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Full text of "Doon de la Roche, chanson de geste, pub. par Paul Meyer et Gédéon Huet"

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SOCIÉTÉ 


DSS 


ANCIENS  TEXTES  FRANÇAIS 


DOON   DE   LA  ROCHE 

PUBLIÉ    PAR 

Paul  MEYER  et  Gédéon  HUET 


f •*s8*,»*-',>si«*'*  V  isiini<&>i 


Le  Pay-cn-Vclay.  —  Imprimerie  Peyriller,  Roucliou  et  Gamon.. 


DOON  DE  LA  ROCHE 


CHANSON    DE   GESTE 


PUBLIÉE    PAR 


Paul  MEYER  et  Gédéon  HUET 


f\ 


V^v 


PARIS 

LIBRAIRIE  ANCIENNE    EDOUARD    CHAMPION 

ÉDITEUR 
5,    QUAI    MALAQUAIS    (vi*) 

M  DCCCCXXI 


Publication  proposée  à  la  Société  le  24  avril  1878. 

Approuvée  par  le  Conseil  dans  sa  séance  du  22  mai  suivant,  sur 
le  rapport  d'une  Commission  composée  de  MM.  Henri  Michelant, 
Gaston  Paris  et  Gaston  Raynaud.  ' 

Commissaire  responsable  : 

(en  remplacement  de  Gaston  Paris, 
mort  avant  le  commencement  de  l'impression) 

,  ,  M.  Antoine  Thomas. 


?Q 
'457 

!  f  2/ 


INTRODUCTION 


CHAPITRE    PREMIER 

HISTORIQUE    DE    l'ÉDITION. 


L'édition  de  Doon  de  La  Roche  a  eu  une  histoire  lon- 
gue, compliquée  et  finalement  douloureuse. 

Le  manuscrit  de  Londres  qui  contient  le  poème  avait 
été  signalé  dès  i838  par  Francisque  Michel,  parmi  les 
résultats  du  voyage  d'exploration  dans  les  bibliothèques 
anglaises,  dont  il  avait  été  chargé  par  le  Ministre  de 
l'Instruction  publique  '.  —  Lorsque  Guessard  conçut 

I.  Francisque  Michel,  Rapports  à  M.  le  Ministre  de  l'Instruc- 
tion publique  sur  les  anciens  manuscrits...  qui  se  trouvent  dans 
les  bibliothèques  d'Angleterre  et  d'Ecosse,  Paris,  i838,  in-4% 
p.  55-56.  Fr.  Michel  donne  quelques  détails  sur  le  manuscrit  du 
Musée  Britannique,  cite  les  10  premiers  et  les  11  derniers  vers 
de  la  chanson  et  indique  un  rapprochement  possible  avec  Doon 
de  Mayence.  —  A  ces  21  vers,  publiés  par  Franc.  Michel,  il  faut 
ajouter  deux  fragments,  formant  un  ensemble  de  122  vers,  cor- 
respondant aux  vv.  i258-i3oo  et  2696-2774  de  notre  texte,  publiés 
par  M.  W.  Benary,  dans  le  t.  XXXI  des  Romanische  Forschungen, 
p.  385-3g2,  en  appendice  à  l'étude  que  nous  mentionnerons  plus 
loin.  C'est  tout  ce  qu'on  a  publié  jusqu'ici  de  Doon  de  La  Roche. 


jj  DOON    DE   LA    ROCHE 

le    projet  de  la  publication  intégrale  des  chansons  de 
.este,  dans  la  collection  d,s  Anciens  poètes  de  la  France 
fl  songea  à  Doon  de  La  Roche.  Un  romaniste  allemand, 
Cari  Sachs  ',  fut  chargé,  en  vue  de  cette  publication, 
par  Fortoul,  alors  Ministre  de  l'Instruction  publique, 
d'une  mission  littéraire  en  Angleterre  :  il  en  rapporta 
entre  autres,  une  copie  de  Doon  de  La  Roche,  qui  fut 
tout   porte    à  le    croire,    remise  a   Guessard,    et    une 
analyse   du  poème,  que  l'auteur  pubha  en  allemand 
à  Berlin,  en   1857,  avec  d'autres  travaux  sur  la  litté- 
rature du  moyen  âge '.  A„ri^r7^ 
Dans   le    prospectus   joint   au  volume  des  Anciens 
poètes  de  la  France  c^ui  parut  en  i858  et  qui  contient 
Gui  de  Bourgogne,   Otinel  e^Floovant,  on   annonce 
comme  devant  paraître  :   «  Fterabrasp.rU.  Krober 
Doon  de  La  Roche,  par  M.  le  doct  Ch.  Sachs  >k-  Dans 
le  prospectus  joint  au  volume  qui  contient  Gaufrey  et 
qui  est'daté  du  le.  octobre  iSSg,  Doon  de  La  Roche  est 
indiqué  comme  devant  être  le  19^  volume  de  la  série 
C.    Sachs  n'est  plus  nommé  comme   éditeur^-   l^n 
,864,  G.  Paris  écrivait:  «...  le  roman  de  Doon  de 
La  Roche..., ni  prendra  bientôt  sa  place  dans  la  co  - 
lection  des  Anciens  poètes  de  la  France     »  .  1  œuvre 
n'avait  toujours  pas  paru.                                  ^     j^  j«  u 
Guessard  se  méfiait,  semble-t-il,  de  l'exactitude  de  la 
copie  de  Sachs;  il  profita  d'un  voyage  que  fit  en  Angle- 
er're  M.  G.  Fagniez,  alors  élève  de  l'Ecole  des  c  h  art  s 
pour  obtenir  une  révision  du  manuscrit.  M.  Fagmez 

,    Il   fut   plus   tard,  avec    Césaire   ViUatt^   auteur   du   grand 
Dictionnaire  allemand-français  et  français-allemand 
Tseitrâ^e  rur  Kunde  alt-fran:^ôsischer,  engbscher  undpio- 

p'  .0,  l'analyse  de  Doon  de  La  Roche,  avec  quelques   remar- 
ques sur  la  langue  du  manuscrit.  A-^Vl,Hf,A\    io5 
3    Bibliothèque  de  l'École  des  chartes,  5-  série,  V  (1864).  ioi>. 


INTRODUCTION  IH 

fit  des  coUationnements  et  des  conjectures  :  le  tout  fut 
remis  à  M.  Paul  Meyer  ',  qui  fut  alors,  semble-t-il, 
chargé  définitivement  du  soin  de  l'édition.  M.  Meyer, 
collationna  de  nouveau  la  copie  de  Sachs  sur  le  manus- 
crit de  Londres 'et  prépara  cette  copie  revue  et  corrigée 
pour  servir  de  base  à  l'édition,  conformément  au 
principe  établi  par  Guessard  pour  la  collection  des 
Anciens  poètes,  savoir  :  reproduction  fidèle  du  texte 
du  manuscrit  principal  (ici  manuscrit  unique),  sauf 
dans  le  cas  de  leçons  manifestement  erronées. 

Après  les  événements  de  1 870-1 871,  la  publication  de 
la  collection  des  Anciens  poètes  (qui,  il  faut  le  dire, 
n'avançait  que  très  lentement  pendant  les  années  qui 
précédèrent  immédiatement  la  guerre  franco-allemande) 
fut  définitivement  abandonnée;  en  revanche,  en  1875 
fut  fondée  la  Société  des  Anciens  Textes  Français. 
Dans  la  séance  du  Conseil  d'administration  de  la  So- 
ciété du  24  avril  1878,  M.  Meyer  proposa  deux  nou- 
velles publications  :  Yder  et  Doon  de  La  Roche-,  le 
projet  fut  renvoyé  à  une  commission,  composée  de 
MM.  Michelant,  G.  Paris  et  G.  Raynaud  ;  dans  la 
séance  du  22  mai  1878,  G.  Paris  fit  un  rapport  et  con- 
clut à  l'admission  du  projet.  G.  Paris  fut  nommé  com- 
missaire responsable  '. 

Dans  l'assemblée  générale  de  la  Société  qui  eut  lieu 
bientôt  après,  le  29  mai  1878,  M.  Meyer,  dans  le  rap- 
port qu'il  fit  en  qualité  de  secrétaire,  parla  en  détail  des 
deux  poèmes  qu'il  s'agissait  de  publier.  Ce  qu'il  dit 
alors  ^  mérite  d'être  reproduit  ici  en  entier,  du  moins 
en  ce  qui  concerne  Doon  de  La  Roche  : 

1.  Je  dois  la  connaissance  de  ces  faits  à  une  communication'-^ 
obligeante  de  M.  G.  Fagniez,  datée  du  17  novembre  igiy. 

2.  A  la  fin  de  la  copie  collationnée,  on  trouve,  écrite  de  la 
main  de  M.  Meyer,  la  date  du  3  octobre  i865. 

3.  Bulletin  de  la  Société  des  Anciens  Textes,  IV  (1878),  72-73, 

4.  Bulletin,  année  citée,  p.  87  et  suiv.  '•> 


^  DOON    DE    LA   ROCHE 

\..Unco.e  à  vous  entretenir  .ede„pro^«^^^^^^^^ 

3.enir  -'- ^^ i,™"  e^.    retelcore  inédits 
t''::XT:;.Vl'ner  e,  la  chanson  de  Doo.  ie    la 

Xn  .e  ..  (Sic,  RocHe  es,  "-^'^Xpin  if  3':''?^;^^°: 
4,600  vers  dont  l-acùon  se  pas^^^ousPe^p,nle_^^  ^^  J^^^ 

donné  en  mariage  sa  ^'*""''  ^  ^„use  es,  chassée  par 
Injus.emen,  accusée,  la  '"f '^f"^' ^es  exploits  à  la  suite 
son  mari,  et  le  poème  est  _.^_^^^jj  j 

a.s,ue.s  >e  ie-  •^andt    fi      d^Ol^e^^  ^^  ^^^^  ^^ 

ï,mr  r:::  extraite  avec  -^f  !^':!^-,,Tn  /en 
,ieo  conduit,  ™  P^  "r^^rde  ^0.  e:t";ncienne  :  tout 
traits  intéressants.  La  "^^anson  ^^.^^  descendre 

entière  en  --"-'"'j;  "Xlignalée  pour  la  première 
plus  bas  que  la  fin  du  xu   siècle^      s  F  ^^^    ^^^ 

'-^•"  ^  ^  !':i';u\"^"b"rt:n:;,'u:  fnalysée  sommaire- 
un  manuscrit  du   Musée  d  |  ^^^  ^.^^^^^  ^^j. 

ment  il  y  a  vingt  ans  par  M.  le  ^    ^'  "  ^^      ,,;,,  „.en  a  été 

,„.,  ce  :»" '"^^^•':;:\ra;Tnt  b™:!»":  nLs  faire  don  de 
découvert.  M.  Guessard  aya  .    ^    manuscrit  du 

r pTh;.r  nf  d'o\- =-"  ---  ^^^  -'- 

tenant. 

Oi.  années  P-^-;^P^"t";rXt  «rî^ 
vaux,  notamment  red.t.on  de  la  V.e  da^t. 

MarecAa/,  absorbèrent  '•-<"";„^„%^;f,X;A..  Dans 
„,8  il  revint  f^;'  ^c  rConseûde  la  Société 
le  procès-verbal  de  la  séance  ou  p 

^-9  "7-^:^f  ^rser;u'il  a";!:rus  pressele 
Meyer  informe  le  ^'^''^'^  ^e  Conseil  nomme 

poème  de  Doon  de  La  (^'^)^^''''-;.  .'T'  .^^  cette  publi- 
L.  Thomas  commissaire  responsabe  pou    -^     P  ^^, 

cation,  en  remplacement  de  G.  Pans.  Le  tirag 


INTRODUCTION  V 

à  625  exemplaires  dont  25  sur  papier  Wiiatman  '  ». 
Des  communications  au  Conseil  le  tenaient  au  courant 
des  premiers  progrès  de  l'impression  '.  Mais,  dans  le 
procès-verbal  de  la  séance  du  Conseil  du  i5  décembre 
19 10,  on  lit  '  :  «  M.  Meyer  espère  reprendre  l'impres- 
sion de  Doon  de  la  Roche,  que  son  état  de  santé  l'a 
obligé  d'interrompre  ».  Avec  sa  conscience  habituelle, 
il  crut  devoir  donner  des  explications  plus  détaillées 
dans  le  rapport  qu'il  lut  à  l'assemblée  générale  de  la 
Société,  le  28  décembre  suivant  '  :  «  Nous  devons 
encore  un  livre,  et  j'ai  le  regret  de  dire  que  la  faute  est 
mienne.  Je  suis  en  effet  atteint,  depuis  plusieurs  mois, 
d'une  affection  dont  Je  ne  suis  pas  guéri,  et  qui  rend 
mes  travaux  très  pénibles.  Toutefois  mon  édition  de 
Doon  de  La  Roche  est  assez  avancée  et  j'espère  réussir 
à  la  terminer  pendant  la  prochaine  année  ». 

Mais  M.  Meyer  avait  trop  présumé  de  ses  forces.  Il 
ne  revint  sur  Doon  de  la  Roche  que  dans  son  rapport 
lu  à  l'assemblée  générale  de  la  Société  le  23  décembre 
1913  ;  il  y  expliqua  en  même  temps  pourquoi  et  en 
quelle  mesure  il  s'était  adjoint  un  collaborateur  *. 

Il  convient  maintenant  de  vous  entretenir  des  autres  pu- 
blications depuis  longtemps  préparées  et  annoncées,  et  qui 
ne  pourraient  être  retardées  sans  inconvénient.  L'une  est  la 
chanson  de  Doon  de  la  Roche  dont  les  trois  premières 
feuilles  sont  en  épreuves  depuis  igoy,  et  que  j'ai  dû  inter- 
rompre, comme  bien  d'autres  travaux,  par  l'état  de  ma 
santé.  Cependant  il  faut  bien  en  finir.  Ce  qui  me  fatigue 
particulièrement,  ce  n'est  pas  l'établissement  du  texte,  qui 
peut  être  terminé  en  peu  de  mois,  c'est  la  rédaction  de 
l'introduction,  ou  plus  spécialement   d'une  certaine  partie 

1.  Bulletin  de  la  Société,  XXXIV  (1908),  58. 

2.  Bulletin,  XXXV  (1909),  48  ;  XXXVI  (1910),  44. 

3.  Bulletin,  XXXVI  (19 10),  5o. 

4.  Bulletin,  XXXVI  (19 10),  72. 

5.  Bulletin,  XXXIX  (igiS),  77-78. 


VI  DOON    DE    LA    ROCHE 

de  l'introduction  :  la  légende  de  dame  Olive,  la  femme  de 
Doon  de  la  Roche.  C'est  une  variante  de  l'histoire  de  la 
femme  injustement  accusée  et  persécutée  qui  finalement 
est  réhabilitée  et  reprend  sa  position  première.  Les  versions 
de  ce  récit,  en  quelque  sorte  banal,  sont  très  variées  et  ont 
été  maintes  fois  étudiées.  Pour  caractériser  la  forme  que 
présente  le  poëme  de  Doon  de  la  Roche  il  me  faudrait  pour- 
suivre des  recherches  que  mes  loisirs  et  surtout  l'état  de  ma 
santé^  notamment  la  faiblesse  de  mes  yeux,  ne  me  per- 
mettent pas  de  conduire  à  bonne  fin.  Je  me  suis  donc 
adressé  à  notre  confrère  M.  Huet,  qui  est  fort  au  courant 
des  travaux  publiés  sur  le  groupe  de  légendes  auquel  appar- 
tient Doon  de  la  Roche.  Grâce  à  lui  j'espère  avoir  terminé 
l'an  prochain  l'édition  depuis  si  longtemps  commencée. 

Le  rapport  où  se  trouvent  ces  paroles  fut  le  dernier 
que  M.  Meyer  put  rédiger  en  sa  qualité  de  secrétaire  de 
la  Société  des  Anciens  Textes.  Le  mal  dont  il  était 
atteint  fit  malheureusement  des  progrès  de  plus  en  plus 
rapides  et  devint  bientôt  incurable. 

Quand  M.  Meyer  se  fut  éteint,  après  de  longues 
souffrances,  la  confiance  de  Madame  Meyer  et  celle 
de  la  Société  des  Anciens  Textes  me  chargèrent  de 
l'achèvement  d'un  travail  auquel  M.  Meyer  lui-même, 
on  l'a  vu,  m'avait  en  quelque  sorte  associé  pendant 
sa  vie. 


INTRODUCTION  VII 


CHAPITRE    II 

LE  MANUSCRIT  ET  LES  FRAGMENTS.  —  LANGUE  DES 
FRAGMENTS  ET  DU  MANUSCRIT. 

La  chanson  de  Doon  de  La  Roche  ne  nous  est  parve- 
nue que  dans  un  seul  manuscrit  complet,  conservé  à 
Londres,  dans  le  British  Muséum  :  il  y  est  côté  Har- 
ley  4404.  Quelques  détails  sur  ce  manuscrit  ont  été 
donnés  par  H.  L.  D.  Ward  '  ;  J'en  dois  d'autres  à  l'obli- 
geance de  MM.  L.  Brandin  et  O.  H.  Prier,  qui  ont  bien 
voulu  examiner  le  manuscrit  à  mon  intention.  D'après 
ces  données,  le  manuscrit  est  un  in-4'',  sur  papier,  de 
25 1  feuillets,  de  294  sur  210  millimètres;  l'écriture  est 
du  XV*  siècle.  La  reliure  est  en  cuir  de  Russie  et  porte 
en  repoussé  les  armes  du  second  comte  d'Oxford, 
Edward  Harley.  Au  dos  sont  écrits  les  titres  :  Le  roman 
de  Doon  V Allemand  de  la  Roche.  Epistre  de  Prestre 
Jehan.  Le  Romans  des  Anfances  Ogier.  Au  dessous  : 

MUS.  BRIT.  BIBL.    HARL.    4404.    PLUT.  LXX.  E.    AuCUnC    nOtC 

d'un  genre  quelconque  sur  les  feuilles  de  garde  ou 
ailleurs,  de  sorte  que  nous  n'avons  aucune  donnée 
sur  les  origines  du  manuscrit  et  ses  destinées  jusqu'au 
moment  où  il  fit  partie  de  la  collection  harleienne  *. 

1.  Catalogue  of  romances  in  the  Department  of  manuscripts  of 
the British  Muséum,  London,  i883,  I,  871.  Une  courte  description 
du  manuscrit  avait  déjà  paru  dans  A  Catalogue  of  the  Harleian 
manuscripts  in  the  British  Muséum,  London,  1808,  III,  141. 

2.  On  sait  qu'Edward  Harley  avait  hérité  de  la  magnifique 
collection  de  manuscrits  formée  par  son  père,  Robert  Harley, 
premier  comte  d'Oxford  ;  il  y  ajouta  des  acquisitions  nouvelles. 
Il  mourut  en  1741.  En  1733,  sa  veuve  vendit  la  collection  à  la 
nation  anglaise  ;  elle  fat  placée  au  Musée  Britannique  ;  voir 
Dictionary  of  National  Biography,  XXIV,  Sgô.  Nous  ne  pouvons 


VIII  DOON    DE   LA    ROCHE 

Le  volume,  écrit  d'un  bout  à  l'autre  de  la  même 
main,  contient  :  fol.  1-88  recto,  Doon  de  La  Roche  ;  3  ff. 
blancs,  non  numérotés;  fol.  89,  Lettre  du  Prêtre  Jean  à 
l'empereur  Frédéric  ';  fol.  1 02-25 1,  les  Enfances 
Ogier. —  Dans  la  partie  qui  contient  Doon  de  La  Roche, 
il  y  a  24  a  27  vers  par  page  ;  une  initiale  rouge  marque 
le  début  de  chaque  laisse.  —  Le  manuscrit  est  bien 
conservé  ;  dans  la  partie  qui  contient  Doon  de  La  Roche 
on  trouve,  au  fol.  82  b,  des  vers  incomplets  (voir  notre 
texte,  v.  4356-4364),  mais  le  feuillet  est  intact;  l'écriture 
n'a  pas  souffert;  il  est  probable  que  le  manuscrit  que 
le  scribe  avait  sous  les  yeux  offrait  à  cet  endroit  un 
texte  en  partie  illisible  et  que  le  copiste  s'est  borné  à 
transcrire  ce  qu'il  pouvait  lire,  s'abstenant  sagement  de 
compléter  les  vers  par  des  conjectures  personnelles. 

Si,  dans  ce  cas,  il  a  fait  preuve  de  discrétion,  il  a 
malheureusement,  au  cours  de  son  travail,  donné  de 
nombreuses  preuves  de  négligence  ^  et  de  précipitation  ; 

remonter  plus  haut  en  ce  qui  concerne  les  destinées  du  manus- 
crit, qui  n'a  certainement  pa:i  été  écrit  en  Angleterre  et  qui  doit 
provenir  de  France. 

1.  Incipit  :  «  Prestes  Jehans  par  la  grâce  de  Dieu  »,  etc.  C'est 
une  pièce  qui  se  trouve  dans  de  nombreux  manuscrits  (voir 
Romania,  XV  (1886),  177)  et  qui  a  été  publiée  par  Jubinal  dans 
son  édition  de  Rutebeuf,  2"  édit.,  III,  356  et  suiv.  M.  O.  H.  Prior 
a  constaté  d'assez  fortes  différences  de  rédaction  entre  le  texte  du 
manuscrit  et  celui  de  Jubinal,  «  mais  le  fond  est  le  même,  quoique 
la  forme  diffère  souvent  ». 

2.  Cette  négligence  se  manifeste  surtout  par  de  nombreuses 
lacunes  de  vers  entiers  ou  même  de  petits  groupes  de  vers  qui  ont 
été  sautés.  L'original  sur  lequel  travaillait  le  copiste  peut  être 
responsable  d'une  partie  de  ces  lacunes  ;  mais  c'est  bien  le  scribe 
du  manuscritde  Londres  qui  a  sauté  le  vers  1277,  lequel  se  lit  dans 
le  premier  des  deux  fragments  appartenant  à  M.  Lelong  ;  comme 
nous  verrons,  il  est  à  peu  près  certain  que  l'auteur  du  manus- 
crit de  Londres  a  travaillé  sur  le  codex  perdu  dont  ces  fragments 
sont  des  débris.  C'est  donc  lui  qui  est  probablement  responsable 
d'une  bonne  partie  des  autres  lacunes  qui  défigurent  le  texte  : 
s'il  a  sauté  un  vers  dans  ce  passage,  il  a  pu  en  sauter  d'autres. 


INTRODUCTION  IX 

de  plus,  il  connaissait  mal  la  langue  des  chansons  de 
geste,  déjà  archaïque  de  son  temps  ',  La  tâche  de 
l'éditeur  eût  été  moins  ardue  et  incertaine,  si,  au  lieu  du 
manuscrit  de  Londres,  il  avait  eu  à  sa  disposition  un 
autre  manuscrit,  plus  ancien  et  meilleur,  dont  il  ne 
reste  malheureusement  que  deux  feuillets. 

Ces  deux  feuillets,  que  nous  désignerons  par  la 
lettre  L,  appartiennent  à  M.  Eugène  Lelong,  qui  les 
a  achetés  avec  un  lot  de  papiers  et  de  débris  prove- 
nant de  Saumur.  M.  Lelong  suppose  que  ce  sont  des 
débris  d'un  manuscrit  qui  aurait  appartenu  à  la  biblio- 
thèque de  Saint-Florent  de  Saumur  ou  à  celle  de  Fon- 
tevrault.  Il  est  probable  que  ces  fragments  ont  servi  de 
couverture  à  un  registre  et  ont  été  ainsi  préservés  de  la 
destruction. 

Les  deux  feuillets  de  parchemin  ont  une  dimension 
de  328  sur  210  millimètres  \  Il  y  a  deux  colonnes  par 
page,  chaque  colonne  comptant  45  vers  ;  le  début  de 
chaque  laisse  est  marqué  par  une  grande  initiale,  alter- 
nativement bleue  et  rouge;  la  première  lettre  de 
chaque  vers  est  marquée  d'un  trait  rouge.  —  L'écriture 
est  du  premier  quart  du  xiv*  siècle;  elle  est  soignée, 
mais  un  peu  carrée  et  épaisse,  de  sorte  qu'elle  produit, 
à  première  vue,  une  impression  confuse.  Malgré  les 
épreuves  qu'ils  ont  traversées,  les  fragments  ont  peu 
souffert  et  sont  lisibles,  dès  qu'on  est  habitué  à  l'écri- 
ture. Ces  fragments  vont,  le  premier,  du  v.    1 146  au 

1.  Certains  indices  feraient  croire  que  le  manuscrit  a  été  écrit 
sous  la  dictée.  Nous  signalons  à  ce  point  de  vue  la  singulière 
faute  cest  pour  sait,  v.  3406  et  l'emploi,  tout  aussi  singulier,  de 
l'infinitif  pour  le  participe,  travaillier  pour  travailliez  v.  3528, 
esploitier  pour  esploitié,  v.  35 17;  des  confusions  du  singulier  et 
du  pluriel  à  la  3*  personne  des  verbes.  Ces  fautes  s'expliquent 
plus  facilement  par  des  erreurs  auditives  que  par  des  erreurs 
visuelles. 

2.  Ces  mesures  sont  celles  du  premier  feuillet,  qui  paraît 
intact;  le  second  a  été  rogné  en  haut. 


i'  DOON    DE    LA    ROCHE 

V.  1 325  ;  le  second,  du  V.  3 1  lo  (ce  premier  vers  a  été 
en  partie  endommagé  par  le  couteau  du  relieur)  au 
V,  3289  du  texte. 

M.  P.  Meyer  a  noté  que  le  manuscrit  auquel  ces  frag- 
ments ont  appartenu  doit  avoir  été,  par  un  hasard  sin- 
gulier, l'original  du  manuscrit  de  Londres.  En  effet,  ce 
manuscrit  reproduit,  au  v.  1 155,  une  leçon  fautive,  qui 
est  le  résultat  d'une  correction  mal  faite  dans  L  ;  si  ce 
fait  peut  ne  pas  être  évident  pour  celui  qui  lit  la  note 
(p.  44  de  notre  texte)  où  cette  faute  est  indiquée  et  où 
l'origine  en  est  démontrée,  d'une  façon  nécessairement 
un  peu  complexe,  il  est  absolument  clair  pour  celui  qui 
a  sous  les  yeux  le  fragment  lui-même,  et  le  met  à  côté 
de  la  leçon  du  manuscrit  de  Londres. 

Une  étude  attentive  des  leçons  du  manuscrit,  com- 
parées à  celles  des  fragments,  confirme  ce  résultat  :  les 
fautes  des  fragments  se  retrouvent  régulièrement  dans 
le  manuscrit  '  ;  nulle  part  ^  celui-ci  ne  présente  une 
variante  préférable  à  la  leçon  des  fragments  '. 


1.  On  peut  ciler  spécialement  le  v.  iiB-j  [fuan:{,  faute  com- 
mune au  fragment  et  au  manuscrit,  pour/ïawf);  le  v.  1269  {es 
pour  est,  va  pour  vos,  fautes  communes  au  fragment  et  au 
manuscrit);  le  v.  1275  (les  mots  et  mi  manquent  dans  le  fragment 
et  dans  le  manuscrit);  le  v.  i3oo  (le  mot  ja  manque  dans  les 
fragments  et  dans  le  manuscrit).  Le  v.  i3oi  se  lit  dans  le 
fragment  et  dans  le  manuscrit  :  Quant  H  enfes  issi  fors  de 
Coloinne  a  cel  terme,  ce  qui  donne  une  syllabe  de  trop.  Au 
V.  3284,  le  second  de  manque  à  la  fois  dans  le  fragment  et  dans 
le  manuscrit. 

2.  La  seule  exception  se  rencontre  au  vers  3236,  où  le  fragment 
porte,  au  lieu  de  grans  qui  se  lit  dans  le  manuscrit  de  Londres  et 
qui  doit  être  la  bonne  leçon,  un  assemblage  de  lettres  dénuées 
de  sens.  Mais  le  copiste  du  manuscrit  a  pu  restituer  grans  par 
conjecture  :  le  scribe  le  plus  négligent  peut  avoir  par  hasard  une 
bonne  inspiration. 

3.  Un  fait  curieux  qui  mérite  d'être  noté  à  propos  des 
fragments,  c'est  que  le  copiste  ne  parait  pas  avoir  compris 
la  locution  par  som   (ou  son)   l'aube  (=  au  lever  du  jour),  fré- 


INTRODUCTION  XI 

La  langue  des  fragments  L  mérite  d'être  étudiée  avec 
soin,  étant  plus  près  de  celle  de  l'original  que  celle  du 
manuscrit  de  Londres.  L'exposé  qui  suit  reproduit, 
avec  quelques  additions  et  modifications,  une  note 
détaillée  de  M.  Meyer,  rédigée  en  vue  de  l'Introduction 
à  l'édition  projetée. 

Phonétique.  —  Voyelles. 

A  pour  e  est  constant  àa^ns  famé,  1221,  1298.  L'au- 
teur confondant  les  sons  originairement  distincts  an  et 
en  (voir  ce  qui  est  dit  plus  loin  sur  la  langue  du 
poème),  il  est  naturel  que  le  copiste  ne  se  soucie  pas 
d'employer  ces  deux  groupes  conformément  à  l'étymo- 
logie  et  qu'il  ait  une  tendance  à  écrire  le  plus  souvent 
an  '.  Cependant,  il  conserve  très  souvent  la  graphie 
étymologique  en,  soit  à  la  tonique,  soit  avant  :  argent 
3i2i,  enfes  ji83,  iSoj,  3224;  enfant  1166,  1179; 
enraigier  3281  ;  entende:{  1 146  ;  entendui  i24.g;  gent^ 
gen:{  3 120,  3 141.  Pour  la  préposition  et  l'adverbe,  (in 
ou  inde),  on  a  plus  souvent  en  qu'an  :  11 56,  11  Sj, 
iiSg,  ii63,  1164,  1171,  1226,  etc.  — On  est  porté  à 
considérer  comme  une  erreur  de  copiste  danrons  (pour 
donrons)  1 149  ;  cf.  donroie  1174.  Cependant  on  ne 
peut  affirmer  que  cette  prononciation  n'ait  pas  existé. 

Ain  par  an  se  rencontre  en  des  cas  assez  bien  déter- 
minés, avant  ch  et  ^continu:  maingier  32j5,mainge- 
roient  3260,  plainchier  3265.  Estrainglaie  (étranglée) 
1208,  où  le  g  est  explosif,  est  exceptionnel;  la  finale 
n'en  est  pas  moins  surprenante,  car  -aie,  pour  le  latin 
-ata,  est  une  prononciation  de  la  région  alpine  *. 

quente  dans  les  chansons  de  geste  :  au  v.  i23o,  on  lit  dans  le  frag- 
ment par  sour  l'aube.  Cette  expression  est  régulièrement  estropiée 
dans  le  manuscrit  de  Londres,  ce  qui  n'a  rien  d'étonnant,  vu  sa 
date;  il  est  plus  singulier  qu'elle  ait  embarrassé  le  copiste  du 
fragment,  qui  écrivait  dans  le  premier  quart  du  xiv*  siècle. 

1.  Sur  la  graphie  sanc,  1 169  et  1281,  pour  sens,  voir  plus  loin 
où  nous  traiterons  de  la  langue  du  manuscrit  de  Londres. 

2.  Dans  notre    fragment,   c'est  peut-être  simplement  une  gra- 


5tll  DOON    DE    LA    ROCHE 

Ai  pour  a  se  rencontre  devant  g  continu  (suffixe 
-ancns,  exe):  putaige  if68,  i3i2,  hontaige  3148, 
anraige  1223,  i253,  enraigier  3179,  saiges  3\32.  —  Si 
mas  [maïs)  3189,  n'est  pas  une  faute  de  copiste,  c'est 
un  exemple  de  la  réduction  d'à/. à  a,  que  nous  retrouve- 
rons en  étudiant  la  langue  du  manuscrit  de  Londres. 

Si  aseîer  3279  était  vraiment  l'équivalent  d'essaier, 
on  aurait  un  exemple  du  passage  d'e  protonique  initial 
à  a,  dont  nous  trouverons  des  traces  assez  nombreuses 
dans  la  graphie  du  manuscrit  de  Londres,  mais  le  vers 
n'est  pas  bien  clair  et  il  peut  être  altéré. 

Poichiei  {—pechie^O  au  v.  3238  nous  ofFre  un  exemple 
du  passage  d'e  protonique  à  of  ;  d'autre  part  e  tonique, 
issu  dl  latin  entravé,  passe  à  o  dans  eschevole  i3o5, 
correspondant  au  francien  eschevele. 

Oi  pour  0  est  habituel  avant  ch  et  g  continu  :  La 
Roiche  1146,  1218,  3288;  loiges  3204;  dans  ces  deux 
exemples,  l'o  est  ouvert  et  tonique;  de  môme  avant 
l'accent  :  loigié  3i  i3,  broichant,  11 60,  et  dans  boiche 
1285,  où  l'o  est  fermé  et  tonique.  On  lit  ois  pour  os 
(première  personne  du  présent  de  l'indicatif)  au  v.  1262. 

Dans  ensoigner  3227,  proinne  1297,  roinne  i233, 
roigne  3i5o,  oi  correspond  à  la  forme  française  ei 
[enseigner,  preigne,  reigne),  Vi  servant  à  marquer  le 
mouillement  de  r«.  On  a  aussi  oi  dans  consoil  1209, 
moillor   3 2^g,  ploin  I2i3. 

O,  ou  sont  employés  indifféremment  pour  l'o  fermé 
(latin  ô,  ù)  :  d'une  part,  nos,  vos,  lor,  por,  jor,  mots  qui 
reviennent  fréquemment,  glo:{  3iii,  deso:{  320i,  très- 
fof  1280,  fo^  1 188,  1247,  traïtor  1188,  seinnor  1244, 
ore  (lat.  hora)  1261,  jornées  iSig,  secors  1268,  plore 
1205,  ploroient  1304;  d'autre  part,  bourc  1259,  court 
1258,  glorious  3217,  nevou  3i38,  3214,  prou:{  3228. 

phie  particulière  {aie  pour  ée);  comp.  vaiai  =■  veai  (lat.  vetavi) 
3234.  / 


\ 


.  INTRODUCTION  X«! 

—  Dans  douce  1262,  Vu  peut  représenter/  vocalisée, 
mais  il  y  a  (io^  (masculin)  au  v,  1272.  —  Dans  pou  i35, 
etc.,  Vo  est  ouvert  (lat.  paucum),  mais  il  y  a  j70  aux 
vers  1281  et  i3i  3. 

U  représente  ue  :  mute  3 195,  illuc  3  186;  mais  on  lit 
bues  au  v.  32o5.  —  On  lit  veul,  pour  vuel,  au  v.  3242. , 

—  Gurpie,  pour  guerpie,au  v.  i258,  peut  être  une  faute 
du  scribe. 

Ui  dans  fuissiez  1166,  à  côté  de  fusse  1167,  n'est 
point  une  forme  insolite;  mais  ce  qui  est  bien  excep- 
tionnel, ce  sont  les  participes  passés  entendui  1249, 
corrui  1 161  ;  la  forme  habituelle  u  se  trouve  dans  venu 
i3o9,  i3i9  et  descendu  i32o.  Fui  (lat.  fuit)  est  cons- 
tant (i  i56,  1 194,  1 198,  1206,  1287,  3x36,  3216,  3243); 
de  même  on  a  connuit  32i5  et  estuit  1 193. 

Consonnes.  —  L  n'est  pas  toujours  vocalisée  devant 
une  consonne  :  on  trouve  nel  (ne  le)  au  v.  3287, 
mais  il  y  a  nou  au  v.  3234;  viels  [ponr  vuels)  3286, 
3287,  mais  voudrai  3222,  3223.  L'article  masc.  sing. 
combiné  avec  de  est  tantôt  écrit  dou  12 14,  3x23,  3198, 
3241,  tantôt  do  1270,   1274. 

La  notation  de  la  finale  us  [Is]  est  flottante  :  aux  i  x  6 1 , 
mais  ax  12 14;  biaus  X232,  i236;  biax  i25o,  1294, 
3256,  3272;  bex  1 165  ;  damoisiax  i3o2. 

L  mouillée,  entre  deux  voyelles,  est  écrite//:  essillie\ 
3x83,  3237,  moillier  3i8i,3x9X,  3229;  suivie  d'une 
consonne,  elle  est  écrite  /  :  miel\  x324,  iels  ii6i,  ou 
se  vocalise  en  u  :  eu\  1254. 

N  mouillée,  entre  deux  voyelles,  est  figurée  par  nni  : 
gaainnier  3ig^,  plainnier  3202,  ou  par gni  :  ensoignier 
3227,  ensoignie^  3x65;  devant  une  atone  on  a  nn  :  vinne 
(lat.  vinea)  3197,  Coloinne  x3oi. 

Le  son  résultant  de  r  + -^  Isti'is  est  noté  par  ;[  dans 
ensoignie:{  3i65,  outragiez  3167,  mais  par  s  dans 
amïés  3  ijS. 

Morphologie.  —  Déclinaison.  —  On  trouve  s  analo- 


XIV  DOON    DE   LA   ROCHC 

gique  au  cas  sujet  singulier  des  substantifs  :  bons  1248, 
3187,  prodons  3 186,  3220,  pères  3i25,  3144;  la  forme 
Do:{  pour  Do,  constante  dans  le  manuscrit,  se  lit  dans 
le  fragment  au  v.  3238;  je  n'ai  pas  trouvé  d'exemple 
de  Do.  —  Dans  la  déclinaison  du  pronom  possessif,  on 
peut  noter /«f  1234  (cas  régime  pluriel). 

Conjugaison.  —  Nous  ne  voyons  à  relever  que  redo:{ 
32IO  (f*  pers.  du  sing.  '  du  présent  de  l'indicatif), 
gardoit  i3o7  (3^  pers.  du  sing.  du  présent  du  sub- 
jonctif) et  haubergetes  3259  (2»  pers.  plur.  du  présent 
de'l'indicatif). 

Si  la  langue  des  fragments  a  un  caractère  oriental 
nettement  prononcé  (à  noter  ai  pour  a  dans  certains 
cas,  ai  pour  ei,  oi  pour  0),  ce  caractère  est  encore  bien 
plus  marqué  dans  la  langue  du  manuscrit  de  Londres, 
qui  offre  d'ailleurs  une  plus  grande  variété  de  faits,  ce 
qui  s'explique  par  la  différence  d'étendue,  le  manuscrit 
contenant  plus  de  4600  vers  au  lieu  des  36o  des 
fragments.  Remarquons  dès  maintenant  que,  par  un 
hasard  singulier,  les  traits  les  plus  frappants  de  la  lan- 
gue du  manuscrit,  pratiquement  unique,  qui  contient 
Doon  de  La  Roche,  se  retrouvent  dahs  le  manuscrit 
également  unique  qui  nous  a  conservé  la  chanson  de 
geste  d'Orson  de  Beauvais.  Dans  l'exposé  qui  suit,  nous 
renverrons,  pour  ces  traits,  à  l'étude  de  G.  Paris,  dans 
l'Introduction  à  son  édition  de  ce  dernier  poème  '. 
Nous  prenons  comme  point  de  comparaison  le 
«  francien  »  normal. 

Notons,  avant  de  passer  aux  faits  de  phonétique 
proprement  dite,  quelques  particularités  de  graphie,  qui 
s'expliquent  par  la  date  du  manuscrit  :  au  (issu  d'al) 
s'écrit  parfois  aul  :  aultres   i5,  26,  aultre,  1298,  hault 


I.  Nous  retrouverons  plus  loin  une   forme  analogue  dans  le 
manuscrit  de  Londres,  p.  xxiii. 
3.  Orson  de  Beauvais  (Paris,  1899),  P*  vii-xvni. 


INTRODUCTION  XV 

46.  etc.;  us  final  s'écrit  Ix,  ux  et  même  ulx'.bealx  2847, 
chevalx  iSi-j,  joieulx  32i6,  beaulx  32oj,  chevaulx  18, 
5/3,  2469,  damoisiaulx  2680,  glorieulx  3198,  mieulx, 
1324,  mantiaulx  25,  morciaulx  3448,  senechaulx 
3555,  etc.  De  même,  f  est  assez  souvent  écrit  j^  :  tournoy 
17,  lojraulment  12,  rqr  20,  ;q^e  80,  etc.  —  Il  y  a  des 
traces  d'orthographe  étymologique  :  corps  43,  monstre 
45,  nepveu  5 20,  3i38,  etc.  (très  fréquent)  '. 

Phonétique.  —  Voyelles. 

A  est  représenté  par  ai  dans  les  syllabes  protoni- 
ques :  aisiet,  aissiet  (assiet)  2763,  3 200,  maingier  1443, 
1537,  mainja  (mangea)  1228,  et  plus  souvent  dans  les 
toniques  :  baire  (barre)  3092,  baires  3614,  barnaige 
16,107,  lignaige  88, /7a/5  (pas)  3416,  etc.  Ces  formes 
se  retrouvent  naturellement  dans  les  verbes  :  abaitre 
1394,  availlent  (avalent)  3575,  chaice  (chasse)  1403, 
faice  (fasse)  3097,  osaites  (osaistes,  osastes)  1)626,  pais- 
sent (passent)  291 1  ;  ai  (a)  1849,  ^^^  {^)  1742,  2773,  vai 
(va)  2j2\  vait  (vat,  va)  267,  etc.,  et  surtout  aux  deu- 
xièmes et  troisièmes  personnes  du  singulier  du  futur  : 
irais  1294,  i362,  serais  1349;  avrai  225 1,  dirai  5^5, 
ferai  [=:  serai,  sera)  i52,  irai  i3o,  vandrai  (viendra) 
33o6,  etc.,  et  aux  troisièmes  personnes  du  singulier  du 
prétérit:  plourai  (ploura)  187  ^  Comparer  Orson  de 
Beauvais,  Introduction,  p.  vm.  —  A  peut  devenir  au 
devant/  et  bl  :  maul  3357,  ^^ule  3410,  saule  (sale) 
3535,  3557;  conestauble,  3568,  guennissauble  36oi, 
tauble  3412  (cf.  Orson,  Intr.,  p.  viii-ix).  —  Parfois  a  de- 
vient e  :  Elemens  (Allemands)  i3,  essaus  (assaut)  1867, 
leniers  (laniers)  2453,  chevellerie  2691,  vessaulx  {vSiS- 

1.  La  forme  monstier  pour  moustier,  1201,  35 16  se  trouve 
déjà  dans  Jourdain  de  Blaie,  édit.  C.  Hofmann. 

2.  Il  faut  probablement  expliquer  par  le  passage  d'à  à  ai, 
suivi  de  la  simplification  d'ai  en  e,  les  formes  melletes  (mellastes) 
4002  et  chaceste[s]  (chaçastes)  4005  ;  cf.  haiibergeres,  faute  pour 
haubergetes,  3269. 


XVI  DOON    DE    LA    ROCHE 

saus)  3704  pert  (part)  38-2  1.  Dans  Orson,  G.  Paris 
n'a  constaté  ce  fait  que  pour  a  devant  n  (Intr., 
p.  ix).  —  Une  fois,  devant  une  chuintante,  a  devient 
oi  :  broichès  (brachez)    33o3. 

E  provenant  d'à  latin  tonique  libre  devient  ei  (spo- 
radiquement) :  grei  ou  grey  jj,  595,  1587,  3o3i,  cres- 
tientey  407,  maufei  3291,  prei  2968  ;  dans  les  partici- 
pes :  donney  408,  gardei  872,  ancontrei  1604,  etc.  Dans 
ces  exemples,  ei  est  final,  mais  on  le  trouve  aussi  à  l'in- 
térieur d'un  mot  :  mefre  (mère)  490,  remeist  865,  sceit 
814,  887,  3i  1 1,  etc.,  de  savoir {cL  Orson,  Introd.,  p.  ix). 
—  £■  de  toute  provenance  peut  devenir  a,  soit  dans  les 
syllabes  toniques  :  ast  (est)  2951,  duchasse  2570,  remas 
(remés,  de  remanoir)  ioôy,  sale  (selle)  2012,  3792,  soit 
surtout  dans  les  protoniques  :  assauça  (exhaussa),  5, 
arastement  2614,  armine  (ermine)  2706,  aseier  (essayer)  . 
3379  ',  assauças,  2967,  avesques  2g36,  2967,  etc., 
Barnars  3 191,  3 660,  Barnart  32  i  5,  gardon  (guerredon) 
3'526,  palée  (pelée)  41 10,  rames  1902,  trabuchier  2304, 
2481.  On  trouve  même  assongne  4340,  pour  enseigne, 
ce  qui  semble  supposer  une  forme  esseigne.  C'est 
surtout  quand  ce  fait  phonétique  s'accompagne  de  la 
chute  de  \'s,  dont  nous  parlerons  plus  loin,  que  le  mot 
prend  un  aspect  quelque  peu  déconcertant  :  amaier 
(esmaier)  3  100,  avoilla  (esveilla)  271  3,  aposa  {esposa) 
4533,  malée  ''  (meslée)  2069,  ratoié  (restoié)  2537.  Ce 
changement  d'e  en  a  se  retrouve  dans  Orson  de  Beau- 
vais  (Introd.,  p.  ix).  —  Un  cas  spécial,  où  e  est  sup- 
planté par  a,  est  celui  des  troisièmes  personnes  du 
pluriel  du  prétérit  :  retournarent,  1 1S4.,  jurarent  1202, 
montarent  2972,  lassarent  ^"ijj,  etc.;  nous  reviendrons 
sur  ce  fait  à  propos  de  la  langue  du  poème.  —  Notons 

1.  Cette  forme  reproduit  celle  du  fragment;  voir  plus  haut,  p.  xii. 

2.  Cette  forme  est  aussi  dans  Parise  la  Duchesse  (v.  2333,  édit, 
Guessard  et  I.archey),  dont  le  manuscrit  unique  a  une  teinte 
orientale  prononcée.  ^ 


INTRODUCTION  ^^ 

encore  quelques  formes  où  ï  latin  entravé  est  rendu 
par  o  {vove  29,  lat.  vïdua)  ou  par  oi  {eschevoille  i3o5, 
lat.  *excapiliat),  et  joignons-y  (quelle  que  soit  l'expli- 
cation qu'il  en  faille  donner)  aort  1341. 

E  protonique  peut  passer  à  i  :  giter  2546  et  à  au  : 
Leauroine  ["pont  Loeroine,  Lorraine)  i3o,  guerraudon 
3383.  —  On  le  trouve  quelquefois  représenté  par  o  et 
par  M  :  proer  35,  gurpie  i258.  —  Notons  encore  vaiai, 
pour  veaiy  3234,  qui  reproduit  une  forme  que  nous 
avons  déjà  signalée  à  propos  des  fragments.  Nous  trai- 
terons plus  loin,  en  parlant  de  la  morphologie,  de  la 
chute  de  Ve  protonique  dans  le  futur  des  verbes  de  la 
première  conjugaison.  —  Par  contre,  un  e  posttonique 
inorganique  paraît  dans  avecque  3222,  avecques  33 16 
(pour  avoec,  avec)  \  On  a  également  la  forme  singulière 
pères  36,  pour  pers,  pairs. 

E  nasalisé  (en)  devient  a  [an]  beaucoup  plus  fréquem- 
ment que  dans  les  fragments  :  an/es,  j5,  94,  apant  8, 
antandre  80,  94,  antans  1227,  ante  (ente)  1394,  1418, 
jugemant  21,  panre  2  53,  etc.;  les  exemples  abondent.  De 
même  dans  les  syllabes  protoniques  :  amperieres  (em- 
pereres)  41,  anraige  785,  819,  937,  1223,  tanra  (tenra, 
tiendra)  68,  vanrai  (venrai,  viendrai)  1277  etc.,  et  dans 
les  posttoniques  :  gisant  (gisent)  2912,  montant  (mon- 
tent) 2i%(>,  pendant  [iptndenX]  22S j,  présentant  (presen- 
tent)  3028.  Une  fois  on  a  ain,  et  une  fois  on,  pour  en  : 
gainchi  1178  (pour  guenchi),  Vondemain  21 17  (pour 
Vendemain). 

En  ce  qui  concerne  Vi,  nous  avons  déjà  remarqué  que 
cette  voyelle  s'écrit  souvent^.  —  Nous  avons  noté  un 
exemple  d'£  inséré  entre  deux  voyelles  :  joier  2358,  pour 
joer  (jouer);  ou  bien  i  représente-t-il  le  c  de  jocare? 

Il  y  a  maint  exemple  d'o  libre  tonique  (ô  latin)  deve- 

I.  Nous  verrons  que  l'auteur  employait  parfois  la  forme  avec- 
que, mais,  dans  les  cas  cités  ici,  avecque  {avecques)  fausse  le  vers. 

»    ...... 


XVIII  DOON    DE    LA    ROCHE 

nant  eu  :  pluseurs  24,  leurs  2  5,  seigneurs  47,  doleur 
4.S5,joeux  993,  honeur  /^3ï2,  moilleur  33 18,  etc.  Mais, 
à  côté  d'o  [enor  8,  jugleors  24,  seror  89,  baudor  1 13, 
etc.),  oz/  n'est  pas  moins  fréquent  :  prou  40,  seignours 
52,  juglour  104,  ploure  146,  nevoM  493,  baudour  971, 
anour  974,  etc.  —  O  devient  01  devant  cA,  n,  v,  5,  f  : 
boiche  2442,  broiche  1099,  cloiches  2931,  La  Roiche 
2194,  2965  ',  èoin^  2444,  ofr  (or,  lat.  aurum)  2907, 
oireille  2o65,  ois  (os,  mod.  «  ose  »)  1262  ^,  oitour  (ostor, 
mod.  «  autour  »)  2180,  oit  (ot,  lat.  habuit)  2987,  oit 
(ot,  lat.  audit)  2825  ^  vozV  (vot,  lat.  voluit)  3245. 

Diphtongues.  —  Ai  se  réduit  à  a  :  lassent  (laissent) 
2370,  mas  (mais)  i252,  2410,  2446,  26i3,  2672.  Ce  fait 
se  présente  surtout  dans  les  premières  personnes  sing. 
des  verbes.  Présent:  a  (ai)  241  i ,  3820,  sa  (sai)  556,  1 147, 
sça  (sçai)  1278,  la  (lai  ou  lais)  2197;  futur  cèlera  2238, 
donra  2085, prendra  3522  ;  prétérit  amena  382 1,  aporta 
3498,  engendra  240,  jura  1349,  i363,  1372,  laissa 
2025,  mena  3095,  planta  1272*.  — Cette  réduction, 
contrepartie  du  passage  d'à  à  ai,  se  retrouve  dans  le 
manuscrit  d'Orson  de  Beauvais  (Introd.  p.  vu). 

Ai  passe  parfois  à  oi  :  deloier  (delaier)  276. 

Au  (issu  d'à/)  est  réduit  k  a  ^  :  habergié  (hâuhergié) 
2773  ;  chevache  3o58,  3722,  3824,  chevacha  3848, 
ignas  (isniaus)  3703,  madie  2955;  de  même  dans  l'ar- 
ticle :  a  [au)  2555,  2556,  258i,  2771.  —  Même  fait,  en 
ce  qui  concerne  l'article,  dans  Orson  de  Beauvais, 
Introd.  p.  xii.  —  Tout  à  fait  insolite  est  le  passage  d'aw 
à  oi  dans  chevoichent  43  5 o. 

1.  Le  scribe  procède  au  hasard.  Au  v.  1146,  où  le  fragment 
porte  La  Roiche,  il  écrit  La  Roche. 

2.  Cette  notation  reproduit  celle  du  fragment. 

3.  Oit  (lat.  audit)  se  retrouve  assez  souvent  aillelirs,  par  ex. 
dans  Jourdain  de  Blaie. 

4.  Ici  le  fragment  porte  plantai. 

5.  On  pourrait  dire  également  que,  au  lieu  de  se  vocaliser,  / 
tombe. 


INTRODUCTION  XIX 

Ei  s'écrit  parfois  ai  :  esvailliés  (esveilliez)  3529.  Il 
devient  très  fréquemment  of,  spécialement  devant  / 
mouillée,  n,  gn  et  ng  :  aparoilliés  2761,  evoilliés 
3484,  mervoille  195,782  ;  moilleur  33i8,  etc.,  amoine, 
(ameine)  2918 1  ramoint  (rameint)  3418,  estroint 
(estreint)  2976,  dointié  (deintié)  3io3,  poine  (peine) 
4197,  etc.;  amome  (ameinc)  2g  i  S,  amoingne  fameine) 
1^02,  doingn a  {deigna)  iS65,  Leoroingne  2S\ 6,  soigne 
(seigne)  2235,  2699,  2943,  3542;  roiné  reigné)  3x5, 
3014,  voigne  (veigne,  viegne)  i554,  i557,  voinges 
(veinges,  venges)  1040,  voingier  (veingier)  1075.  — 
Même  fait  dans  Orson  de  Beauvais^   Introd.  p.  xi. 

Eaus,  du  latin  ellus,  devient  souvent  iaus  :  biaulx 
i25o,  1282  (mais  beaulx  i235),  damoisiaulx  i25o, 
2677  (niais  damoiseaulx  y 3o6),  piaulx  (peaus)  i358, 
mantiaulx  25. 

J'ai  noté  un  exemple  d'/e,  devant  consonne,  réduit  à 
i:  laissirent  (laissiérent)  1625. 

Oi  devient  parfois  ai  :  maie  (moie,  latin  m  ea),  plaier 
(ploier,  plier)  3o88.  De  même  que  ai  se  réduit  assez 
souvent  à  a,  of  peut  se  réduire  à  0:70e  (joie)  107,  3642, 
joeux  (joieus)  444,  ors  (oirs,  latin  hères)  2957.  —  Le 
fait  se  retrouve  dans  Orson  de  Beauvais,  Introduction 

p.  VII  '. 

Ou  passe  à  au  da.ns  faulx  (fous,  latin  fol  lis)  3578. 
Cette  forme  se  trouve  ailleurs. 

Nous  avons  relevé  un  exemple  d'o  non  diphtongue 
dans  mor  2726,  première  personne  du  sing.  de  l'indic. 
présent  de  morir,  au  lieu  de  la  forme  normale  muir. 

Avant  de  passer  à  l'étude  des  consonnes,  signalons 
encore  quelques  contractions,  qui  n'ont  rien  d'étonnant 
quand  on  se  rappelle  la  date  du  manuscrit  :  citain 
(citeain)  3ii5,  /«/ (feeil)  2669,  gaingne  (gaaingne)  18, 


I .  Je  n'ai  pas  trouvé  d'exemple  d'ui  réduit  à  u,  fait  relevé  dans 
Orson  de  Beauvais.       '.  ■  '  ,-.;::.:..:.:  ,lv  w  ; 


XX  DOON    DE    LA    ROCHE 

gaingnier,  2535,  juglour  104,  Loroigne  2385,  plust 
(plëust)  2693.  —  E  protonique,  entre  deux  consonnes, 
tombe  parfois  :  guerdon  3 1 34,  gardon  3326,  pour  guer- 
redon;  chiermant  3148,  pour  chierement. 

Consonnes.  —  Un  fait  qui  intéresse  plutôt  la  graphie 
que  la  phonétique,  c'est  que  c  est  parfois  (très  rarement) 
remplacé  par  s  :  sens  (cens)  3 1  3o  ;  nous  verrons  plus  loin 
la  graphie  inverse,  s  remplacée  par  c,  qui  est  beaucoup 
plus  fréquente.  —  Lu  graphie  brance  (prononcez 
branke),  pour  branche,  1413,  est  bien  connue. —  Une 
graphie  qui  intéresse  la  phonétique  est  mange,  pour 
manche,  3027. 

B  peut  tomber  dans  le  groupe  mb  :  tumeresces  (écrit 
tumerestes),  pour  tomberesses,  4563,  tumé,  pour  tombé 
(même  vers). 

D,  entre  deux  consonnes,  peut  tomber  :  panre  (pendre) 
253,  et  (prendre)  3585. 

G  continu  passe  à  ch  dans  lignaiche  (lignage)  700; 
nous  venons  de  relever  le  fait  inverse,  ch  s'affaiblis- 
sant  en  g  '. 

H  (aspiration  dans  les  mois  d'origine  germanique) 
tombe  (très  rarement)  :  iaume  {heaume)  3004;  on  a  de 
même  autain  (hautain)  3419. 

L,  à  la  tin  d'un  mot,  peut  tomber  :  ici  i25,  ci  (cil) 
355,  si  (cil)  355  (?),  osté  (osiel)  3253;  de  même  à  l'inté- 
rieur devant  consonne  :  vite  (vilté)  2892.  —  Pour  Ir 
on  peut  avoir  rr  :  torrai  (tolrai)  i3i6.  —  Une  forme 
tout  à  fait  singulière  est  solmiers  2899,  pour  sommiers. 

N,  suivant  i  dans  le  corps  d'un  mot,  s'écrit  parfois  gn, 
ce  qui  semble  exprimer  un  mouillement  :  ignias  (iniaus, 
isniaus)  3703,  magnie  et  maignie  (mainie,  maisnie) 
2374.  Même  fait  dans  Orson  de  Beauvais,  Introd., 
p.   XIV  ;    parmi   les   exemples   cités    figure    justement 


I .  Ces  faits  se  retrouvent  dans  le  manuscrit  unique  de  Parise 
la  Duchesse;  voir  la  préface  des  éditeurs,  p.  xiv. 


INTRODUCTION  '^6& 

magnie,  pour  maisnie.  —  On  a,  de  plus,  dans  le 
manuscrit  de  Londres,  roigne  (rêne)  3014,  3853, 
et  chaingnes  (chaînes)  309 1 . 

N  mouillée  peut  s'écrire  ngn  :  congnuit  3856, 
Coulongne  \  12,  rongne  i  i  5,  et  ro/wg^ne  (règne)  3i5o. 
D'autre  part,  n  mouillée  s'exprime  assez  souvent  par  in 
ou  inn  :  Alemaine  2602,  broinne  (broigne)  3/39,  Co- 
loinne  2657,  poinant  (poignant)  3666,  ioinne  (lat. 
teneat)  3747,  etc.  —  Le  groupe  nr  peut  se  réduire  à 
rr  :  corrée,  pour  conreée.  4616. 

R^  dans  les  verbes,  s'emploie  parfois  d'une  façon  irra- 
tionnelle, car  on  trouve  l'intinitif  pour  le  participe  : 
tnivaillier,  pour  travailliez  3528,  esploitier,  pour 
esploitié,  3>5ij,  ce  qui  semble  prouver  que,  à  l'époque 
et  dans  le  pays  où  le  manuscrit  fut  écrit,  l'r  final,  de 
l'infinitif  ne  se  prononçait  plus. 

C  est  souvent  écrit  pour  s  :  ces  (ses)  20,  3920  et 
ailleurs,  c'i7  's'il)  10,  ce  (se),  99,  1408,  ces  (ses,  2*  p. 
sg.  ind.  pr.  de  savoir)  3227,  etc.  Même  fait  dans  Orson 
de  Beauvais,  Introduction,  p.  xiv.  —  La  graphie  de 
c  pour  s,  à  la  fin  d'un  mot,  explique  sanc,  179,  1 169, 
1787  et  2637,  pour  sens.  Nous  avons  déjà  vu  sanc, 
pour  sans,  dans  les  fragments  (ci-dessus,  p.  xi,  n.  i); 
la  même  graphie  se  retrouve  dans  Parise  la  Duchesse, 
V.  1616. 

S  initiale  s'écrit  parfois  se,  particulièrement  dans  le 
verbe  savoir  :  scai  jS,  scaii  70,  sceit  81  5,  2773,  sçavoir 
1915  etc.;  on  trouve  aussi  \cïe/  (siet,  du  verbe  seoir) 
3o86,  3567,  38i3.  —  S,  suivie  d'une  autre  consonne, 
tombe  assez  souvent  :  amitié  [dixmsûé)  1 179,  aine  3 200, 
blemie  (blesmie)  2715,  châtie  (chastie)  3oi5,  coûtés 
(coustez,  costez)  1174,  fut  (fust,  lat.  fuisset)  2849, 
mainnie  [vatsme)  221 1,  ponnée  (posnée)  4124,  etc.  Ce 
fait  peut  s'expliquer  par  la  date  seule  du  manuscrit, 
mais  ce  peut  également  être  une  particularité  dialectale, 
car  dans  le  manuscrit  unique  de  Parise  la  Duchesse, 


XXII  DOON    DE    LA    ROCHE 

qui  est  du  xiii*  siècle,  la  chute  de  l's  avant  consonne 
est  assez  fréquente  '.  —  S,  à  la  fin  d'un  mot,  s'écrit 
assez  souvent  x  :  boix  'iij'h,  3236,  3386,  dux  1 1,  etc., 
desormeix  1 8&2,  foix  3455,  jamaix  2799,  moix  io3, 
Parix  12.  —  Même  fait  dans  Orson  de  Beauvais,  In- 
trod.,  p.  XII.  —  Parfois,  s  s'emploie  d'une  façon  irra- 
tionnelle :  <i^mon«e  (aumosne)  3416;  cheuste  (cheute), 
2577;  ^^^  (<^i'  '^t.  habui)  2857  '.  —  On  a  noté  une  fois 
la  chute  du  groupe  st  à  la  fin  d'un  mot  :  dona,  pour 
donasf,  2641 . 

Une  prononciation  très  indistincte  des  consonnes 
finales  semble  indiquée  par  la  graphie  chant,  pour 
champ,  2454  ^ 

Z  issu  de  f  4"  -^  latin  devient  à  peu  près  toujours  s  : 
adoubés  34,  consoilliés  3 1 3g,  preis  3i  18,  orés  (orrez)  10, 
souffres  1292,  etc.  ;  les  exemples  sont  innombrables. 

Finalement,  on  peut  observer  que  le  copiste  a  une 
tendance  à  doubler  les  consonnes  :  corraige  33oo, 
donney  (doné)  408,  pallais  3 121,  remesse  (remese) 
3098,  seullementS.  taissiés  (taisiez)  840,  tollir  2g. 

Morphologie.  —  Déclinaison.  —  Notons  l'emploi  con- 
tinuel du  cas  régime  pour  le  cas  sujet.  Il  est  inutile  de 
citer  des  exemples;  il  suffit  de  renvoyer  le  lecteur  aux 
variantes,  relevées  complètement,  des  1 18  premiers  vers 
du  texte. 

Conjugaison.  —  Nous  avons  relevé  redo^  (première 
personne  du  singulier  du  présent  de  l'indicatif)  dans  les 

1.  Dans  leur  Introduction  à  l'édition  de  Raoul  de  Cambrai 
(p.  Lxxxviii,  note  2),  P.  Meyer  et  A.  Longnon  citent  une 
charte  de  i238,  écrite  dans  la  partie  méridionale  du  département 
de  l'Aisne,  comme  le  plus  ancien  texte  à  eux  connu  où  se  ren- 
contre ce  fait. 

2.  On  peut  comparer  chastive  (chative,  chetive)  dans  Parise  la 
Duchesse,  p.  29. 

3.  On  trouve  champs,  pour  chants,  dans  un  manuscrit  du 
xv»  siècle,  cité  dans  le  Bulletin  de  la  Société  des  anciens  textes 

français^  III,  86. 


"f:  INTRODUCTION  XXIlt 

fragments;  nous  trouvons,  dans  le  manuscrit,  à  côté  de 
redou:{  32 lo,  qui  correspond   au  redo^  du  fragment, 
deux  autres  exemples  :  men\  i83,  raten\  2799.  On  sait 
que  ces  formes  ne  sont  pas  rares  ailleurs  '.  —  La  pre- 
mière personne   du  singulier  du  présent  de  l'indicatif 
offre  dans  quelques  cas  un  e  final  analogique  :  doute 
3797,  loe  4436,  prie  341 3,  prise  433 1.  —  La  troisième 
personne  du  singulier  conserve   parfois  le  t  final    du 
latin  :  at  looi,  ait  1742,   et  vait  (va)   267;  de   même 
au  futur  :  pourat  365o,  et  au  prétérit  :  servit  11.  — 
La  forme  analogique  parle  2674,  pour  parole,  n'a  rien 
d'étonnant,  vu  la  date  du   manuscrit.    -    A  l'imparfait, 
amot  44,  pour  amoit,  peut  s'expliquer  par  la  réduction 
d'oi  ko.  —  Au  V.  1 208,  on  lit  euissient,  pour  eussent.  — 
On  trouve  deux  exemples  de  la  deuxième  personne  du 
plur.  du  futur  en  -ois  :  seroit  (pour  serais)  83  et  durerais 
3009  '.  —  La  désinence  -ut  de  la  troisième  personne  du 
singulier  du  prétérit   est  notée  parfois  -uit  :  congnuit 
3856.  —   On  trouve  -êtes  et  -estes,  pour  -astes,  à  la 
deuxième  personne  du  pluriel  du  prétérit  de  la  première 
conjugaison  :  melletes  ^ooi,  chaceste[s]  4005.  —  Nous 
avons  vu  que  Ve  protonique  tombait  parfois  entre  deux 
consonnes;  le  même  fait  se  retrouve  naturellement  dans 
les  verbes  :  enarbrai  3 106,  getrai  2754,  getrés  2738, 
mandrai   3ioi;    en   revanche,   un    e  est    inséré  dans 
averoit  3212.  Ici  et  là  ces  formes  faussent  le  vers. 

L'ensemble  des  faits  que  nous  venons  de  passer  en 
revue  indique  nettement  la  région  de  l'Est,  et  spécia- 
lement la  Lorraine,  comme  patrie  du  scribe;  c'est  dans 
le  dialecte  lorrain  que  nous  retrouvons  notamment  deux 
des  faits  les  plus  frappants,  la  réduction  d'af  à  a  et  le 

1.  Crien:{  et  redou^,  v.  160  de  Jourdain  de  Blaie;  doins,  v.  ro63 
de  la  Chevalerie  Ogier,  etc. 

2.  Nous  verrons  plus  loin  que  l'auteur  du  poème  employait  les 
formes  en  -oif  concurremment  avec  celles  en  -Cf  :  en  trait  peut 
par  conséquent  remonter  à  l'original. 


XXIV  DOON    DE   LA   ROCHE 

passage  d'es  initial  à  a  '.  La  langue  des  fragments  appar- 
tenant à  M.  Lelong  présente,  nous  avons  pu  le  cons- 
tater, de  grandes  analogies  avec  celle  du  manuscrit  de 
Londres  ;  pourtant  elle  n'offre  pas  une  couleur  dialectale 
aussi  prononcée.  ^i^Ihi 

''i.  Voir  Lothringischer  Psalter...  Iierausgegeben  von  Friedrich 
Apfelstedt,  Heilbronn,  i88i,  p.  XVI  et  XIX  de  l'Introduction .  — 
Aposer,  pour  esposer,  doit  être  messin;  comp.  aposelixe,  pour 
esposalice,  chez  un  chroniqueur  de  Metz,  cité  par  Godefroy, 
V  APOSELIXE.  —  L'origine  lorraine  du  manuscrit  A'Orson  de 
Beauvais,  dont  la  langue,  ainsi  que  nous  l'ayons  constaté,  pré- 
sente tant  d'analogies  avec  celle  du  manuscrit  de  Doon  de  La 
Roche,  ne  faisait  aucun  doute  pour  G.  Paris  (voir  son  Intro- 
duction, p.  III  et  VII). 


INTRODUCTION  XXV 

CHAPITRE  III 

Versification,  langue,  patrie  et  date  du  poème  '. 

Doon  de  La  Roche  est  écrit  en  vers  alexandrins  asso- 
nances. La  structure  des  vers,  avec  la  césure  après  le 
sixième  pied,  ne  présente  rien  de  particulier.  Comme 
d'ordinaire  dans  les  chansons  de  geste,  les  monosylla- 
bes suivis  d'un  mot  commençant  par  une  voyelle,  ce, 
je,  ne,  que,  se  (latin  si),  peuvent  faire  hiatus  :  avers  ce 
que  il  est  56,  ne  lance  ne  espe'e  1297,  Se  //  est  niés  le 
roi  2046,  ce  est  chose  provée  2539,  je  ai  au  cuer  grant 
ire  2648.  —  Une  autre  licence  bien  connue*  permet  la 
non-élision  de  Ve  posttonique  d'un  mot  polysyllabique 
quand  le  mot  suivant  est  un  monosyllabe  commen- 
çant par  une  voyelle.  Cette  licence,  qui  se  retrouve 
dans  d'autres  chansons  de  geste  %  est  fréquente  chez 
notre  auteur;  on  dirait  qu'il  a  une  prédilection  pour  les 
vers  ainsi  construits.  Voici  les  exemples  que  nous  avons 
relevés  : 

7i3     II  est  molt  juenes  enfes,  si  dit  quanquë  il  set. 

808    Je  ne  vuel  mie  perdre  la  merë  et  le  fil. 

884    Gom  or  le  voit  Landris,  si  commence  a  rire. 

1.  Parmi  les  observations  que  M.  Meyer  avait  consignées  par 
écrit  en  vue  de  l'Introduction,  se  trouvaient  des  notes  sur  la  lan- 
gue du  poème,  ainsi  qu'une  table  provisoire  des  assonances  :  le 
tout  ma  été  naturellement  fort  utile.  M.  Benary  a  donné,  dans 
son  mémoire  cité  (p.  33 1,  note  2),  de  courtes  remarques  sur  la 
langue,  dont  j'ai  également  profité. 

2.  Voir  Ad.  Tobler,  Le  Vers  français,  trad.  K.  Breul  et  L.  Sudrc, 
Paris,  i885,  p.  70-71  ;  P.  Meyer  dans  son  édition  de  VEscoufle, 
Introd.,  p.  LU,  lui. 

3.  Par  exemple  dans  la  Prise  de  Cordres,  édit.  Densusianu, 
V.  1378,  1730,  1761  (l'éditeur  corrige  ces  vers  à  tort,  Introd., 
p.  cxxxvi).  .^î^pt^n 


XXVI  DOON    DE   LA    ROCHE 

972  Olive  la  duchesse;  n'a  plus  belë  ou  mont. 

1206  Et  fu  lez  une  pile   repostë  et  mucie. 

1265  Quant  l'entent  la  duchesse,  si  plorë  et  sospire  '. 
1540,  1647  Car  hom  de  riche  cort  doit  estrë  a  barné. 

1937  Tomilë  et  Malingre  fera  les  chiés  coper. 

221 5  Que  l'avoient  juré  Tomilë  et  Malingre  '. 

23 1 5  Serjans  et  chevaliers  enmoinnë  a  grant  flote. 

2320  Tomilë  et  Malingre  va  noncier  la  parole. 

2726  Se  je  muir  par  amor,  m'arme  en  en  garie. 

333o  Sire,  ce  dist  li  dux,  Frobert  m'apelë  on. 

3562  Dont  otli  dus  pitié,  si  sospirë  et  larme. 

3705  Encontre  lor  seignor  poindre  et  galoper. 

3966  Tomilë  en  menèrent  [lie]  a  un  chalant. 

4247  Si  dist  celé  donzelle  :  «  Reveignë  ou  païs.  » 

4283  Et  sa  fille  la  gente,  la  belle  a[l]  cler  vis.  '• 

4298  Pitié  ot  de  s'amie,  si  sospirë  et  larme. 

4443  En  pais  tenront  latere,  des  orô  en  avant. 

4469  Monta  en  .j.  destrier  qui  la  cropë  ot  lée. 

4521  Est  frerë  a  sa  mère,  bien  veoir   le  poez. 

4608  A  grant  peine  ont  fait  entre  eus  la  départie. 

On  peut  encore   citer   un  exemple,   où  le   mot  qui 
suit  l'e  posttonique  non  élidé  est  polysyllabique: 

662     Quant  vos  verrez  vo  père  au  pueplë  assemblé'. 
L'i  de  qui,  suivi  de  voyelle,  s'élide  parfois  : 

117     Damedex  le  confonde,  ^u'enla  croiz  fu  penez. 
2623     Qw'estoit  au  roi  Dorame  remés  novelement. 

De  même  l'i  de  si  : 
4534     Dis  avesques  i  ot  et  5'i  ot  .c.  abez. 

1.  Le  texte  imprimé  porte  :  si  plore  et  si  sospire.  Le  second  st 
devrait  être  entre  crochets,  vu  qu'il  manque  dans  le  fragment  et 
dans  le  manuscrit,  mais  cette  adjonction  est  inutile.  Môme  remar- 
que pour  le  V.  3o38. 

2.  Le  manuscrit  porte  :  a  Tomilë  et  a  Malingre,  leçon  corrigée 
à  tort  dans  le  texte  en  :  a  T.  et  M. 

3.  Gomp.  Jourdain  de  Blaie,  éd.  Hofmann  :  1008  cui  maie 
flamme  arde  ;  1701  ne  m'en  laissé  issir,  ,,,, , 


INTRODUCTION  XXVII 

Si  me  est  une  fois  contracté  en  une  syllabe  : 
2873     Sim  desfia  en  France  Pepin[s]  li  emperere. 

Si  on  lisait  Si  me,  avec  le  manuscrit,  le  vers  serait 
trop  long  '. 

Si  les  peut  de  même  se  contracter  en  ses  (v.  i8o5). 

Ainsi  que  nous  l'avons  dit,  les  vers  sont  assonances  ; 
on  ne  découvre  nulle  part  une  véritable  tendance  vers 
la  rime.  Le  poème  est  divisé  en  i3o  laisses,  dont  78 
masculines  et  52  féminines.  L'étude  des  assonances 
étant  le  principal  moyen  de  connaître  la  langue  du 
poète  —  moyen  imparfait,  il  est  vrai,  puisqu'elles  ne 
nous  renseignent  que  sur  les  voyelles  — ,  nous  allons 
les  passer  en  revue. 

Assonances  masculines. 

L'a  non  nasalisé  occupe  les  laisses  XXXVIII  et 
XGVI  ;  elles  ne  présentent  pas  le  mélange  d'à  avec  ai, 
mais  c'est  un  hasard,  car  nous  rencontrons  ce  mélange 
plus  loin,  dans  les  laisses  féminines.  Le  seul  mot  inté- 
ressant à  noter  est  saus  3356  (lat.  sa  1  su  s),  où  Vu  se 
prononçait  évidemment  comme  une  semi-voyelle. 

A  nasalisé  se  rencontre  dans  seize  laisses  :  I,  IV,  VI, 
XVIII,  XXXVII,  XL,  XLII,  XLVI,  LXI,  LXXX, 
LXXXIIl,  LXXXIX,  XCIII,  XCIX,  CXIII,  CXXVI. 
—  Dans  ces  laisses,  le  mélange  d'an  avec  en  est  constant; 
il  n'y  a  pas  de  laisses  exclusivement  en  an  ou  en  en. 
La  laisse  LXXX  (3ô  vers)  est  presque  entièrement  en 
en  ;  les  seules  exceptions  sont  garant  26o5  et  dolen^ 
2629  qu'on  pourrait  lire  dolan^  (le  ms.  porte  dolans). 
Dans  la  laisse  XCIX,  où  il  y  a  également  une  prédomi- 
nance d'en,  on  peut  noter,  au  v.  3437,  Olivant,  cas 
régime  d'Olive  ^.  —   Ai,   ei  nasalisé   n'occupe  qu'une 


1.  Comp.  Vie  de  saint  Alexis,   v.  220,  éd.  G.   Paris  :   To^  sui 
enfers,  sim  pais  por  sotte   amor. 

2.  La  rime  besoin  3129  semble  altérée.  —  V.  3457,  on  a  apar- 


XXVIII  DOON   DE   LA    ROCHE 

laisse,  CXVIII;  les  seules  assonances  à  noter  sont  Jhe- 
rusalem  3398  et  entreprains  3449,  pour  entreprens, 
première  personne  du  singulier  du  présent  de  l'indica- 
tif du  verbe  entreprendre. 

É,  onze  laisses  :  II,  VII,  X,  XXI,  XXV,  XXX,  LIX, 
LXIV,  LXXVIII,  CV,  CXXIX.  —  Ces  laisses  ne  pré- 
sentent rien  de  remarquable  au  point  de  vue  de  la  pho- 
nétique :  ^e^  (lat.  sapit)  y  figure  plusieurs  fois  (v.  56, 

305,  etc.),  ce  qui  est  normal  ;  de  même  Dés  ou  Dex  et 
le  cas  régime  Dé.  Parfois  cependant  y  apparaissent  des 
mots  en  ié,  particulièrement  dans  la  laisse  LIX,  qui  est 
d'une  longueur  démesurée  (58o  vers)  :  droiturier  i652, 
enginie\  iji3y  espargnier  1845,  enginié  1914  (corrigé, 
peut-être  sans  nécessité,  en  engané  dans  le  texte);  de 
même  dans  la  laisse  Vil,  beaucoup  plus  courte,  envoie^ 

306.  Ce  ne  sont  pas  des  faits  de  phonétique,  mais  de 
véritables  licences;  l'auteur  de  Parise  la  Duchesse  se 
les  permet  fréquemment  '.  Dans  la  laisse  CV,  vaillant 
3717,  et  dans  la  laisse  CXXIX,  Jehans  453y  sont  sû- 
rement fautifs.  Comme  forme  verbale  arbitraire,  on 
peut  signaler  fonde\  1579,  pour  fondu\. 

/,  quatorze  laisses  :  V,  VU  I,  XI  H,  XXVI,  XLL  XLIV, 
LVI,  LXIX,  LXXXVII,  XC,  CXII,  CXIX,  CXXI, 
CXXIV.  —  Partout,  sauf  dans  LVI,  on  trouve  des 
exemples  d'i  nasalisé.  Comme  faits  phonétiques  inté- 
ressants, on  y  relève  la  présence  de  puis  (pluriel  de 
pui,  lat.  podium)  2269,  bruit,  3932,  qui  semblent  sup- 
poser la  prédominance  du  second  élément  de  la  diph- 

mant,  pouT  aparmain,  aparmaint;  cette  forme  se  trouve  ailleurs. 
On  pourrait,  du  reste,  corriger  en  aparmaint,  vu  que  dans  les 
laisses  féminines  on  trouve  châtaigne  à  côté  de/orsane,  entendent, 
etc.  (voir  plus  loin). 

1.  Voir  édit.  Guessard  et  Larchey,  p.  10  en  bas,  24,  25,  26, 
(2  fois),  36  (2  fois  siét),  etc.  —  De  môme,  dans  la  Prise  de  Cor- 
dres,  Introd.,  p.  cxxxi,  l'éditeur,  M.  Densusianu,  signale  deux 
exemples  de  mots  en  ié  dans  les  assonances  en  é. 


JIJ  INTRODUCTION  XXIX 

tongue,  et  de  Mongiu  ^255,  qui  n'est  explicable  que  par 
la  supposition  contraire.  —  Au  point  de  vue  de  la  mor- 
phologie, on  peut  citer  les  pronoms  mi  228,  479,  809  ; 
ti  788,  1232,  1446  ;  //209.  732.  Au  V.  2860,  le  manuscrit 
porte  lui,  qu'il  n'est  pas  nécessaire  de  corriger  en  li,  car 
il  rentre  dans  le  cas  de  puis  et  bruit  dont  nous  venons 
de  parler.  Comme  formes  verbales,  on  a  seïr  2934, 
2937,  3931,  aseïr  ,^2jj,  cheïr  23o5,  3935,  veïr  3923, 
la  troisième  personne  du  singulier  du  prétérit  de  l'indi- 
catif toli  199  et  celle  du  présent  du  subjonctif  aïst.^ 
1470. 

lé,  onze  laisses  :  XVII,  XXXIII,  LVIII,  LX,  LXXV, 
LXXXII,  LXXXV,  XCII,  XCIV,  CI.  CVIII.  —  Dans 
les  laisses  LXXXII,  XCII,  XCIV,  CI,  CVIII,  on 
trouve  des  exemples  d'ié  nasalisé.  Au  point  de  vue  de 
la  phonétique  on  peut  noter  re^wze:^,  1322;  ce  mot  se 
trouve  aussi  assonant  en  é  (v,  i5  52i,  particularité  qui 
n'est  pas  propre  à  notre  poème  '.  Au  point  de  vue  mor- 
phologique, signalons  le  pronom  féminin  lié  i5i5,  le 
subjonctif  griet  i528,  le  futur  iert  i5oo,  i5o9,  i5i2, 
2462,  3o33.  La  forme  d'impératif  ailliez  3 507,  pour 
alle\,  parait  être  une  licence  du  poète  en  vue  de  l'as- 
sonance. 

O  fermé,  onzelaisses:  III, XIV,  XXXVI,  LV,  LXVII,- 
XCV,  XCVII.  C,  CVII,  ex,  CXIV.  —  Dans  toutes  ces 
laisses,  sauf  dans  la  laisse  LV,  on  trouve  des  exem- 
ples d'o  nasalisé  ;  dans  la  laisse  XCVII  (i3  vers),  la 
seule  assonance  qui  fasse  exception  est  ^or  3386  ;  la 
laisse  III  (36  vers)  n'a  que  deux  assonances  non  nasa- 
lisées, jors  148,  sejor  i5o;dansla  laisse  CXIV  (46 
vers),  on  n'en  compte  que  quatre  :  Audegour  4005, 
4o38,  vos  4009,  anor  4016.  —  Parmi  ces   assonanceS: 

I.  On  la  retrouve  dans  la  seconde  rédaction  du  Moniage  Guil- 
laume ;  voir  Les  deux  rédactions  en  vers  du  Moniage  Guillaume., 
éd.  W.  Cloeita,  t.  II,  p.  247.  I, 


X*X  DOON    DE    LA    ROCHE 

on  peut  signaler  les  premières  personnes  du  pluriel 
soms  ï4.3,escouton  4023,  fron  408 o.  A  côté  d'o  nasa- 
lisé, on  trouve  oi  nasalisé  :  besoin  g  494,  poin:{,  poins 
(lat.  pugnos)  984,  1420.  Dans  la  laisse  XXXVl,  aux 
vv.  967,  986,  on  trouve  deux  fois  l'adjectif  (foM;^  asso- 
nant  avec  vos,  baudor,  mont,  dons  (nom  de  nombre 
écrit  en  chiffres  romains),  secors,  font,  moi  ',  etc.  On 
peut  encore  citer  ailleurs  les  formes  verbales  bout  {lat. 
bullit)  3783,  dont  (lat.  donet)332i  et  sourt  (Idit. 
surgit),  3782;  le  participe  derou^  (lat.  d  i  rup  tos) 
2253,  etc. 

Of,  sept  laisses  :  IX,  XXIII,  XXXII,  XLVIII,  LUI, 
LXVIII,  CXXV.  — On  peut  noter  les  formes  phoné- 
tiques de  l'infinitif  :  veo/r  35 1,  356,  390,  cheoir  3g5, 
tenoir  627  ;  nous  avons  rencontré  plus  haut  les  formes 
analogiques,  en  fr,  dans  les  laisses  en  i  \  —  La  forme 
phonétique  de  la  deuxième  personne  du  pluriel  du  futur, 
verroi:^,  se  lit  au  v.  4418,  mais  dans  les  laisses  en  é  on 
trouve  la  forme  analogique  :  contredire^  664,  deman- 
derez i536,  ire:{  881,  etc.,  voudre'{  79,  etc.;  l'emploi 
simultané  des  deux  formes  est  habituel  '\  Toloi:{,  à  la 
même  personne  de  l'indicatif  présent,  se  lit  au  v.  2556. 

—  On  peut  encore  signaler  le  cas  sujet  doi  371,  402; 
de  même  enoi  «  ennui  »  624,  fréquent  ailleurs. 

U,  cinq  laisses:  XXIX,  XXXIX,  LI,  LXVI,  LXXXVI. 

—  Dans  les  quatre  premières  laisses,  on  trouve  ui  à  côté 
d'u  :  tuit,frui:{,  bruit,  etc;  c'est  un  fait  habituel.  On 
peut  signaler  spécialement  ambedui  1017  ;  nous  avons 
vu  plus  haut  dfof;  cette  double  forme  du   cas   sujet  est 

1.  La  présence  de  moi  (v.  gSS)  est  si  extraordinaire  qu'elle  paraît 
due  à  une  faute  du  copiste;  il  faut  probablement  corriger  et  lire  : 
que  soie  bien  0  vos,  au  lieu  de  :  que  soie^  bien  0  moi. 

2.  Même  emploi  simultané  des  deux  formes  dans  Orson  de 
fitfaMvais;  voir  l'Introduction  de  G.  Paris,  p.  xxxv. 

3.  Par  exemple,  dans  la  Prise  de  Cordres;  voir  l'Introduction 
de  l'éditeur,  p    cxxxiii. 


INTRODUCTlOf*  XXXI 

également  habiiuelle.  —  A  la  fin  de  la  laisse  LXXXVI, 
on  trouve  deux  assonances  en  o  fermé  {lion  2855; 
seror  2856),  qui  semblent  difficiles  à  corriger.  Ce  n'est 
pas  la  seule  irrégularité  dans  l'emploi  de  l'assonance 
qu'on  rencontre  dans  la  seconde  partie  du  poème  ; 
elles  se  multiplient  vers  la  fin. 
Assonances  féminines. 

A-e  non  nasalisé,  deux  laisses  :  Cil  et  CXXII.  —  A 
côté  d'a-e  [sale,  heretage,  larme,  etc.),  on  trouve  dans 
ces  laisses  des  assonances  en  ai-e  [aiguë,  plaise,  laisse^ 
paile  [lat.  pallium],  maistres)  et  en  au-e  {maubre,  aube). 
Parmi  les  assonances  en  a-e,  on  peut  remarquer  la  troi- 
sième personne  du  pluriel  du  prétérit,  entravent,  36 1  5. 
—  Dans  la  laisse  CXXII,  jjovre^  43'7>  doit  être  fautif. 
A-e  [e-e]  nasalisé  le  plus  souvent,  six  laisses  :  XXXI, 
LIV,  LXXI,  LXXVI,  LXXXIV,  CXI.  —  On  voit  figurer 
dans  ces  laisses  des    mots  comme  lances    2334,  ^^"^^ 
2493,  adente  907,  ensemble  908,  enfes  i385,  prennent 
3887,  etc.,  et  aussi  dame  goo,  famé  '  140,   2Sig,  for- 
sane   2498;  puis  Loereigne,  Looraingne,   1402,2816, 
compaignes  2333,    châtaigne    25o8,   et  même    maille 
25o6. 

É-e,  onze  laisses  :  XV,  XXIV,  XLIX,  LXXVI I, 
LXXIX,  LXXXVIII,  CIV,  CIX,  CXVI,  CXVIII, 
CXXVII.  —  Dans  ces  laisses,  on  ne  trouve  guère  à 
relever  que  teles  3839,  pluriel  féminin  de  tel,  et  Père 
(corrigé  à  tort  en  Piere  dans  le  texte),  4101.  Notons 
pourtant,  aux  vv.  41 18  et  4163,  le  cas  sujet  emperere, 
employé   en  fonction  de  régime. 

E-e,  trois  laisses  :  XXXIV,  L,  LXXIII.  —  Il  n'y  a  à 
noter  que  la  forme  francienne  duchesse  1 323,  un  exemple 
d'e  nasalisé  dans  gente   i326,   et   laissent  2370  (nous 

1.  M.  Meyer  avait  noté  que  famé  (toujours  écrit /âme  dans  les 
manuscrits)  et  dame  sont  réunis  sous  la  môme  assonance  dans 
d'autres  poèmes,  par  exemple  dans  Aye  d'Avignon,  éd.  Gues- 
sard  et  Meyer,  p.  45,  53,  Sg,  etc. 


XXXII  DOON    DE    LA    ROCHE 

avons  signalé  plus  haut  laisse  parmi  les  assonances  en 
a-e).  Cette  présence  de  la  diphtongue  ai  dans  celles  en 
è  est  un  fait  que  connaissent  d'autres  poèmes  relati- 
vement anciens,  notamment  la  Prise  de  Cordres  \ 

I-e,  dix-sept  laisses  :  XVI,  XIX,  XXII,  XXVII,  XLIII, 
XLV,  LVII,  LXV.  LXXII,  LXXIV,  LXXXl,  XCI, 
CVl,  CXVII,  CXXVIII.  CXXX,  auxquelles  il  faut 
joindre,  semble-t-il,  les  deux  laisses  LXII  et  CXV,  qui 
ont  un  caractère  spécial.  —  De  ces  laisses,  neuf  (XXII, 
XLIII,  LVII,  LXV,  LXXII,  LXXIV,  LXXXI,  XCI, 
CXXX)  offrent  des  exemples  d'i  nasalisé:  princes  845, 
quinze  842,  Malingres  1191,  1220,  etc.  —  Le  fait  le 
plus  intéressant  qu'on  peut  constater  dans  ces  laisses 
en  fe,  c'est  la  réduction  d'iée  à  ie  :  corrode  507,  83o, 
enseignie  602,  mucie  1206,  rafichie  241  i,  esmaïe 
2743,  etc.  Le  prétérit  assemblirent  2968,  pour  assem- 
blèrent^ est  tout  à  fait  surprenant. 

Les  laisses  LXII  et  CXV  donnent  lieu  à  des  difficul- 
tés spéciales.  Telles  qu'elles  se  présentent  dans  le  manus- 
crit, elles  offrent  des  mots  assonant  en  i-e,  d'autres  en 
ié-e,  et  d'autres  encore  qui  ne  rentrent  ni  dans  la  pre- 
mière catégorie  ni  dans  la  seconde.  On  peut  ramener 
un  certain  nombre  de  mots  en  ié-e  à  la  forme  i-e,  en 
supposant  que  nous  avons  ici  affaire  à  ié  réduit  à  i 
devant  une  consonne,  tait  souvent  signalé  \  qui  aurait 
été  méconnu  par  les  copistes  ;  on  pourrait  ainsi  restituer, 

1.  Voir  les  observations  de  M.  Densusianu  dans  son  édition  de 
cette  chanson.  Introduction,  p.  cxxix  et  cxxxv. 

2.  On  le  trouve  notamment  dans  le  seul  manuscrit  connu  du 
Tristan  de  Beroul  [arire,  pour  ariere,  escrive,  pour  escrieve,  pice, 
pour  pièce,  etc.;  voir  l'Introduction  de  M.  E.  Muret  dans  sa 
2»  édition,  Paris.  \g\o,  p.  xi);  dans  des  manuscrits  et  des  chartes 
d'origine  normande  (voir  A.  Langiors,  dans  son  édition  du 
Roman  de  Fauvel,  par  Gervais  du  Bus,  Introd.,  p.  lxvii).  Pour 
la  réduction  d'i'e  à  i  dans  le  dialecte  liégeois,  voir  Gustave  Cohen, 
Mystères  et  moralités  du  manuscrit  617  de  Chantilly,  Paris,  1920, 
in-4»,  p.  XXXIX. 


ww  INTRODUCTION  XXXIII 

dans  la  laisse  LXII,  porquirent,  pour  porquierent^ 
saint  Pire,  pour  saint  Pierre,  jugire,  pour  jug[i]ere, 
etc.,  et  faire  des  corrections  analogues  dans  la  laisse 
CXV.  Mais  il  y  a  des  mots  qui  résistent  à  toute  correc- 
tion :  on  peut  lire  tirie,  pour  tirée  4086,  mais  il  paraît 
difficile  de  corriger  agirent,  2146,  pour  avèrent,  consi- 
déré comme  équivalent  d'ajffiierent,  et  le  cas  des  mots 
(laisse  CXV)  détiennent  4.060,  entrèrent  4.085,  novelle 
4092,  paraît  désespéré'.  —  Nous  avons  par  conséquent 
laissé  les  assonances  de  ces  deux  tirades  à  peu  près 
telles  qu'elles  étaient  dans  le  manuscrit,  les  abandon- 
nant, comme  un  problème  à  résoudre,  aux  phonétistes 
de  profession.  —  Ce  qui  complique  encore  le  problème, 
c'est  que  la  réduction  d'zV  à  i  devant  consonne  ne  se 
rencontre  dans  aucune  des  nombreuses  laisses  incon- 
testablement en  i-e  qu'offre  le  poème;  d'autre  part,  on 
ne  saurait  considérer  les  laisses  LXII  et  CXV  comme 
des  interpolations,  car  elles  sont  nécessaires  à  la 
marche  du  récit. 

0-e,  neuf  laisses  :  XI,  XXVIIl,  XXXV,  XLVII,  LU; 
LXX,  cm,  CXX,  CXXIII  ;  Vo  doit  être  fermé  dans  les 
laisses  XLVII  et  CXXIII.  — On  peut  noter  que,  dans  la 
laisse  CXXIII,  dolce  (féminin  de  l'adjectif)  assone  avec 
plore*  4.35g  et  tote4'i'ig,de  même  que  le  masculin,  dou:^^ 
dans  la  laisse  masculine  XXXVI,  assone  avec  menor, 
seignoret  to:{.  Dans  la  laisse  XI ,  cloistres  436  assone  avec 
o/re,  ores,  sorent  ;  dans  la  laisse  LXX,  Antoine  avec 
offrent,  broche,  parole;  de  même,  dans  la  laisse  CXX, 
istoire  et  victoire  avec  déporte,  queroles,  etc.  Enfin 
oi  suivi  d' n  mouillée  se  rencontre  dans  la  laisse 
CXXIII  {Coloigne,  Sasoigne[2  fois],  Tresmoigne). 

1.  Cette  laisse  CXV  a  manifestement  embarrassé  les  anciens 
copistes,  comme  elle  gène  un  éditeur  moderne;  nulle  part  le 
texte  n'offre  plus  d'incertitudes  que  dans  cette  tirade. 

2.  Ce  mot,  qui  manque  dans  le  manuscrit,  a  été  suppléé  par 
conjecture,  mais  c'est  celui  que  le  sens  exige. 

c 


XXXIV  DOON    DE   LA    ROCHE 

U-e,  trois  laisses  :  XII,  XX,  LXIII.  —  La  seule  ob- 
servation à  faire,  c'est  que,  dans  les  laisses  féminines 
en  w,  comme  dans  les  laisses  masculines,  on  trouve  ui  à 
côté  d'M  :  destruite  449,  454,  destruire  467,  Puille  2192, 
desduire  2186.  —  Dans  la  laisse  XII,  martin  458  doit 
être  fautif  '.  :;i> 

L'étude  du  texte,  en  dehors  des  assonances,  nouk 
donne  quelques  faits  grammaticaux  de  plus.  —  Dans  la 
déclinaison,  Vs  analogique  de  flexion  peut  faire  défaut 
au  cas  sujet  :  i455e  (A  3o)  i  343,  415 1,  mais  ^^^e^  1 385, 
1405,  etc.;  de  même  emperere  4597.  —  A  côté  des 
premières  personnes  du  pluriel  des  verbes  en  -on,  que  les 
assonances  en  0  nous  permettent  de  constater  [escouton 
4023,  iron  4o3o),  nous  trouvons  -ornes  dans  le  corps 
du  vers  :  assauromes  ijÇ>ji  empliromes  371 3,  lairo- 
mes  2 1 1 o,  parleromes  3 1 8,  poomes  1 768,  savomes  2047  ; 
si  on  lisait  assauron,  etc.,  le  vers  serait  trop  court  d'une 
syllabe  \  — En  ce  qui  concerne  le  futur  et  le  condition- 
nel d'avofr,  on  trouve  avéra  4516,  av[e]re\  4524,  mais 
avrai  1938,  aras  2252,  avra  225 1,  avroit  3212;  de 
même  durerai^  3009,  à  côté  de  durra  291. —  La  forme 
analogique  aima  (première  personne  du  présent  de 
l'indicatif)  se  trouve  au  V.  1181.  La  terminaison  -iens 
(première  personne  plur.  du  subj.  imparfait  ou  du  con- 
ditionnel) ne  compte  pour  deux  syllabes  qu'au  condi- 
tionnel :  morrïens  1275,  serïens  32 1 1,  garirïens  32i2  ; 
cf.  au  subjonctif  imparfait,  dëussiens  3279,  Dans  la 
syllabe  radicale  des  verbes,  eu  compte  généralement 
pour  deux  syllabes  ;  on  trouve  cependant  les  formes 


1 .  Nous  avons  signalé  plus  haut  des  fautes  contre  la  morphologie 
commises  en  vue  de  l'assonance;  il  y  a  également  des  fautes  con- 
tre la  syntaxe  :  entrepris  235,  pour  entreprise  ;  froissiés  3092, 
(masculin),  au  lieu  du  féminin  froissiés;  envie  1479  (indicatif), 
pour  envoit  (subjonctif),  qu'exige  le  sens  de  la  phrase. 

2.  Même  emploi  simultané  des  deux  formes  dans  Orson  de 
Beauvais;  voir  l'édition  de  G.  Paris,  lntrod.,p.  xxxv. 


INTRODUCTION  XXXV 

contractées  :  geu  3174,  eu  3563  '.  —  Meïsmes  compte 
pour  trois  syllabes  à  l'intérieur  du  vers  3i53  comme  à 
l'assonance  de  2145  (je  n'ai  pas  trouvé  d'exemple  de  la 
forme  contractée);  nient  (ms.  néant)  est  monosyllabe 
au  V.  591,  mais  dissyllabe  au  vers  iSgi.  On  peut  encore 
signaler  li  comme  article  féminin  singulier  :  li  aiguë, 
4427.  Mais  il  faut  se  borner  *. 

Essayons  maintenant  de  déterminer,  à  l'aide  des 
données  grammaticales  que  nous  venons  d'énumérer,  la 
région  dans  laquelle  notre  poème  a  été  écrit,  bien  qu'il 
ne  soit  pas  facile  d'arriver  à  des  résultats  très  précis. 

Un  fait  qui  frappe  d'abord  est  la  réduction  d'iee  à  te. 
Cette  particularité  se  rencontre  depuis  le  nord  de  la 
Normandie  jusqu'en  Lorraine;  elle  exclut,  comme 
patrie  de  notre  auteur,  l'Ouest,  le  Centre,  la  région  au 
sud  de  Paris,  même  une  partie  de  la  Champagne  ^ 
Chrétien  de  Troyes  fait,  dans  ses  rimes,  la  distinction 
àHée  et  d'ze.  —  La  réduction  d'z'e  à  i  devant  consonne, 
que  nous  avons  remarquée  dans  deux  laisses,  se  ren- 
contre, nous  l'avons  vu,  dans  un  domaine  tout  aussi 
étendu,  mais  plutôt  sporadiquement,  semble-t-il,  que 
régulièrement.  —   La  confusion  d'à  et    d'e  nasalisés 


1.  On  trouve  des  exemples  plus  nombreux  de  ces  sortes  de 
contractions  dans  Orson  de  Beauvais;  voir  l'Introduction  de 
G.  Paris,  p.  xxxv,  xxxvi.  —  On  lit  dust,  pour  deust,  dans  Jourdain 
de  Blaie,  éd.  C.  Hofmann,  v.  683. 

2.  Au  vers  4174,  on  constate  l'élision  d'e  posttonique  devant 
hante  (A  d'origine  germanique)  :  La  ot  tante  hante  frainte,  mais 
c'est  un  fait  habituel  dans  cette  sorte  de  cliché  ;  voir  Moniage 
Guillaume,  i*  rédaction,  5409,  et  Florence  de  Rome,  2616.  —  Un 
fait  analogue  se  rencontre  aux  vv.  SySô:  Fil  Griffon  d'Autefeuille, 
4179  :  Fiert Griffon  d'Autefeuille,et4i83  :Sur  la  gentd'Autefeuille, 
pour  de  Hautefeuille  (on  sait  que  Vh,  dans  l'adjectif  haut,  est 
d'origine  germanique).  Le  manuscrit  écrit  Haulte  Feulle  au 
v.  4168,  après  la  préposition  à. 

3.  Cf.  O.  Densusianu  dans  son  édition  de  la  Prise  de  Cordres, 
p.  cxxxviii,  note  4.  -,  ,v-i 


XXXVt  DÔON   DE   LA   ROCHE 

permet  une  constatation  plus  précise  :  c'est  un  fait  dis- 
tinctif  des  dialectes  de  l'Est,  opposés  à  ceux  de  l'Ouest 
et  du  Nord  '.  —  Nous  avons  noté,  dans  les  assonances 
en  a-e^  un  prétérit  en  -arent  au  v.  36 1 5  :  ces  formes  sont 
caractéristiques  des  dialectes  de  l'Est  et  du  wallon  \  — 
Li,  comme  article  singulier  féminin,  n'est  pas  aussi 
nettement  délimité,  mais  se  rencontre  dans  les  dialectes 
de  l'Est  '. 

A  ces  constatations,  tirées  de  la  langue,  viennent  s'en 
ajouter  d'autres,  tirées  du  contenu  du  poème.  L'auteur 
se  montre  spécialement  préoccupé  de  l'Est,  de  la  vallée 
du  Rhin.  C'est  là  qu'il  place  en  grande  partie  l'action 
de  son  poème  :  il  parle  des  villes  du  Rhin,  de  Worms 
{Gormaisé)^àe  Spire  (£'5j?/re),deMayence,de  Cologne*. 
Il  sait  que  ces  villes  remontent  à  une  haute  antiquité; 
il  dit  de  Mayence  (v.  3838)  : 

Mais  la  citez  est  forte,  Sarrazin  la  fondèrent. 

\  Sarrazin  »  ici  équivaut  à  «  Romains  ».  Il  sait  qu'il 
y  a  à  Cologne  un  archevêque  et  une  église  Saint- 
Pierre  *. 

Tout  cela  plaide  en  faveur  d'une  origine  orientale 
de  la  chanson  que  nous  a  conservée  le  manuscrit  de 
Londres. 


1.  Ed.  Schwan  et  D.  Behrens,  Gramm.  de  l'anc.  franc.,  trad. 
O.  Bloch  (Leipzig,  igi?),  §  42. 

2.  Ouvr.  cité,  §  355. 

3.  Ouvr.  cité,%  333. 

4.  L'original  immédiat  sur  lequel  travaillait  l'auteur  du 
poème  conservé  avait  également  placé  une  partie  de  l'action  dans 
la  vallée  du  Rhin;  il  mentionnait  Cologne  (voir  le  chapitre 
suivant).  Mais,  à  en  juger  par  l'imitation  espagnole,  les  noms 
empruntés  à  cette  région  étaient  bien  moins  nombreux  dans  ce 
poème  que  dans  la  rédaction  qui  nous  est  parvenue. 

5.  Il  est  vrai  que  cette  église  est  mentionnée  dans  d'autres 
chansons  de  geste  ;  voir  la  Table  de  M.  E.  Langlois,  au  mot 
Saint-Pierre. 


QU'INTRODUCTION  XXXVII 

Quant  à  la  date,  on  a  pu  remarquer  *  que  M.  Meyer, 
en  1878,  était  d'avis  qu'on  ne  pouvait  guère  la  faire 
descendre  plus  bas  que  la  fin  du  xii*  siècle.  Il  attachait 
une  importance  spéciale  au  fait  que  le  poème  était 
entièrement  écrit  en  assonances  ;  s'il  avait  pu  traiter  la 
question  à  fond,  il  aurait  sans  doute  fait  valoir  d'autres 
arguments,  empruntés  à  la  langue  :  c'est  ainsi  que  nous 
avons  vu  plus  haut  que,  comme  des  poèmes  qu'on 
tient  habituellement  pour  antérieurs  à  l'an  1200,  Orson 
de  Beauvais,  Jourdain  de  Blaie,  notre  chanson  n'admet 
que  très  rarement  la  contraction  d'eu  et  eu  ou  u.  — 
M.  Meyer  avait  noté  le  passage  de  notre  chanson  où 
Landri  et  ses  compagnons,  arrivés  à  Constantinople, 
s'émerveillent  de  la  richesse  *  et  de  la  force  de  la  ville 
(v.  1390  et  suiv.)  : 

Et  dit  li  uns  a  l'autre  :  «  Povre  terre  est  de  France  : 
Li  sires  qui  la  tient  par  droit  nient  s'en  vant[e]  ; 
Mais  servons  bien  cestui  s'il  vuet  et  il  commande, 
Que  il  n'a  souz  ciel  homme  qui  tant  ait  ars  ne  lances, 
Qui  pelist  ceste  vile  ne  abatre  ne  prendre  ». 

Comme  M.  Meyer  le  faisait  remarquer,  l'observation 
que  Constantinople  est  imprenable  «  date  d'avant  1 204  »; 
en  effet,  après  la  prise  de  la  ville,  en  cette  année, 
par  les  Croisés,  la  remarque  n'eût  plus  eu  de  sens.  — 
Le  raisonnement  serait  absolument  probant  si  le  poème 
que  nous  a  transmis  le  manuscrit  de  Londres  était  une 
œuvre  originale  ;  mais  nous  verrons  plus  loin  que 
l'auteur  a  travaillé  d'après  une  chanson  plus  ancienne, 
dans  laquelle  il  était  également  question  du  séjour  de 
Landri  à  Constantinople  ;  il  reste  la  possibilité  que  le 

1.  Ci-dessus,  p.  iv. 

2.  La  richesse  de  Constantinople  est  encore  mentionnée  dans 
Florence  de  Rome,  poème  relativement  récent  (v.  120-121,  éd. 
Wallenskôld)  :  Qui  tient  Constantinoble  moût  a  grant  seignorie, 
Conques  ne  Ju  citej  de  trésor  si  garnie. 


XXXVIII  DOON    DE    LA   ROCHE 

renouveleur  ait  reproduit  mécaniquement  un  passage 
de  son  original.  Il  faut  cependant  observer  que,  si 
l'auteur  du  roman  espagnol  a  fidèlement  résumé,  en 
celte  partie  du  récit,  le  poème  qu'il  avait  sous  les  yeux, 
il  n'y  avait  pas  de  place  dans  ce  poème  pour  une  con- 
versation paisible  entre  Landri  et  ses  compagnons  sur  la 
richesse  et  la  force  militaire  de  la  ville  de  Constantin  '. 

Nous  croyons  donc  que  la  conséquence  tirée  par 
M.  Meyer  des  vers  cités  a  bien  des  chances  d'être  juste 
et  que  cet  indice  vient  s'ajouter  à  ceux  qui  nous  obligent 
à  placer  la  rédaction  de  notre  poème  au  plus  tard  dans 
les   premières  années  du  xiii«  siècle. 

Avant  de  passer  aux  questions  d'histoire  littéraire  que 
soulève  Doon  de  La  Roche,  nous  devons  parler  ici  de 
l'aspect  du  texte.  Ainsi  que  nous  l'avons  dit  plus  haut, 
l'idée  primitive  de  M.  Meyer,  quand  il  préparait  pour 
l'impression  la  copie  du  manuscrit  de  Londres,  était 
manifestement  de  s'écarter  de  ce  manuscrit  aussi  peu 
que  possible,  et  d'en  conserver  la  graphie.  Lorsque, 
après  un  long  intervalle,  il  s'occupa  de  nouveau  de 
Doon  deLa  Roche,  il  changea  de  système,  probablement 
sous  l'influence  des  fragments  qui  lui  avaient  été  com- 
muniqués par  M.  Lelong  et  dont  la  langue,  ainsi  que 
nous  l'avons  vu,  ne  présente  pas  le  caractère  nettement 
lorrain  du  manuscrit.  En  établissant  le  texte,  M.  Meyer 
adopta  une  graphie  très  rapprochée  du  francien.  Nous 
avons  suivi  ce  système,  malgré  ses  inconvénients,  car 
l'abandonner  et  revenir  à  la  graphie  du  manuscrit, 
c'eût  été  recommencer  tout  le  travail  et  retarder  indéfi- 


I.  M.  Benary  (p.  3i8,  note,  de  son  mémoire)  s'est  efforcé  de 
trouver  un  rermiMMs  a  ^uo  dans  une  prise  de  Laodicée  (Lalice) 
parles  Musulmans  en  1 188.  Mais  comme  cette  ville  est  fréquem- 
ment mentionnée  dans  les  chansons  de  geste,  un  trouveur, 
voulant  raconter  une  guerre  entre  Byzantins  et  Sarrasins,  pouvait 
facilement  tirer  de  son  imagination  une  prise  de  Lalice  par  ces 
derniers,  sans  avoir  présent  à  l'esprit  un  fait  réel  et  contemporain. 


INTRODUCTION  XXXIX 

nimentune  édition  attendue  depuis  des  années.  Dans  la 
partie  du  texte  que  nous  avons  eue  à  établir',  nous  avons 
par  conséquent  maintenu  autant  que  possible  l'ortho- 
graphe adoptée  par  M.  Meyer,  notamment  la  distinction 
d'an  et  d'en,  d'^  et  de  ^,  issu  de  f  -|-  5.  Certaines  incon- 
séquences étaient  difficiles  à  éviter  ;  on  voudra  bien 
nous  les  pardonner*.  —  A  partir  du  v.  ii8,  M.  Meyer 
n'avait  pas  cru  utile  de  noter  intégralement  dans  les 
variantes  toutes  les  leçons  corrigées  dans  le  texte. 

Dans  l'édition  d'un  texte  qui  ne  nous  est  parvenu,  à 
36o  vers  près,  que  dans  un  manuscrit  unique,  de  date 
récente  et  plein  de  fautes,  il  fallait  nécessairement 
avoir  recours  à  la  critique  conjecturale  :  M.  Meyer  ne 
s'en  était  naturellement  pas  fait  faute  \  et,  d'autre  part, 
M.  Antoine  Thomas  a  remédié  par  des  émendations 
personnelles  à  des  passages  qui  semblaient  désespérés 
et  à  d'autres  dont  l'altération  avait  pu  échapper  à  un 
lecteur  moins  attentif  et  moins  familier  avec  notre 
ancienne  langue.  Nous  n'avons  pas  cru  nécessaire  d'in- 
diquer chaque  fois  le  nom  de  l'auteur  de  l'émendation; 
le  lecteur  voudra  bien  admettre  que  les  meilleures 
conjectures  sont  de  MM.  Meyer  et  Thomas,  les  moins 
bonnes  de  l'auteur  de  ces  lignes. 

M.  Meyer,  en  préparant  une  édition,  songeait  à 
tout  :  j'ai  trouvé  dans  ses  papiers,  outre  quelques 
notes  pour  l'Introduction,  un  embryon  de  Glossaire, 
et  même  des  éléments  pour  l'Index  des  noms  propres. 
Tout  m'a  été  fort  utile. 

1.  Le  texte  établi  par  M.  Meyer  allait  jusqu'au  v.  3365. 

2.  Pour  la  graphie,  comme  pour  le  fond  du  texte,  on  ne  s'est 
pourtant  pas  astreint  à  un  respect  superstitieux  du  travail  de 
M.  Meyer.  Il  est  évident  que,  s'il  araitpu  terminer  rédition  lui- 
même,  il  aurait  changé  bien  des  choses  sur  épreuve.  —  Au  moment 
de  sa  mort,  3  feuilles  seulement  étaient  composées. 

3.  M.  Meyer  avait  indiqué  des  émendations  en  marge  de  sa 
copie;  ces  indications  m'ont  été  fori  utiles  pour  la  partie  du 
texte  qu'il  n'avait  pas  établie. 


»L'  ■  ^  DOON   DE    LA   ROCHE 


CHAPITRE  IV 

ANALYSE   DU    POEME. 

Doon  l'Allemand,  chevalier  presque  sans  terres  (il  ne 
possède  que  la  ville  de  La  Roche),  a  servi  fidèlement, 
pendant  trois  ans,  le  roi  Pépin,  mais  le  roi  ne  lui  a 
rien  donné,  et  Doon,  de  son  côté,  ne  veut  rien  lui 
demander.  La  sœur  du  roi,  Olive,  aime  Doon,  mais 
elle  ne  le  dit  à  personne.  Le  Jour  de  la  Saint-André, 
le  roi  récompense  les  «  soudoiers  »  et  les  princes  de  sa 
cour;  cette  fois  encore,  il  ne  donne  rien  à  Doon. 
Les  chevaliers  couards  débitent  à  ce  sujet  des  plaisan- 
teries qui  parviennent  à  l'oreille  de  Pépin  ;  il  fait 
venir  Doon  et,  pour  le  récompenser,  il  lui  offre  la 
main  de  sa  sœur  Olive  et  toute  la  Lorraine  '.  Doon 
refuse  d'abord,  mais,  par  la  volonté  du  roi,  le  mariage 
se  fait  :  Landri  est  engendré.  Doon  s'établit  à  Cologne 
[avec  sa  femme]  et  sept  cents  chevaliers  (v.  1 15). 

Dans  cette  ville,  il  y  avait  un  traître,  Tomile,  oncle  de 
Ganelon,  cousin  germain  de  Hardré  et  de.,  {nom  altéré). 
Il  dit  à  Doon  que  sa  femme  ne  l'aime  pas,  qu'il  l'a  sur- 

1 .  Des  analyses  plus  ou  moins  détaillées  du  poème  (F),  faites  à 
d'autres  points  de  vue  que  celle-ci,  ont  été  données  par  Sachs, 
dans  son  travail  cité,  par  Léon  Gautier,  Les  Épopées  françaises, 
2'  édit.,  II,  253-261,  par  W.  Benary  dans  son  mémoire  cité, 
p.  3i3  et  suiv.  —  Afin  de  décharger  le  chapitre  suivant, 
on  donne  ici,  en  note,  quelques  indications  sur  les  épisodes 
correspondants  du  roman  espagnol  en  prose  {E)  et  de  la  version 
norroise  dans  la  Karlamagnus-Saga  {N;  voir  pour  les  détails 
bibliographiques  le  chapitre  qui  suit),  et  aussi  quelques  renvois 
à  des  épisodes  analogues  dans  d'autres  chansons  de  geste. 

2.  Dans  notre  poème,  ce  terme  a  un  sens  fort  étendu;  Cologne 
en  fait  partie,  puisque  Doon,  après  avoir  reçu  en  fief  la  Lorraine, 
va  s'établir  dans  cette  ville. 


ai    INTRODUCTION  XLI 

prise,  couchée  avec  un  «  garçon  »  '.  Doon  menace  de 
le  faire  pendre,  s'il  tient  encore  de  tels  propos.  Le  traître 
appelle  un  «  garçon  »  et  le  pousse  à  se  glisser  dans  le 
lit  d'Olive,  qui  a  bu  trop  de  «  piment  »  ;  elle  n'entend 
rien,  ne  voit  rien  '.  Le  garçon,  en  effet,  se  glisse  sous 
la  couverture  du  lit,  sans  autre  vêtement  que  ses  braies, 
mais  il  n'ose  faire  violence  à  la  duchesse.  Tomile,  de 
son  côté,  appelle  Doon.  Celui-ci  vient,  accompagné  de 
trois  comtes  ;  il  soulève  la  couverture,  et  trouve  le 
garçon  couché  à  côté  de  sa  femme  (v.  1 16-196). 

Doon  coupe  immédiatement  la  tête  au  misérable, 
sans  le  mettre  d'abord  à  la  torture.  Il  veut  de  même 
couper  la  tête  à  sa  femme,  qui  s'est  éveillée  et  ne  com- 
prend rien  à  ce  qui  se  passe  ;  mais  ceux  qui  l'accom- 
pagnent le  retiennent  et  lui  donnent  le  conseil  de  faire 
venir  le  roi  Pépin.  Olive,  de  son  côté,  offre  de  se  jus- 
tifier par  l'épreuve  du  feu  ou  de  l'eau  ;  Doon  est  sur 
le  point  d'accepter,  mais,  Tomile  excitant  sa  jalousie, 
il  se  met  en  colère,  et  frappe  même  d'un  coup  de  pied 
le  petit  Landri  \  Doon  envoie  à  Pépin  son  chapelain, 
Grégoire,  pour  l'inviter  à  venir,  sous  un  prétexte,  à 
Cologne.  Grégoire  part  pour  Paris  et  s'acquitte  de  sa 
mission.  Pépin  se  rend  à  Cologne,  où  Doon  expose 
l'affaire  :  Tomile  veut  qu'Olive  soit  brûlée  vive;  Jofroi, 
cousin  de  Doon,  s'offre  à  combattre  pour  Olive  en  duel 
judiciaire;  Doon  repousse   toute  proposition  de  cette 

1.  Dans  F,  le  traître  agit  sans  motif,  ou  du  moins  aucun  motif 
n'est  indiqué.  Dans  E,  Tomillas  (=  Tomile)  veut  perdre  Oliva 
(=  Olive),  afin  de  pouvoir  plus  tard  marier  sa  fille  Aldigon 
(=  Audegour)  au  duc  de  La  Roche,  redevenu  libre  (fol.  a.  ij.  v"). 
—  Dans  Ne,  le  traître,  Milon,  se  venge  de  ce  qu'Olif  (=  Olive)  a 
repoussé  ses  propositions  amoureuses. 

2.  Pour  ce  trait  du  «  piment  »,  inintelligible  ici,  voir  le  cha- 
pitre suivant. 

3.  Ce  détail  du  coup  de  pied  donné  à  Landri  par  son  père  se 
retrouve  dans  E  (fol.  a.  viij.  v»),  mais  plus  tard,  après  la  scène  à 
l'église. 


XLII  DOON   DE   LA   ROCHE 

nature  '.  Avec  l'approbation  de  Pépin,  Doon  se  sépare 
de  sa  femme;  on  assigne  à  celle-ci,  malgré  ses  lamen- 
tations, une  demeure  [ostel]  hors  de  la  ville,  où  elle 
aura  chaque  jour  deux  pains  pour  toute  nourriture. 
Elle  garde  auprès  d'elle  le  petit  Landri,  qui  a  sept  ans 
(v.  197-532). 

Tomile  conseille  à  Doon  de  répudier  définitivement 
Olive,  et  d'épouser  une  fille  à  lui  [Audégour]  :  elle  lui 
apportera  en  dot  les  villes  de  Worms  [Gormaise]  et 
de  Spire  [Espiré]  et  vingt  mulets,  chargés  d'or  et 
d'argent.  Doon  déclare  qu'il  accepte  cette  proposition, 
si  le  roi  donne  son  consentement.  Doon  et  Tomile 
vont  à  Paris,  où  le  roi  consent,  en  effet,  au  mariage, 
après  que  Tomile  lui  a  livré  vingt  mulets  chargés 
d'or  ';  seulement,  il  exige  que  sa  sœur  Olive  soit  traitée 
et  vêtue  conformément  à  son  rang.  Après  Pâques,  à 
Cologne,  a  lieu  le  mariage  de  Doon  et  d'Audegour. 
Au  moment  où  le  mariage  se  célèbre.  Olive  se  rend 
à  l'église,  son  petit  Landri  dans  ses  bras  :  l'enfant 
élève  la  voix,  s'adressant  à  son  père  et  à  l'archevêque, 

1.  Dans  JV,  il  y  a  réellement  un  duel  judiciaire  entre  «  Engel- 
bert  de  Dynhart  »,  qui  prend  la  défense  d'Oliva,  et  le  traître  Milon, 
qui  l'accuse  (analyse  de  G.  Paris,  p.  106-107).  —  Dans  E  (fol.  a. 
vj.  yo-vij.  r"),  il  y  a  une  ordalie  par  le  feu,  à  laquelle  Oliva  se 
soumet  et  qui  se  termine  à  son  honneur. 

2.  Pépin  est  de  môme  représenté  comme  vénal  dans  le  Roman 
d'Aubery  le  Bourgoing,  éd.  Tarbé,  Reims,  1849,  p.  iio  (comp. 
p.  xiv)  et  dans  des  versions  franco-italiennes  et  italiennes  de 
Bovon  de  Hantone  (voir  G.  Paris,  Mélanges  de  littér.  franc,  du 
moyen  âge,  p.  iio).  Charlemagne  se  laisse  corrompre  dans  Orson 
de  Beauvais,  éd.  G.  Paris,  v.  840  et  suiv.,  et  dans  Aye  d'Avignon, 
éd.  Guessard  et  P.  Meyer,  p.  99.  —  Dans  E  (fol.  a.  viij.  r»), 
Tomillas  donne  de  l'or  au  «  duc  de  La  Roche  »  (comme  dans  jP, 
V.  565);  quant  à  Pépin,  pour  le  rendre  favorable  au  mariage 
d'Aldigon  (=  Audégour)  avec  le  duc,  il  lui  promet  que  les  terres 
de  «  Flandes  »  (=  Flandres)  et  de  «  Florencia  »,  qui  avaient  été 
données  en  dot  à  Oliva,  feront  retour  au  territoire  royal,  ce  qui 
est  une  corruption  déguisée. 


:15'     INTRODUCTIOM  XLIII 

et  proteste  contre  le  mariage  ';  il  menace  Tomile  d'un 
châtiment  futur.  De  l'église,  on  se  rend  au  palais. 
Tomile  injurie  Olive,  et  Doon  renie  son  fils.  Celui-ci 
se  déclare  prêt  à  combattre  le  calomniateur  de  sa  mère; 
Tomile  lui  tend  son  gant;  l'enfant  saisit  un  bâton  et 
frappe  Tomile  à  la  tête,  si  rudement  qu'il  tombe  par 
terre.  Doon  défend  à  Tomile  de  se  battre  avec  son  fils; 
il  ordonne  à  Olive  de  rentrer  à  son  «  hôtel  »,  où  elle 
pourra  se  livrer  à  sa  «  puterie  ».  Olive  proteste  de  nou- 
veau de  son  innocence;  le  petit  Landri  déclare  qu'il 
vengera  sa  mère  dès  qu'il  sera  en  état  de  porter  les 
armes.  L'auteur  prédit  qu'en  effet  Landri  se  fera  redou- 
ter, d'Aix-la-Chapelle  jusqu'à  Constantinople.  Désor- 
mais commence  une  merveilleuse  chanson  (v.  533-869). 
Audegour  s'efforce  d'exciter  Doon  contre  Landri  et 
sa  mère;  elle  insulte  et  frappe  le  petit  Landri  toutes  les 
fois  qu'il  vient  voir  son  père.  Elle  met  au  monde  un 
fils,  Malingre,  qui  sera  félon  et  perfide  ;  quand  Landri 
a  dix  ans,  Malingre  entre  dans  sa  septième  année.  Lui 
aussi  insulte  Landri  ;  même  il  le  frappe  %  et  Tomile  lui 
donne  un  coup  de  pied.  Cette  fois,  Doon  prend  le  parti 

1.  La  protestation  du  jeune  fils  d'Olive  contre  le  second  mariage 
de  son  père  se  retrouve  de  même  dans  E  (fol.  a.  viij,  r°,  en  bas), 
mais  cette  protestation  a  lieu  au  palais,  au  moment  où  le  repas 
de  noces  va  commencer;  la  scène  à  l'église  manque.  Cette  scène 
se  retrouve,  au  contraire,  dans  Parise  la  Duchesse,  éd.  Guessard 
et  L.  Larchey,  p.  49  :  le  vieux  Clarembaut  y  proteste  contre  le 
second  mariage  du  duc  Raimont  qui  a  chassé  sa  première  femme  ; 
comme  Landri,  Clarembaut  s'adresse  directement  à  l'évêque 
{Parise,  v.  i63i;  comp.  notre  poème,  v.  692-694). 

2.  Ce  thème  de  l'inimitié  entre  les  jeunes  Landri  et  Malingre 
se  retrouve,  avec  d'autres  circonstances,  dans  N  (voir  l'analyse 
de  G.  Paris,  p.  109);  il  manque  dans  E.  Dans  ce  dernier  récit, 
Oliva,  retirée  dans  un  couvent  et  craignant  les  entreprises  de 
Tomillas  contre  le  jeune  Enrrique  {=  Landri),  fait  répandre  le 
bruit  que  celui-ci  est  mort,  et  l'envoie  ensuite  en  Orient  {E, 
foL  b.  ).).  Toute  cette  histoire  semble  une  invention  du  rédacteur 
espagnol. 


XLIV  DOON   DE  LA   ROCHE 

de  son  fils  aîné;  Landri,  heureux  de  cette  intervention, 
monte  sur  une  table  et  tient  des  propos  menaçants  contre 
Tomile;  Doon  adresse  des  reproches  à  celui-ci.  Asson 
de  Mayence  conseille  à  Doon  de  donner  La  Roche  à 
Landri;  Audegour  proteste;  Tomile  frappe  Asson  si 
rudement  qu'il  tombe  aux  pieds  de  Landri.  Ce  dernier 
arrache  son  «  espié  »  à  un  veneur  venu  du  bois,  et  en 
transperce  le  corps  de  Tomile,  qui  tombe  également. 
En  peu  d'heures,  il  y  eut  soixante-dix  combattants  ; 
Landri  et  ses  partisans  ont  le  dessous  ;  ils  vont  à  leurs 
hôtels  pour  s'armer  :  c'est  la  première  fois  que  Landri 
prend  les  armes.  Il  y  a  un  combat  sur  les  bords  du 
Rhin;  Tomile  est  blessé;  il  conseille  à  ses  parents, 
Ganelon,  Hardré  et  Hervi  de  Lion,  de  conclure  avec 
Landri  une  trêve  de  quatre  ou  cinq  ans  ;  on  pourra  tou- 
jours l'assassiner  plus  tard.  Doon  accepte  l'idée  d'une 
suspension  des  hostilités,  et  annonce  à  Landri  qu'il  a 
conclu  une  trêve  ;  il  se  déclare  joyeux  du  courage  de 
celui  qu'il  n'ose  croire  son  fils.  En  entendant  attaquer 
de  nouveau  le  caractère  de  sa  mère,  Landri  se  fâche  : 
il  brandit  sa  lance  contre  son  père,  mais  celui-ci  réussit 
à  le  calmer.  Landri  retourne  à  Cologne,  où  la  trêve  est 
jurée  solennellement  pour  cinq  ans  (v.  870-1 194)- 

Au  bout  de  six  mois,  Tomile  et  son  lignage  jurent, 
au  «mostier»,  la  mort  de  Landri;  mais  la  nonnain 
Beneïte,  cachée  derrière  un  pilier,  entend  le  serment  des 
conjurés'.  Elle  va  au  palais  avertir  Doon;  celui-ci  fait 


I.  Cet  épisode  manque  complètement  dans  E;  dans  iV,  il  y  a 
un  attentat  contre  la  vie  de  Landri,  mais  avec  des  circonstances 
entièrement  différentes  (analyse  de  G.  Paris,  p.  iio,  en  bas).  — 
Complot  très  semblable  contre  le  jeune  Milon  dans  Orson  de 
Beauvais,  éd.  G.  Paris,  v.  640  et  suiv.;  cependant  la  conjuration 
n'a  pas  lieu  dans  une  église,  semble-t-il,  bien  que  les  conjurés 
jurent  sor  sains,  et  c'est  «  uns  gars  de  la  cuisine  »  qui  révèle  le 
complot  —  M.  Benary  (p.  355  de  son  mémoire)  en  rapproche  avec 
raison  le  complot  dç  Pépin  le  3qssu    contre  la  vie    de  Charlc- 


INTRODUCTION  -  ^<î  XLY 

venir  son  fils  et  lui  conseille  de  quitter  lê  pays  et  de   se 
réfugier  en  France,  chez  son   oncle    Pépin.  —  Landri 
appelle     Gilibert,  Asson,   Guinemant  et  d'autres,   en 
tout  80  pairs  de  Lorraine,  et  leur  demande  de   le   rece- 
voir dans  leur  «  mainburnie  »  ;  il  sera  leur  homme  lige. 
Mais  ils  refusent  de  l'aider,  à  cause  de  l'inconduite  de  -i 
sa  mère.  Landri,  désespéré,   retourne  à  l'hôtel  de  sa  ^ 
mère  Olive  et  lui  déclare   qu'il   va  la  quitter,  puisque? 
Tomile,  Malingre  et  sa  marâtre  ont  juré  sa  mort  :  il  ira 
d'abord  demander  secours   à   Pépin;  si   celui-ci  ne  1er 
retient  pas,  il  s'en  ira  en  «  paiennie».  Il   montre   à  sa 
mère  un  arbre  qu'il  a  planté  :  un  «  clerc  »  lui  a  dit   que  ' 
lui  et  cet  arbre  mourront  dans  la  même  année  ;  tant  que  < 
cet  arbre  sera  vert  et  bien  portant.    Olive  pourra  être 
sûre  que  son  fils    est   en  vie  '.  Sa  mère   est    désolée;  > 
Landri  part  avec  Asson  et  Guinemant   (v.  iipS-iSoS). 
Ils  arrivent    à  Liège:    Landri    demande   l'aide  des 
bourgeois:  ils  la  lui  refusent,  à  cause   du  «  putage  »  de  - 
sa  mère.   Ils  s'en  vont  à   Paris  et  descendent  chez  un 
bourgeois,  qui  va  dire  à  Pépin  que  son  neveu  est  arrivé  ; 
le  roi  défend  de  laisser  entrer   Landri.  Celui-ci  vient  '' 
frapper  à   la  porte  du   palais  ;  le  portier  lui  refusant 
l'entrée,  l'enfant  se  met  en  colère  et  le  maltraite  ;  Asson 
et  Guinemant  le  calment.  Pépin,  du  haut  de  son  palais, 
adresse  la  parole  à    Landri  ;  il   voudrait   bien  l'aider, 
mais  il  ne  peut,  car  il  est  Hé  par  un  serment  à  Tomile. 
Le  lendemain  matin,  il  envoie  cependant  à  Asson  et  à 

magne,   d'après   le   récit   du  Moine   de   Saint-Gall,    II,   12,    dans  v 
Monumenta  Germaniae,  Scriptores,  II,  755. 

I.  L'arbre  «signe  de  vie  »  se   retrouve    (remarque    de  M.    Be- 
nary,  p.  386,  note)  dans  Doon  de  Maience,  v.  SSgo  (p.  i63).  Voir 
sur    cette    croyance    en   un  lien  entre  la  vie  d'un  homme  et  celle    - 
d'une  plante:  P.  Sébillot,  Folk-lore  de  France,    III,  3/2;  Mann- 
hardt,  Wald  und   Feldkulte,   I,  43  et  suiv.;  Frazer,    The   Golden 
Bougfi,  III,  391  et  suiv.  {2*  édit.);  Hartland,  Legend  of  Perseus,    -■ 
II,  28  et  suiv.;  G.  A.  Wilken,  Verspreide  Geschriften  (Semarang,  \ 
1912),  III,  291  et  suiv. 


XLVX'  DOON   DE   LA   ROCHE 

Guinemant  deux  mulets  chargés  d'or,  pour  qu'ils 
gardent  Landri  avec  soin.  Landri  prie  encore  Pépin 
de  le  retenir  près  de  lui  :  le  roi  refuse  de  nouveau,  car  il 
est  lié  par  le  serment  qu'il  jura  après  avoir  reçu  de 
Tomile  les  vingt  mulets  chargés  d'or  '.  Landri  part, 
arrive  à  Rome,  s'embarque  pour  la  Grèce  à  «Saint- 
Pierre  au  Bras  »  et  arrive  à  Constantinople  (v.  iZog- 
i384). 

Landri  et  ses  compagnons  contemplent  avec  admira- 
tion le  luxe  et  la  richesse  de  la  ville  imprenable,  auprès 
de  laquelle  la  France  paraît  une  pauvre  terre.  Landri  se 
présente  à  l'empereur  Alexandre  ',  qui  le  retient  à  son 
service  (v.  1385-1407)^  I 

Ce  fut  au  mois  de  mai,  que  les  arbres  fleurissent. 
Olive  se  lève  au  matin  :  elle  voit  l'arbre  [de  Landri] 
couvert  de  feuillage  ;  il  y  a  cependant  une  branche 
sèche.  Elle  comprend  que  son  fils  n'a  pu  obtenir  le 
secours  qu'il  demandait  ;    elle    se   désespère   et  craint 

1.  Plus  haut,  V.  607  et  suiv.,  où  il  est  question  de  l'accord  peu 
honorable  conclu  entre  Tomile  et  Pépin  et  de  l'or  reçu  par 
celui-ci,  il  n'est  rien  dit  d'un  serment   du  roi. 

