  vers 
l'an  630  avant  Jefus-Chrîfi  ,  don<* 
ne  lieu  de  croire  qu'il  fe  pafTa 
plufieurs  années ,  avant  qu'ils  fuf* 
lent  parvenus  dans  la  Moravie  & 
dans  le  Boiohemum.  Cette  len- 
teur étoit  une  fuite  néceflaire  de 
la  marche  des  femmes  ,  des  enfans 
&  des  troupeaux  qu'ils  dévoient 
conduire  avec  eux,  car  il  ne  faut 
pas  perdre  de  vue  qu'il  ^'agit  ici 
de  la  migration  d'un  peuple  entier, 
&  non  de  la  marche  d'un  corps 
de  troupes. 

IV.  Hérodote  parle  de  certai- 
nes races  de  chevaux  fauvages , 
blancs  comme  la  neige  >  qui  fe 
trouvoient  entre  le  Danube  &  le 
Boryflhèae  ;  ôc  tout  le  monde 
fçait  que  les  plaines  6c  les  forêts 
des  païs^  voifins  du  Tanaïs  &  du 
Volga ,  ont  été  de  tout  tems  rem- 
plies de  chevaux  fauvages.  Cet 
animal  qui  n'efi  point  féroce ,  6c 
qui  s'accoûtuine  aifément  avec  les 
hommes  ,  étant  extrêmement 
commun  dans  les  païs  qu'habî- 
toient  les  Cimmériens  ,  ces  peu* 
pies  ont  dû  trouver  dès  les  pre- 
miers tems  I  le  moyen  d'en  ùxtx 
Niij 


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598  CI 

du  fervice  »  &  de  le  drefier  non 
faulement  à  traîner  des  chars  , 
mais  encore  à  porter  des  cavaliers, 
Ainfi ,  il  eu  naturel  de  croire  que 
ce  font  eux  qui  ont  porté  l'art  de 
l'équitation  dans  les  païs  oii  ils  ont 
pénétré ,  &  où  cet  art  étoit  in- 
connu avant  leur  invafion. 

Il  y  en  a  qui  croyent  que  le 
nom  des  Cimmériens  n*étoit  qu'- 
une épithete  honorable,  prife  de 
la  langue  que  ce  peuple  parloit  ; 
&.  que  ce  nom  défîgnoit  la  bra- 
voure ,  l'intrépidité ,  la  célébrité. 

V.  Dans  tout  ce  qu'on  vient  de 
lire  ,  il  n'a  point  été  queftion  d'une 
colonie  de  Cimmériens  ^  que  quel- 

?ies  Auteurs  placent  dans  la 
ampanie  en  Italie  >  auprès  de 
Baies.  Ephorus  ,  cité  par  Strabon, 
dit  que  ces  Cimmériens  habitoient 
dans  des  fouterreins  qu'ils  appel-f 
loient  Argiles  ,  &  qu'ils  paifoient 
les  uns  chez  les  autres  par  des  ca** 
yernes ,  &  menoient  par  le  même 
chemin  leurs  hôtes  vers  un  oracle 
qu'ils  avoient  xlans  un  lieu  fort 
profond  ;  qu'ils  gagnoient  leur  vie 
a  creufer  des  mines  ;  qu'ils  rece- 
▼oienc  de  Targent  de  ceux  qui 
renoient  confulter  l'oracle  »  •  *  • 
Qu'enfuite  ib  furent  détruits  par 
un  Roi ,  parce  que  la  prédiâioi^ 
de  l'Oracle  ne  s'étoit  pas  accordée 
avec  l'événement ,  &  que  l'Ora- 
de  fut  tranfporté  ailleurs.  Strabon 
traite  cela  de  fables  inventées  par 
ceux  qui  avoient  vécu  avant  lui. 
|<ï'a.-t-il  pas  raifon? 

Il  y  en  a  qui  croyei^t  que  cVft 
de  ces  Cimmériens  d'Italie  ,  plu- 
tôt que  de  ceux  du  Bofphore  ^ 
qu'efi  venu  te  proverbe  ancien  des 
^nébres  Çimoi^i'iennes,  comme 


CI 

on  peut  le  voir  dans  Ovide ,  qui 
tnet  au  même^aïs  le  ténébreux 
palais  du  Sommeil.  C'eft  auffi  ce 
qui  a  fait  croire  à  quelqpes-uns  » 
que  les  Cimmériens  ont  tiré  leur 
nom  du  mot  Phénicien ,  Cammar 
ou  Cimmer  ;  ç'eft-à-dire ,  devenir 
noir  &  obfcur.  Ces  peuples 
étoient  extraordinairement  Aiper^ 
ftitieux ,  à  quoi  contribuoh  fort  lai 
nature  de  leurs  p^ïs ,  dont  ils  ado-» 
roient  les  bois ,  les  fleuves  &  les. 
fontaines.  Il  y  avoit  auffi  un  antre 
fameux  par  où  ils  croyoient  qu'on 
defcendoit  aux  enfers,  &  oii  il 
n'^toit  permis  d'entrer  ^  qu'après 
avoir  facrifié  aux  dieux  infernaux. 
C'eft  fur  cette  faufle  imagination 
de  ces  peuples,  qu'Homère  a  fon* 
dé  la  fable  des  enfers  ,  que  Virgi** 
le  a  imitée  au  fixieme  livre  de  TÉ* 
néïde, 

JPline  donne  aux  Cimmériens 
d'Italie ,  une  ville  qti'il  appelle 
Cimmérium.  Cette  ville  paroit  à 
Cellarius ,  aufli  iabaleufe  que  fe 
peuple  Cimmérien  de  cepaïs-Ià  ^ 
malgré  le  témoignage  de  Fline  ;  ÔC 
il  croit  que  tous  ceux ,  qui  ont 
parlé  de  ce  ptétendu  petiple ,  & 
de  cette  prétendue  ville ,  ne  Tout 
fait  que  fur  l'autorité  d'Homère. 

Cette  ville  des  Cimmériens. 
d'Homère  a  donné  lieu  au  paf* 
fage  de  Pline  ;  6c  fi  de  toute  né- 
cèBitê  il  lui  falloit  trouverûne  pla- 
ce, elle  ne  pourroit  être  mieux  que 
dans  la  vallée  décrite  parFelhis , 
au  mot  CimmeriL  »  On  appelle , 
f>  dit- il ,  CimmérieiQS  ,  ceux  qui 
n  habitent  des  terres,  où  il  faie 
n  un  troid  extrême ,  telles  qu'ont 
n  été  celles  qui  font  entre  Baies 
»  fy  Çuimçs ,  dans  cette  contrée 


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CI 

h  oh  eft  une  vallée  entourée  d*Diie 
»  aiïez  haute  montagne.  Le  fo- 
n  leil  n'y  donne  ^  ni  matin  ni 
i>  foir.  a 

Madame  Dader ,  dans  Tes  re- 
marques for  rOdyflée,  dit  au 
iujetdes  Cimmériens  d'Homère: 
p  Ce  Poëte  ,  connoiiTant  non 
»  feuleoient  le  nom  de  ces  peu- 
»  pies  9  mais  auffi  leurs  climats , 
»  les  a  tranfportés  fur  les  côtes 
»  de  la  Campanie ,  &  il  les  y  a 
»  tranfportét  avec  toutes  les  té- 
»  nébres  dont  il  font  enveloppés, 
f  comme  nens  verrons  dans  le 
»  livre  foivant ,  qu*il  a  tran^orté 
n  à  Circeï  la  ville  d'^aea  «  de  la 
»  Colchide  avec  toutes  fes  pro- 
»  priétés. Ha  bien  vu  c{Ue  ces té- 
»  nébres  ÔL  cette  obfcurité  des 
»  Cimmériens  convenoient  à  un 
n  lieu  où  il  plaçoit  la  defcente  des 
I»  eiifers.  a 

CIMMÉRIS  ,  Cimmerîs  ,  {a) 
furnom  qu'Héfychius  donné  à  Cy- 
bêle  »  à  caufe  du  culte  que  lui  ren-* 
doient  les  Cimmériens. 

CIMMÉRIUM,  Cimnurium, 
KtfAfJiiptov^  ville  de  la  Campanie. 
Il  en  a  été  fait  mention  fur  la  fin 
de  l'article  des  Cimmériens. 

CIMMÉRÏUM,  Cimmerium^ 
Kifiuiptov  ,  (b)  ville  d'Afie  for  le 
Bofphore  Cimmérien.  Pomponius 
Mêla  la  met  à  l'entrée ,  &  Pline 
au  fond  de  l'entrée  de  ce  Bofpho- 
re. Selon  ce  dernier ,  on  la  nom- 
û)oit  auparavant  Cerbérion,  Cette 

(«)   Antiq.  expl.  par  D.  Bera.  de 
Montf.  Totn.  I.  pag.  14. 
ib)  Potnp.  Mel.  p.  90.  Plia.  Tom.  I. 

p.  t05. 
(c)  PtoIem.L.  Iir.  c.tf. 
Uj  Piolcm.  t.  V,  c,  9| 


CI  199 

ville  étoit  à  l'entrée  du  Bofphore 
Gmmérien  ,  à  l'égard  de  ceux  qui 

EafToient  des  Palus-Méotides  dans 
i  Pont  Euxin  ;  elle  étoit  au  fond 
à  regard  de  ceux  qui  faifoient  une 
route  contraire  à  l'orient  du  Bof- 
phore. 

CmMÈKlVM,Cimmerium,{c) 
K./n/uipw^  ville,  que  Ptolémée 
met  dans  la  Cherfonnèfe  Tauri- 
que ,  vers  le  milieu  des  terres  ; 
c'eft-à-dirè ,  qu'elle  étoit  différen- 
te de  celle  qui  étoit  fur  le  boitl  ôc 
à  l'orient  du  Bofphore  Cimmé- 
rien ,  de  laquelle  il  ne  fait  aucune 
mention  ;  peut-être  auili  eft-ce  la 
même  ville  déplacée  par  cet  Au- 
teur, 

CIMMÉRIUM  ^  Cimmerîum  , 
KifJt/uiptof ,  (d)  promontoire  d'A- 
fie ,  fur  la  côte  méridionale  des 
Palus-Méotides ,  entre  la  ville 
d'Apature  &  l'embouchure  du 
Vardan ,  félon  Ptolémée. 

CIMMÉRIUS,  Cimmerius, 
(è)  nom  d'une  montagne  de  la 
Cherfonnèfe  Taurique.  11  en  eft 
parlé  dans  Strabon. 

CIMMÉRIUS  ,  Cimmerîus  , 
Kiiuinfpioç ,  (/)  l'un  de  ces  braves, 
officiers  9  qui  fécondèrent  fi  bien 
Lyfandre  à  JEgos  Potamos.  Cet 
officier  étoit  d'Ephèfe. 

CIMOLE ,  Cimolus ,  K/iui>Aeç  « 
(g)  ifle  de  la  mer  Egée,  une  des 
Cydades  >  fituée  entre  Siphnos  & 
Mélos  >  qui  étoient  auffi  deux 
ifles   du   nombre  des  Cyclades. 

(e)  Strab.  p.  309. 

(/)  Pauf.  p.  6»5. 

0  Scrab.  p.  484.  Plin.  T.  I.  p.  sf  j. 
T*  II.  p  718,  719.  Ptoletn.  L.  111.  c^ 
17.  Ovid.  Metam»  L.  VII.  c.  la. 


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tQO  CI 

Ces  trois  ifles  étoient  à  l'oppofite 
du  golfe ,  qui  féparoit  la  Laconîe 
de  TArgolide.  On  tiroit  de  Fifle 
de  Cimole  une  forte  de  craie ,  qui 
étoit  excellente  pour  ôter  les  ta- 
ches des  habits.  On  s'en  fervoit 
aufli  dans  la  médecine.  Ptolémée 
parle  d'une  ville ,  qui  fans  douU , 
porcoit  le  mêqfie  nom  que  Tifle  , 
qu'il  appelle  Cimolis, 

Les  Italiens  nomment  cette  ifle 
Argentaria.  Elle  prit  ce  nom  , 
dans  le  tems  qu'on  y  découvrit 
des  mines  d'argent.  On  y  voit  en- 
core les  reftes  des  atteliers  &  des 
fourneau^i;  où  l'on  travailloit  ce 
ipétal  ;  mais ,  on  n'oferoit  repren- 
dre aujourd'hui  ces  fortes  de  tra. 
yaux ,  fans  la  permifBon  des 
Turcs  ;  &  les  Turcs ,  fous  prétex- 
te que  les  hâbitans  de  l'ifle  en  re- 
tireroient  de  gros  profits ,  ne  man- 
.,  -queroient  pas  de  les  accabler  d'im- 
f  pots.  Les  gens  du  païs  croyent 
^'  que  les  principales  mines  font  du 
côté  qui  regarde  Poloni ,  petit 
port  de  rifle  de  Milo. 

Dans  le  renverfement  de  l'Em- 

Sire  des  Grecs  par  les  Latins  , 
larc-S^nudo  ,  noblç  Vénitien , 
joignit  l'iile  d'Angentaria  au  duché 
de  Naxie,  avec  quelques  autres 
îfles  voifmes.  Elle  fe  trouva  6n« 
fuite  enveloppée  dans  la  conquête 
que;  Barb^roufiè  fit  de  l'Archi*» 
pel. 

Les  habîtans  d'Argentaria  font 
prefque  tous  du  rit  Grec,  & 
jouiflent  encore  dans  leurs  cha- 

(a)  Herodv  L.  VI.  c.  loj. 

(*)  Pluft.  T.  I.  p.  478  ,  47^  ér  fiq» 
Corn.  Nep,  in  Cimon.  c.  i.  ër  feq» 
Suid.  Tqai.  I.  p.  1459.  Athen.  p.  531. 
Piod.  Sicul.  jp*  t^a.  ^  /«;•  Juâ.  L,  II. 


Cl 

peHes  d'une  vingtaine  de  petites 
cloches  ;  ce  qui  n'eft  pas  un  petit 
privilège  fur  les  terres  des  Turcs. 
Les  Latins  y  font  en  petit  nom- 
bre ;  &  leur  églife  eft  deffervie 
par  un  vicaire  de  l'Évêque  de 
Milo ,  de  laquelle  Argentaria  efl 
comme  le  fauxbourg.  La  judice  y 
efl  adminifirée  par  un  juge  am« 
bulant ,  qui  eft  le  feul  mufalman 
du  païs.  Ordinairement  »  il  n'a  ni 
valet  ni  fervante ,  &  il  n'oferoit 
parler  haut ,  de  peur  que  les  hâ- 
bitans ne  le  fiflent  enlever  par 
quelques  Cor&ires  de  Malte. 

CIMOUS  ,  Cimolis  ,  Kifz^- 
»/<  t  la  même  que  Cimole.  Fbye{ 
Cimole. 

CIMON ,  Clmon,  Ktfj^w  ,  {a) 
fils  de  $téfago)-as ,  petit  fils  de 
Miltiade  L  II  fut  chaOé  d'Athènes 
par  Pififlrate ,  &  ne  fut  rappelle 
qu'après  la  mort  du  Tyran  ,  qui 
arriva  la  première  année  de  la 
63.6  Olympiade  »  52,8  ans  avant 
Jefus  Chrift.  Il  gagna  deux  fois  le 
priix  aux  jeux  Olympiques  ,  & 
^'acquit  l'amitié  du  peuple  ;  mais , 
les  filles  de  Pififtrate  le  firent  af- 
faffiner.  Il  eut  deux  fils  »  Mil&ade 
II ,  père  de,  Cimon  le  Grand  >  Sc 
Sté{ag;oras. 

ÇIMQN ,  Cimon  ,  K/^«r ,  {b) 
Athénien,  l'un  des  plus  grands 
capitaines  de  la  Grèce  *  étoit  fils 
dé  Miltiade  &  d'Hégifipyle , 
Thracienne  de  nation  »  o^  fille  du 
roi  Qlorus.  Miltiade  >  ayant  été 
condamné  à  une  amende  de  cin- 

c.  15.  Thucy4.  paf.  65.  &  fiq,  ïloIK 
HifU  Ane.  T.  II.  p.  171.  &  friv»  Mém. 
de  l»Acad.  des  Infcnpt.  &  Bell,  l^tr, 
Tom.  XII.  p.  155, 


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CI 

qnante  talens  »  fut  mis  en  prSfon 
pour  le  payement  &  y  mourut , 
laifTant  Ton  fils  Cimon  encore  fort 
jeune,  &  fa  fille  Elpinice  qui  n'é- 
toit  pas  encore  en  âge  d'être  ma- 
riée. Cimon  fe  vit  réduit  par  les 
loix  établies  à  Athènes  ^  à  garder 
la  même  prifon  ,  ians  efpérance 
d'en  Cortir  ,  qu*il  n'eût  payé  la 
fomme  à  laquelle  fon  père  avoit 
été  taxé. 

Il  y  a  des  Auteurs  qui  difent 
que  Cimon ,  dans  fa  jeuneiTe ,  fut 
accufé  d*un  commerce  criminel 
avec  fa  foeur;  mais ,  d'autres  affû- 
tent qu*il  avoit  époufé  Elpinice  , 
conformément  aux  coutumes  de 
(a  patrie ,  qui  autorifoient  le  ma- 
riage d'un  frère  avec  une  fœur  ;  Se 
que  la  véritable  raifon  de  ce  ma- 
riage étoit  leur  pauvreté  ,  qui  ne 
permettoit  pas  à  Elpinice  de 
trouver  un  mari  d'auffi  bonne  fa- 
mille qu'elle,  On  ajoute  que  dan$ 
la  fuite  Callias ,  qui  étoit  un  des 
plus  riches  partis  d'Athènes ,  en 
étant  devenu  amoureux ,  6c  ayant 
offert  de  payer  l'amende  à  laquelle 
fon  père  Miltiade  avoit  été  con- 
4aniné  ,  û  on  vouloit  la  lui  accor- 
der ,  Elpinice  y  cpnfentit ,  &; 
Cimon  la  lui  donna  en  mariage. 

Dès  qu'il  C(Hnmença  â  fe  mêler 
du  gouvernement,  il  fut  reçu  avec 
de  grands  témoignages  de  joie  ;  & 
comme  on  étoit  déjà  las  de  Thé- 
miflocle,  on  lui  déféra  les  plus 
grands  honneurs  &  les  premières 
charges ,  parce  qu'il  paroifToit 
agréable  ,  aifé  &  commode  à  la 
multitude»  àcaufe  de  fa  douceur 
&  de  fa  flmplicité.  Mais  ,  ce  qui 
contribua  encore  beaucoup  à  fon 
firancement ,  ce  fut  la  proteâion 


CI  Aot 

d'Ariflkte  ,  fils  de  Lyfin^acbus , 
qui ,  remarquant  dans  fes  mœurs 
un  naturel  heureux  qui  promet- 
toit  beaucoup^  voulut  fe  fervir  de 
lui  comme  d'un  contre- poids  à  la 

5rande  habileté  6c  a  laudace  de 
^hémiflocle.  Les  Medesne  furent 
pas  plutôt  chafTés  de  la  Grèce  p 
qu'il  fut  élu  Capitaine  général  de 
la  flotte ,  les  Athéniens  n'ayant 
point  encore  alors  la  principauté 
parmi  les  Grecs ,  mais  étant  fou-^ 
mis  aux  ordres  de  Paufanias  6c  des 
Lacédémoniens. 

La   première  chofe  qu'il  fît; 
ce  fut  de  faire  admirer  dans  toutes 
fes  campagnes  le  bel  appareil  de 
fes  troupes,    6c  encore  plus  la 
bonne  volonté  par  laquelle  elles  fe 
diflinguoient  entre  tous  les  confé- 
dérés. Cependant,  Paufanias  entra 
fecrétement  en  pourparler  avec 
les  Barbares  pour  trahir  la  Grèce. 
Il  écrivit  même  au  Roi  des  lettres 
à  cet  effet ,  6c  pendant  ce  tems- 
là  il   traitoit  (es  alliés  avec  une 
extrême  rigueur  ^  avec  une  fier- 
té fans  exemple ,  fe  portant  con- 
tr'eux  aux  dernières  infolences  à 
caufede  la  grande  autorité  dont 
il  étoit  revêtu  ,   6c  de  l'orgueil 
infenfé  dont  il  étoit  plein.  Cimon, 
profitant  de  fa  folie ,  recevoit  avec 
bonté  6c  avec  douceur  ceux  qui 
avoient  fouffert  fes  outrages  ,  6c 
vivoit  avec  eux  très  -  gracieufe- 
ment  6c  avec  toute  forte  d'huma- 
nité. Par  ce  moyen  ,  il  tranfporta, 
fans  qu'on  y  prît  garde  ,  des  La- 
cédémoniens    aux    Athéniens   , 
l'Empire  6c  le  commandement  de 
la  Grèce ,  non  par  la  force  des 
armes,  mais  par  la  douceur  de 
fe»  difcours  8c  par  la  facilité  de 


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toi  Cl 

iés  tnœars.  Car ,  la  plupart  des 
alliés,  ne  pouvant  fupporter  la 
idureté  &«rarrogance  de  Paufa* 
nias ,  fe  rangèrent  fous  les  ordres 
de  Cimon  &  d'Ariftide ,  qui ,  en 
les  attirant  à  eux  ,  envoyèrent  en 
même  tems  avenir  les  Éphores 
qu'ils  dévoient  rappeller  leur  gé- 
néral f  parce  qu'il  déshonoroit 
Sparte  >  &  qu'il  troubloit  toute 
la  Grece.^ 

.  Cimon  ,  après  que  tous  les  al- 
lies fe  furent  réunis  fous  fes  or- 
dres, s'embarqua  avec  toute  foa 
armée  pour  aller  en  Thrace  » 
parce  qu'il  avoit  appris  que  quel* 
ques  Perfes  des  plus  confidérables, 
&  parens  même,  du  Roi,  s'é* 
toient  emparés  de  la  ville  d'Éïon 
fur  lé  fleuve  du  Strymon  ;  &  que 
de- là  ils  incommodoient  fort  les 
Grecs  qui  habitoient  dans  ces 
quartiers.  En  arrivant  «  il  battit 
leurs  troupes  dans  un  grand  com- 
bat ,  &  les  obligea  de  (e  renfermer 
dans  la  ville.  Il  fe  jetta  enfuite  dans 
la  Thrace  qui  étoit  au-deilus  du 
Strymon;  6c  d'oh  la  ville xtiroic 
fes  convois  ;  il  en  chafla  les  kabi- 
tans  9  fe  rendit  maître  de  tout  le 
pais  f  &  réduîfit  par  ce  moyen  les 
affiégés  à  une  fi  grande  extrémité, 
que  Butés,  Général  du  Roi,dé- 
fefpérantde  (ts  affaires,  mit  le  feu 
à  la  ville ,  &  fe  brûla  avec  tous 
ies  amis  &  toutes  (es  rîchefles. 

Cimon  ne  retira  donc  pas  un 
grand  avantage  de  la  prîfe  de  cet- 
te ville  ,  tout  ayant  preique  périt 
dans  Fembrafement  avec  les 
.  Barbares  ;  mais  ,  comme  le  pals 
étoit  très-beau  &  très-fertile  ,  il 
le  donna  à  habiter  aux  Athéniens, 
q|ui^  pour  lui  marquer  Içur  ret; 


CI 

connoiffance  ,  lui  permirent  de 
dreiler  dans  la  "ville  trois  Hermès 
de  marbre,  avec  des  Infcrîptions , 
pour  conferver  la  mémoire  de  ce 
grand  exploit.  Ce  fut  pour  Cimon 
le  comble  de  l'honneur  ;  car ,  ni 
Thémiftocle,  ni  Mihiade  n'en 
avoient  jamais  reçu  de  pareil. 
D'oh  vient  donc ,  demande  Plû- 
tarque ,  que  les  ierviçes  &  les  ex- 
ploits de  Cimon  furent  fi  fort 
exahés  &  récompenfés  ?  Ce  fut 
fans  doute,  répond  le  même  Plu- 
tarque  ,  parce  que  foos  les  autres 
Généraux,  les  Athéniens  n'a*» 
voient  combattu  que  pour  défen- 
dre &  'pour  fauver  leur  patrie  ;  ^ 
au  lieu  que  fous  Cimon  ils  avoient 
attaqué  &  battu  les  Barbares  dans 
leur  propre  pais  ,  où  ils  avoient 
fait  des  conquêtes.  Car ,  ils  con- 
quirent Eïon  6c  Amphipolis  où 
ils  envoyèrent  des  colonies  ;  ils  en 
envoyèrent  auflî  dans  l'ifle  de 
Scyros  »  dont  Cimon  fe  rendit 
maître  par  une  aventure  que  nous 
allons  raconter. 

Cette  îfle  étoit  habitée  par  les 
Dolopes ,  très-peu  entendus  à 
cultiver  la  terre,  mais  grands  Cor- 
faires  de  toute  ancienneté.  Non 
contens  de  faire  des  coùrfes ,  ils 
fe  mirent  à  piUer  ceux  qui  relâ- 
choient  cheieux.Un  jour,quelques 
marchands  Theffaliens  étant  entrés 
dans  leur  port  de  Ctéfium ,  ils  les 
pillèrent  &  les  menèrent  en  pri- 
fon.  Mais ,  ces  prifonniers  ayant 
trouvé  le  moyen  de  rompre  leurs 
chaînes  &  de  fe  fauver ,  portèrent 
leurs  plaintes  devant  les  Am- 
phiûyons,  &  firent  condamner 
toute  l'ifle  à  rendre  à  ces  mar- 
chands tout  ce  qui  leur  avoit  été 


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CI 

pris,  5c  à  les  dédommager  de 
leurs  pertes.  Ceux  ,  qui  n'avoient 
point  eu  de  parc  au  pillage ,  re- 
luferent  de  contribuer  à  ce  dédom- 
magement ,  &  dirent  que  c*étoit  a 
ceux  qui  avoient  pillé  à  rendre 
leur  butin.  Ceux-ci ,  craignant  d'y 
être  forcés  ,  écrivirent  à  Cimon 
pour  le  prefTer  de  venir  avec  fa 
flotte»  prendre  pofTeffion  de  Me, 
qu'ils  étoient  prêts  à  lui  livrer, 
Cimon ,  s'en  étant  rendu  maître  , 
de  cette  manière ,  en  chafTa  d'a- 
bords les  Dolopes  »  &  rendit  ainû 
la  mer  Egée  libre ,  6c  la  purgea 
de  ces  Pirates  qui  rinfeftoiene. 

Enfuite ,  ayant  appris  que  Thé- 
fée  ,  fils  d'Egée ,  s'enfuyant  d'A- 
thènes, s-étoit  retiré  dans  cette 
ifle ,  &  qu'il  y  avoir  été  tué  en 
trahifon  par  le  roi  Lycomede ,  qui 
craignoit  que  s'il  lui  donnoit  un 
afyle  ,  il  n'attirrât  fur  lui  les 
Athéniens ,  il  mie  tout  en  œuvre 
pour  trouver  fon  tombeau.  Car , 
les  Athéniens  avoient  reçu  depuis 
peu  un  oracle  d'Apollon ,  qqi  leur 
ordonnoit  de  ramafler  tes  os  de 
Théfée,  de  les  porter  à  Athènes, 
&  de  lui  rendre  les  honneurs  con- 
venables comme  à  un  héros.  Mais, 
on  ne  Içavoit  point  l'endroit  où  il 
avoit  été  enterré  ;  &  les  Scyriens 
ne  vouloient  ni  convenir  qu'il  eût 
été  tué  dans  leur  ifle  ,  ni  permet* 
tre  que  l'on  y  cherchât  fon  tom- 
beau. Cimon  en  fit  la  recherche 
avec  tant  d'empreflement  &  de 
zèle ,  qu'enfin  on  le  trouva.  Il  fit 
donc  charger  iês  os  dans  fa  galè- 
re ,  les  orna  magnifiquement ,  6c 
les   porta   ainfi  dans  fa  patrie , 

Îrès  de  quatre  cens  ans  après  que 
béfk  en  fut  parti  -,  ce  qui  fit  un 


C  ï  2o^ 

fi  grand  plaifir  au  peuple  ,  qu'il 
lui  en  voulut  toujours  du  bien. 
Pour  confèrver  la  mémoire  de  cet 
événement ,  ils  établirent  un  com- 
bat de  Poètes  tragiques,  qui  fut 
très- célèbre. 

Un  ancien  Poète  racontoit 
qu'étant  encore  fort  jeune  6c  nou-»» 
vellement  arrivé  de  Chio  à  Athè- 
nes chez  Laomédon ,  il  foupa  un 
foir  chez  Cimon  ;  6c  qu'après  le 
louper,  dès  que  les  libations  furent 
faites  ,  on  pria  Cimon  de  chanter  ; 
6c  il  le  fit  n  agréablement ,  que 
toute  l'aiTemblée  le  combla  de 
louanges ,  6c  dit  qu'il  étoit  plus 
poli  que  Thémifiode ,  qui ,  ayant 
été  prié  de  chanter  à  un  repas  , 
répondit ,  qu'il  ne  fçavoit  ni  chan- 
ter ni  jouer  de  la  lyre  ,  mais  que 
d'une  ville  petite  6c  pauvre  ,  il  en 
fçavoit  faire  une  ville  grande  6c 
riche. 

Après  qu'il  eut  ceiTé  de  chan* 
ter ,  la  converfation  tomba  fur  fes 
aâions  ;  6c  chacun  rappelhoit  cel- 
les qui  lui  paroiflbient  les  plus 
grandes.  Pour  lui  il  ne  fit  mention 
que  d'une  rufe  dont  il  avoit  ufé  , 
6c  qui  lui  paroifibit  la  chofe  la 
plus  fage  6c  la  plus  fenfée  qu'il 
eût  jamais  faite.  Los  alliés  avoient 
fait  quantité  de  prifonniers  fur  les 
Barbares  dans  les  villes  de  Sefle 
6c  de  Byzance.  Pour  &ire  hon- 
neur à  Cimon ,  ils  le  prièrent  de 
faire  le  partage  du  butin.  Cimon 
mit  d'un  c6té  les  prifonniers  tout 
nqs,  6c  de  l'autre  tous  leurs  orne- 
mens  6c  toute  leur  dépouille.  Les 
alliés  fe  plaignirent  d'abord  de  ce 
partage ,  comme  y  trouvant  trop 
d'inégahté  ;  mais  ,  Gmon  leur 
donna  le  choix ,  6c  leur  dit  qjue 


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io4         CI 

les  Athéniens  fe  cotitenteroîent 
de  la  part  qu'ils  auroient  refufée. 
Alors  ,  un  certain  Hérophytus  de 
Samos  leur  ayant  confeillé  de 
choifir  plutôt  la  dépouille  des 
Perfes  que  les  Perfes  mêmes  ,  ils 
le  crnrent ,  prirent  les  ornemens 
des  Perfes ,  &  laifferent  les  prî- 
Ibnnrers  aux  Athéniens. 

Gmon  partit  donc  avec  le  lot 
qui  lui  étoit  refté ,  paflant  pour 
un  ridicule  faifeur  de  partage  ;  car, 
les  alliés  emportoient  beaucoup  de 
chaînes ,  de  colliers  &  de  bracelets 
d  or ,  quantité  de  riches  habits , 
&  de  beaux  manteaux.  Les  Athé- 
niens au  contraire  n*avoient  pour 
leur  part  que  des  corps  tout  nus , 
il  qui  étoient  très  peu  propres  au 
fîavatl.  Mais,  bientôt  après,  on 
vit  arriver  de  la  Phrygie  &  de  la 
Lydie  les  parens  &  les  amis  de 
ces  prifonniers ,  qui  les  racheté- 
lent  jufqu'au  dernier ,  à  groffes 
Ibmmes  d'argent  ;  de  forte  que  , 
des  deniers  qui  revinrent  de  cette 
rançon ,  Cimon  eut  de  quoi  en» 
irecenir  fa  flotte  quatre  mois  >  Ôc 
qu'il  y  eut  encore  beaucoup  d  or 
de  reile  pour  le  tréfor  public. 

£n  cr  tems-là  ,  les  alliés  con- 
tînuoient  bjen  de  payer  les  con« 
tributions  auxquelles  ils  avoient 
été  taxés  ;  mais ,  las  de  tant  de 
campagnes  quils  avoient  faites  » 
n'ayant  plus  befoin  de  continuer 
la  guerre,  &  ne  défirant  déformais 
que  de  cultivet  leurs  héritages ,  &C 
de  vivre  en  repos ,  les  ennemis 
s'étant  retirés  &  ne  les  incommo- 
dant plus  par  leurs  courfes,  ils  n'en- 
▼oyoîent  plus  ni  les  hommes  nt 
les  vaiiTeaux  qu'ils  dévoient  four- 
nir.   Les   autres    généraux    des 


CI 

Athéniens  tâchoient  de  les  y  for- 
cer par  toutes  fortes  de  voies.  Ils 
traînoient  en  juftice  ceux  qui  y 
manquoient ,  &  obtenoient  contre 
eux  des  condamnations  à  des 
amendes  6c  à  des  peines  même 
corporelles  ;  ce  qui  rendoit  odieux 
&  infuportable  aux  alliés  le  gou- 
vernement des  Athéniens.  Ci- 
mon ,  élu  général ,  prit  une  voie 
toute  contraire  ;  il  ne  foVça  aucun 
des  Grecs;  mais,  prenant  l'argent 
de  ceux  qui  ne  vouloient  pas  Ter—, 
vir  en  perfonne^fic  leurs  vaiffeaux 
vuides»  il  permit  qu'attirés  par 
la  douceur  du  repos ,  ils  demeu- 
raient tranquillement  dans  leurs 
maifons ,  6l  que  de  bons  hommes 
de  guerre  qu'ils  étoient,  ils  de- 
vinuent,  par  leur  parefle,  par 
leur  luxe  &  par  leur  folie,  de 
bons  laboureurs  &  de  bons  né- 

focians ,  mais  lâches  &  timides, 
aifant  donc  monter  ces  vaiffeaux 
par  les  Athéniens  tour-à-tour  , 
les  endurcifTant  ainfi  aux  travaux 
&  au;t  fatigues  ,  &  les  aguerrif- 
iant  de  plus  en  plus  par  toutes  ces 
expéditions  ,  il  fe  trouva  qu'en 
très-peu  de  tems  les  contributions 
&  la  folde,que  les  alliés  payoient, 
lui  eurent  fervi  à  rendre  les  A^hé-^ 
niens  maîtres  de  ceux  mêmes  qui 
les  foudoyoient ,  &  les  entretc- 
noient.  Car ,  comme  les  Athé- 
niens étoient  continuellement  fur 
mer,  qu'ils  avoient  toujours  le 
harnois  fur  le  dos  &  les  armes  à 
la  main  ,  ôc  qu'ils  étoient  nourris 
&  exercés  dant  toutes  ces  guer- 
res, les  alliés  s'accoutumèrent  peu 
à  peu  à  les  craindre  6c  à  les  flatter; 
6c  par-là ,  fans  s'en  appercevoir , 
ils  fe  trouverenc  tout  d'un  coup  y 


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CI 

an  lieu  d'alliés  des  Athéniens; 
leurs  tributaires  &  leurs  efcla- 
ves. 

Il  faut  dire  encore  que  jamais 
capitaine  Grec^  ne  rabaiiïa  ni 
n'humilia  fi  fort  Torgueil  &  la 
fierté  du  grand  roi  de  Perfe  ,  que 
Cimon  ;  car ,  après  l'avoir  chaffé 
de  la  Grèce  »  il  ne  le  quitta  point. 
Mais  ,  le  fuivant  pied  à  pied  fans 
lui  donner  le  tems  de  refpirer  & 
de  rétablir  fes  troupes ,  il  ravagea 
ion  païs  ,  lui  prit  plusieurs  villes  , 
&  en  obligea  plufieurs  autres  à  fe 
révolter ,  Ôc  à  embrafler  le  parti 
des  Grecs  ;  de  forte  que  dans 
toute  TAfie  mineure  >  depuis  l'Io- 
nie  jufqu'à  la  Pamphylie  ,  on  ne 
voyoic  pas  briller  un  feul  étendard 
des  Perfes.  On  dit  même  qu*ayant 
appris  que  ks  généraux  du  Roi 
étoient  fur  les  cotes  de  la  Pam- 
phylie y  avec  une  grofTe  armée 
&  un  grand  nombre  de  vaifleapx  , 
il  voulut  les  épouvanter  de  maniè- 
re qu'ils  n'ofadent  plus  paroitre 
dans  cette  mer  qui  étoit  en  de-çà 
des  iiles  Chélidonies  ;  c'eft  pour- 

?uoi ,  il  fit  voile  des  ports  de 
^nide  &  de  Triopium ,  avec 
deux  cens  galères  que  Thémifto- 
de  avoit  fait  faire  très-légères  & 
très- propres  à  tourner  &  à  être 
maniées  avec  une  extrême  agilité , 
&  qu^il  élargit  alors  en  faifant  fur 
chacune  avec  des  planches  |  un 
pont  qui  débordoit  des  deux  cô- 
tés ;  afin  que  tenant  un  plus  grand 
nombre  de  combattans ,  elles  fuf- 
fent  plus  redoutables  &  fifient  un 
plus  grand  effet  contre  l'enne- 
mi. 

Il  cingla  d'abord  vers  la  ville 
des  Phafélites  ^  qui  étoient  Grecs 


CI  ftos 

de  nation ,  mais  qui  ne  vouloient 
ni  recevoir  fa  fiotte  dans  leurs 
porcs  y  ni  fe  déclarer  contre  le  roi* 
Après  avoir  fait  le  dégât  dass 
leur  pais ,  il  s'approcha  de  leurs 
murailles  pour  les  afliéger.  Ceux 
de  Chio ,  qui  fervoient  fur  fa  flot- 
te ,  &  qui  de  toute  antiquité 
étoient  amis  des  Phafélites,  ta* 
choient  d'adoucir  la  colère  de  Ci- 
mon ;  &  pendant  qu'ils  y  travail- 
loient,  ils  avertifibient  les  Phaiè* 
lites  de  tout  ce  qui  fe  pafibit , 
par  des  lettres  attachées  à  des  fie« 
ches  qu'ils  jettoient  dans  la  place, 
par  deffus  les  murs.  Enfin ,  ils  mé- 
nagèrent leur  accomodement ,  à 
condition  qu'ils  payeroient  dix  u- 
lens  ,  qu'ils  fuivroient  les  Grecs  « 
&  qu'ils  combattroiem  avec  eux 
contre  les  barbares. 

Ceux-ci  étoient  à  l'ancre  avec 
toute  leur  fiotte  «  à  l'embouchure 
de  l'Eurymédon  ;  6c  ils  ne  vou- 
loient pas  bazarder  le  combat  con- 
tre les  Grecs ,  parce  qu'ils  atten- 
doient  un  renfort  de  quatre-vingts 
vaifieaux  Phéniciens ,  qui  leur 
venoient  de  Cypre.  Cimon,  su 
contraire ,  pour  prévenir  ce  rem- 
fort,  s'avança  contr'eux  en  ba- 
taille ,  ré  fol  u ,  s*ils  ne  voulojeat 
pas  combattre  de  bon  gré,  de  les 
y  obliger  par  la  force.  Les  barba- 
res ,  pour  éviter  cette  nécefiité  » 
entrèrent  dans  le  fleuve  :.  mais, 
comme  les  Athéniens  les  y  Sui- 
virent ,  ils  vinrent  enfin  à  leur 
rencontre  avec  fix  cens  voiles, 
ièlon  Phanodémus ,  ou  avec  troii 
cens  cinquante ,  fi  l'on  s'en  rap- 
porte à  Ephorus.  Dans  ce  combat 
naval  ils  ne  firent  rien  qui  répon- 
dit à  de  fi  grandes  forces  ;  car , 


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tournant  d'abord  leurs  prooes  vefs 
la  terre ,  les  premiers  qui  purent 
en  approcher  ,  s'y  jetterent  &  fe 
letirerent  dans  l'armée  de  terre  qui 
étoit  en  bataille  affez  près  du  ri- 
vage ;  les  autres  tombèrent  entre 
les  mains  des  Grecs  >  &  furent 
fort  maltraités.  Une  preuve  cer- 
taine que  les  vaiiTeaux  des  Barba* 
tes  étoient  en  très>grand  nombr^^ 
c*e{l  que  quoiqu'il  y  en  eût  beau- 
coup qui  fe  fauverent  f  comme 
cela  eft  vraifemblable  »  &  beau* 
coup  d'autres,  qui  ftirent  brifés 
ou  coulés  à  fond ,  les  Athéniens 
ne  làifTerent  pas  d*en  prendre  deux 
cens. 

Après  cette  défaite  de  la  flotte, 
Tarmée  de  terre  s'approcha  du  ri- 
vage. Cimon  trouvoit  que  c'étoit 
une  entreprife  très'hazardeufe^que 
de  tenter  une  defcente  en  préfen- 
ce  de  l'ennemi ,  6c  de  mener  des 
troupes  déjà  fatiguées  &  affoiblies 
contre  des  troupes  fraîches  6l  fu- 
périeures  en  nombre.  Mais  , 
voyant  que  le  courage  de  fes  fol- 
dats  étoit  infiniment  relevé  par 
leur  première  viâoire ,  que  leurs 
forces  en  écoient  même*  augmen- 
tées, 6c  qu'ils  ne  demandoient 
qu'à  être  lâchés  comre  les  Barba- 
res ,  il  fit  defcendre  fon  infante- 
rie pefammént  armée  ,  encore 
coûte  chaude  du  combat.  Cette 
infanterie  faute  à  terre  avec  de 
grands  cris  ,  6c  fe  jette  impétueu- 
(ement  fur  les  Petfesi  Ceux  -  cî 
les  reçoivent  avec  courage  ,  6c 
foûtiennent  leur  premier  choc 
fans  s'ébranler  ;  le  combat  fut  ru- 
de. Beaucoup  des  plus  confidéra- 
bles  6c  des  plus  braves  Athéniens 
y  furent  tués  ',  enfin ,  après  de 


grands  eflTorts ,  les  Grecs  rottipi- 
rent  les  Barbares  ,  les  mirent  en 
fuite  6c  en  firent  un  grand  carna- 
ge. Tout  ce  qui  ne  périt  pas  par 
répée  fut  pris ,  6c  on  fe  rendit 
maître  de  leurs  pavillons  qui 
étoient  remplis  de  toutes  fortes  dé 
richeffes. 

Mais ,  Qmon ,  comme  un  re- 
doutable Athlète  ,  après  avol<: 
vaincu  en  un  feul  jour ,  dans  deux 
combats  §  6c  avotr  par  fon  com- 
bat de  terre  ,  furpaflTé  l'exploit 
de  Salamine  ,  6c  par  fon  combat 
de  mer,  celui  de  Platée,  ajouta 
encore  un  nouveau  trophée  à  ces 
deux  viéloires.  Car  ,  ayant  été 
averti  que  les  quatre-vingts  vaif- 
feaux  Phéniciens  ,  qui  n'avoient 
pu  fe  trouver  à  la  bataille  ,  étoient 
arrivés  au  port  d'Hydre  ,  il  y  alla 
en  toute  diligence  avec  fa  fiotte. 
Ces  barbares  ne  fça voient  encore 
rien  de  certain  de  ce  qui  étoit  ar- 
rivé à  ces  deux  grandes  armées; 
ils  ne  pouvoient  s'imaginer  qu'el- 
les euffent  été  battues ,  6c  ils  dé- 
meuroient  en  fufpens  ,  flottant 
entre  la  crainte  6c  l'efpérancei 
Mais  ,  quand  ils  virent  arriver  La 
flotte  viâorieufe ,  ils  furent  fi 
abattus ,  qu'ils  ne  firent  prefquô 
point  de  réfiftance.  Tous  leurs 
vaiileaux  furent  pris ,  6c  la  plus 
grande  partie  de  leurs  troupes  tail- 
lées en  pièces. 

Ce  grand  échec  humilia  fi  fort 
la  fierté  du  grand  Roi ,  qu'il  con- 
fentit  à  figner  ce  traité  de  paix  fi 
célèbre  ;  dont  les  deux  princi- 
paux articles  étoient  qu'il  fe  tien- 
droit  toujours  éloigné  des  ^  mers 
de  la  Grèce  ,  de  la  carrière  d'un 
cheval  ,  6c  qu'il  ne  navigeroit  ja-. 


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Cî 

ttiaîs  en  deçà  des  roches  Cyanées 
&  des  ifles  Chélidonies  avec  au- 
cune armée ,  ni  autres  vaiflieaux 
de  guerre. 

Après  que  les  dépouilles  eurent 
été  vendues  à  Tencan  >  il  fe  trou* 
va  tant  d'or  &  d'argent  dans  l'é* 
pargne ,  que  les  Athéniens  eurent 
abondamment  de  quoi  fournir  à 
toutes  les  dépenfes  publiques ,  & 
que  de  ces  mêmes  tonds  ils  firent 
bâtir  la  muraille  de  la  citadelle  qui 
regardoit  le  midi.  On  dit  aufli  que 
les  grandes  murailles ,  qu'on  ap- 
pelloit  les  jambes,  &  qui  joi- 
gnoient  le  Pirée  à  la  ville ,  furent 
à  la  vérité ,  bâties  après  Cimon  ^ 
mais  que  ce   fut  lui ,  qui  ,   des 
fruits  de  fa  viâoire ,  en  fit  jettcr 
les    premiers    fondemens    avec 
beaucoup  de  travail»  ôc  une  gran- 
de dépenfe.  Car ,  comme  le  ter- 
rein  ,  où  on  étoit  obligé  de  les 
affeoir  ,  fe  trouvoit  au  milieu  des 
eaux  &  des  marais  »  il  fallut  déf- 
icher &  confolider  les  marais  à 
force  de  cailloux  &  de  groffes 
pierres  de  taille  qu'on  y  jettoit. 
Il  fut  aulTi  le  premier  qui  embellit 
la  ville  de  ces  lieux  deflinés  aux 
exercices   &  aux  jeux  honnêtes 
des  gens  de  condition ,  qui  dans  la 
fuite  furent  dans  une  très-grande 
vogue  ;  car ,  il  planta  quantité  de 
beaux  arbres  dans  la  place  publi- 
que ;  &  de  l'Académie ,  qui  étoit 
un  lieu  aride  6c  nu  ,  il  en  fit  un 
parc  ôc  un  bocage  délicieux ,  ar- 
rofé  de  quantité  de  belles  fon- 
taines y  &  percé  de  plufieurs  gran- 
des allées  couvertes  pour  fe  pro- 
mener ,  &  de  longues  lyces  pour 
y  faire  des  courfes. 

Quelque  tems  après  ,    ayant 


et  J2C7 

appris  que  quelques  Perfes  ne 
vouloient  pas  abandonner  ia 
Cherfonnèfe  de  Thrace ,  dont- 
ils  s'étoient  emparés  ,  &  qu'ils 
appelloient  à  leur  fecours  les 
peuples  de  la  haute  Thrace  pout 
s'y  maintenir  ;  il  alla  contr'eus 
avec  quatre  galères.  Les  barbares 
ayant  appris  qu'il  étoit  parti  d*A^ 
thènes  avec  ce  peu  de  vaifTeaux  ^ 
n*en  faifoient  aucun  compte  ; 
mais  •  avec  ces  quatre  galères ,  ii 
ne  laifla  pas  de  les  attaquer.  Il 
prit  treize  de  leurs  vaifTeaux ,  les 
chafTa  entièrement  de  leur  païs  , 
fournit  les  Thraces,  &  réduifit 
toute  la  Cherfonnèfe  fous  le  pou- 
voir des  Athéniens. 

Après  cette  expédition,  il  mar- 
cha contre  ceux  de  Fifle  de  Tha- 
fe ,  qui  s'étoient  révohés  ,  les 
battit  dans  un  grand  combat  na- 
^  val ,  prit  trente-trois  de  leurs  na* 
vires  ,  affiégea  leur  ville  ,  la  prie 
d'afl'aut ,  acquit  aux  Athéniens  les 
mines  d'or  qu'ils  a  voient  dans  le 
continent  voifin ,  &  leur  fournit 
toutes  les  terres  qui  étoient  de  1« 
dépendance  de  cette  ifle. 

De-là  ,  il  lui  étoit  aifé  de 
paiïer  dans  la  Macédoitie  ,  Ôc 
d'enlever  aux  Macédoniens  une 
grande  partie  de  leur  païs  ,  com- 
me il  ne  voulut  pas  profiter  de 
cette  occafion ,  elle  donna  lieu  de 
l'accufer  de  s'être  laiffé  corrom- 
pre par  les  préfens  d'Alexandre  ; 
&  là-deflus  il  fut  pourfuivi  en 
juftice  par  fes  ennemis  ,  qui  s'é- 
toient ligués  contre  lui.  Dans  les 
juAifications  qu'il  employa  auprès 
de  fes  juges,  il  dit  :  »  Que  jamais 
n  il  n  avoit  fait  amitié  ni  alliance 
"  avec  les  Ioniens ,  ni  avec  les 


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Ao8  '  CI 
w  Theflaliens  ,  peuples  trè$-rî- 
»  ches ,  comme  l'avoienc  fait 
w  plufieurs  de  leurs  généraux, 
M  qui  avoient  c  .erché  à  fe  faire 
n  faire  la  cour  ^  ^-  s'enrichir  ; 
»  mais  f  qu'il  s'^cbit  lié  avec  les 
n  Macédoniens,  parce  qu'il  ad- 
91  miroit  ôc  qu'il  tâchoit  d'imiter 
79  leur  fimplicité ,  leur  frugalité  ÔC 
n  leur  tempérance  ,  qu*il  préfé- 
n  roit  à  toutes  les  richefles  du 
n  monde  ;  que  du  refte  ,  il  pou* 
n  voit  fe  vanter  que  perfonnè  n'é- 
f>  toit  plus  aitê  que  lui  d'enrichir 
n  fa  ville  des  dépouilles  àfi  (es 
i>  ennemis,  u  Ces  moyens  de 
juflifîcation  firent  impredion  fur 
Tefprit  des  juges  ;  ôc  il  fut  ren- 
voyé abfous. 

Pendant  tout  le  tems  qu'il  gou- 
verna la  république  ,  il  retint  & 
réforma   toujours   la  licence  du 

I Peuple,  qui  mettoit  le  pied  far 
a  gorge  aux  nobles  ,  &  attiroit  à 
lui  toute  la  puiilance  &  l'autorité. 
Mais,  quand  il  fut  (^arti  de  nou- 
veau pour  aller  commander  l'ar- 
mée ,  le  peuple ,  fe  voyant  libre , 
&  fe  fentant  appuyé  par  Ephialte, 
bouleverfa  tout  l'ancien  ordre  du 
gouvernement ,  renverfa  toutes 
les  lolx  fondamentales  6c  les  an- 
ciennes coutumes  dont  il  avoit 
ufé  de  tout  tems ,  ota  au  Sénat 
de  l'aréopage  la  connoiflance  de 
la  plupart  des  caufes  qui  étoient 
portées  devant  lui ,  ne  lui  laiflant 
que  les  plus  communes  ,  &  en 
très*peti:  nombre  ,  &  fe  rendant 
maître  abfolu  de  tous  les  tribu- 
naux. Ainfi  y  il  jetta  la  ville  dans 
une  pure  démocratie  ,  Périclès 
étant  déjà  puiflant  ^  &  favorifant 
ce  parti  de  tout  fon  pouvoir,  C'eft 


CI 

pourquoi ,  lorfque  Cimon  fut  dei 
retour,  il  témoigna  fon  méconten- 
tement de  voir  la  dignité  du  Sénat 
foulée  aux  pieds  ,  ÔC  tâcha  par 
toutes  fortes  de  moyens  de  le  re- 
mettre en  pofleffion  de  fon  auto- 
rité ,^ÔC  de  faire  revivre  l'Arifto- 
cratie ,  qui  avoit  été  établie  du 
tems  de  Cliftène.  Mais ,  fes  enne-^ 
mis  fe  mirent  à  crier  &  à  exciter 
contre  lui  le  peuple ,  en  renou- 
vellant  les  bruits  qui  avoient  cou. 
ru  de  fon  commerce  avec  fa  fœur 
Elpinice  ,  6c  en  lui  reprochant  le 
grand  attachement  qu'il  avoit  pour 
les  Lacédémoniens.  Sur  quoi ,  il 
y  eut  des  vers  d'Eupolis ,  qui  du- 
rent fort  célèbres,  6c  qui  por- 
toient  :  »  Il  n'étoit  point  méchant 
n  homme  ;  mais  ,  il  étoit  fujet  au 
»  vin  ,  &  très-néglîgent ,  6t  il 
I»  prenoit  fouvent  la  liberté  de 
»  découcher  pour  aller  à  Sparte  » 
»  lailTant  fa  pauvre  fœur  Elpinice 
n  toute  feule  avec  une  grande 
n  cruauté*  a 

Si ,  étant  auffi  négligent  &  auffi 
adonné  au  vin  que  le  dit  ce  Poëte, 
Cimon  n'a  pas  laiiïé  de  prendre 
tant  de  villes ,  &  de  remporter 
tant  de  viâoires,  il  eft  certain  que^ 
s'il  eût  été  vigilant  &  fobre ,  au- 
cun des  capitaines ,  qui  ont  été 
avant  &  après  lui,  ne  Tauroit 
furpafTé  en  beaux  exploits.  Il 
faut  convenir  que  dès  le  commen- 
cement de  fa  vie ,  il  eut  beaucoup 
dlnclination  pour  Lacédémone. 
Car ,  de  deux  enfans  jumeaux 
qu'il  eut  d'une  femme  Clitorien- 
ne  ,  fuivant  Stéfichore ,  il  nomma 
l'un  Lacédémonies ,  &  l'autre 
Éléus.  Ceft  pourquoi,  Périclès 
reprocha  fouvent  à  ces  enfans  leur 

race 


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Cl 

née  du  c6té  de  leur  mère.  Mais; 
felon  Drodore  le  Géographe ,  ces 
deux  enfans  &  un  troifième  en- 
core ,  qui  fut  appelle  Theflalus , 
lui  naquirent  dlfodice ,  611e  d'Eu- 
i;yptolème,  fils  de  Mégaclès,  & 
par  conféquent  Athénienne. 

Ce  qui  contribua  le  plus  à  l'é- 
lévation de  Cimon  ,  ce  fut  la  fa- 
veur des  Lacédémoniens  qui 
écoient  ennemis  déclarés  de  Thé- 
miftocle  ,  &  qui  aimoient  mieux 
que  Cimon ,  qui  étoit  jeune ,  eût 
dans  Athènes  la  principale  puif- 
fance  &  la  plus  grande  autorité. 
Les  Athéniens  le  virent  d'abord 
avec  plaifjr ,  parce  que  cette  bien- 
veillance des  Spartiates  pour  Ci- 
mon leur  apportoit  de  grands 
-  avantages.  Mais ,  quand  ils  turent 
devenus  plus  puiffans  ,  ils  en  fu- 
rent très- fâchés  ;  car  ,  en  leur 
parlant ,  Cimon  ne  ceflbit ,  à  tout 
propos  ,  d'exalter  Laçédémone  , 
îur  tout  quand  il  les  reprenoit  de 
quelque  chofe ,  bu  qu'il  vouloit 
les  piquer.  Il  avoit  coutume  de 
leur  dire  :  Ce  nefl  pas-là  ce  que 
font  les  Spartiates.  Cette  conduite 
ki  attira  l'envie  &:  la  haine  de  fes 
citoyens. 

Mais  ,  ce  qui  lui'  porta  le  plus 
grand  coup  ,  ce  fut  une  calomnie 
horrible.  Laçédémone  ,  qu'un 
tremblement  de  terre  venoit  de 
réduire  à  la  dernière  extrémité  , 
envoya  à  Athènes  pour  deman- 
der du  fecours.  On  dit  que  Cimon 
préférant  l'utilité  des  Lacédémo- 
niens à  ragrandiffement  de  fa  pa- 
trie ,  entraîna  le  peuple  par  Ton 
éloquence,&  marcha  au  fecours  de 
Sparte  avec  quatre  mille  hommes 
de  pied.  Ion  rapportoit  même  Ten- 
Tom.  XI. 


Cl  J209 

droit  de  fon  difcours  »  qui  frappa 
6c  qui  perfuada  le  plus  les  Athé- 
niens. Car ,  il  dit  ,|u'il  les  exhorta 
à  ne  pas  laifTp"  ^^  Grèce  boiteu- 
fe  ^  6c  leur  yui  fans  contre- 
poids. 

Par  ce  mot,  Cimon  judifie 
fufHfamment  le  confeil  qu'il  don- 
noit  de  fecourir  Sparte.  Il  eft  cer- 
tain que  Sparte  6c  Athènes  pou- 
voient  être  regardées  comme  les 
deux  jambes  de  la  Grèce  ;  car  , 
c'étoit  fur  ces  deux  villes  que  tou-. 
te  la  Grèce  étoit  appuyée.  Ainfi , 
Tune  venant  à  périr,  la  Grèce  de- 
tneuroit  comme  boiteufe.  Il  eft 
certain  encore  que  le  peuple  d'A- 
thènes étoit  Ç\  enflé  de  fa  grandeur^ 
fi  fier  6c  fi  mutin  ,  qu'il  avoit  be- 
foin  d'un  frein  capable  de  modé- 
rer fa  fougue  ;  6t  il  n'y  en  avoit 
pas  de  meilleur  que  Sparte.  C'é- 
toit  elle  feule  qui  pouvoit  fervir 
de  contre- poids  à  l'emportement 
des  Athéniens.  C'éioit<}onc  ren- 
dre un  grand  fervice  à  Athènes , 
que  de  fecourir  Sparte  ,  6c  de 
l'empêcher  de  tomber  ,  6^  c'étoic 
un  coup  d'un  grand  politi(;iue. 

Peu  de  tems  après  ,  les  Athé- 
niens reçurent  des  Lacédémoniens 
un  affront  dont  ils  conferverent 
beaucoup  de  reffentiment  ;  6c  fur 
le  moindre  prétexte  qu*ils  purent 
trouver  ,  ils  bannirent  Cimon  par 
le  ban  de  l'Oftracifme,  c*eft-à-di-  - 
re,  pour  dix  ans.  Il  arriva  pendant 
ce  tems-là  que  les  Lacédémoniens 
revenant  d'une  expédition  oîi  ils 
avoient  affranchi  la  ville  de  Del- 
phes de  la  dépendance  des  Pho- 
céens ,  6c  étant  campés  dans  la 
plaine  de  Tanagre,  les  Athéniens 
allèrent  à  leur  rencontre  pour  les 

o 


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j^iio  C  I 

combattre.  En  cette  occafion  ; 
Cimon  fe  crut  difpenfé  de  garder 
fon  ban ,  ôc  fe  rendit  avec  fes 
armes  dans  fa  tribu  (Enéide,  pour 
fervir  fa  patrie  ,  &  pour  combat- 
tre l'ennemi  avec  fes  compatrio- 
tes* Le  Confeil  des  cinq  cens ,  en 
étant  informé ,  &  craignant,  fur 
les  clameurs  de  fes  ennemis» 
qu'il  ne  fût  venu  pour  les  trahir , 
en  troublant  l'ordonnance  de  leur 
bataille ,  &  pour  mener  enfuite 
dans  Athènes  les  Lacédémoniens 
vidèorieux  ,  envoya  faire  défenfe 
expreffe  aux  capitaines  de  le  re- 
cevoir dans  leurs  bandes.  Il  fut 
donc  obligé  de  fe  retirer  ;  mais  , 
avant  que  de  partir  y  il  s'adrefTa  à 
Euthippe,  du  bourg  d-Anaphlune, 
&  à  quelques  autres  de  fes  com- 
pagnons qui  étoient  le  plus  foup- 
çonnés  de  favorifer  les  Lacédé- 
moniens ,  6c  les  conjura  de  com* 
battre  de  toutes  leurs  forces  ôc 
fans  fe  ménager,  afin  que  cette 
journée  fervît  de  preuve  à  leur 
innocence,  6d  effaçât  de  Tefprit  de 
leurs  citoyens  un  foupçon  injufle 
qui  les  déshonoroit. 

Voilà  une  grande  a6lion.  Ci- 
mon vient  de  recevoir  de  ks  ci- 
toyens le  plus  grand  affront  qu'on 
puiflfe  faire  à  un  brave  homme  ; 
oc  il  ne  s'en  venge  qu'en  exhortant 
ceux  qui  font  foupçonnés  comme 
lui ,  à  bien  faire  leur  devoir ,  pour 
détruire  cette  calomnie.  Et  ces 
braves  gens ,  animés  par  fes  ex- 
hortations ,  combattirent  avec 
tant  d'acharnement,  qu'ils  fe  firent 
tous  tuer. 

Cela  fut  caufe  que  les  Athé- 
niens ne  perfévérerent  pas  long- 
^ems   dans    leur   colère   «ontre 


Cl 

Citnon  ;  adoucis  en  partie  >  com- 
me il  efl  vraifemblable ,  par  1< 
fouvenir  des  fervices  qu'il  leur 
avoit  rendus  ,  &  en  partie  rame- 
nés par  la  conjonâure  facheufe 
où  ils  fe  trouvoient  ;  car ,  «yanc 
été  défaits  dans  le  grand  combat 
qui  fut  donné  à  Tanagre  »  6c  at- 
tendant le  printems  prochain,  une 
armée  du  Féloponnèfe  ,  qui  viea- 
droit  fondre  fur  eux ,  ils  rappelle- 
rent  Cimon  de  fon  banniffement. 
Et  ce  fut  Périclès  luimâme  qui 
en  drefTa  6c  propofa  le  décret  ; 
tant  les  querelles  étoient  alors  ci- 
viles 6c  honnêtes ,  6c  les  animoii- 
tés  modérées  6c  prêtes  à  s'appai* 
fer  ,  dès  que  l'utilité  publique  le 
demandoit  ;  6c  tant  rambition , 
qui  efl  la  plus  vive  6c  la  plus  forte 
des  paf&ons  ,  cédoit  6c  fe  confor- 
moit  aux  tems  6c  aux  befoins  de  la 
patrie. 

Dès  que  Cimon iut  de  retour, 
il  travailla  promptement  à  étouf- 
fer la  guerre ,  qui  étoit  déjà  alla» 
mée,  6c  à  réconcilier  les  deux 
villes.  Mais  ,  quand  la  paix  fut 
faite ,  voyant  que  les  Athéniens 
ne  pouvoient  demeurer  en  repos, 
6c  qu'ils  vouloient  fe  donner  du 
mouvement ,  6c  fe  fervir  de  leurs 
armées  pour  s'agrandir  ;  il  eut 
peur  qu'ils  n'inquiétaffent  quelque 
peuple  de  la  Grèce  ,  ou  qu'en  ro« 
dant  autour  des  ifles  du  Félopon- 
nèfe avec  une  fî  grande  flotte  ,  ils 
ne  donnafTent  quelque  prétexte 
d'accufer  leur  ville  d'avoir  excité 
des  guerres  civiles  ,  ou  d'avoir 
donné  des  fujets  de  plainte  a  leurs 
alliés.  Il  arma  donc  deux  cens 
galères  pour  les  mener  encore 
une  fois  faire  la  guerre  en  Égyp-. 


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Cl 

te ,  &  en  Cypte.  Par-là  il  vouloU 
accoutumer  les  Athéniens  ,  &  les 
exercer  à  faire  la  guerre  contre  les 
Barbares ,  &  en  même  cems  ,  les 
enrichir  par  des  voies  juftes  & 
permifes ,  en*  les  mettant  en  état 
de  rapporter  dans  leur  patrie ,  les 
dépouilles  &  toutes  les  richeffes 
de  leurs  ennemis  naturels. 

Quand  tout  fut  prêt,  &  que 
Farmée  fut  fur -le  point  de  s*em- 
barguer ,  Cimon  eut  la  veille  ce 
fonge.  11  lui  fembla  qu'une  4ice 
fort  en  colère  ,  aboyoit  contre 
lui  ;  6c  qu'au  milieu  de  fon  aboi , 
elle  prononça  d'une  voix  humain* 
&  très-bien  aniculée  :  Ficns^  car 
tu  nous /iras  plaijïr  ,  à  moi  &  à 
mes  petits.  Ce  fonge  paroifToit 
difficile  à  expliquer.  Mais ,  un  cer- 
tain Adyphilus  de  Pofidonie,  ami 
particulier  de  Cimon  ,  grand  de- 
vint bon  interprète  de$  fonges , 
lui  déclara  que  ce  fonge  lui  pré- 
difoit  la  mort. 

Ce  fonge  fut  fuivi  d*un  autre  * 
qui  n'étoit  pas  moins  furprenant* 
Un  jour  que  Cimon  offroit  un  fa- 
crifice  à  Bacchus  ,  le  prêtre  ayant 
ouvert  la  viâime  après  l'avoir 
égorgée ,  il  vint  une  quantité  pro- 
digieufe  de  fourmis  ,  qui  enlevè- 
rent le  (àng  qui  étoit  ngé ,  le  por- 
tèrent peu  à  peu  auprès  de  Ci- 
mon, éi  lui  en  enduifirent  le  gros 
doigt  du  pied^  fans  que  per- 
fonne  y  prît  garde ,  pendant  un 
aflez  long-tems.  Enfin,  Cimon 
s'en  apperçut  ;  &  comme  il  les 
regardoit ,  le  facrificateur  vint  lui 
préfenter  le  foie  de  la  victime,  qui 
s'étoit  trouvée  fans  tête. 

Malgré  ces  fmiftres  préfages  , 
il  ne  laifia  pas  de  s'embarquer  ; 


Cî  iit 

tSLt^ilh^y  avoit  plus  moyen  dé 
s'en  dédire.  Il  envoya  d'abord  en 
Egypte  foixante  de  fes  vaiffeaux  » 
&  avec  les  autres ,  il  retourna  fur 
les  côtes  de  Pamphylie»  battit 
l'armée  navale  du  roi ,  compofée 
de  vaiffeaux  de  Phénicie  6c  de  Ci- 
licie ,  fe  rendit  maître  de  toutes 
les  villes  des  environs ,  &  épioit 
cependant  l'occafion  de  pénétrer 
en  Egypte  ;  car ,  il  ne  concevoit 
pas  de  médiocres  deffeins,  6c  il  ne 
penfoit  à  rien  moins  qu'à  ruiner 
6c  détruire  abfolument  l'Empire 
du  grand  roi  de  Perfe.  Ce  qui 
l'excitoit  le  plus  à  cette  haute  en- 
treprife ,  c*étoit  l'envie  6c  la  ja« 
loufie  ,  dont  il  étoit  animé  contre 
Thémiflocle  ,  fur  ce  qu'il  avoit 
appris  que  fa  gloire  6c  fa  puifFance 
étoient  très -grandes  parmi  les 
Barbares  ,  depuis  qu'il  avoit  pro<^ 
mis  au  roi ,  que  s'il  entreprenoit 
là  guerre  contre  les  Grecs ,  il 
conduiroit  lui-même  fon  armée  ^ 
6c  le  fervirott  très-utilement. Mais, 
on  dit  qu'avec  ces  magnifiques 
promcfTes ,  Thémiftode  défefpé-» 
rant  de  pouvoir  jamais  venir  à 
bout  de  la  Grèce  ,  6c  furmonter 
la  fortune  6c  là  vertu  de  Cimon  , 
fe  fit  mourir  volontairement  lui-, 
même. 

Cependant  j  Cimon  ,  qui  avoit 
formé  plufieurs  grands  projets,  8L 
comme  donné  le  fignal  de  plu- 
fieurs grandes  batailles  ^  fe  tenoic 
avec  fa/  flotte  à  la  rade  de  Cypre* 
De-là  il  envoya  à  l'oracle  de  Ju- 
piter Ammon ,  quelques  -  uns  de 
fes  gens  les  plus  fidèles  &  les  plus 
affeâionnés ,  pour  confulter  ce 
Dieu  fur  des  chofes  fort  fecretes  ; 
car,  perfonnên a  jamais  fçu  pour* 

Oij 


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2.11  CI 

2uoi  il  les  avoit  envoyés.  Le 
)ieu  ne  leur  rehdit  pas  même 
d'oracle  ;  mais  ,  dès  qu'il  les  vit 
entrer  dans  fon  temple ,  il  leur  or- 
donna de  s'en  retourher,parce  que 
Cimon  s'étoit  déjà  rendu  auprès 
de  lui.  Ces  paroles  ouïes  ,  ces  am- 
ba (Fadeurs  reprirent  incontinent 
le  chemin  de  la  mer.Étant  arrivés 
au  camp  des  Grecs,  qui  étoit  fur 
les  côtes  d'Egypte  ,  ils  apprirent 
la  mort  de  Cimon  ;  &  rapportant 
le  tems  de  cette  mort  à  celui  oii 
le  Dieu  leur  avoit  annoncé  qu'il 
s'étoit  déjà  rendu  auprès  de  lui , 
ils  connurent  que  fous  cette  efpè- 
ce  d'énigme ,  il  leur  avoit  déclaré 
fa  mort ,  en  leur  faifant  entendre 
qu'il  étoit  déjà  avec  les  Dieux. 
Tel  eft  le  récit  de  Plutarque  ,  au- 
quel le  leâeur  n'ajoutera  pas 
beaucoup  de  foi. 

La  plupart  des  Hiftoriens  rap- 
portent qu'il  mourut  de  maladie» 
au  fiege  de  Citium ,  ville  de  Cy- 
pre  ;  d'autres  difent  que  ce  fut 
d'une  bleffure  qu'il  reçut  en  com- 
battant contre  les  Barbares.  En 
mourant ,  il  commanda  à  fes  offi- 
ciers de  ramener  promptement  la 
flotte  à  Athènes ,  en  cachant  foi- 
gneufement  fa  mort;  ce  qui  fut 
exécuté  avec  tant  de  fecret ,  qu'ils 
avoient  gagné  leurs  portes  ,  6c 
s'écoieint  mis  en  fureté  ,  avant  qu'- 
aucun des  ennemis,  ni  même  des 
alliés ,  fe  fût  apperçu  que  Cimon 
n'étoit  plus  en  vie.  Cimon ,  tout 
mort  qu'il  étoit ,  conduifit  &L  com- 
manda en  quelque  forte  fa  âotte 
pendant  trente  jours. 

On  dit  que  les  os  de  Cimon  fu- 
rent rapportés  dans  l'Attique.Une 
preuve  ,  félon   Plutarque  »  c'eft 


cr 

que  Ton  y  voyoii  fon  tombeatf  J 
qui  étoit  nommé  Cimonia.  Ce- 
pendaiit  »  les  habitans  de  Citium 
bonoroient  encore  du  tems  de  no- 
tre Hiflorienj  un  certain  tombeau» 
Îu'ils  appelloient  le*  tombeau  de 
limon  ,  au  rapport  de  l'orateur 
Nauficratès ,  qui  ajoute  qu'ils  lui 
rendoient  cet  honneur ,  parce  que, 
dans  un  tems  de  Ûérilité  6c  de  fa- 
mine ,  le  Dieu  qu'ils  alletrent  con^ 
fulter  ,  leur  répondit  de  ne  plut 
négliger  Cimon ,  mais  de  l'hono- 
rer 6c  de  le  révérer  comme  un 
Dieu. 

DIGRESSION 

Sur  le  portrait  de  Cimon. 

Plutarque  ,  qui  nous  a  fourni  ce 
qut  nous  venons  de  dire  des  ex- 
ploits de  ce  grand  ,  homme ,  va 
auffi  nous  fournir  de  quoi  tracer 
fon  portrait, 

Cimon  étoit  beau  6c  bien- 
fait de  fa  perfonne.  Il  avoit  la  tail- 
le haute  6c  majeAueufe  >  6c  une 
grande  quantité  de  beaux  cheveux 
irifésy  qui  ombrageoient  fes  épau- 
les. 

Dans  fes  premières  années ,  il 
eut  une  très-mauvaife  réputation» 
6c  fut  fort  diffamé  comme  un 
homme  très-difTolu  ,  grand  bu- 
veur 6c  entièrement  femblable 
à  fonaieul  Cimon,  qui,  à  caufe 
de  fa  flupidité  Sl  de  fa  bêtife ,  eue 
le  furnom  de  Coalemos^  qui  fi- 
gnifie  hébété.  Stéfimbrotus  de 
Thafe ,  contemporain  de  Cimon  , 
avoit  écrit  qu'il  n'apprit,  ni  la 
mufique,  ni  aucune  des  autres 
fciences  qu'on  fait  apprendre  aux 
enfans  de  bonne  maifon ,  6c  qui 
écoient  fort  eh  vogue  en  Grèce  ^ 


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CI 

qu*îl  étoît  entièrement  prîvé  de 
cette  éloquence  ,  de  cette  facilité, 
de  cette  grâce  de  parler  ^  qu'on 
remarquoit  dans  les  enfans  <i'A- 
thènes  ;  mais  qu'il  y  avoit  dans 
fes  difcours  beaucoup  de  magna- 
nimité ,  de  vérité  &  de  franchife  , 
&  que  Ton  naturel  tenoit  plus  d'un 
homme  du  Péloponnèfe ,  que  d'un 
Athénien.  Ainfi ,  on  peut  lui 
appliquer  ce  qu'Euripide  dit 
d'Hercule  :  GroJ^er  au  dehors  , 
fans  nul  ornement,  mais  homme  de 
bien  aufouverain  degré, 

Cimon  fut  fort  enclin  à  l'a- 
mour des  femmes  ;  car ,  le  poëte 
Mélamhius ,  en  badinant  avec  lui 
fur  (es  amours  dans  fes  élégies  , 
faifoit  mention  d'une  Afténa  de 
Salamine  ,  &  d'une  Mneftra , 
comme  de  fes  maîtreffes.  D'ail- 
leHrs  y  il  eft  coudant  qu'il  eut  une 
paiBon  un  peu  trop  forte  pour 
Kodice ,  quoique  fa  femme  légiti- 
me ;  car ,  il  fut  inconfolable  de  fa 
mort ,  comme  cela  paroit  par  les 
élégies  qu'on  lui  adrefTa  pour  le 
confoler. 

Mais ,  <lans  tout  le  refte  dej 
mœurs  de  Ciinon ,  il  n'y  eut  rien 
que  de  grand  &  d'admirable; car, 
il  ne  cédoit  ni  à  Miltiade  en  cou- 
rage &  en  audace ,  ni  à  Thémif- 
tocle  en  fagefTe  &  en  bon  fens. 
Et  tout  le  ntonde  convient  qu'il 
étoitplus  jufte^  plus  homme  de 
bien  que  l'un  &  l'autre  ;  &  que , 
ne  leur  étant  en  rien  inférieur  dans 
lés  vertus  militaires,  il  les  fur- 
paflbit  infiniment  tdus  deux  dans 
les  vertus  politiques  ,  lèrs  mê- 
me qu'il  étoit  encore  ;  jeune,  & 
qu'il  n'avoir  aucune  expérience  de 
la  guerre.  En  effet,  à  l'tnvarion 


CI  ui 

des  Medes ,  lorfque  Thémiftocle 
confeilla  aux  Athéniens  d'aban- 
donner leur  ville  pour  aller  fe 
porter  fur  leurs  vaiffeaux  devant 
Salamine,  6c  combattre  là  par 
mer ,  tout  le  monde  ,  parut  éton- 
né &  concerné  d'un  confeil  fi 
hazardeux  6c  fi  téméraire  ;  mais  , 
on  vit  Cimon  ,  fuivi  de  fes  cama- 
rades ,  &  avec  un  vifage  gai , 
monter  le  long  de  la  rue  du  Cé- 
ramique à  la  citadelle  ,  pour  y 
confacrer  dans  le  temple  de  Mi- 
nerve un  mords  de  bride  qu'il 
portoit  à  la  main,  comme  (i  la 
ville  ,  dans  la  conjondure  oii  elle 
fe  trouvoit  alors ,  n'eût  plus  eu 
befoin  de  gens  de  cheval ,  mais 
de  bons  hommes  de  mer.  Après 
avoir  fait  l'offrande  de  ce  mords , 
il  prit  un  des  boucliers  qui  étoient 
appendus  aux  parois  du  temple  , 
fit  fes  prières  à  la  Déefle ,  defcen- 
dit  fur  le  rivage ,  &  fut  le  premier 
qui ,  par  fon  exemple ,  infpira  la 
confiance  à  la  plupart  des  auttes  , 
&  leur  donna  le  courage  de  s'em- 
barquer. 

Tous  les  grands  biens ,  que  Ci- 
mon avoit  fi  honorablement  ga- 
gnés fur  les  Barbares  ,  il  les  dé- 
pënfa  plus  honorablement  encore 
pour  le  foulagement  des  citoyens. 
Car  ,  il  ôta  les  clôtures  de  fes 
terres  &  de  fes  jardins  ,  afin  que 
les  pauv refis  de  fa  patrie  ,  &  les 
étrangers  même  ,  puflfent  y  aller 
ceuillir  en  toute  liberté,  les  fruits 
dont  ils  aciroient  befoin.  Tous  les 
jours  ,  il  avoit  chez  lui  ua  fouper 
(Impie  ,  mais  fuffifant  pour  uit 
grand  nombre  de  gens.  Tous  les 
pauvres,  quivouloient  y  aller, 
étoient  bien  reçus ,  &  aroient  là 
Oiij 


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jii4  C  I 

leur  nourriture  (ûre;  afin  que  n*i^ 
tant  point  obligés  de  travailler  de 
leur  métier  pour  gagner  leur  vie  , 
ils  pufTent  donner  tout  leur  tems 
aux  affaires  de  la  république.  Il  eft 
vrai  qu' Ariftote  écrit  que  ce  fou- 
per  n*étoit  pas  pour  tous  les  pau- 
vres d'Athènes  indifféremment, 
mais  feulement  pour  les  pauvres 
de  Ton  bourg  de  Lacia. 

Quand  il  alloit  dans  les  rues, 
il  fe  faifoit  fuivre  par  un  grand 
nombre  de  gens  fort  bien  vêtus  ; 
&  lorfqu'il  renconuoit  quelque 
pauvre  vieillard,  qui  n*avoit  qu'un 
méchant  habit ,  il  lui  &ifoit  don- 
ner celui  d'un  de  fes  domeftiques. 
Et  il  n'y  avoii  point  de  pauvre 
citoyen  qui  ne  tint  à  grand  hon- 
neur de  recevoir  publiquement 
de  lui  cette  libéralité.  Ces  mêmes 
domeftiques  portoient  toujours  fur 
eui  beaucoup  d'argent ,  &en  paf- 
iànt  fur  la  place ,  ils  s'approchoîent 
des  plus  honnêtes  de  ces  néceffi- 
teux ,  &  leur  mettoient  dans  la 
main  quelque  pièce  d'argent, 
très-fecrétement  6i  fans  être  vus 
de  perfonne.  Ceft  de  ce  dernier 
trait  que  Çratinus  ,  poëte  comi- 
que, femble  faire  mention  dans 
une  de  fes  pièces  ,  intitulée  Us 
ArchÛoques  yo\i  il  dit  :  Pour  moi^ 
Métrobius,  greffier^  je  me  fiauois  de 
la  douce  efpérance  depaffer  heureu^ 
fement  ma  vieillejfe  auprès  de  Ci-* 
mon,  le  plus  divin,  le  plus  hofpita^ 
lier ,  le  plus  charitable  de  tous  les 
hotnmeSy&  le  premier  des  Athéniens 
tn  toute  venu;  mais,  malheureufe^ 
ment  f  il  eft  mort  le  premier.  £c 
Gorgias  le  Léontin  ,  dit  fort 
bien  que  Cimon  amaffoit  des 
richeffes  pour  s'en  fervir ,  &  qu'ils 


CI 

s*en  fertroît  pour  fe  faire  efiîmet 
&  honorer.  Critias  même,  qui 
fut  un  des  trente  tyrans ,  fouhaite 
dans  fes  élégies  ,  les  richefiés  des 
defcendans  de  Scopas  ,  la  mag- 
nanimité de  Gmon ,  &  les  tro- 
phées d'Agéfilalif  le  Lacédémo- 
nien. 

La  libéralité  de  Cimon  fur- 
paffbit  infiniment  l'humaiûté  & 
la  charité  des  anciens  Athéniens  ; 
car ,  ceux-ci ,  dit  Plutarque ,  ont 
bien  répandu  parmi  les  hommes, 
la  femence  d<e  la  nourriture,  s'il 
efi  permb  de  parler  ainfi ,  en  leur 
enfeignant  à  (emer  le  bled.  Ils  leur 
om  montré  encore  Tufage  des 
fontaines  ,  &  l'utilité'  du  feu  pour 
fubvenir  à  leurs  befcùns.  Mais, 
Cimon  ,  en  Caifant  de  fa  maifon , 
comme  le  Prytanée  commun  de 
tous  les  hommes  ,  en  leur  aban- 
donnant les  prémices  des  fruits  de 
fes  terres ,  ql  de  tout  ce  que  les 
faifons  lui  apportoient  de  meilleur 
&  de  plus  beau ,  &  en  permetum 
aux:  plus  étrangers  même  d'en 
prendre  tant  qu'ils  vouloiént ,  & 
d'en  ufer  comme  de  leur  bien 
propre,  a  comme  rappelle  dans 
la  vie  cette  ancienne  communau- 
té ,  fi  vantée  du  tems  de  Saturne 
&  du  fiede  d'or.  Quant  à  ceux 
qui,  pour  déprimer  ces  largeffes 
de  Gmon ,  di&nt  que  c'étoient 
des  moyens  pour  Natter  le  peu- 
ple ,  pour  6*inAnuer  dans  fes  bon- 
nes grâces ,  &  pour  atdrer  k% 
faveurs  ,  ils  font  aifez  refutés  par 
le  reile  de  la  vie  de  ce  perfonna- 
ge  ,  qui  tenoit  pour  l'Ariftocratie, 
&  étoit  entièrement  porté  pour  le 
gouvernement  des  Lacédfmo- 
luens^cpmmeille  témoigna  hau* 


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CI 

tement  en  fe  joignant  à  Arîftîcle 
pour  s'oppofer  à  Thémiftocle  qui 
élevoit  la  Démocratie  plus  haut 
qu'il  ne  falloit  -,  &  depuis  encore  § 
en  s'emportant  extrêmement  con- 
tre Ephialte  ,  qui ,  pour  faire  plai- 
lîr  au  peuple ,  vouloit  caffer  le 
Sénat  de  TAréopage. 

Quoiqu'il  vît  tous  les  autresv 
Gouverneurs  de  fon  tems ,  hors 
les  feuls  Ariftide  &  Ephialte ,  en- 
richis par  les  concumons  &  les 
voleries  au*ils  falToient  fur  le  pu-* 
bhc  4  il  fe  maintiiy  toujours  in- 
corruptible ,  conferva  Tes  mains 
pures  9  non  feulemenc  de  toutç 
concûffion,  mais  encore  de  tôuc 
préfent ,  &  continua  jufqu'à  la  fin 
fle  fa  vie  de  faire  &  dire  gratuite-? 
ment  tout  ce  qui  étoit  utile  6c  ex- 
pédient pour  la  république. 

CIMON  ,  Ciman,  Klf^u^f ,  (a) 
fameux  peintre ,  natif  de  Cleo- 
ae.  11  efl  parlé  de  ce  peintre  dans 
Wï  padage  de  Pline  ;  éi  ce  paiTaee 
a  donné  lieu  à  M.  le  comte  dé 
Caylus  y  de  faire  quelques  obferr 
yations ,  qu'on  Hra  avec  d'autant 
plus  de  plaifir, qu'elles  ne  fervent 
pas  peu  à  donner  «ne  idée  da 
peintre  dont  il  s'agit^  &  des  pro- 
grès dont  la  peinture  lui  fut  re- 
devable. Voici  d*abord  le  pafîage 
'  de  Pline  :  Hic  [  Cimon  ]  Cota» 
gr^ha  invmt ,  hoc  eft  ,  obliquas 
imagines ,  ^  varie  formare  vuîtus^ 
refpicienUs ,  fufcipientefque  6»  def- 
picientes  ;  articulif  etiam  membra 
diftinxitf  venus  protuUt ,  praterqm 
in  vefte  &  rugas  ^fittu%  invenit. 


CI  iTJ 

M.  Durand  le  traduit  ainfi  : 
M  Cimon  9  avant  tous  les  agtres  , 
n  fit  des  vifages  de  profil  ,  & 
»  généralement  toutesfortes  d'ob- 
n  jets  qui  fe  préfentent  obli- 
n  quement  ;  &  il  s'avifa  le  pre- 
»  mier  de  varier  fçs  figures  & 
w  ûs  airs  de  tête,  en  diverfes 
Il  manières ,  en  les  faifant  tourner 
}i  ou  en  bas  ou  en  haut ,  ou  de 
n  côté  ou  par  derrière  ,  félon  le 
jï  fujet.  Il  pouffa  rinduftrie  enco- 
n  te  plus  loin  ,  en  diflinguant  les 
}>  articles  6i  les  joimures  des 
Il  membres  ;  ce  qu'on  n'avoit  pas 
n  encore  tenté,  il  fit  paroitre  les 
w  veines  &  les  mufcles  ,  &  don- 
w  na  enfin  aux  draperies  des  plis 
n  naturels  &  des  ondulations  lé- 
»  gères.  « 

Il  s'en  faut  bien  aue  M.  le 
comte  de  Caylus  adopte  une 
telle  interprétation,  n  Comment  ^ 
»  Pline,  dic-il ,  auroir-il  pu  dire 
n  que  Cimon  étoit  le  premier 
n  qui  a  voit  fait  des  vifages  de 
»  profil?  Pouvoij-il  ignorer  que 
»  la  première  tête  deuinée ,  celle 
n  que  la  fille  du  fculpteur  Dibu- 
n  tade  avoit  apperçue  dans  uri^ 
»  ombre  ,  s'étoit  préfentée  nécef- 

h  fairement  de  profil • 

i>  Et  puifqu'il  efl  ici  queilion  de 
n  progrès ,  la  remarque  de  Pline 
n  ne  doit  porter  que  fur  les  nou- 
n  veautés  dont  on  étoit  redeva- 
>i  ble  à  Cimon,  Mais,  fans  tn'em* 
»  barraffer  de  Texpreffion  Grec- 
»  que  Catagrapha,  qui  fe  trouve, 
I»  à  ce  que  l'on  m'a  dit ,  différenv 
n  ment  écrite  dans  les  manufcrits, 


.  (a)  Plin.  Tom.  II.  p,  690t  Méffl*  de  TAcad.  des  Infcript.  &  Bell.  Lett»  Toni^ 
SX.  p.  170.  &  friv» 

O  iv  . 


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ziS  CI 

M  il  eft  à  croire  que  Pline  eaten- 
i>  doit  auffi  bien  le  Grec  qu*on  le 
»  fait  aujourd'hui  ;  &  comme  il 
»>  traduit  en  Latin  le  mot  Grec , 
M  quel  qu'il  foie  ,  par  ohliqu(9 
»  imagines  ;  Je  crois  par  confé- 
w  quent .  qu'il  faut  entendre  par 
>»  ces  mots  ,  non  des  vifages  de 
9>  profil ,  maid  des  têtes  vues  en 
»  racourci.  J  obferverai  même 
V  ^ue  le  mot  imago^  ne  doit  point 
»  être  pris  ici  pour  une  figure  , 
»  mais  feulement  pour  une  tête , 
n  un  portrait.  C*étoît  à  peu  près 
n  à  quoi  la  peinture  étoit  bornée 
w  dans  Ton  premier  âge.  On  n'a- 
99  voit  repréfenré  les  têtes  quç 
»  dans  un  feul  afpeé^  ,  c'efl-à-di- 
»  re ,  de  profil.  Cimon  hazàrdâ 
n  le  premier  d'en  defBner  dans 
•>  toutes  fortes  de  fefis>  contraires 
I»  à  celui' ci;  &  il  mit„  par  ce 
i>  moyen  »  une  grande  variété 
19  dans  la  repréfentation  des  tê- 
»>  tes  :  celles ,  qu'il  deffinoit ,  re- 
»  gardoient  tantôt  le  fpeftateur , 
»>  c'eft- à-dire ,  qu'elles  fe  préfen- 
n  toient  de  face  ;  quelquefois  il 
»  leur  faifoit  tourner  la  vue  vers 
n  le  ciel  ;  &  d'autresfois  il  les 
n  faifoit  regarder  en  bas.  Ce  n'é- 
n  toit  point  varier  les  airs  de  têtes  ^ 
»  comme  le  dit  le  fleur  Durand  ; 
»  la  peinture  n'étoit  point  encore 
i>  parvenue  à  ce  degré  de  per- 
i>  fieâion  ;  il  ne  s'agiffoit  que  de 
»i  pofition  ôc  non  d'expreffion  ÔC 
»  de  fentiment.  Cimon  ne  devait 
M  pas  nonplus^aire  voir  des  têtes 
19  par  derrière  ;  il .  vouloit  faire 
»  des  portraits  ;  Se  ce  n'auroit  pas 
n  été  le  moyen  de  les  rendre  re- 
»  connôidables  ;  car ,  je  ne  fors 
I»  point  de  cette  idée,  que  c'eft 


CI 

n  par  des  portraits  que  les  pr6« 
9>  miers  peintres  ont  dii  commen- 
»  cer.  Que  l'on  examine  le  cœur 
9»  humain  ^  &  Ton  en  fera  con- 
99  vaincu»  Les    chofes  ne  pren« 
99  nent  faveur  qu'autant  qu'on  jr 
99  met  de  l'intérêt.  Le  grand  art 
99  de    Cimon    confifloit  donc  à 
99  avoir  ^  pour  ainfi  dire  ,  ouvert 
99  le  premier  »  la  porte  aux  ra» 
99  courcis*  Ce  premier  pas   étoit 
99  d'une  grande  importance  »  &  il 
99  méritoit  bien  qu'on  lui  en  fit 
99  honneur.  Sans  doute  qu'il  fit 
99  pafTer  dans  les  attftudes  de  fes 
99  figures  ,  la  même  variété  de 
99  pofitions    qu'il    a  voit    imagi*- 
99  né  d'introduire  dans  fes  têtes , 
»  quoique  Pline  n'en  dife  rien , 
n  Si  qu'il  faille  en  effet  ne  point 
}>  trop  donner  aux  artifles ,  dans» 
99  ces  premiers   commencemen» 
99  de  la  peinture ,  oîi  tout  doit 
99  marcher  pas  à  pas. 

99  Quant  SLiiTt  autres  progrès  qoe 
99  Cimon  avoit  fait  faire  à  la 
99  peinture,  ils  n'étoient  pas  moîn» 
99  importans ,  &  je  crois^  qu'on  les 
99  peut  envifager  ainfi.  AnicuUs 
99  membra  diflinxit ,  il  eateodit 
I»  mieux  que  ceux  qui  l'avoient 
99  précédé,  les  attachemens;  fans 
99  quoi  '  les  figures  paroiflent  un 
9>  peu  roides  &  d'une  feule  pièce; 
99  défaut  de  tous  les  artifles  qui 
99  ont  paru  dans  tous  les  lems* 
i>  Lorfque  la  peinture  étoit  enco- 
99  re  dans  fon  enfance ,  les  mains 
w  &  les  bras ,  les  pieds  &  les 
19  jambes ,  les  cuifFes  &  les  han- 
99  ches,  la  tête  &  le  col  ,  &c« 
»  tout  cela  ,  dans  leurs  Ouvra- 
99  ges  y  efl  9  comme  on  dit ,  tout 
n  d'une  venue  ^  Se  les  figurrel 


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CI 

l>  rfont  aucun  mouvement.  Ci- 

V  mon  avoit  entrevu  la  néceffité 
»  de  leur  en  donner.  Il  avoit 
»  commencé  à  donner  à  Tes  têtes 
»  des  mouvemens  diverfifiés;  il 
n  étendit  cela  aux  autres  parties 
n  de  fes  figures  ;  ce  qui  ne  pou- 
n  voit  fe  faire  qu'en  attachant 
»  avec  juilefTe  chaque  membre 
»  enfemble.  Cela  eft  plus  intelli- 

V  gible ,  que  de  dire  avec  le  fieur 
If  Durand ,  que  le  peintre  difli/i" 
»  gua  les  articles  &  Us  jointures 
p  des  membres. 

»  Venas  protuUt.  Voici  un 
»  peintre  qui  commence  à  être 

V  convaincu  de  l'utilité  de  Tétu- 
»  de  de  l'anatomie ,  &  qui  la  met 
»  en  pratique  ;  il  fait  paraître  tes 
»  veines  ,  c'eft-à.dire  ,  que  s'é- 
»  tanc  apperçu  des  effets  que  le 
»  mouvement  produit  fur  le  na- 
p  turel  9  en  changeant  la  fituation 
»  des  mufcles,  toutes  les  fois  que 
P  la  figure  prend  une  nouvelle 
»  fituation ,  il  eflaie  d'en  enrichir 
»  la  peinture.  Il  commence  par 
»  la  repréfentation  des  veines  ;  il 
»  étoit  bfen  près  de  connoître  • 
»  Tuiage  &  l'office  des  mufcles , 
9  &  peut-être  que  l'expreffion 
»  Latine  vena  peut  fouffrir  cette 
»  extepfion. 

»  L'art  de  la  peinture  n'avoit 
»  pas  fait  les  mêmes  progrès 
»  dans  la  couleur  qu'on  lui  voit 
s»  fair^  dans  le  deflein  ;  ainfi ,  j'ai 
»  peine  à  croire  que  le  mot  vena 
»  (bit  ici  une  expreffion  figurée , 
»  dont  Pline  fe  foit  fervi ,  pour 
»  faire  entendre  que  Cimon  avoit 
»  animé  la  couleur  ,  &  y  avoit, 
»  pour  ainfi  dire ,  mis  du  fang. 
»  On  dit  des  carnations  du  Ticieoj 


Cl  217 

M  qu*on  voit  le  fang  couler  fous 
»  la  peau.  Un  fiecle  plus  tard, 
n  i'admettrois  volontiers  cette 
n  explication  ;  mais  ,  il  faut  parler 
V  fuivant  les  tems  y  &  les  con- 
n  jeâurestrop  éloignées  nedoi* 
I»  vent  point  être  admifes. 

»  Praterque ,  in  vefle  &»  ruga^ 
M  &Jinus  invenit.  Avant  Ciinoa 
w  tout  écoit ,  comme  l'on  voit , 
n  extrêmement  informe  dans  la 
»  peinture.  Les  figures  ,  vues  de 
Il  profil ,  ne  fçavoient  fe  préfen- 
»  ter  que  dans  unfeulafpeâ.  Les 
»  habillemens  étoient  exprimés 
»  tout  auffi  fimplement  ;  une 
D  draperie,  n'étoit  qu'un  fimple 
Il  morceau  d'étofie  qui  n'offroie 
Il  qu'une  furface  unie.,  Entre  les 
Il  mains  de  Cimon,  cette  drape- 
Il  rie  prend  un  caradère,  il  s'y 
»  forme  des  plis.  On  y  voit  des 
Il  parties  enfoncées,  d'autres  par* 
n  ties  éminentes  qui  forment  des 
Il  finuofités ,  celles  que  la  nature 
n  les  donne  ,  Ôc  que  doit  prendre 
n  une  étoffe  jettée  fur  un  corps 
»  <]ui  a  du  relief,  u 

CIMON,  Cimon  y  K^^ù^  , 
vieillard  extrêmement  pauvre. 
Ayant  été  condamné  à  Rome> 
pour  quelque  crime ,  à  mourir 
de  faim  ,  il  fut  nourri  dans  la 
prifon  par  fa  fille ,  qui  venoit  lui 
donner  à  tetter ,  6c  qui  lui  fauva 
la  vie  par  cette  aâion»  Les  juges, 
étant  informés  de  la  chofe ,  firent . 

tt^ce  au  père  en  faveur  de  la  fille; 
l  l'aéUon  fut  repréfentée  .dans  un 
tableau  ,  qu'on  plaça  enfuite  dans, 
le  temple  de  la  Piété. 

CIMON  ,  Cimon  ,  KlfJLcaf , 
Hitlérien.  Entr'autres  chofes  il 
avoit  décrit  la  bataille  >  oii  les. 


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:2l8  CI 

Amazones  furent  taillées  en  Pièces 
par  les  Athéniens.  Cet  Hiftorien 
eu  cité  par  Arrien. 

CIMON  ,  Ci/non ,  XlfjLo^v. 
(  il  )  Suidas  parle  d'un  Cimon 
Athénien  ,  qu*it  diftingue  de  Ci- 
mon,  fils  de  Mihiade.  Et  après 
hii  avoir  attribué  quelques  traits, 
que  les  Anciens  donnent  à  ce  der- 
nier ,  il  ajoute  qu'il  avoit  compo- 
fé  irn  traité  admirable  de  l'art  de 
oonnoitre  lek  chevaux. 

CIN ,  Cin  y  fut  le  père  des 
Cniéens.  Foye^  Cinéens. 

CIN  A  9  Cindy  ou  plut^  Cyna. 
Voye^i  Cyna. 

ClNARADAS,  Cinaradas  , 
grand  facrificateur  de  la  Vénus 
qoe  l'on  honoroit  à  Paphos. 

CIN  ARE  ,  Cinarùs  ,  iile  dont 
parle  Athénée.  Plutarque ,  dans 
^traité  de  l'exil,  dit  qu'elle  efl 
flérile ,  &  que  fon  terroir  eft  peu 
favorable  aux  plantes.  Pline  la 
nomme  Cinara.  Elle  étoit  votfine 
de  rifle  de  Léros. 

QNARE  E^  THESSAlïE. 
On  lui  donne  deux  filles ,  qui  ^ 
pour  s'être  préférées  à  Junon  , 
furent  mét'amorphefées  en  tnar- 
ciies ,  qu'on  fouloit  en  efttf^itit 
dans  l'un  des  tem{âes  de  cette 
Déeffe 

CINCIBILIS  ,  Cindhms  ,  (h) 
TOI  des  Alpes.  Ce  Prince  ,  l'an  ^e 
Rome  582  f  envoya  de<s  ambafTa* 
deurs  à  Rome  y  pour  fô  plaindre 
du  mauvais  traitement  qoe  C. 
Çaflius ,  qui  avoit  été  Conful 
l'année  précédente ,  avoit  fait  à 

C«)  Suid.  Tom.  I.  p.  1459. 
ih)  Tit.  Lif .  L.  XLIII.  es*. 
(c)  Tit.  Liv.  I*'  Vlï.  c.  î.  L.  3CXT.  c. 
38.  L.  XKVL  c.  H  >  t8^  L,  XXVU.  g. 


CI 

quelques  peuples  (es  alliés  »  qui 
demeuroient  entre  les  Alpes.  Le 
frère  de  ce  roi ,  qui  porta  la  pa- 
role ,  repréfenta  fi  bien  l'iniuftice 
&  la  violence  de  ce  Conful ,  que 
le  Sénat  fe  crut  obligé  de  répon- 
dre qu'il  n'aupprouvoit  pas  le  pro- 
cédé de  Camus;  néamxKMns  qui! 
était  injufle  de  condamner  un 
homme  fans  l'avoir  entenda ,  fur- 
tout  ,  quand  il  étoit  abfent  pour 
les  affaires  de  la  république  ;  que 
lorfqu'il  feroit  revenu  de  la  Ma- 
cédoine ,  oii  il  étoit  alors  ,  on 
poOrroit  1  accufer  en  fa  préfence , 
&  qu'on  leur  rendroit  juftice.  Ce- 
pendant, ponr  marquer  l'eftime 
qu'on  faifoit  de  Cincibilis  ,  on  dé- 
pêcha C.  Lélius  &  M.  iEtniliits, 
en  qualité  d'âmbaffadeurs ,  pour 
lui  faire  connoître  ce  qui  avoit 
été  réfolu  ,  &  l'on  renvoya  les 
Gaulois  avec  de  très  beaux  pré- 
(bns. 

CINCINNATUS ,  Cincinna- 
tus ,  Foy«{  QuïNTius. 

CINCIUS  (L.]  ALIMEN- 
TUS ,  £.  Cincius  AHmcntus ,  (c) 
Auteur  latin,  qui  ^éra  plnfieurs 
emplois  impoTtans.  Il  iut  élevé  à 
la  Préture  l'an  de  ^ome  541  ,  ou 
542  ,  ^  envoyé. en  Sicile  ,  pour 
gouverner  cette  province.  On  loi 
donna^'les  "feîdâts  ée  Cannes  ,  qui 
montoiént  '>à  deux  légions  ,  afin 
qu'il  p>ôt  mieux  contenir  les  peu* 
pies  confiés  \  fes  foins.  Il  eut  le 
matheur  d'être  fait  prifonnier  fur 
&i  de  la  féconde  gtierre  punique» 
vers  Tan  aoi  avant  Jefus  -  Chrift. 

7;  «9.  Mém.  de  PAcad.  des  InXcn^u 
&  Bell,  Lert.  Tom.  \U  ?•  15  >  ï^»  Ï» 
XXI.  p.  J18.  é'ftêiv. 


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Cl 

Tite  Lîve  cite  fouvent  L^Cîncius 
Alimentus  comme  un  auteur  qui 
avoit  recueilli  tout  ce  qui  pou  voit 
avoir  rapport  aux  antiquités  Ro- 
maines. Il  dit,  par  exemple ,  qu'il 
s'en  rapporteroit  plus  volontiers 
à  lui  qu'à  tout  autre ,  fur  le  nom- 
bre des  troupes  qu  avoit  Annibal 
à  fon  arrivée  en  Italie ,  s'il  s'ex- 
pliquoit  clairement  fur  ce  nombre* 
Sans  difHnguer  les  troupes  qu' An- 
nibal avoit  par  lui-même ,  de  <:el- 
les  cfuî  fe  joignirent  à  lui  (ur  fa 
route ,  il  écrit  qu'avec  les  Gaulois 
&  les  Liguriens,  ce  Général  amena 
en  Italie  80000  hommes  d'infante- 
rie, &  10000  de  cavalerie.  Puis,  il 
ajoute  qu'il  a  oui  dire  à  Annibal 
lui-même  9,  que  depuis  qu'il  eut 
paffé  le  Rhône  ju£:|u'à  ce  qu'il 
arrivât  en  Italie ,  où  il  fe  rendit , 
en  pafTant  »  au  fortir  de  la  Gaule , 
par  le  pais  des  Tauriniens ,  il  avoic 
perdu  36000  foldats  ,  &  un  grand 
nombre  de  chevaux  Si  d'autres 
bêtes  de  fomme. 

L.  Qacius  Alimentus  avoit  écrit 
en  grec  des  annales  ou  une  hidaire 
Romaine.  On  lui  attribtfe  une  au- 
tre hiftoire  en  Latin  ,  un  ouvrage 
de  l'art  nnilitaire ,  dont  Aulo-gelle 
allègue  quelque  choie  ;  un  autre 
des  faftes ,  rapporté  par  Macrobe;; 
un  autre  des  mots  anciens  ;  un 
autre  du  pouvoir  des  Q^nûils^ 
vn  autre  de  l'oiEcede  jurifcon- 
fulte. 

CINCIUS  [M]  ALIMEN. 
Tus  ,  M.  Cincius  jilimentus  '{a^ 
étoit  tribun  du  peuple,  l'an  de 
Rome  548  ,  &  204  avant  J.  C, 
Il  fut  un  des  députés  qu'on  en- 


"i 


CI 

yoyz  cette  année  au  général 
Scipion ,  qu'on  accufoit  de  plu- 
(ùeurs  faits  fort  graves ,  mais  qui 
fe  juilifia  pleinement ,  eh  mon- 
trant que  la  conduite  qu'il  avoit 
tenue  jufques  -  là  étoit  irrépro- 
chable. 

M.  Cincius  Alimentus  6t  pafler 
la  loi  Fannia  ,  par  laquelle  on  ré« 
gloit  les  dépenfes  fuperflues  des 
banquets.  Il  fut  auffi  l'auteur  de 
celle  qu'on  appelloit  Munérale» 
faite  contre  les  avocats  ,  qui  pre- 
noient  de  l'argent  de  leurs  parties, 
pour  plaider  leurs  caufes  :  Ne  quis 
ob  caufam  orandam  ,  donum  mu^ 
nufve  cafereté  La  même  loi  rçn» 
fermoit  au(H  une clauie contre  ceux 
qui  corrompoient  le  peuple  par  des 
préfens ,  pour  obtenir  les  charges* 
Cette  loi  défendoit  à  ceux  qui  bri* 
guoient  les  offices  y  de  venir  aux 
affemblées  avec  une  double  robe, 
fous  laquelle  ils  puiïent  cacher  de 
l'argent ,  comme  ils  avoient  ac-* 
coutume  de  faire  ,  pour  acheter 
les  fuf&ages  du  peuple. 

M.  Cincius  Alimentus,  étant 
gouverneur  de  Pifês,rande  Rome 
J58 ,  écrivit  aux  confuls  6&%  let"> 
très ,  par  lefquelles  il  leur  man- 
doit  que  20000  Liguriens  ,  ea 
conféquence  d'une  tronjuration 
faite  dans  l'aflemblée  générale  de 
la  nation  >  avoient  pris  les  armes  ^ 
&  qu'après  ^votr  ravagé  les  cam* 
peigne  de  Luna  ,  ils  étoiènt  paiTéf 
dansceHes  de  Pifes^dbh  ils  avoient 
couru  &  défolé  toutes  les  côtes 
maritimes.  En  conféquence  de 
cette  nouvelle ,  le  cont'ul  Minu- 
cius ,  à  qui  la  Ligurie  étoit  échue*, 


(«)  Tlt.  Ur,  L.  XXIX.  c.  10.  L.  XXXIV.  c  3  >  56*  Xadt.  Annal.  L.  XI.  c.  %i 


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A20  C  I 

après  avoir  pris  Tavîs  des  Séna- 
teurs ,  monta  for  la  tribune  aux 
harangues  ,  Si  de- là  ,  ordonna 
aux  deux  légions  de  la  vide ,  qui 
avoient  été  levées  Tannée  précé- 
dente ,  de  fe  trouver  à  Arrétie 
dans  dix  jours. 

CINCIUS  [P.],P.  Cincius.  {a) 
Il  eft  parlé  dé  ce  P.  Cincius  dans 
rOraifon  de  Cicéron  pour  Sylla. 

CINCIUS  [  M.]  THEOPHI. 
LUS ,  M,  Cincius  Theopbilusy  {b) 
fib  de  Marc<  Dans  une  urne  qui 
nous  refte  de  lui ,  il  eft  qualifié  Vef- 
tiarius  tenuarius  ,  c'eft-à-dire, 
faifeur  ou  vendeur  d'habits  d*é- 
toâê  fine.  Cette  urne  eft  remar- 
quable par  le  caprice  de  l'ouvrier, 
qui  a  repréfenté  fur  le  devant  de 
Turne,  un  lion  ÔC  un  tiere  avec  des 
aîles  d'un  aigle,  &  wr  le  côté, 
deux  efpèces  de  griffons  ,  qui  ont 
le  corps  d'un  lion  ,  &  la  tête  avec 
les  ailes  d'un  aigle.  Les  grands 
candélabres ,  aux  angles  de  l'urne^ 
font  encore  à  remarquer. 

CINCIUS  [C]  PRIMIGE- 
NIUS,  (c)  C.  Cincius  Primigenius  y 
dont  nous  avons  une  urne  de  mar- 
bre »  remarquable  par  rinfcription. 
Le  fèns  en  eft  tel  :  C.  Cincius  Pri- 
migenius  avoit  accordé  à  Primille 
Eftione  ,  &  aux  facrés  Domefti- 
ques,  fix  ollas  minores  j<\\x\  étoient 
ordinairement  des  urnes  de  terre. 
Elles  dévoient  être  mifes  dans  le 
Conditorium  ou  l'Hypogée  des 
ancêtres  de  C.  Cincius  Primigé- 
nius.  Il  donne  à  Primille ,  après  fa 

(s)  Cicer.  Orat.  pro.  p.  Syll.  c«  41. 
ér  fe<i' 

{b)  Antîq.  expl.  par  D.  Bera,  de 
Montf.  Tom.  V.  pag,  9s. 

((>  Anciq.  expU   par  D«  .Bcmt  ^ 


CI 

mort ,  cette  urne  de  marbre ,  tant 
pour  elle  que  pour  fon  petit  -  fils 
^lius  Septimilhis^ôc  pour  Lucien. 
Primille  eft  repréfentée  en  habit 
de  matrone.  On  remarque  que  des 
noms  numériques  font  changé»  ici 
en  furnoms  dans  la  même  famille  ; 
la  grand*  mère  s'appelle  Primilla , 
&  le  petit-fils  ^Uus  Septimillus. 
Cela  fe  faifoit  anciennement  pour 
les  prénoms,  Tértius  ,  Quartus, 
Quinttts ,  Sextus. 

CINCTUS  G ABINUS,  Cinc- 
tus  Gabinas  ,  {d)  forte  de  vête- 
ment, ou  plutôt  d'ornement,  dont 
parle  Tite  Live  en  plufîeurs  en- 
droits. On  croit  que  le  Cin^us 
Gabinus  avoit  lieu,  lorfqu'un  pan 
de  la  robe ,  jette  en  arrière  par- 
deflus  l'épaule  gauche ,  étoit  retiré 
par-deflbus  l'épaule  droite  jufque 
fur  la  poitrine';  en  forte  qu'un 
homme  en  étoit  ceint  à  peu  près 
comme  un  diacre  de  nos  Jours  Teft 
de  fon  étole,  quand  il  fait  quelque 
•  fonâion  de  fon  minîftère.  Ce  fiit 
en  cet  état  que  les  deux  Décius  fe 
dévouerem  pous  les  armées  Ro- 
maines. Voyci  Céthégus  ,  Camille 
Romaine. 

Le  Père  Catrou  ,  au  fujet  d'un 
vers  de  Virgile,  oïl  il  eft  feit  men- 
tion du  Ctnôus  Gabinus  ,  dit  : 
i>  Pour  le  Cin^us  Gabinus ,  c'é- 
n  toit  une  robe  longue  ,  comme 
n  la  portoient  les  Romains ,  mais 
»  qu'on  n'endoflbit  pas.  On  la  £»• 
»»  loit  paffer  en  forme  d'écharpe. 
n  fur  les  épaules  &  fur  la  poi- 

Kfom£  Tom.  V.  p.  7»  »  75. 

(d)  Tii.  Liv.  L.  V.  c.  46.  L.  vm.  6 
9.  L.  X,  c.  »8.  Virg.  iEneid,  L.  Vll.ï, 
6xa« 


> 


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CI 

h  Irîne.  Ce  qui  donna  lien  à  cette 
t}  coutume  militaire  ,  c'efl  «  dit 
n  Tite  Live  ,  que  les  habitans  de 
»  Gabie,  ville  de  la  Campagne 
»  de  Rome ,  ayant  été  furpris  par 
t>  l'ennemi ,  lorfqu'ils  facrifîoient , 
»  fe  ceignirent  de  leurs  robes.ppur 
"  n'en  être  pas  incommodés  oans 
»  le  combat.  C'étoit  une  manière 
9>  de  porter  la  robe  à  la  guerre,  n 
C^NDIADE,  Cindias,  {a)  fur- 
nom  de  Diane.  On  rapporte  que 
quoique  la  ilatue  de  Diane  Cindia* 
de  fût  à  l'air ,  il  ne  neigeoit  ni  ne 
pleuvoit  jamais  defTus.   Ce  traie 
^buleux  fe  trouve  dans  Polybe. 
CINEAS,  Cineas,   KW«c*  (^) 
Thedalien  ,  qui  s'attacha  à  Pyr- 
thus ,  roi  d'Épire.  C'étoit  un  hom- 
me d'un  grand  fens ,  &  qui,  ayant 
été  difeiple  de  Démofthène, ,  paf- 
foit  pour  celui  des  Orateurs  de  ce 
tems-là,  qui  pouvoit  mieux  le  rap* 
peller  dans  l'efprit  de  fes  auditeurs, 
comme  l'ombre  &  l'image  de  la 
force  &  de  l'éloquence  de  ce  grand 
maître.  Auffi  Pyrrhus  fe  fervoit-il 
de  Cinéas  pour  l'envoyer  en  am- 
baffade  vers  les  villes  aveclef-^ 
quelles  il  avoit  quelque  chofe  à 
traiter.  Dans  tous  ces  emplois, 
Cinéas  confirma  la.  vérité  de  ce 
mot  d'Euripide  »  que  l'éloquence 
emporte  tout  ce  que  le  fer  ennemi 
pou rrojt  emporter.  Auffi  Pyrrhus 
djfoit-il  que  l'éloquence  de  Cinéas 
lui  avoit  gagné  plus  de   villes, 
qu'il  n'en  avoit  conquis  par  les  ar- 
mes ;  c'eft  pourquoi  il  avoit  beau- 
coup de  confidération  pour  lui , 
le  combloit  d'honneur  ,  &  l'em- 


Cl  lit 

ployoit  à  toutes  fes  plus  grandes 
affaires. 

Cinéas ,  voyant  Pyrrhus  fe  pré- 
parer à  pafTer  en  Italie  »  &  le 
trouvant  un  jour  d'aflez  bonne 
humeur,  entra  avec  lui  en  conver- 
fation ,  6c  lui  parla  ainfs  :  S^i^ 
gneur  ,  les  Romains  paffènt  pour 
de  grands  hommes  de  guerre ,  &  ils 
coAimandent  à  plujieurs    nations 
très'belliqueufes  &  très^ aguerries^ 
fi  Dieu  nous  fait  la  grâce  de  les 
vaincre  ,  quel  avantage  tirerons^ 
nous  de  notre  viEloire?  Pyrrhus 
lui  répondit  :  Cinéas ,  tu  me  d^- 
mande  une  chofe  qui  parle  d^ellc^ 
même.  Les  Romains  une  fois  vain* 
eus ,  //  n'y  aura  dans  leur  pais  ,  ni 
ville  barbare ,  ni  ville  grecque^  qui. 
ofe  nous  réfifter.  Nous  ferons  d'a^ 
bord  maîtres  de  toute  l  Italie,  dont 
la  grandeur ,  la  force  &  la  puiffance 
doivent  être  moins  ignorées  de  toi 
que  d'aucun  homme  du  monde.  A 
ces  mots ,  Cinéas  fut  quelques  mo- 
mens  fans  parler  ;  enfin  il  conti«» 
nua  :  Mais ,  Seigneur],  quand  nous 
ferons  maîtres  de  l'Italie,  quefe^, 
rons'  nous  ?  Pyrrhus,  qui  ne  voyoit 
pas  encore  où  il  en  vouloit  venir  : 
Voilà  ,  lui  dit-il ,  la  Sicile  qui  nous 
tend  les  bras ,  île  abondante  en  tou" 
te  forte  de  biens,  très  '  peuplée  & 
très  'facile  à  prendre.  Car  ,  depuis 
la  mort  d'Agathocle  ,  tout  y  efl  en 
combufiion  ;  il  n'y  a  point  de  chefs 
dans  les  villes ,  6»  tout  y  eft  gou^ 
vernépar  les  orateurs  ^  efprits  re^ 
muans  &  vénaux.  Tout  ce  que  vous^ 
dites  là  ,  répondit  Cinéas,  eft  très" 
vraifemblable  ;  mais  la  Sicile  prife. 


(s)    Antiq.    cxpl 
Mornf.  T.  1.  p.  64. 
{})  Plut.  T.  I.  p.  J91 


par  D.   Bem.   detad  Amie.  L.  IX.  Epift.  15.  Roll.  Hift. 
At^.  T.  IV.  p.  ao8.  é-  fuiv,  Hia,  Rom. 
^  fêf,  Cicer.  |  T.  il.  p.  192.  dy  friv* 


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^11  Cî 

fera- ce  là  la  fin  de  nos  expédition^? 
Au  contraire ,  repartit  vivement 
Pyrrhus ,  fi  Dieu  nous  accorde  la 
viâloiref  &  que  nous  réujjijjîons,  ce 
ne  feront^  là  que  les  préludes  de 
plus  grandes  entreprifes.  En  effet , 
de  la  Sicile  3  qui  efl-ce  quipourroit 
s'empêcher  de  pajjer  en  j4frique  & 
à  C art b âge  F  II  n'y  a  qu'un  pas. 
j4gathocle  lui  -  même  ^  étant  parti 
fecrétement  de  Syracufe ,  ^  ayant 
traverfé  ce  petit  bras  de  mer ,  avec 
peu  de  vaijfeaux ,  fut  fur  le  point 
de  s'en  rendre  maître»  Or^  l'Afrique 
foumife^  quelqu'unofera-t-ilnidire 
fiipenfety  qu  aucun  de  tous  ces  en» 
nemis  ,  qui  nous  font  aujourd'hui 
de  la  peine ,  &  qui  nous  harcèlent 
de  toutes  parts ,  ofe  feulement  lever 
la  tête  F  Non  certainement ,  ré- 
pondit Cinéas ,  en  Pinterrompant. 
Cary  continua  Pyrrhus,  tu  vois 
lien  qu'avec  un  e fi  grande  puiffance^ 
il  nous  fera  bien  aifé  de  recouvrer 
la  Macédoine  y  &  de  régner  tran» 
quillement  fur  toute  la  Grèce,  Cela 
efi  évident ,  répondit  Cinéas  ;  mais^ 
quand  nous  aurons  tout  conquis  ^ 
que  ferons- nous  ?  Ce  que  nous  fe- 
I  rons  ,  nous  vivrons  en  repos ,  nous 
pafferons  les  jours  entiers  en  ban^ 
quels  j  en  converfations  ^  en  fêtes  ; 
nous  nepenferons  qu'a  nous  réjouir. 
Alors ,  Cinéas  l'arrêtant  :  £h  l  Sei- 
gneur y  lui  dit- il ,  qu'eft'Ce  qui  nous 
empêche  dès  aujourd'hui  de  vivre 
en  repos  ^défaire  des  banquets  ,  de 
célébrer  des  fêtes ,  de  nous  réjouir  ? 
Nous  avons  dès  maintenant  en  nO' 
tre  puiffance  ^  fans  aucune  peine  , 
fans  aucun  foinyCe  que  vous  youle^ 
aller  acheter  par  tant  de  travaux  , 
par  tant  de  périls  &  par  tant^de 
maux  j  que  nous  fouffrirons  &  que 


CI 

nous  ferons  fouffrir  aux  autre fl 

Ce  difcours  de  Cinéas  afRigea^ 
Pyrrhus,  fans  le  corriger  ;  il  voyoit 
bien  qu'il  abandonnoit  une  félicité 
fûre  y  mais,  il  n'avoit  pas  la  force 
de  renoncer  à  des  efpérances  qui 
flattoient  k%  défirs  à  fou  ambi- 
tion. 

M,  Pafcal  examine  cette  réfle- 
xion de  Cinéas,  dans  le  chapitre 
26  de  (es  Penfées ,  où  il  explique 
d'une  manière  admirable  ,  quelle 
eft  l'origine  de  toutes  les  ocicupa- 
tions  tumultuaires  des  hommes , 
&  de  tout  ce  qu'on  appelle  diver- 
tiffement  ou  pafle-tems.  L'ame , 
dit- il ,  ne  trouve  rien  en  elle  qui  la 
contente  ;  elle  n'y  voit  rien  qui  ne 
Tafflige  quand  elle  y  penfe.  C'eft 
ce  qui  la  contraint  de  fe  répandre 
au  dehors ,  &  de  chercher  ,  dans 
l'application  aux  chofes  extérieu- 
res,  à  perdre  le  fouvenir  de  fon 
état  véritable.  Sa  joie  confifte  dans 
cet  oubli,  &  il  fuffit ,  pour  la  ren- 
dre miférable ,  de  l'obliger  de  fe 
voir  &  d'être  avec  foi. 

Cela  pofé  ^  après  un  grand  nom- 
bre d'exemples ,  qui  démontrent 
la  vérité  de  cette  réflexion  ,  il 
ajoute  ce  qui  fuit  :  Lorque  Cinéas 
difoit  à  Pyrrhus  ,  qui  fe  propofoit 
de  jouir  du  repos,  après  avoir 
conquis  une  grande  partie  du  mon- 
de ,  qu'il  feroit  mieux  d'avancer 
lui  -  même  fon  bonheur  ,  en 
jouifTant  dès-lors  de  ce  repos, 
fans  l'aller  chercher  par  tant  de 
fatigues  ;  il  lui  donnoit  un  confeil 
qui  recevoit  de  grandes  diflicultéS| 
&  qui  n'étoit  guère  plus  raifonna- 
ble  que  le  deilein  de  ce  jeune  am- 
bitieux. L'un  &  l'autre  fuppofoit 
que  ilionuiie  fe  pût  contenter  de 


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CI 

(b'i-méme  &  de  (es  biens  préfens , 
fans  remplir  le  vuide  de  fon  cœur 
d'efpérances  imaginaires ,  ce  qui 
eft  faux.  Pyrrhus  ne  pouvoit  être 
heureux ,  ni  devant  ni  après  avoir 
conquis  le  monde  ;  &  peut-être 
aue  la  vie  molle  que  lui  confeilloit 
(on  miniilre ,  étoit  encore  moins 
capable  de  le  fatisfaire  ,  que  Fagi* 
tation  de  tant  de  guerres  6c  de  tant 
de  voyages  qu'il  méditoit. 

Mais ,  ni  Je  philofophe  ,  ni  le 
conquérant ,  n'étoient  en  état  de 
connoitre  ainfi  le  fond  du  coeur 
humain.  Pyrrhus  envoya  donc 
d*abord  Cinéas  aux  Tarentins  « 
avec  3000  hommes  de  pied  ;  &c  il 
ne  tarda  pas  lui-même  a  le  fuivre. 
Cependant,  le  conful  Lévinus  s'a- 
vançoit  à  grandes  journées.  On 
en  vint  aux  mains  >  &  Pyrrhus 
remporta  une  grande  viâoire^  qu'il 
dut  à  Tes  éléphans.  Le  nombre  des 
prifonniers  qu'il  a  voit  fait ,  étoit 
très-confidérable.  On  envoya  de 
Rome  pour  les  racheter  ;  &  Pyr- 
rhus ,  félon  fa  coutume ,  ^flembla 
fon  Confeil  à  cette  occafion. 
Quand  ce  fut  à  Cinéas  de  parler: 
»  Grand  roi  dit- il ,  c'eft  mal  con- 
t>  noitre  les  Romains  ,  que  de  fe 
»  flatter  que  l'échec  qu'ils  ont  re- 
»  çu,  les  ait  rendus  plus  timides  6c 
»  plus  traitables.  Ils  ne  font  jamais 
Il  paroître  plus  de  fermeté  &  de 
»  grandeur  d'atne ,  que  dans  l'ad- 
D  verfité.  Le  meilleur  confeil 
Il  donc  que  je  penfe  pouvoir  vous 
n  donner  ,  c'eft  de  taire  ufage  ici 
V  de  votre  générofité  ordinaire, 
»  de  leur  rendre  leurs  prifonniers 
»  fans  rançon  »  puis  de  leur  en- 
n  voyer  au  plutôt  des  ambaiFa- 
n  deurs,  avec  de  magnifiques  pré- 


C  I  21J 

p  fens,  pour  traiter  avec  eux  de 
n  la  paix.  Vous  le  pouvez  faire 
i>  maintenant  avec  honneur  j  6c  à 
n  des  conditions  avantageufes» 
M  Mais  ,  Seigneur  ,  permettes* 
Il  moi  de  vous  le  dire  ;  vous  êtes 
Il  homme  >  6c  les  chofes  peuvent 
n  changer.  Ne  laiiTez  point  échap« 
n  per  une  occaGon  fi  favorable  ^ 
n  6c  peut-être  unique.  »  Toutle 
confeil  applaudit  à  un  avis  fi  fage» 
&  le  Roi  s'y  rendit. 

Un  jour  ,  comme  on  étoit  à 
table  avec  les  ambaffadeurs  Ro- 
mains^du  nombre  defquels  étoit  le 
célèbre  Fabricius ,  on  fit  pafFer  en 
revue  les  différentes  feâes  des  phi* 
lofophes.  Cinéas  infifla  particulier 
rement  fur  Épicure ,  6c  détailla  ce 
que  les  Épicuriens  penfent  des 
dieux  ,  6c  de  l'éloignement  que  le 
fage  ,  félon  eux  y  doit  avoir  de 
l'adminidration  des  affaires  publi- 
ques ,  6c  du  gouvernement  des 
états.  Il  dit  qu'us  faifoientconfifier 
la  dernière  nn  6c  le  fouverain  bien 
de  l'homme  dans  la  volupté;  qu'ils 
fuy  oient  les  dignités  6c  les  charges, 
comme  la  ruine  6c  le  poifon  de 
cette  douce  indolence  ,  dans  la- 
quelle ils  faifoient  confifler  le 
bonheur  ;  qu'ils  ne  donnoient  à  la 
divinité ,  ni  amour ,  ni  haine ,  ni 
colère  ;  qu'ils  foûtenoient  qu'elle 
neprenoit  aucun  foin  des  hommes, 
6c  qu'ils  la  reléguoient  dans  une 
vie  tranquille ,  où  elle  paffoit  tous 
les  fiecles  fans  affaires  ,  &i  plon- 
gée dans  toutes  fortes  de  délices 
oc  de  voluptés.  Il  y  a  bien  de 
l'apparence  que  la  vie  molle  6c  vo- 
luptueufe  des  Tarentins  donna  lieu 
à  cet  entretien.  Pendant  que  Ci- 
4iéas  parloit  encore ,  Fabricius  « 


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pour  qui  cette  doârîne  étoît  toute 
nouvelle ,  &  qui  ne  concevoit  pas 
comment  un  homme,  qui  débitoit 
de  telles  maximes  ,  ofoit  fe  don- 
ner pour  fage ,  &  cela  dans  la  ville 
la  plus  remplie  do  fcience  &  d'ef- 
prit ,  s'écria  de  toute  fa  force  :  O 
grand  Hercule  ,  puijfent  les  Sam- 
nites  &  Pyrrhus  fuivre  cette 
doêirine  pendant  qu'Us  feront  la 
guerre  aux  Romains» 

Quelques  jours  après  le  départ 
des  ambafladeurs  Romains  ,  Pyr- 
rhus fit  partir  les  (iens.  Cinéas 
étpit  à  leur  tcte.  Il  arriva  à  Rome 
avec  un  équipage  magnifique  »  6c 
il  y  fut  reçu  &  traité  avec  une 
difiinâion  particulière.  Il  s'abou- 
cha avec  les  premiers  de  la  ville  9 
&  leur  envoya  à  tous  6c  à  leurs 
femmes ,  des  préfens  de  la  part  du 
roi.  Perfonne  ne  les  reçut.  Ils  ré- 
pondirent tous ,  6c  leurs  femmes 
de  même  ,  que  quand  Pyrrhus 
feroit  devenu  ,  par  un  traité  fo- 
lemnel,  ami  6c  allié  de  Rome ,  il 
auroit  tout  lieu  d'être  content  de 
chacun  des  Romains. 

Dans  le  peu  de  féjour  qu'ij  fit 
à  Rome  ,  il  eut  grand  foin ,  en 
homme  fenfé  &  en  habile  négo- 
ciateur ,  de  s'inftruire  des  moeurs 
&  des  coutumes  des  Romains,  6c 
fur- tout  du  caraélère  de  ceux  qui 
parmi  eux  avoient  plus  de  crédit 
6c  de  réputation  ;  d'examiner  leur 
conduite  ,  tant  publique  que  par- 
ticulière ;  d'étudier  la  forme  de 
leur  gouvernement ,  6c  de  s'infor- 
mer ,  dans  le  plus  grand  détail 
qu'il  lui  fut  poflible  ,  des  forces  6c 
des  revenus  de  la  république. 

Quand  Cinéas  eut  été  introduit 
dans  le  fénat ,  il  expofa  les  propo- 


CI 

fitîons  de  (on  maître ,  qui  oiFroif 
de  rendre  ,  fans  rançon ,  aux  Ro«* 
mains  leurs  prifonniers  «  qui  pro- 
mettoit  de  leur  aider  à  conquérir 
toute  l'Italie  ,  6c  qui  ne  demandoic 
autre  chofe  que  leur  amitié,  6c  une 
entière  sûreté  pour  les  Tarentins. 
Il  ne  manqua  pas  de  faire  ufage 
de  toute  fon  éloquence  dans  une 
occafion  aufli  importante ,  pour 
exprimer  fortement  le  défir  vif 
6c  fmcère  qu'avoit  Pyrrhus  de 
faire  alliance  avec  une  république 
Ç\  puifTante  6c  fi  remplie  de  grands 
hommes  ;  6c  en  même  tems ,  pour 
mettre  dans  tout  leur  jour  ,  les 
raifons  preiTantes  qui  Tobligeoient 
de  s'intérefTer ,  comme  il  faifoit , 
pour  les  habitans  de  Tarente. 

Plufieurs  des  fénateurs ,  touchés 
du  difcours  de  Cinéas,  paroiffoient 
incliner  à  faire  la  paix  avec  Pyr- 
rhus ,  la  regardant  comme  nécef^ 
faire,  ou  du  moins  comme  fort 
avantageufe  à  l'État,  6c  cette  pen- 
fée  n'étoit  point  farts  fondement 
ni  fans  raifon.  Les  Romains  ve- 
noient  d'être  vaincus  dans  une 
grande  bataille  ;  ils  étoient  à  la 
veille  d'en  livrer  une  féconde.  On 
avoit  tout  Heu  de  craindre  »  les 
forces  de  Pyrrhus  étant  confidé- 
rablement  augmentées  ,  par  la 
jonction  de  plufieurs  peuples  d'I* 
talie  ,  (es  confédérés.  C'étoit  le 
vainqueur  lui  -  même  qui  deman- 
doit  la  paix  avec  autant  d'empref- 
femént ,  que  s'il  avoit  été  vaincu, 
6c  ,  par  conféquent ,  l'honneur  de 
Rome  étoit  à  couvert.  La  délibé- 
ration dura  plufieurs  jours  ;  6c 
comme  rien  ne  cranfpiroit  au  de- 
hors ,  elle  tenoit  Cinéas  dans  une 
grande  inquiétude. 

Le 


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CI 

Le  courage  des  Romains  eut 
befoîn  5  dans  ces  circonftances , 
d*étre  ranimé  par  le  célèbre  Ap* 
pias  Claudius  »  fénateur  îHuftre , 
que  Ton  grand  âge  ,  &  la  perte  de 
la  vue  «  avoient  obligé  de  fe  reti- 
rer des  affaires ,  &  de  fe  renfer- 
mer dans  fa  maifon.  Son  autorité 
entraîna  tout  le  Sénat.  D'un  com- 
mun accord  ,  &  d'une  voix  una- 
nime, on  fit  cette  réponfe  à  Ci- 
néas  :  n  Que  Pyrrhus  commençât 
w  par  fortir  de  l'Italie  ;  qu'alors,  s'il 
n  vouloit  9  il  envoyât  demander 
»  la  paix  ;  mais  que  tant  qu'il  fe- 
)>  roit  en  armes  dans  leur  païs  «  les 
»  Romains  lui  feroîent  la  guerre 
»  de  toutes  leurs  forces  ,  quand 
»  même  il  auroit  battu  mille  Lé- 
»  vinus,  n 

Cinéas  avoU  reçu  des  ordres 
de  fortir  de  Rome  ce  jour- là  mê- 
me ,&  il  le  fit.  La  réponfe  du  Sé- 
nat jetta  Pyrrhus  dans  une  étrange 
furprife.  Comme  il  demandoir  à 
Cinéas  ce  qu'il  avoit  penfé  du  Sé- 
nat &  de  Rome ,  dans  le  féjour 
qu'il  y  avoit  fait,  ce  fage  miniftre, 
qui  n  etoit  point  accoutumé  à  flat- 
ter ,  &  qui  avoit  le  bonheur  d'a- 
voir affaire  à  un  maître  qui  ne  de- 
mandoit  point  qu'on  le  flattât ,  lui 
répondit  :  Que  la  vilU  lui  avoit 
paru  un  temple  y  &  le  Sénat  une 
ajfemblée  de  Rois,  Noble  &  jufle 
idée>de  Tune  &  de  l'autre  l  tant 
les  dieux  étoient  généralement 
refpeâés  dans  Rome ,  &  tant  les 
délibérations  du  Sénat  Romain 
avoient  de  dignité  &  de  grandeur. 
£t  fur  la  quantité  d'habitans  dont 


C  I  2^y 

il  avoit  vil  leurs  villes  &  leurs 
campagnes  peuplées  ,  Cinéas  lut 
dit ,  qu'il  craignoit  beaucoup  que 
Pyrrhus  ne  combattît  contre  une 
hydre  capable  de  s'accroître  &  de 
fe  multiplier  par  fes  propres  forces, 

CINÉAS,  Cinéas i  K.  f«r,,  (tf) 
autre  Theffalien ,  qur  avoit  réduit 
•en  abrégé  les  livres  qu'a  voit  com- 
pofé  Énée  fur  l'art  militaire.  Il 
nous  refte  encore  quelque  chofe 
de  (t%  ouvrages.  Ce  Cinéas  efl  ap- 
paremment le  même  qui  précède, 

CINÉAS,  Cinéas,  K/r/ac,  {b) 
certain  traître  ,  dont  Démofihène 
fait  mention  dans  fa  harangue  de 
la.  couronne. 

CINÉDOPOLIS ,  Cincedopo^ 
lis^  (c)  ifle  de  T  Afie  mineure ,  dans 
le  golfe  Céramique,  à  peu  de  dif- 
tànce  du  continent.  On  raconte 
ainfi  l'origine  du  nom  de  Cinédo- 
polis.  l/n  jour  ,  Alexandre  le 
Grand  ayant  remarqué  que  foti 
armée  commençoit  à  fe  corrom- 
pre par  les  délices  de  t'Afie ,  êc 
qu'il  y  avoit  dans  fon  camp  un 
grand  nombre  d'impudiques  ,  fit 
rechercher  avec  foin  tous  ceux  k 
qui  l'on  pou  voit  faire  jugement 
.  des  reproches  fi  honteux  ;  &  pour 
les  féparer  des  autres ,  il  les  fit  me- 
ner dans  une  petite  île  du  golfe  de 
.Cérame.  Le  lieu  oîi  ils  ^rent 
tranfportésy  eut  part  à  leur  infa- 
mie ;  car ,  en  mémoire  de  ce  qu'ils 
y  furent  relégués  ,  on  l'appella 
Cinédopolis« 

C I N  É  E  N  S  ,  Cinal ,  peuples 
defcendus  de  Cin.  (d)  Ils  habi- 
toient  au  couchant  de  la  mer  inori- 


(«)  AntJq.  cxpl.   par    t).    Bern. 

Momf.  Tom.  IV,  pag.  ii^; 

ik)  Demofth.  de  Coron,  p*  51^ 

Tçm.  XI. 


de 


|(ç)  Plin.  T.  I,  p.  >86,  Fxeinf.  fMppI. 
ip  Q.  Curt.  L.  II.  c.  10. 
Ç2)  Gencf.  c.  Ï5.  V.  i^.' Kumcr.  c* 


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^z6  CI 

te  ,  &  $*étendoîent  aflez  avant 
dans  l'Arabie  Pétrée ,  puifque  Je* 
thro,  beau- père  de  Moife,&  prê- 
tre de  Madian,  étoit  Cinéen^  & 
2ue  da  teois  de  Saiil  >  les  Qnéens 
toient  mêlés  avec  les  Amalécites. 
Quoique  tes  Ciaéens  fuflent  du 
nombre  des  peuples ,  dont  le  Sei- 
gneur avoir  promis  les  terres  aux 
defcendans  d* Abraham  ,  cepen- 
dant 9  en  confidérajtion  de  Jéthro , 
beau-pere  de  Moife  ^  on  conferva 
dans  leur  pays ,  tous  ceux  qui  fe 
fournirent  aux  Hébreux  ;  les  autres 
fe  retirèrent  apparemment  parmi 
les  Iduméens  4c  les  Amalécites. 
Les  terres  des  Cinéens  fe  trouve- 
irent  dans  le  partage  de  Juda. 

Balaam ,  ayant  été  appelle  par 
Balac  9  roi  de  Moab ,  pour  mau- 
dire les  Ifraëiites ,  lorfqu'il  fiit  fur 
une  montagne  ,  d'oîi  il  pouvoic 
voir  le  camp  d'Ifraël  &  le  pais  de 
Cin,  dit  ces  paroles,  s'aareiTant 
aux  Cinéens  :  n  Votre  demeure  eft 
t»  forte  d'affiecte  ;  ma'is  ,  quand 
n  vous  auriez  établi  votre  demeure 
i>  dans  le  roc ,  &  que  vous  feriez 
n  les  plus  vaillans  de  la  race  de 
n  Cin  >  combien  de  tems  pourrez- 
»  vous  fubfifter  ?  Car ,  Auur  vous 
n  prendra,  n  La  demeure  dçs  Ci- 
néens étoit  dans  des  montagnes  & 
des  rochers  prefque  inaccc^bles. 
Le  nom  de  Cin  marque  un  nid , 
un  trou  I  une  caverne  ;  &  Cinnim 
<en  grec  ,  fe  pourroit  traduire  par 
Troglodytes.  Les  Cinéens  furent 
yaincus  ,  &  menés  en  captivité 

«4*  V*   fti  »    ftt»  Jttdic.  c.  !•  T.  |6. 
Keg.  L.  I.  c.  15»  ?•  6.  Parai.  L.  I.  c  a. 

y*  55' 
fs)  RoHn.  de  Antiq.  Rom.  p,  58s. 
Ik)  Aa»<i*  dxiil.  par  Pt  fiem«  de^ 


CI 

par  Nabuchodonofor^  U  n*eft  plus 
Élit  ancune  mention  des  Cinéens 
depuis  Saiil  ;  mais,  ils  ûibfifterent  . 
confondusaveclesIduméens,&les  { 
autres  peuples  de  TArabie  Pétrée.  ' 

CINÉRAIRE ,  Citurarîus,  {a) 
domeftique  occupé  chez  les  Ro- 
mains à  frifer  les  cheveux  des 
femmes ,  &  &  préparer  les  cendres 
qui  entroient  dans  la  poudre  dont 
elles  fe  fervoient,  U  étoit  appelle 
Cméraire^  de  ces  cendres ,  ou  de 
celles  dans  lefquelles  il  £ûfoit 
chauffer  foq  fer  à  frifer. 

CINÉRARIA,  Cineraria.  {I) 
Cétoient  des  cellules  à  conferver 
des  cendres  dans  des  urnes  de 
pierre  ou  de  marbre ,  <)u'on  appel- 
ioit  Offuaria,Spon  croit  que  c  eft  la 
même  choie  que  Columbarîa.  U  y  a 
quelque  apparence  que  ce  mot  Co^ 
lumharia  s'appliquoit  auffi  aux  Ci- 
ncritrM,quand  ilsavoiem  des  troos 
&  des  niches ,  comme  les  pigeon- 
niers. M.  Fabretti  prend  pour  un 
Cinérarium ,  un  bâtiment  oU  l'on 
voit  une  efpèce  de  portail ,  &  un 
efcalier.  Ce  monument  eft  repré- 
(ènté  dans  TAntiquité  de  Ô.  Ber- 
nard de  Montfancon. 

CINÉRÉUS  ,  Cînereus,  U) 
autrement  Cendré.  Ceft  une  dés 
couleurs  ,  que  les  Infcriptions 
donnent  quelquefob  aux  chevaux 
du  Cirque. 

CINGA-,  Cinga,  {£)  tmht 
d*Efpagne,  félon  Céfar.  Voici  ce 
qu'il  dit  de  cette  rivière  :  »  Le 
»  camp  étant  entre  deux  riviires, 

Momf.  TI^Y.p.  47* 

(c)  Antiq.  lexpl.  par  D.  Bem*.  de 
Montf.  Tom.  III.  p.  aP6. 

(^  Csfit  de  Ml*  Cifil.L,  I.  p.  4889 


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CI 

»  ta  Segre  &  la  Cnga ,  l'efpace 
tr  de  trente  milles ,  on  ne  pouvoît 
»  pafTer  ni  l'une  ni  l'autre  «  ainfi  j 
»  tous  étoient  refierrés  dans  ce 
»  détroit*  p  Lucain  dit  : 

Campofque  cocrcet^ 

Cinga  rapax^ 

C'efi  au)ourd*hai  la  Gnca  »  qui 
a  plufiduis  foucces  aux  Pyrénées 
fur  les  frontières  de  France.  La 
principale  eft  près  de  Bielfa^  Ces 
fources  fe  joignent  à  Ainfa  &  au« 
deffus.  A  GiftrO}  elle  reçoit  la 
rivière  d'Effera ,  pafle  à  Balbaf- 
tro ,  à  Monçon  >  à  Akolea ,  re- 
çoit l'Alcanadre  au-defTus  de  Fra- 
|a ,  &  ie  pred  dans  la  Segre  à 
Méquînenza.  Tout  fon  cours  eft 
dans  l'Arrangon» 

CINGÉTORIX ,  Cîngctorix , 
(fl)  l'un  des  principaux  des  Tré- 
vires  y  du  tems  que  Céfar  faifoit 
la  guerre  dans  les  Gaules.  Cette 
cite  étoit  alors  partagée  en  deux 
faâions  ,  dont  Tune  avolt  pour 
chef  Cingétorix^  âc  l'autre  Indu«* 
tiomarus. 

Cingétorix  ^  qui  fe  trouvoit 
apparemcaent  }e  plus  foible ,  vint 
fe  jetter  entre  les  bras  de  Céfar» 
Taflurant  de  fon  attachement  & 
de  celui  de  tout  fon  pani  pour  les 
Romains*  Indutiomarus  au  con- 
traire affembloit  des  troupes  \  & 
après  avoir  retiré  les'  femmes  & 
les  enfans  dans  le  fond  de  la  forêt 
d'Ardenne ,  il  fe  préparoit  à  foû- 
tenir  la  guerre*  Mais  ,  comme  il 
vit  que  plufiçurs  de  ceux,  fur  lef- 
quels  il  avoit  le  plus  compté^ 


CI  117 

effrayés  par  les  armes  de  Céfar  ^ 
ou  gagnéf  par  les  foUicitations  de 
Cingétorix  |  fe  détachoiént  de  Iiii; 
il  craignit  d*étre  abandonné ,  &  'A 
prit  enfin,  quoique  de  mauvaife 

trace  ,  le  parti  de  la  foumiffion» 
^éfar ,  qui  ne  vouloic  pas  s'arrê- 
ter dans  ce  pals ,  feignit  de  rece* 
voir  fes  excufes ,  &  lui  accorda  la 
paix  ;  mais  en  eiigeant  de  lui 
deux  cens  ôta&es ,  Se  entr'autres 
fon  propre  nls.  Indutiomarus , 
déjà  peu  content  ^  fut  encore  ex-» 
trêmement  piqué  des  carefles  que 
Céfar  faifoit  à  Cingétorix  ,  &  da 
foin  qu'il  prenoit  de  lui^  concilier 
les  eiprits  des  principaux  de  la 
nation.  Il  fe  retira  j  le  dépit  dans 
le  cœur ,  &  avec  le  deflein  de  re- 
nouveller  la  guerre  à  la  première 
occafion.  C'efl:  ce  qu'il  ne  tarda 
pas  à  exécuter. 

En  effet,  dans  une  aflemblée 
générale ,  qu^il  fit  convoquer  bien- 
tôt après ,  Cingétorix  fut  déclaré 
ennemi.  Il  avoit  pourtant  époufé 
la  fille  d'Indutiomarus*  Mais ,  fa 
qualité  de  gendre  ne  fut  pas  capa- 
ble de  modérer  le  reflentiment  de 
ce  beau-pere*  Bien  plus,  tous  les 
biens  de  Cingétorix  furent  confif- 
qués*  Malgré  cela  ,  toujours  fidèle 
au  parti  qu'il  avoit  embraflé ,  il 
alla  informer  les  Romains  de  ce 
ui  fe  paffoit.  Ceux-ci ,  profitant 
le  l'avertiflement  ,  marchèrent 
contre  Indutiomarus ,  dont  la  tête 
fut  mife  à  prix.  L'entreprife  réuf- 
fit;  car,  la  tête  de  ce  Général  né 
tarda  pas  à  être  apportée  au  camp 
des  Romains*  La  mort  d'Indutio* 


a; 


isi  Caef.  d€  BeU.  Gall.  L.  V.  p«  159  9  itfo,  »o8.  L.  VI.  p.  siy.  Crév.  Hlfit.llonit 
Tom»  VII.  p.  15s ,  133 1  17». 


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^28  CI 

tnarus  fut  fuivie  de  la  reddition 
générale  du  païs ,  donc  on  confia 
k  gouvernement  avec  unç  auto* 
rite  abfolueà  Cingétorix ,  pour  le 
récompenfer  de  u  fidélité  conf^ 
lante  au  peuple  Romain. 

CINGÉTORIX ,  Cingetorix , 
(j)  roi  d'un  canton  de  la  grande 
Bretagne.  Ce  Prince  fe  joignit  à 
trob  autres  rois  du  pais  pour  atta- 
quer le  camp  de  Céfar  )»  mais  , 
leurs  efforts  ne  réuiUrent  pas.  Ils 
furent  repouflés  avec  une  perte 
confidérable  des  leurs. 

CINGILIE,  Cingilia ,  {b)  ville 
dltalie ,  qui  appartenoit  aux  Vef- 
tins.  Elle  fut  emportée  d'affaut 
Tan  de  Rome  430 ,  par  le  conful 
D.  Junius ,  qui  en  accorda  le  bu- 
tin à  fes  foldats  »  pour  récompen- 
fer une  valeur  ^  à  qui  les  ennemb 
avoient  inutilement  oppofé  leurs 
portes  &  leurs  murailles. 

C1N.GONIUS  VARRON  , 
Cingonius  Varro  ,  (c)  Sénateur 
Romain.  Lan  de  J.  C.  61,  Pé- 
danius  Sécundus  fut  aflafliné  chez 
lui  par  un  de  fes  efclaves  ;  & 
fuivant  un  ancien  ufage  ,  tous  les 
autres  efclaves ,  qui  s'étoient  trou? 
yés  dans  la  maifon  dans  cette  cir- 
conftance ,  &  qui  étoient  au  nom- 
l^re  de  quatre  cens ,  furent  con- 
damnés à  mort.  Cingonius  Var- 
ron  opina  encore  pour  que  l'on 
bannît  de  l'Italie  tous  les  affran- 
chis •  qui  avoient  logé  fous  le  met 
rne  toit  avec  leur  patron  affafîiné. 
Néron  jugea  qu'il  faffifoit  bieo 
gue  la  commifération  n'eût  point 

{#)  Cacf.  de  Bell.  Gall.  p.  176. 

{b)  Tir.  Liv.  L.  VIII.  c.  19. 

(<r)  Tadt.  Annal,  I.  XIV.  c.4S.Hift. 

t^  I.  C,  é.  17,  p^T,  Diàî  A\i  top.  X, 


CI 

adouci  la  loi ,  &  il  ne  voulut  point 
qu'on  y  ajoutât  une  nouvelle  ri-. 
gueur» 

..  Qngonius  Varron,  étant  coB' 
iîil  déugné ,  fut  mis  à  «nort  par 
Tordre  de  l'Empereur  ,  comme 
complice  de  Nymphidius  ,  vers 
Tan  de  J.  C.  68.  Mais ,  comme  il 
n'avoit  point  été  oui  dans  fes  dé- 
fenfes ,  il  pafla  pour  innocent  dans 
Tefprif  du  public. 

CINGULUM ,  Cingulum,  (i) 
ville  d'Italie ,  firuée  dans  le  Picé- 
num.  Céfar  en  fait  mention  dans 
le  premier  livre  de  fes  Commen- 
taires fur  la  guerre  civile.  Il  dît 
qu'il  lui  vint  des  députés  de  Cin- 
gulum  ,  ville  que  Labiénus  avoir 
fait  bâtir  à  fes  dépens.  Ces  dépu- 
tas lui  ayant  promis  qu'on  feroit 
tout  ce  qu'il  ordonneroit,  il  de- 
manda qu'on  lui  envoyât  des 
troupes ,  ce  qui  fut  exécuté. 

Cicéron  parle  auffi  de  la  ville 
de  Gngulum  dans  une  dé  fes  let- 
tres à  Atticus.  n  Nous  fommes 
n  maîtres  de  Cingulum  ,  dites- 
n  vous ,  &  nous  avons  perdu  An« 
n  cône,  n  Pline  en  nomme  les 
habitans  Cingulani  y  &  Frontia 
fait  mention  de  Cingulanus  agtu 
Siliusltalicu$,  dit: 

Celfis  Labienum  CingulaSaxâ 

Miferunt  mûris* 

C'eft  aujourd'hui  Cingolî  oa 
Gngolo  dans  Tétat  de  l'ÉgUte ,  & 
dans  la  marche  d'Ancone  fiir  le 
Mufone. 

n.  p«  349.  T.  m.  p.  10. 

{d)  Caef.  de  Bell.  Civil.  L.  I.  p.  4^X| 
Çiccf.  ad  AttiCi  L»  VII,  Efifii  lit 


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Cl 

ÇINIFLONS,  C//ï//È)/ï^^; 

ëtoîent  les  mêmes  que  lès  Ciné- 
raires. Fove{  Cinéraire. 
CINITHIENS,  Clnithn,  (a) 

Çîuples  d'Afrique  ,  dpnt  parle 
acite.  Cet  auteur  die  que  ce  n*é- 
toit  pas  une  nation  à  méprifer. 
Vers  Tan  de  Jefus-Chrift , .  fous 
l'empire  de  Tibère ,  les  Ciniihiens 
fe  joignirent  à  Tacfarinas  5c  à 
Mazippa  contre  les  Romains. 

Il  y  en  a^qui  placent  ces  peuple» 
^x  environs  de  la  petite  Syrte. 
Ortélius  prétend  qu'il  faut  lire 
Cinyphiens,  du  nom  du  fleuve 
Cinyphé  >  fur  les  bords  duquel 
habitoît  cettef nation. 

CINNA  [  L.  Cornélius]  , 
X,  Cornélius  Cinna ,  A.  Kopiîpkioc 
XjWaç ,  {b)  Tun  des  plus  violens 
oppreiTeurs  de  la  République.  Il 
étoit  Patricien  ,  &  de  la  fa6lion 
oppofée  à  Sylla  ,  quoique  fon 
proche  parent.  Ce  dernier,  ce- 
pendant ,  ne  s'oppofa  point  à  ce 
qu'on  le  nommât  Conful  pour 
Tannée  665  ,  &  avant  J.  C.  87. 
Seulement  il  prit  la  précaution  de 
le  mener  au  Capitole ,  &  là  de  lui 
faire  prêter  ferment  qu'il  n'agiroit 
point  contre  fes  intérêts.  L.  Cor- 
nélius Cinna  fie  le  ferment  prefcrit 
en  préfence  de  plufleurs  témoins , 
&  tenant  en  fa  cpain  une  pierre, 
il  pria  Jupiter ,  s'il  manquoit  à  fes 
jengagemens  ,  de  le  chaOer  de  la 
ville  9  comme  il  jettoit  lui-même 
cette  pierre  hors  de  (a  main.  Il  ed 
étonnant  que  Sylla  pût  prendre 

.    fil)  Tacît.  Annal.  L.  II,  c.  5».  Crév. 
Hift.  des  Emp.  T.  I.  p.  45». 
'  •  (i)  Corn;  Ncp.  in  Tit.  Pomp.  Atttc. 
c.  s.  Appian.  p.  389.  &  fêq.  Plut.  T.  I. 
pt  458.  è"/e^..VçlU  Paterc.  L.  II.  c«  ao« 


C  I  11^ 

quelque  confiance  aux  fermens 
d'un  ambitieux.  Il  ne  s'y  fia  pas 
tellement ,  qu'il  ne  prit  encore  la 
précaution  de  lui  donner  pour 
collègue  Cn.  Oélavien ,  homme 
de  bien ,  amateur  de  la  paix  ôc  dii 
bon  ordre ,  mais  trop*  doux  pour 
réfiHer  à  un  furieux.  Sylla  eut 
bientôt  lieu  de  fe  repentir  de  tou» 
ces  mçnagemens. 
;,  En  effet ,  à  peine  L.  Cornéliu* 
Cinna  fut-il  entré  en  charge ,  qu'il 
fit  voir  combien  Sylla  avoir  eu 
tort  de  prendre  quelque  confiance 
en  lui ,  6c  de  le  croire  capable  de 
refpeûer  fon  ferment.  Il  n'eut  riert 
plus  à  cœur  que  de  le  preffer  de 
fortir  de  l'Italie,  alléguant ,  pouc 
raifon  ,  la  nécçilité  d^arrêter  les 
progrès  de  Mithridate ,  mais  dans 
le  fond  ne  cherchant  qu'4  fe  déli- 
vrer d'un  tel  furveillant ,  pour  exé- 
cuter fes  projets  en  toute  «liberté» 
Sylla,  par  cette  même  raifon,  ne 
fe  preiToit  pas.  Le  Conful  s'avifa  j 
pour  vaincre  fes  retarde  mens ,  de 
le  faire  accufer  paf  le  tribun  M. 
Virgilius.  Une  loi  mettoit  a  l'abri 
de  ces  fortes  de  pourfuites  ceux 
qui  étoient  employés  pour  le  fer- 
vice  de  la  République.  Sylla  donc 
laifTam  là  le  Conful  &  le  Tribun, 
fe  mit  en  mer ,  &  paffa  en  Grèce. 
L.  Cornélius  Cinna  ,ne  fe  vijt 
pas  plutôt  débarraffé  du  feul  obfta- 
de  qui  le  retenoit ,  qu'il  commen- 
ça à  travailler  au  rappel  de  C.  Ma- 
rius.  Turbulent  &  inquiet ,  il  ne 
pouvolt  fupporter  le  repos  &  le 

ér  /«^.  Tacit.  Hift.  L.  ïïï.  c.  8t.  Roll. 
Hift,  Ancien.  T.  V.  p.  34s.  Crév.  Hift. 
Rom.  T.  V.  p.  555  ,  556.  &friv.  T.  Vf. 
p.' 7.  &  friv»  Mém.  de  TAcad,  des  Info 
&  Bell,  Utt.  T.  V.  pag.  18».  &  fmv% 

PU) 


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ijo  CI 

calme.  De  plus  $  une  ambSrîofi 
infenfée  le  portdît  à  vouloir  fe 
rendre  maître  de  la  République* 
Enfin  »  à  ces  motifs ,  fe  joignif  enc 
trois  cens  talens  ,  qui  lui  furent 
donnés  par  les  partifans  de  C. 
Marius.  Ceft  Appien  qui  rappor- 
te ce  dernier  fait,  &  qui  avoit 
cbferré  un  peu  auparavant  que 
des  perfonnes  très  riches ,  hom« 
mes  &  femmes  »  s'intérenoient 
pour  cet  illuftre  fugitif. 

L.  Cornélius  Gnna  prit  donc 
en  main  fa  caufe,  &  fembla  pren« 
dre  en  même  tems  fon  erprit  ;  car , 
il  eut  foin  de  déguifer  Ta  marche  ^ 
&  d  aller  à  fon  but  par  des  voies 
obliques.  Il  ne  manifeûa  point 
d*abord  le  deffein  qu*il  avoit  de 
rétablir  les  exilés  ;  mais  ,  il  en* 
treprit  de  remettre  en  vigueur  la 
loi  qu'avoit  portée  le  tribun  Sul* 
picius  jpour  mêlei*  les  nouveaux 
citoyens  dans  leurs  anciennes  tri« 
bus.  A  ce  fignal ,  une  multftnde 
immenfe  de  ces  nouveaux  citoyens 
accoururent  dans  la  ville  ;  & 
Rome  redevint  le  théâtre  d'une 
divifion  furieufe ,  les  anciens  ré* 
fiftant  auffi  vigoureufement  qu'ils 
fe  voyoient  attaqués*   Les^  deux 

fartis  avoient  chacun  un  Gonful 
leur  tête  ;  les  deux  partis  pren- 
nent le$  armes,  L.  G)rnéliur 
Cinna ,  comme  le  plus  audacieux, 
en  fit  ufage  le  premier. 

Le  plus  grand  nombre  des  tri- 
buns du  peuple  s'oppofoit  à  la 
loi;  il  n'y  avoit  pas  moyen  de 
pafler  outre  ,  fans  employer  la 
violence.  AufE  vit- on  dans  le 
moment  briller  les  épées ,  &  une 
foule  de  féditieux ,  L.  Coniélhis 
Kaoq»  à  la  tête^  fe  jetter  iur  1er 


,     CI 

Magîftrats  /oppofans  >  pour  les 
chaSier  de  la  tribune.  Alors  ,  Cn. 
Oâavien,  au  tour  duquel  s'étoîem  / 
rangés  en,  armes  les  anciens  ci- 
toyens ,  &  tous  ceux  qui  aimoiem 
la  tranquillité  publique  «  emre 
dans  la  place ,  attaque  les  feâieux^ 
les  coupe  en  deux  bandes  &  les 
Afperfe.  Puis,  refpeâant  la  di- 
gnné  confulaire  dans  L.  Cornélius 
Cinna  ^  &  ne  voulant  point  en 
venir  aux  mains  avec  fon  cdk* 
eue,  il  tourne  vers  le  temple  de 
Cafior.  Mais,  ceux  qui  l'accom- 
pagnoient ,  n'imitèrent  pas  k  ti- 
mide circonfpeâion.  Ils  ponflent 
leur  avantage  ,  tuent  tin  grand 
nombre  des  adverfaires ,  &  ine-  . 
nent  battant  les  autres  jufqu'aux 
portes  de  la  ville.  L.  Cornélius 
Cinna ,  qui  étoit  fnpérieur  par  k 
nombre  ,  étonné  de  fe  voir  vaip- 
a  recours  à  la  dernière  ref- 


cu 


fource  des  défefpérés.  Il  appelle  à 
lui  les  efdave^ ,  en  leur  promet- 
tant la  liberté.  Ce  fut  inutilement; 
perfonne  ne  fe  joignit  à  lui,  &il 
tut  obligé  d'abancbnner  la  vîlfe, 
&  de  fe  retirer  en  Campattie.  Le 
combat  avoit  été  très  fanglaot. 
Cicéron  aflure  que  la  place  publi- 
que regorgea  du  fang  des  citoyens, 
o£  fut  toute  remplie  de  motfceaoz 
de  corps  morts  ;  &  Plutarqne  bk 
mofiter  à  dix  miMe  le  nombre  de 
ceux  qui  périrent  du  côté  fenle# 
ment  de  L.  Cornélius  Gnna.  Il 
emmena  avec  lui  quelques  Séna- 
teurs ,  dont  le  plus  illufire ,  fins 
comparaifdn ,  étoit  Sertorlus.  Des 
circonftances  maiheureufes  pour 
ce  grand  homme  Tavoient  jette 
dané  ce  parti. 
Cependant,  le  Sénat  fit  lepro;; 


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ex 

ces  s  L.  Cornélius  Cînna ,  St^é- 
Clara  la  place  de  Conful  ,  qu'il 
^Dccapoit ,  vacante  tant  par  déier- 
tion ,  que  pour  le  crime  d'avoir 
appelle  Iqs  efclaves  à  la  liberté  ; 
aSront  dont  L.  Cornélius  Cinna 
étoit  bien  digne  ^  mais  d'an  exem- 

i>le  qui  pouvoit  être  flcheux.  On 
ui  fubftitua  L.  Cornélius  Mérola, 
qui  étoii  prêtre  de  Jupiter,  Fk* 
mn  DMis^ 

lu.  CornéKusGnnâ,afaifipoufli 
à  bout ,  n'avoît  plus  de  reflburce 
que  dans  les  cens  de  guerre.  Com- 
ice lltalie  n  étoit  pas  encore  en- 
tièrement pacifiée  ,  &  que  les 
Samnites  étoient  toujours  en  ar- 
mes ^  les  Romains  tenoient  aiuffi 
des  armées  de  différens  côtés ,  & 
I    3  y  en  avoir  une  aâutilement  en 
Campanie  /que  commanéoit  App. 
Claudiust   L.  Cornélius  Cinna , 
ayant  gagné  les  principaux  offi- 
I     ciers  de  cette  armée-,  entra  dans 
1    le  camp  ;  &  les  foldaÀ  s'étant  raC^ 
fdmblés  au  tour  de  lui ,  il  renvoya 
j    fes  Liâeurs  ,  comme  n'étam  plus 
qu'un  fimple  particulier.  En  mê- 
me tenss  ,  verfatnt  ^es  larmes  en 
abondance  %,  il  adrefla  ce  difcours 
à  la  multitude  :  ii  Chers  cito}rens , 
w  j*avois  reçu  de  Vous  la  prerhière 
I     w  dignité  de  la  RépuHîque^,  &  le 
»  Sénat  m'en  a  privé  fans  votre 
y»  conlkmemenr.  Ce  ne  font  pa$ 
I     w  néanmoins  mes  difgraces  per- 
!     1^  foniielles  qui  me   touchent  le 
I      »  plus.  Je  plains  vos  droits  vb- 
»  lés  ,  votte  pouvoir  anéanti  ; 
'^  car ,  croî  déftn'inaîs  s'empreffe- 
;      »  ra  de  loUiciter  les  fiiffrages  des 
»  Tribus  ?  Qui  fe  dôrfnera  des 
^  mouvemens  pour  mériter  vos 
»  bonnes  grâces  ?  Comipîent  vous 


CI  x'^i 

i>  fera-t-îl  permis  de  vous  regar- 
n  der  comme  les  maîtres  des 
ff  éleâions ,  comme  les  difbibu* 
i>  teurs  des  emplois  &  des  digni- 
»  tés ,  fi  vous  ne  pouvez  aflurer 
ly  la  jouiflance  de  vos  bienfaits  à 
n  ceux  que  vous  en  avez  revêtus  « 
n  &  fi  vos  créatures  font  expofées 
»  à  fe  voir  dépouittées  fans  vous  , 
n  de  ce  que  vous  feuls  leur  avez 
n  donner  n  II  ajouta  plufieurs 
autres  chofes  dans  le  même  fens , 
&  termina  fon  difcours  par  def- 
cendre  du  tribunal ,  déchirant  fes 
habits ,  &  fe  jettant  aux  pieds  des 
foldats.  Tous  attendris  d'un  tel 
fpèâaclé,  le  relèvent ,  le  font  re- 
monter fur  le  tribunal ,  Tinvitem  à' 
rappeller  fes  Ltâeuts ,  &  lui  pro- 
tègent qu'ils  le  reconnoiflent  tou- 
jours pour  Conful.  En  même 
tems  )  les  oiEciers  qài  avoient  été 
gagnés  s'avancent ,  &  lui  prêtent 
mment  les  premiers  comme  à 
leur  Général.  Puis  ils  font  faire  le 
même  ferment  chacun  aux  troupes 
qu'il  commandoit. 

C'en  étoit  aflez  pour  metti^e  L. 
Cornélius  Cinna  en  état  de  ne 
rien  cramdre.  Mys,  il  vouloit  de 
plus  fe  rendre  redoutable  à  fes 
actverfaires ,  &  reprendre  fur  eux 
l'autorité  du  gouvernement  ^  dont 
ib  s'étoient  mis  en  pofleflion. 
Ainfi,  pôurgroffir  fon  par^,  il 
courut  dans  toutes  les  villes  d'Ita- 
lie >  repréfentant  aux  nouveaux 
citoyens  que  c'étoit  leur  querelle 

Si'tl  avoit  foûtenue ,  &  qu'il  avoît 
é  la  viâime  de  foit  zde  pour 
leurs  intérêts.  Il  fut  écouté  fans 
doute  favorablement;  il  trouva  & 
hommes  &  argent  en  abondance  ; 
^  il  vit  à  fes  ordres  jufqu'à  trcnfr 


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A3^  CI 

cens  cohortes  ou  trente  légions  l 
formées  des  difFérens  peuples  d'I- 
talie ;  puifTance  formidable»  & 
qu'il  n'eil  pas  à  croire  qu'il  ait 
réunie  enfemble  en  corps  d'ar- 
mée ,  mais  qui  doit  faire  conce- 
vpir  combien  grandes  étoient  Tes 
forces  ^  &  combien  a  voient  lieu 
de  trembler  ceux  qui  l'avoient 
cb^Hç  de  Rome. 

Pendant  ce  tems-là  arrive  C*; 
Marius ,  qui  jufque-Ià  s'étbit  tenu 
en  Afrique.  L.  Cornélius  Cinna 
fe  hâta  de  le  recevoir  ,  &  le  dé- 
clara Proconful.  Alors  )  il  marcha, 
contre  Rome  >  &  en  forma  le 
flege  avec  quatre  armées ,  qui  fe 
pofterent ,  1  une  ayant  C.  Marius 
pour  chef  au-deflbus  de  la  ville 
du  côté  de  la  mer  ;  l^autre  com- 
mandée par  Sertorius ,  au-deilus*. 
L.  Cornélius  Cinna  lui-même  Sd 
Carbon  prirent  leurs  quartiers  en- 
tre ceux  de  C*  Marius  &  de  $çr-i 
torius.  Leur  premièrç  attention, 
fut  d*affamer  la  ville  l  ce  qui  leur* 
fut  aifé ,  parce  qu'ils  étoient  maî- 
tres du  Tibre.  La  difette  augmen- 
tant de  jour  en  jour ,  commença; 
à  exciter  les  pkintes  &  les  ippr-^ 
mures  de  la  multitude  ;  de  forte 
qu^  le  Sénat  découragé,  &  ap-. 
préhendant  que  la  ville  ^e  fût 
prife  de  force  ,  ou  livrée  par  tra-; 
hifon^  envoya  des  députés  à  L. 
Cornélius  Cinna  pour  traiter  d'ac- 
commodement. 

L.  Cornélius  Crnna  les  arrêta, 
tout  court  9  en  leur  demandant  fi, 
ceux  qui  les  envoyoient ,  le  re- 
connoiflbient  pour  Conful.  Ils 
n'ayoient  point ,  ce  qui  eft  affez 
furprenant,  d'inûrudions  fur  cet. 
article  9  &  îU  s'en  reto^irnerça^/ 


CI 

fans  aroir  même  entanné  tané'^ 
godation.  Cette  démarche  de  foi- 
bleife  que  le  Sénat  avoit  faite, 
n'eut  donc  d'autre  fruit  que  d'ac- 
croître la  conflernation  de  ceux 
qui  lui  étoient  attachés  »  &  de 
rehauflèr  le  courage  de  Tennemi. 
Il  ne  reftoic  d'autre  reiFource  à 
cette  augufte  compagnie  que  de 
tranfi^er  avec  L.  Cornélius  Cinna, 
aux  conditions  les  plus  dopces 
qu'il  feroit  poffible  d'obtenir.  La 
plus  grande  difficulté  c'étoit  de  loi 
rendre  le  confulat ,  L.  Cornélias 
Mérula  en  ayant  été  revêtu  ;  mais, 
celui-ci ,  par  amour  pour  fa  pa- 
trie f  confentit.  a  l'abdiquer. 

Alors,  on  envoya  de  nouveaux 
députés  à  L.  Cornélius  Cinna, 
avec  ordre  d^  le  reconnoître  pour 
Conful;  Leurs  inAruâions  étoient 
fort  cotâtes.  Ils  n'étoient  chargés 
de  den^ande;;r  autre  chofe  à  L. 
Cornélius  Cinna ,  ilnon  qu'il  jurât 
d'épargner  la  vie  des  citoyens.  Il 
ne  da^a.  pas,  (aire  de  ferment, 
&  voulut  qu'<H)  fe  contentât  de  la 
parole  cpi'il  donnpit  de  ne  caufer 
volontairement  la  mort  à  per- 
fonne.  On  va  voir  comment  il 
tint  cette  p^ole  ;  jmais ,  il  n'auroit 
pas  été  plus  fidèle  au  ferment.  Il 
ajouta  un  avis  pour.Cn.  Oâavien: 
Qu'il  ncfcM^arde  point  à  pam' 
tre  en puèljç  f  dit^ii  aux  députés, 
de  peur,  que. contre  mon  gré  il  ne 
lui  arrive  malheur.  Il  donna  cette 
audience  étant  affis  fur  fon  tribu- 
nal i  ayant  ^vant  lui  fes  Liâeurs» 
&  environné  de  tout  l'appareil  de 
h  majeflé  confplaire. 

L.  Cornélips  Cinna  ,  fe  voyant 
vainqueur,,  tint  un  grand  confeil 
avec  Ç.  Marius  &  les  principaux. 


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CI. 

tliefsde  leur  parti,  pour  délibérer, 
fur  la  manière  dont  ils  uferoienr 
cle  la  viâoire.  Il  fut  conclu  que 
ians  s'embarraffer  des  paroles 
données  aux  députés  du  Sénat , 
ils  feroient  mab-bafTe  fur  tous 
leurs  ennemis;  afin  que  leur  fac-. 
tîon  ,  demeurant  feule  maîtreffe 
du  gouvernement  ,  difpofât  de 
tout  avec  une  entière  autorité.  ^ 
.  Cependant ,  le  Sénat ,  qui  igno- 
roit  cette  crpejlp  délibération ,  ne 
tarda  pas  à  envoyer  de  nouveaux, 
députés  pour  inviter  L.  Cornélius 
Cinna  &  C.  Marius  à  entrer  dans 
la  ville.  Car ,  on  avoit  ajouté  ex- 
preffément  le  nom  de  C.  Marius  „ 
parce  qu'on  fçavoit  fort  bien  que 
c'étoit  lui  qui  étoit  Tame  de  tous 
ces  mouvemens ,  &  que  L.  Cor- 
nélius Cinna ,  k.  propren;ient  par- 
ler, ne  faifoit  quejui  prêter  Ton 
nom.  L.  Cornélius  Cinna  fit  donc 
fon  entrée  ,  précédé  de  Tes  Lic^ 
teurs,  &  environné  de  fes  gardes. 
Auffi-tôt  Rdme  fut  livrée  a  tou- 
tes les  horreurs  de  la  guerre.  Tou- 
tes les  portes  de  la  ville  furent 
fermées  ,  afin  que  perfonne  ne 
pût  s'enfuir  ;  &  fous  prétexte  de 
cKercher  les  ennemis  de  C.  Ma-! 
rîus  ,  les  foJdats  fe,  répandirent 
4ans,  tous  les  quartiers.  Un  très- 
grand  nombre  de  citoyens  furent 
tués.  Tes  femmes  déshonorées,  les 
Qiaifons  pillées..  En  un  niot,  Ro- 
me fut  traitée  comme  une  ville 
prife  d'afTaut. 

L'année  fuivante ,  L.  Cornélius 
Cinna  fe  nomma  Conful  avec 
C.  Marius  fans  aucune  forme 
d'afTemblée  ni  d'éle£lion.  Il  le  fut 
encore  avec  Carbon  Tannée  d'a- 
j)rès,  qui. étoit  la  667.^  de  Rome  ; 


Cl        2n 

&  comme  fl  cette  dignité  lui  fût 
devenue  propre ,  Tannée  fuivante 
Ten  vit  revêtu  pour  la  quatrième 
fois.  Cette  année  fut  en  même 
tems  la  dernière  de  fa  vie.  Sa  > 
mort  eÙ.  racontée  <jifféremmenc 
par  les  Auteurs. 

Selon  Plutarque  ,  Poiftpée  J 
quelque  tems  après  fon  mariage 
avec  Antiûia ,  fe  rendit  au  camp 
de  L.  Cornélius  Cinna ,  où  il  fut 
d'abord  en  butte  à  la  calomnie. 
Ç'efl  (Pourquoi  ,  croyant  avoir 
tout  à  craindre  d'un  Général  com- 
me celui-là ,  il  fe  déroba  fecréte- 
ment.  Comme  on  ne  le  vit  plus 
paroitre^  il  fe  répandit  auffi-tôt 
un  bruit  dans  l'armée  que  L.  Cor- 
nélius Cinna  Tavoit  fait  tuer  ;  & 
fur  le  moment  ceux  qui  haïflbient 
L.  Cornélius  Cinna  ,  &  qui  ne 
pouvoient  le  fupporter  accouru- 
rent pour  fe  jetter  fur  lui.  Il  prit 
la  fuite ,  &  ayant  été  atteint  par 
tin  capitaine ,  il  fe  jetta  d'abord  à 
fes  genoux  &  lui  préfenta  fon  an- 
neau qui  lui  fervoit  de  cachet ,  & 
qui  étoit  d'un  fort  grand  prix.  Le: 
capitaine  répondît  avec  infolence  : 
Mais ,  je  ne  viens  pas  pourfceller  " 
un  Contrat ,  je  viens  pour  punir  un 
Tyra(i  injufte  &  impie  ,  &  le  tua. 

Appien  donne  un  autre  motif 
à  la  (édition  des  foldats ,  &  voici 
comment  il  rapporte  la  mort  de 
L.  Cornélius  Cinna.. 

Sylla  ,  qui  avoit  fait  la  paix 
avec  Mithridate  ,  fe  préparoic  à 
revenir  en  Italie.  L.  Cornélius 
Cinna  &  Carbon ,  s'étant  déclarés 
eux-mêmes  Confuls  ,  levèrent 
auffi-tôt  de  nouvelles  troupes  ,' 
dans  Tintention  de  les  faire  pafler 
par  mer  dans  la  Liburnie  ,  & 


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^U  C I 

d  aller  à  fa  rencontre.  Ceax  quî 
pafTerent  les  premiers  ,  abordè- 
rent heureufement  ;  mais  ,  ceux 
qui  les  fuivirent ,  furent  repoufles 
par  la  tempét*  for  les  côtes  de 
lltalie.  Les  foldats  ,  étant  fortis 
des  vaiffeaux  ,  déclarèrent  qu'ils 
«te  vouloiênt  point  faire  la  guerre 
contre  leurs  citoyens,  &  ^  reti- 
rèrent dans  leur  païs.  Leur  exem- 
ple fut  fuiri  par  le  refte  des  trou- 
pes ,  qui  refufa  de  $*eml»rquer. 
L.  Gornélius  Cinna  indigné  fit 
convoquer  une  affemblée  pour 
reprocher  à  fes  foldats  leur  défo- 
béiffance ,  &  peut-être  pour  les 
en  punir.  Ils  s'y  rendirent  y  la  co- 
lère peinte  fur  le  vifage ,  &  irès- 
difpofés  à  une  révolte  ouverte , 
lorfqu'un  Lideur  ,  qui  vouloir 
faire  faire  place  à  L.  Cornélius 
Gnna  ,  frappa  un  foldat  qui  ne  fe 
langeoit  pas  affez  vite.  Un  cama- 
rade de  celui-ci  maltraita  le  Lic- 
teur. L.  Cornélius  Gnna  ayant 
Toulu  faire  arrêter  ce  foldat ,  auifi- 
tôt  le  camp  retentit  de  cris  af- 
freux ,  les  pierres  volèrent  dô 
toutes  parts  ,  &  ceux  qui  étoient 
auprès  de  L.  Cornélius  Cinna 
le  tuèrent, 

C'étoît  un  gain  pour  L.  Cor- 
nélius Cinna  ,  comme  le  remar- 
Îue  Velleïus  Paterculus ,  de  périr 
ans  une  fédition  de  foldats.  n 
méritoit  les  plus  grandîs  fupplices , 
6c  il  ne  pouvoir  les  éviter ,  s*il  fût 
tombé  emre  les' mains  de  Sylla 
vainqueur.  Mais ,  quant  aux  élo- 
ges que  le  même  Auteur  donne  à 
Ion  courage  &  à  fa  bravoure,  il 
eft  fort  douteux  que  Ton  doive  y 
foufcrire.  Dans  tout  ce  qu'a  fait 
L.  Cornélius  Cinna  $  on  ne  voit- 


Cl 

que  les  intrigues  d'un  faffieux;  & 
s'il  domina  pendant  trois  ans  dans 
Rome ,  il  en  (iit  redevable  à  l'ab- 
fence  de  Sylla ,  &  non  pas  à  foa 
propre  courage. 

Au  reAe ,  la  narration  de  FIu- 
tarque,  touchant  la  mort  de  L« 
Cornélius  Cinna,  efttrès-fiifpefie, 
quand  on  l'examine  de  ptès.  Il  dit 

Sue  Pompée  étoit  dans  le  camp 
e  L.  Cornélius^  Cinna  ,  c'étQÎt 
apparemment  pour  fervir  foqs  ki* 
Or,  ce  fait  ne  paroît  nallement 
i^raifemblable  ;  car  «  il  e(k  confiant 

far  le  témoignage  de  Velleins 
atercnlus ,  &  par  dlm  de  Tau-, 
teur  de  TÉpitonie  de  Trte-Livet 

?ue  Pompeius  Strabon ,  père  de 
ompée ,  après  avoir  long-tems 
'reflé  neutre  entre  les  deux  par- 
tis ,  pour  être  en  état'  de  choi- 
fir  celui  qui  lift  feroit  le  plus  avan- 
tageux ,  le  déclarai  eiifitt  contre  L« 
Cornélius  Cinna  ,  à  quî  il  liv^ 
bataille  fous  les  murs  de  Rome. 
n  eft  encore  certain ,  par  Qcéron> 

Par  Velleïus  Paterculus  &  pat* 
iutarque  même ,  que  Pompée 
fervit  fous  fc«i  père  dans  la  guerre' 
Contre  L.  Cornélius  Cirina.  I^u- 
tarque  rapporte  tnéme^le  celui- 
ci  fubornaunr  Ludtt^  Téreiitius, 
3ui  iaifoit  chambrée  avec  fe  jeune 
ompée ,  &  qui  s'engagea  à  Vzf^ 
fafliner  ,  pendant  que  d'autres 
conjurés  dévoient  mettre  le  feu  à 
la  tente  du  père.  Ottnepeuteit* 
cote  douter  que  Pompée ,  aprè» 
le  retour  de  Sylla ,  n'ait  pris  hau- 
tement fon  parti,  &  Ton  fçsfit  les 
férvices  importaiii  qu'il  lui  rendit* 
A  la  véritfé ,  Appien  ditqiie  lô'rf- 
que  Syllâ  revint  en  ItaBe ,  Pom- 
pée tao  pafToit  pas   pôuf  dere 


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CI 

|)orté  ponr  lui  ;  msis  sll  eft  vrai 
que  Pompée  ait  eu  quelque  cha- 
grin contre  Sylla ,  il  ne  dura  pas 
long-tems ,  &  il  fe  déclara  pour 
kii  quelque  tems  après  fon  retour* 
.  De  tous  cet  faits  ,  il  faut  con- 
clure qu'il  n'eft  point  croyable 
Se  Pompée  ,  après  la  mort  de 
1  père ,  fe  (bit  lié  d'intérêt  avec 
les  ennemis  de  fa  maifon ,  qu'il  fe 
foit  livré  lui-même  à  un  homme 
qui  avoir  voulu  le  £iire  tuer  par 
une  noire  trahifqn ,  &  que  dans 
h  fqite  il  ait  repris  le  parti  de 
Sylla  qu'il  avoit  abandonné  ;  & 
fi  ces  faits  font  vrais  ,  Phitarque 
eft  înexcufable  de  ne  les  avoir  pas 
marqués  précifément ,  foit  pour 
édaircir  fa  narration  ,  &  pour 
prévenir  l'embarras  d'un  leâeur 
attentif,  tout  étonné  de  voir  Pom- 
pée dans  le  camp  de  fes  plus  cruels 
ennemis ,  (bit  pour  faire  remar- 
quer la  l^ereté  de  Pompée,  puif. 
que  Plutarque  dit  lui-même  que 
ton  but  principal  eft  de  peindre  le 
caraâère  &  les  mœurs  ,  &  de 
faire  le  portrait  del'ame.  Mais, 
cette  inconftance  de  Pompée, 
quoiqu'elle  ne  foit  pas  morale- 
ment împoiBble ,  ne  doit  pas  être 
iuppoféey  lorfqu'aucun  Hiftorien 
n'en  parle  pas  formellement;&  cet- 
te circonftance  de  la  narration  de 
Plutarque  fuffit  feule  pour  la  hne 
rejetter.  Il  faut  donc  s'en  tenir  à 
ce  que  dit  Appîen  ;  car  »  il  ne  pa- 
roît  pas  poflibte  de  conciBer  ces 
deux  narrations. 

Un  Sçavam  Ta  pourtant  voulo: 
faire ,  on  plutôt  des  deux  il  n'en 
a  fait  qu'une,  en  ajràtant  à  Tune, 
&  en  retranchant  à  l'autre  ;  ç'eft 
Freinsbémins.  Quoique  l'ouvrage 


C I  13> 

de  cet  Auteur  en  général  foit  très- 
bon  y  on  ofe  dire  qu'en  cette  occa- 
fion  il  a  prévariqué  contre  les  rè- 
gles de  l'hiftoire.  Dans  le  83.6  li- 
vre de  fes  fupplémens  fur  Tite- 
Live ,  en  rendant  compte  de  la 
mort  de  L.  Cornélius  Cinna  ,  il 
adopte  d'abord  le  commencement 
de  la  narration  de  Plutarque  ,  St 
après  avoir  dit  que  Pompée  fut 
obligé  de  fortir  du  camp  ,  &  que 
les  foldats  crurent  qu*il  avoit  été 
tué ,  il  pafle  au  récit  d'Appien  ;  & 
fupprimant  tout  ce  que  cet  Hif- 
torien dit  du  refus  que  les  foldats 
firent  de  marcher  contre  Sylla  , 
ri  raconte  que  L.  G)rnélius  Cin- 
na s'avançant  peur  appaifer  (es 
foldats  irrités  contre  lui  ,  parce 
qu'ils  te  croyoient  auteur  de  la 
mort  de   Pompée  ,  fon  LiâeUi^ 
frappa  un  foldat  »  6c  le  refte  qut 
eft  dans  Appîen  ;  puis  il  reviens  à 
Plutarque  fur  la  manière  dont  iiit 
tué  L.  Cornélius  Ciifha.  Ainfi,  it 
a  compofé  fa  narration  de  cir- 
conftances,  qu'il  appliqué  à  des 
£iits ,  dont  ne  parle  pas  l'Auteuif 
d'où  il  les  a  tirées  ;  il  rejette  ce 
qui  pourroit  h\re  connoirre  la 
différence  qu'il  y  a  entre  Plutar-* 
que  &  Appien ,  &  H  induit  airifi 
en  erreur  ceux  qui  ne  liront  pas 
les  orieinaux ,  &  qui  s'en  repôfe*^ 
ront  fur  bi. 

On  peut  apprendre  ck  ces  ré- 
marques  critiques  »  qui  font  de 
M.  SecoufTe ,  avec  quelle  précau- 
rion  il  faut  lire  certains  Auuenrs , 
Bc  Combien  if  y  a  peu  à  compter , 
fur  ce  qu^Us  nous  racontent  quel- 

3uefois.  Les  Anciens  &  les  Mo^ 
emes  (ont  dans  ce  cas  afTei  fré- 
quemment; Un  peir  de  Fy frbûûift 


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tne,  ,  en  fait  d'hiftolre  ,  loin  de 
nuire  ,  peut  devenir  très- utile  , 
fur  tout  s'il  donne  lieu  à  des  re- 
cherches ,  qui  Raflent  diâinguer  la 
Xérité  du  menfoiige. 

CINNA  [  L,  Corn.  ]  ,  (^) 
L,  Cornélius  Cinna  ^  A.  Kcpvm'a/oç 
iCwaç,  préteur  l'an  de  Home  708. 
Ce  fut  un  de  ceux  qui  eurent  part 
9U  meurtre  de  Céfar.  Peu  de  tems 
g^rès  qu'il  eut  été  aflaffiné,  L. 
Cornélius  Cinna ,  s'avifa  un  jour 
d'inveâiver  contre  loi  d'une  ma- 
nière ou  trageufe.  Il  alla  jùfqu'à  fe 
dépouiller  des  ornemens  de  fa 
inagiftrature ,  qu'il  difoit  avoir 
f eçue  d'qn  tyran  contre  les  loix* 
Le  peuple  ,  à  qui  la  mémoire  de 
Çéfar  étoit  chère  ,  témoigna  fon 
indignation  par  des  clameurs .  6c 
par  des  menaces  .co^ue  L.  Cor- 
nélius Cinna. 

'  CINNA  [  Helvius  ]  ,  HeU 
vins  Cinna  ,  (J?)  tribun ,  qui  étoit 
un  des  amis  de  Céfar.  La  nuit  qui 
précéda  le  meurtre  de  ce  dernier , 
Helvius  Cinna  eut  un  fonge  affez 
étrange.  Il  iongea  ,  dit-on  ,  que 
Çéfaf  rinvitoii  à  fouper ,  &  que 
comme  il  le  refufoit ,  Céfar  le 
prit  par  la  main  «  &  l'entraîna 
malgré  lui  y  quelque  réfi(lance 
^a'iipût  faire.  Dès  qu'il  eut  ap- 

Î>r;s  que  l'on  brûloic  dans  la  place 
e  corps  de  Céfar ,  il  fe  leva  6c 
alla  lui  rendre  les  derniers  hon- 
neurs ,  quoique  ce  fonge  lui  de- 
meurât toujours*  fur  le  cœur ,  & 
qu'il  eât  même  la  fièvre.  Dès 
qu'il  partit  fur  la  place  ,  quelqu'un 

(^)  Appîati.  p.  ^04.  ?lut.  Tôm.  I.  p. 
991.  Crév.  Hili.  Rom.T.  Vllf.  p.  &%. 
,  •(*)  Plut.  T,  I.  p.  740  t  99λ  Appian. 
p.  $11.  Crév.  Hitt*  Rom*  Tom.  VUL  p. 


CI 

du  penple  dît  fon  nom  à  un  antre 
qui  le  demandoii;  cet  autre  ledit 
à  fon  voifin  ,  &  dans  le  moment 
il  courut  de  bouche  en  bouche 
que  c'étoit  un  de  ceux  qui  avoll» 
tué  Céfar  ;  car ,  parmi  les  conju- 
rés ,  ainfi  qu'on  l'a  dit  dans  Tar-x 
tîcle  précédent  >  il  y  en  avoit  un 
qui  portoit  auffi  le  nojm  de  Cin- 
na ;  &  lé  prenant  pour  ce  meur- 
trier,  tout  le  peuple  fe  jetta  fur 
lui ,  &  le  mit  en  pièces  dans  la 
place  même. 

Ce  malheureux  ,  félon  Pl^itar* 
que ,  étoit  un  poëte.  C'étoit  peut* 
être  celui  dont  il  eft  parlé  ci-; 
après. 

CINNA  [  Cn.  Cornélius  ]  i 
Cn.  Cornélius  Cinna  y  (c)  petit 
fils  ,  ou  arrière-petit  fils  de  Pom- 
pée, étant  fils  d*une  petite  fille  Je, 
ce  grand  hpmme.  Il  ne  fut  point 
héritier  des  qualités  éminentes  d9> 
fon  ayeul  ;  car ,  ce  fut  un  homme, 
de  peu  de  mérite.  Il  fut  dinpncé  à 
Augufle,comme  chef  d'une  conju-^, 
ration  tramée  contre  lui.C'étoit  ui» 
des  complices  qui  donnoit  cet  avis» 
ic  il  marqua  le  lieu  ,  le  tems  ,  les> 
arrangemens  pris  pour  tuer  l'Ém-^ 
pereur  ,  pendant  qu'il  offriroit  ui» 
facrifice  ;  de  façon  que  le  crime 
étoit  avéré ,  &  ne  poùvoit  fouffrir 
aucun  doute.  Augufle  réfolut  de 
faire  juftice  du  perfide  Cn.  Cor- 
nélius Cinna  ,  &  indiqua  à  cet 
effet  pour  le  lendemain  un  confeil 
de  fes  amis.    . 

L'intervalle  de  la  nuit  donna 
lieu  à  des  réflexions  ,  dont  il  fut 

U)  Crév.   Hi(i,  dss  Emp.  Tom.  U 


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•  CI 

tlolemment  agité  »  n'envifageant 
qu'avec  une  lone  d*effroi  la  né- 
çeffité  de  condamner  un  citoyen 
de  la  plus  haute  noblede ,  6c  qui , 
à  ce  feul  article  près  ,  étoic  fans 
reproche*  Il  ne  pouvoit  plus  fe  dé* 
terminer  à  ordonner  la  mort  d'un 
coupable  ,  lui  qui  autrefois  avoit 
diâé    en  foupant    avec    Marc- 
Antoine  f  redit  de  la  profcription. 
Ayant  donc  contremandé  Tes  amis, 
&  ayanç  appelle  Cn."  Cornélius 
Cinna  feul ,  il  fit  fortir  tout    le 
inonde  de  fa  chambre ,  lui  ordon- 
na de  s'aiTeoir,  &  lui  parla  en  ces 
termes  :  n   J'exige  avant  tout , 
99  que  vous  m'écoutiez  fans  m'in- 
19  terrompre,  que  vous  me  laif»- 
9>  fiez  achever  tout  ce  que  j'ai  à 
a>  dire ,  fans  vous  récrier.  Lorfque 
•»  j'aurai  fini ,  vous  aurez  toute 
99  liberté  de  me  répondre.  Je  vous 
99  ai  trouvé  ,  Cinna ,  dans  le  camp 
9»  de  mes  ennemis.  Vos  engage- 
n  mens  mêmes  contre  moi  n'e- 
st toient  pas  l'effet  d'un  choix  qui 
9>  pût  changer ,  mais  une  fuite  de 
99  votre  naiâance.  Dans  de  telles 
99  circonftances ,  je  vous  ai  accor- 
3»  dé  la  vie  ,  je  vous  ai  rendu 
»  votre    patrimoine.  Vous  êtes 
99  aujourd'hui  fi  riche,  &  dans 
M  une  fitùation  fi  florifiante ,  que 
99  plufieurs  des  vainqueurs  portent 
n  envie  à  la  condition  du  vaincu. 
I»   Vous  avez  fouhaité  un  (àcerdo- 
M  ce ,  6c  je  vous  l'ai  donné  par 
1»  préférence    fur    des   compéti- 
99  teurs ,  dont  les  pères  àvoient 
>»  combattu  pour  moi.  Après  que 
99  je  vous  ai  comblé  de  tant  de 
99  bienfaits ,  vous  voiliez  m'affaf- 
p  finer.  u 
(«)  QuintlU  L.  X.  c»  4, 


-Cl  2^7 

A  ce  mot,  Cn.  Cornélius  Gnna 
s'étant  écrié  qu'une  telle  fureur 
étoit  bien  loin  de  fa  penfée: 
w  Vous  ne  me  tenez  point  paio- 
M  le ,  reprit  Augufte;nous  étions 
f>  convenus  que  vous  ne  m'in- 
9}  terromperiez  point.  Oui ,  je 
»  vous  le  répète ,  vous  voulez 
i>  m'afTaffiner.  <c  II  lui  expofa  en 
détail  toutes  les  circonftances  « 
tous  les  apprêts  ;  il  lui  nomma  les 
complices  ;  6c  en  particulier  celui 
qui  devoit  porter  le  premier  coup, 
n  finit  cn  lui^  difant  :  n  Je  vous 
1}  fais  grâce  de  la  vie  une  féconde 
9}  fois ,  Cinna.  Je  vous  ai  épargné  5 
»  quoique  vous  fuffiez  mon  en- 
99  nemi  ;  je  vous  pardonne  mainw 
»  tenant  que  vous  avez  ajouté  à 
n  ce  titre  ceux  de  traître  &  dé 
»  parricide.  Commençons  aujour- 
»  d'hui  à  être  amis  fincerement  ; 
n  piquons  nous  d'émulation ,  mol 
»  pour  foûtenir  mon  bienfait, 
»  vous  pour  y  répondre  ;  effor- 
»  çons  -  nous  de  rendre  douteux 
>i  s'il  y  aura  de  ma  part  plus  de 
»  générofité  ,  ou  de  la  vôtre  plus 
n  de  reconnoifiance.  a 

A  un  langage  fi  noble,  il  joignit 
les  effets»  Il  donna  à  Cn.  Corn.  Cin- 
na le  Confulat  pour  l'année  fuivan- 
te ,  fe  plaignant  obligeamment  de 
la'circonfpeâion  timide  qui  l'avoît 
empêché  de  le  demander  .L.  Cor-* 
nélius  Cinna,de  foncôté,fit  preuve 
de  fenfibilité  &  de  bon  cœur.  Il 
devine  ami  fidèle  du  Prince,  à 
qui  il  étoit  deux  fois  redevable  de 
la  vie  ,  &  en  mourant  il  l'inflitua 
fon  feul  héritier. 

ClNNA[C.HELVius],(tf) 
C.  Helvius  Cinna  ,  poëte  Latin  | 


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Jlyi  CI 

qui  vtvoh  du  tetns  des  Trmmvîrsl 
Il  avoit  compofé  un  poëme  en 
vei%  hexamètres,  iatmléSmyrna, 
dans  lequel  il  décrivoit  Tamour 
incedueux  de  Myrrha.  Plufieurs 
Auteurs  en  ont  fait  mal  à  propos 
une  tragédie  ,  qu'ils  ont  appeiiée' 
.  la  Smyrne  de  C.  Helvius  Cinna , 
&  n'ont  pas  fait  attention  ^ue 
9',uvf>vci  en  Grec,  étoitla  mêms 
chofe  que  Myrrha,  &  que  les  vers 
que  Servius  &  Prifden  nous  ont 
coniervés  de  cette  pièce  j^  quoi- 
qu'en*  petit  nombre,  fuffifent  pour 
ùïre  voir  ,  que  ce  n*étdit  pas  une 
pièce  de  théâtre. 

M.  de  la  Monnoie  a  repris  le 

S  te  Briet ,  de  ce  qu'il  dit  de  C» 
elvius  Cinna ,  dans  l'introduc- 
tion  à  Ton  livre  ïnntuléiAcutè  diBa 
vtterum  Po'étarum  Latinorum*  Le 
père  Briet  ayant  lu  ,  dit  -  il , 
ces  mots  dans  le  recueil  d'ancien- 
nes épigrammes  ,  donné  par 
Pierre  Pitliou  en  1590,  In  corn- 
mentarium  L*  Craffiùi  grammatici 
in  Smymam.  C.  Helv'ù  Cinna  ;  &C 
trompé  par  le  point  mis  mal  à 
propos  après  Smymam  ,  crut  que 
C.  Helvius  Cinna  étoit  Tauteur , 
non  feulement  de  Tépigramme  uni 
CraJJitio,  qui  étoit  autant  contre 
C.  Helvius  Cinna  lui-même,  que 
conue  Craflitius ,  mais  encore  des 
quatre  fulvantes ,  dont  la  premiè- 
re a  pour  titre ,  de  Achille  ,  la  fé- 
conde ,  de  Telepho ,  les  deux  au- 
tres ,  in  Xerxem^  La  faute  du  père 
Briet,  ajoute  M.  de  la  Monnoie , 
â  entraîné  M.  Baillet&  beaucoup 


Cl  # 

d'autres  dans  la  même  m^riiê; 
Maîsy  M.  de  la  Monnoie  s*eu  lui- 
même  trompé  ;  &  ce  que  le  père 
Briet  dit ,  eft  iufte. 

CINNAMOMINUM  ,  {a) 
Cinnamomimum  ,  forte  de  parfum 
dont  la  compoûtion  étoit  de^ran- 
de  dépenfe. 

CINNAMUS  [  PuBLius  ]  i 
Publius  Cinnamus.  (^)  Noos  ne 
le  connoifFons  que  par  fon  tom- 
beau. Le  fens  de  llnfcription  eâr 
tel  :  Publias  ConfcHus  Ariftus  a 
fait  faire  ce  monument  pour  PU" 
blius  Cinnamus  fon  cher  fils  d^un 
fi  doux  naturel.  Il  Va  fait  avffi 
pour  lui-même  ,  pour  fes  affran^ 
chis  6*  fes  affranchies  j  6*  pour 
leurs  defcendans. 

CINNÉRETH  [  LE  Lac  de  ] , 
ou  LE  Lac  DE  Cenereth.  Foyei 
Cénéreth. 

CINNlUS,Cw/ii«^,(c)  étoît 
un  furnom  d'Apollon.  tX  Ber- 
nard^de  Montfaucon  met  ce  fur- 
nom  d'Apollon  ail  nombre  dei 
furnoms  locaux  de  ce  Dieu. 

CINOBELLINUS ,  CinobeU 
linus  »  {d)  roi  d'un  peuple  de  la 
grande  Bretagne  >  (ous  l'empire 
de  Cabgula.  Il  chafla  fon  fils  Ad- 
minius,  qui  alla  fe  rendre  aux  Ro« 
mains  ,  d'où  l'Empereur  prit  oc« 
cafion  de  s'atuibuer  un  triomphe 
chimérique  fur  toute  la  grande 
Bretagne  ,  vers  l'an  de  Jefus- 
Chrifr40.  L'Hiflotre  donne  enco- 
re deux  fils  à  Cinobellinus,  iça- 
voir  ,Caraâacus  &  Taeodumnus» 
La  réfidence  ordinaire  de  ce  Prin* 

(^)  Antîq.  expL  par  D,  Bem*  dei  {e)  Antiq.  expl.  par  D.  Bem.  dr 
Moncf.  Tom.  III.  pag.  «07.  i  Monti.  T.  I.  p.  107. 

ih)  Suppi'  ^  TADciq.  ezpl.  par  D.  |  {d)  Crév.  Hift.  des  £mpt  Tom.  U. 
Bcrn.  de  Momf.  Xoab  V.  p.  6g»  Ip.  50»  H%»  \^* 


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Cl 

ce  étoit  la  ville  de  Camolodu- 

CINQUIÈME ,  terme  de  col- 
lège. Oeft  le  nom ,  que  l'on  don- 
ne  à  la  cinc^îème  des  clafles  des 
humanités,  en  commençant  à 
compter  par  la  rhétorique,  qui  eft 
la  première  c»  dignité. 

Cinquiènr^e  fe  dit  encore  du 
lieu  ,  de  la  falle ,  oh  s'affemblent 
les  écoliers  de  la  Cinquième  claf- 
fe,  pour  recevoir  les  leçons  du 
profefleor ,  &  y  faire  les  exerci- 
ces de  cette  tclafie. 

CINTIUS,  Ci^/iw,  (tf)  offi- 
cier Romain  ,  qui  fut  chargé  de 
radminiflration  de  la  Syrie,  Tan 
de  Jefus-Chrift  63  ,  fous  l'em- 
pire de  Néron.  Les  éditions  or- 
dinaires de  Tacite  portent  Cin- 
cius ,  ou  Cintius.  M.  Crévier  , 
dans  fbn  Hiftoire  des  Empereurs , 
lit  Ceflius;  &  pour  juAifier  ùl 
correâion  ,  il  ajoute  cette  note  : 
i>  J'adopte  la  correâion  que  Pi- 
n  ^ghius  a  fahe  fur  le  texte  de  Ta- 
»  cite  ,  qui  porte  par  erreur  Gn« 
If  cius  ou  Cincius.  Celui ,  dont 
»  il  s'agît  ici  ,  eft  un  Ceftius  qui 
».  commença  la  guerre  contre  les 
»  Juifs  ^  &  qui  ayant  afliégé  Jé- 
n  nifalem  ,  fut  repouffé  avec 
p  perte  &  ignominie^  a 

CINYPHE,  Cinypbus,  K/k- 
««ç  «  fleuve  ,  le  même  que  le 
Cinyps.  Fyy^i  Cinyps. 
.  aNYPS.  Cinyps,  K.W.  (*) 
fleuve  d'Afrique ,  dans  la  ré^on, 
appellée  Tjripolitaine  ,  vers  le 
commencement    de    la    grande 


CI  139 

Syrte,  en  de-çà  du  promontoire 
de  Céphales,  an-deffus  de  la 
grande  Leptis. 

Hérodote  dît  que  ce  fieove 
avoit  (a  fource  dans  une  colline 
nomo^ée  le  mont  des  Graces,qu'il 
traverfoit  le  pais  d'une  nation  ap- 
pellée MacM  ^  &  fe  jettoit  dans  la 
mer.  Selon  Strabon ,  il  y  avoit  un 
mur  bâti  par  les  Carthaginois , .  & 
un  pont ,  à  la  faveur  duquel  on 
pafloit  quelques  mauvab  fonds 
qui  avançoient  dans  le  pais*  Ce 
fleuve ,  qui  étoit  fort  petit  par  rap- 
port à  rétendue  de  fon  cours  ,  eft 
préfentement  nommé  Magro. 

CINYPS, Ci/2y/7^,  Klw-i^.  (c)  . 
contrée  de  l'Afrique  Tripolitaine, 
fituée  entre  le  mont  des  Grâces  & 
la  Méditerranée,  &  traverféepar 
le  fleuve  Cinyps,  qui  lui  donnoit 
fon  nom« 

Selon  Hérodote  ,  il  n'y  avoit 
point  de  païs ,  oui  f^t  plus  propre 
pour  le  bled ,  oC  qui  eti  produisît 
davantage.  Auffi ,  la  terre  en 
étoit-elle  noire ,  &  humeâée  de 
fontaines  ;  elle  n'appréhendoit  , 
ni  les  féchereffes ,  ni  les  grandes 
pluies,  quoiqu'il  plût  dans  cet 
endroit  de  l'Afrique.  Ce  pais  ne 
rapportoit  pas  moins  que  la  con- 
trée deBabylone.  Celle  des  Évef- 
pérites  étoit  auffi  fort  bonne  ;  & 
dans  les  meilleures  années ,  elle 
rendoit  le  centuple;  mais, le  pais 
de  Cinyphs  donnoit  trois  cens  fois 
davantage  qu'il  n'avoir  reçu. 

C'eft  préfentement  le  pais  de 
l'état  de  Tripoli ,  entre  le  mont 


(4)  Tadt.    Annal:  L.    XV.   c.  t^.lp,  147.  Pomp*  Mel.  p.  ti. 
Cfév.  Hift.  des  Emp.  Tom.  II.  p.  191.  |     (0  Hcrod.  L.  IV.  c.  198.  Plîn.  T.  I, 

(k)  Serai),  pag.  835.  Herod.  L.  IV.  c.lp.  147. 
M7^.  Ptolcm.  L,  IV,  c.  }.  Pliai  Tom.  1. 1 


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'^O  Cl 

Garian  &  la  mer  Méditerranée. 

CINYPS  ,  Cinyps  ,  klru-^.  (a) 
Virgile  ayant  dit  dans  fes  Géorgi- 
ques :        ' 

Nec  minus  inter  uicmrbas  incana^ 
que  m,  «I^q 

Cinypbii  tonde  -^  hirci  ^  fetafquc 
^comai.îes  ; 

Ufum  in  caflrorum  &  miferis  vela^ 
mina  nantis. 

Le  grammairien  Probus  en  a 
pris  prétexte  de  mettre  en  Afri- 
que au  païs  des  Garamantes  ,  une 
ville  &  un  fleuve  du  nom  de  Ci- 
nyps. Servius  avoit  beaucoup 
mieux  dit ,  [  Cinypbii  hirci  ]  Li- 
byes  à  ftuvio  Cinyphe  ,  c*eft-à- 
dire  ,  les  boucs  Cinyphiens  ,  ou 
de  Libye  à  caufe  du  fleuve  Ci- 
nyps. Tous  les  bons  commenta- 
teurs de  Virgile  ne  cherchent 
point  d'autre  origine  à  ce  mot 
Cinyphii^  que  le  nom  de  ce  fleu- 
ve ,  au  bord  duquel  on  nourriflbit 
des  chèvres.'  Rien  n'empêche 
qu'on  ne  l'entende  aufl[i  du  pais 
de  même  nom  ;  &  cela  convient 
mieux  qu'à  cette  prétendue  ville  , 
dont  Probus  eft  vraifemblable- 
ment  le  fondateur.  Le  P.Catrou, 
dans  fa  traduâion  de  Virgile  , 
change  le  vers  ,  &  au  lieu  de 
Cinyphii  tondent  hirci ,  fetafque 
V  comantes  ,  il  veut  qu'on  life  , 
Cynipbiis  tondent  hircis  fetafque 
comantes. 

On  ne  dira  rien  du  change- 
ment du  génitif  Cinyphii  hirci,  en 
un  datif  pluriel  Cinyphiis  hircis. 


CI 

'II  peut  être  atrivé  que  la  lettre  i 
à,^  fêtas  ayant  fait  omettre  à  quel- 
que copifte  celle  du  mot  hircis , 
des  Grammairiens  trouvant  hirci , 
aient  retranché  âuflli  Vs  de  Ciny^ 
phii  ;  mais  ,  pour  le  changement 
'd'orthographe,on  eft  furpris  que  ce 
Père  l'ait  hazardé.  Quand  tous  les 
manufcrits  &  toutes  les  éditions  de 
Virgile  auroient  Cyniphii  ou  Cyni- 
phiis  9  ce  (eroit  toujouts  une  faute 
qu'il  faudroit  corriger,far  l'autori- 
té de  tous  les  Hiftoriens  &  de  tous 
les  Géographes  qui  ont  eu  occa- 
fion  de  parler  de  Cinyps ,  n'y  en 
ayant  pas  un ,  ni  Grec  ni  Latin  , 
qui  n'ait  écrit  la  première  fyllabe 
de  ce  nom  par  un  i  fimple. 

CINYRAS,  Cinyras',  (h) 
Klfvfet^^  roi  de  Chypre ,  ou  d'A(-. 
fy  rie  félon  d'autres ,  eut  de  Cen- 
chris  fa  femme,  une  fllle  nommée 
Myrrha ,  dont  il  fut  aimé,  &  qu'il 
reçut  dans  fon  lit  fans  la  connoî- 
tre ,  &  de  laquelle  il  eut  Adonis. 
Il  étoit  fi  puiflant ,  que  fes  richef- 
fes  ont  donné  lieu  au  proverbe 
Cinyra  opes.  On  dit  que  fon 
royaume  fut  détruit  par  les  Grecs, 
auxquels ilavoitmanqué  de  parole, 
après  s'être  engagé  de  leur  fournir 
des  vivres  au  hege  de  Troye.  H 
eft  compté  parmi  les  anciens  de- 
vins ,  &  on  veut  qu'il  ait  été  l'a-* 
mant  &  le  prêtre  de  Vénus ,  & 
qu'il  ait  eu  cinquante  flUes  méta- 
morphofées  en  alcyons  »  ou  en 
pierres. 

Quant  aux  rapports  prétendus 
que  M.  le  Clerc  trouve  entre  Ci- 
rynas  &  Noé ,  ils  font  fi  forcés  , 


(*)  Virg.  Georg.  L.  III.  v.  jn.  ir-fi».  |  Metam.  L,  X.  Myth.  par.  M.  TAbb.  Bai^. 
(»;  Tacic.  Hilt.  L.  II.  c.    3.  Ovid.lX,  III.  p.  13.  é^/mv. 

qu'il 


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CI 

3'  Q*îl  feroit  inutile  d'en  faire  \A  la 
ifcuflion.  Sans  s'arrêter  aux  au- 
tres difficultés  >  comment  les  par- 
tifans  de  cette  application  fe  dé- 
barrafferont-ils  de  ranachronifme 
grodier  dans  lequel  ils  s'engagent? 
Tout  le  monde  fçait  la  grande 
étendue  de  tems  qu'il  y  eue  entre 
Noë  &  la  prife  de  Troye.  Eft-il 
aifé  de  rapprocher  deux  hommes 
il  fort  éloijgnés  l'un  de  l'autre ,  & 
de  fuppo(er  avec  vraifemblance 
qu'ils  aient  été  contemporains  ? 

On  trouvera  à  Tartide  de  Myr- 
rha  une  hiftoire  abrégée  de  Tes 
incefles  avec  Cinyras,  auffi  *  bien 
qu'une  explication  de  cette  fable. 
Voy€7^  Mvrrha. 

CINYRUS  ,  Cïnyrus  ,  (j) 
X/rrpoç ,  fils  de  Scintharus  ,  étoit, 
au  rapport  de  Lucien  i  un  grand 
garçon ,  de  belle  taille ,  &  fore 
bien  fait.  Il  devint  amoureux 
d'Hélène ,  &  elle  de  lui^  Leur 
amour  ne  put  être  long-tems  ca- 
ché ;  car ,  ils  fe  faifoienc  mille  ca- 
refies  a  table;  6c  quelquefois  après 
le  repas  ils  s'éearoient  tout  ieuls 
dans  la  forée.  À  la  fin ,  ils  réfolu- 
rent  de  fe  retirer  dans  quelqu'une 
des  ifles  voifmes.  Ils  prirent  la  nuie 
pour  l'exécution  de  leur  deiTein  » 
&  cinglèrent  en  haute  mer  ,  fans 
queperfonne  s'en  apperçût, 

CIOS  ,  Cios  ,  Kreç  *  {b)  ville 
de  l'Afie  mineure  dans  la  Bithy- 
nie.  Pline  dit  que  ç'avoit  été  une 
ville  de  commerce  pour  la  Phry- 
cie,  qui  en  étoit  voifine ,  &  que  les 
Miléfiens  l'avoient  bâtie ,  quoique 
dans  le   lieu  nommé  Afcanie  de 


(/»)  Lucian,  T.  I.  p.  y6%  ,  765. 

{b)  Hin.  T.  I.  p.  »89. 

\c)  Ovid.    Metam.    U    XV.    c.   11.  l 

Tm.  Xt. 


c  I  £4t 

Phrygle.  G'eft  la  même  ville  que 
Cius.  Voye7CX\xs. 

CIPPUS  [M.  GÉNUTitJS  ]  , 
M.  Genutius  ^' — us  ,  (c)  apper- 
çut  des  corner  '  '  Ion  front  en  fé 
regardant  dan.  J^t  e;  6(  s'ima- 
ginant  que  c'éto.  ne  illufion,  ôc 
que  fes  yeux  étoie  "h  trompés  par 
Quelque  fantôme  qdi  avoit  pris  fa 
ùgure  9  il  porta  plufieurs  fois  its 
mains  fur  fa  tête  «  &  touchs^  ce 
qu'il  avoic  vu.  Cela  l'obligea  àé 
s'arrêter  comme  il  revenoit  vifto- 
rieux  des  ennemis  du  peuple  Ro- 
main ;  6c  levant  alors  au  ciel  les 
yeux  &  les  cornes  :  ô  Dieu  ,  dit- 
il  ,  quoi  que  ce  prodige  nous  puijje 
annoncer  l  Si  c'eft  une  cbofe  heU'- 
reufe  ,  que  ce  foit  pour  la  patrie 
&  pour  le  peuple  de  Rome  ;  &t  s* il 
n  annonce  que  des  malheurs  y  qu'ils 
tombent  feulement  fur  moi^  En  mê- 
me tems  ,  il  fit  brûler  de  l'encens 
fur  un  autel  de  gazon  ;  il  remplit 
des  coupes  de  vin ,  di  immola 
deux  brebis  pour  chercher  dans 
leurs  entrailles  l'explication  de  ce 
prodige.  Lorfque  le  devin  les  eut 
regardées,  il  y  vit  de  grandes 
cho(*es ,  fans  être  pourtant  éciairci 
de  rien.  Mais  ,  dès  qu'il  eut  levé 
les  yeux  de  deflus  les  entrailles 
des  viâimes  9  &  qu'il  eut  confidé- 
ré  les  cornes  de  M.  Genutius  Cip- 
pus  :  Je  vous  falue  comme  Roi  , 
dit- il.  Rome  &  l'Italie  vous  obéi- 
ront &  obéiront  à  vos  enfans  ;  d» 
les  cornes  que  vous  ave^  ,  font  des 
préfaces  infailUbes  que  vous  por^ 
tere^  la  couronne.  Ne  diffère^  donc 
pas  davantage  ,  hdte^^vous  d'en- 

IMyth.  par  M.  PAbb.  Ban.  Tom.  Vllf,' 
p.  70.  &  faivt 


Q 


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2^1  Cl 

trer  dans  la  ville  ,  les  deftîns  le 
veulent  &  vous  le  commandent  ; 
/vous  n'y  fere^  pas  plutôt  entré 
quon  vous  en  donnera  l'empire  ^ 
&  vous  y  regnerei  long-tems  en 
paix ,  Prince  aimé  de  votre  peuple, 
&  redouté  de  vos  ennemis. 

