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SOCIÉTÉ
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ANCIENS TEXTES FRANÇAIS
DOON DE LA ROCHE
PUBLIÉ PAR
Paul MEYER et Gédéon HUET
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Le Pay-cn-Vclay. — Imprimerie Peyriller, Roucliou et Gamon..
DOON DE LA ROCHE
CHANSON DE GESTE
PUBLIÉE PAR
Paul MEYER et Gédéon HUET
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V^v
PARIS
LIBRAIRIE ANCIENNE EDOUARD CHAMPION
ÉDITEUR
5, QUAI MALAQUAIS (vi*)
M DCCCCXXI
Publication proposée à la Société le 24 avril 1878.
Approuvée par le Conseil dans sa séance du 22 mai suivant, sur
le rapport d'une Commission composée de MM. Henri Michelant,
Gaston Paris et Gaston Raynaud. '
Commissaire responsable :
(en remplacement de Gaston Paris,
mort avant le commencement de l'impression)
, , M. Antoine Thomas.
?Q
'457
! f 2/
INTRODUCTION
CHAPITRE PREMIER
HISTORIQUE DE l'ÉDITION.
L'édition de Doon de La Roche a eu une histoire lon-
gue, compliquée et finalement douloureuse.
Le manuscrit de Londres qui contient le poème avait
été signalé dès i838 par Francisque Michel, parmi les
résultats du voyage d'exploration dans les bibliothèques
anglaises, dont il avait été chargé par le Ministre de
l'Instruction publique '. — Lorsque Guessard conçut
I. Francisque Michel, Rapports à M. le Ministre de l'Instruc-
tion publique sur les anciens manuscrits... qui se trouvent dans
les bibliothèques d'Angleterre et d'Ecosse, Paris, i838, in-4%
p. 55-56. Fr. Michel donne quelques détails sur le manuscrit du
Musée Britannique, cite les 10 premiers et les 11 derniers vers
de la chanson et indique un rapprochement possible avec Doon
de Mayence. — A ces 21 vers, publiés par Franc. Michel, il faut
ajouter deux fragments, formant un ensemble de 122 vers, cor-
respondant aux vv. i258-i3oo et 2696-2774 de notre texte, publiés
par M. W. Benary, dans le t. XXXI des Romanische Forschungen,
p. 385-3g2, en appendice à l'étude que nous mentionnerons plus
loin. C'est tout ce qu'on a publié jusqu'ici de Doon de La Roche.
jj DOON DE LA ROCHE
le projet de la publication intégrale des chansons de
.este, dans la collection d,s Anciens poètes de la France
fl songea à Doon de La Roche. Un romaniste allemand,
Cari Sachs ', fut chargé, en vue de cette publication,
par Fortoul, alors Ministre de l'Instruction publique,
d'une mission littéraire en Angleterre : il en rapporta
entre autres, une copie de Doon de La Roche, qui fut
tout porte à le croire, remise a Guessard, et une
analyse du poème, que l'auteur pubha en allemand
à Berlin, en 1857, avec d'autres travaux sur la litté-
rature du moyen âge '. A„ri^r7^
Dans le prospectus joint au volume des Anciens
poètes de la France c^ui parut en i858 et qui contient
Gui de Bourgogne, Otinel e^Floovant, on annonce
comme devant paraître : « Fterabrasp.rU. Krober
Doon de La Roche, par M. le doct Ch. Sachs >k- Dans
le prospectus joint au volume qui contient Gaufrey et
qui est'daté du le. octobre iSSg, Doon de La Roche est
indiqué comme devant être le 19^ volume de la série
C. Sachs n'est plus nommé comme éditeur^- l^n
,864, G. Paris écrivait: «... le roman de Doon de
La Roche..., ni prendra bientôt sa place dans la co -
lection des Anciens poètes de la France » . 1 œuvre
n'avait toujours pas paru. ^ j^ j« u
Guessard se méfiait, semble-t-il, de l'exactitude de la
copie de Sachs; il profita d'un voyage que fit en Angle-
er're M. G. Fagniez, alors élève de l'Ecole des c h art s
pour obtenir une révision du manuscrit. M. Fagmez
, Il fut plus tard, avec Césaire ViUatt^ auteur du grand
Dictionnaire allemand-français et français-allemand
Tseitrâ^e rur Kunde alt-fran:^ôsischer, engbscher undpio-
p' .0, l'analyse de Doon de La Roche, avec quelques remar-
ques sur la langue du manuscrit. A-^Vl,Hf,A\ io5
3 Bibliothèque de l'École des chartes, 5- série, V (1864). ioi>.
INTRODUCTION IH
fit des coUationnements et des conjectures : le tout fut
remis à M. Paul Meyer ', qui fut alors, semble-t-il,
chargé définitivement du soin de l'édition. M. Meyer,
collationna de nouveau la copie de Sachs sur le manus-
crit de Londres 'et prépara cette copie revue et corrigée
pour servir de base à l'édition, conformément au
principe établi par Guessard pour la collection des
Anciens poètes, savoir : reproduction fidèle du texte
du manuscrit principal (ici manuscrit unique), sauf
dans le cas de leçons manifestement erronées.
Après les événements de 1 870-1 871, la publication de
la collection des Anciens poètes (qui, il faut le dire,
n'avançait que très lentement pendant les années qui
précédèrent immédiatement la guerre franco-allemande)
fut définitivement abandonnée; en revanche, en 1875
fut fondée la Société des Anciens Textes Français.
Dans la séance du Conseil d'administration de la So-
ciété du 24 avril 1878, M. Meyer proposa deux nou-
velles publications : Yder et Doon de La Roche-, le
projet fut renvoyé à une commission, composée de
MM. Michelant, G. Paris et G. Raynaud ; dans la
séance du 22 mai 1878, G. Paris fit un rapport et con-
clut à l'admission du projet. G. Paris fut nommé com-
missaire responsable '.
Dans l'assemblée générale de la Société qui eut lieu
bientôt après, le 29 mai 1878, M. Meyer, dans le rap-
port qu'il fit en qualité de secrétaire, parla en détail des
deux poèmes qu'il s'agissait de publier. Ce qu'il dit
alors ^ mérite d'être reproduit ici en entier, du moins
en ce qui concerne Doon de La Roche :
1. Je dois la connaissance de ces faits à une communication'-^
obligeante de M. G. Fagniez, datée du 17 novembre igiy.
2. A la fin de la copie collationnée, on trouve, écrite de la
main de M. Meyer, la date du 3 octobre i865.
3. Bulletin de la Société des Anciens Textes, IV (1878), 72-73,
4. Bulletin, année citée, p. 87 et suiv. '•>
^ DOON DE LA ROCHE
\..Unco.e à vous entretenir .ede„pro^«^^^^^^^^
3.enir -'- ^^ i,™" e^. retelcore inédits
t''::XT:;.Vl'ner e, la chanson de Doo. ie la
Xn .e .. (Sic, RocHe es, "-^'^Xpin if 3':''?^;^^°:
4,600 vers dont l-acùon se pas^^^ousPe^p,nle_^^ ^^ J^^^
donné en mariage sa ^'*""'' ^ ^„use es, chassée par
Injus.emen, accusée, la '"f '^f"^' ^es exploits à la suite
son mari, et le poème est _.^_^^^jj j
a.s,ue.s >e ie- •^andt fi d^Ol^e^^ ^^ ^^^^ ^^
ï,mr r::: extraite avec -^f !^':!^-,,Tn /en
,ieo conduit, ™ P^ "r^^rde ^0. e:t";ncienne : tout
traits intéressants. La "^^anson ^^.^^ descendre
entière en --"-'"'j; "Xlignalée pour la première
plus bas que la fin du xu siècle^ s F ^^^ ^^^
'-^•" ^ ^ !':i';u\"^"b"rt:n:;,'u: fnalysée sommaire-
un manuscrit du Musée d | ^^^ ^.^^^^^ ^^j.
ment il y a vingt ans par M. le ^ ^' " ^^ ,,;,, „.en a été
,„., ce :»" '"^^^•':;:\ra;Tnt b™:!»": nLs faire don de
découvert. M. Guessard aya . ^ manuscrit du
r pTh;.r nf d'o\- =-" --- ^^^ -'-
tenant.
Oi. années P-^-;^P^"t";rXt «rî^
vaux, notamment red.t.on de la V.e da^t.
MarecAa/, absorbèrent '•-<"";„^„%^;f,X;A.. Dans
„,8 il revint f^;' ^c rConseûde la Société
le procès-verbal de la séance ou p
^-9 "7-^:^f ^rser;u'il a";!:rus pressele
Meyer informe le ^'^''^'^ ^e Conseil nomme
poème de Doon de La (^'^)^^''''-;. .'T' .^^ cette publi-
L. Thomas commissaire responsabe pou -^ P ^^,
cation, en remplacement de G. Pans. Le tirag
INTRODUCTION V
à 625 exemplaires dont 25 sur papier Wiiatman ' ».
Des communications au Conseil le tenaient au courant
des premiers progrès de l'impression '. Mais, dans le
procès-verbal de la séance du Conseil du i5 décembre
19 10, on lit ' : « M. Meyer espère reprendre l'impres-
sion de Doon de la Roche, que son état de santé l'a
obligé d'interrompre ». Avec sa conscience habituelle,
il crut devoir donner des explications plus détaillées
dans le rapport qu'il lut à l'assemblée générale de la
Société, le 28 décembre suivant ' : « Nous devons
encore un livre, et j'ai le regret de dire que la faute est
mienne. Je suis en effet atteint, depuis plusieurs mois,
d'une affection dont Je ne suis pas guéri, et qui rend
mes travaux très pénibles. Toutefois mon édition de
Doon de La Roche est assez avancée et j'espère réussir
à la terminer pendant la prochaine année ».
Mais M. Meyer avait trop présumé de ses forces. Il
ne revint sur Doon de la Roche que dans son rapport
lu à l'assemblée générale de la Société le 23 décembre
1913 ; il y expliqua en même temps pourquoi et en
quelle mesure il s'était adjoint un collaborateur *.
Il convient maintenant de vous entretenir des autres pu-
blications depuis longtemps préparées et annoncées, et qui
ne pourraient être retardées sans inconvénient. L'une est la
chanson de Doon de la Roche dont les trois premières
feuilles sont en épreuves depuis igoy, et que j'ai dû inter-
rompre, comme bien d'autres travaux, par l'état de ma
santé. Cependant il faut bien en finir. Ce qui me fatigue
particulièrement, ce n'est pas l'établissement du texte, qui
peut être terminé en peu de mois, c'est la rédaction de
l'introduction, ou plus spécialement d'une certaine partie
1. Bulletin de la Société, XXXIV (1908), 58.
2. Bulletin, XXXV (1909), 48 ; XXXVI (1910), 44.
3. Bulletin, XXXVI (19 10), 5o.
4. Bulletin, XXXVI (19 10), 72.
5. Bulletin, XXXIX (igiS), 77-78.
VI DOON DE LA ROCHE
de l'introduction : la légende de dame Olive, la femme de
Doon de la Roche. C'est une variante de l'histoire de la
femme injustement accusée et persécutée qui finalement
est réhabilitée et reprend sa position première. Les versions
de ce récit, en quelque sorte banal, sont très variées et ont
été maintes fois étudiées. Pour caractériser la forme que
présente le poëme de Doon de la Roche il me faudrait pour-
suivre des recherches que mes loisirs et surtout l'état de ma
santé^ notamment la faiblesse de mes yeux, ne me per-
mettent pas de conduire à bonne fin. Je me suis donc
adressé à notre confrère M. Huet, qui est fort au courant
des travaux publiés sur le groupe de légendes auquel appar-
tient Doon de la Roche. Grâce à lui j'espère avoir terminé
l'an prochain l'édition depuis si longtemps commencée.
Le rapport où se trouvent ces paroles fut le dernier
que M. Meyer put rédiger en sa qualité de secrétaire de
la Société des Anciens Textes. Le mal dont il était
atteint fit malheureusement des progrès de plus en plus
rapides et devint bientôt incurable.
Quand M. Meyer se fut éteint, après de longues
souffrances, la confiance de Madame Meyer et celle
de la Société des Anciens Textes me chargèrent de
l'achèvement d'un travail auquel M. Meyer lui-même,
on l'a vu, m'avait en quelque sorte associé pendant
sa vie.
INTRODUCTION VII
CHAPITRE II
LE MANUSCRIT ET LES FRAGMENTS. — LANGUE DES
FRAGMENTS ET DU MANUSCRIT.
La chanson de Doon de La Roche ne nous est parve-
nue que dans un seul manuscrit complet, conservé à
Londres, dans le British Muséum : il y est côté Har-
ley 4404. Quelques détails sur ce manuscrit ont été
donnés par H. L. D. Ward ' ; J'en dois d'autres à l'obli-
geance de MM. L. Brandin et O. H. Prier, qui ont bien
voulu examiner le manuscrit à mon intention. D'après
ces données, le manuscrit est un in-4'', sur papier, de
25 1 feuillets, de 294 sur 210 millimètres; l'écriture est
du XV* siècle. La reliure est en cuir de Russie et porte
en repoussé les armes du second comte d'Oxford,
Edward Harley. Au dos sont écrits les titres : Le roman
de Doon V Allemand de la Roche. Epistre de Prestre
Jehan. Le Romans des Anfances Ogier. Au dessous :
MUS. BRIT. BIBL. HARL. 4404. PLUT. LXX. E. AuCUnC nOtC
d'un genre quelconque sur les feuilles de garde ou
ailleurs, de sorte que nous n'avons aucune donnée
sur les origines du manuscrit et ses destinées jusqu'au
moment où il fit partie de la collection harleienne *.
1. Catalogue of romances in the Department of manuscripts of
the British Muséum, London, i883, I, 871. Une courte description
du manuscrit avait déjà paru dans A Catalogue of the Harleian
manuscripts in the British Muséum, London, 1808, III, 141.
2. On sait qu'Edward Harley avait hérité de la magnifique
collection de manuscrits formée par son père, Robert Harley,
premier comte d'Oxford ; il y ajouta des acquisitions nouvelles.
Il mourut en 1741. En 1733, sa veuve vendit la collection à la
nation anglaise ; elle fat placée au Musée Britannique ; voir
Dictionary of National Biography, XXIV, Sgô. Nous ne pouvons
VIII DOON DE LA ROCHE
Le volume, écrit d'un bout à l'autre de la même
main, contient : fol. 1-88 recto, Doon de La Roche ; 3 ff.
blancs, non numérotés; fol. 89, Lettre du Prêtre Jean à
l'empereur Frédéric '; fol. 1 02-25 1, les Enfances
Ogier. — Dans la partie qui contient Doon de La Roche,
il y a 24 a 27 vers par page ; une initiale rouge marque
le début de chaque laisse. — Le manuscrit est bien
conservé ; dans la partie qui contient Doon de La Roche
on trouve, au fol. 82 b, des vers incomplets (voir notre
texte, v. 4356-4364), mais le feuillet est intact; l'écriture
n'a pas souffert; il est probable que le manuscrit que
le scribe avait sous les yeux offrait à cet endroit un
texte en partie illisible et que le copiste s'est borné à
transcrire ce qu'il pouvait lire, s'abstenant sagement de
compléter les vers par des conjectures personnelles.
Si, dans ce cas, il a fait preuve de discrétion, il a
malheureusement, au cours de son travail, donné de
nombreuses preuves de négligence ^ et de précipitation ;
remonter plus haut en ce qui concerne les destinées du manus-
crit, qui n'a certainement pa:i été écrit en Angleterre et qui doit
provenir de France.
1. Incipit : « Prestes Jehans par la grâce de Dieu », etc. C'est
une pièce qui se trouve dans de nombreux manuscrits (voir
Romania, XV (1886), 177) et qui a été publiée par Jubinal dans
son édition de Rutebeuf, 2" édit., III, 356 et suiv. M. O. H. Prior
a constaté d'assez fortes différences de rédaction entre le texte du
manuscrit et celui de Jubinal, « mais le fond est le même, quoique
la forme diffère souvent ».
2. Cette négligence se manifeste surtout par de nombreuses
lacunes de vers entiers ou même de petits groupes de vers qui ont
été sautés. L'original sur lequel travaillait le copiste peut être
responsable d'une partie de ces lacunes ; mais c'est bien le scribe
du manuscritde Londres qui a sauté le vers 1277, lequel se lit dans
le premier des deux fragments appartenant à M. Lelong ; comme
nous verrons, il est à peu près certain que l'auteur du manus-
crit de Londres a travaillé sur le codex perdu dont ces fragments
sont des débris. C'est donc lui qui est probablement responsable
d'une bonne partie des autres lacunes qui défigurent le texte :
s'il a sauté un vers dans ce passage, il a pu en sauter d'autres.
INTRODUCTION IX
de plus, il connaissait mal la langue des chansons de
geste, déjà archaïque de son temps ', La tâche de
l'éditeur eût été moins ardue et incertaine, si, au lieu du
manuscrit de Londres, il avait eu à sa disposition un
autre manuscrit, plus ancien et meilleur, dont il ne
reste malheureusement que deux feuillets.
Ces deux feuillets, que nous désignerons par la
lettre L, appartiennent à M. Eugène Lelong, qui les
a achetés avec un lot de papiers et de débris prove-
nant de Saumur. M. Lelong suppose que ce sont des
débris d'un manuscrit qui aurait appartenu à la biblio-
thèque de Saint-Florent de Saumur ou à celle de Fon-
tevrault. Il est probable que ces fragments ont servi de
couverture à un registre et ont été ainsi préservés de la
destruction.
Les deux feuillets de parchemin ont une dimension
de 328 sur 210 millimètres \ Il y a deux colonnes par
page, chaque colonne comptant 45 vers ; le début de
chaque laisse est marqué par une grande initiale, alter-
nativement bleue et rouge; la première lettre de
chaque vers est marquée d'un trait rouge. — L'écriture
est du premier quart du xiv* siècle; elle est soignée,
mais un peu carrée et épaisse, de sorte qu'elle produit,
à première vue, une impression confuse. Malgré les
épreuves qu'ils ont traversées, les fragments ont peu
souffert et sont lisibles, dès qu'on est habitué à l'écri-
ture. Ces fragments vont, le premier, du v. 1 146 au
1. Certains indices feraient croire que le manuscrit a été écrit
sous la dictée. Nous signalons à ce point de vue la singulière
faute cest pour sait, v. 3406 et l'emploi, tout aussi singulier, de
l'infinitif pour le participe, travaillier pour travailliez v. 3528,
esploitier pour esploitié, v. 35 17; des confusions du singulier et
du pluriel à la 3* personne des verbes. Ces fautes s'expliquent
plus facilement par des erreurs auditives que par des erreurs
visuelles.
2. Ces mesures sont celles du premier feuillet, qui paraît
intact; le second a été rogné en haut.
i' DOON DE LA ROCHE
V. 1 325 ; le second, du V. 3 1 lo (ce premier vers a été
en partie endommagé par le couteau du relieur) au
V, 3289 du texte.
M. P. Meyer a noté que le manuscrit auquel ces frag-
ments ont appartenu doit avoir été, par un hasard sin-
gulier, l'original du manuscrit de Londres. En effet, ce
manuscrit reproduit, au v. 1 155, une leçon fautive, qui
est le résultat d'une correction mal faite dans L ; si ce
fait peut ne pas être évident pour celui qui lit la note
(p. 44 de notre texte) où cette faute est indiquée et où
l'origine en est démontrée, d'une façon nécessairement
un peu complexe, il est absolument clair pour celui qui
a sous les yeux le fragment lui-même, et le met à côté
de la leçon du manuscrit de Londres.
Une étude attentive des leçons du manuscrit, com-
parées à celles des fragments, confirme ce résultat : les
fautes des fragments se retrouvent régulièrement dans
le manuscrit ' ; nulle part ^ celui-ci ne présente une
variante préférable à la leçon des fragments '.
1. On peut ciler spécialement le v. iiB-j [fuan:{, faute com-
mune au fragment et au manuscrit, pour/ïawf); le v. 1269 {es
pour est, va pour vos, fautes communes au fragment et au
manuscrit); le v. 1275 (les mots et mi manquent dans le fragment
et dans le manuscrit); le v. i3oo (le mot ja manque dans les
fragments et dans le manuscrit). Le v. i3oi se lit dans le
fragment et dans le manuscrit : Quant H enfes issi fors de
Coloinne a cel terme, ce qui donne une syllabe de trop. Au
V. 3284, le second de manque à la fois dans le fragment et dans
le manuscrit.
2. La seule exception se rencontre au vers 3236, où le fragment
porte, au lieu de grans qui se lit dans le manuscrit de Londres et
qui doit être la bonne leçon, un assemblage de lettres dénuées
de sens. Mais le copiste du manuscrit a pu restituer grans par
conjecture : le scribe le plus négligent peut avoir par hasard une
bonne inspiration.
3. Un fait curieux qui mérite d'être noté à propos des
fragments, c'est que le copiste ne parait pas avoir compris
la locution par som (ou son) l'aube (= au lever du jour), fré-
INTRODUCTION XI
La langue des fragments L mérite d'être étudiée avec
soin, étant plus près de celle de l'original que celle du
manuscrit de Londres. L'exposé qui suit reproduit,
avec quelques additions et modifications, une note
détaillée de M. Meyer, rédigée en vue de l'Introduction
à l'édition projetée.
Phonétique. — Voyelles.
A pour e est constant àa^ns famé, 1221, 1298. L'au-
teur confondant les sons originairement distincts an et
en (voir ce qui est dit plus loin sur la langue du
poème), il est naturel que le copiste ne se soucie pas
d'employer ces deux groupes conformément à l'étymo-
logie et qu'il ait une tendance à écrire le plus souvent
an '. Cependant, il conserve très souvent la graphie
étymologique en, soit à la tonique, soit avant : argent
3i2i, enfes ji83, iSoj, 3224; enfant 1166, 1179;
enraigier 3281 ; entende:{ 1 146 ; entendui i24.g; gent^
gen:{ 3 120, 3 141. Pour la préposition et l'adverbe, (in
ou inde), on a plus souvent en qu'an : 11 56, 11 Sj,
iiSg, ii63, 1164, 1171, 1226, etc. — On est porté à
considérer comme une erreur de copiste danrons (pour
donrons) 1 149 ; cf. donroie 1174. Cependant on ne
peut affirmer que cette prononciation n'ait pas existé.
Ain par an se rencontre en des cas assez bien déter-
minés, avant ch et ^continu: maingier 32j5,mainge-
roient 3260, plainchier 3265. Estrainglaie (étranglée)
1208, où le g est explosif, est exceptionnel; la finale
n'en est pas moins surprenante, car -aie, pour le latin
-ata, est une prononciation de la région alpine *.
quente dans les chansons de geste : au v. i23o, on lit dans le frag-
ment par sour l'aube. Cette expression est régulièrement estropiée
dans le manuscrit de Londres, ce qui n'a rien d'étonnant, vu sa
date; il est plus singulier qu'elle ait embarrassé le copiste du
fragment, qui écrivait dans le premier quart du xiv* siècle.
1. Sur la graphie sanc, 1 169 et 1281, pour sens, voir plus loin
où nous traiterons de la langue du manuscrit de Londres.
2. Dans notre fragment, c'est peut-être simplement une gra-
5tll DOON DE LA ROCHE
Ai pour a se rencontre devant g continu (suffixe
-ancns, exe): putaige if68, i3i2, hontaige 3148,
anraige 1223, i253, enraigier 3179, saiges 3\32. — Si
mas [maïs) 3189, n'est pas une faute de copiste, c'est
un exemple de la réduction d'à/. à a, que nous retrouve-
rons en étudiant la langue du manuscrit de Londres.
Si aseîer 3279 était vraiment l'équivalent d'essaier,
on aurait un exemple du passage d'e protonique initial
à a, dont nous trouverons des traces assez nombreuses
dans la graphie du manuscrit de Londres, mais le vers
n'est pas bien clair et il peut être altéré.
Poichiei {—pechie^O au v. 3238 nous ofFre un exemple
du passage d'e protonique à of ; d'autre part e tonique,
issu dl latin entravé, passe à o dans eschevole i3o5,
correspondant au francien eschevele.
Oi pour 0 est habituel avant ch et g continu : La
Roiche 1146, 1218, 3288; loiges 3204; dans ces deux
exemples, l'o est ouvert et tonique; de môme avant
l'accent : loigié 3i i3, broichant, 11 60, et dans boiche
1285, où l'o est fermé et tonique. On lit ois pour os
(première personne du présent de l'indicatif) au v. 1262.
Dans ensoigner 3227, proinne 1297, roinne i233,
roigne 3i5o, oi correspond à la forme française ei
[enseigner, preigne, reigne), Vi servant à marquer le
mouillement de r«. On a aussi oi dans consoil 1209,
moillor 3 2^g, ploin I2i3.
O, ou sont employés indifféremment pour l'o fermé
(latin ô, ù) : d'une part, nos, vos, lor, por, jor, mots qui
reviennent fréquemment, glo:{ 3iii, deso:{ 320i, très-
fof 1280, fo^ 1 188, 1247, traïtor 1188, seinnor 1244,
ore (lat. hora) 1261, jornées iSig, secors 1268, plore
1205, ploroient 1304; d'autre part, bourc 1259, court
1258, glorious 3217, nevou 3i38, 3214, prou:{ 3228.
phie particulière {aie pour ée); comp. vaiai =■ veai (lat. vetavi)
3234. /
\
. INTRODUCTION X«!
— Dans douce 1262, Vu peut représenter/ vocalisée,
mais il y a (io^ (masculin) au v, 1272. — Dans pou i35,
etc., Vo est ouvert (lat. paucum), mais il y a j70 aux
vers 1281 et i3i 3.
U représente ue : mute 3 195, illuc 3 186; mais on lit
bues au v. 32o5. — On lit veul, pour vuel, au v. 3242. ,
— Gurpie, pour guerpie,au v. i258, peut être une faute
du scribe.
Ui dans fuissiez 1166, à côté de fusse 1167, n'est
point une forme insolite; mais ce qui est bien excep-
tionnel, ce sont les participes passés entendui 1249,
corrui 1 161 ; la forme habituelle u se trouve dans venu
i3o9, i3i9 et descendu i32o. Fui (lat. fuit) est cons-
tant (i i56, 1 194, 1 198, 1206, 1287, 3x36, 3216, 3243);
de même on a connuit 32i5 et estuit 1 193.
Consonnes. — L n'est pas toujours vocalisée devant
une consonne : on trouve nel (ne le) au v. 3287,
mais il y a nou au v. 3234; viels [ponr vuels) 3286,
3287, mais voudrai 3222, 3223. L'article masc. sing.
combiné avec de est tantôt écrit dou 12 14, 3x23, 3198,
3241, tantôt do 1270, 1274.
La notation de la finale us [Is] est flottante : aux i x 6 1 ,
mais ax 12 14; biaus X232, i236; biax i25o, 1294,
3256, 3272; bex 1 165 ; damoisiax i3o2.
L mouillée, entre deux voyelles, est écrite//: essillie\
3x83, 3237, moillier 3i8i,3x9X, 3229; suivie d'une
consonne, elle est écrite / : miel\ x324, iels ii6i, ou
se vocalise en u : eu\ 1254.
N mouillée, entre deux voyelles, est figurée par nni :
gaainnier 3ig^, plainnier 3202, ou par gni : ensoignier
3227, ensoignie^ 3x65; devant une atone on a nn : vinne
(lat. vinea) 3197, Coloinne x3oi.
Le son résultant de r + -^ Isti'is est noté par ;[ dans
ensoignie:{ 3i65, outragiez 3167, mais par s dans
amïés 3 ijS.
Morphologie. — Déclinaison. — On trouve s analo-
XIV DOON DE LA ROCHC
gique au cas sujet singulier des substantifs : bons 1248,
3187, prodons 3 186, 3220, pères 3i25, 3144; la forme
Do:{ pour Do, constante dans le manuscrit, se lit dans
le fragment au v. 3238; je n'ai pas trouvé d'exemple
de Do. — Dans la déclinaison du pronom possessif, on
peut noter /«f 1234 (cas régime pluriel).
Conjugaison. — Nous ne voyons à relever que redo:{
32IO (f* pers. du sing. ' du présent de l'indicatif),
gardoit i3o7 (3^ pers. du sing. du présent du sub-
jonctif) et haubergetes 3259 (2» pers. plur. du présent
de'l'indicatif).
Si la langue des fragments a un caractère oriental
nettement prononcé (à noter ai pour a dans certains
cas, ai pour ei, oi pour 0), ce caractère est encore bien
plus marqué dans la langue du manuscrit de Londres,
qui offre d'ailleurs une plus grande variété de faits, ce
qui s'explique par la différence d'étendue, le manuscrit
contenant plus de 4600 vers au lieu des 36o des
fragments. Remarquons dès maintenant que, par un
hasard singulier, les traits les plus frappants de la lan-
gue du manuscrit, pratiquement unique, qui contient
Doon de La Roche, se retrouvent dahs le manuscrit
également unique qui nous a conservé la chanson de
geste d'Orson de Beauvais. Dans l'exposé qui suit, nous
renverrons, pour ces traits, à l'étude de G. Paris, dans
l'Introduction à son édition de ce dernier poème '.
Nous prenons comme point de comparaison le
« francien » normal.
Notons, avant de passer aux faits de phonétique
proprement dite, quelques particularités de graphie, qui
s'expliquent par la date du manuscrit : au (issu d'al)
s'écrit parfois aul : aultres i5, 26, aultre, 1298, hault
I. Nous retrouverons plus loin une forme analogue dans le
manuscrit de Londres, p. xxiii.
3. Orson de Beauvais (Paris, 1899), P* vii-xvni.
INTRODUCTION XV
46. etc.; us final s'écrit Ix, ux et même ulx'.bealx 2847,
chevalx iSi-j, joieulx 32i6, beaulx 32oj, chevaulx 18,
5/3, 2469, damoisiaulx 2680, glorieulx 3198, mieulx,
1324, mantiaulx 25, morciaulx 3448, senechaulx
3555, etc. De même, f est assez souvent écrit j^ : tournoy
17, lojraulment 12, rqr 20, ;q^e 80, etc. — Il y a des
traces d'orthographe étymologique : corps 43, monstre
45, nepveu 5 20, 3i38, etc. (très fréquent) '.
Phonétique. — Voyelles.
A est représenté par ai dans les syllabes protoni-
ques : aisiet, aissiet (assiet) 2763, 3 200, maingier 1443,
1537, mainja (mangea) 1228, et plus souvent dans les
toniques : baire (barre) 3092, baires 3614, barnaige
16,107, lignaige 88, /7a/5 (pas) 3416, etc. Ces formes
se retrouvent naturellement dans les verbes : abaitre
1394, availlent (avalent) 3575, chaice (chasse) 1403,
faice (fasse) 3097, osaites (osaistes, osastes) 1)626, pais-
sent (passent) 291 1 ; ai (a) 1849, ^^^ {^) 1742, 2773, vai
(va) 2j2\ vait (vat, va) 267, etc., et surtout aux deu-
xièmes et troisièmes personnes du singulier du futur :
irais 1294, i362, serais 1349; avrai 225 1, dirai 5^5,
ferai [=: serai, sera) i52, irai i3o, vandrai (viendra)
33o6, etc., et aux troisièmes personnes du singulier du
prétérit: plourai (ploura) 187 ^ Comparer Orson de
Beauvais, Introduction, p. vm. — A peut devenir au
devant/ et bl : maul 3357, ^^ule 3410, saule (sale)
3535, 3557; conestauble, 3568, guennissauble 36oi,
tauble 3412 (cf. Orson, Intr., p. viii-ix). — Parfois a de-
vient e : Elemens (Allemands) i3, essaus (assaut) 1867,
leniers (laniers) 2453, chevellerie 2691, vessaulx {vSiS-
1. La forme monstier pour moustier, 1201, 35 16 se trouve
déjà dans Jourdain de Blaie, édit. C. Hofmann.
2. Il faut probablement expliquer par le passage d'à à ai,
suivi de la simplification d'ai en e, les formes melletes (mellastes)
4002 et chaceste[s] (chaçastes) 4005 ; cf. haiibergeres, faute pour
haubergetes, 3269.
XVI DOON DE LA ROCHE
saus) 3704 pert (part) 38-2 1. Dans Orson, G. Paris
n'a constaté ce fait que pour a devant n (Intr.,
p. ix). — Une fois, devant une chuintante, a devient
oi : broichès (brachez) 33o3.
E provenant d'à latin tonique libre devient ei (spo-
radiquement) : grei ou grey jj, 595, 1587, 3o3i, cres-
tientey 407, maufei 3291, prei 2968 ; dans les partici-
pes : donney 408, gardei 872, ancontrei 1604, etc. Dans
ces exemples, ei est final, mais on le trouve aussi à l'in-
térieur d'un mot : mefre (mère) 490, remeist 865, sceit
814, 887, 3i 1 1, etc., de savoir {cL Orson, Introd., p. ix).
— £■ de toute provenance peut devenir a, soit dans les
syllabes toniques : ast (est) 2951, duchasse 2570, remas
(remés, de remanoir) ioôy, sale (selle) 2012, 3792, soit
surtout dans les protoniques : assauça (exhaussa), 5,
arastement 2614, armine (ermine) 2706, aseier (essayer) .
3379 ', assauças, 2967, avesques 2g36, 2967, etc.,
Barnars 3 191, 3 660, Barnart 32 i 5, gardon (guerredon)
3'526, palée (pelée) 41 10, rames 1902, trabuchier 2304,
2481. On trouve même assongne 4340, pour enseigne,
ce qui semble supposer une forme esseigne. C'est
surtout quand ce fait phonétique s'accompagne de la
chute de \'s, dont nous parlerons plus loin, que le mot
prend un aspect quelque peu déconcertant : amaier
(esmaier) 3 100, avoilla (esveilla) 271 3, aposa {esposa)
4533, malée '' (meslée) 2069, ratoié (restoié) 2537. Ce
changement d'e en a se retrouve dans Orson de Beau-
vais (Introd., p. ix). — Un cas spécial, où e est sup-
planté par a, est celui des troisièmes personnes du
pluriel du prétérit : retournarent, 1 1S4., jurarent 1202,
montarent 2972, lassarent ^"ijj, etc.; nous reviendrons
sur ce fait à propos de la langue du poème. — Notons
1. Cette forme reproduit celle du fragment; voir plus haut, p. xii.
2. Cette forme est aussi dans Parise la Duchesse (v. 2333, édit,
Guessard et I.archey), dont le manuscrit unique a une teinte
orientale prononcée. ^
INTRODUCTION ^^
encore quelques formes où ï latin entravé est rendu
par o {vove 29, lat. vïdua) ou par oi {eschevoille i3o5,
lat. *excapiliat), et joignons-y (quelle que soit l'expli-
cation qu'il en faille donner) aort 1341.
E protonique peut passer à i : giter 2546 et à au :
Leauroine ["pont Loeroine, Lorraine) i3o, guerraudon
3383. — On le trouve quelquefois représenté par o et
par M : proer 35, gurpie i258. — Notons encore vaiai,
pour veaiy 3234, qui reproduit une forme que nous
avons déjà signalée à propos des fragments. Nous trai-
terons plus loin, en parlant de la morphologie, de la
chute de Ve protonique dans le futur des verbes de la
première conjugaison. — Par contre, un e posttonique
inorganique paraît dans avecque 3222, avecques 33 16
(pour avoec, avec) \ On a également la forme singulière
pères 36, pour pers, pairs.
E nasalisé (en) devient a [an] beaucoup plus fréquem-
ment que dans les fragments : an/es, j5, 94, apant 8,
antandre 80, 94, antans 1227, ante (ente) 1394, 1418,
jugemant 21, panre 2 53, etc.; les exemples abondent. De
même dans les syllabes protoniques : amperieres (em-
pereres) 41, anraige 785, 819, 937, 1223, tanra (tenra,
tiendra) 68, vanrai (venrai, viendrai) 1277 etc., et dans
les posttoniques : gisant (gisent) 2912, montant (mon-
tent) 2i%(>, pendant [iptndenX] 22S j, présentant (presen-
tent) 3028. Une fois on a ain, et une fois on, pour en :
gainchi 1178 (pour guenchi), Vondemain 21 17 (pour
Vendemain).
En ce qui concerne Vi, nous avons déjà remarqué que
cette voyelle s'écrit souvent^. — Nous avons noté un
exemple d'£ inséré entre deux voyelles : joier 2358, pour
joer (jouer); ou bien i représente-t-il le c de jocare?
Il y a maint exemple d'o libre tonique (ô latin) deve-
I. Nous verrons que l'auteur employait parfois la forme avec-
que, mais, dans les cas cités ici, avecque {avecques) fausse le vers.
» ......
XVIII DOON DE LA ROCHE
nant eu : pluseurs 24, leurs 2 5, seigneurs 47, doleur
4.S5,joeux 993, honeur /^3ï2, moilleur 33 18, etc. Mais,
à côté d'o [enor 8, jugleors 24, seror 89, baudor 1 13,
etc.), oz/ n'est pas moins fréquent : prou 40, seignours
52, juglour 104, ploure 146, nevoM 493, baudour 971,
anour 974, etc. — O devient 01 devant cA, n, v, 5, f :
boiche 2442, broiche 1099, cloiches 2931, La Roiche
2194, 2965 ', èoin^ 2444, ofr (or, lat. aurum) 2907,
oireille 2o65, ois (os, mod. « ose ») 1262 ^, oitour (ostor,
mod. « autour ») 2180, oit (ot, lat. habuit) 2987, oit
(ot, lat. audit) 2825 ^ vozV (vot, lat. voluit) 3245.
Diphtongues. — Ai se réduit à a : lassent (laissent)
2370, mas (mais) i252, 2410, 2446, 26i3, 2672. Ce fait
se présente surtout dans les premières personnes sing.
des verbes. Présent: a (ai) 241 i , 3820, sa (sai) 556, 1 147,
sça (sçai) 1278, la (lai ou lais) 2197; futur cèlera 2238,
donra 2085, prendra 3522 ; prétérit amena 382 1, aporta
3498, engendra 240, jura 1349, i363, 1372, laissa
2025, mena 3095, planta 1272*. — Cette réduction,
contrepartie du passage d'à à ai, se retrouve dans le
manuscrit d'Orson de Beauvais (Introd. p. vu).
Ai passe parfois à oi : deloier (delaier) 276.
Au (issu d'à/) est réduit k a ^ : habergié (hâuhergié)
2773 ; chevache 3o58, 3722, 3824, chevacha 3848,
ignas (isniaus) 3703, madie 2955; de même dans l'ar-
ticle : a [au) 2555, 2556, 258i, 2771. — Même fait, en
ce qui concerne l'article, dans Orson de Beauvais,
Introd. p. xii. — Tout à fait insolite est le passage d'aw
à oi dans chevoichent 43 5 o.
1. Le scribe procède au hasard. Au v. 1146, où le fragment
porte La Roiche, il écrit La Roche.
2. Cette notation reproduit celle du fragment.
3. Oit (lat. audit) se retrouve assez souvent aillelirs, par ex.
dans Jourdain de Blaie.
4. Ici le fragment porte plantai.
5. On pourrait dire également que, au lieu de se vocaliser, /
tombe.
INTRODUCTION XIX
Ei s'écrit parfois ai : esvailliés (esveilliez) 3529. Il
devient très fréquemment of, spécialement devant /
mouillée, n, gn et ng : aparoilliés 2761, evoilliés
3484, mervoille 195,782 ; moilleur 33i8, etc., amoine,
(ameine) 2918 1 ramoint (rameint) 3418, estroint
(estreint) 2976, dointié (deintié) 3io3, poine (peine)
4197, etc.; amome (ameinc) 2g i S, amoingne fameine)
1^02, doingn a {deigna) iS65, Leoroingne 2S\ 6, soigne
(seigne) 2235, 2699, 2943, 3542; roiné reigné) 3x5,
3014, voigne (veigne, viegne) i554, i557, voinges
(veinges, venges) 1040, voingier (veingier) 1075. —
Même fait dans Orson de Beauvais^ Introd. p. xi.
Eaus, du latin ellus, devient souvent iaus : biaulx
i25o, 1282 (mais beaulx i235), damoisiaulx i25o,
2677 (niais damoiseaulx y 3o6), piaulx (peaus) i358,
mantiaulx 25.
J'ai noté un exemple d'/e, devant consonne, réduit à
i: laissirent (laissiérent) 1625.
Oi devient parfois ai : maie (moie, latin m ea), plaier
(ploier, plier) 3o88. De même que ai se réduit assez
souvent à a, of peut se réduire à 0:70e (joie) 107, 3642,
joeux (joieus) 444, ors (oirs, latin hères) 2957. — Le
fait se retrouve dans Orson de Beauvais, Introduction
p. VII '.
Ou passe à au da.ns faulx (fous, latin fol lis) 3578.
Cette forme se trouve ailleurs.
Nous avons relevé un exemple d'o non diphtongue
dans mor 2726, première personne du sing. de l'indic.
présent de morir, au lieu de la forme normale muir.
Avant de passer à l'étude des consonnes, signalons
encore quelques contractions, qui n'ont rien d'étonnant
quand on se rappelle la date du manuscrit : citain
(citeain) 3ii5, /«/ (feeil) 2669, gaingne (gaaingne) 18,
I . Je n'ai pas trouvé d'exemple d'ui réduit à u, fait relevé dans
Orson de Beauvais. '. ■ ' ,-.;::.:..:.: ,lv w ;
XX DOON DE LA ROCHE
gaingnier, 2535, juglour 104, Loroigne 2385, plust
(plëust) 2693. — E protonique, entre deux consonnes,
tombe parfois : guerdon 3 1 34, gardon 3326, pour guer-
redon; chiermant 3148, pour chierement.
Consonnes. — Un fait qui intéresse plutôt la graphie
que la phonétique, c'est que c est parfois (très rarement)
remplacé par s : sens (cens) 3 1 3o ; nous verrons plus loin
la graphie inverse, s remplacée par c, qui est beaucoup
plus fréquente. — Lu graphie brance (prononcez
branke), pour branche, 1413, est bien connue. — Une
graphie qui intéresse la phonétique est mange, pour
manche, 3027.
B peut tomber dans le groupe mb : tumeresces (écrit
tumerestes), pour tomberesses, 4563, tumé, pour tombé
(même vers).
D, entre deux consonnes, peut tomber : panre (pendre)
253, et (prendre) 3585.
G continu passe à ch dans lignaiche (lignage) 700;
nous venons de relever le fait inverse, ch s'affaiblis-
sant en g '.
H (aspiration dans les mois d'origine germanique)
tombe (très rarement) : iaume {heaume) 3004; on a de
même autain (hautain) 3419.
L, à la tin d'un mot, peut tomber : ici i25, ci (cil)
355, si (cil) 355 (?), osté (osiel) 3253; de même à l'inté-
rieur devant consonne : vite (vilté) 2892. — Pour Ir
on peut avoir rr : torrai (tolrai) i3i6. — Une forme
tout à fait singulière est solmiers 2899, pour sommiers.
N, suivant i dans le corps d'un mot, s'écrit parfois gn,
ce qui semble exprimer un mouillement : ignias (iniaus,
isniaus) 3703, magnie et maignie (mainie, maisnie)
2374. Même fait dans Orson de Beauvais, Introd.,
p. XIV ; parmi les exemples cités figure justement
I . Ces faits se retrouvent dans le manuscrit unique de Parise
la Duchesse; voir la préface des éditeurs, p. xiv.
INTRODUCTION '^6&
magnie, pour maisnie. — On a, de plus, dans le
manuscrit de Londres, roigne (rêne) 3014, 3853,
et chaingnes (chaînes) 309 1 .
N mouillée peut s'écrire ngn : congnuit 3856,
Coulongne \ 12, rongne i i 5, et ro/wg^ne (règne) 3i5o.
D'autre part, n mouillée s'exprime assez souvent par in
ou inn : Alemaine 2602, broinne (broigne) 3/39, Co-
loinne 2657, poinant (poignant) 3666, ioinne (lat.
teneat) 3747, etc. — Le groupe nr peut se réduire à
rr : corrée, pour conreée. 4616.
R^ dans les verbes, s'emploie parfois d'une façon irra-
tionnelle, car on trouve l'intinitif pour le participe :
tnivaillier, pour travailliez 3528, esploitier, pour
esploitié, 3>5ij, ce qui semble prouver que, à l'époque
et dans le pays où le manuscrit fut écrit, l'r final, de
l'infinitif ne se prononçait plus.
C est souvent écrit pour s : ces (ses) 20, 3920 et
ailleurs, c'i7 's'il) 10, ce (se), 99, 1408, ces (ses, 2* p.
sg. ind. pr. de savoir) 3227, etc. Même fait dans Orson
de Beauvais, Introduction, p. xiv. — La graphie de
c pour s, à la fin d'un mot, explique sanc, 179, 1 169,
1787 et 2637, pour sens. Nous avons déjà vu sanc,
pour sans, dans les fragments (ci-dessus, p. xi, n. i);
la même graphie se retrouve dans Parise la Duchesse,
V. 1616.
S initiale s'écrit parfois se, particulièrement dans le
verbe savoir : scai jS, scaii 70, sceit 81 5, 2773, sçavoir
1915 etc.; on trouve aussi \cïe/ (siet, du verbe seoir)
3o86, 3567, 38i3. — S, suivie d'une autre consonne,
tombe assez souvent : amitié [dixmsûé) 1 179, aine 3 200,
blemie (blesmie) 2715, châtie (chastie) 3oi5, coûtés
(coustez, costez) 1174, fut (fust, lat. fuisset) 2849,
mainnie [vatsme) 221 1, ponnée (posnée) 4124, etc. Ce
fait peut s'expliquer par la date seule du manuscrit,
mais ce peut également être une particularité dialectale,
car dans le manuscrit unique de Parise la Duchesse,
XXII DOON DE LA ROCHE
qui est du xiii* siècle, la chute de l's avant consonne
est assez fréquente '. — S, à la fin d'un mot, s'écrit
assez souvent x : boix 'iij'h, 3236, 3386, dux 1 1, etc.,
desormeix 1 8&2, foix 3455, jamaix 2799, moix io3,
Parix 12. — Même fait dans Orson de Beauvais, In-
trod., p. XII. — Parfois, s s'emploie d'une façon irra-
tionnelle : <i^mon«e (aumosne) 3416; cheuste (cheute),
2577; ^^^ (<^i' '^t. habui) 2857 '. — On a noté une fois
la chute du groupe st à la fin d'un mot : dona, pour
donasf, 2641 .
Une prononciation très indistincte des consonnes
finales semble indiquée par la graphie chant, pour
champ, 2454 ^
Z issu de f 4" -^ latin devient à peu près toujours s :
adoubés 34, consoilliés 3 1 3g, preis 3i 18, orés (orrez) 10,
souffres 1292, etc. ; les exemples sont innombrables.
Finalement, on peut observer que le copiste a une
tendance à doubler les consonnes : corraige 33oo,
donney (doné) 408, pallais 3 121, remesse (remese)
3098, seullementS. taissiés (taisiez) 840, tollir 2g.
Morphologie. — Déclinaison. — Notons l'emploi con-
tinuel du cas régime pour le cas sujet. Il est inutile de
citer des exemples; il suffit de renvoyer le lecteur aux
variantes, relevées complètement, des 1 18 premiers vers
du texte.
Conjugaison. — Nous avons relevé redo^ (première
personne du singulier du présent de l'indicatif) dans les
1. Dans leur Introduction à l'édition de Raoul de Cambrai
(p. Lxxxviii, note 2), P. Meyer et A. Longnon citent une
charte de i238, écrite dans la partie méridionale du département
de l'Aisne, comme le plus ancien texte à eux connu où se ren-
contre ce fait.
2. On peut comparer chastive (chative, chetive) dans Parise la
Duchesse, p. 29.
3. On trouve champs, pour chants, dans un manuscrit du
xv» siècle, cité dans le Bulletin de la Société des anciens textes
français^ III, 86.
"f: INTRODUCTION XXIlt
fragments; nous trouvons, dans le manuscrit, à côté de
redou:{ 32 lo, qui correspond au redo^ du fragment,
deux autres exemples : men\ i83, raten\ 2799. On sait
que ces formes ne sont pas rares ailleurs '. — La pre-
mière personne du singulier du présent de l'indicatif
offre dans quelques cas un e final analogique : doute
3797, loe 4436, prie 341 3, prise 433 1. — La troisième
personne du singulier conserve parfois le t final du
latin : at looi, ait 1742, et vait (va) 267; de même
au futur : pourat 365o, et au prétérit : servit 11. —
La forme analogique parle 2674, pour parole, n'a rien
d'étonnant, vu la date du manuscrit. - A l'imparfait,
amot 44, pour amoit, peut s'expliquer par la réduction
d'oi ko. — Au V. 1 208, on lit euissient, pour eussent. —
On trouve deux exemples de la deuxième personne du
plur. du futur en -ois : seroit (pour serais) 83 et durerais
3009 '. — La désinence -ut de la troisième personne du
singulier du prétérit est notée parfois -uit : congnuit
3856. — On trouve -êtes et -estes, pour -astes, à la
deuxième personne du pluriel du prétérit de la première
conjugaison : melletes ^ooi, chaceste[s] 4005. — Nous
avons vu que Ve protonique tombait parfois entre deux
consonnes; le même fait se retrouve naturellement dans
les verbes : enarbrai 3 106, getrai 2754, getrés 2738,
mandrai 3ioi; en revanche, un e est inséré dans
averoit 3212. Ici et là ces formes faussent le vers.
L'ensemble des faits que nous venons de passer en
revue indique nettement la région de l'Est, et spécia-
lement la Lorraine, comme patrie du scribe; c'est dans
le dialecte lorrain que nous retrouvons notamment deux
des faits les plus frappants, la réduction d'af à a et le
1. Crien:{ et redou^, v. 160 de Jourdain de Blaie; doins, v. ro63
de la Chevalerie Ogier, etc.
2. Nous verrons plus loin que l'auteur du poème employait les
formes en -oif concurremment avec celles en -Cf : en trait peut
par conséquent remonter à l'original.
XXIV DOON DE LA ROCHE
passage d'es initial à a '. La langue des fragments appar-
tenant à M. Lelong présente, nous avons pu le cons-
tater, de grandes analogies avec celle du manuscrit de
Londres ; pourtant elle n'offre pas une couleur dialectale
aussi prononcée. ^i^Ihi
''i. Voir Lothringischer Psalter... Iierausgegeben von Friedrich
Apfelstedt, Heilbronn, i88i, p. XVI et XIX de l'Introduction . —
Aposer, pour esposer, doit être messin; comp. aposelixe, pour
esposalice, chez un chroniqueur de Metz, cité par Godefroy,
V APOSELIXE. — L'origine lorraine du manuscrit A'Orson de
Beauvais, dont la langue, ainsi que nous l'ayons constaté, pré-
sente tant d'analogies avec celle du manuscrit de Doon de La
Roche, ne faisait aucun doute pour G. Paris (voir son Intro-
duction, p. III et VII).
INTRODUCTION XXV
CHAPITRE III
Versification, langue, patrie et date du poème '.
Doon de La Roche est écrit en vers alexandrins asso-
nances. La structure des vers, avec la césure après le
sixième pied, ne présente rien de particulier. Comme
d'ordinaire dans les chansons de geste, les monosylla-
bes suivis d'un mot commençant par une voyelle, ce,
je, ne, que, se (latin si), peuvent faire hiatus : avers ce
que il est 56, ne lance ne espe'e 1297, Se // est niés le
roi 2046, ce est chose provée 2539, je ai au cuer grant
ire 2648. — Une autre licence bien connue* permet la
non-élision de Ve posttonique d'un mot polysyllabique
quand le mot suivant est un monosyllabe commen-
çant par une voyelle. Cette licence, qui se retrouve
dans d'autres chansons de geste % est fréquente chez
notre auteur; on dirait qu'il a une prédilection pour les
vers ainsi construits. Voici les exemples que nous avons
relevés :
7i3 II est molt juenes enfes, si dit quanquë il set.
808 Je ne vuel mie perdre la merë et le fil.
884 Gom or le voit Landris, si commence a rire.
1. Parmi les observations que M. Meyer avait consignées par
écrit en vue de l'Introduction, se trouvaient des notes sur la lan-
gue du poème, ainsi qu'une table provisoire des assonances : le
tout ma été naturellement fort utile. M. Benary a donné, dans
son mémoire cité (p. 33 1, note 2), de courtes remarques sur la
langue, dont j'ai également profité.
2. Voir Ad. Tobler, Le Vers français, trad. K. Breul et L. Sudrc,
Paris, i885, p. 70-71 ; P. Meyer dans son édition de VEscoufle,
Introd., p. LU, lui.
3. Par exemple dans la Prise de Cordres, édit. Densusianu,
V. 1378, 1730, 1761 (l'éditeur corrige ces vers à tort, Introd.,
p. cxxxvi). .^î^pt^n
XXVI DOON DE LA ROCHE
972 Olive la duchesse; n'a plus belë ou mont.
1206 Et fu lez une pile repostë et mucie.
1265 Quant l'entent la duchesse, si plorë et sospire '.
1540, 1647 Car hom de riche cort doit estrë a barné.
1937 Tomilë et Malingre fera les chiés coper.
221 5 Que l'avoient juré Tomilë et Malingre '.
23 1 5 Serjans et chevaliers enmoinnë a grant flote.
2320 Tomilë et Malingre va noncier la parole.
2726 Se je muir par amor, m'arme en en garie.
333o Sire, ce dist li dux, Frobert m'apelë on.
3562 Dont otli dus pitié, si sospirë et larme.
3705 Encontre lor seignor poindre et galoper.
3966 Tomilë en menèrent [lie] a un chalant.
4247 Si dist celé donzelle : « Reveignë ou païs. »
4283 Et sa fille la gente, la belle a[l] cler vis. '•
4298 Pitié ot de s'amie, si sospirë et larme.
4443 En pais tenront latere, des orô en avant.
4469 Monta en .j. destrier qui la cropë ot lée.
4521 Est frerë a sa mère, bien veoir le poez.
4608 A grant peine ont fait entre eus la départie.
On peut encore citer un exemple, où le mot qui
suit l'e posttonique non élidé est polysyllabique:
662 Quant vos verrez vo père au pueplë assemblé'.
L'i de qui, suivi de voyelle, s'élide parfois :
117 Damedex le confonde, ^u'enla croiz fu penez.
2623 Qw'estoit au roi Dorame remés novelement.
De même l'i de si :
4534 Dis avesques i ot et 5'i ot .c. abez.
1. Le texte imprimé porte : si plore et si sospire. Le second st
devrait être entre crochets, vu qu'il manque dans le fragment et
dans le manuscrit, mais cette adjonction est inutile. Môme remar-
que pour le V. 3o38.
2. Le manuscrit porte : a Tomilë et a Malingre, leçon corrigée
à tort dans le texte en : a T. et M.
3. Gomp. Jourdain de Blaie, éd. Hofmann : 1008 cui maie
flamme arde ; 1701 ne m'en laissé issir, ,,,, ,
INTRODUCTION XXVII
Si me est une fois contracté en une syllabe :
2873 Sim desfia en France Pepin[s] li emperere.
Si on lisait Si me, avec le manuscrit, le vers serait
trop long '.
Si les peut de même se contracter en ses (v. i8o5).
Ainsi que nous l'avons dit, les vers sont assonances ;
on ne découvre nulle part une véritable tendance vers
la rime. Le poème est divisé en i3o laisses, dont 78
masculines et 52 féminines. L'étude des assonances
étant le principal moyen de connaître la langue du
poète — moyen imparfait, il est vrai, puisqu'elles ne
nous renseignent que sur les voyelles — , nous allons
les passer en revue.
Assonances masculines.
L'a non nasalisé occupe les laisses XXXVIII et
XGVI ; elles ne présentent pas le mélange d'à avec ai,
mais c'est un hasard, car nous rencontrons ce mélange
plus loin, dans les laisses féminines. Le seul mot inté-
ressant à noter est saus 3356 (lat. sa 1 su s), où Vu se
prononçait évidemment comme une semi-voyelle.
A nasalisé se rencontre dans seize laisses : I, IV, VI,
XVIII, XXXVII, XL, XLII, XLVI, LXI, LXXX,
LXXXIIl, LXXXIX, XCIII, XCIX, CXIII, CXXVI.
— Dans ces laisses, le mélange d'an avec en est constant;
il n'y a pas de laisses exclusivement en an ou en en.
La laisse LXXX (3ô vers) est presque entièrement en
en ; les seules exceptions sont garant 26o5 et dolen^
2629 qu'on pourrait lire dolan^ (le ms. porte dolans).
Dans la laisse XCIX, où il y a également une prédomi-
nance d'en, on peut noter, au v. 3437, Olivant, cas
régime d'Olive ^. — Ai, ei nasalisé n'occupe qu'une
1. Comp. Vie de saint Alexis, v. 220, éd. G. Paris : To^ sui
enfers, sim pais por sotte amor.
2. La rime besoin 3129 semble altérée. — V. 3457, on a apar-
XXVIII DOON DE LA ROCHE
laisse, CXVIII; les seules assonances à noter sont Jhe-
rusalem 3398 et entreprains 3449, pour entreprens,
première personne du singulier du présent de l'indica-
tif du verbe entreprendre.
É, onze laisses : II, VII, X, XXI, XXV, XXX, LIX,
LXIV, LXXVIII, CV, CXXIX. — Ces laisses ne pré-
sentent rien de remarquable au point de vue de la pho-
nétique : ^e^ (lat. sapit) y figure plusieurs fois (v. 56,
305, etc.), ce qui est normal ; de même Dés ou Dex et
le cas régime Dé. Parfois cependant y apparaissent des
mots en ié, particulièrement dans la laisse LIX, qui est
d'une longueur démesurée (58o vers) : droiturier i652,
enginie\ iji3y espargnier 1845, enginié 1914 (corrigé,
peut-être sans nécessité, en engané dans le texte); de
même dans la laisse Vil, beaucoup plus courte, envoie^
306. Ce ne sont pas des faits de phonétique, mais de
véritables licences; l'auteur de Parise la Duchesse se
les permet fréquemment '. Dans la laisse CV, vaillant
3717, et dans la laisse CXXIX, Jehans 453y sont sû-
rement fautifs. Comme forme verbale arbitraire, on
peut signaler fonde\ 1579, pour fondu\.
/, quatorze laisses : V, VU I, XI H, XXVI, XLL XLIV,
LVI, LXIX, LXXXVII, XC, CXII, CXIX, CXXI,
CXXIV. — Partout, sauf dans LVI, on trouve des
exemples d'i nasalisé. Comme faits phonétiques inté-
ressants, on y relève la présence de puis (pluriel de
pui, lat. podium) 2269, bruit, 3932, qui semblent sup-
poser la prédominance du second élément de la diph-
mant, pouT aparmain, aparmaint; cette forme se trouve ailleurs.
On pourrait, du reste, corriger en aparmaint, vu que dans les
laisses féminines on trouve châtaigne à côté de/orsane, entendent,
etc. (voir plus loin).
1. Voir édit. Guessard et Larchey, p. 10 en bas, 24, 25, 26,
(2 fois), 36 (2 fois siét), etc. — De môme, dans la Prise de Cor-
dres, Introd., p. cxxxi, l'éditeur, M. Densusianu, signale deux
exemples de mots en ié dans les assonances en é.
JIJ INTRODUCTION XXIX
tongue, et de Mongiu ^255, qui n'est explicable que par
la supposition contraire. — Au point de vue de la mor-
phologie, on peut citer les pronoms mi 228, 479, 809 ;
ti 788, 1232, 1446 ; //209. 732. Au V. 2860, le manuscrit
porte lui, qu'il n'est pas nécessaire de corriger en li, car
il rentre dans le cas de puis et bruit dont nous venons
de parler. Comme formes verbales, on a seïr 2934,
2937, 3931, aseïr ,^2jj, cheïr 23o5, 3935, veïr 3923,
la troisième personne du singulier du prétérit de l'indi-
catif toli 199 et celle du présent du subjonctif aïst.^
1470.
lé, onze laisses : XVII, XXXIII, LVIII, LX, LXXV,
LXXXII, LXXXV, XCII, XCIV, CI. CVIII. — Dans
les laisses LXXXII, XCII, XCIV, CI, CVIII, on
trouve des exemples d'ié nasalisé. Au point de vue de
la phonétique on peut noter re^wze:^, 1322; ce mot se
trouve aussi assonant en é (v, i5 52i, particularité qui
n'est pas propre à notre poème '. Au point de vue mor-
phologique, signalons le pronom féminin lié i5i5, le
subjonctif griet i528, le futur iert i5oo, i5o9, i5i2,
2462, 3o33. La forme d'impératif ailliez 3 507, pour
alle\, parait être une licence du poète en vue de l'as-
sonance.
O fermé, onzelaisses: III, XIV, XXXVI, LV, LXVII,-
XCV, XCVII. C, CVII, ex, CXIV. — Dans toutes ces
laisses, sauf dans la laisse LV, on trouve des exem-
ples d'o nasalisé ; dans la laisse XCVII (i3 vers), la
seule assonance qui fasse exception est ^or 3386 ; la
laisse III (36 vers) n'a que deux assonances non nasa-
lisées, jors 148, sejor i5o;dansla laisse CXIV (46
vers), on n'en compte que quatre : Audegour 4005,
4o38, vos 4009, anor 4016. — Parmi ces assonanceS:
I. On la retrouve dans la seconde rédaction du Moniage Guil-
laume ; voir Les deux rédactions en vers du Moniage Guillaume.,
éd. W. Cloeita, t. II, p. 247. I,
X*X DOON DE LA ROCHE
on peut signaler les premières personnes du pluriel
soms ï4.3,escouton 4023, fron 408 o. A côté d'o nasa-
lisé, on trouve oi nasalisé : besoin g 494, poin:{, poins
(lat. pugnos) 984, 1420. Dans la laisse XXXVl, aux
vv. 967, 986, on trouve deux fois l'adjectif (foM;^ asso-
nant avec vos, baudor, mont, dons (nom de nombre
écrit en chiffres romains), secors, font, moi ', etc. On
peut encore citer ailleurs les formes verbales bout {lat.
bullit) 3783, dont (lat. donet)332i et sourt (Idit.
surgit), 3782; le participe derou^ (lat. d i rup tos)
2253, etc.
Of, sept laisses : IX, XXIII, XXXII, XLVIII, LUI,
LXVIII, CXXV. — On peut noter les formes phoné-
tiques de l'infinitif : veo/r 35 1, 356, 390, cheoir 3g5,
tenoir 627 ; nous avons rencontré plus haut les formes
analogiques, en fr, dans les laisses en i \ — La forme
phonétique de la deuxième personne du pluriel du futur,
verroi:^, se lit au v. 4418, mais dans les laisses en é on
trouve la forme analogique : contredire^ 664, deman-
derez i536, ire:{ 881, etc., voudre'{ 79, etc.; l'emploi
simultané des deux formes est habituel '\ Toloi:{, à la
même personne de l'indicatif présent, se lit au v. 2556.
— On peut encore signaler le cas sujet doi 371, 402;
de même enoi « ennui » 624, fréquent ailleurs.
U, cinq laisses: XXIX, XXXIX, LI, LXVI, LXXXVI.
— Dans les quatre premières laisses, on trouve ui à côté
d'u : tuit,frui:{, bruit, etc; c'est un fait habituel. On
peut signaler spécialement ambedui 1017 ; nous avons
vu plus haut dfof; cette double forme du cas sujet est
1. La présence de moi (v. gSS) est si extraordinaire qu'elle paraît
due à une faute du copiste; il faut probablement corriger et lire :
que soie bien 0 vos, au lieu de : que soie^ bien 0 moi.
2. Même emploi simultané des deux formes dans Orson de
fitfaMvais; voir l'Introduction de G. Paris, p. xxxv.
3. Par exemple, dans la Prise de Cordres; voir l'Introduction
de l'éditeur, p cxxxiii.
INTRODUCTlOf* XXXI
également habiiuelle. — A la fin de la laisse LXXXVI,
on trouve deux assonances en o fermé {lion 2855;
seror 2856), qui semblent difficiles à corriger. Ce n'est
pas la seule irrégularité dans l'emploi de l'assonance
qu'on rencontre dans la seconde partie du poème ;
elles se multiplient vers la fin.
Assonances féminines.
A-e non nasalisé, deux laisses : Cil et CXXII. — A
côté d'a-e [sale, heretage, larme, etc.), on trouve dans
ces laisses des assonances en ai-e [aiguë, plaise, laisse^
paile [lat. pallium], maistres) et en au-e {maubre, aube).
Parmi les assonances en a-e, on peut remarquer la troi-
sième personne du pluriel du prétérit, entravent, 36 1 5.
— Dans la laisse CXXII, jjovre^ 43'7> doit être fautif.
A-e [e-e] nasalisé le plus souvent, six laisses : XXXI,
LIV, LXXI, LXXVI, LXXXIV, CXI. — On voit figurer
dans ces laisses des mots comme lances 2334, ^^"^^
2493, adente 907, ensemble 908, enfes i385, prennent
3887, etc., et aussi dame goo, famé ' 140, 2Sig, for-
sane 2498; puis Loereigne, Looraingne, 1402,2816,
compaignes 2333, châtaigne 25o8, et même maille
25o6.
É-e, onze laisses : XV, XXIV, XLIX, LXXVI I,
LXXIX, LXXXVIII, CIV, CIX, CXVI, CXVIII,
CXXVII. — Dans ces laisses, on ne trouve guère à
relever que teles 3839, pluriel féminin de tel, et Père
(corrigé à tort en Piere dans le texte), 4101. Notons
pourtant, aux vv. 41 18 et 4163, le cas sujet emperere,
employé en fonction de régime.
E-e, trois laisses : XXXIV, L, LXXIII. — Il n'y a à
noter que la forme francienne duchesse 1 323, un exemple
d'e nasalisé dans gente i326, et laissent 2370 (nous
1. M. Meyer avait noté que famé (toujours écrit /âme dans les
manuscrits) et dame sont réunis sous la môme assonance dans
d'autres poèmes, par exemple dans Aye d'Avignon, éd. Gues-
sard et Meyer, p. 45, 53, Sg, etc.
XXXII DOON DE LA ROCHE
avons signalé plus haut laisse parmi les assonances en
a-e). Cette présence de la diphtongue ai dans celles en
è est un fait que connaissent d'autres poèmes relati-
vement anciens, notamment la Prise de Cordres \
I-e, dix-sept laisses : XVI, XIX, XXII, XXVII, XLIII,
XLV, LVII, LXV. LXXII, LXXIV, LXXXl, XCI,
CVl, CXVII, CXXVIII. CXXX, auxquelles il faut
joindre, semble-t-il, les deux laisses LXII et CXV, qui
ont un caractère spécial. — De ces laisses, neuf (XXII,
XLIII, LVII, LXV, LXXII, LXXIV, LXXXI, XCI,
CXXX) offrent des exemples d'i nasalisé: princes 845,
quinze 842, Malingres 1191, 1220, etc. — Le fait le
plus intéressant qu'on peut constater dans ces laisses
en fe, c'est la réduction d'iée à ie : corrode 507, 83o,
enseignie 602, mucie 1206, rafichie 241 i, esmaïe
2743, etc. Le prétérit assemblirent 2968, pour assem-
blèrent^ est tout à fait surprenant.
Les laisses LXII et CXV donnent lieu à des difficul-
tés spéciales. Telles qu'elles se présentent dans le manus-
crit, elles offrent des mots assonant en i-e, d'autres en
ié-e, et d'autres encore qui ne rentrent ni dans la pre-
mière catégorie ni dans la seconde. On peut ramener
un certain nombre de mots en ié-e à la forme i-e, en
supposant que nous avons ici affaire à ié réduit à i
devant une consonne, tait souvent signalé \ qui aurait
été méconnu par les copistes ; on pourrait ainsi restituer,
1. Voir les observations de M. Densusianu dans son édition de
cette chanson. Introduction, p. cxxix et cxxxv.
2. On le trouve notamment dans le seul manuscrit connu du
Tristan de Beroul [arire, pour ariere, escrive, pour escrieve, pice,
pour pièce, etc.; voir l'Introduction de M. E. Muret dans sa
2» édition, Paris. \g\o, p. xi); dans des manuscrits et des chartes
d'origine normande (voir A. Langiors, dans son édition du
Roman de Fauvel, par Gervais du Bus, Introd., p. lxvii). Pour
la réduction d'i'e à i dans le dialecte liégeois, voir Gustave Cohen,
Mystères et moralités du manuscrit 617 de Chantilly, Paris, 1920,
in-4», p. XXXIX.
ww INTRODUCTION XXXIII
dans la laisse LXII, porquirent, pour porquierent^
saint Pire, pour saint Pierre, jugire, pour jug[i]ere,
etc., et faire des corrections analogues dans la laisse
CXV. Mais il y a des mots qui résistent à toute correc-
tion : on peut lire tirie, pour tirée 4086, mais il paraît
difficile de corriger agirent, 2146, pour avèrent, consi-
déré comme équivalent d'ajffiierent, et le cas des mots
(laisse CXV) détiennent 4.060, entrèrent 4.085, novelle
4092, paraît désespéré'. — Nous avons par conséquent
laissé les assonances de ces deux tirades à peu près
telles qu'elles étaient dans le manuscrit, les abandon-
nant, comme un problème à résoudre, aux phonétistes
de profession. — Ce qui complique encore le problème,
c'est que la réduction d'zV à i devant consonne ne se
rencontre dans aucune des nombreuses laisses incon-
testablement en i-e qu'offre le poème; d'autre part, on
ne saurait considérer les laisses LXII et CXV comme
des interpolations, car elles sont nécessaires à la
marche du récit.
0-e, neuf laisses : XI, XXVIIl, XXXV, XLVII, LU;
LXX, cm, CXX, CXXIII ; Vo doit être fermé dans les
laisses XLVII et CXXIII. — On peut noter que, dans la
laisse CXXIII, dolce (féminin de l'adjectif) assone avec
plore* 4.35g et tote4'i'ig,de même que le masculin, dou:^^
dans la laisse masculine XXXVI, assone avec menor,
seignoret to:{. Dans la laisse XI , cloistres 436 assone avec
o/re, ores, sorent ; dans la laisse LXX, Antoine avec
offrent, broche, parole; de même, dans la laisse CXX,
istoire et victoire avec déporte, queroles, etc. Enfin
oi suivi d' n mouillée se rencontre dans la laisse
CXXIII {Coloigne, Sasoigne[2 fois], Tresmoigne).
1. Cette laisse CXV a manifestement embarrassé les anciens
copistes, comme elle gène un éditeur moderne; nulle part le
texte n'offre plus d'incertitudes que dans cette tirade.
2. Ce mot, qui manque dans le manuscrit, a été suppléé par
conjecture, mais c'est celui que le sens exige.
c
XXXIV DOON DE LA ROCHE
U-e, trois laisses : XII, XX, LXIII. — La seule ob-
servation à faire, c'est que, dans les laisses féminines
en w, comme dans les laisses masculines, on trouve ui à
côté d'M : destruite 449, 454, destruire 467, Puille 2192,
desduire 2186. — Dans la laisse XII, martin 458 doit
être fautif '. :;i>
L'étude du texte, en dehors des assonances, nouk
donne quelques faits grammaticaux de plus. — Dans la
déclinaison, Vs analogique de flexion peut faire défaut
au cas sujet : i455e (A 3o) i 343, 415 1, mais ^^^e^ 1 385,
1405, etc.; de même emperere 4597. — A côté des
premières personnes du pluriel des verbes en -on, que les
assonances en 0 nous permettent de constater [escouton
4023, iron 4o3o), nous trouvons -ornes dans le corps
du vers : assauromes ijÇ>ji empliromes 371 3, lairo-
mes 2 1 1 o, parleromes 3 1 8, poomes 1 768, savomes 2047 ;
si on lisait assauron, etc., le vers serait trop court d'une
syllabe \ — En ce qui concerne le futur et le condition-
nel d'avofr, on trouve avéra 4516, av[e]re\ 4524, mais
avrai 1938, aras 2252, avra 225 1, avroit 3212; de
même durerai^ 3009, à côté de durra 291. — La forme
analogique aima (première personne du présent de
l'indicatif) se trouve au V. 1181. La terminaison -iens
(première personne plur. du subj. imparfait ou du con-
ditionnel) ne compte pour deux syllabes qu'au condi-
tionnel : morrïens 1275, serïens 32 1 1, garirïens 32i2 ;
cf. au subjonctif imparfait, dëussiens 3279, Dans la
syllabe radicale des verbes, eu compte généralement
pour deux syllabes ; on trouve cependant les formes
1 . Nous avons signalé plus haut des fautes contre la morphologie
commises en vue de l'assonance; il y a également des fautes con-
tre la syntaxe : entrepris 235, pour entreprise ; froissiés 3092,
(masculin), au lieu du féminin froissiés; envie 1479 (indicatif),
pour envoit (subjonctif), qu'exige le sens de la phrase.
2. Même emploi simultané des deux formes dans Orson de
Beauvais; voir l'édition de G. Paris, lntrod.,p. xxxv.
INTRODUCTION XXXV
contractées : geu 3174, eu 3563 '. — Meïsmes compte
pour trois syllabes à l'intérieur du vers 3i53 comme à
l'assonance de 2145 (je n'ai pas trouvé d'exemple de la
forme contractée); nient (ms. néant) est monosyllabe
au V. 591, mais dissyllabe au vers iSgi. On peut encore
signaler li comme article féminin singulier : li aiguë,
4427. Mais il faut se borner *.
Essayons maintenant de déterminer, à l'aide des
données grammaticales que nous venons d'énumérer, la
région dans laquelle notre poème a été écrit, bien qu'il
ne soit pas facile d'arriver à des résultats très précis.
Un fait qui frappe d'abord est la réduction d'iee à te.
Cette particularité se rencontre depuis le nord de la
Normandie jusqu'en Lorraine; elle exclut, comme
patrie de notre auteur, l'Ouest, le Centre, la région au
sud de Paris, même une partie de la Champagne ^
Chrétien de Troyes fait, dans ses rimes, la distinction
àHée et d'ze. — La réduction d'z'e à i devant consonne,
que nous avons remarquée dans deux laisses, se ren-
contre, nous l'avons vu, dans un domaine tout aussi
étendu, mais plutôt sporadiquement, semble-t-il, que
régulièrement. — La confusion d'à et d'e nasalisés
1. On trouve des exemples plus nombreux de ces sortes de
contractions dans Orson de Beauvais; voir l'Introduction de
G. Paris, p. xxxv, xxxvi. — On lit dust, pour deust, dans Jourdain
de Blaie, éd. C. Hofmann, v. 683.
2. Au vers 4174, on constate l'élision d'e posttonique devant
hante (A d'origine germanique) : La ot tante hante frainte, mais
c'est un fait habituel dans cette sorte de cliché ; voir Moniage
Guillaume, i* rédaction, 5409, et Florence de Rome, 2616. — Un
fait analogue se rencontre aux vv. SySô: Fil Griffon d'Autefeuille,
4179 : Fiert Griffon d'Autefeuille,et4i83 :Sur la gentd'Autefeuille,
pour de Hautefeuille (on sait que Vh, dans l'adjectif haut, est
d'origine germanique). Le manuscrit écrit Haulte Feulle au
v. 4168, après la préposition à.
3. Cf. O. Densusianu dans son édition de la Prise de Cordres,
p. cxxxviii, note 4. -, ,v-i
XXXVt DÔON DE LA ROCHE
permet une constatation plus précise : c'est un fait dis-
tinctif des dialectes de l'Est, opposés à ceux de l'Ouest
et du Nord '. — Nous avons noté, dans les assonances
en a-e^ un prétérit en -arent au v. 36 1 5 : ces formes sont
caractéristiques des dialectes de l'Est et du wallon \ —
Li, comme article singulier féminin, n'est pas aussi
nettement délimité, mais se rencontre dans les dialectes
de l'Est '.
A ces constatations, tirées de la langue, viennent s'en
ajouter d'autres, tirées du contenu du poème. L'auteur
se montre spécialement préoccupé de l'Est, de la vallée
du Rhin. C'est là qu'il place en grande partie l'action
de son poème : il parle des villes du Rhin, de Worms
{Gormaisé)^àe Spire (£'5j?/re),deMayence,de Cologne*.
Il sait que ces villes remontent à une haute antiquité;
il dit de Mayence (v. 3838) :
Mais la citez est forte, Sarrazin la fondèrent.
\ Sarrazin » ici équivaut à « Romains ». Il sait qu'il
y a à Cologne un archevêque et une église Saint-
Pierre *.
Tout cela plaide en faveur d'une origine orientale
de la chanson que nous a conservée le manuscrit de
Londres.
1. Ed. Schwan et D. Behrens, Gramm. de l'anc. franc., trad.
O. Bloch (Leipzig, igi?), § 42.
2. Ouvr. cité, § 355.
3. Ouvr. cité,% 333.
4. L'original immédiat sur lequel travaillait l'auteur du
poème conservé avait également placé une partie de l'action dans
la vallée du Rhin; il mentionnait Cologne (voir le chapitre
suivant). Mais, à en juger par l'imitation espagnole, les noms
empruntés à cette région étaient bien moins nombreux dans ce
poème que dans la rédaction qui nous est parvenue.
5. Il est vrai que cette église est mentionnée dans d'autres
chansons de geste ; voir la Table de M. E. Langlois, au mot
Saint-Pierre.
QU'INTRODUCTION XXXVII
Quant à la date, on a pu remarquer * que M. Meyer,
en 1878, était d'avis qu'on ne pouvait guère la faire
descendre plus bas que la fin du xii* siècle. Il attachait
une importance spéciale au fait que le poème était
entièrement écrit en assonances ; s'il avait pu traiter la
question à fond, il aurait sans doute fait valoir d'autres
arguments, empruntés à la langue : c'est ainsi que nous
avons vu plus haut que, comme des poèmes qu'on
tient habituellement pour antérieurs à l'an 1200, Orson
de Beauvais, Jourdain de Blaie, notre chanson n'admet
que très rarement la contraction d'eu et eu ou u. —
M. Meyer avait noté le passage de notre chanson où
Landri et ses compagnons, arrivés à Constantinople,
s'émerveillent de la richesse * et de la force de la ville
(v. 1390 et suiv.) :
Et dit li uns a l'autre : « Povre terre est de France :
Li sires qui la tient par droit nient s'en vant[e] ;
Mais servons bien cestui s'il vuet et il commande,
Que il n'a souz ciel homme qui tant ait ars ne lances,
Qui pelist ceste vile ne abatre ne prendre ».
Comme M. Meyer le faisait remarquer, l'observation
que Constantinople est imprenable « date d'avant 1 204 »;
en effet, après la prise de la ville, en cette année,
par les Croisés, la remarque n'eût plus eu de sens. —
Le raisonnement serait absolument probant si le poème
que nous a transmis le manuscrit de Londres était une
œuvre originale ; mais nous verrons plus loin que
l'auteur a travaillé d'après une chanson plus ancienne,
dans laquelle il était également question du séjour de
Landri à Constantinople ; il reste la possibilité que le
1. Ci-dessus, p. iv.
2. La richesse de Constantinople est encore mentionnée dans
Florence de Rome, poème relativement récent (v. 120-121, éd.
Wallenskôld) : Qui tient Constantinoble moût a grant seignorie,
Conques ne Ju citej de trésor si garnie.
XXXVIII DOON DE LA ROCHE
renouveleur ait reproduit mécaniquement un passage
de son original. Il faut cependant observer que, si
l'auteur du roman espagnol a fidèlement résumé, en
celte partie du récit, le poème qu'il avait sous les yeux,
il n'y avait pas de place dans ce poème pour une con-
versation paisible entre Landri et ses compagnons sur la
richesse et la force militaire de la ville de Constantin '.
Nous croyons donc que la conséquence tirée par
M. Meyer des vers cités a bien des chances d'être juste
et que cet indice vient s'ajouter à ceux qui nous obligent
à placer la rédaction de notre poème au plus tard dans
les premières années du xiii« siècle.
Avant de passer aux questions d'histoire littéraire que
soulève Doon de La Roche, nous devons parler ici de
l'aspect du texte. Ainsi que nous l'avons dit plus haut,
l'idée primitive de M. Meyer, quand il préparait pour
l'impression la copie du manuscrit de Londres, était
manifestement de s'écarter de ce manuscrit aussi peu
que possible, et d'en conserver la graphie. Lorsque,
après un long intervalle, il s'occupa de nouveau de
Doon deLa Roche, il changea de système, probablement
sous l'influence des fragments qui lui avaient été com-
muniqués par M. Lelong et dont la langue, ainsi que
nous l'avons vu, ne présente pas le caractère nettement
lorrain du manuscrit. En établissant le texte, M. Meyer
adopta une graphie très rapprochée du francien. Nous
avons suivi ce système, malgré ses inconvénients, car
l'abandonner et revenir à la graphie du manuscrit,
c'eût été recommencer tout le travail et retarder indéfi-
I. M. Benary (p. 3i8, note, de son mémoire) s'est efforcé de
trouver un rermiMMs a ^uo dans une prise de Laodicée (Lalice)
parles Musulmans en 1 188. Mais comme cette ville est fréquem-
ment mentionnée dans les chansons de geste, un trouveur,
voulant raconter une guerre entre Byzantins et Sarrasins, pouvait
facilement tirer de son imagination une prise de Lalice par ces
derniers, sans avoir présent à l'esprit un fait réel et contemporain.
INTRODUCTION XXXIX
nimentune édition attendue depuis des années. Dans la
partie du texte que nous avons eue à établir', nous avons
par conséquent maintenu autant que possible l'ortho-
graphe adoptée par M. Meyer, notamment la distinction
d'an et d'en, d'^ et de ^, issu de f -|- 5. Certaines incon-
séquences étaient difficiles à éviter ; on voudra bien
nous les pardonner*. — A partir du v. ii8, M. Meyer
n'avait pas cru utile de noter intégralement dans les
variantes toutes les leçons corrigées dans le texte.
Dans l'édition d'un texte qui ne nous est parvenu, à
36o vers près, que dans un manuscrit unique, de date
récente et plein de fautes, il fallait nécessairement
avoir recours à la critique conjecturale : M. Meyer ne
s'en était naturellement pas fait faute \ et, d'autre part,
M. Antoine Thomas a remédié par des émendations
personnelles à des passages qui semblaient désespérés
et à d'autres dont l'altération avait pu échapper à un
lecteur moins attentif et moins familier avec notre
ancienne langue. Nous n'avons pas cru nécessaire d'in-
diquer chaque fois le nom de l'auteur de l'émendation;
le lecteur voudra bien admettre que les meilleures
conjectures sont de MM. Meyer et Thomas, les moins
bonnes de l'auteur de ces lignes.
M. Meyer, en préparant une édition, songeait à
tout : j'ai trouvé dans ses papiers, outre quelques
notes pour l'Introduction, un embryon de Glossaire,
et même des éléments pour l'Index des noms propres.
Tout m'a été fort utile.
1. Le texte établi par M. Meyer allait jusqu'au v. 3365.
2. Pour la graphie, comme pour le fond du texte, on ne s'est
pourtant pas astreint à un respect superstitieux du travail de
M. Meyer. Il est évident que, s'il araitpu terminer rédition lui-
même, il aurait changé bien des choses sur épreuve. — Au moment
de sa mort, 3 feuilles seulement étaient composées.
3. M. Meyer avait indiqué des émendations en marge de sa
copie; ces indications m'ont été fori utiles pour la partie du
texte qu'il n'avait pas établie.
»L' ■ ^ DOON DE LA ROCHE
CHAPITRE IV
ANALYSE DU POEME.
Doon l'Allemand, chevalier presque sans terres (il ne
possède que la ville de La Roche), a servi fidèlement,
pendant trois ans, le roi Pépin, mais le roi ne lui a
rien donné, et Doon, de son côté, ne veut rien lui
demander. La sœur du roi, Olive, aime Doon, mais
elle ne le dit à personne. Le Jour de la Saint-André,
le roi récompense les « soudoiers » et les princes de sa
cour; cette fois encore, il ne donne rien à Doon.
Les chevaliers couards débitent à ce sujet des plaisan-
teries qui parviennent à l'oreille de Pépin ; il fait
venir Doon et, pour le récompenser, il lui offre la
main de sa sœur Olive et toute la Lorraine '. Doon
refuse d'abord, mais, par la volonté du roi, le mariage
se fait : Landri est engendré. Doon s'établit à Cologne
[avec sa femme] et sept cents chevaliers (v. 1 15).
Dans cette ville, il y avait un traître, Tomile, oncle de
Ganelon, cousin germain de Hardré et de., {nom altéré).
Il dit à Doon que sa femme ne l'aime pas, qu'il l'a sur-
1 . Des analyses plus ou moins détaillées du poème (F), faites à
d'autres points de vue que celle-ci, ont été données par Sachs,
dans son travail cité, par Léon Gautier, Les Épopées françaises,
2' édit., II, 253-261, par W. Benary dans son mémoire cité,
p. 3i3 et suiv. — Afin de décharger le chapitre suivant,
on donne ici, en note, quelques indications sur les épisodes
correspondants du roman espagnol en prose {E) et de la version
norroise dans la Karlamagnus-Saga {N; voir pour les détails
bibliographiques le chapitre qui suit), et aussi quelques renvois
à des épisodes analogues dans d'autres chansons de geste.
2. Dans notre poème, ce terme a un sens fort étendu; Cologne
en fait partie, puisque Doon, après avoir reçu en fief la Lorraine,
va s'établir dans cette ville.
ai INTRODUCTION XLI
prise, couchée avec un « garçon » '. Doon menace de
le faire pendre, s'il tient encore de tels propos. Le traître
appelle un « garçon » et le pousse à se glisser dans le
lit d'Olive, qui a bu trop de « piment » ; elle n'entend
rien, ne voit rien '. Le garçon, en effet, se glisse sous
la couverture du lit, sans autre vêtement que ses braies,
mais il n'ose faire violence à la duchesse. Tomile, de
son côté, appelle Doon. Celui-ci vient, accompagné de
trois comtes ; il soulève la couverture, et trouve le
garçon couché à côté de sa femme (v. 1 16-196).
Doon coupe immédiatement la tête au misérable,
sans le mettre d'abord à la torture. Il veut de même
couper la tête à sa femme, qui s'est éveillée et ne com-
prend rien à ce qui se passe ; mais ceux qui l'accom-
pagnent le retiennent et lui donnent le conseil de faire
venir le roi Pépin. Olive, de son côté, offre de se jus-
tifier par l'épreuve du feu ou de l'eau ; Doon est sur
le point d'accepter, mais, Tomile excitant sa jalousie,
il se met en colère, et frappe même d'un coup de pied
le petit Landri \ Doon envoie à Pépin son chapelain,
Grégoire, pour l'inviter à venir, sous un prétexte, à
Cologne. Grégoire part pour Paris et s'acquitte de sa
mission. Pépin se rend à Cologne, où Doon expose
l'affaire : Tomile veut qu'Olive soit brûlée vive; Jofroi,
cousin de Doon, s'offre à combattre pour Olive en duel
judiciaire; Doon repousse toute proposition de cette
1. Dans F, le traître agit sans motif, ou du moins aucun motif
n'est indiqué. Dans E, Tomillas (= Tomile) veut perdre Oliva
(= Olive), afin de pouvoir plus tard marier sa fille Aldigon
(= Audegour) au duc de La Roche, redevenu libre (fol. a. ij. v").
— Dans Ne, le traître, Milon, se venge de ce qu'Olif (= Olive) a
repoussé ses propositions amoureuses.
2. Pour ce trait du « piment », inintelligible ici, voir le cha-
pitre suivant.
3. Ce détail du coup de pied donné à Landri par son père se
retrouve dans E (fol. a. viij. v»), mais plus tard, après la scène à
l'église.
XLII DOON DE LA ROCHE
nature '. Avec l'approbation de Pépin, Doon se sépare
de sa femme; on assigne à celle-ci, malgré ses lamen-
tations, une demeure [ostel] hors de la ville, où elle
aura chaque jour deux pains pour toute nourriture.
Elle garde auprès d'elle le petit Landri, qui a sept ans
(v. 197-532).
Tomile conseille à Doon de répudier définitivement
Olive, et d'épouser une fille à lui [Audégour] : elle lui
apportera en dot les villes de Worms [Gormaise] et
de Spire [Espiré] et vingt mulets, chargés d'or et
d'argent. Doon déclare qu'il accepte cette proposition,
si le roi donne son consentement. Doon et Tomile
vont à Paris, où le roi consent, en effet, au mariage,
après que Tomile lui a livré vingt mulets chargés
d'or '; seulement, il exige que sa sœur Olive soit traitée
et vêtue conformément à son rang. Après Pâques, à
Cologne, a lieu le mariage de Doon et d'Audegour.
Au moment où le mariage se célèbre. Olive se rend
à l'église, son petit Landri dans ses bras : l'enfant
élève la voix, s'adressant à son père et à l'archevêque,
1. Dans JV, il y a réellement un duel judiciaire entre « Engel-
bert de Dynhart », qui prend la défense d'Oliva, et le traître Milon,
qui l'accuse (analyse de G. Paris, p. 106-107). — Dans E (fol. a.
vj. yo-vij. r"), il y a une ordalie par le feu, à laquelle Oliva se
soumet et qui se termine à son honneur.
2. Pépin est de môme représenté comme vénal dans le Roman
d'Aubery le Bourgoing, éd. Tarbé, Reims, 1849, p. iio (comp.
p. xiv) et dans des versions franco-italiennes et italiennes de
Bovon de Hantone (voir G. Paris, Mélanges de littér. franc, du
moyen âge, p. iio). Charlemagne se laisse corrompre dans Orson
de Beauvais, éd. G. Paris, v. 840 et suiv., et dans Aye d'Avignon,
éd. Guessard et P. Meyer, p. 99. — Dans E (fol. a. viij. r»),
Tomillas donne de l'or au « duc de La Roche » (comme dans jP,
V. 565); quant à Pépin, pour le rendre favorable au mariage
d'Aldigon (= Audégour) avec le duc, il lui promet que les terres
de « Flandes » (= Flandres) et de « Florencia », qui avaient été
données en dot à Oliva, feront retour au territoire royal, ce qui
est une corruption déguisée.
:15' INTRODUCTIOM XLIII
et proteste contre le mariage '; il menace Tomile d'un
châtiment futur. De l'église, on se rend au palais.
Tomile injurie Olive, et Doon renie son fils. Celui-ci
se déclare prêt à combattre le calomniateur de sa mère;
Tomile lui tend son gant; l'enfant saisit un bâton et
frappe Tomile à la tête, si rudement qu'il tombe par
terre. Doon défend à Tomile de se battre avec son fils;
il ordonne à Olive de rentrer à son « hôtel », où elle
pourra se livrer à sa « puterie ». Olive proteste de nou-
veau de son innocence; le petit Landri déclare qu'il
vengera sa mère dès qu'il sera en état de porter les
armes. L'auteur prédit qu'en effet Landri se fera redou-
ter, d'Aix-la-Chapelle jusqu'à Constantinople. Désor-
mais commence une merveilleuse chanson (v. 533-869).
Audegour s'efforce d'exciter Doon contre Landri et
sa mère; elle insulte et frappe le petit Landri toutes les
fois qu'il vient voir son père. Elle met au monde un
fils, Malingre, qui sera félon et perfide ; quand Landri
a dix ans, Malingre entre dans sa septième année. Lui
aussi insulte Landri ; même il le frappe % et Tomile lui
donne un coup de pied. Cette fois, Doon prend le parti
1. La protestation du jeune fils d'Olive contre le second mariage
de son père se retrouve de même dans E (fol. a. viij, r°, en bas),
mais cette protestation a lieu au palais, au moment où le repas
de noces va commencer; la scène à l'église manque. Cette scène
se retrouve, au contraire, dans Parise la Duchesse, éd. Guessard
et L. Larchey, p. 49 : le vieux Clarembaut y proteste contre le
second mariage du duc Raimont qui a chassé sa première femme ;
comme Landri, Clarembaut s'adresse directement à l'évêque
{Parise, v. i63i; comp. notre poème, v. 692-694).
2. Ce thème de l'inimitié entre les jeunes Landri et Malingre
se retrouve, avec d'autres circonstances, dans N (voir l'analyse
de G. Paris, p. 109); il manque dans E. Dans ce dernier récit,
Oliva, retirée dans un couvent et craignant les entreprises de
Tomillas contre le jeune Enrrique {= Landri), fait répandre le
bruit que celui-ci est mort, et l'envoie ensuite en Orient {E,
foL b. ).). Toute cette histoire semble une invention du rédacteur
espagnol.
XLIV DOON DE LA ROCHE
de son fils aîné; Landri, heureux de cette intervention,
monte sur une table et tient des propos menaçants contre
Tomile; Doon adresse des reproches à celui-ci. Asson
de Mayence conseille à Doon de donner La Roche à
Landri; Audegour proteste; Tomile frappe Asson si
rudement qu'il tombe aux pieds de Landri. Ce dernier
arrache son « espié » à un veneur venu du bois, et en
transperce le corps de Tomile, qui tombe également.
En peu d'heures, il y eut soixante-dix combattants ;
Landri et ses partisans ont le dessous ; ils vont à leurs
hôtels pour s'armer : c'est la première fois que Landri
prend les armes. Il y a un combat sur les bords du
Rhin; Tomile est blessé; il conseille à ses parents,
Ganelon, Hardré et Hervi de Lion, de conclure avec
Landri une trêve de quatre ou cinq ans ; on pourra tou-
jours l'assassiner plus tard. Doon accepte l'idée d'une
suspension des hostilités, et annonce à Landri qu'il a
conclu une trêve ; il se déclare joyeux du courage de
celui qu'il n'ose croire son fils. En entendant attaquer
de nouveau le caractère de sa mère, Landri se fâche :
il brandit sa lance contre son père, mais celui-ci réussit
à le calmer. Landri retourne à Cologne, où la trêve est
jurée solennellement pour cinq ans (v. 870-1 194)-
Au bout de six mois, Tomile et son lignage jurent,
au «mostier», la mort de Landri; mais la nonnain
Beneïte, cachée derrière un pilier, entend le serment des
conjurés'. Elle va au palais avertir Doon; celui-ci fait
I. Cet épisode manque complètement dans E; dans iV, il y a
un attentat contre la vie de Landri, mais avec des circonstances
entièrement différentes (analyse de G. Paris, p. iio, en bas). —
Complot très semblable contre le jeune Milon dans Orson de
Beauvais, éd. G. Paris, v. 640 et suiv.; cependant la conjuration
n'a pas lieu dans une église, semble-t-il, bien que les conjurés
jurent sor sains, et c'est « uns gars de la cuisine » qui révèle le
complot — M. Benary (p. 355 de son mémoire) en rapproche avec
raison le complot dç Pépin le 3qssu contre la vie de Charlc-
INTRODUCTION - ^<î XLY
venir son fils et lui conseille de quitter lê pays et de se
réfugier en France, chez son oncle Pépin. — Landri
appelle Gilibert, Asson, Guinemant et d'autres, en
tout 80 pairs de Lorraine, et leur demande de le rece-
voir dans leur « mainburnie » ; il sera leur homme lige.
Mais ils refusent de l'aider, à cause de l'inconduite de -i
sa mère. Landri, désespéré, retourne à l'hôtel de sa ^
mère Olive et lui déclare qu'il va la quitter, puisque?
Tomile, Malingre et sa marâtre ont juré sa mort : il ira
d'abord demander secours à Pépin; si celui-ci ne 1er
retient pas, il s'en ira en « paiennie». Il montre à sa
mère un arbre qu'il a planté : un « clerc » lui a dit que '
lui et cet arbre mourront dans la même année ; tant que <
cet arbre sera vert et bien portant. Olive pourra être
sûre que son fils est en vie '. Sa mère est désolée; >
Landri part avec Asson et Guinemant (v. iipS-iSoS).
Ils arrivent à Liège: Landri demande l'aide des
bourgeois: ils la lui refusent, à cause du « putage » de -
sa mère. Ils s'en vont à Paris et descendent chez un
bourgeois, qui va dire à Pépin que son neveu est arrivé ;
le roi défend de laisser entrer Landri. Celui-ci vient ''
frapper à la porte du palais ; le portier lui refusant
l'entrée, l'enfant se met en colère et le maltraite ; Asson
et Guinemant le calment. Pépin, du haut de son palais,
adresse la parole à Landri ; il voudrait bien l'aider,
mais il ne peut, car il est Hé par un serment à Tomile.
Le lendemain matin, il envoie cependant à Asson et à
magne, d'après le récit du Moine de Saint-Gall, II, 12, dans v
Monumenta Germaniae, Scriptores, II, 755.
I. L'arbre «signe de vie » se retrouve (remarque de M. Be-
nary, p. 386, note) dans Doon de Maience, v. SSgo (p. i63). Voir
sur cette croyance en un lien entre la vie d'un homme et celle -
d'une plante: P. Sébillot, Folk-lore de France, III, 3/2; Mann-
hardt, Wald und Feldkulte, I, 43 et suiv.; Frazer, The Golden
Bougfi, III, 391 et suiv. {2* édit.); Hartland, Legend of Perseus, -■
II, 28 et suiv.; G. A. Wilken, Verspreide Geschriften (Semarang, \
1912), III, 291 et suiv.
XLVX' DOON DE LA ROCHE
Guinemant deux mulets chargés d'or, pour qu'ils
gardent Landri avec soin. Landri prie encore Pépin
de le retenir près de lui : le roi refuse de nouveau, car il
est lié par le serment qu'il jura après avoir reçu de
Tomile les vingt mulets chargés d'or '. Landri part,
arrive à Rome, s'embarque pour la Grèce à «Saint-
Pierre au Bras » et arrive à Constantinople (v. iZog-
i384).
Landri et ses compagnons contemplent avec admira-
tion le luxe et la richesse de la ville imprenable, auprès
de laquelle la France paraît une pauvre terre. Landri se
présente à l'empereur Alexandre ', qui le retient à son
service (v. 1385-1407)^ I
Ce fut au mois de mai, que les arbres fleurissent.
Olive se lève au matin : elle voit l'arbre [de Landri]
couvert de feuillage ; il y a cependant une branche
sèche. Elle comprend que son fils n'a pu obtenir le
secours qu'il demandait ; elle se désespère et craint
1. Plus haut, V. 607 et suiv., où il est question de l'accord peu
honorable conclu entre Tomile et Pépin et de l'or reçu par
celui-ci, il n'est rien dit d'un serment du roi.