2.  Ce  nom  se  trouve  au  v.   1436. 

3.  Dans  E  (fol.  b.  vij .  v°),  Enrrique,  apprenant  que  le  «  soldan  » 
de  Babylone  va  attaquer  Constantinople,  quitte  Jérusalem,  qu'il  . 
vient  de  conquérir  sur  les  Sarrasins,  pour  aller  au  secours  de  la 
ville  menacée  ;  il  fait  naufrage  et  réussit  à  gagner  la  terre  avec 
deux  compagnons  seulement.  Ils  arrivent  à  Constantinople 
dénués  de  tout  et  affamés.  Enrrique  reste  à  l'entrée  de  la  ville, 
au  pied  d'une  tour,  pendant  que  ses  compagnons  vont  dans  la 
ville  pour  chercher  de  la  nourriture.  En  les  attendant,  il  se 
plaint  à  haute  voix  et  raconte  son  histoire.  Mergelina,  la  fille  de 
l'empereur,  qui  habite  dans  la  tour,  entend  ses  plaintes  ;  elle  lui 
jette  d'abord  de  l'or,  puis  donne  ordre  à  un  senescal  de  le  faire 
monter.  — Tout  cela  pourrait  être  de  l'invention  du  rédacteur 
espagnol;  il  y  a  pourtant  une  certaine  analogie  entre  ce  récit  et 
ce  qui  est  raconté  dans  Élie  de  Saint-Gilles,  éd.  G.  Raynaud, 
v.  1401  et  suiv.  —  Le  nom  du  «  soldan  »,  Mirabel,  se  lit  dans  la 
Prise  de  Cordres  et  dans  d'autres  chansons  de  geste  ;  voir  la  Table 
de  M.   E.    Langlois. 


INTRODUCTION      -  XLVII 

bien  ne  jamais  le  revoir.  Pendant  ce  temps,  Landri  est 
à  Constantinople.  L'empereur  est  menacé  d'une  guerre: 
les  Sarrasins  se  sont  emparés  de  Lalice  (=  Laodicée)  et 
en  ont  chassé  les  Harmins  [=  Arméniens]  qui  l'occu- 
paient '.  Landri,  qui  vient  d'être  fait  chevalier  par 
l'empereur,  attaque  les  païens  et  fait  leur  seigneur 
prisonnier  ;  il  le  livre  à  l'empereur  (v.  1408-1439). 

Celui-ci  a  une  fille,  qui  s'appelle  Salmadrine;  elle  est 
amoureuse  de  Landri  au  point  d'en  tomber  malade. 
Voyant  qu'elle  est  souffrante,  près  de  mourir,  l'empereur 
l'interroge  ;  elle  dit  qu'elle  désire  épouser  Landri,  qui 
vient  de  sauver  le  pays.  L'empereur  répond  qu'il  ne 
sait  rien  de  certain  sur  l'origine  de  Landri  ;  il  consen- 
tirait volontiers  au  mariage,  même  si  le  jeune  chevalier 
était  bâtard,  si  celui-ci  était  réellement  parent  du  roi 
de  France,  ainsi  que  l'ont  affirmé  Asson  et  Guinemant  ; 
mais  l'empereur  se  refuse  à  le  croire.  Les  barons 
conseillent  à  l'empereur  d'envoyer  deux  messagers, 
qui  s'enquerront  de  la  véritable  origine  de  Landri  :  s'il 
est  réellement  neveu  du  roi  de  France,  l'empereur  lui 
donnera  sa  fille  en  mariage  ;  s'il  ne  l'est  pas,  il  le  récom- 
pensera de  ses  services  et  le  renverra  (v.  1440- i5oo). 

L'empereur  ordonne  à  deux  de  ses  chevaliers,  Beren- 
gier  et  Outré,  de  s'en  aller  en  France,  à  Laon,  pour 
savoir  la  vérité  au  sujet  de  Landri.  Salmadrine  les  fait 
venir  de  son  côté  et  menace  de  les  faire  mettre  à  mort 
s'ils  rapportent  [au  sujet  de  Landri]  des  choses  qui  lui 
seraient  désagréables.  Elle  leur  donne  deux  «  droma- 
daires »,  qu'elle  fait  garder  dans  un  cellier  et  qui  courent, 


I .  Sur  les  mentions  des  Arméniens  dans  les  chansons  de  geste, 
voir  F.  Macler,  La  France  et  l'Arménie  à  travers  l'art  et  l'histoire, 
Paris,  1917,  gr.  in-40,  p.  12  et  suiv.  Il  résulte  de  ces  recherches 
que  l'auteur  de  Doon  de  La  Roche  peut  être  classé  parmi  les 
«  trouveurs  »,  relativement  instruits,  qui  savaient  que  les  Armé- 
niens étaient  chrétiens  ;  d'autres  les  rangent  avec  les  Açopars,  les 
Bedotns  et  autres  ennemis  de  la  Chrétienté.  ■-  -   ,  ..- .       -  .     .  ^ 


XLVm  DOON   DE   LA    ROCHE 

merveilleusement  vite  :  avec  ces  montures,  ils  peuvent 
être  de  retour  en  huit  jours  et  demi.  Ils  partent,  riche- 
ment costumés,  assis  sur  les  dromadaires  et  munis  de 
malles  remplies  de  «  besants».  Au  bout  de  huit  jours 
ils  sont  à  Cologne  ;  ils  demandent  l'hospitalité  à  un 
riche  bourgeois,  Gonteaume,  originaire  de  La  Roche  et 
cousin  de  Doon.  Gonteaume  se  déclare  prêt  à  les  loger 
pendant  un  an,  sans  rien  leur  faire  payer,  «  pourvu  seu- 
lement que  Dieu  ramène  Landri,  mon  vrai  seigneur,  et 
qu'il  maudisse  Tomile  et  Malingre,  qui  l'ont  chassé  du 
pays»!  Les  messagers  sont  ravis  quand  ils  apprennent 
qu'il  connaît  Landri.  Les  chevaux  (=  les  dromadaires) 
sont  logés  par  Gonteaume  dans  un  cellier  (v.  i5oi- 
1668). 

Mais  Hardré  a  rencontré  les  messagers  et  remarqué 
leurs  chevaux  merveilleux  ;  il  conseille  à  Malingre 
d'aller  les  enlever.  Malingre  suit  ce  conseil  :  il  s'em- 
pare des  chevaux,  après  un  combat  avec  les  serviteurs 
de  Gonteaume,  combat  où  il  est  blessé;  il  se  réfugie 
ensuite  à  l'hôtel  de  Tomile.  Gonteaume  va  se  plaindre 
à  l'archevêque  de  la  violence  qui  lui  est  faite,  et  l'arche- 
vêque convoque  les  bourgeois,  au  nombre  de  soixante 
mille.  Ceux-ci  conseillent  à  l'archevêque  d'envoyer 
Gautier,  cousin  germain  de  Doon,  à  l'hôtel  de  Tomile, 
pour  réclamer  les  chevaux;  s'il  ne  veut  les  rendre,  il 
sera  attaqué.  Malingre  refuse  les  chevaux;  l'archevêque 
ordonne  alors  aux  bourgeois  de  s'armer.  Ceux-ci 
s'arment  en  effet  ;  on  sonne  la  «  bancloche  »  ;  Gonteaume 
et  ses  serviteurs  se  joignent  à  eux;  on  attaque  le  châ- 
teau et  les  gens  de  Tomile  :  lutte  violente,  où  Tomile  et 
Malingre  sont  blessés.  Tomile  et  les  siens  s'enferment 
chez  eux  ;  Tomile  se  met  à  une  fenêtre  et  propose  aux 
assaillants  de  rendre  les  chevaux  et  d'en  rester  là  :  son 
jeune  neveu,  qui  n'est  pas  encore  chevalier,  a  fait  une 
folie  qu'il  est  prêt  à  réparer.  L'archevêque  accepte  cette 
proposition  ;  l'assaut  cesse  et  les  bourgeois  s'en  vont. 


INTRODUCTION  XLiX 

Tomile  et  Malingre  vont  rendre  les  chevaux  à  Gon- 
teaume  et  s'humilient  devant  lui  ;  mais  les  bourgeois 
leur  donnent  des  coups  de  pied  et  leur  reprochent  leur 
conduite  envers  Landri,  leur  seigneur.  Les  messagers 
assistent  à  la  scène  et  se  réjouissent  :  ils  savent  main- 
tenant de  science  certaine  que  Landri  est  le  neveu  du  roi 
et  n'ont  pas  besoin  d'aller  en  France  (v.    1 669- 1 882). 

Olive  sort  à  ce  moment  de  l'église  où  elle  était  allée 
prier.  Gonteaume,  qui  seul  lui  est  resté  fidèle,  l'invite  à 
entrer  chez  lui  et  la  fait  souper  avec  les  messagers, 
auxquels  il  explique  qui  est  Olive;  les  messagers  lui 
donnent  des  nouvelles  de  Landri.  Comme  ils  sont 
édifiés  sur  l'origine  de  Landri  et  se  croient  dispensés  de 
poursuivre  leur  voyage  en  France,  ils  partent  le  lende- 
main matin;  Gonteaume,  l'archevêque  et  Olive  les  con- 
voient; Olive  leur  remet,  pour  Landri,  un  anneau 
qu'elle  a  reçu  de  Doon  pendant  la  première  nuit  de  leur  ' 
mariage  (v.   1883-1972). 

Après  un  heureux  voyage,  les  messagers  arrivent  à 
Constantinople.  C'est  au  mois  de  mai  :  l'empereur 
Alexandre  est  dans  son  verger,  sous  une  tente;  Lan- 
dri, Asson  et  Guinemant  sont  avec  lui,  en  même  temps 
que  Salmadrine,  gracieusement  costumée.  Elle  adresse 
la  parole  à  Landri;  celui-ci  ne  répond  guère  à  ces 
avances  et  lui  dit  qu'il  pense  à  sa  mère,  qui  est  en 
France  au   pouvoir  de  Tomile.   A  ce    moment,    les 

I.  Cet  épisode,  où  l'on  voit  les  bourgeois  d'une  ville  s'armer  et 
se  mettre  en  mouvement  contre  un  chevalier  qu'ils  considèrent 
comme  un  ennemi,  est  une  sorte  de  lieu  commun  qui  se 
retrouve  dans  plusieurs  chansons  de  geste  [Ogier  le  Danois, 
Gaydon,  etc.)  et  même  dans  \e  Conte  du  Graal  de  Chrétien  de 
Troyes.  Voir  C.  Voretzsch,  Epische  Studien,  I,  die  Composition 
des  Huon  von  Bordeaux,  Halle  a.  S.,  1900,  I,  184  (comp.  182, 
note).  La  différence,  c'est  que,  dans  les  épisodes  signalés  par 
M.  Voretzsch,  le  chevalier  qu'on  attaque  est  un  personnage  sym- 
pathique, tandis  que,  dans  F,  Tomile  et  Malingre  sont  des 
traîtres  et  que  tous  les  torts  sont  de  leur  côté. 

d 


L  DOON    DE   LA   ROCHE 

messagers  arrivent;  ils  mettent  pied  à  terre  devant  la 
tente  de  Tempereur,  et  font  le  récit  de  leur  mission  :  ils 
ont  constaté  que  Landri  est  bien  le  neveu  du  roi  Pépin  ; 
en  même  temps,  Outré  remet  à  Landri  l'anneau 
qu'Olive  lui  a  confié.  —  Après  avoir  pris  connaissance 
de  ces  nouvelles,  l'empereur  Alexandre  n'hésite  plus; 
il  accorde  à  Landri  la  main  de  sa  fille  (r,  1973-2 109). 

Le  récit  revient  à  Malingre,  le  fils  d'Audegour.  Doon 
avait  «  adoubé  »  (fait  chevalier)  son  fils;  mais  celui-ci, 
de  plus  en  plus  exaspéré  contre  Olive,  veut  qu'on  lui 
enlève  les  terres  qu'elle  tient  encore  ;  Doon  s'y  refusant, 
Malingre  traite  son  père  de  cou:{  sofran\  (cocu  com- 
plaisant); le  père  frappe  le  fils,  qui  réplique,  et  les  deux 
hommes  en  viennent  aux  mains.  Des  chevaliers  réus- 
sissent cependant  à  établir  une  trêve  entre  le  père  et  le 
fils.  Tomile  et  Malingre  n'en  chassent  pas  moins  Olive 
de  Cologne;  elle  part,  assise  sur  un  mauvais  «  roncin  », 
et  se  réfugie  en  Hongrie,  où  elle  est  recueillie  par  son 
oncle,  l'évêque  Auberi,  à  «  Seine  la  ville  »  (v.  2110- 
2166;  cf.  V.  2925,  pour  la  résidence  d'Auberi). 

Tomile  et  Malingre,  craignant  une  invasion  possible 
de  leur  terre  par  Doon  et  Landri,  expulsent  Doon  de 
Cologne  ;  quand  celui-ci  veut  se  réfugier  à  Aix-[la-Cha- 
pelle],  on  lui  en  refuse  l'entrée.  Il  se  retire  à  La  Roche 
et  part  de  là  pour  Paris,  afin  d'y  voir  Pépin.  Il  trouve 
le  roi  malade;  Pépin  demandant  des  nouvelles  d'Olive, 
Doon  raconte  qu'elle  a  été  chassée  par  Tomile  et 
Malingre,  qui  ont  occupé  ses  fiefs.  Le  roi  se  met  fort 
en  colère,  reproche  à  Doon  sa  conduite  à  l'égard  de  sa 
sœur,   et  le  défie  '.   Doon,  épouvanté,  se  retire  à  La 

I.  Le  roi  arrache  quatre  poils  de  son  «  pellisson  »  d'ermine  [et 
les  jette  au  visage  de  Doon]  (v,  2261).  Le  même  mode  de  défi  se 
retrouve  dans  Raoul  de  Cambrai  (v.  23i6-23i8,  édit.  Meyer  et 
Longnon),  et  dans  Girbert  de  Met:{  (voir  la  note  des  éditeurs  de 
Raoul  de  Cambrai  sur  le  passage  cité,  en  tenant  compte  de  ce 
qu'ils  disent  dans  l'Introduction,  p.  LXIII,  note.) 


INTRODUCTION  LI 

Roche,  qu'il  fortifie,  puis  il  assiège  Aix-la-Chapelle. 
Ceux  de  la  ville  font  une  sortie  ;  Doon  les  attaque  avec 
succès  et  fait  des  prisonniers,  qu'il  amène  à  La  Roche. 
Un  écuyer  va  annoncer  le  désastre  à  Tomile  et  à 
Malingre  ;  ceux-ci  s'avancent  contre  La  Roche.  Il  y  a 
combat  devant  la  ville,  et  Doon  lutte  personnellement 
contre  Tomile.  Celui-ci,  repoussé,  s'enfuit  à  Aix,  et 
Malingre  à  Spire;  mais  bientôt  tous  deux  réunissent  de 
nouveau  une  armée  de  40.000  hommes  et  attaquent  de 
rechef  La  Roche.  Doon  et  Jofroi  défendent  la  ville;  ils 
auraient  réussi  à  repousser  les  assaillants,  si  Pépin 
n'était  survenu.  Il  attaque  Tomile  et  Malingre  et  taille 
leur  armée  en  pièces;  Tomile  s'enfuit  à  Mayence,  et 
Malingre  à  Spire.  Alors  le  roi  se  retourne  contre  Doon  : 
il  prend  La  Roche  et  fait  Jurer  à  Doon  et  à  son  neveu 
Jofroi  qu'ils  quitteront  le  pays  (v.  2167-2408)  '. 

«  Les  autres  jongleurs  qui  disent  de  Doon  en  ont 
beaucoup  chanté,  mais  ils  ne  savent  pas  [la  véritable 
histoire]  :  je  la  reprends  là  où  ils  l'abandonnent  ;  je 
reviendrai  plus  tard  à  Landri  »  (v.  2409-2412). 

Doon,  [accompagné  de  Jofroi],  s'en  va  en  Hongrie  :  là 
règne  le  roi  Dorame,  vaillant  chevalier,  qui  réclame  la 
moitié  de  Constantinople  ;  pour  cette  expédition,  il 
prend  à  son  service  des  chevaliers,  entre  autres  Doon 
et  Jofroi.  Les  Hongrois  campent  sur  la  rive  du  «  Hon- 
gre »  :  ils  jurent  de  tout  ravager  jusqu'à  Constantinople. 
Un  messager  à  cheval,  blessé,  annonce  ces  mauvaises 
nouvelles  '  à  l'empereur  [Alexandre]  ;  Salmadine   sup- 


1.  Dans  E  (fol.  b.  vj.  verso  en  bas),  Pépin  enlève  également  au 
duc  de  La  Roche  ses  terres,  mais  les  circonstances  diffèrent 
complètement. 

2.  Comp.  aux  vv.  2i3r-233  et  aux  v.  2455-2459  la  Chevalerie 
Ogier,  édit.  Barrois,  v.  1225  et  suiv.  :  Uns  chevaliers  s'en  est  sevrés 
des  nos,  Qui  d'un  espial  fu  navrés  ens  el  cors  :  Le  Toivre  passe, 
son  escu  a  son  col,  Aine  ne  fina  si  est  venus  a  Vost.  —  Tôt  droit  a 
Vost  s'en  vint  li  messagiers,  Le  roi  trova  en  son  trefou  ilsiet.  Puis-, 


LU  DOON   DE   LA   ROClHE 

plie  Landri  de  marcher  contre  Dorame.  Landri  refuse 
d'abord  d'intervenir,  jugeant  les  Hongrois  des  adver- 
saires indignes  de  lui.  Mais,  quand  un  second  messager 
blessé  survient,  porteur  de  messages  encore  pires,  Lan-' 
dri  crie  à  ses  chevaliers  «  Armez-vous  !  »  Quarante 
mille  hommes  partent  avec  Landri;  ils  attaquent  les 
Hongrois,  et  Landri  tue  Garnier  (v.  2413-2489). 

L'empereur  Alexandre  attaque  son  neveu  Dorame  : 
il  est  sur  le  point  d'être  vaincu,  quand  Landri  survient  : 
il  frappe  Dorame  de  son  épée  et  l'étourdit  d'un  grand 
coup  :  Dorame  se  rend  prisonnier. 

Leur  roi  vaincu,  les  Hongrois  prennent  la  fuite; 
seuls  Doon  et  Jofroi  tiennent  tête  aux  assaillants. 
Landri  attaque  son  père,  sans  le  reconnaître,  et  réussit  à 
le  vaincre;  il  va  lui  couper  la  tête  quand  le  duc  lui 
crie  merci;  Landri  le  remet  alors  au  roi  Alexandre.  De 
leur  côté,  Asson  et  Guinemant  ramènent  Jofroi  prison- 
nier. Doon  et  Jofroi,  grièvement  blessés,  sont  enfermés, 
avec  quatre-vingts  de  leurs  compagnons,  dans  une  des 
prisons,  où  ils  demeurent  pendant  sept  ans  (v.  2520- 
255o). 

Le  récit  revient  à  Olive,  qui  est  restée  chez  l'évêque 
(Auberi).  Un  jour,  en  sortant  de  l'église,  elle  est 
reconnue  par  quatre  «  pers  de  La  Roche  »,  qui  ren-' 
traient  d'un  pèlerinage  d'outre  mer.  Ils  étaient  partis 
de  chez  eux  il  y  a  sept  ans,  avant  que  la  dame  eût  été 
accusée  [d'adultère];  quand  ils  voient  Olive,  ils 
s'étonnent  beaucoup;  ils  se  disent  entre  eux  :  «  Nous 
avons  trouvé  notre  dame  »,  Ils  l'arrêtent,  s'inclinent 
devant  elle  et  l'interrogent;  elle  leur  raconte  son  his- 
toire. Ils  jurent  sur  des  reliques  qu'ils  lui  rendront  sa 
terre  et  sa  contrée.  L'évêque  assure   à  Olive  que  ces 


s'escria  tant  com  il  puet  huchier  :  «  Rois,  car  chevalche  !  etc.  »  Un 
épisode  analogue  se  lit  dans  Élie  de  Saint  Gilles,  v.  182  et  suiv., 
éd.  G.  Raynaud.  '  "' 


INTRODUCTION  LUI 

quatre  barons  lui  rendront  en  effet  sa  terre;  il  l'engage 
[en  attendant]  à  tenir  large  «  mesnie  »  et  à  donner  de 
grandes  «  soudées  »  (v.  255 1-2595)  '. 

Le  récit  revient  à  Landri  :  le  a  trouyeur  »  rappelle 
ses  aventures  et  l'amour  de  Salmadrine.  Une  nuit, 
Landri  est  seul,  sans  autre  suite  que  les  cinq  compa- 
gnons qu'il  avait  amenés  de  France;  son  maître  Gui- 
nemant  remarque  qu'il  pleure  et  soupire.  Interrogé 
par  Guinemant,  Landri  évoque  ses  malheurs  :  sa  mère 
[probablement]  tuée,  le  roi  Pépin  qui  l'a  abandonné, 
le  mauvais  «  lignage  y>  qui  possède  sa  terre.  Guine- 
mant lui  conseille  de  prendre  congé  du  roi  Alexandre, 
de  retourner  [en  France]  et  d'y  défier  le  roi  Pépin. 
Landri  approuve  ce  conseil  (v.  2596-2670)  '. 

Un  écuyer  de  l'empereur  Alexandre  a  surpris  cette 
conversation  et  se  hâte  de  la  rapporter  à  son  maître  : 
celui-ci  déclare  qu'il  approuve  le  projet  de  Landri  et 
défend  sa  conduite  contre  les  reproches  de  Salmadrine, 
sa  fille.  Il  est  minuit,  on  sonne  les  matines;  l'empe- 
reur va  assister  au  service  dans  la  crypte  de  Sainte- 
Sophie.  Salmadrine  se  lève  et,  vêtue  seulement  d'un 
mantelet  d'hermine,  se  rend  dans  la  chambre  où 
reposent  ceux  Je  France.  Elle  se  glisse  dans  le  lit  de 
Landri,  donne  un  baiser  au  jeune  homme.  Landri, 
troublé,  s'éveille  et  la  conjure  de  dire  qui  elle  est;  Sal- 

1.  Cet  épisode  peut  paraître  surprenant,  car  dans  la  suite  du 
récit  il  n'est  plus  question  de  ces  quatre  «  pers  ».  Il  faut  cepen- 
dant remarquer  que  les  vv.  2584-2585  préparent  en  quelque 
sorte  le  récit  subséquent,  où  l'on  voit  Olive  reconquérir  sa  terre. 

2.  Dans  E,  l'empereur  Manuel  donne  à  Enrrique  (=  Landri) 
l'empire  de  Constantinople  et  la  main  de  sa  fille,  Mergelina, 
immédiatement  après  sa  défense  victorieuse  de  la  capitale  contre 
Mirabel,  solelan  de  Babilonia.  Quelque  temps  après  le  mariage, 
Enrrique,  une  nuit  qu'il  reste  éveillé  (fol.  c.  vj.  v"),  se  reproche 
à  lui-même  de  n'avoir  pas  encore  vengé  sa  mère,  trahie  par 
Tomillas.  Mergelina,  couchée  à  ses  côtés,  entend  ses  soupirs  et 
l'interroge. 


LIV  DOON    DE   LA   ROCHE 

madrine  se  nomme  et  ajoute  :  «  tu  peux  faire  dé  moi 
ton  plaisir;  si  je  meurs  d'amour,  mon  âme  sera  sau- 
vée ».  —  «  Dame  »,  répond  Landri,  «  votre  père  est 
mon  seigneur;  allez  vous  recoucher  ».  Salmadrine 
consent  à  se  retirer;  elle  veut  cependant  que  Landri 
lui  apprenne  «  un  des  jeux  de  France  ».  Landri  répond  : 
«  J'y  consens;  mais  promettez-moi  que,  le  jour  de  la 
Pentecôte,  vous  prierez  votre  père  de  rendre  la  liberté 
à  ceux  qui  sont  en  prison  :  je  leur  pardonnerai,  afin 
que  Dieu  m'accorde  de  me  venger  du  traître  Tomile  ». 
Il  consent  alors  à  ce  que  Salmadrine  lui  donne  un  bai- 
ser, qu'il  lui  rend  d'ailleurs  :  ce  ne  sera  pas  une  honte 
pour  elle,  et,  en  ce  faisant,  il  ne  sera  pas  parjure  à 
l'égard  d'Alexandre  (v.  2671-2750). 

La  jeune  fille  se  retire.  Le  lendemain  l'empereur  fait 
venir  ses  barons,  et  les  Allemands  (c'est-à-dire  Landri 
et  les  siens)  se  présentent  devant  lui.  Alexandre  offre  à 
Landri  sa  fille  et  la  moitié  de  son  «  fief  »,  s'il  consent  à 
rester.  Landri  pleure  :  il  pense  à  sa  mère  Olive  et  à 
son  père  Doon;  il  ne  sait  pas  que  celui-ci  est  prison- 
nier de  l'empereur  Alexandre  (v.  2751-2774). 

Il  y  a  grande  réunion  dans  le  palais  de  l'empereur  : 
les  Allemands  détiennent  la  «  sénéchaussée  »  :  Jofroi  ' 
et  Guinemant  portent  les  éperons;  Amauri  et  Andrieu, 
l'enseigne  et  les  épées;  Landri,  dans  sa  livrée  à  croix 
d'argent,  dirige  la  foule.  Les  évêques  et  les  abbés  célè- 
brent le  service  divin  ;  les  jongleurs  violent  et  chantent. 
Doon,  dans  sa  prison,  entend  ce  bruit  insolite;  il  inter- 
roge le  «  chartrier  ».  Celui-ci  répond  qu'il  y  a  aujour- 
d'hui grande  fête  dans  le  palais  de  Constantin  :  le  roi 
porte  sa  couronne  et  donne  à  ses  princes  leur  «  chase- 
ment  ».  Doon  se  lamente;  Asson  de  Mayence  %  pour  le 


I.  Il  doit  y  avoir  ici  une  confusion  de  l'auteur;  voir  la  note  sur 
le  vers  2783. 
3.  Confusion  en  sens  contraire;  voir  la  même  note. 


INTRODUCTION  LV 

consoler,  lui  raconte  un  songe  qu'il  a  eu.  —  Au  sortir 
de  l'église,  Landrî  et  Salmadrine  prient  l'empereur 
Alexandre  de  mettre  en  liberté  les  prisonniers;  l'em- 
pereur donne  l'ordre  demandé.  Doon  est  si  faible  qu'il 
ne  peut  se  tenir  debout  et  qu'on  doit  le  porter.  Après 
qu'il  a  mangé,  on  le  conduit  devant  le  roi;  celui-ci  lui 
demande  son  nom,  en  faisant  l'éloge  de  son  courage. 
Doon  se  fait  connaître  (v.  2774-2855). 

Quand  Landri  entend  ce  que  son  père  a  dit  et  quand 
il  reconnaît  son  maître  Guinemant,  il  tombe  à  genoux 
et  se  nomme  '.  Il  demande  des  nouvelles  de  sa  mère. 
Doon  raconte  comment  il  a  été  chassé  du  pays  par  les 
traîtres  et  attaqué  par  le  roi  Pépin;  il  ne  sait  ce  qu'est 
devenue  Olive.  Landri  pleure  ;  l'empereur  lui  conseille 
de  reconquérir  plutôt  sa  terre  et  de  la  rendre  à  son 
père,  ou  à  sa  mère,  s'il  peut  la  retrouver.  Salmadrine 
intervient,  et  rappellant  que  Landri  lui  a  promis  le 
mariage,  el],e  menace  de  se  tuer  ou  de  se  déshonorer, 
si  Landri  part.  Celui-ci  la  rappelle  aux  convenances. 
L'empereur  donne  à  Landri  de  l'or  et  vingt  mille 
hommes  pour  l'expédition  qu'il  doit  entreprendre. 
Landri  marche  vers  l'Allemagne  en  traversant  l'Italie 
et  la  Maurienne;  de  son  côté,  Tomile  commence  à 
garnir  ses  châteaux  (v,  2856-2923). 

Sur  ces  entrefaites,  l'évêque  Auberi,  chez  qui  Olive  est 
toujours  réfugiée,  tient  sa  cour  à  «  Seine  la  ville  »,  lors 
de  la  fête  de  Pâques  ;  il  s'adresse  à  ses  chevaliers,  leur 
présente  Olive  et  leur  raconte  comment  elle  a  été  chas- 
sée de  son  pays.  Revêtu  de  son  étole,  il  se  jette  à  leurs 
pieds  et  leur  annonce  son  intention  de  faire  la  guerre 

I.  Orson  de  Beau  vais,  prisonnier,  est  délivré  de  mdme  par  son 
fils  Milon  [Orson  de  Beauvais,  v.  1818  et  suiv.,  éd.  G.  Paris). 
Bien  que  les  circonstances  diffèrent  beaucoup,  certains  détails 
sont  cependant  communs  aux  deux  récits  :  Orson  se  lamente 
dans  sa  prison,  v.  1751-1757-,  une  fois  délivré,  il  est  si  faible 
qu'il  ne  peut  rester  debout,  v.  1804. 


LVI  DOON    DE   LA    ROCHE 

à  Tomile  :  «  Seigneurs,  aidez-nous».  Il  réunit  ses 
«  soudoiers  »  dans  un  pré  hors  de  la  ville.  —  L'armée 
se  met  en  marche  ;  la  duchesse  la  suit,  assise  sur  une 
mule.  Ils  arrivent  devant  La  Roche  ;  ils  mettent  des 
troupes  en  embuscade  dans  les  prés  devant  la  ville, 
pendant  que,  d'autre  part,  trente  chevaliers  enlèvent  du 
butin  '  [sous  les  murs].  Malingre  sort  de  la  >ille,  suivi 
de  cent  quarante  chevaliers;  ils  réussissent  à  reprendre 
le  butin  enlevé,  mais  tombent  dans  l'embuscade;  des 
parents  de  Malingre  sont  tués.  L'évêque  Auberi  s'at- 
taque à  Malingre  lui-même.  Olive,  qui  tient  un  bâton 
à  la  main,  frappe  Malingre  à  la  tête;  il  s'enfuit  avec  les 
siens;  Auberi  et  ses  chevaliers  prennent  La  Roche. 
Les  chevaliers  s'emparent  d'Audegour  et  la  présentent 
à  Olive.  Celle-ci  veut  d'abord  la  livrer  à  ses  écuyers  et 
à  ses  garçons  ;  mais,  sur  les  supplications  de  sa  rivale, 
elle  se  borne  à  la  faire  enfermer  dans  une  prison  sou- 
terraine (v.  2924-3058). 

Pendant  ce  temps-là,  Malingre  s'enfuit  jusqu'à 
Mayence.  Il  raconte  à  Tomile  sa  défaite  et  la  perte  de 
La  Roche.  Tomile  est  d'avis  d'offrir  la  paix  à  l'évêque 
et  à  Olive,  quitte  à  les  empoisonner  ou  à  les  assassiner 
plus  tard.  De  son  côté,  Doon,  suivi  de  20.000  che- 
valiers, vient  camper  devant  Sobrie  ^  :  c'est  une  ville 
qui  lui  appartient  en  propre,  son  père,  l'Allemand 
Florent,  l'ayant  jadis  conquise  sur  un  roi  [païen?]. 
Doon  tient  conseil  :  la  puissance  de  Tomile  l'inquiète; 

1.  Probablement,  dans  la  pensée  de  l'auteur,  du  bétail. 

2.  Ce  nom  de  Sobrie  ou  Sorbrie  est  essentiellement  propre  à  la 
chanson  d'Élie  de  Saint-Gilles,  où  la  ville  est  souvent  men- 
tionnée; en  dehors  de  ce  poème,  on  n'en  trouve  qu'une  ou  deux 
mentions  (voir  la  Table  de  M.  E.  Langlois).  Cette  ville  «  lointaine 
et  fabuleuse  »  (G.  Paris)  est  tout  à  fait  à  sa  place  dans  Élie, 
comme  centre  des  aventures  également  lointaines  du  héros,  mais 
elle  fait  singulière  figure  dans  F,  au  milieu  des  noms  histo- 
riques de  Liège,  Cologne,  Worms,  Spire,  Mayence,  etc.  L'emprunt 
à  Élie  de  Saint-Gilles  paraît  certain.  .  •  ■ 


rv,r  INTRODUCTION  LVII 

Landri  se  fait  fort  de  prendre  la  ville,  mais  Doon 
repousse  cette  idée,  ne  voulant  pas  dévaster  son  propre 
territoire.  Avant  d'agir,  il  ira,  déguisé,  avec  Jofroi, 
parcourir  le  pays,  pour  s'assurer  de  la  véritable  situation 
de  Malingre  et  de  dame  Olive.  Doon  et  Jofroi  partent, 
en  effet,  déguisés  en  pèlerins;  ils  entrent  dans  une  forêt 
où  Doon,  du  temps  de  sa  puissance,  chassait  souvent. 
A  l'issue  de  la  forêt,  ils  se  trouvent  dans  les  terres  d'un 
maire,  Bernard,  homme  et  métayer  du  duc.  Bernard  a 
dix  fils,  dont  cinq  sont  chevaliers,  et  cinq  employés  sur 
les  terres  de  leur  père.  Malgré  ses  beaux  troupeaux  et 
ses  meutes  de  chiens,  le  maire  n'a  pas  le  cœur  joyeux; 
il  songe  à  Doon,  son  seigneur,  qui  est  absent  :  il  en 
parle  à  son  fils  aîné.  Survient  Doon,  déguisé,  qui  re- 
connaît Bernard,  et  il  lui  demande  l'hospitalité  pour 
lui  et  Jofroi.  Admis  dans  la  demeure,  il  met  Bernard 
à  l'épreuve;  il  se  conduit  exprès  d'une  façon  insuppor- 
table :  il  renverse  le  dîner  qu'on  lui  offre  ou  le  donne 
à  manger  aux  domestiques  ,  surtout  il  dit  sans  cesse  du 
mal  de  Doon,  qu'il  traite  de  couard.  Les  deux  premières 
fois,  le  maire,  sur  les  instances  de  sa  femme,  maîtrise 
sa  colère  ;  après  la  troisième  incartade  du  soi-disant 
pèlerin,  qu'il  prend  pour  un  envoyé  de  Malingre,  il  le 
met  à  la  porte  avec  son  compagnon,  malgré  la  nuit  et 
le  temps  affreux  qu'il  fait  (v.  3o59-339i). 

Une  fois  dehors,  sous  la  pluie  froide,  Jofroi  se 
lamente;  Doon  se  moque  de  lui.  La  femme  de  Bernard, 
entendant  les  plaintes  de  Jofroi,  obtient  de  son  mari 
qu'on  fasse  rentrer  les  deux  hommes,  et  leur  ouvre 
«  l'ostel  »;  elle  fait  allumer  du  feu  et  leur  donne  des 
manteaux.  Bernard,  toujours  en  colère,  s'avance  vers 
eux,  et  reconnaît  Doon  à  un  signe  qu'il  a  sur  la  main. 
Doon  renonce  alors  à  feindre.  Bernard  et  sa  famille  lui 
font  fête;  on  lui  apprend  qu'Olive  se  trouve  à  La  Roche, 
d'où  elle  a  chassé  Tomile  (v.  3392-3479). 

Le  lendemain  matin,  Doon  et  Jofroi  revêtent  de  oou- 


LVIII  DOON    DE    LA  ROCHE 

veau  leur  costume  de  pèlerin;  accompagnés  de  cinq 
des  fils  de  Bernard,  habillés  en  bergers,  ils  partent  pour 
La  Roche.  Le  but  de  Doon  est  d'éprouver  Olive.  Devant 
la  «  salle»  fdu  palais],  le  duc  rencontre  sa  femme;  il  se 
donne  pour  un  pèlerin  qui  chemine,  avec  ses  compa- 
gnons, allant  de  France  à  Cologne.  Olive  ordonne  à 
son  sénéchal  de  les  héberger  et  de  leur  donner  de 
l'argent  (v.  348o-3553). 

Doon  se  trouve  ainsi  dans  la  «  salle»  de  son  château; 
pendant  le  dîner,  le  faux  pèlerin  dit  du  mal  de  Doon,  à 
la  grande  indignation  d'Olive,  qui  le  rabroue.  Le  dîner 
fini,  on  fait  le  lit  des  pèlerins  au  milieu  de  la  salle  ;  le  len- 
demain matin,  avant  l'aurore,  ils  se  lèvent  et  s'arment  ', 
puis  se  postent  aux  fenêtres  ;  le  duc  crie  «  Sobrie  !  », 
son  «  enseigne  «(cri  de  guerre).  Olive  se  désespère; 
elle  croit  que  le  château  a  été  surpris  par  des  partisans 
de  Tomile  et  de  Grifon.  Dans  le  bourg,  en  bas  du  châ- 
teau, les  barons  s'arment  de  leur  côté,  et  pénètrent  dans 
le  château,  pour  châtier  les  «  truants  »  qui  s'y  trouvent; 
mais  Jofroi  de  Mayence  les  apaise  en  révélant  que  c'est 
Doon  de  La  Roche  en  personne  qui  est  là.  Olive,  un 
peu  rassurée,  entre  dans  la  salle  et  interpelle  le  faux 
pèlerin,  qui  reconnaît  qu'il  est  Doon.  Les  fils  de  Ber- 
nard ouvrent  les  portes  [du  château];  les  barons  pénè- 
trent dans  la  salle  et  rendent  hommage  à  leur  seigneur  ; 
mais  Olive  dit  qu'elle  ne  pourra  partager  le  lit  de  Doon 
tant  que  Tomile  n'aura  pas  été  pris  et  n'aura  pas  avoué 
ses  machinations  (v.  3554-3652). 

Doon  et  ses  compagnons,  armés  par  Olive  *,  reviennent 
à  Sobrie.  Devant  la  ville,  ils  trouvent  Landri,  à  qui  ils 
apprennent  que  sa  mère  a  pris  La  Roche  ;  mais  il  refuse 
d'aller  la  voir  avant  le  châtiment  de  Tomile.  On  envoie 


1.  On  ne  dit  pas  où  ils  ont  pris  ces  armes  ;  tout  cet  épisode  es 
très  confus. 

2.  Notez  qu'au  v.  3559  i'*  étaient  déjà  arihés. 


'■INTRODUCTION  tlt 

des  messages  à  Sobrie  pour  faire  savoir  aux  bourgeois 
que  leur  seigneur  Doon  est  devant  la  ville;  ils  sont  très 
joyeux  et  font  sonner  les  cloches.  Les  personnages  les 
plus  nobles  de  la  ville  s'avancent  à  cheval  pour  saluer 
Doon;  le  maire  lui  adresse  la  parole  et  lui  ofifre  des 
vivres  pour  ses  troupes,  en  vue  du  siège  de  Mayence. 
Doon  refuse  ;  il  a  assez  de  provisions  (v.  3653-37i8). 

L'armée  du  duc  marche  de  Sobrie  sur  Mayence,  à  tra- 
vers un  territoire  peu  fertile.  Landri,  seul,  s'éloigne  de 
l'armée,  assis  sur  un  mulet,  pour  aller  chasser  au  fau- 
con. Il  est  surpris  par  deux  fils  de  Grifon  [de  Haute- 
feuille],  Hardré  et  Hélie,  au  moment  où  son  faucon 
vient  d'abattre  un  cygne.  Hardré  insulte  Landri,  lui 
reprochant  de  chasser  près  du  vivier  de  son  père  Gri- 
fon ;  il  en  résulte  une  querelle  et  un  combat.  Hardré 
tue  le  mulet  de  Landri  ;  Hélie  l'attaque  de  l'autre  côté, 
mais  Landri  le  tue.  Hardré  veut  venger  son  frère,  mais 
Landri  le  désarçonne,  le  lie  sur  son  cheval  et  l'amène  à 
Doon,  qui  le  fait  pendre  devant  Mayence  (v.  3j  1 9-383 1). 

Les  troupes  de  Doon  sont  devant  Mayence.  On  dresse 
des  machines  de  guerre  pour  battre  les  murs  ;  mais  la 
ville,  fondée  parles  Sarrasins,  est  forte,  et  les  assiégeants 
ne  parviennent  pas  à  endommager  ses  portes  d'ivoire  '. 
Landri  jure  qu'au  besoin  il  assiégera  la  ville  pendant 
sept  ans.  Malingre  fait  une  sortie  avec  la  meilleure 
partie  de  sa  suite  armée;  mais  les  hommes  de  Landri 
réussissent  à  lui  couper   la  retraite.  Dans  la  mêlée,  il 


I.  Nous  n'avons  pas  trouvé  ailleurs  mention  de  ces  portes 
d'ivoire  {olifant)  de  Mayence,  qui  sont  peut-être  une  invention  de 
l'auteur. On  peut  noter  qu'à  latin  du  xii'  siècle,  époque  probable 
de  la  composition  de  F,  Mayence  était  ville  ouverte.  Pour  punir 
les  bourgeois  du  meurtre  de  leur  archevêque,  Arnold  de  Seelho- 
fen,  Frédéric  Barberousse  avait  fait  démolir  les  murs  de  la  ville  en 
1 163;  ils  ne  furent  reconstruits  qu'en  l'an  1200;  voir  K.-A.  Schaab, 
Die  Geschichte  der  BundeS'Festung  3/amf,  Mainz,  i835,  in-8*, 
p.  68. 


LX  DOON    DE    LA   ROCHE 

lutte  avec  son  frère,  qu'il  reconnaît,  et  est  fait  prisonnier 
par  celui-ci  '.  Le  siège  de  la  ville  se  prolonge.  Doon 
permet  au  menu  peuple,  aux  femmes,  aux  vieillards 
et  aux  enfants  de  sortir  de  la  ville  pendant  la  nuit  ; 
après  un  siège  qui  dure  trois  ans  et  demi,  il  ne  reste 
à  Tomile  que  vingt  hommes.  Quand  ils  n'ont  plus  à 
manger  qu'un  poulet,  ils  se  lamentent  et  veulent  aller 
demander  grâce  à  Doon  et  à  Landri.  Mais  Tomile 
refuse;  il  propose  de  s'enfuir  de  l'autre  côté  du  Rhin, 
en  «  Saissoigne  »  (le  pays  des  «  Saisnes  »,  Saxons)  :  il  y 
reniera  la  foi  chrétienne,  puis,  aidé  des  païens,  il  ter- 
rifiera de  nouveau  ses  ennemis.  Les  autres  approu- 
vent cette  idée  (v.  3832-391  5). 

Mais  Landri  fait  bonne  garde  autour  de  la  ville  ;  il 
veille  jour  et  nuit  \  Survient  enfin  l'évêque  [Auberi], 
amenant  un  ingénieur,  Gillibert,  fils  d'Henri  :  celui-ci 
construit  des  machines  de  guerre  qui  détruisent  cent 
quarante  toises  des  murs  et  brisent  les  portes  d'ivoire. 
Mayence  est  prise.  Tomile  veut  s'enfuir,  mais  il  est 
fait  prisonnier  par  Landri.  On  rend  la  ville  à  Asson, 
qui  en  était  seigneur  jusqu'au  moment  où  il  la  quitta 
pour  suivre  son  maître  Doon.  Le  duc  part  pour  La 
Roche,  emmenant  Tomile  (v.  3916-3966). 

Après  qu'Olive  a  embrassé  son  fils,  Tomile  est  pré- 
cipité dans  la  prison  [souterraine]  où  se  trouve  déjà  sa 
fille.  On  dîne  dans  le  palais,  puis  on  fait  venir  Tomile, 
qui  avoue  son  crime,  et  est  pendu  par  Olive  en  per- 


1.  Dans  E  (fol.  d.  iij.  v"),  il  y  a  un  combat  entre  Malindre  (= 
Malingre)  et  Enrrique  (=  Landri),  qui  le  tue  d'un  coup  de  lance. 

2.  Cet  épisode,  qui  ne  mène  à  rien,  semble  une  réminiscence 
d'un  récit  qui  nous  a  été  conservé  dans  E  (fol.  d.  iiij.  vo-d.  v.  r*)  : 
le  traître  Tomillas,  assiégé,  non  dans  Mayence,  mais  dans  Cologne, 
fait  creuser  un  chemin  souterrain,  qui  débouche  au  dehors  ; 
au  moment  où  il  veut  sortir  de  ce  chemin  secret,  il  est  surpris 
par  les  gens  d'Enrrique,  qui  campent  justement  à  l'endroit  où  se 
trouve  l'issuej  il  çst  reconnu  et  fait  prisonnier. 


INTRODUCTION  L« 

sonne,  après  avoir  été  traîné  par  la  ville;  le  corps  est 
brûlé.  Ensuite,  arrive  le  tour  d'Audegour  :  on  la  dé- 
pouille de  ses  vêtements,  et  on  la  jette  dans  le  bûcher, 
qui  vient  de  consumer  les  restes  de  son  père  ;  les  cendres 
sont  semées  au  vent'.  Quant  à  Malingre,  on  lui  coupe 
les  jarrets  ';  mais  le  clergé,  par  ses  supplications, 
obtient  qu'on  lui  fasse  grâce  de  la  vie  :  il  devient  moine 
blanc,  au  cloître  de  Saint-Pierre  (v.  3904-4058). 

Doon,  suivi  de  ses  troupes,  se  dirige  vers  Cologne  ; 
comme  on  lui  en  refuse  l'entrée,  il  assiège  la  ville  et  y 
lance  le  feu  grégeois,  qui  incendie  des  rues  entières.  Les 
bourgeois  avaient  reconnu  Pépin  comme  seigneur  et 
lui  envoyaient  annuellement  un  tribut;  épouvantés,  ils 
prennent  {la  résolution  d'offrir  les  clés  de  la  «tour» 
à  Doon  ;  l'archevêque  et  son  clergé  se  présentent  devant 
le  duc,  et  lui  livrent  la  ville.  Doon  épouse  Olive  une 
seconde  fois  à  l'église  Saint-Pierre  ;  on  célèbre  des 
noces  magnifiques,  et  Pépin  vient  y  assister.  Il  embrasse 
Olive;  quant  à  Landri,  il  lui  adresse  des  paroles  élo- 
gieuses,  et  il  lui  promet  la  Bretagne,  l'Anjou,  la 
Normandie  et  la  «  seneschauciée  de  France  ».  Mais 
Landri  refuse  :  il  ne  veut  rien  tenir  de  son  oncle,  qui  a 
abandonné  sa  mère,  accepté  les  présents  de  Tomile  et 
refusé  de  le  recevoir,  lui  Landri.  Une  scène  violente  a 
lieu  entre  l'oncle  et  le  neveu  ;  Pépin  exaspéré  par  les 
reproches  de  Landri,  veut  le  frapper,  mais  Asson  et 
Guinemant  le  calment;  Pépin  quitte  la  ville  (v.  4059- 
4159)^ 

1.  Dans  E  (fol.  d.  vij.  v'),  Oliva  fait  tirer  à  quatre  chevaux,  sous 
ses  yeux,  le  traître  Tomillas.  Il  n'est  rien  dit  du  supplice  d'Aldigon 
(=  Audegour). 

2.  Ce  supplice  de  Malingre  rappelle  la  légende  des  Enervés  de 
Jumièges,  eux  aussi  fils  révoltés  contre  l'autorité  paternelle. 

3.  Dans  E  (fol.  d.  vj.  V),  Enrrique,  une  fois  que  Tomillas  est 
pris,  a  une  entrevue  avec  Pépin  et  lui  adresse  des  reproches 
amers  sur  sa  conduite  j  mais  l'oncle  et  le  neveu  se  réconcilient 
immédiatement  après. 


LXn  DOON    DE    LA    ROCHE 

Landri  réunit  son  armée,  les  hommes  de  l'empereur 
[de  Constantinople],  et  va  attaquer  Hautefeuille,  la 
ville  de  Grifon.  La  troupe  de  Landri  rencontre  celle 
de  Grifon  ;  Landri  tue  celui-ci  de  sa  propre  main  et 
met  ses  gens  en  fuite  ;  il  prend  ensuite  la  ville,  où  il 
trouve  un  riche  butin,  qu'il  envoie  à  son  père  (v.  4160- 
4191). 

Landri  croit  pouvoir  se  reposer  enfin  ;  mais  il  en  sera 
autrement.  Un  jour  que  l'empereur  Alexandre  de  Cons- 
tantinople est  assis  à  une  fenêtre  de  son  palais,  il  voit 
un  beau  cygne,  qui  lui  rappelle  le  vaillant  Landri.  La 
fille  de  l'empereur  paraît;  elle  demande  à  son  père  de 
faire  revenir  Landri,  qui  lui  a  promis  de  l'épouser. 
L'empereur  envoie  en  France  un  messager,  Malprin, 
qui  devra  rappeler  à  Landri  ses  engagements.  Le 
messager  part  et  trouve  Landri  au  château  de  La 
Roche.  Il  lui  parle  de  l'empereur  Alexandre  et  de  sa 
fille,  qui  languit  d'amour  pour  lui,  et  lui  présente  un 
anneau,  sur  lequel  il  jura  jadis  de  revenir  vers  son 
pays  [Constantinople],  dès  qu'on  le  lui  présenterait 
(v.  4192-4295). 

Landri  ne  sait  que  faire  ;  mais  son  maître,  Guine- 
mant,  lui  reproche  ses  hésitations  :  «  Tu  as  reconquis 
tes  terres  et  vaincu  tes  ennemis  ;  ton  père  et  ta  mère 
se  sont  réconciliés;  tu  dois  retourner  au  pays  où  tu 
as  pris  jadis  les  armes;  l'empereur  t'y  comblera  de  dons, 
et  tu  épouseras  sa  fille  ».  Landri  s'y  résout  (v.  4295- 
4320). 

Mais  un  second  messager  arrive,  messager  de 
malheur  :  il  annonce  que  «  l'empereres  de  France  »  a 
été  pris  à  la  chasse,  avec  cent  chevaliers  de  sa  suite  '. 


I.  M.  Benary  rapproche  de  cet  épisode  celui  de  Jean  de  Lan- 
son,  où  Charlcmagne  est  surpris  et  fait  prisonnier  à  la  chasse  par 
le  héros  du  poème  (voir  l'analyse  de  P.  Paris  dans  Histoire  littér. 
de  la  France,  XXIII,  58o). 


INTRODUCTION  LXIII 

Landri  ordonne  aussitôt  qu'on  lui  apporte  ses  armes;  il 
réunit  4000  chevaliers.  Pendant  ce  temps,  les  «  Saisnes  » 
chevauchent  et  s'éloignent,  emmenant  Pépin;  [leur  roi] 
Brohimax  reproche  à  celui-ci  la  mort  de  son  oncle 
Carsadoine,  et  lui  annonce  qu'il  sera  jugé  le  lendemain 
à  Trémoigne.  Pépin,  transporté  de  colère  et  de  douleur, 
brise  les  cordes  qui  lui  lient  les  mains  ;  d'un  seul  coup 
de  poing  il  abat  l'un  des  Saisnes.  Ceux-ci  tirent  leurs 
épées  ;  ils  sont  sur  le  point  de  le  tuer,  quand  Landri, 
sortant  d'une  vallée,  les  attaque  avec  ses  chevaliers  : 
Brohimax  est  tué  par  Landri  ;  les  Saisnes  prennent  la 
fuite  ;  les  chevaliers  [français]  se  délient  mutuellement, 
revêtent  les  armures  des  Saisnes  tués,  et  montent  sur 
leurs  chevaux;  Pépin,  notamment,  s'empare  de  l'armure 
de  Brohimax.  Ils  se  joignent  aux  compagnons  de  Lan- 
dri :  les  païens  sont  mis  complètement  en  déroute,  et 
les  chrétiens  ramassent  un  grand  butin.  Quand  Landri, 
l'épée  rouge  de  sang,  rencontre  son  oncle,  il  lui  dit: 
«  Roi,  vous  êtes  pris  ;  vous  me  suivrez  à  Cologne  ; 
après  vous,  c'est  moi  qui  posséderai  le  trésor  de 
Paris  ».  Pépin  se  résigne  à  son  sort;  il  descend  même 
de  cheval  et  tombe  aux  pieds  de  Landri.  Mais  celui-ci 
le  relève  :  l'oncle  et  le  neveu  s'embrassent  (c'était  la 
volonté  de  Dieu)  et  se  rendent  ensemble  à  Cologne 
(v.  432 1-44 14). 

Pépin  fait  peser  trois  fois  en  tin  or  son  corps  et  son 
haubert  ;  il  offre  cet  or  à  l'autel  de  l'église  Saint-Pierre, 
distribue  des  dons  à  ses  compagnons,  et  offre  à  Landri 
cent  chevaux.  A  Cologne,  au  palais,  les  barons  dînent  : 
Landri  leur  annonce  que,  les  traîtres  étant  punis  et 
ses  parents  réconciliés,  il  partira  le  lendemain  pour 
Constantinople,  où  il  a  promis  d'épouser  la  fille  du 
roi  Alexandre.  Pépin  dit  qu'il  partira  volontiers  avec 
lui;  on  envoie  un  messager  à  Constantinople,  pour 
annoncer  l'arrivée  prochaine  de  Landri  et  de  sa  suite 
(v.  4415-4461). 


LXIV  DOON    DE    LA    ROCHE 

Le  messager  arrive  à  Constantinople  ;  l'empereur, 
apprenant  la  nouvelle,  monte  achevai  pour  aller  à  la 
rencontre  de  Landri.  Rencontre  de  l'empereur  et  de 
Landri,  d'Olive  et  de  Salmadrine.  On  descend  au 
palais,  où  a  lieu  un  dîner  magnifique;  jeux.  L'empe- 
reur Alexandre  envoie  des  messagers,  pour  que  tous  les 
barons  de  son  empire  viennent  assister  aux  noces  de  sa 
fille.  Tant  de  barons  y  vinrent  que  les  noces  durent  se 
faire  hors  de  la  ville,  dans  une  grande  prairie.  En  pré- 
sence de  Pépin,  l'empereur  Alexandre  adresse  la  parole 
à  Landri  et  lui  annonce  qu'il  lui  donne  sa  fille,  avec 
tout  son  empire.  Le  mariage  de  Landri  et  de  Salma- 
drine est  célébré  par  l'archevêque  Jean,  à  la  grande 
église,  en  présence  des  deux  empereurs  ;  Landri  et  Sal- 
madrine sont  couronnés  au  palais,  où  a  lieu  une  fête 
égayée  par  des  ménestrels.  Les  réjouissances  durent 
pendant  un  mois  entier;  puis  l'empereur  congédie  ses 
barons  après  avoir  distribué  des  cadeaux  ;  mais  Landri 
garde  près  de  lui  les  Français,  pour  leur  montrer  ses 
châteaux.  A  la  fin,  Pépin  annonce  qu'il  est  obligé  de 
rentrer  dans  son  pays  ;  Landri  lui  recommande  de 
vivre  en  paix  avec  Doon  et  Olive;  Pépin  promet  à  Lan- 
dri le  secours  de  sa  «  chevalerie  »,  s'il  en  avait  jamais 
besoin.  On  donne  le  signal  du  départ  et  on  prend  congé; 
Olive  recommande  à  Salmadrine  son  fils  Landri.  Pépin, 
Doon  et  Olive  arrivent  à  Cologne,  où  les  bourgeois 
leur  font  fête,  puis  Pépin  regagne  Paris.  Doon  et  Olive 
vivront  désormais  en  paix.  Landri  et  Salmadrine  eurent 
des  enfants  qui  tinrent  à  la  fois  Constantinople  et  le 
domaine  qu'avait  possédé  Olive,  et  qui  furent  de  bons 
chevaliers  (v.  4462-4627). 

La  chanson  est  finie  ;  si  vous  voulez  en  savoir  davan. 
tage,  adressez-vous  ailleurs  (v.  4628-4638). 


INTRODUCTION  LXV 


CHAPITRE  V 

FORMES    DIVERSES    ET    ÉVOLUTION    DE    LA    LÉGENDE    ÉPIQUE. 

Le  sujet  de  Doon  de  La  Roche  nous  a  été  transmis  dans 
plusieurs  versions,  on  différentes  langues. 

En  français  :  le  présent  poème  [F). 

En  espagnol  :  un  récit  en  prose,  Historia  de  Enrri- 
que  fi  de  Oliva  {E),  que  Ferdinand  Wolf,  bon  juge  en 
ces  matières,  fait  remonter  au  xiv*  siècle.  Il  a  été  im- 
primé '  à  Séville  en  1498;  cette  édition  est  très  rare;  j'ai 
pu  me  servir  d'une  réimpression,  faite  également  à 
Séville,  en  045,  por  Dominico  de  Robertis,  et  dont  la 
Bibliothèque  Nationale  possède  deux  exemplaires,  Rés. 
Yd.  238  et  Rés.  Y\  818.  Une  analyse  détaillée  en  a  été 
donnée  par  Ferd.  Wolf  dans  son  livre  intitulé  :  Ueber 
die  neuesten  Leistungen  der  Fran:{osen  fur  die  Heraus- 
gabe  ihrer  National  Heldengedichte  (Vienne,  i833), 
p.  98-123  ;  une  autre,  plus  rapide,  mais  accompagnée 
d'une  comparaison  suivie  avec  F,  se  trouve  dans  un 
mémoire  de  M.  W.  Benary  ^  que  nous  aurons  souvent 
l'occasion  de  citer  (p.   3 1 3-324). 

En  vieux  norrois  :  la  seconde  branche  de  la  rédaction 
remaniée  de  la  Karlarhagnus-Saga  {Ne).  Cette  bran- 
che, qui  ne  se  trouve  pas  dans  la  rédaction  primitive, 
a  été  traduite  peu  après  1284,  non,  comme  l'ensem- 
ble de  la  Karlamagnus-Saga,  sur  un  poème  français, 


1.  Voir,  sur  les  éditions,  Brunet,  Manuel  du   libraire,  II,  988 
(5' éd.). 

2.  Ueber  die  Verknilpfungen  einiger  fran^çôsischen  Epen,unddie 
Stellen  des  Doon  de    Laroche,    dans    Romanische  Forschungen, 

XXXI,  303-394. 


LXVI  DOON    DE    LA    ROCHE 

mais,  ainsi  qu'il  est  dit  expressément,  sur  la  traduction 
anglaise  [perdue]  d'un  poème  français  '.  Elle  a  été 
publiée  par  R.  C.  Unger,  dans  son  édition  de  la  Kar- 
lamagnus-Saga  {Chv\s,x\3inSi,  1860,  p.  So-jS);  l'éditeur 
a  donné  une  analyse,  en  danois,  dans  son  introduction. 
G.  Paris  a  reproduit  cette  analyse,  traduite  en  français, 
dans  la  Bibliothèque  de  V Ecole  des  chartes,  année  1864 
(5«  série,  tome  V),  p.  io5  etsuiv.,  en  l'accompagnant  de 
quelques  remarques  précieuses.  F.  Wolf  avait  donné 
une  analyse  plus  sommaire  (d'après  Gundtvig)  dans  une 
note  intitulée  :  Ueber  die  Olivasaga,  dans  les  Denk- 
schrifien  de  l'Académie  de  Vienne,  vol.  vni  (année  iSSj) 
p.  263-268. 

Dans  le  dialecte  des  îles  Fœroe:  un  chant  populaire 
[Na],  recueilli  et  publié,  avec  traduction  danoise,  par 
V.  U.  Hammershaimb,  dans  Antiquarisk  Tidskrift, 
vol.  I**"  (année  1846-1848),  p.  279-304. 

Il  existe  également,  sur  notre  thème,  un  chant  islan- 
dais, mentionné  par  Hammershaimb  dans  son  article 
cité,  p.  280. 

Quand  on  compare  ces  versions,  on  voit  dès  l'abord, 
qu'elles  se  divisent  en  deux  groupes  :  1°,  le  poème  fran- 
çais et  le  roman  espagnol  ;  2°,  le  récit  de  la  Karlama- 
gnus-Saga  et  le  chant  des  îles  Fœroe.  Les  deux  ver- 
sions septentrionales  sont  très  étroitement  apparentées  : 
comme  l'a  déjà  remarqué  M.  Benary,  elles  sont  d'ac- 
cord, même  pour  des  noms  de  personnages  de  second 
plan.  M.  Benary  (p.  236  de  son  mémoire)  croit  que  la 
version  des  Fœroe  est  indépendante  de  la  Karlama- 
gnus-Saga,  tout  en  provenant  du  même  original  ;  mais 
ses  arguments  sont  bien  faibles,  et  une  raison  décisive 
nous  porte  à  admettre  que  le  chant  populaire  est  une 
simple  réminiscence,  plus  ou  moins  fidèle,  du  récit  de  la 

I.  F.  Wolf  et  G.  Paris  ont  noté  que  cette  indication  est  confir- 
mée par  l'emploi  du  mot  stevardh,  emprunté  à  l'anglais  steward. 


INTRODUCTION  LXVII 

compilation  norioise  '.  Il  y  a,  dans  le  chant,  des  altéra- 
tions et  des  transpositions  évidentes  ""  ;  en  outre,  les  exi- 
gences du  style  traditionnel  des  chanteurs  des  îles  ont 
amené  des  développements  et  des  modifications  de  la 
donnée  primitive.  Pour  nous,  dans  la  suite  de  la  discus- 
sion, la  Karlamagnus-Saga  sera  l'unique  représentant 
du  second  groupe. 

Examinons  d'abord  le  premier  groupe  :  le  poème 
français  et  le  roman  espagnol  {F  et  E).  Dans  les  grandes 
lignes,  E  est  d'accord  avec  F\  il  doit  avoir  été  traduit 
sur  une  rédaction  très  voisine  de  notre  texte.  Comme 
dans  F,  Oliva  est  la  sœur  de  Pépin  ;  la  substitution 
d'Enrrique  à  Landri  (nom  du  fils)  s'explique  facile- 
ment :  le  nom  peu  connu  de  Landri  a  été  remplacé 
par   Enn-ique   {=    Henrique,   Henri],    très   répandu, 


1.  En  effet,  dans  ce  chant,  comme  dans  la  Karlamagnus-Saga , 
Olifa  (=  Olive)  est  la  fille,  non  la  soeur,  de  Pépin,  et  Gharle- 
magne,  son  frère,  est  nommé  dans  le  couplet  3  (w  Karlamagnus 
Pippingsson  »).  Nous  verrons  plus  loin  qu'il  y  a  de  fortes  raisons 
de  croire  que  cette  modification  dans  la  généalogie  d'Olive,  ainsi 
que  l'introduction  du  personnage  de  Charlemagne,  est  le  fait, 
non  du  traducteur  anglais,  mais  du  compilateur  de  la  Karlama- 
gnus-Saga. —  Notons  que  le  chant  islandais  nous  présente  la 
même  généalogie,  à  en  juger  d'après  le  titre,  donné  ainsi  par 
Hammershaimb  (p.  280  de  son  article)  :  Landres  sémur,  sonar 
Hugions  hertoga  a/Englandi,  og  Olifar,  systur  Karlamagnus  kei- 
sara.  S.  Grundtvig,  qui,  dans  son  grand  ouvrage  intitulé  :  Dan- 
marks  garnie  Folkeviser  (Copenhague,  i853),  I,  199-201,  s'est 
occupé  de  Doon  de  La  Roche,  croyait  également  que  le  chant  était 
indépendant  de  la  Karlamagnus-Saga;  ses  arguments  (traduits 
par  Ferd.  Wolf  dans  sa  note  déjà  citée,  Ueber  die  Olivasaga, 
p.  266)  ne  semblent  pas  non  plus  convaincants  :  ils  reposent  en 
somme  sur  des  raisons  de  sentiment. 

2.  C'est  ainsi  que  l'épisode  des  vêtements  donnés  à  Landri  par 
son  ancienne  nourrice,  et  qui  disparaissent  par  enchantement,  est 
placé,  dans  la  Karlamagnus-Saga,  après  la  rencontre  de  la  mère  et 
du  fils  (analyse  de  G.  Paris,  p.  iio)  ;  le  chant  (couplets  128-1 36) 
place  cet  épisode  avant  cette  rencontre,  certainement  à  tort,  car  il 
se  trouve  ainsi  séparé  des  autres  enchantements  de  la  marâtre. 


LXVÏII  DOON    DE   LA    ROCHE 

dans  la  péninsule  ibérique  comme  ailleurs.  La  pre- 
mière partie  du  récit,  jusqu'à  l'exil  d'Enrrique  (Landri) 
a  de  grandes  analogies  avec  F\  notons  cependant  que 
Tomilias  endort  Oliva,  non  au  moyen  d'un  soporifique, 
mais  par  une  carta  hecha  con  muchos  conjuras  y  con 
muchos  encantamentos  (fol.  a.  iij.  V);  mais  immédiate- 
ment avant  cet  épisode  (fol.  a.  ij.  v«>,  a.  iij.-vo),  il  est  ra- 
conté que  Tomilias  verse  à  Oliva  du  vin  aparejado  con 
jrervas^  qui  la  rend  malade,  ce  qui  rappelle  le  «  piment  » 
dont  il  est  question  dans  F  [y.  169).  Cette  carta 
enchantée,  qu'on  retrouve  dans  d'autres  récits  du  moyen 
âge  %  semble  ici  une  interpolation  du  rédacteur  espa- 
gnol.—  L'homme  que  Tomilias  place  dans  le  lit  d'Olive 
est  un  écuyer  qui  avia  se  hecho  arlote  "  et  s'était  costumé 
en  pèlerin  {romero,  fol.  a.  iij.  v°);  Tomilias  l'ensorcelle 
au  moyen  d'un  anneau  magique  [sorteja)  et  l'oblige  à 
faire  tout  ce  qu'il  veut,  —  Après  sa  disgrâce,  Oliva  se 
réfugie,  sur  le  conseil  du  comte  «jJufréde  Flandes  )),dans 
une  abbaye  de  femmes,  fondée  par  le  comte  (fol.  a.  vij, 
v»),  version  qui  est  un  affaiblissement  évident  de  ce  qui 
se  lit  dans  le  passage  correspondant  de  F. 

La  suite  du  récit  présente  des  analogies  avec  F,  tout 
en  s'en  écartant  parfois  :  Enrrique  (Landri)  part  pour 
l'Orient,  accompagné  du  comte  «Jufré»,  déguisé  en  mar- 
chand, qui  le  présente  comme  son  fils  ;  un  épisode,  pro- 
bablement interpolé  par  le  traducteur  espagnol,  lui  fait 
conquérir  Damas  et  Jérusalem  ;  il  reprend  sur  les  Infi- 
dèles la  vraie  Croix  '  (fol.  b.  ij.  v^-vj.  v°).  Comme  dans 

1.  Voir  Gertrude  Schoepperle,  Tristan  and  Isolt,  Frankfurt, 
igi3,  I,  257.  L'exemple  le  plus  connu  se  lit  dans  le  quatrième 
conte  du  Dolopathos  (éd.  Oesterley,  p.  58  ;  éd.  Hilka,  p.  64;  trad. 
franc.,  éd.  Brunet  et  Montaiglon,  v.  7167  et  suiv.). 

2.  Ferd.  Wolf,  Ueber  die  neuesten  Leistungen,  p.  loi,  traduit 
arlote  par  «  vagabond  »  (landstreicher). 

3.  Sur  les  sources  du  rédacteur  espagnol  dans  cette  partie  de 
son  récit,  on  trouve  quelques  observations  dans  Ferd.  Wolf, 
Ueber  die  neuesten  Leistungen,  p.  109. 


INTRODUCTION  LXIX 

Ff  il  secourt  l'empereur  de  Constantinople  contre  son 
ennemi,  V almirante  Mirabel,  réussit  à  le  vaincre  et  à 
anéantir  son  armée;  l'empereur  lui  donne  la  main  de 
sa  fille  Mergelina  et  lui  cède  l'empire  (fol.  c.  vj.  v*).  — 
Bientôt  après  ce  mariage,  Enrrique  se  rappelle  Tomillas 
et  sa  trahison  envers  Oliva  ;  avec  l'approbation  de  sa 
femme,  il  organise  une  expédition  pour  châtier  le  traître. 
—  Sur  ces  entrefaites,  la  renommée  des  exploits  d'En- 
rrique  étant  parvenue  en  France,  le  pape  avait  ordonné 
au  comte  de  La  Roche  de  reprendre  sa  femme.  Il  en 
résulte  un  différend  entre  le  comte  et  Tomillas,  dont  la 
fille  se  trouve  répudiée;  le  roi  prend  parti  pour  Tomil- 
las ;  guerre  :  le  comte  et  Oliva  sont  assiégés  dans  La 
Roche.  —  Venu  en  France  avec  son  armée,  Enrrique 
trouve  ses  parents  assiégés;  il  pénètre  sous  un  déguise- 
ment dans  le  château,  sans  cependant  se  faire  recon- 
naître ;  puis  il  attaque  les  traîtres  avec  son  armée  :  il 
tue  de  sa  propre  main  Malindre,  son  demi-frère  (fol. 
d.  iij.  v");  Tomillas  est  pris  et  supplicié  (fol.  d.  vij.  v»)'. 
On  voit  que  cette  suite  d'événements  ressemble  en 
gros  à  ce  qui  est  raconté  dans  F,  mais  en  diffère  par 
bien  des  détails;  la  grande  différence  consiste  en  ceci 
que,  dans  £*,  le  rtls,  Enrrique  (=Landri)  passe  seul  en 
Orient,  le  père  restant  en  France;  par  conséquent, 
Doon  n'est  pasfaitprisonnier  en  combattant  l'empereur 
de  Constantinople  au  service  du  roi  de  Hongrie;  la 
délivrance  du  père  par  le  fils  a  lieu  dans  des  circons- 
tances tout  autres.  Cet  épisode  de  la  guerre  d'Orient, 
du  combat  entre  le  père  et  le  fils,  etc.,  est-il  une 
invention  de  l'auteur  de  F,  ou  bien  se  trouvait-il  dans 
l'original  de  E  et  a-t-il  été  laissé  de  côté  par  le  traducteur 
espagnol?  On  pourrait  discuter  longuement  là-dessus, 

I.  L'innocence  d'Oliva  est  démontrée  d'une  façon  ingénieuse  et 
compliquée,  qui  doit  être  une  invention  de  l'auteur  espagnol 
(fol.  d.  V.  v),  étant  en  rapport  avec  la  forme  spéciale  qu'a  revê- 
tue dans  E  la  machination  de  Tomillas  contre  Qliva. 


LXX  DOON    DE    LA    ROCHE 

si  une  particularité  de  F  ne  constituait  une  preuve  déci- 
sive en  faveur  de  la  première  hypothèse.  Au  moment 
où  il  va  raconter  le  départ  de  Doon  pour  la  Hongrie, 
dont  le  roi  se  propose  d'attaquer  l'empereur  de  Cons- 
tantinople,  l'auteur  de  F  dit  : 

Cil  autre  jugleor  qui  de  Doon  vos  dient 
Assez  en  ont  chanté,  mais  il  ne  sevent  mie... 
La  ou  il  la  vos  laissent  la  vos  ai  rafichie  '. 

Tous  ceux  qui  ont  quelque  peu  pratiqué  les  chansons 
de  geste  connaissent  ces  sortes  de  formules  et  savent  ce 
qu'elles  veulent  dire  :  le  poète  les  emploie  quand  il 
s'écarte  de  son  original  et  se  met  à  inventer  de  son  propre 
crû;  ce  qui  suit  est  par  conséquent  une  invention  per- 
sonnelle du  trouvère.  Nous  pouvons  donc  admettre  que 
l'auteur  de  F  travaillait  d'après  un  poème  plus  ancien 
et  plus  simple,  qui  ne  contenait  pas  l'épisode  des  aven- 
tures de  Doon  en  Orient,  et  que  le  traducteur  espagnol  a 
connu,  directement  ou  indirectement,  le  poème  perdu. 

C'est  là  un  résultat  surtout  négatif;  mais  nous  pouvons 
aller  plus  loin.  Si  la  comparaison  détaillée  de  F  ex  de  E 
est  difficile,  puisque  nous  ne  pouvons  déterminer  avec 
précision  les  détails  que  le  traducteur  espagnol  a 
modifiés,  nous  voyons  cependant  que  la  chanson  de 
geste  et  le  roman  espagnol  présentent  en  gros,  en  ce 
qui  concerne  Landri,  la  même  suite  d'événements  :  dans 
les  deux  récits,  Landri  (Enrrique)  est  aimé  de  la  fille 
de  l'empereur  de  Constantinople,  auquel  il  a  rendu,  à 
la  guerre,  des  services  signalés;  dans  les  deux  récits,  il 
part  de  Constantinople  avec  une  armée,  pour  châtier  les 
traîtres  qui  sont  cause  des  malheurs  de  sa  mère.  Nous 
avons  vu  que,  en  ce  qui  concerne  la  première  partie  du 
récit  —  les  machinations  contre  Oliva  et  la  disgrâce  de 
celle-ci  —  il  y  a,  à  côté  de  grandes  différences,  des  ana- 

I.  V.  2409-241 1".  Il  faut  admettre  entre  les  vv.  2410  et  241 1 
un  vers  perdu,  où  il  était  question  d'une  histoire  ou  d'une  chanson. 


INTRODUCTION  LXXI 

logies  essentielles  entre  E  et  F,  qui  confirment  Thypo- 
thèse  d'un  poème  perdu,  source  commune  de  F  ex  de  E. 
Le  groupe  des  versions  septentrionales  —  qui  se 
réduit  en  fait  au  récit  de  la  Karlamagnus-Sag-a,  que  nous 
désignerons  simplement  par  N — présente  des  pro- 
blèmes plus  complexes.  —  A^,  rapproché  de  F,  présente 
de  grandes  différences,  surtout  en  ce  qui  concerne  la 
seconde  partie  du  récit,  bien  que  la  narration  norroise 
se  termine,  comme  celle  de  F  et  de  E,  par  la  réhabili- 
tation d'Olive  et  le  châtiment  des  coupables.  —  Dans  la 
première  partie  du  récit,  nous  avons  en  somme  les 
mêmes  événements  que  dans  F,  mais  avec  des  diffé- 
rences de  détail  ;  Olive  iOlifa)  est  la  fille,  non  la  sœur  de 
Pépin;  Charlemagne  '  joue  un  rôle  dans  le  récit.  Le 
mari  s'appelle  «  Hugon  »  au  lieu  de  Doon;  la  machi- 
nation dont  se  sert  le  traître  (qui  s'appelle  ici  Milon  et 
qui  a  fait  à  Olive  des  propositions  déshonnêtes  qui  ont 
été  repoussées)  pour  perdre  Olive  est  à  peu  près  la  même 
que  dans  F,  mais  les  événements  sont  racontés  d'une 
façon  plus  logique  (voir  plus  loin,  p.  lxxiii)  :  l'homme 
que  le  traître  place  dans  le  lit  est  un  nègre  [bldmann); 
les  détails  qui  suivent  (offre  d'Olive  de  se  soumettre  à 
un  jugement  de  Dieu,  arrivée  de  Pépin)  présentent  éga- 
lement de  grandes  analogies.  Finalement,  Olive  est 
condamnée  à  être  enfermée  pendant  sept  ans  dans  une 
tour  remplie  de  reptiles  venimeux;  on  lui  donne  jour- 
nellement une  cruche  d'eau  et  un  pain  grossier  pour 


I.  G.  Paris  {Histoire  poét.  de  Charlemagne,  p.  414,  note  3) 
attribuait  ces  changements  au  rédacteur  de  la  Karlamagutts-Saga, 
qui  aurait  voulu  rattacher  cette  branche,  comme  les  autres,  au 
nom  de  Charlemagne.  Cette  supposition  nous  paraît  très  vrai- 
semblable. En  effet,  si  Charlemagne  avait  figuré,  contime  frère 
d'Olive,  dans  le  poème  primitif,  on  ne  voit  pas  comment  ce  nom 
célèbre  aurait  pu  disparaître  si  complètement  des  versions  E  et 
F,  où  il  n'est  pas  question  de  Charlemagne,  mais  uniquement 
de  Pépin,  moins  connu  cependant  que  son  fils, 


LXXII  DOON  DE  LA  ROCHE 

toute  nourriture.  —  Hugon  épouse  la  fille  du  traître, 
qui  s'appelle  ici  Aglavia;  il  en  a  un  fils,  Malalandres. 
Landri,  le  fils  d'Olive  (en  norrois  :  Landres),  cherche  un 
asile  chez  son  ancienne  nourrice,  Siliven.  Sur  le  conseil 
de  celle-ci,  il  se  rend  cependant  de  nouveau  à  la  cour, 
pour  y  assister  à  un  jeu  de  paume,  et  y  faire  l'épreuve 
de  sa  valeur;  il  a  une  rencontre  violente  avec  son  demi- 
frère;  à  la  suite  de  cet  événement,  il  doit  s'éloigner 
définitivement. 

A  partir  de  ce  moment,  les  événements  sont  tout 
autres  que  dans  E  et  F  :  errant  et  aflfamé,  Landri 
rencontre  des  nains,  auxquels  il  enlève  des  objets  mer- 
veilleux qui  procurent  à  manger  et  à  boire.  Les  nains, 
d'abord  hostiles,  se  réconcilient  avec  lui  et  lui  prédisent 
qu'il  trouvera  bientôt  sa  mère,  qui  est  en  prison.  Il 
trouve,  en  effet,  une  tour;  près  d'une  petite  lucarne, 
un  oiseau  chante  ;  Landri  décoche  une  flèche  à  l'oiseau  ; 
la  flèche  touche  sa  mère  à  la  poitrine;  elle  se  lamente 
et  se  fait  connaître.  Landri  ouvre  la  prison,  voit  sa 
mère  entourée  de  reptiles,  la  délivre,  la  réconforte  avec 
les  mets  que  lui  procure  la  nappe  merveilleuse  enlevée 
aux  nains.  Sur  le  conseil  d'Olive,  il  retourne  chez  sa 
nourrice,  afin  d'aviser  aux  moyens  de  réhabiliter  sa 
mère.  Voulant  se  rendre  à  la  cour  de  Charlemagne,  qui 
a  succédé  à  Pépin,  il  a  à  lutter  contre  de  terribles 
enchantements  de  sa  marâtre,  puis  à  déjouer  un  attentat 
de  Milon  et  de  Malalandres,  qui  veulent  le  tuer.  Fina- 
lement, Olive  est  réhabilitée  en  présence  de  Charle- 
magne, et  Milon  enfermé  dans  la  prison  qu'elle  occupait 
naguère  et  où  les  reptiles  le  dévorent.  Olive  entre  dans 
un  couvent. 

En  présence  de  ce  récit,  si  différent  de  F,  nous 
devons  rappeler  d'abord  que  si  la  Karlamagnus-Saga 
reproduit  habituellement  des  poèmes  français  que  le 
rédacteur  avait  sous  les  yeux,  il  en  est  autrement  pour 
l'histoire  d'Olive  et  de  Landri  :  le  rédacteur  travaillait 


INTRODUCTION  LXXIII 

d'après  rimitation  anglaise  d'un  poème  français.  Il  y  a, 
par  conséquent,  deux  intermédiaires  :  l'imitateur  anglais 
et  le  traducteur  norvégien;  de  là  une  double  cause 
d'incertitude. 

G.  Paris,  en  1864,  fut  frappé  de  la  simplicité  relative 
du  récit  norrois,  comparé  à  F.  «  L'original  du  livre 
islandais  »,  écrit-il,  «  était  évidemment  plus  simple, 
plus  archaïque  et  meilleur  sous  tous  les  rapports;  il 
n'avait  pas  introduit  dans  son  récit  ces  aventures  insi- 
pides, dont  la  scène  est  en  Orient,  condition  presque 
indispensable  à  tous  les  romans  de  la  décadence  au 
moyen-âge  ».  —  M.  Benary  pense,  au  contraire,  que 
la  seconde  moitié  du  récit,  celle  qui  contient  les  aven- 
tures personnelles  du  fils  d'Olive,  a  été  modifiée  sous 
l'influence  des  contes  populaires  (p.  324-326  du 
mémoire  cité  '). 

Il  est  évident  que  la  question  de  la  valeur  de  iVest 
très  complexe.  Certains  détails  ont  été  certainement 
introduits  par  le  traducteur  anglais.  Si  Gaston  Paris 
avait  écrit  sur  cette  question  une  étude  détaillée,  au  lieu 
d'une  courte  notice,  il  eût  été  le  premier  à  faire  remar- 
quer que  «  Mimung»,  nom  d'une  épée,  et  «  Kleming  », 
nom  d'un  cheval,  n'ont  jamais  pu  se  trouver  dans  une 
chanson  de  geste  française  :  ces  noms  ont  été  introduits 
dans  le  récit  par  le  rédacteur  norvégien,  ou,  plus  vrai- 
semblablement, par  le  traducteur  anglais,  qui  les  a 
empruntés  à  des  traditions  germaniques. 

Pour  la  première  partie  du  récit,  .V  a  certainement 
de  la  valeur  pour  la  reconstruction  de  la  forme  primi- 
tive de  la  légende.  Seul,  il  a  bien  conservé   un   détail, 

I.  M.  Benary  nomme  (p.  3 16  de  son  mémoire),  parmi  les  traits 
folkloriques  de  N,  «  un  oiseau  qui  parle  ».  Mais  l'oiseau  qui  parle 
ne  figure  que  dans  le  chant  populaire  qui,  ainsi  que  nous  l'avons 
vu  plus  haut,  n'a  pas  de  valeur  indépendante;  le  récit  de  la 
Karlamagnus-Saga  (p.  68,  1.  17  du  texte)  ne  connaît  qu'un  oiseau 
qui  chante. 


LXXIV  DOON    DE    LA    ROCHE 

altéré  dans  E  et   devenu  complètement  inintelligible 
dansi^.  Dans  notre  poème,  Tomile,  parlant  d'Olive,  dit 

(v.  199)  : 

Ele  est  molt  forment  ivre,  tant  a  beii  piment. 

On  ne  voit  pas  à  quoi  rime  cette  accusation  d'ivresse, 
portée  ainsi  contre  Olive,  que  rien  n'explique  ni  ne 
prépare.  —  Dans  £",  comme  nous  l'avons  noté  plus 
haut,  Tomillas  verse  à  Olive  du  vin,  «  préparé  avec  des 
herbes  »,  qui  la  rend  malade  ;  il  l'endort  ensuite  au 
moyen  d'une  charte  magique,  ce  qui  est  inutilement 
complexe.  Seul  AT,  donne  un  récit  intelligible  et  logique. 
Après  s'être  réconcilié  avec  Olive,  qui  avait  d'abord 
repoussé  rudement  ses  propositions  amoureuses,  le 
traître  (Milon  =  Tomile)  prie  la  reine  de  sceller  leur 
réconciliation  en  buvant  avec  lui  à  un  gobelet,  rempli 
d'un  breuvage  soporifique.  «  Il  le  porte  à  ses  lèvres, 
fait  semblant  de  boire;  la  reine,  au  contraire,  vide  la 
coupe  et  tombe  aussitôt  dans  un  sommeil  semblable  à 
la  mort  »  (analyse  de  G.  Paris,  p.  107).  Grâce  à  cet 
engourdissement  de  la  reine,  Milon  peut  mettre  à  côté 
d'elle,  dans  son  lit,  un  homme,  un  nègre,  qu'il  a  assoupi 
avec  le  même  breuvage.  —  Ce  récit  a  tout  l'air  d'être  la 
version  originale  :  Fa  voulu  abréger  et  modifier,  il  a 
laissé  de  côté  la  scène  de  la  réconciliation  et  la  première 
mention  du  breuvage,  et,  ainsi,  il  est  devenu  inintel- 
ligible; E  a  voulu  mettre,  dans  le  récit,  du  merveilleux, 
de  la  sorcellerie,  et  il  a  introduit  la  charte  magique,  qui 
fait  double  emploi  avec  le  vin  «  herbe  ».  Cette  fidélité 
manifeste  de  A^,  pour  un  détail  essentiel,  nous  inspire  de 
la  confiance  en  ce  qui  concerne  le  reste  de  son  récit, 
notamment  pour  le  trait  si  curieux  que  l'homme  que  le 
traître  introduit  dans  le  lit  d'Olive  est  un  nègre. 

Les  doutes  portent  surtout  sur  la  seconde  partie  de 
N,  récit  des  aventures  de  Landri  après  qu'il  s'est 
éloigné  définitivement  de  la  cour.  Il  est  certain,  nous 


INTRODUCTION  LXXV 

l'avons  vu,  que  le  traducteur  anglais  a  introduit  dans 
son  récit  des  noms  empruntés  aux  traditions  germa- 
niques; les  nains,  auxquels  Landri  vole  les  objets 
magiques,  n'auraient-ils  pas  la  même  origine?  On  sait 
quel  rôle  jouent  les  nains  dans  les  récits  épiques  alle- 
mands et  Scandinaves.  Cependant,  il  faut  remarquer 
que  les  nains  ne  sont  pas  complètement  absents  de 
l'épopée  française  :  Picolet,  dans  la  Bataille  Loquifer, 
est  un  nain,  de  même  que  Pacolet,  dans  Valentin  et 
Orson  ;  Obéron,  dans  Hiion  de  Bordeaux,  est  un  nain 
secourable.  exactement  comme  les  nains  mentionnés 
dans  N.  Le  trait  des  objets  magiques  volés  à  des  êtres 
surnaturels  n'est  pas  propre  aux  Germains  ;  il  appartient 
au  folklore  international,  et  figure  notamment  dans  un 
conte  mongol  '. 

L'utilisation  de  ce  thème  des  objets  magiques  se  re- 
trouve ailleurs  dans  l'épopée  française.  Il  est  question 
delà  nappe  merveilleuse  qui  fournit  des  mets  dans  une 
chanson  de  geste  du  xiv*  siècle,  Charles  le  Chauve  \  — 
L'épisode  où  Landri  doit  lutter  contre  les  enchante- 
ments de  sa  marâtre  Aglavia  paraît  singulier  au  pre- 
mier abord.  Cependant  les  enchantements  ne  sont  pas 
rares  dans  les  chansons  de  geste.  On  connaît  les  sorcel- 
leries de  Maugis;  et  les  enchantements  d'Orable,  les 
«  jeux  d'Orange  »,  dans  les  Enfances  Guillaume  ^  ont 
la  plus  grande  analogie  avec  ceux  d'Aglavia  dans  N. 

1.  Il  se  trouve  dans  la  rédaction  mongole  des  Vingt-cinq  Contes 
du  Vetâla  :  un  pauvre  diable  vole  à  des  dakinis  (personnages  de 
la  mythologie  bouddhique)  un  marteau  et  un  sac  qui  donnent  de 
quoi  manger  et  tout  ce  qu'on  désire.  Voir  Mongolische  Màrchen- 
Sammliing...  herausgegeben  von  B.  Jillg,  Insbruch,  1868, 
in-4<»,  p.  140-141. 

2.  Voir  l'analyse  de  P.  Paris,  dans  Histoire  litte'r.  de  la  France, 
XXVI,  106. 

3.  Voir  Die  Chanson  «  Enfances  Guillaume»,  Teil  II,  Text 
mit  Varianten,  Apparat,  Einleitung  und  Inhaltsanalyse . . .  von 
August  Becker  (Grçifswald,   igiS,  in-8»),  p.  40  et  suiv.,  v.  1874- 


LXXVI  DOON    DE    LA    ROCHE 

Orable  est  une  magicienne  sympathique,  Aglavia  une 
magicienne  antipathique  :  voilà  la  seule  différence. 
—  De  même,  la  prison  affreuse,  peuplée  d'horribles 
reptiles,  où,  d'après  N,  Olive  est  enfermée,  se 
retrouve  dans  Bovon  de  Hantone  '  et  dans  d'autres 
chansons  de  geste  \  —  On  pourrait  encore  faire  valoir 
que,  pour  une  chanson  de  geste,  A^  a  un  caractère  fort 
peu  guerrier,  vu  qu'on  n'y  trouve  pas  un  seul  récit  de 
bataille.  Mais  il  en  est  de  même  pour  d'autres  chansons 
degeste  anciennes  :  il  n'y  a  presque  pas  d'épisodes  guer- 
riers dans  l'ancienne  chanson  de  geste  d'Ami  et  Amile 
publiée  par  Conrad  Hofmann;  il  n'y  en  a  pas  du  tout 
dans  le  Pèlerinage  de  Charlemagne ,  m  dans  le  poème 
de  Basin  et  Charlemagne,  que  nous   connaissons  par 

1981.  Comp.  l'analyse  de  P.  Paris  dans  Histoire  littér.  de  la 
France,  XXII,  475-477. 

r.  Voirv.  945  deTédit.  donnée  par  Stimming  du  texte  anglo- 
normand.  D'autres  exemples  sont  cités  par  l'éditeur,  p.  cxl  de 
l'Introduction;  on  pourrait  allonger  cette  liste,  citer,  par  exem- 
ple, le  Moniage  Guillaume,  édit.  Cloetta,  2°  rédaction,  v.  3 206, 
3244;  dans  F  même,  Audegour  est  précipitée  dans  une 
«  chartre  »,  où 

Coleuvres,  boterel  li  manjoent  les  flans  (v.  SgS?). 

2.  En  ce  qui  concerne  le  rôle  de  Siiiven,  nourrice  et  conseillère 
du  jeune  Landri,  on  peut,  à  défaut  de  rapprochements  plus 
directs,  rappeler  le  rôle  que  des  femmes  de  toute  condition  jouent 
dans  les  chansons  de  geste  :  c'est  ainsi  que,  dans  Hervi  de  Met^, 
V.  1975  et  suiv.  de  l'éd.  Stengel,  le  jeune  héros,  renié  et  «  fors- 
juré  »  par  son  père,  est  protégé  par  sa  demi-sœur,  une  bâtarde, 
qui  a  épousé  un  bourgeois  de  Metz.  Du  reste,  le  rôle  que  joue 
Siiiven  prouve  qu'elle  n'est  pas  d'une  condition  réellement  infé- 
rieure. D'après  les  idées  du  moyen  Lge,  la  nourrice  d'un  enfant 
de  naissance  élevée  devait  être  elle-même  de  bonne  naissance  ; 
voir  Roman  des  Sept  Sages,  éd.  Keller,  v.  i85  et  suiv.  Le  petit 
Arthur,  élevé  en  secret,  est  confié  à  la  femme  d'un  homme  qui 
n'est  pas  riche,  mais  dont  le  fils  est  plus  tard  chevalier  ;  voir 
Merlin,  éd.  G.  Paris  et  J.  Ulrich,  I,  122,  i?3.  Le  personnage  de 
la  nourrice  était  certainement  dessiné  avec  plus  de  soin  dans  le 
roman  primitif  que  dans  le  résumé  qui  nous  est  parvenu. 


INTRODUCTION 


LXXVII 


une  ancienne  traduction  néerlandaise.  Certes,  les  héros 
des  chansons  de  geste  sont  toujours  des  guerriers;  mais 
ces  récits  incessamment  répétés  de  sièges  et  de  batailles, 
tels  qu'on  les  trouve  dans  F  et  tels  qu'on  les  trouvait 
également,  bien  que  moins  nombreux,  dans  l'original 
commun  et  perdu  de  F  et  de  £",  ne  sont  pas  une  preuve 
d'antiquité  ;  ils  annoncent  plutôt  la  décadence  pro- 
chaine du  genre,  où  l'épopée  dégénère  en  chronique. 

Nous  sommes,  par  conséquent,  ramenés  à  la  théorie 
de  G.  Paris.  JV  reproduit,  avec  fidélité  dans  les  détails 
essentiels,  un  poème  français  perdu,  ne  contenant  pas 
l'épisode  des  aventures  de  Landri  à  Constantinople, 
donc  plus  simple  et  plus  ancien  que  le  poème,  égale- 
ment perdu,  que  postule  la  comparaison  de  F  et  de  E. 

Désignant  par  les  sigles  O'  et  O'  les  deux  poèmes 
français  perdus,  nous  pouvons  établir  le  classement  sui- 
vant de  nos  versions  : 


[trad.  anglaise  perdue 


chant 
islandais 


chant 
des  îles  Fœroe 


On  pourrait  faire  valoir,  contre  ce  classement,  que  i^ 
a  en  commun  avec  iVdes  traits  qui  ne  sont  pas  dans  £", 
notamment  l'inimitié  de  Landri  et  du  fils  de  la  marâtre 


I.  Ce  classement  est  loin  d'être  assuré  pour  le  chant  islandais, 
qui  a  pu  être  intermédiaire  entre  N  et  le  chant  des  îles  Fœroe. 


LXXVIII  DOON    DE    LA    ROCHE 

(Malalandres  dans  N,  Malingre  dans  F)  avant  l'exil  du 
premier.  Mais  il  ne  faut  pas  perdre  de  vue  que  l'auteur 
de  E  s'est  certainement  permis  de  grandes  libertés  :  son 
idée  de  faire  entrer  Olive  dans  un  couvent  (idée  <|ui 
semble  bien  propre  à  un  Espagnol  dévot)  a  pu  entraîner 
des  modifications  dans  l'histoire  de  la  jeunesse  d'En- 
rrique  (=  Landri),  qui  ont  fait  disparaître  la  donnée  de 
l'inimitié  précoce  entre  les  deux  demi-frères,  que  l'au- 
teur de  O*  avait  conservée. 

On  pourrait  encore  objecter  que  notre  hypothèse  de 
deux  renouvellements  anciens,  qui  auraient  bouleversé 
toute  l'économie  du  poème  primitif,  n'est  guère  con- 
forme à  ce  qu'on  sait  de  l'histoire  des  chansons  de  geste. 
Il  est  certain,  en  effet,  que  beaucoup  de  «  renouveleurs  » 
de  chansons  de  geste  ont  respecté  le  plan  original  du 
poème  qu'ils  entendaient  adapter  au  goût  de  leur  temps, 
et  se  sont  contentés  de  modifier  certains  détails;  mais 
d'autres  ont  procédé  d'une  façon  plus  radicale.  On  peut 
citer  le  poème  d'Ami  etAmile,  composé  au  xiv*  siècle,  et 
conservé  dans  le  manuscrit  fr.  12547  de  la  Bibliothèque 
Nationale,  où  les  données  anciennes  ont  été  complè- 
tement remaniées.  Si  l'on  récusait  cet  exemple  comme 
trop  récent,  nous  rappellerions,  outre  le  renouvellement 
de  Berte  au  Grand  Pied  par  Adenet  le  Roi,  si  différent 
de  l'ancien  poème  tel  qu'on  peut  le  reconstruire,  la 
seconde  rédaction  du  Moniage  Guillaume^  où  a  été 
inséré  le  long  épisode  de  Sinagon,  qui  ne  se  trouvait 
pas  dans  les  versions  anciennes  du  poème,  et,  avant 
tout,  la  Reine  Sébile,  cette  chanson  perdue  que  nous 
pouvons  reconstituer  à  l'aide  de  plusieurs  documents 
et  qui  diffère  à  tant  d'égards  du  poème  franco-italien  de 
Venise,  publié  sous  le  titre  de  Macaire  par  A.  Mussafia 
et  par  Guessard.  En  effet,  si  Guessard  s'est  trompé  en 
admettant  que  le  poème  franco-italien  qu'il  éditait  était 
la  transcription  pure  et  simple  d'une  chanson  française, 
il  n'en  reste  pas  moins  que  ce  poème  suppose  un  texte 


INTRODUCTION  LXXIX 

français  perdu,  plus  ancien  et  plus  simple  que  la  Reine 
Sébile,  et  où  manquaient  des  scènes  entières  et  des  per- 
sonnages qui  se  trouvent  dans  le  poème  plus  récent  '. 
Et  ce  poème  lui-même  était  relativement  ancien,  puis- 
qu'Aubri  de  Trois-Fontaines  le  connaît  déjà.  Le  renou- 
vellement supposé  de  notre  poème  ne  serait  donc  pas 
un  cas  isolé. 

Nous  ne  devons  pas  non  plus  nous  étonner  de  voir  la 
version  primitive  de  Doon  de  La  Roche  entre  les  mains 
d'un  traducteur  anglais.  Le  public  français  d'Angle- 
terre était  conservateur  dans  ses  goûts  littéraires  ;  il  se 
plaisait  aux  formes  anciennes  des  poèmes,  tandis  que 
les  renouvellements  se  succédaient  sur  le  continent. 
Fait  remarquable  :  ce  sont  des  manuscrits  écrits  en  An- 
gleterre qui  nous  ont  conservé  la  forme  primitive,  ou  du 
moins  très  ancienne,  de  la  Chanson  de  Roland,  de  la 
Chanson  de  Guillaume,  du  Pèlerinage  de  Charlemagne, 
de  Gormont  et  Isembart.  Le  récit  que  nous  a  transmis 
la  Kai'lamagnus-Saga  est  aussi  peu  exceptionnel  par 
son  histoire  externe  que  par  son  contenu. 

Si  nous  voulons,  après  ce  classement  des  versions 
conservées  de  la  légende,  nous  faire  une  idée  de  son 
développement  et  de  ses  origines,  nous  devons  d'abord 
nous  demander  si  elle  contient  un  élément  historique. 
M.  Ferdinand  Lot  a  prononcé  la  parole  décisive,  dès 
1903,  quand  il  a  qualifié  Doon  de  La  Roche  de  «  com- 
position de  pure  fantaisie  '».  Cet  arrêt  d'un  spécialiste 
de  l'histoire  carolingienne  n'a  pas  arrêté  le  zèle  érudit 
de  M.  Benary,  qui  s'est  obstiné  à  chercher  dans  F  des 
données  historiques.  Naturellement,  il  a  fini  par  trouver 
ce  qu'il  cherchait;  mais  à  quel  prix!  Il  identifie  (p.  365 
de  son  mémoire)  Landri  avec  Landfrid,  duc  des  Ala- 


1.  On  n'y  voyait  pas  le  jeune  Louis  prendre   les   armes  pour 
venger  sa  mère  ;  le  larron  Grimoard  n'y  figurait  pas  non  plus. 

2.  Romania,  XXXll  (1902),  12. 


LXXX  DOON    DE    LA    ROCHE 

mans,  adversaire  de  Charles  Martel  en  jZo\  plus  loin 
(p.  374),  il  tente  d'établir  l'équation  :  Landri  ■■=  Chil- 
déric  '.  —  Une  théorie  qui  s'appuie  sur  de  pareils  rap- 
prochements se  condamne  elle-même.  Les  efforts  in- 
fructueux de  M.  Benary  ne  peuvent  que  confirmer  la 
manière  de  voir  de  M.  F.  Lot  :  Doon  de  La  Roche  ne 
contient  d'autre  donnée  historique  que  le  nom  de 
Pépin  le  Bref,  qui  y  figure  comme  frère  de  la  femme 
calomniée  de  Doon;  l'œuvre  elle-même  est  une  fiction, 
dont  nous  pouvons  analyser   les  éléments  divers. 

Le  premier  élément  est  l'histoire  de  la  femme  inno- 
cente, vertueuse,  odieusement  calomniée,  puis  humiliée 
et  maltraitée  par  suite  de  cette  calomnie.  C'est  là  un 
thème  fréquent  dans  la  littérature  du  moyen  âge;  la 
forme  du  récit  qui  se  rapproche  le  plus  de  Doon  est 
celle  qui  forme  le  début  de  l'histoire  de  la  femme  de 
Charlemagne  accusée  d'adultère,  telle  qu'elle  se  lit 
dans  le  poème  franco-italien  (déjà  cité  plus  haut)  de 
Macaire^.  Dans  ce  poème,  comme  dans  N —  nous 
avons  vu  plus  haut  que,  des  trois  versions  essentielles 
de  Doon,  N  est  la  seule  qui  présente  un  récit  consistant 
de  la  machination  —  le  traître,  Macaire,  est  amoureux 

1.  Landri  provient,  comme  on  sait,  du  germanique  Landric 
et  est  différent  de  Landfrid.  Les  efforts  pour  rattacher  Landri  à 
Childéric  (au  moyen  de  formes  qui  se  trouvent  dans  un  manus- 
crit franco-italien  de  Venise!)  sont  tout  aussi  vains.  Les  raison- 
nements du  savant  allemand  sur  Landri,  Plandris  et  Flandris 
(p.  362-364)  ne  sont  pas  plus  solides;  de  plus,  Jean  des  Prés, 
que  cite  M.  Benary,  est  une  autorité  bien  tardive  et  suspecte.  Le 
mémoire  de  M.  Benary  contient  d'utiles  remarques  de  détail,  mais 
toute  cette  démonstration  historique  est  complètement  manquée. 

2.  Le  rapprochement  a  déjà  été  indiqué  par  G.  Paris,  La  litté- 
rature franc,  du  moyen  âge,  §  27  (5«  édit.,  Paris,  1914,  p.  5o)  et 
par  M.  Benary,  p.  3 14,  n.  i.  —  La  forme  du  récit,  telle  qu'elle  se 
trouvait  dans  le  poème  plus  récent  de  la  Reine  Sébile  (œuvre 
perdue,  mais  qu'on  peut  reconstituer  pour  le  fond)  est  altéré, 
ainsi  que  l'a  déjà  vu  M.  Pio  Rajna,  Origini  delV  epopea  francese 
(Firenze,  1884),  p.  180-182. 


INTRODUCTION  LXXXI 

de  la  reine  et  lui  fait  des  propositions  déshonnêtes, 
qu'elle  repousse  ;  il  les  fait  renouveler  par  un  nain  ;  la 
reine  manifeste  son  indignation  et  frappe  même  le  nain 
violemment;  Macaire  persuade  à  celui-ci  de  se  glisser 
dans  le  lit  de  la  reine.  La  conséquence  est  que  Charle- 
magne,  trouvant  le  nain  dans  le  lit  de  sa  femme,  croit 
celle-ci  coupable  '  ;  plus  tard,  Macaire  lance  le  nain 
dans  le  bûcher  allumé  destiné  à  la  reine.  Le  trait  essen- 
tiel, que  le  mobile  du  traître  est  la  fureur  de  l'amant 
repoussé,  trait  qui  se  trouve  à  la  fois  dans  Macaire  et 
dans  N,  s'est  complètement  obscurci  dans  E  et  F.  On 
retrouve  de  même  dans  les  deux  récits,  Macaire  et  N, 
ce  détail,  que  le  calomniateur  sait  présenter  comme 
amant  de  la  reine  un  individu  qui  doit  inspirer  du 
dégoût  à  une  femme  normalement  constituée,  un 
nain  dans  Macaire,  un  nègre  dans  N,  et  aggrave 
ainsi  la  culpabilité  de  sa  victime.  —  Ce  trait  du  nègre, 


I .  Macaire,  édit.  Mussafia,  Altfran:[ôsiscke  Gedichte  (Wien,  1864), 
II,  p.  8;  édit.  Guessard  (Paris,  1866),  p.  28.  La  version  du  poème 
franco-italien  est  confirmée,  pour  l'essentiel,  par  le  poème  moyen- 
haut-allemand  de  Schondoch  (xiv«  siècle),  la  Reine  de  France, 
dans  lequel  le  nain  est  un  instrument  absolument  inconscient  du 
traître,  le  «  maréchal  »  {marschal,  v.  55- 102,  dans  Schondochs 
Gedichte,  éd.  H.  Hertz,  p.  82-86,  Breslau,  1908,  in-8'>  [Germa- 
nistische  Abhandlungen,  fascic.  3o])  :  le  roi,  averti,  tue  le  nain. 
—  Le  nain  est  moins  innocent  dans  le  miracle  dramatisé  de  la 
Vierge,  Miracle  de  la  Marquise  de  la  Gaudine,  dans  Miracles  de 
Nostre  Dame,  éd.  G.  Paris  et  U.  Robert,  II,  p.  i32-i39,  où  l'action 
présente  du  reste  de  grandes  analogies  avec  les  deux  récits  pré- 
cédents. —  Plus  altérés  sont  les  épisodes  analogues  d'Octavian, 
éd.  Vollmôller  (Heilbronn,  i883,  in-8«),  v.  193-281  (le  «  garçon  », 
est  tué  par  le  mari),  et  de  Florent  et  Octavien,  chanson  de  geste 
du  XIV*  siècle  (Bibl.  Nat.,  ms.  fr.  1432,  fol.  5b-6b  ;  comp.  l'ana- 
lyse dans  Hist.  littér.  de  la  France,  XXVI,  3o4j-,  ces  deux  œuvres 
reproduisent  une  chanson  de  geste  perdue  du  xii*  siècle,  remplie 
de  réminiscences.  Même  récit,  italianisé,  dans  les  Reali  di 
Francis  d'Andréa  da  Barberino,  1.  Il,  c.  42  (édit.  Gamba, 
p.  181;  édit.  Vandelli,  U,  2,  p.  178-179). 

f 


LXXXII  DOON   DE   LA   ROCHE 

dans  N,  est  remarquable.  Les  nègres  n'étaient  certai- 
nement pas  communs  en  Europe  au  xii*  siècle;  d'autre 
part,  ce  détail  rappelle  immédiatement  les  récits  des 
Mille  et  une  Nuits,  dans  lesquels  des  femmes  blan- 
ches, plus  ou  moins  haut  placées,  sont  accusées,  à 
tort  ou  à  raison,  de  relations  coupables  avec  des 
esclaves  nègres.  —  Notre  thème  serait-il  par  hasard 
d'origine  orientale,  arabe?  Nous  n'avons  pas  réussi 
à  trouver,  dans  les  traductions  des  contes  et  nouvelles 
arabes  qui  sont  à  notre  disposition,  un  récit  correspon- 
dant exactement  à  celui  de  iV;  cependant  dans  un  récit 
bien  connu  des  Mille  et  un  Jours,  VHistoire  de  Rep- 
sima,  appartenant  au  cycle  de  la  «  femme  chaste  con- 
voitée par  son  beau-frère  »,  on  peut  signaler  le  thème 
de  l'amant  repoussé,  qui  introduit,  dans  la  chambre  [à 
coucher?]  de  la  femme  qu'il  veut  perdre,  un  homme 
destiné  à  jouer  le  rôle  d'amant  '  surpris  avec  la  femme, 
en  réalité  innocente  ;  seulement,  cet  amant  n'est  pas  un 
nègre.  —  Jusqu'ici  nous  n'avons  pas  réussi  à  trouver 
dans  les  traductions  de  contes  arabes,  ou  arabo-persans, 
quelque  autre  récit,  présentant  une  analogie  plus  pré- 
cise avec  le  groupe  de  récits  occidentaux  que  nous 
avons  signalés,  et  notamment  avec  N;  un  autre  sera 
peut-être  plus  heureux. 

1 .  Les  Mille  et  un  Jours,  édit.  du  «  Panthéon  littéraire  »,  p.  266. 
Même  récit,  traduit  d'après  un  recueil  persan,  Al  Farag  Ba'da 
Alsidda,  par  A.  Wailenskôld,  dans  son  mémoire  intitulé  :  Le 
Conte  de  la  femme  chaste  convoitée  par  son  beau-frère  (dans  Acta 
Societatis  Scientiarum  Fennicae,  t.  XXXIV,  n»  r,  p.  loi).  Le  récit 
persan  diffère  par  les  détails  du  récit  des  Mille  et  un  Jours  et 
est,  à  bien  des  égards,  absurde  ;  il  est  possible  que  Pétis  de 
Lacroix  et  Le  Sage,  rédacteurs  des  Mille  et  un  Jours,  l'aient 
arrangé.  Malgré  les  incertitudes  qui  planent  encore  sur  la  source 
(ou  les  sources)  des  Mille  et  un  Jours,  M.  Wailenskôld  (p.  18  de 
son  mémoire)  croit  cependant  que,  en  ce  qui  concerne  notre  récit, 
les  rédacteurs  français  ont  puisé  à  une  source  différente  du 
recueil  persan.  .-{  ,i:  ,.i  ,i,,^„..., , 


INTRODUCTION  LXXXIII 

Mais,  dans  Doon  de  La  Roche  —  c'est  toujours  la 
rédaction  iVque  nous  avons  spécialement  en  vue  —  ce 
thème  de  la  femme  calomniée  ne  forme  que  le  début  du 
récit;  le  reste  de  l'histoire  appartient  à  un  autre  thème, 
qu'on  peut  désigner  comme  celui  de  «  la  femme  persé- 
cutée, maltraitée  pendant  des  années,  finalement  déli- 
vrée et  vengée  par  son  enfant  [ou  ses  enfants]  ».  En 
effet,  dans  A^,  nous  voyons  Olive  enfermée  pendant  des 
années  dans  une  prison  effroyable,  avec  un  pain  gros- 
sier et  une  cruche  d'eau  pour  toute  nourriture  ;  c'est 
son  fils  Landri,  devenu  grand,  qui  l'en  tire  et  qui 
la  venge  en  châtiant  les  traîtres  qui  la  persécutaient. 
—  Dans  la  version  de  F,  il  n'est  pas  question  de  prison  : 
Olive  est  réduite  à  une  position  humiliée  et  précaire; 
elle  perd  ses  droits  d'épouse  et  est  réléguée  dans  une 
maison  située  hors  de  ville,  où  elle  vit  dans  la  misère, 
avec  son  jeune  enfant,  qu'on  considère  comme  bâtard  ; 
pour  sa  nourriture,  on  ne  lui  donne  que  deux  pains 
par  jour  (v.  5  14  et  suiv.).  Tout  cela  a  l'air  d'une  ver- 
sion adoucie  du  récit  primitif  '. 

I.  Dans  F,  aux  v.  902  et  suiv.,  Audegour,  la  seconde  épouse  de 
Doon,  accuse  celui-ci  de  continuer  à  entretenir  des  relations  avec 
sa  première  femme  répudiée  :  Ain:^  maintenez  a  tort  dame  Olive 
de  France ,  Chascun  jor  i  gisie:^  quant  il  vous  atalente.  M.  Benary 
considère  ce  trait  d'une  sorte  de  bigamie  comme  primitif  et  ar- 
chaïque (voir  p.  365-366  de  son  mémoire).  Mais  il  faut  remarquer, 
d'abord,  que,  dans  ce  vers,  ce  n'est  pas  le  poète  qui  parle  en  son 
propre  nom  :  il  fait  parler  Audegour  en  fureur,  disant  du  mal 
d'une  rivale.  Ensuite,  il  faut  rapprocher  ce  propos  d'autres  pas- 
sages du  poème,  où  Audegour  accuse  Olive  de  vivre  en  prostituée 
(v.  91 5  et  suiv.,  930-931,  945  et  suiv.).  De  môme,  Tomile  avait 
essayé  de  faire  croire  à  Pépin  qu'Olive  s'abandonnait  à  tous  les 
hommes  qui  la  désiraient  (v.  58 1  et  suiv.).  Le  véritable  sens  de 
l'accusation  d'Audegour  aux  v.  902  et  suiv.,  est,  par  conséquent, 
que  Doon  est  un  des  nombreux  amants  de  sa  première  femme, 
devenue  une  vraie  courtisane.  Interprétés  ainsi,  à  la  lumière 
d'autres  passages  de  la  chanson,  les  vers  qu'invoque  M.  Benary 
ne  se  rapportent  plus  à  une  véritable  bigamie,  et  ils  perdent  le 
caractère  que  leur  donnait  l'explication  du  savant  allemand. 


LXXXIV  DOON   DE   LA   ROCHE 

La  version  de  E,  où  Olive  se  fait  religieuse,  s'écarte 
encore  davantage  de  la  version  originale.  Celle-ci, 
conservée,  à  notre  avis,  dans  N,  nous  présente  net- 
tement le  thème  de  la  «  mère  persécutée,  sauvée  et 
vengée  par  son  fils  ».  Ce  thème,  fort  ancien  '  et  qui 
tient  aux  sentiments  les  plus  profonds  de  la  nature 
humaine,  a  pu  être  réinventé  au  cours  des  siècles;  nous 
croyons  cependant  que  l'auteur  du  poème  primitif  sur 
Doon  de  La  Roche  [O')  avait  présent  à  l'esprit  une  version 
d'un  conte  extrêmement  répandu  —  on  l'a  noté  depuis 
l'Europe  occidentale  jusque  dans  l'Archipel  indien  — , 
où  une  jeune  femme  odieusement  calomniée  (le  plus 
souvent  par  des  sœurs,  jalouses  de  son  bonheur)  et  par 
suite  soumise  à  des  traitements  indignes,  est  finalement 
sauvée  et  réhabilitée  par  ses  enfants  devenus  grands, 
ce  qui  entraîne,  dans  les  versions  bien  conservées,  le 
châtiment  des  personnes  qui  avaient  calomnié  la  mère  *. 
Il  est  certain  que  ce  conte  était  connu  en  France  au 
XII*  siècle  :  des  données  essentielles  empruntées  à  ce 
récit  ont  été  combinées  avec  celles  d'un  autre  conte 
pour  former  la  première  partie  du  poème  du  Chevalier 
au  Cygne  *.  Le  trait  commun  à  ces  récits  est  avant  tout 
le  traitement  abominable  infligé  à  la  mère  calomniée  : 
dans  un  conte  syriaque,  noté  d'après  la  tradition  orale 


I .  Nous  nous  bornerons  à  citer,  pour  l'antiquité  grecque,  l'his- 
toire d'Antiope  et  de  ses  fils,  Amphion  et  Zéthos,  sujet  d'une  tra- 
gédie perdue  d'Euripide,  dont  on  possède  un  schéma  détaillé  et 
dont  des  fragments  assez  étendus  ont  été  trouvés,  il  y  a  une  tren- 
taine d'années,  en  Egypte.  A.  D'Ancona,  Sacre  ,Rappresenta\ioni 
(Firenze,  1872),  111,  319,  a  cité  l'histoire  de  Tyrô  et  de  ses  fils, 
thème  d'une  tragédie  perdue  de  Sophocle. 

2.  Voir  E.  Cosquin,  Contes  populaires  de  Lorraine,  I,  n"  17;  le 
recueil  des  frères  Grimm,  n»  96;  J.  Boite  et  G.  Polîvka,  Anmer- 
kungen  :{U  den  Kinder-  u.  Hausmàrchen  der  Brader  Grimm,  II 
(Leipzig,  1913),  380-394;  Revue  d'ethnographie  et  de  sociologie, 
année  1910,  p.  210  et  suiv.,  et  année  191 1,  p.  189  et  suiv. 

3.  Voir  Romania,  XXXIV,  206  et  suiv. 


INTRODUCTION  LXXXV 

par  Galland  et  inséré  par  celui-ci  dans  sa  traduction  des 
Mille  et  une  Nuits,  elle  est  exposée  en  public  à  une 
porte,  et  chaque  passant  doit  lui  crachera  la  figure; 
dans  un  conte  russe,  elle  est  emmurée.  Dans  la  version 
primitive  de  la  chanson  de  geste  sur  la  Naissance  du 
Chevalier  au  Cygne,  que  nous  a  conservée  le  Dolo- 
pathos  latin  de  Jean  de  Haute-Seille,  la  mère  est  con- 
damnée à  être  enterrée  jusqu'aux  mamelles  dans  la 
cour  du  château  de  son  mari,  où  les  gens  du  château 
doivent  se  laver  les  mains  au-dessus  de  sa  tête  et  les 
essuyer  à  ses  cheveux  '.  Dans  notre  hypothèse,  la  tour 
terrible  où  Olive  est  enfermée  est  l'équivalent  de  ce 
supplice  naïvement  barbare;  et  l'on  peut  noter  que, 
dans  des  rédactions  plus  récentes  du  Chevalier  au 
Cygne,  le  supplice  décrit  par  la  version  primitive  est 
également  remplacé  par  une  dure  prison  '. 

Dans  le  conte,  les  enfants,  qui  ont  été  exposés,  une  fois 
devenus  grands,  sauvent  et  réhabilitent  leur  mère.  Ce 
trait  est  clairement  marqué  dans  la  version  N  de  Doon, 
où  c'est  Landri  qui  tire  Olive  de  sa  prison  et  amène  la 
punition  des  traîtres;  dans  E  et  F,  les  événements  sont 

1.  Johannis  de  Alla  Silva  Dolopathos,  éd.  Hilka,  p.  82,  1.  36- 
3o;  traduction  française  de  Herbert,  Roman  de  Dolopathos,  éd. 
Brunet  et  Montaiglon,  v.  g5o8  et  suiv. 

2.  La  Chanson  du  Chevalier  au  Cygne,  éd.  Hippeau,  t.  I, 
V.  277  et  suiv.;  Le  Chevalier  au  Cygne,  éd.  ReifFenberg,  I,  p.  34, 

V.  696  (la  prison  est  très  adoucie).  Dans  le  résumé  latin  d'une 
version  française  perdue  (omit,  cité,  1,  p.  186)  la  mère  est  préci- 
pitée dans  un  puits  profond  et  horrible.  —  Un  récit  analogue  à 
celui  du  Chevalier  au  Cygne  fait  le  fond  du  Miracle  du  Roi 
Thierry  (voir  Miracles  de  Nostre  Dame,  éd.  G.  Paris  et  U.  Robert, 

VI,  257  et  suiv.)  et  de  la  seconde  partie  du  roman  de  Theseus  de 
Cologne  (on  a  remarqué  depuis  longtemps  que  ces  deux  œuvres 
doivent  avoir  une  source  commune)  :  on  y  retrouve  la  mère 
calomniée  et  la  dure  prison.  —  D'autre  part,  le  supplice  de  l'en- 
terrcmeni  à  mi-corps  de  la  femme  innocente  se  retrouve  dans  la 
chanson  de  geste  d'Orsow  de  Beauvais  (éd.  G.  Paris,  v.  833  et 
suiv.),  mais  les  circonstances  diffèrent  complètement. 


LXXXVI  DOON    DE    LA    ROCHE 

plus  compliqués  et  le  thème  primitif  s'est  quelque  peu 
obscurci;  cependant,  dans  ces  deux  récits,  c'est  Landri, 
le  fils,  qui  prend  l'initiative  de  l'expédition  destinée  à 
châtier  les  traîtres  qui  ont  fait  le  malheur  de  sa  mère 
[E,  fol.  c.  VI,  v";  F,  V.  2643  et  suiv.).  Dans  toute  cette 
partie  décisive  du  récit,  c'est  le  fils  d'Olive  qui  agit  et 
commande  (voir  F,  v.  2918)  et  non  l'époux  :  au  milieu 
de  toutes  sortes  de  complications,  nous  retrouvons  dans 
les  versions  E  et  Fia.  donnée  de  iV,  qui  est  également 
la  donnée  du  conte  populaire  et  du  Chevalier  au 
Cygne  "  :  la  mère  réhabilitée  par  ses  enfants  (ou  son 
enfant). 

Voici  comment  a  dû  procéder  l'auteur  du  poème 
primitif  (O'),  que  nous  pouvons  restituer  en  gros  par 
N .  Connaissant  le  récit  populaire,  il  le  transforma  en 
récit  épique,  en  remplaçant  par  la  prison  le  supplice 
singulier  de  la  mère  relaté  par  le  conte  ''.  Il  transforma 
de  même  la  suite  des  événements,  d'un  merveilleux 
bizarre,  qui,  dans  le  conte,  amènent  la  délivrance  de  la 
mère,  en  une  suite  d'actions  vaillantes  du  fils  unique, 

1.  Dans  la  version  primitive  de  la  chanson,  conservée  par  le 
Dolopathos,  cette  donnée  s'est  quelque  peu  obscurcie,  par  suite 
de  la  contamination  du  conte  avec  un  autre,  celui  des  frères 
transformés  en  oiseaux;  on  peut  cependant  noter  que  la  sœur 
des  frères  métamorphosés  se  met  en  rapport  avec  la  mère  mal- 
traitée et  que  c'est  elle  qui,  en  attirant  l'attention  du  père,  amène 
le  dénouement,  la  délivrance  de  la  mère  et  la  punition  de  la 
belle-mère  coupable.  Dans  le  groupe  des  versions  plus  récentes, 
que  G.  Paris  appelait  Béatrix  (voir  Romania,  XIX,  1890,  p.  323 
et  suiv.),  ce  n'est  plus  la  fàlle,  c'est  un  des  fils  qui  joue  le  rôle 
principal.  Ainsi  que  l'a  remarqué  G.  Paris  (article  cité,  p.  323, 
noie  2),  le  thème  de  la  mère  réhabilitée  par  le  fils  se  retrouve 
encore  dans  la  première  partie  de  Doon  de  Mayence.  Enfin,  on 
peut  citer  encore,  comme  un  exemple  de  ce  thème  du  fils  ven- 
geant sa  mère,  le  poème  plus  récent  sur  «  la  Reine  de  France 
calomniée  »,  la  Reine  Sébile  (rôle  du  jeune  Louis,  fils  de  Sébile). 

2.  Cependant  nous  avons  vu  que,  dans  un  conte  russe,  la  mère 
est  emmurée,  ce  qui  ne  diffère  pas  beaucoup  de  la  prison. 


INTRODUCTION  LXXXVIÎ 

qui  remplaçait  les  deux  fils  et  la  fille  qui  figurent  dans 
les  versions  bien  conservées  du  conte.  II  emprunta  les 
détails  de  ces  actions,  soit  à  la  tradition  populaire 
(l'objet  magique  volé  aux  nains),  soit  à  d'autres  chan- 
sons de  geste  (les  enchantements  de  la  marâtre),  ainsi 
que  nous  l'avons  exposé  plus  haut.  Quant  au  début  du 
récit,  comme  la  version  du  conte  '  (la  mère  accusée 
d'avoir  mis  au  monde  des  chiens)  lui  paraissait  par 
trop  enfantine,  il  la  remplaça  par  l'histoire  de  la  femme 
accusée  faussement  d'adultère  et  du  pseudo-amant 
introduit  dans  le  lit,  histoire  alors  répandue  et  qui 
était  peut-être,  ainsi  que  nous  l'avons  indiqué  plus 
haut,  un  thème  international,  d'origine  arabe. 

Ce  poème  primitif  (0'),  dont  l'action  se  retrouve, 
quant  aux  données  essentielles,  dans  iV,  fut  profondé- 
ment remanié,  surtout  en  ce  qui  concerne  la  seconde 
partie  (les  aventures  du  fils)  :  le  résultat  de  ce  remanie- 
ment fut  le  second  poè-me  perdu  [O'),  dont  E  nous  a 
conservé  les  lignes  principales.  L'auteur  de  ce  poème 
jugeait  que  le  rôle  du  jeune  Landri  était  à  la  fois  trop 
fantastique  et  trop  peu  développé  :  afin  de  pouvoir  y 
introduire  les  aventures  lointaines  et  les  récits  de  guerre 
qui  lui  plaisaient  ^,  il  fit  intervenir  un  autre  thème, 
que  M.  Benary  (p.  368  de  son  mémoire)  appelle  celui 
de  «  l'exil  »  et  qui  a  été  défini,  avec  une  heureuse  préci- 

1.  Qu'on  retrouve  dans  le  Chevalier  au  Cygne,  le  Miracle  du 
Roi  Thierry  et  Theseus  de  Cologne. 

2.  Ceci  se  rapporte  à  la  seconde  partie  du  poème;  quant  à  la 
première,  les  malheurs  de  la  mère,  il  est  difficile  de  s'en  faire 
une  idée  nette,  le  rédacteur  espagnol  ayant  beaucoup  changé.  II 
est  cependant  probable  que  l'adoucissement  des  données  primi- 
tives et  barbares  du  récit,  en  ce  qui  concerne  le  traitement  infligé 
à  la  mère  calomniée,  adoucissement  nettement  marqué  dans  F, 
était  déjà  indiqué  dans  O".  Un  pareil  adoucissement  des  données 
primitives  se  retrouve  dans  le  poème  sur  la  Naissance  du  Che- 
valier au  Cygne,  publié  par  Todd,  quand  on  le  compare  au  récit 
archétype,  que  nous  a  conservé  le  Dolopathos. 


LXXXVIII  DOON   DE   LA   ROCHE 

sion,  par  G,  Paris,  à  propos  de  la  chanson  de  geste  pro- 
vençale de  Daurel  et  Béton  \ 

Le  jeune  homme  inconnu  qui,  chassé  par  un  malheur 
quelconque  de  son  pays,  grandit  à  la  cour  d'un  roi  étranger, 
s'y  distingue  par  ses  exploits,  se  fait  aimer  de  la  fille  du  roi, 
et  revient,  d'ordinaire  avec  l'aide  de  ce  roi,  pourtirer  ven- 
geance de  ses  ennemis,  est  un  thème  fréquent  dans  notre 
épopée  :  nous  le  trouvons  dans  Mainet,  dans  Jourdain  de 
Blaie,  dans  Or  son  de  Beauvats,  dans  Bovon  de  Hanstone, 
dans  le  poème  tout  saxon  de  Horn;  il  rappelle  les  aventures 
prêtées  à  Childéric  parles  légendes  franques. 

Si  l'auteur  de  O*  envoie  le  jeune  Landri  chercher  for- 
tune à  Constantinople,  c'est  là  une  conséquence  de 
l'attrait  que  l'antique  Byzance  exerçait  sur  l'imagination 
des  romanciers  du  xii°  siècle  *.  Le  rôle  que  i^  attribue 
à  la  fille  de  l'empereur  et  qui  se  retrouve,  bien  que 
d'une  façon  moins  prononcée  et  moins  choquante, 
dansjE",  est  fréquent  dans  les  chansons  de  geste,  quand 
il  s'agit  de  jeunes  filles  amoureuses,  qu'elles  soient 
chrétiennes  ou  sarrasines  :  elles  font  les  avances  avec  la 
plus  grande  facilité  (qu'on  se  rappelle  Seneheut  dans 
Auberi  le  Bourgoin,  Oriente  dans  Orson  de  Beauvais, 
et  surtout  Belissent  dans  Ami  et  Amile).  Dans  E  aussi 
bien  que  dans  F,  le  fils  de  la  femme  persécutée,  après 
avoir  rendu  à  l'empereur  de  Constantinople  par  son 
courage  des  services  signalés,  revient  dans  son   pays 


1.  Mélanges  de  littérat .  française  du  moyen  âge,  p.  145-146. — 
G.  Paris,  qui  a  oublié  de  parler  du  rôle  de  Landri  dans  notre 
poème,  ne  parle  pas  non  plus  de  Parise  la  Duchesse,  où  l'on 
trouve  manifestement  le  même  thème;  il  est  vrai  que  le  jeune 
Huguet,  dans  Parise,  s'il  amène  des  troupes  avec  lui,  ne  doit  pas 
ces  troupes  à  son  beau-père  ou  futur  beau-père,  mais  cela  ne  fait 
pas  grande  différence. 

2.  M.  Benary  remarque  qu'il  est  déjà  question  de  Constan- 
tinople dans  des  récits  sur  Childéric. 


INTRODUCTION  LXXXIX 

avec  une  armée  pour  châtier  les  traîtres  '.  Nous 
sommes  obligé  de  nous  en  tenir  à  ce  schéma  som- 
maire, le  rédacteur  espagnol  ayant  probablement 
modifié  et  ajouté  bien  des  détails;  il  est  cependant  assez 
probable  que  l'épisode  final,  où  l'on  voit  Doon  et  Olive 
assiégés  par  Pépin  et  Tomile  dans  La  Roche,  et 
délivrés  par  Landri  (=  Enrrique),  se  lisait  déjà  dans  le 
poème  français  (O'). 

C'est  sur  ce  poème  qu'a  dû  travailler  l'auteur  du 
poème  conservé,  F.  Celui-ci  était  évidemment  d'avis 
que,  dans  l'œuvre  qu'il  avait  sous  les  yeux,  le  rôle  du 
père  de  Landri,  Doon,  qui  cependant  donnait,  déjà 
anciennement,  son  nom  à  toute  la  chanson*,  était  trop 
sacrifié,  et  il  résolut  de  le  relever.  Il  modifia  par  consé- 
quent l'action  :  au  lieu  d'être  assiégé  dans  La  Roche  par 
Pépin,  comme  dans  0%  Doon,  dans  F,  est  chassé  de  ses 
domaines  par  le  même  Pépin  ;  obligé  de  vivre  de  son 
épée,  il  prend  du  service  à  l'étranger,  chez  le  roi  de  Hon- 
grie, et  se  trouve  ainsi  mêlé  à  la  guerre  entre  ce  roi  et 
l'empereur  de  Constantinople,  qui,  de  son  côté,  a  à  son 
service  Landri,  le  fils  de  Doon.  Il  en  résulte  l'épisode 
où  le  père  et  le  fils  se  combattent  sans  se  reconnaître, 
situation  souvent  traitée  dans  les  littératures  du  moyen 
âge  depuis  le  Hildebrandlied  ',  de  même  que  la  scène 
où  le  fils  délivre,  sans  le  savoir,  son  père  d'une  longue 
et  dure  captivité,  se  retrouve  ailleurs*.  —  Ces  dévelop- 

1.  Dans  E,  Enrrique  (=  Landri)  est  à  ce  moment  le  gendre  et 
même  le  successeur  de  l'empereur  ;  dans  F,  Landri  est  le  fiancé 
de  la  fille  de  l'empereur. 

2.  Ceci  résulte  du  passage  de  V Ensenhamen  de  Guiraut  de 
Cabrera,  que  nous  citerons  plus  loin. 

3.  R.  Kôhler  et  G.  Paris  en  ont  réuni  de  nombreux  exemples  ; 
voir  R.  Kôhler,  Kleine  Schi-iften,  II  (Berlin,  1900),  263.  —  Il 
faut  bien  avouer  que,  si  l'auteur  de  i^a  ainsi  mis  la  main  sur  des 
situations  émouvantes,  il  les  a  traitées  d'une  façon  médiocre. 

4.  L'épisode  où  le  fils  délivre  le  père  emprisonné  se  retrouve, 
sous  une  forme  bien  meilleure,  dans  Oison  de    Beauvais,  ainsi 


XC     "  DOON   DE   LA    ROCHE 

pements  obligèrent  l'auteur  de  F  à  modifier  par  contre- 
coup le  rôle  de  Landri  :  dans  0\  Landri  assistait  l'em- 
pereur de  Constantinople  une  fois,  contre  les  Sarrasins  ; 
dans  F,  il  l'assiste  deux  fois,  la  première  fois  contre  les 
Sarrasins,  la  seconde  fois  contre  le  roi  de  Hongrie. 
Pour  gagner  de  la  place,  et  afin  de  pouvoir  plus  tard 
raconter  en  détail  la  seconde  guerre,  l'auteur  de  F  a 
réduit  à  une  mention  sommaire  le  récit  de  la  guerre 
contre  les  Sarrasins,  qui,  du  moins  à  en  juger  d'après 
l'espagnol,  était  raconté  longuement  dans  O';  tout  l'in- 
térêt se  porte  chez  lui  sur  la  guerre  contre  les  Hongrois, 
et  la  défense  de  l'empire  contre  Dorame,  roi  de  Hon- 
grie, devient  le  service  signalé  rendu  par  Landri  à 
l'empereur  de  Constantinople.  Mais,  encore  une  fois, 
toutes  ces  modifications  sont  la  conséquence  de  l'im- 
portance du  rôle  donné  au  père  de  Landri. 