M.  Géhutius  Cippus  ,  ayant 
oui  ces  paroles  ,  fe  retira  comme 
d'horreur  '  de  celui  qui  les  pro- 
nonçoit ,  &  détourna  Tes  yeux  de 
la  ville.  Non  ,  non ,  dit-  il ,  je  ne 
veux  point  de  cet  honneur ,  & 
je  prie  les  Dieux  immortels  ,  de 
faire  tomber  autre  part  les  me- 
naces de  ce  préface.  Je  viveraï 
plus  jugement  dans  un  exil  que 
fur  un  trône  i  6»  je  me  hannU 
rai  moi  -  même  avec  plus  d* hon- 
neur &  de  gloire  ^  que  fi  fentrois 
dans  le  Capitole  avec  un  fcep" 
tre  à  la  main.  En  même  tems,  il 
manda  le  Sénat  &  le  peuple  ; 
mais ,  avant  que  de  fe  préfenter 
à  rartembléè ,  il  fe  couvrit  d*une 
couronne  de  feuilles ,  pour  em- 
pêcher qu'on  pe  vît  (qs  cornes, 
Ènfuite  ,  il  monta  fur  une  levée 
de  terre^  qu^il  avoit  fait  faire  pour 
les  foldats ,  &  après  avoir  implo- 
ré les  Dieux ,  fuivant  Tancienne 
coutume:  »  Il  y  a  ici  quelqu'un, 
i>  dit-il ,  qui  fera  bien-tôt  votre 
19  Roi ,  n  vous  ne  le  bannifTez  de 
n  la  ville.  Je  ne  vous  dirai  point 
91  fon  nom  »  je  vous  dirai  feule- 
9>  ment  les  fignes  qui  vous  le  fe* 
99  ront  reconnoitre.  Il  a  des  cor- 
99  nés  fur  le  front ,  &  les  devins 
9>  vous  menacent  que  s'il  entre 
9>  une  fcîs  dans  Rome ,  il  fera 
91  votre  fouverain  ,  &  vous  im- 
99  pofera  des  loix.  Il  a  été  en  fon 
19  pouvoir  d'entrer  glorieufement 


Cl 

99  dans  la  TiUe  ;  mais,  j'a!  eu  afles 
»  de  courage  pour  l'empêcher  de 
»  paffer  outre,  quoiqu'il  n*y  ait 
»  perfonne  au  monde    qui   me 
9>  touche  de  fi  près  que  lui.  £m« 
99  péchez  donc ,  ô  peuple  Ro- 
»  main  >  qu'il  n'entre  avec  vous 
»  dans  Rome  ;  &  fi  vous  le  ju* 
>9  gez  digne  des  fers,  chargez  (on 
99  corps  de  fers  ôc  de  chaînes  ,  ou 
99  délivrez-vous  de  toute  crainte 
99  par  le  meùrue  de  ce  tyran*  ic 
Si  on  a  quelquefois   entendu 
fifHer  le  vent  dans  un  bois  planté 
de  pins ,  dit  Ovide ,  ou  fi  quel- 
quefois l'on  a  entendu  de  loin  le 
bruit  que  fent  les  flots  de  la  mer^ 
on  s'imaginera  celui  qui  s'éleva 
des  voix  confufes  d'un  fi  grand 
peuple  aiTemblé.  Tout  le  monde 
parloit  enfemble,  tout  le  monde 
étoît  étonné ,  &  parmi  cet  éton- 
ne ment  ôr  la  confufion  de  tant  de 
voix  ,  on  n'entendoir  que  celle-ci, 
qui  éclatoit  par-defTus  les  autres  : 
Qwi  eft'ce  ?  qui  efl-ce  ?  Ils  fe  re- 
gardent tous  au  front ,  ils  cher, 
chent  les  cornes  qui   lear  font 
peur  ;  mais  ,  pour  les  tirer  de,*pei- 
ne ,  M.  Génutms  Cippus  repre- 
nant la  parole  :  Voilà ,  dit-il  en  fe 
montrant,    voilà  celui  que  vous 
cherche:^.  En  même  tems  »  il  fe 
découvrit  la  tête  ,  ÔC  fit  voir  les 
cornes  qu'il  avoit  au  front.  Cha- 
cun baiue  la  vue  à  l'afpeâ  de  ce 
prodige  ;  l'on  en  fou  pire  de  dou- 
leur ,  &  quoique  chacun   aimât 
une  tête  Ç\  précieufe  &  fi  illufire, 
néanmoins,qui  le  pourroit  croire? 
Chacun  en  détourna  les  yeux ,  & 
la  regarda  malgré  foi.  Mais,  on 
ne  put  permettre  que  M.  Génu- 
tius  Cippus  demeurât  plus  long-. 


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CI 

tems  fans  honneur.  On  lu!  remît 
fur  le  front  la  couronne  de  fon 
triomphe  &  de  fa  viâoire;  &  le 
Sénat ,  le  voyant  réfolu  de  ne 
rentrer  jamais  dans  la  ville  ,  lui 
donna  autant  de  terre  qu'il  en 
put  renfermer  depuis  .le  ma- 
tin jufqu'au  foir ,  avec  le  fillon 
d'une  charrue.  Pour  conferver  la 
mémoire  de  la  vertu  d*un  Ci  grand 
homme,  on  6t  graver  fur  la  portei 
par  oîi  il  étoit  fprtî  de  la  ville  , 
one  tête  cornue  qui  lui  reffem- 
bloit. 

La  fable  femble  avoir  repris 
cette  aventure  à  l'Hiftoire  ,  com- 
me n  rhiftoire  Tavoit  aupara- 
vant prife  à  la  fable.  En  effet , 
elle  paroît  bien  plus  fabuleufe 
qu'hiflorique  ;  &  jamais  hifloire 
ne  reOembla  mieux  à  une  fable 
que  celle-ci.  Néanmoins ,  quel- 
i  ques-uns  fe  font  efforcés  de  faire 
j  voir  que  cela  pouvoit  arriver  ,  & 
que  cette  même  humeur  ^  de  la- 
quelle fe  forment  les  cornes  des 
animaux  ,  peut  aufli  fe  rencon- 
trer dans  quelques  hommes.  Ils 
rapportent ,  fur  ce  fujet,  plufieurs 
exemples  ;  &  Ton  dit  même  qu'au 
fiede  dernier-,  il  fe  trouva  dans 
un  bois  f  un  payfan  qui  avoit  une 
corne  fur  la  tête.  De  plus»  les 
Céraftes  qui  habitoient  Tifle  de 
Chypre  ,  &  qui  a  voient  dés  cor- 
nes a  la  tête ,  pourroient  auflî 
en  fervir  de  preuve. 

Mais ,  en  regardant  ce  que  la 
nature  peut  faire ,  il  femble  que 
fious  ayons  perdu  le  foin  de  con- 
fidérer  ce  que  peut  produire  la 
vertu,  dont  les  ouvrages  font 
,  aoffi  merveilleux  que  ceiax  de  la 
nature.  L'intention  de  cette  fable 


C I  ^45 

eft  de  nous  montrer  par  l'exem- 
ple de  M.  Génutius  Cippus  , 
qui  refufe  le  royaume,  &  qui 
(e^  bannit  lui-même  plutôt  que 
de  fe  rendre  fouverain  ,  que 
rhomme  de  bien  n*affeûera  ja.- 
mais  de  fe,  rendre  maître  de  fou 
pais ,  quelque  favorable  occafion 
qui  s'en  jpréfente  ;  qu'il  choifira 
plutôt  Texil  ;  &  tous  les  maux 
qui  l'accompagnent ,  qu'une  do- 
mination injufle  ;  6c  que  fi  fa  pa- 
trie ne  peut  être  heureufe  que 
par  fon  malheur ,  il  aimera  foa 
malheur  qui  rendra  fon  païs  heu- 
reux. Ainfi ,  Élius ,  Préteur  ^  fe 
rendit  célèbre  par  le  choix  qu'il 
fit  lui-inême  de  fon  infortune, 
pouvant  jouir  du  bonheur  que  les 
augures  lui  promettoient.  Car,  un 
jour  qu'il  étoit  fur  fon  fiege  ,  & 
qu'il  y  rendoit  la  juftice ,  un  pivert 
vint  fe  repofer  fur  fa  tête  ;  &  l'a- 
rufpice  ou  le  devin ,  ayant  été 
confulté  là-deffus  ,  répondit  que 
tant  qu'Éliùs  conferveroit  cetoi- 
feau  ,  fa  maifon  feront  heureufe  , 
N&  la  république  miférable  ;  mais  , 
que  n  on  le  tuoit ,  le  contraire  ne 
mahqueroit  pas  d'arriver.  Élius  , 
qui  préféroit  la  gloire  de  fon  païs 
à  la  fienne ,  le  tua  auffi-tôt  en  la 
préfence  du  Sénat.  Quelque  tems 
après,  fuivant  la  réponfe  du  de- 
il    perdit  à  la   bataille  de 


vm 


Cannes  dix-fept  jeunes  hommes 
de  fa  maifon ,  dont  le  moindre 
étoit  capable  de  la  rendre  glo- 
fieufe;  ôc  depuis  la  république 
triompha  de  (es  ennemis  ,  &  fon 
Empire  devint  fi  grand  qu'il  s'é- 
tendit par  tout  le  monde. 

Ce  font  là  des  exemples  qui 
iont  bien  dignes  d'être  imités  ,  &* 


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2jU  C  I 

que  r.onjpeut  imiter.  Sylla ,  Ma- 
rius  &  (jinna  ,  s*en  moquèrent 
autrefois ,  &i  les  ambitieux  d'au- 
jourd'hui s'en  moqueront  de 
même.  Mais  »  ce  n'efl  pas  le  vice 
qu*il  faut  confulter  pour  fçavoir 
le  prix  de  la  venu. 

^  CIRATARINIENS  ,  Cirata^ 
fini ,  {a)  peuples  de  Sicile.  Cicé- 
ron ,  qui  nous  en  a  confervé  le 
nom  y  les  range  au  nombre  de 
ceux  que  Verres  avoit  dépouillés. 
Leur  ville  n'étoit  point  confidé- 
rable. 

CIRCÉ  ,  Circe  ,  K//>xm  .  {b) 
fille  du  Soleil  &  de  la  nymphe 
Pérfa,  fille  de  l'Océan.  Homère 
ajoute  qu'elle  étoit  fœur  d'iEétès, 
roi  de  Golchos  ,  qui  vivoit  du 
tems  des  Argonautes^  Mais  »  félon 
Diodore  de  Sicile  ^  elle  étoit  non 
fœur ,  mais  fille  d'iEétès  ,  qui 
Tavôit  eue  d'Hécate. 

Quelques  Auteurs ,  qui  regar- 
dent cette  généalogie  comme  une 
fable  y  ont  dit  que  cette  Princefle 
n'a  paflé  pour  être  la  fille  du  So- 
leil ,  que  parce  qu'elle  avoit  une 
trande  connoiHance  des  plantes 
C  de  la  médecine ,  dont  Apollon, 
pu  plutôt  le  Soleil ,  étoit  le  dieu. 
D'autres  croyent  que  cette  fic- 
tion e(l  uniquement  fondée  ,  félon 
Diodore  de  Sicile ,  fur  ce  que  fon 
bifayeul  s'appelloit  ÉliuS|  ou 
Soleil. 

Circé  s'adonna  à  la  connoifTan- 
ce  des  herbes ,  oîi  elle  réuflit  fi 
bien ,  qu'elle  trouva  plufieurs 
remèdes;  mais»  comme  elle  /e 


CI 

fervît  de  fes  fecrets  pour  fe  reii« 
ger  de  fes  ennemis  par  le  poifon , 
elle  pafTa  pour  une  magicienne. 
On  dit  même  qu'ayant  époiné  lô 
roi  des  Sarmates ,  ou  des  bcy thés, 
elle  Tempoifonna  ;  ce  qui  la  ren- 
dit fi  odieufe  à  (ts  fujets  »  qu'elle 
fut  obligée  de  fortir  de  fon  royau« 
me  pour  fe  retirer  fur  les  côtes 
d'Italie ,   dans  le  lieu  qui  depuis 
porta   le  nom  de    promontoire 
Circéen ,  fur  la  mer  de  Tofcane. 
Apollonius  affure  qu'ApoUoOi 
père  de  cette  Princefle  ,  la  retira 
des  mains  de  ks  fujets  »  qoi  voa- 
loient  la  faire  périr  ,  6c  la  tranf- 
porta  fur  fon  chariot  en  Italie  ;  ce 
qui   veut   dire    qu'elle    échappa 
heureufeittent ,  &  contre   toute 
apparence ,  à  la  vengeance  des 
Scythes ,  s'étant  fauvée  fur  quel- 
que vaifTeau  à  voiles* 
Homère  donne  le  nom  d'ifle 
•  d*i£éa ,    au  lieu  oii  Circé  étoit 
allée  s'établir.  Jafon  &  Médée  , 
après   avoir    tué   &   coupé    par 
morceaux  le  jeune  Abfyrte,  abor- 
dèrent dans  cette  ifle  ,  pour  y 
être  expiés  par  Circé.  Cette  Prio- 
cefTe  y  fœur  ,  ou  félon  d'autres , 
tante  de  Médée  «  les  reçut  avec 
bonté  9  fans  les  connoître.  Us  s'a- 
vancèrent l'un  Ôc  l'autre,  les  yeux 
ba^it!ib>  &  fans  proférer  une  feule 
parole,    fslon    la  coutume    des 
fupplians,  jufqu'au  foyer,  où  Jafon 
ficha  en  terre  l'épée  dont  il  avoit 
tué  fon  beau -frère.  Leur  filence 
&.  leur  fituation  firent   aifénaent 
connoitre  à  Circé  qu'ils  étoient 


(4»)  Ciccr.  în.  Vcrr.  L.  V.  c.  8^.  (Ban.  T.  VI.  p.  414.  é"  /«v.  Mém.  <Jc 

{h)  Diod.  Sicul.  p.  I73.0?id.  Métam.  jrAcad,  des  Infcripc.  &  Bell.  Lett.Tom. 
t,  IV.  c.  I  ,  6.  ^  feq.  Homer.  Odyfl;  L.  11.  p.  ai,  45.  T.  VII.  p.  151.  T.  XU.  p, 
:Ki  V.  ijj.  ër  /ej.  Myth.  par  M.  i'^ljb.  Ix»7,  ér  fniv,  T,  XVIII.  p,  iq. 


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CI 

fugStî&  &  coupables  de  quelque 
homicide  ,  &  elle  fe  prépara  à  les 
expier.  Elle  fit  d'abord  apporter 
un  petit  cochon  de  lait  qui  te.toic 
encore ,  &  l'ayant  égorgé ,  elle 
frotta  de  Ton  lang  les  maiiis  de 
Jafon  &  de  Médée.  On  fit  en- 
fuite  quelques  libations  à  Thon- 
neur  de  Jupiter  expiateur.  Après 
quoi ,  ayant  hit  jetter  dehors  les 
refies  du  facrifice ,  elle  brûla  fur 
l'autel  des  gâteaux  paîtris  de  fa- 
rine ,  de  fel  &  d'eau  ,  &  acconj- 
pagna  ces  aâions  de  prières  pro- 
pres à  fléchir  la  colère  des  cruel- 
les Euménides.  Dès  que  la  céré- 
monie fut  achevée ,  Circé  fit  af- 
feoir  fes  hôtes  fur  des  fieges  ma- 
gnifiques ,  pour  les  traiter  fplen- 
didement.  Il  efl  inutile  de  dire  ici 
qu'ayant  reconnu  fa  nièce  ,  elle 
la  chafTa  de  fon  palais  ,  fad^  ofer 
pourtant  lui  faire  aucun  mauvais 
traitement,  parce  que  Médée 
avoit  imploré  fa  proteÛion  en  état 
de  fuppliante. 

Malgré  les  autorités  fur  lef- 
quelles  ce  récit  efl  appuyé  ^  M. 
l'abbé  Banier  croit  que  Circé  n'a 
d'autre  rapport  avec  Médée, que 
la  reffemblance  de  caraâère  ;  & 
il  fe  fonde  fur  le  témoignage  de 
Strabon  ,  qui  remarque  fort  ju- 
dicieufement  qu*Homère  ayant 
oui  parler  de  la  navigation  de  Ja- 
fon dans  la  Colchide ,  &  dans  le 
ville  d'^éa  ,  qui  en  étoit  la  ca- 
pitale ,  6c  fçachant  toutes  les  fa- 
bles qu'on  avoir  publiées  au  fujet 
de  Médée  &  de  Circé ,  de  leurs 
enchantemens  6c  de  la  conformi- 
té de  leurs  mœurs  ,  a  dit  qu'elles 
étoient  parentes  ;  &  il  a  été  fuivi 
en  cela  par  Onomacrite ,  ôc  par 


CI  ^4j 

Apollonius  de  Rhodes.  Que  fi 
le  même  Homère  a  tranfporté  le 
féjour  de  Circé  au  milieu  de  l'O- 
céan ,  c*étoit  pour  donner  plus 
de  merveilleuse  au  récit  qu'Ulyffe 
faifoit  de  fes  aventures  aux  Phéa- 
ciens  ,  qui  aimoient  les  fictions  » 
&  étoient  trop  ignorans  pour 
pouvoir  le  démentir* 

Comme  Circé  vivoit  à  peu  près 
au  tems  de  la  guerre  de  Troye  , 
on  pourroit  croire  qu'UlyfTe 
abdrda  dans  le  lieu  oh  elle  habi- 
toit ,  &  que  véritablement  il  en 
devint  amoureux.  C'efl  du  moins 
ce  qu'ont  penfé  ceux  qui  afTurent 
qu'il  en  eut  un  fils  nommé  Télé-» 
gone.  Les  charmes  de  cette  Prin- 
cefTe  lui  ayant  fait  oublier  le  foin 
de  fa  gloire ,  ainfi  qu'à  fes  com- 
pagnons ,  ils  fe  plongèrent  dans 
les  plaifirs  d'une  cour  voluptueu- 
fe  ;  ce  qui  a  fait  dire  à  Homère 
qu'elle  les  avoit  changés  en  pour- 
ceaux. Et  fi  l'on  a  ajouté  que  Mer- 
cure donna  à  te  Prince  >  une 
plante  nommée  moly  ,  avec  la- 
quelle il  avoit  évité  les  enchan- 
temens de  Circé  ,  c'efl  pour  nous 
apprendre  qu  étant  enfin  revenu 
de  fes  égaremens  ,  il  avoit  con- 
feillé  à  fes  compagnons  de  fbrtir 
d'un  féjouf  fi  dangereux.  Cette 
plante ,  fi  difficile  à  trouves,  au 
rapport  d'Homère,  efl  la  pru- 
.dencedont  UlyflTefit  ufage  pour 
retirer  fes  fbldats  du  féjour  de  U  ^ 
volupté;  &  l'on  doir croire  que 
tous  les  cbangemens  qu'Homère, 
Ovide  6c  tous  les  auires  Poètes  , 
difent  que  cette  PrincefTe  opéroit, 
étoient  plutôt  les  effets  de  fe# 
charmes  &  de  fa  beauté  ,  que  de 
fa  magie»  qaoiqu'Hom.ère  fad^^ 


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2^6  Cl 

affez  entendre  que  les  breuvages 
qu*elle  donnoitopéroient  ces  mer- 
veilles, n  Vous  fçavez  ,  dit-il ,  ce 
n  que  Ton  conte  du  chant  des 
»  Sirènes ,  &  des  breuvages  de 
91  Grcé.  Si  Ulyffe  eue  été  auffi 
r  infenfé ,  &  auffi  efclave  de  Tes 
n  paffions  que  ceux  de  fa  fuite  , 
n  &  qu'il  eût  bu  fans  précaution 
19  dans  la  coupe  de  cette  magi- 
»  cienne  ,  ou  l'eût  vu  comme  ces 
91  animaux ,  qui  n*aiment  que  la 
»  fange  &  l'ordure,  traîner  une 
V  vie  honcéufe  fous  Tempire  d'une 
9>  infâme  proftituée.  « 

Pour  foûtenir  la  qualité  de  ma- 
gicienne, qu'on  donnoit  à  Ci^cé, 
on  alla  juîqu'à  dire  qu'elle  poffé- 
doîr  l'art  de  faire  defcendre  les 
étoiles  du  ciel  >  afin  de  nous  faire 
voir  que  la  volupté  abrutit  les 
âmes  les  plus  élevées  ;  fi  toute- 
fois on  n'aime  mieux  dire  avec 
Bochart ,  [  car  les  moralités  font 
bien  arbitraires  ]  ,  que  la  fable 
des  cpchantemens  de  Circé  venoit 
du  mot  Phénicien  lat  ,  ou  latim , 
qui  veut  dire  enchantemnnt,  d'où 
cous  les  Latins  ont  été  appelles 
des  enchanteurs.  Bochart  avoit 
lu  dans  les  Anciens  ,  que  le  pais 
Latin  abondoit  en  plantes  veni- 
meufes  ,  6c  propres  à  faire  des 
forts  &.  des  enchancemens ,  ainii 
qu'on  peut  le  voir  dans  Théo- 
phra(le  ,  dans  Strabon ,  dans  le 
Scholiafte  d'Apollonius ,  &  dans 
pludeurs  autres. 

Comme  la  Pfinceffe,dont  nous 
parlons  ,  excella  dans  cet  art , 
&  furpafTa  de  beaucoup  les  autres 
habitans  de  ce  païs  ,  c'efl  fans 


Cl 

doùtç  ce  qui  a  fait  dire  qu'elle 
étoit  fille  d'Apollon ,  le  dieu  de  la 
médecine  ,  à  laquelle  appartient 
1^  connoiflance  des  plantes. 

Au  re(le,ce  qu'il  y  a  de  plus  vrai 
dans  toute  cette  Hiftoire,c'eft  que 
Circé  ,  malgré  fes  enchantemens 
&  fes  mœurs  dépravées  ,  ne 
laiila  pas  de  recevoir  les  hon- 
neurs divins;  &  du  tems  de  Cir 
céron ,  elle  étoit  encore  adorée 
par  les  habitans  de  la  côte  d'Ita- 
lie ,  oîi  elle  avoit  fixé  fon  féjour. 
Remarquoiis  d'après  un  fça« 
vant  Mythologue  ,  qu'il  y  a  eu 
deux  Circés,  qu'on  a  confondues 
dans  la  fuite.  Celle ,  que  Diodore 
de  Sicile ,  d'après  Héfiode ,  dit 
être  petite  fille  du  Soleil,  étoit 
plus  ancienne  qu'Ulyfle ,  puif- 
qu'elle  vivoit  du  tems  des  Argo- 
nautes ,  &  qu'elle  étoit  fœur 
d'i£étès.  Celle ,  chez  qui  Ulyfle 
s'arrêta ,  6c  qui  regnoit  fur  les 
côtes  d'Italie  ,  vers  le  tems  de  la 
guerre  de  Troie  ,  étoit  fille  de  la 
première  Circé  ,  arrière-petîte- 
fille  d'Élius  ,  &  fœur  d'iEétès  IL 
Comme  peu  d'Auteurs  diftin- 
guent  ces  deux  Cifcés,  &  ces 
deux  i£étès  ,  Rois  de  Colchos  , 
on  ne  dpit  pas  s'étonner  de  trou- 
ver tant  d'obfcurité  dans  cette 
hifloire.  Bocace ,  qui  eft  le  My- 
thologue dont  nous  parlons,  avoit 
pour  lui  l'autprité  de  Théodon- 
tion ,  dont  l'ouvrage  ed  perdu. 

Ovide  ajoute  «  à  tout  ce  qu^on 
vient  de  dire  ,  que  Circé  ,  étant 
devenue  atnoureufe  de  Picus ,  roi 
d  Italie  >  le  changea  en  pivert. 

CIRCÉEN  {a)  [  le  promon- 


.  C^»)  Ptoiem.  L.  III.  Cl  it 


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CI 

toîre  ]] ,  Circaum  Prontontorium  , 
XMpxaror  axpoK.  Ce  promoncoire 
étotc  fitué  en  Italie  >  auprès  de 
la  ville  de  Circées  ,  au  païs  des 
Volfques. 

CIRCÉEN  [  le  mont  ]  ,  {a) 
Mons  Circaus ,  o^pç  Jt/f)it«r '•  Cette 
montagne  d'Italie  ,  auprès  de  la- 
quelle on  voyoit  la  ville  de  Cir- 
cées ,  s'appelle  préfentement 
monte  Circello ,  dans  la  campa- 
gne de  Rome.  Elle  eft  fort  haute, 
&  paroit  une  ifle  ,  étant  envi- 
ronnée de  la  mer  de  Tofcane  vers 
le  midi ,  &  des  Palus  pontines  au 
nord. 

CIRCÉES ,  Circeii ,  (b)  ville 
dltalie ,  au  païs  des  Volfques , 
fituée  près  du  promontoire  Cir- 
céen  ,  au  pied  d'une  montagne  , 
qui  fe  nomme  aujourd'hui  monte 
Circella.  Tarquin  le  fuperbe  ,  roi 
de  Rome  ,  voulant  étendre  les 
bornes  de  Ton  Royaume  par  des 
colonies  ,  en  envoya  une  à  Cir- 
cées ,  dans  refpérance  que .  cette 
place  ,  feroit  très  utile  à  Rome  , 
tant  par  terre  qie  par  mer.  Dans 
la  fuite ,  C.  Ma r lus ,  fi  connu  fous 
le  nom  de  Coriolan,  s^étant  re- 
tiré chez  les  Volfques.,  après  avoir 
été  ^banni  de  Rome  ,  fut  mis  , 
comme  on  fçait ,  à  la  tête  des 
armées  que  ces  peuples  vouloient 
oppofer  aux  Romains.  Pour  fa 
première  expédition  ,  il  chafla  de 
I  Circées  tous  ceux  que  la  républi- 
que y  avoir  envoyés  en  colonie  » 
éi  remit  cette  ville  en  la  dépen- 
dance des  Volfques. 

Pline  dit  que  cette  ville  étoit 

(a)  Strab.  p.  13», 
\  {b)  Strab.  p.  aji  ,  13a.  Tit,  Liv,  L.  I. 

I        C.  5$.  L^  II,  c.  )9.  L.  VI.  c.  ii>  21. 


C  I  2^7 

autrefois  entourée  de  la  mer  ,  & 
entièrement  ifolée;  fur  quoi  il  cite 
l'autorité"  d'Homère.  Le  père 
Hardouin  accufe  Pline  de  n'avoir 
pas  bien  entendu  le  poète  Grec  , 
&  prête  à  ce  dernier  une  allégo- 
rie aflez  ingénieufe.  n  L'ille  de. 
»  Circé  ,  dit-il ,  c'eft  la  terre  en- 
i>  tourée  par  tout  de  l'Océan  , 
»  &  Homère  l'appelle  A/aa  , 
)i  c'ed  la  même  qu'il  nomme  ail- 
n  leurs  (pvt-il^cûoi  oSol  ,  parce 
Il  qu'elle  pioduit'tout  ce  qui  eft 
•I  néceifaire  à  la  nourriture  des 
»  hommes.  Homère  donne  à 
Il  Circé  un  frère,  nommé  iEétès, 
Il  c'eit-à-dire  ,  terreftre.  Il  feint 
Il  qu'ils  avoient  l'un  &  l'autre  le 
Il  Soleil  pour  père ,  &  pour  mère 
Il  la  nymphe  Perfa  ,  fille  .de  l'O- 
II  céan  ;  ce  ftere  de  Circé  ,  ou 
Il  de  la  Terre  ,  eft  la  vigueur  de 
»  la  terre  ,  caufée  par  le  Soleil , 
Il  &  nourrie  par  les  eaux  de  l'O- 
i>  céàn.  Cl  C'eft  ainfi  que  les  My- 
thologues s'exercent  à  trouver 
un  fens  phyfique  ou  moral  dans 
les  fixions  d'Homère  ,  quoique 
vralfemblablement  ce  poëte  n'y 
ait  ^mais  entendu  tant  de  fi- 
nèfle.  ^ 

Théophrafte  ,  qui ,  félon  le  té- 
moignage de  Pline,  eft  le  premier 
étranger  qui  ait  écrit  avec  foin 
touchant  les  Romains,  parle  de 
cette  ifle  dans  le  livre  de  l'hiûoire 
des  plantes  ,  qu'il  a  écrit  fous 
Nicodore  ,  magiftrat  des  Athé- 
niens, c'eft- à-dire  ,  l'an  de  Rome 
440  ,  &  dit  que  l'ifle  de  Circées 
avoir  quatre  vingts  ftades  ,  c'eft- 

Plin.  T.  I.  p.  114 ,  15»  ,  ijj^Ptolcm. 
L.III.c.  u 

Qiv 


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2^i        c  I 

à  dire ,  dix  mille  pas  de  grandeur.' 
Pline  conclut  de-là  que  tout  ce 
qu'il  y  a  de  terre  au  tour  de  cette 
ifle  ,  outre  les  dix  miUe  pas  de 
circuit ,  dont  on  vient  de  parler  , 
e(i  un  accroidement  qui  a  été 
ajouté  à  ritalie. 

Sur  les  ruines  de  cette  ville,  ed 
préfenrement  un  village  nommé 
Santa  Felicita.Ortélius  a  été  trom- 
pé ,  quand  il  a  cru  que  c'étoit 
préfentement  Civita  Vecchia,  qui 
^  en  eft  à  environ  foixante-dix  mil- 
ks. 

CIRCEIENS ,  Cicrceîenfes  , 
étoient  les  habitans  de  Circées. 
Voyes;^  Circées. 

CIRCÉSIE,  Circefium,  {a) 
Kipnv.mv  ,  ville  d'Afie.  Eutrope 
l'appelle  Circeffum ,  ce  qui  eft 
une  faute  des  copifies  ;  car ,  Paea- 
nius  ,  Ton  tradudeur  Grec  ,  dit 
fort  bien  K//»CHWor»  avec  un  r  de 
trop  à  la  vérité.  Jiurrope, 'parlant 
de  la  mort  de  l'empereur  Gor- 
dien ,  dit  :  n  Le  foldat  lui  érigea 
n  un  monument  à  vingt  milles 
»  de  Circeflum  ,  qui  eft  une  for- 
»  terefTe  appartenante  encore  aux 
n  Romains ,  au  pied  de  laquelle 
»  pafle  l'Euphrate»  « 

La  Notice  de  l'Empire  met 
Gircéfium  dans  le  département 
de  rOfrhoëne.  Capitolin  appelle 
cette  fortereffe  Circeium  Cai"- 
trum  ,  &  dit  qu'elle  étoit  furies 
frontières  de  Perfe.  Il  prétend  q.ue 
ç'eft  là  que  fut  élevé  le  monu- 
ment ,  dont  il  rapporte  même 
Flnfcription. 

Ammien  -  Marcellin  l'appelle 
Çercufium ,  &  dit  que  c'eft  une 


CI 

place  forte,  très-fflre  &  bîeflt 
bâtie ,  dont  TAbora  &  TEuphra- 
te  entourent  les  murs,  &  font  une 
efpèce  d'ifle.  Il  ajoute  que  l'empe- 
reur Dioctétien  la  trouvant  pe- 
tite &  trop  expofée,  l'entoura  dç 
murs  &  de  hautes  tours. 
•  Cela  eft  conforme  à  ce  que  dît 
Procope,  que  Circéfton  eft  une 
forterefle  dans  la  Méfopotamie  p 
à  l'endroit  où  le  fleuve  Morras  fe 
décharge  dans  l'Euphrate.  Ce  fort 
relevoit  des  Romains  ,  &  avoit 
été  conftruit  par  l'empereur  Dio- 
détien.  Mais  ,  Juftinien  voyant 
qu'il  avoit  été  tellement  ruiné  par 
l'injure  du  tems  ,  qu'il  étoit  aban- 
donné ,  le  rebâtit ,  6c  en  ht  une 
ville  fort  grande  &  fort  considé- 
rable. On  ne  l'avoit  pas  enclos 
tout-à- fait  des  murailles  du  tems 
de  Dioclétien,  mab  feulement  juf- 
ques  fur  les  bords  de  l'Euphrate, 
où  Ton  avoit  élevé  deux  tours  ^ux 
deux  côtés,  dans  la  penfée  que 
ce  fleuve  le  défendoit  affez  de  ce 
côté-là.  L'Euphrate  ayant  miné  , 
avec  le  tems ,  le  pied  de  la  tour , 
qui  étoic  du  cdté  du  midi ,    de 
telle  forte  qu'elle  fembloit  près  de 
tomber  ,  à  moins  qu'on  ne  la  ré- 
parât promptement  ;  Juftinien  à 
qui  Dieu  avoit  téfetvé  la  gloire 
d'être  le  reftaurateur  de  toutes  les 
parties  de  l'Empire,  foûtim   la 
tour ,  ôc  continua  la  muraille  le 
long  de  l'Euphrate.  Il  en  éleva 
une  autre  en  dehors ,   à  l'endroit 
où  les  deux  fleuves  fe  rencon* 
troient ,  &  rendit  la  place  impre* 
nable.  De  plus,  il  y  laifTa  une 
forte  garnifon   fous  un    v^ili^^l 


Ci)  Crév.  Hift,  des  En>ç.  Tom.  V.  p.  184*  T.  VI.  p.  16^ 


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Cl 

tommandanc.  Il  répara  encore  le 
bain  public  ,  qui  ne  pouvoit  plus 
fervir,  &  rembeliit  de  plufieurs 
ornemens.  Le  cours  du  fleuve 
ayant  afToibli  par  la  fuite  des  an- 
nées ,  l'édifice  qui  avoit  été  bâti 
au-defTus  des  fourneaux,  Jufti- 
nien  le  fit  réparer  de  telle  forte , 
que  l'eau  ne  le  put  plus  endom- 
mager y  6c  il  conferva  de  la  forte 
le  divertiflemenc  du  bain  à  la  gar- 
nifom 

CIRCONFLEXE  [Accent  ] , 
Accentus  Circumfltxus.  Cet  ac- 
cent indique  une  fy Uabe  longue. 
En  François  ,  l'accent  grave  fe 
marque  avec  un  petit  chapiteau 
fur  la  fyllabe,  qui  marque  fou- 
vent  le  retranchement  de  quelque 
lettre  ^  qui  faifoit  la  fyllabe  lon- 
gue &  ouverte  ,  comme p4te  pour 
pajle  ,  tête  potrr  tejle  ,  nous  fû" 
mes  pour  nous  fufmes. 

En  Grec,  autrefois  on  le  mar- 
^  quoit  de  même  que  nous  le  mar- 
quons en  François.  Mais,  depuis 
que  les  coplûés  eurent  changé  la 
forme  des  caraôères,  &  qu'ils 
eurent  mis  en  ufage  les  lettres 
courantes  ,  ils  changèrent  auffi  la 
forme  de  l'accent  circonflexe  ;  & 
au  lieu  d'en  former  l'angle  avec 
foin  ,  il  Tarrondirent ,  &  en  écri- 
vant vite  ,  ils  y  ajoutèrent  un 
trait ,  qui  enforma  un  s*  renver- 
se ,  &  couchée  horizontalement, 
ce  qui  produit  cette  figure  ~  ,  au 
Keu  de  celle-ci'^. 

CIRCONLOCUTION, 
Circumlocmio  ,  Circuitio  ,  tour 
d'expreffion,  dont  on  fe  fert,  ou 
lorfqu'on  n'a  pas  pour  ainfi  dire 
fous  la  maiq,  le  terme  propre  à 
^xpritnerdireâementSc  immédia- 


CI         ^49 

tecnent  une  chbfe ,  *oti  lorfqu'on 
s'abftient  d'employer  le  terme 
propre  par  refpeÔ  pour  ceux  à 
qui  l'on  parle ,  ou  pour  quelqu*- 
autre  raifon.  Ce  ifiot  eft  compofé 
du  hmn  Circum  loqttbr ,  je  parle 
au  tour. 

En  rhétorique ,  la  Circonlocu- 
tion ed  une  figure  qu'on  emploie 
pour  éviter  d'exprimer,  en  termes 
direâs ,  des  chofes  dures ,  ou  dé- 
sagréables ,  ou  peu  convenables , 
qu'on  fait  entendre  en  etnpruntant 
d'autres  termes  qui  rendent  la 
même  idée,  mais  d'une  manière 
adoucie  ,  &  en  la  palliant. 

Cicéron  ,  par  exemple ,  ^e 
pouvant  nier  que  Clodius  n'eût 
été  tué  par  Milon  ,  ou  du  moins 
par  fes  ordres ,  l'avoue  indire£le^ 
ment  par  cette  Circonlocution: 
Les  domefliqiïes  de  Milon^n  ayant 
pu  fecourir  leur  maître  ,  quon  di^ 
/oit  avoir  été  tué  par  Clodius ,  jî- 
rent  en  fon  abfence ,  &  fans  fa. 
participation  ou  fon  confente^ 
ment ,  ce  que  chacun  pourroit  at^ 
tendre  des  fîens  en  pareille  occa^ 
Jîon. 

CIRCONSPECTION, 
Retenue  ,   Considération  ', 

ÉGAR03    ,     MÉNAGEMENS. 

Une  attention  réfléchie  &  mefu- 
rée  fur  I^a  façon  de  parler ,  d'agir , 
&  de  fe  conduire  dans  le  com- 
merce du  monde  par  rapport  aux 
autres ,  pour  y  contribuer  à  leur 
fatisfaâion,plptôt  qu'à  la  fienne,efl 
Hdée  générale  que  ces  cinq  mots 
repréfentent  d'abord  ,  fuivant 
la  remarque  de  M.  l'abbé  Girard. 
Voici  ce  femble  les  différences 
qu'on  y  peut  mettre. 
La  circonfpeâion  eft  principa* 


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z^o  CI 

lement  dans  le  difcours;  la  rere- 
nue  e(l  dans  les  paroles  comme 
dans  les  aélions ,  èi  a  pour  défaut 
oppofé  l'impudence  ;  la  confidé- 
ration ,  les  égards  ,  &  les  mena- 
gemens  font^pour  les  perfonnes , 
avec  cette  différence ,  que  la  con- 
fidération  &  les  égards  font  plus 
pour  l'état»  la  lituation  &  la 
qualité  des  gens  que  l'on  fréquen- 
ce» &  que  les  ménagemens  regar- 
dent plus  particulièrement  leurs 
inclinations  ôc  leur  humeur. 

La  confidération  femble  encore 
indiquer  quelque  chofe  de  plus 
fort  que  les  égards  ;  elle  marque 
mieux  le  cas  qu'on  fait  des  pei> 
fonnes  que  l'on  voit  ;  Teftime 
qu'on  leur  porte  en  réalité  , 
ou  feulement  en  apparence,  ou 
un  devoir  qu'on  leur  rend.  Les 
égards  tiennent  davantage  aux 
règles  dç  la  bienféance  £  de  la 
politeffe- 

Toutes  ces  qualités  ,  circonf- 
peêiion  y  retenue  ,  confidération  , 
égards  f  ménagemens  »  font  uni- 
quement les  fruits  de  l'éducation  » 
6c  l'on  peut  les  poiïeder  éminem- 
ment fans  être  plus  vertueux. 
Mais  »  comme  on  ne  cherche 
guère  dans  la  fociété  que  l'écorce» 
on  a  mis  à  ces  qualités  ,  bonnes 
en  elles  -  mêmes  ,  un  prix  fort 
fupérieur  à  leur  valeur.  Les  gens 
du  monde ,  n'ont  par^deflus  les 
autres  hommes  qu'ils  méprifeot  f 
qu'un  peu  de  vernis  qui  les  cou- 
vre ,  &  qui  cache  à  la  vue  ,  leur 
médiocrité  >  leurs  défauts,  6c  leurs 
vices. 


CI 

CIRCUMPADANI CAMPI, 

(a)  nom  que.  Tite-Live  donne 
aux  plaines  qui  s'étendoient  de- 
puis les  bords  du  Pô  jufqu'au  pied 
des  Alpes. 

CIRIADE  t'Ciriada  ,  lieu  mu- 
nicipal f  ou  bourg  de  TAttique 
dans  la  tribu  Hippothoontide , 
félon  Etienne  de  Byzance  &  Hè* 
fychius. 

CIRIBE  ,  CirihttJ  ,   K//>iCiç» 

(b)  certain  perfonnage ,  qui  ga- 
gnoit  fa  yie  à  faire  du  pain  ,  &  en 

.taifoit  vivre  toute  fa  famille. 

CIRNUS  ,  Cirnus,  (c)  roi  de 
rifle  de  Théramène ,  fut ,  feloii 
Juftin ,  père  d'Ariftée ,  furnommé 
Battus  ou  le  Bègue.  Ce  Prince  » 
chagrin  6c  même  honteux  que  fou 
fils  ,  devenu  grand ,  ne  fçût  pas 
encore  parler,  alla  à  Delphes ,  6c 
fit  des  prières  à  Apollon  fur  le 
fujet  qui  l'amenoit.  Il  lui  fut  ré- 
pondu que  Battus  paOTât  en  Afri- 
que y  qu'il  fondât  une  ville  ,  & 
que  ce  feroit-là  qu'il  recouvreroit  * 
l'ufage  de  la  parole.  Comme  cette 
réponfe  paroiffoit  une  efpèce  de 
moquerie  [  car  qu'elle  apparence 
qu'on  pût  trouver  affez  de  monde 
dans  une  ifle  auffi  déferte  que 
Théramène,  pour  aller  fonder  une 
ville  dans  un  p^ïs  auffi  étendu  que 
l'Afrique  ,  ainfi  que  l'oracle  l'or-* 
donnoit  ]  Ctrnus  en  négligea  les 
avis.  Le  dieu  ,  traitant  ce  Roi  6c 
fes  fujets  comme  des  rebelles  ,  les 
affligea  quelque  tems  après  d'une 
pefle  fi  violente  ,  qu'ils  furent 
contraints  de  lui  obéir  ,  quoiqu'il» 
fafTenc  en  fi  petit  nombre ,  qu'un 


(*)  Th.  Li?.  t.  XXI.  c.  JJ. 

ih)  Xenoph.  p.  756. 


1 


(0  juft.  L.  xni.  c.  7. 


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C  I 

feul  vaîffeau  éioit  plus  c^ue  fufE- 
fant  pour  les  porter  tous.  Quand 
ils  eurent  abordé  en  Afrique  >  ils 
donnèrent  la  chaiïe  aux  habitans 
du  mont  Cyra  dont  ils  s'emparè- 
rent ,  tant  à  caufe  de  l'agrément 
du  lieu  j  que  pour  la  commodité 
de  l'eau  ,  qu'une  fontaine  leur 
fournifToit  en  abondance.  Ce  fut- 
là  que  la  langue  de  Battus ,  leur 
cher,  commmença  à  Te  dénouer , 
&  que  ce  Prince  fe  mit  à  parler 
pour  la  première  fois. 

Ce  récit  eft  tiré  de  Juftin ,  mot 
pour  mot.  D'autres  anciens  Au- 
teurs racontent  la  chofe  différem- 
ment ,  furquoi  on  peut  confulter 
Farticle  de  Battus. 

CIRQUE,  Circxw,  (tf)  grand 
bâtiment ,  toujours  plus  lotig  que 
large  ,  oîi  i*on  donooit  difterens 
fpedacles. 

Un  des  bouts  »  le  plus  étroit , 
étoit  terminé  en  ligfie  droite  ;  lau- 
tre  étoit  arrondi  en  demi- cercle. 
Les  deux  côtés  »  qui  partoient  des 
extrémités  de  la  face  droite ,  & 
qui  alloient  rencontrer  les  deux 
extrémités  de  la  face  circulaire  , 
étoient  les  plus  longs  ;  ils  fervoient 
de  baf^  à  des  lièges  ou  gradins 
placés  en  amphithéâtre  pour  les 
fpeâateurs.  La  face  droite  &  la 
plus  étroite  étoit  compofée  de 
douze  portiques  pour  les  chevaux 
&  pour  les  chars;  on  les  appelloit 
carceres  ;  là  il  y  avoit  une  ligne 
blanche  »  d*ou  les  chevaux  çom- 
mençoient  leurs  courfes.  Aux  qua- 

(4)  Roll.  Hilt.  Rom.  Tom.  I.  p.  116. 
Tom.  II.  Préf.  p.  19.  &  fuiv.T.  VIII. 
p.  4x8.  Antiq.  explfq.  par  D.  Bern.  de 
Montf.  T.  m.  p.  a75.  éy  fiUv,  Myth. 
B^  M.  TAbb.  Bàa.  Tom,  VIII,  p.  167. 


CI  251 

tre  angles  du  Cirque ,  fur  le  pour-» 
tour  des  faces ,  il  y  avoit  ordinai- 
rement quatre  corps  de  bâtimens 
quarrés  ^  dont  le  haut  étoit  chargé 
de  trophées  ;  quelquefois  il  y  en 
avoit  trois  autres  cfôns  le  milieu 
de  ce  pourtour ,  qu'on  appelloit 
meniana. 

Le  milieu  de  Tefpace  ,  renfer- 
mé entre  les  quatre  façades  dont 
nous  venons  de  parler ,  étoit  oc- 
cupé par  un  maf£f  d'une  maçon* 
nerie  très- forte  ,  de  douze  pieds 
d'épaiffeur  ,  fur  fix  de  haut  ;  on 
l'appelloit  Spina  circL  II  y  avoit 
fur  la  Spina  des  autels  ,  des  obè- 
lifques,  des  pyramides»  des  (latues, 
&  des  tours  coniques.  Quelque-* 
fois  les  tours  coniques  étojent  éle-^ 
vées  aux  deux  extrémités  fur  des 
maflifs  de  pierres  quarrées  ,  &  ré- 
parées par  un  petit  intervalle  de 
la  Spina  ;  enforte  qu'elles  pana- 
geoient  chacun  des  efpaces  àos 
extrémités  de  la  Spina  aux  façades 
intérieures  du  Cirque  en  deux 
parties  9  dont  la  plus  grande  de 
beaucoup  »  é;oit  entre  la  façade  6c 
les  tours.  Au-deiïous  des  gradins 
en  amphithéâtre  >  placés  fur  les 
façadçs  duCirque  >  on  avou  creu- 
fé  un  large  foilé  rempli  d  eau  ,  & 
deftiné  à  empêcher  les  bêres  de 
s'élancer  fur  les  fpeâateurs  ;  ce 
fofTé  s'appelloit  Euripe. 

Les  jeux  ,  les  combats  ,  les 
courfes  ,  5cc.  fe  faifoient  dans 
Tefpace  compris  de  tous  côtés , 
entre  l'Eu  ripe  Ôc  la  Spina  ;  cet 

ér  fttiv*  Mém.  de  IMcad.  des  Infcript. 
&  Bell.  Lcit.  Tom.  III.  p.  aSo,  ^14, 
J15.  Tom.  IX.  p.  %%,  ér  fmv.  T.  XIII. 
p.  480.  T.  XVII.  p.  209  ^  219  '  220*  ^* 
XXI.P.J44. 


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±^1  CI 

efpace  s'appdloit   Aréa: 

A  l'extérieur ,  le  Cirque  étoît 
environné  de  colonnades ,  de  ga- 
teies ,  d'édifices ,  de  boutiques  de 
towes  fortes  de  marchands,  & 
ée  tietix  pubFics. 

Les  bâtimens  qu'on  appelloît 
Cirques  à  Rome ,  s'appelloient  en 
Grec  Hippodromes.  On  en  attri- 
bue rinftitation  à  Romulus ,  qui 
Je»  appella  Confualia ,  nom  pris 
de  Confus  ,  dieu  des  confeils , 
que  quelques-uns  confondent  avec 
Keptane  équeftre.  Les  jeux,  qui 
lé  cétébroient  dans  les  Cirques  , 
fe  faifoient  auparavant  en  pleine  . 
campagne,  enfuite  dans  de  grands 
endos  de  bois ,  puis  dans  ces  fu- 
perbes  bâtimens  dont  nous  allons 
parler. 

On  célébroît  dans  les  Cirques  , 
des  conrfes  de  chars  ,  des  com- 
bats de  gladiateurs  à  pied ,  des 
combats  de  gladiateurs  à  cheval , 
la  futte  9  les  combats  contre  les 
bétes  ,  les  exercices  du  manège 
par  les  jeunes  gens  ,  les  combats 
sacraux. 

On  comptoit  à  Rome  jufqu'à 
quinze  Cirques  ;  mais  ,  ils  n'é- 
tment  pas  tous  ,  ni  de  la  même 
grandeur  ,  ni  de  la  même  magni- 
ficence. 

Nous  allons  en  rendre  compte  en 
commençant  par  te  grand  Cirque. 

I.  , 

Grand  Cirque. 

Le  grand  Cirque  étoît  dans 
Tonzième  région.  On  Tappelloit 
le  grand  ,  parce  qu  on  y  célébroif 
les  grands  jeux  ,  ou  les  jeux  con- 
lacrés  aux  grands  Dieux,  ou  parce 
qu'il  étoit  le  plus  grand  des  Cir- 


CI    , 

ques.  Il  étoit  dans  la  vallée  Mur^ 
cia  ,  entre  les  monts  Palatin  6c 
Ave'ntin.  Il  fut  commencé  fous 
Tarquin  l'ancien.  Les  Sénateurs 
&  les  Chevaliers  Romains  s'y 
faifoient  porter  des  banquettes  de 
bois ,  appellées  fori  ,  qu'on  rera- 
portoit  à  la  fin  des  jeux.  lUfuc 
dans  la  fuite  orné  ,  embelli  »  & 
renouvelle  fous  plufieurs  Empe- 
reurs ,  mais  fur  tout  fous  Jules 
Céfar.  Sa  longueur  étoit  de  trois 
ûades  &  demi ,  &  fa  largeur  de 
quatre  arpens.  Il  pouvoit  con- 
tenir 150000  ,  félon  quelques- 
uns  ,  260000 ,  ou  même  380000 
félon  d'autres.  Sa  façade  de 
dehors  avoir  deux  rangs  d'ar-- 
chitefture  à  colonnes,  au-deflus 
defquels  il  y  avoir  un  plus  petit 
ordre.  A  fon  extrémité  circulaire, 
il  y  avoit  trois  tours  quarrées ,  & 
deux  à  Tautre  extrémité.  Dans  let 
derniers  tems ,  ces  tours  apparte- 
noient  à  des  Sénateurs ,  &  paf- 
foient  à  leurs  enfans.  Le  bas  de 
ce  Cirque  en  dehors  étoit  un  ranç 
de  boutiques  ménagées  dans  les 
arcades  lei  plus  baffes.  Son  Eu- 
ripe  avoit  dix  pieds  dô  largeur , 
fur  autant  de  profondeur.  La  pre- 
mière rangée  des  fieges  étoit  de 
pierre ,  les  autres  de  bois. 

L'Empereur  Claude  fit  mettre 
en  marbre  les  carceres  ,  ou  en- 
droits ,  d'ob  partoient  les  chevauxj 
&  les  chars^  &  dorer  les  bornes , 
&  défigna  une  place  fur  la  Spina 
pour  les  Sénateurs.  Les  carceres 
étoient  à  la  petite  façade  du  côté  . 
du  Tib|e  ,  au  nombre  de  douze. 
La  première  chofe  ,  que  Toa 
trouvoit  en  s'approchant  de  la 
Spina ,  par  ce  côté,  étoit  le  petit 


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Cl 

temple  appelle  Mdes  Murcla ,  on 
autel  dédié  à  Vénus.  Vers  ce  tem- 
ple étoit  celui  du  dieu  Confus  ;  il 
tôuchoit  prefque  les  trois  pyrami- 
des rangées  en  ligne  droite  qu'on 
appelloic  meta  ,  les  bornes.  Il  y 
eo  avoit  trois  autres  à  l'«iutre  bout» 
ce  qui  ne  faifoit  que  Cix  ,  quoique 
Théodoric  en  ait  compté  fept. 

La  Spina  étoit  contenue  entre 
ces  trois  bornes  d'un  côté ,  &i  les 
trois  autres  bornes  de  Tautre.  Il  y 
avoit  d'abord  fur  la  Spina ,  Tautel 
des  lares ,  puis  Yara  potentium  , 
l'autel  des  Dieux  puiiTans  ;  deux 
colonnes  avec  un  fronton  formant 
comme  l'entrée  d'un  temple  ;  un 
autre  morceau  femblable ,  dédié  à 
Tutéline  avec  un  autel  ;  une  co- 
lonne porum  la  ftatue  de  la  Vic- 
toire y  quatre  colonnes  dont  l'ar- 
chitrave ,  la  frife ,  la  corniche , 
étoienti  ornées  &  furmontées  de 
dauphins.    £lles    formoient    une 
efpèce  de  temple  à  Neptune  ;  la 
ilatue  de  Cybèle  afTife  fur  un 
lion  I  au  pied  du  grand  obélifque , 
vers  le  centra  du  Cirque ,  un  tem- 
pie  du  Soleil  ;  un  trépied  à  la  porte 
de  ce  temple  ;  une  ilatue  de  la 
Fortune  fur  une  colonne;  un  bâ- 
timent à  colonnes ,  couronné  de 
pierres  rondes ,  oblongues  &  do- 
rées ,  qu'on  appelloit  les  œu£s  des 
courfes ,  ova    currkulorum  ,  & 
qu'on  ôtoit  pour  compter  le  nom- 
bre des  courfes  ;  des  temples  ^  des 
colonnes  p  des  flatues ,  &c.  ;  une 
flatue  de  la  Viâoire  fur  une  co- 
lonne ;  l'autel  des  grands  Dieux  ; 
un  obélifque  plus  petit  que  le  pré- 
cédent ,  confacré  à  la  Lune  ;  enfi^ 
les  trois  autres  bornes ,  meta. 
Augufle  fit  fubftituer  un  obé- 


CI  251 

Ufque  à  un  grand  mât ,  qui  étoic 
dreflé  au  milieu  du  Cirque  ,  Ik 
qui  lui  donnoit  l'air  d'un  vaideau^ 
L'empereur  Confiance  y  en  éle- 
va un  fécond  plus  haut  que  le 
premier.,  Celui-ci  eft  maiticenaDt 
à  la  porta  del  Popolo  ;  Tauire  eft 
devant  l'églife  Latéranne.  Aux 
façades  du  Cirque  en-dedans,  il 
y  avoit  comme  aux  amphitfoéa-* 
très  le  podium  ou  place  des  Séna- 
teurs 9  aU'defTus  les  fieges  des 
Chevaliers  Romains  ;  plus  haiit 
une  grande  galerie  régnant  tonc 
au  tour  du  Grque  ;  au-deHus  de 
-  cette  galerie  de  nouveaux  gradins 
continués  par  ordre  au-dèifus  dai 
autres  jufqu'au  haut  ai  la  façade  ^ 
oîi  les  derniers  gradins  étoieoc 
adofTés  contre  l'extrémité  du  pedc 
ordre  d'architeâure  dont  nous 
avons  parlé. 

Dans  les  jours  de  jeux  ,  oë 
jonchoit  l'arène  de  fable  blanc 
Caligula  6c  d'autres  Empereurs  j 
firent  répandre  pour  plus  de  ma- 
gnificence i  du  j^  nabre ,  du  fiic- 
cin  &  du  bleu.  On  y  avoic  pratà-** 
que  un  grand  nombre  de  portes. 
Il  fut  brûlé  fous  Néron  ,  &  il 
s'écroula  fous  Antonin  le  pieux; 
mais  9  on  le  releva  toujotu-s ,  yaU 
qu'à  ce  qu'il  fut  rafé  entièrement  « 
fans  qu'on  f^çache  à  quelle  occa- 
fion.  Il  n'en  ref^e  plus  que  des 
veftiges ,  à  l'endroic  appelle  VaiSe 
di  cerchl 

Cirque  d'Adrien. 

Le  Cirque  d'Adrien  étoit  dans 
la  quatorzième  région  ,  près  de 
l'endroit  où  eft  aujourd'hui  le  châ- 
teau  Saint- Ange.  Il  fut  ainiLap- 


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^54  CI 

pelle  de  l'empereur  Adrien  qm  le 
fit  conftruire.  Il  n'étoit  pas  ma- 
gnifique. Les  uns  prétendent  qn2 
ce  ne  fut  qu'un  enclos  de  bois  ; 
d'autres  ,  qu'il  étoit  de  pierre 
noire.  On  croit  encore  en  remar- 
quer des  vefiiges 

Cirque  d" Alexandre  Sévère. 

Ce  Cirque  étoit  dans  la  neu- 
vième région ,  où  eft  à  préfent  la 
place  Navonne.  On  en  voie  la 
figure  fur  quelques  monnoies  d'A- 
lexandre oévère.  On  l'appelloit 
auffi  le  Cirque  agonal  ,    parce 

Îu'on  y  avoit  célébré  les  jeux  de 
anus  Agonius.  On  prétend  que 
c'eft    pat   corruption    d'Agonius 

Îu*on  a  fait  le  nom  de  Navonne. 
)n  dit  qu'on  découvrit  des  reftes 
de  ce  Cirque,  en  creufant  les  fon- 
demens  de  l'églife  de  fainte  Agnès. 

Cirque  d*Antonîn  Caracalla, 
Le  Cirque  d'Antonin  Caracal- 
la ,  ou  peut-être  de  Gallien  ,  étoit 
dans  la  première  région,  à  l'en- 
droit où  efl  aujourd'hui  la  porte 
faint  Sébaftien  ,  anciennement 
appellée  la  porte  Capène.  On 
croit  en  voir  des  reftes  entre 
réglife  faint  Sébaftien  &  le  Capo 
di  Bove.  Le  pape  Intiocent  X  Hï 
ériger  fon  obélifque  fur  la  magni- 
fique fontaine  de  la  place  Navon- 
ne. L'aire  de  ce  Cirque  efl  aâuel- 
lement  une  prairie  de  223  cannes 
de  long}  fur  331  de  large. 

Cirque  d'Aurélien. 
Le    Cirque    d'Aurélicn   étoit 


CI 

dans  la  cinquième  région  ;  mais  » 
il  faudroit  plutôt  l'appeller  le 
Cirque  d'Éliogabale ,  parce  qu'Au- 
rélien  ne  fit  que  le  réparer. 

Ciiqtie  Caftrenfis. 

Le  Cirque  Caftrenfis  étoit  de- 
vant la  porte  Lubicana  ou  de 
Prénefte  ,  aujourd'hui  la  porte 
Maggiore  ,  non  loin  de  l'amphi- 
théâtre Caftrenfis,  derrière  Saime- 
Croix  en  Jérufalem.  On  prétend 
qu'il  n'étoit  qu'à  Tufage  des  fol- 
dats  9  &  que  c'eft  auffi  le  même 
que  celui  d'Éliogabale. 

Cirque  de  Domitia* 

Ce  Cirque  étoit  dans  la  qua-' 
torzième  région.  Il  y  a  lieu  de 
conjedurer  que  c'étoit  le  même 
que  celui  d'Adrien. 

Cirque  d'Éliogahale, 

Le  Cirque  d'Éliogabale  étoit 
dans  la  quinzième  région.  Son 
obélifque  eft  regretté  des  Sçavans  ; 
il  étoit  chargé  d'hiéroglyphes.  H 
reftoit  encore ,  il  n'y  a  pas  long- 
tems  9  des  veftiges  de  ce  Cirque. 

Cirque  de  Flaminius» 

Le  Cirque  de  Flaminlus  étoit 
dans  la  neuvième  région  ,  dans 
des  prés  appelles  alors  prata  Fia' 
minia»  Il  fut  bâti  l'an  <  30  par 
Cneius  Flaminius ,  Cenleur  ,  le 
même  qui  fut  défait  par  Annibal 
près  du  lac  Trafimène.  Il  avoic 
une  double  galerie  de  colonnes 
cotinthiennes.  Il  étoit  hors  de  la 


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Cl 

Ville.  Cétoît-là  que  commençoît 
la  marche  des  triomphes.  On  y 
donnoit  la  paie  aux  foldats.  On  y 
célébroit  les  jeux  Appollinaires 
&  les  Nundines.  Quand  il  étoit 
inondé  du  Tibre  ,  la  célébration 
des  jeux  fe  transféroit  au  mont 
QuirinaL  On  croit  qu'il  fut  ruiné 
dans  la  guerre  des  Goths  &  de 
lempereur  Juflinien  ;  &  l'on  prér 
tend  qu'en  1 50o,on  en  voyoit  en- 
core des  vertiges,  à  l'endroit  oU 
e(l  aujourd'hui  l'églife  de  faint 
Nicole  aile  Calcare. 

lO.? 

Cirque  de  Flore. 

Le  Cirque  de  Flore  étoît  dans 
la  fiiième  région ,  dans  un  en- 
foncement, entre  le  Quirinal  &  le 
Piotius.  C*étoit-là  qu  on  célébroit 
les  jeux  Floraux.  On  prétend  que 
ce  fut  un  théâtre.  Il  j'appelle  au- 
jourd'hui la  Piazza  Grimana. 

Circus  Intîmus. 

Ce  Cirque  étoit  dans  la  vallée 
Murcia  ;  mais ,  comme  le  grand 
Cirque  s'y  trouvoit  aufli ,  on  les 
confond. 

12.^ 

Cirque  de  Jules  Céfar. 

On  prétend  que  ce  Cirque  s'é- 
tendoit  depuis  le  maufolée  d'Au- 
gufle  jufqu'à  la  montagne  voifme  ; 
mais ,  il  y  a  du  doute,  même  fur 
fon  exidence. 


Cl 


ajî 


Cirque  de  Néron. 
Le  Cirque  de  Néron  étoît  dans 
la  quatorzième  région ,  entre  le 
Janicule  &  le  Vatican  ,  où  efl  an* 
jourd'hui  l'églife  de  faint  Pierre  de 
Rome  ,  devant  laquelle  Sixte- 
Quint  fit  placer  fon  obélifque. 

Cirque  de  Sallufte. 

Le  Cirque  de  Sallufte  étoît 
dacs  la  fixième  région ,  près  de  la 
porte  Colline  ,  vers  le  Quirinal 
&  le  Pintias.  Il  en  refte  des  veftU 
ges ,  quoique  la  plus  grande  partie 
en  foit  copprife  dans  les  jardins 
Ludovifiens ,  où  Ton  en  voit  To- 
bélifque. 

Cirque  Vatican» 

Ce  Cirque  eft  le  même  que 
éelui  de  Néron. 

C\S,  Cis.Kk  (tf)filsde  Jé- 
hiel,  appelle  auffi  Abigabaon,  6c 
de  Maâcha.  L'Écriture  lui  donne 
pluiieurs  frères. 

CIS ,  Cis ,  Kk%  {h)  de  la  triba 
de  Benjamin,  étoit  un  homme 
pûiffanc  &  fort.  Le  premier  livre 
des  Rois  dit 'que  Cis  étoit  filsd'A- 
biel  ;  &  le  premier  livre  des  Pa-^ 
ralipomènes ,  qu'il  Tétoit  de  Ner. 
Tout  le  monde  fçait  que  Cis  fut 
père  de  Saiil ,  premier  roi  des  en- 
fans  de  Juda. 

CIS,C«,fÇ|ç,  (c)  lévite  de  la 
famille  de  Mérari.  Il  étoit  fils 
d'Abdi. 


[m)  Parai.  L.  I.  c.  8.  v.  jo. 

\h)  Reg.  L.  I.  c.  9.  V.  1 , 1.  Parai.  L. 


iT.  c.  8.  V.  îî-  c.  ç.v.  39. 

I      (C)  Parai.  L.  U.  €..29.  v.  it* 


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M^è  C  I 

CISALPIN  ,  Cifalpînus  ,  nom 
dont  les  Romains  (e  fervoient 
pour  marquer  qu'un  peuple  ,  un 
païs  étoient  en  de^çà  des  Alpes  à 
leur  égard  ;  aind  ,  Hs  difoient  la 
Gaule  Cifalpine  pour  diftinguer 
ce  que  les  Gaulois  pofTédoient  en 
Italie  >  d'avec  la  Gaule  propre- 
ment dite  y  qui  étoit  au  de-là  des 
Alpes  par  rapport  à  eux. 

CISALPINE  C  la  Gaule  ] , 
Gallia  Cifalpina.  Foye^  Gaule 
Cifalpine. 

CISIA,  Cijia,  (a)  forte  dô 
voiture  des  Anciens*  Cicéron  en 
fait  mention  dans  fon  oraifon  pour 
Sext.  Rofcius  Amérinus.  Ceft  la 
jnême  qui  fuit* 

CISIUM,  Cifium,  {b)  étoit  une 
efpèce  de  char  fort  léger  ,  à  dçux 
roues  ,  dans  lequel  on  mettoit  une 
caiffe  de  bois  ou  d  oliers  ,  où  s'af- 
feioit  l'homme  qui  alloit  fur  cette 
voiture.  11  étoit  tiré  à  trois  mules. 
On  s'en  fervoit  quand  on  vouloit 
faire  diligence.  Dans  les  paiTages 
des  Auteurs  qui  parlent  du  Ci^ 
fium  ,  ce  font  toujours  des  hom- 
mes qui  vont  dans  cette  voiture , 
&  jamais  des  femmes. 

CISON  y  Cifon  ,  KitrZft  ou 
CissoN  ,  ou  KissoN  >  (c)  tor- 
rent de  Paleftine ,  qui  avoit  fa 
fource  dans  la  vallée  de  Jezraël  ^ 
couloit  le  long  de  cette  vallée , 
au  midi  du  mont  Thabor,  &  alloit 
fe  dégorger  au  port  de  Ptolémaï- 
de  dans  la  Méditerranée.  Le  père 
Nau  dit^en  parlant  dés  montagnes 
à  une  lieue  defquelles  pafTe  ce  tor- 


Cl 

rent ,  autant  qu'il  put  juger  à  là 
vue  I  qu'il  eft  là  fec  la  plus  grande 
partie  de  l'année  »  &  qu'il  n'a  de  ' 
l'eau  en  tout  tems ,  que  depub 
Eudor ,  doQt  il  eft  proche  jufqu'à 
la  mer  de  Galilée  «  où  il  fe  dé* 
charge  du  côté  d'Orient.  Il  ajou- 
te :  il  en  a  auili  toujours ,  à  ce 
qu'on  m'a  dit ,  vers  le  mont  Car- 
mel ,  le  long  duquel  il  coule  ,  ÔC 
va  s'emboucher  dans  la  mer  Mé- 
diterranée à  l'Occident. 

Le  torrent  de  Cifon  eft  célèbre 
clans  l'Écriture.  Dans  le  livre  des 
Juges ,  le  Seigneur  dit  à  Barac  » 
parla  bouche  de  Débora:»  Quand 
Il  vous  ferez  au  torrent  de  Cifon  ^ 
Il  je  vous  amènerai  Sifara ,  géné- 
II  rai  de  larmée  de  Jabin , avec 
n  tous  fes  chariots  &  coûtes  fes 
n  troupes  y  &  je  vous  le  livrerai 
n  entre  les  mains,  u  On  fçait  que 
la  chofe  fut  exécutée  à  la  lettre* 
Ce  fut  auprès  du  torrent  de  Ci- 
fon ,  qu'Élie  fit  mourir  les  pro^ 
phetes  de  Baal. 

CISPIUS  [  le  Mont  ]  ,  Cifpîus 
Mons,  C'étoit  une  montagne  de 
la  ville  de  Rome ,  félon  Feftus  » 
qui  en  fait  une  des  Çit  collines  qui 
formoient  le  mont  Efquilin.Varron 
femble  diftinguer  le  mont  Cifpius 
du  mont  Efquilin*  Le  mont  Cif- 
pius ,  dit- il  9  a  fept  fommets  au** 
près  du  temple  de  Junon  Lucine; 
c'eft  où  demeure  l'ofHcier,  à  la 
garde  duquel  ce  temple  eft  con- 
fié.    . 

CISPIUS  [L.],  L.  Cifpius  i 
Çd)  lieutenant  de  Céfar  ,   qui  le 


(a)  Cicer.  Oratpro  Sext.  Rofc.  Ameni     (r)  Judic.  c.  4.  v.  7.  «^  /f^.  c.  %,  v. 
c.  II.  |ii-  Reg.  L.  m.  c.  iB.  V.  40.  Pfalm.  8ft. 

(h)  Antiq.   expl.    par   D*   Bem.  delv.  10. 
MoDdf.  Xom.  IV.  pag.  xya.  *     {d)  Hirt,  Panf.  de  Bell.  Afrk.  p.  798. 

fit 


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Cl 

ût  partir  un  jour  à  la  tête  de 
vingt- fept  galères ,  avec  ordre  de 
fe  tenir  à  Tancre  à  Thapfe  pour 
fervir  d'efcorte  à  fes  convois. 

CISPIUS  [  M.  ]  ,  M.  Cifpîus , 
{à)  tribun  du  peuple  ,  qui  fut 
chafTé  de  la  place  publique  par 
les  partifans  de  Clodius.  Cicéron , 
qui  le  nomme  dans  fon  oraifon 
pour  P.  Seflius  ,  en  fait  un  grand 
éloge. 

CISSÉE ,  Cifeus ,  (h)  roi  de 
Thrace ,  fut  père  d'Hécube  ,  qui 
époufa  Priam. 

CISSÉE  ,  Ciffeus  ,  (c)  fils  de 
Mélampe ,  compagnon  des  pé- 
rilleux travaux  d'Hercule.  Le 
grand  Gyas  étoit  frère  de  Ciffée; 
ils  étoient  armés  ,  Tun  &  Fautre  , 
d*énof  mes  maflues,  qui  abattoient 
ies  rangs  entiers  de  foldats.  Mais, 
ni  leurs  forces  ,  ni  les  leçons  de 
Mélampe  leur  père  ,  ni  les  armes 
même  d'Hercule,  ne  purent  lès 
garantir  du  coup  que  leur  porta 
Énéç  ,  6c  dont  ils  furent  renver- 
fés. 

CISSÉUS  ,  ajfeus  ,  rivière 
dont  parle  Apollodore. 

CISSÉUS,  Ciffeus ,  Kta-irfvç, 
{d)  petit  Prince,  dont  TÉtat  étoit 
voifm  de  la  Macédoine.  Il  fut  dé- 
fait par  Caranus  ^  roi  dès  Macé- 
doniens. 

CISSIE  ,  Cifia,  Ktirr'^y  (e) 
contrée  d*Afie.  Hérodote ,  parlant 
des  Matienes,  dit:  »  Ils  font  voi- 
«  fins  de  la  Ciilie ,  où  efl  fituée 
»  la  ville  de  Suie ,  près  du  fleuve 
n  Choafpe.  «  Dans  un  autre  en- 

.  (*)  Cicer.  Orat.  pro  Seft.'c.  64, 
(h)  Virg.  i£ncid.  L.  XI.  v.  67^. 
(O  Virg.  i£neid.  L»  X.  v.  317.  &  fiq- 

"•  {d)  Pauf.  p.  606. 

Tom,  XL 


CI  a57 

droit ,  U  s'exprime  ainfî  :  ce  II  y  a 
n  de  rArméJaie  jufqu'à  Matiene» 
n  quatre  gites  ;  &  de  Matiene 
i>  )ufqu*à  la  Ciffie,  &  jufqu'au 
n  fleuve  Choafpe ,  qu^loupaiTe 
n  auili  dans  des  bateaux  ,  &  fur 
i>  lequel  eft  bâtie  la  ville  de  Sufe, 
19  il  y  en  a  treize,en  quarante  deux 
»  parafanges  &  demi,  n  Fbye^ 
Ciffiens.  ^ 

CISSIENNES  [les  Portes]; 
Ciffia  Porta,  (/)  Hérodote  parle 
de  cesf  portes  ^  &  il  nous  apprend 
que  c'étoît  des  portes  de  Babylo- 
ne,  qu'on  appelloit  ainfi.  C'étoienc 
peut-être  celles  où  aboutiflbit  la 
route  du  païs  des  CifCens* 

CISSIENS  ,  Cifii,  XiWc/ ,  (g) 
peuples  d'Afie ,  dont  il  efi  parle 
dans  Diodore  de  Sicile.  Us  habl- 
toient  un  canton  de  la  Médie ,  à 
une  journée  de  Babylone  ,  félon 
Philoftrate.  Ce  canton  eft  con- 
nu fous  le  nom  de  Ciflia.  Dio- 
dore de  Sicile  nous  donne  les  Cif- 
fiens pour  une  nation  très-belli- 
queufe. 

Hérodote  parle  aufli  des  Cif- 
fiens. Selon  lui  ,  ils  formoient 
avec  les  Sufîens  ,  la  huitième  fa- 
trapie ,  qui  payoit  au  roi  des  Per- 
fes ,  trois  cens  talens  tous  les  ans.' 
Les  Ciffiens  fe  trouvèrent  à  l'ex- 
pédition de  Xerxès  contre  la  Grè- 
ce ;  &  ils  marchoient  fous  la  con- 
duite d*Anaphes  ou  d*Anaphanes, 
fils  d'Ocanes  ;  ils  portoient  les 
mêmes  armes  que  les  Perfes ,  & 
étoient  vêtus  de  la  même  forte , 

CO  rtcrod.  t.  V.  c.  49 ,  5t, 
(/)  Herod.  L.  III.  c,  15^  ,  1^8. 
f^)  LMod.  Sicul.  p.  146.  Herod.  L,  III, 
c.  91*  L,  VII,  c.  6»,  86. 

R 


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As8  CI 

finon  qu'ils  ponoient  des  txiltres 
au  lieu  de  tiares. 
CISSIENS,  Cijfii,  ou  Cijp, 

Eîuples  du  Pont  Cappadocien. 
es  Ciffien»  habitoîent  aux  envi- 
rons du  fleuve  de  Cifla ,  dont  ils 
prenoîent  le  nom. 

CISSIENS  ,  Cijfù ,  {a)  mon- 
tagnes de  la  Sarmacie  en  Afie, 
félon  Pline  ,  qui  y  mec  la  fource 
du  fleuve  Imitye. 

CISSONIUS  ,  Cipnîus  ,  {h) 
turnom  de  Mercure*  Dnbitatia 
Caflula ,  Syrienne  de  nation  , 
avoit  bâti  à  Befançon ,  à  fes  pro- 
pres frais,  un  temple  avec  un 
portique  en  Thofineur  de  Mercure 
Ciflbnius.  Cétoit  apparemment 
un  furnom  local  de  ce  Dieu  ;  car, 
f  ien  n*étoit  plus  commun  que  ces 
fortes  de  furnoms. 

CISSOTOMIES ,  Cijotomîa, 
(c)  fêtes  inflituées  en  l'honneur 
d'Hébé ,  déefle  de  la  jeuneflie.  Ce 
nom  fe  prenoit  apparemment  de 
ce  qu'on  y  coupoit  des  JFeuilles  de 
lierre. 

CISSUS,Ci/tf^,  Kkfroç.{d) 
montagne  de  Macédoine  ,  félon 
Lycophron.  Ifaac  Tzetzès  dit 
qu'elle  fut  enfuite  furnommée 
JEnus ,  parce  qu'Énée  s*y  arrêta 

Îuelque  tems  après  la  prife  de 
>oye.  Ortélius  croit  qu'il  fe 
trompe  en  cela ,  comme  en  bien 
d'autres  chofes. 

L'Abrégé  de  Strabon  porte  dans 
le  feptième  livre ,  vers  la  fin,  qui 

(#)  Plia.  T.  I.  p.  507. 
{h)  Antiq.  cxpl.    par   D.   Bem.   de 
Montf.  Tom.  IV.  p.  415. 

(c)  Antiq.   expl.    par   D.   Bçrn.  de 
^  Montf.  Tom.  II.  pag.  ai|, 
{d)  Strab.  p.  3J9. 


et 

manque  dans  le  livre  même  de  ce 
Géographe  ,  qu'Énée  &  Ciffus 
écoient  deux  villes  diflerenres.  On 
y  ajoute  :  1»  On  croiroit  qu'Am- 
n  phidamas  étoit  de  cette  .Ciffus; 
»  car ,  Homère  dit  qu'il  avoit  été 
»  élevé  par  fon  ayeul  qui  étoit 
o  CifFéen ,  dans  la  Thrace  qui 
n  efl  préfemement  nommée  la 
1»  Macédoine.  <i 

Héfychius  met  une  montagne 
de  ce  nom  en  Macédoine  ,  &  une 
ville  du  même  nom  dans  la  Thra* 
ce  ;  &  Leunclavius  dit  que  c'eft 
préfentement  Cis.  Ortélius  croit 
que  la  montagne  ôc  la  ville  étoient 
auprès  de  Theflalonique  vers  la 
mer. 

CISSUS,  C/Jtf  J  ,  KiVcreç  ,  {i) 
jeune  homme ,  qui ,  ayant  perda 
la  vie  dans  la  fureur  d'une  fête  de 
Bacchus ,  fut  métamorphofé  en 
lierre.  C'efl  en  partie  poiy  cela 
que  l'on  prétend  que  cette  plante 
étoit  confacrée  à  Bacchus. 

CISSUS  ,  Cijfus  ,  K/(r<roç  ,  (/] 
étoit  un  dévoc  à  Sérapis.  On  ra- 
conte que  cet  homme  ayant  été 
empoifonné  par  fa  femme  avec 
des,  œufs  de  ferpent  qu'elle  lui 
avoit  fait  manger,  eut  recours  à 
Sérapis ,  qui  lui  ordonna  d'acheter 
une  murène  ,  animal  venimeux  » 
&  de  mettre  fa  main  dans  le  vafe 
où  elle  feroit.  Il  le  fît  ;  la  murène 
le  mordit  à  la  main,  &  il  fe  trouva 
fubitement  guéri. 
^     CISSUS  ,  Cijfus  ,  K.Woç  .  il) 

(#)  Myth.  par  M.  TAbb.  Ban.  Tom. 
IV.  p.  »57, 168. 

(/)  Antiq.  cxplîq.  par  D«  M€m»  i% 
Mont£  X.  IL  p.  299. 

(g)  Plut,  T.  I.  p.  689. 


1 


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CI 

fun  des  lleutenans  d*Ateïandre  ; 
fut  des  premiers  à  venir  appren- 
dre à  ce  Prince  la  fuite  &  Tinfi- 
déiité  d*Harpalus  ,  à  qui  il  avoit 
conéé  la  garde  des  tréfors  ÔC  des 
revenus  de  Babylône,  Il  en  fut 
affez  mal  récompenfé  ;  car ,  Ale- 
xandre le  fit  mettre  en  prifon ,  le 
traitant  de  menteur  &  de  calom- 
tiiateur. 

CISSUSE  ,  Ciffiifa  ,  Kiccovs-ctif 
(a)  fontaine  de  Grèce  »  dans  la 
Béotie ,  fituée  entre  la  ville  de 
Thèbes  &  celle  d'Haliarte.  n  Les 
n  fables  »  félon  Plutarque ,  difent 
n  que  les  nourrices  de  Bacchus  y 
tp  lavèrent  ce  dieu  dès  que  fa  mère 
9  en  fut  délivrée;  &  la  preuve 
n  qu'elles  en  donnent ,  c*eft  que 
n  (es  eaux  font  d'une  belle  coa«- 
»  leurxle  vin ,  très-claires  &  très- 
f»  bonnes  à  boire.  Non  loin  de- là 
i>  naiflent  les  cannes  Crétoifes , 
n  dont  on  fait  les  javelots ,  d'oîi 
9>  les  Haliartiens  concluent  que 
9>  Rhadamanthe  a  autrefois  habité 
M  dans  ce  païs-là ,  &  ils  montrent 
M  même  fon  tombeau ,  qu'ils  ap* 
*>  pellentAléeXe  tombeau  d' Aie- 
n  mène  eft  tout  auprès  ;  car ,  on 
M  prétend  qu'elle  tut  enterrée  en 
19  ce  lieu-là ,  ayant  époufé  en  fe- 
n  condes  noces  Rhadamanthe, 
»  après  1^  mort  d'Amphitryon,  a 

M*  Dacier,  dans  une  remarque 
fur  la  fontaine  de  CiiTufe ,  s'ex- 
prime ainfi  :  i>  Je  ne  fçais  fi  on 
i>  trouve  ailleurs  quelque  mention 
»  d'une  fontaine  aux  environs 
n  d'Haliarte ,  qui  ait  eu  le  nom  de 

U>  Plut.  T.  î.  p.'449.  Pauf.  p.  591. 
Strab*  p.  411  »  41  ). 

(b)  Antiq.  expl.  par  D.  Bern.  de 
Montf.  toin,  III.  p.  148. 


CI  2^9 

n  .Ciffufe.  Te  n*en  connois  point* 
n  MaisjPaufanias  parle  de  la  fon^ 
n  taine  de  '^ilphufa ,  qu'il  place  à 
Il  cinquante  (lades ,  c'eft- à-dire  > 
Il  à  fix  mille  deux  cens  cinquante 
n  pas  de  la  vilb*  Ceft  la  même 
n  fontaine  que  Strabon  appelle 
»  Tilphofa ,  fous  le  mont  Tilpho* 
n  fion ,  au  voifinage  d'Haliarte. 
Il  Et  je  ne  doute  pas  qu'il  ne  faille 
i>  corriger  ce  paflage  de  Plutar* 
}>  que ,  par  celui  de  Paufanias  ,& 
n  par  celui  de  Strabon,  m 

CISSYBIUM ,  Clfybim ,  (h} 
efpèce  de  coupe  »  qui  avoit  des 
anfes»  Nous  n'en  fçavons  pas  da- 
vantage ,  Athénée  ne  nous  ayant 
confervé  que  le  nom  de  cette 
coupe. 

CISTOPHORE ,  Ciftophorus^ 
(c)du  Grec  xiVm  ,  eifia^  corbeil- 
le ,  &  ^#V»«  fero  9  je  porte.  Le 
terme  de  Ciilophore  veut  donc 
dirf  qui  porte  une  corbeille,  JEgge- 
ling  croit,  &avec  aflez  de  vrai^ 
femblance  ,  que  c'efl  de  certains 
paniers  »  gravés  fur  le  revers  des 
médailles ,  que  vient  le  nom  de 
Ciftophore,  &  non  pas  de  la  fi*^ 
gure  d'homme  ou  de  femme  por- 
tant un  panier  fur  la  tête,  comme 
Tout  cru  Hadrianus  Junius  &  plu^ 
fieurs  autres.  Car ,  ces  figures  ne 
fe  voyent  prefque  jamais  (ur  les 
médailles  ;  au  lieu  que  les  autres  y 
fynt  fort  communes.  Il  efV  certain 
que  le  Ciftophore  étoit  fi  ordinai- 
re ,  que  la  levée  des  tributs  s'ap-^ 
pelloit ,  du  moins  en  certains  païs, 
la  levée  du  CiHophore.  Le  Cifto-. 

(O  Antiq.  expU  par  D.  Bern.  de 
Montf.  Xom.  II,  pag.  183.  Mém.  de 
TAcad.  des  Infc.  &  Bell.  Lett.  Xom», 
XII.  p.  214, 

R  ii 


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iCo  C  I 

phore  étoit  donc  une  forte  de 
monnoie  ou  de  médaille. 

CISTOPHORES,  Ciflopho- 
ri,  ^a)  nom  queTon  donnoit  à 
de  jeunes  filles  ,  qui  à  la  fête 'des 
Orgies  ,  fuivoient  les  chariots 
dans  lefquels  étoient  les  tonneaux, 
les  cruches,  les  vafes ,  &c.  &  qui 
portoient  elles  -  mêmes  les  cor- 
beilles 6c  les  cadettes ,  oii  étoit 
enfermé  ce  qu'il  y  avoir  de  plus 
myAérieux  dans  cette  fête, 

CISUS  ,    Cl/us  y      KfiO-Oi^     {b) 

fils  de  Téménus  ,  roi  d'Argos.  Il 
avoit  pluHeurs  frères ,  6c  une 
fœur ,  nommée  Hyrnétho.  Com- 
me l'aîné  de  tous  »  il  fuccéda  à 
fon  père  au  royaume  d'Argos. 
Sous  fon  règne  >  les  Argiens ,  tou- 
jours jaloux  de  leurs  privilèges  6c 
de  leur  liberté,  reOraignirent l'au- 
torité royale  à  un  tel  point  j  qu'ils 
ne  laiflerent  que  le  nom  de  roi  à 
Cifus  6c  à  fes  defcendans.  Il  arriva 
même  dans  la  fuite  que  Meltas , 
fils  de  Lacidas ,  6c  petit- fils  de 
Médon,  fut  condamné  par  le  peu- 
ple à  perdre  le  royaume  6c  la 
vie. 

CITADELLE ,  fortcreffe  que 
l'on  bâtit ,  ou  pour  la  défenfe  d'u- 
ne ville  contre  l'ennemi ,  ou  mê- 
me pour  contenir  les  citoyens  dans 
le  refpeft,  ôc  empêcher  qu'ils  ne 
fe  mutinent  contre  le  Souverain. 
C'eft  pour  cela  qu'on  a  foin ,  en 
choif&fiant  le  lerrein,  d'en  trouver 
un  oui  commande  la  ville.  Quel- 
quefois les  Citadelles  font  join* 
tes  au  corps  de  la  ville ,  ayant  une 
même  enceinte,  quoiqu'elles  en 
foient  toujours  féparées  par  divers 

(«)  Myth.  par  M.  TAbb.  Ban,  T.  IV.  1 
j?.  »26  ,  117.  J 


cr 

ouvrages  auflî  ménagés  qcre  cens 
du  dehors  ,  parce  que  la  garnifoa 
s*y  retire  lorfqu'elle  ne  peut  plus 
défendre  la  ville  ,  ôc  elle  y  tient 
fouvent  encore  long-tems  après 
que  l'ennemi  eft  maître  de  la  pla- 
ce. Quelquefois,  les  Citadelles 
font  fur  une  hauteur.  Cela  dépend 
du  terrein  où  la  ville  eft  fituée. 
Nous  avons  pris  ce  mot  des  Ita- 
liens dans  la  langue  defquels  il 
fignifie  une  petite  ville ,  félon  fon 
étymologie. 

Cita  RI  NES  ,  atarini 
On  lit  ce  nom  comme  celui  d'un 
peuple  de  Sicile  dans  la  Ill.e  Ver- 
rine  de  Cicéron  ^  il  faut  lire  Ce- 
rarini.  C'étoient  les  habitans  de 
Cétarie. 

CITÉ ,  Civitas.  Le  mot  CiU 
défignoit  anciennement  un  état, 
un  peuple  avec  toutes  fes  dépen- 
dances, nne  république  particu- 
lière. Ce  nom  ne  convient  plus 
guère  aujourd'hui  qu'à  quelques 
villes  d'Allemagne  ou  des  cantons 
SurfTes. 

Quoique  les  Gaulois  ne  fuflent 
qu'une  même  nation  ,  ils  étoient 
cependant  divifés  en  plufieurs 
peuples  ,  formant  prefque  autant 
d'États  féparés ,  que  Céfar  appel- 
le Cités  ,  Civitatcs.  Outre  que 
chaque  Cité  avoit  fist  afTemblées 
propres,  elle  envoyoit  encore  des 
députés  à  des  afTemblées  généra- 
les ,  où  Foii  difcutoit  les  intérêts 
de  plufîeurs  cantons.  Mais,  la 
Cité,  ou  Métropole»  ou  Capitale , 
où  fe  tenoient  les  afTemblées,  s'ap- 
pelloit  par  excellence  Civitas.  Les 
Latins  difoient  Civitas  JEduorum^ 

(}\  Pauf.  p.  118  >  lia  9  ij^t 


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Cl 

CîvîtAs  Lingonum ,  Clvïtas  SenO' 
aum  ;  &  c'eft  fous  ces  noms 
qu'Autun,  Langres',  &  Sens, 
(ont  déûgnés  dans  Tltinéraire 
d'Antonin. 

Dans  la  fuite  9  on  n'appella 
Cité  que  les  villes  épifcopales. 
Voye^  Civitas. 

Ce  mot  fe  prend  aujourd'hui 
Amplement  pour  une  ville ,  même 
au  éguré  ;  mais  9  fur  tout  dans  le 
ftyle  oratoire  &  dans  la  poëHe. 
On  dit  :  La  Cité  célefie ,  nous 
n  avons  point  de  Cité  permanente 
dans  ce  monde  ,  une  grande  Cité  » 
une  Cité  nombreufe ,  Jérusalem  eft 
appellée  la  fainte  Cité. 

Il  fe'prend  encore  dans  les  gran- 
des villes  anciennes, pour  la  par- 
tie la  plus  ancienne  de  la  ville.  Une 
ville  s'eft  peuplée  ,  il  s'eft  formé 
des  faubourgs  tout  à  Fentour.  Le 
nombre  des  habitans  s'étant  fort 
multiplié ,  ces  fauxbourgs  fe  font 
trouvés  environnés  d'une  encein- 
te hors  de  laquelle  il  s*eft  bâti  dp 
nouveaux  fauxbourgs  ;  infenfible- 
ment  on  a  laiiTé  tomber  comme 
inutiles  les  murs  ,  qui  féparoîent 
ces  premiers  fauxbourgs  d*avec  la 
ville.  En  ce  cas  ,  on  appelle  Cité 
Tancienne  ville  »  &  Taugmenta- 
tion  qu'elle  a  reçue  autour  d'elle  , 
prend  la  qualité  de  ville  ;  &  com- 
me dans  les  villes  anciennes ,  l'É- 
glife  primitive  ou  la  première  bâ- 
tie ,  eft  dans  le  plus  ancien  quar- 
tier, dans  quelques-unes  le  lieu  où 
eft  cette  églife ,  eft  la  Cité. 

CITÉ  [  Droit  de  ].  Ceft  la 
qualité  de  citoyen  on  bourgeois 
d'une  ville  ,  &  le  droit  de  partici- 
per aux  privilèges ,  <|ui  font  coin- 


G I  i.Ct 

mufls  à  tous  les  citoyens  de  cette 
ville. 

Chez  les  Romains  ,  le  droit  de 
Cité,  c'eft-à-dire,  la  qualité  de 
citoyen  Romain ,  fut  confidérée 
comme  un  titre  d'honneur,  &  de- 
vint un  objet  d'émulation  pour  les 
peuples  voiiins  qui  tâchoient  de 
l'obtenir. 

Il  n'y  eut  d'abord  que  ceux  qui 
étoient  réellement  habitans  de 
Rome^qui  jouirent  du  titre  &  des 
privilèges  de  citoyens  Romains* 
Romuilus  communiqua  le  droit  de 
Cité  aux  peuples  qu'il  avoit  vain- 
cus ,  &  qu'il  amena  à  Rome  ;  fes 
fuccefleurs  firent  la  même  chofe, 
jufqu'à  ce  que  la  ville  étant  aflez 
peuplée ,  on  permit  aux  peuples 
vaincus  de  refter  chacun  dans  leur 
ville;  &  cependant,  pour  les, 
attacher  plus  fortement  aux  Ro- 
mains y  on  leur  accorda  le  droit 
de  Cité  ou  bourgeoifie  Romai- 
ne ,  en  forte  qu'il  y  eut  alors 
deux  fortes  de  cicoyens  Romains  ; 
les  uns  qui  étoient  habitans  de 
Rome ,  &  que  l'on  appelloit  Ci^ 
y  es  ingenui  ;  les  autres  qui  de- 
meuroient  dans  d'autres  villes  ,  & 
que  l'on  appelloit  municip^s.  Les 
Confuls  &  enfuite  les  Empereurs, 
communiquèrent  le  droit  de  Ci- 
té à  différentes  villes  &  à  différens 
peuples  foumis  à  leur  domination, 

La  loi  7  au  code  de  incolis , 
porte  que  le  domicile  de  quelqu'- 
un dans  un  endroit ,  ne  lui  attri- 
bue que  la  qualité  d'habitant  » 
mais  que  celle  de  citoyen  s'ac- 
quiert  par  la  naiffance,  par  l'af- 
franchiftement ,  par  l'adoption,  & 
par  l'élévation  à  quelque  pofte 
hQïwrftblç- 


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igi  CI 

Les  droits  de  Cité  confiflolent 
cliez  les  Ro mains;  i^.  à  jouir  de  la 
liberté;  un  efclave  ne  pouvoit  être 
citoyen  Romain ,  &  le  citoyen 
Romain  qui  tomboit  dans  i'efda- 
vage,perdoit  les  droits  de  Cité.  2.® 
Les  citoyens  Romaitis  n'étoient 
point  fournis  a  la  puifliince  des 
magiftrats  en  matière  criminelle  ; 
ils  arrêcoient  leurs  pourfuites  en 
difant ,  Civis  Romanus  fum  ;  ce 

3ui  tiroit  Ton  origine  de  la  loi  des 
ouze  tables ,  qui  avoit  ordonné 
qu'on  ne  pourroit  décider  de  la 
vie  &  de  l'état  d'un  citoyen  Ro- 
înain  »  que  dans  les  comices  par 
centuries.  3.^  Ils  avoient  le  droit 
dé  fuffrages  dans  les  affaires  de  la 
république*  4.^  Ils  étoient  les 
feuls  qui  euftent  fur  leurs  enfans 
la  puiuance  telle  que  les  loix  Ro- 
maines la  donnent.  5.^ Ils  étoient 
aufli  les  feuls  qui  pufient  exefcer 
le  facerdoce  &la  magidrature^fic 
avoient  plufieurs  autres  privilè- 
ges. 

Le  droit  de  Cité  fe  perdoit; 

X.9  en  fe  faifant  recevoir  citoyen 

d'une  autre  ville;  1.^  en  com- 

-  mettant  quelque  aâion   indigne 

d'un  citoyen  Romain,  pour  la- 

3uelle  on  encpuroit  la  grande 
égradation  appellée  maxima  ca- 
pitls  diminutio  >  qui  ôtoit  tout  à  la 
fois  le  droit  de  Cité,  &  la  liberté. 
3.^  La  moyenne  dégradation , 
appellée  média  capitis  diminutio  , 
ôtoit  auffi  le  droit  dé  Cité  ;  telle 
ëroit  la  peine  de  ceux  qui  étoient 
effacés  du  rôle  des  citoyens  Ro- 
mains ,  pour  s*être  fait  infcrire  fur 
le  rôk  d^une  autre  ville.  Ceux  qui 
étoient  exilés  ou  relégués  dans 
vm  iile,  <buâ[roieat  aufli  cettQ 


tnoyetine  dégradation*,  &confé^ 
quemmem  perdoient  auffi  le  droit 
de  Cité. 

Parmi  nous ,  il  n'y  a  que  la 
naiffance  ou  les  lettres  du  Prince 

Îui  attribuent  les  droits  de  Cité. 
)n  confond  quelquefois  le  droit 
de  Cité  avec  celui  de  bourgeoifie; 
cependant,  le  droit  de  Cité  eft 
plus  étendu  qtie  celui  de  bour- 
geoifie;  il  comprend  auffi  quelque- 
fois l'incolat,  &  même  tous  les 
effets  civils* 

En  effet ,  celui  qui  eft  banni 
d'un  lieu ,  ne  perd  pas  feulement 
•  le  droit  de  bourgeoifie  ,  il  per3 
abfolument  les  droits  de  Cité, 
c'efl-à*dire  ,  tous  les  privilèges 
accordés  aux  habitans  du  lieu«  £t 
fi  le  banniffemem  eft  hors  du 
royaume  y  il  perd  tous  les  effets 
civils. 

On  peut  perdre  les  droits  de 
.  Cité,  fans  perdre  la  liberté ,  com* 
me  il  arrive  à  celui  qui  eft  banni; 
mais ,  la  perte  de  la  liberté  em-> 
porte  toujours  la  perte  des  droits 
de  Cité. 

CITERNE.  Il  y  avoit  plu- 
fieurs  citernes  à  la  campagne  , 
dans  la  Pâleftine*  Il  y  en  avoit 
auffi  dans  les  villes ,  &  dans  les 
maifons  particulières.  Comme  la 
plupart  des  villes  étoient  bâties 
fur  des  montagnes,  ^  que  les 
pluies  ne  tombent  régulièrement 
dans  la  Judée  qu'en  deux  faifons 
de  l'année ,  au  printems  &  en  au- 
tomne ,  on  ét^it  obligé  de  con- 
ferver  de  l'eau  dans  les  Citernes 
à  la  campagne,  pour  abreuver 
les  animaux ,  &  dans  les  villes , 
pour  les  befoins  des  hommes.  On 
en  voit  encore  aujourd'hui  dans 


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CI 

la  Paleftîne,  de  très-grandes,  dont 
les  unes  font  longue»  de  cent  cin- 
quante pas ,  &  larges  de  foixante; 
d'autres  longues  de  cent  vingt- 
deux  pas  ,  6c  larges  de  cinquante- 
quatre.  On  en  voit  une  à  Rama  « 
qui  A  trente- deux  pas  de  long  ^ 
«  vingt- huit  de  large.  On  con- 
fond auez  fouvent  les  puits  &  les 
Citernes ,  6c  mêtne  les  fontaines 
&  les  fources  ,  dans  le  langage  dç 
1  Ecriture* 

CITES,  Cita  f  peuples , 
qui  étoient  venus  trafiquer  à 
Troye  ,  félon  Diâys  de  Crète. 
Ortélius  croit  que  ce  font  les 
Çlites  dont  parle  Tacite  ,  qui  dit  » 
dans  un  endroit  de  fes  annales  > 
qu'ils  étoient  dans  la  Cilicie  ;  & 
dans  un  autre ,  qu'ils  étoient  dans 
la  Cappadoce, 

CITHÉRIADES,  Citharla- 
des  2  (a)  furnom  des  Mufes.  Ce 
furnom  leur  venoit  du  mont  Ci- 
théron. 

CITHÉRIS  ,  Cithçrh  ,  f^)  af- 
franchie de  P.  Volumniu;5,  t*étoit 
une  fenune  de  joie ,  &  qui  avoit 
Tefprit  bouffon.  Après  avoir  fervi 
aux  plaifirs  de  fon  patron ,  elle  fe 
donna  au  poçte  Cornélius  Gai- 
Jus  ,  qu'elle  quitta  pour  fuivre 
Marc-Antoine.  Cicéron  parle  de 
cette  femme  débauchée  dans  une 
de  fes  lettres. 

.  CITHÉRON  ,\Cltb4ron ,  (c) 
Kt^ctifiv  «  montagne  de  Grèce , 
dans  la  Béotie.  Elle  fervoit  à  fé- 
parer  cette  province  deTAttique, 

(«)  Antîq.  expl,  par  D.  Bcm.  de 
MoQif.  Tom.  I.  pag,  no. 

{h)  Cicer.  ad  Amie.  L.  IX.  Epift.  i6. 

(«i  Strab.  p.  408 ,  409.  l'auf.  p. 71  « 
>4Î  >  S4S«  ?lini  X<Wi  I.  p»  157.  Fomp. 


C  1  26^ 

depuis  que  ta  ville  d*Éleuthère  » 
s*étoit  foumife  aux  Athéniens;  car, 
auparavant ,  c*étoit  cette  ville  qui 
féparoit  les  deux  états. 

Le  mont  Cirhéron  avoit  pris 
fon  nom  de  Cithéron ,  un  des  pre- 
miers rois  des  Platéens.  Sous  cette 
montagne  ,  aux  environs  de  Pla- 
tée ,  en  prenant  un  peu  à  droite  » 
on  appercevoit  les  ruines  d'Hy- 
iies  &  d'Erythres»  qui  étoient  au- 
trefois deux  .villes  de  la  Béotie. 

Srrabon  dit  que  le  mont  Cithé- 
ron fimlFoit  non  loin  de  Thèbes  , 
&  que  TAfope  couloit  aux  pieds 
de  cette  montagne.  Du  côté  du 
couchant ,  il  s^abaiflbit  peu  à  peu 
avec  un  détour  ,  au-deHus  de  la 
mer  de  CrifFa,  Il  commençoit  aux 
montagnes  de  TAttique  &  du  ter- 
ritoire de  Méeare ,  auxquelles  il 
étoit  contigu  ;  de-là  s'étendant  de 
côté  &  d'autre  dans  les  campa- 
gnes ,  il  venoit  finir  à  Thèbes. 

Le  mot  Cithéron,  félon  Paufa- 
nias  ,' étoit  confàcré  à  Jupiter  Ci- 
théronius.  Suivant  Pline ,  il  Tétoic 
aux  Mufes  ;  &  Pomponius-Méla 
dit  qu'il  étoit  fameux  par  les  fa- 
bles ôc  par  les  écrits  des  Poètes. 
En  effet ,  ils  y  ont  mis  la  fable 
d*Aéléon  p  les  orgies  de  Bacchus^ 
Amphion  élevant  les  murs  de  Thè- 
bes au  fon  de  là  lyre,  le  fphynx 
d'(Edipe,&c, 

Plutarque  le  Géographe ,  dans 
fon  traité  des  fleuves  6c  des  mon- 
tagnes ,  obferve  que  le  mont  Ci- 
théron étoit  auparavant  nomtné 

Mel.  p.  III.  Ptolem.  L.  m.  c.  15.  Virg» 
Gorg.  L.  ni.  V.  Al.  iEndd.  l,.  IV.  v. 
^oj.  Tic.  Lîv.  L.  XXXÎ.  c  *6.  Plut-  T. 
I.  pag.  3*5  ,  449.  Myth.  par  M,  VÂh\^^ 
,6an.  Tpm.  m,  p.  364. 


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^6^  CI 

Aftérius ,  &  rapporte  à  fon  or- 
dinaire des  origines  fabuleufes  de 
ces  noms. 

ÇITHÉRON,  CitbaroMy(a) 
Kt^a:i.  -y^  Prince  qui  régna  fur  les 
Placéens  avant  Afopus. 

Junon  fe  fâcha  un  jour  contre 
Jupiter;  on  ne  fçait  pas  pourquoi  ; 
mais  ,  on  affure  que  de  dépit  elle 
fe  retira  en  Eubée.  Jupiter  ,  n'a- 
yant pu  venir  à  bout  de  la  fléchir, 
vint  trouver  Cithéron.  Ce  Prince, 
qui  étoit  Thomme  le  plus  fage  de 
ion  tems ,  confeilla  a  Jupiter  de 
faire  faire  une  ftatue  de  bois  ,  de 
rhabiller  en  femme  ,  de  la  mettre 
fur  un  chariot  attelé  d'une  paire 
de  bœufs,  que  l'on  traineroit  par 
b  ville  ,  &  de  répandre  dans  le 
public  ,  que  c'étoit  Platéa,  la  fille 
d'Afopus  qu'il  alloit  époufer.  Son 
confeil  fut  fuivi.  Auffi-tôt  la  nou« 
velle  en  vint  à  Junon ,  qui  part 
dans  le  moment ,  fe  rend  a  Platée, 
t'approche  du  charior  ,  &  dans  fa 
colère  voulant  déchirer  les  habits 
de  la  mariée ,  trouve  que  c'eft  une 
ftatue.  Charmée  de  l'aventure, 
elle  pardonna  à  Jupiter  (à  tsom- 
perie,  &  fe  réconcilia  de  bonne  foi 
avec  lui. 

^  CITHÉRONIA  ,  Citharonia^ 
K/6a/)v  io  ,  (J>)  furpom  de  Junon, 
Cette  Oéeiïe  fut  aînfi  furnommée 
du  mont  Cithéron. 

CITHÉRONIDES ,  Citharo. 
nîdes  ,  Ki^%ifmiêtq\  (c)  furnom 
des  Nymphes.  Elles  furent  ainfi 
fumommées  du  mont  Cithéron , 
qui  leur  étoit  confacré.  Onyoyoit 

(s)  Pauf.    pafT.   54^.   Myth.   par  M. 
PAbb.  Ban.  Tom.  Ilf .  pag.  39;, 
CM  Plut.  T.  I.  p.  ;i5. 
<0  Pauf.  p.  548.  Antiq.  expU   par 


CI 

fqr  cette  montagne  l'antre  des 
Nymphes  Cithéronides.On  appel- 
loit  ce  lieu  Sphragidium,  &on  af- 
furoit  qu'autrefois  ces  Nymphes 
avoient  le  don  de  prophétie.  Du 
nom  de  ce  lieu  les  mêmes  Nym- 
phes étoient  auffi  appellées  Sphra- 
gitides  ,  comme  le  dit  Plutarque 
dans  la  vie  d'Aridide. 

CITHÉRONIUS  ,  Citharo' 
mus  y  Kt^atpuvloç  ,  {J)  fumom 
donné  à  Jupiter  ,  parce  qu'on  lai 
avoit  confacré  le  mont  Cithé« 
ron. 

CITIENS, Ci/i«,  (^)  pciiple 
dont  parle  Plutarque  dans  la  vie 
d'Alexandre  le  Grand.  Mais  ,  cet 
Auteur  n'en  dit  pas  aflez  pour 
marquer  quelle  forte  de  peuple 
c'étoit.  »  Alexandre  ,  dit-  il,  avoit 
M  une  épée  très-légère  à  la  main , 
»  &  d'une  trempe  merveilleafe, 
n  que  le  roi  des  Citiens  lui  sfvoit 
n  donnée  ,  &  qu'il  portoit  dans 
I»  les  combats,  u  C'étoient  peut- 
être  les  habitans  de  quelqu'une  des 
villes  de  Citiun). 

CITIENS  ,  Citu,  Ktrict ,  peii- 
ples  qui  habitoient  la  ville  de  Ci- 
tium  en  Chypre.  Foye^  Citium. 

CITIENS  ,  CitiaL  Cicéron 
nomme  ainfi  des  gens  venus  de 
Phénicie ,  &  qui  étoient  Cliens  de 
Caton.  Ortélius  doute  s'ils  étoient 
de  Citium  dans  Tifle  de  Chy  pre,oa 
fi  ce.n'étoient  pas  plutôt  des  Chu- 
téens. 

CITIUM,  Cicitim,  Klncr,  ville 
de  rifle  de  Chypre,  (/)  Elle  étoit 
fituée  dans  la  partie  méridionale 

D.  Berf.  de  Montf.  Tom.  h  p.  l85. 

(d)  Pauf.  p.  S4S« 

(#)  Plut.  T.  I.  p.  684. 

(/}  Ptolem,  L,  V.  c.  14.  PIut.T.li 


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CI 

iJe  cette  îfle ,  félon  Ptolémée.  Wa- 
tarque  noos  apprend  que  Cimon, 
célèbre  général  d'Athènes ,  mou- 
rut de  maladie  au  fiege  de  Citium. 
La  même  chofe  eft  rapportée  dans 
Cornélius  Népos.  Zenon ,  qui 
étoit  né  dans  cette  ville  ,  en  avoit 
^ris  le  furnom  de  Citius.  Le  P* 
Hardouin  cenfure  Cujas  d'avoir 
penfé  autrement. 

Citium  fut  le  fiège  d'un  Évêque, 
comme  on  le  voit  dans  les  Notices 
de  Léon  le  Sage  &  d'Hiérocles. 
Ce  lieu  s'appelle  préfentement 
Chiti ,  félon  le  P.  Hardouin  ,  & 
donne  fon  nom  au  promontoire 
voiiïn ,  qui  eu  nommé  à  caufe  de 
tt\îi  Capodechiti,  , 

CITIUM,  Citium,  Klrtov,  (a) 
ville  de  Macédoine,  au  rapport  de 
Tite-Live.  Ce  fut-là,  félon  cet 
Hiftorien ,  que  Perfée  ,  roi  de 
Macédoine, l'an  171  avant  Jefus- 
Chrift ,  ordonna  à  fes  ofGciers 
d  aflemblei  .outes  fes  troupes.  Il 
s'y  rendît  lui-même  accompagné 
de  tous  les  grands  de  fa  cour  & 
de  ks  gardes,  après  avoir  fait  avec 
une  magnificence  royale  ,  un  fa- 
crificede  cent  viâimes ,  à  Miner- 
ve furnommée  Alcideme.  Il  y 
trouva  toutes  les  forces  de  Macé- 
doine ,  &  les  troupes  auxilaires 
des  étrangers ,  campées  devant  la 
ville,  &  les  rangea  en  bataille  dans 
la  plaine.  Le  nombre  étoit  en  tout 
de  quarante-trois  mille  hommes  > 
dont  environ  la  moitié  formoit  ce 
qu'on  appelloit  la  phalange. 

P^f»  49» •  Corn.  Nfip*  in  Cimon.  c.  5. 
Plin.  T.  I.  p.  «84.  Diod,  Sicul.  p.  705. 
Thucyd.  p.  7»  ,  7j. 

(a)  Tit    Liv.    L.  XLir.  c.   51. 

(*)  Tit,  Lh.  U  XLIU.  c.  ai. 


CI  !i6s 

Le  père  Lubin ,  dans  fes  tables 
géographiques ,  drefTécs  pour  l'in- 
tellieence  des  vies  des  Hommes 
illustres  de  Plutarque  ,  dit  que 
cette  Citium  étoit  une  colonie  ve- 
nue de  l'autre  Citium  ,  dont  il  eft 
parlé  dans  l'article  précédent. 
'f^iTIUS  [  le  Mont  ]\  {b)  Mons 
CUius.  Il  en  eft  parlé  dans  Tite- 
Live,  au  fujet  de  Perfée ,  roi  de 
Macédoine.  Ce  Prince ,  étant 
parti  d'Élymée  ,  arriva  le  troifiè- 
me Jour  au  mont  Citius  ,  qu'il  ne 
paila  qu'avec  de  grandes  difficul- 
tés, à  caufe  des  neiges  dont  ii 
étoit  couvert ,  &  qui  étoient  fi 
hautes,  qu'à  peine  lui  permirent- 
elles  de  camper.  Auffi  en  partit-il 
bientôt,  non  que  le  chemin  qui  lui 
reftoit  à  faire ,  fût  plus  commode, 
mais  parce  qu'il  n'étoit  pas  poflï- 
ble  d'y  féjourner. 

Ortélius  croit  que  cette  monta- 
gne étoit  quelque  part  vers  TÉtolie. 

CITTUS  ,  Cittus ,  K.TToç» 
{c)  nom  d'une  montagne  lituée 
au-deffus  de  la  Macédoine ,  félon 
Xénophon.  II  y  avoit  dans  cette 
■montagne  beaucoup  de  bêtes  fau- 
ves ,  tels  que  des  lions ,  des  léo- 
pards ,  des  lynx  ,  des  panthères  » 
des  ours  &  autres.  Ortélius  doute 
fi  ce  ne  feroit  point  le  mont  Ci- 
tius de  Tite-Live. 

CITTUS,  Çitcus  ^  Khrcc^ 
(d)  banquier  ,  dont  il  eft  patlé 
dans  la  harangue  de  Démofthène 
contre  Phormion.  ! 

CIVICA    [  CÉRÉALIS  ]  ,  Ce) 

'  Cf)  Xenoph.  p.  99c.  ■' 

Id)  Demofth.  in  Phorm.  p.  941* 
•  (^ey  Taciti  in  Agric.  c.  4a.  Crév.  Hift. 
des  Emp.  T.  IV.  p,  jp. 


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^iG  C  If 

Cerealis  Civica  i  .  dconfiil  4'Afie, 
fous  renipire  d  ;  ^^mitien.  Il  fut 
inis  à  mort  cb>  ^'  on  propre  gou- 
vernement ,  ^  >'  l'ordre  de  ce 
Prince ,  fous  Injiux  prétexte d*un 
deffein  prémédité  de  révolte;  mais 
en  effgt ,  pour  avoir  accepté  cette 
province ,  qui  lui  étoit  échue  psit 
le  fort. 

Cl  Vie  A,  Civîca^  {a)  oncle 
de  l'empereur  Yérus.  Il  accompa- 
gna Lucille,  fille  de  Marc-Aurè- 
le  ,  lorfque  cette  Princeffe  alla 
joindre  Verus  en  Afie ,  pour  ac- 
complir fon  mariage  avec  cet  Em- 
pereur ^  qui  faifoit  alors  la  guerre 
aux  Parthes. 

CIVILIS  [  JuLius],/tt/iii^ 
Civilis  ,  {b)  jouiffoit  d'un  grand 
crédit  parmi  les  Baca^s.  Ce  fut 
ce  qui  le  fauva  vers  Tan  de  Jefus- 
Chrift  69.  Ajoutez  la  crainte 
qu'eurent  les  Romains ,  d'aliéner 
par  fôn  fupplîce  une  nation  fière  & 
puifTante. 

CIVILIS  [Claudius],  (c) 
Claudius  Civilis^  faineux  Batave^ 
diftingué  encre  ceux  de  fa  nation , 
par  fa  nailTance  qu'il  ciroit  du  fang 
royal ,  par  fa  bravoiire  perfonnel- 
le  ,  par  un  efprit  rufé ,  inventif, 
&  fécond  en  expédiens.  Son  noo^ 
cft  peu  connu  parmi  nous  ;  mais  j 
il  "mérite  autant  de  l'être  que  celui 
de  bien  des  guerriers  fatneux  dans 
rHiftoire. 

Il  n'avoit  pas  (ujet  de  (è  louer 
des  Romains.  Son  frère  Julius 
Paulus  ,  fauflemenc  açcufé.  de 
trahifon ,  avoit  été  mis  à  mort  par 
ordre  de  Fontéius  Capito ,  corn- 

{a)  Crév.  Hift.  des  Emp.  T.  IV.  p. 
(»;  Xacit.  Hift.  L,  !•  c.  t9« 


Cl 

mandant  de  la  baflfe-Gernaanlé 
avant  Vitellius.  Claudius  Civilis 
lui  même  fut  chargé  de  chaînes 
&  envoyé  à  Néron.  Renvoyé 
abfous  par  Galba  ,  il  courut  une 
féconde  fois  rifque  de  la  vie  ibus 
Vitellius,  dont  1* armée  demandoit 
fon  fuppUce  avec  indance. 

Le  reflentîment ,  qu'il  confer- 
voit  de  ces  mauvais  traitemens  ^ 
le  porta  à  faifir  Toccafion  de  la 
guerre  civile  pour  fe  venger. 
Mais»  il  étoit  trop  habile  pour 
agir  à  découvert ,  &  pour  avertijr 
les  Romains  par  une  révolte  ma<^ 
nifefte,  de  le  regarder  &  dç  le 
traiter  en  ennemi.  Il  fe  propofoit 
Sertorius  *&  Annibal  pour  mo- 
dèles ;  ôc  prétendant  les  repré* 
fenter  par  fadreffe  de  l'intrigue, 
de  même  qu'il  portoit  leur  refiem- 
biance  fur  le  yifage ,  ayant  com«> 
me  eux  un  œil  de  moins ,  il  réfo- 
lut  de  travailler  fourdement  » 
&  de  cacher  fon  jeu.  Il  feignit 
donc  d'époufer  la  querelle  de 
Vefpafien  ;  &  il  en  avoit  un  pré- 
texte très-ipécieux ,  &  tout-à-fait 
propre  à  donner  à  fes  démarches 
un  air  de  fincérité.  Antonius  Pri- 
mus  lui  avoit  écrit  d'empêcher  le 
départ  des  fe  cours  mandés  p^r 
Vitellius ,  &  d'occuper  les  légiont 
qui  gardoient  le  Rhin ,  par  l'ap- 
parence de  quelque  trouble  en 
([xermahie.  Hordéoiiius  Flaccus  -, 
qui  commandoit  fur  les  lieux  ,  lui 
donnoit  de  femblables  avis  ,  tant 
par  inclination  pour  le  parti  de 
Vefpaffèn,  que  par  afFeâion  pour 
la  république ,  qui  ésoit  en  dan- 

(c)  Tacît.  Hift.  L.  IV.  c.  ij.  ér  /«f. 
L.  V.  e.  14.  érfti*  Ctév.  Hiit,  des  Eim 
T.m.p.  781»^».  <ir  iiiv. 


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CI 

j^er  de  périr ,  Q  une  nouvelle 
inondation  de  troupes  nombreu- 
fes  venoit  encore  fondre  en  Ita-> 
lie,  6c  y  renouveller  la  guerre- 
Claudius  CivilU  voyant  donc 

3tt'U  'pou voit  mafquer  fon  projet 
e  révolte  fous  une  déférence  ap- 
parente aux  ordres  fecrets  des  gé- 
néraux Romains  ,  ne  tarda  pas  à 
mettre  la  main  à  l'œuvre  ;  &  il 
trouvoit  les  Batave^  aâuellement 
difpofés  à  fe  foulever  par  une 
circonftance  particulière.  Vitellius 
avoit  ordonné  des  levées  de  fol- 
dats  parmi  eux  ;&  cette  charge, 
onéreufe  par  elle-même,  deve- 
noit  abfolument  intolérable  par  les 
procédés  tyranniques  de  ceux  qui 
&ifoient  les  enrolemens.  Avides 
&  concuffionaires  ,  ils  prenoient 
des  vieillards ,  des  hommes  infir- 
mes pour  les  rançonner ,  &  les 
contraindre  d'acheter  leur  congé. 
Un  motif  encore  plus  infâme  Tes 
engageoit  à  enlever  de  jeunes  en- 
fans  au-deflbus  de  l'âge  requis 
pour  porter  les  armes.  Toute  la 
nation  fut  indignée;  &  les  émif- 
faires,  apodes  par  Claudius  Civi- 
lis  ,  pour  fouffler  le  feu  de  la  fédi- 
tion  y  perfuaderent  fans  peine  aux 
Bataves  de  refîifer  de  s'enrôler. 
,  Claudius  Civilis ,  lui-même,  fous 
prétexte  d'un  grand  feflin ,  affem- 
bla  dans  un  bois  (acre  les  premiers 
de  la  nobleffe ,  &  ceux  que  la  bra- 
voure &  l'ardeur  iignaloient  par- 
mi la  multitude  ;  &  lorfqu'il  les 
vit  échauffés  par  le  vin  &  la  bonne 
chère  ,  il  s'ouvrit  à  eux. 

Il  commença  par  relever  la  gloi- 
te  ancienne  de  la  nation ,  qu'il 
leur  repréfenta  ensuite  comme 
dégradée  &  flétrie;  par  les  indi« 


CI         267 

gnîtés  &  les  ou-^at,  s  qu'elle  fouf- 
froit ,  étanc  trai^f^  non  plus  en 
alliée ,  mais  en  t  ts .  ve.  Il  ajouta 
que  jamais  l'occa/it  .  n'avoit  été  & 
belle  de  la  remt;  ^  en  liberté* 
n  Les  Romains ,  dit-il ,  font  affoi* 
i>  blis  par  leurs  divifions.  Dans 
I)  leurs  camps  fur  le  Rhin  ,  il  ne 
n  refte  plus  que  des  vieillards  & 
n  un  butin  auf&  riche  qu'afluré. 
n  Ofe^  feulement  lever  les  yeux  , 
^  &  ne  craignez  point  de  vaines 
n  ombres  de  légions  fans  réalité. 
»  Nous  fommes  puiffans  en  ca-» 
n  Valérie  &  en  infanterie.  Nous 
f>  pouvons  compter  fur  l'appui 
n  des  Germains  nos  voifms  & 
»  nos  frères.  Les  Romains  eux- 
n  mêmes  feront  peu  fâchés^  de  U 
f>  guerre  que  nous  fufciterons.  Si 
n  le  fuccès  en  eft  douteux ,  nous 
Il  nous  en  ferons  un  mérite 'au- 
»  près  de  Vefpafien.  La  vi^  .oire 
I)  porte  avec  elle  fon  apologie.  ^' 
Ce  difcours  fut  reçu  de  tous  ceux 
qui  l'entendirent  avec  de  grands 
applaudifTemens ,  &  Claudius  Ci- 
vilis leur  fit  prêter  ferment  félon 
le  rit  le  plus  augufle  &  le  plus 
redouté  parmi  ces  nations  barba* 
res.  Il  follicita  auffi  les  Caninéfa- 
tes  ,  qui  de  même  origine  que  les 
Bataves ,  &  établis  dans  la  même 
iile,  ne  leur  étoient  point  infé- 
rieurs en  vertu  ,  &  ne  leur  ce- 
doient  que  pour  le  nombre.  Il  agit 
pareillement  auprès  de  huit  co- 
hortes Bataves ,  qui ,  renvoyées 
par  Vitellius  en  Germanie ,  fe 
trouvoient  alors  à  Mayence. 

Les  Caniné&tes  fe  mirent  les 
premiers  en  aâion  ;  &  en  atten- 
dant que  Claudius  Civilis  6c  les 
Batdves  letaflent  le  mafque  ,  ils 


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^68  CI 

fê  donnèrent  an  chef  recomman'» 
dable  y  nommo  Brinno»  fous  la 
conduite  duquel  ils  forcèrent  les 
Romains  de  fe  retirer  dans  la  par- 
tie fupérieure  de  Tifle.  Mais  , 
Qaucuns  Civilis  roulut  d'abord 
employer  la  rufe  >  &  feignant 
d*être  toujours  ami  des  Romains  s 
il  blâma  les  préfets  d*avoir  aban- 
donné leurs  cbâceaux.  II  les  ex-r 
bona  à  regaener  leurs  quartiers 
d'hiver  ,  &  a  fe  repoièr  fur  lai 
do  (bin  de  didiper  avec  fa  cohorte 
nne  poignée  de  révoltés.  Son  def- 
fein  étott  de  fe  préparer  une  vic- 
toire aifée  fur  des  troupes  féparées 
les  ânes  des  autres.  Les  officiers 
Romains  fentireni  la  fraude  ;  & 
d'ailleurs  il  leur  Venoit  de  toutes 
pans  des  avis  qui  ne  leur  permet- 
tcnent  point  de  douter  que  le  vrai 
chef  de  la  révolte  ne  fût  Claudius 
Cvilis  ,  â  qui  Brinno  ne  faifoit 
que  prêter  fon  miniftere  &  fon 
Boro»  Les  Germains  >  padionnés 
pour  (a  guerre  ,  n'avoient  pas  pu 
garder  un  fecret  qui  le^r  faifoit 
trop  de  plaifir. 

Claudius  Civilbt  voyant  que 
la  rufê  ne  lui  réuifidoit  pas ,  eut 
recours  à  la  force  ouverte.  Il  fe 
mît  à  la  tête  des  rebelles  ,  &  vint . 
attaquer  les  Romains  dans  leurs 
poftes  ,  fuivi  des  Canioéfaîes  , 
des  Frifons  ,  &  des  Bataves ,  dif- 
tribués  en  corps  de  nations.  Les 
Romains  fe  préparèrent  à  les  bien 
recevoir ,  &  mirent  en  bataille 
leurs  troupes  de  terre  &  de  mer. 
Mais ,  à  peine  en  étoit-on  venii 
aux  mains  ,  qu'une  cohorte  de 
Tongriens  parfa  du  côié  de  Clau- 
dius Civilis  ;  &  cette  trahifon  dé- 
concerta beaucoup  çe^x  %^y  fe 


CI 

virent  abandonnés  ,  &  ttiêmé 
afiaillis  tout  à  la  fois  par  leurs 
ennemis  ôc  leurs  alliés.  La  fiotte 
ufa  de  là  même  perfidie,  de  forte 
que  la  viâoire  de  Claudius  Civi- 
lis fut  complette. 

Ce  premier  exploit  (ut  très- 
avantageux  aux  rebelles  >  en  ce 
qu*il  leur  fournit  des  armes  &  des 
vaiiTeaux,  dont  ils  manquoient  ; 
&  il  y  eut  un  grancl  éclat  dans  la 
Gaule  Çc  la  Germanie  ,  où  Clau- 
dius Civilis  ÔC  fes  aflbciés  furent 
célébrés  comnie  les  vengeurs  de 
la  liberté  commune.  Les  Ger- 
mains ,  plus  voifins  &  plus  fiers  y 
lui  offrirent  à  Tenvi  leur  fecours. 
La  Gaule  étoit  plus  difficile  à 
s*ébranlçr ,  &  il  n*y  eut  rien  que 
Claudius  Civilis  ne  mît  en  œuvre 
pour  s'en  procurer  Tailiance.  Les 
cohortes  qu*il  avoit  vaincues  , 
étoient  Gauloifes  ,  auffi-bien  que 
leurs  commandans.  Il  renvoya 
fans  rançon  les  officiers  qu'il  avoit 
fait  prifonniers  ;  il  donna  aux  fol- 
dats  le  choix  de  refter  avec  lui  ou 
de  s'en  aller ,  promettant  à  ceux 
qui  s'attacheroient  à  fa  fortune 
toutes  fortes  d*agrémens  6c  de 
diftinâions  dans  le  fervice  ,  &  ne 
laifTant  pas  même  partir  les  autres 
fans  les  gratifier  de  quelque  por- 
tion des  dépouilles  des  Romains. 

Ces  largefles  étoient  une  amor- 
ce pour  leur  faire  mieux  goûter 
les  difcoors  par  lefqueis  il  les 
exhortoit  à  fe  révolter.  Il  leur 
repréfentoit  les  maux  extrêmes 
qu'ils  foudroient  depuis  tant  d'aii- 
nées,appellantdu  nom  de  paix  une 
miférable  fervitude.»  Les  Bataves, 
n  difoit-il  ,  quoiqu'exempts  de 
M  tributs^  ont  pris  les  armes  cou* 


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CI 

»  tre  les  Tyrans  de  l'univers  ;  & 
n  dès  la  première  occafion  qui 
i>  s'eft  préfentée  de  combattre  , 
»  ils  ont  vaincu  6c  mis  en  fuite  les 
n  Romains.  Que  fera-ce ,  fi  les 
»  Gaulois  fecouent  le  joug  ? 
n  Queft-ce  que  les  forces  qui 
»  reftent  à  lltalie  ?  Ceft  par  le 
»  fang  des  provinces  ,  que  les 
»  provinces  font  aflervies.  «  Il 
citolt  l'exemple  de  la  Germanie , 
qui ,  par  la  défaite  &  la  mort  de 
Varus  ,  s'étoit  rétablie  en  poflef- 
fion  de  fa  liberté  ;  &  cela  ,  daiis 
un  tems  où  il  s'agifloit  d'attaquer 
Augufte,  &  non  pas  Vitellius.  Il 
obfervoit  que  la  valeur  naturelle 
des  Gaulois  étoit  encore  aidée 
par  la  difcipline  à  laquelle  ils 
s'étoient  formés  en  fçrvant  dans 
les  armées  Romaines  ;  &  après 
les  avoir  remplis  de  Tefpérance 
du  fuccès  ,  il  les  aiguillonnoit  par 
le  fentiment  de  l'amour  de  la  li- 
berté, w  Que  la  Syrie ,  difoit-  il , 
»  que  PAfie  ,  que  l'Orient,  ac- 
n  coutumes  à  obéir  à  des  Rois , 
»  fupporteni  la  fervitude.  La  Gau- 
f>  le  a  encore  plufieurs  citoyens 
M  nés  avant  la  date  de  l'impofîtion 
n  des  tributs.  Les  animaux  mé- 
I)  mes  font  jaloux  de  conferver  la 
w  liberté  ,  que  la  nature  leur  a 
n  donnée.  Et  des  hommes  pleins 
n  de  valeur  renonceroient  à  un 
I)  bien  fi  précieux  ?  Profitez  de 
n  l'occafion  favorable  ,  que  vous 
i>  offrent  les  dieux.  Vos  tyrans; 
n  font  embarraiTés  par  leurs  divi- 
n  fions  ioteflines  ;  vous  n'avez 
n  qu'une  feule  affaire.  Ils  font 
V  fatigués  par  leurs  pertes  ,  Se 
n  vos  forces  font  entières.  Tan- 
i>  dis  qu'ils  fe  partagent  entre  Vi- 


C I  269 

n  tellius  &  Vefpafien ,  vous  pou- 
n  vez  vous  délivrer  de  l'un  &  de 
n  l'autre,  a  C'eft  ainfi  que  Ciau- 
dius  Civilis  ,  portant  en  même 
tems  fes  vues  fur  les  Gaules  & 
fur  la  Germanie  y  fiatcoit  les  peu- 
ples de  ces  vafte»  ôc  puiflances 
régions  de  l'idée  de  la  liberté  , 
pour  fe  préparer  4es  voies  à  s'en 
rendre  le  maître. 

Cependant,  Mummîus  Lapé- 
rus ,  qui  commandoit  le  camp  , 
appelle  Vétéra  ,  oh  hivernoienc 
deux  légions  ,  eut  ordre  de  fe 
mettre  en  campagne,  ôc  de  mar- 
cher contre"  l'ennemi.  Qaudius 
Civilis  ne  (e  fit  pas  long-tems 
chercher.  Ce  fier  Batave  te  pré- 
fenta  ,  faifant  porter  les  drapeaux 
des  cohortes  qu'il  avoit  vaincues , 
comme  un  trophée  capable  d'ani- 
mer les  fiens  par  le  fouvenir  de 
leur  gloire  récente ,  &  d'infpirer 
la  terreur  aux  ennemis.  Il  plaça 
fuivant  la  coutume  des  Germains , 
derrière  les  rangs  ,  fa  mère  6c  (es 
fœurs  ,  les  femmes  &  les  petits 
enfans  des  officiers  &  desfoldats, 
afin  que  des  objets  fi  chers  en- 
cou  rageaflent  les  combattans  à 
vaincre,  oa  les  retinffent  par  la 
honte ,  s'ils  lâchoient  le  pied.       / 

Au  fignal  donné ,  tous  enfem- 
ble,  ho.Times  ôc  femmes,  firent 
retentir  les  airs  ,  les  uns  de  leurs 
chants  de  guerre,  les  autres  de 
leurs  hurlemens.  Les  Romains  n'y 
répondirent  que  par  un  cri  foible, 
&  qui  dénotoit  la  peur,  Ea 
effet ,  ils  voyoienc  leur  aile  gau- 
che mife  à  découvert  par  la  dé- 
fertion  de  la  cavalerie  Batave, 
qui  paffa  du  côté  des  ennemis  ;  & 
fe  couri\a  tout  d'un  coup  conue 


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470    .       CI 

ceux  qu!  la  regardoîent  un  înflant 
auparavant  comme  alliée.  Cepen- 
dant ,  les  légions  tinrent  ferme  6c 
gardèrent  leurs  rangs.  Mais ,  les 
auxiliaires  ,  tant  les  Ubiens  que 
ceux  de  Trêves ,  prirent  honteu- 
fement  la  fuitt ,  &  fe  répandirent 
dans  la  campagne.  Les  Germains 
s'attachèrent  à  les  pourfuivre  ,  & 
donnèrent  ainfi  moyen  aux  légions 
de  Te  retirer  dans  leur  camp. 

Claudius  Labéo ,  commandant 
de  la  cavalerie  Batave  ,  embarraf- 
foic  Claudius  Civilis.  Il  y  avoir 
entr'eux  une  rivalité  ancienne  ;  ils 
étoient  dans  le  païs«  chefs  de  fac- 
tions oppoiees.  Claudius  Civilis 
appréhenda  donc  »  s'il  le  faifoit 
mourir,  de  (e  rendre  odieux  au- 
près de  fes  compatriotes  ;  6c  s'il 
lui  laiiToit  la  vie  ,  d'avoir  en  lui 
un  auteur  éternel  de  troubles  6c 
de  difcordes.  Il  prit  un  parti  mi- 
toyen f  6c  le  tranfporta  dans  la 
Frife  au  de-là  du  Rhin.  Il  reçut 
peu  après  un  puiflant  renfort  par 
la  jonâion  des  huit  cohortes  Ôa- 
taves  qu'il  avoit  follicitées.  Elles 
étoient  en  marche  ,  fuivant  les 
ordres  de  Vitellius ,  lorfque  le 
courietï  de  Claudius  Civilis  les 
atteignit.  Leur  réfolution  fut  tout 
d'un  coup  prife  d'embrafTer  la 
querelle  commune  de  la  nation. 

Claddius  Civilis  ,  voyant  Tes 
forces  fi  confidérablement  aug- 
mentées n'en  conçut  point  un 
orgueuil  de  barbare  ,  6c  ne  s'en- 
fla point  d'une  foie  audace.  Il 
coiinoiffoit  la  puiflance  des  Ro- 
mains, 6c  Tentant  qu'il  lui  étoit 
împoffible  de  fe  mefurer  encore 
avec  eux  ,  il  j>erfifta  dans  fon 
plan  de  dif&mulatioa  ,  6c  il  fit 


Cî 

prêter  le  ferment  de  fidélité  ai 
Vefpafien  par  toutes  les  troupes 
qu'il  avoit  fous  fes  ordres.  Il  fol- 
lictta  même  à  fe  ranger  au  même 
parti  les  deux  légions  qui  s'étoient 
renfermées  dans  le  camp  de  Vé- 
téra.  Il  lui  fut  répondu  que  des 
Romains  ne  '  prenoient  poioc 
confeil  d'un  traître  6c  d'un  enne- 
mi ;  qu'ils  reconnoiffoient  Vitel- 
lius pour  leur  Empereur  »  &  lui 
garderoient  fidélité  jufqu'au  der- 
nter  foupir  ;  qu'il  conyenoit  mal  à 
un  déferteur  Batave  de  faire  le 
perfonnage  d'arbitre  du  fort  des 
Romains ,  6c  qu'il  devoir  plutôt 
s'attendre  à  fubir  la  jufte  peine  de 
fa  perfidie.  Une  réponfe  fi  fiere 
enflamma  la  colère  de  Claudius 
Civilis*  Il  fe  mit  aufli-t6t  en  mar- 
che pour  aller  attaquer  le  camp 
avec  tous  fes  Bataves ,  foûtenus 
des  fecours  qu'avoient  envoyés 
d'au  de-là  du  Rhin  les  Tenâères 
6c  le&  Bruâères ,  6c  il  dépêcha 
des  courriers  par  toute  la  Germa- 
nie, pour  en  inviter  les  peuples  à 
venir  avec  lui  partager  la  gloire  6c 
le  butin. 

Il  arrive ,  occupant  le  centre  de 
fon  armée  avec  l'élite  de  ks  Ba- 
taves. Les  troupes  venues  de 
Germanie  couvrent  la  rive  du 
Rhin  au-deflus  6c  au-^leflbus  du 
camp  ;  la  cavalerie  battoit  la  cam- 
pagne ^  les  vaiiTeàux  remontoient 
le  fleuve.  D'une  part ,  des  figures 
de  loups  6c  d'autres  bêtes  ,  qui 
fervoient  d'enfeignes  aux  nations 
Germaniques ,  de  l'autre  les  dra- 
peaux- des  cohortes  qui  avoient  fi 
long-tems  fervi  dans  les  armées 
Romaines  ,  préfentoient  l'image 
effrayante  d'une  guerre  civile  6c 


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CI 

<trattgère  tout  enfemble.  L'éten- 
.  due  du  camp ,  dreffé  pour  deux 
légions  y  &  qui  contenoit  alors  à 
peine  cinq  mille  hommes  ^  en 
rendoit  la  défenfe  plus  difficile  ; 
mab,  la  multitude  des  valets  ôc 
des  vivandiers  que  la  crainte  y 
a  voit  fait  accourir  de  toutes  parts , 
comme  dans  un  afyle  ,  aidoit  les 
foldats  9  &  les  foulageoit  pour 
certains  minifteres.  L'accès  de  ce 
camp  étoit  aifé,  &  muni  feule* 
ment  de  quelques  fortifications 
légères  ;  parce  qu'Augufle  ,  qui 
Tavoit  établi ,  s'étoit  perfuadé  que 
la  valeur  du  foldat  Romain  fuffi- 
foit  pour  contenir  les  Germains 
dans  le  devoir  ;  &  que  jamais  on 
ne  fe  trouveroit  dans  une  fituation 
fi  trille  ,  que  les  Bataves  ofaiïent 
venir  eux-mêmes  attaquer  les  lé« 
gions. 

Le  cas  arriva  pourtant  ;  &  les 
Bataves  d*un'côté^&  les  Germains 
de  Pautre  ,  s'animant  par  une 
émulation  nationale ,  livrèrent  au 
camp  un  furieux  afjfaut.  Mais  , 
après  plufieurs  tentatives  inutiles , 
défefpérant  de  réuffir  par  la  force, 
ils  convertirent  le  fiege  en  blocus. 
Cependant  ^  Claudius  Civilis  fe 
fortifioit  puifTamment.  Toute  la 
Germanie  voifme  du  Rhin  s'étoit 
déclarée  en  fa  faveur  ;  &  il  em- 
ploya fes  nouveaux  alliés  à  faire 
des  courfes  fur  les  terres  des  peu- 
ples amis  des  Romains.  Les  uns 
avoient  charge  de  piller  &  de  ra- 
vager le  pais  de  Trêves ,  les  au- 
tres celui  des  Ubiens,  Quelques- 
uns  pafTerent  même  la  Meufe  ,  & 
vinrent  infeâer  les  Ménapiens  , 
les  Morins  ,  &  toute  cette  lifière 
feptentrtonale  des  Gaules.  Mais^ 


C  î         171 

nul  peuple  ne  fut  plus  maltraité 
que  les  Ubiens.  Claudius  Civilis  , 
voulant  tenter  un  nouvel  affaut , 
diftribua  les  différentes  opérations 
entre  les  Bataves  &  les  Geritiains 
venus  des  pais  d*au  de-làdu  Rhin. 
Cette  féconde  tentative  ne  réuffic 
pas  mieux  que  la  première.  Re- 
buté du  mauvais  fuccès  ,  il  en 
revint  à  bloquer  la  place;  &  corn* 
me  il  fcignoit  d'agir  pour  Vefpa- 
fien  ,  il  follicitoit  les  afCégés  par 
des  mefTages  fecrets ,  &  par  des 
promefTes  ,  à  abandonner  le  parti 
de  Vitellius ,  fe  propofant  de  le^ 
mener  plus  loin  ^  lorfqu'il  leur 
au  roi t  fait  faire  ce  premier  pas. 

Too^  ce  que  nous  venons  da 
raconter  de  la  guerre  de  Claudius 
Civilis  ,  yéfoic  pafTé  avant  la  ba- 
taille de  Crémone ,  dont  la  nou- 
velle fut  annoncée  en  Germanie 
par  des  lettres  d'Antonius  Primus, 
accompagnées  d'une  ordonnance  « 
que  Cécina  avoit  rendue  en  fa 
qualité  de  Conful.  Et  le  porteur  de 
ces  dépêches  étoit  un  ofHcier  du 
nombre  des  vaincus  ^  nommé  Al* 
pinus  Montanus  ,  qui ,  par  fa  prë« 
fence  ôc  par  fes  difcours»  atteftoit 
la  vérité  des.  faitSé 

Un  événement  fi  important^ 
qui  décidoit  la  querelle  entre  Vef- 
pafien  &  Vitellius  ,  devoit  réunir 
pour  le  parti  du  vainqueur  les 
officiers  ôc  les  foldàts  de  l'armée 
de  Germanie  j  &  conféquem- 
ment  forcer  Claudius  Civilis ,  ou 
de  fe  fou  mettre ,  ou  de  fe  démaf- 
quer ,  &  de  fe  déclarer  nettement 
ennemi  des  Romains.  L'opiniâ- 
treté indomptable  des  foldats  lé- 
.gîonnaires  empêcha  cet  heureux 
effet  ,  entretint  la  divifion  ,  & 


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zj±  Cl 

donna  moyen  à  Claudlus  Civills 
de  remporter  de  nouveaux  avan- 
tages 9  plus  grands  que  ceux  qu'il 
avoit  eus  jufqu'alors.  Ils  prêteront 
ferment  à  Vefpafien  ,  mais  de 
mauvaife  grâce  ,  en  évitant  d'ar- 
ticuler Ton  nom  ,  &  confervant 
dans  le  cœur  Tattarchement  à  Vi- 
teliius. 

Vocula  ,  qui  de  même  que 
tous  les  autres  chefs  ,  étoit  décidé 
pour  Vefparien  ^  envoya  Alpinus 
Montanus  à  Claudius  Civilis  ,  6c 
lui  ordonna  de  repréfenter  à  ce 
Batave ,  qu'il  n'étoit  plus  tems 
pour  lui  de  déguifer  une  guerre 
étrangère  fous  un  faux  \prétexte 
de  diflenfion  civile  ;  &  que  fi  fon 
deflein  avoit  été  de  féconder  Vef- 
pafien ,  il  avoit  rempli  fes  vue», 
&  de  voit  par  conféquent  pofer  les 
armes.  Claudius  Civilis ,  avant 
que  d'avoir  démêlé  le  caraâere 
d'Alpinus  Montanus ,  s'enveloppa 
dans  des  réponfes  vagues  ,  qui  ne 
fignifioient  riei?.  Mais  bientôt  il 
fentit  qu*il  pouvoit  fe  fier  à  lui, 
&  il  s'expliqua  fans  ambiguïté. 

Il  commença  par  fe  plaindre 
des  fatigues  qu'il  avoit  eues  à  foû- 
tenir  des  périls  fans  nombre  aux- 
quels il  s*étoit  vu  expofé  pendant 
vingt-cinq  ans  de  fervice  dans  les 
armées  Romaines,  n  J'en  ai  reçu , 
n  ajouta- 1> il  enfuite ,  une  digne 
9>  récompenfe  ,  par  la  mort  de 
»  mon  frère ,  par  les  chaînes  que 
i>  j'ai  portées  »  par  les  cris  furieux 
»  de  l'armée  de  Germanie ,  qui 
Il  demandoit  mon  fupplice.  Le 
!»•  droit  naturel  m'autorife  à  la 
9>  vengeance ,  &  c'eft  le  jufte  mo- 
»  tif  qui  m'anime.  Et  vous  auffi , 
»  peuples  de  Trêves ,  &  tout  ce 


Cl 

lï  que  vous  êtes  de  Gaulois  fou* 
i>  mis  au  joug ,  quel  prix  attendez- 
»  vous  de  votre  fang  fi  fouvent 
»  verfé  pour  les  Romains  ?  Une 
n  milice  ingrate ,  des  tributs  fans 
»  relâche  ,  les  rigueurs  des  ver- 
)i  ges ,  &  des  haches  ^  ôc  la  né- 
»  ceffité  d'effuyer  tous  les  capri- 
»  ces  des  Tyrans  que  l'on  vous 
n  envoie  de  Rome ,  fous  le  noni 
»  de  généraux  &  de  gouverneurs. 
M  Confidérez  mon  exemple.  Je 
»  n'étois  qu'un  fimple  préfet  de 
>i  cohorte  ;  &  avec  le  feul  appui 
»  des  Caninéfates  Ôi  des  Bataves^ 
i>  nations  bien  peu  nombreufes  fi 
f>  on  les  compare  à  tout  le  reile 
Il  des  Gaulois,  j'ai  humilié  nos 
M  maîtres  ,  je  leur  ai  enlevé  des 
»  camps',  je  les  tiens  aâuelle- 
n  ment  afiiégés.  Que  rifquons- 
m  nous  à  montrer  de  l'audace  ? 
»  Ou  nous  recouvrerons  notre 
)>  liberté  ,  ou  fi  nous  fommes 
»  vaincus  y  nous  ne  pouvons  que 
»  retomber  dans  le  même  état 
»  011  nous  étions,  m  Ce  difcours 
fit  imprefiion  fur  Alpinus  Mon- 
tanus; il  revint  entièrement  g^- 
gné  ,  &  ayant  rapporté  à  Vocula 
une  réponfe  concertée  avec  Clau- 
dius Civilis ,  il  difiimula  le  refte, 
fe  réfervant  à  agir  auprès  de  fes 
compatriotes ,  pour  exciter  parmi 
eux  des  mouvemens ,  qui  ne  car- 
dèrent pas  à  éclater. 

Cependant  ,  Claudius  Civilis 
poufibit  vivement  la  guerre,  & 
bien  inftruit  du  peu  d'intelligence 
qui  étoit  entre  les  chefs  &  les  fol- 
dats  Romains ,  il  fe  crut  afiez  fort 
pour  partager  fes  troupes  en  dei^x 
corps  ,  dont  l'un  iroît  attaquer 
Vocula  au  camp  .  de  Gelduba , 
pendant 


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CI 

pendant  que  l'autre  contlnueroh 
le  fiege.  Peu  s'en  fallut  que  Ten- 
treprife  ne  lui  réufsît.  Vocula 
n'étoit  point  fur  Ces  gardes.  La 
vidoire  refta  néanmoins  de  fon 
côté  ;  maïs  ,  il  ne  profita  pas  de 
fes  avantages.  S'il  eut  pourfuivi 
les  ennemis  ,  il  faifoit  lever  dans 
Tinftant  le  fiege  de  Vétéra.  Ce  ne 
fut  qu'au  bout  de  quelques  jours 
qu'il  fe  mit  en  marche  pour  aller 
à  Claudius  Civilis.. 

Le  rufé  Batave  avoit  profité  de 
cet  intervalle  pour  folliciter  les 
afliégés  k  fe  rendre ,  en  cachant 
de  leur  perAïader  que  le  fecours 
qu41s  attendoient,  étoit  détruit, 
«  que  les  fiens  avoieiit  remporté 
une  viâoire  compleite.  Il  éialoit 
à  leurs  yeux  les  drapeaux  pris  fur 
les  Romains  ;  il  leur  montroit  les 
prifonniers.  Mab  ,  ce  fut  ce  qui 
le  décela.  L'un  de  ces  prifonniers 
eut  le  courage  d'élever  fa  voix 
pour  faire  coonoître  aux  afliégés 
la  vérité  qu'on  leur  déguifoic.  Les 
Germains  le  maflacrerent  fur  la 
place ,  &  accréditèrent  ainfi  fon 
témoignage. 

Enfin  ,  Vocula  arriva  j  &  alla 
fur  le  champ  préfenier  le  cotnbac 
à  Claudius  Civilis  ^  qui  ne  recula 
point,  L'a6lion  ne  commença  pas 
avantageufement  pour  les  Ro- 
mains. Les  plus  féditieux  étoient , 
comme  il  ne  manque  jamais  d'ar- 
river ,  les  plus  lâches.  Quelques- 
.uns  néanmoins ,  fe  fou  venant  de 
leur  gloire  récente  ,  tenoient  fer- 
me dans  leur  pofte  ,  &  s'encou- 
îageoient  inutilement  à  achever 
«dignement  leur  entreprife.  Les 
affiégés ,  voyant  du  haut  de  leurs 
«nurs  tout  ce  qui  fe  paffoit,  firent 
Tom.  XI. 


C  I  171 

très-à  propos  une  fortie  ,  qui  trou- 
bla beaucoup  les  Bataves  ;  &  la 
viftoire  fut  déterminée  en  faveur 
des  Romains  par  l'accident  de 
Claudius  Civilis.  Il  tomba  de  che- 
val »  &  dans  les  deux  armées ,  le 
bruit  courut  qu'il  étoit  mort  oa 
blefFé.  Il  efl  incroyable  quelle 
confiance  c^tte  nouvelle  infpira 
aux  uns  «  qU6l||  confternation  elle 
jetta  parmi  les  autres.  Elle  décida 
pleinement  du  fuccès  ;  le  fiege  fut 
levé  y  &  Vocula  vainqueur  entra 
dans  le  camp  de  Vétéra. 

Cependant  y  Claudius  Civilis, 
rétabli  de  fa  chute ,  ne  carda  pas 
à  reparoître.  Il  vint  attaquer  un 
convoi  entre  Vétéra  ôc  Gelduba, 
lorfqu'il  fe  mettoit  en  route  pour 
aller  prendre  de  nouvelles  provi-. 
fions  ;  &  s'il  ne  le  défit  pas  entiè- 
rement ,  parce  que  la  nuit  mit  fin 
au  combat ,  au  moins  il  lui  coupa 
le  retour.  Vocula  fonit  de  la  place 
pour  fauver  fon  convoi ,  &  pour 
l'aider  à  forcer  les  paflages  ;  & 
aufli-tôt  le  Batave  vint  remettre 
le  fiege  devant  Vétéra.  Ainfi ,  tous 
les  avantages  remportés  par  Vo- 
'cula  s'en  allèrent,  en  fumée ,  &  les 
thofes  fe  retrouvèrent  au  même 
état  qu'auparavant.  Il  y  eut  plus, 
elles  empirèrent.  Le  commandant 
Romain  abandonna  Gelduba ,  & 
fe  retira  à  Nuys  ;  &  Claudius 
Civilis  fe  rendit  maître  du  pofte 
abandonné  ,  &  livra  près  dç  Nuys 
un  combat  de  cavalerie,  dont  le 
fuccès  lui  fut  avantageux. 

Pendant  ce  tems-là  ,  la  nou- 
velle de  la  mort  de  Vifellius  por- 
tée en  Germanie ,  y  augmenta  la 
fureur  de  la  guerre  &  les  forces 
des   rebelles.   Claudius  Civilis  . 

s 


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474  CI 

renonçant  à  la  diflimulatîon  dont 
il  avoit  ufé  jufqu'alors ,  fe  déclara 
ouvertement  ennemi  du  nom  Ro- 
main. Les  Gaulois ,  dès  Iong*tems 
ébranlés  »  fe  joignirent  enfin  à  lui« 
Alors ,  les  négociations  fe  pouf- 
fèrent avec  vivacité  entre  Clau- 
dius  Civilis  &  Julius  Clafficus  né 
dans  le  pais  de  Trêves.  On  y 
ajoute  Julius  Tutor  &  Julius  Sa- 
binus.  Les  trois  liduveaux  chefs 
travaillèrent  chacun  de  leur  côté  à 
fonder^  par  des  entretiens  fecrets, 
tous  ceux  qu'ils  crurent  capables 
d'entrer  dans  leurs  vues ,  ô^  de 
leur  être  utiles  pour  l'exécution. 
Ils  eflayerent  enfuite  de  tromper 
&  de  (urprendre  Vocula*  Mais , 
leurs  tentatives  n'ayant  point 
réufli ,  Julius  ClafBcus  fit  tuer  le 
Général  par  un  déferteur  Ro> 
main  ;  &  les  légions  qu'il  avoit 
commandées ,  prêtèrent  ferment 
aux  Gaulois. 

Reftoit  le  camp  de  Vétéra  ,  oh 
les  légions  afliégées  avoient  fup- 
porté]ufques-làîes  plus  affreules 
extrémités  de  la  difette.  On  leur 
dépêcha  les  plus  corrompus  & 
les  plus  lâches  de  ceux  qui  s'é- 
toient  fournis  ,  pour  leur  offrir  le 
pardon  ,  s'ils  s'accommodoient 
aux  circonflances ,  &  leur  décla* 
rer  qu'autrement  ils  ne  dévoient 
s'attendre  qu'à,  périr  miférablc* 
ment  par  le  fer  ou  par  la  faim. 
Ces  dignes  députés  alléguèrent 
pour  dernier  motif  leur  propre 
exemple.  Les  afTiégés  héaterent 
quelque  tems  entre  le  devoir  & 
les  maux  extrêmes  qu'ils  fouf* 
froient ,  entre  la  gloire  &  la  hon- 
te. Qui  commence  à  délibérer  en 
pareil  cas  ^  eft  bientôt  teadu.  Us 


CI 

fe  déterminèrent  à  déshonorer  $ 
par  une  conclufion  honteufe  »  le 
courage  &  le  mérite  de  leur  belle 
défenle  »  &  ils  envoyèrent  une 
députation  à  Claudius  Civilis  pour 
lui  demander  la  vie.  On  refufa 
de  les  écouter ,  jufqu'à  ce  qu'ils 
euflent  juré  fidélité  à  l'empire  des 
Gaulois.  Après  qu'ils  le  furent 
liés  par  cet  indigne  ferment  , 
Claudius  Civilis  leur  promit  la 
vie  fauve ,  &  la  liberté  de  fortir 
en  armes  de  leur  camp  ;  mais ,  il 
s'en  réferva  poiir  lui  &  pour  les 
fiens  tout  le  butin ,  &  il  y  fit  fur  le 
champ  entrer  des  troupes  qui 
avoient  ordre  de  retenir  l'argent  j 
les  valets  &  les  bagages. 

Cette  capitulation  fi  honteufe 
fut  encore  mal  obfervée.  -Les 
Germains  qu'on  leur  avoit  donnés 
pour  efcorte  ,  les  attaquèrent  à 
cinq  miUes  de  Vétéra.  Quoique 
furpris ,  les  Romains  fe  mirent  en 
détenfe.  Les  plus  braves  fe  firent 
tuer  fur  la  place  ;  plufiêurs  p  s'é- 
tant  difperfés  par  la  fuite  ,  furent 
pourfuivis  ÔL  maffacrés.  Les  au- 
tres s'en  retournèrent  au  camp^ 
&  portèrent  leurs  plaintes  à  Clau- 
dius Civilis ,  qui  blâma  les  Ger« 
mains ,  &  leur  reprocha  leur  per- 
fidie. S'il  patloit  fincerement ,  ou 
s'il  ne  cherchoit  qu'à  garder  les 
dehors  ,  c'efi  ce  que  Tacite  ne 
décide  point.  Mais ,  la  eonduite» 
que  tint  ce  Batavc  à  l'égard  des 
malheureux  reftes  des  légions 
Romaines  »  rend  fa  foi  plus  que 
fufpeâe.  Car ,  après  avoir  pillé 
le  camp  «  il  y  mit  4e  feu  ,  & 
tous  ceux  qui  s'étoient  fauves  da 
combat  ^  périrent  dans  les  flam* 
tne$« 


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Cl 

Claudius  CivîHs,  qui,  fuîvatit 
un  ufage  reçu  parmi  les  nations 
barbares  ,  avoit  fait  vœu  ,  au 
commencement  de  la  guerre ,  de 
laiffer  croître  fes  cheveux,  crut 
fon  vœu  accompli  ,  lorfqu'il  eut 
détruit  les  légions  de  Votera  ,  & 
il  rafa  fa  chevelure.  On  lui  im- 
pute d'avoir  fait  faire  à  fon  fils , 
encore  en  bas- âge ,  reflai  inhu- 
main de  fes  premières  armes ,  de 
fes âeches,  de  fes  traits,  fur  des 
prifonniers  Romains ,  qui  lui  fer- 
voient  de  but»  Ce  feroit  une  hor* 
rible  cruauté. 

Il  eft  remarquable  que  Clau« 
dius  Civilis  fut  attentif  à  ne  point 
s'engager  lui-même ,  &  à  n'en- 
gager aucun  Batave  envers  les 
Gaulois ,  par  la  prédation  du  fer- 
ment que  Ton  exigeoit  des  Ro- 
mains. Il  fe  réfervoit  fes  droits  & 
fes  prétentions  ;  &  s'il  lui  falloit 
un  jour  entrer  en  conteAation 
avec  les  Gaulois  pour  l'Empire  ^ 
il  comptoit  bien  que  les  forces  des 
Germains  &  1  éclat  de  fa  réputa^- 
tion  perfbnnelle  lui  feroient  aifé- 
ment  emporter  la  préférence»  Il 
fit  hommage  de  fa  Viâoire  à  la 
prétendue  prophéteffe  VcUeda  , 
qui  Tavoit  prédite. 

Claudius  Civilis  &  Tulius  Claf- 
ficus  ,  enflés  de  leurs  fuccès ,  dé- 
libérèrent s'ils  livrer  oient  au  pil- 
lage la  ville  de  Cologne*  Le 
goût  de  la  cruauté  &  l'avidité  du 
Butin  les  y  portoient  ;  la  politique 
les  retenoit.  Ils  fentoient  que  fon- 
dant un  nouvel  Empire  ,  rien  ne 
leur  étoit  plus  utile  que  la  réputa* 
tien  de  clémence.  D'ailleurs  ,  un 
motif  de  reconnoiffance  agit  fur 
le  cœur  de  Claudius  Civilis ,  dont 


CI  ,iy$ 

le  fils  s*étant  trouvé  à  Cologne 
dans  les  commencemens  des  trou- 
bles ,  n'avoit  éprouvé  de  la  part 
des  habitans ,  que  les  traitemens 
les  plus  favorables.  Cette  ville  fut 
donc  épargnée. 

Claudius  Civilis  entreprit  de 
gagner  à  fon  parti  les  peuples  du 
voifînage  ,  ou  de  réduire  par  la 
force  ceux  qui  voudroient  faire 
réiiftance.  Il  s'empara  du  païs  des 
Suniciens,  &  enrôla  leur  jeu neffe, 
qu'il  didribua  en  cohortes.  Com- 
me il  fe  préparoit  à  aller  plus  loin,' 
Claudius  Labéo  ,  fuivi.de  troupes 
levées  tumultuairement  parmi  les 
Nerviens  ,  les  Tongres  ,  &  les 
Bétafiens,  vint  à  fa  rencontra,  fie 
l'arrêta  au  pont  de  la  Meufe.  Pat 
l'avantage  de  ce  pofle ,  il  foutint 
fièrement  le  combat ,  jufqu'à  ce 
aue  les  Germains  ,  ayant  paffé  ce 
fleuve  à  la  nage  ,  vinrent  le  pren- 
dre en  queue.  En  même  tems ,' 
Claudius  Civilis  ,  foit  par  un  trUit 
d'audace  fubit,  foit  qu'il  eût  aupa- 
ravant concerté  cette  démarche  , 
s'avança  vers  les  Tongres,  6c 
leur  dit  en  élevant  la  voix  :  „  Nous 
M  n'avons  point  pris  les  armes, 
»  pour  acquérir  aux  Bataves  ôi  à 
n  ceux  de  Trêves  ,  l'empire  fur 
9>  les  nations.  Une  telle  arrogance 
»  eft  bien  éloignée  de  notre  pen-* 
»  féé.  Recevez  notre  alliance ,  je 
»  fuis  prêt  à  paffer  de  votre  côté , 
»  foit  que  vous  me  veuilliçz  pren- 
»  dre  pour  chef  ou  pour  foldat.  ce 
Ce  difcours  adroit  fit  impreffion 
fur  la  multitude  ;  &  déjà  les  fol- 
dats,  à  qui  il  étoit  adreffé,  remet- 
toient  leurs  épées  dans  le  four- 
reau ,  lorfque  Campanus  &  Ju-^ 
venalis ,  qui  tenoient  le  premier 

Si) 


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â76  CI 

rang  entre  les  Tongres  ,  vinrent 
offrir  à  Claudius  Civilis  les  fervi* 
ces  de  toute  la  nation.  Claudius 
Labéofe.fauvay  avant  que  d'être 
enveloppé.  Les  Bétafiehs  &  les 
Nerviens  fuîvirent  l'exemple  des 
Tongres  ;  &  Claudius  Civilis  » 
grolù  des  troupes  de  ces  trois 
peuples ,  fé  vit  au  comble  de  ia 
gloire  &  de  la  puiffance.  Tout 

Î>lioit  devant  lui ,  de  gré  ou  de 
brce. 

Les  nouvelles  de  ces  grands 
fuccèsy  que  la  renommée  enfloit 
encore  9  caufoientde  vives  inquié- 
tudes  aux  Romains.  Pétilius  Cé- 
rialis  ,  guerrier  hardi  &  entrepre- 
nant ,  qu'on  avoit  choifi  pour 
commander  dans  la  bafle-Ger- 
manie,  vint  fe  mettre  à  la  tête  des 
troupes  Romaines.  Une  vidoire 
qu*il  remporta  fur  ceux  de  Trê- 
ves f  obligea  ce  peuple  de  fe  fou- 
mettre.  Les  légions  ,  qui  avoient 
prêté  ferment  aux  Gaulois,  fe 
joignirent  aufli  à  l'armée  de  Péti- 
lius Cérialis.  Les  Langrois  firent 
la  même  chofe.  En  un  mot ,  toute 
la  Gaule  s'étoic  entièrement  déu- 
thée  du  parti  de  Claudius  Civilis 
&  de  Julius  Clafficus.  Ceux-ci , 
dans  ces  circonftafices ,  écrivirent', 
à  Pétilius  Cérialis  ,  quMs  fça- 
voienr  que  Vefpafien  étoit  mort , 
Guoique  l'on  s'efforçât  d'en  étouf- 
fer la  nouvelle;  qu'il  ne  refioit 
plus  aucunes  forces  à  la  ville  &L  à 
l'Italie  9  épuifées  par  les  maux  de; 
la  guerre  civile  ;  que  Mucien  & 
Domitien  n'étoit  que  de  vains 
noms ,  qu'il  fufEfoit  de  méprifer  ; 
que  û  Pétilius  Cérialis  vouloit 
prendre  l'empire  des  Gaules^  pour 
^ux,  ils  fe  renfermoient  dans  les 


CI 

bornes  des  territoires  de  leui^ 
peuples  ;  que  s'il  aimoit  mieux  le 
combat,  ils  ne  s'y  refuferoient 
pas.  Pétilius  Cérialis  ne  fit  aucune 
réponfe  à  Claudius  Civilis  &  à 
Julius  ClafCcus ,  &  il  envoya  à 
Domitien  le  porteur  de  leurs  let- 
tres. 

Claudius  Civilis ,  comprenant 
qu'il  falloit  combattre,  ramafla 
toutes  ks  forces ,  ôc  de  toutes 
part»  les  troupes  des  peuples  qui 
le  reconnoiffoient  pour  cnef ,  fe 
rendirent  auprès  de  lui*  Pétilius 
Cérialis ,  dont  le  vice  étoit  la  né- 
gligence ,  n'empêcha  point  la  réu- 
nion de  tous  ces  pelotons  qu'il  lui 
'  eût  été  aifé  de  battre  féparément* 
Seulement ,  comme  il  voyoit  que 
l'armée  des  ennemis  groffiffoit 
beaucoup,  il  ajouta  des  fortifica- 
tions à  fon  camp  ,  qui  jufques>là 
n'en  avoit  aucune.  Claudius  Civi- 
lis tint  confeil  de  guerre ,  &  les 
avis  fe  trouvèrent  partagés.  Le 
fien  étoit  que  l'on  attendît  les  fe- 
cours  qui  dévoient  venir  des  pais 
au  de-là  du  Rhin ,  &  dont  la  ter- 
reur écraferoit  l'armée  Romaine. 
Julius  Tutor  au  contraire  préten- 
doit  que  les  délais  étoient  favora- 
bles aux  Romains,  à  qui  il  arrivoit 
de  puiffans  renforts.  Ce  dernier 
avis  prévalut ,  parce  que  Julius 
Clafficus  Tembraffa ,  &  on  fe  mit 
fur  le  champ  en  devoir  de  l'exé- 
cuter. Les  Bataves  &  leurs  alliés 
vinrent  en  bon  ordre  attaquer  le 
camp  des  Romains. 

Pétilius  Cérialis  ne  les  attendoît 
pas  ;  il  n'avoit  pas  même  paffé  la 
nuit  dans  fon  camp.  On  vint  lui 
annoncer ,  pendant  qu'il  étoit  en« 
core  dans  fa  chambre  à  Trêves»  fiç 


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CI 

dans  fon  lit ,  que  les  ennemis 
avoient  furpris  le  camp ,  &  que^ 
les  Romains  étoient  vaincus.  Il  ne 
voulut  pas  croire  cette  nouvelle^; 
il  accula  de  timidité  ceux  qui  la 
lui  apportoient.  Mais  bientôt  »  il 
fe  convainquit  par  Tes  yeux  de  la 
vérité  du  fait.  En  arrivant  au 
camp ,  il  trouva  les  lignes  forcées, 
la  cavalerie  mife  en  déroute ,  &  le 
pont  fur  la  Mofelle ,  qui  joignoît 
la  ville  à  la  rive  gauche  du  fleuve^ 
occupé  par  les  ennemis»  Pétilius 
Cérialis  ,  intrépide  dans  un  (î 
grand  danger ,  faifilTant  les  fuyards 
par  le  bras,  ne  fe  ménageant  point 
&  fe  jettant  au  plus  fort  de  la  mê- 
lée, par  cette  heureufe  témérité 
raflembla  les  plus  braves  autour 
de  lui ,  &  commença  par  repren- 
dre le  pont ,  fur  lequel  il  plaça  un 
bon  corps  de  garde.  Ce  commen-. 
cernent  d'avantage  décida  du  fuc- 
cès.de  Taftion,  En  vain,  Julius 
Tutor ,  Claudius  Civlfis ,  &  Ju- 
lius Clafficus ,  tenterent-ils  de  ra- 
nimer le  courage  de  leurs  com- 
battans  par  les  exhortations  les 
plus  puifTantes.  Vainqueurs  un 
moment  auparavant,  les  Bataves 
&  les  alliés  prirent  la  fuite.  La 
caufe  de  leur  défaite  fut  leur  avi- 
dité pour  le  pillage.  Au  lieu  de 
pouffer  les  Romains»qu*ils  avoient 
furpris  &  mis  en  défordre ,  ils  ne 
fongerent  qu*à  fe  difputer  les  Uns 
autres  leurs  dépouilles  ,  6c  ils  leur 
donnèrent  ainfi  le  tems  de  fe  re- 
connaître &  de  fe  rallier.  Pétilius 
Cérialis  avoit  prefqu.e  ruiné  les 
affaires  par  fon  défaut  de  vigi- 
lance i  il  les  rétablit  par  fon  in- 
trépidité ,  &  profitant  de  la  for- 
^^^^»  il  pourfuivic  ki  ennemis» 


CI  ^77 

força  leur  camp  ,  &  les  détrnifir. 

En  même  tems  ,  ceux  de  Co- 
logne voulant  rentrer  dans  l'al- 
liance des  Romains,  envoyèrent 
offrir  à  Pétilius  Cérialis  de  lui  re- 
mettre entre  les  mains  la  femme 
&  la  fœur  de  Claudius  Civilis»  & 
la  fille  de  Julius  Clafficus,  qui 
avoient  été  laiffées  chez  eux  corn- 
tne  des  gages  d'alliance  6c  d  ami* 
tié.  En  même  tems  ,  Ils  implo- 
roient  fon  fecours  contre  un  enne- 
mi irrité,  dont  ils  craignoient  la 
vengeance.  En  effet ,  Claudius 
Civilis  avoit  tourné  de  ce  côté» 
comi^tant  trouver  à  Tolbiac,  dans 
le  territoire  de  Cologne  ,  une  co- 
horte de  Cauques  &  de  Frifons  , 
trèii-ardente  pour  .fon  fervice. 
Mais ,  il  apprit  en  chemin  que 
cette  cohorte  avoit  péri  par  la^ru- 
fe  des  habitâns  de  Cologne  y  qui, 
ayant  didribué  des  viandes  &  da 
vin  en  abondance  à  ces  Germains, 
les  enivrèrent  »  &  mirent  enfuite 
le  feu  à  la  ville ,  dont  ils  fermè- 
rent les  portes  ;  enforte  qu'il  n'en 
échappa  aucun.  Sur  cet  avis  » 
Claudius  Civilis  changea  de  route 
ÔC  de  deffein ,  d'autant  plus  qu'il 
fçut  que  le  général  Romain  ac. 
couroit  en  diligence  pour  fauver 
des  alliés  qui  avoient  befoin  de  fon 
fecours. 

Une  autre,  inquiétude  furvint  à 
Claudius  Civilis.  La  quatorzième 
légion  étoit  arrivée  de  la  grande- 
Bretagne  >  &  il  craignoit  que  fou- 
tenue  de  la  flotte  qui  Tavoit  ame- 
née, elle  ne  tombât  fur  les  Bataves 
du  c6té  où  leur  iile  fe  termine  à 
l'Océan.  Il  fut  bientôt  délivré  de 
cette  crainte.  Fabius  Prifcus,com- 
n\^ndant  de  la  légion ,  la  condi^*; 
S  11) 


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^7»  C  I 

fit  fur  les  terres  des  Nerviens  & 
^des  Tongres  ,  qui  rentrèrent  fous 
robéiflance  des  Romains.  La 
âotte  fut  attaquée  elle>même  & 
battue  par  les  Caninéfates ,  qui" 
prirent  ou  coulèrent  à  fond  un 
grand  nombre  de  bâtimens.  Et 
tout  de  fuite  d'autres  fuccès  reie- 
verent  les  efpérances  de  Claudius 
Civilis*  Les  mêmes  Caninéfates 
mirent  en  fuite  une  grande  multi- 
tude de  Nerviens ,  qui ,  par  zèle 
pour  les  Romains ,  s'étoient  at- 
troupés, 6c  avoient  voulu  prendre 
part  à  la  guerre.  Julius  Claflîcus 
défit  un  détachement  de  cavalerie, 
que  Pétilius  Cérialis  avoir  envoyé 
à  Nuys.  Ce  n  étoit  pas.là  des  per- 
tes confidéra^les  pour  les  Ro- 
mains ;  mais  ,  venant  coup  fur 
coup ,  elles  faifoient  tort  à  l'éclat 
de  ja  viûoire  qu'ils  venoient  de 
remporter. 

Claudius  Civilis ,  ayant  trouvé 
des  reflburces  au  de- là  du  Rhin 
,  pour  réparer  fes  pertes ,  vint  avec 
vne  nombreufe  armée  fe  camper 
à  Vétéra ,  pofte  avantageux  par 
lui-même ,  &  qui  rappellant  aux 
Bataves  les  grands  fuccès  qu'ils  y 
avaient  remportés  ,  pouvoit  par 
ce  fouvenir  échauffer  leurs  coura- 
ges. Pétilius  Cérialis  l'y  fuivit,  ac- 
cru d'un  puifFant  renfort.  ' 
Ni  l'un  ni  l'autre  des  deux 
chefs  n'aimoit  à  temporifer;  6c  ils 
en  feroient  tout  d'un  coup  venus 
aux  mains ,  fi  la  nature  du  terrein 
qui  les  féparoit  n'y  eût  mis  obfta- 
de.  Cétoit  une  plaine  humide  6c 
fangeufe  par  elle-même ,  6c  de 
plus  inondée  des  eaux  du  Rhin , 

3ue  forçoit  de  s'y  répandre  une 
igue  conilruite  par  Claudius  Ci- 


CI 

vilis,qm  gênoirle  cœur  du  fleuve^ 
6c  le  rejettoit  de  ce  côté.  Un  pa- 
reil champ  de  bataille  étoît  biea 
contraire  au  foldat  Romain ,  pe- 
famment  armé  ,  6c  en  danger  de 
perdre  pied  à  chaque  inftant ,  6c 
d'être  obligé  de  fe  mettre  à  U 
nage  ;  au  lieu  que  les  Germains  » 
accoutumés  dès  l'enfance  à  tra- 
verfer  hardiment  les  fleuves,  trou- 
voient  encore  dans  la  légèreté  de 
leur  armure  6c  dans  la  grandeur 
de  leur  taille ,  un  fecours  pour 
s'élever  au  deflus  des  fiots. 

Les  Bataves  ,  qui  feiitoîent 
leur  avantage ,  harceloient  fans 
cefTe  les  Romains  ;  6c  enfin ,  il 
s'engagea  un  combat  ,  plutôt  par 
Taudace  des  particuliers ,  que  par 
le  commandement  des  chefs.  Lefs 
plus  impatiens  de  l'armée  Ro- 
maine s'avancèrent  contre  les- en- 
nemis ,  qui  les  défioient  ;  fie.  bien- 
tôt ils  fe  trouvèrent  dans  une 
trifle  pofition ,  tombant  dans  des 
creux  fi  profonds ,  qu'ils  avoient  9 
hommes  6c  chevaux ,  de  Teau  par 
defFus  la  tête.  Les  Germains,  qui 
connoifToient  les  gués,  ie  portoient 
aifément  de,  quel  côté  ils  vou- 
loient  ;  6c  le  plus  fouvent,  au  lieu 
d'attaquer  les  ennemis  de  front, 
ils  les  prenoient  en  fianc  ou  en 
queue.  Les  Romains ,  accoutumés 
à  combattre  de  pied  ferme  ,  ne 
fe  reconnoifToient  plus  au  milieu 
des  courans  ,  par  lefquels  ils 
étoient  emportés  6c  dîfperfés  çà 
6c,  là  ,  comme  il  arrive  dans  un 
combat  naval  ;  6c  foit  qu'ils  per- 
dident  terre,  ou  qu'ils  trou vafient 
un  appui  folîde ,  fur  lequel  ils 
cherchaffent  à  s'établir^  confon- 
dus pêle-mêle ,  les  bleffés  avec 


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Cî 

ceux  qui  ne  l'étoîent  pas ,  les  bons 
nageurs  avec  ceux  qui  ne  fçavoîenc 
point  nager ,  ils  s'embàrrafToient 
mutuellement  ;  &  loin  de  fe  prê- 
ter fècours,  ils  naifoient  à  leur 
conunune  défenfe.  Le  carnage  ne 
fut  pourtant  pas  aufli  grand  que 
le  trouble  &  le  défordre ,  parce 
que  les  Bataves  n*oferent  pour- 
fuivre  les  Romains  au  de-U  de 
l'endroit  inondé ,  &  fe  retirèrent 
dans  leur  camp. 

L'événement  de  ce  combat  en- 
gagea les  deux  chefs ,  par  des  mo- 
ti6  oppofés ,  a  fe  hâter  d'en  venir 
à  une  aâion  générale.  Claudius 
Civilis  vouloir  pouffer  fa  bonne 
fortune  ;  Pétilius  Cérîalis  fe  pro- 
pofoit  d'effacer  fon  ignominie.  Les 
Bataves  étoient  enhardis  par  lé 
Succès, les  Romains  aiguillonés  par 
la  honte.  Les  uns  pauerent  la  nuit 
dans  les  cris  de  joie  &  les  chants 
de  triomphe  ,  les  autres  dans  dés 
fentimens  d'indignation  6i  le  défir 
de  la  vengeance. 

Le  lendemain  ,  les  deux  armées 
fe  rangèrent  en  bataille.  Pétilius 
Cérialis  mit  en  première  ligne  fes 
cohortes  auxiliaires ,  accompa- 
gtiées  de  la  cavalerie  fur  les  ailes. 
Les  lédons  formèrent  la  féconde 
ligne ,  oc  il  fe  réferva  un  corps  de 
,  troupes  d'élite ,  pour  les  befoins 
imprévus.  Claudius  Civilis  ne  s'é- 
tendit point  en  front ,  mais  diftri- 
buafes  troupes  en  bataillons  poin- 
tus ,  les  Bataves  &  les  Cugernes 
à  droite ,  les  fecours  de  la  grande 
Germanie  à  gauche*  appuyée  au 
fleuve. 

Les  Généraux  parcourant  les 
rangs ,  avant  que  le  combat  comr 
ii^^çât ,  animoient  les  foldats  par 


CI  ^79 

tous  les  motifs  que  fourniffoient 
les  circonftances.  La  vue  de  Vé- 
téra  eioît  un  puiffant  encourage- 
ment pour  le  refte  des  légions 
Germaniques ,  &  Pétilius  Céria- 
lis leur  faifoit  fentir  quel  intérêt 
ils  avoient  à  reconquérir  un  camp 
qui  leur  appartenoit ,  une  rive  ea 
poffeffion  de  laquelle  ils  s'étoient 
vus  fi  long-tems.  Claudius  Civi- 
lis retournoit  en  faveur  des  fiens 
ce  même  motif  en  fens  contraire* 
i>  Ce  champ  de  bataille ,  leur  dit- 
i>  il ,  efl  déjà  témoin  de  votre  va- 
»  leur.  Vous  êtes  poftés  fur  les 
»  monumens  de  votre  gloire ,  & 
n  vous  foulez  aux  pieds  les  cen- 
n  dres  &  les  offemens  des  légions 
n  que  vous  avez  exterminées. 
n  Vos  ennemis  font  dans  un  cas 
n  bien  différent.  De  quelque 
n  côté  qu'ils  portent  leurs  regards, 
9>  tout  leur  rappelle  les  idées  les 
»  plus  finiftres ,  ignominie  y  dé- 
n  laftre ,  captivité.  Ne  vous  ef- 
»  frayez  point  du  fuccès  peu 
19  avantageux  de  la  bataille  d^ 
»  Trêves  ;  c'eft  la  victoire  des 
n  Germains  qui  leur  nuit.  Ils  fe 
M  font  trop  hâtés  de  vouloir  en 
n  jouir  ,  en  pillant  ceux  qu'ils 
n  avoient  défaits  ;  &  elle  leur  a 
n  échappé.  Mais ,  depuis  ,  com- 
»  bien  de  profpérités  ont  com- 
n  penfé  cet  accident  l  Toutes  les 
»  mefures  que  pouvoir  prendre 
»  l'habileté  d'un  chef,  ont  été 
n  prifes.  Vous  combattez  dans 
99  des  plaines  marécageufes  dont 
99  vous  connoiffez  le  fol ,  &  qui 
99  forment  un  périlleux  embarras 
99  pour  les  ennemis.  Vous  avez 
99  devant  les  yeux  le  Rhin  &  les 
19  dieux  de  la  Germanie.  Allez  au 

Si? 


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^8o  CI. 

9)  combat  fous  leurs  aurplces^vous 
n  rappellant  le  fouvenir  de  vosi 
»  femmes  ,  de  vos  mères  ,  de 
»  vos  enfans.  Ce  jour  comblera 
»  la  gloire  de  vos  encêtres  ,  ou 
99  vous  couvrira  3'ignOminie  dans 
19  toute  la  poflé^-ité.  a 

Les  Barbares  ayant  applaudi  à 
ce  difcours  par  des  mouvemens 
expredifs  à  leur  manière  ,  par  des 
danfes  ,  par  un  horrible  cliquetis 
de  leurs  armes ,  le  combat  com- 
mença ,  non  pas  de  près.  On  fe 
lança  d*abord  des  pierres ,  des 
balles  de  fer  ou  de  plomb,  des 
traits  de  toute  efpèce.  Enfin ,  les 
efforts  que  faifoiént  les  Bataves 
pour/attirer  les  Romains  (Jans  le 
marais  ,  réuffirent.  On  en  vint  à 
fe  battre  au  milieu  des  eaux  y  6c 
la  première  ligne  des  Romains  fut 
culbutée.  Il  fallut  que  les  légions 
rdevaflent  les  cohortes  auxiliai- 
res >  oui  ne  pouvoient  plus  tenir. 
Elles  ment  ferme ,  ôc  arrêtèrent 
TeQnemi  ',  mais ,  ce  qui  décida  de 
la  viftoire ,  fut  un  friouvement 
que  fît  à  propos  Pétilius  Cérialis  , 
fur  un  avis  qui  lui  fut  donné  par 
un  transfuge  Batave.  Ce  transfu* 
ge  lui  indiqua  un  pafTage  folide  & 
mal  gardé  fur  fa  gauche,à  Textrê- 
mité  du  marais  ^  6c  il  s*oiFrit,  û  on 
lutdonnoif  quelque  cavalerie,d*al- 
let  prendre  en  queue  les  ennemis. 
Pétilius  Cérialis  détacha  deux  ré- 
gimens  de  cavalerie,  qui,  conduits 
par  le  Batave ,  tournèrent  la  droite 
de  Tarmée  ennemie ,  &  Tattaque- 
rent  par  derrière.  Le  cri  qui  s*éle- 
▼a  en  cet  endroit,  s'étant  porté 
aux  légions ,  les  encouragea  à 
prefTer  en  front  avec  une  nou- 
velle ardeur.  Les  Germains  ne 


Cl 

purent  réfifter  à  cette  double  atta- 
que ;  enfoncés  &  rompus^  ils  s'en- 
fuirent vers  le  Rhin.  La  guerre  au- 
roit  été  terminée  par  ce  combat , 
ù  la  flotte,  que  les  Romains  te- 
noient  fur  le  Rhin  ,  eût  fait  dili- 
gence pour  couper  les  fuyards.  La 
cavalerie  même  ne  les  pourfuivic 
pas  loin  ,  parce  qu'il  furvint  une 
groffe  pluie ,  ôc  que  la  nuit  appro- 
choit.  Âinfi,  les  Germains  vaincus 
fe  retirèrent  à  leur  aife  ;  &  leur 
armée  fut  plutôt  diflipée  que  dé- 
truite. 

Le  fruit  de  cette  viftoîre  ne 
laifTa  pas  que  d'être  confidérable 
pour  les  Romains.  Claudius  Ci- 
vilis  abandonna  tout  le  païs  qu'il 
tenoit  hors  de  l'ifle  des  Bataves , 
6c  il  fe  renferma  dans  cette  ifle 
fa  patrie  ;  mais  ,  après  avoir  pris 
la  précaution  de  renverfer  la  di- 
gue ,  que  Drufus  avoit  autrefois 
cônftruite  à  l'endroit  où  le  Rhin 
commence  à  fe  divifer  en  deux 
bras.  Ces  bras  font  inégaux.  La 
pente  des  eaux  fe  porte  vers  le 
Vahal;  Si  le  bras  droit ,  qui  con- 
ferve  le  nom  de  Rhin  ,  demeure 
le  plus  foible.  Drufus ,  aux  vues 
duquel  il  c^nvenoit  d'avoir  beau- 
coup d*eau  dans  ce  bras  droit,qu'il 
joignit  à  rliTel  par  un  canal  qui 
fubfide  encore  aujourd'hui ,  avoit 
dirigé  fa  digue  de  façon  qu'elle 
rejettoit  les  eaux  vers  la  droite. 
Claudius  Civilis  ,  ayant  un  inté- 
rêt contraire  ,  la  ruina  ;  Si  de 
cette  opération  il  tira  deux  avan- 
tages. En  grofBflfant  le  Vahal ,  il 
fortifîoit  la  barrière  ,  qui  le  fépa* 
roit  des  Romains  ;  6c  le  bras  qui 
bornoit  fon  ifle  au  Septentrion, 
fe  trouvant  réduit  prefque  à  ie€> 


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CI 

lui  ouvroîtune  commonîcatîon  H- 
hre  avec  la  Germanie.  Il  y  pafla, 
aufli-bien  que  Julius  Tutor ,  & 
Julius  Clafficus,  6c  cent  treize 
Sénateurs  de  Trêves.  L'argent  , 
qu'ils  diftribuerent  parmi  les  Ger- 
mains ,  la  commifération,  le  goût 
que  ces  6ères  nations  avoiencpour 
les  hazards  de  la  guerre ,  tous  ces 
motifs  concoururent  à  procurer  de 

Euidans  fecours  à  Claudius  Civi- 
s. 

Pendant  qu'il  étoit  occupé  à  les 
raflembler,  Pétilius  Cérialis  pro- 
fita de  fon  abfence  pour  s'établir 
dans  l'ifle  des  Bataves.  Il  s'y  em- 
para de  quatre  poftes  importans , 
Arenacum,  Batavodurom,  Grin- 
nès  ,  &  Vada  ;  &  pour  s'affurer  la 
pofTeffion  de  ces  lieux ,  qui 
étoient  les  clefs  du  païs^l  y  plaça 
des  corps  de  troupe»  confidéra- 
bles. 

Claudîas  Civilis ,  avac  les  for- 
ces qu'il  avoit  tirées  de  Germanie, 
fe  crut  en  état  d'attaquer  en  un 
feul  jour  ces  quatre  poftes  à  la  fois. 
Il  ne  fe  promettoit  pas  de  réuflir 
par  tout  également.  Mais  ,  en 
o(ant  beaucoup  ,  il  efpéroit  qu'au- 
moins  quelqu'une  de  fes  tentati- 
ves ne  leroit  pas  infruélueufe  ;  & 
comme  il  connoiflbit  Pétilius  Cé- 
rialis pour  un  général  hardi  & 
peu  précautionné ,  il  ne  croyoit 
pas  impoflible  de  le  furprendre , 
&  de  fe  rendre  maître  de  fa  per- 
fonne ,  pendant  que  fur  les  diffé- 
rens  avis  qu'il  recevroit ,  il  cour- 
roit  de  l'un  à  l'autre  des  endroits 
attaqués.  Claudius  Civilis  ne  força 
aucun  des  quatre  poftes  qu'il 
affaillit  ;  il  courut  même  rifque , 
en  voulant  retenir  les  fuyards  ^ 


CI  ±if 

d'être  fait  prifonnier.  Maïs ,  il  ne 
laifTa  pas  de  tuer  du  monde  aux 
Romains  ,  6c  il  leur  échappa  en 
pafTant  le  Rhin  à  la  nage. 

Les  affaires  des  Germains  de- 
venoieht  de  jour  en  jour  plus  cri- 
tiques. Claudius  Civilis  tenta^  pour 
dernière  reflburce  ,  un  combat 
naval  contre  les  Romains  à  Tem- 
bouchure  de  la  Meufe  ,&  n'ayant 
pas  réufîi ,  il  fe  découragea  entiè- 
rement ;  il  abandonna  une  cntre- 
prife  malheureufe  ,  &  fe  retira  au 
de- là  du  Rhin.  Pétilius  Cérialis 
ravagea  l'ifle  des  Bataves^  &  y 
exerça  toutes  fones  d'hofiilités  » 
épargnant  néanmoins ,  fdtvanc  une 
rufe,  fouvent  pratiquée  par  les 
Généraux  ,  les  terres  de  Claudius 
Civilis. 

Cependant  ,  la  faifon  s'avan- 
çoit  ;  &  les  pluies  abondantes 
qui  furvinrent  ,  ayant  grofîi  le 
fleuve  ,  il  fe  déborda  dans  l'ifle. 
Si  la  convertit  en  un  grand  étang. 
Les  Romains  qui  n'avoienc  pas 
pfévu  cet  inconvénient ,  fe  trou- 
vèrent fort  embarralTés.  Leur  flotte 
étoit  loin  ;  ils  n'avoient  point  de  vi- 
vres ;  &  dans  un  païs  plat  &  uni,qui 
n'a  aucune  inégalité,aucune  colline, 
ils  étoient  privés  de  toutes  refFour- 
ces  pour  mettre  leur  camp  à  l'abri 
de  l'inondation.  Ils  pouvoient  périr, 
Cl  les  Germains  les  eufTent  atta- 
qués en  cet  état ,  comme  ils  ^ 
eurent  la  penfée*  Claudius  Civi- 
lis fe  fit  dans  la  fuite  un  mérite 
auprès  des  Romains  d'avoir  fçu 
en  détourner  fes  compauiotes. 
Peut-être  difoit-il  vrai  ;  car ,  il 
fongeoit  alors  à  faire  fa  paix. 

ïl  étoit  las  de  lutter  contre  la 
fortune  j  &  l'efpérance  de  la  vie. 


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ji82  Cl. 

dit  Tacite,  amollit  fouveot  même 
les  grandes  âmes.  Il  demanda  donc 
une  entrevue  à  Pétilius  Cérialis, 
•  mais  avec  des  pricaations  fingu- 
lieres  pour  fa  fiireté.  On  rompit 
un  pont  fur  une  rivière  ^  dont  le 
nom  4  altéré  dans  Tacite  ,  paroît 
devoir  être  celui  d'une  des  bran- 
ches du  Rhin.  Les  deux  Chefs  s'a- 
vancèrent aux  deux  extrémités 
du  pont  rompu  qui  fe  regardoient; 
&  Claudius  Civilis  fit  un  difcours , 
dont  nous  n'avons  que  le  com- 
mencement dans  Tacite  y  parce 
que  cet  excellent  hiftorien  nous 
manque  tout  d  un  coup.  Nous  y 
voyons  que  Claudius  Civilis  em- 
ploya la  faude  &  miférable  excufe 
d'avoir  pris  les  armes  pour  la  que- 
relle de  Vefpafien ,  &  il  finit  fans 
doote  par  implorer  la  clémence 
du  vainqueur.  La  foumiflion  de 
Claudius  Civilis  fut  reçue  par  le 
Général  Romain  ;  &  Ton  doit 
croire  que  les  autres  chefs  des 
rebelles  fuivirent  l'exemple  de 
celui  qui  tenoit  entr'eux  le  premier 
rang.  La  paix  fut  rétablie  dans 
ces  contrées ,  &  l'on  n'y  vit  de 
long-tems  renaître  de  nouveaux 
troubles. 

Ce  que  nous  venons  de  racon- 
ter dans  cet  article  de  la  guerre  de 
Claudius  Civilis  contre  les  Ro- 
mains ,  fe  rapporte  à  Tan  de  J. 
C  69 ,  &  à  l'année  fuivante. 

CIVISMARUS,  Civîfmarus, 
(tf)  roi  célèbre  des  Gaulois.  Ce 
Prince  ,  s'étant  déclaré  pour  les 

O)  Tit.  Lîv.  L.  XXtV.  c.  41. 

(h)  CxC  de  Bell.  Gall.  L.  I.  p.  i}, 
14.  L.  VII.  pag.  s8o,  a8i  ,  ft8ft  ,  18)  , 
3  51 ,  255.  Plin.  Tom.  I.  pag.  148  ,  149, 
T.  II.  pag.  548,  Xacit.  Annal,  L.  III.  c. 


Carthaginois  durant  la  féconde 
guerre  Punique  4  fut  tué  dans  un 
combat ,  qui  fe  livra  en  Efpagne 
près  de  la  ville  d'Aurinx.  Voyei^ 
Aurinx. 

CIVITAS ,  {b)  terme  Latin. 
Nous  n'en  avons  point  dans  notre 
langue  de  propre  pour  exprimer 
celui-ci ,  dans  le  fens  que  les  an- 
ciens Auteurs  lui  donnent  ;  car , 
il  ne  fe  prend  pas ,  comme  on  l'a 
fait  au  déclin  de  l'empire  Romain, 
pour  une  ville ,  mais  tout  enfem- 
ble  pour  l'étendue  ou  jurifdiôion , 
état  ou  diocèfe  entier  d'un  peuple» 
&  pour  le  peuple  même ,  ou  mê- 
me la  plupart  du  tems  ,  pour  un 
corps  formé  de  plufieurs  peuples 
confédérés. 

Que  Civîtas  foît  autre  chofe 
que  Urbs  &  Oppidum  ,  ville  % 
c'eft  ce  que  Céfar  montre  diftinc- 
tement ,  lorfqu'il  dit  :  Cœfar  ad 
Oppidum  Avaricum  ,  quod  erat 
maximum  munitijjimumque  infini* 
bus  Biturigum  ,  atque  agriferti* 
lijffîma  regione  ,  profeélus  eft  ; 
qubd  eo  oppido  recepto  ,  Civita" 
tem  Biturigum  fe  in  potefiatem  re^ 
daéiurum  confidebat  ;  c'eft- à- dire, 
i>  Céfar  prit  fon  chemin  vers 
n  Bourges  ,  qui  étoit  la  plus 
n  grande  &  la  plus  forte  ville, 
19  &  dans  le  quartier  le  plus  fer- 
»  tile  de,  tout  le  Berri  ;  parce 
n  qu'en  la  prenant ,  il  efpéroit  de 
))  réduire  en  fon  pouvoir  toute 
I»  Ja  Cité  dès  peuples  Bituriges , 
i>  c'eft-à-dire ,  toute  l'étendue  du 

44.  Ptolem.  L.  II.  c.  7.  ér  fetf,  Jofcph. 
de  Bell.  Judaïc.  p.  806.  Mém.  dePAcad. 
des  Infcript.  &  Bell.  Lect.  Tom.  XVIU. 
p.  51.  <<r  friv,  T.  XIX.  p.  495 ,  67»! 


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CI 

•>  Berri.  ci  Et  lui  peu  plus  bas  îl 
ajoute  :  Ddiberatur  de  Avarico  in 
communi  concilio^inccndi  placer tt^ 
an  défendu  Procumbunt  Gallis 
omnibus  ,  adpedes  ,  Biturges  ;  ne 
pulcherrimam  prope  totius  Gallia 
urbem^  qua  ,  &prafidio  ,  &  orna" 
mento  ,  fit  Civitati  ,  fuis  manibus 
fuccendere  cogerentur.  n  On  pro- 
II  pofe  en  plein  confeil ,  s'il  falloit 
91  brûler  Bourges  ou  la  défendre  ; 
»  ceux  du  pais  fe  jetterent  aux 
Il  pieds  de  cous  les  Gaulois ,  Ôc 
n  les  fupplierent  qu'ils  ne  fuiïent 
Il  pas  contraints  de  brûler  de 
Il  leurs  mains  la  plus  belle  ville 
n  de  toute  la  Gaule ,  &  qui  étoit 
M  la  fortereffe  6c  l'ornement  de 
»  fon  État.  «  L'on  voit  claire- 
ment dans  ces  paroles ,  que  Civi- 
tas  eft  autant  différent  d'Oppi- 
dum  &  à'Urbs ,  qu'un  tout  diffère 
de  fa  partie  ;  &  Ton  peut  remar- 
quer par  les  fuivantes ,  que  l'éten- 
due de  païs ,  comprife  fous  ce 
nom  Civitas  ,  contenoit  fonvent 
plufieurs  villes  »  puifque  le  m^me 
Auteur  dit  dans  un  autre  endroit  : 
C^no  die  amplius  XX  Urbes  Bi^ 
turigum  incenduntur» 

Comme  l'on  a  pris  Civitas  pour 
un  peuple  ,  Civitates  a  été  pris 
pour  plusieurs  ;  ce  qui  fe  trouve 
encore  nettement  dans  Céfar  , 
lorfqu'il  fait  le  dénombrement 
général  des  gens  de  guéVre ,  que 
chaque  Civitas  de  voit  fournir  con- 
tre Céfar  lui-même  :  Univerfis 
Civitatibus  qua  Oceanum  attin-' 

P^nt quo  funt  in  numéro  Cu- 

riofolites  ,  Rhedones,  Ambibarii  , 
Cadetes  ^  Ofifmii  ,  Lemovices  ^ 
l^rmlli  ,  Sena  [  mïllia']  ;  c'eft-à- 
dire«  Il  A  toutes  les  cités  qui  font 


;  c  I         28} 

».  fur  l'Océan  ,  entre  lefquelles 
Il  font  celles  des  Curie iblites  , 
Il  des  Rhédons  ,  des  Ambiba- 
11  riens  ,  des  Cadetes ,  des  Ofif- 
Il  miens ,  des  Lemovices  y .  des 
Il  Unelles  ,  il  fut  commandé  de 
Il  fournir  fix  mille  hommes  cha- 
II  eu  ne.  a  Or  ,  il  eft  clair  que 
Curiofplites  y  Rhedones  ,  6cc,  font 
autant  de  peuples. 

Pline  fe  fert  encore  du  mot  de 
Civitas  au  même  fens  que  Céfar  , 
en  ces  termes  :  Tungri  Civitas 
Gallia  f>ntem  habet  infignem  .... 
ferruginei  faporis ,  où  il  entend 
par  cette  fontaine  les  eaux  de 
Spâ  y  qui  font  dans  le  territoire  , 
ou  plutôt  dans  le  diocèfe  ,  & 
non  dans  la  ville  de  Tongres. 
De  même  encore  ailleurs,  &  auflli 
clairement  :  Oppidum  Vediantio^ 
rum  Civitatis  Cemelion,  n  Cémé- 
n  lion  ,  ville  de  la  Civitas  des 
Il  Védiantiens.  a  Et  encore  :  ^- 
contiorum  Civitatis  fœderata  duo 
capita,  Vafto  &  Lucus  Augufti^ 
Il  Vaifon  &  Luc  font  les  deux 
Il  principales  places  de  la  Civitas 
n  ou  de  l'état  des  Vocontiens.  u 

La  différence,  qui  eft  encre  Ci- 
vitasy  &  Urbs  &  Oppidum  ,  étant 
connue ,  il  eft  bon  de  voir  en  quoi 
ce  même  mot  Civitas  diffère  de 
Pagus,  Ces  Civitas ,  ou  peuples 
de  la  Gaule ,  étoîent,  félon  Tacite, 
au  nombre  de  foixanie- quatre. 
Ptoléméé  n'en  met  à  la  vérité  que 
foixante  ;  fçavoir  ,  dix-fept  en 
Aquitaine ,  vingt-quatre  dans  la 
Lyonnoife  ,  &  dix-neuf  dans  la 
Belgique  ;  mais  ,  y  en  ayant  réel- 
ment  vingt-trois  dans  la  Belgique 
au  lieu  de  dix-neuf,  il  eft  facile 
par-là  d'accorder  ces  deux  Au- 


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^84  C I    • 

tcnrs.  Ces  foîxante- quatre  peuples 
eu  Civitatesy  étoient  divifés  cha- 
cun, in  plures plagos ,  en  plufieurs 
cantons.  Céfar  dit  :  Omnis  Civitas 
Uelvetia  in  quatuor  pa^o s  dïvifa 
efi;  n  Les  Helvétiens  ou  Tétat  des 
»  Helvétiens  eft  divifé  en  quatre 
p  cantons,  u  On  en  peut  conclu» 
re  que  les  autres  Civitates  des 
Gaules  étoient  aufîi  divifées  cha-  * 
cune  en  différens  cantons  ;  les 
DDCs  en  ayant  plus  ,  les  autres 
moins.  Et  ces  cantons  étoient 
quelquefois  fi  grands  &  fi  puîf- 
fans ,  que  fou  vent  ils  ont  été  pris 
pour  dès  peuples  ;  comme  il  fe 
voit  en  Tigurinus  Pûgus  ,  qui 
étoit  un  canton  du  païs  des  Hel- 
vétiens ,  &  que  Céfar  appelle 
dans  la.  fuite  Tigurini  ,  comme 
on  peuple  entier  de  ce  nottu',C*eft 
de-Ià  fans  doute  que  Plutarque  , 
dans  la  vie  de  Céfar,  dit  qu'il  avoit 
dompté  dans  les  Gaules  trois  cens 
nations  ;  &  que  Jofephe  affure  que 
la  Gaule  étoit  peuplée  de  trois  cens 
quinze  nations ,  ce  nombre  de  na- 
tions n  étant  que  les  pagi  ou  païs 
des  foixante-quatre  Civitates. 

On  pourroit*j  pour  une  plus 
grande  clarté  ,  appeller  Pagi  de 
petits  peuples  ,  &  les  Civitates  de 
grands  peuples  ;  mais  ,  une  chofe 
a  laquelle  il  faut  prendre  garde  , 
c'eft  que  les  mots  Civitas  &  Pagus 
/ont  quelquefois  donnés  fi  confu- 
fément  par  d'anciens  Auteurs  & 
fur  tout  par  Pline ,  que  le  plus 
fouvent  on  n'y  peut  difcerner  les 
uns  d'avec  les  autres  ,  principale- 
»ient  avec  Ptolémée ,  qui  ne  don- 
ne que  les  grands  peuples  ou  Ci- 
ritates» 

La  façon  ^  dont  M,  Fréret 


CI 

s'explique  fur  la  fignificatîon  dil 
mot  Civitas  ou  Cité,  peut  fournir 
beaucoup  de  lumières  fur  cet  ob- 
jet. Voici  fes  obfervations ,  tirées 
de  fes  mémoires  fur  l'origine  Se 
le  mélange  des  anciennes  nations 
&  fur  la  manière  d'en  étudier 
rhiftoire.  »  On  doit  rechercher , 
»  autant  qu'il  eft  poffible ,  quelles 
»  caufes  ont  porté  certaines  na- 
ît tions  à  fe  divifer  en  divers 
9>  corps  politiques ,  dont  le  gon- 
»  vernement  &  les  intérêts  fuf- 
»  fent  féparés  ;  en  Cités  diftin- 
n  guées  par  des  noms  particu- 
n  liers ,  &  très-fouvent  ennemies 
}i  les  une»  des  autres.  Tels  étoient 
n  par  exemple  les  Sarmates ,  déf- 
it quels  Pomponius  Mêla  dit  :  Una 
9»  gens  ,  aliqupt  popuU  &  aliquot 
Il  nomina  ;  &  les  Lygii ,  qui  oc- 
»  cupoient  les  pais  fitués  entre  la 
»  Germanie  &  le  Boryfthène» 
n  ou  ce  que  nous  défignons  au- 
}i  jourd*hui  par  le  nom  général 
»  de  Pologne  ;  Lygiorum  nomen, 
»  in  plures  Civitates  diffufum. 

n  Quand  il  s'agit  de  l'hifioire 
Il  du  moyen  âge  ,  nous  em- 
n  ployons  le  terme  de  nation. 
Il  pour  défigner  un  certain  nom- 
n  bre  de  Cités ,  dont  l'origine  eft 
»  la  même  ,  qui  parlent  une  mê^ 
n  me  langue  ,  mais  avec  des  dia- 
II  leâes  différens,  qui  joignent  au 
Il  nom  commun  à  toutes  ,  un 
Il  nom  particulier  à  chacune 
Il  d'elles;  oîi  quelquefois ,  enfin , 
Il  on  remarque  parmi  les  hom- 
»  mes  une  certaine  configuration 
»  propre  ,  qui  les  diftingue  de 
91  ceux  d'une  autre  nation  ;  à 
91  peu  près  comme  dans  les  plan- 
w  tes }  ou  dans  les  fleur»»  toutes 


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Cl 

j>  les  efpèces  d'un  même  genre 
M  ont  certains  caraâères  com- 
»  muns.  Nous  employons  le  ter- 
»  me  de  Cité ,  pour  défigner  Taf- 
n  fociation  politique  de  plufieurs 
»  peuples  ;  &  par  le  terme  de 
»  peuple  ,  nous  entendons  un 
»  certain  nombre  d'hommes  unis- 
n  par  des  liens  qui  les  rendent 
»  membres  d'un  même  corps , 
n  les  foumettent  aux  mêmes  loix , 
»  les  attachent  aux  mêmes  inté- 
»  rets. 

»  Il  faut  obferver  que  les  com- 
99  binaifons  ,  qui  9  des  diverfes 
99  parties  d'une  même  nation  ^ 
99  forment  difFérens  aflemblages, 
99  peuvent  varier  »  &  varient  en 
99  effet  à  l'infini  fuivant  les  con- 
99  jonâures.  En  conféquence  de 
99  tel  ou  tel  événement ,  il  peut 
99  arriver  que  plufieurs  petits  peu- 
99  pies  fe  réunifient  en  une  feule 
99  Cité  ,  &  qu  au  contraire  une 
99  Cité  fe  divife  en  plufieurs  petits 
19  peuples. 

99  Au  premier  cas  ,  le  nom 
99  d'un  peuple  peu  confidérable 
9>  dans  fon  origine  ,  &  qui  n'oc- 
»  cupoit  qu'une  très-petite  éten-' 
99  due  de  pais  ,  pourra  devenir 
99  tout  d'un  coup  celui  d'une  Cité 
99  piiiflTante  ;  parce  que  ce  peuple 
99  aura  donné  fon  nom  à  tous  les 
99  autres  qui  fe  feront  unis  à  lui. 
99  C'eft  ainfi  que  le  nom  Mes 
99  Goths  ou  Gothons  ,  fortis  d'un 
99  canton  peu  étendu  de  la  Scan- 
99  dinavie  ,  eft  devenu  le  nom 
99  général  d'une  Cité .  très-nom- 
99  breufe.  Par  une  raifon  fembla- 
99  ble ,  le  petit  canton  de  Schouitz 
19  a  donné  fon  nom  à  la  ligue 
»  entière  des  SuiiTcs  ^  quelque 


Cl  ^85 

V  peu  confidérable  qu*ii  foit  par 
99  fon  étendue.  . 

9>  Au  fécond  cas  ,  c*eft-à-dire, 
99  lorfque  la  )igue  qui  avoit  réuni 
99  plufieurs  divers  peuples  en  une 
99  même  Cité,  s'eft  détruite;  il  eft 
99  arrivé  que  le  nom  d'un  peuple, 
99  qui  avoit  été  long-tems  cé!^- 
99  bre  f  a  difparu  prelque  entière-  • 
99  ment  ;  parce  qu'alors  les  difFé- 
99  rens  peuples  particuliers  ont 
99  repris  les  noms  qui  fervoient 
99  auparavant  à  les  difiinguer  en- 
99  tr'eux  4  mais  qui  n'étoient  pas 
99  connus  des  étrangers. 

99  Dans  l'un  &  l'autre  cas  ,  il 
99  eu.  très-pofi[îble  qu'il  ne  foie 
n  arrivé  aucun  changement  dans 
99  la  nation  quioccupoit  un  païs, 
99  que  fes  anciens  habitans  n  aienc 
99  été  ni  détruits  ni  chafl*és ,  6c 
n  qu'il  n'en  foit  pas  venu  de  nou- 
99  veaux  s'y  établir.' 

99  Prefque  tous  les  Écrivains,' 
99  faute  d'avoir  fait  cette  réflexion, 
9)  fe  font  trouvés  dans  des  em- 
99  barras  ,  dont  ils  n'ont  pu  fortir 
99  qu'en  multipliant  des  fuppofi- 
»  tions  toujours  gratuites  &  fou- 
99  vent  abfurdes.  Cependant ,  tes 
99  exemples  s'offrent  en  foule 
99  pour  rendre  ce  principe  impor- 
99  tant ,  aufiî  fenfible  qu'il  eft  vrai. 
99  Les  Sicambres  formoient  ,  au 
99  tems  de  Jules  Céfar ,  une  Cité 
99  puifFanie  ,  dans  la  Germanie 
99  inférieurei  Depuis  la  fin  de 
99  l'empire  d'Augufte  ,  il  n'eft 
99  plus  parlé  d'eux  dansl'Hiftoire, 
99  mais  de  plufieurs  peuples  par- 
99  ticuliers  qui  occupoient  le  mê- 
99  me  païs.  Tacite  s'exprime ,  à 
9)  la  vérité,  comme  fi  le  corps 
99  entier  des    Sicambres  eut  été 


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i.26  Cl 

n  détruit  &  tranfporté  dans  la 
n  Gauïe  ;  Sicamhn  excijî  &  in 
»  Gallias  trajeÛL  Mais  ,  cela  ne 
$}  fe  doit  entendre  que  du  petit 
i>  peuple  9  qui ,  dans  Torigine  » 
f)  avoit  donné  Ton  nom  à  toute 
f>  la  Cité.  Les  armes  Romaines 
n  ayant  forcé  les  difFérens  peu* 
>i  pies  qui  la  compofoient,  »  de 
79  renoncer  à  la-  ligue  qui  les 
ff  unifToit  ,  chacun  d  eux  refta 
n  dans  le  pais  qu'il  avoit  toujours 
n  habité  ;  mais  ,  il  quitta  le  nom 
j>  de  Sicambres  pour  reprendre 
Il  fon  nom  particulier.  Les  cho- 
9»  fes  repèrent  fur  le  même  pied 
n  jufque  vers  Tan  240  de  J.  C; 
n  que  ces  peuples  qui  avoient 
n  autrefois  compofé  la  Cité  des 
»  Sicambres  ,  s*unirent  par  une 
i>  nouvelle  affociation,  qui  prie 
»  le  nom  de  Francs ,  &  qui ,  par 
i>  fa  bravoure  &  fon  attention  à 
i>  profiter  des  circonfiances  »  fe 
n  mit  en  état  de  former  une  Mo- 
19  narchie  puifTante.  ce 

Civitas  étoit  encore  un  terme 
confacré  pour  exprimer  le  droit 
de  bourgeoifie  que  Ton  accordoit, 
comme  une  faveur  fingulière. 
Voyei  Bourgeoifie ,  &  cité  [  droit 
de  1. 

CIUM ,  Cium ,  ville  de  Bithy- 
nie  f  la  même  que  Cius,  Foyei 
Gius; 

CIUS ,  Clus,  KTc^  >  (a)  ville  de 
Bithynie ,  province  de  TAfie  mi- 
neure ,  étoit  fituée  fur  le  bord  de  , 
la  Propontide  ,  au  fond  d'un  petit 
golfe,  auquel  elle   donnoit  fon 

(a)  Pomp.  Mel.  p.  84.  Strab.  p.  %6^. 
Dio.  Cair.  pag.  841.  Tit.  Liv.  L.  XXXI. 
c.  31.  L.  XXXIII.  c.  30.  Diod.  Sicul. 
p.  791.  Crév.  Hifif  des  Emp,  T,  V.  p. 


CI 

nom ,  qu!  s*efl  confervé  jufqu'à 
nos  jours.  Cependant  ,  Pompo- 
nius  Mêla  dit  que  ce  golfe  n*avoic 
point  de  nom.  Quoi  qu'il  en  foit  p 
Philippe  ,  fils  de  Démétrius  & 
père  de  Perfée,  ruina  cette  ville  , 
dont  il  donna  remplacement  à 
Prufias ,  fils  de  Zélas  ,  qui  Tavoît 
aidé  à  la  ruiner.  Prufias,  ayant 
rétabli  depuis  cette  ville ,  Tappella 
de  fon  nom  Prufe. 

Elle  étoit  au  pied  du  mont  Ar- 
ganthonius  ,  félon  Cellarius ,  dont 
le  (èntiment  paroît  appuyé  fur 
des  raifons  très-folides. 

La  ville  de  Cius  eft  célèbre 
dans  les  écrits  des  Anciens  ,  61 

Earticulièrement  dans  ceux  de 
lemnon  ,  qui  l'appelle  Kls^cç  , 
Cierus  ,  mot  à  la  place  duquel 
Saumaife  voudroit  fubftituer  ce- 
lui de  KiWcç ,  Cieius  ;  corre6Hon  , 
qui  ne  fçauroit  fiibfifter  ,  puifque 
Memnon ,  qui  parle  de  cette  ville 
en  plufieurs  endroits  ,  ne  la  nom- 
me jamais  que  Klepoq»  D'ailleurs  , 
les  habitans  de  cette  ville  y  font 
défignés  par  l'adjeôif  Klspuroç  ^ 
Cierinus  ;  &  cet  adjeftif  ne  fçau- 
roit être  dérivé  du  fubftantif 
Kle/6ç. 

C'eft  à  Cium  que  fut  tué ,  fé- 
lon Diodore  de  Sicile  ,  un  roi 
Mithridate ,  fournis  par  Antigo- 
nus ,  mais  qu'on  croyoit  être  paffé 
dans  le  parti  de  CafTandre.  Ce 
Prince  avoit  été  fouverain  de  Cius 
auffi-bien  que  d'Arrhime  pendant 
trente-cinq  ans. 

Dion  Caffius  parle  de  la  ville  de 

^%  »  4*7*  Mém.  de  PAcad.  des  Infcript. 
&  Bell.  Lett.  Tom.  V.  pa£.  2^7  ,  ft»8. 
T.  IX.  p.  84.  T.  XII.  p.  %xu  T.  XVI, 
p.  X47.T.XIX.P.71. 