2. Ce nom se trouve au v. 1436.
3. Dans E (fol. b. vij . v°), Enrrique, apprenant que le « soldan »
de Babylone va attaquer Constantinople, quitte Jérusalem, qu'il .
vient de conquérir sur les Sarrasins, pour aller au secours de la
ville menacée ; il fait naufrage et réussit à gagner la terre avec
deux compagnons seulement. Ils arrivent à Constantinople
dénués de tout et affamés. Enrrique reste à l'entrée de la ville,
au pied d'une tour, pendant que ses compagnons vont dans la
ville pour chercher de la nourriture. En les attendant, il se
plaint à haute voix et raconte son histoire. Mergelina, la fille de
l'empereur, qui habite dans la tour, entend ses plaintes ; elle lui
jette d'abord de l'or, puis donne ordre à un senescal de le faire
monter. — Tout cela pourrait être de l'invention du rédacteur
espagnol; il y a pourtant une certaine analogie entre ce récit et
ce qui est raconté dans Élie de Saint-Gilles, éd. G. Raynaud,
v. 1401 et suiv. — Le nom du « soldan », Mirabel, se lit dans la
Prise de Cordres et dans d'autres chansons de geste ; voir la Table
de M. E. Langlois.
INTRODUCTION - XLVII
bien ne jamais le revoir. Pendant ce temps, Landri est
à Constantinople. L'empereur est menacé d'une guerre:
les Sarrasins se sont emparés de Lalice (= Laodicée) et
en ont chassé les Harmins [= Arméniens] qui l'occu-
paient '. Landri, qui vient d'être fait chevalier par
l'empereur, attaque les païens et fait leur seigneur
prisonnier ; il le livre à l'empereur (v. 1408-1439).
Celui-ci a une fille, qui s'appelle Salmadrine; elle est
amoureuse de Landri au point d'en tomber malade.
Voyant qu'elle est souffrante, près de mourir, l'empereur
l'interroge ; elle dit qu'elle désire épouser Landri, qui
vient de sauver le pays. L'empereur répond qu'il ne
sait rien de certain sur l'origine de Landri ; il consen-
tirait volontiers au mariage, même si le jeune chevalier
était bâtard, si celui-ci était réellement parent du roi
de France, ainsi que l'ont affirmé Asson et Guinemant ;
mais l'empereur se refuse à le croire. Les barons
conseillent à l'empereur d'envoyer deux messagers,
qui s'enquerront de la véritable origine de Landri : s'il
est réellement neveu du roi de France, l'empereur lui
donnera sa fille en mariage ; s'il ne l'est pas, il le récom-
pensera de ses services et le renverra (v. 1440- i5oo).
L'empereur ordonne à deux de ses chevaliers, Beren-
gier et Outré, de s'en aller en France, à Laon, pour
savoir la vérité au sujet de Landri. Salmadrine les fait
venir de son côté et menace de les faire mettre à mort
s'ils rapportent [au sujet de Landri] des choses qui lui
seraient désagréables. Elle leur donne deux « droma-
daires », qu'elle fait garder dans un cellier et qui courent,
I . Sur les mentions des Arméniens dans les chansons de geste,
voir F. Macler, La France et l'Arménie à travers l'art et l'histoire,
Paris, 1917, gr. in-40, p. 12 et suiv. Il résulte de ces recherches
que l'auteur de Doon de La Roche peut être classé parmi les
« trouveurs », relativement instruits, qui savaient que les Armé-
niens étaient chrétiens ; d'autres les rangent avec les Açopars, les
Bedotns et autres ennemis de la Chrétienté. ■- - , ..- . - . . ^
XLVm DOON DE LA ROCHE
merveilleusement vite : avec ces montures, ils peuvent
être de retour en huit jours et demi. Ils partent, riche-
ment costumés, assis sur les dromadaires et munis de
malles remplies de « besants». Au bout de huit jours
ils sont à Cologne ; ils demandent l'hospitalité à un
riche bourgeois, Gonteaume, originaire de La Roche et
cousin de Doon. Gonteaume se déclare prêt à les loger
pendant un an, sans rien leur faire payer, « pourvu seu-
lement que Dieu ramène Landri, mon vrai seigneur, et
qu'il maudisse Tomile et Malingre, qui l'ont chassé du
pays»! Les messagers sont ravis quand ils apprennent
qu'il connaît Landri. Les chevaux (= les dromadaires)
sont logés par Gonteaume dans un cellier (v. i5oi-
1668).
Mais Hardré a rencontré les messagers et remarqué
leurs chevaux merveilleux ; il conseille à Malingre
d'aller les enlever. Malingre suit ce conseil : il s'em-
pare des chevaux, après un combat avec les serviteurs
de Gonteaume, combat où il est blessé; il se réfugie
ensuite à l'hôtel de Tomile. Gonteaume va se plaindre
à l'archevêque de la violence qui lui est faite, et l'arche-
vêque convoque les bourgeois, au nombre de soixante
mille. Ceux-ci conseillent à l'archevêque d'envoyer
Gautier, cousin germain de Doon, à l'hôtel de Tomile,
pour réclamer les chevaux; s'il ne veut les rendre, il
sera attaqué. Malingre refuse les chevaux; l'archevêque
ordonne alors aux bourgeois de s'armer. Ceux-ci
s'arment en effet ; on sonne la « bancloche » ; Gonteaume
et ses serviteurs se joignent à eux; on attaque le châ-
teau et les gens de Tomile : lutte violente, où Tomile et
Malingre sont blessés. Tomile et les siens s'enferment
chez eux ; Tomile se met à une fenêtre et propose aux
assaillants de rendre les chevaux et d'en rester là : son
jeune neveu, qui n'est pas encore chevalier, a fait une
folie qu'il est prêt à réparer. L'archevêque accepte cette
proposition ; l'assaut cesse et les bourgeois s'en vont.
INTRODUCTION XLiX
Tomile et Malingre vont rendre les chevaux à Gon-
teaume et s'humilient devant lui ; mais les bourgeois
leur donnent des coups de pied et leur reprochent leur
conduite envers Landri, leur seigneur. Les messagers
assistent à la scène et se réjouissent : ils savent main-
tenant de science certaine que Landri est le neveu du roi
et n'ont pas besoin d'aller en France (v. 1 669- 1 882).
Olive sort à ce moment de l'église où elle était allée
prier. Gonteaume, qui seul lui est resté fidèle, l'invite à
entrer chez lui et la fait souper avec les messagers,
auxquels il explique qui est Olive; les messagers lui
donnent des nouvelles de Landri. Comme ils sont
édifiés sur l'origine de Landri et se croient dispensés de
poursuivre leur voyage en France, ils partent le lende-
main matin; Gonteaume, l'archevêque et Olive les con-
voient; Olive leur remet, pour Landri, un anneau
qu'elle a reçu de Doon pendant la première nuit de leur '
mariage (v. 1883-1972).
Après un heureux voyage, les messagers arrivent à
Constantinople. C'est au mois de mai : l'empereur
Alexandre est dans son verger, sous une tente; Lan-
dri, Asson et Guinemant sont avec lui, en même temps
que Salmadrine, gracieusement costumée. Elle adresse
la parole à Landri; celui-ci ne répond guère à ces
avances et lui dit qu'il pense à sa mère, qui est en
France au pouvoir de Tomile. A ce moment, les
I. Cet épisode, où l'on voit les bourgeois d'une ville s'armer et
se mettre en mouvement contre un chevalier qu'ils considèrent
comme un ennemi, est une sorte de lieu commun qui se
retrouve dans plusieurs chansons de geste [Ogier le Danois,
Gaydon, etc.) et même dans \e Conte du Graal de Chrétien de
Troyes. Voir C. Voretzsch, Epische Studien, I, die Composition
des Huon von Bordeaux, Halle a. S., 1900, I, 184 (comp. 182,
note). La différence, c'est que, dans les épisodes signalés par
M. Voretzsch, le chevalier qu'on attaque est un personnage sym-
pathique, tandis que, dans F, Tomile et Malingre sont des
traîtres et que tous les torts sont de leur côté.
d
L DOON DE LA ROCHE
messagers arrivent; ils mettent pied à terre devant la
tente de Tempereur, et font le récit de leur mission : ils
ont constaté que Landri est bien le neveu du roi Pépin ;
en même temps, Outré remet à Landri l'anneau
qu'Olive lui a confié. — Après avoir pris connaissance
de ces nouvelles, l'empereur Alexandre n'hésite plus;
il accorde à Landri la main de sa fille (r, 1973-2 109).
Le récit revient à Malingre, le fils d'Audegour. Doon
avait « adoubé » (fait chevalier) son fils; mais celui-ci,
de plus en plus exaspéré contre Olive, veut qu'on lui
enlève les terres qu'elle tient encore ; Doon s'y refusant,
Malingre traite son père de cou:{ sofran\ (cocu com-
plaisant); le père frappe le fils, qui réplique, et les deux
hommes en viennent aux mains. Des chevaliers réus-
sissent cependant à établir une trêve entre le père et le
fils. Tomile et Malingre n'en chassent pas moins Olive
de Cologne; elle part, assise sur un mauvais « roncin »,
et se réfugie en Hongrie, où elle est recueillie par son
oncle, l'évêque Auberi, à « Seine la ville » (v. 2110-
2166; cf. V. 2925, pour la résidence d'Auberi).
Tomile et Malingre, craignant une invasion possible
de leur terre par Doon et Landri, expulsent Doon de
Cologne ; quand celui-ci veut se réfugier à Aix-[la-Cha-
pelle], on lui en refuse l'entrée. Il se retire à La Roche
et part de là pour Paris, afin d'y voir Pépin. Il trouve
le roi malade; Pépin demandant des nouvelles d'Olive,
Doon raconte qu'elle a été chassée par Tomile et
Malingre, qui ont occupé ses fiefs. Le roi se met fort
en colère, reproche à Doon sa conduite à l'égard de sa
sœur, et le défie '. Doon, épouvanté, se retire à La
I. Le roi arrache quatre poils de son « pellisson » d'ermine [et
les jette au visage de Doon] (v, 2261). Le même mode de défi se
retrouve dans Raoul de Cambrai (v. 23i6-23i8, édit. Meyer et
Longnon), et dans Girbert de Met:{ (voir la note des éditeurs de
Raoul de Cambrai sur le passage cité, en tenant compte de ce
qu'ils disent dans l'Introduction, p. LXIII, note.)
INTRODUCTION LI
Roche, qu'il fortifie, puis il assiège Aix-la-Chapelle.
Ceux de la ville font une sortie ; Doon les attaque avec
succès et fait des prisonniers, qu'il amène à La Roche.
Un écuyer va annoncer le désastre à Tomile et à
Malingre ; ceux-ci s'avancent contre La Roche. Il y a
combat devant la ville, et Doon lutte personnellement
contre Tomile. Celui-ci, repoussé, s'enfuit à Aix, et
Malingre à Spire; mais bientôt tous deux réunissent de
nouveau une armée de 40.000 hommes et attaquent de
rechef La Roche. Doon et Jofroi défendent la ville; ils
auraient réussi à repousser les assaillants, si Pépin
n'était survenu. Il attaque Tomile et Malingre et taille
leur armée en pièces; Tomile s'enfuit à Mayence, et
Malingre à Spire. Alors le roi se retourne contre Doon :
il prend La Roche et fait Jurer à Doon et à son neveu
Jofroi qu'ils quitteront le pays (v. 2167-2408) '.
« Les autres jongleurs qui disent de Doon en ont
beaucoup chanté, mais ils ne savent pas [la véritable
histoire] : je la reprends là où ils l'abandonnent ; je
reviendrai plus tard à Landri » (v. 2409-2412).
Doon, [accompagné de Jofroi], s'en va en Hongrie : là
règne le roi Dorame, vaillant chevalier, qui réclame la
moitié de Constantinople ; pour cette expédition, il
prend à son service des chevaliers, entre autres Doon
et Jofroi. Les Hongrois campent sur la rive du « Hon-
gre » : ils jurent de tout ravager jusqu'à Constantinople.
Un messager à cheval, blessé, annonce ces mauvaises
nouvelles ' à l'empereur [Alexandre] ; Salmadine sup-
1. Dans E (fol. b. vj. verso en bas), Pépin enlève également au
duc de La Roche ses terres, mais les circonstances diffèrent
complètement.
2. Comp. aux vv. 2i3r-233 et aux v. 2455-2459 la Chevalerie
Ogier, édit. Barrois, v. 1225 et suiv. : Uns chevaliers s'en est sevrés
des nos, Qui d'un espial fu navrés ens el cors : Le Toivre passe,
son escu a son col, Aine ne fina si est venus a Vost. — Tôt droit a
Vost s'en vint li messagiers, Le roi trova en son trefou ilsiet. Puis-,
LU DOON DE LA ROClHE
plie Landri de marcher contre Dorame. Landri refuse
d'abord d'intervenir, jugeant les Hongrois des adver-
saires indignes de lui. Mais, quand un second messager
blessé survient, porteur de messages encore pires, Lan-'
dri crie à ses chevaliers « Armez-vous ! » Quarante
mille hommes partent avec Landri; ils attaquent les
Hongrois, et Landri tue Garnier (v. 2413-2489).
L'empereur Alexandre attaque son neveu Dorame :
il est sur le point d'être vaincu, quand Landri survient :
il frappe Dorame de son épée et l'étourdit d'un grand
coup : Dorame se rend prisonnier.
Leur roi vaincu, les Hongrois prennent la fuite;
seuls Doon et Jofroi tiennent tête aux assaillants.
Landri attaque son père, sans le reconnaître, et réussit à
le vaincre; il va lui couper la tête quand le duc lui
crie merci; Landri le remet alors au roi Alexandre. De
leur côté, Asson et Guinemant ramènent Jofroi prison-
nier. Doon et Jofroi, grièvement blessés, sont enfermés,
avec quatre-vingts de leurs compagnons, dans une des
prisons, où ils demeurent pendant sept ans (v. 2520-
255o).
Le récit revient à Olive, qui est restée chez l'évêque
(Auberi). Un jour, en sortant de l'église, elle est
reconnue par quatre « pers de La Roche », qui ren-'
traient d'un pèlerinage d'outre mer. Ils étaient partis
de chez eux il y a sept ans, avant que la dame eût été
accusée [d'adultère]; quand ils voient Olive, ils
s'étonnent beaucoup; ils se disent entre eux : « Nous
avons trouvé notre dame », Ils l'arrêtent, s'inclinent
devant elle et l'interrogent; elle leur raconte son his-
toire. Ils jurent sur des reliques qu'ils lui rendront sa
terre et sa contrée. L'évêque assure à Olive que ces
s'escria tant com il puet huchier : « Rois, car chevalche ! etc. » Un
épisode analogue se lit dans Élie de Saint Gilles, v. 182 et suiv.,
éd. G. Raynaud. ' "'
INTRODUCTION LUI
quatre barons lui rendront en effet sa terre; il l'engage
[en attendant] à tenir large « mesnie » et à donner de
grandes « soudées » (v. 255 1-2595) '.
Le récit revient à Landri : le a trouyeur » rappelle
ses aventures et l'amour de Salmadrine. Une nuit,
Landri est seul, sans autre suite que les cinq compa-
gnons qu'il avait amenés de France; son maître Gui-
nemant remarque qu'il pleure et soupire. Interrogé
par Guinemant, Landri évoque ses malheurs : sa mère
[probablement] tuée, le roi Pépin qui l'a abandonné,
le mauvais « lignage y> qui possède sa terre. Guine-
mant lui conseille de prendre congé du roi Alexandre,
de retourner [en France] et d'y défier le roi Pépin.
Landri approuve ce conseil (v. 2596-2670) '.
Un écuyer de l'empereur Alexandre a surpris cette
conversation et se hâte de la rapporter à son maître :
celui-ci déclare qu'il approuve le projet de Landri et
défend sa conduite contre les reproches de Salmadrine,
sa fille. Il est minuit, on sonne les matines; l'empe-
reur va assister au service dans la crypte de Sainte-
Sophie. Salmadrine se lève et, vêtue seulement d'un
mantelet d'hermine, se rend dans la chambre où
reposent ceux Je France. Elle se glisse dans le lit de
Landri, donne un baiser au jeune homme. Landri,
troublé, s'éveille et la conjure de dire qui elle est; Sal-
1. Cet épisode peut paraître surprenant, car dans la suite du
récit il n'est plus question de ces quatre « pers ». Il faut cepen-
dant remarquer que les vv. 2584-2585 préparent en quelque
sorte le récit subséquent, où l'on voit Olive reconquérir sa terre.
2. Dans E, l'empereur Manuel donne à Enrrique (= Landri)
l'empire de Constantinople et la main de sa fille, Mergelina,
immédiatement après sa défense victorieuse de la capitale contre
Mirabel, solelan de Babilonia. Quelque temps après le mariage,
Enrrique, une nuit qu'il reste éveillé (fol. c. vj. v"), se reproche
à lui-même de n'avoir pas encore vengé sa mère, trahie par
Tomillas. Mergelina, couchée à ses côtés, entend ses soupirs et
l'interroge.
LIV DOON DE LA ROCHE
madrine se nomme et ajoute : « tu peux faire dé moi
ton plaisir; si je meurs d'amour, mon âme sera sau-
vée ». — « Dame », répond Landri, « votre père est
mon seigneur; allez vous recoucher ». Salmadrine
consent à se retirer; elle veut cependant que Landri
lui apprenne « un des jeux de France ». Landri répond :
« J'y consens; mais promettez-moi que, le jour de la
Pentecôte, vous prierez votre père de rendre la liberté
à ceux qui sont en prison : je leur pardonnerai, afin
que Dieu m'accorde de me venger du traître Tomile ».
Il consent alors à ce que Salmadrine lui donne un bai-
ser, qu'il lui rend d'ailleurs : ce ne sera pas une honte
pour elle, et, en ce faisant, il ne sera pas parjure à
l'égard d'Alexandre (v. 2671-2750).
La jeune fille se retire. Le lendemain l'empereur fait
venir ses barons, et les Allemands (c'est-à-dire Landri
et les siens) se présentent devant lui. Alexandre offre à
Landri sa fille et la moitié de son « fief », s'il consent à
rester. Landri pleure : il pense à sa mère Olive et à
son père Doon; il ne sait pas que celui-ci est prison-
nier de l'empereur Alexandre (v. 2751-2774).
Il y a grande réunion dans le palais de l'empereur :
les Allemands détiennent la « sénéchaussée » : Jofroi '
et Guinemant portent les éperons; Amauri et Andrieu,
l'enseigne et les épées; Landri, dans sa livrée à croix
d'argent, dirige la foule. Les évêques et les abbés célè-
brent le service divin ; les jongleurs violent et chantent.
Doon, dans sa prison, entend ce bruit insolite; il inter-
roge le « chartrier ». Celui-ci répond qu'il y a aujour-
d'hui grande fête dans le palais de Constantin : le roi
porte sa couronne et donne à ses princes leur « chase-
ment ». Doon se lamente; Asson de Mayence % pour le
I. Il doit y avoir ici une confusion de l'auteur; voir la note sur
le vers 2783.
3. Confusion en sens contraire; voir la même note.
INTRODUCTION LV
consoler, lui raconte un songe qu'il a eu. — Au sortir
de l'église, Landrî et Salmadrine prient l'empereur
Alexandre de mettre en liberté les prisonniers; l'em-
pereur donne l'ordre demandé. Doon est si faible qu'il
ne peut se tenir debout et qu'on doit le porter. Après
qu'il a mangé, on le conduit devant le roi; celui-ci lui
demande son nom, en faisant l'éloge de son courage.
Doon se fait connaître (v. 2774-2855).
Quand Landri entend ce que son père a dit et quand
il reconnaît son maître Guinemant, il tombe à genoux
et se nomme '. Il demande des nouvelles de sa mère.
Doon raconte comment il a été chassé du pays par les
traîtres et attaqué par le roi Pépin; il ne sait ce qu'est
devenue Olive. Landri pleure ; l'empereur lui conseille
de reconquérir plutôt sa terre et de la rendre à son
père, ou à sa mère, s'il peut la retrouver. Salmadrine
intervient, et rappellant que Landri lui a promis le
mariage, el],e menace de se tuer ou de se déshonorer,
si Landri part. Celui-ci la rappelle aux convenances.
L'empereur donne à Landri de l'or et vingt mille
hommes pour l'expédition qu'il doit entreprendre.
Landri marche vers l'Allemagne en traversant l'Italie
et la Maurienne; de son côté, Tomile commence à
garnir ses châteaux (v, 2856-2923).
Sur ces entrefaites, l'évêque Auberi, chez qui Olive est
toujours réfugiée, tient sa cour à « Seine la ville », lors
de la fête de Pâques ; il s'adresse à ses chevaliers, leur
présente Olive et leur raconte comment elle a été chas-
sée de son pays. Revêtu de son étole, il se jette à leurs
pieds et leur annonce son intention de faire la guerre
I. Orson de Beau vais, prisonnier, est délivré de mdme par son
fils Milon [Orson de Beauvais, v. 1818 et suiv., éd. G. Paris).
Bien que les circonstances diffèrent beaucoup, certains détails
sont cependant communs aux deux récits : Orson se lamente
dans sa prison, v. 1751-1757-, une fois délivré, il est si faible
qu'il ne peut rester debout, v. 1804.
LVI DOON DE LA ROCHE
à Tomile : « Seigneurs, aidez-nous». Il réunit ses
« soudoiers » dans un pré hors de la ville. — L'armée
se met en marche ; la duchesse la suit, assise sur une
mule. Ils arrivent devant La Roche ; ils mettent des
troupes en embuscade dans les prés devant la ville,
pendant que, d'autre part, trente chevaliers enlèvent du
butin ' [sous les murs]. Malingre sort de la >ille, suivi
de cent quarante chevaliers; ils réussissent à reprendre
le butin enlevé, mais tombent dans l'embuscade; des
parents de Malingre sont tués. L'évêque Auberi s'at-
taque à Malingre lui-même. Olive, qui tient un bâton
à la main, frappe Malingre à la tête; il s'enfuit avec les
siens; Auberi et ses chevaliers prennent La Roche.
Les chevaliers s'emparent d'Audegour et la présentent
à Olive. Celle-ci veut d'abord la livrer à ses écuyers et
à ses garçons ; mais, sur les supplications de sa rivale,
elle se borne à la faire enfermer dans une prison sou-
terraine (v. 2924-3058).
Pendant ce temps-là, Malingre s'enfuit jusqu'à
Mayence. Il raconte à Tomile sa défaite et la perte de
La Roche. Tomile est d'avis d'offrir la paix à l'évêque
et à Olive, quitte à les empoisonner ou à les assassiner
plus tard. De son côté, Doon, suivi de 20.000 che-
valiers, vient camper devant Sobrie ^ : c'est une ville
qui lui appartient en propre, son père, l'Allemand
Florent, l'ayant jadis conquise sur un roi [païen?].
Doon tient conseil : la puissance de Tomile l'inquiète;
1. Probablement, dans la pensée de l'auteur, du bétail.
2. Ce nom de Sobrie ou Sorbrie est essentiellement propre à la
chanson d'Élie de Saint-Gilles, où la ville est souvent men-
tionnée; en dehors de ce poème, on n'en trouve qu'une ou deux
mentions (voir la Table de M. E. Langlois). Cette ville « lointaine
et fabuleuse » (G. Paris) est tout à fait à sa place dans Élie,
comme centre des aventures également lointaines du héros, mais
elle fait singulière figure dans F, au milieu des noms histo-
riques de Liège, Cologne, Worms, Spire, Mayence, etc. L'emprunt
à Élie de Saint-Gilles paraît certain. . • ■
rv,r INTRODUCTION LVII
Landri se fait fort de prendre la ville, mais Doon
repousse cette idée, ne voulant pas dévaster son propre
territoire. Avant d'agir, il ira, déguisé, avec Jofroi,
parcourir le pays, pour s'assurer de la véritable situation
de Malingre et de dame Olive. Doon et Jofroi partent,
en effet, déguisés en pèlerins; ils entrent dans une forêt
où Doon, du temps de sa puissance, chassait souvent.
A l'issue de la forêt, ils se trouvent dans les terres d'un
maire, Bernard, homme et métayer du duc. Bernard a
dix fils, dont cinq sont chevaliers, et cinq employés sur
les terres de leur père. Malgré ses beaux troupeaux et
ses meutes de chiens, le maire n'a pas le cœur joyeux;
il songe à Doon, son seigneur, qui est absent : il en
parle à son fils aîné. Survient Doon, déguisé, qui re-
connaît Bernard, et il lui demande l'hospitalité pour
lui et Jofroi. Admis dans la demeure, il met Bernard
à l'épreuve; il se conduit exprès d'une façon insuppor-
table : il renverse le dîner qu'on lui offre ou le donne
à manger aux domestiques , surtout il dit sans cesse du
mal de Doon, qu'il traite de couard. Les deux premières
fois, le maire, sur les instances de sa femme, maîtrise
sa colère ; après la troisième incartade du soi-disant
pèlerin, qu'il prend pour un envoyé de Malingre, il le
met à la porte avec son compagnon, malgré la nuit et
le temps affreux qu'il fait (v. 3o59-339i).
Une fois dehors, sous la pluie froide, Jofroi se
lamente; Doon se moque de lui. La femme de Bernard,
entendant les plaintes de Jofroi, obtient de son mari
qu'on fasse rentrer les deux hommes, et leur ouvre
« l'ostel »; elle fait allumer du feu et leur donne des
manteaux. Bernard, toujours en colère, s'avance vers
eux, et reconnaît Doon à un signe qu'il a sur la main.
Doon renonce alors à feindre. Bernard et sa famille lui
font fête; on lui apprend qu'Olive se trouve à La Roche,
d'où elle a chassé Tomile (v. 3392-3479).
Le lendemain matin, Doon et Jofroi revêtent de oou-
LVIII DOON DE LA ROCHE
veau leur costume de pèlerin; accompagnés de cinq
des fils de Bernard, habillés en bergers, ils partent pour
La Roche. Le but de Doon est d'éprouver Olive. Devant
la « salle» fdu palais], le duc rencontre sa femme; il se
donne pour un pèlerin qui chemine, avec ses compa-
gnons, allant de France à Cologne. Olive ordonne à
son sénéchal de les héberger et de leur donner de
l'argent (v. 348o-3553).
Doon se trouve ainsi dans la « salle» de son château;
pendant le dîner, le faux pèlerin dit du mal de Doon, à
la grande indignation d'Olive, qui le rabroue. Le dîner
fini, on fait le lit des pèlerins au milieu de la salle ; le len-
demain matin, avant l'aurore, ils se lèvent et s'arment ',
puis se postent aux fenêtres ; le duc crie « Sobrie ! »,
son « enseigne «(cri de guerre). Olive se désespère;
elle croit que le château a été surpris par des partisans
de Tomile et de Grifon. Dans le bourg, en bas du châ-
teau, les barons s'arment de leur côté, et pénètrent dans
le château, pour châtier les « truants » qui s'y trouvent;
mais Jofroi de Mayence les apaise en révélant que c'est
Doon de La Roche en personne qui est là. Olive, un
peu rassurée, entre dans la salle et interpelle le faux
pèlerin, qui reconnaît qu'il est Doon. Les fils de Ber-
nard ouvrent les portes [du château]; les barons pénè-
trent dans la salle et rendent hommage à leur seigneur ;
mais Olive dit qu'elle ne pourra partager le lit de Doon
tant que Tomile n'aura pas été pris et n'aura pas avoué
ses machinations (v. 3554-3652).
Doon et ses compagnons, armés par Olive *, reviennent
à Sobrie. Devant la ville, ils trouvent Landri, à qui ils
apprennent que sa mère a pris La Roche ; mais il refuse
d'aller la voir avant le châtiment de Tomile. On envoie
1. On ne dit pas où ils ont pris ces armes ; tout cet épisode es
très confus.
2. Notez qu'au v. 3559 i'* étaient déjà arihés.
'■INTRODUCTION tlt
des messages à Sobrie pour faire savoir aux bourgeois
que leur seigneur Doon est devant la ville; ils sont très
joyeux et font sonner les cloches. Les personnages les
plus nobles de la ville s'avancent à cheval pour saluer
Doon; le maire lui adresse la parole et lui ofifre des
vivres pour ses troupes, en vue du siège de Mayence.
Doon refuse ; il a assez de provisions (v. 3653-37i8).
L'armée du duc marche de Sobrie sur Mayence, à tra-
vers un territoire peu fertile. Landri, seul, s'éloigne de
l'armée, assis sur un mulet, pour aller chasser au fau-
con. Il est surpris par deux fils de Grifon [de Haute-
feuille], Hardré et Hélie, au moment où son faucon
vient d'abattre un cygne. Hardré insulte Landri, lui
reprochant de chasser près du vivier de son père Gri-
fon ; il en résulte une querelle et un combat. Hardré
tue le mulet de Landri ; Hélie l'attaque de l'autre côté,
mais Landri le tue. Hardré veut venger son frère, mais
Landri le désarçonne, le lie sur son cheval et l'amène à
Doon, qui le fait pendre devant Mayence (v. 3j 1 9-383 1).
Les troupes de Doon sont devant Mayence. On dresse
des machines de guerre pour battre les murs ; mais la
ville, fondée parles Sarrasins, est forte, et les assiégeants
ne parviennent pas à endommager ses portes d'ivoire '.
Landri jure qu'au besoin il assiégera la ville pendant
sept ans. Malingre fait une sortie avec la meilleure
partie de sa suite armée; mais les hommes de Landri
réussissent à lui couper la retraite. Dans la mêlée, il
I. Nous n'avons pas trouvé ailleurs mention de ces portes
d'ivoire {olifant) de Mayence, qui sont peut-être une invention de
l'auteur. On peut noter qu'à latin du xii' siècle, époque probable
de la composition de F, Mayence était ville ouverte. Pour punir
les bourgeois du meurtre de leur archevêque, Arnold de Seelho-
fen, Frédéric Barberousse avait fait démolir les murs de la ville en
1 163; ils ne furent reconstruits qu'en l'an 1200; voir K.-A. Schaab,
Die Geschichte der BundeS'Festung 3/amf, Mainz, i835, in-8*,
p. 68.
LX DOON DE LA ROCHE
lutte avec son frère, qu'il reconnaît, et est fait prisonnier
par celui-ci '. Le siège de la ville se prolonge. Doon
permet au menu peuple, aux femmes, aux vieillards
et aux enfants de sortir de la ville pendant la nuit ;
après un siège qui dure trois ans et demi, il ne reste
à Tomile que vingt hommes. Quand ils n'ont plus à
manger qu'un poulet, ils se lamentent et veulent aller
demander grâce à Doon et à Landri. Mais Tomile
refuse; il propose de s'enfuir de l'autre côté du Rhin,
en « Saissoigne » (le pays des « Saisnes », Saxons) : il y
reniera la foi chrétienne, puis, aidé des païens, il ter-
rifiera de nouveau ses ennemis. Les autres approu-
vent cette idée (v. 3832-391 5).
Mais Landri fait bonne garde autour de la ville ; il
veille jour et nuit \ Survient enfin l'évêque [Auberi],
amenant un ingénieur, Gillibert, fils d'Henri : celui-ci
construit des machines de guerre qui détruisent cent
quarante toises des murs et brisent les portes d'ivoire.
Mayence est prise. Tomile veut s'enfuir, mais il est
fait prisonnier par Landri. On rend la ville à Asson,
qui en était seigneur jusqu'au moment où il la quitta
pour suivre son maître Doon. Le duc part pour La
Roche, emmenant Tomile (v. 3916-3966).
Après qu'Olive a embrassé son fils, Tomile est pré-
cipité dans la prison [souterraine] où se trouve déjà sa
fille. On dîne dans le palais, puis on fait venir Tomile,
qui avoue son crime, et est pendu par Olive en per-
1. Dans E (fol. d. iij. v"), il y a un combat entre Malindre (=
Malingre) et Enrrique (= Landri), qui le tue d'un coup de lance.
2. Cet épisode, qui ne mène à rien, semble une réminiscence
d'un récit qui nous a été conservé dans E (fol. d. iiij. vo-d. v. r*) :
le traître Tomillas, assiégé, non dans Mayence, mais dans Cologne,
fait creuser un chemin souterrain, qui débouche au dehors ;
au moment où il veut sortir de ce chemin secret, il est surpris
par les gens d'Enrrique, qui campent justement à l'endroit où se
trouve l'issuej il çst reconnu et fait prisonnier.
INTRODUCTION L«
sonne, après avoir été traîné par la ville; le corps est
brûlé. Ensuite, arrive le tour d'Audegour : on la dé-
pouille de ses vêtements, et on la jette dans le bûcher,
qui vient de consumer les restes de son père ; les cendres
sont semées au vent'. Quant à Malingre, on lui coupe
les jarrets '; mais le clergé, par ses supplications,
obtient qu'on lui fasse grâce de la vie : il devient moine
blanc, au cloître de Saint-Pierre (v. 3904-4058).
Doon, suivi de ses troupes, se dirige vers Cologne ;
comme on lui en refuse l'entrée, il assiège la ville et y
lance le feu grégeois, qui incendie des rues entières. Les
bourgeois avaient reconnu Pépin comme seigneur et
lui envoyaient annuellement un tribut; épouvantés, ils
prennent {la résolution d'offrir les clés de la «tour»
à Doon ; l'archevêque et son clergé se présentent devant
le duc, et lui livrent la ville. Doon épouse Olive une
seconde fois à l'église Saint-Pierre ; on célèbre des
noces magnifiques, et Pépin vient y assister. Il embrasse
Olive; quant à Landri, il lui adresse des paroles élo-
gieuses, et il lui promet la Bretagne, l'Anjou, la
Normandie et la « seneschauciée de France ». Mais
Landri refuse : il ne veut rien tenir de son oncle, qui a
abandonné sa mère, accepté les présents de Tomile et
refusé de le recevoir, lui Landri. Une scène violente a
lieu entre l'oncle et le neveu ; Pépin exaspéré par les
reproches de Landri, veut le frapper, mais Asson et
Guinemant le calment; Pépin quitte la ville (v. 4059-
4159)^
1. Dans E (fol. d. vij. v'), Oliva fait tirer à quatre chevaux, sous
ses yeux, le traître Tomillas. Il n'est rien dit du supplice d'Aldigon
(= Audegour).
2. Ce supplice de Malingre rappelle la légende des Enervés de
Jumièges, eux aussi fils révoltés contre l'autorité paternelle.
3. Dans E (fol. d. vj. V), Enrrique, une fois que Tomillas est
pris, a une entrevue avec Pépin et lui adresse des reproches
amers sur sa conduite j mais l'oncle et le neveu se réconcilient
immédiatement après.
LXn DOON DE LA ROCHE
Landri réunit son armée, les hommes de l'empereur
[de Constantinople], et va attaquer Hautefeuille, la
ville de Grifon. La troupe de Landri rencontre celle
de Grifon ; Landri tue celui-ci de sa propre main et
met ses gens en fuite ; il prend ensuite la ville, où il
trouve un riche butin, qu'il envoie à son père (v. 4160-
4191).
Landri croit pouvoir se reposer enfin ; mais il en sera
autrement. Un jour que l'empereur Alexandre de Cons-
tantinople est assis à une fenêtre de son palais, il voit
un beau cygne, qui lui rappelle le vaillant Landri. La
fille de l'empereur paraît; elle demande à son père de
faire revenir Landri, qui lui a promis de l'épouser.
L'empereur envoie en France un messager, Malprin,
qui devra rappeler à Landri ses engagements. Le
messager part et trouve Landri au château de La
Roche. Il lui parle de l'empereur Alexandre et de sa
fille, qui languit d'amour pour lui, et lui présente un
anneau, sur lequel il jura jadis de revenir vers son
pays [Constantinople], dès qu'on le lui présenterait
(v. 4192-4295).
Landri ne sait que faire ; mais son maître, Guine-
mant, lui reproche ses hésitations : « Tu as reconquis
tes terres et vaincu tes ennemis ; ton père et ta mère
se sont réconciliés; tu dois retourner au pays où tu
as pris jadis les armes; l'empereur t'y comblera de dons,
et tu épouseras sa fille ». Landri s'y résout (v. 4295-
4320).
Mais un second messager arrive, messager de
malheur : il annonce que « l'empereres de France » a
été pris à la chasse, avec cent chevaliers de sa suite '.
I. M. Benary rapproche de cet épisode celui de Jean de Lan-
son, où Charlcmagne est surpris et fait prisonnier à la chasse par
le héros du poème (voir l'analyse de P. Paris dans Histoire littér.
de la France, XXIII, 58o).
INTRODUCTION LXIII
Landri ordonne aussitôt qu'on lui apporte ses armes; il
réunit 4000 chevaliers. Pendant ce temps, les « Saisnes »
chevauchent et s'éloignent, emmenant Pépin; [leur roi]
Brohimax reproche à celui-ci la mort de son oncle
Carsadoine, et lui annonce qu'il sera jugé le lendemain
à Trémoigne. Pépin, transporté de colère et de douleur,
brise les cordes qui lui lient les mains ; d'un seul coup
de poing il abat l'un des Saisnes. Ceux-ci tirent leurs
épées ; ils sont sur le point de le tuer, quand Landri,
sortant d'une vallée, les attaque avec ses chevaliers :
Brohimax est tué par Landri ; les Saisnes prennent la
fuite ; les chevaliers [français] se délient mutuellement,
revêtent les armures des Saisnes tués, et montent sur
leurs chevaux; Pépin, notamment, s'empare de l'armure
de Brohimax. Ils se joignent aux compagnons de Lan-
dri : les païens sont mis complètement en déroute, et
les chrétiens ramassent un grand butin. Quand Landri,
l'épée rouge de sang, rencontre son oncle, il lui dit:
« Roi, vous êtes pris ; vous me suivrez à Cologne ;
après vous, c'est moi qui posséderai le trésor de
Paris ». Pépin se résigne à son sort; il descend même
de cheval et tombe aux pieds de Landri. Mais celui-ci
le relève : l'oncle et le neveu s'embrassent (c'était la
volonté de Dieu) et se rendent ensemble à Cologne
(v. 432 1-44 14).
Pépin fait peser trois fois en tin or son corps et son
haubert ; il offre cet or à l'autel de l'église Saint-Pierre,
distribue des dons à ses compagnons, et offre à Landri
cent chevaux. A Cologne, au palais, les barons dînent :
Landri leur annonce que, les traîtres étant punis et
ses parents réconciliés, il partira le lendemain pour
Constantinople, où il a promis d'épouser la fille du
roi Alexandre. Pépin dit qu'il partira volontiers avec
lui; on envoie un messager à Constantinople, pour
annoncer l'arrivée prochaine de Landri et de sa suite
(v. 4415-4461).
LXIV DOON DE LA ROCHE
Le messager arrive à Constantinople ; l'empereur,
apprenant la nouvelle, monte achevai pour aller à la
rencontre de Landri. Rencontre de l'empereur et de
Landri, d'Olive et de Salmadrine. On descend au
palais, où a lieu un dîner magnifique; jeux. L'empe-
reur Alexandre envoie des messagers, pour que tous les
barons de son empire viennent assister aux noces de sa
fille. Tant de barons y vinrent que les noces durent se
faire hors de la ville, dans une grande prairie. En pré-
sence de Pépin, l'empereur Alexandre adresse la parole
à Landri et lui annonce qu'il lui donne sa fille, avec
tout son empire. Le mariage de Landri et de Salma-
drine est célébré par l'archevêque Jean, à la grande
église, en présence des deux empereurs ; Landri et Sal-
madrine sont couronnés au palais, où a lieu une fête
égayée par des ménestrels. Les réjouissances durent
pendant un mois entier; puis l'empereur congédie ses
barons après avoir distribué des cadeaux ; mais Landri
garde près de lui les Français, pour leur montrer ses
châteaux. A la fin, Pépin annonce qu'il est obligé de
rentrer dans son pays ; Landri lui recommande de
vivre en paix avec Doon et Olive; Pépin promet à Lan-
dri le secours de sa « chevalerie », s'il en avait jamais
besoin. On donne le signal du départ et on prend congé;
Olive recommande à Salmadrine son fils Landri. Pépin,
Doon et Olive arrivent à Cologne, où les bourgeois
leur font fête, puis Pépin regagne Paris. Doon et Olive
vivront désormais en paix. Landri et Salmadrine eurent
des enfants qui tinrent à la fois Constantinople et le
domaine qu'avait possédé Olive, et qui furent de bons
chevaliers (v. 4462-4627).
La chanson est finie ; si vous voulez en savoir davan.
tage, adressez-vous ailleurs (v. 4628-4638).
INTRODUCTION LXV
CHAPITRE V
FORMES DIVERSES ET ÉVOLUTION DE LA LÉGENDE ÉPIQUE.
Le sujet de Doon de La Roche nous a été transmis dans
plusieurs versions, on différentes langues.
En français : le présent poème [F).
En espagnol : un récit en prose, Historia de Enrri-
que fi de Oliva {E), que Ferdinand Wolf, bon juge en
ces matières, fait remonter au xiv* siècle. Il a été im-
primé ' à Séville en 1498; cette édition est très rare; j'ai
pu me servir d'une réimpression, faite également à
Séville, en 045, por Dominico de Robertis, et dont la
Bibliothèque Nationale possède deux exemplaires, Rés.
Yd. 238 et Rés. Y\ 818. Une analyse détaillée en a été
donnée par Ferd. Wolf dans son livre intitulé : Ueber
die neuesten Leistungen der Fran:{osen fur die Heraus-
gabe ihrer National Heldengedichte (Vienne, i833),
p. 98-123 ; une autre, plus rapide, mais accompagnée
d'une comparaison suivie avec F, se trouve dans un
mémoire de M. W. Benary ^ que nous aurons souvent
l'occasion de citer (p. 3 1 3-324).
En vieux norrois : la seconde branche de la rédaction
remaniée de la Karlarhagnus-Saga {Ne). Cette bran-
che, qui ne se trouve pas dans la rédaction primitive,
a été traduite peu après 1284, non, comme l'ensem-
ble de la Karlamagnus-Saga, sur un poème français,
1. Voir, sur les éditions, Brunet, Manuel du libraire, II, 988
(5' éd.).
2. Ueber die Verknilpfungen einiger fran^çôsischen Epen,unddie
Stellen des Doon de Laroche, dans Romanische Forschungen,
XXXI, 303-394.
LXVI DOON DE LA ROCHE
mais, ainsi qu'il est dit expressément, sur la traduction
anglaise [perdue] d'un poème français '. Elle a été
publiée par R. C. Unger, dans son édition de la Kar-
lamagnus-Saga {Chv\s,x\3inSi, 1860, p. So-jS); l'éditeur
a donné une analyse, en danois, dans son introduction.
G. Paris a reproduit cette analyse, traduite en français,
dans la Bibliothèque de V Ecole des chartes, année 1864
(5« série, tome V), p. io5 etsuiv., en l'accompagnant de
quelques remarques précieuses. F. Wolf avait donné
une analyse plus sommaire (d'après Gundtvig) dans une
note intitulée : Ueber die Olivasaga, dans les Denk-
schrifien de l'Académie de Vienne, vol. vni (année iSSj)
p. 263-268.
Dans le dialecte des îles Fœroe: un chant populaire
[Na], recueilli et publié, avec traduction danoise, par
V. U. Hammershaimb, dans Antiquarisk Tidskrift,
vol. I**" (année 1846-1848), p. 279-304.
Il existe également, sur notre thème, un chant islan-
dais, mentionné par Hammershaimb dans son article
cité, p. 280.
Quand on compare ces versions, on voit dès l'abord,
qu'elles se divisent en deux groupes : 1°, le poème fran-
çais et le roman espagnol ; 2°, le récit de la Karlama-
gnus-Saga et le chant des îles Fœroe. Les deux ver-
sions septentrionales sont très étroitement apparentées :
comme l'a déjà remarqué M. Benary, elles sont d'ac-
cord, même pour des noms de personnages de second
plan. M. Benary (p. 236 de son mémoire) croit que la
version des Fœroe est indépendante de la Karlama-
gnus-Saga, tout en provenant du même original ; mais
ses arguments sont bien faibles, et une raison décisive
nous porte à admettre que le chant populaire est une
simple réminiscence, plus ou moins fidèle, du récit de la
I. F. Wolf et G. Paris ont noté que cette indication est confir-
mée par l'emploi du mot stevardh, emprunté à l'anglais steward.
INTRODUCTION LXVII
compilation norioise '. Il y a, dans le chant, des altéra-
tions et des transpositions évidentes "" ; en outre, les exi-
gences du style traditionnel des chanteurs des îles ont
amené des développements et des modifications de la
donnée primitive. Pour nous, dans la suite de la discus-
sion, la Karlamagnus-Saga sera l'unique représentant
du second groupe.
Examinons d'abord le premier groupe : le poème
français et le roman espagnol {F et E). Dans les grandes
lignes, E est d'accord avec F\ il doit avoir été traduit
sur une rédaction très voisine de notre texte. Comme
dans F, Oliva est la sœur de Pépin ; la substitution
d'Enrrique à Landri (nom du fils) s'explique facile-
ment : le nom peu connu de Landri a été remplacé
par Enn-ique {= Henrique, Henri], très répandu,
1. En effet, dans ce chant, comme dans la Karlamagnus-Saga ,
Olifa (= Olive) est la fille, non la soeur, de Pépin, et Gharle-
magne, son frère, est nommé dans le couplet 3 (w Karlamagnus
Pippingsson »). Nous verrons plus loin qu'il y a de fortes raisons
de croire que cette modification dans la généalogie d'Olive, ainsi
que l'introduction du personnage de Charlemagne, est le fait,
non du traducteur anglais, mais du compilateur de la Karlama-
gnus-Saga. — Notons que le chant islandais nous présente la
même généalogie, à en juger d'après le titre, donné ainsi par
Hammershaimb (p. 280 de son article) : Landres sémur, sonar
Hugions hertoga a/Englandi, og Olifar, systur Karlamagnus kei-
sara. S. Grundtvig, qui, dans son grand ouvrage intitulé : Dan-
marks garnie Folkeviser (Copenhague, i853), I, 199-201, s'est
occupé de Doon de La Roche, croyait également que le chant était
indépendant de la Karlamagnus-Saga; ses arguments (traduits
par Ferd. Wolf dans sa note déjà citée, Ueber die Olivasaga,
p. 266) ne semblent pas non plus convaincants : ils reposent en
somme sur des raisons de sentiment.
2. C'est ainsi que l'épisode des vêtements donnés à Landri par
son ancienne nourrice, et qui disparaissent par enchantement, est
placé, dans la Karlamagnus-Saga, après la rencontre de la mère et
du fils (analyse de G. Paris, p. iio) ; le chant (couplets 128-1 36)
place cet épisode avant cette rencontre, certainement à tort, car il
se trouve ainsi séparé des autres enchantements de la marâtre.
LXVÏII DOON DE LA ROCHE
dans la péninsule ibérique comme ailleurs. La pre-
mière partie du récit, jusqu'à l'exil d'Enrrique (Landri)
a de grandes analogies avec F\ notons cependant que
Tomilias endort Oliva, non au moyen d'un soporifique,
mais par une carta hecha con muchos conjuras y con
muchos encantamentos (fol. a. iij. V); mais immédiate-
ment avant cet épisode (fol. a. ij. v«>, a. iij.-vo), il est ra-
conté que Tomilias verse à Oliva du vin aparejado con
jrervas^ qui la rend malade, ce qui rappelle le « piment »
dont il est question dans F [y. 169). Cette carta
enchantée, qu'on retrouve dans d'autres récits du moyen
âge % semble ici une interpolation du rédacteur espa-
gnol.— L'homme que Tomilias place dans le lit d'Olive
est un écuyer qui avia se hecho arlote " et s'était costumé
en pèlerin {romero, fol. a. iij. v°); Tomilias l'ensorcelle
au moyen d'un anneau magique [sorteja) et l'oblige à
faire tout ce qu'il veut, — Après sa disgrâce, Oliva se
réfugie, sur le conseil du comte «jJufréde Flandes )),dans
une abbaye de femmes, fondée par le comte (fol. a. vij,
v»), version qui est un affaiblissement évident de ce qui
se lit dans le passage correspondant de F.
La suite du récit présente des analogies avec F, tout
en s'en écartant parfois : Enrrique (Landri) part pour
l'Orient, accompagné du comte «Jufré», déguisé en mar-
chand, qui le présente comme son fils ; un épisode, pro-
bablement interpolé par le traducteur espagnol, lui fait
conquérir Damas et Jérusalem ; il reprend sur les Infi-
dèles la vraie Croix ' (fol. b. ij. v^-vj. v°). Comme dans
1. Voir Gertrude Schoepperle, Tristan and Isolt, Frankfurt,
igi3, I, 257. L'exemple le plus connu se lit dans le quatrième
conte du Dolopathos (éd. Oesterley, p. 58 ; éd. Hilka, p. 64; trad.
franc., éd. Brunet et Montaiglon, v. 7167 et suiv.).
2. Ferd. Wolf, Ueber die neuesten Leistungen, p. loi, traduit
arlote par « vagabond » (landstreicher).
3. Sur les sources du rédacteur espagnol dans cette partie de
son récit, on trouve quelques observations dans Ferd. Wolf,
Ueber die neuesten Leistungen, p. 109.
INTRODUCTION LXIX
Ff il secourt l'empereur de Constantinople contre son
ennemi, V almirante Mirabel, réussit à le vaincre et à
anéantir son armée; l'empereur lui donne la main de
sa fille Mergelina et lui cède l'empire (fol. c. vj. v*). —
Bientôt après ce mariage, Enrrique se rappelle Tomillas
et sa trahison envers Oliva ; avec l'approbation de sa
femme, il organise une expédition pour châtier le traître.
— Sur ces entrefaites, la renommée des exploits d'En-
rrique étant parvenue en France, le pape avait ordonné
au comte de La Roche de reprendre sa femme. Il en
résulte un différend entre le comte et Tomillas, dont la
fille se trouve répudiée; le roi prend parti pour Tomil-
las ; guerre : le comte et Oliva sont assiégés dans La
Roche. — Venu en France avec son armée, Enrrique
trouve ses parents assiégés; il pénètre sous un déguise-
ment dans le château, sans cependant se faire recon-
naître ; puis il attaque les traîtres avec son armée : il
tue de sa propre main Malindre, son demi-frère (fol.
d. iij. v"); Tomillas est pris et supplicié (fol. d. vij. v»)'.
On voit que cette suite d'événements ressemble en
gros à ce qui est raconté dans F, mais en diffère par
bien des détails; la grande différence consiste en ceci
que, dans £*, le rtls, Enrrique (=Landri) passe seul en
Orient, le père restant en France; par conséquent,
Doon n'est pasfaitprisonnier en combattant l'empereur
de Constantinople au service du roi de Hongrie; la
délivrance du père par le fils a lieu dans des circons-
tances tout autres. Cet épisode de la guerre d'Orient,
du combat entre le père et le fils, etc., est-il une
invention de l'auteur de F, ou bien se trouvait-il dans
l'original de E et a-t-il été laissé de côté par le traducteur
espagnol? On pourrait discuter longuement là-dessus,
I. L'innocence d'Oliva est démontrée d'une façon ingénieuse et
compliquée, qui doit être une invention de l'auteur espagnol
(fol. d. V. v), étant en rapport avec la forme spéciale qu'a revê-
tue dans E la machination de Tomillas contre Qliva.
LXX DOON DE LA ROCHE
si une particularité de F ne constituait une preuve déci-
sive en faveur de la première hypothèse. Au moment
où il va raconter le départ de Doon pour la Hongrie,
dont le roi se propose d'attaquer l'empereur de Cons-
tantinople, l'auteur de F dit :
Cil autre jugleor qui de Doon vos dient
Assez en ont chanté, mais il ne sevent mie...
La ou il la vos laissent la vos ai rafichie '.
Tous ceux qui ont quelque peu pratiqué les chansons
de geste connaissent ces sortes de formules et savent ce
qu'elles veulent dire : le poète les emploie quand il
s'écarte de son original et se met à inventer de son propre
crû; ce qui suit est par conséquent une invention per-
sonnelle du trouvère. Nous pouvons donc admettre que
l'auteur de F travaillait d'après un poème plus ancien
et plus simple, qui ne contenait pas l'épisode des aven-
tures de Doon en Orient, et que le traducteur espagnol a
connu, directement ou indirectement, le poème perdu.
C'est là un résultat surtout négatif; mais nous pouvons
aller plus loin. Si la comparaison détaillée de F ex de E
est difficile, puisque nous ne pouvons déterminer avec
précision les détails que le traducteur espagnol a
modifiés, nous voyons cependant que la chanson de
geste et le roman espagnol présentent en gros, en ce
qui concerne Landri, la même suite d'événements : dans
les deux récits, Landri (Enrrique) est aimé de la fille
de l'empereur de Constantinople, auquel il a rendu, à
la guerre, des services signalés; dans les deux récits, il
part de Constantinople avec une armée, pour châtier les
traîtres qui sont cause des malheurs de sa mère. Nous
avons vu que, en ce qui concerne la première partie du
récit — les machinations contre Oliva et la disgrâce de
celle-ci — il y a, à côté de grandes différences, des ana-
I. V. 2409-241 1". Il faut admettre entre les vv. 2410 et 241 1
un vers perdu, où il était question d'une histoire ou d'une chanson.
INTRODUCTION LXXI
logies essentielles entre E et F, qui confirment Thypo-
thèse d'un poème perdu, source commune de F ex de E.
Le groupe des versions septentrionales — qui se
réduit en fait au récit de la Karlamagnus-Sag-a, que nous
désignerons simplement par N — présente des pro-
blèmes plus complexes. — A^, rapproché de F, présente
de grandes différences, surtout en ce qui concerne la
seconde partie du récit, bien que la narration norroise
se termine, comme celle de F et de E, par la réhabili-
tation d'Olive et le châtiment des coupables. — Dans la
première partie du récit, nous avons en somme les
mêmes événements que dans F, mais avec des diffé-
rences de détail ; Olive iOlifa) est la fille, non la sœur de
Pépin; Charlemagne ' joue un rôle dans le récit. Le
mari s'appelle « Hugon » au lieu de Doon; la machi-
nation dont se sert le traître (qui s'appelle ici Milon et
qui a fait à Olive des propositions déshonnêtes qui ont
été repoussées) pour perdre Olive est à peu près la même
que dans F, mais les événements sont racontés d'une
façon plus logique (voir plus loin, p. lxxiii) : l'homme
que le traître place dans le lit est un nègre [bldmann);
les détails qui suivent (offre d'Olive de se soumettre à
un jugement de Dieu, arrivée de Pépin) présentent éga-
lement de grandes analogies. Finalement, Olive est
condamnée à être enfermée pendant sept ans dans une
tour remplie de reptiles venimeux; on lui donne jour-
nellement une cruche d'eau et un pain grossier pour
I. G. Paris {Histoire poét. de Charlemagne, p. 414, note 3)
attribuait ces changements au rédacteur de la Karlamagutts-Saga,
qui aurait voulu rattacher cette branche, comme les autres, au
nom de Charlemagne. Cette supposition nous paraît très vrai-
semblable. En effet, si Charlemagne avait figuré, contime frère
d'Olive, dans le poème primitif, on ne voit pas comment ce nom
célèbre aurait pu disparaître si complètement des versions E et
F, où il n'est pas question de Charlemagne, mais uniquement
de Pépin, moins connu cependant que son fils,
LXXII DOON DE LA ROCHE
toute nourriture. — Hugon épouse la fille du traître,
qui s'appelle ici Aglavia; il en a un fils, Malalandres.
Landri, le fils d'Olive (en norrois : Landres), cherche un
asile chez son ancienne nourrice, Siliven. Sur le conseil
de celle-ci, il se rend cependant de nouveau à la cour,
pour y assister à un jeu de paume, et y faire l'épreuve
de sa valeur; il a une rencontre violente avec son demi-
frère; à la suite de cet événement, il doit s'éloigner
définitivement.
A partir de ce moment, les événements sont tout
autres que dans E et F : errant et aflfamé, Landri
rencontre des nains, auxquels il enlève des objets mer-
veilleux qui procurent à manger et à boire. Les nains,
d'abord hostiles, se réconcilient avec lui et lui prédisent
qu'il trouvera bientôt sa mère, qui est en prison. Il
trouve, en effet, une tour; près d'une petite lucarne,
un oiseau chante ; Landri décoche une flèche à l'oiseau ;
la flèche touche sa mère à la poitrine; elle se lamente
et se fait connaître. Landri ouvre la prison, voit sa
mère entourée de reptiles, la délivre, la réconforte avec
les mets que lui procure la nappe merveilleuse enlevée
aux nains. Sur le conseil d'Olive, il retourne chez sa
nourrice, afin d'aviser aux moyens de réhabiliter sa
mère. Voulant se rendre à la cour de Charlemagne, qui
a succédé à Pépin, il a à lutter contre de terribles
enchantements de sa marâtre, puis à déjouer un attentat
de Milon et de Malalandres, qui veulent le tuer. Fina-
lement, Olive est réhabilitée en présence de Charle-
magne, et Milon enfermé dans la prison qu'elle occupait
naguère et où les reptiles le dévorent. Olive entre dans
un couvent.
En présence de ce récit, si différent de F, nous
devons rappeler d'abord que si la Karlamagnus-Saga
reproduit habituellement des poèmes français que le
rédacteur avait sous les yeux, il en est autrement pour
l'histoire d'Olive et de Landri : le rédacteur travaillait
INTRODUCTION LXXIII
d'après rimitation anglaise d'un poème français. Il y a,
par conséquent, deux intermédiaires : l'imitateur anglais
et le traducteur norvégien; de là une double cause
d'incertitude.
G. Paris, en 1864, fut frappé de la simplicité relative
du récit norrois, comparé à F. « L'original du livre
islandais », écrit-il, « était évidemment plus simple,
plus archaïque et meilleur sous tous les rapports; il
n'avait pas introduit dans son récit ces aventures insi-
pides, dont la scène est en Orient, condition presque
indispensable à tous les romans de la décadence au
moyen-âge ». — M. Benary pense, au contraire, que
la seconde moitié du récit, celle qui contient les aven-
tures personnelles du fils d'Olive, a été modifiée sous
l'influence des contes populaires (p. 324-326 du
mémoire cité ').
Il est évident que la question de la valeur de iVest
très complexe. Certains détails ont été certainement
introduits par le traducteur anglais. Si Gaston Paris
avait écrit sur cette question une étude détaillée, au lieu
d'une courte notice, il eût été le premier à faire remar-
quer que « Mimung», nom d'une épée, et « Kleming »,
nom d'un cheval, n'ont jamais pu se trouver dans une
chanson de geste française : ces noms ont été introduits
dans le récit par le rédacteur norvégien, ou, plus vrai-
semblablement, par le traducteur anglais, qui les a
empruntés à des traditions germaniques.
Pour la première partie du récit, .V a certainement
de la valeur pour la reconstruction de la forme primi-
tive de la légende. Seul, il a bien conservé un détail,
I. M. Benary nomme (p. 3 16 de son mémoire), parmi les traits
folkloriques de N, « un oiseau qui parle ». Mais l'oiseau qui parle
ne figure que dans le chant populaire qui, ainsi que nous l'avons
vu plus haut, n'a pas de valeur indépendante; le récit de la
Karlamagnus-Saga (p. 68, 1. 17 du texte) ne connaît qu'un oiseau
qui chante.
LXXIV DOON DE LA ROCHE
altéré dans E et devenu complètement inintelligible
dansi^. Dans notre poème, Tomile, parlant d'Olive, dit
(v. 199) :
Ele est molt forment ivre, tant a beii piment.
On ne voit pas à quoi rime cette accusation d'ivresse,
portée ainsi contre Olive, que rien n'explique ni ne
prépare. — Dans £", comme nous l'avons noté plus
haut, Tomillas verse à Olive du vin, « préparé avec des
herbes », qui la rend malade ; il l'endort ensuite au
moyen d'une charte magique, ce qui est inutilement
complexe. Seul AT, donne un récit intelligible et logique.
Après s'être réconcilié avec Olive, qui avait d'abord
repoussé rudement ses propositions amoureuses, le
traître (Milon = Tomile) prie la reine de sceller leur
réconciliation en buvant avec lui à un gobelet, rempli
d'un breuvage soporifique. « Il le porte à ses lèvres,
fait semblant de boire; la reine, au contraire, vide la
coupe et tombe aussitôt dans un sommeil semblable à
la mort » (analyse de G. Paris, p. 107). Grâce à cet
engourdissement de la reine, Milon peut mettre à côté
d'elle, dans son lit, un homme, un nègre, qu'il a assoupi
avec le même breuvage. — Ce récit a tout l'air d'être la
version originale : Fa voulu abréger et modifier, il a
laissé de côté la scène de la réconciliation et la première
mention du breuvage, et, ainsi, il est devenu inintel-
ligible; E a voulu mettre, dans le récit, du merveilleux,
de la sorcellerie, et il a introduit la charte magique, qui
fait double emploi avec le vin « herbe ». Cette fidélité
manifeste de A^, pour un détail essentiel, nous inspire de
la confiance en ce qui concerne le reste de son récit,
notamment pour le trait si curieux que l'homme que le
traître introduit dans le lit d'Olive est un nègre.
Les doutes portent surtout sur la seconde partie de
N, récit des aventures de Landri après qu'il s'est
éloigné définitivement de la cour. Il est certain, nous
INTRODUCTION LXXV
l'avons vu, que le traducteur anglais a introduit dans
son récit des noms empruntés aux traditions germa-
niques; les nains, auxquels Landri vole les objets
magiques, n'auraient-ils pas la même origine? On sait
quel rôle jouent les nains dans les récits épiques alle-
mands et Scandinaves. Cependant, il faut remarquer
que les nains ne sont pas complètement absents de
l'épopée française : Picolet, dans la Bataille Loquifer,
est un nain, de même que Pacolet, dans Valentin et
Orson ; Obéron, dans Hiion de Bordeaux, est un nain
secourable. exactement comme les nains mentionnés
dans N. Le trait des objets magiques volés à des êtres
surnaturels n'est pas propre aux Germains ; il appartient
au folklore international, et figure notamment dans un
conte mongol '.
L'utilisation de ce thème des objets magiques se re-
trouve ailleurs dans l'épopée française. Il est question
delà nappe merveilleuse qui fournit des mets dans une
chanson de geste du xiv* siècle, Charles le Chauve \ —
L'épisode où Landri doit lutter contre les enchante-
ments de sa marâtre Aglavia paraît singulier au pre-
mier abord. Cependant les enchantements ne sont pas
rares dans les chansons de geste. On connaît les sorcel-
leries de Maugis; et les enchantements d'Orable, les
« jeux d'Orange », dans les Enfances Guillaume ^ ont
la plus grande analogie avec ceux d'Aglavia dans N.
1. Il se trouve dans la rédaction mongole des Vingt-cinq Contes
du Vetâla : un pauvre diable vole à des dakinis (personnages de
la mythologie bouddhique) un marteau et un sac qui donnent de
quoi manger et tout ce qu'on désire. Voir Mongolische Màrchen-
Sammliing... herausgegeben von B. Jillg, Insbruch, 1868,
in-4<», p. 140-141.
2. Voir l'analyse de P. Paris, dans Histoire litte'r. de la France,
XXVI, 106.
3. Voir Die Chanson « Enfances Guillaume», Teil II, Text
mit Varianten, Apparat, Einleitung und Inhaltsanalyse . . . von
August Becker (Grçifswald, igiS, in-8»), p. 40 et suiv., v. 1874-
LXXVI DOON DE LA ROCHE
Orable est une magicienne sympathique, Aglavia une
magicienne antipathique : voilà la seule différence.
— De même, la prison affreuse, peuplée d'horribles
reptiles, où, d'après N, Olive est enfermée, se
retrouve dans Bovon de Hantone ' et dans d'autres
chansons de geste \ — On pourrait encore faire valoir
que, pour une chanson de geste, A^ a un caractère fort
peu guerrier, vu qu'on n'y trouve pas un seul récit de
bataille. Mais il en est de même pour d'autres chansons
degeste anciennes : il n'y a presque pas d'épisodes guer-
riers dans l'ancienne chanson de geste d'Ami et Amile
publiée par Conrad Hofmann; il n'y en a pas du tout
dans le Pèlerinage de Charlemagne , m dans le poème
de Basin et Charlemagne, que nous connaissons par
1981. Comp. l'analyse de P. Paris dans Histoire littér. de la
France, XXII, 475-477.
r. Voirv. 945 deTédit. donnée par Stimming du texte anglo-
normand. D'autres exemples sont cités par l'éditeur, p. cxl de
l'Introduction; on pourrait allonger cette liste, citer, par exem-
ple, le Moniage Guillaume, édit. Cloetta, 2° rédaction, v. 3 206,
3244; dans F même, Audegour est précipitée dans une
« chartre », où
Coleuvres, boterel li manjoent les flans (v. SgS?).
2. En ce qui concerne le rôle de Siiiven, nourrice et conseillère
du jeune Landri, on peut, à défaut de rapprochements plus
directs, rappeler le rôle que des femmes de toute condition jouent
dans les chansons de geste : c'est ainsi que, dans Hervi de Met^,
V. 1975 et suiv. de l'éd. Stengel, le jeune héros, renié et « fors-
juré » par son père, est protégé par sa demi-sœur, une bâtarde,
qui a épousé un bourgeois de Metz. Du reste, le rôle que joue
Siiiven prouve qu'elle n'est pas d'une condition réellement infé-
rieure. D'après les idées du moyen Lge, la nourrice d'un enfant
de naissance élevée devait être elle-même de bonne naissance ;
voir Roman des Sept Sages, éd. Keller, v. i85 et suiv. Le petit
Arthur, élevé en secret, est confié à la femme d'un homme qui
n'est pas riche, mais dont le fils est plus tard chevalier ; voir
Merlin, éd. G. Paris et J. Ulrich, I, 122, i?3. Le personnage de
la nourrice était certainement dessiné avec plus de soin dans le
roman primitif que dans le résumé qui nous est parvenu.
INTRODUCTION
LXXVII
une ancienne traduction néerlandaise. Certes, les héros
des chansons de geste sont toujours des guerriers; mais
ces récits incessamment répétés de sièges et de batailles,
tels qu'on les trouve dans F et tels qu'on les trouvait
également, bien que moins nombreux, dans l'original
commun et perdu de F et de £", ne sont pas une preuve
d'antiquité ; ils annoncent plutôt la décadence pro-
chaine du genre, où l'épopée dégénère en chronique.
Nous sommes, par conséquent, ramenés à la théorie
de G. Paris. JV reproduit, avec fidélité dans les détails
essentiels, un poème français perdu, ne contenant pas
l'épisode des aventures de Landri à Constantinople,
donc plus simple et plus ancien que le poème, égale-
ment perdu, que postule la comparaison de F et de E.
Désignant par les sigles O' et O' les deux poèmes
français perdus, nous pouvons établir le classement sui-
vant de nos versions :
[trad. anglaise perdue
chant
islandais
chant
des îles Fœroe
On pourrait faire valoir, contre ce classement, que i^
a en commun avec iVdes traits qui ne sont pas dans £",
notamment l'inimitié de Landri et du fils de la marâtre
I. Ce classement est loin d'être assuré pour le chant islandais,
qui a pu être intermédiaire entre N et le chant des îles Fœroe.
LXXVIII DOON DE LA ROCHE
(Malalandres dans N, Malingre dans F) avant l'exil du
premier. Mais il ne faut pas perdre de vue que l'auteur
de E s'est certainement permis de grandes libertés : son
idée de faire entrer Olive dans un couvent (idée <|ui
semble bien propre à un Espagnol dévot) a pu entraîner
des modifications dans l'histoire de la jeunesse d'En-
rrique (= Landri), qui ont fait disparaître la donnée de
l'inimitié précoce entre les deux demi-frères, que l'au-
teur de O* avait conservée.
On pourrait encore objecter que notre hypothèse de
deux renouvellements anciens, qui auraient bouleversé
toute l'économie du poème primitif, n'est guère con-
forme à ce qu'on sait de l'histoire des chansons de geste.
Il est certain, en effet, que beaucoup de « renouveleurs »
de chansons de geste ont respecté le plan original du
poème qu'ils entendaient adapter au goût de leur temps,
et se sont contentés de modifier certains détails; mais
d'autres ont procédé d'une façon plus radicale. On peut
citer le poème d'Ami etAmile, composé au xiv* siècle, et
conservé dans le manuscrit fr. 12547 de la Bibliothèque
Nationale, où les données anciennes ont été complè-
tement remaniées. Si l'on récusait cet exemple comme
trop récent, nous rappellerions, outre le renouvellement
de Berte au Grand Pied par Adenet le Roi, si différent
de l'ancien poème tel qu'on peut le reconstruire, la
seconde rédaction du Moniage Guillaume^ où a été
inséré le long épisode de Sinagon, qui ne se trouvait
pas dans les versions anciennes du poème, et, avant
tout, la Reine Sébile, cette chanson perdue que nous
pouvons reconstituer à l'aide de plusieurs documents
et qui diffère à tant d'égards du poème franco-italien de
Venise, publié sous le titre de Macaire par A. Mussafia
et par Guessard. En effet, si Guessard s'est trompé en
admettant que le poème franco-italien qu'il éditait était
la transcription pure et simple d'une chanson française,
il n'en reste pas moins que ce poème suppose un texte
INTRODUCTION LXXIX
français perdu, plus ancien et plus simple que la Reine
Sébile, et où manquaient des scènes entières et des per-
sonnages qui se trouvent dans le poème plus récent '.
Et ce poème lui-même était relativement ancien, puis-
qu'Aubri de Trois-Fontaines le connaît déjà. Le renou-
vellement supposé de notre poème ne serait donc pas
un cas isolé.
Nous ne devons pas non plus nous étonner de voir la
version primitive de Doon de La Roche entre les mains
d'un traducteur anglais. Le public français d'Angle-
terre était conservateur dans ses goûts littéraires ; il se
plaisait aux formes anciennes des poèmes, tandis que
les renouvellements se succédaient sur le continent.
Fait remarquable : ce sont des manuscrits écrits en An-
gleterre qui nous ont conservé la forme primitive, ou du
moins très ancienne, de la Chanson de Roland, de la
Chanson de Guillaume, du Pèlerinage de Charlemagne,
de Gormont et Isembart. Le récit que nous a transmis
la Kai'lamagnus-Saga est aussi peu exceptionnel par
son histoire externe que par son contenu.
Si nous voulons, après ce classement des versions
conservées de la légende, nous faire une idée de son
développement et de ses origines, nous devons d'abord
nous demander si elle contient un élément historique.
M. Ferdinand Lot a prononcé la parole décisive, dès
1903, quand il a qualifié Doon de La Roche de « com-
position de pure fantaisie '». Cet arrêt d'un spécialiste
de l'histoire carolingienne n'a pas arrêté le zèle érudit
de M. Benary, qui s'est obstiné à chercher dans F des
données historiques. Naturellement, il a fini par trouver
ce qu'il cherchait; mais à quel prix! Il identifie (p. 365
de son mémoire) Landri avec Landfrid, duc des Ala-
1. On n'y voyait pas le jeune Louis prendre les armes pour
venger sa mère ; le larron Grimoard n'y figurait pas non plus.
2. Romania, XXXll (1902), 12.
LXXX DOON DE LA ROCHE
mans, adversaire de Charles Martel en jZo\ plus loin
(p. 374), il tente d'établir l'équation : Landri ■■= Chil-
déric '. — Une théorie qui s'appuie sur de pareils rap-
prochements se condamne elle-même. Les efforts in-
fructueux de M. Benary ne peuvent que confirmer la
manière de voir de M. F. Lot : Doon de La Roche ne
contient d'autre donnée historique que le nom de
Pépin le Bref, qui y figure comme frère de la femme
calomniée de Doon; l'œuvre elle-même est une fiction,
dont nous pouvons analyser les éléments divers.
Le premier élément est l'histoire de la femme inno-
cente, vertueuse, odieusement calomniée, puis humiliée
et maltraitée par suite de cette calomnie. C'est là un
thème fréquent dans la littérature du moyen âge; la
forme du récit qui se rapproche le plus de Doon est
celle qui forme le début de l'histoire de la femme de
Charlemagne accusée d'adultère, telle qu'elle se lit
dans le poème franco-italien (déjà cité plus haut) de
Macaire^. Dans ce poème, comme dans N — nous
avons vu plus haut que, des trois versions essentielles
de Doon, N est la seule qui présente un récit consistant
de la machination — le traître, Macaire, est amoureux
1. Landri provient, comme on sait, du germanique Landric
et est différent de Landfrid. Les efforts pour rattacher Landri à
Childéric (au moyen de formes qui se trouvent dans un manus-
crit franco-italien de Venise!) sont tout aussi vains. Les raison-
nements du savant allemand sur Landri, Plandris et Flandris
(p. 362-364) ne sont pas plus solides; de plus, Jean des Prés,
que cite M. Benary, est une autorité bien tardive et suspecte. Le
mémoire de M. Benary contient d'utiles remarques de détail, mais
toute cette démonstration historique est complètement manquée.
2. Le rapprochement a déjà été indiqué par G. Paris, La litté-
rature franc, du moyen âge, § 27 (5« édit., Paris, 1914, p. 5o) et
par M. Benary, p. 3 14, n. i. — La forme du récit, telle qu'elle se
trouvait dans le poème plus récent de la Reine Sébile (œuvre
perdue, mais qu'on peut reconstituer pour le fond) est altéré,
ainsi que l'a déjà vu M. Pio Rajna, Origini delV epopea francese
(Firenze, 1884), p. 180-182.
INTRODUCTION LXXXI
de la reine et lui fait des propositions déshonnêtes,
qu'elle repousse ; il les fait renouveler par un nain ; la
reine manifeste son indignation et frappe même le nain
violemment; Macaire persuade à celui-ci de se glisser
dans le lit de la reine. La conséquence est que Charle-
magne, trouvant le nain dans le lit de sa femme, croit
celle-ci coupable ' ; plus tard, Macaire lance le nain
dans le bûcher allumé destiné à la reine. Le trait essen-
tiel, que le mobile du traître est la fureur de l'amant
repoussé, trait qui se trouve à la fois dans Macaire et
dans N, s'est complètement obscurci dans E et F. On
retrouve de même dans les deux récits, Macaire et N,
ce détail, que le calomniateur sait présenter comme
amant de la reine un individu qui doit inspirer du
dégoût à une femme normalement constituée, un
nain dans Macaire, un nègre dans N, et aggrave
ainsi la culpabilité de sa victime. — Ce trait du nègre,
I . Macaire, édit. Mussafia, Altfran:[ôsiscke Gedichte (Wien, 1864),
II, p. 8; édit. Guessard (Paris, 1866), p. 28. La version du poème
franco-italien est confirmée, pour l'essentiel, par le poème moyen-
haut-allemand de Schondoch (xiv« siècle), la Reine de France,
dans lequel le nain est un instrument absolument inconscient du
traître, le « maréchal » {marschal, v. 55- 102, dans Schondochs
Gedichte, éd. H. Hertz, p. 82-86, Breslau, 1908, in-8'> [Germa-
nistische Abhandlungen, fascic. 3o]) : le roi, averti, tue le nain.
— Le nain est moins innocent dans le miracle dramatisé de la
Vierge, Miracle de la Marquise de la Gaudine, dans Miracles de
Nostre Dame, éd. G. Paris et U. Robert, II, p. i32-i39, où l'action
présente du reste de grandes analogies avec les deux récits pré-
cédents. — Plus altérés sont les épisodes analogues d'Octavian,
éd. Vollmôller (Heilbronn, i883, in-8«), v. 193-281 (le « garçon »,
est tué par le mari), et de Florent et Octavien, chanson de geste
du XIV* siècle (Bibl. Nat., ms. fr. 1432, fol. 5b-6b ; comp. l'ana-
lyse dans Hist. littér. de la France, XXVI, 3o4j-, ces deux œuvres
reproduisent une chanson de geste perdue du xii* siècle, remplie
de réminiscences. Même récit, italianisé, dans les Reali di
Francis d'Andréa da Barberino, 1. Il, c. 42 (édit. Gamba,
p. 181; édit. Vandelli, U, 2, p. 178-179).
f
LXXXII DOON DE LA ROCHE
dans N, est remarquable. Les nègres n'étaient certai-
nement pas communs en Europe au xii* siècle; d'autre
part, ce détail rappelle immédiatement les récits des
Mille et une Nuits, dans lesquels des femmes blan-
ches, plus ou moins haut placées, sont accusées, à
tort ou à raison, de relations coupables avec des
esclaves nègres. — Notre thème serait-il par hasard
d'origine orientale, arabe? Nous n'avons pas réussi
à trouver, dans les traductions des contes et nouvelles
arabes qui sont à notre disposition, un récit correspon-
dant exactement à celui de iV; cependant dans un récit
bien connu des Mille et un Jours, VHistoire de Rep-
sima, appartenant au cycle de la « femme chaste con-
voitée par son beau-frère », on peut signaler le thème
de l'amant repoussé, qui introduit, dans la chambre [à
coucher?] de la femme qu'il veut perdre, un homme
destiné à jouer le rôle d'amant ' surpris avec la femme,
en réalité innocente ; seulement, cet amant n'est pas un
nègre. — Jusqu'ici nous n'avons pas réussi à trouver
dans les traductions de contes arabes, ou arabo-persans,
quelque autre récit, présentant une analogie plus pré-
cise avec le groupe de récits occidentaux que nous
avons signalés, et notamment avec N; un autre sera
peut-être plus heureux.
1 . Les Mille et un Jours, édit. du « Panthéon littéraire », p. 266.
Même récit, traduit d'après un recueil persan, Al Farag Ba'da
Alsidda, par A. Wailenskôld, dans son mémoire intitulé : Le
Conte de la femme chaste convoitée par son beau-frère (dans Acta
Societatis Scientiarum Fennicae, t. XXXIV, n» r, p. loi). Le récit
persan diffère par les détails du récit des Mille et un Jours et
est, à bien des égards, absurde ; il est possible que Pétis de
Lacroix et Le Sage, rédacteurs des Mille et un Jours, l'aient
arrangé. Malgré les incertitudes qui planent encore sur la source
(ou les sources) des Mille et un Jours, M. Wailenskôld (p. 18 de
son mémoire) croit cependant que, en ce qui concerne notre récit,
les rédacteurs français ont puisé à une source différente du
recueil persan. .-{ ,i: ,.i ,i,,^„..., ,
INTRODUCTION LXXXIII
Mais, dans Doon de La Roche — c'est toujours la
rédaction iVque nous avons spécialement en vue — ce
thème de la femme calomniée ne forme que le début du
récit; le reste de l'histoire appartient à un autre thème,
qu'on peut désigner comme celui de « la femme persé-
cutée, maltraitée pendant des années, finalement déli-
vrée et vengée par son enfant [ou ses enfants] ». En
effet, dans A^, nous voyons Olive enfermée pendant des
années dans une prison effroyable, avec un pain gros-
sier et une cruche d'eau pour toute nourriture ; c'est
son fils Landri, devenu grand, qui l'en tire et qui
la venge en châtiant les traîtres qui la persécutaient.
— Dans la version de F, il n'est pas question de prison :
Olive est réduite à une position humiliée et précaire;
elle perd ses droits d'épouse et est réléguée dans une
maison située hors de ville, où elle vit dans la misère,
avec son jeune enfant, qu'on considère comme bâtard ;
pour sa nourriture, on ne lui donne que deux pains
par jour (v. 5 14 et suiv.). Tout cela a l'air d'une ver-
sion adoucie du récit primitif '.
I. Dans F, aux v. 902 et suiv., Audegour, la seconde épouse de
Doon, accuse celui-ci de continuer à entretenir des relations avec
sa première femme répudiée : Ain:^ maintenez a tort dame Olive
de France , Chascun jor i gisie:^ quant il vous atalente. M. Benary
considère ce trait d'une sorte de bigamie comme primitif et ar-
chaïque (voir p. 365-366 de son mémoire). Mais il faut remarquer,
d'abord, que, dans ce vers, ce n'est pas le poète qui parle en son
propre nom : il fait parler Audegour en fureur, disant du mal
d'une rivale. Ensuite, il faut rapprocher ce propos d'autres pas-
sages du poème, où Audegour accuse Olive de vivre en prostituée
(v. 91 5 et suiv., 930-931, 945 et suiv.). De môme, Tomile avait
essayé de faire croire à Pépin qu'Olive s'abandonnait à tous les
hommes qui la désiraient (v. 58 1 et suiv.). Le véritable sens de
l'accusation d'Audegour aux v. 902 et suiv., est, par conséquent,
que Doon est un des nombreux amants de sa première femme,
devenue une vraie courtisane. Interprétés ainsi, à la lumière
d'autres passages de la chanson, les vers qu'invoque M. Benary
ne se rapportent plus à une véritable bigamie, et ils perdent le
caractère que leur donnait l'explication du savant allemand.
LXXXIV DOON DE LA ROCHE
La version de E, où Olive se fait religieuse, s'écarte
encore davantage de la version originale. Celle-ci,
conservée, à notre avis, dans N, nous présente net-
tement le thème de la « mère persécutée, sauvée et
vengée par son fils ». Ce thème, fort ancien ' et qui
tient aux sentiments les plus profonds de la nature
humaine, a pu être réinventé au cours des siècles; nous
croyons cependant que l'auteur du poème primitif sur
Doon de La Roche [O') avait présent à l'esprit une version
d'un conte extrêmement répandu — on l'a noté depuis
l'Europe occidentale jusque dans l'Archipel indien — ,
où une jeune femme odieusement calomniée (le plus
souvent par des sœurs, jalouses de son bonheur) et par
suite soumise à des traitements indignes, est finalement
sauvée et réhabilitée par ses enfants devenus grands,
ce qui entraîne, dans les versions bien conservées, le
châtiment des personnes qui avaient calomnié la mère *.
Il est certain que ce conte était connu en France au
XII* siècle : des données essentielles empruntées à ce
récit ont été combinées avec celles d'un autre conte
pour former la première partie du poème du Chevalier
au Cygne *. Le trait commun à ces récits est avant tout
le traitement abominable infligé à la mère calomniée :
dans un conte syriaque, noté d'après la tradition orale
I . Nous nous bornerons à citer, pour l'antiquité grecque, l'his-
toire d'Antiope et de ses fils, Amphion et Zéthos, sujet d'une tra-
gédie perdue d'Euripide, dont on possède un schéma détaillé et
dont des fragments assez étendus ont été trouvés, il y a une tren-
taine d'années, en Egypte. A. D'Ancona, Sacre ,Rappresenta\ioni
(Firenze, 1872), 111, 319, a cité l'histoire de Tyrô et de ses fils,
thème d'une tragédie perdue de Sophocle.
2. Voir E. Cosquin, Contes populaires de Lorraine, I, n" 17; le
recueil des frères Grimm, n» 96; J. Boite et G. Polîvka, Anmer-
kungen :{U den Kinder- u. Hausmàrchen der Brader Grimm, II
(Leipzig, 1913), 380-394; Revue d'ethnographie et de sociologie,
année 1910, p. 210 et suiv., et année 191 1, p. 189 et suiv.
3. Voir Romania, XXXIV, 206 et suiv.
INTRODUCTION LXXXV
par Galland et inséré par celui-ci dans sa traduction des
Mille et une Nuits, elle est exposée en public à une
porte, et chaque passant doit lui crachera la figure;
dans un conte russe, elle est emmurée. Dans la version
primitive de la chanson de geste sur la Naissance du
Chevalier au Cygne, que nous a conservée le Dolo-
pathos latin de Jean de Haute-Seille, la mère est con-
damnée à être enterrée jusqu'aux mamelles dans la
cour du château de son mari, où les gens du château
doivent se laver les mains au-dessus de sa tête et les
essuyer à ses cheveux '. Dans notre hypothèse, la tour
terrible où Olive est enfermée est l'équivalent de ce
supplice naïvement barbare; et l'on peut noter que,
dans des rédactions plus récentes du Chevalier au
Cygne, le supplice décrit par la version primitive est
également remplacé par une dure prison '.
Dans le conte, les enfants, qui ont été exposés, une fois
devenus grands, sauvent et réhabilitent leur mère. Ce
trait est clairement marqué dans la version N de Doon,
où c'est Landri qui tire Olive de sa prison et amène la
punition des traîtres; dans E et F, les événements sont
1. Johannis de Alla Silva Dolopathos, éd. Hilka, p. 82, 1. 36-
3o; traduction française de Herbert, Roman de Dolopathos, éd.
Brunet et Montaiglon, v. g5o8 et suiv.
2. La Chanson du Chevalier au Cygne, éd. Hippeau, t. I,
V. 277 et suiv.; Le Chevalier au Cygne, éd. ReifFenberg, I, p. 34,
V. 696 (la prison est très adoucie). Dans le résumé latin d'une
version française perdue (omit, cité, 1, p. 186) la mère est préci-
pitée dans un puits profond et horrible. — Un récit analogue à
celui du Chevalier au Cygne fait le fond du Miracle du Roi
Thierry (voir Miracles de Nostre Dame, éd. G. Paris et U. Robert,
VI, 257 et suiv.) et de la seconde partie du roman de Theseus de
Cologne (on a remarqué depuis longtemps que ces deux œuvres
doivent avoir une source commune) : on y retrouve la mère
calomniée et la dure prison. — D'autre part, le supplice de l'en-
terrcmeni à mi-corps de la femme innocente se retrouve dans la
chanson de geste d'Orsow de Beauvais (éd. G. Paris, v. 833 et
suiv.), mais les circonstances diffèrent complètement.
LXXXVI DOON DE LA ROCHE
plus compliqués et le thème primitif s'est quelque peu
obscurci; cependant, dans ces deux récits, c'est Landri,
le fils, qui prend l'initiative de l'expédition destinée à
châtier les traîtres qui ont fait le malheur de sa mère
[E, fol. c. VI, v"; F, V. 2643 et suiv.). Dans toute cette
partie décisive du récit, c'est le fils d'Olive qui agit et
commande (voir F, v. 2918) et non l'époux : au milieu
de toutes sortes de complications, nous retrouvons dans
les versions E et Fia. donnée de iV, qui est également
la donnée du conte populaire et du Chevalier au
Cygne " : la mère réhabilitée par ses enfants (ou son
enfant).
Voici comment a dû procéder l'auteur du poème
primitif (O'), que nous pouvons restituer en gros par
N . Connaissant le récit populaire, il le transforma en
récit épique, en remplaçant par la prison le supplice
singulier de la mère relaté par le conte ''. Il transforma
de même la suite des événements, d'un merveilleux
bizarre, qui, dans le conte, amènent la délivrance de la
mère, en une suite d'actions vaillantes du fils unique,
1. Dans la version primitive de la chanson, conservée par le
Dolopathos, cette donnée s'est quelque peu obscurcie, par suite
de la contamination du conte avec un autre, celui des frères
transformés en oiseaux; on peut cependant noter que la sœur
des frères métamorphosés se met en rapport avec la mère mal-
traitée et que c'est elle qui, en attirant l'attention du père, amène
le dénouement, la délivrance de la mère et la punition de la
belle-mère coupable. Dans le groupe des versions plus récentes,
que G. Paris appelait Béatrix (voir Romania, XIX, 1890, p. 323
et suiv.), ce n'est plus la fàlle, c'est un des fils qui joue le rôle
principal. Ainsi que l'a remarqué G. Paris (article cité, p. 323,
noie 2), le thème de la mère réhabilitée par le fils se retrouve
encore dans la première partie de Doon de Mayence. Enfin, on
peut citer encore, comme un exemple de ce thème du fils ven-
geant sa mère, le poème plus récent sur « la Reine de France
calomniée », la Reine Sébile (rôle du jeune Louis, fils de Sébile).
2. Cependant nous avons vu que, dans un conte russe, la mère
est emmurée, ce qui ne diffère pas beaucoup de la prison.
INTRODUCTION LXXXVIÎ
qui remplaçait les deux fils et la fille qui figurent dans
les versions bien conservées du conte. II emprunta les
détails de ces actions, soit à la tradition populaire
(l'objet magique volé aux nains), soit à d'autres chan-
sons de geste (les enchantements de la marâtre), ainsi
que nous l'avons exposé plus haut. Quant au début du
récit, comme la version du conte ' (la mère accusée
d'avoir mis au monde des chiens) lui paraissait par
trop enfantine, il la remplaça par l'histoire de la femme
accusée faussement d'adultère et du pseudo-amant
introduit dans le lit, histoire alors répandue et qui
était peut-être, ainsi que nous l'avons indiqué plus
haut, un thème international, d'origine arabe.
Ce poème primitif (0'), dont l'action se retrouve,
quant aux données essentielles, dans iV, fut profondé-
ment remanié, surtout en ce qui concerne la seconde
partie (les aventures du fils) : le résultat de ce remanie-
ment fut le second poè-me perdu [O'), dont E nous a
conservé les lignes principales. L'auteur de ce poème
jugeait que le rôle du jeune Landri était à la fois trop
fantastique et trop peu développé : afin de pouvoir y
introduire les aventures lointaines et les récits de guerre
qui lui plaisaient ^, il fit intervenir un autre thème,
que M. Benary (p. 368 de son mémoire) appelle celui
de « l'exil » et qui a été défini, avec une heureuse préci-
1. Qu'on retrouve dans le Chevalier au Cygne, le Miracle du
Roi Thierry et Theseus de Cologne.
2. Ceci se rapporte à la seconde partie du poème; quant à la
première, les malheurs de la mère, il est difficile de s'en faire
une idée nette, le rédacteur espagnol ayant beaucoup changé. II
est cependant probable que l'adoucissement des données primi-
tives et barbares du récit, en ce qui concerne le traitement infligé
à la mère calomniée, adoucissement nettement marqué dans F,
était déjà indiqué dans O". Un pareil adoucissement des données
primitives se retrouve dans le poème sur la Naissance du Che-
valier au Cygne, publié par Todd, quand on le compare au récit
archétype, que nous a conservé le Dolopathos.
LXXXVIII DOON DE LA ROCHE
sion, par G, Paris, à propos de la chanson de geste pro-
vençale de Daurel et Béton \
Le jeune homme inconnu qui, chassé par un malheur
quelconque de son pays, grandit à la cour d'un roi étranger,
s'y distingue par ses exploits, se fait aimer de la fille du roi,
et revient, d'ordinaire avec l'aide de ce roi, pourtirer ven-
geance de ses ennemis, est un thème fréquent dans notre
épopée : nous le trouvons dans Mainet, dans Jourdain de
Blaie, dans Or son de Beauvats, dans Bovon de Hanstone,
dans le poème tout saxon de Horn; il rappelle les aventures
prêtées à Childéric parles légendes franques.
Si l'auteur de O* envoie le jeune Landri chercher for-
tune à Constantinople, c'est là une conséquence de
l'attrait que l'antique Byzance exerçait sur l'imagination
des romanciers du xii° siècle *. Le rôle que i^ attribue
à la fille de l'empereur et qui se retrouve, bien que
d'une façon moins prononcée et moins choquante,
dansjE", est fréquent dans les chansons de geste, quand
il s'agit de jeunes filles amoureuses, qu'elles soient
chrétiennes ou sarrasines : elles font les avances avec la
plus grande facilité (qu'on se rappelle Seneheut dans
Auberi le Bourgoin, Oriente dans Orson de Beauvais,
et surtout Belissent dans Ami et Amile). Dans E aussi
bien que dans F, le fils de la femme persécutée, après
avoir rendu à l'empereur de Constantinople par son
courage des services signalés, revient dans son pays
1. Mélanges de littérat . française du moyen âge, p. 145-146. —
G. Paris, qui a oublié de parler du rôle de Landri dans notre
poème, ne parle pas non plus de Parise la Duchesse, où l'on
trouve manifestement le même thème; il est vrai que le jeune
Huguet, dans Parise, s'il amène des troupes avec lui, ne doit pas
ces troupes à son beau-père ou futur beau-père, mais cela ne fait
pas grande différence.
2. M. Benary remarque qu'il est déjà question de Constan-
tinople dans des récits sur Childéric.
INTRODUCTION LXXXIX
avec une armée pour châtier les traîtres '. Nous
sommes obligé de nous en tenir à ce schéma som-
maire, le rédacteur espagnol ayant probablement
modifié et ajouté bien des détails; il est cependant assez
probable que l'épisode final, où l'on voit Doon et Olive
assiégés par Pépin et Tomile dans La Roche, et
délivrés par Landri (= Enrrique), se lisait déjà dans le
poème français (O').
C'est sur ce poème qu'a dû travailler l'auteur du
poème conservé, F. Celui-ci était évidemment d'avis
que, dans l'œuvre qu'il avait sous les yeux, le rôle du
père de Landri, Doon, qui cependant donnait, déjà
anciennement, son nom à toute la chanson*, était trop
sacrifié, et il résolut de le relever. Il modifia par consé-
quent l'action : au lieu d'être assiégé dans La Roche par
Pépin, comme dans 0% Doon, dans F, est chassé de ses
domaines par le même Pépin ; obligé de vivre de son
épée, il prend du service à l'étranger, chez le roi de Hon-
grie, et se trouve ainsi mêlé à la guerre entre ce roi et
l'empereur de Constantinople, qui, de son côté, a à son
service Landri, le fils de Doon. Il en résulte l'épisode
où le père et le fils se combattent sans se reconnaître,
situation souvent traitée dans les littératures du moyen
âge depuis le Hildebrandlied ', de même que la scène
où le fils délivre, sans le savoir, son père d'une longue
et dure captivité, se retrouve ailleurs*. — Ces dévelop-
1. Dans E, Enrrique (= Landri) est à ce moment le gendre et
même le successeur de l'empereur ; dans F, Landri est le fiancé
de la fille de l'empereur.
2. Ceci résulte du passage de V Ensenhamen de Guiraut de
Cabrera, que nous citerons plus loin.
3. R. Kôhler et G. Paris en ont réuni de nombreux exemples ;
voir R. Kôhler, Kleine Schi-iften, II (Berlin, 1900), 263. — Il
faut bien avouer que, si l'auteur de i^a ainsi mis la main sur des
situations émouvantes, il les a traitées d'une façon médiocre.
4. L'épisode où le fils délivre le père emprisonné se retrouve,
sous une forme bien meilleure, dans Oison de Beauvais, ainsi
XC " DOON DE LA ROCHE
pements obligèrent l'auteur de F à modifier par contre-
coup le rôle de Landri : dans 0\ Landri assistait l'em-
pereur de Constantinople une fois, contre les Sarrasins ;
dans F, il l'assiste deux fois, la première fois contre les
Sarrasins, la seconde fois contre le roi de Hongrie.
Pour gagner de la place, et afin de pouvoir plus tard
raconter en détail la seconde guerre, l'auteur de F a
réduit à une mention sommaire le récit de la guerre
contre les Sarrasins, qui, du moins à en juger d'après
l'espagnol, était raconté longuement dans O'; tout l'in-
térêt se porte chez lui sur la guerre contre les Hongrois,
et la défense de l'empire contre Dorame, roi de Hon-
grie, devient le service signalé rendu par Landri à
l'empereur de Constantinople. Mais, encore une fois,
toutes ces modifications sont la conséquence de l'im-
portance du rôle donné au père de Landri.
Nous retrouvons cette préoccupation dans les scènes
où Doon se rend, déguisé, dans ses terres, pour mettre
à l'épreuve la fidélité de son vassal, le maire Bernard,
et surtout celle de sa femme. On sait que ce thème du
mari rentrant chez lui, déguisé, après une longue ab-
sence, est très ancien : il remonte à V Odyssée. Au
moyen âge, et dans le cycle carolingien, on le retrouve
dans le récit fantastique du voyage de Gharlemagne à
Paris, inséré dans le poème de la Spagna, et qui pour-
rait bien remonter à un poème épisodique français
perdu'. Ici encore, l'auteur de F est peu original pour
que Ta remarqué M. Benary (p. 333 de son mémoire), qui a
noté également que le « maître » du jeune Milon dans Orson
de Beauvais, Guinement, porte le môme nom que le « maître» de
Landri dans F.
I. Voir G. Paris, Histoire poétique de Charlemagne, p. 398.
Le fait que ce récit est « aniorcé » dans VEntrée d'Espagne (éd.
Thomas, v. 643 et suiv.) confirme singulièrement l'hypothèse de
G.Paris. Voir aussi N eophilologiis ,\\\ (1917-1918), 245, 246. On
peut encore songer à l'épisode de « Tristan fou » dans différentes
versions de Tristan; mais Tristan n'est pas le mari d'Iseut.
INTRODUCTION XCI
le fond de son invention. Afin de maintenir Jusqu'au
bout l'importance attribuée au personnage de Doon, il
lui attribue l'initiative du siège de Cologne, ville qui
joue du reste, dans F, un tout autre rôle que dans
jE*, où elle est aux mains deTomile, tandis que dans F
les habitants ont juré fidélité à Pépin.
Un épisode entièrement de l'invention de l'auteur de
F est celui qui nous montre le roi Pépin, fait prison-
nier à la chasse par les « Saisnes » et sauvé, grâce à
l'intervention rapide et courageuse de Landri, interven-
tion d'autant plus méritoire que le roi s'était fort mal
conduit à l'égard de la mère de Landri, qui était pour-
tant sa sœur, et à l'égard de Landri lui-même. Il semble
bien (quoique la chose ne soit pas clairement expliquée
dans E) que, déjà dans O', Pépin se laissait corrompre
par Tomile pour donner son consentement au mariage
de la fille de celui-ci avec Doon ; il y avait également
(voir plus haut, p, Lxr, note 3) une scène assez violente
où Landri victorieux faisait à Pépin des reproches sur
sa conduite. C'est cette scène qui a donné à l'auteur de
F ridée d'ajouter l'épisode de Pépin tombé au pouvoir
des « Saisnes » et sauvé par Landri', On reconnaît
dans cette invention l'esprit féodal, qui aime à opposer
au roi faible, lâche ou même félon, le dévouement et le
courage du vassal, qui sauve le monarque indigne en
quelque sorte malgré lui ; on peut citer notamment le
Couronnement de Louis, ou plutôt l'ensemble des chan-
sons sur Guillaume d'Orange, qui ont pour idée fonda-
mentale, ainsi que l'a montre M. Bédier% l'antithèse
1. Cet épisode est du reste très maladroitement amené, car on
ne voit pas bien comment le roi, rentré en France au moment où
il se querelle avec Landri (v. i3ig et suiv.), se trouve subite-
ment près du Rhin (v. 4328 et suiv.), exposé à un coup de main
des Saisnes, qui sont fixés de l'autre côté du fleuve et qui le tra-
versent pour aller surprendre Pépin à la chasse.
2. Les Légendes épiques, I (i'« édition), 280.
XCII DOON DE LA ROCHE
entre le roi, perpétuellement représenté comme un être
lamentable, et le vassal, perpétuellement glorifié. Ici
encore, l'auteur de F reste bien au-dessous de ses
modèles.