Nous  retrouvons  cette  préoccupation  dans  les  scènes 
où  Doon  se  rend,  déguisé,  dans  ses  terres,  pour  mettre 
à  l'épreuve  la  fidélité  de  son  vassal,  le  maire  Bernard, 
et  surtout  celle  de  sa  femme.  On  sait  que  ce  thème  du 
mari  rentrant  chez  lui,  déguisé,  après  une  longue  ab- 
sence, est  très  ancien  :  il  remonte  à  V Odyssée.  Au 
moyen  âge,  et  dans  le  cycle  carolingien,  on  le  retrouve 
dans  le  récit  fantastique  du  voyage  de  Gharlemagne  à 
Paris,  inséré  dans  le  poème  de  la  Spagna,  et  qui  pour- 
rait bien  remonter  à  un  poème  épisodique  français 
perdu'.  Ici  encore,  l'auteur  de  F  est  peu  original  pour 

que  Ta  remarqué  M.  Benary  (p.  333  de  son  mémoire),  qui  a 
noté  également  que  le  «  maître  »  du  jeune  Milon  dans  Orson 
de  Beauvais,  Guinement,  porte  le  môme  nom  que  le  «  maître»  de 
Landri  dans  F. 

I.  Voir  G.  Paris,  Histoire  poétique  de  Charlemagne,  p.  398. 
Le  fait  que  ce  récit  est  «  aniorcé  »  dans  VEntrée  d'Espagne  (éd. 
Thomas,  v.  643  et  suiv.)  confirme  singulièrement  l'hypothèse  de 
G.Paris.  Voir  aussi  N eophilologiis ,\\\  (1917-1918),  245,  246.  On 
peut  encore  songer  à  l'épisode  de  «  Tristan  fou  »  dans  différentes 
versions  de  Tristan;  mais  Tristan  n'est  pas  le  mari  d'Iseut. 


INTRODUCTION  XCI 

le  fond  de  son  invention.  Afin  de  maintenir  Jusqu'au 
bout  l'importance  attribuée  au  personnage  de  Doon,  il 
lui  attribue  l'initiative  du  siège  de  Cologne,  ville  qui 
joue  du  reste,  dans  F,  un  tout  autre  rôle  que  dans 
jE*,  où  elle  est  aux  mains  deTomile,  tandis  que  dans  F 
les  habitants  ont  juré  fidélité  à  Pépin. 

Un  épisode  entièrement  de  l'invention  de  l'auteur  de 
F  est  celui  qui  nous  montre  le  roi  Pépin,  fait  prison- 
nier à  la  chasse  par  les  «  Saisnes  »  et  sauvé,  grâce  à 
l'intervention  rapide  et  courageuse  de  Landri,  interven- 
tion d'autant  plus  méritoire  que  le  roi  s'était  fort  mal 
conduit  à  l'égard  de  la  mère  de  Landri,  qui  était  pour- 
tant sa  sœur,  et  à  l'égard  de  Landri  lui-même.  Il  semble 
bien  (quoique  la  chose  ne  soit  pas  clairement  expliquée 
dans  E)  que,  déjà  dans  O',  Pépin  se  laissait  corrompre 
par  Tomile  pour  donner  son  consentement  au  mariage 
de  la  fille  de  celui-ci  avec  Doon  ;  il  y  avait  également 
(voir  plus  haut,  p,  Lxr,  note  3)  une  scène  assez  violente 
où  Landri  victorieux  faisait  à  Pépin  des  reproches  sur 
sa  conduite.  C'est  cette  scène  qui  a  donné  à  l'auteur  de 
F  ridée  d'ajouter  l'épisode  de  Pépin  tombé  au  pouvoir 
des  «  Saisnes  »  et  sauvé  par  Landri',  On  reconnaît 
dans  cette  invention  l'esprit  féodal,  qui  aime  à  opposer 
au  roi  faible,  lâche  ou  même  félon,  le  dévouement  et  le 
courage  du  vassal,  qui  sauve  le  monarque  indigne  en 
quelque  sorte  malgré  lui  ;  on  peut  citer  notamment  le 
Couronnement  de  Louis,  ou  plutôt  l'ensemble  des  chan- 
sons sur  Guillaume  d'Orange,  qui  ont  pour  idée  fonda- 
mentale, ainsi  que  l'a  montre  M.    Bédier%   l'antithèse 

1.  Cet  épisode  est  du  reste  très  maladroitement  amené,  car  on 
ne  voit  pas  bien  comment  le  roi,  rentré  en  France  au  moment  où 
il  se  querelle  avec  Landri  (v.  i3ig  et  suiv.),  se  trouve  subite- 
ment près  du  Rhin  (v.  4328  et  suiv.),  exposé  à  un  coup  de  main 
des  Saisnes,  qui  sont  fixés  de  l'autre  côté  du  fleuve  et  qui  le  tra- 
versent pour  aller  surprendre  Pépin  à  la  chasse. 

2.  Les  Légendes  épiques,  I  (i'«  édition),  280. 


XCII  DOON    DE   LA   ROCHE 

entre  le  roi,  perpétuellement  représenté  comme  un  être 
lamentable,  et  le  vassal,  perpétuellement  glorifié.  Ici 
encore,  l'auteur  de  F  reste  bien  au-dessous  de  ses 
modèles. 

Nous  pouvons  encore  signaler  un  épisode  qui  tient 
du  lieu  commun  dans  une  partie  antérieure  du  poème 
(v.  171 3  et  suiv.)  :  c'est  celui  où  les  bourgeois  de  Colo- 
gne, après  la  plainte  portée  par  Gonteaume,  se  mettent 
en  mouvement  contre  Tomile  et  Malingre,  qui  se  sont 
emparés  des  «  dromadaires  »  des  messagers  de  l'empe- 
reur de  Gonstantinople,  auxquels  Gonteaume  avait 
accordé  l'hospitalité.  Il  est  assez  probable  '  que  nous 
sommes  ici  en  présence  d'une  invention  de  l'auteur  de 
F.  Quel  que  soit  l'auteur  de  l'épisode,  il  n'a  pas  fait 
preuve  d'une  bien  grande  originalité.  Nous  avons  déjà 
dit  plus  haut  que  ce  soulèvement  des  habitants  d'une 
ville  contre  un  chevalier  qui,  à  leurs  yeux,  s'est  mal 
conduit,  est  une  sorte  de  lieu  commun,  qui  se  trouve 
dans  d'autres  chansons  de  geste  et  même  dans  le 
Conte  du  Graal  de  Chrétien  de  Troyes.  —  L'évêque 
guerrier  Auberi,  oncle  d'Olive,  nous  représente  le  type 
ancien  du  prélat  féodal  et  guerrier;  c'est  une  copie 
affadie  du  Turpin  de  la  Chanson  de  Roland. 

Le  classement  des  versions,  tel  que  nous  le  propo- 
sons, diffère  notablement  de  celui  de  M.  Benary';  cette 
différence  est  la  conséquence  naturelle  de  nos  diver- 
gences d'appréciation,  surtout  en  ce  qui  concerne  la 
valeur  de  la  version  N.  Notre  système  a  sur  celui  du 
savant  allemand  l'avantage  d'une  plus  grande  simpli- 
cité ;  il  suppose  moins  de  versions  perdues.  La  partie 

1.  J5  ne  contient  rien  qui  corresponde  â  tout  ce  récit  de  l'envoi 
des  messagers  et  de  leurs  aventures  ;  mais  il  faut  toujours  se 
rappeler  que  l'auteur  de  E  se  permet  de  grandes  libeités  avec 
son  original. 

2.  Voir  le  tableau  généalogique  des  versions,  p.  328  du  mé- 
moire de  M.  Benary. 


INTRODUCTION  XCIII 

de  notre  théorie  relative  à  l'origine  folklorique  du 
thème  est  naturellement  une  hypothèse'  ;  mais  si  notre 
tableau  généalogique  des  versions  est  juste,  Doon  de  la 
Roche  offre  un  exemple  remarquable  des  formes  di- 
verses, de  plus  en  plus  compliquées,  que  peut  revêtir 
un  thème  de  chanson  de  geste  *. 

Nous  avons  jusqu'ici  négligé  de  propos  délibéré  un 
témoignage  dans  lequel  on  pourrait  voir  le  reflet  d'une 
version  perdue  de  Doon  de  La  Roche,  différente  de 
toutes  celles  que  nous  connaissons,  mais  qui  nous 
semble  plutôt  une  fantaisie  individuelle  de  jongleur.  Il 
s'agit  de  passages  relatifs  à  Doon  et  à  sa  femme  Olive 
qui  se  lisaient  dans  un  renouvellement  de  la  chanson  de 
Doon  de  Nanteuil,  actuellement  perdu,  mais  dont  le 
président  Fauchet  a  pris  des  extraits  qui  ont  été  publiés 
par  Paul  Meyer  *.  On  y  lit  (p.  22  de  l'article  de 
P.  Meyer)  : 

1 .  On  pourrait  encore  supposer  que  l'auteur  du  poème  arché- 
type avait  présent  à  l'esprit,  non  le  conte  populaire  lui-même, 
mais  la  forme  primitive  de  la  Naissance  du  Chevalier  au  Cygne, 
conservée  dans  le  Dolopathos  et  dans  laquelle,  comme  nous  l'avons 
vu,  ce  conte  est  utilisé  et  modifié  :  la  coïncidence  curieuse  que 
la  sœur  des  frères  métamorphosés  en  cygnes  va  visiter  sa  mère, 
enterrée  à  mi-corps  dans  la  cour  du  château,  de  même  que  Lan- 
dri,  dans  N,  découvre  sa  mère  dans  la  prison  affreuse  où  elle  a 
été  enfermée,  serait  un  argument  à  l'appui  de  cette  façon  de 
voir.  Mais  la  chanson  primitive  de  la  Naissance  du  Chevalier  au 
Cygne  était-elle  antérieure  au  Doon  de  la  Roche  primitif? 

2.  On  pourrait  objecter  à  notre  théorie  que,  F  étant  probable- 
ment antérieur  à  l'an  1204,  et  notre  classement  postulant  deux 
poèmes  français  perdus,  le  poème  primitif  devrait  vraisembla- 
blement se  placer  avant  ii5o.  Cela  peut  paraître  une  date  bien 
ancienne  pour  une  chanson  qui  ne  contient  aucune  donnée  his- 
torique. Mais  on  pourrait  répondre  en  citant  l'exemple  de  la 
chanson  archétype  d'Ami  et  Amile,  qui  ne  contient  pas  non 
plus  d'éléments  historiques  et  qui  n'en  est  pas  moins  fort  an- 
cienne, probablement  antérieure  à  l'an  iioo  (voir  J.  Bédier,  Les 
Légendes  épiques,  II,  179). 

3.  Remania,  XIII  (1884),  1-26. 


XCIV  DOON    DE   LA    ROCHE 

Olive,  seur  de  Charles,  fut  mariée  a  Doon  de  la  Roche, 
seigneur  de  Frize  (?),  et  fut  séparée  de  lui,  puis  espousée  par 
Bertran,  fils  de  Naismes. 

Et  plus  haut,  p.  21  : 

Bertran,  fils  de  Naismes,  espouse  Olive,  fille  de  Pépin, 
seur  de  Charles,  et  d'elle  eut  Gautier,  qui  espousa 
Nevelon  ',  fille  dudit  Charles  et  tua  Justamont. 

P.  Meyer,  en  publiant  ces  extraits,  conjectura  (p.  lo 
de  son  mémoire)  que  l'auteur  du  renouvellement  de 
Doon  de  Nanteuil  connaissait  Doon  de  La  Roche 
«  d'après  une  rédaction  dont  nous  ne  soupçonnions  pas 
l'existence,  »  Cela  est  possible;  mais  les  imaginations 
que  nous  présentent  ces  deux  extraits  sont  tellement 
étranges  *  qu'il  est  plus  probable  que  nous  sommes  en 
présence  d'une  invention  personnelle  du  jongleur  tardif 
qui  renouvela  la  chanson  de  Doon  de  Nanteuil.  —  On 
peut  remarquer  qu'ici,  comme  dans  la  Karlamagnus- 
Saga  et  le  chant  des  Fœroe,  Olive  est  la  fille,  non  la 
sœur  de  Pépin;  cela  est  la  conséquence  du  fait  que 
l'action  de  Doon  de  Nanteuil  est  placée  sous  le  règne  de 
Charlemagne  :  voulant  mêler  Olive  à  cette  action, 
l'auteur  a  été  obligé  de  la  rajeunir  d'une  génération,  et 
d'en  faire  la  sœur,  non  la  tante  de  l'empereur.  Le  renou- 
veleur  de  Doon  de  Nanteuil  et  le  rédacteur  de  la  Karla- 
magnus-Saga  ont  fait,  chacun  de  son  côté,  le  même 
changement. 

Si,  après  cette  étude  sur  les  différentes  formes  de  la 
légende  épique  de  Doon  de  La  Roche,  on  essaie 
d'apprécier  la  valeur  littéraire  de  F  considéré  en  lui- 

i.  Nevelon  est  un  nom  d'homme.  Si  Fauchet  a  bien  lu,  il  y  a 
ici  une  véritable  singularité. 

2.  Notamment  en  ce  qui  concerne  la  mort  de  Justamont,  tué  par 
Gautier,  fils  de  Bertran  et  d'Olive.  Une  tradition  constante  fait 
tuer  Justamont  par  Pépin  le  Bref  (voir  G.  Paris,  Mélanges  de  lit- 
térature française  du  moyen  âge,  p.  2oi-2o3,  214).  , 


INTRODUCTION      »  'XCV 

même,  on  arrive,  je  crois,  à  un  jugement  d'ensemble 
moins  favorable  que  celui  porté  jadis  par  P.  Meyer, 
dans  son  rapport  de  1878  à  la  Société  des  Anciens 
Textes  Français.  Le  style  du  poème  a  quelque  chose  de 
mou,  les  caractères  sont  souvent  d'une  grande  banalité  ', 
Une  grande  partie  de  F  n'est,  notre  discussion  l'a  mon- 
tré, qu'un  renouvellement  d'un  poème  antérieur  (O'): 
c'est  ainsi  que  la  comparaison  avec  E  montre  que  la  jolie 
scène  où  le  petit  Landri  proteste  contre  le  second 
mariage  de  son  père,  n'est  pas  de  l'invention  de  l'auteur 
de  F,  mais  se  lisait  dans  son  original.  —  Les  épisodes 
que  ce  «  trouveur  »  a  ajoutés  de  son  crû  sont  en  grande 
partie  des  lieux  communs,  faisant  partie  du  «  matériel 
roulant  »  de  l'épopée,  suivant  l'expression  de  G.  Paris. 
Chose  curieuse  :  notre  poète,  qui  développe  parfois 
avec  une  insistance  inutile  et  choquante  les  scènes  bru- 
tales et  cruelles  %  montre  le  plus  de  talent  dans  les 
tableaux  d'un  genre  paisible  et  en  quelque  sorte  idyl- 
lique. La  scène  où  Bernard,  le  riche  «  vavasseur  »,  assis, 
le  soir,  sous  un  chêne,  voit  rentrer  ses  beaux  troupeaux 
et  a  cependant  l'âme  attristée  par  le  regret  de  son  sei- 
gneur absent  (v.  3200  et  suiv.),  est  vraiment  belle  et  ori- 
ginale. C'est  également  une  invention  curieuse  que  ce 
Gonteaume,  à  la  fois  guerrier  et  riche  citoyen  de  Colo- 
gne, qui  invite  régulièrement  à  dîner  la  pauvre  Olive, 
honnie  de  tous  (v.  1889  et  suiv.).  Ici^  comme  ailleurs, 
l'esprit  du  poème  se  rapproche  de  celui  du  roman  bour- 
geois '. 
Doon  de  La  Roche  n'a  pas  eu,  sous  ses  différentes 

1 .  Qu'on  mette,  par  exemple,  le  traître  Tomile  à  côté  de 
Lambert  d'Oridon,  dans  Auberi  le  Bourgoin,  la  comparaison  ne 
sera  pas  à  l'avantage  de  notre  auteur. 

2.  Notamment  la  scène  entre  Olive  et  Audegour  prisonnière 
(v.  3024  et  suiv.),  celle  du  supplice  de  Tomile  (v.   4025  et  suiv.). 

3.  Voir  notamment,  à  la  fin  du  poème,  les  adieux  d'Olive  et  de 
Salmadrine  (v.  4472  et  suiv.). 


XCVI  DOON  DE   LA   ROCHE 

formes,  un  succès  de  premier  ordre  :  il  n'est  pas  devenu 
le  noyau  d'un  cycle;  il  n'a  même  pas  eu  une  suite,  ainsi 
que  cela  est  arrivé  à  Ami  et  Amile  et  à  Aye  d'Avignon. 
Cependant,  notre  poème  a  pénétré  dans  le  Midi.  Dans 
VEnsenhamen  bien  connu  où  le  Catalan  Guiraut  de 
Cabrera,  sous  prétexte  de  reprocher  à  un  jongleur  son 
ignorance,  donne  une  longue  énumération  de  sujets 
épiques,  figure  entre  autres  Doon'.le  jongleur,  dit  Gui- 
raut, ne  sait  chanter 

Ni  d'Oliva,  ni  de  Doon  '. 

Dans  le  Nord  de  la  France,  le  succès  de  la  chanson 
s'est  longtemps  maintenu,  et  Doon  est  devenu  un  sujet 
de  tapisserie  :  en  1387,  Jean  Cosset,  d'Arras,  vendit  à 
Philippe  le  Hardi  VHistoire  de  Doon  de  La  Roche, 
pour  600  francs  *. 

^  Enfin  nous  devons  signaler  l'imitation  probable  de 
certains  épisodes,  de  certains  traits  de  Doon  de  La  Roche, 
et  spécialement  du  poème  conservé,  dans  la  chanson  de 
geste  deParise  la  Duchesse.  Déjà  M.  W.  Benary  a  noté 
(p.  333  de  son  mémoire)  une  scène  analogue  dans  les 
deux  poèmes,  et  conclu  à  une  imitation  de  Doon  par 
l'auieur  de  Parise  ;  on  peut  relever  encore  d'autres  points 
de  ressemblance.   Remarquons  d'abord  qu'on  retrouve 


1.  Édition  de  Bartsch,  Denkmàler  der  proven^^alischen  Litte- 
ratur  (Stuttgart,  i856,  in-8»),  p.  91.  Le  texte  de  Bartsch  porte 
Olitia,  mais  la  leçon  du  manuscrit  d'Esté  est  bien  Oliva;  voir 
A.  Mussafia,  dans  les  Sitpingsberichte  de  l'Académie  de  Vienne, 
classe  philos,  histor,,  t.  LV(i867),  I,  425.  Déjà  Ferdinand  Wolf 
avait  conjecturé  qu'Oliva  était  la  vraie  leçon  et  que  l'allusion  se 
rapportait  à  Doon  de  La  Roche;  voir  Denskschriften  de  l'Aca- 
démie de  Vienne,  classe  philos,  histor.,  VIII  (1857),  268,  note  2. 
L'activité  poétique  de  Guiraut  de  Cabrera  se  place  dans  les 
vingt  dernières  années  du  xii«  siècle  (voir  G.  Paris,  Mélanges  de 
littérat.  franc,  du  m.  â.,  p.  221,  n.  3). 

2.  J.  Guiffrey,  Histoire  de  la  Tapisserie  (Tours,  1886,  in-4»), 
p.  42. 


INTRODUCTION  XCVII 

dans  Parise  le  thème  principal  de  Doon,  la  mère  réha- 
bilitée et  vengée  par  le  fils  ',  et  aussi  le  thème  secon- 
daire, l'exilé  qui  se  rétablit  dans  sa  patrie  avec 
l'appui  d'un  prince  étranger;  mais  il  y  a  des  ressem- 
blances plus  précises.  Le  vieux  Clarembaut  (c'est  ce 
qu'a  déjà  noté  M.  Benary)  proteste  contre  le  second 
mariage  du  duc  Raimond  (p.  49  de  l'édition)  de  même 
que  le  petit  Landri,  dans  Doon,  proteste  contre  le 
second  mariage  de  son  père;  on  peut  noter  que  Cla- 
rembaut, comme  Landri,  s'en  prend,  en  termes  violents, 
presque  identiques,  au  prélat  qui  va  célébrer  le  mariage, 
mais  il  faut  remarquer  que  la  scène  a  dans  Doon 
quelque  chose  de  plus  original,  vu  que  c'est  un  enfant 
qui  parle.  Ce  vieux  Clarembaut,  le  défenseur  de  Parise, 
présente  de  singulières  analogies  avec  Gonteaume,  le 
partisan  d'Olive  dansi^;  tous  les  deux  sont  représentés 
comme  souffrants,  malades  ^;  mais  dans  Parise  cette 
maladie  n'est  pas  motivée,  tandis  que,  dans  F,  elle  Test 
par  le  chagrin  que  cause  à  Gonteaume  l'absence  de 
Doon.  Ici  encore,  F  est  supérieur  à  Pa*-ise.  Enfin, 
Parise,  dans  la  chanson  qui  porte  son  nom,  est  accusée, 
comme  Olive  dans  F,  de  vivre  en  prostituée;  on  peut 
noter  que  le  vers  2546  (p.  76  en  bas)  de  Parf^e  est 
presque  identique  au  vers  917  de  i*'^ 

Ces  faits  sont  d'autant  plus  curieux  que  Parise  la 
Duchesse,  au  point  de  vue  littéraire,  nous  paraît,  dans 
son  ensemble,  préférable  à  Doon  de  la  Roche.  Mais  il  y 
a,  dans  l'histoire  littéraire,  d'autres  exemples  d'imi- 
tateurs supérieurs  à  leurs  modèles. 

1.  On  peut  remarquer  que,  dans  Parise,  la  mère  est  exilée 
(p.  22  de  l'édition  Guessard  et  Larchey);  Parise  est  par  conséquent 
plus  éloignée  du  thème  primordial  que  N  et  même  que  F,  où  il 
reste  des  traces  de  l'emprisonnement  primitif". 

2.  Parise  la  Duchesse,  p.  ii,  i3,  23;  comp.  F,  v. 

3.  Remarquons  encore  que  l'église  Saint-Pierre  de  Cologne, 
mentionnée  assez  souvent  dans  F,  l'est  également  dans  Parise  la 
Duchesse  {v.  928,935). 

g 


XCVIII  DOON    DE    LA    ROCHE 

Comme  tant  d'autres  chansons  de  geste,  Doon  de  La 
Roche  a  été  populaire  hors  de  F'rance  :  nous  avons  vu 
que  la  légende  épique,  sous  ses  différentes  formes,  a  été 
imitée  ou  résumée  en  Espagne,  en  Angleterre,  en  Nor- 
vège, en  Islande;  dans  la  première  moitié  du  siècle 
dernier,  le  récit  des  malheurs  d'Olive  et  des  aventures 
de  Landri  se  chantait  encore  aux  îles  Fœroe.  De  toute 
cette  gloire  traditionelle  il  ne  reste  actuellement,  en 
langue  française,  qu'un  seul  document  complet  :  le 
manuscrit  de  Londres  contenant  le  poème  qui  voit 
enfin  le  jour. 


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r«afc  .n  "^î;:  :  ■;;.-•'  ■•■'1  " 

APPENDICE 

A. —  REMARQUES  SUR  QUELQUES  NOMS  PROPRES. 

Le  nom  de  Landri,  le  véritable  héros  du  poème,  se 
retrouve  dans  toutes  les  versions  (dans  N,  «  Landres  », 
dans  E,  «  Enrrique  »,  par  une  altération  que  nous  avons 
signalée  plus  haut,  p.  lxvii).  M.  F.  Lot,  dans  son  étude 
sur  la  chanson  de  geste  perdue  de  Landri,  qui  aurait 
eu  pour  héros  un  Landri,  comte  de  Nevers,  fait  cette 
remarque  '  :  «  Je  hasarde  en  terminant  l'hypothèse  que 
Landri  a  fourni  son  nom,  rien  que  son  nom,  au  roman 
en  vers  de  Doon  de  La  Roche  \  Le  héros  de  cette  com- 
position de  pure  fantaisie,  dont  l'action  est  censée  se 
passer  sous  le  roi  Pépin,  est  Landri,  fils  de  Doon,  sur- 
nommé «  de  la  Roche  ».  Ce  Doon  de  la  Roche  ne 
devrait-il  pas  son  existence  à  Boon  de  Monceaux  [Bodo 
de  Moncellis),  père  du  comte  de  Nevers,  Landri?  Je 
suppose  que  Boon  a  été  changé  en  Doon  sous  l'influence 
de  «  Doon  de  Mayence  ». 

Cette  hypothèse  est  ingénieuse;  nous  devons  cepen- 
dant faire  observer  qu'il  n'est  pas  absolument  sûr  que 
le  père  de  Landri  se  soit  appelé  «  Doon  de  La  Roche  » 
dans  le  poème  archétype.  Dans  N,  il  s'appelle  Hugon, 
souverain  du  val  de  xMunon.  Il  est  vrai  que  l'on  pour- 
rait supposer  que  l'imitateur  anglais  du  poème  primitif 

1.  Romania,  XXXII  (igoS),  i3. 

2.  M  Lot  ajoute  en  note  :  «  Je  m'aperçois  que  M.  de  la  Lande 
de  Calan  a  eu  l'idée  de  ce  rapprochement  dans  son  livre  bizarre. 
Les  personnages  de  l'époque  romane  (Redon,  1901,  in-8°),  p.  172  ». 
—  Les  «  Landri  »  sont  très  nombreux  dans  l'épopée  française  : 
la  Table  de  M.  E.  Langlois  en  énumère  vingt-six.  Cette  fré- 
quence semble  indiquer  qu'un  prototype,  célèbre  de  bonne 
heure,  a  amené  la  popularité  du  nom. 


C  DOON    DE    LA    ROCHE 

perdu  aura  remplacé  le  nom  de  «  Doon  »,  dont  il  n'y 
avait  pas  d'équivalent  en  anglais,  pour  celui,  plus 
connu  de  «  Hugon  ».  L'auteur  du  roman  espagnol  s'est 
trouvé  placé  devant  la  même  difficulté  :  il  s'en  est  tiré 
en  désignant  constamment  le  mari  d'Olive  par  une 
périphrase,  «  el  Duque  de  la  Roche  ». 

Que  le  nom  de  «  Doon  »  se  soit  trouvé  ou  non  dans 
le  poème  primitif,  c'est  certainement  un  ancien  nom 
épique  :  à  côté  de  «  Doon  de  Mayence  '  »,  que  rappelle 
M.  Lot,  on  peut  citer  «  Doon  de  Nanteuil  »,  héros  d'une 
chanson  de  geste  qui  n'est  certainement  pas  de  l'époque 
la  plus  reculée  de  l'épopée,  mais  dont  la  première  rédac- 
tion devait  remonter  assez  haut  '. 

Le  «  val  de  Munon  »,  dont  Hugon  (=  Doon)  est  le 
souverain  dans  N,  reste  mystérieux  \ 

La  Roche  est  le  domaine  propre  du  père  de  Landri 
dans^"  comme  dans  A^  :  ce  nom  remonte  donc  à  O*. 
M.  F.  Lot,  qui  croit  que  l'auteur  de  Doon  a  été  in- 
fluencé, en  ce  qui  concerne  le  personnage  de  Landri, 
par  la  chanson  de  geste  perdue,  qui  avait  comme  pro- 
tagoniste un  comte  de  Nevers,  rappelle*  qu'il  y  a  dans  le 
Nivernais  plusieurs  localités  du  nom  de  «  La  Roche». 
Mais  la  géographie  de  Doon  indique  plutôt  l'Est 
comme  théâtre  de  l'action  ;  cela  est  évident  en  ce  qui 
concerne  F.  Les  indications  de  E  sont  plus  vagues; 
toutefois  le  fait  que,  dans  le  roman  espagnol,  Tomillas 
(=Tomile)  est  comte  de  Cologne,  semble  bien  indiquer 
que,  dans  O',  l'action  était  placée  également  dans  l'Est. 


1.  Ce  personnage  doit  être  bien  plus  ancien  que  la  chanson  de 
geste  très  récente  dont  il  est  le  héros;  voir  les  observations  de 
G.  Paris,  Histoire  poétique  de  Charlemagne,  p.  76  et  168. 

2.  Voir  l'étude  de  P.  Meyer  dans  le  t.  XIU  de  \a  Remania,  citée 
plus  haut,  p.  xcni. 

3.  M.  Benary  (p.  239,  note,  de  son  mémoire)  a  vainement  essayé 
de  l'identifier,  nous  n'avons  pas  été  plus  heureux. 

4.  Article  cité,  p.  i3,  note  4. 


INTRODUCTION  CI 

On  peut  par  conséquent  identifier  '  le  La  Roche  de  E 
et  F  avec  la  ville  de  Laroche  dans  le  Luxembourg 
belge,  localité  certainement  ancienne  et  qui  était  jadis 
le  chef-lieu  d'un  comté.  11  est  vrai  que  La  Roche,  dans 
E  aussi  bien  que  dans  F,  est  représentée  comme  une 
ville  fortifiée,  tandis  que  le  Laroche  belge  ne  fut  entouré 
de  murailles  que  dans  la  première  moitié  du  xiv^  siècle  '; 
mais  on  sait  que,  en  pareille  matière,  les  auteurs  de 
chansons  de  geste  ne  se  piquent  pas  d'une  exactitude 
absolue. 

Le  nom  d'Olive^,  qui  se  trouve  à  la  fois  dans  F,  dans 
E  («  Olive  »)  et  dans  N  («  Olif  »),  se  lisait  certainement 
dans  le  poème  archétype  (O'). 

Dans  A^,  le  traître  s'appelle  Milon  ;  M.  Benary  a  déjà 
fait  remarquer  (p.  35  5  de  son  mémoire)  que  Milon  est 
un  nom  de  traître  dans  Aye  d'Avignon,  Gui  de  Bour- 
gogne et  Bovon  de  Hanstone;  il  peut  donc  remonter  au 
poème  français  primitif. 

Le  nom  de  «  Tomile  »,  que  donne  F,  se  retrouve,  lé- 
gèrement modifié  («  Tomillas  »),  dans  E  :  il  se  lisait 
donc  dans  0\  Ce  nom  manque  dans  la  Table  de  M.  E. 
Langlois  ;  il  a  l'air  fabriqué,  peut-être  sur  ie  modèle 
d'Amile  *. 

La    fille    du     traître,   seconde     épouse     de    Hugon 


1.  Ainsi  que  l'a  déjà  proposé  M.  Benary,  p.  358  de  son  mémoire. 

2.  A.  de  Leuze,  Histoire  de  Laroche  et  de  son  comté  (Arlon, 
i88o,  in-8°),  p.  6. 

3.  Ce  nom  paraît  emprunté  à  l'hagiographie  :  la  liste  alpha- 
bétique des  saints  dans  L.  de  Mas-Latrie,  Trésor  de  chronologie, 
mentionne  cinq  sainte»  du  nom  d'Olive.  Ce  nom  se  retrouve  dans 
FAie  de  Saint-Gille  et  dans  Yde  et  Olive,  suite  de  Hiion  de  Bor- 
deaux (voir  E.  Langlois,  Table)  ;  ces  deux  poèmes  l'ont  proba- 
blement emprunté  à  Doon  de  La  Roche. 

4.  Dans  les  romances  espagnoles  qui  se  rattachent  à  la  chan- 
son d'Aiol,  le  traître  s'appelle  «  Tomillas  *  (voir  G.  Paris,  Hist. 
poétique  de  Charlemagne,  p.  212).  Ce  nom  est  probablement 
emprunté  à  la  version  espagnole  en  prose  de  Doon  {E). 


cil  DOON   DE  LA    ROCHE 

(=:  Doon),  s'appelle  Aglavia  dans  AT,  nom  qui  paraît 
singulier  et  qui  ne  se  trouve  pas  dans  l'onomastique 
de  l'épopée  française  '. 

Le  fils  issu  du  second  mariage  de  Hugon  (=  Doon) 
avec  cette  femme  s'appelle  Malalandres  dans  N.  G. 
Paris  (p.  109  de  son  analyse)  a  restitué  avec  beaucoup 
de  vraisemblance  comme  nom  français  Mallandri;  le 
nom  aurait  été  inventé  pour  faire  antithèse  à  Landri. 
Dans  F,  ce  personnage  s'appelle  Malingre  \  dans  £",  où  il 
ne  paraît  qu'une  fois,  Malindre  (fol.  d.  iii,  r°  et  v°). 
Cette  forme  semble  à  première  vue  un  intermédiaire 
entre  Mallandri  et  Malingre,  mais  il  est  plus  probable 
qu'on  est  en  présence  d'une  altération  pure  et  simple  de 
Malingre  '. 

Cet  examen  des  principaux  noms  ne  répand  pas 
autant  de  lumière  qu'on  le  désirerait  sur  la  question 
importante  de  la  véritable  nature  de  A^.  Le  traducteur 
anglais  de  O'  a  changé,  semble-t-il,  certains  noms  de  son 
original,  mais,  d'autre  part,  l'auteur  de  O*  paraît  avoir 
innové  dans  l'onomastique  du  poème,  de  même  qu'il 
en  modifie  profondément  le  contenu. 


1 .  Il  en  est  de  môme  de  «  Siliven  «,  nom  de  la  nourrice  et  con- 
seillère de  Landri  dans  N. 

2.  Malingre  est  le  nom  d'un  Sarrasin  dans  la  Chanson  d'An- 
tioche,  et  celui  d'un  personnage  de  la  lignée  de  Ganelon  dans 
une  variante  de  Gui  de  Bourgogne  (voir  E.  Langlois,  Table), 
«  Malyngres  »  figure  parmi  les  parents  du  traître  Macaire  dans 
l'ancienne  traduction  espagnole  en  prose  de  la  Reine  Sébile, 
p.  5i  I,  col.  a  en  bas,  de  l'éd.  Bonilla  y  San  Martin,  dans  Libros  de 
Caballerias,  iv  parte,  Ciclo  arturico,  ciclo  carolingico,  Madrid, 
1907,  pet.  in-fol.  [Nuova  Biblioteca  de  autores  espanoles,  VI).  — 
Au  moyen  âge,  le  nom  de  Malingre  a  été  porté  par  des  person- 
nages réels  (cf.  Bulletin  de  la  Société  des  Anciens  Textes 
Français,  III,  97).  Aujourd'hui  c'est  un  nom  de  famille;  le  Bottin 
de  Paris  pour  19 18  compte  trois  «  Malingre  ».  Les  rapports  de  ce 
nom  avec  l'adjectif  malingie  ne  sont  pas  bien  éclaircis. 


INTRODUCTION  CIII 


B. SUR  UN  DETAIL  DU  RECIT  DE  LA  «  KARLAMAGNUS-SAGA  ». 

Afin  de  réunir  tout  ce  qui  peut  donner  lieu  à 
quelques  rapprochements  avec  le  récit  du  poème  pri- 
mitif, tel  qu'il  est  résumé  dans  la  Karlamagnus-Saga, 
j'appelle  ici  l'attention  sur  un  récit  épique  irlandais, 
forme  spéciale  d'un  conte  international  '  dont  l'ori- 
gine première  n'est  pas  encore  certaine,  bien  que, 
en  ce  qui  concerne  le  récit  irlandais,  une  dérivation 
byzantine  paraisse  très  probable.  Dans  ce  récit,  qui 
se  trouve  dans  un  manuscrit  antérieur  à  ii5o,  se 
lit  l'épisode  suivant,  dont  j'emprunte  le  résumé  au 
professeur  R.  Thurneysen  : 

Une  reine  coupable  confesse  ses  méfaits  (des  meurtres)  à 
son  confesseur  ;  celui-ci  les  révèle  à  son  tour  au  roi,  qui 
ordonne  de  l'enfermer  dans  une  logette  de  bois  près  d'un 
carrefour.  Elle  vit  là  pendant  sept  ans  de  ce  que  des  gens 
charitables  lui  font  passer  par  les  petites  fenêtres  de  la 
logette.  Au  bout  de  sept  ans,  le  roi,  apprenant  qu'elle  vit 
encore,  la  fait  sortir,  et,  sur  sa  demande,  fonde  pour  elle 
un  couvent  et  une  église. 

Cela  rappelle  quelque  peu  le  récit  de  la  Karlama- 
gnus-Saga (p.  io8  de  l'analyse  de  G.  Paris)  :  «  il  [Char- 
lemagne]  approuve  l'avis  de  Milon  d'enfermer  Olive 
dans  une  tour  de  pierre  ;  pendant  sept  ans  elle  y  vivra 
d'un  pain  grossier  et  d'une  cruche  d'eau,  et  si  au  bout 
de  ce  temps  on  la  trouve  encore  vivante,  c'est  signe 
qu'elle  sera  innocente  et  accusée  à  tort  ».  —  La  res- 
semblance des  deux  récits  est  plutôt  extérieure  que  fon- 
damentale; cependant,  il  est  possible  que  le  récit  bvzan- 
tin  ait  influencé  la  chanson  de  geste  *. 

Gédéon  HuET. 


8.  Voir  Reinh.  Kôhler,  Kleine  Schriften,  II,  SgS-Sgg. 
().Ibid.,  II,  398. 


CIV  DOON    DE    LA    ROCHE 

C.  — NOTE  COMPLÉMENTAIRE  SUR  l'hISTORIQUE  DE  l'rDIITON. 

Lorsque  Gédéon  Huet  s'est  éteint,  à  Paris,  le 
lo  novembre  192 1,  les  feuilles  i-i  i  de  l'édition  de  Doow 
de  la  Roche  (texte  et  début  des  notes)  étaient  tirées;  les 
feuilles  a-g  (Introduction)  avaient  été  mises  en  pages 
après  une  première  correction  de  l'auteur. 

Comme  commissaire  responsable,  secondé  par 
M.  Henri  Lemaître,  que  Gédéon  Huet  lui-même  avait 
désigné  dans  son  testament,  j'ai  procédé  à  une  dernière 
révision  de  l'Introduction  et  fait  les  quelques  modifica- 
tions de  détail  qui  m'ont  paru  indispensables. 

M.  Henri  Lemaître,  utilisant  les  notes  de  Paul  Meyer 
et  de  Gédéon  Huet,  a  établi  la  copie  du  Glossaire,  de 
l'Index  des  noms  propres  et  de  la  Table  des  matières 
Grâce  à  son  zèle,  la  disparition  successive  des  deux 
auteurs  n'a  pas  entraîné  pour  la  publication  de  ce 
volume  autant  de  retard  qu'on  aurait  pu  le  craindre.  Au 
nom  de  la  Société  des  Anciens  Textes  français,  je  tiens  à 
lui  exprimer  ici  les  plus  vifs  remerciements. 

Antoine  Thomas. 


-^seB- 


DOON    DE    LA    ROCHE 


I 


Seignor,  oez  chançon  cortoise  et  avenant;     (/.  /) 

Vieille  est  et  ancienne,  de  Doon  l'Alemant. 

Toz  tens  servi  a  cort  par  ses  armes  portant; 

De  piller,  de  rober,  n'ot  un  denier  vaillant  ; 
5        II  essauça  toz  dis  et  leva  ses  serjanz. 

Les  povres  chevaliers,  les  orphelins  enfanz. 

Nuns  bons  de  son  lignage  n'ot  de  terre  .j.  arpant, 

Fors  solement  La  Roche  et  l'enor  qu'i  apent; 

Mais  li  douz  rois  de  gloire  en  donna  Doon  tant 
lo      Com  vos  orrez  avant,  s'il  est  qui  vos  en  chant. 

Li  dus  servi  Pépin  le  roi  molt  longement, 

A  Paris  en  la  sale,  toz  dis  molt  loiaument. 

N.  B.  Pour  les  deux  premières  laisses,  toutes  les  leçons  rejetées 
sont  données,  même  quand  elles  n'intéressent  que  la  graphie. 

I  Seigneurs  oues  chançons  courtoise.  —  3  Touz  temps,  court 
p.  ces  années  pourtant.  —  4  piler,  ung  deniers.  —  5  II  lassauça 
tous  diz,  serjans.  —  6  anfans.  —  8  seullement,  apant.  —  9  doulx. 
—  10  Comme,  orés,  c'il,  vous.  —  n  dux  servit,  longuement.  — 
13  Parix,  salle  tous,  loyaulment.  '  0 

I 


1         ..  DOON    DE    LA   ROCHE 

Molt  i  ot  Angevins  (?),  Baviers  et  Alemanz 

Et  Normans  et  Frisons  et  Pohiers  et  Flamens, 

1 5       Dessus  trestoz  les  autres  fu  i  Do  TAlemanz  : 
De  sens,  de  hardiesse  et  de  barnage  ot  tant, 
Quant  il  vait  en  tornoi,  li  gentiz  Alemanz, 
S'i  gaaignc  chevaus,  si  les  donne  as  serjanz 
Et  as  chevaliers  povres  qui  d'avoir  n'ont  nient, 

20      Quant  li  rois  tient  ses  plaiz,  cui  douce  France  apent, 
S'il  i  a  nul  tort  fait  ne  nul  faus  jugement, 
Li  conseil  [de]  Doon  le  vont  si  redreçant 
Ja  ne  s'en  plainderont  li  petit  ne  li  grant.  (v®) 

Et  jugleors  plusors  ot  a  sa  cort  toz  tens  ; 

25       Si  lor  donnoit  mantiaus  et  blïauz  bels  et  genz 
Et  peliçons  ermins  et  autres  garnemenz; 
Onques  n'i  vint  si  povre  nen  tort  de  li  mananz. 
Ores  si  [crut]  en  Deu  le  père  roi  aidant 
Que  a  veve  moillier  ne  vont  tolir  nient, 

3o       Ne  petit  orfelin  ne  fist  aler  plaidant; 

Por  tant  l'ama  li  sire  qui  fu  adonc  vivanz. 


II 

Molt  fu  Do  de  la  Roche  de  grant  nobilité, 
Li  gentilz  Alemans  qui  tant  fist  a  loer. 


1 3  dâgeûit  Bavies    et  Elemens;  c/.  vv.   ggS-'Q.  —>   14  Flamans 

—  i5  D.  trestous  1.  aultres  fui  Daon  l'Alement.  —  16  et  de 
hardies  et  de  barnaige.  —  17  vat,  tournoy,  gentis  Elemans.  —  18 
gaingne  chevaulx,  donnet  auz  serjans.  —  19  aus,  niant.  —  20  roy, 
ces  plait,  apant. —  21  faiz,  nulz  faulx  jugemant.  —  33  lé  p.  — 
24  pluseurs,  court,  tous  temps.  —  25  leurs  d.  mantiaulx  e^ 
bliaux  bes.  —  26  hermis,  aultres  garnemans.  —  27  nâ  cort  de 
li  menaz.  —  28  II  ne  serait  pas  impossible  que  roi  aidant  fttt  une 
mauvaise  leçon  pour  reamant  {pu  roiamant)  ;  cf.  v.  ii'j2.  — 
29  Gara  vove,  vot  tollir  néant.  —  3o  fit.  —  3i  Pour,  fuit,  viant, 

—  32  fut  Doz.  —  33  fit  aler. 


DOON   DE   LA   ROCHE  9 

Onques  puis  qu'il  prist  armes  et  il  fu  adobez 
35       Ne  vout  li  dus  ardoir  ne  preer  ne  rober, 

Ainz  servi  par  ses  armes  les  princes  et  les  pers, 

Et  tant  fist  lor  servise  que  li  donnent  asez. 

Doons  servi  Pépin  a  Paris  la  cité 

Trois  anztoz  acompliz,  ne  li  vout  rien  rover, 
40      A  .iij<=.  chevaliers  qui  sont  preu  et  séné. 

Et  Pépins  Tempereres  li  eiist  trop  donné  : 

Uneseror  avoit  nostre  empereres  ber, 

La  dame  ot  nom  Olive  au  gent  cors  honoré; 

Ele  amot  plus  le  duc  que  nule  riens,  fors  Dé; 
45      Mais  ainz  ne  l'en  ot  cuer  ne  corage  mostré 

Por  ce  qu'il  n'estoit  mie  de  si  haut  parenté. 

Seignor,  ja  dit  Tescriz  qui  vos  est  demostrez 

Que  il  nest  chose  en  terre,  tant  le  sache  on  celer, 
'1     Que  avant  ne  reveingne  quant  il  est  destiné. 
5o      Ainsi  font  les  amors  que  Do  a  démené  {f.  2) 

Vers  Olive  la  bêle  o  le  viaire  cler. 

Seignor,  ce  fu  .j.  jor  devant  Nativité, 

A  feste  saint  Andrier,  qu'Avant  doivent  entrer; 

Pépins  nostre  empereres,  li  gentiz  et  li  ber, 
55      Loa  ses  soudoiers,  ses  en  lessa  râler, 

Cui  .c.  mars,  cui  .iij",  avers  ce  que  il  set. 

As  princes  donna  [il  et]  chastiaus  et  citez, 

Donjons  et  hors  çt  viles,  recez  et  fermetez; 


34  qui  prit,  fut  adoubés.  —  35  vot,  dux,  proer.  —  36  Ains,  percs. 

—  37  leur  service  que  li  donnarent.  —  38  servit.  Au  lieu  de  Doons 
on  pourrait  proposer  Cil  Do.  —  39  ans  tous  acomplis,  vot.  — 
40  prou-  —  41  Pépin  l'amperieres.  —  43  serou.  —  43  gens,  corps. 

—  44  Elle,  nul. —  45  ains,  an,  couraige  monstre.  —  46  Pour  ce 
qui,  hault  parante.  — 47  Seignours,  escrit,  vous,  demoustré.  — 
48  Qui  n',  saiche.  —  5o  amours,  Doz  a  amené.  —  5i  belle.  — 
52  Seignours,  fut,  jour  davant.  —  53  Avant  doient.  —    54  gentil. 

—  55  Lea,  an  lassa.  Il  parait  manquer  un  vers.  —  56  Cu 
.c.  mars  ou  iijc  au's  ce  qu'il  il  est;  cf.  Charroi  deNimes,v.  38, 

—  57  Au  p.  d.  chastiaulx.  —  58  bours,  villes,  reces,  fermetés. 


4         /  t>OON   DE   LA   ROCHE 

Gui  qu'il  doint  ne  cui  non,  Doon  n'a  rien  donné, 

60       Le  gentil  Alemant,  ainçois  Ta  oblîé, 

Car  il  ot  en  la  cort  longement  conversé: 
Esté  i  ot  .iij.  anz  et  ou  quart  est  entrez. 
Cil  coart  chevalier  en  pristrent  a  parler 
Et  dïent  l'uns  a  l'autre  que  Do  est  oblïez, 

65      Tant  a  servi  le  roi  que  il  l'a  oblïé. 

«  Par  la  foi  que  vos  doi,  riens  ne  li  vuet  donner  : 
«  Il  gardera  la  cort  et  l'iver  et  l'esté, 
«  Et  tenra  les  chemises  quant  li  bainz  ert  chaufez, 
«  Si  avra  nom  Rouciens  as  grenons  enfumez.  » 

70      Tant  ala  la  parole  que  Pépins  bien  le  set; 
Grant  honte  en  a  li  rois,  s'a  Doon  apelé  : 
«  Sire  Do  de  La  Roche,  gentiz,  nobles  et  ber, 
«  Cil  autre  chevalier  m'ont  congié  demandé; 
«  Tuit  s'en  vont  en  lor  terres,  mais  vos  estes  remés. 

75      —  Sire,  »  ce  dist  li  enfes,  «  car  jel  sai  de  verte, 
«  Son  droiturier  seignor  doit  on  servir  assez, 
«  Et  je  vos  servirai  volentiers  et  de  gré; 
«  Et  quant  vos  vos  serez  des  autres  délivré,  (v*) 

«  Si  me  donrez  del  vostre  autant  que  vos  voudrez  ». 

80      Quant  Tentendi  li  rois,  grant  joie  en  a  mené  : 
«  Sire  Do  de  La  Roche,  gentiz  estes  et  ber  ; 
«  Par  la  foi  que  vos  doi,  ce  sai  bien  de  verte, 
«  Se  vos  auques  [m'Jamez,  toz  seroiz  mes  privez; 
«  Et  puis  que  je  vos  voi  [del  tôt]  entalenté 


6g  Que  qu'il  d.  ne  eu.  —  60  ainsois.  —  6i  oit,  cort  lon- 
guement. —  62  ans  et  onqes  e.  antres.  —  63  chevaliers,  prinrent, 
pariés.  —  64  li  .j.  a  l'a.  q.  Doz.  —  66  vous.  —  67  court.  — 
68  tanra,  bain  est  chauffé.  —  70  Pépin,  sçait.  —  71  roi.  — 
72  Doz,  gentil,  noble  et  bel.  —  j3  Ces  aultres  chevaliers. 
—  74  leur  terre  mas.  —  jb  dit,  anfes,  je  sçai  de  veritei.  — 
76  signeur,  assés.  —  77  vous,  voulantier,  grei.  —  78  vous  vous 
serés,  délivrés.  —  79  donrés  du,  vous  vouldrez.  —  80  antandi,  roi, 
joye.  —  81  Doz,  gentil  e.  e  bel.  —  82  foy,  vous,  vérité.  —  83  Se 
vous   amés  anques   tôt  seroit  m.  privés.  —  84  vous  v.  antalanté. 


DOON    DE    LA   ROCHE  3 

85       «  De  faire  mon  servise  sanz  point  de  fauseté,       :  . 
«  Par  la  foi  que  vos  doi,  hui  est  li  jors  entrez 
«  Que  vos  donrai  tel  chose  dont  vos  me  savrez  gré, 
«  Dont  li  vostres  lignages  sera  toz  honorez  : 
«  Olive  ma  seror  vueil  [jou]  que  vos  prenez; 

90      «  De  tote  Loeroigne  avrez  la  ducheé  : 
«  .XX.  chastiaus  i  a  forz  et  .xiiij.  citez; 
«  Et,  puis  que  voz  lignages  ert  au  mien  ajostez, 
a  Ci  a  soudées  granz,  si  les  vos  vueil  donner.  » 
Quant  l'entendi  li  enfes,  si  commence  a  plorcr  : 

95  «  Sire  douz  emperere,  merci!  por  amor  Dé; 
«  Mes  cuers  et  mes  avoirs  vos  sont  abandoné. 
«  Se  je  n'ai  [dame]  Olive,  ja  sont  famés  assez; 
«  Endroit  le  mien  lignage  me  covient  marier  : 
«  Li  oisels  qui  se  haiteainz  qu'il  puisse  voler 
-100    «  Chiet  a  terre  dou  ni,  s'est  a  terre  versez.  » 

Et  respondi  li  rois  :  «  Em  pardon  em  parlez.  » 
A  joie  et  a  lïesce  li  ont  fait  esposer. 
Molt  furent  granz  les  noces,  si  ont  .j.  moisduré; 
Li  jugleor  dou  règne  en  furent  bien  loé  : 

io5    II  en  ont  vair  et  gris  et  hermins  engolez,  [f- 3) 

Destriers  et  palefrois  et  muiez  sejornez. 
A  joie  et  a  barnage  furent  cil  asemblé. 
Adonc  i  fu  Landris  li  valiez  engendrez, 
Li  niés  le  roi  de  France,  qui  tant  fist  a  loer. 


85  san.  —  86  vous,  le  jour  antres.  —  87  vous,  savrés  grés.  — 
88  le  vostre  lignaige,  tous  honorés.  —  8g  veul  q.  vous  prenés.  — 
go  toute  Laorroigne  avrés.  —  gi  chastiaulx,  fors,  cités.  —  ga  vos 
lignaige  est,  ajostés.  —  g3  Ci  a  gens  {avec  un  signe  d'abrévia- 
tion) soudées  se  la  vous  vuel  d.  —  g4  anfes,  commance.  —  g5 
S.  doz  e.  m.  p.  l'a.  de  Dieu.  —  g6  abandonés  —  gy  assés. — 
g8  Androit,  linaige,  convient.  —  qg  oisel,  ce,  ains  qu'i.  —  100 
versés.  —  loi  parlés.  —  102  espouser.  —  io3  grande  1.  nopces, 
moix  dures.  —  jugleour  do  rôme.  —  io5  vers  e  g.  et  hermis  ango- 
lés.  —  106  séjournes.  —  107  joe,  barnaigc.  —  108  fui  Baudris  li 
vallès  engendrés.  —  109  n.  li  r.  -       ,.    ;    ..!  .  ^u. 


é 


DOON    DE   LA   ROCHE 


iio    Adonc  s'en  parti  Do,  li  ber  et  li  senez;     i 
A  .vijc.  chevaliers  gentilment  conreez 
S'en  va  droit  a  Coloigne,  ceie  bone  cité. 
A  joie  et  a  baudor  furent  cil  asemblé  ; 
Puis  furent  a  dolor  et  a  duel  desevré. 

1 15    .1.  losengiers  du  règne  les  a  toz  enchantez; 
Ilavoit  nom  Tomiles,  .j.  traîtres  mortex. 
Damedex  le  confonde,  qu'en  la  croiz  fu  penez  ! 


III 


Ilot  ja  a  Coloigne  .).  traïtor  félon  : 

Cil  ot  a  nom  Tomiles,  oncles  fu  Gueneloh, 
120    Cosins  germains  Hardré  et  Hervi(?)  le  larron, 

Si  apartint  Maugin,  .j.  encrisme  félon; 

Bien  vint  de  son  lignage  qu'il  felst  traîson. 

Sodoiers  fu  le  duc,  princes  de  sa  maison. 

Il  n'ama  onques  home  chevalier  se  lui  non. 
135    Ici[l]  mena  la  dame  par  grant  seducion; 

Par  ses  losengeries  la  destruit  et  confont. 

Il  apela  le  duc  a  conseil  sur  le  pont  : 

«  Sire  Do  de  la  Roche,  entendez  ma  raison. 

«  Je  dirai  tel  parole,  se  j'en  ai  le  pardon, 
i3o    «  Par  tote  Loeroigne  en  ira  li  renons.  » 

Et  respondi  li  dus  :  «  Car  le  nos  dites  dont.  (v°) 

—  Biaus  sire,  volentiers,  quant  j'en  ai  le  pardon. 

«  Ma  dame  ne  vos  aime  vaillissant  .j.  boton  : 


iio  partit  Doz,  bers,  sennes.  —  112  vat,  Coulongne  celle 
bonne.  J'adopte  la  forme  Coloigne,  qui  est  celle  du  fragment  L. 
-—  114  a  d.  a  adisel.  —  ii5  losangiers  de  rongne,  touz  an- 
chanté.  —  116  non,  traites.  —  117  an,  crois,  fust  penés.  —  118 
A  partir  d'ici  on  ne  donnera,  parmi  les  leçons  rejetées,  que 
celles  qui  présentent  quelque  intérêt.  —  119  ot  non.  —  lao 
Hardroi  et  Iduem  [ou  Iduein).  —  126  losengiers. 


BO€>t^   DE   LA   RÔËHË  'J 

«  1er  main  la  pris  provée  gisant  a.j.  garçon; 

i35    «  Ne  l'osai  envaïr,  car  pou  oi  compagnons.  » 
Quant  l'entent  li  dus  Do,  a  pou  d'ire  ne  font  : 
«  Tomiles  de  Goloigne,  baissiez  vostre  raison, 
«  Cafi  pat  icel  apostre  a  cui  peneant  vont, 
«  Par  pou  que  ne  vos  fier  [ens]  ouchiefd'unbaston; 

140    «  Et  se  vos  plus  d'Olive  me  dites  se  bien  non, 
«  Plus  haut  vos  ferai  pendre  que  nul  autre  larron. 
—  Sire,  »  dit  li  traître,  «  merci  !  por  Dieu  del  mont  ', 
«  Se  oel  vos  puis  prover  en  cest  mois  ou  nos  soms, 
«  Si  me  tfénchiez  la  teste  sans  autre  reençon.   » 

145    Quant  li  dus  l'entetidi,  si  tint  le  chief  embronc  ; 
Ilplore  tendrement  des  biaus  ieus  de  son  front. 
«  Dex,  »  dist  il,  «  sire  père,  par  vo  saintisme  nôn^ 
«  Car  me  donez  la  mort  ainz  que  vienne  li  jors. 
«  Haï!  terre,  car  fent  et  de  desoz  moi  font! 

i5o    «  De  ci  que  en  l'abisme  ne  vueii  avoir  sejor. 
«  Haï  !  Olive  dame,  de  la  vostre  façon 
«  Ne  sera  jamais  famé,  chevaliers  ne  nlis  hom. 
«  Je  vos  amoie  plus  que  riens  qui  fust  ou  mont.  » 


IV 

La  suer  le  roi  fu  molt  cortoise  et  avenant; 
i55    Ele  ot  .).  molt  biau  fil  de  Doon  l'Alemant  : 

Il  ot  a  non  Landri  par  droit  baptisement. 

El  gentil  damoisel  molt  i  ot  bel  enfant.  (/.  4) 

Tomiles  de  Goloigne  le  va  molt  soduiant; 

Ocire  vuet  sa  mère  a  duel  et  a  torment. 
160     .1.  garçon  apela,  sili  dist  :  «  Vien  avant. 

«  Se  je  t'osoie  dire  mon  cuer  et  mon  talent, 


i35  anveir,  compagnon.  —  145  ch.  a  uif  bron.  —  147  dit,  et 
toujours  ainsi.  —  148  C.  ne  d.  la  m.  a.  q.  nôme  li  j.  —  149 
de  d.  morfont.  —  i52  Ne  ferai. 


§  DOON   DE   LA    ROCHE 

«  Je  te  feroie  riche  et  d'or  fin  et  d'argent.  » 

Et  respont  li  garçons  :  «Tôt  a  vostre  commant. 

—  Va  donc,  si  le  me  jure  tost  et  isnelement, 
i65    «  Puis  te  dirai  mon  cuer  plus  descombréement.  * 

Li  glozs'engenoilla,  si  fist  le  serement, 

Et  li  a  dit  Tomiles  :  «  Se  toi  plaist,  or  entent. 

«  La  duchesse  se  gist  en  sa  chambre  leenz; 

«  Ele  est  molt  forment  ivre,  tant  a  beu  piment. 
170    «  Ele  n'ot  ne  ne  voit  ne  a  home  n'entent; 

«  Va  te  couchier  o  li  en  son  lit  coiement  ; 

«  Se  te  queut  en  amor,  riches  seras  mananz  : 

«  Chevalier  te  fera,  ne  demorra  nient; 

«  Ele  tedonra  armes  et  riches  garnemenz.  » 
175    Et  respont  li  lechiere  :  «  Tôt  a  vostre  commant.  » 

Il  entra  en  la  chambre  par  molt  fier  marrement  ; 

Entreci  que  au  lit  ne  fist  arestement, 

Et  sozleva  le  paile  tost  et  isnelement. 

Oez  dou  lecheor  conme  il  perdi  le  sens. 
180    II  sozleva  le  paile,  si  s'est  couchiez  dedenz  : 

Trestoz  nus  en  ses  brai[e]s  vers  la  dame  s'estent; 

N'ose  envair  la  dame,  car  pou  ot  hardement. 

Tomiles  vint  a  l'uis,  s'apela  le  duc  franc  : 

«  Sire,  »  dist  li  traîtres,  «  trop  tardez,  venez  en  ;    (v*) 
i85    «  Ja  verrez  de  ma  dame  a  estros  se  je  menz.  » 

Quant  l'entent  li  dus  Do,  a  pou  ne  pert  le  sens  ; 

Des  beaus  ieus  de  son  front  plora  molt  doucement 

Et  du  cuer  de  son  ventre  va  parfont  sospirant. 

O  lui  a  pris  .iij.  contes,  si  s'en  torna  atant  ; 
190    Çaintes  ont  les  espées  as  bons  aciers  trenchanz. 

Il  entra  en  la  chambre  corrodez  et  dolenz, 

Entreci  que  a[u]  lit  n'i  fist  arestement; 

Il  sozleva  le  paile  tost  et  isnelement 


167  Elle  li  a  d.  —  168  sa,  ms.  la.  —  169  b.  de  p.  —  170 
Elle  n'ot  ne  vot.  —  172  qust  en  a.  —  175  commandemant.  — 
179  sens,  ms.  sanc. 


DOON   DE   LA   ItOCHE 


Et  trova  le  garchon  lez  sa  famé  gisant  : 
195    Ce  ne  fu  pas  merveille  se  il  en  fu  dolenz, 

Que  il  n'a  soz  ciel  home  qui  n'en  fust  corroçanz. 


Li  gloz  fu  en  la  chambre  durement  entrepris; 

Il  ne  sot  ou  aler  ne  en  quel  part  fuir. 

Do  a  traite  l'espée,  la  teste  li  toli  : 
200    Au  desmembrer  li  tout,  qu'autre  mal  ne  li  fist. 

De  ce  fist  il  que  fox  qu'a  gehine  nel  mist. 

E[s]tes  vos  ma[i]s  Tomile  du  murtre  bien  garni  : 

N'en  orra  mais  parler  de  ci  que  a  maint  di, 

Mais  droiz  a  droit  repaire,  pieça  que  on  le  dit  : 
2o5    Encor  le  couvendra  le  mal  pechié  gehir, 

Comme  il  fist  le  garçon  o  la  dame  gésir, 

Par  la  foi  que  vos  doi,  se  Dieu  plaist  et  Landri. 

Olive  s'esveilla,  si  geta  .j.  sospir 

Et  choisi  le  garçon  qui  gist  de  devant  li, 
210    Et  son  paile  sanglent  et  son  seignor  mal  mis,        r 

Et  demanda  les  contes  :  «  Ceste  noise  qui  fist? 

«  Je  li  ferai  la  teste  et  les  membres  tolir.  »  (/,  5) 

Li  dus  a  trait  l'espée;  le  chief  en  eust  pris, 

Quant  li  conte  [le]  corrent  par  les  braz  retenir. 
2i5    «  Sire  Do  de  la  Roche,  por  amor  Dieu,  merci! 

«  S'ocïez  nostre  dame,  vos  serez  mal  bailli. 

«  Certes,  ne  remanrons  en  trestot  cest  pais; 

«  Je  ne  sai  en  quel  terre  vos  peussiez  garir. 

«  Mais  envoiez  en  France  a  son  frère  Pépin  ; 


196  f.  dolans —  iggDoons. —  200  tout,  ms.  toli,  mais  l'hémis- 
tiche entier  est  probablement  corrompu.  —  201  que  g.  ne.  — 
2o3  m.  dit.  —  209  Et  vot  le.  —  211  noise,  ms.  nuse  ou  mise.  — 
216  seriez.  —  217  ne,  ms.  nos.  Ce  vers  s'accorde  mal  avec  ce 
qui  précède  et  avec  ce  qui  suit.  Lacune?  —  218  puissiez.       ,    ^    - 


îh  DOON   DE   LA    ROCHE 

220    «  Ce  est  H  gentiz  rois  qui  le  lion  ocist. 
«  Il  en  penra  justice  trestot  a  son  plaisir, 
«  Du  pendre  ou  de  l'ardoir  ou  du  mètre  en  essil. 

—  Seignor,  »  dist  li  dus  Do,  «  corn  puis  enragier  vis 
«  De  la  plus  bêle  dame  qui  de  mère  nasqui! 

225    «  Por  quoi  m'a  la  malvaise  vergondé  et  boni? 

«  Ja  l'amoie  je  plus  que  riens  que  Dieus  feïst.  » 

La  dame  en  apela  et  Jehan  et  Henri  : 

«  Dont  est  mesire  Do  corrociez  envers  mi? 

«  Face  faire  itel  feu  com  lui  vient  a  plaisir, 
23o    «  De  .IX.  cberres  d'espines  alumé  et  espris, 

«  Ou  en  mete  .11.,  se  lui  vient  en  plaisir; 

«  Puis  me  face  les  membres  lier  a  son  devis. 

«  Quant  la  flame  ert  plus  granz,  si  me  getez  en  mi  : 

«  Se  .j.  pois  en  estars  ou  garnemenz  bruïz, 
235    «  Dont  puis  je  provée  estre  de  péchiez  entrepris  ! 

—  Mauvaise,  >>  dist  li  dus,  «  por  quoi  parlez  vos  si? 
k  Ja  estes  vos  provée  de  veoir  et  d'oir. 

«  Mais  ne  vos  amerai  ne  vostre  fil  Landri; 
«  Par  la  foi  que  doi  Dieu,  onques  ne  m'apartint,      (y°) 
240    «  Onques  ne  l'engendrai  ne  il  n'est  pas  mes  filz. 


VI 


—  Sire  Do  de  la  Roche,  »  dist  l-a  dame  au  cors  franc, 
«  Faites  faire  itel  feu  com  vos  vient  a  commant, 
«  De  .îx.  chères  d'espines,  mais  qu'il  soit  bien  ardanz; 
«  Ou  en  i  metez  .xxx.,  s'il  vos  vient  a  talent. 


222  De  p.  —  226 Je  l'a.  —  23o  cWres,  plus  bas  (v.  343)  chere%; 
altxmés.  —  23 1  XL,  tns.  xix,  qui  fausse  le  vers  (dis  et  nuef)  et  de 
plus  n'est  pas  un  chiffre  raisonnable.  —  233  en  mi,  ms.  dedans; 
cf.  V.  246.  —  235  provée,  ms.  primes,  en  abrégé,  cf.  v.  237. 
Il  faudrait  entreprise,  mais  je  ne  vois  pas  le  moyen  de  corriger. 
—  239  doi  a  Dieu.   —  243  soient  b.  a^ 


DOON   DE   LA   ROCHE  i't 

245    «  Puis  si  me  faites  penre  a  deus  de  voz  serjanz 
<(  Et  me  getent  en  mi  quant  la  flame  ert  plus  granz  : 
«  Se  .).  pois  en  est  ars  ne  blemiz  garnemenz, 
«  Dont  provez  ert  mis  cors  de  péchiez  recreanz. 
a  Et  se  Jésus  m'en  gete  par  son  commandement, 

2  5o    «  En  après  cel  juïse  vos  en  ferai  plus  grant  : 
«  Si  me  pendez  au  col  .j.  muele  pesant 
«  Le  fais  d'une  ciierée  a  .xx.  homes  levant, 
«  Puis  si  me  faites  penre  a  .c.  de  voz  serjanz,   càt 
«  Si  me  getent  en  mer,  la  teste  tôt  devant, 

255    «  En  la  greignor  abisme,por  Dieulevoscommant; 
«  Et,  se  je  m'en  revien  tôt  par  dessus  flotant, 
«  Ou  pechié  n'avrai  corpes  que  mis  m'avez  devant  ; 
«  Et  se  j'en  vois  au  fons,  tins  en  ert  faite  atant  ; 
«  Puis  cest  jor  n'en  orrez  parole  ne  semblant. 

260    — Mauvaise  «.distli  dus,«  por  quoi  en  parlez  tant? 
«  Ja  estes  vos  provée  d'oir  et  de  veant. 
«  J'ai  ocis  le  garçon  a  mon  acerin  brant. 
—  Sire  »,  dient  li  conte,  «  trop  parlez  hautement- 
«  Hom  ne  doit  soi  honir  abandonéemcnt.  (/.  6) 

265    «  Faites  fermer  le[s]  huis  tost  et  apertement, 
«  Que  parole  n'en  isse,  ne  nel  sache  la  gent, 
«  Puis  prenez  les  juïses  qu'ele  vos  vait  ofrant.  » 
Li  dus  lor  otria[st]  volentiers,  bonement, 
Quant  li  cuvers  Tomiles  vint  par  destre  corant, 

270    Et  a  saisi  le  duc  par  son  hermine  blanc  : 

«  Que  vues  tu  faire,  Do,  mauvais  hom  recreanz? 
«  Se  tu  prens  les  jtiises  qu'ele  te  vait  ofrant, 
«  Dont  ne  se  couchera  a  .xl.  ou  a  .c.  ? 
«  Doon  le  cous  soffrant  t'apelerons  toz  tens. 

275    «  Nos  t'irons  par  Coloigne  a  noz  doiz  demostrant. 
■  ¥■     vT  Si  seras  cous  clamez,  ce  dïent  li  enfant.  » 

146  En.  —  35o  V.  sera  pi.  g.  —  253  a,  ms.  et.  —  258  ert,  fhs. 
est.  —  261  etdavant;c/.  vv.  3J7  et  36g.  —  263  ditli  c.  —  26411. 
si  a.  —  267  te  V.  —  269  vint,  ms.  ml'l.  —  274  apeleron.  —  276 
dïent,  corr.  diront  ?  •*'' 


12  DOON    DE   LA    ROCHE 

Quant  l'entendi  li  dus,  a  pou  d'ire  ne  fent; 

Il  n'en  presist  plus  rien  por  les  membres  perdant. 

Il  issi  de  la  chambre  corrociez  et  dolenz 
a8o    Et  trova  la  norrice  sus  ou  palais  séant, 

Et  Landrïet  son  fil  dedens  le  berz  plorant. 

Quant  li  enfes  le  voit,  si  li  rit  bonement. 

Et  li  dus  le  bota  de  son  pié  laidement, 

Que  li  berz  reversa  et  Tenfes  chiet  adens  : 
285    Li  viaires  li  fiert  desus  le  pavement; 

Bien  i  parut  la  plaie  jusqu'as  armes  portant. 

Li  enfes  brait  et  crie,  qui  ne  set  autrement  : 

Ne  puet  sa  dolor  dire,  car  il  n'a  pas  le  sens. 

[LiJ  troi  chevalier  plorent  por  l'amor  de  l'enfant, 
290    Et  dist  li  .j.  a  l'autre  :  «  Molt  nos  vait  malement  ;   (v«) 

«  Ci  commence  tel  guerre  qui  durra  longement  ». 

VII 

Li  dus  Do  de  La  Roche  a  son  fil  mal  mené, 

Landrïet  le  petit,  qui  est  de  jone  aé; 

Sanglent  ot  le  visage  et  la  boche  et  le  nés. 
295    Bien  poez  [de  voir]  dire  que  Do  fu  molt  irez; 

L'un  duel  mis  avec  l'autre  n'ot  en  lui  qu'aïrer. 

Et  dist  li  uns  a  l'autre  :  «  Nostre  sire  est  desvez  ;  , 
.    «  Ja  soloit  il  son  fil  Landrïet  [molt]  amer 

«  Et  sa  moillier  la  gente  servir  et  honorer. 
3oo    «  Ne  sai  quel  vif  deable  ont  entre  eus  conversé.  » 

Ja  n'a  il  soz  ciel  home  qui  en  eiist  parlé 

[Ne]  mais  que  li  troi  conte  qui  sont  a  lui  aie. 

L'uns  le  prent  par  le  braz,  d'une  part  l'a  torné  : 

278  presist,  ms.  print.  —  279  II  i.  hors  de.  —  281  le  berz,  ms. 
le  braiz  —  284  berz,  ms.  braz  —  286  p.  jusques  a.  —  288  n'est 
p.  le  sanc.  —  289  plorent,  ms.  plorant.  —  296  d.  mit  {ou  nut) 
auo;  la  restitution  est  fort  douteuse,  d'autant  plus  que  l'autre 
pourrait  avoir  été  écrit  par  anticipation  sur  le  v.  suivant.  — 
297  Nostr.  filr.  , 


DOON    DE    LA    ROCHE 


l3 


«  Sire  Do  de  La  Roche,  gentiz,  nobles  et  ber, 
3o5    «  Dolenz  iert  l'emperere  Pépins,  se  il  le  set; 
«  Mais  prenez  .j.  message  et  si  H  envoiez. 

—  Si  ferai  je,  seignor,  car  molt  sui  vergondez. 
«  Maleoite  soit  l'eure  que  je  fui  onques  nez.  » 
Il  apele  Grégoire,  son  chapelain  privé  : 

3 1  o    «  Sire  frans  clers  »,  [dit  il],  «  envers  moi  entendez  : 
«  De  ci  que  au  matin  a  Paris  m'en  irez  ; 
«  Pépin  l'empereor  vueil  que  me  saluez. 
«  Il  me  dona  .j.  don,  genz  fu  et  honorez  : 
«  Ce  fu  un  pan  de  terre  que  molt  fait  a  loer. 

3i5    «  .1.  hom  la  me  chalonge,  qui  est  d'autre  régné; 

«  Ma  terre  en  est  enfraite  et  ses  bans  trespassez.        [f.  7) 
«  Or  vienge  en  Loeroigne  por  sa  terre  aquiter, 
«  Et  quant  il  ert  venuz,  si  parleromes  d'el. 

—  Sire  »,  ce  dist  Gregoires,  «  je  le  dirai  assez.  » 


VIII 

320    Celé  nuit  jut  Gregoires  de  ci  que  au  matin, 
Li  gentiz  chapelains  cui  Diex  puist  beneïr. 
Il  monte  sus  .j.  mul  corant  et  arabi. 
Et  entra  en  sa  voie,  s'acuilli  son  chemin, 
Et  trespassa  les  terres,  les  puis  et  les  larriz  ; 

325    N'i  ot  reigne  tirée  de  ci  que  a  Paris  ; 
Et  a  trové  le  roi  sus  el  palais  marbrin. 
L'emperere  le  baise,  delez  lui  l'a  assis, 
De  sa  suer  demanda,  le  premier  mot  que  dit. 
Et  après  de  Doon  le  chevalier  gentil. 

33o    «  Comment  le  fait?  »  [dist]  il,  «  comment  se  maintient  il  ? 

3o4  n.  ei  bel.  —  3o5  D.  ser.  —  3o8  Maldite  s.  l'eur  que  je  fuis. 
—  3 14  un  pou.  —  3i5  régné,  ms.  roiné.  —  317  Or  vienge,  ms. 
Vome,  avec  un  signe  d'abréviation  sur  Vo.  ■—  3 18  il  est.  —  32 1 
Le  g.  clerc  c.  D.  puet  deuoir  ou  denoir.  —  322  mulet,  c.  —  328  sa 
suers.  —  33o  C.  le  fait  il  lor  c.  se  m.  il.  ■  v^ 


^4  bOON   DE  LA   ROCHE 

-~-  A  la  foi  que  vos  doi,  moltbien,  la  Dieu  merci! 

«  Je[l]  laissai  a  La  Roche  sain  et  haitié  et  vif; 

«  Mais  .j.don  lui  donnastes,qui  molt  fu  seignoris  : 

«  Ce  fu  un  pan  de  terre  que  molt  fait  a  chérir  ; 
33.5    «  .1.  hom  la  li  chalonge,  qui  est  d'autre  pais. 

«  Olive  vostre  suer  n'a  ne  joie  ne  ris. 

«  Ne  sai  por  quoi  ce  est,  ne  m'en  ont  nul  mot  dit, 

«  Li  dus  lavuet  ardoir  et  les  membres  tolir.  » 

En  l'oreille  li  dist  coiement  et  seri  : 
340    «  De  putage  la  rete,  ne  vos  en  quier  mentir.  » 

Quant  l'entent  l'emperere,  il  n'en  a  mie  ris, 

Et  si  fu  sages  hom  qu'a  home  ne  le  dist, 

Ainz  entra  en  sa  chambre  trestot  a  escheri; 

Soef  maine  son  duel,  que  nuls  hom  ne  l'oï. 
345    «  Ha!  suer  Olive,  qui  en  [tel]  penser  vos  mist? 

a  Por  quoi  m'avez  vos,  dame,  vergondé  et  boni? 

«  Aine  mais  de  mon  lignage  pute  famé  n'issi.  » 


IX 

De  ce  fist  l'emperere  que  proz  et  que  cortois 
Quant  nel  vont  dire  a  home,  chevalier  ne  borjois; 

35o    Ainçois  monta  le  jor,  si  chevalcha  le  soir, 
Atot  .xV".  homes  va  sa  seror  veoir. 
Il  trespassa  les  terres,  les  plains  et  les  arbroiz  ; 
Venuz  est  a  Coloigne  :  molt  fu  granz  li  esfroiz, 
Et  descendent  es  rues  chevalier  et  borjois, 

355    Hennissent  cil  cheval,  cil  mul,  cil  palefroi. 
Do  de  La  Roche  va  son  serorge  veoir; 
Ses  bras  li  mi[s]t  a  col,  si  le  baisa  .iij.  fois, 
Puis  Ten  a  apelé  bêlement  en  requoi  : 

333  l.  donnait.  —  334  un  pou.  —  335  .1.  hommes  qui  s'alonge; 
cf.  V.  3j5.  —  336  V.  s.  ne  joie  ne  ne  rit.  —  340  en  pansée.  On 
pourrait  aussi  proposer  Ha[ï]  O.  s.  qui  en  penser.  —  347  Ainz  — 
349  ne),  ms.  ne  le  —  355  H.  ci  ch.  si  m.  e  palfrois. 


DOON   DE  LA   RQCHE  iS 

«  Sire  d[r]oiz  emperere,  »  ce  dist  Do  li  cortois, 
30O    «  Olive  vostre  suer  a  boni  vos  et  moi. 

«  Certes  lez  .j,  garçon  la  repris  l'autre  soir; 

«  Je  li  irencha[i]  la  teste  a  mon  branc  vianois. 

«  Demandez  leTomile,  qui  ci  sietdelez  moi, 

«  Qui  reprist  le  garçon  qui  avec  li  gisoit  ; 
365    «  Comme  autres  a  sa  famé  ses  talenz  en  faisoit.  (/.  8) 

—  Et  vos,  sire  Tomiles,  qu'en  direz  ?  »  dist  li  rois. 

—  Sire,  »  dist  li  trai[t]res,  «  se  peser  ne  vos  doit, 
«  Je  jugeroie  bien  qu'on  la  deiist  ardoir  : 

«  Ele  est  tote  provée  d'oîr  et  de  veoir.  » 
370    Adonc  parla  Moriz,  Amauris  et  Jofroiz; 
Li  .j.  est  niés  Doon,  sui  cosin  sont  li  doi  ; 
«  Par  les  sainz  Dieu,  Tomiles,  ne  dites  mie  voir; 
«  Ma  dame  ne  fist  onques  putage  ne  desloi. 

—  Toz  en  es  perjurez,  cuverz  »,  ce  dist  Jofroiz  ; 
375    «  Prez  sui  que  m'en  combate  contre  vos  orendroit, 

«  Seus  et  seus  par  mes  armes,  lassus  en  ces  chaumois. 
«  Ou  encore  autre  jeu  vos  partirai  ainçois  : 
«  Soiez  .V.  chevalier,  nos  ne  serons  que  trois, 
«  Puis  ce  venez  combatre  lassus  en  ces  herboiz  ; 
38o    «  Se  ne  vos  rendons  pris  et  recréant  le  roi, 
«  Si  nos  face  mes  sire  desmembrer  et  ardoir. 
«  C'est  ores  granz  merchie[z]  de  .v.  homes  a  trois, 
«  Mais  encor  est  plus  granz  de  Tome  qui  est  droiz. 

—  Sire  »,  ce  dist  Tomiles,  «  n'en  combatrai  des  mois. 
385    «  Demandez  le  Doon,  qui  est  ci  delez  moi, 

«  Qui  reprist  le  garçon  o  qui  ele  gisoit,    . 
«  Com  autres  a  sa  famé  ses  talenz  en  faisoit. 
«  Il  ocist  le  garçon  a  son  branc  vianois. 

—  Sire  Do  de  La  Roche,  qu'en  direz  ?  »  dist  li  rois. 

• 
362  b.  manois,  cf.  v.  388.  —  369  tout  p.  —  374  es  perius. 
—  376  Seul  et  seul;  c.  chanoi  avec  signe  d'abréviation  sur 
Ta.  —  38o  ne  nous  r.  —  383  p.  grant  a  l'o.  q.  e.  droit —  384 
de  moi  —  386  Om;  g.  q.  avec  e,  —  388  b.  manois,  cf. 
V.  363 


le 


DOON    DE    LÀ   ROCHE 


390   «  t0r]alôns  en  la  chambre;  ma  seror  vuéil  vebîr.         (v») 
—  Sire  »,  ce  dist  dus  Do,  «  com  vos  plaira  si  soit. 
«  Lors  parlerez  a  li,  la  métrez  en  destroit.  »     . 
En  la  chambre  s'en  entre  Pépins  li  gentiz  rois 
Quant  la  dame  le  voit,  encontre  se  levoit; 

395    Ele  s'agenoilla;  es  pies  li  vait  cheoir 

Por  merci  deprïer,  car  mestiers  l'en  estoit. 
Et  li  rois  traist  Tespée,  qui  corrociez  estoit  : 
Ja'n  eiist  pris  la  teste  quant  i  vienent  li  .iij.  . 
Adonc  parla  Moriz,  Amauris  et  Jofroi[z], 

400    Li  .)'.  est  niez  Doon  et  sui  cosin  li  doi  : 
«  Sire  douz  emperere,  ice  n'est  mie  droiz, 
«  S'ele  a  fait  son  pechié,  par  la  foi  que  vos  doi, 
«  Que  on  ladoieocire,  desmembrer  ne  ardoir; 
«  Preigne  sa  pénitence  bonement,  sanz  deloi, 

405    «  De  faire  les  juïses  qu'ele  Doon  ofroit. 


—  Seignor  »,  ce  dist  li  rois,  «  com  puis  ore  desver 
«  De  la  plus  bêle  dame  de  la  crestïenté 

«  Que  j'avoie  Doon,  le  riche  duc,  doné, 
«  Le  meillor  chevalier  de  la  crestïenté  ! 
410    ft  Por  quoi  m'a  la  mauvaise  boni  et  vergondé? 

—  Sire,  »  ce  dist  la  dame,  «  se  ainsi  m'aïst  Dés, 
«  Hé  !  Dex,  ja  sui  je  preste  de  juïse  porter, 

«  Soit  en  feu  ou  en  eve  ou  la  ou  vos  voudrez. 

—  Et  vos,  sire  Tomiles  »,  dist  li  rois,  «  ce  oez 

41 5    «  Com  ma  suer  se  poroffre  a  juïse  porter  :  (/".  g) 

«  Ele  nel  feïst  mie,  por  les  membres  coper, 
«  Se  ne  seiist  en  li  molt  très  gran*  seiirté. 

—  Sire  »,  ce  dist  Tomiles,  «  oez  et  escoutez  : 


392  la,  ms.  sa,  —  $99  Amauris,  ms.  et  MauHs.  —  408  j'a  a  D02 
—  41 1  se,  ms.  ne.  —  416  E.  ne  le  f. 


bOOK   DE   LA   ROCHE  !7 

«  Ce  que  vi  a  mes  ieus  n'a  mestier  de  monstrer. 

420    «  Il  n'a  soz  ciel  larron,  tant  ait  avoir  emblé, 

«  S'on  le  lait  escondire,  qui  ja  soit  pris  provez.  » 
Quant  l'entendi  la  dame,  si  commence  a  plorer  : 
«  Certes,  sire  Tomiles,  bien  sai  que  me  haez. 
«  Diex  m'en  face  venjance,  qui  en  crois  tu  penez. 

425    «  Ne  puis  envers  vos  toz  ne  tencier  ne  plorer, 
«  Car  parole  de  famé  ne  puet  avant  aler  : 
«  Ja  n'avra  si  grant  droit  ne  soit  a  tort  tornez. 

XI 

—  Sire  droiz  emperere,  »  ce  dist  Do  de  La  Roche, 
«  Fols  est  qui  famé  croit  quant  juïse  li  ofre  : 

430    «  Ce  que  vi  a  mes  ieus  vuet  torner  a  fantosme; 

«  Le  garçon  ocis  jou,  par  saint  Pierre  de  Rome.  » 
Dist  Tomiles  li  lerres  :  «  Mervoilles  en  oi  ores. 
«  Hé  !  ber,  car  trai  l'espée,  la  putain  si  afole.  » 
Il  issi  de  la  chambre,  si  hauça  sa  parole, 

435    Que  Normant  et  Breton  et  Loereing  le  sorent, 

Etli  moine  et  li  clerc  des  mostiers  et  des  cloistres 

Ou  Olive  ot  doné  et  calices  et  croces 

Et  dras  et  vesteiires,  estamines  et  botes. . . 

«  Haï!  Olive  dame,  franche  riens,  douce  chose, 

440    «  Cil  Sire  vos  garisse,  qui  soztie[n]t  tôt  le  trône 
«  De  vostre  part  remaine  li  biens  faiz  et  l'aumosne. 

XII 

Or  es  vos  la  mervoille  par  la  vile  espandue  ; 

419  Et  que  maines  {ou  ui  a  mes)  uuet  cnz  a  estre  monstrer;  c/. 
V.  43o.  —  421  qui,  ms.  que.  —  431  J'occis  le  garçon.  —  439  Ha 
dame  Olive.  Les  vers  43g-4i  semblent  devoir  être  placés  dans  la 
bouche  des  clercs  du  v.  436,  comme  quelques  vers  plus  bas,  mais 
alors  il  faudrait  supposer  qu'un  vers  annonçant  ce  discours  a  été 
omis. 


"iS  "  booK  DE  LA  Roche 

.   Chevalier  et  serjant  en  emplirent  la  rue, 
Puceles  et  meschines  la  rescrïent  et  huent, 

445    Ces  clerc  et  ces  chanoine  qui  par  les  mostiers  furent,     * 
Ou  Olive  ot  doné  [et]  palefrois  et  mules, 
Estamines  et  croces,  cierges  et  vesteiires. 
«  Haï  !  Olive  dame,  de  la  vostre  aventure  ! 
«  A  quel  tort  seras,  lasse,  démenée  et  destruite! 

450    «  Cil  Sire  vos  garisse,  qui  fu  mis  el  sépulcre.  » 
Li  rois  ist  de  la  chambre,  tozli  fronz  li  tressue  : 
«  Seignor  franc  chevalier  de  France  et  de  Herupe, 
«  [Se]  ma  suer  m'a  honi,  ce  n'est  mie  droiture 
«  Qu'ele  pour  ce  doie  estre  afolée  et  destruite, 

455    «  Se  li  boin  chevalier  de  ma  cort  ne  la  jugent.  » 
Plus  de  mil  chevalier  envers  lui  se  remuent  : 
«  Sire  bons  emperere,  por  quoi  feras  destruire 
«  Olive  ta  seror  et  livrera  martire? 
«  S'ele  a  fait  son  pechié,  c'est  a  famé  nature  ; 

460    «  Mais  por  ce  ait  l'onor  de  sa  vile  perdue, 

«  A  Doon  de  La  Roche  ne  soit  ele  mais  drue.  » 
Et  respondi  li  rois  :  «  Ce  n'est  mie  mesure 
«  Qu'a  Doon  l'Alemanten  soit  l'onor  tolue, 
«  Ainz  vueil  bien  que  il  l'ait,  car  c'est  droiz  et  mesure  ; 
465    «  Ja  Olive  ma  suer  n'en  tenra  teneûr[e]. 

—  Lasse  !  »  ce  dist  Olive,  «  or  sui  je  bien  vaincue      {f.  10 
«  Quant  mi  ami  charnel  premerain  me  forjurent.  » 


XIII 

Quant  part  Do  de  La  Roche  de  sa  famé  acest  di, 
Li  gentilz  Alemans  qui  fu  proz  et  hardiz, 

% 

443  Serjant  en  emplirent  chevalier  tout  le  r.  —444  la,  ms.  le. 
—  446  Cu  ele  ;  cf.  43  j.  —  420  es  sépulture.  —  453  Ma  serors  — 
458  Je  ne  sais  quel  mot  substituer  à  martire.  —  463  l'onor, 
ms.  lantor.  —  464  qui  lait.  —  467  mi,  ms.  Tiulr.  —  468  Q.  Dox  p.; 
c.  dit. 


DOON   DE   LA    ROCHE  19 

470    Onques  nus  hom  de  char  plus  grant  dolor  ne  vi 

Des  dus,  des  arcevesques,  des  princes  dou  paîs. 

Ele  a  dit  .iij.  paroles  qui  départent  d'ami  : 

«  A  Dieu  vos  cornant,  Do,  qui  en  la  crois  fu  mis. 

«  Frans  hom,  se  me  vosisses  encor[e]  retenir, 
475    «  Gomme  .j.  autre  chaitive  vos  servisse  toz  dis  ; 

«  Ne  rovasse  avoec  vos  ne  mangier  ne  dormir  ; 

«  Quant  ore  ne  puet  estre,  n'i  queîsse  gésir, 

«  Ainçois  fuissent  no  lit  a  toz  jors  départi. 

—  Mauvaise,  »  fait  li  rois,  «  tornez  vos  de  sor  mi; 
480    «  Ja  ne  vos  amerai  a  jorque  soie  vis. 

«  Ne  tenrez  de  ma  terre  .j.  pie  ne  .  j.  demi  ; 
.    «  Ne  ne  vos  amerai,  car  soing  [n']  ai  de  Landri  : 

«  Onques  nefu  mes  niés  n'onques  nem'apartint.  » 


XIV 


Quant  part  Do  de  La  Roche  de  sa  famé  ace[l]  jor, 
485    Onques  nus  hom  de  char  ne  vit  si  grant  dolor 

De  dus  et  d'arcevesques,  de  princes,  de  contors. 

Ele  dist  .iij.  paroles  qui  desoivrent  d'amor  : 

«  A  Dieu  vos  comant,  Do,  du  ciel  le  creator  ; 

«  Frans  hom,  se  me  vosisses  retenir  avuec  vos, 
490    «  Come  une  autre  chaitive  vos  servisse  toz  jors. 

—  Mauvaise,  »  dist  li  rois,  «  tornez  [vos]  de  sor  nos;         (v*) 

«  Je  ne  vos  amerai  que  je  vive  a  nul  jor, 

«  Ne  ja  Landri  vo  fil  ne  clamerai  nevo.  » 

Hé  1  Diex,  puis  fu  tel  ore  qu'il  li  ot  tel  besoing 
495    Qu'il  fust  déshéritez,  quant  Landris  le  rescost. 


470  g.  d.  n'oïst.  —  472  d.  d'amis  —  474  vosissies  encor  r.  —  477 
mqueisse.  —  478  A.  fuissiés  vos  litz  a  trestous.  —  482  Cf. 
V.  '/45.  —  484  Q.  Doz  p.  —  486  de  p.  et  de  c.  —  489  ce  me  vosis- 
sies r,  avuel  v.  —  49?  tenez  desus  n.,  cf.  vv.  47g,  80g.  —  493 
filz.  —  495  L.  le  resconte. 


10  DOON    DE   LA   ROCHE 


Tomile  de  Coloigne  fist  il  puis  del  chief  blos 
Et  gehir  par  la  gueule  le  pechié  orguillos 
Com  il  mena  sa  mère  par  ses  granz  traïsons. 


XV 

La  suer  le  roi  de  France  fu  molt  forment  irée  ; 

5oo    Ou  ele  vueille  ou  non,  [de]  la  tor  l'avalèrent. 
Ele  crie  et  huche  a  molt  grant  alenée  : 
«  Haï  !  Pépins  de  France,  por  quoi  faites  ce,  frère, 
«  Que  de  Tonor  me  getes  que  m'avoies  donée?» 
En  France  s'en  rêva  Pépins  nostre  emperere, 

5o5    E  Do  li  Alemanz  en  la  sue  contrée; 

Sa  suer  ne  son  nevo  n'en  laissa  il  denrée. 


XVI 


La  suer  le  roi  fu  molt  dolente  et  corrocie  ; 

Ou  ele  vueille  ou  non,  l'ont  jus  de  la  tor  mise. 

Quant  ele  ist  dou  palais,  si  huche  et  si  crie  : 
5 10    «Haï!  Pépins  de  France,  por  quoi  ce  faites,  sire, 

«  Que  de  l'onor  me  getes  ou  tu  m'avoies  mise? 

«  Certes,  lot  [ce]  me  fait  li  traîtres  Tomiles. 

«  Diex  m'en  face  venjance,  li  filz  sainte  Marie.  » 
2 '«I  ■/    .L  ostel  li  ont  quis  la  desus  en  la  vile  ; 
5i5    Chascun  Jor  a  .ij.  pains  :  tele  fu  sa  devise; 

Iluec  se  desduira  come  .).  autre  chaitive. 


.ic'.- 


XVII 


Nostre  emperere  s'est  en  France  repairiez, 
La  desus  a  Paris,  en  son  demoine  fié, 

496  f.  il  plus  le  ch.blou.  —  5oo  la  t.  li  a. 


DOON   DE   LA   ROCHE  21 

Et  si  a  Loereigne  au  duc  Doon  laissié; 
520    Sa  suer  ne  son  nevo  n'en  a  laissié  plain  pié. 

Tomile[s]  de  Coloigne  cliascun  jor  se  porquiert 
Comment  il  doinst  sa  fille  au  duc,  li  aversiers. 

r 

Damediex  la  maudie,  qui  en  croiz  fu  dreciez. 


XVIII 


:^ 


Olive  la  duchesse  ot  molt  le  cuer  dolent 

525    De  ce  qu'ele  est  retée  de  traïson  par  tant, 

De  chose  dont  n'ot  onques  corage  ne  talent, 
Et  si  em  pert  La  Roche  et  l'onor  qu'i  apent 
Et  son  seignor  Doon,  qu'ele  paramoit  tant. 
Plus  que  nule  rien  qui  fust  ou  siècle  vivant.. . 

53o    A  son  ostel  ou  ore  norri  bien  son  enfant, 
Landrïet  le  petit,  tant  que  il  ot  .vij.  anz  : 
Mieldres  est  ses  aages  que  autres  de  .x.  anz. 
Et  Do  fu  a  Coloigne,  ou  il  tint  ses  corz  granz, 
Norri  ses  chevaliers,  s'aleva  ses  serjanz. 

535    Atant  es  vosTomile  sus  ou  palais  errant, 
Et  apela  le  duc  tost  et  isnelement  : 
«  Sire  )),dist  li  traître,  «  entendez  mon  semblant; 
«  Une  rien  vos  dirai,  si  vos  vient  a  commant  : 
«  Car  donez  dame  Olive  a  .j.  de  voz  serjanz, 

540    «  Jamais  a  la  putain  [ne]  serez  atendanz; 

«  Puis  porquerrez  tel  famé  de  cest  jor  en  avant 


323  e.  restée.  —  326  dont,  ms.  que.  —  529  q.  fut  en  cest  s.  On 
pourrait  encore  proposer,  pour  avoir  une  meilleure  coupe,  P.  q. 
n.  autre  rien  en  cest  s.  v.  —  Après  ce  vers  il  semble  bien  qu'il  y 
ait  une  lacune,  à  moins  que  le  suivant  ne  soit  corrompu.  On  pour- 
rait supposer  quelque  chose  comme  ceci  :  [En  la  vile  vesqui  la 
dame  povrement],  En  son  ostel...  —  532  Mas  miedres.  —  535 
Etant.  —  537  traître,   ms.   aultre.  —  540  p.  s.  mais  a. 


îi'-  DOON   DE   LA   ROCHE" 


«  Dont  Damediex  de  gloire  vos  doinst  .j.  tel  enfant... 
«  Qu'[en]  après  mon  décès  tiegne  mes  onors  granz.  »       (v») 
Quant  l'entent  li  traîtres,  si  fu  liez  et  joianz; 
545    Ja  dira  tel  parole  dont  puis  remest  dolenz. 


XIX 


Chascun  jor  se  porquiert  li  traîtres  Tomiles 
Comment  il  ait  doné  au  duc  [Doon]  sa  fille. 
.1.  jor  l'a  encontre,  si  li  a  pris  a  dire  : 
«  Sire  Do  de  La  Roche,  ce  me  semble  folie 

55o    «  Que  vos  ne  prenez  famé  dont  aiez  fil  ou  fille 
«  Qui  desoentre  vos  vostre  onor  tienne  quite.  » 
Et  respondili  dus  :  «  Je  n'en  sai  nule,  sire, 
«  Qui  ne  soit  ma  parente  ou  si  près  dame  Olive, 
«  Ma  premeraine  famé,  ainçois  que  [la]  prelsse; 

555    «  N'en  avrai  ja  mais  nule  de  si  grant  seignorie.  » 
Et  respont  li  traîtres  :  «Je  en  sai  une,  sire, 
«  Qui  molt  est  proz  et  sage,  si  est  molt  vostre  amie. 

—  Tomiles,  »  dist  li  dus,  «  qui  est  celé  meschine? 

—  Sire,  »  ce  dist  Tomiles,  «  c'est  une  moie  fille 
56o    «  Qui  est  molt  tréscortoise,  si  est  de  sens  esprise, 

«  Ele  done  por  vos  les  pailes  et  les  cires. 
«  Je  tienz  .iiij.  chasteaus  en  la  moie  baillie 
«  Et  la  grant  visconté  de  Gormaise  et  d'Espire; 

542  nous  d.  Le  discours  de  Tomile  est  inachevé,  et  le  v.  543 
paraît  être  la  conclusion  d'une  réponse  de  Doon  à  laquelle  manque 
le  commencement;  ou  encore  {mais  cette  supposition  est  moins  pro- 
bable), on  pourrait  rattacher  le  v.  543  au  discours  de  Tomile  en 
le  corrigeant  ainsi  :  Qu'en  après  vo  décès  {ou  Qu'après  vostre  d.) 
t.  voz  o.  g.;  mais,  dans  cette  seconde  hypothèse,  il  faudrait 
admettre  que  la  réponse  de  Doon  aurait  pris  place  entre  les  vv. 
543  et  544,  et  manquerait  tout  entière.  —  55 1  Qui  de  comme 
vous  tr'es  vostre  honeur  tout  quicte.  —  554  »•  <1-  je  perise — 
559  ce  une  mée  f.  —  56 1  les  pelés  ;  cf.  v.  6o3,  les  cend^us  çt  Içs 
cires.  —  563  de  Gormai  et  de  Spire;  cf.  v,  848, 


DOON   DE   LA   ROCHE 


23 


«(  Par  la  foi  que  vos  doi,  je  vos  daim  trestot  quite; 
565    «  Et  si  vos  en  donrai  de  besanz  pleine  emine, 

«  .XX.  muiez  toz  chargiez  d'or  et  d'argent,  [beaus]  sire.  » 

Avoir  fiert  molt  granz  cops,  pieç'a  que  l'oï  dire. 

«  Je  la  prendrai  »,  dist  Do,  «  se  Pépins  la  m'otrie; 

«  Il  me  donna  a  feme  sa  seror  dame  Olive  : 
570    «  N'en  avrai  jamais  nule  de  sens  si  bien  garnie.  »      (/.  12) 

XX 

Estes  vous  la  novele  par  la  vile  espandue. 

Serjant  et  chevalier  [en]  emplirent  les  rues; 

Il  montent  es  chevaus  et  es  fautrées  mules  ; 

De  ci  que  a  Paris  n'i  ot  règne  tenue. 
575    Tant  font  par  lor  jornées  que  il  a  Paris  furent. 

Vindrent  en  la  cité,  si  descendent  es  rues. 

A  rencontre  [en]  alerent  cil  qui  les  coneûrent... 

Et  quant  le  voit  li  rois,  contre  lui  se  remue; 

Premièrement  demande  :  «  Qu'est  ma  suer  devenue? 
58o    «  Hé!  las,  come  il  me  poise  de  la  sue  aventure! 

—  Sire,  »  ce  dit  Tomiles,  «  jâ  est  ele  si  pute 
«  Que  ne  se  garde  d'orne  la  foie  créature. 

«  Ainçois  se  maintenra  comme  autre  créature. 

—  Tomiles,  »  dit  li  rois,  «  bien  l'avez  maintenue  ; 
585    «  Mais,  par  icel  apostre  qu'on  requiert  ou  Sépulcre, 

«  Se  par  autrui  ne  fust  provée  et  perceiie, 
«  Pieç'a  qu'en  eussiez  celé  teste  perdue. 


565  de  resans  p.  aminé.  —  567  sic  ms.,  cf.  v.  610 —  570  avrai,  ma. 
amai.  —  573  en  est  ajouté  pour  compléter  le  vers,  mais  on  pourrait 
aussi  proposer  ont  emplies.  —  373  m.  a  c.  —  374  roine  t.  —  576 
font,  corr.  vont  ? —  576  es,  ms.  as  —  577  A  l'e.  a.  ci  quil  connegu- 
rent.  —  578  lui  ne  s'explique  qu'à  condition  de  supposer  que  dans  un 
vers  précédent,  qui  serait  omis,  il  aurait  été  parlé  de  Tomile  ou  de 
Doon,  —  583  créature  a  visiblement  pris  la  place  de  quelque  autre 
fHOten  ure,  —  ^8<^  majntenuç  est  peu  satisfaisant;  cqrr,  coneOç  ] 


DOON   DE  LA   ROCHE 


—  Hé!  las  »,  ce  dist  Tomiles,  «  maie  croiz  ai  eue 
«  Quant,  por  bien  et  par  foi  et  par  bone  nature 
590    a  Et  por  mon  droit  seignor,  m'est  tel  poine  creiie. 


XXI 


—  Sire,  »  ce  dist  li  dus,  «  je  n'en  sai  nient  [penser], 
«  Mais  vez  ici  Tomile  qui  me  fait  grant  bonté, 
«  Que  il  n'a  c'une  fille,  si  la  me  vuet  doner, 
«  Et  .iiij.  forz  chastiaus  et  .ij.  granz  viscontez.  » 
595    Et  respondi  li  rois  :  «  Je  l'otroi  a  son  gré, 

«  Quant  il  de  ma  seror  ne  puet  estre  amendé; 
«  Mais  ja  ne  ferai  chose  dont  je  plus  soie  irez. 


XXII 

«  Dites,  sire  Tomiles,  »  ce  dist  li  rois  meïsmes, 
«  Ou  est  dont  celé  famé,  ne  [le]  celez  vos  mie, 

600    «  Que  li  dus  Do  penra  en  la  soie  baillie? 
—  Sire  »,  dist  li  traître,  «  et  ja  est  ce  ma  fille, 
«  Qui  molt  est  proz  et  sage,  cortoise  et  enseignie. 
«  Ele  done  por  lui  les  cendaus  et  les  cires, 
«  Si  n'a  si  bêle  famé  jusqu'au  port  de  Surie. 

6o5    <f  Je  tienz  .iiij.  chastiaus  en  la  moie  baillie 

«  Et  les  granz  viscontez  de  Gormaise  et  d'Espire  : 
«  Par  la  foi  que  vos  doi,  je  li  claim  [tresjtot  quite, 
«  Et  je  vous  en  donrai  de  besanz  ploine  emine, 
«  .XX.  muiez  toz  chargiez  du  plus  fin  or  d'Afrique.  » 

610    Avoirs  fait  molt  grant  chose,  que  tote  rien  otrie. 
Et  respondi  li  rois  :  «  Et  je  l'otri  jneîsmes. 


588  ai  seûe.  —  Sgi  s.  néant.  —  592  gr.  honeur.  —  Sgô  aman-  «^ 
der.  —  597  le  p.  —  604  Corr.  jusquas  porz(?) —  606  Gornai.  J, 
—  608  aminé.  , ,,; 


DOON  DE  LA  ROCHE 


25 


XXIII 


«  Sire  Do  de  la  Roche,  »  ce  dist  Pépins  li  rois, 
«  Vos  penrez  vostre  famé,  je!  vuel  et  si  l'otroi, 
a  Quant  il  de  ma  seror  ne  puet  estre  autre  roi, 
6i5    «  D'Olive  la  duchesse,  qui  a  le  cors  cortois. 

«  Mais  ja  ne  ferai  chose  dont  plus  forment  me  poi[slt. 

—  Sire»,  ce  dit  Tomiles,  «aiez  pa[i]s,  ce  que  doit? 
«  Laissiez  ester  le  plait  de  Doon  et  de  moi, 

«  Et  je  vos  en  donrai  grant  part  de  mon  avoir  : 
620    «  .XX.  muiez  toz  chargiez  de  fin  or  arabois. 

—  Je  l'otroi,  beaus  amis,  »  ce  li  a  dit  li  rois. 
Le  jor  en  fu  li  plaiz  ou  palaiz  maginois  : 
.XX.  muiez  en  reçoit  trestoz  chargiez  d'avoir; 
Quant  les  ot  receiiz,  si  'n  otau  cuer  enoi. 

625    Puis  a  dit  .iij.  paroles,  coiement,  en  requoi  : 
«  Ha[ï]  !  Olive  dame,  grant  duel  porrez  avoir 
«  Quant  vos  verrez  voz  règnes  autre  famé  tenoir. 
«  Miens  en  ert  li  domaiges,  car  je[l]  sai  et  otroi.  » 


(/  i3) 


XXIV 

Do  demande  congié  et  Tomiles  li  lerres  ; 

63o    «  Seignor,  alez  a  Dieu,  »  si  a  dit  l'emperere; 

«  Quant  noces  volez  faire,  [soit]  ma  serors  remese; 
«  Mais  dorénavant  vueil  qu'ele  soit  bien  gardée 
«  Et  de  vair  et  de  gris  richement  afublée, 
«  Si  ait  en  sa  compaigne  .iij.  homes  a  espées; 

635    «  Et  qui  mal  lui  fera,  si  soit  chier  comparée. 
«  Guidiez  vos,  sire  Do,  par  l'arme  vostre  père, 
«  Que,  se  Landris  vit  tant  que  [il]  ceingne  l'espée, 


6i3  V.  jo.  —  614  autre  roi,  sic   ms.,  altéré  —  626  pouez  a.  — 
627  vos  remmes  a.  f.  tenir.  —  628  je  sais.  —  629  a  To.  —  63 1    • 
reniese.  —  633  devers.  —  634  compagnie  —  637  ceigne,  ms.  ceinde.    ( 


î6  DOON    DE   LA    ROCHE 

«  Que  il  ne  vueille  avoir  l'onor  et  la  contrée 
«  Que  je  avoie  vos  et  ma  seror  donée?  » 

640    Quant  l'entent  li  dus  Do,  s'a  la  teste  enclinée, 
Puis  a  dit  .iij.  paroles  coiement,  a  celée  : 
«  Haï!  Olive  dame,  com  vos  vi  bêle  et  clere, 
«  Et  com  vos  estïés  cortoise  et  bien  senée! 
«  Maleo[i]te  soit  l'arme  tel  parole  a  menée 

645    «  Dont  m'amor  et  la  vostre  est  ainsi  desevrée. 
Il  montent  es  muiez,  s'acoillent  lor  errée  ; 
De  ci  que  a  Coloigne  ne  firent  arestée  ; 
Ainsi  i  sont  venu  a  lor  bêle  jornée. 


XXV 


Ce  fu  après  la  Pasque,  que  li  mais  doit  entrer,   ^^0 
65o    Li  dus  fu  a  Coloigne  de  La  Roche  li  ber,  ' 

.    Li  cortois  Alemans  qui  tant  fait  a  loer,  (v») 

Et  dut  ses  noces  faire,  s'autre  famé  esposer, 
C'est  la  fille  Tomile,  le  traïtor  mortel, 
Audegour  la  cuverte;  son  cors  maudie  Dex. 
655    Et  Landris  fu  petiz,  mais  molt  fist  a  loer, 

Li  niés  le  roi  de  France,  qui  tant  par  estoit  ber. 
Par  le  mien  escient,  n'ot  que  v[iiij]  anz  passe[z], 
Mais  sages  fu  et  cointes,  vistes  [et]  empariez  : 
Chascuns  li  rueve  dire,  par  soi  vuet  délivrer. 
660    Olive  la  duchesse  li  a  dit  et  conté, 

Asses  et  Guinemanz,  qui  le  porent  amer  : 
«  Quant  vos  verrez  vo  père  au  pueple  assemblé, 
«  Qu'il  devra  s'autre  famé  plevir  et  esposer, 
«  Vos  irez  au  mostier,  si  le  contredirez; 


641  et  c.  —  646  errée,  ms.  ferrée.  —  653  El  doit.  —  657  Cf. 
vv.  ygS  et  884.  ~  658  cointes,  ms.  de  coste.  On  lirait  pMôf 
justes  ^ue  vistes.  -^  660  \%  çluçiie, 


DOON    DE   LA   ROCHE  2^ 

665    «  Millor  plait  en  avrez,  se  vos  le    .... 

a  Et  millors  tesmongnages,  se  mestier  en  avez. 
—  Seignor,»  ce  distLandris,«car  me  laissiez  ester: 
«c  Je  lui  dirai  molt  bien  et  mieus,  se  vos  volez. 
«  Je  sui  peiiz  et  enfes,  si  n'i  porroie  aler, 

670    «  Et  la  presse  est  molt  grant  ;  car  m'i  faites  porter, 
a  Si  irai  mon  dommage  et  ma  honte  esgarder.  » 
Olive  la  duchesse  l'a  en  ses  bras  levé  ; 
Venue  est  au  mostier,  fait  la  presse  coper; 
Dont  se  taisirent  tuit,  et  Landris  a  parlé, 

675    Li  niés  le  roi  de  France,  li  damoiseaus  senez. 
Ja  parlera  li  enfes  com  ja  oir  porrez  : 
«  Sire  dus  de  la  Roche,  grant  pechié  i  avez, 
«  Qui  ma  dame  laissiez,  autre  famé  prenez, 
a  Et  moi  tolez  ma  terre  et  autrui  la  donez.  if.  14) 

680    «  Ma  dame  est  tote  preste  de  juïse  porter, 

«  Soit  en  feu  ou  en  eve,  ou  la  ou  vos  voudrez. 
«  Sire,  car  me  resgarde;  si  t'en  prengne  pité  : 
«  Ja  n'a  il  soz  ciel  home,  s'il  m'eust  engendré, 
«  Que  a  molt  grant  merveille  que  ne  m'eiist  amé; 

685    «  Et  diable  en  ont  si  vostre  cuer  remué. 

a  La  vostre  char  meisme  com  poez  ahonter? 

«  Tuit  cil  qui  vos  esgardent  sont  tuit  mi  parjuré. 

«  Encor  vos  porrai  faire  félonie  et  viuté  : 

«  Se  Diex  me  laisse  vivre  c'armes  puisse  porter, 

690    «  N'en  penrai  .j.  vivant  que  je  voise  encontrer 
«  Ne  lui  face  les  membres  et  la  teste  coper. 
«  Et  vos,  sire  arcevesques,  ques  avez  esposez, 
«  De  par  nostre  apostoile,  qui  tient  crestïenté, 
«  Vos  desfens  je  très  bien  que  messe  n'i  chantez. 


665  si  vous  le  pourchassez,  leçon  inadmissible  tant  pour  le  sens 
que  pour  la  rime.  —  668  1.  dirais  —  669  si,  ms.  se  —  684  amer.  — 
685  remuer.  —  687  resgardent.  —  688  viuté,  la  leçon  du  ms.  est 
peu  claire;  on  peut'  lirç  boptç  çu  veuté.  —   6^0  Nan  panrai    .j,   ; 
rien  je  ne  v,  ç,  _  ^  ....i.*a 


«Kr  DOON   DE   LA   ROCHE 

695    «  Et  VOS,  sire  Tomiles,  [s"]or[es]  vos  en  gabez, 
«  Vos  ferai  tondre  en  croiz  com  .j.  autre  desvé  ; 
«  A  la  cowe  d'un  mul  vos  ferai  anoer, 
«  Qui  vos  combrisera  et  la  boche  et  le  nés. 
«  Par  trestote  Coloigne  vos  ferai  traîner, 

700    «  Tant  qu'a  vo  fier  lignage  il  sera  reprové.  o"^o 

«  Par  ces  amples  costieres  vos  ferai  démener, 
«  Que  les  membres  trestoz  vos  avrez  desnoe», 
«  Puis  les  ferai  recuerre  et  en  .j.  ru  giter; 
«  Et  certes,  nis  la  terre  ou  li  sans  ert  colez 

705    «  Ferai  je  depecier,  foïr  et  grafîner, 

«  Puis  le  ferai  ardoir  et  la  poudre  venter.  (v*) 

«  Tout  ainsi  faitement  vos  ferai  démener.  » 
Quant  l'entendi  [Tomiles],  s'a  Doon  apelé  : 
«  Sire,  »  dist  li  traître,  «  com  est  fel  et  enflez! 

710    «  Encor  fera  il  pis  se  il  vit  son  aé.  • 

«  Se  vos  le  commandez,  ja  l'avroie  tué.  ^ 

—  Tomiles,  »  dist  li  dus,  «  car  le  laissiez  ester  : 
«  Il  est  molt  juenes  enfes,  si  dit  quanque  il  set. 
«  Vos  vos  devez  taisier,  qui  corpes  n'i  avez.  » 

715    Puis  a  dit  .iij.  paroles  coiement,  a  celé; 

«  Haï  !  Olive  dame,  com  grant  duel  vos  avez  ! 
«  Ne  rote  ne  viole  ne  vos  puet  conforter. 
«  Certes,  se  ce  n'estoit  por  vo  grant  parenté, 
«  Et  que  a  mon  lignage  ne  fust  trop  reprové, 

720    «  Ne  vos  vosisse  perd[r]e  por  l'or  de  .xx.  citez.  » 

XXVI 

Molt  fu  grande  la  corz  a  Coloigne  la  cit. 
Quant  Do  ot  assemblez  les  barons  du  pais. 
Le  jor  a  prise  famé  sanz  congié  de  Landri; 
Ce  ne  fu  pas  por  ce  n'i  meîst  contredit, 

697  d'une  mule.  —  704  nés,  sens.  —  705  Fera  ne  —  711  com- 
niandiés.  —  712  1.  a  e.  —  713  si,  ms.  cil.  —  717  r,  de  v.  —  721    . 
granz,  cité. 


DOOM   DE  La  roche  29 

725    Mais,  se  li  enfes  vit  tant  qu'armes  puist  baillir,  , 

Ce  est  .).  mariage  qui  durera  petit. 

Du  mostier  sont  issu,  ou  palais  se  sont  mis  : 

Les  tables  furent  mises,  a[l]  mangier  sont  assis; 

Cil  jugleor  si  chantent  et  demoinent  granz  ris. 
730    Qui  que  chant  ne  qui  lait,  Olive  n'a  nul  ris, 

Ainz  plora  tendrement  et  tint  son  fil  Landri; 

De  ses  braz  le  descent,  si  le  mist  devant  li; 

Ele  plore  des  iex,  si  gete  granz  sospirs  : 

«  Beaus  filz  »,  dit  la  duchesse,  «  estez  ci  .j.  petit; 
735    «  S'esgardez  vostre  père  qui  a  famé  me  prist,  [f.  i5) 

«  Qui  me  hait  si  du  cuer  que  ne  me  puet  veïr.  » 

—  Mauvaise,  »  dist  Tomiles,  «  car  tu  le  mesfeîs 
«  Tôt  au  pleur  garçon  de  trestot  ce  païs  ; 

«  Do  li  trencha  la  teste  a  son  bran  acerin. 
740    «  Se  li  dus  me  creoit,  il  t'ardroit  le  matin, 
«  La  defors  ceste  vile,  en  .j.  bordel  petit. 

—  Mauvaise,  »  dist  li  dus,  «  tornez  vos  en  de  ci  :• 
«  Je  ne  vos  amerai  tant  que  je  soie  vis, 

«  Ne  n'avrez  de  ma  terre  ne  plain  pié  ne  demi, 
745    «  Ne  ne  vos  amerai,  car  soin  n'ai  de  Landri; 
«  Par  la  foi  que  doi  Dieu,  onques  ne  m'apartint. 

—  Sire,  »  dist  la  duchesse,  «  porTamor  Dieu,  merci! 
«  Preste  sui,  s'il  vos  plait,  a  porter  .j.  juïz, 

«  Soit  en  feu  ou  en  eaue  ou  en  autre  péril, 
750    «  Que  ne  Toi  en  pensée  ne  ne  le  consenti. 

—  Par  Dieu,  »  ce  dist  li  dus,  «  n'en  avrez  escondit, 
«  Car  vos  estes  provée  de  veoir  et  d'oïr.  » 
Quant  l'entent  la  duchesse,  si  enforce  ses  cris, 

Et  garda  a  la  terre  et  voit  son  fil  Landri, 
755    Ele  plore  des  iex  et  giete  granz  sospirs  : 

«  Beaus  filz,  »  dist  la  duchesse,  tt  tant  par  estes  petiz  ! 

725  a.  puet.  —  729  chantant,  demoine.  —  73o  P.-é.  qui[l]  lait(?) 

—  73 1  tient.    —  737-8  Ces  deux   vers  s'accordent  mal;  p.-é.  un 
vers  a-t-il  été  omis  entre  les  deux.  —  741  La  defroit.  —  755  Et. 

—  756  f.  ce  dit. 


'30  tJOON   DE   LA    ROCHE 

a  Lasse!  que  n'es  si granz qu'armes  puisses  soffrir! 
«  Si  penroies  venjance  du  gloton  maleït 
«  Qui  si  juge  mon  cors  et  livre  a  juïz. 

760    —  Taisiez  vos,  bêle  mère,  »  ce  li  a  dit  Landris, 
«  Vos  n'avez  ceanz  père  ne  parenz  ne  amis, 
«  Ne  mais  que  moi  tôt  seul  que  portasies  a  fil. 
a  Je  ne  vos  faudrai  ja  tant  que  je  soie  vis. 
«  Car  laissiez  [or]  le  duc  ses  noces  maintenir, 

765    «  Et  mon  seignor  Tomile  dire  tôt  son  plaisir  : 
a  Se  je  puis  vivre  tant  qu'armes  puisse  baillir, 
«  Ce  est  .j.  mariages  qui  durera  petit. 
«  Quant  je  voi  bien  [huimais]  n'i  troverai  merci, 
«  Ne  m'i  cèlerai  mais,  par  les  sainz  que  Diex  fist, 

770    «  Car  s'est  home  qui  die  qu'o  vos  putage  fist, 

«  Prez  sui  que  lui  combate  très  par  mi  cest  larriz, 
«  A  cheval  et  a  armes,  en  mi  ce  pré  flori  : 
«  Si  soit  Jésus  au  droit,  qui  en  la  croiz  fu  mis. 
«  Se  je  sui  en  bataille  recreanz  et  matiz, 

775    «  Dont  en  prengne  venjance  mes  sire  a  son  plaisir.» 
Quant  entent  la  duchesse  que  ses  enfes  a  dit, 
Que,  selonc  son  pooir,  li  vuet  faire  escondit, 
Pasmée  chiet  a  terre  devant  les  moz  Landri, 
Quant  li  enfes  la  lieve  par  le  peliçon  gris. 

780    Et  tuit  cil  dou  palais  en  sont  tuit  esbahi; 
Il  n'i  ot  si  hardi  que  .j.  seul  mot  deïst, 
Mais  entr'eus  vont  disant  coicment  et  seri  : 
«  Bien  a  parlé  cil  enfes,  granz  mervoilles  a  dit. 
«  Se  il  puet  ja  tant  vivre  qu'armes  puisse  servir, 

785    «  Ce  est  .j.  mariages  qui  durera  petit.  » 
Quant  Tomiles  Toit,  a  poi  n'enrage  vis  : 
Il  a  pris  son  gant  destre,  sel  présente  Landri  : 
«  Vez  moi  ci  em  présent  de  combatre  vers  ti, 


757  puissjés.  —  766  tant  vivre.  —  770  Car  nome  dont  qui  voz  pu- 
taige  fit.  La  correction  est  fort  incertaine. —  771  combatre;  on  pour- 
rait garder  cet  infinitif  en  substituant  de  à  que.  —  787  sel,  ms.  soi. 


DOON    DE    LA   ROCHE 


3l 


«  Que  il  n'a  si  putain  en  .Ix.  pais. 
790    —  Vos  i  mentez,  maus  sers,  »  ce  li  a  dit  Landris. 

Il  garda  a  la  terre,  vit  un  baston  gésir, 

Tost  et  isnelement  celé  part  corant  vint  ; 

Plus  tost  qu'il  onques  pot  a  ses  .ij.  mains  le  pri[s]t, 

Par  la  sale  repaire  coreços  et  maris. 
795    L'enfes  avoit  .viij,  ans,  corne  la  geste  dit; 

Ou  que  voit  le  traïi[r]e,  ne  l'a  pas  meschoisi, 

Ainz  va  feri[r]  Tomile  devant,  enmi  le  vis. 

Amont  parmi  les  iex,  entre  les  .ij.  sorciz; 

Tôt  li  a  fait  sanglant  et  la  boche  et  le  vis 
800    Et  les  goles  de  martres  dou  peliçon  hermin  : 

Ou  que  il  vueille  ou  non,  a  la  terre  chaï. 

Quant  le  vit  li  dus  Do,  molt  Joios  en  devint. 

Il  tressailli  la  table,  que  le  vin  espandi  ; 

Tost  et  isnelement  celé  part  corant  vint; 
8o5    Ou  qu'il  vit  le  trait[r]e,  si  l'a  a  raison  mis  : 

«  Par  les  sainz  Dieu,  Tomiles,  il  n'ira  mie  ainsi. 

«  Apelez  .  j .  tel  home  vers  vos  se  puist  tenir  ; 

«  Je  ne  vuel  mie  perdre  la  mère  et  le  fil. 

«  Olive,  »  fait  li  dus,  «  tornez  vos  de  sor  mi  ; 
810    «  Je  vos  hai  tant  de  cuer  que  ne  vos  puis  veïr. 

XXVII 

«  Alez  a  vostreostel,  »  dit  li  dus,  «  dame  Olive; 
«  Molt  vos  hai  de  mon  cuer  et  si  ne  vos  aim  mie. 
«  Faites  voz  mauvaistiez  et  vostre  puterie.  {V) 

—  Ne[l]  dites  mais,  biaus  sire,  »  ce  li  a  dit  Olive; 
81 5    «  Je  ne  fui  onques  pute,  Diex  le  set,  nostre  sire. 
«  Ou  vos  vueillez  ou  non,  serai  Je  vostre  amie, 
a  Si  serai  a  voz  piez  et  a  la  terre  encline  ; 

7g5  corne  la  g.  le  d.;  on  pourrait  aussi  garder  le  en  lisant 
corn.  —  797  A.  na  —  800  de  martecs.  —  807  se  peut. 
—  810  V.  peut. 


i'v) 


^2  DOON   DE   LA   ROC^Ë 

«  Car  ja  n'amerai  famé  qui  vers  home  se  prise, 
«  Avant  que  s'amistié  ait  ainsi  reconquise.  » 

820    Quant  l'entendi  li  dus,  a  poi  n'enrage  d'ire; 

Il  sospire  de  cuer  com  hom   plains  de  grant  ire, 
Et  parla  hautement,  si  que  François  l'oïrent  : 
«  Par  foi,  Olive  dame,  ainsi  n'ira  il  mie, 
«  Car  vos  estes  vers  moi  si  durement  mesprise 

825    «  Jamais  n'orrons  ensemble  ne  messe  ne  matines.  » 
Et  respont  la  duchesse  :  «  Dont  m'en  irai  je,  sire. 
«  A  Damedieu  de  gloire,  le  fil  sainte  Marie, 
«  Commant  je  vostrecors,  que  de  mort  le  garisse. 
«  N'en  deïst  hui  a[u]tant  tel  a  en  ceste  vile  ». 

83o    Olive  s'en  torna  dolente  et  corocie, 

S'en  maine  devarft  li  Landrïet  le  nobile, 
Car  ne  l'ose  laissier  por  les  parenz  Tomile 
Dont  la  foie  estoit  grant  en  la  sale  perrine. 
Com  or  le  voit  Landris,  si  commence  a  rire, 

835    Car  corroz  a  enfant  ne  dure  gueres  mie; 
Il  regarde  sa  mère  qui  plore  et  sospire. 
Et  voit  ses  iex  moilliez  com  pleine  de  grant  ire; 
Or  dira  tel  parole,  onc  greignor  ne  veïstes  (/,  ly) 

D'enfant  de  son  eage  qui  muere  ne  qui  vive  : 

840    «  Taisiez  vos,  bêle  mère,  por  Dieu  le  fil  Marie. 
«  Oan  oi  jou  .vij.  ans,  si  com  je  vos  oi  dire, 
«  Certes,  en  petit  d'ore  [ert]  que  j'en  avrai  .xv., 
«  Que  porrai  porter  armes,  s'il  est  qui  les  me  livre; 
«  Si  ferai  je  a  .x.,  or  est  plus  corz  termine, 

845  «  Puis  manderai  o  moi  les  contes  et  les  princes, 
«  Trop  lor  donrai  or  fin,  besanz  et  manandies  ; 
«  Il  vendront  tuit  a  moi,  si  feront  mon  servise. 

818  amerai,  sic  ms,,  corr.  amera  (?)  Le  vers  n'est  pas  clair.  — 
819  Autant.  —  829  atant  telle.  —  833  foie,  ms.  sale.  —  835  C. 
trestons.  —  838  Ains  d.  t.  p.  ains  grans  ne  veïst;  on  préférerait 
ne  [on  nen)  oïstes.  —  841  Je  avérai  vij  ans.  //  serait  légitime 
de  remplacer  vij  par  viij,  cf.  v.  ygS.  —  842  avérai.  —  843  Q.  pou- 
ras.  —  844  est,  corr.  ert(.'') 


DOON    DE   LA    ROCHE 


ÎS 


«  Je  vos  rendrai  Coloigne  et  Gormaise  et  Espire, 
«  Et  la  tor  de  La  Roche  dont  vos  fustes  fors  mise. 
85o    «  Encor  vos  ferai  dame  de  [grant]  fermeté  riche.  » 
Quant  l'entent  la  duchesse,  s'en  fu  si  esbaudie 
Qu'ele  n'ot  onques  cure  de  sa  maie  haschie, 
Ainz  apela  le  duc,  si  li  a  pris  a  dire  : 
«  Sire  Do  de  La  Roche,  dès  or  m'en  vois  je,  sire.  » 


XXVIII 

855    La  dame  s'en  torna,  finée  a  sa  parole 

Et  Tomiles  commence  et  [si]  haste  ses  noces; 
Par  le  mien  escient,  comparé  ert  encores. 
Chantent  cil  jugleor  et  violent  et  rotent. 

Des  Aiz  a  la  Chapele  jusqu'à  Bacce  a  la  porte 
860    Et  de  Verdun  ou  mont  entre  ci  que  a  Roinne 

Ne  remest  plus  cité,  tant  fust  de  haut  mur  close, 
Que  Landris  ne  preïst  par  vigor  et  pai-  force; 
Et  par  mer  et  par  terre  mena  il  tel  esforce. 
De  plainne  Monpeillier  jusqu'à  Gonstantinoble  (v®) 

865    Et  de  Montefleune  deci  qu'a  Finepople, 

Ne  remest  plus  paien,  Sarazin  ne  Turcople, 
Que  ne  feïst  passer  par  mi  le  Bras  Saint  George, 
Ce  est  une  rivière  qui  molt  est  roide  et  forte; 
Dont  la  chançons  commence  mervcillose  dès  ore. 

852  mal'  adventure.  —  855  f.  a  s'orisoraison.  On  serait  porté 
à  corriger  sa  raison  ;  mais  alors  il  faudrait  supposer  que  le  v.  855 
est  le  début  d'une  laisse  dont  la  suite  nous  manque.  —  858  Après 
ce  vers  il  y  a  une  lacune.  Les  vers  suivants  annoncent  visible- 
ment les  exploits  de  Landri,  mais  rien,  dans  le  texte,  n'indique 
qu'il  s'agit  de  Landri.  —  SSg  sic.  —  860  Et  de  V.  il  sont  antresi 
q.  a  Roinne.  Par  Roinne  il  faut  entendre  le  Rhône.  —  862  Que 
on  ne  prist  p.  v.  ou  p.  f.  —  865  Montefleune  ou  Montefleuve.  — 
868  Si;  fort  et  roide. 


l4  DOQN   PE  LA  ROCHE 


XXIX 

870    Cç  dit  sainte  Escripture,  si  [com]  savez  bien  tuit, 
Que  ja  de  mauvais  arbre  ne  issera  bon  fruiz. 
Or  norrissiez  .j.  lop  tant  qu'il  soit  parcreuz, 
Quant  vos  l'avrez  nori,  gardé  et  bien  peii, 
Toz  tens  sera  il  lous  ;  cuidiez  qu'il  desnaturt? 

875    Quant  vos  bien  li  ferez,  de  lui  gardez  vos  plus  : 
Il  mangera  voz  bestes  et  gaster  avoz  fruiz. 
Do  a  pris[e]  sa  famç,  mervoilles  fist  li  dus. 
A  la  fille  Tomile  a  celé  nuit  geii 
Et  engendra  .j-  fil  '  fel  et  enragiez  fu, 

880    Car  puis  mist  Loeroigne  en  dolor  et  em  bruit. 

XXX 

Do  de  la  Roche  fu  corociez  et  irez, 
Et  fu  par  sa  folie  de  tôt  desconfortez  ; 
Et  Landris  fu  petiz,  mais  molt  fist  a  loer. 
Par  le  mien  escient  n'ot  que  .viij.  ans  d'aé, 

885  Et  si  vait  a  la  cort  ou  pas  ne  fu  amez. 

La  famé  que  Do  prist  l'avoit  coilli  en  hé, 
Audegours  la  cuverte  (son  cors  confonde  Dex) 
Et  de  fait  et  de  dit  et  de  quanqu'ele  set. 
«  Sire  Do  de  la  Roche,  nos  somes  asemblé 
8go    «  A  tort  et  a  pechié  et  a  mal,  ce  veez. 

«  Pieç'a  que  vos  ai  dit  que  vos  Landri  n'amez 
a  Ne  ne  le  norrissiez,  ne  ja  ne  l'alevez., 
«  Car  enfanz  d'autre  famé  ne  doit  on  ja  amer. 
«  De  mon  père  ai  mervoille  que  tant  l'a  enduré, 

871  istera.  — ^  875  bien,  ms.  mal.  —  S80  Car  plu»  iuit  Leoroi- 
gne  et  dolor  embruit.  —  882   descontez.   —  883  fist,  ms.  fut.  — 

886  le  coillit  antehee.  —  887  la  couverte.  —  888  Lacune  après  ce 
versl  —  891  Passes  vous.  —  893  de  te  f.  —  894  Je  me  mervoille 
de  mon  père. 


POON  DE  LA  ROÇHB  3^ 

895    «  Que  il  ne  Ta  ocis  ou  noie  ou  tué. 

«  Assez  querez  engin  par  quoi  fust  acordez. 

—  Dame  »,  dit  li  dus  Do,  «  car  me  laissiez  ester. 

«  Si  malement  me  puis  ou  lignage  fier 

«  Qui  chasçun  jor  me  ruevent  mon  enfant  afole[r]. 


XXXI 

900    —  Sire  dus  de  la  Roche,  bien  sai,  »  ce  dit  la  dame, 
«  Que  vos  riens  ne  m'amez;  de  ce  sui  en  fiance, 
«  Ainz  maintenez  a  tort  dame  Olive  de  France  : 
«  Chascun  jor  i  gisez  quant  il  vos  atalente. 
«  Guidiez  que  bel  me  soit  et  n'en  soie  dolente  ? 

905    «  Ja  ne  verrai  Landri  que  n'aie  duel  ou  ventre. 
«  Car  li  faites  cest  uis  de  cest  palais  deffendre. 
—  Dame,  »  dit  li  dus  Do,  «  or  oi  plait  qui  m'adente. 
«  Maleoite  soit  l' eure  que  venismes  ensemble  !  » 


XXXI L 

Or  voit  Landris  li  enfes,  qui  auques  s'aperçoit 
910    Et  set  le  grant  outrage  qui  chascun  jor  li  croi[s]t. 

L'enfes  vat  a  la  cort  et  au  main  et  au  soir, 

Et  la  maie  marastre  le  bote  de  sor  soi, 

Audegours  la  cuverte,  cui  Dieu  grant  mal  otroit. 