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CI 

Cîus ,  &  dît  que  ce  fut  entre  cette 
ville  &  celle  de  Nicée  ^  que  fe 
donna  le  combat  entre  les  armées 
de  Niger  &  de  Sévère,  qui  fe 
difputoient  l'Empire  après  la  mort 
de  Pertinax. 

Cius  fut  pillée  par  des  peuples 
Scythes  fous  l'empire  de  Valérien. 
Elle  étoit  Épifcopale ,  &  la  Noti- 
ce de  Hiérocles  lui  donne  le  fep- 
tième  rang  ehtre  les  villes  de  cette 
province. 

Les  habitans  du  pais  la  nom* 

ment  préfentement  Chorafîa  ;  & 

les  Turcs  9  Chéris.  On  prétend 

^  que  fon  nom  vient  de  l'abondance 

ces  cerifes  qu'on  y  cueille. 

CIUS,  Cius,  Km.  {a)  ville 
de  Myfie ,  félon  Xénophon.  Ce 
devoit  être  la  même  que  Cius  de 
Bithynie,  province  limitrophe  de 
la  Myfie. 

CIUS  ,  Cius  ,  Kro;,  ifle,  l'une 
àe$  Cydades  dans  le  voifmage  de 
l'Attique ,  félon  Suidas.  Cet  Au- 
teur ajoute  que  Lyfias  l'appelle 
Polin ,  c'eft-à-dire  ,  ville  ;  &  que 
les  orateurs  ont  fouvent  appelle 
villes ,  les  ifles. 

CIUS ,  Cius  ,  KM ,  {h)  fleuve 
de  la  BaiTe  Myfie.  Il  avoit  fa 
fource  aux  montagnes  de  Thrace , 
&  tomboit  dans  le  Danube.  De- 
nys  Iç  Périégète  dit  que  ce  fut 
auprès  de  ce  fleuve  qu'Hylas  , 
garçon  d'Hercule  ,  fut  enlevé  par 
une  nymphe,  c'eft-à-dire  ,  plus 
fimpiement,  qu'il  s'y  noya. 

Euftathe,dans  fon  commentaire 
fur  Denys  ,  dit  qu'il  y  avoit  au- 
près de  ce  fleuve  une  ville  du 

(s)  Xenoph.  p.  438. 
(h)  Herod.   L.  IV.  c.  49. 


(r)  Mém.  de  l*Acad.  des  lofcript.  &  |  Xenoph.  p.  6^9 


CL  297 

même  nom  ;  cela  fe  voit  aufli 
dans  la  Notice  de  l'Empire,  oïl 
l'on  lit  Cuneus  equitum  StabUfia^ 
norum  Cii.  L'Itinéraire  d'Antonia 
met  Cion ,  qui  eft  le  même  lieu  , 
entre  Carfon  &  Biroë  ,  à  dix  mille 
pas  de  la  première ,  &  à  dix-huit 
mille  pas  de  la  féconde. 

Hérodote  qui  parle  du  Cius^ 
dit  aufli  qu'il  fe  rendoit  dans  le 
Danube,  6c  il  ajoute  que  ce  fleuve 
divifoit  le  mont  Hémus ,  en  def** 
cendant  de  PéonijC  &  du  tnont 
Rhodope. 

CIUS  ,  Cius  ,  KM  »  (c)  l'un 
des  Argpnautes*  Quoique  Gus 
n'y  foit  nommé  par  aucun  de 
ceux  qui  ont  écrit  fur  l'expéditioa 
de  Jalon ,  cependant  l'autorité  de 
Strabon  a  paru  fuflifante  pour  le 
mettre  au  nombre  des  Argonau- 
tes. Cet  Auteur  ,  parlant  de  la 
ville  de  Prufe  dans  la  Bithynie, 
rebâtie  par  Prufias ,  dit  qu'elle  fe 
nommoit  autrefois  Gus  du  nom 
de  fon  fondateur,  qui  l'avoit  bâtie 
à  fon  retour  de  la  Colchide  ;  ce 
qui  eft  confirmé  par  Euftathe 
dans  fon  Commentaire  fur  Denys 
le  Périégète. 

C  L 

CLADAUS ,  ou  CLADÉUS; 

Cladaus  ,  CladeuSf  {d)  K^<t/acc  , 
K^a//cç,  fleuve  du  réloponnèfe 
dans  l'Élide.  Paufanias  le  nomme 
Ciadéus  ;  61:  Xénophon ,  Cladaus. 
Le  preipier  dit  qu'il  vient  de  l'É- 
lide, &  qu'il  fe  mêle  avec  l'Ai- 
phée.  Le  dernier  ,  fans  parler  de 
la  fource  du  Cladaus  ,  auure^  qu'il 

|Bel].  Lett.  Tom.  IX.  p.  84. 

id)  Eauf.  pag.  «98,  Î05,  Ji6,  384*' 


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^88  CL 

coule  près  de  TÂlté  ou  Altîs ,  & 
le  fait  aufli  mêler  avec  l'Alphée. 

Les  Éléens  rendoient  des  hon- 
neurs divins  au  Qadaus  ;  ^  ce 
fleuve  étoir,  après  TAlphée,  celui 
qui  en  recevoit  de  plus  grands. 

CLADOTERIES  ,  Cladoie^ 
ria^  (a)  fêtes  que  Ton  céiébroit 
quand  on  tailioit  la  vigne.  Héfy- 
chius  fait  mention  de  ces  fêtes. 

Le  nom  de  Cladoteries  eft  pris 
du  Grec  kau/oç«  qui  fignifieune 
branche  flexible. 

CLAMPÉTIE  ,  Clampetia  , 
{b)  ville  d'Italie ,  fituée  au  fond 
d'un  golfe  dans  le  pais  ées  Brut- 
tiens.  Elle  fut  prife  par  les  Ro- 
mains Tan  de  Rome  548.  Pline 
ne  nomme  cette  ville,  qu'un  lieu 
fimplement  ,  parce  que  de  fon 
tems  elle  étoit  ruinée.  Mais ,  elle 
s'eft  rétablie  depuis  ;  &  c'eft  pré- 
fentement  l'Amantéa  fur  la  côte 
de  la  Calabre  citérieure. 

Les  anciennes  éditions  de  Tite- 
Live  portoient  dans  un  endroit, 
Dampétie  ,  qu'on  a  corrigé  dans 
les  nouvelles,  en  Clampétie,  com- 
me on  Ht  ailleurs  dans  cet  Auteur. 

CLANÈS  ,  Clanes  ,    K>«Vm;  , 

(c)  torrent  des  montagnes  fituées 
au-deffus  de  la  Vindélicie,  Il  fe 
jettoit  dans  le  DanulSe  9  félon 
Strabon.  Clazius  croit  que  c'eft 
le  Glan ,  qui  arrofe  la  Bavière. 

CLANIS  ,    Clanis  ,    K^<yVi<;  , 

(d)  rivière  d'Italie  dans  l'Étrurie. 
Elle  fe  perdoit  d'abord  dans  le 
Tibre  ;  mais ,  on  fit  dans  la  fuite 
un  changement  dans  fon -cours. 


CL 

Tacîte  rapporte  au  premier  livre 
de  fes  Annales  ,  qu'après  un  dé- 
bordement du  Tibre  ,  qui  avoît 
fait  du  ravage  dans  Rome ,  fous 
Tibère  ,  le  Sénat  chercha  les 
moyens  de  s'en  garantir  à  l'ave- 
nir. Celui ,  qui  (e  préfentoit  le 
plus  naturellement  étoit  de  dé- 
tourner les  rivières  &  les  lacs  qui 
tombent  dans  le  Tibre  ;  mais  , 
entre  toutes  les  autres  rivières  , 
la  plus  aifée  à  détourner  étoit  le 
Clanis  9  appelle  maintenant  la 
Chiana  ;  car ,  entre  les  monta- 
gnes de  la  Tofcane  ,  il  fe  forme 
dans  une  longue  plaine ,  un  grand 
lac  que  la  Chiane  traverfe ,  &  oit 
fes  eaux  ibnt  tellement  en  équi- 
libre ,  qu'elles  n'ont  pas  plus  de 
pente  pour  couler  du  côté  d'O- 
rient dans  le  Tibre ,  que  du  côté 
d'Occident  dans  l'Arne  qui  pafle 
à  Florence;  de  forte  qu'elle  coule 
de  l'un  &  de  l'autre  côté.  Elle 
contribue  beaucoup  aux  inonda- 
tions", tant  du  Tibre  que  de  l'Ar- 
ne. On  pouvoir  donc  ,  en  la  dé- 
tournant entièrement  dans  l'Arne, 
ôter  au  Tibre  une  des  caufes  de 
fes  débordemens  ;  mais ,  on  eût 
fauve  Rome  aux  dépens  de  Flo- 
rence ;  &  quoique  cette  ville  ne 
fui  alors  qu'une  colonie  peu  con- 
fidérable ,  elle  fie  au  Sénat  des 
remontrances  qui  furent  écoutées. 

Les  habitans  de  quelques  au- 
tres villes  d'Italie  ,  menacés  du 
même  malheur  ,  en  firent  auffi , 
&  cherchèrent  fi  foigneufement 
toutes  les  laifons  qui  pouvoient 


(4»)   Anijq.   expl.  par  D,   Bern.  de  I     (c)  Strab.  pag.  107. 
Montf.  T.  II.  p.  ai).  1     {d)  Tacii.  Axuiai.  L.  I.  c.  79.  Strab. 

{h)  Tii.  Liv.  L.  XXIX.  c.  38.  L.  XXX.  j  p.  ajy. 
c.  19.  Piin.  T.  I.  p.  15S.  I 

leur 


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CL 

kar  être  favorables ,  qu'its  repré* 
fenterenc  ,  &  la  dimmutîon  de  la 
gloire  du  Tibre  qui  auroit  moins 
de  fleuves  tributaires ,  &  le  ref- 
peâ  dû  aux  limites  établies  par  la 
nature ,  &  le  renverfement  de  la 
reliebn  de  plufîeurs  peuples  qui 
ne  ffouveroient  plus  dans  leut" 
païs,'des  fleuves  à  qui  ils  ren- 
doient  un  culte.  Les  Romains  |fe 
déterminèrent  alors  à  laifTer  les 
chofes  comme  elles  étoient  ;  mais 
depuis  ils  bâtirent  une  grpfTe  mu- 
raille ,  qui  fermoit ,  d'une  monta- 
gne à  Tautre ,  la  vallée  par  oîi  pafTe 
la  Chiana  pour  fe  jetter  dans  le 
Tibre;  &  ils  laifTerent  au  milieu 
une  Quverture  pour  régler  la 
quantité  d'eau  qu'ils  vouloient 
bien  recevoir.  Cette  muraille  fe 
voit  encore  aujoui-d'hui. 

Les  conteflations  fur  le  cours  de 
la  Chiana  fe  renouvellerent  entre 
Rome  &  Florence  ,  fous  le  pon- 
tificat d'Alexandre  VIL  Le  Pape 
&le  Grand  Duc  convinrent  de 
nommer  des  cotnmifTaire^.  Le 
Pape  nomma  le  cardinal  Carpe- 
gne ,  qui  dévoit  être  aidé  de  M. 
Caflini,  qu'on  a  vu  depuis  à  l'Ob- 
fervatoire  de  Paris ,  &  menrtbre 
de  TAcadémie  Royale  des  Scien- 
ces ;  &  le  Grand  Due  nomma  le 
fénateur\Miehelozïi  &  M.  Vivia- 
ni.  lljs  réglèrent  en  1664  ,  ^  ^^ 
1665  ,  ^3"^  c®  ^^*^^  y  ^voit  à  faire 
de  part  &  d'autre ,  que  la  ma- 
nière de  l'exécuter.  Mais ,  comme 
il  arrive  aflez  fouvent  dans  ce  qui 
ne  regarde  que  le  public ,  on  n'alla 
pas  plus  loin  que  le  projet* 

CLANIS  ,  Clanisy  K;^ar/ç,  {a) 
autre  rivière  d'Italie  dans  la  Cam- 


CL  li^ 

panîe.  M.  l'abbé  Langlet  du  Fref-  . 
noy  prétend  queCIanis ,  Clanius , 
&  Liternus ,  (ont  la  même  chofe 

2ue  le  Glanio  ou  le  Patria  ;  fur  quoi 
).  \Mattheo  Égitio  obferve  que 
Liternum  oppidum  ,  o\x  Scipion  fe 
retira  ,  étoit  près  du  lac  de  même 
nom  &  de  la  Silva  GalUnaria  ; 
que  ce  lac  efl  appelle  lac  de  Pa- 
tria ,  parce  que  Scipion ,  en  fe 
plaignant  de  Rome ,  difoit  f  /n- 
grata  Patria  nec  quidem  oïïa  me^ 
hahes.  n  Le  Clanis  ».  ou  Clanio , 
n  ajoute- t^il^  efi  un  fleuve  qui 
n  prend  la  fouree  dans  la  mon- 
if  tagne  d'Abella  ,  &  traverfe 
n  enfuite  le  territoire  de  Noia  6c 
w  d'Acerra  ,  d'où  il  va  fe  jetter 
)}  dans  la  mer ,  proche  de  Patria  ; 
i>  &  en  paifarit ,  il  prête  fes  eaux 
n  au  lac  Liternus»  peu  au-deflus 
Il  de  l'ancien  Liternum.  On  l'ap- 
n  pelle  Fiume  di  Patria  ;  mais  » 
»  plus  avant  dans  lei  terres  ,  oh 
Il  le  nomme  Lagno ,  qui  e  un 
Il  mot  corrompu  de  Clanius ,  donc 
Il  Virgile  dit  : 

,< •  • .  Clanius  non  aqùus  Acerrlii 

n  Cluvier ,  cotitinûe  D.  Mat- 
II  theo  Égitio  ,  prétend ,  fur  uii 
»  paffaged'Appiend'Aleitandrie, 
Il  que  ce  Clanius  a  été  appelle 
Il  Liris  ,  mais  il  fe  trompé  ;  car, 
\?i  au  contraire  le  véritable  Liris , 
n  c'efl-à-diré  ,  le  Garigliano  eft 
Il  celui  qui  a  été  appelle  aufG 
Il  Glanis ,  au  rapport  de  Pline  : 
h  colonia  Miritutna  Liri  amne  di» 
J>  vifa ,  Glani  quondatn  appellatoi 
I)  Strabon  nous  apprend  la  même 
»  chofe.  Voilà  ce  qui  a  fait  prén- 
n  dre  le  change  à  Cluvier  ,  6<^ 


i»)  Strab.  p.  133.  Virg,  Georj..L.  Il,  y.  a»5, 

Tarn.  XL 


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7  y 


590  C  L 

i>  même  au  fçavantBothart. Voilà 
s>  l'origine  du  mot  de  Garigliano 
}i  par  l'addition  &  la  tranfpofi- 
n  tion  de  quelques  lettres,  m 

Il  s'enfuit  de4à  que  le  Qanîs 
ou  le  Clanius  9  que  M.  de  la  Mar* 
tinière  a  diftingué  ^  font  la  même 
chofe  ;  que  le  P.  Catrou«  en  ex- 
pliquant le  pafTage  deVirgile,  que 
nous  avons  rapporté  9  n*a  pas  fi 
mal  rencontré ,  en  di&nt  que  le 
fleuve,  qui  s*appelloit  autrefois 
Clanius ,  porte  aujourd'hui  le  nom 
de  Laeno.  Ce  en  quoi  ce  cé- 
lèbre Traducteur  de  Virgile  f« 
trompe  ,  c'eft  qu'il  a  écrit  TAgno 
pour  Lagno  ;  qu'il  a  fuppofé  que 
le  Clanius  n'avoit  point  d'autre 
nom ,  quoiqu'il  porte  auffi  celui 
de  Clanio  ;  &  qu'il  a  avancé  qu'il 

f>a(roit  par  la  ville  de  Noie ,  au 
jeu  qu'il  ne  pafle  que  par  le  ter- 
ritoire de  cette  ville. 

CLANIS  ,  Clanïs  ,  Kao^/;  , 
rivière  d'Efpagne  ,  au  rapport 
d'Etienne  de  Byzance. 

CLANIS,  CUnU,  {a)  l'un  des 
Centaures ,  périt  fous  les  coups 
de  Théfée. 

CLANIS  ,  Clanis  ,  autrement 
Danus.  Voye\  Danus. 

CLANIUS  ,  Clanius.  Voye^ 
Clanis  ,  rivière  de  la  Campanie. 

CLARÉOTIS,  Clareotis,  {b) 
K^a^iSriç*  nom  d'une  tribu  des 
Tégéates  dans  le  Péloponnèfe.  II 
en  eft  fait  mention  dans  Paufa- 
nias. 

CL  ARIA ,  Claria,  Ky^iptct ,  (c) 
nom  que  Ton  donnoit  à  Sparte 

(a)  Ovîd.  Metam.  L.  XII.  c.  10. 

(5)  Pauf.  p".  S40. 

(c)  Plut.  T.  I.  p.  Soi. 

id)  Plut.  T.  I.  p.  yai 


CL 

aux  contrats  &  aux  obligatîorif  i 
au  rapport  de  Plutarque. 

CLARISSIME  ,  eft  un  mot 
Latin,  Clariffimus ,  fuperlatifde 
Clams,  illuftre,  qui  par  confé- 
quent  lénifie  très-illuftre. 

CLARIUS  ,  Clarius ,  K^/oc» 
nom  d'un  fleuve  de  1'*  de 


s 


lypre.  Plutarque  en  fait  men- 
tion dans  la  vie  de  Solon.  On 
voyoit ,  félon  lui ,  fur  les  bords 
de  ce  fleuve ,  une  petite  ville  qui 
avoir  été  bâtie  pat  Démophon  , 
fils  de  Théfée.    ^ 

CLARIUS  [Apollon], 
Apollo  Clarius,  AVo'mwj^  KAa>/&ç. 
Ce  dieu  étoit  ainfi  fumommé  à 
caufe  du  culte  qu'on  lui  rendoit 
dans  l'ifle  de  Claros  ,  &  dans  un 
lieu  de  même  nom  en  lonîe. 
^oy^î  Apollon  Clarius,&  ci-après 
l'article  de  Claros  »  ainfi  que  celui 
de  Colophon. 

CLAROS  ,  Claros  ,  Kxa>cç  , 
fe)(nom  d'un  bois  &  d'un  temple 
de  l'Afie  mineure  dans  llonie,  au 
païs  des  Colophoniens.  Ils  étoieitt 
confacrés  à  Apollon  ,  qui  y  avoît 
un  oracle.  Strabon  dit  :  »  Colo« 
n  phon ,  ville  d'Ionie  ;  devant  la 
i>  ville  eft  le  bois  d'Apollon  Cla* 
19  rius  dans  lequel  il)  y  avoît  au- 
)>  trefois  un  ancien  oracle,  u  Pline 
ne  parle  que  du  temple  .d'Apol- 
lon Clarius  ;  il  ne  fait  aucune 
mention  du  bois  facré. 

Le  fcholiafte  d'Apollonius  dit 
qu'il  y  avoit  une  ville ,  nommée 
Claros ,  auprès  de  Colophon ,  6c 
qu'elle  écoit  confacrée  à  Apollon , 

(e)  Strab.  p.  64s.  Plin.  T.  L  p.  m  , 
«79.  Pauf,  p.  400.  ér  fii*  Vire,  iEneid. 
L.  m.  f .  j6ç^. 


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CL 

qui  y  avo'it  un  oracle.  Servîus  ^ 
expliquant  un  vers  de  TÉnéide 
de  Virgile,  dit:  »  Claros  [C/tf- 
M  rium  oppidum  ^  ]  eft  une  ville 
n  aux  confins  des  Colophoniens 
)>  oii  Apollon  eft  adoré ,  ôc  d  oh 
i>  il  efl  appelle  Apollon  Clarius.  <c 

L'on  prétend  qu'il  y  avoit  auiG 
au  même  endroit  »  une  montagne 
du  nom  de  Claros.  On  lit  dans 
un  Commentateur  :  n  Claros , 
M  montagne  &  ville  d'Afie  auprès 
»  de  Colophon ,  d'où  Apollon 
9»  eil  fumommé  Clarius.  a 

Cellarius  n'eft  pas  trop  per- 
fuadé  de  l'exiftence  de  la  ville  & 
de  la  montagne.  Il  ne  trouve  que 
le  bois  &  le  temple  qui  foient 
fondés  fur  des  autorités  iufEfantes. 
Cependant,  Vibius  Séquefter  met 
dans  Ton  catalogue  des  monta*- 
gnes,  Clarius  de  la  Colophonie, 
duquel  Apollon  efl  furnommé 
Clarius.  iElien  parle  de  Claros 
vHle  des  Colophoniens.  Paufanias 
en  parle  auffi.  Il  efl  vrai  que  ce 
dernier  ne  dit  pas  précifément 
que  ce  fût  une  ville. .  Il  rapporte 
feulement  que  ceux  de  Colophon 
avoient  à  Claros  un  temple  &  un 
oracle  d'Apollon  ,  qu'ils  préten- 
dpient  être  d'une  grande  antiquité. 
A  en  juger  par  le  récit  que  fait 
enfuit^  Paufanias  ,  il  paroît  que 
Claros  étoit  le  port  des  Colopho- 
niens. 

CL ARUS  MONS.  Foye^  Au- 
gufta  Nemetum. 

CL  ARUS,  Clams,  {a)  capî- 
taine  Troyen ,  frère  d'Hémon  & 
de  Sarpédon  ,  fîgnala  fa  valeur 
contre  les  Rutules. 

CLASSE ,  ClaJJls ,  Schola.  {b) 

(«)  Virg.  i£neid,  L.  X.  y.  x»6. 


C  L  içr 

Ce  terme  vient  du  Latîn  Calo  , 
qui  eft  formé  du  Grec  xaAç&i  Ôc 
par  contraâion  ,  %ahS  «  appeller, 
convoquet  ,  aflembler.  Âinfi  , 
toutes  les  acceptions  de  ce  mot 
renferment  l'idée  d'une  convoca- 
tion ou  aflemblée  à  part.  Ce  mot 
fignifîe  donc  une  diftinâion  de 
perfonnes  ou  de  chofes  que  l'on 
arrange  par  ordre ,  félon  leur  na- 
ture ,  ou  félon  le  motif  qui  donne 
lieu  à  cet  arrangement.  Ainfi ,  on 
range  les  êtres  phyHques  en  plu- 
fleurs  ClafTes  ,  les  métaux  ,  les 
minéraux ,  les  végétaux ,  &c.  On 
fait  auffi  plufieurs  ClafTes  d'aniv 
maux ,  d'arbres  ,  de  fîmples  ou 
herbes  ,  &c.  par  la  même  ana* 
logie» 

ClafTe  fe  dit  auffi  des  différen* 
tes  falles  des  collèges ,  dans  lef- 
auelles  on  diflribue  les  écoliers , 
félon  leur  capacité.  Il  y  a  fix 
ClafFes  pour  les  humanités  ,  6c 
dans  quelques  collèges  ,  fept.  La 
première  en  dignité  c'efl  la  Rhé- 
torique ;  or ,  en  commençant  à  » 
compter  par  la  Rhétorique  y  on 
defcend  jufqu'à  la  fixième  ou  fep- 
tième ,  &  c'eft  par  Tune  de  celles- 
ci  que  Ton  commence  les  études 
clafiiques.  Il  y  a  deux  autres 
ClafTes  pour  la  Philofophie  ;  l'une 
eft  appellée  Logique  &  l'autre 
Phyfique.  Il  y  a  auffi  les  écoles 
de  Théologie,  celles  de  Droit, 
&  celles  de  Médecine  ;  mais  ^  on 
ne  leur  donne  pas  communément 
le  nom  de  ClafTe. 

Ileflvrai,  conime  on  le  dît; 
que  Quintilien  s'efl  fervi  du  mot 
de  ClafTe ,  en  parlant  des  écoliers  ; 
mais  ,  ce  n'eft  pas  dans  le  même 

I    {h)  Quinill.  L.  I.  c.  s.  L.  IL  c,  «t 

Tij 


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%^i  C  L 

fèns  que  nous  nous  fervons  au- 
jourd'hui de  ce  mot.  Il  paroit ,  par 
le  pafTage  de  Quintilien  ,  que  le 
maître  d'une  même  école  divifoit 
fes  écdiers  en  différentes  bandes , 
félon  leur  différente  capacité.  Ce 
que  Quintilien  en  dit ,  doit  plutôt 
fe  rapporter  à  ce  qu'on  appelle 
parmi  nous  ,  faire  composer  & 
donner  les  places  >  ce  qui  nous 
donnoit,  dit- il,  une  grande  ému- 
lation ,  ea  'nobis  ingens  pa/ma 
contentio  ;  &  c'étoit  une  grande . 
gloire  d'être  le  premier  de  fa  dj- 
vifîon  ,  duc  ère  vero  Clajfem  multo 
pulcherrimum. 

Au  refte  ,  Quintilien  préfère 
réducation  publique ,  faite ,  com- 
me il  l'entend ,  à  l'éducation  do- 
meftique  ordinaire.  Il  prétend  que 
communément  il  y  a  autant  de 
danger  pour  les  mœurs  dans  l'une 
que  dans  l'autre  ;  mais ,  il  ne  veut 
pas  que  les  Claffes  foient  trop 
nombreufes.  Il  faudroît  qu'alors 
la  Claffe  fût  divifée  ,  &  que  cha- 
que divifion  eût  un  maître  parti- 
culier. 

Le  chapitre  ,  oU  Quintilien 
traite  cette  matière ,  efî  rempli^ 
d'obfervations  judicieufes  ;  il  fait 
voir  que  l'éducation  domeflique  a 
des  inconvéniens ,  mais  que  l'é- 
ducation publique  en  a  aufli.  Se- 
roit-îl  impoffible  de  tranfporter 
dans  l'une  ce  qu'il  y  a  d'avanta-  i 
geux  dans  l'autre?  L'éducation 
ëomeftique  eft-elle  trop  folitaire 
&  trop  laiieuiffante  ?  Faites  fou- 
vent  des  aUemblées  ,  des  exeroî- 
ces,  des  déclamations ,  &c.  L'é- 
ducation publiaue  éloigile-t-elle 
trop  les  enfans  de  l'ufage  du  mon- 
^  i  4e  fajEQn  que.  iorfqu'iU  font 


CL 

hors  de  leur  collège ,  ils  paroiffeiil 
auffi  embarraffés  que  s'ils  étoient 
tranfportés  dans  un  autre  mondée 
Faites -leur  voir  fou  vent  des  per- 
fonnes  raifonnables  ;  accoutumez* 
les  de  bonne  heure  à  voir  d'hon- 
nêtes gens  ;  qu'ils  ne  foient  pas 
décontenances  en  leur  préfence. 
Faites  que  votre  jeune  homme  ne 
foit  pas  ébloui ,  quand  il  voit  le 
Soleil  9  &  que  ce  qu'il  verra  un 
jour  dans  le  monde  ^  ne  lui  pa- 
roiffe  pas  nouveau.  L'éducation 
publique  donne  lieu  à  l'émulation. 
Firmiores  in  litteris  profeâlus  dit 

amulàtio 6*  licet  ipfa  vitium 

fit  amb'uio  ^  fréquenter tamcn  caufa 
virtutum  </?. 

Ce  que  dit  Quintilien  fur  la 
vertu  &  la  probité  que  l'on  doit 
rechercher  dans  les  maîtres ,  eft 
conforme  à  la  morale  la  plus  pu- 
re ;  &  ce  qu'il  ajoute  dans  le  cha- 
pitre fuivant ,  fur  les  peines  &  le» 
châtimens  dont  on>  punit  les  éco- 
liers y  efl  bien  digne  de  remarque. 
D  dit  que  cç  châtiment  abat  l'ef- 
prit,  refringit  animum  6»  abj'icit 
lucis  fugam  ,  6*  tadium  difiat. 

CLASSICIANUS  [  JuLius], 
Julius  ClaJJicianus,  Foye^  Juliu$. 

CLASSICUS  [  JuLius  ] ,  Ju- 
lius Clajicus,  Foyei  Julius. 

CLASSIQUE,  Clajficus,  ter- 
me  qui  ne  fe  dit  que  des  Auteurs 
que  l'on  explique  dans  les  collè- 
ges. Les  mots  oc  les  façons  de  par- 
ier de  ces  Auteurs  fervent  de  mo- 
dèle aux  jeunes  ,gens. 

Pour  les  Auteurs  Latins  ,  on 
donne  particulièrement  ce  nom  à 
ceux  qui  ont  vécu  dujems  de  la 
République ,  ou  qui  ont  été  con- 
temporains ou  prefque  contempo>r 


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CL 

raîns  d'Augufte  ;  tels  font  Téreti- 
ce  ,  Céfar ,  Cornélius  Népos ,  Ci- 
céron ,  Sallufte  ,  Virgile ,  Horace, 
Phèdre i^Tite-Live,  Ovide,  Va- 
lere  Maxime  j  Velleius  Patércu- 
lus  ,  Quinte -Curce  ,  Juvénal^ 
Martial  ,  Frontin  ,  Quintilien  , 
Lucain ^ Perfe ,  &c.  auxquels  on' 
ajoute  Corneille  Tacite  ,  qui  vi- 
voie  dans  le  fécond  fieclç ,  auffi- 
bien  que  Pline  le  jeune ,  Florus , 
Suétone,  Juftin,  Eutrope,  &  quel- 
ques autres. 

Quant  aux  Auteurs  Grecs ,  que 
Ton  peut  appeller  Claffiques  ,  ils 
ont  vécu  en  des  téms  bien  diffé- 
rens  ;  tels  qu'Homère  ,  Démof- 
thène ,  Polybe ,  Thucydide ,  Hé- 
rodotc ,  Éfope  ,  Pindare ,  Arifto- 

fhane  ,  Xénophon  ,  Plutarque , 
.ucien  ,  Polyen  ,  Élien  ,  Héro- 
dien ,  Jofephe ,  Diodore  de  Sici- 
le ,  Denys  d'Halicarnafle ,  Ap- 
pien  ,  Dion  Caffius  ,  Euripide , 
Platon ,  Ifocrate ,  faint  Chryfoftô- 
me ,  faint  Bafile ,  faint  Grégoire, 
&c.    " 

L'adjedif  CîaJJîcus  en  Latin , 
n'a  pas  la  même  valeur  ou  accep- 
tion qu'il  a  en  François. 

I  ,^  Clajfîcus  fe  dit  de  ce  qui 
concerne  les  flottes  ou  armées \îa- 
vales,  comme  dans  ce  vers  de 
Properce  : 

Aut  canerem  Sicula  Claffica  hella 

ClaJJica  corona  ,  la  couronne 
Navale  qui  fe  donnoit  à  ceux  qui 
avoient  remporté  la  viâoire  dans 
on  combat  nava^.  ClaJJîci  dans 
Quinte- Curce  fignifie  les  mate* 
lots, 

^.®  ClaJJici  cives ,  ét(»ent  les 


C  L  ^        595 

citoyens  de  la  première  claflfe  ; 
car  ,  il  faut  obferver  que  le  roi 
Servius  avoit  partagé  tous  les 
citoyens  Romains  en  cinq  claffes. 
Ceux ,  qui  félon  l'évaluation  qu'on 
en  avoit  faite ,  avoient  mille  deux 
cens  cinquante  livres  de  revenu  au 
moins,  ou  qui  en  avoient  davan- 
tage ;  ceux-là  ,  dis-je  ,  étoient 
appelles  Clafliques.  ClaJJîci  tef' 
tes ,  fe  difoit  des  témoins  irré- 
prochables ,  pris  de  quelque  clafTe 
de  citoyens. 

C'eft  de- là  que  dai^s  Aulu- 
Gelle  Autores  Claffici  ne  veut  pas 
dire  les  Auteurs  Clafliques ,  dans  le 
fens  que  nous  donnons  parmi  nous 
à  ce  mot  ;  mais ,  Autores  ClaJJîci^ 
(igniâe  les  Auteurs  du  premier 
ordre ,  Scriptores  prima  nota  & 
praftantijjîmi ,  tels  que  Cicéron  » 
Viroile  ,  Horace ,  &c. 

On  peut ,  dans  ce  dernier  fens, 
donner  le  nom  d'Autears  Clafli- 
-ques  François ,  aux  bons  Auteurs 
du  fiecle  de  Louis  XIV ,  6c  de 
celui-ci  ;  mais  on  doit  plus  partie 
culièrement  appliquer  le  nom  de 
Claffiques  aux  Auteurs  qui  ont 
écrit  tout  à  la  fois  élégamment  âc 
correâement  jtels  que  Dépréaux  , 
Racine  ,  &c. 

Qu'il  me  foit  permis  de  faire 
ici  une  réflexion  au  fujet  des  Au- 
teurs Claffiques ,  dont  j*ai  eu  pour 
objet  principal  de  faciliter  l'intel- 
ligence ,  en  entreprenant  cet  Ou- 
vrage. Des  perfonnes  que  je  con- 
fidère  beaucoup  ,  &  qui  donnent 
les  plus  grands  élogçs  à  ma  tâche, 
ont  cru  que  le  terme  de  Claffiques  ^ 
ajouté  au  titre  de  cet  ouvrage^ 
n'en  donnoient  pas  une  idée  afle^ 
étendue  >  puifque  ce  terme  fçov^ 
Ti4Î 


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JÎ94  C  L 

bloit  le  borner  dans  la  fphere  des 
Auteurs  que  l'on  employé  dans 
les  clafTes.  L'énumération  ,  que 
je  viens  de  faire  des  Auteurs 
Claffiques ,  appuyée  de  l'autorité 
des  maîtres  de  l'Art  &  des  plus 
habiles  Littérateurs,  montre  que 
l'on  entend  par  Auteurs  Qaffi- 
ques  ,  tous  ^les  bons  'Auteurs 
Grecs  Ôc  Latins ,  dont  les  ouvra* 
ges  font  parvenus  jufqu'à  nous  en 
tout  eu  en  partie.  Les  Auteurs 
François  Claffiques  ,  font  auffi 
entrés  dans  mon  plan ,  cbmme 
en  font  foi  plufîeurs  articles  de 
ce  Diâionnaire;  tels  font  ceux 
de  Grammaire  Françoife  &  au- 
tres. Quiconque  faifira  donc  bien 
toute  rétendue  qu'a  le  terme 
d'Auteurs  Claffiques ,  n'improu- 
vera  pas ,  ce  me  femble ,  que  je 
Taie  placé  au  frontifpi^  d'un  Ou- 
vrage qui  eft  confacré  à  leur  in- 
telligence* 

CLASSIS  PROCINCT  A.  (a) 

Le  plus  difiingué  des  Flamines  fe 
fâifoit  un  fcrupule  de  voir  au  de- 
là du  Pomérium  une  armée  en 
bataille  ;  ce  qu'on  appelloit  Cla/^s 
Procinda, 

CLASSITIUS ,  Ctajfitîus,{b) 
l'un  des  Satellites  d* Antoine  ^  au 
rapport  de  Cicéron. 

CLASTÏDIUM ,  Claftidium , 
(c)  bourg  dltalie  ,  qui  étoit  fitué 
dans  la  gaule  Cifalpine  en  de-çà 
dii  Pô  9  par  rapport  aux  Romains. 
Ce  lieu  ne  paroît  avoir  été  connu 
que  des  Hiftoriens  >  tels  que  Tite- 
Live  >  Polybe ,  Cornélius  Népos , 

{a)  Coût,  des  Rom.  par  M.  Nieup. 
pag.  107. 
(h)  Cicer.  Philip,  5.  c.  176, 


CL 

Plutarque.  Les  Géographes -n'en 
font  aucune  mention. 

C'étoit  une  place  fortifiée  du-- 
rant  la  féconde  guerre  Punique* 
Les  Romains,  en  ayant  fait  leur 
magafin,  y  avoient  raflemblé  une 
grande  quantité  de  bled.  Annibal^ 
\e  trouvant  dans  une  grande  di- 
fette  ,  fut  obligé  d'y  envoyer  ua 
parti.  Celui  qu'il  avoit  chargé  de 
cette  expédition  ,  tenta  d'abord 
de  s'en  rendre  maître  par  la  force. 
Mais  ,  Dafius  de  Brindes  ,  qui 
commandoit  dans  cette  place  9 
ayant  offert  de  la  lui  livrer  pour 
de  l'argent ,  il  accepta  la  propofi* 
tion  de  ce  traître  ;  &  il  n'en  coûta 
à  Annibal  que  quatre  cens  pièces 
d'or  ,  pour  acheter  de  quoi  nour- 
rir fes  troupes  »  pendant  tout  le 
tems  qu'il  demeura  aux  environs 
de  Trebie.  Il  traita  favorablement 
la  garnifon  qu'on  lui  avoit  livrée 
avec  la  place  9  afin  de  fe  donner 
dans  le  commencement  la  répu- 
tation d'un  général  plein  de  dér 
mence. 

Ce  fut  dans  le  voifin^ge  de 
Claftidium  ,  que  M.  Marcellus 
défit  les  Gaulois  ,  commandés 
par  le  roi  Viridomare.  Au  milieu 
de  It  mêlée  ,  frappé  de  l'éclat  des 
armes  de  ce  Prince ,  il  pouffe  à 
lui  de  toute  fa  force ,  &  perce  fa 
cuirafFe  avec  fa  pique.  Le  coup  , 
augmenté  par  la  vîtefTe  ôc  par  la 
force  du  cheval ,  fut  fi  roide ,  qu'il 
jetta  le  roi  à  la  renverfe.  M.  Mar- 
cellus revient  fur  lui  »  lui  appuie 
un  fécond  &  troifième  coup  qui 
achèvent  de  le  tuer  \  &  fautant  > 

(e)  Tit.  Lîv.  L.  XXL  c.  48.  b.  XXIX. 
c.  II.  Plut.  T.  I.  p.  30*  Com.  Nep.  in 
Annlb.  c,  4* 


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CD 

promptement  à  terre ,  îl  le  dé- 
pouille de  Tes  armes  &  les  voue' 
à  Jupiter  Férétrien,  Dès  qu'il  fut 
arrivé  à  Rome,  fon  premier  foin 
fat  de  les  placer  dans  le  ten^ple  de 
ce  dieu.  Plutarque  ob(erve  que  M. 
Marcellus  fut  le  troifième  général 
Romain  qui  eut  cet  honneur  ,  & 
que  jufqu  au  tems  qu'il  écrivoit  » 
aucun  autre  ne Tavoit  reçu.  Une 
autre  obfervation  de  Plutarque, 
&  qui  regarde  Claffidium  même, 
c'eft  que  cette  place  ^  félon  lui , . 
n'étoit  foumife  que  depuis  peu 
aux  Romains  ,'  lorsqu'elle  fut  té- 
moin de  révenement  dont  on 
vient  de  faire  le  récit. 

Le  texte  de  Plutarque  porte 
Capidium ,  au  lieu  de  Qaflidium. 
Cet  Auteur  n'en  fait  qu'un  bourg  ; 
D  autres  en  font  une  .ville.  C'eft 
aujourd'hui  Chiaflezzo  ou  Chiaf- 
teggio  »  dans  le  Milanois ,  au  ter- 
ritoire de  Pavie. 

CLASTIDIUM  ,  CtaHidium. 
Tiie  -  Live  {a) ,  dans  fon  trente- 
deuxième  livre,  dit  :  Oppida  Cla- 
ftidium  &  L'Uttbium  ,  utraque  Li^ 
gurum.  Sigonius  croit  qu'il  faut 
lire  ici  Cariilum ,  qui  étoit  une 
ville  du  pais  des  Liguriens  ,  dans 
le  territoire  des  Statiellates. 

CLATERNE,  CUurna  (b) , 
KAflfTfpa,  ville  d'Italie,  dans  la 
Gaule  Cifalpine.  L'Itinéraire 
d'Antonin  met  cette  ville  à  dix 
milles  de  Bononie  ;  &  celui  de 
Bordeaux  à  Jérufalem ,  marque 
la  même  diHance.  L'un  &  Tautre 
Itinéraire  compte  de  Claterne  à 
Forum  CorneUi ,  c'eft-sPdire ,  Imo- 


^    C  L  ^95 

la ,  treize  mille  pas.  Cicéron  par- 
le de  cette  ville  en  plufieurs  en- 
droits. Pline  en  fait  aufli  mention^ 
&  la  met  au  nombre  des  Colo- 
nies. Ptolémée  dit  aufli  que  c'é- 
toit  une  des  villes  de  la  Gaule , 
furnomtnée  Togata.  Ce  nom  fe 
trouve  écrit  Cliterna  dans  Stra- 
bon  ;  c'efl  une  faute  des  copifles. 
Cluvier  lie  dans  Tite-Live  :  ab 
altero  ptatore  Sempronio  Tuditano 
oppidum  Cliterrium  expugnatum , 
&  veut  qu'on  life  Claternum  au 
neutre  ;  mais ,  les  éditions  pofié- 
Heures  portent  Aternum, 

Claterne  étoit  déjà  bien  déchue 
du  tems  de  faint  Ambroife,  com- 
me il  paroit  par  la  huitième  de  Tes 
Lettres)  Il  n'en  refte  pas  grande 
chofe  ;  &  ce  refte  s'appelle  Qua- 
derna  ,  aufli  bien  que  le  ruif- 
feau  qui  coule  auprès. 

CLAXRA,  CUtra  (c) ,  fu^- 
nom  donné  à  Diane,  dans  un  mo- 
nument Etrufque  ,  où  l'on  voit 
cette  Déefl*e  porter  les  fymboles 
de  plufieors  divinités. 

Clatra  étoit ,  félon  quelques- 
uns  y  la  déefle  des  grilles  6c  des 
ferrures  ;  elle  avoit  à  Rome  un 
temple^  en  commun  avec  Apol- 
lon ,  fur  le  mont  Quirinal.  Cla- 
tra n'étoit  y  f^lon  d'autres  ,  qu'un 
furnom  d'Ifls. 

CLAUDE  I  ,  ou  CLAU- 
DIUS,  [TiBÉRius  Claudius 
Néro  DKVS\JS^']Tiberius  Clau" 
dius  Nero  Drujus  ,  empereur  Ro- 
main. Voye^^  Tibérius. 

CLAUDEII,  ottCLAU- 
DIUS  [M.  AuRÉLius  Clau- 


(»)  Tir.  Lîv.  L.  XXXII.  c.  tp.  IStrab.  p.  iitf.  Tit.  L.  XXIV.  c.  47. 

C*)  CScer.  ad  Amie.  L.  XII.  Epîft.  5.  |     {c)  Antiq.    expl.    par   D.    Bem. 
«^lia.  T.  I,  p.  17».  Ptolçm.  Im  IU,  Ct  u  IMonti,  T,  I.  p.  loy. 


da 


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3.^6  C  L 

Dius  ]  M.  Aurelius  Claudms,  Em- 
pereur Romain  ,  connu  auffi  fous 
le  nom  de  Claude  le  Gothique. 
Voye^  Gothique. 

CLAUDIA  ,  Claudia  {a), 
▼ilie  de  la  Norique,  félon  Pline. 
Elle  eil  nommée  Claudivium  dans 
Ptolémée.  Cluvier  croit  que  c*eft 
Clàufen  »  village  de  Bavière ,  au- 
près de  Marquarftein  &  du  Chiem- 
fée.  Lazius,  fuivi  par  Ortelius  &L 
par  le  P.  Hardouin,  dit  que  c'eft 
Claeenfurt ,  village  de  Carinthie. 

CLAUDIA  ,  Claudia  ,  con- 
trée  de  i'Afie  mineure  ,  félon 
Diodore  de  Sicile.  Cette  contrée 
étoit  du  côté  de  Milet. 

CLAUDIA  [la  Voie  ], 
Claudia  Via  (^).  Il  eft  parlé  de  ce 
grand  chemin  dans  Ovide.  Il 
commençoit  au  pon^  Milvius ,  & 
alloit  aboutir  à  la  voie  Flaminia 
près  du  libre ,  à  quelque  diftance 
de  Rome.  On  trouvoit  plufieurs 
villes  confidérables  fur  la  voie 
Claudia.  Il  y  en  a  qui  lifent  Clo- 
dia ,  au  lieu  de  Claudia.  Ce  grand 
chemin  étoit  un  des  plus  confidé- 
rables  de  Tltalie.  Il  paffoit  au  ua- 
vers  de  TÉtrurie. 

CLAUDIA,  Claudia  (  c  )  , 
Dame  Romaine ,  fœur  de  Clau- 
dius  Pulcher  •  qui  fit  périr  par  fa 
faute  la  flotte  Romaine.  Cette  Da- 
me ,  l'an  de  Rome  506 ,  fut  ap- 
pellée  en  jugement  devant  le  peu- 
ple; ce  qui' étoit  fans  exemple, 
comme  coupable  du  crime  de  le- 
?e-Majefté.  Voici  à  quelle  occa- 
fion. 


C  L 

Un  jour  qu'elle  revenoitdes  jenri 
&  que  fon  char  alloit  lentement  à 
caufede  la  multitude  du  peu  pie  qui 
rempliflbit  les  rues ,  il  lui  échappa 
de  dire  »  en  s'écriant  d'une  voix 
haute  :  flût  aux  D'uux  que  mon 
frère  pût  revivre^  &  commandât  en* 
cote  la  flotte.  Se  fentant  incommo- 
dée de  la  multitude  ,  elle  en  fou* 
haitoit  la  diminution.  Quelques 
efforts  que  fiflent  fes  parens  &les 
amis  de  fa  famille  qui  étoiem  les 
premiers  de  Rome ,  en  remoff- 
trant  que  les  loix  ne  punifToiem 
point  les  paroles  indifcretes  ,  mais 
feulement  les  aâions  criminelles  « 
eUe  fut  condamnée  à  une  amende, 
qui  fut  employée  à  bâtir  un  petit 
oratoire  à  la  liberté. 

CLAUDIA  QUINTA, 
Claudia  Quinta.  Voye^  Quinta. 

CLAUDIA,  Claudia  (d), 
veftale, fille  de  Claudius.  Comme 
fon  père  triomphoit  malgré  les 
Tribuns  ,*  ceux-ci  entreprirent  de 
le  renverfer  de  fon  char  ,  au  mi- 
lieu même  de  la  marche  de  fon 
triomphe.  Claudia ,  qui  avoit  fui- 
vi tous  leurs  mou  vemens,  fe  mon- 
tra à  propos ,  &  fe  jetta  dans  le 
char  ,  dans  le  moment  même 
qu'un  Tribun  alloit  renverfer  Clau- 
dius ;  elle  fe  mit  entre  fon  père  & 
lui,  6c  arrêta  par  ce  moyen  la 
violence  du  Tribun  ;  retenu  alors 
malgré  lui  par  cet  extrême  ref- 
pe6è  qui  étoit  dû  aux  veftales ,  &, 
qui  ne  laiflbit  à  leur  égard  qu'aux 
pontifes  fèuis  la  liberté  des  re- 
montrances &  des  voies  d^  fait  ; 


1 


(a)  Plin.  T.  I.  p.  179.  Pcoletn.  L.  II.  |  Hift.  Rom.  T.  II.  p.  559. 

ç,  14.  I     (d)  Mém.  de  TAcad.  des  Infcript.  ft 

(b)  Ovid.  de  Ponto.  L.  I.  Eleg.  9.       1  Bell.  Lett.  Tom.  IV.  p9g,  188 «  189.  X* 
0)    pu  tiv,  L.   XIX.  Epie.  &oU.IXXL|>.  337, 


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CL 

aînfî,  dit  Valère  Maxime,  l'un 
alla  en  triomphe  au  capitole ,  &L 
Tautte  au  temple  de  Vefta  ;  &  on 
ne  peut  dire  à  qui  on  de  voit  le 
plus  d'acclamations ,  ou  à  la  vic- 
toire du  père ,  ou  à  la  piété  de  la 
fille.  ^ 

Suétone ,  çn  parlant  de  la  fa- 
ixîille  de  Tibère  ,  c'eft-à-dire ,  de 
la  race  des  Claudius  ,  &  entrant 
dans  le  détail  des  aâions  bonnes 
&  mauvaifes  de  tout  ce  qui  avoit 
porté  ce  nom ,  n'9  pas  manqué  de 
citer  raâion  de  cette  veftale; 
mais ,  félon  lui  »  la  chofe  regardoit 
le  frère ,  &  non  point  le  père  de 
Claudia.  Une  vierge  veflale  ,  dit- 
il  ,  fuivit  jufqu'au  capitole ,  fon 
frère  qui  triomphoit  contre  Taveu 
du  peuple;  ellç  étoit  montéç  avec 
lui  dans  le  char  de  triomphe ,  pour 
prévenir  la  violence  &  Toppoti- 
tion  des  Tribuns;  mais  peut- être 
e(l-ce  une  faute  dans  le  texte  ;  & 
faut-il  litçpatrem  au  liçu  de  /rj- 
tremî  du  moins  ^  Cicéron ,  dans 
fa  harangue  pour  Cœlius  ,  s'ac- 
corde avec  Valère  Maxime  fur 
le  triomphe  du  père. 

Ovide  parle  d'un  temple  de  la 
Bonne  déefle  ,  bâti  par  une  Clau- 
dia ,  &  rétabli  depuis  par  Livie. 

CLAUDIA,  Claudia  (a), 
fille  de  M.  Silanus^  fut  la  pre- 
mière feiTinie  de  Caligula ,  mais 
elle  mourut  peu  de  tems  après 
qu'elle  eut  époufé  ce  prince. 

CLAUDIA  PULCHRA  , 
Claudia  Pulchra.  Foye^  Pulchra. 

CLAUDIA,  Claudia  {h), 
danie  Romaine  qui  fut  convertie 


C  L  297 

par  faim  Paul.  Voye^  l'article  fui- 
vant. 

CLAUDIA  RUFINA. 
Claudia  Rufina  ,  native  de  la 
grande  Bretagne  ,  vivoit  vers  Tan 
100  de  Tere  chrétienne,  (k  fu( 
célèbre  par  fon  efpric. 

Quelques-uns  croyent  qu'elle 
étoit  Chrétienne ,  &  que  c'eft  la 
même  dont  parle  faint  Paul  fur 
la  fin  de  la  féconde  É pitre  à  Ti«»- 
mothée.  On  prétend- qu'elle  étoit 
parente  de  l'empereur  Claudius  ; 
qu'elle  demeuroit  à  Rome  ,  & 
qu'elle  y  époufa  Aulus  Rufus  Pu- 
dens  ,  qu'on  dit  être  le  même 
dont  parle  faint  Paul  au  même 
endroit.  Le  martyrologe  Romain 
fait  mention  ,  au  19  mai ,  de  Put- 
dens  &  de  Pudentienne  fa  fille* 
Celle-ci  fouffrit  le  martyre  ver$ 
l'an  1 40.  La  chronologie  eft  dif- 
férente dans  les  Auteurs  qui  par- 
lent de  Pudeiis  &  de  Claudia, 
qui  cpmpofi  quelques  ouvrages 
en  vers. 

CLAUDIASACRATA, 

Claudia  Sacrata.  rbye^  Sacrata. 

CLAUDIA  LiETA  ,  Clau- 
dia lata.  Foyei  Lsta. 

CLAUDIA  ,  Claudia  (  c  )  , 
fille  de  Crifpus ,  frère  de  l'empe- 
reur Claude  II  ,  époufa  Eutro- 
pius  ,  l'un  des  plus  illuflres  fei- 
gheurs  de  la  nation  des  Darda- 
niens.  De  ce  mariage  naauit  Con- 
fiance Chlore  ,  père  au  grande 
Conflantin. 

CLAUDIA  [la  Tribu], 
Ùaudia  Tribus  (d).  Cétoit  une 


ifi)  T^piî.  AniJal.  L.  VI.  c.  10 ,  45.    |p.  4 »  » 59. 

(b)  Ad  Timoth.  Eplft.  II.  c.  4.  v.  ai.   |     {d)  Tic.  Liv.  L*  II.  c.  J>6i 

lÔ  Crév.   Hiâ»  des  Emp.  Tom.  VI.  | 


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^9.8  C  L 

Tribu  Romaine  ,  qui  avoît  pris 
fon  nom  d' Appius  Claudius ,  au 
f apport  de  Tite-Live. 

CLAUDIA,  Claudia  (a), 
nom  d'une  légion  Romaine.  Elle 
étoit  ainfi  nommée  de  l'empereur 
Claude. 

CLAUDIA ,  Claudia  (b) ,  nom 
commun  à  plusieurs  loix  Romai- 
nes. Elles  furent  ainfi  nommées 
de  ceux  qui  les  avoient  portées. 
Il  y  en  avoit  une  touchant  les  af- 
lemblées  des  magiflrats  ;  une  au- 
tre touchant  les  alliés;  une  autre 
touchant  les  tuteles ,  &c. 

CLAUDIAN A  CASTRA.  K 
Caftra  Claudiana. 

.  CLAUDIANA  ,  Claudiana  , 
{c)  nom  que  Tacite  donne  à  la 
feptième  légion ,  en  pluileurs  en- 
droits de  Tes  hiftoires. 

CLAUDIEN  ,  Claudius  , 
Claudianus  (4)  ,  fameux  poëte 
latin ,  qui  vivoit  dans  le  quatrième 
fiècle  ,  fous  l'empire  de  Théo- 
cbfe ,  &  de  fesfils  Arcadius  &  Ho- 
norius.  Plufieurs  Sçavans  croyent 
qu'il  étoit  Égyptien  ,  natif  de  Ca^ 
nope  ;  ce  que  Crinitus  juge  être  in^ 
conteftable ,  d'après  ce  que  Clau- 
dien  avoue  de  lui-même  dans  Tépi- 
gramme  au  proconful  Gennadius. 

Cependant ,  ce  fentïment  n'eft 
pas  le  plus  univerfel ,  car  plufieurs 
le  font  Efpagnol  ;  &  Pétrarque , 
Ange  Politien  &  Landini ,  ont  cru 
qu'il  étoit  originaire  de  Florence. 
D'autres  alTurent  que  Claudien 
étoit  Gaulois ,  &  que  la  ville  de 


CL 

Vienne  en  Dauphiné  étoît  le  lîett 
de  fa  naiffance  ;  fondés  fur  ce  que 
la  famille  des  Claudiens  a  été  il- 
luftre  dans  cette  ville ,  &  féconde 
en  beaux  efprits.  Quoi  qu'il  en 
foit ,  Claudien  étoit  Païen ,  &  flo- 
riflbît  fous  l'empire  d' Arcadius  & 
d'Honorius  qui  lui  firent  drefler 
dans  Rome  une  ftatue ,  avec  une 
infcription  qui  fe  trouve  dans  Li« 
lio  Gy raidi.  Ce  monument  lai  fut 
élevé  de  fon  vivant  même» 

Il  eft ,  fans  contredit ,  le  pre- 
mier de  tous  les  poètes  qui  ont 
paru  depuis  le  fiède  heureux 
d'Augufte;&  Marc- Antoine  Sa« 
bellic  femble  avoir  eu  raifon  de 
dire  qu'il  efl  le  dernier  des  anciens 
poètes ,  &  le  premier  des  nou- 
veaux. M.  Godeau  ,  après  divers 
autres  critiques  d'Allemagne  & 
dltalie,  témoigne  que  de  tous 
ceux  qui  ont  tâché  de  fuivre  ÔC 
d'imiter  Virgile  ,*  il  eft  celui  qui 
approche  le  plus  de  la  majefté  de 
ce  Poëte ,  &  qui  fe  fent  le  moins 
de  la  corruption  de  fon  fiècle.  Un 
Critique  ÉcofTois  préfère  fans  fa- 
çon Claudien  à  Virgile. 

i**.  Pour  ce  qui  regarde  le  gé- 
nie ,  il  faut  Convenir  qu'il  l'avoit 
admirable.  Crinitus  témoigne  qu'il 
femble  être  formé  par  la  nature  . 
même  pour  la  poëfie  ,  &  qu'il  y 
étoit  heureufément  porté.  La  plu- 
part des  crîtiques  en  ont  jugé  à 
peu  près  de  même.  Les  anciens 
Auteurs  ecdéfiaftiques  mêmes  , 
tels  qu'Orofc  &  Paul  Diacre ,  ne 


i»)  Antiq.  expl.  par  D.  Bern.  de|  {d)  RoU.  Hift.  Ane.  T.  VI.  p.  ix}* 
Montf.  Tom.  IV.  pag.  is.  ICrév.  Hift.  des  Emp.  Tom.  IV.  p.  419. 

(h)  Rofin.  de  Antiq*  Rom.  pag.  ^%y  À  Hift.  tin  Bas  Emp.  par  ,M.  le  Geau  Tonii 
819,8^1.  Iv.p.496^ 

(c)  Tadt,  Hift.  L.  UI.ç,  %i  ^  %j,      | 


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C  L 

luî  ont  pas  refufé  cette  gloire. 
Louis  Vives  dit  que  Claudien 
étoit  né  poëte  ;  qu'il  poflédoit  I  cf- 
prit  poëtique  dans  toute  fa  pléni- 
tude ;^  qu'il  étoit  tout  rempli  de 
ce  feu  qui  produit  l'enthoufiarme. 
Ceft  ce  qu'ont  auffi  reconnu  Bu- 
chanan ,  Jufte-Lipfe ,  Contarini , 
Hankius. 

2®.  Pour  la  fcience ,  Claudien 
ne  laîiToit  pas  d'en  avoir  beau- 
coup. Il  s'étoit  rendu  habile  dans 
la  fcience  des  chofes  naturelles  ; 
dans  celle  des  loix  &  de  la  jurif- 
prudence ,  &  dans  celle  de  l'art 
militaire.  Mais  M.  Baillet  croit 
que  Claudien  étoit  favant  en  poè- 
te; c'eft-à-dire ,  que  fans  appro- 
fondir toutes  ces  connoidances , 
qui  demandent  chacune  un  hom- 
me tout  entier^  il  s*étoit  contenté 
d'en  faire  l'accefToire  de  fa  pro- 
feffion  principale  ;  peut-être  mê- 
me ne  les  avoit-il  étudiées  que 
dans  Homère  &  dans  Vircile. 

5***  Pour  ce  qui  eft  du  8yle  de 
Claudien,  la  plupart  des  Critiques 
conviennent  qu'il  eft  teau ,  pur , 
châtié ,  élégant ,  doux ,  grave  , 
élevé ,  noble  ;  &  ce  qu'on  y  a  le 
plus  admiré ,  c'eft  de  le  voir  cou- 
lant &  facile,  avec  tant  d'autres 
qualités  oui  fe  trouvent  rarement 
réunies  dans  les  autres  Poètes. 
Quelques  Auteurs  modernes  ce- 
pendant ont  tro^vé  que  fa  lati- 
nité n'eft  pas  affez  pure.  M.  Ni- 
cole dit  qu'il  a  trop  de  faillies  de 
jeaneffe ,  &  qu'U  eft  trop  enflé  ; 
les  pères  Briet  &  Rapin,  jéfuhes , 
ont  remarqué  après  lui  la  même 
chofe.  Ce  Poëte ,  dit  le  Gyraldi , 
commence  un  fujet  avec  beau- 
Coup  de  feu  &  de  courage  ;  n\ai$ 


C  L  ^99 

le  vent  lui  manque,  &  il  eft  rare  » 
félon  |ui ,  que  la  fin  de  fes  pièces 
réponde  à  leur  commencement. 

4^.  Entre  les  diverfes  pièces 
de  poëfie  que  Claudien  a  pu-» 
bliées  ,  les  inveâives  contre  Ru- 
fin  &  contre  Eutrope  ,  font  fes 
plus  belles  ,  au  jugement  de  M^ 
Godeau  ;  félon  lui ,  on  ne  peut 
rien  faire  en  ce  genre  de  plus 
achevé.  Après  ces  pièces ,  il  n'y 
en  a  pas  de  plus  eftimées  que  le 
Poëme  de  l'enlèvement  de  Pro- 
ferpine.  Le  Poëme  du  Confulat 
d'Honorius  marche  après.  Il  eft 
bon  de  remarquer  avec  Jules 
Scaliger ,  que  Claudien  a  intro-* . 
duit  dans  la  poëfie  une  efpèce  de 
nouveauté  y  dont  on  n'avoit  point 
encore  eu  d'exemple  ailleurs  que. 
dans  Perfe.  C'eft  celle  de  mettre 
des  préfaces  à  la  tête  de  chaque 
ouvrage,  comme  il  a  fait  à  U 
plupart  des  fiens.  Parmi  les  édi- 
tions de  Claudien ,  celle  de  Hein- 
fius  fils  eft  la  meilleure,  ;  celle 
de  Bathius  eft  aufti  fort  bonne; 
mais  le  commentaire  eft  un  peu 
trop  long.  On  efiime  aufti  celle 
qui  a  été  donnée  en  lôjjidd  ufum 
Delphinu 

Quant^  au  Poëme  de  Jéfus- 
Chnft,  qui  paroît  fous  le  nom 
de  Claudien ,  il  n'çft  pas  de  lut. 
Quelques-uns  l'attribuent  au  pape 
Damafe  ;  &  d'autres  à  Claudien , 
furnommé  Af^am^rr/^j,  qui  vivoit 
fous  l'empereur  Zenon.  Jules-Cé- 
far  Scaliger  dit  dans  fa  Poëtique  » 
que  Claudien  a  hUé  accablé  par  le 
peu  de  nobleffe  de  ^  fa  matière , 
&  qu'il  a  fuppléé  à  fes  défauts 
par  la  fertilité  de  fon  efprit. 

(QLAUDIEN,    Claudianus; 


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500  C  L 

poëte  Grec,' qui  a  été  inconnu  à 
Voflius. 

CLAUDIENNE  [la  famille], 
ou  '  la  famine  des  Claudiens , 
Claudia  gens ,  Claudiorum  gens  , 
7Hroç  K>«t;//i)v  (tf).  C'éioit  une 
illuflre  famille  Patricienne  de  Ro- 
me. £11^  étoit  originaire  du  pais 
des  Sabins.  Celui  (|ui  en  fut  la  ti- 
ge ,  fe  nommoit  Atta  Claufus  ; 
mais  étant  venu  s'établir  à  Ro- 
me 9  il  prit  le  nom  d*Appiu$ 
Ciaudius.  Ses  defcendans  rempli- 
rent les  premières  places  de  la 
République.^ Ciaudius,  qui  a  été 
formé  de  Claudus ,  fignifie  boi- 
teux. 

Cette  famille  fe  fit  toujours  re- 
marquer par  fa  hauteur  &  par 
ia  fierté.  Oppofée  par  fyfiême  au 
gouvernement  Populaire  ,  elle  fut 
dévouée  dans  tous  les  tems  à  la 
grandeur  du  Sénat. 

M.  Dacièr  ,  dans  une  de  fes- 
remarques  fur  la  vie  de  P.  Valé- 
rius  Publicola  ,  dit  qu'il  y  avoir 
deux  familles  de  Claudiens  à  Ro- 
me ,  l'une  Patricienne ,  &  l'autre 
Plébéienne.  La  première  étoit  des 
Claudiens  ,  furnommés  Pulchri; 
&  l'autre  des  Claudiens,  furnom- 
més Marcelli.  Dans  la  fuite  des 
tems ,  il  y  eut  dans  la  Patricienne 
vingt- trois  confuls  ,  cinq  diéèa- 
teurs ,  fept  cenfeurs ,  fept  grands 
triomphes  &  deux  petits.  L'empe* 
reur  Tibère  defcendoit  de  cette 
famille. 

Pour  moi ,.  s'il  m'eft  permis 

(a)  Plut.  T.  I.  p.  To8  >  ii8.  Tit.  Liv. 
I,.  M.  c.  16.  Roll.  Hitt.  Rorp.  T.  I.  p. 
sao ,  m.  Nfém.  de  l*Acad.  d«s  Infcript. 
&  Bell.  Lett.  Tom.  XIX.  p.  501 ,  J04. 

{b)  Plut.  T.  I.  p,  X08,  Tit.  Uv.  L.  Il, 


CL 

d*împrouver  le  fentiment  d'an  fi 
favant  homme,  je  croirois  plutôt 
qu'il  n'y  avojt  qu'une  feule  fa- 
mille Claudienne  de  l'ordre  àes 
Patriciens  ,  &  que  cette  Éimille 
étoit  divifée  en  deux  branches, 
les  Pulchri  &  les  Marcelli^ 

'  //  faudra  chercher  par  leurs 
Surnoms ,  ceux  dont  on  ne  trou^ 
ver  a  pas  les  articles  ci- après, 

CLAUDIES,  (les  eaux)  Clau* 
4idB  aqua,  Suétone  ^  dans  la  vie 
de  l'empereur  Qaudius ,  fait  men- 
tion de  deux  fontaines  de  ce  nom , 
au  voifinage  de  Rome.  Elles 
avoient  outre  cela  chacune  un 
nom  particulier.  L'une  s'appelloit 
Caruleus,  c'eft-à*dire  ,  la  Fon- 
taine bleue  ;  l'autre  Curtius  &  Al- 
budinus. 

CLAUDIUS  [  Appius  ]  , 
Appius  Ciaudius  (  ^  )  ,  AVtti'oç 
KxctV(tioç ,  natif  de  Régillum  ,  vil- 
le des  Sabins.  C'étoit  un  homme 
qui  avo^t  de  grands  biens ,  qui  s'é- 
toit  rendu  recommandable  pat  fa 
force  6c  par  fon  courage  ,  &  qui 
paffoit  pour  le  plus  éloquent  8c 
le  plus  vertueux  de  tous  les  Sa- 
bins. Cet  homme  n  avoit  pu  évi- 
ter le  fort  de  tout  ce  qu'il  y  a  de 
grand,  qui  eft  d'attirer  l'envie; 
car,  fous  prétexte  qu'il  vouloît 
empêcher  la  guerre  contre  les 
Romains ,  on  l'avoit  accufé  de  les 
faVorifer,  &  de  vouloir  accroî- 
tre leur  puiffance ,  pour  s'en  fervir 
à  affujettir  fa  Patrie  ,  &  à  s'en 

c.  15  ,  ti.  ô*  fiq»  Roll.  Hift.  Rom.  T. 
I.  pag.  tio  »  IX I.  &  friv,  M^oi.  de 
TAcad.  des  Infcript.  £ç  Bell.  Lett.  Tom^ 
XII.  pag.  6j. 


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CL 

^end^e  le  tyran.  Voyant  donc  que 
le  peuple  prêtoit  volontiers  To- 
reille  à  ces  calomnies ,  &  qull 
étoit  haï  des  gens  de  guerre  ,  & 
de  tous  ceux  qui  ne  vouloient  pas 
entendre  parler  de  paix;  &  crai- 
gnant qu'on  ae  l'appellât  en  jufti- 
ce ,  il  fit  venir  à  Ion  fecours  un 
très-grand  nombre  de  Tes  pafens 
&  de  fes  amis  y  &  forma  dans  Ton 
pais  un  parti  qui  fut  la  feule  caufe 
du  retardement  de  la  guerre. 

Le  conful  P.  Valérius  Publico- 
la ,  qui  n'oublioit  rien ,  non-  feu- 
lement pour  être  informé  de  ce 
qui  ie  pafToît  parmi  les  Sabins , 
'   mais  encore  pour    fomenter  & 
pour  irriter  leurs  divifions  ,  avoit 
auprès    d'Appius  Claudius,  des 
gens  afHdés  &  habiles  qui  lui  di- 
foient  que  P.  Valérius  Publicola 
le  croyoit  trop  jufte  &  trop  hom- 
ine  de  bien  ,  pour  vouloir  fe  ven- 
ger contre  fa  Patrie  de  Tinjudice 
de  fes  citoyens  ,  quelque  mau- 
vais traitement  qu'il  en  eût  reçu  ; 
mais  que  s'il  vouloit  fe  dérober  à 
leur  haine ,  &  fe  mettre  à  cou- 
vert de  leur  fureur  ,  il  feroit  reçu 
dans  Rome ,  &  en  public ,  &  en 
particulier,   avec   tous  les  hon- 
neurs qui  étoient  dûs  à  fon  '  mé- 
rite ,  &  qu'il  pouvoit  attendre  de 
la  magnificence  des  Romains. 
Appius  Claudius ,  après  avoir 
^    fbuvent  penfé  à  cette  propofition  , 
trouva  que  c'étoit  le  meilleur  par- 
ti qu'il  pût  prendre  dans  la  nécef- 
fité  oh  il  fe  trouvoit.  Ayant  donc 
aflemblé  fes  amis  J  &  ceux-ci  en 
ayant  attiré  encore  d'autres  ,  il 
enleva    aux    Sabins  cinq    mille 
hommes  ,    avec  leurs  efclaves , 
Uurs  femmes  &  leurs  enfans ,  ôc 


CL  3ôf 

les  mena  à  Rome.  Cétoit  -  la  ce 
qu'il  y  avoit  de  plus  paifible  dans 
le  païs ,  &  qui  étoit  le  plus  accou- 
tumé à  une  vie  douce  &  tran^ 
quille.  P.  Valérius  Publicola  ,  qui 
étoit  averti  de  leur  marche  >  les 
reçut  à  bras  ouverts  &  avec  tou- 
tes fortes  de  bons  traitemens  ;  car 
dés  l'entrée ,  il  leur  donna  à  tous 
le  droit  de  bourgeoifie  ,  &  diflri- 
bua  à  chacun  deux  arpens  de  terre 
le  long  de  la  rivière  de  TAnio.  Il 
en  donna  vingt -cinq  à  Appius 
Claudius ,  &  rhonora  de  la  dignité 
de  Sénateur.  Appius  Claudius  , 
ayant  commencé  par-là  d'avoir 
part  à  l'adminifiration  dé  la  Ré- 
publique f  fe  conduifit  avec  tant 
de  prudence  &  de  fageffe ,  qu'il 
parvint  au  plus  haut  degré  de 
l'autorité  »  du  crédit  &  de  la  puif- 
fance. 

Il  s'étoit  appelle  jufque-là  Atta 
Claufus  ;  il  prit  depuis  le  nom 
d'Appius  Claudius  ,  &  fut  la  tige 
de  riltu(tre  famille  des  Claudiens. 
Ceux  qui  l'avoient  fuivi  à  Rome  » 
formèrent  une  nouvelle  Tribu  , 
qui  fe  nomma  la  Tribu  Claudia. 

Appius  Claudius  fu:  un  zélé 
parcifan  6c  un  ardent  défenfeur 
de  l'ordre  ,  dans  lequel  on  l'avoit 
fait  entrer.  Le  récit  que  Ton  va 
faire  d'après  Tite-Live ,  en  fera 
-une  preuve.  Il  parvint  au  con- 
(ulat  Tan  de  Rome  259,  avec  P, 
Servilius.  Cette  année  fut  très- 
•heureufe  pour  la  République  naif- 
fante  ,  &  marquée  par  la  défaite 
des  Volfques.  Appius  Claudius 
les  vainquit  ;  &  après  cet  exploit , 
il  fit  couper  la  tête  à  tous  les 
otages  quils  avoient  à  Rome  , 
ajoutant  cette  peine  à  celle  que  la» 


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301  CL 

lortunp  des  armes  leur  avoit  fait 
fouffrir  ,  pour  avoir  violé  les 
trêves  &  la  foi  des  traités ,  dont 
la  vie  dés  otages  devoit  répon- 
dre. 

Une  difcorde  inteftine  que  la 
guerre  contre  les  Volfques  avoit 
forpendue,  fe  renouvella  bientôt 
après.  Cette  difcorde  étoit  prin- 
cipalement fufcitée  par  ceux  d'en- 
tre le  peuple  qui  étoient  enchaî- 
nés pour  leurs  dettes.  P.  Servi- 
lius  leur  avoit  promis  qu'on  leur 
procureroit  du  foulagement  dès 
'  que  la  guerre  feroit  finie  ;  &  ils 
s'attendoient  à  l'exécution  de  cette 
promefTe.  I^ais ,  Appiûs  Claudius 
fuivant  fon  naturel  emporté  >  & 
voulant  faire  voir  que  fon  collè- 
gue avoit  donné  une  parole  qu'il 
n'étoit  pas  en  état  de  tenir  ,  pro- 
nonça contre  les  débiteurs  des 
fentences  plus  rigoureufes  que  ja- 
imaîs.  On  remit  entre  les  mains 
de  leurs  créanciers  ,  ceux  qui  en 
avoient  été  tirés ,  &  on  leur  en 
livra  de  nouveaux  ,  qui  n'avoient 
point  été  encore  liés.  Cependant , 
on  apprit  que  les  Sabins  fe  prépa- 
roient  à  la  guerre.  Le  Sénat  or- 
donna aufli-côt  des  levées;  mais, 
il  ne  fe  trouva  perfonne  pour  s'en- 
rôler. Alors  ,  Appius  Claudius 
entra  dans  une  furieufe  colère, 
furtout  contre  fon  Collègue.  Il  lui 
reprochoit  que  poor  faire  la  cour 
au  peuple  ,  il  trahiïïbit  la  Répu- 
blique par  un  filence  affeâé  ;  ôc 
que  non  content  de  l'injuftice 
qu'il  fàifoit  à  ceux  qui  avoient 
prêté  leur  argent ,  en  les  empê- 
chant d'^en  pourfuivre  le  payement, 
il  refufoic  encore  de  faire  les  le- 
vées que  le  Sénat  avoit  décernées , 


CL 

pour  être  en  état  de  s'oppofer  aux 
ennemis  ;  mais  que  la  République 
n'étoit  pas  entièrement  abandon- 
née j  ni  la  majefté  confulaire  teU 
lement  abaiffée ,  qu'il  ne  fût  en 
état,  lui  feul ,  de  la  relever,  auffi- 
bien  que  celle  du  Sénat*  Ainfi , 
en  préfence  de  la  multitude  qui 
l'environnoit ,  armé  de  fon  audace 
ordinaire  ,  il  ordonna  à  fes  Lic- 
teurs de  fe  faifir  d'un  des  chefs  de  fa 
fédition  ,  qui  fe  faifoit  remarquer 
parmi  tous  les  autres.  Les  Lic- 
teurs mettoient  déjà  la  main  fur 
lui ,  lorfqu'il  appella  des  ordres 
du  Conful.  Appius  Claudius  fe 
feroit  moqué  de  cet  appel ,  au- 
quel il  ne  doutoit  pas  que  le  peu- 
ple ne  fût  favorable.  Mais  ,  fon 
opiniâtreté  fe  laiffa  vaincre  ,  plu- 
tôt par  les  avis  &  l'autorité  des 
premiers  du  Sénat ,  que  par  les 
clameurs  de  la  multitude ,  tant  il 
avoit  de  fermeté  6c  de  courage 
pour  foûtenir  tout  le  poids  de  la 
fureur  d'un  peuple  révolté. 

Cependant  ,  le  mal  croifToit 
tous  les  jours  ;  &  le  peuple  ne  fe 
contentoit  pas ,  comme  il  avoit 
fait  jufques-là  ,  de  crier  contre 
l'orgueil  ôc  la  cruauté  des  Patri- 
ciens. Mais  ,  ce  qui  avoit  des 
conféquences  bien  plus  dangereu- 
fes  ,  il  faifoit  bande  à  part ,  tenoit 
des  aflemblées  ,  &-  prenoit  des 
mefures  pour  fa  fureté.  Enfin ,  les 
deux  Confuls  fortirent  de  charge, 
également  haïs  du  peuple  ;  avec 
cette  différence,  que  P.' Servilius 
avoit  mécontenté  les  deux  partis, 
au  lieu  qu' Appius  Claudius  avoit 
entièrement  gagné  l'eftime  ôc  la 
bienveillance  des  Sénateurs. 

Ils  eurent  pour  ^fucceifeur  A, 


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j 


CL 

Virgînîus  &  T.  Vétufius  ,  fous 
lefquels  les  difcordès  continuèrent 
comme  auparavant.  Le  Séna^t  (fe 
trouvoit  partagé  en  difFérens  fen- 
timens  fur  les  moyens  qu'il  con- , 
venoit  de  prendre  ;  &  Appius 
Claudius  t  perfiftant  dans  fon  ca- 
raâère  impitoyable ,  foûtint  que 
les  troubles  de  la  République 
avoient  pour  principe  ,  non  la 
mifere  du  peuple ,  mais  la  licence 
à  laquelle  on  foufFroit  qu'il  fe  por- 
tât impunément  ;  &  qu'on  ne  de- 
voit  pas  regarder  ce  qui  fe  paflbit, 
comme  une  fédition,  ma»  com- 
me une  inquiétude  occafionnée 
par  le  repos  &  l'oifiyeté  ;  que 
tout  le  mal  ne  venoit  que  de  la 
liberté  qu'on  lui  avoit  accordée 
d'appeller  ;  qu'en  effet ,  l'autorité 
des  Confuls  fe  bornoit  à  de  (im- 
pies menaces  fans  effet  ;  depuis 
qu'il  étoit  permis  d'appeller  des 
punitions  qu'ils  avoient  ordonnées 
contre  le  crime,  à  ceux-là  mêmes 
qui  en  étoient  complices.  Si  vous 
m'en  croyez,  ajoûtà-t-il,  créons 
an  Oidateur,  dont  les  ordonnan- 
ces ne  font  point  fujettes  à  l'appel , 
&  vous  verrez  que  ce  grand  feu , 
qui  parok  devoir  tout  embrafer, 
fera  éteint  dans  le  moment. 
N'ayez  pas  peur  qu'il  s'en  trouve 
un  feul  qui  foit  aflfez  téméraire , 
pour  repouffer  le  liâeur  d'un  Ma- 
gifirat  qu'il  fçait  être  en  droit  de 
faire  battre  de  verges ,  ou  même 
de  punir  de  mort  quiconque  re- 
fcferoit  d'obéir  à  fes  ordres. 

La  plupart  des  Sénateurs  trou- 
yoient  le  fentiment  d' Appius  Clau* 


C  L  50J 

dius  dur  &  atroce ,  comme  il  Véiokt 
en  effet  ;  mais  ,  fa  faâion ,  &  l'in- 
térêt des  particuliers ,  qui ,  dans 
les  délibérations ,  a  toujours  été  ^ 
&  fera  toujours  pernicieux  au  biea 
public ,  prévalut  fur  l'opinion  des 
autres  ;  6c  peu  s'en  fallut  qu'on  ' 
ne  rélevât  lui-même  à  la  diâatu- 
re,  ce  qui  auroit  infailliblement 
foule vé  le  peuple.  Mais  ,  les  Con- 
fuls ôc  les  Sénateurs  eurent  foin 
qu'une  autorité  redoutable  par  elle** 
même ,  fût  confiée  à  un  hommç 
d'un  naturel  doux  6c  modéré. 

CLAUDIUS  [  Appius  ] ,  (4) 
Appius  Claudius  t  h'irmo^  K>.civ^ 
//oç  ,  fils  du  précédent ,  ne  fut 
pas  moins  ennemi  déclaré  du 
peuple  y  que  ne  l'avoit  été  fon 
père.  Il  fut  élevé  au  confulat  i'ao 
de  Rome  283  ,  maleré  fes  refus 
&  fa  réfiftance,  qu'il  pouffa  juf- 
qu'à  s'abfenter  des  comices  ;  mais, 
tout  abfent  qu'il  étoit ,  il  fut  élu« 
On  lui  donna  pour  collègue 
T.  Quintius  Capitolinus  ,  d'un 
caraâère  âuffi  doux  &  modéré , 
que  l'autre  étoit  emporté  &  vio- 
lent ;  dans  l'efpérance  que  ion 
exemple  &  (es  conCeils  pourroient 
adoucir  ce  qu'il  y  avoit  des  trop 
fier  ôc  de  trop  hautain  dans  les 
manières  d'Appius  Claudiuç. 

Dès  le  commencement  de  l'an- 
née 9  on  remit  fur  le  tapis ,  une 
loi ,  qui  n'alloit  à  rien  moins  qu'à 
ruiner  de  fond  en  comble  la  puif- 
ÙLïice  du  Sénat ,  6c  sa  la  faire  paf- 
fer  entre  les  mains  du  peuple. 
Voléron  Publilius  ,  qu^  en  étoit 
l'auteur  »  fuivoit  fon  entreprife.  - 


(«)  Tit.  Liv.  L,  n.  c,  5d,  ^  /#f .  Flor,  L.  I.  c.  »t.  RolU  Hift.  Rom.  T.  I.  pa^ 
J41.  a*  friv. 


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304         C  L 

Mais  ,  Létorius  Ton  collègue , 
comme  le  plus  nouveau  dans  le 
tribunal,  étoit  aufli  le  pluS  vif  6c 
le  plus  ardent  à  en  pourfuivre 
rétablifTement.  Le  jour  de  raflem- 
blée  ,  les  Tribuns  parurent  les 
premiers  dans  la  place.  Les  Con- 
duis, avec  toute  la  Noblefle,  ne 
manquèrent  pas  de  s'y  trouver, 
pour  rejetter  la  loi.  Létorius  or- 
donne à  Tes  appariteurs  ou  fer-* 
gens  de  les  faire  écarter ,  &  de  ne 
ibuffrir  dans  l'aiTemblée  que  ceux 
qui  dévoient  y  donner  leurs  fuf- 
fr âges.  Les  jeunes  geris  de  qualité 
redoient  dans  leurs  places,  fans 
fe  mettre  en  peine  des  infiances 
des  fergens.  Alors ,  Létorius  com- 
manda qu'on  fe  faisît  de  quelques- 
uns  d*entr'eux.  Mais,  le  corifut 
Appîus  Glaudios  loi  foûttnt  que 
le  pouvoir  des  Tribuns  ne  s'éten- 
doit  que  fur  les  Plébéiens  ;  qu^ils 
étoient  les  Magiflrats  ,  non  du 
peuple  Romain  en  général ,  mais 
de  la  fimple  populace  ;  que  le 
Tribun  lui-même  ne  pouvoit  em- 
ployer qae  les  prières  ,  &  non 
îautorité  ,  pour  fe  faire  faire  pla- 
ce ,  puifque  la  loi  de  leur  établif- 
fement  s'exprimoit  en  ces  termes  i 
Retirez-vous  ,  MeJJieurs  ,  fi  vous 
le  voulei  bien.  Il  n'étoit  pas  diffi- 
cile à  Appius  Claudius  d'embar- 
rafTer  Létorius  dans  les  queflions 
de  droit ,  où  il  étoit  fort  ignorant. 
Ainfi  ,  ce  Tribun  bouillant  de 
colère  ,  ordonne  à  fon  fergent 
de  s'approcher  du  Conful ,  & 
le  Conljjl  à  fon  Liâeur  de  s  ap- 
procher du  Tribun  ,  lui  dé- 
clarant qu'il  n'étoit  qu'un  fimple 
particulier  ,  fans  pouvoir  &  fans 
magiftrature.  Et  le  Tribun  alloit 


CL 

être  outragé,  fi  toute raflémttéé 
ne  fe  fût  élevée  avec  furie  contre 
le  Conful  ,  en  faveur  de  foq  ad- 
verfaire,  6c  que  toute  la  multitude 
n'eût  accouru  dans  la  place  pu- 
blique de  toutes  les  parties  de  la 
ville.  Appius  Claudius  foûtenoit 
cependant  cet  orage  avec  un  cou- 
rage  opiniâtre  &  inflexible ,  &  il 
eil  confiant  qu'il  y  auroit  eu  du 
fang  répandu  ,.  Ci  fon  collègue 
n'eût  chargé  tous  les  confulaires 
de  recenife»  Appius  Claudius  par 
force ,  s'ils  ne  le  pouvoieni  autre- 
ment ,.&  de  le  retirer  de  la  place 
publfque.  Cependant ,  il  trai'ailU 
lui-même  à  appaifer  le  peuple; 
&  il  eut  bien  de  la  peine  à  en  ve- 
nir à  bout. 

Le  Sénat  tint  enfuite  fon  aflem- 
blée  ;  &  les  fentimens  furent 
d'abord  partagés.  Mais  ,  après 
que  Ton  eut  fait  de  férieufes  ré- 
flexions ,  on  prit  le  parti  de  la 
modération^  Toute  l'affemblée 
fupplia  Appius  Claudius  de  ne 
point  expofer  la  République  aux 
malheurs  d'une  guerre  intefline  , 
pour  vouloir  porter  trop  loin  l'au- 
torité confulaire  ;  que  dans  ce 
démêlé  funefle  ,  pendant  que  les 
Tribuns  &  les  Confuls  tiroient  à 
eux  toute  l'autorité ,  la  Républi- 
que refloit  au  milieu  ,  fans  puif- 
fance  &  fans  force ,  déchirée  paf 
les  efforts  de  ceux  qui  cherchoient 
plutôt  à  s'en  rendre  martres  y  qu'à 
la  fauver.  Appius  Claudius ,  de 
fon  côté  ,  prenoit  les  dieux  &  les 
hommes  à  témoins  de  la  lâcheté 
&  de  la  trahifon  des  Sénateurs  ^ 
qui  ruinoient  la  République  «  en 
refufant  de  s'unir  au  Confttl  » 
quoique  de  fon  côté  il  demeurât 

.inviplablemenc 


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CL 

învîolablement  attaché  au  Sénat; 
qu'ils  dévoient  s'attdodre  que  leur 
complaifance  leur  altoit  impofef 
des  ioix  encore  plus  dures  que 
celles  du  Mont  facré.  Il  fe  tint  ce- 
pendant en  repos ,  à  la  prière  de 
tout  le  corps  des  Sénateurs;  & 
les  Tribuns  profitèrent  de  cet  in- 
tervalle de  paix  pour  porter  la 
loi. 

A  Toccafion  de  la  féditîon ,  qui 
$*étoit  élevée  dans  le  public  ,  les 
Éques  &  les  Volfques  rfenouvel- 
lerent  leurs  hoftilités  contre  les 
Romains.  Appius  Claudius  eut 
ordre  de  marcher  contre  les  der* 
niers  ;  &  fon  collègue ,  contre  Içs 
autres.  Appius  Claudius  ne  relâ- 
cha rien  dans  la  guerre ,  de  la  hau- 
teur avec  laquelle  il  avoit  traité 
les  citoyens  dans  la  ville  &  pen- 
dant la  paix.  Il  la  porta  même 
plus  loin^  n^ayant  point  à  lutter  , 
comme  à  Rome ,  contre  Toppo- 
fition  &  la  réfiftânce  des  Tribuns. 
Il  haïffoit  le  peuple  plus  que  n*a- 
voit  fait  fon  père.  Il  étoit  au  dé- 
fefpoir  ,  quand  il  faifoit  réflexion 
que  la  loi  avoit  pafTé  fous  fon 
confulat ,  contre  Fefpérance  des 
Sérwteurs  ,  qui  avoient  compté, 
en  le  créant  Conful ,  qu'il  feroit 
lui  feul  capable  de  l'empêcher; 
d'autant  que  les  Confuls  ptécé- 
dens  en  éroient  venus  à  bout  fans 
peine  ,  dans  un  tems  où  le  Sénat 
n'avoit  pas  de  ù  grandes  reffour- 
ces.  La  co)ère  &c  Tindignation 
portoient  ce  caraftère  ,  naturel- 
lement fier  &  haut ,  à  ufer  à  l'é- 
gard de  fes  foldats  de  Tautorité  la 
plus  févère  &  la  plus  dure.  Mais, 
ils  étoient  fi  aigris  contre  lui ,  que 
toute  fa  rigueur  ne  fut  pas  capa- 
Tom.  XL 


ex  50J 

ble  de  les  dompter.  Ils  £aifoient 
tout  avec  lenteur  ,  avec  noncha- 
lance ,  &  avec  un  efprit  de  réûf- 
tance  &  d'opiniâtreté.  Ils  étoient 
infenfibles  ^  ôc  à  la  honte  de  cé- 
der aux  ennemis  ,  6c  à  la  crainte 
d*être  punis  par  leur  Général. 
S'il  leur  ordonnoit  de  doubler  le 
pas  ,  ils  rallentifloient  à  defTein 
leur  marche.  S'il  étoit  témoin  de 
leur  travail ,  &  qu'il  les  exhortât 
à  continuer,  ils  difconcinuoient  ex- 
près Tadivité  à  laquelle  ils  s'étoient 
portés  d'eux-mêmes.  Ils  baiflbient 
les  yeux  en  fa  préfence  ;  &  quand 
ilpaffbit  vis-à  visd'eux,  ils  pro- 
nonçoient  en  fecret  contre  lui  mille 
exécrations  ;  enforte  que  ice  coura* 
ge ,  qui  avoit  foûtenu  &  m^rifé 
à  Rome  toutes  les  menaces  d'un 
peuple  entier  ,  étoit  quelquefois 
fur  le  point  de  céder  à  l'opiniâtre- 
té de  l'armée.  Aprè^  avoir  inuti- 
lement employé  toute  la  rigueur 
de  la  difcipline  militaire  ,  il  fut 
obligé  d'abandonner  les  foldats  à 
leur  mauvaife  difpofition  ,  fans 
leur  rien  commander.  Il  repro- 
choit  aux  Centurions  de  les  avoir 
débauchés  ,  &  par  des  railleries 
piquantes ,  les  traitoit  de  Tribuns 
du  peuple  &  de  Volerons. 

Les  Volfques ,  qui  étoient  in- 
formés de  tout  ce  qui  fe  pafToit 
dans  le  camp  des  Romains ,  fai- 
foient  de  jour  en  jour  de  plus 
grands  efforts  pour  les  attirer  au 
combat.  Ils  efpéroient  qu'Appius 
Claudius  ne  trouveroit  pas  moins 
de  réfiflancé  dans  fes  foldats ,  que 
le  conful  Fabius  en  avoît  trouvé 
dans  les  fiens.  Ils  ne  fe  trompè- 
rent pas.  L'armée  d' Appius  Clau- 
dius porta  encore  plus  loin  la  dé- 

V 


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5o6  C  L 

fobéiflanite.  Les  foldats  de  Fabius 
ayoient  feulement  refufé  de  vain- 
cre ;  ceux-ci  voulurent  être  vain- 
cus* Auffi-tôt  que  le  Conful  les 
eut  raneés  en  bataille ,  ils  tour- 
nèrent le  dos  ,  &  fe  retirèrent 
honteufement  dans  leur  camp^^ 
où  ils  demeurèrent  les  bras  croi- 
fés,  jufqu'à  ce  que  voyant  leur 
arriere-earde  taillée  en  pièces  par 
les  Voliques ,  &  lès  ennemis  dif- 
pofés  à  les  forcer  dans  leurs  re- 
tranchemens  ,  ils  reprirent  enfin 
leurs  armes  ;  mais ,  ils  n'en  ufe- 
rent  que  pour  empêcher  les  Volf- 
ques  d'y  entrer  ,  leur  abandon^ 
nant  au  refte  tous  les  autres  avan- 
tages qui  fe  trouvèrent  dans  la 
viâoire ,  &  fe  faiiànt  un  plaifir 
&  un  mérite  de  leur  honte  &  de 
leur  défaite.  Appius  Claudius, 
dont  rien  n'étott  capable  d'abattre 
décourage,  vouloit  les  punir  fé- 
lon les  loix  de  la  guerre  ;  ôc  dé)à  il 
convoquoit  raflemblée  dans  cette 
intention ,  lorfque  les  Lieutenans 
&  les  Tribuns  étant  accourus  à  fa 
tente  ,  l'avertirent  de  ne  point 
rifquer  une  autorité  qui  dépendoit 
abiolument  de  la  foumimon  des 
inférieurs  ;  que  les  foldats  difoient 
hautement  qu'ils  ne  viendroient 
point  à  l'afTemblée  ;  que  d'un  con- 
tentement unanime  ,  ils  deman* 
doient  qu'on  les  retirât  de  deflus 
les  terres  des  Volfques  ;  qu'il  n'y 
ayoit  qu'un  moment  qu'on  avoit 
vu  l'ennemi  viâorieuz  ,  près  de 
forcer  les  retranchemens  des  Rq- 
mains  »  6c  d'entrer  dans  leur 
camp  ;  qu'ils  voyoient  devant  leqrs 
yeux,  non  l'apparence  équivoque, 
mais  les  fignes  évidens  de  la  plus 
horrible  tempête* 


CL 

Il  fe  rendit  enfin  à  leurs  remort- 
trances ,  bien  aiTuré  que  tes  mu- 
tins ne  perdroient  rien  pouf  atten<* 
dre  ;  &  ayant  ûxé  leur  retraite  an 
lendemain ,  il  fit  donner  le  fignai 
du  départ  ,  dès  qu'il  fut  jour. 
Dans  le  tems  même  qu'il  mettoit 
fes  bataillons  en  marche,  à  mefure 
qu'ils  fortoient  du  camp  ,  les 
Voiïques  ,  comme  s'ils  euflent 
pris  le  même  fignal  pour  eux , 
vinrent  fqndre  for  ceux  qui  écoient 
à  l'arrière^-garde  des  Romains. 
Les  cris,  que  ceu::^-ct  jetterent, 
ayant  été  portés  jufqu'à  la  tête, 
cauferent  tant  de  défordre  ôc  de 
confufion  dans  les  ranes  6i  parmi 
les  étendards,  que  (ans  écouter 
les  ordres  qu'on  leur  donnoit  de 
fe  mettre  en  défenie  ,  ils  prirent 
tous  ouvertement  la  fuite  ;  &  fe 
précipitant  à  travers  des  mon- 
ceaux de  corps  6c  d'armes ,  ils 
ne  ceiTerent  de  courir ,  que  quand 
l'ennemi  fe  fut  laiTé  de  les  pour- 
fuivre.  Alors ,  le  Conful  qui  ne 
pouvant  les  arrêter  ,  avoit  été 
obligé  de  les  fuivre ,  les  rafliembla 
de  tous  les  endroits  oii  la  frayeur 
les  avoit  difperfés.  Ce  fut  alors 
qu'il  leur  reprocha  ,  avec  autant 
de  véhémence  que  de  jufiice ,  leur 
lâcheté ,  leur  défobéiiïance  &  leur 
trahifon ,  leur  demandant  ce  qu'ils 
avoient  fait  de  leurs  étendards  & 
de  leurs  armes.  Il  ne  s'en  tint  pas 
à  une  ftmple  invedive.  Mais , 
ayant  fait  mettre  à  part  les  foldats 
qui  avoient  jette  leurs  armes  ,  les 
enfeignes  qui  avoient  perdu(  leurs  ' 
drapeaux  ,  les  centurions'  qui 
avoient  abandonné  leurs  rangs , 
fans  épargner  ceux  qui  recevoient 
double  paie  pour  leur  bravouie 


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et 

paiïée ,  &  qui  fe  trouVoient  cou- 
pables de  la  même  6iute  »  il  leur 
fit  à  tous  trancher  la  tête  ^  après 
les  avoir  préalablement  fait  battre 
de  verges.  Il  fit  décimer  le  refie 
de  Tarmée  ,  &  traita  de  la  même 
façon  ceux  à  qui  le  fort  fut  con- 
traire. 

L'année  fuivaiite ,  il  fut  appelle 
en  jugement.  Jamais  on  n*avoit 
amené  devant  le  tribunal  du  peu- 
ple, un  accufé  qui  lui  fut  plus 
odieux.  Il  y  parut  tranfporté  de 
toute  fa  colère  ,  furchareée  de 
celle  qu'il  avoir  héritée  de  kn  pè- 
re. Les  Sénateurs ,  de  l^r  côté , 
fe  déclarèrent  pour  lui  avec  plus 
de  zele  qu'ils  n'avoient  jamais  fait 
pour  aucun  Patricien.  Ils  étoietit 
allarmés  de  voir  expofé  à  toute  la 
furie  des  Tribuns  ôc  du  peuple  » 
ce  défenfeur  zélé  de  la  majeilé  du 
Sénat ,  à  qui  on  ne  pouvoit  re- 
procher d'autre  crime  ,  que  d'a- 
voir fait  paroitre  un  peu  trop 
d'aigreur  dans  les  difpuces  qu'il 
av6it  eues  avec  fes  adverfaires. 
Un  feul  Sénateur ,  c'étoit  Appius 
Claudius4ui-même,  méprifoit  & 
les  Tribuns  &  le  peuple  ^  Ôc  le 
procès  qu'on  lui  avoit  intenté.  Ni 
les  menaces  de  la  multitude  irri^ 
tée ,  ni  les  prières  des  Sénateurs , 
ne  purent  jamais  l'obliger ,  je  ne 
dis  pas  de  changer  d'habits  ,  ou 
de  s'abaifTer  à  la  qualité  de  fup- 
pliant ,  mais  de  rien  rabattre  de 
fa  fierté  &c  de  fa  hauteur  dans  les 
difcours  qu'il  avoit  à  faire  devant 
le  peuple  gour  fe  défendre.  Il 
porta  jufqu'au  bout  la  même  ar- 


C  t  307 

dear  &  la  même  intrépidité  dans 
fes  yeux  &  fur  fon  vifage ,  la  mê- 
me hardiefTe  &  la  mlême  véhé- 
mence dans  fes  harangues  ;  enr 
forte  que  la  plupart  des  Plébéiens 
ne  le  craignoient  pas  moins ,  quand 
il  fe  préfentoit  à  eux  comme  àc^ 
cufé ,  que  quand  il  les  avoit  com- 
mandés comme  Conful.  Il  né 
plaida  qu'une  feule  fois  pour  fà^ 
défenfe  ;  &  fon  ftyle ,  oii  il  né 
rabattit  rien  dé  fa  violente  ac* 
coûtumée  9  refTembla  bien  plus  à 
une  accufation  ,  qu'à  une  apolo- 
gie. Par  cette  fermeté  fans  exem- 
ple ,  il  étonna  tellement ,  &  les 
Tribuns ,  &  tout  le  peuple  avec 
eux  ,  que  d'eux-mêmes  ils  remi- 
rent le  jugement  à  un  autre  tems  , 
laiflant  infenfiblement  languir  la 
procédure  ;  de  façon  que  Taccufé 
mourut  de  maladie ,  avant  que  lé 
jour  auquel  ondevoit  prononcer, 
fût  arrivé.  Les  Tribuns  voulurent 
s'oppofer  à  fon  oraifon  funèbre  ; 
mais  ^  le  peuple  ne  voulut  pas 
qu'on  privât  un  citoyen  Ci  confi-^ 
dérable.,  d'un  honneur  qu'on  ac- 
cordoit  à  tous  (es  femblables.  Les 
éloges  ,  qu'on  lui  donna  après  fa 
mort  ,  ne  lui  firent  pas  moins 
de  plaifir ,  que  les  reprochés  qu'on 
lui  avoit  faits  de  fon  vivant  ;  &  il 
y  a  eu  peu  de  Patriciens  dont  le 
convoi  ait  été  honoré  d'un  plus 
grand  concours.  ♦ 

CLAUDIUS  [C]  ,  C.  Clau' 
dïiis ,  K .  Khot,  '  /o;  ,  (d)  freré 
du  précédent,  étôit  Conful  l'ait 
de  Rome  294  ,  avec  P.  Valérius 
Publicola,  Cette  année ,  les  Tri-- 


(*)  Tit.  Liv.  L.  m.  f .  15  ,  35  ,  40  ,  sS.  L,  IV.  c,  6,  Roll,  Hift.  Rom.  tom.  iV 
|>ag.  36J.  ér  fiiiv. 


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^ô8  C  L 

buns  du  peuple  répandirent  dans 
Rome  le  bruit  d  une  conlpiration 
terrible  ,  donc  ils  avoient  eu  ,  di- 
foiem-ils  «  des  avis  certains  de 
plufîeurs  endroits  &  par  pluHeurs 
lettres  ;  ils  avoient  eux  •  mêmes 
fabriqué  ces  lettres.  C.  Claudius  , 
qui  connoiflbit  bien  les  Tribuns,âc 
qui  fçavoit  de  quoi  ils  étoient  ca- 
pables ,  foûcint  que  cette  préten- 
due confpiration  étoit  une  pure 
&ble  I  controuvée  à  plaifir  pour 
allarmer  les  efprits  foibles ,  ôc 
il  le  prouva  clairement  par  les 
cîrconitances  mêmes  darécit  qu'ils 
en  avoient  fait. 

Dans  la  fuite  >  C.  Claudius,  ne 
pouvant  fouâfrir  les  crimes  des 
Décemvirs  ^  &l  l'abus  énorme  que 
faifoit  Appius  Claudtus  fon  neveu^ 
de  la  puiHance  fuprême,  s'étoic 
retiré  à  Régillum  fon  ancienne 
patrie  ;  mais  ,  quand  il  apprit  qu'il 
avoit  été  conduit  en  prifon  »  il 
r^uitta  fa  retraite  &  revint  à  Ro« 
ine>  pour  aider  de  tout  fon  crédit^ 
dans  un  danger  fi  prefTant ,  ce  me- 
û\e  neveu  dont  on  fçavoit  qu'il 
avoit  déteflé  tous  les  excès.  On 
.vit  paroître  dans  la  place  ce  vé- 
nérable vieillard  revêtu  d'un  ha- 
bit de  deuil ,  &  accompagné  de 
tous  ceux  de  fa  famille  &  d'un 
grand  nombre  de  cliens.  Il  prioit 
qu'on  ne  fit  pas  cet  affront  à  la 
famille  des  Claudius  >  de  les  faire 
regarder  dans  la^oûériré  comme 
des  citoyens  qui  avoient  mérité 
les  fers  &  la  prifon.  Il  repréfentoit 
que  c'éteit  une  chofe  bien  indigne 
de  voir  chargé  déchaînes  dans  un 


CL 

cachot  avec  des  voleurs  &  des 
fcélératSy  un  homme  quicenaine- 
ment  devoit  faire  honneur  à  Tes 
defcendans  par  les  places  confidé- 
rables  qu'il  avoit  remplies  ,  qu'on 
pouvoit  regarder  comme  le  légif- 
larèur  de  Rome  ,  &  comme  l'au- 
teur du  droit  public  &  des  fages 
réglemens  qui  venoient  d'y  être 
établis.  Il  conjuroit  les  Romains 
de  faire  céder  leur  jufle  colère  aux 
fentimens  de  bonté  6c  de  compaf- 
fion ,  qui  leur  étoient  naturels»  6c 
d'accorder  la  grâce  d'un  feul  cou- 
pable aux  humbles  fupplications 
de  la  famille  entière  des  Claudius, 
plutôt  que  de  rejetter  les  prières 
de  tant  de  perfonnes  pour  le  crime 
d'un  feul.  Que  pour  lui ,  s'il  fe 
rendoit  fuppliant  pour  Appius 
Claudius ,  ce  n'étoit  pas  qu'il  fût 
rentré  en  grâce  avec  fon  neveu  ; 
qu'il  faifoit  cette  démarche  uni- 
quement pour  l'honneur  de  (à  fa- 
mille. Qu'on  avoit  recouvré  la 
liberté  par  le  courage  ;  que  la 
voie  pour  aâTermir  l'union  entre 
les  deux  ordres  étoit  la  clémence. 
Plufieurs  furent  touchés  de  ce 
difconrs  t  moins  par  rap{>ort  à 
Appius  Claudius  ,  que  par  confi- 
dération  pour  fon  oncle. 

CLAUDIUS  [  C  Claudius 
CiCÉRON  ]  ,  C  Claudius  Cicero, 
Kp  K7iav/joç  K/xffO0r  ,  (a)  étoit 
tribun  du  peuple,  Tan  de  Rome 
300.  Il  appella  en  jugement  Ro- 
milius  9  qui  fut  condamné  à  cinq 
cens  livres  d'amende, 

CLAUDIUS  L  Appius];  M 
Appius  Claudius  f  A* w 3^10;  K^aw- 


W  Tit.Liv.  L.  m.  c.  31. 
ib)  Tit.  Liv,  L,  111.  c.  3}. 


IDionyf.  Halic.    L. 
L.  XI,  c.  I.  &  f€i. 


X.  c.  îi.  &  ffi» 

Flor»  L.  It  Ct  14* 


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CL 

ito^  ,  fut  conful  Tan  de  Rome 
302  avec  T.  Génutius.  ^Mais , 
corn  pie  le  Sénat  réfolut  enfuite 
qu'on  nommeroit  des  Décemvirs, 
les  deux  Conful^  fe  démirent  de 
leur  charge ,  &  Appius  Çlaudius 
fut  le  premier  des  Décemvirs 
qu'on  choifit.  Il  réunit  en  fa  per- 
sonne TaUtorité  de  tous  fes  Collè- 
gues ,  par  la  faveur  du  peuple  ; 
car  ,  il  s'étoit  fait  dans  (on  carac 
tère  un  changement  fi  furprenant, 
que  de  Tennemile  plus  déclaré^ 
&  du  perfécuteur  le  plus  atroce  de 
la  multitude,  il  étoit  devenu  fon 
plus  zélé  partifan  &  fon  plus  aj:- 
dent  proteâeur. 

L'année  fuivame ,  lorfqu'il  fut 
quefllon  d'élire  de  nouveaux  Dé- 
cemvirs ,  les  Sénateurs  les  plus 
dtflingués  par  leur  âge  &  par  leur 
mérite  •  demandèrent  cette  char- 
ge «  dans  la  crainte  fans  doute  que 
s'ils  ne  fe  préfentoient  point ,  des 
gens  faâieux  &  turbulent  n'en 
lufTent  revêtus  ,  &  ne  caufafTent 
un  dommage  confidérable  à  la 
république.  Appius  Çlaudius ,  qui 
avoit  un  fecret  deffein  de  fe  faire 
continuer ,  voyant  ces  grands 
hommes  ,  qui  avoient  pafie  par 
toutes  les  charges ,  fe  commettre 
en  quelque  forte  pour  celle-ci ,  en 
fut  véritablement  allarmé.  Lç 
peuple  ,  charmé  de  la  manière 
dont  il  s'étoit  conduit  dans  le 
Décemvirat ,  témoignoit  ouver- 
tement vouloir  l'y  continuer  pré- 
férablement  à  tout  autre.  Il  fit 
femblant  d'abord  d'avoir  de  la  ré- 
pugnance à  fe  charger  une  fecon- 


C  L  309 

de  fois  d'un  emploi  laborieux  ôc 
capable  de  lui  attirer  de  la  jalou* 
fie  ;  &  pour  infpirer  à  fes  collè- 
gues le  deflein  dy  renoncer,  il 
déclaroit  publiquement  qu'ayant 
rempli  tous  les  devoirs  de  bons 
citoyens  pgr  le  travail  adîdu  d'une 
année  entière  ,  il  étoit  jufle  de 
leur  accorder  du  repos  &  des 
fucceffeurs.  Plus  il  fe  montroit 
difficile ,  plus  on  le  prefToit  de  fe 
rendre  aux  défirs  &  aux  vœux  de 
tous  les  citoyens.  Il  feignit  enfin 
de  céder  avec  peine  &  malgré  lui 
aux  infiarices  de  la  multitude.  Il 
farpaffoit  tous  ceux  qui  fe  préfen- 
toient pour  cette  charge ,  en  adref- 
fe ,  en  rufe ,  en  fçavoir  faire.  On 
le  voyoit  «  dans  là  place  publique» 
faluer  l'un  ,  doiiner  la  main  à 
l'autre  ,  fe  promener  avec  un  air 
de  fattsfaâion  au  milieu  des  Dui- 
lius  &  des  Icilius ,  les  chefs  du 

Îeuple,  &  pouratnft  dire^lesarcs- 
outans  du  Tribunat ,  &  faire  fa 
cour  par  leur  moyen  à  la  multitu- 
de. Plus  fes  démarches  populaires 
étoient  faufTes  &  oppofées  à  fon 
caraâère ,  plus  il  affeâoit  de  les 
multiplier ,  pour  les  faire  paroître^ 
s'il  étoit  pof&ble  ,  plus  naturelles 
&  plus  vraifemblables  ;  en  quoi  il 
fe  trompoit  fort.  Auffi  fes  Collè- 
gues ,  qui  jufques-là  lui  avoient 
été  entièrement  dévoués,  com- 
mencèrent à  ouvrir  les  yeux ,  & 
conçurent  que  tant  de  popularité 
&  même  de  baffefTe ,  n'étoit  pas 
une  chofe  gratuite  dans  un  hom- 
me d'un  etprit  naturellement  fier 
&  hautain^ 


R0IK  Hift.  Rom.  Tom.  I.  pag,  ^96.  &  frsv,  Mém.  de  TAcad.  dei  InCcript^ 
k  Bell.  Uu.  Tom.  XII.  p.  41, 

y  «I 


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|io  CL 

lis  n'oferent  pourtant  pas  s'op- 
pofer  direâement  à  Tes  vues  ;  ils 
prirent  un  détour  qu'ils  crurent 
pouvoir  leur  réuflir.  Ce  fut  de  le 
choifir ,  comme  le  plus  jeune  d'en- 
tr'euz  ,  pour  préfider  à  raflem- 
blée.  L'ufage  étoit  qu|  le  préfi- 
xent nommât  >  en  concluant,  ceux 
en  faveur  de  qui  fe  réuniflbit  la 
pluralité  des  TufFrages.  Ils  comp- 
toient  par  ce  moyen  mettre  Ap- 
pius  Claudius  hors  d'état  de  fe 
nommer  lui-même  ;  ce  qui  ne  s*é- 
toit  point  encore  vu ,  finon  parmi 
les  Tribuns.  Encore  en  avoit-on 
été  fort  choqué  y  comme  d'une 
pratique  contraire  aux  bienféances 
Ci  à  1  honnêteté  publique.  Foibles 
barrières  contre  l'ambition  !  Auffi 
Appius  Claudius  accepta-t-il  avec 
joie  cette  oflFre,  &  il  fçut  bien 
tourner  en  moyens  de  réui&r ,  les 
obdacles  mêities  qu'on  lui  oppo» 
foie.  Non  concent  de  s'être  fai( 
élire  lui-même ,  U  travailla  à  faire 
tomber  fur  fes  amis  le  choix  du 
peuple  pour  les  neuf  autres  places, 
&  à  donner  Texclufion  aux  plus 
Cliftingués  de  fes  compétiteurs ,  ÔL 
même  à  tous  fes  Collègues  du  pre- 
mier Décemvirat ,  &  il  en  vint 
à  bout.  Là  finit  la  comédie ,  qu'il 
avoit  jouée  l'année  précédente.  D 
leva  le  mafque  &  fe  montra  tel 
qu'il  étoit.  Nous  n'entrerons  point 
ici  dans  le  détail  de  ce  qui  concer- 
ne le  Décemvirat.  On  le  trouvera 
à  l'article  des  Oécemvirs. 

Les  laques  &  les  Sabins  étant 
venus  faire  des  incurfions  fur  Jes 
terres  de  la  république,  on  fongea 
à  repoufTer  l'ennemi.  Quand  les 
légions  furent  prêtes ,  il  fut  quef- 
ÛQO  entre  les  t>écemvir$  de  npm- 


CL 

mer  ceux  d'enrr'eux ,  qui  condui<$ 
roient l'armée.  Mais  ,  comme  la 
guerre  qui  les  menaçoit  au  dedans, 
leur  paroiflfoit  plus  dangereufe  que 
celle  qu'ils'  avoient  à  foûtenir  au 
dehors  ,  &  qu'ils  craignoient  plus 
leurs  citoyens  que  leurs  ennemis, 
ils  jugèrent  Appius  Claudius,  dont 
le  caraâère  étoit  violent  &  haut , 
plus  propre  qu'aucun  auti^  ,  à  ré- 
prif6er  les  tumultes  de  la  ville.  Il 
y  fut  donc  laiiïé  de  concert  avec 
les  partifans  du  Décemvirat;  il 
pilla  impunément  &  les  biens  du 
public  &  ceux  des  particuliers.  U 
m  auffi  des  levées  dans  chaque 
tribu  ;  il  enrôla  tous  ceux  qd 
étoient  en  état  de  porter  les  ar- 
mes, pour  remplacer  les  foldats 
qui  avoient  été  tués  ,  &  pour 
rendre  les  Centuries  eomplettes. 
Ils  pofta  des  troupes  dans  les  en- 
droits «de  la  ville  les  plus  commo- . 
des  &  les  plus  avantageux  ,  tant 
pour  y  faire  fentinelle ,  que  pour 
empêcher  que  ceux  du  parti  op- 
pofé  ne  remuaffent  fous- main.  Ses 
précautions  ne  fe  bornèrent  pas  làf 
Pour  fe  dé&ire  plus  furemeiu  de 
ceux  qui  lui  étoient  oppofés  ,  il 
écrivit  fecrétement  des  lettres  aux 
Décemvirs  qui  étoient  en  campa* 
gne.  Il  les  exhorta  de  faire  mourir 
par  artifice  les  plus  notables ,  d'a- 
gir ouvertement  contre  ceux  qui 
étoient  de  moindre  confequence  9 
&  de  trouver  enfin  les  moyens 
de  fe  délivrer  de  tous  ceux  qui  en 
vouloient  à  leur  autorité ,  foit  par 
fineffe  ,  foit  en  leur  fuppofant 
quelques^rimes ,  afin  qu'il  parât 
que  c'étoil  avec  juftice  qu'on  les 
punifibit  de  mort.  Un  fi  perni- 
cieux çonfeil  ne  fut  exécuté  c^u^ 


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/CL 

trop  ponâuellement. 

.Appius  Claudius  >  fou  tenu  de 
(es  parcifans  ,  fignala  fa  cruauté 
^ans  Rome  même  par  des  coups 
femblabies.  Il  fit  périr  un  grand 
nombre  de  citoyens ,  qu'il  croyoit 
t>ppofés  à  fes  intérêts.  L^  peuple 
néanmoins  fit  peu  d^attention  à  la 

Erte  de  tant  de  gens  ,  que  les 
écemvirs  facrifioient  à  leur  par^ 
fion  de  dominer.  Mais ,  la  mort 
cruelle  &  injufte  du  plus  illuftre 
des  Plébéiens  ,  qni  s'étoit  rendu 
célèbre  par  fa  valeur  &  par  fes 
grands  exploits  ^  difpofa  les  efprits 
a  une  révolte  générale.  Ce  brave 
Plébéien  s*appelloit  Luçius  Siccius 
Dentatus.  Il  s'étoit  trouvé  à  fix 
vingts  batailles ,  &  avoit  rempor- 
té dans  toutes  des  prix  de  valeur. 
Ce  qui  acheva  de  révolter  ouver- 
cernent  tout  le  peuple  contre  les 
Décemvirsy  ce  fut  une  paflion 
infâme  qu'avoit  conçue  Appius 
Claudius  ,  jointe  à  fes  funeftes 
fuites. 

II  étoit  devenu  éperdument 
amoureux  de  Virginie ,  fille  deL, 
Virginius ,  qui  commàndoit  ac- 
tuellement en  qualité  de  Centurion 
une  compagnie  des  cinq  légions 
qui  étoient'  fur  les  terres  des 
Éques.  Cette  jeune  perfo.nne  étoit 
d'une  beauté  incomparable.  Son 

Îere  Tavoit Jpromife  en  mariage  à 
..  Icilius.  Comme  elle  étoit  déjà 
en  âge  d'être  mariée  ,  Appius 
Claudius  I  l'ayant'  vue  lirfe  à  l'é- 
cole de  la  jeunefle ,  qui  étoit  pour 
lors  auprès  du  grand  marché  Ro- 
main ,  fut  aufii-tôt  épris  de  fa 
grande  beauté.  La  pailion  de  Ta- 
mour  qui  s'étoit  emparée  de  fon 
«Qçur»  s'alluma  de  jour  en  jour, 


CL      .     3rr 

&  le  mit,  pour  ainfi  dire,  hors 
de  lui  même,  étant  obligé  de  paf- 
fer  fouvenc  auprès  de  l'école.  Il  ne 
trouva  point  d'autre  moyen  de 
fatisfaire  fon  défir  impur ,  que 
d'ufer  d'artifice  ;  &  d'abord  il  tâ- 
cha de  gagner  cette  jeune  fille  par 
argent.  Virginie  avoit  perdu  fa 
mère  ;  elle  vivoit  fous  la  conduite 
de  fes  gouvernantes.  Appius 
Claudius  s'adreiTa  à  celles  -  ci» 
Tous  les  jours ,  il  leur  envoyoit 
quelques  confidentes  de  fes  fe- 
crets ,  leur  faifoit  de  riches  pré- 
fens  &  de  magnifiques  promeffes, 
fi  elles  voulôient  lui  rendre  fervi- 
ce.  Il  avoit  défendu  à  fes  confi- 
dentes de  le  nommer  ;  elles 
avoient  feujement  ordre  de  dirç 
aux  gouvernantes  de  Virginie , 
que  celui  qui  la  recherchoit ,  étoit 
un  homme  puiiTant ,  qui  pouvoir 
faire  ou  beaucoup  de  bien  ou 
beaucoup  de  mal  à  qui  il  vou- 
dront. 

Quand  il  vit  qu'il  ne  pouvoît 
gagner  les  gouvernante^  ,  &  qu'- 
elles gardoient  leur  jeune  élevé 
avec  plus  de  foin  qu'auparavant , 
fa  paiTion  s'alluma  de  plus  en 
plus ,  6c  il  réfoliit  de  tenter  les 
moyens  les  plus  hardb.  Il  envoyé 
donc  M.  Claudius  pour  l'enlever 
ide  force  ;  mais  ,  le  peuple  la  dé^ 
livre  d'entre  les  mains  du  ravif- 
feur,  qui  en  appelle  au  tribunal 
d'Appius  Claudius. 

Peu  de  tems  après ,  Publius  Nu- 
mitorius  ,  onde  maternel  de  Vir- 
ginie 4  &  un  des  plus  confidérables 
d'entre  les  Plébéiens  ,  arrive  avec 
une  troupe  de  fes  amis  &  de  Ces 
parens.  L.  Icilius ,  à  qui  X.  Vir- 
gimus  avoit  fiancé  fa  fille  j  vtçQK 


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51^  CL 

prefque  en  même  tems  avec  une 
bonne  efcorte  de  jeunes  Plébéiens, 
Il  s'approche  du  tribunal  tout  hors 
d'haleine  ;  il  demande  qui  eu  ce- 
lui qui  a  ofé  mettre  la  main  fur  la 
fille  d*un  citoyen ,  &  quelles  font 
fes  prétentions. 

Âufli  tôt  il  fe  £ait  un  profond 
filence  ,  &  M.  Claudîus  »  qui 
avoit  voulu  enlever  Virginie ,  fait 
un  difcours  pour  prouver  qu'elle 
ed  fille  de  fon  efçlave  ,  &  que 
c'eA  en  cette  aualité  qu'il  a  voulu 
l'enlever.  P,  PJumitorius,  ayant 
répondu  aux  raifons  de  M.  Clau- 
dîus, réclame  Virginie  comme  fon 
oncle,  en  Tabfence  de  fon  père,  &L 
demande  que  Ton  diffère  le  juge- 
ment jufqu'à  ce  qu'on  ait  eu  le 
îtems  de  faire  venir  L.  Virginius. 
Mais  ,  Appius  Cla^^dius  adjuge 
par  provifion  Virginie  à  M.  Clau- 
dius  ,  à  condition ,  qu'il  donnera 
des  cautions  pour  la  repréfenter 
par  tout  oh  boToin  fera.  L.  Icilius 
s'oppofe  à  l'exécution  de  cette  fen- 
tence.  Il  ()rend  Virginie  entre  (es 
bras ,  &  protede  qu'un  le  tuera 
plutôt  que  de  la  lui  enlever.  Les 
Liâeurs  le  repouflfent  ;  &  M. 
Claudius  fe  faifit  de  Virginie. 
Mais ,  le  peuple  lui  fait  lâcher 
prife.  Appius  Claudius  révoque 
auffi  fa  fentence  ;  il  remet  Virgi- 
^nie  entre  les  mains  de  fon  oncle  , 
6c  lui  accorde  un  délai  jufqu'au 
lendemain  pour  faire  revenir  L. 
Virginius  du  camp.  Les  parens  de 
Virginie  demandent  en  vain  un 
plus  long  délai.  Appius  Clauiâius 
le  leur  refufe  »  &  envoie  fecréte- 
ment  au  camp  pour  faire  garder 
Lw  Virginius  dans  une  étroite  pri- 
^n«  Ses  courriers  font  prévenus 


CL 

parle  fils  de  Numitorius,  &  I^ 
frère  de  L.  Icilius.  Ceux-ci  a vertif» 
fent  L.  Virginius  de  ce  qui  fe  pafibit. 
L.  Virginius  obtient  fon  congés  6c 
vient  à  Rome  par  une  route  dé- 
tournée ;  il  évite  la  rencontre  de 
ceux  qui  étoieni  poftés  fur  les  che- 
mins pour  l'arrêter.  Appius  Clau- 
dius 9  ifurpris  de  l'arrivée  de  L. 
Virginius  ,  fe  rend  à  (on  tribunal. 
M.  Claudius  lui  demande  juflice  t 
mais  L.  Virginius  réfute  les  raifons 
de  M.  Claudius* 

Appius  Claudius"  y  femblableà 
un  phrénétique  ,  enivré  de  la 
grandeur  de  fa  puiffance^  enâé 
d'orgueil  »  aveuglé  par  fa  pafCon  , 
brûlé  incérieuiement  par  le  feu  de 
l'amour  qu'il  avoit  pour  Virginie^ 
ne  faifoit  aucune  attention  aux 
difcours  de  ceux  qui  prenoient  fa 
défenfe.  Loin  de  fe  laifFer  atten- 
diir  par  les  larmes  de  cette  jeune 
fille  ,  il  s'ofFenfoit  même  de  la 
compadion  que  railemblée  té- 
moignoit  pour  elle.  Tout  occupé 
de  fa  pafQôn  ,  il  fe  croyoit  lui- 
même  le  plus  à  plaindre  ;  il  fouf- 
froit  les  maux  les  plus  terribles  à 
la  vue  de  cette  rare  beauté  ,  dont 
il.étoit  épris ,  &c  qui  le  rendoit  ef- 
clave.  Livré  à  la  violence  de  fon 
amour  9  il  tint  des  difcoi^rs  fi 
honteux ,  que  pour  peu  qu'on  y 
fît  attention ,  il  étoit  aifé  de  voir 
qu'il  àvoit  lui-même  inventé  des 
faufTetés  Si  des  calomnies  contre 
Virginie»  Mais  »  il  ne  fe*borna  pas 
à  (k  fimples  parc^es  ;  il  poufla 
l'efiFromerie  jufqu'à  faire  l'aâion 
la  plus  cruelle  &  la  plus  tyranni- 
que.  Il  adjuge  Virginie  à  M.  Ciaa- 
dius;  il  rend  lui-même  témoigna- 
ge  qu'elle  eft  fille  de  fon  efdav  e  ,^ 


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CL 

&  qu'a  y  along-tems  qu'il  le  fçâît. 
Alors ,  L.  Virginius  ,  accablé  de 
douleur,  demande  la  pertniflîon 
d'embraÔer  fa  fille  pour  la  dernière 
fois  y  &  de  lui  parler  fans  témoins. 
Appius  Claudius  lui  accorde  cette 
faveur.  L.  Virginius  avance  quel- 
ques pas^  6l  prenant  un  grand 
couteau ,  il  le  plonge  dans  les  en< 
trailles  de  fa  fille  ,  en  difant  feule- 
ment ces  paroles  :  »  J.e  t'envoie 
»  ma,chere  fille  ,  joindre  les  ma- 
»  nés  de  tes  ancêtres  avec  ta  li- 
»  berté  &  ton  honneur.  Si  je  te 
»  laifTpis  vivre  >  tu  ne  pourrois 
»  conferver  ni  Tun  ni  Tautre  fous 
V  un  cruel  tyran,  a 

Dès  qu' Appius  Claudius  ap- 
prend la  fin  tragique  de  celle  qui 
faifoit  l'objet  de  fa  paffion ,  il  fau- 
te de  fon  tribunal ,  il  veut  pour- 
fuivre  L.  Virginius,  il  fait  plufieurs 
chofes  indécentes ,  &c  tient  des 
difcours  peu  convenables  à  un 
magidrat»  Ses  amis  le  retiennent  ; 
ils  le  rangent  autour  de  lui ,  &  le 
conjurent  de  ne  pas  faire  de  nou- 
velles fautes.  Il  cède  enfin  ,  &  fe 
retire  chez  lui  fort  en  colère  contre 
^ux  tous.  Cette  affaire  ayant  mis 
Rome  dans  le  plus  grand  danger 
qu'elle  eût  jamais  couru ,  Valé- 
rius  &  Horatius  ,.  qne  leur  vertu 
faifoit  refpeâer  du  peuple  6l  du 
Sénat,  entreprirent  d'appaifer  Té- 
motion;  ils  en  vinrent  heureufe- 
.ment  à  bout ,  &  l'ancien  gouver- 
nement confula  ire  fut  rétabli. 

Dès  Tannée  fuivante  »  qui  étolt 
la  3ô6.e  de  Rome,  L.  Virginius 
appella  en  jugement  devant  le 
peuple  Appius  Claudius.  Celui-ci 

U)  Tii,  LU,  L,  IV,  c»  S5 ,  36, 


C  L  M5 

comparut  efcor té  d'une  troupe  de 
jeune  Patriciens.  On  ne  l'eut  pas 
plutôt  apperçu  lui  &  fes  fatelli- 
tes  j  que  le  fou  venir  de  fonénortne 
puifiance  ralluma  l'indignation 
dans  tous  les  efprits.  Quoiqu'Ap- 
pius  Claudius  n'eut  rien  à  eipérer, 
ni  du  fecours  des  Tribuns  ,  ni  des 
fufTrages  du  peuple ,  cependant 
auffi-iôt  qu'il  vit  le  Liâeur  s'ap- 
procher pour  le  faifir  :  J*en  appel- 
le, dit*ii,  aux  tribuns  &aupeu^ 
ple^  Ce  feul  mot  ,  qui  port  oit  le 
caraélère  de  la  liberté  ^forti  d'une 
bouche  qui ,  quelques  jours  aupa- 
ravant ,  avoit  prononcé  en  faveur 
de  la^fervitude ,  impofa  filence  à 
tout  le  monde.  Mais  ,  Appius 
Claudius  9  s'étant  apperçu  que  le 
peuple  écoutoit  plus  favorable- 
ment les  prières  de  L.  Virginius 
que  les  fiennes  ,  fe  déroba  par 
une  mort  volontaire  aux  fuites 
d'un  jugement  qu'il  prévoyoic 
bien  lui  devoir  être  contraire. 

On  dit  qu*il  étoit  un  fçavant 
Jurifconfulte  ,  &  qu'il  avoit  beau- 
coup travaillé  aux  loix  des  douze 
Tables. 

CLAUDIUS  [Appius] 
CRASSUS ,  {a)  Appius  Claudius 
Crajfus ,  {a)  fils  du  précédent , 
Tribun  militaire  »  Tan  de  Rome 
331.  C'étoit  un  jeune  homme, 
courageux  6c  entreprenant ,  & 
qui  avoit  fucé>pour  amfi  dire  avec 
le  laic^  la  haine  des  Tribuns  du 
«peuple^  6c  du  peuple  même.  Il 
reda  à  Rome  pour  garder  la  ville  » 
pendant  que  fes  Collègues  allè- 
rent prendre  connoifîance  des  pil- 
lages,  que   les  Vplfques   exei* 


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314  CL 

çoient  fur  les  terres  des  Hernî- 
qiies. 

CLAUDIUS  [Appius] 
CR ASSUS ,  (tf)  jéppius  Claudius 
Crajfus  y  petit  nls  du  Décemvir  , 
&  par  conféquent  fils  de  celui  qui 
précède* 

Ua  jour  ^e  tous  les  Sénateurs 
étoient  dans  Tétonnement  &  dans 
le  filence ,  après  un  difcours  plein 
de  hardieiTe  &  d*arrogance  ^  que 
les  Tribuns  du  peuple  venoiènt  de 
Élire  à  Toccafion'  de  la  loi  y  qui 
^Toit  communiquer  le  confulat 
aux  Plébéiens  ;  Appius  Claudius 
Craflus,  moins  dans  l'efpérance 
de  réuffir ,  que  pour  exiger  (a 
jjttj^e  colère  ,  qu'il  ne  pouroit  re- 
tenir ,  prit  la  parole  &  s'étendit 
beaucoup.  Tout  TefiFet  que  pro- 
dtiîfit  fon  difcours  >  ce  fut  de  iaire 
d^érer  la  tenue  de  TafTemblée 
pour  l'acceptation  d'une  loi  >  qui 
déplaifoit  fi  fort  aux  Patriciens. 

Van  de  Rome  393  ,  le  conful 
X.  Çénutius  fut  défait  &  tué  dans 
«ne  embuTcade  ,  que  les  Herni- 
j<que$  lui  avoient  tendue.  Cet  éve- 
jpnement  donna  lieu  de  créer  un 
l^^iâateur;  &  le  choix  tomba  fur 
Al^pius  Claudius  Craflus,  qui 
orc  iontia  auffi-tôt  au  peuple  d'in- 
ten  ompre.  tout  autre  exercice  , 
pou  r  ne  fonger  qu!à  mettre  des 
troupes  fur  pied.  Il  nomma  pour 
gém  ^ral  de  la  cavalerie .  Q.  Servî- 
Gus*  Avant  qu'ils  fuflent  arrivés  à 
Farm  ée  9  le  lieutenant  C.  Sulpiciu3 
avoit  déjà  remporté  ipielque  avan- 
tage fur  l^n  ennemis*  iCoomie 
ceux** ci   comptoient   bien  quSl 


CL 

vîendroît  de  nouvelles  troupes  Sa 
Rome ,  ils  avoient  aufiTi  groCfi  les 
leurs ,  &  avoient  mandé  toute  la 
fieur  de  leur  jeuneiïe.  Dès  que  les 
deux  armées  furent  en  préfence, 
on  donna  le  fignal  L'aâion  fut  des 
plus  vives  ,&  le  fuccès  long-tems 
douteux.  La  cavalerie  Romaine 
mit  pied  à  terre  ^  &  vint  com- 
battre à  la  tête  de  fon  infanterie. 
Du  côté  des  Herniques,  l'élite  de 
leurs  troupes  &  de  toute  la  nation 
s'avança  pour  foûtenir  ce;(choc. 
Ainfi  la  perte  devint  confidérable 
'  de  part  &  d'autre ,  non  feulement 
par  le  nombre,  mais  encore  par 
la  qualité  &  le  mérite  de  ceux  qui 
périflbient.  Enfin,  les  Herniques 
furent  enfoncés ,  &  mis  en  fuite. 
La  nuit  empêcha  de  les  pourfui- 
vre.  Le  lendemain ,  ils  abandon- 
nèrent leur  camp  f  dont  les  Ro^ 
mains  fe  rendirent  maîtres. 

Appius  Claudius  Crafliis  par- 
vint au  Confulat  l'an  de  Rome 
406.  Cette  année ,  Rome  eut 
deux  fortes  d'ennemis  à  repoufler; 
d'un  côté ,  les  Gaulois  ,  qui  ne 
laiffoient  guère  de  repos  ;  de  l'au- 
tre ,  des  Pirates  de  Grèce ,  quK  in- 
feftoient  les  côte^  de  l'Italie.  Mais, 
Appius  Qaudins  Craffus  mourut 
pendant  qu^'on  failbit  les  prépara- 
tifs de  la  guerre. 

CLAUDIUS  [M.],  {h)  M. 
Claudius  ,  M.  K^aw/rç,  clieilt 
d'Appius  Claudîas  le  Décemvir. 
C'étoit  un  homme« hardi,  cffrontéi 
&  de  ces  «os  qui  ne  s'introdui- 
fent  dans  m  confiance  des  Grands 
que:  par  une  complaifance  crimi- 


(«)  Tît-  Um\   L.  VI.  c.    40.^  &  feq,\     {h)  Tu.  tîv.  L.  III.  C.  44.  ér  /ej, 
!..  VIL  c.  6.  ér  fiq-  ^oU.  Holt.  Roi^  J  Rotl.  Hifl.  Rom.  T.  I.  p.  414.  &  /»iv. 
T,  11.  jp.  iji.  <^^««v.  I 


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CL 

ittelle  pour  leurs  plaîfirs.  Infâme 
miniftre  des  débauches  de  Ton  pa- 
tron ,  il  le  fervit  de  Ton  mieux  dans 
la  paffion  criminelle  qu'il  a  voit 
conçue  pour  la  jeune  Virginie. 
Mais,  cette  affaire, 'ayant  eu  les 
fuites  les  plus  tragiques,ainri  qu'on 
peut  le  voir  ci-deuus ,  M.  Clau- 
dius  fut  accufé  Se  condamné  à 
mort.  On  lui  laiiTa  cependant  la 
vie  s  &  il  s'en  ^Ua  en  exil  à  Ti- 
bur.. 

CLAUDIUS  [Appius] 
CRASSUS  ,  Appius  Claudius 
CraJJusy  (tf)  Tribun  militaire,  l'an 
de  Rome  3  5  2.  Il  fat  laiffé  à  Rome 
exprès  par  Tes  Collègues ,  pour 
réprimer  les  {éditions  ,  que  les 
Tribuns  du  peuple  voudroient  ex- 
citer, n  s'écoit  accoutumé  dès 
ÙL  jeunefle  à  lutter  contre  U 
violence  &  l'emportement  de  la 
multitude;  &  c'étoit  lui  qui,  plu- 
fieurs  années  auparavant,  avoit 
donné  aux  Sénateurs  le  confeil  fa- 
lutaire  de  rendre  inutiles  tous  les 
efforts  des  Tribuns,  par  Toppo- 
fition  de  quelques-uns  de  leurs 
Collègues.  Tite  -  Live  dit  qu'il 
avoit  perfeâionnépar  de  fréquens 
exercices,  le  talent  de  bien  parler, 
<{u'il  avoit  reçu  de  là  nature  ;  & 
il  lui  met  dans  la  bouche  un  dif- 
|:ours  plein  d'une  éloquence  fo- 
nde. 

CLAUDIUS  [C]  HORTA. 
TOR ,  rC.    Claudius    Hortator. 
Voyei  l'article  ft^ivant. 
CLAUDIUS  [C]  RÉGIL. 

^  U)  Tit.  Liv.  L.  V.*x.  1.  é-  /«?. 
Eoll.  Hitt.  Rom.  T.  II.  p.  t.  ér  fri». 

(h)  Tit.  Liv.  L   vm.  c.  15. 

(c)  Juft.  L.  XVIIi.  c.  ».  Tit.  Liv.  L. 
tX,  ç,  »j,  ij«r  /rj.  L.  X-.  C.  7.  &  fep 


CL  5^5 

LENSIS,  C.  Claudius  Regillenjis. 
{b)  L'an  de  Rome  418 ,  le  Sénat, 
irrité  contre  les  Confuls ,  dont  la 
lenteur  avoit  trahi  la  caufe  dé 
leurs  alliés  ,  ordonna  qu'on  créât 
un  Di^ateur.  On  nomma  C* 
Claudius  Régillenfis ,  qui  choifit 
pour  maître  de  la  cavalerie  C, 
Claudius  Hortator.  Mais,  les  au- 
gures ayant  déclaré  cette  nomina- 
tion vicieufe,  on  fe  fit  un  fcrupule 
de  leur  obéir ,  ce  qui  les  obUgea 
d'abdiquer. 

CLAUDIUS  [Appius  ]  ,  (c) 
Appius  Claudius  ,  A''7r7rlc(;  K^at/- 
//oç ,  furnommé  Caecus  ou  l'A- 
veugle, fat  Cenfeur  Tan  de  Rome 
442  avec  C.  Plautius.  Sa  magiCr 
trature  fat  célèbre  par  le  fervice 
qu'il  rendit  aux  Romains  de  Ton 
tems,  ôc  à  tous  leurs  defcendans  , 
en  faifant  paver  le  grand-chemin, 
qui  de  Ton  nom  fat  appelle  depuis 
la  voie  Appia  ;  ôc  en  conduifant 
dans  la  ville ,  par  des  canaux  foÛ9> 
terreins ,  une  eau  aufli  claire  qu'a? 
bondante;  ce  qui  avoit  manqué 
jufques-là  dans  cette  grande  ville; 
Il  acheva  feul  ces  doux  ouvrages 
importans,  parce  que  fon  collè- 
gue avoit  abdiqué  la  cenfare ,  ne 
pouvant  foûtenir  les  reproches  de 
Tes  citoyens ,  à  qui  il  s'étoit  fendu 
odieux  par  la  conduite  infâme 
qu'il  avoit  tenue  dans  le  choix  des 
Sénateurs.  Appius  Claudius ,  conr 
fervant  ce  caraâère  d'opiniâtreté , 
qu'il  avoit  hérité  de  fes  ancêtres  , 
ne  voulut  point  qu'on  remplaçât 

Pkit.  Tom.  I.  pag.  394 ,  39c.  Roll.  Hift. 
Ane.  T.  IV.  p.  116.  Hift.  Rom.  T.  II. 
pag.  283.  &  fitiv*  Mém.  de  TAcad.  des 
Infcript.  &  Bell.  Letc.  Tom.  h  pag.  99» 
Ï,XXI.|».40|. 


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3i6  CL 

Ion  Collègue^  &  exerça  feul  la 
cenfure. 

Ce  fut  par  Ton  confell  >  que  les 
Potltiens  ,  feuls  prêtres  du  temple 
d'Hercule  ,  feuls  tniniftres  des  fa- 
crifices  qu'on  offroic  fur  Ton  autel, 
apprirent  ai  des  efclaves  publics 
les  cérémonies  qu'on  devoit  ob- 
ferver  dans  le  culte  de  ce  dieu  ^ 
&  confièrent  à  des  mains  ù  indi- 
gnes un  minïAère  fi  refpeèUble.  Si 
en  en  croit  la  tradition,  ce  mépris 
eut  des  fuites  furprenantes ,  ôc 
bien  capables  d'ôter  aux  hommes 
Fenvie  de  rien  changer  dans  les 
affaires  de  Ist  religion  ;  car  ,  les 
douze  familles  des  Pçtitiens  que 
Ton  çomptoit  alors ,  compofées 
de  trente  fujets ,  tous  en  âge  de 
puberté  ,.  furent  entièrement 
éteintes  dans  l'efpace  d'un  an. 
Appius  Claudius ,-  qui  leur  avoit 
donné  un  confeil  fi  impie»  n'é- 
chappa pas  lui-même  â  la  ven- 
geance célefte  ;  car ,  quelque  tems 
après ,  il  devint  aveugle ,  &  de- 
meura dans  cet  état  le  refle  de  fes 
jours. 

Appius  Claudius  fut  le  premier 
qui  introduifit  dans  le  Sénat  lés 
enfans  des  affranchis  ;  &  enfuite 
voyant  que  tout  le  monde  défap- 
prouvoit  ce  choix  ,  &  qu'il  n'a- 
voit  pas  acquis  par-là  dans  le  Sé- 
nat toute  l'autorité  qu'il  avoit  ef- 
péré  ,  il  remplit  toutes  les  tribus 
de  ce  qu'il  y  avoit  de  plus  mépri- 
fable  dans  la  ville  ,  &  corrompit 
par-là  les  aflemblées  de  la  place 
publique  &  du  champ  de  Mars. 

Après  avoir  exercé  la  cenfure 
pendant  les  dix-huit  mois  »  aux- 
quels la  loi  ^milia  avoit  fixé  fa 
'durée ,  il  ne  pue  être  engagé  à  ab-^ 


CL 

dîquer ,  nî  par  l'exemple  de  C. 
Plautius  fon  Colfégue,  ni  par 
toutes  les  inflances  ,  qu'on  put 
lui  faire.  T.  Sempronius ,  alors 
tribun  du  peuple ,  l'entreprit  vi- 
vement. Après  lui  avoir  reproché 
les  violences  de  fa  famille  toujours 
impérieufe  ,  toujours  ennemie  de 
la  liberté  du  peuple  Romain  y  & 
qui  par  cette  raifon  lui  étoit  deve- 
nue plus  odieufe  que  celle  des 
Tarquins  ;  après  lui  avoir  rappelle 
le  fouvenir  de  l'infâme  &  cruel 
décemvir  Appius  Claudius  ^  qui 
s'étoit  continué  lui-même  dans  fa 
charge ,  au  méprb  de  toutes  les 
loix  :  Il  Sont-ce  donc  là  ,  lui  dit- 
n  il  y  les  exemples  que  vous  vous 
}>  propofez  à  imiter  ?  Quoi  !  un 
i>  règlement  établi  dans  la  repu* 
n  blique  depuis  plus  de  cent  ans  » 
n  obiervé  inviolablement  par  tant 
fi  xl'Hommes  iiluftres ,  qui  iufr 
M  qu'ici  ont  été  Cenfeurs  >  vous  , 
j>  Appius ,  vous  le  mépriferez , 
»  &  le  violerez  audacieufement  î 
I»  la  vue  &L  fous  les  yeux  du  Sé- 
»  nat  &  du  peuple  ?  Jamais  de- 
n  puis  la  prife  de  Rome  »  un  Cen« 
»  feur  n'eu  demeuré  feul  en  char* 
n  ge.  Tous  »  quand  leur  Collègue 
n  efl  mort,  ont  abdiqué.  Et  vous, 
n  ni  le  lems.  de  votre  magiflratu- 
n  re  expiré  ,  ni  l'exemple  de  vo- 
II  tre  Collègue  qui  fe  retire  ,  ni  li 
}i  pudeur  y  ni  la  loi  ne  vous  arrê- 
II  tenr.  Vous  &ites  conûfler  votre 
}i  honneur  &  votre  mérite  dan^ 
n  l'arrogance,  dans  l'audace,  dans 
Il  le  mépris  des  dieux  Ôc  des 
fi  hommes.  C'eft  avec  peine  que 
Il  je  Vous  parle  de  la  forte.  La 
9}  dignité  ,  que  vous  avec  exer- 
n  cf e  ,   eft  digne    de  '  refpe^ 


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CL 

fc  Maïs ,  votre  inflexible  opînîâ- 
»  treté  me  force  à  ne  vous  point 
»  ménager  ;  &  je  vous  déclare 
n  que  il  vous  n*obéiflez  à  la  loi 
»  Amilia ,  je  vous  ferai  mener 
n  en  prifon.  «  En  effet ,  Appîus 
Claudips  ne  répliquant  que  par 
de  mauvaifes  raifons ,  le  tribun 
ordonna  qu*on  fe  faific  de  fa  per- 
fonne ,  6c  qu'on  le  conduifît  dans 
les  prifons.  Appius  implora  le  fe- 
cours  des  autres  Tribuns.  Six  , 
outre  Sempronius,  étoient  con- 
tre lui;  tous  fe  déclarèrent  en 
fa  faveur  »  &  à  la  honte  des  loix  , 
ÔL  de  tous  les  ordres  de  l'État , 
il  exerça  feul  la  Cenfure  pendant 
tout  le  reûe  du  tems. 

Il  fut  nommé  Conful  avec  L. 
Volumnius ,  Tan  de  Rome  446. 
Voyant  que  fon  Collègue  éioit 
chargé  de  ùlit9  la  guerre  contre 
les  Salentins  ,  nouveaux  ennemis 
de  la  république  |  il  refta  à  Rome, 
pour  augmenter  fon  crédit  &  fa 
pulflance  par  des  voies  politiques, 
puifqu'on  laiffoit  aux  autres  la 
gloire  qui  s'acquiert  parles  armes* 
Quelques  années  après  ,  lorfqu'il 
futqueflion  de  donner  entrée  aux 
Plébéiens  dans  les  dignités  d'Au- 
gures &  de  Pontifes  ,  Appius 
Claudius  s'oppofa  fortement  à  la 
loi ,  qui  ne  laiffa  pourtant  pas  de 
pafler.  U  fut  inter-roi  l'an  de  Ro- 
me 45  3.  Trois  ans  après,  il  par- 
vint de  nouveau  au  Confulat  , 
avec  le  mcme  L.  Volumnius  ;  il 
eut  ordre  de  marcher  dans  l'É- 
trurie,  après  que  fon  Collègue 
étoit  déjà  parti  pour  le  Samnium* 
Il  oiena  avec  lui  deux  légions,  & 
douze  mille  hommes  de  troupes 
alliées,  fy.  alla  camper  près  de 


CL  317 

l'ennemî.  Sa  prompte  arrivée  fer. 
vit  à  arrêter  quelques  peuples 
d'Étrurie  prêts  à  prendre  les  ar- 
mes ;  mais  du  refle^  il  montra  pea 
d*habi(eté  dans  fa  conduite,  & 
eut  peu  de  fuccès.  Il  donna  plu- 
fieurs  petits  combats  dans  des 
tems  &  des  lieux  peu  favorables  ; 
ce  qui  augmenta  beaucoup  la  fier- 
té des  ennemb,  &  jetta  un  grand 
découragement  dans  l'armée  Ro- 
maine ,  enforte  que  ni  le  Conful 
ne  comptoit  fur  fes  troupes,  ni  les 
troupes  fur  le  Coniul. 

Les  chofes  étant  dans  cet  état , 
L«  Volumnius  arrive  du  Samniurai 
avec  fon  armée,  fur  une  lettre 
qu'il  prétendoit^oir  reçue  de  foa 
Collègue.  Appius  Claudius  nioit 
lui  avoir  écrit,  ôi  il  le  reçut  fort 
mal ,  lui  demandant  avec  un  ton 
d'infulte  >  comment  9  lui  qui  fuf- 
fifoit  à  peine  aux  affaires  de  fa 
province  ,  s'iagéroit  de  venir 
au  fecours  d'autrui  fans  en  être 
prié.  L.  Volumnius ,  fans  s'émou- 
voir ,  répondit  qu'il  n'étoit  venu 
qu'en  conféquence  de  la  lettre 
qu'il  avoit  reçue  de  lui  ;  que  puif- 
qp'elle  fe  trou  voit  fauffe,  il  parti - 
roii  fur  le  champ  pour  retourner 
dan^  le  Samnium  ;  qu'il  aimoit 
beaucoup  mieux  avoir  fait  un 
voyage  inutile ,  que  de  trouver 
l'armée  de  fon  Collègue  dans  ua 
état  qui  eût  befoin  de  fon  fer  vice. 
Ils  fe  féparoient  déjà  l'un  de  l'au- 
tre ,  lorfque  les  Lieutenans  eènc- 
raux  d'Appius  Claudius  Si  les 
principaux  officiers  de  fon  armée 
l'environnent,  &  le  prient  avec 
infiance  de  ne  pas  rejetter  un  fe- 
cours ,  que  la  fortune  lui  prèfen- 
toity  &  qu'il  auroit  dû  demander 


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5î8  CL 

lui-même.  D'autres  fe  mettent 
%u.devant  de  L.  Volumnius  ,  & 
le  conjurent  de  ne  ppint  trahir  la 
république  par  une  pique  mal  en- 
iendue  contre  fon  Collègue. 

Cependant ,  l'armée  s'étoit  af- 
femblée  infenfiblement  autour  des 
deux  Confuls.  Les  mêmes  chofes 
quiavoient  étédite^  en  particu- 
lier ,  fe  répétèrent  là  en  public  , 
mais  avec  plus  d'étendue.*  Et 
comme  L.  Volumhius  ,  fupérieur 
fans  contredit  à  fon  Collègue  pour 
le  fond  de  la  caufe  >  mais  beauT 
coup  inférieur  pour  Téloquence  y 
qui  étoit  le  grand  talent  d'Ap> 
pius  Claudius ,  s'exprimoit  néan-r 
moins  afTez  bies^ôc  affez  facile- 
ment ;  Appius  Claudius  >  d  un  ton 
tailleur ,  dit  qu'on  lui  avoit  obli- 
gation "xie  ce  que  L.  Volumnius  , 
autrefois  prefque  muet  ,  étoit 
devenu  difert  Ôc  éloquent;  que 
dans  les  commeyemens  de  (on 
premier  Confulat ,  à  peine  pou- 
voit*il  ouvrir  la  bouche  »  &  que 
maintenant  il  faifoit  des  difcours  , 
&  haranguoit  d'une  façon  popu- 
laire. Taimerois  bien  mitux ,  ré- 
pliqua L.  Volumnius  ,  que  vous 
eujiei  appris  de  moi  à  bien  faire  f 
que  moi  de  vous  à  bien  parler.  Il 
ajouta  que  pour  décider  lequel 
•'àts  deux  Confuls  étoit ,  non  le 
meilleur  oratenr,  de  quoi  la  répu- 
blique avoit  peu  befoin  dans  la 
conjonâure  préfente,  mais  le 
meilleur  Général,  il  lui  donnoit  le 
choix  du  Samnium  ou  de  TÉtru- 
rie  ;  &  que  pour  lui  il  feroit  con- 
tent de  celle  des  deux  provinces 
qui  lui  feroit  laifTçe  par  fon  Col- 
lègue. Les  foldatà  alors  demandè- 
rent ouvertement  qu'ils  fiflent  en- 


et 

femble  la  guerre  en  Étrurle.  !• 
Volumnius ,  voyant  ce  confente- 
mei^t  unanime  :  »  Après  avoir  en 
»  le  malheur ,  dit-il ,  de  m'être 
ï>  trompé  fur  ce  que  vouloit  de 
i>  moi  mon  Collègue ,  je  ne  m*ex- 
M  po&rai  pas  à  Tétre  encore  fur 
n  ce  que  vous  dèfirez  de  moi< 
n  foldats.  Si  vous  fouhaitez  que 
»  je  demeure  ,  faites  le  moi  con- 
II  noitre  d'une  manière  qui  ne  foit 
»  point  équivoque,  a  II  s'éleva 
dans  le  moment  un  cri  fi  violent 
Ôc  fi  général  dans  toute  l'armée  9 
qu'il  fit  fortir  de  leur  camp  les 
ennemis,  qui  fe  rangèrent  auffi- 
tôt  en  bataille.  L.  Volumnius  en 
fit  autant.  On  dit  qu' Appius  Clau* 
dius ,  voyant  que  foit  qu'il  com- 
battît ou  non,  fon  Collègue  auroic 
tout  l'honneur  de  la  viâoire , 
douta  d'abord  du  parti  qu'il  de- 
voit  prendre;  mais  qu'enfuite  la 
crainte  qu'il  eut  que  fes  troupes 
ne  fuiviffent  L.  Volumnius  ,  le 
détermina  à  leur  donner  aufG  le 
fignal  qu'elles  d'emandoient  avec 
empreffement* 

/  Ni  de  part  ni  d'autre  les  ar* 
mées  ne  fe  rangèrent  convena. 
blement.  Gellius  Egnatius  ,  géné- 
ral des  Samnites ,  étoit  allé  au 
fourrage  avec  un  petit  détache*» 
ment  ;  &  fes  foldats ,  combattant 
fans  chefs  &  fans  ordre  ,  ne  fui- 
voient  que  leur  propre  impétuo^ 
iité.  Les  armées  Romaines  ,  d'un 
autre  côté,  nes'étoient  pas  ébran- 
lées eh  même  tems ,  &  n'avoient 
pas  eu  le  tems  de  former  leurs 
rat?gs  comme  il  auroit  fallu.  Vo- 
lumnius en  étoit  aux  mains  avec 
les  ennemis  avant  qu'Appias 
Claudius  arrivât  ^  c'eft  pourquc»  f 


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et 

U  front  deTa  bataille  étoit  inégal. 
Le  hazard  voulut  que  par  une . 
forte  d'échange  fortuite ,  L.  Vo- 
lumnius  eût  en  tête  les  Étrufques , 
&  Appius*  Claudîus  les  Samnites. 
Celui-ci  dans  le  feu  du  combat  , 
voua  un  temple  à  Bellone ,  &  crut 
dans  lé  moment  fe  fentîr  animé 
d'une  ardeur  nouvelle.  Les  deux 
Confuls    rempliiTent    également 
tous  les  devoirs  de  Généraux.  Les 
foldats  9  de  leur  côté  »  font  des 
efforts  extraordinaires  pour    ne 
point  laifTer  à  Tautre  armée  l'hon- 
neur  d  avoir  donné  le  premier 
branle  à  la  viâoire.  Ils  rompent 
donc  &  mettent  eu  fuite  les  enne« 
mîs ,  &  les  pourfuivent  jufqu'à 
leur  camp.  Gellius  Egnatius,  avec 
fes  Samnites ,  y  étant  accouru ,  le 
combat  recommença  tout  de  nou- 
veau ,  &  avec  plus  de  vivacité 
encore  qu'auparavant.  Il  fallut  que 
les  ennemis  cédaiTent  encore.  Dé-* 
jà  les  vainqueurs  attaquoient  le 
qtmp.  Les  deux  Confuls  animent 
à  l'envi  leurs  foldats  >  qui  arra- 
chent les  pallifTades  ^  franchiffent 
les  foffés  9  &  fe  rendent  maîtres 
du  camp.  Le  butin  9  qui  étoit  fort 
conûdérable ,  leur  fut  abandonné. 
Il  y  eut  plus  de  fept  mille  hom- 
mes de  tués  du  côté  des  ennemis» 
&  plus  de  deux  mille  faits  pri- 
fonniers. 

L'année  fui  vante,  Appius  Clau- 
dîus fut  nommé  Préteur;  Si  on  lui 
donna  pour  Collègue  P.  Décius. 
Il  fut  envoyé  contre  les  Samnites» 
fur  {efquels  il  remporta  quelques 
avantages. 

L^an  de  Rome  472  ,  Pyrrhus  , 
roi  d'Épire ,  envoya  à  Rome  Ci- 
né^ ,  l'un  de  fes  minières ,  pour 


C  L  310 

y  propofer  la  paix  au  Sénat,  es- 
pérant que  la  conjonâure  d'une 
viâoire  qu'il  venoit  de  remporter 
&  la  préfence  de  fon  armée ,  fe^ 
roient  trouver  cette  propofitioa 
fort  douce  aux  Romains.  On  dé«- 
libéra  de  cette  importante  affaire 
dans  le  Sénat.  La  délibération  du- 
ra plufieurs  jours  ;  &  comme  riea 
ne  tranfpiroit  au  dehors ,  celate*» 
noit  Cinéas  dans  une  grande  in«* 
quiétude.Le  courage  des  Romains 
^ut  befoin^dans  ces  circonftances, 
d'être  ranimé  par  Appius  Qau- 
dius  ,  que  fon  grand  âge  &  la 
perte  de  la  vue  aroient  obligé  de 
fe  retirer  des  affaires ,  6c  de  fd 
renferme^  dans  fa  maifon  ,  qui 
étoit  pour  lui  une  petite  républi- 
que. Il  avoit  quatre  fils ,  hommes 
^its  9  &  cinq  filles ,  fans  compter 
un  grand  nombre  de  cliens    qui 
étoient  fous  (a  proteâion*  Toat 
aveugle  &  avancé  en  âge  qu*il 
étoit  9  il  gonvernoit  cette  nom«« 
breufe  famille  avec  un  ordre  mer- 
veilleux. Il  avoit  toujours  l'efpiit 
tendu  comme  un  arc  9  ne  fe  laif- 
foit  point  abattre  par  la  vieillefife» 
&  ne  s'aloandonnoit  point  à  ixne 
molle  langueur.  Il  étoit  craint  de 
fes  efclaves ,  refpeâé  par  fes  e  n- 
fans  5  chéri  de  tout  le  monde.  II 
avoit  fçu  fe  conferver  dans  fa  nu  ii-> 
fon  toute  Tautorité  du  conimande- 
ment  ;  elle  étoit  regardée  comi  ne 
une  école  de  vertu  &  d'amour  de 
la  patrie ,  oui  les  règles  Si  les  tt  la- 
ximes  ancietmes  étoient  religieu  fe-: 
ment  obferv  ées. 

Tel  étoit  i^ppius  Claudîus.  !Sur 
le  bruit  four  d  qui  couroit  dan:  s  la 
ville  ,  que  Iç?  Sénat  étoit  difpb  fé  à 
accepter  les;  offres  de  Pyrrhus  ,  il 


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510  CL 

le  fit  porter  dans  Taflemblée  i  oîi 
Ton  garda  un  ^profond  filence ,  dès 
qu*on  le  vit  paroître.  Là  ,  ce  vé- 
nérable vieillard  ,  à  qui  le  zèle 
pour  l'honneur  de  fa  patrie  fem- 
bloit  avoir  rendu  toute  Ton  an- 
cienne vigueur  ,  montra  par  des 
raifons  également  fortes  &  fenfi- 
bles  qu'on  alloit  détruire  par  un 
honteux  traité ,  toute  la  gloire 
que  Rome  jufques-Ià  s'étoit  ac- 
quife.  Puis  ,  tranfporté  d*une  no- 
ble indignation  :  n  Que  font  donc 
n  devenus,  leur  dit-il,  ces  difcours 
V  fi  fiers  que  vous  teniez ,  &  qui 
»  ont  retenti  par  toute  la  terre,que 
99  fi  cet  Alexandre  le  Grand  étoit 
9>  venu  en  Italie  du  tems  de  notre 
»  jeuneffe  &  de  la  vigueur  de  Tâge 
9>  de  nos  pères  ,  il  n'auroit  point 
i>  acquis  la  réputation  d*invinci- 
»  ble  ;  mais  que  par  fa  fuite  ^  ou 
n  par  fa  mort ,  il  auroit  ajouté  un' 
»  nouveau  luftre  à  la  gloire  de 
n  Rome  ?  Quoi  !  vous  tremblez 
s)  maintenant  au  feul  nom  d'un 
»  Pyrrhus ,  qui  a  paffé  fa  vie  à 
Il  faire  la  cour  à  un  des  gardes  de 
n  ce  même  Alexandre;  qoi  erre 
n  comme  un  aventurier  de  con- 
n  crée  en  contrée  ,  pour  fuir  les 
M  ennemis  qu'il  a  dans  fon  païs  ; 
»  &  qui -a  Pinfolence  de  vous  pro* 
n  mettre  la  conquête  de  l'Italie, 
i>  avec  ces  mêmes  troupes,  qui 
>i  n'ont  pu  le  mettre  en  état  de  con- 
w  ferver  une  petite  partie  de  la  Ma- 
»  cédoine.ci  II  dit  beaucoup  d'au- 
tres^chofes  pareilles ,  qui  ranimè- 
rent la  généro(îcéRoraaine,&  difli- 
perent  toutes  les  craintes  du  Sénat. 
Caton,  ou  plutôt  Cicéron ,  em- 
ploie cet  exemple  d'Appius  Clâu- 
diHS  f  pour  montrer  que  le  grand 


CL 

âge  ne  met  point  les  vieillards  hors 
d'état  d'être  utiles  à  leur  patrie. 
Ce  n'eft  point  par  la  force  ni  par 
l'agilité  du  corps ,  que  fe  font  les 
grandes  affaires  ,  mais  par  le  bon 
(ens ,  par  la  droite  raifon ,  par  de 
fages  confeils  fondés  fur  une  lon- 
gue expérience  ;  avantages  que  la 
vieilleiïe  augmente  &  fortifie,  loin 
d'y  donner  aucune  atteinte.  A  qbi 
doit-on  la  bonne  conduite  d*ua 
vaiffeau?  £(l-ce  aux  moufles  qui 
courent,  qui  montent ,  qui  defcen- 
dent  y  &  font  toujours  en  mouve- 
ment, ou  à  l'habileté  du  Pilote» 
qui  tranquille  fur  fon  fiege  i  manie 
le  gouvernail?  C'eft  ce  que  fit 
Appius  Claudius  dans  l'occafion 
dont  il  s'agit.  Son  autorité  entraîna 
tout  le  Sénat.  D'un  commun  ac- 
cord &  d'une  voix  unanime,  on  fit 
cette  réponfe  à  Cinéas  :  Que  Pyr* 
rhus  commençât  par  fortir  de  l'I^ 
talte»  Qu'alors  y  s'il  voulait ,  U 
envoyât  demander  la  faix.  Mais  , 
qut  tant  qu'il  ferait  en  armes  dans 
leur  païs  ,  les  Romains  lui  fc'* 
raient  la  guerre  de  toutes  leurs 
forces ,  quand  même  il  auroit  battu 
mille  Lévinus. 

Voilà  de  ces  grands  traits  qui 
caraéèérifent  le  peuple  Romain, 
&  de  ces  grands  principes  de  po- 
litique, qui  l'ont  élevé  à  un  fi 
haut  point  de  réputation  &  de 
pui (Tance  :  De  ne  céder  jamais  à 
l'ennemi  dans  Vadverfîté  ^  &  de 
faire  paraître  alors  plus  de  coura" 
ge  &  de  fierté  que  jamais» 

Appius  Claudius  mourut  peu 
de  tems  après.  Il  étoit  fort  habile 
dans  la  jurifprudence  Romaine; 
&  Cicéron  le  met  au  nombre  des 
anciens  orateurs  Romains. 

CLAUDIUS 


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CL 

CLAUDIUS  [Appius] 
CAUDEX,  {d\  Appius  Claudius 
Caudex  ,  fils  crAppius  Claudius 
Cœcus  ,  fut  Conful  avec  M. 
Fulrius  Flaccus  ,  l'an  de  Rome 
488. 

Cette  année  ,  ie  peuple  Ro- 
main s'étant  déterminé  à  fecourir 
les     Mamertins  ,    attaqués    par 
Hiéron  ^  tyran  deSyracufe  ,  Ap- 
pius Claudius  Caûdex ,  partit  à  la 
tête  d'une  armée  ,  &  fit  toute  la 
diligence  pofiibie.  Il  s'aeiflbic  de 
pafler  le  détroit  de  Meibne  ,  que 
gardoient  les  Carthaginois.  L'en- 
treprife  étoit  hazardeufe  ,  ou  pour 
mieux  dire  téméraire ,  &  même  , 
félon  toutes  les  règles  de  la  vrai- 
femblance,  impoffible.  Les  Ro- 
mains n*avoient  point  de  fiotte , 
mais  feulement  des  batteaux  grof- 
fièrement   conftruits  ,    que    Ton 
peut  comparer  aux  canots  des  In- 
diens. Car  c'eft  ce  que  paroît  fi- 
gnifier  le  terme  Caudicaria  Na* 
,      ves ,  dont  fe  fervent  les  Anciens 
en  parlant  du  fait  que  nous  rap- 
portons ;    &  c*eft  de-là  que  vint 
au  Conful  le  furnom  de  Caudex» 
Les  Carthaginois  ,  au  contraire  , 
avoient  une  flotte  bien  équipée  & 
très-nombreufe.  Appius  Claudius 
Caudex  ,  dans  cet  embarras  qui 
auroit  rebuté  tout  autre  ,  eut  re- 
cours à  la  rufe.  Ne  pouvant  pafler 
le  détroit  occupé  par  les  Cartha- 
ginois ,    il   feignit  d'abandonner 
I  entreprife  ,  (S.  à^  retourner  du 
côté  de  Rome  avec  tout  ce  qu'il 
avoit  de  troupes  de  débarquement. 
Sur  cette  nouvelle ,  les  ennemis 
qui  bloquoient  Mefline  du  côté  de 


CL  311 

la  mer ,  s'étant  retirés  comme  s'il 
n'y  avoit  plus  eu  rien  à  craindre  , 
le  Conful ,  profitant  de  leur  ab-> 
fence ,  &  des  ténèbres  de  la  nuit , 
traverfa  le  détroit ,  &  arriva  en 
Sicile. 

L'endroit  oh  il  aborda,  étoit 
aflez  près  du  camp  des  Syracu- 
fains.  Il   exhorta  fes  troupes   à 
tomber  brufquement  fur  eui,  leur 
promettant  une   viâoire  afluré» 
dans  la  furprife  oh  ils  les  trouve- 
roient.  L'événement  répondit  aux 
promefles  du   Conful.    Hiéron  , 
qui  ne  s*attendoit  à  rien  moini , 
eut  à  peine  le  tems  de  ranger  fes 
troupes  en  bataille..  Sa  cavalerie 
eut  d'abord  queloues  avantages  ; 
mais ,  l'infanterie  Komaine,  ayant 
donné  dans  le  gros  de  fon  armée, 
renfonça  bientôt ,  &  la  mit  entiè- 
rement eh  déroute.  Appius  Clau- 
dius Caudex  ,  après   avoir    fait 
dépouiller  les  corps    morts  des 
ennemis  ,  fe  retira  ,  &  entra  dans 
Mefllne ,  où  il  fut  reçu  comme 
un  libérateur  venu  du  ciel ,  & 
remplit  les  Mamertins  d'une  joie 
d'autant  plus  grande  &  plus  fen- 
fible ,  qu'elle  n'étoit  prefque  plus 
efpérée. 

Appius  Claudius  Caudex  /dé- 
livré de  toute  inquiétude  de  ce 
côté-là ,  fongea  à  profiter  de  la 
terreur  que  le  bruic  de  cette  pre- 
mière viftoire  avoit  répandue 
même  chez  les  Carthaginois.  Il 
alla  donc  les  attaquer  dans  leur 
camp,  qui  paroiflbit  inacceffible, 
tant  par  fa  fitpation  naturelle,  que 
par  les  retranchemens  dont  on 
i'avoit  fortifié.   Auffi  fut  -  il  re- 


(«)  RoU.  Hift.  Rom.  T.  II.  p.  474.  &  fniv. 

Tom.  XL 


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iiz  CL 

pouffé  avec  quelque  perte ,    & 
obligé  de'fe  retirer.  Les  Cartha* 

Î^inois  »  regardant  cette  retraite 
orcée ,  comme  un  effet  de  leur 
bravoure  y  &  de  la  frayeur  des 
ennemis,  fe  mirent  à  les  pourfui- 
vre.  Ceft  à  quoi  le  Conful  s'at- 
tendoit.  Il  tourna  face.  Alors  ^  la 
fortune  du  combat  changea  ajrec 
Il  fituation  du  lieu.  Il  Âe  refla  à 
chacun  q\)e  fon  propre  courage. 
.  Les  Carthaginois  ne  tinrent  pas 
devant  les  Romains.  Il  y  en  eut 
un  grand  nombre  de  tués.  Les  uns 
fe  uuverent  dans  leur  camp ,  les 
autres  dans  les  villes  voifines  ;  & 
ils  n'oferent  plus  fortir  de  leurs 
retranchemens  tant  qu'Appius 
Claudius  Caudex  demeura  dans 
Meffine. 

Se  voyant  donc  maître  de  la 
campagne  ^  il  ravagea  impuné- 
ment tout  le  plat  païs ,  &i  brâla 
les  bourgs  des  alliés  des  Syracu- 
fains.  Une  confternation  fi  généra- 
le lui  infpira  le  deffein  hardi  d'ap- 
procher de  Syracufe  même.  Là  il 
le  donna  plufieurs  combats ,  dont 
le  fuccès  varia  fort ,  &  dans  l'un 
defquelsie  Conful  courut  un  grand 
danger.  Il  eut  encore  ici  recours  à 
la  rufe.  Il  dépécha  un  officier  à 
Hiéron  comme  pour  traiter  de 
paix.  Le  Roi  écouta  volontiers 
cette  propofîtion.  Ils  eurent  en* 
iemble  quelques  entrevues  ;  ôc 
pendant  ces  pour-parlers  ,  Ap^- 
pius  Claudius  Caudex  fe  tira  in- 
fendblement  du  mauvais  pas  où  il 
s'étoit  engagé.  11  y  eut  encore 
des  proportions  entre  quelques 
particuliers  des  deux  armées.  Il 


CL 

paroit  que  les  Syracufains 
haitoient  la  paix  ;  mais ,  le  u      c 
voulut  point  alors  y  entenur' 
apparemment  parce  que  le  Ç 
fui ,  forti  une  fois  de  danger     fe 
rendoit  plus  difficile. 

Ces  divers  mouvemens  occu- 
pèrent ane  grande  partie  de  l'an* 
née.  Appius  Claudius  Caudex  re- 
tourna à  Meffine  »  où  il  laifla  une 
forte  garnifon ,  capable  de  mettre 
la  ville  en  (ûreté ,  puis  il  pafla  à 
Rhège,  pour  fe  rendre  de-là  à 
Rome.  Il  y  fut  reçu  avec  de 
grands  applaudiffemens ,  &  une 
|oie  univerfelte.  Son  triomphe  fur 
Hiéron  &  fur  les  Carthaginois 
fut  célébré  avec  d'autant  plus  de 
folemnité  &  de  concours  ,  que 
c*étoit  le  premier  qui  eût  été 
remporté  fur  des  peuples  féparés 
deritalieparla  mer. 

CLAUDIUS  GLICIAS,(^) 
Claudius  Glicias ,  homme  de  la 
lie  du  peuple  ,  fut  nommé  Dic- 
tateur par  P<  Claudius  Pulcher, 
Tan  de  Rome  503.  Mais  comme 
cette  nomination  aviliflbit  &  dé- 
gradoit  la  première  charge  de  L'É« 
tat,  Claudius  Glicias  rat  obligé 
de  fe  démettre  ,  &  on  nomma  à 
fa  place  Atitius  Calatinus»  On  dit 
que  Claudius  Glicias  avoit  éfé 
greffier  ou  huiffier  de  P«  Claudius 
Pulcher. 

CLAUDIUS  [Q.],  {b)q. 
Claudius  y  Tribun  du  peuple  , 
Tan  de  Rome  534»  porta  une  loi, 
qui  faifoit  défenfe  à  tout  Sénateur 
&  à  tout  citoyen  qui  feroic  père 
de  Sénateur  ^  d'avoir  une  barque 
qui  tint  plus  de  trois  cens  feptiers* 


C«)  RoU.  Hifit  Rom.  T»  II.  p«  ss^    I   (^)  ^Hi  Uv.  t.  XXI,  c.  ^|. 


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CL 

*rouvoît  que  c'étoit  affez  pour 
il  irporter  à  Rome  les  fruits  que 
'  ^  *!  Sénateurs  recueilloient  dans 
*  »  ^'Ts  terres ,  &  qu'il  étoit  indigne 
dv  leur  rang  de  faire  fervir  leurs 
vaiflfeaux  de  charge  à  tranfporier 
la  récolte  des  autres  citoyens  pour 
de  Targent. 

CLAUDIUS    CENTHpN 

te.  ]  ,  C.  Claudius  Centho  ,  (tf) 
Is  d'Appius  <31audius ,  fut  créé 
inter-roi  Fan  de  Rome  536.  Trois 
ans  après  il  Fut  nommé  Di6lateur 
par  le  conful  T.  Sempronius,  pour 
préfider  aux  aflemblées  ;  &  il  fe 
choifit  pour  maître  de  la  cavale- 
rie, Q.  Fui.  Flaccus.  Dès  le  pre- 
mier joxir  dés  aflTemblées ,  le  Dic- 
tateur nomma  Conful  le  même 
Q.  Fulvius  Flaccus ,  fon  maître 
de  cavalerie ,  &  Appius  Claudius 
Pulcher  ,  qui  a  voit  été  Préteur  en 
,  Sicile. 

CLAUDIUS  ASELLUS  , 
Claudius  Affellus,  Foye^  Jubel- 
lius  Tauréa. 

CLAUDIUS  [C],  C.  Clau- 
dius ,  K.  KhcLv^tUt, ,  {b)  Prêtre  de 
Jupiter ,  Tan  de  Rome  541.  Il  fut 
privé  du  facerdoce  pour  avoir 
mal  préfenté  les  entrailles  de  la 
vi6lime. 
CLAUDIUS  FLAMËN  [Q], 
Q.  Claudius  Flamen  ,  {  c  )  fut 
nommé  Préteur  Tan  de  Rome 
544.  La  ville  de  Tarente  lui  échut 
pour  xlépartement.  L'année  fui- 
vante ,  on  lui  laiiTa  ce  même  dé* 
parlement  avec  la  qualité  de  Pro- 
préteur. Cette  année  9  on  lui  ame- 


CL  325 

naun  jour  quatre  cavaliers  Gau- 
lois ,  &  deux  Numides ,  qui 
avoient  été  pris  par  des  fourrageurs 
de  l'armée  Romaine.  Ils  tâchèrent 
d'abord  de  rembarraffer  par  des 
réponfes  vagues.  Mais  ,  la  crainte 
des  tourmens  ,  dont  il  étala  l'ap- 
pareil à  leurs  yeux ,  les  ayant 
bien- tôt  forcés  de  dire  la  vérité»îU 
lui  avouèrent  qu'ils  portoient  des 
lettres  à  Annibal  de  la  part  d'Af- 
drubal  fon  frère.  Sur  le  champ  »  le 
Propréteur  les  mit  entre  les  mains 
de  L,  Virginius,  tribun  des  foldats, 
f^vec  les  lettres  cachetées  comme 
elles  l'étoient  ,  &  lui  ordonna  de 
les  conduire  au  conful  C.  Claudius 
Néron ,  lui  donnant  pour  efcortë 
deux  efcadrons  de  Samnites. 

CLAUDIUS  [ P.  ].P,C/az^- 
dius ,  n,  K^ott^J^o;,  \d)  Préfet 
des  alliés  dans  l'armée  du  conful 
C.  Claudius  Néron  ,  l'an  de  Ro- 
me 545. 

CLAUDIUS  ASELLUS  [T.]. 
T.  Claudius  Afellus ,  {e)  tribun 
militaire  l'an  de  Rome  545.  Il 
fervoit  en  même  tenu  &  dans  la 
même  armée  que  le  précédent.  Un 
jour,  ils  furent  détachés  de  l'ar- 
mée à  la  tête  de  cinq  cohortes  & 
de  cinq  compagnies  d'infanterie, 
avec  ordre  d  aller  fe  cacher  dans 
un  vallon  ,  &  de  n'en  fortir  qu'au 
moment  qui  leur  avoit  été  mar- 
qué, 

T.  Claudius  Afellus  fut  nom- 
mé Préteur  Tannée  fuivance  ,  & 
eut  la  Sardaigne  pour  départe- 
ment. 


m)  Tit.  Liv.  L.  XXIÎ.  c.  34.  L.  XXV.  !  43. 
c.  a-  I     {d}  Tit.  Liv.  L.  XX VU.  c.  41. 

{h)  Tit.  Liv.  L.  XXVI.  c.  43.  f     Le)  Tit.  Liv.   L.  XXXVII.  c.  41.  L. 

{fi    Tit.  Liv.  L.  XXVII.   ç.   »i  ,  1»  ,  '  XXXVIU.  c,  10. 

Xij 


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5^4  C  L 

CL AUDtUS  ASELLUS  [T.], 
J.  Claudius  Aftllus  ^  {a)  fut  créé 
Édile  Plébéien  avec  M.  Junnis 
Pennusy  Tan  de  Rome  548. 

CLAUDIUS  CENTHON 
[  C.  ]  ,  C.  Claudius  Centho  ,  {b) 
lieutenant  dans  l'armée  du  confui 
P.  Sulpicius  Galba  ,  Tan  de  Ro- 
me 55 1.  Il  fut  envoyé  à  Athènes 
avec  vingt  vaifleaux  de  guerre  ôt 
quelques  troupes  pour  faire  lever 
le  fiege  de  cette  ville.  Étant  arrivé 
dans  le  Pirée  avec  fes  galères ,  il 
rendit  aux  habitans  le  courage  ÔC 
la  con6ance.  Il  ne  fe  contenta  pas^ 
de  mettre  la  ville  &  tout  le  pais 
voifm  en  fureté  ;  mais  ,  ayant  ap- 
pris que  la  garnifon  de  Chalcis  ne 
gardoit  aucune  règle  ni  aucune 
difcipline,  comme  éloignçe  de  tout 
danger ,  il  partit  avec  fa  flotte  » 
arriva  près  de  la    ville  avant  le 

i'our ,  Ôc  ayant  trouvé  les  fentinel- 
es  endormies,  y  entra  fans  peine, 
mit  le  feu  aux  greniers  publics 
remplis  de  ble  &  à  Tarfenal  qui 
étoit  plein  de  machines  de  guerre» 
tailla  en  pièces  toute  la  garnifon , 
&  après  avoir  fait  porter  dans  fes 
raiffeaux  le  butin  immenfe  qu'il 
avoir  amaiTé ,  il  retourna  au  Pirée, 
d'oîi  il  étoir  parti, 

CLAUDIUS  [P.]./'.  C/^^' 

dius  ,  n.  K>ai//i'9$ ,  (c)  Tribun 
militaire  de  la  féconde  légion,  fut 
tué  dans  un  combat  contre  les 
Boïens  l'an  de  Rome  556. 

CLAUDIUS  CENTHON 
[  Appius  ] ,  {d)  Appîus  Claudius 
Centho  ,   parvint  à  Tédilité  curule 


CL 

I*an  de  Rome  573.  Quatre  9m 
après ,  il  fut  Préteur  ,  &  envoyé 
en  Efpagne.  Les  Celtibériens , 
tranquilles  fous  le  gouvernement 
de  fon  prédéceffeur,  fe  révoltèrent 
à  fon  arrivée  dans  la  province;  ÔC 
pour  déclaration  de  guerre ,  ils 
vinrent  tout  d'un  coup  tondre  faf 
le  camp  des  Romains.  Le  jour 
commençoit  à  paroître,  lorfque 
ceux  qui  faifoient  fentinelle  fur  le 
rempart  I  &  ceux  qui  étoient  ea 
fadion  devant  les  portes  ,  ^pper- 
cevant  de  loin  les  ennemis  qui 
s'avançoient ,  crièrent  aux  armes. 
Appius  Claudius  Centhon  donna 
aufli  tôt  le  fignal  du  combat,  6C 
ayant  exhorte  fes  foldats  en  peu 
de  mots ,  les  fît  fortir  fur  les  enne- 
mis par  trois  portes  en  même 
tems.  D'abord,  les  Romains  com« 
battirent  fans  aucurt  avantage  9 
parce  que  les  Celtibériens  les 
arrêtant  aux  pones ,  il  n'y  en 
avoir  qu'une  partie  qui  pût  agir 
dans  l'efpace  étroit  qu'on  leur  laif- 
foit.  Mais  ,  lorfqu'à  force  de  fe 
pouffer  les  uns  les  autres  ,  Us  fo- 
rent une  foisfortis  de  leurs  retràn- 
chemens  ^  &  qu'ils  eurent  formé 
un  front  égal  à  celui  des  ennemis 
qui  les  entouroient,  ilsles  preffe- 
rent  avec  tant  de  vigueur ,  qu'ils 
ne  purent  foûtenir  une  attaque  fi 
impétueufe.  Il  n'étoit  pas  huit 
heures  que  les  Celtibériens  avoient 
déjà  pris  la  fuite.  Les  Romains 
leur  tuèrent  ou  leur  prirent  autour 
de  quinze  mille  hommes  ,  &  leur 
enlevèrent  trente  étendards.  Ils 


{s)  Lit.  Liv.  L.  XXIX.  eu.  I     {À)  Tit.  Liv.  L.  XL.  c.  jç.   L.  XLI. 

{h)  Tit.  Liv.   L.   XXXL  c.    14,21,10.  18,  %6 >  »8.  L.  XLIL  c.  5  ,  15.  L. 
fts.  Rotl.  Hift.  Ane.  T.  IV.  p.  461 ,  461.  IXLIII.  c.  9,  10.  RolK  Hiit.  Ane.  X(UIU 
(0  Tit,  Liv.  L.  XXXin.  c.  }6,  I V.  pag.  57, 


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CL 

s*€mpareretit  de  leur  camp  dès  le 
même  jour  ,  &  par-là  virent  la 
guerre  terniinée  ;  car  ,  ceux  qui 
s'étoient  échappés  du  combat , 
s'en  retournèrent  chacuh  4ans 
leurs  villes  6c  dans  leurs  bourgs  ; 
&  depuis  ce  jour ,  ils  demeure- 
rem  en  repos ,  &  obérrent  aux 
Romains* 

On  fît  à  Rome  un  jour  de 
prières  &  de  procédons  pour 
remercier  les  dieux  de  cet  heureux 
fuccès  d'Appius  Clandius  Cen* 
thonj  &  on  leur  immola  vingt 
viâimes  ;  &  quand  Âppius  Clau- 
dius  Centhon  fut  revenu  d'Efpa- 
gne,  le  Sénat  lui  permit,  par  un 
arrêt  rendu  exprès ,  d'entrer  dans 
la'  ville  avec  i'konneur  du  petit 
triomphe. 

L'année  fuivante  »  on  apprit  à 
Rome  que  le»  TheiTaliens  étoient 
armés  les  uns  contre  les  autres^  & 
on  envoya  Appius  Claudius  CenW 
thon  pour  prendre  connoiffance 
de  leurs  divifions ,  6c  les  appaifer. 
Ce  Général  >  ayant  fait  aux  che£i 
d^  deux  partis  les  réprimandes 

Su'ils  méritoient ,  retrancha  des 
ettes  ^  la  partie  dont  une  ufure 
ifijufte  les  avoit  furchargées  >  & 
ordonna  que  ce  qui  étoit  légiti- 
mement dâ ,  fût  acquitté  en  divers 
payemens ,  dans  un  certain  nom- 
bre d'années.  Le  même  Appius 
Claudius  Centhon  employa  les 
mêmes  voies  pour  rétablir  la  traa* 
quillité  dans  la  Perrhébie. 

;L'an  de  Rome  582  ,  Appius 
Claudius  Centhon  fut  envoyé 
avec  quatre  mille,  hommes  de  pied 
par  le  conful  A.  Hoftilius  ,  pour 
défendre  les  peuples  voifins  de 
rillyrie.  MaiS|  ne  fe  contentant 


CL 


325 


pas  dégroupes  qu'il  avoit  ame 
nées  avec  lui  9  il  tira  tous  les  fe- 
cours  qu'il  put  des  alliés  »  6c  en 
compofa  un  corps  de  huit  mille 
hommes  de  différentes  efpèces  ; 
6c  ayant  parcourt]  tout  le  pais ,  il 
s'arrêta  auprès  de  Lychnide  dans 
la  DafTarétie. 

Aiïez  près  de- là  étoit  la  ville 
d'Ufcana  fur  les  contins  du  royau-^ 
me  de  Periée.Les  habitans  envoyè- 
rent avertir  fecrétement  Appius 
Claudius  Centhon ,  que  s'il  von- 
loit  s'approcher  -de  leurs  murailles , 
avec  fon  armée  ,  il  y  auroit  aux 
portes  des  eens  dîfpofés  à  les  lui 
ouvrir,  6c  a  le  recevoir ,  dans  la 
ville  ;  qu'il  ne  perdroit  ni  fes  pas 
ni  fa  peine ,  6c  qu'il  y  trouveroît 
affez  de  butin  pour  enrichir,  non 
feulement  lui  6c  (es  amis,  mais, 
encore  fes  foldats.  Ce  lieutenant 
fe  laifTa  tellement  aveugler  par  la 
paffion  du  gain  f  que  ians'  fonger 
ni  à  retenir  quelques-uns  de  ceux 
qu'on  lui  avoit  envoyés ,  ni  à  de- 
mander aux  habitans  de  la  ville 
des  otages  pour  fureté  de  leur 
parole  ,  ni  même  à  envoyer  re- 
connoître  le  pals,  il  partit  de  Lych- 
nide au  jour  marqué.  Mais ,  dès 
Sue  les  Romains  furent  à  la  portée 
u  trait ,  la  garnifon  avec  les  ha- 
bitans fondit  fur  eux  par  deux 
portes  en  même  tems  ;  ce  qui  les 
frappa  tellement  »  qu'ils  ne  foô- 
tinrent  pas  feulement  le  premier 
choc  des  ennemis»  Aind  «  il  y  en 
eut  plus  de  tués  dans  U  fuite  que 
dans  le  combat.  Le  Lieutenant  en 
ramena  à  peine  deux  mille  dans 
le  camp;  car»  comme  il  étoit  fort 
éloigné ,  l'épuifement  éh  offrit  un 
plus  grand  nombre  aux  coups  (]qs| 


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^26  CL 

vainqueurs  qui  les  pourfi^olent  # 
iavant  qu'ils  puffent  le  gagner. 
Appius  Claudius  Centhon  ne  s'y 
arrêta  pas  même  pour  recueillir 
ceux  que  la  fiiite  avoit  difperfés 
dans  la  campagne ,  &  à  qui  cette 
attention  auroit  pu  fauver  la  vie  ; 
mais  ,  il  ramena  fur  le  champ  à 
Lychnide  >  les  triftes  reftes  de  fa 
défaite. 

CLAUDIUS  ASELLUS  [L.], 
X,  Claudius  Aftllus  ,  {a)  étoit 
Préteur  Tan  de  Rome  578,  & 
eut  en  partage  la  Sicile. 

CLAUDIUS  [  C.  ] .  C.  CUu* 
diusj  K.  KaupcT/oç,  (b)  l'un  des 
deux  commiflaires  ,  qui  furent 
envoyés  en  Achaïe  y  Tan  de  Ro* 
me  585  ,  pour  réder  les  aiFaires 
de  cette  province,  vîes  deux  com* 
miflaîres  étoiem  vendus  à  Tin- 
jufbcè  ;  mais ,  Ton  l'étoit  encore 
plus  que  l'autre ,  fuivant  Paufa* 
nias  y  q^  ne  nous  dît  point  lequel 
des  deux  c*étoir» 

CLAUDIUS  [  Appius ],(c) 
■Appius  Claudius  ,  Pl-ïïtU^  fixais 
/(oç ,  jeune  homme  ,  qui  vivoit 
du  tems  de  Sylla ,  &  qui  fiit  tué 
avec  un  grand  nombre  d'autres 
dans  une  aâbn  devant  les  murs 
de  Rome.  Il  étoit  très»brave  de 
fsL  perfonne.  Celui  qui  le  fit  tom- 
iber  fous  fes  coups  >  lui  &  fes  ca^ 
marades ,  étoit  un  Samnite ,  nom<' 
tné  Téléfimis. 

CLAUDIUS   ISIDORUS, 
Claudius  Ifidorus  ,  {d)  déclara , 

(m)  Tit.  Lîv.  L.  XLL  c.  10. 

(h)  Tit.  Liv.  L.  XLV.  c.  31.  Pauf.  p. 
416.  KoU.  Hift.  Ane.  Tom.  V.  p.  104  ^ 
105.  . 

(c)  Plut.  T.  I,  p.  470. 

Xd)  coût.*  des  Rom»  fltr  M.  Nieup. 
p^  |to.    . 


CL 

par  fon  teftament ,  que  quoSqu'il 
eût  beaucoup  perdu  pendant  la 
guerre  civile  ,  cependant  il  laiflbit 
a  fes  héritiers  quatre  mille  cent 
feize  eftlaves ,  trois  mille  fix  cens 
paires  de  bœufs ,  deux  cens  cin- 

Juante-fept  mille  autres  animaux, 
c  fix  cens  millions  de  federces. 

CLAUDIUS  [ L. ],Z,C/^- 
dius,  A,  KT^av/loç  ,  {e)  roi  des 
facrifices.  Ctcéron  parle  de  ce  L. 
Claudius  dans  (a  lutfangue  fur  les 
réponfes  des  Arufpices^ 

CLAUDIUS  [  T.  ] ,  r.  Clou, 
dius  ,  (/)  certain  perfônnage  j 
dont  il  eil  (ait  mention  dans  To- 
raifon  de  Cicéron  contre  Vati* 
nius. 

Cicéron  fait  mention  de  plu« 
fieurs  autres  Claudius  dans  fes 
oraifbns. 

CLAUDIUS  [  Appius ],(^) 
Appius  Claudius,  A'xrioç  K^av- 
/io$ ,  l'un  des  corrupteurs  de  Ju- 
lie,  ille  d*Augufie. 
.  CLAUDIUS  COSSUS,  (A) 
Claudius  Coffus ,  Tun  des  dépu- 
tés ,  que  les  Helvétiens  envoyè- 
rent à  l'Empereur  Yitellius  l'an 
de  J«  C.  69.  Ils  trouvèrent  ce 
prince  &  les  légions  dansr  les  dif* 
pofitions  les  plus  facheufes  à  leur 
égard.  Les  foldats  demandoient 
que  la  nation  fût  exterminée»  & 
ils  préfencoient  leuts  poings  fer- 
més Si  leurs  épées  nues  au  vifage 
des  tléputés.  Vitellius  lai-méme 
n'épargnent  ni  les  reproches  ni  les 

(e)  Cice^.  Omt.  de  Arufpl  RefpoQL 
c.  to. 
.  (/)  Ciccr.  Omt.  in  Vatîn.  c.  s. 

(g)  Vcll.  Pâcerc.  L.  II.  c.  koo. 

{h)  Tacit.  Hift.  L.  I.  c.  69.  Crév.  HifL 
des  £âf)p.  T»  fil.  p.  69. 


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CL 

imenaces.  Uéloqueocede  Glaudius 
Coffus  fauva  (a  patrie*  Il  parut 
tremblant  ,  déconcené  ,  verfant 
des  larmes  ,  &c  par  un  difcours 
convenable  à  fa  douleur ,  il  atten- 
drit une  multitude,  toujours  prête 
i  palTer  d'une  extrémité  à  l'autre» 
&  auffi  prompte  à  fe  laifler  tou- 
cher de  commifération ,  qu'à  fe 
porter  aux  plus  violens  excès.  Les 
Soldats  changés  joignent  leurs  lar- 
mes à  Relies  dei  fupplians  ,  & 
plus  fermes  dans  le  parti  de  la  clé- 
mence au*il$  n'afoient  été  ardens 
{)our  celui  de  la  rigueur ,  iU  ob** 
tinrent  de  Vitellius  la  grâce  des 
HelvétFeoff* 

CLAUDIUS  APOLLINAI- 
RE, Claudius  Apollinaris  ,  (<f) 
commandoit  en  cnef  la  âotte  de 
Misène  pour  Vitellius ,  lorfqu*on 
vint  le  loUiciter  de  fe  déclarer  en 
faveur  de  Yefpafien.  On  n'éprou* 
va  pas  beaucoup  d'obftades ,  parce 
que  la  fidélité  de  Claudius  Apol- 
linaire étoit  chancellante  ;  mais  , 
il  manquoic  auffi  de  vigueur  potir 
ibûtenir  une  perâdie»  Apinius  Ti- 
ro  y  ancien  préteur  »  le  fortifia ,  & 
fe  mit  à  la  tête  de  l'entreprtfe.  Ils 
agirent  de  concert  ;  après  avoir 
fait  déclarer  la  flotte  ,  ils  follici- 
lerent  les  villes  de  Campante  , 

Îui   les  fuivirent  fans  difficulté. 
^oye;^  Julianus  f  Claudius  ]• 

CLAUDIUS  HERMINIA- 
NUS ,  Claudius  Hcrminianus ,  in« 
tendant  de  Cappadoce  pour  les  Ro- 
mains, traita  cruellement  les  Chré* 

(«)  Tacic»  HJft*  L.  III.  c.  57.  Crév. 
Hift.  des  Emp.  T.  Itl.  p.  ^19 ,  «lo. 

(»)  Crév.  Hitt.  des  Êiop.  Tom.  V. 
p.  %\%» 

(O  Xit.  Uv.  L.  VIII.  c.  19*  !.•  IX. 


CL  317 

tiens  ;  mais,  par  un  jufle  châtiment 
de  Dieu,les  vers  le  mangèrent  tout 
vivant.  Il  empêcha  y  autant  qu'il 
le  put  »  que  cela  ne  devint  public  ; 
de  peur ,  difoit-il  «  que  les  Chré- 
tiens ne  s'en  réjouiflent.  Cela  arri« 
va  l'an  de  J.  C.  208. 

CLAUDIUS  ATTALUS  , 
Claudius  Attalus  ,  {b)  proconfui 
de  Chypre ,  fut  mis  à  mort  par 
Hélioeabale ,  parce  qu'il  avoir  été 
l'un  des  principaux  amis  de  Ma* 
crin ,  fon  prédécefTeur  à  TEmpire. 

CLAUDIUS  ,  Claudius,  (c> 
K^etvJhç^  certain  Hiilorien ,  que 
Tite-Live  cite  en  plufieurs  en- 
droits. Il  avoit  traduit  en  Latin  , 
les  annales  qa'Acilius  avoit  écrites 
en  Grec.  On  ne  fçait  point  qui 
étoit  ce  Claudius.  Peut-être  étoit-» 
ce  le  même  que  Claudius  ou  Clo* 
dius  Licinius ,  ou  Claudius  Qua« 
drigarius  ,  ou  quelqu'autre  qu'on 
ne  fçauroit  défigner. 

CLAUDUS  ,  Claudus ,  X^atT- 
cToç  ,  ifle  de  la  Méditerranée. 
Fbyei  Caode. 

CLAVIGER,  C/^;|er>  (J) 
c'efl- à-dire  «  porte-mauue  j  ott 
porte-clef.  On  donnoit  le  furnom 
de  Claviger  à  Hercule  &  à  Jamis. 

CLAUSALA  ,  Claufala  ,  (e) 
fleuve  d'Illyrie.  Tite-Ltve  dît 
qu'il  arrofbit  la  ville  de  Scodra  à 
l'orient. 

C'efl  préfentement  la  Boyana, 
qui,  coulant  au  levant  de  Scutarî, 
tombe  dans  le  eolfe  de  Drin ,  oit 
elle  porte  auffi  les  eaux  du  la6 

<S,  5«  L«  A5é  c.  }9. 

(<j)  Antiq.  expliq  par  D.  Bera.  de 
Montf.  T.  1.  p.  sb8. 

(f)  Tit.Uv.L.XLIV.c.  |u 

Xiv 


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5^8  C  L 

Zenta ,  qui  eft  le  Laheatis  Palus 
des  Anciens* 

CLAUSUS  [  Atta]  ,  Atta 
Claufus ,  (<j)  nom  que  porta  d'a- 
bord Appius  Claudius,  le  chef  de 
la  famille  Claudienne.  On  fit  pour 
lui  un  nom  propre  de  ce  qui  n'é- 
toit  qu'un  terme  de  civilité  &  de 
refpeéè ,  Atta  n'étant  que  ce  que 
les  (jrecs  difoient  »  ^tta  -Trii^p. 
C'étoit  un  des  premiers  citoyens 
de  la  ville  de  Régillum.  On  chan- 
gea enfuiie  Ton  nom  ,  &  il  fut 
appelle  Appius  Claudius. 

Virgile  introduit  Claufus  dans 
fon  Énéïde.  n  On  vit  alors  paroi- 
9i  tre  ,  dit-il  ,  à  la  tête  d'une 
1)  nombreufe  troupe  un  guerrier, 
I»  qui  lui  feul  valoit  un  bataillon. 
»  C*étoit  .le  fameux  Claufus  , 
»  d'une  maifon  illudre  parmi  les . 
91  Sabins ......  Sous  fes  ordres 

V  marcheient  les  cohortes  d*Ami- 
»  terne  ,  de  Cures ,  d'Érete ,  de 
p  Mutufque,  pals  couvert  d'oli- 
n  viers ,  de  la  ville  de  Nomente , 
i>  des  campagnes  humides  du 
ly  Vélino  y  des  horribles  monts 
I»  Tétrique  &  Sévère,des  champs 
n  de  Cafpérie  ,  &  de  Forule  ; 
99  ceux  qui  boivent  les 'eaux  d'Hi- 
n  melle  ,  du  Tibre  Se  du  Faba- 
9»  ris  ;  enfin  les  habitans  de  la 
}>  froide  Nurfie ,  du  pais  d'Horra , 

V  &  des  funefies  bords  de  l'Allia. 
9»  Toutes  ces  troupes  étoient  fi 
9>  nombreufes  ,  qu'on  compteroit 
99  auffi  aifément  »  foit  les  fiots  de 
99  la  mer  de  Libye  foulevés  par 
99  l'orageux  Orion  ,  lorfqu'en  hi- 
99  ver  il  fe  plonge  dants  les  eaux  ; 


CL 

99  foit  les  épis  mûris  par  le  foleil , 
99  dans  le  païs  arrofé  des  eaux 
99  de  THermus  ,  &  dans  les  ferti- 
99  les  campagnes  de  la  Ly cie. 
99  L'air  retentit  du  bruit  des  bou- 
99  cliers  ,  &  la  terre  eft  ^mue  par 
99  la  marche  de  tant  de  fojdats.  u 

CLAVULARE  ,  CUvuUrc  , 
(b)  forte  de  chariot  ou  de  brouet- 
te >  dont  nous  ne  connoifTons  guè- 
re que  le  nom.  On  fçaic  feule- 
ment que  ce  chariot  étoit  compofé 
de  claies. 

CLAVUS.  Foyei  Latus  Cla- 
vus. 

CLAZOMÈNE  [la  pref- 
qu'ifle  de  ].  (c)  Cette  prefqu'ifle 
étoit  fituée  fur  les  côtes  de  l'Ionie 
dans  l'Afie  mineure  >  &  prenoic 
fon  nom  de  la  ville  de  Clazomène. 

On  trouve  dans  le  fecond  livre 
des  fupplémens  de  J.  Freinshé- 
mius  pour  Quinte  -  Curce  une 
defcription  de  la  prefqu'ifle  de 
Clazomène ,  que  nous  allons  pla- 
cer ici.  19  Les  Clazoméniens  ,  dit 
99  cet  Auteur ,  habitent  dans  le 
99  golfe  de  Smyrne  ytts  l'endroit 
99  où  le  terrein  e(l  plus  étroit ,  & 
99  fait  unj^  forme  de  péninsule  en 
99  attachant  au  continent  les  ter- 
99  res  qui  s'avancent  dans  la  mer 
99  environ  foixante  flades.  Téos 
99  efl  fur  l'autre  rivage  de  l'Iflhme 
99  vis-à-vis  de  Qazomène  ;  &  la 
99  ville  d'Érythre  ,  fameufe  en- 
99  core  en  ce  tems-là  par  la  vertu 
99  des  ces  femmes  qui  prédifoient 
99  l'avenir  i  e{l  à  l'extrémité  de  la 
99  péninfule.  La  haute  montagne 
19  de  Mimas  qui  efi  proche  de 


(*)  Virg.  iEneid.  L.  VII.  v.  706.  &  j  Montf.  Tom.  IV.  pag.  197. 
fiq.  I     (c)  Freinf»  fupplem.  in  Q.  Cuit.  L| 

(i)  Antiq.  cxpl.   par   D.   Bcrn,  dejll.c»/. 


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CL 

»  cette  ville,  &  qui  regarde  Tifle 
»  de  Chio  ,  découvre  de  tous 
M  côtés  dansia  mer.  Et  Te  laiflant 
»  peu  à  peu  aller  en  pente ,  elle 
»  Te  vient  terminer  en  une  plai- 
»  ne  ,  non  loin  de  Tendroit  oU 
»  font  fitués  les  Clazoméniens. 

»  Alexandre,  ayant  confidéré 
»  Tafliette  ôc  la  di/poiition  de  ce 
»  lieu^  réfolut  de  le  couper  & 
»  de  le  féparer  de  la  terre  ferme , 
»  afin  d*enfermer  Érythre  &  Mi- 
»  mas  de  la  mer  ,  &  de  joindre 
»  enfemble  Tun  &  Fautre  golfe. 
»  On  dit  que  ce  fut-là  la  feule 
»  chofe  ,  dont  le  fucccs  ne  ré- 
o  pondit  pas  à  Tintention  de  ce 
»  prince  ;  car ,  la  fortune  favorifa 
»  toutes  (es  autres  entreprifes 
V  comme  s'il  eût  été  de  fa  gloire 
i>  qu'Alexandre  n'entreprît  rien 
»  vainement.  Enfin  ,  Ton  crut , 
"  comme  un  point  de  religion, 
^  qu'il  n'étoit  pas  permis  aux 
»>  hommes  de  changer  la  face  £c 
»  la  difpoAtion  que  la  nature  avoit 
I»  donnée  à  la  terre  ;  fur  tout 
f>  parce  que  d'autres  ayant  eu  les 
f>  mêmes  defTeins  ,  n'avoient  pas 
»  eu  plus  de  fuccès.  Néanmoins , 
»  il  attacha  Clazomène  à  la  terre 
f  ferme  par  une  digue  de  deux 
n  ftades  ;  car ,  autrefois  ,  les  Cla- 
»  zoméniens  l'avoient  tranfpor- 
n  tée ,  dans  une  ifle  par  la  crainte 
»  qu'ils  avoient  des  Perfes.  a 

CLAZOMÈNE ,  Cla[omene  , 
Kxxlv/ufvC  ,  (a)  ville  de  TAfie 
nineure  fur  les  côtes  de  Ilonie. 

(4)  Vell.  Paterc.  L.  I.  c.  4.  Strab.  p. 
58  >  644,  64s.   Pauf.  pag.  375  ,  40a, 
406.  Plin.  T.  I.  p.  179.  Diod.  Sicul.  p. 
î6^  ,  467.  rierod.   L.  I,  c.  16  ,  51  »  14s.    _-.       - 
l^  II.  c.  178.  L,  V.  c.  1*3.  Tit.  Liv.  L,   p.    17J, 


C  L  529 

Paufanias  en  attribue  la  fondation 
aux  Ioniens,  &  on  place  l'époque 
de  cette  fondation  fous  la  31c. 
Olympiade  >  environ  Tan  656 
avant  TÉre  Chrétienne.  Clazo- 
mène, ajoute  Paufanias^  ne  fut 
pas  feulement  habitée  par  des 
Ioniens  ;  il  y  vint  auffi  des  Cleo- 
néens  ,  des  Phliafiens ,  &  plu- 
fieurs  autres  qui  ,  après  le  retour 
des  Doriens  dans  le  Péloponnèfe , 
furent  obligés,  de  quitter  leur  pre- 
mière demeure  ,  les  uns  pour 
une  raifon ,  les  autres  pour  une 
autre. 

Hérodote  ,  dans  un  endroit  ^ 
attribue  la  ville  de  Clazomène, 
à  la  Lydie  ;  &i  dans  un  autre ,  il 
la  donne  à  l'ionie.  Elle  lui  appar- 
tenoit  en  effet ,  &  étoit  fituée  fur 
le  golfe  de  Smyrne  ,  vers  l'en- 
trée d:urte  prefqu'ifle ,  qui  en  prc- 
noit  le  nom  de  prefqu'ifle  de  Cla- 
zomène. Cette  ville  occupoit  la 
partie  feptentrionale  de  l'il^hme  , 
&  la  ville  de  Téos  en  occupoit  \a 
partie  méridionale  ;  mais  de  ma- 
nière que  cette  dernière  étoit  fi- 
tuée beaucoup  plus  avant  dans  le 
continent.  Cette  pofition  de  Cla- 
zomène &  de  Téos  fert  à  enten- 
dre ce  paffage  de  Velleius  Pater- 
culus  ,  qui  dit  ,  en  parlant  de 
Tiflhme  ;  Hinc  Teos  ,  illinc  Cla^ 
{omena  ;  d'un  côté  eft  Téos ,  ^6c 
de  Kautre  Clazomène. 

On  prétend  que  la  ville  de 
Clazomène  n'a  pas  toujours  occu- 
pé  la  même  place  ;  car  ,  Strabon 

XXXVni.  c.  39.  Virg.  iEncid.  L.  IV.  v. 
545.  Plut.  Tom.  I.  pag.  ^ja.  Roll.  Hift. 
Ane.  Tom.  II.  p.  16.  Méin.  de  PAcad. 
des  Infcript,  &  Bell.  lett.  Tom.  XI{« 


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5?o  C  L 

à\t  qU'on  aj>pelloit  Chytrîam  ; 
I  endroit  oîi  étoit  auparavant  Cla- 
zontene^  &  que  de  la  manière  dont 
la  nouvelle  ville  étoit  fuuée  ^  il  y 
avoit  vis-à-vis  huit  pérîtes  ifles  qui 
ctoîent  cultivées.  Un  autre  paflage 
fie  Strabon  femble  montrer  que  Ta 
fwerqu'Me  de  Clazomène  étoit  au- 
trefois une  iile.  Ajoutez  à  cela  que 
Paufanias  afFure  que  la  peur  que  les 
Ioniens  eurent  des  Perfes,  fit  qu'ils 
paiïerent  dans  l'ifle  qui  étoit  fituée 
vis-à-vis  Tendroit  où  ils  avoieot 
(d'abord  bâti  la  vHJedeClazomène»^ 
&  qu*cnfuîte  Alexandre  voulut 
joindre  Tifle  à  la  ville  par  le  moyen 
eone  cbauflee. 

M.  de  la  Martmière  regarde 
tout  cela  comme  une  fable  ^  ne 
croyant  pas  que  Tifthme  ait  ja- 
mais pu  être  autrement  qu'il  o'eft^ 
parce  que  le  mont  Corycus,  qui 
commence  à  la  pointe  du  fud-oueû 
de  la  prefqu'ifle  ,  vers  le  promon- 
toire Corycus ,  forme  une  chaîne 
qui  travene  cette  prefqu'ifle ,  6c 
qui  s*avance  par  rifthme  dans 
]'Ionie«  Cette  circondance  en 
effet  détruit  entièrement  la  pré- 
tention de  ceux  qui  veulent  que 
]â  prefqu'ifle  de  Clazomène  ait 
été  anciennement  une  ifle. 

Les  Romains  accordèrent  la 
franchifê  à  ceux  de  Clazomène. 
Cette  ville  a  été  renommée  par 
la  naiflance  du  Philofophe  Anaxa- 
goras  ,  dit  le  Phyficien  »  &  par 
celle  de  plufleur»  autres  grands 
Hommes.  Etienne  de  Byzance  dit 
Qu'anciennement  elle  fut  appellée 
Grynes ,  &  qu'il  y  avoit  un  tem- 
ple d'Apollon  ,  qu'effeôivement 
Virgile  appelle  Grynéen  ,  célébré 
par  les  oracles  que  le  dieu  y  rea- 


CL 

doit  ;  on  apprend  d'une  médaffle 
de  Valérien ,  où  Cy bêle  eft  repré- 
fentée  la  tête  couronnée  de  tou- 
relles >  aflife ,  tenant  en  fa  main 
droite  une  petite  ftatoe  vailée, 
avec  la  légende  0EA  KAA- 
ZOMEMH  .  que  cette  déefle 
étoit  la  principale  divinité  de 
Clazomène.  Une  autre  médaille 
préfente  la  tête  d'Augufte  avec 
ces  lettres  K A  AZCM  »  &  le 
revers  GEA  AIBIA  »  ilca  li^ 
bia  ,  la.  dée(Ee  Livie  ,  femme 
d'Augufte. 

Les  Clazoméniens  avoient  des 
bains  également  falutaires  &  ma- 
gnifiques» où  ils  rendoienc  une 
efpèce  de  culte  à  Agamemnon. 
Auprès  étoit  un  antre  qu'ils  di- 
foient  être  l'antre  de  la  mère  de 
Pyrrhus ,  &  ils  faifoient  je  ne  fçaîs 
quel  conte  de  Pyrrhus  berger  , 
dit  Paufanias. 

On  dit  que  quelques  Clazomé- 
niens ,  hommes  hardis  »  fe  trou- 
vant à  Lacédémone,  remplirent 
de  boue  &  d'ordure  les  chaires 
des  Éphores ,  deflinées  à  rendre 
la  juflice  6c  à  régler  les  affaires  de 
l'Eut.  Ces  magiftrats  affeâerenr 
de  n'en  point  paroître  oflenfés  ; 
ils  firent  Amplement  annoncer 
dans  les  rues  »  par  un  crieur  pu- 
blic ,  cette  ordonnance  véritable- 
ment laconique  :  Qa^/i  fçache 
qu'il  eft  permis  aux  Cla^^améniens 
défaire  des  fottifes* 

Entr'autres  fameux  athlètes  j 
qu'avoit  produits  Clazomène ,  on 
compte  Hérodote.  Les  Clazoïr^ 
niens  lui  firent  ériger  une  flat^ie 
à  Oly  mpïe ,  parce  qu'il  fut  le  pre- 
mier d'encr'euxi  qui  remporta  te 


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C  L 

prix  du  {{ade  fur  la  jeunefle  aux 
jeax  Olympiques. 

La  ville  -de  Ciazamène  prend 
aujourd'hui  le  nom  de  Kelifman 
dans  la  Turquie  d'Afie  ,  autre- 
ment dans  la  Nacolte. 

CLAZOMÈNES,  Cli^iomena, 
KM^e/neveit.  Prefque  tous  les  Au- 
teurs anciens  écrivent  ainfi  en 
pluriel  ce  nom»  quoiqu'il  foit  pafTé 
en  ufege  de  1  écrire  en  fingulier 
dans  notre  langue. 

CLAZOMENIENS ,  Claio^ 
menii  ,  Ky^alofxifiQi ,  peuples  ainfi 
sommés  de  la  ville  de  Clazomène. 
Voye^  Clazomène. 

ChtApE.'Çleadas,  {a)  Thé- 
bain  ,  qui  avoit  été  fait  priibnnier 
par  Alexandre ,  lor(que  ce  prince 
afliégeoit  la  ville  de  Thebes. 
Quand  elle  eut  été  prife ,  Cléade 
ayant  eu  permiilion  de  parler , 
effara  d'excufer  en  partie  la  re« 
bellion;  fautes  félon  lui,  qu'on 
devoit  plutôt  imputer  à  une  cré- 
dule &  téméraire  imprudence  , 
qu  a  une  mauvaife  volonté  &  à 
^e  perfidie  déclarée.  Il  remontra 

3 ne  fur  le  faux  bruh  de  la  mort 
'Alexandre,  faifi  avec  trop  d'a- 
vidité, ils/s'étoient  révoltés ,  non 
contre  le  Roi  >  mais  contre  fes 
facceffeurs  ;  que  quelle  que  fût 
leur  faute  ,  ils  en  avoient  été  ri- 
goureufement  punis  par  le&  maui 
extrêmes  qu'ils  avoient  foufferts  ; 

Su'il  oe  reAott  dantla  ville  qu'une 
>ible  troupe  de  femmes  ,  d'en- 
£ïn$  &  de  vieillards  ,  dont  on 
n*avoit  rien  à  cifatndre  >  6c  qui 
éroit  d'autam  plus  digne  de  corn* 

^  C*>  Juft.  L.  XI.  c.  4»  RDlh  Hift.  Anc.| 
T.  m.  p.  ^6i. 
(*)  Anuq.  cspl.  par  *p*  Bcm. 


>  Ancl 
Cl.    à»\ 


pamon,  qu'elle  n'avoit  point  eu 
de  part  à  la  révolte.  U  finiiToit  » 
en  faifant  reflbqvenir  Alexandre 
que  Thebes  ,  qui  avoit  donné 
nalHance  à  tant  de  dieux  &  à 
tant  de  héros  ,  dont  il  comptoit 
plufieurs  au  nombre  de  fes  ancê- 
tres ,  avoit  été  audî  le  berceau 
de  la  gloire  nailTante  de  Philippe 
fon  père  ,  &  lui  avoit  tenu  lieu 
comme  d'une  féconde  patrie.  Ces 
motifs  étoieot  puiflTans  ,  mais  la 
colère  du  vainqueur  prévalut ,  & 
la  ville  fut  détruite. 

CLÉAGR  A ,  CUagra ,  {b)  nom 
que  les  Anciens  donnoient  à  une 
fourchette  ou  croc  à  tirer  la  vian* 
de  du  pot. 