Nous pouvons encore signaler un épisode qui tient
du lieu commun dans une partie antérieure du poème
(v. 171 3 et suiv.) : c'est celui où les bourgeois de Colo-
gne, après la plainte portée par Gonteaume, se mettent
en mouvement contre Tomile et Malingre, qui se sont
emparés des « dromadaires » des messagers de l'empe-
reur de Gonstantinople, auxquels Gonteaume avait
accordé l'hospitalité. Il est assez probable ' que nous
sommes ici en présence d'une invention de l'auteur de
F. Quel que soit l'auteur de l'épisode, il n'a pas fait
preuve d'une bien grande originalité. Nous avons déjà
dit plus haut que ce soulèvement des habitants d'une
ville contre un chevalier qui, à leurs yeux, s'est mal
conduit, est une sorte de lieu commun, qui se trouve
dans d'autres chansons de geste et même dans le
Conte du Graal de Chrétien de Troyes. — L'évêque
guerrier Auberi, oncle d'Olive, nous représente le type
ancien du prélat féodal et guerrier; c'est une copie
affadie du Turpin de la Chanson de Roland.
Le classement des versions, tel que nous le propo-
sons, diffère notablement de celui de M. Benary'; cette
différence est la conséquence naturelle de nos diver-
gences d'appréciation, surtout en ce qui concerne la
valeur de la version N. Notre système a sur celui du
savant allemand l'avantage d'une plus grande simpli-
cité ; il suppose moins de versions perdues. La partie
1. J5 ne contient rien qui corresponde â tout ce récit de l'envoi
des messagers et de leurs aventures ; mais il faut toujours se
rappeler que l'auteur de E se permet de grandes libeités avec
son original.
2. Voir le tableau généalogique des versions, p. 328 du mé-
moire de M. Benary.
INTRODUCTION XCIII
de notre théorie relative à l'origine folklorique du
thème est naturellement une hypothèse' ; mais si notre
tableau généalogique des versions est juste, Doon de la
Roche offre un exemple remarquable des formes di-
verses, de plus en plus compliquées, que peut revêtir
un thème de chanson de geste *.
Nous avons jusqu'ici négligé de propos délibéré un
témoignage dans lequel on pourrait voir le reflet d'une
version perdue de Doon de La Roche, différente de
toutes celles que nous connaissons, mais qui nous
semble plutôt une fantaisie individuelle de jongleur. Il
s'agit de passages relatifs à Doon et à sa femme Olive
qui se lisaient dans un renouvellement de la chanson de
Doon de Nanteuil, actuellement perdu, mais dont le
président Fauchet a pris des extraits qui ont été publiés
par Paul Meyer *. On y lit (p. 22 de l'article de
P. Meyer) :
1 . On pourrait encore supposer que l'auteur du poème arché-
type avait présent à l'esprit, non le conte populaire lui-même,
mais la forme primitive de la Naissance du Chevalier au Cygne,
conservée dans le Dolopathos et dans laquelle, comme nous l'avons
vu, ce conte est utilisé et modifié : la coïncidence curieuse que
la sœur des frères métamorphosés en cygnes va visiter sa mère,
enterrée à mi-corps dans la cour du château, de même que Lan-
dri, dans N, découvre sa mère dans la prison affreuse où elle a
été enfermée, serait un argument à l'appui de cette façon de
voir. Mais la chanson primitive de la Naissance du Chevalier au
Cygne était-elle antérieure au Doon de la Roche primitif?
2. On pourrait objecter à notre théorie que, F étant probable-
ment antérieur à l'an 1204, et notre classement postulant deux
poèmes français perdus, le poème primitif devrait vraisembla-
blement se placer avant ii5o. Cela peut paraître une date bien
ancienne pour une chanson qui ne contient aucune donnée his-
torique. Mais on pourrait répondre en citant l'exemple de la
chanson archétype d'Ami et Amile, qui ne contient pas non
plus d'éléments historiques et qui n'en est pas moins fort an-
cienne, probablement antérieure à l'an iioo (voir J. Bédier, Les
Légendes épiques, II, 179).
3. Remania, XIII (1884), 1-26.
XCIV DOON DE LA ROCHE
Olive, seur de Charles, fut mariée a Doon de la Roche,
seigneur de Frize (?), et fut séparée de lui, puis espousée par
Bertran, fils de Naismes.
Et plus haut, p. 21 :
Bertran, fils de Naismes, espouse Olive, fille de Pépin,
seur de Charles, et d'elle eut Gautier, qui espousa
Nevelon ', fille dudit Charles et tua Justamont.
P. Meyer, en publiant ces extraits, conjectura (p. lo
de son mémoire) que l'auteur du renouvellement de
Doon de Nanteuil connaissait Doon de La Roche
« d'après une rédaction dont nous ne soupçonnions pas
l'existence, » Cela est possible; mais les imaginations
que nous présentent ces deux extraits sont tellement
étranges * qu'il est plus probable que nous sommes en
présence d'une invention personnelle du jongleur tardif
qui renouvela la chanson de Doon de Nanteuil. — On
peut remarquer qu'ici, comme dans la Karlamagnus-
Saga et le chant des Fœroe, Olive est la fille, non la
sœur de Pépin; cela est la conséquence du fait que
l'action de Doon de Nanteuil est placée sous le règne de
Charlemagne : voulant mêler Olive à cette action,
l'auteur a été obligé de la rajeunir d'une génération, et
d'en faire la sœur, non la tante de l'empereur. Le renou-
veleur de Doon de Nanteuil et le rédacteur de la Karla-
magnus-Saga ont fait, chacun de son côté, le même
changement.
Si, après cette étude sur les différentes formes de la
légende épique de Doon de La Roche, on essaie
d'apprécier la valeur littéraire de F considéré en lui-
i. Nevelon est un nom d'homme. Si Fauchet a bien lu, il y a
ici une véritable singularité.
2. Notamment en ce qui concerne la mort de Justamont, tué par
Gautier, fils de Bertran et d'Olive. Une tradition constante fait
tuer Justamont par Pépin le Bref (voir G. Paris, Mélanges de lit-
térature française du moyen âge, p. 2oi-2o3, 214). ,
INTRODUCTION » 'XCV
même, on arrive, je crois, à un jugement d'ensemble
moins favorable que celui porté jadis par P. Meyer,
dans son rapport de 1878 à la Société des Anciens
Textes Français. Le style du poème a quelque chose de
mou, les caractères sont souvent d'une grande banalité ',
Une grande partie de F n'est, notre discussion l'a mon-
tré, qu'un renouvellement d'un poème antérieur (O'):
c'est ainsi que la comparaison avec E montre que la jolie
scène où le petit Landri proteste contre le second
mariage de son père, n'est pas de l'invention de l'auteur
de F, mais se lisait dans son original. — Les épisodes
que ce « trouveur » a ajoutés de son crû sont en grande
partie des lieux communs, faisant partie du « matériel
roulant » de l'épopée, suivant l'expression de G. Paris.
Chose curieuse : notre poète, qui développe parfois
avec une insistance inutile et choquante les scènes bru-
tales et cruelles % montre le plus de talent dans les
tableaux d'un genre paisible et en quelque sorte idyl-
lique. La scène où Bernard, le riche « vavasseur », assis,
le soir, sous un chêne, voit rentrer ses beaux troupeaux
et a cependant l'âme attristée par le regret de son sei-
gneur absent (v. 3200 et suiv.), est vraiment belle et ori-
ginale. C'est également une invention curieuse que ce
Gonteaume, à la fois guerrier et riche citoyen de Colo-
gne, qui invite régulièrement à dîner la pauvre Olive,
honnie de tous (v. 1889 et suiv.). Ici^ comme ailleurs,
l'esprit du poème se rapproche de celui du roman bour-
geois '.
Doon de La Roche n'a pas eu, sous ses différentes
1 . Qu'on mette, par exemple, le traître Tomile à côté de
Lambert d'Oridon, dans Auberi le Bourgoin, la comparaison ne
sera pas à l'avantage de notre auteur.
2. Notamment la scène entre Olive et Audegour prisonnière
(v. 3024 et suiv.), celle du supplice de Tomile (v. 4025 et suiv.).
3. Voir notamment, à la fin du poème, les adieux d'Olive et de
Salmadrine (v. 4472 et suiv.).
XCVI DOON DE LA ROCHE
formes, un succès de premier ordre : il n'est pas devenu
le noyau d'un cycle; il n'a même pas eu une suite, ainsi
que cela est arrivé à Ami et Amile et à Aye d'Avignon.
Cependant, notre poème a pénétré dans le Midi. Dans
VEnsenhamen bien connu où le Catalan Guiraut de
Cabrera, sous prétexte de reprocher à un jongleur son
ignorance, donne une longue énumération de sujets
épiques, figure entre autres Doon'.le jongleur, dit Gui-
raut, ne sait chanter
Ni d'Oliva, ni de Doon '.
Dans le Nord de la France, le succès de la chanson
s'est longtemps maintenu, et Doon est devenu un sujet
de tapisserie : en 1387, Jean Cosset, d'Arras, vendit à
Philippe le Hardi VHistoire de Doon de La Roche,
pour 600 francs *.
^ Enfin nous devons signaler l'imitation probable de
certains épisodes, de certains traits de Doon de La Roche,
et spécialement du poème conservé, dans la chanson de
geste deParise la Duchesse. Déjà M. W. Benary a noté
(p. 333 de son mémoire) une scène analogue dans les
deux poèmes, et conclu à une imitation de Doon par
l'auieur de Parise ; on peut relever encore d'autres points
de ressemblance. Remarquons d'abord qu'on retrouve
1. Édition de Bartsch, Denkmàler der proven^^alischen Litte-
ratur (Stuttgart, i856, in-8»), p. 91. Le texte de Bartsch porte
Olitia, mais la leçon du manuscrit d'Esté est bien Oliva; voir
A. Mussafia, dans les Sitpingsberichte de l'Académie de Vienne,
classe philos, histor,, t. LV(i867), I, 425. Déjà Ferdinand Wolf
avait conjecturé qu'Oliva était la vraie leçon et que l'allusion se
rapportait à Doon de La Roche; voir Denskschriften de l'Aca-
démie de Vienne, classe philos, histor., VIII (1857), 268, note 2.
L'activité poétique de Guiraut de Cabrera se place dans les
vingt dernières années du xii« siècle (voir G. Paris, Mélanges de
littérat. franc, du m. â., p. 221, n. 3).
2. J. Guiffrey, Histoire de la Tapisserie (Tours, 1886, in-4»),
p. 42.
INTRODUCTION XCVII
dans Parise le thème principal de Doon, la mère réha-
bilitée et vengée par le fils ', et aussi le thème secon-
daire, l'exilé qui se rétablit dans sa patrie avec
l'appui d'un prince étranger; mais il y a des ressem-
blances plus précises. Le vieux Clarembaut (c'est ce
qu'a déjà noté M. Benary) proteste contre le second
mariage du duc Raimond (p. 49 de l'édition) de même
que le petit Landri, dans Doon, proteste contre le
second mariage de son père; on peut noter que Cla-
rembaut, comme Landri, s'en prend, en termes violents,
presque identiques, au prélat qui va célébrer le mariage,
mais il faut remarquer que la scène a dans Doon
quelque chose de plus original, vu que c'est un enfant
qui parle. Ce vieux Clarembaut, le défenseur de Parise,
présente de singulières analogies avec Gonteaume, le
partisan d'Olive dansi^; tous les deux sont représentés
comme souffrants, malades ^; mais dans Parise cette
maladie n'est pas motivée, tandis que, dans F, elle Test
par le chagrin que cause à Gonteaume l'absence de
Doon. Ici encore, F est supérieur à Pa*-ise. Enfin,
Parise, dans la chanson qui porte son nom, est accusée,
comme Olive dans F, de vivre en prostituée; on peut
noter que le vers 2546 (p. 76 en bas) de Parf^e est
presque identique au vers 917 de i*'^
Ces faits sont d'autant plus curieux que Parise la
Duchesse, au point de vue littéraire, nous paraît, dans
son ensemble, préférable à Doon de la Roche. Mais il y
a, dans l'histoire littéraire, d'autres exemples d'imi-
tateurs supérieurs à leurs modèles.
1. On peut remarquer que, dans Parise, la mère est exilée
(p. 22 de l'édition Guessard et Larchey); Parise est par conséquent
plus éloignée du thème primordial que N et même que F, où il
reste des traces de l'emprisonnement primitif".
2. Parise la Duchesse, p. ii, i3, 23; comp. F, v.
3. Remarquons encore que l'église Saint-Pierre de Cologne,
mentionnée assez souvent dans F, l'est également dans Parise la
Duchesse {v. 928,935).
g
XCVIII DOON DE LA ROCHE
Comme tant d'autres chansons de geste, Doon de La
Roche a été populaire hors de F'rance : nous avons vu
que la légende épique, sous ses différentes formes, a été
imitée ou résumée en Espagne, en Angleterre, en Nor-
vège, en Islande; dans la première moitié du siècle
dernier, le récit des malheurs d'Olive et des aventures
de Landri se chantait encore aux îles Fœroe. De toute
cette gloire traditionelle il ne reste actuellement, en
langue française, qu'un seul document complet : le
manuscrit de Londres contenant le poème qui voit
enfin le jour.
i;: /INTRODUCTION XCIX
r«afc .n "^î;: : ■;;.-•' ■•■'1 "
APPENDICE
A. — REMARQUES SUR QUELQUES NOMS PROPRES.
Le nom de Landri, le véritable héros du poème, se
retrouve dans toutes les versions (dans N, « Landres »,
dans E, « Enrrique », par une altération que nous avons
signalée plus haut, p. lxvii). M. F. Lot, dans son étude
sur la chanson de geste perdue de Landri, qui aurait
eu pour héros un Landri, comte de Nevers, fait cette
remarque ' : « Je hasarde en terminant l'hypothèse que
Landri a fourni son nom, rien que son nom, au roman
en vers de Doon de La Roche \ Le héros de cette com-
position de pure fantaisie, dont l'action est censée se
passer sous le roi Pépin, est Landri, fils de Doon, sur-
nommé « de la Roche ». Ce Doon de la Roche ne
devrait-il pas son existence à Boon de Monceaux [Bodo
de Moncellis), père du comte de Nevers, Landri? Je
suppose que Boon a été changé en Doon sous l'influence
de « Doon de Mayence ».
Cette hypothèse est ingénieuse; nous devons cepen-
dant faire observer qu'il n'est pas absolument sûr que
le père de Landri se soit appelé « Doon de La Roche »
dans le poème archétype. Dans N, il s'appelle Hugon,
souverain du val de xMunon. Il est vrai que l'on pour-
rait supposer que l'imitateur anglais du poème primitif
1. Romania, XXXII (igoS), i3.
2. M Lot ajoute en note : « Je m'aperçois que M. de la Lande
de Calan a eu l'idée de ce rapprochement dans son livre bizarre.
Les personnages de l'époque romane (Redon, 1901, in-8°), p. 172 ».
— Les « Landri » sont très nombreux dans l'épopée française :
la Table de M. E. Langlois en énumère vingt-six. Cette fré-
quence semble indiquer qu'un prototype, célèbre de bonne
heure, a amené la popularité du nom.
C DOON DE LA ROCHE
perdu aura remplacé le nom de « Doon », dont il n'y
avait pas d'équivalent en anglais, pour celui, plus
connu de « Hugon ». L'auteur du roman espagnol s'est
trouvé placé devant la même difficulté : il s'en est tiré
en désignant constamment le mari d'Olive par une
périphrase, « el Duque de la Roche ».
Que le nom de « Doon » se soit trouvé ou non dans
le poème primitif, c'est certainement un ancien nom
épique : à côté de « Doon de Mayence ' », que rappelle
M. Lot, on peut citer « Doon de Nanteuil », héros d'une
chanson de geste qui n'est certainement pas de l'époque
la plus reculée de l'épopée, mais dont la première rédac-
tion devait remonter assez haut '.
Le « val de Munon », dont Hugon (= Doon) est le
souverain dans N, reste mystérieux \
La Roche est le domaine propre du père de Landri
dans^" comme dans A^ : ce nom remonte donc à O*.
M. F. Lot, qui croit que l'auteur de Doon a été in-
fluencé, en ce qui concerne le personnage de Landri,
par la chanson de geste perdue, qui avait comme pro-
tagoniste un comte de Nevers, rappelle* qu'il y a dans le
Nivernais plusieurs localités du nom de « La Roche».
Mais la géographie de Doon indique plutôt l'Est
comme théâtre de l'action ; cela est évident en ce qui
concerne F. Les indications de E sont plus vagues;
toutefois le fait que, dans le roman espagnol, Tomillas
(=Tomile) est comte de Cologne, semble bien indiquer
que, dans O', l'action était placée également dans l'Est.
1. Ce personnage doit être bien plus ancien que la chanson de
geste très récente dont il est le héros; voir les observations de
G. Paris, Histoire poétique de Charlemagne, p. 76 et 168.
2. Voir l'étude de P. Meyer dans le t. XIU de \a Remania, citée
plus haut, p. xcni.
3. M. Benary (p. 239, note, de son mémoire) a vainement essayé
de l'identifier, nous n'avons pas été plus heureux.
4. Article cité, p. i3, note 4.
INTRODUCTION CI
On peut par conséquent identifier ' le La Roche de E
et F avec la ville de Laroche dans le Luxembourg
belge, localité certainement ancienne et qui était jadis
le chef-lieu d'un comté. 11 est vrai que La Roche, dans
E aussi bien que dans F, est représentée comme une
ville fortifiée, tandis que le Laroche belge ne fut entouré
de murailles que dans la première moitié du xiv^ siècle ';
mais on sait que, en pareille matière, les auteurs de
chansons de geste ne se piquent pas d'une exactitude
absolue.
Le nom d'Olive^, qui se trouve à la fois dans F, dans
E (« Olive ») et dans N (« Olif »), se lisait certainement
dans le poème archétype (O').
Dans A^, le traître s'appelle Milon ; M. Benary a déjà
fait remarquer (p. 35 5 de son mémoire) que Milon est
un nom de traître dans Aye d'Avignon, Gui de Bour-
gogne et Bovon de Hanstone; il peut donc remonter au
poème français primitif.
Le nom de « Tomile », que donne F, se retrouve, lé-
gèrement modifié (« Tomillas »), dans E : il se lisait
donc dans 0\ Ce nom manque dans la Table de M. E.
Langlois ; il a l'air fabriqué, peut-être sur ie modèle
d'Amile *.
La fille du traître, seconde épouse de Hugon
1. Ainsi que l'a déjà proposé M. Benary, p. 358 de son mémoire.
2. A. de Leuze, Histoire de Laroche et de son comté (Arlon,
i88o, in-8°), p. 6.
3. Ce nom paraît emprunté à l'hagiographie : la liste alpha-
bétique des saints dans L. de Mas-Latrie, Trésor de chronologie,
mentionne cinq sainte» du nom d'Olive. Ce nom se retrouve dans
FAie de Saint-Gille et dans Yde et Olive, suite de Hiion de Bor-
deaux (voir E. Langlois, Table) ; ces deux poèmes l'ont proba-
blement emprunté à Doon de La Roche.
4. Dans les romances espagnoles qui se rattachent à la chan-
son d'Aiol, le traître s'appelle « Tomillas * (voir G. Paris, Hist.
poétique de Charlemagne, p. 212). Ce nom est probablement
emprunté à la version espagnole en prose de Doon {E).
cil DOON DE LA ROCHE
(=: Doon), s'appelle Aglavia dans AT, nom qui paraît
singulier et qui ne se trouve pas dans l'onomastique
de l'épopée française '.
Le fils issu du second mariage de Hugon (= Doon)
avec cette femme s'appelle Malalandres dans N. G.
Paris (p. 109 de son analyse) a restitué avec beaucoup
de vraisemblance comme nom français Mallandri; le
nom aurait été inventé pour faire antithèse à Landri.
Dans F, ce personnage s'appelle Malingre \ dans £", où il
ne paraît qu'une fois, Malindre (fol. d. iii, r° et v°).
Cette forme semble à première vue un intermédiaire
entre Mallandri et Malingre, mais il est plus probable
qu'on est en présence d'une altération pure et simple de
Malingre '.
Cet examen des principaux noms ne répand pas
autant de lumière qu'on le désirerait sur la question
importante de la véritable nature de A^. Le traducteur
anglais de O' a changé, semble-t-il, certains noms de son
original, mais, d'autre part, l'auteur de O* paraît avoir
innové dans l'onomastique du poème, de même qu'il
en modifie profondément le contenu.
1 . Il en est de môme de « Siliven «, nom de la nourrice et con-
seillère de Landri dans N.
2. Malingre est le nom d'un Sarrasin dans la Chanson d'An-
tioche, et celui d'un personnage de la lignée de Ganelon dans
une variante de Gui de Bourgogne (voir E. Langlois, Table),
« Malyngres » figure parmi les parents du traître Macaire dans
l'ancienne traduction espagnole en prose de la Reine Sébile,
p. 5i I, col. a en bas, de l'éd. Bonilla y San Martin, dans Libros de
Caballerias, iv parte, Ciclo arturico, ciclo carolingico, Madrid,
1907, pet. in-fol. [Nuova Biblioteca de autores espanoles, VI). —
Au moyen âge, le nom de Malingre a été porté par des person-
nages réels (cf. Bulletin de la Société des Anciens Textes
Français, III, 97). Aujourd'hui c'est un nom de famille; le Bottin
de Paris pour 19 18 compte trois « Malingre ». Les rapports de ce
nom avec l'adjectif malingie ne sont pas bien éclaircis.
INTRODUCTION CIII
B. SUR UN DETAIL DU RECIT DE LA « KARLAMAGNUS-SAGA ».
Afin de réunir tout ce qui peut donner lieu à
quelques rapprochements avec le récit du poème pri-
mitif, tel qu'il est résumé dans la Karlamagnus-Saga,
j'appelle ici l'attention sur un récit épique irlandais,
forme spéciale d'un conte international ' dont l'ori-
gine première n'est pas encore certaine, bien que,
en ce qui concerne le récit irlandais, une dérivation
byzantine paraisse très probable. Dans ce récit, qui
se trouve dans un manuscrit antérieur à ii5o, se
lit l'épisode suivant, dont j'emprunte le résumé au
professeur R. Thurneysen :
Une reine coupable confesse ses méfaits (des meurtres) à
son confesseur ; celui-ci les révèle à son tour au roi, qui
ordonne de l'enfermer dans une logette de bois près d'un
carrefour. Elle vit là pendant sept ans de ce que des gens
charitables lui font passer par les petites fenêtres de la
logette. Au bout de sept ans, le roi, apprenant qu'elle vit
encore, la fait sortir, et, sur sa demande, fonde pour elle
un couvent et une église.
Cela rappelle quelque peu le récit de la Karlama-
gnus-Saga (p. io8 de l'analyse de G. Paris) : « il [Char-
lemagne] approuve l'avis de Milon d'enfermer Olive
dans une tour de pierre ; pendant sept ans elle y vivra
d'un pain grossier et d'une cruche d'eau, et si au bout
de ce temps on la trouve encore vivante, c'est signe
qu'elle sera innocente et accusée à tort ». — La res-
semblance des deux récits est plutôt extérieure que fon-
damentale; cependant, il est possible que le récit bvzan-
tin ait influencé la chanson de geste *.
Gédéon HuET.
8. Voir Reinh. Kôhler, Kleine Schriften, II, SgS-Sgg.
().Ibid., II, 398.
CIV DOON DE LA ROCHE
C. — NOTE COMPLÉMENTAIRE SUR l'hISTORIQUE DE l'rDIITON.
Lorsque Gédéon Huet s'est éteint, à Paris, le
lo novembre 192 1, les feuilles i-i i de l'édition de Doow
de la Roche (texte et début des notes) étaient tirées; les
feuilles a-g (Introduction) avaient été mises en pages
après une première correction de l'auteur.
Comme commissaire responsable, secondé par
M. Henri Lemaître, que Gédéon Huet lui-même avait
désigné dans son testament, j'ai procédé à une dernière
révision de l'Introduction et fait les quelques modifica-
tions de détail qui m'ont paru indispensables.
M. Henri Lemaître, utilisant les notes de Paul Meyer
et de Gédéon Huet, a établi la copie du Glossaire, de
l'Index des noms propres et de la Table des matières
Grâce à son zèle, la disparition successive des deux
auteurs n'a pas entraîné pour la publication de ce
volume autant de retard qu'on aurait pu le craindre. Au
nom de la Société des Anciens Textes français, je tiens à
lui exprimer ici les plus vifs remerciements.
Antoine Thomas.
-^seB-
DOON DE LA ROCHE
I
Seignor, oez chançon cortoise et avenant; (/. /)
Vieille est et ancienne, de Doon l'Alemant.
Toz tens servi a cort par ses armes portant;
De piller, de rober, n'ot un denier vaillant ;
5 II essauça toz dis et leva ses serjanz.
Les povres chevaliers, les orphelins enfanz.
Nuns bons de son lignage n'ot de terre .j. arpant,
Fors solement La Roche et l'enor qu'i apent;
Mais li douz rois de gloire en donna Doon tant
lo Com vos orrez avant, s'il est qui vos en chant.
Li dus servi Pépin le roi molt longement,
A Paris en la sale, toz dis molt loiaument.
N. B. Pour les deux premières laisses, toutes les leçons rejetées
sont données, même quand elles n'intéressent que la graphie.
I Seigneurs oues chançons courtoise. — 3 Touz temps, court
p. ces années pourtant. — 4 piler, ung deniers. — 5 II lassauça
tous diz, serjans. — 6 anfans. — 8 seullement, apant. — 9 doulx.
— 10 Comme, orés, c'il, vous. — n dux servit, longuement. —
13 Parix, salle tous, loyaulment. ' 0
I
1 .. DOON DE LA ROCHE
Molt i ot Angevins (?), Baviers et Alemanz
Et Normans et Frisons et Pohiers et Flamens,
1 5 Dessus trestoz les autres fu i Do TAlemanz :
De sens, de hardiesse et de barnage ot tant,
Quant il vait en tornoi, li gentiz Alemanz,
S'i gaaignc chevaus, si les donne as serjanz
Et as chevaliers povres qui d'avoir n'ont nient,
20 Quant li rois tient ses plaiz, cui douce France apent,
S'il i a nul tort fait ne nul faus jugement,
Li conseil [de] Doon le vont si redreçant
Ja ne s'en plainderont li petit ne li grant. (v®)
Et jugleors plusors ot a sa cort toz tens ;
25 Si lor donnoit mantiaus et blïauz bels et genz
Et peliçons ermins et autres garnemenz;
Onques n'i vint si povre nen tort de li mananz.
Ores si [crut] en Deu le père roi aidant
Que a veve moillier ne vont tolir nient,
3o Ne petit orfelin ne fist aler plaidant;
Por tant l'ama li sire qui fu adonc vivanz.
II
Molt fu Do de la Roche de grant nobilité,
Li gentilz Alemans qui tant fist a loer.
1 3 dâgeûit Bavies et Elemens; c/. vv. ggS-'Q. —> 14 Flamans
— i5 D. trestous 1. aultres fui Daon l'Alement. — 16 et de
hardies et de barnaige. — 17 vat, tournoy, gentis Elemans. — 18
gaingne chevaulx, donnet auz serjans. — 19 aus, niant. — 20 roy,
ces plait, apant. — 21 faiz, nulz faulx jugemant. — 33 lé p. —
24 pluseurs, court, tous temps. — 25 leurs d. mantiaulx e^
bliaux bes. — 26 hermis, aultres garnemans. — 27 nâ cort de
li menaz. — 28 II ne serait pas impossible que roi aidant fttt une
mauvaise leçon pour reamant {pu roiamant) ; cf. v. ii'j2. —
29 Gara vove, vot tollir néant. — 3o fit. — 3i Pour, fuit, viant,
— 32 fut Doz. — 33 fit aler.
DOON DE LA ROCHE 9
Onques puis qu'il prist armes et il fu adobez
35 Ne vout li dus ardoir ne preer ne rober,
Ainz servi par ses armes les princes et les pers,
Et tant fist lor servise que li donnent asez.
Doons servi Pépin a Paris la cité
Trois anztoz acompliz, ne li vout rien rover,
40 A .iij<=. chevaliers qui sont preu et séné.
Et Pépins Tempereres li eiist trop donné :
Uneseror avoit nostre empereres ber,
La dame ot nom Olive au gent cors honoré;
Ele amot plus le duc que nule riens, fors Dé;
45 Mais ainz ne l'en ot cuer ne corage mostré
Por ce qu'il n'estoit mie de si haut parenté.
Seignor, ja dit Tescriz qui vos est demostrez
Que il nest chose en terre, tant le sache on celer,
'1 Que avant ne reveingne quant il est destiné.
5o Ainsi font les amors que Do a démené {f. 2)
Vers Olive la bêle o le viaire cler.
Seignor, ce fu .j. jor devant Nativité,
A feste saint Andrier, qu'Avant doivent entrer;
Pépins nostre empereres, li gentiz et li ber,
55 Loa ses soudoiers, ses en lessa râler,
Cui .c. mars, cui .iij", avers ce que il set.
As princes donna [il et] chastiaus et citez,
Donjons et hors çt viles, recez et fermetez;
34 qui prit, fut adoubés. — 35 vot, dux, proer. — 36 Ains, percs.
— 37 leur service que li donnarent. — 38 servit. Au lieu de Doons
on pourrait proposer Cil Do. — 39 ans tous acomplis, vot. —
40 prou- — 41 Pépin l'amperieres. — 43 serou. — 43 gens, corps.
— 44 Elle, nul. — 45 ains, an, couraige monstre. — 46 Pour ce
qui, hault parante. — 47 Seignours, escrit, vous, demoustré. —
48 Qui n', saiche. — 5o amours, Doz a amené. — 5i belle. —
52 Seignours, fut, jour davant. — 53 Avant doient. — 54 gentil.
— 55 Lea, an lassa. Il parait manquer un vers. — 56 Cu
.c. mars ou iijc au's ce qu'il il est; cf. Charroi deNimes,v. 38,
— 57 Au p. d. chastiaulx. — 58 bours, villes, reces, fermetés.
4 / t>OON DE LA ROCHE
Gui qu'il doint ne cui non, Doon n'a rien donné,
60 Le gentil Alemant, ainçois Ta oblîé,
Car il ot en la cort longement conversé:
Esté i ot .iij. anz et ou quart est entrez.
Cil coart chevalier en pristrent a parler
Et dïent l'uns a l'autre que Do est oblïez,
65 Tant a servi le roi que il l'a oblïé.
« Par la foi que vos doi, riens ne li vuet donner :
« Il gardera la cort et l'iver et l'esté,
« Et tenra les chemises quant li bainz ert chaufez,
« Si avra nom Rouciens as grenons enfumez. »
70 Tant ala la parole que Pépins bien le set;
Grant honte en a li rois, s'a Doon apelé :
« Sire Do de La Roche, gentiz, nobles et ber,
« Cil autre chevalier m'ont congié demandé;
« Tuit s'en vont en lor terres, mais vos estes remés.
75 — Sire, » ce dist li enfes, « car jel sai de verte,
« Son droiturier seignor doit on servir assez,
« Et je vos servirai volentiers et de gré;
« Et quant vos vos serez des autres délivré, (v*)
« Si me donrez del vostre autant que vos voudrez ».
80 Quant Tentendi li rois, grant joie en a mené :
« Sire Do de La Roche, gentiz estes et ber ;
« Par la foi que vos doi, ce sai bien de verte,
« Se vos auques [m'Jamez, toz seroiz mes privez;
« Et puis que je vos voi [del tôt] entalenté
6g Que qu'il d. ne eu. — 60 ainsois. — 6i oit, cort lon-
guement. — 62 ans et onqes e. antres. — 63 chevaliers, prinrent,
pariés. — 64 li .j. a l'a. q. Doz. — 66 vous. — 67 court. —
68 tanra, bain est chauffé. — 70 Pépin, sçait. — 71 roi. —
72 Doz, gentil, noble et bel. — j3 Ces aultres chevaliers.
— 74 leur terre mas. — jb dit, anfes, je sçai de veritei. —
76 signeur, assés. — 77 vous, voulantier, grei. — 78 vous vous
serés, délivrés. — 79 donrés du, vous vouldrez. — 80 antandi, roi,
joye. — 81 Doz, gentil e. e bel. — 82 foy, vous, vérité. — 83 Se
vous amés anques tôt seroit m. privés. — 84 vous v. antalanté.
DOON DE LA ROCHE 3
85 « De faire mon servise sanz point de fauseté, : .
« Par la foi que vos doi, hui est li jors entrez
« Que vos donrai tel chose dont vos me savrez gré,
« Dont li vostres lignages sera toz honorez :
« Olive ma seror vueil [jou] que vos prenez;
90 « De tote Loeroigne avrez la ducheé :
« .XX. chastiaus i a forz et .xiiij. citez;
« Et, puis que voz lignages ert au mien ajostez,
a Ci a soudées granz, si les vos vueil donner. »
Quant l'entendi li enfes, si commence a plorcr :
95 « Sire douz emperere, merci! por amor Dé;
« Mes cuers et mes avoirs vos sont abandoné.
« Se je n'ai [dame] Olive, ja sont famés assez;
« Endroit le mien lignage me covient marier :
« Li oisels qui se haiteainz qu'il puisse voler
-100 « Chiet a terre dou ni, s'est a terre versez. »
Et respondi li rois : « Em pardon em parlez. »
A joie et a lïesce li ont fait esposer.
Molt furent granz les noces, si ont .j. moisduré;
Li jugleor dou règne en furent bien loé :
io5 II en ont vair et gris et hermins engolez, [f- 3)
Destriers et palefrois et muiez sejornez.
A joie et a barnage furent cil asemblé.
Adonc i fu Landris li valiez engendrez,
Li niés le roi de France, qui tant fist a loer.
85 san. — 86 vous, le jour antres. — 87 vous, savrés grés. —
88 le vostre lignaige, tous honorés. — 8g veul q. vous prenés. —
go toute Laorroigne avrés. — gi chastiaulx, fors, cités. — ga vos
lignaige est, ajostés. — g3 Ci a gens {avec un signe d'abrévia-
tion) soudées se la vous vuel d. — g4 anfes, commance. — g5
S. doz e. m. p. l'a. de Dieu. — g6 abandonés — gy assés. —
g8 Androit, linaige, convient. — qg oisel, ce, ains qu'i. — 100
versés. — loi parlés. — 102 espouser. — io3 grande 1. nopces,
moix dures. — jugleour do rôme. — io5 vers e g. et hermis ango-
lés. — 106 séjournes. — 107 joe, barnaigc. — 108 fui Baudris li
vallès engendrés. — 109 n. li r. - ,. ; ..! . ^u.
é
DOON DE LA ROCHE
iio Adonc s'en parti Do, li ber et li senez; i
A .vijc. chevaliers gentilment conreez
S'en va droit a Coloigne, ceie bone cité.
A joie et a baudor furent cil asemblé ;
Puis furent a dolor et a duel desevré.
1 15 .1. losengiers du règne les a toz enchantez;
Ilavoit nom Tomiles, .j. traîtres mortex.
Damedex le confonde, qu'en la croiz fu penez !
III
Ilot ja a Coloigne .). traïtor félon :
Cil ot a nom Tomiles, oncles fu Gueneloh,
120 Cosins germains Hardré et Hervi(?) le larron,
Si apartint Maugin, .j. encrisme félon;
Bien vint de son lignage qu'il felst traîson.
Sodoiers fu le duc, princes de sa maison.
Il n'ama onques home chevalier se lui non.
135 Ici[l] mena la dame par grant seducion;
Par ses losengeries la destruit et confont.
Il apela le duc a conseil sur le pont :
« Sire Do de la Roche, entendez ma raison.
« Je dirai tel parole, se j'en ai le pardon,
i3o « Par tote Loeroigne en ira li renons. »
Et respondi li dus : « Car le nos dites dont. (v°)
— Biaus sire, volentiers, quant j'en ai le pardon.
« Ma dame ne vos aime vaillissant .j. boton :
iio partit Doz, bers, sennes. — 112 vat, Coulongne celle
bonne. J'adopte la forme Coloigne, qui est celle du fragment L.
-— 114 a d. a adisel. — ii5 losangiers de rongne, touz an-
chanté. — 116 non, traites. — 117 an, crois, fust penés. — 118
A partir d'ici on ne donnera, parmi les leçons rejetées, que
celles qui présentent quelque intérêt. — 119 ot non. — lao
Hardroi et Iduem [ou Iduein). — 126 losengiers.
BO€>t^ DE LA RÔËHË 'J
« 1er main la pris provée gisant a.j. garçon;
i35 « Ne l'osai envaïr, car pou oi compagnons. »
Quant l'entent li dus Do, a pou d'ire ne font :
« Tomiles de Goloigne, baissiez vostre raison,
« Cafi pat icel apostre a cui peneant vont,
« Par pou que ne vos fier [ens] ouchiefd'unbaston;
140 « Et se vos plus d'Olive me dites se bien non,
« Plus haut vos ferai pendre que nul autre larron.
— Sire, » dit li traître, « merci ! por Dieu del mont ',
« Se oel vos puis prover en cest mois ou nos soms,
« Si me tfénchiez la teste sans autre reençon. »
145 Quant li dus l'entetidi, si tint le chief embronc ;
Ilplore tendrement des biaus ieus de son front.
« Dex, » dist il, « sire père, par vo saintisme nôn^
« Car me donez la mort ainz que vienne li jors.
« Haï! terre, car fent et de desoz moi font!
i5o « De ci que en l'abisme ne vueii avoir sejor.
« Haï ! Olive dame, de la vostre façon
« Ne sera jamais famé, chevaliers ne nlis hom.
« Je vos amoie plus que riens qui fust ou mont. »
IV
La suer le roi fu molt cortoise et avenant;
i55 Ele ot .). molt biau fil de Doon l'Alemant :
Il ot a non Landri par droit baptisement.
El gentil damoisel molt i ot bel enfant. (/. 4)
Tomiles de Goloigne le va molt soduiant;
Ocire vuet sa mère a duel et a torment.
160 .1. garçon apela, sili dist : « Vien avant.
« Se je t'osoie dire mon cuer et mon talent,
i35 anveir, compagnon. — 145 ch. a uif bron. — 147 dit, et
toujours ainsi. — 148 C. ne d. la m. a. q. nôme li j. — 149
de d. morfont. — i52 Ne ferai.
§ DOON DE LA ROCHE
« Je te feroie riche et d'or fin et d'argent. »
Et respont li garçons : «Tôt a vostre commant.
— Va donc, si le me jure tost et isnelement,
i65 « Puis te dirai mon cuer plus descombréement. *
Li glozs'engenoilla, si fist le serement,
Et li a dit Tomiles : « Se toi plaist, or entent.
« La duchesse se gist en sa chambre leenz;
« Ele est molt forment ivre, tant a beu piment.
170 « Ele n'ot ne ne voit ne a home n'entent;
« Va te couchier o li en son lit coiement ;
« Se te queut en amor, riches seras mananz :
« Chevalier te fera, ne demorra nient;
« Ele tedonra armes et riches garnemenz. »
175 Et respont li lechiere : « Tôt a vostre commant. »
Il entra en la chambre par molt fier marrement ;
Entreci que au lit ne fist arestement,
Et sozleva le paile tost et isnelement.
Oez dou lecheor conme il perdi le sens.
180 II sozleva le paile, si s'est couchiez dedenz :
Trestoz nus en ses brai[e]s vers la dame s'estent;
N'ose envair la dame, car pou ot hardement.
Tomiles vint a l'uis, s'apela le duc franc :
« Sire, » dist li traîtres, « trop tardez, venez en ; (v*)
i85 « Ja verrez de ma dame a estros se je menz. »
Quant l'entent li dus Do, a pou ne pert le sens ;
Des beaus ieus de son front plora molt doucement
Et du cuer de son ventre va parfont sospirant.
O lui a pris .iij. contes, si s'en torna atant ;
190 Çaintes ont les espées as bons aciers trenchanz.
Il entra en la chambre corrodez et dolenz,
Entreci que a[u] lit n'i fist arestement;
Il sozleva le paile tost et isnelement
167 Elle li a d. — 168 sa, ms. la. — 169 b. de p. — 170
Elle n'ot ne vot. — 172 qust en a. — 175 commandemant. —
179 sens, ms. sanc.
DOON DE LA ItOCHE
Et trova le garchon lez sa famé gisant :
195 Ce ne fu pas merveille se il en fu dolenz,
Que il n'a soz ciel home qui n'en fust corroçanz.
Li gloz fu en la chambre durement entrepris;
Il ne sot ou aler ne en quel part fuir.
Do a traite l'espée, la teste li toli :
200 Au desmembrer li tout, qu'autre mal ne li fist.
De ce fist il que fox qu'a gehine nel mist.
E[s]tes vos ma[i]s Tomile du murtre bien garni :
N'en orra mais parler de ci que a maint di,
Mais droiz a droit repaire, pieça que on le dit :
2o5 Encor le couvendra le mal pechié gehir,
Comme il fist le garçon o la dame gésir,
Par la foi que vos doi, se Dieu plaist et Landri.
Olive s'esveilla, si geta .j. sospir
Et choisi le garçon qui gist de devant li,
210 Et son paile sanglent et son seignor mal mis, r
Et demanda les contes : « Ceste noise qui fist?
« Je li ferai la teste et les membres tolir. » (/, 5)
Li dus a trait l'espée; le chief en eust pris,
Quant li conte [le] corrent par les braz retenir.
2i5 « Sire Do de la Roche, por amor Dieu, merci!
« S'ocïez nostre dame, vos serez mal bailli.
« Certes, ne remanrons en trestot cest pais;
« Je ne sai en quel terre vos peussiez garir.
« Mais envoiez en France a son frère Pépin ;
196 f. dolans — iggDoons. — 200 tout, ms. toli, mais l'hémis-
tiche entier est probablement corrompu. — 201 que g. ne. —
2o3 m. dit. — 209 Et vot le. — 211 noise, ms. nuse ou mise. —
216 seriez. — 217 ne, ms. nos. Ce vers s'accorde mal avec ce
qui précède et avec ce qui suit. Lacune? — 218 puissiez. , ^ -
îh DOON DE LA ROCHE
220 « Ce est H gentiz rois qui le lion ocist.
« Il en penra justice trestot a son plaisir,
« Du pendre ou de l'ardoir ou du mètre en essil.
— Seignor, » dist li dus Do, « corn puis enragier vis
« De la plus bêle dame qui de mère nasqui!
225 « Por quoi m'a la malvaise vergondé et boni?
« Ja l'amoie je plus que riens que Dieus feïst. »
La dame en apela et Jehan et Henri :
« Dont est mesire Do corrociez envers mi?
« Face faire itel feu com lui vient a plaisir,
23o « De .IX. cberres d'espines alumé et espris,
« Ou en mete .11., se lui vient en plaisir;
« Puis me face les membres lier a son devis.
« Quant la flame ert plus granz, si me getez en mi :
« Se .j. pois en estars ou garnemenz bruïz,
235 « Dont puis je provée estre de péchiez entrepris !
— Mauvaise, >> dist li dus, « por quoi parlez vos si?
k Ja estes vos provée de veoir et d'oir.
« Mais ne vos amerai ne vostre fil Landri;
« Par la foi que doi Dieu, onques ne m'apartint, (y°)
240 « Onques ne l'engendrai ne il n'est pas mes filz.
VI
— Sire Do de la Roche, » dist l-a dame au cors franc,
« Faites faire itel feu com vos vient a commant,
« De .îx. chères d'espines, mais qu'il soit bien ardanz;
« Ou en i metez .xxx., s'il vos vient a talent.
222 De p. — 226 Je l'a. — 23o cWres, plus bas (v. 343) chere%;
altxmés. — 23 1 XL, tns. xix, qui fausse le vers (dis et nuef) et de
plus n'est pas un chiffre raisonnable. — 233 en mi, ms. dedans;
cf. V. 246. — 235 provée, ms. primes, en abrégé, cf. v. 237.
Il faudrait entreprise, mais je ne vois pas le moyen de corriger.
— 239 doi a Dieu. — 243 soient b. a^
DOON DE LA ROCHE i't
245 « Puis si me faites penre a deus de voz serjanz
<( Et me getent en mi quant la flame ert plus granz :
« Se .). pois en est ars ne blemiz garnemenz,
« Dont provez ert mis cors de péchiez recreanz.
a Et se Jésus m'en gete par son commandement,
2 5o « En après cel juïse vos en ferai plus grant :
« Si me pendez au col .j. muele pesant
« Le fais d'une ciierée a .xx. homes levant,
« Puis si me faites penre a .c. de voz serjanz, càt
« Si me getent en mer, la teste tôt devant,
255 « En la greignor abisme,por Dieulevoscommant;
« Et, se je m'en revien tôt par dessus flotant,
« Ou pechié n'avrai corpes que mis m'avez devant ;
« Et se j'en vois au fons, tins en ert faite atant ;
« Puis cest jor n'en orrez parole ne semblant.
260 — Mauvaise «.distli dus,« por quoi en parlez tant?
« Ja estes vos provée d'oir et de veant.
« J'ai ocis le garçon a mon acerin brant.
— Sire », dient li conte, « trop parlez hautement-
« Hom ne doit soi honir abandonéemcnt. (/. 6)
265 « Faites fermer le[s] huis tost et apertement,
« Que parole n'en isse, ne nel sache la gent,
« Puis prenez les juïses qu'ele vos vait ofrant. »
Li dus lor otria[st] volentiers, bonement,
Quant li cuvers Tomiles vint par destre corant,
270 Et a saisi le duc par son hermine blanc :
« Que vues tu faire, Do, mauvais hom recreanz?
« Se tu prens les jtiises qu'ele te vait ofrant,
« Dont ne se couchera a .xl. ou a .c. ?
« Doon le cous soffrant t'apelerons toz tens.
275 « Nos t'irons par Coloigne a noz doiz demostrant.
■ ¥■ vT Si seras cous clamez, ce dïent li enfant. »
146 En. — 35o V. sera pi. g. — 253 a, ms. et. — 258 ert, fhs.
est. — 261 etdavant;c/. vv. 3J7 et 36g. — 263 ditli c. — 26411.
si a. — 267 te V. — 269 vint, ms. ml'l. — 274 apeleron. — 276
dïent, corr. diront ? •*''
12 DOON DE LA ROCHE
Quant l'entendi li dus, a pou d'ire ne fent;
Il n'en presist plus rien por les membres perdant.
Il issi de la chambre corrociez et dolenz
a8o Et trova la norrice sus ou palais séant,
Et Landrïet son fil dedens le berz plorant.
Quant li enfes le voit, si li rit bonement.
Et li dus le bota de son pié laidement,
Que li berz reversa et Tenfes chiet adens :
285 Li viaires li fiert desus le pavement;
Bien i parut la plaie jusqu'as armes portant.
Li enfes brait et crie, qui ne set autrement :
Ne puet sa dolor dire, car il n'a pas le sens.
[LiJ troi chevalier plorent por l'amor de l'enfant,
290 Et dist li .j. a l'autre : « Molt nos vait malement ; (v«)
« Ci commence tel guerre qui durra longement ».
VII
Li dus Do de La Roche a son fil mal mené,
Landrïet le petit, qui est de jone aé;
Sanglent ot le visage et la boche et le nés.
295 Bien poez [de voir] dire que Do fu molt irez;
L'un duel mis avec l'autre n'ot en lui qu'aïrer.
Et dist li uns a l'autre : « Nostre sire est desvez ; ,
. « Ja soloit il son fil Landrïet [molt] amer
« Et sa moillier la gente servir et honorer.
3oo « Ne sai quel vif deable ont entre eus conversé. »
Ja n'a il soz ciel home qui en eiist parlé
[Ne] mais que li troi conte qui sont a lui aie.
L'uns le prent par le braz, d'une part l'a torné :
278 presist, ms. print. — 279 II i. hors de. — 281 le berz, ms.
le braiz — 284 berz, ms. braz — 286 p. jusques a. — 288 n'est
p. le sanc. — 289 plorent, ms. plorant. — 296 d. mit {ou nut)
auo; la restitution est fort douteuse, d'autant plus que l'autre
pourrait avoir été écrit par anticipation sur le v. suivant. —
297 Nostr. filr. ,
DOON DE LA ROCHE
l3
« Sire Do de La Roche, gentiz, nobles et ber,
3o5 « Dolenz iert l'emperere Pépins, se il le set;
« Mais prenez .j. message et si H envoiez.
— Si ferai je, seignor, car molt sui vergondez.
« Maleoite soit l'eure que je fui onques nez. »
Il apele Grégoire, son chapelain privé :
3 1 o « Sire frans clers », [dit il], « envers moi entendez :
« De ci que au matin a Paris m'en irez ;
« Pépin l'empereor vueil que me saluez.
« Il me dona .j. don, genz fu et honorez :
« Ce fu un pan de terre que molt fait a loer.
3i5 « .1. hom la me chalonge, qui est d'autre régné;
« Ma terre en est enfraite et ses bans trespassez. [f. 7)
« Or vienge en Loeroigne por sa terre aquiter,
« Et quant il ert venuz, si parleromes d'el.
— Sire », ce dist Gregoires, « je le dirai assez. »
VIII
320 Celé nuit jut Gregoires de ci que au matin,
Li gentiz chapelains cui Diex puist beneïr.
Il monte sus .j. mul corant et arabi.
Et entra en sa voie, s'acuilli son chemin,
Et trespassa les terres, les puis et les larriz ;
325 N'i ot reigne tirée de ci que a Paris ;
Et a trové le roi sus el palais marbrin.
L'emperere le baise, delez lui l'a assis,
De sa suer demanda, le premier mot que dit.
Et après de Doon le chevalier gentil.
33o « Comment le fait? » [dist] il, « comment se maintient il ?
3o4 n. ei bel. — 3o5 D. ser. — 3o8 Maldite s. l'eur que je fuis.
— 3 14 un pou. — 3i5 régné, ms. roiné. — 317 Or vienge, ms.
Vome, avec un signe d'abréviation sur Vo. ■— 3 18 il est. — 32 1
Le g. clerc c. D. puet deuoir ou denoir. — 322 mulet, c. — 328 sa
suers. — 33o C. le fait il lor c. se m. il. ■ v^
^4 bOON DE LA ROCHE
-~- A la foi que vos doi, moltbien, la Dieu merci!
« Je[l] laissai a La Roche sain et haitié et vif;
« Mais .j.don lui donnastes,qui molt fu seignoris :
« Ce fu un pan de terre que molt fait a chérir ;
33.5 « .1. hom la li chalonge, qui est d'autre pais.
« Olive vostre suer n'a ne joie ne ris.
« Ne sai por quoi ce est, ne m'en ont nul mot dit,
« Li dus lavuet ardoir et les membres tolir. »
En l'oreille li dist coiement et seri :
340 « De putage la rete, ne vos en quier mentir. »
Quant l'entent l'emperere, il n'en a mie ris,
Et si fu sages hom qu'a home ne le dist,
Ainz entra en sa chambre trestot a escheri;
Soef maine son duel, que nuls hom ne l'oï.
345 « Ha! suer Olive, qui en [tel] penser vos mist?
a Por quoi m'avez vos, dame, vergondé et boni?
« Aine mais de mon lignage pute famé n'issi. »
IX
De ce fist l'emperere que proz et que cortois
Quant nel vont dire a home, chevalier ne borjois;
35o Ainçois monta le jor, si chevalcha le soir,
Atot .xV". homes va sa seror veoir.
Il trespassa les terres, les plains et les arbroiz ;
Venuz est a Coloigne : molt fu granz li esfroiz,
Et descendent es rues chevalier et borjois,
355 Hennissent cil cheval, cil mul, cil palefroi.
Do de La Roche va son serorge veoir;
Ses bras li mi[s]t a col, si le baisa .iij. fois,
Puis Ten a apelé bêlement en requoi :
333 l. donnait. — 334 un pou. — 335 .1. hommes qui s'alonge;
cf. V. 3j5. — 336 V. s. ne joie ne ne rit. — 340 en pansée. On
pourrait aussi proposer Ha[ï] O. s. qui en penser. — 347 Ainz —
349 ne), ms. ne le — 355 H. ci ch. si m. e palfrois.
DOON DE LA RQCHE iS
« Sire d[r]oiz emperere, » ce dist Do li cortois,
30O « Olive vostre suer a boni vos et moi.
« Certes lez .j, garçon la repris l'autre soir;
« Je li irencha[i] la teste a mon branc vianois.
« Demandez leTomile, qui ci sietdelez moi,
« Qui reprist le garçon qui avec li gisoit ;
365 « Comme autres a sa famé ses talenz en faisoit. (/. 8)
— Et vos, sire Tomiles, qu'en direz ? » dist li rois.
— Sire, » dist li trai[t]res, « se peser ne vos doit,
« Je jugeroie bien qu'on la deiist ardoir :
« Ele est tote provée d'oîr et de veoir. »
370 Adonc parla Moriz, Amauris et Jofroiz;
Li .j. est niés Doon, sui cosin sont li doi ;
« Par les sainz Dieu, Tomiles, ne dites mie voir;
« Ma dame ne fist onques putage ne desloi.
— Toz en es perjurez, cuverz », ce dist Jofroiz ;
375 « Prez sui que m'en combate contre vos orendroit,
« Seus et seus par mes armes, lassus en ces chaumois.
« Ou encore autre jeu vos partirai ainçois :
« Soiez .V. chevalier, nos ne serons que trois,
« Puis ce venez combatre lassus en ces herboiz ;
38o « Se ne vos rendons pris et recréant le roi,
« Si nos face mes sire desmembrer et ardoir.
« C'est ores granz merchie[z] de .v. homes a trois,
« Mais encor est plus granz de Tome qui est droiz.
— Sire », ce dist Tomiles, « n'en combatrai des mois.
385 « Demandez le Doon, qui est ci delez moi,
« Qui reprist le garçon o qui ele gisoit, .
« Com autres a sa famé ses talenz en faisoit.
« Il ocist le garçon a son branc vianois.
— Sire Do de La Roche, qu'en direz ? » dist li rois.
•
362 b. manois, cf. v. 388. — 369 tout p. — 374 es perius.
— 376 Seul et seul; c. chanoi avec signe d'abréviation sur
Ta. — 38o ne nous r. — 383 p. grant a l'o. q. e. droit — 384
de moi — 386 Om; g. q. avec e, — 388 b. manois, cf.
V. 363
le
DOON DE LÀ ROCHE
390 « t0r]alôns en la chambre; ma seror vuéil vebîr. (v»)
— Sire », ce dist dus Do, « com vos plaira si soit.
« Lors parlerez a li, la métrez en destroit. » .
En la chambre s'en entre Pépins li gentiz rois
Quant la dame le voit, encontre se levoit;
395 Ele s'agenoilla; es pies li vait cheoir
Por merci deprïer, car mestiers l'en estoit.
Et li rois traist Tespée, qui corrociez estoit :
Ja'n eiist pris la teste quant i vienent li .iij. .
Adonc parla Moriz, Amauris et Jofroi[z],
400 Li .)'. est niez Doon et sui cosin li doi :
« Sire douz emperere, ice n'est mie droiz,
« S'ele a fait son pechié, par la foi que vos doi,
« Que on ladoieocire, desmembrer ne ardoir;
« Preigne sa pénitence bonement, sanz deloi,
405 « De faire les juïses qu'ele Doon ofroit.
— Seignor », ce dist li rois, « com puis ore desver
« De la plus bêle dame de la crestïenté
« Que j'avoie Doon, le riche duc, doné,
« Le meillor chevalier de la crestïenté !
410 ft Por quoi m'a la mauvaise boni et vergondé?
— Sire, » ce dist la dame, « se ainsi m'aïst Dés,
« Hé ! Dex, ja sui je preste de juïse porter,
« Soit en feu ou en eve ou la ou vos voudrez.
— Et vos, sire Tomiles », dist li rois, « ce oez
41 5 « Com ma suer se poroffre a juïse porter : (/". g)
« Ele nel feïst mie, por les membres coper,
« Se ne seiist en li molt très gran* seiirté.
— Sire », ce dist Tomiles, « oez et escoutez :
392 la, ms. sa, — $99 Amauris, ms. et MauHs. — 408 j'a a D02
— 41 1 se, ms. ne. — 416 E. ne le f.
bOOK DE LA ROCHE !7
« Ce que vi a mes ieus n'a mestier de monstrer.
420 « Il n'a soz ciel larron, tant ait avoir emblé,
« S'on le lait escondire, qui ja soit pris provez. »
Quant l'entendi la dame, si commence a plorer :
« Certes, sire Tomiles, bien sai que me haez.
« Diex m'en face venjance, qui en crois tu penez.
425 « Ne puis envers vos toz ne tencier ne plorer,
« Car parole de famé ne puet avant aler :
« Ja n'avra si grant droit ne soit a tort tornez.
XI
— Sire droiz emperere, » ce dist Do de La Roche,
« Fols est qui famé croit quant juïse li ofre :
430 « Ce que vi a mes ieus vuet torner a fantosme;
« Le garçon ocis jou, par saint Pierre de Rome. »
Dist Tomiles li lerres : « Mervoilles en oi ores.
« Hé ! ber, car trai l'espée, la putain si afole. »
Il issi de la chambre, si hauça sa parole,
435 Que Normant et Breton et Loereing le sorent,
Etli moine et li clerc des mostiers et des cloistres
Ou Olive ot doné et calices et croces
Et dras et vesteiires, estamines et botes. . .
« Haï! Olive dame, franche riens, douce chose,
440 « Cil Sire vos garisse, qui soztie[n]t tôt le trône
« De vostre part remaine li biens faiz et l'aumosne.
XII
Or es vos la mervoille par la vile espandue ;
419 Et que maines {ou ui a mes) uuet cnz a estre monstrer; c/.
V. 43o. — 421 qui, ms. que. — 431 J'occis le garçon. — 439 Ha
dame Olive. Les vers 43g-4i semblent devoir être placés dans la
bouche des clercs du v. 436, comme quelques vers plus bas, mais
alors il faudrait supposer qu'un vers annonçant ce discours a été
omis.
"iS " booK DE LA Roche
. Chevalier et serjant en emplirent la rue,
Puceles et meschines la rescrïent et huent,
445 Ces clerc et ces chanoine qui par les mostiers furent, *
Ou Olive ot doné [et] palefrois et mules,
Estamines et croces, cierges et vesteiires.
« Haï ! Olive dame, de la vostre aventure !
« A quel tort seras, lasse, démenée et destruite!
450 « Cil Sire vos garisse, qui fu mis el sépulcre. »
Li rois ist de la chambre, tozli fronz li tressue :
« Seignor franc chevalier de France et de Herupe,
« [Se] ma suer m'a honi, ce n'est mie droiture
« Qu'ele pour ce doie estre afolée et destruite,
455 « Se li boin chevalier de ma cort ne la jugent. »
Plus de mil chevalier envers lui se remuent :
« Sire bons emperere, por quoi feras destruire
« Olive ta seror et livrera martire?
« S'ele a fait son pechié, c'est a famé nature ;
460 « Mais por ce ait l'onor de sa vile perdue,
« A Doon de La Roche ne soit ele mais drue. »
Et respondi li rois : « Ce n'est mie mesure
« Qu'a Doon l'Alemanten soit l'onor tolue,
« Ainz vueil bien que il l'ait, car c'est droiz et mesure ;
465 « Ja Olive ma suer n'en tenra teneûr[e].
— Lasse ! » ce dist Olive, « or sui je bien vaincue {f. 10
« Quant mi ami charnel premerain me forjurent. »
XIII
Quant part Do de La Roche de sa famé acest di,
Li gentilz Alemans qui fu proz et hardiz,
%
443 Serjant en emplirent chevalier tout le r. —444 la, ms. le.
— 446 Cu ele ; cf. 43 j. — 420 es sépulture. — 453 Ma serors —
458 Je ne sais quel mot substituer à martire. — 463 l'onor,
ms. lantor. — 464 qui lait. — 467 mi, ms. Tiulr. — 468 Q. Dox p.;
c. dit.
DOON DE LA ROCHE 19
470 Onques nus hom de char plus grant dolor ne vi
Des dus, des arcevesques, des princes dou paîs.
Ele a dit .iij. paroles qui départent d'ami :
« A Dieu vos cornant, Do, qui en la crois fu mis.
« Frans hom, se me vosisses encor[e] retenir,
475 « Gomme .j. autre chaitive vos servisse toz dis ;
« Ne rovasse avoec vos ne mangier ne dormir ;
« Quant ore ne puet estre, n'i queîsse gésir,
« Ainçois fuissent no lit a toz jors départi.
— Mauvaise, » fait li rois, « tornez vos de sor mi;
480 « Ja ne vos amerai a jorque soie vis.
« Ne tenrez de ma terre .j. pie ne . j. demi ;
. « Ne ne vos amerai, car soing [n'] ai de Landri :
« Onques nefu mes niés n'onques nem'apartint. »
XIV
Quant part Do de La Roche de sa famé ace[l] jor,
485 Onques nus hom de char ne vit si grant dolor
De dus et d'arcevesques, de princes, de contors.
Ele dist .iij. paroles qui desoivrent d'amor :
« A Dieu vos comant, Do, du ciel le creator ;
« Frans hom, se me vosisses retenir avuec vos,
490 « Come une autre chaitive vos servisse toz jors.
— Mauvaise, » dist li rois, « tornez [vos] de sor nos; (v*)
« Je ne vos amerai que je vive a nul jor,
« Ne ja Landri vo fil ne clamerai nevo. »
Hé 1 Diex, puis fu tel ore qu'il li ot tel besoing
495 Qu'il fust déshéritez, quant Landris le rescost.
470 g. d. n'oïst. — 472 d. d'amis — 474 vosissies encor r. — 477
mqueisse. — 478 A. fuissiés vos litz a trestous. — 482 Cf.
V. '/45. — 484 Q. Doz p. — 486 de p. et de c. — 489 ce me vosis-
sies r, avuel v. — 49? tenez desus n., cf. vv. 47g, 80g. — 493
filz. — 495 L. le resconte.
10 DOON DE LA ROCHE
Tomile de Coloigne fist il puis del chief blos
Et gehir par la gueule le pechié orguillos
Com il mena sa mère par ses granz traïsons.
XV
La suer le roi de France fu molt forment irée ;
5oo Ou ele vueille ou non, [de] la tor l'avalèrent.
Ele crie et huche a molt grant alenée :
« Haï ! Pépins de France, por quoi faites ce, frère,
« Que de Tonor me getes que m'avoies donée?»
En France s'en rêva Pépins nostre emperere,
5o5 E Do li Alemanz en la sue contrée;
Sa suer ne son nevo n'en laissa il denrée.
XVI
La suer le roi fu molt dolente et corrocie ;
Ou ele vueille ou non, l'ont jus de la tor mise.
Quant ele ist dou palais, si huche et si crie :
5 10 «Haï! Pépins de France, por quoi ce faites, sire,
« Que de l'onor me getes ou tu m'avoies mise?
« Certes, lot [ce] me fait li traîtres Tomiles.
« Diex m'en face venjance, li filz sainte Marie. »
2 '«I ■/ .L ostel li ont quis la desus en la vile ;
5i5 Chascun Jor a .ij. pains : tele fu sa devise;
Iluec se desduira come .). autre chaitive.
.ic'.-
XVII
Nostre emperere s'est en France repairiez,
La desus a Paris, en son demoine fié,
496 f. il plus le ch.blou. — 5oo la t. li a.
DOON DE LA ROCHE 21
Et si a Loereigne au duc Doon laissié;
520 Sa suer ne son nevo n'en a laissié plain pié.
Tomile[s] de Coloigne cliascun jor se porquiert
Comment il doinst sa fille au duc, li aversiers.
r
Damediex la maudie, qui en croiz fu dreciez.
XVIII
:^
Olive la duchesse ot molt le cuer dolent
525 De ce qu'ele est retée de traïson par tant,
De chose dont n'ot onques corage ne talent,
Et si em pert La Roche et l'onor qu'i apent
Et son seignor Doon, qu'ele paramoit tant.
Plus que nule rien qui fust ou siècle vivant.. .
53o A son ostel ou ore norri bien son enfant,
Landrïet le petit, tant que il ot .vij. anz :
Mieldres est ses aages que autres de .x. anz.
Et Do fu a Coloigne, ou il tint ses corz granz,
Norri ses chevaliers, s'aleva ses serjanz.
535 Atant es vosTomile sus ou palais errant,
Et apela le duc tost et isnelement :
« Sire )),dist li traître, « entendez mon semblant;
« Une rien vos dirai, si vos vient a commant :
« Car donez dame Olive a .j. de voz serjanz,
540 « Jamais a la putain [ne] serez atendanz;
« Puis porquerrez tel famé de cest jor en avant
323 e. restée. — 326 dont, ms. que. — 529 q. fut en cest s. On
pourrait encore proposer, pour avoir une meilleure coupe, P. q.
n. autre rien en cest s. v. — Après ce vers il semble bien qu'il y
ait une lacune, à moins que le suivant ne soit corrompu. On pour-
rait supposer quelque chose comme ceci : [En la vile vesqui la
dame povrement], En son ostel... — 532 Mas miedres. — 535
Etant. — 537 traître, ms. aultre. — 540 p. s. mais a.
îi'- DOON DE LA ROCHE"
« Dont Damediex de gloire vos doinst .j. tel enfant...
« Qu'[en] après mon décès tiegne mes onors granz. » (v»)
Quant l'entent li traîtres, si fu liez et joianz;
545 Ja dira tel parole dont puis remest dolenz.
XIX
Chascun jor se porquiert li traîtres Tomiles
Comment il ait doné au duc [Doon] sa fille.
.1. jor l'a encontre, si li a pris a dire :
« Sire Do de La Roche, ce me semble folie
55o « Que vos ne prenez famé dont aiez fil ou fille
« Qui desoentre vos vostre onor tienne quite. »
Et respondili dus : « Je n'en sai nule, sire,
« Qui ne soit ma parente ou si près dame Olive,
« Ma premeraine famé, ainçois que [la] prelsse;
555 « N'en avrai ja mais nule de si grant seignorie. »
Et respont li traîtres : «Je en sai une, sire,
« Qui molt est proz et sage, si est molt vostre amie.
— Tomiles, » dist li dus, « qui est celé meschine?
— Sire, » ce dist Tomiles, « c'est une moie fille
56o « Qui est molt tréscortoise, si est de sens esprise,
« Ele done por vos les pailes et les cires.
« Je tienz .iiij. chasteaus en la moie baillie
« Et la grant visconté de Gormaise et d'Espire;
542 nous d. Le discours de Tomile est inachevé, et le v. 543
paraît être la conclusion d'une réponse de Doon à laquelle manque
le commencement; ou encore {mais cette supposition est moins pro-
bable), on pourrait rattacher le v. 543 au discours de Tomile en
le corrigeant ainsi : Qu'en après vo décès {ou Qu'après vostre d.)
t. voz o. g.; mais, dans cette seconde hypothèse, il faudrait
admettre que la réponse de Doon aurait pris place entre les vv.
543 et 544, et manquerait tout entière. — 55 1 Qui de comme
vous tr'es vostre honeur tout quicte. — 554 »• <1- je perise —
559 ce une mée f. — 56 1 les pelés ; cf. v. 6o3, les cend^us çt Içs
cires. — 563 de Gormai et de Spire; cf. v, 848,
DOON DE LA ROCHE
23
«( Par la foi que vos doi, je vos daim trestot quite;
565 « Et si vos en donrai de besanz pleine emine,
« .XX. muiez toz chargiez d'or et d'argent, [beaus] sire. »
Avoir fiert molt granz cops, pieç'a que l'oï dire.
« Je la prendrai », dist Do, « se Pépins la m'otrie;
« Il me donna a feme sa seror dame Olive :
570 « N'en avrai jamais nule de sens si bien garnie. » (/. 12)
XX
Estes vous la novele par la vile espandue.
Serjant et chevalier [en] emplirent les rues;
Il montent es chevaus et es fautrées mules ;
De ci que a Paris n'i ot règne tenue.
575 Tant font par lor jornées que il a Paris furent.
Vindrent en la cité, si descendent es rues.
A rencontre [en] alerent cil qui les coneûrent...
Et quant le voit li rois, contre lui se remue;
Premièrement demande : « Qu'est ma suer devenue?
58o « Hé! las, come il me poise de la sue aventure!
— Sire, » ce dit Tomiles, « jâ est ele si pute
« Que ne se garde d'orne la foie créature.
« Ainçois se maintenra comme autre créature.
— Tomiles, » dit li rois, « bien l'avez maintenue ;
585 « Mais, par icel apostre qu'on requiert ou Sépulcre,
« Se par autrui ne fust provée et perceiie,
« Pieç'a qu'en eussiez celé teste perdue.
565 de resans p. aminé. — 567 sic ms., cf. v. 610 — 570 avrai, ma.
amai. — 573 en est ajouté pour compléter le vers, mais on pourrait
aussi proposer ont emplies. — 373 m. a c. — 374 roine t. — 576
font, corr. vont ? — 576 es, ms. as — 577 A l'e. a. ci quil connegu-
rent. — 578 lui ne s'explique qu'à condition de supposer que dans un
vers précédent, qui serait omis, il aurait été parlé de Tomile ou de
Doon, — 583 créature a visiblement pris la place de quelque autre
fHOten ure, — ^8<^ majntenuç est peu satisfaisant; cqrr, coneOç ]
DOON DE LA ROCHE
— Hé! las », ce dist Tomiles, « maie croiz ai eue
« Quant, por bien et par foi et par bone nature
590 a Et por mon droit seignor, m'est tel poine creiie.
XXI
— Sire, » ce dist li dus, « je n'en sai nient [penser],
« Mais vez ici Tomile qui me fait grant bonté,
« Que il n'a c'une fille, si la me vuet doner,
« Et .iiij. forz chastiaus et .ij. granz viscontez. »
595 Et respondi li rois : « Je l'otroi a son gré,
« Quant il de ma seror ne puet estre amendé;
« Mais ja ne ferai chose dont je plus soie irez.
XXII
« Dites, sire Tomiles, » ce dist li rois meïsmes,
« Ou est dont celé famé, ne [le] celez vos mie,
600 « Que li dus Do penra en la soie baillie?
— Sire », dist li traître, « et ja est ce ma fille,
« Qui molt est proz et sage, cortoise et enseignie.
« Ele done por lui les cendaus et les cires,
« Si n'a si bêle famé jusqu'au port de Surie.
6o5 <f Je tienz .iiij. chastiaus en la moie baillie
« Et les granz viscontez de Gormaise et d'Espire :
« Par la foi que vos doi, je li claim [tresjtot quite,
« Et je vous en donrai de besanz ploine emine,
« .XX. muiez toz chargiez du plus fin or d'Afrique. »
610 Avoirs fait molt grant chose, que tote rien otrie.
Et respondi li rois : « Et je l'otri jneîsmes.
588 ai seûe. — Sgi s. néant. — 592 gr. honeur. — Sgô aman- «^
der. — 597 le p. — 604 Corr. jusquas porz(?) — 606 Gornai. J,
— 608 aminé. , ,,;
DOON DE LA ROCHE
25
XXIII
« Sire Do de la Roche, » ce dist Pépins li rois,
« Vos penrez vostre famé, je! vuel et si l'otroi,
a Quant il de ma seror ne puet estre autre roi,
6i5 « D'Olive la duchesse, qui a le cors cortois.
« Mais ja ne ferai chose dont plus forment me poi[slt.
— Sire», ce dit Tomiles, «aiez pa[i]s, ce que doit?
« Laissiez ester le plait de Doon et de moi,
« Et je vos en donrai grant part de mon avoir :
620 « .XX. muiez toz chargiez de fin or arabois.
— Je l'otroi, beaus amis, » ce li a dit li rois.
Le jor en fu li plaiz ou palaiz maginois :
.XX. muiez en reçoit trestoz chargiez d'avoir;
Quant les ot receiiz, si 'n otau cuer enoi.
625 Puis a dit .iij. paroles, coiement, en requoi :
« Ha[ï] ! Olive dame, grant duel porrez avoir
« Quant vos verrez voz règnes autre famé tenoir.
« Miens en ert li domaiges, car je[l] sai et otroi. »
(/ i3)
XXIV
Do demande congié et Tomiles li lerres ;
63o « Seignor, alez a Dieu, » si a dit l'emperere;
« Quant noces volez faire, [soit] ma serors remese;
« Mais dorénavant vueil qu'ele soit bien gardée
« Et de vair et de gris richement afublée,
« Si ait en sa compaigne .iij. homes a espées;
635 « Et qui mal lui fera, si soit chier comparée.
« Guidiez vos, sire Do, par l'arme vostre père,
« Que, se Landris vit tant que [il] ceingne l'espée,
6i3 V. jo. — 614 autre roi, sic ms., altéré — 626 pouez a. —
627 vos remmes a. f. tenir. — 628 je sais. — 629 a To. — 63 1 •
reniese. — 633 devers. — 634 compagnie — 637 ceigne, ms. ceinde. (
î6 DOON DE LA ROCHE
« Que il ne vueille avoir l'onor et la contrée
« Que je avoie vos et ma seror donée? »
640 Quant l'entent li dus Do, s'a la teste enclinée,
Puis a dit .iij. paroles coiement, a celée :
« Haï! Olive dame, com vos vi bêle et clere,
« Et com vos estïés cortoise et bien senée!
« Maleo[i]te soit l'arme tel parole a menée
645 « Dont m'amor et la vostre est ainsi desevrée.
Il montent es muiez, s'acoillent lor errée ;
De ci que a Coloigne ne firent arestée ;
Ainsi i sont venu a lor bêle jornée.
XXV
Ce fu après la Pasque, que li mais doit entrer, ^^0
65o Li dus fu a Coloigne de La Roche li ber, '
. Li cortois Alemans qui tant fait a loer, (v»)
Et dut ses noces faire, s'autre famé esposer,
C'est la fille Tomile, le traïtor mortel,
Audegour la cuverte; son cors maudie Dex.
655 Et Landris fu petiz, mais molt fist a loer,
Li niés le roi de France, qui tant par estoit ber.
Par le mien escient, n'ot que v[iiij] anz passe[z],
Mais sages fu et cointes, vistes [et] empariez :
Chascuns li rueve dire, par soi vuet délivrer.
660 Olive la duchesse li a dit et conté,
Asses et Guinemanz, qui le porent amer :
« Quant vos verrez vo père au pueple assemblé,
« Qu'il devra s'autre famé plevir et esposer,
« Vos irez au mostier, si le contredirez;
641 et c. — 646 errée, ms. ferrée. — 653 El doit. — 657 Cf.
vv. ygS et 884. ~ 658 cointes, ms. de coste. On lirait pMôf
justes ^ue vistes. -^ 660 \% çluçiie,
DOON DE LA ROCHE 2^
665 « Millor plait en avrez, se vos le ....
a Et millors tesmongnages, se mestier en avez.
— Seignor,» ce distLandris,«car me laissiez ester:
«c Je lui dirai molt bien et mieus, se vos volez.
« Je sui peiiz et enfes, si n'i porroie aler,
670 « Et la presse est molt grant ; car m'i faites porter,
a Si irai mon dommage et ma honte esgarder. »
Olive la duchesse l'a en ses bras levé ;
Venue est au mostier, fait la presse coper;
Dont se taisirent tuit, et Landris a parlé,
675 Li niés le roi de France, li damoiseaus senez.
Ja parlera li enfes com ja oir porrez :
« Sire dus de la Roche, grant pechié i avez,
« Qui ma dame laissiez, autre famé prenez,
a Et moi tolez ma terre et autrui la donez. if. 14)
680 « Ma dame est tote preste de juïse porter,
« Soit en feu ou en eve, ou la ou vos voudrez.
« Sire, car me resgarde; si t'en prengne pité :
« Ja n'a il soz ciel home, s'il m'eust engendré,
« Que a molt grant merveille que ne m'eiist amé;
685 « Et diable en ont si vostre cuer remué.
a La vostre char meisme com poez ahonter?
« Tuit cil qui vos esgardent sont tuit mi parjuré.
« Encor vos porrai faire félonie et viuté :
« Se Diex me laisse vivre c'armes puisse porter,
690 « N'en penrai .j. vivant que je voise encontrer
« Ne lui face les membres et la teste coper.
« Et vos, sire arcevesques, ques avez esposez,
« De par nostre apostoile, qui tient crestïenté,
« Vos desfens je très bien que messe n'i chantez.
665 si vous le pourchassez, leçon inadmissible tant pour le sens
que pour la rime. — 668 1. dirais — 669 si, ms. se — 684 amer. —
685 remuer. — 687 resgardent. — 688 viuté, la leçon du ms. est
peu claire; on peut' lirç boptç çu veuté. — 6^0 Nan panrai .j, ;
rien je ne v, ç, _ ^ ....i.*a
«Kr DOON DE LA ROCHE
695 « Et VOS, sire Tomiles, [s"]or[es] vos en gabez,
« Vos ferai tondre en croiz com .j. autre desvé ;
« A la cowe d'un mul vos ferai anoer,
« Qui vos combrisera et la boche et le nés.
« Par trestote Coloigne vos ferai traîner,
700 « Tant qu'a vo fier lignage il sera reprové. o"^o
« Par ces amples costieres vos ferai démener,
« Que les membres trestoz vos avrez desnoe»,
« Puis les ferai recuerre et en .j. ru giter;
« Et certes, nis la terre ou li sans ert colez
705 « Ferai je depecier, foïr et grafîner,
« Puis le ferai ardoir et la poudre venter. (v*)
« Tout ainsi faitement vos ferai démener. »
Quant l'entendi [Tomiles], s'a Doon apelé :
« Sire, » dist li traître, « com est fel et enflez!
710 « Encor fera il pis se il vit son aé. •
« Se vos le commandez, ja l'avroie tué. ^
— Tomiles, » dist li dus, « car le laissiez ester :
« Il est molt juenes enfes, si dit quanque il set.
« Vos vos devez taisier, qui corpes n'i avez. »
715 Puis a dit .iij. paroles coiement, a celé;
« Haï ! Olive dame, com grant duel vos avez !
« Ne rote ne viole ne vos puet conforter.
« Certes, se ce n'estoit por vo grant parenté,
« Et que a mon lignage ne fust trop reprové,
720 « Ne vos vosisse perd[r]e por l'or de .xx. citez. »
XXVI
Molt fu grande la corz a Coloigne la cit.
Quant Do ot assemblez les barons du pais.
Le jor a prise famé sanz congié de Landri;
Ce ne fu pas por ce n'i meîst contredit,
697 d'une mule. — 704 nés, sens. — 705 Fera ne — 711 com-
niandiés. — 712 1. a e. — 713 si, ms. cil. — 717 r, de v. — 721 .
granz, cité.
DOOM DE La roche 29
725 Mais, se li enfes vit tant qu'armes puist baillir, ,
Ce est .). mariage qui durera petit.
Du mostier sont issu, ou palais se sont mis :
Les tables furent mises, a[l] mangier sont assis;
Cil jugleor si chantent et demoinent granz ris.
730 Qui que chant ne qui lait, Olive n'a nul ris,
Ainz plora tendrement et tint son fil Landri;
De ses braz le descent, si le mist devant li;
Ele plore des iex, si gete granz sospirs :
« Beaus filz », dit la duchesse, « estez ci .j. petit;
735 « S'esgardez vostre père qui a famé me prist, [f. i5)
« Qui me hait si du cuer que ne me puet veïr. »
— Mauvaise, » dist Tomiles, « car tu le mesfeîs
« Tôt au pleur garçon de trestot ce païs ;
« Do li trencha la teste a son bran acerin.
740 « Se li dus me creoit, il t'ardroit le matin,
« La defors ceste vile, en .j. bordel petit.
— Mauvaise, » dist li dus, « tornez vos en de ci :•
« Je ne vos amerai tant que je soie vis,
« Ne n'avrez de ma terre ne plain pié ne demi,
745 « Ne ne vos amerai, car soin n'ai de Landri;
« Par la foi que doi Dieu, onques ne m'apartint.
— Sire, » dist la duchesse, « porTamor Dieu, merci!
« Preste sui, s'il vos plait, a porter .j. juïz,
« Soit en feu ou en eaue ou en autre péril,
750 « Que ne Toi en pensée ne ne le consenti.
— Par Dieu, » ce dist li dus, « n'en avrez escondit,
« Car vos estes provée de veoir et d'oïr. »
Quant l'entent la duchesse, si enforce ses cris,
Et garda a la terre et voit son fil Landri,
755 Ele plore des iex et giete granz sospirs :
« Beaus filz, » dist la duchesse, tt tant par estes petiz !
725 a. puet. — 729 chantant, demoine. — 73o P.-é. qui[l] lait(?)
— 73 1 tient. — 737-8 Ces deux vers s'accordent mal; p.-é. un
vers a-t-il été omis entre les deux. — 741 La defroit. — 755 Et.
— 756 f. ce dit.
'30 tJOON DE LA ROCHE
a Lasse! que n'es si granz qu'armes puisses soffrir!
« Si penroies venjance du gloton maleït
« Qui si juge mon cors et livre a juïz.
760 — Taisiez vos, bêle mère, » ce li a dit Landris,
« Vos n'avez ceanz père ne parenz ne amis,
« Ne mais que moi tôt seul que portasies a fil.
a Je ne vos faudrai ja tant que je soie vis.
« Car laissiez [or] le duc ses noces maintenir,
765 « Et mon seignor Tomile dire tôt son plaisir :
a Se je puis vivre tant qu'armes puisse baillir,
« Ce est .j. mariages qui durera petit.
« Quant je voi bien [huimais] n'i troverai merci,
« Ne m'i cèlerai mais, par les sainz que Diex fist,
770 « Car s'est home qui die qu'o vos putage fist,
« Prez sui que lui combate très par mi cest larriz,
« A cheval et a armes, en mi ce pré flori :
« Si soit Jésus au droit, qui en la croiz fu mis.
« Se je sui en bataille recreanz et matiz,
775 « Dont en prengne venjance mes sire a son plaisir.»
Quant entent la duchesse que ses enfes a dit,
Que, selonc son pooir, li vuet faire escondit,
Pasmée chiet a terre devant les moz Landri,
Quant li enfes la lieve par le peliçon gris.
780 Et tuit cil dou palais en sont tuit esbahi;
Il n'i ot si hardi que .j. seul mot deïst,
Mais entr'eus vont disant coicment et seri :
« Bien a parlé cil enfes, granz mervoilles a dit.
« Se il puet ja tant vivre qu'armes puisse servir,
785 « Ce est .j. mariages qui durera petit. »
Quant Tomiles Toit, a poi n'enrage vis :
Il a pris son gant destre, sel présente Landri :
« Vez moi ci em présent de combatre vers ti,
757 puissjés. — 766 tant vivre. — 770 Car nome dont qui voz pu-
taige fit. La correction est fort incertaine. — 771 combatre; on pour-
rait garder cet infinitif en substituant de à que. — 787 sel, ms. soi.
DOON DE LA ROCHE
3l
« Que il n'a si putain en .Ix. pais.
790 — Vos i mentez, maus sers, » ce li a dit Landris.
Il garda a la terre, vit un baston gésir,
Tost et isnelement celé part corant vint ;
Plus tost qu'il onques pot a ses .ij. mains le pri[s]t,
Par la sale repaire coreços et maris.
795 L'enfes avoit .viij, ans, corne la geste dit;
Ou que voit le traïi[r]e, ne l'a pas meschoisi,
Ainz va feri[r] Tomile devant, enmi le vis.
Amont parmi les iex, entre les .ij. sorciz;
Tôt li a fait sanglant et la boche et le vis
800 Et les goles de martres dou peliçon hermin :
Ou que il vueille ou non, a la terre chaï.
Quant le vit li dus Do, molt Joios en devint.
Il tressailli la table, que le vin espandi ;
Tost et isnelement celé part corant vint;
8o5 Ou qu'il vit le trait[r]e, si l'a a raison mis :
« Par les sainz Dieu, Tomiles, il n'ira mie ainsi.
« Apelez . j . tel home vers vos se puist tenir ;
« Je ne vuel mie perdre la mère et le fil.
« Olive, » fait li dus, « tornez vos de sor mi ;
810 « Je vos hai tant de cuer que ne vos puis veïr.
XXVII
« Alez a vostreostel, » dit li dus, « dame Olive;
« Molt vos hai de mon cuer et si ne vos aim mie.
« Faites voz mauvaistiez et vostre puterie. {V)
— Ne[l] dites mais, biaus sire, » ce li a dit Olive;
81 5 « Je ne fui onques pute, Diex le set, nostre sire.
« Ou vos vueillez ou non, serai Je vostre amie,
a Si serai a voz piez et a la terre encline ;
7g5 corne la g. le d.; on pourrait aussi garder le en lisant
corn. — 797 A. na — 800 de martecs. — 807 se peut.
— 810 V. peut.
i'v)
^2 DOON DE LA ROC^Ë
« Car ja n'amerai famé qui vers home se prise,
« Avant que s'amistié ait ainsi reconquise. »
820 Quant l'entendi li dus, a poi n'enrage d'ire;
Il sospire de cuer com hom plains de grant ire,
Et parla hautement, si que François l'oïrent :
« Par foi, Olive dame, ainsi n'ira il mie,
« Car vos estes vers moi si durement mesprise
825 « Jamais n'orrons ensemble ne messe ne matines. »
Et respont la duchesse : « Dont m'en irai je, sire.
« A Damedieu de gloire, le fil sainte Marie,
« Commant je vostrecors, que de mort le garisse.
« N'en deïst hui a[u]tant tel a en ceste vile ».
83o Olive s'en torna dolente et corocie,
S'en maine devarft li Landrïet le nobile,
Car ne l'ose laissier por les parenz Tomile
Dont la foie estoit grant en la sale perrine.
Com or le voit Landris, si commence a rire,
835 Car corroz a enfant ne dure gueres mie;
Il regarde sa mère qui plore et sospire.
Et voit ses iex moilliez com pleine de grant ire;
Or dira tel parole, onc greignor ne veïstes (/, ly)
D'enfant de son eage qui muere ne qui vive :
840 « Taisiez vos, bêle mère, por Dieu le fil Marie.
« Oan oi jou .vij. ans, si com je vos oi dire,
« Certes, en petit d'ore [ert] que j'en avrai .xv.,
« Que porrai porter armes, s'il est qui les me livre;
« Si ferai je a .x., or est plus corz termine,
845 « Puis manderai o moi les contes et les princes,
« Trop lor donrai or fin, besanz et manandies ;
« Il vendront tuit a moi, si feront mon servise.
818 amerai, sic ms,, corr. amera (?) Le vers n'est pas clair. —
819 Autant. — 829 atant telle. — 833 foie, ms. sale. — 835 C.
trestons. — 838 Ains d. t. p. ains grans ne veïst; on préférerait
ne [on nen) oïstes. — 841 Je avérai vij ans. // serait légitime
de remplacer vij par viij, cf. v. ygS. — 842 avérai. — 843 Q. pou-
ras. — 844 est, corr. ert(.'')
DOON DE LA ROCHE
ÎS
« Je vos rendrai Coloigne et Gormaise et Espire,
« Et la tor de La Roche dont vos fustes fors mise.
85o « Encor vos ferai dame de [grant] fermeté riche. »
Quant l'entent la duchesse, s'en fu si esbaudie
Qu'ele n'ot onques cure de sa maie haschie,
Ainz apela le duc, si li a pris a dire :
« Sire Do de La Roche, dès or m'en vois je, sire. »
XXVIII
855 La dame s'en torna, finée a sa parole
Et Tomiles commence et [si] haste ses noces;
Par le mien escient, comparé ert encores.
Chantent cil jugleor et violent et rotent.
Des Aiz a la Chapele jusqu'à Bacce a la porte
860 Et de Verdun ou mont entre ci que a Roinne
Ne remest plus cité, tant fust de haut mur close,
Que Landris ne preïst par vigor et pai- force;
Et par mer et par terre mena il tel esforce.
De plainne Monpeillier jusqu'à Gonstantinoble (v®)
865 Et de Montefleune deci qu'a Finepople,
Ne remest plus paien, Sarazin ne Turcople,
Que ne feïst passer par mi le Bras Saint George,
Ce est une rivière qui molt est roide et forte;
Dont la chançons commence mervcillose dès ore.
852 mal' adventure. — 855 f. a s'orisoraison. On serait porté
à corriger sa raison ; mais alors il faudrait supposer que le v. 855
est le début d'une laisse dont la suite nous manque. — 858 Après
ce vers il y a une lacune. Les vers suivants annoncent visible-
ment les exploits de Landri, mais rien, dans le texte, n'indique
qu'il s'agit de Landri. — SSg sic. — 860 Et de V. il sont antresi
q. a Roinne. Par Roinne il faut entendre le Rhône. — 862 Que
on ne prist p. v. ou p. f. — 865 Montefleune ou Montefleuve. —
868 Si; fort et roide.
l4 DOQN PE LA ROCHE
XXIX
870 Cç dit sainte Escripture, si [com] savez bien tuit,
Que ja de mauvais arbre ne issera bon fruiz.
Or norrissiez .j. lop tant qu'il soit parcreuz,
Quant vos l'avrez nori, gardé et bien peii,
Toz tens sera il lous ; cuidiez qu'il desnaturt?
875 Quant vos bien li ferez, de lui gardez vos plus :
Il mangera voz bestes et gaster avoz fruiz.
Do a pris[e] sa famç, mervoilles fist li dus.
A la fille Tomile a celé nuit geii
Et engendra .j- fil ' fel et enragiez fu,
880 Car puis mist Loeroigne en dolor et em bruit.
XXX
Do de la Roche fu corociez et irez,
Et fu par sa folie de tôt desconfortez ;
Et Landris fu petiz, mais molt fist a loer.
Par le mien escient n'ot que .viij. ans d'aé,
885 Et si vait a la cort ou pas ne fu amez.
La famé que Do prist l'avoit coilli en hé,
Audegours la cuverte (son cors confonde Dex)
Et de fait et de dit et de quanqu'ele set.
« Sire Do de la Roche, nos somes asemblé
8go « A tort et a pechié et a mal, ce veez.
« Pieç'a que vos ai dit que vos Landri n'amez
a Ne ne le norrissiez, ne ja ne l'alevez.,
« Car enfanz d'autre famé ne doit on ja amer.
« De mon père ai mervoille que tant l'a enduré,
871 istera. — ^ 875 bien, ms. mal. — S80 Car plu» iuit Leoroi-
gne et dolor embruit. — 882 descontez. — 883 fist, ms. fut. —
886 le coillit antehee. — 887 la couverte. — 888 Lacune après ce
versl — 891 Passes vous. — 893 de te f. — 894 Je me mervoille
de mon père.
POON DE LA ROÇHB 3^
895 « Que il ne Ta ocis ou noie ou tué.
« Assez querez engin par quoi fust acordez.
— Dame », dit li dus Do, « car me laissiez ester.
« Si malement me puis ou lignage fier
« Qui chasçun jor me ruevent mon enfant afole[r].
XXXI
900 — Sire dus de la Roche, bien sai, » ce dit la dame,
« Que vos riens ne m'amez; de ce sui en fiance,
« Ainz maintenez a tort dame Olive de France :
« Chascun jor i gisez quant il vos atalente.
« Guidiez que bel me soit et n'en soie dolente ?
905 « Ja ne verrai Landri que n'aie duel ou ventre.
« Car li faites cest uis de cest palais deffendre.
— Dame, » dit li dus Do, « or oi plait qui m'adente.
« Maleoite soit l' eure que venismes ensemble ! »
XXXI L
Or voit Landris li enfes, qui auques s'aperçoit
910 Et set le grant outrage qui chascun jor li croi[s]t.
L'enfes vat a la cort et au main et au soir,
Et la maie marastre le bote de sor soi,
Audegours la cuverte, cui Dieu grant mal otroit.
« Filz de putain, bastarz, fui de ci d'avant moi.
91 5 « Va ou bore, a ta mère ; trop est riche d'avoir :
« Assez lui ont doné chevalier et borjoi§ ;
« El ne se garde d'ome qui de mère nez soit. (v<>)
895 Q. il ne vous a 0. n. — 896 p. qui f. — goS que n'an a.
906 c. us — 907 me dante — 90S Maldite s., q . nous v.j — 909 s'
manque. '^ 914 b, fut. — 917 Elle, soit nez.
i6
DOON DE LA ROCHE
— Dame, » [ce] dist li dus, « aiez pais, ce que doit.
« Ja ne vos amera Landris, car ce est droit.
920 a Encor le compar[r]ez a quel fin que ce soit.
« Si en perdrez la teste ; si ne puet remanoir.
— Sire, » ce dist Landris, « certes, vos dites voir. »
XXXIII
Landri[s] va a la cort chascun jor por mangier,
Li niés le roi de France, li damoisiaus prisiez.
925 Tomiles le fait batre garçons et pautoniers :
Si li traient le poil quant il siet au mangier,
Et la maie marastre le bote de ses plez,
Audegours la cuverte, cui Dieus doinst encombrier.
« Filz de putain, bastarz, que demandes, que quiers?
930 « Va au bore o ta mère; trop riche est de deniers :
« Assez l'en ont doné serjant et chevalier.
— Dame, » ce dist Landris, « aiez pais, si m'oiez;
« Laissiez ester ma mère, car riens ne vos requiert.
« Encor le comparrez, par les ieus de mon chief ;
935 « Si em perdrez la teste : ja trestorné n'en [ijert. »
Or est venuz li termes qu'ele dut acouchier,
Si délivre d'un fil; fel [fuj et enragiez;
Il ot a non Malingre ; Dieus confonde son chief.
Li dus le fist en fonz lever et baptisier,
940 Mais aine ne porta foi a home desoz ciel,
Se il le pot traïr, murtrir ne enginier.
XXXIV
Quant li énfes fu nez, granz duel[sj en fu en terfé.
920 quelque, ms. quel. — gaSAinsla couverte — 929 demande
et que. — gSo trope est r. deniers. — 989 f. laver. — 940 ains.
DOON DE LA ROCHE $7
Landris vait a la cort au matin et au vespre.
Et la maie marastre le bat, qu'ele ne cesse : (/. ig)
945 « Filz de putain, bastarz, fui de ci, car tu desves.
« Va a[u] bore a ta mère, car trop est riche, certes :
« Assez l'en ont doné [et] li clerc et 11 préstre ;
« El ne se garde d'omme de cest siècle terestre.
— Dame », ce dist Landris, « car aiez pais et cesse;
gSo « Laissiez caste manière, car pas ne vos apele.
« Encor le comparrez, par Dieu le roi celestre;
« N'en serez trestornée ; s[i] en perdrez la teste. »
Or est venuz li jors [que] ses ventres l'apresse,
Si délivre d'un fil : granz duel[s] en fu en terre.
955 Li dus le fist lever a Ais a la chapele,
Et ota non Mali[n]gre; Dieus confonde sa teste.
Car il ne porta foi a nul home terrestre.
Li niez le roi de France rama[s]t, s'il poïst estre,
Ainsi comme son frère volentiers et a certes : •
960 Quant il l'en vuet baisier, si li guenchist la teste.
Quant Landris ot .x. ans, Malingres entre el setme.
XXXV
Or croissent li enfant et lor bruiz et lor force.
Malingres fu gaignarz, cuverz et de maie ordre,
( Ou que il vit Landri, laidement l'aparole :
\, 965 « Par les sainz Deu, bastarz, molt me poise dès ore
« Que vos vivez céans de mon père et du nostre.
943 et a V. — 945 b. fut. — 948 Elle. — gSB ses v. li a prise
— 953 f. laver. — 937 nul, ms. aul'. — 960 gaichit. — 961 M.
antre .vj. Mais la correction laisse subsister une difficulté,
puisque Landri, au moment du second mariage de son père, avait
huit ans (v. 884). // faut probablement substituer, dans le premier
hémistiche, xv à x. — g63 fu gainnars — 964 Onques n'oit L.
38 DOON DE LA ROCHE
« Vos n'estes pas mes frère, ne li cuers'nel m'aporte
(( Que je ja preigne a vos amistié ne acorde. »
XXXVI
Donques parla Landris, qui fu simple[s] et douz :
970 « Par les sainz Dieu, beaust'rere, grantpechié dites [vos];
« Mes père prist ma mère a joie et a baudor, {v°)
« Olive la duchesse ; n'a plus bêle ou mont.
« .1. péchiez de deable s'est meslez entr'els .ij,,
« Por quoi ne puis avoir demi pié de l'enor.
975 « Haï! Pépins, beaus oncles, por Dieu, ou estes vos?
« Se )e[l] vos demandoie, avroie encor secors;
« Mais por ce nel di mie que jel quiere vers vos :
a Toz tens vos servirai com mon frère menor ;
« Ou soit ou tort ou droit, s'en ferai mon seignor. »
980 Quant l'entendi Malingre[s], a poi de duel ne font :
M Alez en douce France, bastarz contralios.
« Ja Damedé [ne] place, du saint ciel glorios,
« Por riens que sachiez faire que soiez bien o moi. »
Par les cheveus l'aeft a ambe .ij. sespoinz;
985 Ja l'eûst ou feu ars, quant Landris se rescost,
Mais ne le vot tochier, tant fu simples et douz.
Atant es vos Tomile par la presse ou cort,
Et vait ferir Landri de son pié, veant toz,
Qu'il l'abat en la sale sanglant et vergondos.
990 Quant le voit li dus Do, a pou d'ire ne font :
« Par les sainz Deu, Tomiles, grant pechié faite[s] raolt.
« Que demande[z] Landri, cest chetif pecheor? »
Quant l'entendi li enfes, liez en fu et joios.
967 nel, ms. ne le. — 970 grans pechiés. — 977 M. no di mie
por ce q. jo querre v. v. — 982 de s. — 985 a. e qu. L. se rescont,
— 987 envers T,
DOON DE LA ROCHB 39
XXXVII
Quant l'enfes entendi de Doon l'Alemant
995 Qu'i[l] l'ot por lui prier et mostrer bel semblant,
Bien poez dire et croire liez en fu et joianz;
Monta sor .j. table, si parla hautement :
« Or m'entendez, » dist il, « Bavier et Alemant, [f. 20)
« Et Normantet Frison et François et Flamant!
1000 « Le grant orgueil Tomile, Dame dieus le cravant,
« Car ma mère a destruite par son faus jugement.
a Se Dieus me laisse vivre jusqu'as armes portant,
« J'en penraila venjance au mien commandement. »
XXXVIII
Dont reparla Malingres, qui fel fu et gaignarz :
ioo5 « Par les sainz Dieu, biaus père, pechié dit[es] et mal.
• a Je sui li vostre fîlz et ma mère est leals.
« Ci illuec me honî[st] chascun jor .j. bastarz.