«  Filz  de  putain,  bastarz,  fui  de  ci  d'avant  moi. 
91 5    «  Va  ou  bore,  a  ta  mère  ;  trop  est  riche  d'avoir  : 

«  Assez  lui  ont  doné  chevalier  et  borjoi§  ; 

«  El  ne  se  garde  d'ome  qui  de  mère  nez  soit.  (v<>) 


895  Q.  il  ne  vous  a  0.  n.  —  896  p.  qui  f.  —  goS  que  n'an  a. 

906  c.  us  —  907  me  dante  —  90S  Maldite  s.,  q .  nous  v.j  —  909  s' 
manque.  '^  914  b,  fut.  —  917  Elle,  soit  nez. 


i6 


DOON    DE    LA   ROCHE 


— Dame,  »  [ce]  dist  li  dus,  «  aiez  pais,  ce  que  doit. 
«  Ja  ne  vos  amera  Landris,  car  ce  est  droit. 
920    a  Encor  le  compar[r]ez  a  quel  fin  que  ce  soit. 
«  Si  en  perdrez  la  teste  ;  si  ne  puet  remanoir. 
—  Sire,  »  ce  dist  Landris,  «  certes,  vos  dites  voir.  » 


XXXIII 

Landri[s]  va  a  la  cort  chascun  jor  por  mangier, 

Li  niés  le  roi  de  France,  li  damoisiaus  prisiez. 
925    Tomiles  le  fait  batre  garçons  et  pautoniers  : 

Si  li  traient  le  poil  quant  il  siet  au  mangier, 

Et  la  maie  marastre  le  bote  de  ses  plez, 

Audegours  la  cuverte,  cui  Dieus  doinst  encombrier. 

«  Filz  de  putain,  bastarz,  que  demandes,  que  quiers? 
930    «  Va  au  bore  o  ta  mère;  trop  riche  est  de  deniers  : 

«  Assez  l'en  ont  doné  serjant  et  chevalier. 

—  Dame,  »  ce  dist  Landris,  «  aiez  pais,  si  m'oiez; 

«  Laissiez  ester  ma  mère,  car  riens  ne  vos  requiert. 

«  Encor  le  comparrez,  par  les  ieus  de  mon  chief  ; 
935    «  Si  em  perdrez  la  teste  :  ja  trestorné  n'en  [ijert.  » 

Or  est  venuz  li  termes  qu'ele  dut  acouchier, 

Si  délivre  d'un  fil;  fel  [fuj  et  enragiez; 

Il  ot  a  non  Malingre  ;  Dieus  confonde  son  chief. 

Li  dus  le  fist  en  fonz  lever  et  baptisier, 
940    Mais  aine  ne  porta  foi  a  home  desoz  ciel, 

Se  il  le  pot  traïr,  murtrir  ne  enginier. 


XXXIV 

Quant  li  énfes  fu  nez,  granz  duel[sj  en  fu  en  terfé. 

920  quelque,  ms.  quel.  —  gaSAinsla  couverte — 929  demande 
et  que.  —  gSo  trope  est  r.  deniers.  —  989  f.  laver.  —  940  ains. 


DOON    DE    LA    ROCHE  $7 

Landris  vait  a  la  cort  au  matin  et  au  vespre. 

Et  la  maie  marastre  le  bat,  qu'ele  ne  cesse  :  (/.  ig) 

945    «  Filz  de  putain,  bastarz,  fui  de  ci,  car  tu  desves. 
«  Va  a[u]  bore  a  ta  mère,  car  trop  est  riche,  certes  : 
«  Assez  l'en  ont  doné  [et]  li  clerc  et  11  préstre  ; 
«  El  ne  se  garde  d'omme  de  cest  siècle  terestre. 
—  Dame  »,  ce  dist  Landris,  «  car  aiez  pais  et  cesse; 

gSo    «  Laissiez  caste  manière,  car  pas  ne  vos  apele. 
«  Encor  le  comparrez,  par  Dieu  le  roi  celestre; 
«  N'en  serez  trestornée  ;  s[i]  en  perdrez  la  teste.  » 
Or  est  venuz  li  jors  [que]  ses  ventres  l'apresse, 
Si  délivre  d'un  fil  :  granz  duel[s]  en  fu  en  terre. 

955     Li  dus  le  fist  lever  a  Ais  a  la  chapele, 

Et  ota  non  Mali[n]gre;  Dieus  confonde  sa  teste. 
Car  il  ne  porta  foi  a  nul  home  terrestre. 
Li  niez  le  roi  de  France  rama[s]t,  s'il  poïst  estre, 
Ainsi  comme  son  frère  volentiers  et  a  certes  :  • 

960    Quant  il  l'en  vuet  baisier,  si  li  guenchist  la  teste. 
Quant  Landris  ot  .x.  ans,  Malingres  entre  el  setme. 


XXXV 

Or  croissent  li  enfant  et  lor  bruiz  et  lor  force. 

Malingres  fu  gaignarz,  cuverz  et  de  maie  ordre, 
(  Ou  que  il  vit  Landri,  laidement  l'aparole  : 

\,  965    «  Par  les  sainz  Deu,  bastarz,  molt  me  poise  dès  ore 

«  Que  vos  vivez  céans  de  mon  père  et  du  nostre. 


943  et  a  V.  —  945  b.  fut.  —  948  Elle.  —  gSB  ses  v.  li  a  prise 
—  953  f.  laver.  —  937  nul,  ms.  aul'.  —  960  gaichit.  —  961  M. 
antre  .vj.  Mais  la  correction  laisse  subsister  une  difficulté, 
puisque  Landri,  au  moment  du  second  mariage  de  son  père,  avait 
huit  ans  (v.  884).  //  faut  probablement  substituer,  dans  le  premier 
hémistiche,  xv  à  x.  —  g63  fu  gainnars  —  964  Onques  n'oit  L. 


38  DOON   DE   LA   ROCHE 

«  Vos  n'estes  pas  mes  frère,  ne  li  cuers'nel  m'aporte 
((  Que  je  ja  preigne  a  vos  amistié  ne  acorde.  » 


XXXVI 

Donques  parla  Landris,  qui  fu  simple[s]  et  douz  : 

970    «  Par  les  sainz  Dieu,  beaust'rere,  grantpechié  dites  [vos]; 

«  Mes  père  prist  ma  mère  a  joie  et  a  baudor,  {v°) 

«  Olive  la  duchesse  ;  n'a  plus  bêle  ou  mont. 
«  .1.  péchiez  de  deable  s'est  meslez  entr'els  .ij,, 
«  Por  quoi  ne  puis  avoir  demi  pié  de  l'enor. 

975    «  Haï!  Pépins,  beaus  oncles,  por  Dieu,  ou  estes  vos? 
«  Se  )e[l]  vos  demandoie,  avroie  encor  secors; 
«  Mais  por  ce  nel  di  mie  que  jel  quiere  vers  vos  : 
a  Toz  tens  vos  servirai  com  mon  frère  menor  ; 
«  Ou  soit  ou  tort  ou  droit,  s'en  ferai  mon  seignor.  » 

980    Quant  l'entendi  Malingre[s],  a  poi  de  duel  ne  font  : 
M  Alez  en  douce  France,  bastarz  contralios. 
«  Ja  Damedé  [ne]  place,  du  saint  ciel  glorios, 
«  Por  riens  que  sachiez  faire  que  soiez  bien  o  moi.  » 
Par  les  cheveus  l'aeft  a  ambe  .ij.  sespoinz; 

985    Ja  l'eûst  ou  feu  ars,  quant  Landris  se  rescost, 
Mais  ne  le  vot  tochier,  tant  fu  simples  et  douz. 
Atant  es  vos  Tomile  par  la  presse  ou  cort, 
Et  vait  ferir  Landri  de  son  pié,  veant  toz, 
Qu'il  l'abat  en  la  sale  sanglant  et  vergondos. 

990    Quant  le  voit  li  dus  Do,  a  pou  d'ire  ne  font  : 

«  Par  les  sainz  Deu,  Tomiles,  grant  pechié  faite[s]  raolt. 
«  Que  demande[z]  Landri,  cest  chetif  pecheor?  » 
Quant  l'entendi  li  enfes,  liez  en  fu  et  joios. 


967  nel,  ms.  ne  le.  —  970  grans  pechiés.  —  977  M.  no  di  mie 
por  ce  q.  jo  querre  v.  v.  —  982  de  s.  —  985  a.  e  qu.  L.  se  rescont, 
—  987  envers  T, 


DOON   DE   LA   ROCHB  39 


XXXVII 

Quant  l'enfes  entendi  de  Doon  l'Alemant 
995    Qu'i[l]  l'ot  por  lui  prier  et  mostrer  bel  semblant, 

Bien  poez  dire  et  croire  liez  en  fu  et  joianz; 

Monta  sor  .j.  table,  si  parla  hautement  : 

«  Or  m'entendez,  »  dist  il,  «  Bavier  et  Alemant,        [f.  20) 

«  Et  Normantet  Frison  et  François  et  Flamant! 
1000  «  Le  grant  orgueil  Tomile,  Dame  dieus  le  cravant, 

«  Car  ma  mère  a  destruite  par  son  faus  jugement. 

a  Se  Dieus  me  laisse  vivre  jusqu'as  armes  portant, 

«  J'en  penraila  venjance  au  mien  commandement.  » 


XXXVIII 

Dont  reparla  Malingres,  qui  fel  fu  et  gaignarz  : 
ioo5  «  Par  les  sainz  Dieu,  biaus  père,  pechié  dit[es]  et  mal. 
•   a  Je  sui  li  vostre  fîlz  et  ma  mère  est  leals. 

«  Ci  illuec  me  honî[st]  chascun  jor  .j.  bastarz. 

«  Ja  Damedieus  de  gloire  ne[n]  ait  en  m'arme  part 

«  Si  je  ne  vos  [l'jocis,  se  longes  i  esta. 
loio  —  Biaus  niés  »,  ce  dist  Tomiles,  «  malementvos  hasta 

«  Veez  de  vostre  père  qui  l'a  torné  a  gas. 

«  Ghascun  jor  s'aperçoit  par  engin  et  par  art 

«  Comment  Landris  soit  riches  et  vos  soiez  bimarz. 


XXXIX 

^  Par  les  saini  Dieu,  Tomiles,  »  ce  a  dit  Do  li  dus, 
ioi5  «  Tôt  cest  plait  avez  vos  commencié  et  meii 
«  Por  quoi  li  .ij.  enfant  sont  ensemble  irascu  : 

996  joeut.  —  1002  V.  jiisques  a.  —  ioo3  pechiés  —  1009  *  ''"^^ 
^  lpi3  bimars,   corr,  buisnarz  (?)  —  1016  irascir. 


4«  DOON    DE   LA    ROCHE 

«  Frère  deiissent  estre  et  ami  ambedui 

«  Et  retenir  lor  terre  a  force  et  a  vertu  » 

D'autre  part  ont  le  jor  en  la  cort  respondu, 
I020  C'est  Guinemanz  et  Asses  et  Moriz  li  chenuz. 

Et  Asses  de  Maience  est  en  piez  levez  sus  : 

«  Parles  sainz  Dieu,  dus  Do,  morz  es  et  confonduz. 

«  Tu  es  entre  .ij.  seles  a  la  terre  cheiiz, 

«  Quant  tu  pr[es]is  moillier,  aine  tant  gente  ne  fu, 
1025  «  Or  as  prise  la  fille  au  traïtor  parjur,  {v) 

«  Tomile  de  Coloigne,  ne[l]  vos  cèlerons  plus. 

«  Donez  Landri  La  Roche,  car  nos  l'otrion  tuit: 

«  Doée  en  fu  sa  mère;  estre  en  doit  revestus  ». 

Quant  l'entendi  li  dus,  ainz  tant  joios  ne  fu. 
io3o  Audegour  la  cuverte,  cui  Dieus  doint  maleur... 

«  Par  les  sainz  Dieu,  dans  Asses,  fol  plait  avez  meû. 

«  Por  poi  que  [ne]  vos  fier  sur  la  teste  d'un  fust, 

«  Qui  ci  me  tos  m'enor,  si  la  dones  autrui.  » 

Es  le  cuvert  Tomile  par  la  presse  acoru  : 
io35  «  Aiez  pais,  bêle  fille;  s'il  vos  plaist,  seez  jus. 

«  Il  n'a  droit  en  l'enor,  se  molt  chier  n'est  venduz.  » 

Plus  tost  qu'il  onques  pot,  est  celé  part  venuz  : 

«  Par  les  sainz  Dieu,  dans  Asses,  dans  cuvers,  dans  parjurs... 

Du  poing  que  il  ot  gros  enz  ou  col  l'a  féru, 
.1040  Et  jusqu'as  piez  Landri  l'a  sovin  abatu. 

Com  or' le  voit  li  enfes,  aine  tant  dolenz  ne  fu; 

«  Se  je  or  ne  m'en  venge,  morz  sui  et  confonduz.  » 

Par  la  sale  resgarde  droitement  a  .j.  uis, 

Et  voit  un   veneor  qui  de  bois  est  venuz 
1045  Et  tenoit  en  sa  main  .j.  grant  espié  molu. 

1017  deusrient,  enmedui.  —  1018  et  envers  tuit.  —  loig  Qu'a. 

—  1020  Mois;  cf.  1242.  —  io3o  dont  mal  jour.  //  manque  ici 
un  vers,  p.  ex.  :  Si  s'est  levée  en  pië,  que  trop  iriée  fu.  —  io3i 
deux  A.  —  io32  fier,  wi5.  fies. —  io34  couvert.  —  io36  Je  vai  d. 

—  1037  est,  ms.  estre.  —  io38  Ici  encore  il  parait  manquer  au 
moins  un  vers.  —  loSç  ot,  ms.  a.  —  1040  a  pied.  —  1046  e.  molin 
ou  moliu. 


DOON    DE    LA    ROCHE  ^l 

Com  or  le  voit  Landris,  celé  part  est  venuz, 
Si  li  a  tost  des  poinz  arachié  et  tolu  ; 
Par  le  palais  repaire  dolenz  et  irascuz  ; 
Ou  qu'il  voit  le  traître,  ne  l'a  mesqueneu  : 
io5o  II  va  ferir  Tomile,  ne  s'est  aresteiiz; 

Grant  cop  li  a  doné  et  de  fer  et  de  fust, 

Que  par  mi  leu  du  cors  toz  l'aciers  en  parut; 

Nel  navra  mie  a  mort,  por  tant  l'a  abatu.  {/.  21) 

Tomiles  brait  et  crie  et  apele  ses  druz. 


XL 


io55  Tomiles  fu  navrez,  si  en  fu  molt  dolenz, 
Car  Landris  l'a  féru  par  son  fier  hardement, 
Li  niés  le  roi  de  France,  qui  fu  prozet  vaillanz. 
Volentiers  recovrast  encor  en  autre  sens, 
Quant  i  corut  ses  père,  si  li  to[I]t  et  desfent  : 

1060  «  Vues  le  tu  donc  ocire  ?  et  voi  ci  ses  parenz. 

—  Sire,  »  ce  dist  Landris,  «  je  ai  droit  voirement. 
«  Car  ma  mère  ont  destruite  li  sien  faus  jugement. 
«  Se  Dieus  me  laisse  vivre  jusqu'à  armes  portant, 
«  J'enpenraila venjance au miencommandement». 

io65  Et  Asses  de  Maience  s'est  levez  en  estant  ; 
La  colée  ot  reçue,  grains  en  fu  et  dolenz  ; 
De  sa  honte  vengier  estoit  molt  desiranz. 
Par  la  sale  regarde  droitement  vers  .j.  banc. 
Et  voit  un  eschaquier  a  or  et  a  argent  : 

1070  Plus  tost  qu'il  onques  pot,  celé  part  vint  corrant, 
Tost  et  isnelement  a  ses  .ij.  mains  le  prent, 
Par  le  palaiz  repaire  tost  et  isnelement 
Et  va  ferir  Tomile  ou  visage  devant, 

1049  le,  ms.  H.  —  io5i  Grans  cop.  —  io53  Ne  le  navrai  il  mie. 
—  io58  r.  ansor  en  a.  seui.  La  correction  est  douteuse.  —  io65 
c'est  1.  —  1073  au  V. 


4^  DOON    DE    LA    ROCHE 

Quant.),  siens  niési vient, Clarembaus  de  Dinant; 
1075  De  son  oncle  vengier  molt  par  fu  desiranz. 

Et  Asses  le  feri  ou  visage  davant  : 

Le  sanc  et  la  cervele  a  la  terre  en  espant, 

Si  que  mort  l'abati  desus  le  pavement  ; 

Et  li  parent  Tomile  se  vont  molt  escriant.  (v°) 

1080  Lors  meïsme  i  corurent  Baivier  et  Alemant, 

Et  furent  en  po  d'ore  .Ixx.  combatant. 

La  force  les  sorprist,  que  Tiroie  celant? 

Forssolement  Formont,  Asson  et  Guinemant. 

Vienent  a  lor  ostels,  prenent  lor  garnemenz. 
io85  Ce  fu  le  premier  jor  que  Landris  armes  prent  : 

Il  ne  ceint  pas  l'espée,  mais  a  son  col  la  pent, 

Garde  Pépin  son  oncle  agrant  joie  l'atent, 

Qui  plus  lui  est  faliz  des  personéement. 

.IL  chevalier  les  sivent  a  espérons  brochant, 
1090  N'i  a  celui  des  .ij.  ne  soit  riches  mananz. 

Selon  l'aiguë  du  Rin  s'en  vont  esperonant; 

La  force  les  enchauce  environ  de  toz  sens  ; 

Et  quant  le  voit  Landris,  si  en  fu  molt  dolenz. 

Il  en  [a]  apelé  Asson  et  Guinemant  : 
logS  «  Seignor,  or  entendez,  franc  chevalier  vaillant: 

«  Gestes  genz  qui  [nos]  sivent  si  efforciéement 

«  Ne  me  gardent  honor  por  Pépin  le  roi  Franc. 

«  Mielxvoldroieestre  morz  n'i  fiere  maintenant.  » 

Il  broiche  le  cheval  des  espérons  trenchanz 
1 100  Et  a  brandi  la  lance  au  conferton  pendant; 

1074  Le  Mi.  répète  le  premier-  hémistiche  :  Quant  .j.slen  niés 
i  vient  tost  et  isnelmant  |  Quant  .j.  sien  niés  i  vient  Clarambaus 
de  Dinans.  Ces  deux  vers  doivent  évidemment  être  réduits  à  un 
seul.  —  1075  par  fut  molt.  —  1076  ferut.  —  1080  meismes.  Corr. 
L'ore  meïsme  i  corrent?  —  1081  Ms.  vijxx,  chiffre  qui  fausse  le 
vers,  et  qui  d'ailleurs  parait  bien  élevé.  —  io82-3  Ces  vers  se  suivent 
mal;  manque-t-il  un  vers  entre  les  deux}  —  io83  Formant  — 
1084  V.  et  leur  ostes.  —  1088  despersencemant.  —  1089  proi- 
chant.  —  1090  menans.  —  1091  du  rus.  —  1096  Ces  g.  q.  sunt 
ici  effreemant.  —  1098  fiers.  —  1 100  Et  a  brandie  l. 


DOON   DE   LA   ROCHE  4$ 

Sor  Tescu  de  son  col  feri  un  Alemant, 

Par  sor  la  bocle  a  or  li  peçoie  et  porfent, 

Le  haubert  de  son  dos  li  desmaile  et  desment, 

Le  cuer  qu'il  ot  ou  ventre  en   .ij.  moitiez  li  fent. 

I  io5  Toute  plaine  sa  lance  Tabati  mort  sanglant, 

Et  escria  a  La  Roche  !  »  tost  et  isnelement.  (/.  22) 

La  force  les  enchâuce  environ  de  touz  sens. 

XLI 

Asson  et  Guinemant  en  apela  Landris, 

Li  niés  le  roi  de  France,  li  damoiseaus  gentiz  : 

I I  ïo  «  Geste  gent  qui  nos  sivent  et  a  hu  et  a  cri 

«  Ne  me  garde[nt]  honor  por  mon  oncle  Pépin. 

«  Mais  mielx  morir  volroie  que  n'i  voise  ferir.  » 

Il  a  brandi  la  lance  au  confenon  porprin; 

Joserant  de  Coloigne  va  en  l'escu  ferir; 
1 1 1 5  Par  sor  la  bocle  d'or  li  peçoie  et  malmist 

Et  l'aubert  de  son  dos  desmailla  et  rompist  ; 

Le  cuer  qu'il  ot  ou  ventre  en  .ij.  moitiez  fendi, 

Tote  plaine  sa  lance  l'abati  mort  sovin, 

Puis  rescrie  «  La  Roche  !  chevalier,  ferez  i  !  » 
1 1 20  Guinemanz  tiert  .  j.  autre,  li  proz  et  li  hârdiz, 

Que  mort  l'a  abatu  devant  lui  ou  larriz; 

Et  Asses  de  Maience  lor  a  le  quart  ocis. 

Esperonant  s'en  vontdelez  l'aiguë  du  Rin; 

N'i  avront  huimais  garde  de  toz  ceus  de  la  cit. 
1 125  Damedieus  les  garisse,  qui  en  la  croiz  fu  mis. 

Tomiles  fu  navrez,  s'en  fu  grains  et  marriz, 

Et  Malingres  le  plore  et  sa  mère  autresi. 

Atant  es  Guenelon  et  Hardré  son  cousin  ; 

Asamblé  avec  eus  si  estoit  Aloris 
I  i3o  Et  Hervis  de  Lion,  li  cuverz  de  put  lin, 

iioi  ferut.  —  1102  P.  sur,  perçoie.  —  iii5  P.  s.  la  bloc  a 
or;  cf.  V.  22gy.  —  11 16  desmaille.  —  ii23  du  rus.  —  1126 
crains,  ms.  grieus.  —  11 29  avec,  ms.    auos. 


44  DOON    DE    LA    ROCHE 

Et  lor  riche  lignages  qui  si  fut  de  haut  pris  : 

Ne  fussent  traïtor,  tés  chevaliers  ne  vi. 

Plus  tost  que  onques  porent  si  l'ont  a  raison  mis  : 

«  Sire,  mor[r]ez  en  vos,  nobles  hom  et  gentis?  » 
1 135  Et  respont  li  traîtres  :  «  Je  n"ai  soin  de  morir;  (v») 

«  Mais,  si  Landris  s'en  vait,  nos  sommes  escharni  : 

«  Il  gastera  noz  terres  et  trestoz  no^païs. 

«  Car  alez  tost  après,  sel  faites  revenir, 

«  Et  nosli  donrons  trive  a  .iii).  ans  ou  a  .v., 
1140  «  Et  puis  si  Tocirons  bêlement  a  loisir, 

«  Murtrir  ou  estrangler,  quant  il  ert  endormiz. 

—  Hé  !  Diex,  «  ce  dist  faus  Guenes,  «  corn  gent  conseil  a  ci  ! 

—  Voire»,  ce  dist  Hardrés,  «  onques  plus  gent  ne  vi.  » 
Ou  que  il  voit  le  duc,  si  l'a  a  raison  mis, 

1 145  En  l'oreille  li  dist  coiement  et  seri  : 

«  Sire  dus  de  La  Roche,  entendez  ça  vers  mi. 
«  Or  voi  Je  ce  et  sai  que  pensez  de  Landri  ; 
«  Et  car  alez  après,  sel  faites  revenir  ; 
«  Et  nos  li  donrons  trives  a  .iiij.  ans  ou  a  .v. 

I  i5o  «  Querez  ou  doit  aler  ;  ja  l'avons  nos  norri.  » 

Et  respondi  li  dus  :  «  Or  avez  vos  bien  dit  : 
«  Se  cest  plait  poez  faire,  dont  m'avez  vos  gari. 

—  Oïl,  »  ce  dist  Hardrez,  «  par  foi  le  vos  plevi.  » 
Li  traïtor  li  ont  fiancé  et  plevi, 

I I  55  De  cel  jor  en  .v.  ans  i  ont  le  terme  mis, 

• 
1140  £t  plus.  —  1 141  II  manque  sûrement  un  vers  avant  ou 
après  celui-ci.  —  1 146  Ici  commence  le  premier  des  deux  feuil- 
lets dont  se  compose  le  fragment  appartenant  à  M.  Eugène  Le- 
long  [L.].  —  1148  Leçon  de  L.;  le  ms.  omet  Et;  L.  sel,  ms.  ce  le. 
—  1149  L.  trives,  ms.  trêves.  —  ii55  Ms.  De  cel  jour  .v.  anz  .v. 
le  terme  mois.  Cette  leçon,  qui  n'a  pas  de  sens,  est  exactement  celle 
du  fragment  L.,  mais  elle  résulte  d'une  correction  mal  faite  dans 
ce  fragment,  oii  la  leçon  première  était  De  cel  jor  en  avant  i  ont 
le  terme  meis  ;  la  correction  a  consisté  à  raturer,  à  l'encre  rouge, 
les  mots  en  avant  i  ont  et  à  les  remplacer  par  v  anz  v.  Le  cor- 
recteur aurait  du  se  borner  à  remplacer  avant  par  .v.  anz,  et  à  ex- 
ponctuer  {ce  qu'il  n'a  pas  fait)  /'e  de  meis. 


bOON    DE    LA    ROCHE 


4& 


Damedeus  les  confonde,  qui  en  la  croiz  fu  mis. 
Li  dus  Do  en  monta  sor  .j.  cheval  de  pris; 
Ilissi  de  la  vile  por  ramener  Landri. 


XLII 


Li  dus  D.  en  monta  sor  .j.  cheval  ferrant  : 

I  i6o  II  issi  de  la  vile  a  espérons  brochant. 

Tant  a  corru  li  dus  c'aus  ielz  vitson  enfant. 
A  haute  vois  escrie  Asson  et  Guinemant  : 
«  Por  Dieu,  franc  chevalier,  n'alez  plus  en  avant, 
«  Car  je  vos  ai  pris  trives  de  cest  jor  en  .v.  anz. 

1 165  «  Haï  !  beaus  filz  Landri[s],  corn  estes  avenanz! 
«  Se  creûsse  vo  mère,  que  fuissiez  mes  enfanz, 
«  De  nule  rien  en  terre  ne  fusse  si  joianz. 
«  Li  putaigesdeli  vos  va  molt  encorpant.  » 
Quant  l'entendi  Landris,  a  pou  ne  pert  le  sens  : 

1170  c  Par  Dieu!  vos  i  mentez,  dans  cuverz  soduanz. 
«  Ele  ne  fu  ains  pute,  Deu  en  trai  a  garant. 
«  Certes,  se  ce  n'estoit,  por  Deu  le  roiamant, 
«  Car  vos  estes  mes  père,  nel  cèlerai  néant, 
«  Je  vos  donroie  tel  as  costez  et  as  flans. . .  » 

II 75  II  ne  se  pot  tenir,  au  maltalent  c'ot  grant; 
Il  broche  le  cheval  des  espérons  trenchanz 
Et  a  brandi  la  hanste  au  confenon  pendant  : 
Son  père  eust  féru  quant  se  gainchi  ou  champ. 
Debien  et  d'amistié  a  apelé  l'enfant  : 

1 180  «  Haï  !  beaus  filz  Landris,  com  vos  voi  essaiant! 


(/^23) 


II 56  les  d'après  L.;  mi.  le.  —  tiSy  sor  d'après  L;  ms.  SUS.  — 
1166  Les  deux  textes  mon  enfant.  —  1169  sens,  les  deux  textes 
sanc.  —  1 1  73  nel,  L.  nol,  corrigé  en  nos,  ou  l'inverse,  ms.  nous.  — 
1173  Car  sic  L  et  ms.;  corr.  Que(?)  —  1174  La  phrase  paraît 
inachevée —  1177  hanste,  L.  hante,  ms.  lance.  —  1  iy8  II  semble 
quCi  dans  L.,  se  ait  été  surchargé  en  il. 


40  t)90N   DE   LA   ROCHE 

ce  Voir,  nule  riens  en  terre  ne  par  aime  je  tant  ; 
«  Mais  retornez  arriéres  tost  et  isnelement. 
—  Sire,  »ce  dist  li  enfes,  «  tôt  a  vostre  commant.  » 
Il  retornerent  tost  li  chevalier  vaillant 
1 185  Et  vindrent  a  Coloigne,  la  cité  qui  est  granz, 
Puis  i  estut  Landris  encores  demi  an, 
Dont  doit  avoir  la  mort  s'il  est  jamais  fianz 
Le  traitor  Tomile  ne  a  toz  ses  parent.  (v©) 

XLIII 

Quant  Landris  est  entrez  en  ce  jor  en  la  vile, 
1 190  Li  dus  et  li  princier  en  ont  les  trives  prises  ; 

Très  bien  les  a  jurées  Tomiles  et  Malingres 

Et  la  maie  marastre,  qui  molt  ne  l'ama  mie, 

Audegour  la  cuverte,  cui  Jésus  maleïe. 

De  ce  jor  en  .v.  anz  i  fu  mis  li  termines. 
1 195  Puis  i  estut  Landris  demi  an  en  la  vile 

Por  esgarder  Tomile  et  lor  estre  et  lor  vie  ; 

Bien  doit  avoir  [la  mort]  se  il  en  eus  se  fie. 

Tomiles  fu  senez,  s'est  la  plaie  garie. 

Tant  a  aie  .j.  jor  par  Coloigne  la  riche 
1200  Que  de  son  fier  lignage  ot  molt  grant  compagnie. 

Au  mostier  les  mena  entre  vespre  et  complie; 

La  mort  Landri  l'enfant  jurèrent  et  plevirent, 

Que  ne  l'oï  nuns  hom  qui  muire  ne  qui  vive, 

Ne  mais  qu^e  solement  la  nonne  Beneïte 
i2o5  Qui  esioit  au  mostier  ou  fa[i]soit  son  servise, 

Et  fu  lez  .j.  pile  reposte  et  mucie. 

1 187  fianz,  les  deux  textes  ont  fuanz,  qui  n'offre  ici  aucun  sens; 
la  correction  est  suggérée  par  le  v.  1 1 gj;  seulement,  au  v.  1 188, 
on  préférerait  âl  ou  el  au  lieu  de  le.  —  1197  la  mort  manque 
dans  les  deux  textes,  cf.  v.  i  iSj.  L.  porte  avoirt,  où  le  t  est  un 
reste  de  mort.  —  1204  Les  deux  textes  portent  benoite.  —  i3o5, 
au  dans  les  deux  textes;  corr.  ou(?}  —  1206  fu,  L  fui. 


bOON   DE   LA   ROCHE  47 

Or  puis  je  dire  et  croire  qu'il  ne  Fi  savent  mie, 
Car  il  reiissent  morte,  estranglée  ou  ocise. 
Ele  a  oî  le  murtre^  le  consoil  et  le  signe, 

12 10  Por  [ce]  molt  tenrement  des  ieus  plore  et  sospire, 
Damedieu  reclama,  le  til  sainte  Marie, 
Que  il  ces  traïtors  confonde  et  mal[e]ïe, 
Car  il  sont  trestuit  plein  de  molt  grant  félonie. 
Ele  issi  du  mostier,  que  nus  d'eus  nel  sot  mie, 

121 5  Par  .)'.  petit  huisset  qu[e]  ele  i  sot  meïsmes. 

Entre  ci  qu'au  palais  ne  cesse  ne  ne  fine  ;  '      [f*  24) 

Ou  qu'ele  voit  Doon,  par  le  mantel  le  tire  : 

«  Gentis  dus  de  La  Roche,  entendez  moi,  beaussire, 

ce  Li  niés  au  roi  de  France  recevra  par  folie, 

1220  «  Car  sa  mort  ont  jurée  Tomiles  et  Malingres, 
«  Melsme  vostre  famé  qui  ne  le  rainme  mie  : 
«  Leanz,  en  cel  mostier,  sont  trestuit  en  concile,  » 
Quant  l'entendi  li  dus,  a  pou  n'enrage  d'ire; 
Tenrement  des  iex  plore  et  de  son  cuer  sospire  ; 

1225  Damedeu  reclama,  le  fil  sainte  Marie  ; 

Quatre  foiz  se  pasma;  ne  s'en  pot  tenir  mie. 


XLIV 

Quant  li  dus  Do  entent  que  la  nonnains  li  dit. 
Et  il  sot  bien  de  voir  que  mie  ne  menti, 
Onques  puis,  celé  nuit,  ne  manja  ne  dormi. 
i23o  L'endemain,  par  som  l'aube,  a  fait  Landri  venir; 
Bel  et  cortoisement  a  apeler  le  prist  : 


iîo8  euissient  <f^ns  les  deux  textes.  —  laio  Ms.  Par;  les  deux 
textes  omettent  ce.  —  12 12  malie  dans  les  deux  textes —  121 3  !.. 
félonie,  nus.  ire.  —  J2i5  i  sot,  ms.  issoit,  L.  issot.  —  jaig  rece- 
vra, sic  L.  et  ms.;  corr.  restera  (?)  —  1221  Leçon  de  L.;  ms.  ne 
l'ainme.  —  1222  L.  concele,  ms.  conceille.  —  i23o  L.  par  sour, 
ms.  par   soubz.  —  i23i  Z..  le  âst  (mot  rayé)  Is  prist. 


4^  DOON    DE    LÀ    ROCHE 

,«  Haï  !  biaus  filz  »,  dist  il,  «  com  me  poise  de  ti  ! 
«  Ne  te  puis  en  cest  règne  ne  aidier  ne  tenir. 
«  Cil  gloton  t'ociront,  qui  sont  tui  enemi. 
1235  «  Et  car  t'en  va  en  France  a  ton  oncle  Pépin. 


XLV 

—  Je  irai  volentiers,  »  dist  Landris,  «  biauz  douz  sire. 

«  Ne  me  volez  tenser  ne  garder  en  la  vile, 

«  Ainz  me  faites  ici  comme  fel  et  traître. 

«  Jamais  ne  finerai  deci  qu'en  qu'en  paiennie;  » 

1240  «  En  la  crestïenté  ne  remandrai  je  mie.  » 
Landris  en  apela  Gilebert  de  Vaubile, 
Asson  et  Guinemant  et  Roon  et  Morise, 
Des  pers  de  Loereigne  .iiij.^''  des  plus  riches  :  {v°) 

«  Seignor  franc  chevalier  qui  Pépin  estes  quites, 

1245  «  Sui  home  et  sui  ami  de  grant  ancesserie, 
«  Et  car  me  recevez  en  vostre  mainburnie. 
«  Se  je  ja  aquier  terre,  je  vos  ferai  toz  riches  : 
«  Ou  soit  ou  torz  ou  droiz,  je  serai  vostre  hons  liges.  » 
Quant  cil  ont  entendu,  ensemble  respondirent  : 

1 25o  «  Ne  vos  aiderons  ja,  damoiseaus,  beaus  douz  sires  ; 
«  Li  putaiges  vo  mère  a  la  terre  honie, 
«  Ma[i]s  servirons  a  l'autre,  vostre  frère  Malingre.  » 
Et  quant  Tentent  Landris,  a  po  n'enraige  d'ire; 
Tenrement  des  ieus  plore  et  de  son  cuer  sospire. 

1255  «  Par  Deu,  »  ce  dit  li  enfes,  «  le  fil  sainte  Marie, 
«  Se  je  ja  tant  puis  vivre  que  armes  aie  prises, 
«  Je  vos  torrai  les  testes,  les  membres  et  les  vies.  » 
A  iceste  parole  a  la  grant  court  gurpie. 
S'en  est  venuz  au  bourc,  a  Tostel  dame  Olive; 

1233  L.  roinne,  ms.  rainne.  —  1234  tui  d'après  L.,  ms.  luit.  — 
1240  Gilebert,  sic  ms.,  L.  Gelebert  ;  Vaubile,  sic  L.,  ms.  Naubile. 

1243  Ms.  pères.  —   1247  ja  est  omis  dans  le  ms.  —  i2  56  L. 

c'armes,  ms.  qu'arme»  {vers  trop  court). —  1 208  gurpie,  sic  L  et  ms. 


DOON   DE   LA    ROCHE  49 

1 260  II  l'en  a  apelée  ;  .si  li  a  pris  a  dire  : 

«  Demain  m'en  irai,  dame,  ainçois  Tore  déprime, 
a  N'i  os  mes  demorer,  bêle  mère,  douce  amie, 
«  Car  ma  mort  ont  jurée  Tomiles  et  Malingres, 
«  Et  ma  maie  marastre,  cui  Jésus  maleie.  » 

126b  Quant  l'entent  la  duchesse,  si  plore  et  si  sospire  : 
.IIII.  foiz  se  pasma,  ne  s'en  pot  tenir  mie. 

XLVI 

—  «Je  m'en  irai,  ma  dame,  »dist  Landris,  »  voirement, 

«  Ne  lairai  que  Pépin  ,j.  secors  ne  demant, 

«  Et  s'il  ne  me  retient,  n'es[tj  pas  droiz  que  vo[s]  ment, 
1270  «  Du  païs  m'en  irai,  par  le  mien  escient  :  (/.  2Ô) 

«  De  ci  qu'en  paiennie  ne  tarderai  nïent. 

«  En  cel  vergier  plantai  .j.  douz  aubre  l'autre  an  ; 

«  Mère,  ja  le  me  dist  .j.  sages  clers  lisanz, 

«  Proz  et  escïeniros  et  dou  siècle  sachanz, 
1275  «  Qu'entre  mon  aubre  [et  mij  morrïens  en  .j.  an. 

«  Tant  com  vos  le  verrez  vert,  foilli  et  portant, 

«  Tant  ratendez  noveles  de  Landri  vostre  enfant  : 

«  Tote  voie  venrai,  ne  sai  demorer  tant. 

«  Et  puis  que  le  verrez  et  sec  et  decheant, 
1280  «  Ja  ne  me  verrez  mais  en  trestot  vo  vivant.  » 

Quant  l'eniendi  Olive,  a  pou  ne  pert  le  sens; 

Quatre  foiz  se  pasma  por  Landri  son  enfant. 

XLVII 

«  Tu  t'en  iras,  biaus  fîlz,  a  Paris  a  ton  oncle  J 

1260  a  d.,  sic  m.,  L.  au  d.  —  1262  Les  deux  textes  N'i  ois.  — • 
Î263  Sic  dans  les  deux  textes.  Vers  trop  long,  corr.  ma  m.(?)  — 
1269  Les  deux  textes  ont  nés,  vo.  —  1274  L.  assiantrous,  ms» 
essciantiouz.  —  1273  Même  lacune  dans  les  deux  textes.  —  1277 
Ce  vers  est  omis  dans  le  ms.  —  1278  Ms.  nesca  (=  ne  sça[i]). 

4 


5ç  DOON   DE   LA    ROCHE 

«  Je  remanrai,  biau[s]  filz,  chaitive  et  besoingnose. 
1285  «  L'arbre  que  tu  plantas  baiserai  a  ma  boche, 
«  Ne  passera  .j.  jors,  .x.  foiées  ou  .xij.  » 
La  dame  se  pasma,  qui  trop  fu  dolorose. 


XLVIII 

—  Tu  t'en  iras,  biaus  filz,  »  dist  la  mère,  «  je  voi; 
«  Je  [rejmaindrai  chaitive,  si  avrai  le  cuer  noir; 

1290  tt  Cil  gloton  me  sivront  au  matin  et  au  soir. 
«  Se  Pépins  te  retient,  por  Dieu,  mande  le  moi. 

—  Dame  »,  ce  dist  Landris,  «  sofFrez  vos;  ce  que  doit? 
«  Je  ne  vos  faudrai  ja  contre  cui  que  ce  soit. 


XLIX 

—  Tu  t'en  iras,  biaus  filz,  en  estrange  contrée  ; 
1295  «  Je  remaindrai  ici  chaitive  et  esgarée; 

«  N'i  troverai  parent,  cosin  germain  ne  frère 

«  Qui  por  moi  preigne  ja  ne  lance  ne  espée.  {v 

«  Garde  por  autre  famé  ne  soie  obliée. 

—  Dame   »,  ce  dist  Landris,  «  n'estes  pas  bien   senéc  :| 
i3oo  <f  Je  ne  vos  faudrai  [ja],  que  vos  estes  ma  mère.  » 


Quant  ii  enfes  issi  de  Goloigne  a  cel  terme, 


1286  Ms.  Je  i  passerai;  L.  jorz,  foiez;  ms.  jour,  foix.  —  1288 
L.  jo  V.  ;  on  pourrait  proposer  jel.  —  1290  L.  suerront,  ms.  sue- 
ront. —  1295  ici  manque  dans  le  ms.  —  1296  Ms.  Ne  troverais 
parans.  —  1297  L.  proinne,  ms.  prangnent  1.  —  i  3oo  ja  manque 
dans  les  deux  textes.  —  i3oi  L.  et  ms.  i.  fors  de. 


DOON    DE   LA    ROCHE  5l 

Li  niés  le  roi  de  France,  li  damoisiaus  honestes, 

Molt  par  avint  granz  dues,  a  cel  Jor,  en  la  terre. 

Molt  ploroient  ces  dames,  chevalier  et  puceles, 
i3o5  Et  Olive  se  pasme  et  sa  crine  eschevele. 

Et  dus  Do  en  fait  tant,  par  poi  qu'il  ne  se  desve. 

Va  s'en  li  gentiz  enfes  cui  Deus  gardoit  de  perde  ; 

Asson  et  Guinemant  en'mena,  qui  le  servent. 

Il  sont  venu  au  Liège;  celé  nuit  i  herbergent  ; 
i3io  II  manda  les  borjois  que  aide  li  facent. 

«  Ne  vos  aiderons  ja,  sire,  jovente  bêle  : 

«  Li  putaiges  vo  niere  a  honie  la  terre.  » 

Com  or  le  voit  Landris,  a  po  que  il  ne  desve. 

—  Par  Deu,  »  ce  dist  li  enfes,  «  le  verai  roi  celestre! 
1 3 1 5  «  Se  je  Ja  tant  puis  vivre  qu'armes  puisse 'reçoivre, 

«  Je  vostorrai  les  vies,  les  membres  et  les  testes.  » 

Remontent  es  chevaus,  que  n'i  osent  plusestre; 

De  ci  que  a  Paris  ne  finent  ne  ne  cessent. 

A  Paris  sont  venu  par  lor  jornées  bêles  : 
i32o  La  nuit  sont  descendu  chiez  .j.  borjois,  Auterme 

Et  cil  en  va  conter  a  Pépin  les  noveles  : 

«  .1.  vostre  niés,  Landris,  est  venuzen  voz  terres, 

«  Qui  est  fils  dame  Olive,  vo  seror,  la  duchesse.     (/".  26) 

«  Mielz  resemble  Doon  que  nule  riens  en  terre.  » 
i325  Tuit  i  corrent  la  gent;  forment  i  a  grant  presse 

Por  veoir  le  valet,  que  la  persone  est  gente. 

Quant  l'entendit  li  rois,  a  pou  d'ire  ne  desve  ; 

Il  dist  une  parole  dont  li  autre  s'esperdent  : 

«  Fermez  me  tost  les  portes,  que  ne  soient  overtes.  » 
i33o  Quant  celé  parole  oient,  ne  lor  fu  mie  bêle. 

i3o5  D'après  L.;  ms.  et  escrine  et  eschevoille  {L.    eschevole). 

—  i3o6  Ms.  Et  li  duc  D.  tant  en  f,  a  p.  que  ne  ce  d.  —  iSoy 
D'après  L.;  ms.  garde  de  perdre.  —  i3io  facent  sic  L,  ms.  faice. 

—  i3i5  ja  manque  dans  le  ms.;  reçoivre,  sic  ms.  et  L.  —  iSiy 
Ms.  a  ch.  —  i32o  Les  deux  textes  portent  Aterme,  mais  cf.  v. 
i355.  —  i324  Ms.  r.  a.  D.  —  i325  Ce  vers  est  le  dernier  du 
premier  des  deux  feuillets  L.  —  1329  qu'elle  nés. 


52  DOON   DE   LA   ROCHE 


LI 


Quant  li  borjois  du  règne  ont  le  roi  entendu, 

Que  Landris  n'i  seroit  aidiés  ne  maintenuz, 

Adonc  plorent  des  jeus  ;  molt  furent  esperdu  . 

Landris  vint  a  la  porte,  que  vout  entrer  la  sus  : 
i335  «  Portiers,  ovre  la  porte  ;  beneois  soies  tu  ! 

«  Car  a  Pépin  mon  oncle  sui  a  besoing  venuz  ; 

«  S'il  me  voloit  aidier,  bien  me  seroit  cheii. 

—  Vos  n'i  poez  entrer  »,  cil  li  a  respondu  ; 

«  Par  la  foi  que  vos  doi,  li  rois  l'a  deffendu    » 
1340  Et  quant  l'entent  Landris,  molt  en  fu  irascuz  : 

Par  les  cheveus  l'aert,  si  le  hurte  a  .j.  mur, 

Et  l'eûst  ja  tué,  mais  .j.  seul  pou  s'estut, 

Car  Asse  et  Guinemanz  i  sont  corant  venu. 

Ilescrîent  ensemble  :  «  Damoisiaus,  que  fais  tu  ?  » 
1345  Or  est  Landris  a  val  et  Pépins  [fu]  lassus. 

Li  rois  garde  a  val,  s'a  son  neveu  veu  ; 

Il  le  voit  bel  et  gent  [et]  lonc  et  parcreii. 

a  Haï  !  biaus  sire  niés,  comme  [je]  maris  sui, 

«  Quant  de  moi  ne  seras  aidiez  ne  secoruz! 
i35o«f  Je  le  jurai  Tomile,  le  maleoit  parjur. 

«  Or  ne  sai  plus  que  dire,  mais  huimain  remains  tu.  » 


LU 

Or  est  Landris  a  val,  ça  dejus  a  la  porte. 
Et  voit  Pépin  son  oncle,  qui  de  rien  nel  conforte; 
Il  demoine  tel  duel,  par  po  qu'il  ne  s'afole. 
i355  La  nuit  s'en  va  gésir  chies  Auterme,  son  oste, 
Mais  n'i  ot  rien  chanter,  ne  fait  soner  viole. 

i33i  de  romme,  li  rois.  —  i33j  cheûz.  —  1341  aert  ms.  aort  ; 
hurent.  —  i343  i,  ms.  il.  —  i35i  remains,  ms.  semans.  —  i353 
ne  le  c.  —  i354  qu'il,  ms.  qui.  —  i356  fait,  tns.  faire. 


DOON    DE   LA   ROCHE  53^ 

L'endemain  par  som  Taube  fist  Pépins  molt  grant  chose, 
Qu'il  prist  de  son  avoir  quant  .ij.  mulet  en  portent, 
Et  piaus  et  peliçons  .iiij*'^.  beaus  et  nobles  : 
i36o  Asson  et  Guinemant  les  done  toz  et  ofre, 
Por  ce  que  il  Landri  gardent  sor  tote  chose. 


LUI 


«  Tu  t'en  iras,  biaus  niés  »,  ce  dist  li  rois,  »  je  vol; 
«  Ne  te  puis  retenir,  par  la  foi  que  te  doi  : 
«  Je  le  jurai  Tomile,  le  cuvert,  l'autre  soir. 
i365  «  Quier  que  tu  te  garisses  et  que  raies  ton  droit. 
«  De  ta  mère  me  poise,  qui  est  en  tel  destroit; 
«  Cil  glouton  l'ociront  ou  au  main  ou  a[u]  soir. 

—  Sire  »,  ce  dist  li  enfes,  «  tel  est  vostre  voloir. 

«  Se  Dieu  pleiist  qu'e[n]  vos  bien[s]  peiist  remanoir, 
iSyo  «  Sire,  car  me  retien,  que  ce  est  biens  et  droiz. 

—  Por  néant  en  parlez,  biaus  niés  »,  ce  dist  li  rois  ; 
«  Ne  te  puis  retenir,  par  la  foi  que  te  doi  : 

«  Je  le  jura[i]  Tomile,  le  cuvert  male[o]it, 

a  Et  il  m'en  dona,  certes,  grant  part  de  son  avoir  : 
1375  «  .XX.  muiez  toz  chargiez  de  fin  or  arabois.  » 

Quant  Tenfes  l'entendi,  cuidiez  que  bel  l'en  soit?     (/.  37) 

Landris  aqueust  son  oire  et  trossa  son   harnois; 

Le  grant  chemin  S.  Piere  acoilli  [il]  tôt  droit. 

En  la  cité  de  Romme  sejorna  .iiij.  mois, 
i38o  Vint  a  S.  Piere  au  Bras,  trova  nés  et  eschois; 

Landris  est  entrez  enz,  trop  lor  dona  avoir. 

Il  arivent  en  Grice,  en  iver,  qu'il  fait  froit; 

Voient  Costentinoble,  le  palais  haut  et  droit  : 

Jamais  ne  finera  de  ci  qu[e]  il  i  soit. 

i357  p.  souz,  f.  par  m.  —  i358  quanz  .ij.  muUe.  —  i36o 
Assam.  —  1870  e.  bien  et  droit.  —  iSyô  soit,  ms.  fut.  —  077 
oire,  ms.  or.  —  1378  ch.  a  S.  P.  —  1379  mois,  ms.  nuit.  —  i38i 
enz,  ms.  an.  —  1 382  Grice,  ms.  Frise  ;  feist  f. 


54  DOON    DE   LA    ROCHE 


LIV 


i385  Asses  et  Guînemanz  et  Landris,  qui  fu  enfes, 
Voient  Costentinoble,  le  palais  haut  et  ample; 
A  l'ore  de  midi  en  la  cité  s'en  entrent  : 
De  l'or  et  de  l'argent  grant  mervoille  lor  semble, 
Des  perrons  entailliés  a  pieres  et  a  gemmes; 

1 390  Et  dit  li  uns  l'autre  :  «  Povre  terre  est  de  France  : 
«  Li  sires  qui  la  tient  por  droit  nient  s'en  vant[e]  ;  > 
«  Mais  servons  bien  cestui  s'il  vuet  et  il  commande, 
«  Que  il  n'a  souz  ciel  homme  qui  tant  ait  ars  ne  lances, 
«  Qui  peiist  ceste  vile  ne  abatre  ne  prendre  ». 

1395  II  chevalchent  ensemble;  en  la  place  descendent, 
Et  truevent  l'amiral  desouz  l'ombre  d'une  ente. 
Devant  s'en  vait  Landris,  qui  est  bêle  Jovente, 
Et  salua  le  roi  par  molt  grant  sapïence  : 
«  Dieu  vous  saut,  empereres,  et  si  saint  et  si  ange  ! 

1400  — Amis,  et  Dieus  te  saut  !  »  dist  li  rois  Alixandre. 
«  Dont  estes?  dont  venez?  ne[l]  celez,  de  quel  reigne? 
—  A  la  moie  foi,  s^re,  je  sui  de  Loereigne,  (v°) 

a  Mais  guerre  i  a  tant  fort  que  m'en  chace  et  ameigne. 
«  Sire,  car  me  retien  tant  qu'espée  me  ceignes. 

1405  —  Amis  »,  ce  dist  li  rois,  «  frère,  bêle  Jovente, 

«  Et  je  vos  retendrai  et  vos  genz  toz  ensemble  ». 
Asses  et  Guinemans  de  pitié  plorent  sempres. 

Ce  fu  au  mois  de  mai,  que  florissent  ces  entes; 
Par  matin  se  leva  celé  duchesse  franche, 

1410  La  mère  au  duc  Landri,  dame  Olive  la  gente  ; 

Venue  est  au  vergier  desouz  Tombre  d'une  ente, 
Et  el  la  voit  foillier,  verdoier  et  reprendre; 
Et  garde  d'autre  part,  voit  une  sèche  branche. 


t$8j  s'en  antrent   en   la  c.  —   1403  ameigne  {ms.  amoingne), 
corr.   enmeigne  (?)  —  1404  me  sengnies.  —  1412  el,  ms.  elle. 


DOON    DE    LA    ROCHE  55 

Qui  ne  pooit  foillier  n'amors  ne  s'i  puet  prendre  : 
141 5  La  dame  se  pasma,  que  molt  iert  sage  famé  : 
Landris  ne  puet  avoir  le  secors  qu'il  demande. 
«  Haï  !  Landris,  beaus  fîlz,  com  por  vos  sui  dolente  ! 
«  Jamais  je  ne  verrai  vostre  bêle  Jovente.  » 
Quatre  foiz  se  pasma  desoz  l'ombre  de  l'ente. 

LV 

1420  Olive  est  a  Coloigne,  ensemble  fiert  ses  peins  : 

«  Haï  !  Landris,  beaus  filz,  molt  me  poise  de  vos  : 

«  Jamais  ne  vos  verrai  ne  vos  moi  ne  je  vos  ». 

Et  li  enfes  servoit  au  riche  empereor, 

Droit  a  Costentinoble  enz  ou  palais  gregnor. 
1425  Asses  et  Guinemanz  furent  bien  de  la  cort. 

Une  guerre  sordi  au  riche  empereor  : 

Paien  et  Sarrazin,  li  cuvert  orguillos, 

Li  ont  tolu  Lalice,  les  palaiz  et  les  tors,  [f.  28) 

S'en  ont  getés  Hermins,  les  gardains  pris  trestoz. 
1430  Ainz  que  fausi[s]t  la  guerre  ot  Landris  ses  ados  : 

Li  rois  li  ceini  l'espée,  voiant  ses  barons  toz, 

Et  si  li  dona  armes  et  chevaus  merveillos. 

Bien  furent  emploiées  au  noble  poigneor; 

Puis  en  ferit  .M.  cous  sor  paiens  a  baudor, 
1435  Et  desconfist  paiens  et  si  prist  lor  seignor, 

Sil  rendit  Alixandre  sanglant  et  vergondos. 


LVI 

Geste  bataille  et  autre[s]  voirement  fist  Landris  ; 
El  est  tote  provée  de  veoir  et  d'oïr, 

1414  Que;  n'amors,  sic  ms.,  altéré;  prendre,  ms.  ranne.  -^  1415 
iert,  ms.  estoit.  —  1416  qu'il,  ms.  qui.  —  H'?  com,  ms.  comme. 
—  1424  enz,  ms.  sus.  —  1428  o.  tolus  lice.  —  1429  g.  fais  t.  — 
1432  dona,  ms.  done.  —  1434  baudor,  ms.  baudoir.  —  1436  Sou. 


56  DOON    DE   LA    ROCHE 

Et  bien  le  tesmongnerent  li  baron  du  pais. 
1440  Li  roi[s]  ot  .j.  fille  qui  ot  le  cors  gentil, 

Cui  Salmadrine  apelent  li  baron  du  pais  : 

Sor  tote  rien  sor  terre  ama  celé  Landri, 

Qu'el  ne  pooit  mangier,  reposer  ne  dormir. 

Li  rois  la  voit  malmetre,  empirier  et  morir; 
1445  Bel  et  cortoisement  a  aresnier  la  prist  :        -  - 

«  Haï!  fille  »,  dist  il,  «  molt  me  poise  de«ti. 

«  Je  te  cuidai  doner  tel  prince  ou  tel  marchis 

«  Qui  detenist  ma  terre  et  trestot  mon  païs. 

«  Bien  n'en  avrez  [vos]  mie,  ce  m'est  il  bien  a  vis. 
1450  —  Sire  »,  dist  la  pucele,  «  molt  sui  près  de  morir,  ■ 

«  Mais  encor  sai  tel  chose  dont  porroie  garir.  » 

—  Et  que  seroit  ce  fille?  »  li  rois  li  respondit. 
«  Il  n'a  soz  ciel  espice  ne  vos  face  venir, 

«  Ne  home,  tant  soit  fiers,  corajos  ne  hardiz. 
1455  —  Sire  »,  dist  la  pucele,  «  de  Dieu  .v<^,  mercis,      (v°) 

«  Mais  ce  n'i  a  mestier,  par  foi  le  vos  plevis. 

«  Dès  ores  vueil  je,  père,  que  me  donés  mari, 
,    «  Ce  soldoier  de  France  c'om  apele  Landri. 
■    '     «  Aquitée  a  la  terre  et  trestot  le  païs; 
1460  «  Il  n'est  tel  hom  ou  monde  por  ses  armes  servir. 

—  Fille  »,  ce   dist  li   rois,  «  laissiez  ester  Landri. 
«  Je  ne  sai  dont  est  nez,  ne  [sai]  de  quel  païs. 

«  Car  pleûst  or  a  Dieu,  qui  en  la  crois  fu  mis, 
«  Qu'i[l]  fu[s]t  parenz  le  roi  qui  France  a  a  tenir, 
1465  «  Pépin  l'empereor,  qui  est  biaus  et  gentis,^^*^' 
«  Ou  ses  niés  ou  cosins  fust  ores  cil  Landris  ! 
«  Encor  fust  il  bastarz,  sel  seùsse  de  fi, 
«  Vos  li  donroie  a  famé,  par  foi  le  vos  plevis. 
«  Asses  et  Guinemanz  il  le  m'ont  assez  dit, 


1441  Qui.  —  1444  morir,  ms.  noirie,  —  1443  Belle  et  acortoise- 
ment.  —  1449  non  a.  —  1450  morir,  ms.  mort.  —  1462  Et  que  ce- 
roisse  f.  —  1454  Vers  interpolé,  à  moins  qu'il  n'y  ait  une  lacun* 
après.  —  1455  S,  ce  d,  —  1464  p.  li  r. 


DOON    DE    LA    ROCHE  Sy 

1470  «  Mais  Je  nés  en  croirai,  se  Damedieus  m'alst  : 
«  Puis  que  bons  de  sa  terre  est  ciiaciés  et  fu[i]tis, 
«  Félonie  et  bonté  puet  dire  u  son  plaisir.  » 


LVII 

Landris,  qui  fu  de  France,  ama  molt  Salmadrine, 
Ele  lui  assez  plus  que  pucele  qui  vive. 
1475  Li  rois  li  a  doné  grant  mestier  adeprimes  : 

Chambellan  en  a  fait  de  ses  dem.  ines  princes. 
Molt  le  tint  grandement  et  par  grant   seignorie  : 
.IX™.  chevalier  chascun  jor  le  servirent. 
Tomile  est  a  Goloigne;  Dieus  grant  mal  li  envie! 


LVIII 

1480  Or  sert  Landris  le  roi  et  si  bon  chevalier 
Droit  a  Costantinoble,  ou  palais  tôt  plenier. 
Molt  volentiers  preïst  Salmadrine  a  moillier,  (/.  2ff) 

Se  li  rois  lui  vosist  doner  et  otroier, 
Mais  il  ne  savoit  mie  cui  fu  filz  ne  cui  niés, 

1485  Se  il  ert  niés  le  roi  qui  France  a  a  baillier. 
Hé  !  Diex,  s'il  le  seûst,  onques  ne  fust  si  liez. 
A  .1.  conseil  le  traient  si  baron  chevalier  : 

.  .  .  't  ! 

«  Empereres,  biaus  sire,  por  quoi  vos  esmaiez  ? 
«  Car  prenez  en  vo  cort  .ij.  cortois  messagiers, 
1490  «  Si[s]  envolez  en  France,  a  Monlaon  le  fié, 
«  Por  savoir  de  Lmdri  cui  filz  est  ne  cui  niés. 
«  Se  il  est  niés  le  roi  qui  France  a  a  baillier, 
«  Si  lui  donés  vos  terres  et  vo  fille  a  moillier  ; 
«  Et  s'il  n'est  delignage  ne  issi  enforciez, 


1475  a  ce   priuues.  —  1476   ses,  ms.  ces.  —  1477  le,  ms.  la.  — 
1485  ert,  ms.  est.  —  1489  en  vou  cors. 


\\\  ^ 


.  ;■  r 

58  DOON    DE    LA    ROCHE 

1495  «  Si  pren  de  ton  avoir,  si  lui  donc  congié; 
«  Si  en  ira  en  France  li  gentiz  soldoiers, 
«  Puis  n'en  orrez  parler  a  nul  jor  ;  ainsi  iert, 
«  Sil  metra  en  obli  Salmadrine  au  vis  fier.  » 
Et  respondit  li  rois  :  «  Bien  m'avez  conseillié  ; 

i5oo  «  Ainsi  le  ferai  je,  ja  trestorné  nen  iert  ». 
Il  en  a  apelé  deus  de  ses  chevaliers, 
Berengier  et  Outré,  qui  molt  font  a  proisier  : 
«  Seignor,  venez  avant,  nobile  chevalier. 
«  D'une  moie  besoigne  vos  convient  travaillier: 

i5o5  «  Vous  en  irez  en  France,  a  Monlaon  le  fié, 
«  Por  savoir  de  Landri,  cui  filz  est  ne  cui  niés, 
«  Se  il  est  niés  le  roi  qui  France  a  a  bai[l]lier; 
«  Mi  home  estes  tuit  liège,  nel  me  devez  noier. 
«  Tant  portez  de  l'avoir  com  a  plaisir  vos  iert,      (v») 

i5io  «  Si  faites  richement  acheter  les  mangiers.  » 
Et  cil  li  respondirent  :  «  Com  vos  plaira  si  iert. 
«  Au  matin  moverons,  ja  trestorné  nen  [i]ert.  » 
Salmadrine  la  belle  en  a  oî  plaidier. 
Si  manda  a  celé  a  li  les  messagiers, 

1 5 1 5  Et  il  [i]  sont  venu  cortoisement  a  lié. 

Sor  .j.  faudestuel  d'or  dejoste  les  assiét. 
Bel  et  cortoisement  les  prist  a  araisnier  : 
«  Seignor,  or  entendez,  nobile  chevalier. 
«  Vos  en  irez  en  France,  a  Monlaon  le  fié, 

i52o  «  Par  la  foi  que  vos  doi,  bien  m'a  esté  noncié  : 
«  Je  sui  fille  de  roi,  a  celer  ne[l]  vos  quier, 
«  A  moi  apent  la  terre  et  trestoz  li  régnez  : 
«  Plus  aim  le  soldoier  que  nule  riens  soz  ciel, 
«  Par  ice[l]  saint  apostre  c'om  a  Rome  requiert, 


1495  se  1.  —  1497  iert,  W5.  iest.  —  1498  Se  m.  —  i5oo  tres- 
tornent.  —  i5o2  Outré,  nts.  Garin  ;  cf.  v.  i52j,  i53o,  etc.  — 
i5o3  n.  et  ch.  —  i5o8  nel,  ms.  ne  le.  —  i5io  Après  ce  vers,  il  y 
a  p.-ê.  une  lacune  de  quelques  vers;  cf.  v.  J53y,  1645.  —  i5ii 
iert,  ms.  est.  —  i5i5  lié,  ms.  ele.  —  i523  aim,  ms.  aime. 


DOON    DE    LA    ROCHE  5^ 

i525  «  Se  VOS  en  dites  choses  qui  de  nient  me  griet, 
«  Je  vos  ferai  les  membres  et  les  testes  trenchier. 
—  Bêle  »,  ce  dit  Outrez,  «  com  vos  plaira  si  iert; 
«  Ja  chose  ne  dirons  qui  de  nîent  vos  griet. 
«  Le  matin  moverons,  ja  trestorné  nen  iert. 


LIX 

1 53o  —  Berengier[s]  et  Outrez,  »  dist  li  roi[s],  «ça  venez. 
«  D'une  moie  besoingne  vos  convient  a  pener  : 
ce  Vos  en  irez  en  France,  a  Paris  la  cité, 
«  Por  savoir  de  Landri,  de  quel  gent  il  est  nez, 
«  S[e]  il  est  niés  le  roi  qui  France  a  a  garder, 

i535  «  Mi  home  estes  [tuit]  liège,  gardez  ne[l]  me  celez; 

«  Vos  menrez  de  l'avoir  tant  com  demanderez,  (/.  3o) 

«  Et  faites  les  mangiers  richement  achater; 

«  Onques  ne  soit  garçons  de  vo  mangier  tornez, 

«  Serjans  ne  chamberiers  ne  prestres  ne  juglers, 

1540  «  Car  hom  de  riche  cort  doit  estre  a  barné.  » 
Et  cil  li  respondirent  :  «  A  vostre  volenté  ; 
«  Le  matin  moverons,  ja  nen  ert  trestorné  ». 
Salmadrine  la  bêle  en  a  oï  parler, 
■  Si  manda  les  messages  en  sa  chambre  a  privé, 

045  Sor  .j.  faldestuel  d'or  les  a  fait  as[s]eter; 
Bel  et  cortoisement  les  prist  a  apeler  : 
«  Seignor  »,  dist  la  pucele,  «  je  vos  ai  fait  mander  ; 
«  Vos  en  irez  en  France,  a  Paris  la  cité, 
«  Por  savoir  de  Landri,  de  quel  gent  il  est  nez. 

i55o  «  Par  la  foi  que  vos  doi,  bien  m'a  dit  et  conté;  , 

«  Je  sui  fille  de  roi,  que  de  fi  le  savez; 
«  A  moi  apent  la  terre  et  trestoz  li  regne[z]  : 


i525  néant  m'angriet;  cj.  v.  i528.  —  iSsSned.  ch.  —  iSSg 
chamberiere;  cf.  v.  1646.  —  i544  messages,  ms.  messagier  ; 
privé,  ms.  primé  ou  privié.  —  1546  I.  a  p.  —  i55i  de  si  le  sairés. 


(-V 


6o  DOON    DE   LA   ROCHE 

«  Je  vos  ferai  toz  riche[s],  cui  qu'en  doie  peser; 
«  Par  ice[l]  saint  apostre  qu'on  quiert  en  Noiron  Pré, 
I  555  «  Se  vos  en  dites  chose  qui  ne  me  viegne  a  gré, 
«  Je  vos  ferai  les  membres  et  les  testes  coper, 

—  Bien  vos  avons  oi,  bêle  »,  ce  dist  Outrez  ; 

«  Nous  n'en  dirons  ja  chose  qui  ne  vos  viegne  a  gré  ; 
«  Le  matin  moverons  quant  il  ert  ajorné. 
i56o —  Par  foi,  «  dist  Salmadrine  »,  molt  avez  bien  parlé. 
«  Quexchevaus  menrez  vos?  gardez  ne[l]  me  celez. 

—  Par  foi,  noz  deus  muiez  »,  si  li  a  dit  Outrez. 

—  Je  ai  .ij.  dromadaires  coranz  et  abrivez 

«  Que  faiz  en  .j.  celier,  bien  a  .vij.  anz,  garder. 
i565  «  En  .viij.  jors  et  demi  serez  vos  retorné, 

«  Car  il  iront  plus  tost  c'oisiaus  ne  puet  voler  ». 

Et  cil  li  respondirent  :  «  Ainsi  com  vos  volez  ; 

«  Le   matin  moverons  quant  il  ert  ajorné, 

«  Puis  si  serons  très  bien  baigné  et  conreé  ». 
I  570  L'endemain,  par  som  l'aube  se  sont  li  mes  levé. 

Et  mistrent  en  lor  dos  les  hermins  engolez 

Par  desor  les  blïauz  a  fin  or  gironez. 

Les  granz  maniels  de  sable  ont  li  mes  afublé, 

Li  tassel  en  [v]aloient  tôt  l'or  d'une  cité, 
075  Pierres  i  a  et  brasmes  qui  molt  font  a  ioer. 

Les  chapiaus  sebelins  ont  en  lor  chiés  fermez, 

Escharpes  cordoenes  et  les  bordons  ferrez  ; 

Li  picois  sont  d'argent  et  li  voruel  d'or  cler. 

Il  port[er]ent  es  maies  les  besanz  d'or  fondez, 
I  58o  De  trestot  le  plus  riche  que  on  peiist  trover. 

Les  dromadaires  ont  du  celier  amenez, 


i555  chose,  ms.  choses.  —  i56i  Q.  ch.  m.  g. vos  ne  me  c.  — 
1570  p.  souz,  li  nies  1.  Il  se  peut  qu'il  manque  un  vers  après  celui- 
ci;  cf.  V.  ig42.  —  i574  tâsel  en  aloient.  —  ib-jb  brasmes,  ms. 
brenies.  —  1678  voruel  ms.  rovuei,  sic  ms.,  corr.  verroil  (?)  cf. 
V.  igSo.  —  1379  es,  7ns.  as.  —  r58o  peûst,  ms.  puet.  Ce  vers 
s'accorde  mal  avec  le  précédent.  P.-ê.  manque-t-il  un  vers  entre 
les  deux.  —  i58i  ont,  ms.  sont;  celier,  ms.  celles. 


DOON    DE   LA    ROCHE  DI 

Et  lacent  les  cu[i]ries  et  les  chanfreins  dorez, 
Que  mal  ne  lor  puist  faire  li  venz  ne  li  orez, 
Car  il  iront  plus  tost  c'oisiaus  ne  puet  voler. 

i585  Li  messagier  montèrent  par  les  esiriers  dorez, 
Et  sont  venu  au  roi  ;  congié  ont  demandé. 
Et  il  lor  a  doné  volentiers  et  de  gré. 

Salmadrine  la  bêle  les  comanda  a  Dé  (/.  3i) 

«  Qui  vos  rameint  par  tens  a  joie  en  cest  régné. 

1 590  —  Bêle,  Dieus  vos  en  oie,  »  si  li  a  dit  Outrez. 

—  Por  Dieu,  seignor  baron,  de  l'esploitier  pensez. 

—  Certes,  »  ce  dist  Outrez,  «  ja  mar  en  parlerez.  » 
Li  messagier  s'en  tornent,  qui  sont  pro  et  séné  ; 
De  ci  qu'au  Bras  Saint  George  ne  se  sont  aresté. 

1595  Quant  il  i  sont  venu,  s'entrent  en  une  nef, 

Damedieus  lor  dona  tant  droiturier  oré  ! 

D'autre  part  a  la  rive  [quant]  se  sont  arivé. 

Si  drecent  les  cu[i]ries  et  les  chanfreins  dorez; 

Li  mesagier  remontent  par  les  estriés  dorez, 
1600  Et  trespassent  les  terres  et  les  amples  régnez  : 

En  .viij.  jors  ont  passé  .xlviij.  citez 

Et  .vij.  roialmes  grans  et  .x.  arcevesquez. 

Entre  ci  qu'a  Coloigne  ne  voldrent  arester, 

Mais  ainçois  qu'i[l]  retornent  seront  grain  et  iré, 
i6o5  Car  Hardrez  li  traît[r]es  a  les  mes  encontrez, 

Sil  vait  noncier  Tomile  et  Malingre  a  l'ostel. 

Et  li  mes  chevalchierent  par  la  bone  cité 

Et  trespassent  les  rues,  li  pro  et  li  séné; 

Tresqu'a  l'ostel  Gontiaume  ne  se  sont  aresté:' 
16 10  Ce  fu  uns  borjois  riches  qui  fu  de  Roche  nez, 

Cosin[s]  germain[s]  Doon,  le  franc  duc  honoré. 

Por  l'amor  de  Landri  estoit  si  adolez. 


i582  lancent,  chanx  frains.  De  même  v.  i5g8.  —  i583  puist, 
ms.  puet.  —  1589  ramoinne.  —  1592  ja,  ms.  je.  —  1596  Si  l'on 
n'admet  pas  le  sens  exclamatif,  il  faut  supposer  une  lacune  après 
ce  V.  —  1698  Se  d.  —  160Ô  Ce  le  v.  —  1609  s.  arester. 


^2  1)00N   DE   LA   ROCME 

Qu'i[l]  ne  leva  de  lit  bien  a  .vi).  ans  passez, 

Et  gist  en  mi  la  sale  ainsi  corn  .j-  tel  bers  (V) 

i6i5  En  .).  lit  torneïs  qui  molt  fait  a  loer  : 

Li  esponde  sont  d'or,  et  d'argent  li  listé. 

Et  les  contres  de  paile,  dou  millor  d'outre  mer, 

Linçuel  et  oreiller  et  voiles  de  sendel, 

.VIIc.  bezanz  i  tienentde  fin  or  esmeré; 
1620  Et  ot  de  sa  mesnie  .xxx.  sergenz  privez, 

Qui  li  font  ses  comans,  n'en  est  .j.  trestornez; 

Chascuns  avoit  vestu  .j-  hermin  engolé. 

Atant  es  vos  les  mes  qui  ont  forment  erré  ; 

A  piet  sont  descendu  au  mauberin  degré  ; 
1625  La  defors  si  laiss[i]erent  les  chevaus  por  garder. 

Li  dromadaire  furent  estanc  et  tresstié 

Et  li  mes  sont  forment  travaillé  et  pené. 

A  pié  en  sont  monté  contremont  les  degrez, 

Jusques  palaiz  de  marbre  ne  se  sont  aresté, 
i63o  Et  saluèrent  l'oste  com  ja  oir  porrez  : 

«  Ci[l]  Damedex  de  gloire  qui  en  crois  fu  penez, 
«  11  saut  icest  borjois  et  lui  et  son  barné.  » 
Quant  l'entendit  li  osies,  si  a  le  chief  levé  : 
«  Seignor,  et  Dieus  vos  salve!  >>  dist  Gontiaumes  h  ber. 
i635  «  Dites,  franc  pèlerin,  de  quel  terre  venez, 

«  Et  ou  irez,  seignor  ?  De  quel  terre  estes  ne  ?  » 
—  «  A  la  moie  foi,  sire,  si  orrez  venté  : 
«  Né  de  Constantinoble,  la  mi[r]able  cité, 
«  Et  venons  a  saint  P[i]ere  nostre  ofrande  porter. 
1 640  «  Por  ce  qu'estes  prodome,  somes  a  vos  torn^;  (/•  -^2) 

«  Haubergiez  nos  enuit,  por  sainte  chante, 
«  Qui  vos  doint  [ce]le  rien  que  vos  plus  desirez. 
«  Nos  avons  trop  deniers  et  or  et  argent  cler, 

1617  de  peale.-  .618  oreiUieux.  -  16,9  esmeré,  m.  amer  - 
1017  uc  ^  ataint;   cf.  v.  2o38. 

,6.3  erre,  ms.  cne,  c/  v.  2o3ô^  t)  _        7    ^^^^.^^_ 

—    1627    mes,   ms.  mes.—  ibi2    icesr,  wi.  n  t     ,^2/:^ 

auïs,  ml.  Gonciaumes  et  souvent  ainsi  dans  la  smte.  -  i636  q. 
terres.  —  1643  Qu'il. 


DOON    DE    LA    ROCHE 


6S 


«  S'en  ferons  les  mengiers  richement  acheter. 
1645  «  Ja  ne  sera  nus  homs  de  noz  mengiers  tornez, 

«  Serjanz  ne  chamberiers,  ne  prestres  ne  Juglers, 

«  Car  hons  de  riche  cort  doit  estre  a  barné  ». 

—  Par  mon  chief,  »  dist  li  ostes,  «  bien  vos  est  encontre  ; 

«  Par  la  foi  que  vos  doi,  ostel  avez  vos  tel, 
i65o  «  Entreci  qu'a  .j.  an,  se  penre  le  volez, 

«  Ja  ne  vos  costera  .ij.  deniers  moneez. 

«  Que  Dieus  rameint  Landri,  mon  seignor  droiturier... 

«  Et  maldie  -Tomile  et  Malingre  l'enflé, 

«  Que  ainsi  l'ont  a  tort  de  cest  pais  geté.  » 
i655  Li  messagier  l'entendent,  grant  joie  en  ont  mené, 

Et  dient  li  .j.  l'autre  :  «  Bien  nos  est  encontre. 

«  Ancui  orrons  noveles  ;  je  le  voi  bien  tôt  cler. 

«  Landris  est  niés  le  roi,  bien  oïr  le  poez. 

«  Nos  ne  querons  en  France,  certes,  avant  aler.  » 
1660  Com  or  le  voit  li  ostes,  ses  prent  a  apeler  : 

«  Seignor  »,  ce  dist  Gontiaumes,  «  les  chevaus  me  rendez  : 

«  Je  vos  ai  herbergiez,  ja  maren  doterez; 

«  [Ja]  n'i  perdrez  del  vostre  .ij.  deniers  moneez, 

«  Voz  ostes  ne  vos  rende  .j.  marc  d'or  esmeré,  » 
1 665  —  Sire,  »  dïent  li  mes,  «  Dieus  vos  en  sache  gré.  » 

.  Et  il  li  font  molt  tost  les  chevaus  délivrer,  (v«) 

Ou  celier  desoz  terre  les  en  ont  fait  mener. 

Du  fuere  et  du  blanc  orge  lor  ont  [il]  fait  doner. 

Por  amor  de  ses  ostes  est  Gontiaumes  levez 
1670  Et  chauciez  et  vestuz  et  très  bien  conreez  ; 

Si  s'en  va  au  mostier  por  la  messe  escoter, 

Qu'il  n'en  feïst  autant  bien  a  .v.  ans  passez. 

Andeus  les  messagiers  a  avo  lui  menez, 

Mais  ainz  qu'il  s'en  repaire  sera  grains  et  irez, 

1647  estre,  ms.  ilec;  cf.  v.  1540.  —  i652  D.  ramoine  L.  //  est 
probable  qu'après  ce  vers,  on  lisait  un  vers  perdu,  oit  Landri  était 
qualifié  de  neveu  du  roi  Pépin,  cf.  v.  i658.  —  i656  li  .j.  a  l'a.; 
est,  ms.  a.  —  1662  dorerez.  —  i663  N'i  perderés.  —  1664  esmeré, 
ms.  escuier.  —  1669  G.  lever.  —  1672  f.  mais  a. 


64  DOON    DE   LA    ROCHE 

1675  Car  Hardrez  li  traîtres  a  les  mes  encontre[z], 

Si  l'a  noncié  Tomile  et  Malingre  a  l'ostel  : 

«  Par  les  sainz  Dieu,Tomiles,  bien  vos  est  encontre  : 

«  Par  le  mien  escient,  que  vos  estes  faez. 

«  Or  vi  .ij.  pautoniers  en  celé  vile  entrer, 
1680  a  Si  moinent  .ij.  chevaus,  plus  fier  ne  furent  né; 

«  Se  miens  estoit  li  pires,  par  sainte  charité, 

«  Je  nel  donroie  mie  por  Coloigne  sor  mer; 

«  Car  i  alez,  cosins,  les  chevaus  lor  tolez. 

«  A  celé  Pentecoste  en  serez  adobez.  » 
i685  Quant  l'entendi  Malingre,  grant  joie  en  a  mené; 

Tost  et  isnelement  l'en  prist  a  apeler  : 

«  Ou  seront  il  trové,  sire  cosins  Hardrez?  » 

Et  respont  li  traîtres  :  «  Ja  'n  orrez  vérité, 

«  Sire,  en  l'ostel  Gontiaume,  que  molt  petit  amez  » 
1690  Et  respont  li  trait[r]es  :  «  Vos  dites  vérité; 

«  Jamais  ne  l'amerai  en  trestot  mon  aé,  [f.  33) 

«  Tôt  por  l'amor  Landri,  le  gloton  deffaé, 

«  A  cui  il  fist  grant  bien  quant  il  fu  ou  régné.  » 

O  lui  .XXX.  serjanz  s'en  est  li  gloz  tornez, 
1695  Et  vicnent  a[l]  ceiier,  si  ont  les  huis  froez, 

Pristrent  les  dromadaires  qu'il  truevent  establez. 

Ses  en  moine  li  gloz  ou  bore  a  son  ostel, 

Et  li  serjant  Gontiaume  se  corurent  armer. 

Molt  fu  grant  [la]  meslé[e]  au  perron  de  degré  : 
1700  .XIIIl.  des  Malingre  i  ont  les  chiés  co[l]pez; 

Il  meïsme[s]  i  fu  d'un  grant  espiet  navrez; 

Fuant  s'en  va  li  gloz  el  bore,  a  son  ostel. 

.1.  escuier^s]  le  va  a  Gontiaume  conter  ; 

Issuz  est  dou  mostier  ou  il  avoit  oré. 
1705  Come  or  le  voit  li  mes,  si  l'en  a  apelé  : 

«  A  la  moie  foi,  sire,  mal  vos  est  encontre  : 


167g  pautoniers,  ms.  pauterniés.  —  1686  prist,  ms.  print.  — 
1691  en  t.  ma  vie.  —  1692  l'a.  de  L.  —  1696  Prinrent.  —  lyco  i 
oit  des  chief;  cf.v.  i836.—  1701  m.  fut  il.  —  1702  es  b. 


DOON    DE    LA    HOCHE  65 

«  Perdu  sont  li  cheval  que  deviez  garder 

«  A  ces  .ij.  pèlerins  que  vos  ici  veez.  » 

«  —  Diva  »,  ce  dist  Gontiaumes,  «  qui  m'a  donc  desrobé?  » 
1710  «  —  [Tomiles  et  Malingres  ont  cerchié  votre  ostel] 

tt  Et  tolu  les  chevaus,  ja  nel  vos  quier  celer, 

«  A  ces  .ij.  pèlerins  que  vos  ici  veez  ». 

«  —  Hé!  las»,  ce  dist  Gontiaumes,  «  com  par  sui  enginiez!  » 

Plus  tost  qu'il  onques  pot  est  arrière  tornez, 
171  5  Et  vint  a  l'arcevesque,  es  piez  li  est  alez, 

Doulcement  li  baisa  le  cordoan  soler. 

Li  sainz  hom  l'en  redrece,  que  molt  le  pot  amer; 

Bel  et  cortoisement  le  prist  a  apeler  : 

«  Por  Dieu,  sire  Gontiaumes,  dites,  et  coi  avez?  (v») 

1720  «  Est  vos  failliz  avoirs?  lerai  vos  en  doner.  » 

E  respondi  Gontiaumes  :  «  [Sire],  j'en  ai  assez, 

«  [D'jor  et  [d'jargent  ai  ge  .xxx.  somiers  trossez. 

«  Tomiles  et  Malingres  ont  cerchié  mon  ostel 

«  Et  tolu  .ij.  chevaus,  ne  le  vos  quier  celer, 
1725  «  A  ces  .ij.  pèlerins  que  vos  ici  veez. 

«  Or  m'en  voi  a  saint  Picre  et  a  vos  por  clamer. 

«  Or  m'en  faites  justice,  sire  preudom  et  ber.  » 

Et  respont  Tarcevesques  :  «  Ja  mar  en  parlerez  ; 

«  Les  chevaus  vos  rendrai,  cui  qu'en  doie  peser.  » 
1730  II  manda  les  borjois  de  la  bone  cité  : 

Bien  sont  .Ix.  mile  quant  il  sont  asemblé, 

Et  il  i  sont  venu  volentiers  et  de  gré. 

«  Seignor»,dist  li  sainz  hom,  «je  vos  ai  toz  mandez. 

«  Je  sui  serjanz  saint  Piere,  si  que  vos  le  savez, 
1735  «  Et  si  ai  le  pais  et  la  croce  a  garder, 

«  Et  qui  mal  me  fera,  a  vos  m'en  doi  clamer. 

1710  Ce  vers,  qui  est  nécessaire  pour  le  sens,  est  restitué  par 
conjecture  d'après  le  v.  lyjS.  —  171 1  je  nout  v.  —  1713  engi- 
niez {ms.  enginiés)  ne  convient  pas  à  la  rime;  corr.  com  puis^ 
ore  desver  ?  —  1715  es,  corr.. as  ?    -    1720   Estes  v.  failli  a  a.  — 

1721  ai,  ms.  aiz.  —  1728  Ja  ms.  Je.  —  1731  emsemblé.  —  1732  et 
de  ben  g. 


66  DOON    DE    LA    ROCHE 

«  Tomiles  et  Malingre  ont  saint  Pierre  robe 

«  Et  tolu  .i).  chevaus,  ne  le  vuel  pas  celer. 

«  Si  vos  ren  je  la  croce,  ne  [la]  vuel  plus  porter.  » 
1740  Et  dient  li  borjois  :  «  Il  dit  bien  vérité. 

«  Tomiles  est  traîtres,  nos  le  savons  assez. 

«  Ainsi  a  il  Landri  de  cest  païs  geté  ; 

«  Niés  est  le  roi  de  France,  dont  sommes  parjuré.  » 

Li  messaige  l'entendent;  grant  joie  en  ont  mené; 
1745  L'uns  vers  l'autre  s'en  rient  coiement  a  celé  : 

«  Par  les  sains  Dieu,  compains,  bien  nos  est  encontre.  (/".  84] 

«  Landris  est  niés  le  roi,  jou  sai  de  vérité  ; 

«  Ja  ne  querons  en  France  plus  avant  [a]  aler. 

Lors  dient  li  borjois  :  «  Envers  nos  entendez  : 
1750  «  Sire  sainz  arcevesques,  por  sainte  charité, 

«  Car  mandez  a  Tomile,  sans  plus  de  demorer, 

«  Qu'il  rende  les  chevaus  ;  n'en  soit  .j.  refusez. 

«  Et,  s'il  ne  le  vuet  faire,  par  sainte  majesté, 

«  Nos  les  assaurons  sempres  volentiers  et  de  gré. 

1755  «  S'en  trestoute  Coloigne  les  poomes  trover, 

«  Les  membres  et  les  testes  lor  ferïens  coper; 

«  S'issent  fors  de  Coloigne  li  cuvert  naturel. 

—  Hé  !  Diex,  dist  l'arcevesque,  «  qui  i  porroit  aler  ?  » 

La  ot  .j.  chevalier[s],  de  Monlaon  fu  nez; 
1760  Cil  ot  Gautier  a  nom,  qui  fu  proz  et  senez, 

Cosins  germairts  Doon  et  de  son  parenté. 

Quant  le  vit  l'arcevesque,  si  l'en  a  apelé  : 

«  Hé!  beaus  amis  Gautiers,  por  Dieu,  car  i  alez  ; 

«  Si  dites  a  Tomile,  gardez  ne  li  celez, 
1765  «  Qu'il  rende  les  chevaus,  n'en  soit  .j.  trestornez; 

«  El,  se  il  nou  vuelt  faire,  par  sainte  charité, 

«  Nos  l'assauromes  sempres  volentiers  et  de  gré. 

.  1738  nou  V.  —  1743  ait  il.  —  1745  Li  .j.  v.;  et  c.  — ■  1748  quer- 
rons.  —  1753    Et    se    il  ;  on  pourrait  proposer  Et  se   il  nel   v.  — 

1756  lor,  ms.  li;  si  Von  veut  conserver  li,  il  faut  corriger  les  tes- 
tes en  la  teste.  —  1757  Silsont  f.  Cf.  1784-5.  —  1767  N.  la  sau- 
ro  mes. 


DOON    DE    LA    ROCHE  67 

«  [S]e  en  tote  Coloigne  les  poomes  trovôr, 
«  Nous  lor  ferons  les  membres  et  la  teste  coper... 
1770  «  Par  le  mien  escient,  mar  i  seront  trové.      ooiJi 

—  Sîre  )),ce  dist  Gautiers,«  bien  lor  savrai conter  ». 
Il  monta  ou  cheval  courant  et  abrivé 

Et  a  çainte  l'espée  au  pom  d'or  neelé;  (v*) 

Andeus  les  mesagiers  a  avo  lui  menez; 

1 775  Jusqu'à  l'ostel  Tomile  ne  se  sont  aresté  ;  J 

La  dedenz  ont  trové  le  gloton  desfaé 
Qui  juoit  as  eschas  a  son  cosin  Hardré. 
Atant  es  vos  le  mes,  ses  prist  a  apeler  : 
«  Oies,  sire  Tomiles,  [enjvers  moi  entendez  : 

1780  «  L'arcevesques  vous  mande  qu'a  tort  l'avez  robe 
«  Et  tolu  .ij.  chevaus;  ne  le  vos  quiert  celer. 
«  Se  il  ne  sont  rendu  et  on  vos  puet  trover, 
«  On  vos  fera  les  membres  et  la  teste  coper. 
«  S'issiez  hors  de  la  vile,  mal  cuvert  naturel  : 

1785  *  Par  le  mien  escient,  ma[r]  [i]  serez  trové.  » 
Quant  l'entendi  Malingres,  si  a  le  chief  levé  : 
«  Par  les  sainz  Deu,  messaiges,  tu  as  le  sens  desvé  ; 
«  Par  le  mien  escient,  tu  es  touz  enivrez. 
«  Les  chevaus  ne  rendroie  por  quanque  vos  avez. 

1790  «  Ainz  porroit  .j.  contraiz  a  loisir  retorner 
«  De  Pavie  la  large  droit  a  Huissant  sur  mer, 
«  As  genolz  et  as  paumes,  mar  i  querroit  ester, 
«  Que  rende  les  chevaus  por  home  qui  soit  nez. 
«  Va  dir[e]  a  ton  seignor  face  ses  huis  fermef, 

1795  «  Car  je  n'ai  nul  talent  de  sa  messe  escoter,      --<^i 
«  Certes  [je]  m'en  tairai,  si  passera  estez.  » 

—  Dehait  cui  il  en  chaut!  »  ce  dist  Gautier[s]  li  ber, 


1769  lor,  ms.  li.  Après  ce  vers,  lacune;  cf.  v.  ij5j  et  1784  — 
1773  pom,  ms.  poi.  —  1776  le,  ms.  li.  —  1778;  li  m.  »«s  print.  — 

1792  As  gen'oiz  et  as  pasme  m.  q.  i  estre.  —  1787  le  sanc  d.  -^ 

1793  Qui.  —  1796  x.».\TSt\  parait  corrompu;  corr.  tendrai  (?);  pas- 
serai. '—  1797  Dieu   ait,  :  _  :,., 


68  DOON    DE   LA    ROCHE 

«  Par  le  mien  escient,  encui  le  compar[r]ez,  » 

Remonta  a  cheval,  n'osa  plus  demorer; 
1800  Et  li  ,ij.  messagier  s'en  retornent  arier,  [f.  35] 

Deci  qu'a  l'arcevesque  ne  [se]  vontarester. 

Quant  li  sainz  hom  les  vit,  s'a  Gautier  apelé  : 
<f  «  Qu'est  ço,  sire  Gantiers,  que  vos  avez  trové? 

«  Que  me  mande  Tomiles  ?  garde  ne  me  celer. 
i8o5  «  Ravrai  je  les  chevaus  ou  ses  a  refusez  ? 

—  Sire  »,  ce  dist  Gantiers,  ja  'n  orrez  vérité  : 

«  Les  chevaus  ne  rendront  por  quanque  vos  avez, 
«  Ainz  [vos]  mande  Malingres  faites  vos  huis  fermer, 
«  Car  il  n'a  nule  cure  de  vo  messe  escoter. 
i8io«  Certes,  ne  l'orra  mes,  ainz  passera  estez. 

—  Dehait  cui  [il]  en  chaut,  !  »  dit  rarcevesque[s]  ber  ; 
«  Oiez,  seignor  borjois;  alez  vos  adober!  » 

Et  cil  li  respondirent  :  «  Si  ert  com  vos  voldrez.  » 

Li  borjois  de  la  vile  se  corurent  armer 
181  5  Et  vestent  les  hauberz,  lacent  hiaumcs  gemez, 

Et  ceignent  les  espées  as  senestres  costez 

Et  montent  es  chevaus  couranz  et  abrivez 

Et  furent  .ix.  mil[lier]  quant  furent  adoubé. 

Font  soner  la  bancloche  et  les  grailes  soner, 
1820  [Si  qu']  en  molt  petit  d'eure  se  furent  asemblé  ; 

Et  Gontiaumes  li  ost[es]  s'est  tous  coranz  armez  : 

Il  vestit  son  hauberc,  s'a  son  hiaume  fermé 

Et  a  ceinte  l'espée  au  senestre  costé. 

Et  a  prisa  son  col  .j.  fort  escu  boclé, 
1825  Et  monte  en  .j.  cheval  corant  et  abrivé; 

La  coverture  en  fu  d'un  brun  paile  roé; 


1798  encui,  ou  encor(r)  ms.  engu  avec  un  signe  d'abréviation  sw 
ta  dernière  syllabe.  —  [802  les  vit,  ms.  le  sens  ;  on  pourrait  pro- 
poser le  sot.  —  i8o3  Qui  est  ce  ;  que  avés  vous.  —  i8o5  ces  a.  — 
1807  ne  vous  r. —  181 1  Dieu  ait  c.  —  i8i3  ert,  ms.  est.  —  1816 
senestiers  c.  —  1818  Et  sont  .ix.  mil  q.  —  1819  les  bancloiche. 
Peut-être  faudrait-il  substituer  a  souer  [dans  le  premier  cas)  un 
autre  verbe,  par  exemple,  tentir  ?  —  1S22  h.  fermer.  • 


DOON   DE    LA   ROCHE  69 

.VI le.  besanz  i  tienent  de  fin  or  esmer[é].  (v°) 

Et  li  serjant  Gontiaume  se  corurent  armer, 

Et  furent  bien  .ij'^.  quant  il  furent  armé, 
i83o  [Tres]tuit  du  sien  lignage  e  de  son  parenté. 

Jusqu'a[l]  chastel  Tomile  ne  se  sont  aresté. 

La  peiissiez  veoir  .j.  estor  si  mortel: 

Tante  hanste  i  ot  fraite  et  tant  escu  troé, 

Des  haubers  jaserans  tant  esclavain[sj  fausse[z]... 
i835  Le  sanc  et  les  cervelles  a  la  terre  coler; 

Quatre  vinz  des  Tomile  i  o[n]t  les  chiés  copez, 

Il  meismes  i  fu  d'un  grant  espié  navrez. 

Cil  leans  se  desfende[nt]  por  lor  vies  salver, 

Mais  il  ne  lor  vaut  mie  .j.  denier  moneé. 
1840  Atant  es  vos  Malingre  sor  .j.  destrier  monté; 

N'est  encor  chevaliers,  s'est  en  l'estor  entrez. 

Et  quant  le  voit  Gontiaumes,  a  po  qu'il  n'est  desvez; 

Il  broche  le  cheval  des  esperonz  dorez. 

Et  a  brandi  la  hanste  a[u]  confenon  doré, 
1845  Et  va  ferir  Malingre,  ne  le  vot  espargnier. 
Que  l'escu  de  son  col  lui  a  fraint  et  cassé, 

Et  l'haubert  de  son  dos  rompu  et  dessiré. 
Sa  lance  li  conduit  lez  le  senestre  lé; 

Tant  com  han[s]te  li  dure,  l'a  il  jus  enversé; 
i85o  Deable  Tont  gari,  qu'il  a  toz  jors  ame[z]. 

Tomiles  l'a  saisi  entre  lui  et  Hardré, 

En  .j.  tor  de  marbre  l'ont  en  fuie  torné; 

II  referment  les  huis,  li  assaus  est  remez. 

Tomiles  en  monta  contremont  les  degrez,  [f.  36 

i855  Par  .j.  des  fenestres  a  son  chief  forsgeté  ; 

Ou  qu'il  voit  l'arcevesque,  sel  prist  a  apeler  : 

i83o  de  sies  If —  i834-i835,  lacune  entre  ces  deux  vers.  —  i836 
Quatrevins  ioit  des  To.  les  c.  c.  —  1837  Cf.v.  jjoi.  —  i838  por 
lor  mesaluer. —  1839  monnoié.  —  1840  d.  monter.  —  1841  I  e.; 
entrer.  —  1846  ne  le  est  espargnié.  —  1846  1.  ait  frains  et  cassés 
—  1847  Et  le  h.  —  i832  fuie,  ms.  fine  —  i853  huis,  ms.  baisse.  — 
i855  f.  geter. 


70  DOON   DE    LA    ROCHE 

«  A  la  moie  foie,  sire,  a  grant  tort  m'asaillez  : 

«  Se  mes  niez  est  or  enfes,  encor  n'est  adobez; 

«  Et  se  il  fait  folie,  sel  doit  bien  amender. 
1860  «  Je  rendrai  les  chevaus,  ja  n'en  ert  trestorné; 

«  Si  ferai  droit  Gontiaume  volentiers  et  de  gré.  » 

Et  dïent  li  borjois  :  «  En  pardon  en  parlez. 

«  Ne  ferez  traison  quant  de  nos  partirez  ? 

—  Par  foi,  »  dist  l'arcevesques,  «  il  parle  com  senez  : 
i865  «  Les  chevaus  rendra  il  ;  ja  n'en  ert  plus  parlé.  » 

Et  dient  li  borjois  :  «  Si  ert  com  dit  avez.  » 

A  tant  s'en  sont  torné  :  li  essauz  est  reniez. 

Tomiles  s'en  torna  quant  ot  le  plait  guié, 

Si  moine  les  chevaus  Gontiaume  en  son  ostel, 
1870  Entre  lui  et  Malingre,  le  gloton  desfaé. 

Ou  voient  le  borjois,  au  pie  li  sont  aie, 

Mars  l'oste  fu  si  fiers  nés  daigna  resgarder  ; 

Si  les  bota  du  piet,  a  po  ne  sont  crevé  : 

«  Levez  vos  en  d'ici,  fais  cuvert  naturel  ; 
1875  «  Ja  ne  vos  amerai  en  trestot  mon  aé, 

«  Tôt  por  l'amor  Landri,  mon  seignor  naturel, 

«  Que  vos  avez  a  tort  de  cest  pais  geté.  » 

Li  messagier  l'entendent,  grant  joie  en  ont  mené  ; 

L'un  vers  l'autre  s'en  rïent  coiement  et  soef  : 
1880  a  Par  les  sainz  Deu,  compainz,  bien  nos  est  encontre  ; 

«  Landris  est  niés  le  roi  :  bien  oir  le  poez.  (v° 

«  Nos  ne  querons  en  France  désormais  [a]  aler.  » 

Olive  repairoit  du  mostier  honoré, 

En .).  crote  avoit  demi  .j.  jor  esté, 
ï885  Et  ot  dit  [son]  sautier  Olive  [o]  le  vi  cler, 

Que  Jésus  gart  Doon  qu'ele  pot  tant  amer, 

Et  li  ramaint  Landri,  son  fil  qu'ele  ne  het, 

« 
1860  trestornés  —  1862  En  pardons  --  i863  f.  traïsons -*  i865 
L.  ch.  renderai  je;  p.  parlés  —  1867  s.  tornés.  —  1868  torne.  — 
1870  le,  ms.  li.  —  1871  li.  b.  —  1877  p.  geter.  ^  1881-2  Cf.  v. 
l658-g.  —  1883  querrons.  —  i883  tn.  saine  honorer.  —  1887 
ramoinne  ;  que  ne. 


DOON    DE    LA    ROCHE  Jï 

Et  ot  oi  la  messe  a  la  bone  cité. 

Jusqu'à  l'ostel  Gontiaume  ne  se  vot  arester, 
1890  Car  sove[n]te[s]  foiées  i  prenoit  le  disner  ; 

Tuit  li  orent  failli  li  boin  et  li  privé, 

Gontiaumes  la  retient,  li  gentis  et  [li]  ber  ; 

Ou  qu[e]  il  voit  la  dame>  si  est  encontre  alez  ; 

A  .iiij.  chevaliers  si  l'a  fait  adestrer. 
1895  Toz  les  degrez  de  maubre  sont  ou  palais  monté, 

[Dame]  Olive  ont  assise  ou  faudestuel  doré, 

Puis  demandèrent  l'eve,  s'asirent  au  soper  ; 

Assez  ont  venoison  et  vins  viez  et  claré. 

Quant  il  orent  mangié  et  beii  a  planté, 
1900  Les  napes  corent  traire  serjant  et  bacheler. 

Il  demande[nt]  congié,  si  s'en  vont  as  ostés, 

Et  Gontiaume  remest  et  Olive  au  vis  cler 

Et  li  .ij.  messagier,  qui  molt  font  a  loer; 

Huimais  porront  noveles  a  loisir  demander. 
1905  —  Hostes  !  qu'est  ceste  dame  ?  »  ce  li  a  dit  Outrés. 

«  Molt  bien  semble  roïne,  ainsi  voir  m'ait  Dex!  » 

Et  respondit  li  ostes  :  «  Ja  'n  orrez  vérité  : 

«  Ele  est  seror  le  roi  qui  France  a  a  garder; 

«  Si  la  dona  .j.  conte  qui  molt  fait  a  loer, 
1910  «  Dan  Doon  de  la  Roche,  onques  ne  fu  tés  ber; 

«  De  lui  ot  ele  .j.  fil  qui  molt  fait  a  loer, 

«  Et  ota  non  Landri,  molt  gentis  [est]  et  ber. 

«  Ne  savons  de  l'enfant  quel  part  il  est  alez; 

«  Tomiles  de  Coloigne  [molt]  l'a  mal  engané, 
191 5  «  Duc  Doon  de  La  Roche,  c'est  fine  veritez  : 

«  Sa  fille  li  dona,  cesti  iist  desevrer. 

«  Nos  en  avons  les  cuers  corosos  et  irez.  » 


1888  ot,  ms.  ait.  —  1890  s.  foix  il  p.  —  i8gi  boin  s'oppose  mal 
à  privé  :  Vun  de  ces  deux  mots  doit  être  fautif .  —  1893  si  est,  ms. 
cest;  alez,  ms.  aler.  —  1894  a  destier.  —  1895  p.  montés.  —  1896 
faulx  destrier  d.  —  1897  Teve,  ms.  ne,  —  1903  H.  ce  li  a  dit 
qui  a  cest  dame  dit  O.  —  1909  fait  ms.  fut.  —  1914  engané,  ms. 
enginié.  —    191 5  Le  duc  D  {sic)  de  La  R.  ceste  fine  in'tes. 


72  DOON    DE   LA    ROCHE 

—  Sire  »,  [ce]  dit  Outrés,  »  [en]vers  moî  entendez; 
«  Par  la  foi  que  vos  doi,  je  dirai  vérité  : 

1920  «  Homme  somes  Landri  dont  vos  ici  parlez; 
«  Eu  cest  païs  venimes  enquerre  et  demander 
«  Por  savoir  de  l'enfant  qui  est  ses  parentez; 
«  Or  savomes  de  lui  iot[e]  la  vérité, 
«  Le  matin  moverons,  ja  n'en  ert  trestorné. 

1925  «  Nos  ne  querons  en  France,  certes,  avant  aler.  » 
Quant  l'entendi  Olive,  s'en  ot  liesse  assez  : 
Quatre  fois  se  pasma  entre  les  bras  Outré, 
Quant  Goniiaumes  li  ostes  l'en  corut  relever. 
Qui  li  veïst  les  mes  baisier  et  acoler, 

1930  N'i  eiist  si  dur  cuer  non  convenist  plorer. 
«  Veïstes  vos  mon  fil,  por  sainte  charité?  » 

—  Oïl,  en  nom  Deu,  dame,  »  ce  li  a  dit  Outre[z], 
«  Enz  en  Costantinoble  est  mes  sires  remés; 

«  La  portera  corone,  ainz  que  past  li  estez, 
1935  «  Por  la  plus  bêle  famé  de  la  crestïenté, 

«  Et  venra  en  cest  règne  ainçois  .j.  an  passé; 
«  Tomile  et  Ma[lingre]  fera  les  chiés  coper. 

—  Hé  Diex  !  [ce]  dist  la  dame,  tant  l'avrai  désiré.  » 
Celé  nuit  ont  grant  joie  a  loisir  démené. 

1940  Quant  11  lit  furent  fait,  si  sont  couchier  aie. 

L'endemain  par  som  l'aube  se  sont  li  mes  levé, 
Et  vestu  et  chaucié  et  molt  bien  conreé, 
Et  mistrent  en  lor  dos  les  hërmins  engolez 
Par  desus  les  blïauz  a  fin  or  gironez. 

1945  Les  granz  ma[n]tiauz  de  sable  ont  li  mes  afuble[z], 
Dont  li  tassel  en  valent  tôt  l'or  d'une  cité, 
A  pierres  et  a  bra[s]mes  qui  molt  font  a  loer  ; 
Les  chapels  sebelins  ont  en  lor  chiés  posez, 

1922  qui  est  de  ces  p.  On  pourrait  aussi  corr.  qu'est  de  son 
parenté.  —  1924  trestornés.  —  1925  Cf.  v.  1882  —  1929  nies  b. 
1932  en  n.  de  D.  —  1934  a.  qui  part  —  ig36  c.  roine  —  1940  s. 
couchiés  a.  —  1941-51  Cf.  vv.  i5jo-8  —  1948  Les  ch.  ont  s.  en 
lor  chief  poser. 


DOON    DE    LA   ROCHE  -TS 

Escharpes  cordoaines  et  les  bordons  ferrez  ; 
igSo  Li  picois  sont  d'argent  et  li  verroil  d'or  cler. 
'*     Les  dromadaires  font  du  celier  amener  ; 

Li  messagier  i  montent  par  les  estriers  [dorez], 
Gontiaumes  les  convoie  une  pièce,  li  bers, 
E  li  sainz  arcevesques  et  Olive  au  vis  cler. 
1955  La  dame  [ot]  .j.  anel  qui  molt  fi[s]t  a  loer  : 
Ce  fu  du  plus  fin  or  c'on  peust  recovrer  ; 
La  piere  qui  fu  enz  ot  molt  très  grant  bonté. 
Li  dus  Doz  li  donna,  qui  molt  fait  a  loer, 
La  nuit  qu'il  gist  o  lui  a  Monsteruel  sor  mer  ; 
i960  A  donc  [i]  fu  Landris  li  vassaus  engenrez; 

Si  le  traist  de  son  doit  la  dame  o  le  vis  cler,  (/.  3S) 

Bel  et  cortoisement  en  apela  Outré  : 
«  Sire  frans  chevaliers,  vers  moi  [en]  entendez  ; 
«  Vez  ici  .j,  anel  qui  est  molt  bien  ovrez, 
1965  «  Que  me  dona  dus  Do  au  gent  cors  honoré; 
«  Si  le  baillez  Landri  le  mien  fil  alozé. 
«  Ce  seront  [tels]  ensoingnes  que  connoistra assez.  » 
Li  messagiers  le  prist,  qui  nel  vot  refuser 
[Et]  molt  cortoisement  l'a  en  son  doit  bouté. 
1970  Li  messagier  s'en  tornent,  qui  sont  preu  et  séné, 
La  bêle  se  pasma,  Olive  o  le  vis  cler. 
Molt  par  fu  granz  li  duels  quant  il  sont  desevré. 
Li  messagier  cheva[u]chent,  qui  n'i  sont  aresté, 
Et  trespassent  les  terres,  les  porz  et  les  régnez. 

1975  En  .viij.  jors  trespasserent  .xlix.  contez 
Et  .vij.  roialmes  granz  et  .x.  arcevesquez; 
Deci  qu'a  Bras  Saint  George  ne  se  sont  aresté. 
Quant  il  i  sont  venu,  s'entrent  en  une  nef, 

1932  Li  m.  remontent  p.  1.  estrieres.  —  igSS  Contre  I.  c.  — 
1959  qui  g.,  Monstruer;  cf.  v.  2084.  —  i960  Cf.  v.  108.  — 
1965  Qui  me  d.  Doon.  —  1966  Si  le  me  b.  L.  mon  fils  a.  —  1969 
d.  bouter.  —  1970  Cf.    v.    i5g3.  —    1974-76  Cf.  vv.  1600-2.  — 

1976  arche veschies,  qui  ne  convient  pas  à  la  rime.  Il  y  a   arce- 
vesques au  V.  1602.  —  1977-80  Cf.  vv.  i5g4-'j. 


T4 


DOON    DE    LA    ROCHE 


Diex  lor  dona  tantost  si  droiturier  oré  ! . 

1980  D'autre  part  a  la  ter[r]e  es  les  vos  arivez. 

Montent  es  dromadaires,  si  pensent  de  rer[r]er, 
Tresqu'a  Costantinoble  ne  voldrent  arester. 
Par  .).  mardi  matin  i  vindrent  au  disner. 
Seignor,  ce  fu  en  mai,  que  fait  chaut  en  esté, 

1985  Que  florissent  cil  bois,  reverdissent  cil  pré, 
Et  ces  aiguës  revienent  ainsi  en  lor  chinex, 
Cil  petit  oisillon  comencent  a  chanter, 
Quant  li  rois  Alixandres  est  par  matin  levez;  {v°) 

En  .j.  vergier  entra  por  son  cors  déporter, 

1990  Très  en  mi  .j.  prael  i  fait  tendre  son  tref  : 
fW-V  Les  forches  sont  d'argent  et  d'or  fin  li  frestel, 

Trois  escarboucles  ot,  qui  molt  font  a  locr, 
Et  fu  d'un  vermoil  paile  environ  gironez  : 
Li  pans  en  fu  a  or  et  a  argent  fra[i]sez; 

1995  Dieus  me  fist  [nule]  beste  qui  ne  soit  pointe  ou  tref; 
Les  cordes  sont  de  soie  e  li  pan  sont  d'or  cler. 
'i  Et  Landris  li  cortois  i  est  avec  alez, 

Asses  et  Guinemanz  et  li  autres  barnez. 
Salmadrine  la  bêle  i  a  fait  adestrer 

2000  A   iiij'^.  Griffons  qui  molt  font  a  loer. 

De  la  soie  beauté  vos  doi  je  bien  conter  : 
Vestu  ot  en  son  dos  .j.  hermin  engolé, 
Par  desus  .j.  blïaut  a  fin  or  gironé, 
E  fu  estrois  as  lez,  qui  molt  fist  a  loer  ;        ;; 

20o5  .1.  grant  mantel  de  sable  ot  la  bêle  afublé. 
Dont  li  tas[s]el  en  valent  tôt  l'or  d'une  cité, 
A  pieres  et  a  brèmes  qui  molt  font  a  loer  ; 
Ele  ot  molt  vairs  les  ieus,  s'ot  le  viaire  cler 


1981  es,  ms.  a.  —  1985  Que,  ms.  Quil.  —  1992  T.  escarboncle 
d'or  q.  —  1993  vermoillô.  —  1996  pan,  Con\  pau  ou  pel  ?  ■—  1998 
G.  sunt  li  a.  —  2000  A.  .iiij.  tois  {ou  cois)  G.  —  2002  dos,  ms. 
dois.  —  2004  Et  fust  e.  a  las  q.  m.  fust  aloés.  —  aoo5-7  C/.  vv. 
1945-7- 


DOON    DE    LA   ROCHE  75 

Et  la  coleur  vermoille  comme  rose  en  esté, 
2010  A  u[n]  fil  de  fin  or  ot  les  crins  galonés. 

Et  sisi  desus  un  mul  qui  molt  fist  a  loer  : 

La  sele  de  son  dos  vaut  bien  .j.  cité  ; 

Li  arçon  sont  d'or  fin  a  esmaus  tresgité, 

[Et]  la  sambue  en  fu  d'un  brun  paile  roé. 
20 1 5  Onques  ne  tre[s]fina  tant  qu'ele  vint  au  tref.  {f.  3g) 

.1.  vermoil  paile  firent  desus  l'erbe  geter, 

Sus  se  cocha  Landris,  li  gentis  et  li  ber. 

Il  oî  l'oriol  et  la  melle  chanter  ; 

De  sa  merè  li  poise  qu'il  laissa  outre  mer, 
2020  Et  craint  li  faus  Tomiles  ne  rai[t]  fait  afoler; 

Molt  tendrement  des  ieus  commença  a  plorer. 

Salmadrine  la  bêle  l'en  prist  a  regarder  ; 

Seignor,  bien  le  sachiez,  le  cuer  en  ot  iré, 

Et  cuide  de  l'enfant  qu'il  ait  autre  penser, 
2025  Que  ne  dot  les  messages  qu'en  France  sont  aie. 

Parmi  trestoz  les  autres  l'est  alée  acoler. 

Plus  de  .XX.  foiz  le  baise  par  molt  grant  ami[s]té. 

Bel  et  cortoisement  le  prist  a  apeler  : 

«  Damoisiaus  de  bon  aire,  mar  vos  esmaierez. 
2o3o  «  Je  m'en  irai  en  France  a  pié,  se  vos  volez. 

—  Dame  »,  ce  dist  li  enfes,  «  en  pardon  en  parlez. 

«  Par  la  foi  que  vos  doi,  vos  parlerez  tost  d'el. 

«  De  ma  mère  me  poise  que  laissa[i]  outre  mer 

«  Et  dot  li  fel  Tormiles  ne  l'ait  fait  afoler. 
2o35  —  Sire  »,  dist  la  pucele,  «  Dieus  a  tôt  a  garder.  » 

Atant  es  vos  les  mes  qui  de  loing  ont  erré  ; 

A  pié  sont  descendu  devant  le  maistre  tref; 

Lor  dromadaire  furent  estanc  et  tressiié. 


201 1  fut  a  1.  —  2012  La  sale.  —  2016  vermoille  —  2017  se,  ber, 
ms.  bel.  —  2020  o.  mere.  —  2022  prist,  ms.  print.  —  2026  Qui  ne 
dote.  —  2026  l'a  a.  —  2o3o  irais  ;  se.  ms.  ce.  —  2o32  el,  ms.  elle. 
—  1034  fait  esposer;  cf.  v.  2020.  —  2o35  toust  a  g.  —  ïo36-9 
Cf.  i6a3-7.  —  2o38  estanc,  ms.  cstaint  ;  cf.    1626. 


!^.V 


j6  DOON    DE    LA    ROCHE 

[Et]  li  vassal  forment  iravaillié  et  pené. 
2040  II  saluent  le  roi  com  ja  oir  porrez  : 

«  Cil  Damedieus  de  gloire,  qui  en  crois  fu  penez, 

«  Gart  le  roi  Alixandre  et  lui  et  ses  privez. 

«  Desor  trestoz  les  autres  devons  Landri  amer. 

«  Sire,  fumes  en  France  oïret  esgarder 
2045  «  Por  savoir  de  Landri  de  quel  gent  il  est  nez, 

«  Se  il  est  niés  le  roi  qui  France  a  a  garder; 

<i  Or  savomes  de  lui  tote  la  vérité  : 

«  Por  voir  niés  est  Pépin  qui  France  a  a  garder, 

«  Qui  ocist  le  lion  qui  tant  fist  a  doter. 
2o5o  «  Et  fumes  a  Coloigne,  la  mirable  cité, 

«  La  veïmes  sa  mère  qui  tant  a  le  vis  cler, 

«  Dame  Olive  la  bêle,  seror  Pépin  le  ber  : 

«  Il  n'a  tant  bêle  dame  en  la  crestïenté.  " 

«  Tomiles  et  Malingres  la  nos  firent  rober 
2o55  «  Et  tolir  noz  chevaus,  ne  [le]  vos  quier  celer, 

«  Quant  i  ala  Gautiers  et  l'arcevesques  ber, 

«  Par  vive  force  firent  noz  chevaus  ramener; 

«  Quatre  vinz  de[s]  Tomile  i  furent  decopé  ; 

«  Molt  fu  grant  la  meslée  en  la  bone  cité. 
2060  «  Malades  est  Pépins,  bien  a  .vij.  anz  passez, 
•  S        «  Por  duel  de  son  nevo  qu'il  en  la[i]ssa  aler; 

«  N'a  qui  teingne  ses  terres  ne  ses  granz  héritez  ». 

Quant  l'entent  Salmadrine,  ne  l'en  sot  mie  gré. 

Elle  marcha,  avant,  si  le  prist  a  ciner; 
2o65  En  l'oreille  li  dist  coiement  et  soef  : 

«  Par  les  sainz  Dieu,  messages,  molt  as  le  sen  desvé  ; 

«  Par  le  mien  escient,  que  tues  enivrez. 

«  Tost  et  isnelement  alez  en  voz  hostés,  (/.  40) 

«  Si  vos  faites  très  bien  baignier  et  conreer. 


2040  com,  ms.  comme.  —  2042  Garde  le  r.  —  2044  en  Fr.  fus- 
mes.  —  2049  ^s^  *"*•  ^"^^-  —  2o5o  l'amirable  c.  —  2o52  La 
belle  O.  s.  P.  li  b.  —  2064  vous  f.  r.  —  2039  meslée,  ms.  malée. 
—  2060  Pépin  est  malade.  —  2064  marchit.  —  2066  es  le  san  d. 


DOON    DÉ  LA    ROCHE  77 

2070  «  Car  vos  estes  forment  travaillié  et  pené,    ^ 

«  De  ci  qu[e]  a[u]  matin  que  li  Jors  venra  clers. 

«  Puis  venez  a  mon  père,  gardez  n'i  arestez, 

«  Puis  li  dites  trestot  ce  que  avez  trové  ; 

ft  Damedex  vos  confonde  se  de  mot  en  mentez  ». 
2075  Et  il  respondent  :  «  Bêle,  a  vostre  volenté. 

«  Ja  chose  ne  dirons  qui  ne  vos  viengne  a  gré  ». 

Outrés  s'en  est  torne[z],  que  n'i  est  arestez, 

De  ci  que  a  Landri  ne  se  vot  arester  ; 

Bel  et  cortoisement  le  prist  a  apeler  : 
2080  «  Damoisiaus  de  bone  aire,  a  moi  [en]  entendez. 

«  Vés  ici  un  anel  de  fin  or  esmeré 

«  Que  t'envoie  ta  mère  Olive  o  le  vis  cler, 

«  Que  dus  Do  li  dona,'  qui  tant  fait  a  loer, 

«  La  nuit,  quant  jut  a  li,  a  Monsteruel  sor  mer,  » 
2o85  Quant  Landris  l'entendi,  si  commence  a  plorer. 

Outrés  a  pris  l'anel,  si  li  a  présenté, 

Et  Landris  le  reciut,  qui  molt  fist  a  loer  ; 

Plus  de  .c.  fois  le  baise  doulcement  et  soef; 

Enz  en  son  doit  meisme  l'avoit  mis  de  son  gré. 
2090  Li  messagier  s'en  tornent;  congié  ont  demandé  ; 

Landris  lor  a  doné  volentiers  et  de  gré. 

Tost  et  isnelement  s'en  vont  en  lor  ostel, 

Puis  si  se  font  [très  bien]  baingnier  et  conreer. 

Dist  li  rois  Alixandres  :  «  Baron,  or  entendez, 
2095  «  Landris  est  niés  le  roi,  entendre  le  poez  :  [v°) 

«  Demain  prendra  ma  fille,  se  vos  le  me  loez  ; 

«  Si  li  donrai  ma  terre  et  trestot  mon  régné. 

—  Sire  »,  disi  Salmadrine,  «  .v^.  mercis  de  Deu. 

«  Par  la  foi  que  vos  doi,  forment  l'ai  désiré  ». 
2100  Li  rois  s'en  est  tornez  et  ses  riches  barnez; 

Tost  et  isnelement  est  venuz  a  l'ostel  ; 


2070  travaillies  et  penés.  —  2076  ja  ne  >J.  choses  que;  cf.  v. 
j555.—  2081  Vees.  —  2082  Qui;  au  v.  c.  —  2084  Monstruer  ; 
cf.  vv.  igS8-g.  —  2097  Ce.  —  2098  S.  ce  dit  Sa. 


7^  DOON    DE   LA   ROCHE 

Tantost  demande  l'aiguë,  s'assirent  au  soper 
Molt  i  ot  venoison  [et]  vins  viez  et  clarez, 
S'orent  grues  et  gantes  et  paons  empevrez, 
2io5  Isopé,  bogu[e]rastre,  piment  et  eluné. 
Quant  il  orent  mengié  et  beii  a  plenté, 
Si  chantent  et  violent  et  rotent  H  jugler  ; 
Celé  nuit  ont  grant  joie  a  loisir  démené; 
Et  li  lit  furent  fait,  si  sont  couchier  aie. 


LX 


2  1  lo  Or  lairommes  de  ces  qui  sont  bien  aaisié. 

Quant  tens  [etlius]  en  iert  bien  savrons  repairier; 
Si  vos  dirai  du  duc,  de  son  grant  encombrier  : 
Tant  a  norri  Malingre  qu'il  le  fist  ch[eval]ier. 
C'est  li  filz  Audegour,  cui  Dieus  dont  encombrier. 


LXI 

21 1 5  En  meïsme  cel  jor  que  dans  Do  l'Alemans 
Ot  adobé  Malingre,  ne  l'ama  il  notant. 
L'endemain  par  matin  fu  si  ses  malvoillanz 
Que  l'ala  par  haine  toz  tens  contralianz  : 
«  Adoubez sui,  beaus  sire,  merci  Dieu  le  poissant! 

2120  «  Or  se  gardent  tuit  cil  cui  je  suis  mal  voillanz! 

«  Dame  Olive  de  France  ne  voil  pas  que  se  vaut      (/".  41) 
«  Qu'elle  soit  conreée  dès  cest  jor  en  avant 
«  De  lotes  celés  terres  qu'a  vos  sont  apendant  ». 
Quant  Tentendi  li  dus,  a  po  ne  pertle  sen  : 

2104  gantes,  ms.  genres.  —  2io5  elimé.  —  2108  démener.  — 
2109  fait,  ms.  fais.  — 2110  b.  et  aisié.  —  2ii3  chevalier,  ms. 
chier.  —  21 18  Et.  —  2i2t  vant,  jms.  vante.  —  2122  conreée,  m5. 
courecee.  —  2123  t.  celle  tere;  v.  soit  a.     ..•  ■ 


DOON    DE   LA    ROCHE  79 

2125  «  Por  amor  Dieu,  biaus  filz,  ne  te  par  coitier  tant! 
«  Ja  est  [ele]  seror  dant  Pépin  le  roi  Franc  ; 
«  Il  n'a  si  bêle  [dame]  en  cest  siècle  vivant. 
«  Li  rois  vos  a  mandé  par  menace  et  par  ban 
«  Qu'ele  ne  soit  destruite  ne  des  membres  perdant  ». 

2i3o  Quant  l'entendi  Malingre,  a  po  ne  pert  le  sen  : 
«  Haï  !  vos  i  mentez  com  mauvais  couz  sofranz  ; 
«  Vos  estes  de  li  couz  tôt  a  vostre  escïant  » . 
Quant  l'entendi  li  dus,  a  po  ne  pert  le  sen  : 
Il  hauce  le  poing  destre,  si  feri  son  enfant 

21  35  Qu'il[r]abati  a  terre,  qui  que  plort  ne  qui  chant. 
Et  quant  le  volt  Malingre,  si  sailli  en  estant, 
Et  va  saisir  son  père  par  les  grenons  davant, 
Son  peliçon  ermin  li  va  tôt  des[c]irant, 
Entreci  qu'a  la  terre  ne  s'aresta  néant. 

2140  Adoht  i  sont  coru  Baivier  et  Aleman, 

Et  furent  en  po  d'ore  bien  .vij^x.  combatant. 
Cil  gentil  chevalier  çn  vont  trives  prenant 
Et  dou  père  et  dou  fil,  car  molt  est  avenant. 


LXII 


Cil  gentil  chevalier  qui  les  trives  en  quirent 
2145  Et  dou  père  et  dou  fil  et  des  autres  meïsmes, 

Que  d'une  part  et  d'autre  très  bien  les  affïerent 

Et  ostages  livrèrent  et  puis  les  raplig[i]erent. 

Tomiles  et  Malingres  chascun  jor  se  porquierent  (v*>) 

2i5o  Comment  la  suer  du  roi  du  païs  chasse[rïe]nt. 

A  son  hostel  li  mande[nt],  forment  l'ont  corrode, 

Que  se  ele  i  remest,  la  teste  avra  trenchie. 


2125  parGeittier.  —  2126  On  pourrait  proposer  Ja  est  [ele]  la 
sufr.  —  2i3i  m.  comme  m.  c.  et  s.  —  2i33  sen,  ms.  snnc.  — 
2 1 34  feri,  ms.  ferut.  —  2i35  plore  ne  que.  —  21 52  avrait  t.  • 


8o  DÔON    DE    LA   ROCHE 

Quant  l'entent  la  duchesse,  molt  s'en  est  esmaîe; 

Damedieu  reclama  et  le  baron  saint  Pierre  : 

«  Glorieus  [sire]  père,  qui  de  toz  es  jug[i]ere, 
21  55  «  Cil  Loherain  me  taillent,  de  tôt  m'ont  abaissie  ; 

«  Alez  s'en  est  Landris,  parcui  fuisse  garie. 

«  Faillie  m'est  l'estache  ou  m'e[s]toie  apoïe. 

«  Or  n'[avr]ai  jamais  aide  ne  davant  ne  dar[r]iere!  » 

.II.  garçons  li  envoient  et  .j.  charnberiere, 
2160  Sor  .).  mauvais  roncin  ont  la  dame  chargie. 

Quatre  fois  se  pasma  quant  la  vile  a  vuidie. 

Onque[s]  ne  trestina,  si  vint  en  Honguerie  ; 

L'avesque[s]  Auberis  l'a  molt  bien  herbergie, 

Car  il  estoii  sis  oncles  et  elle  esioit  sa  nièce  ; 
21 65  Par  le  mien  escient  que  l'avra  a  mesnie 

Tresque  il  li  rendra  Alema[i]gne  et  Bavière. 


LXIII 

Or  est  Olive  bien  assenée  et  venue  ; 
L'evesques  Auberis  Ta  molt  bien  receue. 
Or  vos  dirons  du  duc,  de  sa  mésaventure  : 
2170  Une  guerre  li  sort,  qui  vient  d'outre  nature. 
Tomiles  et  Malingre  et  sa  tille,  la  pute. 
Cil  en  ont  conseil  pris  et  parole  tenue, 
El  dïent  l'uns  a  l'autre  :  «  Cesi[e]  terre  est  molt  drue 
«  Et  riche  et  aaisiée  ausimeni  comme  Pu[i]lle; 
;<^\        2175  «  Qui  or  avroit  Doon  cest[e]  ter[r]e  tolue! 
«  Car  se  il  se  resemble  et  ,j.  po  s'esvertue, 
a  Tost  avrient  la  ter[r]e  gastée  et  confondue  ;  {f.  42) 

«  Et  se  Landris  revient,  ce  en  malaventure». 

21 55  C.  la  horain  (en  deux  mots).  —  2157  estaiche  ou  je.  — 
2i58  n'ai.  —  2160  la  d.  chergée.  —  2161  a  veudie.  —  2i63 
habergec.  —  2164  ces  o.  —  2170  d'autre  nacure.  —  2173  li  .i.  — 
2176  G.  ce.  —  2177  T.  avriens.  —  2178  est  m. 


DOON    DE    LA    ROCHE  8l 

Tomiles  est  levez,  quant  Malingres  l'argue, 
2180  Et  montent  es  chevaus,  par  la  terre  corurent, 
De  l'un  chastel  a  l'autre,  por  secors  et  ai[uje; 
Cil  gentil  chevalier  lor  afïent  et  jurent 
Que  ja  Do  ne  tendra  chastel  ne  teneiire. 
Ou  repairier  sont  mis,  molt  font  malaventure  : 
2i85  Dans  Do  tint  en  son  poing  .j.  ostor  de  .v.  mues, 
Aler  doit  en  rivière  por  le  sien  cors  desduire; 
Et  li  cuens  i  ala;  .  j.  grant  pièce  i  furent, 
Et  mena  .iiij.  contes  de  molt  grant  teneûre  ; 
Et  quant  il  se  repaire,  s'a  Coloigne  perdue. 
2190  Cil  gentil  chevalier  li  escrïent  et  huchent 
Et  dames  et  puceles  de  soliers  et  de  rues  : 
«  Alez  vos  en,  dans  Do,  en  Calabre  ou  en  Pu[i]lle, 
«  Que  ja  en  Loereingne  ne  tenrez  ma[i]s  tenue». 


LXIV 

Or  est  Do  de  La  Roche  corociez  et  irez  : 
2195  Les  portes  sont  fermées,  ne  pot  dedans  entrer. 
S'a  Malingre  son  fil  et  Tomile  apelez  : 
«  Di  va!  ovre  la  porte,  la[i]  moi  leanz  entrer. 
«  Se  de  riens  t'ai  mesfait,  près  sui  de  l'amender  ». 
Et  cil  li  respondirent  :  «  Certes,  n'i  entre[re]z. 
2200  >.  Par  la  foi  que  doi  Dieu,  mais  n'i  sejornerez  : 
«  Après  vostre  putain  vos  convendra  aler, 
«  Et  querez  tel  conseil  que  sciez  racordez, 
«  Que  ja  de  Loereingne  ne  tenrez  hérité  ». 
Do  li  dus  respondi[s]t  :  «  Dans  gloz,vos  i  mentez  : 
2  2o5  «  El  ne  fu  onques  pute,  jel  sai  de  vérité.  (v») 

«  Mais  encui  ve[r]rai  je,  voirement  De[us]  le  set, 
«  Que  a  mauvais  lignage  sui  du  tout  asemblez.  » 

2180  a  ch.  —  2i83  Do]  D.  —  2186  p.  son  c.  d.  —  2195  furent 
f.  —  22o3  de  Orroine  ne;  hérités.  —  22o5  je  le  s.  —  2206  v.  De 
le  s.  —  2207  au  m.  1. 

6 


82  DOON    DE    LA    ROCHE 


I 

Or  est  Do  soz  Coloigne  coreçous  et  pleins  d'îre; 

Des  ieuz  de  son  front  plore  et  de  son  cuersospire. 
2210  Ts^nt  atendi  li  dus  que  nuiz  fu  asserie, 

Puis  est  montez  [li  dus]  a  mesnie  escherie. 

Onques  tot[e]  la  nuit  ne  cesse  ne  ne  fine, 

Et  est  venuz  a  Ais  quant  l'aube  est  esclarie. 

Entrer  vot  en  la  porte  quant  il  li  contredirent, 
221 5  Que  l'avoient  juré  a  Tomile  et  Malingre, 

Quant  le  voit  li  dus  Do,  a  poi  n'enrage  d'ire;      ,  : 

Des  ieuz  tenrement  plore  et  de  son  cuer  sospire. 

Et  quant  le  voit  li  dus,  si  lor  commence  a  dire  : 

«  Je  vos  torrai  les  membres,  le[s]  te[s]tes  et  les  vies.  » 
2220  Dont  remonta  li  dus  a  mesnie  escherie, 

De  ci  a  son  demoine  ne  cesse  ne  ne  fine. 

Sui  baron  chevalier  en  La  Roche  se  mirent, 

En  son  prime  demoine  que  il  a  de  Dieu  quite. 


LXVI 

Or  est  Do  de  La  Roche  voirement  revenuz 
2225  En  son  privé  demoine  que  il  a  de  Jhesu. 

Or  s'en  ira  clamer  a  Pépin  a[u]  lion 

Del  duel  et  del  domage  qui  li  est  avenuz. 

Il  entra  en  la  voie  et  ou  chemin  batu  ; 

De  ci  qu[e]  a  Paris  ne  s'est  arest[e]uz. 
223o  Tant  fist  par  ses  Jornées  qu[e]  il  i  est  venuz, 

Et  a  trové  le  roi  en  sa  sale  lassus. 

Molt  le  trova  malade,  dolent  et  confondu  ; 

221 1  mainnie.  —  2214  la  portent.  —  22i5  et  a  M.  —  2220  mein- 
nie.  —  2225  cleve  {ou  eleue)  d.  —  2226  a[u]  lion,  sic  ms.  —  2227 
Des  d.  et  des  domaiges.  —  3229  ne  c'e.  —  223o  ces  j. 


DOON  DE   LA   ROCHE  83 

De  duel  [et]  de  pitié  en  a  ploré  li  dus.  (/".  43) 

Et  quant  le  voit  li  rois,  si  li  a  ramentu  : 
2235  «  Que  fait  ma  suer  Olive  en  cest  règne  la  sus  ? 
«  Très  bien  la  me  gardez  [de]  Malingre  et  d'autrui, 
a  Que  ne  li  soit  damages  ne  hontages  venuz. 

—  Ne  le  vos  celera[i]  »,  puis  si  a  dit  li  dus, 

«  Je  ne  sai  de  la  dame  quel  voie  ele  ait  tenu  ; 
2240  a  Tomiles  et  Malingres  l'enchâssent  par  vertu. 
«  Les  fiez  que  me  donastes  ai  je  trestoz  perduz. 

—  Di  va!  »  ce  distli  roi[s],  qui  les  t'a  donc  toluz? 