CLÉANAX  ,  Cleanax  , 
K  ^e  'ivoti, ,  Argien  ,  ami  particu- 
lier de  Mélanopus ,  l'ayeul  d'Ho- 
mère. Voye:^  Homère. 

Khiç^vSpoc  V  devin  qui  étoit  de  Phi*- 
galie  en  Arcadie.  S'étant  fait  chef 
des  efdaves  Argiens ,  il  entretint 
Iong-t(»ms  la  guerre ,  qui  s'étoit 
élevée  dans  Argos  entre  les  efcla- 
ves  &  les  maîtres.  Après  que 
Cléomène ,  roi  de  Lacédémone  , 
eut  défolé  plus  de  flx  cens  familles 
d'Argos,  vers  la  71.C  Olympiade, 
496  ans  avant  J.  C»,  les  efclaves 
s'emparèrent  des  biens  de  leurs 
maîtres  ,  &  en  privèrent  les  pu- 
billes.  Ceux-ci  ,  étant  venus  en 
âge  ,  chaflèrent  ces  ufurpateurs 
de  leur  patrimoine.  Cléandre  fe 
mit  alors  à  la  tête  des  efclaves; 
mais  enfin ,  le  parti  injufte  fut  le 
plusfoible^  6c  ks  légitimes  héii- 

Montf.  T.  III»  p.  lit. 
Cf)  Herod.  L.  VI.  c.  8j. 


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55^  CL 

tiers   demeurèrent  en  pofTeffion 
des  biens  qdt  leur  appartenoient, 

*  CLÉANDRE,  Cléander,  (a) 
K>f«K/^o;»  natif  de  Patarée,  po/- 
féda  pendant  fept  ans  ia  tyrannie 
de  Geie.  Au  bout  de  ce  tems-là, 
3  (ut  taé  par  un  Géléen ,  nommé 
Sibyllus»  &  il  eut  pour  fuccefleui: 
Ion  frère  Hîppocrate. 

CLÉANDRE  ,  CUander,  {b) 
Kxiur/poç  ,  neveu  du  précédent , 
étoit  fils  d'Htppocrate  ;  mais  »  il 
ne  fttccéda  point  à  Ton  père ,  Gé- 
Ion  s'étant  emparé  de  la  tyrannie 
Ibus  prétexte  de  réduira  les  babi- 
tuAsdeGeb»  qui  refufoient  d'o- 
béir à  Qéandre* 

CLÉANDRE,  CUander,  (c) 
K^ffltri^ç,  gouverneur  de  By- 
zance ,  lorfque  les  dix  mille  Grecs 
arrivèrent  dans  cette  ville.  Il  traita 
avec  beaucoup  dlionnêteté  Xé- 
SK>phon ,  qui  les  commandoît ,  & 
donna  tous  fes  foins  à  leurs  mala- 
des ,  que  le»  Byzantins  par  fon 
,  ordre  reçurent  dans  leurs  mai- 
fons, 

CLÉANDRE  ,  CUandcr  ^  (J) 
Kxfflti'//)oç  ,  lieutenant  d'Alexan- 
dre le  Grand.  Un  jour  que  ce 
prince  ,  faifant  le  fîege  de  Tyr , 
éioit  dans  une  grande  perplexité , 
ne  içachant  s*il  devoit  le  continuer 
ou  le  lever  y  Cléandre  lui  amena 
les  troupes  grecques  ,  qu'il  avoir 
padées  depuis  peu  par  mer  en  Afie. 
Il  fut  nommé  depuis  lieutenant  de 
foi  dans  la  province  de  Médie. 

It  f  étoit  encore  »  lorfqu'il  reçut 

rs-)  Herod.  L.  Vif.  c.  1^4. 
(*)  Herod,  L.  VIL  c.  155. 
(ey  Xenof  b*  p.  394.  ér  fff» 


CL 

ordre  de  tuer  Parménîon  ,  qai 
étoit  aftuellement  dans  cette  pro- 
vince. Pour  exécuter  cet  ordre  »  il 
failit  le  moment  oîi  Parménion 
lifoit  une  lettre  ;  il  loi  plongea  le 
poignard  dans  le  flanc ,  &  lui 
donna  encore  un  autre  coup  à  la 
gorge.  Quelques-uns  d'entre  ceux 

Jui  étoient  attachés  à  cet  officier 
rénéral ,  demandèrent  à  Cléandre 
qu'il  leur  fût  permis  de  lui  donner 
la  fépulture  ;  ce  qu'il  refufa  lonç- 
tems  9  craignant  d'ofFenfer  le  Roi  ; 
mais  ,  comme  ib  s'opiniltrerent  à 
le  demander ,  jugeant  qu'il  failoit 
ôter  tout  fujet  de  fédition  ,  il  leur 
permit  d'eniêveiir  le  corps ,  après 
en  avoir  fait  féparer  la  tête ,  qu'il 
envoya  à  Alexandre. 

Cléandre  9  étant  Venu  dan»  la 
fuite  à  la  cour ,  fut  bientôt  fuivi 
des  députés  de  fa  province  »  qui 
étoient  chargés^  de  l'accufer.  li 
avoit  rendu  un  graïkd  fervice  à 
Alexandre  »  en  tuant  Parménion  ; 
mais  »  ce  fervice  n'étoit  pas  capa-« 
ble  d  effacer  ou  d&  compenfer  fes 
crimes.  Car  ,  non  content  d*avoif 
défolé  les  ^milles  par  fes  brigan- 
dages ,  il  avoit  pillé  jufqu'aux 
temples  Seaux  fépulcres;  oc  les 
dames  les  plus  illuftres  pleuroient 
avec  des  larmes  de  fang  leur  pu« 
dicité  vblée.  Ce  qui  avoit  fiir- 
tout  contribué  à  rendre  Cléandre 
fort  odieux ,  c'efl  qu'après  avoir 
forcé  une  fille  de  condition  ,  il 
Tavoit  donnée  pour  concubine  à 
un  de  fes  efdaves.  Il  ne  fut  pas 
néanmoins  condamné ,  mais  feu- 
lement chargé  de  chaînes. 

(d)  Q.  Curt;  L.  IV.  c.  j.  L.  VII.  c. 
».  L.  X.  c.  i.RoU.  mtt.  Ane.  T.  UL 
pJ»g. 706*  707.  . 


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CL 

CLÉANDRE ,  Chander ,  (4) 
K>fay/^ç,  itiiniftrede  Tempereur 
Commode,  eft  un  exemple  fa- 
meux de  ce  qu'on  appelle  les 
jeux  de  la  Fortune* 

Phrygien  de  naiffance  &efclave 
de  condition ,  il  fut  vendu  dans 
ion  païs  »  &  tranfporcé  à  Rome 
pour  y  remplir  les  plus  vils  mi- 
liiftères.Étant  entré  dans  le  palais, 
^  devenu  efclavede  l'Empereur, 
il  plut  à  Commode  encore  enfant 
par  la  fociété  des  mêmes  inclina- 
tions. Il  nourrit  foigneufement  ce 
commencement  défaveur;  &  le 
jeune  Prince ,  après  la  mort  de 
ion  père ,  l'affranchit ,  le  prit  pour 
A>n.  premier  chambellan  ,  &  lui 
fit  époufer  l'une  de  Tes  concubines, 
nommée  Damoftratia.  Cléandre 
écoit  de  tous  les  pl^ifirs ,  ou  pour 
parler  plus  jufte ,  de  toute?  les  dé- 
bauches de  Commode  ;  &  ayant 
gagné  fa  confiance,  il  fut  pendant 
quelque  tems  le  rival  3e  Péren- 
nis,  &  enfin  appuyé  de  la  faâion 
des  affranchis  du  palais  ,  dont  il 
étoit  le  chef,  il  parvint  à  le  per- 
dre. 

Héritier  de  fon  pouvoir  ,  il  en 
abufa  avec  toute  l'indignité  d'une 
ame  baffe  ,  &  il  porta  dans  le  mi- 
niflère  tous  les  vices  de  la  condi- 
tion fervile.  Tout  étoit  à  vendre 
auprès  de  lui ,  les  places  des  Sé- 
nateurs ,  les  commandemens  des 
armées  ,  les  gouvernemens  des 
provinces  ,  les  intendances  ;  6c  il 
ie  faifoit  payer  fort  cher.  Il  y  eut 
des  acheteurs  ,  que  la  fureur  de 
l'ambition  engagea  à  fe  dépouiller 


CL  3î^ 

de  tout  ce  qu'ils  poffédolent  pour 
devenir  Sénateurs.  De  ce  nombre 
fut  JmHus  Solo,  homme  inconnu  , 
de  qui  on  difoit ,  que  par  la  con- 
fifcation  de  fes  biens,  il  étoit  par- 
venu à  fe  faire  reléguer  dans  le 
Sénat.  Ni  le  mérite  ,  ni  la  naif- 
fance n'étoient  comptés  pour  rien. 
Des  affranchis  furent  faits  Séna- 
teurs ,  ôc  même  mis  au  rang  des 
Patriciens  ;  titre  ju(qu*alors  réfervé 
aux  premières  mailbns  de  Rome. 
Cléandre ,  pour  n^ultiplier  fes 
gains ,  multiplioit  les  charges  ,  & 
il  nomma  ce  qui  ne  s*étoit  jamais 
vu ,  vingt-cinq  Confuls  pour  une 
feule  année.  Il  ne  refpeâoit  ni  les 
loix,ni  les  chofes  jugées*  Quicon. 
queavoitde  l'argent  à  donner, 
étoit  fur  d'être  abfbus,  quelque 
crime  qu*il  eût  commis  ;  ou  réin- 
tégré ,  s'il  avoit  fubi  précédem- 
ment la  condamnation,  &  fouvent 
même  avec  un  accroiffement  de 
dignité  ÔC  de  fplendeur.  Nul  ci- 
toyen ne  pou  voit  fe  promettre  de 
conferver  ni  fes  biens ,  ni  fa  vie 
même  j  s'il  avoit  un  ennemi  ric^e9 
qui  voulût  donner  de  l'argent 
pour  le  perdre.  Condamnation  à 
l'exil ,  à  la  mort ,  à  divers  genres 
de  fupplices  ,  confîfcation,  priva- 
tion de  fépulture  «  tout  s'achetoit» 
il  ne  s'agiffoit  que  du  prix. 

Le  favori  amaffa,par  ces  cruels 
&  abominables  trafics ,  des  tréfors 
immenfes  ;  ôc  pour  s'affurer  de  la 
*  poffeffion  de  fa  proie  ,  il  la  parta- 
geoit  avec  les  concubines  du 
Prince,  &  avec  le  Prince  lui- 
même.  Au  refte ,  il  ufoit  magni- 


(O  Dîo.  Caff.  pag.  8a  i.  é*  ff^*  Cr6r.  Hift.  des  Enip.  Tom.  IV.  p.  485  ,4 

490.  ér/wv. 


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3î4  C  L 

fiqu^ment  de  (es  richeffes ,  fomp- 
tueuj(  en  batîmens,  non  feulement 
pour  fon  uiage ,  mais  pour  la 
commodité  6l  la  décoration  de 
plufieurs  villes.  Il  bâtit  dans  Ro- 
me des  thermes  ,  qu'il  appella 
Commodiennes  du  nom  de  Ton 
maître. 

Il  ne  prit  pas  d*abord  la  charge 
de  Préfet  du  Prétoire  ,  trop  dif- 
proportionnée  à  la  baffeife  de  fa 
condition  ;  mais  »  il  %*y  fraya  la 
voie  en  la  dégradant ,  &-l*avilif- 
fant  par  de  fréquentes  mutations. 
U  faifoit  &  défaifoit  \e%  Préfets 
du  Prétoire  à  fa  volonté.  Il  y  en 
eut  un  de  cinq  jours  ,  un  autre  de 
ûx  heures.  Enfin ,  lorfque  Cléan- 
dre  crut  avoir  mis  cette  puifTame 
charge  à  fa  portée ,  il  s  en  revêtit, 
en  (e  donnant  deux  Collègues, 
qui  étoient  (es  créatures ,  ai  en* 
fièrement  dans  fa  dépendance. 
Alors  on  vie  pour  la  première  fois 
trois  Préfets  du  Prétoire. 

Avant  que  Cléandre  fût  parve- 
nu à  ce  haut  grade  ,  un  des  pre- 
miers Sénateurs ,  beau- frère  de 
Commode ,  AntiAius  Burrus  ,  ofa 
élever  fa  voix  contre  les  excès 
énormes  de  l'infolent  affranchi,  6c 
porter  (es  plaintes  à  l'Empereur , 
de  Tabus  que  Ton  faifoit  de  fon 
autorité  &  de  fon  nom.  Cléandre 
retourna  Tattaque  contre  (on  ag- 
gredeur;  il  Taccufa  de  projets 
ambitieux  ,  de  delTein  formé  d'u- 
furper  le  trône.  Antiflius  Burrus  ' 
fuccomba ,  fut  mis  à  mort ,  &  en- 
traîna dans  fon  infortune  ceux  qui 
eurent  le  courage  de  prendre  (a 
défenfe.  Une  autre  «viâime  non 
moins  illufire  de  la  tyrannie  de 
Cléandre  I  fut  Arrius  Antoninus , 


CL 

dont  le  nom  iêmble  annoncer  one 
parenté  avec  Commode.  Il  fut  fa- 
crifié  par  le  Préfet  du  Prétoire  à 
la  vengeance  d'un  certain  Attale , 
qu'il  avoit  condamné  étant  Pro- 
conful  d'Aiie. 

Arrius  Antc^ninus  étoit  tellement 
eflimé  dans  Rc^me ,  que  Lampri- 
de  attribue  à  Tnidignation  que 
caufa  fa  mort  injufèe  6c  cruelle , 
le  fbulévement  du  peuple  qui 
amena  la  chute  de  Cléandre. 
Dion  Caffius  &  Hérodien  don- 
nent pour  caufede  cefoulévement 
une  famine  violente  ;  intérêt  tout 
autrenient  puiffant  fur  les  efprits 
d'une  mtiltitude.  Ces  deux  récits 
peuvent  fe  concilier.  U  efl  très- 
poffible  que  deux  motifs  différens 
aient  concouru  à  un  même  effet. 

Quoi  qu'il  en  foit ,  une  maladie 
contagieufe  qui  avoit  précédé  ,  Sc 
ravagé  pendant  long-tems  Rome 
&  rftalie ,  produifit  la  famine  par 
une  fuite  naturelle  ;  &  la  malice 
des  hommes  augmenta  la  calami- 
té. Ici  nos  deux  adteurs  Grecs  (e 
partagent.  Suivant  Dion  Caffius, 
ce  fut  l'intendant  des  vivres ,  Pa- 
pirius  Dionyiius,  qui ,  au  lieu  de 
remédier  au  mal ,  affçâa  de  l'ag- 
graver ,  dans  le  deffein  de  perdre 
Cléandre  9  en  faifant  retomber  fur 
lui  la  haine  de  la  mifère  publique. 
Hérodien  charge  de  tout  le  feul 
Cléandre.  Il  dit  que  ce  favori , 
enivré  de  fa  fortune ,  donna  l'eilbr 
à  fes  défirs  ;  &  ne  voyant  que 
l'Empereur  au-deflus  de  lui,  pro- 
jetta  de  le  détrôner  6c  d'ufurper 
fa  place  ;  que  dans  cet  efprit  > 
ayant  fait  de  grands  amas  d'ar- 
gent &  de  bled,  il  accrut  à  deffein 
la  cherté  6c  la  difecte  ,  afin  qqje 


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CL 

les  recours  qu*U  donneroit  enfuîte 
par  Tes  l^rgeffes ,  fuflent  d'autant 
mieux  reçus  ,  &  lui  gagnaflenc  à 
l'ioftam  tous  les  cœurs. 

S'il  avoit  cette  penfée ,  elle  lui 
réuffit  très-maL  Le  peuple  >  qui 
le  haiflbh  depuis  long-tems^  à  cau- 
ù  de  fon  iofatiaUe  avidité ,  s'en 

Î>rit  à  lui ,  des  maux  qu'il  fouf- 
iroit.  Dans  les  théâtres  »  dans  les 
jeux  y  il  $*éleva  des<:lameurs  me- 
naçantes contre  le  minifire ,  qui 
affamoit  U  ville  de  Rome.  Dion 
Caflius  raconte  ^  à  ce  fujet  »  une 
fcène  fingulière,  &  qu'il  habille 
prefqu'en  merveille ,  mais  dont  les 
reflbns  font  bien  aifés  à  deviner. 
Il  nous  débite  qu'au  milieu  dune 
courfe  de  chariots  qui  s'exécutoit 
dans  le  cirque  y  une  troupe  d'en- 
fans  tout  d'un  coup  s'avança , 
ayant  à  fa  tête  une  jeune  fille  d'une 
grande  taille  &  d'un  regard  fier 
i&  audacieux.  On  jugea ,  ajoute- 
t^il  ,  par  révénement  qui  fui  vit , 
qqe  ce  devoit  être  quelque  démon, 
quelque  génie,  il  étoit  bien  plus 
umple  de  penfer,  &  Dion  Caf- 
iius  eût  dû  le  dire  ,  qu'une  main 
habile  &  intrigante  taifoit  jouer 
cette  machine,  pour  ameuter  le 
peuple  déjà  très-mécontent,  & 
porté  à  la  fédition. 

Ce  chœur  d'enfans  élevé  la 
VoiX|  poulie  des  cris,  fouhaitant 
mille  profpérités  à  Commode  ;  & 
faifant  des  imprécations  contre 
Cléandre.  Ce  fut  un  fignal  pour 
toute  i'aflemblée.  On  répète  les 
mêmes  cris  ,  on  fe  levé ,  on  quit- 
te le  fpeâacle  ,  on  court  en  foule 
au  lieu  oii  Commode  fe  tenoit 
renfermé,  ne  fongeant  qu'à  fes 
plaifirs ,  pendant  que  la  ville  étoit 


C  L  3Î5 

enfeu.Cétoit  une  grande  &  vaûc 
maifon  dans  un  des  fauxbourgs  de 
Rome.  U  ne  fut  pas  poiOble  à  i» 
muhitude  de  pénétrer  jufqti'à 
l'Empereur.  Cléandre  ,  qui  ob^ 
doit  toutes  les  avenues ,  empêcha 
qu'on  ne  l'avertit  de  tout  ce  qui  fe 
paffoit  ;  &  il  fit  ibrtir  fur  cette 
troupe  fans  armes  la  cavalerie 
Prétorienne ,  qui  en  bleHa  8c  ea 
tua  plufieurs,en  foula  d'autres  (ous 
les  pieds  des'chevaux.  Le  peuple 
fi  cruellement  m^ahraité  s'etmait 
en  défordre  jufqu'aux  portes  de  la 
ville ,  mais  ne  le  rendit  pas  ;  &  là 
ayant  reçu  un  puiflant  renfort  par 
la  jonâion  des  cohortes  de  la  ville:, 
qu'une  ancienne  jalpufie  difpofoit 
à  prendre  parti  contre  les  Préto- 
riens, il  renouvelle  le  combat  » 
dont  la  fortune  fe  balance ,  en- 
forte  qu'il  périflbit  beaucoup  de 
monde  de  part  &  d'autre. 

Dans  un  fi  grand  mal ,  pendant* 
qu'une  efpèce  de  guerre  civile 
inondoît  Rome  de  fang,  peribnne 
n'ofoit  en  donner  avis  à  Commo* 
de  ,  tant  le  miniftre  étoit  redouté. 
Enfin ,  l'extrémité  du  péril  en- 
hardit Fadilla  ,  fœur  de  Commo- 
de ,  fi  nous  en  croyons  Hérodieii, 
ou  Marcia  fa  concubine ,  fi  nous 
aimons  mieux  nous  en  rapportera 
Dion  Caffius.  L'une  ou  l'autre , 
ayant  les  cheveux  épars  ,  &  avec 
tous  les  fignes  de  la  plus  vive 
confiernation ,  vint  fe  jetter  aux 
pied»  de  Commode,  Sl  lui  repré- 
lénta  le  danger  qu'il  couroic ,  les 
vues  ambitieufes  &  criminelles  de 
Cléandre  ,  6c  la  néceffit^^  de  fa- 
crifier  ce  miférable  efclave  à  la 
haine  de  la  multitude ,  6c  à  fa 
propre   fureté.  Commode  étoit 


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33^  CL 

une  ame  timide ,  fur  qui  la  peur 
ponvoit  beaucoup.  EfFrayé  du  dif- 
cours  i  foit  de  Fadilla  ,  foit  de 
Malrcia  ,  il  n'héfita  pas  ;  &  ayant 
mandé  Cléandre,  il  lui  fit  couper 
la  tête  en  fa  préfence.  On  attacha 
cette  tête  au  bout  d'une  pique ,  & 
on  en  donna  le  doux  6c  agréable 
fpeâade  au  peuple  irrité.  Dans  le 
moment ,  tout  le  tumulte  ceiTa  »  le 
peuple  étant  fatisfait. 

Toutes  les  haines  fe  réunirent 
contrq  la  famille  &  les  créatures 
de  cet  indigne  miniftre.  Deux  en- 
fans  mâles  qu'il  avoit,  &  dont  l'un 
encore  en  bas-  âge  étoit  élevé  fur 
les  genoux  de  Commode  ,  furent 
malTacrés  ;  on  extermina  tous  fes 
amis,  toutes  fes  liaifons>  6c  en 
particulier  un  grand  nombre  d'af- 
franchis du  palais  ;  &  leurs  corps 
outragés  en  mille  manières ,  traî- 
nés avec  des  crocs  dans  les  rues  , 
I  furent  jettes  dans  les  égoûts. 

CLÉASOR,  Cleanor,  (a) 
K>tivù}{*  Il  y  avoit  deux  officiers 
de  ce  nom  dans  Farmée  des  dix 
«lille  Grecs.  L'un  étoit  d'Orcho- 
mène  6t  l'autre  d'Arcadie.  Xé- 
nophon  fait  mention  de  ces  deux 
officiers. 

CLÉANTHE ,  CUantbes ,  {b) 
KAf«»6Hç  «  philofophe  Stoïcien  , 
Êls  de  Phanias ,  naquit  à  Aiïus 
dans  la  Troade.  Il  floriffoit  envi- 
ron 240  ans  avant  TÉre  Chrétien- 
S3e.  Il  s*adonna  d'abord  à  l'athléti- 
que ;  mais  ,  dans  un  voyage  qu'il 
6t  à  Athènes  ,  il  fe  mit  au  nombre 
des  difciplcs  de  Zenon ,  &  s'ap- 

(a\  Xenoph.  pag.  \%%  ,  398. 

{h)  Strab.  p.  610.  Suid.  1. 1.  p.  1467. 
CicéT.  Acad.  Queft.  L.  IV.  c.  it6.  de 
Finib.  Bon.  &  Mal.  L.  II.  c.  69.  L.  IV. 


CL 

pliqoa  entièrement  à  la  phîlofo- 
phie.  La  grande  affiduité  qu'il 
avoit  au  travail ,  lui  fit  donner  le 
nom  d'Hercule.  , 

Il-n*avoit  que  quatre  dragmes 
ou  environ  quinze  fols  ,  quand  il 
entra  à  Athènes.  Il  s'y  rendit  fort 
recommandable  par  la  patience 
courageufe  avec  laquelle  il  foûte- 
noit  les  plus  durs  &  les  plus  péni- 
bles travaux.  Il  padoit  la  nuit  pref- 
cju'entière  à  puifer  de  l'eau  pour  un 
jardinier ,afin  d'avoir  de  quoi  vivre^ 
&  de  pouvoir  s'appliquer  à  l'étude 
de  la  philofophie  pendant  le  jour* 
Cité  devant  les  juges  de  l'Aréopa- 
ge, pour  rendre  compte,  félon 
que  Tordonnoit  une  loi  de  Solqn , 
de  quoi  il  vivoit ,  il  produisit  en 
témoignage  lé  jardinier,  &  fans 
doute  (qs  propres  mains  endurcies 
par  le  travail ,  &  pleines  de  callo- 
fîtes.  Selon  quelques-uns ,  il  pro- 
duiHt  auffi  une  femme  ,  dont  il 
paîtriiToit  le  pain.  Sur  la  déclara- 
tion de  ces  deux  témoins  ,  il  fut 
renvoyé  abfous.  Les  juges  ^  ravis 
en  admiration  ,  ordonnèrent  qu'- 
on lui  fournît  du  tréfor  public ,  dix 
mines,  c'eft-à-dire ,  iix  cens  livres. 
Zenon  lui  défendit  de  les  accep- 
ter ;  tant  la  pauvreté  étoit  en  hon- 
neur parmi  ces  Philofophes. 

On  dit  que  Cléanthe  écrivoit 
fur  des  tuiles  6c  fur  des  os  de 
bœufs  y  ce  qu'il  avoit  appris  de 
Zenon  ,  parce  qu'il  n'avoit  point 
d'argent  pour  acheter  des  tablet- 
tes. Cléanthe  fuccéda^à  Zenon,  & 
eut  pour  difciples  le  roi  Antigo- 

c.  7.  Roll.  Hift.  Ane.  T.  VI.  pap.  44s» 
446.  Mém.  de  PAcad.  des  Infcript.  & 
Bell.  Lcti.  Tom.  IX.  pag.  1.  T.  X.  p.  80. 
T.XVMI.  p.   109. 

DUS; 


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CL 

Bus\  &  Chryfippe  aui  fut  fofi 
fucceffeur.  U  étoit  déjà  fort  âgé  > 
lorfque  fa  gencive  s'enfla  &  (e 
pourrit  ;  il  fut  deux  joars  fans 
manger ,  par  ordonnance  des  mé- 
decins f  ce  qui  lui  rendit  la  famé  ; 
de  forte  qu'il  auroit  pu  reprendre 
fa  première  manière  de  vivre. 
Mais ,  il  ne  voulut  plus  prendre 
de  nourriture ,  difant  qu'il  avoit  ^ 
achevé  fa  carrière  ,  &  il  fe  laiiTa 
mourir  de  faim  à  l'âge  de  ioixame- 
dix  ans. 

Diogène  Laerce  cite  plufieurs 
Ouvrages,  que  Cléanthe  avoit 
compoies  >  dont  nous  avons  enco- 
re quelques  lambeaux  dans  Sto- 
bée  &  dans  les  Str ornâtes  de  Saint 
Clément  d'Alexandrie. 

Cléanthe  avoit  naturellement 
Tefprit  pefant  &  tardif;  mais ,  il 
furmonta  ce  défaut  par  une  appli- 
cation opiniâtre  au  travail.  L'é- 
lo^ence  n'étoit  pas  fon  talent.  Il 
s'avifa  pourtant  de  icompofer  une 
rhétorique  ,  auffi-bien  que  Chry- 
fippe ;  mais  f  l'un  &  l'autre  avec 
fi  peu  de  fuccès ,  que  fi  l'on  en 
croit  Cicéron  ,  bon  Juge  certaine- 
ment en  cette  matière ,  ces  ou- 
vrages n'étoient  propres  qu'à 
rendre  un  homme  muet. 

On  range  Cléanthe  au  nombre 
des  Philolophes  qui  prétendoient 
gue  le  feu ,  devenu  plus  fort ,  fub- 
jugueroit  un  jour  les  autres  élé- 
mens;  que  l'univers  feroit  confumé, 
&  que  de  (es  cendres  pour  ainfi 
dire ,  il  en  renaitroit  un  autre  qui 

(s)  Plut.  T.  I.  p.  79|. 

(h)  Lucian.  T.  II.  p.  846  ,  854. 

(e)  Xenoph.  p.  364. 

idj  Pauf.  p.  374. 

{•)  Diod.  Sicul.  pag.  357 ,  ^66  >  584 , 

Tom.  XI. 


.      .        GL  337 

lui  feroît  entièrement  femblable. 

CLÉANTHE,  CUanthes ,{a) 
KAe<er6Mç  9  affranchi  de  Catoil 
d'U  tique,  s'étoit  rendu  habile  dan« 
la  médecine. 

CLtMnmS, CUanthis,{b) 
Khioa^k  ,  fille  d'Arifténete  ,  tut 
mariée  au  fils  du  banqnier  Eucri* 
te.  Le' repas,  donné  à  l'occafion 
de  ce  mariage,  eft  le  banquet  de 
Lucien  ,  appelle  Siuffi  les  Lapitbes^ 
Pendant  qu'on  étoit  à  table,  1« 
cynique  Alcidamas  ,  ayant  de- 
mandé le  nom  de  la  mariée,&s'é-^ 
tant  fait  faire  filence,  tourna  la 
vue  du  côté  des  femmes  ,  &^  dit  : 
Je  bots  à  toi  ,  CUanthis  ,  au  nom 
d* Hercule  notre  patron;  &  comme 
tout  le  monde  (e  fut  pris  à  rire:^ 
Quelle  impertinence  ,  dit- il ,  de  f(t 
moquer  de  ce  que  j'ai  bu  à  elle ,  au 
nom  d*  Hercule  F  Si  elle  ne  méfait 
raifon  ^  &  ne  prend  le  verre  de  ma 
main ,  elle  ne  fera  pas  un  enfant 
robufte  &  vigoureux  comme  moi  , 
tant  de  corps  que  d'efprit. 

CLÉARATUS  ,  Clearatus; 
K^^«fO'^^;,  (c)  officier  dans  l'ar- 
mée des  dix  mille  Grecs  ,  fut  tué 
dans  une  expédition  qu'il  s'étoit 
avifé  de  faire  de  fon  chef  ,  &  cela 
contre  toute  juftice. 

CLÉARESTE  ,  Cleareftus  ^ 
K^saff^Toç»  (ji)  fameux  Athlète, 
qui  fut  vainqueur  au  pentathle* 
Cette  viéloire  lui  mérita  l'honneut 
d'une  flatue  à  Olympie* 

CLÉARQUE,  Clearcbus  i 
K/éotpx^i^    (tf)  célèbre  capitaine 

401 .  &  fiq»  riut.  T.  I.  p.  10x4.  &  fetfà 
Xenoph.  p.  «44.  &  fee[,  Roll.  Hift.  Ane* 
T.  II.  p.  556.  é*  fitiv.  Mém.  de  TAcad. 
des  Infcript.  &  Bell.  Lctt,  Tom.*  XI Vt 
p.  »74'  &  /«iv» 


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CL 

jacédénfTonien  ,  fils  de  Ramphius. 
Il  étoit  habile >  expérimenté  ,  & 
plein  de  courage.  L'an  466  avant 
rÉre  Chrétienne ,  Callicratidès 
fur  le  point  de  livrer  une  bataille , 
oii>  félon  la  prédiâion  des  devins» 
H  de  voit  perdre  la  vie  :  Jt  nomme 
des  àpréfent ,  dit -il  ^  pour  prendre 
ma  place  au  moment  que  je  ferai 
tué  y  CUarque  ,  homme  connu  de 
tout  le  monde  ,  pour  très-expéri-' 
mente  dans  la  guerre. 

Trois  ans  après ,  les  Byzantins, 
divifés  entr'eur ,  &  ne  pouvant 
terminer  leurs  querelles  inteftines  » 
demandèrent  un  chef  à  Lacédé- 
mohe.  Les  Spartiates  leur  en- 
voyèrent Cléarque.  Dès  qu'on 
eut  dépofé  toute  l'autorité  entre 
fes  mains ,  il  fe  fit  une  garde  de 
Soudoyés  ,  5c  changea  en  tyran-' 
nie  la  fonâionde  chefôc  d'arbitre 
qu'on  lui  avoit  confiée.  Il  com- 
mença par  faire  égorger  tous  les 
Magiflra;s  adembles  par  fon  ordre, 
fous  le  prétexte  d'un  feftin  de  re- 
ligion. La  ville  fe  trouvant  par-là 
ians  aucune  forme  de  gouverne- 
ment ni  de  police  ,  il  fit  étrangler 
avec  de  gi'offies  cordes  trente  des 
plus  conhdérables  ,  &  s'appropHa 
leurs  biens.  Il  choifit  les  plus  ri- 
ches dans  tout  le  refte  ;  &  leur 
imputant  des  crimes  imaginaires  , 
il  condamna  les  uns  à  la  mort ,  ôc 
les  autres  au  bannifTement.  Se 
voyant  bien  des  tréfors  par  cette 
voie ,  il  augmenta  fa  garde  &  af- 
fermit fon  autorité.  Cependant ,  le 
bruit  de  fes  cruautés  &  du  pouvoir 
tyrannique  qu'il  exerçoit ,  s'étant 
bien>tôt  répandu ,  les  Lacédémo- 
;iiens4es  premiers  lui  envoyèrent 
des  députés  pour  lui  confeiller  de 


CL 

fe  démettre  lui  -  même  ;  maïs  l 
comme  il  né  fe  rendit  pas  à  cette 
propofition,  on  fit  marcher  contre 
lui  des  troupes ,  à  la  tête  defquel- 
les  on  mit  Fanthoïdas. 

Dès  que  Cléarque  en  eut  la 
nouvelle ,  il  fe  retira  avec  foa 
efcorte  à  Sélymbrie  ,  qui  étoit 
auffi  fous  fa  domination.  Il  ne 
doutoit  pas  que  Byzance  ,  qu'il 
avoit  fi  indignement  traitée,  nefe 
joignît  aux  Lacédémoniens  pour 
le  perdre.  C'eft  pour  cela  que  Sé- 
lymbrie lui  paroifTant  une  place 
plus  forte ,  il  s'y  étoit  tranfporté 
avec  fes  troupes  &  fon  argent. 
Dès  qu'il  fçiit  que  les  Lacédémo- 
niens approchoient  ,  il  alla  au- 
devant  d'eux  jufqu'à  un  endroit 
nommé  le  Paffage  ,  oh  il  livra  le 
combat  à  Panthoidas.  Le  ifuccès 
en  fut  incertain  quelque  tems  ; 
mais ,  enfin  ,  la  valeur  des  Lacé- 
démoniens l'emporta ,  &  l'efcorte 
du  tyran  fut  taillée  en  pièces. 
Cléarque,  avec  le  peu  d'hommes 
qui  lui  reftoient,  fe  fauva  dans 
Sélymbrie ,  oîi  il  fut  affiégé.  Mais» 
s'y  voyant  bien-tôt  en  danger  ,  il 
en  fortit  la  nuit ,  6c  s'enfuit  par 
mer  dans  l'Ionie.  Là  s'étant  atta- 
ché à  Cyrus  le  jeune  ,  frère  d'Ar- 
taxerxe ,  il  parvint  à  avoir  le 
commandement  de  fon  armée  ; 
car ,  Cyrus  nommé  chef  des  Satra- 
pes maritimes,  ôc  qui> étoit  plein 
de  courage  &  d'ambition  ,  fort- 
geoit  à  porter  la  guerre  à  fon  frè- 
re. Âinli,  trouvant  dans  Cléarque 
toute  la  hardiefle  qui  lui  conve- 
noit ,  il  lui  confia  de  grofles  fom- 
mes  pour  lever  le  plus  qu'il  pour- 
roit  de  foldats  étrangers;  &  il 
crut  avec  raifon  avoir  rencontré 


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CL 

eti  lui  un  homme  très- propre  à  lé 
féconder  dans  fes  entreprifes. 

Cléaraue  employa  mille  Dari- 
ques  à  lever  des  troupes ,  ôc  fit 
d'abord  la  gierre  aux  Thraces , 
qui  habitoieiH  rHellefpont.  Il  alla 
enfuite  joindre  Cy  rus,  qui  ne  tarda 
pas  à  Te  mettre  en  chemin  pour 
marcher  contre  fon  frère.  Quand 
on  fat  arrivé  à  Tarfe.lesGrecs  re- 
fuferentde  paiTer  outre^fe  doutant 
bien  qu'on   les  menoit  contre  le 
Roi,  &  criant  hautement  qu'ils  ne 
s'étoient  point  enrôlés  à  cette  con- 
dition. Cléarque,quiles  comman- 
doit,eut  befoin  de  toute  fon  adrefle 
&  de  toute  fon  habileté  pour  étouf> 
fer  ce  mouvement  dans  fa  naiflan- 
ce,Il  avoit  d'abord  voulu  employer 
la  voie  de  Tautorité  &  de  la  force, 
qui  lui  avoit  fort  mal  réuffi.  Il 
cefla  de  s'oppofer  de  front  à  leur 
deffein,    il   parut   même  entrer 
dans  leurs  vues ,  &  les  appuier  de 
fon  approbation  &  de  fon  ctédit. 
Il  déclara  ouvertentent  qu'il  ne  fe 
fépareroit  point  d'eux  ,   &  leur 
conleilla  de  députer  vers  le  Prin- 
ce ,  pour  fçavoir  de  lui  -  même 
conrre  qui  il  prétendoit  les  mener, 
afin  de  le  fuivre  volontairement  (i 
le  parti  leur  plaifoit  ;  finon  de  lui 
demander  la  permiffion  de  fe  re- 
tirer. Par  ce  détour  adroit ,  il  ap- 
paifa  le  tumulte  ,  &  ramena  les 
efprîts.  Il  fut  député  lui  -  même 
avec  quelques  officiers.  Cyrus  , 
qu'il  avoit  averti  de  tout  fecréte- 
ment ,  répondit  qu'il  vouloit  aller 
combattre  Abrocomas  fon  enne- 
mi ,  qui  étoit  à  douze  journées 
delà  fur  l'Euphrate.  Quand  on 
leur  eut  rapporté  cette  réponfe  , 
quoiqu'ils  viffent  bien  où  c>n  lés 


ftienoit^  ils  réfolurent  de  marcher^ 
&  demandèrent  feulement  qu'on 
augmentât  leur  paye.  Cyrus  ,  au 
lieu  d'un  Darique  qu'il  donnoit  pat 
mois  à  chaque  foldat ,  leur  en 
promit  un  6i  demi. 

La  bataille  fe  donna  à  Cunaxa^ 
&  Cyrus  y  perdit  la  vie.  Quand 
Cléarque  vit  le  centre  &  les  ailes 
de  l'armée  en  défordre  ,  il  fe  dif- 
pofa  à  la  retraite,  ne  voulant  point 
attirer  fur  les  Grecs  toute  l'armée 
des  Barbares  qui  pouvoir  les  ex- 
terminer. Cependant ,  les  troupes 
du  Roi  ayant  diffipé  tout  ce  qui 
s'oppofoit  à  elles,  pillèrent  d'abord 
la  tente  de  Cyrus;  &  la  nuit  étant 
venue  ,  elles  fe  jetterent  en  foule 
fur  les  Grecs.  Ceux-ci  les  reçurent 
avec  tant  de  courage ,  que  les  Bar- 
bares eux-mêmes  ne  réfifterent 
que  peu  de  tems  ;  &  furmontés 
par  la  valeur  6c  par  l'expérience 
des  Grecs  ,  ils  furent  mis  eux-mê- 
mes en  fuite;  de  forte  que  les 
troupes  de  Cléarque  qui  tes  pour- 
faivoient ,  en  ayant  tué  encore  urt 
grand  nombre ,  &  fe  retirant  avant 
qu'il  fût*  jour,  drelTerent  un  tro- 
phée f  &  furent  rentrées  dansleuif 
camp  dès  la  féconde  veille  de  1$ 
nuité 

Le  lendemain  ,  Cléarque  re- 
conduifit  les  Grecs  dans  fâ  pre- 
mière retraite  ,  où  "tous  les  autres 
alliés  s'étant  rendus ,  ils  délibère^ 
rent  enfemble  ,  s'ils  fe  rapproche- 
roient  de  la  mer  ,  pour  retourner 
dans  leur  patrie.  Ils  convinrent 
d'abord  de  ne  point  reprendre  la 
route  qu'ils  avoient  tenue  en  vei- 
nant ,  d'autant  plus  qu'une  partie 
de  cette  route  étant  extrêmement 
défsrte,  &  l'autre  occupée  par  ks 

Y  «i 


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54o       .CL 

ennemb ,  ils  auroient  beaucoup 
de  peine  à  y  trouver  leur  rubfii- 
tance.  Us  réfolurent  donc  de  ga- 

f^ner  la  Paphiagonie  ,  aé  nord  de 
'Afie  mineure,  Ôc  ils  fe  mirent 
auf&tôt  en  marche  »  mais  à  pe- 
tites journées ,  comme  ayant  be- 
foin  de  chercher  en  même  tems 
des  vivres.  Cependant ,  Artaxer- 
ze  ayant  appris  que  Tes  ennemis  fe 
retiroient»  &  prenant  leur  retraite 
pour  une  fuite ,  fe  mit  inceflam- 
ment  à  leur  queue  avec  un  grand 
nombre  de  troupes  ;  &  comme  ils 
n*alloient  pas  vite ,  il  les  eut  bien- 
tôt atteints,  Scfe  trouva  dès -la 
.première  nuit  auprès  de  leur  camp. 
Dès  qu'il  apperçut  à  la  pointe  du 
jour  que  les  Grecs  fe  raneeoient 
en  bataille ,  il  leur  envoya  des  dé- 
putés ,  par  lefquels  il  leur  fit  dire  , 
avant  coûtes  chofes ,  qu'il  leur 
donnoit  trois  jours  de  trêve.  Dans 
cet  intervalle,  il  confentit  lui- 
même  de  leur  livrer  un  pâiTage  fur 
à  travers  fes  provinces ,  de  leur 
donner  des  guides  pour  les  con- 
duire jufqu*à  la  mer ,  &  de  leur 
faciliter  Tachât  des  provifions  dont 
ils  auroient  befoin  fur  la  route.  Il 
a(fura  en  particulier  tous  les  fol- 
dats  de  Cléarque  6cd*Aridée,qu*il 
ne  leur  feroic  fait  aucun  tort  là- 
deflus.  Les  uns  &  les  autres  re- 
prirent leur  marche ,  &  Artaxer- 
xe  ramena  à  Babylone  ^  l'armée 
qui  Tavoit  accompagné. 

Cependant  ^  ce  Prince  voyoit 
avec  peine  les  Grecs  retourner 
dans  leur  patrie.  TifFapherne ,  qui 
s'en  apperçut  aifément>  lui  propo- 
fa  de  les  faire  tous  périr  ;  s*il  lui 
donnoit  des  forces  confidérables 
pour  l'exécution  de  ce  deflein.  Le 


CL 

Roi  reçut  avec  plaifir  cette  pro^ 
pofition  ,  &  lui  permit  de  ckoifir 
dans  tout  le  corps  de  fa  milice  ^ 
ceux  qu'il  jugeroit  tes  plus  capa- 
bles d'exécuter  cette  entreprife. 
^  Dès  que  TifFapherne  fe  fut  pour- 
vu de  ce  fecours ,  il  fe  hâta  d'at- 
teindre l'armée  des  Grecs  ,  &  par- 
vint en  effet  à  camper  prè^  d'eux. 
De-li  il  envoya  inviter  Cléarque 
à  venir  jufques  dans  fa  tente ,  ac- 
compagné de  tous  les  officiers  fes 
camarades,  parce  qu'il  avoh  à 
letir  faire  part  de  quelque  chofe 

Îui  concemoit  l'intérêt  commun. 
Iléarque  accepta  cette  offre»&  fut 
fuivi ,  outre  fes  officiers ,  de  deux 
cens  hommes  qui  voulurent  l'ef- 
corter,&  qu'on  admit  dans  le  camp 
des  Perfçs  comme  une  garde  légiti- 
me, TifTapherne  reçut  dans  fa  ten- 
te les  officiers  ;  mais,  tout  lereflè 
demeura  au  dehors.  Au  bout  de 
quelque  tems ,  Tiflàpherne  ayant 
fait  élever  au-deffus  de  &  tente 
parle  dedans,* un  étendard  rouge 
comme  fignal ,  il  fit  faifir  les  om- 
ciers  Grecs ,  pendant  qu'on  égor- 
geoit  au  dehors,  par  fon  ordre  » 
l'efcorte  qui  les  atteadoit,&  qu'on 
aifaffinoit  de  même  les  autres  fol- 
dats ,  qui ,  fur  la  foi  publique  » 
s'étoient  répandus  dans  le  marché, 
pour  y  faire  leurs  provifions,  U 
n'en  échappa  qu'un  feul  qui  alla 
porter  au  camp  la  nouvelle  de 
cette  trahifon.  Cléarque  fut  mené, 
avec  les  autres  officiers  ,  vers 
le  Roi ,  qui  leur  fit  trancher  la 
tête. 

Ctéfias  ,  au  rapport  de  Plutar- 
que ,  écrit  que  Cléarque ,  après 
u'il  eut  été  arrêté ,  le  pria  de  lui 
ire  recouvrer  un  peigne  ;  que 


fa 


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CL 

rayant  obtenu  ,  &  s'en  étant  pei- 
gné 9  il  y  prit  tant  de  plaifir  ,  que 
poar  lui  marquer  fa  reconnoiflan- 
ce ,  il  lui  donna  Ton  anneau ,  afin 
que  s'il  alloit  un  jour  à  Lacédémo- 
ne  9  cet  anneau  lui  fervit  auprès  de 
fesamis  &  de  les  parens,de  (igné  & 
de  gage  de  Tamitié  qu*ii  avoit  eue 
pour  mi  ;  &  que  fur  la  pierre  de 
cet  anneau  étoit  gravée  une  danfe 
de  Caryatides.  U  ajoute  que  tous 
Jes  vivres  qu*on  envoyoit  à  Cléar- 
que,  étoient  enlevés  par  les  autres 
prifonniers  Grecs,  qui  n'en  fai- 
foient  qu'une  très -petite  part  à 
Cléarque  ;  que  lui  Ctéfias  remé- 
liia  à  cela ,  en  fiifant  enforte  qu'on 
en  envoyât  une  plus  grande  quan- 
tité à  Cléarque»  &  qu'on  en  donnât 
d*autres  en  particulier  aux  autres 
pnfonniers  urecs  i  qu'il  lui  rendit 
ce  fervice^  &  hii  fournit  ces  vi- 
vres du  confentement  &  par  la 
£aveur  nséme  de  Pary fatis  ;  Se  que 
comme  il  envoyoit  tous  les  jours 
à  Cïéarquo ,  parmi  ces  provifions, 
un  jambon  «  Cléarque  lui  iniinua 
&  le  pria  inflannsent  de  cacher 
dans  un  jambon  on  petit  poignard, 
&  de  le  lui  envoyer ,  afin  de  ne 
pas  laiiTer  fa  vie  à  la  difcrétion  & 
à  la  cruauté  du  Roi  ;  mais  que 
craignant  ce  Prince  ^  il  avoit  refu- 
fé  de  le  faire.  Il  dit  encore  que  le 
.  Roi  accorda  la  grâce  de  Cléarque 
aux  preflantes  prières  de  la  reine 
(a  mère  ,  &  qu*il  promit  avec  fer- 
ment  qu'il  ne  le  feroit  pas  mourir  ; 
mais  que  dans  la  fuite  ,  à  la  per- 
fuafion  de  ^tatira,  il  fit  ipourir 
tous  les  prifonniers ,  excepté  Me- 
non. 

Il  eft  évident,  dit  Plutarque, 
que  cet  Hifiorien  invente  tout  ce 


C  L  34r 

récit  t  comme  une  fable  dé  tragé»- 
die  ,  pour  faire  honneur  à  la  mé- 
moire de  Cléarque,  puifqu'il 
ajoute  même  que  tous  les  officiers 
Grecs  qu'on  mit  à  mort,  furent 
déchirés  par  les  chiens  &  par  les. 
oifeaux  ;  mais  qu'un  furieux 
tourbillon  de  vent  s'étant  levé  » 
porta  fur  le  corps  de  Cléarque  un 
très  grand  monceau  de  fable» 
dont  il  lui  fit  un  tombeau  ;  qu'au- 
tour de  ce  tombeau  il  crut  quel- 
ques palmiers ,  qui  en  très- peu  de 
tems  formèrent  un  bois  admira- 
ble ,  qui  ombragea  ce  tombeau  , 
de  forte  que  le  Roi ,  frappé  de  ce 
miracle ,  fe  repentit  véritablement 
d'avoir  fait  mourir  Cléarque  ,  qui 
étoit  fi  aimé  des  dieux. 

Portrait  de  Cléarque. 

Cléarque  ,  félon  Xénophon , 
étoit  brave ,  hardi ,  intrépide,  Sx. 
propre  à  former  de  grandes  entre- 
prifes*  En  lui  le  courage  n'étoit 
point  téméraire  ;  mais  conduit  par 
la  prudence ,  &  au  milieu  du  plus 
grand  danger  ,  il  confervoit  tout 
Ion  fang. froid.  Il  aimoit  les  trou- 
pes ,  &  ne  les  laifToit  manquer  de 
rien.  Il  fçavoit  fe  faire  obéir,  mais 
par  là  crainte.  U  avoit  la  mine 
févère  ,  la  parole  rude,  le  châti- 
ment prompt  &  rigoureux  ;  il  s'a- 
bandonnoit  quelquefois  à  la  colère, 
mais  revenoit  bientôt  à  lui.  Il  pu^ 
niflbit  toujours  avec  juflice.  Sa 
V^nde  maxime  étoit  qu'on  ne 
içauroit  rien  faire  d'une  armée 
fans  une  févère  difcipline  ;  &  c'eft 
de  lui  qu'on  tient  ce  mot  «  qu'un 
foldat  doit  plus  craindre  fon  géné^ 
rai  que  les  ennemis.  Les  foldats 
lelUmoienc  fon  courage,  ^  r^Oj 
yiij 


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H^        c  li 

doient  judîce  à  Ton  qiérîte  ;  mais» 
ils  redoutoient  Ton  humeur  ,  & 
n'aîmoient  point  à  (ervït  fous  lui. 
En  un  mot,  die  Xénôphon,  les 
troupes  le  craignoiem  comme  des 
écoliers  craignent  un  févèrc  péda- 
gogue. On  pourrait  dire  de  lui  ce 
que  dit  Tacite  ,  que  par  une  fé- 
vérité  outrée  ,  il  gâtoit  mém^  ce 
qu'il  faifoit  de  bien  d'ailleurs. 

CLÉ  ARQUE,  Clearchusy  {a) 
Ka/ût^X^ç',  capitaine  Macédonien, 
du  tems  de  Philippe ,  père  d'Ale- 
xandre le  Grand.  Ce  fut  un  des 
députés ,  que  Philippe  envoya  à 
Thèbes ,  pour  qu'ils  s'oppofaffenf, 
&  répondifTent  à  tout  ce  que  les 
ambaffadeurs  d'Athènes  propo- 
feroient  contre  fcs  intérêts.  Dé- 
mofthène  étoit  un  de  ces  der- 
niers. 

CLÉARQUE ,  Clearchus  ,  {b) 
Khidoyji'; ,  natif  d'HéracIée ,  ville 
du  Pont  dans  l'Afie  ininçure  ,  fut 
le  premier  qui  ufurpa  la  fouverai- 
ne  puifTance  dans  fa  patrie.  L'a- 
mour de  la  phtlofophie  lui  fit  faire 
un  voyage  à  Athènes,  où  il  étudia 
fous  Platon;  'mais  ,  il  quitta  Ton 
école  fur  un  fonge ,  &' revint  dans 
fa  patrie ,  d'où  il  fut  banni  par  les 
intrigues  de  fes  ennemis.  Il  fe  re- 
tira auprès  de  Mithridate  ,  roi  de 
Cappadoce. 

Cependant ,  le  peuple  d'Héra- 
cIée ayant  demandé  avec  violence 
l'abolition  <les  dettes  &  le  parta- 
ge des  terres;  &  l'affaire  ayant  éré 
long' tems  débattue  dans  le  Sé- 
nat >  fans  pouvoir  être  terminée  ; 

(a)  Plut.  T.  I,  p.  85^.  I  Infcript.  &  Bell.  Lett.  Tom.  VI.  p.  178. 

{b)  Juft.  L.  16.  c.  4»  %*  Diod.  Stcul.  I  Tom.  XIV.  pag.  «79.  &  friv*  JotJBu 
p,  500.  Athen.  p.  8ç.  Roll.  Kilt.  Ahc.fXIX.  p,y^. 
Tom.  IV.  p.  14.  Mém.  ûe  l'Acad.  des] 


CL 

enfin,  les  Nobles,  pour  réprimer 
l'impétuofité  d'un  peuple ,  que 
trop  de  repos  rendoit  inlolent, 
demandèrent  du  fecours  à  Timo- 
thée ,  chef  des  Athémei^s ,  &  en- 
fuite  à  Épaminondas ,  général  des 
Thébains.  Sur  le  refus  de  l'un  ÔL 
de  l'autre  ,  ils  eurent)  recours  à 
Cléarque.  Leurs  mifères  furent  fi 
prenantes ,  qu'elles  Jes  rédoifirem 
a  la  néceffité  de  rappeller^pcar  la 
défenfe  de  la  patrie  «  celui  qu*ils 
avoient  banni  de  la  patrie.  Mais  » 
Cléarque  ,  devenu  plus  fcélérat 
par  fon  exil ,  &  regardant  la  dif- 
xorde  populaire  comme  une  oc- 
càfion  propre  à  ufurper  la  tyran* 
nie  ,  a  d'abord  une  conftérence 
(êcrete  avec  Mithridate  ,  ennemi 
mortel  des  Héradéens  ;  &  ils 
font  tous  deux  un  traité,  par  leqad 
Cléarque  promet  que  dès  qu*il  fera 
reçu  dans  la  ville  ,  il  la  mettra 
entre  les  mains  de  Mithridate  qui , 
de  fon  côté ,  s'engage  à  lui  en 
'laifler  le  gouvernement.  Mais-, 
Cléarque  tourna  contre  Mithri- 
date même,  latrahifon  qu'il  avoit 
tramée  contre  fa  patrie  ;  car  ,  à 
peine  y  fut- il  rentré ,  qu'il  prit 
le  moment  même  ,  où  il  dévoie 
la  lui  livrer  pour  feiâifîr  &  de  lui 
&  de  fes  amis  ,  &  ne  lui  rendit  la 
liberté  qu'après  qu'il  la  lui  eut 
vendue  bien  chèrement. 

Comme  d'allié  de  Mithridate , 
il  en  étoit  tout  d'un  coup  devemi 
d'ennemi  ;  ainfi  partm  changement 
non  moins  foudaln ,  de  détenfeur 
du  Sénat ,  il  fe  fit  le  proteâèur 


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CL 

du  peuple.  Il  ne  fe  contenta  pas 
de  fouie rer  la  populace  contre 
les  Sénateurs ,  auxquels  il  devoit 
fon  autorité  ,  Ton  rappel  ,  &  le 
commandement  de  la  forterefle  ; 
il  exerça  encore  fur  eux  tout  >ce 
que  la  tyrannie  la  plus  ingénieu- 
fement  cruelle  fçauroit  inventer 
de.  plus  déieftable.  Ayant  donc 
fait  aflembler  k  multitude ,  il  leur 
dit  que  bien  loin  d'appuyer  enco» 
re  la  caufe  des  Nobles  trop  long- 
tems  &  trop  durement  déchaînés 
contre  le  peuple,  il  étoit  tout 
prêt  à  s'oppofer  à  leurs  cruautés, 
«'ils  n'y  mettoient  bientôt  un  frein; 
que  s'ils  croyoient  être  affez  forts 
pour  balancer  la  puiiïance  des 
Sénateurs ,  il  fortiroit  de  fa  patrie 
a?ec  fes  foldats  ,  &  s'épargneroit 
le  chagrin  de  voir  les  troubles  qui 
la  défoloient  ;  mais  que  s'ils  fe  dé- 
ficient de  leurs  propres  forces ,  il 
offroit  les  fiennes  à  leur  vengean- 
ce ;  qu'ainfi  c'étoit  à  eux  de  déci- 
der s'il  leur  feroit  plus  avantageux 
qu'il  partît  ,  ou  qo-'il  demeurât 
pour  ]oindre  fes  armes  aux  leurs , 
&  qu'il  attendoit  leurs  ordres  là- 
deffus.  La  populace  ,  excitée  par 
ce  difcours  ,  lui  défère  le  com- 
mandement fouverain  ;  &  ces 
mêmes  hommes,  qui  fupportoient 
impatiemment  l'autorité  du  Sénat , 
fe  rangent  eux  ,  leurs  femmes  & 
leurs  enfans ,  fous  le  joug  d'une 
domination  tyrannique. 

Cléarque  fit  mettre  aux  fers 
foixante  Sénateurs  ;  c'étoit  ce  qu'il 
en  ayoit  pu  faifir  ,  le  refte  lui 
étant  échappé  par  la  fuite.  Le 
peuple  triomphoit  de  voir  le  Sénat 
exterminé  par  le  clief  môme  des 
Sénateurs-!  &  que  par  im  revers 


CL  343 

de  fortune  ,  celui  qu'ils  avoient 
appelle  à  leur  fecours,  fut  l'auteur 
de  leur  ruine.  Cependant ,  le  ty- 
ran, ingénieux  à  rançonner  fes 
prifonnierst,  leur  fait  voir  la  mort 
toujours  préfente  à  leurs  yeux , 
afin  de  leur  faire  racheter  la  vie  à 
plus  grand  prix  ;  6c  lorfqu'il  en  a 
tiré  des  fommes  immenfes  ,  com- 
me pour  les  arracher  fecrétement 
aux  menaces  du  peuple  ,  il  les 
prive,  lui-même  du  jour  ,  après 
les  avoir  privés  de  leurs  biens. 

Ënfuite ,  lorfqu'il  eut  appris  que 
ceux  qui  s'étoient  enfuis ,  fe  dif- 
pofoient  à  lui  faire  la  guerre ,  foû- 
cenus  du  fecours  que  quelques 
villes  avoient  accordé  à  la  pitié 
qu'on  avoit  de  leurs  misères ,  il 
mit  en  liberté  cous  leurs  efclaves. 
Et  pour  accabler  de  toute  forte 
d'affliâions  les  familles  des  No- 
bles ,  il  ordonna  ,  fur  peine  de  la 
vie  ,  à  leurs  femmes  6l  à  leurs 
filles  d'époufer  ces  nouveaux  af- 
franchis, qu'il  vouloit  par- là  ren- 
dre plus  fidèles  à  fon  fervice ,  & 
plus  irréconciliables  avec  leurs 
maîtres.  Mais  ,  ces  dames  ver- 
tueufes  trouvèrent  une  prpmpte 
mort  plus  douce  que  des  noces 
fi  funeftes.  Ainfi ,  les  unes  en  pré- 
viment  le  jour  par  une  mort  pré-» 
cipitée ,  les  autres  fe  la  donnèrent 
au  moment  même  de  leur  hymé- 
née ,  après  avoir  tué  leurs  nou- 
veaux époux  de  leurs  propres 
mains  ;  &  par  un  courage  digne 
de  leur  vertu  &  de  leur  naiflan-  , 
ce  ,  elles  fe  dérobèrent  aux  inful- 
tes  ,  auxquelles  on  les  réfervoit. 

Il  fe  donna  enfuite  un  combat. 
Le  tyran  viâorieux  mène  comme 
en  trioo^he  aux  yeux  du  peupl^^ 
Yiv 


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544*  C  L 

les  Sénateurs  chargés  de  fers.  De 
retour  dans  Héraclée ,  il  déployé 
fur  eux  fa  vengeance.  Les  prifons , 
les  gênes ,  &  les  meurtres  fervent 
indifféremment  à  fes  fureurs.  Il 
n'y  eut  point  d'endroit  dans  la 
ville  y  qui  n'en  portât  les  marques 
affreufes.  Il  joignit  la  préfomp- 
tion  &  l'infolence  à  la  cruauté. 
Enivré  des  faveurs  toujours  conf- 
tantes  de  la  fortune  ,  il  oublie 
quelquefois  qu'il  eft  mortel  >  & 
quelquefois  même  il  fe  dit  fils  de 
Jupiter.  Quand  il  alloit  par  la 
ville ,  il  faifoit  porter  devant  lui 
un  aigle  d'or  comme  une  marque 
de  fon  origine.  Il  fe  paroît  d'une 
robe  de  pourpre  5  6c  d'^ne  cou- 
ronne d'or ,  &  fe  fervoit  de  bro- 
dequins pareils  à  ceux  des  rois  de 
théâtre.  Enfin ,  pour  fe  jouer  des 
dieux  ,  non  feulement  par  la  fable 
de  fa  nailTance ,  dont  il  les  faifoit 
iauflement  les  auteurs  »  mais  en- 
core par  des  noms  qui  leur  étoient 
injurieux ,  il  donna  à  fon  fils  celui 
de  Céraunus,c*eft-à-dire,le  foudre. 
Deux  jeunes  hommes  des  plus 
qualifiés,  indignés  des  aâions,du 
tyran ,  prirent  le  généreux  deflein 
d'affranchir  leur  patrie  par  fa  mort. 
Impatiens  de  montrer  à  leurs 
compatriotes  quMls  fçavoient  met- 
tre en  pratique  la  vertu  ,  à  la- 
quelle ils  fe  formaient  tous  les 
jours  dans  l'école  de  Platon ,  dont 
ils  étoient  les  difciples ,  ils  met- 
tent cinquante  de  leurs  parens  en 
embufcade  ,  &  eux  ,  à  la  manière 
des  gens  qui  ont  quelque  diffé- 
rend enfemble ,  ils  vont  au  palais 
du  tyran  ,  comme  pour  terminer 
leur  débat  devant  lui.  Ils  n'eurent 
pas  de  peine  à  ê^re  iacroduitS|par« 


CL 

ce  qu^ils  étoient  particulièrement 
connus.  Tandis  que  le  tyran  at- 
tentif écoute  celui  qui  parle  le 
premier  ,  il  efl  poignardé  par 
l'autre.  Mais ,  fa  parefFe  de  leurs 
compagnons  trop  lents  à  venir  à 
leurs  fecours,  fut  caufe  qu'ils  per- 
dirent eux-mêmes  la  vie  par  les 
mains  des  gardes  de  celui  à  qui 
ils  venoient  de  la  ravir.  Il  arriva 
de-là  qu'ils  eurent  à  la  véijté  la 
gloire  de  tuer  le  tyran  ,  mais  non 
pas  celle  de  rendre  la  libené  à 
leur  patrie.  Car  »  Satyrus  ,  frère 
de  Ciéarque ,  envahit  la  tyrannie 
par  la  même  voie  ;  de  forte  qu'Hé- 
raclée  eut  le  malheur  de  gémir 
encore  pendant  un  grand  nombre 
d'années  fous  la  domination  fuc« 
ceffive  de  plufieurs  tyrans. 

CLéarque  perdit  la  vie  à  l'âge 
de  cinquante- huit  ans  ,  dont  il  en 
avoit  paffé  douze  dans  latyrannie, 
qui  avoit  commencé  l'an  3  64  avant 
J.  C.  Ce  tyran  laifla  deux  fils  ^ 
Timotbée  &  Denys.  Selon  Dio- 
dore  de  Sjicile ,  Timothée  fut  le 
fécond  tyran  d'HéracIée ,  &  non 
pas  Satyrus.  Mais ,  il  eft  aifé  de 
concilier  Diodore  de  Sicile  avec 
ceux  qui  ne  penfent  pas  tout-à- 
fait  comme  lui.  Ces  derniers  met* 
tent  Satyrus  au  nombre  des  tyrans 
d'Héraçlée,  parce  qu'en  effet  il 
gouverna  comme  tuteur  de  fes 
neveux  ;  &  Diodore  de  Sicile 
l'omet ,  parce  que  la  fouveraine 
autorité  n'étott  qu'un  dépôt  entre 
fes  mains. 

Ciéarque  ai^oit ,  &  protégeoît 
les  fciences.  Il  avoit  formé  une 
bibliothèque,  qu'il  fit  ouvrir  au 
public.  Cet  établiffement ,  qui  lui 
rendoit  les  gens  de  lettres  favora*. 


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CL 

Wes ,  empêcha  que  la  Grèce  ne 
conçût  pour  lui  toute  Thorreur 
que  méritoit  la  façon  tyrannique 
avec  laquelle  il  gouvcrnoit  fa  pa- 
trie. 

CLÉ  ARQUE  ,  CUarchus,  {a) 
K>fafxcç»  fils  du  précédent ,  au 
rapport  de  Nymphis  d-Héraclée  , 
cité  par  Athénée  ,  fut  comme 
fon  père ,  tyran  de  fa  patrie.  Il  fe 
livra  tellement  à  la  bonne  chère 
&  à  la  moUefle  ,  que  devenu 
d'une  grofleur  &  d'une  graiffe 
prodigieufes  ,  non  feulement  il  ne 
vaquoit  plus  aux  affaires  de  fon 
royaume  que  par  manière  d*ac-, 
quit,  mais  qu'il  falloit  lui  enfoncer 
de  longues  aiguilles  dans  Ja  chair, 
pour  le  tirer  du  fommeil  léthargique 
où  il  étoit  continuellement  pion- 

fé  y  encore  n'en  venott-on  pas  à 
out.  On  ajoute  que  ce  prince 
étoit  devenu  fi  monflrueufement 
gros  ,  que  quand  il  vouloit  don- 
ner audience  ,  il  fe  mettoit  de 
bout  dans  un  coffre  très-profond 
qui  cachoit  fon  ventre  ,  &  ne 
laiffoit  paroitre  que  le  bufle.  II 
mourut  âgé  de  cinquante  -  cinq 
ans  ;  fa.  tyrannie  en  avoit  dure 
trente- trois. 

Une  partie  de  ce  que  l'on  vient 
de  raconter  y  efl  attribué  par 
Memnon  à  Denys  ,  père  du 
Cléarque  qui  fuit. 

CLÉ  ARQUE,  CUarchus,  {b) 
Kx/apxo4 ,  fils  de  Denys,  &  pe- 
tit-fils de  Cléarque,  le  premier 
tyran  d'Héraclée.  Il  avoit  un  frè- 
re nommé  Zathras.  Leur  mère  (e 
nommoit  Amaftris  ;  cette  prin- 
ce») Athen.  p.  549.  Mém.  de  TAcad.  |  {h)  Diod.  Sicul.  pajr.  yy%.  Mém.  de 
de»  Infc.  &  Bell,  Lett.  Tom.  XIV.  p.  TAcad^  des  Infcript.  &  Bell.  Leit.  T. 
«85  9  x8â.  i  XXV.  p.  186.  &  faiv. 


CL  345 

cefTe  ,  après  la  mort  de  Denys  , 
époufa  Lyfimachus.  Comme  fes^ 
deux  fils  étoient  encore  en  bas- 
âge  ,  Antigoifus  fe  chargea  d'a- 
bord de  veiller  à  leurs  intérêts  ;  6c 
lorfque  d'autres  foins  ne  lui  per- 
mirent plus  de  continuer  l'exercice 
d'un  fi  honorable  emploi  ^  il  fuf 
remplacé  par  Lyfimachus. 

Quand  Cléarque  ^eut  atteint 
l'âge  d'homme ,  il  prit  en  main 
les  rênes  du  gouvernement.  Il 
(ignala  fon  courage  dans  plufieurs 
guerres  ,  foit  entreprifes  pour  fa 
propre  défenfe  ,  foit  auxiliaires  , 
particulièrement  dans  une  ,  oii 
combattant  avec  Lyfimachus  con- 
tre les  Getes,  il  fut  fait  prifonnier 
avec  lui.  Peu  après ,  Lyfimachtis 
fe  racheta ,  6c  par  fes  foins ,  Cléar- 
que fut  auifi  renvoyé.  Lui  &  fon 
frère  fuccéderent  donc  à  leur  pete 
dans  la  fouveraineté  d'Héraclée  ; 
mais,  bien  loin  d'imiter  fa  bonté  » 
ils  fe  portèrent  à  un  parricide  qui 
fait  horreur.  Leur  mère ,  qui  leur 
avoit  donné  quelque  fujet  de  mé- 
contentement affez  léger ,  s'em-^ 
barqua  fur  un  vaifTeau ,  fous  pro- 
mefle  de  fureté  ;  &  par  la  plus 
noire  des  trahifons  ,  ils  la  firent 
jetter  dans  la  mer.  Lyfimachus , 
qui  étoit  pour  lors  en  Macédoine , 
n'eut  pas  plutôt  appris  ce  qui  s'étoit 
pafTé,  qu'il  réfolut  de  ne  pas  laifFer 
impuni  un  crime  fi  atroce.  Cé- 
toit  l'homme  de  fon  tems  qui  fça- 
voit  le  mieux  l'art  de  feindre  &  de 
difSmuler.  Cachant  donc  fon  def- 
fein  ,  il  s'approcha  d'Héraclée 
avec  toutes  les  apparences  d'un 


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£\6  CL 

mtne  plein  d'amitié  pour  Cléar- 
que  6c  d  affeâion  pour  Tes  fujets. 
doos  ce  mafque  ,  il  n'eft  fufpe 
i  perfonne  ;  il  tnue  dans  Héra- 
clée  ;  il  y  eft  bien  reçu  ;  Cléar- 
€|ue  croit  voir  un  père  en  lui. 
Mais  ,  Lyfimachus  »  fans  perdre 
de  tems ,  fait  arrêter  les  deux 
princes ,  &  4es  immole  tous  deux 
aox  mânes  d'Amaftris. 

CLÉARQUE ,  CUarchus,  {a) 
K>ietf^xoi  ^  fils  de  Nauficlès  ,  l'un 
des  plus  confidérables  citoyens 
tf  Athènes  9  vi voit  vers  l'an  318 
avant  l'Ère  Chrétienne. 

CLÉARQUE ,  Clearchus ,  {b) 
Kyiot^X'^ç  y  naquit  à  Soli*  Ayant 
pris  les  leçons  d'Aridote,  il  de- 
vint un  des  plus  célèbres  Péripa- 
téticiens.  Jofephe  ailiire  qu'il  ne 
le  cédoit  en  mérite  à  aucun  de 
cette  feôe. 

U  compofa  divers  ouvrages  ; 
mais ,  il  ne  nous  refte  qu'un  trag* 
ment  du  traité  touchant  le  fom- 
meil  ,  confervé  par  Jofephe ,  & 
copié  par  Eufebe.  Ceux  ,  dont  on 
a  confervé  les  titres ,  font  ceux- 
ci  :  un  traité  de  l'éducation  ;  un 
autre  des  vies  des  Hommes  illuf- 
tres ,  dont  on  cite  jufqu'au  cin- 
quième livre ,  &  d  oîi  Aulu-Gelle 
a  tiré  ce  qu'il  dit  de  Pythagore  ; 
&  un  troifième  des  taâiques  ou 
de  l'art  militaire.  On  parle  encore 
d'un  ouvrage,  qu'on  peut  regar- 
der comme  un  art  d'aimer  »  ou 
comme  un  recueil  de  narrations 
qui  roulent  toutes  fur  l'amour  ;  & 
c'eft  de-là  qu'Athénée  a  pris  ce 


CL 

qu'il  dit  des  honneurs  que  Gy- 
gès ,  roi  de  Lydie ,  fît  à  une  fem- 
me publique  qu'il  aimoit.  Le  fcho- 
liafte  de  Lycophron  ,  qui  parle 
auffi  de  Cléarque  ,  adare  d'après 
lui  qu'il  y  eut  trois  Hercules  , 
l'Hercule  de  Briarée ,  l'Hercule 
de  Tyr,  &  l'Hercule  Grec. 

CLÉARQUE ,  CUarchus ,  (c) 
y.Tf'ai^X'^ç,  y  fameux  ftatuaire  de 
Rhégium ,  qui  avoit  été  difciple 
d'Euchh-  de  Cortnthe. 

CLÉÉNÉTUS  ,  CUanetus  , 
KxaiVfroc  .  {d)  fils  de  Cléomédoa 
d'Athènes.  Pour  faire  remettre  à 
fon  père  une  amende  à  laquelle  H 
avoit  été  condamné,  il  porta  an 
peuple  des  lettres  de  Démétriot 
en  fa  faveur;  &  par- là  non  feule- 
ment il  fe  déshonora  lut- même, 
mais  encore  il  mie  toute  fa  ville 
en  trouble  &  en  cocnbuftion.  Car, 
il  fit  bien  décharger  fon  père  de 
cette  amende  ;  mais  ,  en  même 
tems ,  les  Athéniens  firent  un  dé- 
cret pour  ordonner  qu'à  Tavenir 
aucun  citoyen  d'Athènes  n'apper-* 
teroit  des  lettres  de  recommanda* 
tion  de  Démétrius. 

Ce  prince  ,  informé  de  ce  dé^ 
cret ,  &  en  étant  très-offenfé  coni* 
me  d'une  chofe  qui  lui  étoit  înja- 
rieufe  ,  fit  éclater  fon  reflenti- 
ment.  Les  Athéniens ,  qui  en  crai«- 
gnirent  les  fuites  ,  annullerent  & 
caiTerent  leur  décret*  Ils  firent 
plus  encore  ;  de  tous  ceux  qui 
l'avoient  confeillé  ou  drefTé  ,  ils 
en  firent  mourir  les  uns,  ôc  bannie 
rent  les  autres  ;  &  non  contens 


(4)  Diod.  Siciol.  p.  66x»  I419  ,  410. 

{b)  Mém.  de  TAcad.  des  înfcript.  &|     (c)  Pauf.  p.  ;50. 
Bell.  Lett.  Tom.   V,  paf(.  «46  ,    «48  *l     \d)  Plut»  T.  I.  p.  899. 
|8o.  T.  VU.  p,  1x5 ,  ia6.  T.  XIV.  pag.  5 


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CL 

de  cette  réparation  ils  firent  on 
autre  décret  qui  portoit ,  que  le 
peuple  d'Athènes  ftataoit  &  or- 
donnoit  que  tout  ce  que  com- 
manderoit  le  roi  Détnétrius  ,  f<?- 
roit  tenu  pour  (aint  envers  les 
dieox  ,  &  jufte  envers  les  hom- 
mes. Le  beau  décret  l 

CLEFS  [  Les  ]  DE  CHYPRE, 
Claves  Cypri  ,  XMiî'/fç  Kutt^ov-, 
{a)  C'efl  ainfî  qu'Hérodote  nom- 
me un  promontoire  de  cette  ifle. 
Les  Phéniciens  defcendkent  un 
jour  fur  ce  promontoire  ,  pendant 
que  les  Perfes  venant  de  Cilifcie, 
débarquoient  à  Salamine.  Foyei 
Clides. 

CLEFS,  C/tfVtf^  Voici  com- 
ment étoient  faites  les  Oefs  des 
Anciens ,  félon  Madame  Dacier. 
C'étoit  un  morceau  de  fer  affez 
long ,  courbé  en  feacille  ,  &  em- 
manché ou  de  bois  ou  d'ivoire. 
Après  qu'on  avoit  détaché  la  cour» 
roie  qui  couvroit  letrou  de  la  fer- 
ture  ,  on  fatfok  entrer  ce  fer  dans 
cette  ferrure  j  ôepar  fon  moyen 
on  reponiToit  le  verrou  qui  fer- 
mort  en- dedans.  Madame  Dacier 
dît  en  avoir  vu  à  peu  près  de 
même  à  la  campagne; 

CLEIDOMANTIE ,  CUido^ 
tnantia  ,  {b)  forte  de  divination  , 
qui  fe  pratiquoit  par  le  moyen 
des  clefs.  Ce  mot  vient  de  xx^k  s 
clavis,  clef,  &  de  /uct^rélà  ,  divi* 
hatio  ,  divinatioil. 

On  ignore  quel  nombre  &  quel 
mouvetpent  de  clefs  exigeoient 
les  Anciens  pour  la  Cleidoroantie , 


CL  ^4,7 

&  quel  genre  de  connoiflance 
pourTavenir  ils  en  prétendoient 
tirer.  Delrio  »  qui  a  fait  des  re- 
cherches fur  toutes  ces  matières  , 
ne  donne  aucune  lumière  fur, celle* 
ci  pour  ce  qui  concerne  l'Anti- 
quité ;  il  nous  apprend  feulement 
3ue  cette  fuperûition  a  eu  lieu 
ans  le  Chriûianifme ,  &  qu'on  la 
pratiquoit  de  la  forte.  »  Lorfqu'on 
w  vouloit  ,  dit- il  ,  découvrir  fi 
n  une  perfonne  foupçonnée  d'un 
»i  vol  ou  de  quelqu'autre  mau- 
i>  vaife  aâion  en  étoit  coupable  » 
n  on  prenoit  une  clef  au  tour  de 
Il  laquelle  on  rouloit  uri  papier  , 
M  fur  lequel  étoit  écrit  le  nom  de 
I)  la  perfonne  fufpeôe  ;  enfuite 
»  on  lioit  cette  clef  à  une  Bible  , 
»  qu*oa  donnoit  à  tenir  à  une 
n  vierge  ;  puis  on  prononçoit 
i>  tout  bas  certaines  paroles ,  en- 
n  tre  lesquelles  étoit  le  nom  de 
4)  l'accufé  ;  ôc  à  ce  nom  ,  l'on 
9»  voyoic  fenfiblement  le  papier 
»  fe  remuer,  a 

CLEIO  ,  CUio ,  (c)  étoit  un 
poète  peu  favorifé  des  biens  de  la 
fortune.  Ju vénal  en  fait  mention 
dans  fa  fepriëme  Satyre. 

CLÉMENS ,  Clemens  (d),  ef- 
clave  d'Agrippa  Pofthume.  Ayant 
appris  la  mort  d'Augufle  ,  il  con- 
çut un  defTein  qui  ne  fe  refTeatoîc 
point  de  la  batiefTe  de  fa  condi- 
tion ;  ce  fut  de  paffer  dans  Tifle 
dé  Planafie  ,  d'enlever  Agrippa  , 
de  gré  ou  de  force  ;  de  le  tranf- 
porter  en  Germanie  ,  &  de  le 
mettre  à  la  tête  des  armées  qui 


(*)  Herod.  L,  V.  c.  t;o8.  •     (d)  Tacit.  Annal.  L.  II.  c.  59  »  40. 

^*)  Myth.  par  M.  PAbb,  Ban.  Tom.  1  Crév.  Hift.    des    Emp.  Tom.  1,   pag, 
n.p.  11».  h7ï>37>« 

V)  ;iivcn.  Saty/.  f.y^j.  |  / 


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H*  CL 

y  krvoient.  '  Ce  qui  Tcmpécht 
d'exécuter  ce  projet  hardi ,  ce  fut 
la  lenteur  de  la  barque  donc  il  Te 
ferait.  N'étant  donc  arrivé  dans 
cette  ifle  qu'après  le  meurtre  du 
petit-fils  d'Augufte  »  qui  avoit  été 
ordonné  par  Tibère ,  il  forma  une 
cmreprife  encore  plus  haute ,  & 
d'un  courage  plus^-détermîné.  Il 
▼ola  les  cendres  de  ce  jeune  prin- 
ce ;  âc  fe  faifant  porter  à  Coffe  , 
pomontoire  d'Étrurie ,  il  fe  cacha 
dans  un  lieu  à  l'écart ,  où  il  laifla 
croître  fa  barbe  &  fes  cheveux  ; 
&  comme  il  étoir  à  peu  près  de 
l'âge  d* Agrippa ,  &  qu'il  lui  ref- 
fembloit  allez  de  vifage  &  de 
taille  ,  il  fit  répandre  le  bruit  que 
ce  prince  vivoit  encore ,  par  des 
gens  qu'il  avoit  apoftés^  &  qui 
d'abord  difoient  ce  fecret  à  l'o- 
feille ,  comme  il  arrive  quand  on 
a  lieu  de  craindre  ;  puis  un  peu 
plus  ouvertement  devant  des 
ignorans ,  qui  appreooient  cette 
nouvelle  avec  joie  ;  &  enfin ,  ils 
en  parloient  fans  garder  aucun 
ménagement ,  quand  ils  rencon* 
troient  des  efprits  turbulent  & 
«vides  de  nouveautés  ;  ÔL  lui* 
snême  entroit  dans  les  villes  mu- 
nicipales à  la  brune ,  prenant  la 
précaution  de  ne  fe  montrer  qu'à 
peu  de  gens ,  &  de  ne  pas  refier 
long-tems  dans  le  même  lieu  ; 
car^  comme  il  fçavoit  que  la  vé- 
rité s'accrédite  ,  à  meftire  qu'on 
l'approfondit ,  au  lieu  que  la  four- 
berie ne  cr'aint  rien  tant  que  l'exa- 
men &  le  grand  jour  »  il  difparoif* 
foit  dès  qu'il  s'étoit  fait  entrevoir , 
on  même  échappoit  à  Tempreffe- 
snent  des  curieux. 
Cependant ,  on  débitoit  dans 


CL 

toute  l'Italie  ^  qu'Agrippa  avmt 
été  fauve  par  une  proteâion  toute 
particulière  des  dieux  ;  on  le 
croyoit  k  Rome;  &déjà  il  étoit 
arrivé  à  Oftie ,  oii  le  peuple  s'at- 
troupoit  au  tour  de  lui  ;  déjà  dans 
la  ville  capitale  il  étoit  te  fujet  de 
toutes  les  converfations  (ecrètes , 
lorfque  Tibère ,  incertain  s'il  de- 
voit  employer  les  armes  des  fol- 
dats  pour  punir  fon  efclave ,  ou 
laiffer  tomber  de  foi -même  une 
vaine  crédulité  ,  tantôt  croyoit 
qu'il  ne  devoit  rien  né^i^er;  &L 
quelquefois  qu*il  ne  falloit  pas 
s'embarrafli^  de  fi  peu  de  chofe. 
Enfin ,  partagé  entre  la  honte  & 
la  crainte  ,  il  chargea  Saluftius 
Crifpus  de  cette  commiffion.  Ce 
Miniilre  choifit  deux  de  Ces 
cliens  »  (  d'autres  difent  deux  loi- 
dats)  9  ôc  les  chargea  d'aller  trou- 
ver ce  fourbe  >  &  de  l'affurer  de  f^ 
part  qu'il  l'aideroit  de  fon  crédit 
&  de  fon  argent  «  &  qu'il  s'expo- 
feroit  à  toutes  fortes  de  périls  pour 
le  maintenir.  Ils  exécutèrent  pon« 
âuellement  fes  ordres ,  &  ayant 
épié  une  nuit  ok  il  fe  tenoit  n^ns 
fur  fes  gardes  »  ils  prennent  main- 
forte  «  Us  le  chargent  de  chaînes  « 
lui  ferment  la  bouche ,  ôc  le  tiai- 
pent  à  Rome  dans  le  palais  de 
l'empereur.  Là,  on  dit  que  Tibè- 
re lui  ayant  demandé  comment  il 
étoit  devenu  Agrippa ,  il  lui  ré- 
pondit ,  comme  vous  êtes  devenu 
Cé(ar.  Mais  ,  on  ne  put  jamais 
l'obliger  à  nommer  fes  complices; 
&  l'empereur ,  n'ofant  pas  rendre 
fa  punition  publique,  le  fit  tuer 
dans  un  coin  de  fon  palais ,  6c  or. 
donna  que  fon  corps  fût  emporté 
fecrétement;  &  quoiqu'un  grand 


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CL 

Nombre  des  officiers  de  la  cour  i 
des  chevaliers  y  &' même  des  fé- 
aateurs  ,  fofTent  foupçonnés  de 
ravoir  aidé  de  leurs  biens  &  de 
leurs  confeils  ,  il  ne  voulut  point 
permettre  que  l'on  fit  aucune  re- 
cherche* 

CLÉMENS ,  CUmens ,  (a)  cen. 
turion  dans  l'armée  de  Pannonie , 
fous  l'empire  de  Tibère  f  Tan  de 
J.  C.  14.  Cette  armée  $*étant  ré- 
voltée ,  Drufus  y  fut  envoyé  pour 
appaifer  la  fédition.  Les  foldats 
chargèrent  Clémens  de  fe  préfen- 
ter  au  jeune  Prince,  &  de  lui  ex- 
pofer  leurs  demandes  ,  fçavoir , 
que  leur  congé  leur  fût  accordé 
au  bout  de  feize  ans  ;  qu'on  leur 
délivrât  leurs  récompenfes  en  ar- 
gent à  la  fin  de  leur  fervice  ;  que 
la  paie  fut  portée  à  un  denier  par 
jour  ;  &  que  les  vétérans  qe  luf- 
fent  plus  retenus  fous  le  drapeau, 
Drufus  répondit  qu'il  n'apparte- 
noit  qu'au  fénat  $c  à  fon  père ,  de 
régler  des  articles  d'une  fi  grande 
conféquence.  Cette  réponfe  ne 
fit  qu'irriter  davantage  la  muiti- 
tade.  Mais ,  Clémens  &  quelques- 
autres  officiers  qui ,  par  de  bon- 
nes voies  s'étoieot  rendus  agréa- 
bles aux  croupes ,  vinre^it  à  bout 
de  les  faire  rentrer  dans  le  devoir* 

CLÉMENS ,  Cltmens ,  {b)  pré- 
fet  du  prétoire  fous  l'empire  de 
Caligula ,  favorifa  fecrétement  la 
conjuration  contre  ce  Prince  ;  & 
quand  il  eut  été  tué  »  fe  déclarant 
alors  aflez  ouvertement  ,  il  ne 
craignit  point  de  dire  aux  foldats 


CL  349 

des  cohortes  Prétoriennes  ,  que 
Caligula  étoit  lui-même  l'auteur 
de  fa  perte  ,  &  que  l'on  dévoie 
moins  en  attribuer  la  caufe  aux 
confpirateurS)  qu'à  la  conduite  du 
Prince  ,qui  avoit  préparé  le  piège 
dans  lequel  il  étûit  tombé.  Ce 
Clémens  eft  vraifemblablement  le 
père  de  celui  qui  fuit. 

CLÉMENS  [Arrétinus]  , 
Arretinus  Clémens  (c),  fénateur 
Romain  ,  allié  à  la  maifon  de 
Vefpafien ,  étoit  fort  agréable  aa 
jeune  Domitien.  Ce  fut  pour  cela 
que  Mucien  le  revêtit  de  l'emploi 
de  préfet  du  prétoire ,  l'an  de  J.  C. 
70  ,  après  en  avoir  dépouillé  At- 
rius  Varus.  Le  père  d' Arrétinus 
Clémens  avoit  été  revêtu  du 
même  emploi  fous  Caligula  ;  & 
Mucien  alléguoit  que  les  foldats 
obéiroient  volontiers  au  fils  de  ce- 
lui qu'ils  avoient  autrefois  vu  à 
leur  tête.  Arrétinus  Clémens  , 
quoique  fénateur ,  fut  donc  étabU 
préfet  des  cohortes  Prétoriennes. 
Il  eft  le  premier  de  fon  ordre ,  qui 
ait  poiïédé  cette  charge ,  jufque*- 
là  affeâée  aux  chevaliers. 

CLÉMENT .  Clémens  (J) ,  Pua 
des  cpopérateurs  de  faint  Paul, 
dans  rétabliiïement  de  TÉvangile  , 
comme  Tattefte  lui  -  même  cet 
Apôtre  dans  fon  Épitre  aux  Phi- 
lippiens  ;  &  il  affure  que  Clément 
eft  du  nombre  de  ceux  ,  dont  ie 
nom  eft  écrit  au  Livre  de  vie. 

La  plupart  des  Pères  &  des  In* 

terprêt  s  ne  doutent  point  que  ce 

ne  foitele  même  Clément  ,  qui 


{a)  Crév.  Hift.  de»  Emp.  Tom.  1.  p.  f     (c)  Tacît.  Hift.  L.  IV,  c.  68.  Créf. 
»99.  &  fitiv.  I  Hift.  des  Emp.  T.  III.  p.vjiS. 

(^)  Crév.   Hift.  d«s  Emp.  Tom.  11.1     (d)  Ad  Philipp.  Epitt,  c.  4.  ?.  5, 
p.  77,  88.  I 


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550  CL 

fuccéda  à  faint  Pierre  i  après  fatiit 
Lin  &  faint  Clet ,  dans  le  gouver- 
nement de  l'églife  ^e  Rome  ;  & 
réglife  femble  marquer  la  même 
chofe  »  lorfqu'elie  fait  réciter  cet 
endroit  de  l'Épitre  aux  Philip- 
piens ,  dans  fon  office ,  le  jour  de 
iaint  Clément.  Grotius ,  au  con* 
traire  »  croit  que  Clément ,  dont 
parle  faint  Paul ,  étoit  un  îimple 
prêtre  de  l'églife  de  Philippes. 

CLEMENT ,  CUnuns  ^  difci- 
^le  de  faint  Pierre  »  &  l'un  de  fes 
lucceiTeurs  au  fouverain  Pontifi- 
cat. Il  fuccéda  à  Anaclet ,  vers  Tan 
de  J.  C.  91 ,  &  ce  fut  fous  fon 
gouvernement  que  Domitien  ex- 
cita la  féconde  perfécution  contre 
l'églife.  On  dit  que  Clément  éta- 
blit fept  notaires  dans  Rome, 
pour  recueillir  les  aâes  des  marr 
tyrs ,  &  pour  conferver  la  mémoi- 
re de  leurs  triomphes.  Ce  fait  eft 
tiré  du  pontificat  du  pape  Dama- 
fe ,  &  ne  mérite  aucune  créance* 
Sous  l'empire  de  Trajan ,  il  fut 
envoyé  en  exil  dans  la  Cherfon- 
nèfe  du  Pon^-Euxin  ,  où  par  fes 
prières  Dieu  fit  fortir  une  fontai- 
nç ,  qui  délivra  plufieurs  Chrétiens 
exilés  avec  lui  &  condamnés 
*  aux  carrières,  de  l'incommodité 
qu'ils  avoient  d'aller  bien  loin 
chercher  de  l'eau. 

Aufidien,  envoyé  de  rempe<* 
reur,  le  fit  jetter  dans  la  mer  avec 
une  ancre  au  col  »  afin  que  les 
Chrétiens  ne  pufTent  retirer  fon 
corps  9  pour  l'honorer  »  félon  leur 
coutume.  Dieu  rendit  inutile  la 
prévoyance  du  tyran  ,  &  con- 
tenta la  dévotion  des  fidèles  ;  car, 
comme  ils  prioient  Dieu  fur  le  ri- 
vage y  la  mer  fe  retira  de  trois  mil- 


CL 

les.  tls  y  entrèrent  avec  aflurance; 
&  y  trouvèrent  un  oratoire  de 
marbre  blanc ,  bâti  de  la  main  des 
anges  ,  pour  la  fépulture  du  mar*' 
tyr  ;  ce  4]ui  efl  rapporté  par  Ni* 
céphore»  par  Grégoire  de  Tours» 
&  par  plufieurs  autres  9  cités  par 
le  cardinal  Baronius  »  qui  oxet  le 
martyre  de  ce  fairit  Pape  en  l'an 
102,  au  lieu  qu'il  doit  être  placé 
en  l'an  loo.  Les  aâes  du  martyre 
de  (àint  Clément ,  d'oii  faint  Gré- 
goire de  Tours  a  tiré  ces  circon- 
itanc'es  ,  font  vtfiblemem  fabu- 
leux ,  étant  remplis  d'une  multi- 
tude de  fautes  contre  la  vérité  de 
l'hiftoire.  11  n'eft  pas  même  cer- 
tain qu'il  ait  été  martyr»  puif« 
que  faint  Irénée  ne  lui  donne  point 
cette  qualité*  Cependant ,  Rufin 
&  le  pape  Zoztme  la  lui  ont  don- 
née au  commencement  du  cin- 
quième fiècle  9  &  il  efl  mis  fous 
ce  titre  dans  les  Martyrologes , 
au  vingt-trois  Novembre.  Ce  faint 
Pape  avoit  tenu  le  fiege  neuf  ans  » 
fix  mois  &  (\x  jours ,  &  eut  pour 
fucceffeur  faint  Évarifte. 

Il  refle  à  faire  deux  remarques 
au  fujet  de  faint  Clément.  La  pre- 
mière regarde  fa  fucceffion  au 
pontificat ,  &  l'autre  roule  fur  les 
livres  qu'on  lui  attribue. 

Quant  à  la  première ,  il  eft  sûr 
qu'il  ne  fut  fait  pape  qu'après 
Anaclet,  ou  Clet  qui  eft  le  même, 
fucceffeur  de  Lin ,  élevé  au  pon- 
tificat aprèf  faint  Pierre.  Quel- 
ques Auteurs  ,  comme  faint  Épi- 
phane  ,  &  Tertullien  dans  le  fé- 
cond livre  des  Prefcriptions  ,  di- 
fent  pourtant  que  le  même  faint 
Pierre  avoit  défigné  Clément  pour 
lui  fuccéder ,  mais  qu'il  ne  voulut 


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CL 

recevoir  le  pontificat  qu'après  Lîn 
&  Clet,  qui  avoient  été  les  coad- 
juteurs  du  premier  vilcaire  de  J. 
C;  ce  que  Rufin  dit  auffi  dans  fa 
Préface  des  dix  livres  des  Récog- 
nitions de  faim  Clément.  On  tient 
qu'il  en  ufa  ainfi  ,  ou  par  humi- 
lité ,  ou  de  peur  que  cette  nomi- 
nation ne  fervit  d*un  exemple  per* 
nicieux  à  la  poftérité*  ^ 

Pour  Tes  ouvrages  ,  il  y  en  a 
plusieurs  fous  fon  nom  ;  on  con- 
noît  d'abord  deux  Épîtres  aux  Co- 
rinthiens y  dont  la  première  ,  qui 
eft  afiurément  de  lui ,  a  été  don- 
née au  public  par  un  Anglois  , 
nommé  Patricius  Junius  ,  qui  la 
fit  imprimer  à  Oxford»  l'an  1633  » 
fur  un  manufcrit  venu  d'Alexan- 
drie, oîi  elle  e(l  à  la  fin  du  Nou- 
veau Teftament.  Elle  eft  écrite  au 
nom  de  TÉglife  Romaine  à  l'Égli- 
fe  de  Corinthe ,  pour  appaifèr  la 
diflenfion  qui  étoit  entre  les  fidèles 
de  cette  dernière  Églife.  C'efl  un 
des  plus  beaux  monumens  de  l'an- 
tiquité. La  plupart  des  anciens 
Auteurs  l'ont  citée  après  l'Écritu- 
re Sainte.  On  n'ed  pas  également 
certain  que  l'autre  Lettre  foit  vé- 
ritablement de  faint  Clément  ;  ce 
qui  fait  qu'elle  n'a  pas  tant  d'au- 
torité ;  cependant ,  on  la  trouve 
citée  dans  les  Anciens;  &  le  frag- 
ment que  nous  en  avons  ^fait  con- 
noitre  qu'elle  n'eft  pas  indigne  de 
faint  Clément. 

Il  y  a  deux  autres  Lettres  de 
faint  Clément  à  faint  Jacques , 
dont  la  faufleté  fe  découvre ,  en 
ce  qu'il  lui  donne  des  nouvelles 
de  la  mort  de  faint  Pierre ,  arri- 
vée long-tems  après  la  Tienne ,  à 
moins  qu'elles  n'euflent  été  écri- 


CL  nt 

tes  à  q!ielqu*autre  ,  comme  dit  le 
cardinal  Bellarmin.  Saint  Épi- 
phane  &  faint  Jérôme  allèguent 
d'autres  Lettres  circulaires  du  mê* 
me  Pontife* 

Outre  ces  Lettres ,  on  lui  at* 
tribue  fauflement  huit  livres  des 
Confiitutions  des  Apôtres  ,  die 
livres  des  Récognitions  ;  les  Ca« 
nons  des  Apôtres,  que  faimJeaa 
de  Damas  met  après  l'Apoca- 
lypfe^  dans  fon  quatrième  livre  de 
la  Foi  Orthodoxe)  la  difpute  con-^ 
tre  Apion  ,  &  d'autres  encore , 
dont  quelques-uns  ont  été  déc!a«i 
rés  apocryphes  par  le  pape  Gé<- 
lafe ,  au  concile  de  Rome ,  parce 
qu'ils  portoient  le  nom  des  Apô* 
très  ,  ou  parce  qu'ils  avoient  été 
falfifiés  par  les  hérétiques ,  corn* 
me  le  cardinal  Baronius  le  dit  des 
livres  des  Récognitions  ,  qui 
avoient  été  corrompus  par  les 
Ébionites  ,  du  vivant  même  de 
faint  Clément ,  &  il  allègue  l'au- 
torité de  faint  Épiphane  qui  les 
accufe  de  cette  talfification.  On 
peut  confuher  faint  Jérôme  dans 
fon  Traité  des  Écrivains  eccléfia^^ 
Aiques  ;  les  DifTertations  que  les 
Cardinaux  Bellarmin  &  Baronius 
ont  faites  au  fujet  des  Ouvrages 
de  faint  Clément  ;  le  P.  Louis  Ja- 
cob ,  dans  fon  ouvrage  qu'il  a  in-* 
titulé  Bibliotheca  Pontificia  ,  oà 
il  cite  avec  aiTez  de  foin  tous  les 
Auteurs  qui  parlent  de  ce  faint 
Pontife  ;  le  père  Turrian ,  dans 
la  défenfe  des  Canons  contre  les 
Centuriateurs  de  Magdebourg. 

CLÉMENT  [T.  Flavius  ]i 
T.  Flavius  Clemens  y  furnomme 
Alexandrin.  Foye^  Flavius. 

CLÉOBIS,  CUohis,  K^/ojJ/,V 


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35*       .CL 

tf ère  de  Bttoti.  Voye;;^  BItofl. 

CLÉOBULE,  CUobulus,  {a) 
Kuo^ov^oç^  fils  d'£vaeoras,  na- 

Suit  à  Linde  y  ville  de  l'ifle  de 
hodes  f  ou  félon  d  autres ,  en 
Carie ,  &  mérita  d'être  mis  au 
nombre  des  fept  Sages  de  la  Grèce. 
Il  étoit  brave ,  bien  fait ,  aimoit 
les  fciences,  &  alla  jufqu'en  Egyp- 
te ,  pour  apprendre  la  philofophie 
de  ces  peuples.  Il  faifoit  auffi  des 
énigmes  en  vers  ,  auffi  bien  que 
Cléobuline/a  fflle,  qui  y  réuf- 
fiflbit  parfaitement.  Il  haifloit  fur- 
tout  l'infidélité  &  l'ingratitude.  Il 
confeilloic  de  faire  du  bien  à  fes 
amis  pour  fe  les  conferver ,  &  à 
fes  ennemis  pour  fe  les  acquérir  ; 
&  il  faifoit  conûfier  la  vertu  dans 
la  haine  du  vice  &  dans  la  fuite 
de  rinjufiice*  Cléobule  mourut 
âgé  de  70  ans  ,  vers  la  55^. 
Olympiade^  l'an  560  avant  Jefus- 
Chrift. 

CLÉOBULE ,  CUobulus,  (J?) 
Yixii^cvHç ,  6ls  de  Glaucus  ,  du 
bourg  d' Acharna  dans  l'Attique. 
Efchine  en  fait  mention  dans  une 
de  fes  Harangues. 

CLÉOBULE  ,  CUohuia ,  (c) 
K>5GTvvi;>a,  fille  d'Orythie  &  d'A- 
pollon ,  ou  plutôt  de  Borée ,  roi 
d'une  partie  de  la  Thrace.  Elle 
fut  mariée  à  Phinée  ,  roi  d'une 
autre  partie  de  la  Thrace  ,  &  en 
eut  deux  fils,  Plexippe  &  Pan- 
dion.  Cette  Princefie  i^t  répudiée 
depuis  par  (on  mari  ^  qui  époufa 
enfuite  Idéa ,  fille  de  Uardanus. 

(#)  Pauf.  p.  655.  RoU.  Hift.  Ane.  T. 
II.  p.  76. 

(b)  iEfch.  Orat.  de  |Falf.   Légat,  p. 
407. 

(c)  Mém.  de  rAcad.  des.Inrcript.  & 


CL 

Au  Heu  dé  Cléobule,  certains  1I« 
fent  Ciéopatre. 

CLÉOCAKES, Cleocaris^{d) 
lieutenant  d'Alexandre  le  Grand , 
fut  envoyé  par  ce  Prince  vers 
Porus  y  pour  lui  déclarer  qu'il  eût 
à  payer  tribut  aux  Macédoniens  j 
&  à  venir  au  devant  d  eux  à  l'en- 
trée de  fon  royaume.  Porus  ré- 
pondit qu'il  ne  manqueroit  pas 
de  farisfaire  à  l'une  de  ces  deux 
chofes  9  6c  qu'il  iroit  recevoir  les 
Macédoniens  fur  fa  frontière» 
mais  que  ce  feroit  les  armes  à  la 
main. 

CLÉOCRATE  ,  CUocrates , 
Kp^foXP^TMÇ ,  certain  perfonnage, 
donc  il  efl  parlé  dans  les  Lettres 
d'Efchine  à  Ctéfiphon. 

CLÉOCRITE ,  CUocritus ,  {e) 
KhtiKptToç ,  capitaine  Grec  ,  na- 
titde  Corinthe,  fe  trouva  à  la 
bataille  de  Platée  ,  l'an  479.  avant 
J.  C.  Il  furvint ,  après  cette  ba- 
taille ,  une  conteftation  entre  les 
Athéniens  &  les  Lacédémoniens , 
pour  fça voir  auquel  des  deux  peu- 
ples on  aiTigneroit  le  prix  de  la 
valeur.  Toute  l'arriiée  s'étant  af- 
femblée  pour  juger  ce  différend, 
Théogiton  de  Nlégare  fut  d'avb 
qu'il  ne  falloit  adjuger  ce  prix  de 
la  valeur  ni  à  Athènes,  ni  à  Spar- 
te,  mais  à  une  troifième  ville, 
s'ils  ne  vouloient  allumer  une 
guerre  civile ,  plus  funefte  que  la 
guerre  qu'ils  venoient  de  termi- 
ner. Après  lui ,  Cléocrite  s'étant 
levé  pour  parier ,  perfonne  œ 

Bell.  Lett.  Tom.  XII.  pag.  m  ,  xia. 

(d)  q.  Curt.  L.  VIII.  c.  ij. 

(e)  PÏut.  Tom.  I.  p.  }»}  »  SJi.  RoB. 
Hitl.  Ane.  T.  II.  p.  231. 

douta 


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C  L 

douta  qu*ll  n'allât  demander  cet 
honneur  pour  fa  patrie  ;  cap  Co- 
rinthe  étoit  la  première  ville  de 
la  Grèce  en  puiilance  &  en  dignité 
après  celles  d'Athènes  &  de  Spar- 
te. Mais  4  on  fut  agréablement 
trompé  ,  quand  on  vit  que  fon 
difcours  étoit  tout  entier  à  la 
louange  des  Platéens  ,  &  qu'il 
conclut  que  ,  pour  éteindre  cette 
contedation  fi  danger^ufe ,  il  fal- 
loit  leur  décerner  à  eux  feuls  ce 
prix  y  dont  ni  les  uns  ni  les  au- 
tres des  contendans  ne  pourroient 
être  jaloux  ni  fâchés*  Ce  difcours 
fut  reçu  de  toute  ra(remt)lée  avec 
applaudiHement.  Arifllde  fe  ran- 
gea le  premier  à  cet  avis  pour 
les  Athéniens;  &  après  lui ,  Pau- 
fanias  pour  les  Lacédémoniens. 

CLÉOCRITE ,  Cleocritus,  {a) 
Ka6c>^/>itoç  ,  héraut  des  Myftes, 
autrement  de  ceux  qui  dévoient 
être  initiés  dans  les  Myftères  fa- 
crés  à  Athènes.  Xénophon  par- 
le de  ce  Cléocrite ,  à  qui  il  donne 
une  voix  fort  claire. 

CLÉOCRITE ,  CUocritus ,  {b) 
Kmxeiro^  ,  perfonnage  feint  , 
que  Lucien  introduit  dans  fon  Dia- 
logue du  pafTage  de  la  Barque.  On 
Ta  voit  tué  pour  avoir  fon  argent. 

CLÉODEME ,  Cleodemus ,  (c) 
Kaso/m^oç  ,  philofophe  Péripaté- 
ticien  ,  que  Lucien  introduit  dans 
fon  Banquet.  Il  dit  qu'on  l'appel- 
loit  l'Épée  Ôc  le  Poignard  ,  à  cau- 
fe  de  fon  adreile  à  attaquer  &  à 
défendre. 

Pendant  le  repas ,  un  beau 
garçon ,  en  donnant  à  boire  à  Cléo- 

(*)  Xenoph.  p.  474. 

(*)  Lucian.  T.  I.  p.  435. 

CO  Lucian.  Tom.  II.  pag.  467,  847. 

Tom.  XI. 


CL  353 

deme  »  fe  mit  à  fourîre  ;  &  lorf- 
qu'il  reprit  le  verre  ,  Cléodeme 
lui  ferra  le  doigt ,  &  lui  mit  dans 
la  main  deux  pièces  d'argent  ; 
mais,  foit  qu'il  ne  les  apperçût^ 
pas,  ou  autrement ,  elles  toinbe- 
rent  à  terre  avec  quelque  bruit; 
ce  qui  les  fit  rougir  tous  deux. 
Chacun  tourna  la  tête  de  ce  côté- 
là  ;  mais  ,  on  ne  fçavoit  à  qui 
étoit  l'argent ,  car  le  jeune  gar- 
çon nioit  qu'il  fût  à  lui,  ÔC  Cleo* 
deme  ne  faifoit  pas  femblant  de 
rien  ;  de  forte  que  la  chofe  pafTa 
doucement ,  par  i'adrefle  du  maî- 
tre du  feflin  qui  y  l'appercevant  ^ 
invita  chacun  à  boire  ^;  &  cepen- 
dant il  fil  figne  au  garçon  de  fe 
retirer ,  &  n  mit  un  autre  à  fa 
place  qui  étmt  moins  dangereux. 
Notre  Philofophe  avoit  corrompu 
la  femme  de  fon  difciple  Soflrate. 
Zénothémis ,  philofophe  Péripaté- 
ticien  ,  avec  qui  Lucien  le  met  aux 
prifes ,  lui  en  fait  des  reproches,  & 
lui  impute  en  outre  d'avoir  donné 
du  poifon  à  Criton  pour  faire 
mourir  fon  père.  Cléodeme  ,  fans 
s'amufer  aux  paroles ,  empoigne 
Zénothémis  par  la  barbe ,  &  l'al- 
loit  alTommer  à  coups  de  poing ,  ' 
fi  Ariflénète  ne  l'eût  retenu ,  & 
ne  fe  fût  mis  entre  deux  pour  les 
féparer.  Quelque  tems*  après, 
comme  ils  continuoient  encore  à 
fe  harceler,  Cléodeme  d'un  coup 
de  poing  ^  jetta  un  œil  hors  de  la 
tête  à  Zénothémis,  &  lui  arracha 
le  nez.  Foye^  Dinomaque. 

CLÉODICE  ,  Cleodice ,  U) 
Ka6o/<xh  »  captive  Trayenne.  On 

ér  feq. 
(d)  Pauf.  p.  659* 


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554  CL 

la  voyoit  reptéfentée  fur  un  lit  à 
Delphes. 

CLÉODORE,  CUodora,  {a) 
K>eo/a>o  ,  nymphe  qui  eut  deux 
maris ,  Tun  mortel ,  c'étoit  Gléo- 
pompe ,  &  l'autre  immortel ,  c'é- 
toit Neptune.  Elle  fut  mère  de 
FarnafTus. 

CLÉODOXE ,  CUodoxa ,  {b) 
l'une  des  filles  de  Niobé  ^  au  rap- 
port de  Tzetzès. 

CLÉŒTAS  ,  Cleatas  ,  (  c  ) 
Ka6c<V«ç,  célèbre  architefte  &  fta- 
tuaire.  Ce  fut  lui  qui  imagina  la 
barrière  d'Olympie  ;  &  il  s'en 
Éçavoit  fi  bon  gré  ,  que  dans  une 
infcriptîon  qui  étoit  au  bas  de  fa 
ftatue  à  Athènes  ,  il  en  tiroit  tou- 
te fa  gloire;  car,  ii^ifoit  parler 
ainfi  fa  flatue  :  Cléatas  ^fils  d'A- 
riftoclhs ,  qui  a  invente  la  barrière 
d'Olympie ,  efi  celui  qui  m*afaiu. 
On  dit  pourtant  qu'Ariftide  laper- 
feâionna  après  lui. 

CLEO  FIS,  Cleofis.  Voye^ 
Cléophes. 

CLÉOLAUS  ,  Cleolaus,  (d) 
T^htihcLQi ,  l'un  des  principaux  de 
Clitore. 

CLÉOLAUS,  Cleolaus,  {e) 
Kaco^aoç  ,  l'un  des  interlocuteurs 
du  Dialogue  de  Lucien,  intitulé 
Philopatris» 

CLÉOMBROTE,  Cleombro- 
tus  ,  KAf o)«PpeTo$  ,  (/)  fils  d'Ana- 
xandride,  roi  de  Sparte ,  eut  deux 
ff  ères ,  Cléomene  I  >  &  Léonidas. 
Celui-ci  fut  tué  aux  Thermopy- 

j(#)  Pauf,  p.  619. 

{k)  Antiq.   expl.    par   D,   Bera.    4e 
>fontf.  Tom*  I.  pag.  107. 
(c)  Pauf.  p.  |8i,  38}. 
{d)  Pauf.  p.  498. 

<e)  Lucian.  T.  II.  p.  101 1  >  loit* 
{f)  Havd.  L.  VUI,  c,7i.  L.  X,  c.  10. 


CL 

les  ;  &  dès  qu'on  eut  appris  h 
nouvelle  de  fa  mort ,  Cléombrote 
marcha  à  la  tête  des  Grecs,  qui 
s'étoient  aflemblés  de  toutes  les 
villes,  pour  empêcher  les  Perfes 
de  paifer  l'ifthme  de  Corinthe* 
Mais  ,  le  foleil  étant  venu  à  s'é- 
clipfer  &  à  perdre  totalement  fa 
lumière,  pendant  qu'on  travail- 
loit  à  fortifier  cet  Iflhme ,  il  ra- 
mena fon  armée  y  ôc  mourut  peu 
de  tems  après.  Il  fut  père  de 
Paufanias  ,  ce  célèbre  général  qui 
défit  Mardonius  à  la  bataille  de 
Platée  ,  v^rs  l'an  479  avant  J.  C 

CLÉOMBROTE  I ,  CUom- 
brotus ,  K^go^j&poToç ,  (g)  fils  de 
Paufanias  II ,  étoit  encore  en  bas- 
âge  lorfque  fon  père  fut  exilé.  On 
le  mit  ,  ainfi  qu'Agéfipolis  fon 
frère  f  fous  la  tutele  d'Aridoma* 
que  leur  proche  parent.  Agéfipo- 
lis  étant  mort  fans  enfant ,  Qéom- 
brote  lui  fuccéda  au  royaume  de 
Sparte. 

Ce  Prince  marcha  deux  foîs 
contre  les  Thébains.  La  féconde 
fois  ,  il  prit  fon  chemin  par  Am- 
bryflTe  ,  ville  de  la  Phocide;  & 
après  avoir  pafTé  fur  le  ventre  ï 
Chéréas  qui  gardoit  le  paflage  de 
ce  côté- là  avec  quelques  troupes , 
il  vint  camper  à  Leuâres  dans  la 
Béotie,  Là  ,  Ciéombrote  &  fon 
armée  eurent  un  préfage  du  mal- 
heur qui  les  attendoit.  C'étoit  la 
coutume  des  rois  de  Sparte  , 
quand  ils  alloient  à  la  guerre  ,  de 

(jg^)  Xenoph.  p.  577.  é*  /ef .  Plut,  T. 
I.  p.  184 ,  x88  i  189 ,  609*  ér  fiq*  P^uC 
pag.  S]»  167,  168»  561 ,  56».  Diod. 
Sicul.  p.  469 ,  484.  ^  fe^n  Roll.  Hitt« 
Ane.  T.  m.  p.  355.  &  fuiv,  Mém.  de 
TAcad.  des  Infcript.  &  Bell,  Lcct.  Tjoak 
XIV.  p.  s  18  y  119» 


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CL 

mener  avec  eux  un  troupeau  de 
moutons ,  afin  d*avotr  toujours  des 
viâimes  toutes  prêtes  pour  les 
facrifices  ,  fur  tout  lorrqu'ik  im- 
ploroient  le  fecours  du  ciel ,  avant 
que  de  livrer  bataille.  A  la  tête 
du  troupeau  marchoient  des  chè- 
vres ,  qui  en  étoient  comme  les 
guides.  II  arriva  que  des  loups  » 
s'étant  jettes  fur  Le  troupeau ,  épar- 
gnèrent les  moutons  &  mangèrent 
les  chèvres.  D'ailleurs  ,  les  Lacé- 
démoniens  irritèrent  les  Dieux  , 
par;  l'attentat  qu'ils  commirent 
contre  les  filles  de  Scédafus ,  un 
des  habirans  du  lieu. 

Les  Thébains  avoient  à  leur 
tête  le  célèbre  Épaminondas. 
L'aâion  commença  par  la  cava- 
lerie. Comme  celle  des  Thébains 
étoit  mieux  montée  &  plus  aguer- 
rie que  celle  de  Lacédémone  , 
celle-ci  ne  fut  pas  long-ien\s  fans 
être  rompue  &  renyerfée  fur  fon 
infanterie ,  qu'elle  commença-  à 
mettre  en  confufion.  Épaminon- 
das fuivant  de  près  fa  cavalerie , 
marche  à  grands  pas  contreCléom- 
brote  ,  &L  tombe  fur  fa  phalange 
avec  tout  le  poids  de  (on  épais 
bataillon.  Celui-ci  ^  pour  faire  di- 
verfion ,  détache  un  corps  de  trou- 
pes ,  auquel  il  donne  ordre  de 
prendre  Épaminondas  tn  fianc, 
&  de  Tenvelopper.  Pélopidas  s'ap- 
percevant  cle  ce  mouvement ,  s'a- 
vance avec  une  vîtefie  &  une 
hardieffe  incroyables ,  à  la  tête 
du  bataillon  pour  prévenir  l'enne- 
mi ,  prend  Qéombrote  lui-même 
en  flanc  ;  &  par  cette  attaque 

(et)  Plut.  T.  î.  pag.  800.  &  fiq»  Pauf. 
p.  169.  Roll.  Hift.  Ane.  Tçm.  IV.  pag. 


CL  555 

brufqne  &  inopinée  le  met  en  dé- 
for  dre.  Le  combat  fut  très -rude 
6c  très- opiniâtre;  &  pendant  que 
Cléombrote  put  agir  ,  la  viâoiré^ 
demeura  douteufe  ,  &  balança 
long-tems  entre  les  deux  partis. 
Quand  il  fut  tombé  mort  de  fes 
bleiTures ,  les  Thébains  pour  ache- 
ver leur  viftoire  ,  les  Lacédémo- 
niens  pour  n'avoir  pas  la  honte 
d'avoir  abandonné  le  corps  de 
leur  roi ,  firent  de  nouveaux  ef- 
forts de  part  &  d'autre  ,  &  lé 
carnage  fut  plus  grand.  Ceux-ci 
fe  battirent  avec  tant  de  fureur 
autour  du  corps  »  qu'enfin  ils  vin- 
rent à  bout  de  l'emporter.  Ani- 
més par  ce  glorieux  avantage ,  ils 
vouloient  revenir  à  la  charge ,  & 
Tauroient  peut-être  fait  avec  fuc- 
cès  9  (i  les  alliés  avoient  fécondé 
leur  ardeur.  Cette  bataille  fe  don- 
na l'an  371  avant  J.  C. 

Cléombrote  avoit  eu  deux 
fils ,  Agéfipolis  &  Cléomene.  Le 
premier  lui  fuccéda  fous  le  nom 
d* Agéfipolis  IL 

CfLÉOMBROTElI,  CUom^ 
brotus  ,  Ka€o/</2^otoç  (tf)  ,  époufa 
Chélonide  *  fille  de  Léonidas  , 
roi  de  Sparte.  Ce  dernier  ,  par 
les  artifices  de  Ly  fandre  «  fut  obli- 
gé de  defcendre  du  trône  ;  & 
Cléombrote  ,  quoique  fon  gen- 
dre ,  ne  rougit  pas  d'y  monter  en 
fa  place ,  après  avoir  contribué  à 
fa  ruine.  Léonidas  fut  rétabli  peu 
d'années  après  ;  &  comme  il  étoit 
fur  tout  fort  irrité  contre  fon  gen- 
dre, il  alla  le  trouver  dans  le  tem- 
ple de  Minerve  oU  il  s'étoit  ré- 

[301.    ër  fuiv.  Métn.   de  T^cad.  des 
llofciipc.  &  Bell.  Lett.  Tom.  XIV.  p.  &x. 

.      Zij 


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55^  CL 

fugié.  Il  lui  reprocha  avec  de 
grands  emportemens  f  qu'étant 
k>n  gendre  y  il  s*étbit  élevé  contre 

*lui  y  qu'il  lui  avoir  ôté  le  royau- 
me ,  éc  qu'il  Favoit  chafTé  de  fa 
patrie. 

Cléombrote  n'avoir  rien  à  ré- 
pondre à  ces  reproches  ;  mais ,  il 
îe  tenoit  là  aflis  dans  un  profond 
(ilence  «  &  avec  une  contenance 
qui  marquoit  fon  embarras.  Sa 
femme  >  Chélonide ,  fille  de  Léo- 

-  nidas  ^  avoit  d*abord  embrafle  le 
parti  de  fon  père  fi  injuftement 
traité.  Mais  alors  ^  changeant  com- 
mis la  fortune  ,  on  la  vit  aflife  au- 
près de  fon  mari ,  fuppliante  com- 
me lui ,  Ôc  le  tenant  tendrement 
embraffé ,  avec  fes  deu^  enfans 
à  fes  pieds,  Tun  d*un  côté > l'autre 

V  de  l'autre. 

Léonidas ,  après  avoir  parlé  un 
moment  avec  fes  amis  y  ordonna 
à  Cléombrote  de  fe  lever  &  de 
fortir  promptement  de  Sparte. 
En  même  tems  y  il  pria  inftam- 
ment  fa  fille  de  demeurer  6c  de 
ne  pas  l'abandonner,  après  la 
marque  de  tendrefTe  qu'il  venoit 
de  lui  donner,  en  lui  accordant 
cette  faveur  infigne,  le  falut  de 
fon  mari  ;  n^is  il  ne  put  la  per- 
fuader.  £t  dès  que  fon  mari  fe 
fut  relevé  »  elle  lui  temit  l'un  de 
fes  enfans  entre  les  bras ,  prit  l'au- 
tre entre  les  fiens  ;  &  après  avoir 
fait  fa  prière  à  la  Déefle  &  adoré 
fon  autel,  elle  alla  en  exil  avec 
lui  ;  de  forte  que  ,  fi  Cléombrote 
n'eût  eu  le  cœur  entièrement  cor- 
rompu par  la  vaine  gloire  &  par 
cette  ambition  démemrée  de  ré- 

C«)  Plat.  X.  I.  p.  35,  Pauf.  p.  360  >  i6u 


CL 

gner  ,  il  auroit  trouvé  jue  Tex 
avec  une  compagne  fi  Vi^rtueufe  , 
étoit  pour  lui  un  bonheur  préfér 
rable  à  la  royauté. 

CLÉOMEDE,  Cleomedes  , 
Khsof^iittiç  {a)  ,  fameux  Athlète 
d'Aftypalée.  On  dit  qu'en  la  72e. 
Olympiade,  luttant  contre  Ic- 
cus  de  la  ville  d'Épidaure ,  il  le 
tua  ,  &  que  pour  cela  ,  ayant  été 
condamné  par  les  dire^eurs  des 
jeux  à  perdre  le  prix  qu'il  avoit 
gagné ,  il  en  conçut  un  tel  cha- 
grin qu'il  en  eut  l'efprit  aliéné* 
Énfuite  de  retour  à  Aftypalée  , 
étant  entré  dans  une  école  où  il  y 
avoit  près  de  foixanté  enfans ,  il 
ébranla  fi  fort  un  pilier  qui  foute- 
noit  le  plancher ,  que  ce  plancher 
tomba  fur  ces  enfans  &  les  écrafa. 
Cléomede  ,  pourfuivi  à  coups  de 
pierre  par  les  habitans ,  fe  réfugia 
dans  un  temple  de  Minerve  ,  & 
fe  cacha  dans  un  grand  coffre  qui|> 
par  hazard  fe  trouva  là.  Ceux 
d'Aflypalée  voulurent  ouvrir  ce 
coffre  ,  &  ne  fçurent  en  venir  à 
bout.  L'ayant  mjs  en  pièces,  & 
n'ayant  point  trouvé  Cléomede  , 
ils  envoyèrent  confulter  l'oracle 
de  Delphes  pour  fçavoir  ce  qu'il 
étoit  devenu.  La  Pythie  leur  ré- 
pondit par  deux  vers  ,  dont  le 
fens  étojj  que  Cléomede  d'Afiy- 
palée ,  le  dernier  des  héros ,  jouif- 
foit  du  féjour  des  bienheureux, 
&  qu'ils  devoieiH  le  mettre  au 
nombre  des  imn^ortels.  Cefl 
pourquoi,  dans  la  fuite  ,  ceux 
d'Aflypalée  l'honorèrent  com- 
me un  héros.  Le  plaifant  hé- 
ros ,  qu'un  fou ,  qui  fait  périr  un 


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fr    ,  CL 

IjT^nd  nombre  d'enfans  ! 

CLÉGMEDE  ,  CUomcdes  , 
K^so/LtiJ'ïi; ,  (a)  Tun  des  trente  ty- 
rans ,  que  Lyfandre  Lacédémo- 
nien  établit  pour  gouverner  l'État 
d* Athènes ,  après  avoir  pris  cette 
ville.  Il  fut  chaffé  par  Thrafibule, 
&  fe  fauva  avec  ceux  de  Tes  col- 
lègues qui  échappèrent  à  ce  brave 
Athénien ,  la  quatrième  année  de 
la  94e.  Olympiade ,  401  ans  avant 

CLÉOMEDE  ,  Cleomedes  ^ 
KMofjtiivK, ,  (Jf)  l'un  de  ces  braves 
officiers  qui  fécondèrent  (i  bien 
Lyfatidre  à  ^gos  Potamos.  Il 
étoit  dé  Samos  ,  félon  Paufanias, 

CLÉOMÉDON,  CUomcdon , 
Kxgçyuf/cDV  ,  (c)  fut  député  vers 
les  Achéens  par  Philippe ,  roi  de 
Macédoine.  L'objet  de  cette  dé- 
putation  étoit  d'engager  ce  peu- 
ple à  fe  déclarer  pour  les  Macé- 
doniens contre  les  Romains. 

CLÉOMÉDON ,  Cleomedon, 
Kjtge^//^y,  père  de  Cléénétus. 
Voye;;^  Cléénétus. 

CLÉOMÉDON  .Chamedon , 
K^iofJLti'm ,  (<f)  filf  d'un  certain 
Cléon  ,  dont  Démofthene  fait 
mention  dans  une  de  fes  haran- 
gues. 

CLÉOMENE  I,  CUomenes  , 

K\eof4€yyc  ,  (f)   fils  d'Anaxandri- 

dès ,  roi  de  Sparte  y  fuccéda  à  fon 

père  Tan  557  avant  l'Ere  Chré- 

^  tienne. 

Il  ne  fut  pas  plutôt  fur  le  trô- 
ne 9  qu'il  leva  une  grofle  armée , 


(4)  Xenoph.  p.  461. 
(A)  Pauf.  p.  6%$. 

(c)  Tit.Liv.  L.  XXXII.  c.  11. 

(d)  Dç{Qofih.  Orat.  in  fiœo;.  p. 


ipo8t 


C  L  357 

compofée  de  Lacé^émoniens  & 
de  leurs  alliés ,  &  entra  dans  TAr- 
golide.  Les  Argiens  de  leur  côté 
marchèrent  à  lui  en  ordre  de  ba- 
taille ;  mais  ils  furent  défaits  ;  cinq 
mille  d'entr'eux  fe  réfugièrent 
dans  un  bois  voifin  confacre  à  Ar- 
gus ,  fils  de  Niobé.  Cléomene  qui , 
fouvent  devenoit  furieux  &  ne  fe 
podédoit  plus  ,  commanda  aux 
Ilotes  dy  mettre  le  feu  ;  de  forte 
que  ce  bois  facré  fut  brûlé  avec 
ces  miférables  qui  imploroient  en 
vain  la  démence  du  vainqueur. 
De  là  »  il  mena  fon  armée  triom* 
phame  à  Athènes  >  délivra  les 
Athéniens  de  la  domination  ty- 
rannique  des  enfans  de  Pififlrate  ; 
&  par  de  fi  beaux  commence- 
mens,  rendit  fon  nom  6c  celui 
des  Lacédémoniens  célèbres  dans 
toute  la  Grèce.  Mais  quelque 
tems  après  ,  par  complaifance 
pour  un  certain  Athénien  nommé 
Ifagoras ,  il  fe  mit  en  tête  de  le 
faire  roi  d'Athenes«  Les  Athé- 
niens ,  indignés  d'un  pareil  def- 
fein  ,  prirent  les  armes  pour  dé- 
fendre leur  liberté  ;  &  Cléomene 
déchu  de  fon  e(pérance ,  ne  put 
faire  autre  chofe  (}ue  de  fe  ven- 
ger en  ravageant  l'Attique,  par- 
ticulièrement un  canton  nommé 
rOrgade ,  &  confacre  aux  Divi- 
nités ,  que  l'on  honore  à  Éleufis. 
Enfuiteil  pafla  dans  l'ifie  d'Égine, 
dont  il  fit  emprifonner  les  princi- 
paux habitans  ,  parce  qu'ils  fa- 
vorifoient   les  Perfes  ,  &  qu'ils 

(e)  Pauf.  pag.  m  ,  164»  16^.  Herocl. 
L.  III.  c.  148.  L.  V,  c.  41.  é-  fea.  L. 
VI.  c.  50.  &  feq.  L.  VII.  c.  148.  RoU, 
Hift.  Anç.  T;  II,  p.  147.  &  fmv.. 


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558  CL 

avoient  per(jadé  à  leurs  conéî- 
toyens  de  reconnoître  Darius, 
fils  d'Hyftafpe ,  pour  leur  fouve- 
rain  ,  en  lui  accordant  la  terre  & 
reau.     .  / 

Pendant  qu'il  étoit  à  Egine , 
Démaratus  »  roi  de  Sparte  »  mais 
de  Tautte  famille  ,  le  Hoircifloit 
dam  refprit  du  peuple*  Çleomè- 
ne ,  piqué  de  cette  infidélité  ,  ne 
fut  pas  plutôt  de  retour ,  qu'il  prit 
des  mefures  pour  dépouiller  Dé- 
inaratus  de  la  royauté  ;  première- 
ment t  il  gagna  la  Pythie  par  des 
libéralités^  Si  Teneagea  à  ne  rien 
répondre  aux  Lacédémoniens  que 
ce  qu'il  lui  diâeroit  lui-même  ;  puis 
ayant  gagné  auffi  Léotychide, 
parent  de  Démaratus ,  &  dufang 
royal  cotnme  lui ,  il  le  porta  à  lui 
diiputer  la  courotine.  Léotychide 
fçut  fe  prévaloir  d'une  parole , 
qu'AriAon ,  père  de  Démaratus , 
avoit  laifTé  échapper,  lorfqu'aa 
fujet  de  la  naiiTance  de  fon  fils , 
il  dit  tout  haut  &  fort  imprudem- 
ment que  cet  enfant  ne  pouvoir 
Ïas  être  de  lui.  Sur  ce  fondement 
léotychide  prétendoit  que  Dé- 
maratus étoit  bâtard.  Cette  affaire 
par  ordre  des  Lacédémoniens ,  fut 
portée  à  Delphes  comme  toutes 
les  autres.  La  Pythie  répondit  tout 
ce  que  Cléomème  voulut;  &  Dé- 
maratus f  facrifié  à  la  vengeance 
de  fon  Collègue ,  perdit  injufle- 
ment  la  couronne.  Peu  de  tems 
après ,  Cléomène  mourut ,  ayant 
tourné  fes  propres  mains  contre 
lui  ;  car  ,  dans  un  de  ces  accès  de 
fureur,  auxquels  il  étoit  fujet  «  il 


CL 

prit  fon  épée  &  fe^la  pafîa  au  tra- 
vers du  corps.  Les  Argiens  regar- 
dèrent ce  genre  de  mort  comme 
une  jufte  punition  de  la  cruauté 
qu'il  avoit  exercée  contre  ces  mal- 
heureux fupplians  qui  s'étoient 
réfugiés  dans  le  bois  facré  d'Ar- 
gus. 

Cléomène  I  mourut  avant  la 
bataille  de  Salamine ,  gagnée  par 
les  Grecs  contre  Xerxès  ,  la  pre- 
mière année  de  la  75  .e  Olympia- 
de ,  480  ans  avant  J.  C. 

CLÉOMÈNE  II,  Cleomeries  , 
KjisojMsrHç ,  (i2)'fils  de  Cléomhro- 
te ,  rdî  de  Sparte ,  fuccéda  envi- 
ron l'an  370  avant  l'Ère  Chré- 
tienne, à  fon  frère  Agéfîpolis» 
dont  le  règne  n'avoît  duré  qu'un 
an.  Celui  de  Cléomène  II  dura 
bien  plus  long- tems ,  puifqu'il  fut 
de  trente- quatre  ans*  Ce  Prince 
ei^  deux  fils  ,  Acrotate  &  Cléo- 
nyme.  Aréus  fils  du  premier ,  qui 
étoit  mort  avant  fon  père  Cléo- 
mène ,  fut  par  le  Sénat  déclaré 
fucceffeur  de  fon  ayeul  ;  ce  qui 
caufa  une  longue  guerre. 

CLÉOMÈNE,  Cleomenes  , 
X^eo/^gi'Mç.  (h)  Diodore  de  Sicile  ^ 
fous  l'an  309  avaht  Jefus-Chrift, 
écrit  que  Cléomène  ,  roi  des  La- 
cédémoniens, mourut  cette  an- 
née là  après  un  règne  de  foixante 
ans  &  dix  mois ,  &  que  fon  fils 
Aréus  ,  qui  lui  fuccéda  ,  régna 
quarante-quatre  ans. 

La  Chronologie  de  Diodore  de 
Sicile  i^e  paroît  pas  s'accorder  ici 
avec  celle  des  autres  Auteurs. 

CLÉOMÈNE  m ,  Cleomenes, 


C«)  Dîocl.  Sicul.  p.  488.  Pauf.  p*  t3  »  1    W  I^io<l*  Sicul.  p.  745,  747, 
168.  Plut.  T.  I.p.  796.  1 


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CL       . 

K>foA<e'vwc ,  {a)  6ls  de  Léonidas , 
roi  de  Sparte ,  naquit  la  quatriè- 
me année  de  la  1 3 1  .c  Olympiade, 
deux  cens  cinquante  -  trois  ans 
avant  Jefus  •  Chrift.  Sa  mère  fe 
nommoit  Cratéficléa.  Léonidas , 
après  avoir  livré  Agis  aux  fier  niers 
fupplîces  ,  fit  épouier  fa  femme  à 
ion  fils  Cléomène  »  qui  n'étoit 
pourtant  pas  encore  en  âge  d'être 
marié.  Mais  «  ce  jeune  Prince  n'en 
eut  pas  moins  d'att|chement  pour 
elle ,  attachement  qu'il  conçut 
dès  le  premier  jour  de  fon  ma- 
riage. 

Cléomène  avoit  beaucoup  de 
grandeur  d'ame  &  une  violente 
paflion  pour  la  gloire.  La  nature 
avoi|^nélé  dans  fon  tempéra- 
menlRie  pointe  &  un  éguillon  de 
vivacité  impétueufe ,  qui  le  pouf- 
foit  avec  ardeur  a  tout  ce  qui  lui 
parotflbit  beau  &  honnête.  Or ,  il 
ne  trouvoit  rien  de  fi  beau  que  de 
commander  à  fes  citoyens  de  leur 
bon  gré  &  de  leur  propre  confen* 
tement  ;  mais ,  il  trouvoit  aufll 
qu'il  n'étoit  pas  contraire  à  la  gloi- 
re d'un  fage  gouvernement,  d'ufer 
de  quelque  violence  pour  réduire 
à  ce  qui  eft  utile  au  bien  public , 
le  petit  nombre  d'injuftes  qui  s'y 
oppofent  pour  leur  intérêt  parti- 
culier. 

Il  n'étoit  point  du  tout  content 
de  l'état  où  il  voyoit  Sparte.  Tous 
les  citoyens  étoieiH  amollis  par  la 
fainéantife  &  par  les  voluptés.  Le 
Roi  même  ,  content  de  vivre  en 
paix  y   négligeoit  abfolument  les 

(#)  Plut.  T.  L  p.  795.  é-  fiq*  Pauf. 
pag.  100.  ér/e^.  Juft.  L.  XXVIlI.c.  4. 
Roll.  Hift.  Ane.  T.  IV.  p.  510  ,  511. 
é"  fmv*  Mém,  de  TAcad.  dç9  Infcript. 


c  L  359 

affaires.  Perfonne  n'étant  touché 
du  bien  public  »  chaque  particulier 
ne  s'occupoii  que  de  fes  intérêts 
&  du  foin  d'enrichir  fa  maifon  aux 
dépens  de  la  ville  même*  Loin 
(|u'on  fongeât  à  £ure  exercer  les 
jeunes  gens ,  &  à  les  former  à  U 
tempérance  ^  à  la  patience ,  &  à 
l'égalité,  il  étoit  très •^ dangereux 
feulement  d'en  parler  ;  cela  feul 
ayant  été  la  cauie  de  la  mort  d' A- 

On  dit  que  Cléomène  encore 
jeune  3  avoit  entendu  quelques 
difcours  de  Philofophie  «  dans  le 
tems  que  Sphérus ,  qui  venoit  des 
bords  du  Boryllhène ,  pafia  à  La- 
cédémone,  &s'appliqvia  avec  aflez 
de  fuccès  à  inltruire  les  jei\nes 

fens.  Attffi-tôt  après  la  mort  de 
.éonidas  fon  pere^  il  lui  fuccéda 
au  royaume  de  Sparte*  Il  avoit 
alors  environ  dix  •>  fept  ans  ;  |bi- 
vant  Paufainas ,  il  fe  fervit  d'à* 
bord  de  l'autorité  des  Éphores 
pour  faire  empoifonner  le  roi  Eu- 
rydamidas  encore  enfant  9  &  de 
l'autre  maifon  des  Rois  de  Sparte. 
Quoi  qu'il  en  foit ,  Cléomène, 
quoique  jeune  ^    vit  avec  y  peine 

Su'il  n'avpit  que  le  vain  titre  de 
Loi ,  &  que  toute  Tau  conté  étoic 
entre  les  mains  des  Éphores ,  qui 
abufoient  étrangement  dé  leur 
pouvoir.  Ilfongea  dès*Iors  à  chan- 
ger le  gouvernement  ;  &  comme 
il  trouvoit  peu  de  perfonnes  dif- 
pofées  à  entrer  dans  fes  vues  ,  il 
crut  que  la  guerre  lui  en  facilite- 
roit  l'exécution^  '&  il    travailla 

&  Bell.  Lctt.  Tom.  V.  pag.  1^ ,  175* 
T.  Viir.  p.  lao.  &  friv.  T.  XIV.  p.  8u 
ër/«iv.  T.  XV.  p.  415. 

Zîv 


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^6o  C  L 

a  commettre  fa  ville  avec  les 
Achéens  ,  qui  heureufement 
avoient  donné  à  Sparte  quelque 
fujec  de  plainte  ;  car ,  dès  que 
Léonidas  fut  mort  $  Aratus  com- 
mença à  harceler  les  Arcadiens  > 
pour  tâter  le  courage  des  Lacédé- 
moniens ,  &  pour  faire  connoître 
en  même  tems  qu'il  méprifoit 
Cléomène  comme  un  homme  fort 
jeune,  &  qui  n'avoit  aucune  expé- 
rience. 

Dès  que  les  Éphores  furent  in- 
formés de  cet  aâe  d'hoftilité ,  ils 
envoyèrent  Cléomène  s'emparer 
du  temple  de  Minerve ,  près  de  la 
ville  de  Belbine.  Ce  Prince  s'en 
étant  faifi  6c  l'ayant  fortifié,  Ara- 
tus n'en  fit  aucune  plainte;  mais, 
il  leva  fon  camp  la  nuit ,  6c  s'en 
retourna  fans  rien  faire  ,  croyant 
que  fa  marche  a  voit  été  bien  ca- 
chée. Mais  ,  le  lendemain  ,  Cléo- 
mène ,  en  fe  moquant ,  lui  écri- 
vit comme  à  fon  ami  pour  lui  de- 
mander où  il  menoit  fon  armée  la 
nuit  dernière.  Aratus  lui  fit  répon- 
fe,  qu'ayant  eu  avis  qu'il  alloit 
fortifier  Belbine ,  il  étoit  forti  avec 
fes  troupes  pour  l'en  empêcher. 
Cléomène  lui  récrivit  &  lui  man- 
da qu'il  étoit  bien  perfuadé  de 
ce  qu'il  lui  difoit  ;  mais  ,  ajoûta-t- 
il ,  je  vous  prie  de  m'expliquèr  , 
û  cela  ne  vous  importe  pas  beau- 
coup ,  pourquoi  vous  faifiez  fui- 
vre  tant  de  flambeaux  &l  tant  d^é- 
chelles.  A  ce  trait  de  moquerie  , 
Aratus  fe  prit  à  rire  ,  6c  demanda 
quel  fujet  c'étojf  que  ce  jeune 
homnjp.  Démocrate  le  Lacédé- 
monien ,  qui  étoit  banni  de  fon 
païs,  lui  répondit  que  s'il  avoit 
quelque  cbofe  à  entreprendre  con*. 


CL 

tre  les  Spartiates ,  il  étoit  tems 
qu'il  fe  hâtât  avant  que  les  ergots 
fuflent  venus  à  ce  poulet. 

Peu  de  tems  après ,  Cléomène 
étant  campé  dans  l'Arcadie  avec 
très-peu  de  cavalerie *6c  quelques 
trois  cens  honrimes  de  pied  ,  les 
Éphores  qui  craignoient  la  guerre, 
lui  envoyèrent  ordre  de  revenir. 
Mais ,  d  abord  après  fon  retour  à 
Sparte ,  Aratus  ayant  pris  la  ville 
de  Caphyes,^s  Éphores  firent 
repartir  Cléomène  tout  auffi-iôt. 
Dans  fa  marche ,  il  prit  la  place 
de  Méthydrie  d'où  il  fit  des  cour- 
fes  dans  tout  lé  païs  d'Argos.  Les 
Achéens  fe  mirent  d'abord  en 
campagne  6c  marchèrent  contre 
lui  avec  vingt  mille  honu^sde 
pied  6c  mille  chevaux ,  iKs  la 
conduite  d'Ariftomaque.  Cléomè- 
ne les  rencontra  près  de  la  ville 
de  Pallantium ,  6c  leur  préfenta  la 
bataille  ;  mais  ,  Aratus ,  ef&ayé 
de  cette  audace  ,  ne  voulut  pas 
que  le  Général  hazardât  le  com- 
bat ,  6c  ft  retira  chargé  d'injures 
par  les  Achéens ,  6c  méprifé  par 
les  Lacédémoniens  qui  n'étoient 
pas  en  tout  cinq  mille  hommes. 
Cette  retraite  enfla  tejjement  le 
courage  à  Cléomène  ,  qu'il  en 
étoit  tout  fier  auprès  de  fes  ci- 
toyens ,  6c  qu'il  les  faifoit  reffou- 
venir  d'un  mot  de  leurs  anciens 
Rois  ,  qui  difoit ,  que  les  Lacé* 
démoniens  ne  demandoiem  jamais 
combien  les  ennemis  étoient,mais 
où  ils  étoienr. 

Quelque  tems  après,  ayant 
marché  au  fecours  des  Èléens ,  à 
qui  les  Achéens  faifoient  la  guer- 
re ,  il  rencontra  près  du  mont 
Lycée  j  les  Achéens  qui  reve^ 


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CL 

noient  déjà  de  leur  expédition ,  & 
tomba  fur  eux  avec  tant  de  furie , 
qu'il  effraya  &  mit  en  déroute 
toute  leur  armée ,  leur  tua  beau- 
coup de  monde,  &:  fit  grand  nom- 
bre de  prifonniers. 

Gléomène  ,  de  retour  à  Sparte, 
fongea  férieufement  À  Texécution 
de  fon  grand  defTein.  Il  eut  afTez 
de  crédit  pour  faire  revenir  de 
Meffène  Archidamusjfrere  d'Agis, 
qui ,  étant  de  l'autre  maifon  roya- 
le de  Sparte ,  avoit  un  droit  in* 
conteflable  à  la  couronne.  II  étoit 
perfuadé  que  lautorité des  Épho- 
res  feroit  beaXicoup  plus  foible , 
quand  le  trône  de  Sparte  feroic 
rempli  par  fes  deux  Rois ,  qui 
étant  bien  unis  ^  pourroient  la 
'contrebalancer.  Mais,  malheureu- 
fement,  ceux  qui  étoient  coupables 
de  la  mort  de  fon  frère  Agis, 
trouvèrent  le  moyen  de  l'afTafli- 
ner.  Cléomène  n'en  perfifta  pas 
moins  dans  la  réfolution  qu'il  avoit 
formée  de  changer  l'état  de  Spar- 
te. Il  perfuada  aux  Éphores  ,  à 
force  d'argent ,  de  lui  décerner 
le  commandement  d'une  armée. 
Il  gagna  encore  plufieurs  autres 
citoyens ,  par  le  moyen  de  fa 
niere  Cratéficléa  ,  qui  lui  fournif- 
foit  en  abondance  tout  l'argent 
qui  lui  étoit  néceflaire,  &  qui  étoit 
ravie  de  fervir fon  ambition.  Car, 
on  dit  même  que  quoiqu'elle  ne 
fe  fouciât  point  ducou^  de  fe  re- 
marier ,  elle  époufa  ,  uniquement 
pour  l'amour  de  lui ,  le  premier 
homme  de  Sparte  en  réputation  & 
e#crédit. 

Quelque  tems  après ,  Cléomè- 
ne remporta  encore  un  nouvel 
avantage  fur  les  Achéens  près  de 


CL  3^1 

Mégalopolîs ,  oïl  Lyfiade  fut  tué , 
pour  s'être  attaché  trop  vivement 
à  la  pourfuite  des  Lacédémoniens, 
qui  d'abord  avoient  été  battus* 
Cette  viftoire  fit  un  grand  hon- 
neur au  jeune  Roi ,  6c  augmenta 
beaucoup  fon  crédit.  Depuis  ce 
tems-là,  il  ne  conçut  plus  que  de 
grands  deiTeins  ;  &  perfuadé  que 
s'il  pouvoit  difpofer  les  affaires 
comme  il  le  prétendoit,  il  feroit 
plus  facilement  la  guerre  aux 
Achéens ,  &  les  vaincroit  avec 
moins  de  peine;il  repréfenta  à  Mé- 
giftone,qui  étoit  le  mari  de  fa  mè- 
re ,  qu'il  falloit  fecouer  le  joug  des 
Éphores  , 'remettre  tous  les  biens 
en  commun  ,  &  par  cette  égalité 
relever  la  grandeur  de  Sparte ,  &, 
redonner  à  leur  ville  la  principauté 
de  toute  la  Grèce ,  telle  que  l'a- 
vdient  eue  teurs  prédéceffeurs. 
Mégiftone  ayant  donpé  les  mains 
à  cette  propofition,  Cléomène  prit 
encore  avec  lui  deux  ou  trois  de 
fes  amis. 

Il  arriva  dans  ce  jour-là  ,  qu'un 
des  Éphores  ,  couchant  dans  le 
temple  de  Pafiphaé,  eut  un  fonge 
admirable.  Il  lui  fembla  que  dans 
le  lieu  oit  les  Éphores  tenoient 
l'audience  ,  il  n'y  avoit  qu'un  fiè- 
ge ,  6c  que  les  quatre  autres 
étoient  ôtés  ;  &  que ,  comme  il 
étoit  étonné  de  ce  changement , 
il  entendit  une  voix  ,  qui ,  venanc 
du  fond  du  temple,  lui  dit  que 
cela  étoit  plus  expédient  pour 
Sparte.  L'Éphore  ayant  rapporté 
le  lendemain  cette  vifion  à  Cléo- 
mène ,  il  en  fut  d'abord  tout  trou- 
blé ,  dans  la  penfée  que  TÉphore, 
fur  quelque  foupçon  qu'il  avoit  de 
fon  defleio,  venoit  le  fonder ,  par 


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f 

le 


562  CL 

ce  fonge  fait  à  plaifir.  Maïs  ,  an 
moment  après  ,  voyant  que  l'É- 
phore  lui  difoitja  vérité  ,  il  fe  re- 
mit; 6l  prenant  avec  lui  tous  ceux 
de  (es  citoyens  qui  lui  étoient  les 
plus  fufpeâs ,  comme  les  plus  ca- 
pables de  s'oppofer  à  Ton  entrepri- 
se, il  fe  faifit  des  villes  d'Héréa 
&  d*AIféa  f  qui  obéifToient  aux 
Achéens,rétabIitOrchomène ,  & 
alla  affeoir  Ton  camp  devant  Man- 
trnée ,  oii  Aratus  avoit  lailTé  une 
jarnifi^n.  Enfin,  il  lafla  tellement 
les  Lacédémoniens  par  Tes  longues 
marches  ,  qu'ils  le  prièrent  de  les 
laiiTer  dans  l'Arcadie  prendre 
quelque  repos,  ce  qu'il  fit;  & 
avec  Tes  foldats  étrangers  ,  il 
sVn  retourna  droite  Sparte. 

Chemin  fai^nt,  il  communi- 
qua fon  deiTeih  à  ceux  qui  témoi- 
gnoient  le  plus  d*&fFeâion  pour 
loi .  &  en  qui  il  avoit  le  plus  de 
confiance ,  &  s'avança  tout  à  fori 
aife  pour  arriver  juftement  dans  le 
tems  que  les  Éphores  feroient  à 
table.  Quand  il  approcha  de  la 
ville ,  il  envoya  des  gens  fûrs  , 
qui  entrèrent  l'épée  à  la  main  dans 
la  fâlie  oh  ils  foupoient ,  tuèrent 
quatre  de  ces  magidrats ,  6c  dix 
de  ceux  qui  avoient  pris  les  armes 
pour  les  recourir.  Agéfilaus.qu'çn 
iavoit laide  pour  mort,  fe  fauva. 
On  ne  fit  plus  de  violence  à  per- 
fonne  ;  &  c'en  étoit  bien  affez. 

Dès  le  lendemain ,  Cléomène 
fit  afficher  les  noms  de  quatre- 
vingts  citoyens ,  qui  dévoient  être 
bannis.  Il  ôta  de  la  falle  d'audience 
tous  les  fièges  des  Éphores  \  ex- 
cept;é  un  feuloîiil  devoit  être  affis 
pour  rendre  la  juftice  ;  &  ayant 
convoqué  une  aÔemblée  du  peu- 


CL 

pte  ,  !l  y  déduifit  les  raifons  delà 
conduite  qu'il  avoit  tenue.  Il  re>- 
préfenta  l'abus  énorme  que  les 
Éphores  faifoient  de  leur  pou- 
voir, pour  anéantir  toute  autorité 
légitime ,  pour  chaffer  leurs  Rois, 
ou  même  pour  lesi  faire  mourir 
fans  aucune  forme  de  juftice  ,  & 
pour  menacer  ceux  qui  défiroient 
de  revoir  dans  Sparte  le  plus  beau 
&  le  plus  divin  des  gouvernemens. 
Il  ajouta  qu'il  étoit  aifé  de  voir 
qu'il  ne  cherchoit  point  fon  pro- 
pre intérêt ,  itiais  uniquement  ce- 
lui des  citoyens  ,  en  faifant  revi- 
vre parmi  eux  l'égalité  &  la  dil- 
cipline  que  le  fage  Lycurgue  y 
avoit  autrefob  établies,  ôc  aux- 
quelles Sparte  devoit  toute  ùl 
gloire  &  toute  fa  réputation. 

Après  avoir  ainn  parlé,  il  fut 
le  premier  qui  mit  tout  foo  bien 
en  commun.  Son  beau-pere  Mé- 
giftone  ,  qui  étoit  fort  riche ,  en  fit 
de  même.  Après  lui,  tous  Tes  amis, 
enfin  tous  les  autres  citoyens  fui- 
virent  cet  exemple ,  6c  tout  le 
pais  fut  partagé.  Il  afiîgna  inêine 
une  portion  à  chacun  de  ceux  qu'il 
avoit  bannis ,  &  promit  de  ^  les 
rappeller ,  dès  que  les  affaires' fe- 
roient tranquilles.  Après  avoir 
rempli  le  nombre  des  citoyens  des 
plus  honnêtes  gens  des  pais  cir- 
convoifins ,  il  leva  quatre  mille 
hommes  de  pied ,  &  leur  enfeigna 
à  fe  fervir  de  picques  à  deux 
mains ,  au  lieu  de  javeUnes ,  &  i 
porter  des  boucliers  avec  de  bon- 
nes anfes  à  pafTer  le  bras  ,  &  nofl 
avec  des  courroies  qui  s'alU* 
choient  avec  des  boucles. 

Enfuite  ,  il  tourna  tous  fes  foins 
du  c6té  de  l'éducation  des  enfaos  1 


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CL 

&  travailla'  à  rétablir  la  dîfcipline 
appellée  laconique  ;  à  quoi  le 
philofophe  Sphërus  l'aida  beau-  n 
coup.  Bien-tôt,  les  exercices  & 
les  repas  reprirent  leur  ancien  or- 
dre &  leur  ancienne  gravité ,  la 
plupart  des  citoyens  embradant 
volontairement  cette  façon  de  vi- 
,  vre  fage  ,  noble  &  réglée  ;  &  le 
refle  ,  qui  étoit  en  petit  nombre, 
s'y  rangeant  par  néceflîté.  Mais, 
pour  adoucir  ce  nom  de  Monar- 
que, &  pour  ne  pas  effaroucher 
les  citoyens ,  il  nomma  Ton  frère 
Eudidas  ,  Roi  avec  lui  ;  &  ce  fut 
la  première  fois  que  les  Spartiates 
eurent  deux  Rois  enfemble  de  la 
même  fanîille. 

Cléomène ,  fe  doutant  bien  que 
les  Achéens  &  Aratus  penferoient 
indubitablement  qu'il  n'oferoit  for- 
tir  de  fa  ville  dans  le  mouvement 
&  le  trouble  qu'y  avoient  excité 
les  nouyautés  qu'il  venoit  d'intro- 
^  duire  dans  lé  gouvernement,  crut 
que  rien  ne  lui  feroit  plus  hono- 
rable ni  plus  utile ,  que  de  faire 
voir  à  Tes  ennemis  la  bonne  volon- 
té des  troupes  à  fon  égard  ,  &  en 
même  tems  l'afFeâion  de  fes  ci- 
toyens pour  lui ,  &  l'affurance  oh 
il  étoit  que  les  nouveaux  change- 
mens  n'avoient  point  aliéné  les 
efprits.  Il  fe  jetta  ddnc  d'abord 
dans  les  terres  de  Mégalopolis ,  y 
fit  un  grand  déeât ,  &  amaila  un 
butin  très-conudérable.  Au  rava- 

Î^edes  terres, il  ajouta  l'infulte  , 
iaifant  célébrer  des  jeux  &  repré- 
fenter  un  fpeâacle  pendant  une 
journée  entière ,  prcfque  fous  les 
yeux  des  ennemis  ;  non  qu'il  y 
prît  aucun  plaifir  par  lui-même , 
ihais  il  fûfoit  voir  par  ce  trait  de 


C  L  3^} 

mépris  8i  de  bravade ,  combien 
il  fe  tenoit  ailuré  de  les  vaincre. 

Quoiqu'il  fût  aflez  ordinaire 
pour  lors  de  voir  à  la  fuite  des 
autres  armées  des  troupes  de  co- 
médiens ,  de  farceurs ,  de  danfeu- 
fes ,  fon  camp  étoit  pur  &  net  de 
pareilles  diflbiutions.  Les  jeunes 
gens  paiToient  la  plus  grande  par- 
tie de  leur  tems  à  s'ex.ercer ,  & 
les  vieillards  à  les  former  &  à  les 
inftruire.  Ils  ne  faifoient  confifter 
leurs  délaffemens ,  que  dans  des 
entretiens  honnêtes ,  doux ,  fami- 
liers ,  qu'ils  avoient  foin  d'égayer 
par  des  railleries  fines  &  délicates, 
mais  modef^es ,  &  jamais  mor- 
dantes ni  injurieufes.  C'étoit  la  lai 
que  le  fage  Légiflateur  de  Sparte 
y  avoit  établie  pour  les  conver- 
fations. 

Cléomène  étoit  lui-même  com-  ^ 
me  le  maître  qui  formoit  ainfi  fês 
citoyens ,  moins  par  des  dîfcours 
que  par  fon  exemple  ,  montrant 
dans  fa  vie  fimple ,  frugale  ,  & 
qui  n'Woit  rien  au  -  defTus  du 
moindre  de  fes  fujecs  ,  un  modèle 
fenfible  de  fageffe  &  de  tempé- 
rance ;  &  c'efl  ce  qui  Taida  infini- 
ment à  exécuter  les  grandes  cho- 
fes  qu'il  fit  en  Grèce.  Car  ,  ceux, 
que  leurs  affaires  àttiroîent  à  la 
cour  des  autres  Rois,  n'admh-oient 
pas  tant  leurs  richefTes  &  leur 
magnificence,  qu'ils  détefloient 
leur  fierté  6cla  hauteur  avec  la- 
quelle ils  traittoient  ceux  qui  les 
approchoient.  On  n'avoit  point 
de  pardls  rebuts  à  efTuyer  à  la  cour 
de  Cléomène.  Avec  un  habit  fim- 
ple &  très-commun  ,  fans  gardes, 
prefque  fans*  officiers ,  il  donnoit 
des  audiences  aufS  longues  qu'on 


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36^  C  L 

le  vouloit ,  recevoit  tout  le  monde 
agréablement ,  ne  rebutoit  jamais 
perfonne;  &  par  cet  air  affable  ôc 
prévenant ,  il  fe  faifoit  générale- 
ment eûimer ,  aimer ,  &  refpec- 
ter. 

Sa  table  ordinaire  étoit  très- 
fimple  &  très'frugale,  &  vérita- 
blement laconique  à  trois  liis  feu» 
lement;  &  s'il  avoit  à  recevoir 
des  ambafladeurs  ou  des  étran- 

fjers  ,  on  ajoûtoit  deux  ou  trois 
its  ,  &  alors  elle  étoit  fervie  par 
fes  officiers  un  peu  plus  fplendide- 
inent.  Cette  bonne  chère  ne  con- 
fiftoit  ni  en  ragoûts ,  ni  en  pâtif- 
ferie,  mais  en  une  plus  grande 
quantité  de  viandes  ^  &  en  un  vin 
un  peu  meilleur  ;  car  ,  il  reprit  un 
}our  un  de  fes  amis ,  qui ,  traitant 
des  étrangers,  leur  fervit  le  brouet 
noir  &  le  gâteau  ,  comme  on  en 
fervoit  aux  tables  publiques  ,  ap- 
pellées  Phidities  ;  &  il  lui  dit  que 
dans  ces  occafions ,  &  fur  tout 
avec  des  étrangers ,  il  ne  falloit 
pas  être  G  rigoureufement  attaché 
à  la  difcipline  laconique. 

Quand  la  table  étoit  levée ,  on 
apportoit  une  table  à  trois  pieds  , 
fur  laquelle  il  y  avoit  une  urne 
d'airain ,  remplie  de  vin ,  deux 
petites  buires  qui  cenoient  chacune 
deux  petites  mefures  ;  &  quelques 
tafles  d'argent  que  Ton  préfentoit 
h  ceux  qui  vouloient  boire  ;  car , 
perfonne  n'étoit  forcé  de  boire 
malgré  lui. 

Il  n'y  avoit  à  ces  repas  aucun 
divertiÂTement  ni  aucune  mufique, 
&  on  n'en  défiroit  point.  Cléomè- 
ne  divertiffoit  &  indruifoit  agréa- 
blement la  compagnie ,  &  égayoit 
la  table  par  fa  çonverfi^Mon»  foie 


CL 

en  faîfant  des  quedions  ,  Coït  en 
racontant  lui-même  des  hidoires 
plaifantes  &  utiles.  Ses  difcours 
les  plus  graves  ÔC  les  plus  férieux 
étoient  toujours  mêlés, d'enjoue- 
ment ;  Se  ce  qu'il  y  avoit  de  gra- 
cieux ÔL  d^agréable,  n  étoit  jamais 
corrompu  par  aucun  trait  trop 
libre ,  ni  par  la  moindre  diffbiu- 
tion.  11  trouvoit  peu  de  mérite  & 
peu  de  gloire  pour  un  Roi ,  à  ne 
pouvoir  s'attacher  les  hommes 
que  par  Tappas  des  richefles  &  de 
la  table  ;  au  lieu  que  de  les  gagner 
par  l'attrait  de  la  parole  ,  &  par 
la  douceur  d'un  commerce  où 
régnent  la  franchife  6c  la  bonne 
foi ,  c'eft  ce  qu'il  jugeoit  une  qua- 
lité vraiment  royale. 

Ce  caraâère  affable  &  pré- 
venant atta choit  les  troupes  à 
Cléomène  ,  les  rempliffoit  d'ar* 
deur  pour  fon  fervice  ,  &  par-là 
les  rendoit  en  quelque  forte  in- 
vincibles. Il  enleva  plufieurs  pla- 
ces aux  Açhéans,  ravagea  les 
terres  de  leurs  alliés  ,  &  s'avança 
près  de  Pheres ,  dans  le  deffein 
de  leur  donner  bataille,  ou  de 
décrier  Aratus  comme  un  lâche 
qui  avoit  fui  le  combat^  &  livré 
tout  leur  plat  pais  au  pillage.  Les 
Achéens  s'étant  donc  mis  en 
campagne  avec  toutes  leurs  trou- 
pes ,  6l  s'étant  campés  dans  les 
terres  de  Dymes  ,  Cléomène  les 
y  fuivit  ;  &  en  les  harcelant  &  les 
défiant  tous  lés  jours  avec  audace, 
il  les  contraignit  enfin  d'en  venir 
au  combat^  où  il  remporta  une 
grande  vidoirç.  Il  mit  leur  armée 
en  fuite ,  leur  tua  beaucoup  de 
monde  >  &  fit  grand  nombre  de 
prifonniers^ 


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CL 

Ce^  grandes  pertes  abattirent 
-fort  le  courage  des  Achéens,  Ils 
craîgnoient  tout  de  la  part  de 
Sparte  ,  furtout  fi  elle  fe  fortifioit 
du  fecours  des  Étoiiens  ^  comme 
le  bruit  en  couroit.  Âratus,  qui 
avoit  accoutumé  d'être  Capitaine 
générai  de  deux  années  ïnnê  y 
quand  Ton  tour  revint ,  &  qu'on 
Teût  éhi  ,  refufa  la  charge  ,  6c  à 
fa  place  Timoxène  fut  nommé 
Général.  On  blâma  fort  Aratus  , 
&  avec  raifon  ,  lui  qui  étoit  le 
pilote ,  d'avoir  abandonné  à  tin 
autre  le  gouvernail  de  fon  vaif- 
ièau  dans  un  tems  d  orage  &  de 
tempête  ,  oîi  il  auroit  été  conve- 
nable &  glorieux  de  s'en  faidr 
comme  par  force ,  û  Ion  s'y  étoit 
oppofé  ,  comme  l'hiftoire  en  four- 
nit plusieurs  exemples  ,  &  de 
ne  fonger  ainil  qu'à  fauver  TÉtat 
aux  dépens  même  de  fa  vie.  Que 
s'il  défefpéroit  des  affaires  &  des 
forces  des  Achéens  ,  il  de  voit 
plutôt  céder  à  Cléomène  ,  qui 
étoit  Grec  &  roi  de  Sparte  , 
que  d'appeller  à  fon  fecours  des 
^Etrangers  &  de  les  rendre  maîtres 
du  Péloponnèfe ,  comme  il  fit 
bientôt  après.  Mais ,  la  jaloufie 
étouffe  toutes  les  fages  réflexions  ; 
c'efl  une  maladie  que  la  raifon 
feule  ne  guérit  point. 

Les  Achéens ,  réduits  à  Textrê- 
mité  ,  fur  tout  depuis  la  dernière 
bataille  dont  nous  avons  parlé , 
envoyèrent  des  ambaffadeurs  à 
Cléomène ,  pour  traiter  de  paix. 
Cléomène  parut  d*abord  leur  im- 
pofer  des  conditions  trop  dures  ; 
mais,  il  envoya  lui-même  des 
ambaiTadeurs  de  fa  part  leur  pro- 
pofer  feulement  de  lui  accorder  le 


C  L  ^6s 

génératat  de  la  ligue  Achéenne} 
que  pour  le  refte  il  n'auroit  aucun 
différend  avec  eux  ,  &  qu'il  leur 
rendroit  leurs  prifonniers  &  leurs 
places.  Les  Achéens,  très-difpo- 
fés  à  recevoir  la  paix  à  ces  condi- 
tion^, prièrent  Cléomène  de  fe 
rendre  à  Lerne,  où  ils  dévoient 
tenir  une  aiTemblée  générale  pour 
conclure  ce  traité.  11  s'étoit  déjà 
mis  en  chemin  pour  s'y  rendre. 
Un  accident  imprévu  qui  lui  ar- 
riva ,  rompit  l'entrevue;  &  il 
s'en  retourna  à  Sparte. 

Cependant,  Aratus  manœuvra 
pour  emoêcher  que  la  négociation 
ne  fe  rffiouât;  mais,  comme  les 
Achéens  n'encroient  point  dans 
fon  fentiment,  il  eut  recours  à  un 
moyen ,  qui  ne  convenoit  à  aucun 
des  Grecs.  Ce  fut  d'appeller  à  fon 
fecours  Antigonus  ,  roi  de  Macé- 
doine ,  &  de  remplir  le  Pélopon- 
nèfe de  ces  mêmes  Macédoniens, 
qu'il  en  a  voit  chafTés  dans  fa  jeu* 
nefle. 

Les  Achéens  s'étant  enfuîteaf- 
femblés  à  Argos,  &  Cléomène 
s'y  éeant  rendu  de  Tégée ,  on  eut 
de  grandes  efpérances  que  le  traité 
de  paix  y  feroit  conclu  &  ligné. 
Mais ,  Aratus  qui  étoit  déjà  con- 
venu des  principaux  articles  avec 
Antigonus  ,  &  qui  craignoit  que 
Cléomène  ne  ruinât  &  ne  ren- 
verfat  tout,  foit  en  gagnant  le 
peuple  par  fes  belles  paroles ,  foit 
en  le  forçant  ,  lui  manda  qu'il 
entendoit  qu'il  entrât  feul  dans  Ar- 
gos ,  &  que  pour  la  fureté  de  fa 
perfonne  ,  on  lui  donneroit  trois 
cens  otages,  ou  que  s'il  n'étoit 
pas  content  de  cette  offre ,  il  n'a- 


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^66  CL 

voie  qu*à  s'approcher  avec  k% 
troupes ,  du  Gymnafe  qui  étoit 
hors  des  portes  de  la  ville  ;  & 
qu'on  |ui  donneroit  audience  ,  en 
ce  Heu.  Â  ces  paroles ,  Cléomène 
$*écria  que  c'étoit  une  très-grande 
injuftice  ,6c  qu'on  devoit  lui  taire 
cette  déclaration  avant  fon  départ^ 
&  ne  pas  attendre  qu'il  fût  arrivé 
aux  portes  de  leur  ville ,  pour  lui 
fignifier  qu'ils  fe  défîoient  de  lui, 
&  pour  le  renvoyer  fans  rien 
faire.  En  même  tems ,  il  écrivit 
aux  Achéens  une  longue  lettre  , 
dont  la  plus  grande  partie  étoit 
une  accusation  contre  Aratus.  De 
fon  côté ,  Aratu»  répondl^à  cette 
accufation,  en  vomifTant  contre 
lui  quantité  d'injures  dans  le 
difcours  qu'il  fit  au  peuple. 

Cléomène  partit  donc  fur  le 
champ  pour  s'en  retourner ,  6c  en  - 
même  tems  il  envoya  un  héraut 
aux  Achéens  >  leur  déclarer  la 
guerre.  Étant  entré  dans  leur  pais, 
il  prit  d'abord  d'emblée  la  ville  de 
Pellene^  Se  en  chaûa  la  garnifon 
des  Achéens.  Enfuite  ,  il  s'empara 
,  de  Phénée  6c  de  Pentelée.  Les 
Achéens ,  craignant  une  trahifon 
qui  fe  tramoit  à  Coriothe  6c  à 
Sicyone,  firent  partir  d'Argos  leur 
cavalerie  6c  l'intanterie  étrangère, 
&  les  envoyèrent  dans  ces  places 
pour  les  garder  ,  pendant  qu'eux 
de  leur  côté  s'étanl  tous  rendus  à 
Argos ,  y  célébroient  les  jeux  Né- 
méens  avec  beaucoup  de  magnifi- 
cence. Cléomène  crut  avec  raifon 
Îru'une  telle  circonftance  pourroit 
acilement  \k  rendre  maître  de 
cette  ville.  .En  eftet,  s*étanc  ap- 
proché la  nuit  des  murailles,  ii 
afiiaya   tellenient  les  habitans. 


CL 

qu'il  n'y  en  eut  pas  un  féal  qui 
oiât  fe  mettre  en  défenfe«  JAzis , 
ils  eurent  garnifon,  donnèrent 
vingt  de  leurs  principaux  citoyens 
pour  otages ,  firent  un  traité  d'al- 
liance avec  les  Lacédémoniens,  6c 
abandonnèrent  le  commandement 
à  Cléomène. 

Ce  iuccès  ne  fervît  pas  peu  à 
augmenter  fa  réputation  ,  6c  à 
accroître  fa  puiflance  ;  car ,  les 
anciens  rois  de  Sparte ,  quelques 
efforts  qu'ils  euffent  faits,n*avoiem 
jamais  pu  s'affurer  de  la  ville  d'Ar- 
gos.  Pyrrhus  même  ,  qui  étoit  un^ 
crès-grand  capitaine  ^  après  l'a- 
voir prife  d'afFaut ,  ne  put  la  con* 
ferver  ,  mais  y  fut  tué  6c  y  perdit 
une  grande  partie  de  fon  armée. 
C'eft  pourquoi  ,  l'on  adnùroit 
d'autant  plus  la  diligence  6c  le 
grand  fens  de  Cléomène  ;  6c  ceux, 
qui  auparavant  fe  moquoient  de 
lui  quand  il  fe  vantoit  qu'il  imitoit 
Solon  6c  Lycurgue  en  aboliffant 
les  dettes ,  6c  en  /endant  tous  les 
citoyens  égaux  en  biens ,  étoienc 
alors  entièrement  perfuadés ,  6c 
avouoient  fincèrement  qu'il  étoir 
feul  la  caufe  du  changement  qui 
étoit  arrivé  au  courage  des  Spar- 
tiates. Car  ,  avant  ce  jour  ,  ils 
étoient  û  abattus  6c  û  peu  capa* 
blés  de  fe  défendre  eux-mêmes , 
que  les  Écoliens  étant  entrés  un 
jour  en  armes  dans  leur  pais  ,-  en 
emmenèrent  en  une  feule  fois 
cinquante  mille  efclaves. 

La  prife  d'Argos  fut  fUivîe  de 
celle  de  plufieurs  autres  villes  du 
Péloponnèfe.  Corinthe  même  fe 
rendit  à  Cléomène  à  l'exception  de 
la  citadelle ,  que  les  Achéens  réfo- 
lurent  de  livrer  à  Aatigonus.  Ce 


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CL 

prince  fut  donc  appelle.  Les  afFai- 
xes  de  Qéomène  commencèrent 
bientôt  à  eii  fouffrir.  Les  Argiens 
fe  révoltèrent ,  &  comme  il  étoit 
en  marchç  pour  fe  rendre  à  Man- 
tinée  ,  on  vint  le  foir  lui  appren- 
dre la  mort  de  fa  femme ,  qu'il 
aimoit  tellement  qu'il  n*avoit  pas 
la  force  de  fe  tenir  éloigné  d*elle 
une  camp^ne  entière.  Le  lende- 
main ,  au  point  du  jour  ,  il  prit  le 
chemin  de  Sparte ,  où  il  arriva  de 
bonne  heure  ;  6c  après  avoir  don- 
né quelques  momens  à  fa  douleur 
dans  fa  maifon  avec  fa  mère  & 
(es  enfans  ,  il  reprit  incontinent 
le  foin  des  affaires  publiques.  En 
ce  tems-là  9  Peolémée  ,  qui  lut 
promettoit  du  fecours  ,  fui  en- 
voya demander  pour  otages  fa 
mère  &  fes  enfans.  Cléomène  fut 
affez  long-tems  fans  ofer  déclarer 
à  fa  mère  cette  demande  du  roi 
d'Egypte.  Mais ,  elle  n'en  fut  pas 
plutôt  inftruite  qu'elle  partit  fans 
la  moindre  difficulté. 

Cependant ,  Antieonus  s'ébant 
rendu  maître  de  Tégee ,  de  Man- 
tinée ,  d'Orchomène  >  &  de  plu- 
fieurs  autres  villes  9  Cléomène 
réduit  à  défendre  la  Laconie  feule , 
affranchit  tous  les  Ilotes  qui  furent 
en  état  de  donner  cinq  mines  , 
c*eft-à-direy  deux  cens  cinquante 
livres.  De  cette  contribution  il 
ramaffa  jufqu'à  cinq  cens  talens,  & 
arma  à  la  Macédonienne  deux  mille 
de  ces  Ilotes  pour  les  oppofer  au 
corps  des  Leucafpides  d'Antigo- 
nus.  Il  forma  enfuite  une  entre^ 
prife  à  laquelle  certainement  on 
ne  devoit  pas  s'attendre.  La  ville 
de  Mégalopolis  étoit  en  ce  tems- 
là  très-confidérable ,  &  elle  ne 


CL  367 

cédolt  ï  Sparte  même,  ni  en  grao- 
deur  ,  ni  en  pui/Tance.  Il  longea  k 
brufquer  cçtte  place,  dcàrepi* 
porter  d'emblée.  Antigomis  avott 
envoyé  la  plus  grande  partie  de 
fes  troupes  en  quartier  d'hiver 
dans  la  Macédoine  ,  &  étoit  de- 
meuré à  Égium  dans  l'affemblée 
des  Achéens  ,  a6n  d*y  prendre 
des  mefures  avec  eux  pour  la 
campagne  prochaine.  Qéomène 
fuppofoit ,  &  fa  conjeâuré  n'étocc 
pas  mal  fondée ,  que  la  garnifon 
de  la  ville  n'étok  pas  bien  forts , 
qu'elle  feroit  peu  fur  fes  gardes  , 
ne  craignant  aucune  infulte  de  la 
part  d'un  ennemi  auffi  foible  que 
lui ,  &  que  pour  peu  qu*il  fit  de 
diligence ,  il  mettroit  Antigonus  , 
oui  en  étoit  aâuellemem  éloigné 
de  trois  journées  de  chemin,  hors 
d'état  de  la  (êcourir.  La  chofe 
arriva  comme  il  l'avoit  projettée. 
Étant  arrivé  de  nuit ,  il  efcalada 
les  murs ,  &  fe  rendit  maître  de 
la  ville  prefque  fans  réfiftance.  La 
plupart  des  habttans  fe  retirèrent 
à  Mefsène  avec  leurs  femmes  & 
leurs  enfans  avant  qu'on  pût  pei>- 
fer  à  les  pourfuivre.  Antigonus 
n'apprit  cet  accident  que  lorfqu'îi 
n'étoit  plus  poûible  d'y  apporter 
du  remède. 

Cléomène ,  par  une  généroGté 
qui  a  peu  d'exemples  ,  envoya 
un  héraut  à  Mefsène  pour  décla- 
rer de  fa  part  aux  Mégalopoli- 
tains  qu'il  leur  rendoit  leur  ville  , 
à  condition  qu'ils  renonceroienc 
à  la  ligue  des  Achéens  ,  ôc  qu'ils 
deviendroient  amis  &  confédérés 
de  Sparte.  Quelque,  avantagenfe 
que  fût  cette  offre  ,  ils  ne  purent 
fe  réfoudre  à  l'accepter  ^  &.  iU 


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368  C  L 

aimèrent  mieux  être  privés  de 
leurs  terres  ,  des  tombeaux  de 
leurs  pères ,  de  leurs  temples ,  en 
un  mot  de  tout  ce  qu'ils  avoient 
de  plus  cker  ÔC  de  plus  précieux 
dans  la  vie  ,  que  de  violer  la  foi 

Îu'ils  avoient  jurée  à  leurs  alliés. 
)e  refus  mit  Cléomène  en  fureur. 
Jufqu*au  moment  de  leur  réponfe, 
non  feulement  il  avoit  épargné  la 
k  ville  ,  mais  il  Tavoit  confervée 
avec  tant  de  foin ,  qu'aucun  foldat 
n*avoit  ofé  y  commettre  le  moindre 
défoilire.  Mais  >  il  entra  pour  lors 
dans  un  tel  emportement ,  qu*il 
Tabandonna  au  pillage ,  envoya  à 
Sparte  les  (latues  &  les  tableaux , 
&  après  avoir  détruit  6c  raféJa 
plus  grande  partie  des  murailles 
&  des  quartiers  les  plus  forts  ,  il 
s'en  retourna  à  Sparte  avec  fes 
troupes.  La  défolation  de  cette 
ville  caufa  une  extrême  douleur 
aux  Achéens.,  &  ils  fe  repro- 
choient  comme  un  crime  de  n'a- 
voir pu  fecourir  de  fi  fîdeles  alliés. 
Ce  qui  ruina  fans  refiburce  les 
affaires  de  Cléomène  ♦  ce  fut  la 
perte  de  la^  bataille  de  Sellafie, 
où  périrent  la  plupart  des  troupes 
étrangères  ,  fans  compter  que  de 
fix  mille  Lacédémoniens,  il  ne  s*en 
fauva  que  deux  cens.  Arrivé  à 
Sparte  ,  il  confeilla  à  (es  citoyens 
de  recevoir  Antigonus  ,  &  leur 
dit  qu*en  quelque  état  qu'il  fe 
trouvât ,  s'il  pouvoit  faire  quelque 
chofe  qui  fût  utile  à  Sparte  ,  il  le 
feroit  avec  un  très-grand  plaifir. 
Étant  enfuite  entré  dans  fa  mai- 
fon  ,  il  ne  voulut  ni  boire  quoi- 
qu'il eût  grand  foif ,  ni  s'afleoir 
quoiqu'il  fût  très-las  ;  mais^s'ap- 
puyant  tout  armé  fur  une  colomnei 


CL 

la  tête  fur  le  coude  »  après  avoir 
repa{{é  en  lui-même  pendant  quel- 
que tems  les  divers  partis  qu'il 
pouvoit  prendre  ,  il  fortit  tout 
d'un  coup ,  ôc  alla  avec  fes  amis 
au  port  de  Gythium ,  &  s'éiant 
embaraué  fur  des  vaifTeaux  qu'il 
avoit  fait  préparer  ,  il  fit  voile 
vers  l'Egypte. 

Un  Spartiate  lui  a3^nt  repré- 
fenté  vivement  les  tnftes  fuites 
du  voyage  qu'il  méditoît  en 
Egypte,  &  la  honte  qu'il  y  auroic 
pour  un  roi  de  Sparte  d'aller 
ramper  baflement  devant  un  prin- 
ce étranger  ,  l'exhorta  fortement 
à  prévenir  ces  juftes  reproches 
par  une  mort  volontaire  &  glo- 
rieufe  ,  &  à  fe  juftifier  par-là  au- 
près de  ceux  qui  étoient  morts 
dans  les  champs  de  Sellafie  pour 
la  liberté  de  Sparte.  Tu  te  trom^ 
p€s  \  lui  répondit  Cléomène ,  de 
croire  quil  y  ait  de  la  force  &  du 
courage  à  affronter  la  mort  par  la 
crainte  d'une  faujfe  horUe  ou  par  le 
défir  d'une  vaine  louante;  dis  plutôt 
que  c' eft  foiblejfe  &  lâcheté,  il  faut 
que  la  mort  que  l'on  choifit  ne  foit 
pas  la  fuite  d'une  aêlion ,  mais  une 
aâion  ;  ny  ayant  rien  de  plus  hon» 
teux  que  de  ne  vivre  &  de  ne  mourir 
que  pour  foi- même.  Pour  moi ,  je 
tacherai  d'être  utile  à  ma  patrie 
jufquau  dernier  foupir.  Quand 
cette  efpérance  nous  manquera  , 
alors  il  nom  fera  aifé  de  mourir  fi 
nous  en  avons  tant  d'envie. 

Cependant ,  Cléomène  arrive 
à  Alexandrie.  Quand  il  falua  le 
Roi  pour  la  première  fois ,  il  en 
fut  reçu  adez  froidement ,  &  fans 
aucune  diûinâion  marquée.  Mais» 
quand  il  eut  donné  des  preuves 

de 


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C  L 

de  (on  grand  fens  >  &  qu'il  eut 
fait  voir  dans  fa  converfation  or- 
dinaire la  franchife  &  la  {implicite 
laconique ,  afTaifonnées  de  grâces 
fans  bafTefle  ^  &  même  d'une 
fierté  noble,  telle  qu'elle  conve- 
noic  à  fa  naiflance  &  à  fon  rang, 
alors  Ptoiémée  connut  tout  fon 
prix  ,  &  l'eftima  infiniment  plus 
que  tous  les  courtifans  ,  qui  ne  ^ 
cherchoient  qu'à  lui  plaire  par  de 
baffes  fiatteries.il  eut  honte  même, 
&  fe  repentit  ^d'avoir  négligé  un  (i 
grand  homme  ,  &  de  l'avoir 
abandonné  à  Ântigonus ,  qui ,  par 
'fa  défaite  ,  avoit  acquis  beaucoup 
de  réputation  ,  &  augmenté  infi- 
niment fa  puifiance.  Il  tâchoit 
donc  de  confoler  &  de  relever 
Cléomène  par  toutes  fortes  d'hon- 
neurs, &  l'encouragea,  en  lui  pro- 
mettant qu'il  le  renverroit  en 
Grèce  avec  une  flotte  &  de  l'ar- 
gent ,  &  qu'il  lé  rétabliroit  fur 
le  trône.  Il  lui  afiigna  une  penfion 
de  vingt-quatre  talens  par  an  9 
dont  il  s'entretint  lui  &  fes  amis 
avec  une  grande  fimplicité ,  épar- 
gnant tout  le  refte  pour  l'em- 
ployer à  fubvenir  aux  nécefiités 
de  eaux  qui  fe  retiroienr  de  Grèce 
en  Egypte.  Mais ,  Ptoiémée  mou- 
JUt  avant  qu'il  eût  pu  accomplir 
'  la  promefle  qu'il  avoit  faite  à 
Cléomène  ,  de  le  renvoyer  dans 
fa  patrie. 

Comme  fon  fucceffeur  ,  Ptoié- 
mée Philopator  ,  ne  s'occupoit 
que  de  plaifirs  &  de  débauches  ,' 
Cléomène  menoit  une  vie  fort 
triûe.  Ce^ndant  ,  le  nouveau 
Roi ,  dans  le  commencement  de 
fon  règne  ,  ne  laiflla  pas  de  fe  fer- 
vir  de  Cléomène.  Car ,  comme 
Tom.  XI. 


C  L  3^9 

H  craîgnoît  fon  frère  Magas,  qui , 
à  cauie  de  fa  mère  ,  avoit  beau- 
coup de  crédit  &  de  pouvoir  par- 
mi les  gens  de  guerre ,  il  appro- 
cha de  lui  Cléomène  ,  &  l'admit 
dans  fes  confeils  les  plus  fecrets , 
où  il  cherchoit  les  moyens  de  fe 
défaire  de  fon  frère»  Cléomène 
feul  s'y  oppofa  ,  repréfentant 
qu'un  Roi  ne  fçauroit  avoir  de 
minières  plus  afiedionnés  à  fon 
fervice,  &  plus  obligés  à  l'aider 
à  porter  le  pefant  fardeau  de  la 
royauté  ,  qUe  fes  propres  frères. 
Cet  avis  prévalut  pour  lors  ;  mais 
bientôt  Ptolén^ée  revint  à  fes 
craintes  &  à  fes  défiances ,  &  il 
s'imagina  ne  pouvoir  s'en  délivrer 
qu'en  ôcant  là  vie  à  celui  qui  en 
écoit  la  caufe. 

Cependant ,  Cléomène  eut  nou- 
velle qu'Antigonus  étoic  mort  ; 
aue  les  Achéens  étoienr  engages 
dans  une  grande  guerre  contie  les 
Étoliens  ;  que  les  Lacédémoniens 
s'étoient  unis  avep  les  derniers 
contre  les  peuples  d'Achaïe  6c  de 
Macédoine ,  &  que  tout  fémbloit 
le  rappeller  dans  fa  patrie.  Alors  , 
il  demanda  avec  empreflement 
de  fortir  d'Alexandriq.  Il  fupplia 
le  Roi  de  lui  donner  des  troupes 
&  des  munitions  fufiifantes  pour 
s'en  retourner.  Ne  pouvant  obte- 
nir cette  grâce ,  il  pria  qu'on  le 
laiCFât  du  moins  partir  avec  fa 
famille  ,  &  qu'on  lui  permît  de 
profiter  de  l'occafion  favorable 
qui  fe  préfentoit  de  rentrer  dans 
fon  royaume.  Ptoiémée  étoit  trop 
occupé  de  (es  plaifirs  ,  pour  dai- 
gner prêter  l'oreille  à  cette  prière 
de  Cléomène. 

Sofibe,  qui  pour  lors  avoit  dans 

Aa 


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570  C  L 

le  royaame  une  grande  autorité  > 
afTembla  (es  amis  ;  &  dans  ce 
confeii ,  il  fut  réfoiu  de  ne  don- 
ner à  Cléomène  ni  flotte  ni  pro- 
vifions.  Ils  croyoient  cette  dé- 
penfe  inutile  »  parce  que  depuis  la 
mort  d' Antigonus ,  les  affaires  du 
dehors  du  royaume  ne  leur  pa- 
roiffbienc  d'aucune  importance. 
D'ailleurs  ,  ce  confeii  craignoit 
qu*Antigonus  n'étant  plus,  &  n'y 
ayant  plu«  perfonne  pour  réfifter 
à  Cléomène  ,  ce  Prince  ,  après 
s'être  fournis  en  peu  de  tems  la 
Grèce  j  ne  devînt  pour  l'Egypte 
un  ennemi  fâcheux  &  redoutable  ; 
d'autant  plus  qu'il  avoit  étudié  à 
fond  l'état  du  royaume  ,  qu'il  en 
connoiffoit  le  fort  &  le^  foible  , 
qu'il  avoit  un  fouverain  mépris 
pour  lé  Roi:  ,  &  qu'il  yoyoit 
quantité  de  parties  du  royaume 
réparées  &  fort  éloignées  ,  fur 
lesquelles  on  pouvoit  trouver  mille 
occafions  de  tomber.  Ce  furent-là 
les  raifons  fur  lefquelles  on  ne 
jugea  pas  à  propos  d'accorder  à 
Cléomène  la  flotte  &  les  fecours 
qu'il  demandoit.  D'un  autre  côié  , 
laifler  partir  ,  après  un  refus  mé- 
prifant ,  un  prince  hardi  &  entre- 
prenant comme  celui- ci ,  c'étoit 
s'en  faire  un  ennemi  qui  tôt  ou 
tard  fe  reffouviendroit  de  cette 
infulte.  Sofibe  ne  crut  pas  même 
qu'il  y  eût  fôreté  de  le  laiffer  libre 
dans  Alexandrie.  Un  mot,  échap- 
pé imprudemment  à  Cléomène , 
lui  revint  alors  dans  l'efprit.  Dans 
un  conféil  où  l'on  délibéroit  au 
fujet  de  Magas  ,  le  miniflre  avoit 
témoigné  craindre  que  ce  Prince 
n'excitât  du  tumulte  par  le  moyen 
des  foldats   étrangers  :  Je  vous 


CL 

réponds  d*eux  ,  dit  Cléomène ,  en 
parlant  de  ceux  du  Péloponnèfe  ; 
&  vous  pouvei  compter  quau  prc" 
mierjîgnal  que  je  leur  donnerai , 
Us  prendront  les  armes  pour  vous» 
Solibe  n*héfita  plus.  Sur  une  ac- 
Cufation  inventée  à  plaifîr,  &  qu'il 
appuya  d'une  faufle  lettre,  que 
lui-même  avoit  fuppofée  à  ce  mal. 
heureux  Prince ,  il  détermina  le 
Roi  à  le  faire  arrêter ,  &  à  l'en- 
fermer dans  une  m^ifon  fûre ,  où 
il  lui  fourniroit  toujours  le  même 
entretien  ^  &  où  il  lui  laiflTeroit  la 
liberté  de  voir  fes  amis ,  maïs  non 
pas  celle  de  fortir. 

Ce  traitement  jetta  Cléomène 
dans  un  chagrin  mortel ,  &  dans 
une  noire  mélancolie.  Comme  il 
ne  voyoit  aucune  fln  ni  aucune 
iflue  à  fes  maux,  il  prie  avec  (es 
amis ,  qui  le  venoient  vifiter ,  une 
réfblution  que  le  feul  défefpoir 
pouvoit  lui  fuggérer;  c'étoit  de 
repoufler  par  les  armes  l'injuftice 
de  Ptolémée ,  de  (bulever  contre 
lui  le  peuple  ,  de  mourir  d'une 
manière  digne  de  Sparte ,  &  de  ne 
pas  attendre ,  comme  des  viâi-* 
mes  engraifTées  ,  qu'on  vint  les 
immoler. 

Ses  amis  ayanttrouvé  le  moyen 
de  le  tirer  de  fa  prifon ,'  ils  cou* 
fent  tous  enfemble  les  armes  à 
la  main  dans  toutes  les  rues , 
exhortant  &  appellant  le  peuple 
à  la  liberté  ;  mais  ,  perfonne  ne 
s'émeut.  Ils  tuent  le  gouverneur 
de  la  ville  qui  venoit  à  leur  ren- 
contre ,  &  quelques  autres  fei- 
gneurs.  Ils  prennent  le  chemin  de 
la  citadelle  pour  en  enfoncer  les 
portes ,  &  délivrer  les  prifonniers  ; 
mais  f  ils  trouvèrent  ces  portes 


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CL 

bîen  fermées  &  bien  barricadées. 
Cléomène  >  déchu  de  Ton  efpé- 
rànce  ,  alloit  errant  çà  &  là  par 
toute  la  ville ,  fans  que  perfonne 
fe  préfentât  pour  le  fuivre  ,  ni 
pour  le  combattre  ^  mais ,  ils  pre- 
noient  tous  la  fuite  ,  faifis  de 
frayeur.  Alors  ,  voyant  que  leur 
entreprife  ne  pouvoit  réuiTir  ,  ils 
la  terminèrent  par  une  fin  tragi- 
que &  fanglante  ,  en  s'entregor- 
geant  tous  les  uns  les  autres  » 
pour  fe  dérober  à  la  honte  du 
iupplice.  Aind  finit  Cléomène  , 
après  avoir  régné  feize  ans  à 
Sparte.  Le  Roi  fit  mettre  fon 
corps  en  croix  ,  &  condamna  à  la 
mort  fa  mère.  Cléomène  mourut 
la  première  année  de  la  140e. 
Olympiade ,  220  ans  avant  J.  C. , 
n'étant  que  dans  la  33e  année  de 
fon  âge.  • 

Quelques  jours  après  ,   ceux 
qui  gardoient  le  corps  de  Cléomè- 
ne fur  la  croix  ,  virent  un  grand 
ferpent    entortillé  autour   de  fa 
tête,  &  qui  lui  couvroit  tout  le 
vifage  ;  de  forte  qu'aucun  oifeau 
carnacier  ne  pouvoit  en  appro- 
cher. Ce  prodige  jetta  la  fuperf- 
tition  &  la  frayeur  dans  refprit 
du  Roi  ,  &  donna  occafion  aux 
femmes  de  la  cour  de  faire  des 
facrifices  d'expiation  &  de  puri- 
fication ,  ne  doutant  point  qu'on 
n*eût  fait  mourir  un  homme  aimé 
des  dieux  ,  &  un  homme  d'une 
nature  fupérieure  à  la  nature  hu- 
maine. Tout  le  peuple  d* Alexan- 
drie courut  même  en  foule  fur  le 
lieu  ;  &  pour  appaifer  les  mânes 
de  Cléomène  ,  il  J*invoquoit  en 
;  l'appellant  héros  ôi  fils  des  dieux , 
I  î^rqu'à  ce  que  des  gens  ,  plus 


c  L  57f 

éclairés  dans  les  caufès  naturelles, 
vinrent  calmer  leur  fuperftition 
&  leur  crainte ,  en  leur  enfeignant 
que  4  comme  des  bœufs ,  quand 
ils  font  corrompus ,  s'engendrent 
les  abeilles ,  des  chevaux  les  guê- 
pes ,  &  des  ânes ,  quand  ils  font 
auilî  pourris  ,  naiflent  les  efcar- 
gots  ;  de  même  du  corps  des 
hommes,  quand  la  liqueur  qui 
compofe  la  moelle  du  dos,  eft* 
arrêtée  &  figée  ,  il  s'en  engendre 
des  ferpens.  Çt  c'eft  fur  cette  ex- 
périence que  les  Anciens  ont  choi- 
fi,  fur  tous  les  animaux,  le  ferpent 
pour  l'approprier  à  l'homme. 

DIGRESSION 

fur  le  portrait  de  Cléomène  Ilh 

Ce  Prince ,  fi  l'on  en  croit  Plu- 
tarque ,  étoit  un  homme  du  plu$ 
grand  mérite,  habile  à  la  guerre, 
inébranlable  dans  les  adverfités  »' 
magnanime  ,  avide  de  la  J^onne 
gloire  ,  uniquement  occupé  da 
bien  de  fes  peuples  ,  incapable  de 
la  moindre  injuftice  ;  c'eft  ainfi 
qu'il  nous  le  repréfente  dans  la 
vie  qu'il  en  a  écrite.  L'idée  ,  que 
nous  en  donnent  les  autres  Au- 
teurs ,  eft  un  peu  différente.  A  la 
vérité  Cléomène  avoit  de  gran- 
des qualités  ;  mais  ,  elles  étoient 
obfcurcies  par  un  nombre  infini 
de  vices.  On  peut  accorder  à 
Plutarque  qu'i^fçavoit  fon  métier, 
qu'il  avoit  le  courage  de  fuppor* 
tier  les  malheurs ,  qu'il  étoit  pru- 
dent &  habile  dans  le  maniement 
des  affaires.  En  cela  Polybe  eft 
d'accord  avec  Plutarque  ;  mais, 
^vec  ces  talens  ,  il  avoit  une  am- 
bition qui  lui  faifoit  entreprendre 
Aaij 


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yji  CL 

les  chofes  les  plus  injures  ^  dès 
qu'il  pouvolt  fe  flatter  de  les  faire 
réuffir.  C'étoit  un  homme  intri- 
guant &  diffimulé  y  qui  manquoit 
aux  fermens  les  plus  folemnels» 
quand  il  croyoit  y  trouver  le 
moindre  avantage.  Il  faut  avouer 
qu'il  éto'u  fort  aimé  des  Lacédé- 
moniens;  mais^l'attachement  qu'ils 
avoient  pour  lui  ,  ne  prouvera 
peut-être  rien  au  fond  ,  quand 
on  en  examinera  la  véritable  cau- 
fe.  Il  avoit  fait  un  arrangement 
favorable  au  peuple  en  apparen- 
ce î  car  9  tout  homme  qui  veut 
innover  dans  le  gouvernement» 
commence  par  fe  rendre  agréa- 
ble au  peuple ,  mais  il  ne  faut 
Ïas  conclure  de- là  qu'il  ait  fait  le 
ien  réel  de  fa  patrie. 
Rien  n'écale  les  louanges ,  que 
Plutarque  donne  à  Cléomène  fur 
les  change  mens  qu'il  fit  dans  le 
gouvernement.  Homme  de  Let* 
très  ,  plus  qu'homme  d'État ,  il  a 
été  ébloui  par  l'apparence  du  pro- 
jet de  Cléomène ,  &  Ta  regardé 
comme  un  nouveau  Lycurgue  » 
tandis  que  Polybe ,  dont  le  juge- 
ment avoit  été  formé  par  le  ma- 
niement des  affaires  publiques  , 
perçoit  au  de- là  de  ces  apparen- 
ces ;  &  jugeant  les  hommes  non 
par  leurs  difcours  »  mais  par  leurs 
aâions ,  il  regardoit  les  change- 
mens  faits  par  Cléomène  comme 
un  moyen  qu'il  avoit  imaginé 
pour  afiervir  fa  patrie. 

CLÉOMÈNE  ,   CUomenes  , 

O)  Mém..  de  TAcad.  dei  Infc.  & 
Bell.  Lett.  Tom.  XIV.  pag.  93* 

{h)  Plut.  Tom.  I.  p.  i^o  »  171  »  5x4. 
ir  fiq»  Diod.  Sicul.  p.  314  >  318  »  3*3  , 
js^Thucyd.  pag.  i9|.  é-  fii*  Pauf.  p. 


CL 

K>tefitfvç.  {a)  fils  de  Cléombro^ 
ce  II ,  roi  de  Spane ,  6it  nommé 
tuteur  d'Agéfipolis  fon  neveu, 
qu'on  mit  fur  le  trône  après  la 
mort  de  Qéomène  III.  Agéfipo- 
lis  étoit  encore  fort  jeune; &  c'eft 
pour  cehi  qu'on  lui  donna  fon  on* 
clepour  tuteur. 

CLÉON  ,  Cleon^  K^/^r  ,  (*) 
Athénien ,  étoit  fils  de  Cléénétos 
corroieur,  &  corroieur  lai-même. 
Il  ne  laiita  pas  de  s'élever  par  la 
brigue  ,  &  apparemment  par  une 
forte  de  mérite  tel  qu'il  le  £alloit 
pour  réuflir  dans  dne  république. 
Il  avoit  une  voix  forte  &  impo- 
fante  avec  un  art  merveilleux  de 
gagner  le  peuple ,  &  de  le  met- 
tre dans  fe$  intérêts.  Ce  fut  lui 
qui  établit  qu'on  donneroit  trois 
oboles  à  chacun  des  fix  mille  ju- 
ges ,  au  lieu  de  deux  qu'on  don- 
tioit  auparavant.  Son  caraâère 
propre  étoit  une  eftime  démefa- 
rée  de  lui-même  ,  une  folle  con- 
fiance dans  fon  mérite  >  &  une 
hardieflie  dans  fes  difcours  pouf- 
fée  jufqu'à  l'impudence  &  l'ef- 
fronterie «  &  qui  n'épargnoit  per- 
fonne. 

L'an  427  avant  l'Ère  Chrétien- 
ne ,  la  ville  de  Mitylène ,  a(fiégée 
par  les  Athéniens ,  &  preffée  par 
la  famine  &  par  les  diitenfions  qui 
regnoient  eqtre  les  citoyens  ,  fut 
enfin  contrainte  de  fe  rendre.  Dès 

3ue  la  nouvelle  en  fut  parvenue  à 
Lthènes ,    le   peuple  s'aiTembla 
pour  régler  de  quelle  manière  oa 

56.  Roll.  Mift.  Ane.  Tom.  II.  pag.  j^ç. 
&  friv,  Mém.  de  TAcad.  des  Infaipr. 
&  Bell.   Leic.   Tom.  XXI,  pag.  14S. 


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CL 

sgtroSt  avec  les  habhans.  Ctéoit» 
violent  &  impitoyable  ,  animant 
raffemblée  par  fes  difcours ,  pro- 
pofa  lavis  de  faire  mourir  tçiis 
ceux  qui  étoient  arrivés  à  Tâgé  de 
puberté,  &  de  réduire  à  refclavage 
les  femmes  ôc  les  enfans.  Le  peu- 
ple ,  entraîné  par  ce  déclamatèur , 
prononça  l'arrêt  qu'on  lui  diftoit, 
&  renvoya  (igiûfier  à  Pachès  Ton 
général  à  Mitylène.  Mais  y  dans 
le  tems  même  que  Pachès  le  lifoic, 
il  en  furvint  |in  autre  tout  con- 
traire. Heureufement  que  ce  peu* 
pie ,  léger  &  inconuant ,  avoit 
lur  le  champ  retrafté  fon  premier 
arrêt. 

Deux  ans  après ,  les  Athéniens 
pouvoiem  terminer  la  guerre  qu'ils 
avoient  avec  les  Lacédémoniens  , 
par  une  paix  qui  n  auroit  pas  été 
moins  glorieufe  pour  eux ,  qu'utile 
&  falutaire  à  toute  la  Grèce. 
Cléon  empêcha  un  (l  grand  bien; 
mais ,  les  Athéniens  ne  tardèrent 
pas  à  fe  repentir  d'avoir  fuivi  Tes 
confeils.  Leurs  troupes  étoient  af- 
fiégées  dans  la  ville  de  Pyle  *  vis- 
à-vis  de  laquelle  étoit  une  petite 
îfle ,  nommée  Sphaâérie.  On  re* 
^ut  avis,  (qu'elles  manquoient 
d'eau  &  de  vivres  ;  ce  qui  excita 
de  vives  plaintes.  Cléon  fentit  bien 
que  ces  plaintes  retomboient  iur 
lui.  Il  commença  par  traiter  de 
faux  rapports  ,  tous  les  bruits  qui 
couraient  fur  la  difètte  oU  étoient 
les  Athéniens  ,  tant  au  dedans  de 
Pyle ,  qu'au  dehors.  Enfuite ,  il 
décria  devant  le  peuple ,  la  lenteur 
&  la  nonchalance  des  chefs  ,  qui 
adiégeoient  l'iÛe ,  prétendant  qu^* 
avec  un  peu  de  vigueur  &  de  cou- 
rage on  poûYÔit  Aifêmem  s'eo 


CTL  375 

rendre  maître  f  &  que  s'il  étoit  en 
leur  place ,  il  en  viendroit  bien- 
tôt à  bout.  On  le  nomma  pour 
chef  de  cette  expédition  ,  Nicias  > 
qui  devoit  y  commander  >  lui 
ayant  cédé  volontiers  cet  hon- 
neur ,  Toit  par  foiblefle ,  car  il 
étoit  naturellement  timide  ;  foit 
par  politique  ,  pour  le  décréditer 
auprès  du  peuple  par  le  mauvais 
fuccès  qu'on  comptoit  qu'il  auroit 
dan&  cette  entreprife.  Cléon  fut 
furpris  &  embarraiTé  ;  car,  il  ne 
s'attendoit  pas  qu'on  dût  le  pren- 
dre au  mot ,  étant  plus  habile  dif- 
coureur  que  brave  guerrier ,  &  fe 
fervant  mieux  de  la  langue  que 
de  l'épée.  Il  ie  défendit  quelque 
tems ,  &  s'excufa  le  mieux  qu'il; 
put  fous  divers  prétextes.  Mais , 
voyant  que  plus  il  reculoit  »  plus 
il  étoit  preiTé ,  il  changea  de  ton  » 
&fubflituant  la  rodomontade  ai^ 
courage ,  il  déclara  en  pleine  af- 
femblée  avec  un  air  ferme  &  af^ 
furé ,  qu'il  rameneroit  dans  vingt 
jours  ceux  de  l'ifle  prifonniers ,  ou 
qu'il  y  périroit.  Toute  l'affemblée 
le  mit  à  rire,  car  on  leconnoif- 
foit. 

Il  eft  étonnant  que  les  Athé- 
niens confiafTent  leurs  troupes  à 
on  fou  comme  Cléon  ,  dont  ils  n9 
pouvoiem  s'empêcher  de  fe  mo- 
quer. Thucydide  en  donne  ane 
faifon  que  Plutarque  a  omife;c^eft 
que  la  promefle  de  cet  étourdi 
plut  aux  plus  fages ,  parce  qu'ils 
efpéroient  qu^l  en  arriveroit  un 
de  ces  deux  biens,  ou  quils  au- 
roient  le  plaifir  de  voir  à  Athènes 
les  Lacédémoniens  prifonniers  ,  fi 
Cléon  réuffifibit ,  ou  s'il  ne  réuf- 
fiflbit  p4S^  ib  auroient  la  co^foi 


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374  CL 

lation  d'en  être  Refaits.  Maïs  , 
n'étoii-ce  pas  acheter  trop  chèce- 
men^  ce  dernier  avantage  ? 

Quoi  qu'il  en  foit ,  contre  toute 
apparence ,  la  chofe  arçiva  ,  corn- 
sue  Cléon  l'avoit  promis.  Lui  & 
Démoflhène  entrèrent  dans  Viûe 
de  Sphaâérie  ,  attaquèrent  vive- 
ment l'ennemi ,  le  pouflerenc  de 
pode  en  pofle  ,  &  gagnant  tou- 
jours du  terrein  ,  l'acculèrent  en-» 
fin  dans  le  fond  de  Tiile.  Les  La- 
cédémoniens  avoient  gaené  un 
fort  qui  paroiflbit  inaccemble.  Là 
ils  fe  rangèrent  en  bataille  ,  firent 
face  du  côté  feul  où  Ion  pouvoit 
les  attaquer,  &  s'y  -défendirent 
avec  un  courage  de  lions.  Comme 
le  combat  avoit  duré  une  grande 
partie  du  jour,  &  qu'ils  étoient 
tous  abattus  de  chaud  ,  de  foif , 
&  de  laiTicude  ,  i  le  Général  des 
Mefféniens»  s'adreffant  à  Cléon  & 
à  Démofthène  ,  leur  dit  que  tout 
ce  qu'ils  faifoient  étoit  inutile  ,  û 
Ton  ne  prenoit  l'ennemi  en  queue, 
&  promit  que  fi  on  vouloit  lui 
donner  quelques  gens  de  trait ,  il 
tourneroit  tant  qu'il  trouveroit  un 
paflage.  En  effet ,  il  grimpa  avec 
fa  troupe  par  des  lieux  efcarpés 
qu'on  ne  gardoit  point  ;  &  fe  cou- 
lant dans  le  fort  fans  être  apperçu^ 
il  parut  tout  à  coup  au  dos  des  La^ 
cédémoniens,  ce  qui  abattit  leur 
courage  |  &  acheva  leur  défaite» 
Ils  ne  fe  défendoient  donc  prefque 
plus  ,  &  vaincus  par  le  nombre , 
attaqués  de  toutes  parts  ,  6c  abat- 
tus de  langueur  &  de  défefpoir , 
ils  commencèrent  à  reculer  ;  mais, 
les  athéniens  fe  faifirent  de  tous 
les  pafTages  ,  pour  leur  empêcher 
la  retraite.  Alors  ^  Cléon  &  Dé- 


CL 

ii}o(lhène  f  voyant  que  fi  on  les 
preflbit  davantage ,  il  n'en  échap- 
peroit  pas  un  ,  ôc  étant  bien  ailes 
de  les  emmener  vifs  à  Athènes , 
arrêtèrent  leurs  gens,  &  firent 
crier  par  un  héraut  qu'ils  miflent 
bas  les  armes  -,  &  qu'ils  fe  rendif- 
fent  à  difcré'tion.  A  ces  mots ,  la 
plupart  baiflerent  leurs  boucliers, 
&  frappèrent  des  mains  en  figne 
d'approbation.  Il  fe  fit  une  efpèce 
de  fufpenfion  d'armes ,  &  leur 
commandant  demanda  qu'il  loi  fût 
permis  d'envoyer  au  camp ,  pour 
fçavoir  la  réfolution  des  chefs.  On 
ne  le  voulut  pas  foufTrir  ;  mais, on 
appella  des  hérauts  de  defTus  la 
côte  ,  6c  après  quelques  allées  & 
.venues  ,  un  Lacédémonien  vint 
dire  tout  haut  qu'on  leur  permet- 
toit  de  traiter,  pourvu  qu'ils  ne  fif- 
fent  rien  contre  leur  honneur.  Sur 
cette  parole  ,  ayant  délibéré  entre 
eux  ,  ils  fe  rendirent  à  difcrétion; 
6c^0  les  garda  jufqu'au  lendemain. 
Alors  ,  les  Athéniens  ,  ayant  dref- 
fé  un  trophée  ,  6c  rendu  aux  La- 
cédémoniens  leurs  morrs ,  s'em- 
barquèrent pour  le  départ ,  après 
avoir  diflribué  les  prifonniers  dans , 
les  vaifTeaux  ,  6c  en  avoir  confié 
la  garde  aux  capitaines  des  galè- 
res. 

L'heureux  fqccès  de  cette  ex- 
pédition augmenta  infiniment  le 
crédit  de  Cléon  parmi  le  peuple, 
6c  lui  infpira  Mne  fierté  infupporta- 
ble.  Il  avoit  une  forte  d'éloquence 
véhémente  ,  impétueufç ,  empor- 
tée 9  qui  entraînoit^  les  efprits». 
moins  par  la  force  des  raifons, 
que  par  la  hardieffe  6c  la  violence 
de  fon  flyle  6c  de  fa  déclamation. 
Ceiut  lui  qui  le  premier  donûa 


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CL 

l'exemple  de.  crier  à  pleine  tête 
dans  les  ailemblées  ,  où  jufques- 
là  on  avoit  gardé  beaucoup  de 
décence  &  de  modération  ,  de 
rejetter  fbn  vêtement  en  arrière 
pour  donper  plus  de  liberté  à  Ton 
geiïe ,  de  Te  frapper  les  cuiffes  y 
d  aller  6c  de  venir  fur  la  tribune  en 
haranguant.  £n  un  mot ,  il  intro- 
duira parmi  les  Orateurs ,  ÔC  par- 
mi tous  ceux  qui  fe  mêloient  du 
gouvernement ,  une  licence  effré- 
née &  un  mépris  de  toutes  les 
bienféançes  ;  licence  &  mépris 
oui  produifirent  bientôt  un  boule- 
versement général  &  une  horrible 
confufion  dans  les  affaires. 

Quelque  tems  après ,  Cléon  fut 
mis  à  la   tête  des  troupes  pour 
marcher  contre  Brafidas^,  général 
des  Lacédémoniens.  En  paffant 
près  de  Sicyone  ,  il  groffit  (on  ar- 
mée d'une  partie  dçs  af&égçans , 
Îu*il  détacha  pour  les  conduire^  à 
'orone  ;  car ,  il  fçavoit  que  Bra- 
fidas  s'étoit  éloigné  de  cette  ville  , 
&  que  les  foldats  qu'il  y  avoit 
laiffés,  n'étoient  pas  capables  de 
lui  tenir  tête.  Il  alla  donc  pofer 
fon  camp  auprès  de  Torone,  qu'il 
^ffiégea  par  mer  &  par  terre.  11  la 
prit  d'aiîaut,  ôc  ât   efcl^ves  les 
femmes  &  les  çnfans ,  &  les  ayant 
mis  dans  les  fers,  aufS-bien  que 
la  garnifon  de  la  place  ,  il  les  en- 
voya tous  à  Athènes.  D^s  qu'il 
eut  placé  dans  la  ville  une  garni- 
fon nouvelle  &  fuffifante  ,   il  fe 
rembarqua  ôc  conduific  fa   flotte 
iufqu'au  fleuve  Strymon  dans  la 
Thrace.  Arrivé  dans  cette  provin- 
ce ,  il  dréffa  fes  tentes  auprès  de 
la  ville  d'Éion,  diflance  d*Am- 
l^hipolis  d'uae  trentaine  de  itades*. 


C  L  375 

Il  commençoit  à  battre  les  murs 
d'Éion  ,  lorfqu'apprenant  que 
Brafidas  étoit  aux  environs  d'Am. 
phipolis  avec  toutes  (es  forces , 
il  marcha  de  ce  côté.  Dès  que 
Brafidas  fçut  que  les  Athéniens 
venoient  à  lui ,  il  fe  mit  en  ordre 
de  bataille ,  &  s'avança  lui-même 
contr'eux.  Ce  fut-là  le  commen- 
cement d'une  bataille  célèbre  par 
l'émulation  égale  des  deux  ar- 
mées. La  viûoire  demeura  long- 
tems  incertaine  par  le  zèle  dçs 
deux  chefs ,  qui  voulant  qu'on  ne 
la  dût  qu'à  leur  valeur,  entraînè- 
rent i^jjeur  exemple  un  grand 
nomlHBde  braves  gens  à  une 
more  mévitable.  Enfin  Brafi- 
das ,  après  avoir  immolé  de  fa 
main  un  nombre  prodigieux  d'en- 
nemis ,  perdit  héroïquement  la 
vie.  Un  moment  après  ,  Cléon 
tomba  de  même.  L'on  étoic  alors 
fous  l'an  42 %  avant  Jefus-Chrift. 
D'autres  racontent  autrement  la 
mort  de  Cléon  ,  &  prétendent 
qu'il  prit  la  fuite  ;  mais  qu'il  fut 
tué  par  un  foldat  qui  le  rencon- 
tra. Ce  foldat  fe  nommoit  Myr-; 
cinius. 

Ce  Cléon  eft  le  même  qu'A- 
riflophane  a  fi  fort  décrié  dans 
fes  comédies  ,  &i  notamment 
dans  celle  qui  efl  intitulée  Us 
Chevaliers. 

On  raconte  qu'un  jour  qu'il 
devoit  parler,  l'affemblée  étant 
déjà  toute  formée,  le  peuple  affis. 
l'attendit  fott  loog-tems.  Enfin  ^  il 
vint  fort  tard  avec  une  couronne 
de  fleurs  fur  la  tête ,  &  en  arrivant 
il  pria  le  peuple  de  remettre  l'af- 
femblée au  lendemain  ;  car,  dit-il, 
je  nai  pas  le  tems  de  vims  parle^ 

Aaiy 


0 


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w 


^76  CL- 

aujourd'hui  f  parce  que  je  dois 
traiter  quelques  étrangers  qui  font 
venus  me  voir ,  &  que  j*ai  fait 
unfacrifice.  Les  Athéniens,  riant 
de  cette  belle  raifon ,  fe  levèrent 
&  congédièrent  l'affen^blée. 