« Ja Damedieus de gloire ne[n] ait en m'arme part
« Si je ne vos [l'jocis, se longes i esta.
loio — Biaus niés », ce dist Tomiles, « malementvos hasta
« Veez de vostre père qui l'a torné a gas.
« Ghascun jor s'aperçoit par engin et par art
« Comment Landris soit riches et vos soiez bimarz.
XXXIX
^ Par les saini Dieu, Tomiles, » ce a dit Do li dus,
ioi5 « Tôt cest plait avez vos commencié et meii
« Por quoi li .ij. enfant sont ensemble irascu :
996 joeut. — 1002 V. jiisques a. — ioo3 pechiés — 1009 * ''"^^
^ lpi3 bimars, corr, buisnarz (?) — 1016 irascir.
4« DOON DE LA ROCHE
« Frère deiissent estre et ami ambedui
« Et retenir lor terre a force et a vertu »
D'autre part ont le jor en la cort respondu,
I020 C'est Guinemanz et Asses et Moriz li chenuz.
Et Asses de Maience est en piez levez sus :
« Parles sainz Dieu, dus Do, morz es et confonduz.
« Tu es entre .ij. seles a la terre cheiiz,
« Quant tu pr[es]is moillier, aine tant gente ne fu,
1025 « Or as prise la fille au traïtor parjur, {v)
« Tomile de Coloigne, ne[l] vos cèlerons plus.
« Donez Landri La Roche, car nos l'otrion tuit:
« Doée en fu sa mère; estre en doit revestus ».
Quant l'entendi li dus, ainz tant joios ne fu.
io3o Audegour la cuverte, cui Dieus doint maleur...
« Par les sainz Dieu, dans Asses, fol plait avez meû.
« Por poi que [ne] vos fier sur la teste d'un fust,
« Qui ci me tos m'enor, si la dones autrui. »
Es le cuvert Tomile par la presse acoru :
io35 « Aiez pais, bêle fille; s'il vos plaist, seez jus.
« Il n'a droit en l'enor, se molt chier n'est venduz. »
Plus tost qu'il onques pot, est celé part venuz :
« Par les sainz Dieu, dans Asses, dans cuvers, dans parjurs...
Du poing que il ot gros enz ou col l'a féru,
.1040 Et jusqu'as piez Landri l'a sovin abatu.
Com or' le voit li enfes, aine tant dolenz ne fu;
« Se je or ne m'en venge, morz sui et confonduz. »
Par la sale resgarde droitement a .j. uis,
Et voit un veneor qui de bois est venuz
1045 Et tenoit en sa main .j. grant espié molu.
1017 deusrient, enmedui. — 1018 et envers tuit. — loig Qu'a.
— 1020 Mois; cf. 1242. — io3o dont mal jour. // manque ici
un vers, p. ex. : Si s'est levée en pië, que trop iriée fu. — io3i
deux A. — io32 fier, wi5. fies. — io34 couvert. — io36 Je vai d.
— 1037 est, ms. estre. — io38 Ici encore il parait manquer au
moins un vers. — loSç ot, ms. a. — 1040 a pied. — 1046 e. molin
ou moliu.
DOON DE LA ROCHE ^l
Com or le voit Landris, celé part est venuz,
Si li a tost des poinz arachié et tolu ;
Par le palais repaire dolenz et irascuz ;
Ou qu'il voit le traître, ne l'a mesqueneu :
io5o II va ferir Tomile, ne s'est aresteiiz;
Grant cop li a doné et de fer et de fust,
Que par mi leu du cors toz l'aciers en parut;
Nel navra mie a mort, por tant l'a abatu. {/. 21)
Tomiles brait et crie et apele ses druz.
XL
io55 Tomiles fu navrez, si en fu molt dolenz,
Car Landris l'a féru par son fier hardement,
Li niés le roi de France, qui fu prozet vaillanz.
Volentiers recovrast encor en autre sens,
Quant i corut ses père, si li to[I]t et desfent :
1060 « Vues le tu donc ocire ? et voi ci ses parenz.
— Sire, » ce dist Landris, « je ai droit voirement.
« Car ma mère ont destruite li sien faus jugement.
« Se Dieus me laisse vivre jusqu'à armes portant,
« J'enpenraila venjance au miencommandement».
io65 Et Asses de Maience s'est levez en estant ;
La colée ot reçue, grains en fu et dolenz ;
De sa honte vengier estoit molt desiranz.
Par la sale regarde droitement vers .j. banc.
Et voit un eschaquier a or et a argent :
1070 Plus tost qu'il onques pot, celé part vint corrant,
Tost et isnelement a ses .ij. mains le prent,
Par le palaiz repaire tost et isnelement
Et va ferir Tomile ou visage devant,
1049 le, ms. H. — io5i Grans cop. — io53 Ne le navrai il mie.
— io58 r. ansor en a. seui. La correction est douteuse. — io65
c'est 1. — 1073 au V.
4^ DOON DE LA ROCHE
Quant.), siens niési vient, Clarembaus de Dinant;
1075 De son oncle vengier molt par fu desiranz.
Et Asses le feri ou visage davant :
Le sanc et la cervele a la terre en espant,
Si que mort l'abati desus le pavement ;
Et li parent Tomile se vont molt escriant. (v°)
1080 Lors meïsme i corurent Baivier et Alemant,
Et furent en po d'ore .Ixx. combatant.
La force les sorprist, que Tiroie celant?
Forssolement Formont, Asson et Guinemant.
Vienent a lor ostels, prenent lor garnemenz.
io85 Ce fu le premier jor que Landris armes prent :
Il ne ceint pas l'espée, mais a son col la pent,
Garde Pépin son oncle agrant joie l'atent,
Qui plus lui est faliz des personéement.
.IL chevalier les sivent a espérons brochant,
1090 N'i a celui des .ij. ne soit riches mananz.
Selon l'aiguë du Rin s'en vont esperonant;
La force les enchauce environ de toz sens ;
Et quant le voit Landris, si en fu molt dolenz.
Il en [a] apelé Asson et Guinemant :
logS « Seignor, or entendez, franc chevalier vaillant:
« Gestes genz qui [nos] sivent si efforciéement
« Ne me gardent honor por Pépin le roi Franc.
« Mielxvoldroieestre morz n'i fiere maintenant. »
Il broiche le cheval des espérons trenchanz
1 100 Et a brandi la lance au conferton pendant;
1074 Le Mi. répète le premier- hémistiche : Quant .j.slen niés
i vient tost et isnelmant | Quant .j. sien niés i vient Clarambaus
de Dinans. Ces deux vers doivent évidemment être réduits à un
seul. — 1075 par fut molt. — 1076 ferut. — 1080 meismes. Corr.
L'ore meïsme i corrent? — 1081 Ms. vijxx, chiffre qui fausse le
vers, et qui d'ailleurs parait bien élevé. — io82-3 Ces vers se suivent
mal; manque-t-il un vers entre les deux} — io83 Formant —
1084 V. et leur ostes. — 1088 despersencemant. — 1089 proi-
chant. — 1090 menans. — 1091 du rus. — 1096 Ces g. q. sunt
ici effreemant. — 1098 fiers. — 1 100 Et a brandie l.
DOON DE LA ROCHE 4$
Sor Tescu de son col feri un Alemant,
Par sor la bocle a or li peçoie et porfent,
Le haubert de son dos li desmaile et desment,
Le cuer qu'il ot ou ventre en .ij. moitiez li fent.
I io5 Toute plaine sa lance Tabati mort sanglant,
Et escria a La Roche ! » tost et isnelement. (/. 22)
La force les enchâuce environ de touz sens.
XLI
Asson et Guinemant en apela Landris,
Li niés le roi de France, li damoiseaus gentiz :
I I ïo « Geste gent qui nos sivent et a hu et a cri
« Ne me garde[nt] honor por mon oncle Pépin.
« Mais mielx morir volroie que n'i voise ferir. »
Il a brandi la lance au confenon porprin;
Joserant de Coloigne va en l'escu ferir;
1 1 1 5 Par sor la bocle d'or li peçoie et malmist
Et l'aubert de son dos desmailla et rompist ;
Le cuer qu'il ot ou ventre en .ij. moitiez fendi,
Tote plaine sa lance l'abati mort sovin,
Puis rescrie « La Roche ! chevalier, ferez i ! »
1 1 20 Guinemanz tiert . j. autre, li proz et li hârdiz,
Que mort l'a abatu devant lui ou larriz;
Et Asses de Maience lor a le quart ocis.
Esperonant s'en vontdelez l'aiguë du Rin;
N'i avront huimais garde de toz ceus de la cit.
1 125 Damedieus les garisse, qui en la croiz fu mis.
Tomiles fu navrez, s'en fu grains et marriz,
Et Malingres le plore et sa mère autresi.
Atant es Guenelon et Hardré son cousin ;
Asamblé avec eus si estoit Aloris
I i3o Et Hervis de Lion, li cuverz de put lin,
iioi ferut. — 1102 P. sur, perçoie. — iii5 P. s. la bloc a
or; cf. V. 22gy. — 11 16 desmaille. — ii23 du rus. — 1126
crains, ms. grieus. — 11 29 avec, ms. auos.
44 DOON DE LA ROCHE
Et lor riche lignages qui si fut de haut pris :
Ne fussent traïtor, tés chevaliers ne vi.
Plus tost que onques porent si l'ont a raison mis :
« Sire, mor[r]ez en vos, nobles hom et gentis? »
1 135 Et respont li traîtres : « Je n"ai soin de morir; (v»)
« Mais, si Landris s'en vait, nos sommes escharni :
« Il gastera noz terres et trestoz no^païs.
« Car alez tost après, sel faites revenir,
« Et nosli donrons trive a .iii). ans ou a .v.,
1140 « Et puis si Tocirons bêlement a loisir,
« Murtrir ou estrangler, quant il ert endormiz.
— Hé ! Diex, « ce dist faus Guenes, « corn gent conseil a ci !
— Voire», ce dist Hardrés, « onques plus gent ne vi. »
Ou que il voit le duc, si l'a a raison mis,
1 145 En l'oreille li dist coiement et seri :
« Sire dus de La Roche, entendez ça vers mi.
« Or voi Je ce et sai que pensez de Landri ;
« Et car alez après, sel faites revenir ;
« Et nos li donrons trives a .iiij. ans ou a .v.
I i5o « Querez ou doit aler ; ja l'avons nos norri. »
Et respondi li dus : « Or avez vos bien dit :
« Se cest plait poez faire, dont m'avez vos gari.
— Oïl, » ce dist Hardrez, « par foi le vos plevi. »
Li traïtor li ont fiancé et plevi,
I I 55 De cel jor en .v. ans i ont le terme mis,
•
1140 £t plus. — 1 141 II manque sûrement un vers avant ou
après celui-ci. — 1 146 Ici commence le premier des deux feuil-
lets dont se compose le fragment appartenant à M. Eugène Le-
long [L.]. — 1148 Leçon de L.; le ms. omet Et; L. sel, ms. ce le.
— 1149 L. trives, ms. trêves. — ii55 Ms. De cel jour .v. anz .v.
le terme mois. Cette leçon, qui n'a pas de sens, est exactement celle
du fragment L., mais elle résulte d'une correction mal faite dans
ce fragment, oii la leçon première était De cel jor en avant i ont
le terme meis ; la correction a consisté à raturer, à l'encre rouge,
les mots en avant i ont et à les remplacer par v anz v. Le cor-
recteur aurait du se borner à remplacer avant par .v. anz, et à ex-
ponctuer {ce qu'il n'a pas fait) /'e de meis.
bOON DE LA ROCHE
4&
Damedeus les confonde, qui en la croiz fu mis.
Li dus Do en monta sor .j. cheval de pris;
Ilissi de la vile por ramener Landri.
XLII
Li dus D. en monta sor .j. cheval ferrant :
I i6o II issi de la vile a espérons brochant.
Tant a corru li dus c'aus ielz vitson enfant.
A haute vois escrie Asson et Guinemant :
« Por Dieu, franc chevalier, n'alez plus en avant,
« Car je vos ai pris trives de cest jor en .v. anz.
1 165 « Haï ! beaus filz Landri[s], corn estes avenanz!
« Se creûsse vo mère, que fuissiez mes enfanz,
« De nule rien en terre ne fusse si joianz.
« Li putaigesdeli vos va molt encorpant. »
Quant l'entendi Landris, a pou ne pert le sens :
1170 c Par Dieu! vos i mentez, dans cuverz soduanz.
« Ele ne fu ains pute, Deu en trai a garant.
« Certes, se ce n'estoit, por Deu le roiamant,
« Car vos estes mes père, nel cèlerai néant,
« Je vos donroie tel as costez et as flans. . . »
II 75 II ne se pot tenir, au maltalent c'ot grant;
Il broche le cheval des espérons trenchanz
Et a brandi la hanste au confenon pendant :
Son père eust féru quant se gainchi ou champ.
Debien et d'amistié a apelé l'enfant :
1 180 « Haï ! beaus filz Landris, com vos voi essaiant!
(/^23)
II 56 les d'après L.; mi. le. — tiSy sor d'après L; ms. SUS. —
1166 Les deux textes mon enfant. — 1169 sens, les deux textes
sanc. — 1 1 73 nel, L. nol, corrigé en nos, ou l'inverse, ms. nous. —
1173 Car sic L et ms.; corr. Que(?) — 1174 La phrase paraît
inachevée — 1177 hanste, L. hante, ms. lance. — 1 iy8 II semble
quCi dans L., se ait été surchargé en il.
40 t)90N DE LA ROCHE
ce Voir, nule riens en terre ne par aime je tant ;
« Mais retornez arriéres tost et isnelement.
— Sire, »ce dist li enfes, « tôt a vostre commant. »
Il retornerent tost li chevalier vaillant
1 185 Et vindrent a Coloigne, la cité qui est granz,
Puis i estut Landris encores demi an,
Dont doit avoir la mort s'il est jamais fianz
Le traitor Tomile ne a toz ses parent. (v©)
XLIII
Quant Landris est entrez en ce jor en la vile,
1 190 Li dus et li princier en ont les trives prises ;
Très bien les a jurées Tomiles et Malingres
Et la maie marastre, qui molt ne l'ama mie,
Audegour la cuverte, cui Jésus maleïe.
De ce jor en .v. anz i fu mis li termines.
1 195 Puis i estut Landris demi an en la vile
Por esgarder Tomile et lor estre et lor vie ;
Bien doit avoir [la mort] se il en eus se fie.
Tomiles fu senez, s'est la plaie garie.
Tant a aie .j. jor par Coloigne la riche
1200 Que de son fier lignage ot molt grant compagnie.
Au mostier les mena entre vespre et complie;
La mort Landri l'enfant jurèrent et plevirent,
Que ne l'oï nuns hom qui muire ne qui vive,
Ne mais qu^e solement la nonne Beneïte
i2o5 Qui esioit au mostier ou fa[i]soit son servise,
Et fu lez .j. pile reposte et mucie.
1 187 fianz, les deux textes ont fuanz, qui n'offre ici aucun sens;
la correction est suggérée par le v. 1 1 gj; seulement, au v. 1 188,
on préférerait âl ou el au lieu de le. — 1197 la mort manque
dans les deux textes, cf. v. i iSj. L. porte avoirt, où le t est un
reste de mort. — 1204 Les deux textes portent benoite. — i3o5,
au dans les deux textes; corr. ou(?} — 1206 fu, L fui.
bOON DE LA ROCHE 47
Or puis je dire et croire qu'il ne Fi savent mie,
Car il reiissent morte, estranglée ou ocise.
Ele a oî le murtre^ le consoil et le signe,
12 10 Por [ce] molt tenrement des ieus plore et sospire,
Damedieu reclama, le til sainte Marie,
Que il ces traïtors confonde et mal[e]ïe,
Car il sont trestuit plein de molt grant félonie.
Ele issi du mostier, que nus d'eus nel sot mie,
121 5 Par .)'. petit huisset qu[e] ele i sot meïsmes.
Entre ci qu'au palais ne cesse ne ne fine ; ' [f* 24)
Ou qu'ele voit Doon, par le mantel le tire :
« Gentis dus de La Roche, entendez moi, beaussire,
ce Li niés au roi de France recevra par folie,
1220 « Car sa mort ont jurée Tomiles et Malingres,
« Melsme vostre famé qui ne le rainme mie :
« Leanz, en cel mostier, sont trestuit en concile, »
Quant l'entendi li dus, a pou n'enrage d'ire;
Tenrement des iex plore et de son cuer sospire ;
1225 Damedeu reclama, le fil sainte Marie ;
Quatre foiz se pasma; ne s'en pot tenir mie.
XLIV
Quant li dus Do entent que la nonnains li dit.
Et il sot bien de voir que mie ne menti,
Onques puis, celé nuit, ne manja ne dormi.
i23o L'endemain, par som l'aube, a fait Landri venir;
Bel et cortoisement a apeler le prist :
iîo8 euissient <f^ns les deux textes. — laio Ms. Par; les deux
textes omettent ce. — 12 12 malie dans les deux textes — 121 3 !..
félonie, nus. ire. — J2i5 i sot, ms. issoit, L. issot. — jaig rece-
vra, sic L. et ms.; corr. restera (?) — 1221 Leçon de L.; ms. ne
l'ainme. — 1222 L. concele, ms. conceille. — i23o L. par sour,
ms. par soubz. — i23i Z.. le âst (mot rayé) Is prist.
4^ DOON DE LÀ ROCHE
,« Haï ! biaus filz », dist il, « com me poise de ti !
« Ne te puis en cest règne ne aidier ne tenir.
« Cil gloton t'ociront, qui sont tui enemi.
1235 « Et car t'en va en France a ton oncle Pépin.
XLV
— Je irai volentiers, » dist Landris, « biauz douz sire.
« Ne me volez tenser ne garder en la vile,
« Ainz me faites ici comme fel et traître.
« Jamais ne finerai deci qu'en qu'en paiennie; »
1240 « En la crestïenté ne remandrai je mie. »
Landris en apela Gilebert de Vaubile,
Asson et Guinemant et Roon et Morise,
Des pers de Loereigne .iiij.^'' des plus riches : {v°)
« Seignor franc chevalier qui Pépin estes quites,
1245 « Sui home et sui ami de grant ancesserie,
« Et car me recevez en vostre mainburnie.
« Se je ja aquier terre, je vos ferai toz riches :
« Ou soit ou torz ou droiz, je serai vostre hons liges. »
Quant cil ont entendu, ensemble respondirent :
1 25o « Ne vos aiderons ja, damoiseaus, beaus douz sires ;
« Li putaiges vo mère a la terre honie,
« Ma[i]s servirons a l'autre, vostre frère Malingre. »
Et quant Tentent Landris, a po n'enraige d'ire;
Tenrement des ieus plore et de son cuer sospire.
1255 « Par Deu, » ce dit li enfes, « le fil sainte Marie,
« Se je ja tant puis vivre que armes aie prises,
« Je vos torrai les testes, les membres et les vies. »
A iceste parole a la grant court gurpie.
S'en est venuz au bourc, a Tostel dame Olive;
1233 L. roinne, ms. rainne. — 1234 tui d'après L., ms. luit. —
1240 Gilebert, sic ms., L. Gelebert ; Vaubile, sic L., ms. Naubile.
1243 Ms. pères. — 1247 ja est omis dans le ms. — i2 56 L.
c'armes, ms. qu'arme» {vers trop court). — 1 208 gurpie, sic L et ms.
DOON DE LA ROCHE 49
1 260 II l'en a apelée ; .si li a pris a dire :
« Demain m'en irai, dame, ainçois Tore déprime,
a N'i os mes demorer, bêle mère, douce amie,
« Car ma mort ont jurée Tomiles et Malingres,
« Et ma maie marastre, cui Jésus maleie. »
126b Quant l'entent la duchesse, si plore et si sospire :
.IIII. foiz se pasma, ne s'en pot tenir mie.
XLVI
— «Je m'en irai, ma dame, »dist Landris, » voirement,
« Ne lairai que Pépin ,j. secors ne demant,
« Et s'il ne me retient, n'es[tj pas droiz que vo[s] ment,
1270 « Du païs m'en irai, par le mien escient : (/. 2Ô)
« De ci qu'en paiennie ne tarderai nïent.
« En cel vergier plantai .j. douz aubre l'autre an ;
« Mère, ja le me dist .j. sages clers lisanz,
« Proz et escïeniros et dou siècle sachanz,
1275 « Qu'entre mon aubre [et mij morrïens en .j. an.
« Tant com vos le verrez vert, foilli et portant,
« Tant ratendez noveles de Landri vostre enfant :
« Tote voie venrai, ne sai demorer tant.
« Et puis que le verrez et sec et decheant,
1280 « Ja ne me verrez mais en trestot vo vivant. »
Quant l'eniendi Olive, a pou ne pert le sens;
Quatre foiz se pasma por Landri son enfant.
XLVII
« Tu t'en iras, biaus fîlz, a Paris a ton oncle J
1260 a d., sic m., L. au d. — 1262 Les deux textes N'i ois. — •
Î263 Sic dans les deux textes. Vers trop long, corr. ma m.(?) —
1269 Les deux textes ont nés, vo. — 1274 L. assiantrous, ms»
essciantiouz. — 1273 Même lacune dans les deux textes. — 1277
Ce vers est omis dans le ms. — 1278 Ms. nesca (= ne sça[i]).
4
5ç DOON DE LA ROCHE
« Je remanrai, biau[s] filz, chaitive et besoingnose.
1285 « L'arbre que tu plantas baiserai a ma boche,
« Ne passera .j. jors, .x. foiées ou .xij. »
La dame se pasma, qui trop fu dolorose.
XLVIII
— Tu t'en iras, biaus filz, » dist la mère, « je voi;
« Je [rejmaindrai chaitive, si avrai le cuer noir;
1290 tt Cil gloton me sivront au matin et au soir.
« Se Pépins te retient, por Dieu, mande le moi.
— Dame », ce dist Landris, « sofFrez vos; ce que doit?
« Je ne vos faudrai ja contre cui que ce soit.
XLIX
— Tu t'en iras, biaus filz, en estrange contrée ;
1295 « Je remaindrai ici chaitive et esgarée;
« N'i troverai parent, cosin germain ne frère
« Qui por moi preigne ja ne lance ne espée. {v
« Garde por autre famé ne soie obliée.
— Dame », ce dist Landris, « n'estes pas bien senéc :|
i3oo <f Je ne vos faudrai [ja], que vos estes ma mère. »
Quant ii enfes issi de Goloigne a cel terme,
1286 Ms. Je i passerai; L. jorz, foiez; ms. jour, foix. — 1288
L. jo V. ; on pourrait proposer jel. — 1290 L. suerront, ms. sue-
ront. — 1295 ici manque dans le ms. — 1296 Ms. Ne troverais
parans. — 1297 L. proinne, ms. prangnent 1. — i 3oo ja manque
dans les deux textes. — i3oi L. et ms. i. fors de.
DOON DE LA ROCHE 5l
Li niés le roi de France, li damoisiaus honestes,
Molt par avint granz dues, a cel Jor, en la terre.
Molt ploroient ces dames, chevalier et puceles,
i3o5 Et Olive se pasme et sa crine eschevele.
Et dus Do en fait tant, par poi qu'il ne se desve.
Va s'en li gentiz enfes cui Deus gardoit de perde ;
Asson et Guinemant en'mena, qui le servent.
Il sont venu au Liège; celé nuit i herbergent ;
i3io II manda les borjois que aide li facent.
« Ne vos aiderons ja, sire, jovente bêle :
« Li putaiges vo niere a honie la terre. »
Com or le voit Landris, a po que il ne desve.
— Par Deu, » ce dist li enfes, « le verai roi celestre!
1 3 1 5 « Se je Ja tant puis vivre qu'armes puisse 'reçoivre,
« Je vostorrai les vies, les membres et les testes. »
Remontent es chevaus, que n'i osent plusestre;
De ci que a Paris ne finent ne ne cessent.
A Paris sont venu par lor jornées bêles :
i32o La nuit sont descendu chiez .j. borjois, Auterme
Et cil en va conter a Pépin les noveles :
« .1. vostre niés, Landris, est venuzen voz terres,
« Qui est fils dame Olive, vo seror, la duchesse. (/". 26)
« Mielz resemble Doon que nule riens en terre. »
i325 Tuit i corrent la gent; forment i a grant presse
Por veoir le valet, que la persone est gente.
Quant l'entendit li rois, a pou d'ire ne desve ;
Il dist une parole dont li autre s'esperdent :
« Fermez me tost les portes, que ne soient overtes. »
i33o Quant celé parole oient, ne lor fu mie bêle.
i3o5 D'après L.; ms. et escrine et eschevoille {L. eschevole).
— i3o6 Ms. Et li duc D. tant en f, a p. que ne ce d. — iSoy
D'après L.; ms. garde de perdre. — i3io facent sic L, ms. faice.
— i3i5 ja manque dans le ms.; reçoivre, sic ms. et L. — iSiy
Ms. a ch. — i32o Les deux textes portent Aterme, mais cf. v.
i355. — i324 Ms. r. a. D. — i325 Ce vers est le dernier du
premier des deux feuillets L. — 1329 qu'elle nés.
52 DOON DE LA ROCHE
LI
Quant li borjois du règne ont le roi entendu,
Que Landris n'i seroit aidiés ne maintenuz,
Adonc plorent des jeus ; molt furent esperdu .
Landris vint a la porte, que vout entrer la sus :
i335 « Portiers, ovre la porte ; beneois soies tu !
« Car a Pépin mon oncle sui a besoing venuz ;
« S'il me voloit aidier, bien me seroit cheii.
— Vos n'i poez entrer », cil li a respondu ;
« Par la foi que vos doi, li rois l'a deffendu »
1340 Et quant l'entent Landris, molt en fu irascuz :
Par les cheveus l'aert, si le hurte a .j. mur,
Et l'eûst ja tué, mais .j. seul pou s'estut,
Car Asse et Guinemanz i sont corant venu.
Ilescrîent ensemble : « Damoisiaus, que fais tu ? »
1345 Or est Landris a val et Pépins [fu] lassus.
Li rois garde a val, s'a son neveu veu ;
Il le voit bel et gent [et] lonc et parcreii.
a Haï ! biaus sire niés, comme [je] maris sui,
« Quant de moi ne seras aidiez ne secoruz!
i35o«f Je le jurai Tomile, le maleoit parjur.
« Or ne sai plus que dire, mais huimain remains tu. »
LU
Or est Landris a val, ça dejus a la porte.
Et voit Pépin son oncle, qui de rien nel conforte;
Il demoine tel duel, par po qu'il ne s'afole.
i355 La nuit s'en va gésir chies Auterme, son oste,
Mais n'i ot rien chanter, ne fait soner viole.
i33i de romme, li rois. — i33j cheûz. — 1341 aert ms. aort ;
hurent. — i343 i, ms. il. — i35i remains, ms. semans. — i353
ne le c. — i354 qu'il, ms. qui. — i356 fait, tns. faire.
DOON DE LA ROCHE 53^
L'endemain par som Taube fist Pépins molt grant chose,
Qu'il prist de son avoir quant .ij. mulet en portent,
Et piaus et peliçons .iiij*'^. beaus et nobles :
i36o Asson et Guinemant les done toz et ofre,
Por ce que il Landri gardent sor tote chose.
LUI
« Tu t'en iras, biaus niés », ce dist li rois, » je vol;
« Ne te puis retenir, par la foi que te doi :
« Je le jurai Tomile, le cuvert, l'autre soir.
i365 « Quier que tu te garisses et que raies ton droit.
« De ta mère me poise, qui est en tel destroit;
« Cil glouton l'ociront ou au main ou a[u] soir.
— Sire », ce dist li enfes, « tel est vostre voloir.
« Se Dieu pleiist qu'e[n] vos bien[s] peiist remanoir,
iSyo « Sire, car me retien, que ce est biens et droiz.
— Por néant en parlez, biaus niés », ce dist li rois ;
« Ne te puis retenir, par la foi que te doi :
« Je le jura[i] Tomile, le cuvert male[o]it,
a Et il m'en dona, certes, grant part de son avoir :
1375 « .XX. muiez toz chargiez de fin or arabois. »
Quant Tenfes l'entendi, cuidiez que bel l'en soit? (/. 37)
Landris aqueust son oire et trossa son harnois;
Le grant chemin S. Piere acoilli [il] tôt droit.
En la cité de Romme sejorna .iiij. mois,
i38o Vint a S. Piere au Bras, trova nés et eschois;
Landris est entrez enz, trop lor dona avoir.
Il arivent en Grice, en iver, qu'il fait froit;
Voient Costentinoble, le palais haut et droit :
Jamais ne finera de ci qu[e] il i soit.
i357 p. souz, f. par m. — i358 quanz .ij. muUe. — i36o
Assam. — 1870 e. bien et droit. — iSyô soit, ms. fut. — 077
oire, ms. or. — 1378 ch. a S. P. — 1379 mois, ms. nuit. — i38i
enz, ms. an. — 1 382 Grice, ms. Frise ; feist f.
54 DOON DE LA ROCHE
LIV
i385 Asses et Guînemanz et Landris, qui fu enfes,
Voient Costentinoble, le palais haut et ample;
A l'ore de midi en la cité s'en entrent :
De l'or et de l'argent grant mervoille lor semble,
Des perrons entailliés a pieres et a gemmes;
1 390 Et dit li uns l'autre : « Povre terre est de France :
« Li sires qui la tient por droit nient s'en vant[e] ; >
« Mais servons bien cestui s'il vuet et il commande,
« Que il n'a souz ciel homme qui tant ait ars ne lances,
« Qui peiist ceste vile ne abatre ne prendre ».
1395 II chevalchent ensemble; en la place descendent,
Et truevent l'amiral desouz l'ombre d'une ente.
Devant s'en vait Landris, qui est bêle Jovente,
Et salua le roi par molt grant sapïence :
« Dieu vous saut, empereres, et si saint et si ange !
1400 — Amis, et Dieus te saut ! » dist li rois Alixandre.
« Dont estes? dont venez? ne[l] celez, de quel reigne?
— A la moie foi, s^re, je sui de Loereigne, (v°)
a Mais guerre i a tant fort que m'en chace et ameigne.
« Sire, car me retien tant qu'espée me ceignes.
1405 — Amis », ce dist li rois, « frère, bêle Jovente,
« Et je vos retendrai et vos genz toz ensemble ».
Asses et Guinemans de pitié plorent sempres.
Ce fu au mois de mai, que florissent ces entes;
Par matin se leva celé duchesse franche,
1410 La mère au duc Landri, dame Olive la gente ;
Venue est au vergier desouz Tombre d'une ente,
Et el la voit foillier, verdoier et reprendre;
Et garde d'autre part, voit une sèche branche.
t$8j s'en antrent en la c. — 1403 ameigne {ms. amoingne),
corr. enmeigne (?) — 1404 me sengnies. — 1412 el, ms. elle.
DOON DE LA ROCHE 55
Qui ne pooit foillier n'amors ne s'i puet prendre :
141 5 La dame se pasma, que molt iert sage famé :
Landris ne puet avoir le secors qu'il demande.
« Haï ! Landris, beaus fîlz, com por vos sui dolente !
« Jamais je ne verrai vostre bêle Jovente. »
Quatre foiz se pasma desoz l'ombre de l'ente.
LV
1420 Olive est a Coloigne, ensemble fiert ses peins :
« Haï ! Landris, beaus filz, molt me poise de vos :
« Jamais ne vos verrai ne vos moi ne je vos ».
Et li enfes servoit au riche empereor,
Droit a Costentinoble enz ou palais gregnor.
1425 Asses et Guinemanz furent bien de la cort.
Une guerre sordi au riche empereor :
Paien et Sarrazin, li cuvert orguillos,
Li ont tolu Lalice, les palaiz et les tors, [f. 28)
S'en ont getés Hermins, les gardains pris trestoz.
1430 Ainz que fausi[s]t la guerre ot Landris ses ados :
Li rois li ceini l'espée, voiant ses barons toz,
Et si li dona armes et chevaus merveillos.
Bien furent emploiées au noble poigneor;
Puis en ferit .M. cous sor paiens a baudor,
1435 Et desconfist paiens et si prist lor seignor,
Sil rendit Alixandre sanglant et vergondos.
LVI
Geste bataille et autre[s] voirement fist Landris ;
El est tote provée de veoir et d'oïr,
1414 Que; n'amors, sic ms., altéré; prendre, ms. ranne. -^ 1415
iert, ms. estoit. — 1416 qu'il, ms. qui. — H'? com, ms. comme.
— 1424 enz, ms. sus. — 1428 o. tolus lice. — 1429 g. fais t. —
1432 dona, ms. done. — 1434 baudor, ms. baudoir. — 1436 Sou.
56 DOON DE LA ROCHE
Et bien le tesmongnerent li baron du pais.
1440 Li roi[s] ot .j. fille qui ot le cors gentil,
Cui Salmadrine apelent li baron du pais :
Sor tote rien sor terre ama celé Landri,
Qu'el ne pooit mangier, reposer ne dormir.
Li rois la voit malmetre, empirier et morir;
1445 Bel et cortoisement a aresnier la prist : - -
« Haï! fille », dist il, « molt me poise de«ti.
« Je te cuidai doner tel prince ou tel marchis
« Qui detenist ma terre et trestot mon païs.
« Bien n'en avrez [vos] mie, ce m'est il bien a vis.
1450 — Sire », dist la pucele, « molt sui près de morir, ■
« Mais encor sai tel chose dont porroie garir. »
— Et que seroit ce fille? » li rois li respondit.
« Il n'a soz ciel espice ne vos face venir,
« Ne home, tant soit fiers, corajos ne hardiz.
1455 — Sire », dist la pucele, « de Dieu .v<^, mercis, (v°)
« Mais ce n'i a mestier, par foi le vos plevis.
« Dès ores vueil je, père, que me donés mari,
, « Ce soldoier de France c'om apele Landri.
■ ' « Aquitée a la terre et trestot le païs;
1460 « Il n'est tel hom ou monde por ses armes servir.
— Fille », ce dist li rois, « laissiez ester Landri.
« Je ne sai dont est nez, ne [sai] de quel païs.
« Car pleûst or a Dieu, qui en la crois fu mis,
« Qu'i[l] fu[s]t parenz le roi qui France a a tenir,
1465 « Pépin l'empereor, qui est biaus et gentis,^^*^'
« Ou ses niés ou cosins fust ores cil Landris !
« Encor fust il bastarz, sel seùsse de fi,
« Vos li donroie a famé, par foi le vos plevis.
« Asses et Guinemanz il le m'ont assez dit,
1441 Qui. — 1444 morir, ms. noirie, — 1443 Belle et acortoise-
ment. — 1449 non a. — 1450 morir, ms. mort. — 1462 Et que ce-
roisse f. — 1454 Vers interpolé, à moins qu'il n'y ait une lacun*
après. — 1455 S, ce d, — 1464 p. li r.
DOON DE LA ROCHE Sy
1470 « Mais Je nés en croirai, se Damedieus m'alst :
« Puis que bons de sa terre est ciiaciés et fu[i]tis,
« Félonie et bonté puet dire u son plaisir. »
LVII
Landris, qui fu de France, ama molt Salmadrine,
Ele lui assez plus que pucele qui vive.
1475 Li rois li a doné grant mestier adeprimes :
Chambellan en a fait de ses dem. ines princes.
Molt le tint grandement et par grant seignorie :
.IX™. chevalier chascun jor le servirent.
Tomile est a Goloigne; Dieus grant mal li envie!
LVIII
1480 Or sert Landris le roi et si bon chevalier
Droit a Costantinoble, ou palais tôt plenier.
Molt volentiers preïst Salmadrine a moillier, (/. 2ff)
Se li rois lui vosist doner et otroier,
Mais il ne savoit mie cui fu filz ne cui niés,
1485 Se il ert niés le roi qui France a a baillier.
Hé ! Diex, s'il le seûst, onques ne fust si liez.
A .1. conseil le traient si baron chevalier :
. . . 't !
« Empereres, biaus sire, por quoi vos esmaiez ?
« Car prenez en vo cort .ij. cortois messagiers,
1490 « Si[s] envolez en France, a Monlaon le fié,
« Por savoir de Lmdri cui filz est ne cui niés.
« Se il est niés le roi qui France a a baillier,
« Si lui donés vos terres et vo fille a moillier ;
« Et s'il n'est delignage ne issi enforciez,
1475 a ce priuues. — 1476 ses, ms. ces. — 1477 le, ms. la. —
1485 ert, ms. est. — 1489 en vou cors.
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58 DOON DE LA ROCHE
1495 « Si pren de ton avoir, si lui donc congié;
« Si en ira en France li gentiz soldoiers,
« Puis n'en orrez parler a nul jor ; ainsi iert,
« Sil metra en obli Salmadrine au vis fier. »
Et respondit li rois : « Bien m'avez conseillié ;
i5oo « Ainsi le ferai je, ja trestorné nen iert ».
Il en a apelé deus de ses chevaliers,
Berengier et Outré, qui molt font a proisier :
« Seignor, venez avant, nobile chevalier.
« D'une moie besoigne vos convient travaillier:
i5o5 « Vous en irez en France, a Monlaon le fié,
« Por savoir de Landri, cui filz est ne cui niés,
« Se il est niés le roi qui France a a bai[l]lier;
« Mi home estes tuit liège, nel me devez noier.
« Tant portez de l'avoir com a plaisir vos iert, (v»)
i5io « Si faites richement acheter les mangiers. »
Et cil li respondirent : « Com vos plaira si iert.
« Au matin moverons, ja trestorné nen [i]ert. »
Salmadrine la belle en a oî plaidier.
Si manda a celé a li les messagiers,
1 5 1 5 Et il [i] sont venu cortoisement a lié.
Sor .j. faudestuel d'or dejoste les assiét.
Bel et cortoisement les prist a araisnier :
« Seignor, or entendez, nobile chevalier.
« Vos en irez en France, a Monlaon le fié,
i52o « Par la foi que vos doi, bien m'a esté noncié :
« Je sui fille de roi, a celer ne[l] vos quier,
« A moi apent la terre et trestoz li régnez :
« Plus aim le soldoier que nule riens soz ciel,
« Par ice[l] saint apostre c'om a Rome requiert,
1495 se 1. — 1497 iert, W5. iest. — 1498 Se m. — i5oo tres-
tornent. — i5o2 Outré, nts. Garin ; cf. v. i52j, i53o, etc. —
i5o3 n. et ch. — i5o8 nel, ms. ne le. — i5io Après ce vers, il y
a p.-ê. une lacune de quelques vers; cf. v. J53y, 1645. — i5ii
iert, ms. est. — i5i5 lié, ms. ele. — i523 aim, ms. aime.
DOON DE LA ROCHE 5^
i525 « Se VOS en dites choses qui de nient me griet,
« Je vos ferai les membres et les testes trenchier.
— Bêle », ce dit Outrez, « com vos plaira si iert;
« Ja chose ne dirons qui de nîent vos griet.
« Le matin moverons, ja trestorné nen iert.
LIX
1 53o — Berengier[s] et Outrez, » dist li roi[s], «ça venez.
« D'une moie besoingne vos convient a pener :
ce Vos en irez en France, a Paris la cité,
« Por savoir de Landri, de quel gent il est nez,
« S[e] il est niés le roi qui France a a garder,
i535 « Mi home estes [tuit] liège, gardez ne[l] me celez;
« Vos menrez de l'avoir tant com demanderez, (/. 3o)
« Et faites les mangiers richement achater;
« Onques ne soit garçons de vo mangier tornez,
« Serjans ne chamberiers ne prestres ne juglers,
1540 « Car hom de riche cort doit estre a barné. »
Et cil li respondirent : « A vostre volenté ;
« Le matin moverons, ja nen ert trestorné ».
Salmadrine la bêle en a oï parler,
■ Si manda les messages en sa chambre a privé,
045 Sor .j. faldestuel d'or les a fait as[s]eter;
Bel et cortoisement les prist a apeler :
« Seignor », dist la pucele, « je vos ai fait mander ;
« Vos en irez en France, a Paris la cité,
« Por savoir de Landri, de quel gent il est nez.
i55o « Par la foi que vos doi, bien m'a dit et conté; ,
« Je sui fille de roi, que de fi le savez;
« A moi apent la terre et trestoz li regne[z] :
i525 néant m'angriet; cj. v. i528. — iSsSned. ch. — iSSg
chamberiere; cf. v. 1646. — i544 messages, ms. messagier ;
privé, ms. primé ou privié. — 1546 I. a p. — i55i de si le sairés.
(-V
6o DOON DE LA ROCHE
« Je vos ferai toz riche[s], cui qu'en doie peser;
« Par ice[l] saint apostre qu'on quiert en Noiron Pré,
I 555 « Se vos en dites chose qui ne me viegne a gré,
« Je vos ferai les membres et les testes coper,
— Bien vos avons oi, bêle », ce dist Outrez ;
« Nous n'en dirons ja chose qui ne vos viegne a gré ;
« Le matin moverons quant il ert ajorné.
i56o — Par foi, « dist Salmadrine », molt avez bien parlé.
« Quexchevaus menrez vos? gardez ne[l] me celez.
— Par foi, noz deus muiez », si li a dit Outrez.
— Je ai .ij. dromadaires coranz et abrivez
« Que faiz en .j. celier, bien a .vij. anz, garder.
i565 « En .viij. jors et demi serez vos retorné,
« Car il iront plus tost c'oisiaus ne puet voler ».
Et cil li respondirent : « Ainsi com vos volez ;
« Le matin moverons quant il ert ajorné,
« Puis si serons très bien baigné et conreé ».
I 570 L'endemain, par som l'aube se sont li mes levé.
Et mistrent en lor dos les hermins engolez
Par desor les blïauz a fin or gironez.
Les granz maniels de sable ont li mes afublé,
Li tassel en [v]aloient tôt l'or d'une cité,
075 Pierres i a et brasmes qui molt font a ioer.
Les chapiaus sebelins ont en lor chiés fermez,
Escharpes cordoenes et les bordons ferrez ;
Li picois sont d'argent et li voruel d'or cler.
Il port[er]ent es maies les besanz d'or fondez,
I 58o De trestot le plus riche que on peiist trover.
Les dromadaires ont du celier amenez,
i555 chose, ms. choses. — i56i Q. ch. m. g. vos ne me c. —
1570 p. souz, li nies 1. Il se peut qu'il manque un vers après celui-
ci; cf. V. ig42. — i574 tâsel en aloient. — ib-jb brasmes, ms.
brenies. — 1678 voruel ms. rovuei, sic ms., corr. verroil (?) cf.
V. igSo. — 1379 es, 7ns. as. — r58o peûst, ms. puet. Ce vers
s'accorde mal avec le précédent. P.-ê. manque-t-il un vers entre
les deux. — i58i ont, ms. sont; celier, ms. celles.
DOON DE LA ROCHE DI
Et lacent les cu[i]ries et les chanfreins dorez,
Que mal ne lor puist faire li venz ne li orez,
Car il iront plus tost c'oisiaus ne puet voler.
i585 Li messagier montèrent par les esiriers dorez,
Et sont venu au roi ; congié ont demandé.
Et il lor a doné volentiers et de gré.
Salmadrine la bêle les comanda a Dé (/. 3i)
« Qui vos rameint par tens a joie en cest régné.
1 590 — Bêle, Dieus vos en oie, » si li a dit Outrez.
— Por Dieu, seignor baron, de l'esploitier pensez.
— Certes, » ce dist Outrez, « ja mar en parlerez. »
Li messagier s'en tornent, qui sont pro et séné ;
De ci qu'au Bras Saint George ne se sont aresté.
1595 Quant il i sont venu, s'entrent en une nef,
Damedieus lor dona tant droiturier oré !
D'autre part a la rive [quant] se sont arivé.
Si drecent les cu[i]ries et les chanfreins dorez;
Li mesagier remontent par les estriés dorez,
1600 Et trespassent les terres et les amples régnez :
En .viij. jors ont passé .xlviij. citez
Et .vij. roialmes grans et .x. arcevesquez.
Entre ci qu'a Coloigne ne voldrent arester,
Mais ainçois qu'i[l] retornent seront grain et iré,
i6o5 Car Hardrez li traît[r]es a les mes encontrez,
Sil vait noncier Tomile et Malingre a l'ostel.
Et li mes chevalchierent par la bone cité
Et trespassent les rues, li pro et li séné;
Tresqu'a l'ostel Gontiaume ne se sont aresté:'
16 10 Ce fu uns borjois riches qui fu de Roche nez,
Cosin[s] germain[s] Doon, le franc duc honoré.
Por l'amor de Landri estoit si adolez.
i582 lancent, chanx frains. De même v. i5g8. — i583 puist,
ms. puet. — 1589 ramoinne. — 1592 ja, ms. je. — 1596 Si l'on
n'admet pas le sens exclamatif, il faut supposer une lacune après
ce V. — 1698 Se d. — 160Ô Ce le v. — 1609 s. arester.
^2 1)00N DE LA ROCME
Qu'i[l] ne leva de lit bien a .vi). ans passez,
Et gist en mi la sale ainsi corn .j- tel bers (V)
i6i5 En .). lit torneïs qui molt fait a loer :
Li esponde sont d'or, et d'argent li listé.
Et les contres de paile, dou millor d'outre mer,
Linçuel et oreiller et voiles de sendel,
.VIIc. bezanz i tienentde fin or esmeré;
1620 Et ot de sa mesnie .xxx. sergenz privez,
Qui li font ses comans, n'en est .j. trestornez;
Chascuns avoit vestu .j- hermin engolé.
Atant es vos les mes qui ont forment erré ;
A piet sont descendu au mauberin degré ;
1625 La defors si laiss[i]erent les chevaus por garder.
Li dromadaire furent estanc et tresstié
Et li mes sont forment travaillé et pené.
A pié en sont monté contremont les degrez,
Jusques palaiz de marbre ne se sont aresté,
i63o Et saluèrent l'oste com ja oir porrez :
« Ci[l] Damedex de gloire qui en crois fu penez,
« 11 saut icest borjois et lui et son barné. »
Quant l'entendit li osies, si a le chief levé :
« Seignor, et Dieus vos salve! >> dist Gontiaumes h ber.
i635 « Dites, franc pèlerin, de quel terre venez,
« Et ou irez, seignor ? De quel terre estes ne ? »
— « A la moie foi, sire, si orrez venté :
« Né de Constantinoble, la mi[r]able cité,
« Et venons a saint P[i]ere nostre ofrande porter.
1 640 « Por ce qu'estes prodome, somes a vos torn^; (/• -^2)
« Haubergiez nos enuit, por sainte chante,
« Qui vos doint [ce]le rien que vos plus desirez.
« Nos avons trop deniers et or et argent cler,
1617 de peale.- .618 oreiUieux. - 16,9 esmeré, m. amer -
1017 uc ^ ataint; cf. v. 2o38.
,6.3 erre, ms. cne, c/ v. 2o3ô^ t) _ 7 ^^^^.^^_
— 1627 mes, ms. mes.— ibi2 icesr, wi. n t ,^2/:^
auïs, ml. Gonciaumes et souvent ainsi dans la smte. - i636 q.
terres. — 1643 Qu'il.
DOON DE LA ROCHE
6S
« S'en ferons les mengiers richement acheter.
1645 « Ja ne sera nus homs de noz mengiers tornez,
« Serjanz ne chamberiers, ne prestres ne Juglers,
« Car hons de riche cort doit estre a barné ».
— Par mon chief, » dist li ostes, « bien vos est encontre ;
« Par la foi que vos doi, ostel avez vos tel,
i65o « Entreci qu'a .j. an, se penre le volez,
« Ja ne vos costera .ij. deniers moneez.
« Que Dieus rameint Landri, mon seignor droiturier...
« Et maldie -Tomile et Malingre l'enflé,
« Que ainsi l'ont a tort de cest pais geté. »
i655 Li messagier l'entendent, grant joie en ont mené,
Et dient li .j. l'autre : « Bien nos est encontre.
« Ancui orrons noveles ; je le voi bien tôt cler.
« Landris est niés le roi, bien oïr le poez.
« Nos ne querons en France, certes, avant aler. »
1660 Com or le voit li ostes, ses prent a apeler :
« Seignor », ce dist Gontiaumes, « les chevaus me rendez :
« Je vos ai herbergiez, ja maren doterez;
« [Ja] n'i perdrez del vostre .ij. deniers moneez,
« Voz ostes ne vos rende .j. marc d'or esmeré, »
1 665 — Sire, » dïent li mes, « Dieus vos en sache gré. »
. Et il li font molt tost les chevaus délivrer, (v«)
Ou celier desoz terre les en ont fait mener.
Du fuere et du blanc orge lor ont [il] fait doner.
Por amor de ses ostes est Gontiaumes levez
1670 Et chauciez et vestuz et très bien conreez ;
Si s'en va au mostier por la messe escoter,
Qu'il n'en feïst autant bien a .v. ans passez.
Andeus les messagiers a avo lui menez,
Mais ainz qu'il s'en repaire sera grains et irez,
1647 estre, ms. ilec; cf. v. 1540. — i652 D. ramoine L. // est
probable qu'après ce vers, on lisait un vers perdu, oit Landri était
qualifié de neveu du roi Pépin, cf. v. i658. — i656 li .j. a l'a.;
est, ms. a. — 1662 dorerez. — i663 N'i perderés. — 1664 esmeré,
ms. escuier. — 1669 G. lever. — 1672 f. mais a.
64 DOON DE LA ROCHE
1675 Car Hardrez li traîtres a les mes encontre[z],
Si l'a noncié Tomile et Malingre a l'ostel :
« Par les sainz Dieu,Tomiles, bien vos est encontre :
« Par le mien escient, que vos estes faez.
« Or vi .ij. pautoniers en celé vile entrer,
1680 a Si moinent .ij. chevaus, plus fier ne furent né;
« Se miens estoit li pires, par sainte charité,
« Je nel donroie mie por Coloigne sor mer;
« Car i alez, cosins, les chevaus lor tolez.
« A celé Pentecoste en serez adobez. »
i685 Quant l'entendi Malingre, grant joie en a mené;
Tost et isnelement l'en prist a apeler :
« Ou seront il trové, sire cosins Hardrez? »
Et respont li traîtres : « Ja 'n orrez vérité,
« Sire, en l'ostel Gontiaume, que molt petit amez »
1690 Et respont li trait[r]es : « Vos dites vérité;
« Jamais ne l'amerai en trestot mon aé, [f. 33)
« Tôt por l'amor Landri, le gloton deffaé,
« A cui il fist grant bien quant il fu ou régné. »
O lui .XXX. serjanz s'en est li gloz tornez,
1695 Et vicnent a[l] ceiier, si ont les huis froez,
Pristrent les dromadaires qu'il truevent establez.
Ses en moine li gloz ou bore a son ostel,
Et li serjant Gontiaume se corurent armer.
Molt fu grant [la] meslé[e] au perron de degré :
1700 .XIIIl. des Malingre i ont les chiés co[l]pez;
Il meïsme[s] i fu d'un grant espiet navrez;
Fuant s'en va li gloz el bore, a son ostel.
.1. escuier^s] le va a Gontiaume conter ;
Issuz est dou mostier ou il avoit oré.
1705 Come or le voit li mes, si l'en a apelé :
« A la moie foi, sire, mal vos est encontre :
167g pautoniers, ms. pauterniés. — 1686 prist, ms. print. —
1691 en t. ma vie. — 1692 l'a. de L. — 1696 Prinrent. — lyco i
oit des chief; cf.v. i836.— 1701 m. fut il. — 1702 es b.
DOON DE LA HOCHE 65
« Perdu sont li cheval que deviez garder
« A ces .ij. pèlerins que vos ici veez. »
« — Diva », ce dist Gontiaumes, « qui m'a donc desrobé? »
1710 « — [Tomiles et Malingres ont cerchié votre ostel]
tt Et tolu les chevaus, ja nel vos quier celer,
« A ces .ij. pèlerins que vos ici veez ».
« — Hé! las», ce dist Gontiaumes, « com par sui enginiez! »
Plus tost qu'il onques pot est arrière tornez,
171 5 Et vint a l'arcevesque, es piez li est alez,
Doulcement li baisa le cordoan soler.
Li sainz hom l'en redrece, que molt le pot amer;
Bel et cortoisement le prist a apeler :
« Por Dieu, sire Gontiaumes, dites, et coi avez? (v»)
1720 « Est vos failliz avoirs? lerai vos en doner. »
E respondi Gontiaumes : « [Sire], j'en ai assez,
« [D'jor et [d'jargent ai ge .xxx. somiers trossez.
« Tomiles et Malingres ont cerchié mon ostel
« Et tolu .ij. chevaus, ne le vos quier celer,
1725 « A ces .ij. pèlerins que vos ici veez.
« Or m'en voi a saint Picre et a vos por clamer.
« Or m'en faites justice, sire preudom et ber. »
Et respont Tarcevesques : « Ja mar en parlerez ;
« Les chevaus vos rendrai, cui qu'en doie peser. »
1730 II manda les borjois de la bone cité :
Bien sont .Ix. mile quant il sont asemblé,
Et il i sont venu volentiers et de gré.
« Seignor»,dist li sainz hom, «je vos ai toz mandez.
« Je sui serjanz saint Piere, si que vos le savez,
1735 « Et si ai le pais et la croce a garder,
« Et qui mal me fera, a vos m'en doi clamer.
1710 Ce vers, qui est nécessaire pour le sens, est restitué par
conjecture d'après le v. lyjS. — 171 1 je nout v. — 1713 engi-
niez {ms. enginiés) ne convient pas à la rime; corr. com puis^
ore desver ? — 1715 es, corr.. as ? - 1720 Estes v. failli a a. —
1721 ai, ms. aiz. — 1728 Ja ms. Je. — 1731 emsemblé. — 1732 et
de ben g.
66 DOON DE LA ROCHE
« Tomiles et Malingre ont saint Pierre robe
« Et tolu .i). chevaus, ne le vuel pas celer.
« Si vos ren je la croce, ne [la] vuel plus porter. »
1740 Et dient li borjois : « Il dit bien vérité.
« Tomiles est traîtres, nos le savons assez.
« Ainsi a il Landri de cest païs geté ;
« Niés est le roi de France, dont sommes parjuré. »
Li messaige l'entendent; grant joie en ont mené;
1745 L'uns vers l'autre s'en rient coiement a celé :
« Par les sains Dieu, compains, bien nos est encontre. (/". 84]
« Landris est niés le roi, jou sai de vérité ;
« Ja ne querons en France plus avant [a] aler.
Lors dient li borjois : « Envers nos entendez :
1750 « Sire sainz arcevesques, por sainte charité,
« Car mandez a Tomile, sans plus de demorer,
« Qu'il rende les chevaus ; n'en soit .j. refusez.
« Et, s'il ne le vuet faire, par sainte majesté,
« Nos les assaurons sempres volentiers et de gré.
1755 « S'en trestoute Coloigne les poomes trover,
« Les membres et les testes lor ferïens coper;
« S'issent fors de Coloigne li cuvert naturel.
— Hé ! Diex, dist l'arcevesque, « qui i porroit aler ? »
La ot .j. chevalier[s], de Monlaon fu nez;
1760 Cil ot Gautier a nom, qui fu proz et senez,
Cosins germairts Doon et de son parenté.
Quant le vit l'arcevesque, si l'en a apelé :
« Hé! beaus amis Gautiers, por Dieu, car i alez ;
« Si dites a Tomile, gardez ne li celez,
1765 « Qu'il rende les chevaus, n'en soit .j. trestornez;
« El, se il nou vuelt faire, par sainte charité,
« Nos l'assauromes sempres volentiers et de gré.
. 1738 nou V. — 1743 ait il. — 1745 Li .j. v.; et c. — ■ 1748 quer-
rons. — 1753 Et se il ; on pourrait proposer Et se il nel v. —
1756 lor, ms. li; si Von veut conserver li, il faut corriger les tes-
tes en la teste. — 1757 Silsont f. Cf. 1784-5. — 1767 N. la sau-
ro mes.
DOON DE LA ROCHE 67
« [S]e en tote Coloigne les poomes trovôr,
« Nous lor ferons les membres et la teste coper...
1770 « Par le mien escient, mar i seront trové. ooiJi
— Sîre )),ce dist Gautiers,« bien lor savrai conter ».
Il monta ou cheval courant et abrivé
Et a çainte l'espée au pom d'or neelé; (v*)
Andeus les mesagiers a avo lui menez;
1 775 Jusqu'à l'ostel Tomile ne se sont aresté ; J
La dedenz ont trové le gloton desfaé
Qui juoit as eschas a son cosin Hardré.
Atant es vos le mes, ses prist a apeler :
« Oies, sire Tomiles, [enjvers moi entendez :
1780 « L'arcevesques vous mande qu'a tort l'avez robe
« Et tolu .ij. chevaus; ne le vos quiert celer.
« Se il ne sont rendu et on vos puet trover,
« On vos fera les membres et la teste coper.
« S'issiez hors de la vile, mal cuvert naturel :
1785 * Par le mien escient, ma[r] [i] serez trové. »
Quant l'entendi Malingres, si a le chief levé :
« Par les sainz Deu, messaiges, tu as le sens desvé ;
« Par le mien escient, tu es touz enivrez.
« Les chevaus ne rendroie por quanque vos avez.
1790 « Ainz porroit .j. contraiz a loisir retorner
« De Pavie la large droit a Huissant sur mer,
« As genolz et as paumes, mar i querroit ester,
« Que rende les chevaus por home qui soit nez.
« Va dir[e] a ton seignor face ses huis fermef,
1795 « Car je n'ai nul talent de sa messe escoter, --<^i
« Certes [je] m'en tairai, si passera estez. »
— Dehait cui il en chaut! » ce dist Gautier[s] li ber,
1769 lor, ms. li. Après ce vers, lacune; cf. v. ij5j et 1784 —
1773 pom, ms. poi. — 1776 le, ms. li. — 1778; li m. »«s print. —
1792 As gen'oiz et as pasme m. q. i estre. — 1787 le sanc d. -^
1793 Qui. — 1796 x.».\TSt\ parait corrompu; corr. tendrai (?); pas-
serai. '— 1797 Dieu ait, : _ :,.,
68 DOON DE LA ROCHE
« Par le mien escient, encui le compar[r]ez, »
Remonta a cheval, n'osa plus demorer;
1800 Et li ,ij. messagier s'en retornent arier, [f. 35]
Deci qu'a l'arcevesque ne [se] vontarester.
Quant li sainz hom les vit, s'a Gautier apelé :
<f « Qu'est ço, sire Gantiers, que vos avez trové?
« Que me mande Tomiles ? garde ne me celer.
i8o5 « Ravrai je les chevaus ou ses a refusez ?
— Sire », ce dist Gantiers, ja 'n orrez vérité :
« Les chevaus ne rendront por quanque vos avez,
« Ainz [vos] mande Malingres faites vos huis fermer,
« Car il n'a nule cure de vo messe escoter.
i8io« Certes, ne l'orra mes, ainz passera estez.
— Dehait cui [il] en chaut, ! » dit rarcevesque[s] ber ;
« Oiez, seignor borjois; alez vos adober! »
Et cil li respondirent : « Si ert com vos voldrez. »
Li borjois de la vile se corurent armer
181 5 Et vestent les hauberz, lacent hiaumcs gemez,
Et ceignent les espées as senestres costez
Et montent es chevaus couranz et abrivez
Et furent .ix. mil[lier] quant furent adoubé.
Font soner la bancloche et les grailes soner,
1820 [Si qu'] en molt petit d'eure se furent asemblé ;
Et Gontiaumes li ost[es] s'est tous coranz armez :
Il vestit son hauberc, s'a son hiaume fermé
Et a ceinte l'espée au senestre costé.
Et a prisa son col .j. fort escu boclé,
1825 Et monte en .j. cheval corant et abrivé;
La coverture en fu d'un brun paile roé;
1798 encui, ou encor(r) ms. engu avec un signe d'abréviation sw
ta dernière syllabe. — [802 les vit, ms. le sens ; on pourrait pro-
poser le sot. — i8o3 Qui est ce ; que avés vous. — i8o5 ces a. —
1807 ne vous r. — 181 1 Dieu ait c. — i8i3 ert, ms. est. — 1816
senestiers c. — 1818 Et sont .ix. mil q. — 1819 les bancloiche.
Peut-être faudrait-il substituer a souer [dans le premier cas) un
autre verbe, par exemple, tentir ? — 1S22 h. fermer. •
DOON DE LA ROCHE 69
.VI le. besanz i tienent de fin or esmer[é]. (v°)
Et li serjant Gontiaume se corurent armer,
Et furent bien .ij'^. quant il furent armé,
i83o [Tres]tuit du sien lignage e de son parenté.
Jusqu'a[l] chastel Tomile ne se sont aresté.
La peiissiez veoir .j. estor si mortel:
Tante hanste i ot fraite et tant escu troé,
Des haubers jaserans tant esclavain[sj fausse[z]...
i835 Le sanc et les cervelles a la terre coler;
Quatre vinz des Tomile i o[n]t les chiés copez,
Il meismes i fu d'un grant espié navrez.
Cil leans se desfende[nt] por lor vies salver,
Mais il ne lor vaut mie .j. denier moneé.
1840 Atant es vos Malingre sor .j. destrier monté;
N'est encor chevaliers, s'est en l'estor entrez.
Et quant le voit Gontiaumes, a po qu'il n'est desvez;
Il broche le cheval des esperonz dorez.
Et a brandi la hanste a[u] confenon doré,
1845 Et va ferir Malingre, ne le vot espargnier.
Que l'escu de son col lui a fraint et cassé,
Et l'haubert de son dos rompu et dessiré.
Sa lance li conduit lez le senestre lé;
Tant com han[s]te li dure, l'a il jus enversé;
i85o Deable Tont gari, qu'il a toz jors ame[z].
Tomiles l'a saisi entre lui et Hardré,
En .j. tor de marbre l'ont en fuie torné;
II referment les huis, li assaus est remez.
Tomiles en monta contremont les degrez, [f. 36
i855 Par .j. des fenestres a son chief forsgeté ;
Ou qu'il voit l'arcevesque, sel prist a apeler :
i83o de sies If — i834-i835, lacune entre ces deux vers. — i836
Quatrevins ioit des To. les c. c. — 1837 Cf.v. jjoi. — i838 por
lor mesaluer. — 1839 monnoié. — 1840 d. monter. — 1841 I e.;
entrer. — 1846 ne le est espargnié. — 1846 1. ait frains et cassés
— 1847 Et le h. — i832 fuie, ms. fine — i853 huis, ms. baisse. —
i855 f. geter.
70 DOON DE LA ROCHE
« A la moie foie, sire, a grant tort m'asaillez :
« Se mes niez est or enfes, encor n'est adobez;
« Et se il fait folie, sel doit bien amender.
1860 « Je rendrai les chevaus, ja n'en ert trestorné;
« Si ferai droit Gontiaume volentiers et de gré. »
Et dïent li borjois : « En pardon en parlez.
« Ne ferez traison quant de nos partirez ?
— Par foi, » dist l'arcevesques, « il parle com senez :
i865 « Les chevaus rendra il ; ja n'en ert plus parlé. »
Et dient li borjois : « Si ert com dit avez. »
A tant s'en sont torné : li essauz est reniez.
Tomiles s'en torna quant ot le plait guié,
Si moine les chevaus Gontiaume en son ostel,
1870 Entre lui et Malingre, le gloton desfaé.
Ou voient le borjois, au pie li sont aie,
Mars l'oste fu si fiers nés daigna resgarder ;
Si les bota du piet, a po ne sont crevé :
« Levez vos en d'ici, fais cuvert naturel ;
1875 « Ja ne vos amerai en trestot mon aé,
« Tôt por l'amor Landri, mon seignor naturel,
« Que vos avez a tort de cest pais geté. »
Li messagier l'entendent, grant joie en ont mené ;
L'un vers l'autre s'en rïent coiement et soef :
1880 a Par les sainz Deu, compainz, bien nos est encontre ;
« Landris est niés le roi : bien oir le poez. (v°
« Nos ne querons en France désormais [a] aler. »
Olive repairoit du mostier honoré,
En .). crote avoit demi .j. jor esté,
ï885 Et ot dit [son] sautier Olive [o] le vi cler,
Que Jésus gart Doon qu'ele pot tant amer,
Et li ramaint Landri, son fil qu'ele ne het,
«
1860 trestornés — 1862 En pardons -- i863 f. traïsons -* i865
L. ch. renderai je; p. parlés — 1867 s. tornés. — 1868 torne. —
1870 le, ms. li. — 1871 li. b. — 1877 p. geter. ^ 1881-2 Cf. v.
l658-g. — 1883 querrons. — i883 tn. saine honorer. — 1887
ramoinne ; que ne.
DOON DE LA ROCHE Jï
Et ot oi la messe a la bone cité.
Jusqu'à l'ostel Gontiaume ne se vot arester,
1890 Car sove[n]te[s] foiées i prenoit le disner ;
Tuit li orent failli li boin et li privé,
Gontiaumes la retient, li gentis et [li] ber ;
Ou qu[e] il voit la dame> si est encontre alez ;
A .iiij. chevaliers si l'a fait adestrer.
1895 Toz les degrez de maubre sont ou palais monté,
[Dame] Olive ont assise ou faudestuel doré,
Puis demandèrent l'eve, s'asirent au soper ;
Assez ont venoison et vins viez et claré.
Quant il orent mangié et beii a planté,
1900 Les napes corent traire serjant et bacheler.
Il demande[nt] congié, si s'en vont as ostés,
Et Gontiaume remest et Olive au vis cler
Et li .ij. messagier, qui molt font a loer;
Huimais porront noveles a loisir demander.
1905 — Hostes ! qu'est ceste dame ? » ce li a dit Outrés.
« Molt bien semble roïne, ainsi voir m'ait Dex! »
Et respondit li ostes : « Ja 'n orrez vérité :
« Ele est seror le roi qui France a a garder;
« Si la dona .j. conte qui molt fait a loer,
1910 « Dan Doon de la Roche, onques ne fu tés ber;
« De lui ot ele .j. fil qui molt fait a loer,
« Et ota non Landri, molt gentis [est] et ber.
« Ne savons de l'enfant quel part il est alez;
« Tomiles de Coloigne [molt] l'a mal engané,
191 5 « Duc Doon de La Roche, c'est fine veritez :
« Sa fille li dona, cesti iist desevrer.
« Nos en avons les cuers corosos et irez. »
1888 ot, ms. ait. — 1890 s. foix il p. — i8gi boin s'oppose mal
à privé : Vun de ces deux mots doit être fautif . — 1893 si est, ms.
cest; alez, ms. aler. — 1894 a destier. — 1895 p. montés. — 1896
faulx destrier d. — 1897 Teve, ms. ne, — 1903 H. ce li a dit
qui a cest dame dit O. — 1909 fait ms. fut. — 1914 engané, ms.
enginié. — 191 5 Le duc D {sic) de La R. ceste fine in'tes.
72 DOON DE LA ROCHE
— Sire », [ce] dit Outrés, » [en]vers moî entendez;
« Par la foi que vos doi, je dirai vérité :
1920 « Homme somes Landri dont vos ici parlez;
« Eu cest païs venimes enquerre et demander
« Por savoir de l'enfant qui est ses parentez;
« Or savomes de lui iot[e] la vérité,
« Le matin moverons, ja n'en ert trestorné.
1925 « Nos ne querons en France, certes, avant aler. »
Quant l'entendi Olive, s'en ot liesse assez :
Quatre fois se pasma entre les bras Outré,
Quant Goniiaumes li ostes l'en corut relever.
Qui li veïst les mes baisier et acoler,
1930 N'i eiist si dur cuer non convenist plorer.
« Veïstes vos mon fil, por sainte charité? »
— Oïl, en nom Deu, dame, » ce li a dit Outre[z],
« Enz en Costantinoble est mes sires remés;
« La portera corone, ainz que past li estez,
1935 « Por la plus bêle famé de la crestïenté,
« Et venra en cest règne ainçois .j. an passé;
« Tomile et Ma[lingre] fera les chiés coper.
— Hé Diex ! [ce] dist la dame, tant l'avrai désiré. »
Celé nuit ont grant joie a loisir démené.
1940 Quant 11 lit furent fait, si sont couchier aie.
L'endemain par som l'aube se sont li mes levé,
Et vestu et chaucié et molt bien conreé,
Et mistrent en lor dos les hërmins engolez
Par desus les blïauz a fin or gironez.
1945 Les granz ma[n]tiauz de sable ont li mes afuble[z],
Dont li tassel en valent tôt l'or d'une cité,
A pierres et a bra[s]mes qui molt font a loer ;
Les chapels sebelins ont en lor chiés posez,
1922 qui est de ces p. On pourrait aussi corr. qu'est de son
parenté. — 1924 trestornés. — 1925 Cf. v. 1882 — 1929 nies b.
1932 en n. de D. — 1934 a. qui part — ig36 c. roine — 1940 s.
couchiés a. — 1941-51 Cf. vv. i5jo-8 — 1948 Les ch. ont s. en
lor chief poser.
DOON DE LA ROCHE -TS
Escharpes cordoaines et les bordons ferrez ;
igSo Li picois sont d'argent et li verroil d'or cler.
'* Les dromadaires font du celier amener ;
Li messagier i montent par les estriers [dorez],
Gontiaumes les convoie une pièce, li bers,
E li sainz arcevesques et Olive au vis cler.
1955 La dame [ot] .j. anel qui molt fi[s]t a loer :
Ce fu du plus fin or c'on peust recovrer ;
La piere qui fu enz ot molt très grant bonté.
Li dus Doz li donna, qui molt fait a loer,
La nuit qu'il gist o lui a Monsteruel sor mer ;
i960 A donc [i] fu Landris li vassaus engenrez;
Si le traist de son doit la dame o le vis cler, (/. 3S)
Bel et cortoisement en apela Outré :
« Sire frans chevaliers, vers moi [en] entendez ;
« Vez ici .j, anel qui est molt bien ovrez,
1965 « Que me dona dus Do au gent cors honoré;
« Si le baillez Landri le mien fil alozé.
« Ce seront [tels] ensoingnes que connoistra assez. »
Li messagiers le prist, qui nel vot refuser
[Et] molt cortoisement l'a en son doit bouté.
1970 Li messagier s'en tornent, qui sont preu et séné,
La bêle se pasma, Olive o le vis cler.
Molt par fu granz li duels quant il sont desevré.
Li messagier cheva[u]chent, qui n'i sont aresté,
Et trespassent les terres, les porz et les régnez.
1975 En .viij. jors trespasserent .xlix. contez
Et .vij. roialmes granz et .x. arcevesquez;
Deci qu'a Bras Saint George ne se sont aresté.
Quant il i sont venu, s'entrent en une nef,
1932 Li m. remontent p. 1. estrieres. — igSS Contre I. c. —
1959 qui g., Monstruer; cf. v. 2084. — i960 Cf. v. 108. —
1965 Qui me d. Doon. — 1966 Si le me b. L. mon fils a. — 1969
d. bouter. — 1970 Cf. v. i5g3. — 1974-76 Cf. vv. 1600-2. —
1976 arche veschies, qui ne convient pas à la rime. Il y a arce-
vesques au V. 1602. — 1977-80 Cf. vv. i5g4-'j.
T4
DOON DE LA ROCHE
Diex lor dona tantost si droiturier oré ! .
1980 D'autre part a la ter[r]e es les vos arivez.
Montent es dromadaires, si pensent de rer[r]er,
Tresqu'a Costantinoble ne voldrent arester.
Par .). mardi matin i vindrent au disner.
Seignor, ce fu en mai, que fait chaut en esté,
1985 Que florissent cil bois, reverdissent cil pré,
Et ces aiguës revienent ainsi en lor chinex,
Cil petit oisillon comencent a chanter,
Quant li rois Alixandres est par matin levez; {v°)
En .j. vergier entra por son cors déporter,
1990 Très en mi .j. prael i fait tendre son tref :
fW-V Les forches sont d'argent et d'or fin li frestel,
Trois escarboucles ot, qui molt font a locr,
Et fu d'un vermoil paile environ gironez :
Li pans en fu a or et a argent fra[i]sez;
1995 Dieus me fist [nule] beste qui ne soit pointe ou tref;
Les cordes sont de soie e li pan sont d'or cler.
'i Et Landris li cortois i est avec alez,
Asses et Guinemanz et li autres barnez.
Salmadrine la bêle i a fait adestrer
2000 A iiij'^. Griffons qui molt font a loer.
De la soie beauté vos doi je bien conter :
Vestu ot en son dos .j. hermin engolé,
Par desus .j. blïaut a fin or gironé,
E fu estrois as lez, qui molt fist a loer ; ;;
20o5 .1. grant mantel de sable ot la bêle afublé.
Dont li tas[s]el en valent tôt l'or d'une cité,
A pieres et a brèmes qui molt font a loer ;
Ele ot molt vairs les ieus, s'ot le viaire cler
1981 es, ms. a. — 1985 Que, ms. Quil. — 1992 T. escarboncle
d'or q. — 1993 vermoillô. — 1996 pan, Con\ pau ou pel ? ■— 1998
G. sunt li a. — 2000 A. .iiij. tois {ou cois) G. — 2002 dos, ms.
dois. — 2004 Et fust e. a las q. m. fust aloés. — aoo5-7 C/. vv.
1945-7-
DOON DE LA ROCHE 75
Et la coleur vermoille comme rose en esté,
2010 A u[n] fil de fin or ot les crins galonés.
Et sisi desus un mul qui molt fist a loer :
La sele de son dos vaut bien .j. cité ;
Li arçon sont d'or fin a esmaus tresgité,
[Et] la sambue en fu d'un brun paile roé.
20 1 5 Onques ne tre[s]fina tant qu'ele vint au tref. {f. 3g)
.1. vermoil paile firent desus l'erbe geter,
Sus se cocha Landris, li gentis et li ber.
Il oî l'oriol et la melle chanter ;
De sa merè li poise qu'il laissa outre mer,
2020 Et craint li faus Tomiles ne rai[t] fait afoler;
Molt tendrement des ieus commença a plorer.
Salmadrine la bêle l'en prist a regarder ;
Seignor, bien le sachiez, le cuer en ot iré,
Et cuide de l'enfant qu'il ait autre penser,
2025 Que ne dot les messages qu'en France sont aie.
Parmi trestoz les autres l'est alée acoler.
Plus de .XX. foiz le baise par molt grant ami[s]té.
Bel et cortoisement le prist a apeler :
« Damoisiaus de bon aire, mar vos esmaierez.
2o3o « Je m'en irai en France a pié, se vos volez.
— Dame », ce dist li enfes, « en pardon en parlez.
« Par la foi que vos doi, vos parlerez tost d'el.
« De ma mère me poise que laissa[i] outre mer
« Et dot li fel Tormiles ne l'ait fait afoler.
2o35 — Sire », dist la pucele, « Dieus a tôt a garder. »
Atant es vos les mes qui de loing ont erré ;
A pié sont descendu devant le maistre tref;
Lor dromadaire furent estanc et tressiié.
201 1 fut a 1. — 2012 La sale. — 2016 vermoille — 2017 se, ber,
ms. bel. — 2020 o. mere. — 2022 prist, ms. print. — 2026 Qui ne
dote. — 2026 l'a a. — 2o3o irais ; se. ms. ce. — 2o32 el, ms. elle.
— 1034 fait esposer; cf. v. 2020. — 2o35 toust a g. — ïo36-9
Cf. i6a3-7. — 2o38 estanc, ms. cstaint ; cf. 1626.
!^.V
j6 DOON DE LA ROCHE
[Et] li vassal forment iravaillié et pené.
2040 II saluent le roi com ja oir porrez :
« Cil Damedieus de gloire, qui en crois fu penez,
« Gart le roi Alixandre et lui et ses privez.
« Desor trestoz les autres devons Landri amer.
« Sire, fumes en France oïret esgarder
2045 « Por savoir de Landri de quel gent il est nez,
« Se il est niés le roi qui France a a garder;
<i Or savomes de lui tote la vérité :
« Por voir niés est Pépin qui France a a garder,
« Qui ocist le lion qui tant fist a doter.
2o5o « Et fumes a Coloigne, la mirable cité,
« La veïmes sa mère qui tant a le vis cler,
« Dame Olive la bêle, seror Pépin le ber :
« Il n'a tant bêle dame en la crestïenté. "
« Tomiles et Malingres la nos firent rober
2o55 « Et tolir noz chevaus, ne [le] vos quier celer,
« Quant i ala Gautiers et l'arcevesques ber,
« Par vive force firent noz chevaus ramener;
« Quatre vinz de[s] Tomile i furent decopé ;
« Molt fu grant la meslée en la bone cité.
2060 « Malades est Pépins, bien a .vij. anz passez,
• S « Por duel de son nevo qu'il en la[i]ssa aler;
« N'a qui teingne ses terres ne ses granz héritez ».
Quant l'entent Salmadrine, ne l'en sot mie gré.
Elle marcha, avant, si le prist a ciner;
2o65 En l'oreille li dist coiement et soef :
« Par les sainz Dieu, messages, molt as le sen desvé ;
« Par le mien escient, que tues enivrez.
« Tost et isnelement alez en voz hostés, (/. 40)
« Si vos faites très bien baignier et conreer.
2040 com, ms. comme. — 2042 Garde le r. — 2044 en Fr. fus-
mes. — 2049 ^s^ *"*• ^"^^- — 2o5o l'amirable c. — 2o52 La
belle O. s. P. li b. — 2064 vous f. r. — 2039 meslée, ms. malée.
— 2060 Pépin est malade. — 2064 marchit. — 2066 es le san d.
DOON DÉ LA ROCHE 77
2070 « Car vos estes forment travaillié et pené, ^
« De ci qu[e] a[u] matin que li Jors venra clers.
« Puis venez a mon père, gardez n'i arestez,
« Puis li dites trestot ce que avez trové ;
ft Damedex vos confonde se de mot en mentez ».
2075 Et il respondent : « Bêle, a vostre volenté.
« Ja chose ne dirons qui ne vos viengne a gré ».
Outrés s'en est torne[z], que n'i est arestez,
De ci que a Landri ne se vot arester ;
Bel et cortoisement le prist a apeler :
2080 « Damoisiaus de bone aire, a moi [en] entendez.
« Vés ici un anel de fin or esmeré
« Que t'envoie ta mère Olive o le vis cler,
« Que dus Do li dona,' qui tant fait a loer,
« La nuit, quant jut a li, a Monsteruel sor mer, »
2o85 Quant Landris l'entendi, si commence a plorer.
Outrés a pris l'anel, si li a présenté,
Et Landris le reciut, qui molt fist a loer ;
Plus de .c. fois le baise doulcement et soef;
Enz en son doit meisme l'avoit mis de son gré.
2090 Li messagier s'en tornent; congié ont demandé ;
Landris lor a doné volentiers et de gré.
Tost et isnelement s'en vont en lor ostel,
Puis si se font [très bien] baingnier et conreer.
Dist li rois Alixandres : « Baron, or entendez,
2095 « Landris est niés le roi, entendre le poez : [v°)
« Demain prendra ma fille, se vos le me loez ;
« Si li donrai ma terre et trestot mon régné.
— Sire », disi Salmadrine, « .v^. mercis de Deu.
« Par la foi que vos doi, forment l'ai désiré ».
2100 Li rois s'en est tornez et ses riches barnez;
Tost et isnelement est venuz a l'ostel ;
2070 travaillies et penés. — 2076 ja ne >J. choses que; cf. v.
j555.— 2081 Vees. — 2082 Qui; au v. c. — 2084 Monstruer ;
cf. vv. igS8-g. — 2097 Ce. — 2098 S. ce dit Sa.
7^ DOON DE LA ROCHE
Tantost demande l'aiguë, s'assirent au soper
Molt i ot venoison [et] vins viez et clarez,
S'orent grues et gantes et paons empevrez,
2io5 Isopé, bogu[e]rastre, piment et eluné.
Quant il orent mengié et beii a plenté,
Si chantent et violent et rotent H jugler ;
Celé nuit ont grant joie a loisir démené;
Et li lit furent fait, si sont couchier aie.
LX
2 1 lo Or lairommes de ces qui sont bien aaisié.
Quant tens [etlius] en iert bien savrons repairier;
Si vos dirai du duc, de son grant encombrier :
Tant a norri Malingre qu'il le fist ch[eval]ier.
C'est li filz Audegour, cui Dieus dont encombrier.
LXI
21 1 5 En meïsme cel jor que dans Do l'Alemans
Ot adobé Malingre, ne l'ama il notant.
L'endemain par matin fu si ses malvoillanz
Que l'ala par haine toz tens contralianz :
« Adoubez sui, beaus sire, merci Dieu le poissant!
2120 « Or se gardent tuit cil cui je suis mal voillanz!
« Dame Olive de France ne voil pas que se vaut (/". 41)
« Qu'elle soit conreée dès cest jor en avant
« De lotes celés terres qu'a vos sont apendant ».
Quant Tentendi li dus, a po ne pertle sen :
2104 gantes, ms. genres. — 2io5 elimé. — 2108 démener. —
2109 fait, ms. fais. — 2110 b. et aisié. — 2ii3 chevalier, ms.
chier. — 21 18 Et. — 2i2t vant, jms. vante. — 2122 conreée, m5.
courecee. — 2123 t. celle tere; v. soit a. ..• ■
DOON DE LA ROCHE 79
2125 « Por amor Dieu, biaus filz, ne te par coitier tant!
« Ja est [ele] seror dant Pépin le roi Franc ;
« Il n'a si bêle [dame] en cest siècle vivant.
« Li rois vos a mandé par menace et par ban
« Qu'ele ne soit destruite ne des membres perdant ».
2i3o Quant l'entendi Malingre, a po ne pert le sen :
« Haï ! vos i mentez com mauvais couz sofranz ;
« Vos estes de li couz tôt a vostre escïant » .
Quant l'entendi li dus, a po ne pert le sen :
Il hauce le poing destre, si feri son enfant
21 35 Qu'il[r]abati a terre, qui que plort ne qui chant.
Et quant le volt Malingre, si sailli en estant,
Et va saisir son père par les grenons davant,
Son peliçon ermin li va tôt des[c]irant,
Entreci qu'a la terre ne s'aresta néant.
2140 Adoht i sont coru Baivier et Aleman,
Et furent en po d'ore bien .vij^x. combatant.
Cil gentil chevalier çn vont trives prenant
Et dou père et dou fil, car molt est avenant.
LXII
Cil gentil chevalier qui les trives en quirent
2145 Et dou père et dou fil et des autres meïsmes,
Que d'une part et d'autre très bien les affïerent
Et ostages livrèrent et puis les raplig[i]erent.
Tomiles et Malingres chascun jor se porquierent (v*>)
2i5o Comment la suer du roi du païs chasse[rïe]nt.
A son hostel li mande[nt], forment l'ont corrode,
Que se ele i remest, la teste avra trenchie.
2125 parGeittier. — 2126 On pourrait proposer Ja est [ele] la
sufr. — 2i3i m. comme m. c. et s. — 2i33 sen, ms. snnc. —
2 1 34 feri, ms. ferut. — 2i35 plore ne que. — 21 52 avrait t. •
8o DÔON DE LA ROCHE
Quant l'entent la duchesse, molt s'en est esmaîe;
Damedieu reclama et le baron saint Pierre :
« Glorieus [sire] père, qui de toz es jug[i]ere,
21 55 « Cil Loherain me taillent, de tôt m'ont abaissie ;
« Alez s'en est Landris, parcui fuisse garie.
« Faillie m'est l'estache ou m'e[s]toie apoïe.
« Or n'[avr]ai jamais aide ne davant ne dar[r]iere! »
.II. garçons li envoient et .j. charnberiere,
2160 Sor .). mauvais roncin ont la dame chargie.
Quatre fois se pasma quant la vile a vuidie.
Onque[s] ne trestina, si vint en Honguerie ;
L'avesque[s] Auberis l'a molt bien herbergie,
Car il estoii sis oncles et elle esioit sa nièce ;
21 65 Par le mien escient que l'avra a mesnie
Tresque il li rendra Alema[i]gne et Bavière.
LXIII
Or est Olive bien assenée et venue ;
L'evesques Auberis Ta molt bien receue.
Or vos dirons du duc, de sa mésaventure :
2170 Une guerre li sort, qui vient d'outre nature.
Tomiles et Malingre et sa tille, la pute.
Cil en ont conseil pris et parole tenue,
El dïent l'uns a l'autre : « Cesi[e] terre est molt drue
« Et riche et aaisiée ausimeni comme Pu[i]lle;
;<^\ 2175 « Qui or avroit Doon cest[e] ter[r]e tolue!
« Car se il se resemble et ,j. po s'esvertue,
a Tost avrient la ter[r]e gastée et confondue ; {f. 42)
« Et se Landris revient, ce en malaventure».
21 55 C. la horain (en deux mots). — 2157 estaiche ou je. —
2i58 n'ai. — 2160 la d. chergée. — 2161 a veudie. — 2i63
habergec. — 2164 ces o. — 2170 d'autre nacure. — 2173 li .i. —
2176 G. ce. — 2177 T. avriens. — 2178 est m.
DOON DE LA ROCHE 8l
Tomiles est levez, quant Malingres l'argue,
2180 Et montent es chevaus, par la terre corurent,
De l'un chastel a l'autre, por secors et ai[uje;
Cil gentil chevalier lor afïent et jurent
Que ja Do ne tendra chastel ne teneiire.
Ou repairier sont mis, molt font malaventure :
2i85 Dans Do tint en son poing .j. ostor de .v. mues,
Aler doit en rivière por le sien cors desduire;
Et li cuens i ala; . j. grant pièce i furent,
Et mena .iiij. contes de molt grant teneûre ;
Et quant il se repaire, s'a Coloigne perdue.
2190 Cil gentil chevalier li escrïent et huchent
Et dames et puceles de soliers et de rues :
« Alez vos en, dans Do, en Calabre ou en Pu[i]lle,
« Que ja en Loereingne ne tenrez ma[i]s tenue».
LXIV
Or est Do de La Roche corociez et irez :
2195 Les portes sont fermées, ne pot dedans entrer.
S'a Malingre son fil et Tomile apelez :
« Di va! ovre la porte, la[i] moi leanz entrer.
« Se de riens t'ai mesfait, près sui de l'amender ».
Et cil li respondirent : « Certes, n'i entre[re]z.
2200 >. Par la foi que doi Dieu, mais n'i sejornerez :
« Après vostre putain vos convendra aler,
« Et querez tel conseil que sciez racordez,
« Que ja de Loereingne ne tenrez hérité ».
Do li dus respondi[s]t : « Dans gloz,vos i mentez :
2 2o5 « El ne fu onques pute, jel sai de vérité. (v»)
« Mais encui ve[r]rai je, voirement De[us] le set,
« Que a mauvais lignage sui du tout asemblez. »
2180 a ch. — 2i83 Do] D. — 2186 p. son c. d. — 2195 furent
f. — 22o3 de Orroine ne; hérités. — 22o5 je le s. — 2206 v. De
le s. — 2207 au m. 1.
6
82 DOON DE LA ROCHE
I
Or est Do soz Coloigne coreçous et pleins d'îre;
Des ieuz de son front plore et de son cuersospire.
2210 Ts^nt atendi li dus que nuiz fu asserie,
Puis est montez [li dus] a mesnie escherie.
Onques tot[e] la nuit ne cesse ne ne fine,
Et est venuz a Ais quant l'aube est esclarie.
Entrer vot en la porte quant il li contredirent,
221 5 Que l'avoient juré a Tomile et Malingre,
Quant le voit li dus Do, a poi n'enrage d'ire; , :
Des ieuz tenrement plore et de son cuer sospire.
Et quant le voit li dus, si lor commence a dire :
« Je vos torrai les membres, le[s] te[s]tes et les vies. »
2220 Dont remonta li dus a mesnie escherie,
De ci a son demoine ne cesse ne ne fine.
Sui baron chevalier en La Roche se mirent,
En son prime demoine que il a de Dieu quite.
LXVI
Or est Do de La Roche voirement revenuz
2225 En son privé demoine que il a de Jhesu.
Or s'en ira clamer a Pépin a[u] lion
Del duel et del domage qui li est avenuz.
Il entra en la voie et ou chemin batu ;
De ci qu[e] a Paris ne s'est arest[e]uz.
223o Tant fist par ses Jornées qu[e] il i est venuz,
Et a trové le roi en sa sale lassus.
Molt le trova malade, dolent et confondu ;
221 1 mainnie. — 2214 la portent. — 22i5 et a M. — 2220 mein-
nie. — 2225 cleve {ou eleue) d. — 2226 a[u] lion, sic ms. — 2227
Des d. et des domaiges. — 3229 ne c'e. — 223o ces j.
DOON DE LA ROCHE 83
De duel [et] de pitié en a ploré li dus. (/". 43)
Et quant le voit li rois, si li a ramentu :
2235 « Que fait ma suer Olive en cest règne la sus ?
« Très bien la me gardez [de] Malingre et d'autrui,
a Que ne li soit damages ne hontages venuz.
— Ne le vos celera[i] », puis si a dit li dus,
« Je ne sai de la dame quel voie ele ait tenu ;
2240 a Tomiles et Malingres l'enchâssent par vertu.
« Les fiez que me donastes ai je trestoz perduz.
— Di va! » ce distli roi[s], qui les t'a donc toluz?
— Par la moie foi, sire, nel vos cèlerai plus :
« Tomiles et Malingres, li cuvert mescreii. »
2245 Quant l'entendi li rois, molt [en] fu irascuz :
Quatre fois se pasma ; molt em pesa au duc.
LXVII
« Sire Do de La Roche », ce dist l'empereor,
« A tort et a pechié m'as tolu ma seror,
« Olive la duchesse a la clere façon.
225o « Or m'en irai au règne voirement a estros,
« Ja n'i avra si riche que ne met[e] au desoz.
« Ou jel face ou jel lais, ja n'i aras honor. »
Del peliçon hermin a .iiij. pois derouz,
S'en desfia Doon, son serorge, oiant toz.
LXVIII
2255 « Sire Do de La Roche, » dist Pépins li bons rois,
2a34 V. le roi ; si, ms. ci. — 2235 Et que f. O. ma s. — 2236
garde M. — 2238 ai d. — 2239 ^st tenus.— 2240 renchasserent
p. V. — 2241 Les chastels. — 2243 nel, ms. nos. — 2244 c. mes-
treux. — 2246 m. em pera. — 225o i. ou rainne. — 2a5i n'i aurai.
— 2352 Ou jel le f.
84 DOON DE LA ROCHË
« A tort et a pechié ma seror me tolois ;
« Chalonge vos [par droit] : preste fu a cest soir
« A faire tel juïse quel gardassent François.
« Vous nel vousistes pendre ; orgueils fu, par ma foi.
2260 « Or m'en irai [au règne], ne puet pas remanoir. »
Dou peliçon hermin a rompus .iiij. pois, (v*
Si desfia Doon, son serorge, c'est voir;
Et quant le voit li dus, grant paour a de soi : -
Il monta ou cheval ; n'i osa remanoir.
LXIX
2265 Do se part de la court, que congié n'i a pris.
N'a si haut homme en France nel haice por Landri,
N'en Flandres n'en Poitou, [Berri] ne Limosin.
Il entra en sa voie, s'acoilli son chemin
Et trespassa les terres [et] les porz et les puis,
2270 Deci qu'a son demoine ne prist [il] onques fin.
Venus est a La Roche ; si l'a faite garnir
Et fait serrer les portes et lever ces paliz
Regeter ces fossez et ces hauz rolleïz,
Et a mandé ses homes, ses chevaliers de pris,
2275 Tant qu'il en ot ensemble la monte de .iij. m. ;
Puis s'adobent ensemble li chevalier hardi
Et montent es chevaus et es destriers de pris.
Entreci que a Ais ne pristrent onques fin ;
Li dus Do s'embuscha en .). brulet petit
2280 Qui fu d'is et d'aubors, de loriers et de pins;
2257 Ch. li uus prestes sui a c. s. — 2258 j. quelle. — 2269 V.
ne le V. p. — 2260 irai, ms. irais. — 2262 c'e. Voirs. — 2265 Ce vers
se lit deux fois de suite dans le manuscrit, la première fois comme
vers final de la laisse LXVIIl. — 2267 Ne P. ne Flanras ne L. —
2272 f. lever 1. po. — 2273 h. roillies. — 2274 m. ces h, ces ch. de
p. — 2275 la, ms. le. — 2277 a ch. et as d. — 227g s'embricha.
DOON DE LA ROCHE 85
.C. chevaliers errant a la porte tramist,
Tôt droit les ont bien estormiz.
Cil dedans s'adoubèrent com chevalier de pris :
Il vestent les haubers, lacent hiaumes bruniz,
2285 Et ceignent les espées as bons coutiaus forbiz
Et montent es chevaus corans et arabis
Et pendent a lor cols les forz escus votiz
Et pristrent en lor poins les forz espiez forbiz, {/. 44).
De la porte s'en issent et crient a hauz criz.
2290 Le cembel ont molt bien premerain envaî,
De ci qu[e] en l'agait ne pristrent onque[s] fin,
Adonc lor sailli Do, qui fu pros et hardiz ;
Il broche le cheval des espérons d'or fin,
Et [a] brandi l'espié au confanon porprin.
2295 Joserani de Coloigne va en res[cu] ferir;
Par soz la bocle d'orli peçoie et malmis[t],
Et l'aubert de son dos rompi et desarti,
Le cuer qu'il ot ou ventre en .ij. moitiés 11 mi[s]t,
Toute plaine sa lance l'abati mort souvi[n].
23oo II escrie : « La Roche ! Chevalier, ferez i! »
La peûst on veoir .j. estor si basti,
Mainte hanste i ot frainteet maint escu croissi,
Tant haubert jaseran rompu et desarti,
Et l'un mort desor l'autre trebuchier et morir,
23o5 Le sanc et la cervele a la terre cheïr.
Loorain s'en tornerent, qui nou porent soffrir,
Et li duc les enchau[ce], qui ne lor fu amis.
.XL. chevaliers a retenus et pris
Et .iiij". vilains des meillors du païs ;
23 10 De ci que a La Roche les a menez et mis.
2281 c. ch. cerremant a la p. tresmit. — 2282 T. d. a la port
1. o. b. escernis; corr. T. d. a la posterne (?) — 2284 h. forbis.
— 2285 Et ceindes. — 2286 es, ms. a. — 2287 1. coul. — 2288 Et
prinsent — 2289 a hault c. — 2291 ne prinrent. — 2294 c. pror-
pin — 2296 blocle do. — 2297 d. li rompit. — 23o5 t. chcor. —
33o6 Laorrain.
86 DOOFf DE LA RÔCHE
De ce tieng je Doon et a fol et a bric
Quant nul de ces perjurs a a ra[a]nçon tnis :
Mieus les eûst fait pendre ou ardoir ou boulir.
LXX
Or s'en repaire Do ou chastel de La Roche,
23 1 5 Serjans et chevaliers enmoinne a grâht flote ;
Argent et raariçon a tnervoille li offrent. (v^)
Onc^tles ne tresfina s'est venus à La Roche,
Garder fait ses prisons en Chartres et en fosses.
L. escuiers s'en torne, qui a espérons broche,
232oTomile et Malingre va noncier la parole.
Sa fille demanda, qui ne fu mie foie :
« Que firent ores d'Ais H baron qui sont itostre ?
— A la moie foi, dame, màlement se deporte[nt],
« Car desdu[i]s de puceles ne tables nés conforte.
2325 « Mardi matin nos vint sire Do de La Roche.
« Si nos mist ses agais enz ou brul de Manoplé }
« Danz Do tios [i] ocist Gilebert et Antoine,
« Asson et Gu[i]nemant et Raol de Vaudone,
« .XL. chevaliers : li maus en estgranz nostres ».
233o Quant l'entendi Totniles, duel ot de ses paroles :
Il a mandé ses homes par vertU et par forée ;
Oriques iïe ttésfiria si vinrent a la Roche.
LXXI
Tomiles et Malingres ont mandé lor compaignes,
Et sont .xl. mile as haubers et àû lâtlCes.
2^11 bric, tns. bris — 23 1 3 Mais. — 23 16 et arancon; leur offri-
réîlt, — 23i9 tornent. — 2322 Q. Font oci. — 2325 m. vous v. —
2327 ^' '^ous 0. — 233o T. grant d. — 233i II manda; p. ver>
tus. — 2333 companies,
DOON DE LA ROCHE 87
2335 [S]i sont venu a Ais en Loeraigne ensemble;
Le samedi sejornent deci [que] a dimenge.
Apres le vespre montent [a] grant mervoille ensemble.
Li pères et li fils demoine[nt] si grant tence;
Venu sont a La Roche; tuit ensemble descendent,
2340 Puis se vont adober et leur armes présentent;
.C. chevaliers envoient ou chastel endementre.
Do fu contremontez par sa grant sapience,
Et a dit a ses hommes : « Tenez vos tuit ensemble ;
« Veez ci [le] cembel : l'agait avrons nos sempres » . [f. 45)
LXXII
2345 Do fu contremontez à sa grant o[s]t bannie,
A .vi)<:. chevaliers qu'il avoit en baillie ;
Li cembels s'en torna, s'ont la barre guerpie,
Ë dus Do lès enchauce com chevaliers nobile ;
De ci qu'a .iii). lieues de l'abatre ne fine.
235o Tomiles lor sailli d'une grant bruil[le] antive,
Ensemble o lui ses niés, li [faus] envers Malingre ;
La peiissiez veoir .j. estor a délivre.
La ot tant éscu fraîrit, tante lance ffesnîtiej
Tant gentil chevalier abàtU mort sans vie.
2355 « Seignor», dist li dus Do, «vez là force plus fiche.
« Damedieus, se lui plait, me venge de Tomile ! »
La n'ot onques parlé [de] joer ne de rire,
Ne d'eschas ne de tables ne déport de meschine ;
Qui mieus puet, si s'en vait, n'i atent seignorie.
2336 sejornerent. — 2338 g. tante — 2840 1. a. prenent. — 2341
c. àvoiént; en demantèr. — 2345 o. batime. — 2353 fresnine,
mi. ffazine. — 2354 vie, ms. mes.— 2357 p. joier. —2359 ma-
tant s.
88 DOON DE LA ROCHE
LXXIII
236o Molt fu grant la bataille [et] merveillose et pesme;
La gent Doon se traient es larris et es terres
Et navrent ces chevaus et ocïent et versent.
Es vos Doon poignant parmi la greignor presse,
Et a brandi [la] lance a trenchant alemele,
2365 Et va ferir Tomile, que il haioit a certes :
Sa lance li conduit lez le costé senestre;
Empoint le par vertu, si le trabuche a terre,
Puis a traite l'espée de son costé senestre,
Ocire vot Tomile, que il haioit acerte[s],
2370 Quant li baron i corent, qui faire ne le la[i]ssent,
A cheval le remonte[nt] li homme de sa terre. (v")
Tomiles s'en foi a Ais a la chapele,
Et Malingres li fels ad Espire la bêle.