—  Par  la  moie  foi,  sire,  nel  vos  cèlerai  plus  : 
«  Tomiles  et  Malingres,  li  cuvert  mescreii.  » 

2245  Quant  l'entendi  li  rois,  molt  [en]  fu  irascuz  : 
Quatre  fois  se  pasma  ;  molt  em  pesa  au  duc. 


LXVII 

«  Sire  Do  de  La  Roche  »,  ce  dist  l'empereor, 
«  A  tort  et  a  pechié  m'as  tolu  ma  seror, 
«  Olive  la  duchesse  a  la  clere  façon. 
225o  «  Or  m'en  irai  au  règne  voirement  a  estros, 
«  Ja  n'i  avra  si  riche  que  ne  met[e]  au  desoz. 
«  Ou  jel  face  ou  jel  lais,  ja  n'i  aras  honor.  » 
Del  peliçon  hermin  a  .iiij.  pois  derouz, 
S'en  desfia  Doon,  son  serorge,  oiant  toz. 


LXVIII 

2255  «  Sire  Do  de  La  Roche,  »  dist  Pépins  li  bons  rois, 

2a34  V.  le  roi  ;  si,  ms.  ci.  —  2235  Et  que  f.  O.  ma  s.  —  2236 
garde  M. —  2238  ai  d.  —  2239  ^st  tenus.—  2240  renchasserent 
p.  V.  —  2241  Les  chastels.  —  2243  nel,  ms.  nos.  —  2244  c.  mes- 
treux.  —  2246  m.  em  pera.  —  225o  i.  ou  rainne.  —  2a5i  n'i  aurai. 
—  2352  Ou  jel  le  f. 


84  DOON    DE    LA   ROCHË 

«  A  tort  et  a  pechié  ma  seror  me  tolois  ; 
«  Chalonge  vos  [par  droit]  :  preste  fu  a  cest  soir 
«  A  faire  tel  juïse  quel  gardassent  François. 
«  Vous  nel  vousistes  pendre  ;  orgueils  fu,  par  ma  foi. 
2260  «  Or  m'en  irai  [au  règne],  ne  puet  pas  remanoir.  » 

Dou  peliçon  hermin  a  rompus  .iiij.  pois,  (v* 

Si  desfia  Doon,  son  serorge,  c'est  voir; 
Et  quant  le  voit  li  dus,  grant  paour  a  de  soi  :  - 

Il  monta  ou  cheval  ;  n'i  osa  remanoir. 


LXIX 

2265  Do  se  part  de  la  court,  que  congié  n'i  a  pris. 

N'a  si  haut  homme  en  France  nel  haice  por  Landri, 
N'en  Flandres  n'en  Poitou,  [Berri]  ne  Limosin. 
Il  entra  en  sa  voie,  s'acoilli  son  chemin 
Et  trespassa  les  terres  [et]  les  porz  et  les  puis, 

2270  Deci  qu'a  son  demoine  ne  prist  [il]  onques  fin. 
Venus  est  a  La  Roche  ;  si  l'a  faite  garnir 
Et  fait  serrer  les  portes  et  lever  ces  paliz 
Regeter  ces  fossez  et  ces  hauz  rolleïz, 
Et  a  mandé  ses  homes,  ses  chevaliers  de  pris, 

2275  Tant  qu'il  en  ot  ensemble  la  monte  de  .iij.  m.  ; 
Puis  s'adobent  ensemble  li  chevalier  hardi 
Et  montent  es  chevaus  et  es  destriers  de  pris. 
Entreci  que  a  Ais  ne  pristrent  onques  fin  ; 
Li  dus  Do  s'embuscha  en  .).  brulet  petit 

2280  Qui  fu  d'is  et  d'aubors,  de  loriers  et  de  pins; 


2257  Ch.  li  uus  prestes  sui  a  c.  s.  —  2258  j.  quelle.  —  2269  V. 
ne  le  V.  p.  —  2260  irai,  ms.  irais.  —  2262  c'e.  Voirs.  —  2265  Ce  vers 
se  lit  deux  fois  de  suite  dans  le  manuscrit,  la  première  fois  comme 
vers  final  de  la  laisse  LXVIIl.  —  2267  Ne  P.  ne  Flanras  ne  L.  — 
2272  f.  lever  1.  po.  —  2273  h.  roillies.  —  2274  m.  ces  h,  ces  ch.  de 
p.  —  2275  la,  ms.  le.  —  2277  a  ch.  et  as  d.  —  227g  s'embricha. 


DOON    DE    LA    ROCHE  85 

.C.  chevaliers  errant  a  la  porte  tramist, 

Tôt  droit les  ont  bien  estormiz. 

Cil  dedans  s'adoubèrent  com  chevalier  de  pris  : 
Il  vestent  les  haubers,  lacent  hiaumes  bruniz, 
2285  Et  ceignent  les  espées  as  bons  coutiaus  forbiz 

Et  montent  es  chevaus  corans  et  arabis 

Et  pendent  a  lor  cols  les  forz  escus  votiz 

Et  pristrent  en  lor  poins  les  forz  espiez  forbiz,  {/.  44). 

De  la  porte  s'en  issent  et  crient  a  hauz  criz. 
2290  Le  cembel  ont  molt  bien  premerain  envaî, 

De  ci  qu[e]  en  l'agait  ne  pristrent  onque[s]  fin, 

Adonc  lor  sailli  Do,  qui  fu  pros  et  hardiz  ; 

Il  broche  le  cheval  des  espérons  d'or  fin, 

Et  [a]  brandi  l'espié  au  confanon  porprin. 
2295  Joserani  de  Coloigne  va  en  res[cu]  ferir; 

Par  soz  la  bocle  d'orli  peçoie  et  malmis[t], 

Et  l'aubert  de  son  dos  rompi  et  desarti, 

Le  cuer  qu'il  ot  ou  ventre  en  .ij.  moitiés  11  mi[s]t, 

Toute  plaine  sa  lance  l'abati  mort  souvi[n]. 
23oo  II  escrie  :  «  La  Roche  !  Chevalier,  ferez  i!  » 

La  peûst  on  veoir  .j.  estor  si  basti, 

Mainte  hanste  i  ot  frainteet  maint  escu  croissi, 

Tant  haubert  jaseran  rompu  et  desarti, 

Et  l'un  mort  desor  l'autre  trebuchier  et  morir, 
23o5  Le  sanc  et  la  cervele  a  la  terre  cheïr. 

Loorain  s'en  tornerent,  qui  nou  porent  soffrir, 

Et  li  duc  les  enchau[ce],  qui  ne  lor  fu  amis. 

.XL.  chevaliers  a  retenus  et  pris 

Et  .iiij".  vilains  des  meillors  du  païs  ; 
23 10  De  ci  que  a  La  Roche  les  a  menez  et  mis. 

2281  c.  ch.  cerremant  a  la  p.  tresmit.  —  2282  T.  d.  a  la  port 
1.  o.  b.  escernis;  corr.  T.  d.  a  la  posterne  (?)  —  2284  h.  forbis. 
—  2285  Et  ceindes.  —  2286  es,  ms.  a.  —  2287  1.  coul.  —  2288  Et 
prinsent  —  2289  a  hault  c.  —  2291  ne  prinrent.  —  2294  c.  pror- 
pin  —  2296  blocle  do.  —  2297  d.  li  rompit.  —  23o5  t.  chcor.  — 
33o6  Laorrain. 


86  DOOFf    DE    LA    RÔCHE 

De  ce  tieng  je  Doon  et  a  fol  et  a  bric 
Quant  nul  de  ces  perjurs  a  a  ra[a]nçon  tnis  : 
Mieus  les  eûst  fait  pendre  ou  ardoir  ou  boulir. 


LXX 

Or  s'en  repaire  Do  ou  chastel  de  La  Roche, 

23 1 5  Serjans  et  chevaliers  enmoinne  a  grâht  flote  ; 

Argent  et  raariçon  a  tnervoille  li  offrent.  (v^) 

Onc^tles  ne  tresfina  s'est  venus  à  La  Roche, 
Garder  fait  ses  prisons  en  Chartres  et  en  fosses. 
L.  escuiers  s'en  torne,  qui  a  espérons  broche, 

232oTomile  et  Malingre  va  noncier  la  parole. 
Sa  fille  demanda,  qui  ne  fu  mie  foie  : 
«  Que  firent  ores  d'Ais  H  baron  qui  sont  itostre  ? 
—  A  la  moie  foi,  dame,  màlement  se  deporte[nt], 
«  Car  desdu[i]s  de  puceles  ne  tables  nés  conforte. 

2325  «  Mardi  matin  nos  vint  sire  Do  de  La  Roche. 
«  Si  nos  mist  ses  agais  enz  ou  brul  de  Manoplé } 
«  Danz  Do  tios  [i]  ocist  Gilebert  et  Antoine, 
«  Asson  et  Gu[i]nemant  et  Raol  de  Vaudone, 
«  .XL.  chevaliers  :  li  maus  en  estgranz  nostres  ». 

233o  Quant  l'entendi  Totniles,  duel  ot  de  ses  paroles  : 
Il  a  mandé  ses  homes  par  vertU  et  par  forée  ; 
Oriques  iïe  ttésfiria  si  vinrent  a  la  Roche. 


LXXI 

Tomiles  et  Malingres  ont  mandé  lor  compaignes, 
Et  sont  .xl.  mile  as  haubers  et  àû  lâtlCes. 

2^11  bric,  tns.  bris  —  23 1 3  Mais.  —  23 16  et  arancon;  leur  offri- 
réîlt,  —  23i9  tornent.  —  2322  Q.  Font  oci.  —  2325  m.  vous  v.  — 
2327  ^'  '^ous  0.  —  233o  T.  grant  d.  —  233i  II  manda;  p.  ver> 
tus.  —  2333  companies, 


DOON    DE  LA   ROCHE  87 

2335  [S]i  sont  venu  a  Ais  en  Loeraigne  ensemble; 

Le  samedi  sejornent  deci  [que]  a  dimenge. 

Apres  le  vespre  montent  [a]  grant  mervoille  ensemble. 

Li  pères  et  li  fils  demoine[nt]  si  grant  tence; 

Venu  sont  a  La  Roche;  tuit  ensemble  descendent, 
2340  Puis  se  vont  adober  et  leur  armes  présentent; 

.C.  chevaliers  envoient  ou  chastel  endementre. 

Do  fu  contremontez  par  sa  grant  sapience, 

Et  a  dit  a  ses  hommes  :  «  Tenez  vos  tuit  ensemble  ; 

«  Veez  ci  [le]  cembel  :  l'agait  avrons  nos  sempres  » .  [f.  45) 


LXXII 

2345  Do  fu  contremontez  à  sa  grant  o[s]t  bannie, 
A  .vi)<:.  chevaliers  qu'il  avoit  en  baillie  ; 
Li  cembels  s'en  torna,  s'ont  la  barre  guerpie, 
Ë  dus  Do  lès  enchauce  com  chevaliers  nobile  ; 
De  ci  qu'a  .iii).  lieues  de  l'abatre  ne  fine. 

235o  Tomiles  lor  sailli  d'une  grant  bruil[le]  antive, 

Ensemble  o  lui  ses  niés,  li  [faus]  envers  Malingre  ; 
La  peiissiez  veoir  .j.  estor  a  délivre. 
La  ot  tant  éscu  fraîrit,  tante  lance  ffesnîtiej 
Tant  gentil  chevalier  abàtU  mort  sans  vie. 

2355  «  Seignor»,  dist  li  dus  Do,  «vez  là  force  plus  fiche. 
«  Damedieus,  se  lui  plait,  me  venge  de  Tomile  !  » 
La  n'ot  onques  parlé  [de]  joer  ne  de  rire, 
Ne  d'eschas  ne  de  tables  ne  déport  de  meschine  ; 
Qui  mieus  puet,  si  s'en  vait,  n'i  atent  seignorie. 


2336  sejornerent.  —  2338  g.  tante  —  2840  1.  a.  prenent.  —  2341 
c.  àvoiént;  en  demantèr.  —  2345  o.  batime.  —  2353  fresnine, 
mi.  ffazine. —  2354  vie,  ms.  mes.—  2357  p.  joier.  —2359  ma- 
tant s. 


88  DOON   DE   LA   ROCHE 


LXXIII 

236o  Molt  fu  grant  la  bataille  [et]  merveillose  et  pesme; 
La  gent  Doon  se  traient  es  larris  et  es  terres 
Et  navrent  ces  chevaus  et  ocïent  et  versent. 
Es  vos  Doon  poignant  parmi  la  greignor  presse, 
Et  a  brandi  [la]  lance  a  trenchant  alemele, 

2365  Et  va  ferir  Tomile,  que  il  haioit  a  certes  : 
Sa  lance  li  conduit  lez  le  costé  senestre; 
Empoint  le  par  vertu,  si  le  trabuche  a  terre, 
Puis  a  traite  l'espée  de  son  costé  senestre, 
Ocire  vot  Tomile,  que  il  haioit  acerte[s], 

2370  Quant  li  baron  i  corent,  qui  faire  ne  le  la[i]ssent, 
A  cheval  le  remonte[nt]  li  homme  de  sa  terre.       (v") 
Tomiles  s'en  foi  a  Ais  a  la  chapele, 
Et  Malingres  li  fels  ad  Espire  la  bêle. 
Et  dus  Do  s'en  repaire  a  sa  mesnie  bêle; 

2375  Entreci  qu'a  La  Roche  ne  fine  ne  [ne]  cesse. 
Tomiles  et  Malingres  s'en  enragent  et  desvent  : 
Il  remande[nt]  lor  hommes  a  force  et  a  poe[s]te. 

LXXIV 

Lor  homes  ont  mandez  Tomiles  et  Malingres; 
Il  sont  sor  les  destriers  monté  .xl.  mile. 
238o  Or  asaudront  La  Roche  et  sa  gent  la  hardie. 

L'endemain  par  som  l'aube  tienent  la  vile  asise; 
Do  et  Joffroiz  s'en  issent,  chascun  jor  i  ocïent, 
Do  les  conquesist  bien,  ne  vos  me[n]tirai  mie, 

236o  pesme,  ms.  peniue.  —  236i  se  retraient  es  larcis  —  2363 
Doz  p.;  la,  ms.  les.  —  2364  brandi,  ms.  brandie.  —  2365  q.  il 
cheoit  a  terre;  cf.  v.  236g.  —  2367  Au  point  la  pervertus. — 
2373  fels,  ms.  fele.  —  2378-2379  T.  et  M.  o.  1.  h.  m.,  Il  s.  .xl.  mi. 
s.  1.  d.  mo.  —  238i  par  sou2  l'a,  treuvent.  —  2382  j.  si  o,  — 
3383  1,  conquerit, 


DOON    DE   LA    ROCHE  89 

Quant  vint  Pcpin[s]  de  France  a  sa  grant  ost  banie. 
2385  En  Lo[e]roigne  en  entre  nostre  emperere  riches, 

Etaquiert  les  chastiaus  [et]  les  bours  et  les  viles. 

Il  estvenuz  en  l'ost  dant  Tomile  et  Malingre; 

Ce  fu  par  une  nuit,  la  gent  fu  endormie; 

Ja  les  ont  bien  rateins,  d'ambepart  lor  escrïent. 
2390  La  peiissiez  veoir  bataille  si  fornie 

Qu'il  i  ot  bien  des  morz,  mien  esciant,  .x".  ; 

Lor  père  ne  lor  mères  onques  puis  ne  les  virent, 

Ne  de  confession  ne  orent  il  aine  mie. 

Tomiles  s'en  foi  a  Maience  la  riche, 
2395  Et  li  rois  repaira  endroit  ore  de  prime, 

Et  ses  riches  barnez  et  sa  grant  compaignie, 

Et  asaillent  La  Roche  par  molt  grant  seignorie, 

La  ot  tant  targes  frainte[s],  qui  si  bien  [sont]  florie[s],  {f.46) 

Tant  gentilz  chevaliers,  qui  gisent  mort  sans  vie  ! 
2400  Assez  en  petit  d'ore  orent  La  Roche  prise. 

Do  et  Jofroiz  mal  virent  a  estros  dame  Olive, 

Car  il  ne  gardent  [l'ore]  que  il  perdent  la  vie. 

Mais  Pépins  Temperere  n'ot  cure  des  ocire, 

Ainçois  lor  fait  )ure[r]  desus  sain[te]s  reliques 
2405  Qu'e[n]  trestote  lor  terre  ne  remanront  il  mie. 

Or  s'en  va  li  dus  Do  corociez  et  plain[s]  d'ire, 

Il  et  Jofroiz  ses  niés,  que  il  aime  et  prise, 

Car  cil  a  [si]  bon  cuer  que  ne  li  faudra  mie. 
Cil  autre  jugleor  qui  de  Doon  vos  dient 
2410  Assez  en  ont  chanté,  mais  il  ne  sevent  mie, . . 

La  ou  il  la  vos  laissent  la  vos  a[i]  rafichie; 

Je  ramenrai  Landri,  mais  ne  vos  anuit  mie. 


2387  dant,  ms.  danz.  —  2391  n'i  ot.  —  2393  ne  orent,  ms.  ne 
oit  ou  ueoit.  —  2396  barnez,  ms.  barons.  —  2398  qui,  ms.  et. 
—  2402  Ca'r  il  ne  g.  que  leur  qu'il  p.  —  2403  des,  ms.  del.  — 
2405  Que  t.  —  2410  II  faut  admettre  après  ce  vers  un  vers 
perdu,  où  il  était  question  d'histoire  ou  de  chanson,  autrement 
la,  daus  le  vçrs  suivant,  ne  se  rapporte  à  rien. 


90  DOON   DE   LA   ROCHE 

Of  s'en  va  li  dus  Do  corociez  et  plein[s]  d'ire; 

A  poine  et  a  travail  vinrent  en  Honguerie. 
241 5  La  ont  trové  le  roi  de  molt  grant  seignorie  ; 

S'a  retenus  les  contes  par  force  et  par  aïe. 

Car  ne  le  sait  Landris  !  n'eûst  talent  de  rire. 

Par  tens  verra  son  père,  que  il  aime  et  prise; 

Granz  cos  se  donneront  en  champ  par  a[a]tie, 
2420  Ne  s'entreconoiss[oi]ent,  car  pieça  ne  se  virent. 


LXXV 

Li  rois  de  Honguerie  fist  forment  a  prisier, 
Et  ot  a  non  Dorâmes,  molt  fu  bons  chevaliers. 
Gostantinoble  claime,  siene  en  fu  la  moitié. 
Ce  fu  droiz  et  mesure,  car  [tel]  part  li  afiert. 

2425  II  a  mandé  ses  hommes,  si  retint  chevaliers,  (v°) 

Ensemble  o  eus  Doon  et  Jofroi  le  guerrier. 
Sor  la  rivé  de  Hongre  sont  Hongre  herbergié, 
Et  jurent  Damedieu,  le  glorios  du  ciel, 
Tresqu'a  Costantinoble  ne  [lor]  laira  il  riens, 

2430  De  proie,  d'autre  chose,  vaillant  .iiij.  deniers. 

A  tant  es  vos  .j.  mes  sor  .j.  cofrànt  destrier  ; 
Et  fu  parmi  le  cors  d'un  grant  espié  plaies. 
A  haute  voie  escrie  :  «  Emperieres,  oiez! 
«  Dorâmes  vostre  niés  [s'Jest  bien  de  vos  vengiez; 
2435  a  Sor  la  rive  de  Hongre  sont  si  homme  logié, 
«  Et  jure  Damedieu,  [le  glorios]  du  ciel, 
«  Tresqu'a  Costantinoble  ne  vos  laira  il  riens, 


2419  G.  c.  se  donnarent  en  bataille  p.  a.  —  2424  Seigneurs  ce 
fu  d.  —  2427  S.  l'aigue  de  Hoguerie;  cf.  v.  2435  —  2429-30  cf. 
243  j-8  et  2450-1.  —  2430-2431  Entre  ces  deux  vers  il  faut  ad- 
mettre une  lacune  :  on  est  brusquement  transporté  à  Constanti- 
nople.  —  2434  vengiez,  ms.  rangiez  ;  cf.  v.  244J. 


DOON   DE   LA   ROCHE  9* 

«  De  proie,  d'autre  chose,  vaillant  .iiij.  deniers.  » 

Salmadrine  la  bêle  en  a  oï  plaidier; 
2440  Bien  poez  dire  et  croire  son  cuer  en  ot  irié. 

Venue  est  â  Landri,  ou  se  devoit  chaucier; 

Si  li  baisa  la  boche,  le  genol  et  le  pié,^ 

Bel  et  cortoisement  l'en  prîst  a  aresnier  : 

«  Sire  Landris  de  France,  molt  es  boins  chevaliers, 
2445  «  De  tote  nostre  guerre  es  tu  venus  a  chief, 

«  Ne  ma[i]s  que  d'une  seule,  mais  ele  est  molt  grief. 

«  Bien  se  venge  de  nos  Dorâmes,  nostre  niés  : 

«  Il  a  mandé  ses  hommes  ;  si  retient  chevalier[s] 

«  Et  jure  Damedieu,  le  glorios  du  ciel, 
2450  «  Tresqu'a  Costantinoble  ne  nos  laira  il  riens 

«  De  proie,  d'autre  chose,  vaillant  .iiij.  deniers.        {f'47) 

—  Bêle,  ce  dist  Landris,  «  ester  car  me  laissiez  : 

«  Je  les  sai  si  coarz,  si  mauvais  et  laniers, 

ft  Or  ne  cuit  nul  en  champ  encontrer  ne  bailler.  » 
2455  Atant  es  vos  .j.  mes  sur  .j.  corrant  destrier, 

Et  fu  parmi  le  cors  navrez  d'un  roit  espié, 

Et  monta  ou  palais  ;  ne  se  vot  atargier  ; 

Ll  sdns  vermeus  li  raie  [et]  davant  et  darier. 

A  haute  vois  s'escrie  :  «  Empereres,  oiez...  » 
2460  Et  quant  l'entent  Landris,  a  poi  n'est  enragiez.        \ 

A  haute  vois  escrie  :  «  Armez  vos,  chevalier!  » 

Et  cil  li  respondirent  :  «  Com  vos  plaira  si  [i]ert.  » 

Lors  s'adobent  ensemble  li  noble  chevalief , 

Et  vestent  les  haubers,  lacent  heaumes  vergiez 
2465  Et  ceignent  les  espées  a[u]  poing  d'of  entaillié 

Et  pendent  â  leur  cols  les  escuz  de  cartier 


2439  o.  plaidoier.  —  2440  irié,  ms.  iriés.  —  2446  Ne  m.  ques  ; 
m.  griefve.  —  2447  ^^  vous,  votre  n.  —  2449  le,  ms.  dou  lê.  — 
i45o  Vous  1.  —  2453  sai,  ms.  sauz  (ou  sanz);  et  si  m.  —  2454 
champ,  ms.  chant.  —  2456  espié,  ms.  espiés.  —  2458  dàrier,  Jtis. 
dariere.  —  2459  h.  v.  fescrié.  Il  est  probable  qu'il  y  à  une  lacune 
après  ce  vers,  cf.  v.  2434  et  suiv.  —  2460  n'est,  ms.  n'a.  -^  2464 
vergiez  ms.  vergiers.  —  2465  ceignent,  ms.  ceindent. 


92  DOON    DE   LA  ROCHE 

Et  prenent  en  lor  poing  les  rois  trancha[n]z  espiez, 
A  .vij.  clous  de  fin  or  les  confenons  laciez, 
Et  montent  es  chevaus  arabis  et  corsiers, 

2470  Et  sont  .xl™.  armé  sor  les  destriers  ; 

Et  Landris  les  conduit,  li  cortois  et  li  fiers, 

Li  niés  le  roi  de  France,  [qui  molt  fist  a  prisier]. 

De  ci  qu'a  l'oste  ne  firent  la  rue  atargier  ;' 

La  s'atiengnent  ensemble  com  vaillant  chevalier 

2475  (Il  broche  l'aragon  des  espérons  d'ormier) 
Grans  cos  se  vont  doner  es  escuz  de  cartier, 
De  sor  les  bocles  d'or  les  ont  frains  et  perciez, 
Les  haubers  jazerans  rompuz  et  desmailliez.         (v°) 
La  peûssiez  veoir  .j.  abateïs  fier, 

2480  Le  sanc  et  la  cervele  contre  terre  ra[i]er 

Et  l'un  mort  desor  l'autre  verser  et  trebuchier. 
Atant  es  vos  Landri  armé  sor  .j,  destrier  : 
Il  broche  [le]  cheval  des  espérons  d'ormier, 
Sor  l'escu  de  son  col  ala  ferir  Garnier  : 

2485  Desor  la  bocle  d'or  li  a  fraint  et  percié 

Et  l'aubert  de  son  dos  rompu  et  desmaillié, 
Le  cuer  qu'il  ot  ou  ventre  li  a  par  mi  trenchié; 
Puis  escria  et  broche  :  «  Ferez  i,  chevalier!  » 
Et  il  si  firent  sempres  ;  ne  s'i  vont  atargier. 


LXXVI 

2490  Molt  fu  grant  la  mellée  la  ou  cil  ost  s'assemble 
Et  d'une  part  et  d'autre  fu  la  perde  molt  grande. 
La  ot  tant  hante  fraite  et  route  targe  tante, 

2469  a.  et  coreciés  —  2472  vers  incomplet  dans  le  ms.  —  2473 
sic  ms.,  altéré;  corr.  De  ci  que  a  la  rive  ne  firent  a.  (?);  cf.  v. 
242^,  2435.  —  2475  des  e.  et  des  pies.  —  2486  rot  et  d.  —  2488 
broche,  ms.  broiche,  altéré  ?  —  2490  La  ou  cil  o.  ansemblet 
f.  m.  g.  la  m.  —  2491  fut  m.  g.  la  p.  —  2492  h.  frainte  et  tante 
targe  route. 


DOON   DÉ   LA   ilOCHE  9$' 

Tant  gentilz  chevaliers  gisent  mort  en  la  lande. 

Très  par  mi  leu  dou  champ  vint  li  rois  Alixandre; 
2495  A  haute  vois  escrie  :  «  Ou  es  alez,  Dorâmes, 

«  Li  filz  de  ma  seror,  qui  chalonges  mon  reigne  ? 

«  Demain  seras  penduz,  se  as  main[s]  te  puis  prendre.  » 

Quant  cil  l'a  entendu,  a  po  que  ne  forsane; 

Il  crie  a  haute  vois,  si  que  trestuit  l'entendent  : 
2  5oo  «  La  terre  vos  chalonge  et  trestot  le  reaime.  » 

Quant  l'entendi  li  rois,  a  po  que  ne  forsane  ; 

Il  broche  le  cheval  des  espérons  qui  trenchent  : 

Li  oncles  et  li  niés  de  l'esperoner  pensent; 

Sor  les  escuz  se  douent  si  granz  [cops]  des  lances 
25o5  Desor  les  bocles  d'or  les  peçoient  et  fendent.  (/.  4^) 

'"'i       Li  haubert  sont  si  fort  n'en  porent  rompre  maille. 

Totes  plaines  lor  lances  s'entrabatent  ensemble. 

Il  resaillent  en  piez  com  nobile  châtaigne, 

Et  sachent  les  espées  dont  li  coltel  bien  trenchent. 
25 10  Granz  cos  se  vont  doner  sor  les  heaumes  a  tente  ; 

Les  pieres  et  les  flo[r]s  en  font  aval  descendre. 

Li  niés  l'oncle  vainquist,  ja  n'i  eiist  desfence  ; 

Atant  es  vos  Landri,  s'ot  bris[i]ée  sa  lance. 

Ou  qu'il  voit  son  seignor,  a  lui  aidier  s'avance, 
25 1 5  II  tint  traite  l'espée  tote  nue  sanglante; 

Va  ferir  le  gloton  sor  l'iaume  de  Plaisance, 
«    Que  les  flors  et  les  pieres  contreval  en  cravante, 

Que  tôt  l'a  estoné,  et  li  gloz  s'espoente. 

Il  va  crier  merci  et  Landris  le  va  prendre  ; 
2520  Parmi  le  nasel  d'or  son  seignor  le  présente. 


2493  gisent,  ms.  gisant.  —  2494  champ,  ms.  chans.  — 
2493  est  a.  —  2497  m.  tu  p.  p.  —  2498  que,  ms.  qui.  — 
25oo  Je  V.  ch.  la  t.  —  2504  Vers  trop  court;  Corr.  sj 
ruistes  [cops]  des  l.(?)  —  25o5  I.  perçoient;  —  2507  Toute  plaine 
lour  lance  s'entrebatent  e.  —  25o8  châtaigne,  ms.  chadonne. 
—  25io  a  tente,  ms.  atante;  leçon  douteuse.  —  25i2  Li  n.  v.  Vo.) 
daffance.  —  25 18  Qui. 


94  DOQN   DE   lA   ROCHE 


L  XXVII 


Quant  Dorâmes  fu  pris,  la  bataille  est  finée, 
Li  Hongre  s'en  fuirent  [tôt]  contreval  la  prée, 
Ne  mais  que  .m.  chaitif  qui  en  l'estor  remestrent  : 
Do  et  Jofroiz  les  tindrent  as  trenchanz  des  espées. 

2525  Se  tel  fuissient  ii  Hongre,  mar  i  fu[s]t  la  meslée. 
Cil  de  Constantinoble  l'eussent  comparé[e]. 
Atant  es  vos  Landri,  sa  lance  [a]  recovrée, 
Il  broche  son  cheval  et  vait  ferir  son  père  : 
L'escu  li  a  percié  et  la  broigne  faussée, 

253o  Ou  cors  li  mi[s]t  la  lance,  si  l'abat  en  la  prée. 

Celé  part  vint  [corant],  si  a  traite  l'espée,  (v®) 

Ja  eûst  voirement  pris  la  teste  son  père, 
Quant  li  dus  li  cria  :.  «  Ne  me  tochiez,  beaus  frère  ! 
«  Soudoie[r]s  sui  chaitis  de  moût  longe  contrée; 

2535  «  Qu'avéras  gaaingnié?  je  n'ai  d'avoir  denrée.  >) 
Quant  l'entendi  Landris,  s'a  la  color  muée  : 
Grant  pitié  en  a  pris,  [s']a  restoié  l'espée. 
Par  le  nasel  du  heaume  ala  penre  son  père, 
Si  le  rendi  le  roi  ;  ce  est  chose  provée. 


LXXVIII  I 

2540  Quant  li  dus  Dos  fu  pris,  lors  fu  li  chans  fine[z] 
Et  Asse  et  Guinemanz  ont  Jofroi  remené  ; 
Et  li  niés  et  li  oncles  furent  forment  pené 


—  2524  as,  ms.  es.  —  2525  mar  i,  ms.  mari  {en  un  mot),  —  25a6 
l'e.  comparer.  —  2529  a  percier;  çourgne  faulcer  —  253o  cors, 
ms.  coz  ;  lance,  ms.  lanor.  —  2532  Ja  e.  p.  v.  la  t.  de  ?.  p.  — 
2534  moût,  ms.  mon. —  2535  a.  gaingnier;  d'à;  danrées.  —  2536 
Q.  l'antant  L.  —  2537  restoié,  ms.  ratoié.  —  2538  nasel,  ms.  vaisel 
—  2539  tandi  le  r. 


DOON    DE   LA   ROCHE  9$ 

Et  furent  enz  es  cors  [moût]  plaie  et  navré. 

Il  retornent  ariere  en  la  bone  cité  ; 
2545  Moût  fu  granz  li  eschas  que  il  ont  conquesté. 

Enz  en  parfonde  chart[r]e  les  fist  li  rois  geter, 

Et  .iiijxx.  des  autres,  car  il  furent  conté; 

Il  i  furent  .vij.  ans,  trop  i  ont  conversé  ; 

Do  [en]  ot  toz  porriz  les  flans  et  les  costez. 
25 5o  Or  vos  lairons  de  ce[u]s  ;  mar  lor  est  encontre  ! 

Et  vos  dirons  d'Olive,  qui  ariere  remest, 

Qui  tant  a  les  noveles  enquis  et  demandé 

Par  quoi  ses  sire  Do  est  du  pais  getez  ; 

A  l'evesque  tantost  l'ala  dire  et  conter. 


LXXIX 

2555  La  suer  a[u]  roi  de  France  est  ariere  remese, 
Avec  le  bon  evesque  qui  tant  [l'ot]  honorée  ; 
Ele  vint  du  moustie[r],  s'a  la  messe  escotée. 
Et  li  per  de  La  Roche  o[n]t  la  mer  [tresjpassée  (/".  4g) 

Bien  a  passé  .vij.  ans  qu'il  Tavoient  outrée, 

256o  Ainçois  que  la  duchesse  fu[s]t  de  pechié  retée 
Et  dou  duc  d'Alemaingne  partie  et  desevrée. 
Quant  il  virent  la  dame,  sur  les  murs  s'aresterent. 
Desouz  les  esclavines  ont  les  paumes  botées  ; 
Molt  se  sont  merveillié,  s'ont  les  coleur[s]  muées 

2565  Et  dient  run[s]  a  l'autre  :  «  No  dame  avons  trovëe  : 
«  C'est  Olive  la  bêle,  qui  de  France  fu  née.  » 
Ainz  ne  s'en  dona  garde  la  duche[sse]   honorée  ; 
Si  la  tienent  as  poinz  de  la  manche  froncée, 
Parfondement  l'enclinent  ;  par  non  l'ont  apelée  : 

2570  «  Duchese  de  bone  aire  vos  soiez  bien  trovée  ! 


2545  fu,  ms.  mit.  —  2549  costez,  ms.  costel.  —  2556  Ensemble 
a  b,  e,  —  2558  li  père;  la  mère.  —  256o  retée, ot5.  restée.  —  256i 
A.  fu  p.  —  2563  pauuces  b.  —  2565  Nos  d.  —  2569  l'o.  enclin  a. 


96  DOON   DE   LA   ROCHE 

—  Baron  )),dist  la  duchesse,  «  vostre  arme  soit  salvée. 
«  Dont  estes,  de  quel  terre  et  dont  est[es  vos]  née?  » 

—  En  la  moie  foi,  dame,  de  la  vostre  contrée  ; 
«  Nos  servîmes  es  noces  ou  tu  fus  esposée, 

2575  «  Quant  tu  fus  de  Doon,  nostre  duc,  mariée. 
«  Ou  est  remés  11  dus  ?  qui  vos  a  desevrée  ?  » 
Quant  l'entend!  la  dame,  s'est  cheûte  pasmée. 
Li  .iii).  pèlerin  par  les  bras  l'ont  levée  ; 
Ele  lor  a  sa  honte  et  sa  perte  contée, 

258o  Cornent  li  fel  Tomiles  l'a  a  tort  démenée. 
Et  Audegou[r]  sa  fille  a  a[l]  duc  mariée. 
Et  que  ne  set  noveI[e.s]  ne  del  fil  ne  del  père. 
Quant  li  per  [l'jentendirent,  de  pitié  em  plorerent; 
Desur  saintes  reliques  tuit  ensemble  jurèrent 

2585  Qu'il  li  rendront  sa  terre  et  tote  sa  contrée 
Ne  la  fille  Tomile  n'ert  ja  par  lor  amée. 
Quant  l'entent  la  duchesse,  grant  joie  en  a  menée. 
«  Nièce  »,dist  li  evesques,  «  franche  dame  honorée, 
«  Cil  .iiij.  baron  sont  de  la  vostre  contrée. 

2590  «  Et  si  ont  devant  moi  vostre  honor  bien  jurée, 
«  Et  si  la  vous  rendront,  ja  n'en  ert  trestornée. 
«  Quant  vos  avrez  La  Roche  et  tote  la  contrée, 
«  Nièce  »,  dist  li  evesques,  «  ne  soiez  esgarée  : 
«  Tenez  large  mesnie,  donez  larges  sodée[s], 

2595  «  Car  par  ce  serez  vos  servie  et  honorée.  » 

D'or  en  avant  commence  de  la  [ruiste]  meslée... 
De  la  fiere  venjance  que  il  fist  de  sa  mère 
Et  geta  de  la  chartre  le  duc  Doon  son  père 
Et  jura  Salmadrine,  la  fil[l]e  l'emperere, 

2600  Et  ensembla  la  gent  qui  de  Pu[il]Ie  fu  née, 
Tosquanz  et 'Genevois  et  ce[l]s  de  Valfondée  : 


2572  et  de  q.  t.;  d.  est  nez.  Altéré.  —  2573  Et  en.  —  2582 
des  f.  —  2583  li  père.  —  2591  la  v.  randrons.  —  2594  1.  mainie. 
—  2596  Après  ce  vers,  il  doit  manquer  un  vers  où  Landri  était 
nommée  —  2601  Torquanz. 


DOON    DE    LA    ROCHE  9^ 

Par  ce[l]s  fu  Alemaine  conquise  et  aquitée 
Et  Tomiles  destruiz  et  sa  fille  afolée. 


LXXX 

Baron,  c'est  vérité,  sachiez  a  escient, 
2605  Li  hom,  puisqu'il  faut  l'autre,  ne[i]  doit  traire  a  garant, 

Ne  cil  celui  [que]  hait,  se  sa  honte  consent. 

Qui  que  prisa  Pépin,  Landris  le  tint  por  lent, 

Qui  lui  et  la  duchesse  failli  vilainement 

Et  prist  du  iraitor  son  or  et  son  argent  ; 
2610  Perdue  eiist  puis  France,  que  Landris  [la]  li  rent. 

Li  valiez  s'en  issi  jovene  [tôt]  povrement, 

O  lui  .V.  chevaliers  qui  furent  si  parent; 

Il  n'ot  pas  [ceint]  l'espée,  mais  a  son  col  la  pent;  (/".  5o) 

Jusqu'à  Constantinoble  ne  prist  arestement. 
2615  La  li  dona  li  rois  armes  et  garnemenz  ; 

Cil  ot  non  Alixandre,  cui  Grifonie  apent, 

Dont  la  geste  Tomile  chai  puis  en  torment. 

Li  rois  ot  .j.  guerre  qui  l'angoisse  et  sorprent, 

De  son  nevo  Dorame  qui  s'onor  li  deffent; 
2620  Landris  le  prist  [par  force]  et  desconfi[s]t  sa  gent 

Et  rendi  l'emperere  par  le  nasel  d'argent, 

Et  son  père  le  duc  prist  il  v[e]raiement 

Qu'estoit  au  roi  Dorame  remés  novelement 

Par  le  félon  Tomile  qui  s'anor  li  desfent. 
2625  Li  dus  ala  en  France  ;  mauvais  secours  i  prent  : 

Pepin[s]  l'i  desfia  se  Olive  ne  li  rent. 

Tant  chevaucha  li  dus  qu'a  Dorame  se  prent; 

Landris  le  prist  [par  force]  par  son  grant  hardement, 


2607  L.  le  tient.  —  2609  prist,  ms.  print.  —  2612  ces  parans. 
—  2613  l'espee,  ms.  espées.  Cf.  v.  1086.  —  2616  Grifoine.  —  2621 
Ce  Landri  l'ampereres  per  le  noel  d'à.  —  2623  Dorâmes.  —  2624 
q.  sa  uoi;  cf.  v.  261  g. 


9^^  DOON    DE   LA   ROCHE 

Mais  il  nel  conut  mie,  si  en  fu  plus  dolenz; 

263o  .VII.  anz  et  .iiij.  mois  i  sofri  le  torment. 
Cil  qui  le  prist  par  force  le  regreta  sovent 
Et  Olive  sa  mère  dont  novele  n'entent. 
Par  la  terre  Alixandre  fist  Landris  son  talent, 
Li  rois  ot  une  fille  qui  molt  ot  le  cors  gent  ; 

2035  De  l'amistié  Landri  se  desdu[i]t  et  esprent, 
Son  servise  li  offre  par  sa  boche  sovent. 
Mais  li  valiez  fu  sage[s]  [et  preuz]  et  de  bon  sens 
Ne  feïst  le  roi  honte  por  or  ne  por  argent  ; 
De  sa  mère  et  del  duc  li  remembre  sovent. 


LXXXI 

2640  Landris  qui  fu  de  France  ama  molt  Salmadrine;  (v" 

Se  li  rois  li  dona[st],  volentiers  Teûst  prise. 

.1.  nuit  fu  li  enfes  a  mesnie  escherie, 

O  ses  .V.  compaignons  de  France  la  garnie; 

Por  l'amor  de  l'enfant  ont  lor  terres  guerpie[s]. 
2645  De  la  honte  li  membre  que  li  a  faitTomiles; 

Li  ber  plore  des  ieus  et  de  son  cuer  sospire. 

Dit  Guinemanz  ses  maistres  :  «  Que  nos  demandez,  sire  ? 

—  Baron,  »  ce  dit  H  enfes,  «  je  ai  au  cuer  grant  ire  : 

<»  Tomiles  a  ma  mère  vergondée  et  honie 
265o  «  Et  del  duc  d'Alemaigne  desevrée  et  partie, 

«  Et  quant  je  sui  chaitis  et  ma  mère  chaitive, 

«  Li  dus  est  hors  de  France,  ja  ne  le  verrai  mie, 

«  Et  ma  mère,  la  lasse  I  estranglée  et  murtrie, 

«  Et  Pépins  m'a  failli  :  ja  n'e[n]  avrai  aïe  ; 
2655  «  Etli  malvais  Iignage[s]  a  ma  terre  saisie  : 

«  Perduz  ai  les  honor[s]  de  Gormaise  et  d'Espire, 


2629  il  ne  le,  fut  le  p.  —  3535  a.  de  L.  —  2637  saige  et  de  b. 
sanc.  —  2038  f.  li  r.  —  2642  miennie.  —  2645  qui  li.  —  2646  de  ces 
i.  —  2647  maistres,  ms.  mâuués;  cf.  v.  265g.  —  a65o  del,  ms.  des. 


DOON    DE   LA  ROCHE  99 

«  Le  chastel  de  La  Roche  et  Coloigne  la  riche; 

«  Certes,  quant  m'en  remembre,  ne  puis  joer  ne  rire». 

Dist  Guinemanz  ses  mai[s]tres  :  «  Ne  vos  esmaiez  mie. 
2660  «  Pris  es[t]  Il  rois  Dorâmes  et  conquis  Montervile 

a  Et  li  .iiij.  baron  qui  les  granz  maus  vos  firent. 

«  Hé  !  Deu,  se  il  [i]  muèrent,  com  mar  virent  lor  vies  ! 

«  Et  li  rois  Alixandres  a  sa  grant  terre  quite. 

«  Hé!  ber,  car  pren  congié  au  roi  et  a  sa  fil[l]e  ; 
2665  «  Râlons  nos  en  [arrière],  a  la  Pasque  florie, 

«  Pour  veoir  le  lignage  qui  nos  pères  traïrent.  [f.  5i) 

«  Hé  !  ber,  se  ne  te  venges,  ta  proesce  est  fa[il]lie. 

«  Se  tu  trueves  le  roi,  de  t*amor  le  desfie. 

—  Mai[s]tre  »,  ce  dist  li  enfes,  «  f[e]el  conseil  me  dites  : 
2670  «  Se  Pepin[s]  ne  m'aie,  de  m'amisté  n'a  mie  ». 

.1.  vaillanz  escuiers  a  la  parole  oie  ; 
Cil  est  a  son  hostel,  mais  ne  le  sevent  mie. 
De  ci  que  ou  palais  ne  cesse  ne  ne  fine, 
Et  trueve  Alixandre  ou  par[o]le  a  sa  fille  ; 
2675  Devant  lui  s'agenoille,  si  li  commence  a  dire  : 

«  E[n]  nom  Deu,  emperere,  or  vos  croi[s]t  poine  et  ire  : 
-   «  Du  damoisiel  de  France  n'avrez  jamais  aïe. 
«  Li  ber  s'e[n]  vuet  aler,  et  ses  maistre  l'otrie. 

—  Amis  »,  dist  l'emperiere,  «  ce  que  est  que  vos  dites  ? 
2680  «  Li  damoisiaus  de  France  a  m'anor  en  baillie, 

V  Tote  Constantinoble,  Monbardon  et  Vaillie  ; 
«  Si  m'a  conquis  Dorame  et  ma  guerre  finie; 
«  Et,  s'il  s'en  vuet  aler,  bêle  ert  la  départie  : 
«  Je  li  ferai  merir  sa  poine  et  son  servise  ; 
2685  «  Tant  lidonra[i]  avoir,  tôt  son  vivant  ert  riches  ». 
Quant  l'entent  la  pucele,  s'est  miiée  et  vertie  : 
«  Sire  rois  Alixandre,  ce  que  est  que  vos  dites? 
a  Ja  ne  m'a  pas  Landris  jurée  ne  plevie 


2660  c.  Monteruule,  cf.  v.  2848.  —  2661  li,  ms>  les.  —  2662 
cotne  m.  V.  1.  nies.  —  2664  prens.  —  2675  si,  ms.  ci.  —  2679 
Ains  ce  d.  —  2680  m'amor  en  b.  —  2684  m.  ses  poines. 


100  DOÔN    DE   LA   ROCHE 

«  Ne  livrez  ses  ostages,  ne  point  ne  sui  je  fie.  » 
2690  —  Fil[l]e,  «  dist  l'emperere,  «  ne  soiez  si  hastive; 
«  Li  ber  a  molt  grant  sens  avec  chevalerie  ; 
«  Si  a  dedanz  son  cuer  .j.  venjance  prise.  (v°) 

«  Mais  or  pl[e]ûst  a  Deu,  le  fil  sainte  Marie, 
«  Qu'il  eust  toute  France  forjurée  et  guerpie  : 
2695  «  Certes,  je  li  donroie  de  m'anor  grant  partie  ». 
Li  rois  s'en  va  couchie[r]  en  sa  chambre  garnie, 
De  ci  qu'a  mie  nuit,  que  sonent  les  matines  ; 
L'empereres  i  va,  o  lui  grant  compaignie 
Des  barons  de  sa  terre,  qui  son  règne  jostisent  ; 
2700  Davant  lui  fait  po[r]tcr  [les]  granz  cierges  de  cire, 
En  .j.  crote  [en]  entre  davant  Sainte  Sofie  ; 
Souvent  reclame  Deu,  le  fil  sainte  Marie. 
Et  la  fille  le  roi  ne  fu  pas  endormie, 
Ainz  se  leva  en  piez,  seule  sanz  compaignie, 
2705  Si  sainglement,  sanz  dras,  c'onques  n'i  ot  chemise, 

Mais  ele  [s']afubla  d'un  mantelet  d'ermine  ; 

Venue  est  en  la  chambre  ou  cil  de  France  gisent,   : 

Le  lit  a  son  ami  ne  meschoisira  mie, 

Car  du  franc  chevalier  ot  la  parole  oie. 
2710  De  Landri  qui  s'en  va  est  dolante  et  pensive  ; 

Entre  lui  e  l'esponde  s'est  mucie  et  glacie  ; 

Quatre  fois  le  baisa  ainz  qu'ele  mot  li  die.         : -u^: 

Li  vassaus  s'esvoilla,  s'a  la  dame  sentie, 

Trova  ces  mameletes  gisant  sor  sa  poitrine; 
27 1 5  Dures  sont  et  noveles,  encor  ne  sont  blemie[s]. 

Es  vos  la  char  l'enfant  si  d'amisté  sousprise 

Que  li  tremble  li  cors  com  foille  qui  balie  ; 

[Ainz]  mais  de  famé  en  terre  n'ot  itel  compaignie.   (/.  5a) 

2689  as  o.  -  2695  de  m'aver.  -  2696  Li  .j.;  ch.  parmie^  -  2698 
LeLpereur.  -  .700  des  cires.  -  .704  A.  U  - '-^7o6  afub  a 
tns.  afluua.  -  2707  cil,  ms.  so.  -  2708  mesches.ra  n^-  -  ^71  = 
le,  ms.  la.  -  2713  li  v.  s'avoilla.  -  2716  sourprist.  -  2717  se, 
corne  f.  q.  baillie. 


DOON   DE  LA  ROCHE  lOI 

Il  li  a  demandé  :  «  Qui  estes  vos,  meschine? 
2720  «  Je  te  conjur  ta  loi  et  [tres]tot  ton  batisme. 

—  Sire  »,  dist  la  pucele,  «  j'ai  a  non  Salmadrine, 
«  Et  sui  fille  Alixandre  le  roi  de  Griffonie, 

«  Qui  tient  Gonstantinoble,  Monbardon  et  Valie. 
«  Que  vos  en  mentiroie  ?  je  sui  la  vostre  amie. 
2725  «  Tes  talenz  en  puez  faire,  que  que  nus  bons  en  die. 
«  Se  je  muer  par  amor,  m'arme  en  ert  garie. 

—  Dame,  »  dist  li  valez,  «  ce  que  est  que  vos  dites  ? 
«  Certes  m'amor  m'avez  afïée  et  plevie. 

«  Ja  set  bien  toz  li  monz,  tis  pères  es[t]  mes  sire  : 
2730  «  Se  tient  Malingre,  par  coi  il  me  jostise. 
«  Râlez  vos  en  gésir,  bêle  suer,  douce  amie. 

—  Sire,  »  dit  la  pucele,  «  tost  m'en  serai  partie, 

«  Mais  d'un  des  jeus  de  France  vuel  ainçois  estre  aprise. 

—  Bêle,  »  ce  dist  li  enfes,  «  et  je  le  vos  otrie, 
2735  «  Par  .j.  tel  covenant  com  vos  m'o[r]rez  ja  dire  : 

«  A  ceste  Pentecoste,  dont  la  feste  est  joïe, 

«  Que  portera  corone  l'emperere  mes  sire, 

«  Get[e]rez  de  prison  les  prisoniers  qu'i  gisent 
hii  ;  «  Et  prierez  vo  père  sauveté  de  lor  vie[s], 
2740  «  Et  je  lor  pardonrai  mon  mautalent  et  m'ire, 

«  Que  Deus  me  doint  venjance  du  traitor  Tomile.  » 

Celé  tendi  sa  main,  sa  foi  li  a  plevie  ; 

De  son  commant  rover  ne  fu  pas  esmaïe; 

Li  niés  Pépin  de  France  bonement  li  otrie  : 
2745  «  Baisiez  moi,  s'il  vos  plaist,  bêle  très  douce  amie,         (yo) 

«  Que  ja  por  .j,  baisier  ne  serez  escharnie, 

«  Ne  ja  ver[s]  Alixandre  n'avrai  ma  foi  mentie  ». 

Et  respont  la  pucele  :  «  Foie  qui  ne  l'otrie  !  » 

A  cel  mot  s'entrebaisent,  que  plus  n'i  atendirent. 

2722  f.  le  roi  A.  —  2723  Monbordon.  —  2725  quelque  n.  —  2726 
ert,  ms.  est  —  2729  b.  tout  li  mont  —  2730  sic  ms.,  vers  trop 
court;  corr.  [Ma  terre]  tient  M.  (?),  cf.  v.  2055.  —  2737  Qui  p. 
—  2738  de  prisons;  qui  i  g.  —  2739  p.  vos  perez.  —  2748  F.  soit 
q.  l'o. 


102  DOON    DE    LA    ROCHE 


LXXXII 


2750  Landris  et  la  pucele  se  sont  entrebaisié, 
Amor  sanz  mespresure  se  sont  afiancié. 
La  pucele  lui  a  gréé  et  otroié 

Que  ele,  a  Pentecoste,  a  la  feste  qui  vient, 

Getera  de  la  ehart[r]e  les  chetis  prisoniers 
2755  Et  lor  donra  bl[ï]auz  et  garnemenz  molt  chier[s]. 

Par  le  conseil  Landri  est  alée  couchier. 

La  nuiz  est  trespassée,  li  jor[s]  est  esclairiez. 

Quant  les  messes  sont  dites  et  fine  li  mestier, 

Ou  palais  Const[antin]  est  li  rois  repairiez. 
2760  L'emperere  manda  ses  barons  chevaliers, 

Et  Alemant  i  vienent  molt  bien  apareillié. 

Ne  ja  por  plus  prodome[s]  ne  les  estuet  changier. 

Quant  li  rois  vit  Landri,  dejoste  lui  l'assiet. 

Lors  li  a  demandé  sanz  point  de  delaier  : 
2765  «  Landris,  filz  a  baron,  me  vole[z]  vos  laissier? 

«  Hé!  ber,  car  pren  ma  fille  et  si  part  a  mon  fié. 

«  Mes  hommes  de  Galabre  vos  donrai  volentiers, 

«  EtTremoi[g]ne  et  Antoine  et  Boneven[t]  mon  fié. 

«  De  tout  mon  fié  [demaine]  avrez  une  moitié.  » 
2770  Quant  l'entendit  li  enfes,  ne  le  vot  otroier  ; 

De  sa  mer[e]  lui  membre.  Olive  o  le  vis  fier, 

Et  por  Doon  son  père  commence  a  larmoier. 

Mais  l'enfes  ne  set  mie  qu'il  Tait  tant  habergié,         (/.  53) 

En  la  chartre  Alixandre  pené  et  travaillé. 

2751  D'à.  s.  pressure.  —  2754  Getrai  —  2757  j.  e.  esclarcer.  — 
2768  mestier,  ms.  mestiers.  —  2759  p.  de  Const.  {sic  ms.)  —  2768 
Et  Tremoine  et  Antoine  {corr.  Hantone  ?).  —  2769  De  sour  son  f. 
a.  —  3771  o  le,  ms.  a.  —  2772  pour  Doz.  —  2773  m.  qui  l'ait.  — 
3774  A  la  ch. 


DOON    DE    LA   ROCHE  Io3 


LXXXIII 


2775  Ou  palais  emperier  sont  venu  Alemant; 

La  fille  au  roi  [i]  moine  ses  maistre  Guinemanz, 

Joste  l'empereor  l'a  asise  en  .j.  banc. 

En  la  cort  sont  venu  Pullois  et  Aufricant, 

Et  li  rois  Alixandre  [a]  fait  crïer  son  ban, 
2780  Que  sa  corz  est  si  fiere  que  mais  ne  fu  si  granz. 

Sa  grant  sene[s]chaucie  livra  as  Alemanz  ; 

Les  espérons  portèrent  Joffroiz  et  Guinemanz, 

Amauris  et  Andrius  lor  enseigne  et  les  branz. 

Landris  porta  le  jor  livrée  [o]  croiz  d'argent, 
2785  A  .j.  baston  qu'il  tint  va  la  presse  rompant. 

Cil  avesque  et  cil  abe  i  dient  gentilz  chanz, 

Cil  jugleor  violent,  notent  et  vont  chantant. 

Li  dus  est  en  la  chartre,  qui  la  noise  [en]  entent. 

Le  chartrier  en  a  apele  :  «  Qui  sont,  va!  celç  gent? 
2790  —  A  la  moie  foi,  [sire],  grant  barnage  a  ceanz  : 

«  Li  rois  porte  corone,  cui  Grifonie  apent; 

a  Ou  palais  Constant[in]  le  servent  celé  gent, 

«  Si  rendra  a  ses  princes  lor  meillor  chasement.  » 

Quant  Tentendi  li  dus,  a  pou  d'ire  ne  fent; 
2795  Et  dit  Do  de  La  Roche  :  «  Que  ferai  je,  dolenz  ! 

«  A  ceste  clere  feste  suel  revestir  ma  gent 

«  Et  doner  a  ma  gent  chevaus  et  garnemenz. 

«  Aï  !  Olive  dame,  com  mal  desevrement  ! 

«  Certes,  biaus  filz  Landris,  jamais  ne  vous  ratenz. 
2800  «  Haï!  mors  »,  distli  dus,  «  que  tardes?  car  me  prent.       {v°] 

«  Certes,  mielz  aim  morir  que  vivre  longement.  » 

Dist  Asse  [de]  Maience  :  «  Las  !  Dex  omnipotenz, 

2775  p.  emperiers.  —  2776  m.  son  maître  Guinemant.  —  2778 
Aufricant,  sic  ms.  —  2780  Qui.  —  2781  es  A.  —  2785  prise  r.  — 
1786  il  d.  g.  champz.  —  2789  va,  ms.  na.  —  2791  Li  roi  portent  c. 
—  2792  p.  a  Constant.  (51c  ms.);  ces  g.  —  2796  soloie  r.  —  2797 
d,  a  mes  genz  —  2798  Oi  d.  O.  —  2802  Dite  ;  Dieu  omnipotant. 


104  DOON    DE    LA   ROCHE 

«  Que  nos  puez  bien  secour[re],  s'a  toi  vient  [a]  talent! 

«  Enuit  sonja[i]  .j.  songe,  sus  ces  bûches  ardanz, 
a8o5  «  Que  iere  a  La  Rociie  el  plus  haut  mandement; 

«  Si  me  donoit  Landris,  voz  filz,  .j.  garnement, 

«  Et  Olive  sa  mère  chevaus  et  garnemenz  ; 

«  De  ma  ci[t]  de  Maience  vi  toz  les  murs  sanglanz, 

«  Et  veoie  en  .j.  eve  Tomile  et  ses  parenz, 
2810  «  Il  n'en  issoient  mie,  ainz  remanoient  enz. 

—  Biaus  niés  »,  ce  dist  li  dus,  «  trop  tarde  longement  ; 

«  Et  moi  que  chaut,  pecheres?  je  n'en  verrai  nient.  » 


LXXXIV 

Le  jor  fu  en  la  chartre  Do,  si  fort  se  démente 
Et  plore  et  sospire  por  s'amie  la  gente  : 
2815  «  Ahi  !  biaus  filz  Landris  »,  fait  il,  «  bel[e]  jovente, 
«  Jamais  ne  vos  verrons  [vivant]  en  Looraingne! 
«  Ce  nos  a  fait  Tomiles,  li  fel,  par  sa  chalenge. 
«  Li  fel  nos  a  traïz;  Deus  mal  [guerdon]  l'en  rende 
«  Et  Audegour  sa  fille,  que  me  dona  a  famé.  » 


LXXXV 

2820  Alixandre  li  ber  repaire  du  mostier 

Et  a  en  sa  compaigne  .xx™.  chevaliers.  , 

Davant  l'empereor  ardent  .m.  encensier; 
Li  niés  Pépin  de  France  repaire  ou  premier  chief, 
Par  soz  l'uis  de  la  chart[r]e  s'est  alez  apoier; 

2825  S'ot  dementer  les  contes, si  l'en  pri[s]t  grant  pitié; 


2803  Que,  corr.  Qui(?)  —  2804  bûches  ardans,  sic  ms.,  altéré. 

—  2805  el,  ms.  en.  —  281 3  f.  D.  en  la  cb.  —  2819  que,  ms.  qui. 

—  2820  Li  barons  A,  —  282^  S'ojt, 


DOON    DE   LA   ROCHE  Io5 

•«u  Le  bon  roi  Alixandre  en  va  dire  et  proier 

Et  sa  fille  la  gent[e]  l'en  est  cheiie  as  piez  ;  (/.  54) 

«  Sire  rois  Alixandre,  nobile  chevalier, 

«  Car  getez  de  voz  Chartres  ces  gentiz  prisonie[r]s; 
283o  «  A  ceste  clere  teste  lor  donez  a  mangier.  » 

Et  respont  l'emperieres  :  «  Par  mon  chief,  volentiers.  » 

Il  envoie  en  la  chartre  .xv.  serjanz  a  pié  : 

«  Par  la  loi  Dieu,  seignor,  bien  devez  [Dieu]  proier, 

«  Quant  li  rois  Alixandre  vos  demande  et  requiert  : 
2835  «  A  ceste  clere  feste  vos  donra  a  mangier.  » 

Quant  l'ot  Do  de  la  Roche,  onques  ne  fu  si  liez. 

Li  dus  se  vot  lever  et  ester  sor  ses  piez  ; 

Tant  fu  foibles  et  las  ne  pot  ester  sor  piez. 

Li  bon  serjant  le  portent  contremont  le  planchié, 
2840  Lui  et  ses  compaignons,  nen  i  ont  nul  laissié. 

De  ci  qu'a[u]  mandement  ou  l'emperiere  siet  ; 

Aine  ne  furent  .v.  home  mielz  servi  de  mangier. 


LXXXVI 

Or  est  Do  de  la  Roche  devant  le  roi  venuz; 

Cil  chevalier  le  gardent,  que  il  ot  abatuz 
2845  Et  plaiez  et  navrez  et  les  chevaus  toluz. 

Dit  li  rois  Alixandre  :  «  Chevaliers,  qui  es  tu? 

«  Certes  molt  es  prodom  ;  molt  fu  beaus  lis  escuz. 

«  Es  plains  sor  Montervile  nos  fus  molt  chier  venduz  ; 

«  Trestuit  fuissons  vaincu,  se  li  François  ne  fust  ; 
285o  «  Par  lui  et  par  ses  homes  fu  li  estorz  vaincuz. 

—  Et  que  vos  chaut,  beaus  sire  ?  »,  ce  li  a  dit  li  dus; 

«  Ja  chevaus  de  .iij.  livres  n'est  par  nos  maintenuz, 

«  Grosse  lance  portée  ne  ruistes  cos  feruz. 

2826  en,  ms.  li.  —  283 1  Et  par  m.  c.  —  2836  Q.  D.  de  La  R.  oï. 
—  2837  ces  p.  —  2841  l'emperiers  s.  —  2842  Ains.  —  2844  ot, 
ms.  oit.  —  2847  tis,  ms.  li.  —  2848  sor,  sic  ms.,  corr.  soz(?);  Mont 
eraule  {en  s  mots;  cf.  v.  2660);  fus,  ms.  fut,  —  2849  T.  fuissiés; 
fust,  ms.  fut,  —  2853  verulles  cors  f. 


I06  DOON    DE    LA    ROCHE 

«  Je  sui  Do  de  la  Roche,  voiremeni  sui  .j.  dus  ;      (v*») 
2855  «  Forment  m'ama  Pépins,  nostre  roi[s]  al  lion  ; 
«  A  moillier  me  dona  Olive  sa  seror  ; 
«  J'en  oi  .).  fil,  Landri,  que  a  tort  ai  perdu.  » 


LXXXVII 

Quant  ot  Landris  li  enfes  que  ses  pères  a  dit 
Et  Guinemant  son  maistre  a  coneii  al  vis, 

2860  Ses  deux  mains  a  tendues,  cheûz  est  devant  lui. 
«  Sire  Do  de  La  Roche,  por  amor  Deu,  merci! 
«  Pardonez  moi  les  maus  que  en  l'estor  vos  fis, 
«  Ou  chief  de  la  bataille  quant  par  force  vos  pris. 
«  Que  mentiroie  je?  Je  sui  Landris  voz  fiz.  » 

2865  Qui  donc  veist  baisier  et  le  père  et  le  fil, 
Et  Asse  de  Maience  et  son  frère  Jofrin, 
Dieus  ne  fist  home  ou  mont  cui  pitié  n'en  preist; 
Li  emperere  plore  ;  ne  s'e[n]  pot  a[s]tenir, 

LXXXVII  I 

«  Sire  »,  ce  dist  Landris,  «  qu'avez  fait  de  ma  mère  ? 
2870  —  Ne  sai  »,  ce  dist  li  dus,  «  si  m'ait  Deus  li  père. 

«  Tomiles  et  Malingres  du  pais  me  geterent 

«  Et  Griffe  d'Autefueille,  li  traït[r]e[s],  li  lerre  ; 

«  Sim  desfia  en  France  Pepin[s]  H  emperere  ; 

«  Por  amor  dame  Olive  la  terre  m'en  veerent. 
2875  «  Je  ne  sai  quel  chemin  la  bêle  en  est  alée  ». 

Quant  l'entendi  Landris,  s'a  la  color  mtiée  ; 

Voianz  toz  se  pasma,  de  pitié  de  sa  mère. 

—  «  Ne  le  faites  ainsi,  amis,  »  dist  l'emperere, 

2855  de  1.  —  2857  oi,  ms.  ois;  que,  ms.  qui  —  2858  oi  L.;  ces  p. 
—  2859  s.  m.  a  requeneu  amis  —  2864  Q.  vos  m.  —  2866  et,  ms. 
a.  —  2867  preïst,  ms.  prinst  —  2873  Si  me  d.  Cf.  v.  2636.  — 
2874  P.  a.  de  O.  la  t.  m'envaierent.  —  2878  f.  mie  a. 


DOON    DE    LA   ROCHE  107 

«  Mais  mandez  ma  grant  gent  par  tote  ma  contrée, 
2880  «  Tant  qu'aiez  assemblé  .xx°.  homes  a  espées;  (/••^•^) 

«  Rêva  t'en  en  ta  terre,  si  [la]  conquier,  beaus  frère. 
«  Quant  tu  l'avras  conquise,  si  la  rent  a  ton  père, 
«  Et  a  ta  mère  [Olive],  se  puet  estre  trovée, 
a  Car  assez  en  avras  en  la  moie  contrée.  » 
2885  Atant  es  Salmadrine  en[z]  ou  p[a]lais  entrée  : 
«  Sire  rois  Alixandre,  trop  m'avez  oblîée  : 
«  Ja  ne  m'a  pas  Landris  prise  ne  esposée, 
«  Ne  livrez  les  ostages  ne  a  mostier  menée. 
«  Sachiez,  se  il  s'en  va  et  je  sui  esgarée, 
2890  tt  Je  me  lairai  cheoir  de  celé  tor  carrée, 
«  A  plus  de  .c.  garçons  me  ferai  délivrer, 
«  Ma  vi[l]té  et  ma  honte  vos  sera  reprovée.  » 
—  Dame,  »  cedist  Landris,  »  trop  vos  estes  hastée  ; 
«  De  diz  et  de  paroles  es  trop  abandonée  ; 
2895  «  Il  nen  avenra  ja  ;  c'est  chose  destinée.  » 
Or  en  ont  tant  parlé  Landris  et  l'emperere, 
Cil  a  fait  sa  venjance  et  sauvée  sa  mère. 
Li  bons  rois  Alixandre  li  dona  grant  soudée, 
Chargiez  .xxx.  somiers  de  l'or  de  sa  contrée 
2900  Et  ot  bien  .xx™.  homes  toz  hardiz  a  l'espée. 
Par  ces  fu  Alemagne  conquise  et  aquitée 
Et  Tonjiles  destruiz  et  sa  gent  afolée. 

LXXXIX 

Bien  l'avez  oï  dir[e]  plusor  et  li  auquant, 

Le  jor  jura  Landris  Salmadrine  a[l]  cors  gent 

2880  ansemblé  ;  le  second  hémistiche  est  trop  long;  lire  h.  d'es- 
pées(?).  Pour  le  chiffre,  cf.  v.  2goo.  —  3883  ce  p.  —  2884  avras, 
ms.  avrés.  —  2885  e.  oui  p.  —  2891  me  ferai  délivrer,  sic  ms.  — 
—  2895  II  ne  m'avra  ja.  —  2896  t.  parler;  Landris,  ms.  li  duc;  51 
Von  n'admet  pas  cette  correction,  il  faut  supposer  une  lacune  après 
ce  vers.—  2897  sâuue  en  sa  m.;  corr.  douteuse.  —  2899  somiers, 
ms.  solmiers. 


I08  DOON    DE   LA   ROCHE 

2905  Et  lëaument  son  maistre,  li  cortois  Guinemant. 
Li  bons  rois  Alixandre  li  dona  avoir  tant, 
Chargiez  .xx.  dromadaire[s]  d'or  fin  et  de  besanz. 
Les  terres  de  Calabre  s'en  vienent  chevalchant 
Et  trespassent  Dunoe,  .j.  eve  fort  et  grant, 

2910  Les  puis  de  Leoroingne  et  les  terres  avant. 
Laissent  le  Genevois,  si  passent  le  Pisant, 
Et  vienent  a  Seiise,  si  gisent  en  val  Lant  ; 
Les  vaus  de  Morïene  s'en  vienent  chevalchant. 
Or  avra  mais  Tomiles  sa  déserte  avenant  : 

2915  De  Maience  brisèrent  les  portes  d'olifant; 
Dont  la  chançon  commence  des  ici  en  avant. 


XC 


A  merveillos  barnage  vint  en  France  Landris, 
De  Pu[i]lle,  de  Tosquaigne  en  amoine  le  pris; 
A  merveillos  barnage  requiert  ses  anemis, 

2920  Or  commence  Tomiles  ses  chastiaus  a  garnir; 
Li  fel  est  a  Maience,  ou  chief  de  son  pais, 
Audegour  a  La  Roche  et  Malingres  ses  fiz, 
De  l'avoir  d'Alemagne  ses  [a]  fait  bien  garnir. 
D'Olive  la  duchesse  plairoit  vos  a  oïr, 

2925  Qui  en  Seine  la  ville  a  son  ostel  porpris, 
Avec  le  bon  evesque,  le  cortois  Auberi  ? 
Sovent  plore  Doon  et  regrete  son  fil. 
A  unes  saintes  Pasques  qu'est  a  l'entrant  d'avril. 
Que  on  doit  célébrer,  honorer  et  chérir. 


2905  vers  obscur;  leçon  altérée? —  2909  Dunoe,  ms.  Dunot.  — 
2910  Leoroingne,  sic  ms.,  altéré.  —  2911  les  G.  —  2912  Senus- 
sent  ;  Valant.  —  2914  le  vers  serait  mieux  à  sa  place  après  le  v. 
2g  1 5.  —  2918  Torquaigne;  le  plus.  —  2919  requiers  s.  a.  — 
2922  ces  f.  —  2923  ses,  ms.  ce.  —  2926  v.  et  s.  h.  —  2927  regarde 
s.  f.  —  2928  l'antree  d'à.  -;>;!:    <  -  .' 


DÔON    DE  LA  ROCHE  10^ 

2930 Tint  revesque[s]  sa  court;  granz  barnages  î  vint. 

Par  ces  hautes  églises  font  ces  cloches  bondir. 

Li  evesques  s'ala  premerains  revestir; 

[Dame]  Olive  adestrerent  li  baron  du  païs,  (/".  56) 

Devant  les  euz  l'evesque  la  menèrent  seïr  ; 
2935  Ja  de  plus  bêle  famé  n'orra  nus  hom  escrit. 

L'avesque[s]  la  regarde;  molt  grant  pitié  l'en  prist, 

Et  voit  ces  chevaliers  par  ces  sièges  seïr. 

—  ft  Or  m'entendez,  seignor,  »  dist  l'evesque  Aub[e]ris, 

«  Veci  .).  duchesse,  Olive  o  le  clervis, 
2940  «  Fille  fu  ma  seror  la  bêle  Beatriz... 

«  Il  la  dona  .j.  duc,  qui  a  joie  la  pri[s]t; 

«  Or  les  a  .j.  îraît[r]es  par  engien  departiz, 

«  Chacié  en  a  le  duc  fors  du  règne  en  essil  ; 
•  ''   «  Mais,  se  cil  [Dex]  m'aie,  qui  vraie  mort  sofri, 
2945  «  Et  je  truisse  Tomile,  [ja]  n'en  estordra  vis.  » 


XCI 


L'evesques  Aub[e]ris  fu  molt  pros  et  nobiles, 

Le  pueple  chiet  as  piez  por  amor  dame  Olive, 

A  son  col  ot  l'estole  et  le  fanon  de  tire. 

—  «  Baron  !  por  Deu  merci,  le  fil  sainte  Marie, 
2950  «  Veez  ci  la  duchesse  qui  de  seignor  n'a  mie, 

u  La  dame  avoit  .j.  fil  ;  morz  li  est  par  envie. 

«  Suer  est  Pépin  de  France  le  roi  [puissant  et]  riche. 

«  Il  la  dona  .j.  duc  de  molt  grant  seignorie  ; 

«  Or  les  a  departiz  par  engien  .j.  traït[r]es, 
2955  «  Tomiles  de  Coloigne,  cui  Damedeus  nia[u]die  I 


3932  L'evesque  s'en  a.  —  2939  Vees  ci;  au  c.  v.  —  2940  lacune 
après  ce  vers.  On  doit  supposer  un  vers  perdu,  où  était  nommé 
Pépin  (cf.  V.  2g 5 2)  dont  il  est  question  au  vers  suivant.  —  2943 
essil,  ms.  aisil.  —  2945  estordera  v.  —  2948  fenon  de  cire.  — • 
2949  Barons.  —  2951  est,  ms.  ast.  —  2962  Sire  e.  P. 


iïÔ  DOON  DE  LA  ROCHE 

€  Tant  enchanta  le  duc  qu'i[l]  li  dona  sa  fille. 
«  .1.  oirs  en  est  issuz  qui  porte  Deu  envie  : 
«  Abatu  a  le  duc  de  sa  grant  seignorie 
«  Et  Olive  sa  famé  de  l'avoir  desaisie  ; 

2960  «  A  tort  et  a  pechié  en  tienent  l'avoir  quite; 

«  P[epin]  s'en  est  clamez,  coresos  et  plein[s]  d'ire... 
«  Mais,  [par]  la  foi  [que]  doi  Dieu  [et]  sainte  Marie, 
«  Je  l'en  movrai  tel  guerre,  si  ne  tardera  mie; 
«  Se  je  puisencontrer  Tomile  ne  Malingre, 

2965  «  Les  honors  de  La  Roche  lor  voldrai  contredire. 
«  Seignor,  aidiez  nos  en,  por  Dieu  le  fil  Marie  !  » 
Li  avesques  manda  qui  ses  sodoiers  prirent  ; 
Desor  Seinne  la  vile  en  .j.  pré  s'asemblirent, 
La  chargent  la  vitaille,  le  pain  et  la  farine, 

2970  As  montenieresmontent,  cil  char  braient  et  crient; 
A  l'esmovoir  de  l'ost  .c.  olifant  bondissent. 
La  duchesse  montèrent  sor  .j.  mur  de  Surie, 
Estroitement  vestue  d'un  paile  de  Roissie. 
De  l'eve  de  ses  ieus  fu  la  guimple  moillie  ; 

2975  Molt  par  semble  la  famé  qui  de  seignor  n'ait  mie; 
En  sa  main  .j.  perche  qu'el'  estreint  et  paumie. 
Le  lundi  ajorné  ne  le  mardi  ne  finent  ; 
Tant  se  sont  travaillé  que  a  La  Roche  vindrent  : 
Quant  voient  le  païs,  la  duchesse  en  sospire. 

2980  Es  [prez]  devant  La  Roche  .iij.  agais  lor  bastirent; 
A  .XXX.  chevalier  [s]  la  proie  recoillirent. 
La  dedenz  s'adoba  li  fiz  a[l]  duc.  Malingres, 
A  .vij'^'^.  chevaliers  est  issuz  de  la  vile, 
La  proie  lor  rescourent  et  l'avoir  lor  tolirent, 

2985  Entre  ci  qu'as  agaiz  ne  voudrent  laissier  mie. 

2961  Pépin,  ms.  P.  Lacune  après  ce  v.  —  2962  M.  la  f.  du  Dieu 
s.  M.  —  2g63  Je  l'ammenerai.  —  2967  sic  ms.;  vers  altéré?  — - 
2970  montemeres  ;  char,  ms.  chars.  —  2974  De  iaiue  de  ces 
chief.  —  2976  el,  ms.  il.  —  2977  1.  ajornée.  —  2979  Q.  le  p.  v.  — 
2980  Ez  uant  de  la  R.  niez  .iij.  a.  1.  b.  --  2981  p.  acoillirent. 
—  2982  d.  s'adobast.  —  2984  1.  toloient.  —  2986  E.  ci  que. 


DOON    DE    LA   ROCHE  ^11 

Cil  lor  corurent  sus,  qui  de  l'agait  issirent; 
La  ot  tant  han[s]te  frainte,  tant[e]  targe  perde, 
Mainz  morz  et  abatuz  des  compaignons  Malingre. 
Es  vos  par  la  bataille  Amorant  de  Saint  Gile: 

2990  Niés  en  Aubri  [l'evesque],  cosins  germains  Olive, 
Dus  estoit  de  Be[o]rges,  siue  en  ert  la  baillie; 
Va  ferir  Grifone[l],  .j.  des  neveuz*Ma[lingre], 
Fil  sa  seror  germaine,  la  dame  Malsarie, 
Qui  tint  quite  Gormaise  et  la  grant  seignorie; 

2995  Le  cuer  li  a  fendu,  l'arme  s'en  est  partie. 
Et  Esmerez  josta  a  Salvain  d[e]  Espire, 
Nez  fu  des  traîtors,  seneschaus  fu  Tomile  ; 
Tant  soef  l'abat  mort  que  ne  brait  ne  ne  crie. 
Aubris,  li  bons  avesque[s],  rêva  ferir  Malingre, 

3ooo  Que  l'escu  li  fendi  et  l'ausberc  li  descire; 
Parmi  le  flanc  senestre  li  a  l'enseigne  mise. 
Et  Olive  seoit  sus  .j.  mul  de  Sulie, 
En  sa  main  .j.  perche  dont  la  han[s]te  est  fresnine  : 
Sor  l'iaume  de  son  chief  ala  ferir  Malingre, 

3oo5  Que  le  nasel  d'acier  en  mi  le  front  li  brise, 
Que  les  denz  li  esclate  et  froisse  les  gencives, 
Li  sanc[s]  vermoilz  en  raie  et  a  val  en  défile; 
Moillie[z]  en  a  les  pans  et  du  haubert  les  lices. 
Lors  escria  la  dame  :  «  N'i  dureroiz,  traîtres,         (v") 

3oio  «  Ça  me  lairez  La  Roche  ;  ne  l'avrez  jamais  mie  ; 
«  Ja  la  me  dona  Do,  quant  a  moillier  ra'ot  prise, 
«  Et  tote[s]  les  honors  detoloigne  la  riche.  » 
Malingres  vit  ses  homes  detrenchier  et  ocire  ; 
Il  est  tornez  en  fuie,  s'a  ses  règnes  guenchies  ; 

3oi5  Damedeus  le  confonde,  qui  trestoz  nos  cha[s]tie  ! 


2986  la  gent  i.  —2990  Aubri,  ms.  Auberi.  —  2991  en  est.  —  2994 
Germaise.  —  2995  Li  c.  li  a  fondus.  —  2996  josta,  ms.  jostej 
Salvain,  sic  ms.,  cf.  v.  3078.  —  2998  que,  ms.  qui.  —  3ooo  Qui. 
—  3oo3  e.  frazjne.  —  3oo5  nasel,  ms.  vaisel.  —  3oo6  froissent  I. 
g.  —  3oi3  ces  h.  —  3014  ces  roigne  g.     ' 


112  DÔÔN   DÉ   LA    ROCHE 

De  .vij'^'^.  chevaliers  n'en  demora  que  .xv. 
Lagent  Malingre  fu  passée  et  desconfite; 
Maint  et  communément  entrèrent  en  la  vile  ; 
Le  chastel  et  le  bourc  et  la  tor  lor  tolirent. 

3o20  Et  Malingres  chevalche  coresos  et  pleins  d'ire; 
D'autre  part  s'en  issi  par  la  porte  d'Espire, 
La  trueve  son  aiol,  le  traïtor  Tomile  ; 
Ne  s'a  mie  atargié  de  ses  noveles  dire. 

Oiez  des  chevaliers  qui  la  Roche  orent  prise! 

3o25  Toz  les  degrez  en  montent  de  la  sale  perrine 
Et  truevent  Audegour  sus  en  la  tor  antive, 
Par  la  mange  la  prirent,  contreval  la  traînent, 
[De]soz  l'ombre  d'un  aubre  la  présentent  Olive  : 
«  Tenez,  franche  duchesse,  vo  mortel  enemie; 

3o3o  «  Du  duel  et  du  contraire  li  rendez  la  mérite. 

—  Par  foi  !  «  ce  dist  Olive,  »  a  gré  m'avez  servie. 
'(  Ici  tornez,  garçon,  escuier,  »  dist  Olive; 
«  Menez  moi  celé  dame  [ça  aval]  en  la  vile. 
«  Esgardez  com  est  bêle,  gre[s]lette  et  eschevie  ! 

3o35  «  Vos  l'aiez  enuit  mais  :  je  la  vos  claime  quite. 

«  Aine  n'ot  de  moi  pitié,  ainçois  me  fiist  chaitive. 
i<  Se  peiist  esploitier,  si  m'eiist  fait  ocire.  » 
Quant  l'entent  Audegour,  si  plore  et  [si]  sospire  : 
«  Merci!  franche  duchesse,  vo  mère  fu  roïne  ; 

3040  «  Tôt  ce  fist  li  miens  père,  li  fel  et  li  traït[r]e. 
«  Il  est  bien  vérité,  toz  tens  l'ai  oï  dire, 
«  Que  famé  de  bon  aire  de  pitié  s'umilie.  » 
Gelé  la  voit  plorer,  li  cuers  li  atenrie  ; 
La  suer  Pépin  [l'japele,  si  li  comence  a  dire  : 
3045  «  Por  l'amor  de  Doon  ou  preïs  compaignie, 
«  N'esterez  enuit  mais  de  vo  cors  mal  baillie, 

3017  fu,  ms.  esi.  —  3o2o  M.  chevalchent.  —  3o2i  s'en  issirent; 
de  Spire.  —  3o23  s'a  m.  estargiés  de  ces  n.  d.  —  3o28  On  pourrait 
aussi  proposer  Soz  l'o.  dfe]  un  a.  —  3029  voz  inortele.  —  3o3o  le 
m.  —  3o32  Veci  —  3o35  V.  l'a.  enuiuais;  cf.  v.  3046.  —  3o36 
Ainz. 


DOON    DE   LA    ROCHE  Il3 

«  Ainz  vos  ferai  geter  en  ma  chartre  perrine, 
«  Illu[e]c  vivrez  toz  jours  a  duel  et  a  martire.  » 


XCII 

3o5o  Dame  Olive  en  apele  ses  .ij.  maistres  chartrie[r]s:f 
«  Prenez  moi  celé  dame,  très  bien  me  la  gardez; 
«  Je  ne  vous  commant  mie  sor  terres  ne  sor  fiez, 
«  Ainçois  la  vos  commant  sor  les  ieus  de  vo  chiet. 
«  Certes,  se  voseschape,  n'en  estordrez  vos  piez.  » 
3o55  Et  cil  respondent  :  «  Dame,  com  vos  plaira  si  [ijert.  » 
Et  le  gris  et  Termine  li  ont  du  dos  sachiez, 
En  la  chartre  l'avalent  parfonde  .xij.  piez, 
Tôt  li  firent  veer  le  boir[e]  et  le  mangier. 
Et  Malingres  cheva[u]che,  qui  est  ou  cors  plaiez  ; 
3o6o  De  ci  qu[e]  a  Maience  ne  voldra  atargier 

Et  vint  en  son  ostel,  s'e[s]t  en  .j.  lit  couchiez. 
Li  gloz  prent  .j.  ba[s]ton,  a  po  ne  l'a  mangié.        {v") 
Tomiles  de  Coloigne,  qui  devant  lui  [en]  vient, 
Ci[l]  li  a  demandé  :  «  Com  vos  esta,  beaus  niés? 
3o65  —  A  la  moie  foi,. sire,  je  sui  mal  engigniez. 

a  Hui  estoie  en  La  Roche  sus  ou  palais  plainnier, 
«  Dou  gentil  duc  mon  père  m'estoit  remés  en  fié, 
«  Fu[s]t  a  tort  ou  a  droit,  j'en  estoie  heritier[s], 
«  Si  avoie  a  ma  table  .vij^x,  de  chevaliers 
3070  «  Quant  Aubris  li  evesques  la  me  vint  ostagier, 
«  Et  ot  en  sa  compaigne  .x~.  de  chevaliers; 
«  .IIL  agaiz  nous  ba[s]tirent  ou  val  de  Roche  Vies  ; 
«  Nostre  proie  acoillirent  a  .xxx.  chevaliers, 


3o5i  COÏT,  me  la  g.  très  bien  (?) —  3o54  n'en  estorderez  nés  — 
3o55  com,  ms.  come.  —  3obj  xij,  ms.  xiiij  {vers  trop  long).  — 
3062  mangié,  ms.  mangier.  Ce  vers  n'a  aucun  sens  et  ne  se  ratta- 
che pas  au  vers  qui  suit.  —  3o63  qui,  ms.  cui.  —  307 1  sa  com- 
paignie.  —  3072  m.  vous  b.  ag.,  cf.  v.  2980. 


Îî4  faÔÔI*  BE  LA  ^bdtïfi 

«  Je  m'en  issi  la  fors,  armez  sor  rtlon  destrief, 

3075  «  Et  .vï]^^.  de  mes  homes,  les  confenons  laciez, 
«  De  ci  que  ou  Val  [Vies]  nés  vousimes  laissier, 
«  Et  barnage  nous  sordrent  et  devant  et  darier. 
«  Vo  neveu  i  perdîmes  a  l'estor  commencier, 
«  Lui  et  Salvain  d'Espire,  le  vostre  conseillier. 

3o8o  «  Des  agaiz  a  Tevesque  ne  me  soi  ainz  gaitier,      -^- 
«  Ainz  me  sort  d'une  lande,  armez  sur  .)'.  destrier. 
((  Li  fel  me  vint  ferir,  ne  me  vot  espargnier, 
«  De  mon  helme  tenant  m'a  les  clavains  trenchiez, 
«  Soz  le  poing  de  m'espée  m'a  enz  ou  cors  plaie, 

3o85  «  Mes  esbais  m'a  tolu[z],  dont  m'a  dolent  laissié. 
«  Et  Olive  seoit  sus  .j.  mul  sulïen, 
«  En  sa  main  .j.  lance  plaine  de  poi  ranier, 
«  Tel  cop  me  vint  paier  que  tôt  me  fi[s]t  ploier, 
«  Sur  mon  destrier  corant  me  fi[s]t  agenoillier.      {f.  5gi) 

3090  «  Illu[e]c  vi  je  mes  homes  ocire  et  detranchier, 

«  Et  mes  cha[a]ingnes  rompre  et  mes  pons  abaissier. 
«  Mes  barres  m'ont  copées  et  mes  portes  froissies, 
«  Je  ne  pou  en  ma  tor  venir  ne  repairier. 
«  Mon  chastel  me  tolirent,  le  bore  et  le  marchié; 

3095  «  N'en  mena[i]  que  .xiiij.  de  .vij^x  chevaliers. 

«  Tant  par  est  grant  ma  perde  ne  la  vos  puis  noncier. 
«  Or  ne  sai  que  je  face  quant  putain  m'a  chacié. 
«  Remese  i  est  ma  mère  ;  ne  li  porrons  aidier.  » 
Li  fel  chaït  pasmez,  tant  [par]  fu  angoissiez. 


3074  armez,  ms.  a  mieulx.  —  3076  La  correction,  empruntée 
au  V.  3072,  est  asse:{  douteuse,  car  nous  ne  savons  ce  qu'il  faut 
entendre  par  Val  Vies  ;  on  pourrait  proposer  d'après  le  v.  2 g  86 
De  ci  que  as  agaiz.  —  3077  Et  barnel  n.  soudrent.  —  3078  Vo 
neveu,  ms.  Nous  vous  ;  cf.  v.  2gg2.  —  3o83  helme,  ms.  clavains 
—  3085  esbais,  sic  ms.,  corr.  eschas  (?);  laissié,  ms.  laissier.  — 
3o86  seoit,  ms.  se  sciet  ;  cf.  v.  3oo2;  sulien,  ms.  sulier.  —  3o87 
poi  ranier,  sic  ms.  en  deux  mots;  corr.  bois  ramier  (?)  —  3o88  f. 
plaier  —  3089  Que  sur  —  3091-2  Ces  deux  vers  sont  intervertis 
dans  le  ms.  —  Soga  barres,  ms.  baires  —  3o93  repairier  ne  venir. 


DOON   DE   LA   ROCHE  I  I  5 

3 100  Et  distli  fel  Tomiles  :  «  Beaus  niés,  ne  t'esmaier. 
«  Or[e]  lor  mand[e]rai  trêves  et  ami[s]tié, 
«  De  Tavesque  et  d'Olive  reconoistrai  mon  fié; 
«  En  présent  lor  métrai  m'onor  et  ma  daintié, 
«.  Tant  que  de  lor  [meson]  puisse  tant  aprochier 

3io5  «  Que  [je]  soie  en  la  Roche  .j.  nuit  a  cochier. 
«  Je  les  enerberai  au  boire  ou  au  mangier, 
«  Ou  les  acorerai  a  .j.  coutel  d'acier  ; 
«  Ja  ne  verront  la  Pasque  ne  septembre  moié  ». 
Et  dit  li  fel  Malingres  :  «  Se  vos  ice  faites, 
«  Dont  serez  vos  mes  oncles  et  je  serai  voz  niés. 

3i  lo  —  Oïl  »,  ce  dist  Tomiles,  «  se  je  puis  esploitier.  » 
Ma[i]s  li  gloz  ne  set  mie  del  franc  duc  qui  revient 
Devers  Constantinoble  o  .xx™.  chevaliers, 
Et  sont  desor  Sobrie  aresté  et  logié; 
Maint  riche  tref  de  soie  i  veîssiez  drecier.  (v') 

3ii5  Li  borjois  citïen  s'en  sont  molt  esmaié, 
Ou  palais  font  porter  lor  or  et  lor  deniers 
Et  si  conduisent  tuit  lor  vitaille  a  somiers. 


XCXIII 

Ez  prez  desoz  Sobrie  vienent  li  ost  errant, 
Tendent  trez  et  aucubes  et  pavillons  Iu[i]sanz. 
3i20  En  la  cit  s'espoentent  borjois  et  autre  gent, 
Ou  palais  font  porter  lor  or  et  lor  argent 

3 100  esmaier,  ms.  amaier.  —  3 102  d'Olive,  ms.  de  la  dame.  — 
3io3  m.  m'avoir  et  ma  dointié.  —  3104  T.  q.  de  I.  me  puis  je 
tant  a.  —  3 106  enarbrai.  —  3iog  faites  altéré,  corr.  fesiez  (?)  — 
3109a  A  ce  vers  commence  le  second  feuillet  appartenant  à  M. 
Lelong.  Ce  fragment  s'étend  jusqu'au  vers  32  88.  La  plus  grande 
partie  du  vers  3 log  a  est  coupée  dans  L.  —  3i  12  o  d'après  L.,  ms. 
et.  —  3ii3  ms.  Sorbrie,  mais  v.  3 118  Sobrie,  comme  dans  L.  — 
3ii4  L.  Maint  riche  trez  de  s.,  ms.  Mains  très  de  soie  riche; 
veîssiez,  ms.  mcûssiez.  —  3ii8  L.  ms.  les  02  c.  —  3i2o  L.  cit, 
ms.  cité. 


IIÔ  DOON   DE    LA   ROCHE 

Et  conduent  a  force  le  vin  et  le  froment, 

Car  il  ne  sevent  mie  dou  duc  le  covenant; 

C'est  sa  chambre  [demaine]  de  son  droit  tenement, 

3 125  Si  la  conquist  ses  père,  li  Alemanz  Florenz, 
Il  en  ocist  .j.  roi  dur  et  fort  desersenz; 
A  Doon  en  remestrent  trestuit  11  chasement. 
La  gent  dont  fu  puplée  ainme  le  duc  forment, 
Onques  ne  li  vousirent  faillir  a  son  besoin 

3i3o  Ne  doner  Audegour  ne  servise  ne  cens. 

Toz  tens  tindrent  la  vile  par  lor  efîorcement  : 
Molt  faitli  bons  que  saiges  qui  son  seignor  ratent. 
Lor  seignor  ratendirent  cil  dedanz  longuement, 
Et  li  dux  lor  en  fist  .j.  guerredon  molt  grant  : 

3i35  Lor  fiez  lor  clama  quites  et  lor  bommes  lor  rent. 
Li  dux  se  fu  levez  par  son  l'aube  aparant, 
Davant  lui  a  mandé  Asson  et  Guinemant 
Et  Jofroi  son  nevou  et  Landri  son  enfant  : 
«  Consoilliez  moi,  mi  home,  franc  chevalier  vaillant. 

3  140  «  Je  redot  molt  Tomile,  et  lui  et  ses  parenz, 
«  Que  ne  face  asemblée  de  vitaille  et  de  genz. 
«  Baron,  s'il  nos  eschape,  molt  en  serai  dolenz  ». 
Landris,  li  filz  le  duc,  parla  premièrement  : 
«  En  non  Deu,  sire  père,  vos  parlez  de  noient  : 

3145  «  Ja  n'ert  en  tel  chastel  que  ne  l'ensuiens  enz, 
«  La  vile  n'ert  si  forz  le  chastel  ne  crevant. 
«  Ces  qui  ma  mort  jurèrent  vos  meirai  en  présent; 

3 124  [demaine]  manque  dans  les  deux  textes.  —  3i25  li,  m*,  si, 
mais  dans  L.  la  première  lettre  est  surchargée,  et  on  peut  hésiter 
entre  \  et  s.  —  3 126  Sic  dans  les  deux  textes,  sauj  que  le  ms. 
porte  desersans.  Corr.  Durefort  de  Sersens  (?)  —  3127  Sic  L.,  ms. 
remetent  ...charsemant.  —  3 128  fu,  L.  fui,  ms.  fut.  —  3129  Sic 
dans  les  àeux  textes;  corr.  f.  a  lor  serment  (î)  —  3i3o  sens  dans 
les  deux  textes.  —  3i32  L.  ratant,  ms.  atant.  —  3i33  ms.  Leurs 
seigneurs;  L.  longuemant.  —  3i36  fu,  L  fui  ;  son,  ms.  sor.  —  3140 
L.  redoz,  ms.  redoute.  —  3144  L  Enondeu  [en  un  mot)  —  3 145  L. 
lansuiens,  ms.  laissuiens.  —  3 146  L.  aucei  ch.  ms.  en  cel  —  3146 
Ce  vers  n'est  pas  clair.  Corr.  Ja  vile  n'ert  si  fort  ne  chastels  (?) 


DOON    DE    LA    ROCHE  II7 

«  Le  hontaige  ma  mère  lor  vendrai  chierement. 

—  Biax  filz  »,  ce  di[s]t  li  dux,  «  vos  parlez  gentement, 
3  I  5o  «  Mes  d'essilier  le  roigne  n'ai  cure  ne  talant, 

«  Car  ce  sont  tuit  mi  home  et  de  mon  tenement 
«  Et  li  auquant  resont  de  ma  honte  dolent. 
«  Jeet  Jofroiz  me[î]smes  volons  aler  devant, 
«  Afublées  les  guimples  par  atempreement, 
3i55  «  Por  savoir  et  enquerre  bien  et  certainement 

«  Com  se  contient  Malingres  et  sa  mère  ausiment. 

—  Sire  »,  ce  di[s]t  Landris,  «  je  l'otroi  bonement. 
«  Hé  Jofroi,  biax  doz  sire,  le  vostre  loiaument  ». 


XCXIV 

Li  dux  s'atapina,  il  et  Jofroiz  ses  niés 
3 160  De  guintes  sarrazines  et  de  dras  dépeciez  ; 
Chapes  orent  floquans  et  chaperons  fleciez, 
Escharpes  cordoainnes  et  bastons  de  pomier  ; 
Par  dedesus  lor  gui[n]tes  ont  lor  treiis  liés; 
Bien  resemblent  tel  gent  qui  vienent  de  proier. 
3i65  «  Pères  »,  ce  di[s]t  Landris,  «  bien  semblez  pautonier  ; 
«  Gardez  que  par  folie  ne  vos  i  otraigiez, 
«  Que  ne  soiez  Tomile  mostrez  ne  enseigniez  : 
«  Tost  vos  feroit  les  membres  coper  et  detrenchier  ; 
«  Puis  que  li  bons  est  morz  n'i  a  nul  recovrier. 
3170  —  Biax  filz  »,  ce  di[s]t  li  dux,  «  je  m'en  garderai  bien.  » 
Il  se  parti  de  l'ost  et  si  a  pris  congié;  . 
En  .j.  forest  entre  qui  .xv.  Hues  tient  : 
Li  dux  sot  bien  le  bois,  car  ce  fu  de  son  fié, 


3i54  Ms.  atampraemant,  qui  est  obscur.  Dans  L.  ce  vers,  qui 
était  le  premier  de  la  seconde  colonne,  est  coupé.  —  3i55  bien  et 
certainement,  mots  coupés  dans  L.  —  3i58  Ce  v.  parait  corrompu. 
Il  y  a  peut-être  une  lacune  avant  ou  après.  —  3i63  L.  guites,  ms. 
guindés;  treûs,  corr.  trebus  (?)  —  Siyi  parti  d'après  L.  Il  y  a 
seulement  p  dans  le  ms.  —  3 172  L.  forel. 


Il8  DOON   DE   LA.   ROCHE 

Mainte  nuit  i  ot  geu,  sejorné  et  chacié. 
3175  II  regarda  sor  destre,  vit  ,j.  aubre  foillié  ; 

D'Olive  lui  remembre,  commence  a  larmoier  : 

«  Haï  !  franche  duchesse,  com  cest  jor  m'amïez, 

«  Et  je  plus  vostre  cors  que  nuns  bons  sa  moillier  ! 

a  Quant  je  vos  ai  perdue,  bien  en  puis  enraigier.  » 
3 180  Li  dux  s'en  passe  outre  parmi  un  val  croissier, 

Ou  il  o'i  le  blasme  primes  de  sa  moillier, 

Dont  ele  fu  chaitive  et  il  fu  essilliez. 

Parmi  .j.  brûel[et]  ont  lor  chemin  changié  ; 

A  l'issir  d'une  lande  troverent  .j.  plaissié, 
3i85  Clos  de  pés  et  d'espines  et  de  palis  troiliés. 

Illuc  maint . j.  frans  maires  prodons  por  gaaignier  ; 

Cil  estoit  bons  le  duc  plevis  et  fianciez, 

De  lui  tenoit  ses  terres,  s'estoit  ses  moitoie[r]s, 

Mais  il  ne  se  vot  onques  a  Malingre  acointier 
3190  Ne  doner  Audegour  vaillant  .j.  sol  denier. 

Encor  avoit  Bernarz  .x.  filz  de  sa  moillier  : 

Proz  [furent]  et  cortois,  li  .v.  sont  chevalier, 

Et  a  .XIX.  charrues  dont  il  fait  gaainnier, 

Que  sui  .V,  fil  maintienent  a  .Ix.  boviers. 
3195  II  ont  laz  et  oisiauz  et  grant  mute  de  chiens  ; 

Li  maire  fait  sa  vinne  planter  et  prevoignier.  (/«  61) 

Il  est  alez  a  vespres  por  Damedeu  proier  : 

Damedeu  reclama,  le  glorios  dou  ciel, 

Qu'il  garisse  Doon  de  mort  et  d'encombrier. 
3200  Davant  la  maistre  porte  sus  .j.  perron  s'asiet, 

Desoz  l'ombre  d'un  chasne  grant  et  gros  et  plainnier, 


3174  L.  sejorner,  mot  omis  dans  le  ms.\  chascié,  ms.  chascier. 
»»-3i78  plus  d'après  L.,  ms.  puis;  que  L.  et  ms.  con.  —  3179 
Quant,  L.  et  ms.  Que.  —  3 180  Ms.  croisie.  —  3 181  blasme,  ms. 
bame.  —  3i85  L  Clox  ;  palis  d'après  L,,  ms.  pas.  —  3190  sol 
denier,  L.  soûl  donier,  ms.  souldoier.  —  3 191  avoit,  les  deux 
ttxtes  a.  On  n'a  pas  dit  jusqu'ici  que  le  père  se  nommât  Bernard. 
—  3194  sui,  ms.  ces;  a,  ms.  et.  —  3199  ms.  garissent;  ce  vers  et 
le  suivant  presque  entier  [début  du  verso)  sont  coupés  dans  L. 


bOON   DE   LA   ROCHE  H^ 

Et  voit  de  totes  parz  son  avoir  repairier, 
Entrer  enz  en  ces  parz  et  berbis  et  bergiers, 
Et  gésir  en  ces  loiges  et  ma[s]tins  et  lévriers, 

32o5  Et  ces  bues  et  ces  vaiches  dont  il  i  a  miliers. 
Gillebert  en  apele,  son  ainné  fil  premier  : 
■  '^        «  Biax  filz,  pleiist  a  Deu,  qui  tôt  puet  jostisier, 

«  Que  de  cest  grant  avoir  fust  venduz  Ja  moitiez, 
«  Si  tenist  Do  mes  sires  l'argent  et  les  deni[e]rs. 

3210  «  Je  redot  molt  Tomile  que  ne  l'ait  espié. 

—  Sire  »,  H  enfant  dïent,  «  molt  en  serïens  lié; 
•  ■    «  Bien  nos  garirïens  etluiavroit  mestier.  » 

A  icestes  paroles  ez  le  duc  ou  il  vient 

Et  son  nevou  Jofroi,  les  bordons  enpoigniez  ; 

•52t5  Bien  [re]connuit  Bernart,  qui  sor  le  perron  siet; 

^~"        Quant  il  le  voit  en  vie,  joianz  en  fu  et  liez, 
Damedeu  en  aore,  le  glorios  dou  ciel  ; 
Son  nevou  en  apele,  si  li  a  consoillié  : 
«  Biax  niés  »,  ce  dist  li  dus,  a  ce  est  mes  moitoiers; 
3 220  «  Certes,  molt  est  prodons  por  son  seignor  aidier. 
«  Mais  ce  ne  sai  Je  mie  s'a  Malingre  se  tient. 
«  Je  me  voudrai  enuit  avec  lui  haubergier, 
«  De  diz  et  de  paroles  le  voudrai  essaier.  (v" 

—  Sire  »,  ce  dist  li  enfes,  «  com  vos  plaira  si  [i]ert  ». 
3225  Li  dux  Doz  se  leva,  qui  molt  fu  ensoigniez  : 

«  Dex  te  saut  !  gentis  bons,  es  prevoz  ou  voiers  ? 
«  Le  seignor  de  ceanz  ses  me  tu  ensoignier? 

—  Oïl  »,  ce  dist  Bernars,  «  que  li  proz  en  est  miens, 
«  Si  me  claiment  seignor  mi  fil  et  ma  moillier. 

323o  —  Amis  »^  ce  dist  li  dux,  «  Dex  en  soit  graciez. 
«  Faites  nos  enuit  mais  avec  vos  haubergier, 
«  Por  amor  Deu  de  gloire  nos  donez  a  mangier  ». 


33o3  en,  ms.  es.  —  32 10  Z.  redoz.  —  32 11  L  S.  dient  li  enfant. 
—  32 16  joianz,  ms.  joieulx.  —  322o  son,  ms.  ces.  —  3225  L  en 
soignier  (en  deux  mots).  —  323 1  Le  ms.  omet  mais;  avec,  L.  o, 
ms.  ou.  —  3232  L.  maingier;  de  même  vv.  3273,  32  j6,  etc. 


120  DOON    DE   LA    ROCHE 

Etrespondi  li  maires  :  «  Par  mon  chief,volentiers; 

Ainz  nou  veai  a  home  ;  anuit  n'ert  commencié. 
3235  —  Amis  »,  ce  di[s]t  li  dux,  «  granz  mercis  en  aiez; 

«  Cist  bois  par  est  molt  granz,  si  m'a  fort  travaillié; 

«  Et  cis  pais  est  gastes,  povres  et  essilliez. 

«  Comme  Doz  en  fu  sires,  ce  fu  torz  et  péchiez; 
f^'         «  Par  sa  grant  coardise  a  cest  pais  laissié. 
3240  «  Ja  Damedeu  ne  place  que  il  soit  repairiez, 

«  Si  ait  eu  dou  cors  si  mortel  encombrier 

«  Comme  mes  cuers  le  vuet  et  je  le  vuel  proier  ». 

Quant  l'entendi  li  maires,  molt  en  fu  corrociez. 

Son  mantel  deffubla,  si  sailli  sus  ses  piez, 
3245  De  son  baston  meïsmes  le  vot  ferir  ou  chief, 

Quant  sui  .ij.  fil  i  corrent,  Gilliberz  et  Gantiers; 

Puis  li  a  dit  :  «  Truanz,  bien  semblez  pautoniers  ; 

«  Ce  vos  puet  on  bien  dire,   ou  por  musart  changier, 

«  Qui  mesdites  [i]ci  dou  meillor  chevalier 
325o  «  Qui  onques  portast  armes  ne  montast  sor  destrier; 

«  Mais  li  dux  fu  traiz  ;  ce  fu  dues  et  péchiez 

«  Et  cil  qui  le  traïrent  en  avront  mal  loier. 

«  Alez  autre  ostel  querre  :  failli  avez  au  mien; 

«  Ja  dedenz  ceste  barre  ne  métrez  mais  le  pié  ». 
3255  Quant  l'entendi  la  dame,  si  l'en  pri[s]t  grant  pitié  : 

«  Por  Deu,  merci,  biax  sire,  nobiles  chevaliers  ! 

«  Se  il  dirent  folie,  ne  s'en  sorent  gaitier, 

«  Ne  ja  por  lor  parole  n'ert  li  dux  enpiriez. 

«  Quant  vos  les  hauberjastes,  por  Deu  nés  enchaciez; 

^.  n  ,. 
3284  veai,  L.  et  ms.  vaiai  ;  ms.  commancier.  —  3236  Ms.  Si 

b.  m.  p.  e.    grans;  L.  porte,  au  lieu  de  grans,  un   assemblage 

de  lettres  dénué'  de  sens  Ijezas.  —  3238  vers  probablement  altéré; 

cf.  plus  bas  V.  3366.  —  3238  L.  poichiez.  —  3240  L.  Damedex. 

—  3244  V.  coupé  dans  L.  —  3246  sui,  ms.  ces.  —  3249  ici,  ms,  ce; 

L.  moiilor.  —  325 1  L.  Mas.  —  3253  autre  ostel,  L.  ûre  o.,  ms. 

vostre  oste.  —  3258  Ms.  nen  ert;  L  ci.  enperiez,  ms.  d.  enpirier.  — 

3259  L  haubergetes,  ms.  haubergeres,  lecture  à  laquelle  peut,  à  la 

rigueur,  se  prêter  L.,  mais  cf.  32gy , 


DOON   DE   LA   ROCHE  121 

3260  «  Enuit  les  mangeroient  ors  ou  lion  ou  chien  ; 

«  Por  no  droit  seignor  lige  le  vos  ruis  et  requier; 

«  Que  Dex,  par  son  cotnmant,  le  doinne  repairier  ! 

—  Dame  »,  ce  di[s]t  li  maires,  «  corn  vos  plaira  si  [i]ert, 

«  A  vo  talant  en  faites,  ne  m'en  entremet  riens  ». 

3205  Toz  les  degrez  de  maubre  en  montent  ou  planchier, 
Et  la  dame  les  moinne  sus  ou  terrin  celier 
Ou  on  fait  la  cu[i]sine  et  la  mesnie  siet  ; 
De  lait  et  de  frommaige  i  sont  li  mes  plenier 
Et  de  flaons  noviax  et  de  pain  tôt  musié  ; 

3270  De  la  froide  fontainne  se  pue[e]nt  aaisier. 
Et  quant  li  dux  le  voit,  s'en  fu  joianz  et  liez. 
«  Biax  niés  »,  ce  dist  li  dux,  «  cist  est  biax  vivandiers, 
«  Certes,  molt  est  prodons  :  assez  done  a  mangier; 
«  Damedex  me  confonde  se  il  n'est  corrociez». 

3275  II  a  bote  la  table  laidement  de  son  pié, 

Trestot  a  respandu  le  boivre  et  le  mangier, 
Dont  en  tindrent  lor  feste  et  braichot  et  lévrier. 
«  En  la  moie  foi,  sire,  ne  somes  pas  bergier 
«  Que  nos  de  tel  viande  dëussiens  aseier. 

3280  «  En  la  terre  de  France  n'en  vi  onques  mangier; 
«  Vos  en  verrez  demain  ces  ma[s]tins  enragier. 
«  Nos  l'avons  en  costume,  en  France  et  a  Poitiers, 
«  Quant  bons  hauberge  autrui,  qu'il  le  conroie  bien, 
«  De  pocinèz  pevrés  et  [de]  gastiaus  broiez 

3285  «  Et  vin  et  ysopé  tant  com  li  est  mestiers. 

*«  Et  se  tu  vuels,  bel  oste,  tel  viande  nos  quier, 
«  Et  se  tu  nel  vuels  faire,  remés  est  nos  mangier. 
«  Se  venons  a  La  Roche,  nos  l'amanderons  bien.  » 
Quant  Tentendi  la  dame,  s'a  son  talent  changié, 

3260  Z,.  maingeroiens.  —  3261  L  P.  nos  droiz;  ms.  P.  vos  drois 
s.  liges  le  v.  prie  et  r.  —  3265  L  plainchier.  —  3269  tôt,  ms.  sont. 
—  3272  Ms.  SI  e.  b.  —  3277  braichot,  ms.  broches.  Vers  perdu 
après  ce  vers?  —  3279  dëussiens  mq.  ms.  —  3283  autrui,  L  et  ms. 
autre  {cf.  3333);  L.  conraie.  —  3286  et  3287  vuels,  L  viels,  ms, 
vuels  (vues).  —  3288  Ici  s'arrête  le  fragment  L. 


i^iH' 


Îi2  DOON   DE   LA   ROCHE 

3290  Car  d'espie  [Tomile]  se  soingne,  dote  et  crient; 
Au  maufé  les  commande  ei  a  vif  aversier  ; 
Son  baron  le  va  dire  et  a  ses  filz  noncier. 


xcxv 

La  dame  ist  de  sa  chambre,  si  entre  en  sa  maison, 
Par  les  maistres  degrez  en  monta  contremont  ; 
3295  Quant  la  vit  li  frans  maire,  si  l'a  mis[e]  a  raison  : 
«  Dit[es]  moi,  bêle  dame,  vo  pèlerin  que  font? 
«  Arsoir  les  hauberjastes  ou  je  vousisse  ou  non, 
«  Por  mon  droit  seignor  lige  vos  en  dona[i]  le  don. 

—  A  la  moie  foi,  sire,  je  n'e[n]  sai  se  mal  non  ; 
33oo  «  Plus  sont  de  fier  coraige  et  hardi  com  lion. 

«  No  vitaille  et  nos  tables  ont  bote  en  .j.  mont, 

«  Or  en  tienent  lor   feste  et  braichot  et  waignon; 
.IV'        «  Damediex  me  confonde  se  ce  pèlerin  sont  ! 

«  Je  cuit  que  sont  espies  Malingre  et  Audegour      (/»  63) 
33o5  «  Qui  nostre  avoir  espïent  e  no  riche  maison; 

«  A  tart  vos  vendra  mais  li  secor[s]  de  Doon. 

«  Certes,  li  dux  est  morz,  ou  il  gist  en  prison  ». 
.«•1         Quant  l'entent  li  frans  maire,  molt  pensa  a  baston, 

Ses  ,ij.  filz  en  apele,  Gilebert  et  Simon  : 
33 10  «  Alons  ou  sosterrin  por  veoir  les  glotons, 

«  Se  il  ne  sevent  rendre  escondit  ou  raison, 

«  Damediex  me  confonde  se  il  mal  ostel  [n'Jont  ! 

«  Ja  por  lor  dos  bien  batre  mar  iront  a  Soissons. 

—  Sire  »,  dient  si  fil,  «  nos  irons  avec  vos, 

33 1 5  «  Mais,  se  Deu  plai[s]t  de  gloire,  ja  ne  le  penserons, 
«  Quant  vos  les  hauberjastes,  nul  mal  ne  lor  ferons 

3290  crient,  ms.  craint.  —  3293  sa  ch.,  corr.  la  ch.  (?)  —  3295 

"^'vit,  ms.  vint.  —  3296  q.  f.  il.  —  33o2  braichot,  ms.  broiches  ;  cf. 

V.  32yj .  —  33o4  Je  cuide  que  ce  sont  e.  —  33o5  Qu'en.  -:-  33o8 

baston,  ms.  baron,  cf.  v.  3322.  —  33io  ou  sorterrin.  —  33i4  d. 

ces  filz.  —  33 1 5  se,  ms.  ce.  ^r  "" 


DOON   DE   LA   ROCHE  12$ 

«  Pour  tel  vitaille  perdre,  car  assez  en  avons, 

«  Et  mo!t  plus  de  meillor  se  doner  les  volons  ». 

Par  les  mai[s]tre[s]  degrez  en  montent  contremont  : 

3320  Encor  trueve[nt]  le  duc  et  son  nevouselonc, 
Ou  atendentla  dame  que  a  mangier  lor  dont. 
Atant  es  le  maior,  en  sa  main  ,j.  baston, 
Par  estrif  et  par  ire  mi[s]t  le  duc  a  raison  : 
«  Dites,  vassaus,  qui  estes,  et  comment  avez  non, 

3325  «  Ou,  par  le  cors  saint  Pierre  c'on  quiert  em  pré  Noiron, 
«  De  no  vitaille  espandre  aurez  tel  g[ui]ardon, 
«  Tel  com  on  [en]  doit  faire  a  encrime  félon  ; 
«  Ainz  oste  ne  trovastes  si  fel  ne  si  félon, 
«  Qui  espandi  ma  table,  [ou  je]  vosisse  ou  non. 

333o  —  Sire  »,  ce  dist  li  dux,  «  Frobert  m'apele  on, 
«  Cest  mien  compain  apele[nt]  Espovante-felon. 
«  En  la  terre  de  France  acostumé  avons, 
«  Quant  on  hauberge  autrui,  que  bel  ostel  li  font 
«  De  pocinèz  pevrez,  de  haste  de  chapon, 

3335  «  Et  vin  et  isopé  assez  et  a  foison; 

«  Onques  ne  vi  mangier  fromaige  ne  maton  ; 

«  Vos  en  verrez  demain  enraigier  ce[s]  gaignons. 

—  Amis  »,  ce  dist  li  maire,  «  assez  vos  en  donrons;  t 

«  Ci  manja  .j.  avesque[s],  passé  a  .iiij.  jors, 

3340  «  Assez  nos  en  remest  pain  et  vin  et  poisson, 
«  Aloues  en  pastez  et  bons  esturions, 
i  «  Nos  n'en  manjasmes  onques,  car  apris  ne  l'avons  ». 

I  Davantlor  en  fist  mètre  de  ci  a  .iiij.  jors. 

Et  li  dux  en  manja,  s'en  dona  son  nevou, 

3345  Aval,  parmi  la  table,  pastoriaus  et  garçons. 


f 


33i8  les,  sic  ms.,  corr.  lor  (?)  —  3323  estrif,  ms.  estre.  —  3326 
noz  vitailles.  —  3328  fel,  corr.  fier?  Le  sens  se  suivrait  mieux 
si  on  faisait  passer  ce  vers  après  le  suivant.  —  3329  La  resti- 
tution est  justifiée  par  le  v.  32gy.  —  333 1  c.  apele  on.  — 
3333  autrui,  ms.  autre.  —  3338  maire,  ms.  dus.  —  3344  *"  ro-> 
corr.  n'en  m.  (?);  do.  as.  n. 


124  DOON    DE   LA   ROCHE 

Etdïentli  .j.  l'autre  :  «  Cil  paumiers  est  prodons. 
«  Ci[l]  sire  le  garisse  qui  sofri  passion  !  » 

XCXVI 

Li  dux  sist  a  [la]  table,  qui  les  morciaus  tailla 

Et  versa  Jofroi  vin,  as  pastoria[x]  dona. 
335o  Celé  nuit  fu  li  dus  a[s]  pastors  seneschals, 

Et  dïent  li  .j.  l'autre  :  «  Deu  !  quel  paumier  ci  a! 

Jhesus,  li  rois  de  gloire,  le  garisse  de  mal  !  » 

A  iceste  parole  estes  vos  Bernehart, 

Vestuz  .j.  peliçon  qui  jusqu'a[s]  piez  li  bat  ; 
3355  Ou  qu[e]  il  voit  le  duc,  Frobert  l'en  apela  : 

«  Dites,  sire  Frobert,  est  nostre  mangiers  saus  ? 

«  Gardez  ne  porchaciez  ne  traison  ne  mal; 

«  Il  n'est  pas  [a]  costume  que  ja  nulz  bons  se  gart 

«  De  prendre  tel  vitaille  com  ses  ostes  avra,  (/°  64 

336o  «  Mais  volentiers  en  prengne  [com  la  trueve]  en  trespa; 

«  L'endemain  prengne  mieus,  se  il  puet  et  il  l'a. 

—  Sire,  »  ce  dit  li  dus,  «  prisie  est  ceste  char 

«  Et  ci[s]  vins  est  boutez  .vij.  ans  [et  plus]  i  a; 

«  Maleoite  soit  il  de  Deu  qui  l'escota  ! 
3365  «  Et  cist  pais  est  gastes,  que  prodome  n'i  a; 

«  Comme  Do  en  fu  sire,  l'amistié  en  passa, 

«  Par  sa  grant  coardise  le  guerpi  et  laissa, 

«  Et  la  dame  [et]  la  terre,  quant  fuant  s'en  ala. 

«  Ja  Damedieu  ne  place  que  jamais  i  a[it]  part, 
3370  «  Ne  jamais  i  revoingne,  que  trop  mal  fait  i  a  !  » 

Quant  l'entendit  li  maire,  son  mantel  defubla, 

3346  li  .j.  a  l'a.;  on  pourrait  conserver  cette  leçon  et  changer 
dient  en  dist  ;  de  même  au  v.  335 1.  —  3347  ^^  nostre  sire  le 
garissent.  —  3349  au  pastoria  d.  —  335i  li  .j.  a  l'a.;  cf.  la  note 
du  V.  3346.  —  3355  V.  li  d.  —  3356  saus,  ms.  sans.  —  336i 
prenant  m.;  se  il,  ms.  si.  —  3364  ^^^'^  altéré  ;  il,  corr.  el  (?)  —  3365 
cist,  ms.  cest;  n'i  a,  ms.  uie.  —  3366  Com  D.  en  f.  s.  tôt  la 
moistié  en  pesa.  —  3370  q.  trope  m.  i,  a  f. 


DOON    DE   La|rOCHE  125 

Il  aprocha  au  feu,  .)•  baston  en  sacha, 
Et  vot  ferir  le  duc,  quant  ses  filz  li  osta, 
Et  sa  moiller  la  gcnt[e]par  les  flans  l'embrasça... 
3375  «  Par  foi,  [sirej  Froberi,  molt  me  tiens  por  musart; 
«  A  pou  que  ne  t'ai  mort  et  ton  compaignon  ars, 
«  Quant  vos  ci  me  mesdites  dou  seignor  natural 
«  Qui  ja  tint  cest[e]  tere  et  encor  la  tenra. 


XCVII 

«  Par  la  foi  Dieu,  Frobert,  je  vos  tien  a  bricon  ; 
338o  «  A  pou  ne  vos  ai  mort  et  ars  vo  compaignon, 

«  Quant  vous  me[s]dites  ci  dou  riche  duc  Doon, 

«  Dou  meillor  chevalier  qui  chauça  esperon  ; 

«  Et  cil  qui  le  traïrent  en  avront  guerredon. 

—  Sire  »,  ce  dit  le  dus,  «  trop  savés  de  sermon; 
3385  «  Se  vos  fuissiez  evesque,  molt  fuissiez  riche[s]  hons. 

«  Mettez  nos  hors  dou  bois  .iij.  Hues  davant  jor;  (v" 

«  Pourcoi  si  le  ferez,  ou  vos  veuUiez  ou  non.  » 

Quant  l'entendi  li  maifle,  molt  pesa  au  baron, 

Il  tressailli  en  pies,  si  a  pris  .j.  baston; 
3390  Et  si  fil  ne  li  vourent  mais  proier  des  baron[s], 

Hors  de  l'ostel  les  boutent,  ou  vousissent  ou  non. 


XCVIII 

Or  sont  andui  li  conte  hors  de  la  baitre  a  plein; 
.1.  pleuge  chiet  froide,  qui  forment  les  destreint. 


3372  sacha,  ms.  faicha.  —  3373  ses,  ms.  ces. —  3373  P.  ma  f. 
Vers  perdu  entre  ce  v.  et  le  précédent?  —  3376  mort,  ms. 
mors.  —  3379  au  b.  —  338o  ne,  ms.  je  ne;  vous  compaignons. 
—  3386  Mestcs;  de  cest  b.;  d.  le  j.  —  3387  Vers  obscur  ;  lacune 
entre  ce  vers  et  le  précédent?  —  3390  p.  dou  baron.  —  3392 
baitre,  corr.  bare(?),  comp.  v.  3254.  —  3393  chiet,  ms.  chief. 


I2b  DOON    DE    LA    ROCHE 

Li  dus  [Do]  tient  a  jeu  de  Joffroi  qui  se  plaint  : 

3395  «  Beaus  niés,  forment  me  poise  que  de  trambler  te  foing; 
«  Vostre  manteaus  ...  n'est  pas  forrés  de  plain, 
«  Tôt  a  ese  est  li  povre  qui  n'a  ostel  ne  pain  ; 
«  Quant  il  en  vait  a    Rome  ou  a  Jherusalem, 
«  Ja  plus  n'avra  plenté  que  bare  a  autrui  main. 

3400  — Sire,  wcedist  li  enfes,«  carcil  froismedestraint: 
«  Se  enuit  n'ai  ostel,  ja  ne  verrai  demain  ». 
La  famé  Be[r]n[eh]art  en  [a]  oï  le  plain[t]  : 
«  Por  Dieu,  merci,  beaus  sire,  des  pèlerins  est[r]ains, 
«  Enuit  les  mangeront  ors  ou  lion  ou  dain, 

3405  «  Ou  il  morront  la  hors,  ou  de  froit  ou  de  fain  ; 
«  Enuit  les  harbergiez,  si  s'en  iront  demain  ; 
«  Por  amor  vo  seignor  le  ru  je  et  reclain, 
«  Que  Damedeu  de  gloire  par  tens  le  vos  ramaint 
«f  Et  confonde  Tomile  et  ramaint  Olivain, 

3410  «  Et  destrue  Audegour,  celle  maie  putain! 

«  Cil  paumier  sont  molt  sot  et  estout  et  vilain, 

«  Abatue  ont  vo  table,  ja  pour  ce  n'avrons  mains. 

«  Sire,  merci  te  pri  por  le  cors  saint  Germain.  [f  65) 

—  Dame  »,  ce  dist  li -maire,  «  de  folie  me  plain  ; 

3415  «  A  vos  talans  en  fait[es],  c'est  li  plus  et  li  main[s]  ; 
«  Certes,  ra[u]smone  d'eus  ne  pris  je  pas  .j.  pain  ». 
Quant  ce  oit  la  dame,  si  prist  la  clef  au  çain[t], 
Les  pèlerins  rappelle,  ne  iaira  nés  ramaint. 
Et  li  maire  en  monta  en  son  palais  [hjautain. 

3420  La  dame  ouvrit  la  porte,  ses  mit  ens  par  la  main; 
De  diz  et  de  folie  les  chastie  et  destraint  : 
'  '.  «  Pèlerin,  trop  par  est[es]  fel  et  félon  et  vain,  » 


339486,  ms.  ce.  —  3395  foing,  sic  ms.,  altéré,  l.  teins  (?).  — 
3396  vers  incomplet  ou  altéré]  l.  V.  m.  [est  povres]  n'e.  p.  (?)  — 
339g  bare,  sic  ms.  —  34^4  ^SlIU  ms.  dains.  —  34o5  fain  ms.  fains. 
—  3406  si,  ms.  cis.  —  3407  de  vos  s.;  ru,  ms.  rue.  —  3409  et  si 
ramaine  Olive.  —  3415  t.  en  fait  iest  li  p.  —  3417  si  p.  la  clef  au 
çaint,  ms.  si  p.  la  cler  au  cain.  —  341g  monta,  ms,  monte.  — 
3430  SCS  ms.  ces. 


♦    DÔON   DE   LA*- ROCHE  1^7 

Le  feu  fait  alumer  Arembour  et  Bertain  ; 
Les  .i).  filles  la  dame  alument  a  ,j.  plain, 

3425  Veullent  ou  non,  lor  tollent  les  bordons  de  lor  main, 
Deus  manteaus  lor  afublent,  qui  ne  sont  pas  vilain, 
Forré  furent  de  gris,  covert  d'un  drap  [d']estain, 
Qui  fut  ouvrés  en  Inde,  en  .j.  pais  lointain; 
Assez  [i]  orent  pomes  [et]  poires  et  parmain[s] 

3430  Et  .).  hanap  de  madré,  qui  d'isopé  fu  plain. 
Bien  fut  servi[s]  li  dus,  de  folie  se  plaint  ; 
Joffrois  doute  son  oncle,  que  mais  ne  les  pormaint, 
Du  froit  qu'il  a  soffert  a  son  visaige  taint  : 
«  L'estre  dehors,  beaus  oncle[s],  certes  n'est  mie  sains; 

3435  «  Laissiez  vostre  folie,  bien  pouez  faire  a  mains, 

«  Damedieus  me  confonde  se  sui  plus  vo  compains  !  » 
Quant  l'entendi  li  dus,  parmi  les  flans  restreint. 
Atant  es  vous  Bernart,  de  molt  grant  ire  plein, 
Vestu  d'un  peliçon,  .j.  baston  en  sa  main, 

3440  Et  regarde  le  duc  as  lon[s]  doiz  et  as  mains,  (v*) 

Et  ot  ou  poing  .  j.  seing,  [qui]  de  vermeil  [fu]  teins, 
Qu'aporta  de  sa  mère,  quant  nasqui  primerains; 
Ains  ne  le  pot  laver  eve  chaulde  ne  bains 
Ne  onque[s]  pornul  basme  nen  i  pot  avoir  meins. 

3445  Quant  il  choisi  la  tache,  dont  fu  il  bien  certain[s] 
Que  c'est  Do  de  la  Roche,  li  mari[s]  Olivain. 
—  Sire,  par  le  baptême,  par  coi  Dieu[s]  vos  destreint, 
«  Dite[s]  moi  qui  vos  estes,  que  je  soie  certains, 
«  Car  por  mon  seignor  lige  t'esgart  et  entreprains. 

XCIX 

3450  —  Certes  »,  ce  dist  li  dus,  «  jel  dirai  voirement  : 
«  Je  sui  Do  de  la  Roche,  sachiez  a  escient; 

3423  A.  a  B.  —  3426  qui,  ms.  ci  —  343o  Et,  ms.  En;  qui,  ms. 
que  —  3434  Lestres  —  3441  .j.  soing  de  vemoille  taint  —  3444 
basme,  ms.  blasme  —  3446  li  ms.  le  —  3450  je  le  d . 


128  DOON    DE   LA   ROCHE       ♦ 

«  Je  ai  esté  maint  jor  en  peine  et  en  torment.  » 
Quant  l'entendi  li  maire,  devant  ses  pies  s'estent, 
De  la  joie  qu'il  a  toz  li  cors  li  resplent, 

3455  Vint  fois  li  [a]  baisé  la  jambe  voirement, 
Et  sa  femme  et  si  fil  le  baisent  doucement. 
Dont  demanda  novelle-de  sa  femme  Olivant. 
—  A  la  moie  foi,  sire,  ja  l'orrés  aparmant  : 
«  Ele  a  prise  La  Roche,  s'est  entrée  dedens, 

3460  «  Ghacié  en  a  Tomile  et  lui  et  ses  parens, 

«  Et  Audegour  sa  fille  est  cheue  en  torment.  » 
Quant  l'entendi  li  dus,  molt  en  devint  joians. 


Grant  joie  en  ot  li  maire,  quant  conut  son  seignor; 
Qui  veist  le  barnage  que  si  .ij.  fil  li  font 

3465  Et  li  père  et  la  mère,  ains  bons  ne  vit  graignor. 
Li  enfant  li  baisèrent  les  pies  et  les  genous. 
Et  la  dame  et  li  maire  le  vis  et  le  ma[n]ton. 
Dont  demanda  novele  de  sa  femme  Audegour.      (/«  66) 
«  Sire  »,  li  dist  li  maire,  «  dont  ne  me  créez  vos? 

3470  «  Olive  l'a  en  chartre  avalée  en  parfont, 

«  Des  maus  que  li  a  fait  li  rendra  guerredon, 

jj        «  Par  l'effort  de  l'evesque  ;  Diex  li  otroit  pardon  ! 
«  Tomiles  et  Malingre  droit  a  Maiance  sont 
«  Et  lor  felon[s]  lignage[s],  dont  .iiij^''.  [i]  sont; 

3475  «  La  escillent  la  terre  entor  et  environ  ; 

«  Cil  Sire  les  confonde,  qui  sofri  passion  !  » 
El  respondi  li  dus  :  «  Nos  les  departiron, 

3452  mains  j.  —  3453  ces  p.  —  3466  li  b.  —  3467  sa  f.  Olive 
—  3458  l'o.  a  parmant  {en  deux  mots).  —  3460  ses,  ms.  ces  — 
3462  d.  joieulx  —  3464  ces  .ij.  fils  —  3466  Li  enfes  —  3467 
maire,  ms.  maistre.  —  3470  en  la  ch.  —  3471  que,  ms.  qui  — 
3472  otroit,  ms.  ottroie.  —  3474,  felonc  I.,  sont,  sic  ms.,  corr. 
[en]  ont  (?)  •      ■ 


DOON   DE   LA    ROCHE  I  29 

«  Se  Dieu  plaist  et  saint  P[i]ere, qu'on  quiertelPréNoiron.» 
Dont  aprestent  les  liz,  s'i  couchent  li  baron. 


CI 


3480  Grant  joie  ot  li  frans  maire  quant  le  duc  ot  couchié, 

De  frés  dras  et  nouveaus  le  porvoit  et  porquiert; 

Il  a  levé  sa  main,  si  Ta  de  Dieu  seigniet, 

Puis  a  esteins  les  cierges  pour  la  clartés  qui  vient. 

Au  matin,  par  som  l'aube,  l'est  aie  esveillier, 
3485  A  .iiij.  chandelabres,  et  il  et  sa  moillier. 

«  Sire  duc  de  bon  aire,  vestez  vos  et  chauciez, 

«  Tant  a  li  cos  chanté  que  jour[s]  est  esclarciez.  » 

Quant  l'entendi  li  dus,  si  fu  joios  et  liez. 

Damedieu  reclama,  qui  en  crois  lu  dreciez  : 
3490  «  Car  me  rendez  m'enoret  ma  gente  moillier, 

«  Olive  la  roial,  cui  lis  tant  encombrier. 

—  Sire,  »  ce  di[s]t  li  maire,  «  ores  de  l'esploitier  ». 

Et  respondi  li  dus  :  «  Par  ma  foi,  voleniier[s].  » 

Il  a  levé  sa  main,  si  a  seignié  son  chief. 
34.95  Et  li  maire  li  baille  .j.  osterin  molt  chier 

Et  Jofroi  son  neveu  .j.  bliau[t]  de  cartier.  {v°) 

«  Amis,  »  ce  di[s]t  li  dus,  «  tout  ce  ne  m'est  mestier, 

«  Mais  les  dras  nous  rendez  que  ci  apona[i]  hier  ; 

«  Vos  .V.  filz,  s'il  vos  plaist,  les  ainez  me  cherchiez, 
35oo  «  Si  soient  povremeni  et  vestu  et  chaucié. 

«  Grant  mal  doit  li  hons  traire  por  son  seignor  aidier; 

«  J'en  irai  a  La  Roche  Olivain  essaier  ». 