CLÉON  ,  Cleon  ,  Khi^^^ .  (a) 
Orateur,  natif  d'HajIicarnaire, 
nous  efl  connu  par  un  pafTage  de 
Plucarque  &  un  autre  de  Corné- 
lius Népps.  n  Une  harangue,  dit 
»  ce  dernier  au  fujet  de  Lyfandre^ 
»  que  l'on  trouva  parmi  fes  pa- 
s»  piers  après  fa  mort^  découvrit 
»>  la  vérité  des  foupçons  qu'on 
9>  avoir  formés  contre  j|^e  but 
7i  de  cette  harangue  cfÊf  avoit 
n  fait  compofer ,  a  ce  que  Ton  dit, 
9»  par  Cléon  d'Halicarnafle ,  étoit 
9»  d'engager  les  Lacédémoniens  à 
9ï  fupprimer  l'autorité  royale  ,  & 
9>  à  le  choifir  préférablement  à 
9>  tout  autre  pour  le  mettre  à  la 
9>  tête  de  leurs  armiées.  Et  comme 
9>  il  avoit  compté  fur  la  facilité 
9»  qu'il  adroit  à  mettre  dans  fon 
9»  parti  les  Prêtres  des  Oracles  à 
9>  force  d'argent ,  il  avoit  entière- 
m  ment  accomodé  les  termes  de 
9>  fa  harangue  aux  réponfes  qu'il 
n  .efpéroit  tirer  des  dieux,  ce 

Ce  pafTage  donne  lieu  de  juger 
que  Cléon  d'HalicarnaiTe  étoit  un 
babiie  Orateur.  C'eft  le  témoi- 
gnage  que  lui  rend  aufli  Plutarque; 
ÔL  après  tout ,  il  falloit  bien  qu'il 
fût  reconnu  pour  tel ,  fi  Lyfandre 
s'étoit  adreflé  à  lui. 

CLÉON,  Cleon  ,  KA«<»r ,  (h) 
Byzantin ,  qui  ,  étant  venu  pren- 
dre les  leçons  des  Philofophes  de 

(«)  Corn.  Hep.  in  Lyfand.  c.  3.  Plut 
T.  I.  p.  447- 
ib)  Plot.  X.  I.  pag.  748. 


CL 

TÂcadémie  à  Athènes ,  avott  lié 
en  ce  lieu  une  amitié  particulière 
avec  Phocion.  Cette  circonûance 
fauva  dans  la  fuite  la  ville  de  By- 
zance.  Cléon  en  étoit  un  des  pre- 
miers ,  en  vertu  &  en  autorité , 
lorfque  Phocion  y  arriva  à  la  tête 
d'une  armée ,  &  fe  donna  pour 
la  caution  de  fon  ami  envers  fes 
concitoyens.  Ceux-ci  ouvrirent 
donc  leurs  portes  aux  Athéniens , 
qui  fe  comportèrent  d'une  maniè^ 
re  irréprochable 

CLÉON  ,  Cleon  ,  F  }Ju,y ,  (c) 
Sicilien  ,  qui  étoit  un  infigne  flat- 
teur f  tant  de^fon  naturel,  que  par 
le  vice  de  fa  nation.  Étant  à  la 
cour  d'Alexandre  ,  un  jour  que 
ce  Prince  étoit  forti  ^  il  fe  mit  fur 
fes  louanges  ,  &  fit  un  long  dé- 
tail des  obligations  qu'on  lui 
avoit  >  &  dont  il  ne  fçavoit  qu'un 
moyen  de  s'acquitter ,  qui  étoit  de 
le  reconnoître  pour  dieu  ,  puifque 
d'ailleurs  on  le  croyoit  tel  y  &c 
qu'à  peu  de  frais  &  avec  deux 
grains  d'encens  feulement ,  ils  lui 
payeroient  tous  les  bienfaits  qu'ils 
en  avoient  reçu  ;  que  c'étoit  une 
^  aâion  de  prudence  aux  Perfes, 
non  moins  que  de  piété  ,  d'adorer 
leurs  Rois  comme  des  dieux  y 
parce  que  de  la  majeflé  du  Prince 
dépendent  le  falut  de  fa  perfonne 
&  celui  de  fon  empire  ;  qu'Her- 
cule même  9  ni  Bacchus  n'avoient 
été  faits  dieux ,  qu'après  avoir 
fur  monté  l'envie  de  ceux  qui  vi- 
voient  de  leur  tems  ;  &  que  la 
poflérité  ne  croyoit  des  hommes, 
que  ce  que  leur  fiede  en  avoit  cru 

ICc)  Q.  Curt.  L.  VIII.  c.  5,  RoU.  Hi«. 
Ane.  T,  III.  p.  739,733. 


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GL 

durant  leur  vie  ;  que  pour  lui , 
fi  les  autres  en  faifoient  difficulté, 
il  étoit  réfolu  de  commencer  &  de 
l'adorer  s'il  rentroit  :  mais  qu'il 
falloit  que  tous  en  fiUent  de  mê- 
me 4  &  principalement  ceux  qui 
faifoient  profeflion  de  fàgefle  ,  6c 
qui  dévoient  donner  aux  autres 
Texemple  de  la  vénération  qui 
étoit  due  à  un  Ci  grand  Roi. 

CLÉON  ,  Cleon  ,  K^cr,  (a) 
tyran  de  Sicyone.  Il  s'étoit  empa- 
ré du  gouvernement  dans  la  ville 
neuve  ,  pendant  que  Clifthène , 
fils  d'Ariftonyme ,  en  avoir  fait 
autant  dans  la  ville  baiTe.  Cléon  , 
ayant  été  tué ,  les  Sicyoniens ,  au 
rapport  de  Pbitarque  ,  élurent 
pour  leurs  premiers  magiftrats  , 
Timoclidas  &  Clinias.  Paufapias 
ne  penfe  pas  de  même  ;  mai^ ,  ce 
n'e  pas  ici  le  lieu  de  difcuter  cet 
article.  Du  tems  de  ce  dernier  Au- 
teur ,  Ton  voyoit  encore  à  Sicyo- 
ne la  maifon  de  Cléon  le  tyran , 
dont  on  avoit  fait  un  palais  deftiné 
aux  empereurs  Romains. 

CLÉON  ,  Cleon  ,  Kx/w  {b) 
étoit  du  pais  de  ces  Magnéiiens  , 
qui  habitoient  fur  les  bords  de 
THermus.  Il  avoit  coutume  de 
dire  qu'il  n'y  a  point  de  gens  plus 
incrédules  ,  que  ceux  qui  avoient 
paiTé  leur  vie ,  fans  rien  voir  d'ex- 
traordinaire  ^  que  pour  lui ,  il  n'a- 
voit  nulle  peine  à  croire  que  Ti- 
tyus  &  les  autres  géans  fufTent  de 
la  grandeur  dont  on  dit  qu'ils 
étoient.  Il  racontoit  à  ce  lujet 
qu'étant  venu  à  Gadès  ,  il ,  avoit 
été  obligé  de  fe  rembarquer  &  de 

(s)  Plut.  T.  L  p.  io»7.  Pauf.  -p.  89»' 
H)  Pauf.  p.  tf  15, 


CL  377 

quitter  Tifle  avec  toute  fa  fuite  par 
Tordre  exprès  d'Hercule  ;  qu'en- 
fuite  y  étant  retourné  ,  il  avoit  vu 
un  officier  de  marine  tué  d'un  coup 
de  foudre ,  que  l'on  avoit  jette  fur 
le  rivage  ,  &  dont  le  corps  avoit 
cinq  arpens  de  longueur  ;  ce  qui , 
difoit-iî,  lui  rendoit  croyable  tout 
ce  que  l'on  raconte  en  ce  genre- 

CLÉON,C/eo«,  KA/a»y,(c) 
certain  perfonnage ,  donc  parle 
Démoilhène  dans  une  de  fes  ha- 
rangues contre  Bœotus.  Il  fut  père 
de  Cléomédon* 

CLÉON  ,  Cléo'n  ,  Kxfwr, 
chef  d'une  bande  d'efclaves  ré- 
voltés en  Sicile.  Son  hidoire  eft 
mêlée  avec  celle  d'Eunus.  Foys^ 
Eunus. 

CLÉON  ,  Cleon,  K>i<éP  .  (d) 
fameux  ftatuaire  de  Sicyone. 
Paufanias  parle  de  fes  ouvrages 
en  plus  d'un  endroit.  Ce  flatuai- 
re  avoit  pris  les  leçons  d'Ami- 
phane. 

CLÉON  ,  Cleon  ,  K}iiûi>r% 
Hidorien ,  cité  par.Étienne  de  By- 
zance.  Il  avoit  fait  un  ouvrage  des 
ports. 

CLÉON  ,  Cleon  ,  Kxg»^  » 
natif  de  Daulis>  Il  n'eut  jamais  de 
fonge  pendant  toute  fa  vie  >  quoî^ 
qu'elle  fut  afTez  longue  ;  &  Ton 
croit  que  c'eft  parce  qu'il  n'étolt 
pas  mélancolique  9  ou  peut-être 
parce  que  les  traces  ,  que  les  (6n^ 
ges  avoient  faites  fur  fon  cerveau» 
étoient  toujours  effacées  «  avant 
qu'il  fe  réveillât  ,  ce  qui  peut 
procéder  de  ce    que  la  matière 


(c)  Demofih.  Orat.  in  fiœoc.  p, 

&  ftq. 

(d)  Pauf.p.si9>5*7044« 


1008. 


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378  CL 

même  du  cerveau  étoît  fort  dc- 
iicace. 

CLÉ01<IE,Xleonc ,  (a)  fils  de 
Pélops  >  donna  Ton  nom  à  la  ville 
de  Cléones  en  Achaïe ,  félon  cer- 
tains* 

CLÉONE,  Cleone,  (b)  fille 
du  fleuve  Afdpe.  C'eft  de  cette 
nymphe  9  au  rapport  de  quel- 
cjues-i^ns ,  que  la  ville  de  Cléo- 
nes en  Achaïe  fut  ainfi  nommée. 

CLÉONICE,  Cleonice,  {c) 
KT^eovUfi  %  jeune  fille  ,  née  de  pa- 
ïens illuflres  de-  Byzance.  Paufa- 
nias ,  général  des  Lacédémoniens^ 
étant  dans  cette  ville ,  envoya 
chercher  la  jeune  Cléonice  pour  la 
faire  fervir  à  (es  plaifirs.  Ses  pa- 
rens ,  ne  pouvant  réfifler  à  cette 
dure  nécefStéy  &  intimidés  par  le 
pouvoir. immenfe  dont  il  abufoic» 
laifTerent  emmener  leur  fiUe.Com- 
me  elle  étoit  encore  pleine  de  pu- 
deur j  avant  que  d'entrer  dans 
la  chambre ,  elle  pria  qu'on  ôtât 
la  lumière.  Elle  entra  enfuite  ;  6c 
en  marchant  dans  les  ténèbres 
avec  un  grand  filence  pour  s'ap- 
procher du  lit  de  Paufanias  qui 
étoit  déjà  endormi ,  elle  donna , 
fai)s  le  vouloir  ,  contre  la  lampe 
qui  étoit  éteinte  6c  la  renverfa. 
Au  bruit  qu'elle  fie  en  tombant  , 
Paufanias  fe  réveilla  en  furfaut  ;  & 
dans  la  penfée  que   c*étoit  quel- 

Îu'ennemi  qui  venoit  pour  TafFa- 
ner,  il  tira  le  poignard  qu'il 
avoit  fous  fon  chevet ,  en  frappa 
Cléonice  6c  la  jetta  fur  le  carreau. 
Cette  fille  ,  étant  morte  de  cette 
biefTure ,  ne  permettoit  p^s  à  fon 

(tf)  Pauf.  p.  III, 
(b)  Pauf»  p.  m. 


CL 

meurtrier  de  goûter  aucun  repos  ; 
car  ,  fon  image  ,  fe  préfentant  à  lui 
toutes  les  nuits  pendant  fon  fom- 
meil,  lui  prononçoit  en  colère  un 
vers  héroïque ,  dont  le  fens  eu  : 
Marche  devant  le  tribunal  de  la 
Ju[iice  ,  qui  punit  les  forfaits  ,  & 
qui  C  attend  ;  Vinfolence  ejl  enfia 
funefie  aux  hommes^ 

Les  alliés  4  indignés  de  cette  ac- 
tion fi  infâme ,  fe  joignirent  à  Ci- 
mon  6c  affiégerent  Paufanias  dans 
Byzance.  Mais  ,  s'étant  échappé , 
6c  étant  troublé  de  cette  image 
qui  le  pourfuivoit  contînuellenienty 
il  fe  retira  à  Héraclée ,  dans  le 
temple  où  Ton  évoquoit  les  âmes 
des  trépaffés  ;  6c  là ,  après  avoir 
fait  les  facrifices  8c  Mes  efFufioos 
funèbres  ,  il  appella  Tame  è^ 
Cléonice ,  6c  la  conjura  de  renon- 
cer à  fa  colère.  Cléonice  parut 
enfin ,  6c  lui  dit  que  bien-tôt  ar- 
rivé à  Sparte  ,  il  feroit  délivré  de 
fes  maux  ^  voulant  fans  doute  par 
ces  paroles  couvertes  luimarquef 
la  mort  qui  Ty  attendoit. 

On  peut  remarquer  en  paffant , 
que  Ta  me  de  Cléonice  efl  *  évo- 
quée par  les  magiciens  ,  comme 
dans  la  Bible  lame  de  Samuel  eft 
évoquée  par  les  enchantemens  de 
la  PythonifTe. 

CLEONICUS ,  Cleonicus ,  {i) 
affranchi  de  Séneque,  s*étoit  laiffé 
gagner  par  Néron  »  félon  quel- 
ques-uns 4  pour  empoifonner  foa 
maître.  Mais ,  ce  criminel  deiïieio 
ne  réuflit  pas,  foit  parce  que  Cleo- 
nicus en  avertit  (on  patron  ,  foit 
par  les  précautions  que  Séneque 

I    (o  Plut.  T.  I.  p.  48». 

I-    itÛ  Tacic,  Annai.  L,  XV.  c.  4$. 


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CL 

cmployoit  lui-même  pour  fe  fouf- 
traire  aux  mauvais  ëefleins  de 
Néron. 

CLÉONIDAS  ,  Cleonidas  , 
K>fcBr:'/aç,  (a)  lieutenant  de  Pto- 
lémée  ,  gardoit  avec  de  bonnes 
troupes  Sicyone  &  Corihthe.  Dé- 
métrius  lui  ayant  oiFert  de  grof- 
fes  fommes  pour  l'engager  à  ren- 
dre la  liberté  à  ces  villes ,  &  à  -en 
retirer  fes  garnifons ,  il  ne  vou- 
lut entendre  à  aucune  propofi- 
tion. 

CLÉONNIS,  Cleonnis,  {h) 
K>iéom;  ,  étoit  un  Prince  Meflé- 
nien  ,  du  fang  royal  d'Épytus  & 
d'Hercule,  du  tems  de  la  pre- 
mière guerre  Mefleniaque.  Il 
commanda  toujours  le  corps  de 
bataille  depuis  le  premier  juiqu^au 
dernier  jour  de  cette  guerre  oh  il 
fut  tué.  Il  avoit  concouru  deux 
fois  pour  être  élu  Roi  ,  la  pre- 
mière après  la  mort  d'Euphaès  , 
b  féconde,  après  la  mort  d'Arifto- 
dème.  Il  commanda    fous   Eu- 

Ehaès  ,  fous  Ariftodème ,  &  fous 
)amis.  Il  eu  beaucoup  parlé  de 
Cléonnis  à  l'article  d*Ariftomène 

I.  Foyei  cet  article. 

.  CLÉONYME,  CUonymus  , 
Vi-h^-JnYvfJLoc,  ^  capitaine  des  Athé- 
niens ,  dont  le  nom  n'eft  connu 
qu'à  caufe  de  fa  lâcheté*  Il  abanr 
donna  fes  troupes  dans  une  ba- 
taille >  &  s'enfuit  le  premier ,  après 
avoir  jette  foh  ,  bouclier»  >  C'eft- 
pourquoi ,  il  eft  raillé  par  le  poète 
Ariftophanedans  fe<  Nuées.  Ceft 

(«)  Plut.  T.  I.  p.  895. 
.  {h)  Pauf.  pag.  218»  è*  j>^.  Mém.  de 
TAcad.  des  Infcript.  &  Bell,   Lett.  T. 

II.  p.  86.  ër/««v.     ' 

%   (O  Xcnoph.  p.  ji8. 


C  L  379 

lui  qui  a  donné  lieu  au  proverbe 
contre  les  lâches  :  Plus  timide  que 
Cleonyme, 

CLÉONYME  ,  CUonymus , 
XAfwj't'Mcç»  {c)  brave  officier 
Spartiate  ^  fut  tué  d'un  coup  de 
flèche  dans  une  action  contre  les 
Carduques.  Cet  officier  étoit  con« 
temporain  de  Xénophon. 

CLÉONYME,  CUonymus^ 
K^5aJ»'f^o;  »  (d)  fils  de  Sphodrias , 
étoit  un  jeune  Spartiate  ,  beau  & 
bienfait.  On  peut  voir  fous  l'arti- 
cle d' Archidame  III ,  roi  de  Spar- 
te ,  ce  que  nous  avonç  eu  occafion 
de  raconter  au  fujet  de  ce  Prince 
&  de  Cléonyme.  11  eft  compté 
au  nombre  des  braves  Spartiates 
qui  furent  tués  à  la  bataille  de 
Leu£lres.  Après  avoir  été  abattu 
trois  fois  devant  le  Roi ,  &  s'être 
relevé  trois  fois  ,  Cléonyme  fut 
çnfin  achevé  en  combattant  gé- 
néreufement  devant  Ton  Prince , 
jufqu'à  la  dernière  goutte  de  fon 
fane* 

CLÉONYME  ,  CUonymus, 
Kxsiûà'Uû;  ,  (^)  général  des  Lacé* 
démoniens. 

Les  Tarentins  ,  ayant  affaire 
en  même  tems  aux  Romains  & 
aux  Lucaniens  ,  envoyèrent  de- 
mander à  Sparte  des  troupes  auxi- 
liaires >  &  nommément  le  général 
Cléonyme.  Les  Lacédémoniens 
leur  accordèrent  cette  demande 
de  bonne  grâce  ,  d'autant  plus 
que  les  Tarentins  leur  foumiffoient 
eux-mêmes  àe  l'argent  >  pour  le- 

'     {d)  Pli^t.  Tom.  I.  p.  609  ,610  ,6ia. 
Jlcnoph.  p.  570.  &  feq, 

(c)  Dîod.  Sicul.  pag.  787.  Tit.  Liv, 
L.  X.  c.  ».  Roll.  Hiit.  Rom.  Tarn.  II. 
P^$o8»joS.,  ,      . 


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38o  CL 

ver  des  troupes  ,  6c  des  vaifleaux 
pour  les  embarquer.  AinH ,  Cleo— 
nyiatf  ayant  bien- tôt  réuni  cinq 
mille  hommes  dans  le  Ténare  de 
Laconie ,  fit  voile  du  coté  de  Ta- 
tente.  Là  il  aflembla  encore  le 
même  nombre  de  Soudoyés ,  & 
faifant  enrôler  les  bourgeois  mê- 
mes de  la  ville ,  il  compofa  une 
armée  de  vingt  mille  hommes  de 
pied  6c  de  deux  mille  hommes  de 
cheval.  II  attira  même  des  Grecs 
établis  en  Italie  »  &  il  fit  alliance 
avec  la  nation  des  Meflapiens.  Au 
feul  afpeâ  de  tant  de  troupes ,  les 
Lucaniens  jugèrent  à  propos  de  Ce 
téconcilier  avec  les  Tarentins.  Les 
Métapontins  s'oppoferent  feuls  à 
ce  racommodement.  Là-deflus,  le 
Spartiate  conieilla  aux  Lucaniens 
de  fe  jetter  ftir  leurs  terres  »  oh 
ayant  rencontré  les  Métapontins 
eux-mêmes  en  corps  d*armée ,  il 
leur  parut  redoutable.  En  efiet , 
étant  entré  à  quelque  tems  de-là 
dans  leur  ville  comme  ami  ,  il 
trouva  moyen  de  tirer  d'eux  plus 
de  fix  cens  talens  d'argent  »  &  de 
le  faire  donner  pour  otages  deux 
cens  jeunes  filles,  qu'il  deflinoit 
fous  ce  titre  ou  fous  ce  prétexte  à 
fes  plaiCrs.  Car ,  ayant  renoncé 
jttfqu'à  rhaVtt  de  Lacédémone , 
il  fe  plongeoit  dans  la  débauche , 
&  fe  faîfott  des  efclaves  de  ceux 
qui  (e^fioient  à  fa  parole;  ainfi, 
avec  toutes  les  uoupes  dont  il 
étoit  accompagné  ,  il  n*exécuta 
lien  qui  fût  digne  de  la  réputation 
de  fa  patrie.  Il  avoit  annoncé  en 
s'embarquant  pour  la  Sicile ,  qu'il 
y  allott  détruire  la  tyrannie  d'A* 
gathode,  &  rendre  cette  ifle  à 
fes  propret  loix  -,  mais  ,  iJyaodQa* 


CL 

nant  auffiiôt  ce  projet  ,  il  vînt 
aborder  à  Corcyre ,  <5ii  fé  faifif- 
fant  de  la  capitale ,  il  y  extorqua 
de  groiles  fommes  d'argent  ,  ▼ 
mit  une  forte  garnifon  ,  &  en  ne 
fa  place  d'armes  »  pour  tomber 
de-là  fur  les  villes  de  la  Grèce 

Îu'il  lui  conviendroit  d'attaquer, 
.à  il  reçut  des  députés  de  la  part 
de*  Démétrios  &  de  Caffandre  , 
qui  l'invitoient  »  chacun  de  leur 
côté,  à  fe  joindre  à  eux;  mais ,  il 
n'écouta  ni  l'un  ni  l'autre.  Appre- 
nant enfuite  que  les  Tarentins  ,  & 
quelques  autres  peuples  d'Italie 
s"étoient  révoltés ,  il  vient  en  di- 
ligence comme  pour  châtier  les 
rebelles.  Mettant  pied  à  terre 
dans  l'endroit  ^oh  ces  barbares 
avoient  leur  camp  ,  il  prend  leur 
ville  ,  en  met  en  vente  les  ci- 
toyens, 6c  ravage  leurs  campa- 
gnes. PafTant  de-là  à  Triopium  , 
n  l'affiege ,  6c  y  fait  trois  mille 
efdaves.  Mais  ,  les  payfans  da 
Voifinage  s'étant  raflieinblés  »  affie^ 

Sent  (on  camp  pendant  la  nuit  ; 
c  dans  le  combat  qui  fut  livré  à 
cette  occafion,  ils  lui  tuèrent  plus 
de  deux  cens  hommes ,  6c  firent 
fur  lui  environ  mille  prifonniers* 
Une  tempête  ,  qui  s'éleva  quel- 
que tems  après ,  fubmergea  une 
vingtaine  de  fes  vaifleaux  ,  qui 
étoient  à  la  rade  auprèsu  de  é>tk 
camp.  Ces  deux  échecs  »  arrivés 
coup  fur  coup  ,  l'obligèrent  de 
ramener  à  Corcyre  le  refte  de 
fon  armée  6c  de  fa  flotte.  Voilà 
ce  qu'on  lit  dans  Diodore  de  Si- 
cile. 

Selon  Tite-Live ,  Cléonyme, 
chaflTé  d'Italie  par  les  Romains , 
ayant  doublé  le  promontoire  di^ 


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CL 

Ktundufium  ,  fut  pouiTé  par  les 
▼eots  au  milieu  du  golfe  Adriati- 
que ;  &  de- là  appercevant  à  fa 
gauche  les  côtes  inacceffibles  de 
rltalie ,  &  à  (a  droite  Tlllyrie  ,  la 
Liburnie  Ôc  Tlflrie ,  toutes  nations 
féroces  ,  &  la  plupart  décriées 
par  les  brigandages  qu'elles  eier- 
çoient  fur  la  mer;  il  arriva ,  ea 
pouffant  plus  loin,  jufqu'aux  riva, 
ges  des  Vénetes.  Là  il  apprit  par 
le  rapport  de  quelques-uns  des 
liens  ,  qu'il  avoit  mis  à  terre  , 
pour  aller  reconnoitre  le  païs  , 
qu'ils  n'avoient  qu*un  pas, à  faire 
pour  découvrir  derrière  une  chauf- 
fée longue  &  étroite  ,  des  marais 
>&  des  étangs  formés  par  les  eaux 
de  h  mer ,  &  un  peu  plus  loin  ^ 
des  plaines  terminées  par  des  col- 
lines qu'on  voyoit  un  peu  plus 
avant;  qu'ils  n'écoient  pas  éloi- 
gnés de  Terr^bouchure  d'un  fleuve 
i)rofond  { c'étoit  le  Méduac]  oh 
es  vaifleaux  pouvoient  demeurer 
xachés  dans  une  rade  (ure  6c  com- 
mode. Cléonyme ,  informé  de  ces 
particularités  ,  ordonna  à  fes  gens 
de  faire  entrer  leur  flotte  dans  ce 
fleuve ,  &  de  le  remonter.  Mais , 
comme  fon  lit  ne  pou  voit  porter  les 
gros  bâtimens»  les  foldats  paflerent 
dans  des  barques  légères,  avec  lef- 
quelles  ils  vinrent  débarquer  fur 
un  rivage  ,  d'où  ils  apperçurent 
dans  la  plaine  crois  gros  bourgs  de 
la    dépendance     des    Padouans* 
Alors,  laifTant  quelques-uns  des 
leurs  pour  garder  leurs  vaifleaux,  * 
.  ils  s'avancèrent  dans  le  païs  ,  pri- 
rent ces  bourgs  d'aflaut,  mirent 
le  feu  aux  maifons  ,  enlevèrent 
un  grand  notpbre  d'hommes  & 
d*animaux;  &  la  douceur  du  bu- 


C  L  381 

tin  les  entraînant  plus  loin  ,  ï\$ 
s'éloignèrent    înfenfiblement    de 
leurs  barques.  Les  Padouans,  que 
les  Gaulois ,  leurs  voifins  ,  obli- 
geoient    d'être    continuellement 
lous  les  armes ,  ayant  appris  ces 
hoftilités  ,  partagèrent  leur  jeu- 
neûe  en  dieux  corps.  Ils  menèrent 
l'un  dans  le  païs  où  ces  étrangers . 
s'étoient  répandus   pour   piller  ; 
l'autre  prit  un  chemin  différent, 
pour  ne  point  rencontrer  ces  py- 
races  ,  &  marcha  vers  l'endroit 
où  leurs  bâtimens  s'étoient  arrê- 
tés ,  environ  à  quinze  milles  de  la 
ville.  Cette  troupe  attaqua  ceux 
qui  gardoient  les  barques ,  &  les 
tuèrent  ;  mais ,  les  Nautonniers 
effrayés  les  conduifirenc  à  la  rive 
oppofée.  Ceux,  qui  étoient  allés 
fondre  fur  les  fourrages  au  milieu 
des  terres ,  n'eurent  pas  un  moin- 
dre ûiccès.  Les  Grecs  furent  bat- 
tus oi  mis  en  fuite  ;  &  quand  ils 
voulurent  regagner  leurs  v^ifleaux, 
les  Yénetes  vinrent  à  leur  ren- 
contre, &  leur  en  fermèrent  le 
chemin.  Ainfl,  ils  fe  trouvèrent 
entré  deux  ennemis.  La  plupart 
furent  tués.  Ceux  qui  demeurè- 
rent prifonniers  ,  apprirent  aux 
vainqueurs  le  lieu  où  leur   roi 
Cléonyme  étoit   refté   avec  fe^ 
gros  vaiffeaux  ,  environ  à  trois 
milles de-là.  Les  Italiens,  ayant 
laiiïé   leurs   prifonniers  dans   le 
bourg  voifln,  s'embarquèrent,  par- 
tie dans  leurs  bacteaux  ,    qu'ils 
fabriquoient    fans   carène  ,    afin 
qu'ils  navigeaflent  aifément  fur  ce 
fl^ve    dans  les  endroits  où    il 
manquoit  de  profondeur ,  partie 
dans  les  barques  des  Grecs  mê- 
mes ,  &  tous  enfemble  vinrent 


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382  C  L 

tomber  far  le  refle  de  la  flotte 
ennemie  ,  qui  étoit  immobile 
dans  fa  place.  Ils  n'eurent  pas  de 
peine  à  tuer  ceux  qui  la  gardoient, 
&  qui  craignoient  tnoins  Tennemi 
que  le  païs ,  qui  leur  étoit  inconnu. 
Comme  ils  furent  furpris  ,  ils 
fongerent  moins  à  fe  défendre , 

2u*à  regagner  la  mer  en  fuyant. 
,es  Padouans,  joints  aux  Véne- 
tes ,  les  pourfuivirent  jufqu'à  Tem- 
bouchure  du.  fleuve  ,  &  s'en  re- 
vinrent viftorieux  ,  après  avoir 
pris  ou  brûlé  une  partie  de  leurs 
vaiflêaux ,  qu'ils  avoient  été  obli- 
gés de  laiiTer  fur  le  labié.  Cléo- 
nyme  fe  retira  à  peine  avec  la 
cinquième  partie  de  fes  vaiflêaux  , 
après  avoir  été  maltraité  fur  tou- 
tes les  côtes  de  la  mer  Adriatique 
oîi  il  avoit  abordé. 

CLÉONYME  ,  Cli^nymus  , 
Kmc^i/^o;  »  (tf)  fils  de  Cléimè- 
ne  II ,  roi  de  dparte,  n'eut  qu'un 
frère  qui  étoit  fon  aîné  y  &  qui 
mourut  avant  lui,  du  vivant  de 
Cléômène  IL  A  la  mort  de  ce 
dernier,  il  y  eut  une  difpute  au 
fujet  de  la  royauté  entre  Cléony- 
me  &  Aréus  fon  n^veu.  Comme 
Cléonyme  paroiflbit  homme  vio- 
lent &  defpotique ,  il  n'étoit  point 
aimé  à  Sparte ,  6c  il  eut  la  dou- 
leur de  voir  qu'Aréus  l'emporta 
fur  lui. 

Cléonyme,  dans  un  âge  fort 
avancé»  avoit  époufé  une  très- 
belle  femme  ,  appellée  Chélido- 
nide  ,  fllîe  de  Léotychidas.  Cette 
jeune  femme ,  ayant  conçu  une 
violente  paflion  pour  Acrotate , 


CL 

fils  du  roî  Aréûs ,  qui  étoît  beaa  \ 
bienfait,  6c  dans  la  fleur  de  fa 
jeunefl[e  ,  rendit  fon  mariage  non 
feulement  très- trifte ,  mais  encore 
très-honteux  pour  fon  mari  Cléo- 
nyme «  que  l'amour  &  la  jaloufle 

^  tranfportoient  également  ;  car  »  fa 
honte  étoit  publique  ,  &  il  n'y 
avoit  pas  un  Spartiate  ,  qui  ne 
fçût  le  mépris  que  fa  femme  avoit 
pour  lui.  Animé  donc  d'un  vif 
défir  de  fe  venger ,  &  de  fes  ci- 
toyens injuftes ,  &  de  fa  femme 
infidèle ,  il  mena  Pyrrhus  contre 
Sparte  avec  vingt- cinq  mille  hom- 
mes  d'infanterie  ,  deux  mille  che- 
vaux &  vingt-quatre  éléphans. 

Ils  arrivèrent  fur  le  foir  devant 
Lacédémone.  Cléonyme  vouloit 
que  Pyfrhus  l'attaquât  fans  difié- 
rer  un  moment ,  pour  profiter  du 
trouble  ou  étoient  les  habitans 
qui  ne  s'attendoient  à  rien  moins 
qu'à  un  fiege,  &  de  l'abfence  du 
roi  Aréus  qui  étoit  allé  en  Crète 
au  fecours  des  Gortyniens.  En 
eflet,  les  Ilotes  &  les  amis  de  Cléo- 
nyme s'empreflbient  déjà  à  orner 
&  à  préparer  fa  maifon,  ne  doutant 
point  que  Pyrrhus  n'y  vînt  fouper 
avec  lui  le  foir  même.  Pyrrhus  , 
qui  comptoit  la  prife  de  cette  ville 
ivLXQ  &  immanquable  ,  remit  l'at- 
taque au  lendemain.  Ce  délai  fau- 
va  Sparte ,  &  montra  qu*il  eft  des 
momens  favorables  &  déçififs  , 
qu'il  faut  faifir,  &  qui  ne  revien- 

,  nent  plus. 

CLÉOPATER  ,  Cleopattr  , 
KAS'VotT/5c;  ,  (^)  étoit  comman- 
dant de   la  citadelle  de   Coria- 


ce) Plut.  Tom.   T.   pag.  400,  ^01  ,|pag.  t%%  ,  i%^, 
796  ,  7^,  Roll.  Hift.  Ane.  Tom.  IV.  I     {h)  Plut.  T.  I,  p.  1046. 


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CL 

ihe  do  tems  d'Aratus. 

CLÉOPATRE  ,  Cleopatra  , 
K>^€Q7roiTfOL  ,  nom  célèbre,  dans 
THiftoire  facrée  &  profane ,  com- 
me on  peut  le*  voir  dans  les  arti- 
cles fùivans. 

CLÉOPATRE  ,  Cleopatra, 
KxèoirttT^ci ,  {a)  611e  dldas  &  de 
Marpefle,  fut  furnommée  Alcyq- 
ne ,  à  ToccaHon  d'une  aventure 
aOfez  fingulière.  Sa  mère  ayant 
été  enlevée  par  Apollon  ,  Idas 
ofa  prendre  les  armes  contre  ce 
dieu  ,  pour  recouvrer  fa  femme  ; 
&  aân  de  conferver  dans  leur  fa- 
mille la  mémoire  de  cette  trifle 
aventure  ils  donnèrent  à  leur  611e 
Cléopâtre  le  furnom  d*Alcyone , 
à  caufe  des  regrets  &  des  larmes 
que  ce$  enlèvement  avoit  caufé  à 
fa  mère  ,  qui  >  comme  une  autre 
Alcyone ,  fe  voyoit  par-là  cruel- 
lement féparée  dé  Ton  mari. 

Cléopâtre  éppufa  Méléagre  , 
dont  elle  eut  une  611e  ,  nommée 
Polydora.  La  mort  de  Méléagne 
lui  caufa  tant  de  regret  j  qu'elle 
ne  put  lui  furvivre. 

CLÉOPATRE  ,  'Cleopatra  , 
K^owarpet  %  (h)  nièce  d'Attale, 
fut  mariée  environ  l'an  336  avant 
J.  C. ,  à  Philippe ,  père  d'Alexan- 
dre le  Grand.  Elle  étoit  encore 
très-jeune ,  mais  d'une  beauté  ex- 
traordinaire ,  aux  attraits  de  la- 
quelle Philippe  ne  put  réfifter.  Il 
avoit  répudié  auparavant  Olym- 
pias  ,  que  fon  orgueil  ÔC  fa  mau- 

ia)  Homer.  Ilîad.  L.  IX.  v.  55s.  ér 
ftq,  Pauf-  p.  219. 

(h)  Juft.  L.  IX.  c.  7.  Pauf.  pag.  466. 
Diod.  Sicul.  p.  558.  Plue.  T.  I.  p.  670. 
Roll.  Hitt.  Ane.  T.  III.  pag,  530.  Mém. 
de  PAcad.  des  Infcript.  &  Bell.  Lctt. 
Xom.  XII.  p.  346. 


C  L  385 

valfe  humeur  lui  avoîent  rendu 
infupportable.  Ce  Prince  ayant 
été  tué  par  Paufanias  quelque  tems 
après  qu'il  eut  contraéèé  ce  nou- 
veau mariage ,  Olympias  tourna 
toute  fa  colère  contre  Cléopâtre  ; 
elle  6t  égorger  fa  propre  6lle  dans 
fon  fein  5  &  Cléopâtre  elle-même 
fut  bientôt  réduite  à  chercher  la 
6n  de  fa  vie  dans  le  plus  honteux 
de  tous  les  fupplices.  L'impitoya- 
ble Olympias  (e  6t  un  plaifîr  bar- 
bare de  voir  cette  malheureufe 
princeffe  fufpendue  à  un  infâme 
poteau.  Tel  eft  le  récit  de  Juftin. 

Paufanias  dit  que  Cléopâtre 
avoit  eu  de  Philippe  ,  non  une 
6Ue ,  mais  un  61s  ;  qu'Olympias 
6t  jetter  la  mère  Ôc  le  61s  dans 
un  vaiffeau  d'airain  brûlant  ;  6c 
qu'elle  les  y  tint  jufqu'à  ce  qu'ils 
euflent  expiré  dans  les  tourmens» 

CLÉOPATRE  ,'  Cleopatra, 
KMOTrarpct ,  (c)  6lle  de  Philippe 
ôiû'Olympias,  &  fœur  d'Alexan- 
dre le  Grand ,  époufa  Alexandre 
fon  oncle  ,  roi  des  Épirotes,  l'an 
336  avant  J.  C.  Le  mariage  fut 
célébré  avec  beaucoup  de  pompe. 
Philippe  ,  voulant  joindre  aux  fo- 
lemnitésde  religion,  de  nombreu- 
fes  afTemblées  deréjouiffance  ,  6t 
trouver  au  feflin  des  noces  ,  des 
muficiens  émules  les  uns  des  au-» 
très ,  &  tous  ceux  qui  étoient  habi- 
les dans  leur  art ,  &  6t  drefTer  des 
tables  fans  nombre  pour  les  amis 
&  pour  les  étrangers.  Il  envoya 

(O   Tit.    Liv.  L.  VIII.  c.  04.  Juft. 
L.  IX.  c.  6.  L.  XIII.  c.  6.  L.  XIV.  c.  1. 

Diod.  Sicul.  pag.  557,751  >75».  Roll. 
kilt.  Ane.  T.  m.  pag.  551.  é'  fitiv.  T. 
IV.  pag.  105.  Mém.  de  PAcad.  des 
Infcript.  &Bell.  Letc.  T.  XII.  pag.  346. 
T.  XVI.  p.  301. 


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'f.  ^^      CL 

inviter  par  toute  la  Grèce  ,  ceux 

avec  lefquels  il  avoit  quelque  liai- 
ion  d'hofpitalité  ,  &  les  chargea 
djamener  avec  eux  le  plus  qu'ils 
pourroient  avoir  fur  tout  d'amis 
étrangers.  Maif ,  tout  cet  appa« 
reil  fe  termina  au  meurtre  de  Phi- 
lippe ;  &  ce  fut  un  déni  de  jufticé 
qui  lui  fit  perdre  la  vie.  Alexan- 
dre Ton  gendre  périt  depuis  dans 
les  guerres  dltalie. 

Après  la  mort  de  Ton  mari , 
Cléopâire  refta  toujours  veuve  j 
&  il  y  avoit  plufieurs  années 
qu'elle  faifoit  fa  réfidence  à  Sar- 
des en  Lydie  ,  lorfque  l'an  308 
avant  l'Ère  Chrétiennne ,  mécon- 
tente d'Antigonus  ,  &  efpérant 
de  trouver  plus  de  faveur  auprès 
de  Ptolémée  roi  d'Egypte ,  elle 
partit  pour  fe  rendre  a  la  cour  de 
ce  Prince.  Les  prérogatives  ,  qui 
lui  étoient  propres ,  avoient  en- 
gagé Caffandre  ,  Lyfimachus  , 
Antigonus  ,  Ptolémée  &  les  per- 
fonnages  les  plus  diflingués  de  la 
cour  d'Alexandre  ,  à  rechercher 
l'alliance  de  cette  princefle  depuis 
la  mort  de  ce  conquérant.  Car  ,  il 
n'étoit  aixcun 'd'eux  ,  qui  «  bien 
perfuadé  que  les  Macédoniens  re- 
connoitroient  fon  époux  pour  leur 
légitime  Roi  ,  n'efpérât  d'attirer 
à  lui  feul  la  fucceilion  entière  de 
ce  vafte  Empire ,  dont  ils  fe  dif- 
putoient  les  uns  aux  autres  les 
parties  féparées  ;  mais  lejgouver- 
neur  de  Sardes  ,  qu*Antig;onus 
avoit  chargé  de  la  garde  de  Cléo- 
pâtre  ,  la  fuivit  de  près  &  l'attei- 
gnit ;   après  quoi  il  la  mit  entre 


CL 

les  mains  de  quelques  femmes  qui 
la  firent  mourirfecrétement.  Mais, 
dans  la  fuite  ,  Antigonus  ne  vou- 
lant pas  que  le  foupçon  de  cet 
aflaflinac  demeurât  fur  lui  ,  _fit 
accufer  &  punir  quelques-unes  de 
ces  femmes  ,  comme  coupables 
en  effet  de  ce  crime  ;  après  quoi  » 
il  fit  faire  à  cette  reine  infortunée 
des  funérailles  magnifiques.  C'eft 
ainfi  que  l'infortunée  Qéopâtre , 
qui  avàii  été  l'objet  de  tant  de 
vœux  ;  trouva  la  mort  aq  lieu  des 
noces  auxquelles  elle  s'atteodoit 
elle-même. 

CLÉOPATRE  ,  Chopatra  , 
K^ovirpa,  «  (a)  fille  d'Antiochus 
le  Grand.  Ce  Prince  ,  ayant  fou- 
rnis toute  la  Céléfyrie  &  la  Pa* 
leftine  9  forma  le  deffein  d'en 
faire  autant  dans  l'Afie  mineure. 
Comme  il  falloit  pour  cela  empê- 
cher que  les  Égyptiens  ne  vinf- 
fent  l'inquiéter  dans  fes  nouvelles 
conquêtes  ,  pendant  qu'il  feroit 
éloigné,  il  envoya  Euclès  Rho- 
dien  à  Alexandrie  propofer  le 
mariage  de  fa  fille  Cléopâtre  avec 
le  roi  Ptolémée  Épiphane ,  avec 
cette  claufe,  qu'on  attendroit  qu'ils 
fuiTent  un  peu  plus  âgés  pour  le 
confommer ,  &  qu'alors  ,  le  jour 
même  des  noces  ,  il  remettroit  à 
lÉgypte  les  provinces  nouvelle- 
ment conquifes  comme  la  dote  de 
fa  'fille.  Cette  propofition  fût 
goûtée,  le  traité  conclu  &  rati- 
fié ;  &  fes  Égyptiens ,  comptant 
fur  fa  parole  Si  fur  (es  engage- 
mens  ;  lui  laifferent  faire  tout  ce 
qu'il    voulut  d'un   autre   côté  , 


(«)  Jofeph.de  Antiq.  Judaïc.  p4  401.1  PAcad.  des  Infcript.  &  Bell.  Lett.Tom* 
Dani.  c.  11.  v.  17.  Roll.  Hift.  Ane.  T.]  XIX.  pag.  58. 
IV,  p.  475 ,  518,  ôjj  ,  668.  Mém.  dej 

fans 


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et 

fans  l'inquiéter  de  Celui  -  cî. 
-,  Quelques  années  après  ,  l'an 
192  avant  J.  C,  Antiochus  don- 
na en  effet  fa  fille  C^opâtre  en 
mariage  à  Ptolémée  Épiphane  » 
&  lui  céda  pour  fa  dot  les  pro- 
vinces de  Céléfyrie  &  de  Palefti- 
Me  ;  à  condition  pourtant ,  comme 
la  chofe  avoit  été  flipulée  aupa- 
ravant i  qu'il  en  toucherott  la. 
moitié  des  revenus.  A  la  mort  du 
Roi  fcuî  mati ,  Cléopâtre.fut  dé- 
clarée régente  &  tutrice  du  jeune 
prince  fon  fils ,  &  elle  s*en  ac* 
quitta  avec  beaucoup  de  foÎQ  fie 
de -prudence. 

On  Cto'm  que  c'eft  cette  prin- 
éeffe ,  qui  eft  défignée  daiis  le 
prophète  Daniel  en  ces  termes: 
//  s* affermira  dans  le  de£ein  de 
venir  s'effiparer  de  tout  le  royaiifttè 
du  roi  dit  Midi  ;  il  feindra  de^i^ou' 
loir  agir  de  bonne  foi  avec  lui  ;  il 
lui  donnera  tn  mariage  fa  fille 
d'une  excellente^  beauté ,  afin  ^ek' 
perdre;  mais  y  fon  dèffeih' ne  lui 
réufftra  pas\y"  &  elle  ne  lui  fera 
point  favorable,  •  -   * 

•  Ce  'j'^rince  cfùi  s^affermira ,  c'eft 
le  roi  AmiechttS  le  Grand  ;  ce  roi 
dû  Midi ,  c'eft  Ptolémée  Épipha- 
ne ;  ehfin,  cette  fille  d'une  excel- 
lente beauté  ,  <  c'eft  Cléopâtre  i 
qui  préfera  les  intérêts  de  fon 
époux  y  aux  vues  injufte»  du  Roi 
fon  père.  Car ,  on  prétend  que 
ce  Prince  ,  'en  donnant  fa  fille  en 
mariage  au  roi  d'Egypte ,  avoit 
eu  intention  de  fe  faciliter  la  con- 
quête de  ce  royaume. 
.  CLÉOPÂTRE  ,   Cleopatra , 


C  L  38J 

K\toitxTpci ,  (a)  fille  de  Ptolémée 
Épiphane  &  de  Cléopâtre ,  épou-' 
fa  Ptolémée  Philométor  fon  frère. 
Comme  ce  Prince  etoit  en  guerre 
avec  Ptolémée  Évergete ,  dit  auffi 
Ptolémée  Phyfcon  ,  Cléopâtre 
employa  fâ  médiation  ,  pour  les 
difpofer  à  un  accommodement , 
fie  elle  y  réufEt  heureufement. 

Après  la  mort  de  fon  mari , 
Cléopâtre  tâcha  de  mettre  la  cou- 
ronne fur  la  tête  du  fils  qu'elle 
avoit  eu  de  lui.  Comme  il  étoît 
encore  en  bas-âge,  d'autres  tra- 
vaillèrent à  la  procurer  à  Ptolé- 
mée Phyfcon ,  roi  de  la  Cyré-' 
naïque ,  fie  l'envoyèrent  prier  de 
venir  à  Alexandrie.  Réduite  par- 
là  à  la  néceftité  de  fonger  à  fa 
défenfe  ,  Cléopâtre  fit  venir  à  fon 
fecours  Onias  fie  Dofithée  avec 
une  armée  de  Juifs.  Il  fe  trouva 
alors  à  Alexandrie  un  ambaffa- 
deur  Romain  ,  nommé  Thermus  , 
qui ,  par  fa  médiation ,  amena  les 
chofes  à  un  accommodement.  On 
<k)nvint  que  Ptolémée  Phyfcon 
épouferoit  Cléopâtre  ,  qu'il  éle- 
veroit  fon  fils,  qui  feroit  déclaré 
héritier  de  la  couronne ,  6l  que 
Ptolémée  Phyfcon  Tauroit ,  en  at- 
tendant ,  pendant  coûte  fa  vie.  II 
n'eut  pas  plutôt  époufé  la  Reine, 
fie  pris  par-là  pofTeiTion  de  la  cou- 
ronne ,  que ,  le  jour  même  des 
noces  ,  il  eua  fon  fils  entre  fes 
bras. 

Dans  la  ftiite  j  s'étant  dégoûté 

de  la  mère,  il  devint  paftionné* 

pour  una  fille  qu'elle  avoit  eue  de 

'Ptolémée  Philométor  ,  &i  qui  po^^ 


U)  Juft.  L.  XXXVlli:  c.  8  ,  ^•.  1.  XXXIX.  c.  î.  Afth.  c»  il.  v.  1.  RôU.  Hift» 
Ane.  Twn.  J V.  p.  678.  T.  V>  180  >  ao6.  ér  >iv. 

Tom.  XI.  B  b 


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^U  C  L 

toit  àuffi  le  nom  de  Cléopâtre.  Il 
cohimença  par  lui  faire  violence  ; 
ènfuite  ,  il  Tépoufa ,  après  avoir 
chafTé  fa  mère.  Les  cpuaurés ,  qu'il, 
exerça  bientôt  après  fur  les  Aie* 
xandrins  ,  le  rendirent  ù  odieux , 

3ue  s'il  n*eût  pas  eu  la  précaution 
e  prendre  la  fuite  ,  il  eût  été 
brûlé  dans  fon  palais.  Ceux  d'A- 
lexandrie mirent  le  gouvernement 
entre  les  mains  de  ^Cléopâtre  ;  & 
fur  la  nouvelle  qu'ils  eurent ,  qu'il 
avoit  tué  fon  propre  fils ,  dans  la 
crainte  qu'ils  ne  l'élufTent  pour 
leur  Roi  en  fa  place  ^  ils  renver- 
ferent  &  briferent  toutes  fes  fla- 
tues.  Ptolémée  Phyfcon  ,  s'ima- 
gînant  qu'on  n'avoit  fait  cela  >  que 
pour  plaire  à  Cléopâtre,  égorgea 
le  fils  qu'il  avoit  eu  d'elle.  Enfui- 
te,  il  fit  couper  fon  corps  en  mor- 
ceaux 9  les  mit  dans  une  caifTe 
avec  la  tête  entière ,  afin  qu'on  la 
reconnût ,  &  l'envoya  par  un  de 
fes  gardes  à  Alexandrie»  avec  or- 
cire  d'attendre  pour  la  lui  préfen- 
ter  le  jour  de  la  naiifance  de  cette. 
PrinceiTe  ,  qui  approclioit ,  &  qui 
devoit  fe  célébrer  avec  beaucoup 
de  magnificence.  Les  ordres  furent 
exécutés.  La  caifTe  lui  fut  rendue 
au  milieu  de  la  joie  de  la  fête ,  qui 
fut  bientôt  changée  en  deuil  &  en 
lamentations.  On  ne  fçauroit  ex- 
primer l'horreur  que  la  vue  de  ce 
triûe  objet  excita  contre  le  tyran , 
<}ont  la  monflrueufe  barbarie  avoit 
produit  un  crime  fi  horrible  &  fi 
inouï.  On  expofa  aux  yeux  du 
peuple  cet  abominable  pcéfent.  Il 
y  produifit  le  même  effet  que  fur 


CL 

la  cour ,  qui  avoit  eu  la  première 
ce  trifle  fpeâade.  On  courut  aux 
armes ,  &  on  ne  fongea  qu'à  em- 
pêcher ce  monftre  de  jamais  re- 
monter fur  le  trône.  On  forma 
une  armée,  dont  le  commande- 
ment fut  donné  à  Marfyas  ,  que 
la  Reine  avoit  nommé  Général  » 
&  l'on  prit  toutes  les  précautions 
poflibles  pour  la  défenfe  du  pais* 

Ptolémée  Phyfcon  ^  de  fon  cô- 
té ,  afiembla  une  armée  confidé- 
rabie.  Il  fe  donna  une  bataille , 
oii  ce  Prince  défit  les  eniœmis. 
Cléopâtre ,  réduite  à  une  grande 
extrémité  par  la  perte  de  fon  ar- 
m^ée  ^  qui  fut  prefque  toute  taillée 
en  pièces  dans  la  déroute ,  envoya 
demander  du  fecours  à  Démétrius 
Nicator ,  roi  de  Syrie ,  qui  avwt 
époufé  la  fille  ainée  qu'elle  avoit 
eue  de  Ptolémée  Philométor,  &  loi 
promit  la  couronne  d'Egypte  pour 
fa  récompenfe.  Démétrius  accep- 
ta ,  fans  balancer  ,  cette  propofi- 
tion ,  vint  avec  toutes  fes  trou- 
pes,  &  forma  le  fieg^  de  Pélufe. 
Mats  y  il  fut  bientôt  obligé  de 
l'abandonner  >  pour  aller  réduire 
fes  propres  fujets*  Cléopâtre  9 
deflicuée  du  fecours  qu'elle  en 
avoit  attendu ,  mit  tous  fes  tréfors 
fur  des  vaiffeaux  ,  Ôc  fe  réfugia 
auprès  de  Cléopâtrefa  fille,  reine 
de  Syrie  ,  vers  l'an  128  avant 
J.C. 

CLÉOPÂTRE  ,  CUopatra  , 
KMOTTf/  f0ot ,  (a)  fille  de  Ptolémée 
Philométor  &  de  Cléopâtre  ,  fut 
d'abord  mariée  à  Alexandre  Baia» 
Son  père  la'  conduifit  lui-même 


<«)  Appian.  p.  i^s.  Juft.  L.  XXXVI.  je.  xo.  v.  51.  ér  fe^f,  RoU;  Hîfl:,  Aac» 
b«  Lf  I.l  X,  V.  p,  176  »  178  >  iS^  àrpUv^ 


ft  1.  L.  XXXIX.  6. 1  «  ».  Macab, 


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CL 

jtifqu'à  Ptolémaïde,  où  fe  célébra 
le  mariage,  i'an  150  avant  J.C. 
Quatre  ans  après  ,  il  la  lui  ôta 
pour  la  donner  à  Démétrius  Ni« 
cator. 

Cç  Prince ,  clans  la  fuite ,  ayant 
été  pris  &  retenu  par  les  Parthes , 
Cléopâtre  fe  renferma  avec  fes 
enfans  dans  Séleucie  >  ob  plufteurs 
des  foldats  de  Tryphon  vinrent  fe 
jétter  dans  fon  parti  Mais,  ces 
défertions  ne  ^roiTiflbient  pas 
pourtant  aflez  (on  parti  pour  la 
n^ttre  en  état  de  fe  Soutenir  par 
elle-même.  Ellecraignoit  auffi  que 
le  peuple  de  Séleucie  ne  la  livrât 
à  Tryphoii ,  plutôt  que  de  foûte- 
nir  un  iiege  pour  Ta  mou  r  d'elle. 
£Ue  fie  donc  propofêr  à  Antio-* 
chus  Sidète  >  frère  de  Démétrius , 
de  s'unir  avec  ^le ,  &  '  promit  en 
ce  tas  de  l'époufer  ,  èi  de  lut 
procurer  la  courohfie.  Car ,  quand 
eue  apprit  que  Démétrius  avoît 
époufé  Rhodogune  ,  elle  en  fut 
û  outrée  qu'eUe  ne  garda  plus  de 
mefures ,  Ôc  réfolut  de  chercher 
de  l'appui  par  un  nouveau  ma- 
riage. Ses  enfans  étoient  encore 
trop  jeunes  pour  foàtenir  le  poids 
d'une  couronne  chancelante ,  & 
elle  n'étoit  pas  de  caraÔère  à 
itefpe^er  beaucoup  leurs  droits* 
Comme  donc  Antiochus  Sidète 
éiéit,,  après  e^ix  ,  h  plus  proche 
héritier  de  fa  couronne ,  elle  fe 
fixa  à  lui ,  6c  le  prit  pour  mari. 
'  Mais  f  après  la  mort  de  ce 
Prince,  elle  revint  à  Démétrius 
Nicator  ,  qui  avoit  été^  relâché 
par  les  Parthes  ,  après  avoif 
époufé  Rhodogune i  611e  du  Roi 
de  cette  nanon.  Alexandre  Zébi- 
xa }  impofleur ,  qui  fe  difoit  fils 


CL  387 

d* Alexandre  Bala  ,  vînt  dîfputer 
la  couronne  de  Syrie  à  Démé* 
trius  Nicator.  Une  bataille  en  dé* 
cida.  Démétrius  Nicator  y  fut 
entièrement  défait  ,  &  s'enfuît 
à  Ptoléoiaïde ,  où  étoit  Cléopâtre 
fa  femme.  Elle ,  qui  avoit  toujours 
fur  le  cœur  fon  mariage  avec 
Rhodogune  chez  les  Pannes ,  prit 
cette  occafion  de  s'en  venger ,  & 
hii  fit  fermer  les  portes  de  la  ville. 
Démétrius  Nicator  fut  obligé  de 
s'eflfuii'  à  Tyr  ,  oh  il  fut  tué. 
Après  fa  inort  ^  Cléopâtre  con- 
ferva  une  partie  du  royaume  ;  & 
Alexandre  Zébina  eut  tout  le 
refte.  Mais  ,  l'aîné  des  enfans , 
que  Cléopâtre  avoit  eus  de  Dé- 
métrius ,  fongea  à  monter  fur  lé 
trône  de  fon  père  ,  &  fe  fit  en 
effet  déclarer  Roi.  Cléopâtre  am-  * 
bitieufe  vouloir  régner  elle-même, 
&  trouvoit  fort  mauvais  que  fon 
fils  voulût  s'établir  à  fon  préjudi- 
ce. £lle  aroh  aufli  lieu  de  crain- 
dre qu'il  ne  lui  prît  envie  de  ven- 
ger la  mort  de  fon  père ,  dont  on 
fçavoit  fort  bien  qu'elle  avoit  été 
caufe.  £lle  le  tua  de  fes  propres 
maiqs ,  en  lui  enfonçant  un  poi'* 
gnard  dans  le  fein. 

Qéopâtre  ,  après  avoir  tué  fon 
fils  aîné  ,  crut  qu'il  étoit  de  fon 
intérêt  de  faire  un  roi  titulaire, 
fous  le  nomf  de  qui  elle  pût  cacher 
l'autorité  qu'elle  v6uloit  fe  con- 
ferver  toute  entière.  Elle  fentoit 
bien  que  des  peuples  guerriers, 
accoutumés  à  être  gouvernés  par 
des  rois  ,  regarderoient  toujours 
le  trône  comme  vacant ,  pendant 
qu'il  ne  feroit  rempli  que  par  une 
princefle  ,  &  qu'ils  ne  manque- 
'  roient  tms  de  f'ofFrir  au  premier 
Bbij 


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388  C  L 

prince  qui  fe  préfenteroit.  Elle  fit 
donc  revenir  Ton  autre  fils  An- 
tiochus  Grypus  d'Athènes  ,  où 
elle  Tavoit  envoyé  pour  Ton  édu- 
cation y  &  le  fit  déclarer  Roi  dès 
qu'il  fiit  arrivé  ;  mais ,-  ce  n'étoit 
qu'un  vain  titre.  Elle  ne  lui  don- 
noit  aucune  part  aux  affaires.;  (k. 
comme  ce  Princevétoit  fort  jeune, 
n'ayant  pasphas  de  vingt  ans ,  ii 
la  laiifa  gouverner  ail'ez  patiem- 
ment pendant  quelque  tems.  Maist 
enfuite ,  il  voulut  commencer  à 
gouverner  par  lui-même. 

L'ambitieufe  Cléopâtre  ,  qui 
voyoit  par-là  diminuer  fon  pou^ 
voir  &i  éclipfer  fa  grandeur ,  n^ 
put  le  foufîrir.  Pour  fe  rendre  de; 
nouveau  maîtrefie  abfolue  de  tout 
le  gouvernement  de  la  Syrie  t  elle 
réi^lut  de  fe  dé£iire  d'Antiochus 
Grypus  comme  elle  avoic  déjà 
fi^it  de  fon  frère  ;  &i  de  donner  la 
cburonne  à  un  autre  fils  qu'elle 
avoit  eu  d'Anciochu»  Sidèie ,  (bus 
qui ,  parce  qu'il  étoic  en  bas- âge  » 
elle  efpéroit  d'avoir  encore  long- 
tems  l'autorité  royale  entre  les 
mains  ,  &  de  prendre  des  çiefures 
jufles  pour  s'y  établir  ù  bien  , 

?u'elle  lui  refteroit  toute  fa  vie. 
)ette  méchante  femme  prépara 
pour  cet  effet  une  coupe  empoi- 
fonnée ,  qu'elle  préfenta  un  jour 
^  Antiochus  Grypus ,  comme  il 
rentroit  fort  échauffé  de  quelque 
exercice  qu'il  venoit  de  faire« 
Mais ,  ce  Prince  ,  ayant  été  in- 
formé  de  fon  dedein  ^  '  la  pria 
d'abord,,  comme  par  honnêteté 
pour  fa  mère ,  &  la  prefla  même 


CL 

de  prendre  cette  coupe  pour  elle* 
même  ;  ôc  fur  le  refus  confiant 
qu'elle  en  fit ,  ayant  fait  paroitre 
quelques  témoins ,  il  lui  fit  enten- 
dre que  le  feul  moyen  qui  lui  ref^ 
toit  de  fe  purger  du  foupçon  qu'on 
formoit  conrr'etle  »  étoit  de  boire 
la  liqueur  qu'elle  lui  avoit  offerte. 
Cette  malheureufe  PfincefFe  ,  qui 
k  voyoit  fans  iffue  6(  (ans  reiTour- 
ce  i  avala  la  coupe.  Le  poifon  fi^ 
fon  effet  fur  le  champ  ,  &  délivra 
la  Syrie  de  ce  monftre,  qui  par 
fes  crimes  inouis  av<^  été  fi  long- 
tems  le  fiéau  de  cet  État. 
.  Elle,  avoit  été  femme  de  trois 
rois  de  Syrie ,  ôc  elle  fot  mère  de 
quatre.  Elle  avoit  caufé  la  mort 
de  deux  de  fes  maris  ;  &  pour  fès 
enfans  ^  elle  en  tua  un  de  fa  pro-. 
pre  main  ,  &  vouloit  fe  défaire 
au(R.  d'Antiochus  Grypus  par  la 
poifon  ,  qu'il iui  fit  avaler  à  elle* 
même  y  l'an  1 18  avant  l'Ère  Chré- 
tienne, 

CL^OPATRf  ^  CUopatra  i 
Kxf o7UTf»<t%  (a)  fœur  de  la  pré«^ 
cédente  ,  tut  mariée  à  (on  oncle 
Ptolémée  Phy icon ,  <j.tii  l'avoit  au- 
paravant déshonorées  Ce  Prince^ 
pour  contraéèe.r  ;ce  miariage  ,  r4-, 
pudia  Cléopâue  ù  propre  fœur, 
qu'il  avoit.  époufee  après  la  mort 
de  fon  premier  mari  Ptoléméâ 
Philométor.  JCette  dernière  étoic 
mère  de  celle  qui  fait  le  fujet  da 
cet  article. 

Ptolémée  Phyfcon  laifTa  en 
mourant  deux  fils ,  qu'il  avoit  eus 
de  Cléopâtre  ;  fçavoir ,  Ptolémée 
Lathyre  qui  étoit  l^ainé^  ôc  Aie* 


(s)  Juft.  L.  XXXIX.  c.  i  ,4*  là(eph.\fifiv.  Mém.  de  TAcad.  desinfcript.  ft 
de;  Anciq.  Judaïc*  p.  45s.  &  fiq,  Roll.    ficlU  Utt.  Xom.  XIV.  p.  195. 
Ilidj  Aoc.  Xo(im  V«  pa(,  ao^  |  si|,  ^1 


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CL 

Slndre.  Par  fon  teftament,  il  avoît 
donné  le  royaume  d'Egypte  à 
Cléopâtrc  &  à  celui  de  fes  deux 
fils ,  qu'elle  choifiroit  elle-même. 
Cléopâtre, croyant  qu'Alexandre 
ferdit  le  plus  complaifant ,  fe  dé- 
terminoit  à  le  prendre  ;  mais  ,  le 
peuple  ne  voulut  pas  foufFrir  qu'- 
on fît  perdre  à  Tautre  fon  droit 
d'ainefle ,  &  obligea  la  Reine  à  fe 
faire  revenir  de  Cypre ,  où  elle 
l'avoit  fait  reléguer  par  fon  père  , 
&  à  FafTocier  avec  elle  à  la  cou- 
ronne. Mais  »  avant  qu*on  lui  fit 
prendre  pofTeffion  du  trône  à 
Memphis ,  félon  la  coutume ,  elle 
l'obligea  de  répudier  Cléopâtre  fa 
fœur  ainée^jqu'il  aimoit  beaucoup, 
&  de  prendre  Sélène  fa  cadette , 
pour  laquelle  il  n'avoit  nulle  incli- 
nation. 

Cette  Princeffe ,  dont  le  cœur 
n'étoit  ftifceptible  que  d*ambicion , 
étoit  fi  occupée  du  défir  de  ré* 
gner  ,  qu'elle  ne  fongeoit  qu'aux 
moyens  de  fe  foûtenir  en  Egypte , 
&  d'y  retenir  entre  fes  mains 
l'autorité  abfolue  pendant  toute  fa 
vie.  Pouf  fe  mieux  affermir,  elle 
donna  le  royaume  de  Cypre  à 
Alexandre  fon  cadet ,  afin  de  tirer 
de  lui  l'adiflance  dont  elle  auroit 
befoin ,  fi  jamais  Ptolémée  La- 
thyre  vouloir  lui  difputer  l'auto- 
rité qu'elle  avoit  réfolu  de  garder. 

Les  Samaritains,  affiégés  par 
deux  des  fils  *de  Jean  Hyrcan ,  en- 
voyèrent demander  du  fecours  à 
Ptolémée  Lathyre,  l'an  109  avant 
Jefus-Chrifl.  Ce  Prince  leur  ac- 
corda fix  mille  hommes  contre 
l'avis  de  fa  mère  Cléopâtre.  Com- 
me elle  avoit  deux  Juifs  pour  fa- 
voris ,  ppuroiimûros  8c  pour  gé- 


C  L  589 

néraux,'-  Chelcias  &  Ananias  , 
tous  deux  fils  d'Onias  ,  qui  avoit 
bâti  le  temple  d'Egypte  ;  ces 
deux  miniflres  ,  qui  la  gouver- 
noient  entièrement ,  la  portoient  à 
favorifer  la  nation  ^  &  par  égard 
pour  eux,elle  ne  vouloit  rien  faire 
qui  fût  préjudiciable  aux  Juifs.  Peu 
s'en  fallut  qu'elle  ne  dépoiât  Pto- 
lémée Lathyre  ,  pour  s'être  enga- 
Î'é  dans  cette  guerre  fans  fon  con-^ 
entement,  &  même  contre  fa 
volonté.  £lle  porta  fi  loin  le  ref- 
femiment ,  qu'elle  eut  de  cette 
atteinte  &  de  quelques  autres  pa- 
reilles ,  qu'il  avoit  données  à  fon 
autorité ,  qu'elle  lui  enleva  fa 
femme  Sélène ,  dont  il  avoit  déjà 
deux  fils ,  ôc  l'obligea  lui-même  à 
(brtird'Égypte.Voici  commentel- 
le  sy  prit.  Ayant  fait  bleifer  quel- 
ques-uns de  fes  Eunuques  favo- 
ris ,  elle  les  produifu  dans  une 
affembléedu  peuple  à  Alexandrie, 
&  dit  que  c'étoit  fon  fils  Ptolémée 
Lathyre  »  qui  les  avoit  ainfi  mal- 
traités, pour  avoir  voulu  la  dé- 
fendre contre  fa  violence.  Elle 
anima  fi  fort  le  peuple  par  cette 
fiélion  pleine  de  noirceur  ,  qui  lui 
perfuada  qu'on  avoit  voulu  la 
tuer ,  que  d'abord  il  fe  fit  un  foU'* 
levement  général  coiitre  Ptolémée 
Lathyre;  &  on  l'auroit  mis  en 
pièces  ,s'il  ne  s'étoit  fauve  au  pore 
dans  un  yaifieau  qui  mit  fur  le 
champ  à  la  voile.  Cléopâtre  au{Ii« 
tôt  fit  venir  Alexandre  fon  cadet, 
à  qui  elle  avoit  fait  donner  le 
royaume  de  Cypre  ,  &  le  fit  roi 
d'Egypte  à  la  place  de  fon  frère  , 
qu'elle  obligea  de  fe  contenter  de 
celui  de  Cypre  que  l'autre  mf* 
foià       ' 


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390  C  L 

Cette  Prînceffe ,  ayant  apprîj 
que  Ptolémée  Laihyre  travailloit 
à  faire  la  conquête  de  la  Judée  & 
de  la  Phénicie  ,  ôc  craignant  que 
cela  ne  le  mît  en  état  d'entrer  en 
Egypte  &  de  la  détrôner,  crut 
devoir  arrêter  les  progrès  qu'il  y 
faifoit.  Elle  leva  pour  cet  effet  une 
armée,  &  en  donna  le  comman- 
dement à  Chelcias  &  à  Ananias  ; 
elle  équipa  en  même  tems  ui^e 
flotte  pour  tranfporter  fe$  troupes, 
&  s'embarquant  elle-même  ,  elle 
vint  débarquer  en  Phénicie.  Elle 
avoit  apporté  avec  elle  une  greffe 
fomme  d'argent  &  Tes  plus  riches 
joyaux.  Voulant  les  mettre  à  cou- 
vert en  cas  de  malheur ,  elle  choi- 
fit  rifle  de  Cos  ,  &  y  envoya  en 
même  tems  fon  petit-fîls  Alexan- 
dre ,  fils  de  celui  qui  regnoit  con- 
jointement  avec  elle. 

L'arrivée  de  Cléopâtre  fît  d'a- 
bord lever  à  Ptolémée  Lathyre  le 
fiege  de  Ptolémaïde  qu'il  faifoit 
depuis  long  -  tems.  Elle  détacha 
Chelcias  avec  une  partie  de  l'ar- 
mée pour  le  pourfuivre ,  &  avec 
l'autre  que  commandoit  Ananias  , 
elle  forma  elle-même  le  fiege  de 
Ptolémaïde  ;  &  elle  le  pouffa  fi 
vigoureufement ,  qu'elle  prit  la 
ville.  Dès  qu'elle  y  fut  entrée, 
Alexandre ,  roi  des  Juifs ,  l'y  vint 
trouver  ,  6c  lui  apporta  de  riches 
préfens  pour  gagner  fes  bonnes 
grâces.  Mais  ,  ce  qui  lui  fervit  le 
plus  à  y  réuflir  »  fut  fa  haine  pour 
Ptolémée  Lathyre  fon  fils  ;  il  n'eut 
pas  befoin  d'autre  recommanda^» 
tion  pour  être  bien  reçu.  Quel- 
ques perfonnes  de  la  cour  de 
Cléopâtre  lui  firent  remarquer  la 
belle    occafîon  qu'elle  avoit ««it 


CL 

main  ,  de  fe  rendre  maîtrefle  âe 
h  Judée  &  de  tous  les  états  d'Ale- 
xandre ,  en  fe  faififfant  de  fa  per-» 
Tonne  ;  ils  l'en  preffoient  même  , 
&  fans  Ananias  elle^'auroit  fait. 

L'année  fuivante,  elle  revitit 
en  Egypte.  Apprenant  à  fon  re- 
tour à  Alexandrie,  que  Ptolémée 
Lathyre  entroit  en  traité  à  Damas 
8^ec  Antiochus  de  Cyziqoe ,  6c 
qu'avec  le  fecours  qu'il  efpéroit 
en  tirer ,  il  fe  difpofoit  à  fiaire  nne 
nouvelle  tentative  pour  recouvrer 
la  couronne  d'Egypte;  cette  Rei- 
ne ,  pour  faire  diverfîon ,  donna 
en  mariage  à  Antiochus  Grypus  , 
Sélène  fa  fille ,  qu'elle  avoit  ôtée 
à  Ptolémée  Lathyre ,  &  lui  en- 
voya en  même- tems  bon  nombre 
de  troupes  ôt  de  groffes  fommes 
d'argent ,  pour  le  mettre  en  état 
d'attaquer  vigoureufement  fon 
frère  le  Cyiicénien.  La  chofe 
réuflit  comme  elle  l'arôit  projet- 
tée. 

Cependant ,  Alexandre ,  frap- 
pé de  la  cruauté  barbare  avec  la- 
quelle Cléopâtre  perfécutoit  fon 
frère  Ptolémée  Lathyre ,  fur  tout 
en  lui  ôtant  fâ  femme  ponr  la 
donner  à  fon  ennemi ,  &  remar- 
quant d'ailleurs  que  les  crimes  ne 
lui  coiitoient  rien  ,  lorfqo'il  s'agîf^ 
foit  de  contenter  fon  ambition ,  ne 
fe  crut  pas  en  fi^reté  auprès  d'elle , 
&  prit  le  parti  d'abandonner  la 
couronne  &  de  fe*  retirer  ,  ai- 
mant mieux  vivre  tranquille  & 
fans  crainte  en  exil ,  que  de  ré- 
gner avec  une  fi  méchante  &  fi 
cruelle  mère,  avec  qui  fa  vie  étott 
continuellenvent  en  dai>ger.  U  fal- 
lut bien  des  folltcitations  pour 
l'engager  à  revenir  ;  car ,  le  peu*- 


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CL 

pie  ne  rouloit  pas  al>rolument 
qu'elle  régnât  feule  ,  quoiqu'on 
vît  bien  qu'elle  n'accordoit  à  fon 
fils  que  le  nom  de  Roi  ;  que  depuis 
la  mort  de  Ptolémce  Fhyfcon  , 
elle  avoir  toujours  eu  Tautorité 
royale  toute  entière;  &  que  la 
véritable  caufe  de  la  difgrace  de 
Ptolémée  Lathyre,  qui  lui  avoit 
coûté  fa  couronne  &  fa  femme , 
étoit  d'avoir  ofé  faire  quelque  cho- 
ie fans  elle. 

Cette  Princeffe  ,  ne  pouvant 
plus  fupporter  d'aiïocié  à  l'auto^ 
rite  royale ,  n'y  fouffirir  que  fon 
fils  Alexandre  partageât  avec  elle 
l'honneur  de  trôhe ,  réfolut  de  fe 
défaire  de  lui  pour  régner  défor- 
mais feule.  Ce  Prince  ,  qui  en  fut 
averti,  la  prévint ,  &  la  nt  mourir. 
Van  89  avant  Jefus-Chrift.  Cétoit 
un  monftre  que  cette  femme  , 
qui  n'avoit  épargné  ni  fa  mère  , 
ni  fes  fils  ,  ni  fes  filles  >  &  qui  avoit 
tout  facrîfié  au  défir  ambitieux  de 
régner.  Elle  fut  ainfi  punie  de  fes 
jcrimes ,  mais  par  un  autre  crime 
qui  égaloit  les  liens. 

CLÉOPATRE;  CUopatra, 
Ky^eowdTpa  ,  (a)  fille  de  la  précé- 
dente &  de  Plolémée  Phyfcon, 
fut  d'abord  mariée  à  fon  frère  Pto- 
lémée Lsithyre.  Mais ,  ayant  été 
répudiée  à  la  foUicitation  de  leur 
mère  commune,  elle  (e  donna  b 
Antiochus  de  Cyzique»  &  lui 
apporta  en  dot  qne  armée  pour 
s'en  fervir  contre  fon  frère  An- 

(«)  Jaft.  L.  XXXIX*  ç.  3,  Roll.  Hill. 
-Ane.  Tom.   V.  pag,  %i^,  &  friv* 

(6)  Vell.  ^atcïc.  L.  II.  c,  8ç  ,  87. 
Appian*  p.  1^8  »  484  »  671.  &  fêq.  Plut. 
Tom.  I.  p.  ^%é,^^  fê^^  Flor.  L.  |V.  c. 
a  ,;,  n,  Roll.  Hift.Anc.  T.  V.  p.  418. 
'&  friv.  Crév.  Hi«.  Koto.  Tom.  Vn,  p. 


CL  39r 

tîochos  Grypus  ,  avec  qui  il  étoit 
en  guerre.  Ce  dernier ,  étant  venu 
afîiéger  la  ville  d'Antioche  ,  oîi 
étoit  alors  Cléopâtre  ,  jpm  cette 
ville.  Tryphène  fa  femme  lui  de* 
manda  infîamment  de  lui  mettre 
Cléopâire  fa  prifonnière  entre  les 
mains.  Quoique  fa  fœurde  père 
^  de  mère ,  elle  étoit  fi  exceffi- 
vement  indignée  de  ce  qu'elle 
avoit  époufé  leur  ennemi ,  &L  lui 
avoit  donné  une  armée  contr'eur, 
qu'elle  vouloir  lui  ôcer  la  vie. 
Cléopâtre  s'étoit  mife  fous  la  pro- 
teâion  d'un  fanâaaire  regardé 
comme  inviolable  ;  c'étoit  un  des 
temples  d'Antioche.  Tryphène 
envoya  des*  foldais  dans  ce  tem- 
ple ,  qui  ne  purent  Tarracher  au- 
trement de  Taucél  y  qu'en  luicou- 
Eant  les  mains  dont  elle  le  tenoit 
mbraffé.  Cléopâtre  expira  en  pro» 
nonçant  mille  exécrations  contre 
les  parricides  auteurs  de  fa  mort, 
&  recommandant  au  dieu  ,  fous 
les  yeux  de  qui  cette  barbare 
cruauté  avoit  été  exercée  ,  le  foin 
d'en  tirer  vengeance. 

CLÉOPATRE,  Cleopatra^ 
K^go7raT/)t ,  fille  de  Ptolémée  La- 
thyre.  Foye^  Bérénice. 

CLÉOPATRE,  CUopatra, 
KMoirirfx ,  (h)  fille  de  Ptolémée 
Aulete,  n'avoit  que  dîxfept  ans , 
lorfque  (on  père  mourut  l'an  5 1 
avant  Jefus-Chrift.  Par  le  tefta- 
^ment  de  ce  Prince,  le  royaume 
d'Egypte  lui  fut  donnera  condition 

5*0.  &  friv,  T.  VIII.  pag..  i«5  ,  50».  ir 
friv*  Mém.  de  PA^d.  à^  Infcript.  Sp 
pell.  Lett.  Tom.  I.  p.  341  •  352.  Tojn. 
VII.  p.  169  ,  170,  175  ,  »7<>.  T.  IX.  p. 
163.  «&•  friv,  T.  XVI.  p.  40J  ,  404,  Tk 
XXU  p.  14» ,  5J7  ,42j ,  4»i$« 

B  b  iv. 


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i 


59^  C  L 

Qu'elle  épouferoii  Taîné  àe  fes 
eux  frerçs ,  &  qu'ils  regneroient 
enliemble.  Comme  ce  Prince  étoit 
encore  mineur ,  il  fut  mis  fous  la 
tutele  oe  deux  minif^res,  qui, 
apparemment  pourfe  rendre  feuls 
maîtres  des  affaires  ,  oterenc  à 
Cléopâtre ,  fous  le  nom  du  Roi  , 
la  part  de  la  fouveraineté,  que  le 
teftament  de  Pcolémée  Aulete  lui 
avoit  laifTée.  Maltraitée  de  la  for- 
te ,  elle  alla  en  Syrie  &  en  Palef- 
tine  pour  y  lever  des  troupes  ,  & 
pour  faire  vs^oir  k$  droits  à  main 
armée. 

Ce  fut  dans  cette  conjonôure 
de  la  guerre  entre  le  frère  &  la 
fœur,  que  Céfar  arriva  en  Egyp- 
te. Il  s'appliqua  à  prendre  con- 
noiHance  de  leur  différend  ;  mais  , 
ce  fut  avec  une  hauteur  qui  dé- 
plut infiniment  aux  Égyptiens.  Il 
ordonna  à  Cléopâtre  6c  à  fon 
frère  ,  qw'ils  eufTent  à  licentier 
leurs  armées  ,  de  à  venir  plaider 
devant  lui  leur  caufe  ,  pour  rece- 
voir enfuite  la  fentence  qu'il  pro- 
nonceroit  entr'eux.  Cléopâtre  , 
qui  connoifToit  le  foible  de  Céfar , 
crut  que  fa  préfence  feroit  l'avo- 
cat le  plus  perfuafif,  qu'elle  pour- 
roit  employer  auprès  de  fon  )uge. 
Elle  lui  fît  dire  qu'elle  s'apperce<^ 
voit  que  ceux  qui  étôient  chargés 
'  de  fon  affaire  ,  la  trahifToient ,  & 
demanda  qu'il  lui  fût  permis  de 
çomparoître  en  perfonne.  Plutar- 
,  que  dit  que  ce  fut  Céfar  qui  la 
preiïa  de  venir  elle-même  plaider 
fa  catife. 

Cette  Prînceffene  prit  avec  elle, 

de  tous  (es  amis  i    que  le  feul 

.Apollodipre  de    Sicile^    fe  jetta 

dans  un*^e%ît  béteâO|  &  arriva  au 


CL 

pied  des  murailles  du  cbâtèatf 
d'Alexandrie,,  qu'il  étoit  lout-àfait 
nuit  clofe.  Voyant  qu'il  n'y  avoit 
aucun  moyen  d'entrer  fans  être 
connue  ,  elle  s'avifa  de  ce  flrata- 
gême«  Elle  s'étendit  au  milieu  d'un 
paquet  de  hardes  ;  Apollodore  le 
couvrit  d'une  enveloppe  ,  le  lia 
enfuite  avec  une  courroie ,  le 
chargea  fur  fon  cou  ,  &  le  porta 
de  cette  manière  par  la,  porte  da 
château  dans  l'appartement  de 
Céfar  ,  à  qui  cette  rufe  ne  déplut 
pas.  La  première  vue  d'une  ù  beU 
ie  perfonne  fit  fur  lui  tout  l'eâFet 
qu'elle  avoit  fouhaité.  Car  ,  il  or- 
donna  que  Cléopâtre  &  Ptolémée 
regneroient  conjointement  en 
Egypte  ,  comme  le  portoit  le 
teftament  de  leur  père  ;  &  que 
Ptolémée  le  cadet  &  Arfmoë  la 
cadette  regneroient  en  Cypre. 

Céfar  eut  de  Cléopâtre  un  fils, 
'qui  fut  nommé  Céfarion,  Son  att« 
tachement  pour  cette  Princeffe  le 
retint  en  Egypte  beaucoup  plus 
long-tems  que  fes  affaires  ne  le 
demandoient.  Il  paffoit  Tes  nuits 
entières  en  feftins  avec  Cléopâtre* 
S'étant  en^barqué  avec  elle  fur  le 
Nil ,  il  parcourut  tout  le  pais , 
avec  une  nombreufe  fiotte  ,  & 
auroit  pénétré  -  jufque  dans  TÉ* 
Ethiopie  yft  fon  armée  n'eût  refufé 
de  le  fuivre.  Il  avoit  réfolu  de 
,  l'amener  à  Rome  &  de  l'époufer  ; 
.  &  fon  deffein  étoit  de/aire  pafler 
dans  l'aflemblée  du.  peuple  une 
loi ,  par  laquelle  il  feroit  permis 
abx  citoyens  Romains  d'époufer 
telles  &  autatit  de  femmes  qull 
leur  plairoit.       \ 

Pendant  la  minorité  de  fon 
frère ,  Cléopâtre  eut  toute  l'auto- 


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CL 

tîté  entre  les  mains.  Quand  îl  fut 
arrivé  à  Tâge  de  quinze  ans ,  qui 
étoit  le  tett^  oii,,  félon  les  loîx  du 
païs,  il  devoit  gouverner  par  lui- 
même  ,  &  prendre  fa  part  de  l'au- 
torité royale  ,  elle  Tempoifonna , 
&  demeura  feule  reine  d'Égypie. 
Cependant ,  Céfar  ayant  été  tué 
à  Rome,Cléopâtre  fe  déclara  fans 
béfiter  pour  les  Triumvirs.  Elle 
donna  à  Alliénus  ,  lieutenant  du 
conful  Polabella ,  quatre  légions  , 
qui  étoient  les  reftes  des  armées 
de  Pompée  &  de  Craffus  ,  &  qui 
Êsiifoient  partie  des  troupes  que 
Céfar  lui  avoit  laidées  pour  la 
garde  de  TÉgypte.  Elle  avoit  audi 
une  flotte  toute  prête  à  faire  voi- 
le 'y  mais,  la  tempête  Tempêcha  de 
partir.  Cadius  fe  rendit  maître  de 
ces  quatre  légions.  Cléopâtre , 
follicitée  plufieurs  fois  par  CafHus 
ile  lui  donner  du  fecours ,  le  refu- 
fa  conftamment.  Elle  partit  quel- 
que^ tems  après  avec  une  âotte 
nombreufe  pour  aller  fecourir  M. 
Antoine  &  Oûavien.  Une  rude 
tempête  lui  fît  périr  beaucoup  de 
vairfeaux,  &  une  maladie  qui 
lui  furvint ,  l'obligea  de  retourner 
en  Egypte. 

M.  Antoine ,  après  la  défaite  de 
Caflius  &  de  Bru  tus  â  la  bataille 
de  Philippes ,  étant  paflé  en  Afie , 
pour  y  établir  l'autorité  duTrium- 
virac ,  cita  Cléopâtre  devant  lui 
pour  répondre  de  quelques  griefs 
imputés  à  fes  gouverneurs  de 
Phénîcie*  Cette  Prinçeffc ,  fûre  de 
fes  chjarmes  par  l'épreuve  qu'elle 
en  ^vpi^.déjà  faite  Ci  héureufement 
auprès  de,  Céfar,  efpéra  qu'elle 
.pourfoit  aufli  captiver  M.  Antoi- 
ne .f^^s^fecilemem  ;  d  autant  plqs 


même  que  le  premier  ne  Tavoit 
connue  que  fort  jeune  encore ,  6c 
lorfqu'elle  n'avoir  aucune  expé-» 
rience  du  monde  ;  au  Heu  qu'elle 
alloit  paroîire  devant  M.  Antoi- 
ne, dans  un  âge  où  les  femmes 
joignent  à  la  fleur  de  leur  beauté  , 
toute  la  farce  de  Tefprit  pour 
manier  &  conduire  les  plus  gran-» 
des  affaires.  Cléopâtre  avoit  alors 
plus  de  vingt-cinq  ans.  Elle  fit 
donc  provifion  de  préfens  très- 
riches,  de  grofles  fommes  d'ar-» 
gent ,  &  fur  tout  d*habits  &  d'or* 
nemens  très  •  magnifiques  ;  & 
mettant  plus  encore  fes  efpéran- 
ces  en  elle-même ,  dans  fes  at- 
traits &  dans  les  grâces  de  fa  per- 
fonne^  plus  puiÏÏanter  que  toutes 
les  paru'res  &  que  l'or  même» 
elle  fe  mit  en  chemin. 

Sur  fa  route  elle  reçut  plufieuts 
lettres  de  M.  Antoine  qui  étoit  à 
Tarfe  ,  &  de  fes  amis  qui  la  pref- 
foiçnt  de  hâter  fon  voyage  ;  mais» 
elle  ne  fit  que  rire  de  tous  ces 
empreiTemens  ,  &  n'en  fit  pas 
plus  grande  diligence.  Après  avoit 
traverfé  la  mer  de  Pamphylie, 
elle  entra  dans  le  Cydnus  ,  6c 
remontant  ce  fleuve  vint  aborder 
à  Tarfe.  On  ne  vit  jamais  d'équi- 
page plus  galant  ni  plus  fuperbe 
que  le  fien.  La  pouppe  de  (on 
vaiiTeau  étoit  toute  éclatante  d'or, 
les  voiles  de  pourpre  ,  &  les  ra-^ 
mes  garnies  il'argent.  Un.pavilloi» 
d'un  tifFu  d'or  étoit  dreffé  fur  le 
tillac ,  fous  lequel  paroiffoit  cette 
Reine  habillée  en  Vénus  ,  6c  en^ 
vironnée  des  plus  belles  filles  de 
fa  cour ,  dont  lés  unes  rèpréfen- 
tpient  les  Néréides  ,  les  autres  les 
(traces.  Au  lieu  de  iroinpj^ttesp 


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594  CL 

on  entenaoh  les  flûtes ,  les  haut- 
bois ,  les  violes ,  &  â*aotres  inf- 
trumens  fembiables  ,  qui  jotioîent 
des  airs  paffionnés;  &  la  ca- 
dence des  avirons ,  qui  étoient 
tnaniés  en  mefore»  rendoit  cette 
harmonie  encore  plus  agréable* 
On  brûloit  fur  le  tilljc  des  par- 
fums ,  qui  répandoîent  leur  odeur 
bien  loin  furies  eaux  du  fleave,ôc 
far  l'une  &  fur  l'autre  de  Tes  rives 
couvertes  d'une  infinité  de  per- 
fonnes ,  que  la  nouveauté  de  ce 
Ipeâacle  avoit  attirées. 

Dès  qu'on  fçut  qu'elle  arrivoît , 
tout  le  peuple  de  Tarfe  fortit  au- 
devant  d'elle ,  jufques-là  que  M. 
Antoine ,  qui  donnoic  alors  au* 
firence  »  vit  Ton  tribunal  abandon- 
né de  tout  le  monde ,  fans  qu'il 
reftât  perfonne  auprès  de^ui  que 
fes  liâeurs  ôc  Tes  domefliques.  Il  (e 
répandit  un  bruit  que  c^étoit  Vé- 
nus qui  venoir  en  mafque  chez 
Bacchus  pour  le  bien  de  TAûe» 

Elle  ne  fi|t  pas  plutôt  defcendue 
Sk  terre,  que  M*  Antoine  l'envoya 
complimenter ,  &  Tinvica  à  fou- 
per.  Mais ,  elle  fit  réponfe  à  fes 
députés  qu*elle  fouhaîtoit  de  le  ré* 
galer  lui-même,  Se  qu'elle  Tat- 
tendoit  dans  les  tentes  qu'elle  fai- 
ibit  préparer  fur  les  bords  du  fleu- 
ve. Il  ne  fit  pas  difficulté  d'y  aller, 
&  il  trouva  des  préparatifs  d'une 
magnificence  qu'on  ne  peut  expri- 
mer. Il  admira  fur  tout  la  beauté 
des  ludres  qu'on  avéit  arrangés 
avec  beaucoup  d'art ,  Ôc  dont  les 
îlluminacions  faifoient  un  jour 
agréable  au  milieu  de  la  nuit. 

M.  Antoine  l'invita  à  fon  tour 
pour  le  lendemain.  Quelques  ef- 
forts qu'il  eût  faits  pour  l'emporter 


CL 

fuf  elle,îls*avoua  vaincii,foît  poor 
la  fomptuofité  ,  foit  pour  l'ordon- 
nance du  repas  ;  &  il  fut  le  pre- 
mier à  railler  fur  la  mefquinerie  & 
la  groffièreté  du  fien ,  en  compa- 
raifon  de  la  richefTe  &  de  l'élé- 
gance de  celui  de  Cléopâtre.  La 
Reine  ,  de  fon  côté ,  voyant  que 
les  plaifanteries  de  M.  Antoine 
n'avoit  rien  que  de  greffier  ,  & 
fentoic  plus  Thomme  de  guerre, 
qu'un  homme  de  cour,  le  paya  en 
pareille  monnoie,  fans  l'épargner, 
mais  avec  tant  d'efprit  &  d'a- 
grément qu'il  ne  s'en  ofFenfoit 
point. 

Il  ne  fut  prefque  point  fait  men* 
tîon  des  griçh  formés  contre 
Cléopâtre ,  qui  d'ailleurs  étoient 
fans  fondement.  Elle  faifit  telle- 
ment M.  Antoine  par  fes  charmes, 
&  fe  rendit  fi  abfolument  maîtref- 
fe  de  ion  efprit ,  qu'il  ne  lui  pou- 
voit  rien  refufer.  Ce  fut  pour  lors 
qu'à  fa  priere,il  fit  mourir  ArGnoë 
la  fœur,  qui  s'étoit  réfugiée  à 
Milet ,  dans  le  teçfiple  de  Diane 
comme  dans  un  afyle  afTuré. 

C'étoîent  tous  les  jours  de  nou- 
velles fêtes.  Un  nouveau  repas  cn- 
chérifToit  toujours  fur  le  précé- 
dent ,  &  il  femble  qu'elle  s'étu- 
dioit  à  fe  furpafTer  elle-même.  M. 
Antoine  ,  dans  un  feftin  qu'elle  lui 
donnoït,  étoif  hors  de  lui-même  i 
la  vue  des  rtchefTes  étalées  de  tou- 
tes parts,  &  fur  tout  du  grand 
nombre  de  coupes  d'or ,  enrichies 
de  pierreries  ,  &  travaillées  par 
les  plus  habiles  ouvriers.  D'un  air 
dédaigneux  ,  elle  dit  que  tout  cela 
étoît  peu  de  chofe  ,  &  elle  loi 
en  fit  préfent.  Le  repas  flii  lende- 
main fut  encore  plus  fuperb^.  M» 


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CL 

Antoine ,  à  fon  ordinaire ,  y  avoît 
amené  avec  lui  bon  nombre  de 
convives,  tous  officiers  de  marque 
&  de  diflinâion.  Elle  leur  donna 
tous  les  vafes  &  toute  la  vaifTelle 
<l'or  &  d'argent  dont  le  buffet  étoit 
chargé. 

Ce  fut  fans  doute  dans  un  de 
ces  feûins  qu'arriva  ce  que  Pline  , 
&  après  lui  Macrobe  ,  racontent. 
Cléopitre  plaifantoit,  félon  fa 
coutume  fur  les  repas  de  M.  An- 
toine ,  comme  étant  fort  modi» 
3ues  &  fort  malentendus.  Piqué 
e  la  raillerie  »  il  lui  demanda , 
d'un  ton  un  peu  échauffé  f  ce 
qu'elle  croyoit  donc  qu'on  pût 
ajouter  à  la  magnificence  de  fa 
table*  Cléopâtre  lui  répondit  froi- 
clément  qu'en  un  feul  fouper  elle 
dépenfoît  un  million.  Il  prétendit 
que  c'étoit  pure  vanterie ,  que  la 
chofe  étoit  impofTible  ,  &  qu'elle 
n'en  vienidroit  jamais  à  bout.  On 
fit  un  pari ,  &  Plancus  fut  pris 
pour  arbitre.  Le  lendemain  on  fe 
rendit  au  repas.  Il  étoit  magnifi- 
que y  mais  n'avoit  rien  de  fi  fort 
extraordinaire.  M.  Antoine  fup* 
putoît  la  dépenfe ,  demandoit  à 
quel  prix  chaque  chofe  pouvoit 
monter  y  &  d'un  air  railleur  , 
comme  fe  tenant  fur  de  la  viéèoi- 
Te,  difoit  qu'on  étoit  encore  bien 
éloigné  d'un  million.  Attende^  , 
dit  la  Reine,  ce  neft  ici  qu'un 
commencement ,  &  je  me  fais  forte 
de  dépenfer  moi  feule  le  million.  On 
apporte  une  féconde  table,&,felon 
l'ordre  qu'elle  en  avoic  donné ,  on 
ne  fervit  defTus  qu'un  (èul  vafe 

{>lein  de  vinaigre.  M.  Antoine , 
urpris  d'un  appareil  fi  nouveau  , 
ne  pouvoit  devHiei  oii  tout  cela 


C  L  395 

tendoît.  Cléopâtre  avoît  à  fes 
oreilles  deux  perles ,  les  plus  bel- 
les qu'on  eût  jamais  vues  ;  6t  dbnt 
chacune  étoit  eûimée  plus 'd'un 
million.  Elle  en  tire  une  ,  la  jette 
dans  le  vinaigre ,  &  après  l'avoir 
fait  fondre  l'avale.  Elle  fe  prépa- 
roit  à  en  faire  autant  de  l'autre-; 
Plancus  l'arrêta ,  &  lui  donnant 
gain  de  caufe  ,  déclara  M.  An- 
toine vaincu. 

Celui-ci  fe  laîfla  enfuite  entraî- 
ner par  Cléopâtre  à  Alexandrie  y 
où  ils  pafFoient  le  temsdans  les 
jeux  ^  dans  les  amufemens  &  dans 
les  délices ,  fe  traitant  l'un  l'autre 
tous  les  jours  avec  des  dépenfes 
exceiCves  &  incroyables.  Cléo- 
pâtre ,  de  peur  que  M.  Antoine 
ne  lui  échappât ,  ne  le  perdoit  ja- 
mais de  vue  ^  &  ne  le  quittoit  nî 
jour  ni  nuit ,  toujours  occupée  à 
le  divertir  &  à  le  retenir  dans  fes 
chaînes.  Elle  jouoit  aux  dez  avec 
lui ,  elle  chafToit  avec  lui ,  &  , 
quand  il  faifoit  l'exercice  des  ar- 
mes ,  elle  étoit  toujours  préfente. 
Son  unique  attention  étoit  de  l'a- 
mufer  aeréablement ,  &  de  ne  lui 
pas  laiiler  le  tems  de  fentir  le 
poids  de  l'ennui. 

Un  jour  qu'il  pêchoit  à  la  ligne  % 
&  qu'il  ne  prenoitrien  ,  il  en  étoit 
très-fâché,  parce  que  la  Reine 
étoit  de  la  partie ,  &  qu'il  ne  vou- 
loit  pas ,  en  fa  préfence ,  paroître 
manquer  d'adrefle,  ou  de  bon- 
heur. Il  s'avifa  donc  de  comman- 
der à  des  pêcheurs  d'aller  fous 
l'eau  ,  attacher  fecrétement  à  l'ha- 
meçon de  fa  ligne  quelques  gros 
poiflbns  de  ceux  qu'ils  avoienc  pris 
auparavant.  Cet  ordre  fut  exécuté 
fur  le  champ  I  &  M.  Antoine  re:^ 


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39^  C  L      ^     ^ 

Jiif  a  deux  ou  trois  fois  fa  lîgne*ton» 
îours  chargée  d'un  gros  poifTon.  Ce 
manège  n'échappa  pas  à  TÉgyp^ 
tienne.  Elle  6t  femblant  d*étre 
étonnée ,  &  d'admirer  ce  bonheur 
de  M.  Antoine;  niais,en  fecret,  elle 
dit  à  Tes  amis  ce  qui  s'écoit  pafTé, 
&  les  invita  i  venir  le  lendemain 
être  fpeâateurs  d'une  pareille  plai- 
fanterie.  Ils  n'y  manquèrent  pas. 
Quand  il  furent  tous  montés  dans 
des  bateaux  de  pêcheurs  »  &  que 
M.  Antoine  eut  jette  fa  ligne , 
elle  commanda  à  un  de  (es  gens 
de  plonger  promptement  dans 
l'eau ,  de  prévenir  les  plongeurs 
de  M.  Antoine ,  &  d'aller  accro- 
cher à  Tameçon  de  fa  ligne  , 
quelque  gros  poiflfon  falé  .  de 
ceux  qu'on  apportoit  du  royaume 
de  Pont.  Lorfque  M.  Antoine 
fentit  que  la  ligne  avoit  fa  charge, 
il  la  retira.  A  la  vue  de  ce  poiUon 
falé ,  ce  furent  des  éclats  de  rire 
tels  qu'on  peut  fe  l'imaginer. 
Alors  ,  Cléopâtre  lui  dit  :  Mon 
Généra/ ,  laijfe^^nous  la  ligne  à 
nous  autres ,  Rois  ou  Reines  du 
Phare  &  du  Canope  ;  votre  pêche^ 
^eft  de  prendre  des  villes  ,  des 
royaumes  &  des  Rois* 

Cette  Reine,  au  milieu  des 
paflîons  les  plus  violentes ,  &  de 
l'enivrement  des  plaifirs,  confier- 
voit  toujours  du  goût  pour  les 
•  belles  lettres  &  pour  les  fciences. 
A  la  place  de  la  fameufe  Biblio- 
thèque d'Alexandrie  ,  qui  avoit 
été  brûlée  quelques  années  aupa- 
ravant ,  elle  ea  établit  une  nou- 
velle ,  à  l'augmentation  de  la- 
quelle M.  Antoine  contribua 
beaucoup  ,  lui  ayant  fai|  préfent 
de    la  bibliothèque  qui  ^mt   à 


CL 

Pergatne ,  oîi  il  fe  troiiva  plus  de 
deux  cent  mille  volumes»  Elle 
n'amaflbic  pas  des  livres  finiple- 
ment  pour  la  parure  ;  elle  en  fiai- 
foie  ufage. 

Comme  elle  fe  prétendoit  fem- 
me légitime  de  M.  Antoine  ,  eUe 
fouffroit  impatiemment  de  le  voir 
marié  avec  Oâavie,  qu'elle  re- 
gardoit  comme  fa  rivale.  Il  filluc 
que  M.  Antoine ,  pour  Tappaîfer, 
lui  fit  de  magnifiques  préfens.  B 
lui  donna  la  Phénicîe ,  la  baffe- 
Syrie,  l'ifle  de  Cypre,  &  une 
grande  partie  de  la  Cilicie.  Il  y 
ajouta  une  partie  de  la  Judée  & 
de  l'Arabie.  Deux  années  fe  paf- 
ferent  pendant  lesquelles  M.  Aiv- 
toine  nt  plufieurs  voyages  à  Ro- 
me «  &  entreprit  quelques  expé- 
ditions contre  les  Parthes  &  les 
Arméniens.  De-là  il*pa{ra  dans  la 
Phénicie ,  où  Cléopâtre  vint  le 
joindre ,  avec  des  habits  &  beau- 
coup d'argent  pour  les  foldats. 
Oâavie  ,  en  même  tems ,  étok 
partie  de  Rome  pour  l'aller  trou- 
ver, &  elle  étoit  déjà  arrivée  à 
Athènes.  Cléopâtre  fentit  biein 
qu'elle  ne  vcnoit  que  pour  lut  dif- 

futer  le  cœur  de  M.  Antoine, 
bur  éviter  ce  danger,  elle  fit 
femblant  de  mourir  d'amour  pour 
M.  Antoine ,  &  atténaoit  dans 
cette  vue  fon  corps ,  ne  prenant 
que  très-peu  de  nourriture.  Tou^ 
tes  les  fois  qu'il  entroit  chez  elle , 
il  lui  voyoit  le  regard  furpris  ôc 
étonné  ;  6c  quand  il  en  forcoit  elle 
prenoit  un  air  abattu  &  languif- 
fant.  Souvent  elle  faifoit  enu>rte 
de  paroîtr^  toute  en  larmes  ;  & 
,dans  le  iboment  même  elle  fe 
hâtoit  de  les  effuyer  ^  4e  les  ca^ 


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C  L 

cher  y  comme  pour  lui  dérober  fa 
fpiblefle  &  Ton  défordre.'M.  An- 
toine ,  qui  ne  craignoit  rien  tant 
que  de  caufer  Je  moindre  déplaifir 
à  Cléopâcre ,  écrivit  des  lettres  à 
Odavie  y   pour  lui  ordonner  de 
l'attendre  à  Athènes ,  &  de  ne  pas 
paiTer  outre  ,^  ju(qu*à  fon  retour 
d  une  expédition  qu'il  alloic  taire 
contre  les  Medes. 
.  Cependant ,  il  n'y  avoit  point 
d'artinces  que  Qéopâtre   n'em- 
ployât pour  retenir  M.  Antoine 
dans  Tes  liens.  Larmes  ,  careiTes, 
reproches ,  ^nenaces  i  tout  étoit 
tpis  en  ufage.  Elle  ayoit  gagné  à 
force  de  préfens ,  tous  ceux  qui 
approchoient  de  M,  Antoine  »  & 
qui  avoient  le  plus  fa  confiance. 
Ce»  batteurs  lui    repréfentoienc 
avec  force  qu'il  y  auroit  de  la  du* 
reté  .&  de   l'inhumanité  d'aban- 
donner Cléopâjtre  dans  le  tride 
ét^t.oîi  eJle  Te  trou  voit ,  &  que  ce 
feroit  faire  OKHirir  cette  infortu- 
i|ée  Prinçefle,  qui  n'aimoit  que 
l^i  9  &  ne  vivoit  que  pour  lui.  Ils 
amollirent  &  fondireat  fi  bien  le. 
cçeor  de  M.  Antoine ,  que  de  peur 
que  Cléopâtre  ne  fe  fit  mourir,  il 
retourna  promptement  à  Alexan- 
drie, 6c  remit  les  Medes  au  prin- 
tems. 

Il  eot  bien  de.U  peine ,  quand 
kprîmems  fin.  arrivé^  à  quitter 
TÉgypte  &  ^  à  «'éloigner  de  fa 
chère  Cléopâtre.  £lie  confentit  à 
l'accompagner  jufqu'au  bord  de 
i'Ëuphrate.  Après  Ion  expédition, 
il  fe  hâta  de  retourner  à  Alexan- 
drie ;  &  ci^mme  Cléopâtre  &  lui 
pafToient  les  jours  6c  les  nuits  dans 
ks  feftins  ,  cette  vaine  Princeffe , 
i^aos  un  de  ces  rçpgy  ^  Yoyant  M» 


CL  597 

Antoine  plein  de  vjn  ,  ofa  bien  lui 
demander  l'empire  Romain ,  6c 
il  n'eut  point  de  honte  de  le  lui 
promettre.  Avant  que  de  quitter 
l'Egypte  9  il  voulut  faire  la  céré- 
monie du  couronnement  de  Cléo« 
pâtre  6c  de  tous  fes  enfans.  Cha«« 
cun  ayant  pris  la  place  quiluiécoit 
deAinée ,  le  héraut ,  par  le  com- 
mandetitent  de  M.  Antoine ,  6c 
en  la  préfence  de  t<^ut  le  peuple  à 
qui  on  avoit  ouvert  les  portes  da 
palais  ,  proclama  Cléopâtre  reine 
d'Egypte,  de  Cypre,  de  Libye 
6c  de  la  Céléfyrie  ,  conjointement 
avecfon  fils  Céfarion.  11  proclama 
enfuite  les  autres  Princes,  Rois  des 
Rois. 

Cléopâtre  fuivit  depuis  M.  Aiw 
toine  dans  fon  expédition  contre 
Auguâe.  Quand  ils  fiirent  arrivés 
à  Éphèfe  ,  les  amis  de  M.  Amoi« 
ne  lui  confeilloient  de  renvoyer 
ceue  Princeffe  à  Alexandrie  ,  juf- 
qu  a  ce  qu'on  vit  quelle  tournure 
prendroient  les  évenemens  de  la 
guerre.  Mais ,  Cléopâtre  ,  crai* 
gnant  que  M.  Antoine  ne  s'accom- 
modât avec  Augufte,  gagna  un 
de  fes  principaux  «mis. à  force 
d'argent ,  6c  le  porta  à  parler  en 
fa  faveur  à  M.  Antoine,  6c  i  lui 
repréfenter  qu'il  n'étoit ,  ni  jufte 
d'éloigner  de  cette  guerre,  une 
P/inceffe  qui  y  contribuoic  fi  fbrc 
de  fon  coté  »  ni  utile  pour  fon  par- 
ti >  parce  que  fon  départ  découra- 
geroit  les  Égyptiens,  quifaifoient 
la  plus  grande  partie  de  fes  forces 
maritimes.  M.  Antoine  ne  réfifta 
point  à  des  remontrances,  qui 
flattoient  en  même  tems  fon 
amour  propre  6c  fa  paffion. 
P'Éphèfe  il   f(^  rendit  ay«c 


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59»  CL 

Qéopâtre  k  S^mos ,  oii  écoU  le 
tendez-vous  de  la  plupart  de  leurs 
troupes»  6c  oîi  ils  pafferent  le  tems 
dans  la  bonne  chère  6c  dans  les 
plaifirs.  Les  magnificences  n  y  fu- 
rent guère  moindres  qu'à  Aie- 
suipdrie*  Les  Rois ,  qui  étoient  à 
leur  fuite ,  s'épuîferent  »  pour  leur 
plaire^  par  des  dépenfes  extraordi- 
naires ,  ôc  déployèrent  dans  leurs 
feilins  un  luxe  exceffif.  De  Samos» 
on  vint  à  Athènes  ,  oh  Ton  pafla 
plufieurs  jours  dans  de  fembJables 
débauches*  Cléopâtre  n'épargna 
rien  pour  obtenir  des  Athéniens 
les  mêmes  marques  d'aâeâion  & 
d'«fiime  »  qu'Oaavie  en  avoit  re- 
çues pendant  fon  féjour  dans  cette 
ville»  Mais  ,  quoiqu'elle  pât  faire, 
elle  n'en  put  arracher  que  des  ci-  • 
vilités  contraintes  y  qui  k  termi- 
nèrent à  une  vaine  dépacation , 
que  M»  Antoine  exigea  des  Athé- 
niens, &  de  laquelle  il  voulut  être  ' 
)e  chef  lui-même  en  qualité  de 
bourgeois  d'Athènes«. 

D'Athjèoes  on  retourna  4  Sa-» 
mos  9  t>ù  toute  la  flotte  étoit  af- 
iemblée.  Rien  n*égalott  la  magni- 
ficence de  la  galère  de  Cléopâire, 
toute  bdUlame  d'or,  avec  des  voi- 
les de  pourpre ,  fes  flammes  6c  Tes 
•  banderoles  fe  ,  jouant  au  gré  du  * 
v€n€ ,  pendant ,  que  les  trompet- 
tes 6c  les  autres  inflrumens  de 
guerre  faifoient  entendre  des  airs 
d  allégrefTe  &  de  triomphe.  M.  An- 
toine  la  fuiyoit  de  près  dans  une 
gjilère  qui  n'étoit  guère  moins  or- 
née. Oeîte  Reine  ,  enivrée  de  fa 
fortune  6c  de  fa  grandeur ,  6c  n*é- 
coutantque  fon  ambition  efFiénée, 
menaçoit  follement  le  Capitole 
d'une  riûae  prochaine  »  6c  fe  pré-; 


CL 

paroit  avec  fa  troupe  înfatne  d'Eu- 
nuques à  détruire  pour  toujours 
l'empire  Romain. 

Cependant ,  les  plus  braves  6c 
les  plus  expérimentés  officiers  de 
M.  Antoine  lui  cpnfeilloient  de 
ne  point  hazc^der  un  combat  na- 
val, 6c  de  renvoyer  Oéopâtre  en' 
Egypte.  Mais,  il  y  avoit  long- 
tems  qu'il  n'étoit  plus  fufceptible 
d'un  bon  confeil ,  ne  faifant  que 
ce  qui  plaifoit  à  Cléopâtre.  Cette 
orgueilieufe  PrïncefTe ,  qui  ne  jn« 
geoit  des  chofes  que  par  Texte- 
rieur,  croyoit  que  fa  fiotte  étoit 
invincible ,  6c  que  les  vatileaux 
d'Augufle  n'en  pourroient  appro- 
cher fans  fe  brifer.  D'ailleurs , 
elle  fentoit  bien  qu'en  cas  de  mal- 
heur il  lui  feroit  plus  aifé  de  fe 
fauver  fur  fes  vaiffeaux  que  par 
terre.  Son  avis  prévalut  donc  fur 
celui  de  tous  les  Généraux. 

La  bataille  fe  donna  le  fécond 
jour  de  Septembre  à  l'embou- 
chure du  golfe  d'Àmbracie  ^  près 
de  la  ville  d'A£lium ,  à  la  vue  des 
armées  de  terre  ,  dont  l'une  étoit 
rangée  %n  bataille  fur  la  côte  du 
nord  ,  6c  l'autre-  (ùt  celle  du  tmàl 
de  ce  détroit ,  attendant  le  fuccès 
du  combattu  liat^  -doufceux  pen- 
dant quelque  tems ,  6c  parut  auffi- 
favorable  à  M;  Antoine  qu'àAu- 
gufle ,  jufqu'à  la  retraite  deQéo- 
patre.  Cette  Reine,  effrayée  du 
bruit  du  combat  ,  oh  tout  étoit' 
terrible  pour  une  iernme ,  prit  la 
fuite  lorsqu'il  n'y  avoit  aucun  dan- 
ger pour  eHe,  &c  entraîna  avec 
elle  toute  fonefcadre  Égyptienne, 
qui  étou  de  foixante  vaifTeaux  de' 
haut  bord ,  avec  lefquels  elle  fît 
voile  du  côté  du.Pék>ponnèj(^.  M, 


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CL 

Antoine  cui  la  vit  fuie,  oubKânt 
touc ,  &  s  oubliant  lui-inême  f  la 
^ivit  précipitamment ,  &  céda  à 
Âugafle  une    viâoire  qu'il  lui 
ayoit  très- bien  difputée  juiques-là. 
-    On  arriva    à  ^Ténare ,    d*oU 
Cléopâcre  prit    la   route  d'Alcr 
yandrie,  £n  approchant  du  pof  t , 
«lie  craignit  «  (i  l'on  apprenoit  Ton 
malheur  «  qu'on  ne  lui  en-  refiifât 
rentrée»   Elle   fit   couronner  fct 
vaifleaux ,  comme  û  elle,  fûjt  re- 
venue^viâorieufe.  A  féne  y  fut- 
elle  entrée  qu'elle  fit  mourir  tous 
les  Grands  de  Ton  royaume ,  qui 
Ijdi  étoient fufpeâs »  de  peur  que» 
ior(quV>n^  fçauroit  Ta  débite  j  il)i 
ç'excitjtffent  des  (éditions  i;oQtre 
eUe.  M.  Antoine  la  trouva  dans 
c^fa^D^antes  exécutioiisu 
'  Elle  forma  bien-têt  après  »  :un 
autre  defljeifl  bien  extraordinaire* 
pçUr  éviiiçr  de  tomber  entre  les 
Biains  d'Auçufte  ;  elle  fongeoit  à 
£aiie  .tranfporter  Tes  vaiiTeaux^de 
kl  ^mej:  .Méditerranée  dans  la  iaet 
Ronge/y   par  l'ifthme  qui  n'arque 
trente  lieues  de  largeur^ôc  à  mec-; 
tfeenfuite  tous  Tes  tréCbrs  dans  ces 
Taifleaux.^  6c  dans  les  autres  qa'- 
^le  avoir  déjà  fur  cette  mer^  Mats« 
ks  Arabes  qui  demeuroient  fur 
cette  côte  ,*  ayant  brûlé  tousi  les 
vatfleeux  qu'elle  y  avolt  >  elle  fut 
obligée  d'abandonner  cedeffein.j 
.   Changeant  donc  de  réfolution , 
eUe  ofe  £>ngea  plus  qu'à  gagner 
Augude, qu'elle  regardoit  comme 
(on  vainqueur ,  &  à  lui  faire  un 
Sacrifice  de  M.  Antoine ,  que  (es 
malheurs  lui  avoient  rendu  indif ^ 
ferént.  Tel  étoit  Tefprit  de  cette 
Princeffe.  Quoiqu'elle  aimât  juf- 
/qu'à  la  fureur,  elle  avoH  encore 


C  L  399 

plus  d'amhilion  que  d'amour  ;  ôt 
la  couronne  lui  étant  phis  chère 
que  fon  marr,'  elle  fongeoit  à  U 
conferver  au  prix  de  la  vie  de  M« 
Antoine.  Mais,  lui  cachant  fes 
fentimens  ,  elle  lui  perfuada  d'en-^ 
voyer  des  ambafladeurs  à  Au-* 
guile  ,  pour  n^ocier  avec  lui  un 
traité  de  paix.  Elle  joignit  fes  am- 
bafladeurs à  ceux  de  M.  Aptoinet 
mais  leur  ordonna  de  traiter  pouf 
elle  en  particulier.  Augufle  ne 
voulut  point  voir  les  ambafTa^* 
deurs  de  M.  Antoine  ;  il  renvoya 
ceux  de  Cléopâtre  avec  une  ré-^ 
ponfe  favorable.  « 

Cependant»  cette  Reine ,  Kfoi 
ptévoyoitcequi  pourroit  arriver, 
ramafToit  toutes  fortes  de  poifons  i 
&  pouiT  éprouver  ceux  qui  fai«« 
foient  mourir  avec  le  moins  dt 
douleur ,  elle  faifoit  l'eiTaî  de  leur 
vertu  &  de  leur  force  fur  les  cri- 
minels condamnés  à  mort^   qui 
étoient  gardés   dans  les  prifons; 
Ayant  vji ,  par  ces  expériences  i 
que  les  poifons  qui  étoient  forts  ^ 
faifbient  mourir  promptement  « 
mais  datis  de  grandes  douleurs  ;& 
que  ceux  qui  étoient  doux ,  cau<r 
foient  une  mort  tranquille ,  mais 
lente^elleefTaya  des  morfures  des 
bétes^venimeufes,  &  fit  appliques 
en  fa:.préfence  fur  diverf^  per«> 
fonnes  ,  différentes  fortes  de  for^ 
pens«  :  Tous  les  jours ,  elle  faifoic 
de  ces  épteuves.  Enfin  >  elle  trou* 
ya  que  l'afpic  étoit  le  feul  qui  ne 
caufoit  ni  convulfions  ni  tranchées, 
&  qui»  prédpitaitt  feulemem  da»s 
une  peiameur  &  dans  un  afibupiP- 
fement  accompagnés  d'une  pfitite 
moiteur  au  vifage ,  &  d'un  amor*- 
tjiirement  de  tou$  les  (ens ,  étei^ 


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400  CL 

gnoir  doacement  la  vie ,  de  forte 
que  ceux  qui  écoient.en  cet  écat , 
le  fâchoiem  quand  on  les  réveil- 
loit ,  ou  qu'on  vouloit  les  lever  , 
de  même  que  ceux  qui  font  pro- 
fondémisnt  endormtSé  Ce  (ut-là  le 
poifon  auquel  elle  fe  fixaV 

Pour  difliper  les  féa^om  &C 
les  fujets  de  plainte  de  •M<r  An- 
toine y  elle  fe  mit  à  le  car^ifer  en- 
core plus  que  de  coutume  ^  de 
forte  que  n'ayant  célébré  4e  jour 
de  fa  propre  Dai{ranc6<|u*âvec  peu 
deiblemniré  ,  &  convenablement 
à  r^tat  préfent  de  ia  fortune ,  elle 
célébra  celui  de  •!&  "naifiafice  ck 
M*  Antoine  avec  untéctat-6(4ine 
inagnificenceau-deâusde  tout  C0 
qu'elle  avoit  fait  auparavant  y  juf- 
quès*là  que  piufieurs  dps  oi&nviés, 
i|ui 'étoient  venus  pau^tres-à  ce 
feûin  i  6'en  rétournecilnt  riches, 
•  Cléôpâtre  avoit  .fait-  bawr  à 
coté  du  temple  d'iii&V- des^tom- 
beaux  .&  des  failes  fupetbesr-,  tant 
par  leur  beauté  Ôcpar  leur  magnt- 
^cence^^.que  par 'leur -^lévàtion^ 
Elle  y.  fit  porter  tous  fes  meubles 
ks-phis  précieux  ,  l'or ,  Targent , 
ks  pi^eries^  l'ébène ,  Tivoite^  6c 
X]uantité  de  parfums  &  de  bois 
aromatiques  ,  comtne  (t  .elje  eût 
«Il  déffein  d'en  iiaice.un-  bâcher  , 
fur  lequel  elle  eût  voulu  fetcon- 
•Himer  avec  tous  fes  tréfors;  Au^ 
^ûê,.alkrmé  pouctootesi  fe«  ri^ 
KhefTes ,  jSc  craiement  qnr  réduite 
au  déièfpoir ,  elle  ne  fes  fit  brûler, 
iui  dépéchoit  tous  ,^ks  jours  des 
gens,  qui  lui  cbimoient de gran^ 
-des  efpérances  d'un  traitement 
plein  de  douceur  ôt  d'humanité  ; 
&  eependam  il  s'approchoit  de  la 
yiUe  à  grandes  journée^»* 


M«  Antoine  ,  qui  ignoroSt  les 
Intrigues  de  Qéopâtre  »  (e  prépa- 
roit  àmnè  hùùtit  défenfe  ;  tnaiS| 
l'amival  de  cette  Princeile  baifla 
pavilkin^  iorfqu'il  fut  à  portée  de 
celui  d'Augufie ,  &  lui  Hvra  toute 
fa  âotte:  M.  Antoine  i  plein  de 
tôge  6C'  dé  défefpoir,  courut  ao- 
palais  dansJe^delTein  de  f«t  vengei^ 
de  Cléo^tre';  mais ,  il  ne  la  trou- 
va pï>int.     ' 

-  Cette  artificieufe  Princefle,qui 
av€fit prévale  qui  arrriva,- vou- 
lant fe  dérober  à  la  colère  de  M. 
Aptotne,  s'écoii  Retirée  dans  le 
qoanier  oii  Soient  les  tombeaux 
des  «rois  d'Egypte,  qui  étoit  tbr* 
tiôé  de  boMAés.  murailles ,  «&  dont 
elle  a^vott  Eût  fermer  (es  portes^ 
£lle6t  dire  à  M.  Antoine  v  que 
préièrànt'une  mort  honorable  à 
une  honteufe  captivité  i  die  s'^ 
coït  donné  la  mort  au  milieu  des 
tombeaux  de  fes  ancêtres  >  oii-elle 
atoitauili'chotô  (a  fépulcure.  M. 
Aa«othe\  trop  crédule,  ne  fe  don- 
na; pas  le^loifir  d'examiner  une 
nouvelle  qui  devoit  lui  ^tre  fui^ 
peék ,  aptes  toutes  les  infidélités 
depéopâtre  ;  &  frappé  de  l'idée 
de  fa'  trart  ^  ii  paffa  tour  d*ua 
coup  de  Texcès  dé  la  colère  dans 
les  plus  vifs  tranfports'dedouleori 
&  ne  fongea  plus  qu'à  la  fiiiyre 
dans  le  tombeau. 

'  Dé^  il  s'étoit  enfoncé  fbo  épée 
dans  le  corps ,  Iorfqu'il  voit  ar<* 
river  un  officier  des  gardes  de  la 
Jleine ,  qui  lui  venoit  dire  qn'elle, 
étoit  vivante.  Il  n'entendit  pas 
plutôt  prononcer  le  nom  de  Cléo« 
pâtre  ,  qa'il  revmt  de  ion  éva- 
nouiffement ,  6c  apprenant  qu'elle 
ia>it  .virante  ^  il  fouffrit  qu'oa 

panTâc 


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CL 

panait  fa  bleffure  ,  &  (e  fît  enfuite 
porter  à  la  forterefle  oîi  elle  s'étoit 
enfermée.  Cléopâtre  ne  permit 
point  qu'on  ouvrit  les  portes  pour 
le  faire  entrer  ,  dans  la  crainte  de 
quelque  furprife  ;  mais ,  elle  pa- 
rut à  une  fenêtre  haute ,  &  jetta 
en  bas  des  chaînas  &  des  cordes. 
On  y  attacha  M.  Antoine  ,  & 
Cléopâtre ,  aidée  de  deux  fem- 
mes, qui  étoient  les  feules  qu'elle 
eût  '  menées  avec  elle  dans  ce 
tombeau  ,  le  tira  à  elle«  Jamais , 
fpeâacle  ne  fut  plus  touchant,  M. 
Antoine,  tout  couvert  de  Tang, 
&  la  mort  peinte  fur  le  yifage, 
étoit  guindé  en  haut>  tournant  fes 
yeux  moarans  vers  Cléopâtre, & 
lui  tendant  (es  foibles  mains,com- 
me  pour  la  conjurer  de  recevoir 
fôs  derniers  foupirs  ;  &  Cléopâtre, 
le  vifage  tendu  >  &  les  bras  roi- 
dis ,  tiroit  les  cordes  avec  grand 
efforC ,  pendant  que  ceux  d'en  bas 
qui  ne  pouvoient  Taider  autre- 
ment, ren(;ourageoient  par  leurs 
cris. 

Quand  elle  l'eut  tiré  à  elle ,  6c 
qu'elle  leur  couché  ,  elle  déchira 
fes  habits  fur  lui ,  fe  frappant  fô 
fein ,  fe.  meurtriiTant  la  poitrine  ; 
&  lui  eïïuyant  le  fang  avec  fon 
vifage  collé  fur  le  fien  ,  elle  Tap- 
pelloitfon  Prince,fon  Seigneur,fon 
cher  Époux,  En  faifant  ces  ttiftes 
exclamations,  elle  coupoit  les 
,  cheveux  de  M.  Antoine ,  f^ivant 
la  fuperilition  (ies  payens  ,  qui 
cfoy oient  foulager  par  -  là  ceux 
qui  mouroient  d'une  mort  vio- 
lente. 

M.  Antoine  ,  ayant  repris  fes 
fens  ,  &    voyant  raffllôion  de 
Cléopâtre ,  Uii  dit ,  pQur  la  con-. 
Tom.  XI.  ' 


CL  4ot 

foler  ,  qu'il  mouroit  heureux  ^ 
puifqu'il  mouroit  entre  fes  bras. 
Cette  PrincefTe  demanda  à  Au- 
gure la  permiffion  d'enfevelir  M. 
Antoine ,  qui  lui  fut  accordée  fans 
peine.  Elle  n'épargna  rien  pour 
rendre  fa  fépulture  magnifique  , 
fuivant  la  coutume  des  Égyptiens. 
Elle  fit  embaumer  fon  corps  avec 
les  parfums  les  plus  précieux  de  " 
rOrient ,  &  le  plaça  parmi  les 
tombeaux  de$  rois  d*Égy pte, 

Augufte  ne  trouva  pas  à  propos 
de  voir  Cléopâtre  dans  les  pre- 
miers jours  de  fon  deuil  ;  mais , 
lorfqu'il  crut  le  pouvoir  faire  avec 
t>ienféance,il  fe  fit  introduire  dans 
fa  chambre ,  après  lui  en  avoir  de- 
mandé la  permiffion ,  voulant  par 
les  égards  qu'il  avoit  pour  elle,  hii 
cacher  fon  defiein.  Elle  étoit  cou- 
chée fur  un  petit  lit  dans  un  état 
fortfmipleôc  fort  négligé.  Quand 
il  entra  dans  fa  chambre  ^  quoi- 
.qu'elle  n'eût  fur  elle  qu'une  fimplê 
tunique,  elle  fe  leva  promptement, 
6c  alla  fe  jetter  à  fes  genoux, 
horriblement  défigurée  ,  les  che- 
veux en  défordre  ,  le  vifage  effaré 
&  fanglant  ,  la  voix  tremblante  , 
les  yeux  prefque  fondus  à  force  de 
pleurer  ,  ôc  le  fein  couvert  de 
meurtriffures  &  de  plaies.  Cepen- 
dant I  cette  grâce  naturelle ,  &c 
cette  fierté  que  fa  beauté  lui  inf* 
piroit ,  n'étoient  pas  entièrement 
éteintes  ;  &  malgré  le  pitoyable 
état  oii  elle  étoit  réduite  ,  de  ce 
fond  même  de  triftefle  &  d'abat- 
tement 9  il  en  fortoit  >  comme  d'un 
fombre  nuage ,  des  traits  vifs  & 
des  efpèces  de  rayons  ,  qui  écla- 
toient  dans  fes  regards  &  dans 
tous  fes  m0uvemens  de  fôn  vifa- 
Cc        ^ 


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4d2  C  L 

ge.  Quoique  prefque  mourante  » 
elle  ne  déferpéroit  pas  d'infpirer 
encore  de  l 'amour  à  ce  jeune 
vainqueur  ,  comme  elle  avoit 
fait  autrefois  à  Céfar  &  à  M. 
Antoine* 

La  chambre  oîi  elle  le  reçut,étoit 
pleine  des  portraits  de  Céfar.  Sei* 
gneùr^ïm dit-elle,  en  lui  montrant 
ces  tableaux ,  voilà  les  images  de 
celui  qui  vous  a  adopfépour  vous 
faire  fuccéder  à  l'empire  Romain  , 
&  à  qui  je  fuis  redevable  de  ma 
couronne.  Puis ,  tirant  de  Ton  fein 
les  lettres  qu'elle  y  avoit  cachées  : 
Voilà  aujfi  ,  continua-t-elle  ,  en 
les  baifant ,  les  chers  témoignages 
d4  fon  amour.  Elle  en  lut  enfuite 
quelques- unes  des  plus  tendres  , 
accompagnant  cette  leâure  de 
paroles  touchantes  &  de  regards 
padionnés.  Mais»  elle  employa 
inutilement  tout  ces  artifices  ;  & , 
foit  que  fes  charmes  n  eufTent  plus 
le  pouvoir  qu'ils  avoient  eu  dans 
fa  jeuneffe ,  ou  que  l'ambition  fût 
la  paiSon  dominante  d'Âuguftey 
il  ne  parut  point  touché  de  fa  vue 
ni  de  fon  entretien ,  fe  contentant 
de  l'exhorter  à  avoir  bon  coura- 
ge I  &  l'afFurant  de  fes  bonnes  in- 
tentions. Elle  s'apperçut  bien  de 
cette  froideur  ,  dont  elle  tira  un 
mauvais  augure  ;  mais  ,  diffimu-? 
tant  fon  chagrin  ,  &  changeant  de 
difcours,  elle  le  remercia  beau- 
coup de  i^%  bonnes  difpofitions. 
Elle  ajouta  qu'en  revanche  elle 
vouloir  lui  livrer  tous  les  tréfors 
des  rois  d*Égypte.  Et  en  effet  elle 
lui  remit  entre  les  mains  un  bor* 
dereau  de  tous  fes  meubles ,  de 
fes  pierreries  &  de  fes  finances* 
Comme  Séleucusi  un  de  fes  tré- 


CL 

forîers  ,  qui  étoit  préfent ,  lu!  re« 
procha  qu'elle  n'avoit  pas  tout  dé- 
claré ,  &  qu'elle  caphoit  &  rete- 
noit  une  partie  de  ce  qu'elle  avoir 
de  plus  précieux,  outrée  d'une 
telle  infolence,elle  lui  donna  plu- 
fieurs  coups  fur  le  vifage.  Puis  , 
fe  tournant  vers  Augufte:  »  N'eft- 
»  ce  pas  une  chofe  horrible ,  lui 
»  dit-elle ,  que  lorfque  vous  n'a* 
»  vez  pas  dédaigné  de  me  venir 
»  voir ,  &  que  vous  avez  bien 
»  voulu  me  confoler  dans  le  trifte 
»  état  où  )e  me  trouve ,  mes 
»  propres  domeftiques  viennent 
n  m'accuiêr  devant  vous  ,  fous 
I)  prétexte  que  j'aurai  réfervé 
»  quelque  bijou  de  femme ,  non 
f>  pour  en  orner  une  miférable 
5i  comme  moi ,  mais  pour  en  faire 
w  un  petit  préfent  à  06tavie  votre 
»  fœur  y  6rà  Livie  votre  époufe, 
M  afin  que  leur  proteâion  attire 
})  de  votre  part  un  traitement  fa- 
)>  vorable  à  une  infortunée  Pria* 
Il  cefle?« 

Augufte  fut  ravi  de  l'entendre 
parler  ainfi  ^  ne  doutant  point  que 
ce  ne  fût  l'amour  delà  vie,  qui 
lui  infpiroit  ce  langage.  Il  lui  dit 
qu'elle  pouvoit  difpofer  à  fon  gré 
des  bijoux ,  qu'elle  avoit  retenus  ; 
&  après  l'avoir  aflurée  qu'il  la 
traiteroit  ave^  plus  de  générofité 
&  de  magnificence  qu'elle  n'ofoit 
Tefpérer ,  il  fe  retira  ,  penfant  l'a- 
voir trompée  ,  &  c'étoit  lui  qui  le 
fut.  En  effet ,  ne  doutant  point 
qu'Augufte  n'eût  defTein  de  la 
faire  fervir  d'ornement  à  fon 
triomphe  j  elle  ne  fongea  plus  qu'à 
mourir  pour  éviter  cette  honte. 
Elle  fçavoit  bien  qu'elle  étoic  ob- 
fervér  par  les  gardes  qu'oa  lui 


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CL 

avoît  donnés ,  qui ,  fous  prétexte 
de  lui  faire  honneur  ,  la  fuivoieDt 
par  tout  ;  &  que  d'ailleurs  le  tems 
preflbit ,  le  jour  du  départ  d* Au- 
gure approchant^  Pour' le  trom- 
per donc  encore  mieux ,  elle  le 
fit  prier  qu'elle  pût  rendre  fes  der- 
niers devoirs  au  tombeau  de  M. 
Antoine  >  &  prendre  congé  de 
lui.  Augufte  lui  ayant  accordé 
cette  permiffion,  elle  s'y  rendit 
effeâivement  pour  baigner  ce 
tombeau  de  Tes  larmes  ,  6^  pour 
alTurer  M.  Antoine ,  à  qui  elle 
adreila  fon  difcours, comme  fi  elle 
l'eût  eu  fous  les  yeux  ,  qu'elle  al- 
loit  bientôt  lui  donner  uçe  preuve 
certaine  de  Ton  amour. 

Après  cette  fuqefte  protefta- 
tîon  ,  qu  elle  accompagna  de  fes 
pleurs  &  de  fes  foupirs ,  elle  fit 
couvrir  le  tombeau  de  fleurs  |  ^ 
revint  dans  fa  chambre.  Puis  elle 
fe  mit  au  bain  »  ÔL  du  bain  à  la 
table,  .ayant  ordonné  qu'on  lui 
fervît  un  repas  magnifique.  Au 
lever  de  la  table,  elle  écrivit  un 
billet  à  Aagufte ,  &  a^ant  fait 
forcir  tous  ceux  qui  étoifint  dans 
fa  chambre,  excepté  (es^feux  fem- 
mes ,  elle  ferma  la  porte  fur  elle  , 
ife  mit  fur  un  lit  de  repos ,  &  de- 
manda une  corbeille  où  il  y  avoit 
des  figues ,  gu'un  païfan  venoit 
d'apporter.  Elle  la  mit  auprès 
d'elle»  6c  un  moment  après^  on  la 
vit  fe  coucher  fur  fon  lit,  comme  fi 
elle  fe  fût  endormie.  Mais  ,  c'eft 
que  l'afpic,  qui  éioit  caché  parmi 
les  fruits  ^  l'ayant  piquée  au  bras 
qu'elle  lui  avoit  tendu,  le  venin 
avoit  auffi-tôt  gagné  le  cœur ,  ÔC 
Tavoit  tuée  fans  douleur  ,  &  fans 
qu'oh  s'en  apperçût.  Les  gardes 


CL  40} 

avolen^  ordre  de  ne  rien  laifTer 
pafTer  ,  qui  ne  fût  vifité-  exaâe- 
meni  ;  mais ,  ce  païfan  travefii , 
qui  étoit  un  fidèle  ferviteur  de  la 
Heine  ,  joua  fi  bien  fon  perfonna- 
ge  ,  &  il  parut  Ci  peu  d'apparence 
de  tromperie  dans  un  panier  de 
fruits  ,  que  les  gardes  le  laifierent 
entrer.  Ainfi  ,  toute  la  prévoyan- 
ce d'Augufte  lui  fut  inutile.     ' 

Il  ne  douta  point  de  la  réfolu- 
tion  de  Clégpâtre  ,  après  avoir  lii 
le  billet  qu'elle  lui  avoit  é.cric,pour 
le  prier  de  permettre  que  foa 
corps  fût  mis  auprès  de  celui  de 
M.  Antoine  dans  un  même  tom- 
beau ;  &  il  dépêcha  promptement 
deux  officiers  pour  la  prévenir* 
Mais  ,  quelque  diligence  qu'ils 
pufTent  faire,  ils  la  trouvèrent 
morte.      - 

Cette  PrincefTe  étoit  trop  fiere 
&  trop  au-deffus  du  commun  ^ 
pour  foufirir  qu'on  la  menât  en 
triomphe ,  attachée  au  char  du 
vainqueur.  Déterminée  à  mourir» 
&  par-là  devenue  capable  des 
plus  féroces  réfolutions ,  elle  vie 
d'un  œil  fec  &  tranquille  ,  couler 
dans  fes  veines  le  poifon  mortel  de 
l'afpic. 

Cléopâtre  mourut  à  l'âgô  de 
trente-neuf  ans ,  dont  elle  en 
avoit  régné  vingt^deux  depuis  la 
mort  de  fon  père. 

DIGRESSION 
fur  le  portrait  de  Cléopâtre, 

La  beauté  de  cette  Reine,  con- 
fidérée  à  part  &  en  elle-même  , 
n'étoit  pas  fi  incomparable  ni  fi 
merveilleufe,  qu'elle  ravît  d'a- 
Lord  en  admiration  ceux  qui  la 
voyoient*  Mais  ,  fon  commerct 
C  G  îj 


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4o^  C  L 

avoit  un  attrait  dont  on  ne  pou- 
voit  fe  défendre  ;  &  fa  beauté  ôc 
fa  bonne  mine ,  accompagnées  des 
charmes  ÔC  des  grâces  de  fa  con- 
Terfation  ,  &  de  toute  la  douceur 
6c  de  la  gentillefle  qui  peuvent 
orner  le  plus  heureux  naturel  » 
latflbient  dans  le  cœur  Ôc  dans  l'ef- 
prit  un  aiguillon  qui  piquoient  juf- 
qu*au  vif.Cétoit  d*ailleurs  un  plai- 
fir  infini  de  l'entendre  feulement 
parler  ,  tant  il  y  avoit  de  douceur 
6c  d'harmonie  dans  le  fon  de  fa 
voix.  Sa  langue  étoit  comme  un 
inftrument  a  plufieurs  cordes , 
qu'elle  manioit  facilement,  6c  dont 
elle  droit ,  comme  elle  vouloit , 
toutes  fortes  de  fons  ôc  de  langa- 
ges. ^ 

Il  y  avoit  peu  de  nations  Bar- 
bares ,  à  qui  elle  parlât  par  tru- 
chement ;  mais  ,  elle  répondoit  à 
la  plupart  dans  leur  propre  lan-> 
gue  9  aux  Éthiopiens  ,  aux  Tro* 
glodytes  ,  aux  Hébreux ,  aux 
Arabes  ,  aux  Syriens  ,  aux  Me-» 
des  9  aux  Parthes.  Eltè  fçavoit  en- 
core plufieurs  autres  langues  ;  au 
lieu  que  les  Rois ,  qui  avoient 
régné  avant  elle  en  Éeypte , 
avoient  à  peine  pu  apprendre  l'É- 
gyptien ;  6c  quelques-uns  d'en- 
tr'eux  avoient  même  oublié  le 
Macédonien^  qui  étoit  leur  languo 
aaturelle. 

CLÉOPATRE  ,  CUopatra  , 
KMoTretTpa  ,  (a)  fille  de  la  précé- 
dente 6c  de  M.  Antoine.  Suidas , 
contre  l'opinion  généralement  re- 
çue ,  foûtient  que  Céfar  écoit  fon 

(a)  Plut.  Tom.  I.  pag.  955.  Mém.  de 
PAcad.  des  Infcrîpt.  k  Bell.  Letc.  Tom 
IV.  p.  460.  T.  XXI.  p.  141 ,  «68. 
.    C*)  Jiift.  L.  XXXVIII,  c.  3. 


CL 

pere»  M.  Antoine  érigea  la  Cyré- 
naïque  en  royaume  en  faveur  de 
la  jeune  Cléopâtre.  Ce  fut  M. 
Titius  qui  eut  la  commifiioode 
l'aller  mettre  en  pofieffîon  de  ce 
nouveau  royaume ,  où  il  fallut 
changer  la  forme  de  gouverne- 
ment ,  qu'on  y  fuivoit  aupara- 
vant. 

Après  la  mort  de  fon  père  & 
de  fa  mère  9  Cléopâtre  fiit  mariée 
par  Augufte  à  Juba  ^  roi  de  Maq- 
ritanie,vers  l'an  de  Rome 72 j. 
Suétone  donne  à  cette  princeffe  le 
furnom  de  Selène,  c'eu  -  à-  dire. 
Lune. 

CLÉOPATRE  ,  CUopatra , 
KyiotrirpoL ,  {b)  fille  de  Mithridate 
roi  de  Pont ,  fut  donnée  en  ma- 
riage à  Tigrane  »  roi  d'Arménie. 
Mithridate,  par  ce  mariage ,  vou- 
lut s'afibcier  les  Arméniens  dans 
la  guerre  qu'il  méditoit  contre  les 
Romains. 

CLÉOPATRE,  CUopatra,  (c) 
K^foxarpa,  courtifànne  de  l'em- 
pereur Claude ,  fe  laifla  gagod 
pour  fe  rendre  délatrice  contre 
l'impératrice  Meflaline. 

CLÉ«>ATRE  ,  CUopatra, 
Kxfowdrpa  >  (d)  femme  de  Geffius 
Fiorus  9  gouverneur  de  Judée 
fous  l'empire  de  Néron ,  fut  com- 
plice de  toutes  les  violences  de 
ion  mari ,  6c  le  foutint  auprès  de 
l'Empereur  par  le  crédit  qu'elle 
avoit  fur  l'elprit  de  l'impératrice 
Poppée. 

CLÉOPHANTE,  CUophan- 
tus,  KAfoç>«rT6ç,   (e)  peintre  de 

(€)  Tacit.  Annal.  L.  XI.  c.  30. 

(d)  Jofeph.  di  Antiq,  Judaïc.  p.  70». 

(e)  Plin.   TûTi.  II.  fzg,  19%,  )49« 
Méoif  de  TAçadt  des  I^cripc  ft 


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CL 

Coriothe.  Oir  dit  qu'il  fe  fervît 
le  premier  de  terre  pulvérifée  &  ^ 
broyée  très-fin  ;  &  qu'il  broya 
des  têts  ou  des  morceatK  de  pots 
de  terre ,  &  qu'il  en  compofa  une 
couleur.  Pline  infmue  que  ce  pour- 
roit  bien  être  le  mên^e  qui  vint  en 
Italie  avec  Démétrios,  perc  du 
premier  Tarquin  ,  pour  éviter  la 
perfécution  de  Cypfel^ ,  tyran  de 
Gjrynthe ,  vers  l*an  620  avant 
Jefus  Chrift. 

CLÉOPHANTE ,  Cleophan- 
tus  ,  (a)  KMopayro;  ,  fils  de  Thé- 
tniftocle ,  que  fon  père  rendit  fi 
habile  à  monter  à  cheval ,  qu'il  s'y 
tenoit^  de  bout  fur  ft%  pieds. 

Platon ,  dans  le  Ménon  »  pour 
prouver  que  la  vertu  ne  peut  être 
enfeignée ,  &  que  c'eft  an  don  de 
Dieu  ,  cîie  l'exemple  de  ce  Cléo- 
phante ,  qui ,  malgré  fon  habileté 
a  monter  à  cheval ,  étoit  très- 
vicieux  ;  ce  que  Thémidocle ,  qui 
étoit  fi  grand  homme ,  auroit 
fans  doute  empêché ,  s'il  avoit  pu, 
par  réducation  &  par  les  précep- 
tes. 

CLÉOPHANTE,  CUophan- 
tus  ,  (^).  K;kfo(2)«KToç  ♦  médecin  , 
dont  parle  Cicéron,  dans  fon 
oraifon  poUr  A.  Cluentius.  Il  vi- 
voit  dans  l'obTcurité,  quoique  ce 
fôt  d'ailleurs  un  homme  remar-» 
quable.  Il  avoit  un  efdave  qu'on 
voulut  engager  à  donner  du  poi- 
fon  à  A*  Cluentius  qui  étoit  ma-^ 
lade  ;  mais  cet  eklave ,  loin  d'ac- 
quiefcer  à  cette  criminelle  propo* 
fition ,  la  déféra  à  fon  maître ,  ^ 


CL  40J 

qui  avertit  le  malade  du  complot 
tramé  contre  fes  jours/ 

CLÉOPHES,  Cleophes,  (c) 
mère  d' Affacane ,  roi  des  Maza- 
ges.  Ce^rince  étoit  mort  depuis 
peu ,  lorfqu* Alexandre  arriva  dans 
le  pays  ;  &  Cléophes  gouvernoit 
le  royaume  en  la  place  de  fon 
fils.  Cette  prînceiïe  fe- défendit 
courageufement  ;  &  quand  elle 
vit  qu'elle  ne  pou  voit  plus  faire 
de  réfidance ,  elle  envoya  des 
ambaHadeurs  à  Alexandre  pour 
lui  demander  pardon. 

Le  roi  le  lui  ayant  accordé  , 
Cléophes  fortit  de  la  ville,  & 
vint  trouver  ce  prince  avec  une 
grande  fuite  de  dames,  qui  lui 
apportoient  du  vin  en  facrifice 
dans  des  coupes  d'or.  Et  lui  ayant 
préfenté  un  fils  qu'elle  avoit ,  & 
qui  n'étoit  encore  qu'un  enfant, 
elle  n'obtint  pas  feulement  fa  grâ- 
ce ,  nxais  elle  fut  aufii  remife  dans 
fes  états ,  avec  toute  la  fplendeur 
de  fa  fortune ,  &  le  nom  de  Reine 
lui  demeura.  Quelques-uns  ont 
cru  qu'en  cela  Alexandre  confi- 
déra  plutôt  la  beauté  ,  que  la 
difgrace  ou  le  malheur  de  cette 
PrincefTe  ;  au  moins  eft-il  vrai  que 
depuis  étant  accouchée  d'un  fils, 
qui  que  ce  fût  qui  en  fût  le  père, 
il  fut  nommé  Alexandre. 

CLÉOPHON ,  Chophon ,  {d) 
Kh%}<puTf^  célèbre  orateur  Athé- 
nien ,  qui  vivoit  fur  la  fin  de  la 
guerrç  du  Péloponnèfe.  Les  Lacé- 
démoniens  «  conAernés  delà  perte 
d'une  bataille,  dont  les  fuites  fii- 


Bell.  Lett.  Tom.  XIX.  pag.  ^54.         IVIII.  c.  10.  RoU.  Hift.  Ane.  T.  III.  p. 
(«)  Plut.  T.  I.  p.  iftS.  I743.  é^  friv, 

ii)  Cicen  Orat.  pro  A.  Cluent.  c.  35. 1    {d)  RoU.  Hift.  Ane.  Tom.  II.  p.  499, 
(O  Jutt.  L.  XII.  c.  7.  Q*  Curt.  L.Isqo* 

C  c  ii| 


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40^  C  L 

renc  très-avantageufes  aux  Athé- 
niens, envoyèrent  demander  la 
paix  aux  vainqueurs.    Ceux  qui 
trouvoient   leur   proât   dans  les 
troubles  de  TÉtat ,  empêchèrent 
réfFet  de  cette  demande.  Celui , 
qui  fe  fit  le  plus  remarquer  dans 
cette  circonftance,  ce  rut  Cléo- 
phon  ;  car  étant  monté  fur  la  tri- 
bune aux  harangues ,  il  anima  le 
peuple  par  un  difcours  violent  & 
féditieux  ,  lui  faifanr  entendre  que 
par  une  fecrete  intelKgence  avec 
les  Lacédémoniens ,  on  trahiffoit 
fes  intérêts  ;  qu'on  vouloit  lui  faire 
perdre  tout  le  fruit  de  Timpor- 
tante  viâoire  qu'il  venoit  de  rem- 
porter y  &  lui  ôter  pour  toujours 
i'occafion  de  fe  venger  pleineùient 
de  tous  les  torts  ôc  de  tous  les 
maux ,  que  Sparte  lui  avoit  fait 
foufFrir.  Cléophon  étoit  un  hom- 
me de  rien ,  un  ouvrier  d'inftru- 
mens  de  mufique.  On  prétend 
même  qu'il  avoit  été  efclave ,  & 
qu'il  s'étoit  fait  infcrire  par  fraude 
dans  le  regiftre  de<  Citoyens.  Il 
porta  l'audace  &  la  fureur  )uf- 
qu'à  menacer  d'enfoncer  fon  poi- 
gnard dans  la  gorge  de  quicon- 
que parleroit  de  paix.  Les  Athé- 
niens 9  enivrés  de  leur  profpérité 
préfente ,  rejetterent  avec  hauteur 
toute  propofition  d'accommode- 
ment. 

CLÉOPOMPE,  Cleopompus, 
K^eo-TToaTTo^ ,  (tf)  époufa  la  nym- 
phe Qéodore ,  dont  il  eut  Par^ 
naflus. 

CLÉOPTOLEME,  CUopto^ 
ïemus ,  {b)  citoyen  de  Chalcis  , 

(s)  Pauf.  p.  619. 

(h)  Tit.  Liv.  L.  XXXVI.  c.  II. 

CO  Plut.  T.  I.  p.  606. 


/ 

CL 

fut  père  d'une  fille  pouf  laquelle 
Antiochus  conçut  de  l'amour , 
pendant  qu'il  étoit  dans  cette  vil- 
le. D*abord  ce  prince  fit  parler  , 
Ï)uis  parla  lui-même  à  Cléopto- 
eme  du  defFein  qu'il  avoit  de 
devenir  fon  gendre.  Cléoptoleme 
avoit  de  la  peine  à  contrarier  une 
alliance  qui  étoit  fi  fort  au-defius 
de  fa  condition.  Mais ,  il  fe  rendit 
enfin  aux  inQances  réitérées  d'An- 
tiochus  ,  l'an  191  avant  Jef.  Ch« 

CLtO?\3SiCUopus,  Kxhwoç. 
Foye^  Cnopus. 

,  CLÉORA  ,  Cleora  f  K>tipa  9 
(c)  femme  d'Agéfilaiis ,  eut  de  ce 
Prince  deux  filles,  appellées  l'une 
Apolia ,  6c  l'autre  Prolyta. 

CLÉOSTHENE,  CUofhhenes, 
KAfcrQçrvç,  fi)  l'un  des  Ephores 
de  Lacédémone  pendant  la  guerre 
du  Péloponnèfe. 

CLÉOSTHENE,  CUofthenes, 
K>$o0-3(yvt'ç  >  (e)  célèbre  Athlète 
de  la  ville  d'Èpidamne ,  fut  vain- 
queur à  la  courfe  du  char  .en  la 
66.C  Olympiade  ;  ce  qui  lui  mé- 
rita l'honneur  d'une  fiatue  àOlym- 
pie  »  qu'on  plaça  derrière  celle  que 
les  Grecs  consacrèrent  à  Jupiter 
après  le  combat  de  Platée.  Il  étoit 
repréfenté  avec  fon  écuyer  fur  un 
char  attelé  de  quatre  chevaux ,  & 
c'étoit  un  ouvrage  d'Agéladas. 
L'infcription  marquoit  jufqu'aux 
noms  de  fe^  chevaux  ;  les  pre- 
miers s'appelloient  Phœnix  & 
Corax ,  les  deux  autres  qui  étoient 
à  côté  du  joug  ,  l'un  à  droite  & 
Taucrè  à  gauche,  fe  nommoieat 
Cnacias  &  Samus. 

{d)  Xenoph.  p.  461. 
(r)  Pauf.  p.  36a t 


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s.' 


CI- 

De  tous  ceux  qui  ont  eu  des 
haras  chez  les  Grecs  ,  Qéoflhene 
eft  le  premier  que  l'on  a  honoré 
d  une  ftatue  à  Olympie. 

CLÉOSTRATE ,  CUoflratus, 
Kxtoo'rpoiToç^  {a)  Argien  qui  fut 
député  avec  quelques  avtres  Grecs 
de  la  part  des  Athéniens  vers  le 
roi  de  Perfe. 

CLÉOSTRATE ,  CUoftratusy 
Kxtocrrfctrtç ,  {b)  fat  aimé  paffion* 
nément  de  Méoeftrate.  Foye^ 
Méneftrate. 

CLÉOTHERE,    CUothera , 
l'une  des  filles  de  Pandarée 

Is  de  Mérops,  fut  enlevée  par 
les  harpyeS)  &  livrée  aux  Furies , 
dans  le  temps  qu'elle  alloit  être 
mariée. 

CLÉOTIME ,  CUotimus ,  (i) 
KAeor//<oç ,  lieutenant  de  Philippe 
père  d'Alexandre  le  Grand,  avoit 
contribué  à  foumettre  les  Eléens» 

CLEPSIAMBE ,  CUpfiamhus , 
(r)inftrument  de  mufique  chez  les 
anciens.  Ceft  tout -ce  que  nous 
en  fçavons. 

CLE?Sm^^,Clcpfydra,{f) 
KM'^vJ'fci ,  étoit  une  machine 
d'une  figure  pyramidale  en  forme 
de  cône.  La  bafe  étoit  percée  de 
plufieurs  petits  trous  9  l'orifice  fu. 
périeur  très-étroit  &  allongé  ea 
pointe ,  in  vicem  colli  graciliter 
fiftulati,  dit  un  auteur  qui  en 
parle  ;  telle  étoit  la  Clepfydre  d'A- 
riftote. 
/  Cette  Clepfydre,  d«||f;  il  parle  fi 

•  (S)  Xenoph.  p.  4J6. 

(*)  Pauf.  p.  580. 

(e)  Myth.  par  M.  TAbb.  Ban.  Tom. 
VIU.  p.  10,  n. 

(4)  Freinsb.  fuppl.  m  Q,  Curt,  L,  I. 
es. 


C  L  407 

fouvent,  &  dont  il  fe  trouve  de 
fi  fréquences  defcriptions  dans 
ceux  de  fon  école ,  avoit  été  em- 
ployée par  ce  Philofophe  pour 
montrer  que  l'air  eft  quelque 
chofe  de  réel  »  6c  rendre  fenfible 
la  force  de  réfifiance  qu'il  a  pour 
repouiler  ou  pour  foûtenir  un 
corps.  En  prenant  la  Clepfydre , 
on  fermoit  l'ouverture  de  Torifite 
fupérieur  par  l'application  d'un 
doigt;  &  en  la  plongeant  dans 
l'eau,  on  remarquoit  comment 
l'air ,  renfermé  dans  la  Clepfydre, 
repoufibit  l'eau ,  ôc  ne  donnoit 
aucune  entrée.  Si  on  la  retiroit  en 
fermant  toujours  l'orifice  fupé- 
rieur, on  remarquoit  comment 
l'air  inférieur  foûtenoit  le  poids  du 
volume  de  l'eau  qui  étoit  dans  la 
Clepfydre. 

Pour  avoir  une  idée  jufte  de 
la  Clepfydre ,  qui  eft  une  horloge 
à  eau ,  il  n'y  a  qu'à  renverier 
celle  d'Ariftote  ;  c'eft  de  celle-là 
que  les  Anciens  parloient.  Arif- 
tophane  parlant  d'un  homme  qui 
aimoit  à  faire  le  juge  :  fon  efprit  , 
dit-il ,  eft  toujours  a  la  Clepfydre, 
Le  même  terme  »  répété  louvent 
dans  le  même  fens ,  fe  trouve 
expliqué  par  les  aiiciens  commen- 
taires ,  oui  portent  que  la  Clep- 
fydre eft  un  vafe  qui  a  par  le 
deflbus  une  très-petite  ouverture, 
par  laquelle  l'eau  s'écoule  peu  à 
peu  j  tandis  que  les  orateurs  plai- 
dent. Ceft  à  cette  coutume  qua 

(e)  Antîq.  expliq  par  D.  fiem.  de 
Monif.  T.  m.  p.  )45. 

(/)  Mém.  de  PAcad.  éts  Infcrîpt.  ft 
Bell.  Lett.  Tom.  IV,  pag.  157.  érfuiv^ 
T.XX.p.448>45S* 

Ce  iv 


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Api  CL 

Démoflhène  fait  allufîon  dans  fa 
harangue  contre  Midias  >  lorfqu'il 
dit  que  les  crimes  de  ce  coupa- 
ble font  tellement  multipliés ,  que 
quand  à  les  rappeller  cous ,  il  em- 
ployeroit  tout  le  tems  qu^on  ac- 
corderoit  à  fon  adverfaire  &  à  lui , 
il  ne  pourroit  encore  en  faire  un 
récit  aflez  circonAancié. 

Le  tems  9  qu'on  employoit  à 
l'inftruâion  d'un  procbs  &  à  la 
décifion  qui  fuivoit  \  étoit  limité 
par  Teau  qui  fe  verfoit  à  trois 
différentes  fois  ,  ce  qui  faifoit 
naître  ces  expreflions  »  irft^iù*^ 
J'ivrtpov  y  Tfli^^/  vidif»  Harpocra-. 
tion  les  explique  dans  fon  livre , 
qui  n'eft  fait  que  pour  donner  l'in- 
telligence de  ces  manières  de  par- 
ler ;  on  mefuroit  par  Teau  ,  dit- 
îl ,  le  temps  des  combats  des  plus 
habiles  orsrteurs.  Delà  viennent 
ces  expreffions  qu'un  fréquent 
ufage  a  fait  pafFer  en  proverbes  : 
Qu'il  parle  pendant  le  tems  qui 
m*eft  marqué  ,  èf  rS  tniS  vJ^oiri 
/f/^aTM  ;  c'éft  Démofthèiie.  Upcç 
t?/wp  Myeify  ad  aquam  dicere  ;  c'eft 
Lucien  qui  le  rapporte  dans  Té- 
loge  de  Détnofthène.  Tf  haé^i* 
\//>:V  fJLtriyitJt ,  c'eft  vivre  de  ce 
qu'on  retire  des  déclamations^ 
dont  le  tems  fe  limitoit  par  l'é- 
coulement de  l'eau  de  la  Clep- 
fydre ,  dit  Philoftrate. 

Les  Latins  connoiflbient  l'ufage 
de  ces  termes.  On  trouve  dans 
Cicéron  en  pluûeurs  endroits  , 
aqua  mihi  haret  f  aquam  perdcre. 
Pline  ,  déclamant  contre  la  préci- 
pitation avec  laquelle  les  juges 
de  fon  fiècle  décidoient  des  plus 
grandes  affaires  »  après  avoir  dit 
que  leurs  pères  n'en  ufoient  point 


CL 

amfi ,  ajqute  :  n  Pour  nous  %  qui 
M  nous  expliquons  plus  nettement 
I»  qui  concevons  plus  vjte,qui 
n  jugeons  plus  équitablemeht  , 
»  nous  expédions  les  affaires  en 
n  moins  d*heures  ^  pauchribus 
n  Çlepfydris ,  qu'ils  ne  mettoient 
I)  de  jours  à  les  entendre.  «  En 
effet ,  on  preffoit  ibuvent  un  ora- 
teur ,  on  ne  lui  laiffoit  pas  le  tems 
de  prononcer  un  difcours ,  qui 
ét6it  le  fruit  de  plufieuts  veilles  ; 
aCiionem  aqua  déficit  ^  à\X  Quin- 
tilien.  L.es  juges  régloiem  le  tems 
qui  devoit  être  accordé  ,  &  c'é- 
toit  Clevfydras  Clepfydris  addere. 
On  fulpendoit  l'écoulement  de 
l'eau  pendant  la  leâure  des  pie- 
ces  i  qui  ne  faifoient  pas  le  corps 
du  difcours  ^  comme  la  dépofi- 
tion  des  témoins  y  le  texte  d'une 
loi  ,  la  teneur  d'un  décret  ;  c*étoit 
là  aquam  fujlinere.  Ce  foin  de  la 
mettre  ou  de  Tarrêter  ,  étoit  d'un^ 
miniftère  fort  inférieur ,  &  les' 
perfonnes  qut  l'exerçoient ,  d'un 
caraâère  fort  méprifable.  Souvent 
emportés  par  Une  haine  particu- 
lière pour  les  orateurs ,  ils  abré- 
geoient ,  contre  toute  juftice  «  le 
tems  que  la  règle  accordoit  pour 
leurs  difcours.  C'étoit  une  préé- 
minence dans  ceux  qui  n'étoienc 
point  affujettis  à  un  efpace  de 
tems  a  contraignant  ;  la  loi  y 
étoit  févère  ,  &  les  exceptions 
rares,  L'eau  écoulée ,  il  falloit  fe 
taire  \  &^-là  elle  a  été  nom- 
mée ttV«7KM  par  Poilu  X  &  par 
Héfychius  ;  ce  qui  faifoit  dire  à 
Platon  dans  un  dialogue ,  que  les 
orateurs  étoient  efclaves  &  les 
philofophes  libres  ,  parce  que 
ceux-ci  s'étendent  dans  leurs  du-* 


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CL 

cours,  &  jouiiïent  en  pa'ix  de 
leur  loifir  ;  mais»  ceux-là  font 
contraints  par  plufieurs  endroits 
&  fur  tout  par  Teau';  qui,  en 
s'écouîant ,  les  prefle  &  les  aver- 
tit de  fe  taire. 

On  ne  prenoit  pas  fans  choix 
toutes  fortes  d'eaux  pour  la  Clep- 
fydre  ;  les  ui^s  étoient  trop  con- 
denfées  par  le  froid,  les  autres 
4rop  raréfiées  par  la  chaleur  ;  les 
unes  s*écouloient  trop  rapide- 
ment ,  les  autres  trop  lentement. 
Les  heures  étoient  donc  ou  trop 
longues  ou  trop  courtes  ;  c'eft  ce 
qui  rendoit  néceflaire  lobferva- 
tion.  Athénée  aflure  qu'on  la  fai- 
(bit.  Lorfqu*on  vouloit  que  la/ 
Clepfydre  marquât  un  long-tems, 
on  détachoit  un  peu  de  la  cire 
dont  la  capacité  intérieure  du  vafe 
étoit  revêtue  ;  fi  Ton  vouloit 
marquer  un  moindre  efpace  de 
tems,  on  y  ajoûtoît  de  la  cire. 
Enée,  qui  a  écrit  de  TArt  mili- 
taire ,  nous  affure  que  c'étoit  ainfi 
qu'on  s*y  prenoit.  Cafaubon  re- 
marque fur  cet  endroit  que  Julius 
Africanns  Ta  copié. 

Pline  attribue  à  Scipion  Nafica 
l'invention  des  Clepfy dres,  c*eft-à- 
dire ,  des  Clepfydres  romaines  ; 
car ,  Vitruve  les  fait  remonter  à 
Ctéfibius  ,  qui  fut  un  des  génies 
les  plus  inventifs  de  toute  Tanti- 
quité.  Nous  pouvons  même  affu- 
rer  que  les  Clepfydres  étoient  de 
beaucoup  antérieures  à  Ctéfibius, 
puifqu'ainfi  qu'on  la  vu  ci-defTus^ 
on  en  faifoitufage  du  tems  d'Arif- 
tophane,  qui  vécut  long-tems 
avant  Ctéfibius. 

CO  Joan.  c.  t.  v*  7.  * 


C  L  409 

Les  Clepfydres  des  Anciens 
étoient  fort  éloignées  de  la  per- 
feâion ,  où  le  P.  Charles  de 
Vailly  ,  religieux  Bénédiâin  de 
la  congrégation  de  St.  Maur ,  les 
a  portées  dans  le  dernier  fiècle. 

Le  mot  Clepfydre  vient  du  Grec  , 
jcaiVtw  >  condo,  je  cache  ,  6c  uJ  <»/>  « 
aqua,  eau. 

CLERMONT.  Foye^  Auguf- 
ta  Nemetum. 

CLÉROMANTIE  ,  C/w- 
mantia^  (ix)  forte  de  divination, 
qui  fe  faifoit  par  le  jet  des  dès  ou 
des  ofTelets  ^  doy  on  confidéroit 
les  points  ou  les  marques ,  pour 
en  inférer  des  cbofes  inconnues  ou 
cachées. 

Ce  mot  vient  du  Grec  xxiTpoç; 
fort,  &  de  (JLôLV'TtlcL ,  divination. 

On  trouve  des  traces  de  la 
Cléromantie.daiîs  le  chapitre  pre* 
mier  du  Prophète  Jonas ,  où ,  pen- 
dant la  tempête  qui  s'ét oit  élevée, 
le  pilote  du  vaifleau  &  fes  com- 
pagnons ,  penfant  que  quelque 
palTager  leur  avoir,  par  ks  crimes, 
attiré. cet  orage ,  jetterent  les  dès, 
&  confulterent  le  Sort  pour  con- 
noitre  qui  ce  pouvoit  être  ;  &  le 
fort  tomba  fur  Jonas ,  ajoute  le 
Texte  facré.  C'étoient  des  Payens 
qui  pratiquoient  cette  fuperftition;* 
mais.  Dieu  la  {^ermettoit  pour 
punir  la  défobéiffance  de  fon  pro- 
phete  ,  &  lui  faire  accomplir  fet 
defleins  for  Ninive. 

Il  y  avoir  à  Bura  ,  Ville  d'A- 
chaïe,  un  temple  6e  un  oracle 
célèbre  d'Hercule.  Ceux ,  qui  con- 
fultoientloracle,  après  avoir  fait 
leurs  prières  à  l'idole ,  jettoient 


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4t©  C  L 

quatre  dès;  &  félonies  points 
ou  nombres  qu'on  avoit  amenés, 
Je  prêtre  rendoit  fa  réponfe.  D'au- 
tres oracles  fameux  étoient  con- 
nus fous  le  nom  de  Sorts ,  tels 
Sue  ceux  de  Prénefte,  d'Antium, 
e  Lyde,  de  Délos,  &c. 

GLESO,  CUfo  ,  (a)  Kaho^«\ 
fille  de  Cléfon  ,  fils  de  Lélex.  Le 
corps  dlno  ayant  été  jette  fur  les 
c^tes.des  Mégaréens ,  Cléfo  &  fa 
fœur  Tauropolis  lui  donnèrent  la 
fépulture.  Telle  étoit  la  tradition 
de  ce  peuple ,  &  cette  tradition 
lui  étoit  particul^re. 

GLÉTABENES  ,  Cletabeni , 
XMjTfltÊMm  ,  peuple  de  l'Arabie 
beureufe ,  félon  Denys  le  Périé- 
gete.  Quelques-uns  veulent  qu'on 
Iffe  Catabenes.  J'en  ignore  la  raw 
fon ,  dit  M.  de  la  Martinière  ; 
car ,  le  grec  porte  bien  expreffé- 
ment  xAura^Myo/.  Les  Clétabenes 
étoient  près  de  la  mer  Rouge ,  & 
voifms  des  Sabéens  &  des  Min- 
néens. 

Rufus  Feftus  Aviénus  dit  dans 
fa  Defcription  de  la  Terre  : 

Rutili  conmmina  Pond 

Mînnaî  Sabathaque  tenent  ^fuper 

impiger  ampla 
Mquora  defulcat  gUba  ditis  CUta» 

benus» 

Ce  qu'il  ajoute  de  la  fertilité  de 
leur  pays  ,  n'eft  point  dans  De- 
nys le  Périégete,  qui  dit  (impie - 
ment ,  qu'à  côté  de  la  mer  Rouge 
habitoient  les  Minnéens,  les  Sa- 
béens &  les  Clétabenes,  leurs 
voifins. 


CL 

CLETE,  ou  CLITE  y  Cleta; 
Clità  ,  (b)  Kxvlra  »  Kxira ,  l'une 
des  Grâces.  Ce  nom  veut  dire 
belle.  Fbye^  Grâces. 

GLÉTORIE,C/e/mtf.  Foyei 
Clitor. 

CLÉTORIENS,  CUtorii  ^ 
KxvTOftoty  les  mêmes  que  lesCli* 
toriens.  Foye^  Gli«>riens. 

GLIB  AN  AIRES,  Clihanaru, 
les  mêmes  que  les  Qibanariens« 
Fbye{  Glibanariens. 

GLIBANARIENS,  Clibana^ 
rii ,  nom  que  les  Perfes  dondoient 
aux  cavaliers  ,  appelles  Gata- 
phraâes  chez  les  Romains.  Voye^ 
'Cataphraâes* 

Il  y  avoit  auffi  des  foldats  Ro- 
mains ,  nommés  Glibanariens ,  dît 
Saumaife  dans  fes  notes  fur  Lam- 
pride,  du  mot  Latin  CUbanum^ 
qui  fignifioit  une  cuiraffe  de  fer  » 
&  venoit  de  Clibanus  ,  c'eft-à- 
dire  ,  four-,  parce  que  ces  fortes 
de  cuirafTes  étoient  concaves  en- 
dedans  &  convexes  dans  leur 
partief  extérieure  ;  ce  qui  avoit 
quelque  analogie ,  quoique  éloi- 
gnée ,  avec  la  calotte  ou  le  deflus 
d'un  four. 

GLIDES ,  Clides .  (c)  terme 
Grec  qui  veut, dire  Clefs.  C'eft  le 
nom  de  quelques  petites  ifles  de  la 
mer  Méditerranée  auprès  de  Tifle 
de  Gypre  ,  félon  Pline  &  Ptolé- 
mée.  Le  premier  en  compte  qua- 
tre ,  6c  les  met  près  du  promon*^ 
toire  oppofé  à  la  Syrie  ,  c'eft-à- 
dire ,  près  du  promontoire  Dina- 
rete.  Strabon  n'y  en  met  que 
deux.  Hérodote  en  fait  auffi  men- 


(4)  Pauf.  p.  79. 

U)  Pâuf.  p.  196,  595, 


(O  Piîn»  T.  I.  p.  aSç.  Ptolem.  L.  V. 
c.  14.  Suab.  p.  6B2«  Herod.  L.  Y.  c.  iQa« 


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C  L 

fîom  Ce  foi^t  plutôt  des  roches  & 
des  écueils  que  des  ifles.  Il  y  en 
a  quatre.  Elles  font  aujourd'hui 
près  du  cap  de  S.  André. 

CLtDICUS,  Clldkus,  Km'/- 
<^/'tcç  V,  père  de  Qinias.  Foye^ 
Clinîas. 

CLIDICUS  ,  Clidicus  ,  (a) 
K^étJ^ixoi  ,  filfc d'iEfimidas  ,  eft 
mis  ^  par  Paufanias  ,  au  nombre 
des  Princes  qui  ont  régné  à  Athè- 
nes. 

CLIDOMANTIE  ,  Clido^ 
mantia  »  autrement  Cleidomantie. 
Voye:^  Cleidomantie. 

CLIGENE  ,  Cligenes  ,  KmT» 
7frwç  ,  (h)  natif  de  la  ville  d'A- 
canthe ,  fut  député  par  fes  con« 
citoyens  vers  les  Lacédémoniens» 
en  préfence  defquels  XénoJ>hon 
lui  fait  prononcer  un  long  dif- 
cours. 

CLIMACHIASfARTHÉ. 
NI  ON  ]  ,  Arthenio  Climackias , 
(c)  fut  nommé  grand-Prêtre  en 
Sicile  contre  toutes  les  règles  , 
fous  le  gouvernement  de  Verres. 
Cet  homme  étoit  d  ailleurs  d'une 
illuftre  naifTance,  &  avoit  de  gran* 
des  richeffes  ;  mais ,  il  ne  pouvoit 
point  alors  pofféder  cette  dignité  ; 
elle  étoit  due  à  un  certain  Héro- 
dote qui  étoit  abfent. 

CLIMAT ,  Clima  f  (d)  terme 
de  Géographie.  On  attribue  à 
Pythéas  Thortneur  d'avoir  établi  le 
premier  la  diftinftion  des  Climats, 
par  la  différente  longueur  des  jours 
6c  des  nuits. 

Les  Géographes  entendent  par 
Climat ,  une  portion  ou  zone  de 

(«)  Pauf.  p.  î  ,  5. 

(h)  Xenoph.  p.  558. 

(O  Ciccr,  in  Verr,  L,  IV.  c.  89 ,  90. 


C  L  411 

la  furface  de  la  terre,  terminée 
par  deux  cercles  parallèles  à  Té- 
quateur^  &  d'une  largeur  telle 
que  le  plus  long  jour  dans  le  pa- 
rallèle le  plus  proche  du  pôle  , 
furpaffe  d'une  certaine  quantité  « 
par  exemple ,  d'une  demi-heure  » 
le  plus  long  jour  dans  le  parallèle 
le  plus  proche  de  Téquateur. 

Les  Climats  fe  ^prennent  donc 
depuis  réquateur  jufqu'aux  pôles» 
&  font  comme  autant  de  bandes 
ou  de  zones  parallèles  à  Téqua* 
teur  ;  mais  ,  il  y  a ,  à  la  rigueur  , 
plufieurs  Climats  dans  la  largeur 
de  chaque  zone.  Un  climat  n'eft 
différent  de  telui  qui  eft  le  plus 
proche  de  lui ,  qu'en  ce  que  le 
plus  grand  jour  d'été  eff  plus  long 
ou  plus  court  d'une  demi-heure 
dans  l'un  que  dans  l'autre. 

Comme  les  Climats  commen- 
cent à  l'éqùateur ,  le  premier  Cli- 
mat dans  fon  commencement  a  ^ 
pour  cette  raifon  ,  précifément 
douze  heures  de  jour  à  fon  plus 
grand  jour  ;  6c  à  fa  fin  ^  il  a  douze 
heures  &  demie  à  fon  plus  grand 
jour. 

Le  fécond  Climat,  qui  com- 
mence où  le  premier  finit ,  a  dou- 
ze heures  &  demie  de  jour  à  fon 
plus  grand  jour  ,  &  à  fa  fin  il  a 
treize  heures  de  jour  à  fon  plus 
grand  jour  ;  &  ainfi  des  atitres 
Climats  <itheures  qui  vont  jufqu'au 
cercle  polaire  >  où  fe  termine  ce 

?ue  les  Géographes  appellent  les 
Climats  d'heures ,  &  où  commen- 
cent \les  Climats  des  mois. 
Comme  les  Climats  d'heures 

I(d)  Mém.  de  TAcad.  des  Infcript.  8c 
Bell.  Lett.  Tom.  XtX.  pag.  165, 


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411  C  L 

font  des  er{>aces  compris  entre 
deux  cercles  parallèles  à  Téqua- 
tcur ,  qui  ont  leur  plus  grand  jour 
plus  long  d'une  demi-heure  dans 
leur  fin  tpe  dans  leur  commen- 
cement ;  de  même ,  les  Climats 
de  mois  font  des  efpaces  termi- 
nés par  deux  cercles  parallèles  au 
cercle  polaire  ,  (itués  par  de-là  ce 
cercle  ,  &  dîuis  lefquels  le  plus 
grand  jour  e(ï  plus  long  d'un  mois 
ou  de  trente  jours  à  la  fin  qu*aa 
commenoement. 

Les  Anciens  ne  donnoîent  lé 
nom  de  Qimat  qu'aux  endroits 
de  la  terre  au'ils  croyoient  habi- 
tables. Ils  euimoient  qu'une  par- 
tie de  la  zone  torride  vers  Féqua- 
teur  ,  6c  une  partie  de  la  zone 
tempérée  par  de-là  le  50  degré 
de  latitude,  étoient  inhabitables; 
&  ils  n'avoient  que  fept  Climats. 
Ils  pofoient  le  commencement  du 
.  premier  à  iid  41I  de  latitude ,  où 
le  plus  long  jour  d'été  eft  de  douze 
iièores  trois  quarts,  &  la  fin  du 
/eptième  Climat  alloit  vers  le  59^ 
de  latitude ,  oii  le  plus  long  joureft 
de  16  heures  20U  Pour  mieux  dtf- 
tinguer  leurs  Climats ,  ils  en  fai- 
£>iem  pafler  le  milieu  par  les 
lieux  les  plus  confidérables  du 
vieux  continent  ;  fçavoir ,  le  pre- 
^  inicr  par  Méroé  en  Ethiopie  ,  le 
fécond  par  Syetie  en  Egypte ,  le 
trotfième  par  Alexandrie  audi  en 
Egypte  ,  le  quatrième  par  Tifle 
de  Rhodes  ,  le  cinquième  par 
Rome  y  le  fixième  par  le  Pont-v 
Euxin  ,  le  feptième  &  dernier 
par  l'embouchure  du  Boryflhène. 
A  ces  fept  Climats  on  en  ajouta 
encore  depuis  deux  autres;  fça- 
'  Toir  »  le  huitième  paflant  par  les 


CL 

tnonts  Riphées  dans  la  Sarmatid 
Afiatique ,  &  le  neuvième  par  le 
Tanaïs. 

Les  Anciens ,  comme  les  Mo- 
dernes ,  ont  encore  divifé  la  terre 
en  de  plus  petits  efpaces ,  que  l'on 
nomme  parallèles  des  Climats , 
afiii  de  les  diftinguer  des  autres 
parallèles  de  Téquateur.  Ces  pa- 
rallèles ne  font  que  des  demi 
Climats  >  defquels  l'efpace  ne 
Contient  qu'un  quart  d'heure  de 
variation  dans  les  plus  longs  jours 
d'été  die  chacun  des  parallèles* 

Les  Modernes  cjui  ont  voyagé 
bien  plus  avant  vers  les  pôles  , 
ont  mis  trente  Climats  de  chaque 
côté  ;  6c  quelques-uns  d'entr'eux 
ont  fait  les  différences  d'un  anart 
d'heure  feulement  >  au  lieu  d'une 
demi-heure. 

L'on  compte  ordinairement 
vingt- quatre  Climats  de  demi- 
heure  ,  6c  douze  de  demi-mois. 
Chacun  des  efpaces  de  ces  der- 
niers comprend  quinze  jours  de 
différence  entre  les  plus  longs 
jours  d'été  de  l'un  &  de  l'autre 
de  ces  Climats  ;  car  ,  fous  les 
cercles  polaires ,  le  plus  long  jour 
d'été  eft  de  vingt-quatre  heures 
ou  d'un  jour  aftronomique  ;  &  le 
plus  long  jour  /ous  les  pôles  con- 
tient 180  jours  agronomiques,  qui 
font  fix  mois  ;  de  forte  qu'après 
avoir  établi  la  différence  de  ces 
Climats  de  la  quantité  de  quinze 
jours  ,  il  e(l  évident  qu'il  en  fau* 
dra  douze  depuis  les  cercles  po- 
laires jufqu'aux  pôles  ;  le  premier 
defquels  commencera  aux  cercles 
polaires ,  ôc  le  dernier  finira  aux 
pôles.  Et  pour  diftinguer  l'éten- 
due de  ces  douze  Climats ,  il  faut 


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CL 

encore  imaginer  douze  cercles  pa- 
rallèles à  l'équateur  par  le  comtnen* 
ceitient  &  la  fin  de  chacun  de  ces 
intervalles  ;  le  premier  defquels 
fera  le  cercle  polaire  ,  qù  efi  lé 
commencement  du  premier  de 
ces  Climats;  &*le  derrtfer  fera 
éloigné  du  pôle  de  20<^  59I ,  qui 
déterminera  le  commencement 
du  dernier  Climat ,  dont  le  pôle 
fera  la  fin. 

Il  ne  faut  pas  croire  au  reile 
que  la  teyipérature  foit  exaâe- 
ment  la  même  dans  les  païs  fitués 
fous  le  même  Climat  ;  car  ^  une 
infinité  de  circobdances  y  comme 
les  vents  ,  les  volcans  ,  le  voifi- 
nage  de  la  mer ,  la  pofition  des 
montagnes  ,  fe  compliquent  avec 
ràâion  du  Soleil ,  &  rendent  fou- 
vent  la  température  très^différen- 
te  dans  des  lieux  placés  fpus  le 
même  parallèle^ 

Il  en  eft  de  même  des  Climats 
placés  des  deux  côtés  de  l'équa- 
teur  à  diftances  égales  ;  de  plus  , 
la  chaleur. même  du  Soleil  eft 
différente  dans  ces  Qimats.  Us 
font  plus  près  du  Soleil  que  nous 
dans  leur  été  ,  &  plus  loin  dans 
leur  hiver. 

CLIMAX  ,  Climax  ,  Km/ucc^  , 
(^)  montagne  de  TAfie  mineure , 
dont  parle  Plutarque  ,  au  fujet 
d'Alexandre.  Ce  Prince  paffa  à 
pied  le  pas  de  la  montagne  ,  ap^ 
pellée  Climax  ,  étant  parti  de  la 
ville  de  Phafélis.  Tel  eft  le  paffa- 
ge  de  Plutarque  ,  qu'il  dit  avoir 
tiré  des  lettres  d'Alexandre  même* 


CL  415 

Nous  trouvons  quelque  chofe  <k 
plus  étendu  dans  Strabon*  »  Près 
n  de  la  ville  de  Phafélis ,  dit  ce 
M  dernier,  entre  la  Lycie  &  la 
n  Pamphylie  ,  eft  un  défilé  le 
»  long  de  la  mer ,  par  oii  Alexan- 
»  dre  fit  pafTer  fon  armée.  L« 
n  mont  Climax  qui  domine  fur  la 
19  mer  de  Pamphylie,  laifle,  entre 
»  le  rivage  &  lui ,  ce  dé^  Éoct 
»  étroit ,  qui  eft  à  fec  pendant 
99  que  la  mer  eft  bafle ,  &  qui 
99  laifTe  un  pafTage  libre  aux 
99  voyageurs  ;  mais  ,  quand  la 
19  mer  âl  haute  «  il  eft  tout  cou- 
99  vert  d'eau.  Comine  on  étm 
19  alors  en  hiver ,  Alexandre  1  qid 
99  donnoit  beaucoup  à  la  fortune  » 
99  voulut  partir  avant  que  les  eaux 
99  fe  fufient  retirées  ;  ainfi  ^  il  UX^ 
99  lut  que  Tes  troupes  marchafTent 
99  tout  un  }our  dans  l'eau  jufqu'i 
99  la  ceinture,  a  Voilà  Ce  que  dit 
$trabon.  Quinte-Curce  a  fait  ua 
mélange  de  miracle  &  de  vérité  , 
pour  orner  fon  récit. 

CLIMAX,  Climax,  K^lfxal^ 
(jb)  autre  montagne ,  qui  étoit  fi- 
tuée ,  au  rapport  de  Strabon ,  dam 
la  Phénicie  entre  le  fieuve  Adonis 
&  la  ville  de  Biblos.  Cette  mon- 
tagne eft  appellée  dans  Jofephe  le 
Climax  des  Tyriens,  &  placée 
dans  le  même  Auteur  à  cent  fta- 
des  de  Tyr  vers  le  feptentrion. 

CLIMAX  ^  Climax  y  K\l,ua^^ 

(c)  autre  montagne  que  Ptolémée 
met  dans  TArabie  heureufe. 

CLIMAX,  Climax,  K^!/un^ ^ 

(d)  château  de  l'Àfie  mineure. 


(•)  Plut.  T.  I.  p.  674.  Strab.  p.  666  ,  j  Judaic.  p.  790. 
467.  Freinf.  fuppl.  in  Q.  Cure.  L.  II.  1     (c)  rtolem.  L.  VI.  c.  7. 
c.  II.  \    {d)  PtoUm.  L.  V.  C.4, 

ik)  Strab,  pag.  755.  Jofciph.  de  Bell.} 


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14  C  L 

icué  far  le  bord  de  la  mer  dans  la 
Galatie. 

CUMâX,  Climax^  KxW^  , 
(a)  chemin  d'Ârcadie-dahs  le  Pé- 
lopofmèfe ,  fitué  près  de  Manti- 
nie.  Ce  chemin  portoit  ce  nom  » 
parce  qu'autrefois  on  y  defcendoit 
par  des  marches  faites  de  main 
d'homme  ;  ce  qui  prouve  qu'il 
étoit  en  peme.  En  fuivant  ce  che- 
min 9  on  arrivoit  au  bourg  de  • 
Mélangée  ,  d'où  couloit  dans  la 
ville  de  Mantinée  une  (burce  de 
fort  bonne  eau. 

GLIMAX9  Climax  y  Khuo^  » 
terme  de  Belles  Lettres.  Il  s'em- 
ploye  dans  le  fens  de  gradation , 
comme  l'indique  l'étymologie 
même  de  ce  terme.  C'eft  une  fi- 
gure de  rhétorique ,  par  laquelle 
le  diicours  s'éieve  ou  defcend 
comme  par  degrés  ;  telle  eft  cette 
penfée  de  Cicéron  dans  Catilina  : 
Nihil  agis  ,  nihil  moliris  ,  nihil 
cogitas  9  quod  ego  non  audiam  , 
non  videam  ,  planèque  fcntiam  ; 
n  Tu  ne  fais  rien,  tu  n'entre- 
n  prends  rien ,  tu  ne  penfes  rien , 
}>  que  je  n'apprenne ,  que  je  ne 
»  voye ,  dont  je  ne  fois  parfaite- 
if  ment  infiruit.  a  Telle  eft  aufli 
cette  invitation  du  même  Cicé- 
ron à  fon  ami  Atticus  :  5/  dormis  ^ 
expcrgifcere  ;  fi  ftas  ,  ingredere  ; 
fi  ingrederis  ,  curre  ;  fi  curris , 
advola  ;  ou  ce  trait  contre  Verres  : 
C'eft  un  forfait  que  de  mettre  aux 
fers  un  citoyen  Romain  ;  un  crime 
que  de  le  faire  battre  de  verges  ; 
prefquun  parricide  que  de  le  met- 
tre à  mon  ;  que  dirai- je  de  le  faire 
crucifier  ? 


CL 

^  CLINI A ,  Clinia ,  fils  de  Mé- 
nédeme ,  e(î  un  des  perfonnaees 
de  l'Heautontimoruménos  de  Té- 
rence.  Il  aimoit  paffionnément 
Antiphile. 

CLINI  AS  ,  Clinias  ,  Kam  /oç  l 
(h)  l'un  Ses  meilleurs  amis  de  So- 
lon.  Ce  fameux  légiflateur  d'A- 
thènes le  confultoit  lui,  Conon 
&  Hipponicus  dans  toutes  fes 
affaires.  Il  leur  communiqua  fon 
deflein  touchant  les  dettes  ,  qu'il 
vouloit  abfolument  abolir.  Ses 
trois  amis  ,  plus  intéreffés  que  fi- 
dèles ,  fe  hâtèrent  de  prévenir  la 
publication  de  i'édit ,  &  emprun* 
terent  fecrétement,  des  meilleures 
bourfes ,  de  fort  grofFes  fommes 
dont  ils  achetèrent  des  héritages. 
Après  que  I'édit  fut  publié ,  com- 
me on  vit  qu'ils  retenotent  les 
héritages  fans  rendre  l'argent ,  on 
ne  manqua  pas  de  rejetter  le  tout 
fur  Solon  ,  &  de  l'accufer  ,  non 
pas  d'aeoir  été  trompé  par  fes 
amis  >  mais  d'avoir  aidé  (es  amb 
à  tromper  les  autres.  Il  eft  vrai 
que  cette  calomnie  fut  bientôt 
détruite  par  la  remife  qu'il  fit  le 
premier  de  cinq  talens  qui  lui 
étoient  dûs  ;  d'autres  ,  comme 
Polyzélus  de  Rhodes ,  en  mettent 
quinze.  Cela  n'empêcha  pour- 
tant pas  que  fes  trois  amis  ne 
fuiïent  appelles  toujours  depuis  ' 
les  Créocopides ,  c'eft- à-dire,  les 
aboliffeurs  de  dettes.  C'étoit  une 
allufion  au  mot  Cécropides  ,  qui 
étoit  le  nom  qu'on  donnoit  aux 
Athéniens  ,  comme  defcendans 
de  Cécrops. 

CLINIAS  ,  Clinias  ,  KMinctÇf 


{a)  Pauf.  p>  464* 


I'  (*)  riut.  T.  I.  pag.  86  ,  87. 


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CL 

fils  d'Alcibiade  IL  (a)  Il  renou- 
Vella  rhofpîtalité  entre  le$  Athé- 
niens &  les  Lacédémoniens.  Il 
s'acquit  beaucoup  de  réputation  à 
la  bataille  navale  d'Artémife ,  oii 
il  combattit  contre  Xeritès  fur  une 
galère  à  trois  rangs  de  rames  , 
qu'il  avoit  équipée  à  Tes  dépens. 
11  fut  tué  à  Coronée  en  Béotie , 
dans  la  bataille  que  les  Athéniens 
gagnèrent  contre  les  Béotiens  la 
feconde  année  de  la  83e  Olym- 
piade ,  447  ans  avant  J^  C.  Son 
fils  Alcibiade  III  fe  rendit  fore 
iUudre. 

CLINIAS  »  Clinîas  «  Kxf/r/«ç , 
{b)  Sicyonien.  Il  chaiïa  les  deux 
tyrans  Euthydème  &  Timoclî- 
das  y  qui  avoient  ufurpé  la  fouve- 
raineté  à  Sicyone  >  &  fut  élu  chef 
de  la  République  par  le  peuple 
qu'il  avoit  mis  en  liberté.  Après 
u  mort  y  Abancidas  s'empara  du 
gouvernement.  Clinias ,  qui  étoit 
père  du  célèbre  Aratus  ,  vivoit 
feus  la  133e  Olympiade  ,  231 
ans  avant  J.  C 

Le  récit  qu'on  vient  de  faire  eft 
tiré  de  Paufanias.  Plutarque  ra- 
conte la  chofe  différemment.  Si- 
cyone, félon  lui,  ne  fit  que  changer 
K)us  les  jours  de  tyrans  ,  jufqu'à 
ce  que  les  citoyens  eurent  élu 
pour  leurs  premiers  'magiflrats 
Clinias  &  Timoclidas  ,  les  deux 
perfonnages  qui  avoient  le  plus 
de  réputation  &  la  plus  grande 
autorité  dans  la  ville.  Déjà  ,  fous 
leur  adminiûration ,  le  gouverne- 
nient  paroiiToit  fe  rétablir  &  pren* 
dre  une  meilleure  forme ,  lorfque 


CL  41 5 

Timoclidas  vint  à  mourir.  Aban- 
tidas ,  fils  de  Paféas ,  profitant  de 
cette  occafion  pour  fe  faifir  de  la 
tyrannie ,  tua  Clinias  ^  &  de  tout 
fes  parens  ou  amis ,  il  chafTa  les 
uns,  6c  tua  les  autres.  Il  cher^ 
choit  aufli  fon  fils  Aratus  qui  n'a- 
voit  que  fept  ans  ^  pour  le  faire 
mourir.  Mais  ,  parmi  le  trouble 
&  le  défordre  dont  la  maifor  étoic 
pleine ,  quand  le  père  fut  tué  , 
cet  enfant  fe  déroba  avec  ceux 
qui  prirent  la  fuite. 

CLINIAS  ,  Clinias  ,  K^ttylaç , 
(c)  Philofophe  de  la  fede  de  Py- 
thagore  ,  &  fameux  muficien  , 
vivoit  environ  la  65e  Olympiade, 
5  20  ans  avant  J.  C.  Il  étoit  ex- 
trêmement emporté  y  &  calmoit 
les  mouvemens  de  fa  paffion  par 
le  fon  de  fa  lyre.  Il  avoit  coutume 
de  s'écrier  dans  ces  occa fions  :  je 
m*  adoucis. 

CLINIAS,  Clinias  ^KMtïlet^^ 
Auteur,  qui  n'efl  connu  que  par  ce 
qu'Agatharchides  en  a  cité  ;  &  il 
n'en  dit  autre  chofe  ,  finon  que 
ceux  qui  le  fuivent  »  prétendent 
que  Perfée  donna  le  nom  à  la 
Perfe ,  &  Éry  thra  à  la  mer  Rouge. 
Hérodote  en  a  dit  autant  de  la 
Perfe ,  &  n'efl  différent  de  Clinias, 
que  dans  quelques  circonftances* 
Oeft  que  les  Grecs  ont  voulu, 
comme  les  autres  peuples  ,  don- 
ner une  grande  idée  de  leurs  an- 
tiquités ;  mais  ,  on  ne  s'y  trompe 
pas ,  &  tout  ce  qu'ils  ont  dit  des 
grands  voyages  de  Perfée  ,  à  été 
reconnu  pour  fabuleux  par  leurs 
plus  fages  Écrivains. 


(«)  Thucyd,  p.  5|8i.  Plut.  T.I.  p,  X91. 1  loaS.  Roll.  Hift.  Anc^  Tom.  IV.  pag, 
Gom.  Nep.  in  Alcib.  c.  x.  \*77' 

ih)  Ptuf.  p,  99,  Plçt.  T.  I.  p.  io»7*  I    (O  Athcn.  p.  6»j ,  614. 


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4t6  cl 

CLINIAS  i  Clinias  ,  Kt^uvIciç^ 
interlocuteur  d*un  .dialogue  de 
Platon.  Il  s'entretient  avec  Socra» 
te  fur  la  punition  des  méchans  & 
Texidence  de  Dieu.  Ceux  ,  qui 
(broient  curieux  de  lire  ce  mor- 
ceau vraiment  intérelTant  ,  en 
trouveront  la  traduâion  à  la  fin 
de  louvrage  que  J'ai  donné  fous 
le  titre  de  Les  mœurs ,  coûturtiis  , 
6»  ufages  des  anciens  Peuples. 

CLINIAS ,  Clinias  ,  KAf/v/aç  , 

Îa)  fils  de  Clidicus.  DémoAhène 
ait  mention  de  ces  deux  perfon- 
nages  dans  une  de  Tes  harangues. 
;  CUNIAS  ,  Clinias,  (b\  Tun 
des  perfonnages  ,  que  terence 
introduit  dans  fon  Andrienne. 
C'étoit  un  des  amans  de  Chryits. 

(c)  Lucien  ,  dans  fou  dialogue 
de  Chélidonium  &  de  Dr ofe  >  in- 
troduit auffi  un  Clinias  >  qu'il  fait 
amant  de  Drofe.  Il  envoya  un 
jour  ce  billet  à  fa  maîtreife  :  »  Les 
M  dieux  me  font  témoins  ,  ma 
»  chère  Drofe  ,  que  je  t'aime  plus 
«  que  moi-même  :  mais ,  Arif- 
M  ténete ,  à  qui  mon  père  m'a 
M  donné  pour  apprendre  la  Phi- 
p  lofophie  9  me  fuit  par  tout  «  & 
n  ne  me  prêche  que  la  venu  , 
t>  pour  me  détourner  de  ma  paf- 
t>  fion.  11  promet  de  me  rendre 
»  heureux ,  £i  je  le  veux  croire  ; 
s»  mais  ,  je  ne  trouve  point  de 
i>  plus  grande  félicité  »  que  de  te 
19  poiTéder.  Vis  contente ,  &  n'ou- 
ïe blie  jamais  ton  Clinias.  « 

CLINIQUES,  Clinici^  nom 

(s)  Demofth.  Orat.  in  Eubul.  p.  888. 

(4)   Terent.  T.  I.  p.  30. 

W)  Lucian.  T.  II.  p.  75».  ér  fiq» 

(d)  RoU.  Hift.  Ane.  T.  III.  p.  4x9. 
ii)  Xcnojph.  p.  461, 


CL 

qu'on  donnoit  ancienoement  a 
ceux  qui  avoient  été  baptifés  dans 
leur  lit  &  en  maladie.  Ôes  baptê** 
mes  étoient  affez  fréquens  dans 
les  premiers  fiecles  de  TÉglife. 

CLINIUS  ,  Clinius ,  (d)  Grec 
natif  de  Tifle  de  Cos  ,  fe  mit  à  la 
tête  de  quelques  troupes  Égyp- 
tiennes pours'oppofer  aux  progrès 
que  fâiîoit  un  corps  de  Pertes  | 
commandé  par  Nicoflrate.  L'en- 
nemi avoit  déjà  pénétré  dans  le 
cœur  de  l'Egypte ,  lorfque  l'on  fe 
mit  en  devoir  dcl'en  chaûer.  Il  y 
eut  une  aâion  des  plus  chaudes, 
où  Clinius  fut  tué  avec  cinq  mille 
de  fes  gens ,  &  le  refte  fut  entiè- 
rement rompu  &  diffipé  >  vers 
l'an  351  avant  J.  C. 

CLINOMAQUE,  Clinoma- 
chus  ,  KxuvifixX'i',  \  (f)  l'un  de 
ceux  qui  furent  Ëphores  à  Lacé- 
dé  mone  ,  pendant  la  guerre  da 
Péloponnèfe.  • 

CLINOMAQUE,  Clinoma- 
chus  ,  KM/>0|UaxoÇ  ^  (/)  Athletji 
Éléen,  eut  tout  l'honneur  du  Peu- 
tathle  dans  la  dafle  des  enfans. 
On  voyoii  fa  ftatue  à  Olympie. 

CUNOPATER,  Clinopater, 
K^uvaTTarip  ,  (g)  père  d'Amipa- 
ter  le  Miléfien.  Voye^  Antipater. 

CLIO  ,  Clio  ,  Khuc^  ,  {h)  Tu- 
ne &  la  première  des  neuf  Ma- 
fes  préfidoit  à  l'hiftoire.  Son  nom 
fignifie  gloire  ,  renommée  ;  ce  qui 
marque  la  gloire  que  les  illufires 
Écrivains  procurent  aux  Héros 
dans  un  ouvrage  Hiftorique.  Oa 

(/)  Pauf.  p.  371. 

(^)  Pauf.  p.  %^6. 

(h)  Myth.  par  M.  TAbb.  Ban.  Tofll. 
IV.  p.  i»5  I  %%(i.  Andq.  éxpUq.  par  D. 
Bein.  de  Momf.  Tt  I.  p.  m  «  xi». 

la 


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C  L 

Jfl  repréfente  ordinairement  fous 
h  figure  d*une  jeune  fille  couron- 
née de  laurier ,  tenant  en  la  main 
droite  une  trompette,  &  de  la 
gauche  un  livre.  M.  Tabbé  Banier 
dit  qu'elle  tient  une  guittare  d'une 
main ,  6c  de  l'autre  un  pleâre ,  au 
lieu  d'archet  ;  elle  efl ,  à  ce  qu*oil 
croit  >  l'inventrice  de  la  guittare. 
Foyei  Mufes* 

CÙO  ,  Clio  ,  Kaç/w  ,  (tf)  nom 
/  d'une  nymphe  ,  donc  parle  Virgile 
dans  Tes  Géorgtques. 

ÇLISTHÈNE,  Cliflhcnes,{b) 
Khsio-Um  ,  fils  d'Aryftonyme ,  & 
petit-'fils  de  Myron  ,  s'empara  de 
la  tyrannie  de  Sicyone. 

Ce  Prince  avoir  une  fille ,  nooi- 
mée  Agariûe ,  qu'il  s'éioit  propo- 
(é  de  marier  au  plus  brave  de 
tous  les  Grecs.  Il  fit  donc  publier 
aux  jeux  Olympiques,  par  un  hé- 
raut, que  quiconque  (e  croirpit 
digne  d'être  le  gendre  de  Clifthè- 
ne ,  fe  rendît  à  Sicyone  dans  foi- 
xame  jours  ,  ou  même  plutôt  ;  & 
que  ce  Prince  avoit  réfolu  de  ma- 
rier (à  fille  un  an  après  les  foixan- 
te  jours  expirés.  Tous  les  Grecs , 
qui  étoient  conGdérables ,  ou  par 
eux-mêmes  ,  ou  par  leurs  ancê- 
tres ,  vinrent  à  Sicyone ,  où  Clif- 
thène  leur  avoit  fait  préparer  un 
ftade  &  une  paleftre  pour  s'y 
exercer.  Parmi  un  grand  nombre 
de  prétendans  ,  il  en  vint  deux 
d'Athènes  ,  Mégaçlés  fils  d'Alc- 
méon ,  &  Hippoclide  qui  étoit  fils 
de  Tifandre ,  &  qui  paffoit  pour . 
le  plus  riche  &  pour  le  plus  beau 

C«)  Virg.  Georg.  L.  IV.  v.  541. 

(b)  Herod.  L.  V.  c.  67 ,  68.  L.  VI.  c. 
126.  ér  fiq  Paul.  p.  55  ,  99»  ïo»  •  ^*' 
Roll.  Hiil.  Ane.  T.  II.  p.  54.  Mém.  de 

Tom.  XI. 


C  L  417 

des  Athéniens.  Étant  donc  tous 
arrivés  dans-  le  terme  prefcrit  ^ 
Clifthène  s'informa  premièrement 
de  leur  pais  6c  de  leur  naiiTan- 
ce  ;  après  quoi ,  il  les  retint  un 
an  auprès  de  lui,  pour  éprouver 
leur  courage  ,  leur  vivacité  ,  leur 
fçavoir  &  leurs  mœurs  ;  tantôt 
les  prenant  en  particulier ,  lajitôt 
les  entretenant  tous  enfemble ,  Ôc 
conduifant  même  les  plus  jeunes 
dans  les  lieux  d'exercice  ,  pour  y. 
être  témoin  de  leur  adrefle.  Mais  , 
il  les  éprouvoit  fur  tout  dans  les 
feftins  ;  car  ,  pendant  le  féjour 
qu'ils  firent  chez  lui ,  il  les  traita 
magnifiquement.  De  tous  ces  pré- 
tendans ,  les  Athéniens  étoient 
le  plus  de  fon  goût,  &  principa- 
lement Hippoclide  ,  qui  lui  paroif^ 
foit  homme  de  cœur.  Mais,  il 
manqua  ce  mariage,,  parce  que 
dans  une  danfe  il  avoit  fait  des 
gefies  &  des  poilu res  qui  déplu- 
rent infiniment  à  Ciiûhène.  Enfin, 
au  bout  de  l'année  ,  celui-ci  fe 
déclara  pour  Mégaclès,&  ren- 
voya les  autres  Seigneurs,  après 
les  avoir  comblés  d'honnêtetés  6c 
depréfens. 

Selon  Paufanias,  leshabitansde. 
Crifia  s'étant  portés  à  plufieurs  im* 

{)iétés^  contre  Apollon,  jufqu'à 
e  dépouiller  d'une  partie  de  fon 
domaine  pour  fe  l'approprier ,  les 
Amphiâyons  firent  un  décret,  par 
lequel  il  étoit  ordonné  que  l'on 
prendroit  les  armes  contre  ces 
*  facrileges.  On  donna  la  conduite 
de  cette  guerre  à  Clifihèhe,  & 

rAcad.  des  Infcript.  &  Bell.  Lett.  Tom. 
T.  p.  134,  IJ5,  T.  II.  p.  ao6.  ob*  i««v. 
T.  IX.  p.  168. 

Dd 


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4ii  CL 

l'on  fit  venir  d'Athènes  Solon  pour 
Utnr  de  confeil  à  ce  Général.  M» 
de  Valois  afliire  que  Paufanias 
s*eft  trompé  ici ,  &  que  Cliflhèné 
«e  commandoit  que  les  troupes 
Sicyoniennet ,  qu'il  avoit  amenées 
avec  lui  f  la  conduite  générale  de 
cette  guerre  ,  ayant  été  confiée  à 
£ury loque.  Mais  ,  comme»  les 
troupes  de  Clifthène  »  ajoute  M. 
de  Valois  »  étoient  compofées  de 
foldats  d'élite  ,  qu'elles  étoient  re- 
marquabtes  par  la  magnificence 
de  leurs  armes ,  &  que  d'ailleurs 
Clifthène    avoit    contribué    plus 

2i'aucon  autre  à  terminer  heureu- 
ment  cette  guerre ,  il  eft  arrivé 
de-là»  que  fpn  nom  eft  devenu  en 
quelque  forte  auffi  illuflre  que  ce- 
lui d'Euryloque  même,  tout  gé- 
néral,  tout  defcendanc  d'Her- 
cule» &  tout  héros  qu*il  étoit. 
La  raifon  en  efi  aifée  à  conce- 
voir. Suivant  le  témoignage  d'Hé- 
rodote ,  Clifthène  étoit  un  des  plus 
riches  Grecs  de  Ton  tems  ;  il  avoit 
des  manières  nobles  &  géoéreufes, 
&  en  cette  occafion ,  il  avoit  fçu 
répandre  à  pleines  mains  Por  & 
l'argent  pour  le  bien  de  la  caufe 
commune.  En  faut- il  davantage 
pour  fe  faire  un  grand  nom ,  mr 
tout  parmi  dés  troupes  ?  Et  pour 
Deu  aue  l'on  joigne  à  cette  humeur 
irieniaifante  quelque  expérience 
de  la  guerre ,  &  quelque  valeur , 
on  ne  peut  manquer  d'être  regar- 
dé comme  un  homme  adorable. 
Or ,  quant  à  l'expérience  au  fait 
de  la  guerre  »  on  ne  fçauroit  dif- 
convenir  que  CliAhène  n'en  eût 
|ine  très- grande  ^  puifqu'il  fut  des 
premiers  a  s'appercevoir  que  les 
Sf'^é^fa  poavoieat  cooicoodé- 


CL 

ment  faire  entrer  dans  leur  villd 
tous  les  vivres  &  toutes  les  pro- 
vifions  néceffaires  ,  qui  venoienc 
débarquer  dans  le  port  de  Cirrha  ; 
&  aue  par  ce  moyen,  ils  tireroienc 
le  hege  en  longueur^  &  mine- 
roient  peu  à  peu  les  ailiégeans , 
fans  courir  prefque  le  moindre 
rifque  de  leur  coté.  Afin  donc  de 
prévenir  un  pareil  inconvénient,  il 
équippa  ,  à  fes  dépens ,  une  flotte 
par  le  moyen  de  laquelle  il  vint  k 
bout  ,  avec  le  tetns ,  de  couper 
aux  Criiïéens  les  vivres  qu'on  leur 
apportoit  par  mer. 

Ce  fervice  fignalé  ne  fut  pas  le 
feul  que  Clifthène  rendit  à  la  cau- 
fe commune  ;  &  les  Amphy âions, 
pour  lui  en  marquer  leur  recon-^ 
noiflance  ,  lui  accordèrent ,  dit  le 
Schdiafte  de  Pindare,  la  fouve- 
raineté  de  Sicyone.  Mais ,  Arifto- 
te  paroit  démentir  ce  feit ,  lorf- 
qu*il  aflure  que  Clifthène  tenoic 
cette  fouveraineté  d'Orthagoras , 
.  l'un  de  fes  ancêtres.  On  peut  con- 
cilier Ariftote  avec  le  Scholiafte, 
en  difant  que  ce  dernier  s'eft  fervi 
d'une  expreifion  trop  forte  ;  qu'il 
ne  devoit  pas  dire  que  les  Am- 
phiâyons  donnèrent  à  Clifthène 
la  fouveraineté  de  Sicyone ,  puif« 
qu'il  Tavoit  déjà  ;  mais  qu'ils  le 
confirmèrent  dans  la  pofteffion  ck 
cette  petite  fouveraineté;  concef- 
fion  1  qui  lui  donna  un  droit  lé- 
gidme  fur  la  "Sicyonie  ,  que  fes 
ancêtres  À  lui  n'avoient  poflîêdée 
jttfques-là  qu'à  titre  d'ofurpation, 
&  par  le  droit  du  plus  fort. 

Quoi  qu'il  en  foit ,  Clifthène  fîit 
le  premier  qui  remporta  le  prix  de 
la  courfe  des  chars  ,  introduite  par 
ks  Amjphiâyoos  dans  le  lenou* 


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CL 

vellement  des  jeux  Pythîques,  Ce 
Prince ,  après  avoir  fait  la  guerre 
contre  les  Argiens  ,  défendit  à 
ceux  de  Sicyonede  réciter  davan- 
tage les  vers  d*Homère ,  parce 
qu'Argos  &  les  Argiens  y  étoient 
trop  hautement  célébrés.  Il  fie 
non  feulement  cette  défenfe,  mais 
il  voulut  encore  ruiner  le  fépulcre 
d*Adrafte,  fils  de  Talaiis,  qui 
étoit  dans  la  place  de  Sicyone , 
parce  qu'il  étoit  Argien.  Ceft 
pourquoi,  il  fit  un  voyage  à  Del- 
phes ,  afin  de  confulter  l'oracle  , 
pour  fçavoir  s'il  feroit  ôter  de  fa 
ville  les  os  de  ce  Prince  ;  mais  , 
la  Pythie  répondit  qu*Adrafte 
avoit  été  véritable  roi  de  Sicyone, 
&  que  quant  à  lui ,  il  en  étoit  le 
deftruâeur. 

Cependant ,  Clifthène  voyant 
que  l'oracle  ne  vouloit  pas  auto- 
rifer  ce  qu'il  avoit  envie  de  faire , 
ne  laifla  pas  à  fon  retour  de  cher- 
cher les  moyens  de  mettre  dehors 
le  corps  d'Adrafte;  &  quand  il 
crut  en  avoir  trouvé ,  il  envoya  à 
Thèbes  en  Béotie  pour  faire  fça- 
von"  aux  «habirans  qu'il  vouloit 
qu'on  lui  amenât  le  corps  de  Mé- 
lanippe ,  fils  d'Aflacus.  Quand  les 
Thébains  lui  eurent  donné  ce 
corps ,  il  le  fit  apporter  dans  la 
ville,  fit  faire  un  temple  dans  Ten- 
droit  le  miçux  fortifié  du  palais 
des  Siçyoniens  ,  &  y  fit  mettre 
Mélanippe.  Il  ne  le  traita  fi  favora- 
blement après  fa  mort,  que  parce 
qu'il  avoit  été  durant  fa  vie  grand 
ennemi  d'AdraAe.  En  effet ,  Mé- 
lanippe avoit  tué  Méciftes  ,  frère 


C  L  41^ 

d*Adrafte ,  &  Tydée  fon  gendre. 
Après  que  Cliflhène  eut  fait  bâtir 
ce  temple  ,  il  donna  à  Mélanippe 
les  fêtes  &  les  facrifices  qu'il  ôta 
à  Adrafte,  &  que  les  Siçyoniens 
avoient  accpûtumé  de  célébrer  ei;i 
fon  honneur ,  parce  que  leur  pais 
avoit  été  à  Polybe ,  &  que  Poly- 
be,  mourant  fans  enfans  mâles  , 
avoir  donné  fa  principauté  à 
Adrafte  ,  fils  de  fa  fille.  Les  Si- 
çyoniens lui  rendoient  de  grands 
honneurs,  &  entr'autres  chofes* 
ils  le  célébroient  dans  leurs  tragé- 
dies ;  de  forte  qu'ils  fembloient 
qu'ils  adoraffent  Adrafte ,  &  non 
pasBacchus.  Néanmoins,  Clifthè- 
ne, rétablit  les  danfes  en  l'honneur 
de  Bacchus ,  &  voulut  qu'on  fit 
toutes  les  autres  cérémonies  en 
l'honneur  de  Mélanippe.  Enfin , 
il  fit  toutes  ces  chofes  contre 
Adrafte. 

Au  refte,  afin  que  les  tribus 
des  Doriens  ne  fuuent  pas  fem- 
blables  à  Sicyone  &  à  Argos ,  il 
en  changea  les  noms ,  &  rendit 
tous  les  Siçyoniens  ridicules.  Car, 
il  donna  à  leurs  tribus  des  noms 
de  porcs  &  d'ânes ,  excepté  celle 
dont  il  étoit ,  à  laquelle  il  attribua 
un  nom  qui  étoit  conforme  à  fa 
dignité.  Les  Siçyoniens  gardèrent 
ces  noms  durant  tout  le  règne  de 
Clifthène  ,  6c  même  foixante  ans 
après. 

CLISTHÈNE  ,  Cli^enes  ,  (a) 
KMi<rv5Yn<; ,  Athénien,  fils  de  Mé- 
gaclès  &  d'Agarifte  ,  6l  par  con- 
îequent  petit-fils  du  , précédent , 
étoit  de  la  famille  des  Alcméoni- 


(/«)  Herod.  L.  V.  c.  66.  &  feq.  Plut.  Ilnfcrîpt.  &  Bell.  Lett.  Tom.  XII.  pag, 
Tom.  I.  p.  15;  »  319  9  488.  Roll.  Hilt.  |i49.  Tom.  XIII.  pag.  134. 
Ane.  T.  II.  p.  61,  Mécn.  dr  PAcad..  des  | 

D  d  ij 


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des.  On  lui  attribue  l'écabliflement 
de  l'Oftracifme  ,  ou  de  la  loi  par 
laquelle  911  pouvoit  condamner  un 
citoyen  au  banniflement ,  à  caufe 
de  fa  trop  grande  puiflance  »  de 
peur  qu'il  ne  fe  rendît  tyran  de  fa 
patrie.  On  lui  attribue  audi  d'avoir 
fait  chafler  d'Athènes ,  Hippias  , 
fils  de  Pififlrate.  Ayant  ainfi  aboli 
la  tyrannie ,  il  fie  de  bonnes  loix , 
&  établit  une  for^ne  de  gouverne- 
ment très-bien  compofé  ,  pour 
conferver  &  pour  faire  vivre  fes 
citoyens  en  bonne  paix  &  en  par- 
faite intelligence. 