Et dus Do s'en repaire a sa mesnie bêle;
2375 Entreci qu'a La Roche ne fine ne [ne] cesse.
Tomiles et Malingres s'en enragent et desvent :
Il remande[nt] lor hommes a force et a poe[s]te.
LXXIV
Lor homes ont mandez Tomiles et Malingres;
Il sont sor les destriers monté .xl. mile.
238o Or asaudront La Roche et sa gent la hardie.
L'endemain par som l'aube tienent la vile asise;
Do et Joffroiz s'en issent, chascun jor i ocïent,
Do les conquesist bien, ne vos me[n]tirai mie,
236o pesme, ms. peniue. — 236i se retraient es larcis — 2363
Doz p.; la, ms. les. — 2364 brandi, ms. brandie. — 2365 q. il
cheoit a terre; cf. v. 236g. — 2367 Au point la pervertus. —
2373 fels, ms. fele. — 2378-2379 T. et M. o. 1. h. m., Il s. .xl. mi.
s. 1. d. mo. — 238i par sou2 l'a, treuvent. — 2382 j. si o, —
3383 1, conquerit,
DOON DE LA ROCHE 89
Quant vint Pcpin[s] de France a sa grant ost banie.
2385 En Lo[e]roigne en entre nostre emperere riches,
Etaquiert les chastiaus [et] les bours et les viles.
Il estvenuz en l'ost dant Tomile et Malingre;
Ce fu par une nuit, la gent fu endormie;
Ja les ont bien rateins, d'ambepart lor escrïent.
2390 La peiissiez veoir bataille si fornie
Qu'il i ot bien des morz, mien esciant, .x". ;
Lor père ne lor mères onques puis ne les virent,
Ne de confession ne orent il aine mie.
Tomiles s'en foi a Maience la riche,
2395 Et li rois repaira endroit ore de prime,
Et ses riches barnez et sa grant compaignie,
Et asaillent La Roche par molt grant seignorie,
La ot tant targes frainte[s], qui si bien [sont] florie[s], {f.46)
Tant gentilz chevaliers, qui gisent mort sans vie !
2400 Assez en petit d'ore orent La Roche prise.
Do et Jofroiz mal virent a estros dame Olive,
Car il ne gardent [l'ore] que il perdent la vie.
Mais Pépins Temperere n'ot cure des ocire,
Ainçois lor fait )ure[r] desus sain[te]s reliques
2405 Qu'e[n] trestote lor terre ne remanront il mie.
Or s'en va li dus Do corociez et plain[s] d'ire,
Il et Jofroiz ses niés, que il aime et prise,
Car cil a [si] bon cuer que ne li faudra mie.
Cil autre jugleor qui de Doon vos dient
2410 Assez en ont chanté, mais il ne sevent mie, . .
La ou il la vos laissent la vos a[i] rafichie;
Je ramenrai Landri, mais ne vos anuit mie.
2387 dant, ms. danz. — 2391 n'i ot. — 2393 ne orent, ms. ne
oit ou ueoit. — 2396 barnez, ms. barons. — 2398 qui, ms. et.
— 2402 Ca'r il ne g. que leur qu'il p. — 2403 des, ms. del. —
2405 Que t. — 2410 II faut admettre après ce vers un vers
perdu, où il était question d'histoire ou de chanson, autrement
la, daus le vçrs suivant, ne se rapporte à rien.
90 DOON DE LA ROCHE
Of s'en va li dus Do corociez et plein[s] d'ire;
A poine et a travail vinrent en Honguerie.
241 5 La ont trové le roi de molt grant seignorie ;
S'a retenus les contes par force et par aïe.
Car ne le sait Landris ! n'eûst talent de rire.
Par tens verra son père, que il aime et prise;
Granz cos se donneront en champ par a[a]tie,
2420 Ne s'entreconoiss[oi]ent, car pieça ne se virent.
LXXV
Li rois de Honguerie fist forment a prisier,
Et ot a non Dorâmes, molt fu bons chevaliers.
Gostantinoble claime, siene en fu la moitié.
Ce fu droiz et mesure, car [tel] part li afiert.
2425 II a mandé ses hommes, si retint chevaliers, (v°)
Ensemble o eus Doon et Jofroi le guerrier.
Sor la rivé de Hongre sont Hongre herbergié,
Et jurent Damedieu, le glorios du ciel,
Tresqu'a Costantinoble ne [lor] laira il riens,
2430 De proie, d'autre chose, vaillant .iiij. deniers.
A tant es vos .j. mes sor .j. cofrànt destrier ;
Et fu parmi le cors d'un grant espié plaies.
A haute voie escrie : « Emperieres, oiez!
« Dorâmes vostre niés [s'Jest bien de vos vengiez;
2435 a Sor la rive de Hongre sont si homme logié,
« Et jure Damedieu, [le glorios] du ciel,
« Tresqu'a Costantinoble ne vos laira il riens,
2419 G. c. se donnarent en bataille p. a. — 2424 Seigneurs ce
fu d. — 2427 S. l'aigue de Hoguerie; cf. v. 2435 — 2429-30 cf.
243 j-8 et 2450-1. — 2430-2431 Entre ces deux vers il faut ad-
mettre une lacune : on est brusquement transporté à Constanti-
nople. — 2434 vengiez, ms. rangiez ; cf. v. 244J.
DOON DE LA ROCHE 9*
« De proie, d'autre chose, vaillant .iiij. deniers. »
Salmadrine la bêle en a oï plaidier;
2440 Bien poez dire et croire son cuer en ot irié.
Venue est â Landri, ou se devoit chaucier;
Si li baisa la boche, le genol et le pié,^
Bel et cortoisement l'en prîst a aresnier :
« Sire Landris de France, molt es boins chevaliers,
2445 « De tote nostre guerre es tu venus a chief,
« Ne ma[i]s que d'une seule, mais ele est molt grief.
« Bien se venge de nos Dorâmes, nostre niés :
« Il a mandé ses hommes ; si retient chevalier[s]
« Et jure Damedieu, le glorios du ciel,
2450 « Tresqu'a Costantinoble ne nos laira il riens
« De proie, d'autre chose, vaillant .iiij. deniers. {f'47)
— Bêle, ce dist Landris, « ester car me laissiez :
« Je les sai si coarz, si mauvais et laniers,
ft Or ne cuit nul en champ encontrer ne bailler. »
2455 Atant es vos .j. mes sur .j. corrant destrier,
Et fu parmi le cors navrez d'un roit espié,
Et monta ou palais ; ne se vot atargier ;
Ll sdns vermeus li raie [et] davant et darier.
A haute vois s'escrie : « Empereres, oiez... »
2460 Et quant l'entent Landris, a poi n'est enragiez. \
A haute vois escrie : « Armez vos, chevalier! »
Et cil li respondirent : « Com vos plaira si [i]ert. »
Lors s'adobent ensemble li noble chevalief ,
Et vestent les haubers, lacent heaumes vergiez
2465 Et ceignent les espées a[u] poing d'of entaillié
Et pendent â leur cols les escuz de cartier
2439 o. plaidoier. — 2440 irié, ms. iriés. — 2446 Ne m. ques ;
m. griefve. — 2447 ^^ vous, votre n. — 2449 le, ms. dou lê. —
i45o Vous 1. — 2453 sai, ms. sauz (ou sanz); et si m. — 2454
champ, ms. chant. — 2456 espié, ms. espiés. — 2458 dàrier, Jtis.
dariere. — 2459 h. v. fescrié. Il est probable qu'il y à une lacune
après ce vers, cf. v. 2434 et suiv. — 2460 n'est, ms. n'a. -^ 2464
vergiez ms. vergiers. — 2465 ceignent, ms. ceindent.
92 DOON DE LA ROCHE
Et prenent en lor poing les rois trancha[n]z espiez,
A .vij. clous de fin or les confenons laciez,
Et montent es chevaus arabis et corsiers,
2470 Et sont .xl™. armé sor les destriers ;
Et Landris les conduit, li cortois et li fiers,
Li niés le roi de France, [qui molt fist a prisier].
De ci qu'a l'oste ne firent la rue atargier ;'
La s'atiengnent ensemble com vaillant chevalier
2475 (Il broche l'aragon des espérons d'ormier)
Grans cos se vont doner es escuz de cartier,
De sor les bocles d'or les ont frains et perciez,
Les haubers jazerans rompuz et desmailliez. (v°)
La peûssiez veoir .j. abateïs fier,
2480 Le sanc et la cervele contre terre ra[i]er
Et l'un mort desor l'autre verser et trebuchier.
Atant es vos Landri armé sor .j, destrier :
Il broche [le] cheval des espérons d'ormier,
Sor l'escu de son col ala ferir Garnier :
2485 Desor la bocle d'or li a fraint et percié
Et l'aubert de son dos rompu et desmaillié,
Le cuer qu'il ot ou ventre li a par mi trenchié;
Puis escria et broche : « Ferez i, chevalier! »
Et il si firent sempres ; ne s'i vont atargier.
LXXVI
2490 Molt fu grant la mellée la ou cil ost s'assemble
Et d'une part et d'autre fu la perde molt grande.
La ot tant hante fraite et route targe tante,
2469 a. et coreciés — 2472 vers incomplet dans le ms. — 2473
sic ms., altéré; corr. De ci que a la rive ne firent a. (?); cf. v.
242^, 2435. — 2475 des e. et des pies. — 2486 rot et d. — 2488
broche, ms. broiche, altéré ? — 2490 La ou cil o. ansemblet
f. m. g. la m. — 2491 fut m. g. la p. — 2492 h. frainte et tante
targe route.
DOON DÉ LA ilOCHE 9$'
Tant gentilz chevaliers gisent mort en la lande.
Très par mi leu dou champ vint li rois Alixandre;
2495 A haute vois escrie : « Ou es alez, Dorâmes,
« Li filz de ma seror, qui chalonges mon reigne ?
« Demain seras penduz, se as main[s] te puis prendre. »
Quant cil l'a entendu, a po que ne forsane;
Il crie a haute vois, si que trestuit l'entendent :
2 5oo « La terre vos chalonge et trestot le reaime. »
Quant l'entendi li rois, a po que ne forsane ;
Il broche le cheval des espérons qui trenchent :
Li oncles et li niés de l'esperoner pensent;
Sor les escuz se douent si granz [cops] des lances
25o5 Desor les bocles d'or les peçoient et fendent. (/. 4^)
'"'i Li haubert sont si fort n'en porent rompre maille.
Totes plaines lor lances s'entrabatent ensemble.
Il resaillent en piez com nobile châtaigne,
Et sachent les espées dont li coltel bien trenchent.
25 10 Granz cos se vont doner sor les heaumes a tente ;
Les pieres et les flo[r]s en font aval descendre.
Li niés l'oncle vainquist, ja n'i eiist desfence ;
Atant es vos Landri, s'ot bris[i]ée sa lance.
Ou qu'il voit son seignor, a lui aidier s'avance,
25 1 5 II tint traite l'espée tote nue sanglante;
Va ferir le gloton sor l'iaume de Plaisance,
« Que les flors et les pieres contreval en cravante,
Que tôt l'a estoné, et li gloz s'espoente.
Il va crier merci et Landris le va prendre ;
2520 Parmi le nasel d'or son seignor le présente.
2493 gisent, ms. gisant. — 2494 champ, ms. chans. —
2493 est a. — 2497 m. tu p. p. — 2498 que, ms. qui. —
25oo Je V. ch. la t. — 2504 Vers trop court; Corr. sj
ruistes [cops] des l.(?) — 25o5 I. perçoient; — 2507 Toute plaine
lour lance s'entrebatent e. — 25o8 châtaigne, ms. chadonne.
— 25io a tente, ms. atante; leçon douteuse. — 25i2 Li n. v. Vo.)
daffance. — 25 18 Qui.
94 DOQN DE lA ROCHE
L XXVII
Quant Dorâmes fu pris, la bataille est finée,
Li Hongre s'en fuirent [tôt] contreval la prée,
Ne mais que .m. chaitif qui en l'estor remestrent :
Do et Jofroiz les tindrent as trenchanz des espées.
2525 Se tel fuissient ii Hongre, mar i fu[s]t la meslée.
Cil de Constantinoble l'eussent comparé[e].
Atant es vos Landri, sa lance [a] recovrée,
Il broche son cheval et vait ferir son père :
L'escu li a percié et la broigne faussée,
253o Ou cors li mi[s]t la lance, si l'abat en la prée.
Celé part vint [corant], si a traite l'espée, (v®)
Ja eûst voirement pris la teste son père,
Quant li dus li cria :. « Ne me tochiez, beaus frère !
« Soudoie[r]s sui chaitis de moût longe contrée;
2535 « Qu'avéras gaaingnié? je n'ai d'avoir denrée. >)
Quant l'entendi Landris, s'a la color muée :
Grant pitié en a pris, [s']a restoié l'espée.
Par le nasel du heaume ala penre son père,
Si le rendi le roi ; ce est chose provée.
LXXVIII I
2540 Quant li dus Dos fu pris, lors fu li chans fine[z]
Et Asse et Guinemanz ont Jofroi remené ;
Et li niés et li oncles furent forment pené
— 2524 as, ms. es. — 2525 mar i, ms. mari {en un mot), — 25a6
l'e. comparer. — 2529 a percier; çourgne faulcer — 253o cors,
ms. coz ; lance, ms. lanor. — 2532 Ja e. p. v. la t. de ?. p. —
2534 moût, ms. mon. — 2535 a. gaingnier; d'à; danrées. — 2536
Q. l'antant L. — 2537 restoié, ms. ratoié. — 2538 nasel, ms. vaisel
— 2539 tandi le r.
DOON DE LA ROCHE 9$
Et furent enz es cors [moût] plaie et navré.
Il retornent ariere en la bone cité ;
2545 Moût fu granz li eschas que il ont conquesté.
Enz en parfonde chart[r]e les fist li rois geter,
Et .iiijxx. des autres, car il furent conté;
Il i furent .vij. ans, trop i ont conversé ;
Do [en] ot toz porriz les flans et les costez.
25 5o Or vos lairons de ce[u]s ; mar lor est encontre !
Et vos dirons d'Olive, qui ariere remest,
Qui tant a les noveles enquis et demandé
Par quoi ses sire Do est du pais getez ;
A l'evesque tantost l'ala dire et conter.
LXXIX
2555 La suer a[u] roi de France est ariere remese,
Avec le bon evesque qui tant [l'ot] honorée ;
Ele vint du moustie[r], s'a la messe escotée.
Et li per de La Roche o[n]t la mer [tresjpassée (/". 4g)
Bien a passé .vij. ans qu'il Tavoient outrée,
256o Ainçois que la duchesse fu[s]t de pechié retée
Et dou duc d'Alemaingne partie et desevrée.
Quant il virent la dame, sur les murs s'aresterent.
Desouz les esclavines ont les paumes botées ;
Molt se sont merveillié, s'ont les coleur[s] muées
2565 Et dient run[s] a l'autre : « No dame avons trovëe :
« C'est Olive la bêle, qui de France fu née. »
Ainz ne s'en dona garde la duche[sse] honorée ;
Si la tienent as poinz de la manche froncée,
Parfondement l'enclinent ; par non l'ont apelée :
2570 « Duchese de bone aire vos soiez bien trovée !
2545 fu, ms. mit. — 2549 costez, ms. costel. — 2556 Ensemble
a b, e, — 2558 li père; la mère. — 256o retée, ot5. restée. — 256i
A. fu p. — 2563 pauuces b. — 2565 Nos d. — 2569 l'o. enclin a.
96 DOON DE LA ROCHE
— Baron )),dist la duchesse, « vostre arme soit salvée.
« Dont estes, de quel terre et dont est[es vos] née? »
— En la moie foi, dame, de la vostre contrée ;
« Nos servîmes es noces ou tu fus esposée,
2575 « Quant tu fus de Doon, nostre duc, mariée.
« Ou est remés 11 dus ? qui vos a desevrée ? »
Quant l'entend! la dame, s'est cheûte pasmée.
Li .iii). pèlerin par les bras l'ont levée ;
Ele lor a sa honte et sa perte contée,
258o Cornent li fel Tomiles l'a a tort démenée.
Et Audegou[r] sa fille a a[l] duc mariée.
Et que ne set noveI[e.s] ne del fil ne del père.
Quant li per [l'jentendirent, de pitié em plorerent;
Desur saintes reliques tuit ensemble jurèrent
2585 Qu'il li rendront sa terre et tote sa contrée
Ne la fille Tomile n'ert ja par lor amée.
Quant l'entent la duchesse, grant joie en a menée.
« Nièce »,dist li evesques, « franche dame honorée,
« Cil .iiij. baron sont de la vostre contrée.
2590 « Et si ont devant moi vostre honor bien jurée,
« Et si la vous rendront, ja n'en ert trestornée.
« Quant vos avrez La Roche et tote la contrée,
« Nièce », dist li evesques, « ne soiez esgarée :
« Tenez large mesnie, donez larges sodée[s],
2595 « Car par ce serez vos servie et honorée. »
D'or en avant commence de la [ruiste] meslée...
De la fiere venjance que il fist de sa mère
Et geta de la chartre le duc Doon son père
Et jura Salmadrine, la fil[l]e l'emperere,
2600 Et ensembla la gent qui de Pu[il]Ie fu née,
Tosquanz et 'Genevois et ce[l]s de Valfondée :
2572 et de q. t.; d. est nez. Altéré. — 2573 Et en. — 2582
des f. — 2583 li père. — 2591 la v. randrons. — 2594 1. mainie.
— 2596 Après ce vers, il doit manquer un vers où Landri était
nommée — 2601 Torquanz.
DOON DE LA ROCHE 9^
Par ce[l]s fu Alemaine conquise et aquitée
Et Tomiles destruiz et sa fille afolée.
LXXX
Baron, c'est vérité, sachiez a escient,
2605 Li hom, puisqu'il faut l'autre, ne[i] doit traire a garant,
Ne cil celui [que] hait, se sa honte consent.
Qui que prisa Pépin, Landris le tint por lent,
Qui lui et la duchesse failli vilainement
Et prist du iraitor son or et son argent ;
2610 Perdue eiist puis France, que Landris [la] li rent.
Li valiez s'en issi jovene [tôt] povrement,
O lui .V. chevaliers qui furent si parent;
Il n'ot pas [ceint] l'espée, mais a son col la pent; (/". 5o)
Jusqu'à Constantinoble ne prist arestement.
2615 La li dona li rois armes et garnemenz ;
Cil ot non Alixandre, cui Grifonie apent,
Dont la geste Tomile chai puis en torment.
Li rois ot .j. guerre qui l'angoisse et sorprent,
De son nevo Dorame qui s'onor li deffent;
2620 Landris le prist [par force] et desconfi[s]t sa gent
Et rendi l'emperere par le nasel d'argent,
Et son père le duc prist il v[e]raiement
Qu'estoit au roi Dorame remés novelement
Par le félon Tomile qui s'anor li desfent.
2625 Li dus ala en France ; mauvais secours i prent :
Pepin[s] l'i desfia se Olive ne li rent.
Tant chevaucha li dus qu'a Dorame se prent;
Landris le prist [par force] par son grant hardement,
2607 L. le tient. — 2609 prist, ms. print. — 2612 ces parans.
— 2613 l'espee, ms. espées. Cf. v. 1086. — 2616 Grifoine. — 2621
Ce Landri l'ampereres per le noel d'à. — 2623 Dorâmes. — 2624
q. sa uoi; cf. v. 261 g.
9^^ DOON DE LA ROCHE
Mais il nel conut mie, si en fu plus dolenz;
263o .VII. anz et .iiij. mois i sofri le torment.
Cil qui le prist par force le regreta sovent
Et Olive sa mère dont novele n'entent.
Par la terre Alixandre fist Landris son talent,
Li rois ot une fille qui molt ot le cors gent ;
2035 De l'amistié Landri se desdu[i]t et esprent,
Son servise li offre par sa boche sovent.
Mais li valiez fu sage[s] [et preuz] et de bon sens
Ne feïst le roi honte por or ne por argent ;
De sa mère et del duc li remembre sovent.
LXXXI
2640 Landris qui fu de France ama molt Salmadrine; (v"
Se li rois li dona[st], volentiers Teûst prise.
.1. nuit fu li enfes a mesnie escherie,
O ses .V. compaignons de France la garnie;
Por l'amor de l'enfant ont lor terres guerpie[s].
2645 De la honte li membre que li a faitTomiles;
Li ber plore des ieus et de son cuer sospire.
Dit Guinemanz ses maistres : « Que nos demandez, sire ?
— Baron, » ce dit H enfes, « je ai au cuer grant ire :
<» Tomiles a ma mère vergondée et honie
265o « Et del duc d'Alemaigne desevrée et partie,
« Et quant je sui chaitis et ma mère chaitive,
« Li dus est hors de France, ja ne le verrai mie,
« Et ma mère, la lasse I estranglée et murtrie,
« Et Pépins m'a failli : ja n'e[n] avrai aïe ;
2655 « Etli malvais Iignage[s] a ma terre saisie :
« Perduz ai les honor[s] de Gormaise et d'Espire,
2629 il ne le, fut le p. — 3535 a. de L. — 2637 saige et de b.
sanc. — 2038 f. li r. — 2642 miennie. — 2645 qui li. — 2646 de ces
i. — 2647 maistres, ms. mâuués; cf. v. 265g. — a65o del, ms. des.
DOON DE LA ROCHE 99
« Le chastel de La Roche et Coloigne la riche;
« Certes, quant m'en remembre, ne puis joer ne rire».
Dist Guinemanz ses mai[s]tres : « Ne vos esmaiez mie.
2660 « Pris es[t] Il rois Dorâmes et conquis Montervile
a Et li .iiij. baron qui les granz maus vos firent.
« Hé ! Deu, se il [i] muèrent, com mar virent lor vies !
« Et li rois Alixandres a sa grant terre quite.
« Hé! ber, car pren congié au roi et a sa fil[l]e ;
2665 « Râlons nos en [arrière], a la Pasque florie,
« Pour veoir le lignage qui nos pères traïrent. [f. 5i)
« Hé ! ber, se ne te venges, ta proesce est fa[il]lie.
« Se tu trueves le roi, de t*amor le desfie.
— Mai[s]tre », ce dist li enfes, « f[e]el conseil me dites :
2670 « Se Pepin[s] ne m'aie, de m'amisté n'a mie ».
.1. vaillanz escuiers a la parole oie ;
Cil est a son hostel, mais ne le sevent mie.
De ci que ou palais ne cesse ne ne fine,
Et trueve Alixandre ou par[o]le a sa fille ;
2675 Devant lui s'agenoille, si li commence a dire :
« E[n] nom Deu, emperere, or vos croi[s]t poine et ire :
- « Du damoisiel de France n'avrez jamais aïe.
« Li ber s'e[n] vuet aler, et ses maistre l'otrie.
— Amis », dist l'emperiere, « ce que est que vos dites ?
2680 « Li damoisiaus de France a m'anor en baillie,
V Tote Constantinoble, Monbardon et Vaillie ;
« Si m'a conquis Dorame et ma guerre finie;
« Et, s'il s'en vuet aler, bêle ert la départie :
« Je li ferai merir sa poine et son servise ;
2685 « Tant lidonra[i] avoir, tôt son vivant ert riches ».
Quant l'entent la pucele, s'est miiée et vertie :
« Sire rois Alixandre, ce que est que vos dites?
a Ja ne m'a pas Landris jurée ne plevie
2660 c. Monteruule, cf. v. 2848. — 2661 li, ms> les. — 2662
cotne m. V. 1. nies. — 2664 prens. — 2675 si, ms. ci. — 2679
Ains ce d. — 2680 m'amor en b. — 2684 m. ses poines.
100 DOÔN DE LA ROCHE
« Ne livrez ses ostages, ne point ne sui je fie. »
2690 — Fil[l]e, « dist l'emperere, « ne soiez si hastive;
« Li ber a molt grant sens avec chevalerie ;
« Si a dedanz son cuer .j. venjance prise. (v°)
« Mais or pl[e]ûst a Deu, le fil sainte Marie,
« Qu'il eust toute France forjurée et guerpie :
2695 « Certes, je li donroie de m'anor grant partie ».
Li rois s'en va couchie[r] en sa chambre garnie,
De ci qu'a mie nuit, que sonent les matines ;
L'empereres i va, o lui grant compaignie
Des barons de sa terre, qui son règne jostisent ;
2700 Davant lui fait po[r]tcr [les] granz cierges de cire,
En .j. crote [en] entre davant Sainte Sofie ;
Souvent reclame Deu, le fil sainte Marie.
Et la fille le roi ne fu pas endormie,
Ainz se leva en piez, seule sanz compaignie,
2705 Si sainglement, sanz dras, c'onques n'i ot chemise,
Mais ele [s']afubla d'un mantelet d'ermine ;
Venue est en la chambre ou cil de France gisent, :
Le lit a son ami ne meschoisira mie,
Car du franc chevalier ot la parole oie.
2710 De Landri qui s'en va est dolante et pensive ;
Entre lui e l'esponde s'est mucie et glacie ;
Quatre fois le baisa ainz qu'ele mot li die. : -u^:
Li vassaus s'esvoilla, s'a la dame sentie,
Trova ces mameletes gisant sor sa poitrine;
27 1 5 Dures sont et noveles, encor ne sont blemie[s].
Es vos la char l'enfant si d'amisté sousprise
Que li tremble li cors com foille qui balie ;
[Ainz] mais de famé en terre n'ot itel compaignie. (/. 5a)
2689 as o. - 2695 de m'aver. - 2696 Li .j.; ch. parmie^ - 2698
LeLpereur. - .700 des cires. - .704 A. U - '-^7o6 afub a
tns. afluua. - 2707 cil, ms. so. - 2708 mesches.ra n^- - ^71 =
le, ms. la. - 2713 li v. s'avoilla. - 2716 sourprist. - 2717 se,
corne f. q. baillie.
DOON DE LA ROCHE lOI
Il li a demandé : « Qui estes vos, meschine?
2720 « Je te conjur ta loi et [tres]tot ton batisme.
— Sire », dist la pucele, « j'ai a non Salmadrine,
« Et sui fille Alixandre le roi de Griffonie,
« Qui tient Gonstantinoble, Monbardon et Valie.
« Que vos en mentiroie ? je sui la vostre amie.
2725 « Tes talenz en puez faire, que que nus bons en die.
« Se je muer par amor, m'arme en ert garie.
— Dame, » dist li valez, « ce que est que vos dites ?
« Certes m'amor m'avez afïée et plevie.
« Ja set bien toz li monz, tis pères es[t] mes sire :
2730 « Se tient Malingre, par coi il me jostise.
« Râlez vos en gésir, bêle suer, douce amie.
— Sire, » dit la pucele, « tost m'en serai partie,
« Mais d'un des jeus de France vuel ainçois estre aprise.
— Bêle, » ce dist li enfes, « et je le vos otrie,
2735 « Par .j. tel covenant com vos m'o[r]rez ja dire :
« A ceste Pentecoste, dont la feste est joïe,
« Que portera corone l'emperere mes sire,
« Get[e]rez de prison les prisoniers qu'i gisent
hii ; « Et prierez vo père sauveté de lor vie[s],
2740 « Et je lor pardonrai mon mautalent et m'ire,
« Que Deus me doint venjance du traitor Tomile. »
Celé tendi sa main, sa foi li a plevie ;
De son commant rover ne fu pas esmaïe;
Li niés Pépin de France bonement li otrie :
2745 « Baisiez moi, s'il vos plaist, bêle très douce amie, (yo)
« Que ja por .j, baisier ne serez escharnie,
« Ne ja ver[s] Alixandre n'avrai ma foi mentie ».
Et respont la pucele : « Foie qui ne l'otrie ! »
A cel mot s'entrebaisent, que plus n'i atendirent.
2722 f. le roi A. — 2723 Monbordon. — 2725 quelque n. — 2726
ert, ms. est — 2729 b. tout li mont — 2730 sic ms., vers trop
court; corr. [Ma terre] tient M. (?), cf. v. 2055. — 2737 Qui p.
— 2738 de prisons; qui i g. — 2739 p. vos perez. — 2748 F. soit
q. l'o.
102 DOON DE LA ROCHE
LXXXII
2750 Landris et la pucele se sont entrebaisié,
Amor sanz mespresure se sont afiancié.
La pucele lui a gréé et otroié
Que ele, a Pentecoste, a la feste qui vient,
Getera de la ehart[r]e les chetis prisoniers
2755 Et lor donra bl[ï]auz et garnemenz molt chier[s].
Par le conseil Landri est alée couchier.
La nuiz est trespassée, li jor[s] est esclairiez.
Quant les messes sont dites et fine li mestier,
Ou palais Const[antin] est li rois repairiez.
2760 L'emperere manda ses barons chevaliers,
Et Alemant i vienent molt bien apareillié.
Ne ja por plus prodome[s] ne les estuet changier.
Quant li rois vit Landri, dejoste lui l'assiet.
Lors li a demandé sanz point de delaier :
2765 « Landris, filz a baron, me vole[z] vos laissier?
« Hé! ber, car pren ma fille et si part a mon fié.
« Mes hommes de Galabre vos donrai volentiers,
« EtTremoi[g]ne et Antoine et Boneven[t] mon fié.
« De tout mon fié [demaine] avrez une moitié. »
2770 Quant l'entendit li enfes, ne le vot otroier ;
De sa mer[e] lui membre. Olive o le vis fier,
Et por Doon son père commence a larmoier.
Mais l'enfes ne set mie qu'il Tait tant habergié, (/. 53)
En la chartre Alixandre pené et travaillé.
2751 D'à. s. pressure. — 2754 Getrai — 2757 j. e. esclarcer. —
2768 mestier, ms. mestiers. — 2759 p. de Const. {sic ms.) — 2768
Et Tremoine et Antoine {corr. Hantone ?). — 2769 De sour son f.
a. — 3771 o le, ms. a. — 2772 pour Doz. — 2773 m. qui l'ait. —
3774 A la ch.
DOON DE LA ROCHE Io3
LXXXIII
2775 Ou palais emperier sont venu Alemant;
La fille au roi [i] moine ses maistre Guinemanz,
Joste l'empereor l'a asise en .j. banc.
En la cort sont venu Pullois et Aufricant,
Et li rois Alixandre [a] fait crïer son ban,
2780 Que sa corz est si fiere que mais ne fu si granz.
Sa grant sene[s]chaucie livra as Alemanz ;
Les espérons portèrent Joffroiz et Guinemanz,
Amauris et Andrius lor enseigne et les branz.
Landris porta le jor livrée [o] croiz d'argent,
2785 A .j. baston qu'il tint va la presse rompant.
Cil avesque et cil abe i dient gentilz chanz,
Cil jugleor violent, notent et vont chantant.
Li dus est en la chartre, qui la noise [en] entent.
Le chartrier en a apele : « Qui sont, va! celç gent?
2790 — A la moie foi, [sire], grant barnage a ceanz :
« Li rois porte corone, cui Grifonie apent;
a Ou palais Constant[in] le servent celé gent,
« Si rendra a ses princes lor meillor chasement. »
Quant Tentendi li dus, a pou d'ire ne fent;
2795 Et dit Do de La Roche : « Que ferai je, dolenz !
« A ceste clere feste suel revestir ma gent
« Et doner a ma gent chevaus et garnemenz.
« Aï ! Olive dame, com mal desevrement !
« Certes, biaus filz Landris, jamais ne vous ratenz.
2800 « Haï! mors », distli dus, « que tardes? car me prent. {v°]
« Certes, mielz aim morir que vivre longement. »
Dist Asse [de] Maience : « Las ! Dex omnipotenz,
2775 p. emperiers. — 2776 m. son maître Guinemant. — 2778
Aufricant, sic ms. — 2780 Qui. — 2781 es A. — 2785 prise r. —
1786 il d. g. champz. — 2789 va, ms. na. — 2791 Li roi portent c.
— 2792 p. a Constant. (51c ms.); ces g. — 2796 soloie r. — 2797
d, a mes genz — 2798 Oi d. O. — 2802 Dite ; Dieu omnipotant.
104 DOON DE LA ROCHE
« Que nos puez bien secour[re], s'a toi vient [a] talent!
« Enuit sonja[i] .j. songe, sus ces bûches ardanz,
a8o5 « Que iere a La Rociie el plus haut mandement;
« Si me donoit Landris, voz filz, .j. garnement,
« Et Olive sa mère chevaus et garnemenz ;
« De ma ci[t] de Maience vi toz les murs sanglanz,
« Et veoie en .j. eve Tomile et ses parenz,
2810 « Il n'en issoient mie, ainz remanoient enz.
— Biaus niés », ce dist li dus, « trop tarde longement ;
« Et moi que chaut, pecheres? je n'en verrai nient. »
LXXXIV
Le jor fu en la chartre Do, si fort se démente
Et plore et sospire por s'amie la gente :
2815 « Ahi ! biaus filz Landris », fait il, « bel[e] jovente,
« Jamais ne vos verrons [vivant] en Looraingne!
« Ce nos a fait Tomiles, li fel, par sa chalenge.
« Li fel nos a traïz; Deus mal [guerdon] l'en rende
« Et Audegour sa fille, que me dona a famé. »
LXXXV
2820 Alixandre li ber repaire du mostier
Et a en sa compaigne .xx™. chevaliers. ,
Davant l'empereor ardent .m. encensier;
Li niés Pépin de France repaire ou premier chief,
Par soz l'uis de la chart[r]e s'est alez apoier;
2825 S'ot dementer les contes, si l'en pri[s]t grant pitié;
2803 Que, corr. Qui(?) — 2804 bûches ardans, sic ms., altéré.
— 2805 el, ms. en. — 281 3 f. D. en la cb. — 2819 que, ms. qui.
— 2820 Li barons A, — 282^ S'ojt,
DOON DE LA ROCHE Io5
•«u Le bon roi Alixandre en va dire et proier
Et sa fille la gent[e] l'en est cheiie as piez ; (/. 54)
« Sire rois Alixandre, nobile chevalier,
« Car getez de voz Chartres ces gentiz prisonie[r]s;
283o « A ceste clere teste lor donez a mangier. »
Et respont l'emperieres : « Par mon chief, volentiers. »
Il envoie en la chartre .xv. serjanz a pié :
« Par la loi Dieu, seignor, bien devez [Dieu] proier,
« Quant li rois Alixandre vos demande et requiert :
2835 « A ceste clere feste vos donra a mangier. »
Quant l'ot Do de la Roche, onques ne fu si liez.
Li dus se vot lever et ester sor ses piez ;
Tant fu foibles et las ne pot ester sor piez.
Li bon serjant le portent contremont le planchié,
2840 Lui et ses compaignons, nen i ont nul laissié.
De ci qu'a[u] mandement ou l'emperiere siet ;
Aine ne furent .v. home mielz servi de mangier.
LXXXVI
Or est Do de la Roche devant le roi venuz;
Cil chevalier le gardent, que il ot abatuz
2845 Et plaiez et navrez et les chevaus toluz.
Dit li rois Alixandre : « Chevaliers, qui es tu?
« Certes molt es prodom ; molt fu beaus lis escuz.
« Es plains sor Montervile nos fus molt chier venduz ;
« Trestuit fuissons vaincu, se li François ne fust ;
285o « Par lui et par ses homes fu li estorz vaincuz.
— Et que vos chaut, beaus sire ? », ce li a dit li dus;
« Ja chevaus de .iij. livres n'est par nos maintenuz,
« Grosse lance portée ne ruistes cos feruz.
2826 en, ms. li. — 283 1 Et par m. c. — 2836 Q. D. de La R. oï.
— 2837 ces p. — 2841 l'emperiers s. — 2842 Ains. — 2844 ot,
ms. oit. — 2847 tis, ms. li. — 2848 sor, sic ms., corr. soz(?); Mont
eraule {en s mots; cf. v. 2660); fus, ms. fut, — 2849 T. fuissiés;
fust, ms. fut, — 2853 verulles cors f.
I06 DOON DE LA ROCHE
« Je sui Do de la Roche, voiremeni sui .j. dus ; (v*»)
2855 « Forment m'ama Pépins, nostre roi[s] al lion ;
« A moillier me dona Olive sa seror ;
« J'en oi .). fil, Landri, que a tort ai perdu. »
LXXXVII
Quant ot Landris li enfes que ses pères a dit
Et Guinemant son maistre a coneii al vis,
2860 Ses deux mains a tendues, cheûz est devant lui.
« Sire Do de La Roche, por amor Deu, merci!
« Pardonez moi les maus que en l'estor vos fis,
« Ou chief de la bataille quant par force vos pris.
« Que mentiroie je? Je sui Landris voz fiz. »
2865 Qui donc veist baisier et le père et le fil,
Et Asse de Maience et son frère Jofrin,
Dieus ne fist home ou mont cui pitié n'en preist;
Li emperere plore ; ne s'e[n] pot a[s]tenir,
LXXXVII I
« Sire », ce dist Landris, « qu'avez fait de ma mère ?
2870 — Ne sai », ce dist li dus, « si m'ait Deus li père.
« Tomiles et Malingres du pais me geterent
« Et Griffe d'Autefueille, li traït[r]e[s], li lerre ;
« Sim desfia en France Pepin[s] H emperere ;
« Por amor dame Olive la terre m'en veerent.
2875 « Je ne sai quel chemin la bêle en est alée ».
Quant l'entendi Landris, s'a la color mtiée ;
Voianz toz se pasma, de pitié de sa mère.
— « Ne le faites ainsi, amis, » dist l'emperere,
2855 de 1. — 2857 oi, ms. ois; que, ms. qui — 2858 oi L.; ces p.
— 2859 s. m. a requeneu amis — 2864 Q. vos m. — 2866 et, ms.
a. — 2867 preïst, ms. prinst — 2873 Si me d. Cf. v. 2636. —
2874 P. a. de O. la t. m'envaierent. — 2878 f. mie a.
DOON DE LA ROCHE 107
« Mais mandez ma grant gent par tote ma contrée,
2880 « Tant qu'aiez assemblé .xx°. homes a espées; (/••^•^)
« Rêva t'en en ta terre, si [la] conquier, beaus frère.
« Quant tu l'avras conquise, si la rent a ton père,
« Et a ta mère [Olive], se puet estre trovée,
a Car assez en avras en la moie contrée. »
2885 Atant es Salmadrine en[z] ou p[a]lais entrée :
« Sire rois Alixandre, trop m'avez oblîée :
« Ja ne m'a pas Landris prise ne esposée,
« Ne livrez les ostages ne a mostier menée.
« Sachiez, se il s'en va et je sui esgarée,
2890 tt Je me lairai cheoir de celé tor carrée,
« A plus de .c. garçons me ferai délivrer,
« Ma vi[l]té et ma honte vos sera reprovée. »
— Dame, » cedist Landris, » trop vos estes hastée ;
« De diz et de paroles es trop abandonée ;
2895 « Il nen avenra ja ; c'est chose destinée. »
Or en ont tant parlé Landris et l'emperere,
Cil a fait sa venjance et sauvée sa mère.
Li bons rois Alixandre li dona grant soudée,
Chargiez .xxx. somiers de l'or de sa contrée
2900 Et ot bien .xx™. homes toz hardiz a l'espée.
Par ces fu Alemagne conquise et aquitée
Et Tonjiles destruiz et sa gent afolée.
LXXXIX
Bien l'avez oï dir[e] plusor et li auquant,
Le jor jura Landris Salmadrine a[l] cors gent
2880 ansemblé ; le second hémistiche est trop long; lire h. d'es-
pées(?). Pour le chiffre, cf. v. 2goo. — 3883 ce p. — 2884 avras,
ms. avrés. — 2885 e. oui p. — 2891 me ferai délivrer, sic ms. —
— 2895 II ne m'avra ja. — 2896 t. parler; Landris, ms. li duc; 51
Von n'admet pas cette correction, il faut supposer une lacune après
ce vers.— 2897 sâuue en sa m.; corr. douteuse. — 2899 somiers,
ms. solmiers.
I08 DOON DE LA ROCHE
2905 Et lëaument son maistre, li cortois Guinemant.
Li bons rois Alixandre li dona avoir tant,
Chargiez .xx. dromadaire[s] d'or fin et de besanz.
Les terres de Calabre s'en vienent chevalchant
Et trespassent Dunoe, .j. eve fort et grant,
2910 Les puis de Leoroingne et les terres avant.
Laissent le Genevois, si passent le Pisant,
Et vienent a Seiise, si gisent en val Lant ;
Les vaus de Morïene s'en vienent chevalchant.
Or avra mais Tomiles sa déserte avenant :
2915 De Maience brisèrent les portes d'olifant;
Dont la chançon commence des ici en avant.
XC
A merveillos barnage vint en France Landris,
De Pu[i]lle, de Tosquaigne en amoine le pris;
A merveillos barnage requiert ses anemis,
2920 Or commence Tomiles ses chastiaus a garnir;
Li fel est a Maience, ou chief de son pais,
Audegour a La Roche et Malingres ses fiz,
De l'avoir d'Alemagne ses [a] fait bien garnir.
D'Olive la duchesse plairoit vos a oïr,
2925 Qui en Seine la ville a son ostel porpris,
Avec le bon evesque, le cortois Auberi ?
Sovent plore Doon et regrete son fil.
A unes saintes Pasques qu'est a l'entrant d'avril.
Que on doit célébrer, honorer et chérir.
2905 vers obscur; leçon altérée? — 2909 Dunoe, ms. Dunot. —
2910 Leoroingne, sic ms., altéré. — 2911 les G. — 2912 Senus-
sent ; Valant. — 2914 le vers serait mieux à sa place après le v.
2g 1 5. — 2918 Torquaigne; le plus. — 2919 requiers s. a. —
2922 ces f. — 2923 ses, ms. ce. — 2926 v. et s. h. — 2927 regarde
s. f. — 2928 l'antree d'à. -;>;!: < - .'
DÔON DE LA ROCHE 10^
2930 Tint revesque[s] sa court; granz barnages î vint.
Par ces hautes églises font ces cloches bondir.
Li evesques s'ala premerains revestir;
[Dame] Olive adestrerent li baron du païs, (/". 56)
Devant les euz l'evesque la menèrent seïr ;
2935 Ja de plus bêle famé n'orra nus hom escrit.
L'avesque[s] la regarde; molt grant pitié l'en prist,
Et voit ces chevaliers par ces sièges seïr.
— ft Or m'entendez, seignor, » dist l'evesque Aub[e]ris,
« Veci .). duchesse, Olive o le clervis,
2940 « Fille fu ma seror la bêle Beatriz...
« Il la dona .j. duc, qui a joie la pri[s]t;
« Or les a .j. îraît[r]es par engien departiz,
« Chacié en a le duc fors du règne en essil ;
• '' « Mais, se cil [Dex] m'aie, qui vraie mort sofri,
2945 « Et je truisse Tomile, [ja] n'en estordra vis. »
XCI
L'evesques Aub[e]ris fu molt pros et nobiles,
Le pueple chiet as piez por amor dame Olive,
A son col ot l'estole et le fanon de tire.
— « Baron ! por Deu merci, le fil sainte Marie,
2950 « Veez ci la duchesse qui de seignor n'a mie,
u La dame avoit .j. fil ; morz li est par envie.
« Suer est Pépin de France le roi [puissant et] riche.
« Il la dona .j. duc de molt grant seignorie ;
« Or les a departiz par engien .j. traït[r]es,
2955 « Tomiles de Coloigne, cui Damedeus nia[u]die I
3932 L'evesque s'en a. — 2939 Vees ci; au c. v. — 2940 lacune
après ce vers. On doit supposer un vers perdu, où était nommé
Pépin (cf. V. 2g 5 2) dont il est question au vers suivant. — 2943
essil, ms. aisil. — 2945 estordera v. — 2948 fenon de cire. — •
2949 Barons. — 2951 est, ms. ast. — 2962 Sire e. P.
iïÔ DOON DE LA ROCHE
€ Tant enchanta le duc qu'i[l] li dona sa fille.
« .1. oirs en est issuz qui porte Deu envie :
« Abatu a le duc de sa grant seignorie
« Et Olive sa famé de l'avoir desaisie ;
2960 « A tort et a pechié en tienent l'avoir quite;
« P[epin] s'en est clamez, coresos et plein[s] d'ire...
« Mais, [par] la foi [que] doi Dieu [et] sainte Marie,
« Je l'en movrai tel guerre, si ne tardera mie;
« Se je puisencontrer Tomile ne Malingre,
2965 « Les honors de La Roche lor voldrai contredire.
« Seignor, aidiez nos en, por Dieu le fil Marie ! »
Li avesques manda qui ses sodoiers prirent ;
Desor Seinne la vile en .j. pré s'asemblirent,
La chargent la vitaille, le pain et la farine,
2970 As montenieresmontent, cil char braient et crient;
A l'esmovoir de l'ost .c. olifant bondissent.
La duchesse montèrent sor .j. mur de Surie,
Estroitement vestue d'un paile de Roissie.
De l'eve de ses ieus fu la guimple moillie ;
2975 Molt par semble la famé qui de seignor n'ait mie;
En sa main .j. perche qu'el' estreint et paumie.
Le lundi ajorné ne le mardi ne finent ;
Tant se sont travaillé que a La Roche vindrent :
Quant voient le païs, la duchesse en sospire.
2980 Es [prez] devant La Roche .iij. agais lor bastirent;
A .XXX. chevalier [s] la proie recoillirent.
La dedenz s'adoba li fiz a[l] duc. Malingres,
A .vij'^'^. chevaliers est issuz de la vile,
La proie lor rescourent et l'avoir lor tolirent,
2985 Entre ci qu'as agaiz ne voudrent laissier mie.
2961 Pépin, ms. P. Lacune après ce v. — 2962 M. la f. du Dieu
s. M. — 2g63 Je l'ammenerai. — 2967 sic ms.; vers altéré? — -
2970 montemeres ; char, ms. chars. — 2974 De iaiue de ces
chief. — 2976 el, ms. il. — 2977 1. ajornée. — 2979 Q. le p. v. —
2980 Ez uant de la R. niez .iij. a. 1. b. -- 2981 p. acoillirent.
— 2982 d. s'adobast. — 2984 1. toloient. — 2986 E. ci que.
DOON DE LA ROCHE ^11
Cil lor corurent sus, qui de l'agait issirent;
La ot tant han[s]te frainte, tant[e] targe perde,
Mainz morz et abatuz des compaignons Malingre.
Es vos par la bataille Amorant de Saint Gile:
2990 Niés en Aubri [l'evesque], cosins germains Olive,
Dus estoit de Be[o]rges, siue en ert la baillie;
Va ferir Grifone[l], .j. des neveuz*Ma[lingre],
Fil sa seror germaine, la dame Malsarie,
Qui tint quite Gormaise et la grant seignorie;
2995 Le cuer li a fendu, l'arme s'en est partie.
Et Esmerez josta a Salvain d[e] Espire,
Nez fu des traîtors, seneschaus fu Tomile ;
Tant soef l'abat mort que ne brait ne ne crie.
Aubris, li bons avesque[s], rêva ferir Malingre,
3ooo Que l'escu li fendi et l'ausberc li descire;
Parmi le flanc senestre li a l'enseigne mise.
Et Olive seoit sus .j. mul de Sulie,
En sa main .j. perche dont la han[s]te est fresnine :
Sor l'iaume de son chief ala ferir Malingre,
3oo5 Que le nasel d'acier en mi le front li brise,
Que les denz li esclate et froisse les gencives,
Li sanc[s] vermoilz en raie et a val en défile;
Moillie[z] en a les pans et du haubert les lices.
Lors escria la dame : « N'i dureroiz, traîtres, (v")
3oio « Ça me lairez La Roche ; ne l'avrez jamais mie ;
« Ja la me dona Do, quant a moillier ra'ot prise,
« Et tote[s] les honors detoloigne la riche. »
Malingres vit ses homes detrenchier et ocire ;
Il est tornez en fuie, s'a ses règnes guenchies ;
3oi5 Damedeus le confonde, qui trestoz nos cha[s]tie !
2986 la gent i. —2990 Aubri, ms. Auberi. — 2991 en est. — 2994
Germaise. — 2995 Li c. li a fondus. — 2996 josta, ms. jostej
Salvain, sic ms., cf. v. 3078. — 2998 que, ms. qui. — 3ooo Qui.
— 3oo3 e. frazjne. — 3oo5 nasel, ms. vaisel. — 3oo6 froissent I.
g. — 3oi3 ces h. — 3014 ces roigne g. '
112 DÔÔN DÉ LA ROCHE
De .vij'^'^. chevaliers n'en demora que .xv.
Lagent Malingre fu passée et desconfite;
Maint et communément entrèrent en la vile ;
Le chastel et le bourc et la tor lor tolirent.
3o20 Et Malingres chevalche coresos et pleins d'ire;
D'autre part s'en issi par la porte d'Espire,
La trueve son aiol, le traïtor Tomile ;
Ne s'a mie atargié de ses noveles dire.
Oiez des chevaliers qui la Roche orent prise!
3o25 Toz les degrez en montent de la sale perrine
Et truevent Audegour sus en la tor antive,
Par la mange la prirent, contreval la traînent,
[De]soz l'ombre d'un aubre la présentent Olive :
« Tenez, franche duchesse, vo mortel enemie;
3o3o « Du duel et du contraire li rendez la mérite.
— Par foi ! « ce dist Olive, » a gré m'avez servie.
'( Ici tornez, garçon, escuier, » dist Olive;
« Menez moi celé dame [ça aval] en la vile.
« Esgardez com est bêle, gre[s]lette et eschevie !
3o35 « Vos l'aiez enuit mais : je la vos claime quite.
« Aine n'ot de moi pitié, ainçois me fiist chaitive.
i< Se peiist esploitier, si m'eiist fait ocire. »
Quant l'entent Audegour, si plore et [si] sospire :
« Merci! franche duchesse, vo mère fu roïne ;
3040 « Tôt ce fist li miens père, li fel et li traït[r]e.
« Il est bien vérité, toz tens l'ai oï dire,
« Que famé de bon aire de pitié s'umilie. »
Gelé la voit plorer, li cuers li atenrie ;
La suer Pépin [l'japele, si li comence a dire :
3045 « Por l'amor de Doon ou preïs compaignie,
« N'esterez enuit mais de vo cors mal baillie,
3017 fu, ms. esi. — 3o2o M. chevalchent. — 3o2i s'en issirent;
de Spire. — 3o23 s'a m. estargiés de ces n. d. — 3o28 On pourrait
aussi proposer Soz l'o. dfe] un a. — 3029 voz inortele. — 3o3o le
m. — 3o32 Veci — 3o35 V. l'a. enuiuais; cf. v. 3046. — 3o36
Ainz.
DOON DE LA ROCHE Il3
« Ainz vos ferai geter en ma chartre perrine,
« Illu[e]c vivrez toz jours a duel et a martire. »
XCII
3o5o Dame Olive en apele ses .ij. maistres chartrie[r]s:f
« Prenez moi celé dame, très bien me la gardez;
« Je ne vous commant mie sor terres ne sor fiez,
« Ainçois la vos commant sor les ieus de vo chiet.
« Certes, se voseschape, n'en estordrez vos piez. »
3o55 Et cil respondent : « Dame, com vos plaira si [ijert. »
Et le gris et Termine li ont du dos sachiez,
En la chartre l'avalent parfonde .xij. piez,
Tôt li firent veer le boir[e] et le mangier.
Et Malingres cheva[u]che, qui est ou cors plaiez ;
3o6o De ci qu[e] a Maience ne voldra atargier
Et vint en son ostel, s'e[s]t en .j. lit couchiez.
Li gloz prent .j. ba[s]ton, a po ne l'a mangié. {v")
Tomiles de Coloigne, qui devant lui [en] vient,
Ci[l] li a demandé : « Com vos esta, beaus niés?
3o65 — A la moie foi,. sire, je sui mal engigniez.
a Hui estoie en La Roche sus ou palais plainnier,
« Dou gentil duc mon père m'estoit remés en fié,
« Fu[s]t a tort ou a droit, j'en estoie heritier[s],
« Si avoie a ma table .vij^x, de chevaliers
3070 « Quant Aubris li evesques la me vint ostagier,
« Et ot en sa compaigne .x~. de chevaliers;
« .IIL agaiz nous ba[s]tirent ou val de Roche Vies ;
« Nostre proie acoillirent a .xxx. chevaliers,
3o5i COÏT, me la g. très bien (?) — 3o54 n'en estorderez nés —
3o55 com, ms. come. — 3obj xij, ms. xiiij {vers trop long). —
3062 mangié, ms. mangier. Ce vers n'a aucun sens et ne se ratta-
che pas au vers qui suit. — 3o63 qui, ms. cui. — 307 1 sa com-
paignie. — 3072 m. vous b. ag., cf. v. 2980.
Îî4 faÔÔI* BE LA ^bdtïfi
« Je m'en issi la fors, armez sor rtlon destrief,
3075 « Et .vï]^^. de mes homes, les confenons laciez,
« De ci que ou Val [Vies] nés vousimes laissier,
« Et barnage nous sordrent et devant et darier.
« Vo neveu i perdîmes a l'estor commencier,
« Lui et Salvain d'Espire, le vostre conseillier.
3o8o « Des agaiz a Tevesque ne me soi ainz gaitier, -^-
« Ainz me sort d'une lande, armez sur .)'. destrier.
(( Li fel me vint ferir, ne me vot espargnier,
« De mon helme tenant m'a les clavains trenchiez,
« Soz le poing de m'espée m'a enz ou cors plaie,
3o85 « Mes esbais m'a tolu[z], dont m'a dolent laissié.
« Et Olive seoit sus .j. mul sulïen,
« En sa main .j. lance plaine de poi ranier,
« Tel cop me vint paier que tôt me fi[s]t ploier,
« Sur mon destrier corant me fi[s]t agenoillier. {f. 5gi)
3090 « Illu[e]c vi je mes homes ocire et detranchier,
« Et mes cha[a]ingnes rompre et mes pons abaissier.
« Mes barres m'ont copées et mes portes froissies,
« Je ne pou en ma tor venir ne repairier.
« Mon chastel me tolirent, le bore et le marchié;
3095 « N'en mena[i] que .xiiij. de .vij^x chevaliers.
« Tant par est grant ma perde ne la vos puis noncier.
« Or ne sai que je face quant putain m'a chacié.
« Remese i est ma mère ; ne li porrons aidier. »
Li fel chaït pasmez, tant [par] fu angoissiez.
3074 armez, ms. a mieulx. — 3076 La correction, empruntée
au V. 3072, est asse:{ douteuse, car nous ne savons ce qu'il faut
entendre par Val Vies ; on pourrait proposer d'après le v. 2 g 86
De ci que as agaiz. — 3077 Et barnel n. soudrent. — 3078 Vo
neveu, ms. Nous vous ; cf. v. 2gg2. — 3o83 helme, ms. clavains
— 3085 esbais, sic ms., corr. eschas (?); laissié, ms. laissier. —
3o86 seoit, ms. se sciet ; cf. v. 3oo2; sulien, ms. sulier. — 3o87
poi ranier, sic ms. en deux mots; corr. bois ramier (?) — 3o88 f.
plaier — 3089 Que sur — 3091-2 Ces deux vers sont intervertis
dans le ms. — Soga barres, ms. baires — 3o93 repairier ne venir.
DOON DE LA ROCHE I I 5
3 100 Et distli fel Tomiles : « Beaus niés, ne t'esmaier.
« Or[e] lor mand[e]rai trêves et ami[s]tié,
« De Tavesque et d'Olive reconoistrai mon fié;
« En présent lor métrai m'onor et ma daintié,
«. Tant que de lor [meson] puisse tant aprochier
3io5 « Que [je] soie en la Roche .j. nuit a cochier.
« Je les enerberai au boire ou au mangier,
« Ou les acorerai a .j. coutel d'acier ;
« Ja ne verront la Pasque ne septembre moié ».
Et dit li fel Malingres : « Se vos ice faites,
« Dont serez vos mes oncles et je serai voz niés.
3i lo — Oïl », ce dist Tomiles, « se je puis esploitier. »
Ma[i]s li gloz ne set mie del franc duc qui revient
Devers Constantinoble o .xx™. chevaliers,
Et sont desor Sobrie aresté et logié;
Maint riche tref de soie i veîssiez drecier. (v')
3ii5 Li borjois citïen s'en sont molt esmaié,
Ou palais font porter lor or et lor deniers
Et si conduisent tuit lor vitaille a somiers.
XCXIII
Ez prez desoz Sobrie vienent li ost errant,
Tendent trez et aucubes et pavillons Iu[i]sanz.
3i20 En la cit s'espoentent borjois et autre gent,
Ou palais font porter lor or et lor argent
3 100 esmaier, ms. amaier. — 3 102 d'Olive, ms. de la dame. —
3io3 m. m'avoir et ma dointié. — 3104 T. q. de I. me puis je
tant a. — 3 106 enarbrai. — 3iog faites altéré, corr. fesiez (?) —
3109a A ce vers commence le second feuillet appartenant à M.
Lelong. Ce fragment s'étend jusqu'au vers 32 88. La plus grande
partie du vers 3 log a est coupée dans L. — 3i 12 o d'après L., ms.
et. — 3ii3 ms. Sorbrie, mais v. 3 118 Sobrie, comme dans L. —
3ii4 L. Maint riche trez de s., ms. Mains très de soie riche;
veîssiez, ms. mcûssiez. — 3ii8 L. ms. les 02 c. — 3i2o L. cit,
ms. cité.
IIÔ DOON DE LA ROCHE
Et conduent a force le vin et le froment,
Car il ne sevent mie dou duc le covenant;
C'est sa chambre [demaine] de son droit tenement,
3 125 Si la conquist ses père, li Alemanz Florenz,
Il en ocist .j. roi dur et fort desersenz;
A Doon en remestrent trestuit 11 chasement.
La gent dont fu puplée ainme le duc forment,
Onques ne li vousirent faillir a son besoin
3i3o Ne doner Audegour ne servise ne cens.
Toz tens tindrent la vile par lor efîorcement :
Molt faitli bons que saiges qui son seignor ratent.
Lor seignor ratendirent cil dedanz longuement,
Et li dux lor en fist .j. guerredon molt grant :
3i35 Lor fiez lor clama quites et lor bommes lor rent.
Li dux se fu levez par son l'aube aparant,
Davant lui a mandé Asson et Guinemant
Et Jofroi son nevou et Landri son enfant :
« Consoilliez moi, mi home, franc chevalier vaillant.
3 140 « Je redot molt Tomile, et lui et ses parenz,
« Que ne face asemblée de vitaille et de genz.
« Baron, s'il nos eschape, molt en serai dolenz ».
Landris, li filz le duc, parla premièrement :
« En non Deu, sire père, vos parlez de noient :
3145 « Ja n'ert en tel chastel que ne l'ensuiens enz,
« La vile n'ert si forz le chastel ne crevant.
« Ces qui ma mort jurèrent vos meirai en présent;
3 124 [demaine] manque dans les deux textes. — 3i25 li, m*, si,
mais dans L. la première lettre est surchargée, et on peut hésiter
entre \ et s. — 3 126 Sic dans les deux textes, sauj que le ms.
porte desersans. Corr. Durefort de Sersens (?) — 3127 Sic L., ms.
remetent ...charsemant. — 3 128 fu, L. fui, ms. fut. — 3129 Sic
dans les àeux textes; corr. f. a lor serment (î) — 3i3o sens dans
les deux textes. — 3i32 L. ratant, ms. atant. — 3i33 ms. Leurs
seigneurs; L. longuemant. — 3i36 fu, L fui ; son, ms. sor. — 3140
L. redoz, ms. redoute. — 3144 L Enondeu [en un mot) — 3 145 L.
lansuiens, ms. laissuiens. — 3 146 L. aucei ch. ms. en cel — 3146
Ce vers n'est pas clair. Corr. Ja vile n'ert si fort ne chastels (?)
DOON DE LA ROCHE II7
« Le hontaige ma mère lor vendrai chierement.
— Biax filz », ce di[s]t li dux, « vos parlez gentement,
3 I 5o « Mes d'essilier le roigne n'ai cure ne talant,
« Car ce sont tuit mi home et de mon tenement
« Et li auquant resont de ma honte dolent.
« Jeet Jofroiz me[î]smes volons aler devant,
« Afublées les guimples par atempreement,
3i55 « Por savoir et enquerre bien et certainement
« Com se contient Malingres et sa mère ausiment.
— Sire », ce di[s]t Landris, « je l'otroi bonement.
« Hé Jofroi, biax doz sire, le vostre loiaument ».
XCXIV
Li dux s'atapina, il et Jofroiz ses niés
3 160 De guintes sarrazines et de dras dépeciez ;
Chapes orent floquans et chaperons fleciez,
Escharpes cordoainnes et bastons de pomier ;
Par dedesus lor gui[n]tes ont lor treiis liés;
Bien resemblent tel gent qui vienent de proier.
3i65 « Pères », ce di[s]t Landris, « bien semblez pautonier ;
« Gardez que par folie ne vos i otraigiez,
« Que ne soiez Tomile mostrez ne enseigniez :
« Tost vos feroit les membres coper et detrenchier ;
« Puis que li bons est morz n'i a nul recovrier.
3170 — Biax filz », ce di[s]t li dux, « je m'en garderai bien. »
Il se parti de l'ost et si a pris congié; .
En .j. forest entre qui .xv. Hues tient :
Li dux sot bien le bois, car ce fu de son fié,
3i54 Ms. atampraemant, qui est obscur. Dans L. ce vers, qui
était le premier de la seconde colonne, est coupé. — 3i55 bien et
certainement, mots coupés dans L. — 3i58 Ce v. parait corrompu.
Il y a peut-être une lacune avant ou après. — 3i63 L. guites, ms.
guindés; treûs, corr. trebus (?) — Siyi parti d'après L. Il y a
seulement p dans le ms. — 3 172 L. forel.
Il8 DOON DE LA. ROCHE
Mainte nuit i ot geu, sejorné et chacié.
3175 II regarda sor destre, vit ,j. aubre foillié ;
D'Olive lui remembre, commence a larmoier :
« Haï ! franche duchesse, com cest jor m'amïez,
« Et je plus vostre cors que nuns bons sa moillier !
a Quant je vos ai perdue, bien en puis enraigier. »
3 180 Li dux s'en passe outre parmi un val croissier,
Ou il o'i le blasme primes de sa moillier,
Dont ele fu chaitive et il fu essilliez.
Parmi .j. brûel[et] ont lor chemin changié ;
A l'issir d'une lande troverent .j. plaissié,
3i85 Clos de pés et d'espines et de palis troiliés.
Illuc maint . j. frans maires prodons por gaaignier ;
Cil estoit bons le duc plevis et fianciez,
De lui tenoit ses terres, s'estoit ses moitoie[r]s,
Mais il ne se vot onques a Malingre acointier
3190 Ne doner Audegour vaillant .j. sol denier.
Encor avoit Bernarz .x. filz de sa moillier :
Proz [furent] et cortois, li .v. sont chevalier,
Et a .XIX. charrues dont il fait gaainnier,
Que sui .V, fil maintienent a .Ix. boviers.
3195 II ont laz et oisiauz et grant mute de chiens ;
Li maire fait sa vinne planter et prevoignier. (/« 61)
Il est alez a vespres por Damedeu proier :
Damedeu reclama, le glorios dou ciel,
Qu'il garisse Doon de mort et d'encombrier.
3200 Davant la maistre porte sus .j. perron s'asiet,
Desoz l'ombre d'un chasne grant et gros et plainnier,
3174 L. sejorner, mot omis dans le ms.\ chascié, ms. chascier.
»»-3i78 plus d'après L., ms. puis; que L. et ms. con. — 3179
Quant, L. et ms. Que. — 3 180 Ms. croisie. — 3 181 blasme, ms.
bame. — 3i85 L Clox ; palis d'après L,, ms. pas. — 3190 sol
denier, L. soûl donier, ms. souldoier. — 3 191 avoit, les deux
ttxtes a. On n'a pas dit jusqu'ici que le père se nommât Bernard.
— 3194 sui, ms. ces; a, ms. et. — 3199 ms. garissent; ce vers et
le suivant presque entier [début du verso) sont coupés dans L.
bOON DE LA ROCHE H^
Et voit de totes parz son avoir repairier,
Entrer enz en ces parz et berbis et bergiers,
Et gésir en ces loiges et ma[s]tins et lévriers,
32o5 Et ces bues et ces vaiches dont il i a miliers.
Gillebert en apele, son ainné fil premier :
■ '^ « Biax filz, pleiist a Deu, qui tôt puet jostisier,
« Que de cest grant avoir fust venduz Ja moitiez,
« Si tenist Do mes sires l'argent et les deni[e]rs.
3210 « Je redot molt Tomile que ne l'ait espié.
— Sire », H enfant dïent, « molt en serïens lié;
• ■ « Bien nos garirïens etluiavroit mestier. »
A icestes paroles ez le duc ou il vient
Et son nevou Jofroi, les bordons enpoigniez ;
•52t5 Bien [re]connuit Bernart, qui sor le perron siet;
^~" Quant il le voit en vie, joianz en fu et liez,
Damedeu en aore, le glorios dou ciel ;
Son nevou en apele, si li a consoillié :
« Biax niés », ce dist li dus, a ce est mes moitoiers;
3 220 « Certes, molt est prodons por son seignor aidier.
« Mais ce ne sai Je mie s'a Malingre se tient.
« Je me voudrai enuit avec lui haubergier,
« De diz et de paroles le voudrai essaier. (v"
— Sire », ce dist li enfes, « com vos plaira si [i]ert ».
3225 Li dux Doz se leva, qui molt fu ensoigniez :
« Dex te saut ! gentis bons, es prevoz ou voiers ?
« Le seignor de ceanz ses me tu ensoignier?
— Oïl », ce dist Bernars, « que li proz en est miens,
« Si me claiment seignor mi fil et ma moillier.
323o — Amis »^ ce dist li dux, « Dex en soit graciez.
« Faites nos enuit mais avec vos haubergier,
« Por amor Deu de gloire nos donez a mangier ».
33o3 en, ms. es. — 32 10 Z. redoz. — 32 11 L S. dient li enfant.
— 32 16 joianz, ms. joieulx. — 322o son, ms. ces. — 3225 L en
soignier (en deux mots). — 323 1 Le ms. omet mais; avec, L. o,
ms. ou. — 3232 L. maingier; de même vv. 3273, 32 j6, etc.
120 DOON DE LA ROCHE
Etrespondi li maires : « Par mon chief,volentiers;
Ainz nou veai a home ; anuit n'ert commencié.
3235 — Amis », ce di[s]t li dux, « granz mercis en aiez;
« Cist bois par est molt granz, si m'a fort travaillié;
« Et cis pais est gastes, povres et essilliez.
« Comme Doz en fu sires, ce fu torz et péchiez;
f^' « Par sa grant coardise a cest pais laissié.
3240 « Ja Damedeu ne place que il soit repairiez,
« Si ait eu dou cors si mortel encombrier
« Comme mes cuers le vuet et je le vuel proier ».
Quant l'entendi li maires, molt en fu corrociez.
Son mantel deffubla, si sailli sus ses piez,
3245 De son baston meïsmes le vot ferir ou chief,
Quant sui .ij. fil i corrent, Gilliberz et Gantiers;
Puis li a dit : « Truanz, bien semblez pautoniers ;
« Ce vos puet on bien dire, ou por musart changier,
« Qui mesdites [i]ci dou meillor chevalier
325o « Qui onques portast armes ne montast sor destrier;
« Mais li dux fu traiz ; ce fu dues et péchiez
« Et cil qui le traïrent en avront mal loier.
« Alez autre ostel querre : failli avez au mien;
« Ja dedenz ceste barre ne métrez mais le pié ».
3255 Quant l'entendi la dame, si l'en pri[s]t grant pitié :
« Por Deu, merci, biax sire, nobiles chevaliers !
« Se il dirent folie, ne s'en sorent gaitier,
« Ne ja por lor parole n'ert li dux enpiriez.
« Quant vos les hauberjastes, por Deu nés enchaciez;
^. n ,.
3284 veai, L. et ms. vaiai ; ms. commancier. — 3236 Ms. Si
b. m. p. e. grans; L. porte, au lieu de grans, un assemblage
de lettres dénué' de sens Ijezas. — 3238 vers probablement altéré;
cf. plus bas V. 3366. — 3238 L. poichiez. — 3240 L. Damedex.
— 3244 V. coupé dans L. — 3246 sui, ms. ces. — 3249 ici, ms, ce;
L. moiilor. — 325 1 L. Mas. — 3253 autre ostel, L. ûre o., ms.
vostre oste. — 3258 Ms. nen ert; L ci. enperiez, ms. d. enpirier. —
3259 L haubergetes, ms. haubergeres, lecture à laquelle peut, à la
rigueur, se prêter L., mais cf. 32gy ,
DOON DE LA ROCHE 121
3260 « Enuit les mangeroient ors ou lion ou chien ;
« Por no droit seignor lige le vos ruis et requier;
« Que Dex, par son cotnmant, le doinne repairier !
— Dame », ce di[s]t li maires, « corn vos plaira si [i]ert,
« A vo talant en faites, ne m'en entremet riens ».
3205 Toz les degrez de maubre en montent ou planchier,
Et la dame les moinne sus ou terrin celier
Ou on fait la cu[i]sine et la mesnie siet ;
De lait et de frommaige i sont li mes plenier
Et de flaons noviax et de pain tôt musié ;
3270 De la froide fontainne se pue[e]nt aaisier.
Et quant li dux le voit, s'en fu joianz et liez.
« Biax niés », ce dist li dux, « cist est biax vivandiers,
« Certes, molt est prodons : assez done a mangier;
« Damedex me confonde se il n'est corrociez».
3275 II a bote la table laidement de son pié,
Trestot a respandu le boivre et le mangier,
Dont en tindrent lor feste et braichot et lévrier.
« En la moie foi, sire, ne somes pas bergier
« Que nos de tel viande dëussiens aseier.
3280 « En la terre de France n'en vi onques mangier;
« Vos en verrez demain ces ma[s]tins enragier.
« Nos l'avons en costume, en France et a Poitiers,
« Quant bons hauberge autrui, qu'il le conroie bien,
« De pocinèz pevrés et [de] gastiaus broiez
3285 « Et vin et ysopé tant com li est mestiers.
*« Et se tu vuels, bel oste, tel viande nos quier,
« Et se tu nel vuels faire, remés est nos mangier.
« Se venons a La Roche, nos l'amanderons bien. »
Quant Tentendi la dame, s'a son talent changié,
3260 Z,. maingeroiens. — 3261 L P. nos droiz; ms. P. vos drois
s. liges le v. prie et r. — 3265 L plainchier. — 3269 tôt, ms. sont.
— 3272 Ms. SI e. b. — 3277 braichot, ms. broches. Vers perdu
après ce vers? — 3279 dëussiens mq. ms. — 3283 autrui, L et ms.
autre {cf. 3333); L. conraie. — 3286 et 3287 vuels, L viels, ms,
vuels (vues). — 3288 Ici s'arrête le fragment L.
i^iH'
Îi2 DOON DE LA ROCHE
3290 Car d'espie [Tomile] se soingne, dote et crient;
Au maufé les commande ei a vif aversier ;
Son baron le va dire et a ses filz noncier.
xcxv
La dame ist de sa chambre, si entre en sa maison,
Par les maistres degrez en monta contremont ;
3295 Quant la vit li frans maire, si l'a mis[e] a raison :
« Dit[es] moi, bêle dame, vo pèlerin que font?
« Arsoir les hauberjastes ou je vousisse ou non,
« Por mon droit seignor lige vos en dona[i] le don.
— A la moie foi, sire, je n'e[n] sai se mal non ;
33oo « Plus sont de fier coraige et hardi com lion.
« No vitaille et nos tables ont bote en .j. mont,
« Or en tienent lor feste et braichot et waignon;
.IV' « Damediex me confonde se ce pèlerin sont !
« Je cuit que sont espies Malingre et Audegour (/» 63)
33o5 « Qui nostre avoir espïent e no riche maison;
« A tart vos vendra mais li secor[s] de Doon.
« Certes, li dux est morz, ou il gist en prison ».
.«•1 Quant l'entent li frans maire, molt pensa a baston,
Ses ,ij. filz en apele, Gilebert et Simon :
33 10 « Alons ou sosterrin por veoir les glotons,
« Se il ne sevent rendre escondit ou raison,
« Damediex me confonde se il mal ostel [n'Jont !
« Ja por lor dos bien batre mar iront a Soissons.
— Sire », dient si fil, « nos irons avec vos,
33 1 5 « Mais, se Deu plai[s]t de gloire, ja ne le penserons,
« Quant vos les hauberjastes, nul mal ne lor ferons
3290 crient, ms. craint. — 3293 sa ch., corr. la ch. (?) — 3295
"^'vit, ms. vint. — 3296 q. f. il. — 33o2 braichot, ms. broiches ; cf.
V. 32yj . — 33o4 Je cuide que ce sont e. — 33o5 Qu'en. -:- 33o8
baston, ms. baron, cf. v. 3322. — 33io ou sorterrin. — 33i4 d.
ces filz. — 33 1 5 se, ms. ce. ^r ""
DOON DE LA ROCHE 12$
« Pour tel vitaille perdre, car assez en avons,
« Et mo!t plus de meillor se doner les volons ».
Par les mai[s]tre[s] degrez en montent contremont :
3320 Encor trueve[nt] le duc et son nevouselonc,
Ou atendentla dame que a mangier lor dont.
Atant es le maior, en sa main ,j. baston,
Par estrif et par ire mi[s]t le duc a raison :
« Dites, vassaus, qui estes, et comment avez non,
3325 « Ou, par le cors saint Pierre c'on quiert em pré Noiron,
« De no vitaille espandre aurez tel g[ui]ardon,
« Tel com on [en] doit faire a encrime félon ;
« Ainz oste ne trovastes si fel ne si félon,
« Qui espandi ma table, [ou je] vosisse ou non.
333o — Sire », ce dist li dux, « Frobert m'apele on,
« Cest mien compain apele[nt] Espovante-felon.
« En la terre de France acostumé avons,
« Quant on hauberge autrui, que bel ostel li font
« De pocinèz pevrez, de haste de chapon,
3335 « Et vin et isopé assez et a foison;
« Onques ne vi mangier fromaige ne maton ;
« Vos en verrez demain enraigier ce[s] gaignons.
— Amis », ce dist li maire, « assez vos en donrons; t
« Ci manja .j. avesque[s], passé a .iiij. jors,
3340 « Assez nos en remest pain et vin et poisson,
« Aloues en pastez et bons esturions,
i « Nos n'en manjasmes onques, car apris ne l'avons ».
I Davantlor en fist mètre de ci a .iiij. jors.
Et li dux en manja, s'en dona son nevou,
3345 Aval, parmi la table, pastoriaus et garçons.
f
33i8 les, sic ms., corr. lor (?) — 3323 estrif, ms. estre. — 3326
noz vitailles. — 3328 fel, corr. fier? Le sens se suivrait mieux
si on faisait passer ce vers après le suivant. — 3329 La resti-
tution est justifiée par le v. 32gy. — 333 1 c. apele on. —
3333 autrui, ms. autre. — 3338 maire, ms. dus. — 3344 *" ro->
corr. n'en m. (?); do. as. n.
124 DOON DE LA ROCHE
Etdïentli .j. l'autre : « Cil paumiers est prodons.
« Ci[l] sire le garisse qui sofri passion ! »
XCXVI
Li dux sist a [la] table, qui les morciaus tailla
Et versa Jofroi vin, as pastoria[x] dona.
335o Celé nuit fu li dus a[s] pastors seneschals,
Et dïent li .j. l'autre : « Deu ! quel paumier ci a!
Jhesus, li rois de gloire, le garisse de mal ! »
A iceste parole estes vos Bernehart,
Vestuz .j. peliçon qui jusqu'a[s] piez li bat ;
3355 Ou qu[e] il voit le duc, Frobert l'en apela :
« Dites, sire Frobert, est nostre mangiers saus ?
« Gardez ne porchaciez ne traison ne mal;
« Il n'est pas [a] costume que ja nulz bons se gart
« De prendre tel vitaille com ses ostes avra, (/° 64
336o « Mais volentiers en prengne [com la trueve] en trespa;
« L'endemain prengne mieus, se il puet et il l'a.
— Sire, » ce dit li dus, « prisie est ceste char
« Et ci[s] vins est boutez .vij. ans [et plus] i a;
« Maleoite soit il de Deu qui l'escota !
3365 « Et cist pais est gastes, que prodome n'i a;
« Comme Do en fu sire, l'amistié en passa,
« Par sa grant coardise le guerpi et laissa,
« Et la dame [et] la terre, quant fuant s'en ala.
« Ja Damedieu ne place que jamais i a[it] part,
3370 « Ne jamais i revoingne, que trop mal fait i a ! »
Quant l'entendit li maire, son mantel defubla,
3346 li .j. a l'a.; on pourrait conserver cette leçon et changer
dient en dist ; de même au v. 335 1. — 3347 ^^ nostre sire le
garissent. — 3349 au pastoria d. — 335i li .j. a l'a.; cf. la note
du V. 3346. — 3355 V. li d. — 3356 saus, ms. sans. — 336i
prenant m.; se il, ms. si. — 3364 ^^^'^ altéré ; il, corr. el (?) — 3365
cist, ms. cest; n'i a, ms. uie. — 3366 Com D. en f. s. tôt la
moistié en pesa. — 3370 q. trope m. i, a f.
DOON DE La|rOCHE 125
Il aprocha au feu, .)• baston en sacha,
Et vot ferir le duc, quant ses filz li osta,
Et sa moiller la gcnt[e]par les flans l'embrasça...
3375 « Par foi, [sirej Froberi, molt me tiens por musart;
« A pou que ne t'ai mort et ton compaignon ars,
« Quant vos ci me mesdites dou seignor natural
« Qui ja tint cest[e] tere et encor la tenra.
XCVII
« Par la foi Dieu, Frobert, je vos tien a bricon ;
338o « A pou ne vos ai mort et ars vo compaignon,
« Quant vous me[s]dites ci dou riche duc Doon,
« Dou meillor chevalier qui chauça esperon ;
« Et cil qui le traïrent en avront guerredon.
— Sire », ce dit le dus, « trop savés de sermon;
3385 « Se vos fuissiez evesque, molt fuissiez riche[s] hons.
« Mettez nos hors dou bois .iij. Hues davant jor; (v"
« Pourcoi si le ferez, ou vos veuUiez ou non. »
Quant l'entendi li maifle, molt pesa au baron,
Il tressailli en pies, si a pris .j. baston;
3390 Et si fil ne li vourent mais proier des baron[s],
Hors de l'ostel les boutent, ou vousissent ou non.
XCVIII
Or sont andui li conte hors de la baitre a plein;
.1. pleuge chiet froide, qui forment les destreint.
3372 sacha, ms. faicha. — 3373 ses, ms. ces. — 3373 P. ma f.
Vers perdu entre ce v. et le précédent? — 3376 mort, ms.
mors. — 3379 au b. — 338o ne, ms. je ne; vous compaignons.
— 3386 Mestcs; de cest b.; d. le j. — 3387 Vers obscur ; lacune
entre ce vers et le précédent? — 3390 p. dou baron. — 3392
baitre, corr. bare(?), comp. v. 3254. — 3393 chiet, ms. chief.
I2b DOON DE LA ROCHE
Li dus [Do] tient a jeu de Joffroi qui se plaint :
3395 « Beaus niés, forment me poise que de trambler te foing;
« Vostre manteaus ... n'est pas forrés de plain,
« Tôt a ese est li povre qui n'a ostel ne pain ;
« Quant il en vait a Rome ou a Jherusalem,
« Ja plus n'avra plenté que bare a autrui main.
3400 — Sire, wcedist li enfes,« carcil froismedestraint:
« Se enuit n'ai ostel, ja ne verrai demain ».
La famé Be[r]n[eh]art en [a] oï le plain[t] :
« Por Dieu, merci, beaus sire, des pèlerins est[r]ains,
« Enuit les mangeront ors ou lion ou dain,
3405 « Ou il morront la hors, ou de froit ou de fain ;
« Enuit les harbergiez, si s'en iront demain ;
« Por amor vo seignor le ru je et reclain,
« Que Damedeu de gloire par tens le vos ramaint
«f Et confonde Tomile et ramaint Olivain,
3410 « Et destrue Audegour, celle maie putain!
« Cil paumier sont molt sot et estout et vilain,
« Abatue ont vo table, ja pour ce n'avrons mains.
« Sire, merci te pri por le cors saint Germain. [f 65)
— Dame », ce dist li -maire, « de folie me plain ;
3415 « A vos talans en fait[es], c'est li plus et li main[s] ;
« Certes, ra[u]smone d'eus ne pris je pas .j. pain ».
Quant ce oit la dame, si prist la clef au çain[t],
Les pèlerins rappelle, ne iaira nés ramaint.
Et li maire en monta en son palais [hjautain.
3420 La dame ouvrit la porte, ses mit ens par la main;
De diz et de folie les chastie et destraint :
' '. « Pèlerin, trop par est[es] fel et félon et vain, »
339486, ms. ce. — 3395 foing, sic ms., altéré, l. teins (?). —
3396 vers incomplet ou altéré] l. V. m. [est povres] n'e. p. (?) —
339g bare, sic ms. — 34^4 ^SlIU ms. dains. — 34o5 fain ms. fains.
— 3406 si, ms. cis. — 3407 de vos s.; ru, ms. rue. — 3409 et si
ramaine Olive. — 3415 t. en fait iest li p. — 3417 si p. la clef au
çaint, ms. si p. la cler au cain. — 341g monta, ms, monte. —
3430 SCS ms. ces.
♦ DÔON DE LA*- ROCHE 1^7
Le feu fait alumer Arembour et Bertain ;
Les .i). filles la dame alument a ,j. plain,
3425 Veullent ou non, lor tollent les bordons de lor main,
Deus manteaus lor afublent, qui ne sont pas vilain,
Forré furent de gris, covert d'un drap [d']estain,
Qui fut ouvrés en Inde, en .j. pais lointain;
Assez [i] orent pomes [et] poires et parmain[s]
3430 Et .). hanap de madré, qui d'isopé fu plain.
Bien fut servi[s] li dus, de folie se plaint ;
Joffrois doute son oncle, que mais ne les pormaint,
Du froit qu'il a soffert a son visaige taint :
« L'estre dehors, beaus oncle[s], certes n'est mie sains;
3435 « Laissiez vostre folie, bien pouez faire a mains,
« Damedieus me confonde se sui plus vo compains ! »
Quant l'entendi li dus, parmi les flans restreint.
Atant es vous Bernart, de molt grant ire plein,
Vestu d'un peliçon, .j. baston en sa main,
3440 Et regarde le duc as lon[s] doiz et as mains, (v*)
Et ot ou poing . j. seing, [qui] de vermeil [fu] teins,
Qu'aporta de sa mère, quant nasqui primerains;
Ains ne le pot laver eve chaulde ne bains
Ne onque[s] pornul basme nen i pot avoir meins.
3445 Quant il choisi la tache, dont fu il bien certain[s]
Que c'est Do de la Roche, li mari[s] Olivain.
— Sire, par le baptême, par coi Dieu[s] vos destreint,
« Dite[s] moi qui vos estes, que je soie certains,
« Car por mon seignor lige t'esgart et entreprains.
XCIX
3450 — Certes », ce dist li dus, « jel dirai voirement :
« Je sui Do de la Roche, sachiez a escient;
3423 A. a B. — 3426 qui, ms. ci — 343o Et, ms. En; qui, ms.
que — 3434 Lestres — 3441 .j. soing de vemoille taint — 3444
basme, ms. blasme — 3446 li ms. le — 3450 je le d .
128 DOON DE LA ROCHE ♦
« Je ai esté maint jor en peine et en torment. »
Quant l'entendi li maire, devant ses pies s'estent,
De la joie qu'il a toz li cors li resplent,
3455 Vint fois li [a] baisé la jambe voirement,
Et sa femme et si fil le baisent doucement.
Dont demanda novelle-de sa femme Olivant.
— A la moie foi, sire, ja l'orrés aparmant :
« Ele a prise La Roche, s'est entrée dedens,
3460 « Ghacié en a Tomile et lui et ses parens,
« Et Audegour sa fille est cheue en torment. »
Quant l'entendi li dus, molt en devint joians.
Grant joie en ot li maire, quant conut son seignor;
Qui veist le barnage que si .ij. fil li font
3465 Et li père et la mère, ains bons ne vit graignor.
Li enfant li baisèrent les pies et les genous.
Et la dame et li maire le vis et le ma[n]ton.
Dont demanda novele de sa femme Audegour. (/« 66)
« Sire », li dist li maire, « dont ne me créez vos?
3470 « Olive l'a en chartre avalée en parfont,
« Des maus que li a fait li rendra guerredon,
jj « Par l'effort de l'evesque ; Diex li otroit pardon !
« Tomiles et Malingre droit a Maiance sont
« Et lor felon[s] lignage[s], dont .iiij^''. [i] sont;
3475 « La escillent la terre entor et environ ;
« Cil Sire les confonde, qui sofri passion ! »
El respondi li dus : « Nos les departiron,
3452 mains j. — 3453 ces p. — 3466 li b. — 3467 sa f. Olive
— 3458 l'o. a parmant {en deux mots). — 3460 ses, ms. ces —
3462 d. joieulx — 3464 ces .ij. fils — 3466 Li enfes — 3467
maire, ms. maistre. — 3470 en la ch. — 3471 que, ms. qui —
3472 otroit, ms. ottroie. — 3474, felonc I., sont, sic ms., corr.
[en] ont (?) • ■
DOON DE LA ROCHE I 29
« Se Dieu plaist et saint P[i]ere, qu'on quiertelPréNoiron.»
Dont aprestent les liz, s'i couchent li baron.
CI
3480 Grant joie ot li frans maire quant le duc ot couchié,
De frés dras et nouveaus le porvoit et porquiert;
Il a levé sa main, si Ta de Dieu seigniet,
Puis a esteins les cierges pour la clartés qui vient.
Au matin, par som l'aube, l'est aie esveillier,
3485 A .iiij. chandelabres, et il et sa moillier.
« Sire duc de bon aire, vestez vos et chauciez,
« Tant a li cos chanté que jour[s] est esclarciez. »
Quant l'entendi li dus, si fu joios et liez.
Damedieu reclama, qui en crois lu dreciez :
3490 « Car me rendez m'enoret ma gente moillier,
« Olive la roial, cui lis tant encombrier.
— Sire, » ce di[s]t li maire, « ores de l'esploitier ».
Et respondi li dus : « Par ma foi, voleniier[s]. »
Il a levé sa main, si a seignié son chief.
34.95 Et li maire li baille .j. osterin molt chier
Et Jofroi son neveu .j. bliau[t] de cartier. {v°)
« Amis, » ce di[s]t li dus, « tout ce ne m'est mestier,
« Mais les dras nous rendez que ci apona[i] hier ;
« Vos .V. filz, s'il vos plaist, les ainez me cherchiez,
35oo « Si soient povremeni et vestu et chaucié.
« Grant mal doit li hons traire por son seignor aidier;
« J'en irai a La Roche Olivain essaier ».
Quant l'entendi li maire, joious en fu et liez;
Cel jour vesti ses filz les dras a ses bergiers,
3478 en p. N. — 347g s'i, ms. ci. — 3480 ot couchier. — 3481
d. et de n. — 3482 D. seignier. — 3483 les, ms. ces. — 3484
soubs l'a. — 3495 .j. estour m. c. — 3499 s'il, ms. cil ; me cherqiés.
— 35o2 Olivain, ms. Olive. — 3 304 Ces jours; ses ... ses, ms.
ces .. . ces *^ ' ""
l3o DOON DE LA ROGHÈ
35o5 Si n'orent nulles chausse[s], escapins ont chaucié.
Au père et a la mere prinrent li fil congié,
Et Bernars si cria : « Enfant, a Dieu ailliez,
« Pensez de vo seignor maintenir et aidier,
« Ou, par le saint apostre qu'om a Rome requiert,
35 lo « Ja ne avrez du mien vaillant .iiij. deniers,
« Ne de mon tenement ne herite[z] ne fiés. »
Li maire les convoie .j. grant pièce a pied.
Quant la nuit lor defîaut, li jors est esclariez,
Li soleii[z] raie chaut qui d'Orient lor vient;
35 1 5 Li dus garde sur destre, s'a veû le clochie[r]
Du chastel de La Roche, la tour et le moustier.
'( Baron », dist li dus Do, « tant avons esploitié
* a Que je voi de La Roche les murs et les terrie[r]s ;
« La dedans maint Olive qui ja fu ma moillier,
?520 « Nous fumes desevré a tort et a pechié.
« Je me voudrai enuit avec li haubergier,
« De diz et de paroles la voudra[i] essaier,
« Son corage esprover se ele m'aime riens.
« Gardez ne dites riens de quanque vous orriez ».
3525 Et cil li respondirent : « Corn vos plaira, si [ijert. »
Il se geta a terre desoz .j. olivier,
Et se sont une pièce dormi et someillié,
, Car li dus et Jofroiz furent molt travaillié;
Puis prennent lor bordons quant se sont esveillié;
353o S'acoillent lor chemin, ne se voudrent targier.
Quant vindrent a La Roche, si fu li jour moiés,
Les vespres sont sonée[s] par le bourc au moustier,
Es rues de la ville sont entré sans congié;
35o5 escapîns, nts. escapint'. — 35o6 les filz c. — 35o7 si,
tns. ci; Enfant, ms. Enfans. — 35o8 P. de vos seigneurs. — 35 17
a. esploitier. — 3523 se, ms. ce. — 3524 v. orer. — 3525 Com,
ms. Corne. — 3526 geta, ms. giete. — 3527 se, ms. ce, d. et
somoillier. — 3528 m. travaiilier. — 3529 et 353o se, ms. ce. —
3533 congié, ms. congiés.
DOON DE LA ROCHE l3l
Il trespassent la ville et le inai[sjtre marchié...
3535 Devant l'uis de la sale encontra sa moillier,
Ou ele vient de vespre[s], a .xxx. chevaliers; *
Li dus se met devant, bien resemble paumier,
Et salue la dame, ne se vot plus targier.
« Duchesse debonaire, » dist li dus, «bien veigniez. »
3540 La dame le regarde, le vit bien afaitié.
« Seignor, dont estes vous? Diex vos ..., paumiers ».
— « Dame », ce distli dus, « de douce France vieng,
« Dou règne vostre frère, Pépin qui France tient;
« Je m'en vais a Coloigne a saint P[i]ere proier.
3545 « Faitefs] nos [ci] enuit, se vos plai[s]t, haubergier ».
Et respont la duchesse : « Par ma foi, volentier[s] ;
« Pour Dieu et pour mon frère serez bien haubergié. »
Son seneschal apele, le cortois Flori[i]en :
« Moine moi ces .vu. homes lassus en ces planchier[s] ;
355o « Si soient enuit mais richement aesié,
« Le matin par som l'aube revestu et baignié; (v«)
« Si lor donez .x. livres de bon[s] colonoissiens,
« Qu'en la ter[rie de France se puissent repairier,
« Si diront a mon frère les nouvelles de bien. »
3555 Et dist li seneschaus : « Par ma foi, volentier[s] ».
Toz les degrés de maubre les enmeine es planchier[s].
en
Or est Do de La Roche morite[z] [sus] en sa Sâïe,
En son alué demoine de son droit héritage,
3534 m. marchier. — 3535 Entre ce vers et le vers précédent,
il faut admettre une lacune : Doon, qui va entrer dans la « sale »,
devait être nommé. — 3537 met, ms. mit. — 3538 se, ms. ce. —
3540 r. se le v. — 3541 Seigneurs; D. v. garisce p., leçon qui
fausse le vers. On pourrait proposer D. si vous gart, p. — 3543
F. Tieage. — 3545 se, ms. si. — 355 1 som, ms, soubz. — 3553
Quant la t.; p. repairiés.
l32 DOON DE LA ROCHE
Dont il ne doit nul home servise ne chavage,
356o Et voit desour ces bans asseoir le barnage.
Les viax et les chenus et ces de joene eage ;
Dont ot li dus pitié, si sospire et larme :
Diex ! tant de mesestances a eu en son eage,
Quant cil ne le congnoissent qu'a nori[z] a sa table !
3565 Quant li soir[s] s'aprocha, si demandèrent l'aiguë ;
Cil gentil chevalier s'asirent par ces tables,
La suer Pépin de France se siet au chief des altres,
Bien la servent devin trestuit li conestable,
Mais li dus ne gosta des premerains mes .iiij.;
3570 Pitié ot de la dame, membre li del hontage.
Quant il orent mangié, si font traire les napes,
Cil jugl[e]or desponent lor chançons et lor fables
Mais Olive la gente ne joe ne ne gabe. -
Quant li desduiz fu faiz, la mesnie s'en partent,
3575 Cil chevalier s'en issent et les degrez avalent
Et les gaites montèrent et es murs et [es] flaides.
Or parlera li dus, cui soit bel ne cui plaise,
Si que l'eve del cuer li coule aval la face :
« A la moie foi, dame, molt est ces pais gaste[s] {f. 68)
358o « Et povres et maldiz et alez a Deables.
« Li duz s'en enfoui per son malvais corage ;
« Quant il vos ot a famé ce fu duel[s] et domage[s] ;
« Se il [i] revient mais a Noël ou a Pasque,
« Se vous le recevez, ce en duel[s] et domage[s] ;
3585 « Or pouez seignor prendre sans [honte et sans] domage,
3559 d. a nulz h. — 356i les chenus, ms. les joene — 3562
larme, ms. larmoie; cf. v. 42g8. — 3565 s'aproche ci d. l'aive.
— 3567 au ch. desaintrcs. — 3571 si, ms. ci. — 3574 desduit fut
fait. — 3575 d. avaiilent. — 3576 flaides, sic ms. — 3578 Lacune
entre ce vers et le précédent? — 358 1 enfoui, ms. a foui en deux
mots. — 3584 L'expression duels et domages a déjà été employée
dans les v. 3582. Un des deux vers doit être altéré, d'autant plus
que domage revient encore au v. 3585. — 3584 prendre, ms.
panre. ' ' v
DOON DE LA ROCHE l33
« Molt sera fous Pepin[s] se il ne[l] vos porchace. »
Quant l'entendi la dame, le siglaton deslace
Et,vo[l]t ferir le duc, mais cenor ne li laisse :
« Par mon chief,dans truans, dit avez grant oltrage.
3590 « Molt fu prodons mes sires et de gentil corage,
« Mais li ber fu trais par .j. mauvais linage;
« Glouton, aies gésir, n'ai soing de vostre ostage,
« Jamais n'avrez de moi .j. seul denier qui vaille. »
La duchesse s'en entre en sa chambre de ma[u]bre,
3595 Qui fu trestoute peinte a oiseaus et a brame[s];
Le lit a[s] pelerin[s] firent en mi la sale,
Il se couch[i]erent si que nuns ne se desaise.
Au main avant le jour, ainsois que crevast l'aube,
Li .vij. baron se lievent, si s'adobent et s'arment,
36oo Et mo[n]tent as fenestres des grans paies de maubre;
Li dus cria « Sobrie! », s'enseingne quenoissable.
Quant l'entendi la dame, tuit le membre li faillent,
Or li tremble li cors et li mue la face.
« Laisse! » dist la duchesse, « ci a mal haubergage,
36o5 «Tôt por voir m'a traie li so[u]du[i]ans lignage[s],
« Tomiles de Coloigne et Grifes a la barbe ; (v°)
« A non Dieu, sire dus, nos amitié[s] départent,
« N'oras jamais de nos nouvelles ne message[s],
« Ne verras ja mon fil a Noël ne a Pasque.
36 10 « Par Dieu, Pépin de France, vostre secours me targe. »
De duel que [a] la dame, a .iiij. fois se pasme ;
Aval, parmi le bourc, en oissiez la fable,
Quant li baron s'adobent et [li chevalier s'Jarment
Et viennent a[s] destroiz, si decopent les bares
36 1 5 Et jurent Damedieu truant mar i entrarent.
3586 s. faus P. — 3588 le, ms. li; cenor, sic ms., altéré. —
35g2 n'aies s. de nostre o. {vers trop long). — 3593 m. que .j. s.
d. vaillent. — 3598 avant, ms. devant. — 359g baron, ms. barons.
— 36oo as, ms. es; maubres. — 36oi Sorbrie. — 36o3 li f. —
3607 vos amitié. — 3609 Ne verres. — 36i2 la fable, sic ms.,
altérée — 3614 si decopes les baires.
I $4 DOON DE LA ROCHE
Di[s]t Jofroi[z] deMaiance : « Ol ai grant outrage,
« Molt faitlionsque fous qui son seignor menace,
« Ce est Do de La Roche, ne nie chaut qui le sache. »
Quant l'entendi la dame, .j. petit s'asouage,
3620 Ele est drecie en pié, si a vestu .j. paile ;
Elç jçsit 4e U chambre, si entra en la sale.
cm
Or est dedans la tour la gentil dame enclose,
Ensemble [o] son mari, qui la prist a espose ;
Ele fu prouz et sage et gentiment parole :
3025 « Dites, vassals, qui es si hardis et si nobles.. .
« Quant vos en ces palais m'osastes faire choses?
— Dame», ce dist li dus « c[e] est Do de La Roche,
Qui t'aporta de France a plenté et a noces.
— Sire», ce dist la dame, « de paour m'avez morte;
363o « Se vous estes mes sire, tost en ert fait l'acorde.
« Hé! bers, car fais ouvrir ces postiz et ces portes,
« Si monteront as uis vo baron et li nostre. »
Li .V. fil Bern[eh]art les euvrent et descloent (/. 6g)
Et li baron i montent a vertu et a force.
3635 Quant il treuvent le duc, le baisent et acolent.
Cil de plus riche[s] fiés lor homage li offrent,
Mais sa moillier la gente de rien ne le conforte.
« Sire », di[s]t la duchesse, « bien sçai l'avoirs est vostre
« Et je vous reprendrai a honor et a noces,
3640 « Mais de gésir ensamble n'i avra Ja parole...
« La cité de Sobrie, le chastel et la roche
3617 q. foulx. — 36i8 que le saiche. — 3630 dreciés en p.
ci a. -^ 3025 q. est ci h- Lacune après ce vers- — 3626 choses,
sic ms., altéré? -^ 363o Ce. — 3632 m. casuis vos barons. —
3634 a vertus. -^ 3635 ce b. — 3636 fiés, avant ce mot Iç ms.
porte chief exponctué. — 3638 S, ce d.; l'avoirs, ms. le voir, r—
3641 II faut supposer une lacune entre ce vers et le précédent.
DOON DE LA ROCHE
l35
a Et l'enor de Coloigne que li gloton vos tollent...