Quant  l'entendi  li  maire,  joious  en  fu  et  liez; 

Cel  jour  vesti  ses  filz  les  dras  a  ses  bergiers, 

3478  en  p.  N.  —  347g  s'i,  ms.  ci.  —  3480  ot  couchier.  —  3481 
d.  et  de  n.  —  3482  D.  seignier.  —  3483  les,  ms.  ces.  —  3484 
soubs  l'a.  —  3495  .j.  estour  m.  c.  —  3499  s'il,  ms.  cil  ;  me  cherqiés. 
—  35o2  Olivain,  ms.  Olive.  —  3 304  Ces  jours;  ses  ...  ses,  ms. 
ces  .. .  ces  *^        '       "" 


l3o  DOON    DE    LA    ROGHÈ 

35o5  Si  n'orent  nulles  chausse[s],  escapins  ont  chaucié. 
Au  père  et  a  la  mere  prinrent  li  fil  congié, 
Et  Bernars  si  cria  :  «  Enfant,  a  Dieu  ailliez, 
«  Pensez  de  vo  seignor  maintenir  et  aidier, 
«  Ou,  par  le  saint  apostre  qu'om  a  Rome  requiert, 

35 lo  «  Ja  ne  avrez  du  mien  vaillant  .iiij.  deniers, 
«  Ne  de  mon  tenement  ne  herite[z]  ne  fiés.  » 
Li  maire  les  convoie  .j.  grant  pièce  a  pied. 
Quant  la  nuit  lor  defîaut,  li  jors  est  esclariez, 
Li  soleii[z]  raie  chaut  qui  d'Orient  lor  vient; 

35  1 5  Li  dus  garde  sur  destre,  s'a  veû  le  clochie[r] 

Du  chastel  de  La  Roche,  la  tour  et  le  moustier. 
'(  Baron  »,  dist  li  dus  Do,  «  tant  avons  esploitié 
*       a  Que  je  voi  de  La  Roche  les  murs  et  les  terrie[r]s  ; 
«  La  dedans  maint  Olive  qui  ja  fu  ma  moillier, 

?520  «  Nous  fumes  desevré  a  tort  et  a  pechié. 
«  Je  me  voudrai  enuit  avec  li  haubergier, 
«  De  diz  et  de  paroles  la  voudra[i]  essaier, 
«  Son  corage  esprover  se  ele  m'aime  riens. 
«  Gardez  ne  dites  riens  de  quanque  vous  orriez  ». 

3525  Et  cil  li  respondirent  :  «  Corn  vos  plaira,  si  [ijert.  » 
Il  se  geta  a  terre  desoz  .j.  olivier, 
Et  se  sont  une  pièce  dormi  et  someillié, 

,  Car  li  dus  et  Jofroiz  furent  molt  travaillié; 

Puis  prennent  lor  bordons  quant  se  sont  esveillié; 

353o  S'acoillent  lor  chemin,  ne  se  voudrent  targier. 
Quant  vindrent  a  La  Roche,  si  fu  li  jour  moiés, 
Les  vespres  sont  sonée[s]  par  le  bourc  au  moustier, 
Es  rues  de  la  ville  sont  entré  sans  congié; 


35o5  escapîns,  nts.  escapint'.  —  35o6  les  filz  c.  —  35o7  si, 
tns.  ci;  Enfant,  ms.  Enfans.  —  35o8  P.  de  vos  seigneurs.  —  35 17 
a.  esploitier.  —  3523  se,  ms.  ce.  —  3524  v.  orer.  —  3525  Com, 
ms.  Corne.  —  3526  geta,  ms.  giete.  —  3527  se,  ms.  ce,  d.  et 
somoillier.  —  3528  m.  travaiilier.  —  3529  et  353o  se,  ms.  ce.  — 
3533  congié,  ms.  congiés. 


DOON    DE   LA   ROCHE  l3l 

Il  trespassent  la  ville  et  le  inai[sjtre  marchié... 

3535  Devant  l'uis  de  la  sale  encontra  sa  moillier, 

Ou  ele  vient  de  vespre[s],  a  .xxx.  chevaliers;  * 

Li  dus  se  met  devant,  bien  resemble  paumier, 

Et  salue  la  dame,  ne  se  vot  plus  targier. 

«  Duchesse  debonaire,  »  dist  li  dus,  «bien  veigniez.  » 

3540  La  dame  le  regarde,  le  vit  bien  afaitié. 

«  Seignor,  dont  estes  vous?  Diex  vos  ...,  paumiers  ». 
—  «  Dame  »,  ce  distli  dus,  «  de  douce  France  vieng, 
«  Dou  règne  vostre  frère,  Pépin  qui  France  tient; 
«  Je  m'en  vais  a  Coloigne  a  saint  P[i]ere  proier. 

3545  «  Faitefs]  nos  [ci]  enuit,  se  vos  plai[s]t,  haubergier  ». 
Et  respont  la  duchesse  :  «  Par  ma  foi,  volentier[s]  ; 
«  Pour  Dieu  et  pour  mon  frère  serez  bien  haubergié.  » 
Son  seneschal  apele,  le  cortois  Flori[i]en  : 
«  Moine  moi  ces  .vu.  homes  lassus  en  ces  planchier[s]  ; 

355o  «  Si  soient  enuit  mais  richement  aesié, 

«  Le  matin  par  som  l'aube  revestu  et  baignié;  (v«) 

«  Si  lor  donez  .x.  livres  de  bon[s]  colonoissiens, 
«  Qu'en  la  ter[rie  de  France  se  puissent  repairier, 
«  Si  diront  a  mon  frère  les  nouvelles  de  bien.  » 

3555  Et  dist  li  seneschaus  :  «  Par  ma  foi,  volentier[s]  ». 
Toz  les  degrés  de  maubre  les  enmeine  es  planchier[s]. 


en 


Or  est  Do  de  La  Roche  morite[z]  [sus]  en  sa  Sâïe, 
En  son  alué  demoine  de  son  droit  héritage, 


3534  m.  marchier.  —  3535  Entre  ce  vers  et  le  vers  précédent, 
il  faut  admettre  une  lacune  :  Doon,  qui  va  entrer  dans  la  «  sale  », 
devait  être  nommé.  —  3537  met,  ms.  mit.  —  3538  se,  ms.  ce.  — 
3540  r.  se  le  v.  —  3541  Seigneurs;  D.  v.  garisce  p.,  leçon  qui 
fausse  le  vers.  On  pourrait  proposer  D.  si  vous  gart,  p.  —  3543 
F.  Tieage.  —  3545  se,  ms.  si.  —  355 1  som,  ms,  soubz.  —  3553 
Quant  la  t.;  p.  repairiés. 


l32  DOON    DE   LA   ROCHE 

Dont  il  ne  doit  nul  home  servise  ne  chavage, 

356o  Et  voit  desour  ces  bans  asseoir  le  barnage. 
Les  viax  et  les  chenus  et  ces  de  joene  eage  ; 
Dont  ot  li  dus  pitié,  si  sospire  et  larme  : 
Diex  !  tant  de  mesestances  a  eu  en  son  eage, 
Quant  cil  ne  le  congnoissent  qu'a  nori[z]  a  sa  table  ! 

3565  Quant  li  soir[s]  s'aprocha,  si  demandèrent  l'aiguë  ; 
Cil  gentil  chevalier  s'asirent  par  ces  tables, 
La  suer  Pépin  de  France  se  siet  au  chief  des  altres, 
Bien  la  servent  devin  trestuit  li  conestable, 
Mais  li  dus  ne  gosta  des  premerains  mes  .iiij.; 

3570  Pitié  ot  de  la  dame,  membre  li  del  hontage. 
Quant  il  orent  mangié,  si  font  traire  les  napes, 
Cil  jugl[e]or  desponent  lor  chançons  et  lor  fables 
Mais  Olive  la  gente  ne  joe  ne  ne  gabe.  - 
Quant  li  desduiz  fu  faiz,  la  mesnie  s'en  partent, 

3575  Cil  chevalier  s'en  issent  et  les  degrez  avalent 

Et  les  gaites  montèrent  et  es  murs  et  [es]  flaides. 

Or  parlera  li  dus,  cui  soit  bel  ne  cui  plaise, 

Si  que  l'eve  del  cuer  li  coule  aval  la  face  : 

«  A  la  moie  foi,  dame,  molt  est  ces  pais  gaste[s]        {f.  68) 

358o  «  Et  povres  et  maldiz  et  alez  a  Deables. 

«  Li  duz  s'en  enfoui  per  son  malvais  corage  ; 

«  Quant  il  vos  ot  a  famé  ce  fu  duel[s]  et  domage[s]  ; 

«  Se  il  [i]  revient  mais  a  Noël  ou  a  Pasque, 

«  Se  vous  le  recevez,  ce  en  duel[s]  et  domage[s]  ; 

3585  «  Or  pouez  seignor  prendre  sans  [honte  et  sans]  domage, 


3559  d.  a  nulz  h.  —  356i  les  chenus,  ms.  les  joene  —  3562 
larme,  ms.  larmoie;  cf.  v.  42g8.  —  3565  s'aproche  ci  d.  l'aive. 
—  3567  au  ch.  desaintrcs.  —  3571  si,  ms.  ci.  —  3574  desduit  fut 
fait.  —  3575  d.  avaiilent.  —  3576  flaides,  sic  ms.  —  3578  Lacune 
entre  ce  vers  et  le  précédent?  —  358 1  enfoui,  ms.  a  foui  en  deux 
mots.  —  3584  L'expression  duels  et  domages  a  déjà  été  employée 
dans  les  v.  3582.  Un  des  deux  vers  doit  être  altéré,  d'autant  plus 
que  domage  revient  encore  au  v.  3585.  —  3584  prendre,  ms. 
panre.  '    '     v 


DOON    DE    LA    ROCHE  l33 

«  Molt  sera  fous  Pepin[s]  se  il  ne[l]  vos  porchace.  » 
Quant  l'entendi  la  dame,  le  siglaton  deslace 
Et,vo[l]t  ferir  le  duc,  mais  cenor  ne  li  laisse  : 
«  Par  mon  chief,dans  truans,  dit  avez  grant  oltrage. 

3590  «  Molt  fu  prodons  mes  sires  et  de  gentil  corage, 
«  Mais  li  ber  fu  trais  par  .j.  mauvais  linage; 
«  Glouton,  aies  gésir,  n'ai  soing  de  vostre  ostage, 
«  Jamais  n'avrez  de  moi  .j.  seul  denier  qui  vaille.  » 
La  duchesse  s'en  entre  en  sa  chambre  de  ma[u]bre, 

3595  Qui  fu  trestoute  peinte  a  oiseaus  et  a  brame[s]; 
Le  lit  a[s]  pelerin[s]  firent  en  mi  la  sale, 
Il  se  couch[i]erent  si  que  nuns  ne  se  desaise. 
Au  main  avant  le  jour,  ainsois  que  crevast  l'aube, 
Li  .vij.  baron  se  lievent,  si  s'adobent  et  s'arment, 

36oo  Et  mo[n]tent  as  fenestres  des  grans  paies  de  maubre; 
Li  dus  cria  «  Sobrie!  »,  s'enseingne  quenoissable. 
Quant  l'entendi  la  dame,  tuit  le  membre  li  faillent, 
Or  li  tremble  li  cors  et  li  mue  la  face. 
«  Laisse!  »  dist  la  duchesse,  «  ci  a  mal  haubergage, 

36o5  «Tôt  por  voir  m'a  traie  li  so[u]du[i]ans  lignage[s], 

«  Tomiles  de  Coloigne  et  Grifes  a  la  barbe  ;  (v°) 

«  A  non  Dieu,  sire  dus,  nos  amitié[s]  départent, 
«  N'oras  jamais  de  nos  nouvelles  ne  message[s], 
«  Ne  verras  ja  mon  fil  a  Noël  ne  a  Pasque. 

36 10  «  Par  Dieu,  Pépin  de  France,  vostre  secours  me  targe.  » 
De  duel  que  [a]  la  dame,  a  .iiij.  fois  se  pasme  ; 
Aval,  parmi  le  bourc,  en  oissiez  la  fable, 
Quant  li  baron  s'adobent  et  [li  chevalier  s'Jarment 
Et  viennent  a[s]  destroiz,  si  decopent  les  bares 

36 1 5  Et  jurent  Damedieu  truant  mar  i  entrarent. 

3586  s.  faus  P.  —  3588  le,  ms.  li;  cenor,  sic  ms.,  altéré.  — 
35g2  n'aies  s.  de  nostre  o.  {vers  trop  long).  —  3593  m.  que  .j.  s. 
d.  vaillent.  —  3598  avant,  ms.  devant.  —  359g  baron,  ms.  barons. 
—  36oo  as,  ms.  es;  maubres.  —  36oi  Sorbrie.  —  36o3  li  f.  — 
3607  vos  amitié.  —  3609  Ne  verres.  —  36i2  la  fable,  sic  ms., 
altérée  —  3614  si  decopes  les  baires. 


I  $4  DOON    DE    LA    ROCHE 

Di[s]t  Jofroi[z]  deMaiance  :  «  Ol  ai  grant  outrage, 
«  Molt  faitlionsque  fous  qui  son  seignor  menace, 
«  Ce  est  Do  de  La  Roche,  ne  nie  chaut  qui  le  sache.  » 
Quant  l'entendi  la  dame,  .j.  petit  s'asouage, 
3620  Ele  est  drecie  en  pié,  si  a  vestu  .j.  paile  ; 
Elç  jçsit  4e  U  chambre,  si  entra  en  la  sale. 


cm 


Or  est  dedans  la  tour  la  gentil  dame  enclose, 
Ensemble  [o]  son  mari,  qui  la  prist  a  espose  ; 
Ele  fu  prouz  et  sage  et  gentiment  parole  : 
3025  «  Dites,  vassals,  qui  es  si  hardis  et  si  nobles.. . 
«  Quant  vos  en  ces  palais  m'osastes  faire  choses? 

—  Dame»,  ce  dist  li  dus  «  c[e]  est  Do  de  La  Roche, 
Qui  t'aporta  de  France  a  plenté  et  a  noces. 

—  Sire»,  ce  dist  la  dame,  «  de  paour  m'avez  morte; 
363o  «  Se  vous  estes  mes  sire,  tost  en  ert  fait  l'acorde. 

«  Hé!  bers,  car  fais  ouvrir  ces  postiz  et  ces  portes, 

«  Si  monteront  as  uis  vo  baron  et  li  nostre.  » 

Li  .V.  fil  Bern[eh]art  les  euvrent  et  descloent  (/.  6g) 

Et  li  baron  i  montent  a  vertu  et  a  force. 

3635  Quant  il  treuvent  le  duc,  le  baisent  et  acolent. 
Cil  de  plus  riche[s]  fiés  lor  homage  li  offrent, 
Mais  sa  moillier  la  gente  de  rien  ne  le  conforte. 
«  Sire  »,  di[s]t  la  duchesse,  «  bien  sçai  l'avoirs  est  vostre 
«  Et  je  vous  reprendrai  a  honor  et  a  noces, 

3640  «  Mais  de  gésir  ensamble  n'i  avra  Ja  parole... 
«  La  cité  de  Sobrie,  le  chastel  et  la  roche 


3617  q.  foulx.  —  36i8  que  le  saiche.  —  3630  dreciés  en  p. 
ci  a.  -^  3025  q.  est  ci  h-  Lacune  après  ce  vers-  —  3626  choses, 
sic  ms.,  altéré?  -^  363o  Ce.  —  3632  m.  casuis  vos  barons.  — 
3634  a  vertus.  -^  3635  ce  b.  —  3636  fiés,  avant  ce  mot  Iç  ms. 
porte  chief  exponctué.  —  3638  S,  ce  d.;  l'avoirs,  ms.  le  voir,  r— 
3641  II  faut  supposer  une  lacune  entre  ce  vers  et  le  précédent. 


DOON   DE    LA   ROCHE 


l35 


a  Et  l'enor  de  Coloigne  que  li  gloton  vos  tollent... 
«  De  ci  que  a  dimanche  m'avrez  frainte[s]  les  portes 
«  Et  vous  m'avrez  rendu  Tomile  par  la  gorge 

3645  «  Et  il  avra  gehi  a  riches  et  a  povres 

«  Qu'il  coucha  le  garçon  [de]lez  moi  de  pute  ordre. 
—  Dame»,  ce  dist  li  dus,  «  ce  n[e]  iert  mie  encore  : 
«  Landris  voz  fils  i  vient  devers  Constantinoble 
a  Et  par  mer  et  par  terre  amoine  tel  efforce 

365o  «  Li  lignage[sj  Tomile  ne  se  pourat  estordre, 

«  Ains  achètera  fort  mon   hontage  et  le  vostre.  » 
Quant  l'entendi  la  dame,  sa  jo[i]e  li  efforce. 


GIV 


Or  a  Do  de  La  Roche  sa  cité  recouvrée 
Et  Olive  la  belle,  que  molt  a  désirée  ; 

3655  Le  jour  i  a  de  joie  maint[e]  larme  plorée. 
[Et]  li  dus  s'adouba  en  la  soie  contrée  ; 
Sa  moillier  lui  dona  haubert  et  bone  espée 
Et  hiaume  a  ce[r]cle  d'or,  bone  targe  roée  ; 
Les  armes  son  neveu  ne  sont  pas  obliée[s],        (v*>) 

366o  Les  .v.  filz  Bern[eh]art  les  a  bone[s]  donées. 
Li  dus  ist  de  la  ville  quant  l'aube  fu  crevée. 
Au  mostier  [le]  plus  mai[s]tre  s'ont  la  messe  chantée, 
Li  bon[s]  dus  d'Alemangne  l'a  de  cuer  escoutée, 
Son  auferrant  demande  et  sa  gent  est  montée 

3665  Et  vienent  a  Sobrie,la  ou  les  oz  trouvereiit. 

Et  Jofroi[z]  va  devant,  poi[g]nar^t  toute  l'estrée; 

Landris  ala  encontre,  si  demanda  son  père  : 

«  Qui  vos  dona  ces  armes,  avez  les  vos  emblées?  » 


3642  enor,  ms.  anor;  lacune  après  ce  vers.  —  3643  que  a,  ms. 
qu'a.  —  3644  rendu,  ms.  randus.  —  3646  Quant  il  c.  —  3648 
Ca[r]  L.  V.  f.  qui  v.  d.  C.  —  365q  se,  ms.  nos.  —  3654  qui  m. 
la  d.  —  366o  f.  Barnars.  —  3665  oz,  ms.  os. 


l36  DOON    DE    LA    ROCHE 

Dist  Jofroiz  de  Maiance  :  «  La  duchesse  voz  mère; 

3670  «  Large  part  de  vos  terres  vos  a  ele  aquitée  ; 
«  Jamais  Jour  tele  dame  ne  sera  [mais]  trovée; 
«  Ele  a  prise  La  Roche,  si  est  dedans  entrée, 
«  Leans  est  Audegour  en  la  chartre  avalée,  » 
Atant  es  vos  le  duc  et  sa  gent  honorée, 

3675  D'Alemangne  Doon,  qui  la  dame  a  amée. 

«  Beaus  filz  »,  ce  dist  li  dus,  «  alons  en  pour  vo  mère, 
«  Si  forment  vos  désire,  [trestoute]  est  aplorée.  » 
Et  respondi  Landris  :  «  Ne  pla[i]ceDieu  le  Père 
«  Que  je  baise  sa  boche  ne  ja  soit  ma  privée, 

368o  «  Si  li  rendrai  Tomile  par  la  goule  parée 

«  Et  si  ert  davant  tous  la  grant  honte  contée 
«  Par  coi  vosire  amors  fut  de  ma  mère  sevrée 
«  Et  m'en  alai  chetis  en  estrange  contrée  ; 
«  Après  sera  ma  dame  de  m'amor  s[a]oulée  ;  » 

3685  Hé  1  Dieu[s],  celé  promesse  ot  si  corte  durée  ; 
Puis  qu'il  ot  sa  jouvente  et  sa  tere  aquitée 
Ne  demora  il  mie  la  moitié  d'une  année  (/.  70] 

Qu'il  me[ijsme  passa  outre  la  mer  salée, 
La  ou  la  chair  de  Dieu  fu  de  la  Virge  née 

3690  Et  la  grans  oz  de  France  travaillie  et  penée. 


CV 


Quant  li  dus  de  La  Roche  oï  son  fil  parler 
Qu[e]  il  ne  voldra  mie  a  sa  mère  torner, 
Deus  messages  envoie  en  la  bone  cité, 
Que  c'est  Do  de  La  Roche,  ne  se  vuelt  plus  celer, 
3695  Qui  enchace  Tomile  et  son  fel  parenté, 
Quant  il  ot  pris  sa  fille,  ou  molt  ot  fauçeté. 

3670  e.  aquiter.  —  367 1  j.  celle  d.  —  3675  D'A.  Aubri  q.  — 
368o  parée,  sic  ms.  —  368 1  si,  ms.  ci.  —  3683  a.  chatif.  —  3686 
P.  qui  —  3688  mer,  ms.  mère.  —  3689  la  chars.  —  3690  g.  os. — 
3691  parler,  ms.  parles.  —  3694  ce  v.  —  3696  ot  dç  f. 


DOON    DE    LA    ROCHE  iSy 

Quant  li  borjois  l'entendent,  grant  jcie  en  ont  mené 
Il  font  traire  ces  cordes  et  ces  cloches  sonner, 
Ces  riches  draps  de  soie  par  ces  rues  poser, 

3700  Encens,  autres  espices  i  font  [il]  embraser; 
Pour  la  joie  du  duc  font  .m.  grailles  sonner, 
Et  ces  portes  ouvrir  et  ces  pons  avaler 
Et  ces  chevaus  isniaus  covrir  et  enseler 
Et  ces  nobles  vassaus  joieusement  monter, 

3705  Encontre  lor  seignor  poindre  et  galoper. 
Tôt  lor  avoir  li  offrent  sans  nés  .1.  refuser. 
«  Baron,  »  ce  dist  li  maire  «  a  Maiance  en  irez, 
«  La  asaudrez  Tomile  par  vive  poësté. 
«  Le  matin,  par  som  l'aube,  quant  il  ert  ajorne, 

3710  «  Vos  manré  .iii«^.  mars  de  cumin  et  de  sel, 
«  Et  de  poivre  molu  .111^.  ro[n]cins  trossez 
«  Et  .m.  buefz  et  .m.  vaiches  et  .m.  bacons  salez, 
«  De  vin  et  de  froment  empliromes  .c.  nés, 
«  Toz  ravoir[s]  de  Sobrie  vos  ert  abandonez.  »  (v°) 

3715  —  Baron,  »  ce  dist  li  dus,  «  bel  aide  m'offrez  ; 
«  Cil  sire  le  vous  mire,  qui  en  crois  fu  penez. 
«  Certes,  je  n'en  avrai  [nés]  .i.  denier  vaillant. 
«  Trop  avons  nous  avoir  pour  nos  cors  conreer  ». 


CVI 

Li  dus  voit  ses  barons,  dolcement  les  mercie; 
3720  Au  matin  par  son  l'aube  est  meû[z]  de  Sobrie. 
Riche  fu  la  vitaille,  belle  sa  compaignie. 
Or  chevalche  li  dus  parmi  la  terre  alisse, 
Une  terre  sauvage  que  Damedieu  maudie  ! 

3699  Ses.  —  3700  E.  et  a.  —  3701  graillier  s.  —  37o3  ch.^ignias 
c.  et  ensaler.  —  3703  Et  contre.  —  ^707  Barons  —  370g  som  ms. 
soubz.  —  3710  manré,  ms.  manres.  —  3716  mire,  ms.  mre  ou 
iure.  —  3719  ces  b.  —  3730  som,  ms.  soubz.  —  3722  alissej 
sic  ms. 


i38 


DOON    DE   LA    ROCHE 


Onque[sJ  n'i  crut  vltaille  dont  frans  hom  peiist  vivre, 
3725  Mais  pieres  de  liois,  bruieroi  et  espines  ; 

Ains  i  fuit  on  la  tere  et  cuert  on  la  marine. 

Molt  lor  poisent  lor  armes,  car  li  chaus  les  aigrie. 

Cel  jour  se  part  Landris  de  l'ost  par  grant  folie, 

Sur  son  poing  .j.  faucon,  dont  li  ber  se  délite; 
3/30  De  ce  f[ist]  il  que  fox  que  son  cheval  oblie... 

Selonc  .1.  rivière  ot  sa  voie  acoillie. 

En  mi  la  voie  encontre  deus  des  nevou[s]Tomile, 

Li  .).  ot  non  Hardré  et  li  autre[s]  Helie, 
'     Et  furent  fil  Griffon  a  la  barbe  florie; 
3735  Jamais  a  plus  félons  ne  prenra  compaignie, 

Bien  sevent  .j-  prodome  engignier  et  ocire, 

Onques  n'amerent  femme,  si  ne  l'orent  honie; 

La  mort  Aubri  l'evesque  ont  jurée  et  plevie; 

Diex!  que  li  filz  au  duc  n'a  la  broinne  vestie  ! 
3740  Plus  en  fust  asseiir  et  moins  dotast  sa  vie. 

A  ce[l]  faucon  qu'i[l]  porte  a  abatu  .J.  cine, 

Li  faucons  s'i  encharne,  par  vertu  s'i  afiche;  (^ 

Li  filz  au  duc  descent,  qui  son  oisel  délivre  ; 

Li  ber  revot  monter  quant  Hardre[z]  li  escrie  : 
3745  «  Si  m'aïst  Diex,  vassal,  c'est  molt  grans  lecherie 

«  Quant  ou  vivier  nion  père  venez  prenre  les  cines  : 

«  Qui  le  tienne  a  savoir,  je  le  tien  a  folie  ; 

«  Se  ch[i]er  nel  comparez,  Damediex  me  maudie! 

«  Ou  palais  de  Maiance  en  venrez  a  Tomile, 
3750  «  A  son  commandement  en  ert  fait[ej  justice  » . 


3725  de  1.,  brueuus  et  saspine.  —  3726  fuit,  ms.  fuet  ;  cuert  on, 
ms.  creue  en.  Ce  vers  se  rattache  mal  à  celui  qui  précède;  il  y  a 
p.-ê.  un  vers  perdu  entre  les  deux.  —  3728  Se.  —  3729  ce  d.  — 
3730  //  faut  probabl.  supposer  un  vers  perdu  oii  il  était  dit  que 
Landri  était  monté  sur  un  mulet;  cf.  v.  3^6^^  Sjji .  —  3734 
fil,  ms.  cil.  —  3735  prenra,  ms.  panra.  —  3737  si,  ms.  se.  —  3739 
le  f.  —  3740  Puis  en  f.  —  3742  p.  vertus  ci  a.  —  3745  aist,  ms. 
eïst.  —  3746  prenre,  ms.  panre.  —  3747  Q,  le  toinne.  —  3748 
ne  le  compares  —  3749  varés  a  T. 


DOON   DE   LA   ROCHE  ïBg 

Quant  l'entendit  Landri[s],  de  mal  talant  s'aïre 
Et  dit  li  filz  au  duc  :  «  Molt  très  grant  pechié  dites 
a  Quant  voiis  pour  .j.  oisel  me  jugiez  a  ocire, 
«  Dite[s]  moi  qui  vos  estes,  ne  le  me  celez  mie  ». 
5755  Et  respondit  Hardrez  :  «  Nevou  somesTomile, 
«  Fil  Griffon  d'Autefeulle,  qui  Sorable  jostise, 
«  De  sa  part  chalongons  le  vivier  et  le  cine  ». 

—  Certes  »,  ce  dist  Landris,  «  or  ne  m'amervoi[l]  mie 
«  Se  vos  estes  félon  et  plain  [d'orgueil  et]  d'ire; 

3760  «  C'onque[s]  vostre  lignage  ne  fut  sans  felonnie. 

—  Fils  a  putain,  félon,  li  miens  cors  vos  deffie, 

«  Se  Damediex  n'en  pense,  molt  a  fa[i]t  grant  folie, 

«  Quant  .).  bons  desarmés  .ij.  chevaliers  defïîe.  » 

Il  a  traite  l'espée  d'acier  vert  et  brunie, 
3765  Et  broche  le  mulet,  sur  les  estriers  s'afiche, 

Et  va  ferir  Hardré  par  orgueil  et  par  ire. 

Li  glous  li  atendi  sa  grant  hante  fraisnine, 

Qui  li  trancha  le  ploi  de  son  mantel  [d'Jhermine; 

En  sa  char  le  navra  par  davant  sa  poitrine.  (v**) 

3770  Damediex  le  gari,  que  mort  nel  feri  mie; 

Li  mules  desous  lui  chaî  d'encombrier, 

Landris  resaut  en  pies,  trait  l'espée  forbie. 

De  la  honte  qu'il  a  la  face  li  pailie, 

Davant  lui  voit  la  mule,  si  [li]  commence  a  dire  : 
3775  «  Ha[ï]  !  mule  d'Espaigne,  Damedieu[s]  te  maudie  ! 

«  Diex  confunde  la  tere  ou  vous  fust[es]  norie  ; 

«  Molt  fait  li  bons  que  fox  qui  en  asne  se  fie  !  » 

Il  a  traite  l'espée,  si  li  cope  l'eschine. 


3752  g.  pechiés  d.  —  SySô  Filz.  —  3758  e.  félons  —  Syôi  Faut- 
il  admettre  un  vers  perdu  annonçant  la  réponse  de  Hardré  ?  — 
3764  vert,  sic  ms.,  altéré?  —  3767  li  atandi  sa  g.  h.  frazine  — 
3770  m.  ne  le  f.  —  3771  altéré;  corr.  La  mule  d.  1.  chiét  d'e. 
[sovjne](?)  —  3775  H.  mules.  —  3777  M.  faite;  a.  ce  ^ent. 


t 


>,,; 


140  DOON   DE   LA   ROCHE 


CVII 


Quant  Landris  ot  parler  les  frères  Guenelon, 

3780  Qui  sont  nevou  Tomile  et  enfant  a  Griffon 
Et  du  félon  lignage  qui  fist  la  traïson, 
Li  sanc  qu'il  ot  ou  ventre  [si]  li  fremi[s]t  et  bout. 
Helye[s]  li  escrie,  qui  d'autre  part  li  sourt  ; 
Li  enfes  se  trestorne,  qui  ot  cuer  de  baron, 

3785  Selonc  le  cors  le  conte  fiert  Pespié  ou  sablon  : 
S'il  atainsisi  Landri,  ja  ne  veïst  Doon 
Ne  dame  Salmadrine  ne  l'eiist  a  baron. 
Et  li  bers  feri  lui  dou  bon  branc  de  quelor, 
Si  li  trancha  le  bras,  le  foie  et  le  poumon, 

3790 Tant  corn  [rjespée  dure  abat  mort  le  félon, 
Et  saisist  le  cheval,  que  n'i  quist  achoison, 
Mist  sa  main  a  la  sele,  si  salli  en  l'arçon, 
Il  ne  le  rendist  mie  por  .c.  mars  de  mangon[s]  ; 
Il  apelle  Hardré,  sel  clame  compagnon  : 

3795  «  Or  vous  puis  je  bien  bien  dire  que  je  suis  fîlz  Doon, 
«  Vers  cui  vostre  lignage  fist  la  grant  traïson  ;  (/. 
€  Mais  je  ne  vous  dout  mie  la  monte  d'un  boton  ». 


CVIII 

Or  est  Landris  li  enfes  remontez  al  destrier. 
Que  il  tolit  Helie,  le  fil  Griffon  le  viel, 
38oo  Et  Hardrés  li  relance  pour  son  frère  vengier; 


3779  ot,  ms.  oi.  —  3780  et  niés  a  G.  —  3781  Et  des  f.  —  3782 
t.  et  boute.  —  3783  escrient  q.  —  3784  ce  trestornent.  —  3785 
espié,  ms.  espies  —  3786  veùst  D.  —  3788  quelor,  sic  ms.  — 
3789  poumon,  ms.  pormonl.  —  3792  Met  la  m.  a  la  sale;  si,  ms. 
ci.  —  3793  mars,  ms.  marc.  —  3794  sel,  ms.  ce  le.  —  3797  doute 
m.  la  moule  ou  monle  d'u.  b.  —  3798  r.  a  cheval  —  3799  G.  le 
mal. 


DOON    DE    LA    ROCHE  I4I 

La  merci  Damedieu,  ne  le  pot  pas  tochier; 

Et  li  ber  ferit  lui,  ne  le  vot  espargnier, 

Amont,  desur  la  face,  parmi  le  henepier, 

Qu'il  11  tranche  l'oreille  et  des  denz  la  moitié, 
38o5  Le  cheval  desouz  lui  a  fait  agenoillier. 

Li  traït[t]re  trabuche,  delez  son  frère  chiet, 

Au  fil  Doon  escrie  et  merci  et  pitié. 

«  Pour  Dieu,  merci  »,  fait  il,  «  frans  bons,  ne  m'ociez, 

«  Mon  cors  pouez  vous  vendre  .j.  mui  d'argent  [entier]. 
38 10  —  Diva!  »  a  dit  Landris,«  ja  [n']en  avrai  denier.  » 

Son  cheval  lui  remoine,  sus  le  fait  ancroier, 

Par  de  dessous  le  ventre  li  lie  les  .ij.  piéz, 

Son  oisel  rapela,  qui  sus  .j.  a[r]bre  siet, 

En  l'ost  le  duc  son  père  s'est  tantost  repairie[z]. 
38 1 5  Li  dus  Do  vat  encontre,  molt  s'en  est  merveillie[z], 

Car  il  l'a  quis  en  l'ost,  en  la  coue  et  ou  chief. 

«  Beaus  filz  !  »  ce  dist  li  dus  «  qui  est  ci[l]  prisonie[r]s  ? 

—  A  la  moie  foi,  sire,  Hardris  ci[st]  losengiers, 
«  Filz  Griffon  d'Autefeulle,  le  chenu  et  le  viel  ; 

3820  «  Mort  li  a[i]  .j.  sien  frère,  si  l'ai  touisoul  laissié; 
«  Cestu[i]  voz  amena[ij,  qui  a  vo  part  affiert.  » 

—  Certes  »,  ce  dist  li  dus,  [a]  mervoille  l'ai  chier,  (v 
Car  il  est  du  linage  qui  vos  volt  essilier.  » 

Tant  cheva[u]che  li  dus  qa[e]  a  Maiance  vient  ; 
3825  Es  prés  davant  la  ville  s'est  tendus  et  logiés, 

Puis[si]  a  fait  les  forches  sus  .j.  haut  pui  drecier, 

Hardré  i  ont  pendu  garçon  et  escuier, 

Que  si  parent  le  voient  des  murs  et  des  clochiers. 

Dont  Dissiez  Tomile  plorer  et  larmoier, 
383o  Molt  forment  se  démente  et  Malingres  ses  niés  : 

«  Haï!  tant  mar  i  fustes,  nobiles  chevaliers  !  » 


38o2  li  bers.  —  38o3  A.  desour;  p.  le  henapies.  —  38o4  Qui  ii. 
—  38io  Dija.  —  38i3  q.  desus.  —  3820  t.  s.  iaissiés.  —  382i  voz 
pert  a.  —  3823  cest  i.  —  3826  pui,  ms.  pin.  —  3828  Qui  ces 
parans.  —  383o  ce  d.  ;  ces  n. 


14^'  bOON   DE  LA   ROCHE 


CIX 


Or  sont  li  ost  au  duc  sous  Maiance  en  la  prée, 
Tendent  très  et  aucubes,  pavillons  et  ramée[s], 
Et  cil  qui  dedans  sont  ont  les  portes  fermées 

3835  Et  cil  de  ro[s]t  au  duc  ont  perieres  levée[s], 

Engins  et  ma[n]goniaus  et  grans  cloies  ramées, 
Getent  trons  et  mairie[n]s  et  grans  pierres  carées. 
Mais  la  cité  est  forte,  Sarrazin  la  fondèrent; 
Les  portes  d'olifant,  que  nulz  bons  ne  vit  teles, 

3840  W  nés  empire[nt]  mie  vaillant  .j.  denrée. 
Landris  jura  le  siège  de  ci  a  .vij.  année[s], 
Et  Guinemans  ses  mai[s]tre  et  li  dus  Do  ses  père 
Et  Asses  de  Maiance  et  puis  Jofroi[z]  ses  père 
Et  après  li  baron  qui  tiennent  les  contrée[s]. 

3845  Malingres  fist  ouvrir  .j.  postis  a  celée, 

Le  mielz  de  sa  maisnie  en  conduit  fors  armée, 
Par  itel  convenant  qu'onques  puis  n'i  entrèrent, 
Car  Landris  lor  cheva[u]che  parmi  .j.  valée 
A  .iiij™.  Turcoples,  qui  ains  mort  ne  dotèrent; 

385o  Entr'ex  et  le  po[s]tis  fu  le  voie  copée. 

A  lor  espiés  tranchans  lor  paient  lor  soldée  ; 
Le  )or  fu  dame  Olive  [chierement]  comparée. 
Malingres  cheva[u]cha,  la  reigne  abandonée, 
A  ris[s]ir  de  la  barre  [il]  encontra  son  père  ; 

3855  Li  dus  avoit  josté,  sa  lance  avoit  froée. 


3832  s.  les  oz.  —  3840  denrée,  ms.  danrées.  —  3842  ces  perre. 
—  3843  Assons  de  M.;  ces  p.  —  3846  Li  m.  de  sa  mainnie.  — 
3847  i.  conveniant;  ne  e.  —  383 1  lors  e.  —  3854  la  barre,  ms.  la 
batre  (en  deux  mots);  encontre  s,  p. 


bOON   DE   LA   ROCHE  14^ 


GX 


Malingres  vit  son  père,  bien  congnuit  ses  ados, 
La  riche  congnois[anc]e,  l'oriflanbe  au  dragon, 
Et  va  ferir  son  père  par  sa  grant  traïson; 
Et  li  dus  ferit  lui  en  guise  de  baron, 

386o  De  Tescu  de  son  col  li  fendi  le  blason, 
Et  lui  et  le  cheval  abati  en  .j.  mont. 
Li  dus  a  trait  l'espée,  si  repaire  au  baron, 
Ja'n  eiist  pris  la  teste  par  dessus  le  menton. 
Quant  Malingres  escrie  :  «  Père,  que  faites  vos  ? 

3865  «  Hé  !  ber,  je  sui  vos  filz  de  vo  feme  Audegour, 
«  Et  niés  le  ber  Tomile  et  le  conte  Griffon  ; 
«  Onques  de  tel  lignage  ne  fu  néz  certes  bons  ». 
—  Non  voir  »,  ce  dist  li  dus,  «  pour  faire  traïson. 
«  Damedieî  me  confonde  se  jà  avez  pardon, 

3870  «  Qiie  ne  vos  pende  as  forches  de  costé  le  gloton.  » 
Par  le  nasel  du  heaume  le  rendi  a  Oton, 
Amauri  de  Coloigne  et  son  frère  Symort  ; 
Et  cil  le  gardent  bien  a  .xv.  compagnons. 


GXI 


Or  sont  li  ost  au  duc  es  prés  desous  Maiance,  (v°) 

3875  Li  vies  est  ou  palais,  cui  Diex  dont  meses[t]ance  ! 
De  son  nevo  li  poise,  qu'il  ot  jugier  a  pendre  : 
«  Haï!  beaus  niés  Malingre,  mar  fut  vostre  Jovente. 
«  Que  fera  vostre  mère,  Audegour  la  dolente, 
a  Et  Hardrés  d'Autefeulle  et  Helies  li  enfes? 


3856  c.  ces  ades.  —  3857  Toliflanble  le  d.  —  3858  grande  t.  — 
3859  au  g-  —  3865  Hé  bers;  yos  fe.  —  3866  le  bers  T.  et  li  c.  G. 
—  3869  se,  ms.  ce.  —  3872  Amarri.  —  3874  s.  les  oz.  —  3875  on 
p.  —  3876  oie  j.  —  3878  Qui.  —  3879  Ce  vers  paraît  singulier., 
Hardré  et  Hélie  étant  morts  tous  les  deux. 


144  DOON    DE    LA    ROCHE 

388o  «  Li  miex  de  mon  lignage  est  toniez  a  tormente. 

«  Ains  mais  ne  fut  .j.  dus  qui  tels  hons  osa[s]t  pendre. 

«  Je  ne  croirai  en  Dieu  se  de  lui  ne  me  venge  ». 

La  oïssiez  plorer  les  honies  et  les  famés  ; 

De  ce  sont  il  dolent  qu'a  Doon  ne  se  rendent, 
3885  Car  de  nul  home  en  tere  autre  secours  n'aiendent. 

Mais  et  mais.)',  et  autre  chascune nuit  s'en  erablent, 

As  murs  et  as  fessés  et  as  terriers  se  prennent, 

Por  rami[s]tié  de  Dieu  lor  fait  li  dus  consente. 

CXII 

Or  sont  li  ost  Doon  soz  Maiance  la  cit  ; 

3890  Toute  la  gent  menue  la[i]ssa  li  dus  issir, 
Les  famés,  [les  veillars]  et  les  enfans  petiz, 
Pour  l'amistié  de  Dieu  qui  de  m'arme  ait  merci. 
Molt  s'en  vont  [a]  emblée,  quant  revesque[s]  i  vint, 
Devers  Saine  la  ville  vint  [i]l  a  oès  Landri; 

3895  Li  sièges  a  duré  .iij.  ans  et  .j.  demi 

Que  n'i  creû  leans  ne  char,  ne  pain[s]  ne  vins[s]  ; 
Tomile  est  ou  palais,  cui  Diex  puet  maleïr  , 
Sa  gent  son:  départi,  luit  sont  mort  et  ocis, 
De  toute  sa  mesnie  ne  remaint  il  que  vint, 

3900  Et  cil  demandent  l'eve,  au  mangier  sont  assis,  (/.  7. 

A  ce  mangier  n[i]  orent  trestuit  ma[i]s  qu'  .j.  poucin, 
Sel  mangierent  sans  sel  et  sans  pain  et  sans  vin. 

Qui  les  oïst  plorer  et 

Et  dist  li  .j.  a  l'autre  :  «  Venuz  est  Antecrist; 

388i  q.  tel  h.  —  3882  se,  ms.  ce.  —  3883  Entre  ce  vers  et  le 
précédent,  faut-il  supposer  quelques  vers  perdus,  où  était  repré- 
sentée la  détresse  de  la  ville  assiégée?  —  3886  mais,  ms.  mois. 
—  3887  terriers,  ms.  terrieres.  —  3888  de  Dieu,  ms.  le  duc,  cf. 
V.  38g2;  1.  faite.  —  3889  '^^  oz  D;  M.  la  cité.  —  3892  m'arme, 
sic  ms.,  corr.  s'arme  (?)  —  ^894  v.  laues  L.  —  3896  Qui  —  3902  Se 
le  m.  —  3903  Q.  1.  o.  p.  et  vongier  et  vomir.  Cette  fin  du  vers 
doit  être  altérée.  —  3904  Et  dient. 


DOON   DE   LA   ROCHE  1^.5 

3go5  «  Car  alons  a  Doon,  si  li  crion  merci, 

«  Por  l'amor  Dieu  de  gloire,  lui  et  son  fil  Landri  ». 
Et  dist  li  fel  Tomiles  :  «  Ja  Vi'i  meteron  fin  ; 
«  Dame  diex  me  confonde  s'anquenuit  ne  m'en  is, 
<  Quant  l'oz  ert  endormie  et  la  gent  en  seri... 

3910  «  Qu'en  bois  ne  en  forest  [errant]  ne  soie  pris. 
«  Tant  m'en  irai  par  nuit  qu'avrai  passé  le  Rin; 
«  El  reigne  de  Saissoigne  voldrai  Deu  relenquir, 
«  Puis  esteront  paien  mi  per  et  mi  ami, 
«  Par  ex  ferai  encor  ceste  terre  frémir.  » 

3915  Et  cil  le  otri[er]ent,  qui  muer[en]t  a  envis  ; 

Mais  il  ne  sevent  mie  com  se  porquiert  Landris  : 
Aine  chevaliers  en  tere  tel  ahan  ne  sofrit, 
Car  il  ne  siet  a  table  ne  ne  dort  en  son  lit, 
Ains  fait  gaitier  les  aives,  les  pors  et  le[s]  païs, 

3920  Deci  qu'a  .iiij.  lieues  a  ses  espies  mis. 

Que  ci[l]  dedens  n'en  issent  ne  soient  escharni. 

Molt  i  orent quant  revesque[s]  i  vint, 

De  tante  bone  enseigne  i  peiist  on  veîr; 

La  vitaille  qu'il  meine  ne  puet  nulz  mètre  en  pris; 

3g25  A  .).  engigneor,  Gillibert  filz  Henri, 

Plus  savoit  il  d'engin  que  nulz  clers  de  latin. 
Cil  fait  .XXX.  perieres  charpenter  et  fornir        (v«) 
Et  grans  cloies  barées  et  soliers  lanceïs  ; 
Par  force  les  conduit  jusqucs  a[u]  mai[s]tre. . . 

3930  Quant  la  polie  torne,  dont  font  les  pdns  cheïr  ; 
Ennuie'  sont  de  ros[t],  n'i  vuelent  plus  seïr  : 
.iiij°>.  perées  font  cheoir  en  .j.  bruit, 


3905  si,  ms.  ci.  —  3908  s'a.  ne  mains.  —  3909  l'oz,  ms.  l'os. 
Après  ce  vers  il  y  a  probablement  une  lacune  d'un  vers.  —  3912  E 
breigne   des  aix   ne  v.  Doz  r.  —  3913   estèrent;   ami,    ms.  amis. 

—  3914  P.  ce.  —  3916  se,  ms.  ce.  —  3917  Ains;  ne  s.  telle 
anhan.  —  3920  ses,  ms.  ces.  —  3922  M.  i.  o.  ablaue.  Corr.  a 
faire  (?)  —  3924  meine,  ms.  moingne;  mètre,  ms.  mestre.  —  3929 
j.  a  m.  roi.  Ce  dernier  mot  est  altéré.  —  393o  cheïr,  ms.  choir. 

—  3932  perées,  ms.  perieres;  bruit,  sic  ms. 


146  DOON    DE    LA    ROCHE 

Gietent  trons  et  mariens  [et]  grans  perons  marsis, 

Les  portes  d'olifant  firent  rompre  par  mi, 
3935  Et  plus  de  .vij»».  toises  firent  des  murs  cheïr. 

A  l'entrer  de  la  ville  fut  grans  li  envaïs, 

De  tous  les  primerains  fut  Jofroi[z]  et  Landris 

Et  li  prous  Guinemans  et  Asses  ses  cosins 

Et  Gautier[s]  de  Sorbrie  et  li  prous  Amauris, 
3940  Tomiles  torne  en  fu[i]e,  s'a  son  ostel  g[u]erpi, 

Landris  le  suit  de  près,  qui  a[u]  nasel  [le]  tint. 

«  Damoisel  debonaire  »,  ce  di[s]t  li  fel,  «merci! 

«  Faites  moi  .j.  evesque  ou  prevoire  venir, 

«  Si  prendra[i]  ma  confesse  por  mes  pechiés  gehir.  » 
3945  Et  dist  Landris  li  enfes:  «  Bien  en  av[r]ez  loisir.» 

Au  mai[s]tre  tref  demoine  le  rent  son  père  pris  ; 

Lors  trai[s]t  li  dus  l'espée,  car  i[l]  le  vot  ferir, 

Quant  Landris  li  escrie  :  «  Malvais  bons,  c'as  tu  dit  ! 

«  Pour  .m.  mars  ne  voldroie,  certes,  qu'il  fu[s]t  ocis, 
3950  «  Ains  le  rendrai  ma  mère,  car  je  li  a[i]  promis.  » 

Celle  nuit  jut  [li  dus]  ou  palais  signori[l], 

De  la  riche  vitaille  le  fist  li  dus  garnir 

Et  li  cortois  evesqucs,  qui  de  vers  Saine  vint;  (/.  y5) 

A  Assonla  rendirent,  qui  la  soulo[i]t  tenir, 
3955  Li  gentis  damoisels,  li  chevaliers  gentis  ; 

Li  bers  l'avoit  g[u]erpie  pour  son  seignor  servir 

Et  pour  Landri  de  mort  eschiver  et  garir. 


CXIII 

Celle  ndit  jut  li  dus  ou  palais  fort  et  grant, 
Les  mors  en  fait  fors  mètre  a  roncins  tramant  ; 

SgSS  ses,  ms.  ces.  —  SgSg  li  p.  et  Mauris.  —  3940  s.  estai  g. 

—  3942  ce,  ms.  a.  —  3946  m.  trai  d.  —  3949  P.  m.  m.  certes  ne 
V.  —  3952  li  dus,  SIC  ms.,  corr.  Landris  (?)  —  3953  q.  daversaine 
V.;  c/.  V.  2925,  2968,  3894.  —  3935  ch.  gentis,  corr.  ch.  hardiz  (?) 

—  3959  r.  traîner. 


DOON   DE   LA    ROCHE  V^j 

3960  Aubris  li  bons  evesques  [i]  mi[s]t  yitailles  tant 

Que  Landris  [l'en]  mercie  et  li  prous  Guinemans. 
AI  matin  font  destendre  les  très  et  les  brehans 
Et  les  aigles  jus  mètre  et  les  pommeaus  lu[i]sans. 
Or  cheva[u]che  li  dus  par  puis  et  par  pendans, 

3965  Molt  sont  fieres  les  oz  et  les  compaignes  grans; 
Tomile  en  menèrent  [lié]  a  un  chalant. 
Ou  chastel  de  La  Roche  es  vos  .i.  mes  poinnant 
Et  trouve  la  duchesse  enz  en  la  tour  séant. 
«  A  la  moie  foi,  dame,  ja  verrez  vostre  enfant 

3970  «  Et  le  duc  debonaire,  que  vos  amastes  tant.  » 
Quant  l'entendi  la  dame,  dont  fu  la  joie  grant, 
Tous  les  degrés  de  maubre  en  descendis!  errant; 
Davant  l'uis  de  la  sale  encontra  son  enfant, 
Mais  el  nel  congnust  mie  au  vis  n[e]  au  samblant, 
I  3975  La  face  avoittroblee  du  fer  et  de  l'ahan. 

Ambedui  s'entrebaisent  [tenrement]  em  plorant; 
Pour  la  joie  d'els  .iij.   em  plorent  ne  sai  quant. 
Ne  vos  mervoilliez  mie  s' elle  aime  son  enfant  : 
Tomile  lui  amaine  et  Malingre  davant.  (v<>) 

3980  Quant  le  voit  la  duchesse,  tout  li  trenbla  li  sens, 
Et  a  dit  a  ses  homes  :  «Ostez  ce  mescreant, 
«  Si  le  m'avalez  tost   en  ma  chartre  plus  grant  ;  » 
Et  il  l'i  trabucherent  le  visage  davant. 
Et  Audegour  sa  fille  a  trovée  séant, 

3985  Coleuvres,  boterel  li  ma[n]joent  les  flans; 
Et  Malingre  gardèrent  a  .xiiij.  serjans. 
Il  demandèrent  [l'eve]  sus  ou  palais  a  tant  ; 
Li  dus  et  la  duchesse  s'asirent  en  .j.  banc  ; 
Le  jour  servi  Landris  du  [vin]  et  du  piment 

3962  brehans,  ms.  brebans.  —  3964  puis,  wt5.  pins.  —  SgôS  M. 
font  fiers  ;  compaignes,  ms.  compaignies.  —  3966  T.  enmenercnt 
{en  un  mot).  —  3969  maie  f.  —  3972  descendist,  ms.  descendent. 

—  3974  e.  ne  le  c.  —  BgyS  ahan,  ms.  anhan.  —  3978  c'e.   a.  — 
3980  le  s.  —  3981  ces  h.  —  3982  p.  grans.  —  3983  C.  et  boteres. 

—  3989  pumant. 


148  DOON    DE   LA    ROCHE 

3990  A  une  cope  d'or,  a  covercle  d'argent  ; 

Dont  manja  la  duchesse,  mais  petit  [ele]  en  prent, 
Landris  ne  pot  mangier,  tant  ot  fier  mautalent, 
Si  eiist  mort  Tomile  et  fait  son  jugement. 
Les  napes  firent  traire  chevalier  et  serjant. 


CXIV 

3995  Landris  et  la  duchesse  avalèrent  le  pont. 

Ambedui  s'entretienent  as  mains  et  a  ba[s]tOn, 
Doucement  s'entrebaisent  le  vis  et  le  menton...    ' 
Son  sene[s]chal  apelle  :  «  Amainne  mon  prison.  » 
Et  il  [le]  amenèrent  sous  le  pin  a[l]  perron, 

4000  La  hart  lïée  au  col  come  .j.  autre  laron  ; 

Quant  le  voit  la  duchesse,  si  l'a  mis  a  raison  : 
«  Si  m'aïst  Diex,  [Tomiles],  vous  semblez  bien  félon  : 
'"  «  Vous  me  mellastes  primes  al  riche  [duc]  Doon, 
«  Et  davant  l'emperere  qui  Pépin  a  a  non 

4005  «  Moi  chaçastes  du  reigne  pour  vo  fil[l]e  Audegour. 

«  Assez  sait  Damediex  se  je  ai  droit  ou  non  ;   "     (/.  76") 
'•"•  «  Selon  vostre  servise  atendez  guerredon. 

—  Dame,  »  ce  di[s]t  Landris,  «  baissiez  vostre  raison, 
«  Si  parlera[i]  Tomile  et  pour  moi  et  pour  vos. 

4010  —  Vassaus  »,  ce  dist  li  enfes,  «  di  ta  confession; 
«  Or  aproche  li  termes  qu'or  endroit  te  pendron. 

—  Sire  »,  ce  dist  Tomiles,  «  pourquoi  le  celeron? 
«  Quant  je  voi  mon  juïse,  je  n'i  avra[i]  pardon. 
«  Selonc   [la]  dame  Olive  coucha[i]  je  .j.  garçon, 

401 5  «  De  ioier  lui  dona[i]  mon  hermin  peliçon, 
«  Dont  il  perdit  la  teste  et  la  dame  s'anor. 

3990  a  cole  d'à.  —  3993  SU  e.  —  3996  au  m.  —  3997  menton, 
ms.  maton.  Après  ce  vers,  lacune  :  il  doit  manquer  un  vers  où 
il  était  question  d'Olive.  —  4001  mis,  ms.  mise.  —  4002  aist,  ms. 
eïst.  —  4oo3  Me  melietes  p.  — 4oo5  M.  chacestc.  —  3406  A.  cest 
Dieu  se  je  ais  ou  d.  ou  n.  —  4007  a.  guerendon. 


DOON    DE   LA   ROCHE  l'4^' 

«  La  mort  Landri  jura[i]  a  .xv.  compaignons, 
«  De  ces  de  mon  lignage,  detoz  les  plus  félons; 
«  Tost  le  mis  hors  de  Francepar  ma  grant  traîson. 

4020  «  Or  renoi  Damedieu,  le  baptême  et  les  fons, 
«  A  lui  ne  a  sa  mère  n'atent  nul  guerredon. 
—  Baron,  »  ce  dist  Landris,  «  cist  moz  doit  estre  a  som  ; 
«  Ce  est  molt  grans  pechié[s]  quant  nous  ci  l'escouton.  » 
A  la  coue  d'une  ieve  li  lient  le  chaon, 

4025  Par  rues  le  traîne[nt]  [et]  aval  et  amont  ; 
Li  pautas  est  espès  et  li  borbois  parfons, 
Del  maltagre  li  gietent  corrées  et  pormont 
Et  pierres  [et]  çavates  et  chaillois  et  bastons, 
Et  li  .).  li  compisse  le  vis  et  le  me[n]ton. 

4o3o  «  Baron»,  dist  la  duchesse,  «  as  forches  en  iron.  » 

La  duchesse  meisme  monta  sus  l'eschaillon,  (v®) 

Ou  col  li  mi[s]t  le  ce[r]cle  et  puis  le  chaienon, 
De  sa  honte  lui  membre  et  de  sa  mesprison. 
Par  [de]desour  la  goule  li  feri  le  cranpon  ; 

4035  Quant  la  polie  tome,  li  fel  va  contremont. 

Puis  firent  .j.  feu  faire  de  mairiens  et  de  trons; 
La  portèrent  le  cors,  si  l'ardent  en  charbons. 
[Et]  la  dehors  la  chartre  amoinent  Audegour, 
Tote  la  despoill[er]ent,  voiant  les  iex  Doon,    '^**^ 

4040  Puis  la  portent  au  feu,  lez  son  père  félon. 


GXV 


Tomiles  fu  pendus  et  sa  fille  estorchie 
Et  la  chars  en  fut  ars[e]  et  tote  graîllie 


4019  Toz  les  m.  —  4020  Or  ie  noi  {ou  uoi)  D.  —  4021  n'atans 
n.  gardons.  —  4022  cest  moit  d.  e.  asson.  —  4024  chaon,  ms. 
haon.  —  4026  bcrbrois  p.  —  403 1  s.  les  chaillons.  —  4032  m.  le 
c.  et  p.  li  mist  le  ch.  —  4037  si  Tardèrent.  —  4o38  amenront  A.  — 
4o3g  les  ieulx  Dos.  —  4041  estorchie,  sic  ms.  —  4042  et  t. 
grailloie. 


i5o 


DOON   DE   LA   ROCHE 


Et  la  poudre  ventée  [en]  aval  la  bruire  ; 

Sachiés  ceste  justice  fut  merveillouse  et  fiere. 
4045  Malingre  en  menèrent  estroit  les  mains  liées, 

Si  li  tranchent  les  pies  et  les  jarès  derier[e]s; 

Pour  la  pitié  de  lui  em  plore  sa  mesnie 

Et  ses  père  meïsmes  i  soffrit  grant  haschiere, 

Quant  voit  son  fil  sanglant  detranchier  [et  ocire]  ; 
4o5o  Des  larme[s]  de  son  cuer  a  la  face  moillie, 

.X.  abé,  .X.  evesque  au[s]  pies  Doon  chaïrent, 

Et  Olive  de  France  i  fut  assez  proie  : 

«  Pour  Dié,  merci,  beaus  sire,  assez  a  grant  haschie; 

«  Par  lui  n'iert  jamais  arme  portée  ne  baillie  ». 
4055  Li  moinne  l'en  proi[e]rent  du  cloistre  [de]  Saint  Piere; 

Quant  il  [r]orent  gari,  les  blans  dras  li  bailli[e]rent, 

Mains  aine  n'ama  les  dras,  car  toz  tems  fut  [traître]; 

Onque[s]  bien  ne  vot  faire,  mais  fu  mais  aiiseres. 

Et  li  dus  s'en  revat  droit  a  Coloigne  arriéres,  [f.  jy) 

4060  Si  li  vieent  les  portes  [icil]  qui  les  détiennent, 

Et  li  dus  les  assi[s]t  et  davant  et  darieres. 

Le  jour  jura  li  dus  et  sa  compaigne  fiere, 

Se  il  prent  la  cité,  la  gent  ert  essillie.. . 

Le  feu  griois  [forment]  as  rues  descoch[i]erent, 
4065  Deci  au  mai[s]tre  bore  sont  arces,  peçoïes. 

Li  borjois  citeen  forment  s'en  esmai[e]rent,  , 

Car  [a]  Pépin  de  France  ont  la  vile  ottroïe,  ^ 

Ghascun  an  l'en  envoient  .xxx.  mules  chargies 

De  bon[s]  dras  d'Aumarie  et  [d']escu[s]  d'Angarie  ; 


4043  bruire,  ms.  bruine.  —  4044  f.  molt  m.  —  4046  les  jarois 
d.  —  4047  em  plorent  sa  magnie.  —  4048  ses,  ms.  ces;  i,  ms. 
il;  g.  haichier.  —  4049  fil,  ms.  filz;  s.  et  detranchier  [altéré)  — 
405 1  Doon,  ms.  Lam.  —  4o53  g.  haichie.  —  4024  j.  armes  por- 
tées ne  baillies.  —  4057  aine,  ms.  ains;  f.  ordes  —  4068  m.  de 
mal  a.  — 4060  li  vaient;  q.  1.  entiennent.  —  4063  e.  assilie.  // 
est  probable  qu'il  manque  un  vers  entre  celui-ci  et  le  suivant. 
—  4065  arces,  ms.  s.  a.  et  p.  —  4066  b,  çiteins,  —  4067  v, 
pttroier.  —  4068  e,  d'Angle. 


DOON    DE   LA    ROCHE 


iSt 


4070  Et  dient  H  .j-  l'autre  :  «  Nos  terres  sont  jugie[s], 
«  Se  Do  nos  prent  a  force  et  nos  vies  trenchies. 
«  Car  li  rendon  les  clés  de  ceste  [tour]  plainiere, 
«  Du  bore  et  du  marchié  et  du  mostier  saint  Piere  ; 
«  Se  Pepin[sj  se  coroce,  dehaiz  ait  cui  en  ...  » 

4075  A  lor  riche  archevesque  ont  lor  raison  chargie. 
Plus  de  .c.  ordené  au  tref  demeine  vienent, 
Bene[ï]çon  [et  pais]  par  Dieu  li  ottroi[er]ent  : 
«  Sire  Do  de  la  Roche,  or  est  bon  que  tu  viegnes; 
«  Li  bourjois  citaen  de  merci  vos  requièrent, 

4080  «  Si  vos  rendront  les  clés  de  ceste  tour  plainier[e], 
«  Toute  vous  ert  la  ville  et  laissie  et  guerpie, 
«  Mais  que  vostre  ire  soit  pardonnée  et  remise.  » 
Quant  l'entent  la  duchesse,  forment  en  devint  lie, 
Dolent[e]  est  de  la  tere  quant  la  voit  essilie. 

4085  Maint  et  communément  [ens]  en  la  ville  entrèrent  ;    (v°) 
Le  jor  i  ot  de  cloches  mainte  corde  tirée 
Et  si  fut  dame  Olive  confermée  et  baigniée; 
Li  dus  la  respousa  droit  au  moustier  saint  P[i]ere. 
Ens  ou  palais  [i]  furent  ces  noces  commencies, 

4090  Bones  et  merveilloses,  aine  hons  ne  vit  si  riches, 
.x".  chevalier  i  sirent  et  mangi[e]rent; 
Aine  n'i  ot  jugleor  n'i  [ot]  robe  novelle. 

I 

4070  Et  d.  1.  .j.  a  l'a.  —  4071  f.  nous  detranchies.  —  4072  clés, 
ms.  clers;  cf.  v.  4080;  c.  planniere.  —  4074  d.  a.  a  c.  en  chaille 
{altéré).  —  4075  1.  r.  charg'.  —  4076  au  t.  demers  amennent.  — 
4077  B.  de  p.  D.  —  4078  que  tu  voignes.  —  4080  clés,  ms.  clers. 
—  4082  V.  i.  lor  s.  p.  et  laissie,  altéré;  on  a  déjà  eu  laissie  dans 
le  V.  précédent.  —  4084  Dolant;  v.  assilie.  —  4085  entrèrent,  sic 
ms.,  altéré.  —  4086  de  c.  maintes  cordes  tirées.  Le  dernier  mot 
doit  être  altéré.  —  4088  moustier,  ms.  n^onstier.  —  4090  Sei- 
gneurs et  m.  c'onques  ne  vi  si  r.  —  4091  chevaliers  issircnt  et 
m,  —  4092  Ains  n'i  ot  juglour  ne  r.  n. 


Ij5.a  DOON    DE   LA    ROCHE 


CXVI 


A  l'entrée  de  mai,  a  une  feste  clere, 

Do  li  dus  de  La  Roche  a  sa  moillier  respousée  , 

4095  Et  fait  bones  ses  noces,  aine  nulz  bons  ne  vit  teles. 

Viennent  [i]  li  baron  de  lointainnes  contrées; 

Et  Aubris  li  avesque[s]  a  la  dame  menée, 

Aidie  et  maintenue  et  forment  honorée. 

De  douce  France  i  vint  Pepin[s]  l[i]  empereres, 
4[ooMolt  fu  beaus  li  barnage[s]  que  François  amenèrent. 

Li  roi[s]  ala  orer  a[u]  grant  mostier  saint  P[i]ere, 

Puis  est  venus  as  noces  ou  la  joie  est  menée; 

Dame  Olive  se  drece,  si  va  baisier  son  frère, 

Em  plorant  se  bais[ier]ent  la  dame  et  l'empereres. 
4105  Contre  le  roi  Pépin  est  maint[e]  gent  levée; 

De  son  nevou  Landri  novelle  a  demandée  : 

«  Dame,  quex  est  voz  fils  a  la  ch[i]ere  membrée, 

«  Par  cui  tu  as  ta  terre  et  t'enor  recouvrée  ?  ' 

—  Veez  le  la,  beaus  sire,  »  ce  respondi  sa  mère, 
41 10  «  Cil  valès  qui  la  tient  celle  verge  pelée. 

—  Beaus  niés,  »  ce  dist  Pepin[s,]  «  bien  vos  porta  voz  mère, 
«  Quant  vos  l'avez  vengie  de  la  gent  desfaée;  (/.  -jS) 
«  Hui  vous  sera  Bretaigne  ottroïe  et  donée, 

«  Anjou  et  Normandie  jusqu'à  la  mer  salée, 
41 1 5  «  Et  la  senechauciée  de  France  oan  donée  ; 
«  De  fié  vos  serviront  .xx"^.  home  a  espée. 

—  Sire,  »  ce  dist  Landri,  «  ci  a  gente  soudée 

«  Et  cortoise  promesse  et  ch[i]er  don  d'emperere, 
«  Ja  Damedieu  ne  place  que  puis  que  cein  espée 

4094  Et  li  d.  ;  m.  reprise.  —  4095  ces  n.  ains  n.  h. —  4098 
Aidie,  sic  ms.  Altéré?  —  4103  se,  ms.  ce.  —  4104  em  plorent; 
et  li  e.  —  4107  est,  ms.  a.  —  41 10  v.  palée.  —41 12  g.  defee.  — 
41 14  mères.—  41 15  F.  ahan  d.  —  41 18  d.  d'ampereres  — 
41 19  p.  cuide  e. 


DOON   DE   LA    ROCHE  I  53 

4120  «  Que  je  tiengne  de  vous  une  sole  denrée. 

«  Par  le  présent  Tomile  faillistes  vos  ma  mère, 
«  Moi  fut  bien  vostre  porte  [et]  vostre  aide  veé[e]  ». 
Quant  l'entendi  Pepin[s],  s'a  la  coulor  muée. 
«  Garçon[s]  »,  ce  dist  Pépins,  «laisse  ester  ta  posnée; 

4125  «  Encor  n'eusse[s]  tu  onques  [d']avoir  denrée; 

«  Mais  je  conquis  Sasoingne  au  tranchant  de  m'espée 
«  Et  ocis  Carsadoine  et  Justamont  son  frère, 
«  Dont  chascun  an  me  vient  li  avoirs  a  charée, 
«  Dont  France  est  maintenue  et  ma  court  honorée 

4i3o  «  Et  la  loi  crestïene  essaucie  et  montée. 

—  Sire  »,  ce  disi  Landris,  «  trop  par  estes  vanteres  ; 
«  Plus  avrai  je  de  vous,  se  longues  ai  durée  ». 

CXVII 

Entre  ii  niés  et  l'oncles  suni  au  palais  par  ire  ; 
Landris  l'en  apella  qui  molt  le  contralie  : 

4i35«  Certes,  orguillous  roi[s],  ce  fut  molt  grant  folie 
«  Et  tort  et  péchiez  grans  quant  vo  seror  faillistes 
«  Et  vo  nevou  petit  por  l'avoir  le  traît[r]e; 
«  Encor  avrez  .j.  jour  gent  soffret[e]  d'aîe; 
«  Se  je  vouloie  France,  el  me  seroit  g[u]erpie,  {v') 

4140  «  Ja  vous  ne  voz  moillier  n'i  avroiz  seignorie. 

«  En  non  Dieu,  petis  roi[s],  je  n'en  prendroie  mie, 
«  Ains  servirai  le  roi  cui  j'ai  ma  foi  plevie, 
«  Si  me  donra  s'enor,  se  Dieu  plest,  et  sa  tille, 
«  Et  je  penrai  par  force  tous  les  po[r]z  de  Hongrie, 

4145  «  Certe[s],  n'a  millour  tere  tant  com  li  monz  tornie; 

41 21  faillit  V.  ma  m.  Cf.  plus  haut  v.  617  et  suiv.  et  plus  bas  v. 
41 36.  —  4124  ta  ponnée.  —  4126  c.  Salsoigne.  —  4127  Et  occis 
Lazadoine  et  Justemont  s.  f.  —  41 3 1  trope  p.  —  4182  v.  ce  longe. 
—  4133  Entres.  —  41 36  q.  vos  serors  falittes.  —  4137  voz  n.  p. 
que  l'a.  en  t.  —  4139  elle  me.  —  4140  avroit  s.  —  4141  E  n.  de 
D.;  je  —  mie,  sic  ms.,  corr.  ja  n'en  prendrai  je  mie  (?).  —  4142 
cui,  ms.  que.  —  4143  m.  teres.  •"."  ^  ""      ■" 


1^4  DOON    DE    LA    ROCHE. 

«  Au  tel  roi  mescreant  trairai  du  cors  la  vie  ; 

«  Mi  enfant  avront  France  par  droit[e]  ansesserie  ; 

«  En  non  Dieu,  mauvais  roi[s],  ne  la  vous  iairai  mie  ». 

Quant  l'entent  l'empereres,  a  po  n'enraige  d'ire, 
41 5o  Volentier[s]  le  feri[s]t  de  sa  paume  sovine, 

Quant  Asse  et  Guinemans  et  si  home  s'escrïent  : 

«  Sire  Pepin[s]  de  France,  laiss[i]ez  vostre  folie, 

«  N'a  si  bon  roi  en  France  n'i  perdi[s]t  ja  la  vie  ». 

Et  dïent  li  marchis  :  «  Râlons  nous  en,  bea[us]  sire, 
4155  «  Ce  fut  torz  et  pechiés  quant  vo  nevou  failli[s]tes. 

—  Hé!  Dex,  »  ce  dist  Pepin[s],  «  com  mal[e]  départie  !  » 

A  tant  ont  demandé  les  mules  de  Sulie; 

Or  s'en   revont  en  France,  s'ont  lor  voie  acoillie; 

Or  n'a  talent  Pepin[s]  que  joue  ne  que  rie. 

cxyiii 

4160  Or  s'en  revient  en  France  Pepin[s]  en  sa  contrée; 

Li  dus  et  sis  bernaige[sj  a  Goloigne  remestrent; 

L'enfes  Landris  en  a  sa  compagne  sevrée. 

Ces  de  Constantinoble,  la  gent  a  l'emperere; 

Venus  est  a  La  Roche,  nuls  ne  set  sa  pensée, 
4163  Lïement  le  recevent  la  gent  de  sa  contrée, 

Encor  n'avoit  li  bers  sa  venjence  finé[e].  {f.  jg) 

Au  matin  par  som  l'aube  furent  sa  gent  armée 

Et  vont  a  HautefeuUe  a  grant  esperonnée; 

Davant  la  mai[s]tre  porte  ont  la  proie  praée, 
4170  Leans  s'adoba  Griffe  a  la  barbe  me[s]lée, 

A  .iiij'^''.  serjans  s'en  ist  lanse  levée; 

La  maisnie  Landri  ont  la  sue  encontrée, 

Ainsois  la  vont  ferir  que  l'aient  detîïée. 

4i5i  Q.  Asses;  sui  h.  —  4i53  ne  p.  —  4i55  q.  vous  nous  f. 
Cf.  V.  4136-4137.  —  4159  P.  qui  juoit  ne  qui  r.  —  4161  ces  b. 
—  4164  sceit  sa  p.  —  4167  p.  soubz  l'a.  —  4171  i.  la  1.  —  4172 
La  maignie. 


DOON    DE    LA    ROCHE  l55 

La  ot  tante  hante  frainte,  tant[e]  targefroée, 
4175  De  sanc  et  de  cervelle  ont  la  terre  puplée. 

Landris  si[ejt  ou  cheval  qu'ot  la  crope  levée, 

Que  H  dona  s'amie  le  jour  qu'il  cint  espée; 

Fiert  Griffon  d'AutefeuUe  sus  la  targe  li[s]tée, 

Desour  la  bocle  d'or  H  a  frainte  et  cassée 
4180  Et  du  haubert  trellis  .iij'^.  mailles  copées, 

Qu'il  li  trancha  le  pis,  le  foie  et  l'eschinée; 

Tant  corn  hante  li  dure,  l'abat  mort  en  la  prée. 

Sur  la  gent  d'Autefuelle  est  la  perde  tornée, 

La  gent  furent  atainte,  conseiie  et  passée, 
4185  Maint  et  communément  [ens]  en  le  vile  entrèrent, 

De  l'or  et  de  l'argent  a  planté  i  trouvèrent, 

Froit  vin  et  bon  froment  et  bone  char  salée. 

Landris  en  a  .ix.  barges  chargies  et  comblées  ; 

En  la  cit  de  Coloigne  les  envoie  a  son  père; 
4190  .G.  chevaliers  i  laisse  qui  la  ville  gardèrent; 

Va  s'en  li  filz  au  duc  en  la  soie  contrée. 

CXIX 

Ou  chastel  de  La  Roche  est  repairiez  Landris; 

Il  a  conquis  satere  et  mors  ses  ennemis;  (v°) 

Or  se  cuide  li  enfes  reposer  et  dormir, 
4195  En  bois  et  en  rivier[e]  sa  joie  maintenir, 

Et  son  père  et  sa  mère  honorer  et  servir  ; 

Mais  sa  grant  poine  sort  et  commence  a  venir. 

Li  bons  rois  Alixandre  s'est  levez  par  matin, 

Droit  a  Saint[e]  Sofie  va  por  la  messe  oir, 
4200  Avec  lui  a  dis  contes  et  dis  autres  marchis, 

Des  barons  de  sa  tere  qui  le  vienent  servir. 

4175  puplée,  sic  ms.,  corr.  porprée  (?)  —  4176  sic  ms.,  corr.  qui 
ot  le  crope  lée  (?)  —  4178  Fièrent.  —  4189  cité  de  C.  —  4190  ch. 
il  laissent.  —  4194  se,  ms.  ce.  —  4198  s'est,  ms.  cçst,  —  4aoo 
«t  dex  %,  n), 


1,56  DOON   DE   LA   ROCHE 

Il  issent  du  mostier  a  ore  de  midi, 

As  fenestres  de  maubre  se  va  li  roi[s]  seïr, 

Par  dever[s]  Orient  voit  .j.  signe  venir, 
4205  Pardesous  la  fenestre  en  .j.  vivier  s'asi[sjt 

Et  fist  tous  les  oiseax  remuer  et  frémir. 

Por  la  beauté  du  signe  li  membre  de  Landri, 

Pitié  le  prist  au  cuer,  si  geta  .j.  sospir, 

Et  dist  entre  ses  denz  que  nulz  hom  ne  l'oï  : 
4210  «  En  non  Dieu,  belle  fille,  au  meillor  ai  failli 

«  Qui  aine  manja[st]  de  pain  ne  ne  beu[s]t  de  vin  ; 

«  Hélas  !  de  son  servise  li  a[i]  molt  mal  meri  !  » 

Atant  es  Salmadrine,  la  fille  au  roi,  qui  vint, 

.III.  chevalier  l'amoinent  a  .j.  mantel  d'ermin; 

4215  Ja  de  plus  bêle  famé  n'or[r]a  nulz  bons  latin; 
As  pies  l'empereor  souz  la  fenestre  sist. 

«  Fille  »,  dist  l'empereres,  «  que  demandes,  que  dis? 
«  Tout  l'avoir  de  cest  siècle  pues  en  ton  cuer  choisir. 

—  Pères  »,  dist  la  pucelle  «  dont  me  rendez  Landri,    (/.  So) 
4220  «  Le  demoisel  de  France  qui  roi  Dorame  prist 

«  Et  m'afia  par  foi  mariage  a  tenir 
«  Et  aquita  par  force  vo  terre  et  vo  païs. 
:  «  Certes,  se  je  ne  l'ai,  molt  aproche  ma  fin, 
«  Ja  ne  vera[i]  la  Pasque  ne  l'entrée  d'avril  ». 
4225  —  Fille  »,  dist  l'empereres,  «  bien  i  poëz  faillir  : 
«  Je  cuit  bien  qu'il  ne  soit  ;  morz  ne  puet  revenir.  » 
.    Respondit  la  pucele  :  «  Dont  [n']ait  li  roi[s]  merci; 
«  Puis  que  roi[s]  son  dit  passe,  ne  doit  son  fié  tenir.  » 

—  Non  voir,  »  dist  l'empereres,  «  se  le  puet  acomplir.  » 
4230  Li  rois  en  apela  son  messagier  Malprin  : 

«  Tu  t'en  iras  en  France,  à  Rains  ou  a  Paris, 

42o3  Au  f.;  ce  vait  le  r.  s.  — 4205  fenestre,  ms.  f'te.  —  4207  li 
remembre  de  L.  —  4209  ces  d.  —  4210  belle  fille,  sicms.;  altérée 

—  42 II  aine,   ms.  ains.  —  421 3  r.   ou  v.  —  4214  m.   eslerni.  — 

4216  Au  p.  Te.  s.    la  forme   s'asist.  —   41 18  Tous.  —  4222   vos 
terres  et  vos  p.  —  4223  se  ms.  ce.  —  4226  Je  cuide  b.  qui  ne  s. 

—  4227  ait,  m5.  out.  —  4228  fiés  t.  —  4239  l'emperieres;  se,  m5.  ci. 


DOON    DE   LA    ROCHE  ibj 

«  Et  cherche  [en]  Alemangne,  [en]  Bourgongne  et  Beri, 
«  Tous  tens  mais  seras  riche[s]  se  tu  le  fais  venir. 
«  Le  gentil  chevalier  salue  de  par  mi, 

4235  «  De  la  foi  lui   remembre  qu[e]  il  [ja]  me  plevi, 
«  Sur  le  branc  de  s'espée  o  les  lettres  d'or  fin; 
«  Le  convent  qu'il  i  out  suis  je  près  de  tenir. 
«  A  iceste[s]  enseigne[s]  le  faites  revenir  ; 
a  Et  s'il  ainsi  nel  fait,  molt  i  avra  mespris, 

4240  «  M'amistié  et  la  soie  estovra  départir.  » 

Quant  l'entent  la  pucele,  s'en  apelle  Malprin 
(Bien  sot  .xxx.  langaiges,  11  roi[s]  l'avoit  norri)  : 
«  Vous  en  irez  en  France,  quant  mis  pères  l'a  dit, 
«  Et  cerchiez  tant  la  tere  que  vous  truissiez  Landri  ; 

4245  «  De  ma  part  li  portez  cest  anelet  petit, 

«  Ou  fut  li  sairemenz  et  jurez  et  pleviz.  »  (v*) 

Si  dist  celé  donzeile  :  «  Reveigne  ou  pais 
«  Dedans  Constaniinoble  l'empereor  servir, 
«  Et,  se  ne  fait  ainsi,  molt  i  avra  mespris, 

4250  «  La  fille  [r]emperer[e]  en  conviendra  morir.  » 
Il  a  pris  l'anel  d'or,  en  s'escharpe  l'a  mis. 
Celé  nuit  sejorna,  si  monta  au  matin; 
Deci  qu'en  Alemangne  n^  prist  il  onques  fin. 
Molt  fort  li  ennuerent  les  poines  a  soflFrir; 

4255  Tote  passa  la  terre,  outre  mer  et  Mongiu. 


cxx 

Baron,  ce  est  en  mai  que  chaude[s]  sont  les  ore[s], 
Chevaliers  a  s'amie  volantier[s]  se  déporte, 


4232  Entre  ce  vers  et  le  suivant,  il  faut  admettre  un  vers  perdu  : 
Que  tu  truisses  Landri,  le  chevalier  de  pris  ou  quelque  chose 
d'analogue,  cf.  v.  4244.  —  4233  se  tu  me  pues  v.  —  4236  o,  ms. 
ou. —  4239  s'il,  ms.  cil. —  4242  sot,  ms.  soit. —  4243  mes  p. —  4247 
Reveigne,  ms.  Revoinne.  —  4249  se,  ms.  si.  —  4262  monta,  ms. 
monte.  —  4255  outremer  en  un  mot.  —  4257  ce  d. 


158  DOON   DE   LA   ROCHE  , 

Que  ces  puceles  vont  a  geus  et  a  quaroles  ; 

Dont  fut  Landris  li  enfes  ou  chastel  de  La  Roche, 
4260  Et  si[s]t  sur  .).  perron  devant  la  mai[s]tre  porte; 

Atant  es  le  messaige  qui  Tanel  d'or  aporte; 

Il  ne  porta  pas  brief,  ains  a  dit  par  parole  : 

«  Jhesus  li  roi[s]  du  ciel,  qui  comma[n]ça  Tistoire, 

«  Il  sait  et  gart  Landri  et  li  croisse  sa  force! 
4265  —  Amis,  »  ce  dist  Landris,  «  Dieu  vous  croisse  victoire  ! 

«  De  quel  tere  es  tu  nez  qui  contes  tels  paroles? 

—  A  la  moie  foi,  sire,  droit  de  Constantinoble, 
«  Ou  la  plus  bêle  famé  por  vostre  amor  s'afole, 
«  Qui  onques  fut  en  tere  ne  jamais  soit  desore. 

4270  «  Or  vous  mande  mes  sires  et  li  grans  apostole[s], 
«  Li  couvent  que  vous  orent  vos  atandent  encor[e]. 
«  Garde[z]  que  [ja]  vers  els  soit  sauve  vo  parole  ;     (/.  81) 
«  Qui  sa  fiance  passe,  a  tous  jour[s]  s'en  affole 
«  Et  qui  soufri  grantment,  li  tala[n]s  lesorporte.  » 

4275  Quant  Tentendi  Landris,  de  bien  parler  le  loue. 

CXXI 

Quant  entendi  li  enfes  que  li  messages  dit, 
Ne  li  laissa  plus  dire,  ains  le  fi[s]t  aseïr; 
A  .)'.  conseil  le  meine  desoz  l'ombre  d'un  pin  : 
«  Commentavez  a  non  ?  —  On  m'apelle  Malprin, 
4280  «  Bien  me  devez  cognoistre,  car  main[t]  jor  vos  servi. 

—  Li  bons  rois  Alixandre  comment  se  maintient-il? 

—  A  la  moie  foi,  sire,  molt  est  proz  et  genti[z]. 

—  Et  sa  fille  la  gente,  la  belle  a[l]  cler  vis, 

«  Est  elle  morte  ou  vive,  at  elle  seignor  pris? 


4258  Corr.  Et  ces  p.  (?)  —  4260  sur,  ms.  sus.  —  4266  De  quelles 
t.  es  tu  n.  q.  Cons.antin  p.  —  4270  li  grant  a.  —  4271  Les 
convant.  —  4272  v.  eulx  s.  sauvée  voz  paroles.  —  4276  messages. 
ms.  messager.  —  4278  conseil,  ms.  conseille.  —  4284  ait  e. 


bOÔN    DE   LA    ROCHE  I Bç 

4285  —  Sire  »,  dist  li  message[s],  «  merveilles  avez  dit  : 
«  Por  la  vostre  amistié  est  toz  jours  en  depri, 
«  Car  el  ne  siet  a  table  ne  ne  dort  en  son  lit, 
«  Ains  est  a  orison  davant  le  cruciti[s], 
«  Et  proie  Damedieu  le  vosire  cors  garit. 

4290  «  Vez  ci  .).  anel  d'or  que  t'envoie  par  mi; 
«  Desour  la  niai[s]tre  jame  li  juras  et  plevis 
«  A  tote[s]  ces  enseignes  repairier  ou  pais  ; 
«  Se  ainsi  ne  le  faiie[s],  de  s'amor  vous  deffi, 
«  Ne  jamais  l'emperere  n'ert  as  François  amis,  » 

4295  Quant  l'oit  Landris  de  France,  molt  s'en  est  esmarriz. 

CXXII 

Quant  li  filz  D[o]  le  duc  entendi  le  message, 
Il  [li]  a  pris  l'anel.  qui  bien  fut  congnissable,  (v«) 

Pitié  ot  de  s'amie,  si  sospire  et  larme. 
Atantes  vous  son  mai[s]trecontremontenla  sale... 
4300  —  «  Ou  est  li  preuz  Landris  a  l'aduré  corage?  » 

—  «  La  aval  el  vergie[r]  parole  a  .j.  mesage.  » 
Quant  li  baron  l'entendent,  les  degrés  en  avalent, 
Truevent  le  fil  au  duc  descoloré  et  pale; 
Premerains  l'en  apelle  dans  Guinemans  ses  mai[s]tres: 

43o5  «  Damoiseaus,  fils  au  duc,  quex  est  vostre  corage  ?  » 

—  «  Mai[s]tre  »,  ce  dist  Landris,  «  bien  doi  avoir  la  rage 
«  Quant  li  roi[s]  Alexandre[s]  me  [desfie  et  me]  bla[s]me  : 
«  Un  chevalier  me  mande  cui  me  laissa  en  garde, 

«  De  son  trésor  plus  riche  m'emplist  il  bien  mes  maies. 
43 1  o  «  Conseilliez  moi,  beaus  maistre[sj,  que  je  ne  sai  que  face.  » 

4287  el,  ms.  ele.  —  4289  c.  garit.  —  4292  c.  anseige  repaire.  — 
4294  as  François,  ms.  affrac'.  —  4296  li  m.  —  4299  ^l  f(iut 
admettre  qu'après  ce  vers,  il  y  avait  un  vers  perdu,  disant  que 
Guinemant  s'entretient  avec  les  autres  «  barons  »,  v.  4802.  — 
43oi  a.  en  ce  v.  —  43o3  pale,  ms.  paile.  -  4307  Q.  li.  r.  A.  me 
blâme.  Vers  trop  court.  —  4308  Molt  cher  me  m.  quil  me  1. 
en  g.  —  43 10  que  fere. 


l6o  DOON   DE   LA   ROCHE 

Et  respont  Guinemans  :  «  Tu  as  mauvais  corage! 

«  Conquis  as  tes  onors  et  mort  le  fel  lignage,  . 

«  Qui  te  firent  chetif  en  la  tere  sauvage  ; 

«  Et  voz  père  li  dus  est  molt  [de]  grant  eage, 
43 1 5  «  Bien  mainta[n]ra  la  tere  et  ta  mère  la  sage  ; 

«  Et  tu  vas  ou  pais  ou  tu  [as]  pris  tes  armes, 

«  Tant  te  donra  li  roi[s],  jamais  ne  seras  povres, 

«  Puis  prenez  la  pucelle  par  leal  mariage, 

—  Mai[s]tres,  »  ce  dit  Landris,  «  gentil  conseil  me  bailles, 
4320  «  Se  ainsi  ne  le  fais,  ce  ert  molt  grant  folage.  » 

Ma[i]s  ....  celle  enseingne,  après  revint  .j.  autre, 

Qui  dut  torner  en  France  a  perde  et  a  domage.  (/.  S2) 

Les  rues  de  la  ville  vint  poi[g]nant  .j.  messages 

Et  fut  navrez  forment  dessus  la  maistre  espale, 

4325  Sanglant  en  ot  le  pan  de  son  bliau[t]  de  paile. 
A  haute  vois  escrie,  oiant  tout  le  barnage  : 
«  Ou  estes  vous,  Landris,  filz  au  duc?  Trop  te  targes! 
«  L'empereres  de  France  est  pris  a  .j.  chace, 
«  O  lui  .c.  chevaliers  du  miex  de  son  barnage; 

4330  «  Chascun[s]  tenoitun  cor,  n'i  avoit  plus  des  armes; 
«  Hé!  bcrs,  se  nés  secours,  po  pris  ton  vaselage  ; 
«  Se  il  passe[nt]  le  Rin,  ce  ert  molt  grant  domage, 
«  Ja  por  la  ra[a]nçon  mar  i  queront  ostage.  » 
Quant  l'enteridi  li  enfes,  dont  ne  sait  que  il  face  ; 

4335  Parmi  son  hardement  acoilli  son  corage, 

A  haute  vois  escrie  :  «  Car  m'aportez  mes  armes.  » 


43 12  t.  honeur;  li  f.  1.  —  4.11 3  firent,  ms.  fier't.  —  4317  le  r.; 
povres,  sic  ms.  —  4321  Mas  c.  ensoingne  a.  r.  .j.  a.  Altéré,  on 
peut  proposer  Ma[i]s  partie  l'enseingne,  a.  r.  .j.  a.  Il  faut  admettre 
qu'avant  ce  vers  il  y  avait  des  vers  perdus,  disant  que  Landri 
congédia  le  messager  de  l'empereur,  après  lui  avoir  promis  de 
partir  pour  Constantinople.  —  4323  p.  .j.  messager.  —  4326  a  h. 
V.  a  crie.  —  433o  p.  d'armes.  —  433 1  pris,  ms.  prise. 


DOÔN   DE   LA   ROCHE  l6l 


CXXIII 


Baron,  desous  le  pin  la  ou  Landris  s'adobe, 
Entor  lui  s'aresterent  li  baron  de  Coloi[g]ne, 
Et  Asse  de  Maiance  et  lor  maisnie  tote 

4340  Et  Guinemans  ses  maistre[s]  tint  l'enseigne  de  porpre  ; 

Molt  fugranzli  barnage[s]  quant  li  mai[s]tre[s]  corfs]  sone, 
Parmi  la  mai[s]tre  rue  s'en  issent  a  grant  corre. 
La  dehors  a  la  barre  furent  esmé  lor  home  ; 

4345  .iii}°».  haubert,  molt  fu  gente  la  rote. 

^'        Or  cheva[ujche[nt]  ensemble  le  bruel  desus  Coloigne. 
Landris  plore  et  démente  et  regrete  son  oncle  : 
«  Haï  î  Pepin[s]  de  France,  gens  roi[s],  belle  persone,       (v") 
«  Se  paien  vous  enmoine[nt],  com  ira  France  a  honte!  » 

4350  Et  li  Sesne  chevauchent,  que  Damediex  confonde, 
L'empereor  en  meinent.  Pépin  de  France  dolce, 
•iiij".  chevaliers  et  sa  maisnie  toute. 
Molt  forment  les  destreint  Brohimax  de  Sesoine  : 
«  Par  Mahomet,  dans  roi[s],  molt  est  vo  vie  corte. 

435.S  «  Mar  veïstes  la  mort  Carsadoine  mon  oncle, 
«  Demain  serez  jugiez  en  la  cit  de  Tresmoigne, 

«  Cil  de  France  en  seront 

((  Tu  rendras » 

Quant  l'entent  l'empereres,  de  duel  et  d'ire  [plore], 

4360  Des  liens  de  ses  poins  a  fait  [rompre  les  cprdes], 
Et  vient  a  .j.  paien,  merveillous  cop  li  donc,  .  |. 

4339  maisnie,  ms.  magnie.  —  4340  ces  m.;  l'assongne  de  p.  — 
4342  rue,  ms.  rues;  corre,  ms.  corne. —  4344 fire  esmes  lor  bornes. 
—  4345  haubert,  ms.  herbers.  —  4346  le  b.  desue  longue.  —  4347 
demre  et  regrate  s.  o.  —  435o  Et  li  S.  chevoichent.  —  435i 
en  meinent,  ms.  amoine.  —  4352  maisnie,  ms.  maignie.  —  4354 
Mahomet,  ms.  Mahon  ;  vo,  ms.  voz.  —  4355  Jazacoigne  [ou 
Jaracoigne),  cf.  plus  haut,  v.  4127.  —4357-4360  vers  incomplets 
dans  le  ms.  —  4359  l'empereres,  ms.  l'empereur.  —  4360  ses,»», 
ces. 


l62  DOON    DE    LA    ROCHE 

Que  dou  mai[s]tre  os  del  col  li  froissa  la  m[e]olle, 

Très  davant  le  seignour 

Dolans  en  fut  ou  cuer 

4365  II  traient  les  esp^es,  si  corrent  le  [confondre] 

Que  ja  Teûssent  mort,  néant  fu[s]t  del  re[s]corre 
Quant  Landris  lor  sordit  par  miliu  d'une  combe. 
A  .XX™.  chevaliers  lor  enseigne  lor  mostrent  ; 
*  '  Landris  si[s]t  ou  cheval  a  la  levée  crope, 

*    ^  *"  437oVaferir  Brohemax  en  l'escu  de  Sasoinne, 

Qui  du  haubert  li  tranche  bien  .iiijn».  doble[s], 

Le  foie  et  le  pormont  et  l'eschine  li  cope  : 

«  Fils  a  putain,  paiens,  vos  me  rendrez  mon  oncle!  {fol.  83) 

«  Guvers!  mar  le  baillastes;  vos  le  lairez  a  honte.  » 


i\! 


.^n: 


GXXIV 

4375  Grant  paor  ont  li  Sesne  quant  il  le  ot  ocis; 
Il  coururent  en  fuie,  si  o[n]t  le  champ  guerpi 
Et  laissierent  tout  soûl  l'emperere  Pépin 
Et  les  frans  chevaliers  qui  France  ont  a  baillir  ; 
Li  .j.  deslie  l'autre  des  chevaliers  gentis 

4380  Et  jurent  Damedieu  [et]  le  cors  saint  Denis 
Mar  fut  si  grans  orguels  porpansés  ne  bastis; 
î      Ja  le  comparent  Saisne  s'il  i  pu[e]ent  venir. 
Pepin[s]  regarde  avant,  voit  Brohemax  gésir, 
Par  delez  la  mamelle  ot  trespercié  le  pis, 

4385  L'heaume  li  deslaça,  l'haubert  li  desvestit  ; 
L'emperer[e]s  si  vait  sus  .j.  cheval  saillir. 


4363-4365  vers  incomplets  dans  le  ms.  —  4365  [confondre] 
suppléé  par  Benary.  —  4366  eussient  m.;  d.  recoure.  —  4367  par 
miliu,  ms.  parmi  liu.  —  4368  ch.  tout  1.  c.  —  4369  a  la  loe  c, 
cf.  V.  4176.  —   4371   b.  iiij  double.  —  4373  putain,  ms.  putains. 

—  4374  mar,  ms.   mal.   —  4375  li  serf  q.  —   4377   Et   lassarent 
tous  s.  —  4379  deslie,   ms.  desue.  —  4381  M.  f.  li  grant  orgue! . 

—  4382  Saisne,  ms.  Sainne.  —  4383  v.  Brenehaut  g. 


/ 


DOON    DE   LA   ROCHE  l63 

Pent  Tescu  a  son  col,  le  roit  espié  saisi[s]t, 
En  la  rote  se  met  o  son  nevou  Landri. 
Qui  lors  veîst  païens  trabuch[i]er  et  morir 

4390  Et  ces  barons  de  France  les  guarnemens  vestir 
Et  ces  chevax  isniax  sur  les  seles  saillir, 
De  molt  grant  vasselage  li  peûst  sovenir. 
En  la  rote  se  metent  as  compaignons  Landri; 
Aine  paien  n'encontrerent  plus  orguiloi  voisins, 

4395  Et  escrîent  «  Monjoie  !  mar  passa[s]tes  le  Rin  !  » 
Il  n'en  estort  .j.  seul[s],  s'il  ne  s'en  puet  foïr,     ♦  r 
En  crote  ou  en  citerne  ou  en  bove  garir. 
Qui  le  jour  vout  eschae,  bien  en  ot  a  loisir  : 
Ce  que  li  .j.  puet  prendre  ne  menassent  li  .x.    (v*j 

4400  Des  mors  ne  des  navrés  ne  sa[i]  conte  tenir, 
Mais  durement  reclament  Mahon  et  Apolin. 
Autour  de  la  bataille  es  vos  poi[g]nant  Landri, 
Et  ot  frainte  sa  hante,  trait  ot  le  branc  forbi, 
L'espée  fut  vermoille,  tant  ot  paiens  ocis. 

4405  Ou  que  il  voit  son  oncle,  par  la  main  le  saisi, 

Puis  li  dist  fièrement  :  «  Dans  rois,  vous  estes  pris, 
En  la  cit  de  Coloigne  en  vanrez  avec  mi. 
Après  vos  m'escherra  li  tresor[s]  de  Paris.  » 
Et  dist  Pepin[s]  de  France  :  «  Jel  commant  et  otri, 

4410  A  mangier  ne  [a]  boire  n'avrai  avant  de  ci.  » 
Du  cheval  ou  il  siet  li  est  as  pies  chaiz  ; 
Et  Landris  l'en  redresse,  que  ne  le  vot  soffrir, 
Trois  fois  s'entrebaiserent,  car  Diex  le  vot  ainsi  ; 
Deci  qu[e]  a  Coloi[g]ne  ne  prirent  onque[s]  fin. 


4388  se  mete.  —  4389  morir,  ms.  moris.  —  4390  Et  as  b.  — 
4391  Et  es  c.  —  4394  Ains  paiens.  —  4398  Que;  en  fut  al.  — 
4400  s.  cope  t.  —  4407  cit,  ms.  cité.  —  4408  m'escherra,  ms. 
miesnera;  li,  ms.  le.  —  4409  Je  le  commande  et  o.  —  4410  Auoit 
ne  b.  —  4412  vot,  ms.  voit.  —  4413  c.  Dieu. 


\64 


DOON  DE  LA  ROCHE 


cxxv 


441 5  En  la  cit  de  Coloi[g]ne  est  repair[i]ez  li  rois, 

La  mai[s]nie  Landri  et  li  autre  François  ; 

Son  cors  et  son  haubert  a  fait  peser  .iij.  fois 

Du  plus  fin  or  d'Arabe,  ja  meillour  ne  verroiz, 

Qu'il  offrit  a  saint  P[i]ere,  a  l'autel  ben[e]oit  ; 
4420  Molt  riche  don  ildone  ses  compaignons  françois 

Et  Landri  .c.  chevax,  qu'as  paiens  a  tolois  ; 

Tuit  ensemble  montèrent  au  palais  maginois. 

Li  frans  dus  de  Coloi[g]ne  ala  baisier  le  roi, 

Et  Olive  son  fils,  qu'ele  plus  aime  et  croit 
4425  Que  nul  home  qui  vive,  [et]  certes  ele  a  droit.        [fol.  S4) 

Molt  demeinent  grant  joie  li  baron  celle  fois  ; 

Li  aiguë  fut  cornée,  si  se  sistrent  a[u]  dois. 

Assez  orent  viande  et  [le]  bon  vin  et  froit  ; 

A  icelle  foie  fut  bien  servi[z]  li  roi[s]... 
4430  Et  Guinem[ans]  sis  mai[s]tres,  qu'il  aime  en  bone  foi. 

Et  tuit  li  haut  baron  qu'il  retient  avec  soi. 

«  Seignour  »,  ce  dist  li  enfes,  «  entendez  [en]vers  moi. 

CXXVI 

«  Baron,  [seignour,  »]  dist  il,  «  entendez  mon  semblant  : 
«  Mes  sire  m'a  mandé,  au  coraige  vaillant, 
4435  «  Qui  tient  Constantinoble  et  quanqu[e]  i  apent, 
«  Li  v[e]rais  empereres,  de  cui  je  me  lotant; 

4415  cit,  ms.  cité.  —  4420  ces  c.  —  4428  Le  franc  duc  de  C. 
—  4425  nulz  h.  —  4426  M,  demoinne  g.  j.  li  barons.  —  4429 
A.  i.  fois  f.  b.  servi  le  roi.  Après  ce  vers,  il  faut  admettre  une 
lacune  d'au  moins  un  vers,  où  il  était  question  de  Landri.  — 
4430  G.  son  maitre.  —  4481  Et  tous  les  haus  barons  qui  estient 
a.  s.  —  4432  Seigneurs.  —  4434  mandés  en  c.  v.  —  4435  q. 
il  a.  —  4436  loe  t. 

I 


DOON    DE    LA   ROCHE  l6$ 

«  Jurer  me  fist  sa  fil[l]e  et  faire  sairement 

«  Qu'a  moillier  [la]  penroie  sans  nul  arestement  ; 

«  Charga  moi  grant  avoir,  ses  barons  et  ses  gens. 

4440  «  La  merci  Damedieu,  il  nos  vat  bellement  : 
«  Li  traïtor  sont  mort  et  livré  a  torment, 
«  Mes  pères  et  ma  mère  ont  fait  acordement, 
«  En  pais  tenront  la  terre,  des  ore  en  avant  ; 
«  Droit  a  Constantinoble,  ou  j'ai  mon  sairement, 

4443  «  M'en  irai  le  matin,  se  Diex  [le]  me  consent, 
«  Si  penrai  Salmadrine,  la  bêle  au  cors  gent  ; 
«  Tels  noces  i  ferai,  par  le  mien  esciant, 
«  Il  n'ot  onque[s]  sibelle[s]  au  reaime  de[s]  Franc[s.] 
«  Ma  mère  [avrai]  o  moi  et  mon  père  ensiment  ; 

4450  (c  .1.  prodome  lairons  tout  nostre  tenement. 

—  Beax  niés,  »  dist  remperer[e]s,  «  ne  vos  dotez  néant, 
Avec  vos  [m'en]  irai  et  si  menrai  grant  gent.  (v«) 

—  Sire,  »  ce  dist  Landris,  «  vous  parlez  avenant.  » 
L'endemain,  par  matin,  font  lor  atornement 

4455  Et  acoillent  lor  voie  et  tout  lor  errement. 

Ici  que  vous  iroie  lor  jornées  contant? 

Tant  errent  et  chevalchent,  par  le  mien  esciant, 

Que  de  Constantinoble  virent  le  mandement. 

Il  prinrent  .j.  message  cortois  et  avenant; 
4460  En  la  cité  l'envoient  la  novelle  portant 

Que  Landris  s'en  repaire,  si  ameinne  grans  gens. 


CXXVII 

Li  messagier[s]  s'en  tome  a  grant  esperonnée  ; 
Au  bon  roi  Alixandre  les  noves  a  contées 


4438  Que  a  m.  —  4439  ces  b.  et  ces  g.  —  4440  rat,  ms.  u'at  — 
4441  s.  mors.  —  4445  se  Dieu.  —  4447  Telles.  —  4452  Âveques 
irais.  —  4455  errement,  ms.  errammant.  —  4458  Qui.  —  4461  g. 
gent.  —  4463  no.UTelles  a  conter. 


l66  DOON   DE   LA  ROCHE 

Que  Landris  est  venu[z],  si  ameine  sa  mère 
4465  Et  son  oncle  Pépin,  qu'est  roi[s]  et  empereres, 

Et  molt  de  haus  barons  et  Doon  le  sien  père. 

Saimadrine  l'entent,  graat  joie  en  amenée. 

Toute  la  ville  en  bruit  ;  meïsmes  l'emperere 

Monta  en  .j.  destrier  qui  la  crope  ot  lée, 
4470  A  rencontre  lor  va,  grant  joie  a  démenée. 

Entrencontré  se  sont  Landris  et  l'emperere; 

Olive  et  Saimadrine  aussi  s'entrencontrerent, 

Plus  de  .c.  fois  s'acoUent  et  assez  se  baisèrent. 

En  la  cité  s'en  entre[nt],  grant  joie  démenèrent. 
4475  Encontre  lor  venue  trestuit  li  sein  sonerent; 

N'i  ot  si  povre  rue  ne  fu[s]t  encortinée. 

Droit  au  mai[s]tre  palais  descent  11  empereres 

Et  Pepin[s]  et  Landris  et  Olive  sa  mère  ;       (/.  85) 

Tout  contreval  la  ville  escuier  s'ostelerent. 


CXXVIII 

4480  Contreval  la  cité  est  la  novelle  oïe 

Que  Landris  est  venu[z]  por  esposer  s'amie  ; 
Diex  !  que.l  joie  on  en  fait  [en]  contreval  la  ville! 
Saimadrine  la  bêle  aresne  dame  Olive  : 
«  Bien  soiez  vos  venue,  ma  dame  et  m'amie  ; 

4485  «  De  Dieu  et  tous  les  sains  soiez  vos  beneîe! 

«  Quanques  je  ai  est  vostre  et  en  vostre  baillie.  » 
Quant  Olive  l'entent,  si  en  devint  molt  lie; 
[Se]  grant  joie  se  font,  je  ne  m'e[n]  merveil  mie. 
Et  li  escuier  font  que  les  nâpes  sont  mises  ; 

4490  Quant  l'eaue  fut  cornée,  cil  chevalier  s'asirent; 
Li  dui  empereur,  Doons  et  dame  Olive 


4465  qu'est,  m*,  qui  est.  —  4466  Doon,  ms.  Doz.  —  4468  m. 
l'empereur.  —  4471  L.  et  l'empereur.  —  4475  li  s.  senerent.  — 
4485  et  de  t.  —  4488  merTcil,  ms.  merToille.  —  4491  Li  deux  e. 


DOON   DE   LA   ROCHE  167 

Au  mai[s]tre  dois  s'asirent  de  la  grant  sale  antie; 
Landris  servi  le  jour  a  la  table  s'amie, 
O  lui  .c.  damoisel  de  France  la  garnie; 

4495  Asses  et  Guinema[n]s,  Hues  de  Pontalie 
Servent  l'empereur,  Doon  et  dame  Olive. 
Assez  orent  piment  et  vins  séant  sor  lie, 
Viandes  a  foison,  poisson,  char,  voleïlle  ;        '"''•^■' 
Ainsois  seroit,  je  cuit,  li  ore  de  compile 

4500  Que  devisé  eusse  tout[e]  la  seignorie. 

Quant  il  orent  mangié,  droit  a  la  prai[e]rie 
Cil  legier  bachelier  ont  quintaine  drecie... 

•  Joer  et  envoisier  par  grant  bachelerie  ;  (y") 

Le  jour  i  ont  François  mainte  lance  brisie. 

45o5  L'emperere  Alixandre  ne  s'i  oblia  mie  : 

Il  tresmet  ses  messages  et  fait  ses  briés  escrire, 
Que  trestuit  li  baron  qui  sont  de  son  empire 
Soient  tuit  a  la  feste  et  as  noces  sa  fille  ; 
Tant  i  vi[n]drent  baron  a  grant  chevalerie 

45 10  Que  fors  de  la  cité  a  la  grant  praierie 

Convint  faire  les  noces  la  belle  Salmadrine. 


CXXIX 

Molt  fut  grans  li  barnage[s]  qui  la  fut  assemble[z]  ; 
Li  afaire  Landri  con  fut  renovelez  ! 
Davant  l'empereur,  qui  de  France  fut  nez,  »  c;-c^. 
45 1 5  Et  davant  les  barons  qui  [la]  sunt  assemblé, 
Ja  Landris  avéra  a  moillier  et  a  per 
Salmadrine  la  belle,  que  il  doit  molt  amer  ; 
Bien  i  est  emploie[z],  de  haute  gent  est  nez, 

4492  m.  doz.  —  4494  c.  damoiseax.  ~  4498  ch.  voloisie.  — 
4601  o.  mangier.  —  4502  C.  1.  bechelet  o  la  quiterne  d.  —  45o3 
Lacune  entre  ce  vers  et  le  précédent.  —  4604  Se  j.;  m.  1.  brisée. 

—  45o5  L'empereres  A.  —  4506  ces  b.  —  4512  f.  grant;  que  la. 

—  45i5  li  b.  ;  s.  assemblés.  —  4616  Que  L.  ;  a  père. 


~l68  DOON    DE   LA    ROCHE 

Et  s'est  bon[s]  chevalier[s],plain[s]  de  [molt]  grant  beauté; 
4620  L'emperer[es]  de  France,  qui  tant  fist  a  loer, 

Est  frère  a  sa  mère,  bien  veoir  le  poez, 

Es  noces  est  venuz  et  li  et  ses  barnez...  .kk 

«  Venez  avant,  Landris,  .1.  petit  m'entendez  ; 

«  Tel  chose  vous  dirai  dont  grant  joie  av[e]rez  : 
4525  «  Je  vous  ottroi  ma  fille,  tantost  l'esposerez, 

«  La  tere  çt  tout  l'empire  de  cest  jour  en  tenrez, 

«  En  avant  de  cest  jour  corone  porterez 

«  O  ma  fille  roîne,  que  vous  esposerez. 

—  Sire  »,  ce  dist  Landris,  «  .v"=.  merci[z]  de  Dé.  »     (/.  86) 
4630  Maintenant  fut  Landris  a[u]  grant  mostier  menez; 

Salmadrine  s'amie  fut  joste  ses  costez. 

.L  [gentilz]  arcevesque[s],  Jehan[s]  fut  apelez. 

Cil  esposa  la  dame  a  molt  grant  dignité  ; 

Dis  avesques  i  ot  et  s'i  ot  .c.  abez, 
4535  .C.  contes  et  .c.  dus  et  .x.  rois  coronez, 

Et  deus  empereors  i  ot  a  l'esposer. 

La  messe  commança  rarcevesque[s]  Jehans  ;     <« >, 

Molt  fut  riche  l'offrande  qui  fut  mise  a  l'autel. 

Quant  la  messe  fut  dite  et  [li]  missels  chantez, 
4540  Au  palais  en  monta  Landris  li  adurez,  / 

En  son  chief  ot  corone,  ja  meillor  ne  verrez; 

Grant  joie  en  ot  sa  mère,  de  cui  il  fut  amez. 

Salmadrine  la  belle,  qui  molt  ot  de  beauté, 

Fu  coronee  ainsi  com  vos  oi  avez. 
4545  L'empereres  de  France  et  Do  li  adurez 

La  tiennent  par  la  main  ;  tuit  i  sont  li  abé. 


4519  Et  cest.  —  4521  poez,  ms.  poiez.  —  4522  barnez,  ms. 
bernes.  —  4523  m'atandés.  Entre  ce  vers  et  le  précédent,  il  faut 
supposer  au  moins  un  vers  perdu,  oii  il  était  dit  que  Vempereur 
de  Constantinople  paraissait  et  adressait  la  parole  à  Landri.  — 
4624  V.  diras;  j.  aurés.  —  4527  Et  anon  en  c.  j.  —  4628  Et  ma 
f.  —  453i  ces  c.  —  4532  J.  i  f.  a.  —  4533  Sil  aposa.  —  4537  l'a. 
Jehans,  sic  ms.  —  4539  d.  et  misdel  ch.  —  4540  En  p.  —  4546 
L'empererer  de  F.  —  4546  t.  en  vont  les  abés.  ' 


DOON    DE   LA   ROCHE  169 

Et  Landris  li  beaus  enfes  refut  bien  adestrez 
D'arcevesques,  de  contes,  de  rois  et  de  abez. 
-  Les  tables  furent  mises  au  palais  principel, 

4550  En  sales,  en  maisons,  en  jardins  et  en  prez; 

De  tous  les  mes  qu'il  orent  n'iert  ja  conte[s]  trovez, 
Que  bien  pouez  savoir  qu'il  en  i  out  assez. 
Molt  furent  bien  servi  de  vin  et  de  claré; 
Et  si  vous  di  pour  voir  que  tuit  li  ménestrel 

4555  De  France,  d'Alemangne,  deci  qu'a  Balegué,  (v**) 
Cil  de  Constantinoble,  de  Rome  la  cité, 
I  furent  a  la  feste  venu  et  assemblé  : 
Li  un[s]  timbre  de  harpe,  et  l'autre  a  violé  ; 
Cil  meine  guigue  et  rote,  ci[l]  fait  harpe  sorier; 

4560  Chascun[s]  de  son  mestier  i  a  le  jour  monstre. 
Quant  vint,  après  mangier,  que  il  furent  levé, 
Lors  font  li  ménestrel  lor  feste  a  grant  plenté. 
Ces  gentis  tumeresces  i  ont  le  jour  tumé. 
Ces  belles  dam[o]iselles  dancié  et  espringué, 

4565  Cil  jone  damoisel  ont  le  jour  behordé. 
Ce  seroitgrans  enuis  de  trestot  recorder; 
.1.  mois  durent  les  noces, c'on  ne  puet  aviser; 
Ou  palais  toz  les  jors  ont  grant  joie  mené. 
Et  quant  les  noces  faillent,  i  out  [grans]  dons  donez. 

4570  Lors  s'en  vont  li  baron,  quant  ont  fait  fëauté, 

Cil  qui  de  la  contrée  erent  norri  et  né;  '  '' 

Mais  Landris  n'en  la[i]ssa  pas  les  François  râler, 
Ains  les  [rejtint  encor  pour  eus  miex  honorer, 
Par  les  chasteax  les  meine  pour  trestout  regarder; 


4548  abez,  altéré;  les  abbés  ont  déjà  été  mentionnés  deux 
vers  plus  haut;  corr.  chasez  (?)  —  455 1  c.  trover.  —  4555 
Baligné.  —  4556  de  C.  et  de  R.  —  4557  II  f.;  venu,  ms.  venus.  — 
4558  Li  u.  timpre;  de  v,  —  4559  Si  m.;  harpe,  sic  ms.,  doit  être 
altéré.  —  4562  f.  li  menestres  I.  festes.  —  4563  g.  tumerestes. 
—  4564  dancier  et  espigner.  —  4565  o.  cil  j.  behordel.  —  4566  t. 
recordes.  —  4568  Onque  1*  de  tous  les  jours  ot  moins  j.  m.  — 
4570  grant  o.  f.  fiantei.  --  4374  meinent  p.  trestous  r. 


'  170  DOON    DE   LA   ROCHE 

4575  Et  Pepin[s]  et  ses  père  et  sa  mère  a[u]  vis  cler 
Furent  bien  ou  pais  servi  et  honoré 
Et  de  molt  riche[s]  dons  lor  at  on  présenté. 
Quant  vint  a  cliief  de  pièce  qu'il  orent  séjourné, 
L'emperer[es]  de  France  at  Landri  apelé  : 

4580  «  Beaus  niés  »,  dist  Tempereres,  «  je  m'en  vuel  retourne 
«  Et  Do  et  vostre  mère,  qui  en  volons  râler, 
«  Que  de  nostre  pais  n'oimesv  puis  parler,  (/.  S 

«  Comment  qu'il  est  mes  homes,  qui  l'ont  a  gouverner, 
«  La  tere  et  lou  pais  [et]  lor  fame[s]  garder. 

4585  —  Sires  »,  ce  dist  Landris,  «  a  vostre  volenté. 


CXXX 

—  Oncles,  »  ce  dist  Landris,  «  empereres  nobile, 

«  Vous  en  irez  ariere  en  France  la  garnie 

«  Et  s'en  menrez  mon  père,  ma  mère  [dame]  Olive; 

«  Pour  Dieu,  amez  l'un  l'autre,  si  ferez  cortoisie. 
4590  —  Landris,  »  ce  di[s]t  li  rois,  «  ne  vous  esmaiez  mie; 

«  Se  vous  avez  mestier  de  ma  chevalerie, 

«  Sachiez  certainement  qu'elle  est  aparillie. 
;of  **  S^  1*'^  d^  vous  mestier,  si  ne  m'oblïez  mie.  » 

On  fait  crier  par  l'ost  :  «  Ci  est  la  départie  !  » 
4595  Et  chascun[s]  apareille  [et]  lui  et  sa  maisnie  ; 

Il  trosent  et  enmalent  et  issent  de  la  ville  ; 

L'emperere  Alexandre  les  conduit  et  les  guide. 

Quant  vint  a[u]  desevrer,  grief  fut  la  départie  ; 

Do  vait  baisier  Landri  et  ausi  fist  01i[v]e  ; 
4600  L'empereres  Pépins  ne  s'i  oblia  mie. 


4679  F.  et  L.  a.  —  458o  vuelle  r.  —  4581  vostre,  ms.  vos  — 
4588  et  ma  m.  O.  —  4591  m.  de  mon  demaine.  Cette  leçon  peut 
s'expliquer  par  une  mauvaise  lecture  de  l'abréviation  chlerie  ou 
chrie.  —  4593  si,  ms.  ci.  — 4394  le  départir.  — 4596  sa  maignie. 
—  4596  enmalent,  ms.  emnaient  —  4599  Do  fait  et  v.  b.  —  4600 
L'empereur  P.        ■    .;;     •     r    |;'f..î   -     .:•■•••■'■         •    "f"":: 


DOON    DE   LA   ROCHE  I7I 

Salmadrine  [la  belle]  s'en  vint  a  dame  Olive, 

Par  molt  de  foi[s]  la  baise,  ne  cesse  ne  ne  fine; 

Dit  Olive  la  belle  :  «  Ma  fille  Salmadrine, 

«  Car  pensez  de  mon  filz,  je  vous  requier  et  prie, 
4605  «  De  tout  en  vous  me  fie;  or  en  pensez,  amie  ! 

«  Le  lairai  remanant,  bien  voi  n'en  menrai  mie. 

—  Dame,  »  dist  Salmadrine,  «  j'en  suis  toute  p[er]ie.  » 

A  grant  peine  ont  fait  entre  eus  la  départie.  (v«) 

Florent  li  chevalier  et  dames  eschevies, 
4610  A  Dieu  le[s]  recommande[nt]  et  li  duc  et  li  prince. 

Etli  roi[s]  Alixandre  en  meine  Salmadrine 

Et  Landri,  cui  il  aime  d'amour  bien  entérine; 

Li  rois  Pépins  en  meine  Doon  et  dame  Olive  ; 

A  Coloigne  s'en  vienent  a  hore  de  compile  ; 
46 1 5  Diex  !  con  grant  feste  en  font  li  bor  jois  de  la  ville  ! 

Bien  i  fut  conreé[e]  toute  la  baronnie. 

Quant  vint  a  l'endemain,  ne  vos  mentirai  mie, 

Pepin[s]  ala  en  France,  il  et  sa  compagnie, 

Et  li  dus  de  La  Roche  et  avec  lui  s'amie, 
4620  Dame  Olive  sa  famé,  en  cui  [il]  molt  se  fie  ; 

En  pais  tenront  la  terre,  ne  est  qui  les  guerrie. 

Et  Landris  demora  avec[que]  Salmadrine  ; 

Enfans  out  de  sa  famé,  qui  est  de  bone  orine, 

Qui  puis  [tinrent  en  pais]  la  terre  dame  Olive, 
4625  Toute  Constantinoble,  la  grant  cité  antie. 

Et  quanque  il  i  apent  et  roialme  et  empire  ; 

Molt  bon  chevalier  furent  et  de  molt  bone  vie. 
Ci  defenit  la  geste,  la  chançons  est  faillie 

De  Landri,  de  Coloigne  et  de  ma  dame  Olive 
4630  Et  del  roi  Alixandre,  qui  tenoit  tout  l'empire 

De[vers]  Constantin[oble],  et  de  sa  belle  fille 


4602  la  baisse.  —  4605   De  toute.  —  4606   Le  romenant  1.  b. 
T.  nen  manirai  m.  —  4615  con,  ms.  cum.  —  4616  f.  corree.  — 
4618  P.  alast.  —  4619  a.  1.   sa  mie  {en  deux  mots).  —  4621 
l.  gerie.  —  453o  t.  toute  l'e. 


/«iU 


172 


DOON    DE    LA   ROCHE 


Et  du  bon  roi  Pépin,  qui  France  outen  baillie, 
Et  des  maus  traïtors  Hatiquetant  et  T[o]mile, 
Forbin  et  Malquerant,  Loqueste  et  Malingre,  (/".  88) 
4635  Que  Landris  ocist  tous  a  l'espée  forbie. 

Cil  Diex  qui  maint  en  haut  si  doint  durable  vie 
Cex  qui  de  bon  cuer  ont  ceste  chançon  oîe  I 
Plus  ne  vous  en  dirai,  querez  qui  plus  en  die. 


explicit  h  romans  de  doon 
l'Alemant  qui  fut  de  la  Roche. 

4635  Qui  L.  —  4636  d.  bone  vie  [vers  trop  court). 


^^^'***** 


NOTES 


V.  56.  Voici  le  passage  du  Charroi  de  Nîmes,  auquel 
renvoie  la  variante,  d'après  le  texte  établi  par  M.  Meyer  lui- 
même  (Recueil  d'anciens  textes,  p.  289,  v.  36-38)  : 

Nostre  empereres  a  ses  barons  âevez . 
Cel  donc  terre,  cel  chastel,  cel  cité, 
Cel  bour  et  ville  selonc  ce  que  il  set. 

V.  102-109.  ^^  remarquera  que  la  ville  où  eut  lieu  le 
mariage  de  Doon  et  d'Olive  n'est  pas  indiquée;  d'autre  part, 
dans  la  suite  du  poème,  deux  fois  (v.  1959  et  2084)  Mon- 
treuil-sur-Mer  est  nommé  comme  la  ville  où  Do  gist  0  lui: 
(Olive).  Il  est  par  conséquent  possible  qu'il  manque  dans  ce 
premier  passage  un  vers,  où  Montreuil-sur-Mer  était  dési- 
gné. 

V.  654.  Audegour.  Voici  les  différentes  formes  de  ce 
nom  dans  le  manuscrit  de  Londres  :  vv.  654,  9i3,  io3o,^ 
21 14,  3865,  3878,  4o38,  Audegour;  v.  887,  Audegours ; 
vv.  1 193,  2819,  2922,  3o26,  3o38,  3468,  40o5,  Andegour; 
V.  258i,  Andegou  (lecture  de  M.  P.  Meyer;  Sachs  et  M.  Be- 
nary  ont  lu  Andegon];  v.  33o4,  Andegon;  v.  3'i3i,  And'; 
V.  3191,  Audeg\  Quant  aux  fragments  L,  on  lit  v.  1193, 
Andegour  {nettement,  et  en  toutes  lettres);  v.  3i3ô,  And' 
(leçon  douteuse,  mais  plutôt  ^«i'  que  Aud');  v.  3190,  Aud' 
(nettement)  —  Dans  cette  incertitude,  la  faute  n  pour  u 
étant  tout  aussi  possible,  paléographiquement,  que  «pour  n, 
nous  avons  donné  la  préférence   à  Audegour,  qu'on   peut 


174  '"   .-         DOON    DE   LA    ROCHE 

expliquer  comme  une  altération  d'Audegon,  nom  qui  se 
trouve  dans  plusieurs  chansons  de  geste  (voir  la  Table  de 
M.  E.  Langlois),  tandis  qu* Andegour  ne  correspond  à  rien; 
on  peut  en  outre  remarquer,  avec  M.  Benary  (p.  829),  que 
dans  le  roman  espagnol  le  personnage  s'appelle  Aldigon. 
D'autre  part,  nous  sommes  bien  obligés  de  conserver  la 
terminais  our,  quelque  singulière  qu'elle  puisse  paraître  :  elle 
est  certifiée  par  l'accord  du  manuscrit  de  Londres  et  du 
fragment  L. 

V.  659.  Ce  vers  est  peut-être  quelque  peu  altéré  dans  la 
forme,  mais  le  sens  général  parait  clair  :  «  Ce  que  chacun 
lui  demande  de  dire,  il  veut  le  dire  de  son  propre  mouve- 
ment. »  En  effet,  dans  la  suite,  nous  voyons  que  le  petit 
garçon  parle  très  bien. 

V.  1198.  Tomiles  fu  sene^  (ms.  senes).  Il  faut  corriger 
Tomiles  fu  sanei^. 

V.  12 19.  Ce  vers  est  sûrement  altéré,  malgré  l'accord  du 
fragment  L  et  du  manuscrit  de  Londres.  En  admettant  la 
correction  restera  pour  recevra  indiquée  en  note  {Li  niés  le 
roi  de  France  restera  par  folie)  on  obtient  le  sens:  «le 
neveu  du  roi  de  France  fera  une  folie  en  restant  (ici),  car 
sa  mort  ont  jurée....  »  Covnp.  Roman  de  Thèbes,  v.  4209 
édit.  Gonstans  :  Cist  remandra  cifolement.  Pour  par folie:= 
folement,  comp.  plus  loin,  v.  3728  et  les  locutions  par  estul- 
tie  «  follement  »,  par  vertu,  «  courageusement  »  etc. 

V.  1429.  La  correction  Lalice  pour  lice  a  déjà  été  proposée 
par  M.  Benary  (p.  3x8  note,  de  son  mémoire)  mais  avec  un 
point  d'interrogation.  Elle  nous  parait  absolument  certaine, 
à  cause  de  la  mention  des  Hermins  (Arméniens)  dans  le  vers 
suivant.  Lalice  (Laodicée)  est  nommée  dans  le  Pèlerinage 
de  Charlemagne  v.  106;  pour  d'autres  mentions,  voir  la 
Table  de  M.  E.  Langlois.  D'autre  part,  les  Arméniens  sont 
à  leur  place  comme  défenseurs  d'une  ville  chrétienne  de 
l'Asie  Mineure. 

V.  1609.  Gontiaume.  Cette  forme  ne  se  trouve  qu'ici;  dans 
la  suite,  on  lit  presque  toujours  Gonciaume.  C'est  Gon- 
tiaume qui  est  la  bonne  forme;  comp.  dans  la  Table  de 
M.  E.  Langlois,  Gontelme,  Gontiaume;  Fôrstemann,  Alt- 
deutsches  Namenbuch,  2'  édit.  Bonn,  1900,  I,  7o3,  Gun- 
thelm,  Gunthalm. 


NOTES  175 

V.  1661.  En  voyant  que  dans  ce  vers  et  plus  loin,  vv.  i665 
et  1680,  les  montures  des  messages  qui  jusqu'ici  ont  été 
qualifiées  de  dromadaires,  sont  appelées  chevaus,  tandis  que 
dromadaire  reparait  au  vers  1696,  on  pourrait  croire  à  des 
altérations  du  texte;  mais  une  telle  supposition  n'est  pas 
nécessaire.  Les  gens  instruits,  au  moyen  âge,  savaient  bien 
que  le  dromadaire  était  une  variété  du  chameau  (on  peut 
citer,  par  exemple,  Sicard,  évêque  de  Crémone,  Mitrale, 
lib.  V,  c.  9,  dans  Migne,  Patrologia  latina,  vol.  2i3,  col. ,, 
235  :  dromedarius  est  animal  minus  camelo,  sed  velocius  eo; 
currit  enim  una  die  quantum  equus  tribus  diebus)  ;  mais  les 
auteurs  des  chansons  de  geste  ne  se  faisaient  pas  une  idée 
bien  nette  de  l'aspect  de  la  bête  :  pour  eux,  le  dromadaire 
était  avant  tout  un  animal  courant  très  vite;  voir  F.  Ban- 
gert,  Die  Tiere  im  altfran:^ôsischen  Epos,  Marburg,  i885 
{Ausgaben  und  Abhandlungen,  fasc.  34),  p.  49.  Le  c  trou- 
veur  »  de  Doon  de  La  Roche  est  donc  excusable  d'avoir  cru 
que  le  dromadaire  était  une  sorte  de  cheval,  courant  beau- 
coup plus  vite  que  les  chevaux  ordinaires. 

V.  1720.  [D'jor  et  [d']argent  ai  ge  .xxx.  somiers  tresse^. 
On  pourrait  lire,  sans  correction,  mais  en  introduisant  une 
ponctuation  :  Or  et  argent  ai  ge,  .xxx.  somiers  trosse:^. 

V.  2128-2129.  Li  rois  vos  a  mandé  par  menace  et  par  ban 
Qu'ele  ne  soit  destruite  ne  des  membres  perdant.  Il  n'y  a  rien 
de  pareil  dans  ce  qui  précède  :  Pépin  n'a  rien  mandé  à 
Malingre.  On  pourrait  corriger  nos  a  mandé,  en  se  rappe- 
lant le  V.  635,  où  Pépin  dit  à  Doon  en  parlant  d'Olive:  Et 
qui  mal  lui  fera,  si  soit  chier  comparée. 

V.  221 5  Que  Vavoientjuréa  Tomile  et  Malingre.  C'est  la 
leçon  du  manuscrit,  mais  on  obtiendrait  un  vers  plus  con- 
forme aux  habitudes  du  style  et  de  la  versification  de  l'au- 
teur en  biffant  a  et  en  lisant  Que  Vavoient  juré  Tomile  et 
Malingre.  Comp.  v.  1937  Tomile  et  Malingre  fera  les  chiés 
coper. 

V.  2347-2348.  Li  cembels  s'en  torna;  s'ont  la  bare guerpie 
Et  dus  Do  les  enchauce  coin  chevaliers  nobile.  —  Le  sens 
parait  être  :  les  chevaliers  qui  font  partie  du  cembel 
et  qui  s'étaient  avancés  jusqu'à  la  bare  (la.  barrière,  la  forti- 
fication extérieure  du  château  de  La  Roche)  en  guise  de 
défi  (comp.   G,  Paris,   Mélanges  de  littérature  franc,    du 


fjÔ  DOON    DE    LA    ROCHE 

moyen  âge,  p.  1 15,  note  i),  lâchent  la  bare,  dès  qu'ils  voient 
que  Doonsort  avec  sa  troupe,  et  tournent  bride;  Doon  les 
poursuit. 

V.  2720.  Je  te  conjur  ta  loi  et  [tres]tot  ton  batisme  (le 
manuscrit  porte  batesme).  Nous  avons  noté  trop  tard  pour 
pouvoir  l'introduire  dans  notre  texte  la  correction  plus  sim- 
ple de  M.  Benary  (p.  887  de  son  mémoire)  :  Je  te  conjur  ta 
loi  et  tôt  ton  batestire.  On  sait  que  batestire  pour  batesme  est 
fréquent  dans  les  chansons  de  geste. 

V.  2728.  Certes  m'amor  m''ave^  afïée  et  plevie.  Ce  vers 
est  certainement  altéré  ;  on  pourrait  lire,  en  biflFant  le  pre- 
mier m'  :  Certes  amor  m'avei(  afïée  et  plevie  ;  cette  correction 
a  déjà  été  proposée  par  M.  Benary  (/.  c).  Seulement,  le  vers 
ainsi  corrigé  se  relie  mal  à  celui  qui  suit  :  Ja  set  bien  to^  H 
mon!{  tis  pères  est  mes  sire  ;  il  faudrait  admettre  un  mais 
sous-entendu,  à  moins  de  supposer  un  vers  sauté  par  le 
copiste. 

V.  2780.  La  restitution  indiquée  en  note  —  Ma  terre  tient 
Malingres,  par  coi  il  me  jostise  —  suppose  que  le  pronom  il 
ne  se  rapporte  pas  à  Malingre,  mais  à  l'empereur,  dont  il  a 
été  question  dans  le  vers  précédent.  Des  équivoques  syn- 
taxiques toutes  semblables  se  trouvent  ailleurs  dans  notre 
chanson;  par  exemple,  v.  2545-46  : 

Moût  fu  granz  li  eschas  que  il  ont  conquesté. 
Enz  en  parfonde  chartre  les  fist  li  rois  jeter. 

Le  les  du  v.  2546  désigne  Doon  et  Jofroi,  dont  il  a  été  ques- 
tion aux  vv.  2542-43  ;  tandis  que  il  dans  le  v.  2545  se  rapporte 
aux  guerriers  du  roi  Alixandre.  —  Pour  la  pensée,  plutôt 
suggérée  qu'exprimée,  comp.  plus  loin,  v.  2747  Ne  ja  ver[s] 
Alixandre  n^avrai  ma  foi  mentie,  et  le  récit  en  prose  su  r 
Ami  et  Amile,  publié  par  Mone,  d'après  un  manuscrit  de 
Lille,  dans  An^eiger  fur  die  Kunde  der  teutschen  Von^eit 
V  (i836)  col.  162  :  elle  (la  fille  de  Charlemagne)  le  requist 
qu'il  (Ami)  fust  son  ami.  Et  Ami  en  nulle  manière  ne  5't 
acordast,  que' il  ne  voiiloit  mie  faire  traïson  a  son  seingnour. 