Mais  ,  dans  la  fuite ,  il  entra  en 
difpute  pour  Tautorité  fuprême 
avec  Ifagoras  ;  &  comme  ils 
étoient  les  plus  puîdans  d'Athè- 
nes ,  ils  formèrent  deux  faâions. 
Çlifthëne ,  qui  avoit  attiré  le  peu- 
ple dans  fon  parti ,  en  changea  la 
conftitution ,  &  au  lieu  des  quatre 
tribus  ,  dont  il  avoit  été  compofé 
)ufques-]à  ,  il  en  établit  dix ,  aux- 
quelles il  donna  les  noms  des  dix 
énfans  d'Ion  ,  que  les  hiftoriens 
Grecs  donnent  pour  le  père  &  le 
premier  auteur  de  la  nation.  Ifa- 
goras 9  fe  voyant  inférieur  en  cré- 
dit à  fon  rival,  eut  recours  aux 
Lacédémoniens.  Cléomène  »  l'un 
des  deux  rois^  de  Sparte ,  obligea 
Clifthène  de  fortir  de  la  ville  avec 
fept  cens  familles  qui  étoient  atta- 
chées à  fon  parti.  Mais  ,  elles  y 
rentrèrent  bientôt  avec  leur  chef , 


CL 

&  furent  rétablies  dans  tous  leuri 
biens.  * 

CLITARQUË,  Claarchus; 
KAf/r«i>xc<%  (â)jrun  des  lieutenans 
de  Philippe ,  père  d*Alexandre  le 
Grand  y  contribua  à  réduire  les 
habitans  d*£ubée. 

CLITARQUË,  Clitatchus 
K^g/ra/îxoç  «  (J>)  auteur  Grec ,  qui 
vivoit  du  tems  d'Alexandre  le 
Grand.  Il  fut  témoin  des  conquê- 
tes de  ce  Prince ,  &  en  écrivit 
l'Hiftoire ,  comme  nous  l'appre- 
nons deQuinte-Curce.  Plucarque 
le  cite  aulfi  dans  la  vie  d'Alexan- 
dre le  Grand.  Quintilien  juge  du 
caraâère  de  cet  Auteur  en  la  ma- 
nière fuivante  :  CUtarchi  proba^^ 
tur  ingerlium ,  /ides  infirmatur. 

CUTARQUE,  Cruarchusi 
K^f/rap^^oç ,  (c)  trahit  les  Eubéens 
félon  Démoflhène ,  dans  fa  haran* 
gue  fur  la  couronne. 

CLITE ,  Clita ,  {d)  fille  de 
Mérops  «  roi  de  Rhyndaque , 
époufa  Cyzicus ,  qui  fonda  la  ville 
de  Cyzique,  Cette  Princeffe  ne 
pouvant  furvivre  à  la  perte  d'un 
époux,  qu'elle  aimoit  tendrement, 
fe  pendit  de  défefpoir. . 

CLITE  LE  ,  Cliteles  ^  {c) 
K^s/TSAMç  ,  natif  de  la  ville  de  Co- 
rinthe.  Xénophon  lui  met  dans  la 
bouche ,  un  difcours  prononcé  en 
préfence  des  Athéniens. 

CLITERNIE,C//rer/iitf,  (/) 
ville  d'Italie  dans  l'Apulie.  Il  eà 


(«)  FreJnf.  fupp.  in.  Q.  Curt.  L.  I. 

c.  5. 

(h)  Q.  Curt,  L.  X.  c.  I.  Ciccr.  Brut. 
ç.  10.  M^m.  de  TAcad.  des  Infcrîpt. 
&  fieli,  Lett.  Tom.  V.  pag.  376,  380  • 
381.  T.  XXI.  p.  4. 

(f  )  PcmoÛQ»  Omi  dç  Coron,  p;  511^ 


{d)  Mém.  de  TAcad*  des  Infcrîpt.  ft 
Bell.  Lett.  Tom.  XII.  p.  m.  T.  XIV, 
pag.  111. 

(e)  Xenoph.  p.  610. 

(/)  Cicer.  ad  Amie.  L.  IX.  Epîft.  ^%i 
Pomp,  Mel.  p,  iftS.  Plia»  X.  I.  p.  i6^,v 


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CL 

cft  parlé  dansCicéron  ,  dans  Pli- 
ne, dans  Pomponius- Mêla.  Pli- 
ne dit  :  Larinatum  Cliternla,  On 
croit  qu*il  la  furnomme  ainfî , 
parce  qu'elle  étoit  dans  le  voifma- 
g\de  Larinum.  Cliternie  étoit  fi* 
tuée  fur  le  bord  de  la  mer. 
^  C'eft  aujourd'hui  Campo  Ma- 

.  rîno ,  félon  le  père  Hardouin.  M, 
l'abbé  Languet  du  Frefnoy  Ta  cru 
de  même.  Ils  ont  été  trompés  par 
Cluvier  dans  fa  carte  du  Sam- 
nîum  ;  mais ,  Dom  Mattheo  Égî- 
tio  obferve  que  dans  les  cartes 
modernes ,  Campo  Marino  eft  du 
côté  du  fleuve  Fuento  ou  Fortore, 
&  que  dans  celle  de  Cluvier,  Cli- 
ternie eft  du  côté  de  Tifernus.  Il 
croit  donc  que  Cliternie  pourroit 
bien  être  ce  qu'on  nomme  aujour- 
d'hui Termoli. 

.  CLITERNINIENS,C//V^r/2/. 
ni  ,  (a)  peuples  d'Italie.  Ils  habi- 

.toient  une  ville,  fituée  dans  le 
païs  des  Équiculains.  Cette  ville 
eft  nommée  Cliternum  dans  Pto- 
lémée. 

CLITERNUM ,  Cliternum  , 
KxshepYov^  (b)  ville  d'Italie  au  pais 
des  Équiculains. 

CLITES ,  Clita ,  Ka«t(«;  ,  (c) 
peuple  Afiatique.  Les  Clites  habi- 
toient  cette  partie  de  l'Âfie  »  qui 
fut  foumife  à  Archélaiis,  roi  de 
Cappadoce  ;  ce  païs  étoit  fîtué 
dans  la  Cilicie ,  auprès  du  mont 
Taurus ,  à  peu  de  diftance  de  la 
mer. 

Tacite  parle  des  Clites  au  fi- 
xlàme  livre  de  fes  Annales,  n  Les 
»y  Clites,  dit' il,  fujets  d'Archélaiis, 


C  L  421 

J>  ^ne  pouvant  foufFrir  qu'on  leur  fit 
»  payer  les  tributs  conformément 
n  au  dénombrèm'ent  ufité  parmi 
n  les  Romains,  fe  retirèrent  fur  le 
n  fommet  du  mont  Taurus ,  &  là 
n  oppofoient  l'avantage  des  lieux 
n  aux  troupes  peu aguerriesde leur 
n  Roi.  Mais,  M.  Trébellius  ayant 
n  été  envoyé  contr'eux  avec  qua- 
1  tre  mille  foldats  légionnaires,  & 
i>  un  bon  corps  de  troupes  auxi- 
»  liaires,  par  Vitelliu$,gouverneur 
n  de  Syrie  invertit  les  deux  col- 
n  lines,  dont  ces  barbares  s'é- 
i>  toient  emparés, appellées l'une 
n  Cadra  j  &  l'autre  JDavara.  Ils 
n  furent  afiez  hardis  pour  faire 
»>  une  fortie  fur  lui  ;  mais  ,  il  en 
»  défit  la  plus  grande  partie  par 
n  les  armes  ,  &  contraignit  le$ 
99  autres  à  fe  rendre  faute  d'eau»  (c 
Tacite  parle  encore  ailleurs  des 
Qites.  C'eft  au  douzième  livre  du 
même  Ouvrage;  &  voici  ce  qu'il 
en  dit  :  n  Les  Clites ,  peuples  de 
»  la  Cilicie ,  groftîers  &  incapa- 
n  blés  de  demeurer  en  repos  » 
n  allèrent  s'emparer  d'une  mon- 
n  tagne  efcarpée  fous  la  conduite 
n  d'un  certain  Trofobore  ;  &  de- 
n  là  fondant  fur  les  côtes  &  les 
n  villes  du  voifinage ,  ils  pilloient 
»  les  habitans  ,  défoloient  la 
n  campagne,  &  le  plus  fouvent 
n  détrouiToient  les  négocians  &c 
n  les  pafTagers.  Ils  pouffèrent  leur 
n  audace  jufqu'à  afliéger  la  viH^ 
)9  d'Anémure ,  &  battirent  Cur- 
i>  tins  Sévérus ,  qui  étoit  venu  de 
»  Syrie  à  fon  fecours  avec  un 
n  corps  de  cavalerie ,  l'ayant  atta- 


ia)  Plin.  T.I.p.  169.  Ptolem.  L.  Ul.r     (e)  Tadt.  Annal.  L.  VI.  c.  41.  X«, 
c.  I.  IXlI.c.  55*  . 

(*)  FiQlcm.  L. III.  Cl.  1 

Dduj 


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4^2  C  L 

n  que  dans  un  terrein  Inégal  & 
99  raboteux ,  qui  donnoit  à  leur 
»>  infanterie  un  grand  avantage  fur 
91  Tes  cavaliers.  Mais,  Antiochus, 
V  î^oi  de  cette  contrée ,  ayant  eu 
n  l'adrefTe,  en  flattant  la  multi- 
91  tude  ,  de  défunir  ce^  Barba- 
99  res,  furprit  leur  chefTrofobo- 
99  re ,  &  par  fa  mort  &  celle  de 
'91  quelques  autres  des  principaux, 
91  m  rentrer  toqs  les  autres  dans  le 
n  devoir.  « 

CLITES  ,  Clh<g  ,  Kxtnat ,  (a) 
ville  de  TAfie  mineure  dans  la 
Bithynie.  Ptolémée  met  cette  ville 
loin  de  la  mer,  au  midi  oriental 
d'Amaftris. 

CLITES  ,  ClUa ,  Kxurct) ,  {b) 
lieu  de  Grèce  »  dans  la  Macédoi- 
ne ,  fitué  à  peu  de  diflance  de  la 
ville  de  CaUandrée.  Tite-Live  ,  9. 
Toccafion  du  fiege  de  cette  ville  , 
entrepris  inutilement  par  les  Ro- 
mains ,  l'an  169  avant  TÉre 
Chrétienne  >  fait  mention  de  di- 
tes. 

CUTIPHON,  Clitipho  ,  fils 
de  Chrêmes ,  eft  un  des  per- 
fonnages  de  la  comédie  de  Té- 
rence  9  intitulée  l'Heautontimoru- 
tnénos. 

CLITOMAQUE,  Clitoma^ 
chus  ,  K  f/ic^ap^cç  ,  (c)  Philofo- 
phe  ,  natif  de  Carthage ,  vivoit 
vers  le  milieu  du  fécond  (iecle 
avant  Jefus*Chrtft,  On  le  nom- 
moit  Afdrubal  »  dan^  le  langage 
de  fon  païs.  A  Tâge  de  quai'anté 
a^9  il  pafla  à  Ajthènes,  &  fut 
difciple  de  Carnéade  ,  qui  prie 

O)  Ptolem.  L.  V.  c.  i. 
(b)  Tit.Uv.  L.  XLÏV.  eu, 
(t)  Plut.  Tom.  I.  p.  861 .  a^a.  Roll. 
HiftAnc^T.  VI.  p.  45 1. 


CL 

foin  de  rinftruire  lui  -  même.  Il  j 
réuffit  fi  bien, que  Clitomaque lui 
fiiccédaj  &  expliqua  (es  fentimens 
dans  plufieurs  ouvrages.  Il  corn- 
pofa  plus  de  quatre  cens  volumes, 
qui  étoient  fort  eflimés  ,  dont  l'un 
avoit  pour  titre,  Confolation.  Il 
l'adreffa  à  fes  concitoyens  après 
la  prife  &  la  ruine  de  Carthage , 
pour  les  confoler  de  l'état  de  cap- 
tivité oîi  ils  fe  trouvoient. 

On  dit  que  ce  Philofophe  avoit 
une  parfaite  connoifTance  des  opi- 
nions de  trois  différentes  feâes  , 
des  Académiciens ,  des  Péripaté- 
ticiens  &  des  Stoïciens.  Diogène 
Laërce  a  écrit  fa  vie.  Il  eu  diffé- 
rent d'un  autre  Clitomaque  Tha- 
rien ,  difciple  d*Euclide. 

CLITON  ,  Cliton  ,  K^el-reév , 
fleuve  du  Péloponnèfe,  dans  FAr- 
cadie,  félon  Héfychius  &  Stace. 
Vûye[  Clitor. 

CLITON,  Cliton^  K^^lrc^y, 

(d)  eut  de  Leucippe ,  une  fille  qui 
fut  mariée  à  Neptune.  Ce  dieu  en 
eut  dix  enfans,  qui  peuplèrent 
rifle  Atlantique. 

CUTON,  Cliton^  Kx^/tû^f, 

(e)  flàtuaire  ,  dont  il  eft  fait  men- 
tion dans  Xénophon. 

CLITONYMÈ ,  Clitonymus, 
Hifloriographe.  Il  compofa  une 
hiflon-e  dltalie  >  &  une  autre  d!e 
Sybaris,  que  Plut^que  a  citées 
dans  fes  petits  parallèles.  Ses  tra- 
giques ne  furent  apparemment 
que  divers  petits  traités  fur  des 
(ujets  vulgaires.  Le  même  Plutar- 
que  en  cite  le  troifième  livre  ,  & 

{d)  Antîq.  expl.   par  D.    Bem.  de 
Montf.  T.  1.  p.  68. 
(«)  Xenoph.  p.  ySi. 


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C  L 

en  rapporte  desYables  affez  mal 
imaginées  touchant  Orphée, 

CllTOR  ,  Clitor  ,  KaéÎtw^  » 
(tf)'ville  du  Péloponnèfe,  dans 
TArcadie.  Elle  fut  bâtie  par  Cli- 
tor ,  fils  d'Azan ,  &  prit  le  nom  de 
fon  fondateur.  Elle  étoit  fituée  à 
environ  fbixante  (lades  de  la  four- 
ce  du  Ladon.  On  y  alloit  par  un 
chemin  fort  étroit  le  long  du  fleu- 
ve Aroanius.  Auprès  de  Clitor  , 
on  pafToit  un  autre  fleuve  de  mê- 
me nom  que  la  ville ,  &  oui  fe 
déchargeoit  dans  l'Aroanius  a  fept 
ftades  de  Clitor. 

On  voyoit  cette  ville  dans  une 
plaine ,  environnée  de  collines. 
Ses  principaux  temples  étoient 
ceux  de  Cérès ,  d'Efculape  &  d'L 
lithye.  Ceux  de  Clitor  avoient 
encore  un  temple  dédié  aux  Diof- 
cures»  qu'ils  appelaient  les  grands 
dieux;  ce  temple  étoit  à, quatre 
ftades  de  la  ville  ;  Caftor  &  Pol- 
lux  y  étoient  en  bronze.  Trente 
fiades  au  de-là  il  y  avoit  fur  le  haut 
d'une  montagne  un  temple  de 
Minerve  Coria^où  la  Déefle  avoit 
une  fiatue. 

Il  y  en  a  qui ,  au  lieu  de  Clitor, 
lîfent  Clitoria  ;  d  autres  Qétorie , 
d'autres  Clitorium. 

CLITOR  ,  Clitor  ,  Kxf/ra»/)  , 
{b)  fleuve  du  Péloponnèfe  dans 
TArcadie.  U  en  a  été  parlé  dans 
l'article  précédent. 

On  croit  que  ce  fleuve  eft  le 
même  que  le  Cliton  d'Héfychius 
&  de  Stace.  Il  efl  nommé' par 
Ovide  Cl'uorius  fons.  Ce  Poëte 

{*-)  Pauf.  pag.  4V9 ,  4<5o  .  486 .  4^7« 
Xenoph.  p.  57».  Tit.  Uv.  L.  XXXIX. 
e.  )5.  Pcolem.  L.  III.  c.  16.  Flin.  X.  I. 
p.  195,  PluCf  X,  I.  p.  40. 


C  L  415 

lui  attribue  la  vertu  de  rendre  le 
vin  défagréable  à  ceux  qui  ont  bu 
de  fes  eaux  ;  foit  ^  dit-il ,  par  une 
propriété  naturelle  ;  (oit  parce 
que  ,  félon  la  tradition  du  pa'js , 
le  fils  d'Amythaon  [  Mélampe  ] 
ayant^à  force.d'herbes  &  de  char- 
mes ,  délivré  les  filles  de  Prœtus  » 
qui  étoient  tourmentées  par  les 
Furies ,  jetta  dans  les  eaux  de  ce 
fleuve,  ce  qui  avoit  fervi  à  les  pu* 
rifier  ;  d'où  efl  refiée  à  ces  eaux  , 
t^ne  antipathie  pour  le  vin.  Niger 
croit  que  c'eft  à  préfenc  le  Gar- 
dichi. 

CLITOR,  C//W,  Kulrcsp^ 
(c)  fils  unique  d'Azan,  fuccéda  à 
fon  père ,  qui  avoit  régné  fnr  une 
partie  de  TArcadie.  Clitor  fit  fa 
réfidence  à  Lycofure  ;  ce  fut  un 
des  plus  puiflans  Rois  de  fon  tems, 
&  il  bâtit  un  ville  qui  porta  le 
nom  de  fon  fondateur.  Ce  Prince 
mourut  fans  enfans  ;  ce  qui  fut 
caufe  que  fon  royaume  pafla  ^ 
Épytus  ,  l'aîné  de  fes  neveux. 

CLITORIENS  ,  Clitoru  ; 
l  >ftTOflot  ^  habitans  de  la  ville  de 
Clitor.  Voye^  Clitor. 

CLITORIS ,  Clitoris,  étoit , 
félon  la  fable,  la  fille  d'un  Myr- 
midon.  Elle  étoic  fi  belle ,  que  Ju- 
I^iter  en  devint  amoureux ,  mais  fi 
petite ,  que  ce  Dieu  fut  o4)ligé  de 
fe  transformer  en  fourmi,  pour 
pouvoir  jouir  de  fes  amours. 

CLITORIUS  FONS.  Voye^ 
Clitor ,  fleuve  du  Péloponnèfe. 

CLITUMNE  ,  Clitumnus  , 
fleuve   d'Italie    dans    l'Ombrie. 

{h)  Ovid.  Metam.  L.  XV.  c.  7.  Mén. 

de  PAcad.  des  Infcript.  &  Mï.  UiU 
X.  V,  p.  iftS  »  ftftç. 
<c)  Pauf.  p.  459  *  4te. 

D  d  iv 


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4^4  CL 

(i{)  Il  a  fa  fource  à  trois  lieues  àe 
Spolete.  Après  avoir  mêlé  Tes  eaux 
avec  celles  du  Topine ,  il  va  fe 
Tendre  dans  le  Tibre.  Virgile  parle 
du  Clitumne  : 

-    Hinc  alhl,  Clitumne^  grèges  &  ma' 
xima  Tauriis 

FiSilma, 

Pline  le  jeune  parle  auffi  de  ce 
fleuve.  Voici  comme  il  s'eiprime. 
9>  Sur  les  bords  de  la  fource  du 
»  Cihumne ,  eft  un  ancien  tem- 
»  pie  fort  refpeâé ,  oîi  fe  voit  la 
91  flatue  du  Clitumne ,  qui ,  par 
w  le  moyen  du  fort ,  rend  des 
.  »  oratles  à  ceux  qui  viennent  le 
n  confulter.  Au  tour  du  temple 
V  font  plufieurs  chapelles,  dans 
M  Tchacune  defquelles  eft  la  repré* 
»  fentation  de  la  divinité  qui  y 
»  eft  honorée  d'un  culte  plus  par* 
n  ticulier  (ous  diâerens  titres. 

»  Dans  quelques-unes  de  ces 
»  chapelles  font  des  fources  ,  qui, 
)>  venant  à  fe  réunir  à  la  prin- 
ji  cipale  fontaine ,  forment  le  Cli- 
»  tumne,  qu'on  pafTe  fur  un  pont. 
9»  Ce  pont  fait  la  féparation  des 
n  eaux  facrées  d'avec  celles  qui 
9»  font  réputées  profanes  ,  6c  il 
9>  n'eft  pas  permis  de  fe  baigner 
»  dans  les  premières. 

n  Les  Habitans  de  Spolete , 
ft  à  qui  Augufte  a  fait  préfent 
n  de  ce  lieu-là,  ajoute  Pline,  y 
9>  exercent  Thofpitalité  envers 
»  ceux  qui  s'y  rendent  par  dé- 
w  Votion  ,  &  il  n'y  a  rien  en  cet 
I»  endroit  qui  ne  fafle  plaifir  ,  qui 


CL 

n  ne  contente  la  curîofité.  Toa- 
n  tes  les  colonnes  &  les  murail- 
V  les  des  chapelles  &  du  temple 
»  font  couvertes  d'infcriptions  à 
n  la  louange  du  fleuve  &  de  fa 
»  fource.  ce 

Ce  fleuve  étoît  en .  fi  grande 
réputation ,  que  Vibios  Séquefter 
afture  qu'on  l'adoroit  fous  le  nom 
de  Jupiter  CHtumnus.  Pline  le 
Naturalifte  nous  .  apprend  aufli 
que  les  eaux  de  ce  fleuve  avoient 
la  vertu  de  blanchir  le  poil  des 
bœufs  ,  qui  paiflbient  le  long  de 
fes  bords  ;  ce  qui  les  faifoic  paf- 
fer  pour  des  animaux  facrés  y 
qu'on  deftinoit  uniquement  à  être 
immolés  à  l'honneur  des  Dieux 
dans  les  jours  de  triomphe. 

Ce  fleuve  conferve  encore  fon 
nom  ,  puifqu'on  l'appelle  aujour- 
d'hui Clitumno. 

CLITUS  ,  ClitUS  (b)   KAf/roç  , 

Troyeh ,  fils  de  Pifénor  ,  étoit 
le  compagnon  -  de  Poly  damas  , 
dont  il  conduifoit  le  char.  Pour 
plaire  à  Heâor  &  aux  Troyens 
il  pouflbit  fes  chevaux  dans  les 
endroits  oii  la  mêlée  étoit  la  plus 
fanglante.  Il  ne  fe  trouva  point 
près  de  lui  de  main  (ecourable,  ^ 
qui  pût  détourner  le  trait  que 
Teucer  lui  tira.  La  flèche  mor- 
telle lui  perce  le  cou.  Clitus 
tombe  de  fon  fiege  fur  îe  fable , 
&  Tes  chevaux  ne  fentant  plus  la 
main  qui  les  gouvernoit ,  tour- 
nent &  emportent  fon  char. 

GLITUS  ,  Clitus  ,  (c).  ÎC  >  f /rcr, 

fils  de  Cardylis ,  qui  de  charbon- 


(4)  Virg.  Georg.  L.  II.  v.  146.  Mém.  |  ér  feq, 
èe  l'Acad.  des  Infcript.  &  Bell.  Letc  1     (O   Freinf,  fuppl,  in  Q.  Curt.  L.  I. 
T.  XII.  pag.  37.  J  c  II, 

(^)  Homer.   Iliad.  L,   XV.   v.  445*  I 


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CL 

«îer  s'étoit  rendu  roi  de  plufieurs 
nations  Iliyriennes ,  mais  qui  avoir 
été  enfuite  dfrujetti  par  Philippe, 
roi  de  Macédoine*  Clitus,  ayant 
fuccédé  à  fon  père  ,  défiroit  ar- 
demment de  recouvrer  fa  liberté. 
Il  crut  en .  trouver  une  occafion 
favorable  dans  la  guerre  qu'A- 
lexandre faifoit  au-delà  du  Da- 
nube. Il  obligea  donc  fes  peu- 
ples à  prendre  les  armes  ,  &  fit 
alliance  avec  le  roi  des  Illyriens 
furnommés  Taulentiens.  Alexan- 
dre inftruit  de  cette  nouvelle  > 
marcha  contre  ces  nouveaux  en- 
nemis ;  &  les  ayant  un  jour  fur- 
pris  défarmés  &  endormis  ,  il 
en  tua  un  grand  nombre  ,  fit  plu- 
fieurs prifonniers ,  &  mit  tous  les 
autres  en  fuite ,  qu'il  pourfuivit 
jufqu'aux  montagnes  des  Taulen- 
tiens. Clitus'  fe  fauva  de  cette  dé- 
faite  dans  la  ville  de  Pélium  ;  & 
enfuite  foit  qu'il  fe  défiât  de  la 
force  de  cette  ville  ,  ou  du  cou- 
rage de  fes  gens ,  il  y  fit  mettre 
le  feu  ,  &  s*en  alla  en  exil  dans 
le  pays  des  Taulentiens. 

CLITUS  ,  Clitus  ,  (<a)  Kaç/toc» 
fils  de  Dropis ,  fut  pourvu  par 
^Alexandre  du  gouvernement  de 
la  province  de  Maracande  ^  en 
la  place  d*Artabaze.  C'étoit  un 
vieil  officier  de  Philippe ,  &  qui 
s*étoit  fignalé  en  beaucoup  de 
rencontres.  Ce  fut  lui  qui  *  à  la 
bataille  du  Granique ,  comme 
Alexandre  combattoit  la  tête  nne 
&  que  Roface  avoit  déjà  le  bras 
levé  pour  le  frapper  par  derrière , 
couvrit  le  roi  de  fon  bouclier ,  & 


C  L  42c 

abattit  la  main  du  barbare.  Sa  , 
fœur  Hellanice  avoit  nouiri  Ale- 
xandre qui  ne  l'aimoit  pas  moins 
que  fa  propre  mère.  Comme,  pour 
toutes  ces  raifons  ,  il  confidéroit 
fort  Clitus  y  il  lui  confiât  une  des 
provinces  les  plus  importantes  de 
fon  empire ,  avec  ordre  de  partir 
dès  le  lendemain. 

Avant  fon  départ  »  il  fut  con- 
vié le  foir  à  un  feftin  ,  où  le  roi , 
après  avoir  beaucoup  bu  ,  fe  mit 
à  célébrer  (es  propres  exploits,  fans 
garder  aucune  mefure  dans  les 
louanges  qu'il  fe  donnoit  à  lui- 
même,  jufqu'à  fe  rendre  infup- 
portable  à  ceux  mêmes  qui  fça- 
voient  qu'il  difoit  la  vérixé.  Clitus, 
qui  étoit  auffi  échauffé  par  le  vin, 
fe  tournant  vers  ceux  qui  étoient 
au-defTous  de  lui  à  cable ,  leur 
rapporta  un  paflage  d'Euripide  , 
de  telle  forte  que  le  roi  pouvoir 
plutôt  ouïr  le  fon  de  fa  voix  que 
les  paroles.  Le  fens  de  ce  peflage 
étoit,  ^U€  les  Grecs  avaient  eu 
grand  tort  d* ordonner  qu  aux  inf- 
criptions  des  trophées ,  on  mettrait 
feulement  le  nom  des  rois  ;  parce 
que  c'étoit  d^ober  à  de  vaillans 
hommes  la  gloire  qu'ils  avoient 
acquife  au  prix  de  leur  fang.  Le 
roi ,  fe  doutant  bien  qu'il  lui  étoit  ' 
échappé  quelque  chofe  de  défo- 
bligeant»  demanda  à  ceux  qui 
étoient  les  plus  proches ,  ce  qu'il 
avoit  dit.  Comme  perfonne  ne 
répondoit ,  Clitus  hauffant  la  voix 
peu  à  peu  ,  fe  mit  à  raconter  les 
aâions  &  les  guerres  de  Philippe 
dans  la  Grèce ,  les  préférant  à  rôut 


{a)  Plttt.  Tom.   I.   pag.  67},  693  ,  j  îo  Q.  Cort.  L.  II.  c.  5,  7.  Roll.  Hift. 
«94.  Jufl    L.  xn.  c.  6.  Q  Curt.  L.  IV.  I  Ane.  Tom.  III.  575  ,  714.  à' Juiv, 
c,  1%.  L.  VUI.  c.  1 ,  2  >  8.  Freiof.  fuppl.  | 


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i26  CL 

ce  qui  (è  faifoit  alors  ;  ce  qui  ex^^ 
cita  ufi^  grande  difpute  encre  les 
jeunes  &  les  vieux.  Quelque  pei- 
ne que  le  roi  fentît  intérieurement, 
il  diffimula  d'abord ,  en  fe  faifant 
violence  ^  ôc  parut  écouter  pa- 
tiemment tout  ce  que  difoit  Clitus 
i  Ton  défavantage.  Il  fembloit  mê- 
me qu'il  aurott  encore  retenu  Ton 
emportement ,  fi  Clitus  en  fût  de- 
sneuré-là.  Maisj  celui-ci ,  pouf- 
iânt  toujours  Tinfolence  plus  loin, 
comme  s'il  eût  pris  è  tâche  d'irriter 
le  roi  &  de  lui  infulter ,  en  vint 
iafqu'à  prendre  ouvertement  la 
détenfe  de  Parménton  s  &  iufqu'à 
foûtenir  que  la  ruine  de  Thëbes 
n'étoit  rien  en  comparaifon  de  la 
viâoire  de  Philippe  fur  les  Athé^ 
nien$3&que  les  vieux  Capitaines 
Macédoniens ,  quoiqu'ils  euflfent 
été  quelquefois  malheureux ,  va- 
loient  beaucoup  mieux  que  ceux 
qui  avoient  la  témérité  de  les  dé- 
crier. 

Alexandre  lui  ayant  dit  fur  cela 
qu'il  plaidoit  fa  propre  caufe  ,  en 
appellant  la  lâcheté  un  malheur, 
Clitus  fe  levé ,  &  \ei  yeux  bouffis 
de  vin  ôc  de!  colère  ;  i>  c'e^l  pour- 
n  tant  cette  main,lui  dit-il  en  éten- 
I»  dant  le  bras ,  qui  vous  fauva  la 
19  vie  à  la  bataille  du  Granique. 
»  C'eft  par  le  fang  &  les  bleiTures 
n  de  ces  Macédoniens  taxés  de  lâ- 
M  cheté  ,  que  vous  ères  devenu 
9>  n  grand.  Mais  ,  la  fia  tragique 
f>  de  Parménion  nous  apprend 
n  quelle  récompenfe  eux  Se  moi 
I»  nous  devons  attendre  de  nos 
»  fer  vices.  »  Ce  dernier  reproche 
piqua  jufqu'au  vif  Alexandre  ;  il 
fe  retint  pourtant  encore  ,  &  fe 
contenta  d'ordonner  à  Clitus  de 


CL 

fortir  de  fa  table.  »  Il  a  raifon,  dit 
»  Clitus  en  fe  levant ,  de  ne  voa- 
n  loir  point  fouffrir  à  fa  table  des 
n  *hommes libres,  qui  ne  fçavent 
M  dire  que  la  vérité»^  Il  fera  bien 
»  depaUer  fa  vie  avec  des  barba- 
n  res  &  des  efdaves  ,  qui  adore- 
n  ront  volontiers  fa  ceinture  Fer- 
n  fienne  &  fa  robe  blanche.  »  Le 
roi  ne  fut  plus  maître  de  fa  colère, 
&  s*étant  jette  fur  la  javeline  de 
l'un  de  fes  gardes ,  il  en  auroit  per- 
cé fur  le  champ  Clitus  ,  û  d'un 
cété  les  courtifans  ne  l'av oient  re- 
tenu ,  &  fi  de  l'autre  les  amis  de 
Clitus  ne  l'avoient  repoufTé  avec 
grande  peine  hors  de  la  falle.  Msûs 
il  y  rentra  incontinent  par  une  au- 
tre porte  f  en  chantant  avec  info- 
lence  des  vers  injurieux  au  Prince, 

Îui,  le  voyant  près  de  lui,  le  perça 
e  fa  javeline ,  &  le  renverfa  mort 
par  terre  ,  en  lui  difant  ces  paro- 
les :  Fû't  -  en  maintenant  trouver 
Philippe  ,  Parménion  &  Attide. 
La  colère  du  Roi  étant  conome 
éteinte  tout-à-coup  dans  le  fang 
de  Clitus ,  fon  crime  alors  fe  mon- 
tra à  lui  avec  toute  fon  énormité 
6c  fa  noirceur.  Il  avoir  eue  un 
homme,qui  à  la  vérité ^voît  abufé 
de  fa  patience ,  mais  qui  jufques- 
là  avoit  été  un  fidèle  ferviteur ,  & 
qui ,  quoique  ce  prince  eût  home 
de  l'avouer^  lui  avoit  fauve  la  vie* 
Il  venoit  de  faire  l'office  abomi- 
nable de  bourreau ,  en  puniffant 
par  un  meurtre  horrible  des  paro- 
les indifcretes ,  qui  pouvoient  être 
imputées  a^  vin.  Cocnment  ofer 
paroître  devant  la  fœur  de  Clitus 
fa  nourrice  ,  6c  lui  préfenter  une 
main  fouillée  du  fang  de  fon  frère? 
ne  pouvant  foûtenir  ces  triftes  ré*. 


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CL 

flexions ,  il  fe  jette  fur  le  corps 
de  ion  ami ,  en  arrache  la  javeline» 
&  s*en  feroit  percé  lui-même  ,  fi 
les  gardes  étant  promptement  ac- 
courus^ ne  lui  euilent  faifi  les 
mains,  &  ne  l'euffent  emporté  par 
force  dans  fa  chambre. 

CLITUS ,  Clitus,  Km/tcç  ,  {a) 
furnommé  le  Noir ,  fût  aofli  un 
des  principaux  officiers  d'Alexan- 
dre. Il  commandoic  un  corps  de 
cavalerie  à  la  bataille  d'Arbèle. 

CLITUS,  Clitus^  Kas/toç  {b) 
officier  qui  commandoic  la  flotte 
Macédonienne,  compofée  de  deux 
cens  quarante  vaifTeaux ,  l'an  323 
avant  J.  C.  Ayaht  attaqué  deux 
fois  Éétion  ,  général  de  la  flotte 
Athénienne  ,  il  demeura  deux  fois 
vainqueur ,  &  coula  deux  fois  à 
fond  un  grand  nombre  de  vaif- 
feaux  ennemis  à  la  vue  deç  ifles 
Échinades. 

Clitus  fut  fait  gouverneur  de  la 
Lydie  Tannée  fui  vante.  Peu  de 
temps  après  ,  Antigonus  vint  à  la 
tête  d'une  armée  pour  le  chafTer 
de  fon  gouvernement.  Clitus ,  inf- 
truit  de  fa  marche  ,  jetta  des  gar- 
nifons  dans  toutes  fes  places ,  & 
pafTa  lui-même  dans  la  Macédoine 
pour  inflruire  Polyfperchon  de  la 
révolte  &  des  entreprifes  d'Anti- 
eonus ,  &  pour  lui  demander  du 
i^cours  contre  cet  ufurpateur.  Il 
obtint  une  flotte  nombreufè ,  qu'il 
conduifit  dans  THellcfpont.  Déjà 
il  avoit  gagné  à  fon  parti  les  villes 
des  environs  de  la  Propontide , 
&  avoit  même  joint  fes  troupes 
ii  celles  d*Arridée  ,  lorfqae  Nica* 


CL  427 

nor  \  commandant  de  la  garnifon 
de  Munychie ,  envoyé  par  CaP 
fandre  avec  toute  fa  flotte ,  parut 
à  la  même  hauteur.  Il  avoit  même 
reçu  de  la  part  d* Antigonus  ,  des 
vaifTeaux  qui  faifoient  monter  cet- 
te armée  navale  au  nombre  de 
plus  de  cent  voiles.  Ainfi ,  le  com- 
bat s'étant  donné  à  la  vue  de  By- 
zance  ,  Clitus  vainqueur  fit  couler 
à  fond  dix-  fept  vaiffeaux  des  en- 
nemis, &  n*eh  prit  pas  moins  de 
quarante  avec  tous  les  hommes 
qui  les  montoient  ;  tout  le  refle  fe 
fauva  dans  le  port  de  Chalcé- 
doine. 

Un  avantage  fi  confi^érable  fit 
croire  à  Clitus  que  les  ennemis  , 
ruinés  par  cette  défaite ,  n'ofe- 
feroient  plus  fe  montrer  fur  mer. 
Mais  ,  Antigonus  fécond  en  ref- 
fources  ,  6c  qui  fçavoit  parfaite- 
ment la  guerre ,  trouva  moyen  de 
réparer  bientôt  ce  dommage.  Car 
ayant  emprunté  des  Byzantins 
des  barques  de  tranfport ,  il  le^ 
fit  charger  pendant  la  nuit  d'ar- 
chers ,  de  frondeurs  ôc  autres 
armés  à  la  légère,  ^  &  les  6t 
arriver  au  point  du  jour  au 
débarquement  des  vainqueurs  qui 
croyoient  prendre  terre  tranquille- 
ment fur  le  bord  oppofé.  Cet  ob»- 
jet  les  mit  dans  un  trouble  prodîs- 
gieux;  car,  voulant  revenir  dans 
leurs  vaifTeaux  ,  fans  oublier  leurs 
dépouilles  déjà  mifes  à  terre ,  8c 
leurs  prifonniers  déjà  embarqués , 
ils  fë  jetterent  eux- mêmes  dans  un 
embarras  dont  ils  n'eurent  pas  le 
tems  de  fortir.  Antigonus  s'étoi( 


(«)   Diod.  SIcul.  pag.  59t. 

(y  Plut.  T»m.  I.  pag,  757.   Diod.1 


iSicul.  pap.  6^6  ,  649  ,  6^5  ,  66^  ,  66/L 


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4^8  CL 

p jurva  de  vaifTeaux  longs ,  char- 
gés de  fa  meilleure  infanterie  > 
qu'il  fe  difpofoit  à  faire  tomber 
fur  fes  ennemis  dans  une  circonf- 
tance  qui  lui  affuroit  la  viâoire. 
Comme  Nicanorétoit  arrivé  cette 
nuit  là  même ,  les  deux  flottes  réu- 
nies attaquant  leurs  adverfaires  en 
défordre,  les  renverferent  du  pre- 
mier choc.  Quelques-uns  de  leurs 
vaifleaux  étoient  brifés  d'un  feul 
coup  d'éperon;  on  enlevoit  à 
d'autres  tout  un  rang  de  rames , 
en  paffant  à  côté  d'eux  ,  d'autres 
enfin  venoient  fe  rendre  d'eux- 
mêmes  pour  prévenir  un  mal- 
heur certain.  En  un  mot ,  à  l'ex- 
ception du  vaifTeau  du  comman- 
dant ,  toute  la  flotte  ennemie  paffa 
en  leur  pouvoir.  Clitus  feul  aban- 
donnant fon  vaifTeau  fe  jetta  à  ter- 
re ,  dans  l'efpérance  de  fe  fauver 
en  Macédoine  ;  mais  il  tomba  en* 
tre  les  mains  de  quelques  foldats 
de  Ly fimachus ,  qui  regorgèrent , 
vers  l'an  318  avant  J,  C. 

Ce  Clitus  «eft ,  fans  doute ,  le 
même  qui ,  au  rapport  de  Piutar- 
que,  fut  chargé  de  conduire  de 
la  cour  de  Macédoine  à  Athènes 
Phbcion  &  fes  amis,  en  appa- 
rence pour  y  être  jugés  ,  mais  en 
effet  pour  y  être  mis  à  mort,  com- 
me déjà  jugés  &  condamnés. 

GLITU5  ,  Clitus  ,  KmItoç  , 
difciple  d* Ariftote,  étoit  de  Milet^ 
Il  avoit  écrit  une  hiftoire  de  fa  pa- 
trie. Il  vivoit  environ  316  ans 
avant  J.  C. 

CLITUS ,  Clitus ,  K^^lroç ,  (a) 
jeune  homme  hardi  &  téméraire. 

(*)  Jofeph.  de  Bell.  Judaïc.  pag.  8a8. 
de  Vit.  Sua.  p.  ion  ,  loia. 

{k)  Tic.  Uv,  L,  ni.   c.  48.  Amiq. 


CL  ; 

Il  fuc  anteur  d'une  (édition  exchte 
à  Tibériade ,  du  tems  de  la  gaerre 
que  Tite  &  Vefpafien  firent  aux 
Juifs.  Jofephe,  voulant  le  punir, 
ordonna  à  un  de  fes  gardes  de  lui 
couper  les  mains  ;&  ce  garde  n'a- 
yant ofé  le  faire,  Jofephe  fe  mit  ea 
état  de  le  punir  lui-même.  Clitus  , 
voyant  qu'il  ne  pouvoit  éviter  la 
punition ,  le  pria  de  lui  laifler  du 
moins  une  main;  Jofephe  le  lui  ac- 
corda ,  pourvu  que  lui-même  s'en 
coupât  une.  AuHi-tôt  ce  féditieux 
tira  fon  épée.,  &fe  coupa  la  main 
gauche. 

CLOACINE,  ou  Cluacine, 
Cloacina  ,  Cludcina  ,  (b)  fumom 
de  Vénus.  Vénus  Cloacine  avoit 
à  Rome  un  temple ,  qu'on  croit 
avoir  été  fur  la  voie  facrée.  Cer- 
tains prétendent  que  cette  Dcefie 
fe  trouvoit  en  deux  différens  en- 
droits de  la  ville. 

Pline  fait  venir  le  nom  de  Cloa- 
cine de  cludere  ,  qui  ancienne- 
ment vouloit  dire  la  même  chofe 
qae purgarCf  purifier;  parce  que 
les  Romains  &  les  Sabins  étant 
fur  le  point  d'en  venir  aux  mains, 
à  caufe  de  l'enlèvement  des  filles 
de  ces  derniers,  fe  purifièrent  en 
ce  lieu;  &  de  là  vient  ,  dit- il, 
que  la  Vénus  qui  y  fut  mife  ,  fut 
appellée  Cloacine.  La6èance  don- 
ne à  ce  nom  une  autre  origine  ; 
c'eft  ,  dit-il ,  qu'on  trouva  à  Ro- 
me ,  du  tems  de  Tatius ,  dans  la 
grande  cloaque  ,  une  ûatue  qui 
fut  confacrée  par  ce  Prince  ,  & 
appellée  Cloacine  du  lieu  où  elle 
avoit  été  trouvée ,  ne  prenant  pas 

expl.  par  D.  Bern.  de  Montf.  Tom.  II. 
P^*  9)  »  94*  Myth.  par  M.  PAbb.  Ban. 
Tom.  I.  p.  548*  T»V.  pag.  3»9  ,  jj^ 


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CL 

garde  que  du  tems  de  TatSus ,  11 
n*y  avoit  point  de  grande  cloa- 
que. Il  feroit  peu  in) portant  d'exa* 
miner  à  laquelle  des  deux  étymo- 
logies  pn  doit  donner  la  préféren* 
ce. 

Quoiqu'on  n*ait  point  encore 
vu  de  veftige  d'aucun  temple  de 
Vénus  Cloacine  ,  D..  Bernard  de 
Montfaucon  hazarde  une  conjec- 
ture là'deflus.  n  Le  temple  de 
ti  Vénus  Cloacine ,  ou  Cluacine  » 
»  dit-il ,  jpourroit  bien  être  re- 
n  préfenté  dans  la  cinauième  ta- 
it bie  des  fragmens  du  plan  de 
i>  l'ancienne  Rome ,  fait  du  tems 
n  de  l'empereur  Septime  Sévère , 
n  &  donné  avec  des  explications 
n  par  le  Bellori.  Cet  habile  An- 
n  tiquaire  a  cru  que  cette  Infcrip- 
n  tion  du  premier  fragment  de 
«I  la  cinquième  table 

llTACH    ' 
A 

fi  devoît  fe  lire  aînfi  ,  LAVA- 
ff  CHR»  A.  Lavacrum  j4grippi^ 
a»  rue  ;  ne  prenant  pas  garde  que 
n  la  jambe  de  la  première  lettre 
n  impàr£iite  qui  refie  ,  &  qui 
»  devroit  être  un  A ,. félon  fa  le- 
i>  çon  y  ne  peut  jamais  Têtre  ; 
n  parce  qu'elle  eft  tout -à -.fait 
»  perpendiculaire  ;  qu'il  n'y  a 
n  point  d'H  à  iavacrum ,  &  que 
p  la  lettre  R  qu'il  a  ajoutée ,  ne 
»  paroît  point  fur  la  pierre  ;  j*y 
f>  lirois  plutôt  Cluacina.  Comme 
fi  •  la  première  lettre  qui  refte  eft 
M  tronquée ,  celle  de  devant ,  qui 
M  devoit  être  un  C  ,  peut  avoir 
»  fauté.  La  première  ,  qui  refte 
19  mutilée  par  le  haut ,  fera  faci- 
le lement  une  L,  Toutes  les  let- 


C  L  419 

9}  très  fuivantes  conviennent  y  en 
M  fuppofant  que  l'H  a  été  mis 
t>  pour  un  N  ;  changement  (i 
n  conmiun  &  fi  aifé  à  faire ,  qu'on 
n  en  voit  fouvent  de  femblables. 
M  Peut-être  trouveroit-on  encore 
19  un  N  fur  la  pierre.  Ceux  qui 
»  font  accoutumés  à  lire  les  an-, 
9»  ciens  marbres  &  les  médailles , 
91  fçavent  qu'il  n'efl  rien  de  fi 
99  commun  que  de  voir  la  jambe^ 
99  d'une  lettre  (ervir  pour  la  pré- 
19  cédante  ;  comme  feroic ,  par 
99  exemple  ,  ici  ,  de  prendre  la 
99  première  jambe  de  la  lettre  N 
99  pour  un  1 ,  6c  de  lire  CLVA- 
99  ClNAoùilya  CLVACNA. 
»  Il  me  paroît  qu'il  n'y  a  rien 
99  de  forcé  dans  la  manière  dont 
99  nous  lifons  ce  mot  ;  duquel  on 
99  aura  bien  dé  la  peine  à  tirer 
99  quelque  chofe ,  £  on  le  veut 
9}  lire  autrement.  Ce  qui  appuie 
99  encore  cette  conjeaure  ,  eft 
•9  que  ce  petit  temple  rond  avoit 
99  quatre  efcaliers  marqués  fur 
99  la  pierre  pour  y  monter  par 
99  quatre  côtés  différens  ^  &  un 
99  autel  au  milieu  ,  comme  au 
99  temple  de  Vénus  Salluflia ,  qui 
99  avoit  quatre  entrées  comme 
99  celui-ci.  Quelque  apparence 
•9  que  je  trouve  à  ma  conjeâure  ^ 
99  je  l'abandonne  pourtant  au  ju-* 
99  gement  des  habiles  gens. 

9>  Dans  les  médailles  de  la  fa- 
99  roi)le  Muilidia  ,  on  voit  uae 
99  efpece  de  barrière  &  de  treil- 
99  lis ,  avec  une  grande  porte  pou^ 
99  entrer  dans  ce  lieu ,  6c  deux 
99  .hommes  qui  (ont  dedans  ;  au- 
19  defFous  des  treillis  efl  écrit  ce 
99  mot  ,  Cloacina.  M.  Vaillant 
Il  ddns  fes  médailles  confulaices» 


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45P  C I^ 

»  croît  que  cela  marque  le  lîeu  ; 
n  oii  Te  tenoient  anciennement 
n  les  Comices, en  latin  Comitia.it 

Laâance  ,  S.  Cyprien  &  S. 
Auguftin  font  mention  de  Vénus 
Cloacine ,  au  fujet  de  laquelle ,  ils 
n'ont  pas  manqué ,  dit  M.  Tabbé 
Banier  ,  d'infulter  les  Romains. 

CLO  ANTHE ,  Cloanthus^  {a) 
l'un  des  compagnons  d'Énée^  & 
du  nombre  de  ceux  qui  furent  ré- 
parés de  la  âotte  par  la  tempête 
qu'Éole  avoit  excitée  à  la  folîici- 
tation  de  Junon»  Énée ,  qui  ne 
s'attendoit  plus  à  le  revoir ,  le 
regrettoit  beaucoup.  Mais, Cloan- 
the  eut  le  bonheur  de  fe  fauver  ^ 
6c  vint  rejoindre  Énée  à  Cartha- 

Dans  ce  combat  de  vaifleaux 
que  le  prince  Troyen  donna  à 
Drépane  pour  honorer  l'anniver- 
fatre  de  la  mort  de  fon  père  An- 
chife  f  Cioanthe  fe  didingua  en- 
tre lousjes  autres.  Déjà  il  n'a  voit 
plus  de  rival  que  Mnefthée ,  peut- 
être. que  les  galères  de  ces  deux 
rivaux  feroient  arrivées  enfemble 
au  port 9  fi  Cioanthe,  étendant 
les  bras ,  n'eût  adrefle  cette  prière 
aux  dieux  de  la  mer.  >•  Divinités  , 
»  qui  régnez  fur  cet  Empire,  & 
».  à  qui  appartient  ce  champ  de 
tr* bataille  ,  je  fais  vœu  de  vous 
M  immoler'rur  le  rivage,  au  pied 
9>  de  vos  autels,  un  taureau  blanc, 
i>  dont  je  jetterai  les  entrailles 
}>  dans  les  flots ,  avec  une  liba- 
i>  tion  de  viti.  u  Les  Néréides , 
toute  la  trou[>e  de  Phorcus  ,  &  la 
nymphe  Panopée  entendirent  fa 


CL 

voix  au  fond  des  eaux.  Palémoif 
lui-même  ,  lui  prêtant  fon  bras 
puifTant ,  poufle  le  navire  ,  qui 
plus  rapide  que  le  vent  >  on  qu'u- 
ne flèche  légère  ,  vole  vers  le  ri- 
vage ,  6c  entre  enfin  triomphant 
dans  le  port.  Cioanthe  fut  donc 
proclamé  vainqueur  |  6c  Énée  lui 
mit  lui-même  lur  la  tête  une  cou* 
ronne  de  laurier. 

Le  prix  de  fa  viâoire  fut  une 
cocte  d'arn(es  tiflue  d'or ,  bordée 
de  bandes  de  pourpre.  L'hiftoîre 
de  Ganymede  y  éioit  repréfentée 
en  broderie.  On  y  voyoit  ce  jeu- 
ne Prince  ,  chafTant  dans  la  forêt 
du  mont  Ida  ,  courant  à  perte 
d'haleine ,  6c  pourfuivant  avec  ar. 
deur  une  troupe  de  cerfs  ,  qu'il 
perçoit  de  Tes  âeches.  L'aigle  de 
Jupiter  fondoit  tout  à  coup  fur 
lui ,  6c  Tenlevoit  entre  Tes  (erres* 
Ses  vieux  gouverneurs  tendoienc 
vainement  \ti  bras  vers  le  ciel, 
6c  les  aboyé  mens  de  fes  chiens 
furieux  le  perdoient  dans  les  airs. 

CLOAQUE.  \h)  Ceftun 
aqueduc  fouterrein  ,  qui  reçoit  les 
eaux  6c  les  ordures  d'une  grande 
ville.  Ce  mot  Cloaque  n'eft  plus 
en  ufage  aujourd'hui  que  pour  les 
ouvrages  des  Anciens.  En  parlant 
des  ouvrages  modernes,  on  die 
ordinairement  égoût.  Le  mot  La- 
tin efl  Cldaca  ;  mot  que  quelques 
Étymologifles  dérivent  de  cluo^ 
falir  ,  inl^âer  par  fa  mauvaife 
odeur. 

Le  Cloaque  ed  aflez  exaâe- 
menc  défini  par  le  célèbre  jurif- 
confulte  Ulpien ,  un  lieu  fouterr. 


(<i)  Vîrg.  iEheîd.  L.  i.  v.  fta6  ,  514,  1    (h)  Antiq.   expl.    par    D.   Bcm.   et 
616 ,  L.  IV.  v«  aSâ.  L.  y«  V»  tta,  &fii.  IMomf.  Tom.  IV.  pag»  toit 


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CL 

rtin  fait  par  art  pour  écouler  les 
eaux  &  les  immondices  d'une  ville* 

Deays  d'Halicaroafle  nous  ap- 
prend que  le  roî  Tarquîn  le  yieux 
eft  le  premier  qui  commen^k  de 
faire  des  canaux  fous  la  ville  de 
Rome ,  pour  en  conduire  les 
immondices  dans  le  Tibre»  Les 
canaux  de  cette  efpèce  augmen- 
tèrent infenfiblement/l'e  multipliè- 
rent à  mefure  que  la  ville  s'ag- 
grandit,&  furent  enfin  portés  à  leur 
perfeâion  fous  les  Empereurs. 

Caffiodore ,  qui  vivoit  en  470 , 
qui  éroit  préfet  du  prétoire  fous 
Xhéodoric  roi  des  Goths ,  &  bon 
connoifleur  en  architeâure,  avoue 
dans  le  recueil  de  fes   lettres  , 

Ïi*on  ne  pouvoit  confidérer  les 
loaqoes  de  Rome  fans  en  être 
émerveillé. 

Le  foin  &  rin^âion  de  ces 
lieux  appartinrent ,  jufqu*au  tems 
d'Augufle  9  aux  Édiles ,  qui  nom- 
itioîent  à  cet  effet  des  officiers,  fous 
le  titre  de  Curatores  Cloacarum. 

Il  y  avoit  une  divinité  qui  pré- 
fîdoic  aux  Cloaques.  C'étoit  Cloa- 
cîfie.  Foyez  fon  article  ci-defTus. 
CLOCHER,  Claudicare.  {a) 
Cette  expreflion  eft  affez  fréquen- 
te dans  l'Écriture.  Jufqu'à  quand 
Clochere\-voUs  des  deux  côtés  ? 
dit  Élie  aux  enfans  d'IfraëU  Ce 
prophète  leur  reproche  par- là  de 
fie  point  adorer  le  vrai  Dieu  d*une 
manière  pure  ôc  fincère  y  &  de 
vouloir  allier  fon  culte  avec  celui 
des  idoles.  Dieu  dit ,  dans  le  pro- 
phète Michée  >  qu'il  rafletriblera 
jçelk  qui  Clochoit  &  quil  avoit 


C  L  431 

rejettée  ;  c*eft- à-dire  ,  qu'il  re- 
prendra cette  époufe  incommo- 
dée ,  difforme  &  répudiée  ,  & 
qu*il  lui  donnera  une  nombreufe 
podérité.  Cette  époufe  ce  font 
les  Juifs  difperfés  &  comme  aban- 
donnés de  Dieu. 

CLOCHER ,  terme  de  poëfie 
latine ,  pour  dire  manquer  de  cé- 
fure  dans  certains  endroits  effen- 
tiels.  On  dit  qu'un  vers  Cloche  ^ 
quand  il  n'a  point  de  céfure  au 
fécond  ou  au  troifîème  pied ,  ou 
à  tous  les  deux  enfemble. 

CLODIA  [  la  voie  ].  Voyei^ 
Claudia. 

CLODIA  [  la  Famille]  ,  Clo- 
dia  Gens,  Cette  £imille  a  produit 
des  perfonnages  célèbres. 

CLODIA  ,  Clodia  ,  K^^.//« , 
(h)  femme  de  Q.  Métellus  Celer* 
Elle  étoit  en  même  tems  fa  cou- 
fine  germaine j  car,  Appius  Çlau- 
dios  Pulcher ,  de  qui  elle  étoit 
fille  ,  Se  par  conféquent  fceur  de 
P.  Clodius  l'ennemi  mortel  de  Ci- 
céron  ,  avoit  époufe  une  CécîUa 
fœur  du  père  de  Q.  Métellus  Ce- 
ler. Il  paroît  par  une  lettre  de 
Gcérôn  ,  qu'il  entretint  d'abord 
quelque  commerce  avec  cette 
Clodia  ;  &  ce  commerce  ne  plai- 
foit  pas  à  fa  femme  Térentia  , 
parce  que  Clodia  avoit  voulu  Té- 
poufer  ;  &  como()e  le  divorce  ren- 
doit  en  ce  tems-là  tout  mariage 
poffible  ,  Térentia  ,  qui  étoit  fort 
Jaloufe,  &  que  fon  mari  crai- 
gnoit  beaucoup  ,  n'eut  point  de 
repos  qu'elle  ne  les  eût  brouillés. 

Clodia  avoit  deux  fœurs  ;  & 


'(*)  Rcg.  L.  m,  ç,  18*  T,  ai,  Mich.|     (h)  Cicer.  Epîft.  ad  Q.  Metell.  Celer, 
f  t  ^t  ¥.  é.  I  Plut,  X.  I,  p.  875. 


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43^  C  L 

quoique  celles-ci  fuflent  auflî  fort 
difFamées  ,  Clodia  Tétoit  beau- 
coup plus  qu'elles  fans  comparai- 
fon.  Car  ,  (es  deux  fœurs  ne  pa- 
roiflenc  avoir  fait  parler  d'elles 
qu'à  Toccaiion  de  leur  frère  ;  6c 
Ciçéron  appelle  Clodia  dans  une 
aâion  publique  ,  lamie  du  genre 
humain.  Il  ajoute  qu'elle  avoit  un 
jardin  ,  qu'elle  encretenoit  avec 
grand  foin  ,  fur  le  bord  du  Tibre  , 
ou  tous  les  jeunes  gens  s'alloient 
baigner  ,  &  où  elle  les  choifiâbit 
à  fon  gré.  Quelque  fufpe^  qu'il 
foit  far  le  chapitre  de  cette  femme 
à  caufe  de  leur  inimitié  ,  des  xe- 
proclies  publics  de  cette  qualité 
ne  pourroient  guère  être  crus 
faux ,  quand  même  ils  ne  feroient 
pas  confirmés  ,  comme'  ils  le  font 
par  Quintilien  &  par  Plutarque  j 
qui  n'étolent  pas  fes  ennemis. 

Plutarque  explique  un  fobriquet 
que  tout  le  monde  lui  donna, 
comme  Gcéron  ,  &  que  Quinti- 
lien avoir  rapporté  fans  l'expli- 
quer ;  fur  ce  qu'elle  fut  trompée 
par  quelqu'un  de  fes  amans  ,  qui 
çut  Tadreffe  de  lui  faire  prendre 
une  bourfe  pleine  de  la  plus  pe- 
tite monnoie  ,  dans  la  croyance 
qu'elle  étoit  pleine  de  la  plus 
grofle.  Enfin  ,  &  pour  dernier 
trai^  de  fa  peinture  »  Cicéron  Tac- 
çufa  fi  clairement  &  fi  publique- 
ment ,  encore  cinq  ans  après , 
d'avoir  empoifonné  fon  mari  , 
qu'on  ne  peut  pas  aufiH  douter 
qu'elle  ne  fût  violemment  foup- 
çonnée;  fur  tout,  fi  l'on  confidère. 
cet  autre  fobriquet  cité  par  Quin- 

Cs}  Plut.  T.  I.  p.  517,  87s. 
{b)  Roiin.  de  Anciq.  Roman,  p.  8191 
8^6,841,845,867,874. 


-    CL 

tîlien  de  quadrantaria  Clittmtuf' 
tra  ,  comme  qui  diroit  la  Clicem- 
neflre  aux  rouges  doubles ,  par  oîi 
la  mort  de  (on  mari  8c  l'heci- 
reu%  fourberie  de  fon  galant  lui 
étoient  également  reprochées  ; 
car  ,  tout  le  monde  fçait  que  Cli* 
temneAre  fit  aufB  mourir  le  fîen. 
CLODIA  ,  Clodia  ,  KaWiW  , 

Îd)  fœur  de  la  précédente ,  épou- 
a  L.  JL.ucuUus«  Mais ,  elle  en  fut 
répudiée  à  caufe  de  fon  impudicité 
&  de  fes  vices. 

CLODIA,  Clodia,  f^)  nom 
commun  à  plufieurs  loix  des  Ro- 
mains. Ces  loix  furent  ainfi  ap- 
pellées  de  ceux  qui  les  portèrent. 
Nous  en  connoiffons  une  touchant 
l'ifle  de  Chypre  ,  Une  autre  tou- 
chant les  collèges ,  une  autre  tou- 
chant les  comices ,  une  autre  tou* 
chant  le  bled  que  Ton  devoit  don- 
ner gratis  au  peuple ,  une  autre 
touchant  la  violence  ,  &c. 

CLODIUS  AQUlTIUS,(c) 
Clodius  Aquitius  ,  o£cier  qui 
fervoit  fous  Jules  Céfar ,  au  rap- 
port d'Hirtius  Panfa. 

CLODIUS-,  Clodius  ,  Kxd^ 
Jt(ç  »  (<f)  çléferteur  de  l'armée  des 
Triumvirs  ^  pafia  dans  le  camp  de 
M.  Brutus.  Il  y  annonça  la  nou- 
velle d'une  viâoire  complette, 
remportée  par  l'armée  Républi- 
caine ;  mais ,  il  iie  fut  point  cru  ; 
on  ne  daigna  p^s  même  le  mener 
à  M*  Brutus  j  Ôç.on  le  méprifa 
comme  un  homme  qui  ne  fçavoit 
rien  de  certain  y  ou  qui  venoit 
donner  den  nouvelles  agréables, 
qu'il  avoit  forgées  pour  plaire  & 

(e)  Hirt.  Panf.  de  Bell.  Hifp.  p.  84s. 
\d)  Plut.  T.  ï.  pag.  1006.  Crév.  Hiff. 
Rom.  X.  VllI.  p.  a6i, 

poui 


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CL 

pour  être  mieux  reçu.  Ce  défaut 
if  attention,  au  rapport  de  Clodius, 
caufa  la  perte  de  M.  Brutus. 

CLODIUS  [PuBLius],  Fu- 
hlius  Clodius,  Voyt\  Publius. 

CLODIUS  [  Sext.]  ,  Sextm 
Clodius^  {a)  fut  le  porte- enfeigne 
&le  boute- feu  de  toutes  les  fé- 
ditîons  excitées  tant  de  fois  par 
P.  Clodius  Ton  patron.  Après  la 
mort  de  ce  dernier,  il  fut  con- 
damné à  l'exil,  fous  prétexte  qu'il 
avoit  réduit  en  cendres  le  palais 
Hoflilien  ,  en  y  brûlant  le  corps 
de  (on  patron. 

CLODIUS  [C],  C.  Clodius, 
{b)  l'un  des  compagnons  de  P. 
Clodius ,  au  rapport  de  Cicéron. 
Ceft  apparemment  le  même  que 
le  précédent. 

CLODIUS  [  L.  ] ,  Z.  Clodîus , 
(c)  étoit  ce  qu'on  appelle  aujour- 
d'hui^ un  Âpotiquaire.  Cicéron 
parle  de  lui  dans  Ion  oraifon  pour 
A.  Cluentius. 

CLODIUS  [  Sext.]  ,  Stxtus 
Clodius  ,  (^)  furnommé  Phof- 
mioft  ,  étoit  un  banquier  9  dont 
parle  Cicéron  dans  Ton  oraifon 
pour  A.  Cécina. 

CLODIUS,  Clodius ,  K^J//oç, 
{e)  affranchi  de  Cicéron.  C'éioit 
un  homme  très- fidèle  ,  que  Cicé- 
ron renvoya ,  parce  qu'il  étoit 
incommodé  d'un  mal  d'yeux.  Il 
étoit  furnommé  Philhétérus ,  ter- 
me Grec  qui  veut  dire  qui  aime 
Us  amis  defon  maître, 

CLODIUS  QUIRINALIS  , 

(J)  Crév.   Hift.  Rom.  Tom.  VU.  p. 
•59 ,  156. 
(h)  Cicer.  pro  Milqn.  cjç. 
(c)  Ciccr.  Orat.  pro  A.  Cluent.  c.  50. 
{d)  Cicer.  Orat.  pro  A.  Cxcin.  c.  »o. 
(e)  Cicer.  ad  Amie.  L.-  XXV.  £pi4  4. 

Tom.  XI. 


Clodius  Quirinalis  ,  (/)  officier, 
qui  avoit  traité  l'Italie  comme  la 
plus  méprifable  des  provii^ces  , 
dans  le  tems  qu'il  commandoit  les 
galères  de  Ravenne.  Il  s'empoi- 
ionna  lui-même,,  pour  éviter  la 
punition  de  (os  débaujches  6c  de 
fe*  cruautés,  l'an  de  Jefus-Chrift 

57- 

CLODIUS  M  ACER ,  Clodius 
Macer.  Foye^  Macer. 

CLODIUS  CELSUS,  C/o^/W 
Celfus ,  (g)  natif  d'Antioche ,  l'ua 
des  plus  fidèles  amis  de  Nym- 
phidius  Sabinus.  C  étoit  un  hom- 
me de  fens  ;  il  dit  librement  fon 
avis  à  Nymphidius  Sabinus ,  lorf- 
qu'ofant  afpirer  à  l'Empire  ,  il 
projettoit  la  ruine  de  Galba.  Il 
effaya  de  le  détourner  d'un  tel 
projet ,  l'affurant  qu'il  n  y  auroit 
•pas  une  maifon  dans  Rome ,  qui 
déférât  le  nom  de  Céfar  à  Nym- 
phidius Sabinus. 

CLODIUS  CELSINUS,  (A) 
Clodius  Celfinus  ,  frère  d'Albinus, 
obtmt  de  grands  honneurs  de  la 
part  du  Sénat  de  Rome. 

CLODIUS  LICINIUS, 
Clodius     Licinius   ,     (  i^    Au- 
teur Latin  ,  qui  a  écrit  une  hif- 
toire  Romaine  ,  citée  par  Tite- 
Liye  dans  le  vingt- neuvième  li*» 
vrê ,  &  par  plufieurs  'autres.  Il 
eil  différent  du  Ciodios,  qui  a 
compofé  en  Grec  un  oirvrage  des 
dieux  ,  citJ&  par  Amobe ,  &  par 
Laâance.  Le  Clodius  qui  a  écrit 
une  chronique  citée  par  Plutarque 
(/)  Tadt.  Annal.  L.  XIIÎ.  c.  30. 
(^)  Crév.   Hift.  des  JEmp.  Tom.  III. 
pog.  9. 

{h)  Crév.  Hifl.  des  Emp.  Tom.  ^» 
pag.  87. 

(s;  Tu,  Liv.  L.  XXIX.  c.  la. 


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4î4  CL 

au  commencement  de  la  vie  de 
Numa  Pompilitis  ,  &  celui  que 
Porphyre  cite  fur  Tabûinence  des 
Pythagoriciens  ,  font  (>eut  -  être 
encore  des  Autettfsdjfférens.^j^^ 
Tarticle  fuivant, 

CLODIUS  ,  Clodiuà  ,  K>6'- 
//eç  »  (a)  certain  Écrivain  ,  qui , 
dans  un  ouvrage  quSl  avoit  inti- 
tulé »  la  réfutation  des  tems  »  Cpô« 
tenoit  que  les  anciennes  Tables  fu- 
rent perdues  9  quand  Rome  fut 
iaccagée  par  les  Gaulois,  &  que 
celles  qu'on  avoit  du  tems  de 
Plutarque ,  avoieot  été  fuppofées 
par  des)  flatteurs  ,  en  faveur  de 
<}uelques  familles,  oui  vouloiem 
fe  faire  defcendre  des  premières 
&  des  plus  iilttftres  maifons  de 
Rome>  dont  >elle8  ne  defcendoient 
en  aucune  manière» 

M.  Dacier  fait  une  remarqtie 
fur  ce  Clodius.  »  On  ne  conndt 
Il  point ,  dit- il ,  cet  Écrivain ,  on 
9f  ne  fçait  pas  même  s'il  étoit 
n  Grec  ou  Latin  ^  car ,  il  n*y  a 
n  pas  d'apparence  que  ce  foit 
n  l'hiftorien  Clodius  Licinius  donc 
;n  il  efl  parlé  dans  Cicéron'  & 
n  dansTite  Live.  Plutarque  n  au- 
if  roit  jamais  dit  d'un  Hiiiorien  fi 
i>  confidérahle ,  ua  certain  Clo- 
»  dius.a 

M.  Datier  fait  une  autre  remar- 
que fur  cet  ouvrage  intitulé  La 
réfutation  des  tans.  ^it  C'ed  ainfî., 
p  à  mon  avis ,  ajoute-  c-il ,  que 
p  te  titre  éf^nx^^  x^oVar ,  doit  être 
n  traduit ,  le  mot  elenchos  figni'- 
M  fiant  eiamen ,  correâion  ;  or , , 
,p  le  but  de  Clodius  étoit  de  faire 


CL 

»  voir  la  fauffeté  des  généalogies 
n  par  la  fauiïeté  de^  noms  &  des 
I»  dates,  u  ' 

ÇLODONES  ,  Clodonts  ,  (^) 
K>aVetfi'fi; ,  nom  que  l'on  donnoit 
en  Macédoine  aux  Bacchantes. 

CLŒUE,  Clœlia  ,  K>o/a.«. 
(f)  jeune  fille  Romaine,  du  nombre 
de  celles  qu'on  avoit  données  en 
otages  à  Porféna  ,  qui ,  pour  ré- 
tablir les  Tarquins  ,  étoicnt  venu 
aHléger  Rome^  lan  247  de  la 
fondation  de  ceue  ville. 

On  dit  que  Clœlie  ,  fe  voyant 
dans  le  camp  de  ce  Prince  ,  logée 
affez  près  des  bords  du  Tibre  « 
trouva  le  moyen  de  tromper  la 
vigilance  de  fes  gardes.  A  la  té:e 
des  autres  Romaines  fes  compe* 
gnes  4  elle  fe  jetta  dans  le  Tibre  ; 
&  le  paiTant  au  milieu  des  traits 
des  ennemis ,  les  ramena  toutes 
faines  <Sc  fauves  chez  leurs  parens. 
Le  Roi  l'ayant  appris  eiitra  d'a- 
bord dans  une  furieufe  colère  ^ 
&  envoya  de^  ambafladeurs  aui 
Romains  ,  pour  demander  qu'on 
lui  renvoyât  Clœlie ,  fans  iiùifter 
fnr  les  autres  ,  dont  il  ne  faifoit 
pas  tant  de  cas.  Mais^  enfuite^ 
pafTant  du  refTentimem  à  l'admi- 
ration ,  il  mettoit  l'entreprife  de 
cette  jeune  Romaine  au-deffus  de 
celles  de  Codés  &  de  Mucius, 
^  déclaroit  hautement  qu'il  re« 
gardoit  le  traité  comme  rompu ,  fi 
on  m  la  lui  remettoit  entre  les 
mains  ;  promettant ,  au  contraire, 
qne ,  quand  on  la  lui  auroit  ren- 
voyée  |  il  la  rendroit  à  fes  parenst 
fans  lui  faire  aucun  mal  ni  aucune 


(<•)  Plut.  Tom,  I»  pag.  Ç9.  Mém.  dei  (r)  Tit.  Liv.  L.  II.  c  i^.  Plut.  Ton* 
PAcad.  des  Infcript.  &  Bell.  Lett.  Tom.ll.  pag.  107.  RoU.  Hlft^  Rqm.  Tom.  U 
VJ.  p.  10  ,  a  I  )  48  «  109  ,  isi  »  IS3.         {  p*  %\^  »  ii7« 

•(y  J?lu5.  T.J.p.66j,  } 


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CL 

Violence.  On  fit  les  chofei  de 
bonne  grâce  de  part  &  d'autre. 
Les  Romains  rendirent  au  Roi  les 
otages  ,  qui  éroiem  le  gage  de  la 
paJJL  ;  ik.  la  verfu  trouva  auprès  du 
Roi,  non  feulement  la  fftreré  qu'il 
kii  avoit  promise  »  mais  encore  la 
Fécompenfe  6l  les  honneurs  dont 
elle  étoit^digno.  Après  avoir  don» 
né  de  grands  éloges  à  Cloelie ,  il 
ajouta  qu'en  h  coniidération  ,  il 
rendoit  aux  Romains  la  moitié  de» 
otages  ;  qu'elle  n'a  voit  qu'à  choi- 
ûr  ceux  qu'elle  vouloir  ramener 
avec  elle.  Quand  on  les  lui  eût 
présentés  tous ,  elle  choiitt  les  plu» 
^u  nés  Romaines ,  aân  de  mettre  à 
Tabri  de  tout  péftl  6c  de  toute: 
injure  ,  celui  de  tous  les  âges  que 
ùl  foibiefTe  y  expofe  davantage. 
Les  autres  n'eurent  aucun^  lieu  de 
fe  plaindre  de  cette  préférence. 
Qua^d  la  paix  eut  été  a^rmie 
par-là  9  les  Remains ,  pour  lé^ 
moigner  à  Closlie  leur  reconnotf- 
fance ,  lui  firent  élever  une  ilatue 
équeftre  au-  haut  de  la-  rue  facrée; 
genre  d'honneur  aufïî  extraordi- 
naire à  l'égard  d'une  femme,  que 
l'étoit  le  courage  qu'elle  avoit  wt 
paroître. 

Cette  hiftoire  eft  racontée  dif- 
Ééremment  par  d'autres  Auteurs; 
fur  quoi  on  peut  confulter  l'article 
de  Valéria. 

CLŒLIENS  ,  Clixin,  (a)  l^j- 
se  des  principales  familles  des 
^Ibaim.Ceux  de  cette  famille  fu- 
ient  admis  dans  le  Sénat  par  Tui^ 
kis  Hoailiu». 


'    (a)  Tit.  Lîv.  L.  T.  c.  30. 
L  (h)  Plut.  T.  1. 1>.  «7. 

(O   Tit.  Liv;  L.  U.c.  ai.   . 

U)  Tit.  Liv.  L.  VI.  c.  ju 


CL  45Î 

CLŒLIES  ries  Foffes], 
Fofa  Clctlia.  (è)  Ce  font  les  mê- 
mes que  les  FoiTes  Quiriienne^. 
Foyei  Cluinienne. 

CLCELIUS  [  Q.  3  ,  Q.  C/œ- 
lias  ,  (c)  fijt  Confuî  avec  T. 
Lartius  ,  l'an  de  Ro/ne  256,^ 

CLCELIUS  [  P.  ]  ,  P.   Clct^ 
Uus  ,  {d)  étoit  tribun  militaire  l'an 
de  Rome  377. 
,CLŒL1US  [T.],  T.Clœlius.. 
yoyei  Cœlius. 

•  Il  y  a  eu  d'autres  célèbres  per- 
fbnnages  du  nom  de  Clôelius  ;  6C 
pour  les  connoitre  ^  yoye[  Giac- 
chus  y  Tullus  6c  Siculus* 

CLONARIUM,  Clonarîum, 
Khwfaptoy  f  (e)  courtifaiine ,  qui 
s'emretient  avec  Lééna  dans  uit 
tBalogue  de  Lucien. 

CLONDICUS ,  Clondîcus  , 
(f)  chef  des  Basâmes.  Ce  fut  fou» 
ra  conduite  qu'environ  trente  mil- 
le hommes  pénétterent  dans  là 
Dardanie ,  Tan  179  avant  Jefus- 
Chrift. 

CLONDICUS  ,  Cîondkus  , 
{g)  roi  des  Gaulois  ,  que  Perfée 
appella  à  fon  fecours  l'an  i63 
avant  Jefus-Chrift.  Comme  il» 
n'étoient  pki»  qu'à  environ  trente 
lieues,  Perfée  leur  députa  Antigo- 
nus  >  l'un  des  Seigneurs  de  fa 
cour.  Celui-ci  leuf  fit  beau  coup*  va* 
loir  les  ordres  que  fon  maître  avoit 
donnés  pour  qu'ils  fuflfent  bieit 
reçus  par  tout  oîi  ils  pafleroient, 
&  les  préfens  qu'il  leur  préparoit. 
Enfurte  ,  tl  les  invita  à  s'avancer 
juiqu^'à  un  certain  lieu  qu'il  leur 

(O  Ludan.  T.  U.  p.  715.  &  fî^j. 
tf)  Tit.  Liv.  L.  XL.  c.  58. 
(g)   Tit.   Liv.  L.  XLIV.   c.   16,  17, 
EplK  Hitt,  Ane,  T.  V.  ç.  58 ,  59. 

£e  ij 


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435  CL 

marquoit  ^  &  à  enroyer  les  prin- 
cipaux d'entr*eux  vers  le  Roi.  Les 
Gaulois  n*étoient  pas  gens  à  fe 
payer  de  paroles.  Ciondicus  alla 
droit  au  fait ,  &  demanda  fi  1  on 
apportoit  la  fomme  dont  on  étoit 
convenu. Gomme  on  ne  lui  donnoit 
point  de  réponfé  :  AlUi^  ,  dit-il  » 
déclarer  a  votre  Prince  ,  qu  avant 
qu'il  ait  envoyé  les  otages  &  les 
fommes  convenues  ,  les  Gaulois  ne 
partiront  point  d'ici. 

Perfée ,  au  retour  de  Ton  dépu- 
té ,  afTembla  fon  confeil.  H  pref- 
fentit  où  iroient  les  avis  ;  &  com- 
me il  étoit  meilleur  gardien  de 
fon  ^argent  que  de  fon  royaume  » 
pour  colorer  fon  avarice,ils «'éten- 
dit fort  fur  la  perfidie  &  la  féroci- 
té des  Gaulois,  ajoutant  qu'il  fe* 
roit  dangereux  de  donner  entrée 
clans  la  Macédoine  à  une  multitu- 
de fi  nombreufe,  de  qui  l'on  auroit 
tout  à  craindre f  &  que  cinq  mille 
cavaliers  lui  fuffiroient.  On  (êntoit 
bien  qu'il  ne  craignoit  que  pour 
fon  argent  ;  mais  per  A>nne  n* ofa  le 
contredire.  Amigonus  retourna 
yers  les  Gaulois  >  &  leur  dit  que 
ion  maître  n'avoit  befoin  que  de 
cinq  mille  cavaliers.  A  cette  pa- 
role ,  il  s'éleva  un  frémifiement  & 
vn  murmure  général  contre  Fér- 
iée^ qui  les  avoir  fait  venir  de  fi 
loin  pour  leur  tnfuker.  Ciondicus 
ayant  encore  demandé  à  Antigo- 
nus  s'il  apportoit  de  l'argent  pour 
les  cinq  mille  cavaliers ,  comme 
celui-ci  chercfaoit  des  détout  s ,  & 
aerépondoit  point  nettement»  les 


CL 

Gaulois  entrèrent  en  fureur ,  8t 
peu  s'en  fallut  qo'ils  ne  fe  jettaffent 
iur  lui  pour  le  mettre  en  pièces  » 
&  lui-même  l'appréhendoit  fort. 
Cependant  ,  ils  refpeâerent  la 
qualité  de  député,  &  le  renvoyé^ 
rent  fans  lui  avoir  fait  aucun  mau- 
vais traitement.  Les  Gaulois  par- 
tirent fur  le  champ ,  reprirent  fe 
cbemin  du  Danube  »  &  ravagè- 
rent la  Thrace  qui  fe  trouvoit  fur 
leur  pafiage. 

CLONIUS  ,  Clonius,  {a)  ca- 
pitaine  Troyen  ,  ton^sa  fous  lea 
coups  de  Turnus.  Virgile  introduit 
un  autre  capiuine  du  même  nom^ 
qui ,  en^combatunt  omtre  Mefla- 
pe ,  ed  renverfé  par  foii  cheval 
indompté. 

CLOTHO,  ou  CLOTHON, 
Clotho  f  KAttGâ)  »  nom  d'une 
Nymphe. 

CLOTHO.  ou  CLOTHON, 
Clotào  ,  K^û^6a«  {fi)  l'une  det 
trois  Parques»  qui  filent  la  deftinée 
ou  la  vie  des  hommes.  Héfiode 
dit  qu'elle  eft  fille  de  Jupiter  ,  fie 
de  Thémis.  Clotho  tient  la  que- 
nouille &  tire  le  fil.  On  la  repré- 
fentoît  vêtue  d'une  longue  roba 
de  diverfes  couleurs  »  portant  fur 
là  tête  une  couronne  enrichie  àt 
fept  étoiles,  &  tenant  d'une  main 
une  quenouille. 

Lucien  met  Clotho  dans  les 
enfers  avec  Charon ,.  &  lui  £ut 
tenir  re^ilre  de  tous  les  nrK>rts, 
auxquels  elle  fait  paffer  la  barque 
de  Char($n  ;  car  »  voici  comme  il 
la  fait  parler  à  Charon  :  n  Tu  as 


(«)  Virg,  i£ndd.  L.  IX,  v.  574.  L.X.Itoi.  Tom.  V.  p.  147.  é*  A»ftr.  Mém.  de 
T.  749.  IPAcad.    des   Infcripc    &    Scil.    Los» 

{k)  JDven.  Satyr.  9*  ▼•  i$5*   Mytli.lTonit   V.  p.  to.  &  /«<Vb 
par  M.  TAbb,  fian,  Tom.  I.  pag.  19s  >« 


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CL 

-%  rallbn ,  Charon ,  embarque  ton 
t»  inonde ,  &  cependant  je  pren- 
jt  drai  mon  regiftre  ;  &  me  met- 
^  tant  à  la  defcente ,  je  demande* 
»  rai  à  chacun  Ton  nom^  fa  mai- 
n  fon  &  fon  village.  Mercure  au- 
n  ra  foin  de  les  ranger  à  me(bre 
f»  qu'ils  entreront.  Commençons 
m  d'abord  par  les  petits  enfans  » 
s»  qui  n'ont  rien  à  me  répondre , 
j»  comme  )e  n'ai  rien  à  leur  de- 
J^  mander,  u 

,  Le  nom  de  Qotho  »  félon  Ful- 
gence,  veut  .dire  évocation  pour 
marquer  que  cette  DéeflTe  règle  le 
moment  de  notre  naiflance.  Ce 
nom  cependant  eft  formé  du  Grec 
KXût^ûù^  qui  fignifiei  Je  fiU  ^  J€ 
tourne  le  fil. 

CLOU  ,  CUvus.  {a)  Moïfe 
compare  les  Chananéens  à  des 
Ctouz.  Il  dit  aux  Ifraëlites  que  s'ils 
ne  les  tuent  pas  tous ,  ceux  qui  fe- 
ront refiés  »  deviendront  à  leur 
égard  comme  des  Cloux  dans  les 
yeux  y  &  comme  des  lances  à  leurs 
côtés.  Quelquefob  l'Écriture  fous 
le  nom  die  Cloux  entend  ces  pieux^ 
qu'on  fichoit  en  terre  pour  foûte- 
nirles  tentes.  Ifaîe»  parlant  de  la 
nouvelle  Jérufalem  fous  l'allégo- 
rie d'une  tente  nouvellement  dref- 
iëe,  dit  que  les  Cloux»ou  les  pieux, 
qui  Taflermiflienc,  ne  s'arrache-* 
ront  jamais  ,  &  que  tous  les  cor- 
dages qui  la  tiennent ,  ne  fe  rom- 
peront  point.  Non  auferentur  cla^ 
vi  ejus  in  ftmpiternum  ,  &  omnes 
funiculiejus  non  rumpentur.   ' 

CLOUX  ,  ClavLCb)  Les  An- 
ciens fe  fervoient  de  Cloux  de  fer» 


CL  4î7 

MabfSls  en avoient  aofE d'airain, 
&  ceux-ci  paflbient  pour  les  meil- 
leurs. Dans  ce  grand  vatiTeau, 
qu*Hiéron  fit  faire  ,  on  ne  voyoit 
eue  des  Cloux  d*airain  &  de  grof* 
(eur  énorme.  Ces  Cloux  d'airain  , 
par  la  trempe  que  l'on  donnoit  à 
ce  métal,  étoient  dune  dureté 
égale  à  celle  des  Cloux  de  fer  ;  ôc 
c  eft  pour  cela  fans  doute  qu'oa 
leur  donnoit  la  préférence. 

CLOUX  DE  JESUS  CHRIST, 
(c^  On  ne  doute  pas  que  Jefus- 
Chrift  n'ait  été  attaché  à  la  croix 
avec  des  Cloux ,  &  que  ces  Cloux 
n'aient  percé  fes  pieds  &  fes  mains. 
Le  texte  des  Évangiles  eft  trop 
précis  pour  cela.  Le  Ffalmifte, 
long-tems  auparavant ,  avoir  pré- 
dit qu'on  lui  perceroit  les  pieds 
&  les  mains.  Foderunt  manus  meas 
&pedes  meos. 

Mais ,  on  difpute  fur  le  nombre 
de  ces  Cloux.  Les  Grecs  repré- 
fentent  toujours  Jefus>Chri(l  at- 
taché à  la  croix  avec  quatre  Cloux. 
Saint  Grégoire  de  Tours  en  met 
autant  ;  un  à  chaque  main  &  un  à 
chaque  pied;  &  fous  les  pieds  une 
efpèce  de  bafe ,  pour  empêcher 
que  le  poids  du  corps  ne  l'attirât 
en  bas  ,  &  ne  lui  déchirât  les 
mains.  Saint  Grégoire  de  Tours 
ajoute  que  llmpératrice  Hélène 
fit  mettre  deux  de  ces  Cloux  dans 
le  mors  de  la  bride  du  cheval  de 
Conftamin  fon  fils ,  &  qu'elle  ea 
jetta  un  dans  la  mer  Adriatique 
pour  en  calmer  les  agitations^ 
D'autres   racontent'  qu'elle   mit 

C^)  Nuiner.  c.  3).  v.  55»  I&ï.  c  13. 1  liContf.  Tom.  IV.  pag.  $8  f  110. 
V.  so.  I     {e)  Joaan.  c.  %o%  v.  ,S5<  Bùlm*  tii 

{à)  Anti^  ç^cpl,  par  D.    Bem.  d*lv,  i8. 

Eeiij 


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438  C  L 

auf&  un  dé  ces  Cloux  dans  le  caf- 
quede,G>nftamin. 

Mais ,  plufieurs  croyent  qu'il 
n'y  eut'que  trois  Cloux  qui  per- 
cèrent les  mains  &  les  pieds  du 
Sauveur  ;  fçavoir ,  un  Clou  à  cha- 
que main  »  &  un  aux  deux  pieds. 
L'ufage  des  Latins  eft  conforme  à 
ce  dernier  fentiment  ;  car ,  la  plu- 
part ^es  crucifix  faits  dans  Téglife 
Latine  y  n'ont  que  trois  Cloux 
DooT  attacher  le  Chrift  à  la  croix. 
Konmis  croit  qu'on  k  fervit  auilî 
de  chaînes,  pour  y  lier  les  bras  du 
Sauveur;  ôc  Saine  Hilaire  parle 
des  cordes  avec  lefquelles  on  l'y 
attacha.  On  montre  des  Cloux  de 
notre-Seigneur ,  ou  plutôt  des 
parties  des  Cloux  de  notre*  Sei- 
g^ilr  en  diver(es  Églifes.  Mais , 
pn  n'en  peMt  pas  conclure ,  ni  que 
ces  reliques  foient  toutes  faufles  & 
inceruines ,  -ni  qu'il  y  ait  eu  plus 
de  quatre  Cloux,  qui  aient  fervi  à 
attacher  Jefus-Chrift  à  la  croix. 
Ceux  que  l'on  montre  dans  les 
tréfors  des  Églifes  ,  ne  (ont  que 
des  parties  des  Qoux  du  Sauveur; 
&  il  fe  peut  faire  que  quelques- 
uns  aient  été  employés ,  non  à 
fercer  Tes  pieds  &  fes  mains  ,mâis 
attacher  les  morceaux  de  la 
croix  ;  le  marche-pied  ,  fur  lequel 
étoient  pofês  les  pieds  du  Sau- 
veur, &  rinfcription  que  Pilate 
fît  mettre  au  haut  de  la  croix. 
Tous  ces  Cloux  ,  dans*  la  fuîte». 
auront  pu  erre  confondus  avec  les 
doux  de  Jefus-Chrif}. 

;  ÇLUACÏNE,  au0çina ,  au. 


lèU.Lett.  T.  lVvp,8y.. 


CL 

trement  Cloacine.  Foye^  Qoa* 
cine. 

CLUDO  ,  Cludo  ,  poignard 
de  théâtre  à  Tufage  des  Romains  » 
fur  la  fcène  ,  &  qui  ne  différoit  en 
rien  du  nètre  ;  la  lame  en  rentroit 
dans  le  manche  »  quand  on  s'en 
frappoit  ;  &  un  reâbn  fptral  l'en 
fai(bit  forttf,  ^quand  on  s'étoic 
frappé. 

CLUENTIA^  Cluentia,  nom 
d'une  tribu  Romaine*  Vbyt^  T^ 

CLUENTIUS  [L.].  {a)  L. 
Clueutius  y  un  des  chef  des  Mar- 
fes  ,  obtint  à  Ron^  le  droit  de 
bourgeoifie  y  &  donna  fon  nom  à 
une  tribu. 

CLUENTIUS  [A.]  HABI^ 
TUS  ,  A.  Clucmius  Habitas ,  {b) 
Romain ,  qui  vivok  l'an  de  Rome 
700.  U  bxx.  acctifé  par  fa  mère 
Sal£a  d'avoir  fait  mourir  Oppia-* 
nicfls  ion  beau-pere ,  &  fut  dé«* 
fefidti  par  Cdcéron.  Nous  avons 
encore  ia  belle  t>raî^  qui  &t  pro- 
aoocée  pour  fa  défende. 

CLUERE.  Foy^^  Cloacine. 

CLUiUENNE  [laFoffe], 
Ffiffa  Cluiiiéu  (c)  Voici  ce  que 
Tite-Lûire  nous  apprend  au  fujet 
de  cette  foflie.  t»  Les  Albaîos  [corn- 
V  mandés  par  CLuilius  ]  vinrent 
w  fioadre  fur  le  territoire  des  Ro- 
I»  inains  avec  une  armée  trés- 
or conûdérable.  Us  (e  pofierem  à 
n  cinq  milles  de  Rome ,  &  en- 
I»  toureieot  leur  camp  d'un  foiTé , 
i»  qu'on  a  appelle  pendant  plu^ 
n  iteuîc  fiedes  U  Fofle  Quilien- 
tf  ne  >eA  mécooire  de  leur  Roi; 

(^)  Cicer.  Crac  pro-Av  Chienc.  c.  i« 
M  Xh,  Ljf«  L.  I.  c;  %i.  L.  JI«  c.  1%^ 


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CL 

I»  jufqu'à  ce  qu'ayant  été  comblé; 
•»  par  fucceflion  de  tems ,  on  en  a 
n  aufS  oublié  le  nom.  Cluilius 
n  étant  mort  dans  ce  camp ,  les 
99  Albains  créèrent  Mettius  SuflPé- 
n  tius  diâateur,  pour  les  com- 
^  mander  en  fa  place.  « 

Tite-Live  ,  dans  un  autre  en- 
droit, lit  les  Foffei  Cluiliennes^ 
i^qffa  Cluilidf, 

CLUILIUS  [C],  C.  Clui- 
lius y  (a)  général  des  Albains  ,  ja- 
loux des  profpérités  de  Rome> 
donna  fecrétement  commiiTion  à 
des  gens  fans  aveu ,  de  piller  le* 
terres  des  Romains  »  dans  refpé-^ 
rance  que  cette  première  démar* 
che  pourroit  produire  une  ruptu- 
re encre  les  deux  peuples.  Ce  qu'il 
fouhaitoit  arriva.  Ceux  qui  étoieni 
offenfés ,  coururent  à  la  vengean- 
ce ;  6c  C.  Cluilius  >  attentif  au 
fuccès  de  ce  piège  >  perfuada  à 
(es  compatriotes ,  que  ce  qui  n*é- 
toit  véritablement  qu'une  repré- 
laille ,  étoit  une  infulce ,  &  qu'il  la 
falloir  repouffer  les  armes  à  U 
main.  Afin  que  cette  infraôion  pa- 
rût un  ade  de  JHftice ,  avant  que 
de  déclarer  la  guerre ,  il  engagea 
la  ville  d*Albe  à  envdyer  des  am- 
badadeurs  poUr  demander  répa-^ 
ration  de  l'ofFenfe.  Il  prétendoit 
auffi  fatbfaire  à  un  traité  condti 
entre  Rome  61  Albe  »  foius  le  re-^ 
gne  de  Romnlus ,  par  lequel  lei 
deux  peuples  étoient  convenus  de 
ne  fe  point  faire  là  guerre ,  6t 
a  voient  réglé  que  fi  l'un  fc  croyoît 
téfé  par  Tautre,  il  demandefoît 
juftice  à  Toffenfeur  ;  mais  que  s*îl 
ûe  l'obtenoit  pas ,  il  lui  feèoitalori 

(«)  Tit.  Liv.  L.  I.  c.  IX  2  %$.  Oionyf. 
I.  p.  87,88. 


CL  4î^ 

permis  de  fe  la  faire  lui-même  par 
les  armes. 

'  Tulius  Hoftilius  f  du  moins  auffi 
fin  que  fon  ennemi  dont  il  dé- 
couvroit  l'artifice ,  reçut  ces  mi-' 
niftres  publics  avec  une  démonf* 
tration  de  civilité  qui  les  trompa  ; 
&  les  retenant  auprès  de  lui  fous 
divers  prétextes  4  il  gagna  affjz  de 
tems  pour  envoyer  à  leur  infça 
des  ambafladeurs  à  Albe,  fe  plain- 
dre de  la  pdix  violée ,  (^  exiger 
une  fatisfaâion  proportionnée  à 
Imjure.  C.  Cluilius  répondit  avec 
toute  la  hauteur  d'un  homme  dé- 
terminé à  faire  la  guerre.  Aprè$ 
le  retour  des  attib^fladeurs  Ko-*- 
mains  ,  Tulius  Hoftilius  donna 
audience  à  ceux  d*Albe ,  fe  plai* 
gnit  de  la  répoiife  fi^re  de  l^r 
diÔateUt ,  &  déclara  qtie ,  puifj- 
qu'ils  défiroîent  la  guerre  ^  il  la 
leur  déclaroit  le  premiet  f  6c 
qu'ils  s*attendi(lent  à  la  voir  in- 
ceflfamiïient  commencer.  Oii  fè 
mit  bientôt  en  cattipagne  de  parc 
&  d'autre.  Les  Albaitts  vinrent 
camper  à  cinq  ttilles  de  Rome  » 
dans  le  lieu  appdlé  depuis  la  Fof- 
fe  Cluiliênne.  Mais ,  peu  de  tenr^ 
après ,  on  trouva  C.  Cluilius  mort 
dans  ÙL  tente ,  (sLtti  qu'oui  en  pût 
deviner  la  caufe.  Il  eut  potir  fuc^i* 
cefleurau  comniàndemem  Mettiu» 
SufFéttus. 

Tout  lei  motide  trouva  Taccii* 
dew  de  C.  Clùilhif  fott  extraor* 
dinàire ,  dit  Denys.d'Hàlicarnaf- 
,fè  ;  il  l'étoit  éii  itfet ,  ajôûre-t^il, 
puifqu'il  n'atoit  été  précédé  d'au- 
cUrie  maladie,fur  laquelle  un  pût  le 
rejetter.  Les  efprits  accoutumés  ^ 
Halic.  L.  III.  c.  ».  Roll.  Hitt.  Rom.  X, 


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44^  C  L 

pourfuit  TAuteur  cité,  à  attribuer 
à  la  providence  divine  tout  ce  qui 
arrive  aux  hommes ,  prétendoient 
que  fa  mort  étoit  un  effet  de  la 
colère  des  Dieux,  parce  que,  con- 
tre toute  juflice  èc  (ans  néceffité  » 
il  avoir  allumé  le  feu  de  la  divifion 
entre  la  ville  d*Albe  ôc  fa  colonie. 
Mais ,  ceux  qui  regardoient  la 
guerre  comme  un  moyen  de  s'en- 
richir, fe  voyant  privés  par  ia 
mort  de  plufieurs  grands  avanta- 

Î^es,  rejettoienc  cet  accident  iui 
es  embûches  &  fur  Tenvie  des 
hommes  ;  ils  prétendoient  que 
quelque  ennemi  caché  l'avoit  tait 
mourir  par  un  poifon  fecret,  dont 
Il  étdit  bien  difficile  de  s*apperce- 
voir.  D'autres  difoient  qu'accablé 
de  chagrin  dans  l'embarras  oîi 
étoient  ies  affaireis  ,  il  s'étoit 
lui-même  donné  la  mort;  parce 
qu'il  voyoit  bien  que  quelques 
peines  qu'il  prit  dans  les  conjonc*- 
tures  préfentes,  tons  fes  efforts 
devenoient  inutiles,  &  que  rien 
ne  lui  réufliffoit  comme  il  fe  Vér 
toit  promis  d'abord>  lorfqu*il  avoit 
pris  les  rênes  du  gouvernement. 
Ceux  au  contraire  qui  jugeoient 
fainement  de  cet  accident  de  leur 
Général ,  fans  fe  laiiFer  emporter  à 
des  fentimens  d'amitié  ou  de  haine, 
n'attribuoient  fa  mort  ni  à  la  colè- 
re des  Dieux,  ni  aux  embûches  de 
Ces  envieux  ,  ni  au  défefpoir  de  fes 
affaires ,  mais  à  la  néceflité  de  la 
i^ature  &  au  àeiBn  qui  a  fixé  le 
nombre  de  nos  jours  dès  le  pre- 
mier înftant  de  notre  naiffance. 
Ainfi  mourut  C.  Cluilius  avant 
que  d'avoir  fait  aucune  aâion  de 


CL 

valeur  ,  vers  Tan  66j  avant  l'Ere 
Chrétienne, 

CLUILIUS  ,  Cluilius ,  (a) 
général  des  Volfques  ,  vivoit  l'an 
440  avant  l'Ere  Chrétienne.  Cette 
année  ,  il  fur  vint  entre  la  nobleffe 
&  le  peuple  d'Ardée,  une  divifion 
qui  mit  la  ville  à  deux  doigts  de 
fa  perce.  Les  deux  partis  ,  qui  fe 
trouvoient  trop  foibles  par  eux« 
mêmes ,  eurent  recours  à  Tétran- 
eer.  Le  Peuple  s'adreffa  aux 
Volfques ,  qui ,  fans  perdre  de 
tems ,  vinrent  à  fon  fecours  ,  fous 
la  conduite  de  Cluilius.  Cefk  dans 
cette  conjonâure,  que  les  députa 
de  la  nobleffe  arrivèrent  à  Rome. 
Le  conful  Géganius  eut  ordre  de 
pardr  fur  le  champ«  Il  arriva  bien- 
tôt avec  fon  armée  près  des  enne- 
mis qui  affiégeoient  la  ville.  Le 
lendemain ,  le  Conful  ayant  dès  le 
grand  matin  partagé  le  travail  en- 
tre fes  troupes ,  fit  environner  de 
bonnes  tranchées  tout  le  camp  des 
Volfques ,  qui  fe  trouvèrent  eux- 
mêmes  afTiégés,  &  ferrés  de  fi 
près  ,  qu'après  quelques  jours  , 
manquant  de  tout,  ils  demandè- 
rent à  capituler.  Le  Conful  leur  fit 
dire  qu'ils  n'avoient  de  quartier  à 
attendre  ,  qu'en  lui  livrant  entre 
'  les  mains  leur  Général,  &  fe  ren- 
dant eux-mêmes  à  difcrétion.  Ré- 
duits au  défefpoir ,  ils  tentèrent  un 
combat  qui  leur  coûta  cher  »  &  oii 
ils  perdirent  beaucoup  de  monde* 
il  fallut  fe  rendre.  Après  qu'ils 
eurent  livi^é  leur  Général ,  &  mb 
bas  les  armes  ^  on  les  fit  ton  s  paf- 
fer  fous  le  joug ,  &  ils  furent  ren- 
voyés avec  un  habit  chacun  feule^ 


Cl)  Tit.  Lxv.  L.  IV,  c.  9^>  10.  Roll.  Hlft.  RoQi.  T*.  I.  p.  48» ,  49|» 


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CL 

ment ,  couverts  de  hotîte  &  d'î- 
enominie.  Lorfque  le  Conful  entra 
a  Roone  en  triomphe ,  il  mena 
devant  Ton  char  Cluilius  aves  les 
riches  dépouilles  qu'il  avoît  prifes 
fur.  les  ennemis. 

CLUNIE  ,  Clunla,  Ky^owia  ^ 
{a)  ville  de  rÇfpagné  Tarrago- 
noife ,  fîcuée  fur  les  confins  de  la 
Celtibérie»  au  païs  des  Aréva- 
ces. 

Cette  ville  étoit  une  colonie 
Romaine ,  comme  Tatteftent  Pto- 
lémée ,  &  quelques  médailles  fur 
lefquelles  on  lit:  COL.  CLUNIA. 
D'autres  médailles  la  qualifient 
municipe  ,  MUN.  CLt/N. 

Galba  étoit  à  Clunie  d^s  la 
plus  grande  conftôrnation ,  6c  oii 
il  n  attendoit  même  que  la  mort  , 
lorfquon  vint  de  Rome  lui  an- 
noncer celle  de  Néron  fon  enne- 
fnî.  A  cette  heureufe  nouvelle  » 
Galba  pafTa  en  un  inilant  de  la 
triflefle,  &  prefque  du  défefpoir,  à 
la  joie  &  à  la  confiance.  Il  vit  Te 
former  fur  le  champ  autour  de  lui 
une  cour  nombreufe  de  perfonnes 
de  tout  état ,  qui  le  félicitoient  à 
Tenvi;  &  deux,  jours  après  ayant 
reçu  le  courrier  du  Sénat,  qui  con* 
firmoit  le  rapport  qu'on  lui  avoit 
faitj  il  quitta  le  titre  de  Lieutenant 
du  Sénat  ôc  du  peuple  Romain , 
prit  le  nom  de  Cefar,  qui  étoi^ 
Revenu  celui  de  la  fouveraine  puif- 
fance ,  &  fe  difpofa  à  aller  incef- 
famment  s'en  mettre  en  pleine 
poflefiion  dans  la  capitale. 

11  eft  à  remarquer  que  Plutar- 

(a)  Plin.  Tom.  I.  p.  14^  ,  144.  Dîo. 
CafT.  p.  11^.  Ptolem.  L.  II.  c.  6.  Crév. 
Hiit,  des  Emp.  T.  II.  p.  ;oo.  Tom,  III. 


C  L  441 

que  change  le  nom  de  Clunîe  en 
celui  de  Colonie.  Cette  ville  étoit 
le  fiege  d*une'  aflemblée ,  de  la- 
quelle relevoit  quantité  de  peu- 
ples. Amoroife  Morales  croit  que 
le  nom  moderne  de  Ou  nie  eft 
Cividal  de  Caftro  ,  Ôc  dans  un 
autre  endroit,  il  dit  que  ceû  Cala- 
horra,  Clufius  ôc  Vafaeus ,  dont  le 
fentiment  eft  plus  fuivi ,  afTurent 
que  c*e{l  le  village  Cruna  ou  Co« 
runna  del  Conde  ;  ce  qui  s'accor- 
de avec  l'Itinéraire  d*Antonin  » 
qui  met  Clunie  prefque  à  moitié 
chemin ,  entre  Kauda  «  qui  eft 
Aranda  de  Duero ,  &  Uxama  qui 
eft  Ofma ,  à  vingt-fix  mille  pas 
de  la  première,  6c  à  vingt -quatre 
mille  pas  de  la  féconde.  On  croie 
avoir  trouvé  l'ancien  fceau  dont 
on  fcelloit  les  décrets  &  les  aâes 
de  rafiemblée  dont  nous  avons 
parlé  ,  &  qu'il  eft  gardé  par  le 
Seigneur  de  Corunna  del  (Jonde* 
CLUPÉE  ,  Clupea  >  KhvTféat  » 
(b)  ville  de  l'Afrique  proprement 
.  dite.  Elle  étoit  fituée  fur  le  bord 
de  la  mer,  à  Toppofite  de  lifte  de 
Coftbre ,  &  à  quelque  dlftance  du 
promontoire  de  Mercure«  Suivant  . 
Solin  ,  cette  ville  fut  bâtie  par  les 
Siciliens  ,  qui  la  nommèrent  Af- 
pis  ;  fans  doute  parce <]u'elle  avoit 
la  figure  d'un  bouclier ,  car  c'eft 
ce  que  fignifie  le  mot  Afpîsy  auffi» 
bien  que  le  mot  Clupea  ou  Clypea. 
Strabon  dit  aufii  que  Clupea  & 
Afpis  étoient  une  feule  &  même 
ville.  Ptolémée,  cependant ,  dis- 
tingue Afpis  de  Clupée  >  &  mec 

(*)  Solin.  p.  19;.  Pomp.  Mcl.  p.  30. 
Strab.  p.  xyj.  Ptolem.  L.  ÏV.  c.  }.  Cxf. 
de  Bell.  Civil.  L.  II.  c  550^  551.  U"^. 
Panf.  de  Bell.  Afric.  p.  75$. 


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442i  CL 

le  promontoire  de  Mercure  entre 
deux.  Clupée  eiï  la  première  des 
villes  d^Afrique ,  que  les  Romains 
prirent  durant  la  première  guerre 
Punique.  Marmol  croit  que  c'eft 
préfenteroent  Zafaran. 

Céfar ,  au  fécond  livre  de  la 
guerre  Civile  ,  lit  le  nom  de  Clu- 
pée en  fingulier  &  en  pluriel  , 
Clupea  &  Clupea.  Hiriius  Panfa 
lit  de  même  dans  fon  livre  de  la 
guerre  d'Afrique.  Néanmoins  , 
tous  les  anciens  Géographes  n'é- 
crivent ce  nom  qu'en  fingulier. 

CLUPEUM,  CLYPEUM.  {a) 
Pour  faire  connoitre  la  différence 
qu'il  y  a  entre  ces  deux  mots  ,  il 
luffit  de  placer  ici  un  extrait  d'une 
didertation  inférée  dans  le  fupplé- 
ment  à  l'Antiquité  expliquée  par 
D.  Bernard  de  Montfaucon. 

»  Ces  grandes  pièces  de  mé- 
»  taljdefiinées  à  repréfenter  les 
f  grands  Hommes  ou  leurs  ac- 
«  tions  ,  étoient  âppellées  des 
M  Romains  Clypei  ;  foit  à  eaufe 
n  de  leur  reffemblance  avec  la 
»  figure  des  boucliers  militaires, 
•>  foit  parce  que  les  boucliers  au- 
91  roient  é^é  les  plus  anciens  ta* 
'>  bleaux  de  gravure  ou  de  fculp- 
»  ture.  Et  de  peur  qu'on  ne  con- 
i>  fondît  une  arme  avec  un  ta- 
>i  bleau  ,  les  Grammairiens  dif- 
»  tinguoient  par  rorthographe , 
>>  comme  fait  Cornélius  Fronto  , 
i»  Clypeum  armofum,  &  Clupeum 
if  imaginis.  Ou  bien  par  le  genre , 
w  comme  Charifius,  après  La- 
to biénus  ;  Clypeus  mafculino  ge^ 
w  ncre  in  fignificatione  fciuipo- 


CL 

»  nîtur  ^  ut  Labienus  ait  ;  fitutr9 
»  autem  génère  imaginem  fignifi» 
n  cat.  Ou  même  par  tous  les 
»  deux ,  comme  Ifidore ,  Clypeus 
19  fciitum  ,  Clupeum  imago» 

n  II  eft  certain  que  le  même 
i>  mot  défignoit  un  bouclier  &  un 
a  tableau.  Tribellius  PoUio  dit  de 
»  Claude  le  Gothique:  Illi  Cly^ 
»  peus  aureus ,  vel  ut  grammatici 
n  loquuntur  ,  Clypeum  aurcum 
»  Scnatûs  totius  judicio  in  Ro" 
n  mana  curia  collocatum  efl^ut 
»  etiam  nunc  videtuh  Expreffa 
»  Thorace  vultûs  ejus  imago»  Je 
»  lirois  volontiers  ,  expreffa  Tho" 
»  race  tenus  ^  ejus  imago  ^  pouf 
»  dire  qu'il  n'y  avoir  que  le  Buf- 
n  te  ;  ce  que  la  baffe  latinité  a  dit 
»  depuis  par  un  feul  mot ,  Tho^ 
vi  racida.Êt  ce  n'étoît  pas  toujours 
^  un  fimple  portrait  ;  les  Empe- 
»  reurs  y  étoient  repréfentés  , 
i>  tantôt  allant  contre  l'ennemi  , 
n  tantôt  retournant  de  la  guerre  » 
»  &c.  On  voit  de  ces  boucliers 
n  repréfencacifs  fur  ks  médailles 
»  de  Probus.  ce 

CLUSINIENS  ,  Clu^ni  ,  (h) 
K Mitrlr  i ,  peuples  d'Italie,  qui  ha- 
bitoient  dans  la  Tofcane.  Titc- 
Live  en  fait  fouvent  mention.  Pli- 
ne diftingue  deux  fortes  de  Cfu- 
iiniens ,  les  nouveaux  &  les  an<* 
ciens,  Clufini  noi^i,  Cll^ni  veteres. 
La  ville  ,  qu'habitoiônt  les  Çlu« 
fmiens  nouveaux  ,  étoit  fitoéé 
vers  les  fources  du  Tibre  ;  ôt 
leur  nom  s'y  efl  confervé  dans 
celui  de  Chiuiî  Novo ,  que  Ton 
donne   à  préfent  à    cette  ville. 


'     (*)  Suppl.  à  PAntiq. 
B^ra.  de  Montf.  Tom,  IV 


cxpl.  par   DJ     (0  Plih,  Tom.  L  iji.  Plut.  T.  I,  p* 
•  pag.  6)464.168^   is6. 


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CL 

Quant  aux  Ciufiniens  anciens  , 
c*étoient  les  habitans  de  la  ville  de 
Clufium,  fur  le  iattClufma.  Foye^ 
Clufium, 

CLUSINUS  [C]  ,  C.  Clw 
finus  ,  (â)  ofHcier  que  Cérar  avoit 
£ait  centurion  dans  Ton  armée. 
Biais  qu'il  caffa  enfuite  »  le  regar- 
ilaiu  comme  indigne  de  fervir  da- 
vantage dans  fes  troupes  ^  parce 
qu*il  étoit  plus  propre  à  exciter 
une  fédtiion,  qu'à  iaire  fon  de-^ 
Voir. 

CLUSIUM,  Clufium^  (h) 
KActc.  y,  ville  d'Italie  dans  la  Tof- 
cane  ,  près  du  lac  Cluâna.  £ile 
étoit  éloignée  de  Rome  de  huit 
cens  fladçs  au  rapport  de  Stra-^ 
bon.  Ce  Géographe  nous  ap- 
prend ,  auHi-bien  que  Tite-Live, 
que  Porféna  ou  Por fenna  étoit  roi 
de  Ciufium  ,  du  tems  que  Tar- 
quin  le  Superbe  fut  chailé  de  Ro- 
me ;  âc  qu'il  entreprit  de  le  rétablir 
fur  le  trône  des  Romains ,  majt 
qu'ayant  fait  fa  paix  avec  cette 
nation  >  il  en  devint  l'ami  &  fe 
tetira  comblé  d'honneur  &  de 
niaenifiqe/es  préfeos. 

Dans  la  fuite ,  Ja  ville  de  Qu- 
fium  fut  attaquée  par  les  Gaulois. 
I^s  Clttûniens  ,  contidéradt  la 
multitude  inânie  de  ces  nouveaux 
ennemis,  leur  air  Ql  leur  figure 
auffi  extraordinaire  que  les  armes 
qu'ils  portoient  »  furent  eôrayés  ^ 
fur  tout  lorsqu'ils  apprirent  que  ces 
étrangers  avoient  fouvem  défait 
les  légions  des  ToTcans ,  tant  en 
de-çà  qu'au  de-1^  du  P^.  Ainû , 

(tf)  Hirc,  PanC  4e.  Belt.  Afcic.  pag. 


79». 

(b)  Scrab.  pag.  xao ,  %t6,  Ptolcm.  L 
112.  c.  I.  TiciJi^  L,V,Çéli.  à"  M'  I 


CL  44Î 

quoiqu'ils  ne  fuffent  ni  amis  ni 
alliés  du  peuple  Rpmain ,  &  qu'ils 
ne  lui  euffent  jamais  rendu  au- 
cun fervice ,  fi  ce  n'eft  qu'ils  n'a- 
voient  point  défendu  contre  lui  les 
Veïens  leurs  parens;  ils  lui  en* 
voyertnt  cependant  des  députés , 
pour  lui  demander  du  fecours 
contre  les  Gaulois.  Le  Sénat  ne 
jugea  pas  à  prppos  de  les  aider 
des  troupes  de  la  république  ; 
mais,  il  envoya  pour  ambaiTa-» 
deurs  aux  Gaulois  les  trois  fils  de 
M.  Fabius  Ambuftus ,  avec  ordre 
de  leur  dire  de  la  part  du  peuple 
Romain,  qu'ils laiiTaiTent  en  re-' 
pos  leurs  alliés ,  de  qui  ils  n'a  voient 
reçu  aucune  injure.  Mais ,  les  pro^ 
pos  fiers  ÔL  brufques  que  ces  am- 
bafladeurs  tinrenr  aux  Gaulois  , 
ayant  aigri  les  efprits  ,  on  courut 
aux  armes  ,  &  on  en. vint  aux 
mains  ûé  part  &  d'autre.  Alors. ^ 
comme  pour  hâter  la  ruine  de 
Rome ,  les  ambaiTadeurs  oubliant 
leur  caraâèré,  prirent  auifi  les 
armes  ^  &  fe  mêlèrent  dans  le 
combat ,  leur  aâion  ne  pot  de-* 
meurer  fecrete  ;  car ,  il  étoit  aifé 
de  remarquer  >  à  la.tête  de  l'armée 
Toicane ,  les  plus  illtiûres  Ôc  les 
plus  braves  de  la  jeuneife  Rooiai* 
ne  ,  tant  leur  valeur  e^açoit  celle 
des  Ckfiniens.  Bien  plus ,  Q. 
Fabius,  ayant  pQuilé  fon  cheval 
au  milieu  des  ennemis,  tua  d'uis 
coup  de  lance  un  de  leurs  chefs  » 
qui  pouffoit,  vigoureuftment  l'a* 
yantrgarde  des  Tofcans  ;  &  s'é- 
tant  mis  en  devoir  de  le  dépouil- 

L.  X.  c  ȍ.  jcN  L.  XXVIII.  c.  4t.  Plin. 
T.  I.  p.  48).  Rûjl.  Hiti.  Rom.  T.  U.  p. 
49*  4xMv*  ^*  lU*  p*  3  »  4* 


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444:         et 

1er  y  il  &t  reconnu  par  les  Gaaioîs, 
qui  publièrent  dans  toutes  les  par- 
ties de  leur  ^rmée  >  que  c'étoit  un 
des  ambaifadeurs  Romains.  Ils 
firent  auffî»t6c  fonner  la  retraite , 
&  iaiffant  les  Clufiniens  en  repos, 
se  (bngerent  plus  qu'à  fe  venger 
de»  Romains» 

Tite-Live  nons  enfeîgne  que 
le  premier  nom ,  que  porta  Qu- 
fioin  y  ce  fut  Camers.  Aujourd'hui 
elle  prend  celui  de  Chiuft.  C*eft 
un  évêché  Aiffragant  de  Sienne* 

CLUSIUM,  Clujium  , 
Khovoior^  autre  ville  dltalie»  (1- 
tuée  aaf&  cSans  la  ToTcane ,  vers 
les  fources  do  Tibre.  Celle  -  et 
étoit  difiinguée  par  Tépithece  de 
nouvelle,  Clufium  novum  »  & 
iautre  par  Tépithete  d ancienne 
Clufium  vetiu^  Elle  conferve  en- 
core Ton  nom  dans  celui  de  Chiufi 
nova  »  qu'elle  prend  aujourd'hui. 

CLUTIDES,  Clutids^,  ia) 
nom  d'une  famille  delà  ville  d'É- 
Ks  dans  le  Péloponiîèfe.  Cette  fa- 
mille s'éfott  rendu  célèbre  par 
Um  habileté  dans  la  fcience  des 
Amipices.  VoyeT  Clytides. 

GLU  VIDIENUS  QUIÉTUS, 
Ciuviditnus  Quieius  »  (b)  (uc  Tua 
de  (seux  que  Néron  relégua  dans 
les  ifles  de  la  mer  Egée  »  Tan  de 
Jefus^Chriil  65  f  comme  compli- 
ces  d'une  conjuration  formée 
contre  fà  perfonne. 

€LUVIE,C/«vw,  (c)  forte- 
refle  d'Italie  dans  le  Saronium. 
Les  Samnites ,  ayant  tenté  inuti- 
lement de  prendre  cette  forterefie 

,    Ct>  Cîcer.  de  Divînat.  L.  I.  f  i. 
iky  Tacic.  Annal.  L.  XV.  c.  71.^ 
(c>  Tit.  Uf,  L.  IX.  ç.  lU  L.  XXVI. 


CL 

de  force,  l'afBégerent  dans  tét 
formes  ;  &  ayant  reçu  à  compofi- 
tion  les  Romains  qui  la  défen- 
doienr^  ils  les  firent  mourir,  après 
tesT  avoir  déchirés  à  coups  de  ver- 
ge )  avec  la  dernière  inhumanité* 
C.  Junms  Bubulcus  ,  ayant  en  le 
Samnium  pour  département  »  vou- 
lut tirer  vengeance  de  leur  perfi- 
die &  de  leur  cruauté.  Il  com- 
mença donc  la  guerre  par  la  prife 
de  Cluvie ,  &c  Tattaqua  avec  tant  . 
de  vigueur ,  que  l'ayant  emportée 
te  premier  jour  qu'U  y  donna  l'af^ 
faut ,  il  fit  égoreer  tous  ceux  jqut 
étoient  en  âge  ae  puberté.  C'efI 
Tite-Live  qui  nous  raconte  ces 
circonftances  ;  &  il  nous  dit ,  dans 
un  autre  endroit  ^  que  le  Sénat 
rendit  »  dans  la  fuite  à  ceux  de 
Qutie  leurs  biens  &  leur  liberté. 

CLUVIE,  Cluvia,  (d)  cer. 
taine  perfonne  ,  dont  il  eft  fût 
mention  dans  Juvénal  ,  qui  en 
parle  dans  fa  première  Satyre. 

CLUVIÉNUS  ,  Cluvicnus  ; 
(e)  mauvais  poëte  du  tems  de 
Juvénal.  Il  en  eft  parlé  dans  ùl 
première  Satyre. 

CLUVIUS  ,  Cluvius.  Voyez 
Rufîis. 

CLUVIUS  [  C.  ]  ,  C.  Cluvius^ 
/)  obtint  d'Augufte  le  rang  de 
^onfulaire ,  quoiqu'il  n'eût  point 
géré  le  Confulac.  Il  avoit  été  défî- 
gné  Conful  ;  nuis ,  en  vetcu  de 
certaines  circonfiances  ,  il  étoit, 
arrivé  que  fi>n  tems  avoit  été  rem- 
pli par  un  autre. 

U  eut  part  à  la  conjuration  qui 

(J)  Juven.  Satyr.  11.  ▼.49. 

(e)  Juven.  Satyr.  i .  v.  80. 

(/)  Crév.  Hift.  des  £mp.  Xom.  1.  p. 


Coi 


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CL 

iiéfivra  Tempire  de  Callgula.  Un 
'lour  qu'il  étoit  affis  att  fpeâade  k 
côté  de  Vatiaius«  Sénateur  Ôi  an- 
cien héteur ,  celui-ci  lui  deman- 
da s'il  n'avoit  rien  appris  de  nou- 
veau ;  Ôc  C  Cluyius  lui  ayant 
répondu  que  non  :  Sçachec  donc  ^ 
ki  die  Vatinius  ,  qu'aujourd'hui  fe 
repréfente  la  pièce  du  meurtre  du 
Tyran.  ۥ  Quvius  Tentendit  fort 
bien  y  fie  lui  recommanda  de  gar- 
der plus  foigneufement  un  tel  fe- 
cret. 

CLUVIUS,  Cluvius  ,  (a) 
officier  qui  avoit  acquis  de  Thon- 
oeur  dans  le  fervice ,  &  le  grade 
de  premier  capitaine  dani^  une 
légion.  Il  fut  père  d*Helvidius 
Pri/cus. 

CLYMÈNE  ,  Cfymene  ,  {h} 
K>vfU¥  ,  fille  de  l'Océan  &  de 
Thétit  »  époufa  Japec ,  dont  elle 
eut  le  grand  Atlas ,  i'illufire  ^é« 
oœtius  ,  le  rufé  Prométhée  & 
Tinfenfé  Éplméthée. 

D'autres  difent  que  Clymène 
(ut*  aimée  d'Apollon  »  &  qu'elle 
en  eut  Phaëton  &  plu(ieurs  filles* 
Vaye^  Phaëton. 

CLYMÈNE  ,  Cfymene  ,  (c) 
Kwfim  •  l'une  des  Néréides  , 
étoit  fiUe  de  Nérée  &  de  Ooris. 

CLYMÈNE  ,  Clymene  ,  {d) 
YhvnévY  f  fille  de  Minyas  ,  fut 
ièmme  de  Céphale  ,fils  de  Deion» 
&  en  eut  Iphidus  ;  tel  efi  le  récit 
.de  Paufanias.  Mais ,  fes  Commen- 
]tateurs  remarquent  qu'il  confond 

(«^  Ttfît.  Hîft.  L.  IV.  c.  s. 

(A)  Ovid.  Metam.  L.  I.  c.  so.  Myth. 
MT  M.  TAbb.  Baa.  T.  I.  pag.  199*  T. 
|II.  p.  450  >  46t. 

CO  Homcr.  Iliad.  L,  XVUI.  ▼.  47. 

^j  Paur.  p.  665. 


Cépha1#avecThy]acos(bn  &ere, 
puifqu'Homère  &  d'autres  an- 
ci/ens  Poètes  attefient  que  Qy- 
mèae  avoit  été  mariée  à  Phyla- 
eus,  &  que  ce  fut  d'eux  que  na- 

Îuit  Iphidus.  Quoi  qu'il  en  foit, 
Clymene  étoit  repréfeatée  dan» 
le  temple  de  Delphes ,  au  rapport 
du  même  Paufanias. 

CLYMÈNE  ,  Cfymtme  ,  (e) 
Kxu/^tfn  t  l'une  des  femmes ,  qui 
étoient  les  compagnes  ^  les  con- 
fidentes d'Hélène.  Elle  ed  unie 
par  le  poëte  Stéfichore  au  nom- 
bre des  captives  faites  par  les 
Grecs.  On  la  voyoit  auffi  repré- 
ièntée  dans  le  temple  de  Del- 
phes. 

CLYMÈNE  ,  Cfymene  ,  (/> 
Kxvf^m ,  femme  de  Diâys.  Ut 
avoient  fervi  l'un  &  l'autre  de 
père  &  de  mère  à  Perfêe  ,  &  l'a*- 
voient  élevé  comme  ktar  propre 
fils  dans  Tifle  Sériphe ,  oti  Ton  a 
dit  que  les  flots  l'avoient  porté. 
Les  Athéniens  avoient  confàcré 
chez  eux  un  autel  à  Diâys  &  à 
Clymène. 

CLYMÈNE  ,  Cfymtne  ,  (g} 
K>vjuipM  «  mère  du  poëte  Homè- 
re 9  félon  les  habitans  d'Ios.  Ces 
peuples  prétendoient  avoir  cheat 
'  eux  la  fépulture  de  cette  femme  » 
ainfi  que  celle  d'Homère. 
N  CLYMÉNUS  ,  Cfymenus  » 
K^v/nmç  t  (h)  fils  de  Phoronée  9 
avoit  bâti,  félon  ceux  d'Hermio- 
aé  9  un  temple  à  Cérès  ChthoiHa 

(#)  Homer. Iliad.  L. m.?.  144,  Pa«£. 
|)aj.  6ç9. 
(/)  Pauf.  p.  II y. 
f^)  Pauf.  p.  655,  6$tf. 
(ir^  Pauf.  p.  151»  151* 


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^\6  CL 

lur  le  mofU  Çronos.  Sa  fœar» 
nommée  Chihonia ,  avoit  eu  part 
k  ta  con(lru6lion  de  ce  temple. 
Clyménus  ,  après  (a  mort  ,  fut 
mis  aa  rang  des  dieux  d'Hermio- 
né  ;  &  on  lui  érigea  en  confé- 
€|uence  un  temple  vis-à-vis  de 
celui  de  Cérès.  Uu  tems  de  Pau- 
fanias ,  il  étoit  fort  enrichi  de  fta- 
fues«  Cet  Auteur  ajoute  quil  ne 
connoit  point  d^Argien  du  nom 
de  Clyménus ,  qui  foit  venu  à 
Hcrmioné  ,  &  qu'il  croit  plutôt 
que  c'eft  quelque  furnotn  du  dieu 
des  enfers 

CLYMÉNUS,  C/y«ertïii,(tf) 
KM>/Jttv^ç  .  61s  de  Cardtf  &  l'un 
des  defcendans  d'Hercule  Idéen« 
Étant  venu  de  Crète  en  ÉKde  » 
il  célébra  les  jeux  à  Olympie  ; 
enfuite  t  il  consacra  un  autel  aux 
Curetés  ,  &  nommémem  à  Her- 
cule ,  fouine  titre  d'Hercule  pro- 
tedeur.  Endymion,  61»  d'Aëth- 
lius ,  chaffa  Clyménus  de  l'Élide , 
s'empara  dti  royaume ,  &  le  pro- 
pofa  à  (es  propres  enfans  pour 
prix  de  la  courfe. 

CLYMÉNUS,  Clymfnus ,  (b) 
Kt^v/h^yw;  s  61s  de  Presbon  ,  Se 
■)5etit-fils  de  Phrixus  ,  fuccéda  à 
Orchoménos  au  royaume  des 
Orchoméniens.  Ce  Prince  eut 
cinq  fils  Erginus  ,  Strat4us  ,  Ar- 
riion ,  Pyléiis  y  &  Axéus.  Il  périt 
malbeureufement ;  car, ' un  jour 
que  Ton  célébroit  la  fête  de  Nep- 
tune OncbeftiuS)  il  fuc,  tué  par 

(«)  Pauf.  \K  %o6,  Mém.  de  l'Acad, 
des  Infcript.  &  Bell.  tett.  Tom.  VIII, 

P«  ?'7« 

(*)  Pauf.  pag.  598.  Mém.  de  TAcad. 
des  Infcript.  &  BeU*  Lcic.  Tom.  VU. 
pag.  6. 


CL 

des  Thébaîns ,  ^vec  qu!  51  avoît 
pris  querelle  pour  un  fort  léger 
fil  jet.  Erginus  l'aîné  de  fes  fils  lut 
fuccéda  ,  &  voulant  ven^r  la 
mort  de  fon  père ,  il  leva  un  ar* 
mée  avec  fes  frères  ,vint  attaquer 
les  Thébains ,  les  tailla  en  pièces  » 
&  ne  mit  les  armes  bas  ,  qu'à 
condition  qu'ils  lui  payeroient 
tous  les  ans  un  tribut  par  manière 
de  fatisfa^ion. 

CLYMÉNUS,  C(y/nm«i,  (r) 
Kxb/itmç  «  le  fécond  des  enlan» 
d'Œnée  &  d'Altée ,  au  rapport 
de  M-  l'abbé  Banier. 

CLYMÉNUS  ,  Ctymenus  / 
Kxv/Litvoç ,  père  d*Harpalice.  Voye^ 
Harpalice. 

CLYMÉNUS  ,  Clyménus  , 
Kx'JiLtfm  ,  fat  un  des  furnoms  de 
Pluton. 

CLYMÉNUS,  Clyménus,  (d) 
KxJ^fwç ,  frère  d'Iphiclus  &  on- 
cle de  Protéfitaiis  ,  eft  compté  , 
par  Valérius  Flaccus  ,  au  nombre 
des  Argonautes.  Cet  Auteur  eft 
le  feul  où  fe  trouve  le  nom  de 
Clyménus. 

CLYPÉE ,  Clypea  ,  Kv^U  , 
la  même  que  Clupée.  Fûye^  Cla^ 
pée. 

CLYPÉUS.  Voyei  Bouclier. 

CLYPÉUS  ,  (e)  fut  anffi  le 
nom  d'une  jiburne.  On  fçait  que 
Les  liburnes  étoient  une  efpece 
de  vaiiTeau. 

CLYTEMNESTRE  , 
Clytemtitflta    ,     Kii^roufJivis^     « 

(0  Mytîî.  par  M.  TAbb.  Ban.  Tom. 
I.  p.  171. 

(d)  Mém.  de  PAc^id.  des  Infcrip.  9l 
Bell.  Lett.  Tom.  îî.  p.  84. 

fe)  Mém.  de-  TAcad.  des  Infcript.  fip 
Beli.  Lett.  Tom.  IV.  p^g.  1.50. 


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CL 

fa)  fîlle  de  Jupiter  félon  la  Fable, 
oc  de  Tyndarc  ,  roî  de  Sparte , 
felon  la  vérité.  Sa  mère  Te  nom- 
snoit  Léda.  Ses.  frères  étoient 
Caftor  &  PoHux.  Elle  avoit  auffi 
une  fœur.  Ceft  lafameufe  Hélène. 
S'il  en  faut  croire  Euripide  « 
Cljytemneftre  fut  d*abord  mariée 
k  Tantale ,  fils  de  Thyefte ,  qu* A- 
gamemnon  roi  de  Mycènes  fie 
mourir.  Elle  époufa  enfuite  le 
meurtrier  même  de  fon  premier 
mari.  Mais ,  Euflathe  ,  fur  le  on- 
iième  livre  de  TOdyiTée  ,  traite 
de  fable  ce  premier  n^ariage  ,  par 
l'autorité  d'Homère  ,  qui  parle 
d'Âgamemnon  comme  ayant 
époufé  une  fille  fi  jeune ,  qu'il  n'y 
avoit  aucune  apparence  qu'elle 
eût  déjà  eu  un  autre  mari. 

Quoi  qu'il  en  foit ,  Agamem- 
non  partant  pour  Troye,  laiffa 
auprès  de  Oytemneftre  fa  fem- 
ihe  ,  un  fidèle  miniftre ,  dont  les 
confeils  dévoient  la  préferver  des 
pièges  qu'on  pourroit  tendre  à  fa 
vertu.  Ce  miniftre  étoit  un  chan- 
tre habile  ,  dont  les  maximes  , 
parées  des  grâces  de  la  poëfie, 
ne  pouvoient  nianquer  de  trouver 
dans  les  cœurs  un  facile  accès. 
Tant  qu'il  fut  auprès  de  Clytem- 
neilre,  elle  refufa  cooAamment 
de  prêter  l'oreille  aux  difcour$ 
féduéèeurs  d'Égifthe  ,  &  ne  fran^  - 
chit  enfin  les  bornes  de  la  pudeur, 
que  lorfqu'ayant  confemi  à  l'éloi- 
gnement  de  ce  Sage ,  elle  fe  fut 
privée  de  l'appui  qui  l'eût  empê- 
chée dé  tomber  dans  le  précipice. 
Son  commerce  avec  Égifthe  de- 


vînt  dès-lors  fi  criant  ,  qu'Aga- 
memnon  lui-même  en  apprit  la 
tride  nouvelle  fur  la  fin  du'  fiege 
de  Troye,  &  réfolut  de  s'en  ven- 
ger ,  dès  qu'il  feroit  de  retour  ; 
mais ,  (à  femme  le  prévint  &  le 
fit  tuer  à  fon  arrivée  avec  fa  ri-* 
raie;  c'étoit  CaiTandre  qu'Aga- 
mçmnon  avoit  fait  fa  captive  âc 
fa  concubine. 

L'infidèle  Clytemncftre  épou/a 
enfuite  Égifthe,  6c  lui  mit  la  cou- 
ronne fur  la  tête  ,  qu'il  garda  fept 
ans.  Mais  ,  fon  crime  ne  demeura 
pas  impuni.  Elle  avoir  eu  trois 
enfans  d'Agamemnon  ,  Orefte; 
Iphigéaie  ,  &  Éledre.   Orefte  » 
qui  avoit  été  obligé  de  prendre 
la  fuite  pour  éviter  d'être  la  vic- 
titne  de  l'intiâgue  de  fa  mère ,  re- 
vint à  Mycènes.  Cependant ,  on 
fit    courir    le    bruit    qu'il    éto  t 
mort  ;  ôc  Clytemneftre  &  Égi(- 
the  en  eurent  tant  de  joie ,  qu'ils 
allèrent  incontinent  dans  le  tem- 
ple d'Apollon  pour  rendre  grâces 
aux  dieux  de  cette  agréable  nou- 
velle. Orefte ,  y  étant  entré  avec  . 
k$  foldats,  &  ayant  fait  arrêter 
les  gardes,  tua  de  fa  propre  maia 
fa  mère  &  fon  malheureux  amant , 
vengeant  ainfi  la  mort  de  (on  père 
&  celle  de  foi)  ayeul.  On  les  en- 
terra hors  de  la  ville  ;  aufii ,  com- 
me le  remarque  Paufanias,  n'é- 
toient-ils  pas  dienes  d'avoir  leur 
fépulture  au  n)eme  lieu  qu'Aga- 
memnon  ,  &  ceux  qui  avoient  été 
tués  avec  lui. 

CLYTEMNESTRE  ,    C/y- 
temncflra ,    {b)  nom  d'une   tia- 


(«)  Pauf.  p.  114.  <&*/ef.  Jnven.Satyr.  Jdcs  Infcrîpt.  &  Bell.  Lett.  T.  V.  pag, 
é.  V.  654.  Myth.  pat.  M.  l*Abb,  Ban.  T.  j  139.  T.  XIII.  p.  99 ,  101, 
yu.  p.  114.  à'  ptiv.  M^m.  de  TAcad.  1     (4)  Ciccr.ad  Amie.  L.  VII.  Epift.  u 


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44«  CL 

gédie  du  poëte  Âttius ,  oii  Ton 
repréfentoic  Agamemnon  retour- 
nant dans  fon  païs  avec  600  mu- 
lets ,  chargés  des  dépouilles  de 
Troye ,  qu'il  avoit  détruite.  Ci- 
céron  parle  de  cette  tragédie  dans 
une  de  Tes  lettres* 

CLYTES  ,  Qlytct ,  (a)  peu- 
<^  pie  de  Macédoine,  chez  qui  fe 
trouvoit  quantité  d'excellent  ni- 
tre  j  félon  Pline.  Mais ,  au  lieu  de 
in  Clytis  ,  qui  fe  trouve  dans  tou- 
tes les  éditions  ,  le  P.  Hardouin 
lit  dans  la  fieone  in  Litis^ 

CLYTIDES  ,  Clytidcs.  La 
famille  des  Clytides  dans  la  Grè- 
ce ,  étoit  fpécialemenc  deftinée 
aux  fondions  des  Ârufpices,avec 
celle  des  Jamides. 

CLYTIE  ,  Clytîa  ,  Kwrl^^  , 
(b)  fille  de  rOcéan  éc  de  Thétis, 
fut  d'abord  aimée  du  Soleil  , 
qui  la  quitta  enfuite  pour  s'at- 
tacher à  Leucothoé.  Elle  en  con- 
çut une  fi  grande  jaloufie»  que 
pour  fe  venger  de  fa  rivale ,  elle 
•découvrit  fes  amours  au  roi  Or- 
chame  fon  père.  Ce  Prince  ,  de- 
venu furieux  à  cette  nouvelle  ,  fit 
enterrer  fa  fille  toute  vive*  Mais , 
Clytie  n'en  fut  pas  pour  cela 
aimée  de  nouveau  du  Soleil.  Ce- 
lui-ci au  contraire  ne  voulut  pas 
k  regarder,  &  perdit  entièrement 
l'amitié  qu'il  avoit  pour  elle. 

Clytie  ne  fe  dépouilla  p9<  de 
fon  amour  à  l'exemple  de  fon 
amant;  elle  en  conçut  une  lan- 
gueur qui  eût  donné  au  Soleil  au 
moins  quelques  fentimens  de  pi- 
tié «s'il  eût  voulu  jetter  les  yeux 

i^)  Plîn.T.II.  p.  564 


{h]  Ovld.  Meum»  L,  IV«  Myth.  par|p.  173.  &  Jmsv, 


CL 

fur  Tétàt  déplorable  de  cette  mali 
heu reufe* nymphe.  Enfin  ,  comme 
elle  fe  laiffa  gouverner  par  les  uani^ 
ports  d'un  amour  qui  fe  changeoit 
en  furie  ,  elle  ne  trouva  plus  rien 
dans  la  compagnie  des  autres 
nymphes,  qui  ne  lui  fût  odieux 
&  inlupportable  ;  6c  elle  demea* 
roit  jour  &  nuit  fur  la  terre  ,  (ans 
avoir  autre  chofe  qui  la  couvrit 
que  fes  cheveux,  qui  fe  répan- 
doient  fur  fon  corps.  Elle  pafla 
ainfi  neuf  jours  entiers ,  &  pen- 
dant ces  trifies  journées  ,  elle  ne 
prie  point  de  nourriture,  &  ne 
te  reput  que  de  fes  larmes.  Elle 
ne  fe  remua  jamais  de  l'endroit 
oh  la  douleur  l'avoit  contrainte 
de  s'affeoir;  elle  tournoit  feulemem 
la  tête  félon  qu'elle  voyoit  aller  le 
Soleil,  afin  de  fuivre  au  moins 
des  yeux  ce  dieu  qu'elle  aimoit  en- 
core. Au  refte ,  on  dit  qu^  fon 
corps  demeura  attaché  à  la  terre» 
que  fes  membres  furent  convertis 
en  feuilles  ,  &  qu'une  fleur  fem- 
blable  au  fouci ,  prit  la  place  de 
fon  vifage.  Mais  ,  quoiqu'elle 
tienne  à  la  terre  ,  &  qu'elle  y  foit 
attachée  par  les  liens  de  fes  raci- 
nes, elle  fe  tourne  toujours  du 
côté  oh  efl  le  Soleil  ,  ôc  Qytîe 
dans  ce  changement  confèrve  en* 
core  fon  amour. 

Explication  de  cette  FahUm 

Clytie  n'efl  autre  chofe  que  U 
fleur,  qu'on  appelle  Héliotrope,  on 
Tourne-foL  L'on  a  feint  apparem- 
inent  qu'elle  a  voit  de  la  jalou  Ge  pour 
Leucothoé ,  parce  que  cette  forte 
de  plante ,  imite  ,  pour  ainfî  dire  , 

M.  TAbb.  Ban.  Tom»  I.  p.  56.  T.  IV. 

Tarbrc 


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CL 

J'arbre  qui  porte  l'encens ,  &  tâ- 
che s^um  d*en  donner  ,  comme 
pour  mériter  l'amour  du  Soleil 
qu'elle  regarde  éternellement.  En 
effet ,  lorfque  l'on  fend  la  tige  de 
cette  fl^  ,  il  en  fort  une  humeur 
gluante  qui  reflemble  à  de  la 
^omme  fondue  ,  qui  a  une  odeur 
approchante  de  celle  de  l'encens. 
Un  homme  fçavant ,  &  qui  a 
voyagé  par  tout  le  Levant,  comme 
l'on  dit  que  les  Philofophes  voya-» 
geoient  autrefois  pour  s''inftruire,& 
pour  connoître  la  nacure^aflure  que 
riléliotrope ,  plantée  auprès  des 
arbres  qui  portent  Tencens  »  les 
fait  mourir  ,  &  qu'elle  meurt 
bientôt  après.  Il  y  a  toute  appa- 
rence que  cette  circonftance  a 
donné  lieu  à  cette  fable. 

Il  ne  faut  pas  confondre  la  plan- 
te Héliotrope  avec  une  pierre  pré- 
cieufe  de  ce  nom ,  qui  a  comme 
àés  veines  fanglantes ,  &  qui , 
étant  mife  dans  Teau^  rend  de 
couleur  de  fang  les  rayons  du 
Soleil  qui  en  approchent  ;  mais , 
étant  hors  de  Veau ,  elle  repré- 
fente  le  Soleil ,  comme  feroit  un 
miroir  ^  ôc  en  montre  facilement 
réclîpfe. 

Cette  plante  ,*  dont  il  eft  tant 
parlé  dans  cette  f^ble ,  a  donc  tant 
d'amoflr  p*our  le  Soleiî ,  qjVile  fe 
tourne  toujours  du  côté  où  il  eft, 
lors  même  qu  il  ne  reluit  pas ,  &c 
que  l'air  eft  nuageux  &i  couvert. 
Et  de  nuit  elle  relTerre  &  ferme 
fa  fleur ,  comme  de  déplaifir  & 
de  douleur  de  Tab/ence  de  Ton 
amant.  Au  refte ,  il  y  a  plufieurs 
fortes  d'Héliotropes  ;  mais  ,  il  eft 
vrairemblable  que  c'eA  de  la  gran- 
de efjpece  dont  il  s'agit  ici. 

Tom.  XL 


C  L  449 

On  demandera  peut-être  pour, 
quoi  le  Soleil  la  quitta  pour  Leu* 
cothoé ,  au  moins  ce  que  l'on  veut 
fignifier  par  cette  infidélité  d'A- 
poUon  ?  Four  moi  ,*  je  penfe  avec 
quelques-uns,  que  cette  plante, 
ayant  été  autrefois  de  grand  ufage 
dans  la  Médecine  ,  perdit  depuis 
ion  crédit,'  &  qu'il  lui  arriva  ce 
qui  eft  arrivé  à  quantité  de  fim- 
ples,  quon  s*eh  eft  fervi  en  un  - 
tems ,  6{  qu'on  les  a  abandonnées 
en  un  autre ,  &c  qu'on  a  feint  fur 
cela  que  le  Soleil  ,  qui  eft  Je  dieu 
de  la  Médecine  ,  quitta  Clytie 
pour  Leucothoé. 

Au  relt^  ,  nous  voyons  dans 
cette  fable  ,  non  feulement  une 
fleur ,  mais  un  ferpent  fous  cette 
fleur  ,  je  veux  dire  la  jaloufie. 
Voyez  ce  que  fait  Clytie ,  6c  vous 
verrez  ce  que  peut  faire  un  jaloux. 
Il  veut  être  aimé ,  il  crainfde  ne 
l'êtrj  pas;  il  a  peur  qu'un  autre 
ne  pofTede  ce  qu'il  fouhaite  être 
à  lui  feul.  Et  cependant  il  fait 
tout  ce  qu'il  peut  pour  fe  priver 
lui-même  de  ce  qu'il  fouhaite  , 
de  ce  qu'il  aime ,  &  même  de  ce 
qu'il  poflede.  Ainfi  Clytie  aime 
le  Soleil  dont  elle  étoit  auffi  ai- 
mée ;  &  parce  qu'elle  tâche  de  le 
poiTéder  toute  feule  ,  elle  le  perd 
pour  jamais  par  Ja  méchanceté 
dont  elle  ufe^nvers  la  miférable 
Leucothoé.  Cela  ne  montre- t-il 
pas  que  la  jaloufie  eft  capable 
des  plus  grands  crimes ,  &  qu'au f- 
fi-tôt  qu'on  commence  à  être  ja- 
Joux  ,  on  commence  à  devenir 
fon  propre  ennemi  ,  &  ennemi 
de  ce  qu'on  aime,  ou  plutôt  de 
ce  que  l^on  penfoit  aimer. 
.  •   CIYTIE  ,  Clytu  ,  K.vrk  » 

Ff 


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A^O  CL 

0  fille  de  Pandare  ,  &  fœur  de 
Camiro*  Foye^  Camiro. 

CLYTÎUS ,  Clytius ,  K>uti'cç, 
un  des  géans  aoi  firent  la  guerre 
aux  dieux.  Vulcain  le  cerrafTa 
aVec  une  maflue  de  fer  rouge  ^ 
&  le  mit  ainfi  hors  de  combat. 

CLYTIUS ,  Clytius ,  Kxvrl^ç  » 

(b)  père  de  Proclée  ,  qui  fut  ma- 
riée à  Cycnus  ,  fils  de  Neptune. 
II  fut  auffi  père  de  ce  Calétor, 
qui  expira  fous  les  coups  d*Ajax. 

CLYTIUS ,  Clytius^  Kai;t/oc , 

(c)  fils  de  Laomédon  &  frère  de 
Priam.  C'efi  le  même  qui  précède. 

CLYTIUS ,  Clytius ,  K>.vr loç , 
(^d)  capitaine  Troyen ,  fils  d'Éo- 
ie ,  naquit  à  Lyrnefle  ,  ville  de  la 
Troade.  Il  fut  père  de  plufieurs 
aiuftres  héros.  Virgile  nomme  en- 
tr'autres  Acmon  &  Euménius. 
Clytius  fut  tué  par  Turnus. 

CLYTIUS ,  Clytius ,  KM/rrcr^ 
(e)  jeune  héros»  un  des  chefs  de 
J  armée  de  Turnus ,  fut  l'objet  de 
la  tendrefTe  de  Cydon. 

CLYTIUS  ,C/y/iw ,  Kxi/Tfcç, 
f/)  père  de  Pirée,  le  fidèle  com- 
pagnon de  Télémaque. 

CLÏTIUS ,  Clytius,  K>vr!o<;  , 
(g)  fils  d'Alcméon,  &  d*une  fille 
de  Phégée.  Ayant  appris  que  Tes 
oncles  maternels  avoient  fait  périr 
Alcméon  fon  père ,  il  rompit  avec 
eux  ,  ôc  fe  retira  en  Élide. 
'  CLYTIUS,  Clytius,  K\«Tfcu 


CL 

(h)  Athénien  ,  fut  père  de  Phéno» 
qui  épou(à  Lamédon. 

CLYTOMÉDÉE,  Clytomc 
deus,  Kxi/TOyun/fJç,  (i)  fils  d*É- 
nops,  fut  vaincu  par  Neftor  au 
combat  du  cefle. 

CLYTON  ,  Clyton  ,  ^k)  l'un 
des  fils  de  Palla$,  au  rapport  d'O- 
vide. 

CLYTUS,  Clytus^  K^^roç^ 
(/)  fils  d'Euryte  &  d'Antiope,  ett 
mis  par  Apollonius  au  nombre 
des  Argonautes.  Il  n*y  a  que  cet 
Auteur  qui  faiTe  mention  de  Cly- 
tus. 

CLYTUS,  Clytus  ,  K  vtoç. 
On)  capitaine  Grec ,  fut  père  de 
Dolops  f  qui  périt  de  la  maîo 
d'Heâor. 

CLYTUS  ,  Clytus ,  Kxiroq  , 
(n)  entra  en  lice  avec  Dryas  ^ 
pour  avoir  la  princefle  Pallène, 
fille  de  Sithon ,  roi  de  la  Cher- 
fonèfe  de  Thrace.  Dryas  fut  vain- 
cu ;  mais ,  ce  fût  par  la  fraude  de 
Pallène.  Cette  Princefle  époufa 
donc  Qy tus ,  &  ils  régnèrent  en- 
femble. 

CLYTUS,  Clytus  ,  autrement 
Ctitus.  Foyer  Clitus. 

CLYTUS  ,  Clytus  ,  (0} 
préteur  des  Acarnaniens  ,  Va9 
191  avant  l'Ère  Chrétienne.  Cet- 
te qualité  lui  donnoit  Hne«  auto- 
rité fouveraine  fur  ceux  de  (a  na« 
tion. 


(4)  Pauf.  p.  666, 

(è)  Pauf.  p.  6)4. 

(c)  Homer  Iliad.  L.  XV.  ▼.  417.  L. 
XX.  V.  s)7»  1)8. 

{d)  Virg.  i£neid.  L.  IX.  ?.  774.  L. 
X.  V.  laÇ.  L.  XI.  V.  666. 

(#)  Virg.  i£neid.  L.  X.  v.  ttç. 

(/)  Homcr.  OdyC  t.  XV,  ▼•  5»u  . 

U)  Pmf*  P*  }Z#^ 


Chy  Pauf.  p.  çtf. 

(s)   Homer.  Iliad.  1.  XXIII.  ▼.  6|4« 

iJO  Ovid.  Métain.T..  VII.  c.  it. 

(t)  Mém.  de  PAcad.  des  Infcnpt.  ft 
Bell.  Lecc.  Tom.  IX.  pag.  84. 

(m)  Hotner.  Iliad.  L.  XI.  v.  |os. 

(»>  Mém.  de  PAcad.  des  Ink.  ft 
Bell.  Lett.  T.  XIV.  p.  191. 

Cl)  Jlu  Uvt  L.  XXXVl,  c.  Il  >  lit . 


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.    -  GN   _ 

Ce  Magiftrat  (e  laiflTa  engager 
dans  le  parti  d'Antiochus ,  contre 
les  Romains  ;  &  jugeant  qu'il  ne 
lui  feroit  pas  facile  de  foulever  les 
faabitans  de  Leucade ,  capitale 
de  l'Acarnanie ,  tant  qu'ils  appré- 
henderoient  la  flotte  des  Romains, 
qui  étoit  aux  environs  de  Céphal- 
lénie ,  commandée  par  Atilius  ^  il 
entreprit  de  les  tromper  par  un 
firatagéme.  Après  qu'il  eut  re- 
présenté  en  pleine  afTemblée ,  qu'il 
falloit  diftribuer  tous  ceux  qui 
portoient  les  armes  »  dans  Médion 
&  dans  Thurium ,  pour  empêcher 
Antiochus ,  ou  les  Étoliens  ^  de 
s'emparer  de  ces  deux  villes  qui 
étoient  fituées  dans  le  cœur  de 
l'Acarnanie  ;  il  fe  trouva  dans 
le  Confeil  des  gens  qui  répon- 
dirent qu'il  n'étoit  pas  néceiTaire 
de  prendre  fi  chaudement  alar- 
me ,  6c  de  mettre  tout  le  monde 
en  mouvement  ;  qu'il  fufHfoit  d*y 
envoyer  un  renfort  de  cinq  cens 
hommes.  Lors  donc  qu'on  les 
eut  mis  au  pouvoir  de  Qytus ,  il 
en  fit  entrer  trois  cens  dans  Mé- 
dion ,  &  deux  cens  à  Thurium  , 
pour  les  livrer  enfuite  au  Roi , 
comme  des  otages  qui  lui  répon- 
droient  de  toute  la  nation  ;  &  ce 
Prince  fut  introduit  bien-tôt  après 
dans  Médion. 

C  N. 

CN ACADIUS  ,  Cnacadius , 
lCrfltx«//o; ,  (tf)  montagne  du  Pé- 
loponnèfe  dans  la  Laconie ,  &  l'u- 
ne des  trois  montagnes  entre  lef' 
quelles  étoit  bâtie  la  ville  de  Las  ^ 

(«)  Pauf.  p.  110. 
(*)  Pauf.  p.  490. 
(f )  Pauf,  p.  36».  ( 


CN  45t 

félon  Paufanîas.  Il  y  avoit  ftir  le 
mont  Cnacadius ,  un  temple  dédié 
à  Apollon  Carneus. 

CNACALÉSIE ,  CnacaUÇm  , 
fiirnom  de  Diane  ,  ainfi  appellée 
du  monc  Cnacalus.  Voy^:^  l'arti- 
cle fiiivant. 

.  QX^ KQKÙJS,  Cnacalus ^(b) 
KvixcLxoi  ,  montagne  du  Pélo- 
ponnèfe ,  auprès  du  bourg  de 
Caphies  dans  l'Arcadie.  Pauunias 
dit  que  Diane  y  avoit  un  temple  » 
où  elle  étoit  adçrée  fous  le  nom 
de  Diane  Cnacaléfie  ,  &  où  l'oa 
faifoit  tous  les  ans  la  fête  de  cecte 
Déeffe. 

Ortélius  a  cru  que  le  nom  de 
Cnacalus  ôc  celui  de  Cnacadius 
fignifioient  une  même  montagne, 
&  que  la  différence  vient  de  U 
faute  des  copifies  qui  ont  pu  faci<* 
lement  changer  un  >  en  ;  mais, 
les  circonflances,  que  Paufanias 
attache  à  l'une  ,  ne  conviennent 
pas  à  l'autre;  d^  plus,  il  les 
donne  à  deux  provinces  difl^en- 
tes. 

CN ACIAS ,  Cnacias  ,  Cr:t jc  '<xu 
(c)  nom  d'un  des  chevaux  de 
l'Athlète,  Clifthène.  Foyei  Clif* 
thène. 

CN ACION ,  Cnacion,  fleuve. 
Foyei  Gnacion. 

CNAGEUS  ,  Cnageus ,  (d) 
Kfctysùi^  fondateur  d'un  temple 
de  Diane  ,  qui  en  prit  le  nom  de 
Diane  Cnagia.  Fo,  Diane  Cnagia* 

CNAUSON.  .  Cnaufin  ,  (<) 
Rmyo-or ,  ville  du  Péloponnèfe, 
dans  l'Arcadie.  Ce  fut  une  de  cel- 
les qui  envoyèrent  la  plus  grande 


(d)  Pauf.  p. 
(0  Pauf..  p. 


498. 


Ffij 


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4$i  C  N 

f)artie  de  leurs  habita  ns  à  Méga- 
opolis,lorfqu*on  fonda  cette  ville* 
Cnaufon  étoit  fituée  dans  lé  pais 
des  Eutréfiens. 
.  CNAZON ,  Cnaion  ,  aiguille, 
dont  les  femmes  Romaines  (t 
forvoient  poTir  arranger  leurs  che- 
veux; eIles*appeUoitauf&  Difcer*^ 
niculum. . 

CNÉMIDES,  Cnmides  , 
R  iffJtUfç,  Vbyei  Cnémis. 

CNÉMIS ,  Cnemis ,  (a)  mon- 
tagne de  Grèce  <lans  la  céotie. 
Une  partie  des  Locriens  en  pre- 
noîent  le  nom  de  Locriens  Épic- 
némidiens*  C'étoient  ceux  t[ui  ha«» 
bitoient  au  pied  de  cette  monta- 

Sne.  L'on  y  voyoit  une  ville ,  que 
trabon  met  à  ToppoCte  du  pro- 
montoire de  Cénée  en  Eubée^ 
Oétoir,  félon  ce  Géographe  ,  une 
place  naturellement  bien  fortifiée. 
Pline  parle  de  cette  ville ,  auffi- 
bien  que  Pompotiius  -  Mêla  8t 
PtoLémée.  Ce  dernier  l'attribue 
aux^pumiens.  De  ces  quatre 
^Géographes  ,  trois  lifent  Cnémi- 
des  en  pluriel.  Pline  efl  le  feul  qui 
life  Cnémis  en  fingulier.. 

CNÈMON  fCnemon  j  K'-vV&'N 

Uf)  l'un  des  interlocuteirs  d'un 

dialogue  des  morts  de  Lucien.  Il 

f 'entretient  avec  Damnippe. 

CNÉMUS  ,  Cnemus ,  Ktvîf^oç  ^ 

Je)  Général  de  l'armée  navale  des 
^ac^démoniensyvivoii environ  la 
S7»e  Olympiade ,  432  ans  avant 
Jefus-Chrift,  Il  fit  une  entreprife 
fur  l'Acamanie  »  qui  ne  lui  fut  pas 
bjureufe.> 

fs)  Strab.  p.  4x6 ,  416.  Plin.  T.  I.  p 
rçâ,  Pomp.  Mel.  p,  113*  Ptolem.  L.  III 
Cé  M» 


co 

CNÉUS|  Cneus,  Le  fumom  de 
Cnéus  9  que  les  Romains  don- 
noient  à  ceux  qui  venoient  au> 
inonde  avec  quelque  marque  na- 
turelle »  ce  que  les  Latins  appel- 
lent Navus  y  à  été  commun  à  plu- 
iîeurs  grands  Hommes  ,  qu'on 
pourra  chercher  par  le  nom  fous 
lequel  ils  ont  été  plus  connus. 

CNIDE,  C/i/Vtfx,  nom  de  ville, 
qui  s'écrit  auffi  Gnide.  VoycT^  Gui- 
de. 

CNIDIENNE,  fumom  de 
Vénus  ,  ainfi  appellée  de  la  dévo- 
tion particulière  que  les  habitans 
de  Cnîdeavoient  pour  elle. 

CNIOIENS,  C/zii/ii,Kr,//c:. 
Voyci  Gnidiens. 

CNISSODIOCTÈS ,  CniP" 
dhâcs,  K  ictrcJ'icâKrvç ,  Tun  des 
combattans  de  la  Batrachomyo- 
machie. 

CNOPVS ,  Cnopus ,  {d)  Pun 
des  fils  de  Codrus,  tira  de  chaque 
ville  dlonie  un  certaiii  nombre 
d'hommes,  qu'il  fit  entrer  dans 
Érythres. 

Le  texte  de  Paufanias  dit  Ctéo- 
pus;  mais  ,  c'eft  Cnopus  qu'il  faut 
lire  avec  Meurfius ,  comme  dans 
Strabon  |  dans  Polyen ,  ôc  dans 
Etienne*  de  Byzance. 

CNOSSUS,  Cnojfus ,  Krao^'V^ 
nom  d'une  vUle.  Voye;^  Gnor« 
fus. 

C  o. 

co ,  Co, K», autrement  Coa 
Voye;^  Cos. 
CO,  Ca,K«,  (f) ville  StA 


J^'? 
it 


(c)  Thucyd.  p.  14».  ^  /tj>. 
"  Pauf.  p.  401. 
f  tolem.  Im  IV,  c.  ^ 


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E 


pte  ;  au  rapport  de  Ptolémée, 
'Q  Géographe  dit  que  vis-à-vis 
étoit  dans  une  ifle,  la  ville  de 
Cunonpolis ,  c'eft-a-dire  •  la  ville 
des  Qiiens.  Cette  dernière  don- 
.noie  fon  nom  au  nome  Cynopoli- 
te  9  dans  lequel  fetrouvoit  la  ville 
jde  Co.  Foyei  Cynopolis. 

COA,  Cotf,  Ki«,  (^)  ville 
ide  TArabie  heurepfe,  dont  il  eft 
parlé  dans  l'article  fuivânt.  Foye( 
cec  article. 

COA ,  Coa ,  (h)  nom  4'un  lieu 
dont  il  eft  fait  mention  au  troifiè- 
n\e  livre  des  Rois  &  au  feconiî 
desParàlîpomcnes.O/î/ii/af/  ve74[ 
aujffi  de  rÊgyipic  fi»  de  Coa ,  des 
chevaux  pour  S àlomon  ;  car^  ceux 
^ui  trafiquaient  pour  le  Roi  y  Us 
achetoient  à  Çoa  ,  ,6*  les  luiame-^ 
noient  pour  un  certain  prix,  Ainfi 
Tit-on  au  troîfième  livre  des  Rois, 
Quant  au  fécond  dés  Paralipomè- 
^es ,  il  porte  :  Les  marchands  qui 
^trafiquoient  pour  Salomon  9  ffli* 
foient  des  voyages  en  Egypte  fy  à 
Çoaj  &  lui  amenoient  des  chevaux 
'de  prix  qu'ils  y  achetoient* 

Les  Interprètes  ne  s'accordent 
J>oint  fur  rintelligenCe  du  nom  de 
Coa.  Il  y  en'  à  ,  ,di^  D.  Calmèt  ^ 
qpi  prennent  Coa  pour  Tifle  dé 
Co ,  célébré  par  les  puvraees  de 
foie  &  de  laine^  qu'on^  y  wifoit  ; 
mab  ,  cela  nç'prouve  cas  qu'il  y 
ait  eu  des  chevaux,  ni  qu*pnen 
ait  amené  à  Salomon  de  cet  en-: 
droit  -  là.  Mâlvénda  entr'autre^ 
croit  que  ces  chevaux "venoiérit  de 
la  ville  de  Coa  de  TArabie  heu- 
jreufe.  D'autres  Tes  amènent  dç 

(tf)  Ptolem.  L.  VI.  c.  7. 
(*)  Reg.  L.  ÏÏI.  c.  10.  V.  »8.  Parai. 
Xr.  II.  ç,  I.  V*  i6i  Ftok^Q.  I,.  VI,  c,  7. 


CO  -455 

Co  »  vHle  d'Egypte  ,  .&  capitale 
du  canton  y  nommé  Cynopoli* 
tain. 

.  On  pourroit  traduire  l'Hébreu 
par  ;  Onfaifoit  venir  des  chevaux 
à  Salomon  de  V Egypte  &  de  Mi^ 
çho'é  ;  car  ,  Pline  affure  qu'an- 
ciennement la  Troglodyte  ,  voifi- 
ne  de  l'Egypte ,  s'appelloit  Mi- 
choë.  D'autres  traduifent  :  Qn 
amenait  à  Salomon  des  chevaux 
d^ Egypte  ,  6».  les  marchands  du 
Roi  achetoient  du  fil  à  prix  d'ar-» 

fent.  Us  prétendent  que  l'Hébreu 
»iichoa  lignifie  du  fil.  Jarchi  l'en- 
tend d'une  file  de  chevaux  atta- 
chés l'un  à  l'autre,  queue  à  queue^» 
ce  qui  eft  fuivi  de  plufieurs  nou- 
yaux  Interprètes.  Bochartentend| 
par  Michoa ,  un  tribut  ;  &  il  tra- 
duit :  On  tirait  des  chevaux  de 
l'Egypte  ;  &  quant  aux  tributs  « 
ies  .fermiers  de  ce  Prince  Us  rece% 
voient  fuivant  un  certain  prix» 

Toute  la  difiiculté  confifte  ici  ^ 
en  ce  que  la  première  lettre  du 
mot  Hébreu  peut  fe  prendre  pour- 
une  prépofition  I  &  alors  on  lira 
de  Coa  ;  mais,  elle  peut  être  auiU 
une  lettre  eflentielle  &  infépara- 
l}le  du  mot ,  &  alors  le  mot  eft 
fufceptible  des  divers  fens  que  l'oa 
yient  de  lire. 

P(^ur  nous  borner  à  ce  qui  eft 
de  la  Géographie ,  il  f^ut  conclura 
qu'il  y  avoit  dans  l'Arabie  heu- 
ireufe  une  ville  nommée  Çoa ,  fe^^ 
loi)  ptolémée^aflez  près  delà  mer, 
"èi  prefque  vis-à-vis  iiïe  Tifle  de 
Diofcoride. 

Co  A ,  Coa ,  K  r«  ,  (c)  fleuve . 

Plin.  T.  I.  p.  341. 
(0  PcQlem,  L.  Vlh  c.  I. 

Ffiij 


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4î4         C  O 

e  Afie ,  qui  »  félon  Ptolé'mée  , 
avoit  fa  fource  au  mont  Imaiis  , 
&alloit  fe  perdre  dans  llndusj 
après  s'être  mêlé  avec  le  fleuve 
Suafte. 

COACTEURS  ,  CoàStores. 
(it)  On  appelloit  ainfi  à  Ron>e 
ceux  qui  exigeoient  le  prix  de  ce 
qui  avoit  été  acheté  dans  les  ven* 
tes  publiques.  Les  financiers  de  la 
république  avoient  auffi  des  Coac- 
teurs  9  pour  faire  payer  les  im- 
pofitioiis. 

COALÉMUS ,  CoaUmus,  {h) 
Kfdxf/uoç  ,  terme  qui  fignifie  hé- 
bété. On  furnommoit  ainfi  l'ayeul 
de  Cimon ,  à  caufe  de  fa  Aupidité 
&  de  fa  bêtife. 

COB  ARES ,  Cohares  ^  (c)  cer- 
taiil  Mede  »  qui  fe  mêloit  de  Fart 
magique  ,  mais  qui  éroit  plus  re* 
nommé  pour  en  faire  profeflîon^ 
que  pour  y  être  bien  habile.  Oé- 
toir  au  refle  un  homme  de  fens  & 
de  probité. 

S'étant  trouvé  à  un  fefiin  que 
donnoit  Beflus^  qui  s'étoit  fait 
déclarer  Roi  de  la  Baâriane ,  & 
qui  méprifoit  Alexandre  le  Grand, 
il  dit  par  fotme  de  préface  :  n  Qu^il 
91  n'ignoroit  pas  qu'il  ne  fût  plui 
»>  expédient  à  un  lerviteur  défaire 
t>  ce  qu'on  lui  demandoit ,  que 
i»  de  donner  confeil ,  parce  que 
19  ceux  qui  obéiffent  ne  courent 
t>  cjue  ta  fortune  des  autres  ;  au 
»  lieu  q^ue  ceux  qui  confeillent  » 
9»  fe  chargent  de  l'événement,  a 
Befins  lui  donna  la  coupe  qu*U 
tenoit  i  la  main  comme  lui  per- 
mettant de  parler  ;  &  Cobares  ^ 

M  Coût,  des  Rom.  par  M»  Kieup.  t 
pii9,  1 


co 

Tayant  prife,  pourfuivit  arnfi  :  ic  La 
^  condition  des  hommes  fe  peut 
n  dire  majheureufe  &  déplorable 
»  en  plufieurs  chofes,  mais  par- 
ti ticuhèrement  en  ce  point,qu'en 
n  nos  propres  affaires  nous  ne 
M  fommes  jamais  fi  avifés  qn'en 
n  celles  d'autrui.  Ceux ,  qui  né 
»  prennent  confeil  que  d'eux- 
i>  mêmes,  font  comme  une  taye 
D  fur  les  yeux^  qui  les  empêche 
»  de  voir  clair.  La  crainte  trouble 
9)  les  uns ,  la  cupidité  offufque  les 
99  autres ,  &  la  plupart  font  aveu- 
91  glés  d'un  certain  amour  naturel 
9f  qu  on  a  pour  fes  fentimens  »  & 
99  qu'on  appelleront  préfomptioa 
99  eh  un  autre  moins  fage  que 
99  vous.  L'expérience  vous  a  àp- 
99  pris  que  prefque  tous  les  hom* 
99  mes  ne  trouvent  rien  de  bon  » 
b  ou  pour  le  moins  d'excellent 
^  que  ce  qui  vient  d'eux.  Souve- 
99  nez- vous  que  c'efi  un  pefant 
99  fardeau  fur  la  tête  qu'une  coa- 
99  ronne.  Il  le  faut  porter  fàge« 
99  ment,  ou  il  vous  accablera. 
99  U  n'eft  pas  ici  befoin  de  fougue, 
99  mais  de  conduite,  a  A  quoi  il 
ajouta  ce  que  les  Baâriens  diibieiit 
en  proverbe  :  (^uun  chien  qui 
aboyé  ne  mord  voint  y  6*  que  les 
rivières  les  plus  profondes  font 
celles  qui  font  moins  de  truite 

Ce  difcours  tenoit  en  fufpend. 
toute  la  compagnie ,  lorfque  s'ou- 
yrant  davantage  ,  il  donna  à  Bef- 
fus  un  confeil  plus  utile  qu'agréar 
ble. 

99  Vous  avez ,  dit-il  ,  affaire  à 
M  un  ennemi  qui  né  s'endort  pas  j 


(J)  Plut.  T.  I  . 
C<)  Q*  Curt*  L 


pag.  480. 


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W  penfez  qu'il  eil  déjà  logé  à  vos 
ai  portes  »  &  je  fuis  fur  qu'il  aura 
91  plutôt  fait  avancer  fon  armée  3 
Il  que  vous  n*aurez  fait  retirer 
9>  cette  table.  Vous  parlez  de  fai. 
9f  re  venir  des  troupes  du  Tanaîs 
i>  &  de  vous  couvrir  des  rivières» 
n  comme  s'il  ne  pouvoit  pas  vous 
n  fuivre  par  tout  011  vous  fuirez* 
n  Les  chemins  vous  font  com* 
9f  muns  à  tous  deux ,  mais  plus 
n  fôrs  an  vainqueur.  Si  la  peur 
»  vous  donne  des  ailes  pour  vous 
99  (auver ,  Tefpérance  lui  en  don- 
9)  nera  de  plus  fortes  pour  vous 
9>  atteindre.  Que  ne  gagnez-vous 
99  plutôt  les  bonnes  grâces  du 
»>  plus  puifTant  ,  étant  certain , 
»  quoiqu'il  en  arrive ,  qu'il  vous 
91  fera  plus  avantageux  de  vous 
9>  rendre ,  que  d'être  fon  ennemi* 
9»  confidérez  que  le  royaume  que 
9>  vous  avez  9  n'efl  point  à  vous , 
9»  &  qu'ainfi  il  vous  eA  plus  aifé 
91  de  vous  en  pafler.  Alors  vous 
a»  commencerez  à  être  vraiment 
ff  Roi ,  quand  celui  qui  vous  peut 
p  donner  &  ôtet  le  (ceptre ,  vous 
9»  l'aura  mis  à  la  main.  Cefconfeil 
9»  eft  ûlutaire  ,  mais*  inutile  fi 
»  vous  ne  l'exécutez  prompte- 
91  ment.  Il  ne  faut  que  l'ombre  de 
9>  la  eaule  à  un  bon  cheval  pour 
n  le  Uire  aller  ;  mais  à  peine  un 
n  cheval  pefant  ira- 1- il  à  coups 
I»  d'éperon,  a 

Beflus  9  farouche  de  fop  natu- 
rel ,/  devenu  encore  plus  furieux 
{>arie  vin  ,  s'emporta  de  telle 
brte ,  qu'à  grand'peine  fes  amis  , 
purent-ils  empêcher  qu'il  ne  cuâc 


co  455 

Cobares  ;  car  »  il  avoit  déjà  tiré 
fon  cimeterre  >  &  fortit  de  table 
tout  forcené.  Cobares ,  échappé 
parmi  le  tumulte ,  alla  fe  rendre  à 
Alexandre. 

COBÉRATIUS  C9BÉRII,. 
LUS,  Coberatius  Coberillus  ,  {a) 
fur  un  tombeau  trouvé  à  Metz  , 
mené  trois  chiens  en  leffe ,  & 
tient  de  l'autre  main  quelque 
chofe  qui  reflemble  aflez  à  un  col* 
lier  de  chien;  il  étoit  peut-êtr( 
veneur  ^ians  quelque  grande  mai*> 
fon.  L'Infcription  eft  courte  ,  fit 
ne  contient  autre  chofe  que  ces 
mots  :  Aux  dieux  Mânes  ,  à  Cdr 
bératius  Coberillus, 

COBIOMACHUS ,  Cobioma^ 
chus  ,(b)  village  des  Gaules  »  fitui 
entre  Touloufe  &  Narbonoe  »  au 
rapport  de  Gcéron.  Ortélius  ai- 
meroit  mieux  lire  Cobiomaeus; 
qui  eft  une  terminaifon  plus  Gau- 
loife.  Car ,  comme  il  le  remarque 
très-bien,  l'antiquité  fournît  en« 
viron  trente  noms  ainfi  terminés. 
On  croit  que  c'efl  préfentement 
Cabaignac. 

COBULATUS ,  Cobulatus  i, 
(c)  fleuve  4^  l'Afie  mineure  ,  au 
rapport  de  Tite-Ltve.  Ortélieus 
prouve  KîAo^aToç  ,  Colobatùs , 
dans  les  fragmens  de  Polybe  »  & 
doute  fi  ces  deux  noms  ne  fignir 
fient  pas  la  même  rivière  que  le 
Cobilus  de  Valérius  Flaccus  ,  & 
le  Kp^dCiay^^  d'Apollonius.  Qaoi 
qu'il  en  foii ,  Tite-Tive  ne  met 
qu'une  journée  de  chemin  des  four- 
ces  du  Lyfis  au  fleuve  Cobula* 
tus. 


(d)  Suppl.  à  rAntîq.  expl.  par  D.  I     (h)  Cicer.  Orat.  pro  M*  Fonteî.  e.  0} 
Bwn.  4c  Momf,  Tom,  V.  p.  97,        |    CO  Tit.Ûv.  L.  XXXVIII.  c,  |j^  ^ 

ffiv 


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.  COBUM  ,  Coèum,  (a)  fleave 
d'Aûe  dans  la  Colchidp.  Il  avoit 
fa  fource  au  mont  Caucafe  ,*  & 
couloit  dans  le  pais  des  Suanes, 
au  rapport  de  Pline.  Arrien  en  fait 
^offi  mention  dans  Ton  périple  du 
Pont-  F.uxin  ,  &  l'appelle  x^^^i 
srrrayuiç.  Foye^  Çhobu«. 

COCALUS  ,  Cocalus  , 
K>'jt«>o; ,  Piince,  qui,  félon  Jui 
tin  t  fe  rendit  fouverain  de  la  Sici- 
le ,  après  que  la  race  des   Cy- 
clopes  qui  en  furent  les  premiers 
habitans ,  eut  été  éteinte. 

Ce  Prince  reçut  dans  fcs  États 
I  Dédale  ,  Torfqu'il  s'enfuit  de 
Crète  ,  épouvanté  des  mena- 
ces de  Minos ,  ■&  l'honora  de  fon 
amitié  ,  parce  qu'il  le  connoîflbit 
déjà  de  réputation,  Dédale  de- 
meura long-tems  dans  Tifle,  & 
fe  fit  admirer  des  habitans  par  fes 
talens.  Il  bâtit  entr'autres  chofes 
bne  citadelle  »  oii  Cocalus  plaça 
fon  palais  &  mit  fes  richeffes  en 
fureté.  Cependant ,  Minos  ayant 
débarqué  des  troupes  en  Sicile  , 
envoya  demander  à  Cocalus 
t[u*il  lui  livrât  Dédale  pour  le  pu- 
nir. Mais  ,  Minos  ayant  enfuite 
accepté  Thorpitalité  que  ce  Prince 
lui  nt  offrir  en,  lui  promettant  de 
le  fatisfaire  ;  Cocalus  l'engagea  à 
fe  baigner ,  &  le  fit  tenir  fi  long- 
tems  dans  le  bain  ^qu'il  y  étouffa  de 
chaleur.  Cocalus  rendit  fon  corps 
à  fes  foldats  ,  en  leur  difant  qu'il 
étoit  mort  pour  être  tombé  mal- 

*   (s)  Plin.  T.  I.  p.  50y. 

(h)  Juft.  Uv.  L.  IV.  c.  t.  Diod.  Sicul. 
pag.  193  »  194.  Mém.  dé  TAcad.  des 
Infcript.  &  Bell.  Lctt.  T,  IX.  pag.  i8â. 
{T.  XIII.  p.  14. 


co 

heureufement  dans  un  bain  d'eaK 
chaude. 

COCCAR A  ,  Coccdra  ,  (c) 
forte  de  gâteau  ,  qui  fe  faifoit 
chez  les  Grecs.  Le  nom  feul  en  eâ 
parvenu  jufqu'à  nous. 

COCCEIUS  ,  Cocceius  ,  (i) 
Kojwnfo;.  ybyei  Nerva ,  Proculus. 

Plutarque ,  dans  la  vie  d'Oihon, 
parle  d'un  neveu  de  ce  Prince,  qui 
étoit  encore  fort  jeune  à  la  mort 
de  fon  oncle.  Il  y  a  apparence  que 
c*eft  Cocceius  Nerva ,  qui  devint 
depuis  Empereur. 

COCCEIUS,  Cocceius, 
Koxxwfoç  ,  («)  fameux  architeâe , 
eut  la  conduite  de  divers  ouvra- 
ges qu'Agrippa  fit  faire  aux  envi- 
rons de  Naples,  entr'autres  de 
ces  chemins  fouterreins  ,  taillés  la 
plupart  dans  des  rochers ,  qui  s'é- 
tendent depuis  cette  ville  jufqu  a 
Putéoles  ou  Pouzzole  ,  &  depuis 
le  lac  que  les  Anciens  appelloient 
TAverne ,  jufqu'à  Cumes, 

COCCIUM,  Coccium,  lieu 
de  la  grande  Bretagne ,  félon  l'I-* 
tinéraire  d'Antonin.  Quelques 
exemplaires  portent  Coccio  à  l'a- 
blatif. Ce  lieu  étoit  fur  la  route 
de  Glanoventa  à  Médiolanum  , 
entre  Brémétonacis  &  Mancu- 
nium ,  à  vingt  mille   pas  de  la 

Eremière ,  6c  à'  dix-fept  mille  de 
i  féconde.  M.  Gale  croit  quec'eft 
RiblecheAer  qui  eft  à  vingt-deux 
milles  de  Brémétonacis ,  félon  lui. 
On  a  déterré  à  Riblechefter  d'an- 
ciens monumens ,  qui  (ont  prefr 

(c)  Antîq.   cxpl.    par   D,  ttm.  de 
Mofttf.  Tom.  III.  p.  ii9« 
U)  Plut.  T.  1.  p.  1074» 
(ff)  Strab,  p.  1^^. 


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CO 

que  tous  mention  de  l'aîle  des  Sat- 
inâtes, ala  Sarmatum  y  &  qui 
montrent  qu'elle  a  autrefois  occu- 
pé ce  lieu ,  quoique  les  Hilloriens 
n'en  difent  rien. 

COCCOCA,  Coccoca,  Kok- 
Xtoxa ,  l*un  des  furnoms  que  Ton 
donnoit  à  Diane*  Voyc^  Diane 
Coccoca, 

COCCON AS ,  Cocconas ,  {a) 
Kojcxorai  chroniqueur  de  Byzan- 
ce  y  étoit  un  des  plus  méchans 
hommes  qu'il  puifle  y  avoir.  Il  fe 
lia  avec  Alexandre  l'impofteur. 
Voye:(^  l'article  de  ce  dernier, 

COCCYGIE ,  Cûccygius ,  {b) 
Ko 'iKvy ioç  ^  montagne  du  Pélopo- 
nèfe  dans  TArgolide.  Paufanias 
dit  qu'entre  cette  montagne  & 
une  autre  qu'il  ne  nomme  pas ,  il 
y  avoit  un  chemin  qui  conduifoit 
à  la  ville  d'Halicé.  Cette  monta- 

Jne  s'appella  d'abord  Thornàx. 
We  prii-enfuite  le  nom  de  Coc- 
^y&^  f  parce  que  Jupiter  s'y  étoit, 
dit-on ,  niétamorphofé  en  coucou. 
Ce  Dieu  avoit  un  temple  fur  le 
fnont  Coccygie^  Au  bas  de  cette 
toontagne ,  on  voyoit  do  tems  de 
Paufanias  ,  un  autre  temple  fan$ 
toit,  ni  portes,  ni  ftatues  ,que  Ton 
croyoit  être  un  temple  d'Apol- 
lon. 

Plutarque  le  Géographe  parle 
du  mont  Coccygie  autrement 
que  Paufanias.  Il  le  met  auprès 
du  fleuve  Inachus ,  &  dit  qu'on 
l*appelloit  auparavant  Dîcéjus  » 
&  que  le  nom  de  Coccygius  lui 

(4)  Ludan.  T.  I.  p.  ?6t,  &  /ê^. 
(*)  Paof.  p.  M?,  154* 
(c)  Mém.  de  P Acad.  des  Infcrîpt.  & 
Beil.  Leit.  T.  XIII^^p.  457,  473. 
U)  Ludan.  T.  II.  p.  »5|*  &  SH* 


CO  457 

fot. donné  ,  parce  que  Jupiter  , 
étant  devenu  amoiJreuxdé  fa  fœur 
Junon ,  en  obtint  les  faveurs  ,  6c 
en  eut  un  fils. 

COCHÉ  ,  Coche  ,  Kc5x«  (0 
place  forte,  tellement  jointe  à  celle 
de  Ctéfiphon ,  qu'elles  fembloient 
ne  faire  enfemble  qu'une  ville  ;  de^ 
manière  pourtant  qu'elles  étoient 
réparées  par  le  Tigre.  C'eft  ce  que 
dit  St.  Grégoire  de  Nazianze  dans 
fa  féconde  harangue  contre  Julieil 
rApoHat.  Rufus  en  fait  une  ville 
de  la  Perfe  propre. 

COCHLIS  ,  Cochlis  ,  ^ox>k, 
{d)  courtifanne ,  qui ,  dans  un  dia- 
logue de  Lucien,  s'entretient  avec 
Parthénis, 

COCHON  ,  Porcus ,  (e)  étoit 
un  des  animaux  qu'on  oftroit  en 
facrifice.  Dans  les  infcriptions  de, 
Gruter,  un  prêtre  facrifie  en  Ef- 
p^gne  une  truie  &  trente  cochons. 
A.  Lacédémone  ,  félon  les  loix  de 
Lycuf gue ,  dit  Xénophon ,  le  Roi 
prenoii  un  cochon  de  chaque  ven- 
trée dans  tout  le  pays,  afin  qu'il, 
ne  manquât  pas  de  viâimes.  Les 
Athéniens  en  immoloient  aufli 
quantité  ,  dit  Elien ,  parce  que  cet 
animal  nuit  beaucoup  aux  moif- 
fons. 

Les  divinités ,  qui  ne  dédaî-» 
gnoient  pas  4^  recevoir  les  co- 
chons en  facrifice  ,  étoient  Her- 
cule ,  Priape,  Sylvain ,  Bacchus » . 
Cérès  ,  les  Lares  ^  &c.  Ces  der- 
niers en  écoient  appelles»  f^lon 
quelques-uns  )    Lares  Grundiles^ 

(t)  Antîq.  expliq  par  D.  Bern.  de 
Montf»  T.  II.  p.  155.  ér  fuiv,  Tom.  HI. 
pag.  118  9  119.  Recueil  d^Antiq.  par 
M.  le  CoQnt.  de  Cayl.  Tonu  L  pa{.  v»* 


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4î8  ^  O   . 

lies  cochons  qu'on  immoloit  a 
Cérès  ^  dévoient  être  noirs  ,  parce 
que  la  terre  eft  de  couleur  noire. 
Strabon  remarque  que  dans  ce 
canton  de  la  Gaule  Cifalpiné ,  qui 
de  fon  tems  confinoic  à  TÉcrurie , 
mais  qui  dans  les  (lecles  plus  re- 
culés en  faîfoit  partie^  la  terre  pro- 
duifoît  àes  fruits  de  toute  efpece  f 
&  une  fi  grande  quantité  de  glands, 
«Jo'on  y  voyoit  dé  nombreux  trou- 
peaux de  cochons  ,  dont  la  ville  de 
Kome  tiroit  une  partie  de  fa  fubfi- 
fiance.  Un  animai  fi  commun  en- 
gageoit  naturellement  les  Etruf* 
ques  à  le  placer  dans  leurs  monu- 
snensy  &  c'efl  peut-être  au  feul 
caprice  des  ouvriers  que  nous  de- 
vons ces  fortes  de  repréfentations. 
Cependant,  fi  l'on  veut  leur  fup- 
pofer  un  motif  religieux ,  il  fuffira 
de  fe  rappeller  que  les  Étrùfques 
fcelloient  du  fang  de  cet  anima) 
les  traités  d'alliance  &  de  paix 
avec  les  nations  voifines  ;  qu'ils 
rimmoloîent  dans  les  cérémonies 
du  mariage  »  &  le  reeardoient 
comme  le  fymbole  de  Ta  fécon- 
dité ;  qu'ils  Favoient  enfin  confa- 
cré  à  Cérès ,  perfuadés  ,  fans  dou-' 
te  comme  les  Égyptiens,  qu'en 
fouillant  la  terre  avec  fon  groin  , 
il  avôit  fourni  à  cette  Déefle  un 
exemple  du  labourage.  Il  n'en  fal- 
loît  pas  tant  à  ce  peuple  fup^rdi- 
tieux^  pour  donner  la  lof  ine  d'une 
tête  de  cochon  à  la  partie  infé- 
rieure de  deuxvafes,  dont  parle 
M.  le  comte  de  Caylus,  &  qui  fui- 
▼ant  toutes  les  apparences  écoieot 
cleftinés  à  fervir  aux  facrific^. 


U)  Cacf.  de  Bell.  GaU.  L.  IH, 
117.  Plin.  Tom.  I.  p.  tt6.  Notic 
eaul.  par  M.  d'Anvill. 


[T,pag.! 

:.  de  laL 


CÔ 

Athénée  parle  d'un  cochon  % 
demi-roti  &  à  demi> bouilli ,  pré- 
paré par  un  cuifinier  qui  avoit  eu 
l'art  de  le  vuider  &  de  le  farcir 
(ans  réventrer;  il  avoit  fait  un 
petit  trou  fous  une  épaule ,  par 
lequel  il  avoit  fait  fortir  toutes  les 
entrailles ,  &  après  avoir  lavé  le 
dedans  avec  du  vin  qu'il  avoit 
laifié  écouler  ,  il  àvoit  fait  enfuite 
entrer  la  farce  par  la  gueule. 

COCLÉS  [Horatius ],^onr. 
tlus  Codes.  Vbyei  Horatius. 

COCOSATES,  Cocofates,  {a) 
peuples  que  Céfar  nomme  parmi 
ceux  qu'il  met  dans  l'Aquitaine* 
Pline  lit  Cocoflates  Sexugnanes. 
San  fon  croit  que  ce  peuple  faifoit 
partie  des  Datiens  «  dont  parle 
Ptolémée.  Mais ,  cette  opinion 
n'eft  (ondée  fur  aucune  preuve  fo' 
lide.  A  parler  jufle ,  on  ne  fçait 
point  où  étolent  placés  les  Coco-, 
fates. 

COCTIENNES,  Comarug. 
Foye^  Cottiennes. 

COCYLITES  ,  Cocylitoi  , 
Ko <f.t/ An- 0t/ ,  les  Habitans  de  la  ville 
de  Cocylium.  Fbyei  Cocylium» 

COCYLIUM  ,  Cocylium ,  (^) 
Ky>LvMov  ^  ville  de  l'Aue  mineure 
dans  ta  Myfie.  Elle  ne  fubfiftoît 
déjà  plus  du  temps  de  Pline.  Les 
Habitans  en  font  nommés  dans 
Xénophon  ;  &  cet  auteur  en  parle 
comme  d*un  peuple  aâuellement 
exldant.  On  lifoit  autrefois  Cocil- 
lum  dans  Pline.  Ceft  le  Père  Har- 
doin,qm  a  rétabli  ce  nom  fur 
.  l'autorité  de  Xénophon. 

COCYTE  ,    Cocytus,  (^) 

(h)  Xenopb.  p.  483.Plin»T.  Lp.  iSli 

(r)  Pauf.  p.  jo» 


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co 

kôitt/Tcç»  fleuve  de  Grèce  dans 
"l*Épire;  Pour  donner  une  idée  de 
ce  fleuve ,  ii  fâffit  de  rapporter  ce 
qu'en  dit  Paufanias  :  »  auprès  de 
»  Cichyre ,  dit-i! ,  on  voit  le 
9)  marai^  Achérufien ,  dont  il  eu 
n  tant  parlé  »  &  TAchéron  qui 
M  efi  un  fleuve;  on  y  trouve  aufli 
t»  le  Cocy  te  ,  dont  l'eau  eft  d'un 
»  goût  fort  défagféable  ;  il  y  a 
»  bien  de  l'apparence  qu^Homère 
m  avoit  vifité  tous  ces  lieux  ,  & 
i»  que  c'eft  ce  qui  lui  a  donné 
»  l'idée  d'en  faire  i'ufage  qu'il  a 
n  fait  dans  fa  defcription  des  en- 
»  fers  y  oii  il  a  coniervé  les  noms 
i>  de  ces  fleuves»  n 

COCYTE,  Cocy  tus  9  Kcokvtoç, 
fleuve  d'Italie  dans  la  Campanie 
près  du  lac  Lucrin .  Ce  fleuve  n'eft 
plus  tel  que  les  anciens  l'ont  vu  ; 
fon  cours  ayant  été  changé  par  la 
chute  d'une  montagne,  cauféepar 
un  tremblement  de  terre  y  qui  ar- 
riva Tan  1Ç38. 

COCYTE,  Cocytusj  Kaict/Toç, 
la)  ,  fleuve  imaginaire ,  que  les 
roëtes  font  couler  dans  les  Enfers. 
Ce  nom  a  paru  d'autant  plus  propre 
à  un  lieu  ù  funefte  ,  qu'il  vient  du 
înot  grec  Kcùitvttr»  qui  fignifie  gê- 
inir,  pleurer. 

*  COCYTE,  Cocy  tus,  Kwkj;to$, 
(^  &meux  Médecin  I  difciple  de 
v^hîron.  On  trouve  dans  Ptolé- 
mée  Hépheftion,  une  anecdote 
fort  fingulière  touchant  ce  méde- 
cin»  On  dit  qu'il  fut  aflez  hàhWe 
pour  guérir  Adonb  de  la  bleffure  . 
^ue  lui  avoit  faite  Mn.fangiier  ^  & 

'  («)  Mém.  de  TAcad.  det  Inicript.  & 
Bell.  Lett.  Tom.  XVU.  p.  $1. 

(b)  ^ycb.  par  M.  l'Abb.  Ban.  Tom. 
m»  pa^.  aOi  14»  Métti»  de  TAcad.  àts 


dont  tout  le  monde  l'avoit  cru 
mort*  C^  auteur  tire  ce  paradoxe 
hiftorique  d'un  vers  d'Euphorîon 
dans  fon  Hyacinthe  j  où  ce  Poëte 
dit  que  le  feul  Cocyte  lava  la 
bleflure  d'Adonis  dénué  de  tout 
ftcours. 

Méziriac  ,  dans  fes  remarques 
fur  les  Épîtres  d'Ovide,  rapporté 
<:e  fait ,  &  paroît  l'admettre  fans 
fcrupule.  Daniel  le  Clerc  ,^qui  l'al- 
lègue aufli  dans  fon  Hifloire  de  la 
Médecine  ,  n'en  a  pas  fi  bonne 
opinion.  Il  eft  perfuadé  que  Pto- 
lémée  a  mal  entendu  ce  vers  da 
Poëte  Grec  ,  qui  n'a  voulu  parler 
que  du  Cocyte,  fleuve  des  enfers, 
lequel  feul  lava  la  plaie  mortelle 
d'Adonis ,  &  y  fervit  de  premier 
appareil,  nul  médecin  n'ayant  eii 
le  tems  de  le  fecourir  &  dé  penfer 
cette  bleflfure. 

COCYTE,  Cocy  tus,Kùi>iivriu 
(c)  L'auteur  de  la  Vulgate  a  em- 
ployé ce  terme  au  livre  de  Job  , 
pour  marquer  la  defcente  des  mé-> 
chans  aux  enfers.  Il  n'y  a  rien 
dans  l'Hébreu  ni  dans  les  anciep- 
nés  Verfions  ,  qui^ait  rapport  au 
Cocyte;  &  il  n'y  a  nulle  appa- 
rence que  Job  en  ait  voulu  parler. 
ces  fables  font  de  beaucoup  pofté- 
rieures  à  fon  tems.  L'Hébreu  por- 
te fimplement  :  Les  mottes  du  tor* 
rent  lui  ont  été  douces  ;  au  lieu  que 
nous  lifons  dans  la  Vulgate  :  DuU 
cisfuît  glareis  Cocyti  ;  fa  préfen- 
ce  a  été  agréable  aux  rivages  du 
Cocyte. 

CODÀNUS  [le  golfe  ]  Coda^ 

|n(crîpt»  Il  Bell.  Lett.  Tojn.  XVU.  p; 
CO  Job.c.  ai.v.  33* 


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i6o  CÔ 

nusfinus.  {a)  Pomponîas  Mêla  faît 
de  ce  golfe  une  defcription ,  de  la- 
quelle on  peut  conclure  que  les  An- 
ciens appelloient  Codanus  finus 
l'entrée  de  la  mer  Baltique  ,  ou  la 
partie  de  cette  mer  qui  coule  en- 
tre les  ifles  du  Danemarck.  n  Au- 
n  delà  de  TElbe ,  dit-il ,  eft  le 
»  golfe  Codanus  qui  eft  grand  Si. 
9»  rempli  de  grandes  ifles  &  de 
ai  petites.  La  mer  enfermée  entre 
If  les  rivages  n*a  nulle  parc  une 
»  étendue  cônfidérable,  &  ne  ref- 
>»  (èmble  guère  à  une  mer  ;  mais 
»  fes  eaux  coulant  entre  les  ifles^ 
1»  paroiïïent  comme  autant  de  ri- 
f»  vières.  . . ,  C'eft-.là  qu'habitent 
»  les  Çimbres  &  les  Teutons,  u 
Sinus  Codanus  eft  donc  la  mer  de 
Danèmarck,  &  comprend  les  dé- 
troits de  âond  &  du  Belt. 

CODDINE  [la  roche  ou  la 
pierre  de]  Coddini  fayum  »  >(h) 
'Ké<rs!yoif  vTfrfiot.  Elle  étoic  fitué^ 
chez  les  Magnêfiens  ,  qui  étoient 
au  nord  du  mont  Sipyle.  On 
voyoit  fur  cett«  roche  une  ftatué 
àe  la  mère  des  Dieux  ,  qui  pafToit 
cohHamment  pour  la  plus  ancîeii- 
tie  de  toute  celles  qu'on  avoit  iri- 
géfes  à  cette  Déeffe. 

CODOMANNUS ,  (c)  Co- 
domannuSf  nom  que  porta  d*abord 
Darius.  Ce  Prince  fut  détrôné  par 
Alexandre.  Voye:^  Darius. 

CODONOPHGRES  ,  Codo- 
nophôri.  (d)  C'étoit  Tufâge  chez 
ks  Anciens  de  faire  accompagneir 


le  cadavre  à  fon  enterrement  pat 
un  porteur  de  fonnette.  C'eft  cet 
homme  qu'on  appelloit  Codonor 
phore. 
CODRION,  Codrio,(e)  ville  âe 
Macédoine.  Quoique  forte  &  biea 
munie, elle/e rendit  aux  Romains 
fans  réfiftance  deux  cens  ans  avant 
Jefus-Chrift,  Ce  fut  la  crainte 
d'être  traitée  auffi  mal  que  l'avoit 
été  la  ville  d* Antipatrie  ,  qui  dé* 
termina  Codrion  à  fe  rendre  fi 
facilement.  Les  Romains  y  laiw 
ferent  une  garnifon. 

CODROPOLIS ,  (/)  Codro^ 
polis ,  Ko<t(>Qirohiç  I  ville  d'Iîlyrie 
au  fond  de  la  mer  Adriatique  , 
félon  Appien.  Cétoit  la  borne  de 
l'Empire ,  partagé  entre  Augofle 
&.  Marc  Antoine. 

CODRUS ,  Codrus  ,  K  i<rpùç  , 
(g)  61s  de  Mélanthus,  fut  le  der- 
nier roi  des  Athéniens. 

Ce  prince  a  toujours  été  cité 
dans  l'antiquité ,  con^me  le  mo- 
dèle des  rois ,  qui  ont  la  noble 
ambition  d*étre  les  pères  de  leurs 
peuples.  Les  Athéniens  ,  étant  ep 
guerre  avec  les  peuples  du  Pélo- 
ponnèfe ,  envoyèrent,  fuivant  Tu- 
Sage  de  ces  tems  -  là,  confuher 
l'oracle  de  Delphes ,  pour  fçavoir 
quel  feroit  le  fuccès  de  cette  guer- 
re. La  répônfe  fût  que  les  Athér 
niens  auroient  la  viâoire  »  fi  leur 
roi .  fe  faifoit  tuer  par  les  ennemis» 
Les  Pétoponnéfietîs»  en  étantaver- 
tis  y  ordonnèrent  qu'on  épargnât 


(«)  Pomp.  Mel.  p.  178  «  193. 
(>)  Pauf.  p.  20Ç. 
CO  Juft.  L  X.  c.  |. 
(ii)  Mécrt.  àe  TAcad.  dfc»  InfcrîptV  & 
Bell.  Lett.  Tom.  VIII.  pag.  6^4,  6^5» 
U)  Tit.  Liv.  L»  XXXI.  c.  »7.    ' 


(/)  Appîan.  p.  709. 

C^)  Pauf.  p.  3'4,  447 ,  448,  6itf.  Jutfé 
L.  II.  c.  6,  7..Memé  de  PAçad.  det 
Infcript.  &  Bdl.  Lctt.  Tom.  IV.  pag. 
i66,  Tom.  VII.  pag,  179.  Tomt  X.  f» 
3.  t,  XIV.  p.  aoy.  . 


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h  perfonne  de  Codrus.  Maïs, 
Codf  us  étant  bien  réfolu  de  fe  dé- 
irouer  pour  le  falut  de  Tes  fujets , 
quitte  les  marques  de  la  royau- 
té ,  fe  déguife  en  bûcheron ,  cher-, 
che  querelle  à  quelques  Lacédé- 
moniens ,  fe  bat  contre  eu¥ ,  fe  fait 
cuer  y  fy,  par  fa  mort  acquiert  la 
viéloire  aux  Athéniens» 

Cet  événement  eft  rapporté  par 
les  uns  à  Tan  477 ,  &  par  d'autres 
à  Tan  521  avant  Solon,  Quoi 
Hu*il  en  foit ,  les  Athéniens,  après 
la  mort  de  Codrus ,  rêduifirent 
kur  état  en  république  ,  qui  fut 
gouvernée  par  des  magiftrats 
qu'ils  nommoient  Archontes.  Mé- 
don ,  fils  ^e  Codrus  ,  fut  le  pre- 
mier, &  gouverna  pendant  vingt 
ans. 

CODRUS  ,  Codrus,  KUpo; , 
ta)  Poëte  Latin ,  contemporain  de 
V  irgile ,  qui  en  fait  mention  dans 
fes  Églogues.  Selon  Servius ,  il  en 
étoit  aum  fait  mention  dans  les 
Élégies  de  Valgius  ,  qui  font  per- 
dues. 

CODRUS ,  Codrus,  Kolpo; , 
(^)  autre  Poëte ,  vivoit  fous  l'em- 
pire de  Domltien  ,  vers  l'an  90 
oe  rÉre  Chrétienne.  Il  fut  auteur 
d'un  poëme  intitulé  Théféïde ,  que 
Juvénal  trouvoit  trop  long.  Le 
même  auteur  parle  de  lui  d'une 
manière  à  faire  voir  qu'il  l'efti- 
moit.  Procule  fa  femme  avoit  la 
taille  extrêmement  petite.  Codrus 
éroit  pauvre,  &  fon  indigence  eft 
paffée  en  proverbe  :  Codro  paupe- 
r'wr» 

COEFFURE  ,  {c)  ornement 

^s)  Vifg.  Eclog.  7.  V.  aa.  &  feq* 
\b)  Juven.  Saiyr.  i.  ?.  tt  Satyr.  j. 


C  O  iôi 

ie  tête ,  ornatus  capîtis.  La  Coëf- 
fure  des  femmes  a  été  de  tout 
tems  fujette  à  bien  des  ^hange- 
mens,  tant  chez  les  Grecs  que 
chez  les  Romains  6c  les  autres 
nations.  Donner  le  nom  de  tous 
ces  différens  ornemens  ,  que  le 
fexe  a  employés  ,  c'éft  ce  qu'on 
ne  peut  faire. 
Sur  les  monumens ,  on  remar- 

Jue  une  grande  diverficé  dans  la 
)oëffure  des  Impératrices  &  des 
autres  femmes.  Les  modes  chan- 
geaient pour  le  moins  auffi  fou« 
vent  en  ces  tems-là  quapjour- 
d'hui.  Dans  les  dix-neuf  ans  de 
règne  de  Marc-Aurele,  fa  fem- 
me Fauftine  paroît  avec  trois  oa 
quatre  CoëfFures  différentes ,  dont 
rune  approche  affez  de  la  fontan- 
ge.  Chacune  de  ces  modes  avoit 
apparemment  fon  nom.  Comment 
trouver  tous  ces  noms  aujour« 
d'hui ,  que  nous  aurions  peut-êtrç 
bien  de  la  peine  à  trouver  ceux 
de  toutes  les  parties  qui  compo- 
fent  préfentement  la  Coëfture 
d'une  femme  ?  Il  nous  refte  pei^i 
de  noms  pour'marquer  les  Coëf- 
fures  anciennes  ,  6t  nous  fommes 
affez  embarraffés  fur  leur  fignifi- 
cation.  Nous  fçavons  que  ce  qu'on 
appelloit  calantique  étoit  un  cou^ 
vre-chef  de  femme  ;  mais  ,  nous 
'  ne  fçavons  pas  en  quoi  la  calan* 
tique  différoit  de  ce  qu'on  appel- 
loit calyptre  ,  nom  qui  ,  félon 
L'écymologie  ,  marque  auffi  un 
couvre-chef.  La  mitre  des  fem- 
mes étoit ,  dit  Servius  ,  la  même 
chofe  que  la  calantique,  un  coa- 

{c)  Amiq.   expl.   par    D.    Bcm.  d« 
MoQtf.  Xom.  tll.  p.  39*  ^  fiiiv. 


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4^2  CO 

vre-chef  de  femmes.  Un  autre 
couvre- chef  de  femmes  ,  qu'on 
appelloit  âamméum  ou  flammèo- 
lum ,  fervoit  aux  nouvelles  ma- 
riées, pour  le  jour  des  noces.Quel- 
ques  -  uns  croyent  (Ju*il  fervoit 
au  (Il  aux  Flaminiquesou  prêtreiTes, 
'&  veulent  que  flamméum  vienne 
de  flaminica  ;  mais  ,  le  double 
m  de  flamméum  femble  réfuter 
cette  étymoloeie.  Selon  Nonius, 
les  Matrones  le  fervoient  du  flam- 
méum ;  il  paroît  par  ce  qu'en  dit 
TertuUien ,  que  c'étoit  un  orne- 
ment ordinaire  ,  dont  les  femmes 
Chrétiennes  fe  fervoient  auffi.  Le 
caliendrum  dont  fait  mention  Ho- 
race, &  dans  les  tems  poftérieurs 
Ârnobe ,  étoit  un  tour  de  che« 
veux  que  les  femmes  ajoûtoient  à 
leur  chevelure  naturelle. 

CCELA  ,  Ca/tf.  Voyci  l'article 
fuivant.  ^ 

CCELA  EUBCEiE  ,  Kaa 
li*v^olaç  »  (a)  lieu  de  Tifle  d'Eu- 
bée.  Ptolémée ,  Valère  Maxime, 
Strabon  en  font  mention.  Le  der- 
nier dit  qu'on  appelle  Cœla  Eu- 
bœae  ,  Tefpace  qui  eft  entre  Au- 
lide  &  Gérefte.  Car ,  pourfuit-il, 
la  côte  fe  courbe  en  forme  de 
golfe  ;  Si  en  approchait  de  Chal- 
cis  ,  elle  fe  courbe  encore  vers  la 
terre-ferme.  Dion  de  Prufe  en 
fat  une  defcription. 

Tite-Live  attribue  le  nom  de 
Cœla  au  golfe  d'Eubée ,  &  pré- 
tend que  ce  nom  lui  étoit  donné 
par  les  gens  du   pays.  Il  ajoute 
qu'il  étoit  fort  redouté  des  Natt- 
er) t>tolcm.  t.  m.  c.  15.  Strab.  pag. 
44s.  Tit.  Liv.  L.  XXXI.  c.  47. 
(h)  Tit.  Liv.  L.  XXXII.  c,  4. 
(O  Tacii.  Annal  L,  III.  c.  38,  Plin, 


tonmers,  fur  tout  versTéquInoxé 
d'Automne,  parce  qu'il  s'y  exd- 
toit  de  grandes  tempêtes  pendaat 
cette  faifon. 

CŒLA,  Cala,  KoTxei ,  (^) 
nom  d'un  défilé  de  la  Theflalîe. 
Il  en  efl  parlé  dans  un  endroit 
de  Tite-Live.  Voici  cet  endroit  : 
Thaumaci  à  Pylis  finuqut  Maliû* 
'  CO  per  Lamiam  eunti  ,  loco  alto  foi 
funt  y  ipfis  faucibus  imminentes  ^ 
qttas  Cœla  vocant  ;  Tbejfaliaque 
tranfeunti  confragofa  loca  ,  im^^ 
plicatafque  flexibus  vall'mm  vias  , 
uhi  ventum  ad  hanc  Urbem  cft^ 
repente  veiut  maris  vafii  ,  fie  im* 
menfa  panditur  planities  >  ut  fub^ 
jeBos  campos  terminare  oculis 
haud facile  queas.  M.  Crévier  fait 
fur  ce  pafTaçe  l'obfervation  fui- 
vante:  »  Levi  mutatione  adjuran- 
n  dus  videtur  hic  locus,  legen*- 
D  dumque  ;  Ipfis  faucibus  immi^ 
n  îtentes  ^  quas  Cctla  vocant  Thef» 
n  faliœ  ^  qua  tranfeunti  ^  &c. 
n  Libro  XXXI.  c.  47.  mentio  fit 
n  finûs  Éuboici,  quem  Ccelavo^ 
D  cant.  Itaaue  non  immeritb  fut 
n  picari  polTumus  bas  £auces  vo* 
»  catas  effe  Cœla  Thejfalia  ,  ad 
n  notandum  difcrimen.  Qua  refer 
n  ad  Thejfalia,  ,  ita  ut  Cenfus  fit , 
n  TheiTaliam ,  velut  maris  vafti 
n  ingens  sequor»  fie  immenfiim 
»  pandi  planitiem  ob  oculos  ejus 
}i  qui  per  fauces  illas  ad  urben^ 
H  Thaumacos  pervenerit.  « 

CCELALETES,  Cœlaleta,  (c) 
peuples  de  Thrace.  Ils  font  ainii 
appelles   dans   Tacite.  Pline  les 

Tom.  I.  p.  90%,  Tit.  Lîv.  L.  XXXVIÎI. 
c.  40.  Dlo.  Ca/T.  p.  ^4).  Ptolem.  L.  UU 
c.  II. 


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co 

tooMme  CœleteS)  Çc  les  dîftingae 
en  grands  &  en  petits.  Les  grands 
habitoient ,  félon  lui ,  au  pied  du 
mont  Hémus  ^  &  les  petits ,  au 

Ï>ied  du  mont  Rhodope.  Tite>Live 
es  nomme  auffi  Cœletes.  Dion 
Caflius  les  appelle  Sialetes  ,  par 
corruption  »  comme  le  remarque 
très- bien  Jufte-Lipfe  fur  Tacite. 
On  trouve  dans  Ptolémée ,  C«/<- 
tica  prafiSiura  ,  Ko^htikû  ,  ce  qui 
montre  que  Cœletes  étoit  le  vrai 
nom  de  ce  peuple. 

Voici  ce  que  Tacite  nous  dit  det 
Cœlaletes  :  n  Les  Cœlaletes  »  Iqs 
1»  Odrufes  &  autres,  nations  puif- 
»  fantes,  prirent  les  armes  fous  di- 
n  vers  chefs  ;  mais ,  comme  ils 
n  étoîent  tous  également  obfcurs 
n  &  ignorans  dans  le  métier  de  la 
n  guerre  y  leur  révolte  ne  fut  .pas 
»  dangereufe.Une  partie  fe  répan- 
»  dit  dans  les  campagnes  voifines 
»  pour  piller  ;  une  autre  paflTa'  le 
n  mont  Hémus  pourallerfoulever 
»  les  nations  éloignées.  Le  plus 
w  grand  nombre  &  les  mieux  dif 
»  cipiinés  adiégerent  Rhémétalces 
I»  dans  Philippopolis  ,  ville  bâtie 
I»  par  Philippe  de  Macédoine, 
»  dont  elle  avoit  pris  le  nom.  ce 

Il  a  été  fait  mention  des  Cœla« 
letes ,  ou  Caeletes  fous  l'article  des 
Àftiens.  royei  Aftiens. 
CCE  LÉS YRIE ,  Cœlefyria.  Voy. 
Céléfyrie. 

CCELETES,  CœUta.  Voyci 
Cœlaletes. 

CCELI A  Cœlîa  ,  K  iK^ct .  (a) 
la  troifième  femme  qu'épouûi  L. 
Corn,  Sylla ,  &  qu'il  répudia  en* 

(4)  Plut.  T.  I.  p.  455. 


C  O  ±6} 

fuite ,  fous  prétexte  qu*elle  etotc 
ftérile.  Et  pour  faire  voir  que  c'é- 
toit  la  feule  raifon  qui  Tobligeoit 
àfe  féparerjd'elle,  il  Ta  renvoya 
honorablement ,  en  lui  donnant 
toutes  fortes  de  louanges  ,  &  ea 
la  comblant  de  préfens.  Mais, 
comme  peu  de  jours  après  il  épou- 
fa  Métella .  ce  mariage  fi  préci*- 
pité  fit  croire  qu'il  avoit  répudié 
Cœlia  fur  un  faux  prétexte. 

CCELISPEX,  Cceli/pex,  fur- 
nom  d'Apollon,  ainû  appelle  à 
Rome  de  la  ftatue  qu'il  avoit  dans 
la  onzième  région.  Cette  (latue 
regardoit  ou  le  ciel  »  ou  le  mont 
Cœlius. 

ÇŒLIUS  [  le  Mont]  ,  Mons 
Cœlius.  {B)  Nous  avons  déjà 
parlé  de  cette  montagne  (bus  le 
nom  de  Caelius.  Nous  ajourerons 
ici  que  le  mont  Cœlius  ne  fit  pas 
d'abord  partie  de  la  ville  de  Ro- 
me 9  &  que  ce  ne  fut  que  fous  ie 
règne  de  Tullus  Hoftilius ,  que 
l'on  pouila  les  édifices  jufqu'à  cet- 
fe  montagne.  Ce  Prince ,  pour  in- 
viter les  autres  à  y  venir  loger  ^ 
s'y  fit  bâtir  un  palais  ,  oii  il  paffii 
le  refte  de  fa  vie. 

CŒLIUS ,  Cœlîus,  (c)  l'un  des 
furnoms  de  Jupiter  ,  au  rapport 
de  Dom  Bernard  de  Montfau- 
con. 

CŒLIUS  ,  Cœlius,  (d)  l'un 
des  lieutenans  de  M.  Antoine.  Il 
en  eft  fait  mention  dans  Plutdr- 
que. 

CŒLIUS, Cwlitts.  FoyeiRvi' 
fus. 

CŒLIUS  IT.  2,  T.  Cœlius, 

(e)  Antiq.   cxpl.    par   D.   Bern,  dt 
Montf.  Tom.  I.  pag.  5;. 
çd)  Plut,  T.  I.  p.  94J, 


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aile 


é4  C  O 

jj  natif  de  Terracine  ,  homme 
adez  connu  de  fon  tems.  Cet 
homme ,  étant  allé  un  jour  fe  cou- 
cher ^  après  fon  fouper ,  dans  une 
même  chambre  avec  deux  de  Tes 
enfans ,  fut  trouvé  le  lendemain 
inatin  égorgé ,  fans  que  Ton  ren- 
contrât ,  ni  efclave  »  ni  autre  per- 
fonne  ,  fur  qui  le  foupçon  pût 
tomber  ;  6c  fes  deux  61s  qui 
étoient  fort  jeunes  ,  &  qui  cou- 
choient  auprès  de  lui,  dirent  qu'ils 
ne  s*étoient  apperçus  de  rien.  On 
les  déféra  néanmoins  comme  par- 
ricides ;  car ,  les  foupçons  étoient 
violens. 