« De ci que a dimanche m'avrez frainte[s] les portes
« Et vous m'avrez rendu Tomile par la gorge
3645 « Et il avra gehi a riches et a povres
« Qu'il coucha le garçon [de]lez moi de pute ordre.
— Dame», ce dist li dus, « ce n[e] iert mie encore :
« Landris voz fils i vient devers Constantinoble
a Et par mer et par terre amoine tel efforce
365o « Li lignage[sj Tomile ne se pourat estordre,
« Ains achètera fort mon hontage et le vostre. »
Quant l'entendi la dame, sa jo[i]e li efforce.
GIV
Or a Do de La Roche sa cité recouvrée
Et Olive la belle, que molt a désirée ;
3655 Le jour i a de joie maint[e] larme plorée.
[Et] li dus s'adouba en la soie contrée ;
Sa moillier lui dona haubert et bone espée
Et hiaume a ce[r]cle d'or, bone targe roée ;
Les armes son neveu ne sont pas obliée[s], (v*>)
366o Les .v. filz Bern[eh]art les a bone[s] donées.
Li dus ist de la ville quant l'aube fu crevée.
Au mostier [le] plus mai[s]tre s'ont la messe chantée,
Li bon[s] dus d'Alemangne l'a de cuer escoutée,
Son auferrant demande et sa gent est montée
3665 Et vienent a Sobrie,la ou les oz trouvereiit.
Et Jofroi[z] va devant, poi[g]nar^t toute l'estrée;
Landris ala encontre, si demanda son père :
« Qui vos dona ces armes, avez les vos emblées? »
3642 enor, ms. anor; lacune après ce vers. — 3643 que a, ms.
qu'a. — 3644 rendu, ms. randus. — 3646 Quant il c. — 3648
Ca[r] L. V. f. qui v. d. C. — 365q se, ms. nos. — 3654 qui m.
la d. — 366o f. Barnars. — 3665 oz, ms. os.
l36 DOON DE LA ROCHE
Dist Jofroiz de Maiance : « La duchesse voz mère;
3670 « Large part de vos terres vos a ele aquitée ;
« Jamais Jour tele dame ne sera [mais] trovée;
« Ele a prise La Roche, si est dedans entrée,
« Leans est Audegour en la chartre avalée, »
Atant es vos le duc et sa gent honorée,
3675 D'Alemangne Doon, qui la dame a amée.
« Beaus filz », ce dist li dus, « alons en pour vo mère,
« Si forment vos désire, [trestoute] est aplorée. »
Et respondi Landris : « Ne pla[i]ceDieu le Père
« Que je baise sa boche ne ja soit ma privée,
368o « Si li rendrai Tomile par la goule parée
« Et si ert davant tous la grant honte contée
« Par coi vosire amors fut de ma mère sevrée
« Et m'en alai chetis en estrange contrée ;
« Après sera ma dame de m'amor s[a]oulée ; »
3685 Hé 1 Dieu[s], celé promesse ot si corte durée ;
Puis qu'il ot sa jouvente et sa tere aquitée
Ne demora il mie la moitié d'une année (/. 70]
Qu'il me[ijsme passa outre la mer salée,
La ou la chair de Dieu fu de la Virge née
3690 Et la grans oz de France travaillie et penée.
CV
Quant li dus de La Roche oï son fil parler
Qu[e] il ne voldra mie a sa mère torner,
Deus messages envoie en la bone cité,
Que c'est Do de La Roche, ne se vuelt plus celer,
3695 Qui enchace Tomile et son fel parenté,
Quant il ot pris sa fille, ou molt ot fauçeté.
3670 e. aquiter. — 367 1 j. celle d. — 3675 D'A. Aubri q. —
368o parée, sic ms. — 368 1 si, ms. ci. — 3683 a. chatif. — 3686
P. qui — 3688 mer, ms. mère. — 3689 la chars. — 3690 g. os. —
3691 parler, ms. parles. — 3694 ce v. — 3696 ot dç f.
DOON DE LA ROCHE iSy
Quant li borjois l'entendent, grant jcie en ont mené
Il font traire ces cordes et ces cloches sonner,
Ces riches draps de soie par ces rues poser,
3700 Encens, autres espices i font [il] embraser;
Pour la joie du duc font .m. grailles sonner,
Et ces portes ouvrir et ces pons avaler
Et ces chevaus isniaus covrir et enseler
Et ces nobles vassaus joieusement monter,
3705 Encontre lor seignor poindre et galoper.
Tôt lor avoir li offrent sans nés .1. refuser.
« Baron, » ce dist li maire « a Maiance en irez,
« La asaudrez Tomile par vive poësté.
« Le matin, par som l'aube, quant il ert ajorne,
3710 « Vos manré .iii«^. mars de cumin et de sel,
« Et de poivre molu .111^. ro[n]cins trossez
« Et .m. buefz et .m. vaiches et .m. bacons salez,
« De vin et de froment empliromes .c. nés,
« Toz ravoir[s] de Sobrie vos ert abandonez. » (v°)
3715 — Baron, » ce dist li dus, « bel aide m'offrez ;
« Cil sire le vous mire, qui en crois fu penez.
« Certes, je n'en avrai [nés] .i. denier vaillant.
« Trop avons nous avoir pour nos cors conreer ».
CVI
Li dus voit ses barons, dolcement les mercie;
3720 Au matin par son l'aube est meû[z] de Sobrie.
Riche fu la vitaille, belle sa compaignie.
Or chevalche li dus parmi la terre alisse,
Une terre sauvage que Damedieu maudie !
3699 Ses. — 3700 E. et a. — 3701 graillier s. — 37o3 ch.^ignias
c. et ensaler. — 3703 Et contre. — ^707 Barons — 370g som ms.
soubz. — 3710 manré, ms. manres. — 3716 mire, ms. mre ou
iure. — 3719 ces b. — 3730 som, ms. soubz. — 3722 alissej
sic ms.
i38
DOON DE LA ROCHE
Onque[sJ n'i crut vltaille dont frans hom peiist vivre,
3725 Mais pieres de liois, bruieroi et espines ;
Ains i fuit on la tere et cuert on la marine.
Molt lor poisent lor armes, car li chaus les aigrie.
Cel jour se part Landris de l'ost par grant folie,
Sur son poing .j. faucon, dont li ber se délite;
3/30 De ce f[ist] il que fox que son cheval oblie...
Selonc .1. rivière ot sa voie acoillie.
En mi la voie encontre deus des nevou[s]Tomile,
Li .). ot non Hardré et li autre[s] Helie,
' Et furent fil Griffon a la barbe florie;
3735 Jamais a plus félons ne prenra compaignie,
Bien sevent .j- prodome engignier et ocire,
Onques n'amerent femme, si ne l'orent honie;
La mort Aubri l'evesque ont jurée et plevie;
Diex! que li filz au duc n'a la broinne vestie !
3740 Plus en fust asseiir et moins dotast sa vie.
A ce[l] faucon qu'i[l] porte a abatu .J. cine,
Li faucons s'i encharne, par vertu s'i afiche; (^
Li filz au duc descent, qui son oisel délivre ;
Li ber revot monter quant Hardre[z] li escrie :
3745 « Si m'aïst Diex, vassal, c'est molt grans lecherie
« Quant ou vivier nion père venez prenre les cines :
« Qui le tienne a savoir, je le tien a folie ;
« Se ch[i]er nel comparez, Damediex me maudie!
« Ou palais de Maiance en venrez a Tomile,
3750 « A son commandement en ert fait[ej justice » .
3725 de 1., brueuus et saspine. — 3726 fuit, ms. fuet ; cuert on,
ms. creue en. Ce vers se rattache mal à celui qui précède; il y a
p.-ê. un vers perdu entre les deux. — 3728 Se. — 3729 ce d. —
3730 // faut probabl. supposer un vers perdu oii il était dit que
Landri était monté sur un mulet; cf. v. 3^6^^ Sjji . — 3734
fil, ms. cil. — 3735 prenra, ms. panra. — 3737 si, ms. se. — 3739
le f. — 3740 Puis en f. — 3742 p. vertus ci a. — 3745 aist, ms.
eïst. — 3746 prenre, ms. panre. — 3747 Q, le toinne. — 3748
ne le compares — 3749 varés a T.
DOON DE LA ROCHE ïBg
Quant l'entendit Landri[s], de mal talant s'aïre
Et dit li filz au duc : « Molt très grant pechié dites
a Quant voiis pour .j. oisel me jugiez a ocire,
« Dite[s] moi qui vos estes, ne le me celez mie ».
5755 Et respondit Hardrez : « Nevou somesTomile,
« Fil Griffon d'Autefeulle, qui Sorable jostise,
« De sa part chalongons le vivier et le cine ».
— Certes », ce dist Landris, « or ne m'amervoi[l] mie
« Se vos estes félon et plain [d'orgueil et] d'ire;
3760 « C'onque[s] vostre lignage ne fut sans felonnie.
— Fils a putain, félon, li miens cors vos deffie,
« Se Damediex n'en pense, molt a fa[i]t grant folie,
« Quant .). bons desarmés .ij. chevaliers defïîe. »
Il a traite l'espée d'acier vert et brunie,
3765 Et broche le mulet, sur les estriers s'afiche,
Et va ferir Hardré par orgueil et par ire.
Li glous li atendi sa grant hante fraisnine,
Qui li trancha le ploi de son mantel [d'Jhermine;
En sa char le navra par davant sa poitrine. (v**)
3770 Damediex le gari, que mort nel feri mie;
Li mules desous lui chaî d'encombrier,
Landris resaut en pies, trait l'espée forbie.
De la honte qu'il a la face li pailie,
Davant lui voit la mule, si [li] commence a dire :
3775 « Ha[ï] ! mule d'Espaigne, Damedieu[s] te maudie !
« Diex confunde la tere ou vous fust[es] norie ;
« Molt fait li bons que fox qui en asne se fie ! »
Il a traite l'espée, si li cope l'eschine.
3752 g. pechiés d. — SySô Filz. — 3758 e. félons — Syôi Faut-
il admettre un vers perdu annonçant la réponse de Hardré ? —
3764 vert, sic ms., altéré? — 3767 li atandi sa g. h. frazine —
3770 m. ne le f. — 3771 altéré; corr. La mule d. 1. chiét d'e.
[sovjne](?) — 3775 H. mules. — 3777 M. faite; a. ce ^ent.
t
>,,;
140 DOON DE LA ROCHE
CVII
Quant Landris ot parler les frères Guenelon,
3780 Qui sont nevou Tomile et enfant a Griffon
Et du félon lignage qui fist la traïson,
Li sanc qu'il ot ou ventre [si] li fremi[s]t et bout.
Helye[s] li escrie, qui d'autre part li sourt ;
Li enfes se trestorne, qui ot cuer de baron,
3785 Selonc le cors le conte fiert Pespié ou sablon :
S'il atainsisi Landri, ja ne veïst Doon
Ne dame Salmadrine ne l'eiist a baron.
Et li bers feri lui dou bon branc de quelor,
Si li trancha le bras, le foie et le poumon,
3790 Tant corn [rjespée dure abat mort le félon,
Et saisist le cheval, que n'i quist achoison,
Mist sa main a la sele, si salli en l'arçon,
Il ne le rendist mie por .c. mars de mangon[s] ;
Il apelle Hardré, sel clame compagnon :
3795 « Or vous puis je bien bien dire que je suis fîlz Doon,
« Vers cui vostre lignage fist la grant traïson ; (/.
€ Mais je ne vous dout mie la monte d'un boton ».
CVIII
Or est Landris li enfes remontez al destrier.
Que il tolit Helie, le fil Griffon le viel,
38oo Et Hardrés li relance pour son frère vengier;
3779 ot, ms. oi. — 3780 et niés a G. — 3781 Et des f. — 3782
t. et boute. — 3783 escrient q. — 3784 ce trestornent. — 3785
espié, ms. espies — 3786 veùst D. — 3788 quelor, sic ms. —
3789 poumon, ms. pormonl. — 3792 Met la m. a la sale; si, ms.
ci. — 3793 mars, ms. marc. — 3794 sel, ms. ce le. — 3797 doute
m. la moule ou monle d'u. b. — 3798 r. a cheval — 3799 G. le
mal.
DOON DE LA ROCHE I4I
La merci Damedieu, ne le pot pas tochier;
Et li ber ferit lui, ne le vot espargnier,
Amont, desur la face, parmi le henepier,
Qu'il 11 tranche l'oreille et des denz la moitié,
38o5 Le cheval desouz lui a fait agenoillier.
Li traït[t]re trabuche, delez son frère chiet,
Au fil Doon escrie et merci et pitié.
« Pour Dieu, merci », fait il, « frans bons, ne m'ociez,
« Mon cors pouez vous vendre .j. mui d'argent [entier].
38 10 — Diva! » a dit Landris,« ja [n']en avrai denier. »
Son cheval lui remoine, sus le fait ancroier,
Par de dessous le ventre li lie les .ij. piéz,
Son oisel rapela, qui sus .j. a[r]bre siet,
En l'ost le duc son père s'est tantost repairie[z].
38 1 5 Li dus Do vat encontre, molt s'en est merveillie[z],
Car il l'a quis en l'ost, en la coue et ou chief.
« Beaus filz ! » ce dist li dus « qui est ci[l] prisonie[r]s ?
— A la moie foi, sire, Hardris ci[st] losengiers,
« Filz Griffon d'Autefeulle, le chenu et le viel ;
3820 « Mort li a[i] .j. sien frère, si l'ai touisoul laissié;
« Cestu[i] voz amena[ij, qui a vo part affiert. »
— Certes », ce dist li dus, [a] mervoille l'ai chier, (v
Car il est du linage qui vos volt essilier. »
Tant cheva[u]che li dus qa[e] a Maiance vient ;
3825 Es prés davant la ville s'est tendus et logiés,
Puis[si] a fait les forches sus .j. haut pui drecier,
Hardré i ont pendu garçon et escuier,
Que si parent le voient des murs et des clochiers.
Dont Dissiez Tomile plorer et larmoier,
383o Molt forment se démente et Malingres ses niés :
« Haï! tant mar i fustes, nobiles chevaliers ! »
38o2 li bers. — 38o3 A. desour; p. le henapies. — 38o4 Qui ii.
— 38io Dija. — 38i3 q. desus. — 3820 t. s. iaissiés. — 382i voz
pert a. — 3823 cest i. — 3826 pui, ms. pin. — 3828 Qui ces
parans. — 383o ce d. ; ces n.
14^' bOON DE LA ROCHE
CIX
Or sont li ost au duc sous Maiance en la prée,
Tendent très et aucubes, pavillons et ramée[s],
Et cil qui dedans sont ont les portes fermées
3835 Et cil de ro[s]t au duc ont perieres levée[s],
Engins et ma[n]goniaus et grans cloies ramées,
Getent trons et mairie[n]s et grans pierres carées.
Mais la cité est forte, Sarrazin la fondèrent;
Les portes d'olifant, que nulz bons ne vit teles,
3840 W nés empire[nt] mie vaillant .j. denrée.
Landris jura le siège de ci a .vij. année[s],
Et Guinemans ses mai[s]tre et li dus Do ses père
Et Asses de Maiance et puis Jofroi[z] ses père
Et après li baron qui tiennent les contrée[s].
3845 Malingres fist ouvrir .j. postis a celée,
Le mielz de sa maisnie en conduit fors armée,
Par itel convenant qu'onques puis n'i entrèrent,
Car Landris lor cheva[u]che parmi .j. valée
A .iiij™. Turcoples, qui ains mort ne dotèrent;
385o Entr'ex et le po[s]tis fu le voie copée.
A lor espiés tranchans lor paient lor soldée ;
Le )or fu dame Olive [chierement] comparée.
Malingres cheva[u]cha, la reigne abandonée,
A ris[s]ir de la barre [il] encontra son père ;
3855 Li dus avoit josté, sa lance avoit froée.
3832 s. les oz. — 3840 denrée, ms. danrées. — 3842 ces perre.
— 3843 Assons de M.; ces p. — 3846 Li m. de sa mainnie. —
3847 i. conveniant; ne e. — 383 1 lors e. — 3854 la barre, ms. la
batre (en deux mots); encontre s, p.
bOON DE LA ROCHE 14^
GX
Malingres vit son père, bien congnuit ses ados,
La riche congnois[anc]e, l'oriflanbe au dragon,
Et va ferir son père par sa grant traïson;
Et li dus ferit lui en guise de baron,
386o De Tescu de son col li fendi le blason,
Et lui et le cheval abati en .j. mont.
Li dus a trait l'espée, si repaire au baron,
Ja'n eiist pris la teste par dessus le menton.
Quant Malingres escrie : « Père, que faites vos ?
3865 « Hé ! ber, je sui vos filz de vo feme Audegour,
« Et niés le ber Tomile et le conte Griffon ;
« Onques de tel lignage ne fu néz certes bons ».
— Non voir », ce dist li dus, « pour faire traïson.
« Damedieî me confonde se jà avez pardon,
3870 « Qiie ne vos pende as forches de costé le gloton. »
Par le nasel du heaume le rendi a Oton,
Amauri de Coloigne et son frère Symort ;
Et cil le gardent bien a .xv. compagnons.
GXI
Or sont li ost au duc es prés desous Maiance, (v°)
3875 Li vies est ou palais, cui Diex dont meses[t]ance !
De son nevo li poise, qu'il ot jugier a pendre :
« Haï! beaus niés Malingre, mar fut vostre Jovente.
« Que fera vostre mère, Audegour la dolente,
a Et Hardrés d'Autefeulle et Helies li enfes?
3856 c. ces ades. — 3857 Toliflanble le d. — 3858 grande t. —
3859 au g- — 3865 Hé bers; yos fe. — 3866 le bers T. et li c. G.
— 3869 se, ms. ce. — 3872 Amarri. — 3874 s. les oz. — 3875 on
p. — 3876 oie j. — 3878 Qui. — 3879 Ce vers paraît singulier.,
Hardré et Hélie étant morts tous les deux.
144 DOON DE LA ROCHE
388o « Li miex de mon lignage est toniez a tormente.
« Ains mais ne fut .j. dus qui tels hons osa[s]t pendre.
« Je ne croirai en Dieu se de lui ne me venge ».
La oïssiez plorer les honies et les famés ;
De ce sont il dolent qu'a Doon ne se rendent,
3885 Car de nul home en tere autre secours n'aiendent.
Mais et mais.)', et autre chascune nuit s'en erablent,
As murs et as fessés et as terriers se prennent,
Por rami[s]tié de Dieu lor fait li dus consente.
CXII
Or sont li ost Doon soz Maiance la cit ;
3890 Toute la gent menue la[i]ssa li dus issir,
Les famés, [les veillars] et les enfans petiz,
Pour l'amistié de Dieu qui de m'arme ait merci.
Molt s'en vont [a] emblée, quant revesque[s] i vint,
Devers Saine la ville vint [i]l a oès Landri;
3895 Li sièges a duré .iij. ans et .j. demi
Que n'i creû leans ne char, ne pain[s] ne vins[s] ;
Tomile est ou palais, cui Diex puet maleïr ,
Sa gent son: départi, luit sont mort et ocis,
De toute sa mesnie ne remaint il que vint,
3900 Et cil demandent l'eve, au mangier sont assis, (/. 7.
A ce mangier n[i] orent trestuit ma[i]s qu' .j. poucin,
Sel mangierent sans sel et sans pain et sans vin.
Qui les oïst plorer et
Et dist li .j. a l'autre : « Venuz est Antecrist;
388i q. tel h. — 3882 se, ms. ce. — 3883 Entre ce vers et le
précédent, faut-il supposer quelques vers perdus, où était repré-
sentée la détresse de la ville assiégée? — 3886 mais, ms. mois.
— 3887 terriers, ms. terrieres. — 3888 de Dieu, ms. le duc, cf.
V. 38g2; 1. faite. — 3889 '^^ oz D; M. la cité. — 3892 m'arme,
sic ms., corr. s'arme (?) — ^894 v. laues L. — 3896 Qui — 3902 Se
le m. — 3903 Q. 1. o. p. et vongier et vomir. Cette fin du vers
doit être altérée. — 3904 Et dient.
DOON DE LA ROCHE 1^.5
3go5 « Car alons a Doon, si li crion merci,
« Por l'amor Dieu de gloire, lui et son fil Landri ».
Et dist li fel Tomiles : « Ja Vi'i meteron fin ;
« Dame diex me confonde s'anquenuit ne m'en is,
< Quant l'oz ert endormie et la gent en seri...
3910 « Qu'en bois ne en forest [errant] ne soie pris.
« Tant m'en irai par nuit qu'avrai passé le Rin;
« El reigne de Saissoigne voldrai Deu relenquir,
« Puis esteront paien mi per et mi ami,
« Par ex ferai encor ceste terre frémir. »
3915 Et cil le otri[er]ent, qui muer[en]t a envis ;
Mais il ne sevent mie com se porquiert Landris :
Aine chevaliers en tere tel ahan ne sofrit,
Car il ne siet a table ne ne dort en son lit,
Ains fait gaitier les aives, les pors et le[s] païs,
3920 Deci qu'a .iiij. lieues a ses espies mis.
Que ci[l] dedens n'en issent ne soient escharni.
Molt i orent quant revesque[s] i vint,
De tante bone enseigne i peiist on veîr;
La vitaille qu'il meine ne puet nulz mètre en pris;
3g25 A .). engigneor, Gillibert filz Henri,
Plus savoit il d'engin que nulz clers de latin.
Cil fait .XXX. perieres charpenter et fornir (v«)
Et grans cloies barées et soliers lanceïs ;
Par force les conduit jusqucs a[u] mai[s]tre. . .
3930 Quant la polie torne, dont font les pdns cheïr ;
Ennuie' sont de ros[t], n'i vuelent plus seïr :
.iiij°>. perées font cheoir en .j. bruit,
3905 si, ms. ci. — 3908 s'a. ne mains. — 3909 l'oz, ms. l'os.
Après ce vers il y a probablement une lacune d'un vers. — 3912 E
breigne des aix ne v. Doz r. — 3913 estèrent; ami, ms. amis.
— 3914 P. ce. — 3916 se, ms. ce. — 3917 Ains; ne s. telle
anhan. — 3920 ses, ms. ces. — 3922 M. i. o. ablaue. Corr. a
faire (?) — 3924 meine, ms. moingne; mètre, ms. mestre. — 3929
j. a m. roi. Ce dernier mot est altéré. — 393o cheïr, ms. choir.
— 3932 perées, ms. perieres; bruit, sic ms.
146 DOON DE LA ROCHE
Gietent trons et mariens [et] grans perons marsis,
Les portes d'olifant firent rompre par mi,
3935 Et plus de .vij»». toises firent des murs cheïr.
A l'entrer de la ville fut grans li envaïs,
De tous les primerains fut Jofroi[z] et Landris
Et li prous Guinemans et Asses ses cosins
Et Gautier[s] de Sorbrie et li prous Amauris,
3940 Tomiles torne en fu[i]e, s'a son ostel g[u]erpi,
Landris le suit de près, qui a[u] nasel [le] tint.
« Damoisel debonaire », ce di[s]t li fel, «merci!
« Faites moi .j. evesque ou prevoire venir,
« Si prendra[i] ma confesse por mes pechiés gehir. »
3945 Et dist Landris li enfes: « Bien en av[r]ez loisir.»
Au mai[s]tre tref demoine le rent son père pris ;
Lors trai[s]t li dus l'espée, car i[l] le vot ferir,
Quant Landris li escrie : « Malvais bons, c'as tu dit !
« Pour .m. mars ne voldroie, certes, qu'il fu[s]t ocis,
3950 « Ains le rendrai ma mère, car je li a[i] promis. »
Celle nuit jut [li dus] ou palais signori[l],
De la riche vitaille le fist li dus garnir
Et li cortois evesqucs, qui de vers Saine vint; (/. y5)
A Assonla rendirent, qui la soulo[i]t tenir,
3955 Li gentis damoisels, li chevaliers gentis ;
Li bers l'avoit g[u]erpie pour son seignor servir
Et pour Landri de mort eschiver et garir.
CXIII
Celle ndit jut li dus ou palais fort et grant,
Les mors en fait fors mètre a roncins tramant ;
SgSS ses, ms. ces. — SgSg li p. et Mauris. — 3940 s. estai g.
— 3942 ce, ms. a. — 3946 m. trai d. — 3949 P. m. m. certes ne
V. — 3952 li dus, SIC ms., corr. Landris (?) — 3953 q. daversaine
V.; c/. V. 2925, 2968, 3894. — 3935 ch. gentis, corr. ch. hardiz (?)
— 3959 r. traîner.
DOON DE LA ROCHE V^j
3960 Aubris li bons evesques [i] mi[s]t yitailles tant
Que Landris [l'en] mercie et li prous Guinemans.
AI matin font destendre les très et les brehans
Et les aigles jus mètre et les pommeaus lu[i]sans.
Or cheva[u]che li dus par puis et par pendans,
3965 Molt sont fieres les oz et les compaignes grans;
Tomile en menèrent [lié] a un chalant.
Ou chastel de La Roche es vos .i. mes poinnant
Et trouve la duchesse enz en la tour séant.
« A la moie foi, dame, ja verrez vostre enfant
3970 « Et le duc debonaire, que vos amastes tant. »
Quant l'entendi la dame, dont fu la joie grant,
Tous les degrés de maubre en descendis! errant;
Davant l'uis de la sale encontra son enfant,
Mais el nel congnust mie au vis n[e] au samblant,
I 3975 La face avoittroblee du fer et de l'ahan.
Ambedui s'entrebaisent [tenrement] em plorant;
Pour la joie d'els .iij. em plorent ne sai quant.
Ne vos mervoilliez mie s' elle aime son enfant :
Tomile lui amaine et Malingre davant. (v<>)
3980 Quant le voit la duchesse, tout li trenbla li sens,
Et a dit a ses homes : «Ostez ce mescreant,
« Si le m'avalez tost en ma chartre plus grant ; »
Et il l'i trabucherent le visage davant.
Et Audegour sa fille a trovée séant,
3985 Coleuvres, boterel li ma[n]joent les flans;
Et Malingre gardèrent a .xiiij. serjans.
Il demandèrent [l'eve] sus ou palais a tant ;
Li dus et la duchesse s'asirent en .j. banc ;
Le jour servi Landris du [vin] et du piment
3962 brehans, ms. brebans. — 3964 puis, wt5. pins. — SgôS M.
font fiers ; compaignes, ms. compaignies. — 3966 T. enmenercnt
{en un mot). — 3969 maie f. — 3972 descendist, ms. descendent.
— 3974 e. ne le c. — BgyS ahan, ms. anhan. — 3978 c'e. a. —
3980 le s. — 3981 ces h. — 3982 p. grans. — 3983 C. et boteres.
— 3989 pumant.
148 DOON DE LA ROCHE
3990 A une cope d'or, a covercle d'argent ;
Dont manja la duchesse, mais petit [ele] en prent,
Landris ne pot mangier, tant ot fier mautalent,
Si eiist mort Tomile et fait son jugement.
Les napes firent traire chevalier et serjant.
CXIV
3995 Landris et la duchesse avalèrent le pont.
Ambedui s'entretienent as mains et a ba[s]tOn,
Doucement s'entrebaisent le vis et le menton... '
Son sene[s]chal apelle : « Amainne mon prison. »
Et il [le] amenèrent sous le pin a[l] perron,
4000 La hart lïée au col come .j. autre laron ;
Quant le voit la duchesse, si l'a mis a raison :
« Si m'aïst Diex, [Tomiles], vous semblez bien félon :
'" « Vous me mellastes primes al riche [duc] Doon,
« Et davant l'emperere qui Pépin a a non
4005 « Moi chaçastes du reigne pour vo fil[l]e Audegour.
« Assez sait Damediex se je ai droit ou non ; " (/. 76")
'•"• « Selon vostre servise atendez guerredon.
— Dame, » ce di[s]t Landris, « baissiez vostre raison,
« Si parlera[i] Tomile et pour moi et pour vos.
4010 — Vassaus », ce dist li enfes, « di ta confession;
« Or aproche li termes qu'or endroit te pendron.
— Sire », ce dist Tomiles, « pourquoi le celeron?
« Quant je voi mon juïse, je n'i avra[i] pardon.
« Selonc [la] dame Olive coucha[i] je .j. garçon,
401 5 « De ioier lui dona[i] mon hermin peliçon,
« Dont il perdit la teste et la dame s'anor.
3990 a cole d'à. — 3993 SU e. — 3996 au m. — 3997 menton,
ms. maton. Après ce vers, lacune : il doit manquer un vers où
il était question d'Olive. — 4001 mis, ms. mise. — 4002 aist, ms.
eïst. — 4oo3 Me melietes p. — 4oo5 M. chacestc. — 3406 A. cest
Dieu se je ais ou d. ou n. — 4007 a. guerendon.
DOON DE LA ROCHE l'4^'
« La mort Landri jura[i] a .xv. compaignons,
« De ces de mon lignage, detoz les plus félons;
« Tost le mis hors de Francepar ma grant traîson.
4020 « Or renoi Damedieu, le baptême et les fons,
« A lui ne a sa mère n'atent nul guerredon.
— Baron, » ce dist Landris, « cist moz doit estre a som ;
« Ce est molt grans pechié[s] quant nous ci l'escouton. »
A la coue d'une ieve li lient le chaon,
4025 Par rues le traîne[nt] [et] aval et amont ;
Li pautas est espès et li borbois parfons,
Del maltagre li gietent corrées et pormont
Et pierres [et] çavates et chaillois et bastons,
Et li .). li compisse le vis et le me[n]ton.
4o3o « Baron», dist la duchesse, « as forches en iron. »
La duchesse meisme monta sus l'eschaillon, (v®)
Ou col li mi[s]t le ce[r]cle et puis le chaienon,
De sa honte lui membre et de sa mesprison.
Par [de]desour la goule li feri le cranpon ;
4035 Quant la polie tome, li fel va contremont.
Puis firent .j. feu faire de mairiens et de trons;
La portèrent le cors, si l'ardent en charbons.
[Et] la dehors la chartre amoinent Audegour,
Tote la despoill[er]ent, voiant les iex Doon, '^**^
4040 Puis la portent au feu, lez son père félon.
GXV
Tomiles fu pendus et sa fille estorchie
Et la chars en fut ars[e] et tote graîllie
4019 Toz les m. — 4020 Or ie noi {ou uoi) D. — 4021 n'atans
n. gardons. — 4022 cest moit d. e. asson. — 4024 chaon, ms.
haon. — 4026 bcrbrois p. — 403 1 s. les chaillons. — 4032 m. le
c. et p. li mist le ch. — 4037 si Tardèrent. — 4o38 amenront A. —
4o3g les ieulx Dos. — 4041 estorchie, sic ms. — 4042 et t.
grailloie.
i5o
DOON DE LA ROCHE
Et la poudre ventée [en] aval la bruire ;
Sachiés ceste justice fut merveillouse et fiere.
4045 Malingre en menèrent estroit les mains liées,
Si li tranchent les pies et les jarès derier[e]s;
Pour la pitié de lui em plore sa mesnie
Et ses père meïsmes i soffrit grant haschiere,
Quant voit son fil sanglant detranchier [et ocire] ;
4o5o Des larme[s] de son cuer a la face moillie,
.X. abé, .X. evesque au[s] pies Doon chaïrent,
Et Olive de France i fut assez proie :
« Pour Dié, merci, beaus sire, assez a grant haschie;
« Par lui n'iert jamais arme portée ne baillie ».
4055 Li moinne l'en proi[e]rent du cloistre [de] Saint Piere;
Quant il [r]orent gari, les blans dras li bailli[e]rent,
Mains aine n'ama les dras, car toz tems fut [traître];
Onque[s] bien ne vot faire, mais fu mais aiiseres.
Et li dus s'en revat droit a Coloigne arriéres, [f. jy)
4060 Si li vieent les portes [icil] qui les détiennent,
Et li dus les assi[s]t et davant et darieres.
Le jour jura li dus et sa compaigne fiere,
Se il prent la cité, la gent ert essillie.. .
Le feu griois [forment] as rues descoch[i]erent,
4065 Deci au mai[s]tre bore sont arces, peçoïes.
Li borjois citeen forment s'en esmai[e]rent, ,
Car [a] Pépin de France ont la vile ottroïe, ^
Ghascun an l'en envoient .xxx. mules chargies
De bon[s] dras d'Aumarie et [d']escu[s] d'Angarie ;
4043 bruire, ms. bruine. — 4044 f. molt m. — 4046 les jarois
d. — 4047 em plorent sa magnie. — 4048 ses, ms. ces; i, ms.
il; g. haichier. — 4049 fil, ms. filz; s. et detranchier [altéré) —
405 1 Doon, ms. Lam. — 4o53 g. haichie. — 4024 j. armes por-
tées ne baillies. — 4057 aine, ms. ains; f. ordes — 4068 m. de
mal a. — 4060 li vaient; q. 1. entiennent. — 4063 e. assilie. //
est probable qu'il manque un vers entre celui-ci et le suivant.
— 4065 arces, ms. s. a. et p. — 4066 b, çiteins, — 4067 v,
pttroier. — 4068 e, d'Angle.
DOON DE LA ROCHE
iSt
4070 Et dient H .j- l'autre : « Nos terres sont jugie[s],
« Se Do nos prent a force et nos vies trenchies.
« Car li rendon les clés de ceste [tour] plainiere,
« Du bore et du marchié et du mostier saint Piere ;
« Se Pepin[sj se coroce, dehaiz ait cui en ... »
4075 A lor riche archevesque ont lor raison chargie.
Plus de .c. ordené au tref demeine vienent,
Bene[ï]çon [et pais] par Dieu li ottroi[er]ent :
« Sire Do de la Roche, or est bon que tu viegnes;
« Li bourjois citaen de merci vos requièrent,
4080 « Si vos rendront les clés de ceste tour plainier[e],
« Toute vous ert la ville et laissie et guerpie,
« Mais que vostre ire soit pardonnée et remise. »
Quant l'entent la duchesse, forment en devint lie,
Dolent[e] est de la tere quant la voit essilie.
4085 Maint et communément [ens] en la ville entrèrent ; (v°)
Le jor i ot de cloches mainte corde tirée
Et si fut dame Olive confermée et baigniée;
Li dus la respousa droit au moustier saint P[i]ere.
Ens ou palais [i] furent ces noces commencies,
4090 Bones et merveilloses, aine hons ne vit si riches,
.x". chevalier i sirent et mangi[e]rent;
Aine n'i ot jugleor n'i [ot] robe novelle.
I
4070 Et d. 1. .j. a l'a. — 4071 f. nous detranchies. — 4072 clés,
ms. clers; cf. v. 4080; c. planniere. — 4074 d. a. a c. en chaille
{altéré). — 4075 1. r. charg'. — 4076 au t. demers amennent. —
4077 B. de p. D. — 4078 que tu voignes. — 4080 clés, ms. clers.
— 4082 V. i. lor s. p. et laissie, altéré; on a déjà eu laissie dans
le V. précédent. — 4084 Dolant; v. assilie. — 4085 entrèrent, sic
ms., altéré. — 4086 de c. maintes cordes tirées. Le dernier mot
doit être altéré. — 4088 moustier, ms. n^onstier. — 4090 Sei-
gneurs et m. c'onques ne vi si r. — 4091 chevaliers issircnt et
m, — 4092 Ains n'i ot juglour ne r. n.
Ij5.a DOON DE LA ROCHE
CXVI
A l'entrée de mai, a une feste clere,
Do li dus de La Roche a sa moillier respousée ,
4095 Et fait bones ses noces, aine nulz bons ne vit teles.
Viennent [i] li baron de lointainnes contrées;
Et Aubris li avesque[s] a la dame menée,
Aidie et maintenue et forment honorée.
De douce France i vint Pepin[s] l[i] empereres,
4[ooMolt fu beaus li barnage[s] que François amenèrent.
Li roi[s] ala orer a[u] grant mostier saint P[i]ere,
Puis est venus as noces ou la joie est menée;
Dame Olive se drece, si va baisier son frère,
Em plorant se bais[ier]ent la dame et l'empereres.
4105 Contre le roi Pépin est maint[e] gent levée;
De son nevou Landri novelle a demandée :
« Dame, quex est voz fils a la ch[i]ere membrée,
« Par cui tu as ta terre et t'enor recouvrée ? '
— Veez le la, beaus sire, » ce respondi sa mère,
41 10 « Cil valès qui la tient celle verge pelée.
— Beaus niés, » ce dist Pepin[s,] « bien vos porta voz mère,
« Quant vos l'avez vengie de la gent desfaée; (/. -jS)
« Hui vous sera Bretaigne ottroïe et donée,
« Anjou et Normandie jusqu'à la mer salée,
41 1 5 « Et la senechauciée de France oan donée ;
« De fié vos serviront .xx"^. home a espée.
— Sire, » ce dist Landri, « ci a gente soudée
« Et cortoise promesse et ch[i]er don d'emperere,
« Ja Damedieu ne place que puis que cein espée
4094 Et li d. ; m. reprise. — 4095 ces n. ains n. h. — 4098
Aidie, sic ms. Altéré? — 4103 se, ms. ce. — 4104 em plorent;
et li e. — 4107 est, ms. a. — 41 10 v. palée. —41 12 g. defee. —
41 14 mères.— 41 15 F. ahan d. — 41 18 d. d'ampereres —
41 19 p. cuide e.
DOON DE LA ROCHE I 53
4120 « Que je tiengne de vous une sole denrée.
« Par le présent Tomile faillistes vos ma mère,
« Moi fut bien vostre porte [et] vostre aide veé[e] ».
Quant l'entendi Pepin[s], s'a la coulor muée.
« Garçon[s] », ce dist Pépins, «laisse ester ta posnée;
4125 « Encor n'eusse[s] tu onques [d']avoir denrée;
« Mais je conquis Sasoingne au tranchant de m'espée
« Et ocis Carsadoine et Justamont son frère,
« Dont chascun an me vient li avoirs a charée,
« Dont France est maintenue et ma court honorée
4i3o « Et la loi crestïene essaucie et montée.
— Sire », ce disi Landris, « trop par estes vanteres ;
« Plus avrai je de vous, se longues ai durée ».
CXVII
Entre ii niés et l'oncles suni au palais par ire ;
Landris l'en apella qui molt le contralie :
4i35« Certes, orguillous roi[s], ce fut molt grant folie
« Et tort et péchiez grans quant vo seror faillistes
« Et vo nevou petit por l'avoir le traît[r]e;
« Encor avrez .j. jour gent soffret[e] d'aîe;
« Se je vouloie France, el me seroit g[u]erpie, {v')
4140 « Ja vous ne voz moillier n'i avroiz seignorie.
« En non Dieu, petis roi[s], je n'en prendroie mie,
« Ains servirai le roi cui j'ai ma foi plevie,
« Si me donra s'enor, se Dieu plest, et sa tille,
« Et je penrai par force tous les po[r]z de Hongrie,
4145 « Certe[s], n'a millour tere tant com li monz tornie;
41 21 faillit V. ma m. Cf. plus haut v. 617 et suiv. et plus bas v.
41 36. — 4124 ta ponnée. — 4126 c. Salsoigne. — 4127 Et occis
Lazadoine et Justemont s. f. — 41 3 1 trope p. — 4182 v. ce longe.
— 4133 Entres. — 41 36 q. vos serors falittes. — 4137 voz n. p.
que l'a. en t. — 4139 elle me. — 4140 avroit s. — 4141 E n. de
D.; je — mie, sic ms., corr. ja n'en prendrai je mie (?). — 4142
cui, ms. que. — 4143 m. teres. •"." ^ "" ■"
1^4 DOON DE LA ROCHE.
« Au tel roi mescreant trairai du cors la vie ;
« Mi enfant avront France par droit[e] ansesserie ;
« En non Dieu, mauvais roi[s], ne la vous iairai mie ».
Quant l'entent l'empereres, a po n'enraige d'ire,
41 5o Volentier[s] le feri[s]t de sa paume sovine,
Quant Asse et Guinemans et si home s'escrïent :
« Sire Pepin[s] de France, laiss[i]ez vostre folie,
« N'a si bon roi en France n'i perdi[s]t ja la vie ».
Et dïent li marchis : « Râlons nous en, bea[us] sire,
4155 « Ce fut torz et pechiés quant vo nevou failli[s]tes.
— Hé! Dex, » ce dist Pepin[s], « com mal[e] départie ! »
A tant ont demandé les mules de Sulie;
Or s'en revont en France, s'ont lor voie acoillie;
Or n'a talent Pepin[s] que joue ne que rie.
cxyiii
4160 Or s'en revient en France Pepin[s] en sa contrée;
Li dus et sis bernaige[sj a Goloigne remestrent;
L'enfes Landris en a sa compagne sevrée.
Ces de Constantinoble, la gent a l'emperere;
Venus est a La Roche, nuls ne set sa pensée,
4163 Lïement le recevent la gent de sa contrée,
Encor n'avoit li bers sa venjence finé[e]. {f. jg)
Au matin par som l'aube furent sa gent armée
Et vont a HautefeuUe a grant esperonnée;
Davant la mai[s]tre porte ont la proie praée,
4170 Leans s'adoba Griffe a la barbe me[s]lée,
A .iiij'^''. serjans s'en ist lanse levée;
La maisnie Landri ont la sue encontrée,
Ainsois la vont ferir que l'aient detîïée.
4i5i Q. Asses; sui h. — 4i53 ne p. — 4i55 q. vous nous f.
Cf. V. 4136-4137. — 4159 P. qui juoit ne qui r. — 4161 ces b.
— 4164 sceit sa p. — 4167 p. soubz l'a. — 4171 i. la 1. — 4172
La maignie.
DOON DE LA ROCHE l55
La ot tante hante frainte, tant[e] targefroée,
4175 De sanc et de cervelle ont la terre puplée.
Landris si[ejt ou cheval qu'ot la crope levée,
Que H dona s'amie le jour qu'il cint espée;
Fiert Griffon d'AutefeuUe sus la targe li[s]tée,
Desour la bocle d'or H a frainte et cassée
4180 Et du haubert trellis .iij'^. mailles copées,
Qu'il li trancha le pis, le foie et l'eschinée;
Tant corn hante li dure, l'abat mort en la prée.
Sur la gent d'Autefuelle est la perde tornée,
La gent furent atainte, conseiie et passée,
4185 Maint et communément [ens] en le vile entrèrent,
De l'or et de l'argent a planté i trouvèrent,
Froit vin et bon froment et bone char salée.
Landris en a .ix. barges chargies et comblées ;
En la cit de Coloigne les envoie a son père;
4190 .G. chevaliers i laisse qui la ville gardèrent;
Va s'en li filz au duc en la soie contrée.
CXIX
Ou chastel de La Roche est repairiez Landris;
Il a conquis satere et mors ses ennemis; (v°)
Or se cuide li enfes reposer et dormir,
4195 En bois et en rivier[e] sa joie maintenir,
Et son père et sa mère honorer et servir ;
Mais sa grant poine sort et commence a venir.
Li bons rois Alixandre s'est levez par matin,
Droit a Saint[e] Sofie va por la messe oir,
4200 Avec lui a dis contes et dis autres marchis,
Des barons de sa tere qui le vienent servir.
4175 puplée, sic ms., corr. porprée (?) — 4176 sic ms., corr. qui
ot le crope lée (?) — 4178 Fièrent. — 4189 cité de C. — 4190 ch.
il laissent. — 4194 se, ms. ce. — 4198 s'est, ms. cçst, — 4aoo
«t dex %, n),
1,56 DOON DE LA ROCHE
Il issent du mostier a ore de midi,
As fenestres de maubre se va li roi[s] seïr,
Par dever[s] Orient voit .j. signe venir,
4205 Pardesous la fenestre en .j. vivier s'asi[sjt
Et fist tous les oiseax remuer et frémir.
Por la beauté du signe li membre de Landri,
Pitié le prist au cuer, si geta .j. sospir,
Et dist entre ses denz que nulz hom ne l'oï :
4210 « En non Dieu, belle fille, au meillor ai failli
« Qui aine manja[st] de pain ne ne beu[s]t de vin ;
« Hélas ! de son servise li a[i] molt mal meri ! »
Atant es Salmadrine, la fille au roi, qui vint,
.III. chevalier l'amoinent a .j. mantel d'ermin;
4215 Ja de plus bêle famé n'or[r]a nulz bons latin;
As pies l'empereor souz la fenestre sist.
« Fille », dist l'empereres, « que demandes, que dis?
« Tout l'avoir de cest siècle pues en ton cuer choisir.
— Pères », dist la pucelle « dont me rendez Landri, (/. So)
4220 « Le demoisel de France qui roi Dorame prist
« Et m'afia par foi mariage a tenir
« Et aquita par force vo terre et vo païs.
: « Certes, se je ne l'ai, molt aproche ma fin,
« Ja ne vera[i] la Pasque ne l'entrée d'avril ».
4225 — Fille », dist l'empereres, « bien i poëz faillir :
« Je cuit bien qu'il ne soit ; morz ne puet revenir. »
. Respondit la pucele : « Dont [n']ait li roi[s] merci;
« Puis que roi[s] son dit passe, ne doit son fié tenir. »
— Non voir, » dist l'empereres, « se le puet acomplir. »
4230 Li rois en apela son messagier Malprin :
« Tu t'en iras en France, à Rains ou a Paris,
42o3 Au f.; ce vait le r. s. — 4205 fenestre, ms. f'te. — 4207 li
remembre de L. — 4209 ces d. — 4210 belle fille, sicms.; altérée
— 42 II aine, ms. ains. — 421 3 r. ou v. — 4214 m. eslerni. —
4216 Au p. Te. s. la forme s'asist. — 41 18 Tous. — 4222 vos
terres et vos p. — 4223 se ms. ce. — 4226 Je cuide b. qui ne s.
— 4227 ait, m5. out. — 4228 fiés t. — 4239 l'emperieres; se, m5. ci.
DOON DE LA ROCHE ibj
« Et cherche [en] Alemangne, [en] Bourgongne et Beri,
« Tous tens mais seras riche[s] se tu le fais venir.
« Le gentil chevalier salue de par mi,
4235 « De la foi lui remembre qu[e] il [ja] me plevi,
« Sur le branc de s'espée o les lettres d'or fin;
« Le convent qu'il i out suis je près de tenir.
« A iceste[s] enseigne[s] le faites revenir ;
a Et s'il ainsi nel fait, molt i avra mespris,
4240 « M'amistié et la soie estovra départir. »
Quant l'entent la pucele, s'en apelle Malprin
(Bien sot .xxx. langaiges, 11 roi[s] l'avoit norri) :
« Vous en irez en France, quant mis pères l'a dit,
« Et cerchiez tant la tere que vous truissiez Landri ;
4245 « De ma part li portez cest anelet petit,
« Ou fut li sairemenz et jurez et pleviz. » (v*)
Si dist celé donzeile : « Reveigne ou pais
« Dedans Constaniinoble l'empereor servir,
« Et, se ne fait ainsi, molt i avra mespris,
4250 « La fille [r]emperer[e] en conviendra morir. »
Il a pris l'anel d'or, en s'escharpe l'a mis.
Celé nuit sejorna, si monta au matin;
Deci qu'en Alemangne n^ prist il onques fin.
Molt fort li ennuerent les poines a soflFrir;
4255 Tote passa la terre, outre mer et Mongiu.
cxx
Baron, ce est en mai que chaude[s] sont les ore[s],
Chevaliers a s'amie volantier[s] se déporte,
4232 Entre ce vers et le suivant, il faut admettre un vers perdu :
Que tu truisses Landri, le chevalier de pris ou quelque chose
d'analogue, cf. v. 4244. — 4233 se tu me pues v. — 4236 o, ms.
ou. — 4239 s'il, ms. cil. — 4242 sot, ms. soit. — 4243 mes p. — 4247
Reveigne, ms. Revoinne. — 4249 se, ms. si. — 4262 monta, ms.
monte. — 4255 outremer en un mot. — 4257 ce d.
158 DOON DE LA ROCHE ,
Que ces puceles vont a geus et a quaroles ;
Dont fut Landris li enfes ou chastel de La Roche,
4260 Et si[s]t sur .). perron devant la mai[s]tre porte;
Atant es le messaige qui Tanel d'or aporte;
Il ne porta pas brief, ains a dit par parole :
« Jhesus li roi[s] du ciel, qui comma[n]ça Tistoire,
« Il sait et gart Landri et li croisse sa force!
4265 — Amis, » ce dist Landris, « Dieu vous croisse victoire !
« De quel tere es tu nez qui contes tels paroles?
— A la moie foi, sire, droit de Constantinoble,
« Ou la plus bêle famé por vostre amor s'afole,
« Qui onques fut en tere ne jamais soit desore.
4270 « Or vous mande mes sires et li grans apostole[s],
« Li couvent que vous orent vos atandent encor[e].
« Garde[z] que [ja] vers els soit sauve vo parole ; (/. 81)
« Qui sa fiance passe, a tous jour[s] s'en affole
« Et qui soufri grantment, li tala[n]s lesorporte. »
4275 Quant Tentendi Landris, de bien parler le loue.
CXXI
Quant entendi li enfes que li messages dit,
Ne li laissa plus dire, ains le fi[s]t aseïr;
A .)'. conseil le meine desoz l'ombre d'un pin :
« Commentavez a non ? — On m'apelle Malprin,
4280 « Bien me devez cognoistre, car main[t] jor vos servi.
— Li bons rois Alixandre comment se maintient-il?
— A la moie foi, sire, molt est proz et genti[z].
— Et sa fille la gente, la belle a[l] cler vis,
« Est elle morte ou vive, at elle seignor pris?
4258 Corr. Et ces p. (?) — 4260 sur, ms. sus. — 4266 De quelles
t. es tu n. q. Cons.antin p. — 4270 li grant a. — 4271 Les
convant. — 4272 v. eulx s. sauvée voz paroles. — 4276 messages.
ms. messager. — 4278 conseil, ms. conseille. — 4284 ait e.
bOÔN DE LA ROCHE I Bç
4285 — Sire », dist li message[s], « merveilles avez dit :
« Por la vostre amistié est toz jours en depri,
« Car el ne siet a table ne ne dort en son lit,
« Ains est a orison davant le cruciti[s],
« Et proie Damedieu le vosire cors garit.
4290 « Vez ci .). anel d'or que t'envoie par mi;
« Desour la niai[s]tre jame li juras et plevis
« A tote[s] ces enseignes repairier ou pais ;
« Se ainsi ne le faiie[s], de s'amor vous deffi,
« Ne jamais l'emperere n'ert as François amis, »
4295 Quant l'oit Landris de France, molt s'en est esmarriz.
CXXII
Quant li filz D[o] le duc entendi le message,
Il [li] a pris l'anel. qui bien fut congnissable, (v«)
Pitié ot de s'amie, si sospire et larme.
Atantes vous son mai[s]trecontremontenla sale...
4300 — « Ou est li preuz Landris a l'aduré corage? »
— « La aval el vergie[r] parole a .j. mesage. »
Quant li baron l'entendent, les degrés en avalent,
Truevent le fil au duc descoloré et pale;
Premerains l'en apelle dans Guinemans ses mai[s]tres:
43o5 « Damoiseaus, fils au duc, quex est vostre corage ? »
— « Mai[s]tre », ce dist Landris, « bien doi avoir la rage
« Quant li roi[s] Alexandre[s] me [desfie et me] bla[s]me :
« Un chevalier me mande cui me laissa en garde,
« De son trésor plus riche m'emplist il bien mes maies.
43 1 o « Conseilliez moi, beaus maistre[sj, que je ne sai que face. »
4287 el, ms. ele. — 4289 c. garit. — 4292 c. anseige repaire. —
4294 as François, ms. affrac'. — 4296 li m. — 4299 ^l f(iut
admettre qu'après ce vers, il y avait un vers perdu, disant que
Guinemant s'entretient avec les autres « barons », v. 4802. —
43oi a. en ce v. — 43o3 pale, ms. paile. - 4307 Q. li. r. A. me
blâme. Vers trop court. — 4308 Molt cher me m. quil me 1.
en g. — 43 10 que fere.
l6o DOON DE LA ROCHE
Et respont Guinemans : « Tu as mauvais corage!
« Conquis as tes onors et mort le fel lignage, .
« Qui te firent chetif en la tere sauvage ;
« Et voz père li dus est molt [de] grant eage,
43 1 5 « Bien mainta[n]ra la tere et ta mère la sage ;
« Et tu vas ou pais ou tu [as] pris tes armes,
« Tant te donra li roi[s], jamais ne seras povres,
« Puis prenez la pucelle par leal mariage,
— Mai[s]tres, » ce dit Landris, « gentil conseil me bailles,
4320 « Se ainsi ne le fais, ce ert molt grant folage. »
Ma[i]s .... celle enseingne, après revint .j. autre,
Qui dut torner en France a perde et a domage. (/. S2)
Les rues de la ville vint poi[g]nant .j. messages
Et fut navrez forment dessus la maistre espale,
4325 Sanglant en ot le pan de son bliau[t] de paile.
A haute vois escrie, oiant tout le barnage :
« Ou estes vous, Landris, filz au duc? Trop te targes!
« L'empereres de France est pris a .j. chace,
« O lui .c. chevaliers du miex de son barnage;
4330 « Chascun[s] tenoitun cor, n'i avoit plus des armes;
« Hé! bcrs, se nés secours, po pris ton vaselage ;
« Se il passe[nt] le Rin, ce ert molt grant domage,
« Ja por la ra[a]nçon mar i queront ostage. »
Quant l'enteridi li enfes, dont ne sait que il face ;
4335 Parmi son hardement acoilli son corage,
A haute vois escrie : « Car m'aportez mes armes. »
43 12 t. honeur; li f. 1. — 4.11 3 firent, ms. fier't. — 4317 le r.;
povres, sic ms. — 4321 Mas c. ensoingne a. r. .j. a. Altéré, on
peut proposer Ma[i]s partie l'enseingne, a. r. .j. a. Il faut admettre
qu'avant ce vers il y avait des vers perdus, disant que Landri
congédia le messager de l'empereur, après lui avoir promis de
partir pour Constantinople. — 4323 p. .j. messager. — 4326 a h.
V. a crie. — 433o p. d'armes. — 433 1 pris, ms. prise.
DOÔN DE LA ROCHE l6l
CXXIII
Baron, desous le pin la ou Landris s'adobe,
Entor lui s'aresterent li baron de Coloi[g]ne,
Et Asse de Maiance et lor maisnie tote
4340 Et Guinemans ses maistre[s] tint l'enseigne de porpre ;
Molt fugranzli barnage[s] quant li mai[s]tre[s] corfs] sone,
Parmi la mai[s]tre rue s'en issent a grant corre.
La dehors a la barre furent esmé lor home ;
4345 .iii}°». haubert, molt fu gente la rote.
^' Or cheva[ujche[nt] ensemble le bruel desus Coloigne.
Landris plore et démente et regrete son oncle :
« Haï î Pepin[s] de France, gens roi[s], belle persone, (v")
« Se paien vous enmoine[nt], com ira France a honte! »
4350 Et li Sesne chevauchent, que Damediex confonde,
L'empereor en meinent. Pépin de France dolce,
•iiij". chevaliers et sa maisnie toute.
Molt forment les destreint Brohimax de Sesoine :
« Par Mahomet, dans roi[s], molt est vo vie corte.
435.S « Mar veïstes la mort Carsadoine mon oncle,
« Demain serez jugiez en la cit de Tresmoigne,
« Cil de France en seront
(( Tu rendras »
Quant l'entent l'empereres, de duel et d'ire [plore],
4360 Des liens de ses poins a fait [rompre les cprdes],
Et vient a .j. paien, merveillous cop li donc, . |.
4339 maisnie, ms. magnie. — 4340 ces m.; l'assongne de p. —
4342 rue, ms. rues; corre, ms. corne. — 4344 fire esmes lor bornes.
— 4345 haubert, ms. herbers. — 4346 le b. desue longue. — 4347
demre et regrate s. o. — 435o Et li S. chevoichent. — 435i
en meinent, ms. amoine. — 4352 maisnie, ms. maignie. — 4354
Mahomet, ms. Mahon ; vo, ms. voz. — 4355 Jazacoigne [ou
Jaracoigne), cf. plus haut, v. 4127. —4357-4360 vers incomplets
dans le ms. — 4359 l'empereres, ms. l'empereur. — 4360 ses,»»,
ces.
l62 DOON DE LA ROCHE
Que dou mai[s]tre os del col li froissa la m[e]olle,
Très davant le seignour
Dolans en fut ou cuer
4365 II traient les esp^es, si corrent le [confondre]
Que ja Teûssent mort, néant fu[s]t del re[s]corre
Quant Landris lor sordit par miliu d'une combe.
A .XX™. chevaliers lor enseigne lor mostrent ;
* ' Landris si[s]t ou cheval a la levée crope,
* ^ *" 437oVaferir Brohemax en l'escu de Sasoinne,
Qui du haubert li tranche bien .iiijn». doble[s],
Le foie et le pormont et l'eschine li cope :
« Fils a putain, paiens, vos me rendrez mon oncle! {fol. 83)
« Guvers! mar le baillastes; vos le lairez a honte. »
i\!
.^n:
GXXIV
4375 Grant paor ont li Sesne quant il le ot ocis;
Il coururent en fuie, si o[n]t le champ guerpi
Et laissierent tout soûl l'emperere Pépin
Et les frans chevaliers qui France ont a baillir ;
Li .j. deslie l'autre des chevaliers gentis
4380 Et jurent Damedieu [et] le cors saint Denis
Mar fut si grans orguels porpansés ne bastis;
î Ja le comparent Saisne s'il i pu[e]ent venir.
Pepin[s] regarde avant, voit Brohemax gésir,
Par delez la mamelle ot trespercié le pis,
4385 L'heaume li deslaça, l'haubert li desvestit ;
L'emperer[e]s si vait sus .j. cheval saillir.
4363-4365 vers incomplets dans le ms. — 4365 [confondre]
suppléé par Benary. — 4366 eussient m.; d. recoure. — 4367 par
miliu, ms. parmi liu. — 4368 ch. tout 1. c. — 4369 a la loe c,
cf. V. 4176. — 4371 b. iiij double. — 4373 putain, ms. putains.
— 4374 mar, ms. mal. — 4375 li serf q. — 4377 Et lassarent
tous s. — 4379 deslie, ms. desue. — 4381 M. f. li grant orgue! .
— 4382 Saisne, ms. Sainne. — 4383 v. Brenehaut g.
/
DOON DE LA ROCHE l63
Pent Tescu a son col, le roit espié saisi[s]t,
En la rote se met o son nevou Landri.
Qui lors veîst païens trabuch[i]er et morir
4390 Et ces barons de France les guarnemens vestir
Et ces chevax isniax sur les seles saillir,
De molt grant vasselage li peûst sovenir.
En la rote se metent as compaignons Landri;
Aine paien n'encontrerent plus orguiloi voisins,
4395 Et escrîent « Monjoie ! mar passa[s]tes le Rin ! »
Il n'en estort .j. seul[s], s'il ne s'en puet foïr, ♦ r
En crote ou en citerne ou en bove garir.
Qui le jour vout eschae, bien en ot a loisir :
Ce que li .j. puet prendre ne menassent li .x. (v*j
4400 Des mors ne des navrés ne sa[i] conte tenir,
Mais durement reclament Mahon et Apolin.
Autour de la bataille es vos poi[g]nant Landri,
Et ot frainte sa hante, trait ot le branc forbi,
L'espée fut vermoille, tant ot paiens ocis.
4405 Ou que il voit son oncle, par la main le saisi,
Puis li dist fièrement : « Dans rois, vous estes pris,
En la cit de Coloigne en vanrez avec mi.
Après vos m'escherra li tresor[s] de Paris. »
Et dist Pepin[s] de France : « Jel commant et otri,
4410 A mangier ne [a] boire n'avrai avant de ci. »
Du cheval ou il siet li est as pies chaiz ;
Et Landris l'en redresse, que ne le vot soffrir,
Trois fois s'entrebaiserent, car Diex le vot ainsi ;
Deci qu[e] a Coloi[g]ne ne prirent onque[s] fin.
4388 se mete. — 4389 morir, ms. moris. — 4390 Et as b. —
4391 Et es c. — 4394 Ains paiens. — 4398 Que; en fut al. —
4400 s. cope t. — 4407 cit, ms. cité. — 4408 m'escherra, ms.
miesnera; li, ms. le. — 4409 Je le commande et o. — 4410 Auoit
ne b. — 4412 vot, ms. voit. — 4413 c. Dieu.
\64
DOON DE LA ROCHE
cxxv
441 5 En la cit de Coloi[g]ne est repair[i]ez li rois,
La mai[s]nie Landri et li autre François ;
Son cors et son haubert a fait peser .iij. fois
Du plus fin or d'Arabe, ja meillour ne verroiz,
Qu'il offrit a saint P[i]ere, a l'autel ben[e]oit ;
4420 Molt riche don ildone ses compaignons françois
Et Landri .c. chevax, qu'as paiens a tolois ;
Tuit ensemble montèrent au palais maginois.
Li frans dus de Coloi[g]ne ala baisier le roi,
Et Olive son fils, qu'ele plus aime et croit
4425 Que nul home qui vive, [et] certes ele a droit. [fol. S4)
Molt demeinent grant joie li baron celle fois ;
Li aiguë fut cornée, si se sistrent a[u] dois.
Assez orent viande et [le] bon vin et froit ;
A icelle foie fut bien servi[z] li roi[s]...
4430 Et Guinem[ans] sis mai[s]tres, qu'il aime en bone foi.
Et tuit li haut baron qu'il retient avec soi.
« Seignour », ce dist li enfes, « entendez [en]vers moi.
CXXVI
« Baron, [seignour, »] dist il, « entendez mon semblant :
« Mes sire m'a mandé, au coraige vaillant,
4435 « Qui tient Constantinoble et quanqu[e] i apent,
« Li v[e]rais empereres, de cui je me lotant;
4415 cit, ms. cité. — 4420 ces c. — 4428 Le franc duc de C.
— 4425 nulz h. — 4426 M, demoinne g. j. li barons. — 4429
A. i. fois f. b. servi le roi. Après ce vers, il faut admettre une
lacune d'au moins un vers, où il était question de Landri. —
4430 G. son maitre. — 4481 Et tous les haus barons qui estient
a. s. — 4432 Seigneurs. — 4434 mandés en c. v. — 4435 q.
il a. — 4436 loe t.
I
DOON DE LA ROCHE l6$
« Jurer me fist sa fil[l]e et faire sairement
« Qu'a moillier [la] penroie sans nul arestement ;
« Charga moi grant avoir, ses barons et ses gens.
4440 « La merci Damedieu, il nos vat bellement :
« Li traïtor sont mort et livré a torment,
« Mes pères et ma mère ont fait acordement,
« En pais tenront la terre, des ore en avant ;
« Droit a Constantinoble, ou j'ai mon sairement,
4443 « M'en irai le matin, se Diex [le] me consent,
« Si penrai Salmadrine, la bêle au cors gent ;
« Tels noces i ferai, par le mien esciant,
« Il n'ot onque[s] sibelle[s] au reaime de[s] Franc[s.]
« Ma mère [avrai] o moi et mon père ensiment ;
4450 (c .1. prodome lairons tout nostre tenement.
— Beax niés, » dist remperer[e]s, « ne vos dotez néant,
Avec vos [m'en] irai et si menrai grant gent. (v«)
— Sire, » ce dist Landris, « vous parlez avenant. »
L'endemain, par matin, font lor atornement
4455 Et acoillent lor voie et tout lor errement.
Ici que vous iroie lor jornées contant?
Tant errent et chevalchent, par le mien esciant,
Que de Constantinoble virent le mandement.
Il prinrent .j. message cortois et avenant;
4460 En la cité l'envoient la novelle portant
Que Landris s'en repaire, si ameinne grans gens.
CXXVII
Li messagier[s] s'en tome a grant esperonnée ;
Au bon roi Alixandre les noves a contées
4438 Que a m. — 4439 ces b. et ces g. — 4440 rat, ms. u'at —
4441 s. mors. — 4445 se Dieu. — 4447 Telles. — 4452 Âveques
irais. — 4455 errement, ms. errammant. — 4458 Qui. — 4461 g.
gent. — 4463 no.UTelles a conter.
l66 DOON DE LA ROCHE
Que Landris est venu[z], si ameine sa mère
4465 Et son oncle Pépin, qu'est roi[s] et empereres,
Et molt de haus barons et Doon le sien père.
Saimadrine l'entent, graat joie en amenée.
Toute la ville en bruit ; meïsmes l'emperere
Monta en .j. destrier qui la crope ot lée,
4470 A rencontre lor va, grant joie a démenée.
Entrencontré se sont Landris et l'emperere;
Olive et Saimadrine aussi s'entrencontrerent,
Plus de .c. fois s'acoUent et assez se baisèrent.
En la cité s'en entre[nt], grant joie démenèrent.
4475 Encontre lor venue trestuit li sein sonerent;
N'i ot si povre rue ne fu[s]t encortinée.
Droit au mai[s]tre palais descent 11 empereres
Et Pepin[s] et Landris et Olive sa mère ; (/. 85)
Tout contreval la ville escuier s'ostelerent.
CXXVIII
4480 Contreval la cité est la novelle oïe
Que Landris est venu[z] por esposer s'amie ;
Diex ! que.l joie on en fait [en] contreval la ville!
Saimadrine la bêle aresne dame Olive :
« Bien soiez vos venue, ma dame et m'amie ;
4485 « De Dieu et tous les sains soiez vos beneîe!
« Quanques je ai est vostre et en vostre baillie. »
Quant Olive l'entent, si en devint molt lie;
[Se] grant joie se font, je ne m'e[n] merveil mie.
Et li escuier font que les nâpes sont mises ;
4490 Quant l'eaue fut cornée, cil chevalier s'asirent;
Li dui empereur, Doons et dame Olive
4465 qu'est, m*, qui est. — 4466 Doon, ms. Doz. — 4468 m.
l'empereur. — 4471 L. et l'empereur. — 4475 li s. senerent. —
4485 et de t. — 4488 merTcil, ms. merToille. — 4491 Li deux e.
DOON DE LA ROCHE 167
Au mai[s]tre dois s'asirent de la grant sale antie;
Landris servi le jour a la table s'amie,
O lui .c. damoisel de France la garnie;
4495 Asses et Guinema[n]s, Hues de Pontalie
Servent l'empereur, Doon et dame Olive.
Assez orent piment et vins séant sor lie,
Viandes a foison, poisson, char, voleïlle ; '"''•^■'
Ainsois seroit, je cuit, li ore de compile
4500 Que devisé eusse tout[e] la seignorie.
Quant il orent mangié, droit a la prai[e]rie
Cil legier bachelier ont quintaine drecie...
• Joer et envoisier par grant bachelerie ; (y")
Le jour i ont François mainte lance brisie.
45o5 L'emperere Alixandre ne s'i oblia mie :
Il tresmet ses messages et fait ses briés escrire,
Que trestuit li baron qui sont de son empire
Soient tuit a la feste et as noces sa fille ;
Tant i vi[n]drent baron a grant chevalerie
45 10 Que fors de la cité a la grant praierie
Convint faire les noces la belle Salmadrine.
CXXIX
Molt fut grans li barnage[s] qui la fut assemble[z] ;
Li afaire Landri con fut renovelez !
Davant l'empereur, qui de France fut nez, » c;-c^.
45 1 5 Et davant les barons qui [la] sunt assemblé,
Ja Landris avéra a moillier et a per
Salmadrine la belle, que il doit molt amer ;
Bien i est emploie[z], de haute gent est nez,
4492 m. doz. — 4494 c. damoiseax. ~ 4498 ch. voloisie. —
4601 o. mangier. — 4502 C. 1. bechelet o la quiterne d. — 45o3
Lacune entre ce vers et le précédent. — 4604 Se j.; m. 1. brisée.
— 45o5 L'empereres A. — 4506 ces b. — 4512 f. grant; que la.
— 45i5 li b. ; s. assemblés. — 4616 Que L. ; a père.
~l68 DOON DE LA ROCHE
Et s'est bon[s] chevalier[s],plain[s] de [molt] grant beauté;
4620 L'emperer[es] de France, qui tant fist a loer,
Est frère a sa mère, bien veoir le poez,
Es noces est venuz et li et ses barnez... .kk
« Venez avant, Landris, .1. petit m'entendez ;
« Tel chose vous dirai dont grant joie av[e]rez :
4525 « Je vous ottroi ma fille, tantost l'esposerez,
« La tere çt tout l'empire de cest jour en tenrez,
« En avant de cest jour corone porterez
« O ma fille roîne, que vous esposerez.
— Sire », ce dist Landris, « .v"=. merci[z] de Dé. » (/. 86)
4630 Maintenant fut Landris a[u] grant mostier menez;
Salmadrine s'amie fut joste ses costez.
.L [gentilz] arcevesque[s], Jehan[s] fut apelez.
Cil esposa la dame a molt grant dignité ;
Dis avesques i ot et s'i ot .c. abez,
4535 .C. contes et .c. dus et .x. rois coronez,
Et deus empereors i ot a l'esposer.
La messe commança rarcevesque[s] Jehans ; <« >,
Molt fut riche l'offrande qui fut mise a l'autel.
Quant la messe fut dite et [li] missels chantez,
4540 Au palais en monta Landris li adurez, /
En son chief ot corone, ja meillor ne verrez;
Grant joie en ot sa mère, de cui il fut amez.
Salmadrine la belle, qui molt ot de beauté,
Fu coronee ainsi com vos oi avez.
4545 L'empereres de France et Do li adurez
La tiennent par la main ; tuit i sont li abé.
4519 Et cest. — 4521 poez, ms. poiez. — 4522 barnez, ms.
bernes. — 4523 m'atandés. Entre ce vers et le précédent, il faut
supposer au moins un vers perdu, oii il était dit que Vempereur
de Constantinople paraissait et adressait la parole à Landri. —
4624 V. diras; j. aurés. — 4527 Et anon en c. j. — 4628 Et ma
f. — 453i ces c. — 4532 J. i f. a. — 4533 Sil aposa. — 4537 l'a.
Jehans, sic ms. — 4539 d. et misdel ch. — 4540 En p. — 4546
L'empererer de F. — 4546 t. en vont les abés. '
DOON DE LA ROCHE 169
Et Landris li beaus enfes refut bien adestrez
D'arcevesques, de contes, de rois et de abez.
- Les tables furent mises au palais principel,
4550 En sales, en maisons, en jardins et en prez;
De tous les mes qu'il orent n'iert ja conte[s] trovez,
Que bien pouez savoir qu'il en i out assez.
Molt furent bien servi de vin et de claré;
Et si vous di pour voir que tuit li ménestrel
4555 De France, d'Alemangne, deci qu'a Balegué, (v**)
Cil de Constantinoble, de Rome la cité,
I furent a la feste venu et assemblé :
Li un[s] timbre de harpe, et l'autre a violé ;
Cil meine guigue et rote, ci[l] fait harpe sorier;
4560 Chascun[s] de son mestier i a le jour monstre.
Quant vint, après mangier, que il furent levé,
Lors font li ménestrel lor feste a grant plenté.
Ces gentis tumeresces i ont le jour tumé.
Ces belles dam[o]iselles dancié et espringué,
4565 Cil jone damoisel ont le jour behordé.
Ce seroitgrans enuis de trestot recorder;
.1. mois durent les noces, c'on ne puet aviser;
Ou palais toz les jors ont grant joie mené.
Et quant les noces faillent, i out [grans] dons donez.
4570 Lors s'en vont li baron, quant ont fait fëauté,
Cil qui de la contrée erent norri et né; ' ''
Mais Landris n'en la[i]ssa pas les François râler,
Ains les [rejtint encor pour eus miex honorer,
Par les chasteax les meine pour trestout regarder;
4548 abez, altéré; les abbés ont déjà été mentionnés deux
vers plus haut; corr. chasez (?) — 455 1 c. trover. — 4555
Baligné. — 4556 de C. et de R. — 4557 II f.; venu, ms. venus. —
4558 Li u. timpre; de v, — 4559 Si m.; harpe, sic ms., doit être
altéré. — 4562 f. li menestres I. festes. — 4563 g. tumerestes.
— 4564 dancier et espigner. — 4565 o. cil j. behordel. — 4566 t.
recordes. — 4568 Onque 1* de tous les jours ot moins j. m. —
4570 grant o. f. fiantei. -- 4374 meinent p. trestous r.
' 170 DOON DE LA ROCHE
4575 Et Pepin[s] et ses père et sa mère a[u] vis cler
Furent bien ou pais servi et honoré
Et de molt riche[s] dons lor at on présenté.
Quant vint a cliief de pièce qu'il orent séjourné,
L'emperer[es] de France at Landri apelé :
4580 « Beaus niés », dist Tempereres, « je m'en vuel retourne
« Et Do et vostre mère, qui en volons râler,
« Que de nostre pais n'oimesv puis parler, (/. S
« Comment qu'il est mes homes, qui l'ont a gouverner,
« La tere et lou pais [et] lor fame[s] garder.
4585 — Sires », ce dist Landris, « a vostre volenté.
CXXX
— Oncles, » ce dist Landris, « empereres nobile,
« Vous en irez ariere en France la garnie
« Et s'en menrez mon père, ma mère [dame] Olive;
« Pour Dieu, amez l'un l'autre, si ferez cortoisie.
4590 — Landris, » ce di[s]t li rois, « ne vous esmaiez mie;
« Se vous avez mestier de ma chevalerie,
« Sachiez certainement qu'elle est aparillie.
;of ** S^ 1*'^ d^ vous mestier, si ne m'oblïez mie. »
On fait crier par l'ost : « Ci est la départie ! »
4595 Et chascun[s] apareille [et] lui et sa maisnie ;
Il trosent et enmalent et issent de la ville ;
L'emperere Alexandre les conduit et les guide.
Quant vint a[u] desevrer, grief fut la départie ;
Do vait baisier Landri et ausi fist 01i[v]e ;
4600 L'empereres Pépins ne s'i oblia mie.
4679 F. et L. a. — 458o vuelle r. — 4581 vostre, ms. vos —
4588 et ma m. O. — 4591 m. de mon demaine. Cette leçon peut
s'expliquer par une mauvaise lecture de l'abréviation chlerie ou
chrie. — 4593 si, ms. ci. — 4394 le départir. — 4596 sa maignie.
— 4596 enmalent, ms. emnaient — 4599 Do fait et v. b. — 4600
L'empereur P. ■ .;; • r |;'f..î - .:•■•••■'■ • "f""::
DOON DE LA ROCHE I7I
Salmadrine [la belle] s'en vint a dame Olive,
Par molt de foi[s] la baise, ne cesse ne ne fine;
Dit Olive la belle : « Ma fille Salmadrine,
« Car pensez de mon filz, je vous requier et prie,
4605 « De tout en vous me fie; or en pensez, amie !
« Le lairai remanant, bien voi n'en menrai mie.
— Dame, » dist Salmadrine, « j'en suis toute p[er]ie. »
A grant peine ont fait entre eus la départie. (v«)
Florent li chevalier et dames eschevies,
4610 A Dieu le[s] recommande[nt] et li duc et li prince.
Etli roi[s] Alixandre en meine Salmadrine
Et Landri, cui il aime d'amour bien entérine;
Li rois Pépins en meine Doon et dame Olive ;
A Coloigne s'en vienent a hore de compile ;
46 1 5 Diex ! con grant feste en font li bor jois de la ville !
Bien i fut conreé[e] toute la baronnie.
Quant vint a l'endemain, ne vos mentirai mie,
Pepin[s] ala en France, il et sa compagnie,
Et li dus de La Roche et avec lui s'amie,
4620 Dame Olive sa famé, en cui [il] molt se fie ;
En pais tenront la terre, ne est qui les guerrie.
Et Landris demora avec[que] Salmadrine ;
Enfans out de sa famé, qui est de bone orine,
Qui puis [tinrent en pais] la terre dame Olive,
4625 Toute Constantinoble, la grant cité antie.
Et quanque il i apent et roialme et empire ;
Molt bon chevalier furent et de molt bone vie.
Ci defenit la geste, la chançons est faillie
De Landri, de Coloigne et de ma dame Olive
4630 Et del roi Alixandre, qui tenoit tout l'empire
De[vers] Constantin[oble], et de sa belle fille
4602 la baisse. — 4605 De toute. — 4606 Le romenant 1. b.
T. nen manirai m. — 4615 con, ms. cum. — 4616 f. corree. —
4618 P. alast. — 4619 a. 1. sa mie {en deux mots). — 4621
l. gerie. — 453o t. toute l'e.
/«iU
172
DOON DE LA ROCHE
Et du bon roi Pépin, qui France outen baillie,
Et des maus traïtors Hatiquetant et T[o]mile,
Forbin et Malquerant, Loqueste et Malingre, (/". 88)
4635 Que Landris ocist tous a l'espée forbie.
Cil Diex qui maint en haut si doint durable vie
Cex qui de bon cuer ont ceste chançon oîe I
Plus ne vous en dirai, querez qui plus en die.
explicit h romans de doon
l'Alemant qui fut de la Roche.
4635 Qui L. — 4636 d. bone vie [vers trop court).
^^^'*****
NOTES
V. 56. Voici le passage du Charroi de Nîmes, auquel
renvoie la variante, d'après le texte établi par M. Meyer lui-
même (Recueil d'anciens textes, p. 289, v. 36-38) :
Nostre empereres a ses barons âevez .
Cel donc terre, cel chastel, cel cité,
Cel bour et ville selonc ce que il set.
V. 102-109. ^^ remarquera que la ville où eut lieu le
mariage de Doon et d'Olive n'est pas indiquée; d'autre part,
dans la suite du poème, deux fois (v. 1959 et 2084) Mon-
treuil-sur-Mer est nommé comme la ville où Do gist 0 lui:
(Olive). Il est par conséquent possible qu'il manque dans ce
premier passage un vers, où Montreuil-sur-Mer était dési-
gné.
V. 654. Audegour. Voici les différentes formes de ce
nom dans le manuscrit de Londres : vv. 654, 9i3, io3o,^
21 14, 3865, 3878, 4o38, Audegour; v. 887, Audegours ;
vv. 1 193, 2819, 2922, 3o26, 3o38, 3468, 40o5, Andegour;
V. 258i, Andegou (lecture de M. P. Meyer; Sachs et M. Be-
nary ont lu Andegon]; v. 33o4, Andegon; v. 3'i3i, And';
V. 3191, Audeg\ Quant aux fragments L, on lit v. 1193,
Andegour {nettement, et en toutes lettres); v. 3i3ô, And'
(leçon douteuse, mais plutôt ^«i' que Aud'); v. 3190, Aud'
(nettement) — Dans cette incertitude, la faute n pour u
étant tout aussi possible, paléographiquement, que «pour n,
nous avons donné la préférence à Audegour, qu'on peut
174 '" .- DOON DE LA ROCHE
expliquer comme une altération d'Audegon, nom qui se
trouve dans plusieurs chansons de geste (voir la Table de
M. E. Langlois), tandis qu* Andegour ne correspond à rien;
on peut en outre remarquer, avec M. Benary (p. 829), que
dans le roman espagnol le personnage s'appelle Aldigon.
D'autre part, nous sommes bien obligés de conserver la
terminais our, quelque singulière qu'elle puisse paraître : elle
est certifiée par l'accord du manuscrit de Londres et du
fragment L.
V. 659. Ce vers est peut-être quelque peu altéré dans la
forme, mais le sens général parait clair : « Ce que chacun
lui demande de dire, il veut le dire de son propre mouve-
ment. » En effet, dans la suite, nous voyons que le petit
garçon parle très bien.
V. 1198. Tomiles fu sene^ (ms. senes). Il faut corriger
Tomiles fu sanei^.
V. 12 19. Ce vers est sûrement altéré, malgré l'accord du
fragment L et du manuscrit de Londres. En admettant la
correction restera pour recevra indiquée en note {Li niés le
roi de France restera par folie) on obtient le sens: «le
neveu du roi de France fera une folie en restant (ici), car
sa mort ont jurée.... » Covnp. Roman de Thèbes, v. 4209
édit. Gonstans : Cist remandra cifolement. Pour par folie:=
folement, comp. plus loin, v. 3728 et les locutions par estul-
tie « follement », par vertu, « courageusement » etc.
V. 1429. La correction Lalice pour lice a déjà été proposée
par M. Benary (p. 3x8 note, de son mémoire) mais avec un
point d'interrogation. Elle nous parait absolument certaine,
à cause de la mention des Hermins (Arméniens) dans le vers
suivant. Lalice (Laodicée) est nommée dans le Pèlerinage
de Charlemagne v. 106; pour d'autres mentions, voir la
Table de M. E. Langlois. D'autre part, les Arméniens sont
à leur place comme défenseurs d'une ville chrétienne de
l'Asie Mineure.
V. 1609. Gontiaume. Cette forme ne se trouve qu'ici; dans
la suite, on lit presque toujours Gonciaume. C'est Gon-
tiaume qui est la bonne forme; comp. dans la Table de
M. E. Langlois, Gontelme, Gontiaume; Fôrstemann, Alt-
deutsches Namenbuch, 2' édit. Bonn, 1900, I, 7o3, Gun-
thelm, Gunthalm.
NOTES 175
V. 1661. En voyant que dans ce vers et plus loin, vv. i665
et 1680, les montures des messages qui jusqu'ici ont été
qualifiées de dromadaires, sont appelées chevaus, tandis que
dromadaire reparait au vers 1696, on pourrait croire à des
altérations du texte; mais une telle supposition n'est pas
nécessaire. Les gens instruits, au moyen âge, savaient bien
que le dromadaire était une variété du chameau (on peut
citer, par exemple, Sicard, évêque de Crémone, Mitrale,
lib. V, c. 9, dans Migne, Patrologia latina, vol. 2i3, col. ,,
235 : dromedarius est animal minus camelo, sed velocius eo;
currit enim una die quantum equus tribus diebus) ; mais les
auteurs des chansons de geste ne se faisaient pas une idée
bien nette de l'aspect de la bête : pour eux, le dromadaire
était avant tout un animal courant très vite; voir F. Ban-
gert, Die Tiere im altfran:^ôsischen Epos, Marburg, i885
{Ausgaben und Abhandlungen, fasc. 34), p. 49. Le c trou-
veur » de Doon de La Roche est donc excusable d'avoir cru
que le dromadaire était une sorte de cheval, courant beau-
coup plus vite que les chevaux ordinaires.
V. 1720. [D'jor et [d']argent ai ge .xxx. somiers tresse^.
On pourrait lire, sans correction, mais en introduisant une
ponctuation : Or et argent ai ge, .xxx. somiers trosse:^.
V. 2128-2129. Li rois vos a mandé par menace et par ban
Qu'ele ne soit destruite ne des membres perdant. Il n'y a rien
de pareil dans ce qui précède : Pépin n'a rien mandé à
Malingre. On pourrait corriger nos a mandé, en se rappe-
lant le V. 635, où Pépin dit à Doon en parlant d'Olive: Et
qui mal lui fera, si soit chier comparée.
V. 221 5 Que Vavoientjuréa Tomile et Malingre. C'est la
leçon du manuscrit, mais on obtiendrait un vers plus con-
forme aux habitudes du style et de la versification de l'au-
teur en biffant a et en lisant Que Vavoient juré Tomile et
Malingre. Comp. v. 1937 Tomile et Malingre fera les chiés
coper.
V. 2347-2348. Li cembels s'en torna; s'ont la bare guerpie
Et dus Do les enchauce coin chevaliers nobile. — Le sens
parait être : les chevaliers qui font partie du cembel
et qui s'étaient avancés jusqu'à la bare (la. barrière, la forti-
fication extérieure du château de La Roche) en guise de
défi (comp. G, Paris, Mélanges de littérature franc, du
fjÔ DOON DE LA ROCHE
moyen âge, p. 1 15, note i), lâchent la bare, dès qu'ils voient
que Doonsort avec sa troupe, et tournent bride; Doon les
poursuit.
V. 2720. Je te conjur ta loi et [tres]tot ton batisme (le
manuscrit porte batesme). Nous avons noté trop tard pour
pouvoir l'introduire dans notre texte la correction plus sim-
ple de M. Benary (p. 887 de son mémoire) : Je te conjur ta
loi et tôt ton batestire. On sait que batestire pour batesme est
fréquent dans les chansons de geste.
V. 2728. Certes m'amor m''ave^ afïée et plevie. Ce vers
est certainement altéré ; on pourrait lire, en biflFant le pre-
mier m' : Certes amor m'avei( afïée et plevie ; cette correction
a déjà été proposée par M. Benary (/. c). Seulement, le vers
ainsi corrigé se relie mal à celui qui suit : Ja set bien to^ H
mon!{ tis pères est mes sire ; il faudrait admettre un mais
sous-entendu, à moins de supposer un vers sauté par le
copiste.
V. 2780. La restitution indiquée en note — Ma terre tient
Malingres, par coi il me jostise — suppose que le pronom il
ne se rapporte pas à Malingre, mais à l'empereur, dont il a
été question dans le vers précédent. Des équivoques syn-
taxiques toutes semblables se trouvent ailleurs dans notre
chanson; par exemple, v. 2545-46 :
Moût fu granz li eschas que il ont conquesté.
Enz en parfonde chartre les fist li rois jeter.
Le les du v. 2546 désigne Doon et Jofroi, dont il a été ques-
tion aux vv. 2542-43 ; tandis que il dans le v. 2545 se rapporte
aux guerriers du roi Alixandre. — Pour la pensée, plutôt
suggérée qu'exprimée, comp. plus loin, v. 2747 Ne ja ver[s]
Alixandre n^avrai ma foi mentie, et le récit en prose su r
Ami et Amile, publié par Mone, d'après un manuscrit de
Lille, dans An^eiger fur die Kunde der teutschen Von^eit
V (i836) col. 162 : elle (la fille de Charlemagne) le requist
qu'il (Ami) fust son ami. Et Ami en nulle manière ne 5't
acordast, que' il ne voiiloit mie faire traïson a son seingnour.
V, 2782. Il y a ici, et dans la suite de la chanson, des
confusions singulières, qui peuvent difficilement être impu-
tées aux copistes, mais qui semblent être le fait de l'auteur.
Jofroi, qui figure ici comme compagnon de Landri, était
représenté dans ce qui précède comme compagnon de
NOTES 177
Doon ; il est fait prisonnier en même temps que celui-ci au
V. 2542. Par une confusion en sens contraire, Asson, le
fidèle compagnon de Landri dans son voyage en Orient
(v. 1425, 1469) et qui se bat à ses côtés en même temps que
Guinemant (v. 2342), partage au v. 2802 la captivité de
Doon. Enfin, au v. 2859, Landri reconnait avec joie, comme
délivré en même temps que Doon, son « maître Guinemant »,
qui a toujours figuré et figure ici (v. 2782) comme compa-
gnon de Landri, pendant son voyage et à la cour de l'empe-
reur Alixandre. Ici, au v. 2782, on pourrait, au besoin, substi-
tuer Asses à Jofroij, mais il est impossible de changer, au
V. 2802, Asse de Maience en Jofroi^ de Maience, Mayence
étant, dans tout le poème, la ville d'Asson et non celle de
son frère Jofroi. Et il est impossible de modifier Guitiemant
son maistre au v. 2859 sans fausser le vers. On pourrait, il
est vrai, considérer ce vers comme interpolé, mais cela ne
résoudrait pas les deux autres difficultés, relatives à Jofroi
et à Asson. — Dans le roman espagnol, le compagnon
d'Enrique (Landri) en Orient s'appelle Jtifre, et nous mon-
trons dans l'Introduction que l'auteur du poème conservé
et celui du roman espagnol ont travaillé d'après le même
original perdu ; il est par conséquent possible que le souve-
nir du Jofroi de ce poème perdu se soit mêlé aux inventions
personnelles de notre « trouveur » ; mais ce souvenir n'ex-
plique pas les deux autres erreurs que nous venons de cons-
tater.
V. 2925. Seine la ville est en réalité, ainsi que l'a déjà vu
M. Benary (p. 32i, note i de son mémoire), la ville de Sienne
en Italie, que notre auteur a transportée du côté de la Hon-
grie (voir au v. 2162). Faut-il, avec M. Benary, ici et aux
vv. 2968 et 3894, corriger {Seine la vieille) = Sena vêtus?
Nous ne le croyons pas. Saine ville se lit également dans le
Roman de Cassidorus, Bibl. Nat., ms. franc. 22549, f^^- ^^f>
comme nom d'une ville de « Lombardie » (dans la suite du
récit, fol. 57/, le nom est écrit Scienne, sans adjonction).
Seine la ville était une forme fautive, mais consacrée par
l'usage.
V, 2g6i. Pépin s'en est clame^,coresos et pleins d'ire. Leçon
du manuscrit, littéralemerit : P. s^en est clamés. Naturelle-
mention pourrait avissi interpréter Pepms s'en e^f c, mais cela
12
178 DOON DE LA ROCHE
serait moins satisfaisant. Selon nous, le sujet est Doon, dont
il a été raconté, v. 2226 et suivants, qu'il alla se plaindre à
Pépin. Il faut peut-être supposer, après le v. 2961, un vers
perdu, rappelant que Pépin se déclara contre Doon et le
chassa de ses terres.
V. 2967. Li avesques manda qui ses sodoiers prirent. Ce v.
n'est pas clair et paraît altéré. On pourrait corriger : des
sodoiers, et comprendre : « l'évêque manda [des gens] qui
prirent (= levèrent) [pour lui] des soudoiers. »
V. 2992. Va ferir Grifonel, j. des neveu^ Malingre, Fil sa
seror germaine, la dame Malsarie. Le nom de « Malingre »
est sûrement altéré : Malingre est toujours représenté comme
l'enfant unique de Doon et d'Audegour. Il faut probablement
corriger : Tomile; comp. le v. 119, où il est dit de celui-ci :
oncles fu Guenelon. — Dans d'autres poèmes, Grifonel est
fils de Ganelon (comp. G. Paris, Mélanges de littér. franc,
du m. â., p. 200); pour l'auteur de Doon de la Roche,
semble-t-il, Grifonel et Ganelon étaient frères, fils de
Malsarie (et de Griffon de Hautefeuille ? comp. v. "ijSb,
où Hélie et Hardré, fils de Griffon, sont également dits
« neveux de Tomile »)•
V. 3oio. Ça me laire^ La Roche; ne Vavre!{ jamais mie.
C'est la leçon du manuscrit ; on pourrait corriger : n'en <3vre;j'
jamais mie, suivant la locution bien connue ; comp. Ne de
Carlon mie vos n'en avre^, Roland, v. 1172; De Gaudissete
mie n'i ont trouvé, Jourdain de Blaie, v. 8209, éd. C. Hof-
mann.
V. 3783-3785. Il y a dans ces vers une singulière confusion
de sujets : au v. 3784, li en/es est évidemment Landri, mais
auv. 3785,1e sujet sous-entendu de fiert est Hélye, nommé
au V. 3783. Cependant il nous semble inutile de supposer
une altération du texte.
V. 3912. El règne de Saissogne voldrai Deu relenquir. On
pourrait aussi restituer: El reiaume des Saisnes v D. r. Ce
vers a été terriblement malraité par les copistes ; le sens
général parait pourtant clair dès qu'on a substitué Deu relen-
quir à l'absurde Do:^ relenquir du manuscrit. Le premier
hémistiche contient manifestement le nom de la Saissoi-
gne ou des Saisnes, dont il sera question dans la suite du
récit. Ces Saisnes, placés naturellement de l'autre côté du
NOTES 179
Rhin (v. 391 1), sont, dans les chansons de geste, toujours
représentés comme païens. L'ambition de Tomile est de
jouer, avec leur aide, le rôle d'un Isambart, d'un Girard de
Fratte (dans la suite d' Aspremont conservée en italien ;
G. Paris, Hist. poét. de Charlemagne, p. 325). Dans Girbert
de Met^, également, le vieux Fromont se réfugie chez les
Sarrasins d'Espagne et en revient avec une grande armée
pour attaquer ses ennemis ; voir l'analyse de P. Paris, dans
Hist. littér. de la France, XXII, 625, 628.
V. 4o3o-4o36. Cette description de la pendaison de
Tomile est loin d'être claire. Qu'est-ce que l'auteur veut
dire au juste par le cercle et le chaienon (v. 4032)? Il n'est
pas facile de le comprendre. Dans Florence de Rome on lit
(v. 4079, éd. Wallenskôld) : Fee^ le la aux f arches, au cou
le chaenon; \c\, chaenon semble l'équivalent de hart «la
corde qui sert à pendre ». — Ce qui paraît certain, c'est
qu'on attachait à la potence, aux forches (v. 4o3o), une
poulie (v. 4o35), sur laquelle passait la corde; il faut admet-
tre qu'on tirait sur la corde, le condamné étant soulevé de
terre et s'en allant en haut, contremont (v. 4o35). — La
même façon de pendre semble indiquée dans Parise la
Duchesse, p. 19, v. 601-602, à propos du supplice du traître
Milon :
s; Puis li ont fait la hart entorle colnoer,
Contremont la sacherent, si l'ont fait ancroer.
Cette façon de pendre diffère de celle généralement
connue, où l'on obligeait le condamné à monter sur une
échelle, que le bourreau retirait ensuite sous ses pieds
(comp. Florence de Rome, v. 4955). — Ici il semble être
question également d'une sorte d'échelle (v. 4o3i : La du-
chesse meîsme monta sur Veschaillon), mais elle sert au
personnage chargé de l'exécution (ici Olive) pour mettre le
cercle autour du cou du condamné et fixer le « crampon »
{cf. feri le cranpon, v. 4034). La poulie était-elle attachée à
ce crampon ?
V. 412 1. Par le présent Tomile faillistes vos ma mère. Il
faudrait peut-être corriger : Por le présent Tomile; comp.
V. 4136-4157 :
Quant vo seror faillistes
Etvo neyou petit j)or l'avoir le traître.
l8o DOON DE LA ROCHE
V. 4127. Carsadoine. Ce personnage, nommé dans le
manuscrit Lat^adoine, est évidemment le même qui, au
V. 4355, est nommé dans le manuscrit Ja^acoigne ou Jara-
coigne. La restitution Carsadoine est due à G. Paris
Mélanges de littérature française du moyen âge, p. 2o3), qui
connaissait notre poème par l'analyse de Sachs. « Carsadoine
de Perse » figure comme ennemi de Pépin dans un fragment
de Mainet {Romania, IV [iSyS], p. 229, v. 58). La correc-
tion paraît d'autant plus évidente que, dans ce passage, Car-
sadoine est également mis en rapport avec Justamont. Dans
Mainet, il est, semble-t-il, son allié; ici, il est son frère.
V. 4176. Landris si[e]t ou cheval qu'ot la crope levée. Comp.
Fierabras, v. 4108 (dans la description d'un cheval) : le bu
en haut levé. — C'est d'après ce v. 4176 que nous avons cor-
rigé le v.4369 : Landris si[s]t ou cheval a la levée crope. Si
cependant ces expressions, qu''ot la crope levée et a la
levée crope, paraissaient trop singulières, on pourrait lire,
au V. 4176 : qui ot la crope lée et, au v. 4369 : qui ot lée la
croupe; comp. v. 4469.
V. 4373-4374. La leçon adoptée est celle des manuscrits,
et suppose que Landri parle à Brohemau. Cependant, il
y a quelque chose de singulier à ce qu'il s'adresse en de
tels termes [vos. me rendre^ mon oncle!) à un homme qu'il
vient de tailler en pièces. Faudrait-il plutôt admettre que
Landri apostrophe les Saxons en général? Dans ce cas, il
faudrait corriger et lire : Fil à putain, païen, vos me rendre:^
mon oncle ! Cuvert, mar le baillastes, vos le laise^ a honte.
— Pour le premier hémistiche du v. 4374, comp. Roland,
3446 (Caries H dist : Culvers, mar le baillastes !) et Prise de
Cordres, iSbô- iS5'j (Fil a putain, gloton et pautonnier, Mar
lou baillastes, par les anges du cid!). Ces rapprochements
justifient la correction mar, pour mal du manuscrit.
M.
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GLOSSAIRE '
A, à. Sert à marquer la posses-
sion : c'est a famé nature,
459, cela tient à la nature de
la femme; a lui ne a sa mère
n'atent nul guerredon, 4021,
j7 n'attend de re'compense ni
de lui {Dieu) ni de sa mère.
Sert à indiquer que l'action se
fait de la façon indiquée par
le substantif qui le suit : a
duel et a martirc, 3048; a
duel et a torment, 1 59 ; a
force, 3 122; a force et a
poeste, 2377 : a force et a
vertu, 1018; a honor et a
noces, 3639; a honte, 4374; a
hu et a cri, 11 10; a joie,
i58g, 2941 ; a joie et a bar-
nage, 107; a joie et a baudor,
971; a joie et a lïesce, 102;
au mautalent, 1175; a mer-
voille, 23 16, 3822; a grant
mcrvoilie, 2337; a poine et a
travail, 2414; a tort, 1780,
1877, 2857 ; a tort et a pechié,
2248, 2256, 2960, etc.; a tort
et a pechié et a mal, 890; a
vertu et a force, 3634.
Indique l'instrument : ocis a
mon acerin brant, 262 ; a son
bran acerin, 739; a .j. coutel
d'acier, 3 107; a .j. bâton,
2785 ; abata a ce[l] faucon,
3741.
Le vêtement : a armes, 772; as
haubers et as lances, 2354;
l'amoinent a .j. mantel d'er-
min, 4214, l'amènent vêtu
d'wt manteau d'hermine.
La partie du corps, qui sert à
accomplir l'action : baiserai a
ma boche, i285, baiserai de
ma bouche; as genolz et as
paumes, 1792 ;vi a mes ieus,
419, 43o, je vis de mes yeux;
aus ielz, 1161, de ses yeux;
as mains et a bâton, 3996; as
mains te puis prendre, 2497.
I. L'astërisque indique les formes restituées.
l82
DOON DE LA ROCHE
La concomitance de temps : a
cest di, 468; a cel jor, 484 ; a
jour que je soie vis, 480, aucun
jour de ma vie; a nul jor, 492,
1497; a tant, 2431, 3322 {cf.
atant).
Précède le nom des personnes
qui accompagnent le sujet de
la phrase; a s'amie, 4257 ; a
.iij<^. chevaliers, 40; a .xv.
compagnons, 3873,4017; juer
a son cosin, 1777; a merveil-
los barnage, 2917, 2919 ; a sa
mesnie bêle, 2374; a mesnie
escherie, 221 1; a sa grant
ost bannie, 2345, 2384; me
faites penre a deux de voz
serjanz, 246; se couchera a
.xl. ou a .c, 273.