V,  2782.  Il  y  a  ici,  et  dans  la  suite  de  la  chanson,  des 
confusions  singulières,  qui  peuvent  difficilement  être  impu- 
tées aux  copistes,  mais  qui  semblent  être  le  fait  de  l'auteur. 
Jofroi,  qui  figure  ici  comme  compagnon  de  Landri,  était 
représenté   dans  ce   qui   précède    comme    compagnon   de 


NOTES  177 

Doon  ;  il  est  fait  prisonnier  en  même  temps  que  celui-ci  au 
V.  2542.  Par  une  confusion  en  sens  contraire,  Asson,  le 
fidèle  compagnon  de  Landri  dans  son  voyage  en  Orient 
(v.  1425,  1469)  et  qui  se  bat  à  ses  côtés  en  même  temps  que 
Guinemant  (v.  2342),  partage  au  v.  2802  la  captivité  de 
Doon.  Enfin,  au  v.  2859,  Landri  reconnait avec  joie, comme 
délivré  en  même  temps  que  Doon,  son  «  maître  Guinemant  », 
qui  a  toujours  figuré  et  figure  ici  (v.  2782)  comme  compa- 
gnon de  Landri,  pendant  son  voyage  et  à  la  cour  de  l'empe- 
reur Alixandre.  Ici,  au  v.  2782,  on  pourrait,  au  besoin, substi- 
tuer Asses  à  Jofroij,  mais  il  est  impossible  de  changer,  au 
V.  2802,  Asse  de  Maience  en  Jofroi^  de  Maience,  Mayence 
étant,  dans  tout  le  poème,  la  ville  d'Asson  et  non  celle  de 
son  frère  Jofroi.  Et  il  est  impossible  de  modifier  Guitiemant 
son  maistre  au  v.  2859  sans  fausser  le  vers.  On  pourrait,  il 
est  vrai,  considérer  ce  vers  comme  interpolé,  mais  cela  ne 
résoudrait  pas  les  deux  autres  difficultés,  relatives  à  Jofroi 
et  à  Asson.  —  Dans  le  roman  espagnol,  le  compagnon 
d'Enrique  (Landri)  en  Orient  s'appelle  Jtifre,  et  nous  mon- 
trons dans  l'Introduction  que  l'auteur  du  poème  conservé 
et  celui  du  roman  espagnol  ont  travaillé  d'après  le  même 
original  perdu  ;  il  est  par  conséquent  possible  que  le  souve- 
nir du  Jofroi  de  ce  poème  perdu  se  soit  mêlé  aux  inventions 
personnelles  de  notre  «  trouveur  »  ;  mais  ce  souvenir  n'ex- 
plique pas  les  deux  autres  erreurs  que  nous  venons  de  cons- 
tater. 

V.  2925.  Seine  la  ville  est  en  réalité,  ainsi  que  l'a  déjà  vu 
M.  Benary  (p.  32i,  note  i  de  son  mémoire),  la  ville  de  Sienne 
en  Italie,  que  notre  auteur  a  transportée  du  côté  de  la  Hon- 
grie (voir  au  v.  2162).  Faut-il,  avec  M.  Benary,  ici  et  aux 
vv.  2968  et  3894,  corriger  {Seine  la  vieille)  =  Sena  vêtus? 
Nous  ne  le  croyons  pas.  Saine  ville  se  lit  également  dans  le 
Roman  de  Cassidorus,  Bibl.  Nat.,  ms.  franc.  22549,  f^^-  ^^f> 
comme  nom  d'une  ville  de  «  Lombardie  »  (dans  la  suite  du 
récit,  fol.  57/,  le  nom  est  écrit  Scienne,  sans  adjonction). 
Seine  la  ville  était  une  forme  fautive,  mais  consacrée  par 
l'usage. 

V,  2g6i.  Pépin  s'en  est  clame^,coresos  et  pleins  d'ire.  Leçon 
du  manuscrit,  littéralemerit  :  P.  s^en  est  clamés.  Naturelle- 
mention  pourrait  avissi  interpréter  Pepms s'en  e^f  c,  mais  cela 

12 


178  DOON    DE    LA    ROCHE 

serait  moins  satisfaisant.  Selon  nous,  le  sujet  est  Doon,  dont 
il  a  été  raconté,  v.  2226  et  suivants,  qu'il  alla  se  plaindre  à 
Pépin.  Il  faut  peut-être  supposer,  après  le  v.  2961,  un  vers 
perdu,  rappelant  que  Pépin  se  déclara  contre  Doon  et  le 
chassa  de  ses  terres. 

V.  2967.  Li  avesques  manda  qui  ses  sodoiers  prirent.  Ce  v. 
n'est  pas  clair  et  paraît  altéré.  On  pourrait  corriger  :  des 
sodoiers,  et  comprendre  :  «  l'évêque  manda  [des  gens]  qui 
prirent  (=  levèrent)  [pour  lui]  des  soudoiers.  » 

V.  2992.  Va  ferir  Grifonel,  j.  des  neveu^  Malingre,  Fil  sa 
seror  germaine,  la  dame  Malsarie.  Le  nom  de  «  Malingre  » 
est  sûrement  altéré  :  Malingre  est  toujours  représenté  comme 
l'enfant  unique  de  Doon  et  d'Audegour.  Il  faut  probablement 
corriger  :  Tomile;  comp.  le  v.  119,  où  il  est  dit  de  celui-ci  : 
oncles  fu  Guenelon.  —  Dans  d'autres  poèmes,  Grifonel  est 
fils  de  Ganelon  (comp.  G.  Paris,  Mélanges  de  littér.  franc, 
du  m.  â.,  p.  200);  pour  l'auteur  de  Doon  de  la  Roche, 
semble-t-il,  Grifonel  et  Ganelon  étaient  frères,  fils  de 
Malsarie  (et  de  Griffon  de  Hautefeuille  ?  comp.  v.  "ijSb, 
où  Hélie  et  Hardré,  fils  de  Griffon,  sont  également  dits 
«  neveux  de  Tomile  »)• 

V.  3oio.  Ça  me  laire^  La  Roche;  ne  Vavre!{  jamais  mie. 
C'est  la  leçon  du  manuscrit  ;  on  pourrait  corriger  :  n'en  <3vre;j' 
jamais  mie,  suivant  la  locution  bien  connue  ;  comp.  Ne  de 
Carlon  mie  vos  n'en  avre^,  Roland,  v.  1172;  De  Gaudissete 
mie  n'i  ont  trouvé,  Jourdain  de  Blaie,  v.  8209,  éd.  C.  Hof- 
mann. 

V.  3783-3785.  Il  y  a  dans  ces  vers  une  singulière  confusion 
de  sujets  :  au  v.  3784,  li  en/es  est  évidemment  Landri,  mais 
auv.  3785,1e  sujet  sous-entendu  de  fiert  est  Hélye,  nommé 
au  V.  3783.  Cependant  il  nous  semble  inutile  de  supposer 
une  altération  du  texte. 

V.  3912.  El  règne  de  Saissogne  voldrai  Deu  relenquir.  On 
pourrait  aussi  restituer:  El  reiaume  des  Saisnes  v  D.  r.  Ce 
vers  a  été  terriblement  malraité  par  les  copistes  ;  le  sens 
général  parait  pourtant  clair  dès  qu'on  a  substitué  Deu  relen- 
quir à  l'absurde  Do:^  relenquir  du  manuscrit.  Le  premier 
hémistiche  contient  manifestement  le  nom  de  la  Saissoi- 
gne  ou  des  Saisnes,  dont  il  sera  question  dans  la  suite  du 
récit.  Ces  Saisnes,  placés  naturellement  de  l'autre  côté  du 


NOTES  179 

Rhin  (v.  391 1),  sont,  dans  les  chansons  de  geste,  toujours 
représentés  comme  païens.  L'ambition  de  Tomile  est  de 
jouer,  avec  leur  aide,  le  rôle  d'un  Isambart,  d'un  Girard  de 
Fratte  (dans  la  suite  d' Aspremont  conservée  en  italien  ; 
G.  Paris,  Hist.  poét.  de  Charlemagne,  p.  325).  Dans  Girbert 
de  Met^,  également,  le  vieux  Fromont  se  réfugie  chez  les 
Sarrasins  d'Espagne  et  en  revient  avec  une  grande  armée 
pour  attaquer  ses  ennemis  ;  voir  l'analyse  de  P.  Paris,  dans 
Hist.  littér.  de  la  France,  XXII,  625,  628. 

V.  4o3o-4o36.  Cette  description  de  la  pendaison  de 
Tomile  est  loin  d'être  claire.  Qu'est-ce  que  l'auteur  veut 
dire  au  juste  par  le  cercle  et  le  chaienon  (v.  4032)?  Il  n'est 
pas  facile  de  le  comprendre.  Dans  Florence  de  Rome  on  lit 
(v.  4079,  éd.  Wallenskôld)  :  Fee^  le  la  aux  f arches,  au  cou 
le  chaenon;  \c\,  chaenon  semble  l'équivalent  de  hart  «la 
corde  qui  sert  à  pendre  ».  —  Ce  qui  paraît  certain,  c'est 
qu'on  attachait  à  la  potence,  aux  forches  (v.  4o3o),  une 
poulie  (v.  4o35),  sur  laquelle  passait  la  corde;  il  faut  admet- 
tre qu'on  tirait  sur  la  corde,  le  condamné  étant  soulevé  de 
terre  et  s'en  allant  en  haut,  contremont  (v.  4o35).  —  La 
même  façon  de  pendre  semble  indiquée  dans  Parise  la 
Duchesse,  p.  19,  v.  601-602,  à  propos  du  supplice  du  traître 
Milon  : 
s;  Puis  li  ont  fait  la  hart  entorle  colnoer, 

Contremont  la  sacherent,  si  l'ont  fait  ancroer. 

Cette  façon  de  pendre  diffère  de  celle  généralement 
connue,  où  l'on  obligeait  le  condamné  à  monter  sur  une 
échelle,  que  le  bourreau  retirait  ensuite  sous  ses  pieds 
(comp.  Florence  de  Rome,  v.  4955).  —  Ici  il  semble  être 
question  également  d'une  sorte  d'échelle  (v.  4o3i  :  La  du- 
chesse meîsme  monta  sur  Veschaillon),  mais  elle  sert  au 
personnage  chargé  de  l'exécution  (ici  Olive)  pour  mettre  le 
cercle  autour  du  cou  du  condamné  et  fixer  le  «  crampon  » 
{cf.  feri  le  cranpon,  v.  4034).  La  poulie  était-elle  attachée  à 
ce  crampon  ? 

V.  412 1.  Par  le  présent  Tomile  faillistes  vos  ma  mère.  Il 
faudrait  peut-être  corriger  :  Por  le  présent  Tomile;  comp. 
V.  4136-4157  : 

Quant  vo  seror  faillistes 
Etvo  neyou   petit  j)or  l'avoir  le  traître. 


l8o  DOON    DE   LA    ROCHE 

V.  4127.  Carsadoine.  Ce  personnage,  nommé  dans  le 
manuscrit  Lat^adoine,  est  évidemment  le  même  qui,  au 
V.  4355,  est  nommé  dans  le  manuscrit  Ja^acoigne  ou  Jara- 
coigne.  La  restitution  Carsadoine  est  due  à  G.  Paris 
Mélanges  de  littérature  française  du  moyen  âge,  p.  2o3),  qui 
connaissait  notre  poème  par  l'analyse  de  Sachs.  «  Carsadoine 
de  Perse  »  figure  comme  ennemi  de  Pépin  dans  un  fragment 
de  Mainet  {Romania,  IV  [iSyS],  p.  229,  v.  58).  La  correc- 
tion paraît  d'autant  plus  évidente  que,  dans  ce  passage,  Car- 
sadoine est  également  mis  en  rapport  avec  Justamont.  Dans 
Mainet,  il  est,  semble-t-il,  son  allié;  ici,  il  est  son  frère. 

V.  4176.  Landris  si[e]t  ou  cheval  qu'ot  la  crope  levée.  Comp. 
Fierabras,  v.  4108  (dans  la  description  d'un  cheval)  :  le  bu 
en  haut  levé.  —  C'est  d'après  ce  v.  4176  que  nous  avons  cor- 
rigé le  v.4369  :  Landris  si[s]t  ou  cheval  a  la  levée  crope.  Si 
cependant  ces  expressions,  qu''ot  la  crope  levée  et  a  la 
levée  crope,  paraissaient  trop  singulières,  on  pourrait  lire, 
au  V.  4176  :  qui  ot  la  crope  lée  et,  au  v.  4369  :  qui  ot  lée  la 
croupe;  comp.  v.  4469. 

V.  4373-4374.  La  leçon  adoptée  est  celle  des  manuscrits, 
et  suppose  que  Landri  parle  à  Brohemau.  Cependant,  il 
y  a  quelque  chose  de  singulier  à  ce  qu'il  s'adresse  en  de 
tels  termes  [vos. me  rendre^  mon  oncle!)  à  un  homme  qu'il 
vient  de  tailler  en  pièces.  Faudrait-il  plutôt  admettre  que 
Landri  apostrophe  les  Saxons  en  général?  Dans  ce  cas,  il 
faudrait  corriger  et  lire  :  Fil  à  putain,  païen,  vos  me  rendre:^ 
mon  oncle  !  Cuvert,  mar  le  baillastes,  vos  le  laise^  a  honte. 
—  Pour  le  premier  hémistiche  du  v.  4374,  comp.  Roland, 
3446  (Caries  H  dist  :  Culvers,  mar  le  baillastes  !)  et  Prise  de 
Cordres,  iSbô- iS5'j  (Fil  a  putain,  gloton  et  pautonnier,  Mar 
lou  baillastes,  par  les  anges  du  cid!).  Ces  rapprochements 
justifient  la  correction  mar,  pour  mal  du  manuscrit. 


M. 

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GLOSSAIRE  ' 


A,  à.  Sert  à  marquer  la  posses- 
sion :  c'est  a  famé  nature, 
459,  cela  tient  à  la  nature  de 
la  femme;  a  lui  ne  a  sa  mère 
n'atent  nul  guerredon,  4021, 
j7  n'attend  de  re'compense  ni 
de  lui  {Dieu)  ni  de  sa  mère. 

Sert  à  indiquer  que  l'action  se 
fait  de  la  façon  indiquée  par 
le  substantif  qui  le  suit  :  a 
duel  et  a  martirc,  3048;  a 
duel  et  a  torment,  1 59  ;  a 
force,  3 122;  a  force  et  a 
poeste,  2377  :  a  force  et  a 
vertu,  1018;  a  honor  et  a 
noces,  3639;  a  honte,  4374;  a 
hu  et  a  cri,  11 10;  a  joie, 
i58g,  2941  ;  a  joie  et  a  bar- 
nage,  107;  a  joie  et  a  baudor, 
971;  a  joie  et  a  lïesce,  102; 
au  mautalent,  1175;  a  mer- 
voille,  23 16,  3822;  a  grant 
mcrvoilie,  2337;  a  poine  et  a 
travail,   2414;  a  tort,    1780, 


1877, 2857  ;  a  tort  et  a  pechié, 
2248,  2256,  2960,  etc.;  a  tort 
et  a  pechié  et  a  mal,  890;  a 
vertu  et  a  force,  3634. 

Indique  l'instrument  :  ocis  a 
mon  acerin  brant,  262  ;  a  son 
bran  acerin,  739;  a  .j.  coutel 
d'acier,  3 107;  a  .j.  bâton, 
2785  ;  abata  a  ce[l]  faucon, 
3741. 

Le  vêtement  :  a  armes,  772;  as 
haubers  et  as  lances,  2354; 
l'amoinent  a  .j.  mantel  d'er- 
min,  4214,  l'amènent  vêtu 
d'wt  manteau  d'hermine. 

La  partie  du  corps,  qui  sert  à 
accomplir  l'action  :  baiserai  a 
ma  boche,  i285,  baiserai  de 
ma  bouche;  as  genolz  et  as 
paumes,  1792  ;vi  a  mes  ieus, 
419,  43o,  je  vis  de  mes  yeux; 
aus  ielz,  1161,  de  ses  yeux; 
as  mains  et  a  bâton,  3996;  as 
mains  te  puis  prendre,  2497. 


I.  L'astërisque  indique  les  formes  restituées. 


l82 


DOON    DE    LA   ROCHE 


La  concomitance  de   temps  :  a 
cest  di,  468;  a  cel  jor,  484  ;  a 
jour  que  je  soie  vis,  480,  aucun 
jour  de  ma  vie;  a  nul  jor,  492, 
1497;   a  tant,  2431,  3322  {cf. 
atant). 
Précède  le  nom  des  personnes 
qui  accompagnent  le  sujet  de 
la  phrase;  a  s'amie,  4257  ;  a 
.iij<^.    chevaliers,    40;  a   .xv. 
compagnons, 3873,4017;  juer 
a  son  cosin,  1777;  a  merveil- 
los  barnage,  2917,  2919  ;  a  sa 
mesnie  bêle,  2374;  a  mesnie 
escherie,    221 1;   a   sa   grant 
ost  bannie,   2345,    2384;  me 
faites   penre  a   deux   de   voz 
serjanz,  246;  se    couchera  a 
.xl.  ou  a  .c,  273. 
Indique  la  matière  dont  est  fait 
un  objet  :  bocle   a  or,   iio3; 
eschaquier  a  or  et  a  argent, 
1069. 
Préposition  de  lieu,  indique  le 
mouvement  :  a  la  terre  cheûz, 
I023,    tombé  à   terre;    a    la 
terre  en  espant,  1077,  répand 
par     terre;     précédant     un 
nom    de    personne,     indique 
che^   qui  on  se  rend  :  gi3, 
946,  1235,  1283,  i336,  3749. 
Au     V.     3824,     a     Maiance 
veut  dire  :  devant  Mayence. 
Dans  les  cas  suivants,  le  français 
moderne  rendrait  a  par  d'au- 
tres prépositions    :    avoir    a 
non,    119,    i56,    etc.,  pour; 
a  la  moie   foi,    1402,    1637, 
etc.,  par;  a  lor  bêle  jornée, 
648,  dans  leur  beau  voyage  ; 
porter  a  fil,  762,  porter  dans 
son  sein,  comme  fils:  au  droit, 
773,  du   côté   du   droit;    au 
pueple,  662,  devant  le  peuple. 


Employé  avec  le  gérondif  pré- 
cédé de  son  complément,  dans 
le  sens  où  nous  employons  le 
gérondif  précédé  de  en  :  as 
espérons  brochant,  1089, 
1160,  en  éperonnant  leurs 
chevaux  ;  a  noz  doiz  demos- 
trant,  275,  montrant  de  nos 
doigts;  a  roncins  traînant, 
395g,  faisant  traîner  par  des 
chevaux;  a  .xx.  homes  le- 
vant, 2  32,  {poids)  que  vingt 
hommes  seulement  peuvent 
soulever;  jusqu'as  armes  por- 
tant, 281,  jusqu'à  l'âge  de 
porter  les  armes. 

aage,  voir  eage. 

aaisier,  aesier,  355o,  réconfor- 
ter; s' — ,  3270,  se  réconfor- 
ter; bien  aaisié,  21 10,  à  son 
aise,  en  bonne  situation  ; 
aaisiée  {dit  d'une  terre),  2174, 
riche,  fertile. 

a[a]tie  :  par   — ,  2419,  à  l'envi. 

abandonée  {fém.),  2894,  sans 
retenue,  sans  mesure  ;  la  règne 
— ,  3854,  à  bride  abattue. 

abandonéement,  264,  à  l'excès. 

abateïs,  2479,  Cfjr-nag'e. 

abisme,  i5o,  V Enfer;  la  grei- 
gnor  — ,  253,  l'endroit  où  la 
mer  est  le  plus  profonde. 

abrivé  :  cheval  — ,  1772,  1817, 
1825,  dromadaire  — ,  i563, 
ardent,  fougueux. 

acerin,  262,  739,  d'acier, 

acheter  :  —  fort,  365 1,  payer 
cher. 

achoison,    3791,  raison,  motif. 

acoiliir,  acuillir,  ^0  p.  sing. 
prés.  ind.  aqueust,  1377  ;  — 
sa  proie,  3073,  s'emparer  d'un 
butin  ;  parmi  son  hardement 
acoilli  son  corage,  4335,  dans 


GLOSSAIRE 


tl 


i83 


sa  hardiesse  il  trouva  com- 
ment disposer  son  cœur  ;  — 
son  chemin,  323,  2268,  353o, 
4455,  —  son  erree,  646,  — 
son  erremeni,  4455,  —  son 
oire,  i3jy,—  sa  voie,  373i, 
41 58,  4455,  se  mettre  en 
route. 

acointier  (s')  a,  3189,  faire 
connaissance  avec. 

acoler,  1929,  2026,  3633,  em- 
brasser; s'  — ,  4473. 

acorde,  968,  363o,  accord. 

acordement,  4442,  accord. 

acorder,  896,  arriver  à  un  ac- 
cord. 

acorer,  3 106,  percer  le  cœur, 
tuer. 

acostumé  :  avoir  — ,  3332,  être 
habitué. 

acuillir,  voir  acoiilir. 

adens,  284,  sur  les  dents,  le  vi- 
sage contre  terre. 

*adenter  [ms.  danter],  907,  éton- 
ner, stupéfier. 

adeprimes,  1475,  d'abord. 

adestrer,  1894,  1999,  2933, 
4547 ,  accompagner  [qqn] 
comme  suite,  comme  garde 
d'honneur. 

adob,  cas  re'g.  pi.  ados,  3856, 
armure,  armes;  avoir  ses 
ados,  1430,  avoir  été  armé 
chevalier. 

adober,  adouber,  34,  1684, 
i858,  etc.,  armer  chevalier; 
s' — ,  1S12,  22j6, etc.,  s'armer. 

adolé,  161 2,  triste. 

adonc,  3i,  108,  etc.,  adont, 
2140,  alors. 

ados,  voir  adob. 

adouber,  voir  adober. 

aduré,  43oo,  4540,  4545,  aguer- 
ri, éprouvé. 


aé,  293,  884,  âge;  en  trestot 
mon—,  1691,  1875,  pendant 
toute  ma  vie  à  venir;  se  il  vit 
son  — ,  710,  s'il  arrive  à 
rdge  d'homme. 

aerdre,  ^e  p.  sing.  prés.  ind. 
aert,  l'i/^i,  saisir,  empoigner. 

aesier,  voir  aaisier. 

afaire,  45 1 3,  situation. 

afaitié  :  bien  — ,  3 540,  courtois, 
sage. 

aferir,  3"  p.  sing.  prés.  ind. 
afiert,  2424,  382 1,  appartenir 
de  droit. 

afPier,  voir  afier. 

affoler,  voir  afoler, 

afiancier  (s'),  2jbi,  se  promettre 
mutuellement. 

afichier  (s'),  3742,  3765,  se 
fixer,  se  cramponner . 

afier,  afïer,  affier,  2146,  2182, 
2728,  4221, jurer. 

afoler,  affoler,  433,  454,  899, 
etc.,  tuer;  au  v.  4268  s'atoler, 
se  dit  d'une  personne  qui  se 
meurt  d'amour. 

afubler,  i5-j3,  ig4.5,  etc., passer 
sur  son  dos  [un  vêtement]. 

agait,  2291,  2326,  etc.,  embus- 
cade. 

ahan,  3917,  3gyb, peine,  labeur. 

ahonter,  686,  honnir. 

aide,  voir  aïe. 

aïdier,  3'  p.  sing.  prés.  ind. 
aïe,  2670,  2944,  3"  p.  sing. 
prés,  stibj.  ait,  1906,  2870, 
aïst,   411,    1474,  e/c,  aider. 

aïe,  aide,  2416,  2677,  etc., 
aide  ;ieTc  &\àc,  i3io,  aider. 

aigle,  3963,  emblème  surmon- 
tant les  mâts  des  tentes. 

aigrier,  3727,  tourmenter. 

aiguë,    1091,    1123,  etc.,  eau. 

aine,  940,  1024,  etc., jamais  {cf. 


i84' 


DOON    DE' LA   ROCHE 


ainz)  ;  —  mais  . . .  ne,  3/^j,  ja- 
mais. . .  ne. 

ainçois,  ainsois  [conj.],  35o, 
478,  etc.,  mais;  {adv.),  2j33, 
3o36,  auparavant;  377,  plu- 
tôt ;  {prép.),  1261,  igSô. 
avant;  —  que  [conj.),  554, 
1604,  etc.,  avant  que. 

ains,  voir  ainz. 

ainsi  :  — com  .j.  tel  bers,  1614, 
comme  il  convient  à  tin  tel 
baron;  —  voir  m'ait  Diex, 
1906,  puisse  Dieu  me  venir  en 
aide. 

ainsois,  voir  ainçois. 

ainz,  343,  464,  etc.,  mais;  — 
que,  99,  î^3o,  etc.,  avant  que; 
ainz,  ains,  pour  aine,  1029, 
3443,  etc.,  jamais;  —  ...  ne, 
1029,  2ji8,  jamais  ;  mais  — , 
45,  —  mais,  388 1,  même  sens. 

aire  :  toujours  dans  la  locu- 
tion de  bon  — ,  2029,  2080, 
etc.,  de  bonne  lignée. 

aïrer  (m/,  pris  substantivt) , 
296,  colère;  s'  — ,  375 1,  se 
mettre  en  colère. 

aiue,  2 181,  aide. 

aive,  voir  eve. 

ajorner,  i559,  i568,  etc.,  faire 
jour;  le  lundi  ajorné  ne  le 
mardi  ne  finent,  2977,  le 
lundi  tant  qu'il  fait  jour,  ni  le 
mardi,  ils  ne  s'arrêtent. 

ajoster  :  vos  lignages  ert  au 
mien  ajostez,  92,  votre  lignée 
sera  unie  à  la  mienne. 

alemele,  2364, /er  de  lance. 

alenée,  5oi,  souffle,  respiration. 

aler,  aller  :  s'en  vait,  2359,  s'en 
va;  m'en  irez,  3i  i,  vous  vous 
en  ire:{;  au  pié  li  sont  aie, 
1871,  se  sont  jetés  à  ses 
pieds. 


alever,  534,  promouvoir,  aider. 
alis  :  terre   alisse,    3j22,  terre 

compacte,  peu  fertile. 
aloue,  3341,  alouette. 
aiozé,     1966,    digne     d'éloges, 

renommé. 
alué,  3558,  alleu. 
amander,  voir  amender, 
ambe:  d'  —  part,  2389,  des  deux 

côtés. 
ambedui,  1017  [var.  enmedui], 
3976,  3996,  andui,  3392,  cas 
suj.  plur.,  ambe  .ij.,  984,  an- 
deus,    1673,   1774,    cas    rég. 
plur.,  tous  les  deux. 
amender,     596,      1859,     2198, 
amanderons,   3288,  réparer. 
amener,  3^  p.  sing.  prés.  subj. 
ameigne,  io43,amoine,  2918  ; 
p.  pa.  amenez,    i58i,  emme- 
ner. 
amervoillier  (s'),  3758,   s'éton 

ner. 
amiral,     1396,    titre    donné  à 
l'empereur  de  Constantinople . 
amisté,    amistié,    2635,    2716, 
4286,  amour  ;  3366,  concorde; 
3ioi,  traité  de  paix. 
amoine,  voir  amener, 
amont,  798,  38o3,  en  haut. 
ancesserie ,       ansesserie    :    de 
grant    — ,    1245,    de    longue 
date;  par  droite — ,  4147,  par 
succession  directe. 
ancroier,  3Siï,  accrocher. 
ancui,  voir  encui. 
andeus,  andui,    voir  ambedui. 
anoer,  697,  lier. 
anor,  voir  honor. 
anquenuit,     3908,     cette    nuit 

même. 
ansesserie,  voir  ancesserie. 
anste,  voir  hanste. 
antif,     fém.       antive,      235o, 


^  H  :^  GLOSSAIRE 


l85 


3o26,  antie,  4492,  4625,  an- 
tique. 

antrée,  voir  entrant. 

anuier,  3<^  p.  si7ig.  prés.  subj. 
anuit,  2412,  ennuyer. 

anuit,  3234,  cette  nuit. 

aorer,  3^  p.  sing.  prés.  ind. 
aore,  3217,  adorer. 

apareillier,  2761,4395;  p.  pa. 
fém.  aparillie,  4592,  prépa- 
rer. 

aparler,  3*  p.  sing.  prés.  ind. 
aparole,  964,  interpeller. 

aparoir  :  l'aube  aparant,  3i36, 
l'aube  apparaissant. 

aparmant,  3430,  tout  de  suite. 

apartenir  a,  121,  483,  746, 
être  apparenté  à . 

apeler,  708,  887,  etc.,  inter- 
peller; 1241,  1260,  etc.,  faire 
venir. 

apendre  a,  8,  327,  1522,  etc., 
dépendre  de  (terme  de  droit 
féodal) . 

apercevoir  (s'),  909,  observer 
avec  intelligence;  —  comment 
(suivi  du  subj.),  1  o  1 2,  faire  en 
sorte  que. 

aploré,  3677,  éploré. 

apoier,   2157,    2824,    appuyer. 

aporter  :  li  cuers  nel  m'a- 
porte,  967,  mon  cœur  ne  me 
le  dit  pas. 

apostoile,  693,  apostole,  4270, 
pape. 

aprendre  :  estre  apris  de, 
2733,  être  renseigné  au  sujet 
de;  apris  ne  l'avons,  3342, 
nous  n'en  avons  pas  l'habi- 
tude. 
apresser  :  ses  ventres  li  apres- 
se,  933,  son  ventre  lui  pèse 
(en  parlant  d'une  femme  sur 
le  point  d'accoucher) . 


aprocher  a,  3372,  approcher  de. 
aquerre,  i^" p.  sing.  prés.  ind. 
aquier,    1247,   •^"*  P-  aquiert, 
2  386,  prendre,  occuper  mili- 
tairement. 
aqueust,  voir  acoillir. 
aquiter,  3 17,   1439,   etc.,    déli- 
vrer. 
arabi,    322,  2286,   2469,   arabe 
(épithète  de  mul,  de  cheval), 
arabois  (à  l'asson.),  620,   i373, 
arabe  (épithète  d'or). 

aragon,  2473,  destrier  de  race 
aragonaise. 

araisnier,  i5i7,  aresnier,  1445, 
2243,  4483,  interpeller. 

arbroi,  352,  lieu  planté  d'arbres. 

arces,  voir  ardoir. 

ardoir,  222,  234,  etc.,  brûler; 
33,  incendier;  p.  pa.  masc. 
ars,  234,985,  etc.,  fém.  plur. 
arces,  4o36. 

aresnier,  voir  araisnier. 

arestée  ;  fere  — ,6^y,  faire  halte. 

arestement  :  fere  — ,  prendre — , 
177,  192,  2614,  faire  halte; 
sans  — ,  4438,  sans  délai. 

arester,  i6o3,  1973,  etc.,  tar- 
der; p.  pa.  aresteûz  {à  l'as- 
son.}, io5o,  2229. 

arguer,  2179,  presser,  aiguil- 
lonner. 

arier,  1800  (à  l'asson.),  arrière. 

ariver  :  se  sont  arivé,  1397, 
ont  accosté,  débarqué. 

arme,    636,  644,  etc.,  âme. 

ars,  voir  ardoir. 

arsoir,  3297,  hier  au  soir. 

art,  1012,  artifice. 

assaillir,  fe  p.  plur.  fut.  ass^n- 
romes,  1767.  assaurons, 
1754,  2^  p.plur.fut.asa.udTez, 
3708,  3'  p.  plur.  fut.  asau- 
dront,  238o,  attaquer. 


i86 


DOON    DE   LA   ROCHE 


aseier,  3279,  goûter  [d'un  mets]. 

aseïr,  voir  asseoir. 

asemblée  :  faire  — de,  3141, 
réunir. 

asembler  (s'),  3«  p.  plur.  pf. 
s'asemblirent,  2968,  se  ras- 
sembler ;  au  p.  pa.,  107,  II 3, 
889,  2207,  allié,  marié. 

asouagier  (s'),  36ig,  se  calmer. 

assener,  2  167,  ^«jrvenzV  à  des- 
tination. 

asseoir  (v.  trans.),  238 1,  4061, 
assiéger  ;  aseïr   [à   Vasson.), 

4277- 
asserir  :  nuiz  fu   asserie,  2210, 

la  nuit  fut  venue. 
asseter,  i545,  asseoir. 
assëur  ;  estre  — ,  3740,  être  en 

sécurité. 
assiantrous,  voir  escïentros. 
ataindre,  J8  j7.  sing.  impf.  subj. 

atainsist,  3786,  atteindre. 
ataint,  voir  estanc. 
atalenter    :  quant   il    vos   ata- 

lente,    goS,    quand    le    désir 

vous  en  prend. 
atant,  a   tant,    258,  2432,  etc., 

au  moment  même,  aussitôt. 
atapiner  (s'),  3 169,  se  déguiser. 
atargier  {y.  intr.),    2478,    3o6o, 

s'attarder  ;  s'  — ,  2467,  2489, 

3o23,  même  sens. 
atempreement,    3i54(?)   [peut- 
être  faut-il     corr.     atapine- 

ment,  déguisement]. 
atendre  {v.trans.),  3j6j,  tendre 

sa    lance;    (v.     intr.),    2749, 

attendre,  différer  ; —  a  [qqn], 

540,  s'occuper  de. 
atenrier  :    li  cuers   li   atenrie, 

3043,  son  cœur  s'attendrit. 
atornement,  4454,  préparatifs . 
atot,  35 1,  avec. 
aubert,.  voir  Jiaubert. 


aubor,  2280,  sorte  d'arbre,  cy- 
tise aubour. 

aubre,  1272,  1273,  etc.,  arbre. 

aucube,  3119,  3833,  tente,  pa- 
villon. 

auferrant,  3664,  destrier. 

auquant  :  li  — ,  2903,  3i52,  un 
certain  nombre. 

auques,  83,    909,  quelque   peu. 

ausberc,  voir  haubert. 

*  aùseres  :  mais  — ,  4o58,  habi- 
tué à  faire  le  mal. 

ausiment,  3i56,  de  même,  éga- 
lement; —  comme. ..,  2174, 
tout  autant  que. 

autre  :  comme  autres^  365, 
38j,  comme  les  autres  ;  comme 
.].  autre  chaitive,  475,  5i6, 
comme  la  première  malheu- 
reuse venue  ;  comme  autre 
créature,  583,  comme  la  pre- 
mière créature  venue;  comme 
.).  autre  desvé,  696,  comme 
le  premier  fou  venu  ;  comme 
.).  autre  larron,  4000,  comme 
le  premier  larron  venu. 

autres!,  1127,  également. 

aval  ;  {avec  idée  de  mouv.),  25 1 1, 
3345,  3578,  4025,  de  haut  en 
bas;  {sans mouv.),  3345,  36i 2, 
4301,  en  bas  ;  en  —  la  bruiere, 
4043,  au  bas  de  la  bruyère. 

avaler,  3575,  3995,  4802, 
descendre  [un  escalier]  ;  5oo, 
3o57,  etc.,  faire  descendre. 

avant  {adv.),  10,  49,  etc.,  plus 
loin,  en  avant ;à' —  moi,  914, 
de  devant  moi; en  —  de,  4527, 
à  partir  de;  decest  jour  en — , 
541,  2122,  à  partir  de  ce 
jour;  parole  de  famé  ne  puet 
—  aler,  426,  affirmation  de 
femme  ne  peut  aller  loin,  n'a 
pas  d'autorité. 


if      GLOSSAIRE 


187 


avenant  (adv.)  :  vos  parlez  — , 
4453,  vous  dites  bien. 

avers,  56,   selon  {voir  la  note). 

aversier,  3291,  le  diable;  522, 
gredin. 

aviser,  4367  [corr.  deviser], 
raconter. 

avo,  1673,  ij-j4,avec. 

avoir  (subst.),  96,  619,  etc., 
richesse, biens;  avoir  fiert  molt 
granz  cous,  567,  la  richesse 
obtient  tout;  avoirs  fait  molt 
grant  chose  que  tote  rien 
otrie,  610,  la  richesse,  qui 
procure  tout,  fait  de  bien 
grandes  choses. 

bacheler,  1900,  bachelier  [ms. 
bechelet],45o2,_;>MMe  homme. 

bachelerie,  45o3,  valeur,  habi- 
leté. 

bacon,  3712,  lard. 

baignier,  4087,  laver  [d'une  im- 
putation] (?). 

baillie,  562,  600,  etc.,  garde, 
gouvernement. 

baillier,  1966,  3495,  etc.,  don- 
ner ;  2454,  atteindre,  rattra- 
per ;  mar  le  baillastes,  4374, 
c'est  pour  votre  malheur  que 
vous  vous  en  êtes  pris  à  lui; 
1485,  1492,  i5o7,  gouverner, 

i.baillir,  725,  766,  4.054, porter, 
manier  [des armes];  mal  bailli, 
216,  3046,  maltraité,  mal- 
mené. 

2.  baillir,  4378  {à  l'asson.  pour 
baillier),  gouverner. 

baitre,  2392  [corr.  barre;  voir 
ce  mot]. 

balier,  2717,  s'agiter,  flotter 
au  vent. 

ban,  2128,  277g,  proclamation 
vublique;  3  16  {plur.),  territoi- 


res oii  s'exerce  unejuridiction. 

bancloche,  i8ig,  cloche  servant 
à  appeler  les  bourgeois. 

banir,  bannir,  2345,  2384, 
convoquer  par  voie  de  ban,  de 
proclamation . 

baptisement,  i56,  baptême. 

bare,  voir  barre. 

barnage,  2790,  2giy,  etc.,  ber- 
naige,  4161,  réunion  de  ba- 
rons; a  joie  et  a — ,  107,  au 
mi  lieu  d'une  assemblée  joy^euse 
de  barons;  faire — ,  3464,  faire 
fête[àqqn]\i6,3b6o,  ensemble, 
des  qualités   chevaleresques. 

barné,  1998,  2100,  etc.,  suite 
de  barons  ;i632,  suite  de 
serviteurs;  estre  a  — ,  i540, 
mener  un  train  magnifique, 
tenir  table  ouverte. 

baron  [au  cas  suj.  sing.  ber, 
433,  etc.,  bers,  3956),  homme 
noble,  seigneur;  le  baron  saint 
Pierre,  2  1 53,  appellation  hono- 
rifique; 1614,1634,  i8g2, per- 
sonnage haut  placé  ;  54,  IIO, 
etc.,  homme  vaillant;  3292, 
3787,  mari;  (adj.)  ber,  42,  81 
[ms.  bel],  3o4  [ms.  bel],  etc., 
noble,  vaillant. 

barre,  2347,  3254,  etc.,  baitre 
[corr.  bairre],  3392,  ^arriére; 
ja  plus  n'avra  plenté  que 
bare  a  autrui  main,  3399  (?). 

basme,  3444,  baume. 

bastir,  2980,  3072,  4^81, machi- 
ner, ourdir;  estor  basti,  2  3oi, 
combat  en  règle  (?). 

bataille,  ']-]4,combat  singulier; 
2863,  corps  de  troupe. 

batestire  [imp»-.  batisme],  2 720. 
Voir  la  note  sur  ce  passage. 

baudor  :  a  — ,  11 3,  971,  1434, 
avec  joie. 


i88 


DOON    DE    LA    ROCHE 


behorder,  4563,  combattre  à  la 
lance,  jouter. 

bel  {cas  suj.  sing.  beaus),  terme 
affectueux  :  beaus  amis,  621, 
beaus  filz,  jbô,  etc.;  estre  bel, 
904,  i3j6,^bgj,  être  agréable, 
convenir  à;  {adv.),  1231,1445, 
etc.,  aimablement,  courtoise- 
ment. 

bêlement,  358,  1148,  aimable- 
ment, poliment;  ^^^o,  favora- 
blement. 

beneiçon,  4077,   bénédiction. 

beneïr,  32 1,  bénir;  beneoit, 
i335,  4419,  béni. 

ber,  bers,  voir  baron. 

bernaige,  voir  barnage. 

*  berz,  281  [ms.  braiz],  284  [ms. 
braz],  berceau. 

besant,  565,  608,  etc.,  bezant, 
1619,  monnaie  d'or. 

besoing:  a — ,  l'i'iS,  par  nécessité. 

besoingnos,  1284,  pauvre. 

bezant,  voir  besant. 

bien  :  nouvelles  de  — ,3554,  bon- 
nes nouvelles;  —  vos  porta 
voz  mère,  41 II,  votre  mère 
vous  porta  [dans  son  sein]  pour 
son  bonheur. 

bimar,  ioi3  [faute  probable 
pour  buisnart],  sot,  imbécile. 

blêmi,  2ji5,  flétri;  207,  taché, 
roussi  par  la  flamme. 

blïaut,  25,  1572,  1944,  20o3, 
2755,  4325,  tunique  portée 
sur  le  «  chainse  »  ;  —  de  Car- 
tier,  3496  (?). 

blos,  496,  privé,  dépourvu. 
bocle,  1102,  iii5,   2296,  2477, 
2^S5 ,bossette fixée  extérieure- 
ment au  centre  de  Vécu  (umbo). 
boclé  :  escu  — ,  i834,  muni  d'un 
:  «  umbo  ». 
boguerastre,  2io5,  boisson  pré- 


parée avec  des  plantes    aro- 
matiques. 
boivre  (subst.),    3276,    boisson. 
bondir  (v.  trans.),  2931,  sonner 
[les  cloches]  ;  {v.  intr.)  2971, 
retentir. 
bonement,   268,  404,  2744,   de 

bon  ccetir;  2^2,  gentiment. 
bonté  :  dire  — ,   1472,  dire  une 

chose  bonne. 
borbrois,    4026,    bourbier   (?)  ; 

n'est  pas  dans  Godefroy. 
bore,     bourc,    91 5,    930,     etc., 

ville,  par  opp.  au  château . 
horde\,j4.i,petiteferme, masure. 
bordon,     1577,     1949,      3214, 
bâton  de  voyage  ou  de  pèleri- 
nage. 
boter,  bouter,  283,  1873,  2563, 
Jrapper,   heurter;    912,   927, 
3275,  repousser  en  frappant  ; 
33oi,  "i'igi, jeter;  1969,2563, 
mettre, fixer. 
bote,  438,  botte. 
*  boterel,  3985    [ms.    botercs], 

crapaud. 
bourc,  voir  bore, 
bouté  :  vin  — ,  3362,  vin  tour- 
né au  gras. 
bouter,  voir  boter. 
bove,  4397,  caverne. 
braichot,    3277,     33o2,    chien, 

brachet. 
braire,  287,  1054,  2998, /jwr/er, 
crier;2g']o,grincer[en  parlant 
d'un  charriot]. 
braiz,  voir  berz. 
brame,  voir  brasme. 
bran,  branc,  brant,    262,    362, 
739,  etc.,  épée;  —  de  l'espée, 
42  36,  lame  de  Vépée. 
brasme,     i575      [ms.     brenie], 
brames,   1947,    brame   3595, 
hreme,2007,pierj-e  précieuse; 


HHDt  GLOSSAIRE        1 


189 


comjp.  Roman  de  Troie, G/oss. 
v°  prasme. 

braz,  voir  berz. 

brehan,    3g62,  tente,  pavilloit., 

brème,  voir  brasme. 

bric,  23 II,  cas  rég.  sing.  bri- 
con,  337g,  fou. 

bricon,  voir  bric. 

brief,  4262,  cas  rég.  pltir.  briés, 
45o6,  lettre. 

brochier,  io8g,  1099,  etc.,  pi- 
quer des   éperons. 

broigne,  broinne,  252g,  3739, 
justaucorps  garni  de  plaques 
de  métal. 

bruei,4346,  brul,  23,  26,  petit 
bois. 

brûel[et],    voir    bralet. 

*bruieroi  [ms.  brueuus],  3723, 
lieu  rempli  de  bruyères. 

bruil[le], /em.,  235o,  bois. 

bruir  : /;.  pa.  bruiz,  234,  bridé. 

bruire,  4043,  bruyère. 

bruit  :  en  dolor  et  en  — ,  880, 
en  douleur  et  en  tumulte;  en 
.j.  — ,   3932,  en  un  coup  (?). 

brul,  voir  bruel . 

brulet,  2279,  petit  bois;  brûe- 
l[et],  3i83  [mauvaise  correc- 
tion, car  le  diminutif  ne  peut 
être  que disyllabe commehvn- 
let,  corr.  plutôt  petit  bruel]. 

bruni  :  cspée  brunie,  3764,  polie. 
,*buisnart[ms.  bimart],  io\3>,sot, 
imbécile. 

*çaint  [ms.  cain],  3 4.1-,  ceinture. 

car,  75,  i3i,  etc.,  conj .  exhor- 
tative;  devant  une  exclama- 
tion :  —  ne  le  sait  Landris  ! 
241 7,  quel  malheur  que  Landri 
ne  le  sache  pas  ! 

Cartier  :  escu  de  — ,  2466, 
2476  (?);  bliaut  de  —  3496  (?). 


celée  :  a  —,  641,  7i5,  etc.,  en 
secret. 

celer,  48,  5gg,  cacher,  tenir 
secret. 

celier,  i5Ô4,  i58i,  1667,  1695, 
1 95 1 ,  cave  {dans  ces  passages 
le  celier  sert  d'écurie  aux 
dromadaires);  3266,  salle  du 
re:{-de-chaussée  oit  tnangent 
les  serviteurs. 

cembel,  2290,  2344,  2347,  ^^~ 
tacitement  destiné  à  attirer 
l'ennemi  dans  une  embus- 
cade. 

ceudal,  cas  rég.  plur.  cendaus, 
6o3,  riche  étoffe  de  soie. 

cenor,  3588  (?). 

cerchier,  17 10,  1723,  fouiller 
[une  maison];  4244,  fouiller 
[un  pays] . 

certes:  a  — ,  gSg,  2365,  2369, 
certainement . 

cesse  :  aiez  —,  94g,  reste:^  tran- 
quille. 

cesser,  1216,  i3i8,  etc.,  faire 
halte. 

chaienon,  4o32,  corde  pour  pen- 
dre. 

chaillois  {cas  rég.  plur.),  4028, 
cailloux. 

chaillons,  voir  eschaillon. 

chair,  voir  cheoir. 

chaitif,  2523,  2534,  etc.,  chetit, 
gg2, 2754,  cas  suj.  sing.  chetis, 
3683  [ms.  chatit],  fém.  chai- 
tive,  475,  4go,  etc.,  malheu- 
reux, misérable. 

chalenge  (à  /'asso».),  2817,  dis- 
pute, querelle. 

chaloir,  3"  p.  sing.  prés.  ind. 
chaut,  1797,  181 1,  etc.,  im- 
porter, être  utile. 

chalongier,  3 1 5,  335,  etc.,  récla- 
mer en  justice,    revendiquer . 


igo 


DOON    DE    LA    ROCHE 


chamberier,  iSSg,  1647,  valet 
de  chambre. 

chamberiere,  2159,  femme  de 
chambre. 

champ,  cas  suj.  sing.  chans, 
2540,  bataille. 

chanfrein,  i582,  ibi)8,  pièce  de 
caparaçon  couvrant  le  devant 
de  la  tête  du  cheval. 

chans,  voir  champ. 

chaon,  4024  [ms.  haon],  nuque, 
cou. 

char:  homde— ,  470,  4.8b, etc., 
en  chair  et  en  os,  vivant. 

charée,  4128, cherée,  262, char- 
retée. 

chargier,  443g,  donner. 

chartrier,   2789,  3o5o,  geôlier. 

chasement,  2793,  3127,  do- 
maine, propriété. 

chastier,  3oi5,  gouverner  {en 
parlant  de  Dieu);  dedizet  de 
folie  les  chastie,  8421,  les  ré- 
primande au  sujet  de  leurs 
paroles  et  de  leur  folie. 

châtaigne,  25o8,  capitaine,  chef 
de  guerre. 

chatis,  voir  chaitif. 

chaumois  {cas  rég.  plur.),  376, 
terrain  couvert  de  chaume. 

chavage,  3559,  capitation,  taxe 
personnelle  payée  par  les  non- 
nobles. 

cheïr,  voir  cheoir. 

cheoir,  cheïr  {à  l'asson.),  23o5 
[ms.  cheor],  3920  [ws.  choir], 
3935,  J«  p.  sing.  prés.  ind. 
chiet,  284,  2947,  38o6;^«p. 
si«g-.j3/.  chai,  800,2617,  3771, 
3^  p.  plur.  pf.  chaînent,  4o5i; 
p.pa.  cas  suj.  sing.  chaïz  441 1 
{à  Vasson.),  cheûz,  io23,  cas 
rég.  cheut,  2577,  fém.  cheûe, 
2828,    2860,    3461,    cheùte. 


2578  ;    bien   me  seroit  cheù, 
1337,  bien  me  serait  advenu. 

chère,  243,  cherre,  23o,  char- 
retée. 

cherée,  voir  charée. 

cherre,  voir  chère. 

chetif,  cas  suj.  sing.  chetis,  voir 
chaitif. 

cheù,  cheûe,  cheûte,  cheûz, 
voir  cheoir. 

chevauchier  (v.  trans.),  4346, 
traverser  à  cheval. 

chief,  938,  i633,  tête;  —  d'un 
pais,  2921,  capitale;  ou  — 
de,  2863,  38 16,  en  tête  de; 
ou  premier  — ,  2823,  en  tête 
du  cortège  ;  au  —  des  altres, 
3567,  ^"  ^^^^  '^^s  autres,  au 
haut  bout  de  la  table  ;  venir 
a  — ,  2445,  venir  à  bout; 
quant  vint  a  —  de  pièce, 
4678,  quand  arriva  le  terme. 

chiere,  4107,  visage. 

chiet,  voir  cheoir. 

chinel,  cas  rég.  plur.  chinex, 
1986,  chenal,  lit  d'un  cours 
d'eau. 

choisir,  209,  3446,  4218,  voir, 
observer . 

chose:  douce — 439,  termed'ami- 
tié;  faire  —  s,  3626  [le passage 
doit  être  altéré  dans  le  ms."]. 

ci  {adv.  de  lieu),  93,  363,  ici; 

—  iluec,  1007,  ici  même;  de 
— ,914,  2221,  depuis  ici  ;  de 

—  que  a,  i5o,  320,  574,  etc., 
d'ici  jusquà;  de  —  que,  i384, 
jusqu'à  ce  que  ;  {adv.  de  temps), 

—  est,  4394,  VOICI  le  moment 
de;  de  —  2o3,  4410,  depuis 
maintenant  ;de  —  a.iiij.  jours, 
33^3,  d'ici  quatre  jours;  de  — 
que  a,  3i  i,  2071, 2336,  3841, 
depuis  ce  moment  Jusqu'à. 


GLOSSAIRE 


1I9U 


ciner,  2064,  faire  un  signe. 

cire,  56i,  6o3,  2948  [corr.  tire], 
étoffe  de  soie  [de  Tyv). 

cit,  721,  1124,  etc.,  cité,  ville. 

citaen,  4079,  citeen,  4066,  ci- 
tïen,  3ii5  {adj.),  de  la  ville 
[épithète  de  borjois). 

citerne,  4397,  grotte. 

clamer,  276,  493,  etc.,  appeler, 
nommer',  —  quitte  [un  fiej], 
3i35,  déclarer  libre;  1726, 
1736,  2226,  porter  plainte  ; 
2423,  réclamer  comme  vous 
appartenant  ;  se  — ,  2261, 
2961,  se  plaindre. 

claré  {adj.),  1898,  2io3  [épi- 
thète de  vin);  [subst.),  4553, 
vin  de  liqueur. 

clavain,  3o63,  collet  garni  d'é- 
cailles  de  fer;  esclavain,i834, 
doit  être  corr.  en  clavain. 

cler,  5i,  etc.,  beau  {épithète  de 
viaire);  2796,  283o,  etc.,  bril- 
lant, magnifique  [épithète  de 
feste);  1643,  1920,  brillant 
[épithète  d'or  et  d'argent). 

cloie,  3836,  0928,  claie. 

coiement,  171,  339,  etc.,  dou- 
cement, sans  faire   de   bruit. 

coillir,  3»  p.  sing.  prés.  ind. 
queut,  172;  —  en  amour, 
172,  aimer;  —  en  hé,  886, 
prendre  en  haine. 

*  cointe,  658,  intelligent. 

*  coitier  (se),  21 25,  se  hdter. 
cole,  voir  covercle. 

colée,  1066,  coup  sur  la  nuque. 
colonoissien,    3552,    denier  de 

Cologne . 
coltel,  2509,  coutel,  2285,  lame 

de  l'épée. 
com    [adv.)    :    —    mal    dese- 

vrement  !    2798,     r—      maie 

départie  !  41 56,   quelle  triste 


séparation  !  [conj.)  tant  — , 
i535,  1849,  «^<-'-»  autant  que. 

comander,  cornant,  voir  com- 
mander, commant. 

combatre  a,  771,  —  vers,  788, 
attaquer. 

combrisier,  698,  briser,  écraser. 

commander,  comander,  255, 
473,  etc.,  recommander. 

commant:  tôt  a  vostre  — ,  i63, 
175,  etc.,  tout  à  vos  ordres; 
com  vos  vient  a  — ,  242, 
comme  vous  le  voule^  ;  se 
vous  vient  a  — ,  538,  si  cela 
vous  plaît  ;  faire  les  comans, 
1621,  exécuter  les  ordres. 

communément,  3oi8,  4085, 
4185,  ensemble. 

compaigne,  634,  2821,  4162, 
compagnie,  société;  3071, 
4062,  troupe  de  soldats;  [au 
plur.),  l'iS'i,  3g65,  force  mi- 
litaire. 

compaignie,  2396,  société, com- 
merce ;  ou  preïs — ,  3o^5,  dont 
tu  fus  la  femme  ;  2718,  3721, 
suite  de  barons;  prenra  [ms. 
panra]  — ,  3735,  rencontrera. 

compain,  1746,  1880,  etc.,  com- 
pagnon. 

comparer,  635,  857,  etc.,  payer 
cher  [au  sens  figuré);  le  jor 
fu  dame  Olive  [chierement] 
comparée,  Zd>b2,  ce  jour-là  on 
paya  cher  à  dame  Olive  les  tour- 
ments qu'elle    avait  endurés. 

compisser,    4029,    uriner  sur. 

concile,  1222,  conciliabule,  com- 
plot. 

conduire,  3  122,  transporter;  sa 
lance  li  conduit,  1848,  2366, 
lui  donne  un  coup  de  lance. 

coneû,  coneûrent,  voir  con- 
gaoistre. 


192 


DOON    DE    LA    ROCHE 


confanon,2294, confenon,  iioo, 
iii3,  oriflamme  attachée  au 
haut  de  la  lance  ;  —  s  laciez^ 
3073. 

con  fermer,  4087,  co«^rwerdflMS 
un  titre. 

confesse  :  prendre  sa  — ,  3944, 
se  confesser. 

confondre,  887,  11 55,  tuer,  dé- 
truire; —  la  terre,  2177, 
3776,  ruiner , dévaster  le  pays  ; 
confondu,  1022,  2232,  trou- 
blé, bouleversé  [sens  moral). 

conforter,  717,  i353,  etc.,  ré- 
conforter., consoler. 

congnissable,  4297,  quenois- 
sable,   36oi,    reconnaissable . 

congnoissance,  3857,  signe  de 
reconnaissance  [pendant  le 
combat] . 

congnoistre,  3'  p.  sing.  pf.  con- 
gnuit,  3856,  congnust,  3974, 
conut,  2629,  3.463,  J*;?.  plur. 
pf.  coneùrent,  577  ;  p.  pa. 
coneù,  2859,  reconnaître. 

conquerre,  3<^  p.  sing.  impf. 
subj.  conquesist,  2383;  2682, 
vaincre  [un  ennemi];  2881, 
2882,  conquérir  [u7t  pays]. 

conquester,  2545,  conquérir. 

conreer,  iii,  1670,  1942,  équi- 
per, vêtir  ,  3283,  4616,  avoir 
soin  de,  régaler  ;  1569,  2069; 
2093,  3718,  soigner,  masser; 
—  de,  2122,  investir  de. 

conseil,  consoil,  1209,  délibé- 
ration ;  4278,  entretien  confi- 
dentiel [entre  deux  peisonnes); 
1142,  2202,  expédient. 

conseiller,  consoillier  ,  32i8^ 
dire  confidentiellement. 

consente  :  lor  fait  li  dus  — , 
3888,  le  duc  leur  donne  son 
consentement. 


conseûe,  vozr  consuir. 

consoillier,  voir  conseillier. 

consûir,  p.  pa.  fém.  conseûe, 
4184,  atteindre. 

contenir  (se),  3i56,  se  conduire. 

contor,  486,  comte. 

contraire  [subst.],  3o3o,  adver- 
sité. 

contraiz  [cas  suj.  sing.),  1790, 
cul-de-jatte. 

contralïer,  2118,  4134,  contre- 
dire, contrarier. 

contralios,  981,  qui  aime  à  con- 
trarier. 

contre,  578,  4io5-,  vers,  à  la 
rencontre  de  ;  —  terre  raier, 
2480,  ruisseler  à  terre. 

contredire,  664,  2214,  2965, 
contester. 

contredit  ;.  mètre  —,  j2^,  faire 
une  protestation. 

contremoni,  1628,  1844,  etc., 
indique  le  mouvement  de  bas 
en  haut  ;  4299,  en  haut  [sans 
mouv.). 

contremonter,  2?42,  2345,  al- 
ler à  contremoni,    remonter. 

contreval,  2317,  etc.,  de  haut 
en  bas;  —la  ville, 4479,  44^2, 
—  la  cité,  4480,  en  bas  dans 
la  ville  [par  opposition  à  la 
situation  élevée  du   château). 

convenant,  voir  covenant. 

convent,  4237,  4271,  engage- 
ment, promesse. 

converser,  61,  3oo,  2248,  de- 
meurer, se  trouver. 

corage,  coraige,  45,  33oo,  etc., 
disposition  du  cœur  ;  526, 
désir. 

corant,  322,  i563,  i825,  2286, 
corrant,  2431,  2455,  rapide 
[épithète  de  mul,  dromadaire, 
cheval,  destrier).   ,,,...... 


GLOSSAIRE 


193 


cordoan,  1716,  cordoain,  1949, 

3162,  cordoen,  1577,  en  cuir 

de  Cor  doue. 
coreços,  coresos,  voir  corosos. 
corner  :  —  Taigue,  44^7'  449°» 

annoncer  à  son  de  trompe  que 

l'eau  est  mise  sur  les  tables, 

que  le  repas  est  servi. 
corocier   (se),    4074.    s'irriter  ; 

p.pr.,  *corroçanz,  196,  irrité; 

p.  pa.   corocié,   2406,    2413, 

corrocié,    228,    397,    irrité  ; 

279,    507,  83o,   ému,  affligé  ; 

21 5,  effrayé. 
corosos,     1917,    coreços,    794, 

coresos,  2961,  coreçous,  2208, 

3o20,  irrité. 
corpe,  257,  714,  faute,  péché. 
corrant,  voir  corant. 
corre,   3^  p.  sing.    prés.     ind. 

cuert,  3726,  parcourir  ;  iinf. 

pris  substantivt),  a  grand  — , 

4342,  en  grande  hâte,  en  cou- 
rant. 
corrée,  4027,  viscères,  entrailles. 
corrocier,  voir  corocier. 
corroz,  833,  colère  ou  chagrin  : 

—   a   enfant   ne  dure  gueres 

mie. 
corsier    [adj.),      2469,    rapide 

{épithète  de  cheval) . 
cort,    3,   455,    533,    etc.,    cour 

royale  ou  seigneuriale. 
cortois,  348,  602,   1489,    1997, 

prudent,  avisé  ;  cors  — ,  61 5, 

beau  corps. 
costiere,    701,  pente,  penchant 

d'une  colline. 
costume  :    avoir  en   — ,    3281, 

être  habitué. 
coue,    4024,  cowe,  697,  queue 
[d'un    cheval];    38 16,   queue, 
arrière-garde  [d'une  armée]. 
courant,  voir  corant. 


cous  {cas  suj.  sing.],  276,  couz, 
21 32,  cocu;  —  sofranz,  273, 
21 3i,  cocu  bénévole. 

coutel,  voir  coltel. 

coutre,  10 17,  couverture  [d'un 
lit],  courtepointe. 

couvenir  :  le  couvendra,  2o5, 
il  sera  obligé. 

covenant,  2735,  3i23,  3847, 
accord,  condition  stipulée. 

coverture,  1826,  manteau  flot- 
tant posé  sur  le  dos  d'un  che 
val. 

cowe,  voir  coue. 

cravanter,  1000,  craventer , 
2617,  crevanter,  3  146,  faire 
tomber  à  terre,  renverser. 

crestienté,  1240,  2o53,  pays 
des  chrétiens. 

crevanter,  voir  cravanter. 

crever,  3598,  36hi,  poindre 
{en  parlant  de  l'aube). 

criendre,  3"  p.  sing.  ind.  prés. 
crient,  3 290 (à  l'asson.), crain- 
dre. 

crins  {cas  rég.  plur.),  2010, 
cheveux. 

crine,  i3o5,  chevelure. 

croce,  1738,  crosse  épiscopale  ; 
1735,  mense  épiscopale. 

*croissier  [ms.  croissie]  :  parmi 
un  val  — ,  3 180  (?) 

croissir,  23o2,   rompre,  briser. 

croistre  (v.  intr.),  590,  910, 
2676,  3896,  survenir;  {v. 
trans).,  4264,  4265,  augmen- 
ter. 

croiz  :  avoir  maie  — ,  588,  avoir 
mauvaise  chance. 

crote,  1884,  2-]oi,  crypte;  4391, 
antre,  caverne. 

cuer,  45,  161,  i63,  etc.,  dispo- 
sition du  cœur;   avrai   le   — 
noir,    1289,    j'aurai  le   cœur 
i3 


194 


DOON    DE    LA    ROCHE 


triste;  de  —,  8io,  821,  3663, 
du  fond  du  cœur;  de  mon 
— ,  812,  même  sens. 

cuidier,  636,  874,  etc.,  /*  p. 
sing.  prés.  ind.  cuit,  2454,  etc., 
penser,  croire;  2454,419/1,56' 
proposer,  avoir  l'intention  de. 

cu[i]rie,  i582,  1598,  harnais  de 
cuir. 

cure  :  n'a  nule  — ,  1809,  n'a  pas 
de  souci;  n'ot  —  de,  2403,  ne 
songea  pas  à . 

cuvert,  269,  374,  etc.,  miséra- 
ble, gredin;  au  fém.  cuverte, 
654,  887,  etc. 

daintié  [ms.  dointié],  3  ro3,  bien, 

terre. 
Damedeus  {casst4J.),  11 56,  Da- 
medex,  i  17,  Damcdieus,  1000, 
Damediex,  523  ;  Damedé  {cas 
rég.)    982,    Damedeu,    i225, 
Damedieu,   827,   le  Seigneur 
Dieu . 
damoisel,   157  {cas  rég.   sing.), 
damoisiel,    2677,     demoisel, 
4220,    damoisiaux  {cas  sujet 
sing.),  i3o2,  1344,    etc.,   da- 
moiseaus,     675,    924,   jeune 
homme  noble. 
dans     {vocatif   enclit.),     io3i, 

1 170,  etc.,  messire. 
darier,     2458,     3077,     dariere, 

2  I  58,  derrière. 
davant,  voir  devant, 
de,  remplacé  aujourd'hui  dans 
certaines  locutions  par  d'au- 
tres prépositions  :  —  Dieu, 
2098,  au  nom  de  Dieu  ;  —  bien 
et  —  amistié,  11 79,  au  nom 
de  ;  —  sa  suer  demanda,  328, 
s'enquit  de  sa  sœur  ;  veez  — 
vostre  pcre,  loii,  voye^ 
votre  père;  —  diz  et  —  folie, 


3421,  au  sujet  de  leurs  pa- 
roles et  de  leur  folie  ;  —  l'or 
et  —  l'argent,  i388,  au  sujet 
de;  dolente—  la  terre,  4084, 
<^ffligée  au  sujet  de  la  terre  ; 
paour  a  —  soi,  2  236,  il  a 
peur  pour  lui;  —  pitié  s'umi- 
lie,  3042,  il  devient  bon 
sous   V influence  de   la  pitié; 

—  merci  vos  requièrent,  4079, 
implorent  votre  pitié;  estre 
bien  la  cort,  1425,  être  bien 
en  coût-;  il  ot  —  sa  mesnie, 
1620,  il  eut  comme  suite  ;  — 
loier,  40i5,    en   récompense; 

—  fait  et  —  dit,  888,  en  fait 
et  en  dit;  —  veoir  et  —  'oïr, 
237,  732,  1438,  —  'oïr  et  — 
veant,  261-,  par  la  vue  et  par 
l'ouïe;  —  costé,  3870,  à  côté  ; 

—  devant,  209,  devant  ;  — 
la  vostre  aventure  !  448,  quel 
fut  votre   malheur!;  partitif, 

—  tante  bone  enseigne  i  peûst 
on  veïr;  3923. 

deci,  voir  ci. 

decoper,  2o58,   3614,  tailler  en 

pièces. 
dedans,     4248,    dedanz,     2692 

{prép.),  dans. 
dedesus  :  par  — ,    3i63  {prép.), 

pardessus. 
defenir,  ^()2\i,  faire  halte. 
deff'aé,  vo/r  desfaé. 
deffaillir,  3^  p.  sing.  prés.   ind. 

dertaut,  3bi3,  manquer. 
deffendre  :  s'onor     li     defïent, 

2619,  2624,  défend  contre  lui 

son  domaine. 
deffier,  voir  desfier, 
defl'ubler,  3244,  defubler,  3371, 

se    dépouiller      [d'un     vête- 
ment]. 
défiler,  3007,  couler. 


GLOSSAIRE 


195 


defors  {adv.),  1625,  dehors; 
{prép.),  741,  en  dehors  de. 

defubler,  voir  deffubler. 

degré,  1624,  1628,  etc.,  marche 
d'un  escalier. 

dehait,  1797,  181 1,  4074,  xMa/- 
heur. 

dejoste  {adv.),  i5i6,  à  côté; 
(prép.),  2763,  à  côte'  de. 

dejus,  i352,  en  bas. 

delaier  [inf.  pris  substantivt), 
2764,  délai. 

delez  [prép.),  827,  363,  38o6, 
à  coté  de  ;  1 123,  3646,  le  long 
de;  par  — ,  4384,  à  côté  de. 

delitier  (se),  3729,  s'amuser,  se 
distraire. 

délivre  :  a  — ,  2  352,  librement, 
sans  obstacle. 

délivrer,  1666,  donner,  remet- 
tre ;  2891,  donner  à  violer  ; 
(v.  intr.)  6bg,  prononcer  des 
paroles  (?)  ;  —  d'un  fil  {verbe 
intr.),  937,  954,  mettre  au 
monde  un  fils  ;  se  — ,  78, 
s'acquitter. 

deloi,  404,  délai. 

demeine  (adj.),  4076,  voir  de- 
moine. 

démener,  45g,  701,  707,  258o, 
maltraiter;     —   amors,      5o, 

—  tel    duel,    1354;   —    joie, 
1939,  2108,4426,4470,4474; 

—  granz  riz,   729  ;  —   tence, 
2338,  mener. 

dementer,  2826,  4347.  se  la- 
menter; se  — ,  281 3,  383o, 
même  sens. 

demoine,  demeine  (adj.),  qui 
appartient  en  propre  :  fié  — 
5i8;  alué  —  3558  ;  qui  appar- 
tient au  seigneur  :  chambre 
—,  3124,  tref  —  3946,4076; 

{SUbst.),      2221,     2223,      2225, 


2270,  3558,  domaine,  terri- 
toire appartenant  en  propre 
au  seigneur. 

demoisei,  voir  damoisel. 

demorer,  1278,  1799,  ^687, 
tarder  ;  ne  demorra  nient, 
ijS,  cela  ne  tardera  pas  ;  sans 
— ,  1751,  sans  délai. 

demostrer,  275,  montrer,  dési- 
gner ;  47,  expliquer,  racon- 
ter. 

denrée,  5o6,  2535,  etc.,  valeur 
d'un  denier. 

départie,  2683,  41 56,  etc.,  dé- 
part, adieux. 

départir,  472,  478,  2942,  etc., 
séparer  ;  3477,  3898,  disper- 
ser. 

depecier,  705,  briser  en  mor- 
ceaux; depecié,  3i6o,  arra- 
ché en  lambeaux. 

déport,  2  358,  récréation,  amu- 
sement. 

déporter  :  —  son  cors,  1989,  se 
délasser,  se  distraire  ;  se  — , 
2323,  4255,  même  sens. 

depri  :  en  — ,4286,  en  prières. 

deprier,  396,  prier,  demander 
en  suppliant. 

derompre,  p.  pa.  cas  rég.  plur. 
derouz,  2253,  arrachés. 

dès  (prép.  de  lieu),  859,  depuis  ; 
{prép.  de  temps)  —  ici  en 
avant,  2912,  à  partir  de  ce 
moment. 

desaisier  (se),  3597,  se  gêner, 
s'incommoder. 

desaisir,  2959,  dépouiller. 

desartir,  2297,  23o3,  mettre  en 
pièces,  déchirer. 

desclore,  3633,  ouvrir. 

descombreement,  i65,  ouver- 
tement. 

desconforté,     882,    découragé. 


igô 


DOON    DE   LA    ROCHE 


desduire  :  le  sien  cors  — ,  2186, 
s'amuser,  se  distraire  ;  se  — , 
2633,  se  réjouir;  5i6  (par 
ironte)i  mener  une  triste  exis- 
tence. 

desdu[i]s  [cas  suj.  sing.),  2324, 
amusement  ;  desduiz  [ms.  des- 
duit],  'ib74.,fête. 

desersenz  [ms.  desersans],  3 1 26, 
nom  propre  altéré. 

déserte,  2915,  récompense. 

desevrement,  2799,  séparation. 

desevrer,  1 14,  645,  etc.,  séparer; 
1916,  ïgj2,  se  séparer, se  quit- 
ter ;  paroles  qui  desoivrent 
d'amour,  487,  paroles  qui 
séparent  de  l'amour,  qui  met- 
tent fin  à  l'amour  ;  [inf.  pris 
substantivt)  4598,  séparatior, 
adieux. 

destaé,  deffaé,  1692, 1776,  1870, 
41 12,  sans  foi. 

destier,  deffier  :  de  t'amor  le 
desfie,  2668,  défie-le  au  nom 
de  ton  amour,  dis-lui  que  tu 
ne  l'aimes  plus  [défi  cheva- 
leresque transporté  dans  les 
relations  d'amour);  de  s'amor 
vous  cieffi,  4293. 

desloi,  3j3,  faute,  crime. 

desmailer,  desmailler,  iio3 
1 1 16,  2478,  2486,  2748,  rom- 
pre le  tissu  de  mailles  du  hau- 
bert. 

desmentir,  iio3,  briser,  mettre 
en  pièces. 

desnaturer  [v.  intr. ),S']4;  chan- 
ger de  nature,  de  caractère. 

desnoer,  702,  disloquer,  dis- 
joindre. 

desoentre,  55 1,   après. 

desor  [prép.),  2043,  23o4,  etc., 
desour,  356o,  4291,  desur, 
2i^^,  dessus  ;  de  sor  soi,  912, 


loin  de  soi  :  1 572,  par  dessus  ; 
par  [de]  desour, 4034,  pardes- 
sus ;  [adv.)  desore,  4269, 
dessus. 

desoz  [prép.),  149,  1419,  etc., 
de  souz,  1396,  141 1,  etc., 
desous  3771,  4337,  par 
dessous,  42o5,  par  de  dessous 
38 12,  S0M5  ;  mètre  au  desoz 
{adv.),  22b i,  vaincre,  accabler. 

*despersonéement  [ms.  desper- 
sencemant],  1088,  d'une  ma- 
nière déshonorante  [manque 
dans  Godefroy). 

despondre,  développer,  racon- 
ter :  cil  jugleor  desponent  lor 
chançons  et  lor  fables,  3572. 

desiober,  1709,  vo/er  [^^«]. 

dessiré,  1847,  déchiré. 

destiné,  2895,  décidé,  fixé  par 
le  destin. 

desiraindre,  voir  destreindrc. 

destre  :  par  — ,  269,  sor  — , 
3175,  sur  — ,  35i5,  à  droite. 

destraindre,  destreindre,  3447, 
serrer,  enserrer  ;  3393,  3400, 
4ib'5 ,  tourmenter  ;  04.2 1 ,  répri- 
mander. 

destroit,  i366,  situation  péni- 
ble ;  mettre  en  — ,  392,  accu- 
ler à  la  nécessité  de  répondre. 
[Cf.  «  Kar  metez  la  dame 
en  destreit,  S'alcune  chose 
vus  dirait  »,  Marie  de  France, 
Lai  du  Bisclavret,  255)  ;  a  [s] 
destroiz  [corr.  a  destroit], 
3614,  serrés  les  uns  contre  les 
autres. 

destruire,  449,  434,  etc.,  tuer; 
126,  looi,  ruiner  {au  sens 
moral). 

desur,  voir  desor. 

desver,  406,  i3i3,  i327,  2376, 
devenir   fou  ;    se    — ,     1 3o6, 


GLOSSAIRE 


197 


même  sens;  desvé,  297,  696, 
etc.,  fou  ;  avoir  le  sen  desvé, 
1787,  2066,  être  fou. 

desvestir  {v.  tvans.)  :  l'haubert 
li  desvestit,  4385,  lui  ôta  son 
haubert. 

detranchier,  3090,  4049,  detren- 
chier,  3oi3,  3 168,  mettre  en 
pièces. 

devant,  davant  (pre'p.),  52,  2  1  58, 
etc.,  avant  •,{adv.]  la  teste  tôt 
— ,  254,  la  tête  la  première  ; 
ou  visage — ,1073,  1076,3983, 
par  les  grenons — ,  2i37;me- 
tre  —  [un  péché], 237,  accu- 
ser de  ;  de  — ,209,  devant. 

devers  {prép.),  3ii2,  3648, 
3894,  3953,  venant  de  :  par  — , 
4204,  même  sens. 

devis  :  a  son  — ,  232,  à  son 
plaisir,  à  sa  fantaisie. 

devise,  5i5,  ration. 

deviser,  4500,  raconter. 

devoir  :  ce  qtie  doit?  617,  grH, 
1292,  à  quoi  bon  ? 

di,  2o3,  468,70Mr  ;  touz  dis,  5, 
12,  etc.,  toujours. 

dignité,  4533,  cérc.nonie. 

dija,  38 10,  exclamation . 

dimenge,  2336,  dimanche. 

dit.  4228,  parole  donnée,  jurée. 

diva,  1709,  2197,  2242,  38io, 
holà! 

doble,  4371,  maille  double  [du 
haubert]. 

doer,  1028,   doter. 

doi  [cas  suj.  plur.),  371,  400, 
dui,  4491,  deux. 

doinst,  doint,  voir  doner. 

dointié,  voir  daintié. 

dois,  4427,  4492,  table. 

dolent,  279,    3o5,   etc.,  affligé. 

doloros,  1287,  afflige'. 

donc,  2865,  efc,  dont,  235,  248, 


etc .,  alors  ;  &  — ,  vo/r,  adonc, 

doner,  fut.  1°  p.  sing.  donrai, 
87,  r»  p.  plur.  donrons, 
II 39,  1149,  2»  pers.  plur. 
donrez,  79;  condit.  /«  pers. 
sing.,  donroie,  11 74;  subj. 
prés.  3"  p.  sing.,  doint,  59, 
dont,  2  1 14,  doinst,  928,  io3û  ; 
(absolt),  539,  donner  en  ma- 
riage ;  —  le  don,  3298,  accor- 
der,  consentir:  se  —  garde 
de,  2567,  s'apercevoir   de. 

dont  [conj.  interr.  de  lieu], 140 1 , 
2372, 3541, ii'oM?;(no«  interr.) 
1462;  {conj.  de  manière}  869, 
au  sujet  de  quoi;  4016,  par 
suite  de  quoi  ;  [interr.)  228, 
273,  pourquoi?  ;  {adv.),  voir 
donc. 

dormir  (se),  3b2y,  dormir. 

doter,  2025,  2034,  etc.,  douter, 
3432,  redouter,  craindre  ;  ne 
vous  dout  mie,  3797,  je  ne 
vous  crains  pas  ;  ains  mort  ne 
dotèrent,  3849,  jamais  ils  ne 
redoutèrent  la  mort;  —  sa  vie, 
3740,  craindre  pour  sa  vie; 
jamar  en  doterez,  1662,  inu- 
tile de  rien  craindre;  se — , 
même  sens;  ne  vos  dotez  néant, 
4401,   n'aye^  aucune  crainte. 

dragon,  3857,  emblème  repré- 
senté sur  une  oriflamme. 

drap,  cas  rég.  plur.  draps, 
3699,  ^'"^^  4069,  etc.,  étoffe  ; 
2705,  3 160,  3498,  35o4, 
4037,  vêtements;  les  blancs 
dras,  4o56,  le  froc  blanc  des 
Cisterciens. 

drecier,  527,  3489,  élever  sur 
la  croix;  i  398,  attacher,  har- 
nacher; se  — ,  41  o3,  se  lever. 

droit  [adj.),  direct:  — e  anses- 
serie,  4147,  —  héritage,  3558, 


198 


DOON    DE    LA    ROCHE 


—  tenement,  3124;  direct, 
légitime  :  droiz  emperere, 
428,  65g,  —  seignor,  bgo, 
3261,  3298  ;  légitime:  —  bap- 
tisement,  i56;  juste,  401, 
1269,  1370;  ce  est  — ,  919, 
c'est  juste,  naturel]  {subst.) 
401,  464,  2424,  chose  juste  et 
équitable;  n'a  si  grant  droit 
ne  soit  a  tort  tornez,  427,  il 
n'y  a  droit  si  juste  qui  ne  soit 
changé  en  toi-t;  le  droit:  uroiz 
a  —  repaire,  204,  le  droit 
retourne  au  droit  {la  justice 
trouve  toujours  son  compte)  ; 
avoir  — ,  1061,  4006,  4425, 
avoir  raison  ;  [adv.)  —  a  [sans 
mouv.),  1424,  1481,  3473, 
4088,  ^^i^^,  justement  à;  [avec 
mouv.),  :    1791,  4o3g,   4199; 

—  de,  4267,  justement    de  ; 

—  nient,  voir  nient. 
droitement,     1043,    1068,    tout 

droit. 
droiture,  /\.b?>,  justice. 
droiturier,  76,  i652,  légitime; 

—  oré,  tSgô,  igjg,  veut  favo- 
rable. 

dromadaire,  id63,  i58r,  1696, 
igbi,  2o38,  espèce  de  cha- 
meau. 

1.  dru,  cas  rég.  pi.  druz,  io54, 
ami;  dmt,  ^6 \,  amie,  épouse. 

2.  dru  :  terre —  e,  21  j?i,  fertile. 
ducheé,  90,  duché. 

duel,    626,    716,   etc.,  cas  suj. 

sing.  dues  [lire  dues],    i3o3, 

dues,  325 1,  chagrin,  malheur. 
dui,  voir  doi. 
durée  :  se  longues  ai  — ,  41  32, 

si  je  vis  longtemps. 
durement,  197,  824,  4401, /or- 

tement. 
durer  :  tant  com  l'espée    dure, 


3790,  tant  com  hante  II  dure, 
1849,  4182,  de  toute  la  lon- 
gueur de  l'épée,  de  la  lance. 

eage,  aage  :  ses  aages,  532,  son 
développement  corporel  par 
rapport  à  son  âge;  de  moit 
grant  eage,  4314,  bien  en  âge 
de  se  défendre  ;  en  son  eage, 
3563,  dans  sa  vie. 

efforce,  3649,  esforce,  863, 
force  armée,  troupe. 

efForcement,  3i3i,  même  sens 
que  efforce. 

*efForcieement  [ms.  effreemant], 
109Ô,  à  grand  effort. 

efforcier  [y.  intr.),  3652,  aug- 
menter, croître. 

effrcemant,  voir  etTorcieement. 

el,  3 18,  2o32,  autre  chose. 

*eluné  [ms.  elimé],  2io5,  [vin] 
oîi  ily  a  de  l'absinthe  (aluis- 
ne).  La  forme  avec  e  est  nor- 
male en  lorrain.  Cf.  Godefroy, 
v°  aluisnier,  où  il  faut  proba- 
blement lire  aluisniez  au  lieu 
de  aluisniers  [cas  suj.  sing.). 

emblée  :  a  —  3893,  en  cachette. 

embler,  420,  3668,  voler,  déro- 
ber ;   s'en  — ,    3886,  s'enfuir. 

embricher  (s')  [corr.  s'embus- 
cher],  2279,  s'embusquer. 

*embronc  :  le  chief  —  [ms.  a 
uif  bron],  145,  la  tête  incli- 
née. 

emine,  365,  608,  mesure  de 
capacité. 

emparlé,  658,  qui  sait  parler, 
disert. 

emperier,  2775,  impérial. 

empevré,  2104,  saupoudré  de 
poivre. 

empirier  {v.  trans.),  3840,  en- 
dommager;   {v.    intr.)    1444 


GLOSSAIRE 


'99 


empirer;  n'ert  li  dux  enpiriez, 
32  58,  le  duc  ne  s  en  portera 
pas  plus  mal. 

emploie,  45 1 8,  placé,  mis  à  sa 
place. 

empoindre,  2367,  atteindre  en 
portant  un  coup. 

en  (prép.)  :  —  nom  Deu,  1932, 
3144,  au  nom  de  Dieu;  — 
après,  25o,  ensuite. 

enarbrer,  vozVenerber. 

encensier,  2822,  encensoir. 

encerchier,  4244,  parcourir  en 
cherchant. 

enchacier,  325g,  enchâsser, 
2240,  chasser,  mettre  à  la 
porte;  voir  enchaucier. 

enchanter,!  1 5, 2g56, ensorceler. 

encharner  (s'),  3742,  s'attacher 
[à  sa  proie]. 

enchâsser,  voir  enchacier. 

enchaucier,  1092,  1107,  2307, 
2348,  enchacier,  3695,  pour- 
suivre. 

enclin,  817,  incliné,  penché. 

encliner,  256g,  saluer. 

enclore,  302  2,  enfermer. 

encombrier,  928,  21 12,  etc., 
malheur,  dommage;  chai  d' — , 
377 1 ,  //  tomba  sous  la  douleur. 

encontre  (adv.)  :  aler  — ,  1893, 
3667,  38i5,  se  lever  — ,  394, 
aller,  se  lever  pour  aller  à  la 
rencontre;  (prép. ),3-jo5,4.4.-jb, 
au  devant  de;  aler  a  1' — ,  376, 
4470,  aller  au  devant. 

encontrer,  548,  690,  etc.,  ren- 
contrer ;  {impers .)  survenir: 
bien  nos  est  encontre,  i656, 
etc.,  nous  avons  eu  de  la 
chance;  mal  vos  est  encontre, 
1706,  vous  n'ave^  pas  eu  de 
chance;  mar  lor  est  encontre, 
2  55o,  même  sens. 


encorper  {v.  trans.),  1 1 68,  por-ter 
préjudice  à. 

encor  [suivi  du  subj.),  même  si  : 
—  Fust  il   bastars,  1467. 

encortiner,  4476,  orner  [une  rue] 
de  pièces  d'étoffes,  en  l'hon- 
neur d'un  personnage  ou 
d'une  fête. 

encrime,  encrisme,  121,  3327 
[épithète  de  félon;  cf.  Roma- 
nia,  li,  108). 

encui,  1798,  2206,  ancui,  1657, 
aujourd'hui  même. 

endementre  2341,  cependant, 
sur  ces  entrefaites. 

endroit  (prép.),  2395,  au  mo- 
ment de;  98,  selon. 

*  enerber  [ms.  enarbrer],  3io5, 

empoisonner. 

entant,  cassuj.  sing.  enfes,  282, 
669,  etc.,  enfant;  i858,  jeune 
homme  non  adoubé;  74,  1 179, 
etc.,  jeune  noble  en  âge  de 
porter  les  armes. 

enflé,  709,  gonflé  de  colère  ; 
i653,  envieux,  méchant. 

enforcier,  733,  renforcer,  aug- 
menter; enforcié,  1494,  fort 
puissant. 

enfouir  (s'),  358 1,  s'enfuir. 

enfraindre  :  ma  terre  en  est 
enfraitc,  3 16,  ma  terre  est 
dévastée . 

*  enganer,    171  3  [ms.  enginiés, 

éd.  enginiez],  19 14  [ms.  engi- 
n\e],  tromper  (voir  engignier). 

engenoiller  (s'),  166,  s'agenouil- 
ler. 

engien,  voir  engin. 

engigneor  {cas  rég.  sing.),  3g25. 
ingénieur. 

engignier,  3o65,  3736,  engi- 
nier,  941,  tromper;  voir  enga- 
ner. 


200 


DOON    DE   LA    ROCHE 


engin,  896,  ioi2,engien,  2942, 
2954,  ruse,  manœuvre;  3836, 
3926,  machine  de  guerre. 

enginier,  vo/r  engignier. 

engolé,  io5,  iSyi,  1622,  1943, 
2002,  muni  d'un  collet. 

enmaler,  4596,  mettre  [les  baga- 
ges] dans  les  malles. 

enmi,  797,  au  milieu  de. 

ennuier  :  li  ennuerent,  4254, 
Vennuyèrent 'j^nrimé  sont  de 
l'ost,  3931,  sont  fatigués  de 
servir  dans  l'armée. 

enoi,  624,  chagrin,  ennui. 

enor,  voir  honor. 

enpiriez,  voir  empirier. 

enpoignier,  3214,  tenir  à  la 
main. 

enquerre,  1921,  3i55,  recher- 
cher, enquêter;  2552,  deman- 
der [des  nouvelles]. 

enragier,  785,  820,  etc.,  enrai- 
gier,  3179,  i33ij,  devenir  fou; 
s'  — ,  2376,  même  sens;  — 
d'ire,  22  16,  4149,  devenir  fou 
de  colère;  enragié,  2460, 
fou;  fel  et  enragiez,  87g,  937 

ens,  voir  enz. 

enseigne,  enseingne,  ensoingne, 
1967,  4238,  4292,4321,  signe 
de  reconnaissance;  36oi,  cri 
de  guerre  ;2-j83,  3oot,  3923, 
4340,  4368,  oriflamme,  gon- 
fanon. 

enseignier,  3167,  ensoignier, 
3227,  indiquer,  montrer  ;en- 
soignié,  3225,  averti,  intelli- 
gent. 

cnseler,  37o3,  seller. 

ensembler,  2600,  rassembler, 
réunir. 

ensiment,  4449,  de  même. 

ensoignier,  voir  enseignier. 

ensoingne,  voir  enseigne. 


ensuire,  3 145,  poursuivre. 

entailiié,  1389,  2465,  façonné, 
gravé. 

entalenté,  84,  désireux. 

ente,  1396,  1408,  141 1,  1419, 
arbre  fruitier . 

entendre,  prêter  attention  :  a 
homme  n'entend,  170,  elle  ne 
fait  attention  à  personne;  en- 
tendez ça  vers  mi,  1 146,  vers 
moi  (en)  entendez,  1963, 
envers  moi  entendez,  3 10, 
a  moi  (en)  entendez,  2080, 
dirige:^  votre  attention  de 
mon  côté,  écoutez-moi  ;  l'enfes 
entendi  de  Doon,  994,  Ven- 
fant  entendit  Doon . 

enterin,  4612,  entier. 

entrabatre  (s'),  2507,  se  jeter 
mutuellement  à  terre. 

*entrant  [ms.  antrée]  [subst.), 
2929,  commencement. 

entre  :  —  lui  et  Malingre, 
1870,  —  lui  et  Hardré,  i85i, 
à  eux  deux,  lui  et  M.  et 
H.  ;  . —  li  niés  et  l'oncles, 
41 33,  à  eux  deux  le  neveu  et 
l'oncle  ;  —  mon  aubre  et  mi, 
1275,  à  nous  deux,  mon  arbre 
et  moi;  —  ci  que  a  [prép. 
de  lieu)  177,  192,  etc.,  jus- 
qu'à; [prép.  de  temps)  i65o, 
d'ici  à. 

entrebaisier  (s'),  2749,  2750, 
3976,  etc.,  se  donner  mutuel- 
lement des  baisers. 

entreci,  voir  entre. 

entreconoistre  (s'),  2420,  se  re- 
connaître mutuellement . 

entrée,   4224,    commencement. 

entremetre  (s'),  3264,  se  mê- 
ler [d'une  chose]. 

entrencontrer  (s'),  4471-2,  se 
rencontrer . 


HHOGLOSSAIRE 


201 


entreprendre,  197,  saisir,  atta- 
quer; de  péchié  entrepris, 
235,  entaclié  de  péché;  — 
por,  3449,  prendre  pour 
[l'^p.  sing.  prés.  ind.  entre- 
prains). 

entrer  :  est  li  jors  entrez 
que,  86,  le  jour  est  venu 
où;  li  mais  doit  — ,  649, 
mai  doit  commencer  ;  s'en 
— ,  3594,  4474,  entrer;  (inj. 
pris  substantivt),  3g36,  en- 
trée. 

entretenir  (s'),  3996,  se  soutenir 
mutuellement. 

enuit,  1641,  2804,  etc.,  cette 
nuit; —  mais,  3o33,  3047, 
etc.,  même  sens. 

envaïr,  i35,  2290,  attaquer; 
182,  violer  [une  femme]. 

envaïs  [cas  suj.  sing.),  3936, 
assaut. 

envers,  3io,  466,  etc.,  vers. 

enverser,  1849,  renverser. 

envie  :  porter  — ,  2gbj,  haïr. 

envier,  3^  p.  sing.  prés.  ind.  en- 
vie, 1479,  e>^voyer. 

environ,  1092,  1107,  1993, 
alentour. 

envis  (a),  3915,  malgré  soi,  à 
contre  cœur. 

envoisier  (s',,  45o3,  s'amuser, 
se  divertir. 

enz,  i38i,  1957,  etc.,  ens,  3420, 
4089  (adv.),  dedans;  —en, 
ig33,  etc.,  —  es,  2643,  —  ou, 
1039,  etc.,  au  milieu  de,  dans 
Vintérieur  de. 

ermin,  voir  hermin. 

errant,  2281,  3ii8,  3972,  aus- 
sitôt. 

*  errée  [ms.  ferrée] ,  646 , 
chemin. 

erre  ment,  4455,  voyage. 


errer,  2o36,  1623,  4.4.5^,  chemi- 
ner, voyager  ;  sus  ou  palais 
errant,  335,  mon  tant  dans  le 
palais;  [inf.  pris  substantivt), 
1981,  voyage. 

es,  ez,  voici  :  es  le  ouvert 
Tomile,  io34,  es  Guene- 
lon,  II 28,  etc.,  ez  le  duc, 
32 13;  —  vos,  535,  987, 
etc.,  ez  vos,  3967,  même 
sens  ;  es  les  vos  arrivez, 
1980,  les  voici  débarqués  {Cf. 
estes). 

esbais,  3o85,  (?). 

esbaudir,  85 1,  réjouir. 

escapin,  35o5,  soulier  léger. 

eschac,  4398,  cas  suj.  sing. 
eschas,    2545,    butin,   prise. 

eschaillon,  4o3i,  échelon. 

eschaquier,  1069,  échiquier. 

escharni,  2746,  raillé,  tourné 
en  dérision;  11 36.  3g-2i,joué, 
trompé. 

escharpe,  1077,  1949,  3 162. 
4201,    sacoche    de     pèlerin. 

1.  eschas,  1777,  2358,  jeu 
d'échec. 

2.  eschas,  voir  eschac. 
escheri,  peu  nombreux  :  a  mes- 

nie   — e,    2210,  2220,2642; 

absolt,   a  — ,  343,    sans   être 

accompagné,  seul. 
escheveler   :  —  sa  crine,  i3o5, 

s'arracher  les  cheveux. 
eschevi,     3o34,    4609,     svelte, 

élégant. 
eschinée,   4 181,    4372,    échine, 

colonne  vertébrale. 
eschiver,  3957,  préserver. 
eschois  [cas    rég.  plur.),  i38o, 

esquif,  bateau. 
escient,    esciant  :  sachez  a   — , 

2604,  "i^bi,  s ache^  bien;  m'\en 

— ,  2391,  par  le  mien — ,   657. 


Î02 


DOON    DE    LA    ROCHE 


SSy,  etc.,  par  ma  foi  ;  tôt  a 
vostre  — ,  2  1 32,  vous  le  save^ 
très  bien. 

escïentros  [ms.  assiantrous,  es- 
sciantiouz],  12^^,  savant. 

escillier,  voir   essilier. 

esclairier,  voir  esclarier. 

esclarcier,    3487,  devenir  clair. 

esclarier,  esclairier  :  quant 
l'aube  est  esclarie,  22 13, 
quand  le  jour  est  venu  ;  li 
jors  est  esclairiez,  2757, 
esclarlez,  35i3,  le  jour  a  lui. 

tsc\2iX.ev  [v.trans.),  3oo6,  briser, 
faire  éclater. 

esclavain,  i834  [corr.  clavaiii 
et  voir  ce  mot] . 

escJavine,  2563,  vêtement  de 
pèlerin. 

*  esclice,  voir  lice. 

escondire  (s'),  421,  se  justifier. 

escondit,  jbi f-jyj,  justification 
d'un  accusé  par  une  preuve 
légale,  ordalie  ou  duel  judi- 
ciaire {cf.  le  Tristan  de  Bé- 
roul);  rendre  — ,  33i  i,  faire 
amende  honorable. 

escoter,   3304,  donner  un   écot. 

escrier,  1079,  1^06,  etc.,  crier; 
{suivi  du  cas  rég.)  1162, 
3744,  etc.,  interpeller;  — 
merci ,  3807  ,  demander 
grâce. 

escriner  (s'),  i3o5  {var.),  s'arra- 
cher les  cheveux. 

escu,  4069,  écH,  monnaie. 

esertota  —,  3397,  satisfait, 
content. 

esforce,    voir  etîorce. 

esfroiz  {cas  suj.  sing.),  353, 
mouvement,    tumulte. 

esgarder,  687,  735,  etc.,  regar- 
der, observer  ;  —  por,  3449, 
considérer  comme. 


esgaré,  1295,  2593,  2889, 
éperdu,  fou. 

esmaier  (s'),  1488,  2029,  etc., 
se  troubler,  s'effrayer. 

esmarri,  4295,  attristé,  troublé. 

esmaus  {cas  rég.  plur.),  201 3, 
émaux . 

estner,  4344,  estimer,  dénom- 
brer. 

esmeré,  1619,  1664,  1827,  2081, 
pur,  affiné  (épithète  d'or). 

esmovoir  {inf.  pris  substantivt), 
2971,  mise  en  marche  [d'une 
armée] . 

espandre,  442,  371,  etc.,  répan- 
dre. 

esperdre  (s'),  i328,  devenir 
éperdu . 

esperonnée,  4168,  4462,  coup 
d'éperon. 

esperonner  {inf.  pris  substan- 
tivt), 2bo3,  action  d'éperonner. 

espices,    3700,    parfums. 

espie,  3290,3304,  3920,  espion. 

espié,  1045,  1701,  1837,  2288, 
2294, 2432,  2456, 2467,  3785, 
385 1,  4387,    épieu,    lance. 

esploitier  (v.  intr.),  3o37,3iio, 
3492,  agir,  mettre  ses  idéesà 
exécution  ;  091,  3  S  1 7,  faire 
vite,  se   hâter. 

espoenter  (s'),  25i8,  3i2o, 
prendre  peur. 

esponde,  1616,  2711,  rebord  du 
lit. 

esposer  {v.  trans.),  692,  4533, 
unir  par  un  mariage  ;  {inf.  pris 
substantivt),    4536,   mariage 

espringuer,  4564,  danser. 

espris,  p.  pa.  «i'esprendre,  23o, 
allume;  de  sens  —  e,  56o, 
aimant  la  sagesse. 

essaiant,  1180,  brave,  coura- 
geux. 


GLOSSAIRE 


203 


essaier,  35o2,  3522,  mettre  à 
répreuve. 

essaucier,  5,  41 3o,  élever. 

essauz  {cas.  rég.  plur.),  1867, 
assauts. 

esciantiouz,  vozrescïentros. 

escillier,  voir  essillier. 

essil,  222,  2943,  exil. 

essillier,  escillier,  3 182,  3823, 
exiler;  3i5o,  3237,  3475, 
etc.,  ruiner,  dévaster. 

establer,  1696,  mettre  à  l'écurie. 

estache,  2157,  poteau  [pris  au 
figuré),  soutien. 

estain,  3727,  laine  peignée. 

estaint,  voir  estanc. 

estamine,  438,  447,  vêtement 
de  dessous  porté  par  les 
clercs. 

'estanc  [ms.  ataint,  estaint], 
1626,    2o38,  fatigué. 

estant:  s'est  levez  en  — ,  io65, 
s'est  mis  debout  ;  saillir  en  — , 
2 1 36,  se  mettre  sur  pied  en 
sursaut. 

estendre  (s'),  3453,  se  jeter  par 
terre  de  tout  son  long. 

ester,  3^  p.  sing.  ind.  prés,  esta, 
1009,  3064;  3*  p.  plur.  fut. 
esteront  [employé  comme  fut. 
d'estre),  39x3;  3^  p.  sing.  pf. 
estut,  1 186,  1 195,  1342  ;  734, 
1792,  2837-8,  rester  debout; 
1 186,  1 195,  demeurer,  rester; 
se  longes  i  esta,  1009,5'//  reste 
ici  longtemps;  s' — ,  1342, 
même  sens;  laissier — .  618, 
667,  712,  etc.,  laisser  tran- 
quille \com  vos  esta?  3064, 
comment  alle:{-vous  ? 

eues  vos,  202,371,3353,  voici 
{voir  es). 

estoner,  25x8,    ébranler. 

estor,  i832,  1841,  etc.,   estorz 


{cassuj.  sing.),  285o,  combat, 
mêlée. 

estorchier,  4041  (?). 

estordre(v.  intr.),  2945,  4396, 
s'échapper,  prendre  le  large  ; 
s'  — ,  365o,    même  sens. 

estormir,  2282,  réveiller  en 
donnant  l'alarme. 

estorz,  voir  estor. 

estour,  voir  osterin. 

estout,  341 X,  sot,   arrogant. 

estovoir,  3^  p.  sing.  ind.  prés. 
estuet,  2762  ;  3^  p.  sing.  fut. 
estovra,  4240,  J«  p.  s.  pf.  estut, 
l'i^i,  falloir,  être  nécessaire. 

est[r]ain,  3403,/éw.  estrange, 
1294,  3683,  étranger. 

estre  :  ert  que  842  {cf.,  pour 
cet  emploi,  Victor  Mortet, 
Langue  de Vitruve,/>.  10);  s'il 
est  qui,  843,  s'il  y  aqqnqui; 
comment  qu"il  est  mes  homes, 
4583,  en  quel  état  sont  mes 
hommes  ;  {inf.  pris  substan- 
tivt),  1196,  manière  d'être. 

estrée,  3666,  route. 

*estrif  [ms.  estre],  3323,  que- 
relle. 

estroit  {adv.),  4.0^5,  étroitement. 

estros,  estrous  :  a — ,  i85,  225 1, 
2401,  certainement. 

estuet,  estut,  voir  estovoir  . 

esvertuer  (s'),  2  x  jô,  faire  preuve 
de  sa  force. 

euz,  3924,  yeux. 

eve,  4x3,  681,  aive,  391g,  e.2w  ; 
—  de!  cuer,  3578,  — des  ieus, 
2974,    larmes. 

ez,  voir  es. 

fable,  3572,  conte  récité  par  un 
jongleur;  36x2,  bruit,  tu- 
multe {'i). 

façon,  i3i,  2249,  visage. 


204 


DOON    DE    LA    ROCHE 


faé,  1678,  doué  par  les  fées, 
heureux. 

faillir,  3^  p.  sing.  impf.  subj. 
fausist,  i43o;f.  pa.  taliz  [cas 
sujet  sing.),  1088,  failli,  1891, 
etc.,  763,  1088,  manquer  à, 
abandonner  dans  la  détresse; 
4155,  être  infidèle;  ,1430, 
4569,  4628,  finir,  se  ter- 
miner ;  li  membre  li  faillent, 
36o2.  les  membres  lui  man- 
quent, cèdent  sous  elle  ;  est 
vos  failliz  avoirs?  \'j2o,ave^- 
vous  perdu  votre  fortune  <; 
au  meillor  ai  failli,  4210,  le 
meilleur  me  manque  aujour- 
d'hui; ta  proesce  est  faillie, 
206(5,  ta  vaillance  a  fait  fail- 
lite; bien  i  poez  — ,  4225, 
vous  sere:^  obligé  de  vous  en 
passer;  failli  avez  au  mien 
[ostel],  3253,  l'ous  n'avej^ plus 
droit  à  mon  hospitalité. 

faire,  fere  :  me  faites  comme, 
1238,  vous  me  traite^  comme  ; 
comment  le  fait  ?  33o,  com- 
ment se  porte-t-il  ?  Tomiles 
le  fait  batre  garçons  et  pau- 
toniers,  926,  Tomile  fait  en 
sorte  que  g.  et  p.  le  battent  ;  — 
les  juïses,  4o5,  se  soumettre  à 
un  jugement  de  Dieu  ;  —  ses 
noces,  632,  célébrer  son  ma- 
riage ;  —  ses  talenz,  2725, 
satisfaire  ses  désirs  amou- 
reux;—  que  fous,  201,  3617, 
etc., — que  proz,  348,  —  que 
saiges,  3i32,  agir  en  ;  molt 
ou  tant  faire  a,  33,  109, 
3i3,  etc.,  mériter  d'être, 
être  à. 
fais,  2.32,  charge. 
faitement,  707,  de  telle  ma- 
nière. 


faldestuel,  r545,  faudestuel  , 
i3i5,  1896,  fauteuil. 

faliz,  voir  faillir. 

*fanon  [ms.  fenon"|,  2948,  mani- 
pule. 

fantosme  :  torner  a  —  ,  43o, 
faire  croire  que  c'est  un 
songe. 

faudestuel,    voir  faldestuel. 

fausist,  voir  faillir. 

fautré  :  fautrées  mules,  373, 
mules  ayant  une  sambue  de 
feutre. 

feauté,  4370,  foi  et  hommage 

f[e]el,  2669,  fidèle. 

fel,  félon,  707,  87g,  etc.,  3328, 
méchant,  coléreux;  [subst.), 
2817-8,  3040,  etc..  gredin, 
criminel. 

félonie,  688,  acte  criminel;  1472, 
chose  mauvaise,  tromperie  ; 
121 3,  traîtrise,  fait  d'être 
traître. 

fendre  [v.  intr.),  149,  se  fendre; 
—  d'ire,  277,  2794,  crever  de 
colère  [voir  fondre). 

fenon,  voir  fanon. 

fere,  voir  faire. 

i'crir,  frapper  :  prés.  ind.  /"  p. 
sing.  fier,  139,  io32,  etc., 
J?<=  p.  sing.  fiert,  285,  etc.; 
impér.  j2«  p.  plur.  ferez,  1 1 19, 
etc.;pf.  .?"  p.  sing.  feri,  1076, 
etc.,  ferit,  1434,  etc.;  subj. 
prés.  /"■*  p.  sing.  fiere,  1098; 
impf.  3^  p.  sing..  ferist, 
4i5o;  p.  pa.  féru,  1039,  etc.; 
4034,  fixer  à  coups  de  mar- 
teau. 
fermer,  1576,  1S22,  fixer,  atta- 
cher. 
fermeté,  38,  83o,  lieu  fortifié. 
ferrant,  1 1 59,  gris  (épithète  de 
cheval). 


GLOSSAIRE 


iob 


ferré,  1577,  194g,  muni  d'une 
pointe  enfer. 

ferrée,  646  [faute  du  ms.  pour 
errée  ;  voir  ce  mot]. 

féru,  voir  fenr. 

fcste  :  tenir  sa  — ,  voir  tenir. 

û,fém.  tie  2689,  assure;  de  — , 
1467.  i55i,  assurément,  avec 
certitude. 

tiance,  90 1 ,  certitude,  confiance  ; 
4273,  serment, parole  donnée. 

tiancer,  1 154.  donner  sa  parole; 
3 1 86,  promettre  foi  (sermen  t 
féodal) . 

fié,  5iH,i4go,  etc.,  fief,  domaine; 
servir  de  — ,  41  lô,  servir 
comme   vassal. 

lier,  176,  iob(>,  etc.,  grand,  ter- 
rible ;  au  vis  — ,  1498,  2771, 
au  beau  visage;  1680,  beau 
[épithète  de  cheval). 

fier  :  p.  prés,  liant  a,  11S8, 
ayant  confiance  en . 

fier,  riere,  fiert,  du  v.  ferir  ;  voir 
ce  mot. 

I.  fin  (adj.)  :  —  e  veriiez.  191 5, 
vérité  pure. 

2. fin  [subst.)  :  prendre  — ,  2270, 
2278,  etc., faire  halte;  a  quel 
—  que  ce  soit,  920,  quelle  que 
soit  l'issue. 

riiicr  {v.trans.,,  ^bb,  2b2i,  etc., 
finir,  terminer;  [v.  intr),  1 2  1 6, 
T239,  s'arrêter,    faire   halte. 

flaide,  3376,  tourelle  (?) 

flecié,   3 1 6 1 ,  fléchi,  ployé. 

floquant  :  chapes  floquans, 
3 1 6 1 ,  chapes  à  floches  (?; . 

riori,  2398,  peint  à  fleurs  [épi- 
thète de  targe;  ;  3734,  grison- 
nant {épithète  de  barbe). 

dote  :  a  grant  — .  23 1 5,  en  grand 
nombre. 

foi,  2747,4235,  parole  donnée; 


a  la  moie  — ,  1402,  1637,  etc., 
à  la  moie  foie  [lire  foi],  1867, 
2243,  par  ma  foi  :  en  la  moie 
—  ,2373,  '52-j8,  même  sens;  par 
— ,  823,  ii53,  etc.,  même 
sens;  par  la  —  que  je  vous  doi, 
564,  607,  e/c,  par  la  parole 
que  je  vous  ai  donnée  ;  por- 
ter — .  940,  937,  tenir  parole. 

toie,  voir  foiée. 

foiee,  1286  [ms.  foiez,  foix, 
au  plur.],  1890  [ms.  foix,  au 
plur.\.  toïe,  4429  [ms.  fois], 
fois. 

foilli,  127Ô,  couvert  de  feuil- 
lage. 

foillier,  1412,  1414,  3i75,  se 
couvrir  de  feuilles. 

foindre  (se)  :  de  trambler  te 
foing  [corr.  foins  ou  fains], 
3395,  tu  redoutes  de  trem- 
bler de  froid. 

foing,  voir  foindre. 

fol  :  fém.  foie,  382,  déver- 
gondée. 

folagc,  4320,  folie. 

folie,  3747,  3762,  action  dérai- 
sonnable; 3237,  propos  incon- 
sidéré: de  —  3414,  3421,  par 
— ,  3i66,  3728,  follement  ; 
'  restera  [ms.  recevra]  par — , 
1 2 1  g,  fera  une  folie  en  restant 
ici  [voir  la  note  aux  var.). 

fondé  (à  l'asson.),  ibjg,  fondu. 

fondre  :  —  d'ire,  i36,  990, 
crever  de  colère  {cf.  fendre 
d'ire,  277)  ;  —  de  duel,  980, 
mourir  de  chagrin. 

forbi,  2285,  44o3,  4035  {épi- 
thète despée),  2288  [épithète 
rf'espié),  aiguisé. 

force,  1082,  1092,  I 107,  2335, 
troupe  de  combattants  ;  a  — , 
3i22,  4071,    a  —  et  poestô  ; 


2o6 


DOON   DE   LA   ROCHE 


2377,   par   — ,     2863,    392g, 
de  force. 

forche,  1991,  partie  de  Varma- 
ture  d'une  tente  ;  forches 
(plur.),  3826,  3870,  4o3o, 
gibet . 

forjurer,  467,  2694,  abandonner 
(primitivement  ,  jurer  que 
de'sormais  on  n^atira  plus  rien 
de  commun  avec  qqn). 

forment,  169,  499,  etc.,  forte- 
ment, beaucoup. 

fornir,  3927,  garnir  [une  machi- 
ne de  guerre]  ;  bataille  for- 
nie,    2'i^o,  forte  bataille. 

fors  [adv.),  849,  i855,  etc, 
dehors  ;  [prép.],  44,  io83, 
excepté; —  de,  1737,  2943, 
etc.,  hors  de. 

forsener,  3^  p.  sing.  prés.  ind. 
forsane  (à  Vasson.),  2498, 
2  5oi,  devenir  fou. 

fosse,  23 18,  cachot. 

fraindre,  briser  :  p.  pa.  frait, 
i833  ;  fraint,  i846[w^.  frains], 
23o2,  2492  [impr.  frait],  4174, 
etc. 

fra[i]sé,  1994,   brodé. 

fraisnin,  voir  fresnin. 

franc,  182,  3 10,  etc. , noble,  géné- 
reux ;  au  cors  — ,  241,  au 
beau  corps. 

fresnin,  2353,  3oo4,  fraisnin, 
3767,  en  bois  de  frêne  [épi- 
thète  de  lance,  hanste). 

frestel,  1991,  fleuron  qui  ter- 
mine extérieurement  le  piquet 
central  d'une  tente;  cj.  Gode- 
froy,  V»  fruitel. 

froer,  1695,  3855,  4174,  bri- 
ser, rompre. 

froissier,  3oo6,  4372,  endom- 
mager, blesser;  3092,  briser 
[une  porte]. 


froncé,  2568,   plisse 

fuant,  1702,  '5368,  fuyant. 

fuere,  1668,  fourrage. 

fuie,  i852,  3014,  etc.,  fuite. 

fuitis  {cas  suj.  sing.),  1471,  fu- 
gitif. 

fust,  io32,  bdtojt  ;  lobi,  bois  de 
lance. 

gaaignier,  gaainnier,  3i86, 
3193,  faire  de  la  culture,  la- 
bourer . 

gab,  cas  rég.  plur.  gas,  ion, 
plaisanterie. 

gaber,  695,  35/3,  se  moquer, 
plaisanter. 

gaignarz  {cas.  suj.  sing.),  963, 
1004,  violent. 

gaignon,  voir  waignon. 

gainchir  (se),  voir  guenchir. 

gaite,  3576,  sentinelle. 

gaitier,  3919,  surveiller;  se  — , 
3o8o,  325y,  se  garder, prendre 
garde. 

galoné,  2010,  orné  d'un  fil  d'or 
[tresse  de  cheveux] . 

gante,  2104,  oie  sauvage. 

garçon,  160,  i63,  £?/c.,garchon, 
194,  valet,  domestique  de  bas 
étage . 

gardain,  1429,  gardien,  défen- 
seur d'une  ville. 

garde  :  avoir  —  de.  11 24,  se 
soucier  de,  avoir  peur  de  ;  se 
doner  — ,  2567,  s'aperce- 
voir. 

garder  :  cui  Deus  gardoit  de 
perde,  1 307,  que  Dieu  protège 
de  la  mort  ;  —  la  cort,  67, 
rester  à  la  cour  ;  {suivi  de  ne 
et  du  subj.)  1298,  i56i.  etc. 
prendre  garde  de;  791,  141, 
etc.,  regarder,  voir;  ne  — 
Tore,  2402,  s'attendre   à  tout 


GLOSSAIRE 


207 


moment;  2258.  considérer 
comme  valable;  {réjl .):  e\  ne  se 
garde  d"ome,  582,  g  17,  etc., 
elle  laisse  approcher  décile 
tous  les  hommes. 

garir  (v.  trans.),  440,  45o,  etc., 
protéger,  préserver;  145 1, 
etc.,  guérir  ;  {v.  intr.),  218, 
4197,  se  mettre  à  Vabri,  se 
sauver;  se — ,  i365,  3212,  se 
défendre. 

garnemenz,  guarnemcnz  [cas 
rég.plur.),  26, 1 74,275 3 .  2797, 
vêtements;  234,  247,  vête- 
ments de  femme;  armes  et — , 

.  26i5,prenentlor— ,io84,guar- 
nemenz  vesiir,  4390,  armure. 

garni,  guarni:  du  murtre  bien 
— ,  202,  bien  en  sûreté  contre 
l'accusation  de  meurtre  ;  2643, 
4494,  4587,  riche, plantureux 
(épithète  de  France)  ;  2696 
[épithète  de  cliannbre). 

garnir,  2271,  2920,  2923,  mettre 
en  état  de  défense  ;  3952, mu- 
nir  [de  provisions], 

gas,  voir  gab. 

gaste,  3237,  3365,  3579,  dé- 
vasté, ruiné. 

gaster,  876,  1137,  2177,  dé- 
vaster. 

gehine  :  mètre  a  — .  201,  faire 
avouer  [par  la  torture). 

gehir,  2o5,  497,  3645,  3944, 
avouer . 

gemé,  ibi5,  orné  de  gemmes 
[épithète deh.tAV.me:)  ;  c/.  jame. 

gentil,  17,  32,  etc.,  noble. 

gésir,  être  couché,  dormir  : 
3*  p.  sing.  pf.  ind.  jut,  3  20, 
2084,  etc.;  p.  pa.  geû,  878. 

geste,  795,  4628,  chronique 
•  [source  originale  de  la  chan- 
son); 2617,  race,  famille. 


geter,  gieter,  1429,  1634,  2553, 
etc.,  chasser  [d'un  pays]  ;  — 
un  sospir,  208,  755,  4208, 
pousser  un  soupir  ;  2598, 
2734,  2828,  faire  sortir  [de 
prison]  ;  —  fors,  i855,  mettre 
[la  tête]  hors  de  la  fenêtre. 

geû,  voir  gésir. 

gieter,  voir  geter. 

gironé,  ^iii  a  des  bandes  cou- 
pées en  biais  :  [en  parlant 
d'un  «  bliaut  »),  072,  1944, 
2oo3  ;  [en  parlant  de  Vétoffe 
d'une  tente),   1993. 

glacier  (se),  2711,  se  glis- 
ser . 

gloton,  1290,  glouton,  1234, 
cassuj.  «iKg-.  glous,  3767, gloz 
166,  etc..  individu  méprisable. 

goule,  3680,4034,  gorge;  goles 
[plur.],  800,  col  de  fourrure 
d'un  vêtement. 

gracier,  323o,  remercier. 

gratiner,  705,  gratter,  labourer 
[la  terre]  avec  les  ongles. 

graignor,  3465,  greignor.  255, 
838,  2363,  gregnor,  1424, 
plus  grand. 

graile,  18 19,    38oi,    trompette. 

graïllier,  4042,  griller. 

grain,  io65,  1126,  1604,  1674, 
triste,  fâché. 

gré  :  de  — ,  77,  i587,  etc., 
de  bon  gré;  venir  a  —,  voir 
venir;  servira — , 3o3i,ser»ir 
de  manière  à  plaire. 

gréer,  2752,  accorder. 

gregnor,  greignor,  voir  grai- 
gnor. 

grenon,  69,  2  i  37,  moustache. 

greslei,  3o34,  svelte. 

grever,  3"  p.  sing.  prés.  subj. 
griet,  i525,  028,  grever, 
affliger. 


208 


DooN  t)E  LA  Roche 


grief,  2447,  4598,  difficile,  labo- 
rieux. 

griet,  voir  grever. 

griois  :  feu  —,  4064,  feu  gré- 
geois. 

gris  (subst.),  io5,  633,  3o56, 
3437,  petit-gris,  fourrure  ; 
[adj.),  779,  de  petit-gris. 

guarn-,  voir  garn-. 

guenchir,  960,  détourner:  — 
les  règnes,  3oi4,  tourner 
bride;  {réjl .),  se  gainchir, 
1 178,  se  détourner. 

'  guerdon,  voir  guenedon. 

gucrpir,  2347,  2644,  etc.,  aban- 
donner. 

guerredon,  3i34,  3383,  *guer- 
don,  2818,  g[ui]ardun,  332b, 
récompense. 

gui[ar]don,  voir  guerredon. 

guier,  1868,  diriger,  conduire 
[une  affaire]. 

guigue,  4559,  instrument  de 
musique. 

guimple,  2974,  guimpe  [de 
femme];  cf.  guiute. 

guinte,  3  1 64  [ms.  et  impr.  guim- 
ple], 3i6o,  3i63  [ms.  guinte, 
guite],  capuchon,  vêtement  de 
pèlerin  [ou  turban?). 

guise  :  a  —  de,  3839,  ^  '^  '^^" 
nière  de. 

gurpir,  1238,  quitter. 

habergier,  voir  herbergier. 
haï  !  439,  448,  etc.,  exclamation 

de  douleur  [cf.  hé  !). 
haichier,  voir  haschiere 
haïr,  2^  p.  plur.  prés.  ind.  haez, 

423;  .?«/?.  sing.  impj.  haioit, 

2365,  2369;  3"  p.  sing.  prés. 

subj.  haice,  2267. 
haitié,    332,    en   bonne    santé, 

dispos. 


haitier  (se),  99,  se  réjouir, 
s'ébattre. 

hanste,  i833,  1844,^(0.,  hante, 
1849,  2492,  etc.,  bois  de  la 
lance. 

haon,  voir  chaon. 

harbergier,  voir  herbergier. 

hardement,  182,  io56,  etc., 
hardiesse,  audace. 

harnois,  1377,  équipage,  ba- 
gage. 

hart,  4000,  corde  de  gibet. 

*haschie,  852  [ms.  adventure], 
4o53  [ms.  haichiej,  souf- 
france, tourment  [cf.  has- 
chiere). 

*haschiere  [ms.  haichier],  4048, 
même  sens  que*  haschie. 

haste,  3334,  viande  rôtie. 

haster,  loio,  attaquer. 

haubergage,  3604,  hospitalité 
[cf.  herbergier). 

haubert,  1847,  4383,  aubert, 
2297,  2486,  ausberc,  3ooo, 
cotte  de  maille. 

haucer  :  —  sa  parole,  434,  éle- 
ver la  voix. 

[h]autain,  3419,  élevé. 

hautement,  263,  882,  997,  à 
voix  haute. 

hé:  coillir  en  — ,  ^%Ç),  prendre 
en  haine. 

hé!  38o,  588,  interjection  ex- 
primant la  peine  [cf.  haï!). 

heaume,  4385,  hiaume,  i8i5, 
etc.,  iaume,  25 16,  3004,  cas- 
que. 

*henepier  [ms.  henapies],  38o3, 
casque  (?). 

herbergier,  i3o9,  etc.,  haber- 
gier, 2i63,  e(c.,  harbergier, 
3406,  haubergier,  323i,  hau- 
berjer,  3297,  donner  V hospi- 
talité à  qqn  ;  1662,  2i63,efc., 


GLOSSAIRE 


209 


—  avec  qqn,  3222,  323  i,  etc., 
loger  che:(  qqn;  i3og,  loger, 
prendre  logis;  estre  herber- 
gié,  2427,  être  campé;  s'  — , 
352  1,  prendre  gîte. 

herboi,  cas  rég.  plur.  herboiz, 
379,   espace  couvert  d'herbe. 

hérité  {subst.  fe'm.),  2062,  22o3, 
35 II,  domaine,  bien. 

hermin,  hermine,  ermin,  42  14, 
fourrure  d'hermine,  io5,  270, 
1671, 1622, 1943, 2002, 2253, 
2261,  manteau  d'hermine  ; 
(adj.),  26,  800,  2137,  4015,  en 
hermine. 

hiaume,  vozV  heaume. 

honir,   225,  264,  etc.,    honnir. 

honor,  2252,  2590,  etc.,  anor, 
2695,  4016,  enor,  8,  974,  etc., 
onor,  5o3,  5 11,  terre,  ^ef; 
2619,  2695,  empire. 

honoré  :  franc  duc  — ,  161 1, 
duchesse  —  e,  2568,  franche 
dame  —  e,  2588,  gent  —  e, 
3674,  mostier  — ,  i883,  don 
— ,  3i3,  au  gent  cors  — , 
43,  1965. 

hontage,  hontaige,  2237,  3148, 
etc.,  honte. 

hu  :  a  —  et  a  cri,  1 1 10,  avec 
des  huées  et  des  cris. 

huchier,  5oi,  509,  2190,  crier. 

huer,  444,  crier. 

hui,  86,  829,  etc.,  aujourd'hui. 

huimain,  i35i,  ce  matin. 

huimais,  *768,  1124,  1904,  dé- 
sormais. 

huis,  265,  etc.,  porte. 

huisset,   i2i5,  petite  porte. 

hurter,  1341,  pousser  violem- 
ment. 

iaume,  voir  heaume, 
ieve,  4024,  jument. 


iluec,  5 16,  illuec,  1007,  3048, 
3090,  illuc,  3 186,  là. 

irascu,  1016,  1048,  1340,  2245, 
en  colère,  furieux. 

ire,  i36,  277,  etc.,  colère  ;  estre 
par  — ,  41  33,  être  en  colère; 
pleine  de  grant  — ,  837,  très 
affligée. 

iré,  295,  etc.,  en  colère;  499, 
597,  881,  1674,  1917,  2023, 
2440,  affligé,  peiné. 

is  {cas  rég.  plur.),  2280,  ;/. 

isncl,  cas  rég.  plur.  isniau.s, 
3703,  4391,  rapide. 

isnelement;  164,  178,  etc.,  vite, 
rapidement. 

isopé,  2io5,  ysopé,  3285,  3335, 
3430,  vin  parfumé  à  Vhy- 
sope;  cf.  Poème  moral,  dans 
Zeitschrift  f.  roman.  Phil., 
XXXII,  53,  V.  7  :  Or  viut  le 
vin  lot  simple,  or  le  viut 
isopé. 

issir  :  ind.  prés,  i^ p.  sing.  is, 
3908,  3^ p.  sing.  ist,  451,  etc., 
3°  p.  plur.  issent,  2289,  etc.; 
impf.  3'  p.  plur.  issoient, 
2810  ;  parf.  3'  p.  sing.  issi, 
279,  etc.,  issit,  3621,  3°  p. 
plur.  issirent,  2g8j;  fut.  3' 
p.  sing.  issera,  871;  subj. 
prés.  3'  p.  sing.  isse,  266, 
2«  p.  plur.  issiez,  1784,  3'  p. 
plur.  issent,  1757;  s'en  — , 
2611,  etc.,  s'en  aller;  2289, 
etc.,  sortir;  {inf.  pris  subs- 
tantivt)  à  r  —  de,  3854,  ^" 
sortir  de. 

ja,  398,  711,  etc.,  déjà;  1247, 
i3i5,  jamais  [affirm.];  explé- 
tif, 545,  58i,  etc.  ;  —  ne,  818, 
905,  efc; —  ...  ne,  425,  465, 
etc.;  ne —  ...  mais,  1280,  ne 

14 


210 


DOON    DE   LA   ROCHE 


—  ...,  893,  i3ii,  etc.;  mais 

—  ne,   597,   616,  jamais  ne; 

—  ne...  ne,  1 2^5  jamais  ni... 
ni;  ne...  —  mais,  555,  plus 
jamais. 

jamais  :  —  jour,  Sôyo,  jamais. 

jame,  4291,  pierre  précieuse 
{cf.  gemé). 

jaseran,    jaserant,   i834,  23o3 
2478,  fait  de  mailles  de  fer 
(épithète  de  haubert). 

jeu,  voir  partir,  tenir. 

joians,  3462,  joianz,  544,  996 
(cas  suj.  sing.),  joyeux. 

joïr,  2736,  célébrer. 

jor,  jour:  le  —,  1019,  2784, 
etc.,  ce  jour-là  ;  a  —  que  soie 
vis,  480,  aucun  jour  de  ma  vie. 

jornée,  648,  i3i9,  223o,  4456, 
voyage . 

joste  iprép.),  2777,  4531,  à  côté 
de. 

joster,  2996,  3855,  jouter. 

jostisier,  2699,  27?!,  3207, 
3756,  administrer,  gouver- 
ner. 

jour,  voir  jor. 

jouvente,  voir  jovente. 

jovene,  2611,  jeune. 

jovente,  jouvente,  1418,  3686, 
"i^T],  jeunesse  ;hQ\e — ,  i3ii, 
1389,  ^^97i  '4o5>  2%ib,beaii 
garçon. 

jugement,  looi,  1062,  témoi- 
gnage Ci). 

jugier,  4070,  confisquer  par  ju- 
gement (?);  —  a,  3753,  3876, 
condamner  à. 

jug[i]ere  {cas  suj.  sing.),  2154, 
j"ge. 

jugleor  {cas  rég.  sing.),  4092, 
jugleor  {cas  suj.  plur.)  104, 
729,  828,  3572,  jugleors  {cas 
rég.   plur.),  24,    juglers  {cas 


suj.  sing.),  1539,  1646,  jugier 
{cas  suj.  plur.),  2107,  jon- 
gleur. 

juïse  {masc),  25o,  267,  272,juïz, 
748,  759  {à  Vasson.),  juge- 
ment de  Dieu  ;  taire  — ,  4o5, 
2258,  porter  — ,  412,  4i5, 
680,  porter  .j.  juiz,  748,  sa- 
tisfaireau  jugement  de  Dieu  ; 
ofrir  — ,  429,  offrir  de  se 
soumettre  au  jugement  de 
Dieu;  livrera  juïz,  753,  sou- 
mettre au  jugement  de  Dieu  ; 
4013,  jugement. 

jurer  :  jura  le  siège  de  ci  a  .vij. 
années,  3841,  jura  que  le 
siège  durerait  au  besoin  sept 
ans;  jura  Salmadrine,  2599, 
2688,  2904,  jura  fidélité  à 
Salmadrine. 

jus  {adv.),  5o8,  io35,  1849,  en 
bas  {avec  mouv.);  mètre — , 
3963,  démonter,  déposer. 

justice,  4044,  exécution  d'un 
arrêt  de  justice,  supplice. 

jut,  voir  gésir. 

laidement,  283,  965,  3275,  mé- 
chamment. 

laier  (?)  [cf.  laissier],  42 1 ,  2429, 
2437,  etc.,  laisser;  4374,  lâ- 
cher; 3418,  laisser,  négliger 
de  faire  une  chose  ;  ne  lairai 
que,  1268,  je  n^aurai  de  cesse 
que;  ne  laira  nés  ramaint, 
3418,  n'aura  de  cesse  qu'elle 
ne  les  ramène;  qui  que  chant 
ne  qui  lait,  y3o,  quelque  soit 
celui  qui  chante  ou  qui  s'abs- 
tienne de  chanter;  ou  jel  face 
ou  jel  lais,  2252,  que  je  le 
fasse  ou  que  je  m'en  abstienne. 

lais,  2232,  voir  laier. 

laissier,  667,  832,  etc., abandon- 


GLOSSAIRE'- 


211 


ner,   délaisser;  276b,   SaSg, 

quitter  {cf.  laier). 
lait,  ySo,  voir  laier. 
lanceïs  :  soiiers  — ,  3928,  ponts 

volants. 
lanier,  2453,   lâche,  couard. 
larmer,  3562,  4298,  pleurer. 
larriz,    324,   771,    1121,    236i, 

terre  en  friche. 
las,  58o,    588,    interjection    de 

douleur  ;  au  fém.  449,  466, 

757,   3604,   malheureuse   que 

je     suis;  la  lasse,    2652,   la 

malheureuse  qu'elle  est. 
lassus,  376,  1345,  etc.,  là-haut. 
latin  :  oïr  —  de,  42  1 5,  entendre 

parler  de. 
laz,    3195,    lacs   à  prendre   le 

gibier. 

1.  lé,  s.  m.,  voir  lez. 

2.  lé,  adj.,  fém.  lée,  4469, 
large. 

leans,  i838,  3673,  etc.,  leanz, 
1222,  2197,  leenz,  198,  là- 
dedans. 

leaument,  2905,  loyalement. 

lecherie,  3745,  impudence. 

lechiere,  175,  cas  rég.  lecheor, 
179,  individu  méprisable. 

leenz,  voir  leans. 

lent,  2607,  mou,   sans  force. 

lerres  {cas  suj.  sing.),  432,  629, 
2872,  misérable,  gredin. 

lés,  voir  lez. 

leu  :  par  mi  leu,  io52,  dans  le 
milieu. 

lever,  2  52,  soulever  ;  b,  promou- 
voir, aider  ;  en  fonz  — ,  939, 
et,  ellipt.,  — ,  955,  tenir  sur 
les  fonts  baptismaux  ;  3835, 
dresser,  construire  ;  161 3,  se 
lever;  est  levez,  2179,  est  en 
piez  levez  sus,  1021,  s'est  le- 
vé; CTopc  levée,  4176,   436g, 


croupe  élevée  {qualité  pour  un 
cheval;  voir  la  7tote). 

1.  lez  (s.  J.J.),  1848  [cf.  /'Errata], 
2004  [ms.  las],  côté. 

2.  lez  {prép.),  194,  36i,  etc.,  à 
côté  de;  1848,  2  366,  du  côté 
de,  vers. 

lice,  3oo8  [corr.  cscWce],  frange 
tailladée  [du  haubert] . 

lie  :  vins  séant  sor  — ,  4497, 
vins  vieux. 

1.  lié,  cas  rég.  tonique  d'ele 
{à  l'asson.),  i5i5. 

2.  lié  {cas  suj.  plur.)  32ii,  liez 
{cas  suj.  sing.),  544,  993,  996, 
3216,  lie  {fém.  sing.),  4083, 
4487,  joyeux. 

liège,  voir  lige. 

lïemenr,  416b,  joyeusement. 

liez,  voir  lié. 

lige,  liège  :  droit  seignor  lige, 
3261,  3298,  3449,  seigneur 
légitime  qui  a  reçu  le  serment 
d'allégeance  ;  home  liège, 
i5o8,  i535,  tenu  par  le  ser- 
ment d'allégeance. 

lignage,  7,  88,  92,  etc.,  linage, 
I  i3o,  lignée,  famille;  de  — , 
1494,  de  haute  naissance. 

lin  :  de  put  lin,  ii3o,  de  race 
mauvaise. 

linage,  voir  lignage. 

linçuel,  1618,  drap  de  lit. 

liois,  3725,  liais. 

lisant,  1273,  instruit,  lettré. 

1.  listé  {cas  suj.  plur.),  1616, 
listel. 

2.  U [s]té,  fém.  — e,  4178,  peint 
à  bandes  {épithète  de  targe). 

Hue,  3386,  lieue. 

livrer,  84.3,  délivrer,  donner. 

1.  loer,  2og6,  conseiller. 

2.  loer,  55,  104,  payer,  récom- 
penser. -      ^^ . 