Cependant ,  quand  on  eut  fait 
voir  aux  juges  ,  qu'après  que 
l'on  avoit  ouvert  la  porte  de  la 
chambre ,  on  avoit  trouvé  les  deux 
jeunes  hommes  endormis  ;  ils  fu- 
rent déclarés  innocens  &  déchar- 
gés de  tout  foupçon  ;  car,  on 
ne  penfoit  pas  que  quelqu'un, 
après  avoir  vrolé  toutes  les  loix 
divines  &  humaines  par  une  ac- 
tion fi  déteftable  ,  pût  audi-tôt 
s'endormir ,  &  que  ceux  qui  Ta- 
voient  commife ,  puflent  non  feu- 
lement repofer  fans  inquiétude, 
mais  refpirer  fans  frayeur. 

Il  y  a  des  éditions  qui  portent 
T.  Clœlius ,  au  Deu  de  T.  Cœ- 
lius. 

CŒLIUS ,  Cœlius  ,  KoiT^i  • 

(b)  lieutenant  de  Carbon ,  dont 
Flutarque  fait  mention  dans  la  vie 
de  Pompée. 

CCELIUS  [M.'],  M.  Cœlius, 

(c)  fut  mis  en  juftice ,  l'an  57 
avant  Jefus-  Chriil ,  comme  ayant 

(*)  Cicer.    Orat.    pro   Scxt.   Rofc. 
^mer.  c.  38,  39* 
^)  J?lut.  T.  1.  p.  605. 


co 

trempé  dans  l'aflafinatde  Dîon; 
philofophe  Académicien.  Cicéron 
prit  fa  défenfe,  &  non  feulement 
M.  Cœlius  fut  abfous ,  mais  la 
plupart  des  autres  que  l'on  avoit 
le  plus  de  raifon  de  croire  coupa- 
bles. Il  étoit  tribun  du  peuple 
l'année  que  P.  Clodius  fut  tué  par 
Milon ,  &  il  fe  fit  honneur  dans 
cette  affaire.  Il  époufa  en  ami 
chaud  les  intérêrs  de  Milon  ;  il  le 
produifit  devant  le  peuple,  &c'eft 
de  concert  avec  lui  que  Milon 
donna  alors  à  (on  affaire  ,  la  tour- 
nure que  Cicéron  a  fui  vie  dans 
fon  plaidoyer. 

Nous  avons  quelques  lettres  de 
M.  Cœlius  à  Cicéron  ,  où  il  eft 
queftion  des  divifions  entre  Céfar 
&  Pompée.  M.  Cœlius  étoit  un 
homme  de  beaucoup  d'eforit, 
mais  qui  avoir  peu  de  folidite ,  & 
encore  moins  d'attachement  aux 
principes  de  la  morale.  Il  écrivoit 
fans  façon  à  Cicéron,que  dans  les 
dllfenfions  civiles,tant  que  l'on  ne 
conteftoit  qu'en  paroles  ,  il  falloit 
embrafler  le  parti  le  plus  hon- 
nête ;  mais  que  quand  la  querelle 
venoit  au  point  de  fe  vuider  pat 
l'épée ,  alors  on  devoit  fe  ranger 
du  côté  du  plus  fon  ,  &  regarder 
comme  le  meilleur,  ce  qui  écoit  le 
plus  fur.  Il  avoit  fuivi  cette  maxi- 
me dans  la  pratique  ;  &  quoiqu'il 
eût  toujours  paru  zélé  pour  l'Arif- 
tocratie  6c  pour  les  loix ,  au  mo- 
ment décifif ,  il  laifla  Pompée  & 
le  Sénat,  &  fe  jetta  dans  le  parti 
de  Céfar.  Encore  ne  demeura-t-il 
pas  conffamment  attaché  au  parti 

(r)  Vell.  Paterc.  L.  II.  c.  68.  Crée. 
HiU.  K(fau  Tom.  VU.  p.  72 ,  941.  & 

de 


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€0 

de  ce  dernier*  Plein  d'ambition  & 
de  cette  coiifîaoce  préfomptueufe: 
qu'infpireat  les  talens  à  un  jeune 
homme  tout  de  feu ,  il  trouva 
mauvais  que  Céùa  eût  donné  à 
Trébonius  la  préture  de  la  ville , 
c^ft-à  dire  ,  le  plus  brillant  des  dé- 
partemens  des  Préteurs  ,  fans  Taf- 
i^jettîr  à  tirer  aii  fort.  Choqué  de 
cette  préférence  »  il  n'en  fallut  pas 
davantage  pour  k  détacher  d'ua 
parti  oit  il  ië  croyoit  méprifé. 

Cherchant  donc  à  exciter  du- 
tcouble  dans  Rome»  il  prit  fous 
ià  proteâioQ  la  caufe  des  débi-. 
teurs  ,  à  laquelle  il  étoit  intéTeflié 
perfonneUeraent*  Car ,  q*iaiqu*il  y 
eût  bien  de  la  folie  &  de  la  témé- 
rité dans  ks  projets,  il  y  avoit 
encore  plus  de  dérangement  dans 
fes  aâaireSé  Comme  Trébonius 
régloît  les  jugemem  qu'il  rendoié 
en  cette  matière  fur  la  loi  portée 
en  dernier  lieu  par  Céfar  f  M* 
Çoelius  plaça  ion  tribunal  à  côtft 
de  celui  du  Préteur  de  .la  villev» 
^déclara qu'il recevroit les  appeû 
de  ceux  qui  fe  croiroient  léféspaf 
kii.  La  prudence  &  k  douces r 
àe  Trébonius  furent  fi  grandes  » 
que  ^perfpnné  jiô  s'en  plaignit. 
Ainfi ,  cette  première  ienutive  de 
M.  Cœlius  fut  fans  Aiccès*  Il  ne  fft 
cebuta  pas>.  &  ré^la  de  ne  rien 
ώna^r  vPuHqu*tl  ne  pouvoit  au) 
tremetn  remuer  6c  échauffer  les 
efprit^;;' il  propofa  deux  lcûx,le3 
plus  injufl'es  &  les.  plus  féditieufe^ 
qui  ^  fiureni  jamais  ',  Tufije,,.  pou* 
exempter  tes  locataires  de  toutes 
les-  maifoflis.de  Rome  duj  paye*^ 
meQtdeieMjsioycfsvrautte,  pour 
abolir  généralement  toutes  les 
dettes.  Ceue^amorcft.fa  foiiieffej. 


CO  4^5 

la  multitude  s'ameuta  »  &  M« 
Cœlius,  à  la  tête  de  cette  canaille, 
vint  attaquer  Trébonius  fur  fou 
tribunal ,  l'en  chaflai  &  bleûa^ 
quelques-uns  de  ceux  qui  l'envi*- 
ronnoiem. 

C'efi  fans  doute  dans  ces  cir* 
confiances  qu'il  écrivit  à  Cicéroa 
une  lettre  d'un  Oyle  bien  différent, 
de  celui  des  précédente^.  Il  y.  pa- 
toit  au  défefpoir  de  ce  s'être  pas, 
rendu  avec  lui  ait  camp  de  Pom^ 
pée,  H  y  ténîoigne,  &  mépris ,  fie 
horreur  pour  ceux  auxqt^els  il 
s'eft  afibcié.  »  Il  m'efi ,  dit  -  il  « 
p  plus  doux  de  périr ,  que  3^  voir 
m  de  pareille^  gens.  Tot^  le  mon<^ 
M  de  ici  nous  détefie  \  il  n'y  a 
1^  pas  un  ordre ,  ni  même  u» 
»  homme  ,  qui  ne  foiiporté;d'in-.. 
n  cltnatioi^  pôur"^' votre  caufe.  Si 
1^  ïon  necr^igooit  des  cruautéai 
»  de  votre  part ,  il  y  a  long^tems 
n  que  nous  ferions  chairs  de 
9  KomeéM  II  invite  en  conféquen-» 
«p  Ponvpée  à  faire  pafler  des  trou-» 
pes  en  Italie.  »  Les  gens  de  votre 
V  parti  i  dit' il  à  Cicéron ,  s'en« 
»  dorment  &  nevoien;  pas  queU 
»  le  eft  notre  Épibleffe  \  &  par  oî% 
v^nous  prétons  ie  liane.  Vous 
it;  vous  expofez  aux  ti(ques  d'une 
Il  bataille.  Vous  avez  tort.  Je  ne 
»  connois  point  vos  trou  pes.  Ma  is^ 
»  les  nôtre;5  fçaventfe  battre  vail- 
le lammem  j  éc  foutenir  le  frèid^ 
».  la  f^im,  a  r  , 

Cette  reflou rce  qu'invoquoit  M. 
Cœlius ,  étoit  bien  éloignée  ^  bien 
incertaine  ;  &  il  n'eut  pas  même 
le  Vems  de  l'attendre.  Serviljus 
Jfauricus  »  qui^.par  fa  dignité  de 
Conful  >  avoit  la  principale  auto- 
i  rite  dMl^li^  Yiljifi.$  Venant  muai  de 
Gg 


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^       co 

quelques  troupes  >  £t  on  iéttet  du 
Sénat ,  qui  inter diToit  M<  Coelius 
de»  ftMiâioot  de  (a  charge*  En' 
exécution  de  et  déaet,  il  arracha 
les  affichtt  dm  loîx  de  ce  Préteor  , 
lui  refufa  l'encrée  du  Sénat,  &  le 
cKafla  de  la  ttibune  ùk  il  écoit 
iHoncé  pour  harangaer  la  mukf- 
tude.  M«  CtttitK  réfifta  qutl(]ut 
rems»  (bâtenu  d'uft  nombre  de 
feôieux  &  de  &  propre  opkiil^ 
frété.  Le  Confol  M  ayant  brift  ùl 
ehaiTe  curule  ^  U  fe  fournit  d'utie 
autre  ,^qu'it  garait  de  lanières  & 
de  courroies,  pour  reprocher  à  ton 
ennemi  quil  avt»it  été  aotreibi» 
fouetté  par  fon  pere« 

Cette  mauvaife  pltrfiinttrie  Ht 

ruvoft  lui  être  d'àucuAe  utilités 
fut  enfm  obligé  .de  «éder  air 
droit  &  à  la  force  ;  À  il  dettiaiid» 
k  permiffion  de  (âiût  dt  Rotàe  y 
feignant  de  vouloir  aUdr  §t  jufti-*' 
6er  auprès  dé  Céfar ,  qui  éknf 
«lors  en  THeiïaliè.  Ce  n'îéioil  point 
4lu  tout  fan  deâëin.  Il  préiendott 
^indreMUoà,  ^f ,  a^uellemein 
d'intelligenee  atet  foi  conroit  tou<* 
te  rhaSe  ^  pour  y  exdter  dei^ 
troubles.  Mai» ,  Mitoit  sh^ant  été 
tué  au  fiege  de  Oxnpfa ,  M.  Coe» 
lius  ne  lui  Airvécut  pas  long-tetti»; 
Il  fe  fit  tuer  auifi  auprès  de  Thu^ 
rium  par  d^  eavaliti^  de  Céfar  y 
Efpagnols  &  Gaulois  «  qu'il  vou-^ 
feit  débaucher  f  8c  tâcher  d'attirer 
à  lui ,  en  leur  promettant  de  lar^ 
gent  »  l'an  49  avant  J.  C. 

DI  G  R  E  S  S  I  O  ff 

fur  le  pomal(  àç  M.  CcUius^ 
Il  porta  très^loin  la  gloire  dîi 


CO 

l'éloquence  ^  Ôi  il  eft  compté  ai 
nombre  des  Orateurs  qui  om  îsk 
l'xH-nement  du  bon  fieck.  Ses  let-< 
très  à  Cioéron  pétillenc  d'efprit, 
&  allient  renjosÊment  &  l'agréa^ 
ble.  plaifiinterk  avec  k  force  & 
l'élévatiom  De  grands  vices  déf< 
honorèrent  des  tsdenvC  eftimables 
en  eux<«mémeK  K  fiic  prodigue, 
débauché  ,  (ans  principes  ^  ùlwê 
fegk  de  conduite  >  capable  de  fa« 
criâer  rfaooseiir  &  la  verta  k  fa 
fortune  ,  ôlùl  fortune  à  feu  reC- 
kmtmtBt.  Car  »  la  colère  le  domt- 
aoic^  &  (q$  emportement  le  rea« 
doient  mfuportabk  dans  la  feciété^ 
Séaeque  nous  en  a  coniervé  un 
trait  rcmatquable/M»  Ccellus  fou- 
pok  téie  à  céte  avec  un  de  lêf 
dims  9  qtô  étoit  l'homme  da  mon- 
de le  plus  patiem  &  le  plus  doux* 
Ce  citent  conootflanc  lliuoieur  de 
(on  patroâ  f  prit  le  parti  de  i'ap* 
plaudir  en  tout  1  &  de  trouver  boo 
tout  œ  qu'il  difoit.  M.  Cœlîut 
t'impcuienta  de  tt*avoir  pom  ma« 
tiètf^  à  difpttte ,  &  d*ua  ton  aigre 
il  cria  à  cet  approbateur  éternel  r 
Pis  dom:  une  fois  mn^  afin  qm 
U0US  (oyons  deux^ 

C4UUS .  Oetlius  y  (4}  k^ 
«eux  brigand ,  dom  Horace  ÙH 
meMtioadans  feeiàtyresé 
.  CŒLIUS ,  Ceiliiés  ,  Kww. 
(i)  Plutarque^dassla  vie  deCicé^ 
ton  «  dit  que  l'orat^ir  Céoîtius  hf 
pria  Mijour  par  ^s*  lettres ,  d# 
kiî  envoyer  èçi$  Panthères  de  I4 
Cilîcie,  dom  il  étottalongoftver^ 
neuF.  11  y  a  une  (auto  dam  cei 
endrqit  au  texte  de  PlaeatiqpieL  Ci 
tCéiok  pas  Toratear  Cécifiiis  j^  «laîi 


^  Uanî;cM<qF^'#rT.^        ê  (H  fl•c^Toel>I«^e:f9 


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VtrAieût  Cœlius  Rufus ,  cOtïiftfe 
le  fçavâiïtBôchart  l'a  fort  bien  vu 
&  corrigé.  M.  CceHus  Rufus  étoit 
alors  Édiîe  curule  ,  &  il  démari- 
dojt  ces  panthères  pour  \e$''jevti 
de  fon  Édillté.  Voici  la  répônfe 
•  que  lui  fait  Gicérbri  dans  la  lettre 
qu'il  lui  écrit  :  »>  Pour  ce  qui  eft 
s»  des  pamhèires,  ceux  qui  ont 
I»  accoutumé  de  faik-e  cette  chaiTé , 
*  y  travaillent  par  mes  ordres 
1h  très-dili^émménù  Mais,  elles 
A  (ùnt  tfès-nifes ,  &  le  peu  qu*ii 
jb  en  reAe  fe  plaint  'à>tt ,  dit-on, 
À  de  ce  que  dàiis  tna  province  on 
*>  ne  dt-eflfe  dés  etAbûchés^ûl 
»  elfes  feUlés  :'  t*feft  pourquoi  f 
s»  elles  dnf  rirdlu  de  quittèlr  thon 
a  gouverriemertf ,  &  de  fe  Retirer 
V>  dan^  la  €àHé.  Mâfs  ^  qu#i  qu'il 
i)  en  fdit,  6n  éhalTe  à  force  & 
«  fur  ^QUt  Padfcbs.  Tout  ceqa*a 
'»  y  eh  aura  fera  pour  vous.  « 

COELOESI,  Kohvthi  U)  Oti 
liomhibit  alrifi  uh  ter'riéin  l>a^  & 
enfoncé,  qui  étiDÎt  dans  Tiilé  de 
•Chio  ,  &  dolît  parle  Hérodote.  îi 
faut  i'ëmàrquer  qiië  ce  ihôt  efl  au 
datif  pluriel ,  «l  que  Cet  Hiftoriéh 
dît  çy  Krhoiét» 

'  CCÊLOSi  Ci^/d^,  K  Tmc  ,  (^) 
ville  &  port  dô  tiier  de  la  Chef- 
ronrièfé  deTHrace,  entre  Êléè  & 
<:ardie ,  felori  Plihe^Eilé  èft  hôûl-- 
inéé  Cœla  dans  Âmmien  Mar- 
eellin  j  &  dâtrfs  les'aâes  du  concile 
d'Éphèfé.  Pompohius  Mélà  dit  ; 
»  Il  y  a  auffl  lé  pdït  ct<^  Coek)^', 
Ifi  fameux  par»  la  bataille  iîavafe 
$f  entre  les  flottes  ,des  AthénîeoS 


îi  &  des  Lacédémonieiis ,  &  piir 
'n  la  défaîte  dé  ces  derniers,  u 
Elle  ëtoit  Épifco|>ale ,  6c  eft  nom- 
mée CoeKa  par  Conflantin  Por- 
phyrogénete,  &  dans  la  Notice 
de  Hierocles.  C'eft  la  même  que 
Cycîenfis  &  Cylla.Fc»ye{  ces  deujt 
mots. 

CŒLOSSE^  Cœiofa,  (c) 
K^iifiuxra-li  y  nom  d*ude  mohtagilb 
du  Péloponnèfe  dans  la  Phliafie, 
au  rapport  de  Strab^n.  Il  y  avolt 
dans  cette  montagne  ,  un  défîfé 
"avec  une  forterefife ,  dôni.  parlef 
Xénophon.  Le  texte  de  ce  dernier 
T)orie  Céliffe,  Ku?^ov^ot,  Ses  Com- 
mentateurs corrigent  cç  mot  ,  éc 
le  lifent  coiriitie  Mit  Strabôn^  . 
;  CŒLUS,  &&/«j,  le  même 
que  Oel,  Pbyc^  Ciel.  "' 

OOEMPTIO  ,  (4  l^ane  d^s 
f ifois  fanés  de  manageâ  uCné'é^ 
dîei  les  Romains,  té  màKage  pir 
Coimptionc  y  oir  par  acHât ,  a  voit 
tiré  fon  nom  d'une  ancienne  pri- 
*  tique  que  la  loi  ordonnoit.  Elle 
confiftoit  en  ce  q[ue  la  femme  ^ 
lenartt  dansfà  main  trois  as  ,  en 
donnoît  Un  à  fbn  fnarl,  comme  Te 
payement  de  l'achat  qu'elle  en 

.    COEMPTIONALE^  ,  (ej 

terme  qui  féiit  dahs  urfe  lettré  d^ 
M.Curius  àCicéron,Qûo^^//ii/^fe 
/  interfériez  CôètnptionaUs  vénale 
profcfijfjerit  ,  &C4  lit  -  ori  dans 
cette  lettré.  Par  ces  niots  fenés 
Cotmptionatcs  ,  îl  faut  entendre 
dé  Vieux  rèflés  d'efelâvéS  à  vént- 
dre ,  ÙQS  efclaves  de  peu  de  prix  ^ 


'    (*')  Hcrod.  L*.  tri.  c.  «d;                      t     (^f)  Mém.  de  TAcad.  dés  Infcript.  i 
".'  (^)  Plm.  ,Tom.  t.'p.  iof ,  »i4.  Pomp.  ]  Bèll.  l.éit.  Tum.  XII.  p«g.  70, 
■Mef.  p.164.       „     .      •       .        ,           I     C«>  Cicer;  àd  Aaiic.  L.  Vit.  :Çjgift.  a^ 
W  Strab',  pag*'^j9i.  XcftopK.  p*.  554,  |    "  ^ .   .  — 


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^^8  CO 

à  caufe  des  vices  6c  des  dé&uu 
qui  les  faifoient  rebuter  ;  en  forte 
qu'on  avoit  peine  à  les  vendre , 
parce  que  plufieurs  enfemble  n*en 
.valoient  pas  un  bon  ;  c*eft  pour- 
.quoi ,  on  en  vendait  pluiieurs  à 
la  fois  pour  peu  de  chofe.  De- là 
vient  qu'on  les  appelloit  Coemp* 
ùonales  f  c'eft-à-dire,  /mw/  vé- 
nales y  à  vendre  ou  à  acheter  tous 
enfenible;  ou  bien  lorfqu'on  en 
>voit  de  bons  à  vendre ,  &  qu'on 
avoit  quelque  difficulté  pour  le 
prix ,  on  en  donnoit  de  ces  défec- 
tueux à  l'acl^eteur  ,  com^ne  par- 
delTus ,  ou  par  furcroit  »  pour  le 
dédommager. 

C(ENA  j  {a)  étoit  chez  lejs 
Anciens  ,  ce  qu'on  a  appcUé-,  de- 
puis dîner.  Catna ,  dît  FeAus  ,  apud 
antiquos  dkebatur^quod  nuncprarh- 
dium  ;  Vefpérna ,  quod  nunc  Cœna 
appeflatur,  f^QvezRepzs,     ' 

CŒNA.POLLUCmiLIS. 
Fi>y^îPolluÔym. 

CCENACULUM  ^  Cœnath, 
yoyci  ^alle  )l  manger. 

CCENON,  (f)  terme  qui  6 
lit  fur  une  pierre  ,  ,  uoûvée  à 
Mandeurre,  il  iîgmfiê  Collvre, 
commun  ,  vulgaire  ,  à  pluueufs 
^fages.  Kt*^^i  *  Ce^ffimunis. 

CCENOMYIÂ ,  (c)  termje  qui 
fe  lit  aujourd'hui  en  deux  endroits 
des  Pfeaumesi  Mais ,  les  anciens 
«xemplairç»  Latins  lifoient  Çyno' 
myian  ^  mouché  do  chien  «comme 
Jifent  encofe  aujourd'hui  la  plu- 
part de$  exemplaires  Grecs»  La 


ço 

J>onneleçoneft  celle  deia  Vuîgate^ 
qui  porte  Canomyiaris  mélange  de 
toute^  fortes  de  mouches  ;  ce  qui 
eft  conformé  à  l'Hébreu  ôc.aux 
anciennes  verfions  Grecques* 

Quelques  anciens  Pfeautîers 
Latins  »  comme  ceux  de  Rome,, 
de  Milan  &  de  S,  Pierre  d6  Char- 
tres ,  lifént  Mufcam  caninam  ;  ce 
qui  exprime  à  la  lettre  le  Grec 
Cynomyian*  Saint  Jérôme ,  daivi 
TËxode^  c.  g.  ?.  »i.  a  mïs  omng 
genus  mufcarum.  Mais»  les  Sep- 
tante I  au  même  endroit ,  Itfeat 
.ipoucbe  de  chien  ,  Cynomyian, 
Or  «  cette  mouche  eft  un  infeâe 
"très  -  dangeteux  ,  qui  s'attache 
principalement  aux  chiens  »  & 
dont  la  piquure  eft  trè$-malio^« 
C<|:NUS  ,  Cœnus  ,^  f£)  fils  d« 
Polémon ,  fut  t|n  des  Généraux 
&  des  favoris  d* Alexandre  Iç 
Grand.  Quoiqu'il  eût  époufé  la 
fcBur  de  Philotas  i  i\  ne  laifla  pas 
de  s'emporter  contre  lui  avec  phii 
.  de  violence  qu'aucun  autre ,  parce 

Î[u'tl  avoit  conijpifé  contre  le  Roi, 
l  prit  même  une  pierre  qui  étok 
'à  (es  pieds  i^  pour  la  lui  jetter  à  h 
tête ,  défirant ,  comme,  plufieurs 
4*ont  cru  X  le  fouftraîre  aux  tour* 
mens.  Mais ,  Alexandre  lui  retint 
la  main  >  &  déclara  qu'il  ne  fouC- 
friroit  pas   qu^on  paâat  outre  » 

?u'on  n'eût  auparavant  entendis 
hilotas  daiu  fes  défenfes. 
Il  fut  envoyé  d^uîs  pour  faire 
le  fiege  de  Bazira  dans  les  Indes, 
Apr^s  avoir  bloqué  cette  place 


(4)  Mém.  'flcrTAcad.  des  Infcript/&  e  Walm.  104.  ▼.  ji. 
fiell.  Lctt,  T.  L  p.  15».  J     (d)  Q.  Curt.t.IlL  cç.L.  ly.  c.  if, 

(k)  Recueil  d'Àtttîq.  par  M.  le  Comt.]  16.  L.  V.  c.  4.  L.  VT.  c,  8,  ^c.  L  VIlll 
leCayl.  Touivî.  p.  ajo,  a)i.  Jet,  i»>'ii,  14.  t.  IX.  c.  v  Koll«  |iiib 

*  CO  M>ât.€.  e»  i.  %u  Fliilm.  7P  t.  45.  i  Aoia,  X,  m.  ^.  764.  &  friv^  ' 


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co 

pafrdes  forts  quil  fit  coftftrulrej' 
il  revînt  joindre  l'armée ,  dans  la- 
quelle il  commanda  toujours  avec 
diftinftion.  Un  jour  que  pas  ub 
officier  it'ofoic  dire  Ion  avis  à 
Alcxatldre ,  au  fujet  d'une  expé- 
dition qu'il  pTOJettoit ,  &  à  laquel-; 
le  les  foldatf  rcfuibieiu  de  fe  prê-^ 
ter ,  Ccenas  s'en  hardit,  &  s'ap- 
procha dh  trône  ,  témoignant 
qu'il  vûuknt  parler*  Quand  les 
foldats  vâfèiît  qu*il  ôtoit  fori  caf«*j 
que ,  car  c'éioit  la  coutume  de; 
Voter  peuV  parler  a»  Roi  ;,  ils  le 
pierent  dé  plaider  la  caufe  com^- 
mun^  de  l'armée  ;  &  voici  com« 
tps  il  i'expnqua  :  n  Non  ^  Sei-^i 
n  gneur  ;  nous  ne  fonisnes  point 
«  chpngé»  a  TOtre- égard  ;  au» 
»  dieux  né  {Slaiferep'un  pareit 
n  malheur.  :  nous  -arriver  Noui 
»  aVoflSy  &'  aDrons  toujours,  le 
©  même  ' zèle ,  lé  tnêtas  attaS 
©xhpmeik  ^  •la  mêlne  "fidéliréi; 
»  Nous'fonunds  plDêtï  i  voai  foi^» 
a»  vre  au  péril  de  néryiet  &  dé 
M-. marcher:.' par  tQUtoiî  SI  roua 
lirpibira  denous  conduire.  Mats; 
9»  s'il  ed 'permît  à  vos  foldats tdi|; 
#  Vousviexpo&r.  leurs^  iêiittnièns 
9' ayec  &k|iâs££6fîdB  déguife'«l 
*>  ment  ,  ils  vous  fupplieht  tdtt 
# .  VQubir.faîen^cobtéiplenrs  i^n- 
n  tés-iiefpeiQueùfcSy'cfufune  der^ 
vinîèfé  Texcrêflnûîé Jbur  arracfie  de* 
%  .la  boucbe/La  graàdeur  dé  tos 
M-expIotns  i  Spigneut  »  4  vaincu» 
n  ^,non }  iéi^eptiâiit  *v«fS[  .ennemis  ^ 
n\  mais  YOttloldat»^raemes..'Nousi 
n  avons  fait  tout  ce  que  des  hamn 
»  mes  pouvoîent  faire?  Nous 
»,^vpn$  tra^erft.les  terrefe  &  lès 
n  rriérs.  ^ous  Voici'feîeiitot  ai^ri* 
p  vés  au  bout  du  mondé  /  & 


GO/  4^9 

»  vous  foiîgez  à  en  conquérir  un 
n  autre  ,  en  allant  chercher  de 
n  nouvelles  Indes  ,  inconnues 
j>  même  aux  Indiens.  Cette  pen-» 
»  fée  peut  être  digne  de  votre 
M  courage ,  mais  elle  pJaife  le  nô*' 
•>  tre  ,  &  nos  forces  ertcôre  plas*- 
w  Voyez  ces  v liages  baves  ^f 60 
»  ces  corps  *  tout  couverts  de 
n  plaies  6c  de  cicatfice^.  Vous 
91  içavez  combiencnotti  étionj  à 
»  votre  départ  5  vous 'veyéz  c^ 
M  qyr  vous  refte.^  Ce  peu  qui  é 
n-  échappé  à  unr  de  périls  &  d^ 
H  fatigues ,  n'a  pius<  ni  léf  tcfù^ 
n  fage  ni  la  force  de  vous  fuîvrew 
i>  Us  défirent  tmtè  dé  revoir  leùry  . 
]^  parens'  &  leur  patirïeV  pour^  y 
»  jouir  en  paix  du  fruit  dé  leur$> 
»  travaux  &  de^^  vos  viSbi^s^ 
j^iPardpnnez-^leur  ce^^éfi*  qui'^ff 
àL;iicECurel  à  toujs-îes  Jiommesv'^U 
»:  vous^  fera  glorieiux ,  Seigneur  J 
n  d*avoir  mi$.'i  iraxte  fortun^ 
•  /dos  iorneis  ^  çie  votr^  modé^' 
i>  ration  ièule  pou  voit  luMmpo*^ 
»  fer  i  &  de  vous  être  hi&é  Vaîli-^ 
ii  tr^  vous-même  ,  après  avbic 
9  vaincu  tous  vos  ennemis.  «  Ce 
diicours  &  ropiniâfteobfti nation- 
de$  foldats  Wnt change!- deiéfo- 
lotion  à  Alexandre^  ^  .  , 
1  Cœnus  mourut  dehialâdie  pea^ 
de  tems  après  ,  pendanr.que  l'ar- 
mée  écoit  campée  hw  les  bords 
de  l'Acéfmév  l/an73:2.6tavaht  J.  C.\ 
Le.  Roi  le  pleulW  'y  mm ,  il  ne*^ 

,  ^uts'etBipécfaer"de"dire  que  pour 
iKude  JDuà  qUt'ii' ayoit  â  vivre  , 
liavdttiaituiie  longue  harangue^ 
Si  parlé  comme  s'il  ny  eût  eu  que 

!  lui  qui  eût  dû  i'e^ôirîa' Macéaaî-* 
ne.  ÇoenuS'  tuj  regcçttf  ^  iion  feu- 

I  Içment  du  Prince ,  mais  de  tpQt|^ 


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A7^  CO 

1  armée.  Il  n'y  ayoîjt  point  de  tneîli-' 
kur  officier  que  loi.  Il  s*étoit  dif- 
âogué  d*une  manière  particulière, 
dans  tons  les  combats.  C'étoit  un 
de  ces  hommes  rare» ,  tk\k^  pour 
le  bien  public  «  qui  agiflent  ians. 
i^acane  vue  d'intérêt  ou  d>mbi« 
don,  &  qui  aimem  affez  leur  Roi 
pour  o(er  Wi  dire  iaVérité  aux  dé^. 
pens  de.  tout.  i 

:'  CŒNYKES  ,  Canyrî  ,  (vi> 
%Mtpv^^tïom  di'unliei^ou  d*uik 
^mon  dans  Pifle  de  Tbafe^  au- 
^^port  d^Hérodote.  Il  y  avoit 
emce  ce  canton  &  celui  des  £ny^ 
lC<a(  >  des  mines  dont  la  décom-K 
^rte  étoît  idue  aux  Phéniciensé  . 
'  CXEPyOftES,  Capiior/i, tiff* 
4'ttn^  tragédie  d£&hyle,  dom^lé 
fujet  eft  la  mort  d*Égifthe  &  d* 
Çlytemaeâre  ,  &  «qui  a  pont  la 
Çho^iif  y  dels  -Aies-  étrangères  qui 
portent  des.  préfens  au  :tombtaift 
i'Agamemofifi.  Cœphores  fignitr 
fie  des  perfonne^s  qui  postent  de» 
libations.  Ce  terai^  vient  de  ')ih>ù  ^ 

CŒRANVS  ,  CaMwu  >  ib\ 
KttpetM^.^ç  ,  capitsôae  Lycien^  qu4 
iî^ttuéparlâylTe.  ^ 

.  CCERANUS^  Ciff^nux  ,.  (c> 
Kolpeipsç ,  capitaine  Critois  ^  qui 
fvcHt  ouittérla^iJIede.Iyâepour 
fiiivre  Mério«t  ^axfi^f^  ^Tioye  ]f 
9C  qui  çondttifoit  ion.  char.  Uft 
îpnr;  Mérîon  ^ant  voulu  coni«> 
liattse  à  pied  ,  alioit  par  fa  mort^ 
donner  ^ux  Trôyeni  u^  gcandt 
Ipjetde  triomphé,  fi  CGei;anbs.iK, 
Ipi  efit  benrenfecneot  amené  4bii 

W  Ktcrod.  L.  VL  c.  4^,  .     ^  1 

C*î  Horaer.  Ilîad.  C  \r.  v.  «77.  | 

Or)  Homer.  Ifiad.  t.  XVU.  ?,  6id. 


co 

cjiar:  Ce  fut  le  faluc  de  Mérfo»;: 
&  C>ceranus,  en  lui  rendant  ce. 
bon  office  9  tomba  (oas  le  fer  de 
rhomicide  Hcâor,  dont  le  javelot 
entrant  un  peu  au-deffobs  de  To- 
reiUe ,  lui  enfonce  lesk  dents ,  &. 
lui  coupe  la  langue.  Cœranux 
tombe  de  bn  fiege  &  lâche  1» 
guides.     .    ,      /     = 

€<ERAKl|S,  Cirranuj^  Ko/v 
fMitcç ,  natit  de  Tidje  de  Parcs  » 
dans  la  tncr  Égêe^  Voyant  na 
joior  pécher  à  ConAaotinofil?  ,  Hk 
acheta  ^Juâeucs  dauphins  qu*on[ 
ftvoit  pcis  ^  &  ks  remit  tous  e« 
meff.  Qneloue  teioi  après ,  étant 
dan^  Vn  vaîUeau  qui  fitmufrage^ 
il.  A*y  QUI  quelui  qui  fir  (lava  par 
le  fecpilrs  ^un  dauphin,  lequel  > 
4b*oii  i  le  tiiç^it ,  '&  l'enleva  fur 
fea  dos  V  l'emportant  juiqu'au* 
devant  dfuoe  caverne  de  Kiile  de 
^ocynthe^  qa'on.  appelle  encore 
aiipurd'hohCfBraàioç.  ^1  ajoâte 
Guè  le  >coéps  x)^  Cxsranus  ayant 
M  brftié  vpfès.  dé.  la  mer  après  fa 
more  «là  dauphins  ;fe .  préfente'< 
tient  le  bng  delà  côtei^,  comme 
■ûuc  honorée  fes  fiuiérailiés*  << 
?  COSRANîW,  C<er4/xtfx,  (4 
Kt»ï^<t;pç ,  fik^dlAbas  »  iu't  père  de 
Eblyduis.  '  y  -  .  ,  ;.  » 
rC^ANUSc ,  Ctcrànus  ,  (e> 
IÇ9^Q«vQ4  ,  p^lpfephe  Gr^c ,  vécuf 
feus  fetnplrede  Néron  «  Us'étoif 
attaché  à  R;ubel)îus  l^iautus  ,  qn'iè 
encoucagjear  à-  attendre  tranquille^ 
ipeht  la  mçfn'^f  Joriquîe  rflmpe*' 
seur.  eavoya  des  gens  pour  I9 
tuer»-'  ^  :•    '  -"  - 


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co 

GCSkAHUS  9  Caranuf  ,'{a) 
^^P^tQiC-  \  inattf  d'Alexandrie  en 
,  Égypuf ,  fut  le  premier  de  cette 
wï\iei  qui  fat  admis  à  Rome  dtai 
le  Sénat, fe^coficttoyens  enayaat 
été  exclut  par  une  ordonnance 
lexprf  fie  d*Attg«fle.  H  foi  ledcft  a« 
|>le  de  fen  ^kémiiofi  à  Caraeafla  i 
qui  Je  £t  Sénaietsff  âc  Confeli 
vers  Tan^^e  h  G  dOi  ^  après  qu'il 
eat  été  baimi  J&ns  S6vère  >  âi 
reofernfé  fi)^  ani  danf  nne  iflis> 
comme  atni  de  Plautiefei.  ^ 

CŒ$TO»OCES,  Cmftoé9ch 


CiSuïiS,  Cœuit  K«Tr6#*  (ii) 
neapies-iiè  TAfie  minenre  ver». le 
rofK-^Eoxiii«   Xéndphon  parie  de 


ces  pepfries ,  âc  tHv  qu'ils  é«oien^ 
^ucononie^y  t*€^4»dirii ,  qu-ik 
fe  gott^eÂleient  pav  leur»  propree 

gem  k;d«irAièref'>r>fiHal>e  de  ce 
mot ,  iSt'Kfem  JêwtW,  C«^t0.    » 

flcové  dO'^^i^ennèfe  dana.  bp 
MeûéfHe;i^bii&ft^Kdic  qu'il  ajpnM 

r-C-ŒUS  ,  toM^,  <i)  faa.de> 
iX><;éani^  (te  ta  TeW,  eilmii  aip 
nomjbr^  deis  Géaae-an  des  Tkana.* 
li  épo«&.  PlMébév  ^  laquette  il> 
eut  Làtone  êc  Ailérîe.  Virgile  lak^ 
naenrion  ^  géàm  Cocue*  < 

(e)  roi  d'un  peuptofiraton  ,  amL 
des  Rom^tts/  £t  fat  Oftorfus 

pàg»  1  ip.         , 

(i^)  Virg.    Ancien    L.   IV.    v.    179 
I4yth.  par  M.  TAbb.  Ban.  Tom.  I.  p. 

(4)  Taci$.  dcJul.  Agricol.  Vi|,c..>^, 


CO  471 

Scàpnla  qui  fit  alliance  avec  ce 
Prînce  9  &  agrandit  fe»  États  par 
le  don  de  quekpçs  villes  \  ancien^ 
ne  polftione  det  Romains  ,  qui 
laîibient  (etvif  ]es>  ftots  mêroes  i 
yétabliâemem  de  le  (èrviinde* 
Gflg^unus  leur  demeura  toujours 
fidiSeitiett  attaché*  • 

COGNATk  (/)  Cette  ex- 
pre&oa  »  danalea  loix  Rjomainest 
maroue  d&aX'^,étoiefit  paréos 
da'côié'det  feniÉi^. 
:  COGNATU&  (^  Les  mo^ 
Cognatus  &  Cûgrtata.f  da«sr  lec 
ttomimôni  ft^  p/eniiene  .quelque^ 
(êm  pém  kl  èeëus^cre  6c la  helle* 
feeùc ,.  cecntnelejpfieitite  M.  Fa<* 
b'retii  par  l'^ttlriiébde'pLafieart 
Inlcrrptiônsi  £9 -eercflines  prcK 
rinces  du  roy^amé  v  le  beaiv^frere 
&  la  bette^fixki^  scellent  Ig 
Crânât  fie;  la  Oifloadei..    .         / 

€OGN0MBN'v:CtA)  fclon  D^ 
fio^naid  de  MoSnéfan^octN,  déû-' 
gnoii le nom-dei Uifamille.,  cfaexi 
les  Romains. 

2-câUttus:  y,  TvSUût ,  <i) 

l^e^TQ  df  Afie^  dotit  parle  Ta:çite  , 
&  qn^en  jcroîc  ètre'lekiiineque 
le  Ghobus.  Fqyei  Chobus. 

eOHORSL  te  long  «jour 
qàe  quelque  Cob>i<(eft-  Hotnaines? 
ont&ue  enicercMÉs  liedx»*  eft  eau-* 
fe  1^  qnelqaei^ant  de  ces  lieun 
oméié  appeHés  dn^nbiadetces 
Cobortea,  \0ti  fçaîr<{aeilans  vnf . 
aociemie    InfcrifÂiin^   rapportée  v 

Cr^.  .^ift,  dç«  Kmp..  Tàm*  II*  p.  *«^, 

(/).Mém.  de  IMUd.  <rcf  Tnfçript.  & 
Béni  tctf,  Tom.  XIF.  pa^.  87:  » 

(£)  Amiq.  cxpl.  pir  f)w  Bertu  de 
Montf.  T.  V.  p,  lot, 

(^)  Antiq.  cxpl.  par  D.  Bertu  i§ 
Montf.  Tom.  V.  pag/ 9f.  f  ^ 

<f>  Taoit^lliA.  L«  RL  c*  ^^ 

Ggiv 


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471         CO 

par  Gôh^us  >  il  efi  fait  metAiod 
de  Cohors  IIL  Albiniana.  On 
lit  dans  une  autre  lofcription 
CoL  •  Araufio  jtcundanorum  Coh: 
XXXUL  volunt  ;  fit  quantité 
d'aïf très  lieux ,  où  les  anciens  mo-^ 
numens  nous  apprennent  quelle 
Cohorte  y  féjourhoit.  Cohors  Gah 
IUta  eft  le  nom  que  :donne  Anto- 
nin  i  à  9n  aticienr  Jieu  d'Efpagfi^ 
dans  b  Ôaltcè^  félon  Ortéltus. 

COHORTAL ,  nom  que  ron 
donnoit  âu^  ierviteurs  du  préfet 
du  prétoire.        .  "^j 

COHORTANUS  ,  Cohorta^ 
nus ,  (ix}  Satrai^e  iUuârë  qui  com-^ 
niandoit  daiisr  une.  province  oit 
vint.  Alexandre  le  iÎTand.  Ihfd 
loumit  volontairement  à  rdbétf-' 
£ince  de -te  p^'incev  qui  lui  rendît 
ies  États  ^  &  ne  lui  demanda  abtrè 
chofe  ,  finon  que  de  trois  fiisr  qn'3 
a  voit ,  iï  IdiîCin'dôrtitât  deux  pcîur 
raccompagner  à  la  guerre.  LeSa^^ 
trapc  (lui  donnai  encore  le  troi-<: 
fieme.  .      .     x 

OOHORTE  y  Chhots  ,1  coi^ps 
{b)  d'infanterie  '  Romaine  »  vqaf 
Êiifoit  là  dixième  partie  delà  lé«' 
gîon,     .r.   .'...'  ,,v     .  .   ,    ;. 

;  L  M.'  le.iMarécial.  de  Pnjtfô- 
gar  :obfe#ye j^quela'  Cohorte .  ré-*- 
pond  à  nos  fiata^ns,.  Il  défiok  Ir* 
bataillon  uh  mmhre  d'hommu  ^\ 
dont  'le pad  corttpltt  éft  depuis  flnq^ 
cent  jj^^U'ji  :  miilt  hommtsy,  que  ♦ 
Vûn  mefzienfmbic  fur  plufieun. 
r^ngs  y  qui  forment  un  quarré 
long  / pouf '4gir,s  Je  mouvop"'$'^ 
combattre  à  pifd'^  ^^f^f^^A  A^^i, 
n'étoit  quum  corps.     >         >a 

'6)  Q.  Curt;.L.yfII.  c.  4.-  .•  I 
ib)  Méo*  de  rAcad.  d«s  Infctipt.^] 


c  a 

' .  11 .  eft  remarquable  fi  &  ?ett 
encore  uneotbrervation  de  M^  d^ 
Poylegur  ,  que  les  nations  les  pins 
habiles  dans  l'art  de  la  guerre,  ont 
formé  des  Cohortes.  Il  femble  que 
ce  corps  foit  tout-rà- fait  naturel; 
le  nombre  de  foldats ,  qfti  le  corn-* 
porent,  e(l  dans  la  prQp(mton  jufte 
pour  avoir  afiez  de  mafle  &  de 
Confiftance,  &  poùt  gardée  en 
mêmetems  la  £p«plefle  nécdOTake 
à  la  liberté  &:  à  l^nifbrmité  des 
mouvemens^  Dans  Tlliade,  Achille 
envoyant  fes  troupes  à  Xk  fuite  de 
Patrocle  ,les  dlvife  ^n  cinq  corps^ 
éhàcufl  de  cin({  cens  hommes  ; 
I7httc}edide  >  dans  fa  \  défcriptioQ 
d'une   bataille  donnât. dans  jat 

Juerré  du  Péloponnèfe  «  auprès  de^ 
dantinée^  dk  qUe  chaque  régi- 
ment Lacédémoniea  eft  compo** 
fé:dejqttatre.ciofi[ipagQie&»  chaca*^ 
1^  de  quatre  :e6:o»adeii  ;  &  pv' 
Tarrangemei^  de&  troupes  en  cett 
^ndroit ,  on  .vx>it  quç  ^Kâque  ef- 
coqade  étoLt^etrpitôâfdeiix  hoon: 
me8:;.par  confécpientiC^que  com*. 
pagnie ,  quoiqu'^Be4N9rtât  lé  nomt 
d4>  dnquaritaine  v  litoit^  pourtant 
de.  cent  vlngtrhuic' •homraest»-^' 
chaque  régiaaeAt.d^  cihq  «icens 
douze  ^  ce  foÀt  nos  batailliuis.  Cet 
bataillon  faineùx  des  La^cédémo- 
niens ,  nomnàé  /tapar  ou  /«^îftic». 
éxoit^  félon  Dîodore  da  Sicile ,  de 
cinq;  cens  hommes^  ^  ' 

.m^\%  jamais  irette.divifion  ptf 
Cohortes  ne  fut  mieux  entendue 
in?  pîus    fçâvahtê  qu'elle   Tétoit. 
javant  Marins ,  quand  la  légion  " 
;étûit  formée  de  foldats  de  différ 

Beh.  tctt,  Tom.  XXIX.  pag.  391,  ^ . 


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co 

tajjt^  e^ece»  Les  Romaîf^s  ayant 

ak)rs  cjuatre  fortes  dç  Ibltkti ,  ie^ 
Haiiats ,  ^s  Princes  y  les  Triai- 
les.  6c  les  Armés  à  la  légère  »  au« 
^CMÇIit  pu  faire  de  chaque  ^fpèca 
^es   corps  féparés;  ils  aimèrent 
î^^x  en  former  qui  fudent  çom- 
pofés  de  quatre  efpèces ,  afin  que; 
tous  ces  corps ,  qu'ils  nommèrent} 
Cohortes,  fe  reflemblaHent ,  corn- 
çijç  fe  reflembloient  les  diverfes 
légions.  Cette  divifion  étoU  belle 
Çç  cqtpmode.  Les  membres  d'une 
armée ,.  quoique  faits  ppur  agir 
de  concert ,  doivent  ^gm  A^re  en 
état  d'agir   féparément.  Or,   la 
Cohorte  avoit  (ous  les  atvanta- 
ge&  .de  la  légion ,,  exce;p,(é  <:elui 
du  nombre.. On  pouvoir  dii^tacher' 
la, Cohorte,  fans  altérer, l^pro- 
portio^n   du  reile ,:  &  .&9s-  rieii. 
troubler  dans  Tordre  de  ia4>àiaille. 
Pe.plus^,  les  quatre  efpèces  réu- 
nies 4ans  le  même  corps,,  frater- 
m(bi^nt,enferobte,i..eUf|?5  fe,  foû- 
lenoientvmutuelleineat-avec  arr 
t}eur  ^Sl  ceue  liaifon  étou&it  le$: 
feuf  jmei^s  d^  jalouse  d'un^.,part , 
Û4^  mépris  de  î  autre  ,<|ue  la> 
différ.èn'&e  d'^eV  d'c;xpérience  &ç' 
d^  i^on^dération  auroit  £ii|t  naître. 
îli.>ll  y  ^t  toujoyrs'dix  Çohor- 
teit.|>fir  ,légiofi.  Ciçeçon^^d^ns  la , 
quaiof zien^  Philippiqpe ,  appelle 
Yjngt  Cohortes,  ci^qn'il. voient  de' 
Hpnunerdeux  légio§is,^I|  e(l  prou- 
vé .que  les  légions  de  Sylia  6c 
c^les  de  Céfar,  ckn^les  guerres  [ 
c\y\lés  A  étoiept  d^  tin^ixûUe  hom- 
mes ;  '  or  ,  Appien  donne   cinq  , 
c^^:  hommes  aujç  çohortçs  de 
SjlU;&  Plurarque,  dans  je  récit  , 
dgh  bataille  de  Pharfale  payant 
dii  qne  Céfar  avoir  placé  ûx  .Ço- 


eo»     .47} 

l)iortes  on  réferve,  dit  ensuite  que 
ces  trois  mille  hommes  fondirent 
iur  la  cavalerie  de  Pompée. 

L'on  ne  fçauroit  être  arrêté , 
ni  par.  Taucorité  de  Servius ,  ni 
par  celle  dlfidore ,  qui ,  mettant 
dans  la  légion ,  comme  tous  les 
iVuteurs  ,  foixante  centuries  &• 
|r;ente  manipules ,  y  fuppofent 
pourtant ,  Tun  iept  Cohortes,  l'au- 
tre douze.  Dans  ce  membre  de 
divifion  ,  qui  ne  s'accorde  nul-^ 
liment  avec  les  deux  autres  ,  on 
yqit  une  erreur  fenfible  qu'il.faut 
ipettre  fur  le  coihpte  des  copiées,. 
ou  peut-ê^'e.  de  ces  deux  Grani-. 
mairiens  ,-C  poftérieurs  aux  bons^ 
fieck«..Une  infcription  de  Tar-; 
ragbone  femble  donner  une.treî*. 
zjeme  Cohorte  ài  la  troîfieme  lé-*, 
gipn.;  mais|  Reinéfuis,  par  une 
çprr^^ion  fenféej^  fait  dilp.îrolcre^ 
l'abfurdité.  Au  lieu  de  LEGJÏC 
C.  XIII  f  il  prétend  qu'on  cîak^ 
\ke ,  LEG.JII.  CI  KEN. 

.Quand  la  légion  n^éioic  pa^^ 
cpmpleUe^^lle  gardoit  toujpur^le; 
iRên:)pnomlprp  de;  Cohortes j  m^iisr 
le  nombre. des  folda(s  4e  chaque^ 
Qt^ort^  diminuoit  à  pcopprtioi)^ 
Catihnarr.<dii.  Sallu|^..,.  .a'avp}([) 
d>bor<i.<ç3e54eux  imillçbopmes.^, 
il:  leis  parti^eaen  deux  légioîJ«o|î 
4  ..co^u.pofa,  chgque  Gçboitç  ^^ 
proportion  de  ce  qu'il  aroit'.dis,; 
folfd^ts.  JrtUcuUus.,  def^aji^nT^igiajirt 
Hçw^ie/te^.ni^e,  cç>i?;r^ y^rai^es  j 
vingt- qu;^tre  Cohortes,  qiii  nejair^ 
foient  qife  dix  n^lle  hornme^ ,,4^1^^ 
Plutar^ue.  Dans  cette  .gu^re^  la,  ^ 
légion  étoit  de  fix  millç^  homxne^f ^ . 
félon  Appieny  Ainfi  ,  la  Qçhort.^  j 
d^voit  être  de  fix^  cens  /losnm^  ;  » 
mais ,  en  cei^c/ocçaflon.  ^  celles  nj^ 


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CD 

Cucullof   ne  contenoîcw  qu\m' 
peu  plut  de  qaatre  cens  hommes, 
Siccius  ,  ce  Romatn  fi  eélebre 
par  l'a  bravoure,  cbns  un  tems  où 
tous  le$  Rbmams  étoiem  braves, 
qui  ne  commanda  jamais  en  chef, 
parce  que  dans  (on  fiecle ,  les  Plé- 
béiens  ne    commandoient    pas, 
mars  qui  fut  un  de  ces  fubalfernesl 
qnî  font  la  réputation  de»  fopé-; 
fîeurs ,  &  à  qui  PHtftoire  n'ou-* 
blie  pa*  toujours  de  rendre ,  aprè* 
leur  morr,rarantageqiïcla'ftTetMs 
la  coutume,    l'intrigûe^^  leuf  dHf 
èié   pendant  leur  vîé;  Siccto  ,' 
<l»-je ,  mena  arec  luî  à  lar  gwârrr 
iwie  Cohorte  de- huit  cens  hom*^ 
tnes  j  c^étoit  Fan  dé  Rome  i^,- 
&  -les  légions  n'étoient  alors  qtie" 
de-qaafre  mille  hon^mes '^  mai^, 
cette  cohorte  ne  &i6>it  pfas  pàrtiie 
d'une  légion  ;  ette  étoît  hors 'de' 
rang,  conopoféede  foldat*- vétév 
JtwnP,  attachés  à  leur  chsf'par'  un- 
engagement  Mrobmatrc  é'eftime 
iftf  de'cbnfîançe ,  jjl^é   fort  q6e 
tbt^  Ic^  fer mèhs  ;  6i  ttt  ûxttaph - 
necofnchit'^ien  pourîe  n6mbfè* 
dH.foMatSr  de  la  Cohorte  légityn^ 
mî^é.' Deux  endroits  de  Derif^- 
d'HâHéamefll^  nous  donnent  potir^ 
ttîîf  des-^tîcJljortes  <fe  'dncf 'éem 
hpiteWèar,  r^n  de  R6«neFi%%  &  ' 
dfe,  lîi^  cén^^  ftosnmes  dttni  éiK 
api^^-^#',dkns  cètetmvl^légîbti 
a^àët  qt^e  de  quatre  nvi'lte  hom'^ 
îàî^li  te.Cèhorte  ne  î^obv»6ît  être  ' 
<JQ^  'é^  (fèl^f^  çen^  hditimèSfc  Peint 
rt^bdâtëh  cette  obje^jott ,'  il  M- 
£t  der'lire  RHiftoire  de  ces  deux 
anbée^s  ;  dans  hi  première ,  le  coi& 
{lA , amégé^ams Ton  camp,  clrôf-^ 
fit  dài^f^'trt^upes  les  plus  braves^ 
geo$  pbati  faire  iine  rîgoutf ûfc*  ^ 


fortîe  ,'8c  donné  à  fon  frère ,  pwrf 
le  iècondet,  deux  Cohortes  de 
cinq  cens  hommes.  0#  (em  que 
ces  deux  corps»-  n'-étoient  pas-  deë 
Cohortes  Qrd^aWes-^mars  qu'elle* 
âireitt  ftjrméeé,  pour  le  ffloitienr^ 
de  ce  qûll  y  avait  àç  ttteilleiirt 
foldats.  baflslefbeofid  exemple  » 
les  Cohortes  de  Ax  cens  hommet 
n'étoient  pas  tion  plus  des  partiee 
régnlieres  de  légion  ;  c^étoieiK  \eé 
troupes  qu*ôn  avoii  laiâ^ëe»  ^pow 
h  garde  d^e  Rome,  auxquelles  oof 
jbignok ,  {^ùn  U  coutume ,  1er 
vieiUards  6i  les  gens  hor»  <4e'fcr- 
▼ice.    > 

ni.  Le  i^om  de  Cohors  étoilf 
propre  à^^hfentcfrte,  Dafis  Cicé» 
roo  ôK^As  lesailtre»  Autéurt  ^  cr 
mot  eft  Oppofé  à  ê^uitatus,  Tke^ 
tive  n^ppefle  Cokors  la  carale«i 
rie  légiowwafire  t^ùe  dans  une  oc-^ 
CEifidn^  o^les  êaraiKeF»ay^ënt  mlr 
pied"  à- tcrlRe,^ortnerent  tom-è-* 
coup^  û*  %aft«itt6n  ;  &  it  donne  X* 
cette  Cdhotte  tnomemanée  répi»- 
theie  de*  Fumata-y  à  caeCe  tie» 
bouclier*  fioniméii  Parmét 'que^ 
pbrtoient  tés  caraKers.  JLef^Àmgi^ 
deSoétofie^  dansrlâ  vie  à^dim^ 
de,  né*  fek  fut  ee  point  attarat^ 
difficulté  ^. '^^«ipj^ft^  mitUids  lU 
ordinai>it ,  ni  fùji'CoàoHem  lufam^* 

ei  eçuifhvi  milîl^asûgti^ieyC^ffy*^ 
nre  le  tenta^que  Cafattbotl  ^  noil^ 
pas  lie  fervfee  de  h  Cavalerie;  ' 
m'aiscètoi  de^Chevaliers-Rémaitit 
qor  n'a  voient  ^ers  nuir  tappott' 
avec  le»  câvalters. 

Quant  à  Fétjrt!^otogie  dti  mot  ; 
Chhon&,  on  etf  donne ,  à  ^o^d^^ 
naire ,  plafieursitiauvaifes.  QueU 
qaes-i>n$  lé  fonc  venir  à  ^ofittnz  ' 


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Jfo  { lùiçré  f  à  coartando ,  îd  efl 
çpncludcndo^  Varroft  fournit  la 
vraie  origine  de  cette  dénomina- 
fjjon  militaire  ;  roaîs  peu^rstra  fe 
tfompes-t-il  fur  l'étymoiogi?  pri- 
çûtive.  Il  dérive  Cohots  de  cotr- 
cm  ;  m^is  ,  poifqu*iI  reconnoît 
l5lii-.mêaie  aillei^r*  que  la  ççur  (}*u- 
t^, .  no^étairif  s'appelle  ^  ci^es;  ks 
Pqët?j8  Giecs,  x^/*»"^^  n'itoit-il 
Ç?l  pl^Sf  P^urel  4^  faire  veak  d]^ 
ce  mol  i^c^iui  dç  Çohars  ?  x^'/^^'^î  » 
dit  Hérychi|is,.7r?piSc.M<  TÎ^ÇÉÛx^Ki. 
&  iivftyhuç  ,  ^i  PexpJ^uc  plu- 
ijeurs  foi^  datu  J^^èr^  ,  le  rei>4 

ou  ,;eo>ploy.é  dan^  tpU5  )es  ^ri- 
Oilteur«  pour  1%  c^uf  d'one-fecme; 
ches  les  italiens  coFte,  ;  £(  cbei^, 
jaçu^  (;£^u^.  Les  pnenoiers  Hoa^^îQ» 
nç  çonïîoifl&nt  ^eJôuxarift^lV 
gric^Mwe  &  J*  guerre,  Qni%  faili 
paiïer  4^  1*1111  i  I^autr'eplîîneorsex-t 
pr^ipnf,  t'affei^bl^Q  die  ;plu^ 
Rieurs  tentes,  fous  lefquellesfepa£^ 
^geok  ^  dans  ûYi.<4n}^>  i|neX^o<- 
îorteLdijirifée  €9  ^jhoipiiles ,  Jejuf 
p^iM«>a;voir:quelqije?  reâ[en3l>laiicê 
ayec  tes  div.erst'^bâ^iDeQs  npivfore 

^pt^mk  hiéffm-DaûHs  i*^méq 

Se  âonftàntiusf  &  f^embiet  eo 
éfQpo«qn3u0 ,,  l'an  dé  hQ^j  $1  jj 
^  da^s  celle  de^  Juliea  qutmar^ 
j^oît,.,:det^  ^nsiaprès^  eontcelts 
terfe„xAiTftni^«  MsaotWkntiomf 
meAe»  Gemof  i^f  .^  d^  Cohortes» 
Qn  en  voit  grande  nombre  d^ns^l^ 
Notice» donc  quelque»- uBes  fo«t 
l^gicHuii^es.  Z<mmëpaflanqd'Ho<^ 

Î^riHs^eafermé  dans  Ravenne  ^ 
j|^<)u'4  Itu  vjoii'Qôrot  fpfL.çc;N[ps. 


CO  47> 

de  trompes  ^qu'U  appelle  r<«7;uûiT«» 
&  qui  faifoiem  qitarante  miUe 
hommes  ;  ç^  feroiem  des  légions 
de  plus  de  ûx  mille  cinq  cens  homi^ 
mes  ;  mai» ,  félon  la  corteâjon  d^ 
^eunclavifui)  néce&ire  en  cef 
eAdfQK  ,  il  &ut  lire  quatre  mill^ 
^  liçi^diequ^ranite  miUr^c'étbiene 
d^s,  Çoi\o^^tfi»  d'un  peu^plua  de  to 
cens  clAqu^tçboayspts»  La  ipilic^ 
(égÎQnna^  é^it  alara  tellement 
altérée  qu*on  ne  la  reconftotfibit 
plus.;  &  qqaiid  aprè&  Judinien  il 
ç'X^^tpto*  d«légwnft»  Les-An^ 
tei^rs  L^ins  çontinufrene  de  fé 
C^rvirdurmotde  Cokorcepoer dé-« 
Âgn^  un  corps  d*In£aoicrie  de  plu» 
(leurs  centainies  de  {6\éat%, . 
^ .  AiiA  la  0>hof te  fbnvéc\it  ^  1^ 
légion  ti^ême.;  ni»s,  tous  les  Sça^ 
V^s*  aê  cottviennené  pas*  qu -elle 
û)je  aée^?ec  la  légioaw  Patrickis^ 
$iavîUas^  &' Siaumaife*.  ftitirisr«ii 
^  pointe  pait.AquiiKK^^ipiiieidene 
que  la  div,i(ion  p^r  Cabo<r«es'iié 
CQffînai^f  a  que  ^  tems  de  MaW 
rius  »  ou  même  de  Jules. -Gé^^^ 
Schétitt[s>  céfutece  fenôiiieAt ,  dbn$ 
fexit&statiQ«  fur  le  «empite^  ^^ 

W^ i.    ^.:  £-..-:::•; 

i  ^-Bn  eSe^*  p«ttrfeutenTrqu!iin*5ii 
si^  pair9f<léï£Qhorfefitavano  f^a»* 
^Sk  >  \\&pf  ^Oi  Sb  Siumalie-në 
(iNUj?|asidimctdié  éçle^âiieey  qua 
Xiter'Liff«.  ji^Btendoiti  ^Ica  4  Ift 
snilice;  Ronsai», Se  ^[u^ilv^  cott^ 
£miuht$  asicieae;  u£ig6»4-ceax>^ 
n^tncA  qui^dendentî^i-eies  ^v^ 
cônaos.^  axtee.ceu»3^  fan  tciiisi 
La  première  foirqaecoèl^Hiflofieft 
parle  deftCqhor«es>c*a(hfaai:iàconde 
anpée  apnbiFexpulfioii  des*  Rois; 
il  les  nomme}  depuis  en  cent  en* 


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47«       c  a 

qu'il  les  confond  avec  Ie§  maâîpti- 
fci  ,  il  ïc>  ^  diftingue  quelqtje- 
fon  esrpreiïément ,  comme  en  ctt 
endroit  :  ConfuL  , . .  quinqnt  €o^ 
àortesy  additis  ^liinque  manipidis^ 
9f^ p^rnn fêtperare  jttèèi,*  Gard 
k  récirdieb  bataille  de*  TrafimèP 
»e ,  a  nomme  après  la  légion-,  la 
Cohorte  ;  après  celle- cr,  le m^ni^' 
pole.SaUuOefKet  auffiftes  Gohor-- 
iesdanrrarmée  de  Nfé«ellii»-ei# 

Mai»  ,^ifiju*on  fe  fonde  ariî- 
^oemeèi  fin:  le  fflence  dé  Polybe; 
îïeft  bon  de  montrer  que  Polybe 
Blême  reconnoît  lesCohortesi'Ën 
^éeriT^at  im  combat  ^u  t>réMèr 
Sctpion^eA.Erp*gne  ♦  ^onrreln-^ 
4iàis;  il  \iomme  la<^hotte  6ns 
^pivoique ,  fe  éêrrant  àà  mot  ta* 
micQUTi^^  €6  dan»  la^<  de^iptkMY 
t^imrbat&iite  du  même  ^àfn(M  i 
«omreAfdcubal  6t»de  GiftoÀ»4r 
4oc6ieriii6me  la  définlctotrdei  h^ 
'C^horte;c^eft^  dtt-'tl';  ivn  corp$ 
«l^o&merîê  compofé  dé  trois  tùtn^ 

^n^KidEpec-i-cms  ontJt^anci  (\và 
laDCo£iDcteu£étoic  ^put^tuM'pmhê 
ocdinaire  de  ta  légion  ^  maî$^)[|i]e 
Ir  n  gpiiihâ^t fbrmoir^a  *  Çk)horte 
lorfqQftt^dreflort  Voriié^  bafa^ 
let;t^G'c(li^  cfifcïncHSs  ^  pour  cette 
woLifouffàm  Polybe  rficn  parle  |3(cAitl 
ikià  b^barifiobrdeft  i6gi<»is.^i»is^ 
0»cre*^à6ribaiffit6..oaTci:âiite:iei 
Cokortmftùêtat'jhan  lUscbot^ 
kb  »  ^^eibmrnèm^èftfMtmifrTpflf 
k.  >^faiio^nBl||e  ::£3n»' vepliq#r  rtdt 
CmcfnsÂ&nenms.  .  ^  -  *•  ^  "  T 
;  >)Li>aisk'B«soem'piiiet  lenoni 
de  Cc/kffa  cei&  d'être  «nuxfage  ;  & 
ccbirde  Numen  étoide.fèoh  cwiw 
«i^;^ûfS4x>inr  figinfier  Xolsorsel 


Dans  le^  Novelles ,  les  Cohorte^ 
font  toujours  nommées  clpi^uo', 
L'hiftoire  Tripahiae  dit  expreffé- 
ment  :  Romanomm  Cohortes  nunc 
Numen  vocantnr.  Synéflus,  qui 
Vivoît  fous  Ai'cadius  ,  appelle  la 
Cohprie  d..:î/xh*  Gn  habilla  même 
à'  la  Grecque  le  mot  Numerus  ^  6t 
for  le  dixième  chapitre  des  A6te% 
dfes  Apôtres,  où  la  Velgate  dit  qute 
&)rneillè  éïoit  Ccnturio  Cohortisy 
quiB  dUitur  Italie  a  ;  ce  que  le  grec 
exprime  âînlî  :  E*x  ^rrUfOL',  -r«ç  )t:i- 
»fli^v^  IftiDex/xéç  ;  St.  Jean  Ghry^ 
foftô me -explique"  le  "mot  a-Trétpa '%* 
comme  inconnu  ^  Ton  .tems , 
par  celui  de  né/uepô^y  rvtifct  ictt^é 
h.ce,%$vfiif  i'VVlrflifju?^9f.S<iida9' inter- 
prète a-7trpse  i  ^r  7n<%in  ç-p-tT-t'' 
flJrm  ,  tflf'»«77K  »  lt9''fxtp(f^  Cédrè-' 
ne  6c  lèi  nouvQfâUx  GfëcVènfï- 
pk>ie  Arfbtf)6ttT^  ^ce  tnot  pour  Co-^ 
Ihwte.  ©a«  la  Notice  ;  qui  eft  tJti 
tems  de  Théodore  le  f  eune  ,"  aii 
voifjégaleâi9htCoWj^6*  NtitHé-^ 
fus.  -i-:''  '  -'^'  ^- '  •  •  '    •  -'^ 

Onry  vt^Vftéifè^ra  ;  c^étoftf 
f\ùi6i  *u\ï  noUf^-e^tf  nom  dom^ 
«ux  'Cohortes** ^*;'qu*un  nd^UKi^éMi 
)  corps  de^trowpes' Selon  O^ftàif* 
tin  Korph}MPogéwifre\  on  «ppf^^c^ 
ainfi  i^ilè^tletémi^d'AVcaèiusr^^ 
poi:iii0»s  de  U^K^dê  miné' ton -<M 
dttqîscén»  bonMtms ,  'fépa*«is  'fit 
pteè^»^  eii  dlvef<ibaik.  ËH<iK-,  h 
tnilfoe  ^ant 'tdui^à-^itâlf^  Si 
ht  légion  anéantie  |  Itf  'Ë6hort# 
pecditf&)  fenr  A6nr&  fa  £or  nft.  ^Le 
mDv}ÂaiSarë*Sungtts\  qu^dttU^ 
pour  la  prémiereifois  dany  Vbptf-I 
eus  V  '^'  -eotifitse  dan»  •  ■  Végdce , 
miîs^i'iî'y  ^AA0mployé  qu^ftôor 
défigner-  ^s^*^ih>uperi>arl«ifel', 
pa&  dah&.  Ici  sar  mées  is»j>éri^e»^ 


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co. 

9c  fitnt  la  place  de  Cehors^  maïs , 
\6\ix  y  td  différeôt  de  l'ancienne 
Cohorte»  ^ 

VI.  Il  paroîi  que ,  Jufqu'à  Ma- 
îÎMS,  toutes  les  Cohortes  furent 
égales,  5c  que  la  première  de 
chaque  légion  ,«'ét<jit  diftinguée 
des  autres»  que  parcç  qu'elle  etoit 
dépofitaire  de  l'Aigle^  ^  Tenfeigne 
de  toute  la  légion  ;  ipais ,  la  0>-. 
Horte  ayant  alors  changé,  d^  face , 
on  croit  voir  peju  aprèS|l^  première 
Coboice  devenirj)lu$  npmbteufe 
que  les  autres^  Céfar^  dans  fon 
expédition  3e  la  grande  Bretagne, 
Voyant  kî  gardçs  avancées ,  vive- 
ment preflee^par  les  Bretons ,  en- 
voie au  fecours  deux  Cohortes,  6c 
c^étoîent ,  ajouie-t  ^  il  par  réfle- 
sfion^les  deux  piemierês  des  deux 
logions.  Oh  pourroit  dire  cepen- 
dant que  cette  di.fUnâiop    peut 
bien  tomber,  non  pas  fur  le  nopi- 
bre^maisTur  la  qualité  des  foldats» 
Si.  qu/e  vraiiêmblableinent  les  p}us 
anciens  &  les  plus  braves  ccn^ipo- 
foient  la  première  Cohorte.  Mais, 
cié  qûî  ferojf  crpite  que  cettp  Co- 
horte étoit  auflî  plus  fprtç.  en  nom- 
bre ,  dès,  le  tems  de  Céfar  ,  c'eft 
ce  qu'il  raconte  de  CraAinus  à  la 
bataille   de  Pharfale.  Ce  brave. 
Officier  I  qui  mourut  alors  pour 
fon  général,  &  dopt  fon  général 
a  fçu  rendre  la  mémoire  îpunortel- 
le,  avoit  été  Tannée  précédente 
Primipile  ,  c'eft-à-dire  ,  pretpier 
capitaine,  de  la  dixième  légion^  &' 
il  feryoit  cette  année  en  quaUté 
de  volontaire.  Auffitot  que  le  fi^ 
gnal  fut  donné,  il  s*écrie  ;  Suivei^ 
mol  y  camarades  f  qui  av€[  marché 
ffus  mes  ordres^  En  mên;i.e.tems  il. 
Ma  rennemi^&  çft  îuivi  de  çei^, 


CO  477 

YÎAgt  (i^ldatsjde  la  même  ceimirie. 
Ce  ne  pou  voit  être  que  la  première 
centurie,  de  la  première  Cohorte 
dç  la  dixieioe  légion  ;  de  fi  les  au* 
tives  cejnturBes  étoienc  d*iiii  miksm 
Boml^re  de.fQldats,  il  Êdloit  que 
cette  Cohorte  fût  de  plus  de  fepc 
ceaibooimes;  or ,  les  l^ions^  de 
Çéfac  o*etant  que  de  cinq  mifie 
bono^me^,  les  autres  Cohonef  n*e« 
Q^vo^ent  avoo'  au  plus  que  cinq 
cens, 

.  Schéliu^,  qui  tire  de  ce  trak 
biûoriaue  la  même  conckiflM, 
dit  qu'a  la  vérité  il  fe  peut  £anre 
quç  1^  premières  cemutiesftiireae 
plus  m>mbreufei ,  parce  ^e  les 
volonuires  &  \e%  foldats  choifis  j 
écoient  enrôlés*  En  effet ,  les  cent 
vjngt  foldats  qui  fuiyîrent  Crafiî* 
nus  ,  font  appelle!  tleiU  milites  Se  . 
volu^tarii;  mais  ,  il  ajoute  xp'à 
eft  aufli,(art  vraifenïblaUe ,  cpie 
la  pretKiiejre  Cohorte  fut  augmen- 
tée ,  parce  q<^e  1* Aigle.,  qui a^eir 
été  autrç^is  à  la  troisième  ligne  * 
entre  les  mains  desTriaîres,  fe 
trouvant  alors  à  la  tête ,  dam  les 
rangs  de  la  première  Cehorte  « 
avoir  J^efoin .  d'un,  grand  nonibre 
de.br^^ves  gens  pour  être  défen-»* 

i  Qttoi^qu'il  ç^  ibît^  oaiie  voie 
pas  de  p^euvecbieoév.idèRtequ'a- 
vaot  Adrien  les  premieres^Ccâior-  > 
tes  fuirent  phis  ccnfidérables  par 
leur  nombre;  xnais,  ibus  ce  prin- 
ce ,  elles  étoient  doubles  des  au* 
très,  &  pçr^oietîtJenomdeCo^ 
bortes  xnilliaires,  Hy^in ,  dans  font 
c^peme&t»  faitlalegioodecinqt 
mille  deux  cens  quatre-vingts  hom- 1 
t?i9^iAl  J4  diyifeen  dix  Cohortes;! 
^.SWmfÂ^  ^â  de  neuC  ceii&  l(à«| 


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4^1  C  0 

siantelioaiinès  ^  &  les  liéuf  autf^fts 
de  quatre  cens  quatre- iringu.Gha^ 
que  G^bonecomieni  fix  céhtuHe^i 
&  c'eû  à  tùïx  que  Saoïmaife  pré^ 
tend  que ,  xiepuit  Tlnâhutiéft  dé 
k  Cohorte  M\]hirt,lei  autfei  ne 
comienneût  plus  que  cinq  centu* 
fti*  Le  caAipeinent  d^Hygm  jprôii' 
Te  évidemment  le  contraire;  le 
terreinycftnierarépoQr  fit  ceti* 
tartes  dans  chacune  des  Cohortes^ 
Au  6.C  cb.  du  fécond  livre,  Vé- 
gèce  expôfele  nombre  dès  G>hbr- 
tea  de  chaque  légion  &  les  feldats 
de  chaque  Cohorte»  Selon  lui  ^ 
une  légbii  èûît  avoSf  dit  Cohor- 
tes ;  la  première  eft  aa^tieffus  deé< 
Éutrôf  f  &  par  le  nombre  6t  parr 
la  qualité  des  foldats  ,  (}ul  doivent 
être  toUs  des  gens  biens  nés  &  éle-t 
,Tés  dans  lès  lettres  )  il  dëitiandé 
•ncore  ailleurs  qu^ls  aieÀt  du  bien^ 
de  la  agate  £c  de  la  valeur.  Cette 
Cokopfte  eft  «ft  pofleâSoA  de  f  Ai- 
gle; elle  porte  les  SfttagetdesJEkzt-' 
pereuri ,  qui  ioùt  Tobjet  de  la  vé* 
aération  des  foyats.  £lie  eft  dcr 
cmzeoeàs  chiq  fantaffîns  éc  de  Cent 
trente -deu»  cavaliers  cuirafles  ,- 
&  s'appelle  C<riiorte  millialre; 
c'eft  la  tére  de  teute  la  légion ,  àt 
c*e(l  par  eUe  qu  on  commeiKe  à 
formel^  UrpreifiieTé  ligne»- qoafid 
on  metlt  legi(H»eii  barailte.  La  fe^ 
cende  Ccihone  èc  les  huit  autres  » 
coniienttem  ebaeitne  cinq  cens  cinq^ 
fantaf^itt  &  fei]lan<e^r»}^eataliers; 
«lies  s'appeBem  Cùhorte^  de  cinq 
cens  ,  Quinginlatiét.  Ehfre  ces 
neuf  Cohortes ,  il  y  en  à  Cint^  c^t 
doivent  être  coiApôfi^es  et  feldats 
plus  brayes  &L  plus-  vigoureux , 
parce  qoetlfes  êcCtipent'dei  poflei, 
plus  mjm^h  4ajy  fonâi^  d^  1^^ 


taifle  ;  c'eft  la  trdifieme  »  la  éû^ 
quieme ,  la  fixiémè  ,  la  huitième 
6i  la  dixienib  ;  car  ,  la  légion  (é 
rangeant  fur  deuxligties  ,  chacune 
dés  cinq  Cohortes  ^  latrôifîem^ 
&  la  huitième  Cohorte  (é  trou- 
vent au  centre ,  Pune  de  la  pre* 
miere  ligné  »  l'autre  de  la  fecoiid^ 
là  cinqmeme  6c  la  dixième  Co^ 
hohè  teriheni  la  gauche  des  deu< 
lignes  9  &  la  fiiieme  eft  placée  à 
la  tête  de  la  féconde  I^ile ,  fous  la 
première  Cohorte ,  derrière  PAi* 
gle  &  les  images'des  Eolper^urs/ 
Ces  dix  Cohortes  y  ajoute- 1> il , 
foilt  une  légion  complette  de  un 
mille  cent  fantaffin^  &  de  fept  cens 
tingt-fiz  cavaHers;là  légion  ûé  doit 
pjas  aVoir  iboins  de  combattais  } 
niais  ,  quelquefois  otf  la  fait  plib 
force  ^  eii  y  faifant  ehtteir  plai^ 
d'une  Cohorte  mïlliâfre. 

Voilà  ce  que  Végèce  appelle 
l'ancienne  ordonnance  de  la  lé- 
gion ;  car ,  il  comtnente  le  chapi- 
tre fuivam  par  ces  nnK>ts  »  Antiquâ 
ordinatione  kgiartis  expofitâ*  U 
iCt^  pas  aifé  de  fixer  cette  époqoe^' 
ilparok  méttie  qu'il  parie  delà 
légion  y  telle  qu'elle  étoit  encore 
divifée  de  ioitieitis;  car,  dans  tout 
k  détail  précédent ,  il  s'exprime 
par  le  préfent  ;  mais ,  ce  tju'il  y  t 
de  certain ,  c'eil  que  cette  divihoii 
ne  s'accorde  point  avec  celle  que 
nous  donne  Hygin ,  âc  qu'elle  etf 
par  conféquem  poUérieute  au  tems 
d*Adrien. 

VII.  Outre  les  tîohortes  desj 
légions,  ^ûrfom  celtes  dont  nous 
avons  parlé  juf<ju*ïd,it  y  eii  avoit 
encore ,  dai?s  lès  armées,  trois  ao-^ 
ties  tefpècés  ,  fâhs  compter  ceBes" 
<pit  furent  ii^aéérpar  Auffxtie^'' 


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pèm  U  (fir^é  de  lat  vtlte  d«  ftonne^ 
&  qu'on  app^lla  Cohortts  viplum 
6l  C^hortts  urbut^i  Celles-ci  n  V 
toieat  rien  de  commufi  avec  te 
fef  vice^  miKtaire.  Nous  altons  d'a- 
bord toDcher  légèrement  ce  qui 
regarde  iet  autres ,  qui  étoient 
employées  à  ta  gtietre^  &  qu'on 
pùixrroit,  par  cette  raÛpli  ^  con» 
fondreavec  tes  Cohortes  légion-* 
Hakesk 

i^.  la  première  &  la  plus. an** 
cîonnei  efpèce  étoient  tes  Cohor ^ 
tes  des  alliés.  A  mcfute  que  les 
Romains  étendoientJevn  Empire 
en  Italie  ^  ils  obltg^oient  lei  peu** 
ftles  qui  (t  doonoient  à  eux  ,  ou 
nn'ils  foftmtttoient  par  tes  armes  « 
oe  fôlimir  teur  contin^ni  de  trou*» 
pbs  ;  &  poiir  l'ordinaire  l'infante*' 
Hé  des  alliés  faifoit^dahs  l'armée, 
un  nombre  égal  à  l'infanterie  Ro« 
snaine  ^  mats  ,  la  caYalerte  y  étoit 
double  dé  celle  det  Romains^ 
Quand  tes  alliés  eurent  obtenn  Je 
droit  de  cité ,  te  qui  arriva  après 
la  guert-e  foetale  ^  ils  entrèrent 
dans  les  légions ,  6£  tes  Romains 
n'employèrent  p)usp<mf  auxiliai-i 
res  qlïe  des  étrangers,  o'eft^àtdire^ 
des  ii»kkiti  qui  h  étoient  pas  levé^ 
en  Italie .,  tels  que  des  Gauloir  ^ 
des .  Gef tnam$  ,  des  Efpagnolsè 
Dès  ta  &c<inde  guerre  Punique  « 
tesScipienS|  en  E^agne,  avoient 
|)>ris  à  leur  UÀàe  des  Cêltibériehs  ^ 
cèqui  fot  «abfe  de  leur  perte# 
-  La  pktpaft  des  Cohortes ,  dont 
B  efi:  poste  dana  les  Auteors  & 
lians  lesinicripiioliSydepaistetems 
et  Sytia^  font  des  troupes  étrange* 
res^  C'erfl  pour  cela  cpie  Vellétus 
^ïU^rcula»  ajoute  aoz  Cohortes 
jdt^l^  l'éj^it^ètede  kgioBsnà^ 


ft£n  de  tes  diftingùer  dés  auxilial* 
'  res  ;  &  quand  il  donne  des  préfets 
aux  Cohortes»  c'eA  toujours  à  des 
Cohortes  étrangères  ;  celles  des 
légions  étoiefit  alors  commandées 
par  des  tribuns ,  &  non  par  des' 
Préfets. 

,  Géfsr  somme  tes  faotaffins  au^ 
xUiaires;  C^herus  alafia^  ôc  les 
Oppoft  à  Cohortes  U^naria*  Ta* 
cite  ^ôc  Suétone  défigneiu  ordinal* 
twomsA  par  le  nom  de  Çohojrtes 
tes  troupe  auxiliaires  ^nuxiUafo^ 
éiôtum  ^friiâ  Gohottts  »  Cohôrué 
fociorum.  Telles  font  tes  trente^ 
quatre  Cohortes  qui  ac^ompa* 
inent  te>  légt<Mis  ^e  Vitellfus  à 
ion  entrée  dans  Ronve;  les  foi- 
xsme^x  Cohortes ,  que  Velléius 
Paterculus  donne  à  Tibère  en  Pan-^ 
Aonie»  par-deffas  dix  t  légions^. 
^  qu'il  diAingue  des  vété- 
rans 6c  des  volontaires^  Les  i\M 
Cohortes ,  qu'il  ajoute  aux  trois 
légions  de  Varus ,  étoieût  desauxi^ 
tiaires  ;  ofi  en  peut  dire  autant 
des  dix  Cohortes  que  Suéton«f 
compte  hors  des  légions,  dansl'ar-i^ 
mée  de  Vefp^enén  Judéetf 

Hy gin  f  dam  fa  Caflramétationi 
entend  par  te  mot  €okorus  , 
quand  il  eft  feul ,  les  troupes  lé-^ 
gionnaires;  lorfqu'il  veut  parler  des 
auxiliaires  >  il  ajoute  l'épithèté  de 
§quitatà  cnp^itatéB,  Ces  corps 
de  foldats  étrangers  étoient  donc 
de  deux  éfpeces  ^  on  tout  entiers 
d'inlanteriè^  &  c'eâ  ce  qu'il  ao-» 
peUe  €9hantspiditat<z ,  Ou  mêtei 
de  cavalerie,  c'eftce  qu'il  nomme 
CohoHcsequ'itata,CQ\\^%'Ç\éto\ftti!t 
de  mille  hommes ,  milliariig  , .  ôtf 
de  cin4  cens^  quingenaria*  Dans 
ksv{a^ierfii^il/  avait  feptcflof 


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4?o  CO 

ioixante  fantailins ,  8c  deux  cens 
quarante  cavaliers  ;  dans  les  au- 
tres, trois  cens  quatre-vingts  hom* 
mes  de  (lied  y  6c  cent  vingt  che- 
Vauit  ;  ce  qui  donne  à  peu  près  un 
cavalier  pour  trois  fantaffins.  La 
proportion  eût  été  exadd-'à  fept 
cens  cinquante  fantaffins  &  <leux 
cens  cinquante  Cavaliers  ;  mais , 
on  vouloit  éviter  le  nombre  impair 
des  centuries  &  des  décuries  ;  ^ 
c^â  un#anentk>n  qu'on  froavera 
par-touc  dans  ta  milice  Grecqne 
&  Romaine  pour  la  cotniliodité 
des  divifions. 

Ce  mélange  des  cavaliers  & 
4qs  fantaffins  »  dans  les  Cohortes 
étrangères  y  fe  voit  dès  le  ^erns 
des  premiers  Empereurs.  Sous  le 
troifîeme  confulat  de  Néron  ,  on 
donné  ^.Corbulon  une  légion  ;  on 
y  joint  des  cavaliers  auxiliaires  , 
&  rinfanterie  de  plofieurs  Cohor- 
tes; Adjeda  ex  Grermahia  legio 
eum  equinhus  alarus  &  ptduatu 
Côhortium  ,  dit  Tacite  ;  ces  Co- 
hortes font  diilinguées  des  légions. 
Afi  tems  de  la  mort  de  Vitetlius  , 
les  Cohortes  des  Bataves  ôc  des 
Caninéfates  demandent  que  leur 
cavalerie  foit  augmentée»  Vefpa-* 
fien  entrant  en  Judée  «avoir  ,  dit 
Jofephe»  trou  légions  &  vingt- 
trois  cohortes,  dont  dixitoîentde 
mille  hommes  de  pied  ;  c'étoit  de 
celles  qu'Hygiir  z^i^Wtpidhstai 
les  treize  autt«s  étoient  defixcens 
fantaffins  &  dé  cent  vingt  cava^^ 
liers  ;  ce  ^t  celles  qu^'Hygin  nom^ 
ta^equiiata.  Pline  le  Jeune  les 
nomme  <queftres  ;  il  demande  à 
T4'a>an  le  droit  de  cité  Romaine 
pour  la  âlle  de  P.  ÂeciiM  Aqitila^ 
j$9t)uiQn  de  1#  iixi^o^  Cidiprt^ 


CO 

équedre.  Cet  Accius  étoît  éinxfi 
ger  »  puifqueYa  fille  n'avoit  pas  à 
Rome  le  droit  de  bourgeoifie;  de 
plus  y  il  étoic  centurion  dans  une 
Cohorte  équeftre  ;  elle  n'étoit 
donc  pas  toute  de  cavalerie.  Le 
centurion  étoit  un  commandant 
d'infanterie  ;  ce  ne  peut  donc  être 
qu*une  Cohorte  étrangère  ,  mê- 
lée de  fantaffins  &  de  cavaliers. 

Ces  Cohortes  étrangères  étoient 
quelquëfors  attachées  ^n  particu- 
lier â  une  légion  en  qoalité  d'aiixi* 
liaîres.  Tacite  parle  de  huit  Co* 
hortes  de  Bataves  auxiliaires  delà 
quatorzième  légion.  Elles  por- 
coient  des  noms  de  nombre  ,  pre« 
miere ,  féconde ,  troifieme  ,  félon 
Tordre  de  leur  création  ;  on  difti«« 
guoit  ainû  celles  qui  étoient  de 
même  efpèce,  ôc  tirées  des  "mê- 
mes peuples  ;  on  trouve  ,  feptima 
Cohors  Lufiutnorum  &  nationum 
Gctidicarum  ;  oâavâ  Brettcontm  , 
diwdecinta  j4lpinorum.E\hs  paroii^ 
fent  fouvent  dans  les  monumens* 

La  belle  iafcription  de  Salone  , 
qui  porte  en  tête  le  nom  &  les  ti- 
tres de  Dxnnitieii ,  &  vers  la  fin 
les  Confuls  de  l'année  de  Rome 
846»  donne  le  droit  de  cité  Rck 
maine&de  mariage  aux  fantaffins 
&  aux  cavaliers,  qui  ont  fervi 
vingt-cinq.ans  dans  deux  Cohor- 
teS'^^quly  font  nommées. 

Cette  infcription  nous  apprend 
encore  qpe  dans  les  Cohoi-tès  des 
volontaires  citoyens  Romains  î  on 
admenoit  auffi  des  éttanget^  B 
eft  parlé  dam  cette  tnfcciption  61 
dans,  ia  Notice  ,  de  latroiiiemc 
Cohorte jdcts  habîtansjjés  Alpes; 
la  première  eft  -npmmée  daâ» 
^m«iiuès  ia;(crj^ti9Qs  de  Groceci 

& 


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co 

&  la  douzième  dans  la  loi  pre- 
mière ,  au  code  de  rejlutitionibus 
militum. 

Quelquefois  on  donnoit  à  ces 
Cohortes  le  nom  des  nations  qui 
les  compofoient ,  Cohors  Macedo' 
nica  )  Cohprs  Ligurum^  Cohors 
Aquitanorum  equitata^primia  mil- 
liaria  Dalmatorum,  Elles  portent 

^quelquefois  le  nom  des  Empe- 
reurs, qui  lesontformçes,  &  mê- 

^  ine  deux  noms  d'Empereurs ,  ap- 
paremment le  nom  du  premier 
qui  les  avoit  créées  ,  Ôc  le  nom 
de  l'Empereur  régnant ,  ou  de  ce- 
lui qui  les  avoit  augmentées  ou 
honorées  de  quelque  privilège.  On 
voit  qu  elles  prenoient  des  épithe- 
tes  honorables,  comme  les  légions. 
On  ajoute  quelquefois  à  leur  nom 
celui  des  païs  où  elles  font  canton* 
nées.  Il  y  en  avoit  qui  étoiënt 
mêlées  de  plufieurs  nations  :  Co- 
hors  Aflurum  ,  Callacorum  ,  & 
Mauretanorum  tingitanorum.EllQS 
prenoibnt  auidi  le  nom  de  leurs 
armes  ;  nous  voyons  un  Cn.  Mu- 
natius  ,  citoyen  Romain  ,  qualifié 
Prafeéijis  Coh.  III.  Sagittariorum; 
c'étoient  des  étrangers  ,  puifque 

.  leur  commandant  eft  nommé  Pra- 
feBus  ,  ÔL  que  d'ailleurs  les  Sagit- 
taires ,  ainfi  que  les  autres  trou- 
pes légères  ,  n'étoient  plus  pris 
d'entre  les  Romains  fous  les  Em- 
pereurs du  tems  defquels  eft  cette 
infcription  ,  où  Cn.  Munatius  eft 
appelle  Procurator  Augufli. 

La  Notice  de  l'Empire  nous 
donne  de  toutes  ces  efpèces  de 
Cohortes  ,  nommées  tantôt  Co- 
hortes ,  tantôt  Numeri  »  tantôt  Au- 
xilia,  La  plupart  font  des  troupes 
étrangères ,  Ôc  leurs  noms  même 
Tom.  XI. 


CO  481 

en  font  une  preuve  ;  leurs  com- 
mandans  font  appelles  Tribuni  ^ 
Prafefli ,  PrapoJitL  Mais ,  dans 
ce  fiecle  demi-barbare,  c'efV-à- 
dire ,  fous  Théodofe  le  Jeune,  il  eft 
à  croire  que  les  troupes  mêmes 
défignées  fous  le  nom  de  légions  f 
n'étoient  guère  que  des  Cohortes 
qui  avoientconfervé  le  nom ,  fans 
avoir  ni  la  forme  ni  le  nombre  des 
légions  anciennes. 

2.^  La  féconde  efpèce  de  Co- 
hortes que  nous  diftinguons  de  la 
légion,  ce^  font  celles  qui  ea 
étoient  féparées  ,  &  qui  étoiene 
pourtant  compofées  de  citoyens 
Romains,  On  lit  fouvent  dans  les 
Auteurs,  decem  ,  viginti  ,  trigînta  , 
quadraginta  Cohortes;  pourquoi 
ne  pas  dire  legio  ,  dune  ,  très  ,  qua^ 
tuor  legîones  ?  fur  quoi  il  eft  à 
obferver  quil  éioit  indifférent  de 
nommer  la  légion  ,  ou  le  nombre 
des  Cohortes  dont  elle  étoit  for- 
mée. Hirtius  Panfa ,  racontant  la 
révolte  des  foldats  contre  Caffius 
Longinus ,  en  Efpagne ,  nomme 
trente  Cohortes  ce  qu'il  vi^sntde 
nommer  trois  légions.  Orofe  ap- 
pelle trois  légions  les  trente  Co- 
hortes que  Cféfar  dit  que  Domi- 
tius  avoit  à  Corfinium.  Tacite  dit 
que  Germanicus  donna  quatre  lé- 
gions à  Cécina ,  fon  lieutenant  ; 
&.  plus  bas  il  dit  que  Cécina  mar- 
choit  à  la  tête  de  quarante  Cohor- 
tes. Ces  Cohortes  font  légionnai- 
res. 

De  plus ,  les  Cohortes  nom- 
mées dans  les  Auteurs  font  quel- 
quefois des  détachemens  des  lé- 
gions ,  ils  en  avertiflént  fouvent  ; 
mais  ,  quand  ils  ne  le  font  pas ,  il 
eft  aflez  diâiclle  de  deviner  fi  ce 

Hh 


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482         c  ^     . 

font  des  Cohortes  légionnaires. 
Par  exemple ,  les  dix-huit  Cohor- 
tes que  Tacite  donne  à  Luceius 
Albinus  9  en  Mauritanie»  du  tems 
de  ViteUius,étoient-eUes  des  Co- 
hortes étrangères  ?  étoient-ce  des 
Cohortes  de  citoyens  Romains 
qui  faifoient  des  corps  féparés  ? 
c*eft  ce  qu'on  ne  peut  décider. 

Mais  ,  voici  des  Cohortes  Ro- 
maines vraiment  réparées  des  lé- 
gions ;  i.^  Les  nouvelles  levées^ 
revoient  quelquefois  un  certain 
tems  en  forme  de  Cohortes  fépa- 
rées  ,  jufqu'à  ce  qu'elles  fervilTent 
à  former  ou  à  recruter  une  légion. 
O'n  lit  dans  plufieurs  Infcriptions  , 
Cohors  nova  Tyronum,  2.**  Il  y 
avoit.des  Cohortes  Romaines, 
qui  demeuroient  toujours  répa- 
rées des  légions  ;  telles  font  dans 
les  Infcriptions  ,  Cohors  mil'num 
hdlicorum  voluntariorum  qua  efl 
in  Syria  ;  Cohors  prima  civium 
Romanorum  ingenuorum  ;  Cohors 
prima  equitata  civium  Romanorum 
in  Germania  inferiore  ;  où  Ton 
voit  qu'il  y  en  avoit  qui  étoient 
mêlées  de  cavalerie  ^  comme  les 
auxiliaires, />r/m^  voluptaria  Cam- 
panorum  in  Pannonia  inferiore. 
Obfervons  ,  en  pafTant ,  qu'elles 
portoient  quelquefois  des  noms 
fingulierS)  &  comme  des  fobri- 
quets  militaires  ,  Voluptaria ,  ap- 
paremment parce  que  la  ville  de 
{papoue  &  la  Campanie  >  d*oîi 
cette  Cohorte  avoit  été  tirée , 
étoient  de  tout  tems  un  pais  de 
délices  &  même  de  débauche.C'eft 
ainfi  qu'entre  les  Cohorte§  de  la 
Kotice  nous  voyons  pétulantes  , 
dont  il  efl  parlé  dans  Ammien 
Marcellia»  &  ^tre  lei  corps  de 


CM 
cayaîerîe  ,  ala  veterana  rafa  GaU 
lorut^  Rhinocorurce,  On  voit  dans 
Gruter ,  grand  nombre  de  Cohor- 
tes  de  volontaires  ;  la  trente -deu- 
xième y  eft  nommée  fur  trois  mo- 
numens.  C'eft  que  ces  Cohortes 
n'étoient pas  en  corps  de  légion; 
on  les  diuinguoit  par  les  noms  de 
nombre  ;  &  il  ed  remarquable  que 
la  charge  de  Tribun  de  ces  Cohor«V 
tes  9  étoît  aufli  honorable  que 
celle  de  Tribun  d'une  légion  ;  les 
monumens  en  font  foi. 

Tacite  parle  d'une  dixhui- 
tième  Cohorte ,  que  Valens ,  lieu- 
tenant de  Yitellius ,  laifTa  à  Lyon  , 
où  elle  étoit  ordinairement  en 
Quartier  d'hiver ,  &  d'une  dix- 
(eptième  qu'Oihon  fit  venir  d'Of- 
tie  à  Rome  pour  l'oppofer  à  Yi- 
tellius. C'étoient ,  félon  les  appa- 
rences, deux  de  ces  Cohortes  dont 
nous  parlons ,  qui  formoient  des 
corps  didingués  des  légions  ,  foit 
pour  être  employées  dans  les  en- 
droits où  il  n*étoit  pas  befoin  d'une 
légion  entière>foit  pour  fervir>dans 
roccafion,de  renfort  ou  de  recrue, 

3.^  La  troifième  &  dernière  ef- 
pèce  de  Cohortes  militaires  ,  qui 
étoient  hors  des  légions  ,  efl  ce 
qu'on  appelloit  »  dans  les  armées  > 
Cohors  pratoria.  Feflus  ,  ou  plu- 
tôt Paul  Diacre ,  en  attribue  ]*o« 
rigine  à  Scipion  l'Africain,  n  Ce 
»  fut ,  dit-il ,  le  premier  [qui  for« 
»i  ma  un  corps  des  plus  braves  de 
n  fon  armée  ,  pour  combattre 
i>  auprès  de  fa  perfonne  ;  il  les 
19  difpenfa  de  tout  autre  fêrvice.» 
»  &  leur  afiigna  une  paye  &  de- 
n  mie.  «  Nous  voyons  pourtant  | 
de  ces  Cohortes  dans  les  armées' 
long- tems  ayant  Scipion»  Tite-LÎ; 


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co 

ve  dît  que  le  Diâateur  A.  Poftu- 
mius,  onze  ans  après  l'expulfion 
des  Rûis  ,  dans  la  célèbre  bataille 
du  lac  Régille ,  fe  fit  efcorter  par 
une  Cohorte  choifie,  qu'il  appelle 
Cohors  dilatons  ;  mais  ,  ce  fait 
eft  Singulier ,  &  depuis  ce  tems  , 
il  n'efl  plus  fait  mentioti  de  ces 
fortes  de  Cohortes.  Polybe  même 
ne  parle  pas  de  cette  inftitution  de 
Scipion ,  mais  feulement  des  trou- 
pes choifies  entre  les  alliés  ,  qu*il 
nomme  extraordinaires  ,  &  dont 
il  dit  que  les  Coniuls  faifoient 
ufage  ;  ce  qui  porte  Jufte-Lipfe  à 
croire  que  Scipion,dont  parle  Paul 
Diacre  ,  eft  Scipion  Émilien.  En 
effet ,  Appien  rapporte  que  ,  dans 
la  guerre  de  Numance ,  ce  Géné- 
ral amena  de  Rome  avec  lui  une 
troupe  de  cinq  cens  volontaires , 
corDpofée  de  (qs  cliens  6c  de  gens 
attachés  à  fa  perfonne>  dont  il 
forma  une  Cohorte  qu'i!  appella 
la  Cohorte  des  amis;  depuis  ce 
tems^  la  chofe  pafTa  en  coutume. 
On  voit  même  que  le  Général 
avoit  alidî  quelquefois  une  garde 
de  cavaliers.  Salluile  dit  de  Ma- 
rias que,  pour  former  fa  garde  de 
cavalerie ,  il  avoit  eu  plus  d'égard 
à  la  bravoure  qu'aux  liaifons  d'a- 
mitié. 

Ces  Cohortes  fe  multiplièrent 
dans  la  fuite  ;  &  il  femble  qu'un 
feul  Général  en  avoit  plufieurs. 
Plutarque  raconte  qu'Oâavie,  qui 
ne  Tçavoit  fe  venger  des  infidélités 
d'Antoine  ,  que  par  des  complai- 
fances  ôt  des  bienfaits  ,  lu?  amena 
à  Athènes  deux  mille  foldats  di- 
vifés  en  Cohortes  Prétoriennes. 
Cet  ufage  n'étoit  pourtant  pas  gé- 
néral &  fans  exception  ;  Céfar  ne 


C  O  485 

parle  nulle  part  de  fa  Cohorte ,  & 
fait    même  connoître   qu'il  n'en 
avoit  pas  en  Gaule  ,  quand  il  dit 
à  fes  foldats  effrayés  à  l'approche 
des  Germains ,  qu'il  marcheroit  à 
l'ennemi  feul  avec  fa  dixième  lé- 
gion ,  &  qu'elle  lui  tiendroit  lieu 
de  Cohorte  Prétorienne.  Sallufte' 
en  donne  une  à  Petreius  dans  la. 
combat  contre  Catilina  ;  c'efl  fur 
ce  modèle' qu'Augufle  inftitua  fa, 
garde  Prétorienne  de  neuf  Cohor-' 
tes. 

VIII.  FinifTons  par  un  article 
moins  important  à  la  vérité  ,  mais 
qui  mérite  pourtant  d'être  éclairci. 
En  huit  endroits  de  la  Notice  d'O- 
rient ,  il  eft  parlé  d'une  divifion 
de  La  Cohorte  qu'on  ne  trouve 
point  ailleurs.  C'eft  pedatura  fu^- 
pcrior  &  pedaturu  inferior.  Dans 
i'énumératïon  des  troupes  ,  fous 
la  dirpofition  du  duc  de  Scythie  ,* 
on  ht  deux  fois  :  Cohors  quinta  > 
peddtura  inferior ,  pour  la  féconde 
légion  dite  Herculia  ;  &  enfuiie 
pour  la  légion  dire  prima  Jovia  , 
on  lit  Cohors  quinta  ,  pedatura 
fuperior^  &  Cohors  quinta  ,  peda^ 
tura  inferior,  La  même  diftindion 
efl  répétée  dans  la  feé^ion  fuivante, 
où  il  efl  queflion  des  troupes  qui 
foiit  fous  la  difpofition  du  duc  de 
Mœfie  ;  la  première  légion  Itali- 
que, &  la  onzième  légion  dite 
Claudia ,  ont  chacune  une  cin- 
quième Cohorte  partagée  en  deux, 
6c  dont  les  deux  parties  fon  énon- 
cées féparéinent  par  les  mots  de 
pcdatura  fuperior  &  pcdatura  in^ 
firior.  Il  laut  d'abord  obferver 
que  ,  dans  le  premier  endroit  où 
les  mots  pcdatura  inferior  font 
deux  fois  appliqués  à  la  cinquième 
H  h  ij 


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a84  C  O 

iJohorte  de  la  légion  Herculîa^ 
il  y  f  grande  apparence  qu'il  y  a 
faute  de  copifte  ,  &  qu'il  faut 
là  ,  comme  on  le  voit  enfuite  pour 
les  trois  autres  légions,  d'abord 
pedaturafupenor.  Si  enfuite  pedu" 
tura  inferior.  Venons  à  i'e^plica* 
tion  de  ces  termes  obfcurs.  i 

Pancirolle,  qui  nous  a  doniré 
fur  la  Notice  de  TEmpire  un  com- 
mentaire fçavant  &  étendu ,  ap- 
porte une  fort  manvaife  raifon  de 
cette  dénomination,  hts  échalas 
des  vignes  s'appellent/:tfi/<îme/iftt«, 
&  Columelle  nomme  pedatio  le 
foin  de  planter  des  échalas  pour 
fôûtenir  les  vignes.  Ici  ,  félon 
VditïCïxoWt^  pedatura  eft  la  palifla- 
de  plantée  fur  la  frontière  &  fur 
la  rive  du  Danube  où  ces  Cohor- 
tes étoient  cantonnées. 

On  fent  aflez  rabfurdité  d'une  ' 
telle  explication.  M.  le  Beau , 
dont  j'ai  extrait  cet  article  tout 
entier ,  en  donne  une  autre  ^  qui 
parorj  avoir  tous  les  cara£ières  de 
la  vérité.  Il  remarque  ;  i.®  Que  le 
mot  pedatura  eft  un  ternie  de 
caftramétation ,  &  d'arpentage  , 
dont  Hygin  &  Frominie  fervent 
pour  exprimer  la  mefure  par 
pieds,  le  toifé  duterrein;  2.®  Que 
ces  divifions  ne  paroiiTent  jamais 
que  dans  la  cinquième  Cohorte 
d'une  légion  i  voici  l'idée  que  ces 
deux  réflexions  lui  ont  fait  naître* 
Ces  mots  pedatura  fuperior  ^  pe- 
datura  inferior  ^  furent  appliqués 
aux  cinquièmes  Cohortes  des  lé- 
gions ,  par  rapport  à  la  place 
qu'elles  occupoient  dans  un  camp, 
quand  la  légion  fe  trouvoit  réunie. 
Le  camp  d'une  légion  fe  divifoit 
tn  deMJ^  partiel  égales  \  fi  toute! 


co 

les  Cohortes  euffent  été  d'un  tnê- 
me  nombre  de  foldats  ^  il  y  auroit 
eu  cinq  Cohortes  dans  chaque 
moitié  du  camp  ;  mais ,  comme 
la  première  Cohorte  étoit  de  mille 
hommes ,  &  que  les  autres  n*é- 
toient  que  de  ci.iq  cens ,  afin  que 
les  deux  panies  du  camp  confer- 
vaflent  leur  égalité  ,  la  cinquième 
Cohorte  fe  partageoit  en  deux  , 
moitié  dans  la  partie  antérieure , 
pedatura  fuperior  f  moitié  dans  la 
poftérieure  ,  pedatura  inferior; 
enforce  que  la  première  partie  du 
camp  contenoit  quatre  Cohortes 
&  demie ,  &  la  féconde  cinq  Co- 
hortes ôc  demie  ;  ce  qui  rendoit  le 
nombre  des  trente  égal  dans  les 
deux  parties.  Cette  divifion ,  qui 
n'avoit  pas  lieu  dans  les  Cohones, 
diftinguoit  la  cinquième  en  deux 
portions  ,  qui  gardoient  leur  dé- 
nomination même  hors  du  campe- 
ment. 

IX.  Quant  aux  Cohortes  inf- 
tîtuées  par  Augufte  fous  le  nom 
de  Cohortes  vigilum  &  Cohortes 
urhana  f  elles  étoient  deftinées, 
comme  nous  l'avons  obfervé ,  à 
veiller  à  la  fureté  de  la  ville  de 
Rome. 

Les  Cohortes  ,  dites  Vigilum^ 
fervoiem  dans  les  incendies.  Il  y 
en  avoit  fept ,  ut^  pour  deux  ré- 
gions de  la  ville  ;  chacune  avoit 
a  fa  tête  un  Tribun,  &  toutes 
étoient  commandées  par  un  offi- 
cier appelle  le  Préfet  des  vigilum; 
elles  étoient  diftribuées  en  quator- 
ze corps-de-gardes.  Il  y  a  des  Au- 
teurs qui  font  monter  le  nombre 
de  ces  Cohortes  jufqu'à  trente  une; 
mais,  il  y  a  lieu  de  croire  qu'ils  fe 
trompent  >  &  qu'ils  prennent  poor 


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j 


^  c 


co 

des  Cohortes  ce  qui  n'en  étoît  que 
^  des  divifîons.  Ces  Cohortes  n'é- 
toient  point  cenfées  troupes  ;  elles 
étoient  prefqu*entièrement  d*af- 
franchis  ,  qu'on  appelloit  par  dé- 
rifion  SparteolL 

Les  Cohortes  ,  dites  urbana , 
étoient  au  nombre  de  quatre  f  & 
comprenoient  chacune  quinze  cens 
Kpmmes.AuguAe  les  inilitua  pour 
ladéfenfedela  ville  ;  elles  avoient 
des  cafernes.  On  les  nommoit  en- 
core milUei  urbanitiani ,  troupes 
de  ville.ElIes  étoient  commandées  „ 
par  le  Préteur  appelle  TuteUr'u  ; 
ce  oui  leur  fit  donner  auffi  queU 
quetois  If  nom  de  Cohortes  Préto- 
riennes. 

COI,  Kùot^  les  habitans  de 
rifle  de  Cos.  Voye[  Cos. 

COm,  Cunctts.  Voyei  Roftral 
[  rOrdre  1. 

CÔLAlA  ,  Colaia^  Kw^e/a  j 
{a)  fils  de  Mafia ,  fut  père  de  Pha- 

COLABRISME,  Colabrif^ 
mum  ,  danfe  des  Xîrecs  ,  qu'ils 
avoient  prife  des  Thraces.  Ceft 
tout  ce  qu  on  en  fçait. 

COLACES  ,  Colaces  ,  {b) 
nom  commun  à  deux  familles 
très-anciennes  de  Salamine  ^  qui 
fe  répandirent  enfuice  par  toute 
rifle  de  Chypre.  Ces  deux  famtl- 
les  avoient  des  emplois  qui  leur 
étoient  affeâés.  La  première  «  des 
Gergines ,  chargée  de  veiller  fur 
le  peuple  i  fe  diiperfoit  dans  tous 
les  lieux  publics ,  dans  les  places  , 
dans  les  boutiques ,  p reçoit  Toreil- 
le  à  tout ,  &  chaque  jour  faifoit 
fon  rapport  aux   Anaâes  de  ce 


cb        485 

qu'elle  avoît  remarqué.  La  fécon- 
de, des  Promalanges,  examinoit 
Ma  vérité  des  dénonciations  faites 
par  les  Gergines. 

Ces  deux  familles  étoient  con- 
fidérées  par  les  rois  de  Chypre  à 
caufe  de  leur  utilité.  Comme  par 
leur  emploi ,  elles  étoient  obligées 
de  faire  ce  que  font  fans  néceflîté 
ceux  qui  flattent  les  Grands ,  les 
Grecs  fe  fer  virent  du  nom  de 
%'ih'xt  pour  dire  un  flatteur  ;  ce  qui 
a  pu  décrier  une  fonftion  qui  n*é- 
toit  pas  méprifable  ,  fi  elle  étoît 
exercée  fidèlement ,  &  qui  depuis 
fut  regardée  comme  honorable 
dans  l'empire  Romain.  Ceux, 
qui  en  étoient  revêtus ,  fe  nom- 
moient  A  gens.     • 

Athénée ,  de  qui  l'on  a  pris  ce 
qu'on  dit  ici ,  navoit  fait  que  co- 
pier Cléarque  de  Soli ,  qui  ajoute 
enfuite  qu'il  y  a  voit  aulli  dans  la 
même  ifle  de  Chypre,  des  fem^ 
mes  nommées  Colacides  ,  qui 
fervoientles  Anaffes,  c'eft-à-dire, 
les  femmes  des  Anaâes  ;  que 
quelques-ânes  d'entr'elles ,  s'étant 
fait  conduire  dans  le  continent  de 
l'Afie  ,  s'attachèrent  aux  femmes 
d'Artabaze  &  de  Mentor ,  qu'el- 
les portoient  dans  leurs  chars  fur 
leurs  épaules ,  d'oii  vient  qu'on 
les  appella  Climacides ,  &  que 
celles  de  fon  tems  qui  faifpient  ce 
métier,  étant  décriées  dans  l'ifle, 
allèrent  en  Macédoine  ,  ou  elles 
accoutumèrent  lés  Princefles  & 
\qs  Dames  à  mener  une  vie  molle, 
&  s'attirèrent  enfin  le  mépris  de 
tout  le  monde. 

COLACRETES,  CoUcrcta; 


(«)  £fd.  L.II.  c.  II.  ▼,7. 


(*;  Athen.  p.  ij? ,  ts». 

H  h  ii) 


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486  CO 

Kofxetitphm  ^  ou  K»>ttyp'z^9j  ,  {A 
étoient  des'Quefteurs ,  ou  Trélo- 
riers  des  deniers  publics.  Xo^^ccxf  * 
Tcti ,  dit  Héfychius  »  dpyvpDcoï  ra- 
/ua/.  L'ancien  SchoIiaAe  d'Arif. 
tophane  dit  :  »  On  appelle  Co- 
i>  lacrete  ,  celui  qui  garde  les  de- 
f>  niers  de  la  ville  ,  oc  eft  tréfo- 
n  rier  des  épices  des  Juges ,  & 
»  des  dépenfes  qui  Te  font  pour 
91  le  culte  des  Dieux,  a  II  dit  à 
peu  près  la  même  chofe  fur  le  vers 
1 5  40  de  la  comédie  des  oifeaux  , 
&  ajoute  que  les  Colacretes  four- 
nifToient  uir  les  fonds  de  la  mari- 
ne ,  au  voyage  &  aux  autres  dé- 
penfes des  T héores  ,  qu'on  cn- 
voy  oit  à  Delphes.  Timée  dans  fon 
Lexique  ,  intitulé  :  trefi  rw  'Trapi 
vxctTeaït  >r^£o»r  .  fur  le  mot  Ka>xct- 
7/>é7«/  »  qui  eft  le  même  que 
Kœ>^^.f§Tci  ,  s'explique  comme 
le  ScholiaAe,  en  difant  que  les 
les  Colacretes  font  les  tréforiers 
des  épices  des  Juges  ,  &  des  dé- 
penfes pour  le  culte' des  dieux. 

Les  colonies  Grecques  portè- 
rent ,en  Afie  le  nom  &  le  titre  de 
Colacretes  ^  qui  font  appelles  Co- 
lécrates  fur  le  marbre  de  Cyzique. 
Et  peut-être  cette  leçon  qu'on  lit 
diflinûement  fur  le  monument  , 
eft-eile  préférable  à  celle  du  Scho- 
liafle  &  des  Lexiques.  L*infcrip- 
;lion  nous  apprend  que  les  Colé- 
crates  de  Cyzique  étoient  au  nom- 
bre de  dix ,  &  même  de  treize , 
en  y  comprenant  les  trois  derniers 
qui  étoient  du  corps   des  Phile-^ 

'  (M^  Recueil  d*Antiq.  par  M.  le  Comt. 
^e  Cayl,  Tom.  II.  pa?.  aji.  &  fmv, 

^b)  Plin.  T.  I.  p.  iSo.  Dio.  CaiT.  pag. 
414.  Strab.  f.  1^4. 


cp 

Les  Colécrates  de  Cyzique  dé- 
voient avoir  une  liaifon  particu- 
lière avec  les  officiers  du  Gym- 
nase, puifque  le  monument  porte 
la  date  de  tel  Gymnafiarque.  Les 
Colécrates,  étoient  les  tréforiers 
des  dépenfes  qui  fe  faifoient  po^jr 
le  culte  des  E>îeux.  Les  jeux  fa- 
crés  ,  dans  les  villes  Grecques ,  & 
les  exercices  qui  préparoient  à  la 
célébration  de  ces  jeux,  étoient 
cenfés  appartenir  au  culte  reli- 
gieux. Les  Athlètes  mêmes  fai- 
(oient  des  vœux  aux  dieux  ^  & 
leur  offroient  des  facrifîces. 

COLAPIS,  Colapis ,  (h)  riviè- 
re  de  b  Pannonie.  Pline  la  décrit 
ainiî  :  t»  Entre  les  rivières  9  le  Co- 
n  lapis  mérite  de  n  être  pas  oo- 
>i  blié  ;  il  entre  dans  la  Save  an- 
»  près  de  Sifcia ,  &  fe  parta- 
n  géant  en  deux  bras  «  forme  une 
»  ifle  qui  eft  appellée  Ségeftique.a 
Dion  Caffius  appelle  cette  même 
rivière  Colops ,  &  dit  que  d'abord 
elle  paiïoit  auprès  de  la  ville ,  & 
que  Tibère  »  ayant  fait  creufer  des 
foiïés  ,  lui  fit  faire  le  tour  de  la 
ville  en  forme  d*i(le  ;  après  quoi 
fes  eaux  rentrèrent  dan&  leur  pre- 
mier lit.  Strabon  ,  qui  parle  aoffi 
de  cette  rivière  »  appelle  Tiile 
Sey^o-rDii  ;  mais  ,  Dion  Cadius  dit 
SntrtKvi  fans  (T.  Lazros  dit  que  les 
Efclavons  l'appellent  aujourd'hui 
Culpa. 

COLAX,  Colax,  (c)  riin 
des  fils  de  Jupiter»  Ce  dieu  Tavoit 
eu  d'Ora. 

COLAX,  ÇolaxJ{d)   nom 

(r)  Myth.  par  M.  PAbb.  Ban.  Tom. 
T.  lU.  p.  «80,  aSi. 
{d)  Terent.  T.  I,  p.  t6o. 


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co 

d*afle  des  pièces  de  Ménandre. 
Dans  cette  pièce  il  y  avoit  un 
paradte  de  ce  nom.  Cefl  un  mot 
Grec  qui  veut  dire  un  flatteur;  6c 
ceÙ  pour  cela  que  les  Anciens 
appelloientainfi  les  parafites. 

COLCAS ,  Colcas ,  {a)  Prince 
qui  regnoit  fur  vingt-huit  villes  de 
rEfpagne  ultérieure,  vers  Tan 
ao6  avant  Jefus-Chrift.  Il  devoit 
fournir  cette  année  aux  Romains  , 
de  rinfanterie  &  de  la  cavalerie 
qu'il  avoit  promis  de  lever  pendant 
l'hiver.  Quelques  années  après , 
il  fe  révolta  contre  les  Romains  y 
&  entraîna  dans  fa  révolte  les  ha- 
bitans  de  dix-fept  villes.    . 

COLCHATARIENS  ,  (^) 
Colchatarii ,  peuples  d'Afie  ,  dont 
parle  Juilin,  à  Toccafîon  d'Arta^ 
bane ,  qui  leur  fît  la  guerre.  Les 
éditions  modernes ,  comme  celle 
de  Gronovius  ,  adoptent  la  cor- 
reâion  de  Bongars  oui  lit  Thoga- 
riens  au  lieu  de  Colchatariens. 
Cependant  ,  Ortélius  croit  ce 
peuple  différent  des  Cochariens  de 
Ptolémée ,  ou  de  Denys  le  Pé- 
riégete  ;  &  des  Cochares  d'Avié- 
nus  ,  qui  étoient ,  dit-il  ,  trop 
éloignés. 

COLCHIDE,  Qholchis,  (c) 
XoA/Jc  ,  contrée  maritime  d'Alie. 
Ses  bornes  ont  varié  fuivant  les 
tems.  Lorfque  Ptolémée  écrivoit , 
elle  étoit  bornée  au  Septentrion 
par  la  Sarmatie  Afîatique  ,  au 
couchant  par  le  Pont-Euxin  ,  de- 

(*)  Tir.  Liv.  L,  XXVIII.  c,  it.  L, 
XXXIII.  c.  •!. 

(*)  Juft.  L.  XUÏ.  c.  1. 

(c)  Ptolcm.  L'.  V,  c.  10.  Strab.  p.  497, 
ër  /«f .  Pomp.  Mel.  p.  88.  Plin.  Tom.  I. 
pag.  17c  ,  179,  504,  508.  Herod.  L.  I, 
c»  104.  L.  II,  c.  104  9  105.  L.  lU.  c.  97* 


c  O  4S7 

pTJÎs  l'embouchure  du  fleuve  Co- 
rax  jufqu'au  golfe  fitué  près  du 
fleuve  du  Phaie  >  au  midi  par  TAr- 
ménie  majeure ,  &  à  Torient  par 
ribérie.  Strabon  étend  la  Colchi- 
de  bien  au  de-là  du  Phafe ,  puif- 
qu'il  la  fait  commencer  auprès  de 
Trapéfunte.  Diodore  de  Sicile  Ty 
fait  commencer  de  même.  Il  y  a 
aufli  des  Géographes,  qui  du  côti 
du  nord  ,  étendent  la  Colchide 
beaucoup  plus  que  ne  fait  Ptolé- 
mée. Ce  dernier  convient  cepen- 
dant avec  Strabon ,  au  fujet  des 
limites  qu'ils  marquent  tous  deux 
de  ce  côté- là. 

I.  M.  Fréret ,  après  avoir  éta- 
bli ^  dans  fes  observations  fur  la 
Cyropédie  de  Xénophon  ,  que  les 
noms  d'Inde  &  d'Ethiopie  étoient 
quelquefois  fynonymes  chez  les 
Anciens ,  prétend  que  l'on  don- 
noit  le  nom  d'Ethiopie  à  k  Col- 
chide. Bochart  rapporte  deux 
exemples  de  cet  ufage.  Le  pre- 
mier eft  tiré  de  Saint  Jérôme,  qui 
dit  que  Saint  Matthias  a  prêché: 
In  altéra  Ethiopia ,  ubi  eft  irrup" 
tîoAbfari  &  Hyfjîportus,  Le  fleu- 
ve Abfarus  &  le  port  d'I^fTus 
font  auprès  du  Phafe  dans  la  La- 
zique  ,  province  de  la'  Colchide» 
Le  fécond  exemple  efl  tiré  de  So- 
phronius  ;  il  die  dans  la  vie  de  St. 
André  ,  que  vers  l'embouchure 
du  fleuve  Abfarus  &  fur  les  bords 
du  Phafe ,  habitent  les  Éthiopiens. 
Ces  deux  Écrivains  ^  il  efl  vrai  ^ 

L.  IV.  c.  40.  L.  VII.  c.  79.  Diod.  Sîcul. 
p.  41  «.  Xenoph.  p.  »,  56  >  )4o.  ^  feq» 
Juii  L.  XXXII.  c.  5.  Mém.  de  PAcad. 
des  Infcript.  &  Bell.  Lett.  Tom.  IV. 
pag.  595.  &  fuiv.  T.  VII.  pag.  141.  ^ 
fniv.  T.  VIIL  p.  560 ,  561.  T.  XII.  pag, 
112.  é'  friv* 

Hhiv 


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488  CO 

ne  font  pas  d*un  tems  bien  reculé; 
maïs ,  outre  quHls  paroiflent  avoir 
fuivi  des  mémoires  plus  anciens 
qu'eux ,  il  efl  conûant  que  long- 
tems  avant  eux  ^  des  peuples 
Éthiopiens ,  c'ed-à-dire,  noirs  ou 
extrêmement  bafanés ,  ont  habité 
ce  païs. 

jL*Auteur  des  Argonautîques 
attribuées  à  Orphée  ^^oit  Onoma- 
crite  ou  un  Écrivain  plus  récent , 
place  au  fond  du  Pont-Euxin  ,  au 
nord  des  Maflynégires  &  des  Ma- 
riandyniens ,  Si  au  midi  du  Phafe, 
une  nation  de  noirs  ou  de  maures, 
Pindare*  en  parlant  des  G)lques , 
les  nomme  Kehccivôo'jretç  ,  aux  vifa^ 
ges  bruns  ;  fur  quoi  le  Scholiafle 
obferve  que  ces  peuples ,  étant 
originaires  d'Egypte  ,  font  wfXc- 
fpTTfotç ,  noirs  de  vifage,  Hérodote 
aflure  que  les  peuples  de  Colchos 
étoient  une  colonie  Égyptienne, 
qu'ils  obfervoient  la  circoncifion  , 
avoient  les  cheveux  frifés ,  le  teint 
bafané  &  olivâtre ,  la  même  phy- 
£onomîe ,  la  même  manière  de 
cultiver  &  de  façonner  le  lin ,  ob- 
fervoient tous  les  mêmes  ufàges  , 
&  C0  qui  efl  décifif ,  parloieiît 
la  même  langue  que  les  Égyp* 
tiens. 

Hérodote ,  furprîs  de  cette  ref- 
femblance  ,  avoit  examiné  la  cho- 
fe  avec  foin ,  6c  s'étoit  informé 
aux  Colques  &  aux  Égyptiens , 
du  tems  où  cette  colonie  Égyp- 
tienne s*étoit  établie  à  Colchos  ; 
mais,  il  n'avoit  pu  l'apprendre. 
Les  Égyptiens  foupçonnoient  que 
c'étoit  une  partie  des  troupes  de 
Séfoftris  ,  que  ce  Prince  avoit  laif- 
fée  en  cet  endroit  pour  défendre 
fon  empire  contre  les  invafions  des 


CO 

peuples  feptentrionaux;  car,  fls  ne 
trouvoient  aucUne  mention  de 
cette  colonie  dans  leurs  Hiftoires. 

Ce  fentiment  a  été  embraffé  par 
tous  les  Écrivains  qui  font  venus 
après  Hérodote  ;  &  quelques-uns, 
ajoutant  de  nouvelles  conjeâures 
à  celles  des  prêtres  Égyptiens, 
aflurent ,  comme  Apollonius  de 
Rhode  &  fon  Scholiafte  ,  qui  cite 
Dicéarque  &  Théopompe,  que 
Séfodris  bâtit  la  ville  d*^a  far  le 
confluent  du  Phafe  &  de  THippus, 
aujourd'hui  Skenifcari  ,  fleuve 
cheval ,  à  trois  cens  ftades  de  la 
mer. 

Valérius  Flaccus  va  encore  plus 
loin  ;  car ,  il  aflure  que  Séfodrb , 
vaincu  par  les  Getes ,  laîffa  une 
partie  de  fes  troupes  danà  la  Col- 
chide  pour  aflurer  fa  retraite. 

M.  Fréret  conclud  de  ces  ob- 
fervations  ,  que  Ton  aura  pu  don- 
ner auffi  à  la  Colchide  te  nom' 
dinde ,  fynonyme  de  celui  d'E- 
thiopie ,  &  que  c'eft  dans  ce  fens 
qu'il  faut  entendre  ce  païs  des  In- 
des dont  parle  Xénophon  ,  quand 
il  dit  que  le  roi  d'AlTyrie,  voulant 
faire  la  guerre  aux  Medes ,  follici- 
ta  les  rois  de  Lydie ,  de  Phryeie, 
de  Paphlagonie  &  celui  des  In- 
des, à  joindre  leurs  armes  aux 
ûennes. 

II.  Ceux  d'entre  les  dix  mille 
Grecs,  qui  étoient  allés  an  fecours 
de  Cyrus ,  pafferent ,  à  leur  re- 
tour ,  dans  la  Colchide ,  dont  les 
habitans  s'aflismblerent  pour  s'op- 
pofer  à  eux ,  de  forte  que  les  Grecs 
furent  obligés  d'en  venir  à  une 
bataille  où  ils  remportèrent  la  vic- 
toire. Ils  fe  faifirent  enfuite  d'une 
hauteur  où  ils  étoient  à  l'abri  de 


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co 

toute  înfulte ,  &  d'ovi  ils  alloîent 
piller  les  terres  de  leurs  ennemis; 
ce  qui    fourniflbit   amplement   à 
tous  leurs  befoins.  Ils  trouvèrent 
entr'autres  chofes  un  grand  nom- 
bre de  ruches  d'oii  ils  rapportè- 
rent une  quantité  prodigieufe  de 
gâteaux  de  cire  &  de  miel.  Mais, 
ils  éprouvèrent  un  accident  ex- 
traordinaire pour  avoir  voulu  en 
ufèr.  Tous  ceux  qui  en  avalèrent 
perdirent  connoKÎance  9  &  tom- 
bèrent comme  morts;  &  la  dou- 
ceur ,  que  ce  miel  répandoit  d'a- 
bord fur  les  lèvres  &  fur  la  lan- 
gue ,   ayant  fervi  de  piège  à  un 
grand  nombre  d'entr*eux  ,  la  terre 
fe    trouva    couverte    d'hommes 
étendus ,  comme  à  la   fin  d'une 
bataille  fanglante.  Le  refte  de  l'ar- 
mée paiTa  un  jour  entier  à  s'éton- 
ner d'un  pareil  accident  ,  &  à  re- 
gretter ceux  qu'ils  croyoient  -avoir 
perdus.  Mais ,  dès  le  lendemain  à 
pareille  heure  ,  tous  ces  malades 
fe  réveillèrent ,  &  fe  relevant  les 
uns  après  les  autres ,  cette  fécon- 
de journée  ne  parut  être  pour  eux 
que  le  lendemain  d'une  forte  pur- 
gation.  Dès  qu'ils  furent  parfai- 
tement rétablis  ,  on  fe  remit  en 
marche ,  &  l'on  arriva  dans  trois 
jours  à  Trapéfunte  ,   ville  de  la 
dépendance  de  la  Colchide. 

Les  peuples  de  la  Colchide 
avoient  chaneé  de  nom  avant  le 
règne  de  JufËnien.  On  les  appel- 
loit  Lazes  ;  ils  avoient  des  Rois 
alliés  des  empereurs  de  Conftan- 
tinople,  de  qui  ils  recevoient  com- 
me une  invefli|ure  à  chaque  mu- 
tation.  Leur  païs  étant  défert  au 
midi  de  l'embouchure  du  Phafe  ; 
Juilinien  ,   Prince  plus  capable 


CO  489 

d^entreprendre  de  grandes  chofes 
que  de  les  foûtenir  ,y  fit  bâtir  une 
ville ,  à  laquelle  on  donna  le  nom 
de  Pétra  ,  à  caufe  de  la  qualité 
du  terrein  ,  tout  rempli  de  pierre?, 
de  montagnes  de  difHcile  accès 
&  de  roches.  Les  Lazes  qui 
avoient  vu  fans  jaloufie  les  Grecs 
occuper  une  partie  de  leur  païs  , 
qu'ils  avoient  eux-mêmes  aban- 
donné ,  fupporterent  impatiem- 
ment Tufage  qu'on  en  fit  pour  lès 
opprimer  ,  &  troubler  leur  com- 
merce par  de  nouvelles  exaltons. 
Gubazes  qui  regnoit  fur  eux  , 
voulut  s'en  venger  ,  &  fans  pen- 
ferau  befoin  qu'il  avoitdes  Grecs, 
qui  fourniflbient  à  (es  fujets  une 
partie  des  chofes  néceflaires  à  la 
vie  ,  il  fit  un  traité  d'alliance  avec 
Chofroès  ,  roi  de  Perfe  ,  à  qui  il 
facilita  la  prife  de  Pétra.  Tout  cela 
fut  fuivi  d'événemens  qu'il  feroic 
tiop  long  de  rapporter. 

IlL  Lycophron  donne  à  la 
Colchide  le  nom  de  Ligyftique, 
ou  Liguftique.  Etienne  de  By- 
zance  lit  Libyftine ,  &  appelle 
Libyftiniens  ,  des  peuples  dont  le 
païs  touchoit  à  la  Colchide. 

Ptolémée  décrit  ainfi  les  côtes 
de  la  Colchide ,  à  commencer  du 
côté  du  nord ,  Diofcurias  ou  Sé- 
baftopolis,  l'embouchure  de  l'Hip- 
pus  ,  Néapolis  ,  l'embouchure  du 
Cyanée  »  Tyganéum  ,  Thiapolis 
ou  iEapolis ,  l'embouchure  du 
Cariftus ,  celle  du  Phafe ,  &  la 
ville  de  ce  nom.  Le  même  Auteur 
met  aufR  les  Lazes  fur  les  bords 
de  la  mer,  &  au-deilus  d'eux  ,  les 
Manrales;  ce  qui  prouve  que  du 
tems  de  ce  Géographe  ,  lès  Lazes 
n'étoieuc  qu'un  peuple  particulier 


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Î90  CO 

ï  la  Colchide  ,  &  que  ce  n*a  été 
que  dans  la  fuite  qu'on  aura  don- 
né ce  nom  aux  Colques  en  gêné* 
rah 

\  Les  Tilles  ou  bourgs,  fitnés 
dans  rintérieur  du  païs,  étoient 
MëchlefTe  «  Madia ,  Sarace  ,  Su- 
rium  &  Zadris. 

On  croit  que  ce  païs  reçut  la 
foi  &  les  lumières  de  l'Évangile  à 
peu  près  dans  le  même  tems  que 
ribérie  ,  province  voifine  ,  en  fut 
éclairée.  Cependant  »  on  ne  trou- 
re  point  qu'il  foie  fait  aucune 
mention  de  fes  Évéques  avant 
Théodore  ,  nommé  au  fixième 
Concile  général.  Il  eft  fait  auiïi 
mention  de  Jean  ,  évêque  de  Pé* 
ira  y  dans  la  prorince  des  La- 
ziens. 

La  Colchide  s'appelle  aujour- 
d'hui Mengrelie ,  nom  qui  pour- 
rott  bien  venir  de  celui  des  peuples 
Manrales ,  dont  nous  avons  parlé 
ci-deflus. 

L'on  fçait  combien  ce  païs  eft 
célèbre  dans  l'hiftoire  des  Argo- 
nautes. Voye{  Argonautes. 

COLCHIDE,  Colchis,  {a) 
K  '>X''^  >  ^iJIc  de  Ja  grande  Ar- 
ménie, dont  il  eft  fait  mention  dans 
Ptolémée. 

COLÉGRATES.  Voyei  Co- 
lacretes, 

COLÉE  ,  CoUum ,  lieu  du  Pé- 
loponnèfe  ,  près  de  Mégalopolis. 
II  en  eft  fait  mention  dans  Po- 
lybe. 

COLENDA,  Colenda,  {b) 
Kft>ei'/a  ,  ville  d'Efpagne.  Titus 
Didius  ta  prit  après  un  fîege  de 

{à)  Ptolcm.  L.  V.  c.  15. 
{h)  Appian.  p.    511  ^u. 
Ce)  Pauf.  p.  6ô. 


CO 

fept  mois ,  au  rapport  d'Appîen, 

COLÉNUS ,  CoUnus  ,  (c) 
KoAdc/i'oç  ,  a  voit  été  un  des  Rois 
de  TAttique ,  felon  les  Myrrhino- 
fiens.  Il  eft  parlé  de  ce  Prince  à 
iVtide  de  Colonides.  Voyc^  Co- 
lonides. 

COLIADES  ,  Coliades  ,  {J) 
fortes  de  myftëres ,  ou  de  facri- 
fices  fecrets  ^  dont  parle  Lucien  » 
&  dont  il  ne  donne  pas  ane  idée 
bien  avantageufe. 

COLIAS,  Colias,  K«>/«ç» 
{e)  nom  d'un  promontoire  de  Grè- 
ce 9  dans  l'Attique.  Il  étoit  fitué 
à  environ  vingt  ftades  du  port,  de 
Phalère,  fur  le  golfe  Saronique. 

Ce  promontoire  fut  témoin  d'u- 
ne fcène  fanglante  du  tems  de  Sa- 
lon. Les  Athéniens  étoient  alors 
en  guerre  au  fujet  de  Tifte  de  Sa- 
lamine.  Solon  ,  éki  général ,  vint 
à  Colias  ,  oyk  toutes  les  dames 
Athéniennes  étoient  afTemblées 
pour  faire  le  facrifice  annuel  à 
Cérès.  Dès  qu'il  y  fut  arrivé  ,  il 
envoya  à  Salamine  un  homme  , 
en  qui  il  fe  fioit  entièrement  «  qui 
fit  femblant  d'être  un  transfuge  , 
&  dit  à  ceux  de  Mégare  ,  qui  te- 
noient  alors  cette  ifle ,  que ,  s'ils 
vouloient  prendre  les  principales 
femmes  des  Athéniens  ,  ils  n'a- 
voient  qu'à  venir  promptement 
avec  lui  au  promontoire  de  Colias« 
Les  Mégaréens  le  crurent ,  &  en- 
voyèrent fur  l'heure  même  des 
foldats.  Solon ,  qui  étoit  aux  aguets 
fur  la  pointe  du  promontoire  , 
n'eut  pas  plutôt  vu  fortir  leur 
vaideau'  du  port  ^  Salamine  ^ 

td)  Lucian.  T.  I.  p.  to^. 
(O  Plut.  Tom.  I.  pag.  8».  Pauf.  p.  i* 
Heiod.  L.  Via.  c.  96.  . 


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co 

qu'il  renvoya  promptement  toutes 
les  femmes  à  Athènes  ,  donna 
leurs  habits ,  leur  coëfFure  Si  leur 
chauiTure  aux  plus  jeunes  de  Tes 
foldats  qui  n*avoient  point  encore 
de  barbe  ,  leur  fit  cacher  des  poi- 
gnards fous  leur  robe  ;  &  quand 
il  les  eut  équipés ,  il  leur  com- 
.  manda  de  danfer  tous  enfemblë 
fur  le  bord  de  la  mer ,  infqu'à  ^e 
qtie  leurs  ennemis  fuffent  à  terre , 
&  que  leur  vaifleau  iie'pôt  plus 
échapper.  Cela  étant  exécuté ,  Jes 
Mégaréens ,  trompé^  par  ces  dan- 
fes  qu'ils  découvrirent  de  loin  , 
approchèrent  avec  une  entière 
confiance  ;  &  étant  abordés,  ce 
fut  à  qui  defcendroit  le  preoiier 
pour  aller  ravir  ces  femmes  ; 
mais ,  on  les  reçut  fi  bien  ,  que 
pas  un  ne  fe  fauva  t  &  qu'ils  fu- 
rent tous  tués  fur  la  place.  Les 
Athéniens  s'embarquèrent  tout 
auffi-tôt  9^k  rendirent  mlaîtres 
de  Salamine  fans  aucune  diffi- 
culté. 

Paufanias  dit  qu'après  la  dé- 
faite de  l'armée  navale  des  Perfes, 
les  débris  de  leurs  vaifleaux  fu- 
rent poufïéf  par  le  flot  au  pro- 
montoire de  Colias.  Il  a)o0te  que 
de  fon  tems  ,  ce  lieu  n*a voit  rien 
de  remarquable  qu'une  Aatue  de 
Vénus  Coliade  &  quelques  au- 
tres flatues  des  déefles  nommées 
Génétyllides. 

COLIAS  ,  Collas  ,  Ko>j«ç . 
{a)  l'un  des  fur  noms  que  Ton  a  voit 
donnés  à  Vénus.  Elle  étoit  ainfi 
furnommée  à  caufe  de  fon  talent 
pour  la  danfe.  Ce  mot  vient  de 

(*)   Antîq,  expL   par  D.   Bem. 
Montf.  Tom.  I.  pig.  171.        .  «^ 

(/;  Mém.  de  TAcad.  des  Infcr^  * 


:i 


C  O  49^1 

y^.ykfoi  >  faite  ,  je  faute  ,  je  danfe. 
Les  Grecs  avoient  élevé  un  tem- 
ple à  Vénus  la  danfeufe. 

COLIPHIUM  ,  Coliphium  , 
K(ûxlpiO¥  ^  {h)  forte  de  pain  fans 
levain  ,  greffier  ,  pefant ,  paitrî 
avec  le  fromage  mou  ,  &  qui  fer- 
voit  de  nourriture  ordinaire  aux 
Athlètes.  Il  en  eft  parlé  dans  les 
-'' '5atyres  de  Ju vénal.  Il  falloit  avoir 
un  bon  eftomac  pour  digérer  aifé- 
ment  une  pareille  nourriture. 

COLISÉE,  (c)  appelle  par  les 
Latins  Colifeum  ,  ou  Coloffaum  , 
éîoit  uii  amphithéâtre  à  Rome , 
que  l'empereur  Vefpafien  fit  bâ- 
tir ,  &  qui  fut  ainfi  nommé ,  parce 
qu'il  étoit  proche  du  Colo^  q«  on 
avoit  dédié  à  Néron-  Cet  amphi- 
théâtre éroit  en  ov^ile  ,  &  d'une 
flîuaure  fufprenanre.  Il  contenoit 
près  de  cent  mille  fpeâateurs  , 
affis  à  leur  aife  autour  de  l'arène, 
c'eft-à-dire ,  du  Wev  où  on  lâchoit  ' 
les  bêtes.  Ce  fut-li  quQ  S.  Ignace, 
martyr  ,  fut  e^ofc  à  la  mort. 
Lorfque  Tempe  eur  Tite  le  dédia , 
il  y  facrifia  qi^tre  mille  bêtes  d« 
diverfes  efpe<ôs. 

Bede  rap'Oï'te  cet  oracle  au 
fujet  du  Cpiféeî  Tant  que  le  Ca^^ 
lifte  fubfif^ra  ,  Rome  fubfiftera  ; 
quand  l/Colifée  tombera^  Rome 
tombera»  ^  quand  Rékie  tombera^ 
le  ma^^  tombera  &  fera  détruit. 
Ugu'^s ,  parlant  du  Colifée  ,  ea 
fjijtun  conte  auffi  ridicule  que 
^(  oracle.  Il  dit  que  l'on  y  avoît 
<acé  des  flatues  de  toutes  les 
provinces  de  l'empire  Romain  , 
au  milieu  defquelles  écoit  celle  de 

Bell.  Lett.  Tom.  I.  p.  «i. 

Ce)  Mém.  de  PAcad.  des  Infcript*  & 
Bell.  Leu.  Xogi.  XII.  pag.  1^5^. 


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i92  C  O 

Rome ,  tenant  une  pomme  d*or  , 
&  que  ces  6gures  étoicnt  dtfpo- 
fées  par  art  magique  ;  de  forte 
que  quand  quelque  province  vou- 
loit  fe  révolter ,  l'image  de  Rome 
fournoit  le  dos  à  celle  de  cette 
province  >  &  qu'alors  les  Romains 
y  envoyoient  une  puiffante  ar- 
mée ,  qni  réduifoit  ces  rebelles. 
Les  ravages  des  Goths  ont  beau- 
coup endommagé  ce  bâtiîirent  , 
qui  tombe  en  rume  tous  les  jours, 
«  dont  la  plus  grande  partie  eft 
déjà  par  terre. 

COLLATÏE  ,  ColUtla  ,  (a) 
KoNAar/a  ,  ville  d'Italie ,  qui ,  fé- 
lon Strabon,  n'étoit  qu'à  trente 
ou  quarante  ftades  de  Rome. 
Quoique  fiiu^e  fur  les  confins  du 
Latium  »  elle  apartenoit  aux  Sa- 
bins  ,  félon  Tite-Live.  Tarquin 
l'ancien  la  leur  enleva  ,  ainfi  que 
tout  le  territcire  qqi  en  dépendoit , 
&  en  donna  k  commandement  à 
Égérius  foanevçu.  Voici  la  for- 
mule ,  dont  on  ifa  pour  la  reddi- 
tion des  Collatins;  Tarquin  ,  en 
s'adreflant  aux  déparés  qu'ils  lui 
avoient  envoyés  :  w  7enez-vous , 
»  leur  dit- il ,  de  la  p^t  du  peuple 
n  de  Collatie ,  en  qualité  de  dé- 
n  pûtes,  avec  pouvoit^Je  vous 
to  mettre  ,  vous  &  le  pypie  de 
^  »  Collatie  j  fous  ma  puîi^nce  ? 
n  Oui ,  nous  avons  été  ci^yés 
»  à  cette  fin.  Le  peuple  de  6^^[a. 
•>  tie  eft-il  le  maître  de  fon  (ù^  ? 
«  Oui.  Vous  rendez- vous  à  ï: 
»  &  au  peuple  Romain  ,  vous 
n  le  peuple  de  Collatie,  la  ville  , 
I»  les  campagnes  s  l^s  eaux«  les 


co 

w  confins ,  les  temples ,  tous  roi 
n  effets ,  tant  humains  que  divins  ? 
i>  Oui.  Et  moi  j'accepte  le  tour,  a 

La  ville  de  Collatie  eft  fameu- 
fe  pour  avoir  fervi.de  fcene  à 
l'aventure  tragique  de  Lucrèce; 
car ,  tout  le  monde  fçait  que  c*étoit 
en  ce  Jieu  que  cette  célèbre  dame 
faifoit  fa  demeure  ,  lorfqoe  Sex- 
tus  Tarquicitfs ,  épris  d'un  violent 
amour  pour  elle  ,  vint  lui  Êiire 
violence  ;  ce  qui  lui  caufa  tant  de 
déplaifir  ,  qu'elle  fe  donna  U 
mort. 

Denys  d'Halicarnaffe  écrit  ce 
nom  Golatie  ;  &  Feftus  ,  Con- 
latie.  Ce  dernier  prétend  qu'il  eft 
dérivé  de  ce  qu'on  y  appona  les 
richeffes  des  autres  villes  ;  &  il 
ajoâte  que  c'étoît  de- là  qu'étoit 
venu  le  nom  de  Conlatine  à  une 
des  portes  de  Rome. 

Strabon  met  Collatie  au  nom- 
bre de  quelques  petite» villes  ,  qui 
n'étoient  plus  que  de  fimples  vil- 
lages ou  même  des  maifbns  de 
particuliers.  Holftenius  ;  dans  (es 
obfervations  fur  l'Italie  de  Cla- 
vier ,  croit  que  Collatie  étoit  près 
du  confluent  de  l'Ofa  &  du  Té-, 
Vérone.  Cette  diftance  ne  s'accor- 
de point  avec  le  récit  de  Tite- 
Live  ,  comme  le  remarque  Cella- 
rius.  Il  ne  refte  aucun  ancien  vef- 
tige  de  ce  lieu ,  qui  puifTe  déter- 
miner où  il  étoit. 

COLLATIE  ,  Coliatia  ,  (i) 

KoMPtt/« ,  autre  ville  d'Italie  fi- 

tuée  dans  i'Apulie  vers  le  mont 

'^rargan.  Pline  en  nomme  les  ha- 

cans  Collatins ,  &  Frontin  dans^ 


r*^  Strab.  pag.  *jo.  Plin,  Tom   ï.  p.  I     (Vy      j        ^  ^^g 
157.  Tu.  Liv.  L,  I.  c.  |8^  57.  &fH»*        \ 


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co 

(on  lîvrc  des  Colonies ,  fait  mea- 
tion  de  Ton  territoire  qu'il  nomme 
ager  Collaùnus  ,  &  il  le  joint  au 
mont  Gargan.  Ceft  tout  ce  que 
Ton  en  fçait. 

COLLATIN  ,  Collaùnus. 
Poyei  Tarquin. 

COLLATINE  ,  ColUtîna  , 
{a)  déeffe  des  Romains.  Cette 
GéefTe  préficjoit  aux  montagnes , 
félon  S.  Auguftin. 

COLLATINS  ,  CoUatîni  , 
peuples  dltalie,  Voye^  Collatie, 

COLLECTE ,  ColUaa.  C'eft 
ainfi  qu'on  apjpells  la  perception 
ou  recouvrement  des  tributs  6c 
importions.  Cet  emploi ,  chez  les 
Romains ,  n'étoit  point  con£déré 
comme  un  emploi  ignoble  ;  c*efl 
ce  qui  réfulte  de  la  loi  X  au  code 
de  excufat.  mun,  »  laquelle  ayant 
détaillé  'tous  les  emplois  qui 
étoient  réputés  bas  &  fordides  , 
n'y  a  point  compris  h  Collefte 
des  tributs  ;  elle  éioit  même  défé- 
rée aux  Décurions  ,  qui  étoient 
les  principaux  des  villes. 

COLLECTIF  ,  CotUmvus  , 
ferme  de  Grammaire,  iocmi  de 
Colligere ,  recueiHîr  ,  raflembler. 

Ce  terme  fe  dit  de  certains 
noms  fubAantifs ,  qui  préi*enteot 
à.  refprit  l'idée  d'un  tout  ,  d*un 
enfemble  formé  psr  Taflemblags 
de  plufieurs  individus  de  même 
cfpece  ;  par  exemple ,  armée  eft 
un  nom  Colleâif»  il^nous  pré- 
fente ridée  fmgulîère'' d*un  en-, 
femble  ,  d'un  tout  formé  par  Taf-- 
femblage  ou  réunion  de  plufieurs 
foldats.  Peuple  eft  auffi  un  terme 
CoUeélif  9  parce  qu'il  excite  dans 


co  495 

refprit  ridée  d'une  colleâion  de 
plufieurs  perfonnes  raiTemblées  en 
ufî  corps  politique,  vivant  en  fo- 
ciété  fous  les  mêities  loix.  Foret 
eft  encore  un  nom  CoHedif  ;  car  , 
ce  mot  y  fous  une  expreftîon  fm- 
gulière ,  excite  Tidé^e  de  plufieursr 
arbres',  qui  font  l'un  auprès  de 
l'autre  ;  ainiî ,  le  nom  CoUeâif 
nous  donne  l'idée  d'unité  par  une 
pluralité  affemblée. 

Mais ,  oblervez  que  pour  faire 
qu'un  nom  foit  Colleéîif  ,  il  no 
fuffit  pas  que  le  tout  foit  compofé 
de  parties  dlvifibles  ;  il  faut  que 
ces  parties  foient  aéhiellement  fé- 
parées  ,  &  qu'elles  aient  chacune 
leur  être)' part.  Autrement , les 
noms  de  chaque  corps  particulier 
ferqient  autant  de  noms  Colleâifs  ; 
car ,  tout  corps  eft  divifible.  Ainû  ,. 
homnu  n'eft  pas  un  nom  Collec- 
tif,  quoique  l'homme  foit  com- 
pofé de  diil'érentes  parties  ;  mais  f 
ville  eft  un  nom  Colleâif ,  foit 
qu'où  prenne  ce  mot  pour  un 
ailemblâge  de  différentes  mai- 
fons ,  ou  pour  une  fociété  de  di« 
vers  citoyens»  Il  en  eft  de  même 
de  multitude ,  quantité ,  régiment , 
troupe  ,  la  plupart ,  &c. 

11  faut  obferver  ici  une  maxime 
importante  de  Grammaire  »  c'eft 
Gue  le  fens  eft  la  principale  règle 
de  la  confiiuâion.  AinU  ,  quand 
on  dit  :  une  infinité  de  perfonnes 
foûtiennent ,  le  verbe  foûtiennent 
eft  au  pluriel ,  parce  qu'en  effet  « 
félon  le  fens  ,  ce  font  plufieurs 
perfonnes  qui  foûtiennent  ;  l'in^- 
finité  n'eft  que  pour  marquer  la 
pluralité  des  perfonnes  qui  foû- 


(4)  Myth.  par  M.  TÂbb.  Ban.  TQxn,  V»  p.  341» 


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494  C  ^ 

tiennent.  Ainfi ,  il  n*y  a  rien  con- 
tre la  Grammaire  dans  ces  fortes 
de  conflruâions.  C'ed  ainfi  que 
'  Virgile  a  dit  :  Pars  merfi  tenuere 
ratem  ;  &  dans  Sallufte  qh  lit  : 
Pars  in  carcerem  aBi  ,  pars  heftiis 
objeSiL  On  rapporte  ces  conf- 
truâions  à  une  figure  qu'on  ap- 
pelle fyllepfe  ;  d'autres  la  nom- 
ment fynthèfe  ;  mais^lenom  ne  fait 
rien  à  la  chofe.Cetce  figure  confllle 
à  faire  la  conflruâion  félon  lefens 
plutôt  que  feloii  les  mots. 

COLLECTIF  ,  terme  de  Lo- 
gique, qui  fe  dit  de  la  totalité  d'un 
genre,  ou  è*une  efpece  «  d'une 
multitude.  Les  Pairs  Ecclé/îa/- 
ùgues  fontfix  ;  cette  propoiition 
e4  vraie  dans  le  fens  Colleélif. 
Les  Pairs  Eccléjîajliquesfont  ducs, 
comtes  ;  cela  n'efl  vrai  que  dans 
le  &ns  diflributif.  Celui-ci  eft 
duc  ^  celui-là  ^  comte. 

Une  conféquence  du  fens  Col- 
leâlf  au  diAributif  eft  bonne  ^ 
quand  c'eCl  en  matière  néceilaire, 
c'eft-à-'dire  ,  quand  il  s'agit  d'un 
attribut  ou  d'une  qualité  eilentieile 
à  la  chofedont  on  parle.  Ellen'eft 
pas  bonne  en  matière  contingen- 
te ,  c'eft-à-dire  ,  quand  il  s'agit 
d'un  attribut  accidentel.  Les  hom- 
mes font  ,  vivans ,  animaux  ^  rai- 
fonnables  ;  donc  Jean  ,  Pierre , 
Louis  ,  &c,  a  V infini,  font  vivans , 
animaux ,  raifonnablçs,  La  confé- 
quence eft  légitime.  Les  hommes 
font  fcav ans  ;  &c.  Donc  Caius  , 
Titius  le  font.  La  conféquence 
n'èfïpas  vraie ,  parce  que  Fanté- 
cédent  ne  Teft  que  dans  le  fens 
diflributif  >  &  non  point  dans  le 


jCO 

fens  Colleflif ,  &  la  matière  étant 
accidentelle  &  condngente. 

COLLÉGA  ,  Collegas  ,  {a) 
K  Mif^aç ,  lieutenant  au  gouver- 
nement de  Syrie  ,  oîi  il  com-^ 
mandoit  pendant  l'abfence  de  Ce- 
fennius  Pétus.  11  eut  beaucoup  de 
peine  à  empêcher  que  les  habi-> 
tans  d'Antioche  ne  fîfTent  main- 
bade  fur  les  Juifis  de  leur  ville, 
qu'on  accufoit  d'avoir  mis  le  feu 
au  marché  quarré ,  au  tréfor  des 
Chartres,  au  greffe,  où  fe  tenoient 
les  ades  publics  ôt  au  palais. 

COLLEGE,  Collepum ,  nom 
qu'on  donne  à  l'afTemblée  de 
certains  corps  ou  fociétés. 

Les  Romains  appelloient  Col- 
lège tout  afTemblage  de  plufieurs 
perfonnes  occupées  aux  mêmes 
fonftions  ,  &  Comme  liées ,  c'efl- 
à-dire ,  unies  enfemble  pour  tra- 
vailler de  concert  ;  &  ils  em- 
ployoient  ce  terme  non  feulement 
à  l'égard  des  perfonnes  qui  tra- 
vailtoient  aux  fondions  de  la  reli* 
gion  ,  du  gouvernement  ou  des 
arts  libéraux  ;  mais  encore  à  l'é- 
gard de  celles  qui  s'occupoient 
aux  arts  méchaniquês. "Ainfi ,  le 
mot  Collège  fignîfioit  ce  que  nous 
appelions  un  corps  ,  une  compa- 
gnie, un  corps  de  métier  ,  un 
métier.  Il  y  avoit  dans  l'empire 
Romain  non  feulement  le  Collège 
des  augures ,  le  Collège  des  capi- 
tolins  ,  c'efl-à-dire  ,  ceux  qui 
avoient  l'intendance  des  jeux  ca-* 
pitolins  ;  mais  auffi  le  Collège 
des  artifans  ,  Collegium  artificum  ; 
le  Collège  des  charpentiers  ,  Col- 
legium jdbrorum  ,   ou  fabrorum 


U)  Jofcph,  de  Bell.  Judaïc.  pag.  973  ;  5)74. 


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co 

tîgnarîorum  ;  le  Collège  des  po- 
tiers ,  ColUgium  figulorum  ;  le 
Collège  des  tondeurs  ,  ColUgium 
fabrorum  arariorum  ;  le  Collège 
des  ferruriers  ,  Collegium  fabro' 
rum  ferrarîorum  ;  le  Collège  des 
ingénieurs ,  ou  des  gens  qui  tra- 
vailloient  aux  machines  de  guerre, 
c'eft-à-dire  ,  des  charpentiers  de 
l'armée ,  tignariorum  ;  des  den- 
drophores ,  dendrophororum  ;  dei 
centonaires,  Centonariorum  ;  des 
faifeurs  de  cafaques  militaires , 
fagariorum  ;  des  faifeurs  de  tentes, 
tabernaculariorum  ;  des  entrepre- 
neurs des  fourrages  ^fœnariorum  ; 
le  Collège  des  boulangers ,  Colle- 
gium piflorum  ;  des  joueurs  d 'inf- 
trumens ,  tibicinum  ,  &c. 

Plutarque  dit  que  ce  fut  Numa 
qui  divifa  le  peuple  Romain  en 
différens  corps  ,  qu'il  appella 
Cplleges  ;  il  le  fit  afin  que  les  par- 
ticuliers ,  fongeant  aux  intérêts 
de  leur  Collège  ,  qui  les  divifoit 
des  citoyens  qui  étoient  des  au- 
tres collèges  ,  ne  s'uniffent  point 
tous  enfemble  pour  troubler  le 
repos  public. 

Les  Collèges  étoient  diflingués 
des  autres  fociétés.^  qui  n'étoient 
pas  établies  en  forme  de  Collège 
par  l'autorité  publique ,  en  ce  que 
ceux  qui  compofoient  un  Collè- 
ge ,  pouvoient  traiter  des  affaires 
communes  de  leur  Collège  ,  qui 
faifoit  un  corps  dans  TÉtat  ;  en 
ce  qu'ils  avoienc  une  bourfe  com- 
mune y  un  agent  pour  faire  leurs 
affaires  y  comme  aujourd'hui  les 
fyndics  de  nos  communautés  ; 
qu'ils  envoyoient  des  députés  aux 
Magiftrats ,  quand  ils  av  oient  à 
traiter  avec  eux  ;  &  qu'ils  pou- 


CD  495 

voient  faire  des  réglemens  &  àes 
ftatuts  pour  leur  Collège ,  pourvu 
qu'ils  ne  fuffent  point  contraires 
aux  loix  de  l'État.  Foye^  Com«- 
munauté. 

COLLEGE  ,  Collegium  ,  fe 
dit  audi  d'un  lieu  public  6c  doié 
de  certains  revenus ,  oii  l'on  en* 
feigne  les  lettres  divines  &  hu- 
maines »  dans  des  falles  appellées 
clalTes ,  deftinées  pour  cela.  Tou- 
tes les  nations  policées  ont  eu  & 
ont  encore  des  collèges  pour 
rinflruâion  de  la  jeuneHe /qu'oa 
a  toujours  regardée  comme  un< 
chofe  des  plus  importantes  pour 
le  bonheur  d'un  État. 

Les  Juifs  6l  les  Égyptiens  ont 
eu  leurs  collèges.  Le  Thalmud  & 
plufieurs  livres  des  Juifs  parlent 
de  leurs  écoles  ,  ou  Collèges* 
Quelques  villes  ont  eu  des  npms, 
qui  marquoient  que  les  iciences  y 
floriffoient ,  comme  Nardée ,  donc 
le  nom  fignifie  fleuve  de  fcience  , 
&  Cariath- Sepher ,  qui  veut  dire, 
ville  de  Livres.  Les  plus  célèbres. 
Collèges  des  Juifs  ont  été  ceux  de 
Jérufalem  ,  de  Tibériade  ,  de 
Nardée  ,  de  Mata-Machafia  /dé 
Pompodita  ,  de  Sura ,  &c.  &  fur- 
tout  de  Babylone.  On  prétend 
que  ce  dernier  fut  établi  par  Ézé- 
chiel  ;  qu'il  fubfiftoit  encore  au 
tems  de  Mahomet  ;  &  que  cet 
impofleur  voulut  que  lés  Collè- 
ges voifins  fufTent  fubordonnés  à^ 
celui  de  Babylone. 

Chez  les  Grecs ,  le  Lycée  & 
l'Académie  étoient  de  célèbres 
Collèges  ;  on  fçait  que  le  dernier 
a  donné  fon  nom  aux  Académies 
&  aux  Univerfués,  qu'on  appelle 
en  Latin  du  nom  Academia.  L^^ 


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49^  C  O 

niaifon  de  chaque  Philofophe  & 
de  chaque  Rhéteur  pouvoit  pafler 
pour  un  Collège  ;  ils  y  donnoient 
des  leçons  à  leurs  difciples,  à  moins 
qu'ils  ne  choififlent  pour  cela  quel- 
que lieu  public ,  comme  un  porti- 
que y  une  galerie ,  &c. 

Les  Romains  établirent  en  di- 
vers endroits  ,  &  fur  tout  dans  les 
Gaules ,  des  Écoles  ou  Collèges  ; 
les  plus  célèbres  étoient  ceux  de 
Marfeille  ,  de  Lyon  ôc  de  Befan- 
çon.  Les  Collèges  ont  prefque 
toujours  été  entre  les  mains  de 
ceux  qui  étoient  confacrés  aux 
miniûeres  de  la  religion.  C'étoienc 
les  Mages  en  Perfe  ,  les  Gymno- 
fophiAes  aux  Indes  ,  &  les  Drui- 
des dans  les  Gaules ,  lefquels  en- 
feignoient  les  fciences  aux  jeunes 
gens.  Quand  la  religion  Chré- 
tienne fut  établie  en  France  ,  il  y 
eut  prefque  autant  de  Collèges 
que  de  monadères.  Chàrlemagne, 
dans  (q5  Capitulaires  ,  ordonne 
que  dans  tous  les  monadères  on 
apprît  aux  enfans ,  les  Pfeaumes , 
la  Mufique  ,  l'Arithmétique  ,  la 
Grammaire.  Mais  ,  parce  que  le 
foin  de  Téducation  de  la  jeuneiTe 
tiroit  tes  moines  de  leur  folitude  , 
partageoit  trop  leur  cems ,  ôc  les 
empêchoit  de  vaquer  aux  exerci- 
ses de  leur  profeffion  ;  dans  la 
fuite  on  a  donné  le  foin  de  plu- 
fleurs  Collèges  à  des  perfonnes 
qui  n'eufTent  point  d  autres  occu^- 
pations  que  celle-là. 

C'eft  ici  le  lieu  de  placer  les  ju- 
dicieufes  ôc  folides  réflexions  d'un 
célèbre  Écrivain  au  fujet  des  Col- 
lèges, wllme  fembîe,  dit-il,  qu'il 
ff  ne  feroit  pas  impofîible  de  don- 
12  ner  une  autre  forme  à  l'éduca- 


co 

»  tîon  des  Collèges.  Pourquoi  paC 

»  fer  fix  ans  à  apprendre  tant  bien 

»  que  mal/une  langue  morte  ?  je 

»  fuis  bien  éloigné  de  défapprou- 

n  ver  Tétude  d'une  langue  dans 

»  laquelle  les  Horace  ôc  les  Tacite 

»  ont  écrit  ;  cette  étude  eft  abfo- 

w  lument  néceflaire  pour   con- 

I)  noître  leurs  admirables  ouvra- 

»  ges  ;  mais ,  je  crois  qu'on  de- 

i)  vroit  fe  borner  à  les  entendre  , 

»  ôc  que  le  tems  qu'on  emploie  à 

»  compofer  en  latin  ,  e(l  un  tems 

n  perdu.Ce  tems  feroit  bien  mieux 

i>  efnployé  à  apprendre  par  prin- 

»  cipes  fa  propre  Langue  ,  qu'ori 

n  ignore  toujours  au  fortir  du  col- 

9)  lege ,  ôc  qu'on  ignore  au  point 

V  de  la  parler  très-mal.  Une  bon- 
i>  ne  grammaire  françoife  feroit  > 
»  tout  à  la  fois  une  excellente  lo- 
»  gique ,  ôc  une  excellente  mé- 
n  taphyfique ,  ôc  vaudroit  bien  les 
n  rapfodies    qu'on    lui  fubflitue. 

V  D'ailleurs  ,  quel  latin  que  celui 
i>  de  certains  collèges  l  nous  en 
9>  appelions  au  jugement  des  con- 
»  noifleurs. 

M  Un  théteur  moderne ,  le  P. 

n  Porée,    crès-refpeélable  d'ail- 

w  leurs  par  fes  qualités  perfonnel- 

n  les ,  mais  à  qui  nous  ne  devons 

n  que  la  vérité,  puifqu'il  nefl  plus, 

V  eft  le  premier,qui  ait  ofé  fe  faire 
»  un  jargon  bien  difféfent  de  la 
»  Langue  que  parloient  autrefois 
M  les  Herfan ,  les  Marin ,  ]e% 
n  Grenan  ,  les  Commire  ,  les 
M  CoflTart  ôc  les  Jouvenci ,  &  que 
n  parlent  encore  quelques  protef- 
w  feurs  célébfes  de  TUniveifité. 
M  Les  fucceffeurs  du  rhéteur  dont 
»  je  parle  ,  ne  fçauroient  trop 
Il  s'éloigner  de  fes  traces. 

.Je 


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co 

,  il  Je  fçaîs  que  le  Latîn  étant  un^ 
p  Langue  morte  ,  dont  prefque 
n  toutes  les  fînefles  nous  échap- 
n  pent ,  ceux  qui  pafTent  aujour- 
j>  d'hui  pour  écrire  le  mieux  eç 
99  cette  Langue  y  écrivent  peut- 
n  être  fort  mal  ;  mais  du  moins  , 
9>  les  vices  de  leur  diâion  nous 
I»  échappent  aufli  ;  &  combien 
»  doit  être  ridicule  une  latinité 
n  qui  nous  fait  rire  ?  certainement 
t>  un  étranger ,  peu  verfé  dans  la 
j>  Langue  françoife,  s'apperce- 
»  vroit  facilement  que  la  diâion 
M  de  Montagne,  c'ed- à-dire  »  du 
99  feizième  (lecle,  approche  plus 
t>  de  celle  des  bons  Écrivains  du 
V  fiècle  de  Louis  XIV,  que  celle 
»  de  Geoffroy  de  Villehardouin  , 
9>  qui  écrivoit  dans  le  treizième 
n  fiecle. 

»  Au  refte,  quelqu'eftime  que 
»  j'aie  pour  quelques-uns  de  nos 
9>  HumaniAes  modernes ,  je  les 
»  plains  d'être  forcés  à  fe  donner 
9i  tant  de  peines  pour  parler  fort 
»  élégamment  une  autre  Langue 
»  que  la  Jeur.  Ils  fe  trompent  s'ils 
»  s'imaginent  en  cela  avoir  le  mé- 
9f  rite  de  la  difficulté  vaincue  ;  il 
M  eu.  plus  difficile  d'écrire  &  de 
t>  parler  bien  fa  Langue,  que  de 
9i  parler  &  d'écrire  bien  une  Lan- 
»  gue  morte  ;  la  preuve  en  eft 
»  frappante.  Je  vois  que  les  Grecs 
M  &  les  Romains  ,  dans  le  tems 
»  que  leur  Langue  étoit  vivante  , 
9>  n'ont  pas  eu  plus  dé  bons  écri- 
»  vains  que  nous  n'en  avons  dans 
»  la  nôtre  ;  je  vois  qu'ils  n  ont  eu, 
»  ainfi  que  nous  ,  qu'un  très- 
»  petit  nombre  d'excellens  Poètes, 
»  &  qu'il  en  eft  de  même  de  toi;i- 
I»  tes  les  nations.  Je  vois  au  con-» 
Tom.  XL 


C  p  497 

»  traire  que  le  renouvellement 
V  des  lettres  a  produit  une  quan- 
ti tité  prodigieufe  de  Poètes  La- 
n  tins  g  que  nous  avons  la  bonté 
n  d'admirer  ;  d  oîi  peut  venir  cette 
n  différence  ?  &  fr  Virgile  ou  Ho- 
II  race  revenoient  au  monde  pour 
»  juger  ces  héros  modernes  du 
n  parnaffe  Latin ,  ne  devroient-iîs 
w  pas  avoir  grand'peur  pour  eux? 
»  Pourquoi, comme  l'a  remarqué 
w  un  Auteur  moderne ,  telle  com- 
II  pagnie,  fort  eftimable  d'ailleurs. 
Il  qui  a  prodoit  une  nuée  de  Ver- 
»  (ificateurs  latins  ,  n'a-t-elie  pa^ 
If  un  feule  Poète  françois  qu'oft 
»  puifle  lire?  pourquoi  les  recueils 
»  de  vers  françois ,  qui  s'échap-, 
II  pent  par  malheur  de  nos  Col- 
»  leges,om-ilseu  fi  peudefuccès; 
»  tandis  que  plufieurs  gens  de 
»  Lettres  eftiment  les  vers  latins 
Il  qui  en  fortent  ?  je  dois  au  reAe 
»  avouer  ici  que  l'Univerfité  de 
Il  Paris  eft  très  •  circonfpefte  & 
»  très-réfervée  fur  la  vertification 
»  françoife  ;  &  je  ne  fçaurdis  l'en 
w  blâmer  ;  mais  nous  en  parlerons 
»  plus  au  long  à  l'article  de  lati- 
Il  nité. 

>i  Concluons  de  ces  réflexions  , 
I»  que  les  compoOtions  latines  font 
n  fujettes  à  de  grands  inconvé-- 
II  niens ,  &  qu'on  teroic  beaucoup 
w  mieux  d'y  fubftituer  des  com- 
II  portions  françoifes  ;  c'eft  ce 
i>  qu'on  commence  à  faire  dans 
»  l'Univerfité  de  Paris  ;  on  y 
n  tient  cependant  encore  au  Latin 
Il  par  préférence  ;  mais  enfin  on 
»  commence  à  y  enfeigner  le 
»  François. 

Il  J'ai  entendu  quelquefois  re- 
II  gretterles  thèfes  qu'on  foûtenoit 

li 


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498      .    CO 

»>  autrefois  en  Grec  ;  j'ai  bien 
«I  plus  de  regret  qu*on  ne  les  foû- 
n  tienne  pas  en  François  ;  6n  fe- 
n  roit  obligé  d*y  parler  rairon^ 
»  ou  de  Ce  taire. 

n  Les  Langues  étrangères  dans 
,  91  lefquelles  nous  avons  un  grand 
»  nombre  de  bons  Auteurs  « 
Il  comme  TAnglois  &  Tltalien  ,  & 
M  peut-être  l'Allemand  6c  TEfpa- 
n  gnol^  devroient  auffi  entrer  dans 
»>  l'éducation  des  Collèges  ;  la 
91  plupart  feroient  plus  utiles  à 
n  fçavoir  que  des  Langues  mor- 
y>  tes  ,  donc  les  fçavans  feuli  font 
99  à  portée  de  faire  ufage. 

n  J'en  dis  autant  de  THiftoire 
9>  &  de  toutes  les  fciences  qui  s'y 
I»  rapportent,  comme  la  Chroiio- 
99  logie  &  la  Géographie.  Malgré 
99  le  peu  de  cas  que  l'on  paroît 
9»  Ëilre  dans  les  Collèges  de  THif- 
99  toire ,  c*eft  peut-être  Tenfance 
n  qui  eu  le  tems  le  plus  propre  à 
9>  l'apprendrc^L'hiffoire  affez  inu- 
^^ile  au  commun  de  hommes, 
•9  efi  fort  utile  aux  enfans ,  par  les 
9»  exemples  qu'elle  leur  préfente , 
9»  êc  les  leçons  vivantes  de  vertu 
99  qu'elle  peut  leur  donner ,  dans 
99  un  âge  oh  ils  n'ont  point  encore 
19  de  principes  fixes ,  ni  bons  ni 
|9  mauvais.  Ce  n'eA  pas  à  trente 
p  ans  qu'il  faut  commencer  à  l'ap- 
19  prendre,  à  moins  que  ce  ne  foit 
|9  pour  la  fimple  curiofué  ,  parce 
p  qu'à  trente  ans^refprit  &  le  cœur 
19  font  ce  qu'ils  feront  pour  toute 
I»  la  vie.  Au  refte ,  un  homme 
p  d'efpric  de  ma  connoiflance 
p  voudroit  qu'on  étudiât  &  qu'on 
p  enfeignât  l'hidoire  à  rebours, 
l>  c'eft-à-dire,  en  commençant 
H  par  npuii  iems^  &  reffu?maot 


CO 

19  delà  ant  ftecles  palTés.  Cette 
M  idée  me  paroît  tr^-jufte  &  très* 
9»  philofophique.  A  quoi  bon  en- 
n  nuyer  d'abord  un  enfant  de 
9»  l'hiftoire  de  Pharamond,  de 
19  Clovis>  de  Charlemagne,  de 
w  Céfar  &  d'Alexandre,  &  lu 
99  laiiTer  ignorer  celle  de  Ton  tems, 
n  comme  il  arrive  prefque  tou- 
9>  jours  par  le  dégoât  queles  c6m- 
n  mencemens  lui  infpirent  ? 

M  A  l'égard  de  la  rhétorique, 
19  on  voudroit  qu'elle  conâfiât 
n  beaucoup  plus  en  exemples 
»  qu'en  précepte^;  qu'on  tie  fe 
n  bornât  pas  à  lire  des  Auteurs 
n  anciens^  &  à  les  faire  admirer 
9»  quelquefois  aflez  mal- à-  propos; 
19  qu'on  eut  le  courage  de  les  cri- 
99  tiquer  fouvent ,  de  les  comparer 
99  avec  les  Auteurs  modernes ,  & 
99  de  faire  voir  en  quoi  nons  avons 
99  de  l'avantage  ou  du  défavan- 
99  tage  fur  les  Romains  &  fur  les 
99  Grecs,  Peut  être  même  de V  roit- 
99  on  faire  précéder  la  rhétorique 
99  par  la  philofophie  ;  car ,  enhn , 
«y  il  faut  apprendre  à  penfer  avanc 
n  que  d'écrire. 

99  Dans  la  philofophie  f  on  bor- 
99  neroit  la  logique  k,  auelques  fï* 
99  gnes;  la  méthaphyhque ,  àuQ 
99  abrégé  de«  Locke  ;  la  moralç 
99  purement  philofophique  ,  aux 
99  ouvrages  de  Séneque  oc  d'Épic- 
91  tête;  la  morale  chrétienne^  an 
99  fermon  de  Jefu&^hrift  furlsv 
99  montagne  ;  la  Phyfique  ,  aux 
99  expériences  &  à  la  géométrie  % 
99  qui  eft  de  coûtes  les  logiques  6c 
99  phyfiqueslameiUeure» 

99  On  voudroit  enfin  qu*oa  joî*' 
91  gnit  à  ces  différentes  études  , 
».  celles  des  beaux  arts  &  for  tout 


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co 

n  de  h  mufique ,  étude  fi  pro- 
M  pre  pour  former  le  goût ,  & 
n  pour  adoucir  les  mœurs,  &  dont 
»  on  peut  bien  dire  avec  Cicéron  : 
w  Hac  fludia  adolefcentiam  alunt , 
»  feneàuum  obleêlant ,  jucundas 
»  rw  ornant ,  adverfis  perfugium 
J>  &  folatium  prabent,  H 

Voilà  ,  comme  je  l'ai  dit ,  des 
réflexions  judicieufes  &  folides. 
Tous  les  maîtres  fenfés  y  applau- 
xliffent.  Mais,  y  en  a-t  il  beau- 
<coup  qui  ailfet  le  courage  de  s'y 
conformer  ?  tant  il  eft  vrai  que 
Vufage  eft  un  tyran  ,  auquel  per- 
-fonne  ne  fçauroit  réfifter, 

COLLENTUM,  Collentum, 
KoxMifro¥  ,  (a^  ville  dlllyrie  dans 
rifle  de  Scardone,  félon  Ftolémée. 
Pline  en  nomme  les  Habitans  C^- 
lentins  ,  par  une  feule  /  ;  mais ,  il 
ne  dit  pas  qu'ils  fufTent  dans  l'ifle 
de  Scardone.  Dans  le  chapitre 
précédent,  il  nomme  Tifle  elle- 
même  Colentum  ,  &  la  place  à 
trente  milles  de  Pola, 

COLLIER,  Torques  ,  {b)  e(' 
pece  d  ornement.  Les  Colliers 
étoient  en  ufage  chez  les  Grecs , 
les  Romains ,  6c  plufieurs  autres 
nations. Cet  ufage  étoit  de  la  pre- 
mière antiquité;  les  femmes  en 
portoient  pourTornement  ;  l'on  en 
mettoit  au  cou  des  déefles.  On  voit 
fur  les  monumens  ,  des  Colliers 
de  perles  au  cou  de  Minerve.  La 
déefle  Ifis,  comme  on  lit  dans 
une  infcription  venue  d*Efpagne , 
en  avoit  un  orné  de  plufieurs  pier- 
reries. Dans  une  autre  infcription 


C  O  1J.99 

de  Gruter  >  nous  lifons  que  Sym- 
phorns  de  Riez  en  Provence  &  fa 
femme  Procris  offrirent  à  Efculape 
entr'autres  chofes  un  Collier  d'or 
compofé  de  petits  ferpens.  Celui , 
que  décrit  Ariftenete  dans  fa  pre- 
mière Épître  ,  eft  plus  remarqua- 
ble ;  il  étoit  orné  de  pierres  pré- 
cieufes  ,  dont  les  plus  petites 
étoient  difpofées  de  manière  qu'el- 
les formoient  le  nom  de  la  belle 
Laïs  qui  les  portoit. 

On  en  donnoit  aux  foldacs  com<* 
me  une  marque  d'honneur  &  une 
récompenfe  de  leur  valeur.  Man« 
lius  Torquatus  portoit  ce  nom 
pour  avoir  pris  un  Collier  à  ua 
Gaulois  \  de  ce  Collier  appelle 
Torques,  il  fut  nommé  Torqua- 
tus, On  en  donnoit  encore ,  félon 
Capicolm,  aux  jeux  militaires.  Il  y 
en  avoit  d'or  fimplement  ;  d'autres 
d'or  ornés  de  pierreries;  quelques- 
uns  d'argent ,  félon  Pline.  Les 
peuples  de  la  grande  Bretagne  en 
portoient  d*ivoire.  Nous  voyoïis 
aGez  (buvent  dans  les  infcriptions, 
des  gens  de  guerre  qui ,  en  récom- 
penfe de  leur  valeur ,  avoient  été 
honorés  de  Colliers  Ôc  de  brace- 
lets. 

COLLINA  ,  Collina ,  nom 
d*une  tribu  Roma'me  9  Voyc:^  Tri- 
bu. 

COLLINE^jCo//i/j4 ,  Ko\%lvot  \, 
(c)  nom  de  l'une  àts  quatre  ré- 
gions qui  partageoient  au  commen- 
cement la  ville  de  Rome.  On  l'ap- 
pelioit  Collina  regio ,  c'eft- à-dire , 
le  quartier  des  Collines ,   parce 


U)  Ptoicm.  L.  II.  c.  17.  Plin.  T.  I.  j     (c)  Plin.  Tom.  II.  pag.  ç8.  Mém.  de 
pag.  178.  jrAcad.  des  lufcript.  &  Beii,  Leu.  T. 

(^)  Andq.  expl.    par    D.    Bcm»   4c[lV.  p.  70.  ^ /««v. 
Moâtf.  Tom.  UI.  pag.  $).  l 

,       liij 


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500  CO 

que  dans  ce  quartier-là  ily  enavoît 
cinq  des  feptqui  étoient  enfermées 
dans  l'enceinte  de  Rome.  Ces  cinq 
étoient  la  Viminale ,  la  Quirinale, 
la  Salutaire ,  la  Mutiale  &  la  La- 
tiale.  La  tribu  qui  demeuroit  dans 
'  ce  quartier  9  s'appelbit  auili  Col- 
line ,  Tribus  Collina  ;  car ,  cha- 
cun àt^  quatre  quaniers  étoit  ha- 
bité par  une  tribu  particulière. 

COLLINE ,  Collina,  Kc^/ra» 
la)  nom  d'une  porte  de  Rome^qui 
etoic  fituée  au  pied  de  la  Colline 
Quirinale ,  ou  du  mont  Quirinal. 
Cette  porte,  dans  la  fuite  du  tems, 
s^appella  la  porte  du  fel,  après 
que  la  rue  qui  cdnduifoit  à  cette 
porte  9  eut  été  appellée  la  rue  du 
îely  viafalaria,  comme  on  voit 
dans  Tacite  j  qui  appelle  cette 
rpe  dufely  dans  le  te'nu  qu'il  nom- 
me encore  cette  porte  Colline.  La 
râifon  pourquoi  fon  nom  chan- 
gea ,  c'eft  que  les  Sabins  qui  por- 
toient  du  fel  à  Rome  $  entroieot 
par  cette  porte* 

Ce  fut  aflez  près  de  la  porte 
jCoUine ,  que ,  fous  l'an  de  Rome 
395  y  l'on  attaqua  les  Gaulois  avec 
toutes  les  forces  de  la  ville.  Les 
Romains  y  combattirent  fpus  les 
yeux  de  leurs  pères  ,&  mères  ^  de 
leurs  femmes  &  de  leurs  enfans^ 
pbjets  capables  y  même  de  loin , 
^'encourager  les  plus  timides;  mais 

3ui  fe  prefentant  alors  aux  yeux 
es  foldats^  ajoûtoient  à  leur  va- 
leur les  fentimens  les  plus  vifis  de 
l'honneur  &  de  la  compaffioii. 
Après  qu'on  eut  verfé  beaucoup 
de  fang  d^  part  &  d'autre ,  les 


CO 

Gaulois  fiirent  enfin  obligés  de 
céder. 

C'étoît  à  la  porte  Colline  que 
l'on  enterroit  toutes  vives  les  Vef- 
tales  convaincues  d'incefte.  Il  y 
avoit'là  dans  l'enceinte  des  murs, 
un  petit  tertre  élevé  ,  qui  s*étetï- 
doit  en  long ,  &  que  les  Romains 
appelloient  en  leur  langue  d'ua 
mot  qui  fignifioit  une  levée.  Oa 
creufoit  fous  ce  tertre  un  petit  ca- 
veau 5  où  Ton  laiiT^june  ouver- 
ture pour  y  defcencOT ,  &  où  l'on 
mettoit  un  petit  lit ,  une  lampe  al- 
lumée, &  une  petite  provifioo 
de  tout  ce  qui  eft  néceflaire  pour 
fe  nourrir,  (:omme  une  cruche 
d'eau ,  une  phiole  d'huile  &  un 
pot  de  lait  y  feulement  pour  ne  pas 
offenfer  la  Religion  ,  en  faifanc  ^ 
mourir  de  faim  une  perfonne  con- 
facrée  avec  les  cérémonies  les  plus 
auguftes  &  les  plus  faintes.  Lorf- 

3ue  la  coupable  étoit  defcendue 
ans  ce  caveau  ,  on  en  fermoit 
l'ouverture  av^c  beaucoup  de  ter- 
re ,  que  l'on  ne  ceffoit  d'y  jettei: 
que  quand  le  terrein  étoit  uni. 

COLLINES  DES  JARDINS, 

Q)  nom  d'une  petite  montagne  de 
la  ville  de  Rpme,  où  étoient  les  jar- 
dins  de  Sallufte.  Elle  fut  enfermée, 
dans  l'enceinte  de  la  ville  par  TEm- 
oereur  Aurelieo.  Le  fêpulcre  de 
Néron  la  rendit  célèbre ,  &  il  y 
avoit  une  loi  qui  ordonnoit  à  tous 
ceux  qui  af»iroient  aux  charge^ 
de  la  République  j  de  paroitre  fuf 
cette  Colline  a  la  vue  du  peuple, 
avant  que  de  defcendre  dans  le 


(4)  Plut.  T.  I.  pag.  6y ,  470.  Tit.  Ltv.  II.  p.  746.  Tacit.  Hift.  L.  III.  c  78  »  8t. 
^.  I.  eu*  L.  lU.  c.  51.  L.  VII.  c.  II.  I     {h)  Mém.  de  l'Acad.  des  Infcripc»  9c 
L.  VUit  c,  I  j,  U  XXII.  c.  57.  Plîn.  T.  |  BcU.  Lctt.  T.;  tV.  p.  71, 


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co 

ditfmp  de  Mars  ^  pour  y  faire  leor 
demande* 

COLLINE,  Co////w,déeffe  (a) 
à  qui  les  Anciens  attribuoient  Tem- 
pire  fur  toutes  les  Collines*  Saint 
AueuiHn  en  fait  mention  dans  la 
Qte  de  Dieu,  Cette  Déeffe  étoit 
adorée  avec  qn  culte  fort  reli-^ 
gieur,  puifqae  les  Collines  mê- 
mes au  commencement  étoient 
adorées  ;  jufques-là  que  leur  nom, 
félon  Varron ,  ^e  vient  que  du 
culte  qu'on  leur  rendoit ,  Po/Iea» 
quant  fuperiora  loca  coUre  ccepe» 
runt,  à  colcndo  Colles  appella'^ 
runt. 

.  COLLINI,  {b)  forte  de  prê- 
très  Saliens ,  établis  par  Tullus 
Hoflilius  I  &  qui  avoient  une  ef- 
pece  de  temple  fur  le  mont  Qui- 
rinal  ;  ce  qui  leur  fit  donner  le  nom 
de  Quirinales  Se  Agonales. 

COLLOC ATION ,  Colloca^ 
tio ,  (c)  étoit  la  cérémonie  que 
Ton  pratiquoit  pour  mettre  le 
corps  mort  à  la  porte. 

COLLYTUS,  Collytus.Voye^ 
Colyttus. 

COLOBIUM ,  Colohium ,  (d) 
nom  que  Ton  donnoit  à  un  habit 
fénacorial.  C'étoit  une  efpece  de 
tunique  ,  dont  on  ne  connoît  pas 
bien  la  forme,,  &  dont  il  eft  fait 
rarement  mention  dans  lès  Au- 
teurs. 

,  COLQCkSlA,  Colocafia,{e) 
efpece  de  fleur  ,  qu*on  voit  fur  la 

(«)  Mych.  par  M.  TAbb.  Baa.  T.  IV. 
p.  461. 

(b)  Coût,  des  Rom.  par  M.  Nieup. 
pag.  »io. 

'  (c)  Anciq.    CKpIiq.  par  D.   Bern.  de 
Montf.  T.  V,  p.  9. 

•   {d)  Antiq.   cxpl.   par   D,   Bcrat   de 
Montf.  Tom»  lU.  pag.  a$* 


C  O  5or 

tâte  de  quelques  Harpocrates. 

COLOCYNTHOPIRATES. 
Colocyathopirata  ,  (/)  Ke^ox^rôo- 
Truptlrat  «  forte  de  corfaires  ima- 
ginaires ,  dont  parle  Lucien.  Ils 
navigeoientfur  de  grandes  citrouiU 
les  longues  de  flx  coudées.  Lorf«^ 
qu'elles  étoient  feches  ,  ils  les 
creufoient  &  fe  fervoient  des  grahis 
au  lieu  de  pierres  dans  le  combat  » 
&  des  feuilles  au  lieu  de  voiles , 
avec  un  inât  de  rofeau* 

C9LOÉ  ,  Coloe  ,  Kpao'm,  (g) 
marais  d'Ethiopie ,  d'oh  fort  la  ri- 
vière d'Aflapus ,  félon,  Ptolémée. 

COLOÉ  ,  Coloé,  KoA^M  »  (A) 
ville  d*Éthiopie  dans  les  terres, 
félon  le  même  Ptolémée.  Arrien 
fait  «ienti9n  de  cette  ville  de  Co- 
loé  dans  fon  Périplede  la  mer  Éry« 
thrée  ;  &  parlant  du  village  d'Adu- 
lé ,  il  ajoute  :  »  De -là  jufqu*àCo- 
i>  loé  ,  ville  maritime ,  où  fe  fait 
n  le  plus  çrand  commerce  de  1*1- 
i>  voire  ,  il  y  a  trois  journées  de 
o  chemin.)» 

COLOÉ  ^  Coloe  ^  Ka/m,  (i) 
lac  de  TAfie  mineure  dans  la  Ly- 
die ,  à  quarante  ftades  de  Sardes* 
yoye{^  Côlœne  &  Gygée. 

COLCENE,  Colœne ,  KoAmiT, 
furnom  de  Diane.  Cette  déef- 
e  étoit  honorée  fous  ce  nom  à 
Mardis ,  où  elle  avoir  un  temple  « 
auquel  Alexandre  accorda  le  droit 
d'aiyle.  Ce  temple  étoit  près  du 
lac  C6I0US,  d*où  venoit  le  furnom 

(O  Suppl.  à  TAntiq.  expL  par  D* 
Bern.  de  Momf.  Tom.  H.  pag.  189. 

(/)  Lucian.  T.  I.  p.  77» ,  77%. 

(g)  Piolem,  L.  IV.  c.  8. 

{h)  Ptolem.  L.  IV.  c,  8. 

(0  Strab.  p.  6t6  ,  6%jr, 

(i)  Strab.  p.  6a6»  6%j,  FreinC  fuppl) 
in  Q.  Curt.  L.  II.  c.  6. 

Il  ut 


f*', 


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502  C  O 

de  Diane  Colœne.  On  laî  célé- 
broit  des  fêtes ,  dans  lefquelles  on 
feifoit  danfer  des  finges* 

COLŒNIS ,  Cotœnis  ,  autre 
furnom  de  Diane  ;  elle  étoic  ado- 
rée fous  ce  nom  par  les  habitans 
de  Myrrhinunte  en  Attique.  On 
dit  qu*il  lui  venoit  de  Colœnus  « 
que  quelques-uns  prétendent  avoir 
régné  à  Athènes  avant  Cécrops. 

COLCEPHRYGES  ,  Colœ- 
phryges ,  peuples  de  G^ece  dans  la 
£éotie.  Etienne  de  Byzance  dit 

3u'on  les  nooimoit  auiS  Anticon- 
yles.  Héfychiusâit  mention  de 
Colœphryi  montagne  de  la  Béo- 
tie. 

COLOGENBAR  ,  CoW- 
har,  ville  d'Afie  près  de  l'Eu phra- 
te  i  afliez  près  d'Édeiïe  ,  félon 
Guillaume  de  Tyr ,  cité  par  Or- 
télius. 

COLOGf^KFbyei  Agrippirte 
[  la  colonie  d^  ] 

COLOMBE ,  Columha  ,  {a) 
TJtpi0"rtpà  )  oifeau  célèbre  dans  les 
Poètes.  La  Colombe  éioit  l'oifeau 
de  Vénus*  Cette  déeflfe  la  portoit 
ik  la  main.  Elle  Tattachoit  à  (qH 
char  -y  elle  prenoit  fa  forme.  Jupî<^ 
rer  fut  nourri  par  des  Colombes  , 
fable  dont  l'origine  refl)?mbfe  à 
celle  de  beaucoup  d*atrires  i  elle 
vient  de  ce  qu'en  Phéniciem  le  mot 
Colomht  fîenifie  prêtre  ou  eurete. 

Il  eft  rait   mention   de  deux 
Colombes  fameufes  ;  l'une  fe  ren* 
dit  à  Dodone ,  oîi  elle  donna  la  ^ 
vertu  de  rendre  des  oracles  à  un     yers  : 


CD 

chêne  de  prédileâion  ;  l'autre  s'en 
alla  en  Libye ,  oii  elle  fe  plaça  en- 
tre les  cornes  d'un  bélier  >  d'où  elle 
publia  fes  prophéties.  Celle -et 
etoit  blanche  »  l'autre  étoit  d'or. 
La  Colombe  d'or  »  qui  donnoit  le 
don  de  prophétie  aux  arbres,  ne 
le  perdit  pas  pour  cela  ;  elle  étott 
perchée  fur  un  chêne  ;  on  loi  facrU 
fioit  ;  on  la  confultoit ,  &L  (es  prê« 
très  vivoient  dans  Tabondance. 
Ce  fut  elle  qui  annonça  à  Hercule 
fà  fin  malheureufe.  La  Colombe 
étoit  le  feul  oifeau  qu'on  laiflat 
vivre  aux  environs  du  temple  de 
Delphes. 

Après  la  mort  de  Sémiramis  » 
on  publia  qu'elle  s'étoit  envolée 
fous  la  figure  d'une  Colombe  ;  & 
dès- lors  les  Colombe^  furent  con» 
facrées  parmi  les  Aflyriens ,  qui 
les  portèrent  dans  leurs  enfeignes. 
C'eftàcerefpeâpources  oifeaux 
peints  dans  les  étendards  des  AiTy- 
riens  «  que  fait  allufîon  l'Écriture 
fainte  dans  Tendron  où  il  eft*  dit  : 
Fugiie  âfaàeglddii  Columha* 

Les  habitans  d'Afcalon  avoknt 
un  fouveraîn  refpeâ  pour  Tes  Co- 
lombes.  Ils  n'ofoient  ni  en  tuer  ni 
en  manger ,  de  peut  de  fe  nourrir 
de  leurs  diesx  mêmes.  Philon  af- 
iure  qu'il  avoit  vu  dans  cette  ville 
nn  nombre  infini  de  Colombes 
qu'on  nourrifloir, &  pour  lefquellss 
on  avoît  une  vénération  particu- 
lière. Tibulle  a  très^henreufemenc 
vxprimé  ce  refpeâ  des  Syriens 
pour  les  Colombes,  dans  ces  deux 


(j)  Myth.  par  M.  PAbb.  Ban.  Tom. 
I.  p.  JS4.  4SB.  T.  ni.  p.  S4»  55 .  144» 
MS*  Amiq.  expl.  par  D.  Bem.  de 
Monif.  Tom»  I,  p/  4i ,  i68«  Tom,  It  p. 


157.  Mém.  de  PAcid.  des  Infcrîpt.  & 
Bell.  Lett.  Tom.  III.  p.  188  •  1^5.  T.  Y. 
3f  >  36.  Tom«  XIV.  p«  6| »  64. T.  XVIU 
pa«.  $8. 


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co 

^uid  referam  ,   ut  volitct  crehras 
inta^aper  urbes 

^Iba  Palajlino  fanSa  Columba 
Syro. 

.  Si  la  Gilombe  étoit  en  fi  gran- 
de vénération  chez  quelques  na-. 
fions ,  il  s*en  t^ouvoit  d'autres  qui 
^voient  des  idées  biep  difFérei^tes 
aa  fu  jet  de  cet  oifean«  Les  Perfes , 
par  eiemple  >  regardoient  (ur  tout 
les.  Colombes  blanches  comme 
des  oifeaux  de  mauvais  augure  » 
ils  les  détefloient.  Perfuadés4]ue  le 
ibleilles  avoir  en  horreur ,  ils  n^en 
IbufFroient  point  danrleur  pais»  du 
inoins  à  ce  que  raconte  Hérodote* 
.  Archytas  de  Tarepte  avoit  fait 
tine  Colombe  de  bois ,  fi  arcifte- 
ment  travaillée,  qu'elle  voloit  pen- 
dant un  te^s  Umité ,  après  quoi 
ieille  perdoit'  Ton  mouvement ,  ju^ 
qu'à  ce  que  la  macbine  fût  rernoo* 

.  COLOMNE ,  Columna  ,  {a) 
«7WAM  ,  terme  que  Vitruve  dérive 
de  Celumen  ,  appui ,  feûtîen.  L'on 
entend  par  Coloo^ne  nne  efpece 
de  cylindre, qui  diâfere  du  pÛier, 
en  ce  que  la  Cobmne  diminue  à 
fon  extrémité  fupéfieureen  forme 
de  cône  tronqué  ,^  que  le  pilier 
efi  élevé  parallèlement. 

Les  Colomnes  fervirentd'abord 
de  monumens  hi^oriques.  Nous 
lifons,  en  effet,  dans  Jofephe, 
que  les  enians  de-Seth  ayant  ap* 
pris  d'Adam  que  le  monde  péri- 
roit  par  l'eau  &  par  le  ieu ,  S( 
craignant  que  la  icienc^  de  l'Af* 
trologie  où  ils  airoient  fait  l»eau« 


C  O  50} 

coup  de  progrès ,  ne  fe  perdit 
avant  que  les  honimes  euflent  en 
le  tems  de  s'eninûruire  ,  bâtirent 
deux  Colomnes ,  Tune  de  brique, 
l'autre  de  pierre ,  fur  lefquellef 
ils  gravèrent  les  connoiiiances 
qu'ils  avoient  acquifes  9  afin  que  fi 
le  déluge  ruinoit  la  Colomne  de 
brique  ,  celle  de  pierre  fubfiftât , 
pour  tranfmettre  a  la  poflérité  la 
mémoire  de  ce  qu'ils  y  avoient 
écrit  ;  &  Jofephe  ajoute  que  cette 
Colomne  fe  voyoit  encore  de  foa 
tems  dans  la  Syrie,  A  la  vérité  » 
ce  fait  ne  laifle  pas  d'être  contre* 
dit,  parce  qu'il  n*efi  p^s  certaja 
que  les  enfans  de  Seth  aient  ha- 
bité la  Palefiine  ;  mais  ,  cela  prou- 
ve toujours  que  dès  ce  tems- là ,  il. 
y  avoit  queloue  manière  de  gra« 
vure  ou  d'iolçription. 

Parmi  les  Héoreyx ,  on  mettoir 
des  Colomnes  à  tous  les  héritages} 
&  il'  étoit  défendu  de  les  âter.  El- 
les marquoient  aufli  les  limites  des 
provinces  ii  des  Étuts  ;  témoin  1^ 
fameufe  Colomne  que  Théfée  fi| 
^iger  dans/iiHiitie  de  Corinthe^ 
pour  diftingiier  îlonie  du  Pélo- 
ponnèfe.  Çyrus  en  mit  une  fur  les 
frontières  de  la  Phrygie  &  de  la 
Lydie;  &  les  Perfes  en  firent  au-^ 
tant  pour  marquer  le  territoire  de 
la  ville  de  Magnéfie. 
,  On  écrivoit  fur  des  Colomnes 
les  ioix  &  les  coutumes  des  pais  r 
(l  l'on  ne  voit  que  {^ycurgue,  qui 
ne  trottlut  pas  fe  foumettre  à  cet 
yfage,  pour  contraindre  lesliacé-* 
4émoniens  ^  les'âppietfdre  par 
cœur.  On  y  écrivoit  la  ttaité»  Sk 


(4)  Jofcpb.  dt  Antiq.  Judaïc  p.  7, 8.  ÎInfcrîpi.  &  Belh  Letf.  Xoœ^  IV,  ptjç, 
utiq.  xpliq.  pzt  D.  Bcm.  de  Moatf.  384.  Tom.  VI.  p.  9  »  9P  k  4S*  X.  VU.  o» 
om. llle.  p,  ()4.  M^m. de  l'Acad.  des  1 1^.  T,  XU.  p.  ii/.  T.  XllL  p.  473;^  ^' 

1  î  iv 


Antiq 
Xom 


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504         c  o' 

les  alliances;  &  au  rapport  de 
Thucydide,  c'éroii  une  pratique 
généralement  établie  dans  les  plai- 
nes d'Olympe  ,  dans  llfthme  , 
dans  TAttique,  &  par  tout  ail- 
leurs. Dans  riile  de  Crète,  on 
voyoit  écrits  fur  des  Colomnes  , 
les  rites  qu'obfer voient  les"Cory- 
bances  pour  célébrer  les  fêtes  de 
Cybele  ;    6c  Diodore  de  Sicile 

f)arle  d'une  Colomne  érigée  à 
'honneur  d'Ifis  6t  d'Ofiris  ,  avec 
ène  Infcription  en  lettres  facrées 
des  Égyptiens.  On  voit  par. là 
que  l'HîAoire  ancienne  fe  lifoit 
par  tout'eii  caraâères  durables. 
On  ffiiibitaufn  pour  rordinaire» 

Eofer  une  Colomne  fur  le  tom- 
eau.  Homère  nous  Tapprénd  en 
plufieurs  endroits  de  Tes  Ouvra- 

fes ,  il   fufHt  d'en  rapporter  un. 
W  qu'une  Colomne  qui  demeure 
inébranlahie  fur  un  tombe aUk 

On  joignoit  quelquefois  à  ce 
tippe  ou  Colomne  ,  les  marques 
de  la  pVofeilion  de  celui ,  à  qui 
on  confacroit  le  tombeau  ;  ainfi 
voyoit-on  une  rame  fur  celui  d*Él- 
pénor.       ' 

L'on  érigeoit  encore  des  Co- 
îomnes  aux  vainqueurs ,  aux  £m- 
{)ereurs ,  ornées  de  bas -reliefs  &L 
de  fculptures  qui  repréfentoient 
'  leurs  exploits.  Telle  eft  la  Colom- 
ne Trajahe  ,  monument  élevé  à 
)a  gloire  de  Trajan.  On  en  met- 
toit  encore  fur  les  grands-chemins 
de  mille  en  mille  pas ,  qu'on  nom** 
moit  pour  cette  raifon  Colomnes 
tnilliaires.  Nous  parlerons  ci-après 
de  ces  derniètes  Colomnes. 
,  La  maifon,:de  campagne  des 
Gordiens ,  fituie  fur  la  voie  Pré- 
neftlna/  avoir  un  téuaflyie,  ou 


on  grand  '  quarré ,  enfermé  3  de 
Colomnes  au  nombre  de  deux 
cens  ,  toutes  d'une  égale  hau- 
teur ;  cinquante  defquelles  étoient 
CaryfHennes ,  cinquante  Clau- 
diennes  ,  cinquante  de  Synna- 
de  t  &  cinquante  de  Numidîe. 
En  général,  on  voyoit  dans  les 
appartemens  des  Seigneurs  du 
premier  rang,  de  grandes  Co- 
lomnes de  marbre ,  dont  les  cha- 
piteaux étoient  dorés,  &  quel- 
quefois des  Colomnes  toutes  do- 

COLOMNE  LÉGALE.  C'é- 

toient  chez  les  Lacédémoniens  des 
Colonines  élevées  dans  les'  places 
publiques ,  où  étoient  gravées,  fur 
des  tables  d'airain ,  les  loix  fonda- 
mentales de  l'État. 

COLOMNE  ANTONINE, 
Columna  Antonina.QttxtCoXota" 
ne  fut  élevée  à  Rome  en  l'hon- 
neur de  M.  Aurele  Antonin.  Elle 
eft  creufe.  On  a  pratiqué  en  de-- 
dans  un  efcalier  de  106  marches. 
Elle  a  175  pieds  de  hauteur  ,  me- 
fiire  ancienne,otr  z6a,  mefure  Ro- 
maine d'aujourd'hui  ;  cinquante- 
fix  petites   fenêtres  l'édairotent. 
Le  tems  &  le  feu  Tavoîent  beau* 
coup  endommagée.  On  la  répara 
fous  Sixte  V.  Ce  Pontife  fit  {4acer 
au  haut  une  ftatue  de  Saint  Paul , 
fondue  en  bronze  &  dorée ,  or- 
nement affez  barbare  ;  car ,  quy 
a-t*il  de  plus  niativais  goût  »  poar 
ne  rien  dire  de  pis  ,  que  la  ftatue 
d'un  Apôtre  du  Chriftianifme  au 
haut  d'un  monument  chargé  des 
aôiotis  militaires  d'un  Empereur 
Payen  ?  On  y  voit  la  légion  ful- 
minante ;  un  orage  épouvantable 
conferve  Tarmée  Romaine  près- 


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co 

de  pérîr  de  foif ,  &  niet  en  fuît€ 
1  ennemi.  Elle  eft  placée  en  de-çà 
&  à  droite  Deila  ftrada  del  Corfo. 
On  y  entre  par  une  porte  prati- 
quée à  fon  piédeflal  ;  une  plate- 
forme quarrée  portant  une  grille 
de  fer  jdi'  fert  de  chapiteau. 

COLOMNE  BELLIQUE  , 
Columna  BelUca  ,  {a)  petite 
Colomne  placée  devant  le  temple 
de  Bellone  ,  à  Rome,  derrière  le 
cirque  Flaminien ,  oh  e(l  mainte- 
nant le  couvent  di  Tor  de  SpecchL 
Quand  on  dédaroit  la  guerre  à 
des  peuples  ,  le  Conful  lançoit  de 
de/Tus  ou  contre  cette  Colomnè 
un  dard  vers  la  contrée  qu*ils  ha- 
bitoient. 

COLOMNE  DE  CÉSAR  , 
Columna  Cafaris.  Elle  étoit  de 
tnarbre  de  Numidie;  elle  avoit 
vingt  pieds  de  hauteur.^  on  Tavoit 
élevée  in  foroRomano  ^  à  l'hon- 
neur de  Jules  Céfar.  On  y  lifoit 
rinfcripcion  Paraiti  Foiria.  Le 
peuple  Tavoit  en  tetJe  vénération, 
qu'il  y  faifoit  des  facrifices  ,  qu'il 
y  terminoit  Tes  différends  ^  &  qu'il 
y  juroit  par  Céfar.  E>olal>ella  la  fit 
abattre ,  &  Cicéron  l'en  loue.  Il  y 
en  a  qui  prétendent  que  ce  ne  fut 
.dansjles  commencemens ,  qu'un 
autel ,  que  le  peuple  &  le  faux 
Marins  avoienc  fait  conftruire  , 
que  Marc-Antoine  éleva  la  Co- 
lomne fur  cet  autel ,  &  que  Tlnf- 
cription  étoit  Parenu  optimè  me^ 
rUo. 

COLOMNE  LACTAIRE  , 
Columna  Laâaria.  Cette  Colom-^ 
n^éîdit  dans  la  onzlèine  région  de 
Rome.  Toutes  les  mères  y  por- 


C  O  50J 

toient leurs  enfans  par  fupeffliiion; 
quelques-unes  les  y  laiiloient  ex- 
pofés  par  indigence  ou  par  inhu- 
manité. On  appelle  maintenant  le 
lieu  de  cette  Colomne  ,  la  Piazza 
Montanara. 

COLOMNE  MÉNIENNE, 
Columna  Mania»  On  voyoic  cette 
Colomne  dans  la  huitième  région. 
Elle  fut  éjevée,  félon  quelques- 
uns,  à  rhonneur  du  conful  Ma- 
nius  ,  après  une  victoire  rempor-? 
téefur  les  Antiates  ;  félon  d  autres, 
par  un  certain  Maenius ,  qui  s'écoit 
réfervé  ce  droit-  en  vendant  fa 
maifon  aux  cenfeurs  Caton  & 
Flaccus  ,  afin  de  voir  de- là  le 
combat  des  Gladiateurs.  Comme 
la  forme  en  étoit  particulière  ,  on 
donna  dans  la  fuite  aux  édifices 
femblables  le  nom  de  Maniana  » 
dont  on  a  fait  le  nom  Mignani.  Il 
eA  fait  mention  de  deux  Colomnes 
Maeniennes  ;  c'eft  au  pied  d'une 
de  ces  deux  Colomnes  que  les 
1  riunivirs  ,  fuinommés  Capitales^ 
jugeoienc  les  voleurs  &  autres 
bandits. 

COLOMNES  ROSTRÉES, 
Columna  Roftrata.  Cétoit  -  là 
qu'on  attachoit  les  éperons  des 
vaifleaux  pris  fur  l'ennemi.  La 
première  fut  élevée  à  Toccafion  de 
la  viâoire  navale  de  C.  Duilius  ^ 
fur  les  Carthaginois.  Elle  étoîc  ' 
dans  le  marche  Romain  ;  on  la 
trouva  en  1 260  près  de  Tare  Sep- 
timien.  Le  cardinal  Alexandre 
Farnèfe  h,  fit  porter  au  Capitole  ; 
^lle  efl  de  marbre  blanc.  Augufle 
en  avoit  fait  confiruire  au  même 
lieu  quatre  autres  femblables ,  da» 


Ci)  Antiq.  expl.  p9r  D,  S«rti.  de  Montfl  X«mt  U,  p.  -fi^ 


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5o6  C  O 

éperons  des  narires  qui  furent  pris 
fiir  Cléopâtre. 

COLOMNE  TRAJANE, 
Columna  Trajana*  Voytz  Trajane. 

COLOMNE  ITINÉRAIRE. 
Ceft  la  même  chofe  que  la  Co- 
lomoe  miUiûre  qui  efi  ci  -  après. 
Voyt^  cependant  Ifinérarre. 

COLOMNE  MILLIAIRE. 
Columna  Milliana.  (a)  On  fçaii 
cfue  les  Romains  plaçoient  de  mil- 
le en  mille  pas  for  les  routes  où  ils 
conflruifoieàt  des  chauiTées  »  des 
Colomnes  de  pierre  fur  leTquelles 
on  gravoit  au  -defibus  do  nom  de 
l'Empereur  qui  les  avoit  hk  éle- 
Ter ,  quelle  étoit  la  diftance  de 
chaque  Colomne  à  la  ville  où  cette 
route  xommençoit.  Cet  uiàge  qui 
,  étort  ancien>avoit  lieu  fur  toutpour 
les  chemins  conftruits  dans  les  pais 
fitués  au  nord  &  à  l'occident  de  TI- 
kalie  ,  dans  Tlllyrie ,  dans  la  Gaule 
&  dans  r£(pagne*  On  trouve  en 
France  plpbeurs  de  ces  Colom- 
nes^ mais  avec  cette  fingularité 
qui  ne  fe  voit  dans  aucun  autre 
paîs  f  que  les  diftances  itinéraires 
font  quelquefois,  marquées  par 
le  nombre  des  lieues ,  leugis ,  & 
non  par  celui  des  milles.  Ces  for- 
tes de  Colomnes  ne  fe  rencon- 
trent que  dans  la  partie  des  Gan- 
les  ,  nommée  par  les  Romains 
Comata  ou  Chevelue^âc  dont  Cé- 
far  (it  la  conquête  ;  dans  tout  le 
refte,  on  ne  voit  que  des  Co- 
lomnes milliaires. 

Qoelquefon  dans  le  même 
canton  &  fous  le  même  Empereur» 
la^diftance  d'une  dation  à  l'autre 


co 

txoix  exprimée  à  la  Romaine  tt 
à  la  Gauloife  ,  c'eft-àdire,  ea 
milles  &  en  lieues  »  noq  pas  à  la 
fois  fur  la  même  Colomne ,  mait 
fur  des  Colomnes  différentes. 

Les  Romains  marqooient  les 
.  milles  par  ces  deux  lenres  »  M.  P« 
avec  un  chiffre  qui  marquoit  le 
nombre  des  milles  ;  par  exemple  , 
M.  P.XXn.  M'dl'm  pajfutm  vi- 
guui  duo.  Les  Gaulois ,  chez  qui 
on  comptoit  par  lieaes,  exprî«' 
noient  les  diitances  par  la  lettre 
L.  avec  le  nombre  des  lieues; 
ainfi,  dans  les  Colomnes  mil* 
liaire^  découvertes  en  France  » 
L.  VIL  ftgntfie  leuga  ou  Uuc» 
feptem ,  (êpt  lieues. 

COLOMNE,  Cdumna.  (^ 
Ce  terme  fe  trouve  affez  fréquem- 
mem  dans  les  Écritures.  Job  dit  : 
//  remue  la  terre  de  fa  place  ;  6t 
fes  Colomnes  font  ébranlées*  El 
ailleurs  :  Les  Colomnes  du  cid 
frémiffent ,  .  6*  elles  tremblent  à  là 
moindre  wtarqm  de  fon  indigna* 
tion.  On  lit  dans  un  Pfeaume  :  La 
terre  s*eft  fondue  avec  tous  ceux 
qui  l'hatitent  ;  mais^  j'en  affer* 
mirai  les  Colomnes.  Ce  font  des 
expreffiont  méuphoriques  qui 
fuppofent  que  le  ciel  &  l^ter* 
re  font  comme  un  édifice  élevé 
de  la  main  de  Dieu ,  éubli  fur  fon 
fondement  6c  fur  fes  bafes  ;  cela 
paroit  par  les  paroles  de  Job.  Ou 
étiei'vpus  ,  lorfyue  je  jettois.  les 
fondemens  de  la  terre?  Dites-le^ 
fi  vous  ave\  t intelligence.  Puif" 
que  vous  éteJ  fi  éclairé  ,  dites -moi 
qui  en  a  réglé  toutes  les  mefures  » 


Co  Mém.  de  PAcad.  àe*  Infcript.  &I  (*)  Job.  c.  9.  v.  6,  c.  i5.  v.  11.  c. 
Bell.  Lctt.  To^  XIV.  p.  150.  T.  XXl.  [  î8.  v.  4.  &  /#f.  Pfalm.  74.  ?.  4.  Epift^ 
p.  65,66.  ladGalacc»».  Vt9« 


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co 

ç»  qui  a  étendu  fur  elle  le  niveau  ? 
Sur  quoifes  bafes  font^elles  affet' 
mies  ,  ou  qui  en  a  pofé  la  pierre 
angulaire?  Les  Anciens  croyoient 
que  ia  terre  étoit  plate  »  &  que 
les  cietix  portoient  fur  Tes  extré- 
mités. 

Saint  Paul,  dans  fon  É pitre  aux 
Galates»  dit  que  Jacques,  Cé- 
phas  ,  6c  Jean  ,  étoient  reconnus 
pour  les.  Colomnes  de  TÉglife; 
c*cft-à  dire  ,  qu'ils  étoient ,  Tap- 
pui ,  le  fou  tien ,  la  force  »  l'orne' 
ment  de  l'Êglife. 