Indique la matière dont est fait
un objet : bocle a or, iio3;
eschaquier a or et a argent,
1069.
Préposition de lieu, indique le
mouvement : a la terre cheûz,
I023, tombé à terre; a la
terre en espant, 1077, répand
par terre; précédant un
nom de personne, indique
che^ qui on se rend : gi3,
946, 1235, 1283, i336, 3749.
Au V. 3824, a Maiance
veut dire : devant Mayence.
Dans les cas suivants, le français
moderne rendrait a par d'au-
tres prépositions : avoir a
non, 119, i56, etc., pour;
a la moie foi, 1402, 1637,
etc., par; a lor bêle jornée,
648, dans leur beau voyage ;
porter a fil, 762, porter dans
son sein, comme fils: au droit,
773, du côté du droit; au
pueple, 662, devant le peuple.
Employé avec le gérondif pré-
cédé de son complément, dans
le sens où nous employons le
gérondif précédé de en : as
espérons brochant, 1089,
1160, en éperonnant leurs
chevaux ; a noz doiz demos-
trant, 275, montrant de nos
doigts; a roncins traînant,
395g, faisant traîner par des
chevaux; a .xx. homes le-
vant, 2 32, {poids) que vingt
hommes seulement peuvent
soulever; jusqu'as armes por-
tant, 281, jusqu'à l'âge de
porter les armes.
aage, voir eage.
aaisier, aesier, 355o, réconfor-
ter; s' — , 3270, se réconfor-
ter; bien aaisié, 21 10, à son
aise, en bonne situation ;
aaisiée {dit d'une terre), 2174,
riche, fertile.
a[a]tie : par — , 2419, à l'envi.
abandonée {fém.), 2894, sans
retenue, sans mesure ; la règne
— , 3854, à bride abattue.
abandonéement, 264, à l'excès.
abateïs, 2479, Cfjr-nag'e.
abisme, i5o, V Enfer; la grei-
gnor — , 253, l'endroit où la
mer est le plus profonde.
abrivé : cheval — , 1772, 1817,
1825, dromadaire — , i563,
ardent, fougueux.
acerin, 262, 739, d'acier,
acheter : — fort, 365 1, payer
cher.
achoison, 3791, raison, motif.
acoiliir, acuillir, ^0 p. sing.
prés. ind. aqueust, 1377 ; —
sa proie, 3073, s'emparer d'un
butin ; parmi son hardement
acoilli son corage, 4335, dans
GLOSSAIRE
tl
i83
sa hardiesse il trouva com-
ment disposer son cœur ; —
son chemin, 323, 2268, 353o,
4455, — son erree, 646, —
son erremeni, 4455, — son
oire, i3jy,— sa voie, 373i,
41 58, 4455, se mettre en
route.
acointier (s') a, 3189, faire
connaissance avec.
acoler, 1929, 2026, 3633, em-
brasser; s' — , 4473.
acorde, 968, 363o, accord.
acordement, 4442, accord.
acorder, 896, arriver à un ac-
cord.
acorer, 3 106, percer le cœur,
tuer.
acostumé : avoir — , 3332, être
habitué.
acuillir, voir acoiilir.
adens, 284, sur les dents, le vi-
sage contre terre.
*adenter [ms. danter], 907, éton-
ner, stupéfier.
adeprimes, 1475, d'abord.
adestrer, 1894, 1999, 2933,
4547 , accompagner [qqn]
comme suite, comme garde
d'honneur.
adob, cas re'g. pi. ados, 3856,
armure, armes; avoir ses
ados, 1430, avoir été armé
chevalier.
adober, adouber, 34, 1684,
i858, etc., armer chevalier;
s' — , 1S12, 22j6, etc., s'armer.
adolé, 161 2, triste.
adonc, 3i, 108, etc., adont,
2140, alors.
ados, voir adob.
adouber, voir adober.
aduré, 43oo, 4540, 4545, aguer-
ri, éprouvé.
aé, 293, 884, âge; en trestot
mon—, 1691, 1875, pendant
toute ma vie à venir; se il vit
son — , 710, s'il arrive à
rdge d'homme.
aerdre, ^e p. sing. prés. ind.
aert, l'i/^i, saisir, empoigner.
aesier, voir aaisier.
afaire, 45 1 3, situation.
afaitié : bien — , 3 540, courtois,
sage.
aferir, 3" p. sing. prés. ind.
afiert, 2424, 382 1, appartenir
de droit.
afPier, voir afier.
affoler, voir afoler,
afiancier (s'), 2jbi, se promettre
mutuellement.
afichier (s'), 3742, 3765, se
fixer, se cramponner .
afier, afïer, affier, 2146, 2182,
2728, 4221, jurer.
afoler, affoler, 433, 454, 899,
etc., tuer; au v. 4268 s'atoler,
se dit d'une personne qui se
meurt d'amour.
afubler, i5-j3, ig4.5, etc., passer
sur son dos [un vêtement].
agait, 2291, 2326, etc., embus-
cade.
ahan, 3917, 3gyb, peine, labeur.
ahonter, 686, honnir.
aide, voir aïe.
aïdier, 3' p. sing. prés. ind.
aïe, 2670, 2944, 3" p. sing.
prés, stibj. ait, 1906, 2870,
aïst, 411, 1474, e/c, aider.
aïe, aide, 2416, 2677, etc.,
aide ;ieTc &\àc, i3io, aider.
aigle, 3963, emblème surmon-
tant les mâts des tentes.
aigrier, 3727, tourmenter.
aiguë, 1091, 1123, etc., eau.
aine, 940, 1024, etc., jamais {cf.
i84'
DOON DE' LA ROCHE
ainz) ; — mais . . . ne, 3/^j, ja-
mais. . . ne.
ainçois, ainsois [conj.], 35o,
478, etc., mais; {adv.), 2j33,
3o36, auparavant; 377, plu-
tôt ; {prép.), 1261, igSô.
avant; — que [conj.), 554,
1604, etc., avant que.
ains, voir ainz.
ainsi : — com .j. tel bers, 1614,
comme il convient à tin tel
baron; — voir m'ait Diex,
1906, puisse Dieu me venir en
aide.
ainsois, voir ainçois.
ainz, 343, 464, etc., mais; —
que, 99, î^3o, etc., avant que;
ainz, ains, pour aine, 1029,
3443, etc., jamais; — ... ne,
1029, 2ji8, jamais ; mais — ,
45, — mais, 388 1, même sens.
aire : toujours dans la locu-
tion de bon — , 2029, 2080,
etc., de bonne lignée.
aïrer (m/, pris substantivt) ,
296, colère; s' — , 375 1, se
mettre en colère.
aiue, 2 181, aide.
aive, voir eve.
ajorner, i559, i568, etc., faire
jour; le lundi ajorné ne le
mardi ne finent, 2977, le
lundi tant qu'il fait jour, ni le
mardi, ils ne s'arrêtent.
ajoster : vos lignages ert au
mien ajostez, 92, votre lignée
sera unie à la mienne.
alemele, 2364, /er de lance.
alenée, 5oi, souffle, respiration.
aler, aller : s'en vait, 2359, s'en
va; m'en irez, 3i i, vous vous
en ire:{; au pié li sont aie,
1871, se sont jetés à ses
pieds.
alever, 534, promouvoir, aider.
alis : terre alisse, 3j22, terre
compacte, peu fertile.
aloue, 3341, alouette.
aiozé, 1966, digne d'éloges,
renommé.
alué, 3558, alleu.
amander, voir amender,
ambe: d' — part, 2389, des deux
côtés.
ambedui, 1017 [var. enmedui],
3976, 3996, andui, 3392, cas
suj. plur., ambe .ij., 984, an-
deus, 1673, 1774, cas rég.
plur., tous les deux.
amender, 596, 1859, 2198,
amanderons, 3288, réparer.
amener, 3^ p. sing. prés. subj.
ameigne, io43,amoine, 2918 ;
p. pa. amenez, i58i, emme-
ner.
amervoillier (s'), 3758, s'éton
ner.
amiral, 1396, titre donné à
l'empereur de Constantinople .
amisté, amistié, 2635, 2716,
4286, amour ; 3366, concorde;
3ioi, traité de paix.
amoine, voir amener,
amont, 798, 38o3, en haut.
ancesserie , ansesserie : de
grant — , 1245, de longue
date; par droite — , 4147, par
succession directe.
ancroier, 3Siï, accrocher.
ancui, voir encui.
andeus, andui, voir ambedui.
anoer, 697, lier.
anor, voir honor.
anquenuit, 3908, cette nuit
même.
ansesserie, voir ancesserie.
anste, voir hanste.
antif, fém. antive, 235o,
^ H :^ GLOSSAIRE
l85
3o26, antie, 4492, 4625, an-
tique.
antrée, voir entrant.
anuier, 3<^ p. si7ig. prés. subj.
anuit, 2412, ennuyer.
anuit, 3234, cette nuit.
aorer, 3^ p. sing. prés. ind.
aore, 3217, adorer.
apareillier, 2761,4395; p. pa.
fém. aparillie, 4592, prépa-
rer.
aparler, 3* p. sing. prés. ind.
aparole, 964, interpeller.
aparoir : l'aube aparant, 3i36,
l'aube apparaissant.
aparmant, 3430, tout de suite.
apartenir a, 121, 483, 746,
être apparenté à .
apeler, 708, 887, etc., inter-
peller; 1241, 1260, etc., faire
venir.
apendre a, 8, 327, 1522, etc.,
dépendre de (terme de droit
féodal) .
apercevoir (s'), 909, observer
avec intelligence; — comment
(suivi du subj.), 1 o 1 2, faire en
sorte que.
aploré, 3677, éploré.
apoier, 2157, 2824, appuyer.
aporter : li cuers nel m'a-
porte, 967, mon cœur ne me
le dit pas.
apostoile, 693, apostole, 4270,
pape.
aprendre : estre apris de,
2733, être renseigné au sujet
de; apris ne l'avons, 3342,
nous n'en avons pas l'habi-
tude.
apresser : ses ventres li apres-
se, 933, son ventre lui pèse
(en parlant d'une femme sur
le point d'accoucher) .
aprocher a, 3372, approcher de.
aquerre, i^" p. sing. prés. ind.
aquier, 1247, •^"* P- aquiert,
2 386, prendre, occuper mili-
tairement.
aqueust, voir acoillir.
aquiter, 3 17, 1439, etc., déli-
vrer.
arabi, 322, 2286, 2469, arabe
(épithète de mul, de cheval),
arabois (à l'asson.), 620, i373,
arabe (épithète d'or).
aragon, 2473, destrier de race
aragonaise.
araisnier, i5i7, aresnier, 1445,
2243, 4483, interpeller.
arbroi, 352, lieu planté d'arbres.
arces, voir ardoir.
ardoir, 222, 234, etc., brûler;
33, incendier; p. pa. masc.
ars, 234,985, etc., fém. plur.
arces, 4o36.
aresnier, voir araisnier.
arestée ; fere — ,6^y, faire halte.
arestement : fere — , prendre — ,
177, 192, 2614, faire halte;
sans — , 4438, sans délai.
arester, i6o3, 1973, etc., tar-
der; p. pa. aresteûz {à l'as-
son.}, io5o, 2229.
arguer, 2179, presser, aiguil-
lonner.
arier, 1800 (à l'asson.), arrière.
ariver : se sont arivé, 1397,
ont accosté, débarqué.
arme, 636, 644, etc., âme.
ars, voir ardoir.
arsoir, 3297, hier au soir.
art, 1012, artifice.
assaillir, fe p. plur. fut. ass^n-
romes, 1767. assaurons,
1754, 2^ p.plur.fut.asa.udTez,
3708, 3' p. plur. fut. asau-
dront, 238o, attaquer.
i86
DOON DE LA ROCHE
aseier, 3279, goûter [d'un mets].
aseïr, voir asseoir.
asemblée : faire — de, 3141,
réunir.
asembler (s'), 3« p. plur. pf.
s'asemblirent, 2968, se ras-
sembler ; au p. pa., 107, II 3,
889, 2207, allié, marié.
asouagier (s'), 36ig, se calmer.
assener, 2 167, ^«jrvenzV à des-
tination.
asseoir (v. trans.), 238 1, 4061,
assiéger ; aseïr [à Vasson.),
4277-
asserir : nuiz fu asserie, 2210,
la nuit fut venue.
asseter, i545, asseoir.
assëur ; estre — , 3740, être en
sécurité.
assiantrous, voir escïentros.
ataindre, J8 j7. sing. impf. subj.
atainsist, 3786, atteindre.
ataint, voir estanc.
atalenter : quant il vos ata-
lente, goS, quand le désir
vous en prend.
atant, a tant, 258, 2432, etc.,
au moment même, aussitôt.
atapiner (s'), 3 169, se déguiser.
atargier {y. intr.), 2478, 3o6o,
s'attarder ; s' — , 2467, 2489,
3o23, même sens.
atempreement, 3i54(?) [peut-
être faut-il corr. atapine-
ment, déguisement].
atendre {v.trans.), 3j6j, tendre
sa lance; (v. intr.), 2749,
attendre, différer ; — a [qqn],
540, s'occuper de.
atenrier : li cuers li atenrie,
3043, son cœur s'attendrit.
atornement, 4454, préparatifs .
atot, 35 1, avec.
aubert,. voir Jiaubert.
aubor, 2280, sorte d'arbre, cy-
tise aubour.
aubre, 1272, 1273, etc., arbre.
aucube, 3119, 3833, tente, pa-
villon.
auferrant, 3664, destrier.
auquant : li — , 2903, 3i52, un
certain nombre.
auques, 83, 909, quelque peu.
ausberc, voir haubert.
* aùseres : mais — , 4o58, habi-
tué à faire le mal.
ausiment, 3i56, de même, éga-
lement; — comme. .., 2174,
tout autant que.
autre : comme autres^ 365,
38j, comme les autres ; comme
.]. autre chaitive, 475, 5i6,
comme la première malheu-
reuse venue ; comme autre
créature, 583, comme la pre-
mière créature venue; comme
.). autre desvé, 696, comme
le premier fou venu ; comme
.). autre larron, 4000, comme
le premier larron venu.
autres!, 1127, également.
aval ; {avec idée de mouv.), 25 1 1,
3345, 3578, 4025, de haut en
bas; {sans mouv.), 3345, 36i 2,
4301, en bas ; en — la bruiere,
4043, au bas de la bruyère.
avaler, 3575, 3995, 4802,
descendre [un escalier] ; 5oo,
3o57, etc., faire descendre.
avant {adv.), 10, 49, etc., plus
loin, en avant ;à' — moi, 914,
de devant moi; en — de, 4527,
à partir de; decest jour en — ,
541, 2122, à partir de ce
jour; parole de famé ne puet
— aler, 426, affirmation de
femme ne peut aller loin, n'a
pas d'autorité.
if GLOSSAIRE
187
avenant (adv.) : vos parlez — ,
4453, vous dites bien.
avers, 56, selon {voir la note).
aversier, 3291, le diable; 522,
gredin.
aviser, 4367 [corr. deviser],
raconter.
avo, 1673, ij-j4,avec.
avoir (subst.), 96, 619, etc.,
richesse, biens; avoir fiert molt
granz cous, 567, la richesse
obtient tout; avoirs fait molt
grant chose que tote rien
otrie, 610, la richesse, qui
procure tout, fait de bien
grandes choses.
bacheler, 1900, bachelier [ms.
bechelet],45o2,_;>MMe homme.
bachelerie, 45o3, valeur, habi-
leté.
bacon, 3712, lard.
baignier, 4087, laver [d'une im-
putation] (?).
baillie, 562, 600, etc., garde,
gouvernement.
baillier, 1966, 3495, etc., don-
ner ; 2454, atteindre, rattra-
per ; mar le baillastes, 4374,
c'est pour votre malheur que
vous vous en êtes pris à lui;
1485, 1492, i5o7, gouverner,
i.baillir, 725, 766, 4.054, porter,
manier [des armes]; mal bailli,
216, 3046, maltraité, mal-
mené.
2. baillir, 4378 {à l'asson. pour
baillier), gouverner.
baitre, 2392 [corr. barre; voir
ce mot].
balier, 2717, s'agiter, flotter
au vent.
ban, 2128, 277g, proclamation
vublique; 3 16 {plur.), territoi-
res oii s'exerce unejuridiction.
bancloche, i8ig, cloche servant
à appeler les bourgeois.
banir, bannir, 2345, 2384,
convoquer par voie de ban, de
proclamation .
baptisement, i56, baptême.
bare, voir barre.
barnage, 2790, 2giy, etc., ber-
naige, 4161, réunion de ba-
rons; a joie et a — , 107, au
mi lieu d'une assemblée joy^euse
de barons; faire — , 3464, faire
fête[àqqn]\i6,3b6o, ensemble,
des qualités chevaleresques.
barné, 1998, 2100, etc., suite
de barons ;i632, suite de
serviteurs; estre a — , i540,
mener un train magnifique,
tenir table ouverte.
baron [au cas suj. sing. ber,
433, etc., bers, 3956), homme
noble, seigneur; le baron saint
Pierre, 2 1 53, appellation hono-
rifique; 1614,1634, i8g2, per-
sonnage haut placé ; 54, IIO,
etc., homme vaillant; 3292,
3787, mari; (adj.) ber, 42, 81
[ms. bel], 3o4 [ms. bel], etc.,
noble, vaillant.
barre, 2347, 3254, etc., baitre
[corr. bairre], 3392, ^arriére;
ja plus n'avra plenté que
bare a autrui main, 3399 (?).
basme, 3444, baume.
bastir, 2980, 3072, 4^81, machi-
ner, ourdir; estor basti, 2 3oi,
combat en règle (?).
bataille, ']-]4,combat singulier;
2863, corps de troupe.
batestire [imp»-. batisme], 2 720.
Voir la note sur ce passage.
baudor : a — , 11 3, 971, 1434,
avec joie.
i88
DOON DE LA ROCHE
behorder, 4563, combattre à la
lance, jouter.
bel {cas suj. sing. beaus), terme
affectueux : beaus amis, 621,
beaus filz, jbô, etc.; estre bel,
904, i3j6,^bgj, être agréable,
convenir à; {adv.), 1231,1445,
etc., aimablement, courtoise-
ment.
bêlement, 358, 1148, aimable-
ment, poliment; ^^^o, favora-
blement.
beneiçon, 4077, bénédiction.
beneïr, 32 1, bénir; beneoit,
i335, 4419, béni.
ber, bers, voir baron.
bernaige, voir barnage.
* berz, 281 [ms. braiz], 284 [ms.
braz], berceau.
besant, 565, 608, etc., bezant,
1619, monnaie d'or.
besoing: a — , l'i'iS, par nécessité.
besoingnos, 1284, pauvre.
bezant, voir besant.
bien : nouvelles de — ,3554, bon-
nes nouvelles; — vos porta
voz mère, 41 II, votre mère
vous porta [dans son sein] pour
son bonheur.
bimar, ioi3 [faute probable
pour buisnart], sot, imbécile.
blêmi, 2ji5, flétri; 207, taché,
roussi par la flamme.
blïaut, 25, 1572, 1944, 20o3,
2755, 4325, tunique portée
sur le « chainse » ; — de Car-
tier, 3496 (?).
blos, 496, privé, dépourvu.
bocle, 1102, iii5, 2296, 2477,
2^S5 ,bossette fixée extérieure-
ment au centre de Vécu (umbo).
boclé : escu — , i834, muni d'un
: « umbo ».
boguerastre, 2io5, boisson pré-
parée avec des plantes aro-
matiques.
boivre (subst.), 3276, boisson.
bondir (v. trans.), 2931, sonner
[les cloches] ; {v. intr.) 2971,
retentir.
bonement, 268, 404, 2744, de
bon ccetir; 2^2, gentiment.
bonté : dire — , 1472, dire une
chose bonne.
borbrois, 4026, bourbier (?) ;
n'est pas dans Godefroy.
bore, bourc, 91 5, 930, etc.,
ville, par opp. au château .
horde\,j4.i,petiteferme, masure.
bordon, 1577, 1949, 3214,
bâton de voyage ou de pèleri-
nage.
boter, bouter, 283, 1873, 2563,
Jrapper, heurter; 912, 927,
3275, repousser en frappant ;
33oi, "i'igi, jeter; 1969,2563,
mettre, fixer.
bote, 438, botte.
* boterel, 3985 [ms. botercs],
crapaud.
bourc, voir bore,
bouté : vin — , 3362, vin tour-
né au gras.
bouter, voir boter.
bove, 4397, caverne.
braichot, 3277, 33o2, chien,
brachet.
braire, 287, 1054, 2998, /jwr/er,
crier;2g']o,grincer[en parlant
d'un charriot].
braiz, voir berz.
brame, voir brasme.
bran, branc, brant, 262, 362,
739, etc., épée; — de l'espée,
42 36, lame de Vépée.
brasme, i575 [ms. brenie],
brames, 1947, brame 3595,
hreme,2007,pierj-e précieuse;
HHDt GLOSSAIRE 1
189
comjp. Roman de Troie, G/oss.
v° prasme.
braz, voir berz.
brehan, 3g62, tente, pavilloit.,
brème, voir brasme.
bric, 23 II, cas rég. sing. bri-
con, 337g, fou.
bricon, voir bric.
brief, 4262, cas rég. pltir. briés,
45o6, lettre.
brochier, io8g, 1099, etc., pi-
quer des éperons.
broigne, broinne, 252g, 3739,
justaucorps garni de plaques
de métal.
bruei,4346, brul, 23, 26, petit
bois.
brûel[et], voir bralet.
*bruieroi [ms. brueuus], 3723,
lieu rempli de bruyères.
bruil[le], /em., 235o, bois.
bruir : /;. pa. bruiz, 234, bridé.
bruire, 4043, bruyère.
bruit : en dolor et en — , 880,
en douleur et en tumulte; en
.j. — , 3932, en un coup (?).
brul, voir bruel .
brulet, 2279, petit bois; brûe-
l[et], 3i83 [mauvaise correc-
tion, car le diminutif ne peut
être que disyllabe commehvn-
let, corr. plutôt petit bruel].
bruni : cspée brunie, 3764, polie.
,*buisnart[ms. bimart], io\3>,sot,
imbécile.
*çaint [ms. cain], 3 4.1-, ceinture.
car, 75, i3i, etc., conj . exhor-
tative; devant une exclama-
tion : — ne le sait Landris !
241 7, quel malheur que Landri
ne le sache pas !
Cartier : escu de — , 2466,
2476 (?); bliaut de — 3496 (?).
celée : a —, 641, 7i5, etc., en
secret.
celer, 48, 5gg, cacher, tenir
secret.
celier, i5Ô4, i58i, 1667, 1695,
1 95 1 , cave {dans ces passages
le celier sert d'écurie aux
dromadaires); 3266, salle du
re:{-de-chaussée oit tnangent
les serviteurs.
cembel, 2290, 2344, 2347, ^^~
tacitement destiné à attirer
l'ennemi dans une embus-
cade.
ceudal, cas rég. plur. cendaus,
6o3, riche étoffe de soie.
cenor, 3588 (?).
cerchier, 17 10, 1723, fouiller
[une maison]; 4244, fouiller
[un pays] .
certes: a — , gSg, 2365, 2369,
certainement .
cesse : aiez —, 94g, reste:^ tran-
quille.
cesser, 1216, i3i8, etc., faire
halte.
chaienon, 4o32, corde pour pen-
dre.
chaillois {cas rég. plur.), 4028,
cailloux.
chaillons, voir eschaillon.
chair, voir cheoir.
chaitif, 2523, 2534, etc., chetit,
gg2, 2754, cas suj. sing. chetis,
3683 [ms. chatit], fém. chai-
tive, 475, 4go, etc., malheu-
reux, misérable.
chalenge (à /'asso».), 2817, dis-
pute, querelle.
chaloir, 3" p. sing. prés. ind.
chaut, 1797, 181 1, etc., im-
porter, être utile.
chalongier, 3 1 5, 335, etc., récla-
mer en justice, revendiquer .
igo
DOON DE LA ROCHE
chamberier, iSSg, 1647, valet
de chambre.
chamberiere, 2159, femme de
chambre.
champ, cas suj. sing. chans,
2540, bataille.
chanfrein, i582, ibi)8, pièce de
caparaçon couvrant le devant
de la tête du cheval.
chans, voir champ.
chaon, 4024 [ms. haon], nuque,
cou.
char: homde— , 470, 4.8b, etc.,
en chair et en os, vivant.
charée, 4128, cherée, 262, char-
retée.
chargier, 443g, donner.
chartrier, 2789, 3o5o, geôlier.
chasement, 2793, 3127, do-
maine, propriété.
chastier, 3oi5, gouverner {en
parlant de Dieu); dedizet de
folie les chastie, 8421, les ré-
primande au sujet de leurs
paroles et de leur folie.
châtaigne, 25o8, capitaine, chef
de guerre.
chatis, voir chaitif.
chaumois {cas rég. plur.), 376,
terrain couvert de chaume.
chavage, 3559, capitation, taxe
personnelle payée par les non-
nobles.
cheïr, voir cheoir.
cheoir, cheïr {à l'asson.), 23o5
[ms. cheor], 3920 [ws. choir],
3935, J« p. sing. prés. ind.
chiet, 284, 2947, 38o6;^«p.
si«g-.j3/. chai, 800,2617, 3771,
3^ p. plur. pf. chaînent, 4o5i;
p.pa. cas suj. sing. chaïz 441 1
{à Vasson.), cheûz, io23, cas
rég. cheut, 2577, fém. cheûe,
2828, 2860, 3461, cheùte.
2578 ; bien me seroit cheù,
1337, bien me serait advenu.
chère, 243, cherre, 23o, char-
retée.
cherée, voir charée.
cherre, voir chère.
chetif, cas suj. sing. chetis, voir
chaitif.
cheù, cheûe, cheûte, cheûz,
voir cheoir.
chevauchier (v. trans.), 4346,
traverser à cheval.
chief, 938, i633, tête; — d'un
pais, 2921, capitale; ou —
de, 2863, 38 16, en tête de;
ou premier — , 2823, en tête
du cortège ; au — des altres,
3567, ^" ^^^^ '^^s autres, au
haut bout de la table ; venir
a — , 2445, venir à bout;
quant vint a — de pièce,
4678, quand arriva le terme.
chiere, 4107, visage.
chiet, voir cheoir.
chinel, cas rég. plur. chinex,
1986, chenal, lit d'un cours
d'eau.
choisir, 209, 3446, 4218, voir,
observer .
chose: douce — 439, termed'ami-
tié; faire — s, 3626 [le passage
doit être altéré dans le ms."].
ci {adv. de lieu), 93, 363, ici;
— iluec, 1007, ici même; de
— ,914, 2221, depuis ici ; de
— que a, i5o, 320, 574, etc.,
d'ici jusquà; de — que, i384,
jusqu'à ce que ; {adv. de temps),
— est, 4394, VOICI le moment
de; de — 2o3, 4410, depuis
maintenant ;de — a.iiij. jours,
33^3, d'ici quatre jours; de —
que a, 3i i, 2071, 2336, 3841,
depuis ce moment Jusqu'à.
GLOSSAIRE
1I9U
ciner, 2064, faire un signe.
cire, 56i, 6o3, 2948 [corr. tire],
étoffe de soie [de Tyv).
cit, 721, 1124, etc., cité, ville.
citaen, 4079, citeen, 4066, ci-
tïen, 3ii5 {adj.), de la ville
[épithète de borjois).
citerne, 4397, grotte.
clamer, 276, 493, etc., appeler,
nommer', — quitte [un fiej],
3i35, déclarer libre; 1726,
1736, 2226, porter plainte ;
2423, réclamer comme vous
appartenant ; se — , 2261,
2961, se plaindre.
claré {adj.), 1898, 2io3 [épi-
thète de vin); [subst.), 4553,
vin de liqueur.
clavain, 3o63, collet garni d'é-
cailles de fer; esclavain,i834,
doit être corr. en clavain.
cler, 5i, etc., beau {épithète de
viaire); 2796, 283o, etc., bril-
lant, magnifique [épithète de
feste); 1643, 1920, brillant
[épithète d'or et d'argent).
cloie, 3836, 0928, claie.
coiement, 171, 339, etc., dou-
cement, sans faire de bruit.
coillir, 3» p. sing. prés. ind.
queut, 172; — en amour,
172, aimer; — en hé, 886,
prendre en haine.
* cointe, 658, intelligent.
* coitier (se), 21 25, se hdter.
cole, voir covercle.
colée, 1066, coup sur la nuque.
colonoissien, 3552, denier de
Cologne .
coltel, 2509, coutel, 2285, lame
de l'épée.
com [adv.) : — mal dese-
vrement ! 2798, r— maie
départie ! 41 56, quelle triste
séparation ! [conj.) tant — ,
i535, 1849, «^<-'-» autant que.
comander, cornant, voir com-
mander, commant.
combatre a, 771, — vers, 788,
attaquer.
combrisier, 698, briser, écraser.
commander, comander, 255,
473, etc., recommander.
commant: tôt a vostre — , i63,
175, etc., tout à vos ordres;
com vos vient a — , 242,
comme vous le voule^ ; se
vous vient a — , 538, si cela
vous plaît ; faire les comans,
1621, exécuter les ordres.
communément, 3oi8, 4085,
4185, ensemble.
compaigne, 634, 2821, 4162,
compagnie, société; 3071,
4062, troupe de soldats; [au
plur.), l'iS'i, 3g65, force mi-
litaire.
compaignie, 2396, société, com-
merce ; ou preïs — , 3o^5, dont
tu fus la femme ; 2718, 3721,
suite de barons; prenra [ms.
panra] — , 3735, rencontrera.
compain, 1746, 1880, etc., com-
pagnon.
comparer, 635, 857, etc., payer
cher [au sens figuré); le jor
fu dame Olive [chierement]
comparée, Zd>b2, ce jour-là on
paya cher à dame Olive les tour-
ments qu'elle avait endurés.
compisser, 4029, uriner sur.
concile, 1222, conciliabule, com-
plot.
conduire, 3 122, transporter; sa
lance li conduit, 1848, 2366,
lui donne un coup de lance.
coneû, coneûrent, voir con-
gaoistre.
192
DOON DE LA ROCHE
confanon,2294, confenon, iioo,
iii3, oriflamme attachée au
haut de la lance ; — s laciez^
3073.
con fermer, 4087, co«^rwerdflMS
un titre.
confesse : prendre sa — , 3944,
se confesser.
confondre, 887, 11 55, tuer, dé-
truire; — la terre, 2177,
3776, ruiner , dévaster le pays ;
confondu, 1022, 2232, trou-
blé, bouleversé [sens moral).
conforter, 717, i353, etc., ré-
conforter., consoler.
congnissable, 4297, quenois-
sable, 36oi, reconnaissable .
congnoissance, 3857, signe de
reconnaissance [pendant le
combat] .
congnoistre, 3' p. sing. pf. con-
gnuit, 3856, congnust, 3974,
conut, 2629, 3.463, J*;?. plur.
pf. coneùrent, 577 ; p. pa.
coneù, 2859, reconnaître.
conquerre, 3<^ p. sing. impf.
subj. conquesist, 2383; 2682,
vaincre [un ennemi]; 2881,
2882, conquérir [u7t pays].
conquester, 2545, conquérir.
conreer, iii, 1670, 1942, équi-
per, vêtir , 3283, 4616, avoir
soin de, régaler ; 1569, 2069;
2093, 3718, soigner, masser;
— de, 2122, investir de.
conseil, consoil, 1209, délibé-
ration ; 4278, entretien confi-
dentiel [entre deux peisonnes);
1142, 2202, expédient.
conseiller, consoillier , 32i8^
dire confidentiellement.
consente : lor fait li dus — ,
3888, le duc leur donne son
consentement.
conseûe, vozr consuir.
consoillier, voir conseillier.
consûir, p. pa. fém. conseûe,
4184, atteindre.
contenir (se), 3i56, se conduire.
contor, 486, comte.
contraire [subst.], 3o3o, adver-
sité.
contraiz [cas suj. sing.), 1790,
cul-de-jatte.
contralïer, 2118, 4134, contre-
dire, contrarier.
contralios, 981, qui aime à con-
trarier.
contre, 578, 4io5-, vers, à la
rencontre de ; — terre raier,
2480, ruisseler à terre.
contredire, 664, 2214, 2965,
contester.
contredit ;. mètre —, j2^, faire
une protestation.
contremoni, 1628, 1844, etc.,
indique le mouvement de bas
en haut ; 4299, en haut [sans
mouv.).
contremonter, 2?42, 2345, al-
ler à contremoni, remonter.
contreval, 2317, etc., de haut
en bas; —la ville, 4479, 44^2,
— la cité, 4480, en bas dans
la ville [par opposition à la
situation élevée du château).
convenant, voir covenant.
convent, 4237, 4271, engage-
ment, promesse.
converser, 61, 3oo, 2248, de-
meurer, se trouver.
corage, coraige, 45, 33oo, etc.,
disposition du cœur ; 526,
désir.
corant, 322, i563, i825, 2286,
corrant, 2431, 2455, rapide
[épithète de mul, dromadaire,
cheval, destrier). ,,,......
GLOSSAIRE
193
cordoan, 1716, cordoain, 1949,
3162, cordoen, 1577, en cuir
de Cor doue.
coreços, coresos, voir corosos.
corner : — Taigue, 44^7' 449°»
annoncer à son de trompe que
l'eau est mise sur les tables,
que le repas est servi.
corocier (se), 4074. s'irriter ;
p.pr., *corroçanz, 196, irrité;
p. pa. corocié, 2406, 2413,
corrocié, 228, 397, irrité ;
279, 507, 83o, ému, affligé ;
21 5, effrayé.
corosos, 1917, coreços, 794,
coresos, 2961, coreçous, 2208,
3o20, irrité.
corpe, 257, 714, faute, péché.
corrant, voir corant.
corre, 3^ p. sing. prés. ind.
cuert, 3726, parcourir ; iinf.
pris substantivt), a grand — ,
4342, en grande hâte, en cou-
rant.
corrée, 4027, viscères, entrailles.
corrocier, voir corocier.
corroz, 833, colère ou chagrin :
— a enfant ne dure gueres
mie.
corsier [adj.), 2469, rapide
{épithète de cheval) .
cort, 3, 455, 533, etc., cour
royale ou seigneuriale.
cortois, 348, 602, 1489, 1997,
prudent, avisé ; cors — , 61 5,
beau corps.
costiere, 701, pente, penchant
d'une colline.
costume : avoir en — , 3281,
être habitué.
coue, 4024, cowe, 697, queue
[d'un cheval]; 38 16, queue,
arrière-garde [d'une armée].
courant, voir corant.
cous {cas suj. sing.], 276, couz,
21 32, cocu; — sofranz, 273,
21 3i, cocu bénévole.
coutel, voir coltel.
coutre, 10 17, couverture [d'un
lit], courtepointe.
couvenir : le couvendra, 2o5,
il sera obligé.
covenant, 2735, 3i23, 3847,
accord, condition stipulée.
coverture, 1826, manteau flot-
tant posé sur le dos d'un che
val.
cowe, voir coue.
cravanter, 1000, craventer ,
2617, crevanter, 3 146, faire
tomber à terre, renverser.
crestienté, 1240, 2o53, pays
des chrétiens.
crevanter, voir cravanter.
crever, 3598, 36hi, poindre
{en parlant de l'aube).
criendre, 3" p. sing. ind. prés.
crient, 3 290 (à l'asson.), crain-
dre.
crins {cas rég. plur.), 2010,
cheveux.
crine, i3o5, chevelure.
croce, 1738, crosse épiscopale ;
1735, mense épiscopale.
*croissier [ms. croissie] : parmi
un val — , 3 180 (?)
croissir, 23o2, rompre, briser.
croistre (v. intr.), 590, 910,
2676, 3896, survenir; {v.
trans)., 4264, 4265, augmen-
ter.
croiz : avoir maie — , 588, avoir
mauvaise chance.
crote, 1884, 2-]oi, crypte; 4391,
antre, caverne.
cuer, 45, 161, i63, etc., dispo-
sition du cœur; avrai le —
noir, 1289, j'aurai le cœur
i3
194
DOON DE LA ROCHE
triste; de —, 8io, 821, 3663,
du fond du cœur; de mon
— , 812, même sens.
cuidier, 636, 874, etc., /* p.
sing. prés. ind. cuit, 2454, etc.,
penser, croire; 2454,419/1,56'
proposer, avoir l'intention de.
cu[i]rie, i582, 1598, harnais de
cuir.
cure : n'a nule — , 1809, n'a pas
de souci; n'ot — de, 2403, ne
songea pas à .
cuvert, 269, 374, etc., miséra-
ble, gredin; au fém. cuverte,
654, 887, etc.
daintié [ms. dointié], 3 ro3, bien,
terre.
Damedeus {casst4J.), 11 56, Da-
medex, i 17, Damcdieus, 1000,
Damediex, 523 ; Damedé {cas
rég.) 982, Damedeu, i225,
Damedieu, 827, le Seigneur
Dieu .
damoisel, 157 {cas rég. sing.),
damoisiel, 2677, demoisel,
4220, damoisiaux {cas sujet
sing.), i3o2, 1344, etc., da-
moiseaus, 675, 924, jeune
homme noble.
dans {vocatif enclit.), io3i,
1 170, etc., messire.
darier, 2458, 3077, dariere,
2 I 58, derrière.
davant, voir devant,
de, remplacé aujourd'hui dans
certaines locutions par d'au-
tres prépositions : — Dieu,
2098, au nom de Dieu ; — bien
et — amistié, 11 79, au nom
de ; — sa suer demanda, 328,
s'enquit de sa sœur ; veez —
vostre pcre, loii, voye^
votre père; — diz et — folie,
3421, au sujet de leurs pa-
roles et de leur folie ; — l'or
et — l'argent, i388, au sujet
de; dolente— la terre, 4084,
<^ffligée au sujet de la terre ;
paour a — soi, 2 236, il a
peur pour lui; — pitié s'umi-
lie, 3042, il devient bon
sous V influence de la pitié;
— merci vos requièrent, 4079,
implorent votre pitié; estre
bien la cort, 1425, être bien
en coût-; il ot — sa mesnie,
1620, il eut comme suite ; —
loier, 40i5, en récompense;
— fait et — dit, 888, en fait
et en dit; — veoir et — 'oïr,
237, 732, 1438, — 'oïr et —
veant, 261-, par la vue et par
l'ouïe; — costé, 3870, à côté ;
— devant, 209, devant ; —
la vostre aventure ! 448, quel
fut votre malheur!; partitif,
— tante bone enseigne i peûst
on veïr; 3923.
deci, voir ci.
decoper, 2o58, 3614, tailler en
pièces.
dedans, 4248, dedanz, 2692
{prép.), dans.
dedesus : par — , 3i63 {prép.),
pardessus.
defenir, ^()2\i, faire halte.
deff'aé, vo/r desfaé.
deffaillir, 3^ p. sing. prés. ind.
dertaut, 3bi3, manquer.
deffendre : s'onor li defïent,
2619, 2624, défend contre lui
son domaine.
deffier, voir desfier,
defl'ubler, 3244, defubler, 3371,
se dépouiller [d'un vête-
ment].
défiler, 3007, couler.
GLOSSAIRE
195
defors {adv.), 1625, dehors;
{prép.), 741, en dehors de.
defubler, voir deffubler.
degré, 1624, 1628, etc., marche
d'un escalier.
dehait, 1797, 181 1, 4074, xMa/-
heur.
dejoste {adv.), i5i6, à côté;
(prép.), 2763, à côte' de.
dejus, i352, en bas.
delaier [inf. pris substantivt),
2764, délai.
delez [prép.), 827, 363, 38o6,
à coté de ; 1 123, 3646, le long
de; par — , 4384, à côté de.
delitier (se), 3729, s'amuser, se
distraire.
délivre : a — , 2 352, librement,
sans obstacle.
délivrer, 1666, donner, remet-
tre ; 2891, donner à violer ;
(v. intr.) 6bg, prononcer des
paroles (?) ; — d'un fil {verbe
intr.), 937, 954, mettre au
monde un fils ; se — , 78,
s'acquitter.
deloi, 404, délai.
demeine (adj.), 4076, voir de-
moine.
démener, 45g, 701, 707, 258o,
maltraiter; — amors, 5o,
— tel duel, 1354; — joie,
1939, 2108,4426,4470,4474;
— granz riz, 729 ; — tence,
2338, mener.
dementer, 2826, 4347. se la-
menter; se — , 281 3, 383o,
même sens.
demoine, demeine (adj.), qui
appartient en propre : fié —
5i8; alué — 3558 ; qui appar-
tient au seigneur : chambre
—, 3124, tref — 3946,4076;
{SUbst.), 2221, 2223, 2225,
2270, 3558, domaine, terri-
toire appartenant en propre
au seigneur.
demoisei, voir damoisel.
demorer, 1278, 1799, ^687,
tarder ; ne demorra nient,
ijS, cela ne tardera pas ; sans
— , 1751, sans délai.
demostrer, 275, montrer, dési-
gner ; 47, expliquer, racon-
ter.
denrée, 5o6, 2535, etc., valeur
d'un denier.
départie, 2683, 41 56, etc., dé-
part, adieux.
départir, 472, 478, 2942, etc.,
séparer ; 3477, 3898, disper-
ser.
depecier, 705, briser en mor-
ceaux; depecié, 3i6o, arra-
ché en lambeaux.
déport, 2 358, récréation, amu-
sement.
déporter : — son cors, 1989, se
délasser, se distraire ; se — ,
2323, 4255, même sens.
depri : en — ,4286, en prières.
deprier, 396, prier, demander
en suppliant.
derompre, p. pa. cas rég. plur.
derouz, 2253, arrachés.
dès (prép. de lieu), 859, depuis ;
{prép. de temps) — ici en
avant, 2912, à partir de ce
moment.
desaisier (se), 3597, se gêner,
s'incommoder.
desaisir, 2959, dépouiller.
desartir, 2297, 23o3, mettre en
pièces, déchirer.
desclore, 3633, ouvrir.
descombreement, i65, ouver-
tement.
desconforté, 882, découragé.
igô
DOON DE LA ROCHE
desduire : le sien cors — , 2186,
s'amuser, se distraire ; se — ,
2633, se réjouir; 5i6 (par
ironte)i mener une triste exis-
tence.
desdu[i]s [cas suj. sing.), 2324,
amusement ; desduiz [ms. des-
duit], 'ib74.,fête.
desersenz [ms. desersans], 3 1 26,
nom propre altéré.
déserte, 2915, récompense.
desevrement, 2799, séparation.
desevrer, 1 14, 645, etc., séparer;
1916, ïgj2, se séparer, se quit-
ter ; paroles qui desoivrent
d'amour, 487, paroles qui
séparent de l'amour, qui met-
tent fin à l'amour ; [inf. pris
substantivt) 4598, séparatior,
adieux.
destaé, deffaé, 1692, 1776, 1870,
41 12, sans foi.
destier, deffier : de t'amor le
desfie, 2668, défie-le au nom
de ton amour, dis-lui que tu
ne l'aimes plus [défi cheva-
leresque transporté dans les
relations d'amour); de s'amor
vous cieffi, 4293.
desloi, 3j3, faute, crime.
desmailer, desmailler, iio3
1 1 16, 2478, 2486, 2748, rom-
pre le tissu de mailles du hau-
bert.
desmentir, iio3, briser, mettre
en pièces.
desnaturer [v. intr. ),S']4; chan-
ger de nature, de caractère.
desnoer, 702, disloquer, dis-
joindre.
desoentre, 55 1, après.
desor [prép.), 2043, 23o4, etc.,
desour, 356o, 4291, desur,
2i^^, dessus ; de sor soi, 912,
loin de soi : 1 572, par dessus ;
par [de] desour, 4034, pardes-
sus ; [adv.) desore, 4269,
dessus.
desoz [prép.), 149, 1419, etc.,
de souz, 1396, 141 1, etc.,
desous 3771, 4337, par
dessous, 42o5, par de dessous
38 12, S0M5 ; mètre au desoz
{adv.), 22b i, vaincre, accabler.
*despersonéement [ms. desper-
sencemant], 1088, d'une ma-
nière déshonorante [manque
dans Godefroy).
despondre, développer, racon-
ter : cil jugleor desponent lor
chançons et lor fables, 3572.
desiober, 1709, vo/er [^^«].
dessiré, 1847, déchiré.
destiné, 2895, décidé, fixé par
le destin.
desiraindre, voir destreindrc.
destre : par — , 269, sor — ,
3175, sur — , 35i5, à droite.
destraindre, destreindre, 3447,
serrer, enserrer ; 3393, 3400,
4ib'5 , tourmenter ; 04.2 1 , répri-
mander.
destroit, i366, situation péni-
ble ; mettre en — , 392, accu-
ler à la nécessité de répondre.
[Cf. « Kar metez la dame
en destreit, S'alcune chose
vus dirait », Marie de France,
Lai du Bisclavret, 255) ; a [s]
destroiz [corr. a destroit],
3614, serrés les uns contre les
autres.
destruire, 449, 434, etc., tuer;
126, looi, ruiner {au sens
moral).
desur, voir desor.
desver, 406, i3i3, i327, 2376,
devenir fou ; se — , 1 3o6,
GLOSSAIRE
197
même sens; desvé, 297, 696,
etc., fou ; avoir le sen desvé,
1787, 2066, être fou.
desvestir {v. tvans.) : l'haubert
li desvestit, 4385, lui ôta son
haubert.
detranchier, 3090, 4049, detren-
chier, 3oi3, 3 168, mettre en
pièces.
devant, davant (pre'p.), 52, 2 1 58,
etc., avant •,{adv.] la teste tôt
— , 254, la tête la première ;
ou visage — ,1073, 1076,3983,
par les grenons — , 2i37;me-
tre — [un péché], 237, accu-
ser de ; de — ,209, devant.
devers {prép.), 3ii2, 3648,
3894, 3953, venant de : par — ,
4204, même sens.
devis : a son — , 232, à son
plaisir, à sa fantaisie.
devise, 5i5, ration.
deviser, 4500, raconter.
devoir : ce qtie doit? 617, grH,
1292, à quoi bon ?
di, 2o3, 468,70Mr ; touz dis, 5,
12, etc., toujours.
dignité, 4533, cérc.nonie.
dija, 38 10, exclamation .
dimenge, 2336, dimanche.
dit. 4228, parole donnée, jurée.
diva, 1709, 2197, 2242, 38io,
holà!
doble, 4371, maille double [du
haubert].
doer, 1028, doter.
doi [cas suj. plur.), 371, 400,
dui, 4491, deux.
doinst, doint, voir doner.
dointié, voir daintié.
dois, 4427, 4492, table.
dolent, 279, 3o5, etc., affligé.
doloros, 1287, afflige'.
donc, 2865, efc, dont, 235, 248,
etc ., alors ; & — , vo/r, adonc,
doner, fut. 1° p. sing. donrai,
87, r» p. plur. donrons,
II 39, 1149, 2» pers. plur.
donrez, 79; condit. /« pers.
sing., donroie, 11 74; subj.
prés. 3" p. sing., doint, 59,
dont, 2 1 14, doinst, 928, io3û ;
(absolt), 539, donner en ma-
riage ; — le don, 3298, accor-
der, consentir: se — garde
de, 2567, s'apercevoir de.
dont [conj. interr. de lieu], 140 1 ,
2372, 3541, ii'oM?;(no« interr.)
1462; {conj. de manière} 869,
au sujet de quoi; 4016, par
suite de quoi ; [interr.) 228,
273, pourquoi? ; {adv.), voir
donc.
dormir (se), 3b2y, dormir.
doter, 2025, 2034, etc., douter,
3432, redouter, craindre ; ne
vous dout mie, 3797, je ne
vous crains pas ; ains mort ne
dotèrent, 3849, jamais ils ne
redoutèrent la mort; — sa vie,
3740, craindre pour sa vie;
jamar en doterez, 1662, inu-
tile de rien craindre; se — ,
même sens; ne vos dotez néant,
4401, n'aye^ aucune crainte.
dragon, 3857, emblème repré-
senté sur une oriflamme.
drap, cas rég. plur. draps,
3699, ^'"^^ 4069, etc., étoffe ;
2705, 3 160, 3498, 35o4,
4037, vêtements; les blancs
dras, 4o56, le froc blanc des
Cisterciens.
drecier, 527, 3489, élever sur
la croix; i 398, attacher, har-
nacher; se — , 41 o3, se lever.
droit [adj.), direct: — e anses-
serie, 4147, — héritage, 3558,
198
DOON DE LA ROCHE
— tenement, 3124; direct,
légitime : droiz emperere,
428, 65g, — seignor, bgo,
3261, 3298 ; légitime: — bap-
tisement, i56; juste, 401,
1269, 1370; ce est — , 919,
c'est juste, naturel] {subst.)
401, 464, 2424, chose juste et
équitable; n'a si grant droit
ne soit a tort tornez, 427, il
n'y a droit si juste qui ne soit
changé en toi-t; le droit: uroiz
a — repaire, 204, le droit
retourne au droit {la justice
trouve toujours son compte) ;
avoir — , 1061, 4006, 4425,
avoir raison ; [adv.) — a [sans
mouv.), 1424, 1481, 3473,
4088, ^^i^^, justement à; [avec
mouv.), : 1791, 4o3g, 4199;
— de, 4267, justement de ;
— nient, voir nient.
droitement, 1043, 1068, tout
droit.
droiture, /\.b?>, justice.
droiturier, 76, i652, légitime;
— oré, tSgô, igjg, veut favo-
rable.
dromadaire, id63, i58r, 1696,
igbi, 2o38, espèce de cha-
meau.
1. dru, cas rég. pi. druz, io54,
ami; dmt, ^6 \, amie, épouse.
2. dru : terre — e, 21 j?i, fertile.
ducheé, 90, duché.
duel, 626, 716, etc., cas suj.
sing. dues [lire dues], i3o3,
dues, 325 1, chagrin, malheur.
dui, voir doi.
durée : se longues ai — , 41 32,
si je vis longtemps.
durement, 197, 824, 4401, /or-
tement.
durer : tant com l'espée dure,
3790, tant com hante II dure,
1849, 4182, de toute la lon-
gueur de l'épée, de la lance.
eage, aage : ses aages, 532, son
développement corporel par
rapport à son âge; de moit
grant eage, 4314, bien en âge
de se défendre ; en son eage,
3563, dans sa vie.
efforce, 3649, esforce, 863,
force armée, troupe.
efForcement, 3i3i, même sens
que efforce.
*efForcieement [ms. effreemant],
109Ô, à grand effort.
efforcier [y. intr.), 3652, aug-
menter, croître.
effrcemant, voir etTorcieement.
el, 3 18, 2o32, autre chose.
*eluné [ms. elimé], 2io5, [vin]
oîi ily a de l'absinthe (aluis-
ne). La forme avec e est nor-
male en lorrain. Cf. Godefroy,
v° aluisnier, où il faut proba-
blement lire aluisniez au lieu
de aluisniers [cas suj. sing.).
emblée : a — 3893, en cachette.
embler, 420, 3668, voler, déro-
ber ; s'en — , 3886, s'enfuir.
embricher (s') [corr. s'embus-
cher], 2279, s'embusquer.
*embronc : le chief — [ms. a
uif bron], 145, la tête incli-
née.
emine, 365, 608, mesure de
capacité.
emparlé, 658, qui sait parler,
disert.
emperier, 2775, impérial.
empevré, 2104, saupoudré de
poivre.
empirier {v. trans.), 3840, en-
dommager; {v. intr.) 1444
GLOSSAIRE
'99
empirer; n'ert li dux enpiriez,
32 58, le duc ne s en portera
pas plus mal.
emploie, 45 1 8, placé, mis à sa
place.
empoindre, 2367, atteindre en
portant un coup.
en (prép.) : — nom Deu, 1932,
3144, au nom de Dieu; —
après, 25o, ensuite.
enarbrer, vozVenerber.
encensier, 2822, encensoir.
encerchier, 4244, parcourir en
cherchant.
enchacier, 325g, enchâsser,
2240, chasser, mettre à la
porte; voir enchaucier.
enchanter,! 1 5, 2g56, ensorceler.
encharner (s'), 3742, s'attacher
[à sa proie].
enchâsser, voir enchacier.
enchaucier, 1092, 1107, 2307,
2348, enchacier, 3695, pour-
suivre.
enclin, 817, incliné, penché.
encliner, 256g, saluer.
enclore, 302 2, enfermer.
encombrier, 928, 21 12, etc.,
malheur, dommage; chai d' — ,
377 1 , // tomba sous la douleur.
encontre (adv.) : aler — , 1893,
3667, 38i5, se lever — , 394,
aller, se lever pour aller à la
rencontre; (prép. ),3-jo5,4.4.-jb,
au devant de; aler a 1' — , 376,
4470, aller au devant.
encontrer, 548, 690, etc., ren-
contrer ; {impers .) survenir:
bien nos est encontre, i656,
etc., nous avons eu de la
chance; mal vos est encontre,
1706, vous n'ave^ pas eu de
chance; mar lor est encontre,
2 55o, même sens.
encorper {v. trans.), 1 1 68, por-ter
préjudice à.
encor [suivi du subj.), même si :
— Fust il bastars, 1467.
encortiner, 4476, orner [une rue]
de pièces d'étoffes, en l'hon-
neur d'un personnage ou
d'une fête.
encrime, encrisme, 121, 3327
[épithète de félon; cf. Roma-
nia, li, 108).
encui, 1798, 2206, ancui, 1657,
aujourd'hui même.
endementre 2341, cependant,
sur ces entrefaites.
endroit (prép.), 2395, au mo-
ment de; 98, selon.
* enerber [ms. enarbrer], 3io5,
empoisonner.
entant, cassuj. sing. enfes, 282,
669, etc., enfant; i858, jeune
homme non adoubé; 74, 1 179,
etc., jeune noble en âge de
porter les armes.
enflé, 709, gonflé de colère ;
i653, envieux, méchant.
enforcier, 733, renforcer, aug-
menter; enforcié, 1494, fort
puissant.
enfouir (s'), 358 1, s'enfuir.
enfraindre : ma terre en est
enfraitc, 3 16, ma terre est
dévastée .
* enganer, 171 3 [ms. enginiés,
éd. enginiez], 19 14 [ms. engi-
n\e], tromper (voir engignier).
engenoiller (s'), 166, s'agenouil-
ler.
engien, voir engin.
engigneor {cas rég. sing.), 3g25.
ingénieur.
engignier, 3o65, 3736, engi-
nier, 941, tromper; voir enga-
ner.
200
DOON DE LA ROCHE
engin, 896, ioi2,engien, 2942,
2954, ruse, manœuvre; 3836,
3926, machine de guerre.
enginier, vo/r engignier.
engolé, io5, iSyi, 1622, 1943,
2002, muni d'un collet.
enmaler, 4596, mettre [les baga-
ges] dans les malles.
enmi, 797, au milieu de.
ennuier : li ennuerent, 4254,
Vennuyèrent 'j^nrimé sont de
l'ost, 3931, sont fatigués de
servir dans l'armée.
enoi, 624, chagrin, ennui.
enor, voir honor.
enpiriez, voir empirier.
enpoignier, 3214, tenir à la
main.
enquerre, 1921, 3i55, recher-
cher, enquêter; 2552, deman-
der [des nouvelles].
enragier, 785, 820, etc., enrai-
gier, 3179, i33ij, devenir fou;
s' — , 2376, même sens; —
d'ire, 22 16, 4149, devenir fou
de colère; enragié, 2460,
fou; fel et enragiez, 87g, 937
ens, voir enz.
enseigne, enseingne, ensoingne,
1967, 4238, 4292,4321, signe
de reconnaissance; 36oi, cri
de guerre ;2-j83, 3oot, 3923,
4340, 4368, oriflamme, gon-
fanon.
enseignier, 3167, ensoignier,
3227, indiquer, montrer ;en-
soignié, 3225, averti, intelli-
gent.
cnseler, 37o3, seller.
ensembler, 2600, rassembler,
réunir.
ensiment, 4449, de même.
ensoignier, voir enseignier.
ensoingne, voir enseigne.
ensuire, 3 145, poursuivre.
entailiié, 1389, 2465, façonné,
gravé.
entalenté, 84, désireux.
ente, 1396, 1408, 141 1, 1419,
arbre fruitier .
entendre, prêter attention : a
homme n'entend, 170, elle ne
fait attention à personne; en-
tendez ça vers mi, 1 146, vers
moi (en) entendez, 1963,
envers moi entendez, 3 10,
a moi (en) entendez, 2080,
dirige:^ votre attention de
mon côté, écoutez-moi ; l'enfes
entendi de Doon, 994, Ven-
fant entendit Doon .
enterin, 4612, entier.
entrabatre (s'), 2507, se jeter
mutuellement à terre.
*entrant [ms. antrée] [subst.),
2929, commencement.
entre : — lui et Malingre,
1870, — lui et Hardré, i85i,
à eux deux, lui et M. et
H. ; . — li niés et l'oncles,
41 33, à eux deux le neveu et
l'oncle ; — mon aubre et mi,
1275, à nous deux, mon arbre
et moi; — ci que a [prép.
de lieu) 177, 192, etc., jus-
qu'à; [prép. de temps) i65o,
d'ici à.
entrebaisier (s'), 2749, 2750,
3976, etc., se donner mutuel-
lement des baisers.
entreci, voir entre.
entreconoistre (s'), 2420, se re-
connaître mutuellement .
entrée, 4224, commencement.
entremetre (s'), 3264, se mê-
ler [d'une chose].
entrencontrer (s'), 4471-2, se
rencontrer .
HHOGLOSSAIRE
201
entreprendre, 197, saisir, atta-
quer; de péchié entrepris,
235, entaclié de péché; —
por, 3449, prendre pour
[l'^p. sing. prés. ind. entre-
prains).
entrer : est li jors entrez
que, 86, le jour est venu
où; li mais doit — , 649,
mai doit commencer ; s'en
— , 3594, 4474, entrer; (inj.
pris substantivt), 3g36, en-
trée.
entretenir (s'), 3996, se soutenir
mutuellement.
enuit, 1641, 2804, etc., cette
nuit; — mais, 3o33, 3047,
etc., même sens.
envaïr, i35, 2290, attaquer;
182, violer [une femme].
envaïs [cas suj. sing.), 3936,
assaut.
envers, 3io, 466, etc., vers.
enverser, 1849, renverser.
envie : porter — , 2gbj, haïr.
envier, 3^ p. sing. prés. ind. en-
vie, 1479, e>^voyer.
environ, 1092, 1107, 1993,
alentour.
envis (a), 3915, malgré soi, à
contre cœur.
envoisier (s',, 45o3, s'amuser,
se divertir.
enz, i38i, 1957, etc., ens, 3420,
4089 (adv.), dedans; —en,
ig33, etc., — es, 2643, — ou,
1039, etc., au milieu de, dans
Vintérieur de.
ermin, voir hermin.
errant, 2281, 3ii8, 3972, aus-
sitôt.
* errée [ms. ferrée] , 646 ,
chemin.
erre ment, 4455, voyage.
errer, 2o36, 1623, 4.4.5^, chemi-
ner, voyager ; sus ou palais
errant, 335, mon tant dans le
palais; [inf. pris substantivt),
1981, voyage.
es, ez, voici : es le ouvert
Tomile, io34, es Guene-
lon, II 28, etc., ez le duc,
32 13; — vos, 535, 987,
etc., ez vos, 3967, même
sens ; es les vos arrivez,
1980, les voici débarqués {Cf.
estes).
esbais, 3o85, (?).
esbaudir, 85 1, réjouir.
escapin, 35o5, soulier léger.
eschac, 4398, cas suj. sing.
eschas, 2545, butin, prise.
eschaillon, 4o3i, échelon.
eschaquier, 1069, échiquier.
escharni, 2746, raillé, tourné
en dérision; 11 36. 3g-2i,joué,
trompé.
escharpe, 1077, 1949, 3 162.
4201, sacoche de pèlerin.
1. eschas, 1777, 2358, jeu
d'échec.
2. eschas, voir eschac.
escheri, peu nombreux : a mes-
nie — e, 2210, 2220,2642;
absolt, a — , 343, sans être
accompagné, seul.
escheveler : — sa crine, i3o5,
s'arracher les cheveux.
eschevi, 3o34, 4609, svelte,
élégant.
eschinée, 4 181, 4372, échine,
colonne vertébrale.
eschiver, 3957, préserver.
eschois [cas rég. plur.), i38o,
esquif, bateau.
escient, esciant : sachez a — ,
2604, "i^bi, s ache^ bien; m'\en
— , 2391, par le mien — , 657.
Î02
DOON DE LA ROCHE
SSy, etc., par ma foi ; tôt a
vostre — , 2 1 32, vous le save^
très bien.
escïentros [ms. assiantrous, es-
sciantiouz], 12^^, savant.
escillier, voir essilier.
esclairier, voir esclarier.
esclarcier, 3487, devenir clair.
esclarier, esclairier : quant
l'aube est esclarie, 22 13,
quand le jour est venu ; li
jors est esclairiez, 2757,
esclarlez, 35i3, le jour a lui.
tsc\2iX.ev [v.trans.), 3oo6, briser,
faire éclater.
esclavain, i834 [corr. clavaiii
et voir ce mot] .
escJavine, 2563, vêtement de
pèlerin.
* esclice, voir lice.
escondire (s'), 421, se justifier.
escondit, jbi f-jyj, justification
d'un accusé par une preuve
légale, ordalie ou duel judi-
ciaire {cf. le Tristan de Bé-
roul); rendre — , 33i i, faire
amende honorable.
escoter, 3304, donner un écot.
escrier, 1079, 1^06, etc., crier;
{suivi du cas rég.) 1162,
3744, etc., interpeller; —
merci , 3807 , demander
grâce.
escriner (s'), i3o5 {var.), s'arra-
cher les cheveux.
escu, 4069, écH, monnaie.
esertota —, 3397, satisfait,
content.
esforce, voir etîorce.
esfroiz {cas suj. sing.), 353,
mouvement, tumulte.
esgarder, 687, 735, etc., regar-
der, observer ; — por, 3449,
considérer comme.
esgaré, 1295, 2593, 2889,
éperdu, fou.
esmaier (s'), 1488, 2029, etc.,
se troubler, s'effrayer.
esmarri, 4295, attristé, troublé.
esmaus {cas rég. plur.), 201 3,
émaux .
estner, 4344, estimer, dénom-
brer.
esmeré, 1619, 1664, 1827, 2081,
pur, affiné (épithète d'or).
esmovoir {inf. pris substantivt),
2971, mise en marche [d'une
armée] .
espandre, 442, 371, etc., répan-
dre.
esperdre (s'), i328, devenir
éperdu .
esperonnée, 4168, 4462, coup
d'éperon.
esperonner {inf. pris substan-
tivt), 2bo3, action d'éperonner.
espices, 3700, parfums.
espie, 3290,3304, 3920, espion.
espié, 1045, 1701, 1837, 2288,
2294, 2432, 2456, 2467, 3785,
385 1, 4387, épieu, lance.
esploitier (v. intr.), 3o37,3iio,
3492, agir, mettre ses idéesà
exécution ; 091, 3 S 1 7, faire
vite, se hâter.
espoenter (s'), 25i8, 3i2o,
prendre peur.
esponde, 1616, 2711, rebord du
lit.
esposer {v. trans.), 692, 4533,
unir par un mariage ; {inf. pris
substantivt), 4536, mariage
espringuer, 4564, danser.
espris, p. pa. «i'esprendre, 23o,
allume; de sens — e, 56o,
aimant la sagesse.
essaiant, 1180, brave, coura-
geux.
GLOSSAIRE
203
essaier, 35o2, 3522, mettre à
répreuve.
essaucier, 5, 41 3o, élever.
essauz {cas. rég. plur.), 1867,
assauts.
esciantiouz, vozrescïentros.
escillier, voir essillier.
essil, 222, 2943, exil.
essillier, escillier, 3 182, 3823,
exiler; 3i5o, 3237, 3475,
etc., ruiner, dévaster.
establer, 1696, mettre à l'écurie.
estache, 2157, poteau [pris au
figuré), soutien.
estain, 3727, laine peignée.
estaint, voir estanc.
estamine, 438, 447, vêtement
de dessous porté par les
clercs.
'estanc [ms. ataint, estaint],
1626, 2o38, fatigué.
estant: s'est levez en — , io65,
s'est mis debout ; saillir en — ,
2 1 36, se mettre sur pied en
sursaut.
estendre (s'), 3453, se jeter par
terre de tout son long.
ester, 3^ p. sing. ind. prés, esta,
1009, 3064; 3* p. plur. fut.
esteront [employé comme fut.
d'estre), 39x3; 3^ p. sing. pf.
estut, 1 186, 1 195, 1342 ; 734,
1792, 2837-8, rester debout;
1 186, 1 195, demeurer, rester;
se longes i esta, 1009,5'// reste
ici longtemps; s' — , 1342,
même sens; laissier — . 618,
667, 712, etc., laisser tran-
quille \com vos esta? 3064,
comment alle:{-vous ?
eues vos, 202,371,3353, voici
{voir es).
estoner, 25x8, ébranler.
estor, i832, 1841, etc., estorz
{cassuj. sing.), 285o, combat,
mêlée.
estorchier, 4041 (?).
estordre(v. intr.), 2945, 4396,
s'échapper, prendre le large ;
s' — , 365o, même sens.
estormir, 2282, réveiller en
donnant l'alarme.
estorz, voir estor.
estour, voir osterin.
estout, 341 X, sot, arrogant.
estovoir, 3^ p. sing. ind. prés.
estuet, 2762 ; 3^ p. sing. fut.
estovra, 4240, J« p. s. pf. estut,
l'i^i, falloir, être nécessaire.
est[r]ain, 3403,/éw. estrange,
1294, 3683, étranger.
estre : ert que 842 {cf., pour
cet emploi, Victor Mortet,
Langue de Vitruve,/>. 10); s'il
est qui, 843, s'il y aqqnqui;
comment qu"il est mes homes,
4583, en quel état sont mes
hommes ; {inf. pris substan-
tivt), 1196, manière d'être.
estrée, 3666, route.
*estrif [ms. estre], 3323, que-
relle.
estroit {adv.), 4.0^5, étroitement.
estros, estrous : a — , i85, 225 1,
2401, certainement.
estuet, estut, voir estovoir .
esvertuer (s'), 2 x jô, faire preuve
de sa force.
euz, 3924, yeux.
eve, 4x3, 681, aive, 391g, e.2w ;
— de! cuer, 3578, — des ieus,
2974, larmes.
ez, voir es.
fable, 3572, conte récité par un
jongleur; 36x2, bruit, tu-
multe {'i).
façon, i3i, 2249, visage.
204
DOON DE LA ROCHE
faé, 1678, doué par les fées,
heureux.
faillir, 3^ p. sing. impf. subj.
fausist, i43o;f. pa. taliz [cas
sujet sing.), 1088, failli, 1891,
etc., 763, 1088, manquer à,
abandonner dans la détresse;
4155, être infidèle; ,1430,
4569, 4628, finir, se ter-
miner ; li membre li faillent,
36o2. les membres lui man-
quent, cèdent sous elle ; est
vos failliz avoirs? \'j2o,ave^-
vous perdu votre fortune <;
au meillor ai failli, 4210, le
meilleur me manque aujour-
d'hui; ta proesce est faillie,
206(5, ta vaillance a fait fail-
lite; bien i poez — , 4225,
vous sere:^ obligé de vous en
passer; failli avez au mien
[ostel], 3253, l'ous n'avej^ plus
droit à mon hospitalité.
faire, fere : me faites comme,
1238, vous me traite^ comme ;
comment le fait ? 33o, com-
ment se porte-t-il ? Tomiles
le fait batre garçons et pau-
toniers, 926, Tomile fait en
sorte que g. et p. le battent ; —
les juïses, 4o5, se soumettre à
un jugement de Dieu ; — ses
noces, 632, célébrer son ma-
riage ; — ses talenz, 2725,
satisfaire ses désirs amou-
reux;— que fous, 201, 3617,
etc., — que proz, 348, — que
saiges, 3i32, agir en ; molt
ou tant faire a, 33, 109,
3i3, etc., mériter d'être,
être à.
fais, 2.32, charge.
faitement, 707, de telle ma-
nière.
faldestuel, r545, faudestuel ,
i3i5, 1896, fauteuil.
faliz, voir faillir.
*fanon [ms. fenon"|, 2948, mani-
pule.
fantosme : torner a — , 43o,
faire croire que c'est un
songe.
faudestuel, voir faldestuel.
fausist, voir faillir.
fautré : fautrées mules, 373,
mules ayant une sambue de
feutre.
feauté, 4370, foi et hommage
f[e]el, 2669, fidèle.
fel, félon, 707, 87g, etc., 3328,
méchant, coléreux; [subst.),
2817-8, 3040, etc.. gredin,
criminel.
félonie, 688, acte criminel; 1472,
chose mauvaise, tromperie ;
121 3, traîtrise, fait d'être
traître.
fendre [v. intr.), 149, se fendre;
— d'ire, 277, 2794, crever de
colère [voir fondre).
fenon, voir fanon.
fere, voir faire.
i'crir, frapper : prés. ind. /" p.
sing. fier, 139, io32, etc.,
J?<= p. sing. fiert, 285, etc.;
impér. j2« p. plur. ferez, 1 1 19,
etc.;pf. .?" p. sing. feri, 1076,
etc., ferit, 1434, etc.; subj.
prés. /"■* p. sing. fiere, 1098;
impf. 3^ p. sing.. ferist,
4i5o; p. pa. féru, 1039, etc.;
4034, fixer à coups de mar-
teau.
fermer, 1576, 1S22, fixer, atta-
cher.
fermeté, 38, 83o, lieu fortifié.
ferrant, 1 1 59, gris (épithète de
cheval).
GLOSSAIRE
iob
ferré, 1577, 194g, muni d'une
pointe enfer.
ferrée, 646 [faute du ms. pour
errée ; voir ce mot].
féru, voir fenr.
fcste : tenir sa — , voir tenir.
û,fém. tie 2689, assure; de — ,
1467. i55i, assurément, avec
certitude.
tiance, 90 1 , certitude, confiance ;
4273, serment, parole donnée.
tiancer, 1 154. donner sa parole;
3 1 86, promettre foi (sermen t
féodal) .
fié, 5iH,i4go, etc., fief, domaine;
servir de — , 41 lô, servir
comme vassal.
lier, 176, iob(>, etc., grand, ter-
rible ; au vis — , 1498, 2771,
au beau visage; 1680, beau
[épithète de cheval).
fier : p. prés, liant a, 11S8,
ayant confiance en .
fier, riere, fiert, du v. ferir ; voir
ce mot.
I. fin (adj.) : — e veriiez. 191 5,
vérité pure.
2. fin [subst.) : prendre — , 2270,
2278, etc., faire halte; a quel
— que ce soit, 920, quelle que
soit l'issue.
riiicr {v.trans.,, ^bb, 2b2i, etc.,
finir, terminer; [v. intr), 1 2 1 6,
T239, s'arrêter, faire halte.
flaide, 3376, tourelle (?)
flecié, 3 1 6 1 , fléchi, ployé.
floquant : chapes floquans,
3 1 6 1 , chapes à floches (?; .
riori, 2398, peint à fleurs [épi-
thète de targe; ; 3734, grison-
nant {épithète de barbe).
dote : a grant — . 23 1 5, en grand
nombre.
foi, 2747,4235, parole donnée;
a la moie — , 1402, 1637, etc.,
à la moie foie [lire foi], 1867,
2243, par ma foi : en la moie
— ,2373, '52-j8, même sens; par
— , 823, ii53, etc., même
sens; par la — que je vous doi,
564, 607, e/c, par la parole
que je vous ai donnée ; por-
ter — . 940, 937, tenir parole.
toie, voir foiée.
foiee, 1286 [ms. foiez, foix,
au plur.], 1890 [ms. foix, au
plur.\. toïe, 4429 [ms. fois],
fois.
foilli, 127Ô, couvert de feuil-
lage.
foillier, 1412, 1414, 3i75, se
couvrir de feuilles.
foindre (se) : de trambler te
foing [corr. foins ou fains],
3395, tu redoutes de trem-
bler de froid.
foing, voir foindre.
fol : fém. foie, 382, déver-
gondée.
folagc, 4320, folie.
folie, 3747, 3762, action dérai-
sonnable; 3237, propos incon-
sidéré: de — 3414, 3421, par
— , 3i66, 3728, follement ;
' restera [ms. recevra] par — ,
1 2 1 g, fera une folie en restant
ici [voir la note aux var.).
fondé (à l'asson.), ibjg, fondu.
fondre : — d'ire, i36, 990,
crever de colère {cf. fendre
d'ire, 277) ; — de duel, 980,
mourir de chagrin.
forbi, 2285, 44o3, 4035 {épi-
thète despée), 2288 [épithète
rf'espié), aiguisé.
force, 1082, 1092, I 107, 2335,
troupe de combattants ; a — ,
3i22, 4071, a — et poestô ;
2o6
DOON DE LA ROCHE
2377, par — , 2863, 392g,
de force.
forche, 1991, partie de Varma-
ture d'une tente ; forches
(plur.), 3826, 3870, 4o3o,
gibet .
forjurer, 467, 2694, abandonner
(primitivement , jurer que
de'sormais on n^atira plus rien
de commun avec qqn).
forment, 169, 499, etc., forte-
ment, beaucoup.
fornir, 3927, garnir [une machi-
ne de guerre] ; bataille for-
nie, 2'i^o, forte bataille.
fors [adv.), 849, i855, etc,
dehors ; [prép.], 44, io83,
excepté; — de, 1737, 2943,
etc., hors de.
forsener, 3^ p. sing. prés. ind.
forsane (à Vasson.), 2498,
2 5oi, devenir fou.
fosse, 23 18, cachot.
fraindre, briser : p. pa. frait,
i833 ; fraint, i846[w^. frains],
23o2, 2492 [impr. frait], 4174,
etc.
fra[i]sé, 1994, brodé.
fraisnin, voir fresnin.
franc, 182, 3 10, etc. , noble, géné-
reux ; au cors — , 241, au
beau corps.
fresnin, 2353, 3oo4, fraisnin,
3767, en bois de frêne [épi-
thète de lance, hanste).
frestel, 1991, fleuron qui ter-
mine extérieurement le piquet
central d'une tente; cj. Gode-
froy, V» fruitel.
froer, 1695, 3855, 4174, bri-
ser, rompre.
froissier, 3oo6, 4372, endom-
mager, blesser; 3092, briser
[une porte].
froncé, 2568, plisse
fuant, 1702, '5368, fuyant.
fuere, 1668, fourrage.
fuie, i852, 3014, etc., fuite.
fuitis {cas suj. sing.), 1471, fu-
gitif.
fust, io32, bdtojt ; lobi, bois de
lance.
gaaignier, gaainnier, 3i86,
3193, faire de la culture, la-
bourer .
gab, cas rég. plur. gas, ion,
plaisanterie.
gaber, 695, 35/3, se moquer,
plaisanter.
gaignarz {cas. suj. sing.), 963,
1004, violent.
gaignon, voir waignon.
gainchir (se), voir guenchir.
gaite, 3576, sentinelle.
gaitier, 3919, surveiller; se — ,
3o8o, 325y, se garder, prendre
garde.
galoné, 2010, orné d'un fil d'or
[tresse de cheveux] .
gante, 2104, oie sauvage.
garçon, 160, i63, £?/c.,garchon,
194, valet, domestique de bas
étage .
gardain, 1429, gardien, défen-
seur d'une ville.
garde : avoir — de. 11 24, se
soucier de, avoir peur de ; se
doner — , 2567, s'aperce-
voir.
garder : cui Deus gardoit de
perde, 1 307, que Dieu protège
de la mort ; — la cort, 67,
rester à la cour ; {suivi de ne
et du subj.) 1298, i56i. etc.
prendre garde de; 791, 141,
etc., regarder, voir; ne —
Tore, 2402, s'attendre à tout
GLOSSAIRE
207
moment; 2258. considérer
comme valable; {réjl .): e\ ne se
garde d"ome, 582, g 17, etc.,
elle laisse approcher décile
tous les hommes.
garir (v. trans.), 440, 45o, etc.,
protéger, préserver; 145 1,
etc., guérir ; {v. intr.), 218,
4197, se mettre à Vabri, se
sauver; se — , i365, 3212, se
défendre.
garnemenz, guarnemcnz [cas
rég.plur.), 26, 1 74,275 3 . 2797,
vêtements; 234, 247, vête-
ments de femme; armes et — ,
. 26i5,prenentlor— ,io84,guar-
nemenz vesiir, 4390, armure.
garni, guarni: du murtre bien
— , 202, bien en sûreté contre
l'accusation de meurtre ; 2643,
4494, 4587, riche, plantureux
(épithète de France) ; 2696
[épithète de cliannbre).
garnir, 2271, 2920, 2923, mettre
en état de défense ; 3952, mu-
nir [de provisions],
gas, voir gab.
gaste, 3237, 3365, 3579, dé-
vasté, ruiné.
gaster, 876, 1137, 2177, dé-
vaster.
gehine : mètre a — . 201, faire
avouer [par la torture).
gehir, 2o5, 497, 3645, 3944,
avouer .
gemé, ibi5, orné de gemmes
[épithète deh.tAV.me:) ; c/. jame.
gentil, 17, 32, etc., noble.
gésir, être couché, dormir :
3* p. sing. pf. ind. jut, 3 20,
2084, etc.; p. pa. geû, 878.
geste, 795, 4628, chronique
• [source originale de la chan-
son); 2617, race, famille.
geter, gieter, 1429, 1634, 2553,
etc., chasser [d'un pays] ; —
un sospir, 208, 755, 4208,
pousser un soupir ; 2598,
2734, 2828, faire sortir [de
prison] ; — fors, i855, mettre
[la tête] hors de la fenêtre.
geû, voir gésir.
gieter, voir geter.
gironé, ^iii a des bandes cou-
pées en biais : [en parlant
d'un « bliaut »), 072, 1944,
2oo3 ; [en parlant de Vétoffe
d'une tente), 1993.
glacier (se), 2711, se glis-
ser .
gloton, 1290, glouton, 1234,
cassuj. «iKg-. glous, 3767, gloz
166, etc.. individu méprisable.
goule, 3680,4034, gorge; goles
[plur.], 800, col de fourrure
d'un vêtement.
gracier, 323o, remercier.
gratiner, 705, gratter, labourer
[la terre] avec les ongles.
graignor, 3465, greignor. 255,
838, 2363, gregnor, 1424,
plus grand.
graile, 18 19, 38oi, trompette.
graïllier, 4042, griller.
grain, io65, 1126, 1604, 1674,
triste, fâché.
gré : de — , 77, i587, etc.,
de bon gré; venir a —, voir
venir; servira — , 3o3i,ser»ir
de manière à plaire.
gréer, 2752, accorder.
gregnor, greignor, voir grai-
gnor.
grenon, 69, 2 i 37, moustache.
greslei, 3o34, svelte.
grever, 3" p. sing. prés. subj.
griet, i525, 028, grever,
affliger.
208
DooN t)E LA Roche
grief, 2447, 4598, difficile, labo-
rieux.
griet, voir grever.
griois : feu —, 4064, feu gré-
geois.
gris (subst.), io5, 633, 3o56,
3437, petit-gris, fourrure ;
[adj.), 779, de petit-gris.
guarn-, voir garn-.
guenchir, 960, détourner: —
les règnes, 3oi4, tourner
bride; {réjl .), se gainchir,
1 178, se détourner.
' guerdon, voir guenedon.
gucrpir, 2347, 2644, etc., aban-
donner.
guerredon, 3i34, 3383, *guer-
don, 2818, g[ui]ardun, 332b,
récompense.
gui[ar]don, voir guerredon.
guier, 1868, diriger, conduire
[une affaire].
guigue, 4559, instrument de
musique.
guimple, 2974, guimpe [de
femme]; cf. guiute.
guinte, 3 1 64 [ms. et impr. guim-
ple], 3i6o, 3i63 [ms. guinte,
guite], capuchon, vêtement de
pèlerin [ou turban?).
guise : a — de, 3839, ^ '^ '^^"
nière de.
gurpir, 1238, quitter.
habergier, voir herbergier.
haï ! 439, 448, etc., exclamation
de douleur [cf. hé !).
haichier, voir haschiere
haïr, 2^ p. plur. prés. ind. haez,
423; .?«/?. sing. impj. haioit,
2365, 2369; 3" p. sing. prés.
subj. haice, 2267.
haitié, 332, en bonne santé,
dispos.
haitier (se), 99, se réjouir,
s'ébattre.
hanste, i833, 1844,^(0., hante,
1849, 2492, etc., bois de la
lance.
haon, voir chaon.
harbergier, voir herbergier.
hardement, 182, io56, etc.,
hardiesse, audace.
harnois, 1377, équipage, ba-
gage.
hart, 4000, corde de gibet.
*haschie, 852 [ms. adventure],
4o53 [ms. haichiej, souf-
france, tourment [cf. has-
chiere).
*haschiere [ms. haichier], 4048,
même sens que* haschie.
haste, 3334, viande rôtie.
haster, loio, attaquer.
haubergage, 3604, hospitalité
[cf. herbergier).
haubert, 1847, 4383, aubert,
2297, 2486, ausberc, 3ooo,
cotte de maille.
haucer : — sa parole, 434, éle-
ver la voix.
[h]autain, 3419, élevé.
hautement, 263, 882, 997, à
voix haute.
hé: coillir en — , ^%Ç), prendre
en haine.
hé! 38o, 588, interjection ex-
primant la peine [cf. haï!).
heaume, 4385, hiaume, i8i5,
etc., iaume, 25 16, 3004, cas-
que.
*henepier [ms. henapies], 38o3,
casque (?).
herbergier, i3o9, etc., haber-
gier, 2i63, e(c., harbergier,
3406, haubergier, 323i, hau-
berjer, 3297, donner V hospi-
talité à qqn ; 1662, 2i63,efc.,
GLOSSAIRE
209
— avec qqn, 3222, 323 i, etc.,
loger che:( qqn; i3og, loger,
prendre logis; estre herber-
gié, 2427, être campé; s' — ,
352 1, prendre gîte.
herboi, cas rég. plur. herboiz,
379, espace couvert d'herbe.
hérité {subst. fe'm.), 2062, 22o3,
35 II, domaine, bien.
hermin, hermine, ermin, 42 14,
fourrure d'hermine, io5, 270,
1671, 1622, 1943, 2002, 2253,
2261, manteau d'hermine ;
(adj.), 26, 800, 2137, 4015, en
hermine.
hiaume, vozV heaume.
honir, 225, 264, etc., honnir.
honor, 2252, 2590, etc., anor,
2695, 4016, enor, 8, 974, etc.,
onor, 5o3, 5 11, terre, ^ef;
2619, 2695, empire.
honoré : franc duc — , 161 1,
duchesse — e, 2568, franche
dame — e, 2588, gent — e,
3674, mostier — , i883, don
— , 3i3, au gent cors — ,
43, 1965.
hontage, hontaige, 2237, 3148,
etc., honte.
hu : a — et a cri, 1 1 10, avec
des huées et des cris.
huchier, 5oi, 509, 2190, crier.
huer, 444, crier.
hui, 86, 829, etc., aujourd'hui.
huimain, i35i, ce matin.
huimais, *768, 1124, 1904, dé-
sormais.
huis, 265, etc., porte.
huisset, i2i5, petite porte.
hurter, 1341, pousser violem-
ment.
iaume, voir heaume,
ieve, 4024, jument.
iluec, 5 16, illuec, 1007, 3048,
3090, illuc, 3 186, là.
irascu, 1016, 1048, 1340, 2245,
en colère, furieux.
ire, i36, 277, etc., colère ; estre
par — , 41 33, être en colère;
pleine de grant — , 837, très
affligée.
iré, 295, etc., en colère; 499,
597, 881, 1674, 1917, 2023,
2440, affligé, peiné.
is {cas rég. plur.), 2280, ;/.
isncl, cas rég. plur. isniau.s,
3703, 4391, rapide.
isnelement; 164, 178, etc., vite,
rapidement.
isopé, 2io5, ysopé, 3285, 3335,
3430, vin parfumé à Vhy-
sope; cf. Poème moral, dans
Zeitschrift f. roman. Phil.,
XXXII, 53, V. 7 : Or viut le
vin lot simple, or le viut
isopé.
issir : ind. prés, i^ p. sing. is,
3908, 3^ p. sing. ist, 451, etc.,
3° p. plur. issent, 2289, etc.;
impf. 3' p. plur. issoient,
2810 ; parf. 3' p. sing. issi,
279, etc., issit, 3621, 3° p.
plur. issirent, 2g8j; fut. 3'
p. sing. issera, 871; subj.
prés. 3' p. sing. isse, 266,
2« p. plur. issiez, 1784, 3' p.
plur. issent, 1757; s'en — ,
2611, etc., s'en aller; 2289,
etc., sortir; {inf. pris subs-
tantivt) à r — de, 3854, ^"
sortir de.
ja, 398, 711, etc., déjà; 1247,
i3i5, jamais [affirm.]; explé-
tif, 545, 58i, etc. ; — ne, 818,
905, efc; — ... ne, 425, 465,
etc.; ne — ... mais, 1280, ne
14
210
DOON DE LA ROCHE
— ..., 893, i3ii, etc.; mais
— ne, 597, 616, jamais ne;
— ne... ne, 1 2^5 jamais ni...
ni; ne... — mais, 555, plus
jamais.
jamais : — jour, Sôyo, jamais.
jame, 4291, pierre précieuse
{cf. gemé).
jaseran, jaserant, i834, 23o3
2478, fait de mailles de fer
(épithète de haubert).
jeu, voir partir, tenir.
joians, 3462, joianz, 544, 996
(cas suj. sing.), joyeux.
joïr, 2736, célébrer.
jor, jour: le —, 1019, 2784,
etc., ce jour-là ; a — que soie
vis, 480, aucun jour de ma vie.
jornée, 648, i3i9, 223o, 4456,
voyage .
joste iprép.), 2777, 4531, à côté
de.
joster, 2996, 3855, jouter.
jostisier, 2699, 27?!, 3207,
3756, administrer, gouver-
ner.
jour, voir jor.
jouvente, voir jovente.
jovene, 2611, jeune.
jovente, jouvente, 1418, 3686,
"i^T], jeunesse ;hQ\e — , i3ii,
1389, ^^97i '4o5> 2%ib,beaii
garçon.
jugement, looi, 1062, témoi-
gnage Ci).
jugier, 4070, confisquer par ju-
gement (?); — a, 3753, 3876,
condamner à.
jug[i]ere {cas suj. sing.), 2154,
j"ge.
jugleor {cas rég. sing.), 4092,
jugleor {cas suj. plur.) 104,
729, 828, 3572, jugleors {cas
rég. plur.), 24, juglers {cas
suj. sing.), 1539, 1646, jugier
{cas suj. plur.), 2107, jon-
gleur.
juïse {masc), 25o, 267, 272,juïz,
748, 759 {à Vasson.), juge-
ment de Dieu ; taire — , 4o5,
2258, porter — , 412, 4i5,
680, porter .j. juiz, 748, sa-
tisfaireau jugement de Dieu ;
ofrir — , 429, offrir de se
soumettre au jugement de
Dieu; livrera juïz, 753, sou-
mettre au jugement de Dieu ;
4013, jugement.
jurer : jura le siège de ci a .vij.
années, 3841, jura que le
siège durerait au besoin sept
ans; jura Salmadrine, 2599,
2688, 2904, jura fidélité à
Salmadrine.
jus {adv.), 5o8, io35, 1849, en
bas {avec mouv.); mètre — ,
3963, démonter, déposer.
justice, 4044, exécution d'un
arrêt de justice, supplice.
jut, voir gésir.
laidement, 283, 965, 3275, mé-
chamment.
laier (?) [cf. laissier], 42 1 , 2429,
2437, etc., laisser; 4374, lâ-
cher; 3418, laisser, négliger
de faire une chose ; ne lairai
que, 1268, je n^aurai de cesse
que; ne laira nés ramaint,
3418, n'aura de cesse qu'elle
ne les ramène; qui que chant
ne qui lait, y3o, quelque soit
celui qui chante ou qui s'abs-
tienne de chanter; ou jel face
ou jel lais, 2252, que je le
fasse ou que je m'en abstienne.
lais, 2232, voir laier.
laissier, 667, 832, etc., abandon-
GLOSSAIRE'-
211
ner, délaisser; 276b, SaSg,
quitter {cf. laier).
lait, ySo, voir laier.
lanceïs : soiiers — , 3928, ponts
volants.
lanier, 2453, lâche, couard.
larmer, 3562, 4298, pleurer.
larriz, 324, 771, 1121, 236i,
terre en friche.
las, 58o, 588, interjection de
douleur ; au fém. 449, 466,
757, 3604, malheureuse que
je suis; la lasse, 2652, la
malheureuse qu'elle est.
lassus, 376, 1345, etc., là-haut.
latin : oïr — de, 42 1 5, entendre
parler de.
laz, 3195, lacs à prendre le
gibier.
1. lé, s. m., voir lez.
2. lé, adj., fém. lée, 4469,
large.
leans, i838, 3673, etc., leanz,
1222, 2197, leenz, 198, là-
dedans.
leaument, 2905, loyalement.
lecherie, 3745, impudence.
lechiere, 175, cas rég. lecheor,
179, individu méprisable.
leenz, voir leans.
lent, 2607, mou, sans force.
lerres {cas suj. sing.), 432, 629,
2872, misérable, gredin.
lés, voir lez.
leu : par mi leu, io52, dans le
milieu.
lever, 2 52, soulever ; b, promou-
voir, aider ; en fonz — , 939,
et, ellipt., — , 955, tenir sur
les fonts baptismaux ; 3835,
dresser, construire ; 161 3, se
lever; est levez, 2179, est en
piez levez sus, 1021, s'est le-
vé; CTopc levée, 4176, 436g,
croupe élevée {qualité pour un
cheval; voir la 7tote).
1. lez (s. J.J.), 1848 [cf. /'Errata],
2004 [ms. las], côté.
2. lez {prép.), 194, 36i, etc., à
côté de; 1848, 2 366, du côté
de, vers.
lice, 3oo8 [corr. cscWce], frange
tailladée [du haubert] .
lie : vins séant sor — , 4497,
vins vieux.
1. lié, cas rég. tonique d'ele
{à l'asson.), i5i5.
2. lié {cas suj. plur.) 32ii, liez
{cas suj. sing.), 544, 993, 996,
3216, lie {fém. sing.), 4083,
4487, joyeux.
liège, voir lige.
lïemenr, 416b, joyeusement.
liez, voir lié.
lige, liège : droit seignor lige,
3261, 3298, 3449, seigneur
légitime qui a reçu le serment
d'allégeance ; home liège,
i5o8, i535, tenu par le ser-
ment d'allégeance.
lignage, 7, 88, 92, etc., linage,
I i3o, lignée, famille; de — ,
1494, de haute naissance.
lin : de put lin, ii3o, de race
mauvaise.
linage, voir lignage.
linçuel, 1618, drap de lit.
liois, 3725, liais.
lisant, 1273, instruit, lettré.
1. listé {cas suj. plur.), 1616,
listel.
2. U [s]té, fém. — e, 4178, peint
à bandes {épithète de targe).
Hue, 3386, lieue.
livrer, 84.3, délivrer, donner.
1. loer, 2og6, conseiller.
2. loer, 55, 104, payer, récom-
penser. - ^^ .
212
DOON DE LA ROCHE
logier : estre logié, 2^35, camper.
loiaument, 3i58 {mot altéré).
loier, 3252, 401 5, récompense,
salaire.
loige, 3204, niche à chien.
long, -zb'i^, éloigné, lointain.
longement, \i,6i, etc., long-
temps .
longes, 1009, longues, 41 32,
longtemps.
lors : — meïsme, 1080, à Vins-
tant même.
losengerie, 126, tromperie.
losengier, ii5, "iSi^, menteur,
intrigant.
madré, èois veiné: hanap de —,
3430.
maginois, riche, somptueux :
palais — , 622, 4422 [cf.
G. Paris, Romania, XIX,
335, n. 3).
main, 13^,^11, etc., matin.
mainburnie, 1246, protection,
tutèle.
maine, 344, mainrai,4452, voir
mener.
mains, 3412, 341 5, 3435 {à Fas-
son.), voirmeins.
maint, voir manoir.
maint et communément, 3oig,
4085, 4185, beaucoup d'hom-
mes ensemble {cf. Bertoni,
Rev. des lang. rom., 1908,
p. 47g, et Zeitschr. f. roman.
Phil., II, 88).
maintenir, 584, i332, e/c, pro-
téger, aider; — une charrue,
3194, conduire une charme',
902, entretenir comme con-
cubine; 2852, entretenir [un
cheval] ; 43 1 5, gouverner ; —
sa joie, 4196, s'amuser; —
ses noces, 764, célébrer ses
noces; se —, 33o, 583, 4281,
se porter, être dans un état
de santé.
maire {cas suj. sing.), 3 186,
3196, etc., maior (cas rég.),
3322, officier domanial.
mairien, marien, 3837, 3933,
4o36, grosse pièce de bois,
madrier.
mais, mes, 3432, plus, davan-
tage ; — et —, 3886, de plus
en plus; 202, 2914, désor-
mais ; enuit —, 3o35, 3046,
323 1, cette nuit-même ; —
huimain, 1 35 1, aujourd'hui ;
tous tens — , 4233, toujours
à l'avenir ; ne... — , 460, 76g,
etc., ne... plus ; ne — que,
3o2, 762, etc., excepté; —
que, 243, 2412, 4082, pourvu
que.
maisnie, voir mesnie.
maistre {ad].), 2o3j, 3200, etc.,
principal.
mal, cas suj. sing. maus, 790,
fém. maie, 912, 927, etc.,
mauvais, méchant ; {adv.) —
virent, 2401, ils virent pour
leur malheur {cf. mar).
malaventure, 2178, 2184, mal-
heur, mauvaise aff'aire.
maldire, i653, 2g55, 3723, etc.,
maudire.
maie, 1579,430g, malle, coffre.
nialeïr , iig3, 1212, 1264,
38g7, maudire.
maleït, 758, maleoit, 3o8 [ms.
maldit], 644 [ms. maleot],
etc., maudit.
malement, 2go, loio, etc.,
mal ; si — me puis ou ligna-
ge fier, 8g8, je puis si mal {st
peu) me Jîer à la famille.
maleoit, voir maleït.
GLOSSAIRE
2l3
inalmetre(v. trans.),i 1 15.2296,
mettre hors d'usage, briser ;
(v. intr.), 1444, tomber ma-
lade; mal mis, 210, hors de
soiil).
maltagre,4027 [corr. massacre],
boucherie.
maltalent, 11 75, mautalent,
2740, 3992, colère.
malvoillant : fu si ses malvoil-
lanz, 2 1 18, il lui fut tellement
hostile.
mameletes, 2j\4, petits seins.
mamelle, 4384, mamelon de
l'homme.
manandies, 846, richesses.
mananz {cas suj. sing.), 27,
riche; riches — , 172, 1090,
homme riche et opulent.
mandement, 28o5, 2841,4458,
corps de bâtiment.
mange, 3027, manche.
mangier (subst.), 728, 926, efc,
mengier, 1644, 1645, repas.
mangon, 3792, monnaie d'or.
mangonel , cas rég. plur.
ma[n]goniaus. 3836, machine
à lancer des pierres.
manoir, 3' p. sing. ind. prés.
maint, 3 186, 35 19, 4036, de-
meurer.
manré, 3710, voir mener et
/'Errata.
mar, 2662, 36i5, 4355, 4374,
4381, 4395, malheureusement,
pour son malheur : — i fust la
meslée, 2525, l'issue du com-
bat eût été malheureuse; —
lor est encontre, 255o, ils n'ont
pas eu de chance ; — fut
vostre jovente, SSy y, votre jeu-
nesse ne fut pas heureuse ;
tant — i fustes, 383 1, quel
malheur que vous y aye^
été!; {suivi du futur) : ja —
en parlerez, 1592, 1728,
inutile d'en parler ; ja —
en doterez, 1662, inutile de
rien craindre ; — i qucrroit
ester, 1792, inutile de cher-
cher à s'y tenir debout ; ja
por la ra[a]nçon — i queront
ostage, 4333, inutile de cher-
cher des otages pour la ran-
çon {les prisonniers auront
été massacrés) ; — vos es-
maierez, 2029, inutile de vous
inquiéter ; ja por lor dos bien
batre — iront a Soissons,
33 1 3, inutile d'aller à Sois-
sons pour avoir le dos bien
battu; — i seront trové, 1770,
1 785, ils y seront trouvés pour
leur malheur.
marbrin, voir mauberin.
marc, cas rég. plur. mars, 3710,
3793, marc {unité de poids);
3949, monnaie.
marchis, 1447, 4200, marquis.
mari, marri, 794, en colère;
1 126, 1548, peiné.
marien, voir mairien.
marine, 3726, rivage de la mer.
marrement, 176, douleur, afflic-
tion.
marri, voir mari.
marsis, 3933, massif.
martire : livrer a —, 458, faire
supplicier.
*massacrê [ms. maltagre], 4027,
boucherie.
matir, 774, mater, abattre.
maton, 3336, lait caillé.
mauberin, 1624, marbrin, 326,
de marbre.
maubre, i8g5, 3265,3556,3594,
36oo, 3972, 42o3, marbre.
maus, voir mal.
214
DOON DE LA ROCHE
maufé, 3291, diable.
mautalent, voir maltalent.
mauvaise {adj . pris subs-
tantivt), 410, 479, 737, 742,
femme qui a une vie déré-
glée.
mauvaistié, 81 3, débauche.
meine, 3924, voir mener.
meins, 3444, mains, 3412,3415,
3435 [à l'asson.), moins.
melle {fém.), 2018, merle.
meller a, 4003, brouiller [qqn]
avec.
membre : chiere — e, 4107,
visage intelligent.
membrer {v. impers.), 2645,
2771, etc., souveyiir.
mener, 3^ p. sing. ind. prés.
maine, 344, 83 1 , meine, 3924,
moine, 1869, 3^ p. plur.
moinent, i68o,/«f. l'p.sing.
mainrai, 4422, 2' p. plur.
menrez, i536, i56o, 3710 [ms.
manres] (cf. /'Errata); — joie,
8o,i685,^fc., — son duel, 344,
se livrer à la joie, à sa dou-
leur; ^gS, malmenre, maltrai-
ter ; — parole, 644, prononcer
une parole ; — guigue et rote,
4.jbg, jouer de ces instruments.
mengier, voir mangier.
menor, 978, plus petit, plus
jeune.
mentir sa foi, 2747, être infi-
dèle à la parole donnée.
m[e]olle,4362, moelle épinière.
merchié : c'est granz — z, 382,
c'est un marché avantageux.
merci, 396, 747, etc., grâce,
pitié; crier — , 3905, deman-
der grâce; avoir — , 3892,
4227, avoir pitié.
mercier, 3719, 3961, remercier.
merir, 2684, 4212, 3' p. sing.
subj. prés, mire, 3716, payer
[qq ch. à qqn].
mérite (/e'm.), 3o3o, récompense.
merveille, mervoille, 195, 432,
442, etc., chose surprenante ;
a molt grant — , 684, il est
très surprenant ; a grant — ,
233 j, de façon surprenante;
avoir — , 894, être surpris,
émerveillé.
merveillier, mervoillier (se),
2364, 38 1 5, 3978, 4488,
s'émerveiller, s'étonner.