212 


DOON    DE    LA  ROCHE 


logier  :  estre  logié,  2^35, camper. 

loiaument,    3i58   {mot  altéré). 

loier,  3252,  401 5,  récompense, 
salaire. 

loige,  3204,  niche  à  chien. 

long,  -zb'i^,  éloigné,  lointain. 

longement,  \i,6i,  etc.,  long- 
temps . 

longes,  1009,  longues,  41 32, 
longtemps. 

lors  : —  meïsme,  1080,  à  Vins- 
tant  même. 

losengerie,  126,  tromperie. 

losengier,  ii5,  "iSi^,  menteur, 
intrigant. 

madré, èois  veiné:  hanap  de  —, 
3430. 

maginois,  riche,  somptueux  : 
palais  — ,  622,  4422  [cf. 
G.  Paris,  Romania,  XIX, 
335,  n.  3). 

main,   13^,^11,  etc.,  matin. 

mainburnie,  1246,  protection, 
tutèle. 

maine,  344,  mainrai,4452,  voir 
mener. 

mains,  3412,  341 5,  3435  {à  Fas- 
son.),  voirmeins. 

maint,  voir  manoir. 

maint  et  communément,  3oig, 
4085,  4185,  beaucoup  d'hom- 
mes ensemble  {cf.  Bertoni, 
Rev.  des  lang.  rom.,  1908, 
p.  47g,  et  Zeitschr.  f.  roman. 
Phil.,  II,  88). 

maintenir,  584,  i332,  e/c,  pro- 
téger, aider;  —  une  charrue, 
3194,  conduire  une  charme', 
902,  entretenir  comme  con- 
cubine; 2852,  entretenir  [un 
cheval]  ;  43 1 5,  gouverner  ;  — 
sa  joie,  4196,  s'amuser;  — 
ses   noces,  764,   célébrer  ses 


noces;  se  —,  33o,  583,  4281, 
se  porter,  être  dans  un  état 
de  santé. 

maire  {cas  suj.  sing.),  3 186, 
3196,  etc.,  maior  (cas  rég.), 
3322,  officier  domanial. 

mairien,  marien,  3837,  3933, 
4o36,  grosse  pièce  de  bois, 
madrier. 

mais,  mes,  3432,  plus,  davan- 
tage ;  —  et  —,  3886,  de  plus 
en  plus;  202,  2914,  désor- 
mais ;  enuit  —,  3o35,  3046, 
323 1,  cette  nuit-même  ;  — 
huimain,  1 35 1,  aujourd'hui  ; 
tous  tens  — ,  4233,  toujours 
à  l'avenir  ;  ne...  — ,  460,  76g, 
etc.,  ne...  plus  ;  ne  —  que, 
3o2,  762,  etc.,  excepté;  — 
que,  243,  2412,  4082,  pourvu 
que. 

maisnie,  voir  mesnie. 

maistre  {ad].),  2o3j,  3200,  etc., 
principal. 

mal,  cas  suj.  sing.  maus,  790, 
fém.  maie,  912,  927,  etc., 
mauvais,  méchant  ;  {adv.)  — 
virent,  2401,  ils  virent  pour 
leur  malheur  {cf.    mar). 

malaventure,  2178,  2184,  mal- 
heur, mauvaise  aff'aire. 

maldire,  i653,  2g55,  3723,  etc., 
maudire. 

maie,  1579,430g,  malle,  coffre. 

nialeïr ,  iig3,  1212,  1264, 
38g7,  maudire. 

maleït,  758,  maleoit,  3o8  [ms. 
maldit],  644  [ms.  maleot], 
etc.,  maudit. 

malement,  2go,  loio,  etc., 
mal  ;  si  —  me  puis  ou  ligna- 
ge fier,  8g8,  je  puis  si  mal  {st 
peu)  me  Jîer  à  la  famille. 

maleoit,  voir  maleït. 


GLOSSAIRE 


2l3 


inalmetre(v.  trans.),i  1 15.2296, 
mettre  hors  d'usage,  briser  ; 
(v.  intr.),  1444,  tomber  ma- 
lade; mal  mis,  210,  hors  de 
soiil). 

maltagre,4027  [corr.  massacre], 
boucherie. 

maltalent,  11 75,  mautalent, 
2740,  3992,  colère. 

malvoillant  :  fu  si  ses  malvoil- 
lanz,  2 1 18,  il  lui  fut  tellement 
hostile. 

mameletes,   2j\4,  petits  seins. 

mamelle,  4384,  mamelon  de 
l'homme. 

manandies,  846,  richesses. 

mananz  {cas  suj.  sing.),  27, 
riche;  riches  — ,  172,  1090, 
homme  riche  et  opulent. 

mandement,  28o5,  2841,4458, 
corps  de  bâtiment. 

mange,  3027,  manche. 

mangier  (subst.),  728,  926,  efc, 
mengier,  1644,  1645,    repas. 

mangon,   3792,    monnaie  d'or. 

mangonel  ,  cas  rég.  plur. 
ma[n]goniaus.  3836,  machine 
à  lancer  des  pierres. 

manoir,  3'  p.  sing.  ind.  prés. 
maint,  3 186,  35 19,  4036,  de- 
meurer. 

manré,  3710,  voir  mener  et 
/'Errata. 

mar,  2662,  36i5,  4355,  4374, 
4381,  4395,  malheureusement, 
pour  son  malheur  : —  i  fust  la 
meslée,  2525,  l'issue  du  com- 
bat eût  été  malheureuse;  — 
lor  est  encontre, 255o,  ils  n'ont 
pas  eu  de  chance  ;  —  fut 
vostre  jovente,  SSy  y, votre  jeu- 
nesse ne  fut  pas  heureuse  ; 
tant  —  i  fustes,  383 1,  quel 
malheur   que    vous   y  aye^ 


été!;  {suivi  du  futur)  :  ja  — 
en  parlerez,  1592,  1728, 
inutile  d'en  parler  ;  ja  — 
en  doterez,  1662,  inutile  de 
rien  craindre  ;  —  i  qucrroit 
ester,  1792,  inutile  de  cher- 
cher à  s'y  tenir  debout  ;  ja 
por  la  ra[a]nçon  — i  queront 
ostage,  4333,  inutile  de  cher- 
cher des  otages  pour  la  ran- 
çon {les  prisonniers  auront 
été  massacrés)  ;  —  vos  es- 
maierez,  2029,  inutile  de  vous 
inquiéter  ;  ja  por  lor  dos  bien 
batre  —  iront  a  Soissons, 
33 1 3,  inutile  d'aller  à  Sois- 
sons  pour  avoir  le  dos  bien 
battu;  —  i  seront  trové,  1770, 
1 785,  ils  y  seront  trouvés  pour 
leur  malheur. 

marbrin,  voir  mauberin. 

marc,  cas  rég. plur.  mars,  3710, 
3793,  marc  {unité  de  poids); 
3949,  monnaie. 

marchis,   1447,  4200,  marquis. 

mari,  marri,  794,  en  colère; 
1 126,  1548,  peiné. 

marien,  voir  mairien. 

marine,  3726,  rivage  de  la  mer. 

marrement,  176,  douleur,  afflic- 
tion. 

marri,  voir  mari. 

marsis,  3933,  massif. 

martire  :  livrer  a  —,  458,  faire 
supplicier. 

*massacrê  [ms.  maltagre],  4027, 
boucherie. 

matir,  774,  mater,  abattre. 

maton,  3336,  lait  caillé. 

mauberin,  1624,  marbrin,  326, 
de  marbre. 

maubre,  i8g5,  3265,3556,3594, 
36oo,  3972,  42o3,  marbre. 

maus,  voir  mal. 


214 


DOON    DE    LA    ROCHE 


maufé,  3291,  diable. 

mautalent,  voir  maltalent. 

mauvaise  {adj .  pris  subs- 
tantivt),  410,  479,  737,  742, 
femme  qui  a  une  vie  déré- 
glée. 

mauvaistié,  81 3,  débauche. 

meine,  3924,    voir   mener. 

meins,  3444,  mains,  3412,3415, 
3435  [à  l'asson.),  moins. 

melle  {fém.),  2018,  merle. 

meller  a,  4003,  brouiller  [qqn] 
avec. 

membre  :  chiere  —  e,  4107, 
visage  intelligent. 

membrer  {v.  impers.),  2645, 
2771,  etc.,  souveyiir. 

mener,  3^  p.  sing.  ind.  prés. 
maine,  344,  83 1 ,  meine,  3924, 
moine,  1869,  3^  p.  plur. 
moinent,  i68o,/«f.  l'p.sing. 
mainrai,  4422,  2'  p.  plur. 
menrez,  i536,  i56o,  3710  [ms. 
manres]  (cf.  /'Errata);  —  joie, 
8o,i685,^fc.,  —  son  duel,  344, 
se  livrer  à  la  joie,  à  sa  dou- 
leur; ^gS,  malmenre,  maltrai- 
ter ;  —  parole,  644,  prononcer 
une  parole  ;  —  guigue  et  rote, 
4.jbg,  jouer  de  ces  instruments. 

mengier,  voir  mangier. 

menor,  978,  plus  petit,  plus 
jeune. 

mentir  sa  foi,  2747,  être  infi- 
dèle à  la  parole  donnée. 

m[e]olle,4362,  moelle  épinière. 

merchié  :  c'est  granz  —  z,  382, 
c'est  un  marché  avantageux. 

merci,  396,  747,  etc.,  grâce, 
pitié;  crier  — ,  3905,  deman- 
der grâce;  avoir  — ,  3892, 
4227,  avoir  pitié. 

mercier,  3719,  3961,  remercier. 

merir,    2684,  4212,  3'  p.  sing. 


subj.  prés,  mire,  3716,  payer 

[qq  ch.  à  qqn]. 
mérite  (/e'm.),  3o3o,  récompense. 
merveille,  mervoille,   195,  432, 

442,  etc.,  chose  surprenante  ; 

a   molt  grant  — ,  684,    il  est 

très  surprenant  ;  a  grant   — , 

233 j,  de  façon  surprenante; 

avoir   — ,   894,  être   surpris, 

émerveillé. 
merveillier,     mervoillier     (se), 

2364,     38 1 5,      3978,     4488, 

s'émerveiller,  s'étonner. 

1.  mes,  1262,  1810,  2446,  3i5o, 
voir  mais. 

2.  mes,  3268,  3569,  4550,  plats, 
mets. 

3.  mes,  1570,  1573,  etc.,  messa- 
ger. 

mesage,  voir  message, 
meschine,  444,  558,  etc.,  jeune 

fille. 
meschoisir,    796,    2708,  ne  pas 

reconnaître,  méconnaître. 
mescongnoistre,  p.^a.  mesque- 

neù,  1049,  méconnaître. 
mescreii,  2244,  sans  foi. 
mesestance,    3563,   3875,  cha- 
grin,peine. 
mesfere,    737,  2198,  faire   du 

tort  à. 
meslé  :  barbe  —  e,  4170,  grise. 
mesnie,    maisnie,    1620,    2594, 

etc.,  ensemble  des  serviteurs  ; 

2374,   3899,    etc.,    suite    [de 

chevaliers];  3846,  4172,  etc., 

troupe,  suitearmée. 
mesprendre    (y.    intr.),     4239, 

4249,   commettre   une  faute; 

se  — ,  824,  même  sens. 
*mespresure,  2-j5i,  faute,  acte 

qui  prête  au  blâme. 
mesprison,      4o33,      injustice, 

mauvais  traitement. 


GLOSSAIRE 


21  5 


mesqueneû,  voir  mescongnois- 
tre. 

message,  3o6,  etc.,  mesage, 
43oi,  messaige,  1744,  etc., 
messager. 

mestier,  2758,  office  religieux  ; 
1475,  dignité,  office  (?)  ;  estre 
— ,  396,  3285, 3497,  être  néces- 
saire ;  avoir  — ,419,  666,  etc., 
avoir  besoin  de  ;  avoir  —  a, 
32  12,  rendre  service  à,  être 
utile  à. 

mesure,  462,  464,  2424,  droit, 
justice. 

mètre,  3'  p.  plur.  pf.  mistrent, 
1570,  1943  ;  —  ens,  3420,/i3i- 
re  entrer  ;  ou  repairier  sont 
mis,  2184,  ils  se  mirent  en 
route  pour  revenir  ;  se  —  en, 
727,  2222,  entrer  dans  ;  mal 
mis,  —  en  pris,  —  a  raison, 
voir  malmetre,  pris,   raison. 

mi,  233,  246,  3596,  milieu;  en 
—  (prép.),  233,eic.,enmi,797, 
au  milieu  de  ;  par  —  [adv.), 
2487,  3934,  par  le  milieu  ; 
par — ,  {prép.),  771,  etc.,  au 
milieu  de;  3j22,  au  travers 
de;  2520,  4335,  par. 

mieldres,  voir  millor. 

mielz,  miex  :  le  mielz,  3846,  le 
miex,  3880,4329,  la  meilleure 
partie. 

miex,  voir  mielz. 

millor,  665,  666,  1617,  etc., 
meilleur;  cas  suj.  sing.  miel- 
dres,532, plus  grand, plus/ort. 

mi[r]able,  i638,  '2o5o  [ms. 
amirable"),  admirable. 

mire,  voir  merir. 

mistrent,  voir  raetre. 

moié,  3io8,  353i,  arrivé  à  la 
moitié  (en  parlant  d'un  mois, 
d'un  jour) . 


moiilier,  29,  1024,  e^c,  épouse. 

moinent,  voir  mener. 

moitoier,  3 188,  32  ig,  méta- 
yer. 

molt,  II,  etc.,  beaucoup,  très. 

molu,     1045,    émoulu,  aiguisé. 

moneé,  i65i,  i663,  i83g,  mon- 
nayé. 

monstrer,  voir  mostrer. 

1.  mont:  en  .j.  — ,  33oi,  386i, 
en  un  tas. 

2.  mont,  142,  i53,  etc.,  monde. 
monte, 2275,  nombre;  3'/g'j,prix. 
*monteniere    [ms.  montemere], 

2970  mule  de  montagne  (?). 

monter  (v.  trans.),  2972,  mettre 
en  selle  ;  (absolt)  35o,  2  336, 
etc.,  monter  à  cheval. 

morir,  /«  p.  sing.  ind.  pr.  muir 
[ms.  mor],  2726  {cf.  /'Errata), 
i^  p.  plur.  cond.  morrïens, 
1275,  3'  p.  sing.  subj.  prés. 
muire,  i2o3,  mourir;  avoir 
mort,  1208,  3376,  etc.,  avoir 
tué. 

mortel  :  le  traitor  —  653,  le 
traître  cruel. 

mostier,  436,  445,  etc.,  mous- 
tier,  2557,  etc.,  église. 

mostrer,  45,993,  etc.,  montrer; 
monstrer,  419,  démontrer, 
prouver. 

moustier,  voir  mostier. 

movoir  (v.  trans.)  :  —  plait, 
ioi5,  io3i,  —  guerre,  2963, 
commencer  une  querelle,  une 
guerre;  {v.  intr.),  ibbg,  ib6g, 
etc.,  se  mettre  en  route, partir. 

mucier  (se),  p.  pa.  fém.  sing. 
mucie,  1206,  2gn,  se  cacher. 

muele,  25i,  meule  [de  moulin]. 

muer,  2  536,  2564, etc., changer; 
se  — ,  2686,  changer  de  posi- 
tion, se  tourner. 


2It) 


DOON    DE    LA    ROCHE 


muire,  voir  monr. 

mul,  322,  355,  etc.,  mur,  2972, 
mulet. 

murtrir,  941,  i  141,  2653,  assas- 
siner. 

musart,  8248,  3375, so(,  étourdi. 

musié  :  pain  — ,  3269  (?). 


nasel,  2520,2539,  263f,  3oo5, 
3871,  3g4i, partie  du  heaume 
qui  protège    le  rtej. 

natural,  voir  naturel. 

nature,  459,  caractère  inné. 

naturel,  1757,  1784,  etc.,  natu- 
ral [à  Vasson.),  33j'j,de  nais- 
sance. 

navrer,  io53,  lobb,  etc.,  blesser 
grièvement. 

néant,  voir  nient. 

neelé,  1773,  émaillé  [épithète 
de  pom). 

nef,  1595,  1978,  cas  rég.  plur- 
nés,  371  3,  navire. 

nen,  2840,  2895,  3444,  non. 

nés,  3706,  nis,  704,  même. 

nient,  néant,  19,  29,  noiant, 
21 16,  etc.,  rien;  ne...  — , 
127,  173,  etc.,  ne...  pas;  de 
— ,  i525,  i528,  3i44,  en  rien, 
pour  rien  :  por  — ,  i3ji,pour 
rien,  en  vain  ;  por  droit  — , 
I  39 1 ,  vraiment  pour  rien  ;  — 
fust  del  rescorre,  4866,  im- 
possible de  le  sauver. 

niés,  niez  {cas  suj .  sing.)  1484, 
i49i,efc.,  neveu;  loio,  i858, 
etc.,  petit-fils. 

nis,  voir  nes. 

nobile,  83i,  i5o3,  etc.,  no- 
ble. 

nobilité,  32,  noblesse  d'dme. 

noiant,  voir  nient. 

noier,  i5o8,   nier. 


noise,  211,  2788,  bruit,  tumulte. 

noncier,  i520,  1606,  etc.,  an- 
noncer, dire. 

norrir,  53o,  872,  etc.,  élever. 

noter,  2787,  jouer  d'un  instru- 
ment. 

noves  {subst.  plur.),  4463,  nou- 
velles. 

nuns  [adj.),  7,  ï2o3  ;  {pr on.), 
3597,  aucun. 

0,  5  (,  171,  etc.,  avec;  ensemble 
— ,  235i,  2426,  3623,  même 
sens;  845,  930,  che:{,  auprès 
[avec  mouv.). 

oan,  841,  41 15,  cette  année. 

obli  :  mètre  en  — ,  1498,  ou- 
blier. 

ocire,  159,  216,  etc.,  tuer. 

ces  :  a  —  Landri,  3894,  au  se- 
cours de  Landri. 

oir,  2957,   héritier. 

oïr,  entendre  :  ind.  prés,  i  ^  pers. 
sing.  oi,  841,  3'  p.  sing.  ot, 
170,  etc.,  3"  p.  plur.  oient, 
i33o;  impér.  2"  p.  plur.  oez, 
I,  179,  oiez,  932,  etc.,  oies, 
■779  '/"^-  ^*  P-  sing.,  orras, 
36o8,  3'  p.,  orra,  202,  etc., 
ora,  42i5;r*  /?.  p/wr.  orrons, 
825,  etc.,  2'  p.  plur.  orrez,  10, 
1497,  etc.  ;  condit.  2*  p.  plur. 
orriez,  3524  ;  parf.  3"  p.  sing. 
oi,  344,  etc.,  /•  p.  plur. 
oïmes,  4582  ;  3'  p.  plur. 
oïrent,  822  ;  subj.  prés.  3' p. 
sing.  oie,  i5go;  impf.  2*  p. 
plur.  oïssiez,  36i2,  etc.  ;  p. 
prés,  oiant  4326  ;  p.  pa.  oï, 
1209,  etc. 

oire,  i377    [ms.  or],  voyage. 

olifant,  2915,  3839,  3934,  ivoire. 

onor,    voir  honor. 

or,   1025,    etc.,  ore,   869,  ores, 


GLOSSAIRE 


217 


422,    6g5,    etc.,  maintenant; 

dès  — ,  854,  869,  963,    1457, 

dès  maintenant  ;  —  endroit. 

401 1.  orendroit,  375,  dans  ce 

moment  même;  ores  de    l'es- 

ploitier,    3492,    il  est    temps 

d'agir;  agissons. 
ordené,    4076,    qui  a    reçu  les 

ordres  sacrés. 
ordre  {subst.  fém.),  catégorie  : 

de  maie  — ,  964;  de  pute  — , 

3646. 

1.  ore  (subst.  fém.),  heure  :  en 
petit  d'  — ,  842,  en  po  d'  — , 
1081,  2 141,  en  peu  de  temps. 

2.  ore  [subst.  fém.),  42  56, 
vent. 

3.  ore,  voir  or. 

oré  {subst.  masc),  i583,  ibg6, 
I  779,  vent. 

orendroit,  voir  or. 

orer ,  1 704,  4 1  o  i ,  prier. 

ores,  voir  or. 

orguel,  4881,  entreprise  auda- 
cieuse, téméraire;  par  — , 
3766,   témérairement. 

orguillos  z|97,  orguilox,  4394, 
violent. 

oriflambe,  3857,  oriflamme, 
gon fanon. 

orine,  4623,  origine,  race. 

oriol,  2018,  loriot. 

orison,  ^i%S,  prière. 

ormier,  2475,  2483,  or /n. 

orrez,  voir  oïr. 

ors,  3260,  3404,  ours. 

ost,  2345,  2384,  etc.,  cas  suj. 
sing.  oz,  3690,  armée. 

T.ostage,  3592,  logement,  gîte. 

2.  ostage,  2690,  2880,  garantie 
donnée  en  raison  d'un  futur 
mariage. 

ostagier(v.  trans.),  3070,  pren- 
dre en  otage. 


oste,  2473  (?). 

ostel,  5 14,  etc.,  demeure  ;  faire 
bel  ^ — {à  qq.),  3333,  servir  un 
bon  repas. 

osteler  (s'),  4479,  se  loger. 

oster,  3373,  3g8i,  arracher  des 
mains. 

*ostorin  [ms.  estour],  3493, 
étoffe  teinte  en  pourpre  [sens 
donné  par  Godefroy  ;  plutôt 
étoffe  précieuse). 

ostor,  2  184,  autour. 

ot,  voir  oïr. 

otraigier  (s'),  3 166,  se  surpas- 
ser, dépasser  la  mesure. 

otrier,  268,  etc.,  otroier,  1483, 
ottrier,  452  5,  etc.,  accorder; 
610,  etc.  approuver. 

i.ou  [conj.de  fewjps), 987,  2441, 
2675,  32i3,  3321,  3536,  au 
moment  oit;  187 1,  —  que, 
796,  8o5,  etc.,  dès  que. 

2.  ou,  61,  etc.,  —  dans  le;  139, 
etc.,  sur  le. 

outrage,  910,  excès,  action  in- 
juste; 36 16,  conduite,  parole 
déraisonnable. 

outre  :  d'  —  nature,  2170,  con- 
tre nature. 

outrer,  2559,  traverser. 

ovré,  1964,  ouvré,  3428,  fa- 
briqué . 

oz,  voir  ost. 

paiennie,  1239,  1271,  le  pays 
des  païens. 

paier  :  —  un  cop,  3o88,  porter 
un  coup. 

paile  [subst.  masc),  56 1,  1617, 
3620,  étoffe  de  soie;  178,  180, 
193,  210,  couverture  délit  en 
soie;  2016,  2973,  362o,  4325, 
robe  en  soie  ;  1826,  2014,  cou- 
verture   de    cheval  en   soie; 


2l8 


DOON    DE    LA    ROCHE 


iggS,  doublure  de  tente  en 
soie. 

pais  :  aiez  — ,  617,  918,  et<x, 
tene:{-vous  tranquille . 

paistre  iv.trans.),  p.  pa.  peu, 
873,  nourrir. 

palais,  3i  16,  3i2i,  château  d'un 
seigneur. 

palefroi,  106,  355,  446,  cheval 
de  voyage. 

palis,  3i85,  paliz,  2272,  palis- 
sade. 

pan,  1994,  iggô,  frange  [d'une 
tente]  ;  3oo8,  basque  [d'un 
haubert]. 

par  {prép.y. — soi,  ôSg,  de  sa  pro- 
pre initiative;  —  non, 2569,  en 
son  nom  ;  —  ses  armes  por- 
tant, 3,  en  le  servant  de  ses 
armes;  marque  le  temps: — ma- 
tin, 1409,  1988,  etc.,  —  nuit, 
39ii,aî^  matin,  de  nuit;  mar- 
que le  lieu  :  —  destre,  269, 
à  droite;  —  ces  tables,  3566, 
à  ces  tables;  — mi  leu,  io52, 
2494,  —  mileu  de,  4367,  dans 
le  milieu  de  ; — sor,  1 102,1 1 15, 
par  dessus;  marque  la  quan- 
tité :  —  pou  que,  1 39,  peu  s'en 
faut  que  ;  renforce  le  sens  d'un 
verbe,  d'un  adjectif  ou  d'un 
adverbe,  528,  755,  etc. 

parcreù,  872,  1347,  ^uf  a  ter- 
miné sa  croissance,  adulte. 

pardon,  129,  permission;  cm 
— ,  lor,  en  —,  1862,  2o3i,  en 
vain,  en  pure  perte. 

parenté  (subst.  masc),  718, 
i83o,  1922,  3695,  famille, 
parentage. 

parfondement,  2569,  profondé- 
ment. 

parfont  [adj.),  4026,  fém. 
parfonde,    2546,    3o37,  pro- 


fond ;  en  — ,3470,  tout  au  fond. 

parjuré,  perjurez  {cas  suj. 
sing.)  :  toz  en  es  perjurez, 374, 
tuen  es  tout  parjure  ;  sont  tuit 
mi  — ,  687,  sont  tous  parjures 
envers  moi  ;  dont  sommes  — , 
1734,  envers  qui  nous  som- 
mes parjures. 

parler,  63,  etc.,  3^ p.  sing.  ind. 
près,  parole,  3624,  etc.,  par- 
ler. 

parmain,  343o,  variété  de  poire. 

parmi,  voir  mi. 

1.  parole  [subst. fém.),%bb,i2b^, 
discours ;l&n\r — ,  2172,  discu- 
ter; n'i  avra  ja  — ,3640,  il  n'en 
sera  plus  question;  70,  2320, 
bruit,  chose  qui  se  répète  ;  par 
— ,  4262,  verbalement. 

2.  parole  (v.  inlr.),  voir  parler. 

part  :  avoir  —  a,  3369,  s'inté- 
resser à;  ja  Damedieus  n'en 
ait  en  m'arme  —  si ... ,  1 008, 
que  Dieu  ne  reçoive  pas  mon 
âme  si. .  .*;  celé  — ,  792,  804, 
etc.,  à  cet  endroit;  d'ambe 
— ,  2389,  des  deux  côtés  ; 
quel  — ,    191 3,   où. 

partir  (v.  trans.)  ;  —  un  jeu,  377, 
laisser  le  choix  entre  deux 
partis;  256i,  2600, séparer  ; 
{v.  intr.),  468,  \^63,  se  sépa- 
rer de;  —  a,  2766,  prendre 
sa  part  de  ;  se  —  de,  2205, 
2732,  etc.,  s'en  aller  de  ; 
s'en  — ,  3574,  s'en  aller. 

Pasque  florie,  2065,  dimanche 
des  Rameaux. 

passer,  4255,  traverser;  4228, 
4273,  transgresser,  être  infi- 
dèle à;  3366,  disparaître; 
passé,  3oi7,  4187,  battu,  dé- 
confit. 

pastorel,  cas  rég.  plur.  pasto- 


GLOSSAIRE 


219 


riaus,  3345,  3349,  jeune  pâ- 
tre. 

paumier,  3346,  31>b\,  etc.,  pè- 
lerin . 

paumïer  [y.  trans.),  2976,  ma- 
nier. 

pautas,  4026,  boue. 

pautonier,  926,  valet;  1679, 
3i65,    3247,  coquin,    gredin. 

pavement,  285,  1077,   dallage. 

pechié  :  dire  — ,  3752,  dire  une 
chose  injuste;  faire  son  — , 
459,  commettre  le  péché  de  la 
chair;  a  tort  et  a  — ,  2248, 
illégalement  et  méchamment. 

peçoier,  1102  [var.  perçoie], 
iii5,  etc..  mettre  en  pièces. 

pei,  cas  rég.  plw.  pés,  3i85, 
pieu. 

pelé,  4:10,  dont  on  a  enlevé 
Vécorce. 

peliçon,  26,  779,  800,  i359, 
2t37, 2253, 2261, 3356, 3439, 
4015,  manteau   de  fourrure. 

pendant  (subst.  masc),  3964, 
pente  d'un  coteau. 

pendre,  voir  prendre. 

peneant,  i38,  pénitent. 

pener,  2542,  3690,  etc.,  mal- 
traiter ;  117,  424,  etc.,  sup- 
plicier; pené,  1627,  2039, 
etc..  fatigué,  épuisé;  se  — 
d'une  besoingne,  i53i,  s'oc- 
cuper d'une  affaire. 

penra,  penrai,  penre,  voir  pren- 
dre. 

penser  (subst.),  2024,  pensée. 

per  [subst.  masc.  etfém.)  :  pers 
de  Loereigne,  1243,  de  La 
Roche,  2558,  2583,  chevaliers 
de  Lorraine,  de  La  Roche  ;  a 
moillier  et  a  — ,  45 16,  comme 
épouse   et   comme  compagne. 

perche,  2976,  3oo6,  bâton. 


perçoivre,  p.  pa.fém.,  perçeûe, 
586,  apercevoir. 

perde,  * 1 3o7  ,  2491,  4322, 
perte. 

perdre  :  por  les  membres  per- 
dant, 278,  dût-il  perdre  les 
membres;  estre  des  membres 
perdant.  2129,  mutilé. 

*  peree  ,  3932  [ms.  perieres] , 
charge  de  pierres  lancée  par 
une  machine  de  guerre. 

periere,  3835,  3927,  machine 
à  lancer  des  pierres  [cf. 
peree). 

périr,  554,  mourir  ;  p.  pa.  fém. 
pe[r]ie,  4607,  brisée  d'émo- 
tion . 

perjurez,  voir  parjuré. 

peron,  voir  perron. 

perrin,  833,  3o25,  3047,  cons- 
truit en  pierre. 

perron,  peron,  1 389, 3200, efc, 
—  de  degré,  1699,  perron; 
3933,  grosse  pierre  lancée 
par  une  machine. 

pés,  voir  pel. 

peser,  3°  p.  sing.  ind.  prés. 
poise,  965,  etc.,  3^  p.  sing. 
subj.  prés.  poi[s]t,  616;  [im- 
personnellement] ,  365,  58o, 
etc.,  être  un  sujet  de  préoccu- 
pation, d'ennui,   de  chagrin. 

pesme,  2  56o,  terrible. 

petit  [adv.],  726,  767,  etc.,  peu; 
en  molt  —  d'cure,  1820,  dans 
très  peu  de  temps;  un  — , 
3619,  4523,  MM  peu;  'j3^,un 
petit  moment. 

peu,  voir  paistre. 

peùssiez,  voir  pooir. 

piaus  [cas  rég.  plur.),  i359, 
peaux,  fourrures. 

picois,  1578,  jgbo, pointe  [d'un 
bâton] . 


220 


DOON    DE    LA    ROCHE 


pié  :  en  piez,  1021,  debout; 
plain  — ,  520,  744,  demi  — , 
1974,  un  pied  entier,  un  demi- 
pied  [de  terre] . 

pieça,  891,  2420,  depuis  long- 
temps;—  que,  204,  56-],  etc., 
il  Y  a  longtemps  que. 

pièce:  une  —,  igSS,  3527, 
pendant  quelque  temps;  une 
grant  — ,  2 187, 3b r  2, pendant 
longtemps. 

pieur,  738,  cas  re'g.  de  pire. 

pile[r],  1206,  pilier  d'église;  cf. 
/'Errata. 

piment,  169,  2io5,  3989,  4497, 
boisson  préparée  avec  du  vin, 
du  miel  et  des  épices. 

pis,  418 1,  4384,  poitrine. 

pité,682,fiîïzV;pitié, 42  08, rp^rgf. 

place,  voir  plaire. 

plaidier,  i5i3,  2439,  parler, 
discuter. 

plaier,  2432,  2643,  etc.,  blesser. 

plaignier,  voir  plenier. 

1.  plain  [subst.),  cas  rég.  plur. 
plains,  332,  2848,  plaine. 

2.  plain,  plein  (arf/.)  :  de  plainne 
Monpeillier,864,  du  milieu  de 
Montpellier  ;  toute  plaine  sa 
lance,  i  io5,  1 1 18,2299,  2507, 
de  toute  la  longueur  de  sa 
lance;  (loc.  adv.),  a  plein, 
3392,  a  un  — ,  3424,  complète- 
ment; As. — ,  33g6,  entièrement. 

plainier,  plainnier,  voir  plenier. 
plain[t]    {subst.    masc),    3402, 

gémissement. 
plaire,  3'  p.  sing.    subj.  prés., 

place,  982,  3240,  etc.,  place, 

3678  {cf.  /'Errata),  plaire. 
plaisir  :  dire    tôt   son    —,  765, 

dire  tout  ce  qui  plait. 
plaissié,  3  184,  domaine  entouré 

d'une  palissade. 


plait,  6r8,622,665,  f  i52,  1868, 
convention,  accord  ;  906,  dis- 
cours ;  ioi5,  io3i,  contesta- 
tion, querelle  ;  (au  plur.)  plaiz, 
20,  cour  de  justice. 

planchié,  2839,  planchier,3265, 
3549,  ^556,  salle  planchéiée, 
située  à  l'étage  supérieur. 

planté,  voir  plenté. 

plein,  voir  plain. 

plenier,  1481,  plaignier,  4072, 
4080,  plainnier  3o66,  grand 
{épithète  de  palais),  32oi 
{épithète  de  chasne);  —  de, 
3268,  abondant  en. 

plenté,  planté,  3399,  abon- 
dance; {loc.  adv.)  a  — ,  1899. 
2106,  4186,  4362;  a  —  et  a 
noces,   3628. 

pleuge,  3392,  pluie. 

plevir,  ii53,  1456,  etc.,  assu- 
rer,jurer;  famé  —,663,  2688. 
lier  à  soi  une  femme  par 
serment;  p.  pa.  plevis,  3187, 
lié  par  allégeance. 

ploi,  3768.  p[l]ois,  2253,  2261, 
pli. 

plus  :  —  tost  qu'il  onques  pot, 
1027,  1070, 1  i33,^î/  plus  vite; 
c'est  li  —  et  li  mains,  34i5, 
c'est  ma  conclusion. 

po,  poi,  pou,  peu,  jpcM  :  .j.  seul 
— ,  1342,  un  petit  moment;  a 
—  ne,  1 36,  186,  etc.,  a  —  que 
1223,  a  —  que  ...  ne,  i3i3, 
1842,  etc.,  par —  que,  139, 
i354,  por  —  que,  \o32,  peu 
s'en  faut    que. 

pocinet,  3284,  3334,  poussin, 
petit  poulet. 

poeste  {à  l'asson.),  2377,  puis- 
sance {cf.  poesté). 

poesté,  3708  (à  l'asson.),  comme 
poeste. 


GLOSSAIRE 


221 


poi  ranier,  3087  [corr.  bois  ra- 
mier (?)]. 

poi,  voir  po. 

poigneor  i433,  combattant. 

poil  {cas  suj.  sing.).  cas  rég. 
plur.,  pois,  234,  247,  2233, 
2  36i,po/7;  926,  chevelure. 

1.  poindre,   3666,    3700,  etc., 
éperonner . 

2.  poindre,  peindre  :  p.  pa.  fém. 
pointe,  1995. 

poine,  590,  2684,  etc.,  peine, 
labeur. 

poing,  2465,  3084,  poignée  de 
V épée ;  {plur .)  poinz,  206^, poi- 
gnet, extrémité  de  la  manche. 

point,  un  peu  :  sanz  —  de  fau- 
seté,  85  ;  sans  —  de  delaier, 
2764. 

pointe,  voir  poindre. 

poinz,  voir  poing. 

pois,  voir  poil. 

poise,  poist,  voir  peser. 

poïst,  voir  pooir. 

•pom  [ms.  poi],  1778,  pom- 
meau d'épée. 

pommel,  cas  rég.  pi.  pom- 
meaus,  3963,  boules  posées 
sur  V extrémité  des  piquets  de 
tente. 

ponnée,  voir  posnee. 

pooir  (v.  intr.),  pouvoir  :  ind. 
prés.  /•  p.  plur.  poomes, 
1755,  1768,  2'  p.  plur.  poez, 
ii52,  i338;  pf.  1"  p.  sing. 
pou,  3og3;  3"  p.  sing.  pot, 
1037,  1070,  etc.,  3^  p.  plur. 
poreni,  ii'i3;  subj.  impf.  3* 
p.  sing.  poïst,  958,  2* p.  plur. 
peûssiez,  2352  ;  s'il  poïst 
estre,  938,  s'il  eût  été  possible. 

por,  pour  {prép.),  589,  832,  e/c, 
à  cause  de  ;  alons  en  —  vo 
mère,  3676,  vers  votre  mère  ; 


—  ce  que,  46,  1640,  parce 
que,  i36i,  pour  que;  —  tant, 
3 1,  pour  cela;  io56.  cepen- 
dant; {avec  le  gérondif)  —  les 
membres  perdant.  278,  diit-i! 
perdre  les  membres  ;  {avec 
rinf.)  —  les  membres  coper, 
416,  dùt-elle  avoir  les  mem- 
bres coupés. 

porchacier,  3357,  3586,  pi-o- 
curer. 

pormener,  3433,  promener. 

pormont.  4027,  4372,  poumon. 

porotirir  (se),  40,  s'offrir,  vo- 
lontiers. 

porpanser,  438 1,  imaginer. 

porprendre  :  —  son  ostel,  2925, 
prendre  gîte,  loger. 

porprin,  1 1 12,  2294,  de  couleur 
pourpre. 

porquerre,  541,  rechercher, 
poursuivre;  3481,  fournir; 
se  — ,  521,  546,  2148,  3916, 
s'efforcer  de. 

port,  2269,  3919,  4144,  pis- 
sage    [dans   les   montagnes] . 

porter  :  portant,  1276,  portant 
des  fruits  (?)  ;  jusqu'as  armes 
portant,  286,  1002,  io63,  JMS- 
qu'à  l'âge  déporter  les  armes  ; 
par  ses  armes  portant,  3,  ew 
le  servant  de  ses  armes. 

posnée  [ms.  ponnée],  4124,  or- 
gueil, arrogance. 

postis,363  1 ,  38bo,3S4b,poterne. 

pot,  voir  pooir. 

1 .  pou,  voir  po. 

2.  pou,  3093,  voir  pooir. 
pour,  voir  por. 

prael,   i ggo,  pelouse. 

praer,  voir  preer. 

prée,  2522,  253o,  etc.,  prairie. 

preer,  35,  praer,    4169,  piller. 

premerain,     prim.erain,     554, 


222 


DOON    DE    LA    ROCHE 


3569,  premier;  mi  ami  char- 
nel — ,  467,  mes  plus  proches 
parents  ;    —   s    [adv.],    2290, 
2982,  4304,  en  premier  lieu; 
quant   nasqui    — ,    3442,  dès 
sa  naissance. 
prendre,    ind.    pf.    2"  p.  sing. 
preïs,     3045,    pr[es]is,    1024, 
3°  p.  sing.  prist,  971,    17 18, 
etc.,    3"    p.    plur.    prinrent, 
35o5,    pristrent,    1696.  2278, 
etc.;  infin.  penre,   245,  2  53, 
etc.;  fut.   i"  p.  sing.   penrai, 
ioo3,  1064,  3'  p.  penra,  221; 
subj.  prés.    3'  p.  sing.  prei- 
gne,  1297;  impf.  3"  p.  sing. 
presist,     278,     preïst,      1482, 
2867;  97^  2887,  etc.,  épou- 
ser; —  a,  63,  548,  etc.,  com- 
mencer à;  l'en  prist  a,  2022, 
même  sens  ;   se  —   a,    1414, 
2627,   3887,    s'attacher,  s'ac- 
crocher   à;    —    compaignie, 
SySb ,  rencontrer  ;  —  fin,  4414, 
faire  halte  ;  —  les  juïses,  267, 
272,    accepter    Voffre    de    se 
soumettre    au    jugement    de 
Dieu;  —  justice,    221,  faire 
justice;  l'en  prist  pitié,  2826, 
2936,    3255,    cui    pitié    n'en 
preïst,    2867,    2/  ««   Ê"^    5"' 
n'en  eût  pitié;  —  prové,  i34, 
42 1 ,  prendre  sur  le  fait  ;  — 
ses  sodoiers,  2947,    lever  ses 
soudoyers  ;  —    trives,    1164, 
1190,     2142,     conclure     une 
trêve  ;  —  une  venjance,  2692, 
arrêter    un    projet    de    ven- 
geance. 
presant  :  em  —  de,  788,  prêt  à; 

mètre  en  — ,  3 147,  amener. 
présenter,    4577,   offrir  ;     pré- 
sentent \ms.  prenent],  2340  (?). 
presse,   669   etc.,  foule,  multi- 


tude ;  fait  la  —  coper,  673, 
se  fraie  un  chemin  au  milieu 
de  la  foule.  » 

preu,  voir  pro  2. 

prevoigner,  3196,  provigner. 

prevoire  [cas  rég.  sing.),  3943, 
prêtre. 

prevost,  3226,  agent  d'un  sei- 
gneur. 

prime  :  demoine  —,  2223, 
domaine  principal  {peut-être 
à  corr.  en  privé;  cf.  v.  2225)  ; 
1261,  23gD,  heure  canonique, 
six  heures  du  matin  ;  —  s 
{adv.),  3i8i,  4003,  potir  la 
première  fois. 

primerain,  voir  premerain. 

primes,  voir  prime. 

princier  [cas  suj.  plur.),  1 190, 
princes,  nobles. 

principel,  4549,  princier  [épi- 
thète  de  palais). 

1.  pris, ;;rjAr  :de —,  1 157,  2274, 
2277,  2283;  de  si  haut  — , 
I  i3i  ;  mètre  en  —  3924,  éva- 
luer, estimer. 

2.  pris  {p.  pa.  de  prendre  pris 
substantivt),  2918,  butin. 

prisier,  proisier,  i5o2,  2418, 
2421,  etc.,  estimer  à  un  prix 
élevé,  louer;  prisié,924,  3362, 
dont'lon  fait  grand  cas. 

prison,  23 18,  'i(j<j'è, prisonnier. 

pristrent,  voir  prendre. 

privé,  1620,  familier;  —  de- 
moine,  2225,  domaine  propre 
(c/.  prime);  {subst.),%3,  1891, 
3679,  ami  intime;  a  — ,  1544, 
en  secret. 

1.  pro  (subst.),  cas  suj.  sing. 
proz,  3228,  profit,  gain. 

2.  pro,  1593,  preu  40  [ms.  prou] 
{adj.  des  2  genres),  cas  suj. 
sing.  pros,  2292,  2946,  prouz, 


GLOSSAIRE 


223 


3624,    proz,    348,    36g,    602, 
1274,  etc.,  sage,  vaillant. 
prodome,    cas   siij.    sing.  pro- 
dons, preudom,    1640,  2847, 
etc.,  homme  de  valeur. 
proesce,  2667,  vaillance. 
proie,  2430,  ■ig8i,etc.,  butin. 
proier,    2826,      SSgo,    supplier 
[qqn]  ;  3242,  demander  à  Dieu 
par  la  prière  ;  prierez  vo  père 
sauveté,  2739,  demanderesf  à 
votre  père  la  vie  sauve  ;  3 164, 
aller    prier    sur    le   tombeau 
d'un     saint,  faire    un    pèle- 
rinage. 

proisier,  voir  prisier. 

pros,  prouz,  voir  pro  2. 

prover  :  estre  prové,  235,  237, 
248,  586,  être  convaincu  [d'un 
délit]  ;  prové  d'oïr  et  de  veant, 
261,  provée  d'oïr  et  de  veoir, 
369,752,  143^,  convaincue  par 
des  témoins  qui  ont  vu  et  en- 
tendu; prendre  prové,  voir 
prendre. 

Proverbes,  locutions  prover- 
biales :  204,  426,  427,  567, 
610,  835,  871,  1023,  3i32 
3169, 3397, 35oi,  3617,  3777. 

proz,  voir  pro  i  et  2. 

pucele,  444,  etc.,  jeune  fille. 

pui,  324,  2269,  etc.,  mont 
arrondi. 

puis  [prép.),  2bg,  386,  après; 
—  que  (conj.),  3169,  3686, 
41 18,  après  que. 

pupler  de,  4172,  couvrir  de. 

put  {adj.  masc),  1 1  3o,  mauvais; 
{au  fém.)  pute,  347,  58 1, 
2 171,  etc.,  de  mauvaise  vie; 
[subst.  fém.  sing.),  cas  rég. 
putain,  2201,  4335,  etc., 
femme  de  mauvaise  vie. 

putage,  putaige,  340, 1 168,  etc.. 


conduite  déréglée  [d'une  fem- 
me], 770  [d'un  homme]  ;  373, 
action  déshonnéte. 

putain,  pute,  voir  put. 

puterie,  81 3,  vie  de  putain. 

quanque,  71 3,  888,  etc.,  tout 
ce  que,  autant  que. 

quant  [adj.)  :  ne  sai  quant, 
3977,  ne  sais  combien  ;  (adv.), 
i32,  596,  etc.,  autant  que; 
1349,  3259,  puisque. 

quarole, /\.2b8,  danse. 

quart,  62,  112 2,  quatrième. 

que(j?roM.  rel.  sujet),  1415  ;  que 
que  2725,  quoi  que;  {conj.) 
8o3,  989,  1121,  etc.,  si  bien 
que  ;  944,  tant  que  ;  [suivi  du 
subj.)  1212,  2j/^.\,  pour  que, 
afin  que  ;  68g,  jusqu'à  ce  que  ; 
{interrog.)  1082,  2724,  2864, 
pourquoi  ? 

quel  que,  2725,  quoique. 

quelor,  3788,  couleur  [cf.  mon 
branc  de  color,  Moniage  Guil- 
laume, 2*  réd.,  V.  3257). 

quenoissable,voircongnissablc. 

querre,  477,  896,  etc.,  cher- 
cher, rechercher  ;  —  que, 
I  Z^b, faire  en  sorte  que  ;  i554, 
3326,  3478,  aller  vénérer  en 
pèlerinage;  —  les  trives, 
2144,  chercher  à  conclure 
des  trêves. 

queut,  voir  coillir. 

qui  :  cui...  cui...  56,  à  un  tel... 
à  tel  autre;  [suivi  d'une  phra- 
se exclamative),  —  or  avroit 
Doon  ceste  tere  tolue,  2176, 
heureux  celui  qui  aurait  en- 
levé cette  terre  à  Doon  ; 
[suivi  dit  subj.)  —  muere  ne 
—  vive,  839,  qui  soit  vivant 
ou  mort  [présent  ou  passé)  ; 


2  24 


DOON    DE    LA    ROCHE 


—  que  chant  ne  —  lait, 
73o,  quel  que  soit  celui  qui 
chante  ou  non  ;  —  que  plort 
ne  —  chant,  21 35,  qu'importe 
quon  en  pleure  ou  qu'on  en 
chante. 

quintainc,  4602,  armure,  mon- 
tée sur  un  poteau,  contre  la- 
quelle s'exerçaient  les  jeunes 
«  bacheliers  ». 

quile,  quitte,  1244,  afranchi 
de  tout  service  féodal;  avoir 
— ,  2223,  2063,  posséder  libre- 
ment ;  clamer  —,  564,  607, 
3o35,  3i33,  déclarer  [une 
chose]  libre  de  servitude  ; 
tenir  — ,  55 1,  2950,  2994, 
tenir  libre  de  servitude. 

racorder,  2202,  réconcilier. 

rafichier,  241 1,  reprendre  [un 
récit]  oii  un  autre  Va  laissé, 
le  compléter. 

raier,  35 14,  raj^onner;  2458, 
2480,  3007,  couler,  ruisse- 
ler. 

raies,  i365,  voir  ravoir. 

rainme,  voir  ramer. 

raison  :  baissiez  vostre  — ,  137, 
4008,  prene:(-le  sur  un  ton 
moins  haut  ;  mètre  a  — ,  8o5, 
1 133,  etc.,  adresser  la  parole; 
chargier  sa  — ,  4075,  confier 
sa  cause. 

raier,  55,  504,  etc.,  aller  de  son 
côté,  s'en  aller. 

ramé,  3836,  fait  de  branchages. 

ramée,  3833,  abri  fait  de  bran- 
chages. 

ramener,  fut.  1*  p.  sing.  ra- 
menrai,  2412;  subj.  prés. 
3*  p.  sing.  rameint,  lôSg, 
i652,    ramaint,    3408,    3409, 

.  ,3418,  ramener. 


ramentevoir,  2234,  rappeler, 
faire  souvenir. 

ramer  :  qui  ne  le  rainme  mie, 
1221,  qui,  elle  aussi,  ne  l'ai- 
me pas. 

*ra:nier  [ms.  ranier],  3087,  de 
branche  d'arbie  (?);  cf.  poi. 

rapligicr,  2147,  cautionner,  ga- 
rantir. 

rateindre,  238g, prendre,  saisir 
par  surprise. 

ratendre,  1277,  2799,  etc.,  at- 
tendre de  son  côté. 

ravoir  :  que  raies  ton  droit, 
i365,  que  tu  rentres  en  pos- 
session de  ce  qui  t'appartient. 

reaime,  25oo,  royaume. 

recez  [ms.  reces]  [cas  rég.  plur.), 
58,  lieu  fortifié. 

reclamer,  i^  p.  sing.  ind.prés. 
reclain,  3407;  121 1,  r225, 
etc.,  invoquer  ;  3407,  deman- 
der en  suppliant. 

recoillir  la  proie,  2981,  s'empa- 
rer du  butin. 

reçoivre,  r3i5  {au  milieu  d'as- 
son,  en  è...  e),  recevoir;  fut. 
recevra,  1 2 1 9  [faute  pour  res- 
tera (?)]. 

reconoistre,  3 102,  faire  hom- 
mage. 

recorder,  ^bÇ)(),  rappeler,  racon- 
ter. 

recovrer,  1956,  se  procurer, 
trouver;  io58,  frapper  un 
second  coup. 

recovrier,  3i()g,guérison,  salut. 

recréant,  38o,  774,  qui  s'avoue 
vaincu  ;  de  péchiez  — ,  248, 
qui  avoue  son  péché,  son  dé- 
lit ;  271,  lâche,  misérable. 

recuerre,  7o3,  recueillir. 

reencon,  143,  rançon. 

regeter,  2274,  curer. 


GLOSSAIRE 


225 


règne,  104,  io5,  etc.,  régné, 
3i5,  i522,  eic,  reigne,  1401, 
2496,  40o5,  roigne,  3i5o, 
royaume  ;  627,  2235,  225o, 
fief,  domaine. 

règne,  reigne,  325,  3oi4,  etc., 
rêne;  n'i  ot  —  tirée,  325,  n'i 
ot  —  tenue,  674,  sans  ralen- 
tir, sans  arrêt. 

relancier,  3^oo,attaquer  de  nou- 
veau avec  la  lance. 

relenquir,  3912,  abandonner, 
renier. 

remander,  2377,  convoquer  de 
nouveau. 

remanoir,  ind.  prés.  2^ p.  sing. 
remains,  i35i,  3'  p.  sing. 
remaint,  3899,  ^"P-  P^"''-  re- 
mainent,44i  ;  Jut.  i^p.  sing. 
remaindrai,  1289,  1295,  re- 
mandrai,  1240,  remanrai, 
1284,/*/?.  p/ur.  remanrons, 
217  ;  parf.  3^  p.  sing.  remest. 
igo2,33^o,  3' p.  plur.  remes- 
trent,252  3,  3i2j,  4.161  ;  p.pa. 
remés,  1933,  2555,  etc.;  441, 
861,  etc.,  rester,  demeurer; 
—  a,  263,  rester  c/ie;^  ;  921, 
2260,  ne  pas  se  faire,  ne  pas 
avoir  lieu;  i853,  i86-j, cesser  ; 
remés  est  nos  mangiers,3287, 
notre  dîner  en  restera  là. 

remembrer,  2639,  2058,  3176, 
souvenir  ;  4235,  rappeler  [à 
qqn). 

remener,  2542,    38ii,  amener. 

remes,  remese,  remest,  remes- 
trent,  voir  remanoir. 

remonter  (v.  intr.),  1599,  se 
remettre  en  selle  ;  {v.  trans.), 
2371,  remettre  en  selle. 

remuer,  685,  éloigner  ;  se  — , 
456,  578,  se  porter,  s'avancer 
vers  qqn. 


rendre,  1661,2793,  3950,  don- 
ner; —  pris,  38o,  faire  prison- 
nier; 3946,  mener  prisonnier  ; 
si  li  rendrai  Tomile,  368o, 
même  sens. 

renoveler  :  li  afaire  Landri  com 
fu  renouvelez  !  45  1 3,  comme 
la  situation  de  Landri  a  pris 
un  nouvel  aspect  \ 

repairier,  204,  5io,  efc,  retour- 
ner chej  soi,  revenir;  23gb, 
tourner  bride;  —  a,  3862, 
s'avancer  vers;  se  — ,  517, 
2374,  etc.,  retourner  ;  s'en  — , 
1674,  23i4,  etc., s'en  revenir. 

reparler,  1004,   répliquer. 

reposl, p.  pa.de  repondre,  1206, 
caché. 

reprendre,  36 1,  364,  386,  sur- 
prendre; 14.12,  reprendre  de 
la  vigueur  {se  dit  d'un  arbre 
au  printemps). 

reprover,  700,  719,  2892, repro- 
cher. 

requerre,  933,  326\,  demander, 
réclamer  ;  4.60b ,  supplier 
[qqn];  —  [qqn]  de  merci, 
4079,  demander  grâce  à  qqn  ; 
585,  i524,  3509,  aller  vénérer 
[un  saint],  en  faisant  un  pèle- 
rinage ;  2834,  faire  venir  ; 
2919,  attaquer. 

requoi  :  en  — ,  358,  625,  en 
secret. 

resaillir,  ind.  prés.  3"  p.  sing. 
resaut,  3'jj2,  3°  p.  plur.  re- 
saillent, 25o8, se  redresser. 

rescorre,  495,  4366,  secourir, 
aider  ;  2984,  reprendre  [du 
butin  à  Pennemt]  ;  se  — , 
985,  se  dégager,  se  libérer 
d'une  étreinte. 

rescrïer  {v.  trans.), 4.44,  crier  ;{v. 
intr.),  1 1 19,  crier  de  nouveau. 
i5 


226 


DOON    DE   LA    liOCHE 


1.  resembler,  3537,  paraître, 
sembler. 

2.  resembler  (se;,  2176,  réunir 
ses  forces. 

respouser,  4087,  4094,  épouser 
de  nouveau. 

rester,  fut.  restera,  1219  (?j; 
voir  folie  et  reçoivre. 

restoier,  2337,  rengainer. 

restre,  3i52,  4247,  être  [de  son 
côté]. 

retenir,  i363,  1370,  etc.,  rete- 
nir à  son  service  ;  1892,  ga7-- 
der  auprès  de  soi; —  leur 
terre,  1018,  tenir  en  leur  pos- 
session, défendre. 

reter,  340,  525,  256o,  accuser. 

revenir  :  —  avant,  49,  se  mani- 
fester, se  découvrir. 

reverser,  284,  renverser . 

revestir,  2796,  355i,  vêtir 
d'habits  neufs  ;  1028,  investir 
de  nouveau. 

revoioir^  ind.  pf.3°  p.  sing.  re- 
vot,  3744,  vouloir  de  nouveau. 

riche,  408,  85o,  etc.,  fort,  puis- 
sant; 3'j2i,   '5gb2,  abondant. 

rien,  52g,  538,  etc.,  chose; 
franche  — ,  439,  noble  créa- 
ture; —  s  (adv.),  3523,  quel- 
que peu. 

ris,  341,  729-730,  rire. 

rivière,  868,  cours  d'eau  [ici 
bras  de  mer,  l'Hellespont]; 
3731,  bord  [d'un  vivier]; 
2186, '4195  [ms.  rivier],  val- 
lée où  on  chasse  le  gibier 
d'eau. 
rober,  4,  tb,  piller  ;  1737,  1780, 
2054,  dépouiller  [qqn],  de  ce 
qu'il  possède. 
roé,  orné  de  figures  de  roues  : 
paile  — ,  1826,  2014;  targe 
roée.  3658. 


roi,   mesure,   disposition,    614; 

cj.  /'Errata, 
roiamant    1172    {et    28    var.), 

rédempteur. 
roide,  voir  roit. 
roigne,    voir    règne, 
roit,    2456,    4387,     rois    (rég. 

pliir.)  2467,  fort,  dur;  fém. 

roide,   868,   rapide   {épithète 

de  rivière), 
rolleïs,  2273,  fortification. 
rompre,   p.  pa.  rompus,  2478, 

fém.  route,  2492  ;  —  la  presse, 

2785,  séparer    la  foule. 
roncin,      2160,       371 1,      3959^ 

cheval  de  charge. 

1 .  rote,  4345,  4388,  4393, 
troupe. 

2.  rote,  y  ïj,  4.55g,  instrument  de 
musique  à  cordes. 

roter,  858,  2 loj,  jouer  de  V ins- 
trument appelé  rote. 

route,  voir  rompre. 

rover,  ind.  prés.  /*  pers.sing. 
ru,  3407,  ruis,  3261,  J«  p. 
sing.  rueve,  659,  3"  p.plur. 
ruevent,  899,  2744  ;  39,  476, 
etc.,  demander. 

rovuel,  voir  voruel. 

ru,  703,  ruisseau. 

ru,  rueve,    ruevent,   ruis,   voir 

rover. 
*ruiste  [ms.ruUe],  2853, violent. 

sable,  1573,  1945,    20o5,  :[ibe- 

line. 
sablon,  3785,  sable. 
sachant,  voir  savoir, 
sachier,  3o56,  tirer,  arracher  ; 

3372    [ms.    faich-],    retirer; 

2509,  dégainer. 
saillir,  2136,2292,  etc.,  sauter. 
sainglement,  2706,  simplement. 
saintisme,  147,    très  saint. 


GLOSSAIRE 


227 


sale,  12,  989,  etc.,  grande  salle 

du  palais. 
sait,  voir  sauver, 
saluer  :  Pépin...  vueil   que  me 

saluez,  3 12,  je  veux  que  vous 

saluie^  Pépin  pour  moi. 
salve,  voir  sauver, 
samblant,  voir  semblant, 
sambue,    2014,  couverture  que 

l'on  met  sous  la  selle. 
saoulé,  3684,  rassasie'. 
sauf:  sauve  parole,  4272, paro/e 

fidèlement  observée. 
saus  [adj.],  3356,  salé. 
saut,  voir  sauver, 
sautier,  1 885,  psautier. 
sauver,  3^  p.  sing.  subj.  prés. 

sait,  4264,  saut   1399,    1400, 

i632,      3226,      salve,     1634, 

sauver. 
sauveté,  2739,  sauvegarde. 
savoir,    ind.    prés,  i'  p.  plur. 

savomes,    1923,    2047,  .?<*  j?. 

plur.  sevent,  1 207  ;  parf.  i'  p. 

sing.   soi,    3o8o,  3^  p.  sing. 

sot,   12 14;  subj.    impf.   1°  p. 

sing.  seûsse,  1467,  3'  p.  sing. 

seûst,  i486;  3173,  connaître; 

—  du,  3926,  se  connaître  en; 

dou siècle  sachanz,  1274,  co«- 

naissant  le  monde;  (inf.  pris 

substantivt)  "i-jâ^-] .  action  sage, 

prudente. 
se  {conj .),  suivi  du  subj.,  3993, 

jusqu'au  moment  oit;  —    lui 

non,   124,  sinon  lui;  —  bien 

non,  140,  sinon  du  bien. 
sebelin,  iSyô,  ig^S,  de  gibeline. 
secheant,  1279,5e   desséchant. 
secour[re],  28o3,  secourir. 
seignier  (v.  trans.),  3482,  3494, 

bénir    par    le    signe    de    la 

croix. 
seignor,  2950,   2975,  etc.,  cas 


suj.   sire,   2553,   2949,  3590, 
3690,  mari. 
seignorie,  2994,  domaine  ;  2959, 
4140,    autorité;  2397,  puis- 
sance ;  1477,  4300,  splendeur, 
magnificence;      555,      2415, 
2953,  valeur,  importance  so- 
ciale; n'i  atent  — ,  2359,  n'at- 
tend pas  son  seigneur  pour 
avancer. 
seignoril  :  cas    suj.   sing.    sei- 
gnoris,   333,  signori[l]    3951, 
qui  appartient  à  un  seigneur, 
333,  digne  d'un  seigneur. 
sein,  4475,  cloche. 
seing  [masc.  soing],  3441,  tache 

naturelle  à  la  peau. 
seïr,  2934,  2937,  etc.,  s'asseoir, 
être  assis;  ind.  prés.  3^  p.  sing. 
siet,  363,g26, etc. :impér.2''p 
plur.    seez,    io35;    parf.   3* 
p.  5ing-.  sist,  20H,    3348,  3' 
p.  plur.  sirent,  370,  sistrent, 
4427;  inf.  3^31,  prendre  part 
à  un  siège. 
sejor,  i5o,  repos. 
sejorner,    2200,    2536,    rester, 
demeurer;   p.    pa.,  106,   re- 
posé, frais. 
selon, selonc,  1091,  373i,  lelong 
de;    3320,    à   côté  de,    au- 
près. 
semblant,  299,  537,  44^^)  opj- 
nion,  idée;    samblant,  3974, 
apparence  extérieure  ;   mos- 
trer  bel  — ,  995,  montrer  de 
bonnes  dispositions. 
sempres,  1407,  2390,  etc.,  tout 

de  suite,  aussitôt. 
sen  :  perdre  le  — ,  2124,   2i3o, 
2 1 33,  avoir  le  —  desvé,  2066, 
perdre  son  bon  sens,  devenir 
fou. 
{   sendel,  1618,  étoffe  de  soie. 


228 


DOON    DE   LA    ROCHE 


scné,  40,643,  etc.,  sage, sensé; 
bien  —,  642,  bien  pourvu  de 
sens. 

senechaucic,  2j8i,  fonctions  de 
sénéchal. 

sener,  p.  pa.  senez,  1 19S,  pan- 
ser. 

senestre,  2368,  3ooi,  etc., gau- 
che. 

serf  :  [au  fig.)  niaus  sers  !  790, 
gredin. 

sergant,  sergent,  voir  serjant. 

seri  :  coiement  et  — ,  339,  782, 
1 1 /^b ,  doucement , à  voix  basse; 
en  — ,  3909,  dans  le  calme  du 
sommeil. 

serjant,  sergant,  serjent,  5,  18, 
etc.,   homme    d'armes;    243, 

.  253,  etc.,  serviteur;  {fig.) 
—  saint  Piere,  1734  [dit  d'un 
évèque] . 

seror  {cas  sujet)  631,1908,2126, 
{cas  rég.)  42,  89,  etc.,  sœur; 
voir  suer. 

serorge,  356,  2254,  2262,  beau- 
frère. 

servir,  38,  76,  s'acquitter  du  ser- 
vice féodal;  2792,  s'acquitter 
du  service  de  cour  ;  —  armes, 
784,  porter  les  armes  ;  par 
ses  armes  — ,  1460,  par  son 
service  guerrier. 

servise,  37,  85,  2684,  3i3o, 
3559,  service  féodal;  feront 
mon  servise,  847,  resteront  à 
mon  service;  selon  vostre  —, 
4007,  selon  votre  conduite; 
2636,  service  amoureux . 

setme,  961,  septième. 
seûsse,   seûst,  sevent,  voir  sa- 
voir, 
sevrer,  3682,  4162,  séparer. 
si  que,  822,  1078,  etc.,  détel- 
le sorte  que;  1734,  ainsi  que. 


comme;  si  ne,  3737,  que...  ne 
{subj.). 

siècle,  529,  948,  etc.,  monde 
terrestre. 

siglaton,  3587,  manteau  de  bro- 
cart. 

signe,  1209.  signal  convenu 
[pour  Vexécution  d'un  meur- 
tre]. 

signoril,  voir  seignoril. 

sire,  voir  seignor. 

sirent,  sistrent,  voir  seir. 

sivre,  3'^  p.  plur.  ind.  prés. 
sivent,  1089,  1096;  3'^ p.  plur. 
fut.  sivront  [ms.  suerront, 
sueront],  1290,  suivre. 

sodée,  voir  soldée. 

sodoicr,  voir  soldoier. 

soduire,  i58  {gér.  soduiant), 
tromper;  p.  prés,  pris  adjec- 
tivt.  soduanz,  1170,  so[u]- 
duLijans  36o5,  trompeur. 

so'éi{adv.),  344, 1879,  e/c,  silen- 
cieusement, sans  faire  de  bruit. 

soffre[te],  41 38,  besoin. 

soffrir,  soufrir  :  armes  — ,  757, 
porter  des  armes;  se — ,  1292, 
rester  tranquille,  patienter; 
sofrant,  274,  2i3i,  patient  à 
l'excès. 
soignier  (se),  3390,  se  garder, 

redouter. 
soing  :  n'avoir  —  de,  482,  745, 
1 1 35,  se  soucier  peu,  n'avoir 
cure  de. 
soldée,  385 1,  sodée,  2594,  sou- 
dée, 93,  2898,  41 17,  récom- 
pense en  argent,  argent. 
soldoier,     1458,     1496,     i523, 
sodoier,  i23,  2967,  soudoier, 
55,  homme  d'armes,  soudoyer. 
soler,  1716,  soulier. 
soiier,  2190,  étage;  —  lanceis, 
3928,  pont  volant. 


GLOSSAIRE 


229 


soloir,  /•  p.  sing.  ind.  prés. 
suel,  2796;  3*  p.  sing.  impf. 
soloit,  298,  souloit,  3964, 
avoir  l'habitude. 

som ,  son  :  par  —  l'aube , 
i23o,  1357,  238i,  etc.,  dès 
le  lever  du  jour;  cist  moz 
doit  estre  a  —  [ms.  asson], 
4022,  ce  discours  doit  être 
fini. 

somier,  1722,  2899,  3ii7, 
cheval  de  bât. 

son,  voir  som. 

soner  :  —  viole,  i356,  jouer  de 
la  viole. 

sor  :  —  tote  chose,  i36r,  — 
lote  rien,  1442,  par  dessus 
tout;   de  — ,  voir  desor;  par 

—  1 102,  au  dessus  de. 
sordre,   3'  p.   sing.   ind.  prés. 

sort,  2170,  4197,  sourt,  3783; 
3"  p.  sing.  pf.  sordi,  1426, 
sordit,  4367,  3'  p.  plur.  sor- 
drent,  3077,  surgir. 

sorporter,  4274,  entraîner,  em- 
porter. 

sorterrin,    33 10,  souterrain  {}). 

sot,  voir  savoir. 

souduiant,  voir  soduire. 

soudée,  soudoier,  vojV  soldée, 
soldoier. 

souloit,  voir  soloir. 

sourt,  voir  sordre. 

souspris,  2716,  épris,  séduit. 

sovent  [adj .)  :  sove[n]te[s] 
foiées,  ï8go,  fréquemment. 

sovin,  1040,  1 1 18,  souvin,  2290, 
.tur  le  dos,   renversé;  paume 

—  e,  4i3o,  la  paume  vers  le 
ciel. 

soz,   3oi,    683,  etc.,  sous;   par 

— ,  2824,  sous. 
suel,  voir  soloir. 
suer,  cas  suj.  sing.,  154,  2233, 


2555,  cas  rég.,  2149,  sœur; 

voir  seror. 
sueront,   suerront,   voir   sivre. 
sulïen,  3o86,  de  Syrie. 
sus   {adv.),   280,    326,    etc.,  en 

haut;    1021,    3266,    en    haut 

{avec  mouv.);    201J,  dessus; 

la  — ,    i334,   là-haut;   2235, 

là-bas,  au  loin  ;  {prép.),  32  2, 

3oo2,  etc.,  sur. 


tables,  2324,  sorte  de  jeu,  forme 
primitive  du  tric-trac. 

taint,  3433,  coloré. 

taisier  (se),  3'  p.  plur.  pf. 
taisirent,  674;  714,  760,  etc., 
se  taire. 

talent,  talant,  161,  1796,  etc., 
disposition  d'esprit;  526,  dé- 
sir; avoir  — ,  «795,  2417, 
3i3o,  avoir  le  désir  de  ;  faire 
son  — ,  2633,  faire  ce  qu'on 
veut;  s!il  vos  vient  a  — ,  244, 
2804,  51  vous  vnule^;  2723, 
41 59,  4274,  désir  amoureux  ; 
faire  ses  — ,  363,  387,  2725, 
satisfaire  ses  désirs  amou- 
reux ;  mal  — ,  voir  maltalent. 

tant  (adj.),  420,  i393,  i833-4, 
2492-?^  etc.,  en  si  grand 
nombre,  en  si  grande  quan- 
tité; {adv.),  49.  861,  1024, 
etc.,  si,  tellement  ;  voir  atant» 
par,  por  ;  {conj.)  —  coin, 
i333,  i8i\^,  etc.,  autant  que; 
—  que,  700,  1403,  tellemen 
que;  53 1,  637,  etc.,  jusqu'à 
ce  que,    tout  le  temps  que. 

tantost,  1979,  2102,  3814,  tottt 
de  suite. 

targe,  2398,  2492,  2987,  3658, 
4174,  bouclier  long  et  rectan- 
gulaire. 


2.-»0 


DOON    DE    LA    ROCHE 


targier,  36 lo,  tarder;  se  — , 
4^27,  retarder. 

tart  ;  a  — ,   33o6,   tardivement. 

tassel,  1574,  1946,  2006, 
franges,  passements. 

tel  :  je  vous  donroie — ,  1174, 
je  vous  porterais  un  tel  coup. 

tence,  2  338,  querelle,  lutte  à 
main  armée. 

tencier,  425,  engager  une  dis- 
cussion, disputer. 

tenement,  3 1 24, 3 1 5 1 ,  445o,  do- 
maine, propriété. 

teneûre,  465,  21 83,  2188,  fief. 

tenir,  fut.  J^  p^  sing.  tenra, 
465,  3378,  tendra,  2i83,  2» 
p.  plur.  tenrez,  481,  etc.  ;  pf. 
3'  p.  plur.  tindrent,  2524, 
3277;  infin.  tenoir  {à  l'asson.), 
627,  avoir,  posséder  {au  sens 
féodal)  ;  693,  gouverner  ; 
1233,  soutenir  ;  2524,  retenir; 

—  a,  337g,  3747,— por,  3375, 
considérer  comme  ;  —  a  jeu 
de,  3394,  5e  moquer  de  ;  — 
.XV.  lieues,  3172,  occuper  une 
étendue  de  i5  lieues;  .vijc.  be- 
zanz  tienent,  1619,  1827, 
y  00  besants  d'or  y  sont  con- 
tenus, cela  vaut  joo  be- 
sants ;  or  en  tiennent  lor 
feste,  33o2,  3277,  maintenant 
[les  chiens]  s'en  régalent  ;  — 
grandement,  1477»  traiter 
avec  distinction  ;  —  mariage, 
j^22 1,  épouser  ; — parole,  2  172, 
délibérer;  —  règne,  574,  rete- 
nir les  rênes;  —  une  voie, 
223^,  prendre  un  chemin;  se 

—  a,  3221,  être  partisan  de; 
s'en — ,  1175,  1226,  1266, 
1 796,  s'abstenir  de. 

tenrement,  1210,  1234,  etc., 
tendrement. 


tens  :  par  — ,  1589,  2418,  3408, 
quand  le  moment  sera  venu, 
plus  tard. 

tenser,  i23y,  protéger. 

tente  :  heaumes  a  — ,  25io, 
heaumes  à  lambrequin  (?). 

tenue,  2  ig'5,fief. 

terme,  936,  i3oi,  401 1,  termi- 
ne, 844,  1194,  moment. 

terrier,  35 18,  3887,  retranche- 
ment en  terre. 

terrin  {adj.),  3266,  dont  le  sol 
est  en  terre  battue. 

timbrer,  i^bb^,  jouer  [d'un  ins- 
trument]. 

tindrent,  voir  tenir. 

tire  [ms.  cire],  2948,  étoffe  de 
soie  [de  Tyr]. 

tirer  :  —  la  reigne,  325,  tirer 
les  rênes,  retenir  le  cheval. 

tolir,  ind.  prés.  2'  p.  sing.  tes, 
ïo33,  3*  p.  sing.  to[l]t,  lobg, 
tout,  200,  2«  p.  plur.  {et  im- 
per.) tolez,  679,  i683,  3*  p. 
plur.  tollent,  3^2b,  3642;  fut. 
ï^p.  sing.,  torrai,  1257,  i3i6, 
22i(j;  pj.  3*^ p.  sing.  to\'\,  199; 
p.  pa.  tolu,  463,  1047,  ^t<^-} 
tolois  {cas  rég.plur.à  l'asson.), 
442 1 ,  enlever. 

tondre  :  faire  —  en  croiz  {com- 
nie  un  fou),  696. 

tormente  :  torner  a  — ,  388o, 
soumettre  à  des  supplices. 

torneïs,  161 5,  fait  au  tour. 

torner,  3'>  p.  sing.  subj.  prés. 
tort,  27;  —  a,  427,  43o,  trans- 
former en;  —  a  [qqn],  1640, 
3o32,  3692,  aller  vers  qqn; 
—  a  gas,  loii,  tourner  en 
plaisanterie;  —  a  tormente, 
voir  ce  mot;  {v.  trans.) 
i538,  1645,  repousser,  chas- 
ser; —  sor  (v.    intr.),  4183, 


GLOSSAIRE 


23  I 


retomber  sur  ;  en  — ,  27,  pren- 
dre congé,se  séparer  [de  qqn]  ; 
—  en  fuie  [absolt],  3g4o,  s'en- 
fuir; (v.  trans.)  i852,  3oi4, 
faire  fuir;  se  —  :  tornez  vos 
de  sor  mi,  47g,  809,  tornez 
[vos]  de  sus  nos,  491,  alle^- 
vous  en;  s'en  — ,  189,  742,  etc, 
s'en  aller. 

tornïer  :  tant  com  li  monz  tor- 
nie,  4145,  sitr  toute  l'étendue 
de   la  Terre  {qui  est  ronde). 

tornoi,  17,  tournoi. 

torrai,  voir  tolir. 

i.tort,  1248,3238,  injustice;  a 
— ,  449,  890,  902,  2858,  injus- 
tement. 

2.  tort,  27,  voir  torner. 

tost,  79r,  792,  i32g, etc.,  vite. 

tôt  :  de — ,  882,  complètement. 

tout,  voir  tolir. 

trabuchier,  trebuchier  (v. 
trans.),  2367,3983,  renverser, 
précipiter;  (v.  inir.),  2481, 
38o6,  4389,  trébucher. 

traîner,  699,  supplicier,  en  traî- 
nant derrière  un  cheval. 

traire,  199,  21 3,  etc.,  tirer 
[l'épée],  926  [le  poil  =  les 
cheveux]  ;  1900,  3571,  3994, 
enlever  [les  nappes]  ;  — grant 
mal,  35oi,  supporter  grand 
mal; —  la  vie  du  cors,  4146, 
tirer  la  vie  du  corps,  tuer  ;  — 
a  .j.  conseil,  1487,  —  a  garant, 
1171,2605,  citer  devant  un 
conseil,  comme  caution  ;  se  — , 
236 1,  s'avancer. 

traïtor,  118,  102b,  etc.,  traî- 
tre. 

*trametre  [ms.  tresmetre],  2281, 
envoyer. 

travail,  2^1^,  peine,  fatigue. 

travaillier,    2774,   36go,  moles- 


ter, tourmenter;  3236,  donner 
de  la  fatigue;  travail  lié, 
2039,  2070,  etc.,  fatigué;  se 
— ,  2978,  se  donner  de  la 
peine  {pour  voyager  vite);  se 
—  de,  i5o4,  s'activer,  se 
démener  pour. 

trebuchier,  voir  trabuchier. 

tref  {masc),  1990,  1995,  201 5, 
2037, 3 1 14,  Si  19,  3633,  3946, 
3962,  4076,  pavillon,  tente. 

trellis  {adj.),^iSo,dont  les  mail- 
les sont  à  triple  fil. 

très,  771,  1990,  2494.  4363, 
exactement,  précisément. 

tresfiner,  2014,  2162,  2317, 
2332,  s'arrêter. 

tresgité,  2oi3, fondu. 

tresmetre,  2281,4506,  envoyer  ; 
cf.  trametre. 

trespas  :  en  — .  336o,  au  pas- 
sage. 

trespasser  (v.  trans.),  324,352, 
etc.,  passer,  franchir;  3 16, 
transgresser,  violer  ;  {v.  intr.) 
2757,  passer  complètement  {en 
parlant  du  temps). 

trespercier,   4384,  transpercer. 

tresque  {conj.  de  temps),  2166, 
jusqu'au  moment  oii;  tresqu'a 
{prép.  de  lieu),  1609,  1982, 
etc.,  jusqu'à. 

tressaillir  {v.  trans.),  8o3,  sau- 
ter pardessus;  (v.  intr.),  — 
en  pies,  3389,  sauter  sur  ses 
pieds,  se  dresser. 

tressuer,  45 1,  se  couvrir  de 
sueur;  tressué,  1626,  2o38, 
trempé  de  sueur. 

trestorner,  1765,  détourner, 
dérober;  —  162 1,  négliger, 
transgresser  [un  ordre]  ;  ja 
n'en  ert  ou  iert  trestorné,  935, 
i5oo,  1860,  etc.,  c'est  décidé, 


232 


UOON    DE    LA    ROCHE 


on  n'y  changera  rien  ;  n'en 
serez  trestornée,  952,  votts 
n'échapperesi  pas  à  votre  des- 
tinée; se  — ,  3784,  se  détour- 
ner. 

trestot,  217,  699,  tout  entier; 
trestoz  {cas  rég.  plur.),  tres- 
tuit  [cas  suj.  phir.),  i5,  1222, 
etc.,  tous  ensemble  ;  [adv.), 
221,  343,  entièrement. 

treûs,  3i63  [corr. trcbus  (?)],  es- 
pèce de  chausses. 

trive,  II 39,  1149,  etc.,  trêve. 

troblé,  3975,  troublé  {dans  le 
sens  matériel  et  le  sens  moral 
à  la  fois). 

troilié,  3i85,  treillissé. 

trois  {sens  indéfini)  :  —  paro- 
les, 472,  487,  etc.,  quelques 
paroles. 

tronc,  cas  rég.  plur.  trons, 
3833,  3937,  tronc  d'arbre  em- 
ployé comme  projectile  pour 
une  machine  de  guerre. 

trône,  440,  ciel,  firmament. 

trons,  voir  tronc. 

trop,  846,946,  1643,  beaucoup, 
très. 

trosser  :  —  son  harnois,  1377, 
charger  son  bagage;  {v.intr.), 
4596,  faire  son  bagage; 
trossé,  1772,  "i-]  II,  chargé  {en 
parlant  d'une  bête  de  somme). 

trover,  ind.  prés.  3'  p.  sing. 
trueve,  3o2  2;  subj.  prés, 
i"  p.  sing.  truisse,  2946,  2° 
p.  plur.  truissiez,  4244,  t7'0u- 
ver. 

truant,  3247,  3589,  36 1 5,  vaga- 
bond. 

trueve,   truisse,    truissiez,    voir 

trover. 
tumer,  4563,  faire  des  culbutes 
d'acrobate. 


tumeresce,   4563,  femme    qui 
«  tume  »,  acrobate. 

uis,  906,   1043,  etc.,  porte. 
umilier  (s'),  3042,  devenir  bon, 
miséricordieux. 

va,  2790,  interjection. 

vaillant,  4,  7,  37,  etc.,  vaillis- 
sant,     i33,    la   valeur  de. 

vaincre: — lestor,  i^bo,  gagner 
la  bataille. 

vair  (adj.),  2008,  changeant, 
brillant  {en  parlant  desyeux)  ; 
{subst.),  io5,  633,  fourrure 
de  l'écureuil  du  Nord. 

val,  2912,  plur.  vaus,  2913, 
vallée;  a  — ,  voir  aval. 

valet,  vallet,  108,  i326,  etc., 
jeune  homme. 

vanteras  {cas  suj.  sing.),  41 3 1, 
vantard. 

vaselage,  voir  vasselage. 

vassal  {adj.),  i960,  brave,  cou- 
rageux; {subst.),  2039,  3324, 
homme. 

vasselage,  vaselage,  433 1 ,  4392, 
courage. 

veant  :  d'oïr  et  de  — ,  261,  par 
rouie  et  par  la  vue. 

veer  {3^  p.  plur.  ind.  prés. 
vieent  [ms.  valent],  4060), 
2874,  3o58,  3234,  4122,  re- 
fuser, interdire. 

veez,  voir  vez. 

veïr,  736,810,3923,  voir;  p.prés. 
veant,  261,  988,  volant,  1431. 

venir  :  bien  veigniez,  3539, 
soye^  le  bienvenu  ;  —  ensem- 
ble, 908,  se  marier;  —  a 
cornant,  242,  etc.,  —  a  gré, 
229,  i555,  i558,  2077,  — a 
plaisir,  229,  —  en  plaisir,  23 1, 
—  a  talant,  244,  plaire. 


GLOSSAIRE 


233 


venjance   :    faire  sa  — ,    2897, 

établir  un  plan  de  vengeance. 

venter,  706,  404?,  jeter  au  vent. 

ventre,  poitrine  :   le  cuer  qu'il 

ot  ou  ventre,  1104,   11 17. 
vergié,    2464,  vergé  {épithètede 

heaume), 
vergonder,  225,  307,  etc.,   cou- 
vrir de  honte. 
vergondos,  989,  i436,  honteux. 
vérité,  voir  verte, 
vermeus  {cas  suj.  sing.),  2438, 
vermoilz  {id.),  3oo-j,  vermoil 
{cas  ré  g.),  1993,  vermeil. 
verroil,    iq5o,  voruel   [nts.  ro- 

vuel]  1378,  virole. 
vers,    788,    824,     etc.,    contre, 
envers;  818,  en  comparaison 
de  ;  de  — ,  voir  devers, 
verser  [v.  trans.),  2  362,  renver- 
ser •,{v.intr.),  100, 2  ^8  I  ,tomber. 
vert,  3764  (?),  épithète  d'espée. 
verte,  vérité:  de  — ,  73,82,  etc.. 

vraiment. 
vertir  (se),  2686,  se  tourner. 
vertu,  10 18,  etc.,  courage;  par 
— ,  2240,  233  I,  etc..  courageu- 
sement. 
ves,  voir  vez. 

vespre  {masc),  943,  2337,  soir, 
vesteûre,   438,   447,    vêtement. 
veudie,  voir  vuidier. 
veve,  29,  veuve, 
vez,  veez,  ves    :  —  ci,  ici,  208, 
2334,  4290,    etc.,    —  moi  ci, 
788,  voici. 
vi.  voir  vis. 

viaire,  3i,  285,  2008,  visage. 
viande,  3279,  etc.,  nourriture. 
vianois,  362,  388,  fabriqué  à 
Vienne  {épithète  de  branc). 
\\ax  {cas rég. plur.),  356 1,  vieux. 
vieent,  voir  veer. 
vilain,  23 10,  homme  non  noble. 


vi[l]té,  voir  viuté. 

viole,  717,    i356,  instrument  à 

cordes. 
violer,  838,  2107,   2787,   4558, 

jouer  de  la  viole, 
i.  vis  {cas  suj.  sing.  de  vif).  223, 

480.  etc.,  vivant. 
2. vis,  797,  799,  etc.,  cas  rég.  vi, 

i883,  visage. 
3.  vis  :  il  m'est  a  — ,  1449,  i7  me 

semble. 
viste,  658,  agile. 
vitaille,  2969,  3iij,etc.,  vivres, 

provisions  de  bouche. 
viuté,   vi[l]té,   2892,  abjection, 

honte  ;  688,  acte  criminel. 
vivandier,  3272,  homme   hospi- 
talier, généreux. 
vivre  :  —  de,  966,  vivre  aux  dé- 
pens de. 
voiant,  voir  veïr. 
voie:  tote  — ,    1278,    de   toute 

manière. 
voicr,  3226,    officier  préposé   à 
la  surveillance  et  à  l'entretien 
des  routes. 
voir,  2262,  vrai;  dire  — ,  372, 
dire  la  vérité;  de   — ,     1228, 
por — ,  2048,  36o5,  vraiment; 
{adv.),  1181,  1906,  etc.,  vrai- 
ment; non — ,4229,  non  vrai- 
ment. 
voire,   1043,    vraiment:   voire- 
ment,  1061,  etc.,  même  sens. 
voldrent,  voir  voloir. 
*  voleïlle,  4498,  volaille. 
voloir,  prés.  ind.     /»  p.    sing. 
vueil.  i457;condif.  j' p. sing. 
volroie,  11 12;  pf.  3' p.  sing. 
vot,  1845,  1968,   33/3,   vout, 
i334,  /•  p.  plur.    vousimes, 
3076,    2'  p.   plur.  vousistes, 
2259,    3*  p.  plur.,  voldrent, 
i6o3,   1982,   voudrent,  353o, 


2^4 


DOON    DE   LA    ROCHE 


vourent,  SSgo  ;  subj.  prés. 
2«  p.  plur.  veuillez,  SSSy: 
impf.  i^  p.  sing.  vosisse,  720, 
3329,  vousisse,  3297,  2^  p. 
vosisses,  474,  489,  3^  p.  vo- 
sist,  1483,  3°  p.  vousissent, 
3391,  vouloir;  inf.  pris  subs- 
tantivt,  i368,  chose  décidée. 

voruel,  voir  verroil. 

vosisse,  vosist,  vot,  voir  valoir. 

votiz,  2287,  en  forme  de  voûte, 
bombé  {épithète  d'escu). 


voudrent,  vourent,  vousimes, 
vousistt^s,  vout,  etc.,  voir 
voloir. 

vueil,  voir  voloir. 

vuidier,^.  pa.fém.  sing.  veudie, 
2 161,  quitter,  abandonner. 

waignon,  gaignon,  33o2,  3337, 
gros  chien,  mâtin. 

ysopé,  voir  isopé. 


TABLE  DES  NOMS  PROPRES 


Afrique  :  or  d'  —,  6og  {cf.  Au- 
friqiiant). 

Âis  a  la  Chapele,  gSg,  2372, 
Aiz  a  la  C,  85g,  Ais  en 
Loeraigne,  2335,  Ais,  221 3, 
2278,  2322,  Aix-la-Chapelle; 
appartient  à  Doon  de  La 
Roche. 

Alemagne,  2901,  Alemaigne, 
2166,  Aiemaine,  2602,  dési- 
gne la  région  soiiabe;  appar- 
tient à  Olive,  comme  femme 
de  Doon;  duc  d'  —,  2  56i, 
265o,  titre  donné  d  Doon. 

Alemant,  998,  1080,  iroi,  cas 
rég.  plur.  Alemans  ,  i3, 
les  Alamans  ou  Soiiabes,  par 
opposition  aux  Raviers  et 
<3«j:  Frisons;  3i25.  épithète 
donnée  à  Florent,  père  de 
Doon;  1,  ly,  etc.,  à  Doon; 
2761,  2775,  2781,  à  Landri 
et  à  ses  compagnons . 

Alixandre,  roi  de  Constantino- 
ple,  1400,  qualifié  empereur, 


1423 ,      1436 ,      1988  ,     etc. 

Aloris  [cas  suj.),  1 129,  traître. 

Amauri,  cousin  de  Doon,  se 
montre  favorable  à  Olive, 
370  et  suiv. 

Amauri,  2783,  3939,  compa- 
gnon de  Landri  à  Constanti- 
nople. 

Amauri  de  Coloigne,  3871, 
compagnon  de  Doon. 

Âmorant  de  Saint-Gile,  2989, 
neveu  de  Vévéque  Auberi,  cou- 
sin germain  d'Olive. 

Andrier  (saint),  53,  saint  An- 
dré. 

Andrius  [cas  sujet),  2783,  com- 
pagnon de  Landri  à  Constan- 
tinople. 

*  Angarie,  voir  Hongrie. 

*  Angevins,  i3. 
Anjou,  41 14. 
Antecrist,  3904. 

Antoine,  2768,  localité  attribuée 
à  Vltalie,  le  nom  semble  être 
une  altération  de   Hantone. 


236 


DOON    DE    LA    ROCHE 


Antoine,  23 2 j,  partisan  de  To- 
mile. 

Apolin,  4401,  (i/ei/  des  Sesnes. 

Arabe,   Arabie  :  or  d'  — ,  4418. 

Arabois,  d'Arabie  :  or  — , 
620. 

Arembour,  3^23, Jille  du  maire 
Bernard. 

Asson  ,  cas  suj.  Asses  de 
Maience,  102  i ,  partisan  d'O- 
live et  de  Landri,  661,  1020, 
etc.  ;  donné  par  erreur  comme 
compagnon  de  prison  de  Doon, 
2802. 

Asson,  2^28,  partisan  de  To- 
mile. 

Auberi  (Aubri  2990,  2999, 
SySS),  évêque,  oncle  d'Olive, 
21 63,  2168,  etc.;  sa  bio- 
graphie, 2926  et  suiv. 

Audegour,  Jille  de  Tomile, 
seconde  femme  de  Doon,  654, 
2  1 14,  3026. 

Aufricant  [cas  suj.  plur.), 
2778,  Africains. 

Aumarie,  Almeria  (Espagne)  : 
drap  d'  — ,  4069. 

Autefeulle,  4178,  Autefueille, 
2872,  Autefuelle,  4183,  Hau- 
tefeuUe,  4168,  château  de 
Grifon  ,  pris  par  Landri, 
4167,  et  suiv.;  voir  Grifon 
d'A. 

Auterme,  i32o,  ï3bb,  bourgeois 
de  Paris . 

Bacce  a  la  porte,  839  (?). 
Baivier,  voir  Bavier. 
*Balegué    [ms.   Baligné],  4555, 

Balaguer  [Catalogne). 
Bavier,  i3,  998,  Bai   ier,    1080, 

Bavarois. 
Bavière,  2iÇ>Ç).pays  appartenant 

à   Olive. 


Beatriz,  2940,  sœur  de  Vévêque 
A  uberi,  mère  de  Pépin  le  Bref. 

Benoîte,  1204,  nonne,  qui  dé- 
nonce à  Doon  le  complot  de 
Tomile  contre  Landri. 

Be[o]rges,  2991,  Bourges,  ville 
dont  Amorant  de  St-Gile  est 
duc. 

Berengier,  i5o2,  i53o,  cheva- 
lier de  Constantinople  envoyé 
en  France  pour  s'enquérir  sur 
Landri. 

Beri,  4232,  Berry. 

Bernart,  3191,  32i5,  3228, 
Bernehart,  3353,  34or,3633, 
366o,  officier  domanial  resté 
fidèle  à  Doon. 

Bertain  [cas  rég.),  3423,  fille  du 
précédent. 

Bonevent,  2768,  Bénévent  (Ita- 
lie). 

Bourgogne,  4232. 

Bras  Saint  Georges,  867,  i5q4, 
1977,  Hellespont,  mer  de 
Marmara. 

Bretaigne,  41 13. 

Breton,   435. 

Brohimax  de  Sesoine,  4353, 
Brohemax,  4370,  4383,  ?-oz 
des  Saxons,  emmène  pri- 
sonnier Pépin  le  Bref. 

Calabre,  2192  (nommé  comme 
un  pays  lointain),  2761.  2908. 

'Carsadoine  4127  [ms.  Laza- 
doine],  4355  [ms.  Jazacoi- 
gne],  roi  de  Sasoingne,  tué 
par  Pépin. 

Clarembaus  (cas  sujet)  de  Hi- 
nant,  1074,  partisan  de  To- 
mile. 

Coloigne,  112  [ms.  Coufongne], 
etc.,  Coloigne  sor  mer,  1622, 
Cologne,    ville    habitée    par 


TABLE    DES    NOMS    PROPRES 


237 


Doon  et  où  se  passe  le  drame 
de  Vaccusation  d'Olive  et  toute 
la  conjuration  contre  Landri  ; 
Varchevèque  de  C.  protège 
les  envoyés  de  F  empereur 
Alexandre  contre  Tomile, 
i6o3  et  suiv.;  Doon  en  est 
chassé,  2168  et  suiv.;  Doon 
reprend  la  ville,  400^  et  suiv.; 
Pépin  y  va  avec  Doon  et 
Olive,  4614  et  suiv.;  voir 
Joserant,  Simon,  Tomile. 

Constantin  (palais),  aybg,  2792. 
palais  bâti  à  Constantinople 
par  Constantin  le  Grand. 

Gonstantinoble,  864,  i638, 
2526,2614,2723,  4267,  Cens 
tentinoble,  i383,  etc.;  2424, 
4433,  etc.,  Constantinople. 

Damedé,  982,  Damcdeu,  i225, 
Damedicu,  827  (cas  rég.\  Da- 
medex,  1 17,  Damedeus,  ii36, 
Damediex,  523,  542.  Dame- 
dieus,  1000,  II25  {cas  suj.), 
le  seigneur  Dieu. 

Daon  l'Alement,  voir  Doon. 

Dé,  voir  Dieu. 

Denis  (saint),  4380. 

Dieu,  207,  2i5,  etc.,  Deu,  28, 
g6b,etc.,Dé,  44,  gb(casrég.), 
Des,  4(1,  Dex,  147,  412,  etc., 
Diex,  321,  423,  etc.,  Dieus, 
226,  928  {cas  sujet).  Dieu. 

Dinant,  1074.  ville  de  Belgique. 

Doon  de  La  Roche,  cas  suj.  Do 
[ms.  Doz],  5o,  Ô4,  etc.,  Do 
IWlemanz  [ms.  Daon  l'Ale- 
ment], i5,  Do  li  Alémanz,  5o5, 
Do  de  la  Roche,  32,  72,  etc., 
Doons,  38;  cas  rég.  Doon,  2, 
9,  etc. 

Dorâmes  {cas  suj.),  roi  de 
Hongrie,  attaque   Alexandre 


empereur  de  Constantinople  et 
est  battu,  2423  et  suiv.,  4220. 
Dunoe,  2909,  le  Danube,  placé 
par  l'auteur  en  Italie. 

Esmerez  [cas  suj.),  2996,  fait 
partie  de  Varmée  de  Vévéque 
Auberi. 

Espaigne,  Espagne  :  mule  d'  — , 
3775. 

Espire,  Spire,  fait  partie  du 
domaine  de  Tomile,  563, 
6o5,  848,  2373,  2656,  3o2i; 
porte  d'  — ,  au  château  de  la 
Roche,    3o2  r  ;    voir   Salvain. 

Espovante-felon,  'i'i'i\,  faux 
nom  que  Doon  donne  à  Jofroi. 

Finepople,    865,    Philippopoli, 

ville  de  Thrace. 
Flamant,  14,  999,  habitants  des 

Flandres. 
Flandres,  2267. 
Florenz  li  Alemanz,  3i25,  père 

de  Doon,  prend  Sobrie. 
Flori[i]en,  3348,  sénéchal  d'O- 
live à  La  Roche. 
Forbin,  4634,  traître. 
Formont,  io83,  compagnon  de 

Landri. 
Franc  :  le   roi    — ,   1097,  2126, 

titre  donné  à  Pépin. 
France,   219,  432,  etc.;   douce 

— ,  20,  981. 
François  (=  franc],    822,  999, 

2258,    2849,    4294,    épithète 

donnée  à  Landri. 
Frisons,  14,  999,   habitants  de 

la  Frise. 
Frobert,    333o    et   suiv.,  faux 

nom  que  se  donne  Doon. 

Garnier,  2484,  chevalier  de  l'ar- 
mée hongroise. 


238 


DOON    DE    LA    ROCHE 


Gautier,  3246,^/5  de  Bernard. 

Gautier,  chevalier,  cousin  ger- 
main de  Doon,  1760  et  suiv., 
est  chargé  par  Varchevêque  de 
Cologne  de  réclamer  à  To- 
mile  les  dromadaires  des  en- 
voyés de  Constantinople . 

Gautier  de  Sorbrie,  BgSg,  par- 
tisan de  Landri. 

Genevois,  291 1,  territoire  de 
Gênes  {})  ;  2601,  homme  de 
Gênes  (?). 

Germain  (saint),  341 3. 

Gilebert,  2327,  partisan  de 
Tomile. 

Gilebert  de  Vaubile,  1241. 

Gillebert,_^/s  aine  de  Bernard, 
3206,  3246,  3309. 

Giilibert  filz  Henri,  ingénieur, 
dirige  le  siège  de  Mayence, 
3925  et  suiv. 

Goniiaume,  riche  bourgeois  de 
Cologne,  cousin  germain  de 
Doon,  héberge  les  etwoyés  de 
Constantinople  venus  pour  s'en- 
quérir de  Landri  y  1 609  et  suiv. 

Gormaise,  Worms,  vicomte  ap- 
partenant à  Tomile,  563, 6o3, 
848  ;  appartenant  à  Grifonel, 

2994- 

Grégoire,  chapelain  de  Doon, 
envoyé  en  mission  auprès  de 
Pépin,  3o9  et  suiv. 

Grice,  i382,    Grèce. 

Grifon  d'Autefueille,  Grifon  le 
viel,  3799,  cas  suj.  Grife, 
Grifes  a  la  barbe,  36o6,  traî- 
tre, 2872,  père  d' H  ardre  et 
d'Hélie,  3734,  seigneur  de  So- 
rable,  3756,  3780,  3799,  3866, 
attaqué  à  Hautefeuille  et  tué 
par  Landri,  4167  et  suiv. 

Grifon  (comte),  voir  Grifon 
d'Autefueille. 


Grifonel,y?/5  de  M alsarie,  sei- 
gneur de  Worms,  est  tué  par 
Amorant  de  Saint-Gile,  2992 
et  suiv. 

Grifonic,  Griftonie,  2616,  2722, 
2791,  empire  des  Grecs. 

Griffons,    2000,   Grecs. 

Guenelon,  cas  suj.  Guenes, 
1142,  traître,  neveu  de  To- 
mile, 119,  1 128,  /rère  d'Har- 
dré  et  d'Hélie,  3779. 

Guinemant,  2328,  partisan  de 
Tomile. 

Guxnemanx,  partisan  d'Olive  et 
de  Landri,  661,  1020,  etc., 
donné  à  tort  comme  compa- 
gnon de  captivité  de  Doon, 
2859. 

Hardré,  traître,  fils  de  Grifon, 
cousin  de  Tomile  et  de  Gue- 
nelon, 120;  ménage  une  trêve 
avec  Doon,  1 128  et  suiv.;  con- 
seille de  voler  les  droma- 
daires des  eyivoyés  de  Cons- 
tantinople, i6o5  et  suiv.; 
fait  prisonnier  par  Landri, 
3783  et  suiv.  ;  nommé  par 
erreur  Hardris,  38i8. 

Hauquetant,  traître,  tué  par 
Landri,  4633. 

Hautcfeulle,    voir    Autefeulle. 

Héiie,  traître,  fils  de  Grifon, 
tué  par  Landri,  3733  et 
suiv. 

Henri,  personnage  de  la  suite 
de  Doon,  227. 

Henri,  père  de  l'ingénieur  Gii- 
libert, 3925. 

Hennins,  1429,  Arméniens. 

Herupe,  452,  région  entre 
Seine  et  Loire  {Cf.  R.  de 
Cambrai,    Table). 

Hervi,  traître,    cousin    de    To- 


TABLE   DES    NOMS    PROPRES 


289 


mile,     120,   appelé  plus    loin 
Hervis  de  Lion,  ii3o. 

1.  Hongre  (li),  2427,  2522,2526, 
les  Hongrois. 

2.  Hongre,  2427,  2436,  fleuve 
qui,  semble-t-il,  sépare  la 
Hongrie  de    V Empire  grec. 

Hongrie,  Honguerie,  pays  oii 
réside  l'évêque  Auberi,  2(62; 
royaume  de  Dorame,  2414, 
2421  ;  4044;  escu  d'*Angarie 
[ms.  Angie],  4069. 

*Huon  [cas  suj.  Hues)  de  Pon- 
talie,  accompagne  Landri  et 
Pépin  àConstantinople,j^4g5. 

Huissant-sur-mer,  1791,  Wis- 
sant,  Pas  de -Calais,  cant.de 
Marquise. 

Jazacoigne,  voir  Carsadoine. 

Jehan,  évêque  de  Constantino- 
ple,  4632. 

Jehan,  homme  de  la  suite  de 
Doon,  227. 

Jhcrusalem,  3398. 

Jésus,  Jhesus,  249,  773,  etc., 
Jésus-Christ. 

Jhesus,  vojV-Jesus. 

Joffroiz,  voir  Jofroi. 

Jofrin,  frère  d'Asson  de  Ma- 
yence,  2866. 

Jofroi  de  Maïance,  cas  suj.  Jo- 
froiz.JofFroiz,  cousin  de  Doon, 
se  montre  favorable  à  Olive, 
370  et  suiv.  ;  aide  Doon  à  dé- 
fendre La  Roche  contre  To- 
mile,  2382  et  suiv.  ;  accom- 
pagne Doon  en  Hongrie  et  est 
fait  prisonnier  avec  lui,  2407, 
etsuiv.;  est  donné  par  erreur 
comme  compagnon  de  Landri, 
2782,  accompagne  Doon  che:{ 
le  maire  Bernard  et  à  La 
Roche,  3 1 38  et  suiv. 


Joserant  de  Coloigne,  partisan 
de  Tomile,  tué  par  Landri, 
II 14;  un  autre  personnage 
du  même  nom  est  tue'  par 
Doon,  2296. 

Justamont,;?ére  de  Carsadoine, 
roi  de  Sasoingne,  tué  par 
Pépin,  4127. 

*  Lalice.  1428,  Laodicée  en 
Phrygie. 

Landri,  cas  suj  Landris,  di- 
min.  Landriet,  280,  292,  53i, 
83i,flls  de  Doon,  108,  etc. 

Lant  (val),  2912,  probablement 
le  «  Land  »  de  l'itinéraire 
d'Albert  de  Stade  [Mon. 
Germ.  Script.,  XVI,  337, 
coL  6),  dernière  station  en 
Maurienne,  avant  la  tra- 
versée du  Mont-Cenis,  au- 
jourd'hui Lanslebourg.  (Cf. 
J.  Bédier,  Les  légendes  épi- 
ques, U,  148.) 

La  Roche,  ville  appartenant  à 
Doon,  Introd.,  p.  C,  8,  216, 
etc.;  assiégée  par  Tomile, puis 
prise  par  Pépin,  2271  etsuiv.  ; 
reprise  par  Olive,  aidée  de  Té- 
vêqiie  Auberi,  2978  et  suiv.  ; 
Doon  y  rejoint  Olive,  35o2 
et  suiv.;  cri  de  guerre  de 
Landri,  1 107,  11 19,  de  Doon, 
23oo. 

Lazadoine,    voir     Carsadoine. 

Leoroingne,  voir  Loeraigne. 

Liège  (le),  i3o9,  Liège,  ville 
belge. 

Limosin^   2267,  Limousin. 

Lion,  I  i3o,  voir  Hervi. 

Loereing,  435,  Loherain,  2i55, 
Loorain,  2'io'j,  Lorrain. 

Loeraigne,  2335,  Loereigne, 
519,     1243,     Loeroigne,    90, 


240 


DOON    DE    LA    ROCHE 


i3o,  880,  2385,  Looraingne, 
2816,  Lorraine;  les  puis  de 
Leoroingne,  2910,  montagnes 
placées  par  l'auteur  en  Italie. 
Loquesie,  traître  tué  par  Lan- 
dri,  4634. 

Mahom,44oij  Mahomet^  4354, 

dieu  des  Sesnes. 
î^aiance,  Maience,  2394,  2808, 

1915,  2921,   3o6o,   3707,   est 

assiégé  par  Doon,    3832    et 

suiv.\  vofr  Asson. 
Malingre, _^/s  de  Doon  et  d'Au- 

degour,  g38,  gbô,  etc. 
Malprin,  messager   de   l'empe- 
reur Alexandre,  4230  et  suiv. 
Malquerant,    traître     tué    par 

Landri,  4634. 
Malsarie,      sœur     de     lomile, 

mère  de  Grifonel,  2992. 
Manople   :    brul  de   — ,    2326, 

bois  placé  dans  le   voisinage 

d'Aix-la-Chapelle. 
Marie  (sainte),  3i3,   827,   etc., 

la  sainte  Vierge. 
Maugin,  traître,  121. 
Monbardon,   1681,    2723,  Mon- 

tebardone  en  Italie.  {Cf.  J. 

dédier,  Les  Légendes  épiques, 

II,  204.) 
Mongiu,    4255,  Montjoie.   {Cf. 

J.  Bédier,  Les  Légendes  épi- 
ques, II,  225  et  suiv.) 
Monjoie,   4390,   Montjoie,    cri 

de  guerre  des  Français. 
Monlaon,     1490,    i5o5,     i5i9, 

1769,  Laon  [Aisne). 
Monpeillier,   864,  Montpellier , 
Montefleûne,  865  (?J. 
Monsteruel     sor      mer,     1959, 

2084,     Montreuil  -  sur  -  mer 

[Pas-de-Calais). 
*  Montervile  [ms.  Monteruule], 


2660,  2848,  localité  oit  eut 
lieu  la  bataille  entre  Dorame 
et  l'empereur  Alexandre. 

Morïene,  2913,   la  Maurienne. 

Morise,  refuse  de  suivre  Lan- 
dri, 1  242  et  suiv. 

Moriz  le  chenuz,  neveu  de 
Doun,  370,  399,  se  montre  fa- 
vorable à  Olive,  1020  et  suiv. 

Noiron  (Pré)  ,  i554,  3333, 
3478,  ager  Vaticanus,  puis 
Prati  dt  Castello,  à  Rome. 

Normandie,  41 14. 

Nonnant,  cas  rég.  Normaus, 
14,  433,  999,  Normands. 

Olive,  à  l'asson.  Olivain,  3409, 
3446,  Olivant,  3437,  sœur  de 
Pépin  et  femme  de  Doon,  43, 
3o,  etc. 

Oton,  partisan  de  Doon,  3871. 

Outré,  envoyé  de  l'empereur 
de  Constantinople  en  France, 
I  3o2  et  suiv. 

Paris  :  Pépin  y  tient  sa  cour, 
12,  38,  3i I,  325,  574,  575, 
1283,  2229. 

Pavie,  1791,  ville  d'Italie. 

Pépin,  roi  de  France,  11,  38, 
etc.;  qualifié  roi,  u,  etc., 
empereur,  41,  54,  etc.,  le 
roi  Franc,  2126;  a  tué  le 
lion,  220,  2226,  2855. 

Père  (saint),  voir  Pierre. 

Pierre  (saint),  qu'on  vénère  à 
Rome,  3325,  3478;  qu'on  vé- 
nère à  Cologne,  21 53,  3544 
{voir  Saint  Pierre)  ;  le  grand 
chemin  saint  Pcre,  1378,  le 
chemin  qui  mène  à  Rome;  S. 
Père  au  Bras,  voir  Saint  Père 
au  Bras. 


TABLE    DES    NOMS    PROPRES 


241 


Pisant,  291 1, contrée  dePiseQ). 

Plaisance  :  iaume  de  — ,  2bij. 

Pohiers,  14,  habitants  de  Poix 
(Somme).  Cf.  Raoul  de  Cam- 
brai, table. 

Poitiers,  3282. 

Poitou,  2267. 

Pontalie,  voir  Huon. 

Pu[i]lle  ,  2173,  2192,  2600, 
2918,  Fouille. 

Pullois,  2778,  habitants  de  la 
Fouille. 

Raol  de  Vaudone,  2328,  parti- 
san de  Tomile. 

Rin,  1091,  *ii23,  3911,4332, 
4395,  le  Rhin,  fleuve. 

Roche,  ;70«r  La  Roche,  16 10. 

Roche  vies  (val  de),  3072,  vallée 
dans  les  environs  de  La  Roche. 

Roinne,  860,  le  Rhône,  fleuve. 

Roissie,  Russie  :  paile  de  — , 
2973. 

Rome,  3398,  4556,  Romme, 
1 15,  1379,  1524,  Rome. 

Roon,  refuse  de  prendre  le 
parti  de  Landri,  1242  et  suiv. 

Roucien  as  grenons  enfumez, 
69,  surnom  donné  à  Doon  en 
manière  de  plaisanterie. 

Saine  la  ville,  voir  Seine  la  ville. 

Saint-Gile,  voir  Amorant. 

Saint  Père  au  Bras,  1 38o,  finn- 
ois/(?).  (Cf.  J.  Bédier,  Les 
Légendes  e'piques,  II,  252- 
253.) 

Saint  Pierre,  église  de  Colo- 
gne, 1639,  1726,  1734,  1737, 
4055,4073,4088,4101,4419. 

Sainte  Sofie,  église  de  Constan- 
tinople,  2701,  4199. 

Saisne,  voir  Sesne. 


Saissoigne,  voir  Sesoigne. 

Salmadrine,  fille  d'Alexandre, 
empereur  de  Constantinople, 
1441,  etc. 

Salvain  d'Espire,  traître,  séné- 
chal de  Tomile,  tué  par  Es- 
meré,  2996  et  suiv.,  3079. 

Sarazin,  866,  Sarrazin,  1427, 
Arabes. 

Sasoigne,  Sasoinne,  voir  Sesoi- 
gne. 

Seine  la  ville  2925,  Seinne  la 
ville,  2968,  Saine,  3953,  Sai- 
ne la  ville,  38g4,  ville  de 
Vévêque  Auberi,  en  Hongue- 
rie  [cf.  V.  2162);  en  réalité 
Sienne,  en  Italie  [voir  la  note 
sur  le  V.  2925). 

Sepolcre,  585,  tombeau  de  saint 
Pierre  à  Rome. 

Sesne  [cas  suj.  plur.),  435o, 
Saisne.  4382,  Saxons. 

Sesoigne,  4353,  Sasoigne,  4126 
Sasoinne,  4370,  Saissoigne, 
3912,  Saxe. 

Seûse,  2912,  Suse,  en  Italie. 
[Cf.  J.  Bédier, Les  Légendes 
épiques.  II,  i38.) 

Simon,  fils  du  maire  Bernard, 
3309. 

Simon  de  Cologne,  3872,  par- 
tisan de  Doon. 

Sobrie,  3ii3  et  suiv.,  3641, 
3665,  3714,  3720,  ville  con- 
quise [sur  les  païens  T)  par  Flo- 
rent, père  de  Dovn  ;  c'est  en 
réalité  la  ville  lointaine  de 
Sobrie,  transportée  arbitrai- 
rement par  l'auteur  de  Doon 
dans  la  vallée  du  Rhin.  Le 
nom  est  emprunté  à  Elie  de 
Saint-Gilles;  cri  de  guerre 
de  Doon,  36oi. 

Soissons,  33 13. 

i« 


24'-i 


DOON    DE    LA    ROCHE 


Sorable,   3756,  ville  de  Grifon 

de  Hautefeuille. 
Sorbrie,  voir  Gautier. 
Sulie,  Surie,  Syrie,  604  :  mur 

de  —  2972,  mul  de  — ,  3oo2, 

4157. 
Sulïen,  de  Syrie:  mul  —,  3o86. 
Surie,  voir  Sulie, 
Symon,  voir  Simon. 

Tomiles,  cas  rég.  Tomile,  1 16, 
119,  etc.,  Tomiles  de  Coloi- 
gne,  i37,  i58,  traître,  frère 
de  Grifon  de  Hautefeuille, 
oncle  de  Guenelon. 

Tosquaigne,  2918,  Toscane. 


Tosquanz  [cas  rég.  plur.), 
2601,  Toscans. 

Tresmoigne,  2768,  4356,  Cré- 
mone en  Italie  (?). 

Turcople,  866,  3849,  Turco- 
mans. 

Vaillie,  voir  Valie.  . 

Val  Lant,  voir  Lant. 
Valfondée,    2601,     localité    en 

Italie. 
Valîe,   2723,    Vaillie   2681  (?). 
Vaubile,  voir  Gilebert. 
Vaudone,  voir  Raol. 
Verdun  ou  mont,  860,  Verdun 

[Meuse). 


tfioitr:,) 


•*illtJ-Mt!« 


.anaac  x.o^  ,9z»iBê 


ERRATA 
CORRECTIONS   ET  ADDITIONS 


Lire  : 

V.  io3,  mois  duré.  —  528,  par  amoit.  —  614,  suppr.  la  note 
aux  var.  —  876,  gastera  voz.  —  gSS,  que  soie  bien  o  vos  (?) 
(cf.  Introd.,  p.  xxx).  —  1088,  despersonéement. —  iiSg,  Do. 

—  1206,  pile[r].  —  1289,  deci  qu'en  paiennie.  —  1265,  plore 
et  sospire  {cf.  Introd.,  p.  xxvi).  —  iSpo,  li  uns  a  l'autre.  — 
1471,  fu[i]tis.  —  i6o5,  mes.  —  1625,  Iaissi[e]rent  {cf.  In- 
trod., p.  xix).  —  1639,  saint  Père.  —  i665,li  mes.  —  lyiS, 
enganez,  et  ajouter  en  note  :  171 3,  enganez,  ms.  engigniez; 
cf.  plus  loin,  V.  1914.  —  1848,  senestre  le[z]. —  1857,   foi. 

—  19 14,  peut-être  faut-il  maintenir  dans  le  fe.rfe  enginié, 
leçon  du  ms.  {cf.  v.  1713  et  Introd.,  p.  xxviii.)  —  1924,  nen. 

—  1995,  Dieus  ne  fist.  —  2060,  var.,  sanc.  —  2080,  de  bon 
aire;  ajouter  aux  var.  :  ms.  de  bonnaire.  —  221 5,  juré  To- 
mile.  —  2253,  2261,  p[l]ois.  —  2319,  .j.  escuiers.  —  2726, 
muir  {cf.  Introd.,  p.  xix).  —  2735,  Par  itel  covenant.  — 
2741,  di[s]t.  — 2789,  Le  chartrier  en  apele.  — 3 107,  ajouter 
aux  var.  :  acorerai,  ms.  acorecerai.  —  3397,  li  povre[s].  — 
3478,  3544,  saint  Père.  —  3678,  ne  place  Dieu.  —  3710,  Vos 
menrez.  —  3795,  puis  je  bien  dire.  —  8909,  var.  :  supprimer 
les  12  derniers  mots.  —  4027,  Del  massacre,  et  ajouter  aux 
var.  :  ms.  maltagre .  —  4086,  var.  :  supprimer  les  six  derniers 
mots.  —  4101,  saint  Père  {cf.  Introd,,  p.  xxxi). 

Notes.  P.  175,  1.  2,  messagers,  au  lieu  de  messages. 


►HM^ 


TABLE  DES  MATIERES 


Introduction. 

Chapitre  PREMIER  :  historique  de  l'édition. ....  .;.î;...>.  .' mi  .'/l 

—  II  :  le  manuscrit  et  les  fragments;  langue  des        .  -xijii 

,,     ,        fragments  et  du  manuscrit va 

— -j'""  ,  III  :  versification,  langue,    patrie  et  date  du 

poème XXV 

_.j    ■  IV  :  analyse  du  poème xl 

—         V  :  formes  diverses  et  évolution  de  la  légende 

épique lxv 

Appendice  :  A,  remarques  sur  quelques  noms  propres..  xcix 
—             B,  sur  un  détail  du  récit  de  la  «  Karlama- 

,j.jii.4»i.         gnus-Saga  » cm 

.;;ai  ,;        c,  note  complémentaire  sur  l'historique  de 

nod  al,          l'édition civ 

Texte  du  poème  de  Doon  de  la  Roche i 

Notes  sur  le  texte  du  poème 173 

Glossaire.,, .,«..... ^.i.,,.,,.,... 180 

Index  des  noms  propres 235 

t^mn^^ui  '.  .•^t>'<  .poçt    -  ,3nb  aoid  sj  îiuq  ,iç>\l  —  .S9indni 

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Publications  de  la  Société  des  Anciens  Textes  Français 
[En  vente  à  la  librairie  Edouard  CHAMPiON,  5,  quai 
Malaquais,  à  Paris-6'  arr.). 


Bulletin  de  la  Société  des  Anciens  Textes  Français  (années  1875  à  1921). 
N'est  vendu  qu'aux  membres  de  la  Socie'té  au  prix  de  3  fr.'par  année,  sur 
papier  de  Hollande,  et  de  6  l'r.  sur  papier  Whatman. 

Chansons  françaises  du  xv«  siècle  publiées  d'après  le  manuscrit  delà  Biblio- 
thèque nationale  de  Paris  par  Gaston  Paris,  et  accompagnées  de  la  musi- 
que transcrite  en  notation  moderne  par  Auguste  Gevaert  (1875).    Epuisé. 

Les  plus  anciens  Monuments  de  la  langue  française  (ix«,  x*  siècles)  pu- 
bliés par  Gaston  Paris.  Album  de  neuf  planches  exécutées  par  la  photo- 
gravure (1875) Epuisé. 

Brun  de  la  Montaigne,  roman  d'aventure  publié  pour  la  première  fois,  d'a- 
près le  manuscrit  unique  de  Paris,  par  Paul  Meyer  (1875).  Sur  papier 
Whatman  seulement 3o  fr. 

Miracles  de  Nostre  Dame  par  personnages  publiés  d'après  le  manuscrit  de 
la  Bibliothèque  nationale  par  Gaston  Paris  et  Ulysse  Robert;  texte  com- 
plet t.  I  à  VII  (1876,  1877,  1878,  1879,  1880,  1881,  i883),  le  vol.  .     i5  fr. 
Le  tome  VII  est  épuisé  en  papier  Hollande. 

Le  t.  VIII,  dû  à  M.  François  Bonnardot,  comprend  le  vocabulaire,  la 
table  des  noms  et  celle  des  citations  bibliques  (1893) 25  fr. 

Guillaume  de  Palerne  publié  d'après  le  manuscrit  de  la  bibliothèque  de  l'Ar- 
senal à  Paris,  par  Henri  Michelant  (1876).  Sur  papier  Whatman  seu- 
lement     40  fr. 

Deux  Rédactions  du  Roman  des  Sept  Sages  de  Rome  publiées  par  Gaston 
Paris  (1876).  Sur  papier  Whatman  seulement 40  fr. 

Aiol,  chanson  de  geste  publiée  d'après  le  manuscrit  unique  de  Paris  par 
Jacques  Normand  et  Gaston  Raynaud  (1877).  Sur  papier  Whatman  seu- 
lement     5d  fr. 

Le  Débat  des  Hérauts  de  France  et  d'Angleterre,  suivi  de  The  Debate  be- 
tween  the  Heralds  ofEngland  and  France,  t/ John  Coke,  édition  commen- 
cée par  L.  Pannier  et  achevée  par  Paul  Meyer  (1877) i5  fr. 

Œuvres  complètes  d'Eustache  Deschamps  publiées  d'après  le  manuscrit  de 
la  Bibliothèque  nationale  par  le  marquis  de  Queux  de  Saint-Hilaire, 
t.  I  à  VI,  et  par  Gaston  Raynaud,  t.  VII  à  XI  (1878,  1880,  1882,  1884, 
1887,  1889,  1891,  1893,  1894,  1901,  i9o3),  ouvrage  terminé,  le  vol.     20  fr. 

Le  saint  Voyage  de  Jherusalem  du  seigneur  d'Anglure  publié  par  François 
Bonnardot  et  Auguste  Longnon  (1878) 20  fr. 

Chronique  du  Mont-Saint-Michel  (1343-1468)  publiée  avec  notes  et  pièces 
diverses  par  Siméon  Luce,  t.  I  et  II  (1879,  i883),  le  vol 20  fr. 

Elie  de  Saint-Gille,  chanson  de  geste  publiée  avec  introduction,  glossaire 
et  index,  par  Gaston  Raynaud,  accompagnée  de  la  rédaction  norvégienne 
traduite  par  Eugène  Koelbing  (1879) là  fr. 


Daurel  et  Béton,  chanson  de  geste  provençale  publiée  pour  la  première  fois 
d'après  le  manuscrit  unique  appartenant  à  M.  F.  Didot  par  Paul  Meyer 
(1880).  Sur  papier  Whatman  seulement 3o  fr. 

La  Vie  de  saint  Gilles,  par  Guillaume  de  Berneville,  poème  du  xii»  siècle 
publié  d'après  le  manuscrit  unique  de  Florence  par  Gaston  Paris  et 
Alphonse  Bos  (1881) 20  fr. 

L'Amant  rendu  cordelier  à  l'observance  d'amour,  poème  attribué  à  Martial 
d'AuvERGNE,  publié  d'après  les  mss.  et  les  anciennes  éditions  par  A.  de 
MoNTAiGLON  (1881) i5  fr- 

Raoul  de  Cambrai,  chanson  de  geste  publiée  par  Paul  Meyer  et  Auguste 
LoNGNON  (1882).  Sur   papier  Whatman  seulement 5o  fr. 

Le  Dit  de  la  Panthère  d'Amours,  par  Nicole  de  Margival,  poème  du  xiii*  siè- 
cle publié  par  Henry  A.  Todd  (i883) i5  fr. 

Les  Œuvres  poétiques  de  Philippe  de  Rémi,  sire  de  Beaumanoir,  publiées  par 
H.  SucHiER,  t.  I  et  II  ensemble  (1884-85) 40  fr. 

La  Mort  Aymeri  de  Narbonne,  chanson  de  geste  publiée  par  J.  Couraye 
DU    Parc   (1884) 20  fr. 

Trois  Versions  rimées  de  l'Évangile  de  Nicodème  publiées  par  G.  Paris  et 
A.  Bos  (i885) o  fr. 

Fragments  d'une  Vie  de  saint  Thomas  de  Cantorbéry  publiés  pour  la  première 
fois  d'après  les  feuillets  appartenant  à  la  collection  Goethals  Vercruysse, 
avec  fac-similé  en  héliogravure  de  l'original,  par  Paul  Meyer  (i885).     20  fr. 

Œuvres  poétiques  de  Christine  de  Pisan  publiées  par  Maurice  Roy,  1. 1,  II  et 
III  (1886,  1891,  1896),  le  vol 20  fr. 

Merlin,  roman  en  prose  du  xiu"  siècle  publié  d'après  le  ms.  appartenant  à 
M.  A.  Huth,  par  G.  Paris  et  J.  Ulrich,  t.  I  et  II  (1886).  Sur  papier 
Whatman  seulement  le  vol 40  fr. 

Aymeri  de  Narbonne,  chanson  de  geste  publiée  par  Louis  Demaison,  t.  I  et 
II  (1887).  Sur  papier  Whatman  seulement  le  vol 40  fr. 

Le  Mystère  de  saint  Bernard  de  Menthon  publié  d'après  le  ms.  unique  appar- 
tenant à  M.  le  comte  de  Menthon  par  A.  Lecoy  de  la  Marche  (1888I.     i5  fr. 

Les  quatre  Ages  de  l'homme,  traité  moral  de  Philippe  de  Novare,  publié 
par  Marcel  de  Fréville  (1888) ao  fr. 

Le  Couronnement  de  Louis,  chanson  de  geste  publiée  par  E.  Langlois, 
(1888).  Sur  papier  Whatman  seulement 5o  fr. 

Les  Contes  moralises  de  Nicole  Bo^on  publiés  par  Miss  L.  Toulmin  Smith 
et  M.  Paul  Meyer  (1889) 25  fr. 

Rondeaux  et  autres  Poésies  du  XV'  siècle  publiés  d'après  le  manuscrit  de  la 
Bibliothèque  nationale,  par  Gaston  Raynaud  (1889) 20  fr. 

Le  Roman  de  Thèbes,  édition  critique  d'après  tous  les  manuscrits  connus, 
par  Léopold  Constans,  t.  I  et  II  (1890)  ensemble 5o  fr. 

Le  Chansonnier  français  de  Saint-Germain-des-Prés  (Bibl.  nat.  fr.  20o5o), 
reproduction  phototypique  avec  transcription,  par  Paul  Meyer  et  Gaston 
Raynaud,  t.  I  (1892) 100  fr. 

Le  Roman  de  la  Rose  ou  de  Guillaume  de  Dole  publié  d'après  le  manuscrit 
du  Vatican  par  G.  Servois  (1893).  Sur  papier  Whatman  seule- 
ment     4 o  fr. 

L'Escoufle,  roman  d'aventure,  publié  pour  la  première  fois  d'après  le  manus- 

«rit  unique  de  l'Arsenal,  par  H.  Michelant  et  P.  Meyer  {1894).  .       23  fr. 

Guillaume  de    la  Barre,  roman  d'aventures,  par  Arnaut  Vidal  de   Ctstei- 

naudari,  publié  par  Paul  Mbyer  (1895) 20  fr- 


Meliador,  par  Jean  Froissart,  publié  par  A.  Longnon,  t.  I,  II  et  III 
(1895-1899),  le  vol 20  fr. 

La  Prise  de  Cordres  et  de  Sebille,  chanson  de  geste  publiée,  d'après  le 
ms.  unique  de  la  Bibliothèque  nationale,  par  Ovide  Densusianu 
(1896) Epuisé. 

Œuvres  poétiques  de  Guillaume  Alexis,  prieur  de  Bucy,  publiées  par 
Arthur  Piaget  et  Emile  Picot,  t.  I,  II  et  III  (1896,  1899,  1908), 
le  volume 20  fr. 

L'Art  de  Chevalerie,  traduction  du  De  re  militari  de  Végèce  par  Jean  de 
Meun,  publié,  avec  une  étude  sur  cette  traduction  et  sur  Li  Abrejance  de 
l'Ordre  de  Chevalerie  de  Jean  Priorat,  par  Ulysse  Robert  (1897).     20  fr. 

Li  Abrejance  de  l'Ordre  de  Chevalerie,  mise  en  vers  de  la  traduction  de 
Végèce  par  Jean  de  Meun,  par  Jean  Priorat  de  Besançon,  publiée  avec 
un  glossaire  par  Ulysse  Robert  {1897) 20  fr. 

La  Chirurgie  de  Maître  Henri  de  Mondeville,  traduction  contemporaine 
de  l'auteur,  publiée  d'après  le  ms.  unique  de  la  Bibliothèque  nationale 
par  le  Docteur  A.  Bos,  t.  I  et  II  (1897,  1898)  ensemble 40  fr. 

Les  Narbonnais,  chanson  de  geste   publiée  pour  la    première  fois  par  Her- 

mann  Suchier,  t.  I  et  II  (1898) Epuisé. 

Il  reste  quelques  exemplaires  du  tome  II. 

Orson  de  Beauvais,  chanson  de  geste  du  xii*  siècle  publiée  d'après  le  ma- 
nuscrit unique  de  Cheltenham  par  Gaston  Paris  {1899) 20  fr. 

L'Apocalypse  en  français  au  XIII*  siècle  (Bibl.  nat.  fr.  4o3),  publiée   par 

L.  Delisle  et   P.  Meyer.  Reproduction   phototypique  (1900) 100  fr- 

—  Texte  et  introduction  (1901) aS  fr. 

Les  Chansons  de  Gace  Brûlé,  publiées  par  G.  Huet  (1902) i5  fr. 

Le  Roman  de  Tristan,  par  Thomas,  poème  du  xii»  siècle  publié  par  Joseph 
BÉDIER,  t.  I  et  II  (1902- 1903),  le  vol Épuisé. 

Recueil  général  des  Sotties,  publié  par  Ém.  Picot,  t.  I,  II  et  III  (1902,  1904, 

19 12),  le  vol 20  fr. 

Robert  le  Diable,  roman  d'aventures  publié  par  E.  Lôseth  (1903).. .     20  fr. 

Ite  Roman  de  Tristan,  par  Béroul  et  un  anonyme,  poème  du  xii*  siècle, 
publié  par  Ernest  Muret  (1903) Epuisé. 

Maistre  Pierre  Pathelin  hystorié,  reproduction  en  fac-similé  de  l'édition 
imprimée  vers  i5oo  par  Marion  de  Malaunoy,  veuve  de  Pierre  Le  Caron 
(1904) i5  fr. 

Le  Roman  de  Troie,  par  Benoit  de  Sainte-Maure,  publié  d'après  tous  les 
manuscrits  connus,  par  L.  Constans,  t.  I,  II,  III,  IV,  V  et  VI  (1904, 
1906,  1907,  1908,  1909,  191 2),  le  vol 2  5  fr. 

Les  Vers  de  la  Mort,  par  Hélinant,  moine  de  Froidmont,  publiés  d'après  tous 
les  manuscrits  connus,  par  Fr.  Wulff  et  Em.  Walberg  (1905).     Epuisé. 

Les  Cent  Ballades,  poème  du  xiv»  siècle,  publié  avec  deux  reproductions 
photorypiques,  par  Gaston  Raynaud  (i9o5) 20  fr. 

Le  Moniage  Guillaume,  chansons  de  geste  du  xii*  siècle,  publiées  par  W 
Cloetta,  t.  I  et  II  (1906,  191 1),  le  vol 25  fr 

Florence  de  Rome,  chanson  d'aventure  du  premier  quart  du  xiii»  siècle, 
publiée  par  A.  Wallenskôld,  t.  I  et  11(1907,  1909),  le  vol 20  fr. 

Les  deux  Poèmes  de  La  Folie  Tristan,  publiés  par  Joseph  Bcdier 
(1907) Épuisé. 


Les  Œuvres  de  Guillaume  de  Machaut,  publiées  par  E.  HocprPNER,  t.  I 

{1908) 20  fr. 

—  t-  n(i9ii) 25  fr. 

Les  Œuvres  de  Simund  de  Freine,  publiées  par  John  E.  Matzke(i909),  20  fr. 

Le  Jardin  de  Plaisance  et  Fleur  de  Rethorique,  reproduction  en  fac-similé 
de  l'édition  publiée  par  Antoine  Vérard  vers  i5oi  (1910) 100  fr. 

Chansons    et    descorts   de    Gautier   de    Dargies,    publiés    par   G.    Huet 
(1912) 10  fr. 

L'Entrée  d'Espagne,   chanson   de  geste   franco-italienne,   publiée  par    A. 
Thomas,  t.  I  et  II  (iqi3)  ensemble 5o  fr. 

Le  Lai  de  l'Ombre,  par  Jean  Renart,  publié  par  J.  Bédier  (tgiS)..     i5  fr. 

Le  Roman  de  la  Rose,  par  Guillaume  de  Lorris  et  Jean  de  Meun,  publié 
d'après  les  manuscrits,  par  E.  Langlois. 
Tome  I  (1914),  II  et  III  (1920),  le  vol 25  fr. 

Le  Roman  de  Fauvel,  par  Gkrvais  du  Bus,  publié  d'après  tous  les  manus- 
crits   connus,    par    M.   A.    Langfor»  (1914-1919) 20  fr. 


Le  Mistére  du  Viel  Testament,  publié  avec  introduction,  notes  et  glossaire, 
par  le  baron  James  de  Rothschild,  t.  I-VI  (1878-1891),  ouvrage  terminé, 

le  vol 20  fr. 

(Ouvrage  imprimé  aux  frais  du  baron  James  de  Rothschild  et  offert  aux 

membres  de  la  Société.) 

Tous  ces  ouvrages  sont  in-8°,  excepté  Les  plus  anciens  Monuments  de  la 
langue  française  et  la  reproduction  de  V Apocalypse,  qui  sont  grand  in-folio, 
et  la  reproduction  du  Jardin  de  Plaisance,  qui  est  in-40. 

Il  a  été  fait  de  chaque  ouvrage  un  tirage  à  petit  nombre  sur  papier  What- 
man.  Le  prix  des  exemplaires  sur  ce  papier  est  double  de  celui  des  exemplaires 
sur  papier  ordinaire. 

Les  membres  de  la  Société  ont  droit  à  une  remise  de  25  p.  100  sur  tous 
les  prix  indiqués  ci-dessus. 

La  Société  des  Anciens  Textes  français  a  obtenu  pour  ses  pu- 
blications le  prix  Archon-Despe'rouses,'à  l'Académie  française,  en 
1882,  et  le  prix  La  Grange,  à  l'Académie  des  Inscriptions  et 
Belles-Lettres,  en  i883,  i8g5,  igoi,  igo8,  igii,  igi4  et 
igi8. 


Le  Puy-en-VeUy.  —  Irapriraerie  Peyriller,  Roachea  et  Gamon. 


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PQ 
14.57 
D5 
1921 


Doon,  de  la  Roche  (Chanson  de 
geste) 

Ibon  de  la  Roche 


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CARDS  OR  SLIPS  FROM  THIS  POCKET 

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