Nous  nous.difpenferons  de  citer 
ici  une  multitude  d'autres  pafTa- 
ees  »  tant  de  l'Ancien ,  que  du 
Nouveau  Tedannent,  où  le  mot 
Colomne  efi  pris  dans  un  fens 
métaphorique. 

COLOMNE  DE  NUÉE  , 
COLOMNE  DE  FEU,  {a) 
Columna  nubis  ^  Columna  ignis^ 
C'eû  cette  Colomne ,  qui ,  obf* 
cure  pendant  le  jour ,  lumineufe 
pendant  la  nuit,  fervit  de  figne  au 
peuple  Juif  pendant  fa  marche  au 
forttr  d'Egypte ,  &  pendant  les 
quarante  ans  de  (ba  féjour  dans 
ledéiêrt. 

COLOMNES  DU  TA- 
BERNACLE ,  Columna  Atrii , 
piliers  fur  lefqueb  les  rideaux  fu- 
rent tendus  autour  du  tabernacle. 
Les  uns  difent  qu'ils  étoient  de 
bronze  »  d'autres  de  bois.  Il  y  en 
a  voit  vingt  du  côté  du- nord,  vingt 
du  côté  du  midi ,  dix  à  l'ocddenc , 
dix  à  l'orient  ;  ce  qui  fait  foixante  ; 
à  moins  qu'en  comptant  les  pilierf 
des  angles  pour  deux  »  cela  ne  r^ 


C  O  507 

duife  le  nombre  à  cinquante- ûx. 
Ces  piliers  ayoient  des  appuis 
d'airain. 

COLOMNE  ,  Columna  ,  {b) 
terme  d'architeâure.  Chez  les 
Grecs  ,  un  ordre  d'architeflure  ^ 
étoit  compofé  de  Colomnes  & 
d'un  entablement.  Les  Romains 
ont  ajouté  des  piédeftaux  fous  les 
Colomnes  de  la  plupart  des  or* 
dres  ,  pour  en  relever  la  hauteur, 

La  Colomne  eft  un  pilier  rond.» 
fait  pour  foû^enir  ou  pour  orner 
un  bâtiment. 

Toute  Colomne ,  Ç\  l'on  en 
excepte  la  Dorique ,  à  laquelle  les 
Romains  ne  donnoient  point  de 
bafe,  eft  compofée  d'une  bafe, 
d*un  fût  6c  d'un  chapiteau. 

La  bafe  eft  la  partie  de  la  Co- 
lomne qui  eft  au-defTous  du  fut  « 
&  qui  pofe  fur  le  piédedal ,  lorf- 
qu'il  y  en  a.  Elle  a  une  plinthe  « 
qni  e(l  une  pièce  plate  &  quarrée 
comme  une  bri<|ue  ,  appellée  en 
Grec  Tx.Wo^  ;  &  des  moulures , 
qui  repréfenent  des  anneaux , 
dont  on  Ibit  'e  bas  des  piliers  pour 
les  empêcher  de  fe  fendre.  Ces 
anneaux  ^  nomtnent  tores  quand 
ils  font  pos ,  &  aûragaies  quand 
ils  font  petits.  Les  tores  laiiTenc 
ordin^^ement  entr'eux  des  inter- 
valle creufés  en  rond ,  c^ue  l'on 
Qor<ne  fcocie  ou  trocUles. 

i^e  fût  de  la  Coloihne  eft  la 
firtie  ronde  &  unie,  qui  s'étend 
iepuis  la  bafe  îufqu'au  chapiteau. 
Cette  partie  de  la  Colomne  eft 
plus  étroite  par  le  haut  que  par 
le  bas»  Il  y  a  des  Architeâes  qui 


(«)  Exod,  c.  13.  V.  fti  ,  4t,  1     f*)  ^oW*  Hîft,  Ane.  Tomt  V.  p.  jt». 


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5o8  C  O 

vcufçnt  que  ïes  CoFamnes  (oient 
plus  groftes  au  tiers  de  leur  hau- 
teur, qu'au  bas  de  leur  fut.  On  ne 
trouve  point  d'exemple  de  ce  fen- 
tinxeiK  dans  l'Antiquité.  D^àutres 
£azit  h  fût  de  la  même  grofTeur  du 
basa»  fiers,  &  le  diminuent  de- 
pots  le  tiers  jufqu'au  haut*  D*au* 
très  en6n  font  d'avis  dé  commen- 
cer la  diminution  dès  le  bas. 
•  Le  chapiteau  eft  ia  partie  fu- 
périearé  de  la  Colômne  qui  pofe 
ûnmédnteinent  fur  fon  fût. 

L^entabiement  eft  la  partie  de 
fordte  qui  eft  au-defTus  des  Co- 
iomnes^n  comprend  l'architrave» 
ù  frife  &  la  corniche. 

L'arcbkrave  repréfente  une 
poutre,  &  porte  immédiatement 
fit  les  chapiteaux  des  Colonuies. 
Les  Grecs  rappellent  épifty le« , 

La  fri(é  eà  l'intervalle  qui  fe 
troure  entre  Varchirrave  6c  la 
corniche.  Elle  r^çréfente  le  f5lan- 
cber  éa  bâtiment. 

La  corniche  eft  le^ouronnement 
de  ror<lre  entier*  £l)e  eft  compo- 
lee  de  f^ufieurs  moilures  ,  qui , 
ÉûQaat  les  unes  fur  les^iutres^peu- 
veiit  mettre  Tordre  à  tabri  ée$ 
cau(;L  du  toit. 

Le  piéiieftal  eft  la  partKla  plus 
Itaile  de  l'ordre,  C'eft  tin\corps 
qnar ré ,  qui  renferme  trois  parties  ; 
l^avoir ,  te  ibc ,  qui  porte  fur  l\ire 
ou  pavé  ;  le  dé ,  qoi  eft  fur  le  Ù>^ 
la  c^matfe ,  qui  eft  la  corniche  cK 
pfédeftal,  &  fur  laquelle  la  CoA 
iottmç  eft  affife. 

Les  Architeâes  ne  conviennent 
pas  emr'eux  fur  les  proportions 
«!e$  Cobmnes  avec  l'entablement 
£(  les  piécieftaax.  En  fui vant- celle 
que  jpiropofe  Vignole  >  lorfque  Ton 


co 

voudra  feîre  pn  ordre  entier  arefC 
piédeftaux  dans  une  hauteur  don* 
née ,  on  divifera  cette  hauteur  en 
dix- neuf  parties  égales'  pour  en 
donner  douze  à  la  Colomne  avec 
fa  bafe  &  fon  chapiteau  ,  trois  i 
l'entableoient ,  &  quatre  au  pié- 
deftal.  Mais ,  Ci  l'on  veut  avoir  un 
ordre  fans  piédeftal^  on  divifera 
la  hauteur  donnée  en  quinze  par- 
ties feulement  ^  &  l'on  en  donne- 
ra douze  à  la  Colomne ,  &  trois  à 
l'entablement. 

Ceft  fur  le  diamètre  du  bas  da 
fût  des  Colomnes  que  toutes  le» 
parties  des  ordres  font  réglées. 
Mais ,  ce  diamètre  n'a  pas  la  mê'* 
me  proportion  avec  la  hauteur 
de  la  Colomne  dans,  tous  les  or* 
dres. 

Le  demi  diamètre  du  bas  du 
fût  fe  nomme  module.  Ce  module 
fert  d'échelle  pour  mefurer  les 
moindres  parties  des  ordres.  Plu- 
fieurs  Archiceâes  le  divifent  en 
trente  parties;  de  ibrte  que  le  dia- 
mètre en  contient  foixante»  qu'on 
peut  appeller  minutes. 

La  différence  qui  fe  trouve  en- 
tre le  rapport  des  hauteurs  de% 
Colomnes  avec  leurs  dian^tres  , 
entre  leurs  bafes ,  leurs  chapi*. 
teaux  ,  6c  leurs  entablemens ,  ror* 
me  la  différence  des  cinq  ordres 
'  d'architeftqre.  Mais ,  c*eft  princi- 
palement   par    leurs    chapiteaux 
qu'on  peut  les  diftinguer  ;  excepté 
le  Tofcan,  que  Ion  pourroit  con- 
\fondre  avec  le  Dorique ,  fi  l'oi^  ne 
>onfidéroit  que  leurs  chapiteaux. 
\es  Colomnes  Doriques  &  Tof- 
c^Hs  n'ont  à  leurs  chapiteaux  que 
'  ^®*\>uluresen  forme  d'anneaux, 
&  P^deffus  une  pièce  plate  6£ 


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ço 

^narrée ,  que  Ton  nomme  tailloir^ 
Mais  t  le  Dorique  eu  aifé  à  di(lin<- 
guer  du  Tofcan  par  la  frife.  Dans 
Fordre  Tofcan,  la  frife  eft  unîe,jSc 
dans  le  Dorique ,  elle  eft  ornée  de 
trîglifes,  qui  font  des  boflages 
quarrés  longs ,  lefquels  imitent 
aflez  bien  les  bouts  de  plufieurs 
poutres  qui  porteroient  fur  Tarchi^ 
trave  pour  former  un  plancher^ 
Cet  ornement  eft  afFeâé  à  l'ordre 
Dorique ,  ôc  ne  fe  trouve  point 
dans  les  autres  ordres* 

Le  chapiteau  Ionique  eft  aifé  à 
reconnoitre  par  fes  volutes ,  qui 
font  des  enroulemens  fpiraux  qui 
ibrtent  de  delTous  le  tailloir. 

Le  chapiteau  Corinthien  eft 
orné  de  deux  rangs  de  huit  feuilles^ 
chacun  >  &  de  huit  petites  volu« 
tes ,  qui  fortent  d'entre  les  feuil- 
les. 

Enfin»  le  chapiteau  Compofite, 
eft  compofé  du  chapiteau  Corin- 
thien &  du  chapiteau  Ionique.  Il 
y  a  deux  rangs  de  huit  feuilles , 
&  quatre  grandes  volutes ,  qui 
parpiftent  for  tir  de  deffous  le  uil- 
loir. 

COLOMNES ,  ColumnéP.  (a) 
Pline  parlant  de  l'ifte  de  Cerné , 
que  l'on  croit  être  Tifle  de  Mada« 
gafcar,  dit:  w.Éphorus  foûtient 
w  qu'en  faifant  voile  de  la  mer 
»  Rouge',  on  ne  peut  y  arriver  à 
%f  caufe  des  grandes  chaleurs  au 
»  de-là  des  Colomnes.  C'eft  ainfi 
»»  qu'on  appelle  de  petites  iftes.  u 
Le;P.  Hardouin  croit  que  ces  pe- 
tites ifles  font  <:elles  de  Mafcaren^ 
has  ,  qui  font  au  nord  de  Mada- 

U)  riin,  Tom.  I.  P'  U7* 


C  O  509 

gafcar ,  an  nombre  de  <!x  bu  lèpt, 
•  prelque  fous  la  ligne. 

COLOMNES  D'HERCU- 
LE ,  Columna  Hcrculis*  {b)  C*eft 
le  nom  que  les  anciens  Géogra- 
phes 6c  Hiftoriens  ont  donné  aux 
deux  montagnes  de  Calpé  ôc  d'A<- 
byla  ,  qui  forment  le  fameux  dé- 
troit de  Cadis  ou  de  Gibraltar  ; 
l'une  du  côté  de  l'Europe  dans 
rAndaloufie,  province  d'Efpagne; 
l'autre  du  côté  de  l'Afrique ,  aa 
païs  de  Tanger  en  Barbarie.  Ces 
deux  montagnes  ont  été  aitaS 
nommées  «  félon  le  fentimenc  de 
plufieurs  Auteurs ,  parce  qu'étant 
hautes  6c  efcarpées  ,  elles  paroif- 
fent  de  loin  à  ceux  qui  viennent 
du  grand  Océan  pour  entrer  dans 
la  Méditerranée,  comme  deux 
Colomnes  ;  ou  parce  qo*Hercuk, 
étant  parvenu  jufqu'à  ce  lieu -là, 
&  croyant  qu'il  n'y  avoit  plus  de 
terres  vers  le  couchant' ,  y  pofa  , 
dit-on,  deux  grandes  Ck>lomne$9 
avec  ces  mots  pour  Infcnpitoa  : 
Non  ultra.  Sur  quoi  il  faut  remiir- 
quer  que  l'Amérique  ayant  comr 
mencé  à  être  découverte  du  tecns 
de  Ferdinand  &  d'Ifabelle ,  l'eqtt- 
pereur  Charles -Quint,  leur  fuc- 
ceiTeurau  royaume  de  Caftille  & 
d'Arragon  9  s'avifa  de  preiu!re  )e 
contre'-pied  de  cette  infcripâo0 
pour  fa  devife ,  plus  ultra ^  yoa- 
jant  faire  connoitre,  ou  qu'il  ayoît 
pouiTé  fes  conquêtes  plus  loia 
qu'Hercule»  ou  qu'elles  ne  dé- 
voient point  avoir  de  bornes. 

Il  y  en  a  qui  prétendent  que 
ces  Colomnes  lonc  de  grand  mon- 


1 


(*)  Tit.  Uv.  L.  XXr.  c.  43,  L,  XXÎII. 
c.  5i 


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5TO  CO 

ceaux  de  pierre  ,  qu'Hercule  fit 
élever  fur  le  rivage  ,  lefqueis  fe* 
font  tellement  affermis  ôc  accrus 
par  la  longueur  des  années  ,  qu'ib 
fe  voyent  de  fort  loin.  Les  Efpa- 
gnols  croyent  que  ces  Colomnes 
écoientfur  le  rivage  t>ccidenral  de 
rifle  de  Cadis  ,  pioche  la  ville  de 
ce  nom ,  oii  Ton  voit  encore  deux 
tours  nommées  par  les  habitans  , 
Colomnes  d'Hercule.  La  &ble 
ajoute  qu'Hercule  défit  en  ce  païs- 
U  Géryon  ,  &  lui  enleva  fes 
bœufs. 

COLON,  Colon,  K^^^ck, 
terme  de  Grammaire.  Ce  terme , 
qui  efl  purement  Grec ,  fignifie 
membre ,  &  par  extenfion  ou  mé- 
taphore y  membce  de  période  ; 
enfuite  %  par  une  autre  extenfion , 
quelques  Auteurs  étrangers  fe  font 
(ervis  de  ce  mot  pour  défigner  le 
(îgne  de  ponâuatton  qu'on  appel- 
le les  deux  points.  Mais ,  nos 
Grammairiens  Franco»  difent 
fimplement  les  deux  points ,  &  ne 
fe  fervent  de  Colon  que  lor(qu'il$ 
citent  en  même  tems  le  Grec. 
C'eft  ainfi  que  Cicéron  en  a  ufé  : 
in  membra  quadam  qua  k^>ci 
Çraci  vocant ,  difpertiebat  ora^ 
tionem.  Et  dans  un  autre  endroit  : 
Vcfcio  cuft  chm  Craci  ni/niuecrd 
&  KûùTiet  nominent ,  nos  ,  non  rtBè, 
ineifa  &  membra  dicamus, 

COLONA ,  Colona,  Ko^olra  » 
(a)  nom  d'une  éminence.  Vaye^ 
jBacchus  Colonate. 

COLONE,  Colone,  a)  lieu 
fitué  dans  le  territoire  de  Pariane. 


{«)  PauC  p.  185* 

(b)  Strab.  p.   ^89. 

(c)  Panf.  p.  58. 
{d)  Strab.  p.  589. 


CO 

Le  texte  de  Strabon  porte  Lico^ 
lone  ;  &  les  manufcrits  Ufent  Hé- 
liocolone. 

Le  poëte  Apollonius  fait  mefl- 
tion  d'un  écueil  de  même  nom , 
qu'il  place  fur  le  rivage  du  Bof* 
phore  de  Thrace  ,  vis-à-vis  des 
Cyanées.  Pierre  Gilles  dit  qu*oa 
rappelle  préfentement  Cromnioa 
par  corruption. 

Il  y  avoit  auffi  un  écueîl  de 
même  nom  dans  la  rivière  deRhe- 
ba  en  Bithynie;  &  enfin,  un  pro* 
montoireprès  du  fleuve  Lycus, 
félon  le  Scholiafle  d'Apollonius. 

COLONE  ÉQUESTRE  , 
Colonus  EqueflrU ,  Koa^joç  tinn^* 
(c)  On  appelloit  ainfi  une  petite 
éminence  qui  étoit  à  Athènes.  Ce 
fut  en  cet  endroit  qu'Œdipe  vint 
pleurer  fes  malheurs ,  félon  ceux 
qui  f^  veulent  point  s'en  rappor- 
ter à  Homère.  On  doit  remarquer 
que  c'efl  de-là  que  .cette  tragédie 
de  Sophocle  1  intitulée  adipe  Co* 
lone  4  6(  qui  a  été  fi  bien  traduite 
en  François  par  feu  M.  Boivin  ^ 
a  pris  fpn  nom. 

COLONES,  Colona,  Xo><?- 
pait  (i)  ville  de  TAfie  mineure, 
fituée  au-deflus  de  Lampfaque. 
C'étoit  au  rapport  de  Strabon  , 
une  colonie  des  Miléfiens.  Ce 
Géographe  met  Colones  vers  le 
milieu  du  territoire  de  Lampia^ 
que. 

COLONES,  Cohna,  Km^ 
f«i  y  {e)  autre  ville  de  TAfie  mi- 
neure ,  qui  étoit  fituée  dans  la 
Troade ,  près  de  Tifle  de  Leuco- 

(«)  Strab,  p,  589  »  ^4'  Corn.  Nep. 
'tt\  Pauf.  c.  î".  Plin.  T.  I.  p.  »8i.  Xçnoph. 
pag.  4^5.  Pauf.  p.  6}4. 


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co 

phrys.  Strabon  la  place  fur  k  bord' 
de  THsllerpont ,  à  cent  quarante 
ftades  dllium  ;  6c  il  ajoute  que 
ï'on  difoh  que  Cygnus  étoit  de 
cette  ville.  Paufanias  parle  d*une 
manière  plus  affirmative  ;  car  ^  il 
aifure  que  Cygnus  régna  à  Colo- 
«es,  Strabon ,  dans  un  autre  en- 
droit ,  nous  apprend  que  Colones 
avoir  appartenu  à  Dia. 

Cornélius  Népos,dans  la  vie  de 
Paufanias  ,  dit  que  ce  Général  des 
Lacédémoniens ,  réfolu  de  ne  plus 
mettre  le  pied  dans  Sparte  »  avoit 
établi  ion  féjour  à  Colones  «  & 
gue  c'eft-là  qu'ij  formoit  des  def* 
ieîns  auffi  funeftes  pour  lui  que 
pour  fa  patrie. 

li  y  a  des  éditions  de  Corné- 
lius Népos ,  qui  portent  Golones, 
pour  Colones.  Une  autre  obferva- 
tion  ,  c*e{l  que  cet  Auteur  ne  dît 
point  que  Colones  fût  une  ville  , 
mais  feulement  un  lieu.  Colonas  » 
qui  Iqcus  in  agro  Troade  eft  9  fc 
contulerat,  Pline  lit  Colone  en  ûn- 
gulier.  Xénophon  fait  auffi  men- 
tion de  cette  ville  ,  &  la  nomme 
Colones  au  pluriel ,  comme  Stra- 
bon &  les  autres  anciens  Au- 
teurs. 

COLONES .  Colona  ,  Kot^^^ 
fKt^  (a)  ville  d*Erythrée,  félon 
Anaximène ,  qui ,  au  rapport  de 
Strabon ,  en  connoiflbit  deux  au» 
très  du  même  nom.  L'une  étoit 
clans  la  Phocide ,  ^  Tautre  dans  la 
Theffalie. 

C^  Strab.  p.  ^^9. 

(*)  Mém.  de  TAcad.  det  Infcript.  & 
JkU.  tett.  T.  IV.  pag.  »7. 

Ctf)  Pauf.  p.  »8i.  Plut.  T.  I.  p.  %66. 

(4)  ^rab.  rag.  aî6.  RoH.  Hift.  Ane. 
^«  I.  p,  11$.  J,  V.  p.  81$.  Hiit.  Rom. 


CO  Tir 

COLONIA  ,  Cohnia  ,  '(  ^  ) 
étoit ,  félon  Tzetzès,  femme  d'O- 
riéus.  Il  y  a  des  Sçavans  qui  pré- 
tendent que  le  nom  de  Colonia 
convient  à  Sara  ;  6c  ils  le  dérivent 
du  Phénicien  Cala ,  torruit ,  torre^ 
ftcit  ,  combuffit  ,  affav'u  /frixit , 
duquel  on  a  fait  Coli  ,  polenta  ^ 
farina.  Au  participe  de  Cala  il 
faut  a  la  Chaldaïque  .,  coUo  ;  & 
avec  le  noun  paragogique ,  Co* 
Iton ,  d'où  Colon  ,  celle  qui  cuit 
du  pain ,  &  en  ajoutant  deus^  celle 
oui  cuit,  qui  fait  du  pain  pour  les 
oteoic. 

COLONIDES ,  Colonides,  (c) 
Kow^lli-  f  villle  du  Péloponnè/e 
dans  la  MeiTénie ,  étoit  fituée  fur 
une  hauteur  fort  près  de  la  mer* 
Les  habitans  (è  difoient  originaife» 
mentdeTAttique,  &  prétendoient 
qu*ils  furent  amenés  dans  la  Mef- 
ienie  par  Colénos,  qm^obéidant 
à  un  oracle  ,  &  guidé  par  le  vol 
d'un  oifeauj  vint  s^établir  dans  le 
lieu  oii  ils  étoient  ;  qu'enfuite  ils 
prirent  infenfiblement  les  moeurs 
&  le  langage  des  Doriens.  Le 
territoire  deColonides  cpnfinoità 
celui  de  Coroné. 

Plutarque  dans  la  vie  de  Phî- 
lopœmen  parle  de  cette  ville  ; 
mais ,  il  n'en  fait  qu*UQ  bourg  ,  ou 
plutôt  un  village.  Il  la  nomme  en 
Cngulier,  au  lieu  que  Paufanias 
la  nomme  en  _pluriel. 

COLONIE , Colonia,  (d)  eft 
le  tranfport  d'un  peuple,  ou  d'une 

Tom.  II.  p.  ?07 ,  ;o8.  Mém.  de  TAcad. 
des  Infcript.  &  Bell.  Lett.  Tom.  V, 
p.  327.  T.  VII.  pag.  45 .  T.  X,  p.  485, 
486.  Tom.  XII.  p.  »4<S.  T.  XIX.  p.  50^, 
&  fmv.  T.  XXI.  p.  9. 


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5T1  C  O 

partie  d^un  peuple ,  d'qn  pals  dans 
un  autre.  Ce  terme  eft  pris  du 
Latin  colcrc  ,  cultiver ,  labourer , 
faire  valoir  un  champ.  De  coUre , 
colo ,  on  a  fait  colonus ,  qui  fi* 
gnifîe  un  laboureur.  Les  Grecs 
difent  cesrwxi'cc  f  pour  marquer  une 
Colonie. 

Les  migrations  ont  été  fréquen- 
tes fur  la  terre  ;  mais  «  elles  ont 
eu  fouvenc  des  caufes  &  des  effets 
différons.   C'eft  pour  les  diûin- 

5uer  ,  que  nous  allons  les  ranger 
ans  des  clafles  différentes. 
L  Environ  350  ans  après  le 
Déluge ,  le  genre  humain  ne  for- 
moit  lencore  qu'une  feule  famille. 
A  la  mort  de  Noë ,  fes  defcen- 
dans»  déjà  trop  multipliés  pour 
habiter  enfemble,  fe  féparerent. 
La  podérité  de  chacun  des  fils  de 
ce  Patriarche,  Japhet,  Sem  ôc 
Cham  ,  partagée  en  différentes 
Tribus ,  partit  des  plaines  de  Sen- 
*  naar  pour  chercher  de  nouvelles 
habitations ,  &  chaque  tribu  de- 
vint une  nation  particulière  ;  ainfi 
fe  peuplèrent  de  proche  en  proche 
les  diverfes  contrées  de  la  terre  « 
à  mefure  que  Tune  ne  pouvoir 
plus  nourrir  fes  habitans. 

Telle  eft  la  première  efpèce  de 
Colonie  ;  le  befoin  loccafionna. 
Son  effet  particulier  fut  la  fubdi- 
yifipn  des  tribus  ou  des  nations. 

IL  Lors  même  que  les  hom- 
mes furent  répandus  fur  toute  la 
furface  de  la  terre,  ch«ique  contrée 
n'étoit  point  aflez  occupée  pour 
que  de  nouveaux  habitans  ne 
pufTedt  la  partager  avec  les  An* 
ciens. 

A  mefure  que  les  terres  s'éloî- 
gi^oient  du  centre  comfnun,  d  où 


co 

toutes  les  nations  étoîent  parties  J 
chaque  famille  féparée  erroit  an 
gré  de  fon  caprice,  fans  avoir 
d'habitation  fixe  ;  mais  ,  dans  les 
pais  où  il  étoit  refié  un  plus  grand 
nombre  d*hommes,  le  (entiment 
naturel  qui  les  porte  à  s'unir  ,  & 
la  connoiffance  de  leurs  befoins 
réciproques ,  y  avoient  formé  des 
fociétés.  L'ambition  ,  la  violence  ^ 
la  guerre ,  ôc  même  la  multiplict* 
té ,  obligèrent  dans  la  fuite  des 
membres  de  ces  fociétés  de  cher- 
cher de  nouvelles  demeures. 

C'ed  ainfi  qu'Inachus ,  Phénî* 
cîen  d*origine  I  vint  fonder  en 
Grèce  le  royaume  d'Argos,  dont 
fa  poftérité  tut  depuis  dépouillée 
par  Danaiis,  autre  aventurier  (brti 
de  l'Egypte.  Cadmus ,  n'ofant  re- 
paroître  devant  Agénor  fon  père, 
roi  de  Tyr ,  aborda  fur  les  confins 
de  la  Phocide ,  &  y  jetta  les  fon- 
démens  de  la  ville  de  Thebes. 
Cécrops ,  à  la  tête  d'une  Colonie 
Égyptienne ,  bâtit  cette  ville,  qui 
depuis,  fous  le  nom  d'Athènes, 
devint  le  temple  des  Arts  &  des 
Sciences.  L'Afrique  vit  fans  in- 
quiétude s'élever  les  murs  de  Car- 
thage ,  qui  la  rendit  bientôt  tribu- 
taire. L'Italie  reçut  les  Troyens 
échappés  à  la  ruine  de  leur  patrie. 
Ces  nouveaux  habitans  apportè- 
rent leurs  loix  ,  ÔC  la  connoiffance 
de  leurs  arts  dans  les  régions  où  le 
hazard  les^conduifit  ;  mais  ^  ils  ne 
formèrent  que  de  petites  fociétés, 
qui  prefque  toutes  s'érigèrent  en 
républiques,     ^ 

La  muhiplické  des   citoyens 

dans  un  territoire  borné,  ou  peu 

fertile  ,  allarmpit  la  liberté.    La 

polit-ique  y  remédia  par  l'établif- 

fémenc 


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co 

^metit  des  Colonies.  La  perte 
même  de  la  liberté ,  les  révolu- 
tions, les  faâions ,  engageoient 
quelquefois  une  partie  du  peuple 
à  quitter  fa  patrie  pour  former 
une  nouvelle  fociété  plus  conforme 
à  fon  génie. 

Telle  eft  entr'autres  Torigine 
de  la  plupart  des  Colonies  des 
Grecs  en  Afie ,  en  Sicile ,  en  Ita- 
lie ,  dans  les  Gaules.  Les  vues  de 
conquête  6c  d'agrandiflement  n'en- 
trèrent point  dans  leur  plan.Quoi- 
Îù'aflez  ordinairement  chaque 
Colonie  confervât  les  loix ,  la  re- 
ligion ,  &  le  langage  de  la  Métro- 
pole 9  elle  étoit  libre ,  &  ne  dé- 
pendoit  de  fes  fondateurs  que  par 
les  liens  de  la  reconnoiflance  ,  ou 
par  le  befoin  d'une  défenfe  com- 
mune ;  on  les  a  même  vues  dans 
quelques  occaiions  ,  aflez  rares  il 
eft  vrai,  armées  Tune  contre  l'au- 
tre. 

Cette  féconde  efpèce<le  Colo- 
nies eut  divers  motifs  ;  mai?  ,  l^ef- 
fet  qui  la  caradérife  »  ce  fut  de 
multiplier  les  fociétés  indépen- 
dantes parmi  les  nations ,  d'aug- 
menter la  communication  emr'el- 
les ,  &  de  les  polir. 

IIL  Dès  que  la  terre  eut  afTez 
d*habitans  pour  qu'il  leur  devînt 
nécefTaire  d'avoir  des  propriétés 
difiinâes  ,  cette  propriété  occa- 
ficnna  des  différends  entr'eux.  Ces 
différends ,  jugés  par  les  loix  entre 
les  membres  d'une  ibcrété  ,  ne 
pouvoient  l'être  de  même  entre 
les  fociétés  indépendantes  ;  la  for- 
ce en  décida  ;  la  foibJeffe  du  vain- 
cu fut  le  titre  d'une  féconde  ufur- 
patioD  ,  &  le  g^e  du  fuccès  ; 
Tom.XI. 


CO  515 

refprit  de  conquête  s'empara  des 
hommes. 

Le  vainqueur  j  pouraffurer  fes 
frontières,  difperfoit  les  vaincus 
dans  les  terres  de  fon  obéiffance , 
&  diftribuoit  les  leurs  à,  fes  pro- 
pres fujets;  ou  bien  il  fe  conten- 
toit  d'y  bâtir  &  d'y  fortifier  des 
villes  nouvelles  ,  qu'il  peu ploit  de 
fes  foldats  &  de  citoyens  de  fon 
État. 

Telle  eft  la  troifième  efpece  de 
Colonies ,  dont  prefque  toutes  les 
hiftoires  anciennes  nous  fournif- 
fent  des  exemples  ,  fur  tout  celles 
des  grands  États.  C'eft  par  ces 
Colonies  qu'Alexandre  contint 
une  multitude  de  peuples  vaincus 
fi  rapidement.  Les  Romains  ,  dès 
l'enfance  de  leur  République  , 
s'en  fervirent  pour  Taccroître  ;  & 
dans  le  tems  de  leur  vafte  domi- 
nation ^  ce  furent  les  barrières  qui 
la  défendirent  long  tems  contré 
les  Panhes  &  les  peuples  d« 
Nord,  Cette  efpece  de  Colonie 
étoit  une  fuite  de  la  conquête ,  & 
elle  en  fit  la  fureté.  Nous  revien- 
drons ci-après  aux  Colonies  des . 
Romains. 

IV.  Les  excurfions  des  Gaulois 
en  Italie  ,  &  des  Vandales  dans 
toute  l'Europe  &  en  Afrique,  des 
Tartaresdans  laChine,forment  une 
quatrième  efpece  de  Colonies.  Ces 
peuples  chaffés  de  leur  païs  par 
d'autres  peuples  plus  puiflans  ,  ou 
par  la  misère  ,  ou  attirés  par  la 
connoiffance  d'un  climat  plus  dîoux 
&  d'une  campagne  plus  fertile, 
conquirent  pour  partager  les  ter- 
res avec  les  vaincus ,  &  n'y  faire 
qu'une  nation  avec  eux  ;  bien  diîf- 
férens  en  cela  jdes  autres  conqu&« 
Kk 


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yf4  CO 

sans  qui  fembloient  ne  chercher 
que  d'autres  ennemis ,  comme  les 
Scythes  en  Afie  ;  ou  à  étendre 
leurs  frontières ,  comme  les  fon- 
dateurs des  quatre  grands  £m* 
pires. 

L'effet  de  ces  Colonies  de  Barba. 
res  fut  d'effaroucher  les  arts,  &  de 
répandre  Tignorance  dans  les  con« 
trées  où  elles  s'établirent  ;  en  mê-* 
ine  tems  elles  y  augmentèrent  la 
population  ,  &  fondèrent  de  puif- 
iantes  Monarchies. 

V.  La  cinquième  efpece  de 
Colonies  eft  de  celles  qu'a  fondées 
l'efprit  de  commerce ,  &  qui  en- 
f  ichiffent  la  Métropole. 

Tyr,  Carthage  &  Marfeille, 
ks  feules  villes  de  l'antiquité  qui 
aient  fondé  leur  puiffance  fur  le 
commerce ,  font  auffi  les  feules 
qui  aient  fuivi  ce  pbn  dans  quel- 
ques -  unes  de  leurs  Coloiries. 
"Ùtique  ,  bâtie  par  les  Tyriens 
près  de  200  ans  avant  la  fuite 
il'Éliffa ,  plus  connue  fous  le  nom 
de  Dîdon ,  ne  prétendit  jamais  à 
«ucun  empire  fur  le$  terres  de 
l'Afrique  ;  elle  ferroit  de  retraite 
aux  vaiffeapx  des  Tytiens ,  ainfi 
que  les  Colonies  établies  à  Mal. 
•ihe  &  le  long  des  côtes  fréquen- 
tées par  les  rhéniciens.  Cadix , 
l'une  de  leurs  plus  anciennes  & 
«de  leurs  pluf  fameufes  Colonies , 
t^  pétendit  jamais  qu'au^  com*- 
ifnerce  de  l'Efpagne  »  fans  entre- 
jprendre  de  lui  donner  des  loix.  La 
fondation  de  Lilyfaée  en  Sicile  ne 
doiuta  aux  Tyriens  aucune  idée 
^e  conquête  fur  cette  ifle. 

Le  commerce  ne  fut  point  Tob- 
Jet  de  l'établiffement  de  Carthage  ; 
;8iatii^  elle  cl\ei;cha   à  s'agrandir 


co 

par  le  commerce;.  C'efl  potw  Vé^ 
tendre  ou  le  conferver  exclufivé- 
ment,  qu'elle  fut  guerrière,  & 
qu'on  la  vit  difputer  à  Rome  la 
Sicile  y  la  Sardaigne ,  l'Efpagne  » 
l'Italie ,  &  même  (es  remparts* 
Ses  Colonies  le  long  des  côtes  de 
l'Afrique ,  for  l'une  &  fur  l'autre 
mer  jufqu'à  Cerné ,  iiugmentoient 
plus  ks  richefles  que  la  force  de 
fon  Empire» 

Marfeille  ,  Colonie  des  Pho- 
céens chaffés  de  leur  païs,  &  en* 
fuite  de  l'ifle  de  Corfe  par  les 
Tyriens  ,  ne  s'occupa  dans  ua 
territoire  fléril^  que  de  fa  pêche  , 
de  fon  commerce ,  &  de  fon  io- 
dépendance.  Ses  Colonies  en  Ef- 
pagne,  &  fur  les  côtes  méridio- 
nales des  Gaules ,  n'avoienc  point 
d'autres  motifs. 

Ces  fortes  d'établiflemens  étoient 
doublement  néceffaires  aux  peu- 
ples qui  s'adonnoient  au  commer- 
ce. Leur  navigation  dépourvue  du 
fecours  de  la  bouffole  p  étoit  tî«r 
mide  ;  ils  n'ofoient  fe  bazarder 
trop  loin  des  côtes  1  &  la  loa^ 
gueor  néceffaîre  des  voyages  ezî- 
geoit  des  retraites  fûres  &  abon- 
dantes pour  les  navigateurs.  L4 
plupart  des  peuples  avec  leiquel$ 
ils  trafiquoient ,  ou  ne  fe  raffem- 
bloient  point  dans  des  villes ,  on 
uniquement  occupés  de  leurs  be-» 
feins ,  ne  mettoient  aucune  valeur 
au  fuperflu,  Il  étoit  indifpen(àble 
d'établir  des  entrepôts  qui  fîffent 
le  comtherce  intérieur,  &  ob  le& 
vaîfleaux  puffent  en  arrivant  faire 
leurs  échanges. 

La  forme  de  ces  Colonies  ré- 
pondoit  affez  à  celle  des  nations 
commerçantes  de  l'Europe  y  e0 


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co 

J^friqne  &  dans  tlndes  elles  y 
ont  des  comptoirs  6c  des  forte- 
refTes  ,  pour  la  commodité  ôc  la 
iûreté  de  leur  commerce, 

VL  Corhme  il  n'y  a  point  de 
peuple  dans  Tantiquité  ,  dont  les 

'  Colonies  aient  été  aufli  fréquentes 
que  celles  du  peuple  Romain , 
flous  nous  y  arrêterons  un  mo- 
ment. Il  y  avoit  deux  fortes  de 
Colonies  chez  les  Romains ,  les 
Colonies  Romaines  &  les  Colo- 
nies Latines.  Les  habitans  des 
Colonies  Romaines  étoient  ci- 
toyens Romains ,  &  avoient  droit 
tle  fufFrages,  fans  néanmoins  avoir 
part  aux  charges  &  aux  honneurs 
de  la  République  ;  ceux  des  Co- 
lonies Latines  avoient  droit  de 
fuffrages ,  fi  le  Magidrat  le  leur 
permettoit  ,  &  étoient  reçus  ci- 
toyens Romains  ,  après  avoir 
exercé  quelque  magiftrature  dans 
une  ville  Latine.  Il  y  avoit  encore 

-des  Colonies  militaires  pour  les 
vieux  foldats,  qui  n  étoient  plus 
capables  de  rendre  fervice;  mais, 
ces  Colonies  ne  faifoienc  pas  une 
claiïe  féparée  dis  Colonies  Ro- 
maines ,  dont  elles  ne  difFéroienc 
que  par  le  choix  de  ceux  dont 
elles  étoient  formées  d'abord. 

Les  Romains ,  de  même  que  les 
Grecs  ^  avoient  accoutumé  dans 
'ks  Colonies,  de  bâtir  des  tem- 
ples &  d'autres  fomptueux  édifi- 
ces ,  pareils  à  ceux  de  Rome  & 
des  autres  villes  d'Italie  ,  pour 
adoucir  l'ennui  des  nouveaux  ha- 
^  hitans  ;  &  ils  donnoienc  aux  ri- 
vières &  aux  montagnes  de  ces 
Colonies  y  les  noms  des  rivières 
&  des  montagnes  qu'ils  avoient 
:  quittées.  C'efl  ainfi  que  Trêves , 


CD  51J 

Cologne ,  Touloufe  ,  &c.  ont  eu 
chacune  leur  capitole,  à  l'exemple 
de  Rome  ;  &  que  Vérone ,  Lyon , 
Vienne ,  Nîmes  ,  Arles  ,  &  d'au- 
tres villes  ,  ont  eu  de  même  leur 
cirque  6c  leur  amphithéâtre ,  don^ 
quelques-uns  confervent  encore 
d'afTez  beaux  reftes. 

Denys  d'Halicarnafle  remonte 
jufqu'à  Romulus  pour  y  trouver 
l'origine  des  Colonies.  En  effet , 
nous  lifons  dans  l'Antiquité  que 
de  toutes  les  places  dont  Romu- 
lus s'empara  &  auxquelles  il  fît  It 
guerre  ,  il  n'en  ruina  aucune  , 
mais  qu'il  fe^oontenta  d'en  enlever 
les  habitafis  ,  pour  les  obliger 
<)'habiter  d'autres  terres  ,  &  qu'il 
iubdituoit  en  la  place  de  ceux-ci , 
des  habitans  de  Rome.  Les  Rois , 
qui  foccéderent  à  Romulus ,  en 
firent  autant  que  lui  ;  ce  qui  n'em- 
pêche pas  qu'on  ne  regarde  Oflie 
comme  la  première  Colonie  de 
Rome  ,  quoiqu'elle  «'ait  été  ha- 
bitée par  des  Romains  que  fous  le 
règne  de  Servius  Tullius  ,  parce 
c'eft  la  feule  qui  fe  foit  trouvée 
de  quelque  confidération ,  toutes 
les  autres  n'étant  que  d'afTez  pe- 
tits bourgs.  Les  Romains  ,  deve- 
nus libres  ,  ne  fongerent  que  tard 
à  faire  de  pareils  établiflfemens  ; 
mais  ,  dès  qu'ils  eurent  commen- 
cé ,  ils^en  firent  plufièurs ,  d'abord 
dans  l'Italie  y  &  enfuite  dans  tous 
les  pals ,  dont  ils  firent  la  conquê- 
te. Augufte  ôc  fes  fuceffeurs  rie 
manquèrent  pas  d'en  faire  de  mê-  « 
me  ,  &  ff  y  en  eut  bientôt  jufque 
fur  les  bords  de  l'Euphrate  &  du 
Tigre  ;  mais,  ces  dernières  furent 
pfefque  toutes  compofées  de  fol« 
dats  vétérans. 

Kkij 


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5l6  C  O 

Ce  qui  encourageoit  les  peuples 
-  à  contribuer  aux  Colonies  Ro- 
maines ,  <eft  que  ceux  qui  les 
envoyoient ,  leur  diflribuoient  ^ 
leur  cédoient  la  propriété  des  ter- 
i;;es  ,  qu'ils  alloient  habiter.  On 
fourniuoit  méoie  gratuitement  aux 
frais ,  non  feulement  de  leur  voya- 

te,  mais  encore  des  inftrumens 
i  des  uflenfiles  néceffaires.  On 
choififlbît  parmi  ceux  que  Toa 
en voy oit,  des  perfonnes  graves  & 
prudentes ,  que  Ton  chargeoit  de 
commander  &  de  régir  les  peu* 
pies  que  Ton  tranfportoit.  C'étoit 
par  Tavis  de  ies  perfonnes  que 
l'on  s'établiflbit ,  ou  que  l'on  fîxok 
fa  demeure  plutôt  dans  un  endroit 
que  dans  un  autre.  Lorfqu*on  bâ- 
tifToit  quelque  ville ,  retendue  & 
la  di(pofirion  étoit  encore  de  leur 
compétence.  Ils  rapportoient  ce- 
pendant tout  ce  qu'ils  faifoient  à  la 
gloire  &  à  l'embelliflement  de  l'Em- 
pire Romain ,  donc  Rome  étoit  la 
u:apitàle.  Prefque  tous  le.Qrs  édifices 
publics ,  comme  leurs  places  publi-  ' 
ques  f  leurs  cemples  &  leurs  pa- 
lais j  étoienc  bâtis  fur  le  modela 
de  quelques-uns  da  ces  mêmes 
bàtimens  qui  étoient  à  Rome. 

Il  n'étoit  pas  permis  à  qui  que 
ce  foit  d'envoyer  ou  de  conduire 
*  une  ou  plufieurs  Colonies  du, peu- 
ple Romain  f.  à  moins  qu'il  ne  fût 
intervenu  une  loi  qui  le  permit 
•xpreffémentr  On  avoit  même  re- 
cours aux  aufpices  avant  que  de 
i  tendre  ces  fortes  de  loix ,  6c  on 
C»ifoit  purifier  le  peuple  qui  de- 
voit  partir.  Le  Prince  ou  le  Sénat 
leur  nommoit  un  chef ,  fous  l'é- 
tendard duquel  ils  étoient  obligés 
M  fe  ranger* 


co 

Il  y  avoit  de  plufieurs  fortes  de 
Colonies;  quelques-unes  étoient 
conlpofées  de  Romains ,  d'autres 
de  Latins  ^  d'autres  d'Italiens. 
Les  unes  étoienc  tributaires  ,  & 
payoiient  par  chaque  année  un 
tribut  au  peuple  Romain, *&  les 
autres  étoient  exemptes  de  ces 
fortes  de  contributions.  On  accor- 
doit  le  droit  de  citoyens  à  quel- 
ques-unes de  ces  Colonies.  On 
compofoit  quelquefois  des  Colo- 
nies de  foldats  vétérans,  à  qui 
on  diftribuoit  des  terres  pour  les 
récompenfer  de  leurs  exploits  mi- 
litaires ;  c'efl  au-  moins  ce  que 
plufieurs  Hiftoriens  attribuent  à 
Lucius  Sylla ,  &  afifurent  auffi  de 
CaïusCéfar,  de  Marc- Antoine  9 
de  Lépidus  &  d'Awgufte.  Toutes 
ces  Colonies  avoient  chacune  leurs 
loix  ;  celles  de  la  plupart  &  fur 
tout  des  Colonies  Romaines  , 
étoient  conformes  à  celles  qui 
s'obfervoient  à  Rome  ;  &  fouvent 
c'étoient  les  mêmes.  Leurs  Magis- 
trats ,  comme  les  Duumvirs ,  les 
Cenfeurs ,  les  Édiles  &  les  Quef- 
teurs ,  étoient  oiiargés  de  veiller 
à  l'obfervation  des  loix  civiles  ;  fie 
les  pontifes  ou  les  prêtres  ,  de 
faire  exécuter  celles  qui  concer- 
noient  le  fervîce  des  dieux.  Lorf- 
qu'il  fe  trou  voit  Quelque  Séna* 
teur  dan$  une  Colonie  ,  on  lui 
donjtoit  le  nom  de  Déçûrion. 

Il  eft  difficile  de  ri^n  (latuer  de 
certain  fur  le  nombre  des  Colo- 
nies ;  quelques  Auteurs  en  comp- 
tent juîqu'à  cent  cinquante  dans 
ritalie  ,  foixante  en  Afrique,  en- 
viron trente  en  Efpagne ,  à  peu 
près  autant  dans  les  vîaules ,  fie 
ainfi  dû  refte.  Quoi  qu'il  en  foit» 


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co 

\\  eft  conftant  que  toutes  les  Co^ 
lonies ,  quelque  part  qu'elles  fuf* 
fent  établies  ,  a  Voient  toutes  le 
même  idiome ,  fçavoir ,  la  langue 
Romaine,  &  qu'elles  ne  fe  ter- 
voient  point  du  tout  du  langage 
du  pais  où  elles  s  etabliiToient. 

COLONIQUES  ,  Colorùca , 
i^a)  nom  que  Céfar  donne  à  deux 
cobortes,dans  le  fécond  livre  de  fes 
commentaires  for  la  guerre  civile» 
Sans  doute  aue  ces  deux  cohortes 
étoient  ainu  appéllées  ^  parce 
^u'on  les  avoit  tirées  des  C^olo- 
nies. 

COLONNAIRE  »  Cêlumna^ 
rium  ,  impôt  ittis  fur  les  colom* 
nés  y  dont  on  omoit  les  maifons  ; 
on  dit  que  ce  fut  Jules  Céùr  qui 
l'imagina  ,  afin  d'arrêter  le  luxe 
de  l'architeâure  ,  qui  ie  remar- 

3uoit  d'une  manière  exorbitante 
ans  les  bâtimens  des  citoyens. 
COLON  TAS,  Colontas^ 
.Ko^^yretc.  Voyt^  Cérès  Chthonia. 
COLONUS  ,.  Colonus  ,  (fi) 
K  ^tovo; ,  lieu  de  Grèce  dans  l'At- 
tique  ,  fitué  à  environ  dix  fiades 
d'Athènes.  Il  hott  confacré  à 
Neptune  ,  felôn  Thucydide..  On 
dit  quHl  y  avoit  un  bois  où  les 
Euménidës  étoient  honorées.  So- 

§hocle  étoit  né  en  ce  lieu  ^  fuivam 
uidas.  ."      ' 

COLOPHON  ,  Colovhon  v 
Xo^o^oli' ,  (c)  ville  de  TAue  mi- 
neure dans  rionie.  Fomponius 
Mêla  dit  que  Mopfus  ,  fils  de 
Manto  qui  étoit  fille  de  Tiréfie  9 

(*)  Cacf.  de  Bell.  Civil.  L.  II.  p.  S4«. 

(h)  Thucyd.  p.  'Ç99, 

(c)  Strab.  pag.  633  ,  641 ,  643.  Plin. 
T.  I.  p.  iti  ,  %yq.  Pomp.  Mel.  p.  79  , 
80,  Pauf.  pag.  187  ,  x88  ,  400.  &  fin*  1 


CO  \V7 

fonda  cette  ville  au  promontoire 
qui  ferme  le  golfe  ^  &  qui  de  l'au- 
tre côté  en  forme  un  autre  qui  eft 
celui  de  Smyrne  ;  mais  ,  félon 
Strabon  ,  Colophoii  dut  fon  ori- 
gine à  une  colonie  de  Py  liens , 
qui  y  fut  conduite  par  Andrémon. 
Celte  ville  étoit  une  de  celles 
qui  difputoient  entr'elles  la  gloire 
d'avoir  été  la  patrie  d'Homère  éc 
d'Apelle.  Mais ,  aucune  autre  ne 
lui  difputolt  celle  d'avoir  produit 
Mimnerme  ,  poëte  Élégiaque  & 
joueur  de  flûte  ,  &  le  philofophe 
Xénophanes. 

La  cavalerie  des  G^lophoniens  é- 
toit  fi  excellente^au  rapport  de  Stra* 
JbQu^qu'elle  donna  lieu  au  proverbe 
colophonem  addere  ,  c'eft- à-dire  ^ 
'  achever  une  entreprife,  parce  qu^ 
icette  cavalerie  avoit  coutume  de 
terminerpar  la  viâoire,  tous  les 
combats  où  elle  fe  trouvoit.  Une 
jcoûtume  fingulière  des  Colopho* 
niens  »  c'eft  qu'à  la  guerre  ,  ils 
avoient  des  elcadrons  de  chiens 
qui  commençoient  le  combat ,  qui 
ne  refufoient  jamais  de  fe  battre, 
&  auxquels  il  ne  falloir  point 
payer  de  montre.  Il  croiiToit  chez 
eux  une  réfine  affez  jaune  ,*  mais 
.qui  étant  broyée ,  étoit  blanche 
&  d'une  odeur  forte  ;  ainfi,  les 
|>ar fumeurs  ne  s'en  fervoient  pas 
comme  Pline  le  remarque.  C'eft 
literlà  (ans  doute  que  les  joueurs 
d'inftrumens  à  cordes  »  comme  le 
Violon  ,  la  baffe  «  &c,  nomment 
.Colophone  la  forte  de  réfine  dont 

Plut.  T.  I.  p.  493*  Tâcit.  Annul  L.  U. 
c.  54.  Mém.  de  PAcad.  des  Infcripi. 
&  Belt,  Lett.  Tom,  XII.  pag.  ib»  %i%  t 
J14.T.XXI.P.  181. 


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5i8  CO 

ils  fe  fervent  pour  frotter  leur 
archet. 

La  ville  de  Colophon  a  été  fiir 
tout  célèbre  par  l'oracle  d'Apol- 
lon Clarius.  Tacite ,  au  fujet  de 
Germanicuii ,  en  parle  en  ces  ter- 
mes :  »  Il  aborda  à  Colophon 
i>  pour  y  confulter  l'oracle  d'À- 
n  pollon  furnommé  Clarius,  Ce 
»  n'eft  point  une  femme  qui  y 
n  rend  les  réponfes  comme  ^ 
»  Delphes ,  mais  un  pitêtre  choifî 
^  dans  certaines  familles,  &  le 
3»  plun  fouvent  de  la  ville  de  Mi- 
»  let.  Il  fe  contente  de  fçavoir  le 
»  nombre  ceux  qui  veulent  con- 
t9  fulter,  &  leurs  noms  >  après 
91  quoi  \  il  defcend  dans  ù  grotte , 
il  boit  de  Teau  d'une  fontaine 
p  myAérîeufe,  &  fans  avoir  au- 
«I  cune  connoiHance  des  lettres^ 
9>  ni  de  la  poëfie  ,  il  donne  en 
>i  vers  une  réponfe  qui  fe  tfouve 
t>  conforme  à  la  penfée  fecrete 
h  des  confultans  ;  &  on  dit  qu'a- 
h  lors  il  prédit  à  Gerihanicus  h 
99  mort  prématurée  en  des  ter^ 
9»  mes  ambigus  ,  fui vant  le  ilyle 
9»  ordinaire  des  oracles,  a 

Pline  parle  aoiii  de  cette  eaa 
de  la  grotte  d'Apollon  Clarius.  Il 
ajoute  que  ceur^  qui  en  buvoienrt, 
rendôient  des  oracles  y  mats  qu'elle 
abrégeoit  leurs  jours.  Le  mêm^ 
Âous  apprend  ailleurs  que  là  Ville 
de  Colophon  étoit  arrofée  par  le 
fleuve  Haléfus. 

Nous  apprenons  d^une  médaille 
de  Trébatius  Gallus,  frappée  à 
Colophon  9  qu'encore  'dans  le 
i  1 1^  pécle  \  cette  ville  &  le» 
douze  autres  de  l'Ionie ,  formoîeni 


CD 

un^  {otte  de  communauté  petit 
les  facrifices ,  telle  qu'elle  étoit  du 
tems  d'Hérodote  ^  qui  en  parle 
affez  au  long  au  premier  livre. 

Il  convient  d'obferver  que  Co- 
lophon n'écoit  pas  prectfément  aa 
bord  de  la  mer  ,  comme  femble- 
roient  l'indiquer  quelques  pàfTages 
des  Anciens ,  &  en  particulier  ce- 
lui que  nous  avons  cité  de  Ta- 
cite. C'étoit  Claros  qui  devoic 
êfre  le  port ,  ou  le  lieu ,  où  l'on 
abordoit  d'abord ,  quand  on  vou- 
loit  aller  à  Colophon.  Il  eft  vrai 
que  l'on  pouvoit  peut-être  bien 
aller  auffi  par  eau  jufqu'à  cette 
ville ,  au  moyen  du  âeuve  Halé- 
fus  ;  c*eft-à-dire,  qu'il  en  étoit 
apparemment' de  Colophon  com- 
me de  quelques-unes  de  nos  villes 
de  France  &  même  des  pais  étran- 
^rs ,  qui  paffisnt  pour  des  ports 
de  mer ,  quoiqu'elles  en  loîenc 
«éloignées  de  plufieurs  lieues ,  par- 
ce que  les  vaiiTeaux  y  parviennent 
par  les  fleuves,  fur  lefquels  elles 
ùmt  fttuées. . 

.  Les  Colophoniens  avoient  cou- 
tume de  fàcrifier  uh  petit  chien 
noir  à  leur  déefle  Énodia.  Ce  fa- 
crîâce  fe  faifoit  pendant  la  nuit. 
-.  Colophon  a  été  le  fiege  d'un 
JÊvêque  ibfFragant  d'Éphèfe.  On 
dit  que  cette  ville  eft  ruinée  ,  & 
qu'il  n'en  reile  plus  aujourd'hui 
-aucune  trace.  > 

'  COLO?UON,Coiopho7i,Ko' 
9inàùt  ♦  ville  de  l'Épire  ,  félon  Di- 
«céarque.  Mais ,  quelques  Sçavans 
modernes  croyent  qu'il  faut  lire 
'  Tolophod.  ■' 

CÔLOPHONIE  ,  (d)  Co/a- 


Oi)  Fauf.^.  40t. . 


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co 

fhonia  y  }Co>e^àrr/« ,  nom  Cjfxt  l'on 
donnoit  au  territoire ,  que  pofTé^ 
doient  les  habitans  de  la  ville  de 
Colophon.  Voye^  Colophoii. 

CpLOPHONIENS  ,  Colo- 
phonii^  étoientlës  habitans  de  Co** 
lophon.  Vbye\  Colophon* 

^COLOPS  ,  Colops  ,  K»Afl^^♦ 
Voye^  Colapis. 

COLOSSE  ,  Colojfu^  ,  du 
Grec  KcTioç'coç  y  compofiè  de  Kih^ç 
grand,  Sl^ttoç  œil  >  c*eft- à«$<iBre, 
grand  à  la  vue.  On  entend  fous 
ce  nom  un  bâtiment  d'une  gran<- 
deur  confidérable ,  tek  qu'étoient 
Jes  Pyramides  en  Egypte  «les  am- 
phitéatres  en  Gr^ce  &L  en  Italie* 

Colofle  fe  dit  auffi  d'une  figure , 
dont  la  proponion  eft  fortau-dîeflajs 
de  la  naturelle ,  telle  qu'étoit  celle 
dp  Soleil  à  Rhodes ,  À  les  ftatues 
des  empereurs  Néron  &  Com«- 
mode  ,  dont  il  refie  encore  qoel^ 

2ues  fra^mens  dans  la  cour  du 
^apitoie  à  Rome. 
COLOSSE  DE  RHODES , 
{a)  ftatue  d'airain  d'une  grandeur 
prodigieux ,  iitaée  à  l'entrée  du 
port  de  Rhodes,  &  qu'r  paflbit 
pour  une  des  fept  mervetUes  du 
monde«  En  voici  l'hiftoire  tirée 
principalement  de  M.  Prideaux.- 
Cette  ilatue  étoit  dédiée  an 
Soleil  ;  elle  avoit  70  coudées ,  ou 
105  pieds  de  haut^  &  le  refie  à 
proportion  ;  peu  de  gens  po«i- 
voient  embra&r  (on  pouce  ;  les 
navires  ploient  à  pleines  voiles 
entre  fes  jambes.    . 

Dimècrius ,  après  avoir  aflié^ 
vivement  la  ville  de  Rhodes  pen- 


CO  519 

dant  tin  an  fans  pouvoir  la  pren-? 
dre  >  las  d'un  fî  long  fiege ,  fit  la 
paix  avec  les  Rhodiens  ,  &  en 
s'en  tetournant  il  leur  donna  e9 
préfent  toutes  les  machines  dt 
guerre  qu'il  avoit  envoyées  à  ce 
iiege.  Ils  les  vendûent  dans  \f 
fuite  pour  trois  cens  talens ,  dont 
ils  fe  Servirent ,  avec  l'argent  qu'om 
y  ajouta  >  pour  faire  ce  Colofli^ 
Ce  fut  l'ouvrage  dé  Charès  de 
Xindus  «  difciple  du  fameux  Ly- 
fippe  >  qùiy  employa  douze  ans. 
Mais,  foixaote^fix  ans  après  l'exi- 
cution  de  fon  entreprife  ,  le  Co»- 
loffe  fut  abattu  par  un  grand  trern^ 
Jblement  de  terre  qui  fe  fit  femir 
.en  Orient,  &  qui  caufa  des  défô» 
lations  pfodigieufes  »  fur  tout  dans 
la  Carie  &  dans  l'ifle  de  Rhodes. 
On  commença  à  travailler  à  ce 
Êimeux  Colofle  l'an  300  avant  !• 
C,  il  fut  achevé  l'an  288  ^r& 
renverfé  l'an  2.22.  > 

Les  Rhodiens  ,  pour  réparée 
le  domm^e  que  cet  accident  leuc 
ravoit  caufé ,  quêtèrent  chez  tous 
les  princes  &  dans  les  états  Grecs 
de  nom  ou  d'origine^  &  exagé- 
f  ejrent  tellement  leurs  pertes ,  que 
la  colleâe  qui  fe  fit  pour  eux,  fur 
tout  chez  les  rois  d'Egypte ,  de 
Macédoine ,  de  Syrie ,  du  Pont  & 
de  Bith3mie  ,  alla  pour  le  moins 
à  cinq  fois  autant  que  la  véritable 
fomme  à  laquelle  ces  pertes  fe 
montoient. 

En  effet ,  l'émulation  qui  régna 
entre  les  ^princes  pour  ibulager 
cette  vîHe  défolée ,  eft  fans  exein- 
pie  dans  rHtftoire.  Ptolémée ,  roi 


*)  Roll.  Hîft.  Xnc.  T.  V.  p. 
9l  BeU*  JLeit.  To^o.  XiV«  pa{. 


')7  >  W  »  33^*  Uiia,  de  PAcad.  des  Infcrîp|^ 


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5^0  C  O 

d'Egypte  9  fournit  feul  trois  cens 
talens ,  un  million  de  mefures  de 
froment ,  des  matériaux  pour  bâ- 
tir vingt  galères ,  tant  à  cinq  rangs 
de  rames  qu'à  trois  rangs  de  ra- 
mes f  une  quantité  infinie  de  bois 
pour  d'autres  bâtimens  ,  &  en 
]>articulier  pour  rétablir  le  Colofle 
trois  mille  talens  ,  c'eft-à-dire, 
neuf  millions ,  fuivam  M.  JR^oUin , 
&  dIus  de  dix  millions  fuivant  le 
doâeur  Bernard.  Outre  les  Rois  ^ 
tontes  les  villes  (îgnalerent  leurs 
libéralités;  les  particuliers  voulu- 
rent auffi  entrer  en  part  de  cette 
gloire  ,  &  Ton  cite  une  dame , 
appellée  Chryféis ,  véritablement 
digne  de  Ton  nom  ,  qui  fournit 
feule  cent  mille  mefures  de  fro- 
ment.Que  les  princes  d*à-préfent, 
dit  Pqlybe ,  &  nous  pouvons  dire 
deux  mille  ans  après  lui ,  que  les 
princes  de  nos  jours  comprennent 
combien  ils  font  éloignés  de  ceux 
dont  on  vient  de  parler.  En  aflez 
peu  d'années  Rhodes  fut  rétablie 
-dans  un  état  plus  magnifique 
qu'elle  n'avoit  jamais  été ,  h  l'ex- 
ception du  Colofle  ;  car ,  les  Rho- 
dtens  ,  au  lieu  d'employer  une 
partie  de  cet  argent  ,  comme 
c'étoit  la  principale  intention  de 
ceux  qui  l'avoient  donné ,  à  rele- 
ver le  Coloflie ,  prétendirent  fort 
fagement  que  l'oracle  de-Delphes 
le  leur  avoit  défendu  ,  &  gardè- 
rent toutes  ces  Tommes ,  dont'  ils 
s'enrichirent. 

Le  ColofTe  demeura  abattu 
comme  il  étoit  «  fans  qu'on  y  tou« 
chat  pendant  894  ans  ,  au  bout 
defquels  ^  l'an  de  J.  C.  672  , 
Moawias  9  le  fixième  calife  ou 
empereur  des  Sarf alias ,  ajram 


co 

pris  Rhodes  .Je  vebdit  à  un  mar- 
chand Juif  qiA  en  eut  la  charge  de 
neuf  cens  chameaux  ;  c'eft-à  dire , 
qu'en  comptant  huit  quintaux  pour 
une  charge  »  l'airain  de  cet^e  ila- 
tne  9  après  le  déchet  de  tant  d'an- 
nées par  la  rouille ,  &c.  6c  ce  oui 
vraifeni^lablement  en  avoit  été 
volé ,  fe  montoit  encore  à  fept 
cens  vingt  mille  livres ,  ou  à  fept 
mille  deux  cens  quintaux. 

Léo  Allatius  aiTure  que  le  Co- 
lofTe de  Rhode>  fut  relevé  ions  le 
feptièifie  confulat  de  Vefpafien, 
&  que  l'empereur  Commode  , 
après  lui  avoir  fait  ôter  la  tête, 
ordonna  qu'on  y  mit  la  fienne. 
Il  s'appuye  fur  l'autorité  de  Geor«, 
ge  Syncelle  ;  mais,  jl  a  lu  tf  Voé»% 
inRkodo ,  pour  èr  U^SiSôî^  in 
facra  via ,  &  il  a  pris  le  Colofle 
de  Néron ,  fait  à  Rome  par  Zé- 
nodore,  pour  le  ColofTe  du  So- 
leil ,  fait  à  Rhodes  par  Charès. 
Suétone  rapporte  fur  ce  fujet, 
que  Néron  fit  mettre  dans  une 
cour ,  à  l'entrée  de  ùl  maifon  »  un 
Colofle  de  fix  vingts  pieds  »  donc 
la  tête  repréfentoit  celle  de  ce 
Prince»  Pline  dit  que  Zénodore  » 
qui  avoit  travaillé  dix  ans  en  Au- 
vergne à  une  flatue  de  Mercure  , 
fut  appelle  à  Rome  par  Néron 
pour  y  faire  ce  ColofTe ,  lequel 
après  la  mort  de  cet  Empereur , 
fut  dédié  au  Soleil ,  pour  abolir  la 
mémoire  de  ce  monflre.  Dion 
Caflius  nous  apprend  que  Vef- 
pafien  fit  tranfporter  ce  même 
ColofTe  de  la  maifon  de  Néron 
dans  la  rue  facrée.  Lampridius  dit 

Su'enfuite  l'empereur  Commode 
t  mettre  fa  tête  en  la  place  de 
celte  de  Néron  ^  &  Hérodien^ 


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co        ^ 

qu'il  la  fit  mettre  au  lieu  de  celle 
du  Soleil;  mais, on  peut  concilier 
ces  deux  Auteurs  ,  en  difant  que 
Vefpafien  n*avoit  point  ôié-  la 
tête  de  Néron  ,  &  qu'il  s'étoit 
contenté  d'y  ajouter  des  rayons 
pour  en  faire  la  dédicace  au  So- 
leil ;  de  forte  que  c'étoit  la  tête 
de  Néron ,  &  Timage  du  Soleil. 

Les  premiers  Coloffes  tirent 
leur  origine  d'Egypte  ,  ou  plu- 
fieors  Auteurs  afiurent  que  le  roi 
Séfoftris  fit  placer  dans  le  temple 
que  l'on  avoit  bâti  à  Vulcain  dans 
la  ville  de  Memphis  ,  plufieurs 
fiatues  de  pierre  ^  tant  de  lui  (k 
de  fa  femme  que  de  fes  en£ans , 
donc  les  unes  avoient  trente  cou- 
dées de  haut  &  les  autres  vingt. 

M.  Lttcullus  apporta  d'ApolIo- 
nîe  ,  ville  du  Pont ,  à  Rome  ,  & 
fit  piacer  dans  le  Capitole ,  la 
figure  d*Apollon ,  qui  avoit  tren- 
te coudées  de  hauteur.  Il  y  avoit 
encpre  à  Rome  une  autre  ftatue 
de  cuivre^  repréfentant  Apollon  > 
dans  le  temple  d'Augufle  ,  qui 
^voit  plus  de  cinquante  pieds  de 
haut.  Le  ColofTe  d'Augude  étoic 
dans  la  place  qui  portoit  fdn  nom 
â(  Rome.  Conflantin  .en  fit  bâtir 
«in  dans  le  milieu  du  cirque  de 
Conâantinople.  Domiiien  avoit 
fait  dreiTer  dans  le  milieu  de  la 
f>lace  publique ,  une  ftatue  éqUef- 
•tre^  à  fon  honneur  »  de  cqnt  fept 
5»fed«  de  haut,  que  le  Sénat  fit 
abattre  après  la  mort  de  ce  Prin- 
xë.  Le  Colofle  d'Hercule  ,  que 
JFabius  Maximus  Verrucofus  prit 
à  Trente  ,  &  qu'il  fit  placer  dans 
ie  Capitolej  étoit  une  flatue  de 


CO  521 

cuivre  y  que  Lyfippe  avoit  faite. 
Celui  de  Jupiter  fut  fait  par  ordre 
de  l'empereur  Claude,  &  placé 
proche  du  théâtre  de  Pompée  ,  ôc 
à  caufe  de  cela  appelle  Jupiter 
Pompéien.  Sp.  Carvilius  ,  après 
la  défaite  des  Samnites ,  fit  fqndre 
toutes  les  armes  de  cuivre  qu'il 
avoit  prifes  fur  eux ,  &  en  fit  faire 
tine  fiatue  de  Jupiter  ,  aux  pieds 
de  laquelle  il  fe  fit  repréfenter. 
Ce  ColofTe  fut  mis  auffi  dans  le 
Capitole.  Il  y  en  avoit  un  en 
l'honneur  de  Mars ,  dans  le  tem- 
ple de  Brutus  Callaicus. 

Quelque  grandes  que  fuiïent 
ces  fiatues ,  &  quoique  les  Au- 
teurs qui  en  ont  parlé  t  fe  foieht 
fervis  du  terme  de  ColofTe,  qui 
leur  efl  propre  à  la  vérité  ,  en 
prenant  ce  mot  dans  fa  vraie  6c 
jufle .  fignification  ,  néanmoins  il 
ne  convient  &  ne  s'entend  com- 
munément que  de  cette  fameufe 
flatue  de  Rhodes  ,  dont  nous  ve- 
nons de  parler. 

COLOSSES,  Colofa,  (a) 
Koxo^ral  «  ville  de  l'Afie  mineure 
dans  la  grande  Phrygie.  M.  d'An- 
villé  dans  fes  cartes  la  met  au 
confluent  du  Lycus  &  du  Méan«» 
dre. 

Cette  ville  tenoît  un  rang  cqn- 
fidérable  dans  le  païs .  Selon  Xé- 
nophon,elle  étoit  grande,  riche  6c 
fort  peuplée.  Plufieurs  autres  Au- 
teurs en  parlent  auffi  en  diverfes 
occafions.  Eufebe  ,  dans  fa  Chro- 
nique 9  dit  qu'elle  fut  renverfée 
fous  l'empire  de  Néron ,  par  un 
tremblement  de  terre.  Elle  fut  une 
des  premières  villes  qui  embrafTer- 


(s)  Xenoph,  p.  «45,  Plln,  T.  I.  p.  189.  Strab,  p.  576,  Herod.  L.  VJI*  c.  3^ 


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522  C  O 

rent  le  Chriflianifme ,  &  nous 
a^ons  une  des  Épîtres  de  Saint 
Paul  adrefTée  à  fes  babitans.  Les 
Colodîens  avoient  eu  le  malheur 
q^e  de  faux  Apôtres  étoient  venus 
chez  eux  ,  &  y  avoient  prêché  la 
circoncifîon  &  des  obfervances  lé* 
gales  y  &le  cuite  fuperAitieux  des 
Anges  &  autres  doârines  étran- 
gères. S,  Paul  réfute  les  taux  Apô- 
tres ,  Si  donne  aux  Coloiliens  un 
excellent  préfervatif ,  contre  les 
dogmes  dont  on  avoit  voulu  cor- 
rompre leur  foi.  Il  leur  prêche  la 
plus  belle  &  la  plus  fublime  mora- 
le. On  croit  au  reûe  que  S.  Paul 
n'étoit  jamais  allé  à  Coloffes,  quoi« 
qu'il  eût  annoncé  l'Évangile  dans 
la  Phrygie  ;  &  lorfqu'il  écrivit  fa 
lettre  aux  habitans  de  cette  ville  , 
il  étoit  dans  les  liens  à  Rome.  El- 
le leur  fut  portée  par  Tychique  & 
Onéfime. 

Quelques  exemplaires  Grecs 
lifent  Colaffes ,  au  lieu  de  Co- 
lofles  ;  c*e(l  une  faute  d'orthpgra* 
phe  ûiffifamment  réfutée  par  l'u- 
niformité des  exemplaires  Latins , 
qui  tous  portent  Coloffes  fans  va- 
riation. Suidas  ,  Zonare ,  Glyc;as , 
Euflathe,  Calepin,  MunAer  6l 
quelques  autres,par  un  raônement 
ridicule  ,  ont  prétendu  que  le  nom 
de  Coloffiens  ne  fignifioit  pas  les 
habitans  de  la  viUe  de  Colodes , 
mais  les  Rhodiens,  que  Saint  Paul 
avoit  défîgnés  par  une  alkifion  au 
Coloffe  de  Rhodes.  Un  peu  de 
géographie  leur  eût  diffipé  cette 
illuuon  ;  car  ,  Saint  Paul  ^  parlant 
d'Épaphras  qui  étoit  avec  lui  pri*» 
fonnier  à  Rome ,  &  qui  étoit  de 


co 

la  ville  de  Coloffes ,  dît  :  w  J« 
»  puis  bien  leur  rendre  ce  tétnoi- 
n  gnage  ,  qu'il  a  un  grand  zélé 
n  pour  vous  &  ceux  de  Laodicée 

M  &  d'Hiérapolis Saluas 

»  de  ma  part  nos  frères  de  Laodi- 
»  cée.  .....  Et  lorfque  cette 

»  lettre  aura  été  lue  parmi  vous, 
M  ayez  foin  qu'elle  foit  lue  auffi 
n  dans  l'égliie  de  Laodicée.  a 
Cela  fait  voir  clairement  que  les 
Coloffiens ,  à  qui  Saint  Paul  écrit , 
étoient  voifins  de  Laodicée  & 
.d'Hiérapolis.  En  effet ,  Colofles 
étoit  entre  ces  deux  villes  ,  à  en- 
viron vingt  mille  pas  de  Tune  & 
de  l'autre  ;  au  lieu  que  les  Rho-r 
diens  étoient  à  près  de  deux  cens 
mille  pas. 

Dans  la  Notice  des  villes  dont 
le  nom  a  été  changé  ,  on  lit  Co- 
lojja  ,  nunc  Chonai  ;  ainfi  Chona^ 
ed  le  nom  que.cette  ville  porta  en* 
fuite  9  ,&.  elle  Je  conferve  encore. 
Car ,  on  dit  que'  les  Grecs  l'appel?', 
lent  aujourd'hui  Chonos. 

COLQUES ,  Colchi ,  Ko^x9#  » 
étoient  les  babitans  de  la  Colchide» 
Voyei  Colchide. 

COLQljtS  ^  Colchi^  K»>xM» 
{a)  yillie  des  Caréens ,  peuples  de 
rinde.  C'étoit  un  entrepôt,  a« 
rapport  de  Ptolémée.  Anka  em 
fait  auffi  mention ,  &  dit  dans  ion 
périple^de  k  c^r  Erythrée  ^  qu*of 
y  pêchoit  des  perles  »  &  que  l'on 
employoit  à  cela  des  cùaûneb 
qui  avoient  mérité  la  mort. 

Le  golfe»  fur  lequel  cette  ville 
étoit  ^fttuée  ,  fe  nommoit  golfe 
Colchique.  . 

COLUMBARIA ,  Columbék^^ 


G)^Pcolem«  t.  VU,  ç.  !• 


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.        co 

rîa  ,  (*a)  Me  de  la  mer  de  Tofca- 
ne.  Elle  prenoit  fon  nom  des  pi- 
geons dont  il  y  avoit  fans  doute 
quantité.  Pline  la  notanrje  immé- 
diatement après  celle  de  Maena- 
xia  ,  aujourd'hui  Meloria,  qui 
■eft  devant  Livourne. 

COLUMBARIA ,  (h)  nom 
que  Feftus  donne  aux  trous  ,  que 
l'on  pratiquoit  aux  côtés  d'un 
-vaifTeau  ,  pour  y  pafler  les  ra- 
mes ,  parce  que  ces  trous  reffem- 
bloient  à  ceux  d*un  colombier. 

Le  nom  de  Columbaria  fe  don- 
noît  aufli  à  des  maufolées  de  fa- 
milles de  diftinâion ,  où  Ton  avoit 
pratiqué  des  cellules  ;  &  dans  ces 
cellules  des  rangées  de  niches  « 
placées  les  unes  fur  les  autres , 
Comme  les  boulins  dans  un  colom- 
bier. Ces  niches  renfermoient  des 
urnes  i-ondes  ,  olla  ;  il  y  en  avoit 
aui£  de  quarrées.  Un  Columbaria 
cohtenoit  (buvent  pluiieurs  urnes. 

Dom  Bernard  de  Montfaucon , 
dans  fon  Antiquité ,  préfente  des 
:C)olumbaria  donnés  par  Spon  ,  où 
îl'on  peut  remarquer  la  forme  des 
niches  ,  des  trous  profonds  dans 
ces  niches ,  &  de  quelques  vafes 
cinéraires ,  qu'on  voit  tout  en- 
tiers. 

■  M.  Fabretti  donne  la  forme  d'att- 
irés Columbaria  trouvés  fur  la  voie 
Aurélia  ;  ils  font  à  côté  d'un  efca- 
-tier,  où  Ion  remarque  dix  niches, 
dans  léfquelles  étoient  quarante 
c urnes  cinéraires  >  quatre  à  chaci*- 
ne.  Ces  Columbaria  appartenoif^t 
'à  la  famille  C«ci/w.  Nous  d>n- 
nons  ,  dit  Dom  Bernard  de  M)nt- 


'   C  O  525 

faucon  >  la  forme  un  peu  plus 
grande  de  l'une  des  niches ,  afin 
qu'on  puiffe  voir  comment  les 
quatre  urnes  cinéraires  y  étoienc 
placées.  M.  Fabretti  dit  qu'il  a  vu 
deux  de  ces  Columbaria  où  cha- 
que niche  avoit  quatre  urnes  ; 
c'étoit  fans  doute  pour  quelque 
famille  nombreufe.  Ces  olla  ou 
urnes  étoient  fouvent  tellement 
ajuftées  dans  leurs  trous  ,  qu'on 
ne  pouvoit  les  ôter  de-là  ,  ni  les 
tranfporter  ailleurs.  En  certaines 
niches  il  y  en  avoit  quatre,  en 
d'autres  il  n'y  en  avoit  que  deux , 
&  quelquefois  une  feulement , 
comme  on  peut  voir  dans  celles 
de  Spoo.  .D'autres  Columbaria 
ont  beaucoup  plus  de  niches  ,  & 
chaque  niche  a  deux  urnes. 

Ces  Columbaria  prenoient  auflî 
leurs  noms  des  olla  ou  des  urnes 
qui  y  étoient  placées ,  &  s'appel- 
loient  ollaria. 

COLUMELLE  [  L.  Junius 
MoDÉRATUS  ]  ,  X.  Junius  Mo- 
deratus  Olumêlla.  Voye^  Modé- 
ratus. 

COIUMEN  ,  Columen  ,  (c) 

nom  d^n  certain  lieu  d'Italie  ,  au 

rapport  de  Tite-  Live.  Ortelius 

croi  qu'il  étoit  dans  le  Latium  ,  y 

ves  le  mont  Algide,  &  qu'on 

rappelle  présentement  Colonia. 

,    COLUMNARIENS,Co/«OT- 

narîL  (d)  Ce  font  des  gens  de 

néant,  qui  ont  l'amé  vénale  & 

'  méchante ,  ainii  appeHés  à  caufe 

de  la  Colomne    Méria ,  où  \l'on 

affichoit  les  citations  qu*bn  faifoic 

^en  *  juftice  contre  ces  fortes  de 


(4)  Plin.  T.I.  p.  160. 
ib)  Antiq.  cxpK    par   D.  *eni 
Moncf.  Tom.  IV.  p.  11 1.  T  V.  p, 


I&  fuiv. 
(O  Tit.Li 
U;  Cicei.i 


L.  HT.  c.  »;. 
ad  Amic^  L.  VIII.  £pifl.  9. 


Digltized  by  LjOOQ iC 


5^4  CO 

gens.  On  trouve  ce  terme  dans 
une  lettre  de  Cœlius  Rufus  à  Ci- 
céron. 

COLURE,  Colurus^  nom 
commun  à  deux  grands  cercles  » 
que  Ton  fuppofe  s'entrecouper  à 
aneles  droits  aux  pôles  du  monde. 
Uan  paiTe  par  les  points  folfii- 
ciaux  y  c'efi-à-dire  >  par  les  points 
ou  rédipttque  touche  les  deux 
tropiques  ;&  Tautre  par  les  points 
équinoâiaux  ,  c'eft- à-dire  i  par 
les  pcMQts  oii  Técliptique  coupe 
réquateor  ;  ce  qui  a  fait  donner  au 
premier  le  nom  de  Colure  des  folf- 
tices  »  &  au  fecond  celui  de  Colure 
des  équinoxes. 

Les  Colûres,  en  coupant  aînfi 
réquateur  »  marquent  les  quatre 
faifons  de  l'année;  car,  ils  divi- 
itnx  rédiptique  en  quatre  parties 
égales  ,  à  comn^encer  par  le  poiilt 
de  réqutnoxe  du  printeihs.  Com- 
me ces  cercles  pafTeiK  par  les  pôles 
du  monde,  il  eft  (vident  qu'ils 
Ibnt  Tun  &  l'autre  aunombre  d^s 
Dxértdiens» 

Att  rcfte ,  ces  cercle^  étoienc 
plus  d*u£ige  dans  TaÔronomie 
ancienne  qu'ils  ne  font  ai^ourd'* 
hui»  Ce  n'ed  prefque  plus  c^e  par 
habttude  quon  en  fait  mention 
dans  les  Ouvrages  for  la  fphe^. 

Ils  ont  été  ain(i  nommés  N^e 
deox  mots  Grecs  Koaoç  >  mutilu\ 
iruncatus  ,  nmitilé  ,  tronqué  ,  &, 
êvpà  y  cauda ,  queue ,  comme  pft« 
raflant  avoir  la  queue  coupée , 
parce  qu*on  ne  les  voit  jamais  tout 
entiers  fur  notre  horizon. 
COLUTHUS ,  Coliuhus ,  {a) 

U)  Suid-  T.  I.  p.  1487. 
Ui>  Plio.  Xom.  I.  p.  tS}. 


CO  . 

KoacdGcç  ,  poëte  Grec.  Suidas  ,  Ic 
feui  des  Anciens  qui  parle  de  Co- 
luthus  ,  nous  apprend  feulement 
qu'il  étoit  de  Lycopolis ,  ville  de 
la  Thébaïde  en  Egypte ,  &  qu'il 
naquit  fous  le  règne  d*Ana(lafe  , 
qui  fuccéda  en  l'année  491  à  Ze- 
non. Il  nous  rede  de  Coluthus  un 
poëme  de  l'enlèvement  d'Hélène , 
dont  Suidas  ne  parle  point  ,  qui 
fut  trouvé  par  le  cardinal  Befta* 
rion  ,  proche  Bitonto  ,  dans  la 
terre  de  Bari.  Poftel ,  poëte  de 
Hambourg ,  l'a  traduit  en  vers 
Allemands.  La^cher,  autre  Sça- 
vant  du  Nord ,  en  avoit  préparé 
une  édition  plus  exaâe  &  plu» 
ample  que  celles  qui  avoient  pré- 
cédé ,  &  il  devoit  y  joindre  des 
fchoUes  Grecques  ,  des  variantes» 
des  diflîertations  philologiques  > 
un  gloflaire  Grec.  C'étoit  em- 
ployer beaucoup  d'érudition  pour 
un  ouvrage  fort  mince  en  tout 
fens.  Le  poëme  n'eft  en  effet 
qu'une  narration  aflez  feche  de 
l'enlèvement  d'Hélène  en  fuivant 
l'ordre  naturel  des  faits.  M.  da 
Molard  Ta  traduit  ep  François  en 
1742  avec  des  remarques  ^  in-ié 
à  Paris. 

COLYCANTIENS ,  Co/y,- 
cantii ,  (J>)  peuple  de  l'Afie  pro- 
prement dite.  Il  ne  fubfiftoit  dé^à 
plus  du  tems  de  Pline. 

COLYMBARIUM ,  Colym^ 

^^harium  ,   Kow/uCifiov  %  (c).  pro- 

"montoire  de  l'ifle  de  Sardaigne  , 

i^on  Ptolémée.  Il  devoit  être  (ut 

la\ôte  orientale. 

i^OLYMBETHRE ,  Colymr^ 


1 


\ 
(0  ?Açm,  L III,  c.  j. 


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co 

ètthra  ^  KoMM^Mepoe,  (tf)  terme 
qui  iîenifie  une  pifcine.  On  voyoit 
une  Colymbéthre  près  de  Méga* 
ris  en  Sicile.  On  attribuoh  à  Dé- 
dale la  conAruâion  de  cet  édifice, 
au  travers  duquel  le  fleuve  Âlabon 
fe  déchargeoit  dans  la  mer.  Ce 
uionunient  fubfiâoit  encore  du 
tems  de  Diodore  de  Sicile. 

COLYPES  ,  Colypes ,  bourg 
de  l'Attique  ,  d^ns  la  tribu  Égéï- 
de  y  félon  Suidas, 

COLYTTUS,  Colytttts,  (h) 
Ko;^i;ttoç  «  nom  d'un  quartier  de 
la  ville  d'Athènes ,  de  la  tribu 
Égéide.  On  difoit  que  les  enfans 
y  commençoient  à  parler  un  mois 
plutôt  que  dans  le  relie  de  la  ville* 
C  eft-là  qu'étoit  né  le  philofophe 
Platon  &  le  fameux  Mifanthrope 
Timon«  Ce  quartier  &  celui  de 
Mélitos  étoient  voifins  l'un  de 
l'autre.  Meurfius  critique  le  poëte 
Alciphron  &  Diogène  Laërce  de 
ce  qu'ils  écrivent  ce  mot  avec  deux 
il  ou  deux  M  ,  &  non  pas  avec  un 
feul  A  «  comme  Héfychius  >  Efchi- 
ne  &  Strab^n.  Mab  ,  tous  les 

marbres  font  conformes  à  cette 
manière  d'écrire  stvec  deux  //  ÔC 

un  T. 

COMAGÈNE ,  Comagtne^QU 

CoMMAGÉNE ,  avec  deux  MM. 

Voye^  Commaéène. 

COMAGÈNE  ,  Comagenum , 

ville  de  la  Pannonie ,  entre  Vien* 

se  ,  6c  le    mont    Cétius ,  félon 

l'Itinéraire  d'Antonin ,    à  vingt- 
quatre  mille  pas  de  l'une  6(  de 

l'amre.  La  Nptice  de  TEippire  en 

(^)  Diod.  Sicul,  p.  195.  jp.  »i4.  Mém.  de  TAcad.  des  ïnfcript. 

Ih)  Sirab.  p.  6î.  Plut.  T.  I.  p.  8^i.      I&  Bell.  Le».  Tom.  XIX.  pag.  53  ,  54, 
(t)  Strab.  p.  5*1,  53s,  ^16.  Ptolem.lToiH.  XX\,  p.  421. 
I..  V.  c.  7.  Plin.  X.  1.  pag.  30a.  Ap^ian.  1 


fait  mention  comme  d*tin  lieu  oh 
il  y  avoir  garnifon. 

Trébellius  PoHion  parle  dans  la 
vie  de  l'empereur  Claude  II 9  dNi- 
ne  aventure  qu'il  eut  àComagèDC 
Il  n'en  eft  point  parlé  dans  l'édi- 
tion ordinaire  ;  mais ,  Gruter  6c 
Saumaife  ont  remarqué  qu'on  ea 
trouve  le  récit  dans  le  manufcric 
de  la  bibliothèque  Palatine. 

Lazius  dit  que  Comagène  eft 
Holnbourg  ou  Hombourg ,  ville 
d'Autriche.  Dans  fa  carte  de  cette 
contrée  y  il  met   une  montagne 

Sxx'Az^^éiXtComageiULsmons,  & 
ont  il  dit  que  le  nom  vulgaire 
eft  Kaunberg  ,  q^'on  écrit  auifi 
Chaumberg ,  6c  il  croit  que  cette 
montagne  ^ù.  la  même  que  le  moue 
Cétius  de  Ptolémée. 

COM AGENI ,  les  babîtans  dt 
Comaeène.  Voye^  Comagène. 

COMANE.  Nous  fommes 
daos  l'ufage  d'écrire  ainfi  en  fin* 
gulier  ce  nom ,  quoiqu'il  doive 
être  écrit  Comanes  en  pluriel. 
Du  moins  »  les  Latins  &  les  Grecs 
le  lifent  de  cette  manière  ;  & 
dans  ces  fortes  de  circonftances  , 
nous  fuivons  ordinairement  leur 
onhographe.  C'eft  pour  cette  rai- 
foa  que  dans  les  articles  fuivans 
on  trouvera  le  nom  de  Comane 
écrit  en  pluriel. 

COMANES,  Comana  ,  (c) 
K^f<av«  «  ville  de  lAfie  mineure  , 
dans  la  Cappadoce  ,  &  pour  par« 
1er  plus  juite ,  dans  la  Cataonie  , 
qui  étoit  un  canton  de  la  Cappa- 
doce. Elle  étoit  fituée  fur  le  fleuve 


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<i26  C  O 

Sa  rus  ,  dans  les  vallées  profondes 
&  étroites  du  mont  Antitaurus. 

C'étoit  une  ville  mémorable  au 
rapport  de  Strabon.  Son  temple 
de  Bellone  itir  tout  étoit  fort  ce* 
lebre.  Il  y  avoit  une  multitude 
infinie  de  ces  prétendus  Prophe* 
tes  ,  qui  fe  difoiem  infpirés  d'une 
fureur  divine,  6c  d'autres  minières 
deflinés  au  fervice  du  temple.  Les 
habitans  de  cette  ville ,  du  tems 
de  Strabon  ,  quoique  d'ailleurs 
fournis  à  un  Roi,  étoient  cependant 
entièrement  dévoués  aux  volon- 
tés du  fouverain  Pontife,  qui  étoit 
le  maitre,&du  temple»  &  de  tous 
les  minières  qui  le  deHervoient. 
Lorfque  notre  Géographe  y  pafFa, 
ces  minières  étoient  au  nombre  de 
ût  mille  ,  tant  hommes  que  fem- 
mes. Le  temple  podédoit  beau- 
coup de  terres  ,  dont  le  revenu 
étoit  pour  le  fouverain  Pontife; 
&  ce  fouverain  Pontife  étoii  le 
plus  honoré,  après  le  Roi,  dans  la 
Cappadoce.  Les  Rois  &  les  fou* 
verains  Pontifes  étoient  tirés  or- 
dinairement dp  la  même  famille. 
On  croyoit  qu'Orefte  &  Iphigé- 
nie  fa  fœur  avoient  apporté  à 
Comanes  les  chofes  facrées  ^  de  la 
Scythie  Taurique  ,  &  y  avoient 
dépofé  la  chevelure  de  cette 
Princeffe  ;  d'où  la  ville  avoit  pris 
fon  nom ,  la  chevelure  en  Grec 
•'appellaiit  Kr«M. 

Cette  ville  étoit  partagée  par  le 
fleuve  Sarus.  Procope  ,  cité  par 
Ortélius,  la  met  dans  la  petite 
Arménie  fur  le  même  fleuve  ;  fur- 
quoi  il  faut  fe  rappeller  que  cer- 


co 

taSns  Auteurs  anciens  ont  comprît 
la  Cataonie  dans  l'Arménie  mi- 
neure. Dans  ce  (èns ,  la  pofîtîon 
indiquée  par  Procope  ,  eft  exade. 

L'on  a  au(B  donné  ^  la  ville  de 
Comanes  le  nom  de  Cryfe.  Elle 
prit  encore  celui  de  Julia  Pia  Fé-r 
lix  Auguila ,  de  la  femme  de 
l'empereur  Sévère  ,  fous  le  règne 
duquel  on  y  envoya  une  colo* 
nie. 

COMANES  ,  Comana  ,  (a) 
K^juctfet  «  autre  ville  de  l' Aûe  mi- 
neure >  dans  le  royaume  de  Ponr, 
étoit  fituée  fur  le  fleuve  Iris.  Pto- 
lémée  la  furnomme  Pontica.  Con- 
facrée  à  la  même  DéefTe  que  la 
ville  de  Comanes  de  Cappadoce  , 
elle  fuivoit  auffi  prefque  les  mê- 
mes rits.  Ses  Prêtres  fe  préten- 
doient  également  infpirés  d'une 
fureur  divine  ;  &  on  leur  rendoit 
de  grands  honneurs.  Le  fouverain 
Pontife ,  fous  les  anciens  Rois  ^  fe 
ceignoit  le  diadème  deux  tbis  l'an, 
à  une  certaine  folemnité'appeliée 
la  fortîe  de  la  DéefTe  ;  &  il  étoit  le 
plus  élevé  en  honneur  après  le 
Roi. 

Après  la  défaite  de  Mithridate» 
Pompée  donna  à  Archélatis  la 
fbuveraine  facrificature  de  Coma- 
nes ,  &  ajouta  au  champ  facré,  un 
autre  champ  qui  avoit  deux  fchœ- 
nes  de  circuit ,  ou  foixante  flades. 
Il  jordonna  en  même  tems  aux  ha- 
bitans d'obéir  à  Archélaiis.  Celui- 
ci  devint  ainfi  leur  chef  fuprênte  ; 
ainfi  que  des  Prêtres  qui  étoient 
dans  la  ville  ,  excepté  feulemetit 
qu'il  ne  pbuvoit  pas  les  vendre.  Il 


.  (4)  Strab.  p.  547,  557.  &  feq»    Plîn.U'Acad.  des  Infcrlpt.  &  B^l.  Lctt.  T. 

T.  I.  p.  30^,  Ftolem.  L.  V.  c.  6.  Hirt.    XXI.  p.  411. 

Panf.  de  Bell.  A£cic.  pag.  74».  Mém.  de  |  * 


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CL 

tut  pour  fucceffeur  fon  fils ,  qui 
fat  remplacé  par  Lycomede,  au- 
quel on  donna  quatre  fchœnes  de 
terre  de  plus  que  n'avoient  eu  Tes 
t>rédéce{feurs.  A  Lycomede  fuc- 
céda  Ditei^us ,  fils  d'Adîatorix. 
Il  fut  redevable  de  fa  dignité  à 
Augure  f  qui  ,  dit  on ,  voulut 
récompenfer  par -là  le  courage 
qu'il  avoit  montré  daiis  une  cir- 
conftance. 

Strabon  dit  que  cette  ville  étoit 
fort  peuplée  ,  Ôc  qu'elle  étoît 
comme  un  entrepôt  pour  ceux  qui 
irenoient  d'Arménie.  La  fête  , 
tîite  la  fortie  de  la  DéefTe ,  y  atti- 
f  oit  beaucoup  de  monde.  L'on  s'y 
-rendoit  en  foule ,  hommes  &L  fem- 
mes >  des  villes  6c  des  campagnes 
'des  environs.  L'on  y  voyoit  en 
touttems  des  pèlerins  qui  venoient 
faire  des  vœux  &  des  facrifîces  à 
la  Déefle.  Les  habitans  fe  trai- 
'toient  avec  délicateffe.  Leurs  hé- 
ritages étoienc  couverts  de  vi- 
-gnobles.  11  y  avoit  piufieurs  fem- 
-fnes^qui  faifoient  un, trafic  hon- 
teux de  leur  corps,  &  dont  la 
plupart  étoient  des  Prétrefles  ; 
car,  cette  ville,  félon  la  remar- 
qtie  de  Strabon  ,  étoit  une  autre 
Corinthe.  Le  grand  nombre  de 
"femmes  débauchées  vouées  à  Ve- 
nus ,  que  Ton  y  trouvoit ,  y  ame- 
noit  piufieurs  étrangers ,  qui  s'y 
.^uinoient  par  les  grande.s  dépendes 
qu'ils  y  faifoient. 

Pline  parle  de  Comanes  com- 
me d'une  ville  qui  ne  fubfiftoit 
plus,  auffi-bien  que  les  villes  de 
Thémifcyre,  Sotira  &  Àmafie. 


C  L  $17 

H  ajoute  après  le  mot  Comana  : 
nunc  Manuïum.  Ortélius  &  que!» 
ques  autres  ont  cru  que  par  ces 
deux  derniers  mots,  Pline  avoic 
voulu  dire  que  Comanes  avoit  été 
appeilée  de  fon  tems  Manteium. 
Ce  n'eu  point  cela  ,  il  dit  au  con- 
traire qu'elle  ne  fubfiftoic  déjà 
plus,/tt^.  S'il  ajoute  nunc  Man^- 
uium^  c'eft  pour  faire  entendre 
que  de  toutes  les  villes  qu'il  vient 
de  nommer ,  &  qui  étoient  dé- 
truites ,  il  ne  reftoit  plus  que  l'o- 
racle. Du  refte ,  Pline  s'eft  trom- 
pé à  l'égard  d' Amafie  qui  fubfiila 
long-tems  encore  après  lui. 

COMANIE,  Comania,  (a) 
KofAxrla  ,  contrée  d'Afie  ,  félon 
Xénophon.  Pline  fait  mention  d'un 
peuple  nommé  Comani  ,  qui  doit 
être  celui  de  cette  contrée.  C'eft 
aufili  vraifemblablement  le  peuple 
nommé  Xo^koî  ,  Com  par  Ptolé- 
mée.  Pomponius-Méla  ({iftinguc/ 
dans  ces  cantons  les  peuples  Co- 
mares  &  Coamanes  ,  voifins  des 
Paropamifiens. 

COMANUS,  Comanus,  {hy 
fils  de  Nannus ,  roi  des  Ségobri- 
giens.  Ce  fut  ce  dernier  Prince  , 
qui  céda  aux  Phocéens  le  lieu , 
où  ils  bâtirent  la  ville  de  Marfeil- 
le.  Après  la  mort  de  Nannus  , 
Comanus  lui  fuccéda  au  royaume 
des  Ségobrigiens. 

Quelque  tems  après ,  un  Lî-- 
gùrien  lui  repréfenta  que  Mar- 
(eille  feroit  un  jour  funefte  au  re- 
pos &  à  la  liberté  des  peuples 
voifins  ;  qu'il  devoit  fe  hâter  de 
l'opprimer  dans  fa  naifiance,  de 


çai)  Xcnoph.  p.  4»(5.  Plin.  T 
114.  Ptglcm*  L.  VI 


c.  16.  Ponap.  Mcl.| 


19 


Ib)  Jttft,  L,  XUII.  c,  4. 


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528  C  O 

peur  aue  quand  les  forces  de  cette 
viile  feroient  accrues ,  il  n'en  fut 
lui-même  accablé.  Il  appuya  Ton 
difcours  du  conte  de  cette  chienne 
de  la  fable,  qui,  pleine  &  tou- 
chant prefque  à  fon  terme  ,  pria 
un  berger  de  lui  prêter  fimplçment 
une  place  où  elle  pût  mettre  bas 
fes  petits  ;  qu'en  ayant  obtenu 
cette  grâce  elle  lui  en  demanda 
une  nouvelle  ,  &  le  conjura  de 
vouloir  bien  perme^re  qu'elle  les 
nourrit  au  même  endroit  ;  mais 
qu'enfin  après  qu'ils  furent  deve- 
nus grands  ,  &  qu'elle  fe  vie  for- 
tifiée de  ce  fecours  domefiique^ 
elle  ufurpa  la  propriété  du  lieu  ; 
qu'ainfi ,  les  Marfeillois  qui  n'oc- 
cupoient  alors  ce  coin  de  terre 
qu'autant  qu'on  vouloit  bien  le 
fouffrir  9  deviendroient  un  )our  Its 
maures  de  tout  le  païs.  G>ma- 
nus ,  animé  par  cçs  paroles ,  ma* 
^hine  la  perte  des  Marfeillois  par 
les  embûches  qu'il  leur  prépare.  Il 
choifit  pour  cet  effet  le  jour  qu'ils 
célébroient  la  fête  de  Flore.  Il  y 
envoie  un  grand  nombre  de  braves 
hommes,qui  entrèrent  dans  la  yille 
à  la  vue  de  tout  le  monde ,  par  le 
droit  d'hofpitalité  commun  entre 
les  deux  peuples.  Il  y  en  fait  con- 
duire fecrétement  plufieurs  autres 
dans  des  chariots  couverts  de  joncs 
&  de  feuilles;  &  lui,il  fe  cache  avec 
une  armée  derrière  les  montagnes 
voiiines ,  afin  de  fe  trouver  à  ' 
point  noi9:^mé  aux  portes  /  au  mo- 
ment qu^  les  conjurés  les  lui  ou- 
vriroiem^  pendant  la  nuit ,  6c  pour 
,fe  rendre  maître  de  la  ville  enfe- 


co 

velle  dans  le  fommeil  &  dans  k 


vm. 


Mais,  une  certaine  dame,  pa- 
rente de  Comanus,  touchée  du  fort 
2ui  attendoit  un  jeune  &  aimable 
rrec ,  avec  qui  elle  avoir  un 
'  commerce  de  galanterie  ,  lui  dé- 
couvrit les  deffeins  qu'on  tra- 
moit  contre  fa  patrie,  dans  le  tems 
qu'il  la  tenoit  entre  fes  bras,  ÔC 
l'exhorta  à  fe  dérober  au  péril  qui 
le  menaçoit.  Le  jeune  homme 
court  d'abord  le  révéler  aux  Ma* 
eiftrats ,  qui ,  profitant  de  l'avis  , 
font  faire  main-baffe  fur  cous  les 
Liguriens  ,  tant  ceux  qu'on  prit 
dans  la  ville ,  que  ceux  qu'on  tira 
de  deffous  le  jonc  qui  lescouvroit. 
Après  quoi ,  tournant  contre  Co- 
manus les  mêmes  embûches  qu'il 
leurdreffoir,  ils  le  furprennentf 
&  le  tuenc  avec  fèpt  mille  hom- 
mes. C'eff  de-là  que  les  Marfeil- 
lois prirent  la  coûtutiie  de  fermer 
leurs  portes  les  jours  de  fête ,  de 
faire  le  guet,  de  pofer  des  fenti- 
nelles  fur  leurs  remparu,  &  ds 
reconnoitre  les  étrangers. 

COM ASIE  ,  Comafia ,  (  4  ) 
l'une  des  Grâces  fuivanc  un  ancien 
monument.  Ce  nom  ne  fe  trouve 
nulle  autre  part. 

.  COtAASTVS,  Comaftus,y'û' 
lage  de  la  Perfe  propre ,  au  rap- 
pof;t  de  Polyen. 

COUATE,  jOomatus  ,  (A 
Chevrier ,  que  ceux  de  fa  profef- 
fion  a  voient  pris  pour  le  héros  de 
leurs  chanfons.  C'eff  peut-éue  le 
même  qui  fuit. 

COMATE  ,   Comatus,  (c) 

(S-)    Amiq.   expl.  par  D.   £em.  det  Bell.  Lett.  T.  IV.  p.  547. 
Momf.  T.  I.  p.  177.  (t)  Mém.   de   TAcad.  des   Inlc,   9t 

{k)  Mém.  dç  TAcad.  jles  Infcrîpc.  &|ficll.  \,^iu  Tom.  XII.  pag.  46.  . 

certain 


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co 

certain  perfonnage  qui  promit  un 
agneau  aux  Nymphes  >  ayant  déjà 
fait  préfent  de  deux  chèvres  aux 
Mules. 

COMAZON,  Comaion,  (a) 
terme  Grec ,  qui  fignifie  farceur. 
On  donna  ce  nom  à  Eutychien , 
flatteur  de  l'empereur  Héliogaba*- 
le,  parce  qu'il  étoit  boufFon  & 
farceur  de  proFeffion. 

COMhABVS  ^Combabus,  {b) 
Kof^CiCoç  9  jeune  Seigneur  de  la 
cour  du  rot  de  Syrie ,  Antiochus 
I  furnommé  Soter.  Ce  Prince  Tai- 
moit  extrêmement.  La  reine  Scra- 
tonice  ayant  fait  vœu  de  bâtir  un 
temple  à  Junon  dans  la  Ville  fa- 
cfée,  Combabus  fut  nommé  pour 
accompagner  cette  Princefle  dans 
fbn  voyage  »  quoiqu'il  ïk  tout  ce  ; 
qu'il  pût  pours'en  excufer,  de  peur 
que  fa  jeunefle  &  fa  beauté  ne 
donnafTenc  quelque  prKe  à  la  mé<- 
difance.  Mais  ^  comme  il  vit  que 
le  Roi  le  vouloit  abfolument  ,il  fe. 
retira  chez  lui  fort  trifte,  après 
avoir  obtenu  fept  jours  pour  fe 
préparer  au  départ.  Il  commença 
U  à  déplorer  fa  condition  ,  de  fe 
voir  fur  le  point  de  perdre  les  bon- 
i^S  grâces  du  Prince ,  dont  il  étoit 
le  favori ,  &  peut-être  la  vie ,  s'il 
venoit  à  être  accufé  du  crime  Qu'- 
il appréhendoit.  Dahs  ce  délef^ 
poir,  il  fe  coupa  les  parties  qui 
pouvoient  donner  du  foupçon  de 
lui  ;  &  les  ayant  fait  embaumer , 
il  les  porta  au  Prince  dans  un  vafe 
cacheté  ,  &  lui  dit  qu'il  le  prioit 
de  lui  garder  ce  tréfor  jufqu'à  fon 
retour  ;  ce  que  le  Prince  lui  pro- 


C  O  529 

mit  ;  &  après  l'avoir  fcellé  de  fon 
(ceau  ,  il  le  remit  entre  les  mains 
de  ceux  qui  avoient  la  garde  de 
fon  cabinet.  Combabus  partit  en-* 
fuite  ,  &  fut  trois  ans  à  ion  voya- 
ge. Cependant ,  ce  qu'il  avoit 
appréhendé»  arriva;  car»  cette 
jeune  PrincefTe  devint  amoureufe 
de  lui ,  par  une  longue  fréquenta- 
tion f  en  rabfence  de  fon  mari* 

D'abord  elle  fit  tout  ce  qu'elle 
pUt  pour  vaincre  ou  diffimuler  fon 
amour  ;  mais ,  c<>mme  elle  vit  que 
cela  ne  fervoit  qu'à  l'augmenter  , 
6c  que  l'entretien  continuel  d'un 
jeune  Seigneur  fi  accompli  »  l'allu* 
moit  de  plus  en  plus  »  elle  réfoluc 
à  la  fin  de  fe  déclarer^  Pour  le  faire 
plus  adroitement»  elle  fit  un  grand 
feAin  »  afin  d'avoir  moins  de  pu- 
deur,  &  de  le  pouvoir  attribuer  à 
la  gaieté.  Aprèç  qu'on  eut  donc 
foupé  ,  elle  entra  dans  l'apparte- 
ment de  Combabus  ,  &  lui  dé- 
couvrit fa  pafTion.  Il  lui  répondit 
premièrement  qu'il  voyoit  bien 
que  c'étoit  par  une  galanterie  Sc 
pour  l'éprouver,  afin  de  fe  mo- 
quer après  de  lui.  Mais  ^  lorfqu'il 
vie  qu'elle  perfiftoit  dans  fon  def- 
fein  »  il  s'excufa  fur  la  fidélité  qu'il 
de  voit  à  fon  maître.  A  la  fin  , 
comme  elle  ne  recevoit  aucune 
réponfe  »  il  lui  fit  voir  qu'il  n'étoit 
pas  en  état  de  la  fervir  ,  ajoutant 
les  raifons  qui  l'avoient  pu  obliger 
à  fe  faire  ce  fanglant  outrage.  Lsi 
Princefle»  furpriie  d'un  accident  (î 
imprévu»  quitta  fa  pourfuite  »  6c 
non  pas  (on  amour  ;  de  forte 
qu'elle  ne  pou  voit  vivre  fans  lui  ^ 


(«)  Ctév.  Hift.  des  Einp.  Tom.  V. 

Tom.  XI. 


(h)  Ludan.  T,  II.  p.  890.  é"  fii* 

LI 


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5P  GO 

&  tâchoit  de  divertir  fa  paflîon  ^ 
dans  la  douceur  de  (on  entretien. 
Cependant ,  la  chofe  devint  ft  pu* 
i}lique^  qu'elle  parvint  jufqu'aux 
oreilles  du  Roi ,  &  ce  Prince  indi- 
gné rappella  Cotnbabus  en  dili* 
gence..  Quelques-uns  difent  que 
ce  fut  la  Princeffe  même  qui  \\  c- 
cufa  de  Tavoir  voulu  corrpmpre  » 
comme  Phèdre  fit  Hippolyte  , 
voyant  qu'elle  n-'en  pouvoit  venir 
à  bout. 

Quoi  qu'il  en  fck ,  Combabus  , 
afliiré  de  fa  vertu  ,  fe  rendit 
promptement  auprès  du  Roi;  6c 
il  ne  fut  pas  plutôt  arrivé  qu'il  fût 
atrétéprifonnier  ;  6c  le  Roi ,  ayant 
adembléfon  confeil,  l'accufapu- 
bliquement  d'avoir  débauché  fa 
femme  «  trahi  fon  bienfaiteur ,  fie 
feuille  les  myftères  des  Dieux  par 
un  adultère.  Toutes  les  excufes 
au*il  eût  pu  alléguer,  ne  lui  euffent 
(ervi  de  rien ,  parce  que  la  vrai- 
femblance  ètoit  contre  lui  f  & 
qui]  y  avoit-là  une  infinité  de  faux 
témoins  pour  le  condamner.  Auifi 
ne  répondit-il  rien  à  ces  accufa- 
lions  ;  mais ,  comme  il  vit  qu'on 
l'ailoit  envoyer  au  fupplice ,  il 
pria  le  Roi  de  lui  remettre  entre 
les  mains  le  dépôt  qu'il  lui  avoir 
donné,  comme  l'accufanr  fous 
tnain  de  (e  le  vouloir  approprier» 
Le  Prince  l'ayant  fait  venir  aufli- 
tot ,  il  rompît  le  cachet  &  fit  voir 
les  pièces  juftificatives  de  fon  in- 
nocence. Alors ,  le  Roi  tout  con- 
fus ,  courut  l'embrafTer  &  fe  plai*- 
gnit  à  lui  du  crime  qu'il  avott 
commb  comre  foi-même.  Mais^ 
pour  le  confoler  du  mal  qu'il  lui 
avoit  fait ,  il  envoya  fur  le  champ 
tous  fe&  accu^iteurs  au  fupplice  ; 


&  ils  reçurent  la  mort  au  moment 
qu'ils  attendoient  la  récompenfe. 
Éûfuite,  il  combla  ce  jeune  Sei-> 
gneur  de  nouvelles  faveurs ,  Sc 
voulut  qu'il  n'y  eût  rien  de  fecre^ 
pour  lui  f  &  qu'il  pût  entrer  à 
toute  heure  où  étoit  le  Roi.  Après 
cela ,  il  kTrenvoya  ,  à  fa  prière  , 
travailler  à  laccompliflement  de 
T-ouvrage  qui  étoit  demeuré  im- 
partit ;  &  pour  récompenfe  de  fa 
vertu  y  il  lui  fit  drefler  une  ilatne 
d'airain  dans  ce  même  temple ,  en 
habit  d'homme ,  avec  un  vifage 
de  .femme ,  fait  de  la  main  dti 
meilleur  maître  de  ce  tems-là« 

On  dit  que  plufieurs  de  fes 
amis»  par  complaifance,  ou  par 
infpiration ,  fe  firent  Eunuques  à 
fon  exemple ,  &  qu'ils  allèrent 
pafler  là  avec  lui  ^  le  refte  de  leurs . 
jours  pour  le  confoler.  Cette  cou- 
tume fe  conlerva  long^tems  parmi 
les  Prêtres  de  ce  temple;  ils  n'a« 
voient  même ,  ni  d'autres  robes  , 
ni  d'autres  occupations  que  celles 
des  femmes ,  &  cela  par  une  ren« 
contre  malheureufequi  arriva  en- 
core  à  Combabus.  Car»  on  dit 
qu'une  jeune  étrangère ,  étant  de- 
venue amoureufe  die  lui ,  fe  tua 
de  défefpoir ,  après  qu'elle  eut  ap- 
pris ce  qu'il  étoit;  de  forte  que 
touché  véritablement  de  ce  mal- 
heur ,  il  ne  s'habiHa  plus  depuis 
qu'en  femme ,  afin  que  perfonne  à 
l'avenir  n'y  fût  trompé. 

COMBAT  ,  Certamen  ,  Pa* 
gna ,  Pralium  >  fe  dit  en  général 
d'une  querelle» ou  d'un  différend 
qui  fe  décide  par  la  voie  des  ar- 
mes. 

Dans  une  guerre ,  les  Auteurs 
font  une  difiinâion  entre  un  Corn* 


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co 

bat  &  une  bataille  ;  cette  dernière 
exprime  l'aâîon  générale  de  tonte 
l-armée/au  lieu  que  le  Combat  ne 
fignifie  qu'une  efcarmouche  parti* 
Gulière,  ou  l'aâion  d'une  ample 
partie  de  Tarmée  ;  de  forte  que 
le  combat  eft  proprement  une 
partie  d'une  bataille.  Foye{  Ba- 
taille. 

COMBAT  SINGULIER, 
Certamen  Singulare.  (a)  C'cft  un 
Combat  d*un  feul  à  un  feul.  On 
eh  trouve  des  exemples  dans 
THiftoire ,  tant  Sacrée  que  Pro- 
fane. David  ,  chez  les  Hébf eux , 
combat  contre  le  géant  Goliath  , 

Su'il  terrafle.  T.  Manlius,  Fan  de 
Lomé  394 ,  remporte  une  vic- 
toire ftgnalée  fur  un  Gaulois ,  qui 
avoit  défié  le  plus  brave  des  Ro- 
mains de  venir  fe  mefurer  avec 
lui. 

Il  a  été  un  tems  que  les  procès- 
fe  décidoient  par  le  Combat  fin- 
gulier.  On  fuppofoit  que  Dieu 

*  n'accordoit  la  viéioire  qu'à  celui  * 
qui  avoit  le  meilleur  droit.  Cela 
arrivoit  en  matière  civile,  aoffi-* 
bien  qu'en  matière  criminelle. 
L'accufateur  Juroit  fur  la  vérité  de 
fon  accufation  ,  &  l'accufé  lui 
donnoit  le  dément?,  fur  quoi  cha-^ 
cun  jetioit  fon  gage  de  bataille  en 
Juftice,  Alors  ,  on  conf^tuoit  les* 
dâux  champions  prifonniers  juf^ 
qu*au  jour  du  Combat.  Le  défen<-' 

.  deur  avoit  le  choix  des  armés  ;  & 
s'il  n*étoit  point  vaincu  avant  le 
coucher  du  (bleil ,  il  étoit  abfous 
&  cenfé  viftorieux.  Cet  abus  étoit 
autrefois  tellement  autorifé ,  que 


RoU.  Hi», 
(*;  Ad 


r.  L.  I.  c.  17.  V.  4.  ^  /rj.l 
.  Rom.  T.  ïl.  p.  15  j  ,  T54.  ] 
Corioilv  EpHk.  !•  c.  9.  v.  %$*  | 


CO  5jt 

les  Évéques  &  les  Juges  ecclé- 
fiaftiques  ordonnoient  le  Combat 
dans  les  chofes  obfcures  &  dou- 
teufes.  On  rapporte  qu'Alfonfe  9 
roi  de  Caflille  ,  ayant  voulu  abo- 
lir le  rit  Mozarabique  pour  intro- 
duire rOâice  Romain ,  &  le  peu- 
ple s'y  étant  oppofé  ^  on  convint  * 
de  terminer  le  différend  par  un 
Combat. 

COMBAT  ,  Certamen  ,  jégortf 
A*y^¥ ,  {h)  s'entend  des  jeux  fo- 
lemnels  des  Grecs  &  des  Ro- 
mains à  l'honneur  des  Dieux,  telsr 
qu'étoient  les  jeux  Olympiques  i 
les  PythienS ,  les  Néméens ,  les 
Iflhmiqués ,  les  Combats  du  Cir- 

3ue  ,  les  Aâiens  ,  &  les  autres 
ont  nous  parlerons  en  leur  place» 
Les  Combats  qui  s'y  faifoient  » 
étoient  la  courfe ,  la  lutte ,  les 
coups  de  poingt ,  le  palec ,  &c. 
Les  combattans ,  qui  fe  nom- 
moient  Athlètes.,,  s'y  préparoient 
dès  la  jeunefTe  parades  exercices 
continuels  &  un  régime  très- 
exaâ.  Ils  ne  mangeoient  que  de 
certaines  viandes  Ôc  à  certaines 
heures  ;  ils  ne  buvoient  point  de 
vin  ,  &  n  avoient  point  de  com- 
merce avec  les  femmes.  Leur  tra* 
vail  &  leur  repos  étoient  réglés  ; 
c'eft  par  l'exemple  de  ces  com- 
battans, que  Saint  Paul  exhone  les 
Chrétiens  à  s'abftenir  de  tout. 
Foyei  Athlètes. 

COMBATS  [  Les  ]  ,  (c)  font 
perfonnifiés  dans  le  fyAême  de 
k  Théogonie  d'Héfiode.  Ce  Poë- 
te  les  faiu  fils  de  la  Difcorde. 

(f)  Mém.  de  PAcad.  det  Infcrlpt.  $c 
Bdl.  Letl.  Tom.  XVm.  j*ag.  j, 

Llij 


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53^  CO 

COMBE, Combe ,  (a)  fille  d'O- 
phius  ,  &it  métamorphofée  en  oi- 
leau ,  &  évita  par  cette  aventure 
la  furie  de  ks  enfans^  qui  vouloient 
Taffadîner. 

Cette  fable  fienifie  que  Combe, 
par  fon  adrefle,  ^happa  des  mains 
de  Tes  enfans.  Cette  princefTe  en 
s^voit  un  aifez  grand  nombre ,  & 
on  lui  en  donne  jufqu'à  cent. 

Toi  qui  fouhaites  des  enfans 
Comme  un  avare  la  richejfe  f 
£t  qui  crois  que  de  nos  vieux  ans 
Ils  font  la  paix  &  Vallégrejfe  ; 
Vois  par  cet  exemple  fameux  » 
Que  tu  nefçais  ce  que  tu  veux  , 
Ou  que  tu  veux  fouvent  la  peine. 
Combe  en  reçut  beaucottp  d* appui  p 
Il  en  a  plus  d*une  centaine  , 
J^t  tous  confpirent  contre  lui. 

Il  y  en  a  qui ,  comme  on  le  voit 
par  ces  vers,  font  de  Combe  un 
prince  &  non  une  prînceiTe.  L'en- 
droit ,  où  Ovide  en  fait  mention , 
cft  également  fufceptible  de  l'un 
&  dé  l'autre  fens. 

Adjacet  his  pleuron  in  qua  trepi'^ 
dantibus  alis 

Ophias  cffugit  natorum  vulnera 
Combe* 

•  Le  plus  grand  nombre  cepen- 
dant s'accorde  à  prendre  Combe 
pour  une  perfonne  du  fexe  fémi- 
ain  y  &  certains  la  font  fille  d'Af* 
copus ,  &  prétendent  qu'elle  pad 
fe  pour  avoir  la  première  inventé 

(«>  Ovld.  Mecam.  L.  VU. 

pa    M.  rAbb.  Ban.  Tom.  VIII 

{h)  Tit.U?.L,XXXVm. 


l 


CO 

les  armes  d'airain  ;  d'où  vient 
u'ellç  a  été  fumommée  Chakis. 
.e  erand  nombre  d'enfans  qu'elle 
avott  eus ,  donna  lien  à  un  pro* 
verbe  parmi  les  Grecs  :  Elle  a 
m  autant  d^ enfans  que  Combe  ^ 
pour  dire  une  femme  féconde. 

COMBENNONS  ,  Comben^ 
nones.  Voyez  Benne. 
,  COMBOLOMARUS,  Com^ 
hoiomarus ,  (M  roi  d'une  partie  des 
Gaulois  »  établis  dans  l'Afie  mi* 
neure.  Ce  Prince  vivoit  environ 
189  ans  avant  Jefus-Chrift;  c'eft- 
à-dire ,  dans  le  tems  que  Tes  fu- 
jets  &  les  autres  Gaulois  du  pats 
furent  réduits  fous  lapuiâance  des 
Romains. 

COMBOS,  Com^x, terme, 
(c)  qui  avoit  été  introduit,  com* 
me  celui  d'une  ville  dans  ce*  vers 
de  Ju vénal  :  Ardetadhuc  Ombos& 
T^ntyra;  par  des  copiftes  ignorans 
oui  »  doublant  le  c  du  mot  adhuc^ 
lavoknt  répété  au  commence* 
ment  du  mot  fuivant.  Ortélios  a 
oté  ciette  ordure  &  rétabli  le  vrai 
nom  qui  eCl  Ombos ,  ea  dépit  de» 
manufcrits  &  de  tous  les  impri- 
més qu'il  y  avoit  de  fon  tems* 

COMBRÉE,  Combrea,  {d) 
KcSft^p^mf  vilte  de  Macédoine. 
Hérodote  y  qui  fait  mention  de 
cette  ville,  la  met  dans  le  voifî- 
nage  de  l'aliène.  Il  nomme  Crof- 
fée  le  pais  où  il  la  place  avec  quel- 
ques autres. 

COMBULTERIE,  Comhul^ 
teriuf  ville  appeUée  auffi  Corn- 
pulterie.  Voyez  Compulterie. 

COMBUTIS,  Combutis,  (t) 


.c.9.Myth.l    (c) 


Juven.  Stcyr.  15.  v.  ){• 
Herod.  L.  VIX,  c.  xi|» 
Pauf.  p.  650. 


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co 

Kl/ul^ovriç ,  l'un  des  chefs  des  Gau- 
lois ,  qui  firent  une  irruption  dans 
la  Grèce  fous  la  conduite  du  fé- 
cond Brennus.  Foye^  Oreftorius* 

COME,  Comef  Foyei  Macr^ 
Comç, 

COMtJyiE  ^Comœdia,  nom 
d*une  maifon  de  campagne ,  que 
Pline  I^  Jeune  avoit  auprès  du  lac 
de  Corne. 

COMÉDIE,  Comœdia,  (a) 
Ku/Ltcùttla  ,  eft  rimitation  des 
mœurs  mi(e  en  a^ion  ;  imitation 
des  mœurs ,  en  quoi  elle  diffère 
de  la  tragédie  &  du  poëme  héroï- 


que ;  imitation  en  action ,  en  quoi 
elle  diffère  du  poëme  didaâique 
moral  &  du  fimple  dialogue. 

La  Comédie  diffère  particuliè- 
rement de  la  tragédie,  dans  fon 
principe,  dans  fes  moyens  &  dans 
ja  fin.  La  fenfibilité  humaine  eft 
le  principe  d'où  part  la  tragédie; 
le  pathétique  en  eft  le  moyen  ; 
rhorreur  des  grands  crimes  &  l'a- 
mour des  fublimes  vertus  font  le« 
fins  qu'elle  fe  propofe.  La  malice 
naturelle  aux  hommes  eft  le  prinr 
cipe  de  la  Comédie,  Nous  voyons 
les  dé&uts  de  nos  femblables  avec 
une  complaifance  mêlée  de  mé-r 
pris ,  lorfque  ces  défauts  ne  font 
ni  affez  affligeans  pour  exciter  la 
compa{fion,ni  affez  révohans  pour 
donner  de  la  haine ,  ni  afle^  dan- 

fereux  pour  infpirer  de  l'effroi. 
>es  images  nous  font  fourire  ,  fi 
elles  font  pçintes  avec  fineffe  ;  el- 
les nous  font  rire ,  fi  Içs  trait»  de 
cette  malîgne  joie  »  auffi  frappans 

(4)  Roll.  Hift.  Ane.  Tom.  III.  pag. 
X56.  ér  fniv%  Métn.  de  TAcad.  des 
Infcript.  &  Beil.  Lett.>  Tom.,  I.  pag. 
iç>,  15Q.  Tom.  IV.  pag.  13^.  ^friv. 


ou^îf^attendus ,  font  aiguifés  par  la 
^irprife.  De  cette  difpofition  à 
faifir  le  ridicqle  ,  la  Comédie  tire 
fa  force  &  fes  moyens.  Il  eût  été 
fans  doute  plus  avantageux  de 
changer  en  nous  cette  complai- 
fance vicieufe  en  une  pitié  philo- 
fophique  ;  mais ,  on  a  trouvé  plus 
facile  &  plus  (ur  de  faire  fervir  la 
malice  humaine  à  corriger  les  au- 
tres vices  de  Thumanit^  peu  près 
comme  on  emploie  les  pointes  da 
diamant  à  polir  le  diamant  même, 
C'eft-là  l'objet  ou  la  fin  de  la 
Comédie, 

L 

Origine  de  la.    Comédie  che[  les 
Grecs. 

Les  Dorîens ,  qui  s*attribupient 
l'invention  de  toutes  les  pièces  de 
^  théâtre  ,  revendiquoient  en  par- 
ticulier celle  de  la  Comédie.  Les 
Athéniens  appetloient  les  boorgt 
&  les  villages  /S/uoi  ;  au  lieu  que 
le  terme  vl^ou  étoit  propre  aux 
Doriens.  Or,  c'eft  de  ce  dernier 
mot ,  felon  eux ,  que  la  Comédie 
a  tiré  fon  nom,  parce  que  les 
premiers  i[!omédiens  ,  n'étant  pas 
reçus  dans  les  villes  »  allcMem 
jouer  dans  les  bourgs.  Suivant 
cette  étymologie ,  le  mot  ComédU 
fignifieroit  la  chanfon  du  bourg 
pu  du  village.  Mais  ,  c'eft  «de  quoi 
ne  convenoient  point  les  Athé-^ 
niens  ,  qui  dérivoient  ce  mot  da 
verbe  %(0ti^l<»  )  qui  fignifie  all^ 
en  mafque  par  les  rues ,  en  chan- 
tant &  en  dan&nt,  aller  faire  l'a- 

Tom.  VI.  p.  146.  T.  XII.  p.  91 ,  ^^^  X. 
XV.  p.  «57,  «60  *  «61.  T.  XVI.  p.  j»9, 
&  fmv.  T.  XVII.  p.  410.  &fitiv,  Tom, 
XXI.  p.  iA%,ér  faiv, 

L 1  uj 


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534  C  O 

mour ,  aller  rendre  vifite  à  Co- 
mus,  qui  étoic  le  dieu  des  feflins. 
M.  Dacier  croit  que  cette  dernière 
étymologie  ne  peut  fe  foûtenir  , 
fit  qu*elle  eft  contre  tome  analo- 

Sjie.  Mais ,  dit  M.  l'abbé  Vatrv , 
ommes-nous  mieux  inftraits  là- 
deflus  que  les  Athéniens  qui  la 
croyoient  bonne  ,  ou  qu'Ariflote 
qui  la  propofeCans  la  condamner  ? 

Les  EWiens  prouvoient  enco- 
re qu'ils  Troient  les  inventeurs  de 
la  (Jomédîe  ,  parce  qu*Épichar- 
me ,  plus  ancien  que  Ghionidès , 
fit  que  Magnés  ,  étoit  Sicilien* 
Mais  ,  ceux  de  Cô  ,  parce  que 
le  même  Épicharme  avoir  été 
exile  chez  eux  «vouloient  que  la 
Comédie  y  eût  pris  naiflance  ;  & 
Sis  dérivoient  le  mot  Comédie,  du 
ïiom  de  leur  îfle. 

Les  Athéniens  avoîentanffi  des 
titres  en  leur  faveur.  II  regnoît 
dans  k  Grèce  placeurs  traditions , 
qui  leur  attribuoient  l'invention 
des  pièces  de  théâtre.'  On  difoît 
que  c'étoit  les  habitans  d'un  bourg 
de  TAttique ,  appelle  Icarie  ,,  qui 
Vétoient  avifés  les  premiers  d'im- 
moler un  botic  à  Bacchps ,  parce 
que  cet  animal  fe  déclare  l'ennemi 
de  ce  dieu ,  en  broutant  &  en  gâ- 
tant la  vigne.  On  ajoûtoit  que  les 
chanfons  ,  les  d^nfes  Ôcles  autres 
cérémonies  qui  avoient  accompa- 
gné ce  facrïfiçe  ,  avoient  été  la 
première  ébauche  de  la  tragédie 
&  de  la  Comédie  ;  &:  que  ce  ne 
fut  qu'à  l'imitation  des  Icariens , 
que  de  femblabies  facrifices  eu- 
rent liei^  chez  les  différentes  na-^ 
tions  de  la  Grèce.  En  efFet ,  Su-^ 
farion  fit  Thefpis ,  qui  étoient  Ica- 
riens» foocplus  anciens  qu'aucun 


,         CO 

autre  poëte ,  (oit  tragique  ,  fott 
comique  ,  8c  ont  vécu  avant  Épi- 
charme  ,  que  les  Siciliens  vou* 
loient  faire  paflier  pour  l'inventeur 
de  la  Comédie. 

Il  n'eft  pas  non  plus  hors  de 
vraifemblance  que  c'eft  à  ces 
fêtes  de  Bacchus  célébrées  à  Ica- 
rie ,  que  l'on  étoît  redevable  de 
ces  chanfoils  remplies  d'inveôi- 
ves  f  dont  parle  le  Scholiafie  d*A- 
TÎfiophane ,  6c  qu'il  dit  avoir  été 
l'occafton  de  l'établidement  de  la 
Comédie  à  Athènes.  Voici  com- 
ment cet  Auteur  s'exprime.  Len 
Athéniens,  jouiffant  d'une  pro- 
fonde paix  ,  commencèrent  à 
vexer  &  à  maltraiter  les  habitans 
de  la  campagne.  Ces  malheureux 
vinrent  fe  plaindre  à  la  ville; 
mais  ^  on  ne  leur  fit  point  juftice  ; 
ils  imaginèrent  de  courir  pendant 
là  nuit  les  rues  d'Athènes ,  fie  d*in- 
veôîver  à  grands  cris  contre  ceux 
de  qui  ils  avoient  reçu  quelque 
injure.  On  s'apperçut  bientôt  que 
ce  moyen  leur  réuffifibit.  Se  que 
les  plus  puiflans  citoyens  deve- 
noient  plus  retenus  ,  dans  la  crain- 
te que  leurs  înjuftices  Ôc  leurs  ex- 
cès ne  fuffent  découverts  publi- 
quement. Cette  obfervation  fit 
croire  au  peuple,  qu'il  feroit  utile 

5ue  quelques  Poètes  fiffenc  des 
ers  contre  ceux  qui  oferoient 
abufer  de  leur  autorué  fie  de  leurs 
nchelTes.  On  voulut  que  ces  vers 
ié  récitaflfent  en  plein  théâtre;  on 
établit  des  prix  pour  ceux  qui  y 
«xcelleroient  ;  fie  à  caufe  de  fon 
origine  «  on  nomma  cette  forte 
de  .poème  ,  Comédie  ,  du  mot 
xf  A«e  »  qw  fignifie  fommeil. 
Toutes  ces  étymologies  Se  ces 


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co 

apinions  dîflérentes  (ont  bien  voir 
que  les  Grecs  ne  i^avoieitt  pas 
eux-mêmes  avec  cenitude  Thifl ai- 
re de  leun  poëfies  dramaciqoes  , 
6c  que  ce  qu'ils  nous  en  difenc 
fi*eft  fondé  que  fur  des  conjeâu- 
res,  plus  ou  moins  apparences. 
Au  refte  ,  il  pourroit  bien  être 
zrtwi  que  les  myftères  de  Bac- 
Chus  »  s'étant  établis  en  différens 
lieux  &  avec  les  mêmes  cérémo- 
nies ,  euflem  produit  par  tout  les 
mêmes  poëfies  licentieufes  ^  dont 
chaque  peuple  en  pardculier  s'eft 
fiait  honneur  ;  parce  que  chacun 
s'eft  imaginé  qu'il  les  avoir  culti- 
vées le  premier ,  8l  qu'il  ne  les 
avoit  imitées  de  personne.         • 

Ariftote»  l'aoteur  le  plus  afluxé 
<^u'on  puifTe  cônfulter  fur  ces  ma- 
tières »  nous  dit  dans  un  endroit , 
que  les  Poëtes  lambiques  dégé-^ 
Itérèrent  en  poëtes  comiques  ;  & 
ailleurs,  que  la  tragédie  doit  fon 
origine  aux  poëtes  Dithyrambi- 

Îues ,  &  la  Comédie  aux  «poètes 
halliques^  Op  a  prétendu  qu' A- 
rifiote  (e  contrediioit  »  en  parlant 
de  la  forte  ;  mais ,  s'il  y  a  quelque 
reproche  à  lui  faire  «  c'eft  d'avoir 
féparé  ces  deux  ibufces  de  l'an- 
cienne Comédie  ;  &  de  n'avoir  pas 
dit  en  Q>lme  tçms  ^  ,que  les  poê- 
les lambiques  éiles  poëtes  Phalli- 
ques avoient  été ,  en  quelque  ma- 
nière ,  les  pères  de  la  Comédie. 
S'il  s'éioii  exprimé  de  la  forte  ,^  il 
eût  dit  une  chofe  ,  non  feulement 
très-vraifemblable  ,  mais  qui  fe 
tr<M]ve  encore  confirmée  par  des 
témoignages  &  de^autorhés,  aux* 
quelles  on  ne  f<çauroit  fe  refufen 

£n  effets  il  n^eû  pas  douteux 
^que  les  deux  csrraâères  dillinâi£» 


co  535 

de  l'ancienne  Comédie  ne  fuffent 
lafatyre  perfonnelle  &  l'obfcénité. 
Par  la  latyre  perfonnelle  ,  elle 
imita  la  poëfle  ïambique  j  6c  elle 
emprunta  des  poëfies  phalliques 
les  ordures  dont  elle  amufa  fes 
fpeâateurs«  Si  nous  en  croyons  le 
l^us  grand  nombre  des  Auteurs  » 
elle  dut  fa  naiflance  aux  poëmes 
informes  que  Ion  chantoit ,  à  Toc- 
cafion  des  récokes  ,  &  fur  tout 

;  des  vendanges.  Dans  ces  jours 
confacrés  à  Ëacchus  »  une  partie 
des  vendangeurs  fe  déguifoient  en 
fatyres  ,  ou  en  quelqu'autre  pec- 
fonnaee  ridicule  du  cortège  de  ce 
dieu.  Montés  fur  des  chariots ,  en 
allant  &  en  revenant  du  prefFoir , 
ils  accabloient  d'injures  tous  ceux 
qu'ils  rencontroient  ;  d'où  vient 
le  proverbe  >  eiç  ii,  <^iÇMç  \a>^tU  , 
qui  figniâe  fe  déchaîner  contre 
quelqu'un  ,  &  lui  dire  les  injures 
les  plus  fales  &  les  plus  groffières. 
On  voit  encore  quelques  traces 
de  cet  ancien  ufage  en  beaucoup 
d'endroits.  Pendant  les  facrifices , 
ces  hommes  grofCers ,  que  la  fo- 
lemnité  &  leur  déguifement  auto» 

.  rifoient  à  tout  faire  &  à  tout  dire, 
fe  tournoient  en  ridicule  les  uns 
les  autres  ;  ceux ,  qui  en  avoient 

Je  talent»  compofoient  exprès  des 

1  couplets  à  leur  mode  $  mais ,  il  y 
en  avoit  fans  nombre  de  tout  faits 
po^r  ces  fortes  d'occafions»  que 
tout  le  monde  fçavoit.»  &  qu'on 
ne  manquoit  pas  de -chanter  ^taute 
tPamres.  Les  danfes  y  les  geftes-, 
les  grimaces ,  étoient  dans  le  mê- 
me goût  que  les  chanfons  ;  tout 
:1e  monde  prenoit  part  à  la  fête; 
&  s'il  y  avoit  un  bouffon  dans  le 
village  y.c'étoic alors  qu'il  fe  figna* 

Lliv 


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5}6  CO 

loit.  On  peut  voir  la  defcriptiofl  » 
qa'Horace  fait  de  ces  fêtes  ,  que 
ce  Poëte  regarde  comme  la  pre* 
mière  origine  de  la  Comédie. 

Ces  farces ,  compofées  i  la  hâte 
&  jouées  par  des  païfans  ivres , 
donnèrent  Tidée  à  des  Poètes  qui 
'  fe  fentoient  du  talent  pour  cette 
forte  d'ouvrage ,  d'en  compofer 
à  loidr  dans  le  même  goût ,  & 
d*aller  de  village  en  village  le»  ré- 
citer y  montés  fur  des  trétaux ,  ou 
de  defTus  des  chariots.  Ils  pre- 
noient  leur  part  du  feflin  ;  on  leur 
laiflbit  emporter  quelque  outre  de 
vin  nouveau  ;  &  on  les  couron- 
noit.  Mais ,  leur  licence  effrénée 
.  fît  que  pendant  long-tems  on  ne 
voulut  poim  leur  permettre  l'en- 
trée des  villes  ,  &  qu'ils  furent 
'  obligés  de  courir  les  campagnes. 

Quelques  Poètes  cependant  fe 
firent  une  grande  réputation  par 
ce  genre  d'ouvrage.  Nous  trou- 
vons dans  les  marbres  d' Arondel , 
l'époque  de  Sufarion  ,  fets  le 
tems  de  Pififtrate.  Il  paroît  par 
ce  monument  que  ce  Poëte  fut 
un  des  premiers  qui  mérita  une 
attention  un  peu  férieufe,  &  qu'on 
établit  un  combat  âc  des  prix  en 
fa  confidération.  Si  nous  linons  ce 
marbre  comme  Ta  lu  M.  Prideaux, 
nous  pourrions  en  conclure  que 
Sufarion  avoit  fait  jouer  fes  pie- 
ces  k  Athènes^;  mais»  Bentley  lit 
.  différemment-  ;  &  il  paroit  bien 
'.fondé  à  rejetteria.lieçon  de  M. 
Prideaux.  Il  y  avoit  long-tems 
qu'un  grand  nombre  de  Poètes 
s'étoient  diftinguéi  par  des  ïambes 
d'une  force  &  xl'une  véhémence 
extraordinaires.  Il  n'eft  pas  dou- 
«teux  que  ^lei<  P<mes  comiques 


CO 

n'aient  puifé  dans  les  poëfies  Jâ- 
cyrîques  ;  qu'ils  ne  lésaient  prifes 
pour  modèles  ,  &  qu'ils  ne  s'en 
ibtent  beaucoup  aidés  pour  atta- 

3uer  les  ridicules.  Il  y  avoîc  auffi 
es  poçfies  phalliques  fort  ancien- 
.  nés  »  qu'il  étoit  d'uiâge  de  chanter 
publiquement  ,  dans  toutes  les 
villes  de  là  Grèce.  Les  Pertes 
comiques  ne  les  négligèrent  pis 
non  plus;  &  ils  trouvèrent  abon- 
damment dans  ces  vers  licentieox» 
'  de  quoi  égayer  leur  drame  »  & 
divertir  leurs  fpeQateurs  ;  û  nous 
ne  voulons  dire  plutôt  que  l'an* 
cienne  Comédie  n'étoit  ,  k  pro- 
prement parler  ,  qu'un  com- 
po(é  &  un  mélange  de  poëfies 
ïambiques  &  de  poëfies  phalli- 
ques* 

,  #AriAote  dit  qu'Homère  avoit 
donné  un  premier  effai  de  la  Co- 
médie 9  en  changeant  en  fimple 
phiiiànterie  les  railleries  offienfan- 
tes  des  premiers  Poëtes;  &  en 
effet ,  a}oûte-t-il  »  fon  Margitès 
a  le  même  rapport  avec  la  Co- 
médie ,  que  fon  Iliade  &  fon 
Odyffee  ont  avec  la  tragédie.  Se- 
..lon  guidas,  ce  Margitès  étoit  un 
homme  d'uqp  fottiie  &  d'une  im- 
bécillicé  extraordinaires  ;  il  ne  put 
jamais  compter  oue  jqfqu'à  cinq  ; 
il  ne  put  apprendre  aucune  forte 
de  profei&on  ;  &  il  étoh  déjà 
homme  ,  qu'il  ne  fçavoit  pas  qui 
de  -fon  père  ou  de  fa  mefe  l'avoit 
mb  au  monde.  Ce  poëme  d'Ho- 
mère eft  perdu  ;  il  feroit  cepen- 
dant nécefiàire  de  le  voir  pour  en 
juger.  Car ,  fi  la  fottife  de  Mar- 
gitès étoit  telle ,  que  le  dit  Suidas  » 
eiie  devoit  exi^iter  plutôt  la  com- 
.pafiion  que  le  rire  ^  &  par  con^ 


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c  o 

féqoent  n'étoit  pas  j  félon  Arifto- 
te  même  ,  le  ridicule  propre  à  la 
Comédie. 

Les  changemens  qui  font  arrî- 
▼és  à  la  tragédie  »  nous  dit  encore 
ce  Phiiofophe ,  ont  été  fenfibles , 
&  on  en  a  connu  les  Auteurs  ; 
mais ,  la  Comédie  a  été  inconnue , 
parce  qu'elle  ne  s*eft  pas  cultivée 
éès  le  commencement ,  comme 
la  tragédie ,  car  le  Magiflrat  ne 
commença  que  fort  tard  à  donner 
des  chœurs  comiques.  Ceux  qui 
jouoient  auparavant  «  n*étoient 
que  des  aâeurs  libres  &  volon- 
taires ,  qui  jouoient  pour  eux  »  & 
fans  ordre  du  Magiftrat. 

Tandis  que  la  Comédie  ne  fut , 
pour  ainfi  dire ,  que  tolérée  dans 
les  villes ,  &  qu'elle  ne  reçut  au- 
cun fecours ,  ni  aucune  protec- 
tion du  Magiftrat  »  ce  ne  fut  qu'un 
fpeâade  tres-informe  ;  elle  n'é- 
toit compofée  que  du  choeur  feul  ; 
elle  n'avoit  ni  hiftrions ,  ni  maf- 
ques ,  ni  décorations  ,  ni  même 
d'adion  dramatique.  Ce  n'étoit 
qu'une  fatyre  outrée  de  ceux  à 
qui  le  Poëte  en  vouloit ,  ou  des 
chan(bns  groflière»  defiinées  à 
amufer  une  populace  effrénée, 
dans  les  jours  de  fête  &  de  dé- 
bauche. 

Enfin  ,  foît  que  l'on  crut  que  le 
fpeâacle  pourroit  contribuer  à  la 
réformation  des  mœurs ,  foit  que 
ce  ne  fût  que  pour  faire  plaifir  au 
peuple  f  le  Magiftrat  accorda  en- 
fin le  chœur  à  la  Comédie  j  c'eft- 
à*dire ,  qu'il  fit  la  dépenfe  de  tout 
ce  qui  étoit  néceflaire  pour  la  re- 
préfentation  des  Comédies  ;  on 
propofa  des  prix  aul  Poètes  co- 
miques &  à  leurs  aâeurs  ',  ce  qui 


CO  537 

arriva  vers  le  tems  de  Périclès. 
Alors  ,  la  Comédie  prit  une  face 
toute  nouvelle.  La  repréiéntation 
des  tragédies  fe  donnoit  depuis 
long- tems  à  grands  frais  &  avec 
beaucoup  de  magnificence  ;  elles 
fer  virent  de  modèles  aux  Poètes 
comiques  ,  qui  formèrent  toute 
la  difpofition  de  leurs  fables  ,  fur 
celles  de  la  tragédie.  Ils  travefti- 
rent ,  pour  ainfi  dire ,  la  Mufique  ,/ 
&  la  firent  en  quelque  forte  def- 
cendre  à  leurs  ufages  ;  ils  em- 
pruntèrent des  habits  ,  des  déco- 
rations >  des  machines  ,  tout  ce 
qui  leur  convint  ,  &  formèrent 
de  tout  cela  un  fpeélacle  qui  eût 
quelque  régularité.  Mais ,  en  mê- 
me tems ,  ils  furent  très-fideles  à 
conferver  à  ce  nouveau  drame  ks 
deux  anciens  caraûères.  Non  feu- 
lement ils  expoferent   à  la  rifée 
du  peuple ,  les  fots  &  les  vicieux  ; 
mais  ,   ils   s'acharnèrent    encore 
contre  les  plus  honnêtes  gens  de 
la  République.  Perfonne  ne  fut  à 
l'abri    de   leurs    médifances  ,  ni 
même  de  leurs  calomnies  ,  qu'ils 
afifaifonnoient  de  leurs  bons  mots. 
Ils  fçurent  rendre  ridicule  jufqu'à 
la  fageffc  &  à  la  vertu  même^ 
&  l'indécence  &  l'effronterie  fu- 
rent portées  à  leur  comble* 

I  I. 

De  la  Comédie  ancienne  ,  moyen- 
ne &  nouvelle. 

Cette  première  efpèce  de  Co- 
médie s'appeila  la  Comédie  an- 
cienne ,  ou  la  vieille  Comédie. 
On  comptoit  douze  ^Poètes  >  qui 
avoient  excellé  dans  ce  genre  ; 
fçavoir  ,  Magnés  ,  Timocréon  , 
Cratès ,  Eupolis ,  Cratinus  ^  Arif* 


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558  CO 

fophane  f  Phrynicus  ,  Stralîs  , 
Phérécratcs,  Platon  ,  Téléclides 
&  Théopoœpe.  Le  nombre  des 
Comédies ,  que  ces  douze  Poëies 
^voient  compofées ,  (t  montoît  à 
tiofs  cens  foixante-^uinze  ;  il  ne 
ne  nous  en  rcfte  aujourd'hui  que 
quelques  fragmens  épars  çà  &  là 
dans  d^  Auteurs  anciens  ,  prin- 
cipalement dans  Plutarque  &i  dans 
Athénée.  Seulement  onze  Comé- 
dies entières  du  feul  Ariftophane 
font  venues  jufqu'à  nous.  Les  Cri- 
tiques anciens  nous  difent  que  te» 
Poètes  qui  Favoient  précédé, 
avoient  contribué  chacun  en  quel- 
que chofe ,  à  donner  à  la  vieille 
Comédie  ,  une  forme  régulière  , 
&  à  augmenter  fes  agrémens  ; 
tnais  que  ce  fut  Aridophane  qui 
la  porta  à  U  perfeâion ,  &  qu'il 
furp^Ha  tous  ceux  qui  travaillèrent 
dans  le  même  genre.  C*eft  ce  qui 
Ta  fait  appeller  par  toute  l'Anti- 
quité ie  comique  par  excellence  , 
comme  Homère  eft  connu  par  ce 
fcul  mot ,  U  Poète, 

Voici ,  félon  M.  Tabbé  Vatry , 
de  Quelle  manière  fe  forma  la  Co- 
médie ancienne ,  6c  quel  fut  Te 
but  des  Poètes  qui  la  cuhiverent. 
Lorfque  la  tragédie  fut  parve- 
nue à  ce  point  de  perfeâion  oîi  la 
portèrent  à  Fenvi  un  grand  nom- 
bre d*excellens  Poètes  ,  fur  tout 
Efchyle,  Sophocle  &  Euripide; 
d'autres  Poètes,  dont  le  génie 
étoit  porté  à  la  plaifanterie  &  à  la 
fatyre,  entreprirent  de  donner  un 
fpeâade  dans  lequel  tout  ce  que 
les  tragiques  avoient  imaginé  pour 
exciter  Tadmiration ,  la  terreur  & 
la  pitié  ,  fut  employé  à  faire  rire 
les  fpeâateurs  j  &  à  ayilir  &  à 


CO 

rendre  méprifables  &  ridîcaîcs 
tous  ceux  qu'il  leur  plut  d'atta- 
quer. Ce  n étoit,  à  proprement 
parler ,  que  des  parodies  conti- 
nuelles des  tragédies  les  plus  efti- 
mées  ;  des  bouftonneries  ,  (bavent 
les  plus  indécentes  &  les  plus 
obfcènes ,  des  fatyres  amères  & 
outrées  contre  les  plas  grands 
homtnes  de  la  République  ;  tnais 
tout  cela  mêlé  en  même  tems  de 
morceaux  de  poëfie  admirables  ^ 
de  vrai  &  de  faine  morale ,  & 
fur  tout  lie  la  plus  fine  5c  de  la 
plus  profonde  politique*  Le  livre 
de  Rabelais  efl  ce  que  nous  avons 
de  plus  proprfe  en  François,  à 
nous  donner  4]ne  jufte  idée  d*A- 
riftophane,  6c  il  femble  qu'on 
peut  dire  à  peu  près  le  même  bien 
&  le  même  mal  de  ces  deux  Au- 
teurs. 

Les  Poètes  tragiques  avoient 
imaginé  des  aâions  grandes  ôC 
capables  d'émouvoir  puiffamment 
leurs  fpeé^ateurs  ;  ils  emprun- 
toient  ordinairement  leurs  fujets 
plutôt  de  la  Fable  que  de  l'Hifloi- 
re  ;  ils  y  trouvoient  un  merveil- 
leux propre  à  relever  &  à  agran- 
dir les  objets  ,  &  à  employer  les 
talens  qu'ils  fe  fentoient  pour  la 
grande  poèfie. 

Les  Poètes  de  la  vieille  Comé- 
die ne  prirent  poirtt  leurs  fujets 
dans  la  vie  ordinaire  des  hommes; 
ils  voulurentfurprendre  leurs  fpec- 
tateurs  par  la  nouveauté  6c  parla 
bizarrerie  de  leurs  fiâions  ;  ils  fe 
firent  un  mérite  de  tirer  des  fonds 
les  plus  frivoles  en  apparence  ,  de 
quoi  charmer  6c  inftruire  même 
leurs  concitoyens ,  &  furpaiTer 
leurs  rivaux. 


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co 

Un  Poëte,aprës  avoir  aind  choî- 
C  le  fujet  le  plus  bizarre  &  le  plus 
extravagant  qu'il  pouvoir  imagi- 
ner y  formoic  Ton  plan  fur  celui  des 
plus  belles  tragédies  >  en  emprun* 
toit  toutes  les  parties  &  en  fui- 
voit  toutes  les  règles.  Il  s'aflrei- 
gnoit  aux  txoh  unités  d  a6Hon ,  de 
lieu  &  de  tems  ,  &  faifoit  fur  le 
même  modèle  Texpofition  de  fon 
fujet ,  fon  nœud  &  fon  dénoue- 
ment. 11  partageoit  fa  pièce  en  fcè- 
nes  &  en  intermèdes  ;  il  employoit 
le  vers  ïambe  &  faifoit  ufage  de 
toutes  les  autres  efpcces  de  vers 
que  les  Tragiques  avoient  adoptés. 
Non  feulement  les  Pottes  de  la 
vieille  Comédie  prirent  lesmêmcts 
efpeces  de  vers  que  les  Tragique; 
mais  y  pour  rendre  ceux-ci  ridi- 
cules ,    ils  donnoient  fouvent  à 
leurs  vers  la  pompe  &  la  magni- 
ficence des  vers   des  tragédies  , 
qu'ils     parodioient    continuelle- 
ment ,  employant  les  expreflTions 
les  plus  fublimes  Ôc'les  plus  ma* 
jeftueufes  pour  dire  des  chofes  les 
plus  baffes  &  les  plus  bouffonnes. 
Le  ScholiaAe  d'Ariftophane  aver- 
tit à  chaque  infhnt  que  tels  vers 
font  pris  d'Efchyle ,  tels  autres  de 
Sophocle  ou  d*£urîpide  ,  ou  de 
quelqu'autre  tragique. 

La  Comédie  ancienne ,  ainfi 
que  la  tragédie , ,  mettoit  fur  le 
théâtre  trois  fortes  de  perfonna- 
ges  ;  fçavoir ,  des  hommes ,  des 
dieux  >  &  des  êtres  imaginaires. 
Par  rapport  aux  hommes  qui  pa- 
roiffoient  dans  la  vieille  Comédie, 
c*étoienc  les  premiers  &  les  plus 
diftingués  d'entre  les  citoyens; 
c*écoient  les  Magiftrats  ,  les  Gé- 
néraux d'armée.  On    ne  fdi&lt 


'    ,         CD  539 

grâce  a  perfonne  ;  nous  en  avons 
la  preuve  dans  Ariftophane  ,    6c 
les  témoignages  des  Anciens  ne 
nous   permettent  pas   de  douter 
que  les  autres  Poëtes  n'aient  por- 
té aufli  loin  que  lui  leur  licence 
effrénée.  Ainfi ,  cette  efpece  de 
Comédie  ne  donnoit   pas  feule- 
ment des   caraâères   généraux  , 
elle  peignoit  encore  tels  &   te]f 
hommes  en  particulier,  &  comme 
elle  ne  les  mettoit  fur  la  fcène  qi  e 
pour  les  tourner  en  ridicule ,  ou  les 
rendre  odieux ,  elle  donnoif  beau- 
coup dans  l'exagération.  On  peut 
fore  bien  comparer  les  carartères 
peints  dans  les  Comédies  d'Arifto- 
phane ,  à    ces    portraits  que  les 
peintres    appellent   des   charges^ 
dont  le  but  eft  d'attraper  la  ref- 
femblance»  mais  en  augmentant 
&  en  chargeant  beaucoup  les  dé- 
fauts de  l'original.  Tout  défiguré 
que  foit  Socraie  dans  les  Nuées  , 
on  le  reconnoît  pour  le  même  So- 
crate  qui  parle  dans  Platon  ;  c'eft 
fon  tour  d'efprit  ;  c'eft  fa  manière 
de    raifonner    &  de    converfcr. 
Quoique  Cléon  fût  un  perfonna- 
ge  fort  méprifable ,  on  fent  que 
fon  caraâère  eft    outré  dans  la 
Comédie  que  fit  exprès  contre  lui 
Ariftophane ,  &  qui  eft  intitulée 
les  Chetaliers,  Il  en  eft  de  mênre 
de  tous  ceux  que  ce  poëme  a  mis 
fur  la  fcène  ;  c'eft  ce  qui  a  fait  dire 
à  Ariftote  que  le  propre  de  la 
Comédie  étoit  dépeindre  les  hom- 
mes pires  qu'ils  ne  font. 

Les  Poëtes  tragiques  întroduî- 
foîent  fouvent  des  Dieux  dans  leurs 
pièces ,  &  ils  les  faifoient  parler 
avec  la  majefléqui  leur  convenoif. 
Ariftophane  en  fait  parohre  fou- 


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5io  C  O 

vent  dans  fes  Comédies ,  maïs  lis 
n  y  font  pas  plus  épargnés  que 
les  hommes.  La  vieille  Comédie 

Î>lairantoit  de  tout  ;  &  fi  Ton  fouf- 
roit  qu'on  fe  moquât  des  perfon- 
Ues  qui  occupotent  les  premières 
places  de  la  republique  ;  fi  le  peu- 
ple d'Athènes  même  en  perfonne 
mis  fur  le  théâtre ,  excitoit  les 
huées  des  fpedateurs ,  on  conçoit 
ftifément  que  la  plai(anterie  étoit 
permife  à  Tégard  des  Dieux.  Il  y 
a  toute  apparence  que  l'on  regar- 
doit  cps  fortes  de  railleries  comme 
un  badinage  innocent,  &  qui  ne  ti- 
roit  point  à  conféquence.  On  étoit 
perfuadé  que  les  Dieux  étoient 
trop  fages  pour  s'oflenier  des  dif- 
cours  extraragans  d'un  Poëte.  On 
croyoit  même  qu'ils  en  rioient  les 
premiers ,  &  qu'ils  s'en  divertif- 
foient.  Arnobe  nous  apprend  qu'à 
Rome,  lorfqu'on  pou  voit  foup- 
çonner  que  Jupiter  étoit  en  colè- 
re ,  pour  le  remettre  en  belle  hu- 
meur 9  on  faifoit  jouer  l'Amphi- 
tryon de  Plaute.  Ce  qui  eft  cer- 
tain, c'eft  que  l'on  défendit  aux 
Poëte»  comiques  d'attaquer  des 
perfonnages  réels ,  fans  leur  in- 
terdire de  plaifanter  fur  les  Dieux; 
nous  en  avons  la  preuve  dans  le 
Pîutos  d' Ariftophane  .  qui  appar- 
tient à  la  moyenne  Congédie ,  & 
où  les  Dieux  font  fort  maltraités. 
Les  tragiques  Grecs  mirçnt  fur 
la  fcène  non  feulement  les  IXeux , 
les  demi.Dieux ,  &  généralerqent 
tout  cje  que  la  Fable  avoit  con^- 
cré ,  ils  portèrent  encore  la  hat- 
dieffe  jufqu'à  introduire  des  êtrei 
allégoriques.  La  rage  ou  la  fureur 
joue  un  r^ôle  dans  l'Hercule  furieux 
d'Euripide.  La  mort  eft  un  des 


co 

perfonnages  de  TAlcefte  du  même 
Poëte.  Elchyle  fait  attacher  Pro- 
méthée  au  rocher  par  la  force  6c 
par  la  violence.  Les  Poètes  comi- 
ques ne  demeurèrent  point  em 
refte  avec  les  tragiques  fur  cec 
article.  Ils  firent  des  perfonnages 
de  tout  ce  qui  leur  vint  dans  l'ef- 
pi'it.  La  guerre  &  le  tumulte  font 
deux  perfonnages  de  la  Comédie 
d^ Ariltophane ,  intitulée  la  Paix. 
Dans  les  G>iêpes  ^  un  chien  fe 
porte  pour  accufateur  d'un  autre 
chien,  forme  fa  plainte ,  &  le  cou- 
teau qui  a  coupé  le  fromage  ,  eft 
cité  comme  témoin.  Les  Nuées 
font  des  nymphes  charmantes  qui 
chantent  de  très-beaux  vers  ,  & 
ferment  le  chœur  de  la  Comédie 
qui  porte  leur  nom.  Il  n'eft  pas 
jufqu'aux  grenouilles ,  qui  neèif-- 
fent  un  rôle  confidérable. 

Les  Poètes  tragiques  ,  à  Tenvî 
des  Orateurs ,  tâchoieiit  d*infpirer 
au  peuple  les  fentimens  qu'ils 
croyoient  les  plus  convenables  à 
fes  intérêts  ,  oC  leurs  pièces  font 
desallufions  continuelles  aux  a£Fai« 
tes  publiques.  Les  Poëtes  Comi- 
ques s'ingéroient  dans  les  matiè- 
res du  gouvernement  bien  plus 
avant  encore  j  &  bien  plus  à  dé- 
couvert que  les  tragiques.  Il  n'y 
a  pas  une  feule  pièce  d' Ariftopha- 
ne ,  dans  laquelle  on  ne  fronde  le 
gouvernement  d'Athènes.  Non 
feulement  on  y  attaque  les  vices 
des  particuliers .,  quels  qu'ils 
foient  ;  mais ,  on  y  expofe  avec  la 
plus  grande  liberté  toutes  les  fautes 
de  la  République  ;  fouvent  même 
la  pièce  ne  roule  que  fur  un  point 
<:apital  de  politique.  Les  Comè- 
tes intitulées /a  Ptfix^  Us  Acar^ 


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co 

naniens  ,  Lyfiftrau^  les  femmes  au 
Sénat ,  n'ont  d'autre  but  que  de 
perTuader  aux  Athéniens  de  s'ac- 
corder avec  les  Lacédémoniens , 
&  de  finir  une  guerre  qui  les  rui- 
noit  les  uns  &  les  autres ,  auffi* 
bien  que  leurs  alliés  &  leurs  tribu- 
taires ;  c*eft  pourquoi  >  Platon  , 
en  envoyant  à  Denys  l'ancien  les 
Comédies  d'Ariilophane  ,  lui 
mande  qu'il  n*y  a  aucun  livre  qui 
le  puifle  mettre  fi  bien  au  fait  de 
tout  ce  qui  regarde  les  Athéniens. 

Ce  peuple  étoit  grand  amateur 
de  harangues  ;  leurs  tragiques  en 
ont  rempli  leurs  pièces  ;  les  vieux 
Poëte»'*comiq«es  en  inféroient 
auffi  dans  leurs  Comédies ,  &  les 
ornoient ,  ainfi  que  les  tragiques , 
de  maiimes  de  politique  6c  de 
morale.  U  y  en  a  un  grand  nom- 
bre de  cette  forte  dans  Ariftopha- 
ne  ;  par  exemple ,  les  plaidoyers 
de  la  richefle  &  de  la  pauvreté 
dans  le  Plutus»  &  ceux  de  la  juflice 
&  de  rinjudice  dans  les  Nuées. 

On  faUbit  de  grandes  dépenfes 
pour  les  repréfentations  des  tragé- 
dies f  en  décorations  >  en  machi- 
nes &  en  habits.  La  vieille  Comé- 
die prétendoit  égaler  la  tragédie 
par  tous  ces  moyens ,  &  fou- 
vent  la  travefiir  &  la  rendre  ridi- 
cule. Dans  la  Comédie  des  Gre- 
nouilles j  Bacchus ,  habillé  en 
Hercule  «  arrive  fur  les  bords  du 
Styx ,  qu'il  pafTe  dans  la  barque 
deCharon;  il  trouve  de  l'autre 
côté  des  monfires  de  plufieurs 
formes  qui  cherchent  à  l'épouvan- 
ter. Ce  Dieu  pénètre  enfuite  dans 
le  féjour  des  bienheureux  ,  où 
Von  célèbre  en  fon  honneur  les 
iuyflères  avec  les  hymnes  |  les 


CO  54t 

procédions  ,  les  flambeaux  &  les 
autres  cérémonies  en  ufage  dans 
ces  fortes  de  fêtes.  Tout  cela  ^up- 
pofe  une  grande  variété  dans  les 
décorations  ,  les  machines ,  les 
habits  ;  &c.  Il  devoit  y  avoir  en- 
core pkis  de  magnificence  dans  la 
Comédie  des  Oifeaux;  les  fpeâa- 
cles  dévoient  ^tre  extrêmement 
brillans  ,  fur  tout  au  dernier  aâe  ; 
il  ie  paiTe  au  milieu  de  Tair  ,  dans 
la  ville  de  Néphélococugie  ;  on  y 
apperçoit  des  murs  6c  des  tours 
bâties  fur  les  nues,  Prométhée,  6c 
après  hii  trois  autres  Dieux  y  àd^ 
cendent  du  ciel.  Pifihétâsrus  en 
disfcend  auffi  fur  un  char  dé 
triomphe;  la  Déeffe ,  fouveraî- 
neté  fupetbement  parée  ,  eft 
affife  auprès  de  lui  ;  il  tient  d'une 
main  le  fceptre  ,  6c  de  l'autre  les 
foudres  de  Jupiter.  Le  théâtre  eft 
tout  illuminé  d'éclairs  Je  bruit  du 
tonnerre  fe  mêle  aux  chants  àt% 
oifeaux  qui  voltigent  en  foule  au- 
tour de  Pifihétaerus  leur  nouveau 
Roi. 

La  Comédie  ancienne  fubfifla/ 
jufqu'au  cems  où  Alcibiade  gou- 
verna la  république.  Alors ,  on  fe 
lafFa  de  ces  cenfeurs  outrés  ;  6c 
Eupolis  a^ant  maltraité  dans  une 
de  fes  Comédies  Alcibiade  lui- 
même  ,  il  fut  fait  une  loi  par  la- 
quelle il  étoic  défendu  aux  auteurt 
de  Comédies  de  parler  mal  d'au- 
cun homme  vivant ,  6c  de  le  nom- 
mer par  fon  nom. 

Les  Poètes  fe  retranchèrent 
alors  à  médire  des  morts ,  6c  fur 
tout  des  anciens  Poètes  ;  ce  fut  ce 
qu'on  appella  la  moyenne  Comé- 
die. Ennn  ,  on  fe  dégoûta  entière- 
ment  de  n'entendre  jamais  que  des 


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54^  C  O 

faiyres  ;  d'autant  plus  que  les  au- 
teurs de  Comédies  trouvoient 
toujours  9  malgré  les  défenfes  , 
mille  moyens  de  tourner  en  ridi- 
cule ceux  qui  leur  déplaifoient. 

On  inventa  donc  la  nouvelle 
Comédie  ,  qui  ne  fut  plus  que 
Timitation  de  la  vie  ordinaire  des 
(impies  citoyens.  Son  but  unique 
fut  de  rendre  les  hommes  meil- 
leurs &  plus  fages  ,  fous  l'appa- 
rence de  ne  vouloir  que  les  amu- 
fer  &  les  faire  rire.  C'eft  à  cette 
dernière  efpèce  que  la  Comédie 
fe  fixa  ;  ce  qui  arriva  un  peu  avant 
le  règne  d'Alexandre. 

Mais,  un  fpeâade  de  cette 
nature ,  fi  propre  à  divertir  les 
honnêtes  gens,,  ne  put  fuâire  au 
peuple  ;  il  lui  fallut  toujours  des 
bouffons.  Ariftote  npus  dit  que  de 
fôn  tems  la  coutume  de  chanter 
publiquement  des  vers  phalliques 
fubfiftoit  encore  dans  plufieurs 
villes.  On  cpnferva  aufli  des  far- 
ces dans  l'ancien  goût ,  ÔC  de  plus 
d'une  efpèce  ;  telles  furent  les  dt- 
célies,  les  magodies  ,  les  mi- 
mes. 

De  tout  ce  que  nous  venons  de 
dire ,  il  réfulte  que  la  vieille  Co- 
médie différoit  de  la  nouvelle  ; 
i,^  Par  le  tems  ;  2.^  Par  la  ma- 
tière ;  3.^  Par  la  forme. 

I.**  Par  le  tems.  La  vieille 
Comédie  fuccéda  immédiatement 
aux  farces  groffières  qu'on  jouoit 
au  tems  des  vendanges ,  6ç  dans 
lefquelles  on  portoit  l'effronterie 
&  la  licence  aux  derniers  excès; 
c'ef!  ce  qui  fait  que  la  ^deur  eft 
fouvent  bleffée  dans  Ari^ophane* 
Il  falloit  que  ce  Poëi(i  plût  au 
peuple  j  qui   écoit  accoutumé  à 


co 

rire  des  plaifanteries  les  plas  groC 
fières  &  les  plus  indécentes.  Lorf- 
que  la  vieille  Comédie  fut  inven- 
tée »  la  république  d'Achènes  étoit 
dans  fon  plus  haut  point  de  pro(^ 
péri  té;  ce  qui  faifoitque  le  peu- 
ple étoit  extrêmement  infblent  y 
&  qu'il  ne  refpeâoit  rien.  La  vieil- 
le Comédie  fe  reffemit  de  ces 
défauts.  Dans  la  fuite ,  les  fcien- 
ces  ôc  les  arts  adoucirent  les 
mœurs,  &  amenèrent  la  politeffe  > 
ce  qui  rendit  la  nouvelle  Comé- 
die moins  fatyrique  &  plus  dé- 
cente. 

2.^  Par  la  matière.  Le  fond  des 
vieilles  Comédies  étoit  dépures 
fixions,  mais  dont  les  perfonnages 
étoienc  des  noms  connus,  &  pour 
la  plupart  véritables  ;  au  lieu  que 
la  nouvelle  Comédie  ti'attaqua les 
vices  qu'en  général ,  &  fans  hleC- 
fer  perfonne  en  particulier.  La 
vieille  Comédie  s'ingéroit  dans  les 
affaires  du  gouvernement  ,  &  at- 
taquoit  les  premiers  de  laRépubli» 
que  ,  la  nouvelle  n'introduifit  que 
des  gens  d'un  état  médiocre* 

3.^  Par  la  forme.  Elle  emprun- 
ta de  la  tragédie  fon  plan  &  fa 
conAitution.  La  tragédie  cher<- 
choit,par  toutes  fortes  de  moj^ens, 
à  relever  &  à  ennoblir  fesfujets; 
la  Comédie  ^u  contraire  em-" 
ployoit  les* mêmes  moyens  pour 
avilir,  &  rendre  odieufes  &  ridicu- 
les, les  perfonnes  qu'elle  attaquoit. 
Die  fe  permettoit  toutes  fortes  de 
fierions;  les  plus  bizarres  &  les 
plus  hardies  étoient  celles  qui  lui 
plaifoient  le  plus  ;  elle  employoic 
les  expreflions  les  plus  relevées  & 
les  plus  poétiques  ,  au  lieu  que  la- 
nouvelle  Comédie  fe  borna  à  l'i^ 


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CQ 

tentation  fidelle  d«  U  vie  commune 
des  hommes. 

.L'on  trouvera  au  mot  moyenne 
quelque  chofe  de  plus  étendu  que 
ce  que  Ton  vient  de  lire ,  touchant 
la  Comédie  moyenne. 

-III. 

Pe  la  Comédie  che^  les  Romains, 

Comme  il  eft  plus  ai(é  d'imiter 
le  groiSer  &  le  bas  que  le  délicac 
&.  le  noble ,  les  premiers  Poètes 
lidtins^  enhardis  par  la  liberté  &  la 
jaloufie  républicaine  «  fuivirenc  les 
traces  d'Ariftophane.  De. ce  nom- 
bre fut  Plaute  lui  même  ;  fa  mufe 
ed  9  comme  celled'Aridophane  « 
de  l'aveu  nonTuCpeâ  de  l'un  de 
Iisurs  apologides  »  une  bacchante, 
.pour  ne  rien  dire  de  pis  p  dont  la 
langue  eil  détrempée  de  fiel. 

1  érertce  qui  fui  vit  Plante  ^ 
comme  Ménandre' Ariflophane» 
imita  Ménandre  fans  l'égaler.  Cé- 
iar  l'appelloit  un  demi* Ménandre, 
&  lui  reprochoit  de  n'avoir  pas  la 
force  comique  ;  exprei&on  que  les 
commentateurs  ont  interprétée  à 
jl^eur  façon  ,  mais  qui  doit  s'enten- 
dre de  ces  grands  traits  qui  ap- 
profondifTent  les  caraâères  ,&  qui 
font  chercher  Je  vice  }u(que  dans 
les  replis  de  lame ,  pour  Texpofer 
en  plein  théâtre  au  mépris  des 
Q>e6hteurs. 

Plaute  eft  plus  vif,  plus  gai , 
plus  fort ,  plus  varié  ;  Térence , 
plus  fin ,  plus  vrai  ^  plus  pur,  plus 
élégant  ;  l'un  a  l'avantage  que 
donne  l'imagination  qui  n'eil  cap- 
tivée ,  ni  par  les  règles  de  l'art , 
ùi  par  celles  des' mœurs  ,  fur  le 
talent  afiuietti  à  toutes  ces  règles  ; 
l'autre  a  le  mérite  d  avoir  concilié 


c  b  545 

Tagrément  &  la  décence ,  la  po- 
litefTe  6l  la  plaifanterie ,  l'exaâi- 
tude  &  la  facilité.  Plaute  toujours 
varié ,  n'a  pas  toujours  l'art  de 
plaire  j  Térence ,  trop  femblable 
à  lui-oiême^,  a  le  don  de  paroître 
toujours  nouveau.  On  fouhaite* 
toit  à  Plaute  Famé  de  Tjérence , 
à  Térence  l'efpritde  Plaute. 

Les  Romains  fous  2e«  Confols  ^ 
aufii  jaloux  de  leur  liberté  que  les 
Athéniens ,  mais  plus  jaloux  de 
la  dignité  de'leur  gouvernement, 
n'auroient  jamais  permis  que  la 
république  fût  expofée  aux  traits 
infultans  de  leurs  Poètes.  Ainfi  , 
les  premiers  comiques  Latins  ba- 
zardèrent la  fatyre  perfonnelie  , 
mais  jamais  la  fatyre  politique. 

Dès  que  l'abondance  &  le  luxe 
eurent  adouci  les  mœurs  de  Ro* 
me  ,1a  Comédie  elle-même  chan- 
gea fon  âpreté  en  douceur  ;  âc 
comme  les  vices  des  Grecs  avoient 
pafTé  chez  les  Romains,  Térence, 
pour  les  imiter ,  ne  fit  que  copier 
Mérundre^ 

La  Comédie,  chez  les  Romains, 
prit  différens  noms  ,  relativement 
à  diffét entes  circondances ,  donc 
nous  allons  rendre  compte  en  peu 
de  mots. 

i.^  Ils  eurent  les  Comédies 
Atellanes  ,  ainfi  nommées  d'A« 
telle  dans  la  Campanie.  C'étoic 
un  tiïïu  de  plaifanteries  ;  la  langue 
en  étoit  ofcique  ;  elle  étoit  divi-^ 
fée  en  aâes  ;  il  y  avoit  de  la  mu- 
fique  ,  de  la  pantomime ,  &  de  la 
danfe  ;  de  jeunes  Romains  en 
étoient  les  aâeurs. 

2 y  Les  Comédies  Mixtes ,  oîi 
une  partie  fe  paflbit  en  récit ,  une 
autre  en  aâiôn  ;  ils  difoient  qu'el- 


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544  .     '    C  O 

les  étoient  partim  Stataria ,  par^ 
tim  Motoria  ,  &  ils  citoient  en 
exemple  TEunuque  de  Térence. 

3.^  Les  Comédies  appellées 
Motorids  f  celles  où  tout  étoit  en 
aâion,  comme  dans  TAmphi- 
tryon  de  Plaute. 

4.^  Les  Comédies  appellées 
PaUiata  ,  oh  le/fujet  &  les  per- 
Ibnnages  étoient  Grecs ,  où  les 
habits  étoient  auffi  Grecs ,  où  l'on 
fe  fervoit  du  palliun;.  On  les  ap- 
loit  auffi  Crepida  ,  chauflure 
commune  des  Grecs. 

5.^  Les  Comédies  appellées 
Planipedia  ,  celles  qui  fe  ]ouoient 
à  pieds  nuds ,  ou  plutôt  fiir  un 
théâtre  de  plein  pied  avec  le  rez- 
de- chauffée. 

6.^  Les  Comédies  appellées 
Prauxtata  p  où  le  fujet  6c  les 
perfonnages  étoient  pris  dans  Té- 
tatdela  nobleife,&  de  ceux  qui 
portoient  les  toges  Prétextes* 

7,^  Les  Comédies  appellées 
Rhintonica ,  ou  Comique  lar- 
moyant ,  ce  que  l'on  appelloit  en- 
core Hilara  Tragedia^  ou  Lanna 
Comedia  ,  ou  Comedia  Italica. 
L'inventeur  en  fut  un  bouffon  de 
Tacente ,  nommé  Rhintone. 

8.^  Les  Comédies  appellées 
S  tôt  aria  9  celles  où  il  y  a  beaucoup 
de  dialogue  &  peu  d'aâioa,  telles 
que  l'Hécyre  de  Térence  &  l'Afi- 
naire  de  Plante* 

9.^  Les  Comédies  appellées 
Tabemaria  »  dont  le  fujet  &  les 
perfonnages  étoient  pris  du  bas- 
peuple  9  (k  tirés  des  tavernes.  Les 


co 

aâears  y  jouoient  en  robes  lon^^ 
gués ,  fans  manteaux  à  la  Grec<« 
que.  Afranins  &  Ennius  fe  dif- 
tinguerent  dans  ce  genre* 

10.^  Les  Comédies  appellées 
Togata ,  où  les  aâeurs  étoient  ha« 
billes  de  la  toge.  Stéphanius  fit 
les  premières;  on  les  fbus-divifa  en 
Togata ,  proprement  dites  »  Pru'^ 
textata  ^  Tabemaria  ^  &  Atella-- 
na.  Les  Togata  tenoient  pi-opre- 
ment  le  milieu  entre  les  PrcteX" 
tata  &  les  Tabemaria  ;  c'étoient 
les  oppofées  -des  Palliaia. 

11.^  Les  Comédies  appellées 
Trabeata  ;  on  en  attribue  l'inten- 
tion à  Caïus  MéliiTus.  Les  aôeurs 
y  paroifFoient  in  trdbeis  ^  8l  y 
jouoient  des  triomphateurs  ,  des 
chevaliers*  La  dignité  de  ces  per- 
fonnages >  fi  peu  propres  au  co* 
mique ,  a  répandu  bien  de  l'ob- 
fcurité  fur  la  nature  de  ce  fpeâa- 
cle. 

COMÉDOVIS  AUGUS- 
TIS*  (a)  Ces  deux  termes  for- 
ment le  commencement  d'une  an- 
cienne Infcription;  6c  les  Anti- 
quaires croyent  qu'ils  pourroient 
bien  défigner  des  divinités  Gauloi* 
fes 

COMESSATIO.  Ch)  Quand 
on  mangeoit  après  le  fouper  chex 
les  Romains  »  on  appelloit  cela 
CometTatio. 

COMET AS,  Corners  ,  (c) 
poëte  Grec,dont  Voffius  n*a  point 
£ait  mention. 

COMETES,  Comètes,  (d) 
Ko^MTHç ,  l'un  des  centaures  ^  tut 


(«)  Suppl.  à  TAntiq.   expi.  par   D.  I     (c)  Mém.  de  TAcad.  des  Infcript.  flc 
Bern.  de  Montf.  Tom,  II.  p.  %17.       Ifiell.  Lett.  Tom.  II.  pag.  i^^. 

(h)  Coût,  des  Rom«  par  M.  Nieup. }     {d)  Ovid.  Metam.  L.  XII.  c.  6. 
pag,  J14,  I 

accablé 


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co 

^accablé  fous  let  coups  du  Lâ{iithe 
llhétus. 

COMETES  ,' Comètes  9  (a) 
Kof^^Tnç  ^  père  d'Aftérion ,  un  des 
.Argonautes ,  avoit  époufé  Antw 

fone ,  fille  de  Phérès.  VaKrius 
laccus  donne  à  Comètes  Tépithe- 
te  de  Crîftatus. 

•  •  '•  Ceîtr  Aftèrion  ^  quem  ma" 
tre  cadtntem 

Crîftatus  gemino  fovit  pater  amne 
.  Comètes^ 

L'interf»ete  Carrion  croit  que 'le 
Poëtea  youlufaire  par-là  alhiiioa 
au  mot  Cometa ,  &  l'explique  par 
cet  endroit  de  Pline  ,  Cqmetas 
Graci^Qçant ,  noftii  crinuas  y?e/- 
las  horrentes  .^jLie  fanguineo  ;  & 
comme  cet^ewB  n'a  pa^  été  du 
goût  des  autre^!ommeotateurs  ^ 
Mafier  a  prétendu  qu'il  Callbît  li# 
re  cenaus ,  épîthete  convenable  à 
Comètes,  qur  hàbitoit  prèsd^un 
promontoire  de  ce  nom  »  duquel 
Strabon  parle.  Mais ,  comme  les 
ineilleurs  tnanuftnts  portent  C.v- 
ihitus  ,  il  faut  croire  que  c'eft  la 
leçon  qu'on  doit  fuivre.  Comètes 
pouToit  ê^re  ,  auffi-bien  que  fa 
femme  »  de  la  race  dés  Éolidet.   ^ 

COMETES  ,  Comètes,  (h) 
Ko/<MTu;,  l'aîné  des  enfans  de  Ti;? 
famène ,  fe  retira  en  Afie ,  félon 
Faufanias. 

COMETES  ,  Comètes  ,  (c) 
Xe//HTMç,  Tun  des  fils  de  Thefiius, 
eu  compté  au  nombre  des  héros , 
qui  attaquèrent  le  fanglier  de  Ca- 
lydon. 

ià)  Pauf.  p.  %%o.  Mém.  de  i*Acad. 
des  Infcript.  &  ficU.  Lett.  Xom,  IX» 
p*  8i ,  8». 

(*)  Pauf.  p.  407»      ^ 

Tom.  XII 


CO 


54S 


COMETES  ,  Comètes  ,  fd) 
Ko^uMTMç  ,  certain  Mage  ,  Tun  des 
amis  de  Cambyfe,  fils  deCyrus, 
&L  fon  fuccefleur  au  royaume  des 
Perfes.  Comètes  fut  choifi  par  ce 
Prince^pour  être  le  Miniftre  de  kk 
fureurs.  Car ,  Cambyfe  ayant 
fongé  une  nuit  que  fon  frère  Mer* 

fis  devoir  régner ,  fut  fort  effrayé 
e  ce  fonge  ;  &  s'étant  déterminé 
à  fe  défaire  de  lui ,  il  chargea  Co*^ 
metès  de  cette  exécrable  commit^ 
fion.  Mais  j  il  périt  lui-même  dans 
rintervalle ,  rfune  bleflure  qu'il 
s'étoit  faite  par  mégarde  avec  fon 
épée.  Comètes  «  inûruit  de  cet 
accident ,  fe  hâte  encore  plus  de 
tuer  Mergis  »  avant  que  la  nouvel* 
le  de  la  mort  de  Cambyfe  fe  foit 
répandue.  S*étant  donc  défait  dit 
légitime  hélitier  de  l'Empire,  il 
lui  fubfiitue  Oropafte  fon  propre 
frère,  qui  reffembloit  parfaitement 
au  Prince  qu'il  venôit  d'aflfaf&neré 
Tel  eft  le  récit  de  Juftin. 

Hérodote  raconte  la  chofe  tout 
autrement ,  &  dit  que  ce  fut  Pre- 
xafpe ,  liomme  fort  eftimé  parmi 
les  Perfes  ,  oui  fe  défit  à  la  chafle 
du  frère  de  tambyfe  ,  par  Tordit 
même  de  Cambyfe  ;  &  que  la 
mort  de  ce  Prince  infpira  à  uq 
Mage  >  qu'il  nomme  Patizithes ,  la 
réfolution  de  s'emparer  du  royau- 
me. 

COMÉTHO  ,  Comatho  , 
KofccwôSjprêtreflTe  de  Diane.  Foyci 
Mélanippe. 

COMÉTHO  ,  Cometho  ,  Ks- 


(f)  Pauf.  p.  519* 
(d)  Ja&,  U.  h  c. 
c«  61. 


9.  Herod.  L.  III^ 


Mm 


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fc 


54^  CO 

4a.^œ  ,  (a)  fille  de  Ptérâas,  coupa 
e  cheveu  fatal  d'où  dépendoit  la 
deftinée  defon  pere$  &  ce  Prince 
infortuné  en  perdit  U  vie.  Le  fens 
de  cette  fable  eu  que  Cométhd 
fit  alliance  avec  les  ennemis  d^ 
Ptérélas  ;  ce  qui  cau(a  la  ruine  de 
ce  Prince.  Mais ,  ell<e  fiH  punie  de 
(a  trahifon  par  celui-là  même  ^ 
faveur  duquel  elle  1  avoic  comr 
ipife.  C*étoit.  Amphitryon  »  par 
quiellefut  mife  à  mdrt., 

COMÉUS ,  Com^us,  {b)  r«tt 
des  furnoini  que  rai\tiqoité  a  at-f» 
tribués  à  Apollon^  \\  éfoit  adoré 
fous  ce  furnom  à  Sékucie  ,  'd'qii 
U  ftatue  fut  portée  à  Rome,  & 
placée  dans. le  temple  d*ApolkHi 
Palatin.  On  dit  que  les  foldats  qui 
prirent  Séleucie|S*étant  mis  à  che^^ 
f;her  dans  le  temple  d'Apolloil 
Coméus>  des  tréfort  qu'ils  y  fup4 
pofoient  caichéi  jil  fortic  9  par  uae 
çaverture  qu*U*  avoient  faite  .^  ui^e 
vapeur  empbifônnée  qui  répatidS 
la  pefte  depuis  cette  -ville  ju(que 
fur  les  bords  du  Rhin  ;  c'eft-  à- 
dire ,  que  ce  pillage  &  cette  peAé 
\  fi  elle  eft  vraie  ]  arrivèrent  en 
inême  tems ,  &  que  le  peuple 
toujours  fuperftitieax .  &  raifon* 
Dant  à  (k  manière  ordinaire  »  ré- 
garda Tun  de  ces  événemens  comf 
me  la  caufe  de  l'autre.  \ 

Apollon  Coméus,  c*eft-à-dîre  , 
Apollon  à  belle  çhçveîure.  L*idée 
poétique  de  donner  à  Apollon. 
tMie  belle  chevelure  blonde,  vient, 
félon  toute  apparence ,  de  la  ma- 
inère  éparfe  dont  0n  voit  (es 
rayons ,  lorfqu'ils  tombent  obli- 


C«f)  Myth.  par  M 
(iJVAmiq.  €xpl.  par 


CO 

<|tiemem  fur  une  forêt  éjpaïKre  «& 
qu'ils  paflent  entre  les  feuilles 
^ès  arbre»  comme  de  longs  filets 
lucnnep^  &  blonds.  I^es  Nau^ 
içratieiis  célébroieot  fa  fête  en  ha- 
UtttW5ic.. 

. .  XiOMICE  ;  Comthm ,  {c)  Heu 
de  Rome  dans  la  hattième  ré^on» 
yei:s  Je  Capicole  \  près  duinarché 
Romain.  C'étoit*là  que  fe  tenoient 
ordinairement  les  Comices  par 
Curies.  Ce  lieu  h'ëtoif  ,f^lon  tou- 
te apparence»  fermé  cfùe  .d'un 
^ornpefcè^  de  deuJt  ptsrtes',  par 
»i»fdêfqueHe3  ixôé  Cuvie  ibrtoit» 
tai|di».que  la  Curîeâiivame  e<i- 
trCMt  par  Tautre,' félon  Pordre  gar- 
dé dans  les  ov'dia  on  fiptu ,  aa 
th^mp  de  MarsJ^e  fut  couvert 
qu'en  545.  OfHJnmffi  des  por- 
fiquet,  <»a  y  éleva  dés  fiatues; 
c*6oMt-»là  qo'étoit  \eplmeal  tibonis^ 
bu'lfaateloii  les  IV^àgiib-ats  pré- 
tDi'encfermem;de  figpier  fativage 
fous  lequel  la  loa«e ravoir  alaicé 
Rémasrf&  Romiilus';  1^  grande 
pierre  noire  qnéftomnlus  choifit 
dé  fen  vivant  pour  fil  tombe.  On 
y  punUTèit  les  maUàîteon;  on  y 
Couettpit  i  mort -ceux  qui  avoient 
couompu  les  Veûates.Les  An- 
ciens y  jouoîenc  à  la  paume ,  & 
CaBton  s'y  exerçôit  quelquefois. 
'^  Oa  dit  qu'il  y  avoit  dans  le 
Comice ,  une  efpèçe  d'échafaud 
qu  de  théâtre  élevé  &  ^^cieux  , 
qu'on  nommoit  la  Tribune  aux  ha- 
ran^»,  que  les  Romains  appel- 
aient Rofira. 

Ce  lieu  3  nommé  Roftra  »  étoît 
un  temple  où  Ion  avoit  rangé  les 

l*Abb.  Ban.  Tom.  f  Montf.  Tom*  I.  pag.  6^, 

(r)  Tir.  Liv.  L.  I.  c.  j«.  RoU,  Hifl. 


3.  de  M 


D,  Bcrn.  de'Aom*  T.  III.  p*  $93 • 


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co 

éperons  des  navires, qaeC.  Mœ- 
nius  Conful  avoit  pris  dans  une 
bataille  contre  les  Ântiates ,  l'an 
de  Rome  416;  &  avant  Jefus- 
Chrift  338,  Cétoit  de  cet  endroit 
qu'on  rendoit  la  juilice  ,  qu'on 
propofoit  les  loix  au  peuple,qu'on 
le  naranguoit ,  &  qu'on  traitoil 
avec  lui  généralement  de  toutes 
cbofes.  On  y  élifoit  encore  la  plu- 
part des  Magiilrats  ;  auflj  les  pré« 
tendans  aux  charges  s'y  famiiiari- 
foient  indifféremment  avec  tout 
le  monde ,  careffoient  &  prioieat 
les  uns ,  promettoiem  aux  autres  , 
&  n'oublioient  rien  pour  avoir  les 
fufFrages  ,  fe  faîfant  affilier  dans 
ces  occafions  par  leurs  amis  6c  par 
leurs  parens  qui  avoient  le  plus  de 
crédit.  Il  y  avoit  un  autre  lieu 
nommé  Rofira,  au  pied  du  mont 
Palatin. 

COMICES ,  Comitia  ,  {a) 
nom  que  l'on  donnoit  aux  aflfem- 
blées  du  peuple  R^omain,  qui 
avoient  pour  objet  les  affaires  de 
l'État.  Ces  affembées  étoient  con- 
voquées &  dirigées  ,  ou  par  un 
des  deux  Confuls  ,  ou  dans  la  va- 
cance du  Confulatjpar  Tinter-rex, 
par  un  Préteur ,  un  Diâateur ,  un 
Tribun  du  peuple ,  un  Souverain 
Pontife,  ce  qui  n'étoit  pas  01  di- 
najre  ,  un  Décemvir  ,  ou  un 
Édile. 

Les  Comices  fe  tenoient  ou 
pour  réleétion  d'un  Magiflrac,  ou 
pour  quelque  innovation  dans  les 
Loix,  ou  pour  une  réfolution  de 
guerre;  l'addidion  d'un  Gouverne- 
xnent ,  la  dépofition  d'un  Général, 


(^)  Coût,   des  Rom.  par  M.  Kîeup.  jlnfcript. 
p.  3a.  é"  fai^»  Mém.  de  TAcad,  des  ^  &  fuivt 


n.  On 


,  CO 

le  jugement  d'un  citoyen.  Un 
s'aflembloit  dans  le  champ  de 
Mars,  ou  dans  le  marché  ,  ou  an 
Capitole.  Les  citoyens  habitans  de 
Rome  &  les  étrangers  y  étoient 
indiftindement  admis.  Il  n'y  avoit 
point  de  Comices^  les  jours  de  fê- 
tes ,  les  jours  de  foires ,  ni  les  jours 
malheureux.  On  ne  comptoit  dans 
l'année  que  184  jours  de  Comices; 
ils  étoient  remis  quand  il  tonnoit  , 
ou  qu'il  faiioit  mauvais  rems ,  ou 
que  les  augures  ne  pouvoient  pas 
commencer  ou  continuer  leurs 
obfervations.  La  hberté  des  af- 
femblées  Romaines  fut  très-gênée 
fous  Jules  Céfar  ,  moins  fous  Au- 
gufte  ,  plus  ou  moins  dans  la 
fuite  ,  félon  le  caraâère  des  Em- 
pereurs. 

La  diftinftion  des  Comices  fui- 
vit  la  didribution  du  peuple  Ro- 
main. Le  peuple  Romain  étoit  di- 
vifé  en  Centuries  ,  en  Curies  6c 
Tribus  j  il  y  eut  donc,  fur  tout 
dans  les  commencemens ,  les  Co^ 
mices  appelles  Comitia  tributa , 
les  Curiata  ,  &  les  Centuriata,  Ih 
prirent  auili  des  noms  différens  ^ 
fui  van  t  les  magiflratures  auxquel- 
les il  falloit  pourvoir  ;  &  il  y  eut 
des  Comices  dits  Confularia  ,  les 
Pretoria ,  les  Mdilitia  ^  Cenforia  , 
Pontificia  ,  ProconfuUrïa  ,  Pro- 
pratoria  &  Tnbujûtia  ,  lans 
compter  d'autres  Comices  dont 
l'objet  étant  particulier  ,  le  nom 
rétoit  auffi  ,  tels  que  les  Calata. 

Le  nM)t  Comices  vient  d'un  mot 
Latin, qui  Hgnifie  aller enfemùU , 
s*ajfembler. 

&  Beîr  tett.  Tom.  I.  p.si 

Mm  ij 


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548  C  O 

COMICES,  appelles  jEdi^ 
litia.  C'étoit  des  afletnblées  ,  où 
l'on  élifoit  les  Édiles  Curules 
&  Plébéiens;  elles  étoient  Quel- 
quefois convoauées  par  les  Tri- 
buns,  quelquetois  par  les  Édiles  ; 
le  peuple  y  écoit  diOribué  par 
Tribus. 

COMICES,  appelles  Calata. 
Le  peuple  y  dans  ces  ademblées , 
étoit  diftribué  par  Curies  ou  par 
Centuries.  C'étoit  un  Liâeur  qui 
appelbit  les  Curies;  c'étoit  un 
Cornicen  qui  appelioit  les  Cen- 
turies. Elles  étoient  demandées 
par  le  Collège  des  Prêtres  ;  on  y 
élifoit  dans  les  Centuries  un  rex 
Sacrîficulus ,  &  dans  les  Curies , 
un  Flaminé.  On  n'appelloit  que 
dix- fept  Tribus  ;  ce  n'étoient  donc 
pas  proprement  des  afTemblées 
qu'on  pût  appeller  Comitia ,  mais 
Confilia,  On  y  faifoit  les  aftes  ap- 
pelles adrogations  ,  ou  adoptions 
de  ceux  qui  étoient  leurs  maiires  , 
fui  juris.  On  y  paffoit  les  tefta- 
xnens  appelles  de  ce  nom ,  tefla" 
menta  Calata  ;  on  y  agitoit  de  la 
cérémonie  appellée  deuftatio  fa^ 
(rorum ,  ou  de  raccompliflçment 
des  legs  deftinés  aux  chofes  fa- 
crées ,  félon  quelques-uns  »  ou  de 
la  confécration  des  édifices ,  félon 
d'autres. 

COMICES,  appelles  Cenfo- 
ria.  C'étoient  des  afTemblées  , 
oîi  l'on  ïlifoit  les  Cenfeurs»  Le 
peuple  y  étoit  diftribué  par  Cen- 
turies; un  des  Confuls  y  préHdoit; 
le  Cenfeur  élu  entroit  en  charge 
immédiatement  après  l'éle^lion  ,  à 
moins  qu'il  n'y  eût  quelque  caufe 
de  nullit.é.  #• 

COMICES  ^  appelles  Centu^ 


co 

rîata  ,  autrement  Com'ices  par 
Centuries.  Voye^  Centuries. 

COMICES  ,  appelles  Confit- 
laria»  Dans  ces  affemblées  ,  le 
peuple  étoit  diftribué  par  Centu- 
ries ;  on  y  élifoit  les  Confuls.  Le$ 
premiers  Comices  CctnfuUria  fe 
tinrent  l'an  de  Rome  245  par  Sp. 
Lucrétius ,  inter-rex  pour  lors>& 
on  y  nomma  Confuls  M.  Jun.  Bro- 
tus  &  Tarquinius  CoUatinus.  On 
créa  fou  vent  un  inter-rèx  pour 
préfider  à  ces  Comices ,  quand 
réleâion  des  Confuls  ne  pouvoic 
fe  faire  au  tems  marqué.  L'inter- 
rex,  fous  lequel  l'éleâion  des 
Confuls  fe  commençoit  ,  n'en 
voyoit  pas  ordinairement  la  con* 
clufion  ;  fon  règne  n'étant  que  de 
cinq  jours ,  on  en  créoit  un  fé- 
cond* Ce  fut  dans  la  fuite  à  un 
Exconful  k  tenir  les  Comices  con- 
fulaires.  Au  défaut  d'Exconful , 
on  faifoit  un  Diâateur,  Us  fe  te- 
noient  à  la  fin  du  mois  de  Juillet, 
ou  au  commencement  d'Août. 
Lorfque  les  féances  étoient  inter- 
rompues ,  l'éleâion  duroit  jufqu- 
au  mois  d'Oâobre.  Cependant, 
les  Candidats  au  Confiùat  s'ap- 
pelloient  Confuls  défignés ,  Con^ 
Jules  defipiati  ;  &  la  fonâion  des 
Diéèateurs  ne  finiftbit  qu'au  pre- 
mier Janvier  ,  &  avant  qu'on  eût 
^xi  lé  premier  Janvier  ,  qu'au 
commencement  de  Mars.  Alors , 
\ts  Confuls  défignés  enttoient  en 
exercice. 

COMICES ,  appelles  Curiataj^ 
ou  Comices  par  Curies.  Voyez 
Lunes. 

COMICES  ,  Pontificia,  Le 
peuple,  dans  ces  aftîemblées,  étoit 
diftribué  par  Tribus  j  on  y  élifoit 


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co 

mû  foaveraîn  Pontife  ;  on  tSroît  le 
rang  des  Tribus  au  fort  ;  l'unani- 
mité  de  dix- fept  Tribus  fuffifoit 
pour  réleâion.  Ce  fut  un  Pontife 
<]ui  les  convoqua  ^  6c  qui  les  tinc 
Î4ifqu*à  ce  que  ce  droit  eut  été 
transféré  aux  Confuls  par  la  loi 
jDomitia. 

COMICES,  appelles  Prato- 
ria.  C'étoient  des  aîTemblées ,  oli 
le  peuple  étoit  diAribué  par  Cen- 
turies; on  y  élifoit  les  Préteurs. 
Ces  Comices  étoient  tenus  par 
VA  ConfiiU  Comme  il  y  avoit 
quelquefois  jufqu'a  dix  Préteurs  à 
nommer ,  6c  que  le  nombre  des 
Candidats  étoit  grand ,  les  féances 
duroient  û  long-cems  qu'on  divi- 
Ibit  réleâion  ,  6c  qu  on  différait 
celle  de  quelques  Préteurs.  Ces 
Comices  fe  tenoiènt  un ,  deux 
ou  trois  jours ,  6c  rarement  plus 
tard  »  après  les  Comices  Confu- 
laires. 

COMICES ,  appelles  Procon- 
fularia  6c  Proprcetoria.  Le  peu- 
ple ,  dans  ces  aiTemblées  »  étoit 
diftribué  par  Tribus.  On  y  élifoit 
les  Proconfuls  6c  les  Propréteurs , 
lorfque  les  cas  Texigeoienc^comme 
plufieurs  Gouvernemens  de  pro- 
vince à  remplir  ,  plufieurs  guerres 
à  conduire ,  une  feule  guerre  ou 
un  feul  gouvernement ,  auquel  les 
deux  Confuls  ou  Préteurs  préten- 
doient  en  même  tems.  Quant  à  la 
manière  de  les  tenir ,  voyez  les 
Comices  appelles  Centuriata» 

COMICES  ,  appelles  Quaf 
toria.  Dans  ces  affemblées ,  le 
le  peuple  étoit  diflribué  par  Cu- 


C  G  549 

rîes  ;  on  y  élut  les  Qoefteufs,  jus- 
qu'à ce  que  ce  droit  fut  transféré 
aux  Comices  par  Tribus.  Les  Co- 
mices Quaftoria  étoienf  tenus  par 
un  Conful  ;  on  y  procédoit  pat 
Curies  dans  le  marché  Romain  , 
&  par  Tribus  dans  le  champ  de 
Mars. 

COMICES ,  appelles  Sacerdo. 
tum.  C'étoient  des  ademblées ,  bil 
le  peuple  étoit  diftribué  par  Trî«% 
bus.  On  y  élifoit  les  Prêtres.  Le 
Cotoful  y  préfidoit. 

COMICES ,  appelles  Tribmd^ 
lia,  ^y^^  Tribunitia. 

COMICES,  appelles  ,  Trihw'       , 
ta,  ou  Comices  par  Tribus.  F^e;;  - 
Tribus. 

COMICILES  ,  Comicllia  » 
étoient  des  affemblées  particuliè- 
res des  citoyens  Romains.  On  lef 
appelloit  ainfi  pour  les  diftinguer 
des  Comices,  où  tout  le  peuple 
devoit  fe  trouver  au  moins  par 
fes  repréfentans. 

CÔMINIENS  ,  Comnî ,  pea^ 
pie  d'Italie.  Leur  ville  fe  nommoic 
Cominium.  Voye^  Cominium. 

COMINIUM,  Comi/uW;  (^) 
ville  d'Italie ,  au  païs  des  Samni- 
tes.  Cette  ville  fut  affiégée  parles 
Romains ,  l'an  de  Rome  459.  Le 
Conful  Sp.  Canrilius  fit  des  efforts 
extraordinaires  pour  faire  réuffir 
Taffaut.  On  efcalade  les  muTs , 
on  enfonce  les  portes.  Les  aiSé* 
gés  ,  perdant  toute  efpérance  ,  fe 
retirent  tous  dans  la  place  publi- 
que ,  6c  après  une  courte  6c  foi- 
ble  défenfe  ,  mettent  bas  les  ar- 
mes ,  &  fe  rendent  à  difcrétion  au 


(^)  Tit.  Liv.  L.  X.  c.  59,  ^  ^ê^.  L.  XXV.  c.  14.  PHn.  T.  I.  p,  169.  RoU.  Hift. 
jaom.  T.  Jï.  p.  J57,  J58. 


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5SO  CO 

Confui  au  nombre  de  plus  ie 
quinze  mille  hommes;  il  y  en 
avoit  eu  plus  de  quatre  mille  de 
tués.  La  ville  fut  livrée  au  pillage , 
&  réduite  en  cendres. 

Pline  nomme  les  habitans  Co- 
mini  ;  &  le  P.  Hardouin  trouve 
qu'il  feroit  mieux  de  lire  Cominii. 
Pline  met  Cominium  au  liombre 
des  villes  qui  ne  fubfidoient  plus 
de  Ton  tems.  Cependant ,  Scipion 
Mazella  ,  cité  par  Ortélius  ,  pré- 
tend  qu'on  l'appelle  préfentement 
Comino. 

Tite-Live,  au  cinquième  livre 
de  la  troifième  Décade,  parle 
d'une  ville  »  qu'il  nomme  Comi- 
nium Ceritum.  £fl-ce  la  même  , 
dont  on  vient  dé  .faire  mention  , 
ou  une  aurre,diftérçnte  de  celle-ci? 
Cour  moi  j'avoue  que  je  ne  fçau- 
rois  décider  la  queftion. 

COMiNIUS,  Cominius.  Fbyei 
Pontius  &  Poilu  mus. 

COMINIUS  [Sext.],  (a) 
Sext,  Cominius ,  fut  conduit  par 
ordre  du  Préteur  Verres  à  un  re- 
pas barbare  donné  à  MeHine. 
C'eft  dans  cette  circonftance  que 
ce  Préteur  voulut  lui  jetter  à  la 
tête  la  coupe  qu'il  tenoit  en  main , 
&  qu'il  ordonna  de  le  faifir  à  la 
gorge  pour  être  de  -  là  renfermé 
dans  les  cachots. 

COMINIUS  [  Q.  ]  .  {b)  Q. 
Cominius  ,  ofHcier  ,  qui  fervoit 
dans  l'armée  de  Céfar.  Etant  tom- 
bé entre  les  mains  de  Scipion ,  il 


CO 

fervit  depuis  dans  les  troupes  d0 
ce  dernier. 

COMINIUS  [L.  ],  Z.  C<M 
minius.  Ciceron  dit  de  ce  L.  Co- 
minius la  même  chofe  que  de  ce- 
lui qui  fuie.  Voye;^  l'article  fui- 
vant. 

COMINIUS  [P.], -P.  Coi«*^ 
nius  »  (  c  )  Chevalier  Romain , 
joignit  beaucoup  d'éloquence  à 
une  grande  probité.  Il  nit  accu^ 
fateur  de  Stalénus  >  félon  Cice- 
ron. 

COMINIUS  [C]  ,  C.  Comi^ 
nius  ,  (d)  Chevalier  Roinain  ,  fut 
convaincu  d'avoir  compofé  con- 
tre Tibère  un  poëme  injurieux  & 
diffamant.  Ce  Prince  lui  6t  ce- 
pendant grâce  aux  prières  d'un 
Sénateur  ,  frère  du  coupable. 

COMIQUE  [  Le  ]  ,  (e)  fur- 
nom  donné  par  excellence  aa 
poëte  Ariflophane  9  comme  Ho- 
mère eft  connu  par  ce  feul  mot 
le  Poëte, 

COMIQUE ,  Comicus  ^  nom 
que  l'on  donne  aux  anciens  Poè- 
tes' qui  ont  compofé  des  corné-' 
dies. 

COMIUS,  Comius,  {f)  Atré- 
bate  I  fe  rendit  d^abord  digne  de 
la  confiance  de  Céfar ,  qui  le  fit 
Roi  de  fa  nation.  Comme  fon 
nom  étoit  fort  connu  ^  fort  con- 
fidéré  dans  la  grande-Bretagne, 
Céfar ,  fur  le  point  dfy  paiTer ,  l'y 
envoya  avec  ordre  de  parcourir 
différens  peuples  ,  &  de  les  ex- 


^ii)  Cicer.  Orat.  in  Vcrr.  L.  VI.  c.  to. 
(&)  Hirc.  Panf.  de  fiell.  Afric.  pag. 
784  *  786. 
(c)  Ciccr.  Orat.  pro  A.  Clucnt.  c.  80. 
{d,  Tacit.  Annal.  L*  IV.  c^;i. 
(e)  Mém.  de  TAcad.  «des  lofcript.  & 


fiell.  Lett.  T.  (XXI.  p.  146. 

(/)  C«f.  de.BcU.  GalL  L.  IV.  p.  14I, 
149.  L.  V.  pag.  176.  L.  Vïll.  pag.  174. 
&  fe<f,  Crév.  Hift.  Rom.  Tom.  VU.  p. 
143.  &  friv,  ^ 


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co 

JiW-tCf  à  teconnoître  l'Empire  Ro- 
main^  Mais, les  Bretons^  an  lieu 
de  fe  foufnettre ,  arrêtèrent  Co- 
mius  ,    qui  demeura  prifonnier , 
jufqu'à  ce  que  Céfar  eut  contraint 
ces  peuples  à  fe  rendre^ 
;  L^  i-oi  des  Atrébates  fe  montra 
9flet  loQZ«-tems  attaché  aux  iàté* 
féts  des  Romains  ,  &  en  fut  biea 
técocApenfé.  Mais  >  le  zele  !pour 
h  hberxé    commune    &    «pouc 
b  ;gl.oîré  de  li  nation.^  l^mîiorîp» 
%i  depuis  en  lui  furnoUt- autre 
motif,  &  eiFaça  tout  aut^-e  fbu- 
ytnir*'  Lorfque  toute  la  Gaule  , 
tant  Celtique  que  Belgiîquç^  fe 
ixkt  eu  mouvement  pour  fecourir 
la  ^ille  d'AIife  ,  aiBéeée  par  Cé- 
far ,.  oa  vit  Comiu«  te  dillinguer 
parmi  ks  che&  d'une â^ «ombreux 
fe  arm*ëe»  Tan  J2  avant  J.C. 
L'année  fuivante ,  il  iravailloit  à 
foulevçr  les  peuples  de  fon  can- 
ton ;  T,  Labiénus  ,  inûruit  des 
manoeuvres  fecretes  dé  Comius  , 
crut  qu'avec  un  perfide  ,  il  étoit 
permis  d'ufer  de  perfidie.  Il  ne 
voulut  pas  le  mander  pour  fe  ren- 
dre maître  de  fa  perfonne  ,  crai- 
Snam  de  n'être  pas  obéi ,  &  de  lui 
onner  par-là   un  avertilFement 
de  fe  tenir  fur  (es  gardes.  Il  lui 
détacha     Volufénus     Quadratus 
pour  l'attirer  à  une    entrevue  , 
dans  laquelle  des  centurions  Ro- 
mains avoient  ordre  de  le  tuer. 
Comius  vint  à  l'entrevue,  &  Vo- 
lufénus Quadratus  lui  ayant  pris 
la  main  >  un  centurion  lui  déchar- 

Sea  un  coup  d'épée  fur  la  tête. 
Luffi-tôt ,  les  Gaulois  qui  accom- 
gnoient  Comius,  tirent  eux-mê- 
mes leurs  épées  ;  les  Romains 
(^n  font  autant*  «Il  n'y  eut  pas 


CO  55? 

néanmoins  de  combat;  &  ils  ne 
cherchèrent  de  part  &  d'autre 
qu'à  fe  retirer  ;  les  Romains  parce 
qu'ils  croy  oient  que  la  blefFure  de 
Comius  étoit  mortelle  ,  ôc  Us 
Gaulois  parce  •qu'ils  apprékeA^ 
dolent  une. -embtifcade^  De  ce 
momenr^  Comius  prit  «ne  £erm« 
réfolution  de  ne  jamais.  &'  trouver 
en  un  même  lieu  avec  aucun  Ro* 
main  ;^  ôt  en  conféquence ,  lor&jue 
les  Bellovaces:  firent  kur.patx^ 
il  alla  chercher  une  retraite  ^chea 
les  Germains.  •  ^   ",    - 

Il  étoit  dbnc  le  (êul  qu'il»  n!&y<Ht 
pas  .été  poffible  de  réduire.  Les 
Atrébates     cependant  .  l'anToôeot 
abandonné  \'  &  s'éto^ent  febmiè 
aux  vainqueurs*  IL  n'avoit  qiik'an 
nombre  <lè  cavaliers  atiachésr  à  fa 
petibfaoe.,  ^vec  lelqueU  -ilvÊiifoit 
des.icoorTeS'^  &l:  enlevôit  fisuvent 
les  convois  que  l'on    conduifoît 
aux  quartiers  d'hiver  des  Romains. 
M.  Antoine  commandoit  dans  ces 
cantons  ;  &  trouvant  fans  doute 
peu  digne  de  lui  de  pourfuivre  un 
ennemi  errant  &  fugitif ,  il  char- 
gea de  ce  foin  ce  même  Volufé- 
nus Quadratus  >  dont  on  vient  de 
parler.  Celui-ci,  animé  par  la  hai- 
ne, &  par  le  dépit  d'avoir  une 
première  fois  manqué  fon  coup, 
fe  mit  en  quête  de  grand  courage. 
Il  fe  laifla  pourtant  tromper  par 
Comius  d'une  façon  fingulière  6c 
qui  a  quelque  chofe  d'aUez  plai- 
fant.  Comius  avoit  quelques  bar- 
eues  à  fa  difpofition  pour  pàfler 
dans  la  grande- Bretagne»  s'il  fe 
trouvoit  trop  preffé.  Il  fe  vit  réduit 
à  tenter  cette  relTource  dans  un 
moment  oîi  Iç  vent  étoit  favora-» 
ble ,  mais  oU  Sa  mer  étoit  retirée  ^ 


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55^  .       C  d 

&  avoit  laifTé  fes  bâtiméns  à  fec. 
Il  étok  perdu ,  Ci  ébn  ennemi  fe 
fût  approché  du  rivage.  Mais  , 
Comitts  ^.  pour  len  détourner , 
éula  tes  voiles  au  haut  des  mâts; 
&  comme  le  vem  les  enâoit, 
Vohifénus  Quadratus  ,  qui  le» 
YÎt  de  Iota  en  cet  eut  ^  crut  que 
le  Gaulois  étoit  en  oleiiie  naviga- 
tion, &  s'ea  retourna.  . 
i'  U  y  eutentr'eui  divers  combats* 
f  nfin  ,  dans  une  dernière  occafion 
oii  Cooiius  fuyoit^  le  Roihain  em- 
porté par  l'ardeur  de  la  pour  fuite , 
cootUt  fur  lui  affez  mal  accompa- 
gné. G>nûus  s*en  apperçut ,  & 
toutnam  bride  fubitement,  il  vient 
fondre  fur  Voluféntts. Quadratus , 
&  hn  perce  laiCuiAe  d*ua4violent 
conpr  de  iance*  Il  ne  pat  point 
rachèver\  &  mêmeù  ironpefut 
snife  ea  défordre  par  les  .cavalters 


co 

Romains  >  qui  s'étoient  raflèmblés 
au  toar  de  leur  commandant  ;  Co- 
mius  (e  fauva  ,  laiflant  ion  enne- 
mi dans  un  état  oii  l*on  défefpé- 
roit  prefque  de  fa  vie. 

Après  ce  combat  ,  foit  qu'il 
fôt  fatisfait  de  s'être  vengé  ^  foit 
au*il  craignît  de  fucconmer  à  1» 
mi,  parce  qu'il  a  voit  perdu  une 
grande  partie  de  (on  inonde ,  3 
députa  à  M.  Antoine,  oflrantde 
fe  fbumettce  à  touc  ce  qu'on  lui 
ordooneroit  »  &:de  fe  retirer  dans 
le  Heu  qui  lui  feroit  pfefcrit.  Sen* 
lenient  il  demanda  que  l'on  eut 
cet  égard  pour  fesjuftes  craintes, 
de  ne  point  exiger  qu'il  parût  de- 
vant aucun  Romain.  M.  Antoî* 
ne,  qui  avoit  un  fond  de  bonté  &- 
de  généroflcé  naturelles  ^  4roûva^ 
fes  excufes  valables ,  reçut  Xes  ôta^ 
ges  y  &  lui  accorda  la  paix» 


Ftn  du  oniïème  Volume, 


l 


A  CHAALONS,  chczSENEUZE,  Indprimeur  du  Roi. 


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