1. mes, 1262, 1810, 2446, 3i5o,
voir mais.
2. mes, 3268, 3569, 4550, plats,
mets.
3. mes, 1570, 1573, etc., messa-
ger.
mesage, voir message,
meschine, 444, 558, etc., jeune
fille.
meschoisir, 796, 2708, ne pas
reconnaître, méconnaître.
mescongnoistre, p.^a. mesque-
neù, 1049, méconnaître.
mescreii, 2244, sans foi.
mesestance, 3563, 3875, cha-
grin,peine.
mesfere, 737, 2198, faire du
tort à.
meslé : barbe — e, 4170, grise.
mesnie, maisnie, 1620, 2594,
etc., ensemble des serviteurs ;
2374, 3899, etc., suite [de
chevaliers]; 3846, 4172, etc.,
troupe, suitearmée.
mesprendre (y. intr.), 4239,
4249, commettre une faute;
se — , 824, même sens.
*mespresure, 2-j5i, faute, acte
qui prête au blâme.
mesprison, 4o33, injustice,
mauvais traitement.
GLOSSAIRE
21 5
mesqueneû, voir mescongnois-
tre.
message, 3o6, etc., mesage,
43oi, messaige, 1744, etc.,
messager.
mestier, 2758, office religieux ;
1475, dignité, office (?) ; estre
— , 396, 3285, 3497, être néces-
saire ; avoir — ,419, 666, etc.,
avoir besoin de ; avoir — a,
32 12, rendre service à, être
utile à.
mesure, 462, 464, 2424, droit,
justice.
mètre, 3' p. plur. pf. mistrent,
1570, 1943 ; — ens, 3420,/i3i-
re entrer ; ou repairier sont
mis, 2184, ils se mirent en
route pour revenir ; se — en,
727, 2222, entrer dans ; mal
mis, — en pris, — a raison,
voir malmetre, pris, raison.
mi, 233, 246, 3596, milieu; en
— (prép.), 233,eic.,enmi,797,
au milieu de ; par — [adv.),
2487, 3934, par le milieu ;
par — , {prép.), 771, etc., au
milieu de; 3j22, au travers
de; 2520, 4335, par.
mieldres, voir millor.
mielz, miex : le mielz, 3846, le
miex, 3880,4329, la meilleure
partie.
miex, voir mielz.
millor, 665, 666, 1617, etc.,
meilleur; cas suj. sing. miel-
dres,532, plus grand, plus/ort.
mi[r]able, i638, '2o5o [ms.
amirable"), admirable.
mire, voir merir.
mistrent, voir raetre.
moié, 3io8, 353i, arrivé à la
moitié (en parlant d'un mois,
d'un jour) .
moiilier, 29, 1024, e^c, épouse.
moinent, voir mener.
moitoier, 3 188, 32 ig, méta-
yer.
molt, II, etc., beaucoup, très.
molu, 1045, émoulu, aiguisé.
moneé, i65i, i663, i83g, mon-
nayé.
monstrer, voir mostrer.
1. mont: en .j. — , 33oi, 386i,
en un tas.
2. mont, 142, i53, etc., monde.
monte, 2275, nombre; 3'/g'j,prix.
*monteniere [ms. montemere],
2970 mule de montagne (?).
monter (v. trans.), 2972, mettre
en selle ; (absolt) 35o, 2 336,
etc., monter à cheval.
morir, /« p. sing. ind. pr. muir
[ms. mor], 2726 {cf. /'Errata),
i^ p. plur. cond. morrïens,
1275, 3' p. sing. subj. prés.
muire, i2o3, mourir; avoir
mort, 1208, 3376, etc., avoir
tué.
mortel : le traitor — 653, le
traître cruel.
mostier, 436, 445, etc., mous-
tier, 2557, etc., église.
mostrer, 45,993, etc., montrer;
monstrer, 419, démontrer,
prouver.
moustier, voir mostier.
movoir (v. trans.) : — plait,
ioi5, io3i, — guerre, 2963,
commencer une querelle, une
guerre; {v. intr.), ibbg, ib6g,
etc., se mettre en route, partir.
mucier (se), p. pa. fém. sing.
mucie, 1206, 2gn, se cacher.
muele, 25i, meule [de moulin].
muer, 2 536, 2564, etc., changer;
se — , 2686, changer de posi-
tion, se tourner.
2It)
DOON DE LA ROCHE
muire, voir monr.
mul, 322, 355, etc., mur, 2972,
mulet.
murtrir, 941, i 141, 2653, assas-
siner.
musart, 8248, 3375, so(, étourdi.
musié : pain — , 3269 (?).
nasel, 2520,2539, 263f, 3oo5,
3871, 3g4i, partie du heaume
qui protège le rtej.
natural, voir naturel.
nature, 459, caractère inné.
naturel, 1757, 1784, etc., natu-
ral [à Vasson.), 33j'j,de nais-
sance.
navrer, io53, lobb, etc., blesser
grièvement.
néant, voir nient.
neelé, 1773, émaillé [épithète
de pom).
nef, 1595, 1978, cas rég. plur-
nés, 371 3, navire.
nen, 2840, 2895, 3444, non.
nés, 3706, nis, 704, même.
nient, néant, 19, 29, noiant,
21 16, etc., rien; ne... — ,
127, 173, etc., ne... pas; de
— , i525, i528, 3i44, en rien,
pour rien : por — , i3ji,pour
rien, en vain ; por droit — ,
I 39 1 , vraiment pour rien ; —
fust del rescorre, 4866, im-
possible de le sauver.
niés, niez {cas suj . sing.) 1484,
i49i,efc., neveu; loio, i858,
etc., petit-fils.
nis, voir nes.
nobile, 83i, i5o3, etc., no-
ble.
nobilité, 32, noblesse d'dme.
noiant, voir nient.
noier, i5o8, nier.
noise, 211, 2788, bruit, tumulte.
noncier, i520, 1606, etc., an-
noncer, dire.
norrir, 53o, 872, etc., élever.
noter, 2787, jouer d'un instru-
ment.
noves {subst. plur.), 4463, nou-
velles.
nuns [adj.), 7, ï2o3 ; {pr on.),
3597, aucun.
0, 5 (, 171, etc., avec; ensemble
— , 235i, 2426, 3623, même
sens; 845, 930, che:{, auprès
[avec mouv.).
oan, 841, 41 15, cette année.
obli : mètre en — , 1498, ou-
blier.
ocire, 159, 216, etc., tuer.
ces : a — Landri, 3894, au se-
cours de Landri.
oir, 2957, héritier.
oïr, entendre : ind. prés, i ^ pers.
sing. oi, 841, 3' p. sing. ot,
170, etc., 3" p. plur. oient,
i33o; impér. 2" p. plur. oez,
I, 179, oiez, 932, etc., oies,
■779 '/"^- ^* P- sing., orras,
36o8, 3' p., orra, 202, etc.,
ora, 42i5;r* /?. p/wr. orrons,
825, etc., 2' p. plur. orrez, 10,
1497, etc. ; condit. 2* p. plur.
orriez, 3524 ; parf. 3" p. sing.
oi, 344, etc., /• p. plur.
oïmes, 4582 ; 3' p. plur.
oïrent, 822 ; subj. prés. 3' p.
sing. oie, i5go; impf. 2* p.
plur. oïssiez, 36i2, etc. ; p.
prés, oiant 4326 ; p. pa. oï,
1209, etc.
oire, i377 [ms. or], voyage.
olifant, 2915, 3839, 3934, ivoire.
onor, voir honor.
or, 1025, etc., ore, 869, ores,
GLOSSAIRE
217
422, 6g5, etc., maintenant;
dès — , 854, 869, 963, 1457,
dès maintenant ; — endroit.
401 1. orendroit, 375, dans ce
moment même; ores de l'es-
ploitier, 3492, il est temps
d'agir; agissons.
ordené, 4076, qui a reçu les
ordres sacrés.
ordre {subst. fém.), catégorie :
de maie — , 964; de pute — ,
3646.
1. ore (subst. fém.), heure : en
petit d' — , 842, en po d' — ,
1081, 2 141, en peu de temps.
2. ore [subst. fém.), 42 56,
vent.
3. ore, voir or.
oré {subst. masc), i583, ibg6,
I 779, vent.
orendroit, voir or.
orer , 1 704, 4 1 o i , prier.
ores, voir or.
orguel, 4881, entreprise auda-
cieuse, téméraire; par — ,
3766, témérairement.
orguillos z|97, orguilox, 4394,
violent.
oriflambe, 3857, oriflamme,
gon fanon.
orine, 4623, origine, race.
oriol, 2018, loriot.
orison, ^i%S, prière.
ormier, 2475, 2483, or /n.
orrez, voir oïr.
ors, 3260, 3404, ours.
ost, 2345, 2384, etc., cas suj.
sing. oz, 3690, armée.
T.ostage, 3592, logement, gîte.
2. ostage, 2690, 2880, garantie
donnée en raison d'un futur
mariage.
ostagier(v. trans.), 3070, pren-
dre en otage.
oste, 2473 (?).
ostel, 5 14, etc., demeure ; faire
bel ^ — {à qq.), 3333, servir un
bon repas.
osteler (s'), 4479, se loger.
oster, 3373, 3g8i, arracher des
mains.
*ostorin [ms. estour], 3493,
étoffe teinte en pourpre [sens
donné par Godefroy ; plutôt
étoffe précieuse).
ostor, 2 184, autour.
ot, voir oïr.
otraigier (s'), 3 166, se surpas-
ser, dépasser la mesure.
otrier, 268, etc., otroier, 1483,
ottrier, 452 5, etc., accorder;
610, etc. approuver.
i.ou [conj.de fewjps), 987, 2441,
2675, 32i3, 3321, 3536, au
moment oit; 187 1, — que,
796, 8o5, etc., dès que.
2. ou, 61, etc., — dans le; 139,
etc., sur le.
outrage, 910, excès, action in-
juste; 36 16, conduite, parole
déraisonnable.
outre : d' — nature, 2170, con-
tre nature.
outrer, 2559, traverser.
ovré, 1964, ouvré, 3428, fa-
briqué .
oz, voir ost.
paiennie, 1239, 1271, le pays
des païens.
paier : — un cop, 3o88, porter
un coup.
paile [subst. masc), 56 1, 1617,
3620, étoffe de soie; 178, 180,
193, 210, couverture délit en
soie; 2016, 2973, 362o, 4325,
robe en soie ; 1826, 2014, cou-
verture de cheval en soie;
2l8
DOON DE LA ROCHE
iggS, doublure de tente en
soie.
pais : aiez — , 617, 918, et<x,
tene:{-vous tranquille .
paistre iv.trans.), p. pa. peu,
873, nourrir.
palais, 3i 16, 3i2i, château d'un
seigneur.
palefroi, 106, 355, 446, cheval
de voyage.
palis, 3i85, paliz, 2272, palis-
sade.
pan, 1994, iggô, frange [d'une
tente] ; 3oo8, basque [d'un
haubert].
par {prép.y. — soi, ôSg, de sa pro-
pre initiative; — non, 2569, en
son nom ; — ses armes por-
tant, 3, en le servant de ses
armes; marque le temps: — ma-
tin, 1409, 1988, etc., — nuit,
39ii,aî^ matin, de nuit; mar-
que le lieu : — destre, 269,
à droite; — ces tables, 3566,
à ces tables; — mi leu, io52,
2494, — mileu de, 4367, dans
le milieu de ; — sor, 1 102,1 1 15,
par dessus; marque la quan-
tité : — pou que, 1 39, peu s'en
faut que ; renforce le sens d'un
verbe, d'un adjectif ou d'un
adverbe, 528, 755, etc.
parcreù, 872, 1347, ^uf a ter-
miné sa croissance, adulte.
pardon, 129, permission; cm
— , lor, en —, 1862, 2o3i, en
vain, en pure perte.
parenté (subst. masc), 718,
i83o, 1922, 3695, famille,
parentage.
parfondement, 2569, profondé-
ment.
parfont [adj.), 4026, fém.
parfonde, 2546, 3o37, pro-
fond ; en — ,3470, tout au fond.
parjuré, perjurez {cas suj.
sing.) : toz en es perjurez, 374,
tuen es tout parjure ; sont tuit
mi — , 687, sont tous parjures
envers moi ; dont sommes — ,
1734, envers qui nous som-
mes parjures.
parler, 63, etc., 3^ p. sing. ind.
près, parole, 3624, etc., par-
ler.
parmain, 343o, variété de poire.
parmi, voir mi.
1. parole [subst. fém.),%bb,i2b^,
discours ;l&n\r — , 2172, discu-
ter; n'i avra ja — ,3640, il n'en
sera plus question; 70, 2320,
bruit, chose qui se répète ; par
— , 4262, verbalement.
2. parole (v. inlr.), voir parler.
part : avoir — a, 3369, s'inté-
resser à; ja Damedieus n'en
ait en m'arme — si ... , 1 008,
que Dieu ne reçoive pas mon
âme si. . .*; celé — , 792, 804,
etc., à cet endroit; d'ambe
— , 2389, des deux côtés ;
quel — , 191 3, où.
partir (v. trans.) ; — un jeu, 377,
laisser le choix entre deux
partis; 256i, 2600, séparer ;
{v. intr.), 468, \^63, se sépa-
rer de; — a, 2766, prendre
sa part de ; se — de, 2205,
2732, etc., s'en aller de ;
s'en — , 3574, s'en aller.
Pasque florie, 2065, dimanche
des Rameaux.
passer, 4255, traverser; 4228,
4273, transgresser, être infi-
dèle à; 3366, disparaître;
passé, 3oi7, 4187, battu, dé-
confit.
pastorel, cas rég. plur. pasto-
GLOSSAIRE
219
riaus, 3345, 3349, jeune pâ-
tre.
paumier, 3346, 31>b\, etc., pè-
lerin .
paumïer [y. trans.), 2976, ma-
nier.
pautas, 4026, boue.
pautonier, 926, valet; 1679,
3i65, 3247, coquin, gredin.
pavement, 285, 1077, dallage.
pechié : dire — , 3752, dire une
chose injuste; faire son — ,
459, commettre le péché de la
chair; a tort et a — , 2248,
illégalement et méchamment.
peçoier, 1102 [var. perçoie],
iii5, etc.. mettre en pièces.
pei, cas rég. plw. pés, 3i85,
pieu.
pelé, 4:10, dont on a enlevé
Vécorce.
peliçon, 26, 779, 800, i359,
2t37, 2253, 2261, 3356, 3439,
4015, manteau de fourrure.
pendant (subst. masc), 3964,
pente d'un coteau.
pendre, voir prendre.
peneant, i38, pénitent.
pener, 2542, 3690, etc., mal-
traiter ; 117, 424, etc., sup-
plicier; pené, 1627, 2039,
etc.. fatigué, épuisé; se —
d'une besoingne, i53i, s'oc-
cuper d'une affaire.
penra, penrai, penre, voir pren-
dre.
penser (subst.), 2024, pensée.
per [subst. masc. etfém.) : pers
de Loereigne, 1243, de La
Roche, 2558, 2583, chevaliers
de Lorraine, de La Roche ; a
moillier et a — , 45 16, comme
épouse et comme compagne.
perche, 2976, 3oo6, bâton.
perçoivre, p. pa.fém., perçeûe,
586, apercevoir.
perde, * 1 3o7 , 2491, 4322,
perte.
perdre : por les membres per-
dant, 278, dût-il perdre les
membres; estre des membres
perdant. 2129, mutilé.
* peree , 3932 [ms. perieres] ,
charge de pierres lancée par
une machine de guerre.
periere, 3835, 3927, machine
à lancer des pierres [cf.
peree).
périr, 554, mourir ; p. pa. fém.
pe[r]ie, 4607, brisée d'émo-
tion .
perjurez, voir parjuré.
peron, voir perron.
perrin, 833, 3o25, 3047, cons-
truit en pierre.
perron, peron, 1 389, 3200, efc,
— de degré, 1699, perron;
3933, grosse pierre lancée
par une machine.
pés, voir pel.
peser, 3° p. sing. ind. prés.
poise, 965, etc., 3^ p. sing.
subj. prés. poi[s]t, 616; [im-
personnellement] , 365, 58o,
etc., être un sujet de préoccu-
pation, d'ennui, de chagrin.
pesme, 2 56o, terrible.
petit [adv.], 726, 767, etc., peu;
en molt — d'cure, 1820, dans
très peu de temps; un — ,
3619, 4523, MM peu; 'j3^,un
petit moment.
peu, voir paistre.
peùssiez, voir pooir.
piaus [cas rég. plur.), i359,
peaux, fourrures.
picois, 1578, jgbo, pointe [d'un
bâton] .
220
DOON DE LA ROCHE
pié : en piez, 1021, debout;
plain — , 520, 744, demi — ,
1974, un pied entier, un demi-
pied [de terre] .
pieça, 891, 2420, depuis long-
temps;— que, 204, 56-], etc.,
il Y a longtemps que.
pièce: une —, igSS, 3527,
pendant quelque temps; une
grant — , 2 187, 3b r 2, pendant
longtemps.
pieur, 738, cas re'g. de pire.
pile[r], 1206, pilier d'église; cf.
/'Errata.
piment, 169, 2io5, 3989, 4497,
boisson préparée avec du vin,
du miel et des épices.
pis, 418 1, 4384, poitrine.
pité,682,fiîïzV;pitié, 42 08, rp^rgf.
place, voir plaire.
plaidier, i5i3, 2439, parler,
discuter.
plaier, 2432, 2643, etc., blesser.
plaignier, voir plenier.
1. plain [subst.), cas rég. plur.
plains, 332, 2848, plaine.
2. plain, plein (arf/.) : de plainne
Monpeillier,864, du milieu de
Montpellier ; toute plaine sa
lance, i io5, 1 1 18,2299, 2507,
de toute la longueur de sa
lance; (loc. adv.), a plein,
3392, a un — , 3424, complète-
ment; As. — , 33g6, entièrement.
plainier, plainnier, voir plenier.
plain[t] {subst. masc), 3402,
gémissement.
plaire, 3' p. sing. subj. prés.,
place, 982, 3240, etc., place,
3678 {cf. /'Errata), plaire.
plaisir : dire tôt son —, 765,
dire tout ce qui plait.
plaissié, 3 184, domaine entouré
d'une palissade.
plait, 6r8,622,665, f i52, 1868,
convention, accord ; 906, dis-
cours ; ioi5, io3i, contesta-
tion, querelle ; (au plur.) plaiz,
20, cour de justice.
planchié, 2839, planchier,3265,
3549, ^556, salle planchéiée,
située à l'étage supérieur.
planté, voir plenté.
plein, voir plain.
plenier, 1481, plaignier, 4072,
4080, plainnier 3o66, grand
{épithète de palais), 32oi
{épithète de chasne); — de,
3268, abondant en.
plenté, planté, 3399, abon-
dance; {loc. adv.) a — , 1899.
2106, 4186, 4362; a — et a
noces, 3628.
pleuge, 3392, pluie.
plevir, ii53, 1456, etc., assu-
rer,jurer; famé —,663, 2688.
lier à soi une femme par
serment; p. pa. plevis, 3187,
lié par allégeance.
ploi, 3768. p[l]ois, 2253, 2261,
pli.
plus : — tost qu'il onques pot,
1027, 1070, 1 i33,^î/ plus vite;
c'est li — et li mains, 34i5,
c'est ma conclusion.
po, poi, pou, peu, jpcM : .j. seul
— , 1342, un petit moment; a
— ne, 1 36, 186, etc., a — que
1223, a — que ... ne, i3i3,
1842, etc., par — que, 139,
i354, por — que, \o32, peu
s'en faut que.
pocinet, 3284, 3334, poussin,
petit poulet.
poeste {à l'asson.), 2377, puis-
sance {cf. poesté).
poesté, 3708 (à l'asson.), comme
poeste.
GLOSSAIRE
221
poi ranier, 3087 [corr. bois ra-
mier (?)].
poi, voir po.
poigneor i433, combattant.
poil {cas suj. sing.). cas rég.
plur., pois, 234, 247, 2233,
2 36i,po/7; 926, chevelure.
1. poindre, 3666, 3700, etc.,
éperonner .
2. poindre, peindre : p. pa. fém.
pointe, 1995.
poine, 590, 2684, etc., peine,
labeur.
poing, 2465, 3084, poignée de
V épée ; {plur .) poinz, 206^, poi-
gnet, extrémité de la manche.
point, un peu : sanz — de fau-
seté, 85 ; sans — de delaier,
2764.
pointe, voir poindre.
poinz, voir poing.
pois, voir poil.
poise, poist, voir peser.
poïst, voir pooir.
•pom [ms. poi], 1778, pom-
meau d'épée.
pommel, cas rég. pi. pom-
meaus, 3963, boules posées
sur V extrémité des piquets de
tente.
ponnée, voir posnee.
pooir (v. intr.), pouvoir : ind.
prés. /• p. plur. poomes,
1755, 1768, 2' p. plur. poez,
ii52, i338; pf. 1" p. sing.
pou, 3og3; 3" p. sing. pot,
1037, 1070, etc., 3^ p. plur.
poreni, ii'i3; subj. impf. 3*
p. sing. poïst, 958, 2* p. plur.
peûssiez, 2352 ; s'il poïst
estre, 938, s'il eût été possible.
por, pour {prép.), 589, 832, e/c,
à cause de ; alons en — vo
mère, 3676, vers votre mère ;
— ce que, 46, 1640, parce
que, i36i, pour que; — tant,
3 1, pour cela; io56. cepen-
dant; {avec le gérondif) — les
membres perdant. 278, diit-i!
perdre les membres ; {avec
rinf.) — les membres coper,
416, dùt-elle avoir les mem-
bres coupés.
porchacier, 3357, 3586, pi-o-
curer.
pormener, 3433, promener.
pormont. 4027, 4372, poumon.
porotirir (se), 40, s'offrir, vo-
lontiers.
porpanser, 438 1, imaginer.
porprendre : — son ostel, 2925,
prendre gîte, loger.
porprin, 1 1 12, 2294, de couleur
pourpre.
porquerre, 541, rechercher,
poursuivre; 3481, fournir;
se — , 521, 546, 2148, 3916,
s'efforcer de.
port, 2269, 3919, 4144, pis-
sage [dans les montagnes] .
porter : portant, 1276, portant
des fruits (?) ; jusqu'as armes
portant, 286, 1002, io63, JMS-
qu'à l'âge déporter les armes ;
par ses armes portant, 3, ew
le servant de ses armes.
posnée [ms. ponnée], 4124, or-
gueil, arrogance.
postis,363 1 , 38bo,3S4b,poterne.
pot, voir pooir.
1 . pou, voir po.
2. pou, 3093, voir pooir.
pour, voir por.
prael, i ggo, pelouse.
praer, voir preer.
prée, 2522, 253o, etc., prairie.
preer, 35, praer, 4169, piller.
premerain, prim.erain, 554,
222
DOON DE LA ROCHE
3569, premier; mi ami char-
nel — , 467, mes plus proches
parents ; — s [adv.], 2290,
2982, 4304, en premier lieu;
quant nasqui — , 3442, dès
sa naissance.
prendre, ind. pf. 2" p. sing.
preïs, 3045, pr[es]is, 1024,
3° p. sing. prist, 971, 17 18,
etc., 3" p. plur. prinrent,
35o5, pristrent, 1696. 2278,
etc.; infin. penre, 245, 2 53,
etc.; fut. i" p. sing. penrai,
ioo3, 1064, 3' p. penra, 221;
subj. prés. 3' p. sing. prei-
gne, 1297; impf. 3" p. sing.
presist, 278, preïst, 1482,
2867; 97^ 2887, etc., épou-
ser; — a, 63, 548, etc., com-
mencer à; l'en prist a, 2022,
même sens ; se — a, 1414,
2627, 3887, s'attacher, s'ac-
crocher à; — compaignie,
SySb , rencontrer ; — fin, 4414,
faire halte ; — les juïses, 267,
272, accepter Voffre de se
soumettre au jugement de
Dieu; — justice, 221, faire
justice; l'en prist pitié, 2826,
2936, 3255, cui pitié n'en
preïst, 2867, 2/ «« Ê"^ 5"'
n'en eût pitié; — prové, i34,
42 1 , prendre sur le fait ; —
ses sodoiers, 2947, lever ses
soudoyers ; — trives, 1164,
1190, 2142, conclure une
trêve ; — une venjance, 2692,
arrêter un projet de ven-
geance.
presant : em — de, 788, prêt à;
mètre en — , 3 147, amener.
présenter, 4577, offrir ; pré-
sentent \ms. prenent], 2340 (?).
presse, 669 etc., foule, multi-
tude ; fait la — coper, 673,
se fraie un chemin au milieu
de la foule. »
preu, voir pro 2.
prevoigner, 3196, provigner.
prevoire [cas rég. sing.), 3943,
prêtre.
prevost, 3226, agent d'un sei-
gneur.
prime : demoine —, 2223,
domaine principal {peut-être
à corr. en privé; cf. v. 2225) ;
1261, 23gD, heure canonique,
six heures du matin ; — s
{adv.), 3i8i, 4003, potir la
première fois.
primerain, voir premerain.
primes, voir prime.
princier [cas suj. plur.), 1 190,
princes, nobles.
principel, 4549, princier [épi-
thète de palais).
1. pris, ;;rjAr :de —, 1 157, 2274,
2277, 2283; de si haut — ,
I i3i ; mètre en — 3924, éva-
luer, estimer.
2. pris {p. pa. de prendre pris
substantivt), 2918, butin.
prisier, proisier, i5o2, 2418,
2421, etc., estimer à un prix
élevé, louer; prisié,924, 3362,
dont'lon fait grand cas.
prison, 23 18, 'i(j<j'è, prisonnier.
pristrent, voir prendre.
privé, 1620, familier; — de-
moine, 2225, domaine propre
(c/. prime); {subst.),%3, 1891,
3679, ami intime; a — , 1544,
en secret.
1. pro (subst.), cas suj. sing.
proz, 3228, profit, gain.
2. pro, 1593, preu 40 [ms. prou]
{adj. des 2 genres), cas suj.
sing. pros, 2292, 2946, prouz,
GLOSSAIRE
223
3624, proz, 348, 36g, 602,
1274, etc., sage, vaillant.
prodome, cas siij. sing. pro-
dons, preudom, 1640, 2847,
etc., homme de valeur.
proesce, 2667, vaillance.
proie, 2430, ■ig8i,etc., butin.
proier, 2826, SSgo, supplier
[qqn] ; 3242, demander à Dieu
par la prière ; prierez vo père
sauveté, 2739, demanderesf à
votre père la vie sauve ; 3 164,
aller prier sur le tombeau
d'un saint, faire un pèle-
rinage.
proisier, voir prisier.
pros, prouz, voir pro 2.
prover : estre prové, 235, 237,
248, 586, être convaincu [d'un
délit] ; prové d'oïr et de veant,
261, provée d'oïr et de veoir,
369,752, 143^, convaincue par
des témoins qui ont vu et en-
tendu; prendre prové, voir
prendre.
Proverbes, locutions prover-
biales : 204, 426, 427, 567,
610, 835, 871, 1023, 3i32
3169, 3397, 35oi, 3617, 3777.
proz, voir pro i et 2.
pucele, 444, etc., jeune fille.
pui, 324, 2269, etc., mont
arrondi.
puis [prép.), 2bg, 386, après;
— que (conj.), 3169, 3686,
41 18, après que.
pupler de, 4172, couvrir de.
put {adj. masc), 1 1 3o, mauvais;
{au fém.) pute, 347, 58 1,
2 171, etc., de mauvaise vie;
[subst. fém. sing.), cas rég.
putain, 2201, 4335, etc.,
femme de mauvaise vie.
putage, putaige, 340, 1 168, etc..
conduite déréglée [d'une fem-
me], 770 [d'un homme] ; 373,
action déshonnéte.
putain, pute, voir put.
puterie, 81 3, vie de putain.
quanque, 71 3, 888, etc., tout
ce que, autant que.
quant [adj.) : ne sai quant,
3977, ne sais combien ; (adv.),
i32, 596, etc., autant que;
1349, 3259, puisque.
quarole, /\.2b8, danse.
quart, 62, 112 2, quatrième.
que(j?roM. rel. sujet), 1415 ; que
que 2725, quoi que; {conj.)
8o3, 989, 1121, etc., si bien
que ; 944, tant que ; [suivi du
subj.) 1212, 2j/^.\, pour que,
afin que ; 68g, jusqu'à ce que ;
{interrog.) 1082, 2724, 2864,
pourquoi ?
quel que, 2725, quoique.
quelor, 3788, couleur [cf. mon
branc de color, Moniage Guil-
laume, 2* réd., V. 3257).
quenoissable,voircongnissablc.
querre, 477, 896, etc., cher-
cher, rechercher ; — que,
I Z^b, faire en sorte que ; i554,
3326, 3478, aller vénérer en
pèlerinage; — les trives,
2144, chercher à conclure
des trêves.
queut, voir coillir.
qui : cui... cui... 56, à un tel...
à tel autre; [suivi d'une phra-
se exclamative), — or avroit
Doon ceste tere tolue, 2176,
heureux celui qui aurait en-
levé cette terre à Doon ;
[suivi dit subj.) — muere ne
— vive, 839, qui soit vivant
ou mort [présent ou passé) ;
2 24
DOON DE LA ROCHE
— que chant ne — lait,
73o, quel que soit celui qui
chante ou non ; — que plort
ne — chant, 21 35, qu'importe
quon en pleure ou qu'on en
chante.
quintainc, 4602, armure, mon-
tée sur un poteau, contre la-
quelle s'exerçaient les jeunes
« bacheliers ».
quile, quitte, 1244, afranchi
de tout service féodal; avoir
— , 2223, 2063, posséder libre-
ment ; clamer —, 564, 607,
3o35, 3i33, déclarer [une
chose] libre de servitude ;
tenir — , 55 1, 2950, 2994,
tenir libre de servitude.
racorder, 2202, réconcilier.
rafichier, 241 1, reprendre [un
récit] oii un autre Va laissé,
le compléter.
raier, 35 14, raj^onner; 2458,
2480, 3007, couler, ruisse-
ler.
raies, i365, voir ravoir.
rainme, voir ramer.
raison : baissiez vostre — , 137,
4008, prene:(-le sur un ton
moins haut ; mètre a — , 8o5,
1 133, etc., adresser la parole;
chargier sa — , 4075, confier
sa cause.
raier, 55, 504, etc., aller de son
côté, s'en aller.
ramé, 3836, fait de branchages.
ramée, 3833, abri fait de bran-
chages.
ramener, fut. 1* p. sing. ra-
menrai, 2412; subj. prés.
3* p. sing. rameint, lôSg,
i652, ramaint, 3408, 3409,
. ,3418, ramener.
ramentevoir, 2234, rappeler,
faire souvenir.
ramer : qui ne le rainme mie,
1221, qui, elle aussi, ne l'ai-
me pas.
*ra:nier [ms. ranier], 3087, de
branche d'arbie (?); cf. poi.
rapligicr, 2147, cautionner, ga-
rantir.
rateindre, 238g, prendre, saisir
par surprise.
ratendre, 1277, 2799, etc., at-
tendre de son côté.
ravoir : que raies ton droit,
i365, que tu rentres en pos-
session de ce qui t'appartient.
reaime, 25oo, royaume.
recez [ms. reces] [cas rég. plur.),
58, lieu fortifié.
reclamer, i^ p. sing. ind.prés.
reclain, 3407; 121 1, r225,
etc., invoquer ; 3407, deman-
der en suppliant.
recoillir la proie, 2981, s'empa-
rer du butin.
reçoivre, r3i5 {au milieu d'as-
son, en è... e), recevoir; fut.
recevra, 1 2 1 9 [faute pour res-
tera (?)].
reconoistre, 3 102, faire hom-
mage.
recorder, ^bÇ)(), rappeler, racon-
ter.
recovrer, 1956, se procurer,
trouver; io58, frapper un
second coup.
recovrier, 3i()g,guérison, salut.
recréant, 38o, 774, qui s'avoue
vaincu ; de péchiez — , 248,
qui avoue son péché, son dé-
lit ; 271, lâche, misérable.
recuerre, 7o3, recueillir.
reencon, 143, rançon.
regeter, 2274, curer.
GLOSSAIRE
225
règne, 104, io5, etc., régné,
3i5, i522, eic, reigne, 1401,
2496, 40o5, roigne, 3i5o,
royaume ; 627, 2235, 225o,
fief, domaine.
règne, reigne, 325, 3oi4, etc.,
rêne; n'i ot — tirée, 325, n'i
ot — tenue, 674, sans ralen-
tir, sans arrêt.
relancier, 3^oo,attaquer de nou-
veau avec la lance.
relenquir, 3912, abandonner,
renier.
remander, 2377, convoquer de
nouveau.
remanoir, ind. prés. 2^ p. sing.
remains, i35i, 3' p. sing.
remaint, 3899, ^"P- P^"''- re-
mainent,44i ; Jut. i^p. sing.
remaindrai, 1289, 1295, re-
mandrai, 1240, remanrai,
1284,/*/?. p/ur. remanrons,
217 ; parf. 3^ p. sing. remest.
igo2,33^o, 3' p. plur. remes-
trent,252 3, 3i2j, 4.161 ; p.pa.
remés, 1933, 2555, etc.; 441,
861, etc., rester, demeurer;
— a, 263, rester c/ie;^ ; 921,
2260, ne pas se faire, ne pas
avoir lieu; i853, i86-j, cesser ;
remés est nos mangiers,3287,
notre dîner en restera là.
remembrer, 2639, 2058, 3176,
souvenir ; 4235, rappeler [à
qqn).
remener, 2542, 38ii, amener.
remes, remese, remest, remes-
trent, voir remanoir.
remonter (v. intr.), 1599, se
remettre en selle ; {v. trans.),
2371, remettre en selle.
remuer, 685, éloigner ; se — ,
456, 578, se porter, s'avancer
vers qqn.
rendre, 1661,2793, 3950, don-
ner; — pris, 38o, faire prison-
nier; 3946, mener prisonnier ;
si li rendrai Tomile, 368o,
même sens.
renoveler : li afaire Landri com
fu renouvelez ! 45 1 3, comme
la situation de Landri a pris
un nouvel aspect \
repairier, 204, 5io, efc, retour-
ner chej soi, revenir; 23gb,
tourner bride; — a, 3862,
s'avancer vers; se — , 517,
2374, etc., retourner ; s'en — ,
1674, 23i4, etc., s'en revenir.
reparler, 1004, répliquer.
reposl, p. pa.de repondre, 1206,
caché.
reprendre, 36 1, 364, 386, sur-
prendre; 14.12, reprendre de
la vigueur {se dit d'un arbre
au printemps).
reprover, 700, 719, 2892, repro-
cher.
requerre, 933, 326\, demander,
réclamer ; 4.60b , supplier
[qqn]; — [qqn] de merci,
4079, demander grâce à qqn ;
585, i524, 3509, aller vénérer
[un saint], en faisant un pèle-
rinage ; 2834, faire venir ;
2919, attaquer.
requoi : en — , 358, 625, en
secret.
resaillir, ind. prés. 3" p. sing.
resaut, 3'jj2, 3° p. plur. re-
saillent, 25o8, se redresser.
rescorre, 495, 4366, secourir,
aider ; 2984, reprendre [du
butin à Pennemt] ; se — ,
985, se dégager, se libérer
d'une étreinte.
rescrïer {v. trans.), 4.44, crier ;{v.
intr.), 1 1 19, crier de nouveau.
i5
226
DOON DE LA liOCHE
1. resembler, 3537, paraître,
sembler.
2. resembler (se;, 2176, réunir
ses forces.
respouser, 4087, 4094, épouser
de nouveau.
rester, fut. restera, 1219 (?j;
voir folie et reçoivre.
restoier, 2337, rengainer.
restre, 3i52, 4247, être [de son
côté].
retenir, i363, 1370, etc., rete-
nir à son service ; 1892, ga7--
der auprès de soi; — leur
terre, 1018, tenir en leur pos-
session, défendre.
reter, 340, 525, 256o, accuser.
revenir : — avant, 49, se mani-
fester, se découvrir.
reverser, 284, renverser .
revestir, 2796, 355i, vêtir
d'habits neufs ; 1028, investir
de nouveau.
revoioir^ ind. pf.3° p. sing. re-
vot, 3744, vouloir de nouveau.
riche, 408, 85o, etc., fort, puis-
sant; 3'j2i, '5gb2, abondant.
rien, 52g, 538, etc., chose;
franche — , 439, noble créa-
ture; — s (adv.), 3523, quel-
que peu.
ris, 341, 729-730, rire.
rivière, 868, cours d'eau [ici
bras de mer, l'Hellespont];
3731, bord [d'un vivier];
2186, '4195 [ms. rivier], val-
lée où on chasse le gibier
d'eau.
rober, 4, tb, piller ; 1737, 1780,
2054, dépouiller [qqn], de ce
qu'il possède.
roé, orné de figures de roues :
paile — , 1826, 2014; targe
roée. 3658.
roi, mesure, disposition, 614;
cj. /'Errata,
roiamant 1172 {et 28 var.),
rédempteur.
roide, voir roit.
roigne, voir règne,
roit, 2456, 4387, rois (rég.
pliir.) 2467, fort, dur; fém.
roide, 868, rapide {épithète
de rivière),
rolleïs, 2273, fortification.
rompre, p. pa. rompus, 2478,
fém. route, 2492 ; — la presse,
2785, séparer la foule.
roncin, 2160, 371 1, 3959^
cheval de charge.
1 . rote, 4345, 4388, 4393,
troupe.
2. rote, y ïj, 4.55g, instrument de
musique à cordes.
roter, 858, 2 loj, jouer de V ins-
trument appelé rote.
route, voir rompre.
rover, ind. prés. /* pers.sing.
ru, 3407, ruis, 3261, J« p.
sing. rueve, 659, 3" p.plur.
ruevent, 899, 2744 ; 39, 476,
etc., demander.
rovuel, voir voruel.
ru, 703, ruisseau.
ru, rueve, ruevent, ruis, voir
rover.
*ruiste [ms.ruUe], 2853, violent.
sable, 1573, 1945, 20o5, :[ibe-
line.
sablon, 3785, sable.
sachant, voir savoir,
sachier, 3o56, tirer, arracher ;
3372 [ms. faich-], retirer;
2509, dégainer.
saillir, 2136,2292, etc., sauter.
sainglement, 2706, simplement.
saintisme, 147, très saint.
GLOSSAIRE
227
sale, 12, 989, etc., grande salle
du palais.
sait, voir sauver,
saluer : Pépin... vueil que me
saluez, 3 12, je veux que vous
saluie^ Pépin pour moi.
salve, voir sauver,
samblant, voir semblant,
sambue, 2014, couverture que
l'on met sous la selle.
saoulé, 3684, rassasie'.
sauf: sauve parole, 4272, paro/e
fidèlement observée.
saus [adj.], 3356, salé.
saut, voir sauver,
sautier, 1 885, psautier.
sauver, 3^ p. sing. subj. prés.
sait, 4264, saut 1399, 1400,
i632, 3226, salve, 1634,
sauver.
sauveté, 2739, sauvegarde.
savoir, ind. prés, i' p. plur.
savomes, 1923, 2047, .?<* j?.
plur. sevent, 1 207 ; parf. i' p.
sing. soi, 3o8o, 3^ p. sing.
sot, 12 14; subj. impf. 1° p.
sing. seûsse, 1467, 3' p. sing.
seûst, i486; 3173, connaître;
— du, 3926, se connaître en;
dou siècle sachanz, 1274, co«-
naissant le monde; (inf. pris
substantivt) "i-jâ^-] . action sage,
prudente.
se {conj .), suivi du subj., 3993,
jusqu'au moment oit; — lui
non, 124, sinon lui; — bien
non, 140, sinon du bien.
sebelin, iSyô, ig^S, de gibeline.
secheant, 1279,5e desséchant.
secour[re], 28o3, secourir.
seignier (v. trans.), 3482, 3494,
bénir par le signe de la
croix.
seignor, 2950, 2975, etc., cas
suj. sire, 2553, 2949, 3590,
3690, mari.
seignorie, 2994, domaine ; 2959,
4140, autorité; 2397, puis-
sance ; 1477, 4300, splendeur,
magnificence; 555, 2415,
2953, valeur, importance so-
ciale; n'i atent — , 2359, n'at-
tend pas son seigneur pour
avancer.
seignoril : cas suj. sing. sei-
gnoris, 333, signori[l] 3951,
qui appartient à un seigneur,
333, digne d'un seigneur.
sein, 4475, cloche.
seing [masc. soing], 3441, tache
naturelle à la peau.
seïr, 2934, 2937, etc., s'asseoir,
être assis; ind. prés. 3^ p. sing.
siet, 363,g26, etc. :impér.2''p
plur. seez, io35; parf. 3*
p. 5ing-. sist, 20H, 3348, 3'
p. plur. sirent, 370, sistrent,
4427; inf. 3^31, prendre part
à un siège.
sejor, i5o, repos.
sejorner, 2200, 2536, rester,
demeurer; p. pa., 106, re-
posé, frais.
selon, selonc, 1091, 373i, lelong
de; 3320, à côté de, au-
près.
semblant, 299, 537, 44^^) opj-
nion, idée; samblant, 3974,
apparence extérieure ; mos-
trer bel — , 995, montrer de
bonnes dispositions.
sempres, 1407, 2390, etc., tout
de suite, aussitôt.
sen : perdre le — , 2124, 2i3o,
2 1 33, avoir le — desvé, 2066,
perdre son bon sens, devenir
fou.
{ sendel, 1618, étoffe de soie.
228
DOON DE LA ROCHE
scné, 40,643, etc., sage, sensé;
bien —, 642, bien pourvu de
sens.
senechaucic, 2j8i, fonctions de
sénéchal.
sener, p. pa. senez, 1 19S, pan-
ser.
senestre, 2368, 3ooi, etc., gau-
che.
serf : [au fig.) niaus sers ! 790,
gredin.
sergant, sergent, voir serjant.
seri : coiement et — , 339, 782,
1 1 /^b , doucement , à voix basse;
en — , 3909, dans le calme du
sommeil.
serjant, sergant, serjent, 5, 18,
etc., homme d'armes; 243,
. 253, etc., serviteur; {fig.)
— saint Piere, 1734 [dit d'un
évèque] .
seror {cas sujet) 631,1908,2126,
{cas rég.) 42, 89, etc., sœur;
voir suer.
serorge, 356, 2254, 2262, beau-
frère.
servir, 38, 76, s'acquitter du ser-
vice féodal; 2792, s'acquitter
du service de cour ; — armes,
784, porter les armes ; par
ses armes — , 1460, par son
service guerrier.
servise, 37, 85, 2684, 3i3o,
3559, service féodal; feront
mon servise, 847, resteront à
mon service; selon vostre —,
4007, selon votre conduite;
2636, service amoureux .
setme, 961, septième.
seûsse, seûst, sevent, voir sa-
voir,
sevrer, 3682, 4162, séparer.
si que, 822, 1078, etc., détel-
le sorte que; 1734, ainsi que.
comme; si ne, 3737, que... ne
{subj.).
siècle, 529, 948, etc., monde
terrestre.
siglaton, 3587, manteau de bro-
cart.
signe, 1209. signal convenu
[pour Vexécution d'un meur-
tre].
signoril, voir seignoril.
sire, voir seignor.
sirent, sistrent, voir seir.
sivre, 3'^ p. plur. ind. prés.
sivent, 1089, 1096; 3'^ p. plur.
fut. sivront [ms. suerront,
sueront], 1290, suivre.
sodée, voir soldée.
sodoicr, voir soldoier.
soduire, i58 {gér. soduiant),
tromper; p. prés, pris adjec-
tivt. soduanz, 1170, so[u]-
duLijans 36o5, trompeur.
so'éi{adv.), 344, 1879, e/c, silen-
cieusement, sans faire de bruit.
soffre[te], 41 38, besoin.
soffrir, soufrir : armes — , 757,
porter des armes; se — , 1292,
rester tranquille, patienter;
sofrant, 274, 2i3i, patient à
l'excès.
soignier (se), 3390, se garder,
redouter.
soing : n'avoir — de, 482, 745,
1 1 35, se soucier peu, n'avoir
cure de.
soldée, 385 1, sodée, 2594, sou-
dée, 93, 2898, 41 17, récom-
pense en argent, argent.
soldoier, 1458, 1496, i523,
sodoier, i23, 2967, soudoier,
55, homme d'armes, soudoyer.
soler, 1716, soulier.
soiier, 2190, étage; — lanceis,
3928, pont volant.
GLOSSAIRE
229
soloir, /• p. sing. ind. prés.
suel, 2796; 3* p. sing. impf.
soloit, 298, souloit, 3964,
avoir l'habitude.
som , son : par — l'aube ,
i23o, 1357, 238i, etc., dès
le lever du jour; cist moz
doit estre a — [ms. asson],
4022, ce discours doit être
fini.
somier, 1722, 2899, 3ii7,
cheval de bât.
son, voir som.
soner : — viole, i356, jouer de
la viole.
sor : — tote chose, i36r, —
lote rien, 1442, par dessus
tout; de — , voir desor; par
— 1 102, au dessus de.
sordre, 3' p. sing. ind. prés.
sort, 2170, 4197, sourt, 3783;
3" p. sing. pf. sordi, 1426,
sordit, 4367, 3' p. plur. sor-
drent, 3077, surgir.
sorporter, 4274, entraîner, em-
porter.
sorterrin, 33 10, souterrain {}).
sot, voir savoir.
souduiant, voir soduire.
soudée, soudoier, vojV soldée,
soldoier.
souloit, voir soloir.
sourt, voir sordre.
souspris, 2716, épris, séduit.
sovent [adj .) : sove[n]te[s]
foiées, ï8go, fréquemment.
sovin, 1040, 1 1 18, souvin, 2290,
.tur le dos, renversé; paume
— e, 4i3o, la paume vers le
ciel.
soz, 3oi, 683, etc., sous; par
— , 2824, sous.
suel, voir soloir.
suer, cas suj. sing., 154, 2233,
2555, cas rég., 2149, sœur;
voir seror.
sueront, suerront, voir sivre.
sulïen, 3o86, de Syrie.
sus {adv.), 280, 326, etc., en
haut; 1021, 3266, en haut
{avec mouv.); 201J, dessus;
la — , i334, là-haut; 2235,
là-bas, au loin ; {prép.), 32 2,
3oo2, etc., sur.
tables, 2324, sorte de jeu, forme
primitive du tric-trac.
taint, 3433, coloré.
taisier (se), 3' p. plur. pf.
taisirent, 674; 714, 760, etc.,
se taire.
talent, talant, 161, 1796, etc.,
disposition d'esprit; 526, dé-
sir; avoir — , «795, 2417,
3i3o, avoir le désir de ; faire
son — , 2633, faire ce qu'on
veut; s!il vos vient a — , 244,
2804, 51 vous vnule^; 2723,
41 59, 4274, désir amoureux ;
faire ses — , 363, 387, 2725,
satisfaire ses désirs amou-
reux ; mal — , voir maltalent.
tant (adj.), 420, i393, i833-4,
2492-?^ etc., en si grand
nombre, en si grande quan-
tité; {adv.), 49. 861, 1024,
etc., si, tellement ; voir atant»
par, por ; {conj.) — coin,
i333, i8i\^, etc., autant que;
— que, 700, 1403, tellemen
que; 53 1, 637, etc., jusqu'à
ce que, tout le temps que.
tantost, 1979, 2102, 3814, tottt
de suite.
targe, 2398, 2492, 2987, 3658,
4174, bouclier long et rectan-
gulaire.
2.-»0
DOON DE LA ROCHE
targier, 36 lo, tarder; se — ,
4^27, retarder.
tart ; a — , 33o6, tardivement.
tassel, 1574, 1946, 2006,
franges, passements.
tel : je vous donroie — , 1174,
je vous porterais un tel coup.
tence, 2 338, querelle, lutte à
main armée.
tencier, 425, engager une dis-
cussion, disputer.
tenement, 3 1 24, 3 1 5 1 , 445o, do-
maine, propriété.
teneûre, 465, 21 83, 2188, fief.
tenir, fut. J^ p^ sing. tenra,
465, 3378, tendra, 2i83, 2»
p. plur. tenrez, 481, etc. ; pf.
3' p. plur. tindrent, 2524,
3277; infin. tenoir {à l'asson.),
627, avoir, posséder {au sens
féodal) ; 693, gouverner ;
1233, soutenir ; 2524, retenir;
— a, 337g, 3747,— por, 3375,
considérer comme ; — a jeu
de, 3394, 5e moquer de ; —
.XV. lieues, 3172, occuper une
étendue de i5 lieues; .vijc. be-
zanz tienent, 1619, 1827,
y 00 besants d'or y sont con-
tenus, cela vaut joo be-
sants ; or en tiennent lor
feste, 33o2, 3277, maintenant
[les chiens] s'en régalent ; —
grandement, 1477» traiter
avec distinction ; — mariage,
j^22 1, épouser ; — parole, 2 172,
délibérer; — règne, 574, rete-
nir les rênes; — une voie,
223^, prendre un chemin; se
— a, 3221, être partisan de;
s'en — , 1175, 1226, 1266,
1 796, s'abstenir de.
tenrement, 1210, 1234, etc.,
tendrement.
tens : par — , 1589, 2418, 3408,
quand le moment sera venu,
plus tard.
tenser, i23y, protéger.
tente : heaumes a — , 25io,
heaumes à lambrequin (?).
tenue, 2 ig'5,fief.
terme, 936, i3oi, 401 1, termi-
ne, 844, 1194, moment.
terrier, 35 18, 3887, retranche-
ment en terre.
terrin {adj.), 3266, dont le sol
est en terre battue.
timbrer, i^bb^, jouer [d'un ins-
trument].
tindrent, voir tenir.
tire [ms. cire], 2948, étoffe de
soie [de Tyr].
tirer : — la reigne, 325, tirer
les rênes, retenir le cheval.
tolir, ind. prés. 2' p. sing. tes,
ïo33, 3* p. sing. to[l]t, lobg,
tout, 200, 2« p. plur. {et im-
per.) tolez, 679, i683, 3* p.
plur. tollent, 3^2b, 3642; fut.
ï^p. sing., torrai, 1257, i3i6,
22i(j; pj. 3*^ p. sing. to\'\, 199;
p. pa. tolu, 463, 1047, ^t<^-}
tolois {cas rég.plur.à l'asson.),
442 1 , enlever.
tondre : faire — en croiz {com-
nie un fou), 696.
tormente : torner a — , 388o,
soumettre à des supplices.
torneïs, 161 5, fait au tour.
torner, 3'> p. sing. subj. prés.
tort, 27; — a, 427, 43o, trans-
former en; — a [qqn], 1640,
3o32, 3692, aller vers qqn;
— a gas, loii, tourner en
plaisanterie; — a tormente,
voir ce mot; {v. trans.)
i538, 1645, repousser, chas-
ser; — sor (v. intr.), 4183,
GLOSSAIRE
23 I
retomber sur ; en — , 27, pren-
dre congé,se séparer [de qqn] ;
— en fuie [absolt], 3g4o, s'en-
fuir; (v. trans.) i852, 3oi4,
faire fuir; se — : tornez vos
de sor mi, 47g, 809, tornez
[vos] de sus nos, 491, alle^-
vous en; s'en — , 189, 742, etc,
s'en aller.
tornïer : tant com li monz tor-
nie, 4145, sitr toute l'étendue
de la Terre {qui est ronde).
tornoi, 17, tournoi.
torrai, voir tolir.
i.tort, 1248,3238, injustice; a
— , 449, 890, 902, 2858, injus-
tement.
2. tort, 27, voir torner.
tost, 79r, 792, i32g, etc., vite.
tôt : de — , 882, complètement.
tout, voir tolir.
trabuchier, trebuchier (v.
trans.), 2367,3983, renverser,
précipiter; (v. inir.), 2481,
38o6, 4389, trébucher.
traîner, 699, supplicier, en traî-
nant derrière un cheval.
traire, 199, 21 3, etc., tirer
[l'épée], 926 [le poil = les
cheveux] ; 1900, 3571, 3994,
enlever [les nappes] ; — grant
mal, 35oi, supporter grand
mal; — la vie du cors, 4146,
tirer la vie du corps, tuer ; —
a .j. conseil, 1487, — a garant,
1171,2605, citer devant un
conseil, comme caution ; se — ,
236 1, s'avancer.
traïtor, 118, 102b, etc., traî-
tre.
*trametre [ms. tresmetre], 2281,
envoyer.
travail, 2^1^, peine, fatigue.
travaillier, 2774, 36go, moles-
ter, tourmenter; 3236, donner
de la fatigue; travail lié,
2039, 2070, etc., fatigué; se
— , 2978, se donner de la
peine {pour voyager vite); se
— de, i5o4, s'activer, se
démener pour.
trebuchier, voir trabuchier.
tref {masc), 1990, 1995, 201 5,
2037, 3 1 14, Si 19, 3633, 3946,
3962, 4076, pavillon, tente.
trellis {adj.),^iSo,dont les mail-
les sont à triple fil.
très, 771, 1990, 2494. 4363,
exactement, précisément.
tresfiner, 2014, 2162, 2317,
2332, s'arrêter.
tresgité, 2oi3, fondu.
tresmetre, 2281,4506, envoyer ;
cf. trametre.
trespas : en — . 336o, au pas-
sage.
trespasser (v. trans.), 324,352,
etc., passer, franchir; 3 16,
transgresser, violer ; {v. intr.)
2757, passer complètement {en
parlant du temps).
trespercier, 4384, transpercer.
tresque {conj. de temps), 2166,
jusqu'au moment oii; tresqu'a
{prép. de lieu), 1609, 1982,
etc., jusqu'à.
tressaillir {v. trans.), 8o3, sau-
ter pardessus; (v. intr.), —
en pies, 3389, sauter sur ses
pieds, se dresser.
tressuer, 45 1, se couvrir de
sueur; tressué, 1626, 2o38,
trempé de sueur.
trestorner, 1765, détourner,
dérober; — 162 1, négliger,
transgresser [un ordre] ; ja
n'en ert ou iert trestorné, 935,
i5oo, 1860, etc., c'est décidé,
232
UOON DE LA ROCHE
on n'y changera rien ; n'en
serez trestornée, 952, votts
n'échapperesi pas à votre des-
tinée; se — , 3784, se détour-
ner.
trestot, 217, 699, tout entier;
trestoz {cas rég. plur.), tres-
tuit [cas suj. phir.), i5, 1222,
etc., tous ensemble ; [adv.),
221, 343, entièrement.
treûs, 3i63 [corr. trcbus (?)], es-
pèce de chausses.
trive, II 39, 1149, etc., trêve.
troblé, 3975, troublé {dans le
sens matériel et le sens moral
à la fois).
troilié, 3i85, treillissé.
trois {sens indéfini) : — paro-
les, 472, 487, etc., quelques
paroles.
tronc, cas rég. plur. trons,
3833, 3937, tronc d'arbre em-
ployé comme projectile pour
une machine de guerre.
trône, 440, ciel, firmament.
trons, voir tronc.
trop, 846,946, 1643, beaucoup,
très.
trosser : — son harnois, 1377,
charger son bagage; {v.intr.),
4596, faire son bagage;
trossé, 1772, "i-] II, chargé {en
parlant d'une bête de somme).
trover, ind. prés. 3' p. sing.
trueve, 3o2 2; subj. prés,
i" p. sing. truisse, 2946, 2°
p. plur. truissiez, 4244, t7'0u-
ver.
truant, 3247, 3589, 36 1 5, vaga-
bond.
trueve, truisse, truissiez, voir
trover.
tumer, 4563, faire des culbutes
d'acrobate.
tumeresce, 4563, femme qui
« tume », acrobate.
uis, 906, 1043, etc., porte.
umilier (s'), 3042, devenir bon,
miséricordieux.
va, 2790, interjection.
vaillant, 4, 7, 37, etc., vaillis-
sant, i33, la valeur de.
vaincre: — lestor, i^bo, gagner
la bataille.
vair (adj.), 2008, changeant,
brillant {en parlant desyeux) ;
{subst.), io5, 633, fourrure
de l'écureuil du Nord.
val, 2912, plur. vaus, 2913,
vallée; a — , voir aval.
valet, vallet, 108, i326, etc.,
jeune homme.
vanteras {cas suj. sing.), 41 3 1,
vantard.
vaselage, voir vasselage.
vassal {adj.), i960, brave, cou-
rageux; {subst.), 2039, 3324,
homme.
vasselage, vaselage, 433 1 , 4392,
courage.
veant : d'oïr et de — , 261, par
rouie et par la vue.
veer {3^ p. plur. ind. prés.
vieent [ms. valent], 4060),
2874, 3o58, 3234, 4122, re-
fuser, interdire.
veez, voir vez.
veïr, 736,810,3923, voir; p.prés.
veant, 261, 988, volant, 1431.
venir : bien veigniez, 3539,
soye^ le bienvenu ; — ensem-
ble, 908, se marier; — a
cornant, 242, etc., — a gré,
229, i555, i558, 2077, — a
plaisir, 229, — en plaisir, 23 1,
— a talant, 244, plaire.
GLOSSAIRE
233
venjance : faire sa — , 2897,
établir un plan de vengeance.
venter, 706, 404?, jeter au vent.
ventre, poitrine : le cuer qu'il
ot ou ventre, 1104, 11 17.
vergié, 2464, vergé {épithètede
heaume),
vergonder, 225, 307, etc., cou-
vrir de honte.
vergondos, 989, i436, honteux.
vérité, voir verte,
vermeus {cas suj. sing.), 2438,
vermoilz {id.), 3oo-j, vermoil
{cas ré g.), 1993, vermeil.
verroil, iq5o, voruel [nts. ro-
vuel] 1378, virole.
vers, 788, 824, etc., contre,
envers; 818, en comparaison
de ; de — , voir devers,
verser [v. trans.), 2 362, renver-
ser •,{v.intr.), 100, 2 ^8 I ,tomber.
vert, 3764 (?), épithète d'espée.
verte, vérité: de — , 73,82, etc..
vraiment.
vertir (se), 2686, se tourner.
vertu, 10 18, etc., courage; par
— , 2240, 233 I, etc.. courageu-
sement.
ves, voir vez.
vespre {masc), 943, 2337, soir,
vesteûre, 438, 447, vêtement.
veudie, voir vuidier.
veve, 29, veuve,
vez, veez, ves : — ci, ici, 208,
2334, 4290, etc., — moi ci,
788, voici.
vi. voir vis.
viaire, 3i, 285, 2008, visage.
viande, 3279, etc., nourriture.
vianois, 362, 388, fabriqué à
Vienne {épithète de branc).
\\ax {cas rég. plur.), 356 1, vieux.
vieent, voir veer.
vilain, 23 10, homme non noble.
vi[l]té, voir viuté.
viole, 717, i356, instrument à
cordes.
violer, 838, 2107, 2787, 4558,
jouer de la viole,
i. vis {cas suj. sing. de vif). 223,
480. etc., vivant.
2. vis, 797, 799, etc., cas rég. vi,
i883, visage.
3. vis : il m'est a — , 1449, i7 me
semble.
viste, 658, agile.
vitaille, 2969, 3iij,etc., vivres,
provisions de bouche.
viuté, vi[l]té, 2892, abjection,
honte ; 688, acte criminel.
vivandier, 3272, homme hospi-
talier, généreux.
vivre : — de, 966, vivre aux dé-
pens de.
voiant, voir veïr.
voie: tote — , 1278, de toute
manière.
voicr, 3226, officier préposé à
la surveillance et à l'entretien
des routes.
voir, 2262, vrai; dire — , 372,
dire la vérité; de — , 1228,
por — , 2048, 36o5, vraiment;
{adv.), 1181, 1906, etc., vrai-
ment; non — ,4229, non vrai-
ment.
voire, 1043, vraiment: voire-
ment, 1061, etc., même sens.
voldrent, voir voloir.
* voleïlle, 4498, volaille.
voloir, prés. ind. /» p. sing.
vueil. i457;condif. j' p. sing.
volroie, 11 12; pf. 3' p. sing.
vot, 1845, 1968, 33/3, vout,
i334, /• p. plur. vousimes,
3076, 2' p. plur. vousistes,
2259, 3* p. plur., voldrent,
i6o3, 1982, voudrent, 353o,
2^4
DOON DE LA ROCHE
vourent, SSgo ; subj. prés.
2« p. plur. veuillez, SSSy:
impf. i^ p. sing. vosisse, 720,
3329, vousisse, 3297, 2^ p.
vosisses, 474, 489, 3^ p. vo-
sist, 1483, 3° p. vousissent,
3391, vouloir; inf. pris subs-
tantivt, i368, chose décidée.
voruel, voir verroil.
vosisse, vosist, vot, voir valoir.
votiz, 2287, en forme de voûte,
bombé {épithète d'escu).
voudrent, vourent, vousimes,
vousistt^s, vout, etc., voir
voloir.
vueil, voir voloir.
vuidier,^. pa.fém. sing. veudie,
2 161, quitter, abandonner.
waignon, gaignon, 33o2, 3337,
gros chien, mâtin.
ysopé, voir isopé.
TABLE DES NOMS PROPRES
Afrique : or d' —, 6og {cf. Au-
friqiiant).
Âis a la Chapele, gSg, 2372,
Aiz a la C, 85g, Ais en
Loeraigne, 2335, Ais, 221 3,
2278, 2322, Aix-la-Chapelle;
appartient à Doon de La
Roche.
Alemagne, 2901, Alemaigne,
2166, Aiemaine, 2602, dési-
gne la région soiiabe; appar-
tient à Olive, comme femme
de Doon; duc d' —, 2 56i,
265o, titre donné d Doon.
Alemant, 998, 1080, iroi, cas
rég. plur. Alemans , i3,
les Alamans ou Soiiabes, par
opposition aux Raviers et
<3«j: Frisons; 3i25. épithète
donnée à Florent, père de
Doon; 1, ly, etc., à Doon;
2761, 2775, 2781, à Landri
et à ses compagnons .
Alixandre, roi de Constantino-
ple, 1400, qualifié empereur,
1423 , 1436 , 1988 , etc.
Aloris [cas suj.), 1 129, traître.
Amauri, cousin de Doon, se
montre favorable à Olive,
370 et suiv.
Amauri, 2783, 3939, compa-
gnon de Landri à Constanti-
nople.
Amauri de Coloigne, 3871,
compagnon de Doon.
Âmorant de Saint-Gile, 2989,
neveu de Vévéque Auberi, cou-
sin germain d'Olive.
Andrier (saint), 53, saint An-
dré.
Andrius [cas sujet), 2783, com-
pagnon de Landri à Constan-
tinople.
* Angarie, voir Hongrie.
* Angevins, i3.
Anjou, 41 14.
Antecrist, 3904.
Antoine, 2768, localité attribuée
à Vltalie, le nom semble être
une altération de Hantone.
236
DOON DE LA ROCHE
Antoine, 23 2 j, partisan de To-
mile.
Apolin, 4401, (i/ei/ des Sesnes.
Arabe, Arabie : or d' — , 4418.
Arabois, d'Arabie : or — ,
620.
Arembour, 3^23, Jille du maire
Bernard.
Asson , cas suj. Asses de
Maience, 102 i , partisan d'O-
live et de Landri, 661, 1020,
etc. ; donné par erreur comme
compagnon de prison de Doon,
2802.
Asson, 2^28, partisan de To-
mile.
Auberi (Aubri 2990, 2999,
SySS), évêque, oncle d'Olive,
21 63, 2168, etc.; sa bio-
graphie, 2926 et suiv.
Audegour, Jille de Tomile,
seconde femme de Doon, 654,
2 1 14, 3026.
Aufricant [cas suj. plur.),
2778, Africains.
Aumarie, Almeria (Espagne) :
drap d' — , 4069.
Autefeulle, 4178, Autefueille,
2872, Autefuelle, 4183, Hau-
tefeuUe, 4168, château de
Grifon , pris par Landri,
4167, et suiv.; voir Grifon
d'A.
Auterme, i32o, ï3bb, bourgeois
de Paris .
Bacce a la porte, 839 (?).
Baivier, voir Bavier.
*Balegué [ms. Baligné], 4555,
Balaguer [Catalogne).
Bavier, i3, 998, Bai ier, 1080,
Bavarois.
Bavière, 2iÇ>Ç).pays appartenant
à Olive.
Beatriz, 2940, sœur de Vévêque
A uberi, mère de Pépin le Bref.
Benoîte, 1204, nonne, qui dé-
nonce à Doon le complot de
Tomile contre Landri.
Be[o]rges, 2991, Bourges, ville
dont Amorant de St-Gile est
duc.
Berengier, i5o2, i53o, cheva-
lier de Constantinople envoyé
en France pour s'enquérir sur
Landri.
Beri, 4232, Berry.
Bernart, 3191, 32i5, 3228,
Bernehart, 3353, 34or,3633,
366o, officier domanial resté
fidèle à Doon.
Bertain [cas rég.), 3423, fille du
précédent.
Bonevent, 2768, Bénévent (Ita-
lie).
Bourgogne, 4232.
Bras Saint Georges, 867, i5q4,
1977, Hellespont, mer de
Marmara.
Bretaigne, 41 13.
Breton, 435.
Brohimax de Sesoine, 4353,
Brohemax, 4370, 4383, ?-oz
des Saxons, emmène pri-
sonnier Pépin le Bref.
Calabre, 2192 (nommé comme
un pays lointain), 2761. 2908.
'Carsadoine 4127 [ms. Laza-
doine], 4355 [ms. Jazacoi-
gne], roi de Sasoingne, tué
par Pépin.
Clarembaus (cas sujet) de Hi-
nant, 1074, partisan de To-
mile.
Coloigne, 112 [ms. Coufongne],
etc., Coloigne sor mer, 1622,
Cologne, ville habitée par
TABLE DES NOMS PROPRES
237
Doon et où se passe le drame
de Vaccusation d'Olive et toute
la conjuration contre Landri ;
Varchevèque de C. protège
les envoyés de F empereur
Alexandre contre Tomile,
i6o3 et suiv.; Doon en est
chassé, 2168 et suiv.; Doon
reprend la ville, 400^ et suiv.;
Pépin y va avec Doon et
Olive, 4614 et suiv.; voir
Joserant, Simon, Tomile.
Constantin (palais), aybg, 2792.
palais bâti à Constantinople
par Constantin le Grand.
Gonstantinoble, 864, i638,
2526,2614,2723, 4267, Cens
tentinoble, i383, etc.; 2424,
4433, etc., Constantinople.
Damedé, 982, Damcdeu, i225,
Damedicu, 827 (cas rég.\ Da-
medex, 1 17, Damedeus, ii36,
Damediex, 523, 542. Dame-
dieus, 1000, II25 {cas suj.),
le seigneur Dieu.
Daon l'Alement, voir Doon.
Dé, voir Dieu.
Denis (saint), 4380.
Dieu, 207, 2i5, etc., Deu, 28,
g6b,etc.,Dé, 44, gb(casrég.),
Des, 4(1, Dex, 147, 412, etc.,
Diex, 321, 423, etc., Dieus,
226, 928 {cas sujet). Dieu.
Dinant, 1074. ville de Belgique.
Doon de La Roche, cas suj. Do
[ms. Doz], 5o, Ô4, etc., Do
IWlemanz [ms. Daon l'Ale-
ment], i5, Do li Alémanz, 5o5,
Do de la Roche, 32, 72, etc.,
Doons, 38; cas rég. Doon, 2,
9, etc.
Dorâmes {cas suj.), roi de
Hongrie, attaque Alexandre
empereur de Constantinople et
est battu, 2423 et suiv., 4220.
Dunoe, 2909, le Danube, placé
par l'auteur en Italie.
Esmerez [cas suj.), 2996, fait
partie de Varmée de Vévéque
Auberi.
Espaigne, Espagne : mule d' — ,
3775.
Espire, Spire, fait partie du
domaine de Tomile, 563,
6o5, 848, 2373, 2656, 3o2i;
porte d' — , au château de la
Roche, 3o2 r ; voir Salvain.
Espovante-felon, 'i'i'i\, faux
nom que Doon donne à Jofroi.
Finepople, 865, Philippopoli,
ville de Thrace.
Flamant, 14, 999, habitants des
Flandres.
Flandres, 2267.
Florenz li Alemanz, 3i25, père
de Doon, prend Sobrie.
Flori[i]en, 3348, sénéchal d'O-
live à La Roche.
Forbin, 4634, traître.
Formont, io83, compagnon de
Landri.
Franc : le roi — , 1097, 2126,
titre donné à Pépin.
France, 219, 432, etc.; douce
— , 20, 981.
François (= franc], 822, 999,
2258, 2849, 4294, épithète
donnée à Landri.
Frisons, 14, 999, habitants de
la Frise.
Frobert, 333o et suiv., faux
nom que se donne Doon.
Garnier, 2484, chevalier de l'ar-
mée hongroise.
238
DOON DE LA ROCHE
Gautier, 3246,^/5 de Bernard.
Gautier, chevalier, cousin ger-
main de Doon, 1760 et suiv.,
est chargé par Varchevêque de
Cologne de réclamer à To-
mile les dromadaires des en-
voyés de Constantinople .
Gautier de Sorbrie, BgSg, par-
tisan de Landri.
Genevois, 291 1, territoire de
Gênes {}) ; 2601, homme de
Gênes (?).
Germain (saint), 341 3.
Gilebert, 2327, partisan de
Tomile.
Gilebert de Vaubile, 1241.
Gillebert,_^/s aine de Bernard,
3206, 3246, 3309.
Giilibert filz Henri, ingénieur,
dirige le siège de Mayence,
3925 et suiv.
Goniiaume, riche bourgeois de
Cologne, cousin germain de
Doon, héberge les etwoyés de
Constantinople venus pour s'en-
quérir de Landri y 1 609 et suiv.
Gormaise, Worms, vicomte ap-
partenant à Tomile, 563, 6o3,
848 ; appartenant à Grifonel,
2994-
Grégoire, chapelain de Doon,
envoyé en mission auprès de
Pépin, 3o9 et suiv.
Grice, i382, Grèce.
Grifon d'Autefueille, Grifon le
viel, 3799, cas suj. Grife,
Grifes a la barbe, 36o6, traî-
tre, 2872, père d' H ardre et
d'Hélie, 3734, seigneur de So-
rable, 3756, 3780, 3799, 3866,
attaqué à Hautefeuille et tué
par Landri, 4167 et suiv.
Grifon (comte), voir Grifon
d'Autefueille.
Grifonel,y?/5 de M alsarie, sei-
gneur de Worms, est tué par
Amorant de Saint-Gile, 2992
et suiv.
Grifonic, Griftonie, 2616, 2722,
2791, empire des Grecs.
Griffons, 2000, Grecs.
Guenelon, cas suj. Guenes,
1142, traître, neveu de To-
mile, 119, 1 128, /rère d'Har-
dré et d'Hélie, 3779.
Guinemant, 2328, partisan de
Tomile.
Guxnemanx, partisan d'Olive et
de Landri, 661, 1020, etc.,
donné à tort comme compa-
gnon de captivité de Doon,
2859.
Hardré, traître, fils de Grifon,
cousin de Tomile et de Gue-
nelon, 120; ménage une trêve
avec Doon, 1 128 et suiv.; con-
seille de voler les droma-
daires des eyivoyés de Cons-
tantinople, i6o5 et suiv.;
fait prisonnier par Landri,
3783 et suiv. ; nommé par
erreur Hardris, 38i8.
Hauquetant, traître, tué par
Landri, 4633.
Hautcfeulle, voir Autefeulle.
Héiie, traître, fils de Grifon,
tué par Landri, 3733 et
suiv.
Henri, personnage de la suite
de Doon, 227.
Henri, père de l'ingénieur Gii-
libert, 3925.
Hennins, 1429, Arméniens.
Herupe, 452, région entre
Seine et Loire {Cf. R. de
Cambrai, Table).
Hervi, traître, cousin de To-
TABLE DES NOMS PROPRES
289
mile, 120, appelé plus loin
Hervis de Lion, ii3o.
1. Hongre (li), 2427, 2522,2526,
les Hongrois.
2. Hongre, 2427, 2436, fleuve
qui, semble-t-il, sépare la
Hongrie de V Empire grec.
Hongrie, Honguerie, pays oii
réside l'évêque Auberi, 2(62;
royaume de Dorame, 2414,
2421 ; 4044; escu d'*Angarie
[ms. Angie], 4069.
*Huon [cas suj. Hues) de Pon-
talie, accompagne Landri et
Pépin àConstantinople,j^4g5.
Huissant-sur-mer, 1791, Wis-
sant, Pas de -Calais, cant.de
Marquise.
Jazacoigne, voir Carsadoine.
Jehan, évêque de Constantino-
ple, 4632.
Jehan, homme de la suite de
Doon, 227.
Jhcrusalem, 3398.
Jésus, Jhesus, 249, 773, etc.,
Jésus-Christ.
Jhesus, vojV-Jesus.
Joffroiz, voir Jofroi.
Jofrin, frère d'Asson de Ma-
yence, 2866.
Jofroi de Maïance, cas suj. Jo-
froiz.JofFroiz, cousin de Doon,
se montre favorable à Olive,
370 et suiv. ; aide Doon à dé-
fendre La Roche contre To-
mile, 2382 et suiv. ; accom-
pagne Doon en Hongrie et est
fait prisonnier avec lui, 2407,
etsuiv.; est donné par erreur
comme compagnon de Landri,
2782, accompagne Doon che:{
le maire Bernard et à La
Roche, 3 1 38 et suiv.
Joserant de Coloigne, partisan
de Tomile, tué par Landri,
II 14; un autre personnage
du même nom est tue' par
Doon, 2296.
Justamont,;?ére de Carsadoine,
roi de Sasoingne, tué par
Pépin, 4127.
* Lalice. 1428, Laodicée en
Phrygie.
Landri, cas suj Landris, di-
min. Landriet, 280, 292, 53i,
83i,flls de Doon, 108, etc.
Lant (val), 2912, probablement
le « Land » de l'itinéraire
d'Albert de Stade [Mon.
Germ. Script., XVI, 337,
coL 6), dernière station en
Maurienne, avant la tra-
versée du Mont-Cenis, au-
jourd'hui Lanslebourg. (Cf.
J. Bédier, Les légendes épi-
ques, U, 148.)
La Roche, ville appartenant à
Doon, Introd., p. C, 8, 216,
etc.; assiégée par Tomile, puis
prise par Pépin, 2271 etsuiv. ;
reprise par Olive, aidée de Té-
vêqiie Auberi, 2978 et suiv. ;
Doon y rejoint Olive, 35o2
et suiv.; cri de guerre de
Landri, 1 107, 11 19, de Doon,
23oo.
Lazadoine, voir Carsadoine.
Leoroingne, voir Loeraigne.
Liège (le), i3o9, Liège, ville
belge.
Limosin^ 2267, Limousin.
Lion, I i3o, voir Hervi.
Loereing, 435, Loherain, 2i55,
Loorain, 2'io'j, Lorrain.
Loeraigne, 2335, Loereigne,
519, 1243, Loeroigne, 90,
240
DOON DE LA ROCHE
i3o, 880, 2385, Looraingne,
2816, Lorraine; les puis de
Leoroingne, 2910, montagnes
placées par l'auteur en Italie.
Loquesie, traître tué par Lan-
dri, 4634.
Mahom,44oij Mahomet^ 4354,
dieu des Sesnes.
î^aiance, Maience, 2394, 2808,
1915, 2921, 3o6o, 3707, est
assiégé par Doon, 3832 et
suiv.\ vofr Asson.
Malingre, _^/s de Doon et d'Au-
degour, g38, gbô, etc.
Malprin, messager de l'empe-
reur Alexandre, 4230 et suiv.
Malquerant, traître tué par
Landri, 4634.
Malsarie, sœur de lomile,
mère de Grifonel, 2992.
Manople : brul de — , 2326,
bois placé dans le voisinage
d'Aix-la-Chapelle.
Marie (sainte), 3i3, 827, etc.,
la sainte Vierge.
Maugin, traître, 121.
Monbardon, 1681, 2723, Mon-
tebardone en Italie. {Cf. J.
dédier, Les Légendes épiques,
II, 204.)
Mongiu, 4255, Montjoie. {Cf.
J. Bédier, Les Légendes épi-
ques, II, 225 et suiv.)
Monjoie, 4390, Montjoie, cri
de guerre des Français.
Monlaon, 1490, i5o5, i5i9,
1769, Laon [Aisne).
Monpeillier, 864, Montpellier ,
Montefleûne, 865 (?J.
Monsteruel sor mer, 1959,
2084, Montreuil - sur - mer
[Pas-de-Calais).
* Montervile [ms. Monteruule],
2660, 2848, localité oit eut
lieu la bataille entre Dorame
et l'empereur Alexandre.
Morïene, 2913, la Maurienne.
Morise, refuse de suivre Lan-
dri, 1 242 et suiv.
Moriz le chenuz, neveu de
Doun, 370, 399, se montre fa-
vorable à Olive, 1020 et suiv.
Noiron (Pré) , i554, 3333,
3478, ager Vaticanus, puis
Prati dt Castello, à Rome.
Normandie, 41 14.
Nonnant, cas rég. Normaus,
14, 433, 999, Normands.
Olive, à l'asson. Olivain, 3409,
3446, Olivant, 3437, sœur de
Pépin et femme de Doon, 43,
3o, etc.
Oton, partisan de Doon, 3871.
Outré, envoyé de l'empereur
de Constantinople en France,
I 3o2 et suiv.
Paris : Pépin y tient sa cour,
12, 38, 3i I, 325, 574, 575,
1283, 2229.
Pavie, 1791, ville d'Italie.
Pépin, roi de France, 11, 38,
etc.; qualifié roi, u, etc.,
empereur, 41, 54, etc., le
roi Franc, 2126; a tué le
lion, 220, 2226, 2855.
Père (saint), voir Pierre.
Pierre (saint), qu'on vénère à
Rome, 3325, 3478; qu'on vé-
nère à Cologne, 21 53, 3544
{voir Saint Pierre) ; le grand
chemin saint Pcre, 1378, le
chemin qui mène à Rome; S.
Père au Bras, voir Saint Père
au Bras.
TABLE DES NOMS PROPRES
241
Pisant, 291 1, contrée dePiseQ).
Plaisance : iaume de — , 2bij.
Pohiers, 14, habitants de Poix
(Somme). Cf. Raoul de Cam-
brai, table.
Poitiers, 3282.
Poitou, 2267.
Pontalie, voir Huon.
Pu[i]lle , 2173, 2192, 2600,
2918, Fouille.
Pullois, 2778, habitants de la
Fouille.
Raol de Vaudone, 2328, parti-
san de Tomile.
Rin, 1091, *ii23, 3911,4332,
4395, le Rhin, fleuve.
Roche, ;70«r La Roche, 16 10.
Roche vies (val de), 3072, vallée
dans les environs de La Roche.
Roinne, 860, le Rhône, fleuve.
Roissie, Russie : paile de — ,
2973.
Rome, 3398, 4556, Romme,
1 15, 1379, 1524, Rome.
Roon, refuse de prendre le
parti de Landri, 1242 et suiv.
Roucien as grenons enfumez,
69, surnom donné à Doon en
manière de plaisanterie.
Saine la ville, voir Seine la ville.
Saint-Gile, voir Amorant.
Saint Père au Bras, 1 38o, finn-
ois/(?). (Cf. J. Bédier, Les
Légendes e'piques, II, 252-
253.)
Saint Pierre, église de Colo-
gne, 1639, 1726, 1734, 1737,
4055,4073,4088,4101,4419.
Sainte Sofie, église de Constan-
tinople, 2701, 4199.
Saisne, voir Sesne.
Saissoigne, voir Sesoigne.
Salmadrine, fille d'Alexandre,
empereur de Constantinople,
1441, etc.
Salvain d'Espire, traître, séné-
chal de Tomile, tué par Es-
meré, 2996 et suiv., 3079.
Sarazin, 866, Sarrazin, 1427,
Arabes.
Sasoigne, Sasoinne, voir Sesoi-
gne.
Seine la ville 2925, Seinne la
ville, 2968, Saine, 3953, Sai-
ne la ville, 38g4, ville de
Vévêque Auberi, en Hongue-
rie [cf. V. 2162); en réalité
Sienne, en Italie [voir la note
sur le V. 2925).
Sepolcre, 585, tombeau de saint
Pierre à Rome.
Sesne [cas suj. plur.), 435o,
Saisne. 4382, Saxons.
Sesoigne, 4353, Sasoigne, 4126
Sasoinne, 4370, Saissoigne,
3912, Saxe.
Seûse, 2912, Suse, en Italie.
[Cf. J. Bédier, Les Légendes
épiques. II, i38.)
Simon, fils du maire Bernard,
3309.
Simon de Cologne, 3872, par-
tisan de Doon.
Sobrie, 3ii3 et suiv., 3641,
3665, 3714, 3720, ville con-
quise [sur les païens T) par Flo-
rent, père de Dovn ; c'est en
réalité la ville lointaine de
Sobrie, transportée arbitrai-
rement par l'auteur de Doon
dans la vallée du Rhin. Le
nom est emprunté à Elie de
Saint-Gilles; cri de guerre
de Doon, 36oi.
Soissons, 33 13.
i«
24'-i
DOON DE LA ROCHE
Sorable, 3756, ville de Grifon
de Hautefeuille.
Sorbrie, voir Gautier.
Sulie, Surie, Syrie, 604 : mur
de — 2972, mul de — , 3oo2,
4157.
Sulïen, de Syrie: mul —, 3o86.
Surie, voir Sulie,
Symon, voir Simon.
Tomiles, cas rég. Tomile, 1 16,
119, etc., Tomiles de Coloi-
gne, i37, i58, traître, frère
de Grifon de Hautefeuille,
oncle de Guenelon.
Tosquaigne, 2918, Toscane.
Tosquanz [cas rég. plur.),
2601, Toscans.
Tresmoigne, 2768, 4356, Cré-
mone en Italie (?).
Turcople, 866, 3849, Turco-
mans.
Vaillie, voir Valie. .
Val Lant, voir Lant.
Valfondée, 2601, localité en
Italie.
Valîe, 2723, Vaillie 2681 (?).
Vaubile, voir Gilebert.
Vaudone, voir Raol.
Verdun ou mont, 860, Verdun
[Meuse).
tfioitr:,)
•*illtJ-Mt!«
.anaac x.o^ ,9z»iBê
ERRATA
CORRECTIONS ET ADDITIONS
Lire :
V. io3, mois duré. — 528, par amoit. — 614, suppr. la note
aux var. — 876, gastera voz. — gSS, que soie bien o vos (?)
(cf. Introd., p. xxx). — 1088, despersonéement. — iiSg, Do.
— 1206, pile[r]. — 1289, deci qu'en paiennie. — 1265, plore
et sospire {cf. Introd., p. xxvi). — iSpo, li uns a l'autre. —
1471, fu[i]tis. — i6o5, mes. — 1625, Iaissi[e]rent {cf. In-
trod., p. xix). — 1639, saint Père. — i665,li mes. — lyiS,
enganez, et ajouter en note : 171 3, enganez, ms. engigniez;
cf. plus loin, V. 1914. — 1848, senestre le[z]. — 1857, foi.
— 19 14, peut-être faut-il maintenir dans le fe.rfe enginié,
leçon du ms. {cf. v. 1713 et Introd., p. xxviii.) — 1924, nen.
— 1995, Dieus ne fist. — 2060, var., sanc. — 2080, de bon
aire; ajouter aux var. : ms. de bonnaire. — 221 5, juré To-
mile. — 2253, 2261, p[l]ois. — 2319, .j. escuiers. — 2726,
muir {cf. Introd., p. xix). — 2735, Par itel covenant. —
2741, di[s]t. — 2789, Le chartrier en apele. — 3 107, ajouter
aux var. : acorerai, ms. acorecerai. — 3397, li povre[s]. —
3478, 3544, saint Père. — 3678, ne place Dieu. — 3710, Vos
menrez. — 3795, puis je bien dire. — 8909, var. : supprimer
les 12 derniers mots. — 4027, Del massacre, et ajouter aux
var. : ms. maltagre . — 4086, var. : supprimer les six derniers
mots. — 4101, saint Père {cf. Introd,, p. xxxi).
Notes. P. 175, 1. 2, messagers, au lieu de messages.
►HM^
TABLE DES MATIERES
Introduction.
Chapitre PREMIER : historique de l'édition. .... .;.î;...>. .' mi .'/l
— II : le manuscrit et les fragments; langue des . -xijii
,, , fragments et du manuscrit va
— -j'"" , III : versification, langue, patrie et date du
poème XXV
_.j ■ IV : analyse du poème xl
— V : formes diverses et évolution de la légende
épique lxv
Appendice : A, remarques sur quelques noms propres.. xcix
— B, sur un détail du récit de la « Karlama-
,j.jii.4»i. gnus-Saga » cm
.;;ai ,; c, note complémentaire sur l'historique de
nod al, l'édition civ
Texte du poème de Doon de la Roche i
Notes sur le texte du poème 173
Glossaire.,, .,«..... ^.i.,,.,,.,... 180
Index des noms propres 235
t^mn^^ui '. .•^t>'< .poçt - ,3nb aoid sj îiuq ,iç>\l — .S9indni
. ( « X X A
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Publications de la Société des Anciens Textes Français
[En vente à la librairie Edouard CHAMPiON, 5, quai
Malaquais, à Paris-6' arr.).
Bulletin de la Société des Anciens Textes Français (années 1875 à 1921).
N'est vendu qu'aux membres de la Socie'té au prix de 3 fr.'par année, sur
papier de Hollande, et de 6 l'r. sur papier Whatman.
Chansons françaises du xv« siècle publiées d'après le manuscrit delà Biblio-
thèque nationale de Paris par Gaston Paris, et accompagnées de la musi-
que transcrite en notation moderne par Auguste Gevaert (1875). Epuisé.
Les plus anciens Monuments de la langue française (ix«, x* siècles) pu-
bliés par Gaston Paris. Album de neuf planches exécutées par la photo-
gravure (1875) Epuisé.
Brun de la Montaigne, roman d'aventure publié pour la première fois, d'a-
près le manuscrit unique de Paris, par Paul Meyer (1875). Sur papier
Whatman seulement 3o fr.
Miracles de Nostre Dame par personnages publiés d'après le manuscrit de
la Bibliothèque nationale par Gaston Paris et Ulysse Robert; texte com-
plet t. I à VII (1876, 1877, 1878, 1879, 1880, 1881, i883), le vol. . i5 fr.
Le tome VII est épuisé en papier Hollande.
Le t. VIII, dû à M. François Bonnardot, comprend le vocabulaire, la
table des noms et celle des citations bibliques (1893) 25 fr.
Guillaume de Palerne publié d'après le manuscrit de la bibliothèque de l'Ar-
senal à Paris, par Henri Michelant (1876). Sur papier Whatman seu-
lement 40 fr.
Deux Rédactions du Roman des Sept Sages de Rome publiées par Gaston
Paris (1876). Sur papier Whatman seulement 40 fr.
Aiol, chanson de geste publiée d'après le manuscrit unique de Paris par
Jacques Normand et Gaston Raynaud (1877). Sur papier Whatman seu-
lement 5d fr.
Le Débat des Hérauts de France et d'Angleterre, suivi de The Debate be-
tween the Heralds ofEngland and France, t/ John Coke, édition commen-
cée par L. Pannier et achevée par Paul Meyer (1877) i5 fr.
Œuvres complètes d'Eustache Deschamps publiées d'après le manuscrit de
la Bibliothèque nationale par le marquis de Queux de Saint-Hilaire,
t. I à VI, et par Gaston Raynaud, t. VII à XI (1878, 1880, 1882, 1884,
1887, 1889, 1891, 1893, 1894, 1901, i9o3), ouvrage terminé, le vol. 20 fr.
Le saint Voyage de Jherusalem du seigneur d'Anglure publié par François
Bonnardot et Auguste Longnon (1878) 20 fr.
Chronique du Mont-Saint-Michel (1343-1468) publiée avec notes et pièces
diverses par Siméon Luce, t. I et II (1879, i883), le vol 20 fr.
Elie de Saint-Gille, chanson de geste publiée avec introduction, glossaire
et index, par Gaston Raynaud, accompagnée de la rédaction norvégienne
traduite par Eugène Koelbing (1879) là fr.
Daurel et Béton, chanson de geste provençale publiée pour la première fois
d'après le manuscrit unique appartenant à M. F. Didot par Paul Meyer
(1880). Sur papier Whatman seulement 3o fr.
La Vie de saint Gilles, par Guillaume de Berneville, poème du xii» siècle
publié d'après le manuscrit unique de Florence par Gaston Paris et
Alphonse Bos (1881) 20 fr.
L'Amant rendu cordelier à l'observance d'amour, poème attribué à Martial
d'AuvERGNE, publié d'après les mss. et les anciennes éditions par A. de
MoNTAiGLON (1881) i5 fr-
Raoul de Cambrai, chanson de geste publiée par Paul Meyer et Auguste
LoNGNON (1882). Sur papier Whatman seulement 5o fr.
Le Dit de la Panthère d'Amours, par Nicole de Margival, poème du xiii* siè-
cle publié par Henry A. Todd (i883) i5 fr.
Les Œuvres poétiques de Philippe de Rémi, sire de Beaumanoir, publiées par
H. SucHiER, t. I et II ensemble (1884-85) 40 fr.
La Mort Aymeri de Narbonne, chanson de geste publiée par J. Couraye
DU Parc (1884) 20 fr.
Trois Versions rimées de l'Évangile de Nicodème publiées par G. Paris et
A. Bos (i885) o fr.
Fragments d'une Vie de saint Thomas de Cantorbéry publiés pour la première
fois d'après les feuillets appartenant à la collection Goethals Vercruysse,
avec fac-similé en héliogravure de l'original, par Paul Meyer (i885). 20 fr.
Œuvres poétiques de Christine de Pisan publiées par Maurice Roy, 1. 1, II et
III (1886, 1891, 1896), le vol 20 fr.
Merlin, roman en prose du xiu" siècle publié d'après le ms. appartenant à
M. A. Huth, par G. Paris et J. Ulrich, t. I et II (1886). Sur papier
Whatman seulement le vol 40 fr.
Aymeri de Narbonne, chanson de geste publiée par Louis Demaison, t. I et
II (1887). Sur papier Whatman seulement le vol 40 fr.
Le Mystère de saint Bernard de Menthon publié d'après le ms. unique appar-
tenant à M. le comte de Menthon par A. Lecoy de la Marche (1888I. i5 fr.
Les quatre Ages de l'homme, traité moral de Philippe de Novare, publié
par Marcel de Fréville (1888) ao fr.
Le Couronnement de Louis, chanson de geste publiée par E. Langlois,
(1888). Sur papier Whatman seulement 5o fr.
Les Contes moralises de Nicole Bo^on publiés par Miss L. Toulmin Smith
et M. Paul Meyer (1889) 25 fr.
Rondeaux et autres Poésies du XV' siècle publiés d'après le manuscrit de la
Bibliothèque nationale, par Gaston Raynaud (1889) 20 fr.
Le Roman de Thèbes, édition critique d'après tous les manuscrits connus,
par Léopold Constans, t. I et II (1890) ensemble 5o fr.
Le Chansonnier français de Saint-Germain-des-Prés (Bibl. nat. fr. 20o5o),
reproduction phototypique avec transcription, par Paul Meyer et Gaston
Raynaud, t. I (1892) 100 fr.
Le Roman de la Rose ou de Guillaume de Dole publié d'après le manuscrit
du Vatican par G. Servois (1893). Sur papier Whatman seule-
ment 4 o fr.
L'Escoufle, roman d'aventure, publié pour la première fois d'après le manus-
«rit unique de l'Arsenal, par H. Michelant et P. Meyer {1894). . 23 fr.
Guillaume de la Barre, roman d'aventures, par Arnaut Vidal de Ctstei-
naudari, publié par Paul Mbyer (1895) 20 fr-
Meliador, par Jean Froissart, publié par A. Longnon, t. I, II et III
(1895-1899), le vol 20 fr.
La Prise de Cordres et de Sebille, chanson de geste publiée, d'après le
ms. unique de la Bibliothèque nationale, par Ovide Densusianu
(1896) Epuisé.
Œuvres poétiques de Guillaume Alexis, prieur de Bucy, publiées par
Arthur Piaget et Emile Picot, t. I, II et III (1896, 1899, 1908),
le volume 20 fr.
L'Art de Chevalerie, traduction du De re militari de Végèce par Jean de
Meun, publié, avec une étude sur cette traduction et sur Li Abrejance de
l'Ordre de Chevalerie de Jean Priorat, par Ulysse Robert (1897). 20 fr.
Li Abrejance de l'Ordre de Chevalerie, mise en vers de la traduction de
Végèce par Jean de Meun, par Jean Priorat de Besançon, publiée avec
un glossaire par Ulysse Robert {1897) 20 fr.
La Chirurgie de Maître Henri de Mondeville, traduction contemporaine
de l'auteur, publiée d'après le ms. unique de la Bibliothèque nationale
par le Docteur A. Bos, t. I et II (1897, 1898) ensemble 40 fr.
Les Narbonnais, chanson de geste publiée pour la première fois par Her-
mann Suchier, t. I et II (1898) Epuisé.
Il reste quelques exemplaires du tome II.
Orson de Beauvais, chanson de geste du xii* siècle publiée d'après le ma-
nuscrit unique de Cheltenham par Gaston Paris {1899) 20 fr.
L'Apocalypse en français au XIII* siècle (Bibl. nat. fr. 4o3), publiée par
L. Delisle et P. Meyer. Reproduction phototypique (1900) 100 fr-
— Texte et introduction (1901) aS fr.
Les Chansons de Gace Brûlé, publiées par G. Huet (1902) i5 fr.
Le Roman de Tristan, par Thomas, poème du xii» siècle publié par Joseph
BÉDIER, t. I et II (1902- 1903), le vol Épuisé.
Recueil général des Sotties, publié par Ém. Picot, t. I, II et III (1902, 1904,
19 12), le vol 20 fr.
Robert le Diable, roman d'aventures publié par E. Lôseth (1903).. . 20 fr.
Ite Roman de Tristan, par Béroul et un anonyme, poème du xii* siècle,
publié par Ernest Muret (1903) Epuisé.
Maistre Pierre Pathelin hystorié, reproduction en fac-similé de l'édition
imprimée vers i5oo par Marion de Malaunoy, veuve de Pierre Le Caron
(1904) i5 fr.
Le Roman de Troie, par Benoit de Sainte-Maure, publié d'après tous les
manuscrits connus, par L. Constans, t. I, II, III, IV, V et VI (1904,
1906, 1907, 1908, 1909, 191 2), le vol 2 5 fr.
Les Vers de la Mort, par Hélinant, moine de Froidmont, publiés d'après tous
les manuscrits connus, par Fr. Wulff et Em. Walberg (1905). Epuisé.
Les Cent Ballades, poème du xiv» siècle, publié avec deux reproductions
photorypiques, par Gaston Raynaud (i9o5) 20 fr.
Le Moniage Guillaume, chansons de geste du xii* siècle, publiées par W
Cloetta, t. I et II (1906, 191 1), le vol 25 fr
Florence de Rome, chanson d'aventure du premier quart du xiii» siècle,
publiée par A. Wallenskôld, t. I et 11(1907, 1909), le vol 20 fr.
Les deux Poèmes de La Folie Tristan, publiés par Joseph Bcdier
(1907) Épuisé.
Les Œuvres de Guillaume de Machaut, publiées par E. HocprPNER, t. I
{1908) 20 fr.
— t- n(i9ii) 25 fr.
Les Œuvres de Simund de Freine, publiées par John E. Matzke(i909), 20 fr.
Le Jardin de Plaisance et Fleur de Rethorique, reproduction en fac-similé
de l'édition publiée par Antoine Vérard vers i5oi (1910) 100 fr.
Chansons et descorts de Gautier de Dargies, publiés par G. Huet
(1912) 10 fr.
L'Entrée d'Espagne, chanson de geste franco-italienne, publiée par A.
Thomas, t. I et II (iqi3) ensemble 5o fr.
Le Lai de l'Ombre, par Jean Renart, publié par J. Bédier (tgiS).. i5 fr.
Le Roman de la Rose, par Guillaume de Lorris et Jean de Meun, publié
d'après les manuscrits, par E. Langlois.
Tome I (1914), II et III (1920), le vol 25 fr.
Le Roman de Fauvel, par Gkrvais du Bus, publié d'après tous les manus-
crits connus, par M. A. Langfor» (1914-1919) 20 fr.
Le Mistére du Viel Testament, publié avec introduction, notes et glossaire,
par le baron James de Rothschild, t. I-VI (1878-1891), ouvrage terminé,
le vol 20 fr.
(Ouvrage imprimé aux frais du baron James de Rothschild et offert aux
membres de la Société.)
Tous ces ouvrages sont in-8°, excepté Les plus anciens Monuments de la
langue française et la reproduction de V Apocalypse, qui sont grand in-folio,
et la reproduction du Jardin de Plaisance, qui est in-40.
Il a été fait de chaque ouvrage un tirage à petit nombre sur papier What-
man. Le prix des exemplaires sur ce papier est double de celui des exemplaires
sur papier ordinaire.
Les membres de la Société ont droit à une remise de 25 p. 100 sur tous
les prix indiqués ci-dessus.
La Société des Anciens Textes français a obtenu pour ses pu-
blications le prix Archon-Despe'rouses,'à l'Académie française, en
1882, et le prix La Grange, à l'Académie des Inscriptions et
Belles-Lettres, en i883, i8g5, igoi, igo8, igii, igi4 et
igi8.
Le Puy-en-VeUy. — Irapriraerie Peyriller, Roachea et Gamon.
<^PH
PQ
14.57
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1921
Doon, de la Roche (Chanson de
geste)
Ibon de la Roche
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PLEASE DO NOT REMOVE
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